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Document 62023CC0048
Opinion of Advocate General Rantos delivered on 5 September 2024.#Alajärven Sähkö Oy e.a. and Elenia Verkko Oyj v Energiavirasto.#Request for a preliminary ruling from the Markkinaoikeus.#Reference for a preliminary ruling – Internal market for electricity – Directive (EU) 2019/944 – Article 57(4) and (5) – Independence of national regulatory authority in the exercise of its duties and powers – Policy guidelines issued by a Member State – Legislative amendment aimed at reducing electricity distribution prices – Decision concerning methods for monitoring electricity system operation charges taken by the regulatory authority concerned following that amendment – Account taken of the travaux préparatoires relating to the law that introduced that amendment.#Case C-48/23.
Conclusions de l'avocat général M. A. Rantos, présentées le 5 septembre 2024.
Alajärven Sähkö Oy e.a. et Elenia Verkko Oyj contre Energiavirasto.
Demande de décision préjudicielle, introduite par le markkinaoikeus.
Renvoi préjudiciel – Marché intérieur de l’électricité – Directive (UE) 2019/944 – Article 57, paragraphes 4 et 5 – Indépendance de l’autorité de régulation nationale dans l’exercice de ses missions et de ses compétences – Orientations formulées par un État membre – Modification législative visant à réduire les prix de distribution d’électricité – Décision concernant les méthodes de contrôle des tarifs de l’exploitation du réseau électrique prise par l’autorité de régulation concernée à la suite de cette modification – Prise en compte des travaux préparatoires de la loi ayant procédé à ladite modification.
Affaire C-48/23.
Conclusions de l'avocat général M. A. Rantos, présentées le 5 septembre 2024.
Alajärven Sähkö Oy e.a. et Elenia Verkko Oyj contre Energiavirasto.
Demande de décision préjudicielle, introduite par le markkinaoikeus.
Renvoi préjudiciel – Marché intérieur de l’électricité – Directive (UE) 2019/944 – Article 57, paragraphes 4 et 5 – Indépendance de l’autorité de régulation nationale dans l’exercice de ses missions et de ses compétences – Orientations formulées par un État membre – Modification législative visant à réduire les prix de distribution d’électricité – Décision concernant les méthodes de contrôle des tarifs de l’exploitation du réseau électrique prise par l’autorité de régulation concernée à la suite de cette modification – Prise en compte des travaux préparatoires de la loi ayant procédé à ladite modification.
Affaire C-48/23.
Recueil – Recueil général
Identifiant ECLI: ECLI:EU:C:2024:695
CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
M. ATHANASIOS RANTOS
présentées le 5 septembre 2024 ( 1 )
Affaire C‑48/23
Alajärven Sähkö Oy e.a.,
Elenia Verkko Oyj
contre
Energiavirasto
[demande de décision préjudicielle formée par Markkinaoikeus (tribunal des affaires économiques, Finlande)]
« Renvoi préjudiciel – Marché intérieur de l’électricité – Directive (UE) 2019/944 – Article 57, paragraphes 4 et 5 – Indépendance des autorités de régulation nationales – Article 59 – Missions et compétences de ces autorités – Établissement de méthodes de contrôle – Législation nationale ayant pour objectif de faire baisser le prix de la distribution d’électricité sans interférer directement dans les tarifs de transport et de distribution ou dans leurs méthodes de calcul – Décision d’une autorité de régulation d’adapter en conséquence ses méthodes de contrôle – Droit pour le gouvernement d’un État membre d’édicter des orientations générales qui ne concernent pas les missions et les compétences de l’autorité de régulation – Portée de ce droit »
I. Introduction
1. |
La directive (UE) 2019/944 ( 2 ) énonce que les États membres doivent garantir l’indépendance des autorités de régulation nationales dans le cadre du marché intérieur de l’électricité. Ces autorités sont notamment investies de la mission consistant à fixer ou à approuver, selon des critères transparents, les tarifs de transport et de distribution, et/ou leurs méthodes de calcul. |
2. |
Dans quelle mesure cette directive permet au gouvernement d’un État membre de réduire le niveau des coûts des gestionnaires de réseau de distribution d’électricité, afin de faire baisser les tarifs pour les consommateurs, sans porter atteinte à l’indépendance de l’autorité de régulation nationale ? Telle est, en substance, la question posée par le markkinaoikeus (tribunal des affaires économiques, Finlande). |
3. |
La demande de décision préjudicielle a été présentée dans le cadre d’une procédure engagée par Alajärven Sähkö Oy e.a. et Elenia Verkko Oyj (ci-après « Elenia »), des gestionnaires de réseau, au sujet de décisions de l’Energiavirasto (Agence de l’énergie, Finlande), à savoir l’autorité de régulation nationale, de modifier ses méthodes de contrôle relatives à la détermination de la rémunération des gestionnaires de réseau à la suite de l’adoption d’une loi visant à faire baisser les prix de la distribution d’électricité. |
II. Le cadre juridique
A. Le droit de l’Union
4. |
L’article 1er de la directive 2019/944, intitulé « Objet », énonce : « La présente directive établit des règles communes concernant la production, le transport, la distribution, le stockage d’énergie et la fourniture d’électricité, ainsi que des dispositions relatives à la protection des consommateurs, en vue de la création de marchés de l’électricité dans l’Union véritablement intégrés, concurrentiels, axés sur les consommateurs et souples, équitables et transparents. La présente directive, en tirant parti des avantages d’un marché intégré, vise à assurer des prix et des coûts énergétiques abordables et transparents aux consommateurs, un niveau élevé de sécurité d’approvisionnement et une transition sans heurts vers un système énergétique durable à faible intensité de carbone. Elle définit des règles essentielles relatives à l’organisation et au fonctionnement du secteur de l’électricité de l’Union [...] ainsi que des règles sur l’indépendance des autorités de régulation dans les États membres. La présente directive expose également des modes de coopération entre les États membres, les autorités de régulation et les gestionnaires de réseau de transport en vue de la création d’un marché intérieur de l’électricité totalement interconnecté qui renforce l’intégration de l’électricité produite à partir de sources renouvelables, la libre concurrence et la sécurité de l’approvisionnement. » |
5. |
L’article 57 de cette directive, intitulé « Désignation et indépendance des autorités de régulation », prévoit : « 1. Chaque État membre désigne une seule autorité de régulation au niveau national. [...] 4. Les États membres garantissent l’indépendance de l’autorité de régulation et veillent à ce qu’elle exerce ses compétences de manière impartiale et transparente. À cet effet, les États membres veillent à ce que, dans l’exécution des tâches de régulation qui lui sont conférées par la présente directive et la législation connexe, l’autorité de régulation :
5. Afin de protéger l’indépendance de l’autorité de régulation, les États membres veillent notamment à ce que :
[...] » |
6. |
L’article 59 de ladite directive, intitulé « Missions et compétences des autorités de régulation », dispose : « 1. L’autorité de régulation est investie des missions suivantes :
[...]
[...] 7. Sauf dans les cas où l’[Agence de coopération des régulateurs de l’énergie (ACER)] est compétente pour définir et approuver les conditions ou méthodes pour la mise en œuvre des codes de réseaux et des lignes directrices adoptés au titre du chapitre VII du règlement (UE) 2019/943 [ ( 3 )] en vertu de l’article 5, paragraphe 2, du règlement (UE) 2019/942 [ ( 4 )] en raison de leur nature coordonnée, les autorités de régulation sont chargées de fixer ou d’approuver, suffisamment à l’avance avant leur entrée en vigueur, au moins les méthodes nationales utilisées pour calculer ou établir :
[...] » |
B. Le droit finlandais
7. |
L’article 19 du sähkömarkkinalaki (588/2013) [loi sur le marché de l’électricité (588/2013)], tel que modifié par le laki sähkömarkkinalain muuttamisesta (730/2021) [loi portant modification de la loi sur le marché de l’électricité (730/2021), ci-après la « loi 730/2021 » ( 5 )] (ci-après la « loi sur le marché de l’électricité »), intitulé « Obligation de développement du réseau », énonce : « Un gestionnaire de réseau doit, afin d’assurer une fourniture d’électricité de qualité suffisante aux utilisateurs de son réseau, entretenir, exploiter et développer son réseau électrique et les connexions à d’autres réseaux conformément aux exigences fixées pour l’exploitation des réseaux électriques et aux besoins raisonnables des utilisateurs du réseau. Le réseau électrique doit être conçu, construit et entretenu de manière à ce que :
[...]
