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Document 62017CJ0034

Arrêt de la Cour (deuxième chambre) du 26 avril 2018.
Eamonn Donnellan contre The Revenue Commissioners.
Demande de décision préjudicielle, introduite par la High Court (Irlande).
Renvoi préjudiciel – Assistance mutuelle en matière de recouvrement de créances – Directive 2010/24/UE – Article 14 – Droit à un recours effectif – Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne – Article 47 – Possibilité pour l’autorité requise de refuser l’assistance au recouvrement au motif que la créance n’a pas été dûment notifiée.
Affaire C-34/17.

Court reports – general – 'Information on unpublished decisions' section

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2018:282

ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

26 avril 2018 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Assistance mutuelle en matière de recouvrement de créances – Directive 2010/24/UE – Article 14 – Droit à un recours effectif – Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne – Article 47 – Possibilité pour l’autorité requise de refuser l’assistance au recouvrement au motif que la créance n’a pas été dûment notifiée »

Dans l’affaire C‑34/17,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la High Court (Haute Cour, Irlande), par décision du 16 janvier 2017, parvenue à la Cour le 24 janvier 2017, dans la procédure

Eamonn Donnellan

contre

The Revenue Commissioners,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de M. M. Ilešič (rapporteur), président de chambre, M. A. Rosas, Mmes C. Toader, A. Prechal et M. E. Jarašiūnas, juges,

avocat général : M. E. Tanchev,

greffier : M. I. Illéssy, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 18 janvier 2018,

considérant les observations présentées :

pour M. Donnellan, par Mmes L. Glennon et E. Silke, solicitors, M. P. McGarry, SC, ainsi que par M. R. Maguire, barrister,

pour the Revenue Commissioners, par Mme M.-C. Maney, solicitor, M. N. Travers, SC, M. B. Ó Floinn, BL, ainsi que par M. M. Corry, advocate,

pour le gouvernement hellénique, par Mmes E. Tsaousi et M. Tassopoulou, ainsi que par M. K. Georgiadis, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par MM. M. Wilderspin et H. Krämer, ainsi que par Mme F. Tomat, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 8 mars 2018,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 14, paragraphes 1 et 2, de la directive 2010/24/UE du Conseil, du 16 mars 2010, concernant l’assistance mutuelle en matière de recouvrement des créances relatives aux taxes, impôts, droits et autres mesures (JO 2010, L 84, p. 1, et rectificatif JO 2016, L 357, p. 17).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Eamonn Donnellan aux Revenue Commissioners (ci-après les « Commissioners ») au sujet du recouvrement d’une créance constituée, d’une part, d’une amende infligée à M. Donnellan par une autorité douanière hellénique et, d’autre part, d’intérêts ainsi que de frais ou de pénalités relatifs à cette amende.

Le cadre juridique

La directive 2010/24

3

La directive 2010/24 a été adoptée sur le fondement des articles 113 et 115 TFUE. Ses considérants 1, 7, 17, 20 et 21 énoncent :

« (1)

L’assistance mutuelle entre les États membres aux fins du recouvrement de leurs créances respectives ainsi que de celles de l’Union en ce qui concerne certaines taxes, impôts et autres mesures contribue au bon fonctionnement du marché intérieur. [...]

[...]

(7)

L’assistance mutuelle peut prendre les formes suivantes : l’autorité requise peut fournir à l’autorité requérante les renseignements utiles à cette dernière pour le recouvrement des créances nées dans l’État membre requérant et notifier au débiteur tous les documents relatifs à ces créances émanant de l’État membre requérant. L’autorité requise peut aussi procéder, à la demande de l’autorité requérante, au recouvrement des créances nées dans l’État membre requérant ou prendre des mesures conservatoires de nature à garantir le recouvrement desdites créances.

[...]

(17)

La présente directive ne devrait pas empêcher l’exécution de toute obligation de fournir une assistance plus large découlant d’accords ou d’arrangements bilatéraux ou multilatéraux.

[...]

(20)

Étant donné que les objectifs de la présente directive, à savoir l’établissement d’un système uniformisé d’assistance au recouvrement au sein du marché intérieur, ne peuvent pas être réalisés de manière suffisante par les États membres et peuvent donc [...] être mieux réalisés au niveau de l’Union, l’Union peut prendre des mesures, conformément au principe de subsidiarité [...]

(21)

La présente directive respecte les droits fondamentaux et observe les principes reconnus notamment par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. »

4

L’article 1er de cette directive, intitulé « Objet », précise que ladite directive « établit les règles que les États membres doivent respecter en ce qui concerne la fourniture, dans un État membre, d’une assistance au recouvrement pour toute créance visée à l’article 2 née dans un autre État membre ».

