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Document 52016IP0090

Résolution du Parlement européen du 10 mars 2016 sur la situation en Érythrée (2016/2568(RSP))

JO C 50 du 9.2.2018, p. 57–63 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

9.2.2018   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 50/57


P8_TA(2016)0090

Situation en Érythrée

Résolution du Parlement européen du 10 mars 2016 sur la situation en Érythrée (2016/2568(RSP))

(2018/C 050/09)

Le Parlement européen,

vu ses résolutions antérieures sur l'Érythrée, notamment celles du 7 février 2002 (1), du 18 novembre 2004 (2) et du 15 septembre 2011 (3) sur la situation des droits de l'homme dans le pays, y compris le cas de Dawit Isaak,

vu les résolutions 751 (1992), 1882 (2009), 1907 (2009), 2023 (2011) et 2244 (2015), du Conseil de sécurité des Nations unies qui ont prorogé l'embargo sur les armes imposé à l'Érythrée jusqu'au 15 novembre 2016, et le rapport du Groupe de contrôle pour la Somalie et l'Érythrée du 19 octobre 2015,

vu le rapport soumis au Conseil des droits de l'homme le 19 juin 2015 par le rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme en Érythrée, Sheila B. Keetharuth,

vu l'accord de partenariat ACP-UE (Accord de Cotonou), tel qu'il a été révisé en 2005 et en 2010, dont l'Érythrée est signataire,

vu la décision 2010/127/PESC du Conseil du 1er mars 2010 concernant des mesures restrictives contre l'Érythrée (4), modifiée par la décision 2010/414/PESC du Conseil du 26 juillet 2010 (5) et ensuite par la décision 2012/632/PESC du Conseil du 15 octobre 2012 (6),

vu les conclusions du groupe de travail A «Contrôle» de la commission du développement du Parlement européen du 11 novembre 2015,

vu la déclaration du porte-parole du Service européen pour l'action extérieure (SEAE) du 18 septembre 2014 concernant les prisonniers politiques en Érythrée,

vu le rapport du SEAE de 2015 sur le partenariat Érythrée-Union européenne,

vu le rapport par pays d'ONU Femmes du mois de juin 2014 sur le gouvernement de l'État d'Érythrée,

vu le programme indicatif national pour l'Érythrée au titre du 11e Fonds européen de développement (FED) du 3 février 2016,

vu la déclaration faite aux médias, le 8 juin 2015, par la commission d'enquête des Nations unies sur les droits de l'homme en Érythrée,

vu la convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

vu les déclarations du 23 novembre 2011 et du 25 juin 2013 des coprésidents de l'Assemblée parlementaire paritaire ACP-UE sur la situation des droits de l'homme en Érythrée,

vu son débat du 27 mai 2015 sur l'aide de l'Union au développement en Érythrée à la lumière des violations avérées des droits de l'homme,

vu la constitution de l'Érythrée, adoptée en 1997, qui garantit les libertés civiles, y compris la liberté de religion,

vu les conventions de l'Organisation internationale du travail no 29 sur le travail forcé, no 105 sur l'abolition du travail forcé, no 87 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical,

vu la charte africaine des droits de l'homme et des peuples de 1981,

vu le pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966,

vu la déclaration universelle des droits de l'homme de 1948,

vu l'article 123, paragraphes 2 et 4, de son règlement,

A.

considérant que l'Union apporte son soutien à l'Érythrée depuis son indépendance par rapport à l'Éthiopie en 1993; que le gouvernement d'Érythrée a enterré la promesse initiale d'instauration de la démocratie et de l'état de droit qui avait été faite au lendemain de l'indépendance en prétextant la défense nationale et le service national; que les élections présidentielles qui devaient se tenir en 1997 n'ont jamais eu lieu et que la constitution ratifiée la même année n'a jamais été appliquée; que les élections régionales de 2009 n'ont pas encore été organisées; que, même avant la dissolution de l'Assemblée nationale en 2002, l'adoption de la législation se faisait par décret gouvernemental;

B.

considérant que l'indépendance acquise contre l'Éthiopie en 1993 avait suscité l'espoir au sein de la communauté internationale et dans la population érythréenne que cela permettrait de fonder un pays respectant les droits de l'homme et exempt de répression; qu'il n'en a rien été, mais qu'au contraire la répression s'est accentuée et les violations des droits de l'homme se sont multipliées;

