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Document 52010AE0444

Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission. Le futur cadre réglementaire concernant la concurrence dans le secteur automobile» COM(2009) 388 final

OJ C 354, 28.12.2010, p. 73–79 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

28.12.2010   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 354/73


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission. Le futur cadre réglementaire concernant la concurrence dans le secteur automobile»

COM(2009) 388 final

2010/C 354/18

Rapporteur: M. HERNÁNDEZ BATALLER

Le 22 juillet 2009, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, la Commission a décidé de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission. Le futur cadre réglementaire concernant la concurrence dans le secteur automobile»

COM(2009) 388 final.

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 2 mars 2010.

Lors de sa 461e session plénière des 17 et 18 mars 2010 (séance du 18 mars 2010), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 84 voix pour, 5 voix contre et 7 abstentions.

1.   Conclusions

1.1   Le CESE approuve le diagnostic que la Commission fait du secteur et des domaines dans lesquels il faudrait accroître la concurrence. Après examen des options présentées par la Commission, le CESE marque sa préférence pour l'adoption de dispositions sectorielles sous forme de lignes directrices ajoutées à l'exemption générale par catégories. Aussi accueille-t-il favorablement la proposition de règlement et la proposition de lignes directrices supplémentaires. Il insiste néanmoins sur la nécessité de les lire conjointement et à titre de complément aux orientations générales relatives aux restrictions verticales, qui n'ont pas encore été présentées, ce qui rend difficile une interprétation indépendante.

1.2   Le CESE est d'accord avec la Commission quant à la nécessité d'établir un cadre juridique qui ait des répercussions générales positives sur le bien-être des consommateurs et renforce leur protection. Le CESE réitère les orientations déjà formulées dans certains de ses avis antérieurs sur la concurrence (1).

1.3   Il s'avère néanmoins nécessaire dans ce cas d'instaurer un régime transitoire de deux ans pour les concessionnaires, qui sont dans leur grande majorité des petites et moyennes entreprises, pour lesquelles il faudrait prévoir, dans un souci de sécurité juridique et sur la base du principe de confiance légitime et de proportionnalité, une période de temps raisonnable pour qu'elles puissent amortir l'investissement consenti, mieux s'adapter à l'évolution technologique du marché et contribuer à l'amélioration de la sécurité routière.

1.4   De même, le CESE espère que le nouveau cadre juridique apportera une sécurité juridique à tous les opérateurs, ne créera pas de nouveaux obstacles aux entreprises, s'inspirera des principes du «Small business Act» et poursuivra les mêmes objectifs de concurrence que ceux du règlement 1400/2002.

1.5   Le CESE estime que les lignes directrices supplémentaires ne devraient prévoir aucune limite aux accords de monomarquisme, ce qui serait plus en accord avec le nouveau règlement d'exemption.

1.6   Les accords relatifs aux véhicules utilitaires (VU) pourraient être régis par le règlement général d'exemption par catégories pour les restrictions verticales ne ce qui concerne le marché après-vente.

2.   Introduction

2.1   Le règlement (CE) no 1400/2002 de la Commission, du 31 juillet 2002, concernant l'application de l’article 81, paragraphe 3, du traité CE à des catégories d’accords verticaux et de pratiques concertées dans le secteur automobile (2), prévoit des règles plus strictes que celles établies dans le règlement (CE) no 2790/1999 de la Commission, du 22 décembre 1999, relatif à l'application du paragraphe 3 de l'article 81 du traité CE à certaines catégories d'accords verticaux et de pratiques concertées dans le secteur automobile (3).

2.2   Le règlement (CE) no 1400/2002 de la Commission porte principalement sur les pratiques et les conduites susceptibles de restreindre gravement la concurrence et établit une liste de restrictions en vertu desquelles un accord ne saurait en aucune sorte bénéficier d'une exemption («restrictions caractérisées») ainsi qu'une autre liste énumérant les restrictions qui sont interdites mais n'empêchent pas l'application de l'exemption prévue par ce règlement au reste de l'accord («conditions spécifiques»).

