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Document 52011DC0025

COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS RELEVER LES DÉFIS POSÉS PAR LES MARCHÉS DES PRODUITS DE BASE ET LES MATIÈRES PREMIÈRES

/* COM/2011/0025 final */

52011PC0025

COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS RELEVER LES DÉFIS POSÉS PAR LES MARCHÉS DES PRODUITS DE BASE ET LES MATIÈRES PREMIÈRES /* COM/2011/0025 final */


[pic] | COMMISSION EUROPÉENNE |

Bruxelles, le 2.2.2011

COM(2011) 25 final

COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROP ÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS

RELEVER LES DÉFIS POSÉS PAR LES MARCHÉS DES PRODUITS DE BASE ET LES MATIÈRES PREMIÈRES

1. Introduction

Les marchés des produits de base ont connu ces dernières années une volatilité de plus en plus forte et des fluctuations de prix sans précédent. Sur toutes ces grandes catégories de marchés, notamment ceux de l'énergie, des métaux et des minerais, de l'agriculture et des denrées alimentaires, les prix ont enregistré une forte hausse en 2007 pour atteindre un niveau record en 2008, avant de reculer nettement à compter du second semestre de 2008 et, depuis l'été 2009, ils affichent à nouveau une tendance à la hausse. À des degrés divers, ces fluctuations de prix se sont répercutées sur les prix à la consommation, provoquant parfois de l'agitation sociale et accentuant la pauvreté .

Ces évolutions récentes s'expliquent par une série de modifications des caractéristiques de l'offre et de la demande mondiales ainsi que par certains chocs de courte durée qui ont perturbé les principaux marchés des produits de base et des matières premières. Les années 2002 à 2008 ont été marquées par une très forte augmentation de la demande de matières premières, tirée par le dynamisme de l'économie mondiale, en particulier dans des pays émergents comme la Chine. Cet accroissement de la demande sera renforcé par la poursuite du processus rapide d'industrialisation et d'urbanisation dans des pays tels que la Chine, l'Inde et le Brésil. La Chine est déjà le plus gros consommateur de métaux au monde: sa part dans la consommation de cuivre, par exemple, est passée de 12 % à environ 40 % au cours des 10 dernières années[1]. Ces fluctuations de prix ont encore été amplifiées par divers problèmes structurels au niveau des chaînes d'approvisionnement et de distribution de différents produits de base, notamment pour ce qui est de la disponibilité des infrastructures et des services de transport. Ces évolutions interviennent à un moment où la compétitivité des entreprises européennes passe par un accès efficace et sûr aux matières premières.

Les marchés découvrent en outre le poids grandissant de la finance, les flux d'investissement financier vers les marchés d'instruments dérivés sur produits de base ayant sensiblement augmenté au cours des dernières années: entre 2003 et 2008, par exemple, les investissements effectués par les investisseurs institutionnels sur les marchés des produits de base, qui atteignaient 13 milliards d'euros en 2003, ont augmenté pour représenter entre 170 et 205 milliards d'euros en 2008. Si la crise financière est venue interrompre cette tendance à la hausse, les positions financières ont été, en 2010, proches des niveaux record enregistrés en 2008 sur plusieurs marchés, voire les ont dépassés; les investissements effectués par les opérateurs boursiers, en particulier, ont fortement augmenté. Si le débat concernant l'importance relative des multiples facteurs qui influent sur les prix des produits de base n'est pas tranché, il est manifeste qu'il existe à présent un lien plus étroit entre les fluctuations de prix que l'on enregistre sur différents marchés de produits de base, lesquels sont désormais plus étroitement liés aux marchés financiers[2].

Face à ces évolutions, de plus en plus de voix se sont élevées pour réclamer l'adoption de mesures destinées à atténuer les effets négatifs de ces fluctuations sur les producteurs comme les consommateurs, en particulier les plus vulnérables d'entre eux. Ces appels retiennent maintenant l'attention au niveau politique le plus élevé, comme lors des derniers sommets du G20.

Les défis posés par les prix des produits de base et les matières premières sont étroitement liés et touchent aux politiques conduites dans les domaines des marchés financiers, du développement, de l'industrie et des relations extérieures. La Commission européenne en conséquence a pris un certain nombre d'initiatives: dès 2008, elle a souligné l'importance stratégique de définir des politiques appropriées pour les matières premières en lançant une initiative dans ce domaine[3]. Depuis, elle a pris dans ce cadre des mesures touchant à l'accès durable aux matières premières à l'intérieur comme à l'extérieur de l'UE, ainsi qu'à l'utilisation efficace des ressources et au recyclage. Elle a également engagé une réflexion approfondie concernant le marché des produits de base en général et les prix des denrées et la sécurité de l'approvisionnement alimentaire en particulier[4]. Pour remédier à la crise financière, elle a lancé une série de mesures visant à améliorer la régulation, l'intégrité et la transparence des marchés financiers et elle a présenté dernièrement une proposition concernant la régulation des marchés de l'énergie.

La présente communication dresse le bilan des résultats obtenus dans chacun de ces domaines et des mesures envisagées pour poursuivre les efforts entrepris. Ceux-ci s'inscrivent dans le cadre de la stratégie Europe 2020 qui vise à garantir une croissance intelligente, durable et inclusive, et qui est étroitement liée à l'initiative phare «Une Europe efficace dans l'utilisation des ressources»[5]. Ces travaux viendront alimenter ceux du G20 qui a convenu, lors du sommet de Pittsburgh, «d'améliorer la régulation, le fonctionnement et la transparence des marchés financiers et physiques de matières premières afin de remédier à la volatilité excessive des prix des matières premières»[6]. Cet engagement a été renforcé en novembre 2010 par le sommet du G20 organisé à Séoul, lors duquel les participants ont promis de lutter contre la volatilité du marché de l'alimentation et la volatilité excessive du prix des combustibles fossiles[7].

2. Évolutions sur les marchés mondiaux des produits de base

Les fondamentaux, notamment les changements inattendus des conditions économiques mondiales liés à la forte croissance de la demande des économies de marché émergentes, ont eu une influence décisive sur la façon dont ont évolué les marchés des produits de base[8]. Les autres facteurs qui ont également joué un rôle sont notamment les déficits d'approvisionnement, la politique monétaire et, ces dernières années, diverses interventions startégiques ponctuelles. Les restrictions à l'exportation, les mesures aux frontières et les évolutions des politiques de stockage ont eu une incidence sur les prix alimentaires pendant la période qui a précédé la crise des prix alimentaires de 2008. L'utilisation accrue des terres agricoles pour la production d'énergies renouvelables a accentué le lien entre l'évolution des prix agricoles et celle des prix de l'énergie. Ces fluctuations de prix ont également été amplifiées par divers problèmes structurels au niveau des chaînes d'approvisionnement et de distribution de différents produits de base[9].

Chacun des marchés de produits de base a son fonctionnement propre en fonction de la nature du produit, des besoins des opérateurs et du contexte. Il n'existe pas de modèle unique pour l'organisation des marchés de produits de base et, partant, de la façon dont les prix évoluent. Le commerce sur certains marchés de produits de base présente un degré élevé de normalisation, tandis que sur d'autres marchés, la façon dont s'effectuent les échanges peut varier en fonction des besoins spécifiques des différents opérateurs. Les marchés des instruments dérivés[10] sur produits de base existent depuis longtemps et jouent un rôle dans la couverture des risques des producteurs comme des consommateurs de divers produits de base. Tout comme le commerce des produits de base sous-jacents peut prendre différentes formes, les transactions dont font l'objet les produits dérivés peuvent se dérouler d'une façon bilatérale, qualifiée généralement de «gré à gré», ou sur des marchés organisés. De plus, le rôle des institutions financières de même que l'importance des instruments dérivés varient fortement d'un marché à l'autre. Les parties qui suivent examinent les évolutions spécifiques observées sur les marchés de l'énergie et des produits agricoles de base ainsi que l'interdépendance croissante des marchés de produits de base et des marchés financiers.

2.1. Évolution des marchés physiques

2.1.1. Énergie (pétrole, électricité, gaz)

D'une manière générale, les marchés pétroliers, qui sont intégrés, liquides et mondiaux, sont réputés être particulièrement déterminés non seulement par des fondamentaux économiques, mais aussi par des facteurs géopolitiques, le rôle de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) et les transactions non physiques. Les instruments d'investissement dans les produits financiers et les instruments dérivés, ainsi que les technologies du commerce ont considérablement évolué. Lors du sommet de Séoul, le G20 a souligné que le bon fonctionnement et la transparence des marchés de l'énergie étaient importants pour la croissance économique. Il s'est penché sur la transparence des marchés physiques, la volatilité des prix des combustibles fossiles et l'élimination progressive des subventions inefficaces accordées à ces combustibles.

Le marché du gaz, qui est de plus en plus influencé par le développement de ressources non conventionnelles, s'est toujours appuyé sur des contrats de gré à gré à long terme. Avec la prolifération du gaz naturel liquéfié (GNL), le gaz se négocie de plus en plus sur un marché mondial et liquide qui se standardise. Le marché de l'énergie le moins mondial est celui de l'électricité, dont le transport sur de longues distances est limité pour des raisons matérielles d'inaptitude au stockage et de perte d'énergie. La portée géographique de ce marché est, dès lors, inférieure à celle des marchés d'autres produits énergétiques.

