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Document 62007CJ0278

    Arrêt de la Cour (deuxième chambre) du 29 janvier 2009.
    Hauptzollamt Hamburg-Jonas contre Josef Vosding Schlacht-, Kühl- und Zerlegebetrieb GmbH & Co. (C-278/07), Vion Trading GmbH (C-279/07) et Ze Fu Fleischhandel GmbH (C-280/07).
    Demandes de décision préjudicielle: Bundesfinanzhof - Allemagne.
    Règlement (CE, Euratom) nº 2988/95 - Protection des intérêts financiers des Communautés européennes - Article 3 - Récupération d’une restitution à l’exportation - Détermination du délai de prescription - Irrégularités commises avant l’entrée en vigueur du règlement nº 2988/95 - Règle de prescription faisant partie du droit civil général d’un État membre.
    Affaires jointes C-278/07 à C-280/07.

    Recueil de jurisprudence 2009 I-00457

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2009:38

    ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

    29 janvier 2009 ( *1 )

    « Règlement (CE, Euratom) n o 2988/95 — Protection des intérêts financiers des Communautés européennes — Article 3 — Récupération d’une restitution à l’exportation — Détermination du délai de prescription — Irrégularités commises avant l’entrée en vigueur du règlement n o 2988/95 — Règle de prescription faisant partie du droit civil général d’un État membre»

    Dans les affaires jointes C-278/07 à C-280/07,

    ayant pour objet des demandes de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduites par le Bundesfinanzhof (Allemagne), par décisions du 27 mars 2007 , parvenues à la Cour le 13 juin 2007 , dans les procédures

    Hauptzollamt Hamburg-Jonas

    contre

    Josef Vosding Schlacht-, Kühl- und Zerlegebetrieb GmbH & Co. (C-278/07),

    Vion Trading GmbH (C-279/07),

    Ze Fu Fleischhandel GmbH (C-280/07),

    LA COUR (deuxième chambre),

    composée de M. C. W. A. Timmermans, président de chambre, MM. J.-C. Bonichot, J. Makarczyk, P. Kūris et M me C. Toader (rapporteur), juges,

    avocat général: M me E. Sharpston,

    greffier: M me K. Sztranc-Sławiczek, administrateur,

    vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 17 avril 2008 ,

    considérant les observations présentées:

    pour Josef Vosding Schlacht-, Kühl- und Zerlegebetrieb GmbH & Co., par M e F. Grashoff, Rechtsanwältin,

    pour Vion Trading GmbH, par M e K. Landry, Rechtsanwalt,

    pour Ze Fu Fleischhandel GmbH, par M e D. Ehle, Rechtsanwalt,

    pour le gouvernement tchèque, par M. T. Boček, en qualité d’agent,

    pour le gouvernement français, par M. J.-C. Gracia, en qualité d’agent,

    pour la Commission des Communautés européennes, par M. F. Erlbacher et M me Z. Malůšková, en qualité d’agents,

    ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 25 septembre 2008 ,

    rend le présent

    Arrêt

    1

    Les demandes de décision préjudicielle portent sur l’interprétation de l’article 3, paragraphes 1 et 3, du règlement (CE, Euratom) n o  2988/95 du Conseil, du 18 décembre 1995 , relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes ( JO L 312, p. 1 ).

    2

    Ces demandes ont été présentées dans le cadre de litiges opposant le Hauptzollamt Hamburg-Jonas (ci-après le « Hauptzollamt » ) à Josef Vosding Schlacht-, Kühl- und Zerlegebetrieb GmbH & Co., à Vion Trading GmbH et à Ze Fu Fleischhandel GmbH (ci-après les « défenderesses au principal » ) au sujet du remboursement de restitutions à l’exportation.

    Le cadre juridique

    Le droit communautaire

    3

    Selon le troisième considérant du règlement n o  2988/95, « il importe […] de combattre dans tous les domaines les atteintes aux intérêts financiers des Communautés » .

    4

    Selon le cinquième considérant dudit règlement, « les comportements constitutifs d’irrégularités, ainsi que les mesures et sanctions administratives y relatives, sont prévus dans des réglementations sectorielles en conformité avec le présent règlement » .

