Choisissez les fonctionnalités expérimentales que vous souhaitez essayer

Ce document est extrait du site web EUR-Lex

Document 62024TJ0091

Arrêt du Tribunal (troisième chambre) du 3 septembre 2025.
Eti Gıda Sanayi ve Ticaret AŞ contre Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle.
Dessin ou modèle de l’Union européenne – Procédure de nullité – Dessin ou modèle de l’Union européenne enregistré représentant une décoration pour sachets d’emballage – Marques nationales verbale et figuratives antérieures – Motif de nullité – Usage dans le dessin ou modèle ultérieur d’un signe distinctif dont le titulaire est en droit d’interdire l’utilisation – Article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement (CE) no 6/2002 – Droit matériel applicable – Droits de la défense – Étendue de l’examen opéré par la chambre de recours.
Affaire T-91/24.

Identifiant ECLI: ECLI:EU:T:2025:814

 ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

3 septembre 2025 ( *1 )

« Dessin ou modèle de l’Union européenne – Procédure de nullité – Dessin ou modèle de l’Union européenne enregistré représentant une décoration pour sachets d’emballage – Marques nationales verbale et figuratives antérieures – Motif de nullité – Usage dans le dessin ou modèle ultérieur d’un signe distinctif dont le titulaire est en droit d’interdire l’utilisation – Article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement (CE) no 6/2002 – Droit matériel applicable – Droits de la défense – Étendue de l’examen opéré par la chambre de recours »

Dans l’affaire T‑91/24,

Eti Gıda Sanayi ve Ticaret AŞ, établie à Eskişehir (Turquie), représentée par Me A. Căvescu, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme C. Bovar et M. J. Ivanauskas, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Star Foods E.M. SRL, établie à Bucarest (Roumanie), représentée par Mes V. von Bomhard et J. Fuhrmann, avocats,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de Mmes P. Škvařilová‑Pelzl (rapporteure), présidente, G. Steinfatt et M. D. Kukovec, juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu la phase écrite de la procédure,

vu la mesure d’organisation de la procédure du 23 janvier 2025 et les réponses de l’intervenante et de l’EUIPO déposées au greffe du Tribunal, respectivement, le 6 et le 7 février 2025,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1

Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Eti Gıda Sanayi ve Ticaret AŞ, demande l’annulation de la décision de la troisième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 14 décembre 2023 (affaire R 1016/2023‑3) (ci-après la « décision attaquée »).

Antécédents du litige

2

Le 28 octobre 2016, la requérante a présenté une demande d’enregistrement d’un dessin ou modèle communautaire auprès de l’EUIPO, en vertu du règlement (CE) no 6/2002 du Conseil, du 12 décembre 2001, sur les dessins ou modèles communautaires (JO 2002, L 3, p. 1).

3

Le dessin ou modèle communautaire dont l’enregistrement a été demandé et qui est contesté en l’espèce est représenté dans la vue suivante :

Image

4

Les produits auxquels le dessin ou modèle contesté est destiné à être appliqué relèvent de la classe 32.00 au sens de l’arrangement de Locarno instituant une classification internationale pour les dessins et modèles industriels, du 8 octobre 1968, tel que modifié, et correspondent à l’indication suivante : « Sacs [emballages] (ornementation pour-) ».

5

Le 21 janvier 2019, l’intervenante, Star Foods E.M. SRL, a introduit auprès de l’EUIPO une demande en nullité du dessin ou modèle contesté pour les produits visés au point 4 ci-dessus.

6

Le motif invoqué au soutien de la demande en nullité était celui visé à l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement no 6/2002, dans sa version antérieure à l’entrée en vigueur du règlement (UE) 2024/2822 du Parlement européen et du Conseil, du 23 octobre 2024 (JO L, 2024/2822), lu conjointement avec l’article 36, paragraphe 2, sous b) et c), de la lege nr. 84 privind mărcile și indicațiile geografice (loi no 84 sur les marques et les indications géographiques), du 15 avril 1998 (Monitorul Oficial al României, no 337, du 8 mai 2014, ci-après la « loi roumaine sur les marques »). L’intervenante avait appuyé ladite demande sur la marque roumaine verbale antérieure KRAX, ainsi que sur trois marques roumaines figuratives antérieures, présentant le même élément verbal « krax » dans des stylisations différentes. Les quatre marques antérieures étaient enregistrées, notamment, pour des produits compris dans la classe 30, et plus précisément, pour des « préparations faites de céréales ». L’intervenante soutenait que, en raison des similitudes entre les signes antérieurs et les produits couverts par eux, il existerait un risque de confusion au sens de cette dernière disposition, lui permettant ainsi de faire interdire l’usage de son signe distinctif dans le dessin ou modèle contesté. En outre, les marques nationales antérieures étant renommées en Roumanie, leur reproduction de manière similaire dans ledit dessin ou modèle permettrait au titulaire de ce dernier de bénéficier de leur renommée et de l’effort commercial et, par suite, son usage porterait atteinte à leur caractère distinctif au sens de la disposition en question.

7

À la demande de la requérante, par décision du 11 décembre 2019, la division d’annulation a suspendu la procédure dans l’attente d’une décision définitive du Tribunalul Bucureşti (tribunal de Bucarest, Roumanie) devant lequel la marque nationale figurative antérieure portant le numéro 142285 (ci-après la « marque antérieure ») était également contestée.

8

Par décision du 13 mars 2023, la division d’annulation, après avoir repris la procédure à la suite du rejet définitif du recours introduit devant la juridiction nationale, a fait droit à la demande en nullité, en commençant son examen sur le fondement de la marque antérieure, déposée le 12 septembre 2014, enregistrée le 5 mai 2016 au nom de l’intervenante et représentée dans la vue suivante :

Image

9

Plus particulièrement, la division d’annulation a d’abord constaté que la marque antérieure présentait un caractère distinctif intrinsèque moyen et que sa validité avait été confirmée par les tribunaux roumains. Ensuite, elle a considéré, en substance, que les produits couverts par ladite marque et ceux auxquels le dessin ou modèle contesté est destiné à être appliqué étaient identiques, que cette marque et ledit dessin ou modèle présentaient un degré moyen de similitude visuelle, étaient identiques sur le plan phonétique et que, partant, les similitudes entre les deux signes étaient suffisantes pour conclure à l’existence d’un risque de confusion. Dans ces conditions, l’intervenante ayant le droit d’interdire, en vertu de l’article 36, paragraphe 2, sous b), de la loi roumaine sur les marques, l’utilisation du signe dont il était fait usage dans ce dessin ou modèle, elle a déclaré ce dernier nul, conformément à l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement no 6/2002 dans sa version antérieure. Étant donné que la demande avait été accueillie sur la base du caractère distinctif intrinsèque de la marque en question, elle a conclu qu’il n’y avait pas lieu de se prononcer sur le prétendu caractère distinctif accru revendiqué par l’intervenante, ni sur son allégation visant à interdire l’usage du signe dans le dessin ou modèle concerné en raison de la supposée renommée d’une telle marque. De même, elle a considéré qu’il n’y avait plus lieu d’examiner les autres droits antérieurs invoqués par l’intervenante.

