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Document 62021CC0124

Conclusions de l'avocat général M. A. Rantos, présentées le 15 décembre 2022.
International Skating Union contre Commission européenne.
Pourvoi – Concurrence – Réglementation instituée par une association sportive internationale – Patinage sur glace – Entité de droit privé investie de pouvoirs de réglementation, de contrôle, de décision et de sanction – Règles relatives à l’autorisation préalable des compétitions, à la participation des athlètes à ces compétitions ainsi qu’au règlement arbitral des conflits – Exercice parallèle d’activités économiques – Organisation et commercialisation de compétitions – Article 101, paragraphe 1, TFUE – Décision d’association d’entreprises portant atteinte à la concurrence – Notions d’“objet” et d’“effet” anticoncurrentiels – Justification – Conditions.
Affaire C-124/21 P.

Court reports – general – 'Information on unpublished decisions' section

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2022:988

 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. ATHANASIOS RANTOS

présentées le 15 décembre 2022 ( 1 )

Affaire C‑124/21 P

International Skating Union

contre

Commission européenne

« Pourvoi – Concurrence – Réglementation instituée par une fédération sportive internationale exerçant en parallèle un pouvoir de régulation et une activité économique – Règles relatives à l’autorisation des compétitions, à la participation des athlètes à celles-ci et au règlement arbitral des conflits – Article 101, paragraphe 1, TFUE – Restriction de la concurrence par objet – Justification »

I. Introduction

1.

Par son pourvoi, l’International Skating Union (Union internationale de patinage, ci-après l’« UIP » ou la « requérante ») demande l’annulation partielle de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 16 décembre 2020, International Skating Union/Commission (T‑93/18, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2020:610), par lequel cette juridiction a partiellement rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision C(2017) 8230 final de la Commission européenne, du 8 décembre 2017, relative à une procédure d’application de l’article 101 TFUE et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire AT/40208 – Règles d’éligibilité de l’Union internationale de patinage) (ci-après la « décision litigieuse »).

2.

En parallèle, un pourvoi incident, visant également à obtenir l’annulation partielle de l’arrêt attaqué, a été introduit par les deux athlètes à l’origine de la plainte ayant conduit la Commission à ouvrir la procédure contre l’UIP, à savoir MM. Tuitert et Kerstholt, ainsi que par l’European Elite Athletes Association (Association européenne des athlètes d’élite), parties intervenantes en première instance (ci-après les « parties intervenantes » et les « requérants au pourvoi incident »).

3.

Tout comme l’affaire C-333/21, European Super League, dont mes conclusions sont présentées le même jour, la présente affaire se situe au cœur de la problématique des relations et de l’articulation entre le droit de la concurrence et le sport, et soulève des questions qui, outre leur caractère inédit sur le plan juridique pour certaines d’entre elles, présentent également une importance majeure d’un point de vue « existentiel » pour les fédérations sportives.

II. Les antécédents du litige

4.

Les antécédents du litige sont exposés aux points 1 à 37 de l’arrêt attaqué et peuvent, pour les besoins des présentes conclusions, être résumés de la manière suivante.

A. Le contexte factuel

5.

L’UIP est l’unique fédération sportive internationale reconnue par le Comité international olympique (CIO) dans le domaine du patinage artistique et du patinage de vitesse sur glace. Elle est composée d’associations (fédérations) nationales de patinages, dont des clubs et des patineurs sont membres.

6.

L’UIP endosse une double fonction dans la mesure où, d’une part, elle a pour objet de réglementer, d’organiser, de gérer et de promouvoir le patinage artistique et le patinage de vitesse sur glace à l’échelle mondiale et, d’autre part, d’exercer une activité économique consistant à organiser des compétitions internationales de patinage sur glace.

7.

Dans le cadre de ses fonctions « réglementaires », l’UIP a émis un ensemble de règlements, de codes et de communications, parmi lesquels les règles suivantes sont établies. Les règlements généraux de l’UIP comprennent des règles désignées sous le nom de « règles d’éligibilité », qui déterminent les conditions dans lesquelles des athlètes peuvent participer à des compétitions de patinage sur glace. Ces règles d’éligibilité prévoient que de telles compétitions doivent, d’une part, avoir été autorisées par l’UIP ou par ses membres et, d’autre part, respecter les règles instituées par cette fédération.

8.

Dans leur version adoptée au cours de l’année 2014, lesdites règles d’éligibilité incluaient, notamment, la règle 102, paragraphe 2, sous c), la règle 102, paragraphe 7, et la règle 103, paragraphe 2, dont il découlait que, en cas de participation d’un athlète à une compétition non autorisée par l’UIP ou par l’un des membres de cette fédération, l’intéressé s’exposait à une sanction d’exclusion à vie de toute compétition organisée par celle-ci.

9.

Elles contenaient également la règle 102, paragraphe 1, sous a), i), selon laquelle une personne « a le privilège de participer aux activités et aux compétitions relevant de la compétence de l’UIP si cette personne respecte les principes et les politiques de [celle-ci,] tels que formulés dans [s]es statuts », et la règle 102, paragraphe 1, sous a), ii), qui stipulait que « la condition d’éligibilité est conçue pour assurer la protection adéquate des intérêts économiques et autres de l’UIP, qui utilise ses revenus financiers pour la gestion et le développement des disciplines sportives [...] ainsi que pour le soutien ou le bénéfice [de ses] membres [...] et de leurs patineurs ».

10.

Au cours de l’année 2016, les règles d’éligibilité ont fait l’objet d’une révision.

11.

Selon la règle 102, paragraphe 7, telle qu’issue de cette révision, les sanctions prévues en cas de participation d’un athlète à une compétition non autorisée par l’UIP sont déterminées en fonction de la gravité de l’infraction commise et comprennent un avertissement en cas de première infraction, une exclusion allant jusqu’à 5 ans en cas de participation négligente à une compétition non autorisée, une exclusion allant jusqu’à 10 ans en cas de participation consciente à une telle compétition et une exclusion à vie en cas d’infraction considérée comme « très grave ».

12.

En outre, la règle 102, paragraphe 1, sous a), ii), telle qu’issue de ladite révision, ne se réfère plus à la protection adéquate des intérêts économiques de l’UIP et énonce, à la place, que « la condition d’éligibilité est conçue pour assurer une protection adéquate des valeurs éthiques, des objectifs statutaires et d’autres intérêts légitimes » de cette fédération, laquelle « utilise ses revenus financiers pour la gestion et le développement des disciplines sportives [...] ainsi que pour le soutien ou le bénéfice [de ses] membres [...] et de leurs patineurs ».

13.

Parallèlement à ces différentes règles, l’article 25 des statuts de l’UIP, tels qu’applicables depuis le 30 juin 2006, prévoit la possibilité, pour les athlètes qui entendraient contester une décision d’inéligibilité les concernant, d’introduire, à titre exclusif, un recours contre cette décision devant le Tribunal arbitral du sport (ci-après le « TAS »), établi à Lausanne (Suisse).

14.

Le 25 octobre 2015, l’UIP a publié la communication no 1974 (ci-après la « communication no 1974 »), intitulée « Compétitions internationales ouvertes », qui définit la procédure à suivre pour obtenir une autorisation d’organiser une compétition internationale de patinage sur glace et qui est applicable tant aux membres de cette fédération qu’aux organisateurs tiers.

15.

Cette communication énonce que toutes ces compétitions doivent faire l’objet d’une autorisation préalable par l’UIP et être organisées conformément aux règles instituées par cette fédération. Ladite communication énumère, par ailleurs, un ensemble d’exigences d’ordres général, financier, technique, sportif et éthique auxquelles tout organisateur de compétition de patinage sur glace est tenu de se conformer. Celles-ci prévoient, notamment, que toute demande d’autorisation doit être accompagnée d’informations techniques et sportives (lieu de la compétition, montant des prix qui seront octroyés, plans d’affaires, budget, couverture télévisuelle, etc.), que tout organisateur est tenu de soumettre une déclaration confirmant qu’il accepte le code éthique de l’UIP et que cette dernière peut demander des informations additionnelles sur ces différents éléments. Ainsi qu’il résulte de l’article 4, sous h), du code éthique de l’UIP, tel qu’applicable depuis le 25 janvier 2012, tout organisateur doit notamment « s’abstenir de participer à toute forme de paris ou de soutenir toute forme de paris ou de jeux de hasard liés à toute compétition ou activité relevant de la compétence » de cette fédération.

16.

Corrélativement, la communication no 1974 habilite l’UIP à accepter ou rejeter une demande d’autorisation sur la base tant des exigences énoncées dans cette communication que des objectifs fondamentaux poursuivis par cette fédération, tels que définis, en particulier, à l’article 3, paragraphe 1, des statuts de celle-ci. En cas de rejet, l’organisateur peut former un recours auprès du TAS, conformément aux règles procédurales de l’UIP.

17.

Enfin, cette communication prévoit que tout organisateur de compétition de patinage sur glace est tenu de payer une contribution de solidarité à l’UIP, dont le montant est déterminé au cas par cas et destiné à la promotion et au développement des disciplines sportives supervisées par cette fédération.

B. La procédure administrative et la décision litigieuse

18.

Le 8 décembre 2017, la Commission a adopté la décision litigieuse, qui porte tant sur les règles de l’UIP adoptées au cours de l’année 2014 que sur celles issues de la révision intervenue pendant l’année 2016.

19.

Dans cette décision, la Commission a, en premier lieu, défini le marché concerné comme étant le marché mondial de l’organisation et de la commercialisation des compétitions internationales de patinage de vitesse sur glace. Cette institution a également relevé que l’UIP avait la capacité d’impacter substantiellement la concurrence sur ce marché en sa double qualité d’entité détentrice du pouvoir d’autoriser les compétitions internationales relatives à celui-ci et d’entité responsable de l’organisation des plus importantes de ces compétitions.

20.

En deuxième lieu, la Commission a estimé que l’UIP pouvait être regardée comme une association d’entreprises et que les règles adoptées par celle-ci constituaient une décision émanant d’une telle association d’entreprises, au sens de l’article 101, paragraphe 1, TFUE.

21.

En troisième lieu, cette institution a considéré que les règles d’éligibilité et d’autorisation instituées par l’UIP avaient pour objet de restreindre la concurrence, au sens de l’article 101, paragraphe 1, TFUE, au motif, en substance, que l’examen du contenu de ces règles, de leurs objectifs ainsi que du contexte économique et juridique dans lequel elles s’inscrivent faisait apparaître qu’elles pouvaient être utilisées pour empêcher les organisateurs potentiels de compétitions internationales de patinage de vitesse sur glace concurrentes de celles de l’UIP d’accéder au marché concerné et qu’elles étaient de nature à restreindre les possibilités, pour les patineurs de vitesse professionnels, de participer librement à de telles compétitions ainsi qu’à priver les organisateurs potentiels de celles-ci des services des athlètes dont la présence est nécessaire à leur tenue.

22.

En quatrième lieu, la Commission a observé qu’il n’était pas nécessaire d’examiner les effets des règles en cause sur la concurrence, avant d’exposer les raisons pour lesquelles elle considérait que ces règles avaient aussi des effets anticoncurrentiels.

23.

En cinquième lieu, elle a estimé, en substance, que lesdites règles ne pouvaient pas être regardées comme échappant au champ d’application de l’article 101, paragraphe 1, TFUE au motif qu’elles constituaient des restrictions inhérentes à la poursuite d’objectifs légitimes et proportionnées à ces derniers, de telle sorte qu’elles devaient être qualifiées, eu égard à leur objet ainsi qu’à leurs effets anticoncurrentiels, de restriction prohibée par cette disposition.

24.

En sixième lieu, la Commission a considéré que les règles adoptées par l’UIP en matière d’arbitrage ne constituaient pas, en elles-mêmes, une restriction de la concurrence mais que, en l’espèce, elles n’en renforçaient pas moins la restriction de la concurrence découlant des règles d’éligibilité et d’autorisation instituées par cette fédération.

25.

En septième et dernier lieu, elle a estimé que ces règles d’éligibilité et d’autorisation ne remplissaient pas les conditions cumulatives prévues à l’article 101, paragraphe 3, TFUE pour pouvoir bénéficier d’une exemption au titre de cette disposition, qu’elles affectaient le commerce entre les États membres, qu’elles avaient des effets tant dans l’Union que dans l’Espace économique européen (EEE) et qu’il s’imposait d’enjoindre à l’UIP de mettre fin à l’infraction ainsi caractérisée sous peine d’astreintes, sans toutefois lui infliger d’amende compte tenu, notamment, de l’absence de « précédent » décisionnel en ce domaine.

26.

Le dispositif de la décision litigieuse comprend un article 1er, aux termes duquel l’UIP « a enfreint l’article 101 [TFUE] et l’article 53 de l’accord [EEE] en adoptant et en appliquant les règles d’éligibilité, notamment les règles 102 et 103 des règlements généraux [...] de 2014 et de 2016, au patinage de vitesse ». Il contient également un article 2 enjoignant à cette fédération de mettre fin à cette infraction et de s’abstenir de la réitérer, ainsi qu’un article 4 prévoyant l’imposition d’astreintes en cas de non-respect de ces injonctions.

