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Document 62016CJ0649

    Arrêt de la Cour (première chambre) du 20 décembre 2017.
    Peter Valach e.a. contre Waldviertler Sparkasse Bank AG e.a.
    Demande de décision préjudicielle, introduite par l'Oberster Gerichtshof.
    Renvoi préjudiciel – Coopération judiciaire en matière civile – Règlement (UE) no 1215/2012 – Champ d’application – Action en responsabilité délictuelle contre les membres d’un comité des créanciers ayant refusé un plan de redressement dans une procédure d’insolvabilité.
    Affaire C-649/16.

    Court reports – general – 'Information on unpublished decisions' section

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2017:986

    ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

    20 décembre 2017 ( *1 )

    « Renvoi préjudiciel – Coopération judiciaire en matière civile – Règlement (UE) no 1215/2012 – Champ d’application – Action en responsabilité délictuelle contre les membres d’un comité des créanciers ayant refusé un plan de redressement dans une procédure d’insolvabilité »

    Dans l’affaire C‑649/16,

    ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par l’Oberster Gerichtshof (Cour suprême, Autriche), par décision du 30 novembre 2016, parvenue à la Cour le 19 décembre 2016, dans la procédure

    Peter Valach,

    Alena Valachová,

    SC Europa ZV II a.s.,

    SC Europa LV a.s.,

    VAV Parking a.s.,

    SC Europa BB a.s.,

    Byty A s.r.o.

    contre

    Waldviertler Sparkasse Bank AG,

    Československá obchodná banka a.s.,

    Stadt Banská Bystrica,

    LA COUR (première chambre),

    composée de Mme R. Silva de Lapuerta (rapporteur), président de chambre, MM. J.‑C. Bonichot, A. Arabadjiev, S. Rodin et E. Regan, juges,

    avocat général : M. M. Szpunar,

    greffier : M. A. Calot Escobar,

    vu la procédure écrite,

    considérant les observations présentées :

    pour M. Valach, Mme Valachová, SC Europa ZV II a.s., SC Europa LV a.s., VAV Parking a.s., SC Europa BB a.s. et Byty A s.r.o., par Me Z. Nötstaller, Rechtsanwältin,

    pour Waldviertler Sparkasse Bank AG, Československá obchodná banka a.s. et Stadt Banská Bystrica, par Me S. Fruhstorfer, Rechtsanwältin,

    pour le gouvernement espagnol, par Mme M. J. García-Valdecasas Dorrego, en qualité d’agent,

    pour la Commission européenne, par M. M. Wilderspin et Mme M. Heller, en qualité d’agents,

    vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

    rend le présent

    Arrêt

    1

    La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 1er, paragraphe 2, sous b), du règlement (UE) no 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2012, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 2012, L 351, p. 1).

    2

    Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Peter Valach, Mme Alena Valachová, SC Europa ZV II a.s, SC Europa LV a.s., VAV Parking a.s., SC Europa BB a.s. et Byty A s.r.o. à Waldviertler Sparkasse Bank AG, Československá obchodná banka a.s. et Stadt Banská Bystrica (la ville de Banská Bystrica) au sujet d’une action en responsabilité délictuelle à la suite du refus d’un plan de redressement dans le cadre de la procédure d’insolvabilité concernant VAV invest s.r.o.

    Le cadre juridique

    Le droit de l’Union

    Le règlement no 1215/2012

    3

    Les considérants 10 et 34 du règlement no 1215/2012 énoncent :

    « (10)

    Il est important d’inclure dans le champ d’application matériel du présent règlement l’essentiel de la matière civile et commerciale, à l’exception de certaines matières bien définies [...]

    [...]

    (34)

    Pour assurer la continuité nécessaire entre la convention [du 27 septembre 1968 concernant la compétence judiciaire et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 1972, L 299, p. 32), telle que modifiée par les conventions successives relatives à l’adhésion des nouveaux États membres à cette convention (ci-après la “convention de Bruxelles”)], le règlement (CE) no 44/2001 [du Conseil, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 2001, L 12, p. 1),] et le présent règlement, il convient de prévoir des dispositions transitoires. La même continuité doit être assurée en ce qui concerne l’interprétation par la Cour de justice de l’Union européenne de la convention de Bruxelles [...] et des règlements qui la remplacent. »

    4

    L’article 1er, paragraphe 2, sous b), du règlement no 1215/2012 est rédigé comme suit :

    « Sont exclus de son application :

    [...]

    b)

    les faillites, les concordats et d’autres procédures analogues ».

