Choisissez les fonctionnalités expérimentales que vous souhaitez essayer

Ce document est extrait du site web EUR-Lex

Document 62024TJ0092

Arrêt du Tribunal (troisième chambre) du 3 septembre 2025.
Eti Gıda Sanayi ve Ticaret AŞ contre Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle.
Dessin ou modèle de l’Union européenne – Procédure de nullité – Dessin ou modèle de l’Union européenne enregistré représentant un emballage – Marque nationale figurative antérieure – Motif de nullité – Usage dans le dessin ou modèle ultérieur d’un signe distinctif dont le titulaire est en droit d’interdire l’utilisation – Article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement (CE) no 6/2002 – Droits de la défense – Étendue de l’examen opéré par la chambre de recours.
Affaire T-92/24.

Identifiant ECLI: ECLI:EU:T:2025:815

 ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

3 septembre 2025 ( *1 )

« Dessin ou modèle de l’Union européenne – Procédure de nullité – Dessin ou modèle de l’Union européenne enregistré représentant un emballage – Marque nationale figurative antérieure – Motif de nullité – Usage dans le dessin ou modèle ultérieur d’un signe distinctif dont le titulaire est en droit d’interdire l’utilisation – Article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement (CE) no 6/2002 – Droits de la défense – Étendue de l’examen opéré par la chambre de recours »

Dans l’affaire T‑92/24,

Eti Gıda Sanayi ve Ticaret AŞ, établie à Eskişehir (Turquie), représentée par Me A. Căvescu, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme C. Bovar et M. J. Ivanauskas, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Star Foods E.M. SRL, établie à Bucarest (Roumanie), représentée par Mes V. von Bomhard et J. Fuhrmann, avocats,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de Mmes P. Škvařilová‑Pelzl (rapporteure), présidente, G. Steinfatt et M. D. Kukovec, juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu la phase écrite de la procédure,

vu la mesure d’organisation de la procédure du 23 janvier 2025 et les réponses de l’intervenante et de l’EUIPO déposées au greffe du Tribunal, respectivement, le 6 et le 7 février 2025,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1

Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Eti Gıda Sanayi ve Ticaret AŞ, demande l’annulation de la décision de la troisième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 15 décembre 2023 (affaire R 912/2023‑3) (ci-après la « décision attaquée »).

Antécédents du litige

2

Le 13 juillet 2007, la requérante a présenté une demande d’enregistrement d’un dessin ou modèle communautaire auprès de l’EUIPO, en vertu du règlement (CE) no 6/2002 du Conseil, du 12 décembre 2001, sur les dessins ou modèles communautaires (JO 2002, L 3, p. 1).

3

Le dessin ou modèle communautaire dont l’enregistrement a été demandé et qui est contesté en l’espèce est représenté dans la vue suivante :

Image

4

Les produits auxquels le dessin ou modèle contesté est destiné à être appliqué relèvent de la classe 09.03 au sens de l’arrangement de Locarno instituant une classification internationale pour les dessins et modèles industriels, du 8 octobre 1968, tel que modifié, et correspondent à l’indication suivante : « Emballages ».

5

Le 21 février 2020, l’intervenante, Star Foods E.M. SRL, a introduit auprès de l’EUIPO une demande en nullité du dessin ou modèle contesté pour les produits visés au point 4 ci-dessus.

6

Le motif invoqué au soutien de la demande en nullité était celui visé à l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement no 6/2002, dans sa version antérieure à l’entrée en vigueur du règlement (UE) 2024/2822 du Parlement européen et du Conseil, du 23 octobre 2024 (JO L, 2024/2822), lu conjointement avec l’article 36, paragraphe 2, sous b) et c), de la lege nr. 84 privind mărcile și indicațiile geografice (loi no 84 sur les marques et les indications géographiques), du 15 avril 1998 (Monitorul Oficial al României, no 337, du 8 mai 2014, ci-après la « loi roumaine sur les marques »). L’intervenante avait appuyé ladite demande sur plusieurs droits antérieurs, dont la marque roumaine figurative KRAX, qui était enregistrée sous le numéro 071100 pour des produits compris dans la classe 30, notamment des « en-cas, en particulier ceux fabriqués à partir de céréales par expansion et extrusion, avec des arômes différents ». L’intervenante soutenait que, en raison des similitudes entre le signe antérieur et les produits qu’il couvrait, il existerait un risque de confusion au sens de cette dernière disposition, lui permettant ainsi de faire interdire l’usage de son signe distinctif dans le dessin ou modèle contesté. En outre, la marque nationale antérieure étant renommée en Roumanie, sa reproduction de manière similaire dans ledit dessin ou modèle permettrait au titulaire de ce dernier de bénéficier de sa renommée et de l’effort commercial et, par suite, son usage porterait atteinte à son caractère distinctif au sens de la disposition en question.

7

À la demande de la requérante, par décision du 31 mai 2021, la division d’annulation a suspendu la procédure dans l’attente d’une décision définitive du Tribunalul Bucureşti (tribunal de Bucarest, Roumanie) devant lequel la marque roumaine figurative antérieure no 071100 (ci-après la « marque antérieure ») était également contestée.

8

Par décision du 7 novembre 2022, la division d’annulation a repris la procédure à la suite du rejet définitif du recours introduit devant la juridiction nationale et, par conséquent, le 1er mars 2023, elle a fait droit à la demande en nullité, en commençant son examen sur le fondement de la marque antérieure, déposée le 3 août 2003, enregistrée le 2 mai 2006 au nom de l’intervenante et représentée dans la vue suivante :

Image

9

Plus particulièrement, la division d’annulation a d’abord constaté que la marque antérieure présentait un caractère distinctif intrinsèque moyen et que sa validité avait été confirmée par les tribunaux roumains. Ensuite, elle a considéré, en substance, que les produits couverts par ladite marque et ceux auxquels le dessin ou modèle contesté est destiné à être appliqué étaient identiques, que cette marque et ledit dessin ou modèle présentaient un degré moyen de similitude sur les plans visuel et phonétique et que, partant, les similitudes entre les deux signes étaient suffisantes pour conclure à l’existence d’un risque de confusion. Dans ces conditions, l’intervenante ayant le droit d’interdire, en vertu de l’article 36, paragraphe 2, sous b), de la loi roumaine sur les marques, l’utilisation du signe dont il était fait usage dans ce dessin ou modèle, elle a déclaré ce dernier nul, conformément à l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement no 6/2002 dans sa version antérieure. Étant donné que la demande avait été accueillie sur la base du caractère distinctif intrinsèque de la marque en question, elle a conclu qu’il n’y avait pas lieu de se prononcer sur le prétendu caractère distinctif accru revendiqué par l’intervenante, ni sur son allégation visant à interdire l’usage du signe dans le dessin ou modèle concerné en raison de la supposée renommée d’une telle marque.

10

Le 28 avril 2023, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’annulation.