2.3   Les principes généraux de ce règlement no 1400/2002 de la Commission sont les suivants:

il ne s'applique pas exclusivement aux véhicules particuliers mais également à d'autres types de véhicules, comme les autobus où les camions;

il oblige chaque constructeur à choisir un système de distribution sélective ou de distribution exclusive tout en considérant comme pouvant faire l'objet d'une exemption deux types distincts de systèmes de distribution, principalement:

le système exclusif, pour autant que le constructeur assigne à chaque distributeur ou atelier de réparation un territoire de vente exclusif (ou un groupe de clients exclusif). À l'intérieur de ce territoire, aucun autre distributeur ne peut être désigné. Ces distributeurs peuvent également se voir imposer des niveaux minimums de qualité. La concurrence est renforcée en favorisant les ventes passives sur le territoire exclusif et en particulier, les ventes à des revendeurs en dehors du réseau,

le système sélectif, pour autant que le fournisseur s'engage à vendre les biens ou services contractuels, soit directement soit indirectement, uniquement à des distributeurs ou à des réparateurs sélectionnés en fonction de critères spécifiques. Un système de distribution sélective peut se fonder sur des critères quantitatifs ou des critères qualitatifs ou les deux catégories de critères;

il n'est pas possible de cumuler dans un même contrat des clauses de distribution sélective et de distribution exclusive. Plus concrètement, la clause appelée «clause relative aux lieux d'établissement» n'est pas autorisée dans le cadre d'un système de distribution sélective, tandis qu'il est possible de l'imposer à des distributeurs dans le cadre d'un système de distribution exclusif;

le règlement distingue trois marchés de produits différents au paragraphe 1er de son article 8:

distribution de véhicules à moteur neufs: en calculant la part de marché sur la base du volume des ventes des biens contractuels et des biens correspondants vendus par le fournisseur, avec tout autre bien vendu par le constructeur considéré comme interchangeable et remplaçable par l'acheteur, en fonction des caractéristiques, prix et usage présumé des produits,

distribution de pièces de rechange: en calculant la part de marché sur la base du volume des ventes des biens contractuels et des biens correspondants vendus par le fournisseur, avec tout autre bien vendu par le constructeur considéré comme interchangeable et remplaçable par l'acheteur, en fonction des caractéristiques, prix et usage présumé des produits,

service de réparation et d'entretien: en calculant la part de marché sur la base du volume des ventes des biens contractuels et des biens correspondant vendus par le fournisseur, avec tout autre bien vendu par le constructeur considéré comme interchangeable et remplaçable par l'acheteur, en fonction des caractéristiques, prix et usage présumé des produits;

outre les limites relatives aux parts de marché, le règlement considère, au paragraphe 1er, lettre c, de l'article 6, que l'existence de «différences de prix ou de conditions de fourniture des biens contractuels ou de biens correspondants substantielles entre les marchés géographiques est incompatible». Dans ces cas, la Commission peut retirer l'exemption prévue dans le règlement;

la Commission a tenté de lutter contre les obstacles au marché parallèle, et ce règlement 1400/2002 considère que la limitation des ventes par le distributeur aux usagers finaux d'autres États membres (en faisant, par exemple, dépendre le prix d'achat et la rétribution du distributeur de la destination des véhicules ou du lieu de résidence des usagers finaux), équivaudrait à une restriction indirecte des ventes. En outre, les objectifs de vente ne sont plus autorisés, de même que l'assignation de produits ou systèmes de bonus sur la base d'un territoire qui serait plus réduit que le marché intérieur.

2.4   Le cadre juridique de l'automobile a évolué ces dernières années et l'adoption du règlement (CE) no 715/2007 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2007 sur l'homologation de type des véhicules à moteur en ce qui concerne les émissions provenant des véhicules particuliers et utilitaires légers et sur l'accès à l'information relative à la réparation et à l'entretien des véhicules (4), dont les dispositions, qui étaient volontaires, sont devenues obligatoires à partir de septembre 2009 (5), est particulièrement significative à cet égard. Toutefois, pendant quelques années, le parc automobile comprendra un grand nombre de véhicules non couverts par ce règlement, constituant un marché non négligeable pour les ateliers indépendants.

