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Document 52006DC0708

Livre Vert - Moderniser le droit du travail pour relever les défis du XXIe siècle

/* COM/2006/0708 final */

52006DC0708

Livre vert Moderniser le droit du travail pour relever les défis du XXIe siècle /* COM/2006/0708 final */


[pic] | COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES |

Bruxelles, le 22.11.2006

COM(2006) 708 final

LIVRE VERT

Moderniser le droit du travail pour relever les défis du XXIe siècle

TABLE DES MATIÈRES

1. Introduction – les objectifs du présent livre vert 3

2. Le droit du travail dans l'Union européenne – état des lieux 5

a. Evolution dans les États membres 5

b. Action au niveau de l'UE 6

3. Le principal défi politique – un marché du travail flexible et favorable à l'intégration 7

4. Modernisation du droit du travail: questions pour le débat 10

a. Les transitions professionnelles 10

b. Insécurité juridique 11

c. Relations de travail triangulaires 14

d. Aménagement du temps de travail 15

e. Mobilité des travailleurs 15

f. Aspects du contrôle de l'application de la législation et travail non déclaré 16

1. INTRODUCTION – LES OBJECTIFS DU PRÉSENT LIVRE VERT

L'objectif du présent livre vert est de lancer un débat public dans l'UE afin de réfléchir à la manière de faire évoluer le droit du travail dans le sens de l'objectif de la stratégie de Lisbonne, à savoir parvenir à une croissance durable génératrice d'emplois plus nombreux et de meilleure qualité. La modernisation du droit du travail est l'une des principales conditions d'une capacité d'adaptation des travailleurs et des entreprises qui produit des résultats. Ce but doit être poursuivi à la lumière des objectifs de plein emploi, de productivité de la main-d'œuvre et de cohésion sociale de la Communauté. Il est conforme aux demandes faites par le Conseil européen tendant à mobiliser l'ensemble des ressources concernées aux niveaux national et communautaire dans le but de promouvoir les compétences, la formation et la capacité d'adaptation de la main d'œuvre, ainsi que la capacité de réaction des marchés du travail aux défis engendrés par le double impact de la mondialisation et du vieillissement démographique en Europe. Comme le souligne le rapport de situation annuel 2006 sur la croissance et l'emploi de la Commission, « un accroissement de la faculté de réaction des marchés du travail européens est vital pour le développement de l ’ activité économique et l ’ augmentation de la productivité »[1].

Les marchés du travail européens doivent relever le défi de la conciliation d'une flexibilité accrue avec la nécessité d'offrir à tous le maximum de sécurité[2]. La recherche de la flexibilité sur le marché du travail a conduit à une diversité croissante des formes de contrats de travail. Celles-ci peuvent être très différentes du modèle classique de contrat[3], du point de vue tant de la sécurité de l'emploi et du revenu que de la stabilité relative des conditions de travail et de vie qui y sont associées.

En 2003, dans son rapport au Conseil européen, la task-force européenne pour l'emploi, présidée par Wim Kok, a observé qu'un marché du travail à deux vitesses pourrait apparaître entre les travailleurs «intégrés» (« insiders» ) ayant un emploi permanent et les «exclus» (« outsiders »), notamment les chômeurs, les personnes coupées du marché du travail et celles se trouvant dans des situations de travail précaires et informelles[4]. Les exclus occupent une «zone grise» où les droits fondamentaux du travail ou de la protection sociale peuvent être considérablement réduits, engendrant une situation d'insécurité en ce qui concerne les perspectives d'emploi futures, avec une incidence sur des choix cruciaux de leur vie privée (disposer d'un logement, fonder une famille, etc.). Le recours à d'autres formes d'emploi pourrait se développer encore en l'absence de mesures visant à adapter le contrat de travail classique dans le but de favoriser une flexibilité accrue tant pour les travailleurs que pour les entreprises. La task-force a donc demandé instamment aux États membres d'évaluer, et s'il y a lieu de revoir, le degré de flexibilité prévu dans les contrats standards en ce qui concerne les délais de préavis, les coûts et les procédures de licenciement individuel ou collectif, ou encore la définition du licenciement abusif[5].

Les lignes directrices intégrées sur la croissance et l'emploi[6] soulignent la nécessité d'adapter la législation du travail pour promouvoir la flexibilité en même temps que la sécurité dans l'emploi et réduire la segmentation du marché du travail. Le dialogue social joue également un rôle essentiel dans la recherche de solutions collectives et/ou au niveau des entreprises, afin de permettre aux travailleurs "intégrés" mais aussi "exclus" d'effectuer avec succès les transitions entre les différents statuts, tout en aidant les entreprises à répondre de manière plus souple aux besoins d'une économie tournée vers l'innovation et aux changements apportés par les restructurations à l'environnement concurrentiel.

Les autres moyens d'action inhérents à l'approche de la "flexicurité" comprennent l'apprentissage tout au long de la vie, qui permet aux individus de se maintenir à niveau eu égard aux nouvelles compétences demandées; des politiques actives du marché du travail qui aident les chômeurs ou les inactifs à réintégrer ce marché; ou encore des règles plus souples dans le domaine de la sécurité sociale pour répondre aux besoins des personnes qui changent d'emploi ou quittent temporairement le marché du travail.

Le présent livre vert se penche sur le rôle que pourrait jouer le droit du travail en promouvant la "flexicurité" dans l'optique d'un marché du travail plus équitable, plus réactif et favorable à l'intégration, qui contribue à rendre l'Europe plus compétitive[7]. Il entend:

- identifier les principaux défis qui n'ont pas encore trouvé de réponse satisfaisante et qui sont le reflet d'un fossé évident entre les cadres juridique et contractuel existants, d'une part, et les réalités du monde du travail, d'autre part. L'accent porte principalement sur le champ d'application personnel du droit du travail et non sur les questions de droit du travail collectif;

- faire participer les gouvernements des États membres, les partenaires sociaux et les autres parties intéressées à un débat ouvert pour examiner comment le droit du travail peut contribuer à promouvoir la flexibilité associée à la sécurité dans l'emploi, indépendamment de la forme du contrat, et donc contribuer en fin de compte à la création d'emplois et à la réduction du chômage;

- stimuler le débat sur la façon dont différents types de relations contractuelles, ainsi que des droits du travail applicables à tous les travailleurs, pourraient favoriser la création d'emplois et profiter tant aux travailleurs qu'aux entreprises en facilitant les transitions sur le marché du travail, en encourageant l'apprentissage tout au long de la vie et en développant la créativité de la main-d'œuvre dans son ensemble;

- contribuer à l'objectif "mieux légiférer" en encourageant la modernisation du droit du travail, sans oublier de considérer globalement ses bénéfices et ses coûts, pour permettre aux travailleurs et aux entreprises de mieux comprendre leurs droits et leurs obligations. Il convient de tenir compte des problèmes rencontrés en particulier par les PME pour supporter les coûts administratifs qui découlent de la législation tant communautaire que nationale.

