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Document 62006CJ0362

    Arrêt de la Cour (deuxième chambre) du 23 avril 2009.
    Markku Sahlstedt e.a. contre Commission des Communautés européennes.
    Pourvoi - Protection des habitats naturels - Liste des sites d'importance communautaire pour la région biogéographique boréale arrêtée par décision de la Commission - Recevabilité d'un recours en annulation introduit par des personnes physiques ou morales à l'encontre de cette décision.
    Affaire C-362/06 P.

    Recueil de jurisprudence 2009 I-02903

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2009:243

    ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

    23 avril 2009 ( *1 )

    «Pourvoi — Protection des habitats naturels — Liste des sites d’importance communautaire pour la région biogéographique boréale arrêtée par décision de la Commission — Recevabilité d’un recours en annulation introduit par des personnes physiques ou morales à l’encontre de cette décision»

    Dans l’affaire C-362/06 P,

    ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice, introduit le 4 septembre 2006,

    Markku Sahlstedt e.a., représentés par Me K. Marttinen, asianajaja,

    partie requérante,

    les autres parties à la procédure étant:

    Commission des Communautés européennes, représentée par MM. M. Huttunen et M. van Beek, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

    partie défenderesse en première instance,

    soutenue par:

    Royaume d’Espagne, représenté par M. F. Díez Moreno, en qualité d’agent, ayant élu domicile à Luxembourg,

    partie intervenante au pourvoi,

    République de Finlande,

    partie intervenante en première instance,

    LA COUR (deuxième chambre),

    composée de M. K. Schiemann, faisant fonction de président de la deuxième chambre, MM. J. Makarczyk, P. Kūris, L. Bay Larsen (rapporteur) et Mme C. Toader, juges,

    avocat général: M. Y. Bot,

    greffier: Mme K. Sztranc-Sławiczek, administrateur,

    vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 28 février 2008,

    ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 23 octobre 2008,

    rend le présent

    Arrêt

    1

    Par leur pourvoi, M. Sahlstedt e.a. demandent l’annulation de l’ordonnance du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 22 juin 2006, Sahlstedt e.a./Commission (T-150/05, Rec. p. II-1851, ci-après l’«ordonnance attaquée»), par laquelle celui-ci a rejeté leur recours visant à l’annulation de la décision 2005/101/CE de la Commission, du 13 janvier 2005, arrêtant, en application de la directive 92/43/CEE du Conseil, la liste des sites d’importance communautaire pour la région biogéographique boréale (JO L 40, p. 1, ci-après la «décision litigieuse»).

    Le cadre juridique

    2

    Selon le sixième considérant de la directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages (JO L 206, p. 7, ci-après la «directive ‘habitats’»), il y a lieu, en vue d’assurer le rétablissement ou le maintien des habitats naturels et des espèces d’intérêt communautaire dans un état de conservation favorable, de désigner des zones spéciales de conservation afin de réaliser un réseau écologique européen cohérent suivant un calendrier défini.

    3

    L’article 4 de la directive «habitats» dispose:

    «1.   Sur la base des critères établis à l’annexe III (étape 1) et des informations scientifiques pertinentes, chaque État membre propose une liste de sites indiquant les types d’habitats naturels de l’annexe I et les espèces indigènes de l’annexe II qu’ils abritent. Pour les espèces animales qui occupent de vastes territoires, ces sites correspondent aux lieux, au sein de l’aire de répartition naturelle de ces espèces, qui présentent les éléments physiques ou biologiques essentiels à leur vie et reproduction. […]

    La liste est transmise à la Commission, dans les trois ans suivant la notification de la présente directive, en même temps que les informations relatives à chaque site. Ces informations comprennent une carte du site, son appellation, sa localisation, son étendue ainsi que les données résultant de l’application des critères spécifiés à l’annexe III (étape 1) et sont fournies sur la base d’un formulaire établi par la Commission selon la procédure visée à l’article 21.

