ORDONNANCE DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

8 février 2010 ( *1 )

Dans l’affaire T-481/08,

Alisei, établie à Rome (Italie), représentée par Mes F. Sciaudone, R. Sciaudone, S. Gobbato, R. Rio et A. Neri, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. P. van Nuffel et L. Prete, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet, d’une part, une demande d’annulation de la décision prétendument contenue dans la lettre de la Commission du 19 août 2008, portant sur le remboursement d’une partie des avances versées à la requérante dans le cadre de certains projets de coopération au développement et d’aide humanitaire financés par le budget communautaire ou par le Fonds européen de développement (FED) et, d’autre part, une demande de réparation du préjudice prétendument subi par la requérante du fait du comportement de la Commission,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. M. Vilaras (rapporteur), président, M. Prek et V. M. Ciucă, juges,

greffier: M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

Cadre juridique et contractuel

Contrats entre Alisei et la Commission

1

La requérante, Alisei, est une association sans but lucratif de droit italien, constituée par acte du 20 janvier 1998, à la suite de la fusion des associations sans but lucratif de droit italien Cidis et Nuova Frontiera. Entre le et le , elle a conclu avec la Commission des Communautés européennes 22 contrats de subvention, au sens du titre VI («Subventions») de la première partie ainsi que du titre IV («Actions extérieures») de la deuxième partie du règlement (CE, Euratom) no 1605/2002 du Conseil, du , portant règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes (JO L 248, p. 1, ci-après le «règlement financier»).

2

Les conditions générales régissant 17 [ALI 08, ALI 41, ALI 44, ALI 46, ALI 03, ALI 04, ALI 06, ALI 07, ALI 17, ALI 18, ALI 19, ALI 25, ALI 39, ALI 42, ALI 45, ALI 47 et ALI 48] de ces 22 contrats comportent une clause aux termes de laquelle «tout litige entre la Commission et [la requérante] qui pourrait apparaître dans l’exécution du […] contrat et qui n’aurait pu être réglé à l’amiable entre les parties sera soumis aux tribunaux de Bruxelles».

3

Les conditions générales régissant cinq de ces 22 contrats désignent les tribunaux de Bruxelles comme juridiction compétente pour statuer sur les litiges pouvant apparaître dans le cadre de leur exécution dans l’hypothèse où les parties n’ont pas pu régler leur différend à l’issue d’une tentative de règlement à l’amiable et/ou d’une procédure de conciliation.

4

En outre, les conditions générales régissant les 22 contrats susmentionnés prévoient la possibilité, pour les services compétents de la Commission notamment, d’effectuer des vérifications et des contrôles de l’utilisation qui est faite de la subvention accordée.

Contrats entre Alisei et des pays tiers financés par le FED

5

Le Fonds européen de développement (FED) a été établi pour financer la coopération de la Communauté européenne avec les États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP), tout d’abord par le biais d’une annexe au traité CEE, puis par des accords internes des États membres réunis au sein du Conseil. À ce jour, il y a eu dix FED successifs et les accords internes relatifs à ces FED ont été conclus pour une durée correspondant à la durée des divers accords et conventions par lesquels la Communauté européenne et ses États membres ont établi ce partenariat spécial avec les États ACP. Les montants dont étaient dotés les FED n’ont pas été inscrits au budget général des Communautés européennes, ce qui explique que leur gestion a été régie par un règlement financier spécifique pour chaque FED.

6

S’agissant des sixième, septième, huitième et neuvième FED, leur création a été prévue, respectivement, par la troisième convention ACP-CEE, signée à Lomé le 8 décembre 1984 (JO 1986, L 86, p. 3, ci-après la «convention de Lomé III»), par la quatrième convention ACP-CEE, signée à Lomé le (JO 1991, L 229, p. 3, ci-après la «convention de Lomé IV»), par l’accord portant modification de la convention de Lomé IV, signé à Maurice, le (JO 1998, L 156, p. 3, ci-après l’«accord de Maurice») et par l’accord de partenariat entre les membres du groupe ACP, d’une part, et la Communauté européenne et ses États membres, d’autre part, signé à Cotonou le (JO L 317, p. 3, ci-après l’«accord de Cotonou»).

7

Ces accords et conventions prévoient que, sauf disposition contraire, tout projet ou programme financé par une subvention du FED donne lieu à l’établissement d’une convention de financement entre la Commission et l’État ou les États ACP concernés. Cette convention précise, notamment, l’engagement financier du FED ainsi que les modalités et conditions de financement (voir article 222, paragraphe 1, de la convention de Lomé III, article 291, paragraphes 1 et 2, de la convention de Lomé IV, non modifié par l’accord de Maurice, et article 17, paragraphes 1 et 2, de l’annexe IV, intitulée «Procédures de mise en œuvre et de gestion», de l’accord de Cotonou).

8

En outre, ces mêmes accords et conventions instituent la fonction d’ordonnateur principal du FED. Celui-ci est désigné par la Commission. Il est responsable de la gestion des ressources du FED (voir article 226, paragraphe 1, de la convention de Lomé III, article 311, paragraphe 1, de la convention de Lomé IV, non modifié par l’accord de Maurice et article 34, paragraphe 1, de l’annexe IV de l’accord de Cotonou).

9

Le financement des quatre FED susmentionnés a fait l’objet de quatre accords internes entre les États membres réunis au sein du Conseil, à savoir l’accord interne 86/126/CEE, relatif au financement et à la gestion des aides de la Communauté (JO 1986, L 86, p. 210), la décision 91/482/CEE du Conseil, du 25 juillet 1991, relative à l’association des pays et territoires d’outre-mer à la Communauté économique européenne (JO L 263, p. 1), l’accord interne entre les représentants des gouvernements des États membres, réunis au sein du Conseil, relatif au financement et à la gestion des aides de la Communauté dans le cadre du second protocole financier de la convention de Lomé IV (JO 1998, L 156, p. 108), et l’accord interne 2000/770/CE entre les représentants des gouvernements des États membres, réunis au sein du Conseil, relatif au financement et à la gestion des aides de la Communauté dans le cadre du protocole financier de l’accord de Cotonou et à l’affectation des aides financières destinées aux pays et territoires d’outre-mer auxquels s’appliquent les dispositions de la quatrième partie du traité CE (JO L 317, p. 355).

10

Les dispositions d’application de ces quatre accords internes font l’objet, respectivement, du règlement financier 86/548/CEE, du 11 novembre 1986, applicable au sixième FED (JO L 325, p. 42), du règlement financier 91/491/CEE, du , applicable à la coopération pour le financement du développement en vertu de la convention de Lomé IV (JO L 266, p. 1), du règlement financier 98/430/CE, du , applicable à la coopération pour le financement du développement en vertu de la convention de Lomé IV (JO L 191, p. 53), et du règlement financier du applicable au neuvième FED (JO L 83, p. 1).