Une consultation publique sera ouverte sur les questions soulevées par le présent livre vert pendant une période de quatre mois[8]. À l'issue de la consultation publique, les principales questions et options politiques identifiées dans les réponses des Etats membres, des partenaires sociaux et des autres parties intéressées seront examinées dans le cadre d'une communication de suivi qui sera adoptée par la Commission en 2007. Celle-ci s'inscrit dans le cadre de la série d'initiatives prises par la Commission, en collaboration avec les États membres, en rapport avec la question plus large de la flexicurité. En particulier, une communication de la Commission sur la flexicurité sera présentée en juin 2007: ce texte visera à définir les arguments en faveur de la "flexicurité", de même que, d'ici à la fin 2007, une série de principes communs visant à aider les États membres à accroître les efforts dans les processus de réforme.

2. LE DROIT DU TRAVAIL DANS L'UNION EUROPÉENNE – ÉTAT DES LIEUX

a. Evolution dans les États membres

La finalité initiale du droit du travail était de pallier les inégalités économiques et sociales inhérentes à la relation de travail. Dès le début, la législation du travail a eu pour préoccupation de définir la situation de l'emploi comme le principal facteur auquel seraient attachés divers droits. Ce modèle traditionnel repose sur plusieurs hypothèses principales relatives à cette situation. Il s'agit notamment: i) de l'hypothèse d'un emploi permanent à plein temps; ii) de l'hypothèse que les relations de travail sont régies par le droit du travail, autour du contrat de travail; et iii) de l'hypothèse qu'un employeur unique est responsable du respect des obligations qui incombent aux employeurs. Il convient de rappeler à cet égard que les traditions des États membres sont très différentes en ce qui concerne la formulation et la mise en œuvre de la législation du travail et des politiques de l'emploi.

La rapidité des progrès technologiques, l'intensification de la concurrence liée à la mondialisation, l'évolution de la demande des consommateurs et la croissance soutenue du secteur des services soulignent la nécessité d'accroître la flexibilité. L'apparition de la gestion à flux tendus, la tendance chez les entreprises à revoir leur politique d'investissement à plus court terme, la diffusion des technologies de l'information et de la communication, de même que des évolutions de la demande de plus en plus fréquentes, ont poussé les entreprises à s'organiser de manière plus souple. Cela se traduit par une évolution de l'organisation et du temps de travail, des salaires et du nombre de salariés employés à différents stades du cycle de production. Ces changements ont créé une demande pour une plus grande diversité contractuelle, qu'elle soit ou non prévue explicitement par la législation européenne et nationale.

Or le modèle traditionnel de la relation de travail peut ne pas être adapté à tous les travailleurs recrutés sur des contrats à durée indéterminée standards appelés à relever le défi de l'adaptation aux changements et de la saisie des opportunités de la mondialisation. Des clauses et des conditions de travail trop protectrices peuvent par ailleurs décourager les employeurs de recruter pendant les périodes de reprise économique. D'autres modèles de relations contractuelles peuvent renforcer la capacité des entreprises à développer la créativité de leur personnel dans son ensemble et développer ainsi leur avantage concurrentiel.

Les réformes de la législation nationale relative à la protection de l'emploi engagées depuis le début des années 90 portent surtout sur l'assouplissement des règles en vigueur pour favoriser la diversité contractuelle[9]. Le but de ces réformes était de développer une flexibilité «marginale», c'est-à-dire d'instaurer des formes d'emploi plus souples assorties d'une protection moindre contre le licenciement, afin de faciliter l'accès de nouveaux venus et de demandeurs d'emploi défavorisés sur le marché du travail et de permettre, à ceux qui le souhaitent, d'avoir un choix plus grand quant à leur emploi. Les marchés du travail sont devenus en conséquence de plus en plus segmentés[10].

L'évolution du dialogue social aux niveaux national, sectoriel et de l'entreprise, qui tend à introduire de nouvelles formes de flexibilité interne, montre également que les règles applicables au lieu du travail peuvent être adaptées aux changements des réalités économiques. L'application des conventions collectives à de nouvelles problématiques (ex: restructurations, compétitivité, accès à la formation) et à de nouvelles catégories de travailleurs (comme les travailleurs intérimaires) montre que la relation entre la loi et ces conventions évolue. Les secondes ne sont désormais plus cantonnées dans la fonction auxiliaire qui consiste à compléter les dispositions légales relatives aux conditions d’emploi. Aujourd'hui, ce sont des instruments importants qui servent à adapter les principes légaux aux situations économiques et aux circonstances particulières de certains secteurs.

b. Action au niveau de l'UE

Au niveau de l'UE, une série de mesures législatives et politiques, de même que plusieurs études analytiques, ont été lancées afin de déterminer comment associer de nouvelles formes de travail plus souples à un minimum de droits sociaux pour tous les travailleurs.

L'amélioration des conditions de vie et de travail pour le travail à durée déterminée, le travail à temps partiel, le travail intérimaire et le travail saisonnier a été initialement soulignée dans la Charte communautaire des droits sociaux de 1989 et dans le programme d'action relatif à la mise en œuvre de la charte qui a suivi[11]. Une période de vifs débats sur l'opportunité de prendre des initiatives au niveau communautaire en rapport avec ces relations de travail a abouti à l'adoption des directives sur le travail à temps partiel[12] et le travail à durée déterminée[13], qui ont rendu contraignants les accords-cadres des partenaires sociaux européens établissant le principe d'égalité de traitement entre les travailleurs à temps partiel et à durée déterminée et les travailleurs à temps plein dans une situation comparable.

En 2000, la Commission a lancé une première phase de consultation des partenaires sociaux sur la modernisation des relations de travail, qui a abouti à l'adoption de l’accord-cadre sur le télétravail en 2002[14]. En 2002, la Commission a adopté une proposition de directive sur des normes minimales relatives aux conditions de travail des travailleurs intérimaires[15], sur laquelle le Conseil n'est pas parvenu pour l'heure à adopter une position commune.