[...] » |
8. |
L’article 51 de cette loi, intitulé « Exigences de qualité relatives à l’exploitation du réseau de distribution », contient des dispositions détaillées à cet égard. |
9. |
L’article 52 de ladite loi, intitulé « Plan de développement du réseau de distribution », prévoit : « Le développement d’un réseau de distribution du gestionnaire de réseau de distribution doit être fondé sur un plan de développement du réseau de distribution qui est transparent et qui doit comprendre :
[...] » |
10. |
L’article 119 de la même loi, intitulé « Disposition transitoire relative à la sécurité de l’exploitation du réseau de distribution », dispose : « Le gestionnaire de réseau de distribution est tenu de satisfaire aux exigences énoncées à l’article 51, premier alinéa, points 2 et 3, dans sa zone de responsabilité, au plus tard le 31 décembre 2028. Les exigences doivent être satisfaites d’ici au 31 décembre 2019 pour au moins 50 % de tous les utilisateurs du réseau de distribution, à l’exclusion des résidences secondaires, et d’ici au 31 décembre 2023 pour au moins 75 % de tous les utilisateurs du réseau de distribution, à l’exclusion des résidences secondaires. Si la proportion de câbles souterrains du réseau moyenne tension de la zone de responsabilité du gestionnaire de réseau de distribution n’est pas supérieure à 60 % au 31 décembre 2018, le gestionnaire de réseau de distribution doit se conformer aux exigences de l’article 51, premier alinéa, points 2 et 3, dans sa zone de responsabilité, au plus tard le 31 décembre 2036. Dans ce cas, les exigences doivent être satisfaites pour au moins 75 % de tous les utilisateurs du réseau de distribution au plus tard le 31 décembre 2028, à l’exclusion des résidences secondaires. » |
11. |
Dans le cadre des travaux préparatoires de la loi 730/2021, l’exposé des motifs détaillé relatif à la modification de l’article 119 de la loi sur le marché de l’électricité indique, notamment, ce qui suit. La prolongation de la période de mise en œuvre des exigences en matière de sécurité de l’exploitation du réseau de distribution modifiera sensiblement l’environnement réglementaire des gestionnaires de réseau de distribution. Les effets d’orientation des dispositions de l’article 119, deuxième et troisième alinéas, de cette dernière loi doivent être en adéquation avec le reste du contrôle du réseau. Par conséquent, les propositions de modification de ces dispositions signifient également que les méthodes de contrôle de la fixation des tarifs du réseau doivent tenir compte de la prolongation de la période de mise en œuvre des exigences en matière de sécurité d’approvisionnement et des changements qui s’y rapportent dans les investissements des gestionnaires de réseaux de distribution et leur financement. Les effets de la modification de l’environnement de l’exploitation doivent être pris en compte, par exemple, dans les différents éléments de financement des investissements et d’incitation à ceux-ci contenus dans les méthodes de calcul des tarifs des gestionnaires de réseaux de distribution. |
12. |
L’article 6 du laki sähkö- ja maakaasumarkkinoiden valvonnasta (590/2013) [loi sur la surveillance des marchés de l’électricité et du gaz naturel (590/2013)], dans sa version applicable au litige au principal (ci-après la « loi sur la surveillance »), intitulé « Tâches de l’Agence de l’énergie en tant qu’autorité de régulation nationale », est libellé comme suit : « L’Agence de l’énergie, agissant en tant qu’autorité de régulation nationale au sens de la législation de l’Union européenne applicable aux secteurs de l’électricité et du gaz naturel, est chargée notamment de :
[...]
[...] » |
13. |
Aux termes de l’article 10 de cette loi, intitulé « Conditions et méthodes établies par l’Agence de l’énergie » : « L’Agence de l’énergie doit, par décision (décision de fixation), fixer pour le gestionnaire de réseau, le gestionnaire de réseau principal responsable de système, le gestionnaire de réseau de transport responsable de système, ainsi que le gestionnaire d’une installation de traitement de gaz naturel liquéfié, les conditions d’utilisation des services et les méthodes de fixation des tarifs des services ci-après, et ce avant leur introduction :
[...] » |
14. |
L’article 13 de ladite loi, intitulé « Modification de la décision de fixation », énonce : « L’Agence [de l’énergie] peut modifier une décision de fixation en adoptant une nouvelle décision, à la demande du destinataire de la décision de fixation ou à l’initiative de l’Agence [de l’énergie] elle-même. Une décision de fixation adoptée pour une durée déterminée peut être modifiée à l’initiative du destinataire de celle-ci ou de l’Agence [de l’énergie], et une décision de fixation adoptée pour une durée indéterminée peut être modifiée à l’initiative de l’Agence [de l’énergie] si : [...]
[...] » |
III. Le litige au principal, les questions préjudicielles et la procédure devant la Cour
15. |
Par décisions du 30 novembre 2015 (ci-après les « décisions du 30 novembre 2015 »), l’Agence de l’énergie a établi, pour les quatrième et cinquième périodes de contrôle, comprises, respectivement, d’une part, entre le 1er janvier 2016 et le 31 décembre 2019 et, d’autre part, entre le 1er janvier 2020 et le 31 décembre 2023, des méthodes de contrôle relatives à la détermination de la rémunération des gestionnaires pour l’exploitation d’un réseau ainsi que des redevances perçues pour le service de transport d’électricité (ci-après les « méthodes de contrôle initiales »). |
16. |
Par décisions du 15 décembre 2021 (ci-après les « décisions du 15 décembre 2021 »), l’Agence de l’énergie a modifié ses décisions du 30 novembre 2015, pour la période comprise entre le 1er janvier 2022 et le 31 décembre 2023, en ce qui concerne les méthodes de contrôle initiales. Les décisions du 15 décembre 2021 énoncent que l’Agence de l’énergie s’est saisie de sa propre initiative de la question des méthodes de contrôle postérieurement à l’entrée en vigueur, le 1er août 2021, de la loi 730/2021. |
17. |
Les 17 et 19 janvier 2022, Alajärven Sähkö et Elenia ont respectivement saisi le markkinaoikeus (tribunal des affaires économiques), la juridiction de renvoi, d’un recours tendant, notamment, à l’annulation des décisions du 15 décembre 2021 au motif que celles-ci avaient changé les méthodes de contrôle initiales en mettant à jour les prix unitaires utilisés dans le calcul de la base de rémunération des gestionnaires d’un réseau d’électricité et en supprimant la méthode optionnelle appliquée aux fins de la détermination du taux d’intérêt sans risque. Dans leurs recours, les requérantes ont fait valoir que l’Agence de l’énergie n’avait pas adopté ces décisions de manière autonome, en sa qualité d’autorité de régulation indépendante, contrairement à ce qu’exige l’article 57 de la directive 2019/944. |
18. |
Dans son mémoire en réponse, l’Agence de l’énergie a demandé à la juridiction de renvoi de rejeter ces recours en soutenant, notamment, que le changement des méthodes de contrôle initiales s’inscrivait dans le cadre des modifications apportées à la loi sur le marché de l’électricité et à celle sur la surveillance. Elle a exposé que le législateur national avait estimé que ces modifications étaient conformes aux exigences du droit de l’Union concernant l’indépendance de l’autorité de régulation nationale et qu’elles se limitaient à énoncer des orientations générales. |
19. |
La juridiction de renvoi souligne qu’elle doit trancher la question de savoir si l’Agence de l’énergie pouvait, par ses décisions du 15 décembre 2021, changer, au milieu d’une période de contrôle, les méthodes de contrôle initiales. Dans le cadre de cette appréciation, il conviendrait de déterminer si les modifications apportées à la loi sur le marché de l’électricité par la loi 730/2021 ont porté atteinte à l’indépendance de cette agence, qui est l’autorité de régulation nationale, au sens de l’article 57 de la directive 2019/944. |
20. |
À cet égard, ladite agence aurait justifié ces décisions essentiellement par les travaux préparatoires de la loi 730/2021. Lesdites décisions indiqueraient notamment que, à la suite des modifications de la loi sur le marché de l’électricité résultant de cette loi, la même agence a commencé à préparer un changement des méthodes de contrôle initiales afin de mettre celles-ci en conformité avec les exigences qui découlent de la législation nationale. Selon les mêmes décisions, l’objectif principal de ces modifications était de fournir à l’Agence de l’énergie de nouveaux outils permettant d’influencer l’évolution des prix du transport d’électricité sans compromettre le développement de réseaux électriques intelligents et en assurant la sécurité de l’approvisionnement. |
