CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. NICHOLAS EMILIOU

présentées le 2 février 2023 ( 1 )

Affaire C‑543/21

Verband Sozialer Wettbewerb eV

contre

famila-Handelsmarkt Kiel GmbH & Co. KG

[demande de décision préjudicielle formée par le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice, Allemagne)]

« Renvoi préjudiciel – Prix de vente – Boissons et yaourts vendus dans des contenants consignés – Réglementation nationale obligeant les professionnels à indiquer le montant de la consigne séparément du prix du produit lui-même et interdisant d’indiquer le montant total »

I. Introduction

1.

Lorsque vous achetez de l’eau potable vendue dans une bouteille consignée, à un prix indiqué, comme « 1 euro, consigne en sus : 0,25 euro », la consigne de 25 centimes étant remboursable lors de la restitution de cette bouteille, combien cette eau potable vous coûte-t-elle réellement ?

2.

Telle est, en somme, la question qui est au cœur de la présente affaire.

3.

Verband Sozialer Wettbewerb eV (ci-après le « demandeur ») a considéré que famila-Handelsmarkt Kiel GmbH & Co. KG (ci-après la « défenderesse ») a agi illégalement en indiquant, comme prix des boissons et yaourts vendus dans des contenants consignés, le prix hors consigne (dont le montant était également indiqué dans la publicité, mais séparément). Le demandeur a donc attaqué la défenderesse en cessation et lui a réclamé le paiement d’une somme forfaitaire à titre d’indemnisation de ses frais de mise en demeure.

4.

Ce recours a été accueilli en première instance, mais il a été rejeté en appel. Le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice, Allemagne), juridiction de renvoi, saisi d’un pourvoi en Revision, s’interroge sur l’interprétation de la notion de « prix de vente », au sens de l’article 2, sous a), de la directive 98/6/CE ( 2 ), et, plus particulièrement, sur la question de savoir si cette notion inclut une consigne à payer pour des bouteilles ou des pots en verre consignés dans lesquels des produits tels que des boissons ou des yaourts sont vendus. Si le montant de cette consigne devait être considéré comme faisant partie du « prix de vente », la juridiction de renvoi se demande si la législation nationale interdisant l’indication du montant total (composé du prix du produit lui-même et de la consigne pour le contenant) peut être considérée comme une disposition plus favorable en ce qui concerne l’information des consommateurs sur les prix et leur aptitude à les comparer, au sens de l’article 10 de la directive 98/6. Dans l’affirmative, la juridiction de renvoi demande en outre, en substance, si une telle disposition aboutit à une situation dans laquelle les consommateurs sont privés d’une information substantielle (sur le prix total) et se heurte donc, en tout état de cause, à l’harmonisation complète réalisée par la directive 2005/29/CE ( 3 ).

II. Le cadre juridique

A. Le droit de l’Union

5.

En vertu de son article 1er, la directive 98/6 a pour objet de « prévoir l’indication du prix de vente et du prix à l’unité de mesure des produits offerts par des professionnels aux consommateurs, afin d’améliorer l’information des consommateurs et de faciliter la comparaison des prix ».

6.

Aux termes de l’article 2, sous a), de la directive 98/6, le « prix de vente » est « le prix définitif valable pour une unité du produit ou une quantité donnée du produit, c’est-à-dire comprenant la [taxe sur la valeur ajoutée (TVA)] et toutes les taxes accessoires ».

7.

Conformément à l’article 3, paragraphe 1, de la directive 98/6, « [l]e prix de vente et le prix à l’unité de mesure doivent être indiqués pour tous les produits visés à l’article 1er, l’indication du prix à l’unité de mesure relevant de l’article 5 [qui prévoit des exceptions à l’obligation d’indiquer le prix à l’unité de mesure]. Le prix à l’unité de mesure ne doit pas être indiqué s’il est identique au prix de vente ».

8.

Conformément à l’article 3, paragraphe 4, de la directive 98/6, « [t]oute publicité qui mentionne le prix de vente des produits visés à l’article 1er doit également indiquer le prix à l’unité de mesure, sous réserve de l’article 5 ».

9.

L’article 10 de la directive 98/6 dispose que celle-ci « n’empêche pas les États membres d’adopter ou de maintenir des dispositions plus favorables en ce qui concerne l’information des consommateurs et la comparaison des prix, sans préjudice de leurs obligations au titre du traité ».

B. Le droit allemand

10.

Il ressort de l’ordonnance de renvoi que l’article 1er, paragraphe 1, première phrase, de la Preisangabenverordnung (règlement relatif à l’indication des prix, BGBl. 2002 I, p. 4197, ci‑après la « PAngV ») prévoit que toute personne qui, à titre commercial ou professionnel ou, de manière régulière, à tout autre titre, offre des produits ou des services aux consommateurs, ou qui, en tant que vendeur, réalise des annonces publicitaires indiquant un prix, adressées aux consommateurs finals, est tenue d’indiquer le prix à payer, lequel comprend la TVA ainsi que tous les autres éléments du prix (le prix total). Il ressort également de l’ordonnance de renvoi que, lorsqu’il est demandé au consommateur de s’acquitter d’une garantie remboursable en sus du prix d’un produit, il convient d’en indiquer le montant à part, en sus du prix du produit, sans indiquer de montant total.

III. Les faits, la procédure nationale et les questions préjudicielles

11.

La défenderesse commercialise des denrées alimentaires. Dans un dépliant, elle a fait de la publicité pour des boissons et des yaourts conditionnés respectivement dans des bouteilles et des pots en verre consignés. Le montant de la consigne n’était pas compris dans les prix indiqués, mais précisé sous forme d’une mention séparée : « consigne en sus : … euros ». Le demandeur, une association qui veille à l’intérêt de ses membres en matière de respect du droit de la concurrence, a considéré que cela était illégal en raison du défaut d’indication d’un prix total et a attaqué la défenderesse en cessation, tout en lui réclamant le paiement d’une somme forfaitaire à titre d’indemnisation de ses frais de mise en demeure.

12.

Le Landgericht (tribunal régional, Allemagne) a condamné la défenderesse. La juridiction saisie de l’appel a toutefois réformé le jugement de première instance et débouté le demandeur de ses demandes.

13.

Il ressort de la décision de renvoi que la juridiction d’appel a éprouvé des doutes quant à savoir s’il y avait toujours lieu d’interpréter l’article 1er, paragraphe 1, première phrase, de la PAngV en ce sens que le montant de la consigne doit être compris dans le prix total, en ajoutant que, en tout état de cause, il ne pouvait être fait droit au recours du demandeur, car l’article 1er, paragraphe 4, de la PAngV prévoit une exception (à l’obligation d’indiquer le prix total) pour le cas où une consigne est réclamée. La juridiction d’appel a également considéré que, bien que cette disposition soit contraire au droit de l’Union, il n’en demeure pas moins qu’elle correspond à l’état du droit en vigueur et les principes de l’État de droit s’opposent à ce que la défenderesse soit condamnée alors qu’elle s’y est conformée.

14.

Par son pourvoi en Revision, introduit devant le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice), juridiction de renvoi, le demandeur a demandé le rétablissement du jugement de première instance.

15.

La juridiction de renvoi a relevé que l’article 1er, paragraphe 1, première phrase, de la PAngV est une règle visant à réglementer le comportement des opérateurs sur le marché au sens de l’article 3 bis du Gesetz gegen den unlauteren Wettbewerb (loi sur la répression de la concurrence déloyale, BGBl. 2010 I, p. 254). Dans la mesure où elle oblige les professionnels à indiquer le prix « total », TVA comprise, cette disposition est fondée, selon la juridiction de renvoi, sur l’article 1er, l’article 2, sous a), l’article 3 et l’article 4, paragraphe 1, de la directive 98/6. Par conséquent, la question de savoir si la défenderesse a enfreint l’article 1er, paragraphe 1, première phrase, de la PAngV dépend de l’interprétation de ces dispositions de la directive 98/6 et, notamment, du point de savoir si le montant de la consigne à payer lors de l’achat de produits conditionnés dans des bouteilles ou des pots en verre consignés doit être compris dans le prix de vente au sens de l’article 2, sous a), de la directive 98/6.

16.

