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de l'Union européenne

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2023/2611

24.11.2023

RECOMMANDATION (UE) 2023/2611 DE LA COMMISSION

du 15 novembre 2023

sur la reconnaissance des qualifications des ressortissants de pays tiers

LA COMMISSION EUROPÉENNE,

vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, et notamment son article 292,

considérant ce qui suit:

(1)

La pénurie de travailleurs dans l’Union limite considérablement sa capacité à s’adapter aux transformations en cours qui surviennent dans les économies et sur les marchés du travail en ce qui concerne la nature du travail, la production et la communication.

(2)

Dans l’ensemble de l’Union, les employeurs font régulièrement état de difficultés à trouver des travailleurs possédant les compétences requises. En outre, le vieillissement de la population devrait réduire la main-d’œuvre disponible et aggraver les pénuries de compétences à l’avenir. La catégorie des petites et moyennes entreprises (PME), qui compte 25 millions d’entreprises dans l’Union, est particulièrement touchée parce que ces entreprises peinent à trouver les talents nécessaires pour bénéficier d’une croissance durable, évoluer et faire face à la concurrence.

(3)

La pénurie de personnel qualifié touche tous les écosystèmes sectoriels dans de nombreux États membres, et la demande de personnel hautement, moyennement et faiblement qualifié pour des postes vacants augmente. Des secteurs tels que la construction, l’industrie manufacturière, les technologies de l’information et de la communication (TIC), les transports, les services professionnels, la santé et les soins de longue durée sont confrontés à des pénuries persistantes. En outre, les pénuries de main-d’œuvre dans des secteurs clés qui sont essentiels à la transition écologique ont doublé entre 2015 et 2021. Cette situation est encore aggravée par le fait que les entreprises peinent à trouver des salariés possédant les compétences numériques adéquates et éprouvent des difficultés particulières à recruter des spécialistes des TIC.

(4)

Les pénuries de compétences présentent un défi majeur pour l’Union, qui aspire à rester un acteur mondial de premier plan et un pôle pour les technologies «zéro net», tout en atteignant des objectifs ambitieux en matière de climat et d’énergie. Elles entravent également la capacité de l’Union à exploiter le potentiel des transitions écologique et numérique, à renforcer sa primauté technologique, à stimuler la croissance et l’innovation et à réagir efficacement aux situations d’urgence telles que la pandémie de COVID-19 ou les conflits géopolitiques. Les pénuries de main-d’œuvre qualifiée dans certains secteurs, tels que les soins de santé et les soins de longue durée, limitent la capacité à prendre en charge la population vieillissante et à garantir l’accès de tous à des soins de santé de qualité.

(5)

Pour remédier à ces pénuries de compétences, il y a lieu d’investir massivement dans le perfectionnement et la reconversion professionnels, ainsi que dans des mesures visant à stimuler la participation des adultes en âge de travailler au marché du travail; il convient également de faciliter la mobilité de la main-d’œuvre, d’améliorer les conditions de travail et d’attirer les personnes possédant les compétences requises dans l’Union.

(6)

L’Union a toujours soutenu les actions tendant à remédier aux pénuries de compétences et de main-d’œuvre en maximisant le potentiel de sa main-d’œuvre nationale. Ces actions comprennent des initiatives visant à améliorer la mobilité de la main-d’œuvre au sein du marché intérieur, telles que la mise en place des réseaux européens de coopération des services de l’emploi (EURES). En outre, l’Union cherche à faire augmenter le taux de participation au marché du travail des femmes, des personnes handicapées et des personnes issues de l’immigration. Une attention particulière est également accordée à l’engagement des groupes sous-représentés, notamment les jeunes sans emploi qui ne suivent ni études ni formation (NEET). La stratégie européenne en matière de compétences de 2020 (1) définit 12 actions visant à aider les particuliers et les entreprises à développer leurs compétences et à les mettre à profit, notamment les recommandations du Conseil en matière d’enseignement et de formation professionnels (2), les comptes de formation individuels (3), les microcertifications (4) et le lancement du pacte pour les compétences. Le pacte pour les compétences soutient la collaboration entre organisations publiques et privées afin de renforcer l’action collective en matière de compétences pour répondre aux besoins du marché du travail. Par ailleurs, il favorise les partenariats à grande échelle dans les écosystèmes sectoriels clés.

(7)

L’Union s’efforce d’adopter une approche inclusive en vue de combler les pénuries de main-d’œuvre, notamment en permettant aux citoyens de l’Union, toutes générations confondues, de concrétiser leurs choix de vie et de réaliser leur potentiel dans l’économie et la société au sens large. À cette fin, l’Union met à la disposition des États membres un ensemble complet d’instruments, notamment la communication de la Commission intitulée «Le changement démographique en Europe: une panoplie d’instruments d’action», pour mieux concilier les aspirations familiales et le travail rémunéré, soutenir les jeunes générations et leur donner les moyens de s’épanouir, ainsi que donner aux générations plus âgées les moyens d’agir et de préserver leur bien-être.

(8)

Toutefois, la main-d’œuvre de l’Union ne peut pas à elle seule répondre à la demande de travailleurs qualifiés. Pour que l’économie de l’Union soit prospère et résiliente, il est nécessaire de la rendre plus attractive pour les talents mondiaux. Une migration légale bien gérée de demandeurs d’emploi en provenance de pays tiers doit faire partie de la solution aux pénuries de main-d’œuvre; elle permettra aux employeurs de trouver des travailleurs possédant les compétences dont ils ont besoin et stimulera ainsi la croissance économique.

(9)

Les données de l’enquête européenne sur les forces de travail montrent que les ressortissants de pays tiers titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur sont plus susceptibles que les citoyens de l’Union d’être surqualifiés pour leur emploi et d’occuper des postes peu ou moyennement qualifiés. En 2022, le taux de surqualification de l’Union était de 39,4 % pour les citoyens de pays tiers, contre 31,8 % pour les citoyens de l’Union originaires d’autres États membres et seulement 21,1 % pour les ressortissants de l’État membre considéré (5). La surqualification peut entraîner des pertes économiques pour les personnes concernées ainsi que pour l’économie de l’Union.

(10)

Si les États membres conservent le droit de déterminer les volumes d’admission des personnes en provenance de pays tiers qui viennent sur leur sol pour travailler, l’Union a mis en place une approche globale de la migration légale, reconnaissant le rôle essentiel que jouent les migrants dans l’économie et la société de l’Union, afin de rationaliser les procédures migratoires et d’harmoniser les conditions d’admission et les droits des ressortissants de pays tiers dans l’Union. Le pacte sur la migration et l’asile (6) reconnaît que le développement de voies légales d’accès à l’Union pour les ressortissants qualifiés de pays tiers constitue un élément essentiel d’un système global de gestion des migrations. La refonte de la directive (UE) 2021/1883 du Parlement européen et du Conseil (7) (dite «directive carte bleue») vise à attirer des talents hautement qualifiés sur le marché du travail. Afin de répondre à la demande croissante de professionnels qualifiés dans le secteur des TIC des États membres, cette directive prévoit que, dans certaines professions liées aux TIC, des compétences professionnelles supérieures soient considérées comme équivalentes aux qualifications de l’enseignement supérieur. En outre, le train de mesures relatives aux compétences et aux talents (8), adopté par la Commission en avril 2022, souligne que la migration légale profite tant aux migrants qu’à leur pays d’origine et d’accueil. Ce train de mesures annonçait des mesures législatives, opérationnelles et tournées vers l’avenir tendant à renforcer le cadre de l’Union en matière de migration légale, notamment des propositions visant à modifier la directive 2003/109/CE du Conseil (9) et la directive 2011/98/UE du Parlement européen et du Conseil (10) afin de simplifier les procédures d’admission des ressortissants de pays tiers de tous les niveaux de compétences et de renforcer les droits dont ils jouissent une fois qu’ils résident dans l’Union.

(11)

Les personnes qualifiées ayant besoin d’une protection internationale et qui sont désireuses d’occuper un emploi dans les États membres constituent un vivier largement sous-utilisé de demandeurs d’emploi potentiels susceptibles de répondre aux besoins des employeurs. Conformément à la recommandation (UE) 2020/1364 de la Commission (11) sur les voies légales d’accès à une protection dans l’Union européenne, la Commission a encouragé les États membres à mettre en place des parcours professionnels complémentaires pour les personnes ayant besoin d’une protection internationale afin de tirer parti de leurs compétences, de leurs qualifications et de leur motivation, tout en remédiant aux pénuries de compétences et de main-d’œuvre dans l’Union.