5

L’article 2 de ladite directive, intitulé « Champ d’application », dispose :

« 1.   La présente directive s’applique aux créances afférentes :

a)

à l’ensemble des taxes, impôts et droits quels qu’ils soient, perçus par un État membre ou pour le compte de celui-ci ou par ses subdivisions territoriales ou administratives ou pour le compte de celles-ci, y compris les autorités locales, ou pour le compte de l’Union ;

[...]

2.   Le champ d’application de la présente directive inclut :

a)

les sanctions, amendes, redevances et majorations administratives liées aux créances pouvant faire l’objet d’une demande d’assistance mutuelle conformément au paragraphe 1, infligées par les autorités administratives chargées de la perception des taxes, impôts ou droits concernés ou des enquêtes administratives y afférentes, ou ayant été confirmées, à la demande desdites autorités administratives, par des organes administratifs ou judiciaires ;

[...]

c)

les intérêts et frais relatifs aux créances pouvant faire l’objet d’une demande d’assistance mutuelle conformément au paragraphe 1 ou aux points a) ou b) du présent paragraphe.

[...] »

6

Aux termes de l’article 8 de la même directive, intitulé « Demande de notification de certains documents relatifs à des créances » :

« 1.   À la demande de l’autorité requérante, l’autorité requise notifie au destinataire l’ensemble des documents, y compris ceux comportant une dimension judiciaire, qui émanent de l’État membre requérant et qui se rapportent à une créance visée à l’article 2 ou au recouvrement de celle-ci.

[...] »

7

L’article 10 de la directive 2010/24, intitulé « Demande de recouvrement », dispose, à son paragraphe 1 :

« À la demande de l’autorité requérante, l’autorité requise recouvre les créances qui font l’objet d’un instrument permettant l’adoption de mesures exécutoires dans l’État membre requérant. »

8

L’article 11 de cette directive, intitulé « Conditions régissant les demandes de recouvrement », énonce, à son paragraphe 1 :

« L’autorité requérante ne peut présenter de demande de recouvrement aussi longtemps que la créance et/ou l’instrument permettant l’exécution de son recouvrement dans l’État membre requérant font l’objet d’une contestation dans ledit État membre, sauf dans les cas où l’article 14, paragraphe 4, troisième alinéa, est applicable. »

9

L’article 12 de ladite directive, intitulé « Instrument permettant l’adoption de mesures exécutoires dans l’État membre requis et documents connexes », dispose :

« 1.   Toute demande de recouvrement s’accompagne d’un instrument uniformisé permettant l’adoption de mesures exécutoires dans l’État membre requis.

Cet instrument uniformisé permettant l’adoption de mesures exécutoires dans l’État membre requis reflète la substance de l’instrument initial permettant l’adoption de mesures exécutoires et constitue le fondement unique des mesures de recouvrement et des mesures conservatoires prises dans ledit État membre. Aucun acte visant à le faire reconnaître, à le compléter ou à le remplacer n’est nécessaire dans cet État membre. L’instrument uniformisé permettant l’adoption de mesures exécutoires comporte au minimum les informations suivantes :

a)

les informations permettant d’identifier l’instrument initial permettant l’adoption de mesures exécutoires, une description de la créance, y compris sa nature, la période couverte par la créance, toutes dates pertinentes pour la procédure d’exécution, le montant de la créance et de ses différentes composantes tels que le principal, les intérêts courus, etc. ;

b)

le nom du destinataire et tout autre renseignement utile à son identification ;

c)

les noms, adresses et coordonnées :

i)

du bureau responsable de la liquidation de la créance et, s’il diffère,

ii)

du bureau auprès duquel des informations complémentaires peuvent être obtenues concernant la créance ou concernant les possibilités de contestation de l’obligation de paiement.

[...] »

10

L’article 13 de la même directive, intitulé « Exécution de la demande de recouvrement », énonce :

« 1.   Aux fins du recouvrement dans l’État membre requis, toute créance faisant l’objet d’une demande de recouvrement est traitée comme une créance de l’État membre requis, sauf disposition contraire prévue dans la présente directive. L’autorité requise met en œuvre les compétences et les procédures définies par les dispositions législatives, réglementaires ou administratives de l’État membre requis applicables aux créances relatives aux mêmes droits, impôts ou taxes ou, à tout le moins, à des droits, impôts ou taxes similaires, sauf disposition contraire prévue dans la présente directive.

[...]

3.   À compter de la date de réception de la demande de recouvrement, l’autorité requise applique un intérêt de retard conformément aux dispositions législatives, réglementaires et administratives en vigueur dans l’État membre requis.

[...] »

11

L’article 14 de la directive 2010/24, intitulé « Différends », énonce :

« 1.   Les différends concernant la créance, l’instrument initial permettant l’adoption de mesures exécutoires dans l’État membre requérant ou l’instrument uniformisé permettant l’adoption de mesures exécutoires dans l’État membre requis, ainsi que les différends portant sur la validité d’une notification effectuée par une autorité compétente de l’État membre requérant, sont du ressort des instances compétentes dudit État membre. Si, au cours de la procédure de recouvrement, la créance, l’instrument initial permettant l’adoption de mesures exécutoires dans l’État membre requérant ou l’instrument uniformisé permettant l’adoption de mesures exécutoires dans l’État membre requis sont contestés par une partie intéressée, l’autorité requise informe cette partie que l’action doit être portée devant l’instance compétente de l’État membre requérant, conformément aux règles de droit en vigueur dans celui-ci.