C. La procédure juridictionnelle et l’arrêt attaqué

27.

Par requête déposée au greffe du Tribunal le 19 février 2018, l’UIP a demandé l’annulation de la décision litigieuse. À l’appui de ses conclusions, elle a invoqué huit moyens tirés, en substance, pour le premier, de la violation de l’obligation de motivation, pour les deuxième à cinquième, de la violation de l’article 101 TFUE en ce que cet article a été appliqué à ses règles d’éligibilité et d’autorisation ( 2 ), pour le sixième, de la violation dudit article en ce que celui-ci a été appliqué à ses règles en matière d’arbitrage et, pour les septième et huitième, du caractère illégal des injonctions ainsi que des astreintes qui lui ont été imposées.

28.

Le 16 décembre 2020, le Tribunal a adopté l’arrêt attaqué, dans lequel il a jugé, en substance, que la décision litigieuse n’était pas entachée d’illégalité en ce qu’elle portait sur les règles d’éligibilité et d’autorisation de l’UIP mais qu’elle était illégale en ce qu’elle concernait les règles mises en place par cette fédération en matière d’arbitrage.

D. Les conclusions des parties

1.   Les conclusions relatives au pourvoi

29.

Par son pourvoi, l’UIP demande à la Cour :

d’annuler l’arrêt attaqué en tant que celui-ci a partiellement rejeté le recours en première instance ;

d’annuler la décision litigieuse dans la mesure où celle-ci n’a pas déjà été annulée par l’arrêt attaqué, et

de condamner la Commission et les parties intervenantes aux dépens exposés tant en première instance qu’au stade du pourvoi.

30.

La Commission conclut au rejet du pourvoi et à la condamnation de l’UIP aux dépens.

31.

Les parties intervenantes concluent au rejet du pourvoi.

2.   Les conclusions relatives au pourvoi incident

32.

Par leur pourvoi incident, les requérants au pourvoi incident demandent à la Cour :

d’annuler l’arrêt attaqué en tant que celui-ci a partiellement annulé la décision litigieuse ;

de rejeter le recours en première instance dans la mesure où celui-ci n’a pas déjà été rejeté par l’arrêt attaqué, et

de condamner l’UIP aux dépens exposés au stade du pourvoi.

33.

La Commission conclut à l’accueil du pourvoi incident et à la condamnation de l’UIP aux dépens.

34.

L’UIP conclut au rejet du pourvoi incident et à la condamnation des parties intervenantes aux dépens.

III. Analyse du pourvoi

A. Observations liminaires

35.

Avant de procéder à l’examen du pourvoi, il me paraît utile de clarifier le cadre analytique qu’il convient d’appliquer lors de l’analyse des règles émises par des fédérations sportives au regard du droit de la concurrence

1.   Sur l’application de l’article 101, paragraphe 1, TFUE aux règles adoptées par des fédérations sportives

36.

Conformément à la jurisprudence de la Cour, l’exercice des sports relève des règles du traité FUE en matière de concurrence dans la mesure où il constitue une activité économique ( 3 ). Il s’ensuit que les règles des instances sportives dirigeantes comme celles de l’UIP n’échappent pas, en principe, à l’application du droit de la concurrence de l’Union ( 4 ).

37.

Néanmoins, toute mesure prise par une fédération sportive susceptible d’avoir un effet restrictif sur la concurrence ne tombe pas nécessairement sous le coup de l’interdiction édictée à l’article 101, paragraphe 1, TFUE. En effet, aux fins de l’application de cette disposition à un cas d’espèce, il y a lieu, tout d’abord, de tenir compte du contexte global dans lequel cette mesure a été prise ou déploie ses effets et, plus particulièrement, de ses objectifs ( 5 ).

38.

Ainsi, dans le cadre de l’application du droit de la concurrence aux règles établies par des fédérations sportives, les références aux caractéristiques spécifiques du sport qui figurent à l’article 165 TFUE peuvent s’avérer pertinentes, notamment aux fins de l’appréciation d’éventuelles justifications des restrictions de la concurrence ( 6 ).

39.

Dès lors, lorsque les effets restrictifs qui découlent d’un règlement litigieux d’une fédération sportive ont pu raisonnablement être considérés comme nécessaires pour garantir un objectif légitime « sportif » et si lesdits effets ne vont pas au-delà de ce qui est nécessaire pour assurer la poursuite de cet objectif, ces mesures ne tombent pas sous le coup de l’article 101, paragraphe 1, TFUE ( 7 ).

40.

Il convient de préciser, à cet égard, que l’analyse des restrictions accessoires et la question de savoir si un comportement donné échappe au champ d’application de l’article 101, paragraphe 1, TFUE au motif qu’il est proportionné à l’objectif légitime qu’il poursuit est distincte de celle de savoir si ce comportement a pour objet ou pour effet de restreindre la concurrence. Tel que cela ressort clairement de la jurisprudence de la Cour, ce n’est qu’après avoir constaté, dans une première étape, qu’une mesure est susceptible de restreindre la concurrence au sens de l’article 101, paragraphe 1, TFUE – sans pour autant toujours arriver à un constat explicite de restriction de la concurrence par objet ou par effet – que la Cour va examiner, dans une seconde étape, si les effets restrictifs de la concurrence sont inhérents à la poursuite d’objectifs légitimes et proportionnés, afin d’échapper ainsi au champ d’application de l’article 101, paragraphe 1, TFUE ( 8 ).

41.

Contrairement à l’approche suivie par la Commission dans la décision litigieuse, il convient de constater que, dans l’arrêt attaqué, le Tribunal a conjointement examiné le deuxième moyen de la requérante, concernant la constatation selon laquelle les règles d’éligibilité avaient pour objet de restreindre la concurrence, et les troisième et quatrième moyens, relatifs à l’appréciation par la Commission de la question de savoir si la restriction de la concurrence est inhérente et proportionnée à la poursuite d’objectifs légitimes ( 9 ).

42.

Par ailleurs, l’application de la notion de « restriction accessoire » n’implique pas la mise en balance des effets proconcurrentiels et anticoncurrentiels, cette analyse ne pouvant être effectuée que dans le cadre spécifique de l’article 101, paragraphe 3, TFUE ( 10 ). Il s’ensuit que la théorie des restrictions accessoires peut s’avérer particulièrement pertinente dans le cas des règles émises par des fédérations sportives dans la mesure où les conditions à remplir pour bénéficier de l’exemption en vertu de l’article 101, paragraphe 3, TFUE semblent être plus difficilement réalisables que celles visées par l’arrêt Meca-Medina ( 11 ). Il y a lieu de rappeler, à cet égard, qu’afin de bénéficier d’une exemption individuelle sur le fondement de l’article 101, paragraphe 3, TFUE, une mesure devra remplir les quatre conditions cumulatives prévues à cet article et qu’il revient à la partie à laquelle il est reproché d’avoir violé les règles de concurrence de démontrer que des effets proconcurrentiels sous forme de gains d’efficacité, liés principalement à des avantages économiques – telle que la création d’un surcroît de valeur par un abaissement du coût de production ou l’amélioration et la création d’un nouveau produit – l’emportent sur les effets restrictifs d’un accord.

43.

Enfin, lorsque les restrictions vont au-delà de ce qui est nécessaire pour garantir la réalisation de l’objectif légitime poursuivi, il convient d’en analyser les effets sur la concurrence suivant l’analyse classique de l’article 101, paragraphe 1, TFUE, sans exclure la possibilité d’une éventuelle justification au titre de l’article 101, paragraphe 3, TFUE ( 12 ).

2.   Sur les obligations qui pèsent sur une fédération sportive qui dispose d’un pouvoir d’autorisation et d’un monopole d’organisation d’événements sportifs

44.

Au vu du rôle traditionnellement conféré aux fédérations sportives, celles-ci s’exposent à un risque de conflit d’intérêts découlant du fait que, d’une part, elles disposent d’un pouvoir réglementaire et que, d’autre part et dans le même temps, elles assurent une activité économique.

45.

De ce fait, lorsque ce pouvoir n’est pas assorti de limites, d’obligations ou d’un contrôle, la fédération sportive investie dudit pouvoir est susceptible de fausser la concurrence en refusant l’accès d’autres opérateurs sur le marché concerné en favorisant la (ou les) compétition(s) que celle-ci organise. Or, un système de concurrence non faussée ne pourrait être garanti que si l’égalité des chances entre les différents opérateurs économiques était assurée ( 13 ).

46.

Dans l’arrêt attaqué, le Tribunal a confirmé la position de la Commission concernant le risque d’un conflit d’intérêts, celle-ci ayant souligné la nécessité de soumettre ce cumul à un ensemble de limites et de contrôles, notamment en encadrant la possibilité pour une fédération sportive d’utiliser ses pouvoirs d’autorisation et de sanction au moyen de critères transparents, objectifs, non discriminatoires et proportionnés afin de prévenir tout risque d’utilisation dévoyée consistant à favoriser l’activité économique de l’intéressée ou à défavoriser celles de ses concurrents, voire à exclure toute concurrence. À cet égard, l’analyse du Tribunal s’est principalement fondée sur la jurisprudence de la Cour tirée des arrêts MOTOE et OTOC ( 14 ).

47.

En l’occurrence, dès lors que l’UIP organise elle-même des compétitions et qu’elle est également détentrice du pouvoir d’autoriser les compétitions organisées par des tiers, force est de constater que cette situation est susceptible de donner lieu à un conflit d’intérêts, ce qui implique que cette fédération soit soumise à certaines obligations dans le cadre de l’exercice de ses fonctions réglementaires afin de ne pas fausser la concurrence.

48.

Il convient, néanmoins, de souligner que la seule circonstance qu’une même entité exerce à la fois les fonctions de régulateur et d’organisateur de compétitions sportives n’implique pas, en elle-même, une violation du droit de la concurrence de l’Union. Par ailleurs, il découle de la jurisprudence citée au point 46 des présentes conclusions, et sans qu’il soit nécessaire de mettre en place une séparation structurelle entre ces deux fonctions, que l’obligation principale qui pèse sur une fédération sportive se trouvant dans la situation de l’UIP est de veiller à ce que ces tiers ne soient pas indûment privés d’un accès au marché au point que la concurrence sur ce marché s’en trouve faussée.

49.

Il s’ensuit que les fédérations sportives peuvent, sous certaines conditions, refuser l’accès sur le marché à des tiers, sans que cela constitue une violation de l’article 101, paragraphe 1, TFUE, sous réserve que ce refus soit justifié par des objectifs légitimes et que les mesures prises par ces fédérations soient proportionnées par rapport auxdits objectifs.

B. Sur le premier moyen du pourvoi principal et sur le second moyen du pourvoi incident

1.   Observations liminaires

50.

Par les trois branches du premier moyen de son pourvoi, l’UIP met en cause la partie de l’arrêt attaqué qui confirme l’existence d’une restriction de la concurrence par objet injustifiée, tenant au système d’autorisation préalable et à la clause d’exclusivité assortie de sanctions mis en place par ses règles. Plus particulièrement, elle reproche au Tribunal :

par la première branche, de n’avoir pas examiné ses arguments concernant l’appréciation par la Commission de certains faits sous-tendant la constatation d’une restriction de la concurrence par objet ;

par la deuxième branche, d’avoir substitué son appréciation factuelle et juridique à celle de la Commission, en retenant l’existence d’une infraction différente de celle qui a été constatée à l’article 1er de la décision litigieuse, sur la base d’interprétation erronée de l’article 101, paragraphe 1, TFUE ;

par la troisième branche, d’avoir commis des erreurs dans l’analyse globale des quatre éléments pris en compte par la Commission pour conclure que les règles d’éligibilité constituaient une restriction de la concurrence par objet ( 15 ).

51.

Par le second moyen de leur pourvoi incident, les parties intervenantes mettent également en cause la partie de l’arrêt visée par la troisième branche du premier moyen, sous un angle différent, à savoir le fait que le Tribunal a estimé, à tort, que le comportement de l’UIP de chercher à protéger ses propres intérêts économiques ne relèverait pas d’un objectif anticoncurrentiel en soi.

52.

La question principale soulevée par ces moyens, qui présentent plusieurs éléments se recoupant, est, en substance, celle de savoir si le Tribunal a fait une interprétation de l’article 101, paragraphe 1, TFUE exempte d’erreur de droit, en confirmant la décision litigieuse en ce que celle-ci avait conclu à l’existence d’une restriction de la concurrence par objet.

53.

Je vais donc examiner ces moyens et branches conjointement, tout en indiquant dans l’analyse qui suit, si nécessaire, les points spécifiques à certains de ces moyens ou branches.

2.   Sur la recevabilité

54.

Avant de procéder à l’analyse du premier moyen, il convient, tout d’abord, d’écarter les exceptions d’irrecevabilité soulevées par les parties intervenantes au sujet de la première branche et d’une partie de la troisième branche du premier moyen.