    2.   Sur la base des critères établis à l’annexe III (étape 2) et dans le cadre de chacune des cinq régions biogéographiques mentionnées à l’article 1er point c) iii) et de l’ensemble du territoire visé à l’article 2 paragraphe 1, la Commission établit, en accord avec chacun des États membres, un projet de liste des sites d’importance communautaire, à partir des listes des États membres, faisant apparaître les sites qui abritent un ou plusieurs types d’habitats naturels prioritaires ou une ou plusieurs espèces prioritaires.

    […]

    La liste des sites sélectionnés comme sites d’importance communautaire, faisant apparaître les sites abritant un ou plusieurs types d’habitats naturels prioritaires ou une ou plusieurs espèces prioritaires, est arrêtée par la Commission selon la procédure visée à l’article 21.

    3.   La liste mentionnée au paragraphe 2 est établie dans un délai de six ans après la notification de la présente directive.

    4.   Une fois qu’un site d’importance communautaire a été retenu en vertu de la procédure prévue au paragraphe 2, l’État membre concerné désigne ce site comme zone spéciale de conservation le plus rapidement possible et dans un délai maximal de six ans en établissant les priorités en fonction de l’importance des sites pour le maintien ou le rétablissement, dans un état de conservation favorable, d’un type d’habitat naturel de l’annexe I ou d’une espèce de l’annexe II et pour la cohérence de Natura 2000, ainsi qu’en fonction des menaces de dégradation ou de destruction qui pèsent sur eux.

    5.   Dès qu’un site est inscrit sur la liste visée au paragraphe 2 troisième alinéa, il est soumis aux dispositions de l’article 6 paragraphes 2, 3 et 4.»

    4

    L’article 6 de cette directive est libellé comme suit:

    «[…]

    2.   Les États membres prennent les mesures appropriées pour éviter, dans les zones spéciales de conservation, la détérioration des habitats naturels et des habitats d’espèces ainsi que les perturbations touchant les espèces pour lesquelles les zones ont été désignées, pour autant que ces perturbations soient susceptibles d’avoir un effet significatif eu égard aux objectifs de la présente directive.

    3.   Tout plan ou projet non directement lié ou nécessaire à la gestion du site mais susceptible d’affecter ce site de manière significative, individuellement ou en conjugaison avec d’autres plans et projets, fait l’objet d’une évaluation appropriée de ses incidences sur le site eu égard aux objectifs de conservation de ce site. Compte tenu des conclusions de l’évaluation des incidences sur le site et sous réserve des dispositions du paragraphe 4, les autorités nationales compétentes ne marquent leur accord sur ce plan ou projet qu’après s’être assurées qu’il ne portera pas atteinte à l’intégrité du site concerné et après avoir pris, le cas échéant, l’avis du public.

    4.   Si, en dépit de conclusions négatives de l’évaluation des incidences sur le site et en l’absence de solutions alternatives, un plan ou projet doit néanmoins être réalisé pour des raisons impératives d’intérêt public majeur, y compris de nature sociale ou économique, l’État membre prend toute mesure compensatoire nécessaire pour assurer que la cohérence globale de Natura 2000 est protégée. L’État membre informe la Commission des mesures compensatoires adoptées.

    Lorsque le site concerné est un site abritant un type d’habitat naturel et/ou une espèce prioritaires, seules peuvent être évoquées des considérations liées à la santé de l’homme et à la sécurité publique ou à des conséquences bénéfiques primordiales pour l’environnement ou, après avis de la Commission, à d’autres raisons impératives d’intérêt public majeur.»

    Les antécédents du litige

    5

    La Commission a, par la décision litigieuse, arrêté la liste des sites d’importance communautaire de la région biogéographique boréale.

    6

    Cette décision a intégré dans lesdits sites certains terrains appartenant à des personnes privées, parmi lesquelles l’ensemble des requérants à l’exception de Maa- ja metsätaloustuottajain keskusliitto MTK ry (ci-après «MTK ry»). Cette dernière est une association qui regroupe environ 163000 exploitants agricoles et forestiers.

    La procédure devant le Tribunal et l’ordonnance attaquée

    7

    Par requête déposée au greffe du Tribunal le 18 avril 2005, M. Sahlstedt e.a. ont introduit le recours ayant donné lieu à l’ordonnance attaquée.