2.   Les différends concernant les mesures exécutoires prises dans l’État membre requis ou la validité d’une notification effectuée par une autorité compétente dudit État membre sont portés devant l’instance compétente de ce dernier, conformément aux dispositions législatives et réglementaires qui y sont applicables.

3.   Lorsqu’une action visée au paragraphe 1 a été portée devant l’instance compétente de l’État membre requérant, l’autorité requérante en informe l’autorité requise et lui indique les éléments de la créance qui ne font pas l’objet d’une contestation.

4.   Dès que l’autorité requise a été informée des éléments visés au paragraphe 3, soit par l’autorité requérante, soit par la partie intéressée, elle suspend la procédure d’exécution, en ce qui concerne la partie contestée de la créance, dans l’attente de la décision de l’instance compétente en la matière, sauf demande contraire formulée par l’autorité requérante conformément au troisième alinéa.

À la demande de l’autorité requérante, ou lorsque l’autorité requise l’estime nécessaire, [...] l’autorité requise peut prendre des mesures conservatoires pour garantir le recouvrement, dans la mesure où les dispositions législatives ou réglementaires en vigueur dans l’État membre requis le permettent.

L’autorité requérante peut, conformément aux dispositions législatives et réglementaires et aux pratiques administratives en vigueur dans l’État membre requérant, demander à l’autorité requise de recouvrer une créance contestée ou la partie contestée d’une créance, pour autant que les dispositions législatives et réglementaires et les pratiques administratives en vigueur dans l’État membre requis le permettent. Toute demande en ce sens doit être motivée. Si l’issue de la contestation se révèle favorable au débiteur, l’autorité requérante est tenue de rembourser toute somme recouvrée, ainsi que toute compensation due, conformément à la législation en vigueur dans l’État membre requis.

[...] »

12

En vertu de l’article 28 de cette directive, les États membres étaient tenus d’adopter et de publier, au plus tard le 31 décembre 2011, les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à ladite directive, et d’appliquer ces dispositions à partir du 1er janvier 2012.

13

À son article 29, la directive 2010/24 a abrogé, avec effet au 1er janvier 2012, la directive 2008/55/CE du Conseil, du 26 mai 2008, concernant l’assistance mutuelle en matière de recouvrement des créances relatives à certaines cotisations, à certains droits, à certaines taxes et autres mesures (JO 2008, L 150, p. 28).

14

La directive 2008/55 avait codifié la directive 76/308/CEE du Conseil, du 15 mars 1976, concernant l’assistance mutuelle en matière de recouvrement des créances relatives à certaines cotisations, droits, taxes et autres mesures (JO 1976, L 73, p. 18), ainsi que ses actes modificatifs.

Le règlement d’exécution (UE) no 1189/2011

15

Le règlement d’exécution (UE) no 1189/2011 de la Commission, du 18 novembre 2011, fixant les modalités d’application relatives à certaines dispositions de la directive 2010/24 (JO 2011, L 302, p. 16), énonce, à son article 15, paragraphe 1 :

« Les demandes de recouvrement ou de mesures conservatoires contiennent une déclaration certifiant que les conditions prévues par la directive 2010/24/UE pour l’engagement de la procédure d’assistance mutuelle sont remplies. »

Le litige au principal et la question préjudicielle

16

M. Donnellan, qui est un ressortissant irlandais, a été recruté, au cours de l’année 2002, en tant que conducteur de véhicules poids lourds par TLT International Ltd, entreprise de transport de droit irlandais.

17

Au mois de juillet 2002, M. Donnellan a, sur l’instruction de cette entreprise, retiré, auprès d’un négociant établi en Grèce, 23 caisses d’huile d’olive. Le bordereau de livraison relatif à ces marchandises indiquait comme destinataire de celles-ci une entreprise exploitant des supermarchés en Irlande.

18

Le 26 juillet 2002, M. Donnellan a présenté ce bordereau de livraison au bureau des douanes du port de Patras (Grèce). À cette occasion, un agent des douanes a, lors d’une inspection desdites marchandises, découvert, outre l’huile d’olive, 171800 paquets de cigarettes de contrebande. Par suite de cette découverte, M. Donnellan a été arrêté et le véhicule ainsi que sa cargaison ont été saisis.

19

Le 29 juillet 2002, M. Donnellan a, en première instance, été jugé coupable de contrebande et de délivrance de données fiscales fictives. Ces infractions ont respectivement donné lieu à la condamnation de l’intéressé à trois ans et à un an d’emprisonnement. M. Donnellan a été immédiatement incarcéré.

