ISSN 1725-2431

doi:10.3000/17252431.C_2010.354.fra

Journal officiel

de l'Union européenne

C 354

European flag  

Édition de langue française

Communications et informations

53e année
28 décembre 2010


Numéro d'information

Sommaire

page

 

I   Résolutions, recommandations et avis

 

AVIS

 

Comité économique et social européen

 

461e session plénière des 17 et 18 mars 2010

2010/C 354/01

Avis du Comité économique et social européen sur la Feuille de route pour l'égalité entre les femmes et les hommes (2006-2010) et stratégie de suivi

1

2010/C 354/02

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Personnes handicapées: emploi et accessibilité par étapes pour les personnes handicapées dans l'UE. Stratégie de Lisbonne après 2010 (avis exploratoire)

8

2010/C 354/03

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Intégration des travailleurs immigrants (avis exploratoire)

16

2010/C 354/04

Avis du Comité économique et social européen sur la Politique européenne des transports dans le cadre de la stratégie de Lisbonne après 2010 et de la stratégie de développement durable (avis exploratoire)

23

2010/C 354/05

Avis du Comité économique et social européen sur Les mutations industrielles et les perspectives du secteur des deux-roues motorisés en Europe (avis d’initiative)

30

2010/C 354/06

Avis du Comité économique et social européen sur La réforme de la politique agricole commune en 2013 (avis d'initiative)

35

2010/C 354/07

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Pour une nouvelle gouvernance des organisations internationales

43

2010/C 354/08

Avis du Comité économique et social européen sur La politique des transports dans la région des Balkans occidentaux

50

2010/C 354/09

Avis du Comité économique et social européen sur Les organisations de la société civile et la présidence du Conseil de l'UE (avis d'initiative)

56

2010/C 354/10

Avis du Comité économique et social européen sur La mise en œuvre du traité de Lisbonne: démocratie participative et initiative citoyenne (art. 11) (avis d'initiative)

59

 

III   Actes préparatoires

 

Comité économique et social européen

 

461e session plénière des 17 et 18 mars 2010

2010/C 354/11

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Conseil établissant un plan à long terme pour le stock de merlu du nord et les pêcheries exploitant ce stockCOM(2009) 122 final — 2009/0039 (CNS)

66

2010/C 354/12

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Conseil établissant un régime de contrôle et de coercition dans la zone de la convention sur la future coopération multilatérale dans les pêches de l'Atlantique du Nord-Est (avis d'initiative) COM(2009) 151 final — 2009/0051 (CNS)

67

2010/C 354/13

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Conseil établissant un plan pluriannuel pour le stock occidental de chinchard commun et les pêcheries exploitant ce stockCOM(2009) 189 final — 2009/0057 (CNS)

68

2010/C 354/14

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de Règlement du Conseil établissant un plan à long terme pour le stock d'anchois dans le Golfe de Gascogne et les pêcheries exploitant ce stockCOM(2009) 399 final — 2009/0112 (CNS)

69

2010/C 354/15

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Conseil établissant un programme de documentation des captures de thon rouge (Thunnus thynnus) et modifiant le règlement (CE) no 1984/2003COM(2009) 406 final — 2009/0116 (CNS)

70

2010/C 354/16

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Conseil concernant certaines dispositions relatives à la pêche dans la zone couverte par l'accord de la CGPM (Commission générale des pêches pour la Méditerranée)COM(2009) 477 final — 2009/0129 (CNS)

71

2010/C 354/17

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) no 247/2006 portant mesures spécifiques dans le domaine de l’agriculture en faveur des régions ultrapériphériques de l’UnionCOM(2009) 510 final — 2009/0138 (CNS)

72

2010/C 354/18

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission. Le futur cadre réglementaire concernant la concurrence dans le secteur automobileCOM(2009) 388 final

73

2010/C 354/19

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions: Réexaminer la politique communautaire de l’innovation dans un monde en mutationCOM(2009) 442 final

80

2010/C 354/20

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant les directives 1998/26/CE, 2002/87/CE, 2003/6/CE, 2003/41/CE, 2003/71/CE, 2004/39/CE, 2004/109/CE, 2005/60/CE, 2006/48/CE, 2006/49/CE et 2009/65/CE en ce qui concerne les compétences de l'Autorité bancaire européenne,l'Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles et l'Autorité européenne des marchés financiersCOM(2009) 576 final — 2009/0161 (COD)

85

2010/C 354/21

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) no 708/2007 relatif à l'utilisation en aquaculture des espèces exotiques et des espèces localement absentesCOM(2009) 541 final — 2009/0153 (CNS)

88

FR

 


I Résolutions, recommandations et avis

AVIS

Comité économique et social européen

461e session plénière des 17 et 18 mars 2010

28.12.2010   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 354/1


Avis du Comité économique et social européen sur la «Feuille de route pour l'égalité entre les femmes et les hommes (2006-2010) et stratégie de suivi»

2010/C 354/01

Rapporteure: Laura GONZÁLEZ DE TXABARRI ETXANIZ

Dans une lettre en date du 25 septembre 2009, Mme Margot WALLSTRÖM, vice-présidente de la Commission européenne, a demandé au Comité économique et social européen, conformément aux dispositions de l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, d'élaborer un avis exploratoire sur le thème suivant:

«Feuille de route pour l'égalité entre les femmes et les hommes (2006-2010) et stratégie de suivi».

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 23 février 2010.

Lors de sa 461e session plénière des 17 et 18 mars 2010 (séance du 17 mars 2010), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 137 voix pour, 3 voix contre et 5 abstentions.

1.   Recommandations

1.1

L'égalité entre les femmes et les hommes est un objectif en soi, mais c'est aussi l'une des conditions préalables à l'obtention des objectifs de l'UE en matière de croissance, d'emploi et de cohésion sociale.

1.2

Le rapport à mi-parcours sur l’état d’avancement de la feuille de route sur l'égalité des chances intervient dans un contexte de crise économique. Il faut noter l'impact et les conséquences de la crise sur les femmes et les hommes compte tenu de leur place respective dans la société.

1.3

Il essentiel d'inclure le principe de l'égalité dans toutes les politiques, notamment dans les politiques sociales et d'emploi, et de poursuivre les efforts visant à supprimer les obstacles qui entravent la participation pleine et égale des femmes et des hommes au marché de l'emploi.

1.4

Pour garantir et accroître l'indépendance économique des femmes, il faut améliorer qualitativement et quantitativement l'emploi occupé par les femmes, sans oublier d'aider les indépendantes, lutter contre le risque de précarité auquel elles sont confrontées et favoriser une répartition équitable des responsabilités familiales et domestiques.

1.5

La disparité salariale a une origine structurelle: sous-évaluation des capacités traditionnellement considérées comme féminines, ségrégation professionnelle et sectorielle, emplois précaires, interruption de la vie professionnelle, etc. La législation et les conventions collectives sont des instruments efficaces pour lutter contre la disparité salariale, l'implication de tous les agents économiques et sociaux étant nécessaire à cet égard.

1.6

Une présence renforcée des femmes dans le cadre de l'entreprise et dans la vie politique encourage l'égalité entre les hommes et les femmes, l'indépendance financière de ces dernières, le dépassement des stéréotypes liés au genre et la promotion des femmes au niveau de la prise de décisions.

1.7

Les femmes sont particulièrement vulnérables à l'exclusion sociale et à la pauvreté. L'individualisation des droits sociaux, le revenu minimum garanti, la comptabilisation des périodes d'inactivité ou de temps de travail réduit pour des raisons de charge familiale, sont des mesures qui améliorent la protection sociale et diminuent le risque de pauvreté de la population.

1.8

La conciliation de la vie familiale et de la vie professionnelle est vitale pour atteindre l'égalité et améliorer l'emploi des femmes; cela passe par des services sociaux publics de qualité et par l'amélioration des congés de maternité, de paternité et parentaux existants. Il faut avancer dans la voie de la coresponsabilité de tous les acteurs sociaux dans la répartition équitable du travail domestique et des soins.

1.9

Le CESE considère qu'il est nécessaire de promouvoir la représentation paritaire des femmes dans la prise de décisions. Pour ce faire, les États membres doivent s'engager davantage, fixer des objectifs clairs et adopter des mesures efficaces (action positive, programmes d'égalité, etc.).

1.10

Face à la persistance de la violence fondée sur le genre et la traite des êtres humains, le CESE estime qu'il est nécessaire de faire appliquer la législation actuelle et d'élaborer des plans d'action nationaux coordonnés par une stratégie européenne globale, ainsi que d'accroître les programmes spécifiques.

1.11

Pour lutter contre les stéréotypes sexistes, le CESE considère qu'il est essentiel d'éduquer et de former la société à des modèles non sexistes, de proposer des formations tant aux hommes qu'aux femmes, d'encourager les femmes à faire des études scientifiques et technologiques, d'améliorer la valorisation des emplois traditionnellement considérés comme féminins et d'éviter le sexisme dans les moyens de diffusion et de communication.

1.12

La politique extérieure et la politique de développement de l'UE doivent être utilisées pour promouvoir les droits des femmes à l'échelle internationale, en renforçant leurs capacités et leur autonomie.

1.13

Le CESE considère qu'il est nécessaire d'inclure pleinement de manière transversale une analyse de genre dans tous les domaines d'action de la Commission et d'appliquer cette analyse de genre aux budgets aussi bien au niveau européen que national. Il faut pour cela disposer de ressources humaines formées à l'égalité ainsi que d'indicateurs ventilés par sexe qui permettent de mettre en évidence la situation des femmes et des hommes et d'évaluer le degré d'application de la feuille de route pour l'égalité.

1.14

Dans la nouvelle stratégie pour l'égalité à suivre à partir de 2010, il importe que les objectifs ne se limitent pas à de simples recommandations adressées par la Commission aux États membres mais prennent la forme de lignes directrices contraignantes, assorties d'objectifs quantifiables. Cela requiert une plus grande implication politique à tous les niveaux. Les institutions de l'UE doivent montrer l'exemple, procéder à une révision proactive du travail effectué et réaliser une étude d'impact sur la mise en œuvre.

2.   Observations générales

2.1

La feuille de route pour l'égalité entre les femmes et les hommes 2006-2010 traduit l'engagement pris par la Commission européenne d'avancer sur le chemin de l'égalité en coopération avec les États membres. À la demande de la Commission, le CESE mène son évaluation en analysant l'impact des mesures adoptées et leur degré d'application, et avance des propositions d'action pour la nouvelle stratégie à suivre à partir de 2010.

2.2

Le CESE reconnaît l'engagement dont l'UE fait preuve depuis longtemps envers l'égalité: le traité de Rome, en 1957, inclut le principe de l'égalité salariale; le traité d'Amsterdam, en 1997, adopte une approche duelle combinant transversalité et mesures spécifiques, et le traité de Lisbonne contient un engagement explicite en faveur de l'élimination des inégalités et de la promotion de l'égalité.

2.3

Au niveau international, l'UE adhère à la Plateforme d'action de Pékin, aux Objectifs du millénaire pour le développement, ainsi qu'à la convention des Nations unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (CEDAW), qui place la femme au centre des préoccupations en matière de droits humains.

2.4

Malgré l'envergure de ce cadre normatif, les objectifs prévus n'ont pas été atteints et les inégalités subsistent entre les hommes et les femmes. Aucun des six domaines prioritaires de la feuille de route pour l'égalité 2006-2010 n'a enregistré de progrès substantiel. L'on peut dès lors se poser la question de la réalité de la volonté politique de faire changer les choses. L'inclusion du principe d'égalité de genre, facteur clé de la compétitivité et de la croissance, doit être une priorité de la nouvelle stratégie d'action de l'UE 2020.

2.5

L'évaluation de la feuille de route pour l'égalité 2006-2010 est effectuée dans un contexte de crise économique, et il faut analyser les conséquences que cette crise a sur les femmes, compte tenu de leur situation particulière sur le marché de l'emploi et en matière de politiques publiques de dépenses sociales, surtout celles qui ont trait aux services sociaux, soit les domaines qui concernent le plus les femmes.

2.6

La crise a affecté en premier lieu les emplois traditionnellement occupés par les hommes (construction, transports, industrie) pour s'étendre ensuite aux secteurs à plus forte présence féminine (services bancaires, commerce, etc.). Ainsi, les ménages ont vu souvent leurs revenus réduits au seul salaire des femmes, habituellement inférieur à celui des hommes, dans la mesure où elles occupent principalement des emplois dans le secteur des services, avec des contrats à temps partiel ou temporaires, voire dans l'économie informelle. Tout cela a des répercussions négatives sur l'économie nationale, réduisant la consommation des ménages et freinant la reprise.

2.7

La crise a également une incidence sur les politiques sociales: les indemnités de chômage sont moins importantes pour les femmes, en quantité comme en durée de couverture, étant donné la place souvent désavantageuse qu'elles occupent sur le marché du travail. De surcroît, les services publics de base tels que l'hygiène, la santé, l'éducation et les services sociaux en général restreignent leur offre précisément au moment où les familles, et plus particulièrement les femmes, en ont le plus besoin. Dans la mesure où ces secteurs concentrent une main-d'œuvre féminine, cela aura de nouveau des effets négatifs sur l'emploi des femmes.

2.8

Les mesures de lutte contre la crise ne peuvent pas être neutres en termes de genre et les nouvelles politiques de reprise économique et les programmes actuels des Fonds structurels devront, aussi longtemps que nécessaire, tenir compte de la place différente qu'occupent les hommes et les femmes dans la société.

2.9

Il faut considérer l'égalité comme une priorité non seulement pour gérer la crise actuelle et la reprise future, mais aussi pour faire face aux défis démographiques et économiques qui affectent le modèle social européen et ont une incidence sur les femmes et leur indépendance économique.

3.   Observations particulières - Partie I: Domaines prioritaires pour l'action en faveur de l'égalité entre les hommes et les femmes

La feuille de route pour l'égalité entre les femmes et les hommes (2006-2010) contient les engagements et les actions jugés nécessaires pour avancer dans la voie de l'égalité et gommer les inégalités.

La première partie du plan contient six domaines prioritaires d'action politique, assortis des indicateurs correspondants:

1.

Atteindre le même niveau d'indépendance économique pour les femmes et les hommes

2.

Conciliation entre activité professionnelle, vie privée et familiale

3.

Parité de représentation des femmes et des hommes dans la prise de décisions

4.

Éradication de toutes les formes de violence dont sont victimes les femmes

5.

Élimination des stéréotypes sexistes

6.

Promotion de l'égalité des genres dans la politique étrangère et la politique en faveur du développement.

La deuxième partie se concentre sur l'amélioration de la gouvernance.

3.1   Atteindre le même niveau d'indépendance économique pour les femmes et les hommes

3.1.1   Atteindre les objectifs de Lisbonne en matière d'emploi

3.1.1.1

Nombre de pays n'ont pas encore atteint l'objectif de 60 % de femmes employées, défini par la stratégie de Lisbonne. En effet, ce pourcentage est actuellement de 58,8 % pour les femmes alors qu'il atteint 70,9 % pour les hommes (1), et le taux d'emploi des femmes chute à 36,8 % après l'âge de 55 ans contre 55 % pour les hommes. Les femmes sont plus touchées par le chômage, mais cet écart se réduit au fur et à mesure de la crise (9,8 % de femmes au chômage contre 9,6 % d'hommes).

3.1.1.2

Outre la quantité d'emplois, il est également nécessaire d'améliorer la qualité d'emploi des femmes. Ces dernières sont en effet largement majoritaires dans les secteurs peu rémunérateurs et dans les postes à plus haut risque de précarité. L'emploi à temps partiel est éminemment féminin (31,5 % de femmes contre 8,3 % d'hommes); 14,3 % des femmes employées ont un emploi temporaire. Par ailleurs, lorsqu'elles ont des enfants, leur taux d'emploi chute de plus de dix pour cent, ce qui traduit l'inégale répartition des responsabilités familiales et le manque d'infrastructures d'accueil.

3.1.1.3

Le CESE recommande de faire une analyse conjointe du taux de chômage et du taux d'inactivité des femmes pour raisons familiales (2). Du fait qu'elles assument principalement la charge familiale, il arrive souvent qu'elles ne réunissent pas les conditions nécessaires pour être considérées comme «chômeuses». Leur inactivité professionnelle traduit donc une forme de chômage déguisé.

3.1.1.4

Une approche pluridisciplinaire s'impose qui permette de compléter les politiques d'emploi par des mesures sociales et éducatives, notamment des formations exemptes de stéréotypes liés à l'emploi, des services sociaux publics de qualité qui permettent aux personnes dépendantes de bénéficier de services appropriés, et des campagnes de sensibilisation encourageant une répartition des tâches domestiques entre les femmes et les hommes.

3.1.1.5

La Commission doit intégrer et promouvoir l'égalité dans tous ses programmes (comme c'est le cas dans le programme PROGRESS). Les Fonds structurels constituent un cadre incomparable: ils permettent de connaître le degré d'application des pays membres, de réaliser une évaluation annuelle de l'impact de ces mesures sur le genre par pays, voire d'établir des mesures appropriées et des sanctions à l'encontre de ceux qui ne garantiraient pas un emploi féminin de qualité et en quantité suffisante.

3.1.2   Éliminer les différences de salaires entre les femmes et les hommes

3.1.2.1

L'égalité salariale est une condition essentielle pour atteindre l'égalité entre les hommes et les femmes. Or, malgré les avancées législatives, l'écart salarial entre ces derniers s'élève à 17,4 % et augmente jusqu'à 30 % pour les femmes de plus de 50 ans.

3.1.2.2

L'inégalité salariale a une origine structurelle: relégation des femmes dans des secteurs économiques peu valorisés et des professions mal rémunérées, présence plus forte dans l'économie informelle et les emplois précaires, interruption ou réduction de la vie professionnelle pour des raisons familiales. Ces éléments ont une incidence négative sur leur niveau de salaire.

3.1.2.3

Le CESE (3) recommande que chaque État membre réexamine ses dispositifs en matière de conditions de contrat et de rémunération pour éviter la discrimination directe et indirecte des femmes.

3.1.2.4

La législation doit inclure des mécanismes de contrôle permettant de détecter toute forme de discrimination sexuelle, en encourageant l'établissement de systèmes de classification professionnelle transparents afin que les qualifications, l'expérience et le potentiel de l'ensemble du personnel soient évalués et rémunérés de la même façon.

3.1.2.5

Les négociations collectives sont un bon instrument pour inclure des systèmes d'évaluation d'emplois non sexistes, de congés de formation pour la promotion professionnelle des femmes, de congés personnels et de congés pour raisons familiales, de distribution flexible du temps de travail etc., qui réduisent les écarts salariaux.

3.1.3   Femmes chefs d'entreprise

3.1.3.1

Même lorsqu'elles sont hautement qualifiées, les femmes sont encore en minorité à occuper des postes de responsabilité dans les entreprises. La Commission a encouragé l'égalité dans le cadre de la responsabilité sociale des entreprises; elle a étendu les aides d'État aux nouvelles entreprises créées par des femmes [règlement (CE) no 800/2008] et a accordé son soutien au Réseau des femmes chefs d'entreprises. Il serait souhaitable que ce dernier soit associé à des organisations pertinentes de la société civile, afin de bénéficier de l'échange d'expériences et de bonnes pratiques.

3.1.3.2

Il est conseillé de mettre en pratique les recommandations du Plan d'action de l'UE sur l'esprit d'entreprise afin d'augmenter la création d'entreprises par des femmes grâce à des mesures telles qu'un meilleur accès aux financements et au crédit, le développement des réseaux commerciaux d'organisation et de conseil, une formation professionnelle et de recyclage appropriée, la promotion de bonnes pratiques.

3.1.4   L'égalité de genre dans la protection sociale et la lutte contre la pauvreté

3.1.4.1

Les femmes sont particulièrement vulnérables à l'exclusion sociale et à la pauvreté. Leur position d'infériorité sur le marché du travail et leur situation de dépendance par rapport aux systèmes de protection sociale sont autant d'éléments qui contribuent à cette situation.

3.1.4.2

Il convient d'harmoniser les conditions d'accès à la protection sociale accordée aux femmes et aux hommes. La réduction du temps de travail pour des raisons familiales, l'utilisation des congés de maternité et/ou parentaux pour garder les enfants, l'emploi à temps partiel ou temporaire, la ségrégation et la discrimination salariale sont autant d'éléments qui réduisent la quantité et la durée des prestations sociales futures des femmes, en particulier en matière de chômage et de retraite. Pour pallier en partie cette situation d'inégalité, il est indispensable, entre autres mesures, d'assimiler le temps consacré au travail non rémunéré et les périodes de temps de travail réduit et d'inactivité pour raisons familiales à des périodes de cotisation à temps plein.

3.1.4.3

Le système public de protection sociale doit garantir un revenu minimum digne qui permette de réduire le risque de pauvreté, en accordant une attention particulière aux femmes âgées, aux veuves qui perçoivent une pension dérivée et aux familles monoparentales dont le chef est une femme.

3.1.4.4

Les systèmes privés de pension en vigueur dans certains pays doivent faire l'objet d'une attention particulière car les conditions des pensions futures sont établies sur les revenus et l'espérance de vie de la personne, ce qui pénalise particulièrement les femmes.

3.1.4.5

L'année européenne de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale a été fixée à 2010. Elle coïncide avec la fin de la stratégie de Lisbonne et de la mise en œuvre de la méthode ouverte de coordination. La nouvelle stratégie UE 2020 doit établir des objectifs concrets et des mesures plus efficaces à court et à long termes pour combattre la pauvreté, en particulier chez les femmes.

3.1.5   La dimension de genre dans le domaine de la santé

3.1.5.1

Le CESE considère qu'il est nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle stratégie de santé qui intègre les besoins différents des hommes et des femmes en matière de santé, et souligne l'absence d'actions concrètes prévues dans ce sens. À cette fin, il est nécessaire de faire progresser la recherche consacrée à la santé des femmes et aux maladies qui les touchent.

3.1.5.2

Le vieillissement de la population ainsi que la participation des femmes au marché de l'emploi augmenteront à l'avenir la demande de services de soins de longue durée. Les États membres doivent garantir des services sociaux et de santé publics de qualité, leur absence ayant des effets négatifs, en particulier sur les femmes, qui sont principalement responsables des soins.

3.1.6   Lutter contre la discrimination multiple, surtout à l'encontre des femmes immigrantes ou de minorités ethniques

3.1.6.1

Le CESE répète qu'il est nécessaire d'inclure la perspective de genre dans les politiques migratoire et d'asile. Les femmes immigrantes, ainsi que celles issues de minorités ethniques, doivent faire l'objet d'une attention particulière car elles sont davantage exposées aux inégalités, et se trouvent dans une situation de plus grande vulnérabilité, surtout en période de crise économique (4).

3.1.6.2

La féminisation des migrations est étroitement liée à la demande de main-d'œuvre dans les secteurs domestique et de soins; cela est largement imputable à l'insuffisance d'infrastructures sociales. Un nombre important de femmes immigrantes travaillent dans ces secteurs informels et précaires. Il faut «professionnaliser» et régulariser l'emploi, outre le fait d'encourager la qualification professionnelle pour renforcer l'insertion professionnelle des femmes immigrantes.

3.2   Concilier l'activité professionnelle et la vie privée et familiale

3.2.1

Les objectifs établis dans la stratégie de Lisbonne en matière d'emploi des femmes ont été atteints, bien que les objectifs de Barcelone relatifs aux structures d'accueil des enfants n'aient pas été respectés (couverture de 33 % pour les moins de 3 ans et de 90 % pour les tranches d'âge de 3 à 6 ans). Il est indispensable de disposer d'infrastructures d'accueil qui offrent un nombre de places suffisant et des services flexibles afin de garantir des prestations personnalisées et de qualité: des infrastructures de garde en dehors des heures de travail, pendant les périodes de vacances, des cantines et des centres spécialisés selon le degré de dépendance. L'investissement dans les services sociaux a non seulement des conséquences positives sur l'économie et l'emploi, en particulier, mais revêt en outre une grande utilité sociale.

3.2.2

La prise en charge des enfants et des personnes dépendantes nécessite des horaires flexibles et impose une réorganisation du temps de travail, qui doit être adapté aux besoins familiaux et professionnels, suivant un dispositif accessible autant aux femmes qu'aux hommes.

3.2.3

Une large part des femmes recourt à l'emploi à temps partiel comme mesure de conciliation. Cela est dû en partie à l'insuffisance des infrastructures d'accueil. Toutefois, la féminisation de l'emploi à temps partiel n'est pas uniquement imputable à des raisons familiales; dans bon nombre de cas, c'est le seul moyen pour les femmes d'accéder au marché de l'emploi (5).

3.2.4

En matière de congés, il est nécessaire d'aboutir à une égalité des droits individuels entre les femmes et les hommes, indépendamment de leur type de contrat (indépendants, temporaires, à durée indéterminée …). À cet égard, le CESE se félicite de l'accord atteint entre la CES, Businesseurope, le CEEP et l'UEAPME pour étendre le congé parental (6), mais considère qu'il est nécessaire de poursuivre les efforts vers l'égalité totale. Le CESE salue l'initiative de la Commission d'améliorer la protection des femmes enceintes, accouchées ou allaitantes et partage l'avis selon lequel un congé de maternité d'une durée minimale de 18 semaines doit être garanti (7).

3.2.5

Il faut clairement viser la coresponsabilité de tous les acteurs sociaux concernant les tâches domestiques et de soins, principalement assumées par les femmes, afin de tirer le meilleur parti de l'ensemble du capital humain. Il est nécessaire de mener une campagne en faveur de la répartition du travail domestique et de garde - à l'origine des inégalités - et de la revalorisation de ce type de tâches.

3.3   Promouvoir la représentation paritaire des femmes et des hommes dans la prise de décisions

3.3.1

Il faut un engagement plus ferme pour atteindre la parité entre femmes et hommes en termes de prise de décisions (8), dans les domaines économique, politique, scientifique et technologique. La situation des femmes a à peine évolué ces dernières années. Il est par conséquent nécessaire d'introduire des objectifs clairs assortis de délais précis pour les atteindre, ainsi que des politiques spécifiques et des mesures efficaces (action positive, programmes d'égalité, formation spécifique, quotas de participation, campagnes de sensibilisation, etc.).

3.3.2

La parité entre femmes et hommes dans le domaine de la politique doit être un axe central de la construction européenne. Suite aux élections de juin 2009, les femmes occupent 35 % des postes au Parlement européen, et elles sont 10 à la Commission, face à 17 hommes. Elles occupent 24 % des postes au sein des parlements nationaux et détiennent 25 % des portefeuilles ministériels des gouvernements nationaux (9). Il y a actuellement au CESE 23, 6 % de conseillères contre 76,4 % de conseillers, tandis qu'au niveau des postes de direction (directeurs, sous-directeurs, secrétaires généraux adjoints) les femmes ne représentent que 16,7 % contre 83,3 % d'hommes. La représentation paritaire entre hommes et femmes doit être une priorité clé pour atteindre l'égalité à tous les niveaux.

3.3.3

Les progrès perçus dans le domaine de la recherche publique sont très modestes (les femmes y représentent 39 %), et l'on perçoit à peine une évolution dans le secteur économique et financier (il n'y a pas de femmes à la direction des banques centrales et elles ne représentent que 17 % des membres de leurs conseils d'administration et à peine 3 % de ceux des grandes entreprises).

3.4   Éradiquer la violence de genre et la traite des êtres humains

3.4.1

La violence à l'encontre des femmes et des filles demeure un véritable fléau. Il s'agit d'un phénomène mondial et systémique, aux formes et aux manifestations multiples. Le CESE partage la préoccupation de la Commission face au nombre de femmes victimes de violence, à l'ampleur qu'a acquis le phénomène de la traite des femmes et de la prostitution, particulièrement parmi les immigrantes, et à la persistance d'actes criminels commis au nom des traditions et de la religion (10).

3.4.2

Il y a lieu de prendre des mesures sociales, économiques et juridiques appropriées pour réduire et éliminer des situations génératrices de violence à l'encontre des femmes - ressources matérielles insuffisantes, dépendance économique, faible niveau d'éducation, persistance de stéréotypes sexuels, difficultés d'accès au marché de l'emploi, etc.

3.4.3

Une attention particulière doit être accordée aux femmes immigrantes isolées de la société ou en situation irrégulière, qui sont de ce fait plus vulnérables. La langue, les différences socioculturelles, la méconnaissance des structures d'aide existantes, empêchent souvent ces femmes de demander de l'aide lorsqu'elles sont victimes de violence domestique. Cette situation est plus grave encore pour les femmes immigrantes sans-papiers; des mesures spécifiques s'imposent à cet égard pour abattre les obstacles et garantir leurs droits.

3.4.4

Des programmes spécifiques sont nécessaires (tout en poursuivant les dispositifs existants, comme les programmes Daphné), ainsi qu'un financement plus important pour prévenir et combattre la violence à l'encontre des femmes. Il convient d'élaborer des plans d'action nationaux dans le cadre d'une stratégie coordonnée à l'échelle européenne, assortie de mesures concrètes et de délais qui en garantissent l'application effective. Faire appliquer les cadres juridiques existants en vue de prévenir la violence domestique et de protéger les victimes et les personnes vulnérables, y compris les enfants, doit être une priorité pour les États membres. De plus, il est nécessaire de disposer d'indicateurs qui offrent un panorama détaillé de tous les aspects de la violence de genre, y compris le harcèlement sexuel et la traite de personnes. Il est indispensable d'établir des statistiques unifiées à l'échelle de l'UE à des fins de suivi et d'évaluation en la matière.

3.4.5

Compte tenu du nombre préoccupant d'actes de violence chez les jeunes, y compris de genre, la décision de la Commission d'inscrire la lutte contre la violence de genre dans les projets du programme Jeunesse en action semble pertinente. Il est par ailleurs nécessaire d'inclure la culture de la non-violence et le respect des droits de toutes les personnes dans l'ensemble des programmes d'éducation et de formation pour l'enfance et la jeunesse.

3.5   Éliminer les stéréotypes sexistes de la société

3.5.1

Les stéréotypes sexistes sont des attitudes culturelles et sociales qui présupposent l'existence de rôles et de fonctions spécifiquement masculins ou féminins, ce qui a une incidence sur l'orientation de la formation et les options d'emploi, et génère une ségrégation au sein du marché de l'emploi. Ces stéréotypes constituent un frein à l'égalité et à la pleine participation de femmes et d'hommes à la prise de décisions.

3.5.2

Malgré un niveau d'éducation élevé, les femmes continuent à se concentrer dans des secteurs économiques (santé et action sociale, éducation, commerce, administration publique, services aux entreprises, hôtels et restaurants, etc.) et des professions (vendeuses, employées de maison, gardiennes, employées administratives, etc.) traditionnellement considérés comme féminins, occupant les catégories d'emploi inférieures qui offrent moins de possibilités de promotion. La ségrégation professionnelle est restée inchangée au cours des dernières années et l'on a pu constater que l'augmentation de l'emploi féminin concerne des secteurs qui avaient déjà une forte majorité de femmes.

3.5.3

Pour lutter contre les stéréotypes sexistes, il y a lieu:

d'éduquer les enfants et les jeunes aux modèles non sexistes en surveillant particulièrement le matériel éducatif et les enseignants qui reproduisent de tels stéréotypes. Le CESE voit d'un bon œil l'inclusion de l'égalité de genre en tant que priorité spécifique dans les programmes communautaires d'éducation et de formation;

d'encourager la présence de femmes dans les études scientifiques et technologiques, où elles sont sous-représentées, pour leur permettre ainsi d'accéder à de meilleurs emplois, et équilibrer la présence des femmes et des hommes dans tous les domaines de connaissance;

de promouvoir l'esprit d'entreprise, d'innovation et de créativité chez les femmes indépendantes, salariées et sans emploi. Cela constituera un outil essentiel pour souligner les forces qu'apportent les femmes à la société;

d'assurer la participation des femmes au marché du travail à égalité de conditions, particulièrement lorsqu'elles sont mères de famille et ont des mineurs à leur charge;

de valoriser les emplois «féminins», en particulier dans le domaine des soins, en encourageant la formation continue;

d'éliminer les stéréotypes sexistes des médias et de l'industrie publicitaire, en accordant une attention toute particulière à la violence et à la diffusion d'images dégradantes de femmes;

d'accroître la présence de femmes dans la sphère décisionnelle des moyens de communication, pour promouvoir un traitement non discriminatoire et une vision réaliste des femmes et des hommes dans la société.

3.6   Promouvoir l'égalité de genre en dehors de l'UE

3.6.1

La Commission doit continuer à promouvoir les droits des femmes dans le contexte international à travers sa politique extérieure et de développement. Il y a lieu d'inclure la dimension de genre dans tous les aspects de la coopération et de prévoir des mesures spécifiques pour les femmes, en favorisant leur participation aux processus de prise de décision et leur capacité d'initiative, tout en encourageant les capacités des pays en voie de développement à assumer la promotion de l'égalité.

3.6.2

Il est nécessaire d'inclure la perspective de genre dans la politique européenne de sécurité et de défense (PESD) pour agir dans des situations de crise. En matière d'aide humanitaire (ECHO), la Commission devra accorder une attention particulière aux femmes avec enfants ou parents à charge en cas de catastrophes naturelles ainsi qu'aux femmes victimes de violence masculine dans des périodes de conflit.

4.   Deuxième partie: Améliorer la gouvernance en faveur de l'égalité entre les hommes et les femmes

4.1

Il est recommandé d'inclure de manière transversale l'analyse de genre dans chacun des domaines d'action de la Commission, y compris les budgets, et de réaliser une évaluation des progrès accomplis en matière d'égalité dans le cadre de sa propre structure. Pour ce faire, il est indispensable de disposer de ressources humaines formées aux questions d'égalité entre les hommes et les femmes et de bons indicateurs ventilés qui permettront de visualiser la situation des femmes.

4.2

La Commission doit maintenir un dialogue ouvert et permanent avec des organisations de femmes, des partenaires sociaux et d'autres organisations de la société civile pour mieux comprendre les problèmes liés à l'inégalité.

4.3

Le CESE demande à la Commission d'inviter instamment toutes les unités à utiliser un langage non sexiste dans tous les documents, textes officiels et interprétation de toutes les langues, ainsi que dans les pages Web.

5.   Partie III. Stratégies à suivre à partir de 2010

À la demande de la Commission, le CESE avance une série de propositions dans la perspective de la nouvelle feuille de route pour l'égalité qui sera mise en œuvre à partir de 2011.

5.1

L'égalité entre les hommes et les femmes doit être abordée dans une perspective globale. Il importe que les politiques communautaires en la matière ne se limitent pas à renforcer la participation des femmes dans tous les domaines, à relever les défis démographiques, ou à améliorer le bien-être des enfants, entre autres, mais qu'elles tendent explicitement à réduire les inégalités dans la répartition des responsabilités familiales, domestiques et de soins, en particulier entre les femmes et les hommes et, d'une manière générale, entre tous les agents sociaux.

5.2

La Commission doit inclure l'égalité de genre à titre prioritaire dans tous ses domaines d'action, commissions, unités, mesures, politiques, directions, et ce de manière transversale. Le genre n'est pas une question qui concerne uniquement la direction générale de l'emploi et des affaires sociales.

5.3

Il est nécessaire de faire appel à des spécialistes de la question du genre pour former et fournir le matériel requis afin d'accroître la prise de conscience, les connaissances et la capacité du personnel européen en ce qui concerne l'égalité. Eurostat doit continuer à ventiler ses statistiques par sexe, en améliorant les méthodologies par rapport à celles qui existent déjà et en incorporant de nouveaux indicateurs qui puissent permettre de mieux connaître la réalité des femmes et, partant, d'offrir un panorama complet de leur situation dans l'UE.

5.4

Il convient d'inclure la perspective de genre dans les budgets de l'UE et dans tous les pays membres. Des études sont également nécessaires pour évaluer l'impact de l'action publique sur les femmes et les hommes.

5.5

Les Fonds structurels constituent un cadre incomparable pour que les pays membres puissent intégrer la dimension de genre à leurs programmes opérationnels et dans les différentes phases de la mise en œuvre des fonds, en réalisant en outre une évaluation de l'impact sur le genre dans chaque axe prioritaire ou domaine d'action des programmes concernés. Pour améliorer les résultats, il est nécessaire de renforcer la coordination et la collaboration entre les Fonds structurels et les organismes chargés de l'égalité dans chaque pays.

5.6

La Commission doit veiller à l'application effective de la législation, en présentant des cas de bonnes pratiques et en sanctionnant les pays qui ne respectent pas le principe d'égalité entre les femmes et les hommes. Il convient qu'elle supervise et évalue l'égalité des genres dans toutes ses politiques et toutes ses directions générales. Pour ce faire, il faut une méthode d'évaluation qui permette d'observer et d'apprécier le degré d'application des objectifs fixés et les progrès ou régressions qui se sont produits, et envisager la création d'une unité d'évaluation pour superviser et évaluer systématiquement l'action des différents États membres, en utilisant les indicateurs déjà évoqués dans la feuille de route sur l'égalité.

5.7

Si le futur plan devait faire l'objet de modifications, nous recommandons de modifier le premier domaine en le subdivisant quelque peu: en effet, il englobe des problématiques distinctes (emploi, santé, immigration) qui appellent des moyens d'intervention différents. Il serait également souhaitable d'inclure un nouveau domaine sur «les femmes et l'environnement» étant donné que les femmes jouent un rôle de premier plan dans le développement durable, du fait de leur sensibilité particulière à la qualité de vie et à la durabilité pour les générations actuelles et futures (11).

5.8

Le CESE souligne le rôle important des partenaires sociaux dans la promotion de l'égalité par le biais du dialogue social et les négociations collectives. Le cadre d'action sur l'égalité hommes-femmes de 2005 constitue un bon exemple à cet égard.

5.9

L'Institut européen pour l'égalité entre les femmes et les hommes doit jouer un rôle important quant à l'amélioration de la gouvernance et la révision de la législation en vigueur dans le domaine de la sensibilisation et de l'égalité. Il devra veiller à ce que toutes les politiques incluent et encouragent l'égalité ainsi qu'une participation citoyenne et politique plus responsable et inclusive en termes de genre.

5.10

Les problèmes économiques et financiers dont souffre l'Europe, de même que les changements démographiques, ne doivent pas avoir une incidence sur cet objectif d'égalité et le reléguer au second plan.

Bruxelles, le 17 mars 2010.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Eurostat (EFT) emploi: 2/2009 et chômage 9/2009.

(2)  Le taux d'inactivité pour des raisons familiales (enfants et personnes dépendantes) chez les femmes de 25 à 54 ans est de 25,1 % face à 2,4 % à peine chez les hommes. Par ailleurs, 19,2 % d'entre elles sont inactives en raison d'autres responsabilités familiales face à 2,9 % pour les hommes (source: EFT, Eurostat, 2008).

(3)  JO C 211 du 19.8.2008, p. 54.

(4)  Voir avis JO C 182 du 4.8.2009, p. 19, et JO C 27 du 3.2.2009, p. 95.

(5)  En 2008, dans l'UE, 31,5 % des femmes employées avaient un contrat à temps partiel contre 8,3 % des hommes. 27,5 % des femmes employées à temps partiel l'étaient en raison de problèmes de prise en charge (d'enfants ou de personnes dépendantes) et 29,2 % parce qu'elles ne trouvaient pas d'emploi à temps plein (pour les hommes, ces proportions sont respectivement de 3,3 % et de 22,7 %). Source: EFT, Eurostat.

(6)  Le congé parental est prolongé de trois à quatre mois, dont un mois accordé au père de manière non transférable et applicable à tous les travailleurs, indépendamment de leur type de contrat.

(7)  JO C 277 du 17.11.2009, p. 102.

(8)  Il y a dix ans, lors de la conférence «Femmes et hommes au pouvoir» qui s'est tenue à Paris en 1999, l'Union européenne s'est engagée à avancer vers une Europe plus représentative, avec une participation plus équilibrée des femmes et des hommes à la prise de décisions.

(9)  Données au mois d'octobre 2009.

(10)  JO C 110 du 9.5.2006, p. 89.

(11)  Comme l'indique la Plateforme d'action de Pékin, 1995.


28.12.2010   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 354/8


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Personnes handicapées: emploi et accessibilité par étapes pour les personnes handicapées dans l'UE. Stratégie de Lisbonne après 2010» (avis exploratoire)

2010/C 354/02

Rapporteur: Miguel Ángel CABRA DE LUNA

Par lettre du 23 juillet 2009, M. Diego LÓPEZ GARRIDO, secrétaire d'État pour l'Union européenne auprès du ministère des affaires étrangères et de la coopération, a demandé, au nom de la future présidence espagnole, que le Comité économique et social européen élabore un avis exploratoire sur le thème

«Personnes handicapées: emploi et accessibilité par étapes pour les personnes handicapées dans l'UE. Stratégie de Lisbonne après 2010».

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 23 février 2010.

Lors de sa 461e session plénière des 17 et 18 mars 2010 (séance du 17 mars 2010), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 152 voix pour, 0 voix contre et 3 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

Stratégie UE 2020

1.1

Le Comité économique et social (CESE) réclame que la stratégie UE 2020, les lignes directrices pour l'emploi et l'Agenda Social incluent un paragraphe sur le handicap afin de garantir une approche transversale et mieux coordonnée de cette question dans toutes les politiques communautaires.

1.2

Le CESE rappelle que l'inclusion, dans la future stratégie UE 2020, de critères renforçant les politiques relatives au handicap, aura un impact sur la rentabilité économique pour l'ensemble de la société tout en permettant d'accomplir des progrès en matière d'inclusion sociale et de non-discrimination.

1.3

Le CESE estime qu'il est nécessaire d'adopter un «Pacte européen pour le handicap» qui jette les bases d'une nouvelle politique européenne en la matière. Celui-ci serait en accord avec la future stratégie de la Commission en matière de handicap, dans le cadre du traité de Lisbonne ainsi que de la convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées (CNUDPH) et de son protocole, dont la ratification devrait être finalisée dans les plus brefs délais par l'Union européenne et les États membres.

1.4

Le CESE réclame des politiques encourageant l'innovation, fondées sur des données statistiques, qui accordent une visibilité aux personnes handicapées dans toutes les statistiques européennes et nationales pertinentes.

Emploi et personnes handicapées

1.5

Le CESE défend l'idée d'un marché du travail ouvert à tous et signale que l'approche présidant aux politiques d'emploi des personnes handicapées doit couvrir l'ensemble du processus vital lié à l'emploi («lifestreaming») et placer un accent particulier sur l'éducation, le recrutement, le maintien dans l'emploi et la réinsertion professionnelle. Il conviendrait que les politiques visant les jeunes handicapés, au même titre que celles qui concernent les travailleurs touchés par un handicap soudain, soient prioritaires dans la future stratégie UE 2020 et dans la nouvelle stratégie de la Commission pour les personnes handicapées.

1.6

Le CESE demande à la Commission de présenter un rapport, dans un délai d'un an, sur la mise en œuvre des dispositions sur le handicap et l'emploi figurant dans la directive 2000/78.

1.7

Le CESE rappelle que le recrutement dans un environnement de travail ordinaire requiert la mise en place de services sociaux adéquats et de mesures incitatives et stimulantes. Il reconnaît, par ailleurs, le rôle des entreprises qui emploient une majorité de personnes handicapées et, plus généralement, des entreprises de l'économie sociale et des PME, qui ont également besoin du soutien de services sociaux et de stimulants adéquats. Il souligne aussi l'importance des partenaires sociaux en la matière.

1.8

Le CESE réclame la mise en œuvre de politiques de sensibilisation susceptibles de lever les stéréotypes qui subsistent sur les travailleurs handicapés et souligne le rôle des médias dans l'acceptation de la diversité.

Accessibilité

1.9

Le CESE souligne que l'accessibilité est avantageuse pour l'ensemble de la société et pas uniquement pour les personnes handicapées, et entraîne une augmentation de la clientèle pour les entreprises.

1.10

En matière d'accessibilité, le CESE recommande une mise en œuvre progressive guidée par des objectifs communs à court, moyen et long termes (qui inclue une date claire et définitive pour les nouveaux produits, services et infrastructures, mais aussi pour ceux qui existent déjà).

1.11

Le CESE soutient l'instauration d'une capitale européenne de l'accessibilité universelle.

1.12

Le CESE signale que la présentation de la législation en matière d'e-accessibilité est urgente, réaffirme son engagement en faveur du principe de «conception pour tous» et de développement de normes d'accessibilité; réclame qu'un plan d'action soit présenté à cet égard avant 2011, et rappelle qu'il croit dans le développement d'une «carte européenne du handicap» qui facilite la reconnaissance mutuelle des droits des personnes handicapées et leurs déplacements transfrontaliers.

Handicap et égalité des sexes

1.13

Pour mettre un frein à la situation d'invisibilité et de discrimination multiple vécue par les femmes et les filles handicapées, il est nécessaire d'inclure la dimension de genre d'une manière transversale dans la conception, le développement, le suivi et l'évaluation des politiques concernant le handicap.

Dialogue social et handicap

1.14

Le CESE reconnaît l'importance de l'action des partenaires sociaux pour garantir l'égalité de traitement des personnes handicapées au travail en prévoyant pour ces dernières des conditions de travail justes et favorables.

1.15

Les partenaires sociaux doivent intégrer la dimension de handicap dans toutes les actions et négociations intersectorielles, sectorielles et d'entreprise, particulièrement en matière d'emploi, d'accessibilité et de protection sociale.

Participation et dialogue civil

1.16

Le CESE confirme qu'il souscrit pleinement au principe selon lequel «rien ne saurait se faire pour les personnes handicapées sans les personnes handicapées» et que ce principe doit s'appliquer à la stratégie UE 2020 comme aux programmes en faveur des personnes handicapées financés par les pouvoirs publics.

1.17

L'UE et les États membres doivent assurer la promotion de la société civile et garantir le financement de son développement, en lui assurant une indépendance et une capacité de participation à l'élaboration de politiques et/ou à la fourniture de services sociaux.

2.   Introduction

2.1

Le CESE se félicite de la demande que lui a adressée la présidence espagnole d'élaborer cet avis sur «Les personnes handicapées: emploi et accessibilité par étapes pour les personnes handicapées dans l'UE. Stratégie de Lisbonne après 2010».

2.2

Le CESE a constitué, de manière continue et transversale par ses avis, un véritable acquis dans ce domaine depuis le premier avis d'initiative spécifique sur «L'intégration des personnes handicapées dans la société», adopté en juillet 2002 (1), contribuant de la sorte à soutenir l'égalité de traitement et la non-discrimination pour les personnes handicapées et leurs familles (2).

2.3

Les personnes handicapées représentent plus de 16 % de la population (au moins 80 millions) (3), et cette proportion augmente avec le vieillissement de celle-ci.

2.4

Le CESE reconnaît les progrès réalisés dans la législation (4) et l'application des politiques européennes (5), lesquels, avec la déclaration de Madrid de 2002 (6), ont contribué à rendre l'UE plus inclusive pour les personnes handicapées. Néanmoins, la marge d'amélioration est importante, car les avancées ont eu jusqu'à présent un caractère sectoriel et fragmenté, souffrant d'une absence de stratégie unifiée comme l'a confirmé l'évaluation intermédiaire du plan d'action européen 2003-2010 (7). Il y a également lieu de renforcer les services de la Commission européenne responsables des politiques européennes en faveur des personnes handicapées.

2.5

Le CESE rappelle les derniers résultats de l'Eurobaromètre 2009 (8), qui traduisent une nette augmentation (de 8 % cette dernière année) de la discrimination fondée sur le handicap perçue par les répondants (53 % en 2009 contre 45 % en 2008), plus de 33 % des personnes handicapées déclarant avoir été victimes de discriminations en 2009.

2.6

Le CESE reconnaît que les avancées en matière de handicap doivent beaucoup au travail de conscientisation et de pression du mouvement européen pour le handicap et de ses organisations représentatives, rassemblées autour du Forum européen des personnes handicapées (FEPH), ainsi qu'au soutien des partenaires sociaux.

2.7

Le CESE rappelle au trio présidentiel du Conseil l'importance de tenir compte de cet avis dans le cadre de leur présidence.

3.   Nouvelle politique communautaire sur le handicap dans la future stratégie UE 2020

3.1   Le CESE rejoint la Commission pour dire que les politiques qui encadreront la stratégie UE 2020 devraient «contribuer clairement à la cohésion sociale, s'attaquer au chômage et renforcer l'inclusion sociale…. Il convient pour ce faire de repenser les systèmes éducatifs et les marchés du travail ainsi que de renforcer la mobilité et de stimuler le dynamisme de l'Europe afin de libérer notre potentiel innovant et créatif»  (9).

3.2   Le CESE estime qu'il est nécessaire d'adopter, dans le cadre de la stratégie UE 2020, un «Pacte européen pour le handicap», comme cela a été le cas pour la jeunesse et le genre.

3.3   Ce pacte serait un accord commun, approuvé par le Conseil des ministres, entre les gouvernements des États membres, la Commission et le Forum européen des personnes handicapées, auquel seraient associés le Parlement européen et le Comité économique et social, soit à travers lui les partenaires sociaux et les représentants de la société civile organisée. Ce pacte devrait être administré par un Comité européen pour le handicap, présidé par un représentant des États membres épaulé par un Secrétaire exécutif issu de la Commission. Le Pacte assignerait des objectifs communs aux États membres, avec des indicateurs de conformité et l'obligation de rendre un rapport lors du Conseil européen de printemps (10). Cela permettrait d'appliquer au handicap une variante de la méthode ouverte de coordination (MOC).

3.4   Il conviendrait que ce pacte couvre l'égalité d'accès à l'éducation, l'égalité de traitement en matière d'emploi et d'accès à l'emploi, la législation sur les revenus minimums et la protection sociale, la libre circulation, l'autonomie de vie et personnelle, l'égalité d'accès aux biens et aux services pour les personnes handicapées, l'accord pour un programme concernant l'accessibilité aux nouvelles technologies, les transports et le milieu urbain, la santé et le suivi de la dépendance sous toutes ses manifestations ainsi que les politiques fiscales d'incitation à l'inclusion des personnes handicapées et de couverture du surcoût qu'occasionnent, pour les personnes handicapées, la plupart des activités quotidiennes (11)

3.5   Ce pacte inclurait, transversalement, les besoins particuliers des femmes et des filles handicapées, des jeunes handicapés, du rapport vieillissement/handicap, des personnes ayant besoin d'un soutien important pour acquérir une autonomie personnelle et des personnes handicapées vivant en milieu rural. Il encouragerait également la recherche, le développement et l'innovation concernant le handicap.

3.6   Le Pacte devra prévoir un accord qui sera développé dans le cadre du traité de Lisbonne, de la Charte des droits fondamentaux et de la CNUDPH, à travers trois piliers:

3.6.1   (i) Moment historique de révision des politiques communautaires – Placer les personnes handicapées et leurs familles au centre des politiques communautaires

3.6.1.1

Le CESE demande que la stratégie UE 2020 et l'Agenda social viennent renforcer la coordination et l'effet de l'actuelle stratégie de Lisbonne et de l'agenda social renouvelé (12). Cela suppose d'inclure une section sur les personnes handicapées et leurs familles. Celle-ci devrait aborder notamment les questions d'emploi, d'éducation, d'inclusion, de protection sociale et d'accessibilité, garantissant la présence des trois grandes orientations en matière de handicap (13).