21. |
La juridiction de renvoi relève, en outre, que, selon le projet de loi du gouvernement ayant conduit à l’adoption de la loi 730/2021 (ci-après le « projet de loi »), l’objectif des modifications apportées à la loi sur le marché de l’électricité était de chercher à freiner l’augmentation des prix de distribution de l’électricité par des mesures visant à réduire le niveau des coûts des gestionnaires de réseaux de distribution et à atténuer l’augmentation du niveau des coûts. À cet égard, le projet de loi aurait traité des changements des méthodes de contrôle que l’Agence de l’énergie a mises en œuvre postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi 730/2021, en soulignant que la révision de ces méthodes n’était pas subordonnée à l’existence d’une législation visant directement le contenu desdites méthodes. |
22. |
Le projet de loi préciserait également que l’Agence de l’énergie a exposé, dans un rapport cadre préparé pour le Työ- ja elinkeinoministeriö (ministère de l’Économie et du Travail, Finlande) dans le cadre des travaux préparatoires de la loi 730/2021, que, en raison des propositions de modification de la législation nationale applicable aux gestionnaires d’un réseau d’électricité, elle devrait changer déjà, pour la période de contrôle actuelle, les méthodes de contrôle initiales. Selon une appréciation de ce ministère figurant dans le projet de loi, les changements des méthodes de calcul applicables aux tarifs de distribution annoncés par cette agence auraient une incidence significative sur les rémunérations des gestionnaires de réseaux et sur celles enregistrées auprès des propriétaires de ceux-ci. De surcroît, le projet de loi contiendrait des estimations des incidences économiques découlant des changements des méthodes de contrôle quant au niveau de rémunération autorisé des gestionnaires de réseaux de distribution et aux redevances de distribution perçues par ces derniers auprès de leurs clients. |
23. |
Par ailleurs, un rapport de la commission des affaires économiques rédigé dans le cadre du débat parlementaire relatif au projet de loi mentionnerait, notamment, qu’il conviendrait d’intervenir sur les rémunérations excessives des gestionnaires de réseaux qui seraient rendues possibles par les méthodes de calcul appliquées. Selon ce rapport, dans le cadre des méthodes de contrôle initiales, la valeur du réseau aurait été fixée sur le fondement des prix unitaires par composant déterminés par l’Agence de l’énergie. Or, ces prix unitaires auraient été fixés pour une période d’une durée de huit ans, allant de l’année 2016 à l’année 2023, alors que ceux-ci ne refléteraient plus le niveau des coûts réels. Ledit rapport mettrait en exergue le fait qu’un facteur essentiel sous-tendant la réglementation de la tarification des prix du transport de l’électricité et les méthodes de calcul des tarifs est l’évaluation du réseau électrique, au moyen de laquelle la base de la rémunération est déterminée, et que les propositions de modification de la législation nationale étaient spécifiquement destinées à permettre un changement du modèle de contrôle pendant la période de contrôle en cours. |
24. |
La juridiction de renvoi ajoute qu’Alajärven Sähkö et Elenia ont fait valoir devant elle que la mise en œuvre des objectifs résultant des travaux préparatoires de la loi 730/2021 et l’incidence sur l’indépendance de l’Agence de l’énergie ressortaient également des pièces qu’elles ont produites, notamment le matériel de présentation fourni par le ministère de l’Économie et du Travail lors d’une conférence de presse le 15 octobre 2020, et le matériel de présentation utilisé par le ministre de l’Économie pendant une conférence de presse le 28 janvier 2021. |
25. |
Selon cette juridiction, les modifications de la loi sur le marché de l’électricité résultant de la loi 730/2021 ne concernaient pas, en tant que telles, directement les méthodes de contrôle des gestionnaires de réseaux appliquées par l’Agence de l’énergie afin de déterminer la rémunération raisonnable des entreprises de réseaux de distribution. En outre, ces modifications n’auraient porté ni directement sur les prix unitaires utilisés dans le calcul de la base de la rémunération ni sur le taux d’intérêt sans risque appliqué pour déterminer le niveau raisonnable de rémunération. L’objectif desdites modifications, tel qu’il ressortirait également des travaux préparatoires de la loi 730/2021, aurait été de faire baisser le prix de la distribution d’électricité. Comme cela est indiqué dans ces travaux préparatoires, l’Agence de l’énergie se serait vu conférer des moyens et des justifications pour changer les méthodes de calcul afin de réduire le prix de la distribution d’électricité dès le milieu de la période de contrôle, ces changements ayant été exposés et leurs effets ayant été évalués à l’avance. Ces considérations sembleraient avoir eu une incidence claire également sur l’adoption, par cette agence, des décisions du 15 décembre 2021. |
26. |
Ladite juridiction estime qu’une interprétation de la Cour est nécessaire sur le point de savoir si l’objectif visant à freiner l’augmentation des prix de la distribution d’électricité et à faire baisser ces prix peut être considéré comme une question ne relevant pas des missions et des compétences de l’autorité de régulation nationale telles que prévues à l’article 59 de la directive 2019/944, en particulier lorsque l’objectif de la modification législative est, par exemple, d’accroître l’efficacité en matière de coûts des entreprises de réseau ou si, à cet égard, il peut également s’agir d’orientations politiques générales qui ne se rapportent pas à ces missions et à ces compétences, et, si tel est le cas, à quelles conditions. La même juridiction estime également qu’il convient d’examiner l’importance à accorder au fait que les déclarations visées figurent dans les travaux préparatoires de la loi 730/2021 ( 6 ) et si celles-ci peuvent être considérées comme des orientations politiques au sens de l’article 59 de cette directive. |
27. |
Dans ces conditions, le markkinaoikeus (tribunal des affaires économiques) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :
|
28. |
Des observations écrites ont été présentées à la Cour par Alajärven Sähkö, Elenia, l’Agence de l’énergie, les gouvernements finlandais et chypriote, ainsi que par la Commission européenne. |
IV. Analyse
29. |
Par ses questions préjudicielles, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 57, paragraphes 4 et 5, de la directive 2019/944, relatif à l’indépendance des autorités de régulation nationales, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à la législation d’un État membre ayant pour objectif, ainsi que l’indiquent les travaux préparatoires de la loi en cause, de faire baisser les prix de la distribution d’électricité sans interférer, en tant que telle, directement dans les tarifs de transport et de distribution d’électricité, et/ou leurs méthodes de calcul, au sens de l’article 59, paragraphe 1, sous a), de cette directive, mais dont l’effet a été que l’autorité de régulation nationale a modifié ses méthodes de contrôle au milieu d’une période de contrôle. |
30. |
En vue de répondre à cette question, j’examinerai, en premier lieu, l’étendue de l’indépendance conférée aux autorités de régulation nationales par la directive 2019/944 (section A), puis, en second lieu, le respect de l’indépendance de ces autorités quant à leur mission de fixer ou d’approuver les tarifs de transport et de distribution, et/ou leurs méthodes de calcul (section B). |
A. Sur l’étendue de l’indépendance conférée aux autorités de régulation nationales par la directive 2019/944
31. |