20

Le 17 octobre 2002, M. Donnellan a été acquitté, en appel, de ces deux chefs d’accusation et a bénéficié d’une libération immédiate.

21

Le 27 avril 2009, le bureau des douanes de Patras a émis un avis tendant à ce qu’une sanction administrative d’un montant de 1097505 euros soit infligée à M. Donnellan, en raison du fait que la cargaison saisie au mois de juillet 2002 contenait 171800 paquets de cigarettes de contrebande.

22

Le 19 juin 2009, l’ambassade de Grèce en Irlande a adressé un courrier recommandé à « M. Donnellan Eamonn Ballyhaunis, Ireland », invitant celui-ci à prendre contact dans les meilleurs délais avec ses services, afin qu’il puisse venir réceptionner et signer des documents importants le concernant.

23

Par une décision du 15 juillet 2009, faisant suite à l’avis du 27 avril 2009, le bureau des douanes de Patras a infligé à M. Donnellan la sanction pécuniaire de 1097505 euros. Le même jour, cette sanction a été publiée au Journal officiel de la République hellénique.

24

Le 14 novembre 2012, les autorités helléniques ont transmis aux Commissioners une demande de recouvrement, au sens de l’article 10 de la directive 2010/24, rédigée en langue anglaise et portant sur ladite sanction pécuniaire de 1097505 euros, majorée d’intérêts d’un montant de 384126,76 euros et de frais ou de pénalités s’élevant à 26340,12 euros.

25

Cette demande contenait notamment, au titre de la déclaration, exigée à l’article 15 du règlement d’exécution no 1189/2011, certifiant que les conditions prévues par la directive 2010/24 pour l’engagement de la procédure d’assistance mutuelle étaient remplies, les informations suivantes :

« The claim(s) is (are) not contested » [« La (les) créance(s) n’est (ne sont) pas contesté(es) »] ;

« The claim(s) may no longer be contested by an administrative appeal/by an appeal to the courts » [« La (les) créance(s) ne peut (ne peuvent) plus être contesté(es) par un recours administratif/par un recours juridictionnel »] ;

« Appropriate recovery procedures have been applied in the State of the applicant authority but will not result in the payment in full of the claim » [« Des procedures de recouvrement appropriées ont été appliquées dans l’État de l’autorité requérante, mais ne conduiront pas au paiement intégral de la créance »].

26

Le 15 novembre 2012, M. Donnellan a reçu des Commissioners une lettre, portant la date du 14 novembre 2012, lui réclamant, dans un délai de 30 jours, la somme de 1507971,88 euros au titre du recouvrement de la sanction pécuniaire, des intérêts et des frais ou pénalités faisant l’objet de la demande des autorités helléniques.

27

À cette lettre était joint l’« instrument uniformisé » visé à l’article 12 de la directive 2010/24, rédigé en langue anglaise. Cet instrument faisait référence à la décision susvisée du bureau des douanes de Patras et qualifiait la créance concernée de la manière suivante : « Multiple duties for illegal cigarette trading » (dettes diverses en raison de contrebande de cigarettes).

28

Ce même instrument mentionnait le numéro du passeport de M. Donnellan et qualifiait l’adresse de l’intéressé de « known » (connue).

29

Dès réception de ladite lettre du 14 novembre 2012, M. Donnellan a mandaté un solicitor aux fins d’obtenir des précisions au sujet de la décision du bureau des douanes de Patras.

30

Le 11 juin 2014, M. Donnellan a engagé une procédure devant la High Court (Haute Cour, Irlande), en vue d’obtenir une dispense d’exécution de la demande de recouvrement des sommes réclamées.

31

Le 12 décembre 2014, une ordonnance de référé suspendant l’exécution de cette demande a été rendue par cette juridiction, dans l’attente de la résolution au fond de l’affaire.

32

Les Commissioners soutiennent devant la High Court (Haute Cour) que, en l’absence de recours introduit par M. Donnellan en Grèce en ce qui concerne la créance en cause, ils sont tenus de donner une suite favorable à la demande de recouvrement et de poursuivre l’exécution forcée de celle-ci.

33

M. Donnellan fait valoir qu’il a été privé de son droit à un recours effectif en Grèce et que, dans ces circonstances, il ne peut être donné une suite favorable, par les Commissioners, à ladite demande de recouvrement.

34

À cet égard, M. Donnellan a notamment produit devant la juridiction de renvoi un rapport dressé par M. Siaperas, expert en droit hellénique. Selon ce rapport, la dernière date à laquelle M. Donnellan aurait pu introduire un recours contre la décision du bureau des douanes de Patras était le 13 octobre 2009, à savoir 90 jours après la publication de la sanction auJournal officiel de la République hellénique.