    Le règlement (CE) no 1346/2000

    5

    Les considérants 4, 6 et 7 du règlement (CE) no 1346/2000 du Conseil, du 29 mai 2000, relatif aux procédures d’insolvabilité (JO 2000, L 160, p. 1), prévoient :

    « (4)

    Il est nécessaire, pour assurer le bon fonctionnement du marché intérieur, d’éviter que les parties ne soient incitées à déplacer des avoirs ou des procédures judiciaires d’un État à un autre en vue d’améliorer leur situation juridique (forum shopping).

    [...]

    (6)

    Conformément au principe de proportionnalité, le présent règlement devrait se limiter à des dispositions qui règlent la compétence pour l’ouverture de procédures d’insolvabilité et la prise des décisions qui dérivent directement de la procédure d’insolvabilité et qui s’y insèrent étroitement. Le présent règlement devrait, en outre, contenir des dispositions relatives à la reconnaissance de ces décisions et au droit applicable, qui satisfont également à ce principe.

    (7)

    Les procédures d’insolvabilité relatives à la faillite d’entreprises insolvables ou d’autres personnes morales, les concordats et les autres procédures analogues sont exclues du champ d’application de la convention de Bruxelles [...] »

    6

    L’article 3, paragraphe 1, de ce règlement établit :

    « Les juridictions de l’État membre sur le territoire duquel est situé le centre des intérêts principaux du débiteur sont compétentes pour ouvrir la procédure d’insolvabilité. Pour les sociétés et les personnes morales, le centre des intérêts principaux est présumé, jusqu’à preuve contraire, être le lieu du siège statutaire. »

    Le droit slovaque

    7

    L’article 415 du Občiansky zákonník (code civil slovaque) prévoit :

    « Chacun est tenu de se comporter de manière à ce qu’aucun dommage ne soit causé à la santé, au patrimoine, à la nature et à l’environnement. »

    8

    L’article 420, paragraphe 1, de ce code est ainsi libellé :

    « Chacun est responsable du dommage qu’il a causé en manquant à une obligation juridique. »

    9

    Selon la demande de décision préjudicielle, la procédure d’insolvabilité, en droit slovaque, distingue entre la procédure de faillite et la procédure d’assainissement. Cette dernière est régie par les articles 108 à 165 de la loi sur l’insolvabilité.

    10

    Selon l’article 127, paragraphe 1, de la loi sur l’insolvabilité, le comité des créanciers est composé de trois ou de cinq membres qui sont désignés par l’assemblée des créanciers conformément à ladite loi. Selon le paragraphe 4 de cet article, tous les membres du comité des créanciers sont tenus d’agir dans l’intérêt commun de l’ensemble des créanciers.

    11

    Ce comité a pour mission, avec l’assemblée des créanciers, d’approuver, conformément à l’article 133, paragraphe 1, de ladite loi, le plan de redressement qui doit être établi par le débiteur failli. Si le comité des créanciers rejette le plan de redressement ou n’adopte pas de décision dans les délais prévus à l’article 144, paragraphe 1, de la loi sur l’insolvabilité, il appartient au syndic de demander sans délai l’ouverture de la procédure de faillite, conformément à l’article 144, paragraphe 2, de cette loi.

    Le litige au principal et la question préjudicielle

    12

    VAV invest est une société de droit slovaque dont les actifs font l’objet d’une procédure d’assainissement ouverte en Slovaquie. Waldviertler Sparkasse Bank, Československá obchodná banka et Stadt Banská Bystrica (la ville de Banská Bystrica) ont été désignées en tant que membres du comité des créanciers.

    13

    VAV invest a présenté, ainsi qu’il est prévu par la loi sur l’insolvabilité, un plan de redressement. Cependant, le comité des créanciers, lors de la réunion du 11 décembre 2015, a rejeté ce plan sans fournir de justification compréhensible, ce qui a entraîné l’échec de la procédure d’assainissement et la liquidation des actifs de VAV invest dans le cadre de la procédure de faillite ouverte par la suite.

    14

    En raison du rejet du plan de redressement, d’une part, M. Valach et Mme Valachová soutiennent avoir subi un préjudice à cause de la perte de valeur importante des parts sociales de VAV invest qu’ils détenaient, ainsi qu’une perte de revenus. D’autre part, SC Europa ZV II, SC Europa LV, VAV Parking, SC Europa BB et Byty A, en qualité de sociétés de projet, auraient subi quant à elles un préjudice causé par le risque d’échec de projets de construction ou par le retard de ceux-ci.