11

Ces quatre règlements prévoient que la Commission assure la gestion du FED sous sa propre responsabilité et nomme, notamment, l’ordonnateur principal du FED ainsi que le comptable de celui-ci (voir article 10, paragraphe 1, et articles 11 et 13 du règlement financier 86/548, article 9, paragraphe 1, et articles 11 et 13 du règlement financier 91/491, article 13, paragraphe 1, et article 15, paragraphe 1, du titre II «Gestion des crédits du FED dont l’exécution est assurée par la Commission» du règlement financier 98/430 ainsi qu’article 1er, paragraphe 2, et articles 18 et 27 du règlement financier du 27 mars 2003 applicable au neuvième FED). Les trois premiers règlements financiers évoqués au point 10 ci-dessus instituent, en outre, la fonction du contrôleur financier. En revanche, l’article 133, paragraphe 2, du règlement financier du applicable au neuvième FED prévoit que les engagements relevant des FED antérieurs effectués avant l’entrée en vigueur de l’accord de Cotonou, le , continuent à être exécutés conformément aux règles applicables à ces FED, sauf en ce qui concerne, notamment, la fonction du contrôleur financier, pour laquelle les dispositions dudit règlement sont d’application. Ce dernier règlement ne prévoit pas la fonction du contrôleur financier.

12

Les règlements financiers 86/548, 91/491 et 98/430, applicables respectivement au sixième, au septième et au huitième FED prévoient que, en principe, toute créance certaine, liquide et exigible due au FED dans le cadre de l’exécution des crédits du FED, doit faire l’objet, de la part de l’ordonnateur principal, d’un ordre de recouvrement. Toutefois, l’ordonnateur principal peut renoncer à recouvrir une créance. Un ordre de recouvrement fait l’objet d’un enregistrement par le comptable, qui en prend charge et est tenu de faire diligence en vue d’assurer, à la date visée dans celui-ci, le recouvrement de la créance qui y est afférente. Le comptable informe l’ordonnateur principal du non-recouvrement des créances dans les délais prévus et entame, le cas échéant, la procédure de récupération (voir articles 15 et 16 du règlement financier 86/548, article 15, paragraphe 2, et article 16 du règlement financier 91/491, article 18, paragraphe 2, et article 19 du règlement financier 98/430).

13

Le règlement financier du 27 mars 2003 applicable au neuvième FED contient des dispositions analogues en ses articles 45 à 47. Toutefois, certaines précisions supplémentaires ont été apportées s’agissant des recouvrements. Premièrement, l’article 45, premier alinéa, dudit règlement, dispose que l’ordre de recouvrement est «suivi d’une note de débit adressée au débiteur», laquelle est également établie par l’ordonnateur principal du FED. Deuxièmement, l’article 46, paragraphe 2, du même règlement énonce que, à défaut de recouvrement effectif d’une créance, le comptable du FED «lance sans délai la procédure de récupération, par toute voie de droit, y compris, le cas échéant, par compensation. Si celle-ci n’est pas possible, le comptable recourt à l’exécution forcée du titre, soit conformément à l’article 44, paragraphe 2, soit sur la base d’un titre obtenu par la voie contentieuse». Troisièmement, l’article 44, paragraphe 2, de ce règlement prévoit que «la Commission peut formaliser la constatation d’une créance à charge de personnes autres que des États dans une décision qui forme titre exécutoire dans les conditions définies à l’article 256 du traité [CE]».

14

Entre le 24 avril 2002 et le , la requérante a conclu dix contrats de prestations de services qui ont été financés par le FED. Elle a conclu six contrats avec la Commission, agissant en lieu et place de la République démocratique du Congo, qui ont été financés par le sixième FED, un contrat avec la République d’Angola, qui a été financé par le septième FED, un contrat avec la République de Guinée équatoriale, qui a été financé par le huitième FED, et deux contrats, respectivement, avec la République gabonaise et la République démocratique de São Tomé e Príncipe, qui ont été financés par le neuvième FED.

15

Tous ces contrats sont régis par les dispositions du cahier général des charges relatif aux marchés de services financés par le FED, qui figure à l’annexe IV de la décision no 3/90 du Conseil des ministres ACP-CEE, du 29 mars 1990, portant adoption de la réglementation générale, des cahiers généraux des charges et du règlement de procédure de conciliation et d’arbitrage, relatifs aux marchés de travaux, de fournitures et de services financés par le FED, et concernant leur application (JO L 382, p. 1), telles que complétées ou modifiées par le contrat.

16

S’agissant des litiges relatifs au contrat, l’article 45.2 du cahier général des charges susmentionné, intitulé «Règlement des litiges», prévoit la fixation d’une procédure à suivre pour le règlement à l’amiable des différends. En cas d’échec de cette procédure, l’article 45.3 dudit cahier général des charges indique que les parties peuvent convenir de tenter une conciliation par un tiers dans un délai déterminé. L’article 45.5 de ce cahier des charges ajoute que, «[à] défaut d’un règlement à l’amiable ou par conciliation dans le délai maximal prévu, le litige est […] dans le cadre d’un marché transnational, réglé […] soit, si les parties au marché en conviennent ainsi, conformément à la législation nationale de l’État du maître d’ouvrage ou à ses pratiques internationales établies […] soit par arbitrage conformément aux règles de procédure adoptées conformément à la convention».

17

La disposition de l’article 45.5 n’a pas été complétée ou modifiée dans les dix contrats en question. De plus, dans aucun de ces contrats, il n’est convenu un règlement des litiges conformément à la législation ou aux pratiques de l’État concerné, de sorte que les litiges entre les parties à ces contrats sont à régler par arbitrage. Les règles de procédure d’arbitrage auxquelles il est fait référence à l’article 45.5 sont celles figurant à l’annexe V de la décision no 3/90.

18

Par ailleurs, la requérante a conclu deux contrats respectivement avec la République du Congo et la République de Côte d’Ivoire, qui ont été financés, respectivement, par le huitième et par le neuvième FED. L’article 13 des conditions générales applicables à chacun de ces contrats prévoit une procédure de règlement à l’amiable des différends entre les parties à ces contrats, ainsi que la possibilité de soumettre le différend, d’un commun accord, à la Commission. Aux termes du même article, en cas d’échec des procédures mentionnées ci-dessus, chaque partie peut soumettre le différend aux tribunaux de l’État de l’administration contractante.

Antécédents du litige

19

Le 27 août 2004, l’Office de lutte antifraude (OLAF), a ouvert une enquête à l’égard de la requérante, ce dont cette dernière a été informé le . Dans ce cadre, l’OLAF a effectué, du au , une série d’inspections dans les locaux de la requérante à Milan. Pendant cette période, des employés d’une société de révision comptable externe ont également effectué une inspection dans lesdits locaux de la requérante.

20

Par lettre du 6 mars 2006, l’OLAF a transmis à la requérante, pour commentaire, son rapport de contrôle et de vérification, établi à la suite des inspections ayant eu lieu du au , ainsi que le projet de rapport de la société de révision externe comptable susmentionnée. Copie de cette lettre a également été transmise par l’OLAF à l’Office de coopération de la Commission (Europaid). La requérante a présenté ses observations sur ledit rapport le .

21

Par lettre du 3 mai 2006, Europaid a informé la requérante que les constatations des rapports susmentionnés faisaient naître un doute sur le caractère éligible des frais dont celle-ci avait demandé le remboursement dans le cadre de différents projets. Par conséquent, Europaid envisageait d’ordonner un audit et, entre-temps, s’agissant des contrats en cours et des programmes de travail relevant de sa compétence, de suspendre tout paiement à la requérante.