35

La juridiction de renvoi déduit de l’ensemble des pièces du dossier, premièrement, que la lettre recommandée du 19 juin 2009, adressée par l’ambassade de Grèce à M. Donnellan, n’a pas été délivrée à ce dernier, deuxièmement, que celui-ci a pris connaissance de l’existence de la décision lui infligeant la sanction pécuniaire le 15 novembre 2012 et, troisièmement, qu’il n’a été informé du contenu et des motifs de cette décision que par des courriers ultérieurs, notamment par des lettres du 31 mars 2014 et du 29 décembre 2015 du ministère des Finances hellénique.

36

Selon la juridiction de renvoi, il ressort de la jurisprudence constante des juridictions irlandaises, de la Constitution irlandaise, ainsi que des obligations de l’Irlande au regard de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci‑après la « CEDH »), qu’aucun juge irlandais ne peut autoriser l’exécution d’une décision, telle que celle en cause au principal, qui n’a pas été notifiée à l’intéressé et qui est, par ailleurs, fondée sur des faits pour lesquels l’innocence de ce dernier a été constatée. En effet, l’exécution d’une telle décision porterait atteinte, en Irlande, à l’ordre public.

37

Tout en considérant que la directive 2010/24 ne permet pas de contester la légalité de la décision des autorités helléniques devant les juridictions irlandaises, la juridiction de renvoi estime que les principes du droit de l’Union, tels qu’ils ressortent de l’arrêt du 14 janvier 2010, Kyrian (C‑233/08, EU:C:2010:11), suggèrent néanmoins que des circonstances exceptionnelles peuvent autoriser la juridiction de renvoi à se fonder sur la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») pour refuser l’exécution d’une demande de recouvrement telle que celle en cause au principal.

38

Dans ces conditions, la High Court (Haute Cour) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« L’article 14, paragraphes 1 et 2, de la directive 2010/24 s’oppose-t-il à ce que, pour déterminer le caractère exécutoire en Irlande d’un “instrument uniformisé permettant l’adoption de mesures exécutoires”, délivré le 14 novembre 2012 par le bureau des douanes de Patras, concernant des pénalités et amendes administratives d’un montant de 1097505 euros infligées le 15 juillet 2009 pour des faits présumés de contrebande ayant eu lieu le 26 juillet 2002 (montant s’étant par la suite élevé à 1507971,88 euros en raison d’intérêts et de pénalités), la High Court (Haute Cour) :

applique, concernant la demande d’exécution, le droit à un recours effectif et à un procès équitable dans un délai raisonnable pour un citoyen irlandais et de l’Union européenne (article 47 de la Charte et articles 6 et 13 de la CEDH, dont le contenu correspond aux droits octroyés aux citoyens par les articles 34, 38 et 40.3 de la Constitution irlandaise), dans des circonstances dans lesquelles la procédure concernée n’a été expliquée pour la première fois à [l’intéressé] qu’au moyen d’une “traduction non officielle” en anglais [...] dans une lettre en date du [29 décembre 2015] adressée par le ministère des Finances [hellénique] [...] à l’administration fiscale irlandaise et aux avocats représentant [l’intéressé] en Irlande ;

tienne compte des objectifs de la directive 2010/24 de fournir une assistance mutuelle (considérant 20 de la directive 2010/24) et de respecter l’obligation de fournir une assistance plus large découlant de la CEDH (considérant 17 de la directive 2010/24), tel que le droit des citoyens à un recours effectif, prévu à l’article 47 de la Charte et à l’article 13 de la CEDH ;

prenne en considération la pleine efficacité du droit de l’Union pour ses citoyens, eu égard notamment au point 63 de l’arrêt du 14 janvier 2010, Kyrian, C‑233/08, [EU:C:2010:11] ? »

Sur la question préjudicielle

39

Par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 14, paragraphes 1 et 2, de la directive 2010/24 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce qu’une autorité d’un État membre refuse l’exécution d’une demande de recouvrement portant sur une créance afférente à une sanction pécuniaire infligée dans un autre État membre, pour des motifs liés au droit de l’intéressé à un recours effectif devant un tribunal.

40

Il convient de rappeler d’emblée que le principe de confiance mutuelle entre les États membres a, dans le droit de l’Union, une importance fondamentale étant donné qu’il permet la création et le maintien d’un espace sans frontières intérieures. Ce principe impose, notamment en ce qui concerne l’espace de liberté, de sécurité et de justice, à chacun de ces États de considérer, sauf dans des circonstances exceptionnelles, que tous les autres États membres respectent le droit de l’Union et, tout particulièrement, les droits fondamentaux reconnus par ce droit [avis 2/13 (Adhésion de l’Union à la CEDH), du 18 décembre 2014, EU:C:2014:2454, point 191 et jurisprudence citée].

41

Tout en relevant du domaine du marché intérieur, et non de celui de l’espace de liberté, de sécurité et de justice, la directive 2010/24 repose également sur le principe de confiance mutuelle rappelé ci-dessus. En effet, la mise en œuvre du régime d’assistance mutuelle instauré par cette directive dépend de l’existence d’une telle confiance entre les autorités nationales concernées.