    15

    Les requérants au principal ont saisi le Landesgericht Krems an der Donau (tribunal régional de Krems an der Donau, Autriche) d’une action en responsabilité et soutiennent que Waldviertler Sparkasse Bank, Československá obchodná banka et Stadt Banská Bystrica (la ville de Banská Bystrica) ont méconnu l’obligation générale de prévention prévue à l’article 415 du code civil slovaque ainsi que les obligations qui leur incombent en qualité de membres du comité des créanciers en vertu de la loi sur l’insolvabilité, notamment en ce qui concerne l’obligation d’agir dans l’intérêt commun de l’ensemble des créanciers, et qu’elles sont, en conséquence, responsables des préjudices qu’ils ont subis, en application de l’article 420 du code civil slovaque.

    16

    Le Landesgericht Krems an der Donau (tribunal régional de Krems an der Donau) a rejeté le recours sans examen au fond, pour défaut de compétence internationale. Selon cette juridiction, l’action en responsabilité en cause est indissociable de la fonction des défenderesses au principal en tant que membres du comité des créanciers et des obligations qui en découlent au titre de la loi sur l’insolvabilité. Cette action en responsabilité découlerait donc directement du droit de l’insolvabilité et serait en lien étroit avec celui-ci. Elle serait donc exclue du champ d’application du règlement no 1215/2012 en vertu de l’article 1er, paragraphe 2, sous b), de ce règlement et, partant, il y aurait lieu de lui appliquer le règlement no 1346/2000. Dans ce cas, le tribunal compétent serait celui qui a ouvert la procédure d’insolvabilité.

    17

    Les requérants au principal ont fait appel devant l’Oberlandesgericht Wien (tribunal régional supérieur de Vienne, Autriche), lequel a confirmé le rejet du recours pour absence de compétence internationale dans la mesure où l’action en cause relève de la procédure d’insolvabilité en ce qu’elle a trait au non-respect par un organe obligatoire prévu par celle-ci des obligations qui lui incombent dans l’intérêt de la masse des créanciers. Elle relèverait, en tant qu’action annexe à la procédure d’insolvabilité, de l’exception prévue à l’article 1er, paragraphe 2, sous b), du règlement no 1215/2012.

    18

    Les requérants au principal ont formé un pourvoi en cassation devant l’Oberster Gerichtshof (Cour suprême, Autriche).

    19

    Dans ce contexte, la juridiction de renvoi s’interroge quant à la délimitation des champs d’application respectifs des règlements nos 1215/2012 et 1346/2000, notamment en ce qui concerne une action en responsabilité dirigée contre des membres d’un comité des créanciers en raison de leur comportement lors d’un vote dans le cadre d’une procédure d’insolvabilité.

    20

    Dans ces conditions, l’Oberster Gerichtshof (Cour suprême) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

    « L’article 1er, paragraphe 2, sous b), du règlement [...] no 1215/2012 [...] doit-il être interprété en ce sens qu’une action ayant pour objet une demande en dommages et intérêts pour responsabilité délictuelle formée contre des membres d’un comité des créanciers en raison de leur comportement illégal lors d’un vote portant sur un plan de redressement dans le cadre d’une procédure d’insolvabilité par les titulaires de parts sociales dans la débitrice faillie, comme c’est le cas [de M. Valach et de Mme Valachová], et par les sociétés de projet qui étaient en relation commerciale avec la débitrice faillie, comme c’est le cas [de SC Europa ZV II, de SC Europa LV, de VAV Parking, de SC Europa BB et de Byty A], relève de l’insolvabilité au sens de l’article 1er, paragraphe 2, sous b), du règlement no 1215/2012 et est, dès lors, exclue du champ d’application matériel dudit règlement ? »

    Sur la question préjudicielle

    21

    Par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 1er, paragraphe 2, sous b), du règlement no 1215/2012 doit être interprété en ce sens que cette disposition s’applique à une action en responsabilité délictuelle, formée contre les membres d’un comité des créanciers en raison de leur comportement lors d’un vote portant sur un plan de redressement dans le cadre d’une procédure d’insolvabilité, et que, dès lors, une telle action est exclue du champ d’application matériel de ce règlement.

    22

    La réponse à la question préjudicielle exige de déterminer la portée de la compétence de la juridiction ayant ouvert la procédure d’insolvabilité, dans la mesure où l’article 1er, paragraphe 2, sous b), du règlement no 1215/2012, qui s’applique en matière civile et commerciale, exclut de son champ d’application les « faillites, concordats et d’autres procédures analogues ».