11

Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours. En substance, elle a conclu que la division d’annulation était fondée à déclarer nul le dessin ou modèle contesté en vertu de l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement no 6/2002 dans sa version antérieure, lu conjointement avec l’article 36, paragraphe 2, sous b), de la loi roumaine sur les marques, dès lors qu’il existait un risque de confusion. À cet égard, elle a considéré que les produits couverts par ladite marque et ceux auxquels ce dessin ou modèle est destiné à s’appliquer étaient similaires, que lesdits signes étaient similaires à un degré moyen sur les plans visuel et phonétique, que les principaux éléments verbaux de ces signes étaient dépourvus de signification pour le public roumain et que les différences conceptuelles fondées sur les autres éléments composant ledit dessin ou modèle n’avaient pas d’incidence pour l’appréciation du risque de confusion en raison de leur caractère descriptif ou faiblement distinctif et de leur taille et position secondaire, de sorte que la comparaison sur le plan conceptuel était impossible. Par ailleurs, elle a conclu que la forclusion par tolérance selon le droit roumain, alléguée par la requérante, ne prospérait pas à défaut de preuve de la tolérance revendiquée pendant une période ininterrompue de cinq ans.

Conclusions des parties

12

La requérante conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :

annuler la décision attaquée ;

condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens.

13

L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

rejeter le recours ;

condamner la requérante aux dépens en cas d’organisation d’une audience.

14

L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

rejeter le recours ;

condamner la requérante aux dépens.

En droit

15

À l’appui du recours, la requérante invoque, en substance, trois moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement no 6/2002 dans sa version antérieure, le deuxième, de la violation des articles 94 et 95 du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1), et de l’article 40, paragraphe 1, de la loi roumaine sur les marques, telle que modifiée (Monitorul Oficial al României, no 856, du 18 septembre 2020, ci-après la « loi nouvelle roumaine ») et, le troisième, de la violation de ses droits de la défense.

16

Le Tribunal estime qu’il convient de commencer par l’examen du troisième moyen, de poursuivre par l’examen du deuxième moyen et de finir par celui du premier moyen.

Sur le troisième moyen, tiré de la violation des droits de la défense

17

La requérante reproche, en substance, à la chambre de recours d’avoir violé ses droits de la défense et, plus particulièrement, son droit d’être entendue, en ne tenant pas compte, de manière répétée, de ses observations relatives au fait que l’intervenante ne serait pas la titulaire de la marque antérieure. Selon elle, l’intervenante n’a pas apporté la preuve de l’existence de ladite marque, du nom du titulaire de cette marque ou du renouvellement de la marque en question. Elle en déduit que la chambre de recours aurait dû rejeter le recours contre la décision de la division d’annulation comme étant irrecevable pour défaut d’identification valable du titulaire effectif du droit antérieur.

18

L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

19

À titre liminaire, il y a lieu d’observer que la requérante se borne à relever des différences typographiques dans le nom de l’entité juridique de la titulaire de la marque antérieure ainsi que dans les adresses mentionnées dans les différents éléments de preuve présentés au cours de la phase administrative de la procédure. Selon elle, l’absence de prise en compte de son argumentation, relative à la prétendue absence de preuve que l’intervenante serait la titulaire réelle de ladite marque, constituerait, en substance, une violation de ses droits de la défense.

20

Aux termes de l’article 62 du règlement no 6/2002 dans sa version antérieure, les décisions de l’EUIPO ne peuvent être fondées que sur des motifs ou des preuves au sujet desquels les parties ont pu prendre position. Cette disposition consacre, dans le cadre du droit des dessins ou modèles de l’Union européenne, le principe général de protection des droits de la défense. En vertu de ce principe général du droit de l’Union européenne, les destinataires des décisions des autorités publiques qui affectent de manière sensible leurs intérêts doivent être mis en mesure de faire connaître utilement leur point de vue. Le droit à être entendu s’étend ainsi à tous les éléments de fait ou de droit qui constituent le fondement de l’acte décisionnel, mais pas à la position finale que l’administration entend adopter [arrêt du 9 février 2017, Mast-Jägermeister/EUIPO (Gobelets), T‑16/16, EU:T:2017:68, point 57], ni à chaque fait notoire sur lequel elle s’appuie pour arriver à cette position [voir arrêt du 29 avril 2020, Bergslagernas Järnvaru/EUIPO – Scheppach Fabrikation von Holzbearbeitungsmaschinen (Outil pour fendre le bois), T‑73/19, non publié, EU:T:2020:157, point 15 et jurisprudence citée].

21

Par ailleurs, selon une jurisprudence constante, les droits de la défense ne sont violés du fait d’une irrégularité procédurale que dans la mesure où celle-ci a eu une incidence concrète sur la possibilité pour l’intéressé de se défendre. Ainsi, le non-respect des règles en vigueur ayant pour finalité de protéger les droits de la défense n’est susceptible de vicier la procédure administrative que s’il est établi que celle-ci aurait pu aboutir à un résultat différent en son absence [voir arrêt du 9 septembre 2015, Dairek Attoumi/OHMI – Diesel (DIESEL), T‑278/14, non publié, EU:T:2015:606, point 34 et jurisprudence citée].

22

En l’espèce, premièrement, il y a lieu de relever que, dans le mémoire exposant les motifs du recours du 3 juillet 2023, la requérante avait déjà fait grief à la division d’annulation d’avoir, en substance, erronément apprécié les éléments de preuve relatifs à la titularité de la marque antérieure, dont les traductions seraient, au demeurant, partiellement erronées.

23

Deuxièmement, il ressort des extraits du certificat d’enregistrement délivré par l’Oficiul de Stat pentru Inventii si Mărci (Office d’État pour les inventions et les marques, Roumanie) et de leur traduction, qui ont été présentés en même temps que la demande en nullité, que la marque antérieure était initialement enregistrée par « SC STAR FOODS EM SRL », sise Str. Taberei nr. 2, Jud. Ilfov, Popeşti Leordeni 077160, en Roumanie. Ce certificat indique, dans sa version en langue roumaine ainsi que dans sa traduction, que la titulaire actuelle est « SC STAR FOODS E.M. SRL », sise Calea Vacareşti nr. 391, et. 4, Secţiunea 2, sector 4, Bucureşti, en Roumanie. La différence d’adresses et la nouvelle ponctuation dans l’intitulé de l’entité légale propriétaire de la marque antérieure ne suffisent toutefois pas pour conclure à un doute sérieux quant à la titularité effective de la marque antérieure par l’intervenante. En outre, le Tribunalul Bucureşti (tribunal de Bucarest) a confirmé, par sa décision du 9 juillet 2020 dans l’affaire no 19812/3/2018, rendue dans le cadre d’une demande en nullité introduite devant les juridictions nationales, que l’intervenante était la titulaire de la marque antérieure, qui demeure valablement enregistrée jusqu’au 3 août 2025.