3.6.1.2

Le CESE rappelle que l'inclusion, dans la future stratégie UE 2020, des politiques relatives au handicap dans les compétences de l'UE aura des effets de rentabilité économique pour l'ensemble de la société tout en permettant d'accomplir des progrès en matière d'inclusion sociale et de non-discrimination. C'est d'ailleurs ce qui ressort de récentes études coûts/bénéfices (14).

3.6.1.3

Le Pacte européen pour le handicap doit être en accord avec la future stratégie de la Commission relative aux personnes handicapées (15), qui remplacera l'actuel plan d'action en faveur des personnes handicapées 2003-2010.

3.6.1.4

La stratégie européenne pour l'emploi (SEE) et la méthode ouverte de coordination (MOC) concernant l'inclusion sociale, la protection sociale, les pensions, l'éducation, la jeunesse et d'autres domaines doivent, dans leurs lignes directrices et dans les objectifs communs aux États membres, poursuivre et améliorer leur prise en compte du handicap afin qu'il apparaisse dans leurs plans nationaux, en renforçant leur capacité analytique et en tenant compte des résultats dans les rapports périodiques.

3.6.1.5

Les politiques européennes soutiendront l'éradication de tous les phénomènes extrêmes de violation des droits de l'homme fondamentaux touchant les personnes handicapées, notamment l'internement en grandes unités fermées, la ségrégation éducative, l'annulation de la capacité juridique ou la violence, et tiendront compte des facteurs aggravants dont pâtissent les femmes et les filles handicapées ainsi que les personnes lourdement dépendantes (16).

3.6.1.6

Nous avons besoin de politiques qui encouragent l'innovation et se fondent sur des données statistiques. Le pacte visera à renforcer la visibilité des personnes handicapées dans tous les outils statistiques pertinents (17). Il est pour cela nécessaire de disposer de sources, d'indicateurs et d'outils statistiques harmonisés, actualisés et offrant un reflet fidèle de la réalité et de créer, entre autres, un module permanent sur le handicap dans l'enquête européenne sur les forces de travail ainsi qu'un module sur l'intégration sociale des personnes handicapées, et d'inclure les problématiques du handicap dans les modules généraux concernés..

3.6.1.7

Le CESE réclame l'inclusion d'une orientation sur les droits des personnes handicapées, fondée sur la CNUDPH, dans les «Lignes directrices de l'Union européenne concernant les droits de l'homme et le droit humanitaire international» qui seront adoptées par le Conseil de l'Union européenne.

3.6.2   (ii) Un cadre juridique européen approprié pour le handicap

3.6.2.1

Le CESE affirme que l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne apporte de nouvelles bases juridiques. Il rappelle également la valeur des articles 10, 11 et 19, ainsi que des articles 21 et 26 de la Charte des droits fondamentaux, qui ont valeur de traité.

3.6.2.2

La CNUPDH génère de nouvelles obligations pour l'UE; aussi le CESE demande-t-il instamment:

3.6.2.2.1

que l'UE finalise ses travaux concernant la ratification de la CNUDPH et de son protocole, conformément à la décision du Conseil. (18) Il rappelle à cet égard que la convention susmentionnée a une valeur légale de traité international et invite les États membres à s'engager à la ratifier rapidement;

3.6.2.2.2

d'analyser, à la lumière de la CNUDPH, toute la législation communautaire ayant une incidence sur le marché intérieur, les transports, les impôts, la concurrence, la santé, la consommation, les moyens de communication numériques et électroniques, l'emploi, l'éducation et la non-discrimination;

3.6.2.2.3

de créer un mécanisme de coordination (19) au sein de la Commission, auquel participeraient les commissaires concernés, et de créer l'organisme indépendant réclamé par la CNUDPH (20).

3.6.2.3

Le CESE se félicite de l'actuelle proposition de directive sur la non-discrimination au-delà de l'emploi (21) mais signale qu'elle n'est pas suffisamment conforme à la CNUDPH. Cette directive, actuellement en cours de discussion au Conseil, doit garantir, en ce qui concerne la question de la discrimination, la reconnaissance d'un traitement préférentiel aux personnes handicapées dans certaines circonstances; la portée en termes de protection sociale, de santé et d'éducation, en signalant que la ségrégation éducative est discriminatoire; il y a lieu d'appliquer le principe d'accessibilité des personnes handicapées d'une manière générale; les aménagements raisonnables devraient concerner tous les domaines et des subsides publics devraient être alloués pour leur réalisation; l'accessibilité devrait couvrir également tous les biens et services offerts au public et, enfin, concernant la mise en œuvre, il conviendrait de concrétiser davantage les obligations de l'UE dans ce domaine, avec une application immédiate aux nouvelles constructions et des engagements réalistes pour les constructions existantes.

3.6.3   (iii) Financement approprié du Pacte européen pour le handicap

3.6.3.1

Le CESE rappelle la nécessité de maintenir et d'approfondir, dans la future politique de cohésion, les dispositions du règlement général des Fonds structurels sur la non-discrimination et l'accessibilité des personnes handicapées, comme critères de sélection et d'exécution de projets cofinancés par l'UE (22). La future politique de cohésion devra garantir des actions pour et de la part de l'ensemble des personnes handicapées dans tous les États membres, avec des moyens financiers suffisants. Ces principes doivent s'étendre au budget européen et à d'autres programmes européens en matière de recherche, de compétitivité, de formation, d'emploi, ainsi qu'en matière sociale et de coopération au développement entre autres, en incluant les nouveaux programmes à partir de 2014.

3.6.3.2

Le CESE reconnaît que la participation de la société civile dans la gestion directe du FSE (en matière de formation et d'emploi) et du FEDER a eu des résultats très positifs et encourage à généraliser ce modèle dans les programmes opérationnels des Fonds structurels à partir de 2013.

3.6.3.3

Le CESE considère que le maintien du soutien financier des organisations européennes de personnes handicapées, notamment le FEDH et des organismes d'insertion sociale, à travers le programme Progress, renforce l'assise démocratique de l'UE et la structuration de la société civile.

4.   L'UE et l'emploi pour les personnes handicapées

4.1

C'est dans le cadre de la SEE que doit se renforcer l'emploi des personnes handicapées. La situation des travailleurs européens sur le marché du travail est compliquée, mais elle est encore plus difficile pour les travailleurs handicapés; c'est pourquoi il faut rendre le marché inclusif à tous.

4.2

Le CESE exprime la préoccupation que lui inspire la question du chômage des personnes handicapées. Avant la crise, 78 % des personnes atteintes de handicap lourd n'avaient pas accès au marché de l'emploi, leur taux d'inactivité étant deux fois supérieur à celui du reste de la population tandis que leur taux d'emploi était de 20 % inférieur à celui de la moyenne des personnes n'ayant pas de handicap (23).

4.3

Or, avec la crise (qui a porté le chômage à 10 % dans l'UE) (24) , la situation des personnes handicapées sur le marché de l'emploi s'est encore détériorée à deux égards: d'une part, parce qu'elles auront plus de difficultés à accéder au marché de l'emploi (25) et de l'autre, parce que les gouvernements auront tendance à ajuster leurs déficits publics en réduisant le montant des aides et pensions de toutes sortes. Le CESE prévient que les personnes atteintes de handicap ne peuvent pas être les premières victimes de la crise et s'oppose à une réduction du soutien qui leur est accordé (26).

4.4

Le danger existe que la crise accroisse les risques de pauvreté des personnes handicapées et de leurs familles. Mais la crise peut aussi représenter une opportunité pour développer une activité d'entreprise plus inclusive, au moyen de mesures d'incitation, et accroître la productivité des entreprises, contribuant à améliorer l'économie dans son ensemble.

4.5

Le CESE affirme que l'un des principaux objectifs de la SEE doit être d'encourager l'emploi des personnes handicapées. Il invite de ce fait à introduire dans les lignes directrices pour l'emploi un objectif qui reprenne les dispositions prévues par la conclusion 34 du sommet européen de printemps 2006 (27): «Il faut viser avant tout à augmenter la participation au marché du travail, en particulier celle … des personnes handicapées … Afin de réaliser ces objectifs, les travaux devraient être menés en étroite coopération avec les partenaires sociaux.» Il y a lieu d'établir une série de mesures que les États seraient tenus d'appliquer dans le cadre de leurs plans nationaux.

4.6

Les partenaires sociaux jouent un rôle fondamental pour permettre aux personnes handicapées d'accéder au marché de l'emploi par le biais des négociations collectives et pour garantir leur insertion dans l'entreprise. Ils contribuent aussi au développement de politiques en matière de diversité et négocient des plans à cet égard en concertation avec les chefs d'entreprise, qui devraient à leur tour recevoir des stimulants pour avancer dans cette voie. Pour ce faire, ils peuvent avoir recours aux politiques de responsabilité sociale des entreprises. À cet égard, le CESE félicite les partenaires sociaux européens, qui en décembre 2009 ont achevé avec succès leurs négociations en vue d'un nouvel accord autonome sur les marchés du travail inclusifs.

4.7

Le CESE demande la présentation d'un rapport, dans un délai d'un an, sur la mise en œuvre des dispositions concernant le handicap et l'emploi de la directive 2000/78 (28).

4.8

Le CESE réaffirme que les personnes handicapées ont des compétences, au même titre que n'importe quelle autre personne, pour mener une vie professionnelle pleine et qu'il faut encourager plutôt que sous-estimer leurs capacités. Les personnes handicapées ont le droit de travailler au même titre que les autres.

4.9

Le CESE attire l'attention sur le fait que, selon l'enquête d'Eurofound, la progression des problèmes de santé mentale fait de ce handicap la principale cause d'abandon précoce du marché de l'emploi. Dans certains pays, environ 40 % (29) des retraites anticipées y sont imputables. Il est nécessaire que s'opère un changement de mentalités par rapport à la situation de ces travailleurs, moyennant une prise de conscience des citoyens et des autorités.

4.10

Le CESE rappelle que la reconnaissance de ces compétences suppose l'existence de mécanismes pour certifier les connaissances (non formelles) acquises à travers l'expérience ou l'éducation (formelle). C'est pourquoi le CESE prône la mise en place d'un «passeport des qualifications» (30) permettant aux personnes handicapées de bénéficier d'une mobilité professionnelle dans l'UE.

4.11

Les politiques d'emploi pour les personnes handicapées doivent couvrir l'ensemble du processus vital lié à l'emploi («lifestreaming» (31)), tenir compte du logement, de l'éducation de base, de la formation, de l'endettement familial, des difficultés financières, de la santé, de l'environnement défavorable et de l'économie locale, ainsi que du recrutement, du maintien dans l'emploi et de la réinsertion.

4.12

La libre circulation est un principe communautaire qui ne s'est pas concrétisé pour les personnes handicapées. Cela a des répercussions sur leurs déplacements dans d'autres pays de l'UE en vue d'y travailler, d'y étudier, d'y prendre leur retraite ou d'y exercer une quelconque autre activité.

4.13

Parmi les obstacles à la libre circulation figure l'impossibilité d'exporter des droits tels que l'assistance personnelle qui pourrait pourtant devenir réalité moyennant l'adoption de mesures concrètes de coordination des systèmes de sécurité sociale et l'organisation de campagnes européennes de sensibilisation et de formation.

4.14

Le CESE rappelle que l'«inclusion active» doit être connectée au marché de l'emploi et garantir un niveau de revenus suffisants et l'accès à des services sociaux de qualité se traduisant par une amélioration des conditions de vie, également pour ceux qui sont sans emploi (32).

4.15

Le CESE rappelle que le recrutement dans le milieu du travail ordinaire requiert des services d'emploi, de réinsertion professionnelle, des services sociaux et de santé, de maintien et de gestion des revenus, ainsi que des stimulants (33).

4.16

Le CESE préconise une adaptation des prestations sociales et de la fiscalité, de telle sorte que l'entrée dans le marché de l'emploi n'entraîne pas une perte de pouvoir d'achat pour les personnes handicapées, cette adaptation devant également motiver celles-ci à accéder à des emplois de qualité, assortis de rémunérations justes. Il invite aussi à prévoir des mesures financières incitatives pour les entreprises, afin de favoriser le recrutement, l'emploi aidé sur le marché ordinaire du travail, l'auto-emploi et l'esprit d'entreprise chez les personnes handicapées, en recourant entre autres au microfinancement (34). Ces mesures s'adresseraient aussi aux ONG offrant des services de soutien aux travailleurs handicapés et à leurs familles.

4.17

Il y a lieu d'établir des mesures de maintien et de reclassement de travailleurs frappés d'un handicap soudain, afin que cette situation n'entraîne pas un abandon précoce du marché de l'emploi; il conviendrait également d'adapter les lieux de travail et leur environnement (aménagements raisonnables) pour les personnes handicapées, et de garantir à ces dernières l'accès aux programmes de formation et d'adaptation professionnelle permettant l'évolution de carrière (35). Pour les pays ayant des systèmes de quotas, il y a lieu d'assurer qu'ils réunissent les objectifs de recrutement par le biais des mécanismes et du soutien appropriés. Introduire une dimension sociale dans la procédure de passation des marchés publics peut aussi permettre d'améliorer la situation de l'emploi des personnes handicapées.

4.18

Le CESE est fermement convaincu des avantages que revêt le financement de l'emploi par rapport au paiement de prestations de chômage, et de l'intérêt de mesures incitatives pour que les personnes handicapées désirent accéder à l'emploi ou à l'auto-emploi, et que les employeurs les recrutent.

4.19

Le CESE est favorable aux politiques destinées aux jeunes handicapés, y compris en matière d'éducation précoce, et à leur transition entre formation et premier emploi, de même qu'aux politiques visant les travailleurs touchés par un handicap soudain, en vue de garantir leur reclassement ou leur maintien en activité. Ces groupes doivent être prioritaires dans la future stratégie UE 2020 et devront avoir une place dans la révision de la stratégie de la Commission pour les personnes handicapées. Le CESE rappelle son avis SOC/349 visant à développer une stratégie non seulement POUR les jeunes, mais aussi AVEC les jeunes (36).

4.20

Le CESE reconnaît le rôle des entreprises qui emploient une majorité de personnes handicapées, de celles qui sont plus actives dans ce domaine, ainsi que, en général, des entreprises de l'économie sociale, comme les coopératives, les mutuelles, les associations ou les fondations, qui favorisent l'inclusion sociale et l'intégration des personnes handicapées dans le marché du travail en leur accordant les mêmes droits du travail ainsi que le régime spécial de soutien fixé par les États membres.

4.21

Le CESE souligne l'importance de soutenir les PME de telle sorte qu'elles puissent intégrer une perspective inclusive du travail et jouer dûment leur rôle pour garantir l'efficacité des mesures en faveur des personnes handicapées dans le cadre de l'emploi.

4.22

Les institutions et organismes de l'UE et des États membres doivent connaître la situation et montrer l'exemple en ce qui concerne l'inclusion des travailleurs handicapés au sein de leur personnel, en recourant à un plan de mesures concrètes destinées à améliorer les indices d'insertion professionnelle, qui sont généralement très bas.

4.23

Le CESE souligne l'importance du concept de flexicurité pour les personnes handicapées, soit l'amélioration des conditions de flexibilité et d'adaptabilité des ressources humaines dans les entreprises, associée à une amélioration de la qualité des conditions et de sécurité dans le cadre de l'emploi. Les stratégies doivent garantir aux personnes handicapées la possibilité de concilier vie professionnelle et vie privée, l'accès à la formation ainsi que la transition entre différentes situations, aides sociales et emplois, et ce tout au long de leur vie.

4.24

Le CESE soutient l'encouragement des nouveaux secteurs d'activité favorables à l'environnement ainsi que les emplois sociaux, la promotion de l'accessibilité et la conception pour tous, qui représentent une opportunité d'emploi pour les personnes handicapées.

4.25

Le CESE défend la politique d'aides sociales à l'attention des travailleurs handicapés ayant besoin d'une assistance, mais aussi de services pour permettre à l'entourage d'une personne handicapée de continuer à travailler.

4.26

Les politiques de sensibilisation lèvent les stéréotypes (37) sur les travailleurs handicapés, en s'adressant aux partenaires sociaux, gérants, cadres supérieurs et employés, professionnels de la santé et administration publique (38).

4.27

Les instruments d'incitation mentionnés devraient être facilement utilisables par les entreprises et les travailleurs, et il convient que les organismes publics en assurent une promotion et une utilisation efficaces.

4.28

Il y a lieu de souligner le rôle des moyens de communication, en tant qu'agents clés pour la sensibilisation et la diffusion des principes de tolérance, d'inclusion sociale et d'acceptation de la diversité dans la société européenne.

4.29

Le CESE soutient la mise en place d'initiatives innovatrices telles que le «passeport des compétences» ou le «lifestreaming» évoqués précédemment, et cite en particulier les exemples suivants:

4.29.1

le modèle d'accompagnement continu dans le cadre de l'emploi, «job coaching», avec accompagnement et parrainage;

4.29.2

la création d'un «système d'accréditation de l'apprentissage préalable» (39) qui reflète l'apprentissage progressif;

4.29.3

l'accompagnement tout au long de la vie professionnelle dans des entreprises et au sein des administrations publiques;

4.29.4

l'utilisation, grâce aux nouvelles technologies, de systèmes de soutien notamment audiovisuels (didacticiels vidéo) (40), et en général la mise à disposition de technologies d'assistance, en garantissant que les technologies usuelles soient accessibles sur le poste de travail;

4.29.5

le développement d'un modèle de gestion du handicap (41), dans le cadre des politiques générales de diversité des entreprises.

5.   L'accessibilité pour les personnes handicapées

5.1

Le CESE rappelle la résolution du Conseil de l'Union européenne du 17 mars 2008: l'«accessibilité n'est rien moins que la pierre angulaire d'une société inclusive basée sur la non-discrimination» (42), avec un rôle fondamental des partenaires sociaux, l'accessibilité étant une condition préalable à l'emploi.

5.2

Le CESE réitère les positions contenues dans son avis exploratoire (43) sur le thème «Égalité des chances pour les personnes handicapées» qui note que les personnes handicapées ont les mêmes droits mais des besoins distincts, impliquant différents modes d'accessibilité aux biens et services.

5.3

Le CESE recommande la mise en œuvre progressive d'objectifs communs à court, moyen et long termes (assortis de délais précis et définitifs pour les nouveaux biens, services et infrastructures et ceux existant déjà) qui soient contraignants pour les États membres. Le potentiel des marchés publics pourrait notamment être utilisé à cet égard.

5.4

Le CESE reconnaît que l'accessibilité est fondamentale pour permettre la jouissance des droits politiques et civils d'application immédiate, et que cela doit se traduire par des plans spécifiques d'accessibilité, comprenant des règles et des sanctions qui engagent tous les pouvoirs publics, et offrant aux citoyens handicapés la possibilité de recourir à des mécanismes pour faire valoir leurs droits. Ainsi, il ne devrait plus y avoir d'élections au PE sans garantie d'accessibilité des collèges électoraux et sans la participation d'une proportion convenable de personnes handicapées aux listes électorales; des mesures appropriées devraient également être prises au niveau national.

5.5

Le CESE note les efforts consentis par les États membres de l'UE et la Commission pour garantir l'accessibilité, efforts dont l'objectif ultime doit être l'accessibilité universelle (édifices publics, établissements d'intérêt public, entreprises privées, biens et services, infrastructures touristiques, commerce électronique, information, transports, technologies et communications).

5.6

Le CESE souligne que l'accessibilité est avantageuse pour l'ensemble de la société (personnes âgées, femmes enceintes, personnes à mobilité réduite, etc.). Les entreprises accessibles auront une clientèle supplémentaire (15 % des consommateurs). De nouveaux produits créent de nouveaux marchés et sont une source de croissance durable pour l'économie.

5.7

En outre, le CESE fait remarquer que s'engager pour l'accessibilité revient à s'engager sur les droits fondamentaux de la citoyenneté européenne, comme il l'a signalé dans son avis sur l'«accessibilité électronique» (44).

5.8

Le CESE rappelle aux institutions européennes, et particulièrement à la Commission européenne, que l'accessibilité de ses bâtiments et de ses systèmes d'information électroniques (notamment le site Web et la section réservée aux consultations publiques de la Commission) est limitée. Il est donc nécessaire de prévoir un plan d'accessibilité qui témoigne d'un engagement réel envers les personnes handicapées (45).

5.9

Le CESE réclame la mise en place d'aides d'État (46) pour les entreprises et les services privés aux personnes handicapées, afin d'atteindre l'objectif d'aménagements raisonnables prévus par la directive 2000/78 (47). Il conviendrait que le principe d'«accessibilité préventive» se développe dans les services privés.

5.10

Il faut poursuivre l'élaboration de normes d'accessibilité pour soutenir la législation qui y ferait référence dans le cadre des marchés publics, en prenant comme exemple la législation nord-américaine. Le CESE rappelle l'importance du dialogue entre institutions, industrie et société civile dans la définition de ces normes (48).

5.11

Le Comité appuie la création d'une «capitale européenne de l'accessibilité universelle», fondée sur un système d'attribution de labels de qualité, décernés aux villes et régions européennes en reconnaissance des efforts réalisés pour l'accessibilité de leurs différents sites, biens et services et favorisant le développement durable des collectivités locales.

5.12

Le CESE attend des nouveaux règlements sur les transports (maritimes, autobus urbains et interurbains, taxis) qu'ils prennent dûment en considération les différents besoins des personnes handicapées, en exigeant que tout moyen de transport et les lieux d'accès à ces transports soient adaptés, suivant le modèle de la règlementation actuelle sur les transports aérien et ferroviaire.

5.13

Le CESE a accueilli favorablement la communication de la Commission sur l'e-accessibilité (49) et a demandé à l'UE d'intégrer les actions proposées pour le cadre de référence européen de la société de l'information. Il est urgent de présenter une législation en matière d'e-accessibilité avec, entre autres, l'accessibilité des sites Internet, la communication inclusive, les téléservices, les téléphones portables, la technologie numérique et les guichets automatiques. Ces objectifs figuraient déjà en 2003 dans la déclaration ministérielle de Crète (50) et dans la déclaration de Riga, mais il existe aujourd'hui des doutes fondés quant à leur réalisation dans les délais impartis. Aussi le CESE invite-t-il à mettre en place avant 2011 un plan d'action intensif pour atteindre ces objectifs.

5.14

Le CESE réaffirme son engagement en faveur du principe de «conception pour tous» et juge fondamental d'inclure ce concept dans tous les cursus de formation, aussi bien professionnels qu'universitaires, afin que tous les professionnels le mettent en œuvre.

5.15

Le CESE soutient la mise en place d'une «carte européenne du handicap» qui permette aux personnes handicapées, lors de leurs déplacements transfrontaliers, de bénéficier de la reconnaissance mutuelle de leurs droits, y compris de facilités d'accès aux transports, à la culture et aux loisirs, suivant l'exemple de la carte européenne de stationnement.

6.   Handicap et égalité des sexes

6.1

Le CESE fait remarquer que 60 % des personnes handicapées en Europe sont des femmes, et qu'elles se trouvent en situation d'inégalité. En effet, elles continuent d'endurer une discrimination quant à la reconnaissance de leurs droits et dans l'accès aux biens et aux services (santé, éducation, prévention de la violence sexiste, entre autres).

6.2

Sur une décennie, les niveaux d'emploi des femmes handicapées sont restés inchangés, avec un taux d'inactivité et de chômage élevé, des salaires plus bas, et des difficultés accrues d'intégration dans le monde du travail.

6.3

Il est nécessaire d'inclure la dimension de genre d'une manière transversale dans la conception, le développement, le suivi et l'évaluation des politiques concernant le handicap. Il y a lieu de disposer de mesures et d'actions spécifiques destinées à garantir aux femmes handicapées un accès à l'emploi et à favoriser leur embauche.

7.   Dialogue social et handicap

7.1

Le CESE lance un appel aux partenaires sociaux pour qu'ils veillent à ce que les personnes handicapées puissent travailler aux mêmes conditions que les autres, dans des conditions de travail justes et favorables, en bénéficiant notamment de l'égalité des chances et de rémunération pour un travail de même valeur et qu'elles puissent exercer leurs droits du travail et syndicaux; il y a lieu d'encourager, en particulier, la participation des personnes handicapées au sein des organisations professionnelles et syndicales, et de veiller à ce que le travail sous-traité bénéficie des mêmes conditions que celui réalisé dans l'entreprise (51) (article 27 de la CNUDPH).

7.2

En ce qui concerne l'emploi, la sécurité sociale, la santé et la sécurité au travail, mais aussi dans d'autres contextes et dans les relations professionnelles en général, le dialogue social est fondamental pour la défense des droits, l'égalité des chances et la non-discrimination des personnes handicapées. Il est fondamental pour l'adoption de mesures d'action positive en matière d'emploi et d'accessibilité, ainsi qu'en matière de formation, de promotion et d'assistance aux travailleurs handicapés.

7.3

Les partenaires sociaux doivent intégrer la perspective du handicap dans toutes les actions et négociations intersectorielles, sectorielles et d'entreprise, en particulier en ce qui concerne l'emploi, l'accessibilité et la protection sociale, en collaboration avec la société civile organisée de personnes handicapées.

7.4

Les partenaires sociaux doivent participer au suivi et à l'application de la CNUDPH en matière de relations de travail et de protection sociale.

8.   Participation et dialogue civil

8.1

Le CESE confirme son adhésion au principe selon lequel rien ne saurait se faire pour les personnes handicapées sans les personnes handicapées (52) et croit en des politiques de responsabilisation individuelle et d'autoreprésentation.

8.2

Le CESE considère que le dialogue civil auprès des personnes handicapées et de leurs familles constitue le cadre permettant d'améliorer la gouvernance de l'UE, en établissant des mécanismes et des protocoles d'application obligatoire, et en créant des organes «ad hoc» de participation et de consultation au sein de l'UE.

8.3

Les organisations de personnes handicapées doivent participer aux rapports périodiques évaluant les politiques d'emploi et d'accessibilité, la mise en œuvre de la CNUDPH, ainsi que les programmes et instruments financiers de la Commission, pour garantir la prise en compte du point de vue de la société civile, par exemple sous la forme de rapports alternatifs.

8.4

L'UE et les États membres doivent assurer la promotion de la société civile et garantir le financement de son développement, en lui assurant une indépendance et une capacité de participation à l'élaboration de politiques et/ou de fourniture de services sociaux.

Bruxelles, le 17 mars 2010.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Avis du CESE, JO C 241, 7.10.2002, p. 89.

(2)  Avis du CESE: JO C 182, 4.8.2009, p. 19JO C 10, 15.1.2008, p. 80JO C 93, 27.4.2007, p. 32JO C 256, 27.10.2007, p. 102JO C 185, 8.8.2006, p. 46JO C 88, 11.4.2006, p. 22JO C 110, 9.5.2006, p. 26JO C 24, 31.1.2006, p. 15JO C 110, 30.4.2004, p. 26JO C 133, 6.6.2003, p. 50JO C 36, 8.2.2002, p. 72.

(3)  http://epp.eurostat.ec.europa.eu/portal/page/portal/microdata/eu_silc

(4)  Directive du Conseil no 2000/78/CE du 27 novembre 2000 —Règlement du Conseil (CE) no 1083/2006 du 11 juillet 2006); Règlement (CE) no 1107/2006 du Parlement européen et du Conseil du 5 juillet 2006 [Journal Officiel L 204 du 26.7.2006], et paquet législatif concernant les télécommunications COM(2007) 697 final – COD 2007/0247.

(5)  Communication de la Commission sur l'Agenda Social COM(2005) 33 final et Communication de la Commission «Égalité des chances pour les personnes handicapées: un plan d'action européen», COM(2003) 650 final.

(6)  http://antiguo.cermi.es/graficos/declaracion-madrid.asp

(7)  http://ec.europa.eu/social/BlobServlet?docId=3784&langId=fr

(8)  Eurobaromètre: Discrimination dans l'UE en 2009 (travail d'investigation mené entre le 29 mai et le 14 juin 2009).

(9)  COM(2009) 647 final.

(10)  Résolution du Conseil (2008/C75/01).

(11)  Avis du CESE, JO C 93, 27.4.2007.

(http://w3.bcn.es/fitxers/baccessible/greugecomparatiueconmic.683.pdf)

http://www.feaps.org/actualidad/23_04_09/ultima_hora/sobreesfuerzo_15_04_09.pdf.

(12)  COM(2009) 58 final.

(13)  COM(2009) 647 final.

(14)  Cf. Gregorio RODRÍGUEZ CAMPO, Carlos GARCÍA SERRANO et Luis TOHARIA, Evaluación de las políticas de empleo para las personas con discapacidad y formulación y coste económico de nuevas propuestas de integración laboral («Évaluation des politiques de l'emploi destinées aux personnes handicapées et formulation de nouvelles propositions d'intégration professionnelle», avec estimation de leur coût, Colección Telefónica Accessible no 9, Ediciones Cinca, avril 2009 - ISBN: 978-84-96889-48-4. Madrid, Espagne.

(15)  Résolution du Conseil (2008/ C 75/01).

(16)  http://cms.horus.be/files/99909/MediaArchive/EDF%20declaration%20on%20girls%20and%20women%20with%20disabilities.doc

(17)  Avis du CESE, JO C 10, 15.1.2008, p. 80.

(18)  Décision du Conseil no 15540/09 du 24 novembre 2009.

(19)  http://cms.horus.be/files/99909/MediaArchive/library/EDF_contribution_OHCHR_contribution_national_frameworks_for_implementation_CRPD(final).doc

(20)  http://www.efc.be/Networking/InterestGroupsAndFora/Disability/Pages/TheEuropeanConsortiumofFoundationsonHumanRightsandDisability.aspx

(21)  Proposition de directive du Conseil (COM(2008) 426 final), 2 juillet 2008.

(22)  http://www.observatoriodeladiscapacidad.es/?q=es/informacion/agenda/18112009/presentaci_n_de_innet16_european_inclusion_network_lanzamiento_del_obser

(23)  Statistiques en bref, Thème 3: L'emploi des personnes handicapées en Europe en 2002, Eurostat 26/2003.

http://epp.eurostat.ec.europa.eu/cache/ITY_OFFPUB/KS-NK-03-026/FR/KS-NK-03-026-FR.PDF

(24)  Office statistique des Communautés européennes (Eurostat) – janvier 2010.

(25)  Eurobaromètre, Discrimination dans l'UE en 2009, et avis du CESE, JO C 256 du 27.10.2007, p. 102.

(26)  http://www.cermi.es/NR/rdonlyres/6487C9F8-F423-493B-83B8-562CB09201B8/30184/EstudioCERMICrisisyDiscapacidad.doc

www.cermi.es

(27)  Conclusions de la présidence du Conseil européen de Bruxelles, 23 et 24 mars 2006.

(28)  Directive du Conseil 2000/78.

(29)  Analyse de la Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail, fondée sur des données rassemblées par l'Agence allemande de contrôle sanitaire (2007). http://www.gbe-bund.de/gbe10/pkg_isgbe5.prc_isgbe?p_uid=gastd&p_sprache=E

(30)  Centre européen des entreprises à participation publique et des entreprises d'intérêt économique général (CEEP) http://www.ceep.eu.

(31)  Centre européen des entreprises à participation publique et des entreprises d'intérêt économique général (CEEP) http://www.ceep.eu.

(32)  Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail.

(33)  Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail.

(34)  http://ec.europa.eu/social/main.jsp?langId=fr&catId=89&newsId=547.

(35)  Guide intitulé Creating an inclusive society: mainstreaming disability based on the social economy example («Vers une société inclusive: intégrer les questions de handicap, sur le modèle de l'économie sociale»).

http://www.socialeconomy.eu.org/IMG/pdf/Guide_on_Disability_Mainstreaming_and_Social_Economy.pdf

(36)  Avis du CESE, JO C 318, 23.12.2009, p. 113.

(37)  www.fundaciononce.es

(38)  Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail. http://www.eurofound.europa.eu/.

(39)  Centre européen des entreprises à participation publique et des entreprises d'intérêt économique général (CEEP) http://www.ceep.eu.

(40)  Centre européen des entreprises à participation publique et des entreprises d'intérêt économique général (CEEP) http://www.ceep.eu.

(41)  Centre européen des entreprises à participation publique et des entreprises d'intérêt économique général (CEEP) http://www.ceep.eu.

(42)  Résolution du Conseil (2008/C 75/01).

(43)  Avis du CESE, JO C 93, 27.4.2007, p. 32.

(44)  Avis du CESE, JO C 110, 9.5.2006, p. 26, et résolution du Conseil du 6 février 2003 (JO C 39, 2003, p. 5).

(45)  COM(2007) 501 final.

(46)  Articles 41 et 42 du règlement (CE) de la Commission no 800/2008 du 6 août 2008.

(47)  Directive du Conseil 2000/78 du 27 novembre 2000.

(48)  http://ec.europa.eu/information_society/activities/einclusion/archive/deploy/pubproc/eso-m376/index_en.htm et

http://cms.horus.be/files/99909/MediaArchive/M420%20Mandate%20Access%20Built%20Environment.pdf

(49)  COM(2005) 425 final, COM(2008) 804 final.

(50)  Déclaration sur l'e-inclusion: Ministres européens des transports et des communications, avril 2003.

(51)  Article 27 de la CNUDPH.

(52)  C'est le mot d'ordre du Forum européen des personnes handicapées (Assemblée générale du FEPH, 2009).


28.12.2010   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 354/16


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Intégration des travailleurs immigrants» (avis exploratoire)

2010/C 354/03

Rapporteur: M. Luis Miguel PARIZA CASTAÑOS

Par un courrier en date du 23 juillet 2009 et au titre de l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, M. Diego LÓPEZ GARRIDO, secrétaire d'État pour l'Union européenne auprès du ministère des affaires étrangères et de la coopération, a demandé, au nom de la future présidence espagnole, que le Comité économique et social européen élabore un avis exploratoire sur le thème

«Intégration des travailleurs immigrants».

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 23 février 2010.

Lors de sa 461e session plénière des 17 et 18 mars 2010 (séance du 17 mars 2010), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 138 voix pour, 5 voix contre et 8 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le CESE souligne la valeur ajoutée européenne des politiques en matière d'emploi, d'immigration et d'intégration. Les politiques exclusivement nationales ne fonctionnent pas, il sera donc nécessaire de renforcer l'assise européenne de ces politiques.

1.2   Les travailleurs et travailleuses immigrants apportent une contribution positive au développement économique et au bien-être de l'Europe. En raison de sa situation démographique, l'UE devra accueillir davantage de nouveaux immigrants.

1.3   Il est nécessaire d'améliorer les processus d'intégration tant à des fins d'efficacité économique qu'à des fins de cohésion sociale. L'emploi est un aspect fondamental de l'intégration.

1.4   L'intégration est un processus social à double sens de compromis réciproque qui doit être facilité au moyen d'une bonne gouvernance et d'une bonne législation. Le CESE demande au Conseil d'adopter la directive devant garantir un cadre commun de droits pour les immigrants et l'amélioration de la législation relative à la lutte contre la discrimination.

1.5   L'intégration sur le lieu de travail dans des conditions d’égalité des chances et de traitement constitue également un défi pour les partenaires sociaux, qui doivent la promouvoir dans les négociations collectives et le dialogue social, également au niveau européen. Les travailleuses et travailleurs immigrants doivent adopter une attitude favorable à l'intégration.

1.6   Les entreprises déploient leurs activités dans des environnements dont la diversité ne cesse de croître. Il est nécessaire qu'elles adoptent une approche positive de la diversité culturelle afin d'améliorer l'intégration et aussi d'élargir les opportunités.

1.7   Le CESE propose à la Commission de demander l'élaboration d'un avis exploratoire dans le cadre de la création d'une plateforme européenne de dialogue pour la gestion de l'immigration professionnelle qui est prévue dans le programme de Stockholm.

2.   Champ de l'avis

2.1   La présidence espagnole a demandé au CESE d'élaborer un avis exploratoire afin que l'Union européenne puisse améliorer l'intégration des travailleurs immigrants. Le présent avis du Comité va dès lors se centrer sur l'intégration des travailleurs immigrants dans le monde de l'emploi et sur d'autres aspects liés directement et indirectement au marché du travail.

2.2   Les aspects généraux de la politique en matière d'immigration et d'intégration ne seront examinés que dans la mesure où ils relèvent directement de l'avis. Le Comité a adopté plusieurs avis sur l'intégration (1) qui présentent une approche plus générale et il a élaboré un avis d'initiative visant le renforcement de l'intégration dans le nouvel agenda de politique sociale de l'UE, pour des thèmes tels que l'éducation et la formation, l'égalité entre les femmes et les hommes, la santé, le logement, la politique de la famille et de la jeunesse, la pauvreté et l'exclusion sociale, etc.

2.3   L'Europe doit renforcer l'approche d'intégration dans la politique commune de l'immigration. Le Comité a constitué un groupe d'étude permanent «Intégration» dans le but de participer aux travaux du Forum européen de l'intégration.

2.4   Le traité de Lisbonne bénéficie d'une base juridique plus solide (2) qui permet à l'UE d'«appuyer l'action des États membres en vue de favoriser l'intégration des ressortissants des pays tiers en séjour régulier».

3.   Les immigrants contribuent au développement économique et au bien-être de l'Europe

3.1   Au cours de ces dernières années, l'Europe a accueilli de nombreux immigrants issus de pays tiers, venus à la recherche de nouvelles opportunités. Néanmoins, les politiques restrictives appliquées par de nombreux gouvernements européens limitent le recrutement légal de travailleurs immigrants par les entreprises.

3.2   Dans son rapport «L'emploi en Europe» de 2008 (3), la Commission affirmait que «Les immigrants (…) ont joué un rôle important dans la croissance globale de l'économie et de l'emploi dans l'Union depuis 2000, en contribuant à faire face aux pénuries de main-d'œuvre et de compétences et à accroître la flexibilité du marché du travail».

3.2.1   Dans son rapport conjoint sur l'emploi (2009-2010) (4), la Commission indique que bien que l'UE traverse une crise de perte d'emploi, certains États membres et certaines catégories professionnelles connaissent des pénuries de main-d'œuvre. Par ailleurs, la Commission propose de renforcer l'intégration des immigrants déjà installés et qui sont particulièrement touchés par la crise; elle recommande également que l'on encourage les entreprises à diversifier leur main-d'œuvre et à mettre en œuvre les «chartes de la diversité».

3.3   Dans l'UE, depuis 2000, 21 % de croissance du PIB et 25 % de nouveaux emplois ont été créés grâce à la contribution des immigrants, à tel point que la croissance de certains secteurs économiques aurait stagné ou ralenti s'ils n'avaient pas été composés en grande partie par des travailleurs et travailleuses immigrants.

3.4   Il y a lieu de garder à l'esprit que les restrictions concernant les citoyens des nouveaux États membres travaillant dans l'UE ont été supprimées dans plusieurs pays dont le Royaume-Uni, l'Irlande et la Suède.

3.5   Le CESE souhaite souligner l'importance de l'esprit d'entreprise de nombreux immigrants, qui créent des entreprises en Europe et contribuent ainsi à la création d'emploi et de richesse, malgré que les législations en matière d'immigration présentent souvent des obstacles très difficiles à surmonter.

3.6   Bien que l'intensité des flux migratoires ait varié dans les États membres de l'UE, il apparaît que les pays qui ont admis le plus d'immigrants ont enregistré une plus forte croissance de l'économie et de l'emploi. Dans certains États membres dont l'Espagne, le Royaume-Uni, l'Irlande et l'Italie, le pourcentage est plus élevé (5).

3.7   La progression de l'immigration dans les sociétés européennes pose aussi de nouveaux problèmes et constitue un défi important pour la cohésion sociale. Les sociétés européennes sont confrontées à de nombreux problèmes sociaux liés à l'immigration qui doivent faire l'objet d'une approche intégrale ainsi que proposé par le CESE dans des avis précédents.

3.8   Le Comité estime que nombre de problèmes sociaux (racisme, délinquance, violence liée au genre, marginalisation, échec scolaire, etc.) mettent en évidence la nécessité d'améliorer l'intégration. Très souvent, les gouvernements, surtout à l'échelon local, sont dépassés par les problèmes.

3.9   Les médias versent parfois dans le sensationnalisme lorsqu'ils traitent les problèmes d'immigration générant ainsi une inquiétude au sein de la population. Certains responsables politiques utilisent également ces problèmes de manière opportuniste et irresponsable.

3.10   Le Comité constate avec inquiétude que le racisme et la xénophobie se répandent dans de nombreux pans de la société. Les partis et les mouvements extrémistes se servent des problèmes liés à l'immigration pour nourrir un sentiment de crainte au sein de la population et promouvoir des politiques intolérantes, violentes et contraires aux droits de l'homme.

3.11   Le racisme est considéré comme un délit dans le droit pénal. Néanmoins à maintes occasions, les autorités politiques et les responsables sociaux manifestent une attitude de tolérance envers ce phénomène qui est inacceptable. Il est impératif que la police et la justice, les faiseurs d’opinion, les médias et les responsables politiques changent d'attitude et combattent le racisme avec plus de détermination et de pédagogie sociale.

4.   L'immigration vers l'Europe augmentera à l'avenir

4.1   La situation démographique de l'UE est telle que, du fait du vieillissement de la population et de la faible natalité, les marchés de l'emploi nécessiteront la participation de nombreux travailleurs et travailleuses immigrants. Selon les prévisions démographiques les plus récentes d'Eurostat, la population en âge de travailler va commencer à décliner après 2012, même si au cours de cette décennie les flux d'immigration sont de 1,5 million de personnes par an. Si ces flux n'augmentent pas durant la prochaine décennie, la population en âge de travailler diminuera de 14 millions.

4.2   Par ailleurs, il est clair que la mobilité internationale des travailleurs va s'accroître dans le monde, étant donné que de nombreuses personnes se voient obligées d'émigrer en raison du manque d'emplois décents dans leur pays d'origine, et certaines d'entre elles viennent en Europe afin d'y chercher de nouvelles opportunités professionnelles et personnelles.

4.3   Le CESE estime que le désir des nouveaux immigrants de réaliser leur projet de migration en Europe représente une grande opportunité.

4.4   Le Comité est d'avis que des politiques améliorant l'intégration sociale sont nécessaires pour que les travailleurs immigrants aient leur chance et que les sociétés européennes améliorent la cohésion sociale, étant donné que la réussite des projets de migration dépend, tant pour les travailleurs immigrants que pour les sociétés d'accueil, de la manière dont se déroule le processus d'intégration.

4.5   La crise économique et l'augmentation du chômage concernent tous les secteurs sociaux, les travailleurs autochtones et les travailleurs immigrants. Les chiffres des marchés de l'emploi en Europe indiquent que les travailleurs immigrants peu qualifiés et qui occupent des emplois d'une moindre qualité sont les premières victimes de la crise et que les femmes immigrantes sont plus touchées par le chômage.

4.6   Malgré la récession actuelle et l'augmentation du chômage en Europe, les prévisions démographiques indiquent, qu'une fois la crise surmontée et les niveaux de croissance économique et d'emploi rétablis, la contribution de nouveaux immigrants sera nécessaire pour satisfaire aux besoins des marchés de l'emploi européens, compte tenu des caractéristiques propres à chacun des États membres.

5.   La législation européenne en matière d'admission: un défi à relever

5.1   Depuis qu'il y a dix ans, l'UE a ouvert la voie menant vers une politique commune d'immigration, la plus grande difficulté réside dans l'élaboration de la législation concernant l'admission de nouveaux immigrants, étant donné que chaque État membre a sa propre législation et des approches très différentes.

5.2   Les politiques et les législations en matière d'immigration ainsi que l'accès à l'emploi sont liées à l'évolution des marchés du travail. Il convient donc que les partenaires sociaux participent activement, mais que ces processus reposent sur le respect des droits humains des immigrants.

5.3   Le Comité estime que la législation en matière d'immigration doit favoriser l'intégration et considérer les travailleurs immigrants comme de nouveaux citoyens, comme des personnes dont les droits doivent être protégés, et pas seulement comme de la main-d'œuvre destinée à satisfaire les besoins des marchés du travail.

5.4   Les partenaires sociaux doivent participer aux différents échelons. Le Comité observe avec intérêt la proposition de la Commission de créer une plateforme européenne du dialogue pour la gestion de la migration professionnelle, à laquelle les partenaires sociaux pourraient participer.

5.5   Le Comité a proposé une politique commune de l'immigration et une législation harmonisée pour que les immigrants puissent arriver par des voies légales et être traités de manière équitable, que leurs droits fondamentaux soient protégés et leur intégration améliorée.

5.6   Or l'Europe n'a pas accueilli les immigrants avec des politiques et des législations appropriées; en raison du caractère restrictif de la plupart des politiques et législations nationales, de nombreux immigrants sont arrivés en suivant des canaux d'immigration irréguliers, se voyant contraints de travailler dans l'économie informelle. Le Comité estime que l'UE doit adopter de nouvelles initiatives qui visent à transformer le travail informel en travail légal.

5.7   Le Comité est d'avis que le fait de faciliter les procédures d'immigration légale aura pour effet de réduire l'immigration irrégulière et le risque que certains immigrants en situation irrégulière soient victimes des réseaux criminels de trafics illicites et de traite des êtres humains. Le programme de Stockholm inclut de nouveaux engagements de l'UE à combattre ces réseaux criminels.

5.8   Le CESE considère que les politiques restrictives ont un impact très négatif sur les processus d'intégration puisqu'elles donnent aux immigrants une image de personnes qui ne sont ni bienvenues ni bien acceptées.

5.9   Ces politiques s'accompagnent parfois de discours politiques et sociaux qui criminalisent l'immigration, génèrent l'exclusion et promeuvent la xénophobie et la discrimination.

5.10   Le Pacte européen sur l'immigration et l'asile sera mis en œuvre au cours des prochaines années à travers le programme de Stockholm. L'on peut s'attendre à ce que le traité de Lisbonne permette de conclure plus facilement des accords au sein du Conseil, et que le pouvoir de codécision du Parlement, favorise l'harmonisation de la législation.

5.11   Le Comité aurait préféré une législation horizontale, mais le Conseil et la Commission ont choisi d'élaborer des directives sectorielles. La directive sur la carte bleue (6) a été adoptée récemment dans le but de faciliter l'admission de travailleurs hautement qualifiés. La Commission prévoit d'élaborer au cours des prochains mois de nouvelles propositions de directive.

5.12   Le Comité considère qu'il est essentiel que l'UE dispose d'une législation adéquate en matière d'admission étant donné que l'intégration est étroitement liée à l'égalité de traitement et à la non-discrimination. C'est pourquoi le CESE a soutenu (7) (tout en proposant quelques améliorations) la directive-cadre sur les droits des travailleurs immigrants proposée par la Commission (8) et qui est encore débattue au Conseil. La version actuellement à l'examen au Conseil part d'une approche insuffisante et inacceptable pour la société civile et pour le Comité.

5.13   Le Conseil doit approuver la directive cadre afin de garantir un niveau de droits adéquat pour tous les travailleurs immigrants et d'éviter des situations de discrimination. Le Comité propose que la présidence espagnole de l'UE réoriente les débats au Conseil sur la directive-cadre en vue d'une adoption rapide pour autant qu'elle inclue un système approprié de droits communs dans toute l'UE qui se fonde sur l'égalité de traitement notamment en matière de droits du travail et droits sociaux des travailleurs immigrants.

5.14   Le Comité a adopté récemment un avis d'initiative plaidant pour que la législation en matière d'immigration respecte les droits fondamentaux (9). Il y propose un cadre avancé de droits et d'obligations. Par ailleurs, il est nécessaire de réformer la directive sur le regroupement familial.

6.   L'emploi est un aspect fondamental du processus d'intégration

6.1   L'intégration est un processus social à double sens de compromis réciproque qui concerne non seulement les immigrants mais aussi la société d'accueil. C'est le premier des principes de base communs concernant l'intégration adoptés par le Conseil en 2004.

6.2   L'intégration nécessite que les autorités, les partenaires sociaux et les organisations exercent une autorité forte. Les politiques publiques peuvent favoriser ces processus sociaux et la participation active de la société civile est également essentielle. Dans un avis précédent (10), le CESE a souligné l'importance du rôle des collectivités locales et régionales.

6.3   Par ailleurs, les travailleurs et travailleuses immigrants doivent adopter une attitude favorable à l'intégration en s'attachant à apprendre la langue, les lois et les coutumes de la société d'accueil.

6.4   Le Comité participe aux côtés de la Commission aux activités du Forum européen de l'intégration et souhaite souligner encore une fois le fait qu'il importe que les organisations de la société civile participent et soient consultées à tous les niveaux de gouvernance.

6.5   L'intégration des personnes d'origine immigrée va au-delà du domaine professionnel auquel se réfère le présent avis, étant donné qu'elle est particulièrement importante en ce qui concerne le domaine familial, les écoles et les universités, les villages et les quartiers, les institutions religieuses, les organisations sportives et culturelles, etc.

6.6   L'emploi est un aspect fondamental du processus social d'intégration, dans la mesure où un emploi exercé dans des conditions décentes constitue la clé de l'autosuffisance économique des immigrants et favorise les relations sociales et la connaissance mutuelle entre la société d'accueil et les immigrants.

6.7   L'Europe sociale repose sur le travail et l'intégration est essentielle pour le développement de cette Europe sociale. Les entreprises européennes sont des acteurs sociaux indispensables qui sont à la fois concernés par et engagés dans l'intégration.

6.8   La crise économique et l'augmentation du chômage affaiblissent les processus d'intégration et alimentent certains conflits dans la société et dans le marché du travail. Le CESE estime, qu'en ces circonstances, il est nécessaire que tous les acteurs (les immigrants, les pouvoirs publics, les partenaires sociaux et la société civile) redoublent les efforts d'intégration.

6.9   Les travailleurs immigrants, qui sont couverts par les conventions internationales des droits de l'homme ainsi que par les principes et les droits consacrés par les conventions de l'OIT, ont droit à bénéficier d'un traitement équitable en Europe. Dans un avis précédent (11), le CESE a indiqué les droits et les obligations que la législation européenne doit garantir aux travailleurs et aux travailleuses immigrants.

6.10   Le Comité considère qu'il y a lieu de compléter la législation et les politiques publiques avec la collaboration des partenaires sociaux, car l'insertion professionnelle est également liée au comportement social et aux engagements syndicaux et patronaux.

6.11   Les services publics de l'emploi doivent encourager des programmes visant à améliorer l'accès à l'emploi des immigrants en facilitant la reconnaissance des qualifications professionnelles, en améliorant sans discrimination la formation linguistique et professionnelle et en fournissant une information appropriée sur les systèmes d'emploi du pays d'accueil.

6.12   Les syndicats, les organisations patronales, les associations d'immigrants et les autres organisations de la société civile jouent un rôle très important pour transmettre l'information et faciliter l'accès à l'emploi des immigrants.

6.13   La majorité des entreprises en Europe sont petites et moyennes et procurent un emploi à la plus grande partie de la population active, en ce y compris aux immigrants. C'est donc au niveau des PME que se déroulent, dans une grande mesure, les processus sociaux d'intégration.

7.   L'égalité de traitement et la non-discrimination comme piliers de l'intégration

7.1   Le CESE considère que l'accueil et le traitement réservé par les autorités et les entreprises aux travailleurs immigrants est fondamental. Ces derniers sont souvent désavantagés par rapport aux travailleurs autochtones.

7.2   Bien sûr, les situations diffèrent d'un État membre à l'autre, tout comme le droit du travail et les pratiques sociales. Toutefois, de nombreux travailleurs immigrants font face à un certain nombre de désavantages et de difficultés pour trouver un emploi et à un manque de reconnaissance de leurs qualifications professionnelles, sans compter que, dans bien des cas, ils ne parlent pas la langue et ne connaissent ni les lois, ni les pratiques, ni les institutions sociales du pays d'accueil.