    5

    L’article 1 er du même règlement dispose:

    « 1.    Aux fins de la protection des intérêts financiers des Communautés européennes, est adoptée une réglementation générale relative à des contrôles homogènes et à des mesures et des sanctions administratives portant sur des irrégularités au regard du droit communautaire.

    2.    Est constitutive d’une irrégularité toute violation d’une disposition du droit communautaire résultant d’un acte ou d’une omission d’un opérateur économique qui a ou aurait pour effet de porter préjudice au budget général des Communautés ou à des budgets gérés par celles-ci, soit par la diminution ou la suppression de recettes provenant des ressources propres perçues directement pour le compte des Communautés, soit par une dépense indue. »

    6

    L’article 3, paragraphes 1 et 3, du règlement n o  2988/95 prévoit:

    « 1.     Le délai de prescription des poursuites est de quatre ans à partir de la réalisation de l’irrégularité visée à l’article 1 er , paragraphe 1. Toutefois, les réglementations sectorielles peuvent prévoir un délai inférieur qui ne saurait aller en deçà de trois ans.

    Pour les irrégularités continues ou répétées, le délai de prescription court à compter du jour où l’irrégularité a pris fin. […]

    La prescription des poursuites est interrompue par tout acte, porté à la connaissance de la personne en cause, émanant de l’autorité compétente et visant à l’instruction ou à la poursuite de l’irrégularité. Le délai de prescription court à nouveau à partir de chaque acte interruptif.

    […]

    3.    Les États membres conservent la possibilité d’appliquer un délai plus long que celui prévu […] au paragraphe 1 […] »

    7

    L’article 4, paragraphes 1 et 4, dudit règlement énonce:

    « 1.    Toute irrégularité entraîne, en règle générale, le retrait de l’avantage indûment obtenu:

    par l’obligation de verser les montants dus ou de rembourser les montants indûment perçus,

    […]

    4.    Les mesures prévues par le présent article ne sont pas considérées comme des sanctions. »

    8

    Aux termes de l’article 11, premier alinéa, du règlement n o  2988/95, ce dernier entre en vigueur le troisième jour suivant celui de sa publication au Journal officiel des Communautés européennes, laquelle est intervenue le 23 décembre 1995 .

    Le droit national

    9

    Selon les indications de la juridiction de renvoi, à la date des faits au principal, il n’existait en Allemagne aucune disposition spécifique relative aux délais de prescription applicables aux litiges de nature administrative relatifs à des avantages indûment octroyés. Toutefois, tant l’administration que les juridictions allemandes appliquaient par analogie la prescription trentenaire de droit commun, telle que prévue à l’article 195 du code civil allemand (Bürgerliches Gesetzbuch). Depuis 2002, ce délai de prescription de droit commun aurait toutefois été ramené à trois ans.

    Les litiges au principal et les questions préjudicielles

    10

    Il ressort des décisions de renvoi que, au cours de l’année 1993, les défenderesses au principal ont fait procéder à des dédouanements de viande bovine en vue de son exportation en Jordanie et ont, à leur demande, bénéficié à ce titre d’avances sur les restitutions à l’exportation. À la suite de contrôles effectués au début de l’année 1998, il aurait été découvert que, en réalité, les cargaisons en question avaient été expédiées en Irak dans le cadre de procédures de transit ou de réexportation.

    11

    Dans ces conditions, le Hauptzollamt a, par décisions du 23 septembre 1999 (affaire C-278/07) et du 13 octobre 1999 (affaires C-279/07 et C-280/07), réclamé le remboursement des restitutions à l’exportation en cause.

    12

    Les défenderesses au principal ont alors introduit des recours à l’encontre desdites décisions devant le Finanzgericht Hamburg. Celui-ci a fait droit à ces recours au motif que la règle de prescription, telle que prévue à l’article 3, paragraphe 1, du règlement n o  2988/95, s’opposait aux remboursements en question puisque ceux-ci avaient été réclamés plus de quatre années après les opérations d’exportation litigieuses.

    13

    À l’encontre de ces décisions dudit Finanzgericht, le Hauptzollamt a formé des pourvois en « Revision » devant la juridiction de renvoi.