Les marchés européens de l'électricité (et du gaz) sont de plus en plus intégrés du fait de l'existence du marché intérieur. S'y sont développés des bourses de l'énergie ou d'autres marchés organisés, ainsi que des marchés de gré à gré animés par des intermédiaires, qui peuvent être utilisés aussi bien pour la livraison physique que pour la couverture. Il n'en reste pas moins que les prix du marché sont extrêmement sensibles aux capacités de production effectivement disponibles ou prévues, l'électricité ne pouvant être stockée à l'échelle industrielle.

2.1.2. Agriculture et sécurité de l'approvisionnement alimentaire

La plupart des produits agricoles de base, notamment les végétaux, se caractérisent par une production à caractère fortement saisonnier et leur offre ne peut pas toujours s'adapter rapidement à l'évolution des prix ou de la demande, ce qui signifie que les marchés agricoles se définissent par un certain degré de variabilité. Des facteurs structurels, tels que la croissance démographique, les pressions exercées sur les terres agricoles et l'incidence du changement climatique, peuvent accentuer les tensions qui sont de plus en plus fortes sur les marchés agricoles. Toutefois, la volatilité des prix des produits agricoles de base a atteint ces temps-ci des niveaux sans précédent. C'est le cas aussi bien sur les marchés européens et internationaux que sur les marchés au comptant et à terme. Au sein de l'UE, les réformes successives de la politique agricole commune (PAC) ont sensiblement réduit les prix de soutien et les mesures connexes. Les producteurs et les négociants de produits de base sont donc devenus plus sensibles à l'évolution des prix du marché, ce qui les prédispose davantage, même si ce n'est pas le cas dans l'ensemble des secteurs agricoles, à utiliser les marchés à terme pour couvrir les risques. Le négoce d'options et d'instruments dérivés de gré à gré se développe également. Ces facteurs expliquent, dans une certaine mesure, le regain d'activité sur les bourses européennes et soulèvent deux questions en particulier: la sécurité de l'approvisionnement alimentaire et la nécessité d'une plus grande transparence sur les marchés des produits dérivés agricoles.

La sécurité de l'approvisionnement alimentaire a été définie comme l'un des grands axes de la future réforme de la PAC[11]. Seule une agriculture forte permettra au secteur très concurrentiel de l'industrie alimentaire de préserver son rang dans l'économie et le commerce de l'UE et de contribuer de manière importante aux marchés internationaux. C'est pourquoi, dans le cadre du cycle de Doha pour le développement, l'UE a marqué son accord sur un ensemble important de mesures dans le domaine agricole sous réserve de parvenir à un accord ambitieux, équilibré et global.

La volatilité excessive des prix des denrées pèse aussi bien sur les producteurs que sur les consommateurs et a des répercussions importantes sur la sécurité de l'approvisionnement alimentaire pour les pays en développement importateurs de denrées. En 2007 et 2008, par exemple, lorsque les prix des produits alimentaires ont flambé, une grande partie de la population pauvre des pays en développement a réduit sa ration alimentaire[12]. Les hausses de prix des produits alimentaires observées en 2010 pourraient entraîner une nouvelle augmentation de la malnutrition, des besoins humanitaires, des tensions et des troubles sociaux chez les consommateurs les plus faibles de la planète. Si une hausse des prix mondiaux pourrait stimuler la production agricole, les mécanismes de transmission des prix sont souvent imparfaits. Dans de nombreux pays en développement, les marchés des produits de base sont souvent déconnectés des marchés mondiaux ou, dans le meilleur des cas, les signaux des prix mondiaux sont transmis aux marchés nationaux avec un fort décalage, la réaction de l'offre nationale s'en trouvant souvent retardée.

Plusieurs analyses, notamment de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, de l'OCDE et de la Commission, portent sur l'évolution de l'offre et de la demande, exacerbée par des facteurs économiques et stratégiques à court terme (y compris des restrictions à l'exportation), qui expliquent en partie l'extrême volatilité des prix, notamment des facteurs spécifiques aux marchés financiers qui peuvent avoir amplifié les modifications de prix. Malgré les incertitudes qui subsistent, les perspectives établies pour les produits agricoles de base par plusieurs organisations, notamment les toutes dernières projections à moyen terme de la Commission, appellent clairement trois conclusions:

- les prix des produits agricoles de base devraient rester supérieurs à leurs moyennes historiques, ce qui inverserait la tendance persistante à la baisse qui les caractérisait, du moins pendant un certain temps;

- la volatilité des prix devrait également rester élevée, même si ses causes et sa durée continuent d'être incertaines;

- le niveau des prix des intrants agricoles risque aussi de rester supérieur à ce qu'il a toujours été.

Compte tenu de tous ces éléments, la hausse des prix des produits agricoles de base n'entraînera pas forcément une majoration des revenus des agriculteurs, notamment si leurs marges sont fortement érodées par l'augmentation des coûts. Qui plus est, les problèmes auxquels pourraient être confrontés les pays importateurs nets de produits alimentaires et, plus généralement, les consommateurs les plus vulnérables en raison de l'incidence des prix sur l'augmentation des prix des produits alimentaires, sont évidents. Si une certaine variabilité fait partie intégrante des marchés agricoles, une volatilité excessive n'est bénéfique ni pour les producteurs ni pour les consommateurs.

2.1.3. Matières premières

Les minerais métalliques, les minerais industriels, les matériaux de construction, le bois et le caoutchouc naturel sont des matières premières qui, contrairement à l'électricité, font l'objet d'échanges au niveau mondial. En ce qui concerne les prix et les marchés, les matières premières diffèrent essentiellement entre elles selon qu'elles sont échangées en bourse ou non. Par exemple, les métaux de base tels que l'aluminium, le cuivre, le plomb, le nickel, l'étain et le zinc font l'objet d'échanges, notamment sur la London Metals Exchange (LME), qui est la principale bourse de métaux du monde. Ce n'est pas le cas de plusieurs matières premières essentielles de l'UE, telles que le cobalt, le gallium, l'indium et les terres rares, qui font l'objet d'un marché moins transparent et de volumes d'échanges très limités par rapport à d'autres matières.

Les marchés mondiaux des métaux et des minerais évoluent de manière cyclique en fonction de l'offre et de la demande. Toutefois, les années 2002 à 2008 ont été marquées par une importante augmentation de la demande de matières premières, tirée par le dynamisme de la croissance économique mondiale, en particulier dans les pays émergents. Cela s'est traduit par des niveaux de prix records. Selon les dernières tendances, la demande de matières premières sera une fois de plus déterminée par l'évolution des économies émergentes et par la diffusion rapide de technologies génériques essentielles.

Sur ces marchés, les décisions prises par certains pays d'accorder à leurs entreprises un accès privilégié aux ressources nationales, notamment en imposant des restrictions à l'exportation, suscitent de plus en plus l'inquiétude. Ces décisions créent des distorsions sur les marchés mondiaux et des incertitudes quant à la régularité des flux de produits de base. Elles peuvent avoir des incidences aussi bien pour les pays développés que pour les pays en développement, pratiquement aucune économie n'étant autosuffisante pour toutes les matières premières. Les pays les moins développés notamment peuvent être particulièrement tributaires des importations de produits de base et donc pâtir de l'absence ou de l'insuffisance de règles multilatérales dans certains domaines tels que les droits à l'exportation. De plus, les entreprises réagissent aux fluctuations de prix de diverses manières, par exemple, en constituant des stocks, en négociant des contrats à long terme ou en se couvrant par des contrats à terme. Certaines de ces réactions peuvent exacerber les pressions exercées sur l'offre.

2.2. Interdépendance croissante des marchés de produits de base et des marchés financiers

Les instruments dérivés de matières premières permettent aux producteurs et aux consommateurs de se protéger contre les risques liés à la production physique et à l'incertitude sur les prix. Ils sont aussi de plus en plus considérés comme de simples investissements financiers. Dans ce cadre, les flux d'investissements financiers vers les marchés d'instruments dérivés de matières premières ont considérablement augmenté ces dernières années (voir graphique 1).

Les marchés de produits de base et les marchés financiers sont donc de plus en plus imbriqués les uns dans les autres et ont en commun un nombre croissant d'intervenants en quête de d'instruments de gestion des risques et de possibilités d'investissement. La liquidité, l'efficacité et l'accessibilité des marchés au comptant sont renforcées par le bon fonctionnement des marchés d'instruments dérivés et vice-versa. Des informations utiles et fiables sur les fondamentaux des marchés, telles que les volumes de production et de consommation, la capacité des réseaux et des conduites, etc., ainsi que le volume des échanges sur les marchés de produits de base sont nécessaires pour fixer les prix d'une manière transparente et harmonieuse aussi bien sur les marchés au comptant que sur les marchés d'instruments dérivés. Toutefois, les marchés d'instruments dérivés sont utilisés non seulement par les entreprises commerciales à des fins de gestion des risques, mais aussi par les institutions financières dans le cadre de leurs stratégies de répartition des risques. Les prix des contrats à terme sur marchandises (instruments dérivés cotés sur des marchés organisés) constituent souvent des indices de référence utilisés pour fixer, par exemple, les prix au détail de l'énergie et des produits alimentaires pour les consommateurs de l'UE.