C.

considérant que le rapport du rapporteur spécial des Nations unies indique que la situation des droits de l'homme en Érythrée compte parmi les pires au monde, avec des violations quotidiennes des droits de l'homme et aucune amélioration constatée ces dernières années; que de nombreux jeunes ont fui le pays pour échapper à la répression exercée par le gouvernement et au service militaire obligatoire, qui commence souvent à un très jeune âge; que la loi imposant un service d'une durée de dix-huit mois est souvent transgressée, dans la mesure où la plupart des Érythréens accomplissent leur service pour une durée indéterminée; qu'un service militaire obligatoire aussi long entrave la croissance économique potentielle du pays; qu'une augmentation du salaire du service national n'a aucun sens au regard de la récente dévaluation du nakfa et des restrictions bancaires qui ont conduit à l'actuelle carence dans le pays; que de nombreux appelés sont soumis au travail forcé et se voient confier des missions civiles; que la plupart de ces conscrits se trouvent dans une situation d'esclavage dans laquelle toute candidature à un emploi et la possibilité d'avoir une vie de famille sont contrôlées; que la liberté de culte et de conscience, la liberté de la presse et la liberté d'expression ne sont pas garanties;

D.

considérant que la commission d'enquête des Nations unies sur les droits de l'homme en Érythrée a conclu que les violations comprenant exécutions extrajudiciaires, actes de torture (y compris sévices sexuels et esclavage sexuel), service national comme forme d'esclavage, travail forcé et politique du «tirer pour tuer» à la frontière, peuvent constituer des crimes contre l'humanité;

E.

considérant que l'organisation Human Rights Watch souligne l'absence de liberté religieuse en Érythrée; que le gouvernement harcèle sévèrement les citoyens qui pratiquent des religions autres que les quatre qu'il reconnaît; que même dans le cas de religions reconnues, le gouvernement interfère dans la pratique religieuse;

F.

considérant que les activités homosexuelles sont illégales en Érythrée, et que le gouvernement refuse de mettre en œuvre la législation de lutte contre les discriminations afin de protéger les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexes (LGBTI);

G.

considérant que la discrimination et la violence à l'égard des femmes sont présentes à tous les niveaux de la société érythréenne; que non seulement les femmes sont particulièrement exposées à de hauts risques de violence sexuelle dans l'armée et dans les camps d'entraînement militaire, mais aussi au sein de la société en général, où la violence à l'égard des femmes a lieu dans un climat d'impunité; que, selon les estimations, 89 % des filles en Érythrée ont subi des mutilations génitales féminines (MGF); qu'en mars 2007, le gouvernement a publié une proclamation faisant des MGF un délit, interdisant ces pratiques et soutenant des programmes éducatifs qui découragent la pratique au cours de l'année en question; que les femmes peuvent perdre leur droit aux coupons alimentaires et l'accès à la terre;

H.

considérant que de nombreux civils érythréens sont arrêtés pour divers motifs injustifiés, comme l'expression d'opinions indépendantes, ou sans justification explicite, pour une durée indéterminée; que des prisonniers, parmi lesquels figurent des enfants, sont détenus dans des conditions extrêmement pénibles qui, dans certains cas, s'apparentent à de la torture et le refus de soins médicaux; que les femmes détenues sont souvent surveillées par des hommes, ce qui accroît le risque de violences sexuelles et sexistes; que, selon l'index de l'organisation Freedom House (rapport de 2015), l'Érythrée continue de se situer parmi les environnements les plus répressifs pour les médias, enregistre le plus mauvais résultat possible et est classé comme «le pire des pires» pays au monde, qui présente le plus faible taux d'accès à internet — 1 % seulement;

I.

considérant que, dans une déclaration prononcée à Bruxelles le 18 septembre 2014, le porte-parole du SEAE se disait préoccupé par la détention d'un groupe de 11 députés et membres éminents du Front populaire pour la démocratie et la justice (PFDJ), depuis le 18 septembre 2001, en l'absence de chefs d'inculpation, de jugement et sans possibilité de voir un avocat, et par la détention illégale, depuis le 23 septembre 2001 de 10 journalistes indépendants, parmi lesquels Dawit Isaak, un ressortissant suédois et le seul prisonnier d'opinion européen; considérant que le patriarche Abune Antonios demeure au secret et assigné à résidence depuis janvier 2006;