(12)

Afin de faciliter le recrutement international et d’offrir aux ressortissants de pays tiers la possibilité d’exercer une profession recensée comme étant un métier en tension qui présente un intérêt pour l’Union, la Commission a proposé la création d’un «réservoir européen de talents» (12), une plateforme qui rassemblerait des profils de demandeurs d’emploi originaires de pays tiers et des offres d’emploi d’employeurs établis dans les États membres, et qui aiderait à les mettre en adéquation. Le réservoir de talents a pour objet de rendre l’Union plus attractive aux yeux des demandeurs d’emploi de pays tiers et d’aider les employeurs à remédier aux pénuries de compétences et de main-d’œuvre dans l’Union. Le réservoir européen de talents pourrait également soutenir la mise en œuvre des parcours professionnels complémentaires.

(13)

La Commission met également en place des partenariats destinés à attirer les talents, qui constituent l’un des aspects essentiels de la dimension extérieure du pacte sur la migration et l’asile et qui sont mis en œuvre conformément à la communication de la Commission intitulée «Attirer des compétences et des talents dans l’UE» (13).

(14)

Dans un contexte de concurrence mondiale accrue pour attirer des compétences et des talents, seul un des États membres de l’Union figure parmi les cinq pays de l’OCDE les plus attractifs pour les travailleurs hautement qualifiés en 2023 (14). La capacité d’attirer et de retenir des talents dépend de multiples facteurs, dont les politiques d’intégration et d’inclusion, les mesures de soutien aux migrants ayant des besoins particuliers, les voies légales d’accès à la résidence permanente et à la citoyenneté, y compris pour les étudiants, les perspectives de revenus et la fiscalité, la perception des perspectives d’avenir, la qualité de vie et la reconnaissance des compétences et des qualifications.

(15)

Les diverses actions de l’Union en matière de compétences et de migration abordent le défi consistant à attirer des travailleurs qualifiés et la question du rôle de la reconnaissance des compétences et des qualifications. La communication de la Commission accompagnant la stratégie européenne en matière de compétences (15) souligne la nécessité de redoubler d’efforts pour améliorer les voies légales d’entrée dans l’Union et la reconnaissance des compétences des ressortissants de pays tiers sur son marché du travail. Le plan d’action de la Commission en faveur de l’intégration et de l’inclusion pour la période 2021-2027 (16) reconnaît l’importance de faciliter la reconnaissance et la comparabilité des qualifications des ressortissants de pays tiers afin d’aider ces derniers à utiliser l’intégralité de leurs compétences. Le plan industriel du pacte vert (17) a annoncé des actions, notamment des travaux sur la reconnaissance des qualifications des ressortissants de pays tiers, et a pour la première fois mis en évidence la valeur d’une approche donnant la priorité aux compétences pour recenser les compétences réelles des citoyens et des ressortissants de pays tiers. Le train de mesures d’aide aux PME (18) reconnaît que les pénuries de compétences comptent parmi les plus grands défis auxquels les PME sont confrontées et rappelle l’engagement de présenter une initiative visant à améliorer la reconnaissance des compétences et des qualifications des ressortissants de pays tiers afin de contribuer à combler les déficits de compétences sur le marché du travail de l’Union. La communication de la Commission intitulée «La compétitivité à long terme de l’UE: se projeter au-delà de 2030» a également souligné le fait que, pour remédier aux pénuries de compétences dans l’Union, il est nécessaire de simplifier la mobilité en facilitant la reconnaissance des compétences et des qualifications des citoyens d’autres États membres et des ressortissants de pays tiers.

(16)

Le 14 septembre 2022, la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, a annoncé l’Année européenne des compétences (2023) dans son discours sur l’état de l’Union européenne, soulignant que la solution aux défis en matière de compétences passe nécessairement par le fait d’attirer des compétences adéquates dans l’Union. La décision (UE) 2023/936 du Parlement européen et du Conseil (19) a fixé quatre objectifs pour l’Année européenne des compétences, notamment celui d’«attirer des ressortissants de pays tiers possédant les compétences requises dans les États membres». Cet objectif implique de promouvoir les possibilités de d’enseignement ou de formation (y compris, le cas échéant, l’éducation et la formation linguistiques), de favoriser le développement des compétences et la mobilité, et de faciliter la reconnaissance des certifications.

(17)

La reconnaissance des compétences et des qualifications joue un rôle clé pour ce qui est d’attirer des talents et, plus généralement, de recruter. Les qualifications et les acquis d’apprentissage associés à celles-ci servent de signaux de réussite dans l’enseignement ou la formation. Les qualifications et les niveaux de qualification sont souvent utilisés pour fixer les conditions d’accès aux emplois et peuvent être liés à la progression de carrière et à la rémunération. Les qualifications sont souvent exigées pour démontrer le respect des normes et des exigences régissant l’emploi à certains postes, par exemple dans les professions réglementées.

(18)

Une approche donnant la priorité aux compétences préconise le recensement et la pleine utilisation des compétences individuelles — qu’elles aient été acquises dans un contexte formel, non formel ou informel — plutôt que de fonder les évaluations uniquement sur les qualifications de la personne. Les mesures visant à attirer les talents et à accroître la participation au marché du travail peuvent être élargies et devraient s’appuyer sur cette approche, qui valorise les compétences et cherche à mettre en adéquation les personnes, compte tenu de leurs talents et potentiel, avec les emplois.

(19)

La reconnaissance des compétences et des qualifications des ressortissants de pays tiers est organisée et gérée de différentes manières à l’échelon national, en fonction des exigences légales et de l’organisation de l’emploi, de l’éducation, de la formation et de la migration dans les différents États membres. Les États membres prennent des décisions de reconnaissance juridiquement contraignantes lorsqu’ils accordent des droits à des ressortissants de pays tiers titulaires de certaines qualifications. Ces décisions permettent de vérifier qu’une personne possède les compétences et qualifications nécessaires avant de lui accorder des droits dans trois cas particuliers, à savoir dans le cadre de l’accès à une profession réglementée, dans le cadre de l’accès à l’enseignement ou à la formation ou dans le cadre de la migration de la main-d’œuvre.

(20)

Le premier cas, c’est-à-dire celui de l’accès à une profession réglementée, est celui dans lequel le ressortissant d’un pays tiers peut avoir besoin de faire reconnaître ses compétences et qualifications pour accéder à une profession réglementée ou l’exercer. Des centaines de professions relèvent de cette catégorie, par exemple dans les domaines des soins infirmiers, de la médecine, de la pharmacie et de l’architecture. Dans certains États membres, cela concerne aussi les maçons, les plombiers, les électriciens ou les ingénieurs civils. Une «reconnaissance des qualifications professionnelles» est nécessaire pour pouvoir accéder à ces professions dans les États membres où elles sont réglementées.

(21)

Afin de garantir efficacement la liberté d’établissement et de prestation de services ainsi que la libre circulation des personnes, tout en veillant au respect des normes et des exigences professionnelles, l’Union a établi des principes, des procédures et des critères communs de reconnaissance pour promouvoir la transparence, l’équité et la cohérence de la reconnaissance des qualifications professionnelles au moyen de la directive 2005/36/CE du Parlement européen et du Conseil (20).

(22)

Les principaux bénéficiaires de la directive 2005/36/CE sont les ressortissants des États membres exerçant leur droit à la libre circulation en vertu du droit de l’Union. La présente recommandation complète la directive en bénéficiant principalement aux ressortissants de pays tiers qui s’emploient à obtenir un visa ou un permis de travail et de séjour dans un État membre ou qui résident déjà légalement dans l’Union, qu’ils soient titulaires de qualifications délivrées dans l’Union ou dans des pays tiers. Un certain nombre de recommandations peuvent également s’appliquer à la reconnaissance des qualifications des ressortissants de l’Union titulaires de qualifications délivrées dans des pays tiers, afin de garantir le respect du principe de l’égalité de traitement.

(23)

Le considérant 10 de la directive 2005/36/CE indique que la directive ne fait pas obstacle à la possibilité pour les États membres de reconnaître, conformément à leur réglementation, des qualifications professionnelles acquises en dehors du territoire de l’Union européenne par des ressortissants d’un pays tiers, mais que cette reconnaissance devrait se faire dans le respect des conditions minimales de formation pour certaines professions. Certaines règles relatives à la reconnaissance des qualifications s’appliquent aux ressortissants de pays tiers, lorsqu’ils bénéficient de l’égalité de traitement avec les ressortissants de l’État membre d’accueil en vertu de la législation de l’Union en matière d’asile et de migration légale, ainsi que de la libre circulation (résidents de longue durée, membres de la famille de citoyens de l’Union issus de pays tiers, bénéficiaires du statut de réfugié ou du statut conféré par la protection subsidiaire, chercheurs, travailleurs hautement qualifiés titulaires d’une carte bleue européenne, ressortissants de pays tiers relevant du champ d’application de la directive 2011/98/UE, travailleurs saisonniers, etc.).