Après avoir noté qu’une réponse affirmative à cette question s’opposerait, en principe, à la règle nationale figurant à l’article 1er, paragraphe 4, de la PAngV, la juridiction de renvoi a relevé que cette disposition pourrait néanmoins être maintenue si elle était considérée comme étant une disposition plus favorable en ce qui concerne l’information des consommateurs et la comparaison des prix, pouvant être adoptée par les États membres en vertu de l’article 10 de la directive 98/6. Toutefois, la juridiction de renvoi se demande si, en tout état de cause, ladite disposition ne se heurte pas à la directive 2005/29, qui a réalisé une harmonisation complète et s’oppose à l’adoption de règles nationales, même lorsque celles-ci sont plus favorables aux consommateurs.

17.

Dans ces conditions, le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

La notion de “prix de vente”, au sens de l’article 2, sous a), de la directive 98/6, doit-elle être interprétée en ce sens qu’elle inclut le montant de la consigne que le consommateur est tenu de payer lors de l’achat de produits conditionnés dans des bouteilles ou des pots en verre consignés ?

Dans le cas où la première question appellerait une réponse affirmative :

2)

L’article 10 de la directive 98/6 autorise-t-il les États membres à maintenir une disposition dérogatoire à l’article 3, paragraphes 1 et 4, lu en combinaison avec l’article 2, sous a), de cette directive, telle que l’article 1er, paragraphe 4, de la [PAngV], aux termes duquel, lorsqu’il est demandé au consommateur, outre le prix du produit, de s’acquitter d’une garantie remboursable, le montant de cette garantie doit être indiqué à part, en sus du prix du produit, sans combiner ceux‑ci dans le cadre d’un montant total, ou la logique d’harmonisation complète de la directive 2005/29 s’y oppose‑t‑elle ? »

18.

Des observations écrites ont été déposées par le demandeur, la défenderesse, le gouvernement allemand ainsi que par la Commission européenne. Ces parties ont également été entendues lors de l’audience qui s’est tenue le 19 octobre 2022.

IV. Analyse

19.

Je commencerai mon analyse par des remarques liminaires sur la finalité et le contexte plus large des systèmes de consigne (section A). J’exposerai ensuite les arguments qui, selon moi, conduisent à conclure que la notion de « prix de vente », au sens spécifique de l’article 2, sous a), de la directive 98/6, doit être interprétée en ce sens qu’elle n’inclut pas le montant de la consigne que le consommateur est tenu de payer lors de l’achat de produits conditionnés dans des contenants consignés (section B). Cette conclusion rend sans objet la seconde question préjudicielle. Cela étant, pour le cas où la Cour devrait ne pas suivre ma proposition de réponse à la première question préjudicielle, j’exposerai les raisons qui m’amènent à considérer qu’une disposition nationale, telle que l’article 1er, paragraphe 4, de la PAngV, doit être considérée comme étant une disposition plus favorable en ce qui concerne l’information des consommateurs et la comparaison des prix, au sens de l’article 10 de la directive 98/6, au maintien de laquelle l’harmonisation complète réalisée par la directive 2005/29 ne fait pas obstacle (section C).

A. Observations liminaires sur les systèmes de consigne

20.

Il ressort de la décision de renvoi que les boissons et les yaourts en cause au principal sont commercialisés dans des contenants en verre consignés. Le montant de la consigne est remboursable lors de la restitution de ces contenants.

21.

De manière générale, les systèmes de consigne constituent un instrument visant à inciter les consommateurs à restituer les contenants vides, en vue d’une utilisation ultérieure ou du recyclage, plutôt que de les jeter purement et simplement ( 4 ).

22.

Cet instrument relevant de l’économie circulaire n’est certainement pas nouveau. La base de données des instruments de politique environnementale de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) cite, comme le plus ancien exemple connu, le système irlandais de 1799 encourageant la restitution des contenants d’eau gazeuse. En outre, le système le plus ancien enregistré dans cette base de données est l’Oregon Bottle Bill (loi sur les bouteilles de l’État d’Oregon, États-Unis d’Amérique) de 1971 ( 5 ).

23.

Dans ladite base de données, un système de consigne a été défini comme un système dans lequel on applique « un supplément sur le prix d’un produit potentiellement polluant », supplément qui est remboursé « lorsque la pollution est évitée, par la restitution du produit ou de ses résidus » ( 6 ).

24.

Il convient en outre de souligner que, en tant que déchets potentiels, les contenants sont soumis à la législation de l’Union comprenant, antérieurement, la directive 85/339/CEE ( 7 ) et, actuellement, la directive relative aux emballages et aux déchets d’emballages ( 8 ) ou la directive (UE) 2019/904 ( 9 ). Dès lors que ces directives présentent les systèmes de consigne comme des instruments que les États membres peuvent mettre en place afin de satisfaire à leurs obligations dans ce contexte, elles reconnaissent implicitement que ces systèmes peuvent contribuer efficacement à minimiser les incidences environnementales des déchets ( 10 ). Cela a également été expressément reconnu au treizième considérant de la directive 91/157/CEE du Conseil relative aux piles et accumulateurs contenant certaines matières dangereuses ( 11 ).

25.

Cela étant, lorsque les États membres mettent en place des systèmes de consigne, ils doivent rester attentifs aux exigences découlant, entre autres, des règles relatives à la libre circulation des marchandises. Dans ce contexte, certains aspects des systèmes de consigne allemand et danois ont, par le passé, été jugés incompatibles avec ces exigences ( 12 ).

26.

En gardant à l’esprit ces éléments relevant du contexte plus large, il ressort du dossier de l’affaire que l’article 1er, paragraphe 4, de la PAngV, texte en cause au principal, a été introduit en 1997 afin d’encourager un système de contenants réutilisables et recyclables (et d’assurer une meilleure comparabilité des prix lorsqu’une consigne est réclamée). La juridiction de renvoi a expliqué que cela a eu lieu en réaction à son arrêt « Flaschenpfand I » [« Bouteilles consignées I »] de 1993. Je crois comprendre que, dans cet arrêt, la juridiction de renvoi a jugé que faire de la publicité pour des boissons rafraîchissantes conditionnées dans des bouteilles soumises à consigne, sans que la consigne soit mentionnée et sans indication du prix total, était incompatible avec la PAngV ( 13 ).

27.

Pour rappel, l’article 1er, paragraphe 4, de la PAngV impose aux professionnels l’obligation d’indiquer le prix du produit lui-même et le montant de la consigne, lorsque celle-ci est réclamée, tout en interdisant d’indiquer le montant total.

28.

Dès lors, j’aborderai à présent la première question préjudicielle afin d’examiner si, outre qu’elle constitue une incitation à participer à l’effort de recyclage et de réutilisation, la consigne réclamée pour des contenants pour boissons et denrées alimentaires doit être considérée comme faisant partie du « prix de vente » au sens de l’article 2, sous a), de la directive 98/6. Si tel était le cas, le montant de la consigne devrait être intégré dans le « prix de vente » qui, en vertu de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 98/6, doit être indiqué, avec le « prix à l’unité », pour les produits vendus aux consommateurs. Une telle conclusion vaudrait également pour toute publicité qui mentionne le « prix de vente », question qui relève de l’article 3, paragraphe 4, de la directive 98/6.

B. Une consigne réclamée pour des contenants consignés pour boissons et yaourts fait-elle partie du « prix de vente » ?

29.

Aux termes de l’article 2, sous a), de la directive 98/6, le « prix de vente » est « le prix définitif valable pour une unité du produit ou une quantité donnée du produit, c’est-à-dire comprenant la TVA et toutes les taxes accessoires ». L’examen de ce libellé (sous-section 1), lu à la lumière des objectifs spécifiques poursuivis par la directive 98/6 (sous-section 2) ainsi que des objectifs environnementaux poursuivis par d’autres instruments du droit de l’Union (sous‑section 3), me conduit à conclure que le montant de la consigne ne peut pas être considéré comme faisant partie du « prix de vente » au sens de l’article 2, sous a), de la directive 98/6.

1.   Le libellé de l’article 2, sous a), de la directive 98/6

30.

J’expliquerai dans la suite des présentes conclusions qu’une consigne réclamée pour certains contenants, qui doit être remboursée au client lors de la restitution du contenant, ne constitue pas une « taxe » (sous-section a). Je me pencherai ensuite sur les autres précisions que la Cour a apportées à la notion de « prix de vente », lorsqu’elle a décrit les éléments relevant de cette notion comme étant, en principe, des éléments inévitables qui constituent la contrepartie pécuniaire de l’acquisition des produits concernés (sous-section b).

a)   La consigne en cause n’est pas une « taxe »

31.