À titre liminaire, il convient de rappeler que l’article 194, paragraphe 1, TFUE énonce que, dans le cadre de l’établissement ou du fonctionnement du marché intérieur et en tenant compte de l’exigence de préserver et d’améliorer l’environnement, la politique de l’Union dans le domaine de l’énergie vise, dans un esprit de solidarité entre les États membres, à assurer le fonctionnement du marché de l’énergie, à assurer la sécurité de l’approvisionnement énergétique dans l’Union, à promouvoir l’efficacité énergétique et les économies d’énergie ainsi que le développement des énergies nouvelles et renouvelables, et à promouvoir l’interconnexion des réseaux énergétiques ( 7 ). Le paragraphe 2 de cet article prévoit que, sans préjudice de l’application d’autres dispositions des traités, le Parlement européen et le Conseil, statuant conformément à la procédure législative ordinaire, établissent les mesures nécessaires pour atteindre les objectifs visés audit paragraphe 1, lesquelles n’affectent pas le droit d’un État membre de déterminer les conditions d’exploitation de ses ressources énergétiques, son choix entre différentes sources d’énergie et la structure générale de son approvisionnement énergétique, sans préjudice de l’article 192, paragraphe 2, sous c), TFUE. Par conséquent, le traité FUE, tout en établissant la compétence de l’Union dans le domaine de l’énergie, attribue expressément aux États membres le droit de décider, notamment, des conditions d’exploitation de leurs ressources énergiques. C’est, in fine, l’articulation entre ces deux compétences, européenne et nationale, qui est au cœur de la présente affaire. |
32. |
Adoptée sur le fondement de l’article 194, paragraphe 2, TFUE, la directive 2019/944 doit être lue en combinaison avec d’autres actes relatifs au marché de l’électricité et publiés à la même date, à savoir, notamment, le règlement (UE) 2019/941 ( 8 ) et le règlement 2019/943. Cette directive dispose, à son article 1er, deuxième alinéa, qu’elle définit des règles essentielles relatives à l’organisation et au fonctionnement du secteur de l’électricité de l’Union, notamment des règles sur l’indépendance des autorités de régulation dans les États membres. Il ressort du troisième alinéa de cet article que ladite directive expose également des modes de coopération entre les États membres, les autorités de régulation et les gestionnaires de réseau de transport en vue de la création d’un marché intérieur de l’électricité totalement interconnecté qui renforce notamment la sécurité de l’approvisionnement. |
33. |
Dans ce cadre, l’article 57, paragraphe 4, de la directive 2019/944 énonce que les États membres garantissent l’indépendance de l’autorité de régulation et veillent à ce qu’elle exerce ses compétences de manière impartiale et transparente. Aux fins de garantir une telle indépendance et dans l’exécution des tâches de régulation qui lui sont conférées par cette directive et la législation connexe, cette disposition prévoit, d’une part, à son point a), que l’autorité de régulation soit juridiquement distincte et fonctionnellement indépendante d’autres entités publiques ou privées et, d’autre part, à son point b), i) et ii), que le personnel de cette autorité et les personnes chargées de sa gestion agissent indépendamment de tout intérêt commercial et ne sollicitent ni n’acceptent d’instructions directes d’aucun gouvernement ou autre entité publique ou privée dans l’exécution des tâches de régulation, cette exigence étant sans préjudice d’une étroite concertation, le cas échéant, avec les autres autorités nationales concernées ou d’orientations générales édictées par le gouvernement qui ne concernent pas les missions et compétences de régulation prévues à l’article 59 de ladite directive. Celles-ci comprennent notamment la mission, figurant au paragraphe 1, sous a), de cet article 59, consistant à fixer ou approuver, selon des critères transparents, les tarifs de transport et de distribution ou leurs méthodes de calcul, ou les deux. En outre, aux termes de l’article 57, paragraphe 5, sous a), de la même directive, afin de protéger l’indépendance de l’autorité de régulation, les États membres veillent à ce que cette autorité puisse prendre des décisions de manière autonome, indépendamment de tout organe politique ( 9 ). |
34. |
Si la Cour n’a pas encore eu l’occasion d’interpréter l’article 57, paragraphes 4 et 5, de la directive 2019/944, elle a rendu plusieurs arrêts relatifs à l’article 35, paragraphes 4 et 5, de la directive 2009/72, dont le libellé est analogue à celui de cet article 57, paragraphes 4 et 5. Il ressort de la jurisprudence de la Cour, pour la présente affaire, les enseignements suivants. |
35. |
S’agissant de la notion d’« indépendance », ni l’article 57 de la directive 2019/944 ni aucune autre disposition de cette dernière ne définissent celle-ci. À cet égard, la Cour a déjà jugé que, en ce qui concerne les organes publics, cette notion désigne, dans son sens habituel, un statut qui assure à l’organe concerné la possibilité d’agir en toute liberté par rapport aux organismes à l’égard desquels l’indépendance de cet organe doit être assurée, à l’abri de toute instruction et de toute influence extérieure ( 10 ). Cette indépendance décisionnelle implique que, dans le cadre des missions et des compétences de régulation visées à l’article 59 de cette directive, l’autorité de régulation adopte ses décisions de manière autonome, sur le seul fondement de l’intérêt public, pour assurer le respect des objectifs poursuivis par ladite directive, sans être soumise à des instructions externes provenant d’autres organes publics ou privés ( 11 ). |
36. |
Le respect de ladite indépendance présente un caractère obligatoire de jure et de facto. Ainsi, conformément à la jurisprudence de la Cour, la compétence attribuée par la directive 2019/944 exclusivement à l’autorité de régulation et l’indépendance de celle-ci doivent être garanties à l’égard de tout organe politique, et donc non seulement à l’égard du gouvernement, mais également à l’égard du législateur national, lequel ne saurait soustraire une partie de ces pouvoirs à l’autorité de régulation et les attribuer à d’autres organes publics ( 12 ). En ce sens, la Cour a considéré que l’attribution à une autorité autre que l’autorité de régulation de la compétence pour définir des éléments déterminants pour le calcul des tarifs en ce qui concerne certaines installations de transport de l’électricité, tels que la marge bénéficiaire, n’était pas conforme au droit de l’Union ( 13 ). |
37. |
En outre, il résulte de la jurisprudence de la Cour que l’article 57, paragraphes 4 et 5, de la directive 2019/944 exige que les représentants des ministères nationaux ne puissent pas utiliser leur participation à des procédures relatives à la fixation de prix pour exercer une quelconque pression sur l’autorité de régulation ou pour lui adresser des instructions susceptibles d’orienter ses décisions dans le cadre de ses missions et compétences découlant de l’article 59 de cette directive. Si ladite directive ne s’oppose pas à ce que le gouvernement d’un État membre, notamment au moyen de la participation de représentants de ses ministères, puisse faire valoir sa position devant l’autorité de régulation nationale quant à la manière dont il considère que cette autorité pourrait prendre en compte l’intérêt public dans le cadre de ses missions de régulation, cette participation et, notamment, les avis formulés par ces représentants au cours des procédures relatives à la fixation de prix ne peuvent revêtir un caractère contraignant ni en aucun cas être considérés, par l’autorité de régulation, comme des instructions auxquelles elle serait tenue de se conformer dans l’exercice de ses missions et de ses compétences ( 14 ). De surcroît, les règles relatives à la participation de représentants des ministères nationaux aux procédures relatives à la fixation de prix ne doivent pas porter atteinte à la portée des décisions de l’autorité de régulation, adoptées en vertu des missions et des compétences prévues audit article 59. En particulier, là où de telles missions ou compétences l’exigent, ces règles de participation ne sauraient affecter le caractère obligatoire et directement applicable des décisions de cette autorité, en imposant, par exemple, que ces décisions soient, avant leur mise en œuvre, préalablement acceptées ou autorisées par ces représentants ( 15 ). |
38. |
Ainsi, les compétences réservées à l’autorité de régulation relèvent du domaine de l’exécution, sur la base d’une appréciation technique spécialisée de la réalité, et, dans l’exercice de ces compétences, cette autorité est subordonnée à des principes et à des règles établis par un cadre normatif détaillé à l’échelle de l’Union, qui limitent sa marge d’appréciation et l’empêchent de faire des choix de nature politique ( 16 ). |