10

Le 14 mai 2023, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’annulation.

11

Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours. En substance, elle a considéré qu’il y avait lieu d’examiner le recours sur le seul fondement de la marque antérieure et a conclu que la division d’annulation était fondée à déclarer nul le dessin ou modèle contesté en vertu de l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement no 6/2002 dans sa version antérieure, lu conjointement avec l’article 36, paragraphe 2, sous b), de la loi roumaine sur les marques, dès lors qu’il existait un risque de confusion. À cet égard, elle a considéré que les produits couverts par ladite marque et ceux auxquels ce dessin ou modèle est destiné à s’appliquer étaient similaires, que les signes en cause étaient similaires à un degré moyen sur le plan visuel et identiques sur le plan phonétique, que les éléments verbaux desdits signes étaient dépourvus de signification pour le public roumain, de sorte que la comparaison sur le plan conceptuel était impossible. Par ailleurs, s’agissant de la demande de preuve de l’usage de cette marque, elle a considéré qu’il n’y avait pas lieu d’examiner les arguments de la requérante, dès lors que la marque en question ainsi que ledit dessin ou modèle étaient enregistrés depuis moins de cinq ans au moment de l’introduction de la demande en nullité. En outre, elle a considéré qu’il n’y avait pas non plus lieu d’examiner l’allégation de forclusion par tolérance selon le droit roumain, revendiquée par la requérante.

Conclusions des parties

12

La requérante conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :

annuler la décision attaquée ;

condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens.

13

L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

rejeter le recours ;

condamner la requérante aux dépens en cas d’organisation d’une audience.

14

L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

rejeter le recours ;

condamner la requérante aux dépens.

En droit

15

À l’appui du recours, la requérante invoque, en substance, trois moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement no 6/2002 dans sa version antérieure, le deuxième, de la violation des articles 94 et 95 du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1), et de l’article 40, paragraphe 1, de la loi roumaine sur les marques, telle que modifiée (Monitorul Oficial al României, no 856, du 18 septembre 2020, ci-après la « loi nouvelle roumaine ») et, le troisième, de la violation de ses droits de la défense.

16

Le Tribunal estime qu’il convient de commencer par l’examen du troisième moyen, de poursuivre par l’examen du deuxième moyen et de finir par celui du premier moyen.

Sur le troisième moyen, tiré de la violation des droits de la défense

17

La requérante reproche, en substance, à la chambre de recours d’avoir violé ses droits de la défense et, plus particulièrement, son droit d’être entendue, en ne tenant pas compte, de manière répétée, de ses observations relatives au fait que l’intervenante ne serait pas la titulaire de la marque roumaine figurative portant le numéro 071100. Selon elle, l’intervenante n’a pas apporté la preuve de l’existence de ladite marque, du nom du titulaire de cette marque ou du renouvellement de la marque en question. Elle en déduit que la chambre de recours aurait dû rejeter le recours contre la décision de la division d’annulation comme étant irrecevable pour défaut d’identification valable du titulaire effectif du droit antérieur.

18

L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

19

Aux termes de l’article 62 du règlement no 6/2002 dans sa version antérieure, les décisions de l’EUIPO ne peuvent être fondées que sur des motifs ou des preuves au sujet desquels les parties ont pu prendre position. Cette disposition consacre, dans le cadre du droit des dessins ou modèles de l’Union européenne, le principe général de protection des droits de la défense. En vertu de ce principe général du droit de l’Union européenne, les destinataires des décisions des autorités publiques qui affectent de manière sensible leurs intérêts doivent être mis en mesure de faire connaître utilement leur point de vue. Le droit à être entendu s’étend ainsi à tous les éléments de fait ou de droit qui constituent le fondement de l’acte décisionnel, mais pas à la position finale que l’administration entend adopter [arrêt du 9 février 2017, Mast-Jägermeister/EUIPO (Gobelets), T‑16/16, EU:T:2017:68, point 57], ni à chaque fait notoire sur lequel elle s’appuie pour arriver à cette position [voir arrêt du 29 avril 2020, Bergslagernas Järnvaru/EUIPO – Scheppach Fabrikation von Holzbearbeitungsmaschinen (Outil pour fendre le bois), T‑73/19, non publié, EU:T:2020:157, point 15 et jurisprudence citée].

20

Or, le recours formé devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’EUIPO au sens de l’article 61 du règlement no 6/2002 [arrêt du 20 octobre 2021, JMS Sports/EUIPO – Inter-Vion (Élastique pour cheveux en spirale), T‑823/19, EU:T:2021:718, point 11] et l’article 188 du règlement de procédure du Tribunal prévoit que les mémoires déposés par les parties dans le cadre de la procédure devant celui-ci ne peuvent modifier l’objet du litige devant la chambre de recours.

21

En l’espèce, il ressort du dossier de l’EUIPO et de la demande en nullité initialement introduite le 21 janvier 2019 que la marque roumaine figurative no 071100 n’était pas invoquée à l’appui de ladite demande, de sorte que ladite marque ne faisait pas partie de l’objet du recours. De ce fait, en vertu des dispositions combinées de l’article 61 du règlement no 6/2002 et de l’article 188 du règlement de procédure, les allégations de la requérante, relatives à la marque en question, modifient l’objet du litige, dès lors que cette marque n’avait pas été invoquée au soutien de cette demande.

22

Dans ces circonstances, la requérante n’est pas fondée à soutenir que la chambre de recours a commis une violation de ses droits de la défense en ne tenant pas compte de ses observations relatives au fait que l’intervenante ne serait pas la titulaire de la marque roumaine figurative no 071100.

23

Il s’ensuit que le troisième moyen doit être rejeté comme étant non fondé.

Sur le deuxième moyen, tiré de la violation des articles 94 et 95 du règlement 2017/1001, lus conjointement avec l’article 40, paragraphe 1, de la loi nouvelle roumaine

24

La requérante reproche à la chambre de recours d’avoir violé les articles 94 et 95 du règlement 2017/1001 ainsi que l’article 40, paragraphe 1, de la loi nouvelle roumaine. D’une part, selon elle, la chambre de recours a commis une erreur de droit en n’ordonnant pas à l’intervenante de produire la preuve de l’usage de la marque antérieure qui ne relevait pas du délai de grâce de cinq ans. D’autre part, elle soutient, en substance, que la chambre de recours aurait dû examiner le recours contre la décision de la division d’annulation au regard de ladite loi et, partant, en application de cette dernière disposition, aurait dû demander la preuve de l’usage sérieux de ladite marque, dans le cadre d’une procédure de nullité fondée sur l’article 39 de cette loi, d’une teneur identique à celle de l’article 36 de la loi roumaine sur les marques en vigueur au moment de l’introduction de la demande en nullité.