Je relève, tout d’abord, que la consigne en cause ne saurait être considérée comme une « taxe », élément que l’article 2, sous a), de la directive 98/6 désigne expressément comme devant être compris dans le « prix de vente ».

32.

Il en est ainsi simplement parce que le produit d’une taxe constitue normalement une source de recettes publiques, qui n’implique pas la fourniture d’une contrepartie. Or, une consigne, telle que celle en cause au principal, ne présente aucune de ces caractéristiques.

33.

Sous réserve de vérification par la juridiction de renvoi, il semble que le produit de la collecte de la consigne en cause au principal n’est jamais versé au Trésor public. En outre, ainsi que je l’exposerai plus en détail dans la suite des présentes conclusions, la consigne peut être considérée comme la contrepartie du contenant, étant entendu qu’elle sera remboursée lors de la restitution de ce dernier.

34.

Plus précisément, la nature même de la consigne en cause au principal (ainsi que, de manière plus générale, des consignes similaires) semble impliquer que, au moment même où cette consigne est réclamée, le vendeur (voire une catégorie plus large de professionnels) s’engage à accepter la restitution du contenant pour lequel ladite consigne a été réclamée et à rembourser le montant de cette même consigne au client (ou, en réalité, à quiconque restitue ce contenant). À cet égard, le gouvernement allemand a expliqué que l’obligation pour les professionnels d’accepter la restitution dudit contenant et de rembourser le montant de la consigne réclamée n’est pas limitée dans le temps.

35.

Pour ces raisons, je suis d’avis que la consigne en cause ne peut pas être considérée comme étant une « taxe ».

36.

Cela étant précisé, j’en viens à présent aux précisions apportées par la Cour dans le contexte de l’article 2, sous a), de la directive 98/6, que j’ai mentionnées aux points précédents des présentes conclusions et qui visent à déterminer si un élément donné du prix peut être considéré comme « définitif ».

b)   La consigne en cause constitue-t-elle un élément définitif du prix ?

37.

Mis à part le fait que les taxes ont été expressément incluses dans la notion de « prix de vente », telle que prévue à l’article 2, sous a), de la directive 98/6, cette directive ne fournit aucune autre indication quant à la portée exacte de cette notion, outre le fait que le prix de vente est le « prix définitif ».

38.

En interprétant ces termes dans l’arrêt Citroën Commerce ( 14 ), amplement commenté par les parties à la présente procédure, la Cour a jugé, au point 37 de cet arrêt, que, « [e]n tant que prix définitif, le prix de vente doit nécessairement inclure les éléments inévitables et prévisibles du prix, éléments qui sont obligatoirement à la charge du consommateur et qui constituent la contrepartie pécuniaire de l’acquisition du produit concerné ».

39.

Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Citroën Commerce, l’acquéreur d’un véhicule devait supporter les frais de transfert de ce véhicule du fabricant au vendeur, en sus du prix de vente indiqué dans une publicité. Cette publicité mentionnait également les frais de transfert, mais, comme dans l’affaire au principal, ces derniers étaient mentionnés séparément. Dans ce contexte, la Cour a souligné que le consommateur n’avait d’autre choix que de supporter ces frais qui étaient inévitables et prévisibles, à la différence, notamment, d’éventuels coûts de livraison du véhicule à l’endroit choisi par le consommateur ( 15 ). Eu égard à ces éléments, la Cour a conclu que les frais en cause auraient dû être inclus dans le prix de vente du véhicule et non pas faire l’objet d’une indication séparée ( 16 ).

40.

Afin d’apprécier si la même conclusion peut être tirée en ce qui concerne une consigne, j’appliquerai le critère que la Cour a dégagé au point 37 de l’arrêt Citroën Commerce, tel que rappelé au point 38 des présentes conclusions, qui semble, en y regardant de plus près, contenir deux critères principaux permettant de déterminer si un coût donné doit être considéré comme faisant partie du « prix définitif » et, donc, du « prix de vente ». Ainsi, ce coût doit i) constituer la contrepartie pécuniaire de l’acquisition du produit concerné (sous-section 1) et ii) être inévitable, car le consommateur doit s’en acquitter nécessairement et de manière prévisible (sous-section 2).

1) La consigne en cause constitue-t-elle la contrepartie pécuniaire de l’acquisition du produit concerné ?

41.

En premier lieu, il n’existe, à mon sens, aucun doute qu’une consigne telle que celle en cause est de nature pécuniaire.

42.

En second lieu, sous réserve du droit national applicable, il semble que, entre l’achat du produit et la restitution du contenant, le consommateur acquiert non seulement la propriété du produit, mais aussi la propriété du contenant et peut, en principe, en disposer librement. À cet égard, si je partage la position de la défenderesse et du gouvernement allemand selon laquelle l’acquisition du contenant n’est pas la finalité première de l’achat et le consommateur n’y attache aucun intérêt particulier, je considère que cette acquisition accessoire est inévitable, étant donné que le contenant et le produit vendu dans celui-ci forment un tout, ainsi que le soutiennent, en substance, le demandeur et la Commission.

43.

Cela étant, il semble que, sous réserve du droit national applicable, lorsque le consommateur « restitue » le contenant et le professionnel « rembourse » la consigne, d’un point de vue juridique, le professionnel (r)achète le contenant, ainsi qu’il est inconditionnellement tenu de le faire. En outre, cette obligation peut ne pas être limitée aux contenants de produits achetés auprès de ce professionnel en particulier. L’obligation de « rembourser » la consigne semble ainsi être une obligation d’acheter les contenants présentés audit professionnel pour le prix prévu par la loi ou par une autre source.

44.

On pourrait donc soutenir que, à la différence de ce qui se passe dans le cas des emballages non soumis à consigne, la mise en œuvre d’un système de consigne transforme les emballages en produits à part entière, ayant une valeur économique autonome qui peut être distinguée de la valeur économique de leur contenu.

45.

Ces considérations peuvent étayer la position selon laquelle les contenants ne constituent pas « des produits offerts par des professionnels aux consommateurs », au sens de l’article 1er de la directive 98/6, pour lesquels le « prix de vente » prévu à l’article 2, sous a), de cette directive est fixé ( 17 ). Cela conduirait alors à conclure que la consigne ne saurait être considérée comme un élément du « prix de vente » au sens de ladite directive, car elle constitue non pas la contrepartie de l’acquisition du produit concerné, mais la contrepartie de l’acquisition accessoire du contenant.

46.

Toutefois, outre une certaine lourdeur, cette construction intellectuelle est incompatible avec le simple fait, susmentionné, que l’acquisition des contenants ne saurait être dissociée de celle des produits qui y sont conditionnés, pour des raisons pratiques évidentes et, sous réserve d’une éventuelle législation nationale spécifique, pour des raisons juridiques. Par conséquent, selon moi, une consigne doit être considérée comme constituant une partie de la contrepartie pécuniaire de l’acquisition des produits offerts par des professionnels aux consommateurs, au sens de la directive 98/6.

47.

Il reste néanmoins à déterminer si les coûts liés à une consigne doivent être considérés comme « inévitables ».

2) La consigne en cause constitue-t-elle un élément inévitable du prix ?

48.

Les parties à la présente procédure ont amplement débattu sur le point de savoir si une consigne peut être considérée comme un élément inévitable du prix. Ce débat a essentiellement eu trait au problème soulevé par la nature insaisissable de la consigne qui, au moment de l’achat, doit nécessairement être payée par le consommateur, même si elle peut être remboursée par la suite, lors de la restitution du contenant.

49.

Le demandeur et la Commission ont fait valoir que le moment pertinent devrait être le moment de l’achat, puisque c’est à ce moment‑là que le consommateur doit payer la somme totale pour acquérir le produit en cause. En outre, la Commission a indiqué plusieurs cas dans lesquels le contenant n’est pas restitué, ce qui signifie qu’il n’y a pas de demande de remboursement du montant de la consigne. Plus précisément, la Commission a évoqué la situation d’un touriste qui achète un tel produit et quitte ensuite le territoire national, renonçant ainsi à la possibilité de réclamer la consigne. Toujours selon la Commission, le contenant peut être perdu ou détruit, ou le consommateur peut simplement décider de le conserver et de l’utiliser à d’autres fins, telles que la conservation de confitures artisanales.