Des études approfondies sur l'évolution du droit du travail dans l'UE-15 au cours de la période 1992-2003 ont été publiées[16]. Les résultats de ces études ont été présentés à la conférence "Labour Law in Europe: Steps towards 2010" (Le droit du travail en Europe: le chemin vers 2010), organisée par la présidence néerlandaise en 2004, avec le soutien de la Commission[17]. D'autres études par pays sont aujourd'hui entreprises, de manière à couvrir l'évolution du droit du travail dans l'UE-25, ainsi qu'en Bulgarie et Roumanie.

La protection des conditions de travail et l'amélioration de la qualité du travail dans les États membres dépend essentiellement de la législation nationale et de l'efficacité des mesures de contrôle du respect de la législation prises au niveau national. Au niveau de l'UE, l'acquis social soutient et complète l'action des États membres dans ce domaine.

Par son soutien à une série d'instruments politiques tels que le dialogue social européen et des mesures financières comme le Fonds social européen, Progress et la proposition de Fonds européen d'ajustement à la mondialisation, la Commission européenne sert aussi de catalyseur pour soutenir l'action des Etats membres et des partenaires sociaux en vue de renforcer les objectifs de Lisbonne en matière de croissance et d'emploi. La coordination des politiques de l'emploi dans le cadre du partenariat pour la croissance et l'emploi et la méthode ouverte de coordination dans le domaine de l'inclusion sociale permettent par ailleurs de garantir la pleine mobilité des travailleurs en Europe conformément aux traités. Ces méthodes s'appuient sur des objectifs concrets, notamment politiques, fixés au niveau de l'UE, qui sont ensuite mis en application sous forme de plans d'action nationaux, sur le recours à des mesures de référence et à des indicateurs afin d'évaluer les progrès accomplis, ainsi que sur l'échange d'expériences et l'évaluation par des pairs de manière à tirer des enseignements des bonnes pratiques.

3. LE PRINCIPAL DÉFI POLITIQUE – UN MARCHÉ DU TRAVAIL FLEXIBLE ET FAVORABLE À L'INTÉGRATION

Différents contrats ont proliféré en l'absence d'une adaptation plus globale du droit du travail et des conventions collectives à l'évolution rapide de l'organisation du travail et de la société. En utilisant ces contrats atypiques, les entreprises cherchent à rester compétitives dans une économie mondialisée, en évitant notamment le coût qu'implique le respect des règles relatives à la protection de l'emploi, les délais de préavis et les coûts liés aux cotisations sociales qui y sont associées. Les contraintes administratives liées à l'emploi de travailleurs réguliers ont également eu une incidence considérable sur la création d'emplois, notamment dans les petites entreprises[18]. Les contrats atypiques et les contrats standards souples permettent aux entreprises de s'adapter rapidement à l'évolution des choix des consommateurs et des technologies et à de nouvelles opportunités pour attirer et retenir une main d'œuvre plus diversifiée, grâce à une meilleure adéquation de l'offre et de la demande de main-d'œuvre. Les travailleurs, quant à eux, ont plus d'options, notamment en ce qui concerne les aménagements du temps de travail, les possibilités de carrière, un meilleur équilibre entre la vie familiale et professionnelle et la formation, et une plus grande responsabilité personnelle.

Les contrats à durée déterminée, les contrats à temps partiel, les contrats de travail intermittent, les contrats «zéro heure», les contrats proposés aux travailleurs recrutés par des agences d'intérim, les contrats proposés aux travailleurs indépendants, etc. font aujourd'hui partie intégrante des caractéristiques des marchés du travail européens. La part de l'emploi total représentée par les travailleurs recrutés sur des contrats différents du modèle contractuel standard et ceux ayant le statut d'indépendants est passée de plus de 36 % des travailleurs en 2001 à près de 40 % des travailleurs dans l'UE-25 en 2005[19]. Le travail à temps partiel est passé de 13 % à 18 % de l'emploi total ces 15 dernières années. Depuis 2000, il contribue plus (à hauteur de 60 % environ) à la création d'emplois que le travail à temps plein standard. Le travail à temps partiel reste principalement une caractéristique du travail féminin – puisqu'il concerne près d'un tiers des femmes qui ont un emploi, contre seulement 7 % des hommes. Le travail à durée déterminée est passé de 12 % de l'emploi total en 1998 à plus de 14 % de l'emploi total dans l'UE-25 en 2005. Contrairement au travail à temps partiel, le travail à durée déterminée ne fait pas ressortir d'importantes différences entre les sexes[20]. Etant donné la progression de la participation à ces formes de contrats, il serait peut-être nécessaire d'examiner le degré de flexibilité prévu par les contrats standards pour que ceux-ci soient davantage en mesure de faciliter le recrutement, le maintien et la progression sur le marché du travail.

Le travail indépendant est également un moyen de faire face aux besoins de restructuration, de réduire les coûts directs ou indirects de la main-d'œuvre et de gérer les ressources de manière plus souple dans des circonstances économiques imprévues. Il traduit aussi le choix d'un modèle commercial par des entreprises orientées vers la fourniture de services qui mènent à bien des projets pour leurs clients. Il reflète souvent une décision, prise librement, de travailler de façon indépendante malgré un niveau de protection sociale moindre, en échange d'un contrôle plus direct sur les conditions d'emploi et de rémunération. Les travailleurs indépendants étaient plus de 31 millions dans l'UE-25 en 2005, soit 15 % de la main-d'œuvre totale[21]. Ceux qui travaillent pour leur propre compte, sans l'aide de salariés, représentent 10 % des travailleurs dans l'UE-25. Tandis que l'agriculture et le commerce de détail comptent toujours le plus grand nombre de personnes appartenant à cette catégorie, cette forme de travail est une caractéristique de plus en plus présente dans les secteurs du bâtiment et des services aux personnes qui font appel à l'externalisation, à la sous-traitance et au travail dans le cadre de projets.

Il est toutefois avéré que la diversification des types de contrats peut avoir certains effets préjudiciables[22]. Une partie des travailleurs risquent d'être piégés par une succession d'emplois de courte durée et de basse qualité assortis d'une protection sociale insuffisante, qui les laissent dans une situation de vulnérabilité. Ces emplois peuvent cependant servir de tremplin à certaines personnes, fréquemment celles qui ont des difficultés particulières, pour s'intégrer sur le marché du travail.

