EUR-Lex Access to European Union law

Back to EUR-Lex homepage

This document is an excerpt from the EUR-Lex website

Document 52003DC0232

Septième Rapport de la Commission au Conseil sur la situation de la construction navale dans le monde

/* COM/2003/0232 final */

52003DC0232

Septième Rapport de la Commission au Conseil sur la situation de la construction navale dans le monde /* COM/2003/0232 final */


SEPTIÈME RAPPORT DE LA COMMISSION AU CONSEIL SUR LA SITUATION DE LA CONSTRUCTION NAVALE DANS LE MONDE

TABLE DES MATIÈRES

1. Introduction

2. Analyse du marché

2.1.1. Carnets de commandes et parts de marché

2.1.2. Évolution des prix

3. Études de coûts

3.1.1. Mise à jour des analyses de coûts antérieures

3.1.2. Nouvelles analyses

4. Conclusions

1. Introduction

Ce septième rapport de la Commission au Conseil sur la situation de la construction navale dans le monde, traitant de l'évolution du marché en 2002, a été établi conformément à l'article 12 du règlement (CE) n° 1540/98 [1] du Conseil faisant obligation à la Commission de présenter un rapport sur la situation de la construction navale dans le monde, et s'inscrit dans le prolongement des six rapports précédents [2].

[1] JO L 202, 18.07.1998, p.1

[2] COM(1999) 474 final; COM(2000) 263 final; COM(2000) 730 final; COM(2001) 219 final; COM(2002) 205 final; COM(2002) 622 final

Le 27 juin 2002, le Conseil a chargé la Commission de faire une dernière tentative pour résoudre les problèmes découlant de certaines pratiques commerciales des chantiers navals sud-coréens et pour parvenir à un accord à l'amiable avec la Corée du Sud. Comme le rappelle le sixième rapport, aucun accord n'a pu être trouvé avec la Corée.

En l'absence d'une solution négociée, la Commission a entamé des procédures devant l'OMC le 21 octobre 2002 et poursuit désormais cette action. En outre, et conformément à la décision du Conseil du 27 juin 2002, un mécanisme de défense temporaire destiné à la construction navale [3] est entré en vigueur le 2 juillet 2002. Celui-ci autorise les aides directes aux chantiers navals à concurrence de 6 % pour certaines classes de navires [4] et est applicable aux contrats signés à compter du 24 octobre 2002.

[3] Règlement CE n° 1177/2002 du Conseil

[4] Ces classes de navires sont les porte-conteneurs, transporteurs de produits pétroliers/chimiques et méthaniers. Cette dernière catégorie de navires est subordonnée à la confirmation par la Commission que, sur la base des enquêtes couvrant la période de 2002, l'industrie communautaire a subi des préjudices matériels graves sur ce segment de marché du fait de pratiques coréennes déloyales.

Au niveau de l'OCDE, les négociations en vue d'un nouvel accord sur la construction navale ont débuté en décembre 2002. Au stade actuel, il est néanmoins trop tôt pour prévoir l'issue de ces négociations qui se poursuivront jusque 2005 au plus tard.

En réponse à une demande précédente du Conseil, exprimée dans les conclusions du Conseil de mai 2001, l'industrie de la construction navale de l'UE a, de concert avec la Commission, lancé l'initiative LeaderSHIP 2015, destinée à développer de nouvelles structures de travail et priorités technologiques et à soutenir l'industrie communautaire de la construction navale, notamment en instituant des règles de jeu égales aux niveaux mondial et régional. Cette initiative rassemble les principaux partenaires industriels, syndicats et décideurs de l'UE, aussi bien de la Commission que du Parlement. LeaderSHIP 2015 se penchera sur l'ensemble des questions pertinentes en matière de construction navale, depuis le commerce mondial jusqu'aux défis se posant en matière de compétences, sans oublier les possibilités de mise en commun des conceptions/fournitures. L'initiative a déjà dégagé des idées de lignes d'action possibles visant à garantir la future compétitivité de la construction navale européenne, anticipant sur la réponse à apporter à la situation des chantiers navals mondiaux. Les résultats de ces travaux seront présentés au Conseil dans le courant de l'année.