    8

    La Commission a, par acte déposé au greffe du Tribunal le 5 juillet 2005, soulevé une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal.

    9

    Par l’ordonnance attaquée, le Tribunal a rejeté ledit recours comme irrecevable, au motif que M. Sahlstedt e.a., qui ne sont pas les destinataires de la décision litigieuse, ne sont pas directement concernés par celle-ci.

    10

    Au point 54 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a relevé que la décision litigieuse, qui désigne comme sites d’importance communautaire des zones du territoire finlandais, ne produit pas, par elle-même, des effets sur la situation juridique des requérants qui ont la qualité de propriétaire de terrains situés dans ces zones. Selon le Tribunal, cette décision ne contenant aucune disposition quant au régime de protection des sites d’importance communautaire, telles des mesures de conservation ou des procédures d’autorisation à respecter, elle n’affecte ni les droits et obligations des propriétaires de biens fonciers ni l’exercice de ces droits. Le Tribunal a jugé que, contrairement à ce que prétendaient M. Sahlstedt e.a., l’inclusion desdites zones dans la liste des sites d’importance communautaire n’oblige nullement les opérateurs économiques ou les personnes privées.

    11

    Il ressort du point 59 de l’ordonnance attaquée que, selon le Tribunal, aucune des obligations visées à l’article 6, paragraphes 1 à 4, de la directive «habitats» n’est directement applicable à M. Sahlstedt e.a. En effet, toutes ces obligations nécessitent un acte de la part de l’État membre concerné, afin qu’il précise de quelle manière il entend mettre en œuvre chacune de celles-ci, qu’il s’agisse des mesures de conservation nécessaires (article 6, paragraphe 1, de la directive «habitats»), des mesures appropriées pour éviter la détérioration du site (article 6, paragraphe 2, de cette directive) ou de l’accord à donner par les autorités nationales compétentes quant à un projet susceptible d’affecter un site concerné de manière significative (article 6, paragraphes 3 et 4, de ladite directive).

    12

    Ensuite, au point 61 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a jugé, d’une part, que, de la même manière que les particuliers requérants, les membres de MTK ry ne peuvent être considérés comme directement concernés par la décision litigieuse et, d’autre part, que cette association n’a pas démontré avoir un intérêt propre à la poursuite de l’action, tel qu’une position de négociateur qui serait affectée par ladite décision.

    13

    Le Tribunal a enfin considéré, au point 62 de l’ordonnance attaquée, que, les requérants n’étant pas directement concernés par la décision litigieuse, il n’y avait pas lieu de se prononcer sur la question de savoir s’ils l’étaient individuellement.

    14

    Il a cependant précisé au point 63 de cette ordonnance que, à défaut d’être en droit de demander l’annulation de la décision litigieuse, les requérants peuvent contester les mesures prises en application de l’article 6 de la directive «habitats» qui les affectent et, dans ce cadre, conservent la possibilité d’exciper de l’illégalité de cette décision devant les juridictions nationales statuant dans le respect de l’article 234 CE.

    Les conclusions des parties

    15

    Par leur pourvoi, M. Sahlstedt e.a. demandent à la Cour d’annuler l’ordonnance attaquée ainsi que la décision litigieuse et de condamner la Commission aux dépens.

    16

    La Commission demande à la Cour de rejeter le pourvoi dans son intégralité et de condamner les requérants aux dépens.

    17

    Le Royaume d’Espagne conclut également au rejet du pourvoi.

    Sur le pourvoi

    18

    Dans leur pourvoi, M. Sahlstedt e.a. invoquent trois moyens, tirés, respectivement, d’un défaut de motivation de l’ordonnance attaquée, d’une erreur de droit entachant l’appréciation du Tribunal selon laquelle les requérants ne sont pas directement concernés par la décision litigieuse et de la méconnaissance du droit à une protection juridictionnelle effective.

    Appréciation de la Cour

    19

    À titre liminaire, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 230, quatrième alinéa, CE, toute personne physique ou morale peut former un recours contre les décisions dont elle est le destinataire et contre les décisions qui, bien que prises sous l’apparence d’un règlement ou d’une décision adressée à une autre personne, la concernent «directement et individuellement».