Les chiffres pour l'UE-15 montrent que quelque 60 % des personnes qui avaient été recrutées sur des contrats atypiques en 1997 disposaient de contrats standards en 2003. Toutefois, 16 % d'entre elles se trouvaient toujours dans la même situation et 20 % avaient quitté le marché du travail[23]. Le risque d'être en position de faiblesse sur le marché du travail comporte aussi une forte dimension de genre et de génération, puisque les femmes, les personnes plus âgées, mais aussi les jeunes recrutés sur des contrats atypiques, ont moins de chances d'améliorer leur situation sur ce marché[24]. Il convient toutefois de tenir compte du fait que les États membres enregistrent des taux de transition très différents.

Le rapport récent sur l'emploi en Europe 2006[25] parle du constat selon lequel l'existence d'une législation de protection de l'emploi trop rigide tend à réduire le dynamisme du marché du travail, en aggravant les perspectives d'emploi des femmes, des jeunes et des travailleurs plus âgés. Ce rapport souligne qu'une déréglementation "marginale" maintenant les règles strictes applicables aux contrats standards pratiquement intactes tend à favoriser la segmentation des marchés du travail et influe négativement sur la productivité. Il souligne également que les travailleurs se sentent mieux protégés par un système d'aide en cas de chômage que par la législation de protection de l'emploi. Des régimes d'allocations chômage bien conçus, combinés à des politiques actives du marché du travail, semblent constituer une meilleure assurance contre les risques liés au marché du travail.

Dans le contexte de la mondialisation, du processus de restructuration et de la progression vers une économie fondée sur la connaissance, les marchés du travail européens doivent être à la fois plus favorables à l'intégration et plus réactifs à l'innovation et au changement. Les travailleurs potentiellement vulnérables doivent avoir la possibilité de progresser socialement pour améliorer leur mobilité et réussir leurs transitions sur le marché du travail. Les règles juridiques qui sous-tendent la relation de travail traditionnelle ne donnent peut-être pas suffisamment de marge de manœuvre aux travailleurs recrutés sur des contrats à durée indéterminée standards pour explorer les opportunités d'une plus grande flexibilité au travail, ni ne les encouragent peut-être à agir en ce sens. La bonne gestion de l'innovation et du changement implique que les marchés du travail prennent en considération trois aspects principaux: la flexibilité, la sécurité dans l'emploi et la segmentation. Le présent livre vert a pour but de stimuler le débat sur la question de savoir si un cadre réglementaire plus «réactif» est nécessaire pour renforcer la capacité des travailleurs à anticiper et gérer les changements, indépendamment de leur type de contrat - à durée indéterminée ou temporaire atypique.

Questions 1. Quelles seraient, selon vous, les priorités d'un programme conséquent de réforme du droit du travail? 2. L'adaptation du droit du travail et des conventions collectives peut-elle contribuer à améliorer la flexibilité et la sécurité dans l'emploi et à réduire la segmentation du marché du travail? Si oui, comment? 3. La réglementation existante – sous la forme de lois et/ou de conventions collectives – freine-t-elle ou stimule-t-elle les entreprises et les travailleurs dans leurs efforts pour saisir les opportunités d'accroître la productivité et s'adapter aux nouvelles technologies et aux changements liés à la concurrence internationale? Comment la qualité de la réglementation applicable aux PME peut-elle être améliorée, tout en préservant les objectifs de celle-ci? 4. Comment faciliter le recrutement au moyen de contrats permanents et temporaires, que ce soit par la voie législative ou le biais de conventions collectives, de manière à accroître la souplesse de ces contrats tout en garantissant un niveau suffisant de sécurité dans l'emploi et de protection sociale? |

4. MODERNISATION DU DROIT DU TRAVAIL: QUESTIONS POUR LE DÉBAT

a. Les transitions professionnelles

Dans la plupart des États membres, les législations du travail et de la sécurité sociale ont été conçues pour garantir la protection des travailleurs dépendants dans des emplois particuliers. Elles ne suffisent peut-être pas pour aider les travailleurs dans leur transition d'un statut à l'autre, que ce soit dans le cadre d'interruptions «subies» (par exemple licenciement et chômage) ou volontaires du travail (par exemple congés d'éducation et de formation, responsabilités familiales, congés sabbatiques et congé parental). Les problèmes des femmes, qui sont représentées de manière disproportionnée dans ces nouvelles formes de travail et restent confrontées à des obstacles pour accéder à l'intégralité des droits et prestations sociales, doivent également être résolus.

Les chances d'accéder au marché du travail, d'y rester et d'y progresser varient considérablement, car la législation relative à la protection de l'emploi et la réglementation des contrats au niveau national ont toutes deux une forte incidence sur les transitions entre les statuts, en particulier en ce qui concerne la situation des chômeurs de longue durée et des «exclus» recrutés sur des emplois précaires. Parmi les mesures normatives qui facilitent les transitions sur le marché du travail, issues du dialogue social au niveau national, figurent la loi néerlandaise sur la flexibilité et la sécurité de 1999, la loi autrichienne sur les indemnités de licenciement ( Abfertigungsrecht ) de 2002[26] et le décret espagnol de juin 2006 facilitant la conversion des contrats à durée déterminée en contrats à durée indéterminée assortis d'indemnités de licenciement réduites[27]. La réforme autrichienne constitue un exemple intéressant de l'évolution radicale d'un système fondé sur la relation de travail traditionnelle entre un travailleur et une entreprise vers un système plus global reposant sur un fonds gérant des "comptes d'épargne individuels" au niveau national. Le lien entre licenciement par un employeur et versement d'une indemnité ponctuelle de départ a été supprimé. Ces nouvelles règles permettent aux travailleurs de quitter un emploi lorsqu'ils en trouvent un autre, plutôt que d'y rester par crainte de perdre les indemnités qui y sont attachées. La réforme a permis d'écarter la menace que pouvait faire peser, sur l'existence d'une entreprise, l'obligation soudaine de supporter le coût de licenciements et d'étaler dans le temps la contribution d'un employeur au fonds de gestion des "comptes d'épargne individuels". Du point de vue du salarié, ce nouveau système réduit le coût de la mobilité professionnelle dans la mesure où les travailleurs ne perdent plus l’intégralité de leurs droits à indemnités de fin de contrat lorsqu’ils prennent un nouvel emploi.