(24)

La directive 2005/36/CE s’applique également aux ressortissants de certains pays tiers par l’intermédiaire de divers instruments et accords. Par exemple, la directive 2005/36/CE s’applique également aux ressortissants des pays de l’EEE (en vertu de l’accord sur l’Espace économique européen) et aux ressortissants suisses (en vertu de l’accord UE-Suisse sur la libre circulation des personnes). L’accord de retrait et l’accord de commerce et de coopération conclus entre l’Union européenne et le Royaume-Uni précisent les modalités d’application de la directive 2005/36/CE aux qualifications obtenues au Royaume-Uni avant la fin de la période de transition, le 31 décembre 2020.

(25)

Les accords de libre-échange (ALE) de l’Union contiennent des dispositions visant à soutenir l’élaboration d’accords de reconnaissance mutuelle (ARM) des qualifications professionnelles avec des pays tiers. L’ARM relatif aux architectes conclu en 2022 entre l’Union et le Canada permet d’exercer en tant qu’architecte dans les deux territoires selon des critères convenus. Les accords commerciaux de l’Union comportent également des engagements visant à faciliter la présence temporaire de professionnels qualifiés sur son territoire, ce qui peut compléter les procédures visant à mieux reconnaître les qualifications délivrées dans des pays tiers.

(26)

Le deuxième cas dans lequel les ressortissants de pays tiers peuvent avoir besoin d’obtenir la reconnaissance de leurs compétences et qualifications est la «reconnaissance académique», c’est-à-dire la reconnaissance aux fins de l’accès à des types d’enseignement ou de formation complémentaire, comme des études universitaires ou une formation professionnelle; ou aux fins de l’utilisation d’un titre universitaire. La reconnaissance académique s’axe sur la validité, le niveau et les acquis d’apprentissage d’une qualification étrangère d’enseignement ou d’un apprentissage antérieur en vue de donner accès à des études complémentaires. Le réseau européen des centres nationaux d’information et le réseau des centres nationaux d’information sur la reconnaissance académique des diplômes (réseaux ENIC-NARIC) fournissent des informations, des conseils et des décisions de reconnaissance pour faciliter l’accès à la poursuite des études (généralement dans l’enseignement supérieur), et peuvent jouer un rôle dans la prise de décisions de reconnaissance, le traitement des recours ou la fourniture de conseils sur la reconnaissance ou la comparabilité des qualifications, y compris pour l’accès à l’emploi dans certains pays.

(27)

La convention de l’Unesco et du Conseil de l’Europe sur la reconnaissance des qualifications relatives à l’enseignement supérieur dans la région européenne est le principal instrument juridique en matière de reconnaissance des qualifications en Europe et au-delà. Elle promeut des procédures de reconnaissance équitables et transparentes dans un délai raisonnable pour les qualifications du deuxième cycle de l’enseignement secondaire et les qualifications d’un niveau supérieur. L’article VII de la convention de Lisbonne sur la reconnaissance vise à faciliter la reconnaissance des qualifications de l’enseignement supérieur détenues par les réfugiés, les personnes déplacées et les personnes assimilées aux réfugiés qui ne sont pas en mesure de produire des documents attestant de leurs qualifications, afin de simplifier leur accès aux programmes d’enseignement supérieur ou aux activités professionnelles. En outre, en 2017, le comité de la convention de Lisbonne sur la reconnaissance a adopté une recommandation sur la reconnaissance des qualifications détenues par les réfugiés, les personnes déplacées et les personnes assimilées aux réfugiés, qui énonce des principes destinés à l’établissement de politiques de reconnaissance des qualifications détenues par les réfugiés. La convention mondiale de l’Unesco sur la reconnaissance des qualifications relatives à l’enseignement supérieur établit des principes universels pour la reconnaissance équitable, transparente et non discriminatoire des qualifications de l’enseignement supérieur et des qualifications qui donnent accès à l’enseignement supérieur et offrent des possibilités de poursuite d’études et d’emploi.

(28)

Le troisième cas dans lequel des ressortissants de pays tiers peuvent avoir besoin de faire reconnaître leurs compétences et leurs qualifications s’inscrit dans le contexte des procédures relatives à la migration de la main-d’œuvre. Pour la délivrance de visas ou de permis de travail et de séjour à des fins professionnelles, certains États membres vérifient les compétences et les qualifications des ressortissants de pays tiers. Les critères d’évaluation et les approches varient d’un État membre à l’autre. La reconnaissance des compétences et des qualifications pour la migration de la main-d’œuvre peut être organisée dans le cadre d’un processus préalable au départ ou postérieur à l’arrivée, le but étant de préparer les ressortissants de pays tiers à leur intégration. Les taux élevés de refus des demandes et la longueur des délais de traitement peuvent dissuader les ressortissants de pays tiers; par ailleurs, l’évaluation fondée uniquement sur les qualifications et sur l’éducation et la formation formelles ne tient pas toujours compte de l’ensemble des compétences et du potentiel des demandeurs et peut faire obstacle à l’intégration des ressortissants de pays tiers au sein du marché du travail.

(29)

Au-delà des cas dans lesquels la reconnaissance des compétences et des qualifications est requise, les ressortissants de pays tiers peuvent également nécessiter un accès à des outils et à des informations pour étayer de manière transparente leurs compétences et qualifications, par exemple pour exercer un emploi dans des professions non réglementées ou avoir accès à un financement. Si la reconnaissance des qualifications n’est pas requise, les ressortissants de pays tiers peuvent néanmoins avoir besoin d’une déclaration de comparabilité ou d’informations ou de conseils sur la nature et l’authenticité des qualifications acquises dans leur pays, afin de comprendre et de pouvoir expliquer la valeur de leurs compétences et de leurs qualifications. Cette utilisation volontaire d’instruments pour rendre transparentes les qualifications ne confère pas de droits supplémentaires au titulaire de la qualification et ne relève pas du champ d’application de la présente recommandation. Même si elle est exclue de la définition du terme «reconnaissance» dans le contexte de la présente recommandation, l’obtention d’une telle déclaration officielle ou le fait de rendre des compétences et qualifications compréhensibles pour les employeurs pourraient être qualifiés de «reconnaissance» dans certains États membres.

(30)

Des initiatives de longue date telles que le cadre Europass (21) et les outils de transparence tels que le cadre européen des certifications (CEC) (22), la classification européenne des aptitudes, compétences, certifications et professions (ESCO), les justificatifs numériques européens relatifs à l’apprentissage et les outils de transparence du processus de Bologne peuvent être utilisés pour favoriser la transparence et la comparabilité des compétences et des qualifications dans l’ensemble de l’Union, de sorte à permettre la formation et l’évolution de carrière.

(31)

Dans les trois cas où les ressortissants de pays tiers pourraient avoir besoin de faire reconnaître leurs compétences et leurs qualifications, les procédures correspondantes sont souvent plus complexes et plus coûteuses que celles destinées aux citoyens de l’Union. Les ressortissants de pays tiers reçoivent en général moins facilement de l’aide. Ils peuvent rencontrer des difficultés en raison de barrières linguistiques (si les services d’information et de soutien ne sont pas disponibles dans les langues qu’ils connaissent) ou peuvent éprouver des difficultés à comprendre les différents systèmes nationaux de reconnaissance des compétences et des qualifications et à s’orienter dans ceux-ci. Dans certains cas, les ressortissants de pays tiers doivent obtenir la traduction et la certification officielle de leurs documents et assumer les frais correspondants, ou encore fournir des documents et autres preuves de leurs qualifications qui ne sont pas exigés des ressortissants de l’Union ou qui ne sont généralement pas délivrés dans leur pays d’origine. Les bénéficiaires ou demandeurs d’une protection internationale dans l’Union ainsi que les personnes ayant besoin d’une protection internationale qui se trouvent dans des pays tiers et peuvent bénéficier de parcours professionnels complémentaires peuvent même être dans l’incapacité de fournir des documents attestant pleinement leurs qualifications, par exemple lorsque des documents ont été perdus lors d’une fuite ou d’un déplacement imposé.

(32)

Les employeurs et les recruteurs sont souvent confrontés à des difficultés et à des frais lorsqu’ils recrutent des ressortissants de pays tiers. Le manque d’accès aux informations sur les qualifications obtenues dans les pays tiers, la lourdeur des procédures administratives, les exigences en matière de traduction, la vérification de l’authenticité, le respect de la réglementation et la longueur des délais de traitement (y compris pour la reconnaissance des compétences et des qualifications) peuvent leur compliquer la tâche d’attirer des talents sur un marché du travail concurrentiel. Certains États membres appliquent le principe de préférence pour les ressortissants de l’Union (examen du marché du travail), en vertu duquel les entreprises, avant de pouvoir recruter un ressortissant de pays tiers, doivent prouver que, conformément à la législation nationale, elles ont recherché — en vain — des travailleurs nationaux, des ressortissants de l’Union ou des ressortissants de pays tiers en séjour régulier ayant accès au marché du travail. Cette exigence crée une charge supplémentaire pour les employeurs, en particulier pour les PME.