J.

considérant qu'il n'y a pas de liberté de la presse, puisque les médias indépendants sont interdits en Érythrée, et que, dans le classement mondial de la liberté de la presse de Reporters sans frontières, l'Érythrée occupe, pour la huitième année consécutive, la dernière place parmi les 170 à 180 pays évalués;

K.

considérant que l'Érythrée occupe la 186e place sur 188 pays repris dans l'indice de développement humain pour l'année 2015, selon le rapport sur le développement humain de 2015 du programme de développement des Nations unies;

L.

considérant que le rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des droits de l'homme en Érythrée recense trois grands domaines de préoccupation, à savoir: la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels, y compris le droit à un logement convenable; le trafic et la traite des êtres humains; et le nombre croissant de mineurs non accompagnés, qui font partie des plus de 5 000 personnes fuyant chaque mois le pays;

M.

considérant que le 26 juin 2015, des centaines de réfugiés érythréens ont manifesté devant le siège de l'Union africaine, en demandant que l'organisation régionale fasse pression pour des réformes démocratiques dans leur pays d'origine; que les manifestants accusaient le président érythréen de longue date Isaias Afewerki d'être un dictateur et pressaient l'Union africaine de prendre des mesures;

N.

considérant qu'en novembre 2015, les Nations unies ont lancé une alerte à la sécheresse dans la Corne de l'Afrique en raison du phénomène El Niño qui sévit actuellement; que les Nations unies ont indiqué en décembre 2015 qu'il s'agissait de la pire sécheresse jamais enregistrée dans la région, responsable d'une réduction des récoltes comprise entre 50 % et 90 %; que, dès lors, l'Érythrée fait partie des pays confrontés à la difficile tâche d'assurer la sécurité alimentaire de leur population;

O.

considérant qu'en totale contradiction avec la réalité de la sécheresse, le président érythréen a récusé la menace d'une crise alimentaire, affirmant que le pays ne connaîtra pas de crise en dépit d'une réduction de la production agricole;

P.

considérant que l'Union européenne est un donateur important de l'Érythrée en matière d'aide au développement et d'assistance;

Q.

considérant que le gouvernement érythréen a suspendu l'aide unilatéralement en 2011 et ne reconnaît pas publiquement sa collaboration et son partenariat avec l'Union européenne; que l'Érythrée ne fait pas le nécessaire pour permettre aux députés européens de visiter le pays librement et sans contrôle;

R.

considérant que la perte de leurs moyens de subsistance encourage les femmes et les enfants à fuir le pays; qu'en 2015 les Érythréens fuyant leur pays représentaient le quatrième contingent de personnes risquant leur vie pour se rendre en Europe (après les Syriens, les Irakiens et les Afghans) et subissaient la loi de passeurs sans scrupule avant de pouvoir embarquer pour une dangereuse traversée de la Méditerranée; que dès lors la situation en Érythrée affecte directement l'Europe, car si les droits de l'homme étaient respectés dans ce pays et si les Érythréens pouvaient y vivre sans crainte, ils pourraient rentrer chez eux;

S.

considérant que, selon le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, plus de 400 000 Érythréens, soit 9 % de la population totale, ont fui le pays; que le HCR estime que quelque 5 000 Érythréens quittent le pays chaque mois, ce qui s'explique dans une large mesure par la persistance de graves violations des droits de l'homme; qu'en 2015, 69 % des demandes d'asile d'Érythréens ont abouti à l'octroi du statut de réfugié dans l'Union, tandis qu'une partie supplémentaire de 27 % des demandeurs ont bénéficié de la protection subsidiaire, ce qui montre la gravité de la persécution en Érythrée;

T.

considérant que la traite des êtres humains, avec demande de rançon, qui sont gravement torturés dans le Sinaï, est à l'origine de nombreux meurtres et disparitions de réfugiés érythréens ayant été enlevés, tandis que les survivants, profondément traumatisés, n'ont reçu aucune aide, ni soins; qu'une totale impunité prévaut, les auteurs n'ayant pas été traduits en justice; que les enfants non accompagnés victimes de la traite d'êtres humains doivent faire l'objet d'une attention particulière, car ils nécessitent une assistance et une aide spécifiques compte tenu de leur grande vulnérabilité;

U.