24

Par ailleurs, il ressort à suffisance de droit des éléments de réponse de l’intervenante, à la suite des mesures d’organisation de la procédure adoptées par le Tribunal, que, premièrement, les différences de ponctuation résultent des usages des dénominations commerciales dans les différentes langues, notamment en roumain ou en anglais. À cet égard, il ressort de la réponse de l’intervenante que l’élément litigieux « EM » ou « E.M. » correspond aux initiales de M. Emmanuel Mitzalis, précédent propriétaire de l’entreprise, et que dans tous les documents officiels en roumain ledit élément contient la même ponctuation. Deuxièmement, il ressort également des réponses de l’intervenante que les différentes adresses figurant sur les documents de l’Office d’État pour les inventions et les marques ou dans les diverses pièces du dossier correspondent à la même entité juridique, ayant plusieurs locaux commerciaux et dont le siège principal a été transféré de Str. Taberei nr. 2, Jud. Ilfov, Popeşti Leordeni 077160 à Calea Vacareşti nr. 391, et. 4, Secţiunea 2, sector 4, Bucureşti, le siège initial servant désormais de bureaux et de siège secondaire de l’entreprise. Troisièmement, il est constant, ainsi qu’il ressort également de la réponse de l’intervenante, que l’entreprise titulaire de la marque antérieure a toujours été enregistrée et dotée d’un code unique d’enregistrement. En outre, cela est corroboré par la mention dudit code dans la décision du Tribunalul Bucureşti (tribunal de Bucarest) du 9 juillet 2020 rendue dans l’affaire no 19812/3/2018 ayant confirmé la validité de la marque antérieure.

25

Troisièmement, il ressort des points 17, 22 et 23 de la décision attaquée que la division d’annulation a rejeté les arguments de la requérante relatifs à la preuve de la propriété de la marque antérieure, et que la chambre de recours a admis des éléments de preuve complémentaires, en vertu de son pouvoir d’appréciation prévu à l’article 63, paragraphe 2, du règlement no 6/2002, afin de confirmer que la demande de marque avait été déposée et enregistrée au nom de « SC STAR FOODS E.M. SRL » sous la même adresse que celle qui figure dans la demande en nullité. Cette adresse est également indiquée sous l’adresse initiale de la titulaire de la marque dans l’extrait actuel du registre, tel que l’intervenante l’avait présenté dans le cadre de la procédure administrative.

26

Il s’ensuit que la chambre de recours n’a pas violé les droits de la défense de la requérante. En outre, aucun des éléments du dossier ne fait ressortir un doute sérieux sur la propriété de la marque antérieure, de sorte que la décision attaquée n’est entachée d’aucune illégalité procédurale pouvant avoir une incidence sur l’issue du présent recours.

27

Il s’ensuit que le troisième moyen doit être rejeté comme étant non fondé.

Sur le deuxième moyen, tiré de la violation des articles 94 et 95 du règlement 2017/1001, lus conjointement avec l’article 40, paragraphe 1, de la loi nouvelle roumaine

28

La requérante reproche à la chambre de recours d’avoir violé les articles 94 et 95 du règlement 2017/1001 ainsi que l’article 40, paragraphe 1, de la loi nouvelle roumaine. D’une part, selon elle, la chambre de recours a commis une erreur de droit en n’ordonnant pas à l’intervenante de produire la preuve de l’usage de la marque antérieure qui ne relevait pas du délai de grâce de cinq ans. D’autre part, elle soutient, en substance, que la chambre de recours aurait dû examiner le recours contre la décision de la division d’annulation au regard de ladite loi et, partant, en application de cette dernière disposition, aurait dû demander la preuve de l’usage sérieux de ladite marque, dans le cadre d’une procédure de nullité fondée sur l’article 39 de cette loi, d’une teneur identique à celle de l’article 36 de la loi roumaine sur les marques en vigueur au moment de l’introduction de la demande en nullité.

29

L’EUIPO, soutenu par l’intervenante, conteste les arguments de la requérante.

30

En l’espèce, il y a lieu d’observer que la requérante n’a pas présenté une demande de preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure devant la division d’annulation et la chambre de recours.

31

À cet égard, il doit être rappelé que, aux termes de l’article 61 du règlement no 6/2002, le contrôle de légalité opéré par le Tribunal sur une décision de la chambre de recours doit se faire au regard des questions de droit qui ont été portées devant celle-ci. Dès lors, la fonction du Tribunal n’est pas d’examiner de nouveaux moyens introduits devant lui. En effet, l’examen de ces nouveaux moyens serait contraire à l’article 188 du règlement de procédure du Tribunal, selon lequel les mémoires déposés par les parties dans le cadre de la procédure devant le Tribunal ne peuvent pas modifier l’objet du litige devant la chambre de recours [voir, en ce sens, arrêt du 3 juillet 2024, Canalones Castilla/EUIPO – Canalones Novokanal (Tube pour le déversement des eaux ou goulotte), T‑329/22, non publié, EU:T:2024:438, point 69 et jurisprudence citée].

32

Partant, le deuxième moyen doit être rejeté comme étant non fondé.

Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement no 6/2002 dans sa version antérieure

33

La requérante soutient que la chambre de recours a violé l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement no 6/2002 dans sa version antérieure, en ayant erronément conclu à l’existence d’un risque de confusion.

34

La requérante reproche, en substance, à la chambre de recours, premièrement, d’avoir commis une erreur d’appréciation quant à la détermination des produits en cause, deuxièmement, d’avoir examiné le recours contre la décision de la division d’annulation en se basant sur la perception du consommateur moyen et non sur celle de l’utilisateur averti, troisièmement, d’avoir erronément conclu à une similitude moyenne des signes en cause sur les plans visuel et phonétique et, quatrièmement, d’avoir erronément conclu à un degré moyen de caractère distinctif de la marque antérieure, en raison notamment du fait que l’élément verbal « krax » de ladite marque avait une signification pour le public pertinent, et que cette marque avait coexisté pendant plus de dix ans avec la marque de l’Union européenne CRAXX.

35

L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

36

Aux termes de l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement no 6/2002 dans sa version antérieure, un dessin ou modèle peut être déclaré nul s’il est fait usage d’un signe distinctif dans un dessin ou modèle ultérieur et que le droit de l’Union ou la législation de l’État membre concerné régissant ce signe confère au titulaire du signe le droit d’interdire cette utilisation.

37

Selon la jurisprudence, une demande en nullité d’un dessin ou modèle communautaire, fondée sur le motif de nullité visé à l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement no 6/2002 dans sa version antérieure, ne saurait prospérer que s’il est conclu que le public pertinent considérera que, dans le dessin ou modèle communautaire faisant l’objet de cette demande, il est fait usage du signe distinctif invoqué à l’appui de la demande en nullité. L’examen de ce motif de nullité doit être fondé sur la perception par le public pertinent du signe distinctif invoqué à l’appui de ce motif ainsi que sur l’impression d’ensemble que ledit signe produit sur ce public [voir arrêt du 24 septembre 2019, Piaggio & C./EUIPO – Zhejiang Zhongneng Industry Group (Mobylettes), T‑219/18, EU:T:2019:681, point 67 et jurisprudence citée].

38

Le motif de nullité visé à l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement no 6/2002 dans sa version antérieure n’implique pas nécessairement la reproduction intégrale et détaillée d’un signe distinctif antérieur dans un dessin ou modèle communautaire ultérieur. En effet, quand bien même certains éléments du signe en question seraient absents dans le dessin ou modèle communautaire contesté ou d’autres éléments y seraient ajoutés, il pourrait s’agir d’un « usage » dudit signe, notamment lorsque les éléments omis ou ajoutés sont d’une importance secondaire [voir arrêt du 7 février 2018, Şölen Çikolata Gıda Sanayi ve Ticaret/EUIPO – Zaharieva (Emballage pour cornets à glace), T‑794/16, non publié, EU:T:2018:70, point 22 et jurisprudence citée].