7.3   Le point de départ est une bonne législation contre la discrimination, néanmoins l'on note toujours l'existence, au niveau national, de législations discriminatoires entre travailleurs autochtones et immigrants et, surtout, de pratiques discriminatoires envers les travailleurs en raison de leur origine nationale, ethnique ou culturelle, qui se manifestent de manière directe ou indirecte.

7.4   L'égalité de traitement et les politiques de lutte contre la discrimination sont les piliers des politiques d'intégration. Adoptant une approche bidirectionnelle de l'intégration, le Comité considère que les entreprises, les syndicats et les autorités doivent garantir l'égalité de traitement aux travailleurs immigrants et éviter tout type de discrimination à leur encontre.

7.5   Les employeurs et les travailleurs immigrants doivent respecter les normes de travail et les conventions collectives en vigueur dans chaque entreprise ou secteur conformément aux lois et pratiques nationales. Le Comité souhaite souligner que le racisme et la discrimination sont des comportements criminels devant également faire l'objet de sanctions dans les entreprises conformément à la législation du travail.

7.6   Afin de faciliter l'intégration dans le marché de l'emploi, il est nécessaire que les travailleurs et travailleuses immigrants soient informés des lois du travail et des conventions collectives qui régissent les droits et les obligations sur le lieu de travail.

7.7   Dans un contexte politique et social favorable à l'intégration, les travailleurs immigrants participeront plus facilement à des itinéraires et des programmes d'intégration (notamment l'apprentissage de la langue, des lois et des coutumes) que les autorités devront d'ailleurs faciliter.

7.8   Les directives de l'UE relatives à l'égalité de traitement en matière d'emploi (12) et à l'égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d'origine ethnique (13) sont des instruments juridiques essentiels pour déterminer la législation et les pratiques dans les États membres en ce qui concerne la lutte contre la discrimination et la promotion de l'insertion professionnelle.

7.9   Le Parlement a récemment approuvé une résolution sur la nouvelle directive contre la discrimination (14), qui vient compléter les directives existantes. Le CESE a aussi rendu un avis dans lequel il soutient la proposition de la Commission et invite à tenir compte de la discrimination multiple. Une fois adoptée, cette nouvelle directive étendra le principe de non-discrimination à des domaines tels que l'éducation, la santé, la protection sociale et l'habitat.

7.10   Le CESE estime que les directives contre la discrimination n'ont pas été transposées de manière appropriée dans les législations nationales. De ce fait, certains États membres ne possèdent pas une bonne législation contre la discrimination. La nouvelle directive, une fois adoptée, constituera un instrument législatif très positif.

7.11   Les partenaires sociaux, acteurs fondamentaux pour le fonctionnement des marchés de l'emploi et piliers de la vie économique et sociale européenne, ont un rôle important à jouer dans l'intégration. Lors des négociations collectives, ils doivent assumer leurs responsabilités en termes d'intégration des immigrants en éliminant des conventions collectives et des réglementations et pratiques professionnelles tout facteur direct ou indirect de discrimination.

7.12   Dans le cadre des négociations collectives et, en particulier, au sein de l'entreprise, il faut établir des mécanismes pour garantir que l'accès au travail et le recrutement soient conformes au principe de l'égalité des chances. Il est particulièrement important, de disposer à cet égard d'instruments qui permettent d'éviter la discrimination directe et indirecte.

7.13   Néanmoins actuellement, l'égalité de traitement en termes de salaire et de conditions de travail n'est, dans la pratique, pas garantie pour nombre de travailleurs immigrants. Il appartient aux autorités du travail et aux partenaires sociaux d'élaborer des procédures visant à éviter les discriminations et de promouvoir activement l'égalité des chances.

7.14   En Europe, deux types d'emplois se développent: des emplois de qualité pour la plus grande partie des citoyens européens et les immigrants hautement qualifiés et des emplois de mauvaise qualité pour la majorité des immigrants. Par conséquent, la mauvaise qualité de l'emploi est également un facteur de discrimination lorsque les entreprises ont recours aux immigrés en tant que main-d'œuvre «plus vulnérable».

7.15   Le CESE a proposé dans plusieurs avis que les États membres améliorent leurs systèmes d'homologation de diplômes (15), et que l'UE se dote d'un système de reconnaissance des diplômes pouvant être utilisé par les travailleurs immigrants (16). Dans les entreprises européennes, de nombreux immigrants occupent des postes pour lesquels ils sont surqualifiés.

7.16   Nombre de travailleurs immigrants sont également désavantagés et font l'objet de discrimination en termes d'évolution de carrière et de promotion. Les lois du travail, les conventions collectives et les pratiques au sein des entreprises doivent garantir le principe de l'égalité des chances en ce qui concerne la promotion des travailleurs. Il appartient aux partenaires sociaux d'engager de nouvelles initiatives à cet égard.

7.17   Les formations techniques et professionnelles constituent des instruments très importants pour améliorer l'aptitude à l'emploi des travailleurs immigrants; néanmoins, certaines lois et pratiques nationales empêchent les ressortissants de pays tiers d'y participer ou limitent leur participation. Le CESE estime qu'il appartient aux pouvoirs publics et aux partenaires sociaux de faciliter l'accès des travailleurs immigrants aux formations dans des conditions d'égalité.

7.18   Certains États membres développent, en collaboration avec les entreprises, des programmes de formation dans les pays d'origine qui précèdent l'obtention du permis de séjour afin d'aider les ressortissants des pays tiers à s'intégrer au marché du travail lorsqu'ils arrivent en Europe.

7.19   L'Union européenne n'a pas encore résolu de manière satisfaisante la question de la portabilité des droits de pension pour les travailleurs européens. Les travailleurs immigrants sont également confrontés à de nombreux problèmes découlant des législations nationales qui ne leur garantissent pas valablement les droits à la pension acquis durant leur vie professionnelle en Europe. Les raisons à cela sont très diverses et dépendent des législations nationales et des conventions signées avec les pays tiers.

7.20   Le Comité propose que la Commission européenne adopte une initiative qui peut être législative permettant de garantir les droits à la pension des travailleurs immigrants, lorsque ces derniers changent de résidence au sein de l'UE et lorsqu'ils retournent dans leur pays d'origine ou résident dans un autre pays.

7.21   Les syndicats doivent accueillir des travailleurs immigrés parmi leurs adhérents et faciliter leur accès aux fonctions de représentation et de direction. En Europe, la plupart des syndicats ont établi de bonnes pratiques garantissant à tous les travailleurs les mêmes droits et la lutte contre la discrimination.

7.22   Le CESE estime que des politiques actives et de nouveaux engagements des partenaires sociaux sont nécessaires pour encourager des comportements favorables à l'intégration sociale, à l'égalité de traitement et à la lutte contre la discrimination sur le lieu de travail. Le dialogue social européen peut constituer un cadre approprié pour inciter les partenaires sociaux à prendre de nouveaux engagements au niveau qu'ils jugeront opportun.

7.23   L'Agence européenne des droits fondamentaux a étudié (17) la discrimination au travail fondée sur l'origine ethnique sur les marchés de l'emploi en Europe et a montré qu'elle est très importante en dépit de la législation.

8.   La gestion de la diversité

8.1   Les entreprises européennes sont de plus en plus diverses et cette diversité va s'accroître dans le futur. Il est impossible d'atteindre une bonne intégration des immigrants dans le monde professionnel à défaut d'une approche positive de la diversité culturelle, qui revêt un intérêt croissant pour les entreprises et les travailleurs.

8.2   Les grandes entreprises ont leur propre culture qui s'est développée avec le temps entre les travailleurs, et qui est également fonction de l'environnement social et des relations avec les clients.

8.3   Les entreprises européennes déploient leurs activités dans des villes dont la diversité ne cesse de croître. Le Comité des régions et la fondation de Dublin ont, grâce au réseau CLIP (18), échangé leurs expériences afin de favoriser la diversité dans la fonction publique.

8.4   La diversité culturelle découlant de l'immigration pose un nouveau défi qu'il est nécessaire de relever pour élargir la culture de l'entreprise en intégrant des nouveaux travailleurs à tous les niveaux: celui des cadres supérieurs, des cadres moyens et celui des autres travailleurs.

8.5   Par ailleurs, la mondialisation permet aux entreprises d'évoluer dans de nouveaux environnements sociaux et culturels et de nouveaux marchés et de rencontrer des nouveaux clients de cultures différentes.

8.6   Nombre d'entreprises reconnaissent d'ailleurs l'intérêt de bien gérer la diversité. L'évolution de ces dernières décennies vers une économie de services a renforcé les contacts entre l'entreprise et le client. Par ailleurs, la mondialisation a poussé les entreprises à rechercher de nouveaux marchés partout dans le monde. La diversité des clients et des utilisateurs auxquels s'adresse l'entreprise est également plus importante.

8.7   Une bonne gestion de cette diversité au sein de l'entreprise permet de mieux tirer parti des capacités de tous les travailleurs d'origines et de cultures diverses et de renforcer l'efficacité dans les relations extérieures de l'entreprise avec un marché lui aussi diversifié.

8.8   Les entreprises qui gèrent bien cette diversité sont mieux placées pour capter des «talents» dans toutes les régions du monde, ainsi que des clients dans les nouveaux marchés. En outre, elles peuvent accroître la créativité et la capacité d'innovation de leurs employés dans la mesure où tous les travailleurs (y compris les travailleurs immigrants) trouvent un climat d'accueil qui y est favorable.

8.9   Souvent, les petites entreprises européennes n'ont pas de département de ressources humaines, il est dès lors nécessaire qu'elles puissent recevoir le soutien de structures spécialisées fournies par les autorités et les organisations patronales.

8.10   La gestion de la diversité est fondée sur une application stricte des mesures d'égalité de traitement et de lutte contre la discrimination. Elle implique en outre la mise sur pied de programmes d'accueil des travailleurs immigrés, de mesures de respect des différences culturelles, de systèmes de communication qui tiennent compte de la diversité linguistique, de formules de médiation pour la résolution de conflits, etc.

8.11   La formation à la gestion de la diversité est nécessaire. Au sein de l'entreprise, cette formation peut s'adresser à différents groupes tels que la direction, les responsables intermédiaires et l'ensemble du personnel, mais aussi aux organisations syndicales et patronales.

8.12   Les entreprises, au même titre que les organisations patronales et syndicales, doivent disposer de départements spécialisés dans la gestion de la diversité pour promouvoir les initiatives, évaluer les résultats et encourager les changements.

8.13   Les pouvoirs publics doivent soutenir la gestion de la diversité au sein de l'entreprise en offrant des incitants économiques et fiscaux aux sociétés qui élaborent des plans en ce sens; ils doivent également favoriser l'échange de bonnes pratiques, le développement de programmes de formation et la réalisation de campagnes de promotion.

9.   Les difficultés de l'intégration dans les cas de l'économie informelle et de l'immigration irrégulière

9.1   Les travailleurs immigrants «sans papiers» et, partant, en situation irrégulière, sont contraints de travailler dans l'économie informelle. Celle-ci est proportionnellement plus importante dans les États membres ayant un plus grand nombre d'immigrants irréguliers. Les immigrants en situation irrégulière sont souvent victimes d'une exploitation extrême sur le marché du travail par certains employeurs.

9.1.1   Les immigrants en situation irrégulière sont souvent victimes d'une exploitation extrême sur le marché du travail par certains employeurs.

9.2   Le CESE a adopté un avis (19) relatif à la proposition de directive qui propose de sanctionner les employeurs exploitant des immigrants en situation irrégulière.

9.3   Les travailleuses «sans papiers» employées à des travaux ménagers se trouvent dans une situation très vulnérable et dans certains cas dans des conditions de semi-esclavage. Certaines législations nationales ne garantissent pas pleinement les droits du travail ni les droits sociaux pour ce type d'activité. Ces problèmes sont encore plus aigus dans le cas des personnes en situation irrégulière et travaillant dans l'économie souterraine. Le Comité propose à la Commission européenne d'adopter de nouvelles initiatives afin de protéger convenablement les droits du travail et les droits professionnels de ces travailleuses.

9.4   Depuis ces dernières années, certaines législations nationales criminalisent les associations humanitaires qui aident les personnes en situation irrégulière dans le but d'éviter leur exclusion sociale et de faciliter leur intégration. Le Comité signale que ces législations sont contraires aux droits de l'homme et au principe moral de la solidarité. La Commission européenne et l'agence de Vienne doivent évaluer ces situations et adopter les initiatives nécessaires.

9.5   L'intégration sociale est plus difficile lorsque les immigrants se trouvent en situation irrégulière; aussi, le Comité a-t-il proposé que l'on mène des processus de régularisation individualisés des immigrants en situation irrégulière en tenant compte de leur degré d'enracinement social et professionnel sur la base de l'engagement pris par le Conseil dans le cadre du Pacte européen sur l'immigration et l'asile (20), qui prévoit des régularisations individuelles, dans le cadre des législations nationales, pour raisons humanitaires ou économiques, en particulier dans les secteurs professionnels à forte concentration de personnes en situation irrégulière.

10.   Quelques initiatives du programme de Stockholm

10.1   La Commission a proposé de créer une plateforme européenne du dialogue pour la gestion de la migration professionnelle, à laquelle participeraient des entrepreneurs, des syndicats, des agences pour l'emploi et d'autres parties concernées.

10.2   Le CESE propose à la Commission qu'elle s'inspire de la procédure ayant conduit à la création du forum européen de l'intégration, pour demander au Comité d'élaborer un avis exploratoire en 2010. Ainsi, avec la participation de toutes les parties concernées, le Comité pourrait avancer une proposition pour la création de cette plateforme européenne avec laquelle il souhaite collaborer.

10.3   La Commission a aussi proposé que l'UE se dote d'un code de l'immigration qui garantisse aux immigrants légaux un niveau de droits uniforme et comparable à celui des citoyens européens. Cette codification des textes législatifs existants inclura, si nécessaire, des modifications utiles pour simplifier ou compléter les dispositions existantes et améliorer leur application effective.

10.4   Le CESE considère que la législation européenne de l'immigration doit s'assortir d'un cadre commun des droits (statut européen) horizontal, qui garantisse le respect et la protection des droits et des libertés des immigrants en Europe, indépendamment de leur catégorie professionnelle et de leur statut juridique. La directive-cadre débattue au sein du Conseil, serait, si elle était approuvée, un bon instrument juridique pour protéger les droits des immigrants.

10.5   Le Comité salue l'initiative de la Commission de présenter un code européen de l'immigration, pour autant qu'il s'agisse d'une proposition législative qui garantisse les droits fondamentaux aux immigrants et un niveau de droits uniforme et comparable à celui qui est offert aux citoyens communautaires.

Bruxelles, le 17 mars 2010.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  JO C 27 du 3.2.2009; JO C 128 du 18.5.2010, p. 29;

JO C 80 du 30.3.2004;

JO C 318 du 23.12.2006;

JO C 125 du 27.5.2002;

JO C 208 du 3.9.2003.

(2)  Article 79.

(3)  COM(2008) 758 final.

(4)  COM(2009) 674 final.

(5)  «The Economic and Fiscal Impact of Immigrants» (L'impact économique et budgétaire des immigrants), Institut national de recherche économique et sociale, octobre 2007 et «Coyuntura española - Los efectos de la inmigración sobre el empleo y los salarios» Informe Mensual de la Caixa, núm 295, (La conjoncture en Espagne – les effets de l'immigration sur l'emploi et les salaires, rapport mensuel no 295 de La Caixa), octobre 2006.

(6)  Directive CE/2009/50.

(7)  JO C 27 du 3.2.2009, p. 114.

(8)  COM(2007) 638 final.

(9)  JO C 128 du 18.5.2010, p. 29.

(10)  JO C 318 du 23.12.2006.

(11)  JO C 128 du 18.5.2010, p. 29.

(12)  Directive CE/2000/78.

(13)  Directive CE/2000/43.

(14)  P6_TA(2009)0211.

(15)  Voir, en particulier, JO C 162 du 25.6.2008, p. 90.

(16)  Voir, entre autres, JO C 218 du 11.9.2009.

(17)  Enquête EU-MIDIS »Enquête de l’Union européenne sur les minorités et la discrimination»: Rapport sur les principaux résultats, Agence européenne des droits fondamentaux, 9.12.2009.

(18)  Réseau de villes pour une politique locale d'intégration des migrants – réseau de plus de 30 villes européennes sous la gestion d'Eurofound.

(19)  JO C 204 du 9.8.2008.

(20)  Conseil de l'UE, 13440/08, 24.9.2008.


28.12.2010   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 354/23


Avis du Comité économique et social européen sur la «Politique européenne des transports dans le cadre de la stratégie de Lisbonne après 2010 et de la stratégie de développement durable» (avis exploratoire)

2010/C 354/04

Rapporteur: M. BUFFETAUT

Par lettre datée du 23 juillet 2009, la présidence espagnole de l'Union européenne a demandé au Comité économique et social européen, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, d'élaborer un avis exploratoire sur la:

«Politique européenne des transports dans le cadre de la stratégie de Lisbonne après 2010 et de la stratégie de développement durable».

La section «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a élaboré son avis le 24 février 2010.

Lors de sa 461e session plénière des 17 et 18 mars 2010 (séance du 17 mars 2010), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 152 voix pour, 1 voix contre et 4 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le Comité économique et social européen souligne que la compétitivité, la fiabilité, la fluidité et la rentabilité des transports sont une condition de la prospérité économique de l’Europe et que la libre circulation des personnes et des biens constitue une des libertés fondamentales de l’Union européenne. Les transports seront ainsi appeler à contribuer de façon importante à la réalisation des objectifs de la stratégie 2020. Il attire aussi l’attention sur le fait que le secteur des transports dans son ensemble a beaucoup souffert de la crise économique que nous traversons. Mais il est conscient du caractère insuffisamment durable du secteur.

1.2   Il soutient les efforts réalisés pour aboutir à une comodalité efficace et l’optimisation et la mise en réseau des différents modes de transport afin d’avoir un système de transport intégré et une fluidité maximale des transports. Toutefois, il souligne qu’il ne faut pas abandonner l’ambition de favoriser le transfert modal, faute de quoi le développement de modes de transport décarbonés stagnera et, qu’à l’inverse, la congestion et les émissions ne cesseront de croître.

1.3   Le Comité économique et social européen, qui constate la dépendance du secteur des transports à l’égard des énergies fossiles, avec ses conséquences tant sur le plan des émissions que sur celui de la sécurité et l’indépendance de l’approvisionnement et qui sait que les ressources, notamment de pétrole, sont limitées, considère que la future politique européenne des transports, tout en préservant la compétitivité du secteur dans le cadre de la stratégie 2020, doit poursuivre quatre objectifs majeurs: la promotion de modes de transports sobres en carbone, l’efficacité énergétique, la sécurité et l’indépendance de l’approvisionnement ainsi que la lutte contre la congestion du trafic.

1.4   Les principaux défis à relever et les enjeux à intégrer dans une politique durable des transports sont l’urbanisation croissante et la demande de confort dans les déplacements quotidiens, la préservation de la santé publique qui implique la réduction des émissions de polluants et de gaz à effet de serre, la préservation d’une économie des échanges qui intègre la nécessité de la réduction des émissions, la définition de territoires homogènes pour bâtir une vraie politique intégrée de transport, la compréhension et l’adhésion des populations et des acteurs économiques pour contribuer à la mise en œuvre de nouvelles politiques et de nouveaux comportements en matière de mobilité. Mais il est clair que si l'Union européenne est seule à agir, ses efforts seront vains. La nécessité d'un accord international sur la réduction des gaz à effet de serre est évidente tant pour des raisons tenant au réchauffement climatique que pour celles relatives à la diminution des ressources énergétiques classiques.

1.5   Dans ces conditions, le CESE préconise la mise en œuvre d’une série de mesures concrètes tant par les collectivités locales que par les États membres avec le soutien et l’impulsion de l’Union européenne. Celle-ci, tant par des actes législatifs que par l’orientation des fonds de cohésion ou de développement régional, par les nouvelles lignes directrices du réseau transeuropéen de transport, par les interventions de la Banque européenne d’investissement dispose de moyens d’action. Ces mesures qui s'inscrivent dans le cadre des objectifs majeurs énoncés plus haut, pourraient être notamment:

la mise en œuvre d’un ambitieux plan de recherche et développement dans le domaine de la mobilité et des transports (motorisation, carburants, lutte contre les émissions efficacité énergétique);

la mise en œuvre d’un site d’échange de bonnes pratiques en matière de transports urbains ou de transports sur longue distance;

le développement de parcs de stationnement relais et des transports publics notamment par des lignes de bus en site propre, le tramway et le métro;

le perfectionnement des TIC comme un moyen d’efficacité, de fiabilité et de sécurité des transports publics;

la mise en place de véritables services gestionnaires de la mobilité sur des aires géographiques suffisamment vastes et chargés d’optimiser et de garantir la fluidité et la bonne connexion des divers modes de transport;

la création d’espaces de livraison de proximité et de centre de distribution urbaine pour l’hyper centre;

le maintien d’emprises ferroviaires en ville,

la promotion, en s’appuyant sur des mesures fiscales, des moyens de transports et de technologies plus efficace sur le plan énergétique et moins émettrices de CO2 et autres polluants;

la création d’aires de repos sécurisées et confortables pour les chauffeurs routiers, l’amélioration de leur conditions et de travail et de leur formation;

la mise en œuvre rapide de réseaux ferroviaires à priorité fret et le développement d’une véritable culture du service client en ce domaine particulier;

l’encouragement, au besoin par des mesures fiscales, aux voitures à énergies alternatives et aux biocarburants de 3e génération;

le lancement d’un véritable plan européen pour le développement des véhicules électriques qui mette ainsi l’Union européenne en position de définir ou de contribuer à définir les standards internationaux d’un secteur en devenir;

le développement de la notion de «ports verts» et la mise en œuvre des autoroutes de la mer;

l’amélioration des conditions de travail et de formation des gens de mer;

le développement d’autoroutes fluviales et fluviomaritimes ainsi que la mise en service de nouvelles barges plus adaptées notamment pour le transport de semi remorques et de conteneurs;

la prise en compte des impératifs de durabilité et de protection de l’environnement dans le choix des infrastructures de transport;

l’internalisation des coûts externes des transports pour tous les secteurs des transports afin de ne pas pénaliser indûment tel ou tel mode de transport et de parvenir à une vérité du coût des transports;

l’adoption par les collectivités publiques organisatrices d’objectifs réalistes de diminution des émissions de gaz à effet de serre et des autres polluants et de durabilité liés aux transports locaux;

la prise en compte de ces objectifs dans la conception des systèmes de transport public et dans le choix des infrastructures;

la mise en place systématique d’études d’impact solides et réalistes avant la mise en œuvre des politiques et mesures proposées.

1.6   En pratique le défi à relever pour une nouvelle politique des transports est de préserver le dynamisme du secteur et sa compétitivité tout en ayant pour objectifs de réduire les émissions de gaz à effet de serre et les polluants, de faciliter le transfert modal, de réduire les distances et de favoriser les transports «sans coutures», d’attirer plus de personnes vers des modes peu émetteurs, ramené au km/passager ou au km/marchandise.

1.7   Pour y parvenir, il existe des solutions simples qui peuvent avoir des répercutions directes, rapides et tangibles à des coûts maîtrisés: choisir les carburants les plus verts possibles et les plus renouvelables, utiliser le biogaz fourni par le recyclage des déchets, récupérer des espaces existants (délaissés ferroviaires ou portuaires par exemple) et les affecter à des services de mobilité, améliorer les espaces de connexion là où ils existent déjà, faciliter l’unité des titres de transport sur les distances régionales et/ou urbaines, développer les lignes de bus en site propre, encourager le covoiturage, faciliter les échanges d’information entre les opérateurs ferroviaires …

1.8   Il existe aussi des solutions nécessitant des choix politiques forts qui ont des répercussions financières plus lourdes: création de parcs relais pour les automobiles connectés à une alternative crédible des transport, mettre en place un système de centralisation d’informations qui permette la régulation des entrées-sorties pour tous les modes de transport sur un territoire donné, organiser l’urbanisation la plus adaptée pour réduire la mobilité forcée, investir dans les tramways ou le métro, internaliser les coûts externes dans les prix de vente du transport, développer les TIC qui permettront de donner des informations fiables aux acteurs de la chaîne de mobilité, mesurer les efficacités des modes choisis, mettre en place des processus d’énergie renouvelable et récupérer cette énergie en la déployant les meilleurs moyens (électricité pour le tramway, gaz pour certains véhicules, etc.) ….

2.   Introduction

2.1   La réalisation du marché unique suppose un système de transport des personnes et des biens efficaces et fiables. La mondialisation des échanges elle-même a été rendue possible par la révolution des transports et par l’abaissement des coûts, la multiplication des opérateurs, la compétition et la réalisation d’infrastructures.

2.2   Les transports, nécessaires à la vie économique et professionnelle le sont tout autant à la vie personnelle et privée. Ils sont les conditions de l’échange et la liberté d’aller et venir est une liberté fondamentale.

2.3   Aussi les activités de transport sont naturellement un élément essentiel de l’économie européenne. Elles représentent environ 7 % du PIB et 5 % des emplois et contribuent à la création de 30 % du PIB de l’industrie et de l’agriculture et de 70 % du PIB des services.

2.4   Il faut souligner que la lourdeur des charges administratives dans le secteur des transports et le fait que celles-ci diffèrent d’un État membre à l’autre créent des coûts cachés et constituent des barrières aux échanges intra communautaires. Ces coûts et ces lourdeurs administratives pèsent d’un poids particulier sur les petites et moyennes entreprises.

2.5   Si l’Union européenne peut se féliciter de l’efficacité économique des transports et de leur compétitivité, le secteur reste marqué par un caractère insuffisamment durable. Or un système de transport durable doit non seulement assurer les différentes finalités économiques du transport mais encore respecter le pilier social et le pilier environnemental du développement durable.

2.6   Le concept même de transport durable implique de créer les conditions de la croissance économique tout en assurant des conditions de travail dignes et des métiers qualifiés pour une activité socialement responsable qui ne porte pas préjudice à l’environnement.

2.7   Malgré les progrès dans la motorisation des véhicules et de la qualité des carburants, malgré les engagements volontaires des constructeurs, le secteur des transports demeure celui où le taux de croissance des gaz à effet de serre reste le plus élevé.

2.8   Le volume des transports de marchandises n’a cessé de croître et plus que le PIB alors que si les transports de passagers ont effectivement crus en moyenne de 1,7 % par an entre 1995 et 2007, ils sont restés en deçà de la croissance du PIB dans la même période (2,7 %).

2.9   Les transferts de la route vers d’autres modes, tels le chemin de fer et les voies navigables, sont restés limités depuis 2001. Pire, on a pu constater des reports «à rebours» vers la route.

2.10   Enfin, le secteur reste dépendant à 97 % des combustibles fossiles, ce qui a des incidences néfastes tant sur le plan de l’environnement que sur celui de la dépendance énergétique.

2.11   Une politique de long terme nécessite donc de confirmer l’efficacité de nos transports, d’améliorer leur impact environnemental et leur sécurité, d’accroître la comodalité, de favoriser le report modal, d’améliorer les conditions de travail et de consentir les efforts d’investissements nécessaires.

2.12   Ceci s’avère d’autant plus important que les études de la Commission pour 2020 prévoient une forte augmentation des flux de transport si aucune inflexion ne se produit:

le transport intérieur en Europe occidentale augmenterait de 33 %;

le transport intérieur en Europe orientale de 77 %;

le transport de l’Europe occidentale vers l’Europe orientale de 68 %;

le transport de l’Europe orientale vers l’Europe occidentale de 55 %.

2.13   Si ces prévisions se réalisent nous parviendrons à une congestion généralisée sur les axes majeurs de communication. Trop de transport finira par tuer le transport. Dès lors nous devons consentir à des efforts considérables de recherche et de développement dans les techniques du transport (motorisation, carburants, efficacité énergétique, lutte contre la pollution …) d’investissement dans les infrastructures, d’amélioration de la comodalité, réhabilitation du fret ferroviaire, de développement du transport par voie d’eau ou maritime. Il nous faudrait un véritable plan Marshall pour les nouvelles technologies et les investissements dans les transports si nous voulons atteindre les objectifs de la Commission de réduction des émissions de carbone. Des professionnels du transport ont d’ailleurs développé le concept d’optimodalité, c'est-à-dire l’optimisation des performances techniques, économiques et environnementales des chaînes de transport des marchandises et créé un cercle pour l’optimodalité en Europe. L’objectif à poursuivre est de parvenir à découpler la croissance économique des effets négatifs du transport.

2.14   La question de la nature des transports et de leur utilité sociétale et économique a été posée. Cette interrogation est sensible. La liberté d’aller et venir est un droit fondamental, et la libre circulation des personnes, des biens et des services est un des principes fondateurs de l’Union européenne qui sous tend les règles de l’Organisation mondiale du commerce. En outre qui pourrait décider du caractère utile ou inutile des transports? La question est-elle pour autant vaine? Non car il apparaît qu’il est aujourd’hui nécessaire de parvenir à la vérité économique du coût des transports, c'est-à-dire d’internaliser les coûts externes générés par chaque type de transport et supportés aujourd’hui par la collectivité, notamment en matière d’environnement mais aussi de santé publique ou de sécurité. En parvenant à une plus grande vérité économique des transports, donc à des coûts plus réalistes, certains flux pourront être réduits au profit de flux de proximité.

3.   Transports terrestres

3.1   Le mot d’ordre européen est devenu la comodalité, c'est-à-dire le fait d’optimiser chaque mode de transport et de promouvoir la meilleure complémentarité et l’interaction la plus efficace possible entre les différents modes de transport. 80 % des transports terrestres sont effectués sur des distances inférieures à 100 km. Il convient donc d’apporter une réponse adaptée à cette demande qui, outre les transports routiers peut aussi être satisfaite par le transport ferroviaire de proximité, le transport fluvial ou maritime paraissant moins praticable pour de très courtes distances. En tout état de cause, il convient d’encourager avec vigueur le transfert modal quand il est pertinent, faute de quoi l’Union européenne ne parviendra pas à développer une économie des transports sobre en carbone.

3.2   Transport urbain et régional

3.2.1

Ce mode de transport obéit à des contraintes particulières. En effet, la circulation urbaine est à l’origine de 40 % des émissions de CO2 et de 70 % des autres polluants issus du transport routier. En outre la congestion urbaine, outre ses effets néfastes pour la santé publique et l’environnement, a un coût estimé à 2 % du PIB de l’Union européenne. Le développement des transports publics est une nécessité mais celui-ci doit répondre à certains critères pour répondre aux exigences d'un véritable service d'intérêt général et représenter ainsi une alternative à la voiture individuelle: fréquence, rapidité, sécurité, confort, accessibilité, coût abordable, maillage, connexions aisées. Il permet de relever non seulement des défis environnementaux mais encore des défis de cohésion sociale comme le désenclavement des banlieues.

3.2.2

L’usage des transports à énergie électrique est souhaitable, mais l’électricité elle-même doit être produite de façon durable et si possible sans émissions de CO2. Les systèmes de covoiturage ou de voitures «partagées» doivent aussi être encouragés.

3.2.3

C’est une véritable politique de mobilité urbaine durable qu’il conviendrait de mettre en place. Celle-ci suppose d’endiguer le transport individuel, éventuellement par la mise en place de péages urbains, mais surtout par l’amélioration de la qualité et de la facilité d’usage des transports publics qui passe par le développement des infrastructures et des services nécessaires à la mise en œuvre d’une inter modalité efficace. Étant donné la situation des finances publiques dans beaucoup des États membres de l’Union européenne ceci pourra être facilité dans certains cas par le développement des partenariats public/privé pour la réalisation de nouvelles infrastructures telles que des lignes de bus en site propre, des lignes de tramways, de trolleybus ou de métro, de nouvelles lignes ferroviaires régionales ou la remise en exploitation de lignes délaissées, le développement des technologies de l’information et de la communication dédiées aux transports, la modernisation et la simplification de la billettique …

3.2.4

Dans la pratique des mesures de bon sens comme le développement de parcs relais bien reliés au centre des agglomérations, la mise en exploitation de lignes de bus en site propre ou la remise en exploitation de lignes ferroviaires qui avaient été déclassées, seraient de nature à permettre de réels progrès à des coûts supportables.

3.2.5

Le perfectionnement des techniques d’information et de communication sera un instrument efficace pour développer l’inter modalité des transports au travers d’une véritable politique territoriale de gestion des transports. Ces technologies autorisent une gestion plus fine des trafics et devraient permettre de mettre au point des systèmes d’optimisation énergétique des flux de véhicules sur le réseau routier. Elles permettent également d’informer les voyageurs en temps réel tout au long du déplacement, de simplifier et d’optimiser la billettique, de faciliter les modalités de réservation. Grâce à ces techniques le voyageur pourra optimiser son parcours, connaître les horaires, la fréquence des passages et même réaliser le bilan énergétique du mode de transport qu’il aura choisi. Les TIC agiront ainsi comme un moyen de mise en synergie des modes de transport, de l’usage des infrastructures, et de l’efficacité énergétique.

3.2.6

Les problèmes de gestion des systèmes de transport dépassent souvent le cadre de la seule commune pour concerner un large territoire autour de la ville centre. À l’initiative des autorités locales concernées, il pourrait être créé, sur des zones géographiques larges et cohérentes, de véritables services gestionnaires de la mobilité, par exemple sous la forme de délégation de service public. Les missions de ce gestionnaire de la mobilité seraient notamment:

d’analyser les mobilités sur les territoires concernés, en tenant compte des opérateurs locaux, des flux de voyageurs, des contraintes géographiques et urbaines, etc.;

d’optimiser et de rendre adéquat l’offre de mobilité aux besoins recensés;

de gérer des services transverses pour faciliter l’intermodalité: information, billettique et télébillettique, transport à la demande, transport des personnes à mobilité réduite, covoiturage …;

de réaliser des audits de gestion de la mobilité et de son impact environnemental.

3.2.7

L’autorité organisatrice conserverait bien entendu la liberté de choix des opérateurs locaux, la tarification, la définition de sa politique des transports et de déplacement et d’aménagement du territoire. Elle assurerait la transparence contractuelle, définirait des contrats d’objectifs engageant le gestionnaire et les collectivités concernées, fixerait des objectifs de qualité de service.

3.2.8

Le CESE a déjà souligné le rôle déterminant des autorités locales dans l’organisation des transports publics et de l’aménagement du territoire. Le principe de subsidiarité joue certes son rôle en ce domaine néanmoins l’Union européenne souhaite à juste titre promouvoir les modèles les plus durables de transports urbains. Elle a déjà octroyé des financements au titre des fonds structurels et de cohésion ainsi qu’au titre du programme CIVITAS. Il serait souhaitable que l’UE renforce les échanges de bonnes pratiques en matière de transports urbains, mais aussi qu’elle finance un effort de recherche, au sein du prochain programme cadre, sur l’interaction entre transports et aménagement urbain.

3.3   Transport urbain de marchandises

3.3.1

Ce type de transport génère un trafic important. Par exemple, à Paris, il représente 20 % du trafic et 26 % des émissions de GES. Il faut donc optimiser la logistique urbaine et favoriser quand c’est possible, le transfert modal vers le fer ou le fluvial.

3.3.2

Il est possible d’imaginer:

un groupage des livraisons, en créant des espaces de livraison de proximité, aires d’arrêt et de manutention proches des établissements et entreprises voisines;

des centres de distribution urbaine, pour assurer les livraisons dans l’hyper centre, avec limitation des tonnages, passage obligé par des plates-formes logistiques, optimisation du remplissage, recours à des véhicules électriques;

dans la mesure du possible le maintien des emprises ferroviaires en ville, avec une garantie d’accès à tous les opérateurs;

dans les grandes villes situées le long de rivières, développer des infrastructures de ports fluviaux.

3.4   Transport routier de marchandises.

3.4.1

La croissance du transport routier de marchandises oblige à relever une série de défis: l’accroissement des émissions de CO2, la grande dépendance du secteur des transports à l’égard des combustibles fossiles, la nécessité d’améliorer les infrastructures notamment en matière de sécurité, le fait de garantir des conditions et un environnement de travail favorables pour les chauffeurs.

3.4.2

En ce qui concerne les émissions de CO2, il convient d’intensifier la recherche et le développement afin de réduire les émissions, notamment en développant de nouveaux moteurs ainsi que les énergies alternatives. La promotion, au moyen de mesures fiscales, de produits et/ou de mesures axés sur les moyens de propulsion alternatifs et la réduction des émissions de CO2 est d’autant plus efficace qu’est menée une ambitieuse politique de recherche. À cet égard l’internalisation des coûts externes (1) doit s’appliquer à tous les moyens de transports de façon équitable.

3.4.3

Le développement de solutions technologiques et la mise en œuvre des technologies de l’information et de la communication appliquées au transport routier des marchandises sera essentiel pour relever les défis auxquels est affronté le secteur, pour réduire la dépendance énergétique, les émissions des véhicules et la congestion des réseaux. Il conviendrait de créer un cadre clair pour introduire de nouvelles technologies avec la création de standards ouverts, garantissant l’inter opérabilité et augmenter les dépenses de R&D pour les technologies qui n’ont pas encore atteint la maturité nécessaires pour une mise sur le marché. Ces technologies doivent également être utilisées afin de réduire la fréquence des voyages à vide par une meilleure information appliquée à la logistique. Leur intérêt peut être grand pour accroître la sécurité des transports.

3.4.4

Il convient aussi d’améliorer les infrastructures notamment en matière d’aires de stationnement et d’installations de repos équipées, sûres et surveillées afin de les mettre à l’abri des vols et des actes de délinquance notamment pour assurer la sécurité des chauffeurs.

3.4.5

Pour les chauffeurs, il faut maintenir l’attrait de la profession en assurant des conditions et un environnement de travail favorables, tels qu’un temps de travail réglementé, des temps de conduite et de repos harmonisés, qui ne restent pas des dispositions législatives sans lendemain mais qui soient mises en œuvre dans la réalité (2).

3.5   Transport ferroviaire

3.5.1

Si le transport ferroviaire de passagers tend à s’améliorer, notamment sur les grandes distances, avec les lignes à grande vitesse, le transport du fret par le chemin de fer reste trop faible, environ 8 % des marchandises transportées. D'une façon générale, il convient de veiller à ce que la modernisation et l'accroissement de la compétitivité des chemins de fer se fassent en tenant le plus grand compte des impératifs de sécurité ainsi que de la continuité du service en cas d'intempéries saisonnières.

3.5.2

Le CESE soutient la proposition de la Commission de réseaux à priorité fret, mais il faut parvenir à une culture de service au client, de démarche commerciale et compétitive. L’ouverture à la concurrence devrait faciliter cette transition.

3.5.3

L’idée de réseaux à priorité fret consiste à définir des créneaux horaires et géographiques sur lesquels les trains de fret bénéficieraient d’un passage prioritaire, sans nuire au trafic des trains de voyageurs.

3.5.4

Il convient de rappeler qu’il existe quelques exemples déjà mis en œuvre dans l’Union européenne, certaines lignes étant même réservées au transport de fret comme la Betuwe line entre le port de Rotterdam et l’Allemagne. On peut citer les projets New opera et Ferrmed.

3.5.5

Le développement du fret ferroviaire est possible à certaines conditions:

proposer une véritable offre de service logistique plus qu’une simple prestation de transport;

réussir à abaisser les coûts pour être plus compétitif;

obtenir une meilleure fiabilité dans le service rendu;

parvenir à des temps de trajet de «bout en bout» raisonnables;

offrir plus de flexibilité dans l’offre ainsi qu’une meilleure réactivité en cas de perturbation du trafic.

3.5.6

Le développement du fret ferroviaire nécessite aussi le développement de plateformes intermodales de ferroutage. À cet égard, on ne peut que se féliciter du déblocage du projet de liaison de ferroutage Lyon/Turin, mais après un développement aléatoire du transport rail/route il y a lieu désormais de promouvoir les autoroutes ferroviaires de ferroutage (comme l’autoroute alpine ou la ligne Lorry rail entre Perpignan et Luxembourg) ainsi que les autoroutes de la mer comme le projet franco-espagnol Fres Mos entre Nantes Saint Nazaire et Gijon.

3.6   Voitures automobiles

3.6.1

Le paquet énergie/climat impose des contraintes fortes aux constructeurs. Il conviendra de développer de nouvelles voitures à énergie alternative et notamment des automobiles électriques ou hybrides. Il est aussi important de ne pas fermer la réflexion sur les biocarburants. Aujourd’hui se développent des biocarburants de troisième génération plus performants, notamment à partir des algues, ce qui évite les conflits de destination avec terres arables destinées à la production agricole de produits destinés à l’alimentation humaine.

3.6.2

En dehors des questions relatives aux techniques disponibles et aux véhicules offerts sur le marché il existe d’autres domaines de progrès notamment en matière d’économie d’énergie et d’espace aujourd’hui encombré du fait de la congestion automobile. Ainsi en va-t-il des cours de conduite économique mis en œuvre dans certaines grandes entreprises ou administrations, des pratiques de covoiturage ou de voitures partagées, de la mise à disposition de petits véhicules électriques en location dans certaines villes.

3.7   Marche et bicyclettes

3.7.1

En ville le développement de ces moyens de déplacement doivent être encouragés mais trouvent leur limite dans des considérations topographiques, de climat ainsi que d’âge des usagers. Toutefois il est clair que les collectivités locales devraient développer les pistes cyclables sécurisées, un des obstacles au développement de l’usage du vélo résidant dans le danger potentiel du fait de la circulation automobile.

4.   Transports maritimes

4.1   Le trafic maritime supporte une grande part des échanges internationaux. Le secteur souffre du fait de la crise et est confronté aujourd’hui à une surcapacité. Il faut éviter un désinvestissement et une perte de compétences et de savoir faire qui seraient calamiteux lors de la reprise, d’autant plus que le transport maritime européen est le tout premier au niveau mondial et qu’il convient de préserver des conditions de concurrence équitables et la compétitivité de la flotte européenne qui constitue un atout pour l’Union européenne.

4.2   Les carburants

4.2.1

Les navires utilisent des sous-produits pétroliers très polluants. En dehors de la nécessaire évolution technologique, il convient d’envisager avec la profession comment compenser l’impact environnemental négatif. Si le système des quotas de CO2 n’est pas adapté peut-être faut il envisager une écotaxe? Cette question devrait être discutée dans le cadre des instances maritimes internationales.

4.2.2

En tout état de cause le Comité réitère son soutien à l’investissement dans la recherche et le développement qui ont trait aux navires, aux carburants et aux ports verts, tout comme il insiste pour que les autoroutes de la mer prévues dans le programme des RTE soient mises en œuvre.

4.3   Sécurité

4.3.1

On n’évitera jamais les fortunes de mer et les naufrages mais tout doit être fait pour assurer la sécurité des passagers comme des équipages, tant sur le plan de la conception que sur celui de l'entretien des navires. Les dispositions européennes sur la sécurité en mer sont parmi les plus complètes au monde. En revanche, la lutte conte les dégazages sauvages doit être d’une fermeté et d’une sévérité sans faille.

4.4   Formation

4.4.1

Maintenir et développer les transports maritimes européens suppose que des jeunes gens se dirigent encore vers les carrières maritimes et qu’ils souhaitent y demeurer. Il convient d’améliorer la qualité de la formation des gens de mer ainsi que les conditions de travail et de vie à bord et d’œuvrer à renforcer les équipages à bord.

5.   Transports fluviaux

5.1   Les transports fluviaux sont largement développés dans le nord de l’Europe mais pourraient l’être davantage en d’autres pays. À l’image de ce qui a été initié dans le domaine maritime, il conviendrait de réfléchir au concept d’autoroute fluviales et fluviomaritimes d’autant plus que ce type de transport est trois à quatre fois moins consommateur d’énergie et émetteur que le transport routier. Ce concept innovant ne pourra se développer qu’avec la mise en navigation de nouveaux types de navires et de réalisation de plateformes portuaires et logistiques.

5.2   Le navire fluviomaritime et la barge fluviale sont les facteurs clés de la création de nouveaux services fluviaux, de leur efficacité et de leur rentabilité par leur bonne adéquation aux trafics en termes de capacité et de vitesse, aux caractéristiques portuaires et de navigation. Il s’agit d’optimiser les dimensions des navires et des barges afin, notamment, de pouvoir y transporter semi remorques et conteneurs

6.   Transport aériens

6.1   Ceux-ci sont à l’origine de 3 % du CO2 présent dans l’atmosphère. Il faut souligner que la progression des émissions a été deux fois plus faible que l’augmentation du trafic depuis 1990. Les transports aériens seront soumis au système d’échanges de quotas et la Commission a posé le problème de la taxation du kérosène, comme celui de la TVA pour les transports intra communautaires.

6.2   Le développement des transports aériens a été dû à la libéralisation du secteur ainsi qu’au développement des compagnies à bas coûts, or l’implantation de celles-ci a souvent été accompagnée par l’octroi de subventions publiques qu’il serait opportun d’accompagner de l’obligation de mettre en œuvre des politiques de compensation de la part des sociétés bénéficiaires.

6.3   La question de la sécurité aérienne est évidemment essentielle lorsque l’on aborde la politique des transports aériens. L’Union européenne devrait être en pointe pour l’établissement d’un système de sécurité aérienne international et agir en ce sens au cours de la conférence internationale de l’OACI qui se tiendra en mars à Montréal.

6.4   Il convient enfin de bien préparer le passage à la deuxième phase du plan «ciel unique» après 2012 et de mener à bien les difficiles négociations entre les États-Unis et l’Union européenne en matière de transport aérien.

7.   Infrastructures

7.1   Le CESE a toujours soutenu le programme des réseaux transeuropéens de transports. Il réaffirme son soutien à ce programme mais s’inquiète des difficultés de financement et des retards.

7.2   Il relève que l’Europe élargie a des besoins accrus dans le domaine des infrastructures de transport et qu’il convient de réfléchir à l’adaptation des instruments financiers existants, voire à la création d’instruments nouveaux. Toutes les réflexions doivent pouvoir être menées pour permettre la mise en place d’infrastructures durables: association de financements publics et privés, mobilisation de ressources nouvelles non budgétaires etc.

7.3   Il faut souligner que les infrastructures de transport jouent un rôle très important pour le développement socio économique et la cohésion régionale. Mais les infrastructures de transport sont aussi la base pour un système de transport durable et respectueux de l’environnement. Le choix du type d’infrastructures est donc crucial. L’accessibilité des régions et leur intégration dans les ensembles nationaux et européens doivent donc être conçues au travers de la promotion d’infrastructures durables respectueuses de l’environnement.

7.4   Il conviendrait que les futures lignes directrices pour les RTE-T qui seront présentées en début de 2011 reflètent clairement le choix de l’Union européenne de privilégier les transports sobres en carbone.

7.5   Le CESE réaffirme son soutien sans faille au programme GALILEO et souligne la nécessité qu’il soit mené à bien sans retards supplémentaires.

8.   Internalisation des coûts environnementaux

8.1   Chacun s’accorde sur la nécessité d’internalisation des coûts environnementaux des transports. À défaut de cette internalisation, c’est la collectivité qui supporte les coûts. De surcroît, ceci peut encourager des comportements économiques quelque peu aberrants qui amènent à transporter sur d’immenses distances des produits que l’on pourrait se fournir à courte distance. De l'avis du CESE, le moyen le plus efficace d'internaliser une grande partie des conséquences environnementales devrait être une taxe sur le dioxyde de carbone. Elle serait pour les entreprises une forte incitation à chercher elles-mêmes des moyens de réduire leurs émissions de CO2 et l'impact négatif que ces émissions exercent sur l'environnement.

8.2   L’écovignette est un procédé qu’il est impossible d’écarter a priori, même si ses modalités de mise en œuvre et son impact doivent être étudiées avec soin. Ce principe devrait d’ailleurs être envisagé pour le transport aérien comme pour le transport maritime au sein des instances internationales compétentes (OACI et OMI). La relance de la discussion concernant la révision de la directive «Euro-vignette» est souhaitable mais en gardant à l’esprit que le principe de l’internalisation des coûts externes doit être d’application générale pour tous les modes de transport.

Bruxelles, le 17 mars 2010.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Avis CESE 1947/2009 sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 1999/62/CE relative à la taxation des poids lourds pour l'utilisation de certaines infrastructures» – pas encore publié au JO; JO C 317 du 23.12.2009, p. 80.

(2)  JO C 161, 13.7.2007, p. 89. JO C 27, 3.2.2009, p. 49. JO C 228, 22.9.2009, p. 78.


28.12.2010   

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Journal officiel de l'Union européenne

C 354/30


Avis du Comité économique et social européen sur «Les mutations industrielles et les perspectives du secteur des deux-roues motorisés en Europe» (avis d’initiative)

2010/C 354/05

Rapporteur: M. RANOCCHIARI

Corapporteur: M. PESCI

Le 16 juillet 2009, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l’article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d’élaborer un avis d’initiative sur:

«Les mutations industrielles et les perspectives du secteur des deux-roues motorisés en Europe».

La commission consultative des mutations industrielles (CCMI), chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a élaboré son avis le 4 février 2010.

Lors de sa 461e session plénière des 17 et 18 mars 2010 (séance du 18 mars 2010), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 140 voix pour et 2 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le secteur des deux-roues motorisés revêt une importance considérable dans l’Union européenne, tant pour l’économie que pour l’emploi. Les constructeurs témoignent de réalités très différentes: certains opèrent à l’échelle mondiale dans l’ensemble des segments ou dans des segments très spécialisés, alors que d’autres exercent leurs activités à l’échelon national, voire local, sous une forme parfois proche de l’artisanat. Il en va de même en ce qui concerne les secteurs dérivés, qui comptent un pourcentage élevé de PME (1).

1.2

Déclenchée par la crise au dernier trimestre 2008, la chute de la demande a entraîné une série de conséquences négatives pour l’ensemble du secteur, qui ont eu de graves retombées sur les plans structurel et de l’emploi (la baisse de 31 % de la demande a provoqué une diminution de 35 % du chiffre d’affaires et des commandes et a eu des répercussions désastreuses sur l’emploi). Les données provisoires concernant l’année 2009 confirment l’évolution négative du marché, qui accuse un déclin de 21 % par rapport à 2008 et de 25 % par rapport à 2007.

1.3

Le CESE craint que de nouvelles pertes d’emploi importantes ne se produisent dans le courant de 2010 si l’on ne développe pas sans délai des politiques destinées à soutenir le secteur.

1.4

Le 12 novembre 2009, le CESE a organisé une audition publique dans le cadre du 67e Salon international du cycle et de la moto de Milan, afin de recueillir d’autres témoignages de la part de constructeurs, d’équipementiers, de syndicats, d’utilisateurs, d’ONG et du monde universitaire. Cette audition est venue confirmer en substance les convictions du groupe de travail.