2.4.1   En ce qui a trait à la concurrence sur le marché des pièces de rechange, basée sur les droits de propriété industrielle dont le constructeur est titulaire et le recours généralisé à différents accords de sous-traitance avec les fournisseurs d'équipements originaux («accord d'outillage»), il a été précisé que certaines pièces de rechange restent captives des réseaux de constructeur de véhicules.

2.4.2   Aussi, la Commission a-t-elle proposé d'introduire une clause relative à la réparation, dans sa proposition de directive révisée sur les dessins et modèles à propos de laquelle le CESE s'est favorablement prononcé, en rappelant (6) que «le monopole conféré aux propriétaires de dessins ou modèles ne concerne que la configuration extérieure d'un produit et non le produit en soi», et que «en ce qui concerne les pièces de rechange visées par la clause de réparation, le fait de les soumettre au régime de protection des dessins ou des modèles reviendrait à établir un monopole de produits sur le marché secondaire, ce qui va à l'encontre de la nature même de la protection juridique des dessins et modèles».

2.5   En ce qui concerne le secteur automobile, concrètement, le CESE a adopté un avis sur «Les marchés des équipements et les marchés d'aval du secteur automobile» (7), dans lequel il faisait valoir que les acteurs de ces marchés sont les constructeurs de véhicules, leurs fournisseurs et les opérateurs indépendants ou agréés présents sur les marchés de l'entretien automobile, des pièces de rechange et accessoires, ainsi que ceux qui interviennent dans la fabrication, la distribution et la vente au détail, tous ces acteurs constituant un réseau qui compte 834 700 entreprises, des PME principalement, dont le chiffre d'affaires s'élève à 1 107 milliards d'euros et qui fournit de l'emploi à quelque 4,6 millions de salariés.

3.   Évolution récente des documents de la Commission

3.1   Le 21 décembre 2009, la Commission a adopté un:

«Projet de règlement de règlement de la Commission relatif à l'application de l'article 101, paragraphe 3, du traité à certaines catégories d'accords verticaux et de pratiques concertées dans le secteur automobile» et un

«Projet de communication de la Commission concernant des lignes directrices supplémentaires sur les restrictions verticales dans les accords de vente et de réparation de véhicules automobile et de distribution de pièces détachées de véhicules automobiles»

La Commission a lancé une consultation publique sur ces documents.

3.2   Le 15 janvier 2010, le commissaire chargé de la concurrence, Mme KROES, a décidé de transmettre au Comité économique et social européen les deux textes mentionnés au paragraphe précédent, manifestant son intérêt à connaître le point de vue du Comité sur ces projets de réglementation.

3.3   Par conséquent, dans le présent avis sur le document COM(2009) 388 final, le rapporteur examine simultanément les projets de réglementation visés au paragraphe 3.1.

4.   Synthèse des documents de la Commission

4.1   La communication de la Commission sur le futur cadre réglementaire de la concurrence applicable au secteur automobile propose ce qui suit:

a)

En ce qui concerne les accords relatifs à la vente de véhicules automobiles neufs et à compter du 31 mai 2013:

appliquer les règles générales de la nouvelle exemption par catégorie proposée relative aux accords verticaux;

adopter des orientations sectorielles spécifiques pour empêcher l'éviction du marché des constructeurs de véhicules automobiles concurrents et préserver leur accès aux marchés de vente au détail et de réparation de véhicules; sauvegarder la concurrence intramarque et préserver l'effet dissuasif de l'article 81;

maintenir en vigueur les dispositions du règlement applicable aux accords de distribution de véhicules automobiles jusqu'au 31 mai 2013.

b)

Pour ce qui est de l'accord de réparation et d'entretien et/ou de fourniture et la distribution de pièces de rechange et à compter du 31 mai 2010:

appliquer les règles générales de la nouvelle exemption par catégorie proposée relative aux accords verticaux;

adopter des orientations sectorielles spécifiques tant au moyen d'un règlement d'exemption par catégorie spécifique que d'une combinaison des deux instruments, en vue de renforcer la capacité des autorités chargées de la concurrence à apporter une réponse aux préoccupations en la matière qui soit plus générale et qui ait une portée plus large, en particulier en ce qui a trait à: (i) l'accès aux informations techniques; (ii) l'accès aux pièces détachées; (iii) l'utilisation abusive des garanties; et (iv) l'accès au réseau d'ateliers de réparation agréés.