22

Après une rencontre entre les représentants de la Commission et ceux de la requérante le 16 mai 2006, Europaid a, par lettre du , confirmé à la requérante son intention d’ordonner un audit pour vérifier le caractère éligible des coûts déclarés par celle-ci. Par lettre du , Europaid a communiqué à la requérante, d’une part, l’identité du réviseur externe auquel l’audit avait été confié et, d’autre part, les projets sur lesquels cet audit devait porter.

23

L’audit a débuté par une phase exploratoire réalisée dans les locaux de la requérante du 12 au . Cette phase exploratoire de l’audit visait à identifier et à localiser la documentation nécessaire pour l’enquête. À partir du , des contrôles ont été effectués sur place. Le , une rencontre préliminaire de clôture a été organisée entre le réviseur externe et la requérante, en présence des représentants de la Commission. Le , une autre rencontre a eu lieu entre le réviseur externe et la requérante, également en présence de représentants de la Commission. Cette rencontre a mis fin aux contrôles sur place.

24

Par lettres des 18 janvier, , et , la requérante a émis certaines critiques concernant le réviseur externe auquel l’audit avait été confié, ainsi que la manière dont cet audit avait été réalisé. Europaid a répondu aux trois premières lettres de la requérante par lettres des , et

25

Par lettre du 20 juillet 2007, la Commission a transmis à la requérante, pour commentaire, une version consolidée du projet de rapport d’audit accompagnée de ses propres observations. Elle a également invité la requérante à se prononcer sur le recouvrement d’une somme de 6433424,80 euros et l’a informée de l’intention de la Commission d’engager une procédure contradictoire pour faute professionnelle grave et défaut grave d’exécution des obligations contractuelles, conformément aux articles 93, 96 et 114 du règlement financier, ainsi que de l’exclure pendant une période de deux ans de toute participation aux procédures d’adjudication et de subvention financées par la Communauté. Elle a accordé à la requérante un délai d’un mois pour formuler ses observations à ce sujet.

26

Cette lettre de la Commission a été suivie d’un échange de correspondance entre les parties, comportant cinq lettres adressées par la requérante à Europaid, datées respectivement des 20 et et du , des et , ainsi que trois lettres adressées par Europaid à la requérante, datées respectivement des et et du .

27

Par lettre du 19 août 2008, la Commission a transmis à la requérante le rapport final de l’audit, que le réviseur externe lui avait communiqué le . Elle a également répondu aux lettres de la requérante des et et informé cette dernière de l’ouverture d’une procédure de recouvrement d’un montant total de 4750121 euros concernant des sommes indûment perçues dans le cadre des 34 contrats en cause à une date qui lui serait communiquée ultérieurement par l’ordonnateur compétent.

Procédure et conclusions des parties

28

Par requête déposée au greffe du Tribunal le 5 novembre 2008, la requérante a introduit le présent recours, dans lequel elle conclut à ce qu’il plaise au Tribunal:

annuler la décision prétendument contenue dans la lettre du 19 août 2008;

condamner la Commission à la réparation du préjudice subi par la requérante;

condamner la Commission aux dépens.

29

Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le 19 janvier 2009, la Commission a soulevé une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 114 du règlement de procédure du Tribunal. Elle conclut à ce qu’il plaise au Tribunal:

rejeter le recours comme irrecevable;

condamner la requérante aux dépens.

30

La requérante a présenté ses observations sur l’exception d’irrecevabilité le 4 mars 2009. Dans ses observations, elle conclut à ce qu’il plaise au Tribunal:

rejeter l’exception d’irrecevabilité;

condamner la Commission aux dépens.

31

Dans le cadre d’une mesure d’organisation de la procédure prévue à l’article 64 du règlement de procédure, le Tribunal a invité la Commission à produire certains documents. Cette dernière a déféré à cette demande dans le délai imparti.

32

Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le 2 juillet 2009, la requérante a demandé l’adoption de «mesures d’organisation de la procédure» tendant à ce que, d’une part, il soit ordonné à la Commission de produire, dans son intégralité, le contrat que celle-ci a conclu avec le réviseur externe chargé d’effectuer l’audit mentionné ci-dessus (voir les points 21 et 22 ci-dessus) et, d’autre part, le Tribunal procède à l’audition, comme témoins, du directeur général d’Europaid et d’un associé du réviseur externe auquel l’audit a été confié.

33

La Commission a déposé ses observations sur cette demande le 17 juillet 2009. Elle fait valoir que la demande de la requérante tend, en réalité, à l’adoption de mesures d’instruction et doit être rejetée comme irrecevable ou, à titre subsidiaire, comme non fondée.

34

Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le 30 septembre 2009, la requérante a demandé l’adoption d’une mesure d’organisation de la procédure tendant à ce que la Commission soit invitée à préciser si le réviseur externe a effectué un audit régi par les «normes comptables internationales» ou s’il a réalisé une «procédure convenue», régie par «les normes internationales sur les services connexes 4400 — Missions d’examen d’informations financières sur la base de procédures convenues», laquelle serait étrangère à ce qui était prévu par le contrat conclu entre ce réviseur et la Commission.

35

Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le 1er décembre 2009, la requérante a produit le contrat conclu entre la Commission et le réviseur externe et a invoqué deux nouveaux moyens à l’appui de son recours.

En droit

36

En vertu de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure, si une partie le demande, le Tribunal peut statuer sur l’irrecevabilité sans engager le débat au fond. Conformément au paragraphe 3 du même article, la suite de la procédure est orale, sauf décision contraire du Tribunal. Par ailleurs, en vertu de l’article 111 du règlement de procédure, lorsqu’un recours est manifestement dépourvu de tout fondement en droit, le Tribunal peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d’ordonnance motivée.

37

En l’espèce, le Tribunal estime qu’il est suffisamment éclairé par les pièces versées au dossier et qu’il n’y a pas lieu d’ouvrir la procédure orale.

Sur la demande en annulation

Arguments des parties

38

La Commission fait valoir que la lettre du 19 août 2008 s’inscrit dans un cadre purement contractuel, régi par les stipulations des différents contrats dont il est question dans cette même lettre. Or, les conditions contractuelles applicables aux contrats conclus entre la requérante et elle ne comporteraient aucune clause compromissoire désignant le Tribunal pour statuer sur le présent litige, mais, au contraire, stipuleraient que les tribunaux de Bruxelles seraient compétents pour tout litige relatif à ces mêmes contrats. Les autres contrats mentionnés dans la même lettre, conclus entre la requérante et un certain nombre de pays tiers et financés par le FED, seraient régis par des conditions contractuelles selon lesquelles les différends relatifs à ces contrats devraient être réglés «conformément à la législation nationale de l’État maître d’ouvrage». Le Tribunal ne serait donc aucunement compétent pour les litiges relatifs à tous ces contrats. Par ailleurs, compte tenu du cadre contractuel dans lequel s’inscrirait la lettre du , celle-ci ne constituerait pas un acte susceptible de faire l’objet d’un recours en annulation devant le Tribunal.

39

La Commission ajoute que, en tout état de cause, compte tenu de son libellé, la lettre du 19 août 2008 ne saurait être considérée comme un acte qui produit des effets juridiques obligatoires, mais serait, tout au plus, un acte préparatoire, non susceptible d’être attaqué par la voie d’un recours en annulation.