considérant que le 22 février 2016, le programme pour le secteur de la sécurité (Security Sector Program) de l'Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) a officiellement publié, à Addis-Abeba (Éthiopie) un rapport d'étude intitulé «Human Smuggling and Trafficking on the Horn of Africa-Central Mediterranean Route»(Immigration clandestine et traite des êtres humains sur la route migratoire de la Corne de l'Afrique et de la Méditerranée centrale);

V.

considérant que l'Érythrée soutient le processus de Khartoum (une initiative conjointe de l'Union européenne et de l'Union africaine, lancée le 28 novembre 2014, pour répondre au problème des migrations et du trafic des êtres humains) qui comporte la mise en œuvre de projets concrets, y compris le renforcement des capacités judiciaires et des actions de sensibilisation;

W.

considérant que l'Union européenne a d'abord imposé des sanctions contre l'Érythrée en mars 2010 afin de mettre en œuvre la résolution 1907 (2009) du Conseil de sécurité des Nations unies et que ces sanctions comprenaient un embargo sur les armes, des restrictions en matière de déplacements et des gels des avoirs à l'égard des personnes qui constituent une menace pour la paix et la réconciliation nationale;

X.

considérant que l'Union européenne a tout intérêt à la stabilisation de l'Érythrée, car la situation actuelle pousse une partie considérable de la population à fuir et des milliers de personnes meurent victimes d'activités criminelles comme l'immigration clandestine et le trafic d'êtres humains;

Y.

considérant que le régime étend son emprise totalitaire sur la diaspora érythréenne, en procédant à l'extorsion de fonds auprès de ses ressortissants par le biais d'une taxe de 2 % sur les revenus d'expatriés, en faisant de l'espionnage et s'en prenant aux membres de la famille restés en Érythrée, au motif d'actes perçus comme répréhensibles; que le 28 janvier 2016, le ministre érythréen du développement national et le chef de la délégation de l'Union européenne ont signé le programme indicatif national au titre du 11e Fonds européen de développement (FED) à Asmara, pour une valeur de 200 millions d'euros au cours des cinq prochaines années; que les actions devraient se concentrer sur l'énergie renouvelable, la gouvernance et la gestion des finances publiques dans le secteur de l'énergie en particulier;

Z.

considérant que le 13 novembre 2015, la commission du développement du Parlement a demandé à la Commission européenne et au SEAE de tenir compte des conclusions envoyées au comité du FED concernant le projet de programme indicatif national pour l'Érythrée, qui faisaient état de l'ampleur et de la gravité des violations des droits de l'homme commises par le régime érythréen, de l'absence de fiabilité de ce régime en tant que partenaire de la coopération au développement, de la corruption omniprésente et de l'absence quasi-totale de transparence dans la gestion des finances publiques dans le pays, ainsi que du risque de détournement des fonds du FED destinés à la gestion des flux migratoires; que la commission du développement demandait au comité du FED de ne pas adopter le programme indicatif national dans l'attente de nouvelles discussions; que la position du Parlement a été ignorée;

AA.

considérant que le FPDJ a établi un contrôle et une surveillance sur les communautés de réfugiés et de la diaspora par le biais des ambassades, lesquelles sont impliquées dans l'extorsion sous forme de taxes frappant la diaspora et de contributions «volontaires» en échange de services, tels que les documents d'identité, passeports, certificats de naissance et documents importants dont peuvent dépendre les réfugiés; que ces pratiques constituent une violation de la convention de Vienne sur les relations diplomatiques; que des dirigeants des jeunes militants du FPDJ aux Pays-Bas ont engagé des campagnes judiciaires visant des universitaires néerlandais, des médias et institutions gouvernementales, avec l'appui des dirigeants politiques d'Asmara, vraisemblablement pour museler les détracteurs du régime; que le rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des droits de l'homme a également fait l'objet de menaces;

1.

prend acte avec une grande inquiétude de la situation déplorable des droits de l'homme et de l'absence totale d'état de droit et de liberté des médias en Érythrée;

2.

souligne qu'il faut donner la priorité à la lutte contre le déficit de justice, à la gouvernance démocratique et à la restauration de l'état de droit en mettant fin à un régime autoritaire fondé sur la crainte de détentions arbitraires et au secret, de la torture et d'autres violations des droits de l'homme, dont certaines peuvent constituer des crimes contre l'humanité;

3.