Graphique 1: Transactions sur les marchés d'instruments dérivés sur matières premières (nombre total de contrats ouverts pour instruments financiers à terme et options)

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Source: Commodity Futures Trading Commission, États-Unis (via Reuters Ecowin).

Un contrat d'instruments dérivés se caractérise par le fait même que sa valeur dépend de celle du marché sous-jacent auquel il se rapporte. C'est d'autant plus vrai lorsque le marché sous-jacent est un marché physique. Les prix des instruments dérivés sur matières premières et des produits de base physiques sous-jacents sont donc corrélés. Les marchés d'instruments dérivés sur matières premières et les marchés de produits de base ne sauraient donc être considérés séparément.

Comprendre de quelle manière interagissent les marchés financiers et les marchés physiques reste, néanmoins, une question complexe. Il est d'autant plus difficile d'établir ces corrélations que les marchés physiques ne présentent pas tous les mêmes caractéristiques. Divers facteurs entrent en jeu, dont certains sont spécifiques à tel ou tel marché, si bien que plusieurs dynamiques de marché sont à l'œuvre dans les différents secteurs concernés. À ce stade, compte tenu de l'absence de transparence sur ces marchés, il est encore plus difficile d'évaluer la nature exacte et l'étendue des liens qui existent entre le processus de formation des prix sur les marchés de produits de base et la montée en puissance des marchés d'instruments dérivés.

Si, à l'évidence, les positions sur les marchés d'instruments dérivés et les prix au comptant sont étroitement liés, il reste difficile d'apprécier pleinement les interactions et l'incidence que peuvent avoir sur la volatilité des marchés physiques sous-jacents les fluctuations sur les marchés d'instruments dérivés. Il est d'autant plus difficile d'établir ces corrélations que les marchés physiques ne présentent pas tous les mêmes caractéristiques et que plusieurs dynamiques de marché sont à l'œuvre dans les différents secteurs concernés. Il convient donc de pousser plus avant les travaux pour mieux comprendre cette évolution[13].

Toutefois, à ce stade, il apparaît déjà clairement qu'il convient de renforcer le degré de transparence et l'obligation de rendre des comptes aussi bien sur les marchés physiques sous-jacents que sur les marchés d'instruments dérivés. Une plus grande transparence et un accès aisé aux informations sur les marchés physiques, permettront aux investisseurs de prendre des décisions informées, favoriseront un processus approprié de fixation des prix et faciliteront la détection et la prévention des abus. Par ailleurs, la récente volatilité des prix a montré qu'il convenait de maintenir la possibilité, pour les acteurs des marchés physiques, de couvrir les risques liés aux prix, tout en assurant un suivi étroit et efficace de l'évolution des marchés. Cet aspect est particulièrement important pour les pays en développement importateurs de denrées. De nouvelles mesures de régulation ciblées, telles que la fixation, au besoin, de limites de position, pourraient également être envisagées dans ce contexte.

3. Réaction stratégique de l'UE à l'évolution des marchés des produits de base

Au niveau de l'UE, une initiative a vu le jour pour accroître la surveillance, l'intégrité et la transparence des transactions réalisées sur les marchés de l'énergie[14]. Plusieurs initiatives ont été prises afin d'améliorer le fonctionnement de la chaîne alimentaire et la transparence sur les marchés de produits agricoles de base. Dans le cadre des réformes en cours du cadre de régulation des marchés financiers, la Commission a également défini des mesures visant à augmenter l'intégrité et la transparence des marchés d'instruments dérivés sur matières premières.

3.1. Marchés physiques

3.1.1. Énergie (pétrole, électricité, gaz)

La Commission a montré qu'elle était disposée à prendre des mesures pour garantir le bon fonctionnement des marchés de l'énergie en proposant d'établir des règles claires interdisant les abus de marché sur les marchés de gros de l'électricité et du gaz, complétées par un cadre européen de surveillance des marchés et de nouveaux pouvoirs d'exécution pour les autorités de régulation de l'énergie[15]. Cette approche permettra aux entreprises et aux citoyens européens de tirer parti des avantages du marché intérieur et offre un bon exemple des moyens à mettre en œuvre pour surmonter les difficultés qui résultent de l'interdépendance croissante des marchés de produits de base et des marchés financiers. La proposition de règlement concernant l'intégrité et la transparence du marché de l'énergie[16] fournira aux autorités européennes et nationales les instruments nécessaires pour déceler les cas d'abus de marché sur les marchés de gros où le gaz et l'électricité font l'objet d'échanges:

- l'agence européenne de coopération des régulateurs de l'énergie (ACRE) sera chargée de surveiller les marchés en vue de mettre au jour d'éventuels cas d'abus;

- les opérateurs n'auront pas le droit d'utiliser des informations privilégiées pour tirer parti de leurs transactions ou manipuler le marché en provoquant une hausse artificielle des prix qui ne serait pas justifiée par des raisons liées à la disponibilité, au coût de production ou à la capacité de stockage ou de transport de l'énergie;

- la coopération sera renforcée entre les régulateurs des marchés physiques (ACRE) et ceux des marchés financiers (Autorité européenne des marchés financiers ou AEMF).

La Commission s'emploiera à garantir que les exigences en matière de transparence concernant les données fondamentales relatives aux marchés du gaz et de l'électricité sont appropriées et répondent aux besoins des marchés.

3.1.2. Agriculture et sécurité de l'approvisionnement alimentaire

Les causes de la volatilité des prix étant nombreuses, il n'existe pas de solution unique et simple aux problèmes recensés. C'est d'autant plus le cas que la spécificité de la production agricole (liens avec la sécurité de l'approvisionnement alimentaire, environnement, notamment dépendance de la production agricole à l'égard des cycles de vie, du temps et des saisons, des conditions sanitaires et des parasites) complique encore l'incidence éventuelle des mesures qui pourraient être prises.

Toutefois, un domaine d'action essentiel concerne l'amélioration des informations sur les marchés. Le secteur agricole dispose d'une quantité importante d'informations sur la production, la consommation et les réserves agricoles, qui proviennent de sources publiques (Banque mondiale, FAO/OCDE, ministère de l'agriculture des États-Unis, UE, ABARE) ou d'organes compétents dans le domaine des produits de base (en particulier le Conseil international des céréales). Ces informations se distinguent clairement de celles sur les produits de base tels que les métaux, les minerais et l'énergie, qui sont essentiellement fournies par les entreprises et leur appartiennent. La qualité et la disponibilité en temps voulu d'informations relatives aux réserves alimentaires nationales et régionales et aux prévisions en matière de production et de consommation de produits alimentaires pourraient néanmoins encore être améliorées. Le G20 a demandé à la «Banque mondiale de collaborer avec les autres agences internationales concernées pour concevoir des mesures qui permettront d'améliorer les informations sur les réserves alimentaires nationales et régionales et les prévisions concernant la production alimentaire», une mission que la Commission appuiera sans réserve.

Même si la politique agricole commune de l'UE dépend de plus en plus des lois du marché, les informations sur l'évolution du marché des produits de base et la transparence dont elle doit faire l'objet font partie intégrante des efforts déployés pour garantir le bon fonctionnement de la chaîne agroalimentaire:

- les États membres communiquent régulièrement à la Commission un large éventail de données qui sont publiées sur internet[17] et examinées avec des comités consultatifs de parties prenantes;

- un instrument de surveillance des prix des produits alimentaires a été institué par l'Office statistique de la Commission afin d'accroître la transparence des prix[18], et son amélioration fait actuellement l'objet d'un examen;

- les services de la Commission produisent et publient régulièrement des perspectives à moyen terme pour les principaux marchés de produits agricoles de base[19].

La Commission a institué un forum à haut niveau sur l'amélioration du fonctionnement de la chaîne d'approvisionnement alimentaire[20] qui ne s'occupe pas de la volatilité des prix proprement dite, mais aborde la question de l'évolution de la transmission des prix tout au long de la chaîne d'approvisionnement, examine les relations entre les entreprises, la compétitivité de l'industrie alimentaire, la logistique agroalimentaire et l'instrument de surveillance des prix des produits alimentaires.

Les flambées des prix des produits alimentaires ont révélé que les investissements dans l'agriculture de nombreux pays en développement ont été insuffisants au cours des dernières décennies[21]. Dans sa politique de développement, l'UE a reconnu la nécessité d'inverser cette tendance. Ainsi que l'indique le livre vert sur la politique de développement de l'UE[22], celle-ci peut jouer un rôle important en réduisant l'incidence de la volatilité des prix sur les populations les plus vulnérables. La Commission a déjà adopté un cadre d'action sur la sécurité alimentaire[23], indiquant que l'UE et les États membres devraient contribuer à améliorer le fonctionnement des marchés de l'alimentation aux niveaux mondial, régional et national, notamment par une meilleure transparence des marchés. Cela supposerait d'aider les pays en développement à renforcer les organisations d'agriculteurs, à améliorer la transparence des prix, à accroître la productivité agricole sur une base durable, ainsi qu'à élaborer et à mettre en œuvre des cadres réglementaires. Le développement de la production agricole permettra d'augmenter la résilience et la capacité d'adaptation aux chocs alimentaires.