55.

Contrairement à ce que soutiennent ces parties, l’argumentation de l’UIP ne constitue pas une demande de réappréciation des faits présentée sous le couvert de prétendues erreurs de droit. En effet, cette argumentation porte bien sur une question de droit et, plus précisément, sur l’interprétation effectuée par le Tribunal de l’article 101, paragraphe 1, TFUE, dans la mesure où l’UIP soutient que le Tribunal a retenu un critère juridique erroné pour l’application des conditions relatives à la constatation d’une infraction au droit de la concurrence.

56.

Ensuite, pour des raisons analogues, il y a lieu de rejeter l’exception d’irrecevabilité soulevée par l’UIP à l’égard du second moyen du pourvoi incident. En effet, l’argument des parties intervenantes ne porte pas sur une question de fait mais sur une appréciation purement juridique effectuée par le Tribunal. Tel que cela est précisé au point 102 des présentes conclusions, les parties intervenantes invoquent une erreur de droit, en reprochant au Tribunal de ne pas avoir pris en compte le fait que l’UIP se trouve dans une situation différente de toute autre entreprise pour laquelle la protection de ses intérêts économiques serait légitime.

57.

Enfin, il convient de rejeter la demande de l’UIP de déclarer ce moyen inopérant au motif que, indépendamment de la problématique soulevée par les parties intervenantes, le Tribunal a, en définitive, confirmé la conclusion de la Commission relative à l’existence d’une restriction de la concurrence par objet. En effet, le second moyen du pourvoi incident porte sur une question liée au contexte juridique et économique de la présente affaire, et à la problématique plus générale de la prévention du risque de conflit d’intérêts.

3.   Sur le fond : la constatation d’une restriction de la concurrence par objet

a)   Considérations générales sur les contours de la notion d’« objet anticoncurrentiel » au sens de l’article 101, paragraphe 1, TFUE

58.

Pour relever de l’interdiction énoncée à l’article 101, paragraphe 1, TFUE, un accord, une décision d’association d’entreprises ou une pratique concertée doit avoir « pour objet ou pour effet » d’empêcher, de restreindre ou de fausser la concurrence dans le marché intérieur.

59.

Il convient de rappeler, à cet égard, que l’objet et l’effet anticoncurrentiel d’un accord sont des conditions non pas cumulatives, mais alternatives pour apprécier si un tel accord relève de l’interdiction énoncée à l’article 101, paragraphe 1, TFUE. Ainsi, selon une jurisprudence bien établie de la Cour, le caractère alternatif de cette condition, marqué par la conjonction « ou », conduit à la nécessité de considérer d’abord l’objet même de l’accord, compte tenu du contexte économique dans lequel il doit être appliqué ( 16 ).

60.

Conformément à une jurisprudence constante de la Cour, certains types de coordination entre entreprises révèlent un degré suffisant de nocivité à l’égard de la concurrence pour qu’il puisse être considéré que l’examen de leurs effets n’est pas nécessaire ( 17 ). Cette jurisprudence tient à la circonstance que certaines formes de coordination entre entreprises peuvent être considérées, par leur nature même, comme nuisibles au bon fonctionnement du jeu normal de la concurrence ( 18 ).

61.

Il ressort également de la jurisprudence de la Cour qu’il n’est pas nécessaire d’examiner les effets d’un accord dès lors que l’objet anticoncurrentiel de ce dernier est établi ( 19 ). Dans l’hypothèse où l’analyse d’un type de coordination entre entreprises ne présenterait pas un degré suffisant de nocivité à l’égard de la concurrence, il conviendrait, en revanche, d’en examiner les effets et, pour l’interdire, d’exiger la réunion des éléments établissant que le jeu de la concurrence a été, en fait, soit empêché, soit restreint, soit faussé de façon sensible ( 20 ).

62.

Afin d’apprécier si une décision d’association d’entreprises présente un degré suffisant de nocivité pour être considérée comme une restriction de la concurrence par objet au sens de l’article 101, paragraphe 1, TFUE, il faut s’attacher à la teneur de ses dispositions, aux objectifs qu’elle vise à atteindre ainsi qu’au contexte économique et juridique dans lequel elle s’insère ( 21 ).

63.

Ces précisions ayant été apportées, il convient à présent de se pencher sur l’analyse effectuée par le Tribunal, afin de déterminer si ce dernier a considéré, à bon droit, que les règles de l’UIP atteignaient un degré de nocivité tel que leurs effets négatifs sur la concurrence pouvaient être présumés.

b)   Sur l’appréciation de l’existence d’une restriction par objet en l’espèce

64.

Je propose de suivre la grille d’analyse « classique » pour la constatation d’une restriction de la concurrence par objet, en examinant, dans un premier temps, l’analyse réalisée par le Tribunal du contenu (section 1) et des objectifs (section 2) des règles d’éligibilité, ce qui m’amènera à une conclusion préliminaire (section 3) avant de me pencher, dans un second temps, sur les arguments mis en avant par la requérante relatifs aux erreurs prétendument commises par le Tribunal dans son appréciation du contexte juridique (section 4) et économique (section 5), et le refus de prendre en considération l’intention des parties.

1) Sur l’analyse du contenu des règles d’éligibilité

65.

Il convient de rappeler, à titre liminaire, qu’il ressort des constatations du Tribunal que les règles de l’UIP qui étaient en place avant les modifications introduites au cours de l’année 2016 et la publication de la communication no 1974 ne prévoyaient aucun critère d’autorisation pour les compétitions que des tiers envisageaient d’organiser et que toute participation à des événements tiers faisait l’objet d’une sanction d’exclusion à vie. Le Tribunal a ainsi estimé que, avant la publication de cette communication, la requérante jouissait d’une discrétion totale pour refuser d’autoriser de telles compétitions ( 22 ).

66.

L’adoption de la communication no 1974 est venue modifier les règles d’éligibilité en définissant la procédure à suivre afin qu’un organisateur tiers puisse obtenir l’autorisation d’organiser une compétition dans le cadre du système d’autorisation préalable, en introduisant, à cette fin, un certain nombre d’exigences d’ordres général, financier, technique, sportif et éthique ( 23 ). Nonobstant les modifications apportées par cette communication, le Tribunal a estimé que le pouvoir discrétionnaire de l’UIP n’avait pas été substantiellement modifié. Le Tribunal a ainsi considéré que l’UIP continuait de disposer d’une large marge d’appréciation lui permettant de refuser l’accès au marché à tout concurrent sur la base de conditions vaguement décrites, y compris pour des motifs qui ne sont pas explicitement prévus dans les règles d’éligibilité ou dans le code d’éthique, ce qui pouvait aboutir à l’adoption de décisions de refus pour des motifs illégitimes ( 24 ). L’UIP infligerait, en outre, ou du moins menacerait d’infliger, des sanctions sévères aux patineurs qui participent à des compétitions organisées par des concurrents qui ne sont pas autorisées.

67.

C’est sur la base de ces constatations que le Tribunal a conclu que les règles d’éligibilité constituaient une restriction de la concurrence par objet, l’analyse du contenu des règles d’éligibilité effectuée par le Tribunal s’étant concentrée, d’une part, sur les critères d’autorisation ( 25 ) et, d’autre part, sur la sévérité des sanctions prévues par ces règles ( 26 ), aspects que j’examinerai séparément ci-après.

i) Sur les critères d’autorisation prévus par les règles d’éligibilité

68.

Je rappelle, à titre liminaire, que, selon une jurisprudence constante de la Cour, le critère juridique essentiel pour déterminer l’existence d’une restriction de la concurrence par objet réside dans la constatation qu’un accord présente, en lui‑même, un degré suffisant de nocivité à l’égard de la concurrence pour considérer qu’il n’y a pas lieu d’en rechercher les effets ( 27 ). Une telle constatation doit donc se limiter aux formes de coordination qui peuvent être considérées, par leur nature même, comme nuisibles au bon fonctionnement du jeu normal de la concurrence ( 28 ) et dont le caractère nocif est facilement décelable ( 29 ), ce qui impose une interprétation restrictive de la notion de « restriction de la concurrence par objet » ( 30 ).

69.

Il convient de noter, par ailleurs, que, afin de justifier qu’un accord soit qualifié de restriction « par objet », une expérience suffisamment solide et fiable doit exister pour qu’il puisse être considéré que cet accord est, par sa nature même, nuisible au bon fonctionnement du jeu de la concurrence sans qu’il soit nécessaire d’en examiner les effets concrets ( 31 ).

70.

Force est de constater que, en premier lieu, au point 89 de l’arrêt attaqué, le Tribunal soutient que l’objet anticoncurrentiel des règles de l’UIP peut être déduit du fait que cette dernière jouissait d’une large marge d’appréciation pour refuser des compétitions proposées par des tiers, ce qui pouvait aboutir à l’adoption de décisions de refus pour des motifs illégitimes. La restriction de la concurrence par objet résulterait ainsi, selon le Tribunal, du pouvoir discrétionnaire de l’UIP – et donc de la capacité de cette fédération – de refuser des événements organisés par des tiers.

71.

En se fondant sur l’arrêt T-Mobile Netherlands e.a. ( 32 ), la Commission défend cette position, faisant valoir que l’objet anticoncurrentiel peut être déduit, en l’espèce, du fait que les règles de l’UIP sont « aptes » à restreindre la concurrence.

72.

Toutefois, il me semble douteux que l’on puisse considérer que l’aptitude théorique de porter atteinte à la concurrence sur la base de la large marge d’appréciation dont peut bénéficier une fédération sportive puisse suffire à établir un objet anticoncurrentiel, d’autant plus lorsque les effets anticoncurrentiels qui devraient, en principe, pouvoir être assumés sont incertains et, en tout état de cause, ne ressortent pas de l’analyse effectuée par le Tribunal, ce dernier s’étant contenté d’une interprétation abstraite des règles en question de l’UIP sans examiner aucun exemple concret de leur mise en œuvre.

73.

Je relève, également, que l’existence même d’un mécanisme d’ autorisation préalable permettant à des organisateurs tiers de demander d’accéder au marché – indépendamment du pouvoir discrétionnaire que détient l’UIP pour refuser une telle autorisation – devrait suffire, en lui-même, pour soulever des interrogations quant au caractère suffisamment nocif des règles de l’UIP du point de vue du droit de la concurrence. La question de savoir si le mécanisme en place est, en effet, suffisant pour assurer une concurrence effective sur le marché concerné ou s’il restreint la concurrence ne peut être établi, selon moi, que sur la base d’une analyse des effets anticoncurrentiels.

74.

En outre, lorsqu’on examine de plus près les éléments pris en compte par le Tribunal dans le cadre de l’analyse du contenu des règles d’éligibilité pour établir la marge d’appréciation dont disposerait l’UIP, il me paraît contestable que ces éléments puissent revêtir le caractère nocif requis par la jurisprudence de la Cour pour établir une restriction de la concurrence par objet ( 33 ). Je rappelle, à cet égard que, dans le cadre de l’analyse du contenu des règles d’éligibilité, le Tribunal a pris en compte, outre les sanctions, l’absence d’un lien direct entre, d’une part les règles d’éligibilité et, d’autre part, des objectifs légitimes ou une compétition ou une série de compétitions organisées par la requérante.

75.

À titre d’exemple, le fait qu’une fédération sportive ne définisse pas de manière suffisamment précise les objectifs poursuivis dans ces règles en se contentant d’employer des « expressions vagues » ou qu’elle ne prévoie pas une liste exhaustive des exigences requises pour l’autorisation d’une compétition tierce (en se réservant le droit de demander aux organisateurs des informations additionnelles liées aux différentes exigences susvisées), comme l’a constaté le Tribunal aux points 85 et 87 de l’arrêt attaqué, peut effectivement indiquer la portée large, voire excessive, des règles d’éligibilité et la marge d’appréciation importante détenue par cette fédération, mais cela reste loin de révéler un caractère nocif du point de vue de la concurrence ou un objet anticoncurrentiel ( 34 ). Il en va de même pour les constatations du Tribunal au point 97 de l’arrêt attaqué en ce qui concerne l’absence de lien entre les règles d’éligibilité de la requérante et une compétition ou une série de compétitions organisées par celle-ci.

76.

Il convient de constater, en second lieu, ainsi que le relève l’UIP par ailleurs, que le Tribunal s’est principalement appuyé sur la jurisprudence de la Cour dans le cadre d’affaires portant sur des restrictions de la concurrence par effet pour conclure à une restriction de la concurrence par objet.

77.

Plus précisément, s’agissant de la communication no 1974, le Tribunal a estimé, au point 88 de l’arrêt attaqué, que celle-ci ne contenait pas de « critères d’autorisation clairement définis, transparents, non discriminatoires, contrôlables et susceptibles de garantir aux organisateurs de compétitions un accès effectif au marché pertinent » au sens de la jurisprudence issue de l’arrêt OTOC ( 35 ). L’absence de tels critères dans les règles de l’UIP serait, selon le Tribunal, un élément pertinent pour constater l’existence d’une restriction de la concurrence par objet.