    14

    Constatant notamment que les irrégularités reprochées concernent une période antérieure à l’adoption du règlement n o  2988/95, le Bundesfinanzhof a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes, lesquelles sont rédigées en des termes identiques dans les trois affaires C-278/07 à C-280/07:

    « 1)

    Le délai de prescription de l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, première phrase, du règlement […] n o  2988/95 […] doit-il être également appliqué lorsqu’une irrégularité a été commise ou a cessé avant l’entrée en vigueur dudit règlement?

    2)

    Le délai de prescription fixé dans ladite disposition s’applique-t-il aux mesures administratives telles que la récupération d’une restitution à l’exportation accordée à la suite d’irrégularités?

    Dans l’hypothèse où il conviendrait de répondre à ces deux questions par l’affirmative:

    3)

    Un délai plus long peut-il être appliqué par un État membre en vertu de l’article 3, paragraphe 3, du règlement […] n o  2988/95 alors même que le droit de cet État membre prévoyait déjà une telle prorogation de délai avant l’adoption dudit règlement? Un tel délai plus long peut-il être également appliqué lorsqu’il n’était pas prévu dans une disposition spécifique relative à la récupération de restitutions à l’exportation ou relative à des mesures administratives en général, mais lorsqu’il résultait d’une disposition générale (de droit commun) dudit État membre englobant tous les cas de prescription n’ayant pas fait l’objet de dispositions spéciales? »

    15

    Par ordonnance du président de la Cour du 30 juillet 2007 , les affaires C-278/07 à C-280/07 ont été jointes aux fins de la procédure écrite et orale ainsi que de l’arrêt.

    Observations liminaires

    16

    À titre liminaire, s’agissant de l’argumentation des défenderesses au principal tendant à remettre en cause l’exposé des faits par la juridiction de renvoi, en particulier en ce qui concerne l’existence des irrégularités qui leur sont reprochées, il importe de rappeler qu’il n’appartient pas à la Cour d’établir les faits pertinents pour la solution du litige au principal. En effet, il incombe à la Cour de prendre en compte, dans le cadre de la répartition des compétences entre les juridictions communautaires et nationales, le contexte factuel et réglementaire dans lequel s’insèrent les questions préjudicielles, tel que celui-ci est défini par la décision de renvoi (voir, en ce sens, arrêts du 13 novembre 2003 , Neri, C-153/02, Rec. p. I-13555 , points 34 et 35, ainsi que du 17 juillet 2008 , ASM Brescia, C-347/06, Rec. p. I-5641 , point 28).

    17

    Par conséquent, il convient d’examiner les questions préjudicielles dans le cadre factuel défini par le Bundesfinanzhof.

    Sur les questions préjudicielles

    Sur la deuxième question

    18

    Par sa deuxième question, qu’il convient d’examiner en premier lieu, le Bundesfinanzhof demande, en substance, si le délai de prescription prévu à l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n o  2988/95 est applicable non seulement aux sanctions, mais également aux mesures administratives.

    19

    Ainsi, cette juridiction cherche à se voir confirmer que la notion de « poursuites » visée à ladite disposition concerne indistinctement toute démarche entreprise par les autorités nationales en liaison avec une irrégularité et que, par conséquent, elle ne vise pas uniquement les mesures permettant d’aboutir à une sanction administrative au sens de l’article 1 er , paragraphe 1, du règlement n o  2988/95.

    20

    À cet égard, il convient de rappeler que l’article 1 er , paragraphe 1, du règlement n o  2988/95 introduit une « réglementation générale relative à des contrôles homogènes et à des mesures et des sanctions administratives portant sur des irrégularités au regard du droit communautaire » , et ce, ainsi qu’il ressort du troisième considérant dudit règlement, afin de « combattre dans tous les domaines les atteintes aux intérêts financiers des Communautés » (arrêt du 24 juin 2004 , Handlbauer, C-278/02, Rec. p. I-6171 , point 31).