En dehors d'une synthèse sur l'évolution du marché en 2002, le présent rapport fournit une mise à jour des études antérieures sur les coûts, et y ajoute de nouvelles études de coûts effectuées depuis la présentation du sixième rapport.

Comme c'était déjà le cas pour les rapports antérieurs, certains éléments clés sous-jacents, concernant par exemple l'étendue et la méthodologie afférentes à la surveillance du marché par la Commission, ne sont pas répétés ici. Ces éléments sont développés dans les rapports précédents et sont énumérés dans l'introduction du cinquième rapport sur la construction navale.

2. Analyse du marché

2.1.1. Carnets de commandes et parts de marché

Les diverses questions créant problème sur le marché global de la construction navale et certains segments de celui-ci (excès des commandes dans le passé, ralentissement économique américain, incertitudes de l'économie mondiale et conséquences du 11 septembre) ont continué de se manifester tout au long de l'année 2002. Les entrées de commandes en 2002 ont été inférieures aux chiffres enregistrés en 2000 et 2001, et ont porté sur un total de 20 470 000 tbc (contre 29 430 000 tbc en 2000 et 23 340 000 tbc en 2001, source: Lloyd's Register/OCDE). Les prises de commandes ont donc chuté de 12,3 % sur la période 2001-2002, après un recul de 20,7 % sur la période 2000-2001.

Les plus touchés par la détérioration des conditions du marché sont les porte-conteneurs et bateaux de croisière (comme le fait apparaître le graphique suivant). Un seul navire de croisière a été commandé depuis le 11 septembre 2001, et l'industrie a clairement indiqué que la période de consolidation du marché allait se poursuivre sur les deux ou trois prochaines années, autrement dit que les nouvelles commandes de navires de croisière seraient limitées et sélectives. Dans le cas des porte-conteneurs, certaines commandes ont été enregistrées sur le segment Post-Panamax, mais l'activité est bien en deçà des niveaux précédents. Les principaux armateurs de porte-conteneurs ont enregistré des pertes ou une chute importante des bénéfices en 2002 et s'efforcent d'augmenter leur flotte de bâtiments plus importants de manière à abaisser les coûts unitaires à moyen terme. Un grand nombre de porte-conteneurs Post-Panamax devant entrer en service au cours des 24 prochains mois, il faut s'attendre à une nouvelle détérioration des taux de fret sur ce segment de marché, et l'investissement doit être vu en termes de consolidation du marché, plutôt que d'expansion de celui-ci. Les taux d'intérêt étant actuellement extrêmement bas, certains armateurs peuvent être tentés de prendre la décision d'investir maintenant dans de nouveaux bâtiments, plus tôt qu'ils ne le feraient normalement.

La demande pour d'autres types de navires tels que les transporteurs de GNL, les chimiquiers et tankers s'est également inscrite à la baisse, bien qu'à un moindre degré.

Seuls les transporteurs de produits pétroliers et vraquiers ont enregistré une hausse des commandes, en raison du remplacement des anciens tonnages suite aux nouveaux règlements de sécurité maritime de l'UE ("Erika" et "Prestige") ainsi que de la demande domestique japonaise et chinoise. Dans le cas des vraquiers, la demande a également été influencée de façon positive par les nouvelles règles de conception devant entrer en vigueur à compter du 1er juillet 2003. Ces règles exigeront un renforcement de certaines parties de la structure métallique des bâtiments mis en service après cette date, ce qui devrait entraîner une augmentation estimée de 5 % du poids d'acier mis en oeuvre et donc majorer les coûts de construction. Cependant, ces classes de navires sont d'une faible valeur de production et la compétition pour les contrats portant sur ces segments est féroce, ce qui entraîne une pression constante sur les prix à la baisse.

Le graphique qui suit illustre l'évolution des activités de commandes sur les années 2000-2002 pour les principales classes de navires (source: Lloyd's Register/OCDE/graphique adapté par les services de la Commission).