25

L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

26

L’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement no 6/2002 dans sa version antérieure exige, notamment, que le droit de l’Union ou la législation de l’État membre régissant le signe antérieur invoqué à l’appui d’une demande en nullité fondée sur cette disposition « confère au titulaire du signe le droit d’interdire » l’utilisation de son signe dans un dessin ou modèle ultérieur [arrêt du 12 mai 2010, Beifa Group/OHMI – Schwan-Stabilo Schwanhäußer (Instrument d’écriture), T‑148/08, EU:T:2010:190, point 63].

27

En l’espèce, les signes antérieurs invoqués à l’appui d’une demande en nullité comprennent notamment la marque antérieure, qui est une marque figurative roumaine, régie par les dispositions de la loi roumaine sur les marques. L’article 36, paragraphe 2, de ladite loi confère au titulaire d’une marque le droit d’interdire l’usage de tout signe pour lequel, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque en question et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services couverts par cette marque et par le signe concerné, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public.

28

Certes, l’article 40, paragraphe 1, de la loi nouvelle roumaine, invoqué par la requérante dans ses écritures, prévoit que, sur demande de la partie défenderesse, le titulaire d’une marque antérieure apporte la preuve que, au cours des cinq années qui précèdent la date de cette action, la marque a fait l’objet d’un usage sérieux pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et qui sont invoqués, ou qu’il existe des motifs pour le non-usage, pour autant qu’à cette date la marque antérieure ait été enregistrée depuis cinq ans au moins et que, à défaut d’une telle preuve, l’action est rejetée.

29

Toutefois, l’article 40, paragraphe 1, de la loi nouvelle roumaine, qui découle de la réforme nationale du droit des marques visant à transposer l’article 17 de la directive (UE) 2015/2436 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2015, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 2015, L 336, p. 1), n’est pas applicable en l’espèce, dans la mesure où il n’était pas en vigueur au moment de l’introduction de la demande d’enregistrement ou de priorité du dessin ou modèle contesté. En effet, compte tenu de la date d’introduction de la demande d’enregistrement en cause, à savoir le 28 octobre 2016, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, les faits de l’espèce sont régis par les dispositions matérielles du règlement no 6/2002 dans sa version antérieure et la loi roumaine sur les marques dans sa version en vigueur à cette date (voir, par analogie, ordonnance du 5 octobre 2004, Alcon/OHMI, C‑192/03 P, EU:C:2004:587, points 39 et 40, et arrêt du 23 avril 2020, Gugler France/Gugler et EUIPO, C‑736/18 P, non publié, EU:C:2020:308, point 3 et jurisprudence citée).

30

En outre, quant à la prétendue violation des articles 94 et 95 du règlement 2017/1001, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 94 dudit règlement, les décisions de l’EUIPO ne peuvent être fondées que sur des motifs ou des preuves au sujet desquels les parties ont pu prendre position et que, aux termes de l’article 95, paragraphe 2, du même règlement, l’EUIPO peut ne pas tenir compte des faits que les parties n’ont pas invoqués ou des preuves qu’elles n’ont pas produites en temps utile.

31

Par ailleurs, selon la jurisprudence, en l’absence, dans le règlement no 6/2002, de disposition spécifique concernant les modalités de présentation d’une demande de preuve de l’usage sérieux du signe antérieur par le titulaire d’un dessin ou modèle communautaire mis en cause par une demande en nullité fondée sur ce signe, il y a lieu de considérer que ladite demande de preuve doit être présentée expressément en temps utile devant l’EUIPO. En principe, celle-ci doit être présentée dans le délai imparti par la division d’annulation au titulaire du dessin ou modèle communautaire mis en cause par une demande en nullité pour présenter ses observations en réponse à cette dernière demande. En effet, la jurisprudence développée en ce qui concerne l’article 47, paragraphes 2 et 3, du règlement 2017/1001 s’applique aussi, par analogie, aux demandes de preuve de l’usage sérieux présentées dans le cadre des procédures de nullité conformément à l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement no 6/2002, car il ne saurait être admis, dans ce contexte également, que la chambre de recours puisse être amenée à statuer sur une affaire différente de celle soumise à la division d’annulation, à savoir une affaire dont la portée aurait été élargie par l’ajout de la question préalable de l’usage sérieux du signe antérieur invoqué à l’appui de la demande en nullité (voir, en ce sens, arrêt du 12 mai 2010, Instrument d’écriture, T‑148/08, EU:T:2010:190, points 67 à 72).

32

Or, en l’espèce, comme le font valoir à juste titre l’EUIPO et l’intervenante, la requérante n’a pas présenté une demande de preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure en temps utile devant la division d’annulation et n’en fait mention pour la première fois que dans le mémoire exposant les motifs du recours en date du 13 juillet 2023. Dès lors, la demande de preuve de l’usage de la marque antérieure présentée devant la chambre de recours était irrecevable.

33

Il y a lieu de relever néanmoins que la chambre de recours n’a pas rejeté la demande de preuve de l’usage de la marque antérieure présentée devant elle comme irrecevable, mais a déclaré, au point 52 de la décision attaquée, que le délai de cinq ans à compter de la date de dépôt de la demande en nullité, à savoir le 21 janvier 2019, n’était pas écoulé. Ainsi, en ayant pris position sur l’écoulement du délai de grâce, la chambre de recours a statué sur le fond sur des arguments nouveaux de la requérante pour les rejeter, sans pour autant que, à supposer même qu’elle ait commis une erreur à cet égard, ladite erreur soit de nature à remettre en cause la légalité de la décision attaquée, puisqu’elle n’a pas, dans ces circonstances, d’incidence sur le dispositif de cette décision.

34

Du fait de l’irrecevabilité de la demande de preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure présentée devant la chambre de recours, le deuxième moyen doit être rejeté.

Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement no 6/2002 dans sa version antérieure

35

La requérante soutient que la chambre de recours a violé l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement no 6/2002 dans sa version antérieure, en ayant erronément conclu à l’existence d’un risque de confusion.

36

La requérante reproche, en substance, à la chambre de recours, premièrement, d’avoir commis une erreur d’appréciation quant à la détermination des produits en cause, deuxièmement, d’avoir examiné le recours contre la décision de la division d’annulation en se basant sur la perception du consommateur moyen et non sur celle de l’utilisateur averti, troisièmement, d’avoir erronément conclu à une similitude moyenne des signes en cause sur le plan visuel et à une identité sur le plan phonétique et, quatrièmement, d’avoir erronément conclu à un degré moyen de caractère distinctif de la marque antérieure, notamment du fait que l’élément verbal « krax » de ladite marque avait une signification pour le public pertinent, et que cette marque avait coexisté pendant plus de dix ans avec la marque de l’Union européenne CRAXX.

37

L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

38

Aux termes de l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement no 6/2002 dans sa version antérieure, un dessin ou modèle peut être déclaré nul s’il est fait usage d’un signe distinctif dans un dessin ou modèle ultérieur et que le droit de l’Union ou la législation de l’État membre concerné régissant ce signe confère au titulaire du signe le droit d’interdire cette utilisation.