39. |
Pour quelles raisons l’indépendance de l’autorité de régulation doit-elle revêtir un tel caractère obligatoire ? À cet égard, la Cour a précisé que la pleine indépendance des autorités de régulation à l’égard des entités économiques et des entités publiques, que celles‑ci soient des organes administratifs ou des organes politiques et, dans ce dernier cas, titulaires du pouvoir exécutif ou du pouvoir législatif, est nécessaire pour garantir que les décisions prises par ces autorités soient impartiales et non discriminatoires, en excluant la possibilité de privilégier les entreprises et les intérêts économiques liés au gouvernement, à la majorité ou, en tout cas, au pouvoir politique, et que, en outre, la stricte séparation à l’égard du pouvoir politique permet aux autorités de régulation d’inscrire leur action dans une perspective à long terme, qui est nécessaire pour réaliser les objectifs des directives relatives au marché de l’électricité ( 17 ). Cette indépendance a ainsi pour finalité d’éviter les conflits d’intérêts au détriment des consommateurs. Un auteur a observé qu’une telle indépendance vis-à-vis du secteur régulé a trouvé progressivement une consistance juridique, au moyen de la jurisprudence de la Cour, puis dans le droit dérivé ( 18 ). La sauvegarde de l’indépendance des autorités de régulation revêt différents aspects, qui ont notamment été analysés par le Conseil des régulateurs européens de l’énergie (CEER) ( 19 ). |
40. |
Si le système du droit de l’Union privilégie une conception large de l’indépendance pour ce qui concerne les compétences spécifiques dévolues aux autorités de régulation nationales ( 20 ), ce système n’exclut pas, pour autant, que les États membres puissent, dans certaines conditions, intervenir sur le fonctionnement du marché de l’électricité. En effet, l’article 59 de la directive 2019/944 établit la liste des missions et des compétences conférées aux autorités de régulation. Si cette liste concerne de nombreux domaines, elle ne couvre pas l’entièreté du marché de l’électricité. Les États membres peuvent ainsi adopter leur propre réglementation relative au marché national de l’électricité en dehors de ces missions et compétences. Par ailleurs, l’article 57, paragraphe 4, sous b), ii), de cette directive énonce que l’exigence d’indépendance du personnel de l’autorité de régulation et des personnes chargées de sa gestion est sans préjudice d’orientations générales édictées par le gouvernement de l’État membre concerné. Selon la jurisprudence de la Cour, il ressort clairement du libellé de cette disposition que de telles orientations générales ne concernent pas les missions ni les compétences de régulation visées à l’article 59 de ladite directive ( 21 ). |
41. |
Comme le précise le considérant 87 de la directive 2019/944, celle-ci et la directive 2009/73/CE ( 22 )« ne privent pas les États membres de la possibilité d’établir et de publier leur politique énergétique nationale. Il s’ensuit que, en fonction des dispositions constitutionnelles d’un État membre, il pourrait relever de la compétence d’un État membre de déterminer le cadre d’action à l’intérieur duquel les autorités de régulation doivent remplir leur mission, par exemple en ce qui concerne la sécurité de l’approvisionnement. Cependant, les orientations de politique énergétique générale formulées par l’État membre ne doivent pas empiéter sur l’indépendance ou l’autonomie des autorités de régulation ». |
42. |
Ce considérant établit ainsi un lien explicite entre, d’une part, les orientations générales adoptées par le gouvernement d’un État membre, qui concernent non seulement le personnel et les personnes chargées de la gestion de l’autorité de régulation, au sens de l’article 57, paragraphe 4, sous b), ii), de la directive 2019/944, mais également l’ensemble des acteurs du marché de l’électricité, et, d’autre part, la sécurité de l’approvisionnement, laquelle, selon l’article 59, paragraphe 1, sous m), de cette directive, ne relève pas nécessairement de la compétence de l’autorité de régulation ( 23 ). Il ressort également dudit considérant que les États membres peuvent établir, plus généralement, leur politique énergétique nationale, ainsi que le prévoit l’article 194, paragraphe 2, TFUE ( 24 ). Par conséquent, le gouvernement d’un État membre est en droit d’adopter des orientations générales, notamment relatives à la « sécurité de l’approvisionnement » en électricité. |
43. |
La directive 2019/944 ne définit pas la notion de « sécurité de l’approvisionnement ». À cet égard, il paraît intéressant de se référer au règlement 2019/941, dont l’article 2, sous 1), définit la « sécurité d’approvisionnement en électricité » comme la « capacité d’un système électrique à assurer l’approvisionnement en électricité des clients à un niveau de performances clairement établi, tel que déterminé par les États membres concernés ». Cette capacité se traduit par une « norme de fiabilité », laquelle indique, d’une manière transparente, le niveau de sécurité d’approvisionnement nécessaire de l’État membre ( 25 ), et qui est calculée en utilisant au moins le coût de l’énergie non distribuée et le coût qu’un nouvel entrant doit couvrir sur une période déterminée, et est exprimée sous la forme d’une « prévision d’énergie non desservie » et d’une « prévision de perte de charge » ( 26 ). |
44. |
En conclusion, comme l’a relevé la Commission dans ses observations écrites, la directive 2019/944 vise à trouver un équilibre entre, d’une part, l’exigence que les autorités de régulation nationales soient indépendantes et, d’autre part, le droit pour un État membre d’établir sa politique énergique nationale dans des domaines qui ne relèvent pas de la compétence exclusive de ces autorités de régulation, notamment quant à la sécurité d’approvisionnement en électricité. |
B. Sur le respect de l’indépendance des autorités de régulation nationales quant à leur mission de fixer ou d’approuver les tarifs de transport et de distribution, et/ou leurs méthodes de calcul
45. |
Aux termes de l’article 59, paragraphe 1, sous a), de la directive 2019/944, l’autorité de régulation est investie de la mission de fixer ou d’approuver, selon des critères transparents, les tarifs de transport et de distribution ou leurs méthodes de calcul, ou les deux ( 27 ). Par ailleurs, le paragraphe 7, sous a), de cet article 59 énonce que, en principe, les autorités de régulation sont chargées de fixer ou d’approuver, suffisamment à l’avance avant leur entrée en vigueur, au moins les méthodes nationales utilisées pour calculer ou établir les conditions de raccordement et d’accès aux réseaux nationaux, y compris les tarifs de transport et de distribution ou leurs méthodes de calcul, ces tarifs ou méthodes permettant de réaliser les investissements nécessaires à la viabilité des réseaux. Il découle de la jurisprudence de la Cour qu’une interprétation de ces dispositions en ce sens qu’il est loisible à un gouvernement national de fixer ou d’approuver les méthodes de calcul des tarifs d’accès au réseau mettrait à mal les objectifs poursuivis par cette directive ( 28 ). |
46. |
En l’occurrence, comme cela ressort du libellé de la seconde question préjudicielle, la juridiction de renvoi considère que la loi 730/2021 n’interfère pas, en tant que telle, directement dans les tarifs de transport ou de distribution ni dans les méthodes de calcul de ceux-ci. Cependant, elle se demande si cette loi n’a pas porté indirectement atteinte à l’indépendance de l’Agence de l’énergie, laquelle a par la suite modifié ses méthodes de contrôle au milieu d’une période de contrôle. |
47. |
Si cette juridiction fait référence à la loi 730/2021, elle vise, plus précisément, les travaux préparatoires de celle-ci, à savoir le projet de loi, préparé par le gouvernement. Il ressort de la décision de renvoi ainsi que des observations écrites d’Alajärven Sähkö et du gouvernement finlandais que, en adoptant cette loi, le Parlement finlandais a approuvé en l’état les propositions législatives contenues dans le projet de loi. Dans ces conditions, en réponse à l’interrogation de la juridiction de renvoi figurant au point 26 des présentes conclusions, je suis d’avis que les travaux préparatoires de ladite loi peuvent être considérés comme des orientations générales édictées par le gouvernement de l’État membre concerné, au sens de la directive 2019/944 ( 29 ). En tout état de cause, compte tenu de la jurisprudence citée au point 36 des présentes conclusions, l’indépendance de l’autorité de régulation nationale doit être garantie à l’égard de tout organe politique, et donc non seulement à l’égard du gouvernement de l’État membre concerné, mais également à l’égard du législateur national. |