(33)

La reconnaissance des compétences et des qualifications délivrées dans les pays tiers peut s’avérer difficile pour les autorités nationales des États membres en raison d’un manque d’accès aux informations sur les qualifications des pays tiers, de différences dans l’organisation des systèmes d’éducation, de formation et de qualification, de différences linguistiques, de difficultés pour vérifier l’authenticité ou encore du manque de réseaux et de contacts établis permettant d’instaurer la confiance et la compréhension à l’égard des qualifications obtenues en dehors de l’Union. En outre, les autorités nationales gèrent les données et les informations relatives à la reconnaissance des compétences et des qualifications de manières différentes et divergentes, elles ont donc une capacité limitée à échanger des informations entre elles et à élaborer des approches cohérentes pour reconnaître les compétences et les qualifications des ressortissants de pays tiers.

(34)

La reconnaissance des compétences et des qualifications des ressortissants de pays tiers à l’échelle nationale devrait être planifiée, dotée de ressources et développée dans le cadre d’approches pangouvernementales visant à attirer les talents, en fonction de l’évolution de l’offre et de la demande de compétences.

(35)

Les autorités nationales devraient renforcer leur capacité à simplifier et à accélérer les procédures de reconnaissance et fournir un soutien et des informations pertinentes aux ressortissants de pays tiers, aux autorités chargées de la reconnaissance, aux services publics de l’emploi, aux inspections du travail et aux autorités compétentes en matière de migration. La coopération à l’échelle de l’Union dans le domaine des compétences et des qualifications, ainsi que l’expertise et l’expérience des États membres en matière de reconnaissance des compétences et des qualifications, peuvent aider les autorités nationales et accroître la capacité collective de l’Union à réformer et à améliorer les processus de reconnaissance des compétences et qualifications des ressortissants de pays tiers. La coopération peut permettre le partage d’expertise et d’informations et l’adoption d’approches cohérentes en matière de reconnaissance des compétences et qualifications des ressortissants de pays tiers, en particulier pour les qualifications fréquemment observées dans le cadre des procédures de reconnaissance dans les États membres.

(36)

La coopération administrative, les partenariats et les accords avec les pays tiers, ainsi que la coopération avec les prestataires d’enseignement et de formation et les autres parties intéressées dans les pays tiers, peuvent faciliter la confiance, la transparence, l’échange d’informations et l’authentification des certifications.

(37)

La guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine a créé un besoin urgent de faciliter l’accès au marché du travail de l’Union pour les bénéficiaires d’une protection temporaire. La recommandation (UE) 2022/554 de la Commission (23) a établi des recommandations et des orientations visant à aider les États membres à faciliter la reconnaissance des qualifications professionnelles des personnes fuyant la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine. Une évaluation par la Commission (24), publiée en juin 2023, concernant l’application de cette recommandation par les États membres et les réponses qu’ils y ont apporté a recensé une série de pratiques prometteuses. Cette évaluation a mis en évidence le fait que certains États membres avaient pris des mesures importantes pour faciliter l’intégration des professionnels ukrainiens, notamment dans les domaines de la santé et de l’enseignement. La recommandation (UE) 2022/554 a envoyé un signal politique fort aux États membres afin qu’ils fassent tout ce qui est en leur pouvoir pour répondre aux besoins urgents de la situation. Des parties intéressées, telles que le groupe des coordonnateurs pour la reconnaissance des qualifications professionnelles, ont exprimé leur satisfaction à l’égard de la recommandation (UE) 2022/554, et certaines ont suggéré que les mesures soient étendues à d’autres ressortissants de pays tiers.

(38)

L’Union s’est engagée à soutenir le développement humain et économique par l’intermédiaire de l’aide au développement et de la coopération. Les partenariats avec les pays tiers qui visent à attirer les talents sont développés d’une manière mutuellement bénéfique permettant de répondre aux besoins des deux partenaires sur le marché du travail. La politique et l’action de l’Union et des États membres en matière de recrutement international devraient atténuer toute conséquence négative éventuelle pour les pays d’origine. Les efforts déployés pour attirer les talents ne devraient pas conduire à une fuite du capital humain ou à une «fuite des cerveaux» susceptible de limiter la capacité socio-économique et le développement des pays tiers ainsi que leur capacité à gérer des services essentiels. Des approches systématiques en matière de recrutement international sont nécessaires, y compris des partenariats mutuellement bénéfiques avec les pays d’origine, à l’instar des partenariats pour les talents, qui soutiennent le développement des compétences et des capacités dans le pays d’origine,

RECOMMANDE:

CHAPITRE I

DISPOSITIONS GÉNÉRALES

Objectif

1.

La présente recommandation énonce des orientations tendant à simplifier et à accélérer la reconnaissance des compétences et des qualifications des ressortissants de pays tiers par les États membres, afin de renforcer l’attractivité du marché du travail de l’Union pour les ressortissants de pays tiers et de permettre leur intégration sur le marché du travail en fonction des besoins de l’économie et de la société de l’Union.

2.

Les procédures de reconnaissance des compétences et des qualifications des ressortissants de pays tiers devraient s’inscrire dans le cadre d’approches globales, pangouvernementales, visant à gérer la disponibilité des compétences, selon les évolutions en matière de compétences dans les États membres et à l’échelle de l’Union. Ces approches englobent le perfectionnement et la reconversion professionnels, l’activation sur le marché du travail, la mobilité dans l’Union, les conditions de travail et le défi consistant à attirer des talents extérieurs à l’Union.

3.

Les États membres devraient s’attacher à utiliser le potentiel de la migration légale pour attirer des ressortissants de pays tiers qualifiés de sorte à remédier aux pénuries de main-d’œuvre et de compétences. Dans ce contexte, les États membres devraient:

a)

chercher à renforcer systématiquement leur attractivité en tant que destination pour les ressortissants de pays tiers de tous niveaux de compétences, notamment en améliorant les systèmes de reconnaissance des compétences et des qualifications, ce qui, le cas échéant, entraînera un accroissement considérable de leur indicateur OCDE relatif à l’attractivité des talents pour les travailleurs hautement qualifiés;

b)

tirer pleinement parti des compétences et des qualifications des ressortissants de pays tiers sur leur marché du travail, en vue de réduire nettement, d’ici à 2030, l’écart entre le taux de surqualification parmi les ressortissants de pays tiers et le taux de surqualification parmi leurs propres ressortissants.

Champ d’application

4.

La présente recommandation s’applique aux situations dans lesquelles des ressortissants de pays tiers s’emploient à obtenir un visa ou un permis de travail et de séjour dans un État membre ou résident déjà légalement dans l’Union.

5.

La présente recommandation s’applique lorsque la reconnaissance des compétences et des qualifications est requise pour accorder à un ressortissant de pays tiers des droits, plus précisément:

a)

pour donner accès à une profession réglementée dans un État membre («reconnaissance des qualifications professionnelles»);

b)

pour donner accès à un programme d’enseignement ou de formation («reconnaissance académique»);

c)

pour accorder un visa ou un permis de travail et de séjour à des fins d’emploi dans l’État membre, lorsque la reconnaissance des compétences et des qualifications fait partie du processus («reconnaissance des compétences et des qualifications pour la migration de main-d’œuvre»).

Définitions

6.

Aux fins de la présente recommandation, on entend par:

a)

«reconnaissance des compétences et des qualifications»: la reconnaissance formelle par une autorité compétente de la validité d’une qualification étrangère ainsi que le recensement des compétences, en vue d’accorder à un ressortissant de pays tiers des droits, à savoir l’accès à une profession réglementée, un visa et un permis de travail et de séjour à des fins d’emploi, ou l’accès à un programme d’enseignement ou de formation;

b)

«reconnaissance des qualifications professionnelles»: la reconnaissance par un État membre d’une qualification professionnelle étrangère aux fins de l’accès à une profession réglementée ou de l’exercice d’une profession réglementée sur son territoire;

c)

«profession réglementée»: une activité ou un ensemble d’activités professionnelles dont l’accès, l’exercice ou une des modalités d’exercice est subordonné(e), directement ou indirectement (en vertu de dispositions législatives, réglementaires ou administratives), à la possession de qualifications professionnelles déterminées;

d)

«reconnaissance académique»: la reconnaissance formelle, par une autorité compétente, de la validité et du niveau d’une qualification étrangère d’enseignement ou d’un apprentissage antérieur, qui s’axe sur les acquis d’apprentissage, en vue de donner accès à des études supplémentaires, sans préjudice du droit des établissements d’enseignement et de formation ou des autorités compétentes de fixer des critères d’admission particuliers pour certains programmes ou de vérifier l’authenticité des documents;

e)