39

Selon la jurisprudence, une demande en nullité d’un dessin ou modèle communautaire, fondée sur le motif de nullité visé à l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement no 6/2002 dans sa version antérieure, ne saurait prospérer que s’il est conclu que le public pertinent considérera que, dans le dessin ou modèle communautaire faisant l’objet de cette demande, il est fait usage du signe distinctif invoqué à l’appui de la demande en nullité. L’examen de ce motif de nullité doit être fondé sur la perception par le public pertinent du signe distinctif invoqué à l’appui de ce motif ainsi que sur l’impression d’ensemble que ledit signe produit sur ce public [voir arrêt du 24 septembre 2019, Piaggio & C./EUIPO – Zhejiang Zhongneng Industry Group (Mobylettes), T‑219/18, EU:T:2019:681, point 67 et jurisprudence citée].

40

Le motif de nullité visé à l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement no 6/2002 dans sa version antérieure n’implique pas nécessairement la reproduction intégrale et détaillée d’un signe distinctif antérieur dans un dessin ou modèle communautaire ultérieur. En effet, quand bien même certains éléments du signe en question seraient absents dans le dessin ou modèle communautaire contesté ou d’autres éléments y seraient ajoutés, il pourrait s’agir d’un « usage » dudit signe, notamment lorsque les éléments omis ou ajoutés sont d’une importance secondaire [voir arrêt du 7 février 2018, Şölen Çikolata Gıda Sanayi ve Ticaret/EUIPO – Zaharieva (Emballage pour cornets à glace), T‑794/16, non publié, EU:T:2018:70, point 22 et jurisprudence citée].

41

Cela est d’autant plus vrai que, ainsi qu’il ressort d’une jurisprudence bien établie, le public ne garde en mémoire qu’une image non parfaite des marques enregistrées dans les États membres ou des marques de l’Union européenne. Cette considération est valable pour tout type de signe distinctif. Par conséquent, en cas d’omission de certains éléments secondaires d’un signe distinctif utilisé dans un dessin ou modèle communautaire ultérieur, ou en cas d’ajout de tels éléments à ce même signe, le public pertinent ne se rendra pas nécessairement compte de ces modifications du signe en question. Au contraire, il pourra penser qu’il est fait usage dudit signe tel qu’il l’a gardé en mémoire dans le dessin ou modèle communautaire ultérieur (voir arrêt du 7 février 2018, Emballage pour cornets à glace, T‑794/16, non publié, EU:T:2018:70, point 23 et jurisprudence citée).

42

Il s’ensuit que l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement no 6/2002 dans sa version antérieure trouve à s’appliquer lorsqu’il est fait usage non seulement d’un signe identique à celui invoqué à l’appui de la demande en nullité, mais également d’un signe similaire (voir arrêt du 7 février 2018, Emballage pour cornets à glace, T‑794/16, non publié, EU:T:2018:70, point 24 et jurisprudence citée).

43

Conformément à l’article 36, paragraphe 2, sous b), de la loi roumaine sur les marques, le titulaire d’une marque peut demander, en substance, à l’organe judiciaire compétent d’interdire à des tiers, en l’absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires d’un signe pour lequel, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque ou en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services sur lesquels le signe est apposé, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public, y compris le risque d’association entre le signe et la marque.

44

Ainsi que l’a relevé à bon droit la chambre de recours au point 27 de la décision attaquée, l’article 36, paragraphe 2, sous b), de la loi roumaine sur les marques constitue en droit roumain la transposition de l’article 10, paragraphe 2, sous b), de la directive 2015/2436, dont le libellé est lui-même identique à l’article 5, paragraphe 1, sous b), de la directive 2008/95/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2008, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 2008, L 299, p. 25). Par conséquent, la notion de « risque de confusion » au sens de l’article 36, paragraphe 2, sous b), de ladite loi doit être interprétée à la lumière de la jurisprudence relative à l’article 5, paragraphe 1, sous b), de la directive 2008/95 et à l’article 10, paragraphe 2, sous b), de la directive 2015/2436 (voir, en ce sens, arrêt du 7 février 2018, Emballage pour cornets à glace, T‑794/16, non publié, EU:T:2018:70, points 25 et 26).

45

Selon la jurisprudence de la Cour, constitue un « risque de confusion » au sens de l’article 10, paragraphe 2, sous b), de la directive 2015/2436 le risque que le public puisse croire que les produits ou services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement. L’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public doit être appréciée globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce (voir, en ce sens, arrêts du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, points 22 et 23, et du 6 octobre 2005, Medion, C‑120/04, EU:C:2005:594, points 23 à 29).

46

À la lumière de ces considérations, il convient d’examiner si la chambre de recours a, à bon droit, confirmé la décision de la division d’annulation accueillant la demande en nullité du dessin ou modèle contesté sur le fondement de l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement no 6/2002 dans sa version antérieure, après avoir estimé, en vertu de l’article 36, paragraphe 2, sous b), de la loi roumaine sur les marques, qu’il existait un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent.

47

À titre liminaire, conformément à la jurisprudence citée aux points 44 et 45 ci-dessus, la présente procédure concerne l’étendue de la protection d’une marque et plus particulièrement la question de savoir si le titulaire de ladite marque antérieure peut faire interdire l’usage de son signe distinctif dans le dessin ou modèle contesté. Partant, contrairement aux arguments de la requérante, il n’y a pas lieu d’examiner le présent moyen en tenant compte de l’impression produite sur l’utilisateur averti ou les caractères individuel et nouveau du dessin ou modèle contesté, au sens des articles 4 à 6 du règlement no 6/2002.

Sur la détermination des produits en cause et leur comparaison

48

La requérante conteste, en substance, les appréciations de la chambre de recours selon lesquelles les produits en cause sont similaires. Plus particulièrement, elle considère que rien n’indiquait que le dessin ou modèle contesté serait utilisé pour des bâtonnets d’en-cas.

49

L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

50

Aux fins de déterminer le produit auquel le dessin ou modèle contesté est destiné à être incorporé ou auquel il est destiné à être appliqué, il convient de tenir compte de l’indication qui y est relative dans la demande d’enregistrement dudit dessin ou modèle, mais également, le cas échéant, du dessin ou modèle lui-même, dans la mesure où il précise la nature du produit, sa destination ou sa fonction [arrêt du 18 mars 2010, Grupo Promer Mon Graphic/OHMI – PepsiCo (Représentation d’un support promotionnel circulaire), T‑9/07, EU:T:2010:96, point 56].

51

Par ailleurs, pour apprécier la similitude entre les produits en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre ces produits. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire (arrêt du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 23).

52

S’agissant plus particulièrement de la complémentarité des produits et des services, qui est un critère susceptible de fonder à lui seul l’existence d’une similitude entre des produits et des services, il convient de rappeler que les produits ou les services complémentaires sont ceux entre lesquels existe un lien étroit, en ce sens que l’un est indispensable ou important pour l’usage de l’autre, de sorte que les consommateurs peuvent penser que la responsabilité de la fabrication de ces produits ou de la fourniture de ces services incombe à la même entreprise. Ainsi, aux fins de l’appréciation du caractère complémentaire de produits et de services, il convient, en fin de compte, de prendre en considération la perception par ledit public de l’importance pour l’usage d’un produit ou d’un service d’un autre produit ou service (voir arrêt du 7 février 2018, Emballage pour cornets à glace, T‑794/16, non publié, EU:T:2018:70, point 37 et jurisprudence citée).