39

Cela est d’autant plus vrai que, ainsi qu’il ressort d’une jurisprudence bien établie, le public ne garde en mémoire qu’une image non parfaite des marques enregistrées dans les États membres ou des marques de l’Union européenne. Cette considération est valable pour tout type de signe distinctif. Par conséquent, en cas d’omission de certains éléments secondaires d’un signe distinctif utilisé dans un dessin ou modèle communautaire ultérieur, ou en cas d’ajout de tels éléments à ce même signe, le public pertinent ne se rendra pas nécessairement compte de ces modifications du signe en question. Au contraire, il pourra penser qu’il est fait usage dudit signe tel qu’il l’a gardé en mémoire dans le dessin ou modèle communautaire ultérieur (voir arrêt du 7 février 2018, Emballage pour cornets à glace, T‑794/16, non publié, EU:T:2018:70, point 23 et jurisprudence citée).

40

Il s’ensuit que l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement no 6/2002 dans sa version antérieure trouve à s’appliquer lorsqu’il est fait usage non seulement d’un signe identique à celui invoqué à l’appui de la demande en nullité, mais également d’un signe similaire (voir arrêt du 7 février 2018, Emballage pour cornets à glace, T‑794/16, non publié, EU:T:2018:70, point 24 et jurisprudence citée).

41

Conformément à l’article 36, paragraphe 2, sous b), de la loi roumaine sur les marques, le titulaire d’une marque peut demander, en substance, à l’organe judiciaire compétent d’interdire à des tiers, en l’absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires d’un signe pour lequel, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque ou en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services sur lesquels le signe est apposé, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public, y compris le risque d’association entre le signe et la marque.

42

Ainsi que l’a relevé à bon droit la chambre de recours au point 28 de la décision attaquée, l’article 36, paragraphe 2, sous b), de la loi roumaine sur les marques constitue en droit roumain la transposition de l’article 10, paragraphe 2, sous b), de la directive (UE) 2015/2436 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2015, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 2015, L 336, p. 1), dont le libellé est lui-même identique à l’article 5, paragraphe 1, sous b), de la directive 2008/95/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2008, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 2008, L 299, p. 25). Par conséquent, la notion de « risque de confusion » au sens de l’article 36, paragraphe 2, sous b), de ladite loi doit être interprétée à la lumière de la jurisprudence relative à l’article 5, paragraphe 1, sous b), de la directive 2008/95 et à l’article 10, paragraphe 2, sous b), de la directive 2015/2436 (voir, en ce sens, arrêt du 7 février 2018, Emballage pour cornets à glace, T‑794/16, non publié, EU:T:2018:70, points 25 et 26).

43

Selon la jurisprudence de la Cour, constitue un « risque de confusion » au sens de l’article 10, paragraphe 2, sous b), de la directive 2015/2436 le risque que le public puisse croire que les produits ou services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement. L’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public doit être appréciée globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce (voir, en ce sens, arrêts du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, points 22 et 23, et du 6 octobre 2005, Medion, C‑120/04, EU:C:2005:594, points 23 à 29).

44

À la lumière de ces considérations, il convient d’examiner si la chambre de recours a, à bon droit, confirmé la décision de la division d’annulation accueillant la demande en nullité du dessin ou modèle contesté sur le fondement de l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement no 6/2002 dans sa version antérieure, après avoir estimé, en vertu de l’article 36, paragraphe 2, sous b), de la loi roumaine sur les marques, qu’il existait un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent.

45

À titre liminaire, conformément à la jurisprudence citée aux points 42 et 43 ci-dessus, la présente procédure concerne l’étendue de la protection d’une marque et plus particulièrement la question de savoir si le titulaire de ladite marque antérieure peut faire interdire l’usage de son signe distinctif dans le dessin ou modèle contesté. Partant, contrairement aux arguments de la requérante, il n’y a pas lieu d’examiner le présent moyen en tenant compte de l’impression produite sur l’utilisateur averti ou les caractères individuel et nouveau du dessin ou modèle contesté, au sens des articles 4 à 6 du règlement no 6/2002.

Sur la détermination des produits en cause et leur comparaison

46

La requérante conteste, en substance, les appréciations de la chambre de recours selon lesquelles les produits en cause sont similaires. Plus particulièrement, elle considère que rien n’indiquait que le dessin ou modèle contesté serait utilisé pour des bâtonnets d’en-cas.

47

L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

48

Aux fins de déterminer le produit auquel le dessin ou modèle contesté est destiné à être incorporé ou auquel il est destiné à être appliqué, il convient de tenir compte de l’indication qui y est relative dans la demande d’enregistrement dudit dessin ou modèle, mais également, le cas échéant, du dessin ou modèle lui-même, dans la mesure où il précise la nature du produit, sa destination ou sa fonction [arrêt du 18 mars 2010, Grupo Promer Mon Graphic/OHMI – PepsiCo (Représentation d’un support promotionnel circulaire), T‑9/07, EU:T:2010:96, point 56].

49

Par ailleurs, pour apprécier la similitude entre les produits en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre ces produits. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire (arrêt du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 23).

50

S’agissant plus particulièrement de la complémentarité des produits et des services, qui est un critère susceptible de fonder à lui seul l’existence d’une similitude entre des produits et des services, il convient de rappeler que les produits ou les services complémentaires sont ceux entre lesquels existe un lien étroit, en ce sens que l’un est indispensable ou important pour l’usage de l’autre, de sorte que les consommateurs peuvent penser que la responsabilité de la fabrication de ces produits ou de la fourniture de ces services incombe à la même entreprise. Ainsi, aux fins de l’appréciation du caractère complémentaire de produits et de services, il convient, en fin de compte, de prendre en considération la perception par ledit public de l’importance pour l’usage d’un produit ou d’un service d’un autre produit ou service (voir arrêt du 7 février 2018, Emballage pour cornets à glace, T‑794/16, non publié, EU:T:2018:70, point 37 et jurisprudence citée).

51

À cet égard, la complémentarité entre des produits et des services dans le contexte d’un risque de confusion ne s’apprécie pas sur la base de l’existence pour le public pertinent d’un rapport entre les produits et les services en cause du point de vue de leur nature, de leur utilisation et de leurs canaux de distribution. En effet, un critère tiré du rapport entre l’utilisation desdits produits et services ne permet pas d’apprécier pleinement le caractère indispensable, voire important desdits produits et services l’un pour l’autre que requiert l’analyse de la complémentarité entre lesdits produits et services. En effet, le fait que l’utilisation d’un produit ou d’un service soit sans rapport avec l’utilisation d’un autre produit ou d’un autre service n’implique pas dans tous les cas que l’usage de l’un n’est pas important ou indispensable pour l’usage de l’autre (voir arrêt du 7 février 2018, Emballage pour cornets à glace, T‑794/16, non publié, EU:T:2018:70, point 38 et jurisprudence citée).