    20

    En l’occurrence, il est constant que les requérants ne sont pas les destinataires de la décision litigieuse.

    21

    Bien que la Commission ait également contesté que les requérants soient individuellement concernés par cette décision, le Tribunal ne s’est prononcé que sur la question de savoir s’ils sont directement concernés par celle-ci.

    22

    À cet égard, il convient de rappeler que le critère qui subordonne la recevabilité d’un recours introduit par une personne physique ou morale contre une décision dont elle n’est pas le destinataire à la condition qu’elle soit directement et individuellement concernée par cette décision, fixé à l’article 230, quatrième alinéa, CE, constitue une fin de non-recevoir d’ordre public que les juridictions communautaires peuvent à tout moment examiner, même d’office (voir en ce sens, notamment, ordonnance du 5 juillet 2001, Conseil national des professions de l’automobile e.a./Commission, C-341/00 P, Rec. p. I-5263, point 32, et arrêt du 29 novembre 2007, Stadtwerke Schwäbisch Hall e.a./Commission, C-176/06 P, point 18).

    23

    Dès lors, à supposer même que M. Sahlstedt e.a. puissent être considérés comme directement concernés par la décision litigieuse, encore faudrait-il qu’ils soient également individuellement concernés par celle-ci pour que leur recours à l’encontre de cette décision soit recevable.

    24

    Ainsi qu’il est mentionné au point 46 de l’ordonnance attaquée, ceux-ci ont fait valoir que la décision litigieuse concerne individuellement, en particulier, tous les propriétaires fonciers qui possèdent des terres situées sur les sites repris dans la liste approuvée par la Commission et à l’égard desquels une interdiction de détérioration trouvera à s’appliquer.

    25

    Il résulte des points 25, 31, 33 et 34 de l’ordonnance attaquée que, devant le Tribunal, la Commission a contesté que les requérants soient individuellement concernés en faisant notamment valoir que les sites inclus dans la liste arrêtée par la décision litigieuse sont exclusivement désignés sur le fondement de critères biologiques, qu’il n’est pas possible, sur la base de cette décision, ou du moins sur la base des données que la Commission a utilisées lors de son élaboration, d’identifier les propriétaires de ces sites et que ces derniers intéressent également des secteurs de la société autres que celui des propriétaires fonciers, comme les sociétés de construction, les organisations non gouvernementales ou d’autres citoyens.

    26

    À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, les sujets autres que les destinataires d’une décision ne sauraient prétendre être individuellement concernés que si cette décision les atteint en raison de certaines qualités qui leur sont particulières ou d’une situation de fait qui les caractérise par rapport à toute autre personne et, de ce fait, les individualise d’une manière analogue à celle dont le destinataire d’une telle décision le serait (voir, notamment, arrêts du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission, 25/62, Rec. p. 197, 223, et du 13 décembre 2005, Commission/Aktionsgemeinschaft Recht und Eigentum, C-78/03 P, Rec. p. I-10737, point 33).

    27

    Une décision telle que la décision litigieuse s’inscrit dans le cadre de l’article 4 de la directive «habitats», qui organise une procédure de classement des sites naturels en zones spéciales de conservation (ci-après les «ZSC»), procédure qui doit notamment permettre, ainsi qu’il ressort de l’article 3, paragraphe 2, de cette même directive, la réalisation d’un réseau écologique européen cohérent de ZSC, dénommé «Natura 2000», qui est formé par des sites abritant des types d’habitats naturels et des habitats des espèces figurant, respectivement, à l’annexe I et à l’annexe II de ladite directive, et qui doit assurer le maintien ou, le cas échéant, le rétablissement, dans un état de conservation favorable, des types d’habitats naturels et des habitats d’espèces concernés dans leur aire de répartition (voir, en ce sens, arrêt du 7 novembre 2000, First Corporate Shipping, C-371/98, Rec. p. I-9235, points 19 et 20).