53

À cet égard, la complémentarité entre des produits et des services dans le contexte d’un risque de confusion ne s’apprécie pas sur la base de l’existence pour le public pertinent d’un rapport entre les produits et les services en cause du point de vue de leur nature, de leur utilisation et de leurs canaux de distribution. En effet, un critère tiré du rapport entre l’utilisation desdits produits et services ne permet pas d’apprécier pleinement le caractère indispensable, voire important desdits produits et services l’un pour l’autre que requiert l’analyse de la complémentarité entre lesdits produits et services. En effet, le fait que l’utilisation d’un produit ou d’un service soit sans rapport avec l’utilisation d’un autre produit ou d’un autre service n’implique pas dans tous les cas que l’usage de l’un n’est pas important ou indispensable pour l’usage de l’autre (voir arrêt du 7 février 2018, Emballage pour cornets à glace, T‑794/16, non publié, EU:T:2018:70, point 38 et jurisprudence citée).

54

En l’espèce, la chambre de recours a considéré, au point 35 de la décision attaquée, que les produits en cause étaient complémentaires et, partant, similaires. À cet égard, elle a relevé à juste titre qu’il ressort de la désignation du produit concerné par le dessin ou modèle contesté et de la représentation de ce dernier que celui-ci est destiné à être appliqué à des emballages de bâtonnets d’en-cas. Ces derniers sont inclus dans la catégorie générale des produits alimentaires de consommation courante tels que des en-cas ou des produits connexes, qui sont identiques aux « préparations faites de céréales » relevant de la classe 30 et couvertes par la marque antérieure.

55

Il en résulte que le dessin ou modèle contesté destiné à s’appliquer à un emballage est à tout le moins important pour l’usage des produits visés par la marque antérieure, de sorte qu’il existe, au sens de la jurisprudence citée au point 52 ci-dessus, un lien étroit entre eux caractérisant leur complémentarité et, partant, leur similitude.

Sur le territoire pertinent et le public pertinent et son niveau d’attention

56

Dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].

57

En premier lieu, conformément à la jurisprudence selon laquelle, lorsque la marque antérieure est une marque nationale, le territoire pertinent est celui dans lequel ladite marque est protégée [voir, en ce sens, arrêts du 3 septembre 2010, Companhia Muller de Bebidas/OHMI – Missiato Industria e Comercio (61 A NOSSA ALEGRIA), T‑472/08, EU:T:2010:347, point 34, et du 2 mars 2022, Laboratorios Ern/EUIPO – Beta Sports (META), T‑192/21, non publié, EU:T:2022:105, point 28], la chambre de recours a considéré, au point 36 de la décision attaquée, que le territoire pertinent était la Roumanie, ladite marque étant enregistrée et protégée dans ledit État membre.

58

En second lieu, dans la mesure où les produits couverts par la marque antérieure et ceux concernés par le dessin ou modèle contesté se rapportent, notamment, aux bâtonnets d’en-cas destinés au grand public (voir point 54 ci-dessus), la chambre de recours a considéré que le public pertinent était composé des consommateurs dont le niveau d’attention était moyen lors de l’achat de ce type de produits.

59

Ces conclusions sont exemptes d’erreur et doivent être confirmées.

Sur la comparaison des signes

60

Selon la jurisprudence, deux signes sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre eux une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents, à savoir les aspects visuel, phonétique et conceptuel [voir, en ce sens, arrêts du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, EU:T:2002:261, point 30, et du 10 décembre 2008, MIP Metro/OHMI – Metronia (METRONIA), T‑290/07, non publié, EU:T:2008:562, point 41].

61

L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en cause, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte en particulier de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des signes qu’a le consommateur moyen des produits en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque ou un autre signe distinctif comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (arrêts du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 23, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 25).

62

L’appréciation de la similitude entre deux signes ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’un signe complexe et à le comparer avec un autre signe. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les signes en cause, considérés chacun dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par un signe complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir, en ce sens, arrêts du 6 octobre 2005, Medion, C‑120/04, EU:C:2005:594, point 29, et du 22 octobre 2015, BGW, C‑20/14, EU:C:2015:714, point 36). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 42). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43).

63

En l’espèce, avant d’apprécier la similitude des signes en cause, il y a lieu d’examiner leurs éléments distinctifs et dominants.

– Sur les éléments distinctifs et dominants des signes en cause

64

Ainsi que l’a rappelé la chambre de recours au point 39 de la décision attaquée, la marque antérieure est constituée du terme « krax », écrit en lettres majuscules stylisées, disposées par ordre décroissant de la lettre majuscule « K » à la lettre majuscule « X », sur un fond foncé de forme irrégulière.

65

S’agissant du dessin ou modèle contesté, la chambre de recours a décrit ce dernier, au point 40 de la décision attaquée, comme comportant un fond rectangulaire bleu, une grappe de bâtons d’en-cas et un morceau de fromage triangulaire sur le côté gauche. Les éléments verbaux « eti », « crax » et « sticks » sont positionnés l’un en dessous de l’autre et placés au-dessus des éléments figuratifs. Les éléments verbaux « crax » et « sticks » sont représentés en lettres majuscules blanches avec une bordure bleue, tandis que l’élément verbal « eti » est écrit en rouge avec une bordure blanche et noire et comprend un élément figuratif noir non spécifié près de son coin supérieur gauche. Selon la chambre de recours, l’élément verbal « crax » se démarque clairement en raison de sa taille plus importante, de sa position centrale et de sa stylisation particulière par rapport aux autres éléments verbaux.

66

La requérante reproche, en substance, à la chambre de recours d’avoir considéré que l’élément verbal « crax » du dessin ou modèle contesté était capable, à lui seul, de dominer l’image dudit dessin ou modèle. Selon elle, tous les autres composants de ce dessin ou modèle ne sont pas négligeables dans l’impression globale d’ensemble produite par celui-ci, dès lors que la similitude des signes dépend du caractère distinctif de leurs composants et d’autres facteurs pertinents éventuels. En outre, elle fait valoir que l’élément verbal « eti » est le plus dominant dans l’impression globale produite par le dessin ou modèle en question, de sorte que ledit élément verbal attirera le plus l’attention du public pertinent. Elle fait valoir, dès lors, que les éléments verbaux « crax » et « sticks » sont secondaires et dépourvus de caractère distinctif par rapport aux produits en cause.

67

Par ailleurs, la requérante conteste les conclusions de la chambre de recours selon lesquelles l’élément verbal « crax » est dépourvu de signification pour le public pertinent et revêt donc un caractère distinctif. Selon elle, ledit public percevra cet élément verbal, d’une part, comme renvoyant aux produits compris dans la classe 30 et commercialisés en Roumanie sous la dénomination « craxuri » et, d’autre part, comme étant descriptif, en ce qu’il renvoie au son qui est produit lors de la consommation d’aliments croquants ou croustillants, comme les bâtonnets d’en-cas.