50.

À mon avis, la Commission a parfaitement raison de suggérer que certains des contenants soumis à consigne peuvent trouver, pour ainsi dire, une nouvelle vie, ou qu’ils peuvent être écartés de la voie de la réutilisation ou du recyclage (immédiats) à laquelle ils étaient destinés. L’on peut parfaitement décider de ne pas restituer certains contenants (et renoncer donc à la possibilité de demander le remboursement de la consigne), qu’il s’agisse de bocaux en verre que l’on entend utiliser pour de la confiture de fraises ou de contenants en aluminium, initialement remplis de bière, que l’on peut conserver comme souvenirs d’un festival de musique estival. De même, l’on peut voyager en dehors du pays, en oubliant ou en n’ayant simplement pas le temps de restituer un contenant consigné, ou bien l’on peut, par inadvertance, faire tomber et casser une bouteille en verre qui aurait pu être restituée et réutilisée, mais qui, malheureusement, ne le sera jamais.

51.

Cela étant, je dirais qu’il ne s’agit pas de situations typiques que l’on associe au sort des contenants consignés, une fois vidés. À cet égard, le gouvernement allemand a expliqué, lors de l’audience, que, en 2019, 96 % des contenants en plastique consignés avaient été restitués ( 18 ), ce qui montre, du moins en ce qui concerne cet État membre, une forte tendance des consommateurs à participer à l’effort de réutilisation et de recyclage (indépendamment de ce que seraient les solutions « concurrentes », comme jeter ces contenants, les conserver à des fins pratiques ou pour des raisons sentimentales, les détruire par inadvertance ou, tout simplement, les oublier). Il apparaît ainsi que, dans la grande majorité des cas, les coûts liés à une consigne sont, en fin de compte, évités.

52.

En outre, indépendamment du taux exact de restitution des contenants, j’estime que ce qui importe le plus en l’espèce est que la consigne peut, par principe, être remboursée et est censée l’être.

53.

En cela, la situation d’une consigne diffère fondamentalement de celle de frais liés au transfert d’un véhicule, comme dans l’arrêt Citroën Commerce, dans lequel le critère du « caractère inévitable » semble avoir joué un rôle crucial.

54.

C’est peut-être pour cette raison qu’une grande partie de la discussion dans la présente affaire a porté sur la question de savoir si les coûts liés à une consigne sont évitables ou non. Toutefois, en l’espèce, la question de savoir lequel, des deux moments possibles (l’achat du produit ou la restitution du contenant), est le plus pertinent pour cette appréciation risque de devenir quelque peu circulaire. Le critère du « caractère inévitable » a été utile dans le contexte de l’arrêt Citroën Commerce et a permis, selon moi, à la Cour de souligner que les frais de transfert en cause dans cette affaire-là ne concernaient pas un service optionnel choisi par le consommateur ( 19 ). Toutefois, ces éléments sont moins utiles dans les circonstances de la présente espèce qui, selon moi, peuvent être utilement appréciées à la lumière de l’adjectif « définitif », qui caractérise le « prix de vente » au sens de l’article 2, sous a), de la directive 98/6.

55.

Dans mon esprit, l’élément qui définit le système de consigne est que la consigne constitue un élément du prix qui peut (et est peut-être d’ailleurs censé) être remboursé au consommateur. Cela change la situation de manière plutôt radicale, s’agissant de déterminer si le prix payé par le consommateur est définitif, par rapport à la situation dans laquelle aucun système de consigne n’est applicable. En d’autres termes, et ainsi que le font valoir, en principe, la défenderesse et le gouvernement allemand, le fait que la consigne puisse très bien être un élément inévitable du prix au moment de l’achat ne devrait pas occulter sa nature intrinsèque d’élément remboursable, qui implique que cette consigne peut ne pas être un élément du prix supporté en définitive par le consommateur.

56.

Ces considérations m’amènent à conclure qu’une consigne ne peut pas être considérée comme faisant partie du « prix de vente » au sens de l’article 2, sous a), de la directive 98/6. Cette conclusion est, en outre, corroborée par les objectifs spécifiques poursuivis par la directive 98/6, que j’aborderai dans la suite des présentes conclusions.

2.   Les objectifs poursuivis par la directive 98/6

57.

En vertu de son article 1er, la directive 98/6 a pour objet de « prévoir l’indication du prix de vente et du prix à l’unité de mesure des produits offerts par des professionnels aux consommateurs, afin d’améliorer l’information des consommateurs et de faciliter la comparaison des prix ».

58.

Dans cette logique, l’article 4, paragraphe 1, de cette directive dispose que « [l]e prix de vente et le prix à l’unité de mesure doivent être non équivoques, facilement identifiables et aisément lisibles ».

59.

Il découle, plus particulièrement, de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 98/6 que les professionnels sont tenus d’indiquer le prix de vente et le prix à l’unité de mesure pour tous les produits couverts par cette directive ( 20 ). En outre, conformément à l’article 3, paragraphe 4, de ladite directive, toute publicité qui mentionne le prix de vente doit également indiquer le prix à l’unité de mesure.

60.

Bien que le champ d’application matériel de la directive 98/6 soit assez large quant aux produits qu’elle couvre ( 21 ), il revêt une importance particulière dans un contexte où le consommateur se voit proposer des produits en quantités et en conditionnements variables et a donc un intérêt à comparer les prix sur la base d’une même unité de mesure ( 22 ). En effet, ainsi que la Cour l’a rappelé, le législateur de l’Union a cherché, en adoptant cet instrument, à assurer « la protection des consommateurs non pas en matière d’indication des prix, en général [...], mais en matière d’indication des prix des produits par référence à différents types d’unités de mesure » ( 23 ).

61.

Cela étant, et comme l’a relevé la juridiction de renvoi, lorsque le consommateur se voit présenter un prix « de vente total », il est bien informé de ce que cette acquisition coûtera concrètement.

62.

À ce stade, je souhaiterais revenir sur l’argument avancé par le demandeur, que la Commission a fait sien lors de l’audience, relatif au cas d’un consommateur disposant d’un euro seulement. Dans l’exemple présenté initialement par le demandeur, il s’agissait, pour être plus précis, d’un enfant qui, si je comprends bien, était amené à croire, à tort, qu’il pouvait acheter sa boisson préférée coûtant 89 cents, avant de découvrir que tel n’était pas le cas, en raison de l’obligation de payer 25 cents supplémentaires à titre de consigne.

63.

Je dois dire que je suis tout à fait sensible à la déception que ce petit client peut ressentir lorsqu’il se présente à la caisse avec la boisson de son choix, pour découvrir alors seulement que « 0,89 euro, consigne en sus : 0,25 euro » signifie que cette boisson coûte plus d’un euro, de sorte qu’il ne sera malheureusement pas en mesure de l’acheter.

64.

Toutefois, je fais observer, en premier lieu, que le critère d’évaluation qui guide habituellement la Cour dans son interprétation des dispositions du droit de la consommation est celui du consommateur normalement informé et non celui du consommateur vulnérable, tel qu’un enfant ( 24 ). En second lieu, je relève que le bénéfice potentiel d’une information directe sur le prix total d’un produit donné doit, en tout état de cause, être apprécié au regard des incidences sur l’aptitude des consommateurs à comparer facilement les prix des produits vendus dans le cadre d’un système de consigne avec les prix des produits qui ne sont pas vendus dans le cadre d’un tel système, ou encore les prix des produits auxquels s’appliquent des consignes d’un montant différent. En d’autres termes, la manière dont le prix de chaque produit considéré isolément est indiqué ne doit pas entraver la comparabilité des prix des produits considérés dans leur ensemble.

65.

Dans ce contexte plus large, lorsque la consigne est comprise dans le prix de vente, il existe un risque que les consommateurs effectuent des comparaisons erronées entre les prix demandés pour différents produits, étant donné que certains de ces produits peuvent être soumis à consigne, tandis que d’autres peuvent ne pas l’être et que des consignes de montants différents peuvent s’appliquer selon le type de contenant ou de produit ( 25 ). Il ressort de la décision de renvoi que de telles considérations (ainsi que des considérations environnementales) ont amené le législateur national à adopter l’article 1er, paragraphe 4, de la PAngV, disposition en cause au principal, étant donné que ce législateur s’est inquiété du désavantage visuel subi par les produits vendus dans le cadre d’un système de consigne, qui apparaissaient plus onéreux.