Évolution des nouvelles commandes par principaux types de navires, 2000-2002

>REFERENCE A UN GRAPHIQUE>

Légende:

cgt = tbc

LNG = GNL

LPG = GPL

Chemical = chimiquier

Crude Oil = tanker

Oil products = transporteur de produits pétroliers

Bulk = vraquier

Gen. Cargo = cargo

Container = porte-conteneurs

Ro-Ro = roulier

Pass./Ro-Ro = roulier passagers

Cruise = navire de croisière

Ces évolutions affectent les principales régions mondiales de construction navale de façon différente. Si les chantiers nippons continuent de bénéficier d'une forte demande domestique en ce qui concerne les vraquiers étant donné que ces commandes sont pratiquement entièrement passées au Japon (conformément aux schémas de commandes traditionnels, mais aussi en vertu du fait que les chantiers japonais ont optimisé la production en série de ce type de bateau), la Corée du Sud rivalise avec la Chine en matière de contrats de tankers, principalement au profit d'armateurs européens. Cette concurrence étant pratiquement entièrement axée sur les prix, on ne saurait attendre de bénéfices substantiels de ces commandes comme le montrent les études de coûts détaillées. Les chantiers navals de l'UE ne sont plus actifs sur ces segments de marché à faible valeur ajoutée. Ceci entraîne une diminution du volume de production des chantiers UE apparaissant clairement d'après l'évolution des parts de marché indiquée ci-dessous, qui devrait se poursuivre, et un certain nombre de pertes d'emplois et de fermeture de chantiers navals ont été signalées dans la plupart des grands pays constructeurs européens. Les principaux segments prometteurs pour les chantiers navals de l'UE sont le secteur des ferries [5] (concernant principalement la catégorie des transbordeurs/rouliers) et petits tankers [6], où les besoins de remplacement sont en progression. Cependant, ces évolutions doivent encore se matérialiser et peuvent arriver trop tard pour de nombreux chantiers déjà à cours de commandes en 2003 et 2004. De surcroît, on peut supposer que les chantiers navals coréens tenteront de prendre pied sur ces segments de marché par des offres de prix très basses.

[5] Du fait de la législation UE récemment adoptée concernant les exigences spécifiques de stabilité des navires rouliers et les règles et normes de sécurité des bateaux de passagers.

[6] À la suite de la nouvelle législation de sécurité maritime de l'UE adoptée ou proposée à la suite des accidents "Erika" et "Prestige".

Les parts de marché ont évolué comme suit (sur la base de tbc):

>EMPLACEMENT TABLE>

L'ensemble des évolutions décrites ci-dessus doit être considéré dans la perspective d'une importante surcapacité de production dans le secteur de la construction navale, estimée à au moins 20 % au-dessus des niveaux requis pour le remplacement nécessaire des anciens tonnages et l'ajustement à la demande supplémentaire éventuelle découlant de la progression du commerce maritime [7]. Cette surcapacité continue de croître avec les nouveaux investissements de chantier consentis en particulier en Chine et à présent également au Vietnam. Simultanément, les chantiers coréens continuent de développer leurs capacités de production existantes, principalement par le biais d'un appel croissant à la sous-traitance de certains lots, notamment les structures métalliques. Ceci devrait continuer d'exercer un effet négatif sur les prix.

[7] KSA, l'association des chantiers navals coréens, s'attend à une capacité excédentaire de 16,1 % en 2005, tandis que l'AWES, l'association des constructeurs et réparateurs navals européens table sur un chiffre de 29,3 % (source: OCDE).

2.1.2. Évolution des prix

Les prix des navires fin 2002 étaient généralement inférieurs aux prix relevés fin 2001. Selon Clarkson Research Studies, source tarifaire faisant foi, les tendances suivantes ont été relevées.

[Les classes de navires reprennent celles énumérées par Clarkson.]

[Dans le cas des navires porte-conteneurs, la capacité d'emport de conteneurs en EVP (unité d'équivalent 20 pieds) est indiquée, les navires au-delà de 5 000 EVP entrant dans la catégorie des porte-conteneurs appelés "Post-Panamax".]

[Transporteur de GNL signifie transporteur de gaz naturel liquéfié, transporteur de GPL signifie transporteur de gaz de pétrole liquéfié.]

[VLCC signifie super pétrolier.]

[Ro-Ro désigne un navire roulier.]