«reconnaissance des compétences et des qualifications pour la migration de main-d’œuvre»: la reconnaissance des compétences et des qualifications au titre d’un processus d’octroi, par un État membre, d’un visa ou d’un permis de travail et de séjour à un ressortissant de pays tiers, y compris au titre d’un système d’immigration fondé sur des points;

f)

«profession réglementée prioritaire»: une profession réglementée qu’un État membre a répertoriée comme étant essentielle en vue de répondre aux besoins en compétences clés pour le développement économique ou pour la fourniture de compétences et de services essentiels, et qui nécessite l’adoption d’actions ou de mesures particulières afin de renforcer la main-d’œuvre active dans la profession concernée;

g)

«validation des compétences acquises par l’apprentissage non formel ou informel»: le processus par lequel une autorité compétente ou un organisme compétent confirme qu’une personne a obtenu dans des contextes d’apprentissage non formels ou informels des acquis d’apprentissage, mesurés au regard d’une norme pertinente;

h)

«cours de transition»: une possibilité d’apprentissage ciblée portant sur les différences importantes entre les connaissances, les compétences et les aptitudes acquises par une personne et celles requises pour accéder à une profession réglementée;

i)

«modèle européen d’apprentissage»: le modèle multilingue de données pour l’apprentissage, publié par la Commission, qui peut être utilisé pour décrire toutes les données relatives à l’apprentissage, y compris l’apprentissage formel, non formel ou informel, et qui soutient l’échange de données ayant trait aux compétences, l’interopérabilité, ainsi que la délivrance et l’échange de justificatifs numériques;

j)

«cadre européen des certifications» ou «CEC»: un cadre de référence commun de huit niveaux de certification, s’exprimant en acquis d’apprentissage avec des niveaux de compétence croissants, qui sert de grille de transposition entre les différents systèmes de certification et leurs niveaux, le but étant d’améliorer la transparence, la comparabilité et la transférabilité des certifications des personnes;

k)

«cadre national des certifications»: l’instrument de classification des certifications selon un ensemble de critères correspondant à des niveaux déterminés d’apprentissage, qui vise à intégrer et à coordonner les sous-systèmes nationaux de certification et à améliorer la transparence, l’accessibilité, la gradation et la qualité des certifications à l’égard du marché du travail et de la société civile;

l)

«surqualification»: une situation dans laquelle une personne possède un niveau de compétences ou d’enseignement et de formation supérieur à celui requis pour exercer son emploi (25).

CHAPITRE II

PRINCIPES DE RECONNAISSANCE DES COMPÉTENCES ET DES QUALIFICATIONS DES RESSORTISSANTS DE PAYS TIERS

Les principes énoncés ci-après concernent la place que tient la reconnaissance des compétences et des qualifications des ressortissants de pays tiers dans le contexte plus large des politiques en matière de migration de main-d’œuvre et des politiques relatives au marché du travail et aux compétences.

7.

Chaque État membre devrait systématiquement aplanir les obstacles liés à la reconnaissance des compétences et des qualifications qui entravent la capacité des ressortissants de pays tiers à migrer légalement vers l’État membre concerné, à obtenir un emploi correspondant à leurs compétences et à leur expérience, et à bien s’intégrer sur le marché du travail dudit État membre, remédiant ainsi aux pénuries de compétences ou de main-d’œuvre dans ledit État membre.

8.

Les procédures nationales de reconnaissance des compétences et des qualifications devraient s’appuyer sur une approche donnant la priorité aux compétences qui mette l’accent sur tout le talent et le potentiel des personnes et qui atténue le risque de surqualification. Il faudrait adapter les procédures pour éviter que les évaluations des ressortissants de pays tiers ne reposent uniquement sur les qualifications de ces personnes. La reconnaissance des qualifications devrait, dans la mesure du possible, être utilisée en combinaison avec une évaluation des compétences et des expériences.

9.

Les États membres qui ont recours à des examens du marché du travail devraient suivre régulièrement les besoins du marché du travail et la disponibilité des compétences. Ils pourraient envisager des exemptions à ces examens pour le recrutement dans des professions ou secteurs touchés par des pénuries de compétences, et sont encouragés à envisager de telles exemptions pour les PME en particulier. Quand des examens du marché du travail sont réalisés, les États membres devraient faire en sorte qu’ils soient menés à bien rapidement, qu’ils n’induisent qu’une charge administrative limitée pour les employeurs et les ressortissants de pays tiers, et qu’ils soient mis en œuvre de manière claire et transparente. Les États membres devraient apporter un soutien particulier aux PME.

10.

Les stratégies nationales, dont la reconnaissance des compétences et des qualifications, visant à attirer les talents à l’échelle mondiale devraient être gérées de manière à atténuer le risque de fuite des capitaux humains («fuite des cerveaux») pour les pays d’origine. Cet objectif peut être atteint en collaborant pour soutenir le partage des connaissances et le développement des compétences dans le pays d’origine ainsi qu’en en assurant un suivi et menant des recherches en continu afin de déceler les éventuelles conséquences négatives sur les pays d’origine et en soutenant la migration circulaire, pour que les deux pays puissent tirer parti de la migration légale vers l’Union.

11.

La reconnaissance des compétences et des qualifications ne devrait pas être requise pour le recrutement dans les professions qui ne sont pas réglementées. Dans ces cas, des informations et des outils en matière de transparence peuvent favoriser la compréhension et la comparaison des qualifications des ressortissants de pays tiers en vue de faciliter leur recrutement si nécessaire.

CHAPITRE III

ORGANISATION DE LA RECONNAISSANCE DES COMPÉTENCES ET DES QUALIFICATIONS DES RESSORTISSANTS DE PAYS TIERS

Les recommandations du présent chapitre s’appliquent à chacun des trois cas de reconnaissance des compétences et des qualifications énoncés au point 5, a) à c), ci-dessus.

Renforcement des capacités

12.

Les États membres devraient allouer des ressources financières et humaines appropriées pour soutenir les capacités de leurs autorités compétentes, dont leurs centres d’information nationaux européens et les centres nationaux d’information sur la reconnaissance académique des diplômes (centres ENIC-NARIC), pour qu’ils puissent répondre à la demande, ainsi que simplifier et accélérer les procédures de reconnaissance des compétences et des qualifications des ressortissants de pays tiers.

Développement du personnel

13.

Les autorités nationales devraient veiller à ce que le personnel pertinent ait accès à une formation pour développer les compétences, dont les compétences en langues étrangères, nécessaires pour pouvoir informer et conseiller tant les employeurs que les ressortissants de pays tiers, et évaluer les compétences et les qualifications.

Gestion des données

14.

Les autorités nationales devraient systématiquement enregistrer, analyser et publier des données sur les types de demandes adressées par les ressortissants de pays tiers, sur les pays d’origine, sur les délais de traitement et sur l’issue des décisions prises (y compris les décisions défavorables et les mesures de compensation qui ont été appliquées), afin de suivre l’incidence des procédures de reconnaissance des compétences et des qualifications.

15.

Les autorités nationales devraient adopter le modèle européen d’apprentissage pour structurer les données sur les décisions de reconnaissance, les certifications précédemment traitées et d’autres données sur les acquis et les droits d’apprentissage, afin de favoriser l’interopérabilité entre les systèmes et de faciliter le partage d’informations sur la reconnaissance des compétences et des qualifications des ressortissants de pays tiers.

16.

Les autorités nationales devraient utiliser la classification européenne des aptitudes, compétences, certifications et professions (ESCO) lorsqu’elles enregistrent des informations sur les professions, sur les qualifications et sur les connaissances, compétences et aptitudes dans leurs systèmes nationaux, le but étant de faciliter l’échange d’informations entre les États membres et les pays tiers ainsi que la traduction des données.

17.

Les autorités nationales devraient inclure des informations sur le niveau correspondant du CEC dans toutes les données qu’elles enregistrent sur les qualifications de pays tiers, de sorte à favoriser la comparaison et la transparence des qualifications.

Développement des connaissances

18.

Les autorités nationales devraient développer des sources d’information fiables sur les qualifications, les systèmes d’enseignement et de formation, l’assurance de la qualité et les professions réglementées dans les pays tiers, ainsi que demander l’accès à de telles sources d’information, le cas échéant.

19.

Les États membres devraient créer ou alimenter des bases de données nationales interopérables sur la comparabilité des qualifications des pays tiers, avec la possibilité de publier des déclarations de comparabilité, de manière à faciliter le partage d’informations sur leurs décisions de reconnaissance et à renforcer la transparence des procédures de reconnaissance. Afin de faciliter l’interopérabilité, les bases de données devraient être fondées sur les normes du modèle européen d’apprentissage.

Coopération

20.