Enfin, étant donné l'incidence que les actions unilatérales de certains gouvernements peuvent avoir sur les marchés physiques et la volatilité des prix, une meilleure gouvernance et un dialogue international dans ce domaine s'avèrent nécessaires.

3.2. La régulation des marchés financiers

De l’avis général, il est souhaitable d’accroître l’intégrité et la transparence du marché des instruments dérivés sur produits de base. Conformément aux principes et aux conclusions du G20, la Commission a pris certaines initiatives à cet effet:

- elle a adopté une proposition de règlement sur les produits dérivés négociés de gré à gré[24], qui vise à réduire le risque systémique et à améliorer, pour les régulateurs, la transparence à l’égard de tous les instruments dérivés, y compris sur produits de base;

- la révision de la directive sur les abus de marché[25], au printemps 2011, aura pour objectif de définir clairement dans quels cas les négociations menées sur les marchés constituent des abus et de garantir que tous les marchés et transactions susceptibles de faire l’objet de pratiques abusives sont adéquatement régis par des règles paneuropéennes;

- le réexamen des produits d’investissement de détail[26] déterminera s’il est nécessaire de renforcer la rigueur et d’améliorer la qualité des informations lorsque des produits d’investissement structurés sur produits de base sont proposés aux investisseurs de détail;

- la directive sur la gestion des fonds d’investissement alternatifs[27] renforcera la transparence des fonds pour les investisseurs et les autorités de contrôle nationales et permettra de mieux cerner leur impact sur les marchés d’instruments dérivés sur produits de base;

- la révision de la directive sur les marchés d’instruments financiers[28], au printemps 2011, visera à accroître encore la transparence des transactions et des prix en matière d’instruments dérivés sur produits de base, en précisant dans quelles conditions ces instruments doivent être négociés exclusivement sur des marchés organisés. La Commission étudiera aussi la nécessité de recueillir des informations plus systématiques et plus détaillées sur les activités commerciales de différents types de participants aux marchés d’instruments dérivés sur produits de base, ainsi que le besoin, pour les régulateurs, d’avoir une vue d’ensemble plus complète des positions existantes; elle vérifiera également s’il y a lieu d’imposer des limites de position;

- enfin, la création de l’Autorité européenne des marchés financiers (AEMF) garantira la cohérence des règles techniques applicables à ces marchés et contribuera à renforcer la collaboration avec les régulateurs des marchés physiques sous-jacents[29].

3.3. Interaction entre les marchés physiques et financiers de produits de base

Les mesures décrites ci-dessus contribueront à garantir que les flux d’investissement, actuellement en pleine augmentation, sont plus transparents, mieux comptabilisés et moins susceptibles de perturber le fonctionnement des marchés de produits de base. La Commission reconnaît néanmoins qu’il est nécessaire de mieux comprendre l’interaction entre les marchés physiques et financiers de produits de base. Dans ce contexte, la Commission:

- analysera plus en détail l’évolution des marchés physiques et financiers des produits de base afin de permettre une meilleure compréhension de leurs relations, soutiendra les initiatives similaires en cours de réalisation à l’échelle mondiale (G20, OICV, AIE, FAO, CNUCED, OCDE, FMI, etc.);

- favorisera l’amélioration de la transparence et de l’accessibilité des informations relatives aux marchés physiques de produits de base, y compris par l’intermédiaire des régulateurs et institutions concernés, afin de garantir le bon fonctionnement de ces marchés.

4. INITIATIVE «MATIÈRES PREMIÈRES» DE L'UE

Au-delà des évolutions liées à la volatilité des prix et à l’interaction entre les marchés physiques et financiers de produits de base, la question de l’approvisionnement physique en matières premières reste essentielle. En 2008, la Commission a lancé l’initiative «matières premières»[30], qui définit une stratégie intégrée pour répondre aux différents obstacles liés à l’accès aux matières premières non énergétiques et non agricoles.

Cette initiative repose sur trois piliers, qui consistent à garantir des conditions équitables en matière d’accès aux ressources dans les pays tiers, à favoriser un approvisionnement durable en matières premières auprès de sources européennes et à dynamiser l’efficacité des ressources et promouvoir le recyclage. La stratégie repose, entre autres, sur la nécessité d’appliquer une «diplomatie des matières premières» intégrée à des politiques plus générales à l’égard des pays tiers, telles que des politiques en faveur des droits de l’homme, de la bonne gouvernance, de la résolution des conflits, de la non-prolifération et de la stabilité régionale. La présente partie analyse les résultats obtenus à ce jour dans le cadre de la définition des matières premières essentielles, ainsi que dans le domaine des échanges, du développement, de la recherche et de l’efficacité et du recyclage des ressources. Le point 5 traite des étapes ultérieures.

4.1. Définition des matières premières essentielles

La Commission a recensé 14 matières premières essentielles au niveau de l’UE (voir l’annexe ci-après), en collaboration avec les États membres et les parties intéressées, et a développé des moyens méthodologiques transparents, novateurs et pragmatiques pour définir ce qu’il y a lieu d’entendre par «matière première essentielle»[31].

Les matières premières essentielles sont celles qui présentent un risque particulièrement élevé de pénurie d’approvisionnement dans les dix prochaines années et qui jouent un rôle particulièrement important dans la chaîne de valeur. Le risque lié à l’approvisionnement découle de la concentration de la production dans un cercle restreint de pays et de la stabilité politique et économique fragile de certains fournisseurs. Il est fréquent que ce risque soit exacerbé par une faible substituabilité et des taux de recyclage trop bas. La stabilité de l’approvisionnement joue souvent un rôle important lorsqu’il est question d’atteindre des objectifs de politique climatique et de favoriser l’innovation technologique. Par exemple, les terres rares sont essentielles pour fabriquer des aimants permanents à haute performance utilisés dans les turbines pour éoliennes ou les véhicules électriques, les convertisseurs catalytiques pour véhicules, les circuits imprimés, les fibres optiques et les supraconducteurs à haute température. L’UE dépend entièrement des importations et, en 2009, la Chine concentrait 97 % de la production mondiale. Pourtant, il n’existe actuellement aucun procédé de recyclage ou de substitution commercialement viable pour les terres rares.

Les travaux menés en vue de définir les matières premières essentielles ont aussi mis en évidence la nécessité de disposer de données et de connaissances de meilleure qualité et de mettre régulièrement à jour la liste des matières premières, de manière à refléter l’évolution du marché, les progrès techniques (par exemple, lithium, hafnium et nickel) ou les nouvelles informations concernant l’impact d’une matière sur l’environnement. En outre, ils ont permis de conclure que les mesures prises par le pouvoir public ne devaient pas porter exclusivement sur les matières premières essentielles.

4.2. Mise en œuvre de la stratégie commerciale de l’UE à l’égard des matières premières

Depuis 2008, un certain nombre de réalisations ont vu le jour en matière de politique commerciale de l’UE. Une stratégie commerciale à l’égard des matières premières a été définie et un premier rapport annuel publié[32]. Pour l’heure, les résultats atteints dans les trois domaines principaux sont les suivants:

- l’UE a proposé l’adoption de disciplines commerciales en matière de restrictions à l’exportation (dont les interdictions, les contingents, les droits et les certificats d’exportation non automatiques) dans toutes les négociations concernées, qu’elles soient bilatérales ou multilatérales (par exemple dans l’accord de libre-échange avec la Corée, ainsi que dans les dispositions relatives aux droits à l’exportation applicables à un certain nombre de matières premières, dont le bois, dans le contexte de l’adhésion de la Russie à l’OMC);

- en ce qui concerne l’application de la stratégie, la Commission a continué à lutter contre les obstacles, en premier lieu par le dialogue. Cependant, lorsque le dialogue n’a pas porté ses fruits, elle s’est montrée disposée à utiliser d’autres outils, y compris les procédures de règlement des différends de l’OMC;

- en ce qui concerne la portée de la stratégie, la Commission a abordé la question des matières premières dans le cadre de plusieurs dialogues bilatéraux et au sein de l’OCDE. À la suite de l’organisation conjointe d’un atelier consacré à cette question, fin 2009, ce thème a été ajouté au programme de travail de l’OCDE pour 2011-2012.

4.3. Instruments de développement

Plusieurs actions ont été lancées dans le cadre du 10e FED, principalement au titre de la bonne gouvernance («renforcer les États»). Des projets ont également été financés par le Fonds fiduciaire UE-Afrique pour les infrastructures, à l’aide de prêts de la BEI, en faveur de projets miniers, ou du septième programme-cadre de recherche et de développement, pour la réalisation d’études géologiques. La Commission s’efforce également d’entretenir un climat d’investissement sain grâce à diverses initiatives, telles que des programmes d’assistance technique par pays visant à améliorer la transparence des revenus au moyen de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives, et des travaux destinés à encourager la bonne gouvernance dans le domaine fiscal[33].