1.5

Dans le contexte ainsi tracé, le CESE:

a)

juge nécessaires des mesures adéquates visant à stimuler la demande de deux-roues motorisés dans les États membres et invite la Commission européenne, ainsi que les États membres, à encourager la mise en œuvre ou le renouvellement de ces mesures à moyen terme, en prenant plus particulièrement en compte les véhicules à faible empreinte écologique et performants sur le plan de la sécurité,

b)

souhaite que, dans le cadre de l’élaboration imminente de la proposition de règlement sur les deux-roues motorisés, la Commission suggère pour ce secteur des objectifs réalisables, progressifs, compatibles avec la conception, la fabrication et le marché, qui puissent garantir des solutions souples pour le secteur industriel et, partant, une moindre augmentation des coûts pour le consommateur, et qui tiennent compte de la conjoncture ainsi que de la grande diversité des produits,

c)

considère qu’une concurrence loyale exige une surveillance accrue concernant les autorisations et les marchés ainsi que la réciprocité des accords de libre-échange entre l’UE et le Sud-Est asiatique,

d)

invite la Commission à adopter, pour le secteur des deux-roues motorisés, une approche similaire à CARS21 (2) dans le but de favoriser les partenariats, la compétitivité et l’emploi,

e)

considère que le septième programme-cadre peut contribuer à la réalisation de ces objectifs et appelle de ses vœux la création d’une plateforme consacrée au secteur des deux-roues motorisés dans le but de soutenir les entreprises dont la production se situe en Europe et qui utilisent la filière européenne,

f)

invite le secteur industriel à poursuivre les restructurations, fusions et acquisitions et à mettre davantage l’accent sur le développement de coopérations, y compris avec les équipementiers, afin de maximaliser toutes les synergies possibles,

g)

juge nécessaire de développer le dialogue social pour favoriser l’emploi dans ce secteur, en créant des normes européennes en matière de formation continue et de spécialisation des travailleurs et, dans le même temps, d’encourager la réduction du travail précaire,

h)

invite la Commission à réserver une place importante aux deux-roues motorisés dans le cadre des mesures prévues par le plan d’action pour la mobilité urbaine, en raison de la contribution indéniable que ce secteur est susceptible d’apporter à la réalisation d’une mobilité plus durable.

2.   Le secteur des deux-roues motorisés dans l’UE

2.1

Le secteur des deux-roues motorisés revêt une importance considérable dans l’UE tant pour l’économie et que pour l’emploi. S’il présente quelques similitudes avec le secteur automobile (3), il est cependant caractérisé par un certain nombre de spécificités: une taille plus réduite, une structure davantage fragmentée et une production plus diversifiée.

2.2

Au cours des dernières décennies, ce secteur a fortement évolué, dans la mesure où les marques historiques européennes ont été soumises à une concurrence croissante de la part des marques japonaises. Les constructeurs japonais, qui comptent aujourd’hui parmi les principaux acteurs du secteur, ont développé leurs activités de production directement dans l’UE. Dans le même temps, en Europe, le secteur s’est réorganisé au moyen de restructurations, fusions et acquisitions et en créant des groupes industriels de taille moyenne qui coexistent avec des producteurs de niche et un nombre important de PME.

Si les constructeurs «traditionnels» européens, japonais et américains dominent toujours le marché européen, ils sont toutefois soumis, depuis les années 1990, à une concurrence croissante de la part des économies émergentes. En ce qui concerne le nombre de véhicules produits, le poids de l’UE est relatif (1,4 million), en particulier par rapport à celui de la Chine (plus de 20 millions), de l’Inde (plus de 8 millions) et de Taïwan (1,5 million); la production européenne se caractérise toutefois par sa supériorité sur le plan de la valeur ajoutée, de l’innovation, de la qualité et de la sécurité.

2.3

Dans les statistiques d’Eurostat, le secteur des deux-roues motorisés est classé sous le code NACE 35.41. Selon les donnés les plus récentes, relatives à 2006, le secteur des constructeurs de deux-roues motorisés compte, dans l’UE à 27 États membres, 870 entreprises, dont 80 % sont implantées dans six États membres (Italie, Royaume-Uni, Allemagne, France, Espagne et Autriche). Il ressort du chiffre d’affaires moyen de 8 millions d’euros que le secteur comporte un nombre important de PME. Celui-ci est en effet estimé à 650, soit quelque 75 % du nombre total des entreprises.

2.4

Pour 90 %, la production européenne est réalisée par une centaine de petits et moyens constructeur (4), qui déploient leurs activités dans différents pays de l’UE (les pays susmentionnés plus la République tchèque, les Pays-Bas, le Portugal, la Slovénie, la Suède), ainsi qu’en Norvège et en Suisse. Les 10 % restants de la production européenne sont répartis entre des petits ou très petits constructeurs.

2.5

Les constructeurs témoignent de réalités très différentes puisque certains opèrent à l’échelle mondiale dans l’ensemble des segments (motocyclettes à usages divers et de cylindrées différentes, scooters de diverses cylindrées, cyclomoteurs, tricycles et quadricycles) ou dans des segments très spécialisés, alors que d’autres exercent leurs activités à l’échelon national, voire local, sous une forme parfois proche de l’artisanat, compte tenu de la taille de leur entreprise et de leurs méthodes de production.

2.6

Selon la réglementation technique (homologation européenne), il existe différentes catégories de deux-roues motorisés présentant des caractéristiques différentes (cylindrée, utilisation). La directive européenne sur les permis de conduire prévoit pour sa part différentes conditions concernant la conduite des deux-roues motorisés (cyclomoteurs de catégorie AM; motocycles de catégorie A1; motocycles de catégorie A2; motocycles de catégorie A). Cette diversité favorise la fragmentation de la production et réduit les économies d’échelle.

2.7

La fragmentation du secteur des deux-roues motorisés est en partie historique mais trouve essentiellement son origine dans la nature même du marché. Si les segments les plus étroitement liés à la mobilité utilitaire (en particulier urbaine), comme celui des scooters, autorisent davantage de synergies en matière de production, surtout au niveau des motorisations, le segment des motocyclettes se prête moins à des synergies telles que l’utilisation de motorisations et de composants communs sur des modèles de marques différentes. Force est surtout de constater que les caractéristiques dynamiques varient sensiblement en fonction de la taille des véhicules. À cela s’ajoutent les différences liées aux usages spécifiques auxquels ils sont destinés et, enfin, aux attentes de l’utilisateur. Souvent, il existe une identification importante entre certaines marques et une configuration particulière du moteur (par exemple le moteur boxer de BMW, la distribution desmodromique de Ducati, le V-twin de Moto Guzzi, le moteur à trois cylindres de Triumph) ou de la structure du deux-roues, qui reflète la demande d’un marché européen et d’exportation composé, dans une large mesure, de passionnés.

2.8

Les véhicules sont produits en petites séries et en nombre limité, de sorte que la rentabilité du capital investi est moins importante que dans le secteur automobile. Cette caractéristique vaut également en partie pour les secteurs des équipements et de la distribution.

2.9

Soutenu par un marché européen en expansion depuis 2002 (+22 % pour la période de 2002 à 2007), le chiffre d’affaires lié à la production européenne de deux-roues à moteur a atteint 7 milliards d’euros en 2006, pour un chiffre d’affaires total de 34 milliards dans le secteur des deux-roues à moteur dans l’Union européenne. Il est intéressant de souligner qu’entre 2004 et 2006, ce secteur a gagné 12 % dans l’Union européenne, une progression supérieure à celle enregistrée par le secteur manufacturier en général et le secteur automobile (tous les deux + 8 %), ce qui a eu un effet positif sur l’emploi.

3.   Le rôle des secteurs des équipements, de la distribution et du service après-vente des deux-roues à moteur

3.1

Les secteurs des équipements et de la distribution sont eux aussi fortement fragmentés.

3.2

Les équipements proviennent en partie de fournisseurs du secteur automobile ayant une activité marginale dans le secteur des deux-roues motorisés (systèmes d’alimentation), mais surtout de fournisseurs spécifiques (roues, pots d’échappement, embrayages, etc.), compte tenu de la spécialisation requise. Le nombre de fournisseurs du secteur est estimé à environ 500. S’il s’agit, historiquement, de fournisseurs européens (concentrés en Italie, en Espagne, en France, au Royaume-Uni, en Allemagne et aux Pays-Bas), la concurrence des fournisseurs asiatiques s’est toutefois amplifiée ces dernières années. Pour y faire face, certains fournisseurs européens ont à leur tour délocalisé une partie de leurs activités en Asie. Toutefois, les équipementiers européens dépendent exclusivement des commandes provenant des producteurs européens.

3.3

Le réseau de distribution et d’assistance répond à des exigences de proximité spécifiques au secteur des deux-roues motorisés (en particulier concernant les cyclomoteurs et les scooters): on compte dans l’UE environ 37 000 points de vente et après-vente, souvent gérés par des entreprises familiales. L’Italie, la France, le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Espagne, les Pays-Bas, la Grèce et la Suède concentrent 91 % du chiffre d’affaires du secteur de la distribution et de l’assistance, lequel a progressé de 5 % entre 2004 et 2006.

4.   Emploi et aspects sociaux

4.1

Au cours de la période de 2002 à 2007, l’emploi dans le secteur des deux-roues motorisés a connu une progression constante dans l’UE, atteignant 150 000 travailleurs en 2007. Il est intéressant de constater qu’entre 2004 et 2006, l’emploi dans ce secteur au sein de l’UE a augmenté de 4 % alors qu’il a enregistré une baisse de 3 % dans le secteur manufacturier en général et de 5 % dans le secteur automobile. Cette progression témoigne du dynamisme et du caractère innovant du secteur des deux-roues motorisés et est favorisée par une demande croissante de véhicules, s’inscrivant dans le cadre tant de la mobilité urbaine que des loisirs.

4.2

Sur ce nombre total d’emplois, 25 000 sont directement liés à la production de deux-roues motorisés et sont principalement pourvus en Italie, en Espagne, en France, au Royaume-Uni, en Allemagne, en Autriche et aux Pays-Bas. En raison du caractère saisonnier du marché des deux-roues motorisés (printemps et été essentiellement), on observe des pics de production à certaines périodes de l’année, durant lesquels les constructeurs font notamment appel à des travailleurs saisonniers. Il existe à cet égard une demande de souplesse accrue pour faire face à la demande périodique du marché.

4.3

Par ailleurs, 20 000 emplois concernent les équipements et sont essentiellement localisés en Italie, en Espagne, en France, au Royaume-Uni, en Allemagne, aux Pays-Bas et en Hongrie.

4.4

Enfin, 105 000 emplois concernent le secteur de la vente et de l’après-vente. Compte tenu de leur nature, ils sont répartis dans l’ensemble de l’UE, même si 92 % de ces travailleurs sont employés en Italie, en Allemagne, en France, au Royaume-Uni, en Espagne, aux Pays-Bas, en Grèce, en Belgique et en Suède.

5.   Le contexte économique actuel et les tendances internationales

5.1

Il ressort des chiffres mentionnés ci-dessus que le secteur des deux-roues motorisés s’est montré très dynamique au cours des dernières années. Le marché européen a en effet enregistré une croissance qui, en 2007, correspondait à plus de 2,7 millions de véhicules (le parc roulant de l’UE est estimé à quelque 34 millions de véhicules). La crise de ces deux dernières années a toutefois provoqué en 2008 une baisse du marché européen de 7,4 % par rapport à 2007. En particulier, une diminution importante (34 %) a été enregistrée au dernier trimestre 2008 par rapport à la période correspondante de 2007. Cette tendance à la baisse s’est accentuée au premier trimestre de 2009, au cours duquel les ventes de deux-roues motorisés ont chuté de 37 % par rapport à la même période de 2008. Les chiffres de 2009, encore provisoires, confirment cette évolution négative du marché, avec une baisse globale de 21 % par rapport à 2008 et de 25 % par rapport à 2007.

5.2

Les effets de la crise affectent l’ensemble du secteur. Dans le cas des constructeurs, en plus de peser lourdement sur les bénéfices, la chute des ventes les a amenés à réduire leur production afin de pouvoir gérer les stocks excédentaires. Cette diminution a, à son tour, été à l’origine d’une réduction du nombre d’heures travaillées, de l’arrêt de la production et d’un recours moins important au travail saisonnier ainsi que d’une révision des planifications des entreprises à court et long terme. Dans certains cas, des réductions permanentes d’effectifs allant jusqu’à 25 % ont été nécessaires. Les entreprises de certains petits et moyens constructeurs ont été placées sous régime d’administration spéciale et sont en vente, d’autres ont déjà cessé leurs activités. Ces évolutions annoncent d’autres restructurations, même s’il est difficile d’en prévoir les conséquences sur le tissu économique et social en ce qui concerne d’éventuelles délocalisations vers des pays tiers.

5.3

Vu la diminution de la demande de la part des constructeurs, les équipementiers doivent réduire leur production, avec les retombées que cela implique pour l’emploi. Certains ont dû cesser leurs activités et l’on estime actuellement que quelque 10 % des fournisseurs du secteur risquent la faillite. Cette situation engendre des frais additionnels notamment pour les constructeurs, qui doivent faire face à des investissements imprévus pour soutenir les équipementiers ou trouver d’autres fournisseurs, voire développer de nouveaux moules pour des pièces en aluminium ou en plastique qui ne sont plus disponibles dans les stocks. Actuellement, les commandes et le chiffres d’affaires diminuent d’environ 40 %. Il n’est pas rare que pour rester compétitifs, les constructeurs se tournent massivement vers des fournisseurs du Sud-Est asiatique.

5.4

Le secteur de la distribution et du service après-vente est gravement touché par la crise et la diminution des activités, notamment en raison de la petite taille des entreprises (PME et entreprises familiales). En Espagne par exemple, le nombre de points de vente a baissé de 25 % en 2008, ce qui a provoqué le licenciement de plus de 6 000 personnes. Si rien ne change, on prévoit qu’entre 2009 et 2010, environ 25 % des entreprises et des concessionnaires et 60 % des agents cesseront leurs activités. Les effets de la crise sur le réseau de la distribution génèrent aussi des coûts supplémentaires pour les constructeurs, qui doivent soutenir le réseau afin de conserver des débouchés pour leurs produits et être en mesure de tirer profit de la reprise économique lorsqu’elle sera amorcée.

5.5

Le CESE craint une nouvelle perte substantielle d’emplois en 2010 si l’on n’élabore pas au plus vite des politiques d’appui en faveur de ce secteur. En outre, pour contribuer au maintien de l’emploi dans celui-ci, il y a lieu de développer le dialogue social en encourageant la formation continue et la spécialisation des travailleurs, y compris au niveau universitaire, et de favoriser la réduction du travail précaire.

5.6

Les mesures prises jusqu’ici pour soutenir à terme la demande de deux-roues motorisés sont isolées et insuffisantes. Contrairement à ce qui s’est produit dans le secteur automobile, l’Italie est le seul pays européen à avoir introduit rapidement une prime à la casse, qui a eu des effets positifs sur le marché italien et, partant, européen, et a favorisé le retrait de la circulation des véhicules les plus polluants. En Italie, on est passé d’une baisse initiale du marché de l’ordre de 35 % au cours des deux premiers mois de 2009 à une situation positive dans le secteur des scooters de petite cylindrée, qui ont bénéficié de la prime de 500 euros accordée pour la mise à la casse des véhicules obsolètes. L’état du secteur des motocyclettes et des cyclomoteurs reste préoccupant, avec une chute globale des ventes de plus de 20 %. Bien qu’elle ait approuvé en juillet la prime à la casse pour les deux-roues motorisés qu’elle annonçait depuis des mois, l’Espagne n’a pas encore mis cette mesure en application, ce qui favorise une attitude attentiste de la part des consommateurs et, partant, freine les achats (de janvier à août 2009, les ventes ont chuté de 52 % pour les cyclomoteurs et de 43 % pour les motocyclettes par rapport à la même période en 2008). Cet exemple met clairement en évidence l’importance d’un cadre réglementaire européen qui favorise la stabilité sur les marchés nationaux en contribuant à préserver la confiance des consommateurs.

5.7

Les mesures prises à l’appui de la demande sont certainement intéressantes pour les consommateurs, mais ne résolvent pas nécessairement le problème des équipementiers et du secteur européen des deux-roues motorisés. En Italie par exemple, si la prime fixe de 500 euros a été une véritable aubaine pour les petits scooters de 125 et 150 cc importés de Taïwan vendus à un prix variant entre 1 500 et 2 000 euros et, dans une moindre mesure, pour la production européenne vendue à un prix plus élevé, elle n’a toutefois pas permis de soutenir le demande de véhicules de catégorie intermédiaire dont le prix oscille entre 6 000 et 8 000 euros. Les équipementiers européens n’ont tiré aucun bénéfice de cette mesure, étant donné qu’ils ne fournissent pas les constructeurs asiatiques. Afin d’assurer un bénéfice à l’ensemble du secteur, il est nécessaire de prendre des mesures d’appui à la demande qui garantissent une prime dont le montant est proportionnel au prix des véhicules bénéficiaires, en particulier ceux qui proposent des solutions avancées en matière d’empreinte écologique et de systèmes de sécurité de pointe.

5.8

Il est urgent de faciliter l’accès aux financements pour les entreprises européennes opérant dans ce secteur, afin qu’elles puissent faire face aux coûts additionnels générés par la crise et continuer à investir dans la recherche, le développement et l’innovation (constructeurs et équipementiers), ce qui leur permettra de rester compétitives en misant sur la qualité et l’innovation et de produire des véhicules toujours plus respectueux de l’environnement et sûrs.

6.   Perspectives futures pour le secteur: défis et opportunités

6.1

Si les résultats négatifs du premier semestre devaient se confirmer pour toute l’année 2009, l’ensemble du secteur pâtirait, en 2010, d’une diminution de sa capacité de crédit auprès des banques. Même en cas de reprise imminente, les capacités en matière d’investissement ainsi que de recherche et de développement seront réduites, ce qui aura des effets négatifs à moyen terme et, partant, fragilisera davantage les entreprises, avec les retombées ultérieures éventuelles sur l’emploi que cela implique.

6.2

Au cours des dix dernières années, depuis l’introduction en 1999 de la norme Euro 1 jusqu’) celles appliquées actuellement, le secteur a réduit de manière significative les émissions polluantes. Cette réduction est de l’ordre de 90 % pour le monoxyde de carbone (CO) et les hydrocarbures (HC), et de plus de 50 % pour l’oxyde d’azote (NOx). En ce qui concerne la réduction de la pollution acoustique, les résultats obtenus sont encourageants: le secteur dans son ensemble (y compris les associations de consommateurs) tente d’arriver à de nouvelles améliorations, qui peuvent essentiellement être réalisées sur les routes grâce à l’utilisation de pots d’échappement homologués et à une conduite plus compatible avec la protection de l’environnement. En ce qui concerne la sécurité, le secteur s’est montré innovant et une série de systèmes de freinage avancés équipent progressivement les différents types de deux-roues motorisés, y compris les véhicules de conception nouvelle comme les tricycles et les quadricycles.

6.3

La Commission élabore actuellement une proposition de règlement sur les deux-roues motorisés qui est attendue pour début 2010. Bien qu’il soit nécessaire de poursuivre les progrès en matière d’environnement et de sécurité, dans le contexte économique actuel il est toutefois fondamental d’éviter tout changement perturbateur et de prendre en compte les capacités réelles du secteur et la dimension des différents acteurs. En ce qui concerne les nouvelles normes Euro, il convient de proposer des objectifs réalisables et de prévoir une mise en œuvre progressive qui respecte le calendrier imposé par la conception, la production industrielle et le marché. Il est souhaitable que ce règlement privilégie une approche qui permette au secteur de tirer profit de sa propre capacité d’innovation en lui garantissant une souplesse qui tienne compte de la conjoncture et du large éventail des produits (concernant les caractéristiques techniques et le marché), en particulier pour la diffusion des systèmes de freinage avancés. Le secteur industriel a présenté à la Commission des propositions allant dans ce sens sur le plan du respect de l’environnement et de la sécurité routière.

6.4

Les constructeurs «traditionnels» sont exposés, et le seront toujours davantage, en particulier dans le contexte économique actuel, à une concurrence de type «faible coût/faible qualité», qui vient plus particulièrement de la part du Sud-Est asiatique et concerne surtout les deux-roues motorisés de petite et moyenne cylindrée, sur lesquels les marges sont réduites. Les enquêtes menées révèlent qu’il n’est pas rare que ces produits importés ne répondent pas aux critères d’homologation de l’UE et présentent un risque pour la sécurité du consommateur et pour l’environnement. Des essais réalisés sur un échantillon de deux-roues motorisés de production chinoise importés dans l’UE ont révélé une non-conformité qui se traduit par des distances de freinage pouvant dépasser de 35 % les critères d’homologation de l’UE et par des émissions polluantes jusqu’à 20 fois supérieures. Il existe par ailleurs des problèmes liés à la contrefaçon de véhicules ou de parties de véhicules produits en Europe par des constructeurs des économies émergentes ainsi qu’à la falsification des certificats de conformité par des sociétés commerciales qui importent des véhicules non conformes dans l’UE. Sur un volet du marché européen très sensible aux prix il faut, pour garantir une concurrence loyale, accroître la surveillance concernant l’homologation et les marchés, par des contrôles rigoureux de «la conformité de la production» réalisés par les autorités compétentes et/ou les services de contrôle technique sur les véhicules mis sur le marché afin de vérifier leur conformité et le respect de la réglementation sur la propriété intellectuelle.

6.5

Les constructeurs «traditionnels» sont en revanche récompensés par les consommateurs pour le design, les qualités de leurs produits, leur capacité d’innovation et le degré de sécurité de leurs véhicules. Ceci vaut pour les véhicules haut de gamme de petite et moyenne cylindrée et en particulier pour les véhicules de grosse cylindrée, à haute valeur ajoutée, qui sortent du lot compte tenu des solutions techniques adoptées et pour lesquels la marque joue un rôle important. Ces produits souffrent davantage de la situation économique actuelle. Le succès des véhicules présentant une technologie de pointe, par exemple les véhicules hybrides et électriques qui commencent à faire leur apparition sur le marché, dépendra dans une large mesure du soutien accordé par le secteur public et, partant, de la capacité à dépasser la crise actuelle.

6.6

Il convient d’accorder une attention particulière aux accords de libre-échange afin que la libéralisation des droits de douane entre l’UE et les pays du Sud-Est asiatique soit positive pour les deux parties, et d’éliminer les barrières non tarifaires (par exemple l’interdiction de circulation frappant, en Chine, les motos d’une cylindrée supérieure à 250 cc) qui constituent un réel problème pour les exportateurs européens.

6.7

S’ils veulent relever avec succès les défis qui se posent actuellement à eux, les constructeurs doivent, comme ils l’ont déjà fait dans le passé, poursuivre les restructurations, les fusions et les acquisitions et continuer à développer des coopérations susceptibles de maximaliser toutes les synergies possibles.

6.8

La survie des équipementiers européens est essentielle pour conserver la spécificité des productions typiquement européennes reconnues comme exclusives par les consommateurs. En d’autres termes, il y a lieu d’éviter que ne se reproduise ce qui est arrivé par exemple dans le secteur des cycles où l’on a vu disparaître des fournisseurs d’équipements importants, comme les châssis, de sorte que l’Europe dépend aujourd’hui de la Chine pour l’assemblage des vélos.

6.9

Les équipementiers européens ne sont pas en mesure de faire face à la concurrence des prix et doivent obligatoirement miser sur l’innovation, le développement du design en coopération avec les constructeurs pour réaliser des économies d’échelle lorsque c’est possible, ainsi que sur un véritable partenariat qui garantisse le flux des commandes entre constructeurs et fournisseurs de véhicules haut de gamme.

6.10

Une approche similaire à CARS21 mais spécifique au secteur des deux-roues motorisés dans son ensemble est souhaitable si l’on veut relever au mieux ces défis et favoriser la compétitivité du secteur ainsi que l’emploi.

6.11

Les fonds consacrés à la recherche par le septième programme-cadre peuvent contribuer à la réalisation de ces objectifs en privilégiant les entreprises qui produisent en Europe et qui ont recours à la filière européenne. À cette fin, comme c’est le cas dans le secteur automobile, une plateforme de recherche consacrée au secteur des deux-roues motorisés apporterait une contribution essentielle, en particulier pour les PME, par le biais de la participation à des consortiums chargés d’établir des priorités en matière de recherche.

6.12

La Commission a récemment présenté un plan d’action pour la mobilité urbaine. L’un de ses nombreux objectifs consiste à rendre le trafic plus fluide, ce qui est une caractéristique inhérente aux deux-roues motorisés. Si la crise a rendu ce secteur vulnérable, il tirera toutefois profit, à long terme, des besoins croissants de véhicules de substitution pour une mobilité plus durable, en particulier en ville, à condition que l’on puisse surmonter les difficultés économiques actuelles à moyen terme en évitant des dégâts irrémédiables.

Bruxelles, le 18 mars 2010.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Une liste des constructeurs et d’autres informations sur le secteur des deux-roues motorisés sont consultables sur le site internet de la CCMI (http://www.eesc.europa.eu/sections/ccmi/opinions_reports/total_list/index_fr.asp#PTW).

(2)  Un cadre réglementaire concurrentiel pour le secteur automobile européen au XXIe siècle (groupe de haut niveau «CARS 21», 2007).

(3)  Voir le rapport d’information de la CCMI sur le thème Le secteur automobile en Europe: situation actuelle et perspectives, adopté par la CCMI le 13 novembre 2007.

(4)  La liste en annexe pourra être consultée sur le site internet de la CCMI lorsque l’avis aura été adopté.


28.12.2010   

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C 354/35


Avis du Comité économique et social européen sur «La réforme de la politique agricole commune en 2013» (avis d'initiative)

2010/C 354/06

Rapporteur: M. Lutz RIBBE

Le 16 juillet 2009, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l'article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d'élaborer un avis d'initiative sur le thème de:

«La réforme de la politique agricole commune en 2013».

La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 25 février 2010.

Lors de sa 461e session plénière des 17 et 18 mars 2010 (séance du 18 mars 2010), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 163 voix pour, 5 voix contre et 5 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le CESE estime préoccupant que l'écart entre l'engagement en faveur du modèle agricole européen et de la multifonctionnalité de l'agriculture européenne, d'une part, et la réalité quotidienne des exploitations agricoles, d'autre part, continue à se creuser. Le modèle agricole européen, qui est plus que jamais menacé par les évolutions actuelles, doit être soutenu et encouragé de manière d'autant plus déterminée et ciblée par une politique agricole commune (PAC) forte.

1.2   En raison des marchés – et des prix qui sont souvent bas ou qui fluctuent fortement –, les agriculteurs sont soumis à une forte pression qui leur demande de s'adapter et d'aller vers une spécialisation et une rationalisation des exploitations. Ces processus peuvent conduire à une concentration régionale problématique et à l'abandon de l'agriculture dans les régions défavorisées. Compte tenu de cette pression en faveur de l'adaptation, le CESE estime qu'il est urgent de promouvoir à l'avenir, à travers la politique agricole commune, la préservation et le développement d'une agriculture européenne multifonctionnelle, présente sur l'ensemble du territoire et poursuivant des objectifs de développement durable.

1.3   Pour le CESE, la réponse est claire: il ne suffit pas de viser simplement une augmentation de la compétitivité en vue de servir le marché mondial. La PAC d'après 2013 ne doit pas conduire à une production uniquement axée sur les performances économiques, spécialisée et concentrée au niveau régional, et visant à casser les prix, mais bien à un modèle agricole européen, fondé sur des principes de souveraineté alimentaire, de durabilité et répondant aux nécessités réelles des agriculteurs et des consommateurs.

1.4   Ceci suppose au préalable un autre cadre de politique agricole, car on ne pourra obtenir l'agriculture multifonctionnelle voulue aux conditions et aux prix du marché mondial.

1.5   Le CESE appelle la Commission, le Conseil et le Parlement européen à décrire tout d'abord avec la plus grande clarté l'objectif de la PAC, puis à présenter l'ensemble des instruments nécessaires et à faire connaître les besoins financiers, avant de régler la question du financement. Le CESE estime qu'il serait erroné de fixer en premier lieu une enveloppe financière pour un domaine d'action, puis de la répartir entre les différentes mesures et entre les États membres.

1.6   Le traité fait de la «stabilisation des marchés» un des objectifs de la PAC. Il importe que les marchés soient stables. Le CESE estime dès lors qu'il importera à l'avenir aussi d'utiliser les instruments de marché afin de stabiliser les prix et d'éviter que ces derniers ne connaissent de trop fortes fluctuations. Pourtant, les mesures de régulation des marchés et/ou de garantie des prix à la production ont été réduites à un minimum et les marchés agricoles de l'UE comptent parmi les plus ouverts par rapport aux pays tiers. Cette situation est à l'origine de la majorité des problèmes, qui ne peuvent être résolus sur le long terme qu'au seul moyen de paiements de transfert.

1.7   La politique agricole ne consiste donc pas seulement à répartir des aides financières. Les agriculteurs attendent à juste titre de percevoir un revenu juste de la vente de leurs produits sur le marché et de la rémunération des prestations en faveur de la société qu'ils fournissent dans le cadre du modèle agricole européen.

1.8   À cette fin, il importe en outre de promouvoir et de soutenir la production et la commercialisation de produits de qualité ayant une dimension régionale et reflétant la diversité des zones rurales dans l'UE, tout en privilégiant les filières de distribution courtes et en favorisant l'accès direct des agriculteurs ou des groupements de producteurs au consommateur, afin d'accroître la compétitivité des structures d'exploitation et de faire face à la toute-puissance de la grande distribution dans les négociations. Il convient de sauvegarder la diversité et la différenciation des productions européennes, notamment par une information appropriée des consommateurs.

1.9   Une des tâches essentielles de la réforme sera de transformer l'actuel système européen de soutien à l'agriculture, fort disparate, en un système unifié, reposant sur des critères objectifs et accepté par la société.

1.10   Les paiements aux agriculteurs ne peuvent plus se justifier par des décisions ou des droits hérités du passé, ils devraient rétribuer leurs prestations en faveur de la société – qu'il convient de définir précisément –, qui sont nécessaires au maintien du modèle agricole européen et dont les prix du marché ne tiennent pas compte. Il convient ainsi de lier ces paiements à la réalisation d'objectifs.

1.11   On ne peut pas justifier un paiement unique à la surface dans toute l'Europe, en raison, entre autres, des grandes différences structurelles et climatiques, des fortes divergences des revenus moyens nationaux et régionaux, de la forte divergence des coûts des intrants et des coûts de production et de la disparité des prestations que fournissent les différentes exploitations et types d'exploitation pour maintenir le modèle agricole européen. Il convient au contraire de trouver des solutions adaptées aux conditions spécifiques des régions ou des types d'exploitations.

1.12   Il convient de poursuivre le renforcement des programmes de développement rural, mais également de les optimiser. Le Comité s'oppose clairement au transfert de ces tâches vers la politique structurelle et/ou régionale générale. Le Comité est également d'avis que les mesures relevant de l'actuel FEADER devraient avoir un rapport évident avec l'agriculture; la construction de routes et le câblage pour réseaux à large bande n'en font donc pas partie.

2.   Définition des tâches

2.1   La Commission européenne présentera en 2010 une communication relative à la conception future de ses priorités politiques et du cadre budgétaire après 2014. Cette communication exposera aussi les orientations des politiques communautaires, comme la PAC et les Fonds structurels.

2.2   L'objet de cet avis d'initiative est de formuler des idées et des réflexions de fond de la société civile organisée au sujet de l'orientation et de la conception futures de la PAC. Il s'agit ainsi de transmettre des arguments et des recommandations à la Commission pour l'élaboration de la communication.

3.   Situation de départ: le «modèle agricole européen» – référence en matière de politique agricole – est menacé

3.1   Les attentes de la société vis-à-vis de l'agriculture ont fortement évolué. Depuis longtemps, il ne s'agit plus seulement de s'efforcer d'atteindre les objectifs fixés par l'article 33 du traité CE, qui ont été repris tels quels dans le nouveau traité de Lisbonne, par exemple en augmentant la productivité pour produire des biens alimentaires en quantité suffisante et à des prix raisonnables.

3.2   De nouvelles exigences ont vu le jour, parmi lesquelles il convient de citer la protection de la biodiversité, le maintien du paysage de cultures sur l'ensemble du territoire, le développement de l'espace rural assorti d'efforts visant à maintenir les emplois existants et à en créer de nouveaux, la définition de produits régionaux en tant que biens culturels, etc. L'agriculture doit en outre faire face aux conséquences du changement climatique et contribuer par ailleurs au stockage du dioxyde de carbone.

3.3   La crise alimentaire mondiale, mais aussi la situation problématique sur les marchés de l'énergie mettent de plus en plus clairement en évidence d'autres fonctions particulièrement importantes d'une agriculture locale, c'est-à-dire ancrée au niveau régional, comme la garantie de la sécurité ou de la souveraineté alimentaire ainsi que de la fourniture d'énergie.

3.4   La sécurité alimentaire doit être un droit fondamental pour tous les hommes. Même s'il n'apparaît pas nécessaire d'atteindre un niveau de 100 % d'autosuffisance alimentaire, l'objectif devrait être de parvenir au niveau le plus élevé possible (et disposer ainsi de la souveraineté alimentaire).

3.5   L'agriculture comporte souvent une dimension culturelle et des éléments d'identité régionale, les produits alimentaires pouvant symboliser l'histoire des pays et des régions ainsi que leur spécificité. S'il est théoriquement possible d'importer de tels produits alimentaires, les paysages de cultures, la biodiversité et cette dimension culturelle ne peuvent cependant être préservés que par une exploitation active et paysanne des terres; ce ne sont pas des biens que l'on peut acquérir à l'importation. La valeur des produits alimentaires se mesure dès lors tout à fait différemment de celle, par exemple, des produits industriels, pour lesquels le site de production est fixé principalement en fonction des coûts.

3.6   Le débat sur l'économie durable s'est ainsi étendu à l'agriculture. Quand celle-ci s'articule de manière cohérente autour d'objectifs de développement durable, on parle, au niveau politique, de «modèle agricole européen».

3.7   C'est dans la préservation et le développement du «modèle agricole européen», c'est-à-dire d'une agriculture paysanne (1) multifonctionnelle au sein de l'Union, dont le revenu serait comparable au revenu moyen national ou régional, que le CESE voit la clé du maintien d'une production de denrées alimentaires sur une vaste partie du territoire, satisfaisant aux critères de quantité, de qualité et de différenciation régionale, qui respecte la nature, protège et entretienne l'espace européen, sauvegarde la diversité et la différenciation des produits et favorise l'entretien de paysages de cultures et d'espaces ruraux européens divers et variés.

3.8   Le Comité souligne qu'il existe déjà de nos jours, en Europe également, des différences considérables entre une agriculture axée sur la multifonctionnalité et une agriculture qui doit/devrait s'orienter avant tout sur des marchés globalisés et libéralisés.

3.9   Il constate avec beaucoup d'inquiétude que le fossé entre les grandes déclarations sur le modèle agricole européen et/ou la multifonctionnalité, et la réalité quotidienne des exploitations agricoles, continue à se creuser.

3.10   Cela tient entre autres au fait que les agriculteurs, qui ne se voient pas conférer un simple rôle productif mais un «rôle multifonctionnel» dans l'espace rural, doivent accomplir des tâches qui commencent par leur coûter de l'argent sans rien leur rapporter, parce que les prix des produits agricoles, orientés en fonction du marché, ne tiennent pas compte de leurs prestations dans le domaine de la multifonctionnalité.

3.11   De nos jours, les exploitations sont dès lors obligées de participer à toutes les évolutions possibles et imaginables de la productivité pour assurer leur survie économique. De manière insidieuse, l'Union européenne s'éloigne ainsi progressivement du modèle agricole européen et l'on observe une tendance à l'industrialisation de l'agriculture. D'un côté, l'on voit apparaître des formes d'exploitation qui vont dans le sens d'une «américanisation de l'agriculture européenne» alors que de l'autre, de nombreuses exploitations pouvant contribuer de manière importante au maintien d'une agriculture multifonctionnelle doivent mettre la clé sous la porte.

3.12   Ces processus se sont mis en place dans les différentes branches d'exploitation et à des degrés très divers selon les régions. Une dynamique intense s'est mise en place ces dernières années et de véritables ruptures structurelles se produisent parfois: ainsi, pour la seule année 2008, 20 % de l'ensemble des exploitations porcines ont dû arrêter leur activité en Basse-Saxe, alors que le nombre de porcs engraissés est resté exactement le même.

3.13   Il est difficile de dire où ce processus s'arrêtera. Depuis longtemps déjà, on ne peut plus exclure la possibilité que l'Europe voie disparaître des secteurs de production entiers, à l'instar de ce qui est survenu dans l'industrie. Un premier exemple pourrait être le secteur avicole, qui est quasiment le seul à être déjà aussi largement «industrialisé». Une des plus grandes entreprises d'Europe, le groupe avicole Doux, a délocalisé plusieurs sites de la France vers le Brésil, où les coûts de production sont inférieurs.

3.14   En d'autres termes, même des évolutions continues de la productivité ne peuvent finalement garantir la survie d'une agriculture européenne sur des marchés mondiaux non réglementés. Elles n'ont jamais été le garant d'une agriculture pratiquée à grande échelle en Europe.

3.15   Le Comité souligne que des productions fortement concentrées accroissent la vulnérabilité de l'agriculture européenne face aux crises.

3.16   Le modèle agricole européen se caractérise par le fait que l'on accepte volontairement de renoncer à augmenter la productivité, ce qui constitue naturellement un handicap concurrentiel. C'est pourtant exactement ce qui est visé du point de vue politique et économique. S'agissant de l'utilisation des OGM, des hormones et des stimulateurs de croissance, de la lutte contre la salmonellose ou de la préservation des paysages, les citoyens européens ont en effet des conceptions différentes de celles qui peuvent avoir cours ailleurs qu'en Europe. Une chose est claire: ces attentes en matière de production, plus élevées que dans certains autres pays, engendrent des coûts que l'on ne peut pas faire supporter aux seuls agriculteurs!

3.16.1   À cet égard, il est de la plus haute importance de renforcer les mécanismes de contrôle aux frontières par le biais de protocoles de garantie sanitaire qui permettent de vérifier les conditions de traçabilité et de sécurité, ainsi que la non-utilisation de produits prohibés dans l'UE, en appliquant les mêmes exigences aux produits communautaires qu'aux produits importés.

3.17   Les responsables politiques européens se voient ainsi confrontés à la tâche de maintenir une agriculture qui ne peut suivre l'évolution de la productivité mais qui doit néanmoins garantir un revenu suffisant aux exploitants.

3.18   Le modèle agricole européen ne peut être obtenu aux conditions et aux prix du marché mondial. L'on ne peut pas prétendre à une agriculture

qui soit en mesure de produire dans les conditions (souvent faussées) du marché mondial, dans toutes les régions européennes;

qui réponde en même temps à toutes les exigences en matière de production (qualité, sécurité, préservation des ressources naturelles, respect du bien-être des animaux, etc.), tout en gardant la maîtrise des coûts européens;

et qui assure en outre un marché du travail moderne proposant des salaires attrayants, se caractérisant par un niveau d'emploi et de sécurité élevé ainsi qu'un haut niveau de formation et de qualifications professionnelles.

3.19   Le modèle agricole européen étant ainsi plus que jamais menacé par les évolutions actuelles, il doit être soutenu et encouragé par une politique agricole commune forte.

4.   Déterminer l'orientation de la politique agricole à partir de 2014: où la PAC doit-elle mener?

4.1   Bien que, dans son histoire, la politique agricole commune ait partiellement fait l'objet à plusieurs reprises de modifications et réformes fondamentales, un nouveau débat visant à la réformer – après 2000, 2003, 2008 – se tient derechef. Cela laisse entendre que jusqu'à présent, les questions sociétales en lien avec la PAC n'ont pas toutes obtenu une réponse satisfaisante. C'est pourquoi la politique agricole commune fait à intervalles réguliers l'objet de critiques acerbes, lorsqu'elle n'est pas, dans une certaine mesure, remise en question. De l'avis du CESE, si l'on prend au sérieux le modèle agricole européen, une orientation radicale de l'agriculture vers le marché s'exclut d'elle-même.

4.2.   Les parties concernées doivent non seulement se positionner dans ce débat de société, mais également passer à l'offensive. C'est ainsi qu'il sera possible d'expliquer clairement à la société les raisons pour lesquelles l'agriculture joue véritablement un rôle particulier. L'agriculture et l'élevage, pratiqués de manière durable au sens du modèle agricole européen, constituent la base de l'alimentation de notre société et sont un secteur stratégique pour garantir une gestion et un aménagement du territoire adéquats, la préservation des paysages, le respect de l'environnement et la lutte contre le changement climatique.

4.3.   Le CESE considère qu'il est absolument indispensable de réunir tout d'abord un consensus social sur ce que doit être l'agriculture européenne de l'avenir, et donc le modèle politique européen. Pour résumer: la PAC souhaite-t-elle défendre et développer le «modèle agricole européen» ou bien veut-elle essentiellement rendre un petit nombre d'exploitations, toujours plus spécialisées, concentrées géographiquement et optimisées, aptes à participer à une course aux prix les plus bas de plus en plus acharnée au niveau mondial?

4.4   Pour le CESE, la réponse est claire: il ne suffit pas de viser simplement une augmentation de la compétitivité en vue de servir le marché mondial. La PAC d'après 2013 ne doit pas conduire à une production uniquement axée sur les performances économiques, spécialisée et concentrée au niveau régional, et visant à casser les prix, mais bien à un modèle agricole européen, fondé sur des principes de souveraineté alimentaire, de durabilité et répondant aux nécessités réelles des agriculteurs et des consommateurs.

4.5   Le modèle agricole européen ne peut survivre que si la compétitivité de l'agriculture multifonctionnelle est renforcée par rapport à une production agricole orientée vers les performances économiques. C'est ce qui doit devenir la mission essentielle de la PAC, et les instruments agropolitiques doivent être axés sur cet aspect, ce qui entraînera des changements considérables dans la structure des aides financières. Poursuivre la suppression des instruments de gestion serait aller à l'encontre de cette exigence.

4.6.   Le CESE appelle la Commission, le Conseil et le Parlement européen à décrire tout d'abord avec la plus grande clarté l'objectif de la PAC, puis à présenter l'ensemble des instruments nécessaires et à faire connaître les besoins financiers, avant de régler la question du financement. Le CESE estime qu'il serait erroné de fixer en premier lieu une enveloppe financière pour un domaine d'action, puis de la répartir entre les différentes mesures et entre les États membres.

4.7   Le CESE souligne la nécessité de tenir compte, dans les réflexions sur l'orientation de la PAC après 2013, du fait qu'un sixième de tous les emplois en Europe est directement ou indirectement lié à la production agricole. La PAC est dès lors importante aussi pour garantir l'emploi dans l'UE, en particulier dans les zones rurales. La disparition de la production agricole proprement dite entraînerait une suppression des emplois dans les secteurs situés en amont et en aval – jusque dans l'industrie alimentaire! En outre, l'agriculture gère près de 80 % du territoire de l'Union européenne et joue un rôle essentiel dans l'utilisation durable des ressources, la conservation des habitats naturels, la biodiversité, etc. Elle est également appelée à jouer un rôle croissant dans la lutte contre le changement climatique.

5.   Un paquet diversifié de mesures de politique agricole

5.1   Le marché est fondé sur des prix, et très rarement sur des valeurs. Les prix obtenus par les agriculteurs sont de plus en plus calculés en fonction des conditions de production et des coûts de revient les plus avantageux au niveau mondial. En revanche, le «modèle agricole européen» est beaucoup plus axé sur les valeurs dont les prix du marché mondial ne tiennent pas compte.

5.2   Le traité fait de la «stabilisation des marchés» un des objectifs de la PAC. Il importe que les marchés soient stables. Le CESE estime dès lors qu'il importera à l'avenir aussi d'utiliser les instruments de marché afin de stabiliser les prix et d'éviter que ces derniers ne connaissent de trop fortes fluctuations. Pourtant, les mesures de régulation des marchés et/ou de garantie des prix à la production ont été réduites à un minimum et les marchés agricoles de l'UE comptent parmi les plus ouverts par rapport aux pays tiers. Cette situation est à l'origine de la majorité des problèmes, qui ne peuvent être résolus sur le long terme uniquement au moyen de paiements de transfert.

5.3   La politique agricole ne consiste donc pas seulement à répartir des aides financières. Les agriculteurs attendent à juste titre de percevoir un revenu juste de la vente de leurs produits sur le marché et de la rémunération des prestations en faveur de la société qu'ils fournissent dans le cadre du modèle agricole européen.

5.4   Si la société veut défendre le modèle agricole européen, elle doit apporter son soutien par l'intermédiaire de la politique agricole. L'agriculture devra alors admettre que la société estime naturel que le soutien qu'elle accorde permette de combler également ses attentes en matière d'agriculture multifonctionnelle.

5.5   Échanges commerciaux, marchés et organisations de marché

Volatilité / stabilité des marchés

5.5.1   Pour ce qui est des marchés et des prix, il convient de considérer et de résoudre au minimum trois problèmes différents:

la volatilité toujours plus élevée des marchés, pour des prix à la production orientés à la baisse;

des secteurs de la transformation et de la commercialisation toujours plus puissants sur le marché par rapport aux producteurs;

des problèmes évidents à la production et à la commercialisation des produits locaux, régionaux et de qualité; il est à cet égard nécessaire de disposer d'une réglementation spécifique de l'agriculture, orientée vers les marchés locaux et régionaux.

5.5.2   Le fait d'avoir renoncé dans une large mesure à des instruments efficaces de stabilisation des marchés a alimenté la spéculation et la volatilité de ces marchés, ce qui va à l'encontre des traités sur l'UE, tant actuels qu'anciens.

5.5.3   L'importante fluctuation des prix a tendance à réduire la part des producteurs dans la chaîne de valeur et à accroître les marges de commercialisation.

5.5.4   Les années écoulées ont clairement montré que les consommateurs n'en profitent guère non plus: le recul de 40 % du prix de la betterave sucrière a été à peine répercuté sur les prix à la consommation, ce qui vaut également pour la chute des prix du lait et des céréales.

5.5.5   L'expérience acquise montre qu'il est économiquement plus avantageux de pratiquer des interventions régulatrices – avec les mesures appropriées et au moment opportun – que de réparer les dommages ultérieurement.

5.5.6   La crise du lait montre clairement qu'il est impossible de réduire au minimum les interventions visant à réguler le marché et/ou le volume de production sans compromettre les normes élevées de production et/ou la multifonctionnalité qu'attend la population.

5.5.7   L'expiration du régime des quotas laitiers est associée au risque que de nombreux producteurs de lait abandonnent leur activité, surtout dans les régions défavorisées, ce qui revient souvent à abandonner l'exploitation des terres. Il est certainement vrai que les volumes de lait consommés par exemple en Estonie peuvent être produits dans d'autres régions d'Europe plus productives à un coût inférieur à celui du lait produit dans ce pays. Néanmoins, une telle délocalisation de la production pour des motifs économiques est diamétralement contraire aux objectifs du modèle agricole européen; le CESE se prononce pour une politique agricole qui permette une exploitation généralisée des terres, fondée sur le principe de la souveraineté alimentaire. Il importe d'insister sur le fait que cela ne pourra pas se réaliser au seul moyen de transferts financiers, et qu'il faut par conséquent réguler les marchés et la production.

5.5.8   La stabilisation des marchés et, dans ce cadre, la mise en place d'un «filet de sécurité», doit ainsi représenter l'une des composantes essentielles de la réforme de la PAC.

5.5.9   C'est pourquoi le CESE défend la position suivante:

les quelques mesures de stabilisation des marchés encore disponibles doivent non seulement rester garanties et être appliquées lorsque le marché l'exige, mais il convient aussi de développer et d'introduire de nouvelles mesures de stabilisation des marchés conformes aux règles de l'OMC;

compte tenu des impondérables toujours plus nombreux qui surviennent sur les marchés agricoles internationaux, il y a lieu de prévoir des dispositifs stratégiques de prévention des crises en matière de produits agricoles, basés sur le stockage;

il convient en outre de se demander comment agir sur les marchés, pour les stabiliser, en s'appuyant sur les organisations de producteurs et/ou les accords interprofessionnels.

Problèmes au sein de la chaîne d'approvisionnement alimentaire

5.5.10   Il existe un déséquilibre des positions de négociation en matière de fixation des prix. Les agriculteurs évoquent des pratiques contractuelles inéquitables découlant du poids excessif des grossistes en alimentation dans les négociations.

5.5.11   À l'heure actuelle, en ce qui concerne la question décisive des parts détenues par les différents acteurs dans la chaîne de valeur, c'est le marché, et lui seul, qui en décide – en parfaite application de la doctrine économique libérale. Cette situation est totalement insatisfaisante, notamment pour les exploitants agricoles, qui sont fréquemment confrontés à une chute continue des prix à la production, même si leurs coûts unitaires augmentent, et sont souvent amenés à réagir par des mesures qui vont à l'encontre des objectifs du modèle agricole européen.

5.5.12   Étant donné que, dans les 27 pays de l'Union, 15 chaînes de distribution contrôlent déjà à elles seules 77 % du marché alimentaire, le CESE estime qu'il est nécessaire, comme c'est le cas actuellement aux États-Unis, de vérifier si le droit de la concurrence est suffisant pour empêcher que des structures dominent le marché et qu'y règnent des pratiques contractuelles douteuses. Il importe que l'ensemble des parties concernées soient associées à cette vérification. Cette analyse devrait conduire à une modification de la réglementation communautaire de la concurrence pour le secteur agroalimentaire de telle sorte qu'elle tienne compte de la spécificité de ce secteur et soit adaptée à celle des pays concurrents sur les marchés mondiaux, conformément aux conclusions du groupe à haut niveau sur le lait.

5.5.13   Le CESE demande à la Commission de s'efforcer d'accroître la transparence de la formation des prix et de proposer des solutions permettant d'éviter des répercussions de prix dites «asymétriques» (2).

Commercialisation des produits locaux, régionaux, spécialisés et de qualité

5.5.14   Les grandes chaînes d'approvisionnement alimentaire et les centres de transformation exigent des matières premières à bas prix, de forme toujours plus régulière et quasi-normalisées. Il n'y a guère de place pour la diversité régionale et la spécificité des produits.

5.5.15   Il est donc précisément très important, pour le maintien du modèle agricole européen, de produire et de commercialiser des produits de qualité ayant une dimension régionale et reflétant la diversité des zones rurales dans l'UE; cette tâche mérite donc d'être soutenue beaucoup plus vigoureusement. Raccourcir les filières de distribution et fournir aux agriculteurs ou aux groupements de producteurs un accès direct au consommateur peut favoriser l'accroissement de la compétitivité de structures d'exploitation qui sont justement plus petites et exigent plus de main-d'œuvre.

5.5.16   Il convient de tenir compte, dans une mesure beaucoup plus large que par le passé, des indications géographiques et des différences de techniques de production. Il est nécessaire de les considérer comme un «droit de propriété intellectuelle» et de les protéger. Ces informations peuvent constituer le lien entre les produits agricoles et les régions, ce qui revient à dire que les produits ont non seulement une origine «sûre» mais qu'ils présentent aussi des caractéristiques qualitatives qui se sont cristallisées au fil du temps. Il est important de définir clairement ce que l'on entend par produits régionaux.

5.5.17   L'étiquetage des produits fait actuellement très souvent l'objet de pratiques trompeuses et douteuses. À l'avenir, il ne devrait plus être autorisé, par exemple:

que des emballages pour le lait montrent des vaches qui broutent dans un pré lorsque le lait provient d'animaux qui n'ont plus accès aux pâturages. Il convient en lieu et place d'encourager la différenciation sur le marché (par des programmes de production de lait provenant de vaches élevées dans les prés ou nourries à l'herbe, en allant jusqu'aux stratégies régionales de commercialisation par des producteurs ou de petites coopératives);

que la publicité se fonde sur des indications régionales, alors que les produits ont une tout autre origine.