Les États membres devraient dialoguer avec les partenaires sociaux et avec les acteurs nationaux pertinents (employeurs, PME, société civile, organisations de migrants, etc.) afin de lever les obstacles au recrutement de ressortissants de pays tiers, notamment les lacunes dans la compréhension et la reconnaissance des compétences et des qualifications.

21.

Les autorités nationales devraient intensifier leurs contacts et leurs relations de travail avec les autres autorités nationales et avec d’autres parties intéressées, y compris dans d’autres États membres, afin de développer les connaissances et d’échanger des informations sur la reconnaissance des compétences et des qualifications des ressortissants de pays tiers.

Coopération avec les pays tiers

22.

Les autorités nationales devraient coopérer avec les pays tiers (entre autres dans le contexte d’accords commerciaux, d’accords de reconnaissance mutuelle et de partenariats, comme les partenariats pour les talents) en vue de simplifier et d’accélérer la reconnaissance des compétences et des qualifications des ressortissants de pays tiers.

23.

Lorsqu’il existe une coopération avec des pays tiers, les autorités nationales devraient:

a)

offrir aux ressortissants du pays tiers un accès aux procédures de reconnaissance avant leur arrivée;

b)

développer, en coopération avec le pays tiers, leurs connaissances sur les qualifications pertinentes et les acquis d’apprentissage escomptés, sur la structure du système d’enseignement et de formation du pays tiers ainsi que sur les domaines relevant des professions réglementées;

c)

organiser des échanges d’informations, des visites d’étude et des projets communs avec des pays tiers pour favoriser la compréhension des qualifications et la confiance dans celles-ci;

d)

mettre en place, avec les autorités du pays tiers, des procédures permettant d’authentifier les documents, de détecter les documents frauduleux et d’obtenir des informations manquantes, afin de réduire la charge administrative pesant sur les demandeurs et sur les autorités nationales.

Information et soutien

24.

Les États membres devraient offrir aux ressortissants de pays tiers un soutien ciblé et sur mesure en matière de reconnaissance des compétences et des qualifications, notamment:

a)

dans le contexte des processus préalables au départ;

b)

dans le contexte des services de l’emploi destinés à favoriser l’accès au marché du travail;

c)

concernant l’accès aux possibilités d’apprentissage tout au long de la vie dans l’État membre;

d)

en faveur de la réintégration des ressortissants de pays tiers dans leur pays d’origine à leur retour.

25.

Les États membres devraient veiller à ce que les ressortissants de pays tiers, les employeurs et les autres parties intéressées puissent accéder à des informations conviviales, complètes et actualisées sur la reconnaissance des compétences et des qualifications des ressortissants de pays tiers sur leur territoire.

a)

Les services d’information et de soutien devraient être fournis dans la ou les langues nationales, en anglais et dans les langues fréquemment parlées par les migrants qui arrivent dans l’État membre ou par les migrants qui y résident déjà légalement.

b)

Les informations en ligne devraient être proposées dans des formats adaptés aux appareils mobiles et accessibles.

26.

Les États membres devraient coordonner leurs stratégies de fourniture d’informations et de services de soutien concernant la reconnaissance des compétences et des qualifications des ressortissants de pays tiers, aux échelons national, régional et local, notamment:

a)

par le développement d’outils en ligne complets pour aider les ressortissants de pays tiers à trouver les informations nécessaires ainsi qu’un soutien en vue de la reconnaissance de leurs compétences et qualifications;

b)

par l’élaboration centralisée ou coordonnée d’informations sur la reconnaissance des compétences et des qualifications des ressortissants de pays tiers qui peuvent être diffusées et réutilisées par les autorités chargées de la reconnaissance, par les services publics de l’emploi, par les inspections du travail et par les autorités compétentes en matière de migration;

c)

par la coordination de l’enregistrement et des mises à jour des coordonnées des autorités nationales chargées de la reconnaissance des qualifications professionnelles des ressortissants de pays tiers publiées dans la base de données sur les professions réglementées, afin d’appuyer l’action décrite au point 56, c), ci-dessous.

27.

Les informations fournies devraient aider les ressortissants de pays tiers à comprendre les procédures de reconnaissance qu’ils doivent suivre, le cas échéant, et devraient les orienter vers les services de soutien concernés, comme suit:

a)

accès aux professions réglementées: les ressortissants de pays tiers devraient être orientés vers des informations pertinentes sur les professions réglementées dans l’État membre, comprenant les points de contact qui fournissent des informations sur la reconnaissance des qualifications professionnelles ainsi que les autorités compétentes dans les États membres;

b)

octroi de l’accès à un programme d’enseignement ou de formation: les ressortissants de pays tiers devraient être orientés vers des informations pertinentes sur la reconnaissance académique et les études dans l’État membre;

c)

procédures de migration légale: les ressortissants de pays tiers devraient être orientés vers des informations pertinentes sur les procédures de migration légale, comprenant les coordonnées des autorités compétentes en matière de migration;

d)

emploi dans les professions non réglementées: les ressortissants de pays tiers devraient être orientés vers des informations sur la transparence des compétences et des qualifications, y compris vers des services d’information en ligne, afin qu’ils puissent obtenir des conseils ou des déclarations (par exemple des déclarations de comparabilité) qui les aideront à présenter leurs compétences et leurs qualifications aux employeurs.

28.

Les États membres devraient faciliter la reconnaissance et la transparence de tout apprentissage effectué par des ressortissants de pays tiers dans l’État membre:

a)

en veillant à ce que les ressortissants de pays tiers puissent obtenir des preuves (certificats ou autres justificatifs, etc.) de tout apprentissage qu’ils ont effectué dans l’État membre;

b)

en veillant à ce que les ressortissants de pays tiers aient accès aux processus de validation des compétences acquises par l’apprentissage non formel ou informel;

c)

en fournissant un soutien administratif aux autres États membres et aux pays d’origine afin de favoriser la reconnaissance et la compréhension de l’apprentissage effectué par les ressortissants de pays tiers dans l’État membre.

Procédures

29.

Les États membres devraient veiller à ce que les procédures de reconnaissance des compétences et des qualifications des ressortissants de pays tiers soient conviviales et réduisent au minimum la charge administrative pesant sur les demandeurs.

Traductions

30.

Les autorités nationales devraient utiliser eTranslation (le système de traduction automatique de la Commission) ou d’autres systèmes de traduction automatique, s’il y a lieu.

31.

Les autorités nationales devraient, dans la mesure du possible, réduire au minimum l’obligation pour les ressortissants de pays tiers de fournir des traductions de documents, notamment en s’abstenant d’exiger des demandeurs qu’ils fournissent des traductions de langues prises en charge par l’outil eTranslation.

Authentification

32.

Les États membres devraient s’efforcer de créer la confiance nécessaire pour vérifier efficacement l’authenticité, la validité, le niveau ainsi que les acquis d’apprentissage, le cas échéant, des qualifications de pays tiers, entre autres par la coopération avec les pays tiers et le développement des connaissances sur les systèmes de certification des pays tiers.

33.

En cas d’incertitude ou de doute, les autorités nationales devraient vérifier l’authenticité des documents chaque fois que cela est possible, par exemple en prenant contact avec les autorités de pays tiers, plutôt que d’exiger du demandeur qu’il fournisse des preuves supplémentaires. Les autorités nationales ne devraient pas faire supporter aux demandeurs une charge ou des dépenses indues pour faire certifier des documents ou en prouver l’authenticité d’une quelque autre manière.

34.

Les autorités nationales devraient veiller à ce que puissent avoir accès à une évaluation de leurs qualifications — le cas échéant — par les autorités nationales, aux fins de la recherche d’un emploi ou de l’accès à un apprentissage, les bénéficiaires ou demandeurs d’une protection internationale ainsi que les personnes ayant besoin d’une protection internationale qui se trouvent dans un pays tiers, peuvent bénéficier de parcours professionnels complémentaires et sont dans l’incapacité de fournir des documents attestant adéquatement leurs qualifications.

35.

Les autorités nationales devraient veiller à ce que les délais de traitement soient grandement réduits lorsque les documents sont soumis sous forme de justificatifs numériques assortis d’une signature numérique fiable (d’un niveau d’authenticité semblable à celui offert par l’infrastructure européenne pour les justificatifs numériques), puisque l’authenticité peut être vérifiée instantanément dans de tels cas.

Frais

36.

Les autorités nationales devraient publier des informations transparentes sur tous les frais liés aux procédures de reconnaissance et veiller à ce que les frais appliqués ne dépassent pas les coûts réels de la procédure et soient comparables, dans des circonstances similaires, aux frais appliqués aux citoyens de l’Union. Les États membres sont encouragés à réduire ou à supprimer, dans la mesure du possible, les frais — comme les frais de dossier — appliqués aux bénéficiaires ou aux demandeurs d’une protection internationale ainsi qu’aux personnes ayant besoin d’une protection internationale qui se trouvent dans un pays tiers et peuvent bénéficier de parcours professionnels complémentaires.