4.4. Nouvelles possibilités en matière de recherche, d’innovation et de compétences

L’UE a pris des mesures pour améliorer sa base de connaissances sur les gisements de nombreuses matières premières importantes, en cours d’exploitation ou à exploiter, et pour encourager l’industrie extractive à fournir de nouveaux produits à l’industrie manufacturière, dans le contexte du septième programme-cadre de recherche et de développement. Le projet ProMine, lancé en 2009 et doté d’un budget de 17 millions d’euros, permettra de créer la première base de données satellitaire paneuropéenne sur les ressources minérales, ainsi qu’un système de modélisation informatique 4D qui contribuera à déterminer la valeur des ressources minérales européennes. Des fonds ont été alloués à des projets relatifs à la mise en œuvre de techniques souterraines avancées visant à garantir une exploitation minière intelligente, à la substitution des matières premières essentielles, telles que les terres rares et les métaux du groupe du platine, et à la coordination des activités des États membres dans le domaine de la manutention industrielle des matières premières, via ERA-NET. L’UE soutient le développement du concept de «bioraffinage», qui contribuera à la création de nouveaux produits à grande valeur ajoutée; les plateformes européennes de technologie pour les ressources minières durables et pour la technologie de la filière bois sont, quant à elles, des outils importants pour stimuler de nouveaux efforts en matière de recherche dans le domaine des matières premières.

Le Fonds européen de développement régional finance également la recherche, l’innovation et les mesures d’aide aux entreprises dans le domaine de la prospection et de l’extraction des matières premières. Le programme Erasmus Mundus (2009-2013) sur les minéraux et l’environnement soutient la création de nouvelles compétences dans le domaine des matières premières.

4.5. Lignes directrices sur la mise en œuvre de la législation relative à «Natura 2000»

Face aux inquiétudes exprimées sur la façon de gérer des objectifs parfois contradictoires – garantir un niveau élevé de protection de l’environnement dans les zones «Natura 2000» tout en assurant le développement d’activités extractives compétitives – la Commission a élaboré des lignes directrices sur l’application du cadre décisionnel de «Natura 2000». Elle y souligne, notamment, l’absence d’exclusion automatique des activités de l’industrie extractive non énergétique menées à l’intérieur ou à proximité de zones «Natura 2000»[34]. La Commission a aussi élaboré des lignes directrices présentant des exemples de bonnes pratiques à appliquer pour exploiter les ressources forestières tout en garantissant une gestion durable des forêts[35].

4.6. Exploitation plus efficace des ressources et de meilleures conditions de recyclage

La notion d’utilisation durable des ressources naturelles est de plus en plus intégrée dans les initiatives de l’UE en faveur de la croissance et de la compétitivité[36]. Les États membres ont mis en œuvre plusieurs politiques et instruments pratiques pour rendre plus efficace l’exploitation des ressources. Une des questions politiques les plus importantes concerne le besoin de clarté juridique dans la définition des conditions auxquelles les déchets valorisés peuvent être reclassés en tant que produits. En s’appuyant sur la directive-cadre sur les déchets, la Commission définit actuellement les critères de «fin de la qualité de déchet» pour des flux de déchets spécifiques, et les travaux progressent en ce qui concerne les règles applicables aux métaux ferreux et à l'aluminium, au cuivre, au papier valorisé et au verre.

Depuis 2008, la Commission s’efforce d’empêcher les exportations illégales de déchets, ou leur mise en décharge illicite, en aidant les États membres à mettre en œuvre le règlement sur les transferts de déchets. Elle envisage d’élaborer des lignes directrices applicables aux transferts de véhicules usagés ou d’épaves. En ce qui concerne le flux de déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE), la Commission a proposé un nouvel objectif de collecte ambitieux, qui garantirait que 85 % du flux de DEEE soit disponible en vue de la valorisation des matières premières qu’il contient, au lieu d’être perdu à la suite d’un traitement inadéquat. De surcroît, en ce qui concerne la catégorisation applicable au transfert d’équipements électroniques et électriques «usagés», elle a proposé des règles plus strictes qui obligeront les exportateurs de ces équipements à démontrer la fonctionnalité de chaque article exporté à des fins de réutilisation.

5. Orientations futures pour l'initiative «Mati ÈRES PREMIÈRES»

Bien que des progrès considérables aient été réalisés dans la mise en œuvre de l'initiative «matières premières», des améliorations sont encore nécessaires. Une approche intégrée, fondée sur trois piliers, est essentielle, chaque pilier contribuant à garantir un approvisionnement équitable et durable de l'UE en matières premières.

5.1. Suivi des matières premières essentielles

L'approvisionnement en matières premières est essentiellement l'affaire des entreprises, le rôle des pouvoirs publics consistant à mettre en place des conditions d'encadrement propices. La Commission entend explorer, avec l'industrie extractive, le secteur du recyclage et les industries utilisatrices, les possibilités de mener des actions ciblées, notamment dans le domaine du recyclage. Elle est aussi disposée à examiner, aux côtés des États membres et de l'industrie, la valeur ajoutée et la faisabilité que présenterait un éventuel programme de constitution de stocks de matières premières. Au niveau de l'UE, le programme de constitution de stocks de pétrole vise à protéger la sécurité publique des États membres et de l'UE[37]. La Commission:

- suivra les problèmes posés par les matières premières essentielles afin de définir des actions prioritaires et examinera ces questions avec les États membres et les acteurs concernés;

- actualisera régulièrement, au moins tous les trois ans, la liste des matières premières essentielles.

5.2. Approvisionnement équitable et durable en matières premières sur les marchés mondiaux (premier pilier)

L'UE conduira activement, dans le cadre de partenariats stratégiques et de dialogues sur les politiques à mener, une «diplomatie des matières premières», en vue de garantir l'accès à ces dernières, en particulier aux matières premières essentielles.

5.2.1. Politique de développement et approvisionnement durable en matières premières

L'activité minière durable peut et devrait contribuer au développement durable. De nombreux pays en développement – en particulier en Afrique – ne sont cependant pas parvenus à mettre les ressources dont ils regorgent au service d'une croissance durable et inclusive, souvent en raison de problèmes de gouvernance liés aux cadres réglementaires ou à la fiscalité. Améliorer la gouvernance et la transparence, de même que le climat des échanges et des investissements dans le secteur des matières premières est essentiel pour atteindre une croissance inclusive et un développement durable dans les pays riches en ressources. Grâce à ses politiques de développement et en partenariat avec les pays en développement, l'UE peut jouer un rôle crucial à cet égard, en créant des situations profitables à tous dans lesquelles pays développés et pays en développement jouissent d'une offre durable en matières premières et en mettant les ressources financières intérieures tirées du secteur minier au service du développement durable pour soutenir les objectifs de stratégies visant la croissance inclusive et la lutte contre la pauvreté.

La Commission examinera ces questions plus en détail dans le contexte du processus de consultation lancé avec le livre vert consacré à l'avenir de la politique de développement de l'UE et de l'appui budgétaire de l'UE, ainsi que dans le cadre de la consultation publique qu'elle a ouverte concernant une éventuelle obligation de fournir des informations pays par pays[38]. L'UE encouragera les gouvernements partenaires à développer des programmes de réforme exhaustifs qui fixent clairement des objectifs tels que l'amélioration des régimes de taxation des activités minières, l'accroissement de la transparence autour des revenus et des marchés, ou le renforcement de la capacité à utiliser les recettes pour soutenir les objectifs de développement. Une transparence accrue aidera la société dans son ensemble et les organes de surveillance nationaux à demander des comptes aux gouvernements et aux entreprises concernant les recettes fiscales ou leur chiffre d'affaires, ce qui permettra de réduire la fraude et la corruption et de garantir un climat des échanges et des investissements plus prévisible.

À Addis-Abeba en juin 2010, la Commission a convenu avec la Commission de l'Union africaine d'instaurer une coopération bilatérale sur les matières premières et les questions de développement, basée sur l'initiative «matières premières» et sur la stratégie de la Commission de l'Union africaine relative à l'exploitation minière et aux minéraux de 2009 («Vision pour l'industrie minière en Afrique»). Cette coopération sera axée sur trois éléments: la gouvernance, les investissements et les connaissances/compétences en géologie. Dans la stratégie commune Afrique-UE 2011-2013, approuvée lors du sommet Afrique-UE de novembre 2010, des actions relatives aux matières premières sont prévues dans le cadre du partenariat consacré au commerce, à l'intégration économique régionale et aux infrastructures. L'UE et ses États membres œuvreront de concert sur ces questions. La Commission propose:

- de renforcer le soutien financier et politique de l'Europe à l'initiative pour la transparence des industries extractives (EITI) et d'aider les pays en développement à la mettre en œuvre;

- de procéder à des échanges de bonnes pratiques avec des organisations internationales telles que la Banque mondiale, le FMI et la Banque africaine de développement;

- d'examiner comment accroître la transparence dans l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement et de remédier, en collaboration avec les grands partenaires commerciaux, aux situations dans lesquelles les revenus tirés des industries extractives servent à financer des guerres ou des conflits internes;

- d'encourager l'industrie extractive à divulguer davantage d'informations financières, notamment par l'adoption éventuelle d'une obligation de fournir des informations pays par pays. La Commission tiendra compte des progrès accomplis par le Conseil des normes comptables internationales (CNCI) sur une norme comptable internationale applicable à l'industrie extractive, ainsi que de l'état actuel de la législation des pays tiers impliqués dans la région[39] ;

- de promouvoir l'application des normes européennes par les entreprises de l'UE présentes dans les pays en développement et l'application du document de référence concernant les meilleures techniques disponibles et de développer un code d'éthique pour les entreprises de l'UE présentes dans les pays tiers; et

- d'appuyer les travaux de l'OCDE sur le devoir de diligence dans le secteur minier;

- de continuer à examiner – en collaboration avec les pays africains – la possibilité de soutenir davantage la coopération entre les instituts d'études géologiques des deux continents et d'encourager la collaboration dans ce domaine dans les enceintes multilatérales telles que le programme international des géosciences de l'UNESCO.