5.5.18   Il importe d'accroître et de contrôler la transparence du marché et d'améliorer les informations destinées aux consommateurs (telles que le marquage de l'origine). Pour mieux faire connaître la réglementation que doivent respecter les agriculteurs européens, il y a lieu de lancer des campagnes visant à informer les consommateurs sur les systèmes de production européens. Il convient en outre d'attacher une importance particulière au système d'étiquetage. À cet égard, le CESE estime qu'il faudrait tenir compte des recommandations formulées dans l'avis relatif à l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires (3).

5.5.19   À l'avenir, l'argent des contribuables devrait avant tout servir à renforcer les produits et les marchés régionaux.

5.6   Les instruments de financement de la PAC

La situation actuelle

5.6.1   Actuellement, le système d'aides à l'agriculture de l'UE n'est pas uniforme: dans l'UE à 15, le régime de paiement unique repose sur un modèle historique et il évolue, le cas échéant vers un régime de paiement unique à la surface. Dans les 12 nouveaux États membres, un régime de paiement unique à la surface a été directement appliqué, et le montant des paiements y est inférieur à celui de l'UE-15.

5.6.2   De ce fait, les agriculteurs profitent de manière extrêmement disparate du système actuel de paiements. D'une part, cette situation est souvent considérée comme injuste, et d'autre part, le contribuable peine à comprendre ce système.

5.6.3   Une tâche essentielle de la prochaine réforme sera de créer un système unifié, reposant sur des critères objectifs et accepté par la société.

5.6.4   Les aides directes du 1er pilier se justifiaient à l'origine par la réduction des prix garantis opérée en 1992. Elles ont été accordées jusqu'en 2003 en tant que paiements compensatoires, avant que le «découplage» ne soit introduit par les décisions de Luxembourg. Étant donné, cependant, que la plupart des États membres ont opté pour le «modèle historique de paiement unique», il existe encore et toujours des divergences considérables entre les agriculteurs du point de vue des bénéfices qu'ils retirent du système actuel. À cause du découplage, ils n'exercent plus aucune influence directe sur les modalités de production.

5.6.5   Les aides directes (= paiements à la surface) du 2e pilier ont pour but de rémunérer les agriculteurs pour certaines prestations supplémentaires en faveur de la société, qui vont au-delà des exigences réglementaires et qui ne sont pas reflétées dans le prix du marché, et de les encourager à maintenir une production dans les zones défavorisées, comme le requiert la société.

5.6.6   Les aides directes du 1er pilier sont actuellement financées à 100 % par le budget de l'UE, alors que celles du 2e pilier doivent être, par contre, cofinancées par les États membres. Ces deux mécanismes de financement exercent chacun dans de nombreux États membres une influence sur «l'attrait» des programmes. Le CESE demande à la Commission de veiller, lors de la planification des programmes, à ce que des taux de cofinancements différents ne conduisent pas les États membres à privilégier ou au contraire à négliger certaines parties de ces programmes.

5.6.7   Outre les paiements directs, des moyens sont affectés au développement rural (3e axe du 2e pilier), au titre des aides à l'investissement destinées aux exploitations (1er axe du 2e pilier) ainsi que du programme LEADER.

5.6.8   En raison de l'instabilité et de la volatilité des marchés, entre autres, le transfert direct des fonds est devenu parfois très important pour le revenu des exploitants. Sans les transferts financiers, la mutation structurelle de l'agriculture serait nettement plus radicale, même s'il faut constater que les différentes exploitations ne profitent qu'à des degrés très divers de l'instrument le plus important actuellement, à savoir les paiements directs du 1er pilier.

Les futurs systèmes de paiement

5.6.9   Le CESE maintient la position qu'il a défendue jusqu'ici au sujet des aides directes du 1er pilier. Il a toujours souligné que les paiements directs fonctionnels «ont un rôle important, mais [qu']ils ne peuvent constituer qu'un revenu complémentaire» (4). Les revenus des agriculteurs doivent provenir des recettes du marché et des prestations en faveur de la société qui ne sont pas rémunérées par le marché.

5.6.10   La rémunération des prestations, qui est nécessaire mais n'a jusqu'à présent pas encore été accordée, suppose l'obtention d'un consensus sur le type de prestations fournies par les agriculteurs, individuellement ou collectivement. Il s'agit d'un aspect important pour la fixation de principes clairs relatifs à l'octroi futur des paiements directs. Il est indispensable que ces derniers se fondent sur des critères objectifs, qu'ils soient «couplés» à quelque chose, pour pouvoir également acceptés par la société.

5.6.11   La situation devrait être fondamentalement la suivante:

seuls les agriculteurs en activité, les associations d'entretien des paysages ou les autres institutions qui entretiennent les paysages culturels, peuvent bénéficier des paiements directs au titre du 1er ou du 2e pilier;

les paiements directs au titre du 1er ou du 2e pilier tiennent compte de l'emploi présent et généré dans chaque exploitation;

les paiements directs au titre du 1er ou du 2e pilier rétribuent les prestations des agriculteurs en faveur de la société, qui sont nécessaires au maintien du modèle agricole européen. Le revenu des agriculteurs devrait provenir principalement des prix d'un marché régulé où les coûts de production soient reconnus;

en raison de la grande diversité des conditions agroclimatiques dans l'UE, les paiements directs au titre du 1er ou du 2e pilier devraient également contenir des composantes qui permettraient de compenser, à l'échelle supranationale, les coûts induits par ces facteurs agroclimatiques pour les agriculteurs (5).

5.6.12   Il convient donc de décider quels paiements directs (et de quel montant) doivent être accordés pour quelle prestation concrète. Les exploitations et/ou les sites de production qui ne fournissent pas ou ne veulent pas fournir ce type de prestations, et qui ne contribuent donc pas à la réalisation du modèle agricole européen, ne doivent pas du tout bénéficier de ces paiements à l'avenir.

5.6.13   Les paiements directs, qui servent au règlement des prestations d'utilité publique qui n'ont pas cours sur le marché (par exemple, services environnementaux concrets et bien définis), ne doivent pas prêter à controverse. Le CESE considère comme impératif non seulement de développer des programmes en la matière, mais également de les rendre plus attrayants et flexibles. Il est donc essentiel de réintroduire les «composantes incitatives». Il serait aussi important de pouvoir réagir de manière plus souple en fonction des différentes activités des agriculteurs. Les programmes devraient être beaucoup plus axés sur les résultats et moins sur les mesures.

5.6.14   De nombreuses mesures nouvelles relèveront ultérieurement de cette catégorie, comme par exemple les méthodes agricoles qui contribuent à la lutte contre le changement climatique ou à la capture du carbone dans le sol; l'exploitation herbagère en fait indéniablement partie.

5.6.15   De même, les paiements directs servant à compenser des difficultés naturelles permanentes et immuables, ainsi que les paiements effectués pour compenser des restrictions d'utilisation imposées par des normes, par exemple dans le domaine de la protection de la nature, sont plus que justifiés. Dans de nombreuses zones protégées, il importe de pratiquer un type d'activité agricole déterminé afin de maintenir le caractère de ces zones. Le CESE estime peu réaliste de vouloir interdire les paiements au motif que le règlement sur les zones protégées constitue un cadre de référence auquel les agriculteurs doivent se conformer.

5.6.16   En ce qui concerne les aides directes, la politique agricole doit être centrée, à l'avenir, sur un système de paiements directs fonctionnels et donc différenciés, correspondant à une prestation concrète en faveur de la société. L'indemnité compensatoire en fait indéniablement partie.

5.7   Un paiement unique à la surface pour compenser les handicaps concurrentiels?

5.7.1   Il a été proposé, dans le cadre du débat, de transformer les paiements directs actuels du 1er pilier en un paiement unique à la surface à l'échelle de l'UE, qui serait accordé au motif que l'agriculture européenne, qui doit respecter des normes de production plus strictes, se retrouve dans une situation concurrentielle défavorable par rapport aux producteurs de pays tiers.

5.7.2   Le CESE partage sans réserve l'avis selon lequel il convient d'envisager une compensation de ce type pour palier les handicaps concurrentiels. En effet, les normes sociales et environnementales, qui sont essentielles dans le modèle agricole européen, sont considérées dans les accords commerciaux comme des barrières non tarifaires au commerce, ce qui est tout à fait inacceptable. Il est urgent et indispensable de réformer le système de l'OMC à cet égard, car un système commercial mondial dépourvu de normes sociales et écologiques est inacceptable.

5.7.3   Il convient, afin de palier les handicaps concurrentiels, de savoir dans quels secteurs de production les normes européennes se différencient concrètement de celles des principaux concurrents et quels sont les handicaps, en matière de coûts, qui en résultent de manière probante pour les exploitations individuelles/les différents types d'exploitation/les diverses formes de production.

5.7.4   Les conditions et donc les coûts de production sont extrêmement disparates en Europe: l'on observe non seulement des différences structurelles et (agro)climatiques importantes, mais le prix des intrants et le coût de la vie divergent également au plus haut point selon les régions. De même, les désavantages concurrentiels en matière de coûts, qui découlent des économies d'échelles au sein de chaque État membre, de chaque région et entre les types d'exploitation, sont eux aussi fortement disparates.

5.7.5   Comme l'on peut aisément le comprendre, les handicaps de production démontrables, par exemple, que connaissent les exploitations d'élevage ne peuvent être éliminés par un paiement unique à la surface, dont profiteraient aussi les exploitations ne pratiquant pas l'élevage.

5.7.6   Il en découle que la question de la compensation des désavantages compétitifs ne se résoudra pas au moyen d'un paiement unique à la surface identique dans toute l'Europe, mais elle devrait être réglée en tenant compte des spécificités de chaque région, de leurs conditions agroclimatiques ainsi que des types d'exploitation.

5.8   Un paiement unique à la surface pour le transfert de revenus?

5.8.1   Il est indéniable que les quelque 50 milliards d'euros accordés chaque année à l'agriculture européenne sur le budget agricole de l'UE sont, dans l'intervalle, indispensables pour la survie de nombreuses exploitations.

5.8.2   Les prix agricoles payés actuellement sont donc non seulement trop faibles pour maintenir le modèle agricole européen, mais ils mettent également en péril l'intégralité du secteur agricole européen.

5.8.3   C'est la raison pour laquelle a été évoquée la possibilité d'accorder à tous les agriculteurs une sorte de «prime de base et de garantie de subsistance», sous forme d'un paiement européen unique à la surface.

5.8.4   La situation en matière de revenus se présente de manière extrêmement différente selon les types d'exploitation et les régions. Les disparités mentionnées au paragraphe 5.7.4. jouent à cet égard un rôle décisif. Il en résulte qu'il convient d'adopter une approche très différenciée du problème des revenus. Ce problème ne peut pas non plus être résolu grâce à un paiement européen unique à la surface, dont par exemple les vastes exploitations et/ou les exploitations fonctionnant avec peu de main-d'œuvre profiteraient de manière disproportionnée.

5.8.5   Au lieu d'envisager un paiement unique à la surface, il conviendrait, le cas échéant, de concevoir un paiement qui serait versé par tête/travailleur, mais dont il conviendrait de plafonner le montant. Dans le cas de cette approche également, le calcul de la prime devrait prendre en compte les différences exposées au paragraphe 5.7.4. En outre, un système de primes de ce type devrait aussi tenir compte du fait que le niveau de revenus des exploitations est déterminé par les prix pour les producteurs et les coûts à la production et que ceux-ci sont soumis à des fluctuations de plus en plus importantes. Un système qui cherche à se justifier par le niveau de revenus doit être en mesure de réagir de manière suffisamment souple à des variations de prix de plus en plus marquées.

Périodes de transition

5.9   Un système européen de paiements unifiés, qu'il ne faut pas confondre avec un paiement européen unique à la surface et qui ne reposerait plus sur des droits à paiement historiques, mais sur des prestations concrètes et actuelles qui restent à définir, conduira à modifier considérablement les flux financiers entre les États membres, mais également entre les exploitations. D'un point de vue financier, il y aura donc des gagnants et des perdants. Le Comité préconise de traiter cette question avec tact et de prévoir, le cas échéant, des périodes transitoires. Il convient de concevoir ces dernières de manière à ce que le nouveau système soit opérationnel à mi-parcours ou au plus tard à la fin de la prochaine perspective financière.

5.10   L'avenir du 2e pilier

5.10.1   De nombreux citoyens ont l'impression que les dommages imputables en premier lieu aux mauvaises conditions-cadres de la politique peuvent être compensés par des éléments du 2e pilier.

5.10.2   Il convient de faire comprendre aux citoyens que les mesures qui seront proposées au titre du 2e pilier de la PAC viendront compléter les paiements directs fonctionnels et serviront, de manière encore plus ciblée, à maintenir, garantir et mettre en œuvre le modèle agricole européen. Ce système présuppose d'optimiser l'éventail de mesures.

5.10.3   Ce qui précède ne vaut pas seulement pour le 2e axe du 2e pilier. Les aides à l'investissement destinées aux exploitations agricoles doivent aussi être davantage axées sur le «développement durable». Pour le CESE, il ne fait aucun doute qu'il existe en Europe des besoins en investissements considérables, non seulement pour optimiser les exploitations agricoles du point de vue du développement durable, mais également pour réaménager partiellement notre paysage de cultures qui, dans le passé, avait été modifié pour répondre à des exigences parfois exclusivement axées sur les techniques de production (voir par exemple le régime des eaux / la directive-cadre sur l'eau).

5.10.4   Le CESE se prononce en faveur du renforcement et de l'optimisation de l'éventail des tâches actuellement proposées au titre du 3e axe du 2e pilier. Il s'oppose clairement au transfert de ces tâches vers la politique structurelle et/ou régionale générale. Le Comité est également d'avis que les mesures relevant de l'actuel FEADER devraient avoir un rapport évident avec l'agriculture; la construction de routes et le câblage pour réseaux à large bande n'en font donc pas partie.

Bruxelles, le 18 mars 2010.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  L'expression «agriculture paysanne» ne définit pas la taille de l'exploitation mais plutôt le mode d'exploitation des agriculteurs et comment ceux-ci conçoivent leurs activités: organisées en cycles entrelacés et complémentaires aussi proches de l'exploitation que possible, orientées vers la préservation d'emplois qualifiés et variés, liées aux communes et aux régions, responsables de la nature et des animaux et tournées vers les générations futures.

(2)  Lorsque les prix à la production augmentent, les prix à la consommation augmentent très vite, lorsque les prix à la production baissent, les prix à la consommation ne baissent que très lentement.

(3)  JO C 77 du 31.03.2009, p. 81.

(4)  JO C 368 du 20.12.99, p. 76-86, cf. paragraphe 7.6.1.

(5)  JO C 318 du 23.12.2009, p. 35.


28.12.2010   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 354/43


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Pour une nouvelle gouvernance des organisations internationales»

2010/C 354/07

Rapporteure: Mme VAN WEZEL

Corapporteur: M. CAPPELLINI

Le 25 février 2009, lors de sa session plénière, le Comité économique et social, en application de l’article 29, paragraphe 2 de son Règlement intérieur, a décidé d’élaborer un avis d’initiative sur le thème:

«Pour une nouvelle gouvernance des organisations internationales».

La section spécialisée «Relations extérieures», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 4 mars 2010.

Lors de sa 461e session plénière des 17 et 18 mars (séance du 17 mars), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 132 voix pour, 0 voix contre et 4 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

L’économie est aujourd’hui plus intégrée que jamais. Les crises mondiales majeures qui frappent notre monde désormais multipolaire, mettent en évidence la nécessité d’une nouvelle gouvernance et d’une légitimité renforcée des organisations internationales. Cette légitimité doit se fonder sur des valeurs, des normes et des objectifs communs, sur la cohérence et l’efficacité, l’inclusion de tous les pays et de leurs citoyens. Le CESE soutient la participation active de l’UE au développement de cette nouvelle gouvernance des organisations internationales.

1.2

La nécessité de réforme des organisations internationales, des agences des Nations unies, des institutions de Bretton Woods était reconnue dès avant la crise économique et financière; toutefois, cette dernière a rendu la réforme plus urgente. Lorsqu’il est apparu que l’impact de la crise financière était irréversible, le G20 a pris les commandes pour y réagir. Malgré que les résultats du processus du G20 soient relativement bien accueillis, la légitimité de ses décisions est, quant à elle, remise en question. Le CESE demande à l’UE d’établir des liens réels entre le processus du G20 et les institutions des Nations unies représentatives afin de renforcer l’ECOSOC.

1.3

Les pays émergents et en voie de développement doivent jouer un rôle plus important dans la gouvernance des organisations internationales. Le CESE est favorable à une restructuration plus approfondie de la Banque mondiale et du FMI pour accroître la représentation de ces pays.

1.4

La gouvernance des organisations internationales devrait reposer sur la Charte des Nations unies et la Déclaration universelle des droits de l’homme. L’UE a défendu âprement la coopération multilatérale, et le CESE soutient pleinement cette position. Toutefois, le CESE note que l’environnement qui entoure la promotion des valeurs multilatérales a changé et qu’il faut dès lors revoir les communications de la Commission européenne concernant la politique de l’UE sur le multilatéralisme  (1).

1.5

Même si les organisations internationales ont des objectifs clairs, elles manquent néanmoins d’efficacité, faute de mécanismes appropriés pour assurer le suivi des décisions et l’évaluation de leur l’impact. L’UE a développé des systèmes de monitorage qui constituent des exemples de bonnes pratiques et pourraient être adoptés à l’échelle internationale pour suivre des interventions complexes à plusieurs niveaux. Le CESE encourage l’UE à introduire ces systèmes de suivi auprès d’organisations internationales.

1.6

Le CESE soutient l’idée d’accroître l’autorité des organisations internationales pour réglementer les marchés financiers au niveau international afin d’éviter une nouvelle crise financière. Il soutient l’idée de renforcer la réglementation aux niveaux européen et international dans les domaines suivants: l’augmentation des réserves, la réglementation des fonds spéculatifs, le démantèlement des paradis fiscaux, la lutte contre les rémunérations excessives et perverses, la réduction des risques liés à l’effet de levier financier et la consolidation au niveau supranational des organes de supervision.

1.7

Le CESE soutient toute initiative de l’UE visant à encourager la coopération et la cohérence entre les organisations internationales. Il invite l’UE à suivre l’initiative de Mme MERKEL et à faciliter l’instauration d’un dialogue formel entre les organisations internationales afin de promouvoir la coopération fondée sur l’agenda de l’OIT pour un travail décent.

1.8

Le CESE se félicite de la résolution du Parlement européen invitant les États membres de l’UE à ratifier les conventions actualisées de l’OIT et soutient la demande du Parlement européen à la Commission d’élaborer une recommandation invitant les États membres à ratifier les conventions de l’OIT actualisées et à contribuer activement à leur mise en œuvre. Le CESE souhaite participer activement à l’élaboration de cette recommandation.

1.9

Tout en reconnaissant la valeur du «pouvoir discret» exercé par l’Union européenne dans les structures de gouvernance des organisations internationales, le Comité estime que l’UE devrait élaborer une stratégie pour accroître son pouvoir et renforcer sa position au sein de chaque organisation internationale. Le CESE devrait pouvoir s’exprimer dans des réunions consultatives organisées dans le cadre de l’élaboration de ces stratégies.

1.10

Le Comité espère que le nouveau traité de Lisbonne, le nouveau Haut représentant pour les affaires étrangères et la coopération diplomatique renforcée permettront d’unifier la voix et d’améliorer la place de l’UE au sein des organisations internationales. Aussi le CESE encourage-t-il l’UE à faire preuve de cohérence dans sa politique extérieure et vis-à-vis des objectifs qu’elle poursuit.

1.11

Le processus de formation de la nouvelle gouvernance n’est pas très transparent. Les partenaires sociaux et les organisations représentatives de la société civile devraient y participer; le CESE attend de l’UE qu’elle rende les informations sur ce processus aisément accessibles.

1.12

L’ouverture à la consultation d’organisations représentatives de la société civile, de syndicats et d’organisations patronales renforce l’efficacité des institutions internationales. Ces organisations doivent participer à des structures consultatives transparentes, ainsi qu’aux systèmes de monitorage. Le CESE attend de l’UE (CE et États membres) qu’elle promeuve et facilite une meilleure consultation des organisations de la société civile et des partenaires sociaux dans les futures structures de gouvernance des organisations internationales.

2.   Introduction

2.1

La discussion sur le système de gouvernance des organisations internationales n’est certes pas nouvelle. Toutefois, l’extension rapide et l’impact profond de la crise financière mondiale ont mis en évidence la faiblesse de la gouvernance internationale dans une économie mondialisée et l’interdépendance croissante de tous les pays. Non seulement la crise affecte toutes les économies, mais elle a en outre provoqué une crise majeure au niveau de l’emploi qui touche des millions de travailleurs et d’entreprises déjà vulnérables. Afin de limiter au maximum l’impact négatif de cette crise et d’éviter qu’elle ne se reproduise, il est nécessaire de mieux réglementer le secteur financier, noyau de départ de l’actuelle crise. Mais cela ne suffit pas. Pour créer une économie durable, fondée sur des valeurs, il est nécessaire d’instaurer un nouveau mode de gouvernance de l’économie mondiale, plus efficace, responsable et transparent.

2.2

Cet avis porte essentiellement sur les organisations internationales qui dirigent les politiques sociales, économiques et financières, tenant compte des processus de réforme dont ces organisations font l’objet et du contexte de crise financière: l’ONU, l’OMC, l’OIT, la Banque mondiale, le Fonds monétaire international, l’OCDE ainsi que le G20 et le Conseil de stabilité financière.

2.3

Le monde est confronté à des crises mondiales majeures: seule une réponse au niveau mondial permettra d’y apporter des réponses efficaces. Ceci vaut aussi bien pour les défis de l’actuelle crise économique et financière que pour la crise alimentaire, de l’eau, de l’énergie, la pauvreté accrue, les problèmes environnementaux y compris les effets du réchauffement climatique, la sécurité et l’accroissement des migrations.

2.4

La mondialisation a modifié le paysage des relations économiques et il importe que ce changement se reflète dans la structure de gouvernance économique mondiale. Les rapports de force évoluent tandis que les pays BRIC acquièrent de l’importance sur les plans économique, politique et stratégique. Nous sommes passés d’un monde bipolaire (guerre froide) à un monde unipolaire (suprématie américaine) pour arriver à un monde multipolaire. Les économies émergentes et les pays en voie de développement doivent jouer un rôle dans les institutions qui composent le nouveau modèle de gouvernance mondiale.

2.5

Seules des institutions légitimes pourront s’attaquer à ces défis. Or pour atteindre cette légitimité, la nouvelle structure de gouvernance devra mettre en œuvre des politiques cohérentes, d’une manière efficace et inclusive de toutes les nations et les peuples.

2.6

Plusieurs initiatives ont été engagées ces dernières années pour revoir le système de gouvernance mondiale des organisations internationales et réformer l’ONU. Des progrès ont été accomplis concernant l’approche «d’une ONU» en termes d’aide aux pays, avec le coordinateur résident du système des Nations unies aux commandes. En 2009, le Conseil des chefs de secrétariat pour la coordination de l’ONU a annoncé le lancement de neuf initiatives conjointes entre les organisations des Nations unies et les institutions de Bretton Woods. Dans la nouvelle architecture de la gouvernance de l’économie mondiale, il est suggéré de renforcer le rôle et la compétence de l’ECOSOC. Depuis l’éclatement de la crise économique et financière, le processus de réforme a gagné en importance, dirigé par le G20.

2.7

À Pittsburgh, États-Unis, les 24 et 25 septembre 2009, les dirigeants des pays du G20 ont pris des décisions qui modifieront considérablement la gouvernance des organisations internationales. Ils ont en effet décidé que le G20 serait désormais le premier forum en matière de coopération économique internationale. Ils ont déclaré qu’ils poursuivraient leurs efforts pour réglementer les marchés financiers et placer la question de l’emploi de qualité au cœur de la relance économique. Ils ont décidé de créer un cadre pour une croissance forte, durable et équilibrée, s’engageant à formuler des objectifs communs à moyen terme pour faire en sorte que leurs politiques macroéconomiques, fiscales et commerciales soient cohérentes avec une croissance durable et équilibrée de l’économie mondiale. Ils ont confié au FMI la tâche de les aider à évaluer leurs politiques afin de faciliter le dialogue. Ce faisant, ils ont largement renforcé le rôle du FMI, déjà stimulé par un financement supplémentaire de 500 milliards de dollars. La Banque mondiale a vu son autorité reconfirmée dans le domaine de la réduction de la pauvreté grâce à des prêts supplémentaires (à concurrence de 100 milliards de dollars), l’accent étant tout particulièrement mis sur la sécurité alimentaire et énergétique des pays pauvres. Les prochaines réunions des pays du G20 sont prévues en juin 2010 au Canada, puis en novembre 2010 en Corée, et en 2011 en France.

2.8

Les dirigeants du G20 ont convenu de moderniser l’architecture de la coopération économique. Les droits de vote au FMI pour les pays émergents augmenteront de 5 % aux dépens de pays plus petits, jusqu’ici surreprésentés. La Banque mondiale est, elle aussi, appelée à considérer la représentation des pays émergents dans sa structure décisionnelle.

2.9

Toutefois, malgré que les résultats du processus du G20 soient relativement bien accueillis, la légitimité de son leadership est, quant à elle, remise en question. Les pays les plus pauvres au monde ont été exclus du débat. L’agenda du G20 n’est pas le fruit d’une politique consensuelle et seules quelques organisations internationales pertinentes y participent activement. La crainte d’une érosion du rôle de l’ONU est grande au sein de cette organisation, en ce qui concerne, notamment, les questions socio-économiques. Il faut trouver un nouvel équilibre entre le nouveau rôle du G20, l’ONU et ses agences et les institutions de Bretton Woods. Il faut s’attendre à ce que de nouvelles initiatives et idées surgissent, dans un contexte de relations économiques et politiques en constante et rapide mutation.

2.10

Les pays du G20 doivent créer des liens effectifs avec des processus représentatifs des Nations unies de telle sorte que les intérêts de tous les pays du monde puissent être pris en considération dans une architecture mondiale nouvelle et inclusive, doublée de la création d’un Conseil de sécurité économique et sociale des Nations unies, un ECOSOC largement réformé et doté de pouvoirs décisionnels accrus ou d’un «Conseil économique global» (2). L’UE doit se positionner par rapport à tous ces changements. Certains observateurs craignent que le changement d’équilibre des pouvoirs ne se fasse au détriment de l’influence européenne sur la scène internationale.

2.11

L’attention accordée au rôle de la société civile et des partenaires sociaux dans ce processus est insuffisante. Le CESE recommande que le G20 reconnaisse une place officielle à la société civile et aux partenaires sociaux, et encourage les ministres du travail du G20 à associer à leurs travaux les institutions qui représentent les partenaires sociaux au niveau international. Bien que certaines organisations internationales accordent un statut consultatif aux partenaires sociaux et aux organisations de la société civile, le processus manque globalement de transparence et des organisations représentatives telles que le CESE et les conseils économiques et sociaux devraient être plus activement impliquées.

3.   Principes de la nouvelle gouvernance

3.1

La nouvelle gouvernance des organisations internationales devrait reposer sur les principes et valeurs de l’ONU. Bien que les organisations internationales aient leur propre structure de gouvernance, il conviendrait que leur fonctionnement repose sur la Charte des Nations unies, les droits de l’homme fondamentaux, la dignité humaine et l’égalité de droits entre les hommes et les femmes, la justice et le respect des normes et des traités internationaux, la promotion du progrès social, un meilleur niveau de vie dans un espace de plus grande liberté. La nouvelle structure de gouvernance des organisations internationales devrait promouvoir le développement durable et l’inclusion sociale et permettre de traiter efficacement les principaux problèmes mondiaux.

3.2

Les principes contenus dans la Charte des Nations unies et de la Déclaration universelle des droits de l’homme constituent également des valeurs de l’Union européenne. L’UE se fonde sur les principes de liberté et de dignité, de dialogue, de stabilité et de respect des accords internationaux. Elle est d’ailleurs une ardente promotrice du multilatéralisme, des Nations unies et de ses traités, position que le CESE soutient. Toutefois, le CESE note que l’environnement qui entoure la promotion des valeurs multilatérales a changé et qu’il faut dès lors revoir les communications de la Commission européenne concernant la politique de l’UE sur le multilatéralisme: «Édifier un partenariat efficace avec les Nations unies dans les domaines du développement et des affaires humanitaires» (COM(2001) 231) et «Union européenne et Nations unies: le choix du multilatéralisme» (COM(2003) 526).

3.3

Il importe que la nouvelle structure de gouvernance de l’économie mondiale se fonde sur le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et concentre ses efforts sur les questions sociales urgentes telles que l’emploi, la pauvreté, la sécurité alimentaire et l’inégalité croissante, contribuant également à la justice sociale et à un monde plus juste. Elle devrait jouer un rôle plus important dans la promotion d’une économie verte et protéger les biens publics comme l’air pur, l’eau potable, la biodiversité et la réduction des émissions de carbone.

4.   Nouvelle gouvernance: coopération accrue, cohérence et efficacité renforcées

4.1

Le CESE demande à la Commission européenne et à d’autres institutions européennes de promouvoir activement une nouvelle gouvernance des organisations internationales, qui renforce leur cohérence et leur permette de contribuer plus efficacement au développement durable, ainsi qu’à la réalisation des objectifs de travail décent et de durabilité des entreprises.

4.2

Les organisations internationales, en particulier l’ONU et ses agences, ont des objectifs clairs, mais elles manquent parfois d’efficacité. En effet, malgré l’existence d’objectifs formalisés dans des normes et des traités internationaux, leur mise en œuvre est souvent inadéquate; par ailleurs un système d’évaluation d’impact efficace fait défaut. La nouvelle gouvernance des organisations internationales devrait mettre davantage l’accent sur l’application et le suivi des décisions prises.

4.3

Le monitorage est en train de devenir un outil important pour garantir la cohérence dans la mise en œuvre des politiques et orienter les dirigeants et les décideurs politiques vers les domaines les plus préoccupants pour eux. Il constitue aussi un mécanisme d’alerte rapide qui permet d’intervenir en temps utile et d’une manière appropriée. Le CESE suggère d’utiliser et de développer cette approche à une échelle plus vaste et coordonnée, en fonction des besoins des organisations internationales, étant donné que l’expérience européenne de monitorage d’interventions complexes à plusieurs niveaux a renforcé la capacité de gestion commune des pouvoirs publics, des professionnels et du secteur privé.

4.4

Les organisations internationales peuvent être plus efficaces si elles renforcent mutuellement leurs objectifs. Certaines disposent de mécanismes de plaintes et d’arbitrage (OMC), d’autres de mécanismes de supervision développés, sans toutefois bénéficier de pouvoirs leur permettant de veiller au respect des normes qu’elles édictent (OIT). Les politiques des organisations internationales ne devraient pas se contredire mutuellement. Pour que les objectifs des Nations unies, des institutions financières internationales et de l’UE puissent être atteints, ces organisations doivent œuvrer de concert pour promouvoir leurs normes respectives, comme l’égalité entre les hommes et les femmes, la durabilité, le travail décent et la libéralisation du commerce.

4.5

La gouvernance des institutions financières internationales, FMI, Banque mondiale et Conseil de stabilité financière, est au cœur des débats sur la gouvernance mondiale de l’économie. La nécessité de réglementer les marchés financiers et de les rendre plus transparents est aujourd’hui plus urgente que jamais, car il n’est désormais plus possible de prendre des mesures adéquates uniquement au niveau national. Pour que les organisations internationales puissent être plus efficaces dans la prévention de crises futures, le CESE est favorable au principe d’accroître équitablement leur autorité dans la réglementation des marchés financiers au niveau international, tout en évitant un environnement trop restrictif, étouffant et bureaucratique. Le Comité soutient l’idée de renforcer la réglementation aux niveaux européen et international dans les domaines suivants: l’accroissement des réserves, la réglementation des fonds spéculatifs, le démantèlement des paradis fiscaux, la lutte contre les rémunérations excessives et perverses, la réduction des risques liés à l’effet de levier financier et la consolidation au niveau supranational des organes de supervision, entre autres.

4.6

Une coopération internationale renforcée est désormais nécessaire pour faire face à l’impact de la crise sur l’économie réelle. Pour être sûre, l’économie mondiale doit être mieux réglementée et fondée sur des valeurs. La chancelière allemande, Mme MERKEL, a pris à cet égard une initiative importante: lors d’une réunion regroupant l’OMC, la Banque mondiale, le FMI, l’OIT et l’OCDE, au début de 2009 elle a proposé le lancement d’une Charte pour une gouvernance économique durable (3) qui poserait les jalons de politiques cohérentes visant à atteindre des objectifs communs, chaque organisation œuvrant selon son propre mandat. Se fondant sur cette Charte, les dirigeants du G20 ont formulé à Pittsburgh un ensemble de «valeurs fondamentales pour une activité économique durable», dans lesquelles ils expriment leur responsabilité, envers les différentes parties concernées (consommateurs, travailleurs, investisseurs et entrepreneurs), d’accroître la prospérité des personnes par le biais de stratégies économiques, sociales et environnementales cohérentes. L’OCDE a préparé une «norme mondiale du 21e siècle» fondée sur les principes directeurs existant dans le domaine de la gouvernance d’entreprise, des multinationales, de la lutte contre la corruption et de la coopération fiscale (4). La commission Stieglitz recommande l’adoption de mesures fortes visant à faire face au déclin de la demande, à créer de l’emploi et à atteindre les objectifs du millénaire pour le développement. Le CESE recommande que l’UE et ses États membres soutiennent ces initiatives.

4.7

L’OIT doit jouer un rôle particulier dans la nouvelle structure de gouvernance. Les normes du travail de l’OIT et le concept de travail décent et d’entreprises durables donnent des orientations pour faire face à la crise de l’emploi. À l’occasion de sa 98e conférence, en juin 2009, les trois parties constituantes de l’OIT ont adopté un Pacte mondial pour l’emploi, qui englobe une série de mesures visant à renverser les tendances à la baisse en matière d’emploi et de croissance. Le CESE demande instamment à l’UE de faire pression pour obtenir l’instauration d’un dialogue formel entre les organisations internationales fondé sur l’agenda de l’OIT pour un travail décent concernant l’emploi et le développement des entreprises, la protection sociale, des conditions de travail humaines, des relations professionnelles saines et les droits au travail.

4.8

Pour accroître la cohérence, le Comité conseille à l’UE de promouvoir tant à l’interne qu’à l’externe, la ratification des conventions actualisées de l’OIT et la mise en œuvre de l’agenda sur le travail décent. En particulier, le Comité demande instamment la ratification et la mise en œuvre des conventions les plus pertinentes pour l’agenda sur le travail décent, y compris les conventions sur la sécurité et la santé au travail, les conventions sur la sécurité sociale et la Convention 94 sur les clauses de travail dans les contrats publics. Les règles de l’UE n’exemptent pas les États membres des obligations qu’ils ont contractées en ratifiant les conventions de l’OIT. Le CESE soutient l’appel lancé par le Parlement européen à la Commission dans sa résolution du 26 novembre 2009 de préparer une recommandation à l’attention des États membres afin qu’ils ratifient les conventions de l’OIT actualisées et contribuent activement à leur mise en œuvre. Ayant émis des avis sur la dimension sociale de la mondialisation (5) et sur la promotion du travail décent pour tous (6), le CESE souhaite s’engager activement dans la préparation de cette recommandation.

4.9

En outre, le CESE soutient toute initiative de l’UE visant à encourager la coopération entre les organisations internationales sur des thèmes spécifiques. La coopération entre l’OMC et l’OIT sur l’emploi, la collaboration sur les questions de sécurité sociale entre la Banque mondiale et l’OIT et celle sur la mise en œuvre des normes du travail entre la Banque mondiale et le FMI constituent de bons exemples en la matière. L’emploi des jeunes, la microfinance et la sécurité sociale constituent des questions de la plus haute importance.

5.   La nouvelle gouvernance: les intérêts des pays en voie de développement mieux pris en considération

5.1

Les pays en voie de développement et les pays émergents doivent jouer un rôle plus important dans les nouvelles structures de la gouvernance mondiale qui seront adoptées par les organisations internationales. Toutefois, leur intégration doit se fonder sur les règles de l’ONU et le respect des droits de l’homme. L’objectif de garantir un travail décent et la mise en œuvre des normes internationales du travail de l’OIT dans les pays émergents et en voie de développement devraient guider les politiques des organisations internationales. La Banque mondiale et le FMI doivent faire l’objet d’une restructuration plus approfondie pour accroître la représentation et la puissance des pays plus pauvres au sein de leurs institutions et dans leurs processus.

5.2

Il est nécessaire de soutenir les pays en voie de développement pour faciliter leur participation effective aux processus décisionnels de l’OMC. Ils doivent être en mesure de participer plus aisément aux négociations commerciales et encouragés à approfondir leurs connaissances des questions commerciales ainsi que leurs capacités et compétences techniques dans le domaine de l’intégration des marchés. Les pays en voie de développement doivent jouir d’un espace politique légitime dans les relations commerciales.

5.3

En mars 2009, le FMI a effectué une analyse de la vulnérabilité des pays à faibles revenus aux effets pervers de la crise mondiale financière et de l’actuelle récession (7). Selon les estimations de l’OIT, plus de 200 millions de personnes risquent de sombrer dans l’extrême pauvreté, la plupart vivant dans des pays en voie de développement et dans des économies émergentes. Le nombre d’actifs pauvres gagnant moins de 2 USD par jour pourrait atteindre 1,4 milliard, minant de la sorte les progrès accomplis pendant la dernière décennie pour réduire la pauvreté dans le monde. La pauvreté croissante affectera surtout les femmes, qui constituent 60 % des pauvres dans le monde. Dans ces circonstances, il faut fournir des efforts supplémentaires pour atteindre les OMD. Le CESE demande instamment à l’UE d’honorer scrupuleusement ses engagements pour atteindre les OMD.

6.   Quel rôle l’UE pourrait-elle jouer pour promouvoir une nouvelle gouvernance des différentes organisations internationales?

6.1

L’UE a un rôle particulier à jouer à cet égard sur la scène internationale. Elle est le premier exportateur au monde, le principal donateur d’aide aux pays en développement et le marché de référence au plan international. Malgré cela, des recherches indiquent que l’UE connaîtrait actuellement une perte d’influence au sein de l’ONU (8). Les résolutions sur les droits de l’homme que l’UE soumet à l’assemblée générale des Nations unies recueillent un moindre soutien qu’il y a dix ans et ce en raison d’une influence accrue des pays réfractaires à toute forme d’interférence dans leurs «affaires intérieures» comme la Chine ou la Russie. (9).

6.2

L’enjeu de la gouvernance mondiale est de taille pour l’UE. Le modèle européen d’économie sociale de marché est unique et s’est avéré particulièrement apte à résoudre les problèmes complexes de l’actuelle crise économique. L’UE et ses institutions doivent engager des démarches actives pour préserver leurs intérêts et promouvoir leurs valeurs.

6.3

L’UE est représentée dans toutes les organisations internationales concernées par la question de la gouvernance de l’économie mondiale, que ce soit par la présence d’États membres aux conseils d’administration de ces organisations, par la coordination des politiques de ses membres au sein de ces organisations, par la représentation que lui assure l’État membre détenant la présidence ou directement par le biais du statut représentatif de la CE. Dans la plupart des organisations internationales, l’UE n’a qu’un statut d’observateur (à l’exception de l’OMC et de la FAO) et mise sur un «pouvoir discret» pour exercer son influence. Bien que le «pouvoir discret» et le réseau européen de bonnes volontés soient efficaces, l’UE devrait néanmoins œuvrer activement à l’obtention d’une position formelle, dans la mesure du possible. L’UE devrait élaborer, pour chaque organisation internationale, une stratégie pour accroître son pouvoir et renforcer sa position, afin de promouvoir un système de gouvernance plus efficace et juste de ces organisations.

6.4

L’UE est représentée au FMI par l’intermédiaire de différents porte-parole (le président de l’EURIMF, la BCE, le président de l’Eurogroupe, le ministre des finances de la présidence de l’UE), mais des divergences entre États membres sur les questions financières et de développement empêchent l’Europe de parler d’une seule voix. S’il est vrai que la CE est investie de l’autorité pour s’exprimer au nom de l’UE sur les questions liées au commerce, dans d’autres domaines financiers ou économiques, même les 16 États membres de l’UE qui ont une monnaie commune et ont délégué certaines de leurs compétences à la BCE n’adoptent pas nécessairement de positions unifiées. Étant donné l’importance accrue des institutions de Bretton Woods et, en particulier, du FMI, le CESE exhorte l’UE et ses institutions à améliorer leur coordination concernant la gouvernance de ces institutions. Les pays de l’UE détiennent 32 % des droits de vote au FMI contre 17 % pour les États-Unis d’Amérique. Une politique européenne mieux coordonnée permettrait de compenser la perte d’influence des plus petits États membres de l’UE au profit des économies émergentes.

6.5

Le CESE demande à l’UE d’encourager le FMI à promouvoir des politiques d’accès au crédit et au financement, en particulier pour les PME et les agriculteurs qui constituent la colonne vertébrale et les principaux pourvoyeurs d’emploi de toutes les économies nationales. Le CESE demande également que l’UE exhorte les institutions financières internationales à libérer des fonds à l’attention des pays en voie de développement, afin qu’ils puissent appliquer des mesures anticy cliques et, ce faisant, s’abstiennent d’imposer des conditionnalités procycliques.

6.6

Depuis 2000, l’UE a considérablement accru sa contribution financière à la Banque mondiale (241 M euros en 2008). Le CESE admet l’importance de la Banque mondiale pour éradiquer la pauvreté et recommande que l’UE encourage cette institution à adopter des politiques de développement économique incluant le travail décent ainsi que l’accès aux soins de santé, à l’éducation et à d’autres biens publics. Le CESE exhorte l’UE à soutenir la Banque mondiale s’agissant du financement des plans de relance pour les pays touchés par l’actuelle crise économique et financière, axés sur le soutien du développement d’entreprises durables, de la création d’emplois, de l’investissement public, de politiques actives du marché du travail, de l’extension de la sécurité sociale de base à tous, de filets de sécurité supplémentaires pour les plus vulnérables et d’investissements dans l’«économie verte».

6.7

Dans le cadre du nouveau traité de Lisbonne, le Parlement européen dispose de pouvoirs de codécision en matière de politique commerciale. Le CESE considère que cela offre de nouvelles opportunités pour renforcer sa coopération avec le Parlement et la Commission sur les questions commerciales. Le CESE a élaboré plusieurs avis pertinents sur les questions commerciales et sur la nécessité de rendre les politiques cohérentes avec les politiques sociales et environnementales (10) .

6.8

L’UE passe beaucoup de temps à tenter de coordonner ses points de vue et positions au sein des organisations internationales, au détriment du temps et des efforts qu’elle pourrait consacrer à convaincre les autres membres d’organisations internationales d’adhérer à ses positions. La convention de l’ONU pour les personnes handicapées est l’une des exceptions positives récentes à cet égard. Les organisations de la société civile peuvent soutenir une position conjointe. Le CESE note une certaine convergence dans le vote des pays de l’UE et encourage l’UE à se préparer à parler d’une seule voix pour éviter de diluer son influence faute d’accord entre ses membres. Il faut espérer que le traité de Lisbonne contribuera à améliorer cette situation. L’acceptation du nouveau traité, le nouveau poste de Haut représentant et la coopération diplomatique renforcée sont autant d’opportunités d’améliorer la position internationale de l’UE.

6.9

Une meilleure gouvernance des organisations internationales, offrant plus de cohérence et, partant, plus d’efficacité, commence chez soi. Les politiques européennes au sein de l’ONU et de ses agences, au G20 et dans les institutions de Bretton Woods devraient être soumises aux mêmes principes et promouvoir les mêmes objectifs, dans le cadre du mandat et de la structure des différentes organisations. Des efforts nettement plus importants sont nécessaires pour développer des politiques cohérentes au sein des organisations internationales La politique européenne sur la cohérence pour le développement constitue à cet égard un exemple positif. Le CESE fait également référence à la cohérence entre politiques internes et externes dans le cadre de la stratégie de Lisbonne (11).

7.   Une meilleure consultation et implication des partenaires sociaux et des organisations de la société civile

7.1

La participation des partenaires sociaux et des organisations de la société civile est une condition préalable à la protection et à la promotion de valeurs fondamentales pour les organisations internationales. L’enjeu de la gouvernance des organisations internationales est colossal pour la société civile. La récente crise a démontré que la société civile, plus particulièrement les contribuables, les travailleurs, les consommateurs, les épargnants, les propriétaires immobiliers et les entrepreneurs paient un lourd tribut à l’insuffisance et à l’inefficacité de la gouvernance mondiale.

7.2

La nouvelle structure de gouvernance prend forme dans les sommets diplomatiques de haut niveau, suivant un processus peu transparent. Les organisations de la société civile et les partenaires sociaux ont un accès très limité à l’information sur ce processus, sans parler de leur accès à la prise de décisions. Les organisations de la société civile et les syndicats tentent de mobiliser l’opinion publique et de faire pression sur leurs gouvernements pour communiquer leurs idées sur la future structure de gouvernance de l’économie mondiale. Certaines parties du monde de l’entreprise sont consultées, tandis que d’autres en sont exclues. La voix des organisations de la société civile et des partenaires sociaux devrait être mieux prise en compte dans le processus politique de l’UE mais aussi par les organisations internationales

7.3

Il existe de nombreux exemples de bonnes pratiques aux niveaux national, régional et international concernant la participation de la société civile dans la gouvernance des organisations internationales. Au niveau international, l’exemple de l’OIT se distingue. Les représentants des employeurs et des travailleurs participent, sur un pied d’égalité, avec les gouvernements et toutes les autres institutions de l’OIT, à la gouvernance, à la prise de décisions, à l’instauration de normes et/ou au suivi des activités. Le Comité consultatif économique et industriel auprès de l’OCDE (BIAC) et la Commission syndicale consultative auprès de l’OCDE (TUAC) sont également de bons exemples de consultation institutionnalisée des partenaires sociaux. Toutes les autres organisations internationales organisent des consultations moins systématiques auprès des partenaires sociaux et d’autres organisations de la société civile (les Nations unies accordent un statut consultatif à certaines ONG, tandis que d’autres, comme le G20, n’en prévoient pas du tout). L’efficacité de la gouvernance des organisations internationales sera renforcée en institutionnalisant la participation en toute transparence d’organisations représentatives de la société civile et de partenaires sociaux. Les organisations internationales peuvent également être plus efficaces en incluant les organisations de la société civile et les partenaires sociaux dans leurs mécanismes de suivi et de contrôle, ainsi que dans leurs systèmes de monitorage et d’alerte rapide.

7.4

Le CESE attend de l’UE qu’elle associe les organisations de la société civile et les partenaires sociaux à l’élaboration de ses politiques et de ses positions concernant la nouvelle gouvernance des organisations internationales. Le Comité escompte également qu’elle promeuve le principe de consultation de la société civile et des partenaires sociaux, au sein des organisations internationales, lors des discussions concernant les structures de gouvernance. Une consultation digne de ce nom suppose la transparence et l’accès aisé aux documents dans un délai qui permette de prendre en considération et d’inclure les points de vue des parties prenantes.

7.5

Le CESE attend de l’UE (CE et États membres) qu’elle promeuve et facilite une meilleure consultation des organisations de la société civile et des partenaires sociaux dans la future gouvernance des organisations internationales.

Bruxelles, le 17 mars 2010.

Le président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  COM(2001) 231: «Édifier un partenariat efficace avec les Nations unies dans les domaines du développement et des affaires humanitaires» et COM(2003)526: Union européenne et Nations unies: le choix du multilatéralisme.

(2)  Conformément aux recommandations de la commission d’experts présidée par Joseph Stieglitz chargée de conseiller les Nations unies à l’occasion de la conférence organisée par cette dernière sur la crise économique et financière mondiale et son impact sur le développement, juin 2009. La commission Stieglitz a également recommandé la création d’un groupe d’experts qui serait chargé de faire des recommandations au Conseil.

(3)  Communiqué de presse conjoint de la Chancelière Angela Merkel, 5 février 2009, Berlin.

(4)  Angel Gurría, Secrétaire général de l’OCDE, Rome 12 mai 2009.

(5)  JO C 234 du 22.09.2005, p. 41.

(6)  JO C 93 du 27.04.2007, p. 38.

(7)  IMF, The Implications of the Global Financial Crisis for Low-Income Countries, mars 2009.

(8)  Richard Gowan, Franziska Brantner: A global force for Human Rights? An audit of European Power at the UN. European Council on Foreign Relations, septembre 2008. www.ecfr.eu.

(9)  JO C 182 du 04.08.2009, p. 13.

(10)  JO C 211 du 19.08.2008, p. 82.

(11)  JO C 128 du 18.05.2010, p. 41.


28.12.2010   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 354/50


Avis du Comité économique et social européen sur «La politique des transports dans la région des Balkans occidentaux»

2010/C 354/08

Rapporteur: M. ZOLTVÁNY

Lors de sa session plénière du 16 juillet 2009, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l'article 29, paragraphe 2, de son Règlement intérieur, d'élaborer un avis d'initiative sur:

La politique des transports dans la région des Balkans occidentaux.

La section spécialisée «Relations extérieures», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 4 mars 2010.

Lors de sa 461e session plénière des 17 et 18 mars 2010 (séance du 17 mars 2010), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 132 voix pour, 2 voix contre et 4 abstentions.

1.   Recommandations

1.1   Recommandations à l'intention de l'Union européenne (Commission européenne):

poursuivre le processus d'élargissement de l'UE;

accélérer le processus de libéralisation du régime des visas avec l'Albanie et la Bosnie-Herzégovine afin de permettre à leurs citoyens de circuler sans visa dans les pays membres de Schengen; entamer également des négociations à ce sujet avec le Kosovo (1);

mobiliser toutes les ressources financières disponibles afin de maximiser les investissements dans les projets d'infrastructure et utiliser à cette fin le cadre d'investissement en faveur des Balkans occidentaux récemment créé;

continuer à accorder la priorité à la dimension sociale dans la mise en œuvre du traité instituant une communauté des transports. Il convient de soutenir le forum social afin d'en faire un instrument efficace pour renforcer le dialogue social sectoriel à l'échelle de la région;

soutenir les mesures en faveur des modes de transport les plus écologiques, tels que les voies navigables intérieures et les chemins de fer dans les Balkans occidentaux;

tenir compte des évaluations de l'impact socio-économique des réseaux de transport dans la conception d'une politique commune des transports;

soutenir la modernisation du réseau de base du transport régional en fonction des besoins;

considérer le réseau principal de transport régional de l'Europe du sud-est comme un élément futur des réseaux transeuropéens de transport (TEN-T) dans le cadre du processus de révision de la politique en matière de TEN-T, afin de soutenir l'intégration renforcée des Balkans occidentaux à l'UE;

lancer une étude sur l'emploi dans les pays des Balkans occidentaux signataires de la communauté des transports; également veiller dûment à la création de programmes de formation destinés tant aux employeurs qu'aux salariés afin de leur permettre de mieux faire face aux évolutions du marché de l'emploi;

allouer au secrétariat de la communauté des transports les ressources humaines suffisantes pour traiter des affaires sociales et du dialogue social.