78.

Force est néanmoins de constater que, si la Cour, dans l’arrêt OTOC, a retenu que le fait de ne pas prévoir les critères précités peut entraîner une restriction de la concurrence, elle n’a pas considéré que l’absence de tels critères entraînerait automatiquement la qualification d’une restriction de la concurrence par objet mais plutôt comme une indication des effets restrictifs qui découleraient d’une réglementation ne prévoyant pas de tels critères ( 36 ).

79.

Néanmoins, malgré le fait que le Tribunal a lui-même expressément reconnu, au point 72 de l’arrêt attaqué, que la réglementation en cause dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt OTOC ait été qualifiée par la Cour de restriction par effet, il a néanmoins jugé que cette circonstance ne ferait pas obstacle à ce que cette jurisprudence (ainsi que celle tirée de l’arrêt MOTOE) puisse être appliquée dans le cadre de l’analyse d’une restriction par objet. Pour justifier son approche, le Tribunal s’est fondé sur l’arrêt Generics (UK) e.a. ( 37 ), et notamment sur le point 84 de celui-ci, qui, selon le Tribunal, permettrait de considérer qu’un accord puisse restreindre la concurrence par objet dans un contexte particulier alors que, dans d’autres contextes, une analyse des effets de l’accord serait nécessaire.

80.

Or, s’il n’est pas contesté que, selon le contexte dans lequel il s’inscrit, un accord peut restreindre la concurrence par objet dans certains cas, tandis que, dans d’autres, ses effets devraient être analysés, cela ne signifie pas que les critères tirés de l’arrêt OTOC (ou de l’arrêt MOTOE) puissent être directement transposés à la présente affaire afin d’établir une restriction de la concurrence par objet.

81.

Dans la présente affaire, le Tribunal n’explique ni quel serait le « contexte particulier » qui justifierait la qualification d’une restriction de la concurrence par objet ni, notamment, la façon dont ce contexte se distingue de celui en cause dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt OTOC afin de justifier une différente qualification quant à la restriction constatée.

ii) Sur la sévérité des sanctions prévues par les règles d’éligibilité

82.

S’agissant du régime des sanctions prévues par les règles d’éligibilité, l’UIP a fait valoir que le niveau des sanctions infligées aux patineurs participant à un événement organisé par un tiers n’a, en tant que tel, aucune pertinence pour déterminer si ses règles d’éligibilité ont ou non pour objet de restreindre la concurrence, étant donné que ces sanctions ne peuvent produire des effets négatifs sur la concurrence que si le refus d’autoriser cet événement était fondé sur des motifs illégitimes.

83.

Toutefois, contrairement à ce que soutient la requérante et, nonobstant le fait que des sanctions puissent, à un stade ultérieur, être justifiées par des objectifs légitimes (ce qui pourrait les exclure complètement du champ d’application de l’article 101 TFUE), il n’en reste pas moins que le caractère répressif d’une réglementation et l’importance des sanctions applicables en cas de violation de celles-ci sont des éléments particulièrement pertinents dans l’analyse du contenu des règles d’éligibilité dès lors qu’ils sont susceptibles de produire des effets négatifs sur la concurrence. En effet, comme l’a constaté, à bon droit, le Tribunal aux points 91 et 95 de l’arrêt attaqué, la sévérité des sanctions fixées est susceptible de dissuader les athlètes de participer à des compétitions non autorisées par la requérante et, par voie de conséquence, pourrait verrouiller le marché aux concurrents potentiels qui se verraient privés de la participation des athlètes nécessaires pour l’organisation d’une compétition sportive.

84.

Néanmoins, son incidence sur la concurrence ne peut pas être analysée de manière abstraite sans tenir compte du contexte global dans lequel s’insère le régime des sanctions. Comme l’a constaté, à juste titre, le Tribunal aux points 89 et 95 de l’arrêt attaqué, l’objet anticoncurrentiel allégué des règles de l’UIP ne peut être déduit uniquement sur la base d’une appréciation isolée de la sévérité des sanctions, mais il devrait plutôt être apprécié dans le contexte (plus général) de la constatation selon laquelle l’UIP jouissait d’une « large marge d’appréciation » pour refuser d’autoriser les compétitions proposées par des tiers ( 38 ).

85.

Je considère, au vu de ce qui précède, que les éléments retenus par le Tribunal dans son analyse du contenu des règles d’éligibilité ne permettent de conclure à l’existence d’une restriction par objet en ce qui concerne les règles d’éligibilité de l’UIP.

2) Sur l’analyse des objectifs poursuivis par les règles d’éligibilité

86.

S’agissant des objectifs poursuivis par les règles de l’UIP, je rappelle que l’analyse du Tribunal s’est concentrée, d’une part, sur la protection d’objectifs légitimes ( 39 ) et, d’autre part, sur la protection des intérêts économiques de l’UIP ( 40 ), aspects que j’examinerai séparément ci-après.

i) Sur la question de la protection des intérêts légitimes poursuivis par l’UIP

87.

Il convient de relever, à titre liminaire, que, dans le cadre de la deuxième branche du premier moyen de son pourvoi, l’UIP reproche au Tribunal d’avoir constaté une nouvelle infraction consistant en une restriction de la concurrence par objet différente de celle identifiée dans la décision litigieuse. Plus précisément, l’UIP fait valoir que le Tribunal a substitué sa propre motivation à celle de la Commission, en s’appuyant largement sur les éléments discutés à la section 8.5 de la décision litigieuse (intitulée « Les règles d’éligibilité entrent dans le champ d’application de l’article 101 du traité »), alors que ces éléments n’ont pas été inclus dans la section 8.3 de cette décision (intitulée « Restriction de la concurrence par objet ») qui portait sur le constat de l’existence d’une infraction par objet.

88.

La requérante se fonde, notamment, sur le fait que la question de la protection des intérêts légitimes de l’UIP n’a pas été examinée en détail par la Commission dans le cadre de son analyse de la restriction par objet (section 8.3 de la décision litigieuse) ( 41 ), mais a été abordée dans la section 8.5 de cette décision dans laquelle la Commission a examiné si les règles d’éligibilité entraient dans le champ d’application de l’article 101 TFUE.

89.

Contrairement à l’approche suivie par la Commission de distinguer entre ces deux cadres d’analyse, le Tribunal a estimé opportun, comme il l’énonce lui-même au point 64 de l’arrêt attaqué, d’examiner conjointement le deuxième moyen (concernant la constatation d’une restriction par objet) et les troisième et quatrième moyens (concernant l’appréciation par la Commission de la question de savoir si la restriction de la concurrence est inhérente et proportionnée à la poursuite de l’objectif de protection de l’intégrité du patinage de vitesse des paris sportifs) ( 42 ). Ce faisant, le Tribunal a intégré la question de la prise en compte des objectifs d’intérêt général dans le cadre de l’identification de la restriction de la concurrence par objet.

90.

Se pose donc la question de savoir si le Tribunal a pu, sans commettre d’erreur de droit, procéder à une analyse « combinée » ou « parallèle » de l’existence d’une restriction de la concurrence par objet et de l’absence de caractère objectivement justifié et proportionné de cette restriction.

91.

D’emblée, force est de constater que cette approche du Tribunal est à l’origine d’une certaine confusion dès lors qu’elle a pour résultat de ne pas clairement faire ressortir la nature de l’analyse suivie. Ainsi, dans un premier temps, le Tribunal a suivi l’approche classique de l’identification d’une restriction de la concurrence par objet, en analysant d’abord le contenu des règles d’éligibilité. Néanmoins, dans un second temps, lors de l’examen des objectifs de ces règles, le Tribunal semble examiner ces derniers à la lumière des critères dégagés par l’arrêt Meca-Medina, en retenant que l’objectif avancé par l’UIP selon lequel les règles viseraient à protéger l’intégrité du patinage contre les paris, s’il est effectivement légitime, ne justifie pas les restrictions constatées, qui ne sont pas inhérentes à sa poursuite et sont jugées disproportionnées. Ainsi, la constatation que les règles de l’UIP sont disproportionnées par rapport aux objectifs recherchés entraînerait, selon le Tribunal, tant l’inapplicabilité de l’« exception des restrictions accessoires » que leur qualification automatique en tant que restriction par objet.

92.

Avant de prendre position sur l’approche suivie par le Tribunal, il convient de rappeler que, dans le cadre de l’article 101, paragraphe 1, TFUE, les objectifs poursuivis par un accord ou par une décision d’association d’entreprises peuvent jouer un rôle sous deux aspects dans l’analyse.

93.

D’une part, les buts objectifs qu’un accord vise à atteindre sont pertinents et tendent à déterminer si celui-ci relève de l’interdiction énoncée à l’article 101, paragraphe 1, TFUE ( 43 ). Ces buts objectifs, qui doivent ressortir clairement des mesures en cause, ne doivent pas être confondus avec les intentions subjectives de restreindre ou non la concurrence, ou encore avec les objectifs légitimes éventuellement poursuivis par les entreprises visées ( 44 ). Il convient de préciser, à cet égard, qu’il résulte d’une jurisprudence constante que le fait qu’une mesure soit considérée comme poursuivant un objectif légitime n’exclut pas que ladite mesure puisse être considérée comme ayant un objet restrictif de la concurrence ( 45 ). Ainsi, dans le cadre de la constatation d’une restriction de la concurrence par objet, l’analyse des objectifs vise à établir (à l’appui d’autres éléments tels que le contenu d’un accord et son contexte juridique et économique) le but ou le caractère anticoncurrentiel et suffisamment nocif d’un accord. Ne sont donc pas pris en compte, à ce stade de l’analyse, des objectifs légitimes, bien que ceux-ci puissent être pris en considération, le cas échéant, aux fins d’obtenir une exemption au titre de l’article 101, paragraphe 3, TFUE.

94.

D’autre part, les objectifs poursuivis par un accord jouent également un rôle dans le contexte de l’analyse des restrictions accessoires, qui vise à déterminer si les effets restrictifs de concurrence qui découlent d’une mesure donnée sont inhérents et proportionnés à la poursuite d’un objectif légitime. Lorsque ces conditions sont remplies, l’accord incluant la mesure en cause échappe pleinement au champ d’application de l’article 101, paragraphe 1, TFUE. Dans ce cadre, l’identification de cet objectif et la reconnaissance de sa légitimité constituent la première étape de cette analyse.

95.

Si certains aspects de ces deux analyses, en principe distinctes, peuvent se chevaucher, il n’en reste pas moins que l’examen des objectifs des mesures en cause diffère conceptuellement dans les deux cas de figure. Il en va de même pour les conséquences qui doivent être tirées de ces deux analyses.

96.

Ainsi, contrairement à ce que semble soutenir le Tribunal, le caractère disproportionné d’une mesure par rapport à un objectif légitime n’entraîne pas automatiquement la qualification de « restriction de la concurrence par objet ». Plus précisément, le fait qu’une mesure ne remplit pas les critères du test prescrit par l’arrêt Meca-Medina signifie uniquement que celle-ci devra être (ou restera) soumise à l’« analyse classique » au regard de l’article 101 TFUE, y compris à l’examen du bénéfice éventuel d’une exemption en vertu de l’article 101, paragraphe 3, TFUE. Par conséquent, s’il est, en effet, probable qu’une mesure qualifiée de « restriction de la concurrence par objet » soit – par sa nature – disproportionnée par rapport à un objectif légitime recherché, le contraire n’est pas nécessairement le cas.

97.

Au vu de ce qui précède, j’estime que le Tribunal a commis une erreur de droit en considérant, aux points 110 et 111 de l’arrêt attaqué, que le système d’autorisation préalable de l’UIP pouvait être considéré comme une restriction de la concurrence par objet du fait qu’il irait au-delà de ce qui est nécessaire à la poursuite de l’objectif d’assurer que les compétitions sportives soient conformes à des standards communs.

98.

Il convient de noter, néanmoins, que si les éléments examinés par le Tribunal pour conclure que les règles d’éligibilité sont disproportionnées par rapport aux objectifs légitimes recherchés ne peuvent pas fonder la constatation d’une restriction par objet, ils pourraient cependant s’avérer pertinents pour constater une restriction par effet s’ils sont utilisés pour exclure de manière injustifiée des organisateurs tiers d’événements, comme la Cour l’a indiqué dans les arrêts Meca-Medina ( 46 ) et OTOC ( 47 ).

99.

Je relève, enfin, que la position du Tribunal en ce qui concerne tant l’interprétation du contenu des règles de l’UIP que son appréciation, selon laquelle le caractère disproportionné des règles de l’UIP par rapport aux objectifs recherchés serait suffisant pour constater une restriction de la concurrence par objet, engendrerait un élargissement de la notion de « restriction de la concurrence par objet » qui irait à l’encontre d’une jurisprudence bien établie de la Cour imposant une interprétation restrictive de cette notion ( 48 ).

ii) Sur la question de la protection des intérêts économiques de l’UIP

100.