Traitement des demandes

37.

Les autorités nationales devraient veiller à ce que les ressortissants de pays tiers:

a)

aient accès à des outils en ligne pertinents, semblables à ceux dont disposent les citoyens de l’Union, pour la soumission et le traitement des demandes de reconnaissance;

b)

reçoivent un accusé de réception immédiatement après avoir soumis une demande en ligne de reconnaissance;

c)

reçoivent un accusé de réception d’une demande complète ou une notification de tout document manquant dans un délai raisonnable, qui ne devrait pas dépasser 15 jours calendaires à compter de la soumission de la demande de reconnaissance.

CHAPITRE IV

RECONNAISSANCE DES QUALIFICATIONS PROFESSIONNELLES

Les recommandations du présent chapitre s’appliquent aux autorités compétentes chargées de la reconnaissance des compétences et des qualifications des ressortissants de pays tiers requise pour donner accès à une profession réglementée dans un État membre, au titre du point 5, a), ci-dessus.

38.

Les États membres devraient faciliter la reconnaissance des qualifications professionnelles des ressortissants de pays tiers en simplifiant les procédures et en les alignant plus étroitement sur les procédures prévues par la directive 2005/36/CE.

Documents et formalités

39.

Les autorités compétentes devraient demander aux ressortissants de pays tiers un nombre et des types de documents semblables à ceux exigés des citoyens de l’Union à l’appui d’une demande d’autorisation d’accès à une profession réglementée, en application de l’article 50, paragraphe 1, et de l’annexe VII de la directive 2005/36/CE.

40.

La reconnaissance des qualifications professionnelles ne devrait pas être subordonnée à des connaissances linguistiques, sauf si celles-ci font partie des qualifications (par exemple dans le cas des orthophonistes ou des professeurs de langues). Les exigences linguistiques pour l’exercice de la profession réglementée dans l’État membre d’accueil ne devraient pas aller au-delà de ce qui est nécessaire et proportionné.

Décisions de reconnaissance

41.

Les autorités compétentes devraient:

a)

fonder leur évaluation des demandes des ressortissants de pays tiers sur des règles équivalentes à celles énoncées à l’article 13, paragraphe 1, de la directive 2005/36/CE;

b)

assimiler à un titre de formation tout titre de formation délivré dans un pays tiers dès lors que le ressortissant d’un pays tiers a, dans la profession concernée, une expérience professionnelle de trois ans dans un autre État membre qui a précédemment reconnu ledit titre, sur la base de l’article 3, paragraphe 3, de la directive 2005/36/CE;

c)

n’appliquer des mesures de compensation que dans des situations équivalentes à celles prévues à l’article 14 de la directive 2005/36/CE;

d)

veiller à ce que les ressortissants de pays tiers aient la possibilité de choisir entre un stage d’adaptation et une épreuve d’aptitude, à l’instar de ce qui est prévu par l’article 14 de la directive 2005/36/CE;

e)

examiner les informations contenues dans les décisions de reconnaissance antérieures prises par d’autres États membres, le cas échéant, en vue d’une reconnaissance plus rapide des qualifications professionnelles du demandeur;

f)

mener à bien le plus rapidement possible la procédure de reconnaissance pour l’autorisation d’accéder à une profession réglementée, de manière qu’une décision dûment motivée puisse être prise dans un délai raisonnable, qui ne devrait pas dépasser deux mois à compter de la date de soumission d’une demande complète.

Professions réglementées prioritaires

42.

Les États membres devraient tirer le meilleur parti des renseignements sur les pénuries de main-d’œuvre et de compétences, disponibles auprès des sources nationales et de l’Union, et exiger de leurs autorités compétentes qu’elles rendent compte des pénuries de main-d’œuvre attendues dans les professions réglementées relevant de leur compétence. Les États membres devraient se servir de ces données aux fins de la planification de la main-d’œuvre, notamment pour répertorier les professions réglementées prioritaires afin d’attirer les ressortissants de pays tiers, pour recenser les pays tiers avec lesquels des partenariats pourraient être établis et pour envisager des adaptations à apporter aux procédures de reconnaissance des compétences et des qualifications.

43.

Les autorités compétentes devraient s’appuyer sur les décisions antérieures ou développer les connaissances sur les qualifications pertinentes pour les professions réglementées prioritaires afin:

a)

de mettre en place des filières «accélérées», y compris en déployant du personnel supplémentaire, pour répondre à une priorité nouvelle ou urgente en matière de reconnaissance;

b)

de réduire au minimum les délais de traitement, pour qu’une décision dûment motivée puisse être prise dans un délai de quatre semaines à compter de la date de soumission d’une demande complète;

c)

de réduire au minimum les exigences applicables aux demandes de reconnaissance;

d)

de recenser les différences importantes en matière d’enseignement et de formation avec les pays tiers pertinents, de sorte à mettre en place des cours de transition sur mesure pour les ressortissants de pays tiers.

44.

En ce qui concerne les professions réglementées prioritaires, les autorités compétentes devraient envisager, pour permettre aux ressortissants de pays tiers d’exercer plus rapidement après avoir soumis leur demande de reconnaissance et pendant que la procédure d’examen de la demande est en cours, des mécanismes parmi lesquels:

a)

des possibilités d’emploi temporaire sous un contrôle organisé conformément aux pratiques nationales en vigueur dans la profession;

b)

des possibilités d’emploi temporaire accompagné d’une formation et d’une évaluation;

c)

l’accès aux postes d’assistant liés à la profession, avec la possibilité d’obtenir un accès complet à l’exercice de la profession après une décision de reconnaissance favorable.

45.

Les autorités compétentes devraient proposer une formation linguistique aux ressortissants de pays tiers en vue de faciliter leur accès à la profession réglementée prioritaire s’ils répondent à toutes les exigences en matière de reconnaissance.

CHAPITRE V

RECONNAISSANCE DES COMPÉTENCES ET DES QUALIFICATIONS POUR LA MIGRATION DE MAIN-D’ŒUVRE

Les recommandations du présent chapitre s’appliquent aux autorités nationales participant aux procédures relatives à la migration de main-d’œuvre, au titre du point 5, c), ci-dessus.

46.

Les autorités nationales compétentes en ce qui concerne la reconnaissance des compétences et des qualifications ainsi que les questions de migration et d’emploi devraient coopérer étroitement afin de rationaliser les processus de migration de main-d’œuvre, tout en tenant compte des points de vue des partenaires sociaux et des entreprises, en particulier des PME.

47.

Les États membres devraient communiquer clairement les cas où la reconnaissance des compétences et des qualifications est requise dans le cadre de processus (systèmes fondés sur des points, etc.) pour l’obtention d’un visa ou d’un permis de travail et de séjour sur leur territoire.

48.

Les États membres devraient faciliter la reconnaissance précoce des compétences et des qualifications, le cas échéant, dans le contexte des évaluations préalables au départ du pays d’origine, pour que les ressortissants de pays tiers puissent accéder au marché du travail sans retard inutile.

49.

Les autorités nationales devraient suivre l’approche donnant la priorité aux compétences afin d’atténuer le risque de surqualification de la main-d’œuvre immigrée. Il conviendrait que les procédures portent en priorité sur les compétences et les expériences afin de révéler tout le potentiel des ressortissants de pays tiers et de favoriser leur intégration sur le marché du travail, dans des postes qui sont en adéquation avec leurs compétences. Les autorités nationales devraient éviter de fonder les évaluations uniquement sur les qualifications.

CHAPITRE VI

DISPOSITIONS FINALES

Égalité de traitement

50.

Les États membres devraient veiller à ce que les citoyens de l’Union possédant des qualifications obtenues dans l’Union ou dans un pays tiers reçoivent un traitement qui n’est pas moins favorable que celui qui est appliqué aux ressortissants de pays tiers possédant les mêmes qualifications.

51.

Les États membres devraient veiller à ce que les qualifications obtenues dans l’Union soient reconnues de la même manière indépendamment du fait qu’elles sont détenues par des citoyens de l’Union ou par des ressortissants de pays tiers.

52.

Les États membres devraient faire usage de la marge d’appréciation dont ils disposent pour simplifier et accélérer leurs procédures nationales de reconnaissance des qualifications. Lorsque les procédures d’un État membre sont plus souples que celles prévues par la directive 2005/36/CE, l’État membre en question devrait examiner s’il est possible d’adopter une approche d’un degré de souplesse similaire en ce qui concerne la reconnaissance des qualifications obtenues dans un pays tiers.

Appui de la Commission

53.