66.

Par ailleurs, je rappelle que, en principe, la directive 98/6 impose l’obligation d’indiquer non seulement le prix de vente, mais également le prix à l’unité de mesure. Le fait d’intégrer le montant de la consigne dans le prix de vente peut, selon moi, créer une confusion quant à la manière dont ce prix à l’unité de mesure a été déterminé. Cela est d’autant plus problématique, à mon sens, que ledit prix constitue l’outil le plus simple dont dispose le consommateur pour comparer les prix des produits vendus en quantités différentes.

67.

À mon avis, ces considérations relatives aux objectifs poursuivis par la directive 98/6 confirment ma conclusion antérieure selon laquelle une consigne ne peut pas être considérée comme faisant partie du « prix de vente » au sens de l’article 2, sous a), de la directive 98/6.

68.

Je considère qu’il en va de même en ce qui concerne les objectifs environnementaux auxquels les systèmes de consigne sont liés d’emblée, comme je l’expliquerai plus en détail dans la suite des présentes conclusions.

3.   Le contexte environnemental plus large de la directive 98/6

69.

Les systèmes de consigne sont, avant tout, des instruments de politique environnementale, dans la mesure où ils visent à inciter les consommateurs à participer à la réutilisation ou au recyclage, afin de réduire les incidences environnementales négatives des déchets. Ces attributs leur sont reconnus, explicitement ou implicitement, par le droit de l’Union, ainsi que je l’ai évoqué brièvement dans la section A des présentes conclusions.

70.

Pour rappel, le treizième considérant de la directive 91/157 ( 26 ) contenait une reconnaissance expresse en ce sens.

71.

En outre, l’article 5, paragraphe 2, de la directive 85/339 ( 27 ) (désormais abrogée) disposait que, « [d]ans le cas d’utilisation d’un système de consigne, les États membres veillent d’une manière appropriée à ce que le consommateur soit clairement informé du montant de la consigne ». Il ressort clairement de la proposition ayant donné lieu à cette directive que la Commission a examiné la question de savoir s’il convenait d’introduire des règles communes qui seraient plus spécifiques et contraignantes et qui porteraient, entre autres, sur le développement de systèmes de consigne. Cette proposition suggérait même que le signe « R » soit apposé sur les contenants concernés, mais cette suggestion n’a pas été reprise dans la directive adoptée ( 28 ), abrogée ultérieurement par la directive 94/62, ainsi que je l’ai précédemment relevé ( 29 ).

72.

La proposition de la Commission ayant donné lieu à l’adoption de la directive relative aux emballages et aux déchets d’emballages a reconnu les efforts entrepris par certains États membres pour faire face au problème environnemental causé, notamment, par l’utilisation de contenants à usage unique et a fait référence à des systèmes de consigne mis en place, ou qui allaient être mis en place, dans certains des États membres ( 30 ).

73.

Toutefois, la version initiale de la directive relative aux emballages et aux déchets d’emballages ne contenait aucune référence aux systèmes de consigne ( 31 ), ce qui semble refléter les difficultés posées par certains de ces systèmes quant au respect des règles relatives à la libre circulation des marchandises ( 32 ), aspect que j’ai évoqué aux points précédents des présentes conclusions ( 33 ).

74.

Cela a néanmoins changé avec les modifications apportées à l’article 5 de la directive relative aux emballages et aux déchets d’emballages par la directive 2018/852 ( 34 ). L’article 5, paragraphe 1, sous a), de cette directive prévoit actuellement que les « systèmes de consigne » font partie des mesures que les États membres peuvent adopter afin de satisfaire à leur obligation d’« encourager l’augmentation de la part d’emballages réutilisables mis sur le marché et des systèmes de réemploi des emballages qui soient respectueux de l’environnement, conformes au traité [...] ».

75.

En outre, depuis 2018, il résulte de l’annexe IV bis, point 5, de la directive 2008/98/CE ( 35 ), ainsi que de l’article 9, paragraphe 1, troisième alinéa, sous a), de la directive 2019/904, adoptée en 2019 ( 36 ), que les systèmes de consigne sont reconnus comme des moyens pouvant être utilisés par les États membres, en substance, afin de réduire ou prévenir la production de déchets.

76.

Ces règles du droit de l’Union, adoptées plus ou moins récemment dans le domaine des emballages et des déchets, montrent ainsi que le législateur de l’Union perçoit le système de consigne comme un instrument pouvant effectivement contribuer à atténuer à long terme les incidences environnementales négatives, les modalités étant laissées à l’appréciation des États membres, sous réserve du respect du traité.

77.

L’interdiction d’indiquer le montant total du prix d’un produit vendu dans le cadre d’un système de consigne, telle que prévue à l’article 1er, paragraphe 4, de la PAngV, peut être considérée comme une méthode qui vise, comme l’a en substance soutenu la défenderesse et comme l’a expliqué le gouvernement allemand lors de l’audience, à attirer l’attention du consommateur sur le fait qu’un certain contenant peut être recyclé ou réutilisé. Les consommateurs peuvent ainsi être incités à choisir des produits considérés comme plus respectueux de l’environnement. Toutefois, l’indication du prix total peut affaiblir ce message, étant donné que cette manière d’indiquer le prix risque de brouiller l’information selon laquelle un système de consigne s’applique d’emblée.

78.

Ces considérations, tirées du contexte externe (environnemental) de la directive 98/6, constituent donc un élément supplémentaire qui confirme, selon moi, ma conclusion antérieure selon laquelle le montant d’une consigne ne peut pas être considéré comme faisant partie du « prix de vente » au sens de l’article 2, sous a), de la directive 98/6.

79.

Au vu des considérations qui précèdent, je suggère à la Cour de répondre à la première question préjudicielle que l’article 2, sous a), de la directive 98/6 doit être interprété en ce sens que la notion de « prix de vente » qui y est prévue n’inclut pas une consigne à payer pour des contenants consignés dans lesquels des produits sont offerts aux consommateurs.

C. À titre subsidiaire : l’interdiction d’indiquer un prix « total » constitue une disposition plus favorable qui améliore l’information sur les prix et facilite leur comparaison

80.

Si la Cour devait ne pas suivre ma proposition de réponse à la première question préjudicielle et concluait que la consigne fait bien partie du « prix de vente » au sens de l’article 2, sous a), de la directive 98/6, il conviendrait de répondre à la seconde question préjudicielle posée par la juridiction de renvoi, portant sur le point de savoir si l’article 1er, paragraphe 4, de la PAngV pourrait être maintenu en tant que « disposition plus favorable » au sens de l’article 10 de la directive 98/6 (sous-section 1) et, dans l’affirmative, si l’harmonisation complète réalisée par la directive 2005/29 ferait néanmoins obstacle à ce qu’il soit maintenu (sous-section 2).

1.   La règle nationale en cause constitue-t-elle une « disposition plus favorable » au sens de l’article 10 de la directive 98/6 ?

81.

Je rappelle que l’article 10 de la directive 98/6 permet l’adoption de mesures nationales « plus favorables »« en ce qui concerne l’information des consommateurs et la comparaison des prix ». Par conséquent, à supposer que la consigne en cause soit considérée comme faisant partie du « prix de vente », l’interdiction de l’inclure dans le prix de vente prévue par l’article 1er, paragraphe 4, de la PAngV pourrait néanmoins être considérée comme étant conforme à la directive 98/6 si elle constituait une telle mesure « plus favorable ».

82.

La juridiction de renvoi estime que la disposition nationale en cause n’est pas plus favorable aux consommateurs, car elle oblige ceux‑ci à calculer eux-mêmes le prix total. Ce point de vue est partagé par la Commission.

83.