Il convient de rappeler, d’emblée, que, contrairement à ce qu’avait retenu la Commission au considérant 169 de la décision litigieuse, le Tribunal a considéré, aux points 108 et 109 de l’arrêt attaqué, que, à supposer qu’il soit avéré que les règles d’éligibilité adoptées au cours de l’année 2016 poursuivent également un objectif de protection des intérêts économiques de la requérante, le fait qu’une fédération vise à protéger ses intérêts économiques n’est pas en lui-même anticoncurrentiel.

101.

Cette appréciation du Tribunal est contestée par les parties intervenantes dans le cadre du second moyen du pourvoi incident, que je propose d’examiner à ce stade de mon analyse pour les raisons citées au point 51 des présentes conclusions.

102.

Les parties intervenantes reprochent, plus précisément, au Tribunal d’avoir commis des erreurs de droit en concluant que la poursuite par l’UIP de ses propres intérêts économiques n’est pas anticoncurrentielle en soi. Selon les parties intervenantes, le principe selon lequel une entreprise est, en général, autorisée à poursuivre ses intérêts économiques ne peut pas s’appliquer à l’UIP au vu de sa situation particulière. En effet, le double rôle de l’UIP, qui est à la fois un organe de réglementation et une entité économique, devrait lui interdire de poursuivre des intérêts économiques liés à son rôle d’organe de réglementation, c’est‑à‑dire d’autoriser ou de refuser des événements organisés par des tiers au détriment de ses concurrents. L’essence de la présente affaire résiderait ainsi dans le fait que les règles d’éligibilité permettent à l’UIP de refuser l’accès au marché à des concurrents. En conséquence, ces règles et les décisions d’inéligibilité qui en découlent auraient également une incidence négative sur les intérêts (économiques) des patineurs de vitesse professionnels et des organisateurs tiers de compétitions. C’est au regard de ces circonstances que le Tribunal aurait dû déterminer, d’après les parties intervenantes, si une entreprise pouvait légitimement poursuivre ses propres intérêts économiques. Cette position est également partagée par la Commission.

103.

Pour les raisons qui suivent, je suis d’avis que l’analyse du Tribunal n’est pas entachée d’une erreur de droit et qu’il convient de rejeter les arguments soulevés par les parties intervenantes au soutien du second moyen du pourvoi incident.

104.

Comme cela a été exposé aux points 44 à 49 des présentes conclusions, si certaines obligations s’imposent aux fédérations sportives afin d’encadrer les pouvoirs dont elles disposent et d’en contrôler le bon exercice, la protection des intérêts économiques d’une fédération sportive telle que l’UIP ne serait problématique du point de vue du droit de la concurrence que dans l’hypothèse où celle-ci priverait de manière injustifiée l’accès au marché d’un concurrent.

105.

Retenir l’interprétation des parties intervenantes reviendrait à interdire toute activité économique à des fédérations sportives qui sont dans la même situation que l’UIP, une situation difficilement conciliable avec le fait que, nonobstant leurs caractéristiques particulières, celles-ci sont en même temps des entreprises pour lesquelles, comme pour toute autre entreprise, la poursuite d’objectifs économiques est inhérente à leur activité. Par ailleurs, les activités économiques que poursuivent ces fédérations sont, dans plusieurs cas, non seulement liées, mais aussi interdépendantes à leurs activités sportives et peuvent, de ce fait, ne pas être dissociées.

106.

Il convient de constater, au regard de ce qui précède, que la poursuite par une fédération sportive, telle que l’UIP, de ses propres intérêts économiques n’est pas anticoncurrentielle en soi et ne peut donc être utilisée comme un élément indiquant un objectif anticoncurrentiel dans le cadre de l’appréciation d’une restriction de la concurrence.

107.

Je note, enfin, que le Tribunal a lui-même reconnu que les règles de l’UIP poursuivaient des objectifs légitimes en ce qui concerne la protection tant des intérêts économiques de la requérante que ceux liés au sport ce qui aurait dû l’amener à remettre en cause sa constatation selon laquelle l’objet de ces règles serait, par leur nature même, nuisible au bon fonctionnement du jeu normal de la concurrence ( 49 ).

3) Conclusion préliminaire sur l’analyse du contenu et des objectifs poursuivis par les règles d’éligibilité

108.

L’analyse qui précède du contenu des règles d’éligibilité et des objectifs poursuivis par celles-ci est, en soi, suffisante pour conclure que le Tribunal a commis une erreur de droit quant à la qualification des règles d’éligibilité de l’UIP en tant que restriction(s) de la concurrence par objet, sans qu’il ne soit nécessaire d’examiner les arguments mis en avant par la requérante pour contester l’analyse effectuée par celui-ci, d’une part, du contexte juridique et économique et, d’autre part, de l’intention des parties. Néanmoins, par souci d’exhaustivité, je vais brièvement prendre position sur ces deux points qui ont été soulevés par l’UIP, notamment au vu de leur pertinence éventuelle dans le cadre de l’analyse des effets anticoncurrentiels potentiellement engendrés par les règles de l’UIP.

4) Sur l’analyse du contexte juridique et économique des règles d’éligibilité

109.

Le Tribunal a considéré, aux points 115 à 123 de l’arrêt attaqué, que l’examen du contexte juridique et économique dans lequel s’inscrivaient les règles d’éligibilité et d’autorisation de l’UIP n’était pas de nature à remettre en question la conclusion de la Commission relative à l’existence d’une restriction de la concurrence par objet, au sens de l’article 101, paragraphe 1, TFUE, de telle sorte qu’il n’était pas nécessaire d’examiner, au surplus, les effets actuels ou potentiels de ces règles sur la concurrence.

110.

La requérante fait valoir, à cet égard, que le Tribunal a commis une erreur de droit dans son analyse du marché pertinent au regard de son contexte. En particulier, elle estime que le Tribunal a erronément refusé de prendre en considération les compétitions de patinage artistique qu’elle avait approuvées. Elle reproche, plus précisément, au Tribunal d’avoir rejeté l’application de la jurisprudence issue de l’arrêt CB/Commission qui prévoit que, dans le cadre de l’analyse d’une restriction par objet, il y a lieu de prendre en compte tout élément pertinent, compte tenu, notamment, de la nature des services en cause ainsi que des conditions réelles de fonctionnement et de la structure des marchés, relatif au contexte économique ou juridique dans lequel ladite coordination s’insère, sans qu’il importe qu’un tel élément relève ou non du marché pertinent ( 50 ).

111.

Il convient de rappeler, à cet égard, que le Tribunal a estimé que si, dans l’affaire ayant donné lieu à cette jurisprudence, il existait des interactions entre le marché pertinent et un marché connexe distinct, de tels éléments n’avaient pas été établis en l’espèce. Selon le Tribunal, la circonstance selon laquelle la requérante a pu approuver des compétitions de patinage artistique, même à supposer qu’il s’agissait de véritables compétitions indépendantes, est dénuée de pertinence pour l’analyse du contexte dans lequel les règles d’éligibilité s’insèrent, car elle ne remet pas en cause la conclusion selon laquelle les règles d’éligibilité de la requérante lui permettent de fausser la concurrence sur le marché pertinent en favorisant ses propres compétitions au détriment des compétitions proposées par des tiers, et, dès lors, ces règles n’assurent pas un accès effectif à ce marché ( 51 ).

112.

La Commission soutient que l’argument relatif à l’interprétation prétendument erronée de l’arrêt CB/Commission est inopérant, dans la mesure où, même si le Tribunal avait confondu ce que la Cour avait présenté dans cet arrêt comme un exemple d’une situation spécifique dans laquelle il est pertinent de prendre en compte un élément relatif à un marché autre que le marché pertinent, avec une règle générale, cela ne remettrait pas en cause le raisonnement décisif décrit au paragraphe précédent des présentes conclusions.

113.

À cet égard, j’estime que, contrairement à ce que soutient la Commission, le fait d’admettre – ne serait-ce que sur le plan théorique comme l’a fait le Tribunal – que l’UIP ait pu approuver des compétitions indépendantes de patinage artistique serait susceptible de soulever des interrogations quant à la qualification de « restriction de la concurrence par objet ».

114.

S’il est vrai que l’analyse effectuée par la Cour dans l’arrêt CB/Commission s’inscrit dans un cadre factuel particulier (à savoir l’existence d’interactions entre les deux volets d’un système biface, et entre le marché pertinent et un marché connexe distinct), il n’en reste pas moins que la pratique décisionnelle de l’UIP dans le cadre du patinage artistique pourrait s’avérer pertinente lors de l’analyse du contexte juridique des règles en question.

115.

En effet, comme l’a constaté le Tribunal au point 117 de l’arrêt attaqué, il convient de relever, d’une part, que ces deux disciplines (à savoir le patinage artistique et le patinage de vitesse), nonobstant leur caractérisation en tant que marchés distincts par la Commission – une définition de marché qui n’est pas remise en cause par la requérante – sont régies par le même cadre réglementaire – et, partant, les mêmes règles d’autorisation préalable et sanctions disciplinaires trouvent à s’appliquer aux deux disciplines – et, d’autre part, qu’il revient au même organe, à savoir l’UIP, d’autoriser ou de refuser l’organisation d’événements indépendants pour ces deux disciplines.

116.

Or, cet élément pourrait constituer une circonstance particulière susceptible de faire naître un doute sur la nocivité présumée des règles de l’UIP s’il était avéré que cette dernière avait autorisé des compétitions indépendantes de patinage artistique. Dès lors, je considère que si, lors de l’examen du contexte juridique et économique d’un accord présumé avoir un objet anticoncurrentiel, des éléments soulèvent des doutes quant au degré de nocivité requis ou apparaissent contradictoires, une analyse de ses effets devient nécessaire.

117.

S’il est vrai que, en vue d’établir l’existence d’une restriction de la concurrence par objet, l’analyse du contexte économique et juridique dans lequel une mesure s’insère doit se limiter à ce qui s’avère strictement nécessaire, sans comprendre une analyse des effets de la mesure en cause ( 52 ), il me semble que la prise en compte de la pratique décisionnelle de l’UIP, dans le contexte plus global de l’analyse de son rôle et des pouvoirs qui lui sont attribués, ne dépasserait pas les limites du cadre analytique d’une restriction de la concurrence par objet.

118.

Cela étant dit, il convient de préciser, en l’occurrence, que la prise en compte de la pratique décisionnelle de l’UIP sur le marché du patinage artistique dépendra de l’appréciation des circonstances factuelles sur laquelle la Cour n’a ni vocation à statuer, ni les éléments nécessaires pour le faire, étant donné que ceux-ci n’ont pas été appréciés par le Tribunal ( 53 ).

5) Sur l’analyse des intentions des parties

119.

En se référant à une jurisprudence constante de la Cour, selon laquelle des éléments d’intentionnalité ne sont pas nécessaires pour établir l’existence d’une restriction de la concurrence par objet ( 54 ), et estimant, par ailleurs, que l’existence d’une restriction de la concurrence par objet était suffisamment étayée par l’examen du contenu et des objectifs des règles d’éligibilité ainsi que du contexte dans lequel celles-ci s’insèrent, le Tribunal a considéré, au point 121 de l’arrêt attaqué, que les arguments avancés par la requérante à l’encontre de cette partie de l’examen de la restriction par objet sont inopérants.

120.

La requérante réfute cette appréciation tant dans le cadre de la première branche de son premier moyen que dans une partie de la troisième branche de celui-ci, en reprochant, en substance, au Tribunal de n’avoir examiné aucun de ses arguments contestant l’appréciation de la Commission des faits à l’appui de la constatation d’une restriction de la concurrence par objet telle que celle-ci ressort de la décision litigieuse.

121.

Il convient de souligner, à cet égard, que les éléments factuels sur lesquels la Commission aurait fondé son analyse et que le Tribunal aurait omis d’examiner – que la requérante conteste, par ailleurs, sans toutefois soulever une dénaturation des faits – portent tous sur des exemples de compétitions indépendantes qui démontreraient, d’après la Commission, l’intention de l’UIP de refuser l’entrée de concurrents sur le marché pertinent ( 55 ).

122.

Au vu de l’analyse qui précède, par laquelle je propose d’accueillir le premier moyen du pourvoi et d’annuler l’arrêt du Tribunal concernant la constatation d’une restriction de la concurrence par objet, je suis d’avis que ces éléments factuels peuvent être pertinents dans le cadre de l’analyse des effets des règles de l’UIP. Ainsi, au regard des considérations qui précèdent, ayant trait au bien-fondé de la motivation, j’estime également qu’il n’est plus nécessaire d’examiner le moyen tiré du défaut de motivation.

4.   Conclusions sur le premier moyen

123.