Les pays en développement riches en ressources sont souvent handicapés par l'insuffisance de leurs infrastructures dans les secteurs du transport, de l'énergie et de la protection de l'environnement, qui limite leur capacité à exploiter leurs richesses minérales dans l'intérêt de leurs populations.

La Commission européenne, la Banque européenne d'investissement (BEI) et d'autres institutions financières européennes de développement continueront d'examiner, en coopération avec les autorités nationales et régionales africaines, comment promouvoir les infrastructures les mieux adaptées et se pencheront sur les questions de gouvernance connexes, éléments susceptibles de contribuer à l'utilisation durable des ressources de ces pays et de faciliter l'approvisionnement en matières premières; pour ce faire, elles s'appuieront sur leurs dialogues sectoriels respectifs pour orienter le processus. La Commission européenne a) étudiera plus particulièrement la possibilité d'augmenter les prêts (assortis éventuellement d'un volet subvention) à l'industrie, notamment en faveur de projets d'exploitation minière et de raffinage, y compris aux secteurs industriels situés en aval et b) explorera la possibilité de promouvoir des instruments financiers qui réduisent les risques pour les opérateurs au moyen de garanties financées par l'UE, notamment par le Fonds européen de développement. Le fonds fiduciaire UE-Afrique pour les infrastructures[40] pourrait également aider les pays africains dans cette tâche.

La politique de développement devrait aussi être axée sur la création de liens entre l'industrie extractive et l'industrie locale, en améliorant la chaîne de valeur et en maximisant la diversification. Ainsi, il y aurait lieu d'encourager le développement adéquat des capacités des entreprises et les accords commerciaux devraient ménager la souplesse nécessaire pour y parvenir. L'UE peut aussi aider les pays en développement à améliorer leurs connaissances géologiques[41], ce qui leur permettrait de mieux estimer leurs réserves nationales de minerais, de mieux planifier leur budget sur la base des recettes qu'ils peuvent escompter de ces réserves et leur conférerait un pouvoir de négociation accru à l'égard des sociétés minières.

5.2.2. Renforcer la stratégie commerciale relative aux matières premières

La Commission entend renforcer la stratégie commerciale relative aux matières premières[42] décrite au point 4.2 dans le respect des objectifs de développement et de bonne gouvernance. Elle considère que l'UE devrait:

- poursuivre et développer les dialogues bilatéraux thématiques sur les matières premières engagés avec tous les partenaires concernés et intensifier les discussions qui se déroulent actuellement dans les enceintes pluri- et multilatérales (y compris le G20, la CNUCED, l'OMC et l'OCDE); effectuer de nouvelles études afin d'améliorer la compréhension de l'incidence des restrictions à l'exportation sur les marchés des matières premières, et encourager un débat sur leur utilisation en tant que moyen d'action;

- intégrer davantage les questions relatives aux matières premières, telles que les restrictions à l'exportation et les aspects liés à l'investissement, dans les négociations commerciales de l'UE en cours et à venir menées dans des cadres bilatéraux, plurilatéraux ou multilatéraux;

- chercher à instaurer un mécanisme de suivi des restrictions à l'exportation qui entravent l'approvisionnement durable en matières premières et continuer à lutter contre les obstacles qui affectent l'offre de matières premières ou entraînent des distorsions sur les marchés en aval, en privilégiant le dialogue, mais en n'hésitant pas à recourir aux procédures de règlement des différends s'il y a lieu;

- encourager la participation de pays concernés non membres de l'OCDE aux travaux menés sur les matières premières par cette organisation et continuer à analyser les disciplines multilatérales et plurilatérales, notamment la prise en compte des bonnes pratiques;

- utiliser les instruments de la politique de concurrence pour veiller à ce que l'approvisionnement en matières premières ne soit pas perturbé par des accords anticoncurrentiels, des opérations de concentration ou des mesures unilatérales décidées par les entreprises concernées;

- faire progresser les actions susmentionnées et approfondir l'analyse des priorités fixées pour les matières premières avec les pays tiers, au moyen de mesures autonomes, dans des cadres bilatéraux et multilatéraux et par le dialogue; et continuer à mener, au niveau de l'UE, une politique commerciale cohérente avec ces priorités.

5.3. Favoriser l'approvisionnement durable au sein de l'UE (deuxième pilier)

La stratégie Europe 2020 insiste sur la nécessité de promouvoir des technologies qui accroissent les investissements dans le patrimoine naturel de l'UE. Les industries extractives relèvent de cette catégorie, mais leur développement est entravé par un cadre réglementaire pesant et par la concurrence d'autres utilisations des sols. Dans ce domaine, un grand nombre de questions réglementaires relèvent de la compétence des États membres. La Commission s'efforce donc principalement de faciliter l'échange de bonnes pratiques.

Simultanément, les activités d'extraction dans l'UE doivent se dérouler dans de bonnes conditions de sécurité. Cet aspect est important pour l'image du secteur et constitue un préalable à son acceptation par le grand public. La Commission considère les pratiques suivantes[43] comme étant particulièrement importantes pour promouvoir les investissements dans les industries extractives:

- définition d'une politique nationale concernant les minéraux visant à garantir que les ressources minérales sont exploitées d'une manière économiquement viable, harmonisée avec d'autres politiques nationales, fondée sur des principes de développement durable et incluant un engagement de mettre en place un cadre juridique et un dispositif d'information appropriés;

- élaboration d'une politique d'aménagement du territoire concernant les minéraux, qui comprendrait une base d'informations géologiques numériques, une méthodologie transparente pour recenser les ressources minérales et des estimations à long terme concernant la demande régionale et locale; recensement et préservation des ressources minérales (en tenant compte d'autres utilisations des sols), et notamment leur protection contre les effets des catastrophes naturelles;

- mise en place d'un processus régissant l'autorisation de l'exploration et de l'extraction minières qui soit clair et compréhensible, qui présente un certain degré de certitude et qui permette de rationaliser le processus administratif (par ex. introduction de délais, demandes de permis parallèles et guichet unique).

La Commission propose d'examiner avec les États membres, dans le plein respect du principe de subsidiarité, la possibilité d'établir un mécanisme de suivi des actions par les États membres dans le domaine précité, notamment par l'élaboration d'indicateurs.

Il importe également de continuer à développer la base de connaissances nécessaire à la mise en œuvre d'une stratégie efficace dans le domaine des matières premières. À court terme, la Commission propose d'examiner, avec les États membres, la possibilité de renforcer les synergies entre les instituts nationaux d'études géologiques, ce qui permettrait de réaliser des économies d'échelle, de réduire les dépenses et d'accroître le potentiel de lancement de projets conjoints (base de données harmonisées sur les minéraux, annuaire européen des matières premières, par exemple). À moyen terme, les synergies devraient contribuer à améliorer la base de connaissances sur les matières premières européennes de manière coordonnée, en tenant compte en particulier des perspectives qui s'ouvriront dans le cadre du GMES. Pour certaines matières premières, telles que le bois, la demande croissante dont les énergies renouvelables font l'objet continue d'intensifier la concurrence. Cette augmentation de la demande ne va pas toujours de pair avec un accroissement de l'offre, ce qui entraîne une hausse des coûts.

La Commission entend:

- promouvoir les travaux de la CEE-ONU dans le domaine de la normalisation concernant la déclaration des réserves et des ressources au niveau de l'UE;

- procéder à une analyse adéquate de la disponibilité de bois et de papier recyclé en tenant compte de la demande potentielle émanant de la filière bois et du secteur des énergies renouvelables (biomasse);

- continuer d'appuyer la création de conseils sectoriels européens sur les compétences lorsque des parties intéressées (partenaires sociaux ou observatoires concernés, par exemple) en prendront l'initiative;

- promouvoir la recherche et le développement dans la chaîne de valeur des matières premières, notamment sur les processus d'extraction, de traitement et de substitution.

5.4. Dynamiser l'efficacité des ressources et promouvoir le recyclage (troisième pilier)

Avec la croissance de la demande mondiale de matières premières, il conviendra de redoubler d'efforts en matière de recyclage. L'augmentation des taux de recyclage fera baisser la pression sur la demande de matières premières primaires, contribuera à la réutilisation de matériaux précieux qui, autrement, seraient perdus et réduira la consommation d'énergie et les émissions de gaz à effet de serre résultant des opérations d'extraction et de transformation. Dans le cadre de l'initiative phare d'Europe 2020 «Une Europe efficace dans l'utilisation des ressources», la Commission présentera, en 2011, une feuille de route pour une Europe efficace dans l'utilisation des ressources. Elle exposera sa vision des changements structurels et technologiques nécessaires pour parvenir à une économie à faibles émissions de carbone, efficace dans l'utilisation des ressources et résiliente au changement climatique à l'horizon 2050, et la manière dont nous pourrons opérer cette transition en mettant en œuvre des politiques qui apporteront le plus grand profit à la croissance, à l'emploi et à la sécurité énergétique de l'UE.