[Les appellations Aframax, Suezmax, Panamax, Le Cap, Handymax et Handysize font référence à certaines dimensions et caractéristiques standard respectivement pour les pétroliers et les vraquiers.]

Évolution des prix 2001 - 2002 par principaux types de navires

>EMPLACEMENT TABLE>

Certaines conclusions peuvent être tirées du tableau ci-dessus:

* Les prix ont été stables sur les segments où les chantiers UE sont en position de force et les chantiers coréens ne sont pas particulièrement actifs, à savoir les petits porte-conteneurs et navires rouliers.

* Les prix ont augmenté marginalement (+ 2,9 %) sur le segment des petits pétroliers en raison de la forte demande de remplacement des bâtiments plus anciens, à la suite de la nouvelle législation de sécurité maritime de l'UE (ou de son anticipation). Cependant, si on veut bien tenir compte de l'augmentation significative des coûts de production en Corée et en Chine (pays dans lesquels la plupart de ces commandes sont actuellement passées) et de la forte demande qui s'exerce sur ce segment, cette augmentation de prix est fort modeste.

* Les prix ont augmenté pour tous les types de vraquiers suite à une forte demande domestique au Japon et en Chine ainsi qu'à des règles de conception plus strictes pour ce type de bâtiment dont on attend l'entrée en vigueur au 1er juillet 2003. La plupart des commandes étant passées au Japon, la discipline de prix imposée par le gouvernement nippon semble fonctionner, et les chantiers chinois collent au niveau de prix pratiqué par les leaders de marché japonais.

* Les prix se sont de nouveau détériorés dans des proportions significatives sur les segments dont les chantiers coréens se sont fait une spécialité (méthaniers et grands porte-conteneurs) et sur lesquels ils s'affrontent en concurrence directe. Ceci confirme la conclusion antérieure de la Commission suivant laquelle la féroce concurrence en Corée du Sud a un effet délétère sur le marché mondial et selon laquelle les prix semblent être fixés par les principaux chantiers coréens sans toujours respecter les coûts de production effectifs.

Il est à noter que le recul de la valeur du dollar américain vis-à-vis de l'euro, du Won et du Yen aurait dû aboutir à une augmentation de prix générale en dollar américain. Ceci ne s'étant pas produit, il faut en conclure que globalement les prix des navires ont de nouveau chuté. Le graphique qui suit indique l'évolution du Yen vis-à-vis du dollar américain au cours de la période 1999-2002. Le renforcement notable du Won en 2002 et en particulier au cours du dernier trimestre aurait dû forcer les producteurs coréens à demander des prix en dollar américain plus élevés, mais ceci n'a pas été le cas.

Évolution du taux de change Won/dollar américain

>REFERENCE A UN GRAPHIQUE>

L'indice de prix des navires établi par la Commission reflète l'évolution des prix (voir graphique). Il indique que la modeste revalorisation des prix observée en 2000 et 2001, période où les commandes étaient soutenues, a fait long feu et que les niveaux de prix sont les plus bas depuis plus d'une décennie.

>REFERENCE A UN GRAPHIQUE>

Indice des prix des navires neufs (1987 = 100)

3. Études de coûts

3.1.1. Mise à jour des analyses de coûts antérieures

Suivant en cela les rapports précédents, le présent rapport présente une actualisation de toutes les analyses de coûts menées précédemment par la Commission dans le cadre de l'exercice de surveillance du marché. La méthodologie appliquée à ces analyses a été décrite dans les deux premiers rapports sur la construction navale et n'est pas reprise ici. La méthode est sans cesse affinée.

Comme les projets de la construction navale se déroulent sur une durée assez longue et que les coûts réels peuvent changer jusqu'au moment de la livraison du navire, les études de coûts doivent se baser sur des hypothèses prévisionnelles. Ces hypothèses sont régulièrement révisées et les résultats sont actualisés à chaque fois que des informations nouvelles ou plus précises sont recueillies. C'est ce que reflète le tableau ci-dessous. La référence au rapport sur la construction navale dans lequel une commande particulière a été étudiée devrait permettre d'examiner les détails relatifs au contrat en question. Au fur et à mesure que la Commission progresse dans sa mission de surveillance du marché, des commandes qui avaient été antérieurement et qui sont à présent exécutées peuvent permettre de vérifier le modèle de coût. Jusqu'ici, les chiffres mis à jour sont conformes aux résultats d'origine.