Dans l’hypothèse où une restriction par objet n’est pas clairement établie, une analyse complète de ses effets doit être menée pour les besoins de l’article 101, paragraphe 1, TFUE. Une telle analyse a pour objectif de déterminer l’incidence sur la concurrence que l’accord est susceptible de produire sur le marché concerné. En l’occurrence, seul un examen de la manière dont les règles sont interprétées et appliquées en pratique par l’UIP permettra de déterminer si ces règles risquent de porter atteinte à la concurrence. En d’autres termes, il conviendrait d’analyser si, en vertu du pouvoir d’appréciation dont dispose l’UIP, cette fédération a pu restreindre la concurrence en refusant l’accès au marché pertinent, un examen qui doit, en principe, uniquement pouvoir être effectué lorsque les effets (concrets) de la mesure en cause sont pris en compte.

124.

Au vu de ce qui précède, il convient d’accueillir le premier moyen du pourvoi.

C. Sur le second moyen du pourvoi

125.

Par le second moyen de son pourvoi, l’UIP soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit en n’examinant pas le quatrième moyen de sa requête, par lequel celle-ci affirmait que sa décision de ne pas approuver une compétition tierce intitulée « Icederby » qui devait avoir lieu à Dubaï (Émirats arabes unis) (ci-après l’« événement de Dubaï ») ne relevait pas du champ d’application de l’article 101 TFUE dès lors que cette décision poursuivait, selon elle, un objectif légitime et conforme à son code d’éthique, qui interdit toute forme de soutien aux paris.

126.

Il y a lieu, à titre liminaire, de rejeter l’exception d’irrecevabilité soulevée par les parties intervenantes, selon laquelle, tout en alléguant formellement l’existence d’erreurs de droit, l’UIP demande en réalité à la Cour, de façon irrecevable, de réapprécier les faits sans pour autant prétendre que le Tribunal les aurait dénaturés. En effet, il me semble que, par son second moyen, l’UIP reproche au Tribunal un défaut de motivation, en ce que ce dernier aurait omis de répondre à une partie centrale de son argumentation ( 56 ).

127.

Sur le fond, il convient de constater, en premier lieu, que, dans le cadre du deuxième moyen de son pourvoi, l’UIP soutient non pas le fait que les règles d’éligibilité ne relèvent pas du champ d’application de l’article 101 TFUE, mais uniquement que sa décision de ne pas approuver l’événement de Dubaï devrait être exclue du champ d’application de cette disposition du fait que cette décision poursuivait un objectif légitime.

128.

Néanmoins, force est de constater que ni la décision litigieuse ni l’arrêt attaqué ne visent spécifiquement la décision de refus relative à l’événement de Dubaï. Si le refus lié à cet événement semble, en effet, être à l’origine de l’enquête qui a été lancée par la Commission (à la suite de la plainte introduite auprès de celle-ci par MM. Tuitert et Kerstholt) et qui a abouti à la décision litigieuse – et que ce refus semble avoir été utilisé, ainsi que d’autres exemples de compétitions, pour illustrer la manière dont ces règles ont été appliquées en pratique – il n’en reste pas moins que la décision litigieuse porte sur les règles d’éligibilité qui ont été adoptées par l’UIP et leur compatibilité avec l’article 101 TFUE. Le Tribunal a ainsi estimé que ces règles suffisaient en soi pour étayer la conclusion selon laquelle celles-ci se sont avérées problématiques du point de vue du droit de la concurrence, indépendamment de l’épreuve spécifique en cause ( 57 ).

129.

Il convient de noter, à cet égard, que, contrairement à ce que soutient la requérante, l’insertion du terme « application » à l’article 1er de la décision litigieuse ne peut être interprété comme visant l’événement de Dubaï mais résulterait davantage de la constatation par la Commission d’une restriction de la concurrence à la fois par objet et par effet (qui est exposé dans les sections 8.3 et 8.4 de la décision litigieuse) ( 58 ).

130.

En deuxième lieu, contrairement à ce que soutient la requérante, le Tribunal n’a pas omis d’examiner le quatrième moyen de la requête dès lors que celui-ci a été examiné conjointement avec les deuxième et troisième moyens, aux points 64 et suivants de l’arrêt attaqué ( 59 ).

131.

S’agissant de la question plus générale de savoir si les règles d’éligibilité peuvent échapper à l’application de l’article 101 TFUE en tant que restrictions accessoires, après avoir reconnu, dans un premier temps, la légitimité des objectifs poursuivis par l’UIP – et notamment celui relatif à la protection de l’intégrité du patinage de vitesse des risques liés aux paris ( 60 ) – et qu’un système d’autorisation préalable destiné à veiller à ce que tout organisateur respecte des standards communs constituait un mécanisme apte à assurer la réalisation d’objectifs liés à la spécificité du sport ( 61 ), le Tribunal a estimé, dans un second temps, que le caractère arbitraire et disproportionné des règles d’éligibilité et notamment des sanctions mises en place en l’espèce par l’UIP allaient au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre ces objectifs au sens de la jurisprudence relative aux restrictions accessoires, et notamment l’arrêt Meca-Medina ( 62 ).

132.

Il convient, en dernier lieu, de rejeter l’argument par lequel la requérante reproche à la Commission et au Tribunal de ne pas avoir tenu compte des évolutions législatives en Corée (pays d’origine du concept Icederby) en ce qui concerne les paris, cet élément étant dénué de pertinence pour l’évaluation de la compatibilité des règles de l’UIP au regard du droit de la concurrence de l’Union. J’estime donc que c’est à bon droit que cet argument n’a pas été pris en compte par le Tribunal.

133.

Au vu de ce qui précède, je suis d’avis qu’il y a lieu de rejeter le deuxième moyen du pourvoi.

D. Sur la demande d’évocation du litige et sur le renvoi de l’affaire au Tribunal

134.

Conformément à l’article 61 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, lorsque le pourvoi est fondé, la Cour annule la décision du Tribunal. Elle peut alors soit statuer elle-même définitivement sur le litige, lorsque celui-ci est en état d’être jugé, soit renvoyer l’affaire devant le Tribunal pour qu’il statue.

135.

Il convient de relever, à cet égard, que l’UIP a formulé une demande d’évocation du litige en estimant que, en cas d’annulation de l’arrêt attaqué, la Cour serait en position d’évoquer l’entièreté du litige. Il y a lieu de constater, néanmoins, que les motifs qui justifient l’annulation de l’arrêt attaqué ne sont pas de nature à entraîner l’annulation totale de la décision litigieuse. En effet, ces motifs n’impliquent l’annulation de cette décision qu’en ce que celle-ci constate que les mesures en cause ont pour objet de restreindre la concurrence au sens de l’article 101, paragraphe 1, TFUE. En vertu de la jurisprudence rappelée au point 123 des présentes conclusions, il convient dès lors de déterminer si, ainsi que la Commission l’a considéré dans la décision litigieuse, les accords en cause ont « pour effet » de restreindre la concurrence au sens de l’article 101, paragraphe 1, TFUE.

136.

Or, cet aspect du litige implique l’examen de questions de fait sur la base d’éléments qui n’ont pas été appréciés par le Tribunal dans l’arrêt attaqué, celui-ci ayant estimé qu’un tel examen était superflu, dès lors qu’il a considéré que la Commission n’avait pas commis d’erreur en concluant, dans la décision litigieuse, que les mesures en cause avaient un objet anticoncurrentiel. Si certains aspects factuels ont en effet été débattus lors de la procédure écrite et orale devant le Tribunal, il n’en reste pas moins que ce dernier est seul compétent pour apprécier les faits. Par ailleurs, étant donné que les questions portant sur l’analyse des effets sur la concurrence n’ont pas été débattues devant la Cour, l’affaire n’est pas, sur ce point, en l’état d’être jugée.

137.

Par conséquent, il y a lieu de renvoyer l’affaire devant le Tribunal et de réserver les dépens.

IV. Analyse du premier moyen du pourvoi incident

138.

Par leur premier moyen, structuré en deux branches, les requérants au pourvoi incident contestent la partie de l’arrêt attaqué dans laquelle le Tribunal a considéré que le mécanisme d’arbitrage exclusif et obligatoire mis en place par l’UIP ne pouvait pas être regardé comme « renforçant » la restriction de la concurrence par objet caractérisée par la Commission.

139.

Plus précisément, les requérants au pourvoi incident font valoir que le Tribunal a commis une erreur de droit en considérant que la Commission ne pouvait pas conclure, à la section 8.7 de la décision litigieuse, que le règlement d’arbitrage de l’UIP renforçait la restriction de la concurrence par objet engendrée par les règles d’éligibilité ( 63 ).

140.

Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a, dans l’ensemble, considéré, contrairement à la Commission dans la décision litigieuse, comme légitimes les règles instituées par l’UIP prévoyant le recours à l’arbitrage dans le domaine sportif ( 64 ) – règles qu’il a examinées comme « circonstance aggravante » et a analysées sur le terrain du calcul des amendes ( 65 ) – et suffisante la possibilité, pour les athlètes lésés, de se tourner vers les juridictions nationales pour réclamer des dommages et intérêts ex post ou de déposer une plainte devant les autorités de concurrence nationales et la Commission pour assurer l’effectivité des règles de concurrence de l’Union et du droit à une protection juridictionnelle effective ( 66 ).

A. Sur la recevabilité et le caractère opérant du premier moyen

141.

Il convient de rejeter d’emblée l’exception d’irrecevabilité soulevée par l’UIP au motif que le premier moyen du pourvoi incident modifierait l’objet du litige devant le Tribunal. Si, en effet, certains éléments mentionnés par les requérants au pourvoi incident, tels que la question de l’indépendance et de l’impartialité du TAS, se situent en dehors du cadre déterminé par la décision litigieuse et par l’arrêt attaqué, et doivent de ce fait être écartés de la présente analyse, la plupart des arguments avancés par ces parties ont été débattus pendant la procédure devant la Commission et le Tribunal, et sont à présent valablement invoqués pour contester l’arrêt attaqué.

142.

L’UIP estime, par ailleurs, que ce moyen serait inopérant, dès lors que, comme l’a constaté le Tribunal aux points 132 et 137 de l’arrêt attaqué, la Commission se serait limitée, dans la décision litigieuse, à conclure à titre surabondant que les règles adoptées par cette fédération en matière d’arbitrage renforçaient la restriction de la concurrence par objet découlant d’autres règles instituées par celle-ci, à savoir les règles d’éligibilité et d’autorisation. De ce fait, ni l’article 1er de la décision litigieuse, qui constate l’existence d’une infraction, ni la partie de l’arrêt attaqué qui rejette les moyens du recours de l’UIP relatifs à cet article ne reposeraient, à un quelconque titre, sur les appréciations de la Commission et du Tribunal concernant lesdites règles.

143.

Néanmoins, force est de constater que, même si ces considérations pouvaient être jugées surabondantes en ce qu’elles ne faisaient pas partie de celles qui fondent le constat d’infraction figurant à l’article 1er de la décision litigieuse, le Tribunal s’est référé à ces appréciations (comme le reconnaît d’ailleurs l’UIP elle-même dans ses observations) pour annuler partiellement les articles 2 et 4 de la décision litigieuse, par lesquels la Commission a enjoint à cette fédération de mettre fin à l’infraction constatée en modifiant ses règles (y compris celles portant sur l’arbitrage) sous peine d’astreintes ( 67 ).

144.

Partant, sous réserve des constatations effectuées au point 141 des présentes conclusions, j’estime qu’il y a lieu de considérer ce moyen comme étant recevable et opérant.

B. Sur le fond

1.   Observations liminaires

145.

Il convient de noter, à titre liminaire, que l’emploi des termes « circonstance aggravante » par le Tribunal pour désigner les règles instituées par l’UIP en matière d’arbitrage et l’analyse de ces dernières sur le terrain du calcul des amendes prêtent à une certaine confusion ( 68 ). Il en va de même pour la qualification du règlement d’arbitrage par la Commission, dans la décision litigieuse, en tant qu’« élément de renforcement » d’une restriction de la concurrence.

146.

S’agissant, en premier lieu, de la notion de « circonstance aggravante » utilisée par le Tribunal, comme celui-ci le relève, à juste titre, au point 144 de l’arrêt attaqué, la décision litigieuse n’emploie pas cette notion et ne se réfère pas aux lignes directrices de 2006 pour le calcul des amendes ( 69 ). Dans ce contexte, il est difficile de comprendre comment le Tribunal a pu considérer, au point 148 de l’arrêt attaqué, que la Commission « [avait] estimé à tort que le règlement d’arbitrage constituait une circonstance aggravante au sens des lignes directrices de 2006 ».

147.

Cette confusion transparaît également dans les observations des parties. Tandis que la Commission reproche au Tribunal d’avoir mené son raisonnement sur la base des lignes directrices de 2006, alors même que celle-ci n’a pas estimé, dans la décision litigieuse, que le règlement d’arbitrage constituait une circonstance aggravante au sens de ces lignes directrices, les requérants au pourvoi incident, lorsqu’ils font référence à la décision litigieuse, n’utilisent pas les termes « élément de renforcement » retenus par la Commission dans cette décision mais ceux de « circonstance aggravante » et soutiennent que la Commission a qualifié (à juste titre selon eux) le règlement d’arbitrage de « circonstance aggravante ».

148.