48. |
La juridiction de renvoi souligne que l’objectif de la loi 730/2021, tel que cela résulte de ces travaux préparatoires, était de faire baisser les prix de la distribution d’électricité en Finlande. À cet égard, notamment, le projet de loi aurait contenu des estimations des incidences économiques des changements des méthodes de contrôle quant au niveau de rémunération autorisé des gestionnaires de réseaux de distribution et aux redevances de distribution perçues par ceux-ci auprès de leurs clients. Alajärven Sähkö et Elenia soutiennent en outre, dans leurs observations écrites, que le projet de loi comprenait des calculs très précis sur la manière dont les décisions de l’Agence de l’énergie relatives aux méthodes de calcul seraient affectées par cette loi. |
49. |
Le gouvernement finlandais expose, dans ses observations écrites, que des tempêtes et des quantités importantes de neige ont causé des perturbations considérables aux réseaux de distribution d’électricité en Finlande au cours des années 2000, provoquant ainsi des coupures d’électricité. En conséquence, la loi sur le marché de l’électricité, dans sa version initiale, entrée en vigueur le 1er septembre 2013, aurait fixé des objectifs aux gestionnaires de réseaux en vue d’améliorer la sécurité des réseaux de distribution, qui devaient être satisfaits par étapes d’ici à la fin de l’année 2028 dans leurs zones de responsabilité respectives ( 30 ). Au cours de l’année 2016, des distributeurs d’électricité auraient informé leurs clients de hausses particulièrement élevées de leurs prix, ce qui a conduit le gouvernement à introduire dans cette loi des dispositions, entrées en vigueur le 1er septembre 2017, visant, notamment, à faciliter la prolongation de la période de mise en œuvre des exigences relatives à la sécurité des réseaux de distribution, afin de réduire le niveau des coûts des gestionnaires de réseaux de distribution et de freiner l’augmentation des prix du transport de l’électricité. Le gouvernement entré en fonction pendant l’année 2019 aurait prévu la poursuite de ces mesures en proposant des mesures relatives au développement et à la sécurité des réseaux de distribution dès lors que l’Agence de l’énergie était compétente pour modifier les méthodes de calcul des redevances de transport et de distribution d’électricité. |
50. |
Toujours selon le gouvernement finlandais, la loi 730/2021 a apporté les modifications suivantes : premièrement, une période supplémentaire de huit ans a été adoptée pour la mise en œuvre des exigences en matière de sécurité de l’exploitation du réseau de distribution, conformément au nouvel article 119 de la loi sur le marché de l’électricité ; deuxièmement, une disposition, à savoir l’article 19, deuxième alinéa, point 6, de cette loi, a été insérée, selon laquelle le gestionnaire de réseau doit être en mesure de fournir des services de transport et de distribution aux utilisateurs de son réseau de manière rentable, et, troisièmement, l’article 52 de ladite loi, portant sur le plan de développement du réseau de distribution, a été complété afin que ce plan puisse à l’avenir être utilisé pour encourager et contrôler l’efficacité en matière de coûts du développement du réseau de distribution, notamment en exigeant que ledit plan mentionne si le gestionnaire de réseau a recours à la participation active de la demande, à des mesures d’efficacité énergétique, de stockage de l’énergie ou à d’autres ressources, à titre d’option par rapport à l’expansion de la capacité de transport du réseau de distribution. Ce gouvernement ajoute que, au regard de l’assouplissement des exigences en matière de sécurité de l’approvisionnement apporté par ces modifications, l’Agence de l’énergie était fondée à changer les méthodes de calcul des tarifs de distribution afin d’empêcher les gestionnaires de réseaux de percevoir des frais de distribution indûment élevés auprès de leurs clients. |
51. |
À cet égard, il convient de rappeler que, s’agissant de la compétence de la Cour pour répondre aux questions préjudicielles, le système de coopération établi à l’article 267 TFUE est fondé sur une nette séparation des fonctions entre les juridictions nationales et la Cour. Dans le cadre d’une procédure introduite en vertu de cet article, l’interprétation des dispositions nationales appartient aux juridictions des États membres et non à la Cour, et il n’incombe pas à cette dernière de se prononcer sur la compatibilité de normes de droit interne avec les dispositions du droit de l’Union. En revanche, la Cour est compétente pour fournir à la juridiction nationale tous les éléments d’interprétation relevant du droit de l’Union qui permettent à celle-ci d’apprécier la compatibilité de normes de droit interne avec la réglementation de l’Union ( 31 ). |
52. |
De manière générale, le seul fait que le gouvernement d’un État membre cherche à faire baisser les prix de la distribution d’électricité n’apparaît pas, en tant que tel, incompatible avec l’article 57, paragraphes 4 et 5, de la directive 2019/944. En effet, ainsi que cela a été relevé précédemment, cette directive ne prive pas les États membres de la possibilité d’établir leur politique énergétique nationale. |
53. |
Certes, l’exercice par un État membre de ses propres compétences quant à l’établissement de sa politique énergétique nationale comporte, par sa nature même, inévitablement des répercutions sur les coûts d’exploitation du réseau électrique. Dès lors, il n’apparaît pas toujours évident, en pratique, d’établir une distinction entre la mise en œuvre d’une politique énergétique nationale et le respect des compétences de l’autorité de régulation ( 32 ). Si la jurisprudence de la Cour a fait l’objet de critiques ( 33 ), il me semble, au contraire, qu’elle permet de tracer une ligne de démarcation entre les compétences de l’autorité de régulation et celle de l’État membre. |
54. |
En effet, dans le cadre de l’établissement de sa politique énergétique nationale, un État membre dispose de la compétence pour décider du niveau de la sécurité d’approvisionnement en électricité, lorsqu’il n’a pas conféré cette compétence à l’autorité de régulation. Ainsi, un État membre est en droit d’opter pour une norme de fiabilité inférieure pour ses réseaux énergétiques s’il estime que la norme précédente entraîne un coût global excessif, tout en ne portant pas atteinte à la viabilité de ces réseaux. Cet abaissement de la norme de fiabilité conduit, en principe, à une baisse des coûts d’investissement pour les gestionnaires de réseau de transport et de distribution, qui doit impliquer in fine une baisse des tarifs pour les consommateurs. Cet exercice ne signifie pas que, de facto, l’État membre fixe les tarifs de transport et de distribution, et/ou leurs méthodes de calcul. En effet, l’influence sur les méthodes de calcul des tarifs des gestionnaires de réseaux de distribution apparaît comme un résultat tout à fait indirect de l’intérêt légitime de l’État membre à choisir le niveau de sa sécurité d’approvisionnement en électricité. |
55. |
Par ailleurs, conformément à l’article 194, paragraphe 2, TFUE, un État membre est compétent pour déterminer les conditions d’exploitation de ses ressources énergétiques. À première vue, le fait qu’un État membre impose aux gestionnaires de réseau de fournir des services de transport et de distribution aux utilisateurs de manière rentable et que le plan de développement du réseau de distribution puisse à l’avenir permettre d’encourager et de contrôler l’efficacité en matière de coûts du développement de ce réseau semble relever de cette compétence. En effet, les États membres sont en droit de rechercher la meilleure utilisation possible de leurs ressources en électricité. |
56. |