4.2   Le projet de règlement d'exemption

4.2.1   Ces accords verticaux peuvent améliorer l'efficacité économique d'une chaîne de production ou de distribution en permettant une meilleure coordination entre les entreprises participantes, même si cela dépend du degré de pouvoir de marché des parties prenantes à l'accord.

4.2.2   De même, les accords verticaux comportant des restrictions susceptibles de restreindre la concurrence et de porter préjudice aux consommateurs ou qui ne sont pas indispensables à l'obtention des effets positifs mentionnés précédemment, doivent demeurer exclus du bénéfice de l'exemption par catégorie.

4.2.3   Le projet fait la distinction entre les accords relatifs à la distribution de véhicules à moteur neufs («le marché primaire») et les accords relatifs aux services de réparation et d'entretien et à la distribution de pièces de rechange («marché secondaire»).

4.2.4   Le «marché primaire» se verra appliquer les dispositions du règlement général sur les accords verticaux: en particulier celles de la limitation des parts de marché, la non-exemption de certains accords verticaux et les conditions prévues dans ce règlement, aux termes desquelles ces accords verticaux peuvent bénéficier de l'exemption concédée par le règlement général, pour autant que toutes les conditions qu'il établit soient respectées, ce qui semble raisonnable, dès lors qu'il s'agit d'un marché dans lequel la concurrence existe.

4.2.5   En ce qui concerne le «marché secondaire», il faut tenir compte de certaines caractéristiques spécifiques du marché après-vente de l'automobile, qui sont liées à l'évolution technologique ainsi qu'à la complexité et à la fiabilité croissantes des composants automobiles que les constructeurs automobiles acquièrent auprès des fournisseurs d'équipements originaux.

4.2.6   La Commission partage le point de vue du CESE selon lequel les conditions de concurrence dans le marché après-vente des véhicules à moteur ont également un impact direct sur la sécurité publique dans la mesure où la conduite des véhicules pourrait ne pas se faire dans des conditions de sécurité en cas de réparation incorrecte, ainsi que sur la santé publique et l'environnement, en raison des émissions de dioxyde de carbone et d'autres agents polluants qui requièrent un entretien régulier du véhicule.

4.2.7   Les accords verticaux relatifs à la distribution de pièces de rechange et aux services de réparation et d'entretien ne doivent bénéficier d'une exemption par catégorie que s'ils respectent, en plus des conditions prévues pour l'exemption établies dans le règlement général pour les accords verticaux, les exigences plus strictes relatives à certains types de restrictions graves de la concurrence pouvant limiter la fourniture de pièces de rechange sur le marché après-vente des véhicules à moteur, concrètement:

les accords qui restreignent la vente de pièces de rechange par les membres d'un système de distribution sélectif d'un constructeur automobiles aux réparateurs indépendants, qui les utilisent pour la prestation de services de réparation ou d'entretien;

les accords qui, tout en respectant le règlement général, restreignent la capacité de fabricants de pièces de rechange à vendre ces pièces aux réparateurs agréés dans le système de distribution d'un constructeur automobile, aux distributeurs indépendants de pièces de rechange, aux réparateurs indépendants ou aux usagers finaux: tout cela, sans préjudice de l'application des dispositions relatives à la responsabilité de droit privé, de la capacité d'exiger l'utilisation des «pièces de rechange d'une qualité équivalente», y compris d'accords qui prévoient des obligations pour les réparateurs agréés de n'utiliser que les pièces de rechange fournies par le constructeur automobiles pour ces réparations, pendant la période de garantie;

les accords qui limitent la capacité d'un fabricant de composants ou de pièces de rechange originaux à apposer sa marque déposée ou son logo sur ces pièces.