Force est de constater, néanmoins, que les termes « circonstance aggravante » sont utilisés au point 28 desdites lignes directrices pour désigner certains cas de figure justifiant l’augmentation d’une amende imposée à une entité infractionnelle par la Commission, parmi lesquels figurent le comportement récidiviste, le refus de coopérer, l’obstruction pendant le déroulement de l’enquête ou encore le rôle de meneur ou d’incitateur joué par une entité dans le cadre d’une infraction ( 70 ).

149.

Or, bien que les circonstances aggravantes figurant dans la liste contenue au point 28 des lignes directrices de 2006 ne soit pas exhaustive, comme le Tribunal l’a constaté, à juste titre, au point 152 de l’arrêt attaqué, les circonstances aggravantes figurant dans cette liste ont en commun de décrire des comportements ou des circonstances illicites qui rendent l’infraction plus nuisible et qui justifient une condamnation particulière se traduisant par une augmentation de la sanction imposée à l’entreprise responsable. Il est donc difficilement concevable que l’inclusion d’une clause d’arbitrage dans les statuts d’une fédération sportive – dont la légitimité au regard du droit de la concurrence n’est d’ailleurs pas contestée par la Commission – puisse faire partie de cette classification.

150.

En ce qui concerne, en second lieu, la qualification du règlement d’arbitrage de la part de la Commission en tant qu’« élément de renforcement » d’une restriction de la concurrence, cette approche soulève également des interrogations tant sur le terrain du droit matériel que d’un point de vue méthodologique. Se pose notamment la question de savoir pourquoi la Commission a caractérisé l’existence d’éléments de nature à renforcer une restriction de la concurrence et à influer sur la possible justification de celle-ci, sans pour autant constituer une infraction en soi. Je me demande, d’ailleurs, quelle est la valeur juridique et la finalité d’une telle qualification sous l’angle du droit de la concurrence dès lors que celle-ci est effectuée à titre surabondant.

151.

Par ailleurs, la décision de la Commission de qualifier le mécanisme de recours exclusif et obligatoire à l’arbitrage d’« élément de renforcement » de la restriction de la concurrence dans le cadre d’une analyse isolée et séparée de la constatation de l’infraction semble pour le moins singulière ( 71 ). On pourrait se demander, à cet égard, pourquoi la Commission n’a pas tout simplement inclus l’examen des clauses d’arbitrage dans son analyse des règles émises par l’UIP si elle estimait que de telles règles pouvaient d’une façon ou d’une autre porter atteinte à la concurrence. Cela est d’autant plus étonnant dans la mesure où la Commission semble avoir analysé l’ensemble des règles (ou l’« écosystème » normatif) mis en place par l’UIP pour constater que celles-ci entravaient la concurrence ( 72 ).

152.

Ces clarifications ayant été apportées, il convient à présent d’examiner si le Tribunal a, sans commettre une erreur de droit, considéré que le mécanisme de recours exclusif et obligatoire à l’arbitrage ne pouvait pas être ainsi qualifié d’« élément de renforcement » de la restriction de la concurrence qui a été constatée.

2.   Sur la première branche du premier moyen du pourvoi incident

153.

Dans le cadre de la première branche de leur premier moyen, les requérants au pourvoi incident reprochent au Tribunal d’avoir commis des erreurs dans son analyse relative à la justification de la compétence exclusive du TAS pour les litiges portant sur les aspects anticoncurrentiels des décisions d’inéligibilité de l’UIP.

154.

Il convient de noter, en premier lieu, que l’argumentation des requérants au pourvoi incident repose principalement sur une distinction qu’ils établissent entre des affaires liées à la spécificité du sport pour lesquelles, en principe, l’arbitrage du TAS peut se justifier par des intérêts légitimes et des affaires ayant une dimension économique sans liens apparents avec le sport, et qui, de ce fait, ne devraient pas être soumises à la juridiction exclusive du TAS.

155.

Ce raisonnement est peu convaincant à mes yeux, dès lors qu’il repose sur une distinction qui paraît « artificielle ». En effet, si la distinction entre des affaires « purement sportives » (ou portant sur des aspects non économiques du sport) et d’autres « purement économiques » peut éventuellement être établie sur le plan théorique dans certaines hypothèses, cette dichotomie est loin d’être évidente en pratique, dans la mesure où ces deux aspects sont difficilement dissociables.

156.

Prenons l’exemple fourni par les requérants au pourvoi incident au soutien de leur argumentation, à savoir celui d’une décision individuelle d’inéligibilité visant un athlète qui serait fondée sur des règles d’éligibilité qui pourraient être incompatibles avec le droit de la concurrence. Je ne suis pas sûr de suivre le raisonnement de ces parties lorsqu’elles soutiennent qu’une telle décision constitue principalement une question de droit de la concurrence et que le fait que le litige se soit produit dans le cadre du sport professionnel n’est qu’un élément circonstanciel. Le fait que des règles émises par une fédération sportive soient contestées sous l’angle du droit de la concurrence ne signifie pas nécessairement qu’une décision individuelle d’inéligibilité (adoptée sur la base de ces règles) visant un athlète ne porte pas sur une question qui soit (purement) sportive. Ainsi, la circonstance que des règles émises par une fédération sportive régissant l’organisation et la participation d’athlètes à certaines compétitions sportives peuvent être disproportionnées par rapport aux objectifs poursuivis et risquerait d’avoir des effets négatifs sur la concurrence ne signifie pas que les objectifs « sportifs » poursuivis ne sont pas eux-mêmes légitimes.

157.

En second lieu, il importe de constater que tant la Commission, dans la décision litigieuse, que le Tribunal, dans l’arrêt attaqué, ont reconnu à juste titre que le recours à un mécanisme d’arbitrage exclusif et obligatoire était une méthode généralement acceptée de règlement des différends et que le fait de conclure une clause d’arbitrage ne restreint pas en lui-même la concurrence ( 73 ). Au demeurant, la Cour européenne des droits de l’homme serait parvenue à la même conclusion, en estimant que, dans un contexte sportif, il est légitime de soumettre les litiges à un tribunal arbitral international spécialisé, comme le TAS, dans la mesure où un tel mécanisme garantit l’uniformité procédurale, la sécurité juridique ainsi que des décisions rapides et économiques, tout en reconnaissant par ailleurs l’indépendance et l’impartialité du TAS ( 74 ).

158.

En effet, on pourrait difficilement concevoir l’organisation ou le déroulement de n’importe quelle discipline ou compétition sportive si chaque participant (athlète ou club sportif) disposait de la possibilité de contester un aspect ou un autre d’un tel événement sur n’importe quelle base juridique devant des juridictions nationales ou autre instance juridictionnelle, cela, notamment, en présence de compétitions internationales qui, par définition, impliqueraient potentiellement une pléthore de juridictions nationales, ce qui entraînerait automatiquement une fragmentation du système actuel.

159.

À la lumière des considérations qui précèdent, je partage l’appréciation du Tribunal, figurant au point 156 de l’arrêt attaqué, selon laquelle le caractère obligatoire de l’arbitrage et la circonstance que le règlement d’arbitrage confère au TAS une compétence exclusive pour connaître des différends relatifs aux décisions d’inéligibilité peuvent se justifier par des intérêts légitimes liés à la spécificité du sport. Partant, je considère qu’un mécanisme non étatique de règlement des conflits en première ou deuxième instance, tel que le TAS, avec une possibilité de recours, aussi limitée soit-elle, devant un tribunal étatique, en dernière instance, est adéquat dans le domaine de l’arbitrage sportif international.

160.

Au vu des éléments qui précèdent, je suis d’avis qu’il convient de rejeter la première branche du premier moyen du pourvoi incident.

C. Sur la seconde branche du premier moyen du pourvoi incident

161.

Dans le cadre de la seconde branche de leur premier moyen, les requérants au pourvoi incident soutiennent que le Tribunal a commis une erreur de droit en concluant que le règlement d’arbitrage ne compromet pas la pleine efficacité du droit de la concurrence de l’Union et le droit à une protection juridictionnelle effective. À cet égard, ces requérants soulèvent une série de problématiques qui ont été débattues pendant la procédure devant la Commission et le Tribunal, et qui sont à présent invoquées pour contester l’arrêt attaqué. Plus précisément, ces parties remettent en question l’appréciation du Tribunal en ce qui concerne, tout d’abord, l’« extériorité » du TAS et du Tribunal fédéral suisse par rapport au système juridictionnel de l’Union et les limites de la prise en compte du droit de la concurrence de l’Union par ces deux instances, ensuite, le caractère de facto obligatoire, pour les sportifs, du mécanisme d’arbitrage en cause et, enfin, le caractère fragmenté, limité et, en définitive, inefficace des possibilités de contrôles de l’activité disciplinaire de l’UIP et des sentences arbitrales correspondantes par les juridictions nationales ( 75 ).

162.

En premier lieu, je rappelle que l’ordre juridique de l’Union repose sur un système juridictionnel garantissant la cohérence et l’uniformité dans l’interprétation du droit de l’Union. Pour ce faire, les juridictions nationales et la Cour assurent une application pleine et effective du droit de l’Union dans l’ensemble des États membres ainsi que la protection juridictionnelle que les justiciables tirent de ce droit ( 76 ), y compris dans le domaine du droit de la concurrence ( 77 ). Dans ce cadre, le recours à l’arbitrage est susceptible de réduire la pleine efficacité et l’uniformité du droit de l’Union, ainsi que la possibilité d’obtenir une protection juridictionnelle effective lorsque le tribunal arbitral ne fait pas partie du système de l’Union et n’est pas soumis à un contrôle complet du respect du droit de l’Union par les juridictions nationales ( 78 ).

163.

Il convient de noter, à cet égard que, la Cour opère une distinction entre, d’une part, les traités conclus avec les États membres, dans lesquels l’arbitrage est imposé aux parties privées et vise à soustraire les litiges à la compétence de leurs propres tribunaux et, d’autre part, l’arbitrage commercial, qui est le résultat de la volonté librement exprimée des parties concernées qui visent des litiges entre des parties d’un rang égal ( 79 ).

164.

À l’appui de leur pourvoi incident, les requérants soutiennent que le règlement d’arbitrage en cause ne constitue pas un véritable arbitrage commercial et doit être apprécié sur la même base que les affaires Achmea et PL Holdings, dans la mesure où la compétence exclusive du TAS imposée aux athlètes serait analogue à celle qu’imposent les États membres aux parties privées dans le cadre des traités d’investissements bilatéraux. Toutefois, je suis d’avis que le raisonnement retenu dans ces affaires n’est, en tout état de cause, pas transposable au règlement d’arbitrage en l’espèce, en particulier compte tenu de la divergence des procédures d’arbitrage.

165.

À la différence des affaires Achmea et PL Holdings, qui concernaient un traité (bilatéral d’investissement) conclu avec un État membre et qui portaient sur les principes de confiance mutuelle et de coopération loyale entre les États membres, empêchant ces États d’autoriser des parties privées à soumettre des litiges à un organe qui ne fait pas partie du système juridictionnel de l’Union ( 80 ), l’arbitrage en cause au principal s’applique dans les relations entre des parties privées et une fédération sportive internationale (et non pas un État membre). Ainsi, comme l’a indiqué le Tribunal, au point 162 de l’arrêt attaqué, la constitution du TAS ne trouve pas son origine dans un traité par lequel des États membres auraient consenti à soustraire à la compétence de leurs propres juridictions des litiges pouvant porter sur l’application ou l’interprétation du droit de la concurrence. Par conséquent, une application par analogie des principes découlant de ces arrêts, pour les raisons qui précèdent, doit être écartée.

166.

En second lieu, il convient de noter que tant les requérants au pourvoi incident que la Commission reprochent au Tribunal de ne pas avoir pris en compte les modalités concrètes de l’arbitrage sportif, et, notamment, le fait qu’il constitue non pas un véritable arbitrage commercial, librement convenu par les deux parties, mais un arbitrage imposé de façon unilatérale et à titre exclusif par l’UIP aux athlètes, sous la menace d’une interdiction de participation aux compétitions organisées par cette fédération et donc d’une impossibilité, pour ceux-ci, d’exercer leur profession.

167.

Si, en effet, il existe éventuellement une « asymétrie de pouvoirs » entre une fédération sportive et les athlètes, qui peut conduire à considérer que ces derniers n’ont pas d’autres choix que d’adhérer aux règles de cette fédération ( 81 ), je suis d’avis que, à partir du moment où, d’une part, l’indépendance et l’impartialité du TAS ne sont pas remises en question, et que, d’autre part, le recours à l’arbitrage du TAS peut se justifier par des intérêts légitimes liés à l’exigence que des litiges sportifs soient soumis à une instance juridictionnelle spécialisée ( 82 ), un tel argument ne peut pas prospérer.

168.

Partant, j’estime, à l’instar du Tribunal, que le règlement d’arbitrage en cause n’est pas susceptible, concrètement et à lui seul, de renforcer la restriction de la concurrence engendrée par les règles d’éligibilité de l’UIP.

169.

Au vu des éléments qui précèdent, je suis d’avis qu’il convient de rejeter le premier moyen du pourvoi incident.