Les abréviations utilisées ci-après font référence aux chantiers navals coréens:

DHI: Daewoo Heavy Industries

DSME: Daewoo Shipbuilding and Marine Engineering

HHI: Hyundai Heavy Industries

HMD: Hyundai Mipo Dockyard

HHIC: Hanjin Heavy Industries and Construction

SHI: Samsung Heavy Industries

>EMPLACEMENT TABLE>

3.1.2. Nouvelles analyses

Depuis la parution du sixième rapport sur la construction navale, 5 nouvelles analyses de coûts ont été entreprises.

Elles concernent les commandes suivantes passées à des chantiers navals sud-coréens:

- Porte-conteneurs 5 100 EVP (série de 6 unités), 40 776 tbc, à construire par Daewoo Shipbuilding et Marine Engineering

- Porte-conteneurs 4 900 EVP (série de 4), 34 775 tbc, à contruire par Hanjin Heavy Industries and Construction

- Transporteur de produits pétroliers/chimiques (série de 4), 24 480 tbc, à contruire par STX Shipbuilding Co. (ex-Daedong)

- Vraquier de type "Le Cap", 26 250 tbc, à construire par Hyundai Heavy Industries

- Transporteur de produits pétroliers (série de 4), 23 200 tbc, à construire par Hyundai Mipo Dockyard

Les résultats de ces études de coûts sont résumés ci-dessous.

Comparaison des montants des commandes communiqués et des coûts de construction calculés pour les navires neufs sélectionnés (nouvelles analyses)

>EMPLACEMENT TABLE>

Ces résultats confirment les conclusions des rapports précédents. Les chantiers coréens continuent de vendre des navires à des prix apparaissant être en deçà du prix normal (coût intégral de production majoré d'une marge de profit de 5 %). Les prix semblent généralement fixés à un niveau couvrant les frais d'exploitation directs mais n'incluant pas les provisions pour inflation et l'ensemble des coûts financiers. Les prix des navires issus des chantiers coréens s'affichant à des bas historiques au cours de la période sous revue, alors que les coûts de production ont augmenté, le fossé entre les prix des contrats et les prix normaux se creuse toujours davantage. Les dernières études ont mis en évidence un écart de 20 % en moyenne (en chiffres non pondérés) alors qu'il était de 8 % dans le cinquième rapport publié voici un an.

Les chantiers coréens, dotés de leur formidable capacité de production, sont particulièrement affectés par tout retournement de marché, dans la mesure où ils ont besoin de remplir leurs gigantesques cales de construction et de s'assurer suffisamment de trésorerie pour refinancer leurs dettes à court terme. Par conséquent, tout indique que les chantiers coréens s'efforcent de s'approprier toute commande apparaissant sur le marché, que ces commandes s'avèrent rentables compte tenu des coûts coréens ou non. Il vaut d'être remarqué que les carnets de commandes des chantiers coréens sont de plus en plus dominés par les pétroliers, en dépit de l'annonce faite en mars 2001 par le vice-président exécutif et directeur du marketing de la division chantiers navals de Hyundai Heavy qui a affirmé qu'HHI "envisageait de faire porter l'effort sur la valorisation des marges bénéficiaires en se montrant plus sélectif dans l'acceptation des commandes" [8]. D'autres directeurs de chantier ont également déclaré que les plates-formes coréennes abandonneraient les segments de marché des pétroliers et vraquiers dans la mesure où les augmentations de coûts imputables à la hausse des rémunérations, à l'inflation et à l'évolution des taux de change ne permettaient plus de dégager de bénéfices sur les bâtiments à faible valeur ajoutée. Cette évolution ne s'est pas matérialisée, et par conséquent un certain nombre de chantiers coréens ont enregistré des pertes pour 2002. D'autres chantiers ont fait état de bénéfices pro-forma.