La Commission facilitera l’échange d’informations et la coopération entre les États membres sur la reconnaissance des compétences et des qualifications des ressortissants de pays tiers, notamment par l’apprentissage mutuel et l’échange de bonnes pratiques et en facilitant la coopération entre les États membres, les partenaires sociaux, les parties intéressées, les autorités chargées de la reconnaissance et les organisations internationales. La Commission organisera des réunions au sein du groupe des coordonnateurs pour la reconnaissance des qualifications professionnelles et dans d’autres enceintes pertinentes, comme le groupe consultatif du cadre européen des certifications, la plateforme pour la migration de la main-d’œuvre, le réseau européen pour l’intégration, le groupe de pilotage du réservoir européen de talents, le réseau européen de centres nationaux d’information et le réseau des centres nationaux d’information sur la reconnaissance académique des diplômes (réseaux ENIC-NARIC).

54.

La Commission invitera les États membres à rendre compte de leurs initiatives, réformes, bonnes pratiques et statistiques sur la reconnaissance des compétences et des qualifications des ressortissants de pays tiers.

55.

La Commission peut, à la demande des États membres, leur fournir un soutien et une expertise sur mesure au titre de son instrument d’appui technique afin de réformer les systèmes nationaux et de faciliter les processus de reconnaissance des compétences et des qualifications des ressortissants de pays tiers.

56.

La Commission s’emploiera à améliorer la transparence des processus de reconnaissance et l’accès à ceux-ci:

a)

en encourageant et en aidant les États membres à mettre au point des bases de données sémantiquement interopérables sur les processus et décisions de reconnaissance, qui soient capables de générer des déclarations de comparabilité;

b)

en continuant de soutenir les réseaux ENIC-NARIC et en encourageant les États membres à envisager d’étendre les compétences des NARIC aux qualifications de l’enseignement et de la formation professionnels (EFP);

c)

en aidant les États membres à inclure, dans la base de données sur les professions réglementées, des informations relatives aux autorités compétentes des États membres chargées de la reconnaissance des qualifications détenues par des ressortissants de pays tiers donnant accès à des professions réglementées;

d)

en donnant accès à des informations en ligne pour aider les ressortissants de pays tiers à comprendre les exigences en matière de reconnaissance des compétences et des qualifications dans l’Union.

57.

La Commission se servira des outils de l’Union pour favoriser la compréhension des compétences et des qualifications acquises dans les pays tiers prioritaires qui peuvent contribuer à remédier aux pénuries sur le marché du travail de l’Union. La Commission:

a)

collaborera avec la Fondation européenne pour la formation (ETF), avec les réseaux ENIC-NARIC, avec le registre européen pour la garantie de la qualité dans l’enseignement supérieur, avec les États membres et avec les pays tiers en vue d’élaborer des orientations sur les cadres de certification des pays tiers et sur certaines qualifications, en comparant le cadre européen des certifications avec les cadres nationaux de certification, et en réalisant des évaluations ciblées des pratiques des pays tiers en matière d’accréditation et d’assurance qualité;

b)

veillera à ce que la plateforme Europass contienne des informations actualisées sur les pratiques de reconnaissance et la législation applicable dans les pays tiers, comme prévu à l’article 3, paragraphe 2, point d), de la décision (UE) 2018/646;

c)

étudiera la faisabilité de la mise en place, dans le prolongement du pôle de ressources consacré à l’Ukraine, d’autres pôles de ressources en ligne contenant des informations sur les compétences et les qualifications;

d)

étudiera la faisabilité de la mise au point à l’échelle de l’Union d’un outil capable de générer des déclarations de comparabilité à partir d’un modèle harmonisé pour les qualifications de certains pays tiers, englobant plusieurs États membres;

e)

traduira dans les langues de certains pays tiers les outils qui facilitent l’évaluation des compétences des ressortissants de pays tiers (par exemple Europass, l’outil européen de profilage des compétences des ressortissants de pays tiers).

Fait à Bruxelles, le 15 novembre 2023.

Par la Commission

Thierry BRETON

Membre de la Commission


(1)  La stratégie européenne en matière de compétences engagée en 2020 exprimait les objectifs de l’Union en matière de perfectionnement et de reconversion professionnels à atteindre au cours des cinq années suivantes.

(2)  Recommandation du Conseil du 24 novembre 2020 en matière d’enseignement et de formation professionnels (EFP) en faveur de la compétitivité durable, de l’équité sociale et de la résilience (JO C 417 du 2.12.2020, p. 1).

(3)  Recommandation du Conseil du 16 juin 2022 relative aux comptes de formation individuels (JO C 243 du 27.6.2022, p. 26).

(4)  Recommandation du Conseil du 16 juin 2022 sur une approche européenne des microcertifications pour l’apprentissage tout au long de la vie et l’employabilité (JO C 243 du 27.6.2022, p. 10).

(5)  Eurostat, LFSA_EOQGAN.

(6)  Communication de la Commission sur un nouveau pacte sur la migration et l’asile [COM(2020) 609 final].

(7)  Directive (UE) 2021/1883 du Parlement européen et du Conseil du 20 octobre 2021 établissant les conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d’un emploi hautement qualifié, et abrogeant la directive 2009/50/CE du Conseil (JO L 382 du 28.10.2021, p. 1).

(8)  Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Attirer des compétences et des talents dans l’UE [COM(2022) 657 final].

(9)  Directive 2003/109/CE du Conseil du 25 novembre 2003 relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée (JO L 16 du 23.1.2004, p. 44).

(10)  Directive 2011/98/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 établissant une procédure de demande unique en vue de la délivrance d’un permis unique autorisant les ressortissants de pays tiers à résider et à travailler sur le territoire d’un État membre et établissant un socle commun de droits pour les travailleurs issus de pays tiers qui résident légalement dans un État membre (JO L 343 du 23.12.2011, p. 1).

(11)  Recommandation (UE) 2020/1364 de la Commission du 23 septembre 2020 sur les voies légales d’accès à une protection dans l’Union européenne: promouvoir la réinstallation, l’admission humanitaire et d’autres voies complémentaires (JO L 317 du 1.10.2020, p. 13).

(12)  Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d’un réservoir de talents européen [COM(2023) 716].

(13)  Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Attirer des compétences et des talents dans l’UE [COM(2022) 657 final].

(14)  Quel est le meilleur pays pour les talents mondiaux au sein de l’OCDE? OCDE, Débats sur la politique migratoire no 29, 2023.

(15)  Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social et au Comité des régions — stratégie européenne en matière de compétences en faveur de la compétitivité durable, de l’équité sociale et de la résilience [COM(2020) 274 final].

(16)  Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Plan d’action en faveur de l’intégration et de l’inclusion pour la période 2021-2027 [COM(2020) 758 final].

(17)  Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil européen, au Conseil, au Comité économique et social et au Comité des régions intitulée «Un plan industriel du pacte vert pour l’ère du zéro émission nette» [COM(2023) 62 final].

(18)  Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions intitulée «Train de mesures de soutien aux PME» [COM(2023) 535 final].

(19)  Décision (UE) 2023/936 du Parlement européen et du Conseil du 10 mai 2023 relative à l’Année européenne des compétences (JO L 125 du 11.5.2023, p. 1).

(20)  Directive 2005/36/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 septembre 2005 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles (JO L 255 du 30.9.2005, p. 22).

(21)  Décision (UE) 2018/646 du Parlement européen et du Conseil du 18 avril 2018 concernant un cadre commun pour l’offre de meilleurs services dans le domaine des aptitudes et des certifications (Europass) et abrogeant la décision no 2241/2004/CE (JO L 112 du 2.5.2018, p. 42).

(22)  Recommandation du Conseil du 22 mai 2017 concernant le cadre européen des certifications pour l’apprentissage tout au long de la vie et annulant la recommandation du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2008 établissant le cadre européen des certifications pour l’éducation et la formation tout au long de la vie (JO C 189 du 15.6.2017, p. 15).

(23)  Recommandation (UE) 2022/554 de la Commission du 5 avril 2022 concernant la reconnaissance des qualifications pour les personnes fuyant l’invasion russe de l’Ukraine (JO L 107 I du 6.4.2022, p. 1).

(24)  Assessment of Commission Recommendation (EU) 2022/554 of 5 April 2022 on the recognition of qualifications for people fleeing Russia’s invasion of Ukraine [Évaluation de la recommandation (UE) 2022/554 de la Commission du 5 avril 2022 sur la reconnaissance des qualifications des personnes fuyant l’invasion de l’Ukraine par la Russie], direction générale du marché intérieur, de l’industrie, de l’entrepreneuriat et des PME, juin 2023.

(25)  Eurostat définit le taux de surqualification comme la part des personnes occupées diplômées de l’enseignement supérieur (niveaux 5 à 8 de la CITE 2011) qui exercent un emploi peu ou moyennement qualifié pour lequel un diplôme de l’enseignement supérieur n’est généralement pas requis (grands groupes 4 à 9 de la CITP-08).


ELI: http://data.europa.eu/eli/reco/2023/2611/oj

ISSN 1977-0693 (electronic edition)