invite instamment le gouvernement de l'Érythrée à mettre un terme au système de service national à durée indéterminée en démobilisant les appelés ayant effectué leur service obligatoire de 18 mois, ainsi qu'au travail obligatoire pour les appelés au-delà de cette période, à prévoir l'objection de conscience, et à mettre fin à l'obligation pour tous les écoliers de passer leur dernière année de scolarité dans un camp d'entraînement militaire; demande au gouvernement érythréen de veiller à ce que personne n'entame de formation militaire avant d'avoir atteint l'âge de 18 ans ou après avoir dépassé l'âge normal de la conscription; note que les autorités érythréennes ont rappelé, en février 2016, que l'accord avec l'Union européenne n'entraînerait aucune réforme de la politique de l'Érythrée en matière de service militaire;

4.

considère que le comité du FED aurait dû prendre en considération les recommandations de la commission du développement, à savoir ne pas adopter le programme indicatif national et prolonger les discussions; estime que la décision d'adopter le programme indicatif national pour l'Érythrée en dépit de l'opposition du Parlement est la manifestation d'un déficit démocratique et compromet gravement le rôle du Parlement, qui est d'assurer la mise en œuvre effective des objectifs de développement de l'Union européenne; demande, à cet égard, que le Parlement soit investi de pouvoirs de contrôle sur le FED au moyen d'un accord interinstitutionnel contraignant au titre de l'article 295 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne; souligne que les conclusions de la commission du développement sur les projets de documents de programmation devraient être d'office envoyées par la Commission à la représentation permanente des États membres;

5.

prend acte de l'affectation de 200 millions d'euros au cours des cinq prochaines années au programme indicatif national au titre du 11e Fonds européen de développement, afin de contribuer à la réduction de la pauvreté et au développement socio-économique, d'attaquer les causes économiques et politiques de l'émigration et de financer des projets portant sur les énergies renouvelables, l'efficacité énergétique et la gouvernance économique; rappelle que cette enveloppe vient s'ajouter à d'autres volets de la coopération comme l'instrument européen pour la démocratie et les droits de l'homme;

6.

invite la Commission à s'assurer que les fonds alloués ne vont pas au gouvernement érythréen, mais sont strictement utilisés pour couvrir les besoins de la population érythréenne en matière de développement, de démocratie, de droits de l'homme, de gouvernance et de sécurité, ainsi que la liberté d'expression, de la presse et de réunion; presse l'Union européenne d'assurer la conditionnalité de l'aide récemment consentie et également de veiller à ce que le programme indicatif national aide l'Érythrée à procéder à une réorientation majeure de sa politique énergétique de manière à rendre l'énergie accessible à tous, notamment dans les régions rurales, qui n'ont toujours pas l'électricité; estime, en outre, que le volet «gouvernance» du programme indicatif national devrait se concentrer nettement sur la mise en œuvre des recommandations de l'examen périodique universel sur les droits de l'homme mené par les Nations unies;

7.

rappelle qu'un mineur non accompagné est avant tout un enfant potentiellement en danger et que la protection des enfants, et non les politiques d'immigration, doivent guider les États membres et l'Union européenne dans le traitement qu'ils appliquent aux mineurs non accompagnés, afin d'assurer le respect du principe essentiel de l'intérêt supérieur de l'enfant; rappelle que toute personne de moins de 18 ans, sans exception, doit être considérée comme un enfant et, partant, un mineur; rappelle que les mineurs non accompagnés, en particulier les filles, sont deux fois plus susceptibles d'être confrontés à des difficultés et à des problèmes que les autres mineurs;

8.

appelle la communauté internationale et les partenaires de l'Érythrée en matière de développement à intervenir et à exercer des pressions sur le gouvernement érythréen pour permettre l'apport d'une aide étrangère en faveur des communautés fragilisées avant que la crise ne s'amplifie; prie instamment l'Union de prendre des mesures urgentes et efficaces pour aider le peuple érythréen à renforcer sa résilience face au phénomène El Niño afin de garantir la sécurité alimentaire ainsi que l'accès à l'eau et à l'assainissement;

9.

demeure vivement préoccupé par la situation des droits de l'homme dans le pays; réitère sa demande aux autorités érythréennes afin qu'elles libèrent immédiatement et sans condition les parlementaires, les journalistes (y compris le ressortissant suédois Dawit Isaak qui n'a pas donné signe de vie depuis 2005), les prisonniers politiques et les prisonniers de conscience;