4.3   Le projet de lignes directrices supplémentaires

4.3.1   Les lignes directrices établissent quelques principes pour évaluer, conformément à l'article 101 du traité, les problèmes qui se présenteraient dans le contexte des restrictions verticales incluses dans les accords de vente et de réparation de véhicules à moteur et de distribution des pièces de rechange. Ces lignes directrices s'appliquent sans préjudice de l'applicabilité des lignes directrices générales sur les accords verticaux et à titre de complément à celles-ci.

4.3.2   Pour interpréter ces lignes directrices, la Commission devra également tenir compte du code de conduite présenté par les associations de constructeurs automobiles, ACEA et JAMA, relatif à certaines bonnes pratiques commerciales que les constructeurs automobiles s'engagent à appliquer afin d'agir en toute bonne foi dans l'exécution de leurs obligations contractuelles vis-à-vis de leurs distributeurs et réparateurs agréés.

4.3.3   Les lignes directrices sont structurées comme suit:

champ d'application du règlement d'exemption par catégorie dans le secteur de véhicules à moteur et rapport avec le règlement général d'exemption par catégorie pour les accords verticaux;

application des dispositions complémentaires du règlement d'exemption par catégorie dans le secteur des véhicules à moteur;

traitement des restrictions spécifiques: marque unique et distribution sélective.

4.3.4   En ce qui concerne la marque unique, une nouveauté est apportée, qui consiste à faire démarrer la période quinquennale du début de la relation contractuelle entre les parties, au lieu de remplacer un document contractuel par un autre se référant au même objet. Toutefois, cela peut être déduit de la note en bas de page no 9 et non du corps du texte des lignes directrices. Compte tenu de l'importance de cette modification, il serait souhaitable de l'insérer dans le corps lui-même.

4.3.5   Les lignes directrices exposent les obligations qui entravent la concurrence et leurs effets négatifs (création de barrières à l'entrée ou expansion de fournisseurs concurrents) et positifs (contribution à la résolution de problèmes de «parasitisme», renforcement de l'image de marque et de la réputation du réseau de concessionnaires).

4.3.6   En ce qui a trait à la distribution sélective, il importe que les opérateurs indépendants puissent accéder à l'information technique et que les garanties juridiques soient correctement appliquées.

5.   Observations

5.1   Cela fait plus de deux décennies qu'en matière de concurrence le secteur automobile des véhicules particuliers et utilitaires légers fait l'objet de règlements spécifiques d'exemption par catégorie.

5.2   Dans le rapport d'évaluation qu'elle a élaboré le 31 mai 2008, la Commission a mesuré l'impact de l'exemption par catégorie sur les pratiques du secteur automobile. Ce rapport a fait l'objet d'innombrables commentaires de la part des parties prenantes, qui ont été à l'origine du rapport d'analyse d'impact élaboré par les services de la Commission (SEC(2009) 1052, SEC(2009) 1053), dont une lecture croisée avec celle de la communication COM(2009) 388 final est recommandée.

5.3   Or, il se trouve qu'ont lieu simultanément la révision et l'adoption d'une nouvelle exemption générale par catégorie, qui doit remplacer, à partir de mai 2010 le règlement actuel (CE) no 2790/1999 du 22 décembre 1999. C'est en partant du principe que le règlement (CE) no 2790/1999 sera révisé que la Commission prévoit,

en un premier temps, pour le secteur automobile, trois sous-options: (ii) l'application, tout court, de l'exemption générale par catégorie relative aux accords verticaux; (iii) l'adoption de dispositions sectorielles spécifiques sous forme de lignes directrices ajoutées à l'exemption générale par catégorie et (iv) l'adoption d'un règlement d'exemption par catégorie centré sur les restrictions de la concurrence dans le secteur des services après-vente;

par la suite, avec le projet de règlement et les lignes directrices, l'adoption d'un règlement comportant des dispositions sectorielles spécifiques assorties de lignes directrices.

5.4   L'acquisition d'un véhicule à moteur est, avec l'achat d'un logement, le poste le plus important du budget familial des consommateurs européens et celui qui illustre le mieux l'importance et le degré de réalisation du marché intérieur. Selon des estimations du secteur, 40 % du coût total relatif à la «vie utile» d'un véhicule à moteur est représenté par son acquisition, 40 % par son entretien et 20 % par les assurances.