68

L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

69

Selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation du caractère dominant d’un ou plusieurs composants déterminés d’un signe complexe, il convient de prendre en compte, notamment, les qualités intrinsèques de chacun de ses composants en les comparant à celles des autres composants. En outre et de manière accessoire, peut être prise en compte la position relative des différents composants dans la configuration du signe complexe (voir, en ce sens, arrêt du 23 octobre 2002, MATRATZEN, T‑6/01, EU:T:2002:261, point 35).

70

Par ailleurs, pour déterminer le caractère distinctif d’un élément composant un signe, il y a lieu d’apprécier l’aptitude plus ou moins grande de cet élément à contribuer à identifier les produits ou les services pour lesquels le signe a été enregistré comme provenant d’une entreprise déterminée et donc à distinguer ces services de ceux d’autres entreprises. Lors de cette appréciation, il convient de prendre en considération, notamment, les qualités intrinsèques de l’élément en cause au regard de la question de savoir si celui-ci est ou non dénué de tout caractère descriptif des produits et des services pour lesquels le signe a été enregistré [voir arrêt du 8 juillet 2015, Deutsche Rockwool Mineralwoll/OHMI – Ceramicas del Foix (Rock & Rock), T‑436/12, EU:T:2015:477, point 28 et jurisprudence citée].

71

Lorsque certains éléments d’une marque revêtent un caractère descriptif au regard des produits et des services pour lesquels la marque est protégée ou des produits et des services désignés par la demande d’enregistrement, ces éléments ne se voient reconnaître qu’un caractère distinctif faible, voire très faible. Ce caractère distinctif ne pourra, le plus souvent, leur être reconnu qu’en raison de la combinaison qu’ils forment avec les autres éléments de la marque. Du fait de leur faible, voire très faible caractère distinctif, les éléments descriptifs d’une marque ne seront généralement pas considérés par le public comme étant dominants dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci, sauf lorsque, en raison notamment de leur position ou de leur dimension, ils apparaissent comme susceptibles de s’imposer à la perception du public pertinent et d’être gardés en mémoire par celui-ci. Cela ne signifie toutefois pas que les éléments descriptifs d’une marque sont nécessairement négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci. À cet égard, il convient, en particulier, de rechercher si d’autres éléments de la marque sont susceptibles de dominer à eux seuls l’image de celle-ci que le public pertinent garde en mémoire [voir arrêt du 18 janvier 2023, YAplus DBA Yoga Alliance/EUIPO – Vidyanand (YOGA ALLIANCE INDIA INTERNATIONAL), T‑443/21, non publié, EU:T:2023:7, point 69 et jurisprudence citée].

72

En l’espèce, en premier lieu, il convient d’observer que, premièrement, la chambre de recours a conclu à juste titre, au point 39 de la décision attaquée, que la requérante n’avait pas apporté la preuve d’une éventuelle signification de l’élément verbal « crax » du dessin ou modèle contesté ou de l’élément verbal « krax » de la marque antérieure et d’une quelconque association entre une éventuelle signification desdits termes avec les produits en cause. En outre, c’est également à juste titre que la chambre de recours a considéré, en substance, que la requérante ne saurait se prévaloir de la coexistence d’autres marques nationales similaires en l’absence d’éléments de preuve de leur usage sur le territoire pertinent.

73

À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon l’article 63 du règlement no 6/2002 dans sa version antérieure, dans le cadre d’une procédure relative à une action en nullité, telle que prévue à l’article 25, paragraphe 1, sous e), dudit règlement dans sa version antérieure, l’examen de l’EUIPO est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties et que celui-ci peut ne pas tenir compte des faits que les parties n’ont pas invoqués ou des preuves qu’elles n’ont pas produites en temps utile. En outre, s’agissant de l’argumentation de la requérante portant sur le caractère faiblement distinctif du mot « craxuri » en ce qu’il serait fréquemment utilisé en ce qui concerne les produits en cause, il y a lieu de souligner que sa matérialité n’a pas été démontrée. Le seul élément de preuve produit par la requérante à l’appui de cette argumentation est constitué d’une liste de marques comprenant le mot « craxx » pour des produits relevant des classes 29 et 30. Or, la simple énumération d’un nombre relativement limité de marques sans indication permettant de mesurer leur connaissance par le public de référence ne permet pas de conclure à une association dans l’esprit de ce dernier entre le mot « craxuri » et lesdits produits [voir, en ce sens, arrêt du 13 avril 2011, Sociedad Agricola Requingua/OHMI – Consejo Regulador de la Denominación de Origen Toro (TORO DE PIEDRA), T‑358/09, non publié, EU:T:2011:174, point 35]. Partant, il n’y a pas lieu de remettre en cause l’appréciation de la chambre de recours, découlant du point 41 de la décision attaquée, selon laquelle l’élément verbal « crax » est dépourvu de signification pour le public pertinent et revêt, en conséquence, un caractère distinctif.

74

Deuxièmement, la chambre de recours a considéré, à juste titre, au point 41 de la décision attaquée, que l’élément verbal « eti » revêtait un caractère distinctif, dès lors qu’il n’avait aucune signification pour le public pertinent. Toutefois, en raison de sa petite taille, ledit élément verbal jouera un rôle secondaire dans l’impression d’ensemble produite par le dessin ou modèle contesté. Par ailleurs, les autres éléments composant ledit dessin ou modèle, à savoir l’élément verbal « sticks » et les éléments figuratifs représentant des en-cas et du fromage, sont descriptifs des produits concernés par ce dessin ou modèle, dès lors qu’ils renvoient à des bâtonnets d’en-cas au goût de fromage et, partant, sont dépourvus de caractère distinctif.

75

Troisièmement, il y a lieu d’observer que le fond bleu rectangulaire est de nature décorative et ne joue qu’un rôle secondaire dans l’impression d’ensemble produite par le dessin ou modèle contesté. Il en va de même pour le petit élément figuratif noir non spécifié, qui aura un impact limité, voire nul sur l’impression d’ensemble produite par ce dessin ou modèle en raison de sa très petite taille.

76

En second lieu, selon la jurisprudence, lorsqu’un signe est composé d’éléments verbaux et figuratifs, les premiers sont, en principe, plus distinctifs que les seconds, car le consommateur moyen fera plus facilement référence aux produits en cause en citant le nom qu’en décrivant l’élément figuratif de ce signe (arrêt du 7 février 2018, Emballage pour cornets à glace, T‑794/16, non publié, EU:T:2018:70, point 49).

77

À cet égard, il y a lieu d’observer, à l’instar de la chambre de recours aux points 25 et 43 de la décision attaquée, que l’élément verbal « krax » est le seul élément verbal de la marque antérieure et que l’élément verbal « crax » représente l’élément le plus accrocheur du dessin ou modèle contesté. En effet, ces éléments, qui sont stylisés de manière similaire, notamment en leurs caractères majuscules de couleur blanche, sont représentés par taille croissante ou décroissante. Dans ces conditions et dès lors que tous les autres éléments dudit dessin ou modèle jouent un rôle secondaire dans l’impression d’ensemble ou sont descriptifs, la chambre de recours a conclu à juste titre que l’élément verbal « krax » était l’élément le plus distinctif composant ladite marque et que l’élément verbal « crax » était l’élément dominant au sein de ce dessin ou modèle.