1.2   Recommandations à l'intention du Comité économique et social européen (CESE):

encourager, grâce aux travaux des comités consultatifs mixtes, les partenaires sociaux des pays des Balkans occidentaux à jouer un rôle actif dans le dialogue social tant à l'échelon national que régional;

organiser une conférence sur la politique des transports dans les Balkans occidentaux avec la participation de représentants des organisations de la société civile de ces pays, de la Commission européenne et du CESE;

définir les mécanismes de création et d'institutionnalisation de la future coopération avec le forum social régional que prévoit d'établir le traité instituant une communauté des transports.

1.3   Recommandations à l'intention des gouvernements des pays des Balkans occidentaux:

renforcer la coopération régionale dans les domaines de la politique des transports et des infrastructures de transport;

assurer une planification efficace des investissements publics d'intérêt régional dans le secteur des transports et y renforcer les capacités;

mettre en œuvre les réformes nécessaires et accélérer le processus d'adoption de l'acquis communautaire;

exploiter les possibilités de financement ou de cofinancement privé des projets prioritaires et complémentaires (partenariats publics/privés) et créer un environnement approprié pour ce type de projet;

accroître la transparence des marchés publics;

améliorer l'administration des frontières et accroître les capacités aux points de passage des frontières pour accélérer les transports et en améliorer la qualité à l'échelle régionale;

élaborer des politiques cohérentes à l'échelle régionale qui viseraient à encourager les transports intermodaux et le déploiement de systèmes de transports intelligents (STI);

poursuivre les efforts de rapprochement avec les pays voisins et résoudre les questions en suspens dans le cadre des relations bilatérales;

jouer un rôle actif dans le développement de la stratégie du Danube actuellement en cours de préparation afin de bénéficier des projets conjoints d'infrastructures avec les États membres de l'UE et les pays voisins;

associer les partenaires sociaux, ainsi que des représentants d'autres organisations de la société civile concernées, au processus d'élaboration de la politique régionale des transports et faire converger les politiques de l'emploi et les réformes.

2.   Contexte de l'avis

2.1   Le rôle que jouent les transports et les infrastructures en matière de coopération régionale dans Balkans occidentaux est tenu pour un facteur crucial du développement économique général, social et environnemental de cette région. Le développement du réseau principal de transport régional pour l'Europe du sud-est («South East Europe Core Regional Transport Network») (ci-après le réseau principal) représente une excellente occasion pour les pays des Balkans occidentaux d'unir leurs intérêts et de chercher des solutions qui soient avantageuses du point de vue économique, social ainsi qu'environnemental et profitables à cette région dans son ensemble. En termes d'essor économique, la mise en œuvre de projets d'infrastructures régionales a une incidence positive sur les économies de la région, contribue à l'ouverture de leurs marchés à de nouvelles initiatives entrepreneuriales et renforce l'efficacité des échanges commerciaux entre les pays de la région. Le développement du réseau de transport régional aide en particulier les gouvernements des pays des Balkans occidentaux à lutter contre un taux de chômage élevé et, dès lors, stimule l'expansion économique générale de la région. De meilleures opportunités d'emploi et une mobilité accrue de la main-d'œuvre contribuent également au développement social. Le réseau de transport régional permet également de renforcer la coopération transfrontalière et les contacts interpersonnels. Compte tenu de l'impact considérable des transports sur l'environnement, il est essentiel que les questions environnementales soient prises en compte dans le cadre du développement du réseau de base du transport régional.

Le développement de ce réseau a également une forte dimension politique. En mettant en œuvre des projets d'infrastructures, les gouvernements des pays des Balkans occidentaux avec l'ensemble des autres acteurs concernés peuvent témoigner de leur disponibilité à surmonter les tensions et les problèmes bilatéraux issus d'un passé récent. Le développement du réseau de transport régional contribue dès lors à l'intégration régionale des pays des Balkans occidentaux.

2.2   Le rôle de l'Union européenne dans le développement de la politique des transports dans la région des Balkans occidentaux.

2.2.1

L'UE porte un intérêt direct aux Balkans occidentaux car cette région est située au cœur de l'Europe. Tous les pays de la région sont soit des candidats, soit des candidats potentiels à l'adhésion à l'UE. Pour atteindre cet objectif, ils doivent satisfaire à l'ensemble des critères et des conditions d'adhésion. La coopération régionale est l'un des préalables en vue d'une intégration réussie de ces pays dans l'Union européenne et elle constitue dès lors également un élément essentiel du processus de stabilisation et d'association (PSA). Pour cette raison, l'UE tient à soutenir l'essor de projets régionaux, notamment du réseau principal de transport régional, qui joue un rôle fondamental.

2.2.2

L'UE considère que les transports sont un domaine d'action tout désigné et approprié pour une coopération régionale efficace et estime par conséquent que la politique des transports dans la région des Balkans occidentaux peut être ambitieuse et faire progresser la région vers l'alignement sur l'acquis communautaire. L'importance de cette politique est encore renforcée par le fait que quatre des dix corridors paneuropéens traversent les Balkans occidentaux. La politique européenne en matière de transports poursuit dans cette région trois objectifs principaux. Le premier consiste à améliorer et à moderniser le réseau de transport de l'Europe du sud-est en vertu de considérations de développement économique et social. Le second vise à optimiser le trafic sur le réseau en appliquant des mesures douces et/ou horizontales. Le dernier vise à permettre d'aligner la région sur l'acquis en matière de transport. Afin de développer ces priorités, l'UE négocie actuellement un traité instituant une communauté des transports avec les pays des Balkans occidentaux (voir le paragraphe 4.3 ci-après).

3.   Description du réseau principal de transport de cette région

Le protocole d'accord sur le développement du réseau principal de transport régional pour l'Europe du sud-est le définit comme un réseau multimodal qui comprend les liaisons routières, ferroviaires et de navigation intérieure des sept pays participants des Balkans occidentaux, l'Albanie, la Bosnie-Herzégovine, la Croatie, l'ancienne République yougoslave de Macédoine, le Monténégro, la Serbie et le Kosovo (2), ainsi que certains ports maritimes, fluviaux et aéroports.

Le réseau principal routier et ferroviaire se compose de corridors et de voies. Les corridors correspondent aux corridors paneuropéens de transport établis, numéros V, VII, VIII et X, qui relient ces pays à l'UE. Les voies, dont sept sont routières et six ferroviaires, complètent le réseau principal afin de relier entre elles les capitales de cette région et ces dernières à celles de pays voisins. Leur objectif est également de relier les grands centres urbains régionaux, d'assurer l'accès aux ports (et aéroports) du réseau principal et de garantir une desserte appropriée des zones les plus isolées de cette région. Le réseau principal des voies navigables intérieures se compose du Corridor VII (le Danube) et de la Save.

3.1   Le réseau routier principal

Le réseau routier principal est long de 5 975 km au total, dont 3 019 de corridors et 2 956 de routes. Selon les données recueillies par l'observatoire des transports de l'Europe du sud-est (OTESE), 13,2 % du réseau routier principal sont classés comme étant en mauvais ou en très mauvais état, tandis que 87 % des routes le sont comme étant en état médiocre à très bon (3).

La prépondérance du secteur routier explique que lui soit allouée la plus grande part des financements. Il convient d'améliorer la qualité des routes afin de réduire les pertes de temps, les embouteillages ainsi que la pollution et de les rendre plus sûres. Bien que les pays en question se soient efforcés d'étoffer et de durcir leur législation, la sécurité routière reste l'un des problèmes essentiels (4). Les données en la matière dépeignent une situation inquiétante dans cette région de l'Europe du sud-est, où le nombre de victimes ne cesse de croître, en raison des effets cumulés d'un manque d'investissements, de l'absence d'entretien approprié et de l'inapplication de la législation.

3.2   Le réseau ferroviaire principal

3.2.1

Le réseau ferroviaire principal est long de 4 615 km au total, dont 3 083 de corridors et 1 532 de voies. Seuls 15 % du réseau ferroviaire principal sont classés comme en bon état, tandis que 19 % le sont comme en mauvais ou très mauvais état (5).

3.2.2

Le transport ferroviaire est le maillon le plus faible de tous les modes de transport. L'analyse de l'accessibilité, en comparant les mêmes couples départ/destination, montre que les trajets en chemin de fer ont une durée jusqu'à 200 % plus importante que celle des trajets par la route. L'infrastructure ferroviaire est sous développée dans tous les pays des Balkans occidentaux. C'est pourquoi des investissements ferroviaires considérables y sont nécessaires. La restructuration des compagnies de chemin de fer, dont les effectifs sont souvent considérés comme pléthoriques, constitue un autre défi à relever à l'avenir.

3.3   Les autres modes de transport (voies navigables intérieures, ports de navigation intérieure, ports maritimes)

3.3.1

Le Danube (corridor VII) (6) traverse la Croatie et la Serbie sur 588 km et la Save est navigable sur 593 km. Le réseau principal se compose également de sept ports maritimes et de deux ports fluviaux (7) Hormis une portion de 30 km, le Danube est pour l'essentiel en bon étatcontrairement à la Save, dont l'état est bien plus mauvais (8).

3.3.2

Les voies navigables intérieures constituent le mode de transport le plus écologique et le moins cher. Cependant, il présente l'inconvénient d'être lent.

3.3.3

L'intermodalité des transports est limitée et se résume actuellement pour l'essentiel au transport terrestre de containers de et vers les ports. De plus, les terminaux intermodaux existants ne sont pas utilisés à leur pleine capacité. Cependant, le potentiel des transports intermodaux dans le cadre du réseau principal est estimé à quelque 10 %, et devrait croître de 15 % d'ici 2015.

3.3.4

On peut faire valoir que les réformes du secteur des transports progressent constamment dans tous les pays de cette région grâce à la poursuite des stratégies nationales de transport et à l'adoption de nouveaux textes législatifs et réglementaires conformes à l'acquis et la politique de transport de l'UE. Ces pays admettent de manière générale que ces réformes devraient être cohérentes avec les intérêts de leur région, ce qui signifie qu'elles ne devraient pas créer de disparités qui pourraient aller à l'encontre du développement et une gestion efficace du réseau principal. À l'image de ce qui se passe pour le processus d'adhésion à l'UE, certains pays sont plus avancés que d'autres.

4.   Les documents cadres et les dispositions institutionnelles

4.1

La politique commune des transports pour les Balkans occidentaux remonte au Pacte de stabilité pour l'Europe du sud-est de 1999. Comme indiqué précédemment, l'UE voit dans la coopération des pays de la région des Balkans occidentaux un pré-requis à leur adhésion future à l'UE et une condition préalable au développement de la politique des transports pour cette région. L'UE a donc encouragé ces pays à développer une coopération intrarégionale et à renforcer leur coordination dans le domaine de la politique commune de transport. Afin de stimuler le développement d'une infrastructure de transport en Europe du sud-est, les participants de la région et la Commission européenne ont signé en 2004 un protocole d'accord sur le développement du réseau principal de transport de la région d'Europe du sud-est. En conséquence, trois grands organismes de coordination ont remplacé les divers forums qui agissaient dans le domaine de l'infrastructure de transport régional. Le premier est la conférence ministérielle annuelle, qui prend les décisions stratégiques, le second est un comité directeur qui coordonne la mise en œuvre du dit protocole d'accord et le dernier est l'Observatoire des transports de l'Europe du sud-est (OTESE) qui sert de secrétariat permanent (9). Ce protocole d'accord engage les parties prenantes à concevoir et à mettre en œuvre conjointement un plan d'action pluriannuel glissant sur une période de 5 ans. Il sert également à encadrer un processus coordonné qui mène à l'élaboration d'un projet de traité instituant une communauté des transports avec les pays des Balkans occidentaux.

4.2

Ce dernier traité, actuellement en cours de négociation, viendra remplacer le protocole d'accord existant. Il vise à créer un marché intégré des infrastructures, des systèmes et des services de transports terrestres, fluviaux et maritimes, lié étroitement au marché intérieur de l'Union européenne des transports en question. L'institution de cette communauté des transports accélérerait l'intégration des systèmes de transports au sein de cette région ainsi qu'avec ceux de l'UE. En plus d'accélérer l'alignement de la législation afférente, y compris l'acquis social dans ce domaine, cette communauté des transports permettrait aux usagers et aux citoyens de bénéficier plus rapidement du processus d'adhésion. Elle offrirait également une sécurité juridique aux opérateurs et aux investisseurs du secteur des transports, permettant ainsi de stimuler et d'accélérer les investissements nécessaires et le développement économique (10).

4.3

Elle vise par ailleurs à créer un cadre réglementaire et commercial stable qui permette d'attirer les investisseurs pour tous les modes de transports et les systèmes de gestion du trafic, d'accroître l'efficacité des modes de transport et de contribuer à une répartition modale plus durable ainsi que d'associer au développement des transport le progrès social et le respect de l'environnement. Il convient de souligner que le traité ne prendra effet dans certains pays des Balkans occidentaux que lorsque ces derniers appliqueront l'ensemble de l'acquis nécessaire.

5.   Les principaux défis concernant la politique des transports dans la région des Balkans occidentaux

L'intégration de l'infrastructure est un grand défi pour les pays des Balkans occidentaux. Alors que les infrastructures et la facilitation des transports sont cruciaux pour le développement économique, la cohésion et l'intégration sociales, on peut faire valoir que les transports dans cette région se caractérisent par leurs systèmes extrêmement fragmentés, leur infrastructure détériorée et leurs services inefficaces. Pour changer cet état des choses, des efforts appropriés seront nécessaires dans les domaines de la planification, de la législation et des financements. Au moment de relever ces trois défis, il conviendrait toutefois de tenir compte des grands traits spécifiques historiques, politiques, économiques, sociales et géographiques de la région des Balkans occidentaux. De ce fait, l'expérience de l'extension de la politique de transports de l'UE aux douze nouveaux États membres ne sera que faiblement transposable.

5.1   La planification

5.1.1

L'harmonisation réglementaire et la coordination entre autorités sont les principaux moteurs de l'intégration du secteur des transports. Eu égard au nombre d'acteurs qui participent au processus de développement de la politique régionale des transports, il convient de planifier et de coordonner convenablement ces activités.

5.1.2

Au plan national, l'application de l'acquis requiert des gouvernements des pays des Balkans occidentaux de planifier et de mettre en œuvre d'importantes réformes dans leurs secteurs des transports, ainsi que dans d'autres secteurs connexes. Ce processus devrait être accompagné d'une étude d'impact précise.

5.1.3

Parmi les éléments importants pour un développement efficace de la politique des transports, il conviendrait de citer la planification efficace des dépenses publiques et la coopération avec les autres parties prenantes, y compris les partenaires sociaux et les institutions financières internationales.

5.1.4

Un défi connexe réside dans la nécessité de faire correspondre les stratégies nationales des transports aux intérêts de cette région et de coordonner la mise en œuvre du projet de réseau principal, pour soutenir la gestion efficace et le développement du réseau principal.

5.1.5

Enfin et surtout, l'élaboration des plans d'action glissants pluriannuels de l'OTESE pour le développement du réseau principal de transport pour cette région requiert de planifier et de coordonner efficacement ces activités au plan régional. Une telle coordination sera également nécessaire dans le cadre du forum social régional, auquel participeront les représentants des partenaires sociaux et des autres parties concernées des pays des Balkans occidentaux, y compris les organisations non gouvernementales.

5.2   La législation

5.2.1

Une priorité en la matière réside dans l'adaptation nécessaire de la législation nationale à l'acquis communautaire et aux normes de l'UE dans le domaine des transports. L'acquis est particulièrement vaste dans ce domaine, couvrant l'accès au marché et les normes en matière sociale, technique, fiscale, de sécurité et environnementale. Les pays des Balkans occidentaux sont donc confrontés au défi de mettre en œuvre et d'appliquer ce vaste corpus d'acquis qui comprend un grand nombre de règlements, de directives et de décisions. La transposition et l'application sélectives de cet acquis européen constituent des défis supplémentaires.

5.2.2

En raison de la fragmentation élevée qui caractérise la région de l'Europe du sud-est, les questions liées au passage des frontières y sont très importantes. Actuellement, les temps d'attente aux frontières entravent sérieusement l'efficacité et la compétitivité du réseau principal. Aussi, les participants des Balkans occidentaux devraient-ils consentir des efforts supplémentaires pour améliorer la gestion et les procédures aux frontières et réduire les temps d'attente.

5.2.3

Il conviendrait également de mettre en lumière les aspects environnementaux. L'application des normes environnementales revêt une importance toujours plus grande lors de l'élaboration des projets d'infrastructure. Comme la législation en la matière constitue une part importante de l'acquis, il ne saurait être question qu'elle ne soit pas appliquée. On peut cependant arguer de ce que les pays des Balkans occidentaux connaissent de sérieuses difficultés à appliquer la législation environnementale.

5.3   Les financements

5.3.1

Le développement et l'entretien des réseaux de transports mobilisent des moyens financiers que les secteurs publics ne peuvent pas fournir. La coordination entre donateurs joue donc à cet égard un rôle important. L'UE mise à part, il convient que les institutions financières internationales (IFI), telles que la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD), la Banque mondiale, la Banque européenne d’investissement (BEI), la Banque de développement du Conseil de l'Europe (BDCE), et les donateurs bilatéraux coordonnent leurs activités pour allouer les fonds nécessaires. Les gouvernements des pays des Balkans occidentaux peuvent également recourir aux partenariats publics/privés (PPP) pour financer leurs réseaux de transport.

5.3.2

La conférence ministérielle tenue à Sarajevo en septembre 2009 en a d'ailleurs reconnu toute l'importance. La déclaration des ministres participants n'a pas seulement reconnu et salué le rôle important que le secteur privé joue dans le développement des infrastructures, mais également la nécessité de créer un cadre institutionnel et législatif qui lui permette de participer aux projets d'infrastructure par le biais des partenariats publics/privés. De plus, les ministres se sont engagés, à cette occasion, à élaborer des projets d'infrastructure à l'échelle régionale et ils ont soutenu la mise en place d'un réseau des partenariats publics/privés de l'Europe du sud-est (11). Cette déclaration fournit un cadre approprié en vue d'améliorer la réalisation de projets PPP de développement des infrastructures dans la région. Sa mise en œuvre exige cependant des réformes, y compris des régimes législatifs et réglementaires, ainsi que le soutien actif, au moyen d'une assistance technique et financière, des partenaires internationaux, à savoir la Commission européenne, les institutions financières internationales et les donateurs bilatéraux.

5.3.3

Le cadre d’investissement en faveur des Balkans occidentaux (WBIF) constitue une mesure supplémentaire importante destinée à garantir une coopération plus étroite entre les institutions financières internationales, les donateurs bilatéraux et l'Union européenne. Il a été lancé en décembre 2009 et il comprend un mécanisme conjoint d’aide non remboursable et un mécanisme conjoint de prêts destinés à financer la réalisation de projets prioritaires dans les Balkans occidentaux, parmi lesquels les projets d'infrastructure jouent un rôle crucial (12).

6.   Les retombées économiques et sociales/le rôle de la société civile

L'extension des réseaux de transports régionaux présente des risques et des opportunités équivalents pour les employeurs et les salariés. La participation de ces deux groupes est essentielle pour mener à bien la mise en œuvre de tout projet d'infrastructure. On peut cependant faire valoir que ni les organisations patronales ni les syndicats n'utilisent efficacement leur rôle de partenaires sociaux vis-à-vis des institutions de l'UE, des institutions financières et des donateurs internationaux. D'autre part, le succès de la restructuration des infrastructures et des réformes d'accompagnement dépend largement d'un soutien total et d'une acceptation générale, ce qui ne pourra se faire sans l'engagement actif des organisations de la société civile. Le dialogue avec les partenaires sociaux et les acteurs de la société civile devrait donc jouer un rôle crucial en matière de conception de toute politique dans les Balkans occidentaux, y compris la politique des transports. Les pays de cette région se caractérisent cependant par une tradition de dialogue social et civil médiocre, des mécanismes de consultation peu développés et une conception du partenariat déficiente. Dans ces conditions, il convient d'encourager les gouvernements des pays des Balkans occidentaux à faciliter la participation active de représentants des partenaires sociaux et d'autres organisations de la société civile concernées au processus d'élaboration de la politique régionale des transports et à la conception des stratégies de réforme.

6.1   Les organisations patronales

6.1.1

Les transports sont l'un des secteurs prépondérants dans l'emploi dans la région. Les employeurs devraient donc jouer un rôle dans l'élaboration des politiques et la conduite des réformes qui bénéficient à leurs entreprises, mais également aux salariés et aux citoyens de leur pays. Les organisations du secteur des transports et les employeurs ont également un rôle à jouer dans la négociation des priorités des réseaux de transport nationaux et régionaux, dans l'analyse de leur impact sur la promotion de la mobilité, la création et le maintien d'emplois ainsi qu'au niveau des bénéfices généraux pour les économies nationales.

6.1.2

Dans cette région, la visibilité et l'influence des organisations patronales varient d'un pays à l'autre. De manière générale, leurs positions sont plutôt faibles surtout en raison d'une absence de capacités internes de mobilisation, de difficultés à offrir une représentation efficace et à promouvoir leurs intérêts dans les relations avec le gouvernement et les autres parties prenantes.

6.1.3

Il y a donc lieu de développer les compétences des membres des organisations patronales en matière de représentation et d'analyse, qui seraient bénéfiques non seulement pour chaque pays mais également pour l'UE.

6.2   Les organisations syndicales

6.2.1

Le secteur des transports est l'un des plus grands pourvoyeurs d'emploi dans la région. La plupart de ces pays connaissent des conditions sociales et d'emploi précaires, avec un chômage persistant élevé, des taux de pauvreté importants et une forte migration de la population active, ainsi que des systèmes de sécurité sociale surchargés. Le secteur des chemins de fers a vu en une décennie quelque 50 % de ses travailleurs quitter leur emploi (13). La réforme des chemins de fer que chacun de ces pays devra mettre en œuvre passe par une réduction des effectifs, la privatisation des opérateurs de fret et la fermeture des lignes locales qui ne sont pas rentables (14). Les plans visant à libéraliser le transport ferroviaire auront donc un impact sur l'emploi et les conditions de travail.

6.2.2

Des pertes d'emplois affectent également les activités portuaires, ainsi que les communautés et les économies locales qui en dépendent. Des pertes d'emplois comparables se sont produites dans le secteur de la navigation intérieure.

6.2.3

Les organisations syndicales jouent avec les autres partenaires sociaux un rôle important dans l'évaluation de l'impact du développement du réseau principal de transport sur l'emploi. Les syndicats des transports de la région, coordonnés par la fédération européenne des travailleurs des transports, ont fait campagne – tant au niveau national qu'européen – pour que des études d'impact social se généralisent tout au long de la planification stratégique et de la mise en œuvre du traité instituant une communauté des transports (15). Les syndicats se préoccupent par ailleurs de faire converger les politiques de l'emploi et les réformes.

6.3   Autres groupes d'intérêt

Le développement des infrastructures a des effets considérables sur l'environnement. En conséquence, la protection de ce dernier joue un rôle important dans ce processus et devrait être prise en compte lors de la planification et du développement du réseau d'infrastructure. À cet égard, les organisations de défense de l'environnement ont un rôle significatif à jouer. Parmi elles, le centre régional pour l'environnement (CRE) de l'Europe centrale et orientale jouit d'une position unique. Sa mission est d'aider à résoudre les problèmes environnementaux de la région. Son objectif principal est de favoriser la coopération entre les organisations non gouvernementales, les gouvernements, les entreprises et d'autres acteurs dans le domaine de l'environnement et également de soutenir l'échange d'informations et la participation du public dans la prise de décisions en matière environnementale. Ce centre a convenu avec une autre initiative régionale importante, le conseil de coopération régionale, de mettre en œuvre le programme cadre, feuille de route pour la coopération environnementale en Europe du sud-est, qui comprend une série de conférences thématiques trimestrielles à haut niveau.

Outre les organisations de défense de l'environnement, le développement des infrastructures intéresse tout spécialement les organisations de consommateurs de l'ensemble de cette région, de même qu'un large éventail d'organisations non gouvernementales qui se consacrent au développement local ou d'associations qui prônent l'usage de la voiture, comme celles de l'industrie automobile.

7.   Le rôle du CESE pour le développement de la politique des transports dans la région des Balkans occidentaux

Les pays des Balkans occidentaux se caractérisent par une tradition de dialogue social médiocre et des mécanismes de consultation entre les partenaires sociaux peu développés. L'engagement des partenaires sociaux dans le processus de réforme est donc un pré requis essentiel pour une politique régionale des transports durable dans les Balkans occidentaux. Le CESE peut donc jouer un rôle de conseil important pour renforcer le dialogue social dans cette région, y compris à l'occasion du Forum de la société civile des Balkans occidentaux. Le CESE peut prêter son assistance afin de choisir les partenaires au sein des organisations de la société civile dans chacun des pays des Balkans occidentaux, ainsi que de renforcer les capacités de ces organisations et de leurs membres. De plus, l'expérience du CESE peut apporter une valeur ajoutée lors de la création du forum social régional, que prévoit d'établir le traité instituant une communauté des transports.

Bruxelles, le 17 mars 2010.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Tel qu'il est défini par la résolution 1244/1999 du Conseil de sécurité des Nations unies.

(2)  Tel qu'il est défini par la résolution 1244/1999 du Conseil de sécurité des Nations unies.

(3)  Plan de développement du réseau principal des transports dans la région du sud-est européen, Observatoire des transports de l’Europe du sud-est (OTESE), décembre 2008, www.seetoint.org/index.php?option=com_rubberdoc (en anglais).

(4)  Voir: Fédération routière européenne et Chambre de commerce mixte Belgique/Luxembourg/Europe du sud est: des réseaux pour la paix et le développement (2006), disponible en anglais sur le site:http://www.erf.be/index.php?option=com_content&view=article&id=157 %3Anetworks-for-peace-and-development&catid=18&Itemid=31

(5)  Plan de développement du réseau principal des transports en Europe du sud-est, Observatoire des transports de l’Europe du sud-est (SEETO), décembre 2008, www.seetoint.org/index.php?option=com_rubberdoc (en anglais)

(6)  L'Union européenne élabore actuellement une stratégie pour la région du Danube (la stratégie du Danube), où elle reconnaît toute l'importance de ce fleuve.

(7)  Font partie du réseau principal les sept ports maritimes suivants: Rijeka, Split, Ploce, Dubrovnik (en Croatie), Bar (au Monténégro), ainsi que Durres et Vlore (en Albanie). Les deux ports fluviaux se trouvent en Serbie, à Belgrade et à Novi Sad.

(8)  Plan de développement du réseau principal des transports de l'Europe du sud-est, Observatoire des transports de l’Europe du sud-est (SEETO), décembre 2009, www.seetoint.org/index.php?option=com_rubberdoc (en anglais).

(9)  L'objectif de l'OTESE est également de promouvoir la coopération en matière de développement des infrastructures principales et auxiliaires du réseau principal de transport de l'Europe du sud-est et de promouvoir et de renforcer les capacités locales en vue de mettre en œuvre les programmes d'investissement, de gestion, de collecte des données et d'analyse en matière de réseau de transport principal de la région. www.seetoint.org (en anglais).

(10)  Voir: «La Commission propose la création d’une Communauté des transports avec les Balkans occidentaux et prend de nouvelles mesures pour renforcer la coopération avec les pays voisins dans le secteur des transports», Bruxelles, le 5 mars 2008, http://europa.eu/rapid/pressReleasesAction.do?reference=IP/08/382&format=HTML&language=FR

(11)  Déclaration ministérielle sur les partenariats publics/privés pour le développement des infrastructures en Europe du sud-est, le 25 septembre 2009.

(12)  Pour une présentation du cadre d’investissement en faveur des Balkans occidentaux, voir (en anglais): http://ec.europa.eu/enlargement/pdf/western-balkans-conference/wbif-a4-def_en.pdf; pour le lancement du cadre d’investissement en faveur des Balkans occidentaux, voir: http://europa.eu/rapid/pressReleasesAction.do?reference=BEI/09/246&format=HTML&aged=0&language=FR&guiLanguage=en

(13)  Voir: Fédération européenne des travailleurs des transports (FET): l'impact social de la politique européenne d'infrastructures de transport, 2005 Contribution à une consultation publique.

(14)  Voir: Banque mondiale: la réforme des chemins de fer dans les Balkans occidentaux, document inédit de la Banque mondiale, District de Washington, 2005.

(15)  La fédération européenne des travailleurs des transports coordonne les actions syndicales avec ses membres provenant de l'Europe du sud-est depuis janvier 2003. Cette fédération couvre les secteurs suivants: les transports routiers, ferroviaires, maritimes et de la navigation interne et l'aviation. Il n'existe pas de dialogue social sectoriel à l'échelle européenne dans le secteur portuaire.


28.12.2010   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 354/56


Avis du Comité économique et social européen sur «Les organisations de la société civile et la présidence du Conseil de l'UE» (avis d'initiative)

2010/C 354/09

Rapporteur: M. Miklós BARABÁS

Le 25 mars 2009, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l'article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d'élaborer un avis d'initiative sur le thème:

«Les organisations de la société civile et la présidence du Conseil de l'UE».

Le sous-comité «Les organisations de la société civile et les présidences de l'UE», chargé de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 12 janvier 2010.

Lors de sa 461e session plénière des 17 et 18 mars 2010 (séance du 17 mars 2010), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 156 voix pour, 2 voix contre et 5 abstentions.

1.   Introduction

1.1

L'entrée en vigueur, le 1er décembre 2009, du traité de Lisbonne a apporté des changements considérables dans le système institutionnel de l'Union européenne, en créant notamment le poste de président permanent du Conseil européen. Dans le même temps, le traité de Lisbonne a doté d'une base juridique la «présidence à trois» (1), dans le cadre de laquelle trois États membres remplissent, pendant une période de 18 mois et sur la base d'un programme convenu préalablement, les missions propres à la présidence du Conseil de l'UE.

1.2

Du point de vue de la société civile, l'article 11 du traité de Lisbonne revêt une importance particulière. En effet, il prévoit notamment le renforcement de la démocratie participative, l'intensification et l'institutionnalisation du dialogue avec les citoyens, la poursuite des consultations de fond dans le cadre de l'élaboration des politiques communautaires et l'instauration de l'initiative citoyenne. Toutes ces mesures peuvent contribuer au renforcement du dialogue civil.

1.3

L'ambition du présent document est d'examiner les thèmes mentionnés dans les paragraphes précédents. À cette fin, il insiste sur le rôle particulier du CESE, en tant que représentant institutionnel au niveau européen de la société civile organisée, formule des propositions en vue de consolider ce rôle et, parallèlement, soutient pleinement les dispositions du traité de Lisbonne visant à rendre le fonctionnement de l'Union européenne plus efficace et plus transparent et à accroître la légitimité de l'UE.

2.   Vers la nouvelle présidence en exercice, la «présidence à trois»

2.1

La présidence en exercice, ou plus précisément la présidence en exercice du Conseil de l'Union européenne, n'est pas une nouveauté: il s'agit d'une fonction qui se caractérise essentiellement par le fait qu'elle est exercée à tour de rôle, pendant une période de six mois, par chacun des États membres de l'Union. Pendant cette période, le pays qui a la charge de la présidence est «le visage et la voix» de l'UE; il définit les stratégies et assume une fonction et des missions d'organisation et de représentation.

2.2

Les missions de la présidence s'accompagnent de lourdes responsabilités et reposent sur les efforts de l'ensemble du gouvernement. Tant qu'un État membre assume cette fonction, il n'a pas le droit de défendre des positions nationales.

2.3

Les règles relatives à la présidence ont été modifiées le 15 septembre 2006 par la Décision du Conseil portant adoption de son règlement intérieur (2006/683/CE), et ont jeté les bases nécessaires à l'instauration du système du «trio» de la présidence. Ce règlement prévoit, pour l'essentiel, que pour chaque période de 18 mois, les trois présidences qui seront en exercice à ce moment-là élaborent, en étroite coopération avec la Commission et après avoir procédé aux consultations, le programme des activités du Conseil pour ladite période.

2.4

Quel est l'avantage de cette nouvelle forme de présidence? Le système conserve toujours la caractéristique de la présidence semestrielle qui laisse une certaine marge de manœuvre au pays exerçant la présidence. Le programme élaboré conjointement par le «trio» contribue à une meilleure collaboration entre les États membres, qui peuvent ainsi garantir une plus grande continuité et une meilleure cohérence des politiques de l'Union et, par conséquent, dans la vie de la Communauté.

2.5

Le premier groupe de la présidence de type «trio», composé de l'Allemagne, du Portugal et de la Slovénie, a commencé à fonctionner le 1er janvier 2007, et a été suivi, du 1er juillet 2008 au 31 décembre 2009, par le «trio» constitué de la France, de la République tchèque et de la Suède. L'on estime cependant que, pour diverses raisons mais avant tout à cause de l'absence de bases juridiques, ce sont surtout les considérations et les aspirations nationales qui dominaient dans les travaux de ces «trios» plutôt que les positions communes au «trio».

2.6

Après l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne, c'est l'équipe Espagne-Belgique-Hongrie qui assume les fonctions de la «présidence à trois» et ce depuis le 1er janvier 2010. Son action se fonde sur le programme de travail adopté lors de la réunion du Conseil européen du 17 décembre 2009. Ce programme, très ambitieux, porte sur un large éventail de domaines. L'un des principaux éléments contribuant au succès des travaux est la composition du «trio»: un grand État membre et/ou un pays fondateur – disposant par conséquent d'une expérience considérable – avec un pays ayant adhéré ultérieurement à l'Union et un «nouvel» État membre.

2.7

L'expérience montre que même si les pays disposant du plus grand poids politique bénéficient aussi d'un pouvoir de négociation plus fort, les pays plus petits peuvent compenser leurs handicaps – qui ne sont souvent qu'apparents – ou leur éventuel manque d'expérience par un choix judicieux des priorités, une bonne stratégie de négociation et une disposition non négligeable au compromis.

2.8

Après l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne, l'action de la présidence à trois créera en effet un précédent en ce qui concerne la répartition des tâches entre le président du Conseil européen élu pour deux ans et demi (et rééligible une fois) et le «trio» fonctionnant sur la base de la tournante, une répartition des tâches dont on ne cerne pas aujourd'hui clairement tous les éléments. Le succès dans ce domaine suppose une collaboration étroite. Considérant que, pour le reste, le système actuel continuera de s'appliquer pour un grand nombre de domaines, on est en droit de s'attendre à ce que les gouvernements nationaux continuent bien naturellement de s'efforcer de «faire parler d'eux» et d'être efficaces pendant les six mois de leur présidence. Cette nouvelle situation comporte des éléments importants également pour les organisations de la société civile.

3.   Les organisations de la société civile et la pratique actuelle: quelques traits caractéristiques

3.1

Nous partons du principe que les missions à accomplir par la présidence tournante du Conseil relèvent fondamentalement des gouvernements nationaux. Celles-ci sont menées à bien avec le concours déterminant de fonctionnaires publics (diplomates), d'experts et de responsables politiques. Ni les documents régissant l'exécution des tâches présidentielles, ni le traité de Lisbonne n'abordent la participation organisée et institutionnelle de la société civile.

3.2

Dans le même temps, tant les institutions de l'UE que les gouvernements des pays exerçant la présidence tournante du Conseil reconnaissent de plus en plus que la participation de la collectivité, c'est-à-dire des organisations de la société civile et des citoyens, peut contribuer de manière appréciable au succès des travaux. Cela démontre une reconnaissance de la valeur de la démocratie participative et l'importance du dialogue civil.

3.3

L'on ne peut toutefois pas en déduire qu'il existe une politique et une pratique uniques au niveau de l'UE en ce qui concerne la manière dont les organisations de la société civile s'associent et participent à la réalisation des programmes des présidences du Conseil. Quant à la situation au niveau national, elle peut être très différente d'un pays à l'autre et le degré d'organisation et d'activité de la société civile du pays assurant la présidence du Conseil ainsi que la qualité de ses relations avec son gouvernement ont une influence déterminante. Les relations de partenariat ne peuvent être considérées dans ce domaine comme caractéristiques.

3.4

L'on peut également conclure de ce qui précède que l'implication des organisations de la société civile dans l'élaboration des priorités proposées par le pays assumant la présidence du Conseil n'est pas généralisée. Cette situation entraîne logiquement, au sein de la société civile, un sentiment d'appropriation défaillant, voire inexistant.

3.5

Étant donné que la «présidence à trois» est un concept relativement nouveau, il n'est pas surprenant que l'on ne puisse assister qu'occasionnellement à des actions ou initiatives conjointes, convenues d'avance, de la part des organisations de la société civile des trois pays concernés. À cet égard, des premiers signes encourageants apparaîtront sous la présidence du «trio» Espagne-Belgique-Hongrie, notamment dans le cadre de la préparation et de l'organisation de manifestations de la société civile qui auront une grande visibilité (à Malaga en 2010 et à Budapest en 2011).

3.6

Depuis quelques années, il est de coutume que le pays assumant la présidence du Conseil accueille, avec le soutien de la Commission européenne, une rencontre représentative de la société civile – ce qui s'est traduit, sous la présidence française, par l'organisation d'un forum de la société civile, de grande envergure, à La Rochelle en septembre 2008. Les questions touchant directement les organisations de la société civile y sont débattues, et dans le meilleur des cas intégrées dans les priorités élaborées par le pays en question.

3.7

Les années thématiques décidées par l'Union européenne (par exemple 2010, année européenne de la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale) offrent de bonnes possibilités en termes de participation des organisations de la société civile aux programmes et aux activités de la présidence du Conseil.

4.   Le Comité économique et social européen et la présidence du Conseil: pratique actuelle

Au cours des années, le CESE a mené de nombreuses activités en rapport avec la présidence du Conseil, entre autres dans les domaines suivants:

invitation de représentants de haut niveau du pays assurant la présidence du Conseil à la session plénière du CESE et aux réunions d'autres organes (sections, groupes, etc.);

définition des priorités et préparation d'activités spécifiques du CESE en relation avec les programmes de la présidence semestrielle du Conseil;

avis du CESE sur différentes questions à la demande et à l'initiative de la présidence du Conseil;

participation aux différents programmes de la présidence du Conseil; publication d'avis du CESE sur des questions faisant l'objet d'un débat;

visites dans le pays exerçant la présidence du Conseil; participation à des programmes spécialisés et renforcement des liens avec les différentes organisations de la société civile;

participation à des manifestations de la société civile de grande envergure et de niveau européen organisées dans le pays de la présidence du Conseil;

organisation, au siège du CESE, de conférences, de présentations, de manifestations culturelles, d'expositions, etc. offrant au pays assurant la présidence du Conseil et aux organisations de sa société civile la possibilité de se faire connaître;

accueil au CESE de groupes de visiteurs (représentants de la société civile) en provenance du pays de la présidence;

attention accrue, dans le cadre de la politique de communication du CESE, pour le pays de la présidence et sa société civile.

5.   Étape suivante: le traité de Lisbonne, la présidence du Conseil et la société civile organisée – propositions

5.1

Notre point de départ est le traité de Lisbonne et son entrée en vigueur le 1er décembre 2009, qui créent les conditions appropriées pour que l'Union européenne puisse donner des réponses tournées vers l'avenir aux multiples défis auxquels elle est confrontée.

5.2

Notre objectif est le développement de la démocratie participative, l'intensification du dialogue avec les citoyens, le renforcement du dialogue civil pour pouvoir ainsi également contribuer au renforcement de la légitimité démocratique des institutions européennes.

5.3

L'article 11 du traité de Lisbonne constitue une bonne base à cette fin; les nouvelles possibilités prévues par cet article concordent parfaitement avec de précédents avis du CESE, notamment celui sur le document de la Commission intitulé «La Commission et les organisations non gouvernementales: le renforcement du partenariat» (adopté le 13 juillet 2000) (2) et celui sur «La représentativité des organisations européennes de la société civile dans le cadre du dialogue civil» (adopté le 14 février 2006) (3). Il devient de ce fait non seulement possible, mais également nécessaire que le CESE, en tant que représentant institutionnel au niveau européen de la société civile organisée, joue un rôle actif d'instigateur s'agissant de la réalisation complète possible des opportunités offertes par le traité de Lisbonne, en particulier son article 11, comme l'a mentionné le Comité dans son avis sur «La mise en œuvre du traité de Lisbonne: démocratie participative et initiative citoyenne (art. 11 TUE)», qui a été adopté le 17 mars 2010 (4).

5.4

Dans ce contexte, la présidence du Conseil constitue un instrument approprié pour:

renforcer l'engagement en faveur de l'idée européenne et contribuer à ce que la citoyenneté européenne active caractérise davantage notre quotidien;

faire en sorte que les organisations de la société civile et les citoyens soient les acteurs et les instigateurs directs des processus politiques qui, à différents niveaux, visent à définir l'avenir de l'Union européenne;

renforcer le dialogue civil;

s'assurer que le CESE poursuive, innove et enrichisse en permanence ses activités en rapport avec la présidence du Conseil, et que, dans ce cadre et en complément des points répertoriés au paragraphe 4, le Comité:

a)

insiste sur les initiatives et actions conjointes de la société civile, y compris l'organisation dans le pays assurant la présidence, de manifestations de la société civile à grande visibilité;

b)

œuvre pour que les principales initiatives de la société civile, en tant que résultat du dialogue de partenariat avec les autorités, soient intégrées dans les programmes de la présidence, ce qui permettrait de renforcer leur acceptation et leur soutien par la société;

c)

examine régulièrement, dans le cadre du groupe de liaison avec les organisations et réseaux européens de la société civile, les questions en rapport avec la présidence en exercice du Conseil et importantes du point de vue des organisations de la société civile;

d)

incite les conseils économiques et sociaux (ou institutions similaires) des pays de la présidence à participer activement aux programmes et activités qui les concernent

e)

garantisse à ses conseillers issus du pays de la présidence du Conseil toute l'aide nécessaire pour leur permettre de mener à bien leurs travaux en rapport avec la présidence;

f)

veille, par la diffusion des meilleures pratiques, à ce que les organisations de la société civile puissent contribuer efficacement aux travaux du pays de la présidence du Conseil.

Bruxelles, le 17 mars 2010.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  «La présidence du Conseil… est assurée par des groupes prédéterminés de trois États membres pour une période de 18 mois.» (JO C 115 du 9.5.2008, p.341: Déclaration ad article 16, paragraphe 9, du traité sur l'Union européenne concernant la décision du Conseil européen relative à l'exercice de la présidence du Conseil, article premier, premier point) – communément dénommés: «présidence à trois».

(2)  JO C 268 du 19.9.2000.

(3)  JO C 88 du 11.4.2006.

(4)  Voir page 59 du Journal officiel actuel.


28.12.2010   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 354/59


Avis du Comité économique et social européen sur «La mise en œuvre du traité de Lisbonne: démocratie participative et initiative citoyenne (art. 11)» (avis d'initiative)

2010/C 354/10

Rapporteure: Anne-Marie SIGMUND

Le 16 juillet 2009, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l'article 29, paragraphe 2, du Règlement intérieur, d'élaborer un avis d'initiative sur

«La mise en œuvre du traité de Lisbonne: démocratie participative et initiative citoyenne (art. 11 TUE)».

Le sous-comité chargé de préparer les travaux du Comité en la matière a adopté son avis le 11 février 2010.

Lors de sa 461e session plénière des 17 et 18 mars 2010 (séance du 17 mars 2010), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 163 voix pour, 1 voix contre et 3 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Les dispositions du traité sur l'Union européenne (TUE) relatives aux principes démocratiques de l'Union, notamment l'article 11, constituent de l'avis du Comité une étape historique dans la réalisation d'une Europe des citoyens tangible, qui fonctionne dans la pratique et qu'il est possible d'aménager. Cependant, il convient de définir de manière plus contraignante les différents processus démocratiques et de les doter des structures nécessaires.

1.2   S'agissant du dialogue civil horizontal (article 11. 1 TUE) et du dialogue civil vertical (article 11.2 TUE), le Comité réclame une définition claire de cet instrument et l'adoption de règles relatives à ses modalités d'application et aux parties prenantes. Il suggère à la Commission, par analogie avec la procédure suivie concernant l'article 11.4 TUE, d'engager un processus de consultation en présentant un livre vert sur le dialogue civil et de prendre les dispositions nécessaires sur la base des résultats obtenus.

1.3   Le Comité souligne sa volonté, déjà exprimée en plusieurs occasions, de contribuer de manière effective, en sa qualité de partenaire et d'intermédiaire dans le cadre du dialogue civil, au développement de ce dialogue et de jouer un rôle plus important en tant que lieu de rencontre. Afin d'accompagner de manière constructive le dialogue civil avec la société civile organisée, il met à la disposition de toutes les institutions de l'UE ses réseaux et son infrastructure.

1.4   L'article 11.3 TUE place les pratiques de consultation de la Commission, déjà largement développées jusqu'ici, dans le contexte du pilier participatif - désormais renforcé - du modèle démocratique européen. Le Comité appelle de ses vœux, pour cet instrument également, des règles de procédure plus claires, respectueuses des principes de transparence, d'ouverture et de représentativité.

1.5   Avec l'initiative citoyenne européenne introduite par l'article 11.4 TUE, le traité met concrètement en œuvre, pour la première fois dans l'histoire, une procédure de démocratie directe au niveau transfrontalier, transnational. Le Comité salue expressément cette nouvelle possibilité et entend contribuer concrètement à cette première historique. Il précise sa position concernant les dispositions d'application concrètes qui devront être adoptées en 2010. Il convient à cet égard de veiller:

à ce que les citoyens ne rencontrent pas d'obstacles inutiles dans l'exercice de leurs droits de participation, puisqu'il ne s'agit que d'une initiative invitant à mettre une question à l'ordre du jour;

à faciliter, par des règles du jeu et des dispositions claires, l'organisation de l'initiative dans 27 États membres par les promoteurs de celle-ci, sans qu'ils risquent de se heurter à des obstacles imprévus au niveau national;

à octroyer le cas échéant aux organisateurs une aide financière dès lors qu'un certain seuil est atteint.

1.6   Le Comité est appelé à jouer un rôle clé au sein d'une infrastructure démocratique transnationale en Europe et assumera ses fonctions dans le cadre de l'article 11 TUE avec efficacité et de manière ciblée. Il se propose également de faire office de service d'information, de soutenir le cas échéant les initiatives citoyennes par l'adoption d'un avis en la matière, d'organiser des auditions sur une initiative ayant abouti et d'appuyer éventuellement l'évaluation réalisée par la Commission en élaborant un avis.

2.   Contexte

2.1   En décembre 2001, les chefs d'État et de gouvernement européens ont adopté à Laeken un nouveau mode d'élaboration des traités européens et ont décidé de convoquer une «Convention sur l'avenir de l'Europe» qui, grâce à sa composition (1), a insufflé une forte dynamique démocratique et a en fin de compte accouché, en juin 2003, d'un texte contenant des propositions innovantes assurant une transparence et une participation accrues.

2.2   Après que les résultats négatifs des référendums organisés en France et aux Pays-Bas eurent mis en échec le «traité établissant une Constitution pour l'Europe» élaboré par la Convention, un traité sur l'Union révisé a été signé le 13 décembre 2007 à Lisbonne. Il est entré en vigueur le 1er décembre 2009.

3.   Introduction

3.1   L'entrée en vigueur du traité de Lisbonne rationalise de nombreuses procédures et les rend plus transparentes, clarifie les compétences, étend les prérogatives du Parlement européen et renforce la visibilité de l'Union européenne tant à l'intérieur qu'à l'extérieur.

3.2   À côté des formes de démocratie parlementaire (indirecte) (2), le modèle démocratique européen est étendu et renforcé, mais en aucun cas remplacé, par l'ancrage de la démocratie participative (directe) dans le TUE.

3.3   Les dispositions concrètes régissant la démocratie participative concernent:

le dialogue civique horizontal,

le dialogue civique vertical,

les procédures de consultation de la Commission déjà en vigueur et

la nouvelle initiative citoyenne européenne.

3.4   Conformément à la nature du traité sur l'Union, les dispositions de l'article 11 TUE ne sont que des clauses générales qu'il convient à présent de définir, d'organiser et de mettre en œuvre par des dispositions législatives appropriées et auxquelles les acteurs concernés doivent donner vie.

3.5   Concernant l'initiative citoyenne européenne, la Commission a déjà pris une initiative opportune et publié un livre vert (3). Elle présentera à l'issue de la procédure de consultation une proposition de règlement sur la mise en œuvre de l'article 11.4 TUE. Ce faisant, elle a envoyé un signal clair démontrant l'importance qu'elle attache au dialogue dans les préparatifs de la mise en œuvre de ce nouvel instrument et notamment à la prise en compte des acteurs de la société civile organisée et des citoyens intéressés de toute l'Union, qui seront ultérieurement appelés à porter ces initiatives.

4.   Traité de Lisbonne – Article 11 TUE

4.1   Dialogue civil horizontal

Article 11.1 TUE: «Les institutions donnent, par les voies appropriées, aux citoyens et aux associations représentatives la possibilité de faire connaître et d'échanger publiquement leurs opinions dans tous les domaines d'action de l'Union.»

4.1.1

Cette disposition confère au «dialogue civil» horizontal sa base juridique, sans le définir plus précisément. Dans le cadre de ses avis (4)  (5)  (6), le Comité s'est déjà exprimé à plusieurs reprises sur le dialogue civil, qu'il considère comme un élément essentiel de la participation dans le cadre du modèle démocratique européen. Il a également déjà souligné maintes fois sa volonté de faire office de plate-forme et de multiplicateur de ce dialogue et de contribuer à l'émergence d'une opinion publique européenne. Il n'a cessé d'insister dans ce contexte sur le fait qu'en sa qualité de partenaire et d'intermédiaire dans le cadre du dialogue civil, il entend contribuer et contribuera de manière effective au développement de ce dialogue. Il est disposé dans ce contexte à jouer un rôle accru en tant que lieu de rencontre et à apporter un soutien pratique, par exemple en mettant à disposition son infrastructure. Pour le Comité, il est très important de faire en sorte que le dialogue civil trouve l'écho nécessaire auprès de l'opinion publique (européenne) et devienne un véritable débat interactif.

4.1.2

Le Comité insiste une fois encore sur la nécessité de définir clairement cet instrument de la démocratie participative et d'arrêter les modalités concrètes de son fonctionnement. Ainsi, il convient de clarifier quels critères de représentativité doivent remplir les associations mentionnées dans ce chapitre pour pouvoir participer au dialogue. En ce qui concerne la représentativité des acteurs de la société civile organisée, le Comité a déjà fait valoir (7) combien il est important de distinguer entre représentativité quantitative (représentation légitime de la majorité des personnes concernées) et qualitative (preuve de l'expertise requise). Le Comité estime que les associations qui doivent prendre part au dialogue doivent être représentatives selon des critères à la fois quantitatifs et qualitatifs.

4.1.3

Il faudra également que le législateur indique plus précisément quelles mesures concrètes il juge nécessaire de prendre pour se conformer à l'obligation d'utiliser «les voies appropriées» (cf. article 11.1 TUE).

4.1.4

Le Comité juge important dans ce contexte d'insister sur la différence entre le dialogue civil européen et le dialogue social européen et met en garde contre toute confusion entre ces deux concepts. Le dialogue social européen constitue bien entendu aussi une composante essentielle d'une participation qualifiée, mais il obéit à des règles spécifiques en matière de contenu, de participation, de procédures et d'impact. Son ancrage juridique dans le traité témoigne de son importance.

4.2   Dialogue civil vertical

Article 11.2 TUE: «Les institutions entretiennent un dialogue ouvert, transparent et régulier avec les associations représentatives et la société civile.»