40

La requérante admet que le Tribunal n’est pas compétent pour connaître des litiges relatifs aux 34 contrats concernés par la lettre du 19 août 2008. Elle fait toutefois valoir que l’affirmation de la Commission selon laquelle ladite lettre s’inscrirait dans un cadre purement contractuel et, par conséquent, ne serait pas un acte pouvant faire l’objet d’un recours en annulation devant le Tribunal est fondée sur une lecture erronée et partiale de cette lettre ainsi que sur la méconnaissance de l’objet et du contenu de la demande en annulation.

41

Selon la requérante, dans la lettre du 19 août 2008, la Commission n’a pas seulement répondu à ses affirmations relatives à la suspension des paiements et aux prétendues irrégularités de l’audit et annoncé l’ouverture d’une procédure de recouvrement. Elle lui aurait également transmis le rapport final d’audit et l’aurait informée qu’elle considérait ce rapport comme une base technique fiable et légitime, s’agissant des conséquences à tirer dans cette affaire. En d’autres termes, par lettre du , la Commission aurait validé les conclusions du réviseur externe en adoptant le rapport final.

42

Ce serait précisément sur cet aspect spécifique de la lettre du 19 août 2008 que porterait la demande d’annulation, par laquelle elle conteste la décision de la Commission, adoptée dans le cadre de ses prérogatives administratives, de considérer close et réglée la procédure d’audit confiée à un réviseur externe et d’en valider l’ensemble des conclusions en adoptant le rapport final.

43

Par ailleurs, les violations de certains de ses droits et de certains principes généraux du droit, invoquées dans la requête, concerneraient l’adoption et l’approbation du rapport en question en tant qu’acte attribuable à la volonté et aux pouvoirs d’une administration dans l’exercice de ses prérogatives de puissance publique, et non les éventuelles relations contractuelles entre elle et la Commission. Il s’agirait, donc, de griefs tenant non à la violation de stipulations contractuelles spécifiques, mais à la violation de principes généraux du droit.

44

La jurisprudence relative à l’irrecevabilité d’un recours en annulation formée contre un acte s’inscrivant dans un contexte contractuel serait dépourvue de pertinence en l’espèce. D’une part, la lettre du 19 août 2008 ne constituerait ni un ordre de recouvrement ni une note de débit, comme le reconnaîtrait d’ailleurs la Commission. D’autre part, dans cette même lettre, la Commission aurait considéré comme close et régulière la procédure d’audit confiée à un réviseur externe et en aurait validé les conclusions. Elle serait, donc, dissociable du cadre contractuel dans lequel cette lettre s’inscrivait, et ce d’autant plus qu’elle concernerait également les contrats conclus avec un certain nombre de pays tiers, exclusivement financés par le FED.

45

La requérante soutient également que, dans la mesure où, dans la lettre du 19 août 2008, la Commission a définitivement clos la procédure d’audit confiée à un réviseur externe, celle-ci aurait considéré cette procédure d’audit comme régulière et aurait validé les conclusions du réviseur externe en adoptant le rapport final, ce qui aurait modifié sa situation juridique. Elle prétend, en effet, être passée du statut de «créancier d’une série de paiements encore à recevoir» à celui de «débiteur, au moins potentiel, des montants déjà versés et à présent objets de contestations comptables». En outre, en application des principes de prudence applicables en matière comptable, ladite lettre l’aurait obligée à effacer de son bilan de créances un montant supérieur à 2 millions d’euros et à inscrire à leur place une dette imprévue de 4,7 millions d’euros.

46

La requérante affirme que, même si la lettre du 19 août 2008 pouvait, en partie, être considérée comme étant un acte préparatoire, dans la mesure où la Commission a répondu à ses griefs et a anticipé l’ouverture d’une procédure de recouvrement, la partie de cette lettre relative à la clôture de la procédure d’audit et à l’adoption du rapport final revêtirait un caractère définitif et serait détachable du contexte contractuel, au sens de l’arrêt de la Cour du , Geotronics/Commission (C-395/95 P, Rec. p. I-2271, points 12 à 15), dont la solution serait applicable par analogie en l’espèce, de sorte que cette lettre pourrait faire l’objet d’un recours en annulation. Cette interprétation serait également confirmée par les observations présentées par la Commission devant le Médiateur européen en réponse à une plainte déposée par la requérante.

Appréciation du Tribunal

47

Dans le cadre d’un recours en annulation, le juge contrôle la légalité des actes adoptés par les institutions destinés à produire des effets juridiques obligatoires à l’égard des tiers, en modifiant de façon caractérisée leur situation juridique (ordonnance du Tribunal du 10 avril 2008, Imelios/Commission, T-97/07, non publiée au Recueil, point 21; voir également, en ce sens, arrêts de la Cour du , IBM/Commission, 60/81, Rec. p. 2639, point 9, et du , Reynolds Tobacco e.a./Commission, C-131/03 P, Rec. p. I-7795, point 54).

48

Lorsqu’il s’agit d’actes ou de décisions dont l’élaboration s’effectue en plusieurs phases, notamment au terme d’une procédure interne, en principe ne constituent un acte attaquable que les mesures qui fixent définitivement la position de l’institution au terme de cette procédure, à l’exclusion des mesures intermédiaires dont l’objectif est de préparer la décision finale (arrêt IBM/Commission, point 47 supra, point 10, et arrêt du Tribunal du 7 mars 2002, Satellimages TV5/Commission, T-95/99, Rec. p. II-1425, point 32).

49

Il n’en serait autrement que si des décisions ou des actes pris au cours de la procédure préparatoire constituaient eux-mêmes le terme ultime d’une procédure spéciale distincte de celle qui doit permettre à l’institution de statuer sur le fond (arrêt IBM/Commission, point 47 supra, point 11, et ordonnance du Tribunal du 9 juin 2004, Camós Grau/Commission, T-96/03, RecFP p. I-A-157 et II-707, point 30).

50

Par ailleurs, les actes adoptés par les institutions qui s’inscrivent dans un cadre purement contractuel dont ils sont indissociables ne figurent pas, en raison de leur nature, au nombre des actes dont l’annulation peut être demandée au Tribunal (ordonnances du Tribunal du 10 mai 2004, Musée Grévin/Commission, T-314/03 et T-378/03, Rec. p. II-1421, point 64, et Imelios/Commission, point 47 supra, point 22).

51

En l’espèce, il convient d’examiner si la lettre du 19 août 2008 constitue un acte pouvant faire l’objet d’un recours en annulation devant le Tribunal. La requérante fait valoir que tel serait le cas dès lors que cette lettre, d’une part, contiendrait une décision mettant fin à une procédure administrative d’audit, confiée par la Commission à un réviseur externe et, d’autre part, adopterait le rapport d’audit rédigé par ce réviseur.

52

En premier lieu, s’agissant des 22 contrats mentionnés au point 1 ci-dessus, il convient de relever que, afin de protéger ses droits découlant desdits contrats et de s’assurer de la bonne exécution par la requérante des obligations qui lui incombent en vertu des mêmes contrats, la Commission peut procéder aux contrôles et aux vérifications qui lui paraissent nécessaires et appropriés. De tels contrôles et vérifications sont, par ailleurs, expressément autorisés par les termes mêmes des contrats concernés (voir point 4 ci-dessus).

53

Dans ce contexte, la Commission peut charger un réviseur externe d’effectuer, pour son compte, un audit et de lui communiquer les conclusions de cet audit sous forme d’un rapport. Elle peut également, si les conclusions de ce rapport lui paraissent exactes et justifiées, se fonder sur celles-ci pour faire valoir, devant les instances appropriées, les droits dont elle s’estime titulaire en vertu des contrats en question.