    23

    À cet égard, il y a lieu de rappeler que, conformément au considérant 34 du règlement no 1215/2012, il convient d’assurer la continuité nécessaire, d’une part, entre la convention de Bruxelles, le règlement no 44/2001 et le règlement no 1215/2012, et, d’autre part, en ce qui concerne l’interprétation par la Cour de cette convention et des règlements qui la remplacent.

    24

    En outre, la Cour a jugé que les règlements nos 1215/2012 et 1346/2000 doivent être interprétés de façon à éviter tout chevauchement entre les règles de droit que ces textes énoncent et tout vide juridique. Ainsi, les actions exclues, au titre de l’article 1er, paragraphe 2, sous b), du règlement no 1215/2012, du champ d’application de ce dernier, en tant qu’elles relèvent des « faillites, concordats et autres procédures analogues », relèvent du champ d’application du règlement no 1346/2000. Symétriquement, les actions qui n’entrent pas dans le champ d’application de l’article 3, paragraphe 1, du règlement no 1346/2000 relèvent du champ d’application du règlement no 1215/2012 (voir, en ce sens, arrêt du 9 novembre 2017, Tünkers France et Tünkers Maschinenbau, C‑641/16, EU:C:2017:847, point 17).

    25

    Ainsi qu’il découle notamment du considérant 10 du règlement no 1215/2012, l’intention du législateur de l’Union a été de retenir une conception large de la notion de « matière civile et commerciale » figurant à l’article 1er, paragraphe 1, de ce règlement et, par conséquent, un champ d’application large de ce dernier. En revanche, le champ d’application du règlement no 1346/2000, conformément à son considérant 6, ne doit pas faire l’objet d’une interprétation large (voir, en ce sens, arrêt du 9 novembre 2017, Tünkers France et Tünkers Maschinenbau, C‑641/16, EU:C:2017:847, point 18 ainsi que jurisprudence citée).

    26

    En application de ces principes, la Cour a jugé que seules les actions qui dérivent directement d’une procédure d’insolvabilité et qui s’y insèrent étroitement sont exclues du champ d’application du règlement no 1215/2012. Par voie de conséquence, seules ces actions entrent dans le champ d’application du règlement no 1346/2000 (voir, en ce sens, arrêt du 9 novembre 2017, Tünkers France et Tünkers Maschinenbau, C‑641/16, EU:C:2017:847, point 19 ainsi que jurisprudence citée).

    27

    Or, c’est ce même critère qui est repris au considérant 6 du règlement no 1346/2000 aux fins de délimiter l’objet de ce dernier. En effet, selon ce considérant, ledit règlement devrait se limiter à des dispositions qui règlent la compétence pour l’ouverture de procédures d’insolvabilité et la prise de décisions qui « dérivent directement de la procédure d’insolvabilité et [...] s’y insèrent étroitement ».

    28

    Dans ce contexte, il convient de déterminer, à la lumière des considérations qui précèdent, si une action en responsabilité délictuelle, telle que celle au principal, satisfait à ce double critère.

    29

    S’agissant du premier critère, il y a lieu de rappeler que, afin de déterminer si une action dérive directement d’une procédure d’insolvabilité, l’élément déterminant retenu par la Cour pour identifier le domaine dont relève une action est non pas le contexte procédural dans lequel s’inscrit cette action, mais le fondement juridique de cette dernière. Selon cette approche, il convient de rechercher si le droit ou l’obligation qui sert de base à l’action trouve sa source dans les règles communes du droit civil et commercial ou dans des règles dérogatoires, spécifiques aux procédures d’insolvabilité (arrêt du 9 novembre 2017, Tünkers France et Tünkers Maschinenbau, C‑641/16, EU:C:2017:847, point 22).

    30

    En l’occurrence, il ressort des constatations de la juridiction de renvoi que l’action au principal vise à mettre en cause la responsabilité des membres du comité des créanciers lequel, lors d’un vote qui a eu lieu le 11 décembre 2015, a refusé le plan de redressement proposé par VAV invest. C’est en raison d’un tel rejet que la procédure de faillite a été ouverte. Or, les requérants au principal considèrent que ce comité a agi de façon illégale, raison pour laquelle l’action en responsabilité a été engagée.