Je conviens certes que la règle nationale en cause oblige les consommateurs à additionner les deux montants en cause pour déterminer le montant total du prix à payer. Cela étant, en tout état de cause, un système de consigne rend inévitable un exercice arithmétique, que la consigne soit ou non comprise dans le prix de vente. Plus important encore, le fait de considérer que la nécessité d’additionner deux montants est moins favorable aux consommateurs repose, selon moi, sur une prémisse erronée quant aux objectifs poursuivis par la directive 98/6. À cet égard, et au regard de ce que j’ai exposé au point 64 des présentes conclusions, il ne ressort pas de cette directive que le législateur de l’Union a entendu mettre le consommateur (normalement informé) à l’abri de la nécessité d’additionner deux montants en cas de besoin. La directive 98/6 repose plutôt sur l’idée que, pour de tels consommateurs normalement informés, la comparaison des prix devrait être aisée. Dès lors, il convient également de tenir compte de cet objectif dans une situation spécifique dans laquelle un système de consigne s’applique. Pour les raisons que j’ai exposées précédemment, une règle telle que celle prévue à l’article 1er, paragraphe 4, de la PAngV constitue la meilleure façon de réaliser ledit objectif.

84.

À cet égard, je renvoie à ce que j’ai exposé dans la section B.2 des présentes conclusions, où j’ai expliqué que le fait de ne pas indiquer le montant total du prix incluant la consigne constitue la manière optimale de réaliser l’objectif d’améliorer l’information des consommateurs sur les prix et leur aptitude à les comparer.

85.

En effet, indiquer le montant total, consigne incluse, peut rendre plus difficile la comparaison des prix des différents produits et peut, en outre, rendre confuse la détermination du prix à l’unité de mesure. Dès lors, si la consigne devait être considérée comme faisant partie du prix de vente, j’estime que les mêmes arguments permettraient de conclure que ne pas indiquer le montant total est plus favorable que de l’indiquer, au sens de l’article 10 de la directive 98/6.

86.

Cela étant, lors de l’adoption de « mesures plus favorables » au sens de l’article 10 de la directive 98/6, les États membres doivent respecter les obligations qui leur incombent en vertu d’autres dispositions du droit de l’Union ( 37 ). Dans ce contexte, la juridiction de renvoi se demande si la disposition nationale en cause, quand bien même elle serait considérée comme étant « plus favorable », pourrait être maintenue, ou bien si l’harmonisation complète réalisée par la directive 2005/29 s’y opposerait. J’aborderai ce dernier aspect dans la suite des présentes conclusions.

2.   La règle nationale en cause et la directive 2005/29

87.

Comme je l’ai indiqué précédemment, par sa seconde question préjudicielle, la juridiction de renvoi a invité la Cour à préciser si l’harmonisation complète réalisée par la directive 2005/29 s’oppose à la disposition de l’article 1er, paragraphe 4, de la PAngV. Bien que le libellé de cette question préjudicielle ne révèle pas une justification plus précise des doutes nourris par la juridiction de renvoi, je crois comprendre, au regard des arguments développés dans la décision de renvoi, que cette juridiction a estimé que la règle nationale en cause pouvait aboutir à l’omission d’une information devant être considérée comme « substantielle » au sens de la directive 2005/29, en violation des exigences prévues par cette directive en matière de publicité.

88.

Il convient également de relever que la décision de renvoi a exposé les caractéristiques pertinentes de la directive 2005/29, qui a effectivement réalisé une harmonisation complète ( 38 ), et s’est étendue aussi sur la relation entre cette directive et la directive 98/6. Dans ce contexte, la juridiction de renvoi a relevé que la directive 2005/29 n’autorise pas les mesures nationales dérogatoires, quand bien même il s’agirait de mesures « plus favorables » adoptées sur le fondement de l’article 10 de la directive 98/6, sous réserve des exceptions expressément prévues par la directive 2005/29, étant précisé que, selon la juridiction de renvoi, aucune de ces exceptions n’est applicable dans les circonstances de l’espèce.

89.

J’admets certes le caractère approfondi de l’analyse faite par la juridiction de renvoi, mais, à mon sens, il n’y a pas lieu de s’y pencher outre mesure, étant donné que son utilité repose, si je comprends bien les doutes que nourrit la juridiction de renvoi, sur la prémisse que l’article 1er, paragraphe 4, de la PAngV déroge à l’exigence posée par la directive 2005/29 de fournir au consommateur une information « substantielle » sur le prix des produits offerts ( 39 ).

90.

Toutefois, comme je l’expliquerai dans la suite des présentes conclusions, je ne pense pas que cette prémisse soit correcte.

91.

Les doutes de la juridiction de renvoi quant à la compatibilité avec le droit de l’Union de l’interdiction nationale d’indiquer le prix total semblent reposer, en particulier, sur l’article 7, paragraphe 5, de la directive 2005/29. Cette disposition qualifie de « substantielles » les obligations d’information qui s’appliquent en matière de publicité et qui sont prévues par d’autres instruments du droit de l’Union, dont une liste non exhaustive figure à l’annexe II de la directive 2005/29 ( 40 ). Cette liste mentionne, entre autres, l’article 3, paragraphe 4, de la directive 98/6, qui impose, en principe, que le prix à l’unité de mesure soit indiqué dans toute publicité qui mentionne également le prix de vente. La juridiction de renvoi relève que l’obligation d’information sur le prix de vente des produits offerts aux consommateurs, prévue à l’article 3, paragraphe 1, de la directive 98/6, bien qu’elle ne soit pas strictement imposée par l’article 3, paragraphe 4, de cette directive, devrait également être réputée substantielle.

92.

Je crois comprendre que les préoccupations de la juridiction de renvoi impliquent que, dans le cadre de ces considérations, le prix de vente devrait signifier le « prix total », qui inclut la consigne, et que, partant, dans la mesure où l’article 1er, paragraphe 4, de la PAngV empêche que cette information spécifique soit donnée, en tant que telle, aux consommateurs, il peut se heurter à l’obligation de leur fournir une information substantielle (sur le prix), conformément à l’article 7 de la directive 2005/29.

93.

Afin de répondre aux doutes de la juridiction de renvoi, je relève, en premier lieu, qu’il ressort de l’article 7, paragraphe 1, de la directive 2005/29 qu’une information substantielle est, de manière générale, une information « dont le consommateur moyen a besoin, compte tenu du contexte, pour prendre une décision commerciale en connaissance de cause et [dont l’omission], par conséquent, l’amène ou est susceptible de l’amener à prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise autrement ».

94.

En deuxième lieu, je relève que le « prix toutes taxes comprises » figure à l’article 7, paragraphe 4, sous c), de la directive 2005/29 ( 41 ) parmi six types d’informations considérées comme « substantielles » dans le cadre d’une « invitation à l’achat » ( 42 ).

95.

En troisième lieu, il est vrai que la Cour a jugé dans son arrêt Deroo‑Blanquart « qu’est considéré comme une information substantielle le prix d’un produit proposé à la vente, c’est-à-dire le prix global du produit, et non le prix de chacun de ses éléments », de sorte que l’article 7, paragraphe 4, sous c), de la directive 2005/29 « fait obligation au professionnel d’indiquer au consommateur le prix global du produit concerné » ( 43 ). Dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, le professionnel avait indiqué le prix global d’un ordinateur équipé de logiciels préinstallés, proposé aux consommateurs comme un ensemble, mais n’avait pas indiqué les différents éléments du prix. La Cour a jugé que l’absence d’indication séparée des prix de l’ordinateur et des logiciels ne constituait pas une pratique commerciale trompeuse au sens de la directive 2005/29.

96.

Je crois comprendre que le dictum de l’arrêt Deroo-Blanquart, selon lequel le prix global constitue une information substantielle, concerne implicitement des situations dans lesquelles le consommateur ne se voit communiquer que les différents éléments du prix, ce qui lui permet difficilement de comprendre le prix réel du produit. Selon moi, cet arrêt n’est pas, en tant que tel, pleinement transposable aux circonstances de l’espèce, car, pour les raisons que j’ai exposées dans la partie précédente des présentes conclusions, le caractère remboursable d’une consigne fait qu’elle peut difficilement être comparée à un prix à payer pour des logiciels installés sur un ordinateur ou pour tout autre élément proposé dans le cadre d’une offre conjointe.

97.

De surcroît, je suis d’avis que la question pertinente à poser en l’espèce n’est pas celle de savoir si l’interdiction d’indiquer le montant total du prix entraîne une omission d’« informations substantielles », mais celle de savoir si tel est l’effet de l’article 1, paragraphe 4, de la PAngV, considéré dans son ensemble. Je rappelle que cette disposition, outre qu’elle contient cette interdiction, énonce l’obligation d’indiquer le prix du produit et le montant de la consigne.

98.