5.5   L'objectif essentiel des consommateurs européens en matière de concurrence dans le secteur automobile pourrait se résumer ainsi: choisir librement le lieu d'achat, pouvoir faire réparer leur véhicule où c'est nécessaire et bénéficier du meilleur prix et d'une meilleure sécurité routière.

5.6   S'il est essentiel d'assurer un marché dynamique et compétitif, doté d'un niveau d'évolution technologique approprié et englobant tous les opérateurs économiques du secteur automobile, notamment les petites et moyennes entreprises des services de réparation, les signaux rassurant envoyés aux consommateurs sont également importants.

5.7   Le règlement (CE) no 1400/2002 actuel a transmis quelques-uns de ces signaux positifs en prévoyant par exemple, qu'en vertu du règlement, la garantie émise dans un État membre par un constructeur devient valable, dans les mêmes conditions, dans tous les États membres, lorsque le consommateur muni d'un carnet de garantie rempli par un concessionnaire dans un autre État membre ne doit plus attendre que la garantie soit appliquée dans son pays d'origine, ou encore lorsque que le concessionnaire ou les ateliers de réparation agréés auxquels le consommateur confie son véhicule ne demandent plus de frais ou n'exigent plus de documents supplémentaires.

5.8   Des difficultés subsistent néanmoins en ce qui concerne la revente de véhicules neufs par des intermédiaires, liées aux exigences des fournisseurs envers leurs concessionnaires, notamment en vue de satisfaire les exigences d'«identité de marque», et la liberté d'approvisionnement auprès d'autres concessionnaires agréés ou importateurs nationaux, sans oublier les restrictions indirectes des fournitures croisées de véhicules entre concessionnaires agréés

5.9   La Commission a suivi de très près l'application du règlement (CE) no 1400/2002, ce qui ressort de décisions exemplaires comme les quatre décisions adoptées en septembre 2007 qui ont fourni des orientations importantes au secteur dans le domaine de l'accès aux informations techniques (Affaires Comp/39.140-39.143. impliquant les marques Daimler Chrysler, Fiat, Toyota et Opel) (8).

5.10   Huit ans après l'adoption du règlement (CE) no 1400/2002, les indicateurs économiques confirment que le degré de concurrence sur les marchés concernés, qui a conduit la Commission à faire le choix d'une exemption par catégorie plus stricte, s'est nettement amélioré.

5.11   Ce climat de concurrence dynamique et complexe se reflète notamment dans une baisse des prix réels des véhicules à moteur neufs, l'entrée de nouvelles marques sur le marché, des fluctuations des parts de marché des marques concurrentes, une concentration modérée et décroissante ainsi qu'une offre élargie pour les consommateurs dans les différents segments comparables. Toutefois, la diversité des marchés nationaux subsiste au sein du marché intérieur, en particulier dans les nouveaux États membres, où le marché des véhicules d'occasion et des réparateurs indépendants est plus développé.

5.12   C'est surtout au niveau de l'accès des réparateurs indépendants aux pièces de rechange et aux informations techniques que des obstacles à une concurrence accrue subsistent, aux dépens manifestement des consommateurs. La contrefaçon et la piraterie des pièces de rechange continuent de préoccuper le secteur, en raison de la piètre qualité de celles-ci dans certains cas et dans d'autres, de l'insécurité routière qui peut découler de l'utilisation de ce type de produits.

5.13   Les propositions de la Commission relatives au futur cadre réglementaire de la concurrence applicable au secteur automobile sont compatibles avec cette approche et cette politique de mise en application. Le CESE rappelle à cet égard ses avis antérieurs dans lesquels il avait marqué son soutien aux travaux de la Commission en matière d'actions collectives, tant au plan général, que pour violation des règles de la concurrence plus particulièrement.

6.   Observations particulières

6.1   Le CESE estime que l'option de la Commission consistant à proposer un règlement spécifique et des lignes directrices est équilibrée car elle tient compte des éventuelles répercussions économiques, de l'impact sur les petites et moyennes entreprises dont le marché des services de réparation, d'entretien et de distribution de pièces de rechange est composé en grande partie, ainsi que de l'éventuel impact social, environnemental et en matière de sécurité routière.