    31

    À cet égard, la juridiction de renvoi a relevé que la procédure d’insolvabilité distingue, dans la législation slovaque, deux voies possibles de résolution, à savoir, d’une part, la procédure d’assainissement et, d’autre part, la procédure de faillite. Si, dans le cadre de la procédure d’assainissement, le comité des créanciers rejette le plan de redressement ou n’adopte pas de décision dans les délais prévus à l’article 144, paragraphe 1, de la loi sur l’insolvabilité, il appartient au syndic de demander sans délai l’ouverture de la procédure de faillite, conformément à l’article 144, paragraphe 2, de cette loi.

    32

    Dans ce contexte, il convient de relever que, en l’occurrence, l’action en responsabilité a été introduite, d’une part, par des porteurs de parts sociales de la société faisant l’objet de la procédure d’insolvabilité et, d’autre part, par des sociétés ayant des relations commerciales avec cette société.

    33

    En outre, cette action vise, notamment, à déterminer si les membres du comité des créanciers ont, lors du rejet du plan de redressement, ce qui a provoqué l’ouverture de la procédure de faillite, violé leur obligation d’agir dans l’intérêt commun de l’ensemble des créanciers.

    34

    En effet, ainsi qu’il découle de la décision de renvoi, selon l’article 127, paragraphe 4, de la loi sur l’insolvabilité, tous les membres du comité des créanciers sont tenus d’agir dans l’intérêt commun de l’ensemble des créanciers dans la mesure où ce comité a pour mission, avec l’assemblée des créanciers, d’apprécier et, le cas échéant, d’approuver, conformément à l’article 133, paragraphe 1, de cette loi, le plan de redressement qui doit être établi par le débiteur failli.

    35

    Ainsi, l’action en responsabilité en cause au principal est la conséquence directe et indissociable de l’exercice par le comité des créanciers, un organe obligatoire qui est créé lors de l’ouverture de la procédure d’insolvabilité, de la fonction qu’il tire spécifiquement des dispositions du droit national régissant ce type de procédure (voir, par analogie, arrêt du 2 juillet 2009, SCT Industri, C‑111/08, EU:C:2009:419, point 28).

    36

    Partant, force est de constater que les obligations qui servent de base à l’exercice d’une action en responsabilité délictuelle contre un comité des créanciers, telle que celle au principal, trouvent leur source dans des règles spécifiques aux procédures d’insolvabilité.

    37

    Quant au second critère, mentionné au point 27 du présent arrêt, il est de jurisprudence constante que c’est l’intensité du lien existant entre une action juridictionnelle et la procédure d’insolvabilité qui est déterminante pour décider si l’exclusion énoncée à l’article 1er, paragraphe 2, sous b), du règlement no 1215/2012 trouve à s’appliquer (arrêt du 9 novembre 2017, Tünkers France et Tünkers Maschinenbau, C‑641/16, EU:C:2017:847, point 28).

    38

    À cet égard, afin de vérifier si la responsabilité des membres du comité des créanciers est susceptible d’être engagée en raison du rejet du plan de redressement, il y aura lieu d’analyser notamment l’étendue des obligations incombant à ce comité dans le cadre de la procédure d’insolvabilité et la compatibilité dudit rejet avec ces obligations. Or, force est de constater qu’une telle analyse présente un lien direct et étroit avec la procédure d’insolvabilité et est, dès lors, intimement liée au déroulement de cette procédure.

    39

    Dans ces conditions, il y a lieu de considérer qu’une action telle que celle en cause au principal dérive directement d’une procédure d’insolvabilité et s’y insère étroitement, de sorte qu’elle n’entre pas dans le champ d’application du règlement no 1215/2012.

    40

    Eu égard à ces considérations, il y a lieu de répondre à la question posée que l’article 1er, paragraphe 2, sous b), du règlement no 1215/2012, doit être interprété en ce sens que cette disposition s’applique à une action en responsabilité délictuelle, formée contre les membres d’un comité des créanciers en raison de leur comportement lors d’un vote portant sur un plan de redressement dans le cadre d’une procédure d’insolvabilité, et que, dès lors, une telle action est exclue du champ d’application matériel de ce règlement.

    Sur les dépens

    41

    La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

     

    Par ces motifs, la Cour (première chambre) dit pour droit :

     

    L’article 1er, paragraphe 2, sous b), du règlement (UE) no 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2012, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, doit être interprété en ce sens que cette disposition s’applique à une action en responsabilité délictuelle, formée contre les membres d’un comité des créanciers en raison de leur comportement lors d’un vote portant sur un plan de redressement dans le cadre d’une procédure d’insolvabilité, et que, dès lors, une telle action est exclue du champ d’application matériel de ce règlement.

     

    Signatures


    ( *1 ) Langue de procédure : l’allemand.

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