52

En l’espèce, la chambre de recours a considéré, au point 36 de la décision attaquée, que la représentation du dessin ou modèle contesté montre clairement l’avant de l’emballage de denrées alimentaires, destiné au conditionnement d’en-cas ou de produits connexes. L’usage de l’emballage correspondant au dessin ou modèle contesté étant crucial pour l’utilisation des produits visés par la marque antérieure, à savoir les préparations faites de céréales relevant de la classe 30, cela suffit pour conclure à un lien étroit, à la forte corrélation et à la complémentarité des produits associés au dessin ou modèle contesté et de ceux couverts par la marque antérieure.

53

Il en résulte que l’usage de l’emballage représenté par le dessin ou modèle contesté est, à tout le moins, important pour l’usage des produits visés par la marque antérieure, de sorte qu’il existe, au sens de la jurisprudence rappelée au point 50 ci-dessus, un lien étroit entre eux caractérisant leur complémentarité et, partant, leur similitude.

Sur le territoire pertinent et le public pertinent et son niveau d’attention

54

Dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].

55

En premier lieu, conformément à la jurisprudence selon laquelle, lorsque la marque antérieure est une marque nationale, le territoire pertinent est celui dans lequel ladite marque est protégée [voir, en ce sens, arrêts du 3 septembre 2010, Companhia Muller de Bebidas/OHMI – Missiato Industria e Comercio (61 A NOSSA ALEGRIA), T‑472/08, EU:T:2010:347, point 34, et du 2 mars 2022, Laboratorios Ern/EUIPO – Beta Sports (META), T‑192/21, non publié, EU:T:2022:105, point 28], la chambre de recours a considéré, au point 37 de la décision attaquée, que le territoire pertinent était la Roumanie, ladite marque étant enregistrée et protégée dans ledit État membre.

56

En second lieu, dans la mesure où les produits couverts par la marque antérieure et ceux concernés par le dessin ou modèle contesté se rapportent, notamment, aux bâtonnets d’en-cas destinés au grand public (voir point 52 ci-dessus), la chambre de recours a considéré que le public pertinent était composés des consommateurs dont le niveau d’attention était moyen lors de l’achat de ce type de produits.

57

Ces conclusions sont exemptes d’erreur et doivent être confirmées.

Sur la comparaison des signes

58

Selon la jurisprudence, deux signes sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre eux une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents, à savoir les aspects visuel, phonétique et conceptuel [voir, en ce sens, arrêts du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, EU:T:2002:261, point 30, et du 10 décembre 2008, MIP Metro/OHMI – Metronia (METRONIA), T‑290/07, non publié, EU:T:2008:562, point 41].

59

L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en cause, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte en particulier de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des signes qu’a le consommateur moyen des produits en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque ou un autre signe distinctif comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (arrêts du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 23, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 25).

60

L’appréciation de la similitude entre deux signes ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’un signe complexe et à le comparer avec un autre signe. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les signes en cause, considérés chacun dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par un signe complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir, en ce sens, arrêts du 6 octobre 2005, Medion, C‑120/04,EU:C:2005:594, point 29, et du 22 octobre 2015, BGW, C‑20/14, EU:C:2015:714, point 36). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 42). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43).

61

En l’espèce, avant d’apprécier la similitude des signes en cause, il y a lieu d’examiner leurs éléments distinctifs et dominants.

– Sur les éléments distinctifs et dominants des signes en cause

62

Ainsi que l’a rappelé la chambre de recours au point 40 de la décision attaquée, la marque antérieure est constituée du terme « krax », écrit en lettres majuscules stylisées, disposées par ordre décroissant de la lettre majuscule « K » à la lettre majuscule « X », sur un fond foncé de forme irrégulière.

63

S’agissant du dessin ou modèle contesté, la chambre de recours décrit ce dernier, au point 41 de la décision attaquée, comme un emballage rectangulaire bleu foncé sur lequel figurent des bâtonnets d’en-cas et un morceau de fromage dans un cadre ovale. Autour de ces représentations figuratives et entre celles-ci se trouvent différents éléments verbaux, à savoir « eti » et « crax » en haut, « peynirli » et « çubuk kraker » en bas et « orijinal kitir lezzet » au milieu à droite. L’élément verbal « crax » est représenté en lettres majuscules blanches écrites de la plus petite à la plus grande et avec un contour bleu et jaune, tandis que l’élément verbal « eti » est écrit en rouge avec un contour blanc et noir et comprend un élément figuratif blanc non spécifié près du coin supérieur gauche. Les éléments verbaux « orijinal kitir lezzet » et « peynirli » sont représentés en tout ou partie en majuscules et en casse de titre, en blanc avec un contour noir, tandis que l’élément verbal « çubuk kraker » est représenté en lettres majuscules fines de couleur jaune.

64

La requérante reproche, en substance, à la chambre de recours d’avoir considéré que l’élément verbal « crax » du dessin ou modèle contesté était capable, à lui seul, de dominer l’image dudit dessin ou modèle. Selon elle, tous les autres composants de ce dessin ou modèle ne sont pas négligeables dans l’impression globale d’ensemble produite par celui-ci, dès lors que la similitude des signes dépend du caractère distinctif de leurs composants et d’autres facteurs pertinents éventuels. En outre, elle fait valoir que l’élément verbal « eti » est le plus dominant dans l’impression globale produite par le dessin ou modèle en question, de sorte que ledit élément verbal attirera le plus l’attention du public pertinent. Elle fait valoir, dès lors, que l’élément verbal « crax » est secondaire et dépourvu de caractère distinctif par rapport aux produits en cause.

65

Par ailleurs, la requérante conteste les conclusions de la chambre de recours selon lesquelles l’élément verbal « crax » est dépourvu de signification pour le public pertinent et revêt donc un caractère distinctif. Selon elle, ledit public percevra cet élément verbal, d’une part, comme renvoyant aux produits compris dans la classe 30 et commercialisés en Roumanie sous la dénomination « craxuri » et, d’autre part, comme étant descriptif, en ce qu’il renvoie au son qui est produit lors de la consommation d’aliments croustillants, comme les bâtonnets d’en-cas.

66

L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

67

Selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation du caractère dominant d’un ou plusieurs composants déterminés d’un signe complexe, il convient de prendre en compte, notamment, les qualités intrinsèques de chacun de ses composants en les comparant à celles des autres composants. En outre et de manière accessoire, peut être prise en compte la position relative des différents composants dans la configuration du signe complexe (voir, en ce sens, arrêt du 23 octobre 2002, MATRATZEN, T‑6/01, EU:T:2002:261, point 35).

68

Par ailleurs, pour déterminer le caractère distinctif d’un élément composant un signe, il y a lieu d’apprécier l’aptitude plus ou moins grande de cet élément à contribuer à identifier les produits ou les services pour lesquels le signe a été enregistré comme provenant d’une entreprise déterminée et donc à distinguer ces services de ceux d’autres entreprises. Lors de cette appréciation, il convient de prendre en considération, notamment, les qualités intrinsèques de l’élément en cause au regard de la question de savoir si celui-ci est ou non dénué de tout caractère descriptif des produits et des services pour lesquels le signe a été enregistré [voir arrêt du 8 juillet 2015, Deutsche Rockwool Mineralwoll/OHMI – Ceramicas del Foix (Rock & Rock), T‑436/12, EU:T:2015:477, point 28 et jurisprudence citée].