L'exploitation des mines urbaines («urban mining»), qui consiste à récupérer des matières utiles à partir de déchets urbains, est l'une des principales sources de métaux et de minerais pour l'industrie européenne. L'utilisation de matières premières secondaires contribue à l'efficacité des ressources, à la réduction des émissions de gaz à effet de serre et à la préservation de l'environnement. Toutefois, le potentiel d'un grand nombre de ces ressources n'est pas pleinement exploité et, bien que le volume de recyclage des déchets urbains ait doublé en dix ans dans l'UE, la situation varie fortement d'un État membre à l'autre. Compte tenu des pressions qui s'exercent en faveur de la réduction des émissions de carbone, de la protection de la santé et de la réduction de la dépendance à l'égard de l'extérieur, il convient de renforcer les mesures contre les obstacles qui freinent le recyclage. La Commission considère que ces obstacles se regroupent en trois grandes catégories: la «fuite» de déchets vers des sites de traitement non conformes aux normes qui sont situés dans ou en dehors de l'UE, les obstacles au développement du secteur du recyclage et une innovation inadaptée en matière de recyclage.

Pour promouvoir une Europe plus efficace dans l'utilisation des ressources, il est essentiel d'améliorer la mise en œuvre et l'application de la législation existante de l'UE dans le domaine des déchets. La Commission propose donc:

- de revoir la stratégie thématique pour la prévention et le recyclage des déchets en 2012 en vue de mettre au point des bonnes pratiques en matière de collecte et de traitement des flux de déchets essentiels, notamment ceux qui comportent des matières premières préjudiciables pour l'environnement. Lorsque cela s'avérera nécessaire, l'offre de statistiques en matière de recyclage sera améliorée;

- de soutenir les actions pilotes et de recherche visant à améliorer l'efficacité des ressources et les incitations économiques en faveur du recyclage ou des systèmes de remboursement;

- de procéder à une évaluation ex post de l'acquis de l'UE en matière de déchets, notamment des secteurs dans lesquels les législations applicables aux divers flux de déchets pourraient être harmonisées dans un souci de cohérence. Cette évaluation couvrirait notamment l'efficacité des mesures dissuasives et des sanctions prévues en cas d'infraction aux règles de l'UE en matière de déchets;

- de réexaminer le plan d'action pour une consommation et une production durables en 2012 afin de définir les nouvelles initiatives à prendre dans ce domaine;

- d'analyser la faisabilité de la mise au point d'instruments d'écoconception i) favorisant une utilisation plus efficace des matières premières, ii) garantissant la recyclabilité et la durabilité des produits et iii) encourageant l'utilisation de matières premières secondaires dans la fabrication des produits, notamment dans le cadre de la directive «écoconception»; et

- d'élaborer de nouvelles initiatives visant à améliorer la compétitivité des industries du recyclage dans l'UE, notamment en instaurant de nouveaux instruments de marché qui favoriseront le développement des matières premières secondaires.

La problématique du dumping environnemental des déchets se pose également dans le cas de transferts illicites de déchets vers des pays tiers. Afin de continuer à renforcer l'application du règlement sur les transferts de déchets, la Commission propose:

- de garantir l'application de normes d'inspection précises et efficaces en matière de déchets dans l'UE en 2011, notamment de dispositions visant à faciliter le contrôle des transferts de déchets par les autorités douanières;

- d'envisager de mobiliser des fonds du 7e PC pour la recherche en vue d'améliorer les techniques de détection, d'identification, de traçage et de localisation des transferts illicites;

- d'examiner la faisabilité de la mise en œuvre d'un système mondial de certification des installations de recyclage pour l'exportation des flux de déchets en se basant sur des critères de gestion écologiquement rationnelle;

- de s'appuyer sur le réseau IMPEL[44] pour œuvrer, avec les États membres, à l'étude de la faisabilité d'un mécanisme européen formel garantissant l'application de l'acquis de l'UE.

5.5 Innovation: une question transversale

Les matières premières sont des intrants essentiels à la compétitivité des entreprises du secteur et au développement de nombreuses applications technologiques propres, respectueuses de l'environnement. L'innovation est primordiale pour libérer le potentiel de l'UE dans ce domaine et a un rôle à jouer face aux défis que posent les piliers de l'initiative «matières premières». Le besoin d'innovation se fait sentir à tous les stades de la chaîne de valorisation, notamment au niveau de l'extraction, de la transformation durable, de l'écoconception, du recyclage, des nouvelles matières, de la substitution, de l'efficacité des ressources et de l'aménagement du territoire. La Commission déterminera s'il y a lieu de lancer un partenariat d'innovation sur les matières premières dans le cadre de l'initiative phare Europe 2020 «Une Union de l’innovation»[45].

6. Perspectives

L'accès aux produits de base et aux matières premières est essentiel pour préserver la capacité productive de l'économie et garantir le bien-être des citoyens. Les produits de base et les matières premières sont achetés dans le monde entier ainsi qu'en Europe. Le défi est de veiller à ce que les besoins en la matière soient satisfaits de manière à soutenir les objectifs plus larges de développement des pays d'approvisionnement, la protection de l'environnement, le libre-échange et des marchés stables qui ne font peser aucun risque sur l'économie dans son ensemble.

L'activité financière s'est développée dans toutes les catégories de produits de base et de matières premières. La nécessité de faire en sorte que le développement de cette activité soutienne sans entrave l'accès aux produits de base et aux matières premières et ne déstabilise pas l'économie européenne ni les économies des pays en développement est donc un enjeu majeur au niveau européen et international. Ces marchés doivent rester au service de l'économie réelle en contribuant à la formation des prix et en offrant la possibilité de se couvrir contre les risques de marché.

Les prix des instruments dérivés sur les matières premières et des produits de base physiques sous-jacents sont corrélés. La dynamique de ces prix remet en cause les modèles établis et il devient de plus en plus difficile de comprendre la formation des prix des produits de base. Il convient dès lors de renforcer l'intégrité et la transparence des marchés des instruments dérivés sur les matières premières et la Commission considère qu'il est nécessaire d'encourager une meilleure compréhension de cette évolution. C'est pour cette raison qu'elle a lancé plusieurs initiatives dans le secteur des services financiers, comme indiqué au point 3.2., et qu'elle examinera dans quelle mesure il convient d'encore améliorer la transparence et l'accessibilité des informations sur les marchés physiques de produits. Cette amélioration de la transparence des aspects tant physiques que financiers des activités commerciales devrait permettre aux régulateurs et aux acteurs du marché de mieux comprendre l'interaction entre les marchés physiques et financiers de produits et contribuer à prévenir les pratiques abusives.

La Commission réfléchira également à d'autres moyens d'action pour renforcer la sécurité de l'approvisionnement alimentaire. Cette année, elle contribuera à l'action du G20 par les travaux qu'elle a entrepris sur chacune de ces questions, notamment à la lumière de la priorité qu'accorde la présidence française à l'examen des prix des produits de base et de la sécurité alimentaire.

La durabilité de l'offre et de la demande de matières premières étant l'un des principaux enjeux actuels, la Commission entend également renforcer la mise en œuvre de son initiative sur les matières premières dans le cadre d'une stratégie intégrée fondée sur trois piliers. De surcroît, elle organisera un débat public périodique revêtant la forme d'un événement thématique annuel qui favorisera la sensibilisation aux défis à relever et fera le bilan des progrès accomplis.

Annexe

Concentration de la production des matières premières essentielles, et taux de recyclage et de substitution

Les 14 matières premières énumérées ci-dessous sont essentielles, car elles sont exposées à un risque accru de pénurie d'approvisionnement et exercent un impact plus important sur l'économie que la plupart des autres matières premières. Le risque élevé de pénurie d'approvisionnement s'explique principalement par le fait qu'une part importante de la production mondiale provient essentiellement d'une poignée de pays: la Chine (antimoine, spath fluor, gallium, germanium, graphite, indium, magnésium, terres rares, tungstène), la Russie (métaux du groupe du platine), la République démocratique du Congo (cobalt, tantale) et le Brésil (niobium et tantale). Très souvent, cette concentration de la production est d’autant plus problématique qu’elle va de pair avec une faible substituabilité et des taux de recyclage bas.