4.2.1

Cette disposition se réfère au dialogue civil vertical et enjoint aux institutions de l'Union de l'entretenir de manière régulière. Le Comité s'est également déjà exprimé à propos de cette forme de dialogue civil (8) et il demande à la Commission d'en définir plus précisément les modalités, sur le plan tant du contenu que des procédures juridiques.

4.2.2

Il y a quelque temps déjà, le Parlement européen – anticipant sur cette disposition du traité – a créé l'«Agora», instrument du dialogue civil vertical.

4.2.3

Étant donné que l'article 11.2 TUE invite toutes les institutions à entretenir un dialogue avec la société civile, le Comité demande à toutes les autres institutions, mais plus particulièrement au Conseil, d'indiquer au plus vite comment elles entendent mettre en œuvre cet article du traité.

4.2.4

Le Comité met ses réseaux et son infrastructure à la disposition de toutes les institutions de l'Union afin de lancer et d'accompagner de manière constructive ce dialogue vertical avec la société civile organisée.

4.3   Consultations par la Commission européenne

Article 11.3 TUE: «En vue d'assurer la cohérence et la transparence des actions de l'Union, la Commission européenne procède à de larges consultations des parties concernées.»

4.3.1

Cette disposition place les pratiques de consultation de la Commission, déjà largement développées jusqu'ici, dans le contexte du pilier participatif - désormais renforcé – du modèle démocratique européen. Le Comité rappelle (9)  (10) que cette pratique de consultation représente en substance un élément essentiel du principe de la «gouvernance européenne» (11) instauré en 2001 par la Commission et qu'en tant que démarche descendante, elle ne permet qu'indirectement, dans un premier temps, une action de la société civile. Il fait toutefois observer qu'il y a lieu d'établir une distinction entre la «consultation», qui est une initiative des autorités, et la «participation», qui constitue un droit du citoyen. Le principe d'une participation active - de sa propre initiative - de la société civile organisée à un processus (démarche ascendante) n'est pas remis en cause par cette disposition.

4.3.2

Le Comité est disposé dans le cadre de son mandat à soutenir la Commission européenne lorsqu'elle souhaite réaliser des consultations dépassant le cadre habituel de l'enquête en ligne, par exemple en organisant des consultations communes sur des questions spécifiques ou des consultations ouvertes dans le cadre de forums des parties prenantes, conformément à la méthode de l'espace ouvert.

4.3.3

Mais la consultation ne constitue pas à elle seule un véritable dialogue avec la société civile organisée. C'est pourquoi le Comité invite la Commission à revoir et à structurer la méthode actuelle de consultation. Il importe, d'une part, que le délai prévu pour les consultations soit suffisant pour que la société civile organisée et les citoyens aient vraiment le temps d'élaborer leurs réponses et que la consultation ne soit pas que de pure forme. Il faut, d'autre part, que l'évaluation des résultats soit plus transparente. La Commission devrait répondre aux contributions et exposer son point de vue, en expliquant pourquoi telle ou telle proposition a été retenue ou rejetée, afin d'instaurer un véritable dialogue. La Commission devrait, en ce qui la concerne, débattre activement avec la société civile organisée de telle ou telle amélioration.

4.4   L'initiative citoyenne européenne

Article 11.4 TUE: «Des citoyens de l'Union, au nombre d'un million au moins, ressortissants d'un nombre significatif d'États membres, peuvent prendre l'initiative d'inviter la Commission européenne, dans le cadre de ses attributions, à soumettre une proposition appropriée sur des questions pour lesquelles ces citoyens considèrent qu'un acte juridique de l'Union est nécessaire aux fins de l'application des traités.»

4.4.1

Le Comité partage le point de vue selon lequel cette nouvelle initiative citoyenne européenne revêt pour l'intégration européenne une importance dépassant largement le cadre de sa dimension juridique et doit être considérée comme un premier élément de démocratie directe à l'échelon transnational, dont l'application est toutefois limitée aux citoyens de l'Union, conformément au libellé de cette disposition. Il se féliciterait qu'à l'occasion d'une révision du traité, elle soit étendue aux ressortissants de pays tiers qui résident en permanence sur le territoire de l'Union.

4.4.2

Il y a lieu de souligner que le nouveau droit d'initiative citoyenne européenne n'est pas assimilable à une «initiative populaire» telle qu'il en existe dans de nombreux États membres, laquelle débouche sur un référendum obligatoire, mais qu'il s'agit d'une initiative invitant à examiner une question et demandant à la Commission de légiférer. Il s'agit d'un instrument à la disposition des minorités, qui donne seulement la possibilité d'influer sur l'agenda politique. La Commission conserve le droit d'initiative législative et le processus législatif qui s'ensuit éventuellement se déroule conformément aux procédures prévues.

4.4.3

Certaines règles et normes sont bien sûr nécessaires à la mise en œuvre de cet instrument. Mais comme les instruments de la démocratie directe au niveau européen restent encore à créer, il conviendrait de doter l'initiative citoyenne européenne d'un cadre à l'intérieur duquel elle pourrait peu à peu se développer. Le règlement d'application de l'article 11.4 TUE devrait établir des normes minimales et des conditions d'admissibilité aussi peu élevées que possible et, dans les domaines où les expériences font défaut au niveau de l'Union, laisser un espace disponible pour une marge d'appréciation et d'interprétation, puisque l'effet d'une initiative citoyenne européenne se limite à faire en sorte qu'une question déterminée soit incluse dans le programme d'action de la Commission.

4.4.4

Toutefois, le Comité n'est absolument pas d'accord avec le Parlement européen (12) lorsqu'il affirme «qu'il incombe au Parlement de contrôler le processus de l'initiative citoyenne». Il se déclare défavorable au contrôle d'un processus par le législateur au stade prélégislatif. Un tel «contrôle» violerait le principe du partage des pouvoirs. C'est pourquoi le Comité appelle de ses vœux la création d'une «instance consultative» indépendante ou d'un «service d'assistance» destiné à aider les initiateurs lors de la préparation et du lancement d'une initiative citoyenne européenne, de manière à éviter de manière générale, à défaut d'exclure, des conflits trop évidents avec les dispositions en matière d'admissibilité et de mise en œuvre.

4.4.5

Le Parlement attire à juste titre l'attention, dans ce même rapport, sur la nécessité de distinguer entre les pétitions, qu'il y a lieu d'adresser au Parlement, et les initiatives citoyennes, qui doivent être adressées à la Commission pour l'inviter à agir. Aussi convient-il de concevoir de manière totalement différente les procédures et les exigences relatives à ces deux instruments de participation citoyenne.

4.4.6

L'initiative citoyenne européenne en tant qu'instrument de la démocratie directe est aussi un moyen efficace de mettre en œuvre des processus délibératifs transnationaux. Les citoyens, qui aujourd'hui ont plutôt pris leurs distances vis-à-vis de «l'Europe politique», ont à présent la possibilité de participer au moyen d'initiatives et de projets concrets. Plus ils seront invités et encouragés à prendre part à l'initiative sans rencontrer d'obstacles administratifs inutiles et excessifs, plus ils se détacheront de l'image qu'ils ont d'eux-mêmes de spectateurs de décisions difficilement compréhensibles, pour passer du statut d'objet à celui de sujet de la collectivité européenne. Un tel processus, mis en œuvre pas à pas, qui oblige à se pencher sur les problèmes d'intérêt européen, ne pourra que favoriser l'émergence d'une conscience européenne, d'une opinion publique européenne.

4.4.7

Sur le fond, il est à souligner qu'une initiative citoyenne européenne ne peut bien entendu contrevenir au traité ou à la Charte européenne des droits fondamentaux. Mais comme dans le processus indirect/parlementaire, il peut également arriver dans le processus direct/citoyen de formation de l'opinion que des groupes extrémistes mettent à profit les canaux disponibles à cette fin et les détournent pour servir de manière éventuellement abusive leurs propres intérêts. Cela représente pour toute démocratie un grand défi fondamental, mais aussi son principal atout par rapport aux systèmes non démocratiques. Une démocratie représentative moderne reposant sur des piliers aussi bien indirects que directs doit être prête à parler de manière ouverte et transparente d'aspirations discutables, voire extrémistes.

4.5   Livre vert de la Commission européenne sur une initiative citoyenne européenne

4.5.1

Bien que le Comité n'ait pas été un destinataire direct de la procédure de consultation qui s'est achevée, il souhaite, préalablement à l'examen imminent de la proposition de règlement au Parlement et au Conseil, apporter une contribution qualifiée au processus de formation de l'opinion et donne ci-après son avis sur les questions soulevées dans le livre vert.

4.6   Nombre minimum d'États membres dont les citoyens doivent provenir

4.6.1

Le Comité partage le point de vue de la Commission selon lequel le seuil doit être déterminé sur la base de critères objectifs. Il n'est pas d'accord avec elle lorsqu'elle affirme qu'il faut au minimum un tiers des États membres, c'est-à-dire neuf États, pour représenter un intérêt commun à l'échelle de l'Union, mais n'approuve pas non plus la position de certaines organisations, pour lesquelles un seuil significatif est déjà atteint avec quatre États membres.

4.6.2

Le Comité se range plutôt à l'avis du Parlement européen, qui estime qu'un quart des États membres, soit actuellement sept États, constitue un seuil approprié. Cette valeur se réfère à l'article 76 TFUE, qui prévoit l'adoption, sur initiative d'un quart des États membres, d'actes juridiques visant à assurer la coopération administrative dans le cadre de la coopération judiciaire et policière ou en matière pénale. Le Comité y voit un ordre de grandeur approprié pour une réelle dimension européenne de l'initiative citoyenne.

4.7   Nombre minimum de signatures par État membre

4.7.1

Étant donné que le traité de Lisbonne ne parle que d'«un nombre significatif d'États membres», l'on pourrait également envisager de ne pas fixer de nombre minimum de participants par État. Mais, compte tenu de l'exigence d'une double majorité affirmée à plusieurs reprises dans le traité, le Comité partage le point de vue de la Commission selon lequel le fait de renoncer à un nombre minimum de participants par État membre serait contraire à l'esprit du traité.

4.7.2

Plutôt que la fixation d'un pourcentage invariable de 0,2 % par État membre, le Comité suggère un système flexible qui pourrait permettre une péréquation appropriée entre les États. Une valeur plancher absolue de 0,08 % (13) pourrait ainsi être exigée pour que les signatures provenant d'un État membre soient prises en compte. Une initiative citoyenne requiert bien entendu un million de signatures au total. La combinaison de ces deux critères assurerait une péréquation automatique tout en satisfaisant aux exigences du traité concernant la représentativité et l'existence d'un réel intérêt européen commun.

4.7.3

Un tel dispositif flexible, qui permettrait une plus grande facilité d'application, se justifie également aux yeux du Comité par le fait que l'initiative citoyenne européenne ne débouche pas en fin de compte sur une décision contraignante, mais ne constitue qu'une simple invitation adressée à la Commission.

4.8   Admissibilité d'un soutien à une initiative citoyenne

4.8.1

Le Comité partage le point de vue de la Commission selon lequel, afin d'éviter des charges administratives inutiles, la condition générale requise pour soutenir une initiative citoyenne devrait être que le citoyen concerné soit autorisé à participer aux élections européennes dans son État membre de résidence. Quelle que soit la sympathie que l'on éprouve pour une participation des jeunes (par exemple à travers un abaissement à 16 ans de l'âge minimal), une telle dérogation aux conditions régissant le droit de vote aux élections européennes compliquerait de manière disproportionnée le contrôle des signatures, en obligeant la quasi-totalité des États membres à établir de doubles registres électoraux.

4.9   Forme et libellé d'une initiative citoyenne

4.9.1

Le Comité juge là aussi inopportun d'imposer des prescriptions trop rigoureuses concernant la forme. Les exigences formelles requises pour les requêtes introduites auprès des administrations devraient s'appliquer et certaines exigences minimales devraient être définies (voir également paragraphe 4.13). Le contenu de l'initiative et de la décision demandée devrait être présenté de manière concise et claire. Il faut toujours que le signataire d'une initiative citoyenne européenne ait clairement conscience de ce à quoi il souscrit.

4.10   Exigences concernant la collecte, la vérification et l'authentification des signatures

4.10.1

Rien ne s'oppose à l'établissement au niveau communautaire, pour la collecte, la vérification et l'authentification des signatures, de règles de procédures et de normes communes qui s'écartent du droit national considéré, étant donné que l'initiative citoyenne européenne constitue un (nouvel) instrument transnational de participation.

4.10.2

Toutes les formes de collecte des signatures qui permettent une vérification de l'identité devraient être autorisées. La collecte des signatures devrait pouvoir s'effectuer aussi bien par l'intermédiaire d'un portail en ligne que directement auprès du public. Il semble excessif aux yeux du Comité d'exiger une authentification des signatures par les autorités nationales ou un notaire. Il convient en tout état de cause de veiller, parallèlement au contrôle d'identité, à ce que les personnes soutenant l'initiative aient apposé leur signature en toute indépendance et de leur plein gré. Des dispositions spécifiques doivent être prises à cette fin, en particulier en ce qui concerne la collecte électronique de signatures.

4.10.3

L'indication du nom, de l'adresse, de la date de naissance, ainsi qu'un courriel de vérification en cas de collecte en ligne, semblent constituer des dispositifs de sécurité et d'authentification suffisants. L'objectif doit être de faire en sorte que toute initiative fondée sur les règles minimales établies par le règlement pour la collecte des signatures ne se heurte dans aucun pays de l'Union à des obstacles supplémentaires. S'agissant des Européens vivant à l'étranger, le lieu de résidence du participant devrait être déterminant pour l'attribution du vote.

4.10.4

La vérification des signatures collectées devrait être réalisée par les États membres, par exemple selon la méthode des contrôles par échantillonnage qui a fait ses preuves dans certains États membres de l'Union.

4.11   Délai pour la collecte des signatures

4.11.1

Les expériences d'initiatives citoyennes réalisées avant l'adoption du traité de Lisbonne ont montré que le lancement d'une initiative peut prendre beaucoup de temps. C'est pourquoi le Comité estime que le délai d'un an proposé par la Commission est trop court et préconise un délai de 18 mois. Par référence à l'observation émise précédemment concernant le fait que l'initiative enclenche un processus qui va beaucoup plus loin que son objectif concret et donne naissance à une véritable opinion publique européenne, il serait regrettable, selon le Comité, que la fixation d'un délai relativement court d'un an remette en question l'issue positive d'un tel processus et de tous ses effets juridiques et sociétaux concomitants.

4.12   Enregistrement des initiatives proposées

4.12.1

Le Comité considère comme la Commission qu'il revient aux organisateurs de l'initiative d'en examiner eux-mêmes au préalable la légalité et la recevabilité. L'enregistrement devrait pouvoir s'effectuer sur un site Internet mis à disposition par la Commission et contenant également des informations de fond, afin que tous les citoyens puissent s'informer sur les initiatives en cours.

4.12.2

Le Comité suggère dans ce contexte que la Commission mette à disposition sur le futur site Internet consacré à l'initiative citoyenne européenne un instrument en ligne pour la collecte de signatures. Ce site Internet pourrait en outre servir de forum de discussion sur les différentes initiatives existantes et ainsi contribuer dans une certaine mesure à l'émergence d'un espace public européen.

4.12.3

Cela étant, le Comité est d'avis qu'il faudrait également mettre à la disposition des organisateurs d'une initiative citoyenne un guichet qui puisse les conseiller non seulement sur des questions de procédure, mais aussi sur le fond. Le Comité est disposé à cet égard à faire office de service d'assistance («helpdesk»).

4.12.4

Un système de cartons jaunes/rouges pourrait peut-être être envisagé, qui permettrait de signaler à un stade assez précoce aux promoteurs d'une initiative citoyenne que leur initiative n'est éventuellement pas recevable, par exemple en raison de critères formels tels que l'absence de compétence de la Commission dans ce domaine ou une violation manifeste des droits fondamentaux.

4.13   Exigences appliquées aux organisateurs – Transparence et financement

4.13.1

De l'avis du Comité, les organisateurs d'une initiative doivent fournir les informations suivantes:

le comité qui est à la base de l'initiative et son représentant vis-à-vis de l'extérieur;

les personnes qui soutiennent éventuellement l'initiative;

le plan de financement;

un aperçu des ressources humaines et des structures.

4.13.2

Le Comité ne peut en aucun cas accepter que la Commission annonce qu'aucune forme de soutien et de financement publics des initiatives citoyennes n'est prévue, et surtout qu'elle affirme que c'est la seule façon de garantir l'indépendance de ces initiatives. La Commission européenne soutient financièrement les structures et les activités de nombreuses organisations non gouvernementales efficaces; l'on ne saurait pour autant en déduire que ces acteurs de la société civile cofinancés par la Commission sont de ce fait dépendants de celle-ci. De plus, si l'on s'en tient à la logique de la Commission, seules les grandes organisations bénéficiant de soutiens financiers puissants auraient la possibilité d'envisager le lancement d'une initiative citoyenne européenne.

4.13.3

Le Comité invite donc à examiner la possibilité que l'UE apporte une aide financière dès qu'une première étape aura été franchie, par exemple 50 000 signatures émanant de trois États membres, afin d'exclure les campagnes vouées à l'échec ou insuffisamment sérieuses. Le système proposé de cartons jaunes/rouges pourrait également jouer un rôle dans ce contexte.

4.14   Examen par la Commission des initiatives citoyennes ayant abouti

4.14.1

Le délai de six mois proposé par la Commission est jugé par le Comité comme une limite absolue et il soutient l'approche en deux temps proposée par le Parlement européen dans sa résolution (deux mois pour l'examen des critères formels et trois mois pour la décision sur le fond (14). La Commission devrait organiser ce processus interne de décision de manière aussi transparente que possible.

4.14.2

Une fois qu'une initiative citoyenne a abouti, il convient d'en établir définitivement la recevabilité.

4.14.3

Pendant la phase d'évaluation politique par la Commission, le Comité organise, avec la participation éventuelle du Parlement et de la présidence du Conseil, des auditions au cours desquelles les organisateurs présentent leur initiative à la Commission. Le CESE pourrait le cas échéant compléter ce processus par l'élaboration d'un avis exploratoire ou d'initiative en la matière.

4.14.4

L'acceptation, l'acceptation partielle ou le rejet d'une initiative par la Commission doit être justifiée publiquement et de manière détaillée auprès des initiateurs. En cas de rejet, la Commission doit publier une notification formelle pouvant faire l'objet d'un recours devant la Cour de justice de l'Union européenne.

4.15   Initiatives sur le même thème

4.15.1

Le Comité estime qu'il est de la responsabilité des organisateurs de lancer une initiative sur un thème similaire. Il faut rappeler une fois de plus que le nouveau droit d'initiative citoyenne européenne concerne une initiative invitant à examiner une question. En conséquence, le Comité ne voit aucune raison de prévoir dans ce contexte des interdictions ou des mesures dissuasives.

4.16   Observations complémentaires

4.16.1

Le Comité est d'avis que la Commission devrait se charger, pour les organisateurs d'une initiative citoyenne ayant déjà obtenu le soutien de 50 000 personnes provenant de trois États membres, de la traduction du texte dans toutes les langues officielles.

5.   Conclusions

5.1   Les dispositions du TUE relatives aux principes démocratiques de l'Union, notamment l'article 11 TUE, constituent de l'avis du Comité une étape historique dans la réalisation d'une Europe des citoyens tangible, qui fonctionne dans la pratique et qu'il est possible d'aménager. Cependant, il convient de définir de manière plus contraignante les différents processus démocratiques et de les doter des structures nécessaires.

5.2   Le Comité invite en conséquence la Commission à présenter, après le livre vert sur l'initiative citoyenne européenne, un livre vert sur le dialogue civil portant sur la mise en œuvre concrète des articles 11.1 et 11.2, afin de réfléchir aux pratiques existantes, de définir plus précisément les procédures et les principes appliqués, de les évaluer et d'apporter des améliorations avec l'aide de la société civile organisée, notamment en établissant des structures claires. Le Comité se déclare là aussi disposé à apporter son concours dans le cadre de ses compétences.

5.3   Il invite en outre les autres organes à faire savoir comment elles entendent mettre en pratique les nouvelles dispositions du traité.

5.4   L'article 11.4 TUE représente une innovation démocratique sans précédent, même au niveau international. Pour la première fois dans l'histoire de la démocratie, des ressortissants de plusieurs États se trouvent conjointement investis d'un droit transnational de participation.

5.5   Ce nouveau droit civique démocratique recèle d'énormes potentialités. Il a pour objet de renforcer la démocratie représentative en Europe. Il consolide directement la composante participative du modèle démocratique européen. Mais indirectement, il peut contribuer à l'intégration de l'UE, à son renforcement, à l'émergence d'une opinion publique européenne et à une plus forte identification des citoyens à l'UE. Compte tenu précisément de la taille et de la diversité de l'Europe, il faut veiller à ce que tous les citoyens, même ceux qui ne disposent pas de beaucoup de moyens ou n'appartiennent pas à de grandes organisations établies, puissent se servir de tous les outils démocratiques. L'utilisation des instruments démocratiques ne doit pas être liée à la présence d'importantes ressources financières.

5.6   Le Comité, qui se voit confirmé par le traité de Lisbonne dans son rôle d'organe consultatif ayant pour mission d'assister le Parlement européen, le Conseil et la Commission, continuera de s'acquitter de ses tâches essentielles et d'émettre des avis conformément aux fonctions qui lui sont assignées par le traité. De par sa fonction de trait d'union, il entend plus que jamais jouer un rôle pivot dans une infrastructure démocratique globale au niveau européen.

5.7   Soucieux de soutenir au mieux par ses activités les institutions précitées de l'Union et d'optimiser son fonctionnement, le Comité propose également, s'agissant de l'initiative citoyenne européenne:

d'élaborer pendant le délai d'évaluation un avis sur une initiative citoyenne formellement acceptée par la Commission;

d'élaborer le cas échéant un avis à l'appui d'une initiative citoyenne en cours;

d'organiser des auditions sur des initiatives fructueuses (organisateurs, Commission, Parlement, Conseil);

de mettre en place un service d'information (conçu comme un guichet mis à la disposition des citoyens pour répondre à des questions de procédure et autres);

de fournir des informations complémentaires (publication d'un guide sur la démocratie participative, organisation de conférences sur la mise en œuvre pratique, etc.).

Bruxelles, le 17 mars 2010.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Placée sous la présidence de Valéry GISCARD D'ESTAING et de deux vice-présidents, Giuliano AMATO et Jean-Luc DEHAENE, la Convention était composée comme suit:

15 représentants des chefs d'État et de gouvernement des États membres,

13 représentants des chefs d'État et de gouvernement des pays candidats à l'adhésion,

30 représentants des parlements nationaux des États membres,

26 représentants des parlements nationaux des pays candidats à l'adhésion,

16 représentants issus des rangs des parlementaires européens,

2 représentants de la Commission européenne.

À cela s'ajoutaient 13 observateurs issus du CESE, du CdR et des partenaires sociaux, ainsi que le médiateur européen. Les observateurs du CESE étaient Göke FRERICHS, Roger BRIESCH et Anne-Marie SIGMUND.

(2)  L'article 10 TUE dispose que le «fonctionnement de l'Union» est fondé sur la «démocratie représentative».

(3)  COM(2009) 622 final du 11.11.2009.

(4)  Avis sur «La société civile organisée et la gouvernance européenne — Contribution du Comité à l'élaboration du Livre blanc» du 25.4.2001 – JO C 193 du 10.7.2001.

(5)  Avis sur «La représentativité des organisations européennes dans la société civile dans le cadre du dialogue civil» du 14.2.2006 – JO C 88 du 11.4.2006.

(6)  Avis exploratoire sur le thème «Pour un nouveau programme européen d'action sociale» du 09.7.2008 – JO C 27 du 03.2.2009 (paragraphes 7.6 et 7.7).

(7)  Voir note 5.

(8)  Avis sur «La Commission et les organisations non gouvernementales: le renforcement du partenariat» du 13.7.2000 – JO C 268 du 19.9.2000, ainsi que l'avis sur «Le rôle et la contribution de la société civile organisée dans la construction européenne» du 24.9.1999 – JO C 329 du 17.11.1999.

(9)  Avis sur «La société civile organisée et la gouvernance européenne — Contribution du Comité à l'élaboration du Livre blanc» du 25.4.2001 – JO C 193 du 10.7.2001.

(10)  Avis sur le thème «Gouvernance européenne — un Livre blanc» du 20.4.2002 – JO C 125 du 27.5.2002.

(11)  COM(2001) 428 final du 25.7.2001.

(12)  Résolution du Parlement européen du 07.5.2009, rapporteure Sylvia-Yvonne KAUFMANN (T6-0389/2009).

(13)  Ce pourcentage s'inspire du pourcentage minimal de 0,08 % requis pour la présentation d'une initiative citoyenne en Italie.

(14)  Ce point devrait être réglé sur le modèle de la procédure des initiatives du Parlement européen au titre de l'art. 225 TFUE; voir la résolution du Parlement européen du 9 février 2010 sur un accord-cadre révisé entre le Parlement européen et la Commission pour la prochaine législature, du 9 février 2010 (P7_TA(2010)0009).


III Actes préparatoires

Comité économique et social européen

461e session plénière des 17 et 18 mars 2010

28.12.2010   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 354/66


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Conseil établissant un plan à long terme pour le stock de merlu du nord et les pêcheries exploitant ce stock»

COM(2009) 122 final — 2009/0039 (CNS) (1)

2010/C 354/11

Le Conseil, en date du 18 janvier 2010, et le Parlement européen, en date du 5 mars 2010 ont décidé, conformément à l'article 43 du TFUE, ancien article 37 du TCE, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de Règlement du Conseil établissant un plan à long terme pour le stock de merlu du nord et les pêcheries exploitant ce stock »

COM(2009) 122 final — 2009/0039 (CNS) (1).

Ayant estimé que le contenu de la proposition est satisfaisant et n'appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 461e session plénière des 17 et 18 mars 2010 (séance du 17 mars 2010), a décidé, à l'unanimité, de rendre un avis favorable au texte proposé.

Bruxelles, le 17 mars 2010.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  L'acronyme devra se lire COD.


28.12.2010   

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C 354/67


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Conseil établissant un régime de contrôle et de coercition dans la zone de la convention sur la future coopération multilatérale dans les pêches de l'Atlantique du Nord-Est» (avis d'initiative)

COM(2009) 151 final — 2009/0051 (CNS) (1)

2010/C 354/12

Le Conseil, en date du 18 janvier 2010, et le Parlement européen, en date du 5 mars 2010, ont décidé, conformément à l'article 43 du TFUE, ancien article 37 du TCE, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de Règlement du Conseil établissant un régime de contrôle et de coercition dans la zone de la convention sur la future coopération multilatérale dans les pêches de l'Atlantique du Nord-Est»

COM(2009) 151 final — 2009/0051 (CNS) (1).

Ayant estimé que le contenu de la proposition est satisfaisant et n'appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 461e session plénière des 17 et 18 mars 2010 (séance du 17 mars 2010), a décidé, à l'unanimité, de rendre un avis favorable au texte proposé.

Bruxelles, le 17 mars 2010.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  L'acronyme devra se lire COD.


28.12.2010   

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C 354/68


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Conseil établissant un plan pluriannuel pour le stock occidental de chinchard commun et les pêcheries exploitant ce stock»

COM(2009) 189 final — 2009/0057 (CNS) (1)

2010/C 354/13

Le Conseil, en date du 18 janvier 2010, et le Parlement européen, en date du 5 mars 2010 ont décidé, conformément à l'article 43 du TFUE, ancien article 37 du TCE, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de Règlement du Conseil établissant un plan pluriannuel pour le stock occidental de chinchard commun et les pêcheries exploitant ce stock»

COM(2009) 189 final — 2009/0057 (CNS) (1).

Ayant estimé que le contenu de la proposition est satisfaisant et n'appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 461e session plénière des 17 et 18 mars 2010 (séance du 17 mars 2010), a décidé, à l'unanimité, de rendre un avis favorable au texte proposé.

Bruxelles, le 17 mars 2010.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  L'acronyme devra se lire COD.


28.12.2010   

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C 354/69


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de Règlement du Conseil établissant un plan à long terme pour le stock d'anchois dans le Golfe de Gascogne et les pêcheries exploitant ce stock»

COM(2009) 399 final — 2009/0112 (CNS) (1)

2010/C 354/14

Le Conseil, en date du 19 janvier 2010, et le Parlement européen, en date du 5 mars 2010, ont décidé, conformément à l'article 43 du TFUE, ancien article 37 du TCE, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de Règlement du Conseil établissant un plan à long terme pour le stock d'anchois dans le Golfe de Gascogne et les pêcheries exploitant ce stock»

COM(2009) 399 final — 2009/0112 (CNS) (1).

Ayant estimé que le contenu de la proposition est satisfaisant et n'appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 461e session plénière des 17 et 18 mars 2010 (séance du 17 mars 2010), a décidé, à l'unanimité, de rendre un avis favorable au texte proposé.

Bruxelles, le 17 mars 2010.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  L'acronyme devra se lire COD.


28.12.2010   

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C 354/70


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Conseil établissant un programme de documentation des captures de thon rouge (Thunnus thynnus) et modifiant le règlement (CE) no 1984/2003»

COM(2009) 406 final — 2009/0116 (CNS) (1)

2010/C 354/15

Le Conseil, en date du 19 janvier 2010, et le Parlement européen, en date du 5 mars 2010, ont décidé, conformément à l'article 43 du TFUE, ancien article 37 du TCE, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de Règlement du Conseil établissant un programme de documentation des captures de thon rouge (Thunnus thynnus) et modifiant le règlement (CE) no 1984/2003»

COM(2009) 406 final — 2009/0116 (CNS) (1).

Ayant estimé que le contenu de la proposition est satisfaisant et n'appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 461e session plénière des 17 et 18 mars 2010 (séance du 17 mars 2010), a décidé, à l'unanimité, de rendre un avis favorable au texte proposé.

Bruxelles, le 17 mars 2010.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  L'acronyme devra se lire COD.


28.12.2010   

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C 354/71


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Conseil concernant certaines dispositions relatives à la pêche dans la zone couverte par l'accord de la CGPM (Commission générale des pêches pour la Méditerranée)»

COM(2009) 477 final — 2009/0129 (CNS) (1)

2010/C 354/16

Le Conseil, en date du 19 janvier 2010, et le Parlement européen, en date du 5 mars 2010, ont décidé, conformément à l'article 43 du TFUE, ancien article 37 du TCE, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de Règlement du Conseil concernant certaines dispositions relatives à la pêche dans la zone couverte par l'accord de la CGPM (Commission générale des pêches pour la Méditerranée)»

COM(2009) 477 final — 2009/0129 (CNS) (1).

Ayant estimé que le contenu de la proposition est satisfaisant et n'appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 461e session plénière des 17 et 18 mars 2010 (séance du 17 mars 2010), a décidé à l'unanimité, de rendre un avis favorable au texte proposé.

Bruxelles, le 17 mars 2010.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  L'acronyme devra se lire COD.


28.12.2010   

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C 354/72


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) no 247/2006 portant mesures spécifiques dans le domaine de l’agriculture en faveur des régions ultrapériphériques de l’Union»

COM(2009) 510 final — 2009/0138 (CNS) (1)

2010/C 354/17

Le Conseil, en date du 19 février 2010, et le Parlement européen, en date du 18 février 2010, ont décidé, conformément à l'article 43 du TFUE, ancien article 37 du TCE, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de Règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) no 247/2006 portant mesures spécifiques dans le domaine de l’agriculture en faveur des régions ultrapériphériques de l’Union»

COM(2009) 510 final — 2009/0138 (CNS) (1).

Ayant estimé que le contenu de la proposition est entièrement satisfaisant et que par ailleurs il avait déjà fait l'objet de ses avis CES 771/2008 et CESE 255/2010 adoptés le 22 avril 2008 (2) et le 17 février 2010 (3), le Comité, lors de sa 461e session plénière des 17 et 18 mars 2010, (séance du 17 mars 2010) a décidé à l'unanimité, de rendre un avis favorable au texte proposé et de renvoyer à la position qu'il a soutenue dans les documents susmentionnés.

Bruxelles, le 17 mars 2010.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  L'acronyme devra se lire COD.

(2)  Avis du CESE sur la Stratégie pour les régions ultrapériphériques: bilan et perspectivesJO C 211, 19.8.2008, p. 72.

(3)  Avis du CESE sur les Incidences des Accords partenariaux économiques sur les régions ultrapériphériques (zone Caraïbes) – JO C … du …, p. ….


28.12.2010   

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C 354/73


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission. Le futur cadre réglementaire concernant la concurrence dans le secteur automobile»

COM(2009) 388 final

2010/C 354/18

Rapporteur: M. HERNÁNDEZ BATALLER

Le 22 juillet 2009, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, la Commission a décidé de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission. Le futur cadre réglementaire concernant la concurrence dans le secteur automobile»

COM(2009) 388 final.

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 2 mars 2010.

Lors de sa 461e session plénière des 17 et 18 mars 2010 (séance du 18 mars 2010), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 84 voix pour, 5 voix contre et 7 abstentions.

1.   Conclusions

1.1   Le CESE approuve le diagnostic que la Commission fait du secteur et des domaines dans lesquels il faudrait accroître la concurrence. Après examen des options présentées par la Commission, le CESE marque sa préférence pour l'adoption de dispositions sectorielles sous forme de lignes directrices ajoutées à l'exemption générale par catégories. Aussi accueille-t-il favorablement la proposition de règlement et la proposition de lignes directrices supplémentaires. Il insiste néanmoins sur la nécessité de les lire conjointement et à titre de complément aux orientations générales relatives aux restrictions verticales, qui n'ont pas encore été présentées, ce qui rend difficile une interprétation indépendante.

1.2   Le CESE est d'accord avec la Commission quant à la nécessité d'établir un cadre juridique qui ait des répercussions générales positives sur le bien-être des consommateurs et renforce leur protection. Le CESE réitère les orientations déjà formulées dans certains de ses avis antérieurs sur la concurrence (1).

1.3   Il s'avère néanmoins nécessaire dans ce cas d'instaurer un régime transitoire de deux ans pour les concessionnaires, qui sont dans leur grande majorité des petites et moyennes entreprises, pour lesquelles il faudrait prévoir, dans un souci de sécurité juridique et sur la base du principe de confiance légitime et de proportionnalité, une période de temps raisonnable pour qu'elles puissent amortir l'investissement consenti, mieux s'adapter à l'évolution technologique du marché et contribuer à l'amélioration de la sécurité routière.

1.4   De même, le CESE espère que le nouveau cadre juridique apportera une sécurité juridique à tous les opérateurs, ne créera pas de nouveaux obstacles aux entreprises, s'inspirera des principes du «Small business Act» et poursuivra les mêmes objectifs de concurrence que ceux du règlement 1400/2002.

1.5   Le CESE estime que les lignes directrices supplémentaires ne devraient prévoir aucune limite aux accords de monomarquisme, ce qui serait plus en accord avec le nouveau règlement d'exemption.

1.6   Les accords relatifs aux véhicules utilitaires (VU) pourraient être régis par le règlement général d'exemption par catégories pour les restrictions verticales ne ce qui concerne le marché après-vente.

2.   Introduction

2.1   Le règlement (CE) no 1400/2002 de la Commission, du 31 juillet 2002, concernant l'application de l’article 81, paragraphe 3, du traité CE à des catégories d’accords verticaux et de pratiques concertées dans le secteur automobile (2), prévoit des règles plus strictes que celles établies dans le règlement (CE) no 2790/1999 de la Commission, du 22 décembre 1999, relatif à l'application du paragraphe 3 de l'article 81 du traité CE à certaines catégories d'accords verticaux et de pratiques concertées dans le secteur automobile (3).

2.2   Le règlement (CE) no 1400/2002 de la Commission porte principalement sur les pratiques et les conduites susceptibles de restreindre gravement la concurrence et établit une liste de restrictions en vertu desquelles un accord ne saurait en aucune sorte bénéficier d'une exemption («restrictions caractérisées») ainsi qu'une autre liste énumérant les restrictions qui sont interdites mais n'empêchent pas l'application de l'exemption prévue par ce règlement au reste de l'accord («conditions spécifiques»).

2.3   Les principes généraux de ce règlement no 1400/2002 de la Commission sont les suivants:

il ne s'applique pas exclusivement aux véhicules particuliers mais également à d'autres types de véhicules, comme les autobus où les camions;

il oblige chaque constructeur à choisir un système de distribution sélective ou de distribution exclusive tout en considérant comme pouvant faire l'objet d'une exemption deux types distincts de systèmes de distribution, principalement:

le système exclusif, pour autant que le constructeur assigne à chaque distributeur ou atelier de réparation un territoire de vente exclusif (ou un groupe de clients exclusif). À l'intérieur de ce territoire, aucun autre distributeur ne peut être désigné. Ces distributeurs peuvent également se voir imposer des niveaux minimums de qualité. La concurrence est renforcée en favorisant les ventes passives sur le territoire exclusif et en particulier, les ventes à des revendeurs en dehors du réseau,

le système sélectif, pour autant que le fournisseur s'engage à vendre les biens ou services contractuels, soit directement soit indirectement, uniquement à des distributeurs ou à des réparateurs sélectionnés en fonction de critères spécifiques. Un système de distribution sélective peut se fonder sur des critères quantitatifs ou des critères qualitatifs ou les deux catégories de critères;

il n'est pas possible de cumuler dans un même contrat des clauses de distribution sélective et de distribution exclusive. Plus concrètement, la clause appelée «clause relative aux lieux d'établissement» n'est pas autorisée dans le cadre d'un système de distribution sélective, tandis qu'il est possible de l'imposer à des distributeurs dans le cadre d'un système de distribution exclusif;

le règlement distingue trois marchés de produits différents au paragraphe 1er de son article 8:

distribution de véhicules à moteur neufs: en calculant la part de marché sur la base du volume des ventes des biens contractuels et des biens correspondants vendus par le fournisseur, avec tout autre bien vendu par le constructeur considéré comme interchangeable et remplaçable par l'acheteur, en fonction des caractéristiques, prix et usage présumé des produits,

distribution de pièces de rechange: en calculant la part de marché sur la base du volume des ventes des biens contractuels et des biens correspondants vendus par le fournisseur, avec tout autre bien vendu par le constructeur considéré comme interchangeable et remplaçable par l'acheteur, en fonction des caractéristiques, prix et usage présumé des produits,

service de réparation et d'entretien: en calculant la part de marché sur la base du volume des ventes des biens contractuels et des biens correspondant vendus par le fournisseur, avec tout autre bien vendu par le constructeur considéré comme interchangeable et remplaçable par l'acheteur, en fonction des caractéristiques, prix et usage présumé des produits;

outre les limites relatives aux parts de marché, le règlement considère, au paragraphe 1er, lettre c, de l'article 6, que l'existence de «différences de prix ou de conditions de fourniture des biens contractuels ou de biens correspondants substantielles entre les marchés géographiques est incompatible». Dans ces cas, la Commission peut retirer l'exemption prévue dans le règlement;

la Commission a tenté de lutter contre les obstacles au marché parallèle, et ce règlement 1400/2002 considère que la limitation des ventes par le distributeur aux usagers finaux d'autres États membres (en faisant, par exemple, dépendre le prix d'achat et la rétribution du distributeur de la destination des véhicules ou du lieu de résidence des usagers finaux), équivaudrait à une restriction indirecte des ventes. En outre, les objectifs de vente ne sont plus autorisés, de même que l'assignation de produits ou systèmes de bonus sur la base d'un territoire qui serait plus réduit que le marché intérieur.

2.4   Le cadre juridique de l'automobile a évolué ces dernières années et l'adoption du règlement (CE) no 715/2007 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2007 sur l'homologation de type des véhicules à moteur en ce qui concerne les émissions provenant des véhicules particuliers et utilitaires légers et sur l'accès à l'information relative à la réparation et à l'entretien des véhicules (4), dont les dispositions, qui étaient volontaires, sont devenues obligatoires à partir de septembre 2009 (5), est particulièrement significative à cet égard. Toutefois, pendant quelques années, le parc automobile comprendra un grand nombre de véhicules non couverts par ce règlement, constituant un marché non négligeable pour les ateliers indépendants.

2.4.1   En ce qui a trait à la concurrence sur le marché des pièces de rechange, basée sur les droits de propriété industrielle dont le constructeur est titulaire et le recours généralisé à différents accords de sous-traitance avec les fournisseurs d'équipements originaux («accord d'outillage»), il a été précisé que certaines pièces de rechange restent captives des réseaux de constructeur de véhicules.

2.4.2   Aussi, la Commission a-t-elle proposé d'introduire une clause relative à la réparation, dans sa proposition de directive révisée sur les dessins et modèles à propos de laquelle le CESE s'est favorablement prononcé, en rappelant (6) que «le monopole conféré aux propriétaires de dessins ou modèles ne concerne que la configuration extérieure d'un produit et non le produit en soi», et que «en ce qui concerne les pièces de rechange visées par la clause de réparation, le fait de les soumettre au régime de protection des dessins ou des modèles reviendrait à établir un monopole de produits sur le marché secondaire, ce qui va à l'encontre de la nature même de la protection juridique des dessins et modèles».

2.5   En ce qui concerne le secteur automobile, concrètement, le CESE a adopté un avis sur «Les marchés des équipements et les marchés d'aval du secteur automobile» (7), dans lequel il faisait valoir que les acteurs de ces marchés sont les constructeurs de véhicules, leurs fournisseurs et les opérateurs indépendants ou agréés présents sur les marchés de l'entretien automobile, des pièces de rechange et accessoires, ainsi que ceux qui interviennent dans la fabrication, la distribution et la vente au détail, tous ces acteurs constituant un réseau qui compte 834 700 entreprises, des PME principalement, dont le chiffre d'affaires s'élève à 1 107 milliards d'euros et qui fournit de l'emploi à quelque 4,6 millions de salariés.

3.   Évolution récente des documents de la Commission

3.1   Le 21 décembre 2009, la Commission a adopté un:

«Projet de règlement de règlement de la Commission relatif à l'application de l'article 101, paragraphe 3, du traité à certaines catégories d'accords verticaux et de pratiques concertées dans le secteur automobile» et un

«Projet de communication de la Commission concernant des lignes directrices supplémentaires sur les restrictions verticales dans les accords de vente et de réparation de véhicules automobile et de distribution de pièces détachées de véhicules automobiles»

La Commission a lancé une consultation publique sur ces documents.

3.2   Le 15 janvier 2010, le commissaire chargé de la concurrence, Mme KROES, a décidé de transmettre au Comité économique et social européen les deux textes mentionnés au paragraphe précédent, manifestant son intérêt à connaître le point de vue du Comité sur ces projets de réglementation.

3.3   Par conséquent, dans le présent avis sur le document COM(2009) 388 final, le rapporteur examine simultanément les projets de réglementation visés au paragraphe 3.1.

4.   Synthèse des documents de la Commission

4.1   La communication de la Commission sur le futur cadre réglementaire de la concurrence applicable au secteur automobile propose ce qui suit:

a)

En ce qui concerne les accords relatifs à la vente de véhicules automobiles neufs et à compter du 31 mai 2013:

appliquer les règles générales de la nouvelle exemption par catégorie proposée relative aux accords verticaux;

adopter des orientations sectorielles spécifiques pour empêcher l'éviction du marché des constructeurs de véhicules automobiles concurrents et préserver leur accès aux marchés de vente au détail et de réparation de véhicules; sauvegarder la concurrence intramarque et préserver l'effet dissuasif de l'article 81;

maintenir en vigueur les dispositions du règlement applicable aux accords de distribution de véhicules automobiles jusqu'au 31 mai 2013.

b)

Pour ce qui est de l'accord de réparation et d'entretien et/ou de fourniture et la distribution de pièces de rechange et à compter du 31 mai 2010:

appliquer les règles générales de la nouvelle exemption par catégorie proposée relative aux accords verticaux;

adopter des orientations sectorielles spécifiques tant au moyen d'un règlement d'exemption par catégorie spécifique que d'une combinaison des deux instruments, en vue de renforcer la capacité des autorités chargées de la concurrence à apporter une réponse aux préoccupations en la matière qui soit plus générale et qui ait une portée plus large, en particulier en ce qui a trait à: (i) l'accès aux informations techniques; (ii) l'accès aux pièces détachées; (iii) l'utilisation abusive des garanties; et (iv) l'accès au réseau d'ateliers de réparation agréés.

4.2   Le projet de règlement d'exemption

4.2.1   Ces accords verticaux peuvent améliorer l'efficacité économique d'une chaîne de production ou de distribution en permettant une meilleure coordination entre les entreprises participantes, même si cela dépend du degré de pouvoir de marché des parties prenantes à l'accord.

4.2.2   De même, les accords verticaux comportant des restrictions susceptibles de restreindre la concurrence et de porter préjudice aux consommateurs ou qui ne sont pas indispensables à l'obtention des effets positifs mentionnés précédemment, doivent demeurer exclus du bénéfice de l'exemption par catégorie.

4.2.3   Le projet fait la distinction entre les accords relatifs à la distribution de véhicules à moteur neufs («le marché primaire») et les accords relatifs aux services de réparation et d'entretien et à la distribution de pièces de rechange («marché secondaire»).

4.2.4   Le «marché primaire» se verra appliquer les dispositions du règlement général sur les accords verticaux: en particulier celles de la limitation des parts de marché, la non-exemption de certains accords verticaux et les conditions prévues dans ce règlement, aux termes desquelles ces accords verticaux peuvent bénéficier de l'exemption concédée par le règlement général, pour autant que toutes les conditions qu'il établit soient respectées, ce qui semble raisonnable, dès lors qu'il s'agit d'un marché dans lequel la concurrence existe.

4.2.5   En ce qui concerne le «marché secondaire», il faut tenir compte de certaines caractéristiques spécifiques du marché après-vente de l'automobile, qui sont liées à l'évolution technologique ainsi qu'à la complexité et à la fiabilité croissantes des composants automobiles que les constructeurs automobiles acquièrent auprès des fournisseurs d'équipements originaux.

4.2.6   La Commission partage le point de vue du CESE selon lequel les conditions de concurrence dans le marché après-vente des véhicules à moteur ont également un impact direct sur la sécurité publique dans la mesure où la conduite des véhicules pourrait ne pas se faire dans des conditions de sécurité en cas de réparation incorrecte, ainsi que sur la santé publique et l'environnement, en raison des émissions de dioxyde de carbone et d'autres agents polluants qui requièrent un entretien régulier du véhicule.

4.2.7   Les accords verticaux relatifs à la distribution de pièces de rechange et aux services de réparation et d'entretien ne doivent bénéficier d'une exemption par catégorie que s'ils respectent, en plus des conditions prévues pour l'exemption établies dans le règlement général pour les accords verticaux, les exigences plus strictes relatives à certains types de restrictions graves de la concurrence pouvant limiter la fourniture de pièces de rechange sur le marché après-vente des véhicules à moteur, concrètement:

les accords qui restreignent la vente de pièces de rechange par les membres d'un système de distribution sélectif d'un constructeur automobiles aux réparateurs indépendants, qui les utilisent pour la prestation de services de réparation ou d'entretien;

les accords qui, tout en respectant le règlement général, restreignent la capacité de fabricants de pièces de rechange à vendre ces pièces aux réparateurs agréés dans le système de distribution d'un constructeur automobile, aux distributeurs indépendants de pièces de rechange, aux réparateurs indépendants ou aux usagers finaux: tout cela, sans préjudice de l'application des dispositions relatives à la responsabilité de droit privé, de la capacité d'exiger l'utilisation des «pièces de rechange d'une qualité équivalente», y compris d'accords qui prévoient des obligations pour les réparateurs agréés de n'utiliser que les pièces de rechange fournies par le constructeur automobiles pour ces réparations, pendant la période de garantie;

les accords qui limitent la capacité d'un fabricant de composants ou de pièces de rechange originaux à apposer sa marque déposée ou son logo sur ces pièces.

4.3   Le projet de lignes directrices supplémentaires

4.3.1   Les lignes directrices établissent quelques principes pour évaluer, conformément à l'article 101 du traité, les problèmes qui se présenteraient dans le contexte des restrictions verticales incluses dans les accords de vente et de réparation de véhicules à moteur et de distribution des pièces de rechange. Ces lignes directrices s'appliquent sans préjudice de l'applicabilité des lignes directrices générales sur les accords verticaux et à titre de complément à celles-ci.

4.3.2   Pour interpréter ces lignes directrices, la Commission devra également tenir compte du code de conduite présenté par les associations de constructeurs automobiles, ACEA et JAMA, relatif à certaines bonnes pratiques commerciales que les constructeurs automobiles s'engagent à appliquer afin d'agir en toute bonne foi dans l'exécution de leurs obligations contractuelles vis-à-vis de leurs distributeurs et réparateurs agréés.

4.3.3   Les lignes directrices sont structurées comme suit:

champ d'application du règlement d'exemption par catégorie dans le secteur de véhicules à moteur et rapport avec le règlement général d'exemption par catégorie pour les accords verticaux;

application des dispositions complémentaires du règlement d'exemption par catégorie dans le secteur des véhicules à moteur;

traitement des restrictions spécifiques: marque unique et distribution sélective.

4.3.4   En ce qui concerne la marque unique, une nouveauté est apportée, qui consiste à faire démarrer la période quinquennale du début de la relation contractuelle entre les parties, au lieu de remplacer un document contractuel par un autre se référant au même objet. Toutefois, cela peut être déduit de la note en bas de page no 9 et non du corps du texte des lignes directrices. Compte tenu de l'importance de cette modification, il serait souhaitable de l'insérer dans le corps lui-même.

4.3.5   Les lignes directrices exposent les obligations qui entravent la concurrence et leurs effets négatifs (création de barrières à l'entrée ou expansion de fournisseurs concurrents) et positifs (contribution à la résolution de problèmes de «parasitisme», renforcement de l'image de marque et de la réputation du réseau de concessionnaires).

4.3.6   En ce qui a trait à la distribution sélective, il importe que les opérateurs indépendants puissent accéder à l'information technique et que les garanties juridiques soient correctement appliquées.

5.   Observations

5.1   Cela fait plus de deux décennies qu'en matière de concurrence le secteur automobile des véhicules particuliers et utilitaires légers fait l'objet de règlements spécifiques d'exemption par catégorie.

5.2   Dans le rapport d'évaluation qu'elle a élaboré le 31 mai 2008, la Commission a mesuré l'impact de l'exemption par catégorie sur les pratiques du secteur automobile. Ce rapport a fait l'objet d'innombrables commentaires de la part des parties prenantes, qui ont été à l'origine du rapport d'analyse d'impact élaboré par les services de la Commission (SEC(2009) 1052, SEC(2009) 1053), dont une lecture croisée avec celle de la communication COM(2009) 388 final est recommandée.

5.3   Or, il se trouve qu'ont lieu simultanément la révision et l'adoption d'une nouvelle exemption générale par catégorie, qui doit remplacer, à partir de mai 2010 le règlement actuel (CE) no 2790/1999 du 22 décembre 1999. C'est en partant du principe que le règlement (CE) no 2790/1999 sera révisé que la Commission prévoit,

en un premier temps, pour le secteur automobile, trois sous-options: (ii) l'application, tout court, de l'exemption générale par catégorie relative aux accords verticaux; (iii) l'adoption de dispositions sectorielles spécifiques sous forme de lignes directrices ajoutées à l'exemption générale par catégorie et (iv) l'adoption d'un règlement d'exemption par catégorie centré sur les restrictions de la concurrence dans le secteur des services après-vente;

par la suite, avec le projet de règlement et les lignes directrices, l'adoption d'un règlement comportant des dispositions sectorielles spécifiques assorties de lignes directrices.