    28

    Ainsi, la décision litigieuse, qui vise une série de territoires classés en tant que sites d’importance communautaire en vue de permettre la réalisation dudit réseau Natura 2000, a, à l’égard de tout intéressé, une portée générale en ce qu’elle s’applique à tous les opérateurs qui, à quelque titre que ce soit, exercent ou sont susceptibles d’exercer, sur les territoires visés, des activités pouvant mettre en cause les objectifs de conservation poursuivis par la directive «habitats».

    29

    Il y a lieu, cependant, de rappeler que la Cour a itérativement jugé que le fait qu’une disposition a, par sa nature et sa portée, un caractère général en ce qu’elle s’applique à la généralité des opérateurs économiques intéressés n’exclut pas pour autant qu’elle puisse concerner individuellement certains d’entre eux (voir, en ce sens, arrêts du 18 mai 1994, Codorniu, C-309/89, Rec. p. I-1853, point 19, ainsi que du 22 juin 2006, Belgique et Forum 187/Commission, C-182/03 et C-217/03, Rec. p. I-5479, point 58).

    30

    À cet égard, la Cour a jugé que, lorsqu’une décision affecte un groupe de personnes qui étaient identifiées ou identifiables au moment où cet acte a été pris et en fonction de critères propres aux membres de ce groupe, ces personnes peuvent être individuellement concernées par cet acte en tant qu’elles font partie d’un cercle restreint d’opérateurs économiques (voir arrêt du 13 mars 2008, Commission/Infront WM, C-125/06 P, Rec. p. I-1451, point 71 et jurisprudence citée).

    31

    Toutefois, la possibilité de déterminer, avec plus ou moins de précision, le nombre ou même l’identité des sujets de droits auxquels s’applique une mesure n’implique nullement que ces sujets doivent être considérés comme étant concernés individuellement par cette mesure lorsqu’il est constant que cette application s’effectue en vertu d’une situation objective de droit ou de fait définie par l’acte en cause (voir, notamment, arrêt du 22 novembre 2001, Antillean Rice Mills/Conseil, C-451/98, Rec. p. I-8949, point 52, ainsi que ordonnances du 25 avril 2002, Galileo et Galileo International/Conseil, C-96/01 P, Rec. p. I-4025, point 38, et du 8 avril 2008, Saint-Gobain Glass Deutschland/Commission, C-503/07 P, Rec. p. I-2217, point 70 et jurisprudence citée).

    32

    Or, en l’espèce, à l’exception de MTK ry, il apparaît que la décision litigieuse concerne les requérants uniquement en tant qu’ils sont titulaires de droits sur des terrains inclus dans certains sites d’intérêt communautaire retenus par la Commission aux fins de la mise en place d’un réseau écologique européen cohérent de ZSC, c’est-à-dire en vertu d’une situation objective de fait et de droit définie par l’acte en cause, et non pas en fonction de critères propres à la catégorie des propriétaires fonciers.

    33

    Au demeurant, la décision litigieuse n’ayant pas été arrêtée au vu de la situation particulière des propriétaires fonciers, elle ne saurait dès lors être regardée comme un faisceau de décisions individuelles adressées à chaque propriétaire foncier.

    34

    Il s’ensuit que les requérants, à l’exception de MTK ry, ne peuvent être considérés comme individuellement concernés par la décision litigieuse, au sens de l’article 230, quatrième alinéa, CE.

    35

    En ce qui concerne MTK ry, il convient de rappeler que la défense d’intérêts généraux et collectifs d’une catégorie de justiciables ne suffit pas pour établir la recevabilité d’un recours en annulation introduit par une association. Sauf circonstances particulières telles que le rôle qu’elle aurait pu jouer dans le cadre d’une procédure ayant abouti à l’adoption de l’acte en cause, une telle association n’est pas recevable à introduire un recours en annulation lorsque ses membres ne sauraient le faire à titre individuel (voir, notamment, ordonnance du 18 décembre 1997, Sveriges Betodlares et Henrikson/Commission, C-409/96 P, Rec. p. I-7531, point 45).