L'adoption d'une approche du travail «tout au long de la vie» peut nécessiter de placer l'accent moins sur le souci de protéger des emplois particuliers que sur la mise en place d'un cadre d'appui garantissant la sécurité dans l'emploi, y compris une aide sociale et des mesures actives de soutien aux travailleurs pendant les périodes de transition. C'est ce qu'a fait le Danemark en combinant une législation de protection "allégée" de l'emploi, une intensification des mesures actives du marché du travail, un investissement considérable dans la formation et des allocations chômage généreuses assorties de conditions strictes.

Questions 5. Cela vaudrait-il la peine d'envisager de combiner un assouplissement de la législation de protection de l'emploi à un système bien conçu de soutien aux chômeurs, sous la forme de compensations pour perte de revenu (politiques passives du marché du travail) mais aussi de politiques actives du marché du travail? 6. Quel pourrait être le rôle de la loi et/ou des conventions collectives négociées par les partenaires sociaux dans la promotion de l'accès à la formation et les transitions entre les différentes formes de contrats afin de soutenir la mobilité verticale tout au long d'une vie professionnelle pleinement active? |

b. Insécurité juridique

L'apparition de formes de travail atypique variées a estompé les frontières entre le droit du travail et le droit commercial. La distinction binaire traditionnelle entre «salarié» et «travailleur indépendant» n'est plus le reflet fidèle de la réalité économique et sociale du travail. Des différends peuvent survenir à propos de la nature juridique d'une relation de travail lorsque celle-ci est déguisée ou lorsque de véritables difficultés se posent pour faire coïncider de nouvelles modalités de travail dynamiques avec la relation de travail traditionnelle.

Il y a travail déguisé lorsqu'une personne qui est salariée n'est pas considérée comme telle, dans le but de dissimuler sa véritable situation juridique et d'éviter certains coûts tels que les prélèvements fiscaux obligatoires et les cotisations de sécurité sociale. Cette pratique illégale peut résulter d'un recours impropre aux dispositions du droit civil ou commercial.

Les mesures adoptées au niveau national pour combattre le phénomène du travail déguisé, souvent élaborées en collaboration avec les partenaires sociaux, vont de l'introduction de présomptions légales irréfragables[28] à un meilleur contrôle de l'application de la législation, et incluent également des campagnes ciblées et des initiatives spécialement axées sur l'information et la sensibilisation[29]. En raison de l'absence de clarté de la définition juridique du statut d'indépendant que l'on trouve dans les dispositions législatives et administratives nationales, certains individus, qui pensent être «indépendants», peuvent parfois être considérés comme travailleurs dépendants par les administrations fiscales ou de la sécurité sociale. En conséquence, le travailleur indépendant/ salarié et son client/employeur principal peuvent se voir contraints de payer des cotisations sociales supplémentaires[30]. La Commission a souligné que le problème des personnes qui se font passer pour des travailleurs indépendants afin de contourner la législation nationale[31] doit être principalement traité par les États membres[32].

La notion de « travail économiquement dépendant » couvre des situations qui ne relèvent ni de la notion bien établie de travail salarié, ni de celle de travail indépendant. Cette catégorie de travailleurs ne dispose pas de contrat de travail. Ils peuvent ne pas tomber sous le coup de la législation du travail, parce qu'ils occupent une «zone grise» entre le droit du travail et le droit commercial. Quoique formellement «indépendants», ils restent économiquement dépendants d'un seul commettant ou client/employeur pour la provenance de leurs revenus[33]. Ce phénomène devrait être clairement distingué de l'utilisation, délibérément fausse, de la qualification de travail indépendant. Certains États membres ont déjà adopté des mesures législatives pour protéger la situation juridique des travailleurs indépendants économiquement dépendants et vulnérables[34].

S'il est vrai que ces approches sont quelque peu préliminaires et partielles, elles reflètent néanmoins les efforts entrepris par les législateurs, les tribunaux et les partenaires sociaux pour résoudre les problèmes qui se posent dans ce domaine complexe. L'«approche ciblée» du Royaume-Uni qui introduit dans la législation du travail différents droits et obligations dans le chef des "salariés" ( employees ) et des "travailleurs" ( workers ) est un exemple de la manière dont certaines catégories de travailleurs vulnérables parties à des relations de travail complexes se voient conférer des droits minimaux sans bénéficier de l'étendue des droits du travail attachés aux contrats de travail classiques[35]. Les droits liés à la protection contre la discrimination, la protection de la santé et de la sécurité, les garanties de salaire minimal, de même que la protection des droits de négociation collective, ont été sélectivement étendus aux travailleurs économiquement dépendants dans plusieurs États membres. D'autres droits, en particulier en matière de préavis et de licenciement, tendent à n'être accordés qu'aux salariés «stables» ayant accompli une certaine période de travail ininterrompue pour un employeur déterminé.

Au niveau communautaire, la réglementation des conditions de travail des agents commerciaux indépendants montre que les règles du marché intérieur peuvent se rapprocher de certains aspects du droit du travail. Afin d'assurer la protection minimale des agents commerciaux indépendants dans leurs relations avec leurs commettants, la directive 86/653/CEE[36] contient des dispositions concernant, notamment, le paiement de leur rémunération; les conditions de transformation des contrats à durée déterminée en contrats à durée indéterminée; ainsi que la réparation du préjudice causé par la cessation d'un contrat.

D'aucuns ont fait valoir que tous les contrats de travail individuels portant sur des services effectués par des travailleurs indépendants économiquement dépendants devaient être soumis au respect de certaines obligations minimales[37]. Même si elles augmentent la sécurité et la transparence et garantissent un niveau de protection minimal pour les indépendants, ces obligations pourraient cependant avoir pour effet de limiter l'étendue de ces dispositions contractuelles.