42

Il ressort, en particulier, de l’article 12, paragraphe 1, de cette directive que le recouvrement de la créance dans l’État membre requis est fondé sur l’« instrument uniformisé » par lequel l’autorité requérante transmet, à l’autorité requise, des données figurant dans l’instrument initial permettant l’adoption de mesures exécutoires dans l’État membre requérant. Aucun acte visant à faire reconnaître, à compléter ou à remplacer cet instrument uniformisé n’est nécessaire dans l’État membre requis.

43

Il découle, en outre, de l’article 14, paragraphe 1, de la directive 2010/24 que toute contestation de la créance, de cet instrument initial, de cet instrument uniformisé ou d’une notification effectuée par une autorité compétente de l’État membre requérant doit être portée devant les instances compétentes de cet État membre et non pas devant celles de l’État membre requis.

44

La directive 2010/24, loin de conférer aux instances de l’État membre requis un pouvoir de contrôler les actes de l’État membre requérant, limite expressément, à son article 14, paragraphe 2, le pouvoir de contrôle de ces instances aux actes de l’État membre requis.

45

Si, certes, les actes pris par les États membres en vertu du régime d’assistance mutuelle établi par la directive 2010/24 doivent être conformes aux droits fondamentaux de l’Union, parmi lesquels figure le droit à un recours effectif énoncé à l’article 47 de la Charte, il n’en découle nullement que les actes de l’État membre requérant devraient pouvoir être attaqués tant devant les juridictions de cet État membre que devant celles de l’État membre requis. Au contraire, ce régime d’assistance, en ce qu’il se fonde, notamment, sur le principe de confiance mutuelle, permet d’accroître la sécurité juridique en ce qui concerne la détermination de l’État membre dans le ressort duquel des différends sont traités et, ainsi, d’éviter le forum shopping (voir, par analogie, arrêt du 21 décembre 2011, N. S. e.a., C‑411/10 et C‑493/10, EU:C:2011:865, point 79).

46

Il s’ensuit que le recours que l’intéressé introduit dans l’État membre requis pour écarter la demande de paiement que lui a adressée l’autorité compétente de cet État membre aux fins du recouvrement de la créance instituée dans l’État membre requérant, ne saurait conduire à un examen de la légalité de cette créance.

47

En revanche, ainsi que la Cour l’a déjà relevé, il ne saurait être exclu que l’autorité requise puisse, à titre exceptionnel, décider de ne pas accorder son assistance à l’autorité requérante. Ainsi, l’exécution de la demande de recouvrement de la créance peut notamment être refusée s’il s’avère que cette exécution serait de nature à porter atteinte à l’ordre public de l’État membre dont relève l’autorité requise (voir, en ce qui concerne l’article 12 de la directive 76/308, auquel correspond, en substance, l’article 14 de la directive 2010/24, arrêt du 14 janvier 2010, Kyrian, C‑233/08, EU:C:2010:11, point 42).

48

À cet égard, il importe de relever que, conformément à l’article 13, paragraphe 1, de la directive 2010/24, la créance faisant l’objet d’une demande de recouvrement est traitée comme une créance de l’État membre requis, ce dernier étant ainsi amené à mettre en œuvre les compétences et les procédures définies par les dispositions législatives, réglementaires ou administratives applicables aux créances relatives aux droits, impôts ou taxes identiques ou similaires dans son ordre juridique. Or, il est difficilement concevable qu’un titre permettant l’exécution du recouvrement d’une créance identique ou similaire de l’État membre requis soit exécuté par celui-ci si cette exécution est de nature à porter atteinte à son ordre public (voir, par analogie, en ce qui concerne la directive 76/308, arrêt du 14 janvier 2010, Kyrian, C‑233/08, EU:C:2010:11, point 43).

49

Cela étant, il appartient à la Cour de contrôler les limites dans lesquelles les autorités d’un État membre peuvent refuser, en ayant recours à des conceptions nationales telles que celles relatives à leur ordre public, d’accorder leur assistance à un autre État membre dans le cadre d’un régime de coopération établi par le législateur de l’Union (voir, en ce sens, arrêts du 28 avril 2009, Apostolides, C‑420/07, EU:C:2009:271, points 56 et 57, ainsi que du 25 mai 2016, Meroni, C‑559/14, EU:C:2016:349, points 39 et 40).

50

Il est, en outre, de jurisprudence constante que les limitations du principe de confiance mutuelle sont d’interprétation stricte (voir, notamment, arrêts du 14 novembre 2013, Baláž, C‑60/12, EU:C:2013:733, point 29 ; du 16 juillet 2015, Diageo Brands, C‑681/13, EU:C:2015:471, point 41 ; du 25 mai 2016, Meroni, C‑559/14, EU:C:2016:349, point 38, et du 23 janvier 2018, Piotrowski, C‑367/16, EU:C:2018:27, point 48).