69

Lorsque certains éléments d’une marque revêtent un caractère descriptif au regard des produits et des services pour lesquels la marque est protégée ou des produits et des services désignés par la demande d’enregistrement, ces éléments ne se voient reconnaître qu’un caractère distinctif faible, voire très faible. Ce caractère distinctif ne pourra, le plus souvent, leur être reconnu qu’en raison de la combinaison qu’ils forment avec les autres éléments de la marque. Du fait de leur faible, voire très faible caractère distinctif, les éléments descriptifs d’une marque ne seront généralement pas considérés par le public comme étant dominants dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci, sauf lorsque, en raison notamment de leur position ou de leur dimension, ils apparaissent comme susceptibles de s’imposer à la perception du public pertinent et d’être gardés en mémoire par celui-ci. Cela ne signifie toutefois pas que les éléments descriptifs d’une marque sont nécessairement négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci. À cet égard, il convient, en particulier, de rechercher si d’autres éléments de la marque sont susceptibles de dominer à eux seuls l’image de celle-ci que le public pertinent garde en mémoire [voir arrêt du 18 janvier 2023, YAplus DBA Yoga Alliance/EUIPO – Vidyanand (YOGA ALLIANCE INDIA INTERNATIONAL), T‑443/21, non publié, EU:T:2023:7, point 69 et jurisprudence citée].

70

En l’espèce, en premier lieu, il convient d’observer que, premièrement, la chambre de recours a conclu à juste titre, au point 40 de la décision attaquée, que la requérante n’avait pas apporté la preuve d’une éventuelle signification de l’élément verbal « crax » du dessin ou modèle contesté ou de l’élément verbal « krax » de la marque antérieure et d’une quelconque association entre une éventuelle signification desdits termes avec les produits en cause. En outre, c’est également à juste titre que la chambre de recours a considéré, en substance, que la requérante ne saurait se prévaloir de la coexistence d’autres marques nationales similaires en l’absence d’éléments de preuve de leur usage sur le territoire pertinent.

71

À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon l’article 63 du règlement no 6/2002 dans sa version antérieure, dans le cadre d’une procédure relative à une action en nullité, telle que prévue à l’article 25, paragraphe 1, sous e), dudit règlement dans sa version antérieure, l’examen de l’EUIPO est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties et que celui-ci peut ne pas tenir compte des faits que les parties n’ont pas invoqués ou des preuves qu’elles n’ont pas produites en temps utile. En outre, s’agissant de l’argumentation de la requérante portant sur le caractère faiblement distinctif du mot « craxuri » en ce qu’il serait fréquemment utilisé en ce qui concerne les produits en cause, il y a lieu de souligner que sa matérialité n’a pas été démontrée. Le seul élément de preuve produit par la requérante à l’appui de cette argumentation est constitué d’une liste de marques comprenant le mot « craxx » pour des produits relevant des classes 29 et 30. Or, la simple énumération d’un nombre relativement limité de marques sans indication permettant de mesurer leur connaissance par le public de référence ne permet pas de conclure à une association dans l’esprit de ce dernier entre le mot « craxuri » et lesdits produits [voir, en ce sens, arrêt du 13 avril 2011, Sociedad Agricola Requingua/OHMI – Consejo Regulador de la Denominación de Origen Toro (TORO DE PIEDRA), T‑358/09, non publié, EU:T:2011:174, point 35]. Partant, il n’y a pas lieu de remettre en cause l’appréciation de la chambre de recours, découlant du point 42 de la décision attaquée, selon laquelle l’élément verbal « crax » est dépourvu de signification pour le public pertinent et revêt, en conséquence, un caractère distinctif.

72

Deuxièmement, la chambre de recours a considéré, à juste titre, au point 42 de la décision attaquée, que, compte tenu du fait que l’élément verbal « crax » avait un caractère distinctif et du fait de sa taille plus grande, de sa position centrale et de sa stylisation particulière, celui-ci se distinguait clairement dans l’impression globale, au même titre que l’élément verbal « peynirli » qui était également dépourvu de signification et qui était, partant, distinctif dans la partie inférieure de l’emballage. Par ailleurs, les éléments « eti » et « kitir lezzet », bien que dépourvus de signification et distinctifs, joueront un rôle secondaire dans l’impression globale en raison de leur petite taille et de leur position secondaire.

73

Troisièmement, c’est également à juste titre que la chambre de recours a conclu, au point 42 de la décision attaquée, que le terme « orijinal » était similaire à l’équivalent roumain « original » et serait donc dépourvu de caractère distinctif pour les produits en cause, tandis que l’élément verbal « çubuk kraker » pourrait être considéré par une partie du public roumain comme évoquant le terme « cub » (qui signifie « cube ») et que le terme « kraker » pourrait l’être comme évoquant les en-cas pouvant être communément dénommés « crackers » et qu’ils sont donc faibles. Néanmoins, en raison de leur taille plus petite ou de leur position secondaire, tous ces éléments joueront un rôle secondaire dans l’impression globale. Les autres éléments du dessin ou modèle contesté, à savoir les éléments figuratifs et ornementaux correspondant aux bâtonnets d’en-cas et au morceau de fromage, sont descriptifs des produits en cause et, par conséquent, dépourvus de caractère distinctif. L’emballage bleu et le cadre ovale sont de nature décorative et ne jouent donc qu’un rôle secondaire dans l’impression globale produite par ledit dessin ou modèle. Il en va de même pour le petit élément blanc non spécifié, qui n’aura qu’une influence limitée, voire nulle sur l’impression d’ensemble produite par ce dessin ou modèle en raison de sa petite taille.

74

En second lieu, selon la jurisprudence, lorsqu’un signe est composé d’éléments verbaux et figuratifs, les premiers sont, en principe, plus distinctifs que les seconds, car le consommateur moyen fera plus facilement référence aux produits en cause en citant le nom qu’en décrivant l’élément figuratif de ce signe (arrêt du 7 février 2018, Emballage pour cornets à glace, T‑794/16, non publié, EU:T:2018:70, point 49).

75

À cet égard, il y a lieu d’observer, à l’instar de la chambre de recours aux points 22 et 40 de la décision attaquée, que l’élément verbal « krax » est le seul élément verbal de la marque antérieure et que l’élément verbal « crax » est un élément verbal co-dominant, avec l’élément verbal « peynirli », au sein du dessin ou modèle contesté. En effet, les éléments verbaux « krax » de ladite marque et « crax » dudit dessin ou modèle, qui sont stylisés de manière similaire, notamment en leurs caractères majuscules de couleur blanche, sont représentés par taille croissante ou décroissante. Dans ces conditions et dès lors que tous les autres éléments du même dessin ou modèle jouent un rôle secondaire dans l’impression d’ensemble ou sont descriptifs, la chambre de recours a conclu à juste titre que l’élément verbal « krax » était l’élément le plus distinctif composant cette marque et que l’élément verbal « crax » était co-dominant et accompagné d’éléments figuratifs dépourvus de caractère distinctif ou qui étaient descriptifs dans le dessin ou modèle contesté.