10.

encourage la Commission à obtenir des garanties claires de la part du gouvernement érythréen qu'il mettra en œuvre des réformes démocratiques et veillera au respect des droits de l'homme, notamment en appliquant les recommandations faites lors de la 18e réunion du groupe de travail de l'examen périodique universel, recommandations qu'il a acceptées le 7 février 2014; invite le gouvernement à permettre aux experts indépendants des Nations unies et de l'Union africaine, ainsi qu'au rapporteur spécial des Nations unies, d'accéder au pays et à autoriser la commission d'enquête sur la situation des droits de l'homme en Érythrée à exercer pleinement son mandat et à coopérer avec elle, y compris en ce qui concerne les questions relatives aux finances publiques;

11.

rappelle que la liberté de religion est un droit fondamental et condamne avec fermeté toute forme de violence ou de discrimination fondée sur la religion;

12.

se félicite des mesures prises par le gouvernement érythréen pour empêcher les MGF; invite le gouvernement à renforcer en général la promotion et la protection des droits des femmes, y compris en prenant des mesures supplémentaires pour lutter contre les pratiques préjudiciables, telles que les mariages d'enfants, les mariages précoces et les mariages forcés, et à mettre un terme à l'impunité en cas de violences sexuelles; demande au gouvernement érythréen de respecter les mères célibataires et de veiller à ce qu'elles soient soutenues et protégées;

13.

condamne le recours que fait le gouvernement érythréen à la «taxe de la diaspora», qui est collectée par extorsion et d'autres manœuvres illégales auprès des Érythréens vivant à l'étranger et utilisée, en violation des résolutions des Nations unies, pour financer des groupes armés dans des pays voisins et ainsi déstabiliser la région; exhorte le gouvernement à mettre fin à l'établissement de la «culpabilité par association» qui vise les membres de la famille de personnes qui se soustraient au service national, cherchent à fuir l'Érythrée ou omettent de payer la taxe sur le revenu de 2 % imposée par le gouvernement aux expatriés érythréens;

14.

exige que l'Érythrée signe et mette en œuvre immédiatement la Convention des Nations unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et respecte pleinement les obligations qui lui incombent en vertu de la convention internationale sur les droits civils et politiques et de la charte africaine sur les droits de l’homme et des peuples, qui interdisent toutes deux la torture; relève avec inquiétude que les acteurs publics et privés, y compris les entreprises, sont fortement limitées par le contrôle du gouvernement; reconnaît que l'absence de gestion des finances publiques, y compris l'absence de budget national, rend le contrôle budgétaire impossible, et que l'interchangeabilité des ressources financières en raison du contrôle de la banque centrale par le gouvernement peut encourager les achats militaires et contribuer ainsi au terrorisme et à la déstabilisation de la région;

15.

demande instamment à toutes les entreprises internationales qui investissent en Érythrée d'agir dans le respect de la pleine réalisation des droits de l'homme et de ne pas nuire;

16.

invite instamment les États membres de l'Union à enquêter sur le rôle du FPDJ et de ses différents mouvements, y compris l'aile des jeunes militants, et à interdire toutes les formes d'association et d'activité qui soutiennent directement l'exercice du contrôle et de la surveillance en Europe, mettent à mal les principes démocratiques et l'état de droit, et créent des systèmes d'intimidation et d'extorsion d'argent; demande instamment aux États membres d'agir pour mettre fin à la taxation de la diaspora et d'enquêter sur les mouvements financiers liés à toute autre forme de «contribution» destinée aux associations liées au gouvernement érythréen et situées à l'étranger et à protéger pleinement les droits d'asile de tous les réfugiés érythréens en Europe;

17.

charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, à l'Assemblée parlementaire paritaire ACP-UE, au Conseil de l'Union africaine, à la communauté est-africaine, au Secrétaire général des Nations unies ainsi qu'à la vice-présidente de la Commission /haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, ainsi qu'aux autorités érythréennes.


(1)  JO C 284 E du 21.11.2002, p. 359.

(2)  JO C 201 E du 18.8.2005, p. 123.

(3)  JO C 51 E du 22.2.2013, p. 146.

(4)  JO L 51 du 2.3.2010, p. 19.

(5)  JO L 195 du 27.7.2010, p. 74.

(6)  JO L 282 du 16.10.2012, p. 46.


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