    21

    Or, l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n o  2988/95 fixe, en matière de poursuites, un délai de prescription qui court à partir de la réalisation de l’irrégularité, laquelle, selon l’article 1 er , paragraphe 2, du même règlement, vise « [t]oute violation d’une disposition du droit communautaire résultant d’un acte ou d’une omission d’un opérateur économique qui a ou aurait pour effet de porter préjudice au budget général des Communautés […] » (arrêt Handlbauer, précité, point 32).

    22

    Ainsi, contrairement à ce que soutiennent notamment le gouvernement français et la Commission des Communautés européennes, il en découle que l’article 3, paragraphe 1, du règlement n o  2988/95 est applicable tant aux irrégularités conduisant à l’imposition d’une sanction administrative au sens de l’article 5 de celui-ci qu’à celles faisant l’objet d’une mesure administrative au sens de l’article 4 dudit règlement, mesure qui a pour objet le retrait de l’avantage indûment obtenu sans toutefois revêtir le caractère d’une sanction (voir, en ce sens, arrêt Handlbauer, précité, points 33 et 34).

    23

    Il y a donc lieu de répondre à la deuxième question que le délai de prescription prévu à l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n o  2988/95 est applicable aux mesures administratives telles que la récupération d’une restitution à l’exportation indûment perçue par l’exportateur en raison d’irrégularités commises par ce dernier.

    Sur la première question

    24

    Par sa première question, la juridiction de renvoi demande si la règle de prescription quadriennale, prévue à l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n o  2988/95, trouve à s’appliquer à des irrégularités qui ont été commises ou qui ont cessé avant l’entrée en vigueur de ce règlement.

    25

    À titre liminaire, il y a lieu de relever que, avant l’adoption du règlement n o  2988/95, le législateur communautaire n’avait prévu aucune règle de prescription applicable à la récupération d’avantages indûment perçus par les opérateurs économiques à la suite d’un acte ou d’une omission de leur part qui ont eu ou auraient eu pour effet de porter préjudice au budget général des Communautés ou à des budgets gérés par celles-ci.

    26

    Dès lors, avant l’adoption du règlement n o  2988/95, les litiges relatifs à la récupération de montants indûment versés en vertu du droit communautaire devaient, en l’absence de dispositions communautaires, être tranchés par les juridictions nationales en application de leur droit national, sous réserve toutefois des limites qu’impose le droit communautaire, en ce sens que les modalités prévues par le droit national ne pouvaient aboutir à rendre pratiquement impossible ou excessivement difficile la récupération des aides indues et que l’application de celui-ci devait se faire d’une façon non discriminatoire par rapport aux procédures visant à trancher des litiges nationaux du même type (arrêt du 19 septembre 2002 , Huber, C-336/00, Rec. p. I-7699 , point 55 et jurisprudence citée).

    27

    En adoptant le règlement n o  2988/95 et, en particulier, l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, de celui-ci, le législateur communautaire a toutefois entendu instituer une règle générale de prescription applicable en la matière et par laquelle il entendait, d’une part, définir un délai minimal appliqué dans tous les États membres et, d’autre part, renoncer à la possibilité de recouvrer des sommes indûment perçues du budget communautaire après l’écoulement d’une période de quatre années postérieure à la réalisation de l’irrégularité affectant les paiements litigieux.

    28

    Il en résulte que, à partir de la date d’entrée en vigueur du règlement n o  2988/95, tout avantage indûment perçu du budget communautaire peut, en principe et excepté dans des secteurs pour lesquels le législateur communautaire a prévu un délai inférieur, être recouvré par les autorités compétentes des États membres dans un délai de quatre années.

    29

    S’agissant du sort des avantages indûment perçus du budget communautaire en raison d’irrégularités qui ont été commises avant l’entrée en vigueur du règlement n o  2988/95, force est de constater que, par l’adoption de l’article 3, paragraphe 1, de ce règlement et sans préjudice du paragraphe 3 de cet article, le législateur communautaire a défini de la sorte une règle de prescription générale par laquelle il a volontairement réduit à quatre années la période pendant laquelle les autorités des États membres, agissant au nom et pour le compte du budget communautaire, devraient ou auraient dû récupérer de tels avantages indûment perçus.