54

Il s’ensuit que, pour autant que les 22 contrats en question sont concernés, l’audit effectué par le réviseur externe choisi par la Commission relève de l’exercice, par cette dernière, de ses droits découlant desdits contrats et s’inscrit, donc, dans le cadre contractuel défini par ces contrats.

55

Par conséquent, quand bien même la lettre du 19 août 2008 devrait être comprise en ce sens qu’elle met un terme à la procédure d’audit relative aux 22 contrats susmentionnés et qu’elle valide les conclusions du réviseur externe en adoptant le rapport final, elle n’est pas, contrairement à ce que fait valoir la requérante, dissociable du cadre contractuel constitué par ces contrats et ne saurait être qualifiée d’acte pouvant faire l’objet d’un recours en annulation devant le Tribunal. La demande en annulation de la décision prétendument contenue dans cette lettre, pour autant qu’elle vise ces 22 contrats, est, donc, irrecevable.

56

Par ailleurs, cette demande ne saurait être requalifiée en ce sens qu’elle fait valoir la violation, par la Commission, des obligations qui lui incombent en vertu des 22 contrats susmentionnés et qu’elle est, donc, introduite en vertu d’une clause compromissoire désignant le Tribunal pour statuer. En effet, c’est à la partie requérante qu’il appartient de faire le choix du fondement juridique de son recours et non au juge de choisir lui-même la base légale la plus appropriée (arrêt de la Cour du 15 mars 2005, Espagne/Eurojust, C-160/03, Rec. p. I-2077, point 35; ordonnances du Tribunal du , Evropaïki Dynamiki/Commission, T-205/05, non publiée au Recueil, point 38, et Imelios/Commission, point 47 supra, point 19).

57

En tout état de cause, quand bien même la demande en annulation, pour autant qu’elle vise la partie de la lettre du 19 août 2008 relative aux 22 contrats en question, pourrait ainsi être requalifiée, elle serait irrecevable, le Tribunal étant manifestement incompétent pour en connaître.

58

En effet, le Tribunal n’est compétent pour statuer, en première instance, sur les litiges de nature contractuelle portés devant lui par des personnes physiques ou morales qu’en vertu d’une clause compromissoire. À défaut d’une telle clause, il étendrait sa compétence juridictionnelle au-delà des litiges dont la connaissance lui est limitativement réservée (ordonnance du Tribunal du 3 octobre 1997, Mutual Aid Administration Services/Commission, T-186/96, Rec. p. II-1633, point 47).

59

Or, en l’espèce, les 22 contrats mentionnés au point 1 ci-dessus ne contiennent aucune clause compromissoire désignant le Tribunal pour statuer sur le présent litige, mais stipulent, au contraire, que les litiges relatifs à ces contrats relèvent de la compétence des tribunaux de Bruxelles.

60

En deuxième lieu, pour autant que la lettre du 19 août 2008 vise les 12 contrats mentionnés aux points 14 et 18 ci-dessus, conclus entre la requérante et certains États ACP et financés par le FED, il convient de relever que, selon une jurisprudence constante en matière de marchés publics bénéficiant d’une aide financière du FED, les interventions des représentants de la Commission, qu’il s’agisse d’approbations ou de refus d’approbations, de visas ou de refus de visas, tendent uniquement à constater que les conditions du financement sont ou non réunies et n’ont pas pour objet ni ne sauraient avoir pour effet de porter atteinte au principe selon lequel les marchés en question demeurent des marchés nationaux, que seuls les États bénéficiaires ont la responsabilité de préparer, négocier et conclure (arrêts de la Cour du , STS/Commission, 126/83, Rec. p. 2769, point 16, et du , CMC e.a./Commission, 118/83, Rec. p. 2325, point 28).

61

En effet, les entreprises soumissionnaires ou attributaires des marchés en cause n’entretiennent de relations juridiques qu’avec l’État bénéficiaire responsable du marché et les actes des représentants de la Commission ne peuvent avoir pour effet de substituer à leur égard une décision émanant de cette institution à la décision de l’État ACP, seul compétent pour conclure et signer ce marché (arrêts de la Cour STS/Commission, point 60 supra, point 18; du 14 janvier 1993, Italsolar/Commission, C-257/90, Rec. p. I-9, point 22, et du , Forafrique Burkinabe/Commission, C-182/91, Rec. p. I-2161, point 23).

62

Ces considérations, valables pour les contrats de prestations de services mentionnés au point 14 ci-dessus, conclus à la suite d’un appel d’offre national organisé par l’État ACP concerné, sont également valables, par analogie, s’agissant des contrats de subvention conclus par un État ACP mentionnés au point 18 ci-dessus.

63

Toutefois, ces considérations ne sont pas, à elles seules, suffisantes pour conclure à l’irrecevabilité d’un recours en annulation contre un acte adopté par la Commission dans l’exercice de ses compétences propres, par un particulier visé par cet acte et à qui celui-ci est formellement adressé, quand bien même ledit acte s’inscrirait dans le cadre d’une procédure de nature contractuelle (voir, en ce sens, arrêt Geotronics/Commission, point 46 supra, points 13 et 14).

64

Afin de se prononcer sur la recevabilité de la demande en annulation, pour autant qu’elle vise les 12 contrats conclus entre la requérante, d’une part, et différents États ACP, d’autre part, il convient donc de déterminer si cette lettre, formellement adressée à la requérante, contient effectivement une décision de la Commission, adoptée dans l’exercice de ses compétences propres, laquelle serait susceptible de faire l’objet d’un recours en annulation devant le Tribunal.

65

La requérante admet elle-même que, pour autant que, dans la lettre du 19 août 2008, la Commission lui annonce qu’une note de débit va prochainement lui être adressée, cette lettre ne constitue pas un acte produisant des effets obligatoires juridiques à son égard. Elle soutient, toutefois, que, dans ladite lettre, la Commission ne se contente pas de répondre à ses griefs relatifs à l’audit effectué par un réviseur externe à la demande de la Commission, mais adopte une décision formelle mettant un terme à la procédure administrative d’audit et validant les conclusions du réviseur externe en adoptant le rapport final. Cette décision serait susceptible de faire l’objet d’un recours en annulation devant le Tribunal.

66

Il convient de relever, à cet égard, qu’un audit effectué dans le cadre de contrats financés par le FED a nécessairement pour objet la vérification du caractère régulier des opérations financières effectuées dans le cadre de l’exécution de ces contrats. Dans ce contexte, des irrégularités donnant lieu à une obligation de remboursement de certains montants au FED peuvent être constatées.

67

Toutefois, les créances dues au FED qui seraient constatées à la suite d’un audit effectué par la Commission ou à sa demande ne trouvent pas leur origine dans l’audit lui-même, mais dans la violation par une partie à un contrat financé par le FED de ses obligations contractuelles. En effet, le rapport d’audit ne fait que constater les irrégularités éventuelles déjà existantes ainsi que les créances qui en résultent. Il ne modifie, donc, en rien la situation juridique du débiteur de ces créances. Ce dernier a, par ailleurs, la possibilité de contester les constatations et les conclusions du rapport d’audit devant la juridiction compétente, dans le cadre de tout litige portant sur les créances en question.