Le CESE souhaite souligner les aspects suivants de la proposition présentée:

6.2   Subordination du régime spécial relatif au secteur automobile au REC général. Le CESE constate que les orientations complémentaires proposées par la Commission pour le secteur automobile doivent être lues conjointement avec les Orientations générales relatives aux accords verticaux (cf. I, 1 (i) Orientations) qui n'ont pas encore été présentées, ce qui nuit naturellement à une évaluation indépendante et séparée des premières.

6.3   Entrée en vigueur du nouveau régime – Le projet de règlement prévoit deux régimes d'entrée en vigueur, en fonction du marché visé. Un régime d'application immédiate, à compter du 1er juin 2010 pour le marché des pièces de rechange, de réparation et d'entretien de véhicules, et un autre, qui prolonge l'application du règlement 1400/2002 jusqu'au 31 mai 2013 et s'applique à l'achat et à la vente de véhicules neufs.

6.3.1   Tout en admettant que c'est sur le marché primaire que l'on constate actuellement une concurrence plus faible, qu'il importe de stimuler, le CESE est d'avis que la coexistence de deux régimes différenciés peut entraîner des difficultés dès lors que, souvent, les contrats conclus entre les concessionnaires et les distributeurs comportent les deux composantes.

6.3.2   Sans perdre de vue l'intérêt du consommateur dans un contexte d'évolution rapide de l'état de la concurrence dans le marché des pièces de rechange, de la réparation et de l'entretien, le CESE admet la possibilité de prévoir une règle transitoire qui éviterait la création d'obstacles supplémentaires dans la renégociation de contrats entre distributeurs et concessionnaires à la lumière des nouvelles règles.

6.3.3   Le CESE invite instamment la Commission européenne à faire appliquer dans sa totalité le nouveau REC relatif au secteur automobile à compter du 1er juin 2010, tout en prévoyant pour le marché primaire un régime transitoire progressif de deux ans afin d'adapter les accords de distribution existants aux nouvelles règles.

6.3.4   Il faut rappeler que les constructeurs peuvent mettre fin aux contrats de distribution moyennant un préavis de trois ans. Cela signifie que les concessionnaires qui ont fait certains choix et des investissements importants sur la base du REC actuel seraient obligés d'attendre jusqu'au mois de juin 2013 pour signer un nouvel accord de distribution, sauf si la possibilité est laissée aux constructeurs et aux concessionnaires d'ajuster leurs contrats avant cette échéance, s'ils le jugent nécessaire à la lumière des nouvelles règles et d'éventuels changements des conditions du marché.

6.3.5   Appliquer le nouveau REC au marché primaire à compter du 1er juin 2010 présenterait l'avantage de coïncider avec l'entrée en vigueur du nouveau REC et des nouvelles orientations concernant le marché après-vente.

6.3.6   La grande majorité des distributeurs étant également présents dans les services après-vente, l'on comprend aisément pourquoi le CESE est favorable à l'application du nouveau REC aux marchés primaire et secondaire en même temps. Cette option sera synonyme de simplification, de flexibilité et, ce qui n'est pas le moins important, d'une réduction des coûts de transition.

6.4   Monomarquisme

Selon les orientations (paragraphe 25, note en bas de page no 9), interdiction sera faite aux constructeurs d'inclure des obligations de monomarquisme dans les nouveaux contrats avec leur concessionnaires à partir de l'entrée en vigueur du nouveau REC. Si l'on considère que la grande majorité des constructeurs garderont le même réseau de concessionnaires dans les années à venir, cette décision aura pour effet d'abolir pratiquement le monomarquisme. Cette restriction ne va pas seulement à l'encontre de la suggestion du CESE (voir observation 1 ci-dessus); elle est également en contradiction avec le nouveau REC (28 juillet 2009) qui ne prévoit pas de limites pour les contrats de monomarquisme.