– Sur la comparaison sur le plan visuel

78

La requérante soutient que les signes en cause ne présentent pas de similitudes sur le plan visuel. Selon elle, l’élément verbal « eti » du dessin ou modèle contesté doit être considéré comme attirant toute l’attention du public pertinent. Par ailleurs, elle estime que tous les autres éléments verbaux et figuratifs dudit dessin ou modèle sont immédiatement lisibles et ne seront pas perçus comme des éléments simplement décoratifs.

79

Toutefois, ainsi qu’il a été relevé au point 77 ci-dessus, l’élément verbal « crax » du dessin ou modèle contesté est celui qui retiendra le plus l’attention du public pertinent et, partant, influencera le plus l’impression globale produite par ledit dessin ou modèle.

80

En l’espèce, il convient d’observer que, sur le plan visuel, trois des quatre lettres des éléments verbaux distinctifs et dominants des signes en cause coïncident, à savoir la suite de lettres « r », « a », « x », toutes représentées en lettres majuscules avec un effet tridimensionnel similaire, légèrement inclinées de gauche à droite, la taille des lettres décroissant dans la marque antérieure et croissant dans le dessin ou modèle contesté. En outre, lesdits signes diffèrent, d’une part, par leur lettre initiale en majuscule, à savoir, respectivement, « K » et « C » et, d’autre part, par la suite croissante ou décroissante de la taille de leurs lettres.

81

À cet égard, la chambre de recours a considéré à juste titre, au point 44 de la décision attaquée, que les différences entre les signes en cause mentionnées au point 80 ci-dessus ne sauraient l’emporter sur la similitude créée par les trois lettres identiques stylisées de manière similaire. Cependant, même si lesdits signes diffèrent également par la présence, dans le dessin ou modèle contesté, de l’élément verbal secondaire « eti », du mot non distinctif « sticks » ainsi que par les fonds, les couleurs et le petit élément figuratif noir, tous de nature décorative, et par la représentation non distinctive de bâtonnets d’en-cas et de fromage, ces éléments n’ont pas d’équivalence dans la marque antérieure et ne sont pas en mesure de l’emporter sur la similitude des éléments dominants « krax » et « crax », en raison de leur absence de caractère distinctif et de leur taille et de leur position secondaires.

82

Il s’ensuit que c’est sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a conclu à un degré moyen de similitude visuelle pour les signes en cause.

– Sur la comparaison sur le plan phonétique

83

La requérante fait valoir qu’il n’existe aucun degré de similitude sur le plan phonétique entre les signes en cause. Selon elle, même si les consommateurs ne prononceront qu’un seul des éléments verbaux compris dans le dessin ou modèle contesté par économie de mots, ce sera l’élément verbal « eti », qui ne présente aucune similitude avec l’élément verbal « krax » de la marque antérieure.

84

En l’espèce, ainsi qu’il ressort du point 74 ci-dessus, les éléments figuratifs et l’élément verbal « sticks » composant le dessin ou modèle contesté sont dépourvus de caractère distinctif et revêtent une importance secondaire. En outre, l’élément verbal « eti », bien que distinctif en raison de l’absence de signification par rapport aux produits en cause, revêt une importance secondaire, en raison de sa taille et de sa position. Par ailleurs, ainsi qu’il ressort également du point 81 ci-dessus, les éléments verbaux « krax » de la marque antérieure et « crax » du dessin ou modèle contesté contiennent la même suite de lettres « r », « a », « x », qui, tout comme les lettres « k » et « c », sera prononcée de la même manière.

85

À cet égard, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, lorsque les consommateurs sont confrontés à une marque composée de différents éléments verbaux dont certains revêtent une importance secondaire, ils ont tendance à abréger oralement cette marque afin de la rendre plus facile à prononcer [voir, en ce sens, arrêt du 30 novembre 2006, Camper/OHMI – JC (BROTHERS by CAMPER), T‑43/05, non publié, EU:T:2006:370, point 75]. Il en résulte que les éléments verbaux du dessin ou modèle contesté autres que l’élément verbal « crax », qui revêtent tous une importance secondaire, sont moins susceptibles d’attirer l’attention du consommateur et sont donc moins susceptibles d’être prononcés. En outre, les éléments figuratifs ne seront pas prononcés, de sorte que les consommateurs seront plus susceptibles de faire référence aux produits concernés par ledit dessin ou modèle en prononçant uniquement l’élément dominant de ce dessin ou modèle, à savoir l’élément verbal « crax ».

86

Partant, c’est sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a conclu, au point 45 de la décision attaquée, à un degré élevé de similitude phonétique pour les signes en cause.

– Sur la comparaison sur le plan conceptuel

87

La requérante soutient que la chambre de recours aurait dû conclure à l’absence de similitude conceptuelle des signes en cause. Plus particulièrement, elle fait valoir que l’élément verbal « eti », qui serait le plus dominant et le plus distinctif du dessin ou modèle contesté, et l’élément verbal « krax » de la marque antérieure seront tous les deux perçus comme des mots fantaisistes et différents et que, parmi lesdits signes, l’un est un signe verbal et l’autre un signe figuratif, de sorte qu’il n’existerait aucune similitude entre ces signes sur le plan conceptuel.

88

Il y a lieu de rappeler que la comparaison conceptuelle a pour objet de comparer les « concepts » que les signes en cause comportent. Le terme « concept » signifie, selon la définition qu’en donne par exemple le dictionnaire Larousse, une « idée générale et abstraite que se fait l’esprit humain d’un objet de pensée concret ou abstrait, et qui lui permet de rattacher à ce même objet les diverses perceptions qu’il en a, et d’en organiser les connaissances » [voir arrêt du 16 juin 2021, Smiley Miley/EUIPO – Cyrus Trademarks (MILEY CYRUS), T‑368/20, non publié, EU:T:2021:372, point 52 et jurisprudence citée].

89

De même, selon la jurisprudence, la similitude conceptuelle implique que les signes en cause concordent dans leur contenu sémantique (voir, en ce sens, arrêt du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 24). Il en découle que lorsque le public pertinent ne comprend pas la signification des mots ou ne peut attribuer une signification particulière à aucun desdits signes, aucune comparaison conceptuelle n’est possible [voir, en ce sens, arrêts du 7 février 2018, Emballage pour cornets à glace, T‑794/16, non publié, EU:T:2018:70, point 76, et du 6 avril 2022, Agora Invest/EUIPO – Transportes Maquinaria y Obras (TRAMOSA), T‑219/21, non publié, EU:T:2022:219, point 117 et jurisprudence citée].