Questions 7. Les définitions juridiques nationales du travail salarié et du travail indépendant doivent-elles être clarifiées de manière à faciliter les transitions en toute bonne foi entre le statut de salarié et celui de travailleur indépendant et inversement? 8. Est-il nécessaire de prévoir un «socle de droits» relatif aux conditions de travail de tous les travailleurs, indépendamment de la forme de leur contrat de travail? Quelle serait, selon vous, l'incidence de ces obligations minimales sur la création d'emplois et la protection des travailleurs? |

c. Relations de travail triangulaires

Le développement du travail intérimaire a conduit à la modification des législations du travail de certains États membres afin de déterminer les responsabilités respectives de l'employeur et de l'entreprise utilisatrice, dans le but de protéger les droits des travailleurs. La "relation de travail triangulaire" entre une entreprise utilisatrice, un salarié et une agence correspond généralement à la situation dans laquelle un travailleur intérimaire est recruté par une agence d'intérim, puis mis à la disposition d'une entreprise utilisatrice pour y effectuer des prestations en vertu d'un contrat commercial. La "dualité d'employeurs" qui en résulte ajoute à la complexité de la relation de travail[38].

Dans la plupart des États membres, le travail par agence d'intérim est régi par un ensemble de lois, de conventions collectives et d'autoréglementation[39]. La proposition de la Commission concernant une directive relative aux travailleurs des agences de travail intérimaire entend établir un principe de non-discrimination garantissant que ces travailleurs ne sont pas traités moins favorablement que les travailleurs "réguliers" d'une "entreprise utilisatrice"[40].

Des problèmes similaires peuvent se poser lorsque les travailleurs sont impliqués dans de longues chaînes de sous-traitance. Plusieurs États membres ont tenté de résoudre ces problèmes en établissant un système de responsabilité conjointe et solidaire des contractants principaux à l'égard des obligations de leurs sous-traitants. Ce système encourage les contractants principaux à s'assurer du respect de la législation du travail par leurs partenaires commerciaux. Toutefois, d'aucuns ont fait valoir que ces règles pouvaient servir à restreindre la sous-traitance par des sociétés étrangères et donc entraver la libre prestation des services dans le marché intérieur. La jurisprudence récente relative au détachement des travailleurs a établi que ce système faisait partie de modalités procédurales acceptables permettant d'obtenir le respect du droit au salaire minimal, à condition que cette forme de protection des travailleurs soit nécessaire et proportionnée à l'objectif poursuivi, et conforme à l'intérêt général[41].

Questions 9. Pensez-vous que les responsabilités des différentes parties aux relations de travail multiples devraient être précisées, pour déterminer à qui incombe la responsabilité du respect des droits du travail? Serait-il faisable et efficace de recourir à la responsabilité subsidiaire pour établir cette responsabilité dans le cas de sous-traitants? Dans la négative, voyez-vous d'autres moyens permettant de garantir une protection suffisante des travailleurs parties à des relations de travail triangulaires? 10. Est-il nécessaire de clarifier le statut des travailleurs employés par des agences de travail intérimaire? |

d. Aménagement du temps de travail

L'absence d'accord au Conseil extraordinaire EPSCO du 7 novembre 2006 souligne les défis particuliers qui subsistent, dans certains secteurs comme la santé, en rapport avec les dispositions de la directive 2003/88/CE et la jurisprudence pertinente de la Cour de justice[42].

La Commission réexamine actuellement la situation à la lumière du blocage au Conseil.

Question 11. Comment pourrait-on adapter les obligations minimales en matière d'aménagement du temps de travail afin d'offrir plus de flexibilité aux employeurs et aux travailleurs, tout en garantissant un niveau élevé de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs? Quels devraient être les aspects de l'aménagement du temps de travail à traiter en priorité par la Communauté? |

e. Mobilité des travailleurs

L'application cohérente du droit du travail européen peut être menacée, en particulier dans le contexte transnational des activités des entreprises et de la fourniture de services, en raison de la variété des définitions du travailleur données par les différentes directives. Cela peut poser un problème particulier lorsqu'il s'agit de travailleurs frontaliers[43].

En dehors du domaine particulier de la libre circulation des travailleurs, la plupart des textes législatifs de l'UE en rapport avec le droit du travail laissent le soin aux États membres de définir le «travailleur». D'aucuns ont fait valoir que les États membres devaient garder une marge d'appréciation pour décider de l'étendue de la définition du travailleur contenue dans les différentes directives. Toutefois, ce renvoi constant au droit national plutôt qu'au droit communautaire pourrait affaiblir la protection du travailleur, en particulier lorsque la liberté de circulation est en jeu. Des difficultés liées à la divergence des définitions du travailleur sont apparues en particulier dans le cadre de la mise en œuvre des directives sur le détachement des travailleurs et les transferts d'entreprises. Dans ces circonstances, les différences dans l'étendue des définitions du «travailleur» sont difficilement conciliables avec les objectifs de politique sociale de la Communauté, à savoir parvenir à un équilibre entre la flexibilité et la sécurité pour les travailleurs.

Question 12. Comment les droits du travail des travailleurs effectuant des prestations dans un contexte transnational, notamment des travailleurs frontaliers, peuvent-ils être garantis dans l'ensemble de la Communauté? Pensez-vous qu'il est nécessaire d'améliorer la cohérence des définitions du «travailleur» contenues dans les directives européennes, de manière à garantir que ces travailleurs puissent exercer leurs droits du travail, quel que soit l'État membre dans lequel ils travaillent? Ou bien estimez-vous que les États membres devraient garder une marge de manœuvre dans ce domaine? |

f. Aspects du contrôle de l'application de la législation et travail non déclaré

Les mécanismes de contrôle de l'application des législations devraient suffire à garantir le bon fonctionnement et l'adaptabilité des marchés du travail, à prévenir les violations du droit du travail au niveau national et à protéger les droits des travailleurs dans le futur marché européen du travail[44]. Dans ce contexte, le travail non déclaré apparaît comme une caractéristique particulièrement préoccupante et persistante de nos marchés du travail actuels, souvent associée à des mouvements transfrontaliers de main d'œuvre. Principal facteur du dumping social, il est responsable non seulement de l'exploitation des travailleurs, mais également de distorsions de la concurrence. Par une résolution d'octobre 2003[45], le Conseil a appelé les États membres à résoudre ce problème. Parmi les mesures proposées figurent des mesures préventives et des sanctions, mais aussi la conclusion de partenariats entre les partenaires sociaux et les pouvoirs publics au niveau national pour s'attaquer au travail non déclaré. Ces mesures revêtent actuellement la forme d'un mélange de mesures d'incitation à la transformation du travail non déclaré en emploi régulier, de sanctions et pénalités, de liens renforcés avec le système fiscal et les prestations sociales et de simplification administrative ou fiscale.