En revanche, dès lors que l’autorité de régulation a pour mission de fixer ou d’approuver les tarifs de transport et de distribution, et/ou leurs méthodes de calcul, en application de l’article 59, paragraphe 1, sous a), de la directive 2019/944, c’est à cette seule autorité qu’il appartient de déterminer les méthodes de calcul et le montant de ces tarifs. En ce sens, la Cour a relevé que le gouvernement d’un État membre ne peut fixer les méthodes de détermination des redevances d’accès au réseau et décider dans quels cas et sous quel encadrement l’autorité de régulation nationale peut fixer lesdites conditions ou méthodes, ou les approuver à la demande du gestionnaire de réseau ainsi que dans quels cas particuliers d’utilisation du réseau et sous quelles conditions cette autorité peut, ponctuellement, approuver ou interdire des redevances individuelles d’accès à ce réseau ( 34 ). |
57. |
Dès lors, comme le relève la Commission dans ses observations écrites, des modifications de la législation nationale ne seraient pas conformes à la directive 2019/944 si elles déterminaient dans le détail leurs effets sur les tarifs de transport et de distribution, et/ou leurs méthodes de calcul, dans la mesure où, aux termes des articles 57 et 59 de cette directive, l’autorité de régulation dispose de la compétence exclusive pour évaluer les conséquences des modifications apportées, notamment, à la norme de fiabilité et refléter celles-ci dans les méthodes de fixation des prix. |
58. |
À cet égard, Alajärven Sähkö et Elenia font valoir que le ministère de l’Économie et du Travail, le ministre en charge du marché de l’électricité et le Parlement finlandais ont donné à l’Agence de l’énergie des instructions très détaillées sur les modifications que celle-ci devait apporter, à la suite de l’adoption de la loi 730/2021, aux méthodes de contrôle qu’elle avait définies antérieurement, ce qui constituerait une voie détournée pour fixer les tarifs de transport et de distribution, et/ou leurs méthodes de calcul. De son côté, l’Agence de l’énergie soutient que son rapport cadre, qui portait sur les méthodes de contrôle du caractère raisonnable de la fixation des tarifs de l’exploitation du réseau électrique, a été réalisé de manière autonome et que, dans un souci de prévisibilité du processus législatif, il est souhaitable que l’autorité de régulation puisse fournir un avis d’expert indépendant sur l’incidence potentielle de modifications de la législation nationale. Dès lors qu’un tel avis est destiné à éclairer le législateur national quant à l’impact de ces modifications sur les tarifs de transport et de distribution, et/ou leurs méthodes de calcul, j’estime qu’il ne porte pas atteinte à l’indépendance de l’autorité de régulation dans la situation où celle-ci a pu agir de manière autonome, sur le seul fondement de l’intérêt public, pour assurer le respect des objectifs poursuivis par ladite directive, sans être soumise à des instructions externes provenant d’autres organes ( 35 ), ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier. |
59. |
J’ajoute que, selon le libellé de la seconde question préjudicielle, l’Agence de l’énergie « a dû modifier ses méthodes de contrôle » à la suite de l’adoption de la loi 730/2021, ce qui peut être compris comme imposant une obligation à cette agence. Dans le même temps, il ressort de la décision de renvoi que, dans ses décisions du 15 décembre 2021, ladite agence énonce qu’elle s’est saisie de sa propre initiative de la question des méthodes de contrôle postérieurement à l’entrée en vigueur de cette loi. En outre, dans ses observations écrites, la même agence expose que la formulation correcte de la question serait « a jugé nécessaire de modifier ses méthodes de contrôle » en ce sens que, selon l’article 13, premier alinéa, point 2, de la loi sur la surveillance, elle peut modifier sa décision de fixation des méthodes de contrôle au vu de l’évolution de la législation nationale, et que cette disposition laisse explicitement à l’autorité de régulation le pouvoir d’apprécier la nécessité et les fondements des méthodes de contrôle ainsi que des modifications qui y sont apportées. Par conséquent, l’Agence de l’énergie considère elle-même ne pas avoir agi dans le cadre d’une compétence liée en ce qui concerne la fixation des tarifs de transport et de distribution, et/ou leurs méthodes de calcul. |
60. |
Par ailleurs, dans ses observations écrites, le gouvernement chypriote observe que, selon le libellé de la seconde question préjudicielle, l’autorité de régulation nationale a modifié ses méthodes de contrôle au « milieu d’une période de contrôle ». Ce gouvernement en déduit qu’une telle modification ne semble pas conforme à l’article 59, paragraphe 7, de la directive 2019/944, aux termes duquel les autorités de régulation sont chargées de fixer ou d’approuver, « suffisamment à l’avance avant leur entrée en vigueur », au moins les méthodes nationales utilisées pour calculer ou établir les tarifs de transport et de distribution ou leurs méthodes de calcul, et porterait atteinte à l’indépendance de l’autorité de régulation nationale si elle a été imposée. Cependant, il y a lieu de relever que la juridiction de renvoi n’interroge pas la Cour sur la question de l’application temporelle des décisions du 15 décembre 2021. En effet, la décision de renvoi ne contient aucun développement à cet égard. Dans ces conditions, il n’y a pas lieu d’examiner cette question. |
61. |
En définitive, c’est à la juridiction de renvoi qu’il incombe d’examiner si la loi 730/2021 entre dans le cadre des compétences conférées à un État membre par la directive 2019/944, à savoir si l’action de l’État membre concerné était strictement limitée à l’établissement de sa politique énergétique nationale, notamment quant à la sécurité d’approvisionnement du réseau électrique et aux conditions d’exploitation de ses ressources énergétiques, ou si elle a empiété sur la compétence exclusive de l’autorité de régulation nationale de fixer les tarifs de transport et de distribution, et/ou leurs méthodes de calcul. |
62. |
Eu égard à tout ce qui précède, je suis d’avis que l’article 57, paragraphes 4 et 5, de la directive 2019/944 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à la législation d’un État membre ayant pour objectif, ainsi que l’indiquent les travaux préparatoires de celle-ci, d’exercer une influence à la baisse sur les prix de la distribution d’électricité sans interférer, en tant que telle, directement dans les tarifs de transport et de distribution d’électricité, et/ou leurs méthodes de calcul, mais dont l’effet a été que l’autorité de régulation nationale a modifié ses méthodes de contrôle, pour autant que cette législation traduit les orientations générales édictées par le gouvernement de l’État membre en ce qui concerne sa politique énergétique nationale, notamment quant à la détermination du niveau de la sécurité de l’approvisionnement et des conditions d’exploitation des ressources énergétiques, qui ne relèvent pas des missions et des compétences de l’autorité de régulation, au sens de l’article 59 de cette directive. |
V. Conclusion
63. |
Au vu des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre aux questions préjudicielles posées par le markkinaoikeus (tribunal des affaires économiques, Finlande) de la manière suivante : L’article 57, paragraphes 4 et 5, de la directive (UE) 2019/944 du Parlement européen et du Conseil, du 5 juin 2019, concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité et modifiant la directive 2012/27/UE, doit être interprété en ce sens que : il ne s’oppose pas à la législation d’un État membre ayant pour objectif, ainsi que l’indiquent les travaux préparatoires de celle-ci, d’exercer une influence à la baisse sur les prix de la distribution d’électricité sans interférer, en tant que telle, directement dans les tarifs de transport et de distribution d’électricité, et/ou leurs méthodes de calcul, mais dont l’effet a été que l’autorité de régulation nationale a modifié ses méthodes de contrôle, pour autant que cette législation traduit les orientations générales édictées par le gouvernement de l’État membre en ce qui concerne sa politique énergétique nationale, notamment quant à la détermination du niveau de la sécurité de l’approvisionnement et des conditions d’exploitation des ressources énergétiques, qui ne relèvent pas des missions et des compétences de l’autorité de régulation, au sens de l’article 59 de cette directive. |
( 1 ) Langue originale : le français.