Je rappelle en outre que, ainsi que la Cour l’a également mis en exergue dans l’arrêt Deroo-Blanquart ( 44 ), conformément au considérant 14 de la directive 2005/29, constitue une information substantielle une information clé dont le consommateur a besoin pour prendre une décision commerciale en connaissance de cause.

99.

Dans ces conditions, je suis d’avis que l’indication du prix composé de deux éléments (clairement) affichés et liés, tels que « 0,89 euro, consigne en sus : 0,25 euro », fournit au consommateur non seulement l’information sur le prix total à payer au moment de l’achat, qui peut être aisément déterminé par le consommateur moyen normalement informé et raisonnablement attentif et avisé ( 45 ), mais également l’information tout aussi importante selon laquelle le produit est vendu dans le cadre d’un système de consigne, ce qui a les implications économiques et environnementales spécifiques que j’ai décrites précédemment.

100.

Enfin, je rappelle que, pour qu’une pratique soit considérée comme déloyale au sens de l’article 5, paragraphe 2, de la directive 2005/29, elle doit notamment conduire à une altération substantielle du comportement économique des consommateurs, notion qui, aux termes de l’article 2, sous e), de la directive 2005/29, est comprise comme une altération sensible de l’aptitude du consommateur à prendre une décision en connaissance de cause, l’amenant à prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise autrement.

101.

En revanche, il ressort de la décision de renvoi que l’article 1er, paragraphe 4, de la PAngV a été adopté afin d’améliorer l’aptitude des consommateurs à prendre des décisions en connaissance de cause, sur la base d’une meilleure comparabilité des prix. Il résulte également de l’appréciation effectuée dans la partie précédente des présentes conclusions qu’indiquer la consigne séparément, sans indiquer le prix total, contribue à la réalisation des objectifs d’information des consommateurs et de comparabilité des prix, poursuivis par la directive 98/6. Dans ces conditions, je ne vois pas en quoi la disposition nationale en cause pourrait, en soi, avoir pour effet d’imposer aux professionnels d’adopter un comportement ayant pour résultat une altération de l’aptitude des consommateurs, au sens de l’article 2, sous e), de la directive 2005/29.

102.

Au vu des considérations qui précèdent, je propose donc à la Cour de répondre à la seconde question préjudicielle que la directive 2005/29 ne s’oppose pas à une disposition nationale telle que l’article 1er, paragraphe 4, de la PAngV, en vertu de laquelle, lorsqu’il est demandé au consommateur, outre le prix du produit, de s’acquitter d’une consigne, le montant de cette consigne doit être indiqué à part, en sus du prix du produit, sans que ceux‑ci soient combinés dans le cadre d’un montant total.

V. Conclusion

103.

Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre aux questions préjudicielles posées par le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice, Allemagne) comme suit :

L’article 2, sous a), de la directive 98/6/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 février 1998, relative à la protection des consommateurs en matière d’indication des prix des produits offerts aux consommateurs,

doit être interprété en ce sens que :

la notion de « prix de vente » qui y est prévue n’inclut pas une consigne à payer pour des contenants consignés dans lesquels des produits sont offerts aux consommateurs.


( 1 ) Langue originale : l’anglais.

( 2 ) Directive du Parlement européen et du Conseil du 16 février 1998 relative à la protection des consommateurs en matière d’indication des prix des produits offerts aux consommateurs (JO 1998, L 80, p. 27).

( 3 ) Directive du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur et modifiant la directive 84/450/CEE du Conseil et les directives 97/7/CE, 98/27/CE et 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil et le règlement (CE) no 2006/2004 du Parlement européen et du Conseil (« directive sur les pratiques commerciales déloyales ») (JO 2005, L 149, p. 22).

( 4 ) Voir, à cet égard, arrêt du 14 décembre 2004, Commission/Allemagne (C‑463/01, EU:C:2004:797, point 76), et considérant 4 de la directive (UE) 2018/852 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2018, modifiant la directive 94/62/CE relative aux emballages et aux déchets d’emballages (JO 2018, L 150, p. 141). Pour un aperçu général, voir A European Refunding Scheme for Drinks Containers, Parlement européen, 2011, p. 12 et suiv., et, plus récemment et concernant particulièrement les plastiques, Engagements des ministres de l’Environnement sur les plastiques. Visions, actions et plans définis au niveau national annoncés à la réunion du Conseil de l’OCDE au niveau des Ministres (RCM), juin 2022, ENV/EPOC(2022)14.

( 5 ) Policy Instruments for Environment, OCDE, Database, 2017, p. 6.

( 6 ) Policy Instruments for Environment, OCDE, Database, 2017, p. 6. Ainsi que l’indique cette source, les systèmes de consigne ne concernent pas uniquement les contenants pour boissons, mais peuvent également couvrir d’autres objets, tels que les accumulateurs plomb-acide ou les pneumatiques usagés.

( 7 ) Directive du Conseil du 27 juin 1985 concernant les emballages pour liquides alimentaires (JO 1985, L 176, p. 18), abrogée par la directive 94/62/CE du Parlement européen et du Conseil, du 20 décembre 1994, relative aux emballages et aux déchets d’emballages (JO 1994, L 365, p. 10, ci-après la « directive relative aux emballages et aux déchets d’emballages »).

( 8 ) Directive telle que modifiée par la directive 2018/852.

( 9 ) Directive du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 relative à la réduction de l’incidence de certains produits en plastique sur l’environnement (JO 2019, L 155, p. 1).

( 10 ) Voir, notamment, septième, huitième et dixième considérants ainsi qu’article 5, paragraphe 2, de la directive 85/339 ; article 5, paragraphe 1, sous a), de la directive relative aux emballages et aux déchets d’emballages, telle que modifiée par la directive 2018/852, et article 9, paragraphe 1, troisième alinéa, sous a), de la directive 2019/904.

( 11 ) Directive du 18 mars 1991 (JO 1991, L 78, p. 38), abrogée par la directive 2006/66/CE du Parlement européen et du Conseil, du 6 septembre 2006, relative aux piles et accumulateurs ainsi qu’aux déchets de piles et d’accumulateurs (JO 2006, L 266, p. 1).

( 12 ) Arrêts du 20 septembre 1988, Commission/Danemark (302/86, EU:C:1988:421) ; du 14 décembre 2004, Radlberger Getränkegesellschaft et S. Spitz (C‑309/02, EU:C:2004:799), et du 14 décembre 2004, Commission/Allemagne (C‑463/01, EU:C:2004:797). De surcroît, dans le contexte d’une législation et d’une pratique nationales relatives à un système de consigne, l’arrêt du 9 juin 2021, Dansk Erhverv/Commission (T‑47/19, EU:T:2021:331), concerne la légalité de la décision C(2018) 6315 final de la Commission, du 4 octobre 2018, concernant l’aide d’État SA.44865 (2016/FC) – Allemagne – Aide alléguée en faveur de magasins de boissons situés à la frontière allemande, et est frappé par un pourvoi dans l’affaire pendante C‑508/21 P.

( 13 ) Arrêt du Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice) du 14 octobre 1993, I ZR 218/91, disponible à l’adresse Internet suivante : https://research.wolterskluwer‑online.de/document/bdbc1eba-d26c-4ffc-915c-2a5b764acf6b.

( 14 ) Arrêt du 7 juillet 2016 (C‑476/14, ci-après l’« arrêt Citroën Commerce », EU:C:2016:527).

( 15 ) De cette manière, la Cour a sans doute voulu opérer une distinction entre ces frais inévitables et le prix d’éventuels services optionnels. De tels services optionnels étaient en cause dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt (cité par la Cour) du 18 septembre 2014, Vueling Airlines (C‑487/12, ci-après l’« arrêt Vueling Airlines », EU:C:2014:2232, point 37). Voir également arrêt Citroën Commerce, points 38 à 40.

( 16 ) Arrêt Citroën Commerce, point 41. Je crois comprendre que, en raison des spécificités de cette affaire, la Cour n’a pas eu à examiner le dernier élément du critère énoncé au point 37 de cet arrêt, tel que rappelé au point 38 des présentes conclusions, relatif à la question de savoir si le coût en cause constitue la contrepartie pécuniaire de l’acquisition du produit concerné.

( 17 ) Je rappelle que, conformément à l’article 1er de la directive 98/6, celle-ci « a pour objet de prévoir l’indication du prix de vente et du prix à l’unité de mesure des produits offerts par des professionnels aux consommateurs, afin d’améliorer l’information des consommateurs et de faciliter la comparaison des prix » (mise en italique par mes soins).