5.4   L'acquisition d'un véhicule à moteur est, avec l'achat d'un logement, le poste le plus important du budget familial des consommateurs européens et celui qui illustre le mieux l'importance et le degré de réalisation du marché intérieur. Selon des estimations du secteur, 40 % du coût total relatif à la «vie utile» d'un véhicule à moteur est représenté par son acquisition, 40 % par son entretien et 20 % par les assurances.

5.5   L'objectif essentiel des consommateurs européens en matière de concurrence dans le secteur automobile pourrait se résumer ainsi: choisir librement le lieu d'achat, pouvoir faire réparer leur véhicule où c'est nécessaire et bénéficier du meilleur prix et d'une meilleure sécurité routière.

5.6   S'il est essentiel d'assurer un marché dynamique et compétitif, doté d'un niveau d'évolution technologique approprié et englobant tous les opérateurs économiques du secteur automobile, notamment les petites et moyennes entreprises des services de réparation, les signaux rassurant envoyés aux consommateurs sont également importants.

5.7   Le règlement (CE) no 1400/2002 actuel a transmis quelques-uns de ces signaux positifs en prévoyant par exemple, qu'en vertu du règlement, la garantie émise dans un État membre par un constructeur devient valable, dans les mêmes conditions, dans tous les États membres, lorsque le consommateur muni d'un carnet de garantie rempli par un concessionnaire dans un autre État membre ne doit plus attendre que la garantie soit appliquée dans son pays d'origine, ou encore lorsque que le concessionnaire ou les ateliers de réparation agréés auxquels le consommateur confie son véhicule ne demandent plus de frais ou n'exigent plus de documents supplémentaires.

5.8   Des difficultés subsistent néanmoins en ce qui concerne la revente de véhicules neufs par des intermédiaires, liées aux exigences des fournisseurs envers leurs concessionnaires, notamment en vue de satisfaire les exigences d'«identité de marque», et la liberté d'approvisionnement auprès d'autres concessionnaires agréés ou importateurs nationaux, sans oublier les restrictions indirectes des fournitures croisées de véhicules entre concessionnaires agréés

5.9   La Commission a suivi de très près l'application du règlement (CE) no 1400/2002, ce qui ressort de décisions exemplaires comme les quatre décisions adoptées en septembre 2007 qui ont fourni des orientations importantes au secteur dans le domaine de l'accès aux informations techniques (Affaires Comp/39.140-39.143. impliquant les marques Daimler Chrysler, Fiat, Toyota et Opel) (8).

5.10   Huit ans après l'adoption du règlement (CE) no 1400/2002, les indicateurs économiques confirment que le degré de concurrence sur les marchés concernés, qui a conduit la Commission à faire le choix d'une exemption par catégorie plus stricte, s'est nettement amélioré.

5.11   Ce climat de concurrence dynamique et complexe se reflète notamment dans une baisse des prix réels des véhicules à moteur neufs, l'entrée de nouvelles marques sur le marché, des fluctuations des parts de marché des marques concurrentes, une concentration modérée et décroissante ainsi qu'une offre élargie pour les consommateurs dans les différents segments comparables. Toutefois, la diversité des marchés nationaux subsiste au sein du marché intérieur, en particulier dans les nouveaux États membres, où le marché des véhicules d'occasion et des réparateurs indépendants est plus développé.

5.12   C'est surtout au niveau de l'accès des réparateurs indépendants aux pièces de rechange et aux informations techniques que des obstacles à une concurrence accrue subsistent, aux dépens manifestement des consommateurs. La contrefaçon et la piraterie des pièces de rechange continuent de préoccuper le secteur, en raison de la piètre qualité de celles-ci dans certains cas et dans d'autres, de l'insécurité routière qui peut découler de l'utilisation de ce type de produits.

5.13   Les propositions de la Commission relatives au futur cadre réglementaire de la concurrence applicable au secteur automobile sont compatibles avec cette approche et cette politique de mise en application. Le CESE rappelle à cet égard ses avis antérieurs dans lesquels il avait marqué son soutien aux travaux de la Commission en matière d'actions collectives, tant au plan général, que pour violation des règles de la concurrence plus particulièrement.

6.   Observations particulières

6.1   Le CESE estime que l'option de la Commission consistant à proposer un règlement spécifique et des lignes directrices est équilibrée car elle tient compte des éventuelles répercussions économiques, de l'impact sur les petites et moyennes entreprises dont le marché des services de réparation, d'entretien et de distribution de pièces de rechange est composé en grande partie, ainsi que de l'éventuel impact social, environnemental et en matière de sécurité routière.

Le CESE souhaite souligner les aspects suivants de la proposition présentée:

6.2   Subordination du régime spécial relatif au secteur automobile au REC général. Le CESE constate que les orientations complémentaires proposées par la Commission pour le secteur automobile doivent être lues conjointement avec les Orientations générales relatives aux accords verticaux (cf. I, 1 (i) Orientations) qui n'ont pas encore été présentées, ce qui nuit naturellement à une évaluation indépendante et séparée des premières.

6.3   Entrée en vigueur du nouveau régime – Le projet de règlement prévoit deux régimes d'entrée en vigueur, en fonction du marché visé. Un régime d'application immédiate, à compter du 1er juin 2010 pour le marché des pièces de rechange, de réparation et d'entretien de véhicules, et un autre, qui prolonge l'application du règlement 1400/2002 jusqu'au 31 mai 2013 et s'applique à l'achat et à la vente de véhicules neufs.

6.3.1   Tout en admettant que c'est sur le marché primaire que l'on constate actuellement une concurrence plus faible, qu'il importe de stimuler, le CESE est d'avis que la coexistence de deux régimes différenciés peut entraîner des difficultés dès lors que, souvent, les contrats conclus entre les concessionnaires et les distributeurs comportent les deux composantes.

6.3.2   Sans perdre de vue l'intérêt du consommateur dans un contexte d'évolution rapide de l'état de la concurrence dans le marché des pièces de rechange, de la réparation et de l'entretien, le CESE admet la possibilité de prévoir une règle transitoire qui éviterait la création d'obstacles supplémentaires dans la renégociation de contrats entre distributeurs et concessionnaires à la lumière des nouvelles règles.

6.3.3   Le CESE invite instamment la Commission européenne à faire appliquer dans sa totalité le nouveau REC relatif au secteur automobile à compter du 1er juin 2010, tout en prévoyant pour le marché primaire un régime transitoire progressif de deux ans afin d'adapter les accords de distribution existants aux nouvelles règles.

6.3.4   Il faut rappeler que les constructeurs peuvent mettre fin aux contrats de distribution moyennant un préavis de trois ans. Cela signifie que les concessionnaires qui ont fait certains choix et des investissements importants sur la base du REC actuel seraient obligés d'attendre jusqu'au mois de juin 2013 pour signer un nouvel accord de distribution, sauf si la possibilité est laissée aux constructeurs et aux concessionnaires d'ajuster leurs contrats avant cette échéance, s'ils le jugent nécessaire à la lumière des nouvelles règles et d'éventuels changements des conditions du marché.

6.3.5   Appliquer le nouveau REC au marché primaire à compter du 1er juin 2010 présenterait l'avantage de coïncider avec l'entrée en vigueur du nouveau REC et des nouvelles orientations concernant le marché après-vente.

6.3.6   La grande majorité des distributeurs étant également présents dans les services après-vente, l'on comprend aisément pourquoi le CESE est favorable à l'application du nouveau REC aux marchés primaire et secondaire en même temps. Cette option sera synonyme de simplification, de flexibilité et, ce qui n'est pas le moins important, d'une réduction des coûts de transition.

6.4   Monomarquisme

Selon les orientations (paragraphe 25, note en bas de page no 9), interdiction sera faite aux constructeurs d'inclure des obligations de monomarquisme dans les nouveaux contrats avec leur concessionnaires à partir de l'entrée en vigueur du nouveau REC. Si l'on considère que la grande majorité des constructeurs garderont le même réseau de concessionnaires dans les années à venir, cette décision aura pour effet d'abolir pratiquement le monomarquisme. Cette restriction ne va pas seulement à l'encontre de la suggestion du CESE (voir observation 1 ci-dessus); elle est également en contradiction avec le nouveau REC (28 juillet 2009) qui ne prévoit pas de limites pour les contrats de monomarquisme.

6.5   Véhicules particuliers et utilitaires

Comme dans le règlement actuel, la Commission met sur un pied d'égalité les voitures particulières et les véhicules utilitaires (VU), tandis que les premières sont des biens de consommation et les seconds des biens d'équipement gérés dans un contexte d'entreprise à entreprise. Dans ce contexte, le client n'achète pas seulement un véhicule, mais un package dans lequel le service est un aspect essentiel du choix, effectué afin de maximiser l'utilisation du VU, comme c'est le cas pour les tracteurs agricoles et les engins de construction. Une telle différence de marché implique que même les aspects concurrentiels ne sont pas les mêmes pour les deux types de produits.

6.5.1   D'ailleurs, le secteur des VU, tant dans le marché primaire que dans le secondaire, n'a pas connu de problème de concurrence ni fait l'objet de critiques de la part de l'utilisateur final car il très compétitif et une part importante de son marché est traditionnellement occupée par les fournisseurs indépendants.

6.5.2   Aussi le CESE estime-t-il que les contrats relatifs aux VU devraient être régis par le REC pour le marché après-vente également, comme c'est le cas pour les tracteurs et les engins de construction.

6.6   Approvisionnement en pièces détachées

6.6.1   L’article 5 b) du projet de règlement prévoit: ''l’exemption ne s’applique pas à la restriction convenue entre d’une part un fournisseur de pièces, d’outils de réparation ou de diagnostics ou de tout autre équipement et d’autre part un constructeur, qui limiterait la faculté du fournisseur de vendre ces produits ou services aux réparateurs ou distributeurs agréés ou aux réparateurs agréés et indépendants ou aux utilisateurs finaux''.

6.6.2   La formulation de cette restriction ne paraît pas être adaptée à l’objectif poursuivi par la Commission.

6.6.3   En effet, la clause d’achat des pièces, dans le REC actuel, empêche le constructeur d’imposer un approvisionnement supérieur à 30 % auprès de lui. En conséquence, la diversification de l’approvisionnement des réseaux créé une baisse des prix. Même si les constructeurs détiennent encore une part plus importante que 30 % dans l’approvisionnement, ceci est expliqué par les systèmes d’objectifs, de primes et de rabais mis en place par les constructeurs. Cette situation témoigne de la pression concurrentielle qu’exercent les équipementiers sur les constructeurs.

6.6.4   Or, dans la proposition d’article 5 b), il n’est pas fait mention d’un pourcentage au-delà duquel les distributeurs ou les réparateurs ne sont pas obligés de se fournir chez le constructeur (telle que la clause actuelle de 30 %).

6.6.5   De plus, il est affirmé que les équipementiers doivent pouvoir livrer les réparateurs agréés. Or, cette possibilité restera théorique si les constructeurs détiennent la capacité de prescrire un approvisionnement exclusif ou quasi exclusif de leurs réseaux en pièces de rechange.

6.7   Garanties

Enfin, le CESE souligne également la position de la Commission concernant les garanties des véhicules automobiles. Compte tenu de la responsabilité directe du constructeur qui est engagée pour ce qui est du bon fonctionnement et de la réparation des défauts, la Commission prévoit que l'obligation faite aux réparateurs d'utiliser exclusivement des pièces fournies par le constructeur pendant la période de la garantie légale constitue une exemption. Le CESE juge cette position acceptable pour autant qu'elle n'entraîne pas pour le consommateur une impossibilité absolue de recourir à des réparateurs indépendants pour l'entretien régulier du véhicule, laquelle pourrait constituer une restriction des droits du consommateur et notamment de celui d'avoir accès à des biens de qualité et à la garantie y relative.

Bruxelles, le 18 mars 2010.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  JO C 228 du 22.9.2009, p. 47; JO C 175 du 28.7.2009, p. 20.

(2)  JO L 203 du 1.8.2002, p. 30.

(3)  JO L 336 du 29.12.1999, p. 21.

(4)  JO L 171 du 29.6.2007, p. 1.

(5)  JO C 318 du 23.12.2006, p. 62.

(6)  Voir les avis du CESE: JO C 388 du 31.12.1994, p.9 et JO C 286 du 17.11.2005, p. 8.

(7)  JO C 317 du 23.12.2009, p. 29-36.

(8)  JO C 66 du 22.03.2007, p. 18.


28.12.2010   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 354/80


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions: Réexaminer la politique communautaire de l’innovation dans un monde en mutation»

COM(2009) 442 final

2010/C 354/19

Rapporteur: M. MALOSSE

Le 2 septembre 2009, la Commission a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions: réexaminer la politique communautaire de l’innovation dans un monde en mutation»

COM(2009) 442 final.

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 2 mars 2010.

Lors de sa 461e session plénière des 17 et 18 mars 2010 (séance du 17 mars 2010), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 108 voix pour, 1 voix contre et 2 abstentions.

1.   Qu'est-ce que l'innovation?

1.1   Selon la définition citée dans la communication «l’innovation, c’est la capacité de prendre des idées nouvelles et de les convertir plus efficacement et plus rapidement que la concurrence en résultats commerciaux grâce à des nouveaux processus, produits ou services» (1).

1.1.1   Plus que la capacité, l’innovation est l’action, le processus qui permet de convertir des idées existantes ou nouvelles en résultats.

1.1.2   L’innovation est souvent le fruit d’un travail collectif (association d’entreprises, partenaires sociaux, chercheurs); elle s'applique également au fonctionnement interne de l'entreprise notamment grâce aux idées des salariés. Face à la compétition mondiale, les entreprises européennes devront développer de meilleurs procédés pour impliquer les salariés aux résultats de l'entreprise et motiver leur créativité.

1.1.3   L'innovation peut également concerner des domaines qui ne jouent pas directement sur le marché comme le développement humain, la santé, l’innovation sociale, environnementale, en matière de services d’intérêt général, de citoyenneté ou d’aide au développement.

1.2   En fait, l’innovation serait plutôt un objectif de société, la valorisation de la créativité humaine pour promouvoir un développement économique soutenable et plus harmonieux.

1.2.1   L'innovation doit trouver des réponses aux enjeux de société de ce siècle: approvisionnement durable en énergie et protection du climat, développement démographique, globalisation, attractivité des territoires, création d'emplois, cohésion et justice sociales.

1.3   L’innovation n’est pas une fin en soi; elle sert des objectifs sociétaux, que l’on peut résumer sous les vocables de progrès et de durabilité, il faut toutefois s’accorder sur la définition et la mesure de ces vocables.

Il nous semble intéressant que l’Union puisse être pionnière en la matière, en définissant et en utilisant de nouveaux indicateurs économiques et sociétaux capables de mesurer la croissance et son évolution dans le temps (2).

2.   Qu'a fait l'Union Européenne?

La communication dresse un bilan naturellement flatteur des actions menées par l’Union, tant au niveau de l’amélioration des conditions cadres, du soutien à une adoption plus large des produits et services innovants sur le marché, de la création de synergies et du volet financier. Il faut souligner qu’elle articule sa démonstration principalement autour des innovations technologiques.

L’utilisation du vocable «politique communautaire» en parlant de l’innovation est quelque peu emphatique car, comme le bilan présenté dans cette communication en fait la démonstration, il s’agit plutôt d’un ensemble de mesures et d’actions que l’on coordonne. En effet, l’UE ne dispose pas de compétences juridiques propres en la matière (compétence d’appui).

2.1   Amélioration des conditions cadre

2.1.1   Certaines mesures prises par l’UE ont eu un réel impact positif comme la révision des règles sur les aides d’État favorisant les éco-investissements et les investissements en R&D ou la fusion des réseaux Euro Info Centres et Centres Relais Innovation dans le cadre du réseau Entreprise Europe. Le lancement du Small Business Act européen a suscité beaucoup d’espoirs qui n'ont pas été à ce jour suivis de suffisamment de réalisations concrètes et visibles pour les PME (3). On pourrait citer aussi la communication «New skills for new jobs» qui va dans la bonne direction mais ce n’est qu’une communication sans moyens de mise en œuvre jusqu’à présent.

2.1.2   À contrario, l’absence de décision sur le Brevet communautaire est un aveu criant de l’incapacité du Conseil européen à prendre ici les mesures nécessaires qui auraient une incidence directe sur l’innovation comme en témoignent le déclin continu de la part des brevets déposés en Europe par rapport au reste du monde, mais aussi les coûts considérablement plus élevés pour les Européens. De ce fait, l'UE souffre d'un déficit de protection qui pénalise les entreprises, notamment les PME.

2.1.3   Les politiques et instruments proposés par la Commission européenne sont jusqu'à présent principalement axés sur les phases nécessaires en amont de l'innovation, et sur les grandes entités publiques ou privées de recherche. Cette approche devrait être complétée par des mesures et instruments supplémentaires, par exemple des processus d'élaboration de normes qui se concentrent davantage et systématiquement sur les processus innovants.

2.1.4   D'une manière générale, les administrations, en particulier au plan local, peuvent être sources d’innovation, dans tous les domaines.

2.1.4.1   En ce qui concerne les marchés publics, les donneurs d’ordre privilégient trop souvent les offres du moins-disant, au détriment de la qualité des propositions. Or on peut favoriser l'innovation en orientant les commandes publiques et améliorer ainsi la qualité des services aux citoyens (4).

2.2   Mise en œuvre des politiques d'innovation

2.2.1   La communication souligne l’accroissement des possibilités de financements sur le budget européen dans le cadre des perspectives financières 2007-2013.

2.2.1.1   La réalité de cet accroissement, n'est pas visible pour les acteurs qui déplorent la lenteur et la complexité des procédures, notamment pour le 7e Programme Cadre de Recherche et de Développement (PCRD). De même pour les fonds structurels européens où, en plus de la lourdeur bureaucratique, le manque de visibilité du fait du saupoudrage des aides et du principe d’additionnalité les empêche d’être utilisés comme de véritables leviers pour l’innovation.

2.2.1.2   La révision prochaine du règlement financier doit simplifier, concentrer et modéliser les règles de participation, d’éligibilité et de «reporting».

2.2.2   Ce constat s'applique aussi aux instruments financiers de la Banque européenne d’investissement (BEI), qui agit généralement au travers d’intermédiaires qui appliquent leurs propres conditions. Les efforts consentis par la BEI et la Commission pour favoriser le financement des PME innovantes est remarquable mais leurs effets ne sont pas visibles. Le marché européen du financement reste fragmenté en Europe et peu favorable aux PME innovantes non technologiques. Au niveau national, il est nécessaire d’inciter le secteur bancaire à prendre davantage de risques dans le financement des PME.

2.2.3   Le nouveau Programme cadre pour l’Innovation et la Compétitivité (CIP) avait l’ambition d’intégrer des mesures et programmes existants mais dispersés. Les activités restent en réalité cloisonnées en sous-programmes et leur cohérence n’est pas prouvée. De plus, le CIP a été doté d’un budget de 3,6 milliards d’euros sur 7 ans ce qui est peu au vu des enjeux pour l'UE.

2.2.4   Les programmes européens peinent à répondre à leur propres objectifs, notamment en terme de participation du secteur privé, et des PME en particulier. Les fonds disponibles sont alloués de façon privilégiée aux institutions publiques, au détriment du secteur privé. La bonne gestion des fonds publics alloués à la recherche et à l’innovation, et l’impact réel de ces investissements sur l’économie européenne sont des préoccupations cruciales pour le CESE.

2.2.5   La coordination entre les programmes communautaires et les programmes nationaux n’est pas efficace. Il n’existe par exemple pas de programmation commune États membres / UE qui permettrait d’éviter de confondre additionnalité et complémentarité.

2.3   Créations de synergies

2.3.1   L’existence des Programmes nationaux de Réforme dans le cadre de la stratégie de Lisbonne offre un cadre de référence aux États membres en matière d’innovation. Cependant, la grande hétérogénéité des approches et une faible implication des partenaires sociaux et autres acteurs de la société civile dans leur conception et leur mise en œuvre en diminuent l’impact et l'efficacité.

2.3.2   «L'Espace européen de la Recherche» a été établi pour encourager la cohérence du système et les synergies avec les États membres. Pour le CESE, ce point mériterait vraiment d’en faire une priorité pour l’avenir avec beaucoup plus d’engagement.

2.3.2.1   Par exemple, l'Institut européen d'Innovation et de Technologie (EIT), dans son architecture actuelle, ne peut remplir sa mission d'origine de faire dialoguer le secteur de la recherche, l'entreprise et le monde de l'éducation. Doté de moyens relativement faibles (2,8 milliards d’euros de 2008 à 2013 (5), l'EIT reste un instrument virtuel peu accessible aux entreprises non familiarisées avec les programmes européens.

2.3.3   D’après le dernier tableau de bord de l’innovation (6), les pays champions de l’innovation en Europe ont des points communs: dépenses importantes pour l’éducation, la formation tout au long de la vie, dépenses importantes en R&D et instruments de soutien à l’innovation. On pourrait ajouter une bonne pratique du dialogue social et du dialogue civil.

De meilleures synergies restent à trouver afin que ces bonnes pratiques se généralisent en Europe et qu’on encourage plus ouvertement une convergence UE/États membres sur des décisions politiques communes et coordonnées en faveur ces facteurs clés de succès.

2.3.4   Cette synergie doit aussi concerner les acteurs de la société civile et les partenariats publics/privés.

À titre d'exemple, les «clusters» permettent aujourd'hui de faire travailler efficacement les universités et les instituts de recherche avec les entreprises, au sein de structures soutenues par des investissements publics et privés. Cette expérience des «clusters» est positive au plan national mais, en l'absence d’une politique de soutien communautaire, l'UE ne peut en exploiter le bénéfice. L’UE devrait prendre des initiatives pour l’européanisation des clusters permettant de professionnaliser leur gouvernance, de les internationaliser et d’optimiser ainsi leur fonctionnement et leur financement.

2.3.5   Les synergies entre les priorités établies par les différents programmes européens de soutien à l’innovation doivent être privilégiées au regard des défis sociétaux. On trouve en effet les mêmes priorités dans différents programmes communautaires, sans passerelles.

3.   Les préconisations du CESE

Le CESE soutient la mise en place d’une stratégie européenne ambitieuse en matière d’innovation qui propose une vision plus large et plus intégrée.

3.1   Des principes de départ

L’innovation doit être prise au sens large, aussi bien pour les produits et services mis sur le marché que pour le secteur non-marchand et le domaine sociétal ou social.

Le Traité de Lisbonne élargit le champ d'action des politiques communautaires dans des domaines propices à l'innovation: politique commerciale, énergie, espace, tourisme, culture, santé, etc.

L’innovation est par essence interdisciplinaire et transversale, telle devrait être aussi la stratégie et les moyens de mise en œuvre.

L’innovation doit être compatible avec les principes et valeurs de l’Union. Une innovation peut être en effet «bonne» technologiquement mais avoir des effets indésirables pour l’environnement ou la cohésion de la société.

Il est nécessaire de familiariser les citoyens avec les nouvelles technologies en les faisant rentrer dans le débat public (OGM, énergie nucléaire …).

Le développement des technologies clés (7) (nanotechnologies, micro- et nanoélectronique, photonique, matériaux avancés, biotechnologies, technologies de l'information, science de la simulation) doit être soutenu de manière ciblée et en tenant compte de son caractère interdisciplinaire. Il faut cependant que les programmes européens de recherche comportent un volet valorisation interdisciplinaire et que les applications des technologies clés puissent être exploitées dans des secteurs traditionnels.

Les priorités doivent être définies au regard des objectifs sociétaux de l'UE (santé, environnement, énergie, …)

La stratégie européenne de l’innovation doit être fondée sur les synergies et les partenariats avec les acteurs du secteur privé et de la société civile.

Les PME doivent être au cœur du futur plan européen en faveur de l'innovation. Toutes les mesures cadres, programmes et dispositions facilitant l’innovation dans les PME doivent être favorisées.

3.2   Des propositions

3.2.1   Dans le cadre de son groupe d’étude, le CESE a organisé une audition publique à l’Institut de Prospective Technologique de Séville le 14 janvier 2009. Cette audition, réunissant des représentants de l’Institut ainsi que des acteurs locaux du soutien à l’innovation, a permis d’élaborer des propositions concrètes.

3.2.2   La base de toute politique est de disposer de bons indicateurs et de bons instruments d'analyse. Aujourd'hui l'UE dispose de plusieurs instruments d'analyse: «European innovation score board», «Inno policy trendchart», «European Cluster's observatory», «Innobaromètre», «Sectoral Innovation watch» et «EU industrial R&D investments scoreboard». Dans un souci de cohérence, le CESE recommande la création d'un «Observatoire européen de l'innovation» unique, qui reprendrait les outils existants mais en leur donnant de la cohérence et encore plus de visibilité. De plus, une évaluation n’est significative que si les résultats sont comparés à des objectifs; le futur plan européen devra être accompagné d'objectifs clairs, y compris en termes d'indicateurs quantitatifs. À l'aide d'objectifs et d'indicateurs clairs, cet observatoire devra être en mesure de travailler de manière transparente et indépendante, pour assurer une évaluation objective des politiques.

3.2.3   La recherche fondamentale crée le terreau indispensable aux innovations futures. Le CESE soutient dès lors un accroissement des budgets européens en faveur de la recherche dans ce domaine, notamment pour le prochain Programme Cadre de Recherche et Développement de l'UE (PCRD), à condition d'en cibler les priorités (en phase avec les défis sociétaux), et de faire jouer les effets de levier avec les programmes nationaux et le secteur privé.

3.2.3.1   Par ailleurs, le CESE suggère d’examiner de nouvelles approches pour favoriser la participation des PME aux programmes communautaires, telles que le concept de partenariat responsable. Il s’agirait, sur base d’une charte commune, d’alléger les formalités administratives (audits, «reporting»).

3.2.4   Le développement de partenariats entre les établissements d’enseignement et de recherche, notamment les universités et les acteurs économiques et sociaux, est aussi un bon moyen de développer une synergie positive en faveur de l’innovation en entreprise mais aussi dans le monde de l'éducation (8).

3.2.4.1   L’EIT devrait prendre une forme de «tête» de réseau de structures existantes afin de favoriser la diffusion des technologies nouvelles vers tous les secteurs. À terme, l’EIT devrait permettre de financer des investissements dans des infrastructures d’envergure européenne, au sein desquelles convergeraient les politiques de recherche, d’éducation et d’innovation.

3.2.4.2   De plus, les programmes favorisant la mobilité des chercheurs, entre États membres mais aussi entre les secteurs privés et publics doivent être encouragés; l’exemple du doctorat industriel danois, qui permet aux ingénieurs d’une entreprise de préparer un doctorat universitaire, notamment en suivant des cours dans un autre État membre (9), est une bonne pratique qui mériterait d’être testée à l’échelle européenne.

3.2.5   Les instruments de décloisonnement des activités d'appui à l'innovation entre l'UE et les États membres devraient, selon le CESE devenir les éléments prioritaires du futur programme. Dans ce sens, il faut renforcer les réseaux de proximité qui font le pont entre le niveau européen et le niveau local en faisant se croiser les idées et les projets. Le CESE préconise de mettre en place des plateformes de partenariats européennes qui soient ouvertes aux acteurs de la société civile. Le réseau «Entreprise Europe Network», opérateur de terrain pour les entreprises, pourrait servir de base à cette plateforme.

3.2.6   L’amélioration de l’accès aux financements est primordiale, en particulier pour le développement des PME innovantes et des start-up. Il faut renforcer le rôle de la BEI, notamment en étendant le mécanisme de financement avec partage de risques, et établir un marché européen du capital risque.

3.2.6.1   De plus, le CESE recommande des mesures spécifiques dans le cadre du Small Business Act (SBA), par exemple la promotion d'un «deuxième marché boursier» européen ainsi que des mesures d’incitation fiscales pour l’investissement des particuliers dans l’innovation, ainsi que l’intéressement des salariés.

3.2.7   On constate que dans de nombreux pays l'innovation et l'esprit d'entreprise sont en recul auprès des jeunes. Il faut encourager la créativité et l'esprit d'initiative dans les cursus d'enseignement.

3.2.7.1   Le CESE propose, à l’instar de l’expérience des ambassadeurs de l’entrepreneuriat féminin, qu’un réseau d’ambassadeurs des Jeunes Entrepreneurs se développe, avec l’appui des institutions européennes.

3.2.8   Une meilleure utilisation des fonds structurels s'impose si l'on veut favoriser l’innovation dans les pays concernés par la politique de cohésion. Il s’agirait en particulier de mieux cibler les actions, d’éviter le principe obligatoire d'additionnalité qui est source de retard et de manque de visibilité. Le CESE souligne le potentiel de l'innovation sociétale auprès des acteurs de la société civile, totalement ignorée jusqu'à présent des programmes structurels ainsi que les programmes d'éducation.

3.2.9   La politique de concurrence (aides d'état, coopération entre entreprises) de l'UE doit être aussi adaptée à un plus grand soutien à une meilleure valorisation des innovations et aux transferts de technologies. Des secteurs particuliers comme la construction de logement ou les infrastructures et moyens de transport devraient à cet égard faire l'objet d'une attention spécifique en raison de leur rôle dans la question du changement climatique.

3.2.10   Avec le Traité de Lisbonne, l'UE renforce ses compétences en matière de politique commerciale et de coopération extérieures. Il faut saisir cette chance pour imaginer une politique européenne d'échanges scientifiques et techniques, coordonnée avec les politiques nationales. Une attention particulière doit être portée aux échanges et à la coopération avec les pays voisins de l'UE.

4.   Conclusions

4.1   Plus que les moyens budgétaires qui lui seront attribués, c’est la volonté politique réelle de la Commission européenne et des États membres à assurer sa mise en œuvre, la qualité des partenariats, notamment avec la société civile et l’établissement d’un dialogue avec les citoyens qui conditionneront la réussite de cette stratégie. Le CESE appelle ainsi le Conseil européen et la Commission européenne à présenter un plan d'action en faveur de l'innovation qui soit la pierre angulaire d'une stratégie pour la croissance et l'emploi en Europe (UE 2020).

4.2   Le futur plan européen en faveur de l'innovation devrait s’accompagner d’un véritable plan d’action, assorti d’un calendrier de mise en œuvre et de suivi des progrès réalisés. À cet égard, la forme juridique de ce plan (recommandations, «act» ou toute autre forme) a une importance subalterne. C'est son contenu et les engagements précis, chiffrés et datés de mise en œuvre qui détermineront son efficacité

4.3   L’ambition de cette stratégie doit être la concrétisation d’une véritable politique «communautaire», au service du redémarrage de l'économie européenne.

Bruxelles, le 17 mars 2010.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  «Creating a national innovation Framework», science progress, Richard Nedis and Ethan Byler, avril 2009.

(2)  À l’instar des préconisations du rapport de la Commission sur la mesure de la performance économique et du progrès social (www.stiglitz-sen-fitoussi.fr), ces indicateurs doivent dépasser la simple mesure de PIB, et prendre en compte des mesures fines et différenciées des revenus disponibles, de l’éducation, de l’environnement, de la distribution des richesses.

(3)  JO C 182 du 4.8.2009, p. 30.

(4)  Un premier pas a été franchi dans le cadre de l’initiative marchés porteurs (rapprochement de donneurs d’ordre pour favoriser l’attribution de marchés publics à des entreprises innovantes), mais les résultats seront à examiner de près (car l’initiative a démarré en septembre 2009).

(5)  À titre de comparaison le budget de fonctionnement annuel du MIT (Massachusetts Institute of Technology) est de 2,4 milliards de dollars.

(6)  European Innovation Scoreboard – Pro Inno Europe.

(7)  Cf. Communication de la Commission européenne «Préparer notre avenir: développer une stratégie commune pour les technologies clés génériques dans l’UE», COM(2009) 512 final.

(8)  JO C 228 du 22.9.2009, p. 9.

(9)  Financée par des bourses européennes Marie Curie.


28.12.2010   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 354/85


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant les directives 1998/26/CE, 2002/87/CE, 2003/6/CE, 2003/41/CE, 2003/71/CE, 2004/39/CE, 2004/109/CE, 2005/60/CE, 2006/48/CE, 2006/49/CE et 2009/65/CE en ce qui concerne les compétences de l'Autorité bancaire européenne,l'Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles et l'Autorité européenne des marchés financiers»

COM(2009) 576 final — 2009/0161 (COD)

2010/C 354/20

Rapporteur unique: M. ROBYNS DE SCHNEIDAUER

Le 25 novembre 2009, le Conseil a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant les directives 1998/26/CE, 2002/87/CE, 2003/6/CE, 2003/41/CE, 2003/71/CE, 2004/39/CE, 2004/109/CE, 2005/60/CE, 2006/48/CE, 2006/49/CE et 2009/65/CE en ce qui concerne les compétences de l'Autorité bancaire européenne, l'Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles et l'Autorité européenne des marchés financiers»

COM(2009) 576 final — 2009/0161 (COD).

La section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 3 mars 2010.

Lors de sa 461e session plénière des 17 et 18 mars 2010 (séance du 18 mars 2010), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 115 voix pour, 0 voix contre et 1 abstention.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le CESE considère que la crise fournit une opportunité urgente de concrétiser une réforme significative du système de surveillance. Cette réforme doit avoir pour objectifs la prévention, tant d’incidents isolés que de crises de plus grande ampleur, et la résistance à de tels chocs. Pour cela, il y a lieu de s’appuyer sur des bases définies au niveau communautaire, voire sur une interaction entre un régime communautaire solide et ses équivalents dans d’autres pays.

1.2

Le CESE déplore que l’harmonisation imparfaite des conditions d’accès aux marchés et des exigences prudentielles permette à ce jour des arbitrages réglementaires et engendre des distorsions de concurrence. Un alignement de ces exigences sur la base de la robustesse, de la maîtrise des risques des acteurs financiers et de la qualité de l’information du public constitue un fondement indispensable d’une communauté d’intérêts au sein de l’espace économique européen. Ce mouvement doit s'accompagner d'une attention constante portée aux qualifications des contrôleurs sur la base notamment de collaboration mutuelle.

1.3

Le CESE appuie pour ces raisons la Commission dans ses travaux en vue de doter les Autorités de surveillance sectorielles de pouvoirs leur permettant de définir des normes techniques communes et leur permettant de résoudre des différends entre autorités nationales. Il approuve l’évolution des rapports entre autorités de contrôle vers un mode de résolution collégiale d’éventuels différends quant à leur pratique respective dans les domaines pour lesquels des processus décisionnels conjoints ont été prévus. Il rejoint la Commission dans le souci de faire une distinction nette entre ce qui relève du domaine technique, d’une part, et du domaine politique, qui revient aux institutions communautaires investies d’un mandat politique, de l’autre.

1.4

Le CESE invite la Commission à se montrer ambitieuse dans les travaux qui figurent à son programme pour parachever les modifications entreprises, dans le domaine des normes techniques applicables au secteur des valeurs mobilières et dans celui des directives attendues dans celui des assurances et des pensions professionnelles.

2.   Contexte

2.1

Le 26 octobre 2009, la Commission européenne a présenté une proposition de directive, Omnibus I, en vue de modifier un ensemble de directives ayant trait à des activités faisant partie du secteur des services financiers. Il s’agit des directives ayant trait aux exigences de fonds propres, aux conglomérats financiers, aux pensions professionnelles, aux abus de marché, aux marchés d’instruments financiers, aux prospectus, au caractère définitif du règlement, à la transparence, au blanchiment de capitaux et aux fonds de placement.

2.2

La Commission a pour objectifs la protection du public, la stabilité financière et l’amélioration du marché unique que les régimes de surveillance nationaux, même en partie harmonisés, ne permettent pas de réaliser.

2.3

Pour réaliser ces objectifs il y a donc lieu de définir la portée des compétences prévues dans les Règlements en vue d’instituer les autorités résultant de la transformation des comités de surveillance européens existants. Eu égard à l’uniformité recherchée, la proposition de directive modificative permet d’apporter les changements voulus aux textes existants.

2.4

Cette proposition s’inscrit dans le droit fil de la politique développée par la Commission suite à l’analyse des conclusions du rapport du groupe d’experts de haut niveau, présidé par M. Jacques de Larosière, pour mettre en place un système européen de surveillance plus efficace, plus intégré et plus durable. Ce système devrait, selon la communication de la Commission de mai 2009, se composer d’un Comité européen du risque systémique, chargé de la surveillance macroéconomique et de celle des risques affectant la stabilité financière, d’une part, et d’un système européen de surveillance financière, composé d’un réseau d’autorités nationales de surveillance financière travaillant de manière coordonnée avec de nouvelles autorités européennes de surveillance, d’autre part.

2.5

Ces autorités devraient être issues des trois comités de surveillance occupant le «niveau 3» dans l’architecture issue du processus décisionnel désigné du nom du professeur Lamfalussy, compétents respectivement pour les activités bancaires, les assurances et les pensions professionnelles, et enfin les marchés financiers.

2.6

Pour doter l’Europe d’un ensemble de règles financières plus harmonisé, la Communication de la Commission de mai 2009 intitulée «Surveillance financière européenne» (1) se fixait pour objectif de permettre aux autorités d’élaborer des projets de normes techniques et de favoriser l’échange d’informations micro-prudentielles.

2.7

La présente proposition y donne suite selon trois axes principaux: elle définit le champ d’application des normes véritablement techniques (outils, méthodes, statistiques, formulaires, …) destinées à assurer une convergence de la surveillance tendant à plus d’uniformité, qui devront être adoptées ensuite par la Commission.

2.8

Elle habilite les autorités à régler les différends entre autorités nationales ayant trait à des situations où la coopération s’impose dans un esprit où l’intérêt national est tempéré par l’intérêt commun, et où la conciliation précède l’éventuelle décision contraignante.

2.9

Enfin, elle met en place des canaux adaptés pour l’échange d’informations permettant de parvenir sans obstacles juridiques à une doctrine commune, en particulier dans les rapports entre les autorités nationales et les nouvelles autorités européennes.

2.10

Celles-ci seraient par ailleurs habilitées à traiter avec leurs homologues de pays tiers, à publier des avis notamment sur les aspects prudentiels de fusions et acquisitions transfrontalières, et enfin à dresser des listes communautaires des acteurs financiers agréés.

3.   Observations générales

3.1

Le présent avis du CESE s’inscrit dans la lignée des avis adoptés à la suite de la crise financière de 2007-2008, notamment l’avis sur le rapport du groupe de Larosière (2) et sur la surveillance macro- et microprudentielle. Bien que les principales causes immédiates de cette crise peuvent être attribuées à des dérives du système financier des États-Unis, celle-ci a révélé à la fois des lacunes dans les régimes de surveillance européens et d’importantes différences entre ceux-ci. Le Comité regrette que ni des crises, ni des incidents antérieurs (notamment l’affaire Equitable Life) n'avaient suffi pour engager plus tôt les réformes nécessaires.

3.2

Les déboires vécus par des clients d’institutions ayant développé des activités transfrontalières sont en effet de nature à mettre en péril la confiance des consommateurs à l’égard du marché unique.

3.3

Les nouvelles autorités devraient être dotées de structures de consultation des milieux professionnels concernés, des organisations syndicales, des consommateurs de services financiers, et entretenir un dialogue avec le CESE en tant que représentant de la société civile.

3.4

Le CESE souligne le caractère technique des trois nouvelles autorités. Leur statut d’organes autonomes doit rester subordonné aux compétences politiques de la Commission et, en dernière analyse, du Parlement européen.

3.5

Le CESE observe que les institutions financières ayant des activités couvrant plusieurs États membres devraient bénéficier de la plus grande uniformité des pratiques de surveillance. Il est particulièrement attentif au fait que le régime proposé ne crée en soi pas de nouvelles contraintes pour les acteurs financiers, dont les coûts auraient été répercutés sur les usagers, sous réserve des conséquences de la mise à niveau des pratiques des États qui avaient bénéficié d’arbitrages réglementaires et de distorsions de concurrence.

3.6

Le CESE approuve l’inclusion des principes de «mieux légiférer» dans le dispositif proposé, au travers de consultations publiques et d’études d’impact dès le stade de la conception de mesures. De même, il salue le souci de flexibilité et de nécessité que la Commission entend promouvoir.

3.7

En ce qui concerne le caractère collégial des trois nouvelles autorités, le Comité plaide en faveur d’un équilibre entre les différentes autorités nationales en cas de différend. Selon le CESE, la collégialité signifierait que les autorités nationales adoptent des décisions communes sans privilégier la taille des marchés ou la présence d’opérateurs en dehors de leur pays d’origine.

Bruxelles, le 18 mars 2010.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  COM(2009) 252 final.

(2)  JO C 318 du 23 décembre 2009, p. 57.


28.12.2010   

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Journal officiel de l'Union européenne

C 354/88


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) no 708/2007 relatif à l'utilisation en aquaculture des espèces exotiques et des espèces localement absentes»

COM(2009) 541 final — 2009/0153 (CNS)

2010/C 354/21

Rapporteur: M. Valerio SALVATORE

Le 11 novembre 2009, le Conseil, conformément à l'article 37 du traité instituant la Communauté européenne, et le 5 mars 2010, le Parlement européen, conformément à l'article 43(2) du TFUE, ont décidé de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) no 708/2007 relatif à l'utilisation en aquaculture des espèces exotiques et des espèces localement absentes»

COM(2009) 541 final — 2009/0153 (CNS).

La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 25 février 2010.

Lors de sa 461e session plénière des 17 et 18 mars 2010 (séance du 17 mars 2010), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 130 voix pour, sans voix contre et 3 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le Comité approuve les modifications apportées au règlement (CE) no 708/2007 relatif à l'utilisation en aquaculture des espèces exotiques et des espèces localement absentes, découlant de l'acquisition de nouvelles connaissances scientifiques, y compris les résultats de l'action concertée IMPASSE financée au titre du sixième programme-cadre.

1.2

Le Comité souhaite lui aussi la réalisation du double objectif poursuivi par le règlement: réduire au minimum le niveau de risque lié à l'élevage d'espèces exotiques et localement absentes, et soulager les opérateurs du secteur de formalités administratives fastidieuses. La lourdeur bureaucratique est liée aux demandes d'autorisations nationales nécessaires pour les installations aquacoles dans lesquelles sont élevées des espèces exotiques et localement absentes.

1.3

À cette fin, il importe au plus haut point de garantir la biosécurité des installations par l'adoption de mesures appropriées: a) pendant le transport; b) par l'application de protocoles clairement définis dans les installations aquacoles de destination; et c) par le respect de procédures adéquates jusqu'à la mise à la consommation des produits du poisson.

1.4

Dans ce contexte, la nouvelle définition des installations aquacoles fermées semble bien structurée et cohérente avec les résultats du projet IMPASSE; toutefois, le langage éminemment technique utilisé pourrait donner lieu à des interprétations parfois incorrectes. Afin de prévenir d'éventuelles ambigüités à l'étape de la mise en œuvre, il conviendrait d'ajouter au nouveau règlement une disposition précisant clairement que les installations aquacoles fermées doivent être considérées comme telles si elles se situent sur la terre ferme.

1.5

Le nouveau règlement stipule en outre que les installations aquacoles fermées doivent veiller à empêcher que des inondations n'entraînent la dispersion des espèces allochtones d'élevage ou de matériel biologique dans les eaux libres. À cette fin, il conviendrait de définir une distance de sécurité entre les installations précitées et les eaux libres, en fonction du type, de la localisation et de la configuration du site d'implantation de l'installation aquacole.

1.6

De même, étant donné que l'eau n'est pas le seul facteur de risque de fuites, il convient de prévoir tous les systèmes nécessaires à la protection des installations aquacoles fermées contre les prédateurs en mesure de disperser les espèces d'élevage.

1.7

Enfin, le Comité approuve la thèse selon laquelle les mouvements au départ d'une installation aquacole fermée vers une installation aquacole ouverte ne doivent pas être considérés comme des mouvements ordinaires. À cet égard, il conviendrait d'ajouter qu'il est souhaitable que les installations aquacoles fermées soient gérées et administrées distinctement des installations ouvertes, lorsque le cycle de production le permet, afin de réduire au minimum tout risque éventuel de contamination des écosystèmes aquatiques.

2.   Introduction

2.1

Dans une situation où la pêche décline, en raison d'une surexploitation des mers et des eaux intérieures, l'aquaculture peut contribuer favorablement à la satisfaction de la demande croissante en protéines de poisson. En effet, l'on a enregistré, au cours des trente dernières années, une croissance annuelle de 11 % de la production aquacole au niveau mondial (R. Naylor & M. Burke, 2005) (1).

2.2

Dans ce contexte, l'introduction et l'élevage d'espèces exotiques et localement absentes en Europe sont vigoureusement prônées par certains groupes d'intérêts économiques et commerciaux, qui doivent cependant se conformer aux objectifs de sauvegarde des écosystèmes, potentiellement vulnérables en cas d'exercice incorrect de cette activité.

2.3

L'introduction d'espèces exotiques constitue en effet l'un des principaux facteurs de perturbation des écosystèmes aquatiques qui sont imputables à l'homme, et la deuxième cause, immédiatement après la destruction des habitats, de la perte de biodiversité au niveau mondial. Tous les écosystèmes reposent sur un équilibre fragile, qui est le fruit d'un lent processus évolutif, grâce auquel tout organisme interagit avec l'environnement qui lui est propre en établissant une série de relations avec l'espace qu'il occupe et les autres organismes présents. Dans cette situation, chaque organisme joue un rôle bien précis et occupe une niche écologique bien définie. Il est intéressant d'examiner également les effets des changements climatiques sur la migration des espèces de poissons dans les divers milieux aquatiques.

2.4

Lorsqu'une espèce exotique rejoint une nouvelle communauté, elle interagit avec les espèces préexistantes de manière telle qu'elle peut modifier de façon imprévisible les équilibres atteints précédemment. Les nouveaux occupants peuvent établir avec les espèces indigènes un rapport de prédation ou de concurrence pour la nourriture et l'espace, apporter de nouveaux parasites et autres agents pathogènes provenant de leur pays d'origine ou encore s'hybrider avec les espèces autochtones.

2.5

Il est donc indispensable de définir les principales caractéristiques des installations d'aquaculture fermées, qui passent par l'existence d'une barrière physique entre les organismes sauvages et d'élevage, le traitement des déchets solides, l'élimination appropriée des organismes morts, ainsi que le contrôle et le traitement de l'eau entrante et sortante.

3.   Observations générales

3.1

Dans les installations d'élevage, le risque de fuite des espèces exotiques et localement absentes augmente à mesure que les systèmes de contrôle diminuent. Les systèmes fermés, dans lesquels l'aquaculture est confinée à l'intérieur de structures sûres, protégées par des barrières physiques et chimiques, réduisent le risque de fuites au minimum, tandis que les systèmes d'élevage extensif ouverts présentent un niveau de sécurité moindre, et favorisent parfois, même involontairement, la dispersion des espèces importées dans les environnements naturels.

3.2

L'on estime qu'environ 20 % des espèces non autochtones sont élevées dans des systèmes ouverts et moins de 10 % dans des systèmes fermés intensifs, mais dans certains cas (mollusques bivalves), les animaux vivants sont temporairement déplacés, y compris sur de longues distances, pour la phase d'épuration, vers des installations tant fermées qu'ouvertes, avec de nouveaux risques de dispersion (IMPASSE) (2).

3.3

Les systèmes fermés existants utilisent des technologies diverses pour l'épuration des eaux d'entrée et de sortie, mais prévoient tous une séparation physique entre les élevages aquacoles et les écosystèmes aquatiques naturels. Toutefois, le développement rapide de ces techniques d'élevage et l'évolution des différents systèmes d'aquaculture ont incité le Conseil à élaborer le règlement faisant l'objet du présent avis.

3.4

Le règlement (CE) no 708/2007 a établi un cadre régissant les pratiques aquacoles en ce qui concerne les espèces exotiques et celles qui sont localement absentes pour évaluer et réduire au minimum l'incidence potentielle de ces espèces sur les habitats aquatiques. Ledit règlement prévoit la mise en place d'un système de permis au niveau national.

3.5

Ces permis ne sont pas requis dans les cas où les installations d'aquaculture fermées garantissent la biosécurité des élevages. La réduction du risque requiert l'adoption de mesures appropriées pendant le transport, l'application de protocoles clairement définis dans les installations aquacoles de destination et le respect de procédures adéquates jusqu'à la mise à la consommation des produits du poisson.

3.6

La nouvelle définition des installations d'aquaculture tient dûment compte des résultats de l'action IMPASSE, mais il conviendrait d'y intégrer une disposition précisant clairement que les installations aquacoles fermées doivent être considérées comme telles si elles se situent sur la terre ferme.

3.7

Le Comité souscrit pleinement à l'objectif visé par le nouveau règlement consistant à empêcher la libération de déchets solides ou de (parties de) spécimens d'élevage dans les eaux libres. Cependant, eu égard à l'évolution technologique rapide dans le domaine de la filtration et de l'épuration des eaux usées, il ne faut pas oublier que divers systèmes permettent de garantir la sécurité biologique, qui doit rester une priorité: l'on peut en effet recourir à des moyens physiques, chimiques, biologiques, ou à une combinaison de ceux-ci.

4.   Observations particulières

4.1

Pour éviter tout risque de contamination des écosystèmes aquatiques, il y a lieu de définir des mesures adéquates de surveillance et de contrôle pour l'introduction et le transfert d'espèces aquatiques exotiques et localement absentes. Cela n'est réalisable que par l'élaboration, l'adoption et la mise en œuvre de codes internationaux de pratiques et procédures appropriées.

4.2

Étant donné que l'eau n'est pas le seul facteur de risque de fuites, il convient de prévoir tous les systèmes nécessaires à la protection des installations aquacoles fermées contre les prédateurs, surtout les oiseaux, susceptibles de disperser les animaux de l'élevage dans la nature.

4.3

Par ailleurs, il est souhaitable que les installations aquacoles fermées soient gérées et administrées distinctement des installations ouvertes, afin de réduire au minimum tout risque éventuel de contamination des écosystèmes aquatiques.

4.4

Le Comité approuve le choix qui a été fait de confier aux États membres la responsabilité de mettre à jour périodiquement sur le site internet la liste des installations aquacoles fermées présentes sur leur territoire, garantissant une publicité maximale en la matière, de manière à responsabiliser tant les opérateurs que les diverses parties intéressées au niveau local en ce qui concerne la gestion correcte des élevages.

Bruxelles, le 17 mars 2010.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  R. Naylor & M. Burke (2005). Aquaculture and Ocean Resources: Raising Tigers of the Sea, in: Annual Review of Environment and Resources. 30:185-218.

(2)  Projet IMPASSE no 44142. D1.3. Rapport 3.1. Review of risk assessment protocols associated with aquaculture, including the environmental, disease, genetic and economic issues of operations concerned with the introduction and translocation of species (Gordon H. Copp, Esther Areikin, Abdellah Benabdelmouna, J. Robert Britton, Ian G. Cowx, Stephan Gollasch, Rodolphe E. Gozlan, Glyn Jones, Sylvie Lapègue, Paul J. Midtlyng, L. Miossec, Andy D. Nunn, Anna Occhipinti Ambrogi, S. Olenin, Edmund Peeler, Ian C. Russell, Dario Savini), 2008, p. 14.