    30

    Toutefois, en vertu du principe de la sécurité juridique, l’application de l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n o  2988/95 ne saurait permettre auxdites autorités nationales de recouvrer des dettes antérieures à l’entrée en vigueur de ce règlement qui ont déjà été prescrites en vertu de règles nationales de prescription applicables à la date de la commission des irrégularités en cause.

    31

    S’agissant des dettes nées sous l’empire d’une règle nationale de prescription, telle que celle en cause au principal, qui ne sont pas encore prescrites, l’entrée en vigueur du règlement n o  2988/95 a pour conséquence que, en application de l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, de ce règlement, une telle dette doit se trouver en principe prescrite dans un délai de quatre années courant à compter de la date à laquelle les irrégularités ont été commises.

    32

    Dans de telles circonstances, en application de ladite disposition, toute somme indûment perçue par un opérateur en raison d’une irrégularité antérieure à l’entrée en vigueur du règlement n o  2988/95 doit, en principe, être considérée comme prescrite en l’absence de tout acte suspensif adopté dans les quatre années suivant la commission d’une telle irrégularité, acte suspensif qui, aux termes de l’article 3, paragraphe 1, troisième alinéa, du même règlement, s’entend comme un acte porté à la connaissance de la personne en cause, émanant de l’autorité compétente et visant à l’instruction ou à la poursuite de cette irrégularité.

    33

    Il s’ensuit que, lorsqu’une irrégularité a été commise, comme dans les affaires au principal, au cours de l’année 1993 et sous l’empire d’une règle nationale de prescription trentenaire, une telle irrégularité relèvera de la règle générale communautaire de prescription de quatre années et sera, à ce titre, prescrite au cours de l’année 1997 en fonction de la date précise de la commission de ladite irrégularité remontant à l’année 1993, sous réserve toutefois de la possibilité que conservent les États membres, en vertu de l’article 3, paragraphe 3, du règlement n o  2988/95, de prévoir des délais de prescription plus longs.

    34

    Compte tenu de ce qui précède, il convient de répondre à la première question que, dans des situations telles que celles en cause au principal, le délai de prescription prévu à l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n o  2988/95:

    s’applique à des irrégularités commises avant l’entrée en vigueur de ce règlement;

    commence à courir à compter de la date de la commission de l’irrégularité en cause.

    Sur la troisième question

    35

    Par sa troisième question, la juridiction de renvoi cherche à savoir, d’une part, si la possibilité que conservent les États membres, en vertu de l’article 3, paragraphe 3, du règlement n o  2988/95, d’appliquer un délai de prescription plus long que celui prévu au paragraphe 1 du même article peut concerner une règle de prescription antérieure à l’adoption dudit règlement. D’autre part, cette juridiction demande si un tel délai plus long doit résulter d’une disposition nationale spécifique relative à la récupération de restitutions à l’exportation ou aux mesures administratives en général ou si ledit délai peut également résulter d’une disposition générale de droit commun.

    36

    Dans des situations telles que celles en cause au principal, dans lesquelles les irrégularités reprochées aux opérateurs ont été commises en 1993 sous l’empire d’une règle nationale de prescription trentenaire, ainsi qu’il a été constaté au point 33 du présent arrêt, les sommes indûment perçues en raison de telles irrégularités étaient susceptibles, en l’absence d’acte suspensif, d’être prescrites au cours de l’année 1997, à la condition que l’État membre où ont été commises les irrégularités n’ait pas fait usage de la faculté qui lui est offerte par l’article 3, paragraphe 3, du règlement n o  2988/95.

    37

    Il ressort des décisions de renvoi que, dans les affaires au principal, les autorités nationales compétentes ont réclamé le remboursement des restitutions à l’exportation en cause par décisions du 23 septembre 1999 (affaire C-278/07) et du 13 octobre 1999 (affaires C-279/07 et C-280/07).

    38

    Il en résulte que la prescription des sommes en cause aurait dû en principe être considérée comme acquise par l’application de la prescription générale de quatre années prévue à l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n o  2988/95.

    39

    Toutefois, postérieurement à l’entrée en vigueur de ce règlement, les juridictions allemandes ont continué d’appliquer le délai de prescription trentenaire résultant de l’article 195 du code civil allemand aux actions tendant à la récupération de restitutions indûment perçues par les opérateurs.