51

En l’occurrence, nonobstant la déclaration figurant dans la demande de recouvrement, selon laquelle des procédures de recouvrement ont été appliquées dans l’État membre requérant, il est constant, selon la décision de renvoi, que ce n’est qu’à la date à laquelle l’autorité compétente de l’État membre requis a transmis à l’intéressé la demande de paiement accompagnée de l’instrument uniformisé que celui-ci a eu connaissance du fait que, plusieurs années auparavant, une sanction pécuniaire lui avait été infligée dans l’État membre requérant. La juridiction de renvoi constate, au demeurant, que c’est longtemps après qu’il eut pris connaissance de l’existence de cette sanction que l’intéressé a obtenu des informations plus précises sur le contenu et les motifs de la décision par laquelle cette sanction lui a été infligée.

52

Dans ces conditions, cette juridiction estime qu’un refus d’exécution de la demande de recouvrement pourrait se justifier pour des motifs liés au droit à un recours juridictionnel effectif et au fait que, en Irlande, l’exécution d’une sanction pécuniaire non notifiée à l’intéressé est contraire à l’ordre public.

53

Aux fins d’apprécier si des circonstances telles que celles visées par la juridiction de renvoi peuvent, sans méconnaître le principe de confiance mutuelle, conduire à un refus d’exécution, il importe de relever, tout d’abord, que l’instrument uniformisé, adressé par l’autorité requérante à l’autorité requise aux fins du recouvrement d’une créance et transmis par cette dernière à l’intéressé en annexe à la demande de paiement, n’a pas pour fonction de notifier à l’intéressé la décision, adoptée dans l’État membre dont relève l’autorité requérante, qui fonde cette créance. Cet instrument, qui, ainsi qu’il a été rappelé au point 9 du présent arrêt, mentionne, notamment, le type de créance, le quantum de celle-ci ainsi que les données personnelles de l’intéressé, a pour but de permettre aux autorités de l’État membre requis d’adopter des mesures d’exécution et de prêter ainsi leur assistance au recouvrement. En revanche, la communication dudit instrument, sans que la décision infligeant la sanction pécuniaire et la motivation de celle-ci soient transmises à l’intéressé, ne constitue pas une notification de cette décision.

54

Il y a lieu, ensuite, de rappeler que le régime d’assistance mutuelle en matière de recouvrement de créances vise notamment à garantir l’accomplissement effectif des notifications de tous actes et décisions relatifs à une créance ou à son recouvrement, émanant de l’État membre où l’autorité requérante a son siège (voir, en ce qui concerne la directive 76/308, arrêt du 14 janvier 2010, Kyrian, C‑233/08, EU:C:2010:11, point 57). L’article 8 de la directive 2010/24 prévoit, à cet égard, la possibilité, pour l’autorité ayant émis la créance, de solliciter de l’autorité compétente de l’État membre de résidence de l’intéressé une assistance à la notification des documents relatifs à cette créance.

55

Il importe, enfin, de souligner que, aux fins de pouvoir exercer son droit à un recours juridictionnel effectif, au sens de l’article 47 de la Charte, contre une décision lui faisant grief, l’intéressé doit connaître les motifs sur lesquels est fondée la décision prise à son égard soit par la lecture de la décision elle-même, soit par une communication de ces motifs faite sur sa demande, afin qu’il puisse défendre ses droits dans les meilleures conditions possibles et décider en pleine connaissance de cause s’il est utile de saisir le juge compétent (arrêt du 4 juin 2013, ZZ, C‑300/11, EU:C:2013:363, point 53 et jurisprudence citée).

56

Dans des circonstances telles que celles constatées par la juridiction de renvoi dans l’affaire au principal, l’intéressé est soumis à la procédure d’exécution de la demande de recouvrement visée par la directive 2010/24, nonobstant le fait que la sanction pécuniaire en cause ne lui a pas été notifiée. L’intéressé est ainsi placé dans une situation dans laquelle le paiement du montant de ladite sanction, majoré des intérêts et des frais visés à l’article 2, paragraphe 2, sous c), de cette directive ainsi que de l’intérêt de retard prévu à l’article 13, paragraphe 3, de celle-ci, lui est réclamé par l’autorité requise, alors même que, à défaut d’une connaissance suffisante du contenu et des motifs de la décision lui infligeant la sanction, il n’a pas été en mesure de contester celle-ci dans l’État membre dont relève l’autorité requérante.