( 18 ) Je relève qu’il est fait état d’un taux de restitution des bouteilles réutilisables de 98,5 % dans le rapport final Awareness and Exchange of Best Practices on the Implementation and Enforcement of the Essential Requirements for Packaging and Packaging Waste [Sensibilisation et échange de bonnes pratiques sur la mise en œuvre et l’application des exigences essentielles relatives aux emballages et aux déchets d’emballages], Commission européenne, DG ENV, 3 août 2011, p. 80, point 5.1.2, disponible à l’adresse Internet suivante : https://ec.europa.eu/environment/pdf/waste/packaging/packaging_final_report.pdf.

( 19 ) Voir point 39 et note en bas de page 15 des présentes conclusions. Je rappelle que, dans son arrêt Citroën Commerce, la Cour a fait référence à son arrêt antérieur, Vueling Airlines, dans lequel elle avait opéré une distinction entre, d’une part, les éléments inévitables et prévisibles du prix du service aérien qui doivent être précisés en tant que composantes du prix définitif et, d’autre part, les suppléments de prix, relatifs à un service qui n’est ni obligatoire ni indispensable pour le service aérien lui‑même (tel que le transport des bagages), au sens de l’article 23, paragraphe 1, du règlement (CE) no 1008/2008 du Parlement européen et du Conseil, du 24 septembre 2008, établissant des règles communes pour l’exploitation de services aériens dans la Communauté (JO 2008, L 293, p. 3).

( 20 ) Cette obligation est assortie d’exceptions, telles que celle prévue à l’article 3, paragraphe 1, dernière phrase, de la directive 98/6, en vertu de laquelle le prix à l’unité de mesure ne doit pas être indiqué « s’il est identique au prix de vente ».

( 21 ) En atteste le fait que, dans son arrêt Citroën Commerce, la Cour a appliqué la directive 98/6 à l’indication du prix dans une publicité pour un véhicule. Une position contraire avait été exprimée dans les conclusions de l’avocat général Mengozzi dans l’affaire Citroën Commerce (C‑476/14, EU:C:2015:814, point 50).

( 22 ) Conclusions de l’avocat général Mengozzi dans l’affaire Citroën Commerce (C‑476/14, EU:C:2015:814, point 48). Voir, également, conclusions de l’avocat général Cruz Villalón dans l’affaire Commission/Belgique (C‑421/12, EU:C:2013:769, point 63).

( 23 ) Arrêt du 10 juillet 2014, Commission/Belgique (C‑421/12, EU:C:2014:2064, point 59).

( 24 ) Voir, à cet égard, considérant 18 de la directive 2005/29 et, par exemple, arrêt du 3 février 2021, Stichting Waternet (C‑922/19, EU:C:2021:91, point 57 et jurisprudence citée).

( 25 ) Le gouvernement allemand a expliqué que, en ce qui concerne les produits nationaux, des consignes d’un montant de 2, 3, 8, 15 ou 25 cents s’appliquent selon le type de contenant. Le prix total de ces produits peut donc varier, même lorsqu’ils sont vendus dans les mêmes quantités. En outre, ce gouvernement a fait valoir que les produits importés peuvent ne pas être soumis à consigne ou peuvent être soumis à une consigne d’un montant différent.

( 26 ) Le treizième considérant de cette directive est rédigé en ces termes : « considérant que le recours à des instruments économiques, comme par exemple la mise en œuvre d’un système de consigne, peut encourager la collecte séparée et le recyclage des piles et accumulateurs usagés ». Cet instrument a été abrogé par la directive 2006/66, qui ne fait aucune référence spécifique aux systèmes de consigne. Voir son article 8 sur les systèmes de collecte.

( 27 ) Note sans pertinence dans la version en langue française des présentes conclusions.

( 28 ) Voir projet d’article 7, paragraphe 2, sous a), de la proposition de directive du Conseil en matière d’emballages pour liquides alimentaires [COM(81) 187 final] (JO 1981, C 204, p. 6), et neuvième considérant de l’exposé des motifs de cette proposition.

( 29 ) Note sans pertinence dans la version en langue française des présentes conclusions.

( 30 ) Points 1.3, 1.6 et 3.2 de la proposition de directive du Conseil relative aux emballages et aux déchets d’emballages [COM(92) 278 final]. Des références similaires figuraient dans l’exposé des motifs de la proposition ayant donné lieu à l’adoption de la directive 85/339 (voir p. 6 et 7 de cette proposition).

( 31 ) Voir article 7 de la version initiale de cette directive, intitulé « Systèmes de reprise, de collecte et de valorisation ».

( 32 ) Point 4.1, page 8, de la proposition COM(92) 278 final. Cette proposition évoquait « l’affaire danoise », en se référant sans doute à l’arrêt du 20 septembre 1988, Commission/Danemark (302/86, EU:C:1988:421), cité au point 1.6, page 4, de ladite proposition.

( 33 ) Voir point 25 des présentes conclusions.

( 34 ) Note sans pertinence dans la version en langue française des présentes conclusions.

( 35 ) Directive du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 relative aux déchets et abrogeant certaines directives (JO 2008, L 312, p. 3), telle que modifiée. Voir, également, considérants 29 et 30 de la directive (UE) 2018/851 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2018, modifiant la [directive 2008/98] (JO 2018, L 150, p. 109), texte ayant introduit l’annexe IV bis dans la directive 2008/98.

( 36 ) Note sans pertinence dans la version en langue française des présentes conclusions.

( 37 ) Je rappelle que l’article 10 de la directive 98/6 emploie les termes « sans préjudice de leurs obligations au titre du traité ».

( 38 ) Voir, par exemple, arrêt du 10 juillet 2014, Commission/Belgique (C‑421/12, EU:C:2014:2064, point 55 et jurisprudence citée).

( 39 ) Je relève que l’appréciation au regard de la directive 2005/29 s’effectue généralement à l’égard d’une pratique commerciale particulière, adoptée volontairement par un professionnel, ou à l’égard d’une réglementation nationale interdisant, en toutes circonstances, un certain comportement, prétendument au-delà de ce que permettent les règles harmonisées de la directive 2005/29. En revanche, la seconde question préjudicielle posée en l’espèce invite la Cour à apprécier la compatibilité avec cette directive d’une obligation légale pouvant, si l’on se réfère aux doutes de la juridiction de renvoi, aboutir à une pratique commerciale déloyale. Cela étant, j’estime qu’une telle appréciation est justifiée, puisque le fait d’autoriser les États membres à imposer aux professionnels d’adopter un comportement constitutif d’une pratique commerciale déloyale au sens de la directive 2005/29 priverait cette directive de son effet utile.

( 40 ) L’article 7, paragraphe 5, de la directive 2005/29 dispose que « [l]es informations qui sont prévues par le droit communautaire et qui sont relatives aux communications commerciales, y compris la publicité ou le marketing, et dont une liste non exhaustive figure à l’annexe II, sont réputées substantielles ».

( 41 ) L’article 7, paragraphe 4, sous c), de la directive 2005/29 qualifie d’« informations substantielles »« le prix toutes taxes comprises, ou, lorsque la nature du produit signifie que le prix ne peut raisonnablement pas être calculé à l’avance, la manière dont le prix est calculé, ainsi que, le cas échéant, tous les coûts supplémentaires de transport, de livraison et postaux, ou, lorsque ces coûts ne peuvent raisonnablement pas être calculés à l’avance, la mention que ces coûts peuvent être à la charge du consommateur ».

( 42 ) L’article 2, sous i), de la directive 2005/29 définit l’« invitation à l’achat » comme « une communication commerciale indiquant les caractéristiques du produit et son prix de façon appropriée en fonction du moyen utilisé pour cette communication commerciale et permettant ainsi au consommateur de faire un achat ». Sur cette notion, voir arrêt du 12 mai 2011, Ving Sverige (C‑122/10, EU:C:2011:299, point 28).

( 43 ) Arrêt du 7 septembre 2016, Deroo-Blanquart (C‑310/15, ci-après l’ arrêt Deroo-Blanquart , EU:C:2016:633, point 46).

( 44 ) Arrêt Deroo-Blanquart, point 48.

( 45 ) Tel étant le critère d’évaluation pris par la directive 2005/29, ainsi qu’il ressort de son considérant 18.