Pour l'UNICE/UEAPME, le CEEP et la CES, ce problème fait partie, dans le cadre de l'équilibre à trouver entre flexibilité et sécurité, des questions qui doivent faire l'objet d'une analyse commune dans le programme de travail des partenaires sociaux européens pour 2006-2008[46].

Les ministères de l'emploi et leurs services ont un rôle crucial à jouer dans le contrôle de l'application de la loi, en recueillant des données fiables sur les tendances du marché du travail et l'évolution des formes de travail et d'emploi, et en adoptant des sanctions effectives et dissuasives pour lutter contre le travail non déclaré et les relations de travail déguisées. Dans le cas de travailleurs mobiles dans les transports routiers et maritimes, la nature transnationale et extraterritoriale de ces secteurs rend le contrôle de l'application de la loi particulièrement difficile[47].

Une coopération plus efficace est nécessaire entre les différentes instances de contrôle administratives au niveau national, notamment l'inspection du travail, l'administration de la sécurité sociale et l'administration fiscale. Le renforcement des ressources et l'amélioration de l'expertise de ces instances de contrôle, de même que la consolidation de leur collaboration avec certains partenaires, peuvent contribuer à réduire les causes du travail non déclaré.

Un renforcement de la coopération administrative au niveau de l'UE peut aussi aider les États membres à détecter les abus et le contournement des règles du droit du travail et à les combattre, et garantir ainsi le respect du droit communautaire. L'article 10 CE fixe une règle générale qui impose aux États membres et aux institutions communautaires des obligations réciproques de coopération et d'assistance effectives et exige que toutes les mesures appropriées soient prises pour faciliter la réalisation de la mission de la Communauté. Les pratiques illégales à dimension internationale ne font que souligner la nécessité d'un renforcement de cette coopération au niveau de l'UE, pour améliorer les stratégies et les moyens d'inspection utilisés pour analyser les pratiques et les conditions de travail.

Questions 13. Pensez-vous qu'il soit nécessaire de renforcer la coopération administrative entre les autorités compétentes, de manière à ce qu'elles puissent contrôler plus efficacement le respect du droit du travail communautaire? Pensez-vous que les partenaires sociaux aient un rôle à jouer dans cette coopération? 14. Pensez-vous que d'autres initiatives soient nécessaires au niveau de l'UE en vue de soutenir l'action des États membres dans la lutte contre le travail non déclaré? |

[1] Rapport de situation annuel 2006 de la Commission européenne sur la croissance et l'emploi «Passons à la vitesse supérieure», p. 6. Voir aussi le Rapport conjoint sur l'emploi du Conseil et de la Commission, 2005/2006, pp. 6 et 12-13.

[2] ibid.

[3] L'étude intitulée " The Employment Status of Individuals in Non-Standard Employment " et réalisée par B. Burchill, S. Deakin et S. Honey, UK Department of Trade and Industry (1999), qualifie les formes atypiques d'emploi de formes de travail qui diffèrent du modèle de la relation de travail "permanente" ou à durée indéterminée construite autour de la semaine de travail continue, à plein temps .

[4] L'emploi, l'emploi, l'emploi: créer plus d'emplois en Europe. Rapport de la task-force européenne pour l'emploi, novembre 2003, p. 9.

[5] ibid, chapitre 2, p. 30.

[6] Lignes directrices pour l'emploi (2005-2008) (adoptées le 12 juillet 2005) - JO L 205 du 6.8.2005, p. 21.

[7] Le droit du travail n'est pas le seul facteur pertinent à cet égard. Les lignes directrices intégrées sur la croissance et l'emploi reconnaissent qu'une révision du coin fiscal peut être nécessaire pour faciliter la création d'emplois, notamment à bas revenus. Faire porter l'impôt moins sur le travail, mais davantage sur la consommation et/ou la pollution, peut aussi largement contribuer à cet objectif. Le présent livre vert ne traite pas des migrations économiques, celles-ci faisant l'objet de la politique commune en matière d'immigration.

[8] Les contributions se feront en utilisant le formulaire électronique disponible sur le site de la Commission européenne à l'adresse: http://ec.europa.eu/yourvoice/consultations/index_fr.htm.

[9] Perspectives de l'Emploi de l'OCDE, édition 2004, chapitre 2, "Réglementation de la protection de l’emploi et performance du marché du travail".

[10] Rapport conjoint sur l'emploi, 2005/2006.

[11] Commission européenne, programme d'action relatif à la mise en œuvre de la charte communautaire des droits sociaux fondamentaux, novembre 1989.

[12] Directive 97/81/CE concernant l'accord-cadre sur le travail à temps partiel conclu par l'UNICE, le CEEP et la CES.

[13] Directive 1999/70/CE concernant l'accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée.

[14] A la demande des partenaires sociaux, la Commission a fait réaliser une étude par Adalberto Perulli: "Travail économiquement dépendant / parasubordination: les aspects juridiques, sociaux et économiques" (2002).

[15] COM(2002) 149 du 20.3.2002, présenté après la tentative manquée des partenaires sociaux de parvenir à un accord, puis modifié par COM(2002) 701 du 28.11.2002.

[16] L'évolution du droit du travail (1992-2003), vol. I et II. Un rapport général donnant un aperçu global de l'évolution du droit du travail dans l'UE-15 a été élaboré.

[17] Voir aussi les conclusions finales de la conférence organisée par la présidence néerlandaise à Leiden en 2004, http://internationalezaken.szw.nl/index.cfm?fuseaction=dsp_document&link_id=44922#3738600

[18] Observatoire des PME européennes, n° 7, Le recrutement d'employés: contraintes administratives pour les PME en Europe, 2002, p. 11.

[19] Lignes directrices pour l'emploi (2005-2008): indicateur du nombre total de salariés sur des contrats à temps partiel et/ou à durée déterminée et du nombre total d'indépendants en pourcentage du nombre de personnes ayant un emploi, sur la base de l'Enquête sur les forces de travail, 2005, Eurostat.

[20] Emploi en Europe 2006, annexe statistique. Les contrats de travail à temps partiel peuvent être à durée tant indéterminée que déterminée. Les statistiques récentes sur la perception qu'ont les travailleurs de leurs conditions de travail (publiées dans la quatrième enquête sur les conditions de travail de la Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail) révèlent que 68 % des travailleurs à temps partiel sont satisfaits de leur temps de travail, contre 23 % qui souhaiteraient prester plus d'heures et 9 % qui seraient désireux de prester moins d'heures.