57

Or, ainsi que l’a relevé en substance M. l’avocat général au point 70 de ses conclusions, une situation dans laquelle l’autorité requérante sollicite le recouvrement d’une créance fondée sur une décision qui n’a pas été notifiée à l’intéressé n’est pas conforme à la condition régissant les demandes de recouvrement, énoncée à l’article 11, paragraphe 1, de la directive 2010/24. En effet, dès lors que, selon cette disposition, une demande de recouvrement, au sens de cette directive, ne peut être présentée aussi longtemps que la créance et/ou l’instrument permettant l’exécution de son recouvrement dans l’État membre d’origine font l’objet d’une contestation dans cet État membre, une telle demande ne peut non plus être présentée lorsque l’intéressé n’a pas été informé de l’existence même de cette créance, cette information constituant un préalable nécessaire pour que celle-ci puisse être contestée.

58

Cette interprétation est, par ailleurs, confortée par l’article 47 de la Charte et par la jurisprudence de la Cour en matière de signification et de notification d’actes judiciaires. Il ressort notamment de cette jurisprudence que, afin de garantir le respect des droits prévus audit article 47, il importe de veiller non seulement à ce que le destinataire d’un acte reçoive réellement l’acte en cause, mais également à ce qu’il soit mis en mesure de connaître ainsi que de comprendre de façon effective et complète le sens et la portée de l’action engagée contre lui à l’étranger, de telle sorte qu’il puisse utilement faire valoir ses droits dans l’État membre d’origine (voir, en ce sens, arrêt du 16 septembre 2015, Alpha Bank Cyprus, C‑519/13, EU:C:2015:603, points 31 et 32, ainsi que jurisprudence citée). De telles considérations sont pertinentes également dans le contexte de la directive 2010/24.

59

Par conséquent, lorsqu’une demande de recouvrement est présentée, alors même que l’intéressé n’a pas eu la possibilité de saisir les juridictions de l’État membre requérant dans des conditions compatibles avec le droit fondamental à un recours effectif, la règle énoncée à l’article 14, paragraphe 1, de la directive 2010/24, telle que transposée dans le droit national, ne saurait raisonnablement lui être opposée.

60

Il en va a fortiori ainsi lorsque, comme en l’espèce, l’autorité requérante a elle-même indiqué, dans la demande de recouvrement, et donc à une date antérieure à celle à laquelle l’intéressé a eu connaissance de l’existence de la créance en cause, qu’il n’était plus possible d’introduire un recours administratif ou juridictionnel dans l’État membre requérant pour contester cette créance. Si, certes, le gouvernement hellénique a, ultérieurement, dans ses observations devant la Cour, affirmé le contraire, en faisant valoir que la possibilité d’introduire un recours ne s’était pas éteinte par suite de l’expiration du délai de recours déclenché par la publication de cette créance au Journal officiel de la République hellénique, il ne saurait être reproché à l’intéressé d’avoir pris en considération l’information fournie par l’autorité requérante dans la demande de recouvrement, dont il avait, après avoir eu connaissance de l’existence de ladite créance, reçu copie et qu’il avait fait vérifier par un expert en droit hellénique, qui l’avait confirmée.

61

Il résulte de ce qui précède qu’une situation exceptionnelle telle que celle en cause au principal, dans laquelle une autorité d’un État membre demande à une autorité d’un autre État membre de recouvrer une créance afférente à une sanction pécuniaire dont l’intéressé n’a pas eu connaissance, peut légitimement conduire à un refus d’assistance au recouvrement de la part de cette dernière autorité. L’assistance prévue par la directive 2010/24 est, ainsi que l’intitulé et divers considérants de cette dernière l’indiquent, qualifiée de « mutuelle », ce qui implique, notamment, qu’il appartient à l’autorité requérante de créer, avant qu’elle présente une demande de recouvrement, les conditions dans lesquelles l’autorité requise pourra utilement et en conformité avec les principes fondamentaux du droit de l’Union accorder son assistance.

62

Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la question posée que l’article 14, paragraphes 1 et 2, de la directive 2010/24, lu à la lumière de l’article 47 de la Charte, doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à ce qu’une autorité d’un État membre refuse l’exécution d’une demande de recouvrement portant sur une créance afférente à une sanction pécuniaire infligée dans un autre État membre, telle que celle en cause au principal, au motif que la décision infligeant cette sanction n’a pas été dûment notifiée à l’intéressé avant que la demande de recouvrement ne soit présentée à ladite autorité en application de cette directive.

Sur les dépens

63

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (deuxième chambre) dit pour droit :

 

L’article 14, paragraphes 1 et 2, de la directive 2010/24/UE du Conseil, du 16 mars 2010, concernant l’assistance mutuelle en matière de recouvrement des créances relatives aux taxes, impôts, droits et autres mesures, lu à la lumière de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à ce qu’une autorité d’un État membre refuse l’exécution d’une demande de recouvrement portant sur une créance afférente à une sanction pécuniaire infligée dans un autre État membre, telle que celle en cause au principal, au motif que la décision infligeant cette sanction n’a pas été dûment notifiée à l’intéressé avant que la demande de recouvrement ne soit présentée à ladite autorité en application de cette directive.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : l’anglais.

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