90

En l’espèce, les éléments dominants des signes en cause sont dépourvus de signification pour le public pertinent (voir points 73 et 77 ci-dessus). Ils ne peuvent donc pas véhiculer de concept auprès du public pertinent.

91

S’agissant des autres éléments composant le dessin ou modèle contesté, ainsi qu’il ressort des points 74 et 77 ci-dessus, ceux-ci occupent une position secondaire limitant leur impact dans le cadre de la comparaison conceptuelle des signes en cause. Toutefois, cela ne signifie pas que lesdits éléments sont entièrement négligeables. Ainsi, l’élément verbal « sticks » ainsi que les éléments figuratifs ornementaux correspondant à la pile de bâtonnets d’en-cas et au morceau de fromage dudit dessin ou modèle doivent être pris en considération lors de cette comparaison, dès lors qu’ils véhiculent un concept de produits alimentaires de consommation courante et renvoient à des bâtonnets d’en-cas au goût de fromage.

92

Ainsi, contrairement à la conclusion qui figure au point 46 de la décision attaquée, il y a lieu de considérer, au regard de ce qui précède, que les signes en cause sont différents sur le plan conceptuel.

Sur le caractère distinctif de la marque antérieure

93

La requérante fait valoir que la marque antérieure possède, en substance, un faible caractère distinctif dès lors que l’élément verbal « krax » décrit le son produit lors de la consommation d’en-cas à base de céréales et en raison de la coexistence de ladite marque avec l’enregistrement international désignant l’Union européenne de la marque CRAXX, enregistré le 7 décembre 2004 sous la référence 0854152A pour des produits identiques compris dans les classes 29 et 30.

94

D’une part, ainsi qu’il ressort des points 73, 77 et 90 ci-dessus, l’élément verbal « krax » de la marque antérieure, à l’instar de l’élément verbal « crax » du dessin ou modèle contesté, est dépourvu de signification pour le public pertinent et la requérante n’a pas apporté la preuve que l’élément verbal « krax » avait une signification pour ledit public. S’agissant de l’affirmation de la requérante concernant un caractère onomatopéique de ce dernier élément verbal, une onomatopée du son produit lors de la consommation de produits croustillants n’est pas, en l’espèce, évidente.

95

D’autre part, l’argument de la requérante relatif à la coexistence de la marque antérieure avec la marque CRAXX ne saurait prospérer afin de démontrer que, en l’espèce, la marque antérieure possède, en substance, un faible caractère distinctif. En effet, le caractère distinctif de la marque antérieure, que celui-ci dérive des qualités intrinsèques de cette marque ou de sa renommée, concerne l’aptitude de cette marque à identifier les produits ou les services pour lesquels elle a été enregistrée comme provenant d’une entreprise déterminée et donc à distinguer ces produits ou services de ceux d’autres entreprises [voir, en ce sens, arrêts du 13 septembre 2018, Birkenstock Sales/EUIPO, C‑26/17 P, EU:C:2018:714, point 31 et jurisprudence citée, et du 21 décembre 2021, Dr. Spiller/EUIPO – Rausch (Alpenrausch Dr. Spiller), T-6/20, non publié, EU:T:2021:920, point 145 et jurisprudence citée]. Ce dernier n’implique pas une comparaison entre plusieurs signes, mais ne concerne qu’un seul signe, à savoir la marque antérieure (voir, en ce sens, arrêt du 11 juin 2020, China Construction Bank/EUIPO, C‑115/19 P, EU:C:2020:469, point 58).

96

Partant, la chambre de recours n’a commis aucune erreur d’appréciation en ayant considéré que la marque antérieure revêtait, en substance, un caractère distinctif moyen.

Sur l’appréciation globale du risque de confusion

97

L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les signes, et inversement (arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 19).

98

En outre, aux fins de l’appréciation globale du risque de confusion, il doit notamment être tenu compte de ce que le consommateur moyen, au sein du public pertinent, n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques, mais doit se fier à l’image imparfaite de celles-ci qu’il garde en mémoire (arrêt du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 26). Par ailleurs, il ne pourrait être conclu à l’existence d’un risque de confusion que si le public pertinent était susceptible d’être induit en erreur sur l’origine commerciale des produits en cause [voir, en ce sens, arrêt du 24 novembre 2021, Jeronimo Martins Polska/EUIPO – Rivella International (Riviva), T‑551/20, non publié, EU:T:2021:816, point 86].

99

En l’espèce, la chambre de recours a conclu, au point 51 de la décision attaquée, à l’existence d’un risque de confusion quant à l’origine commerciale des produits en cause compte tenu de l’image imparfaite que les consommateurs auront gardée en mémoire des signes en cause.

100

À cet égard, premièrement, ainsi qu’il ressort du point 54 ci-dessus, la chambre de recours était fondée à considérer que les produits en cause étaient similaires en raison de leur complémentarité. Deuxièmement, les signes en cause comportent les éléments verbaux communs et dominants « krax » de la marque antérieure et « crax » du dessin ou modèle contesté, qui sont dépourvus de signification et qui sont, par conséquent, distinctifs (voir points 69 à 77 ci-dessus). Troisièmement, lesdits signes sont différents sur le plan conceptuel (voir points 88 à 92 ci-dessus). Quatrièmement, la chambre de recours a également considéré, à juste titre, que ces signes étaient similaires à un degré moyen sur le plan visuel (voir points 79 à 82 ci-dessus). De surcroît, les même signes présentent un degré élevé de similitude phonétique (voir point 86 ci-dessus). Cinquièmement, c’est également à juste titre que la chambre de recours a considéré que la marque antérieure revêtait un caractère distinctif moyen (voir point 96 ci-dessus).

101

Il en résulte que le public pertinent, doté d’un niveau d’attention moyen, pourra raisonnablement penser, lorsqu’il est confronté au dessin ou modèle contesté, que les produits concernés et les produits visés par la marque antérieure, similaires, ont la même origine commerciale.

102

Dans ces conditions, la chambre de recours n’a commis aucune erreur en ayant conclu, au point 51 de la décision attaquée, à l’existence d’un risque de confusion sur l’origine commerciale des produits au sens de l’article 25, paragraphe 1, sous e), du règlement no 6/2002 dans sa version antérieure, lu conjointement avec l’article 36, paragraphe 2, sous b), de la loi roumaine sur les marques.

103

Il s’ensuit que le premier moyen n’est pas fondé et doit être rejeté, tout comme, partant, le recours dans son intégralité.

Sur les dépens

104

Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

105

La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par l’intervenante, conformément aux conclusions de cette dernière. En revanche, l’EUIPO n’ayant conclu à la condamnation de la requérante aux dépens qu’en cas d’organisation d’une audience, il convient, en l’absence d’une telle organisation, de décider que l’EUIPO supportera ses propres dépens.

 

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

 

1)

Le recours est rejeté.

 

2)

Eti Gıda Sanayi ve Ticaret AŞ est condamnée à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par Star Foods E.M. SRL.

 

3)

L’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) supportera ses propres dépens.

 

Škvařilová-Pelzl

Steinfatt

Kukovec

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 3 septembre 2025.

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : l’anglais.

Haut