6.5   Véhicules particuliers et utilitaires

Comme dans le règlement actuel, la Commission met sur un pied d'égalité les voitures particulières et les véhicules utilitaires (VU), tandis que les premières sont des biens de consommation et les seconds des biens d'équipement gérés dans un contexte d'entreprise à entreprise. Dans ce contexte, le client n'achète pas seulement un véhicule, mais un package dans lequel le service est un aspect essentiel du choix, effectué afin de maximiser l'utilisation du VU, comme c'est le cas pour les tracteurs agricoles et les engins de construction. Une telle différence de marché implique que même les aspects concurrentiels ne sont pas les mêmes pour les deux types de produits.

6.5.1   D'ailleurs, le secteur des VU, tant dans le marché primaire que dans le secondaire, n'a pas connu de problème de concurrence ni fait l'objet de critiques de la part de l'utilisateur final car il très compétitif et une part importante de son marché est traditionnellement occupée par les fournisseurs indépendants.

6.5.2   Aussi le CESE estime-t-il que les contrats relatifs aux VU devraient être régis par le REC pour le marché après-vente également, comme c'est le cas pour les tracteurs et les engins de construction.

6.6   Approvisionnement en pièces détachées

6.6.1   L’article 5 b) du projet de règlement prévoit: ''l’exemption ne s’applique pas à la restriction convenue entre d’une part un fournisseur de pièces, d’outils de réparation ou de diagnostics ou de tout autre équipement et d’autre part un constructeur, qui limiterait la faculté du fournisseur de vendre ces produits ou services aux réparateurs ou distributeurs agréés ou aux réparateurs agréés et indépendants ou aux utilisateurs finaux''.

6.6.2   La formulation de cette restriction ne paraît pas être adaptée à l’objectif poursuivi par la Commission.

6.6.3   En effet, la clause d’achat des pièces, dans le REC actuel, empêche le constructeur d’imposer un approvisionnement supérieur à 30 % auprès de lui. En conséquence, la diversification de l’approvisionnement des réseaux créé une baisse des prix. Même si les constructeurs détiennent encore une part plus importante que 30 % dans l’approvisionnement, ceci est expliqué par les systèmes d’objectifs, de primes et de rabais mis en place par les constructeurs. Cette situation témoigne de la pression concurrentielle qu’exercent les équipementiers sur les constructeurs.

6.6.4   Or, dans la proposition d’article 5 b), il n’est pas fait mention d’un pourcentage au-delà duquel les distributeurs ou les réparateurs ne sont pas obligés de se fournir chez le constructeur (telle que la clause actuelle de 30 %).

6.6.5   De plus, il est affirmé que les équipementiers doivent pouvoir livrer les réparateurs agréés. Or, cette possibilité restera théorique si les constructeurs détiennent la capacité de prescrire un approvisionnement exclusif ou quasi exclusif de leurs réseaux en pièces de rechange.

6.7   Garanties

Enfin, le CESE souligne également la position de la Commission concernant les garanties des véhicules automobiles. Compte tenu de la responsabilité directe du constructeur qui est engagée pour ce qui est du bon fonctionnement et de la réparation des défauts, la Commission prévoit que l'obligation faite aux réparateurs d'utiliser exclusivement des pièces fournies par le constructeur pendant la période de la garantie légale constitue une exemption. Le CESE juge cette position acceptable pour autant qu'elle n'entraîne pas pour le consommateur une impossibilité absolue de recourir à des réparateurs indépendants pour l'entretien régulier du véhicule, laquelle pourrait constituer une restriction des droits du consommateur et notamment de celui d'avoir accès à des biens de qualité et à la garantie y relative.

Bruxelles, le 18 mars 2010.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  JO C 228 du 22.9.2009, p. 47; JO C 175 du 28.7.2009, p. 20.

(2)  JO L 203 du 1.8.2002, p. 30.

(3)  JO L 336 du 29.12.1999, p. 21.

(4)  JO L 171 du 29.6.2007, p. 1.

(5)  JO C 318 du 23.12.2006, p. 62.

(6)  Voir les avis du CESE: JO C 388 du 31.12.1994, p.9 et JO C 286 du 17.11.2005, p. 8.

(7)  JO C 317 du 23.12.2009, p. 29-36.

(8)  JO C 66 du 22.03.2007, p. 18.


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