68

L’argument de la requérante tiré de ce que l’adoption du rapport final l’aurait obligée à modifier son bilan par l’effacement d’un crédit et à inscrire à la place de celui-ci une dette imprévue, ne saurait conduire à une conclusion contraire, dès lors que, ainsi qu’il a déjà été relevé, le rapport d’audit ne saurait impliquer l’obligation de la requérante de modifier sa propre comptabilité, qui relève de sa seule responsabilité.

69

Il convient également de rappeler que la Commission est chargée, par les accords et conventions ayant institué les différents FED ainsi que par les règlements financiers correspondants, d’assurer la gestion de ces FED. Dans ce contexte, elle a non seulement le droit, mais également le devoir de s’assurer, avant tout versement de fonds communautaires, que les conditions de tels versements se trouvent effectivement réunies et, à cette fin, elle doit notamment rechercher les informations nécessaires pour assurer une gestion économique des ressources du FED (arrêt du Tribunal du 11 juillet 1996, International Procurement Services/Commission, T-175/94, Rec. p. II-729, point 45; voir également, en ce sens, arrêt CMC e.a./Commission, point 60 supra, points 44 et 47).

70

Ainsi qu’il a été relevé aux points 12 et 13 ci-dessus, l’ordonnateur principal du FED, qui a été nommé par la Commission, doit établir un ordre de recouvrement pour toute créance certaine, liquide et exigible due au FED. Cet ordre est adressé au comptable, qui a également été nommé par la Commission. Ce dernier fait diligence en vue d’assurer la rentrée des recettes du FED et si à l’échéance prévue dans l’ordre de recouvrement, le recouvrement effectif n’a pas eu lieu, il en informe l’ordonnateur principal du FED et lance la procédure de récupération. Le règlement financier du 27 mars 2003 applicable au neuvième FED ajoute que l’ordre de recouvrement est suivi d’une note de débit, adressée au débiteur.

71

La constatation d’une créance due au FED dans un rapport d’audit portant sur des contrats financés par le FED peut donc donner lieu à l’établissement d’un ordre de recouvrement y relatif ainsi que, le cas échéant, d’une note de débit adressée au débiteur.

72

Toutefois, ainsi qu’il a déjà été jugé, une note de débit est une simple information donnée au débiteur d’une obligation résultant d’un contrat financé par le neuvième FED auquel la Commission n’était pas partie. Dans le cas où le débiteur ne verse pas la somme réclamée, la Commission peut soit renoncer au recouvrement de la créance, soit procéder à une compensation, soit recourir à l’exécution forcée qui peut intervenir par une décision exécutoire ou par un titre exécutoire obtenu par la voie contentieuse. Dès lors, la note de débit n’a pas de caractère exécutoire, mais est un simple acte préparatoire précédant l’adoption d’une décision de la Commission de poursuivre ou non la procédure de recouvrement soit en engageant une procédure contentieuse soit en adoptant une décision qui forme titre exécutoire. La note de débit n’est pas, par conséquent, une mesure fixant définitivement la position de la Commission, ne produit pas d’effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts du débiteur et, partant, n’est pas susceptible de faire l’objet d’un recours en annulation (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 17 avril 2008, Cestas/Commission, T-260/04, Rec. p. II-701, points 75 et 76).

73

Cette conclusion est également valable s’agissant d’un ordre de recouvrement, prévu dans tous les règlements financiers régissant les quatre FED en question en l’espèce. Outre qu’un tel ordre n’est même pas adressé au débiteur, mais revêt un caractère purement interne, étant uniquement adressé au comptable, il implique seulement l’obligation pour ce dernier, en cas de non-recouvrement de la créance concernée, d’entamer la procédure de recouvrement, par les différents moyens évoqués ci-dessus.

74

Il n’est donc nullement certain qu’un rapport d’audit ayant constaté des créances dues au FED donnera lieu à un acte qui produit des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts du débiteur. Tel ne sera, à l’évidence, pas le cas si la Commission décide de renoncer au recouvrement de la créance. Tel ne sera pas non plus le cas si la Commission décide d’entamer la procédure de recouvrement par la voie contentieuse, auquel cas un recours sera directement introduit devant les juridictions compétentes. Dans cette dernière hypothèse, ainsi qu’il a déjà été relevé, le débiteur aura la possibilité de contester les conclusions de l’audit dans le cadre de cette procédure.

75

À supposer même qu’un rapport d’audit portant sur des contrats financées par le FED aboutisse à un acte ultérieur, produisant des effets juridiques obligatoires à l’égard de l’une des parties contractantes, ledit rapport d’audit ne constituerait qu’un acte préparatoire de cet acte ultérieur, qui seul ferait grief à l’intéressé. Une décision de la Commission portant clôture de l’audit et validant les conclusions du réviseur externe en adoptant le rapport final ne saurait donc, selon la jurisprudence évoquée aux points 47 et 48 ci-dessus, faire l’objet d’un recours en annulation devant le Tribunal.

76

C’est à tort que la requérante évoque, à cet égard, une prétendue procédure administrative d’audit. Aucun des règlements financiers mentionnés au point 11 ci-dessus ne contient de dispositions relatives aux audits portant sur les contrats financés par le FED. Si cela ne signifie pas qu’il est interdit à la Commission d’effectuer elle-même, ou de demander à un réviseur externe d’effectuer pour son compte, de tels audits, il n’en reste pas moins qu’il ne saurait être question, dans cette hypothèse, d’une procédure spéciale et distincte d’audit, prétendument close par une décision approuvant le rapport d’audit. La jurisprudence évoquée au point 49 ci-dessus n’est donc pas pertinente en l’espèce.

77

Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que la demande en annulation de la décision prétendument contenue dans la lettre du 19 août 2008 est également irrecevable pour autant que cette lettre concerne les 12 contrats conclus entre la requérante et différents États ACP et financés par le FED et doit, donc, être rejetée dans son intégralité.

78

En troisième lieu, la conclusion selon laquelle la demande en annulation de la décision prétendument contenue dans la lettre du 19 août 2008 est irrecevable tant en ce qui concerne les 22 contrats mentionnés au point 1 ci-dessus qu’en ce qui concerne les 12 contrats mentionnés aux points 14 et 18 ci-dessus n’est pas remise en cause par l’argumentation avancée par la requérante dans son mémorandum déposé le (voir le point 35 ci-dessus).

79

En substance, la requérante fait valoir que, alors que le contrat conclu entre la Commission et le réviseur externe, produit en annexe à ce mémorandum, prévoyait que ledit réviseur effectuerait un «audit» conformément aux «normes comptables internationales», la Commission aurait, par la suite et sans formellement modifier le contrat, accepté que le réviseur procède seulement à des vérifications selon une «procédure convenue». La requérante soutient que ce fait confirmerait le caractère fondé des moyens invoqués dans la requête et invoque deux nouveaux moyens, tirés, respectivement, d’une violation de «l’obligation d’impartialité de l’action administrative» et d’un excès ou d’un détournement de pouvoir.

80

Quand bien même ces affirmations seraient recevables et fondées, elles ne démontrent nullement que la lettre du 19 août 2008 contient une décision susceptible de faire l’objet d’un recours en annulation devant le Tribunal. Tout au plus, elles tendent à démontrer le caractère irrégulier de l’audit effectué par le réviseur externe à la demande de la Commission. Or, ainsi qu’il a déjà été relevé, cet audit s’inscrit dans un cadre contractuel dont il est indissociable.