[21] ibid, voir aussi Relations du travail en Europe, 2004. Le travail indépendant est particulièrement important en Pologne, Hongrie, Lituanie, Lettonie et Estonie en ce qui concerne les nouveaux États membres de l'UE, ainsi qu'au Royaume-Uni, en Irlande, au Portugal et aux Pays-Bas.

[22] Precarious Employment in Europe: A comparative study of labour market related risks in flexible economies. ESOPE Final Report. Direction générale de la recherche, 2004.

[23] Emploi en Europe 2004, page 15 et chapitre 4. Il faut certes reconnaître que tous les contrats atypiques ne sauraient être considérés comme précaires.

[24] Emploi en Europe 2004, chapitre 4, p. 181.

[25] Emploi en Europe 2006, pp. 81 et suiv.

[26] Voir les commentaires sur ces exemples, cités dans le rapport de la task-force pour l'emploi, pages 33 et 35, ainsi que les Perspectives de l'Emploi de l'OCDE, édition 2004, chapitre 2.

[27] Voir le rapport dans European Industrial Relations Observatory On-line , août 2006,http://www.eiro.eurofound.eu.int/2006/05/articles/es0605019i.html.

[28] La loi néerlandaise sur la flexibilité et la sécurité de 1999 a introduit une présomption légale irréfragable selon laquelle un contrat de travail existe lorsqu'un travail est effectué pour autrui en contrepartie d'une rémunération hebdomadaire ou pour au moins vingt heures par mois pendant trois mois consécutifs.

[29] Après la conclusion récente d'accords par les partenaires sociaux en Irlande et en Espagne, les gouvernements de ces pays ont décidé d'augmenter le nombre des inspecteurs du travail.

[30] Deuxième carrière: Surmonter les obstacles rencontrés par les travailleurs salariés souhaitant accéder au statut d'indépendant et/ou créer leur entreprise. Direction générale des Entreprises, Commission européenne (2004). p. 8, 29 -31.

[31] Les organisations des partenaires sociaux ont observé que le faux travail «indépendant», l'offre fictive de services et le développement des chaînes de sous-traitance sont utilisés afin de contourner les restrictions transitoires à l'accès à certains marchés du travail nationaux mises en place après l'élargissement. Voir rapport sur le fonctionnement des dispositions transitoires du Traité d'adhésion de 2003 - COM(2006) 48 du 8.2.2006.

[32] En conséquence, la Commission se félicite de l'adoption en juin 2006 d'une recommandation sur la relation de travail lors de la 95e session de la Conférence internationale du travail qui encourage la formulation et l'adoption par les États membres, en consultation avec les partenaires sociaux, de politiques nationales qui permettent de revoir régulièrement le champ d'application de leur législation et, s'il y a lieu, de la clarifier et de l'adapter pour garantir une protection effective des travailleurs liés par une relation de travail. Cet instrument non contraignant adopte une approche stratégique en laissant aux États le soin de définir dans leur législation et leur pratique la nature et l'étendue de la protection accordée aux travailleurs liés par une relation de travail.

[33] Cela ne signifie pas que ces travailleurs soient nécessairement dans une situation de vulnérabilité.

[34] Ainsi, l'Italie et l'Allemagne ont identifié le concept de travailleurs «similaires aux travailleurs salariés» correspondant à la notion de «parasubordination» en droit civil. En Allemagne, les modifications du code social, introduites en 1999 concernant la situation des travailleurs économiquement dépendants du point de vue de la sécurité sociale, ont été largement revues en 2002 (voir Evolution du droit du travail, vol. 2, pp. 151-153). L'Espagne envisage, quant à elle, l'adoption d'un texte de loi relatif aux droits et aux prestations dont bénéficient les travailleurs indépendants, y compris les travailleurs économiquement dépendants, donnant effet à l'accord conclu le 26 septembre 2006 par le gouvernement espagnol et les principaux représentants des travailleurs indépendants.

[35] Document de réflexion du ministère britannique du commerce et de l'industrie, juillet 2002; voir aussi “ Success At Work: Protecting Vulnerable Workers, Supporting Good Employers ", ministère britannique du commerce et de l'industrie, mars 2006.

[36] Directive 86/653/CEE du Conseil du 18 décembre 1986 relative à la coordination des droits des États membres concernant les agents commerciaux indépendants.

[37] Voir notamment Perulli, op. cit. chapitre 3.

[38] Temporary agency work in an enlarged European Union , Fondation européenne, 2006, p. 1.

[39] ibid.

[40] Proposition modifiée de directive du Parlement Européen et du Conseil relative aux conditions de travail des travailleurs intérimaires - COM(2002) 701.

[41] La Cour de justice a jugé que l’article 5 de la directive 96/71/CE concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services, interprété à la lumière de l’article 49 CE, ne s’oppose pas au recours à un tel système, qui constitue une mesure adéquate en cas de non-respect de la directive, à condition que ce système soit proportionné à l'objectif poursuivi et qu'il n'aille pas au-delà de ce qui est nécessaire pour l'atteindre. Arrêt de la Cour de justice du 12 octobre 2004 dans l'affaire C-60/03 Wolff et Müller, Rec. 2004, p. I -9553.

[42] Voir notamment les arrêts rendus par la Cour le 3 octobre 2000 dans l'affaire C-303/98 (SIMAP), Rec. p. I-7963, le 9 octobre 2003 dans l'affaire C-151/02 (Jäger), Rec. p. I-8389, ainsi que le 1er décembre 2005 dans l'affaire C-14/04 (Dellas), Rec. p. I-10253.

[43] Voir aussi résolution du PE A5-0338/2000 - JO C 262 du 18.9.2001, p. 148.

[44] Voir rapport de l'OIT V(1) sur la relation de travail (2005), point 65. Voir aussi les problèmes mis en lumière dans le rapport sur le fonctionnement des dispositions transitoires du Traité d'adhésion de 2003. Voir enfin la communication de la Commission COM(2006) 159 «Orientations concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services».

[45] Résolution du Conseil relative à la transformation du travail non déclaré en emploi régulier - JO C 260 du 29.10.2003.

[46] Programme de travail des partenaires sociaux européens, 2006-2008, 23 mars 2006.

[47] Directive relative à l'aménagement du temps de travail des activités de transport routier — Dispositions de la directive applicables aux indépendants et aux périodes nocturnes, futur rapport d'une étude réalisée pour la DG TREN.

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