V. Conclusion

170.

Eu égard aux considérations qui précèdent, je propose à la Cour de statuer comme suit :

l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 16 décembre 2020, International Skating Union/Commission (T-93/18, EU:T:2020:610), est annulé ;

l’affaire est renvoyée devant le Tribunal de l’Union européenne ;

le pourvoi incident est rejeté ;

les dépens sont réservés.


( 1 ) Langue originale : le français.

( 2 ) Le deuxième moyen de la requérante portait sur la constatation d’une restriction par objet et les troisième et quatrième moyens concernaient l’appréciation par la Commission de la question de savoir si la restriction de la concurrence est inhérente et proportionnée à la poursuite d’objectifs légitimes.

( 3 ) Voir arrêt du 25 avril 2013, Asociația Accept (C‑81/12, EU:C:2013:275, point 45 et jurisprudence citée).

( 4 ) Voir, en ce sens, arrêt du 18 juillet 2006, Meca-Medina et Majcen/Commission (C‑519/04 P, ci-après l’« arrêt Meca-Medina , EU:C:2006:492, points 29 à 34).

( 5 ) Voir arrêt du 19 février 2002, Wouters e.a. (C‑309/99, EU:C:2002:98, point 97).

( 6 ) Voir arrêt du 16 mars 2010, Olympique Lyonnais (C‑325/08, EU:C:2010:143, point 40).

( 7 ) Voir arrêt Meca-Medina (point 42 ainsi que jurisprudence citée et point 45).

( 8 ) Voir arrêts du 19 février 2002, Wouters e.a. (C‑309/99, EU:C:2002:98, point 110) ; du 4 septembre 2014, API e.a. (C‑184/13 à C‑187/13, C‑194/13, C‑195/13 et C‑208/13, EU:C:2014:2147, points 43 et 49), ainsi que du 23 novembre 2017, CHEZ Elektro Bulgaria et FrontEx International (C‑427/16 et C‑428/16, EU:C:2017:890, points 51 et 57).

( 9 ) Voir points 87 à 89 des présentes conclusions.

( 10 ) Voir considérant 29 et 30 de la communication de la Commission sur les lignes directrices concernant l’application de l’article 81, paragraphe 3, du traité (JO 2004, C 101, p. 97).

( 11 ) Voir point 40 des présentes conclusions.

( 12 ) Voir arrêt du 28 février 2013, Ordem dos Técnicos Oficiais de Contas (C‑1/12, ci-après l’« arrêt OTOC , EU:C:2013:127, points 101 à 103).

( 13 ) Voir arrêts du 1er juillet 2008, MOTOE (C‑49/07, ci-après l’« arrêt MOTOE , EU:C:2008:376, point 51) et OTOC (point 88).

( 14 ) Voir arrêts MOTOE (points 49 à 52) et OTOC (points 69 à 92).

( 15 ) Plus précisément, l’UIP fait valoir que l’examen par le Tribunal du contenu des règles mises en place par elle-même, du contexte juridique et économique dans lequel celles-ci s’inscrivent et des objectifs qu’elles poursuivent ne révèle pas le degré de nocivité requis pour une qualification de restriction de la concurrence par objet.

( 16 ) Voir arrêt du 18 novembre 2021, Visma Enterprise (C‑306/20, EU:C:2021:935, point 55 et jurisprudence citée).

( 17 ) Voir arrêt du 18 novembre 2021, Visma Enterprise (C‑306/20, EU:C:2021:935, point 57 et jurisprudence citée).

( 18 ) Voir arrêt du 11 septembre 2014, CB/Commission (C‑67/13 P, ci-après l’« arrêt CB/Commission , EU:C:2014:2204, point 50 et jurisprudence citée).

( 19 ) Voir arrêt du 4 juin 2009, T-Mobile Netherlands e.a. (C‑8/08, EU:C:2009:343, points 28 et 30).

( 20 ) Voir arrêt CB/Commission (point 52 et jurisprudence citée).

( 21 ) Voir arrêt du 16 juillet 2015, ING Pensii (C‑172/14, EU:C:2015:484, point 33 et jurisprudence citée).

( 22 ) Voir point 86 de l’arrêt attaqué.

( 23 ) Voir point 15 des présentes conclusions.

( 24 ) Voir points 89 et 95 de l’arrêt attaqué.

( 25 ) Voir points 84 à 89 et 96 à 98 de l’arrêt attaqué.

( 26 ) Voir points 90 à 95 de l’arrêt attaqué.

( 27 ) Voir arrêt du 2 avril 2020, Budapest Bank e.a. (C‑228/18, EU:C:2020:265, point 37 ainsi que jurisprudence citée).

( 28 ) Voir arrêt CB/Commission (point 50), et conclusions de l’avocat général Wahl dans l’affaire CB/Commission (C‑67/13 P, EU:C:2014:1958, point 39).

( 29 ) Voir conclusions de l’avocat général Wahl dans l’affaire CB/Commission (C‑67/13 P, EU:C:2014:1958, point 56) et conclusions de l’avocat général Bobek dans l’affaire Budapest Bank e.a. (C‑228/18, EU:C:2019:678, point 42).

( 30 ) Voir arrêt du 2 avril 2020, Budapest Bank e.a. (C‑228/18, EU:C:2020:265, point 54 ainsi que jurisprudence citée).

( 31 ) Voir arrêt du 2 avril 2020, Budapest Bank e.a. (C‑228/18, EU:C:2020:265, point 76 ainsi que jurisprudence citée), et conclusions de l’avocat général Bobek dans l’affaire Budapest Bank e.a. (C‑228/18, EU:C:2019:678, points 54 et 63 à 73).

( 32 ) Arrêt du 4 juin 2009 (C‑8/08, EU:C:2009:343, point 31).

( 33 ) Voir point 68 des présentes conclusions.

( 34 ) Ces éléments peuvent, toutefois, être pris en compte dans le cadre de l’analyse des restrictions accessoires pour illustrer le caractère disproportionné des règles de l’UIP.

( 35 ) Voir arrêt OTOC (point 99).

( 36 ) Voir arrêt OTOC (points 70 à 100).

( 37 ) Arrêt du 30 janvier 2020, Generics (UK) e.a. (C‑307/18, EU:C:2020:52).

( 38 ) Voir points 89 et 95 de l’arrêt attaqué.

( 39 ) Voir points 100 à 104 de l’arrêt attaqué.

( 40 ) Voir points 105 à 114 de l’arrêt attaqué.

( 41 ) En effet, bien que la Commission fasse une référence, au considérant 163 de la décision litigieuse, à l’absence de liens directs des règles de l’UIP avec des objectifs légitimes, un élément qui a principalement été analysé dans le cadre de l’examen du contenu de ces règles, le considérant 171 de cette décision ne laisse aucun doute quant à l’approche suivie par la Commission d’exclure la prise en compte d’objectifs légitimes au stade de l’analyse de l’objet anticoncurrentiel.

( 42 ) Voir points 99 à 114 de l’arrêt attaqué.

( 43 ) Voir arrêt CB/Commission (point 53 et jurisprudence citée).

( 44 ) Voir conclusions de l’avocat général Wahl dans l’affaire CB/Commission (C‑67/13 P, EU:C:2014:1958, point 117).

( 45 ) Voir arrêt du 2 avril 2020, Budapest Bank e.a. (C‑228/18, EU:C:2020:265, point 52 ainsi que jurisprudence citée).

( 46 ) Point 47 de cet arrêt.

( 47 ) Points 70 à 100 de cet arrêt.

( 48 ) Voir point 68 des présentes conclusions.

( 49 ) Voir arrêt CB/Commission (point 75).

( 50 ) Voir arrêt CB/Commission (point 78).

( 51 ) Voir points 118 et 119 de l’arrêt attaqué.

( 52 ) Voir arrêt du 20 janvier 2016, Toshiba Corporation/Commission (C‑373/14 P, EU:C:2016:26, point 29).

( 53 ) Il convient de noter, à cet égard, que les informations concernant les compétitions que l’UIP aurait acceptées dans le domaine du patinage artistique font l’objet d’interprétations divergentes entre la Commission et l’UIP.

( 54 ) Voir arrêt du 6 avril 2006, General Motors/Commission (C‑551/03 P, EU:C:2006:229, point 77).

( 55 ) Voir considérants 175 à 177 de la décision litigieuse.

( 56 ) Voir arrêt du 11 avril 2013, Mindo/Commission (C‑652/11 P, EU:C:2013:229, point 41).

( 57 ) Cette constatation du Tribunal semble également être confirmée par l’analyse effectuée par la Commission, aux considérants 251 à 266 de la décision litigieuse, qui concerne la proportionnalité de ces règles au regard des objectifs poursuivis, sans que cette analyse ne porte spécifiquement sur l’événement de Dubaï.

( 58 ) L’UIP réitère, à cet égard, l’argument soulevé dans le cadre de la première branche et d’une partie de la troisième branche du premier moyen, selon lequel la Commission s’était fondée sur l’événement de Dubaï pour conclure, à l’article 1er de la décision litigieuse, que celle-ci a enfreint l’article 101 TFUE « [en adoptant] et en appliquant les règles d’éligibilité » (mise en italique par mes soins).

( 59 ) Voir point 96 des présentes conclusions.

( 60 ) Voir points 100 à 104 de l’arrêt attaqué.

( 61 ) Voir point 108 de l’arrêt attaqué.

( 62 ) Parmi les éléments pris en considération par le Tribunal, il convient de noter en particulier qu’au point 97 de l’arrêt attaqué, celui-ci a retenu que les règles d’éligibilité permettent à la requérante d’imposer des sanctions d’inéligibilité aux athlètes en cas de participation à des compétitions non autorisées, même si le calendrier de la requérante ne prévoit aucune compétition au même moment et même si les athlètes en question ne peuvent, pour une raison quelconque, participer aux compétitions organisées par la requérante.

( 63 ) Voir points 131 à 164 de l’arrêt attaqué.

( 64 ) Voir points 154 à 156 de l’arrêt attaqué.

( 65 ) Points 142 à 153 de l’arrêt attaqué.

( 66 ) Voir points 157 à 161 de l’arrêt attaqué.

( 67 ) Voir points 138 et 145 de l’arrêt attaqué.

( 68 ) Voir points 142 à 153 de l’arrêt attaqué.

( 69 ) Lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement no 1/2003 (JO 2006, C 210, p. 2, ci-après les « lignes directrices de 2006 »).

( 70 ) Voir points 150 à 152 de l’arrêt attaqué.

( 71 ) Les appréciations concernant le règlement d’arbitrage figurent dans une section postérieure à la conclusion sur l’existence d’une restriction de la concurrence, à savoir dans la section 8.7 de la décision litigieuse. Dans cette section, la Commission n’a pas conclu que le règlement d’arbitrage constituait une infraction autonome au droit de la concurrence, mais simplement qu’il renforçait les restrictions de la concurrence engendrées par les règles d’éligibilité.

( 72 ) À titre d’exemple, il convient de constater que, dans la décision C(2018) 4761 final de la Commission, du 18 juillet 2018, relative à une procédure d’application de l’article 102 TFUE et de l’article 54 de l’accord EEE (affaire AT.40099 – Google Android), la Commission a examiné des « éléments de renforcement » de la restriction de la concurrence constatée dans la section de la décision dédiée à cette constatation (considérants 1132 à 1145) et non pas dans une section séparée et ultérieure à cette constatation.

( 73 ) Voir point 154 de l’arrêt attaqué et considérant 269 de la décision litigieuse.

( 74 ) Voir Cour EDH, 2 octobre 2018, Mutu et Pechstein c. Suisse, CE:ECHR:2018:1002JUD004057510, § 98 et 159.

( 75 ) Voir considérants 270 à 286 de la décision litigieuse.

( 76 ) Voir arrêt du 6 mars 2018, Achmea (C-284/16, EU:C:2018:158, points 35 et 36 ainsi que jurisprudence citée).

( 77 ) Voir arrêt du 9 février 2022, Sped-Pro/Commission (T-791/19, EU:T:2022:67, point 91).

( 78 ) Voir arrêts du 26 octobre 2021, PL Holdings (C-109/20, EU:C:2021:875, point 45 ainsi que jurisprudence citée), et du 6 mars 2018, Achmea (C-284/16, EU:C:2018:158, points 58 à 60 ainsi que jurisprudence citée).

( 79 ) Voir arrêt du 6 mars 2018, Achmea (C-284/16, EU:C:2018:158, point 55 et jurisprudence citée).

( 80 ) Voir arrêts du 26 octobre 2021, PL Holdings (C-109/20, EU:C:2021:875, points 45 à 47), et du 6 mars 2018, Achmea (C-284/16, EU:C:2018:158, points 58 à 60).

( 81 ) Voir Cour EDH, 2 octobre 2018, Mutu et Pechstein c. Suisse, CE:ECHR:2018:1002JUD004057510, § 113 à 115.

( 82 ) Voir points 157 à 159 des présentes conclusions.

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