    40

    À cet égard, il convient de constater que l’article 3, paragraphe 3, du règlement n o  2988/95 se réfère à la « possibilité » que les États membres « conservent » de prévoir un délai de prescription plus long que celui prévu au paragraphe 1, premier alinéa, dudit article.

    41

    Ainsi, il ressort du libellé de l’article 3, paragraphe 3, du règlement n o  2988/95 que cette disposition ne se borne pas à prévoir la possibilité pour les États membres d’introduire un délai de prescription plus long que celui édicté au paragraphe 1, premier alinéa, du même article. En effet, de manière expresse, ledit paragraphe 3 reconnaît également à ces derniers la faculté de conserver un délai de prescription plus long qui existait à la date de l’entrée en vigueur de ce règlement.

    42

    Il s’ensuit que, en vertu de l’article 3, paragraphe 3, du règlement n o  2988/95, les États membres peuvent, d’une part, continuer à appliquer des délais de prescription plus longs existant à la date de l’adoption dudit règlement et, d’autre part, introduire de nouvelles règles de prescription prévoyant de tels délais postérieurement à cette date.

    43

    S’agissant du point de savoir si ces délais nationaux de prescription doivent être spécifiquement prévus par une disposition nationale applicable à la récupération des restitutions à l’exportation ou, plus généralement, à des mesures administratives, il convient de relever que le libellé de l’article 3, paragraphe 3, du règlement n o  2988/95 ne comporte pas d’éléments répondant explicitement à une telle question.

    44

    Certes, l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, dudit règlement dispose que les réglementations sectorielles peuvent prévoir un délai inférieur au délai de quatre ans, mais qui ne saurait aller en deçà de trois ans. Toutefois, il est question dans cette disposition de réglementations sectorielles adoptées au niveau communautaire, ainsi que le confirme le cinquième considérant de ce règlement, et non de réglementations sectorielles nationales (voir, en ce sens, arrêt Handlbauer, précité, point 28).

    45

    En outre, le règlement n o  2988/95 ne prévoit aucun mécanisme d’information ou de notification relatif à l’usage fait par les États membres de leur faculté de prévoir des délais plus longs, conformément à son article 3, paragraphe 3. Il s’ensuit qu’aucune forme de contrôle n’a été prévue au niveau communautaire en ce qui concerne tant les délais de prescription dérogatoires appliqués par les États membres en vertu de cette disposition que les secteurs dans lesquels ceux-ci ont décidé d’appliquer de tels délais.

    46

    Par conséquent, l’article 3, paragraphe 3, du règlement n o  2988/95 ne saurait être interprété en ce sens que les États membres doivent, dans le contexte de cette disposition, prévoir lesdits délais de prescription plus longs dans des réglementations spécifiques et/ou sectorielles.

    47

    Compte tenu de ce qui précède, il convient de répondre à la troisième question que les délais de prescription plus longs que les États membres conservent la faculté d’appliquer en vertu de l’article 3, paragraphe 3, du règlement n o  2988/95 peuvent résulter de dispositions de droit commun antérieures à la date de l’adoption de ce règlement.

    Sur les dépens

    48

    La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

     

    Par ces motifs, la Cour (deuxième chambre) dit pour droit:

     

    1)

    Le délai de prescription prévu à l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement (CE, Euratom) n o  2988/95 du Conseil, du 18 décembre 1995 , relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes, est applicable aux mesures administratives telles que la récupération d’une restitution à l’exportation indûment perçue par l’exportateur en raison d’irrégularités commises par ce dernier.

     

    2)

    Dans des situations telles que celles en cause au principal, le délai de prescription prévu à l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n o  2988/95:

    s’applique à des irrégularités commises avant l’entrée en vigueur de ce règlement;

    commence à courir à compter de la date de la commission de l’irrégularité en cause.

     

    3)

    Les délais de prescription plus longs que les États membres conservent la faculté d’appliquer en vertu de l’article 3, paragraphe 3, du règlement n o  2988/95 peuvent résulter de dispositions de droit commun antérieures à la date de l’adoption de ce règlement.

     

    Signatures


    ( *1 ) Langue de procédure: l’allemand.

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