    36

    Or, ainsi qu’il a été constaté au point 34 du présent arrêt, les personnes physiques ou morales qui sont propriétaires de terrains inclus dans les sites d’intérêt communautaire retenus par la décision litigieuse ne sont pas individuellement concernées par celle-ci. Dès lors, MTK ry, à supposer même qu’elle compte de telles personnes parmi ses membres, ne saurait, en tant que telle, être considérée comme individuellement concernée par ladite décision.

    37

    Il résulte des considérations qui précèdent que M. Sahlstedt e.a. ne sont pas individuellement concernés par la décision litigieuse.

    38

    Il s’ensuit que les deux premiers moyens, tirés, respectivement, d’un défaut de motivation de l’ordonnance attaquée et d’une erreur de droit entachant l’appréciation du Tribunal selon laquelle les requérants ne sont pas directement concernés par la décision litigieuse doivent être rejetés comme inopérants.

    39

    Il convient donc d’examiner le troisième moyen tiré de la méconnaissance du droit à une protection juridictionnelle effective.

    Argumentation des parties

    40

    Par leur troisième moyen, Sahlstedt e.a. exposent que, si le droit d’introduire un recours leur est refusé, ils n’auront aucune possibilité de formuler des griefs contre la décision sur le fondement de laquelle le territoire sur lequel sont situés les biens fonciers qu’ils possèdent a été inclus dans le réseau Natura 2000 et des restrictions ont été imposées sous forme d’interdiction de détérioration et d’obligation d’évaluation.

    41

    Le Royaume d’Espagne soutient que l’impossibilité de se défendre invoquée par Sahlstedt e.a. n’existe pas. En effet, le classement en ZSC pourrait être attaqué devant les juridictions nationales.

    Appréciation de la Cour

    42

    Contrairement à ce que font valoir les requérants, le constat du Tribunal selon lequel leurs conclusions tendant à l’annulation de la décision litigieuse doivent être rejetées comme irrecevables n’équivaut pas à un déni de justice.

    43

    À cet égard, il suffit de rappeler que, ainsi qu’il ressort en substance du point 63 de l’ordonnance attaquée, les particuliers doivent pouvoir bénéficier d’une protection juridictionnelle effective des droits qu’ils tirent de l’ordre juridique communautaire. La protection juridictionnelle des personnes physiques ou morales qui ne peuvent pas, en raison des conditions de recevabilité prévues à l’article 230, quatrième alinéa, CE, attaquer directement des actes communautaires du type de la décision litigieuse doit être assurée de manière efficace par les voies de recours devant les juridictions nationales. Celles-ci sont, conformément au principe de coopération loyale énoncé à l’article 10 CE, tenues d’interpréter et d’appliquer, dans toute la mesure du possible, les règles internes de procédure gouvernant l’exercice des recours d’une manière qui permette auxdites personnes de contester en justice la légalité de toute décision ou de toute autre mesure nationale relative à l’application à leur égard d’un acte communautaire tel que celui en cause, en excipant de l’invalidité de ce dernier et en amenant ainsi ces juridictions à interroger à cet égard la Cour par la voie de questions préjudicielles (arrêt du 22 mars 2007, Regione Siciliana/Commission, C-15/06 P, Rec. p. I-2591, point 39).

    44

    Dès lors, il y a lieu de rejeter également le troisième moyen.

    45

    Il résulte des considérations qui précèdent que le pourvoi doit être rejeté dans son ensemble.

    Sur les dépens

    46

    Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 118 de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

    47

    La Commission ayant conclu à la condamnation de M. Sahlstedt e.a. et ceux-ci ayant succombé en leurs conclusions, il y a lieu de les condamner aux dépens.

    48

    En application de l’article 69, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement de procédure, également applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 118 du même règlement, les États membres qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens. Dès lors, il y a lieu de décider que le Royaume d’Espagne et la République de Finlande supportent leurs propres dépens.

     

    Par ces motifs, la Cour (deuxième chambre) déclare et arrête:

     

    1)

    Le pourvoi est rejeté.

     

    2)

    M. Sahlstedt e.a. sont condamnés aux dépens.

     

    3)

    Le Royaume d’Espagne et la République de Finlande supportent leurs propres dépens.

     

    Signatures


    ( *1 ) Langue de procédure: le finnois.

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