– Sur la comparaison sur le plan visuel

76

La requérante soutient que les signes en cause ne présentent pas de similitudes sur le plan visuel. Selon elle, l’élément verbal « eti » du dessin ou modèle contesté doit être considéré comme attirant toute l’attention du public pertinent. Par ailleurs, elle estime que tous les autres éléments verbaux et figuratifs dudit dessin ou modèle sont immédiatement lisibles et ne seront pas perçus comme des éléments simplement décoratifs.

77

Toutefois, ainsi qu’il a été relevé au point 75 ci-dessus, l’élément verbal « crax » du dessin ou modèle contesté est celui qui retiendra le plus l’attention du public pertinent et, partant, influencera le plus l’impression globale produite par ledit dessin ou modèle.

78

En l’espèce, il convient d’observer que, sur le plan visuel, trois des quatre lettres des éléments verbaux distinctifs et co-dominants des signes en cause coïncident, à savoir la suite de lettres « r », « a », « x », toutes représentées en lettres majuscules avec un effet tridimensionnel similaire, légèrement inclinées de gauche à droite, la taille des lettres décroissant dans la marque antérieure et croissant dans le dessin ou modèle contesté. En outre, lesdits signes diffèrent, d’une part, par leur lettre initiale en majuscule, à savoir, respectivement, « K » et « C » et, d’autre part, par la suite croissante ou décroissante de la taille de leurs lettres.

79

À cet égard, la chambre de recours a considéré à juste titre, au point 45 de la décision attaquée, que les différences entre les signes en cause mentionnées au point 78 ci-dessus ne sauraient l’emporter sur la similitude créée par les trois lettres identiques stylisées de manière similaire. Il en va de même pour l’élément verbal « peynirli » qui est clairement séparé de l’élément verbal « crax » du fait de sa position vers le bas de l’emballage. Cependant, même si lesdits signes diffèrent également par la présence, dans le dessin ou modèle contesté, des éléments verbaux secondaires « eti », « orijinal kitir lezzet » et « çubuk kraker », ainsi que par les fonds, les couleurs et le petit élément figuratif blanc, tous de nature décorative, et par la représentation de l’ensemble non distinctif de bâtonnets d’en-cas et du morceau de fromage, ces éléments n’ont pas d’équivalence dans la marque antérieure et ne sont pas en mesure de l’emporter sur la similitude des éléments dominants ou co-dominants « krax » et « crax », en raison de leur absence de caractère distinctif et de leur taille et de leur position secondaires.

80

Il s’ensuit que c’est sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a conclu à un degré moyen de similitude visuelle pour les signes en cause.

– Sur la comparaison sur le plan phonétique

81

La requérante fait valoir qu’il n’existe aucun degré de similitude sur le plan phonétique entre les signes en cause. Selon elle, même si les consommateurs ne prononceront qu’un seul des éléments verbaux compris dans le dessin ou modèle contesté par économie de mots, ce sera l’élément verbal « eti », qui ne présente aucune similitude avec l’élément verbal « krax » de la marque antérieure.

82

En l’espèce, ainsi qu’il ressort du point 73 ci-dessus, les éléments verbaux « orijinal » et « çubuk kraker » ainsi que tous les éléments figuratifs composant le dessin ou modèle contesté sont dépourvus de caractère distinctif et revêtent une importance secondaire. En outre, les éléments verbaux « eti » et « kitir lezzet », bien que distinctifs en raison de leur absence de signification par rapport aux produits en cause, revêtent une importance secondaire en raison de leur taille et de leur position. Par ailleurs, ainsi qu’il ressort du point 79 ci-dessus, les éléments verbaux « krax » de la marque antérieure et « crax» du dessin ou modèle contesté contiennent la même suite de lettres « r », « a », « x », qui, tout comme les lettres « k » et « c », sera prononcée de la même manière. Ainsi, les signes en cause ne diffèrent que par la prononciation de l’élément verbal « peynirli », co-dominant avec l’élément verbal « crax » au sein dudit dessin ou modèle.

83

À cet égard, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, lorsque les consommateurs sont confrontés à une marque composée de différents éléments verbaux dont certains revêtent une importance secondaire, ils ont tendance à abréger oralement une marque comprenant plusieurs termes afin de la rendre plus facile à prononcer [voir, en ce sens, arrêt du 30 novembre 2006, Camper/OHMI – JC (BROTHERS by CAMPER), T‑43/05, non publié, EU:T:2006:370, point 75]. Il en résulte que les éléments verbaux « eti », « kitir lezzet », « orijinal » et « çubuk kraker » du dessin ou modèle contesté, qui revêtent tous une importance secondaire, sont moins susceptibles d’attirer l’attention du consommateur et sont donc moins susceptibles d’être prononcés. En outre, les éléments figuratifs ne seront pas prononcés, de sorte que les consommateurs seront plus susceptibles de faire référence aux produits concernés par ledit dessin ou modèle en prononçant les éléments co-dominants de ce dessin ou modèle, à savoir les éléments verbaux « crax » et « peynirli ».

84

Partant, c’est sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a conclu, au point 46 de la décision attaquée, à un degré moyen de similitude phonétique pour les signes en cause.

– Sur la comparaison sur le plan conceptuel

85

La requérante soutient que la chambre de recours aurait dû conclure à l’absence de similitude conceptuelle des signes en cause. Plus particulièrement, elle fait valoir que l’élément verbal « eti », qui serait le plus dominant et le plus distinctif du dessin ou modèle contesté, et l’élément verbal « krax » de la marque antérieure seront tous les deux perçus comme des mots fantaisistes et différents et que, parmi lesdits signes, l’un est un signe verbal et l’autre un signe figuratif, de sorte qu’il n’existerait aucune similitude entre ces signes sur le plan conceptuel.

86

Il y a lieu de rappeler que la comparaison conceptuelle a pour objet de comparer les « concepts » que les signes en cause comportent. Le terme « concept » signifie, selon la définition qu’en donne par exemple le dictionnaire Larousse, une « idée générale et abstraite que se fait l’esprit humain d’un objet de pensée concret ou abstrait, et qui lui permet de rattacher à ce même objet les diverses perceptions qu’il en a, et d’en organiser les connaissances » [voir arrêt du 16 juin 2021, Smiley Miley/EUIPO – Cyrus Trademarks (MILEY CYRUS), T‑368/20, non publié, EU:T:2021:372, point 52 et jurisprudence citée].

87

De même, selon la jurisprudence, la similitude conceptuelle implique que les signes en cause concordent dans leur contenu sémantique (voir, en ce sens, arrêt du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 24). Il en découle que lorsque le public pertinent ne comprend pas la signification des mots ou ne peut attribuer une signification particulière à aucun desdits signes, aucune comparaison conceptuelle n’est possible [voir, en ce sens, arrêts du 7 février 2018,Emballage pour cornets à glace, T‑794/16, non publié, EU:T:2018:70, point 76, et du 6 avril 2022, Agora Invest/EUIPO – Transportes Maquinaria y Obras (TRAMOSA), T‑219/21, non publié, EU:T:2022:219, point 117 et jurisprudence citée].