Sur la demande en indemnité

Arguments des parties

81

La Commission fait valoir que le comportement prétendument préjudiciable que lui reproche la requérante dans le cadre de sa demande en indemnité concerne le fait qu’elle n’aurait pas correctement ou pas du tout exécuté ses obligations découlant des différents contrats de financement qu’elle a conclus, en suspendant certains paiements. La lecture des parties de la requête consacrées au caractère prétendument illicite du comportement de la Commission, à l’existence d’un lien de causalité entre ce comportement et le préjudice prétendument subi par la requérante ainsi qu’à l’étendue de celui-ci, confirmerait cette conclusion.

82

Selon la Commission, la vérification du caractère prétendument illégal du comportement que lui reproche la requérante suppose donc un examen des droits et des devoirs qui lui incombaient en vertu des contrats en question. Or, en l’absence d’une clause compromissoire désignant le Tribunal pour statuer sur le présent litige dans lesdits contrats, un tel examen outrepasserait la compétence du Tribunal. La Commission estime, dès lors, que, par sa demande en indemnité, la requérante cherche à obtenir un résultat que celle-ci ne peut obtenir qu’en introduisant une action en responsabilité contractuelle devant les juridictions compétentes. La demande en indemnité serait, donc, manifestement irrecevable.

83

Dans la requête, la requérante invoque, à l’appui de sa demande en indemnité, l’absence de communication dans les meilleurs délais par la Commission de sa décision, adoptée en novembre 2005, de suspendre tout paiement en sa faveur, ainsi que le refus de la Commission de lui fournir des éclaircissements à ce sujet et de rencontrer ses représentants. Ce comportement aurait perduré pendant plusieurs mois, jusqu’à ce que la Commission l’informe, par lettre, en mai 2006, de ladite décision. Selon la requérante, ce comportement de la Commission serait entaché des mêmes motifs d’illégalité que ceux exposés à l’appui de la demande en annulation et constituerait également une violation des principes de bonne administration et de transparence par la Commission.

84

S’agissant du lien de causalité entre le comportement reproché à la Commission et le préjudice qu’elle prétend avoir subi ainsi que de l’étendue de celui-ci, la requérante fait valoir que, n’ayant pas eu connaissance de la décision de la Commission de suspendre les paiements en sa faveur, elle a poursuivi la réalisation de plusieurs projets sans modifier sa structure opérationnelle et ses programmes de dépenses et, partant, a ainsi contracté de nouvelles «dettes», en raison tant de la réalisation d’autres projets auxquels elle participait que de son implication dans plusieurs procédures contentieuses. Elle aurait également subi un «très grave» préjudice moral. Par ailleurs, la requérante invoque la responsabilité non contractuelle de la Communauté pour comportement non fautif.

85

Dans ses observations sur l’exception d’irrecevabilité, la requérante fait valoir que l’argumentation de la Commission relative à l’irrecevabilité de la demande en indemnité est fondée sur une dénaturation du contenu de sa requête. Il résulterait de la lecture de l’ensemble de la partie de celle-ci consacrée à la demande en indemnité que la requérante demande la réparation du préjudice qu’elle aurait subi du fait de l’omission de la Commission de l’informer en temps utile de la décision de suspendre tout paiement en sa faveur. La demande en indemnité serait donc fondée sur la violation des principes de transparence et de bonne administration par la Commission, ainsi que sur les autres moyens d’illégalité invoqués à l’appui de la demande en annulation.

86

Le fait que la requérante demande en réparation de son préjudice matériel des montants clairement distincts des paiements auxquels elle pourrait prétendre au titre des contrats en question et qu’elle poursuivrait, en outre, la réparation de son préjudice moral, confirmerait la nature non contractuelle de la demande en indemnité et, partant, son caractère recevable.

Appréciation du Tribunal

87

Il convient de relever, en premier lieu, que, selon une jurisprudence bien établie, l’engagement de la responsabilité non contractuelle de la Communauté au sens de l’article 288, deuxième alinéa, CE pour comportement illicite de ses organes est subordonné à la réunion d’un ensemble de conditions, à savoir l’illégalité du comportement reproché aux institutions, la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement allégué et le préjudice invoqué (arrêt de la Cour du 29 septembre 1982, Oleifici Mediterranei/CEE, 26/81, Rec. p. 3057, point 16; arrêts du Tribunal International Procurement Services/Commission, point 69 supra, point 44, et du , Oleifici Italiani/Commission, T-267/94, Rec. p. II-1239, point 20).

88

En deuxième lieu, ainsi qu’il ressort d’une jurisprudence constante, la responsabilité non contractuelle de la Communauté ne saurait être engagée du fait d’un acte licite que si trois conditions cumulatives sont remplies, à savoir la réalité du préjudice prétendument subi, le lien de causalité entre celui-ci et l’acte reproché aux institutions de la Communauté ainsi que le caractère anormal et spécial du préjudice allégué (arrêt de la Cour du 15 juin 2000, Dorsch Consult/Conseil et Commission, C-237/98 P, Rec. p. I-4549, points 19 et 53, et ordonnance de la Cour du , Galileo International Technology e.a./Commission, C-325/06 P, non publiée au Recueil, point 76).

89

En troisième et dernier lieu, en vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable à la procédure devant le Tribunal conformément à l’article 53, premier alinéa, du même statut, et de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure, la requête doit contenir l’objet du litige et un exposé sommaire des moyens invoqués. Ces éléments doivent être suffisamment clairs et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant sans autres informations. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il est nécessaire, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit, sur lesquels celui-ci se fonde, ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même (ordonnances du Tribunal du 28 avril 1993, De Hoe/Commission, T-85/92, Rec. p. II-523, point 20; du , Asia Motor France e.a./Commission, T-154/98, Rec. p. II-1703, point 49, et arrêt du Tribunal du , Ismeri Europa/Cour des comptes, T-277/97, Rec. p. II-1825, points 28 et 29).

90

S’agissant d’une demande en indemnité tendant à la réparation du préjudice prétendument subi en raison de la suspension par la Commission de tout paiement en sa faveur, la requérante doit, afin de se conformer à ses obligations susvisées, préciser dans sa requête les éléments de fait et de droit qui seraient à l’origine de la prétendue obligation de la Commission d’effectuer des paiements en sa faveur ou, à tout le moins, de l’informer en temps utile de la décision de suspendre ces paiements.

91

De telles précisions sont, avant tout, nécessaires afin de permettre au Tribunal de vérifier si le recours vise effectivement la responsabilité non contractuelle de la Communauté, tant du fait d’un acte illicite que du fait d’un acte licite, ou s’il vise, plutôt, sa responsabilité contractuelle auquel cas, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence évoquée au point 58 ci-dessus, le Tribunal ne serait compétent pour connaître du recours que dans l’hypothèse où les contrats en cause contiendraient une clause compromissoire le désignant pour connaître des litiges relatifs à leur exécution.