[8] Entretien avec Reuters, 7 mars 2001

On ne manquera pas de s'intéresser à la commande controversée d'un porte-conteneurs de 5100 EVP destiné à Hamburg Süd. Cette commande a reçu des offres d'un chantier européen et de deux chantiers coréens. DSME a finalement remporté la commande avec un prix de 55 millions de dollars, conduisant SHI à déposer une plainte auprès du gouvernement coréen, DSME étant accusé de casser les prix. le gouvernement coréen a ensuite ordonné à DSME de relever son offre pour l'amener à celle de SHI à 58 millions de dollars. Comme justification de cette mesure exceptionnelle de la part du gouvernement coréen (lequel avait à de multiples reprises prétendu auprès de la Commission qu'il n'avait pas d'influence sur les pratiques commerciales des chantiers coréens), le directeur de la division chantiers navals du ministère du commerce de l'industrie et de l'énergie a déclaré que "l'offre de prix de Daewoo, qui apparaît trop basse compte tenu du prix du marché, pourrait constituer une entrave à la concurrence loyale et porter atteinte à la crédibilité des exportateurs coréens" [9]. On ignore si DSME a finalement augmenté son prix, Hamburg Süd insistant pour affirmer que le contrat a été signé au prix de 55 millions de dollars et ne voyant pas de motif d'accepter de révision substantielle.

[9] Lloyd's List du 11 novembre 2002

4. Conclusions

Les sérieuses difficultés auxquelles est confrontée la construction navale mondiale se poursuivent, avec une diminution des prises de commandes dans les principales régions de construction et des prix stagnant à un très bas niveau. Les principales raisons en sont les surcapacités de production, la saturation de l'offre, le ralentissement des économies mondiales et les répercussions du 11 septembre. Cette dernière circonstance a eu un impact significatif sur les perspectives à court et moyen terme de l'industrie de la croisière et donc sur la demande de nouveaux navires de croisière. L'étiage des prix dans la plupart des classes de bâtiments a pour enjeu central une féroce compétition intra-coréenne. Seuls les chantiers nippons et chinois parviennent actuellement à accroître leurs ventes grâce à une demande domestique stable d'une part et à une bonne compétitivité en matière de prix d'autre part.

Les commandes mondiales de nouveaux bâtiments en 2002 sont en retrait d'environ 12 % par rapport à 2001. Dans l'UE où la production se concentre de plus en plus sur les navires de croisière, la situation est bien pire, les commandes enregistrant un tassement de plus de 50 % par rapport à 2001 et de plus de 70 % par rapport à 2000.

Ce sont les porte-conteneurs et navires de croisière qui sont le plus touchés par l'atonie des carnets de commandes, mais les pétroliers, chimiquiers et méthaniers font également les frais de la conjoncture dégradée. La demande a progressé sur le segment des transporteurs de produits pétroliers, en raison des besoins de remplacement découlant de la nouvelle législation de l'UE en matière de sécurité maritime, ainsi que sur le segment des vraquiers. Cependant cette demande additionnelle n'a eu qu'un impact très limité sur les prix.

Par voie de conséquence, les chantiers navals se voient menacés de cessation d'activités et un certain nombre de faillites et de licenciements ont déjà été enregistrés, principalement en Europe.

Les prix des nouveaux navires s'inscrivent de nouveau à la baisse et sont à présent à leur plancher depuis une décennie. Aucune majoration de prix n'est intervenue en 2002 et on ne s'attend à aucun décollage en 2003.

Les chantiers de Corée du Sud ont encore revu à la baisse leurs offres de prix, malgré des augmentations de l'ensemble des principaux facteurs de coût, et, si l'on en croit l'analyse de la Commission, un certain nombre de chantiers coréens pourraient bientôt avoir des difficultés à faire face à leurs obligations financières à court terme.

Les études de coûts détaillées menées par la Commission en ce qui concerne les commandes passées aux chantiers sud-coréens confirment les résultats des rapports précédents, à savoir que les navires sont offerts à des prix qui ne semblent pas refléter les coûts intégraux de production. On observe ainsi que les offres de prix coréennes n'incluent aucune provisions pour inflation et service de la dette. Les études font apparaître que l'écart se creuse de nouveau entre les prix proposés et le prix normal calculé.

Top