Matières premières | Principaux producteurs (2008, 2009) | Principales sources d'importation dans l'UE (2007 ou 2006) | Taux de dépendance à l'égard des importations | Substituabilité | Taux de recyclage |

Antimoine | Chine 91% | Bolivie 77% | 100% | 0,64 | 11% |

Bolivie 2% | Chine 15% |

Russie 2% | Pérou 6% |

Afrique du Sud 2% |

Béryllium | États-Unis 85% | États-Unis, Canada, Chine, Brésil (*) | 100% |

Chine 14% |

Mozambique 1% |

Cobalt | RDC 41% | RDC 71% | 100% | 0,9 | 16% |

Canada 11% | Russie 19% |

Zambie 9% | Tanzanie 5% |

Spath fluor | Chine 59% | Chine 27% | 69% | 0,9 | 0% |

Mexique 18% | Afrique du Sud 25% |

Mongolie 6% | Mexique 24% |

Gallium | ND | États-Unis, Russie (*) | (*) | 0,74 | 0% |

Germanium | Chine 72% | Chine 72% | 100% | 0,8 | 0% |

Russie 4% | États-Unis 19% |

États-Unis 3% | Hong Kong 7% |

Graphite | Chine 72% | Chine 75% | 95% | 0,5 | 0% |

Inde 13% | Brésil 8% | ND |

Brésil 7% | Madagascar 3% |

Canada 3% |

Indium | Chine 58% | Chine 81% | 100% | 0,9 | 0,30% |

Japon 11% | Hong Kong 4% |

Corée 9% | États-Unis 4% |

Canada 9% | Singapour 4% |

Magnésium | Chine 56% | Chine 82% | 100% | 0,82 | 14% |

Turquie 12% | Israël 9% |

Russie 7% | Norvège 3% |

Russie 3% |

Niobium | Brésil 92% | Brésil 84% | 100% | 0,7 | 11% |

Canada 7% | Canada 16% |

Métaux du groupe du | Afrique du Sud 79% | Afrique du Sud 60% | 100% | 0,75 | 35% |

platine | Russie 11% | Russie 32% |

Zimbabwe 3% | Norvège 4% |

Terres rares | Chine 97% | Chine 90% | 100% | 0,87 | 1% |

Inde 2% | Russie 9% |

Brésil 1% | Kazakhstan 1% |

Tantale | Australie 48% | Chine 46% | 100% | 0,4 | 4% |

Brésil 16% | Japon 40% |

Rwanda 9% | Kazakhstan 14% |

RDC 9% |

Tungstène | Chine 78% (6,1) | Russie 76% | 73% | 0,77 | 37% |

Russie 5% (6,5) | Bolivie 7% |

Canada 4% | Rwanda 13% |

(*) soumis à de fortes fluctuations |

Remarque: la dépendance à l'égard des importations est calculée comme suit: «importations nettes / (importations nettes + production dans l'UE)».

Source: données extraites du rapport intitulé «Critical raw materials for the EU», élaboré par le groupe de travail ad hoc du groupe d'experts sur l'approvisionnement en matières premières chargé de définir les matières premières essentielles. Juin 2010.

[1] Bureau mondial des statistiques sur les métaux – Annuaire 2009.

[2] Rapport de la CFTC «Staff report on commodity swap dealers and index traders with Commission recommendations», Washington, 2008. (American Economic Review ); communication de la Commission COM(2008) 821 «Prix des denrées alimentaires en Europe» et document de travail de ses services SEC(2008) 2971 «Task force on the role of speculation in agricultural commodities price movements - Is there a speculative bubble in commodity markets?».

[3] Initiative «matières premières» — répondre à nos besoins fondamentaux pour assurer la croissance et créer des emplois en Europe, COM(2008) 699.

[4] «Une chaîne d'approvisionnement alimentaire plus performante en Europe», COM(2009) 591 et «Un cadre stratégique de l'UE pour aider les pays en développement à relever les défis liés à la sécurité alimentaire», COM(2010) 127.

[5] Une Europe efficace dans l'utilisation des ressources: initiative phare relevant de la stratégie Europe 2020, COM(2010) 2020, Europe 2020, et COM(2011) 21.

[6] Voir http://www.pittsburghsummit.gov/mediacenter/129639.htm

[7] Voir http://www.g20.org/Documents2010/11/seoulsummit_declaration.pdf

[8] Voir par exemple le rapport au G20 établi par la task force sur les marchés à terme de matières premières de l'IOSCO (Task force on Commodity Futures) - Novembre 2010.

[9] «Une chaîne d'approvisionnement alimentaire plus performante en Europe» COM(2009) 591.

[10] Un instrument dérivé peut être défini comme un actif financier, généralement un contrat entre deux ou plusieurs parties, qui tire sa valeur de la valeur d'autres actifs, titres, voire indices.

[11] Communication COM(2010) 672 intitulée «La PAC à l'horizon 2020».

[12] FAO, PAM, «L'état de l'insécurité alimentaire dans le monde», octobre 2010.

[13] Une partie de ces travaux est déjà engagée (voir point 3.2) en étroite coopération avec les homologues internationaux concernés, notamment les États-Unis, en vue de garantir la mise en place d'un cadre de régulation cohérent.

[14] Le marché des quotas qui relève du système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre de l'UE n'est pas abordé dans la présente communication, les quotas n'étant pas des produits au sens où on l'entend généralement. La Commission a publié à ce sujet la communication COM(2010) 796 intitulée «Vers une surveillance renforcée du marché relatif au système européen d'échange de quotas d'émission».

[15] Cette section n'aborde pas d'autres questions liées à l'énergie telles que la sûreté et la sécurité ou la cohérence et l'efficacité globales de la politique énergétique extérieure de l'UE. Ces questions sont traitées dans la communication COM(2010) 639 intitulée «Énergie 2020 Stratégie pour une énergie compétitive, durable et sûre».

[16] Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant l'intégrité et la transparence du marché de l'énergie, COM(2010) 726, décembre 2010.

[17] Voir, par exemple, http://ec.europa.eu/agriculture/markets/prices/monthly_en.pdf.

[18] Voir http://epp.eurostat.ec.europa.eu/portal/page/portal/hicp/methodology/prices_data_for_market_monitoring.

[19] http://ec.europa.eu/agriculture/publi/caprep/prospects2010/index_en.htm.

[20] Voir http://ec.europa.eu/enterprise/sectors/food/competitiveness/forum_food/index_en.htm.

[21] Moins de dix pays africains ont atteint l'objectif de Maputo fixé en 2003, qui est de consacrer dix pour cent de leurs investissements publics à l'agriculture.

[22] Livre vert intitulé «La politique de développement de l’UE en faveur de la croissance inclusive et du développement durable. Accroître l’impact de la politique de développement de l’Union européenne», COM(2010) 629.

[23] Communication COM(2010) 127 intitulée «Un cadre stratégique de l'UE pour aider les pays en développement à relever les défis liés à la sécurité alimentaire».

[24] COM(2010) 484 du 15.9.2010.

[25] Directive 2003/6/CE (JO L 96 du 12.4.2003).

[26] Une consultation publique relative aux produits d'investissement de détail a été lancée le 26 novembre 2010; elle est disponible à l'adresse suivante: http://ec.europa.eu/internal_market/finservices-retail/investment_products_fr.htm#consultation.

[27] COM(2009) 207 du 30.4.2009.

[28] Directive 2004/39/CE (JO L 145 du 30.4.2004).

[29] Règlement (UE) n° 1095/2010 du Parlement européen et du Conseil du 24 novembre 2010 instituant une Autorité européenne de surveillance (Autorité européenne des marchés financiers), modifiant la décision n° 716/2009/CE et abrogeant la décision 2009/77/CE de la Commission (JO L 331 du 15.12.2010, p. 84).

[30] Communication COM(2008) 699 intitulée "Initiative «matières premières» — répondre à nos besoins fondamentaux pour assurer la croissance et créer des emplois en Europe".

[31] «Critical raw materials for the EU», rapport du groupe de travail ad hoc du RMSG chargé de définir les matières premières essentielles, juin 2010.

[32] DG Commerce - «Raw materials policy - 2009 annual report» (http://ec.europa.eu/trade/creating-opportunities/trade-topics/raw-materials/).

[33] Communication COM(2010) 163 intitulée «Coopérer avec les pays en développement afin d’encourager la bonne gouvernance dans le domaine fiscal».

[34] http://ec.europa.eu/environment/nature/natura2000/management/guidance_en.htm.

[35] «Good practice guidance on the sustainable mobilisation of wood in Europe», Commission européenne, Forest Europe, FAO, 2010.

[36] Voir communication COM(2011) 21 intitulée «Une Europe efficace dans l’utilisation des ressources – initiative phare relevant de la stratégie Europe 2020».

[37] Directive 2009/119/CE du Conseil du 14 septembre 2009.

[38] http://ec.europa.eu/internal_market/consultations/2010/financial-reporting_en.htm.

[39] Par exemple, les dispositions concernant le devoir de diligence et les exigences en matière d'information imposées aux entreprises qui font partie de la chaîne d'approvisionnement en matières premières; voir la loi américaine Dodd/Frank de réforme de Wall Street et de protection du consommateur (US Dodd Frank Wall Street Reform and Consumer Protection Act).

[40] Ce fonds fiduciaire a pour mission de soutenir les projets d'infrastructures transfrontaliers et régionaux en Afrique subsaharienne.

[41] Par exemple, le projet AEGOS réunit les services de relevés géographiques européens et africains dans le but d'améliorer le niveau et la qualité des données sur les ressources disponibles en ce qui concerne l'Afrique.

[42] DG Commerce, Raw materials policy - 2009 annual report.

[43] «Improving framework conditions for extracting minerals for the EU». Rapport du groupe de travail ad hoc du RMSG sur l'échange de bonnes pratiques en matière d'aménagement du territoire, de délivrance de permis et de partage d'informations géologiques, juin 2010.

[44] Réseau de l'Union européenne pour l'application et le respect du droit de l'environnement.

[45] COM(2010) 546.

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