88

En l’espèce, les éléments co-dominants du dessin et modèle contesté et l’élément dominant de la marque antérieure sont dépourvus de signification pour le public pertinent (voir points 71, 72 et 75 ci-dessus). Ils ne peuvent donc pas véhiculer de concept auprès du public pertinent.

89

S’agissant des autres éléments du dessin ou modèle contesté, ainsi qu’il ressort des points 73 et 75 ci-dessus, ceux-ci occupent une position secondaire limitant leur impact dans le cadre de la comparaison conceptuelle des signes en cause. Toutefois, cela ne signifie pas que lesdits éléments sont entièrement négligeables. Ainsi, les éléments verbaux « orijinal » et « çubuk kraker » ainsi que les éléments figuratifs ornementaux correspondant aux bâtonnets d’en-cas et au morceau de fromage dudit dessin ou modèle doivent être pris en considération lors de cette comparaison, dès lors qu’ils véhiculent un concept de produits alimentaires de consommation courante et renvoient à des bâtonnets d’en-cas au goût de fromage.

90

Ainsi, contrairement à la conclusion qui figure au point 47 de la décision attaquée, il y a lieu de considérer, au regard de ce qui précède, que les signes en cause sont différents sur le plan conceptuel.

Sur le caractère distinctif de la marque antérieure

91

La requérante fait valoir que la marque antérieure possède, en substance, un faible caractère distinctif dès lors que l’élément verbal « krax » décrit le son produit lors de la consommation d’en-cas à base de céréales et en raison de la coexistence de ladite marque avec l’enregistrement international désignant l’Union européenne de la marque CRAXX, enregistré le 7 décembre 2004 sous la référence 0854152A pour des produits identiques compris dans les classes 29 et 30.

92

D’une part, ainsi qu’il ressort des points 71, 75 et 88 ci-dessus, l’élément verbal « krax » de la marque antérieure, à l’instar de l’élément « crax » du dessin ou modèle contesté, est dépourvu de signification pour le public pertinent et la requérante n’a pas apporté la preuve que l’élément verbal « krax » avait une signification pour ledit public. S’agissant de l’affirmation de la requérante concernant un caractère onomatopéique de ce dernier élément verbal, une onomatopée du son produit lors de la consommation de produits croustillants n’est pas, en l’espèce, évidente.

93

D’autre part, l’argument de la requérante relatif à la coexistence de la marque antérieure avec la marque CRAXX ne saurait prospérer afin de démontrer que, en l’espèce, la marque antérieure possède, en substance, un faible caractère distinctif. En effet, le caractère distinctif de la marque antérieure, que celui-ci dérive des qualités intrinsèques de cette marque ou de sa renommée, concerne l’aptitude de cette marque à identifier les produits ou les services pour lesquels elle a été enregistrée comme provenant d’une entreprise déterminée et donc à distinguer ces produits ou services de ceux d’autres entreprises [voir, en ce sens, arrêts du 13 septembre 2018, Birkenstock Sales/EUIPO, C‑26/17 P, EU:C:2018:714, point 31 et jurisprudence citée, et du 21 décembre 2021, Dr. Spiller/EUIPO – Rausch (Alpenrausch Dr. Spiller), T‑6/20, non publié, EU:T:2021:920, point 145 et jurisprudence citée]. Ce dernier n’implique pas une comparaison entre plusieurs signes, mais ne concerne qu’un seul signe, à savoir la marque antérieure (voir, en ce sens, arrêt du 11 juin 2020, China Construction Bank/EUIPO, C‑115/19 P, EU:C:2020:469, point 58).

94

Partant, la chambre de recours n’a commis aucune erreur d’appréciation en ayant considéré que la marque antérieure revêtait, en substance, un caractère distinctif moyen.

Sur l’appréciation globale du risque de confusion

95

L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les signes, et inversement (arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 19).

96

En outre, aux fins de l’appréciation globale du risque de confusion, il doit notamment être tenu compte de ce que le consommateur moyen, au sein du public pertinent, n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques, mais doit se fier à l’image imparfaite de celles-ci qu’il garde en mémoire (arrêt du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 26). Par ailleurs, il ne pourrait être conclu à l’existence d’un risque de confusion que si le public pertinent était susceptible d’être induit en erreur sur l’origine commerciale des produits en cause [voir, en ce sens, arrêt du 24 novembre 2021, Jeronimo Martins Polska/EUIPO – Rivella International (Riviva), T‑551/20, non publié, EU:T:2021:816, point 86].

97

En l’espèce, la chambre de recours a conclu, au point 52 de la décision attaquée, à l’existence d’un risque de confusion quant à l’origine commerciale des produits en cause compte tenu de l’image imparfaite que les consommateurs auront gardée en mémoire des signes en cause.

98

À cet égard, premièrement, ainsi qu’il ressort du point 52 ci-dessus, la chambre de recours était fondée à considérer que les produits en cause étaient similaires en raison de leur complémentarité. Deuxièmement, les signes en cause comportent les éléments verbaux communs et, respectivement, dominant et co-dominant « krax » dans la marque antérieure et « crax » dans le dessin ou modèle contesté, qui sont dépourvus de signification et qui sont, par conséquent, distinctifs (voir points 67 à 75 ci-dessus). Troisièmement, lesdits signes sont différents sur le plan conceptuel (voir points 86 à 90 ci-dessus). Quatrièmement, la chambre de recours a également considéré, à juste titre, que ces signes étaient similaires à un degré moyen sur le plan visuel (voir points 77 à 80 ci-dessus). De surcroît, les même signes présentent un degré moyen de similitude phonétique (voir point 84 ci-dessus). Cinquièmement, c’est également à juste titre que la chambre de recours a considéré que la marque antérieure revêtait un caractère distinctif moyen (voir point 94 ci-dessus).

99

Il en résulte que le public pertinent, doté d’un niveau d’attention moyen, pourra raisonnablement penser, lorsqu’il est confronté au dessin ou modèle contesté, que les produits concernés et les produits visés par la marque antérieure, similaires, ont la même origine commerciale.

100

Dans ces conditions, la chambre de recours n’a commis aucune erreur en ayant conclu, au point 52 de la décision attaquée, à l’existence d’un risque de confusion sur l’origine commerciale des produits au sens de l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement no 6/2002 dans sa version antérieure, lu conjointement avec l’article 36, paragraphe 2, sous b), de la loi roumaine sur les marques.

101

Il s’ensuit que le premier moyen n’est pas fondé et doit être rejeté, tout comme, partant, le recours dans son intégralité.

Sur les dépens

102

Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

103

La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par l’intervenante, conformément aux conclusions de cette dernière. En revanche, l’EUIPO n’ayant conclu à la condamnation de la requérante aux dépens qu’en cas d’organisation d’une audience, il convient, en l’absence d’une telle organisation, de décider que l’EUIPO supportera ses propres dépens.

 

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

 

1)

Le recours est rejeté.

 

2)

Eti Gıda Sanayi ve Ticaret AŞ est condamnée à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par Star Foods E.M. SRL.

 

3)

L’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) supportera ses propres dépens.

 

Škvařilová-Pelzl

Steinfatt

Kukovec

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 3 septembre 2025.

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : l’anglais.

Haut