92

Force est toutefois de constater que, si la requérante évoque, dans sa requête, une prétendue suspension de tout paiement en sa faveur décidée par la Commission déjà au mois de novembre 2005, elle ne précise aucunement quels seraient les paiements auxquels elle aurait eu droit en l’absence de cette suspension et, encore moins, s’ils trouveraient leur justification dans des contrats conclus entre elle et la Commission ou s’ils découleraient directement de dispositions applicables non citées par ailleurs dans la requête. Il s’ensuit que, s’agissant de la demande en indemnité, la requête ne satisfait pas aux exigences minimales de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure.

93

La circonstance que, dans la requête, la requérante évoque exclusivement la responsabilité non contractuelle de la Communauté ainsi que la prétendue violation, par la Commission, des principes de bonne administration et de transparence, ne sauraient remettre en cause ces conclusions.

94

En effet, s’agissant d’un litige de nature contractuelle, la simple invocation de règles juridiques qui ne découlent pas d’un contrat, mais qui s’imposent aux parties, ne saurait avoir pour conséquence de modifier la nature contractuelle du litige et de soustraire, par conséquent, la partie qui invoque ces règles à la juridiction compétente. S’il en était autrement, la nature du litige et, par conséquent, la juridiction compétente seraient susceptibles de changer au gré des normes invoquées par les parties, ce qui irait à l’encontre des règles de compétence matérielle des différentes juridictions (arrêt de la Cour du 20 mai 2009, Guigard/Commission, C-214/08 P, non publié au Recueil, point 43).

95

Par ailleurs, les institutions sont soumises à des obligations relevant du principe général de bonne administration à l’égard des administrés exclusivement dans le cadre de l’exercice de leurs responsabilités administratives. En revanche, lorsque la relation entre la Commission et la partie requérante est clairement de nature contractuelle, cette dernière ne saurait reprocher à la Commission que des violations de stipulations contractuelles ou des violations du droit applicable au contrat (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 3 juin 2009, Commission/Burie Onderzoek en advies, T-179/06, non publié au Recueil, point 118).

96

Il ressort de ces considérations que la requérante ne pouvait pas se contenter d’évoquer, dans la requête, la responsabilité non contractuelle de la Communauté ainsi que la prétendue violation, par la Commission, des principes de bonne administration et de transparence, mais devait préciser l’origine, contractuelle ou non, des obligations que la Commission aurait violée lorsqu’elle a décidé de suspendre tout paiement à la requérante et qu’elle a omis, pendant une longue période, de faire part de cette suspension à la requérante.

97

Il résulte de tout ce qui précède que la demande en indemnité est irrecevable et doit être rejetée.

98

Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argumentation avancée par la requérante dans son mémorandum déposé le 1er décembre 2009 (voir le point 35 ci-dessus). Cette argumentation est dépourvue de pertinence pour la demande en indemnité, dès lors qu’elle concerne l’audit effectué par un réviseur externe à la demande de la Commission et se rapporte, donc, à une période postérieure à celle concernée par la demande en indemnité. En effet, selon les propres affirmations de la requérante, le prétendu comportement fautif de la Commission aurait pris fin avec l’envoi de la lettre d’Europaid, du , informant la requérante de la suspension de tout paiement en sa faveur. Or, l’audit n’a débuté que le (voir points 21 et 23 ci-dessus).

99

En tout état de cause, quand bien même la requête devrait être comprise en ce sens que les paiements visés par la suspension prétendument décidée en novembre 2005 trouveraient leur origine dans les 34 contrats susmentionnés et concernés par l’audit ordonné par la Commission, il convient de relever, d’une part, que, s’agissant des 22 contrats conclus entre la Commission et la requérante, mentionnés au point1 ci-dessus, une prétendue violation, par la Commission, de ses obligations découlant de ces contrats engagerait sa responsabilité contractuelle et donnerait lieu à un litige de nature contractuelle qui échappe à la compétence du Tribunal, à défaut de clause compromissoire le désignant pour statuer sur ce litige.

100

D’autre part, s’agissant des 12 contrats mentionnés aux points 14 et 18 ci-dessus, conclus entre la requérante et certains États ACP et financés par le FED, il est vrai que les considérations exposées aux points 60 et 62 ci-dessus ne peuvent affecter les voies de recours dont dispose tout intéressé à l’encontre de la Commission, dans le cadre des procédures ouvertes par les articles 235 et 288, deuxième alinéa, CE (arrêt de la Cour du 19 septembre 1985, Murri/Commission, 33/82, Rec. p. 2759, point 35).

101

Toutefois, il a été jugé que, dans le cas où un différend contractuel entre un État ACP et son cocontractant dans le cadre d’un contrat financé par le FED n’a pas été réglé préalablement, à l’amiable ou par le recours aux procédures prévues dans le contrat, tel que l’arbitrage, l’autre partie au contrat se trouve dans l’incapacité d’établir que le comportement de la Commission relatif à ce différend lui a causé un préjudice distinct de celui dont il lui appartient de poursuivre la réparation à l’encontre de l’État ACP en question, selon les voies appropriées. Dans une telle hypothèse, une demande en indemnité introduite par cette même partie contre la Commission en vertu de l’article 235 CE et de l’article 288, deuxième alinéa, CE, doit être rejetée, faute pour la partie requérante d’avoir établi l’existence d’un lien de causalité entre le comportement reproché à la Commission et le préjudice allégué (voir, en ce sens, arrêts Murri/Commission, point 100 supra, points 36 à 39, et International Procurement Services/Commission, point 69 supra, points 58 à 61).

102

Tel est précisément le cas en l’espèce, s’agissant des 12 contrats susmentionnés, conclus entre la requérante et différends États ACP. En effet, selon les affirmations de la requérante elle-même, le préjudice visé par sa demande en indemnité trouve son origine dans la suspension des paiements en sa faveur que, par la conclusion de ces contrats, les États ACP s’étaient engagés à effectuer, si toutes les conditions prévues à cet égard étaient remplies.

103

Or, il appartenait à la requérante, et lui appartient toujours si elle s’y croit fondée, de poursuivre à l’encontre des États ACP concernés, selon les voies de droit appropriées, la réparation d’un éventuel préjudice résultant de la prétendue violation par lesdits États de leurs obligations découlant des contrats en question. Par conséquent, à supposer que la demande en indemnité puisse être comprise comme visant la réparation du préjudice prétendument subi par la requérante du fait de la suspension des paiements prévus par les 12 contrats en question, elle doit être rejetée comme étant manifestement dépourvue de tout fondement en droit.

104

Il ressort de l’ensemble des considérations qui précèdent que la demande en indemnité doit également être rejetée et, par suite, le recours dans son intégralité. Dans ces conditions, il n’est pas nécessaire d’ordonner les mesures sollicitées par la requérante dans ses demandes des 2 juillet et (points 32 et 34 ci-dessus), quelle que soit leur qualification juridique exacte, à savoir qu’il s’agisse de mesures d’organisation de la procédure ou d’instruction. En effet, selon la requérante, ces mesures ont pour objectif de fournir davantage de précisions sur la nature des instructions données par la Commission au réviseur externe chargé d’effectuer l’audit, question qui est dépourvue de toute pertinence pour la solution du litige.

Sur les dépens

105

Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

 

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

ordonne:

 

1)

Le recours est rejeté.

 

2)

Alisei est condamnée aux dépens.

 

Fait à Luxembourg, le 8 février 2010.

Le greffier

E. Coulon

Le président

M. Vilaras


( *1 ) Langue de procédure: l’italien.