( 2 ) Directive du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité et modifiant la directive 2012/27/UE (JO 2019, L 158, p. 125). Aux termes de l’article 72 de la directive 2019/944, celle-ci a abrogé la directive 2009/72/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 juillet 2009, concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité et abrogeant la directive 2003/54/CE (JO 2009, L 211, p. 55), avec effet au 1er janvier 2021.
( 3 ) Règlement du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 sur le marché intérieur de l’électricité (JO 2019, L 158, p. 54).
( 4 ) Règlement du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 instituant une agence de l’Union européenne pour la coopération des régulateurs de l’énergie (JO 2019, L 158, p. 22).
( 5 ) La loi 730/2021 est entrée en vigueur le 1er août 2021.
( 6 ) La juridiction de renvoi vise, à cet égard, l’arrêt du 29 avril 2004, Björnekulla Fruktindustrier (C‑371/02, EU:C:2004:275).
( 7 ) Voir arrêt du 15 juillet 2021, Allemagne/Pologne (C‑848/19 P, EU:C:2021:598, point 37 et jurisprudence citée).
( 8 ) Règlement du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 sur la préparation aux risques dans le secteur de l’électricité et abrogeant la directive 2005/89/CE (JO 2019, L 158, p. 1).
( 9 ) De même, le considérant 80 de la directive 2019/944 énonce que, pour garantir le bon fonctionnement du marché intérieur de l’électricité, il est nécessaire que les autorités de régulation soient en mesure de prendre des décisions concernant tous les aspects réglementaires pertinents et qu’elles soient totalement indépendantes de tous autres intérêts publics ou privés. Ce considérant précise également que cela n’empêche ni l’exercice d’un contrôle juridictionnel, ni l’exercice d’un contrôle parlementaire, conformément au droit constitutionnel des États membres.
( 10 ) Voir, en ce sens, arrêt du 2 septembre 2021, Commission/Allemagne (Transposition des directives 2009/72 et 2009/73) (C‑718/18, ci-après l’« arrêt Commission/Allemagne », EU:C:2021:662, point 108 ainsi que jurisprudence citée).
( 11 ) Voir, en ce sens, arrêt Commission/Allemagne, point 109 et jurisprudence citée.
( 12 ) Voir, en ce sens, arrêt Commission/Allemagne, point 130.
( 13 ) Voir arrêt du 29 octobre 2009, Commission/Belgique (C‑474/08, EU:C:2009:681, points 29 à 31).
( 14 ) Voir, en ce sens, arrêt du 11 juin 2020, Prezident Slovenskej republiky (C‑378/19, EU:C:2020:462, points 62 et 63). Sur cet arrêt, voir Rizzuto, F., « The Independance of National Regulatory Authorities : Is There Now an Autonomous EU LAW concept of Independance of General Application ? », European Competition and Regulatory Law Review, 2021, vol. 5, no 1, p. 64 à 75.
( 15 ) Voir, en ce sens, arrêt du 11 juin 2020, Prezident Slovenskej republiky (C‑378/19, EU:C:2020:462, point 64).
( 16 ) Voir, en ce sens, arrêt Commission/Allemagne, point 132.
( 17 ) Voir arrêt Commission/Allemagne, point 112. Au point 126 de cet arrêt, la Cour a également relevé que le principe de démocratie ne s’oppose pas à l’existence d’autorités publiques situées en dehors de l’administration hiérarchique classique et plus ou moins indépendantes du gouvernement, qui exercent souvent des fonctions régulatrices ou des missions qui doivent être soustraites à l’influence politique, tout en restant soumises au respect de la loi, sous le contrôle des juridictions compétentes et que le fait de conférer aux autorités de régulation nationales un statut indépendant de l’administration générale n’est pas en soi de nature à priver ces autorités de leur légitimité démocratique, dans la mesure où elles ne sont pas soustraites à toute influence parlementaire.
( 18 ) Voir Delzangles, H., « L’indépendance des autorités de régulations sectorielles, communications électroniques, énergie et postes », thèse de doctorat soutenue le 30 juin 2008 à l’université de Bordeaux IV (France), en particulier p. 234.
( 19 ) Voir rapport (uniquement disponible en langue anglaise) du CEER intitulé « Safeguarding the independence of regulators – Insights from Europe’s energy regulators on powers, resources, independence, accountability and transparency », 13 décembre 2016, consultable à l’adresse suivante : https://www.ceer.eu/wp-content/uploads/2024/04/C16-RBM-06-03_SafeguardingNRAIndependence_PUBLIC-13-Dec-2016.pdf.
( 20 ) Voir conclusions de l’avocat général Pitruzzella dans l’affaire Commission/Allemagne (Transposition des directives 2009/72 et 2009/73) (C‑718/18, EU:C:2021:20, point 128).
( 21 ) Voir, en ce sens, arrêt Commission/Allemagne, point 110.
( 22 ) Directive du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2009 concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel et abrogeant la directive 2003/55/CE (JO 2009, L 211, p. 94).
( 23 ) Dans ses observations écrites, le gouvernement finlandais souligne que, aux termes de l’article 6, premier alinéa, point 7, de la loi sur la surveillance, le législateur national a conféré à l’autorité de régulation non pas le pouvoir d’approuver ou de définir les règles en matière de sécurité et de développement des réseaux de distribution d’électricité, mais la mission de contrôler le respect de celles-ci et de participer à l’élaboration des exigences relatives à la qualité de service des réseaux et de la fourniture d’électricité.
( 24 ) Voir point 31 des présentes conclusions.
( 25 ) Voir article 25, paragraphe 1, du règlement 2019/943.
( 26 ) Voir article 25, paragraphe 3, du règlement 2019/943. À titre d’exemple, le Royaume de Belgique a fixé la norme de fiabilité à trois heures. Voir, en ce sens, arrêté royal du 4 septembre 2002 modifiant l’arrêté royal du 31 août 2021 relatif à la détermination de la norme de fiabilité et à l’approbation des valeurs du coût de l’énergie non distribuée et du coût d’un nouvel entrant (Moniteur belge du 14 septembre 2022, p. 67240).
( 27 ) En outre, le considérant 82 de cette directive énonce que les autorités de régulation devraient établir ou approuver les tarifs de réseau individuels pour les réseaux de transport et de distribution ou une méthode, ou les deux, et que, dans les deux cas, l’indépendance des autorités de régulation concernant la fixation des tarifs de réseau en vertu de l’article 57, paragraphe 4, sous b), ii), de ladite directive devrait être préservée.
( 28 ) Voir, en ce sens, arrêt Commission/Allemagne, point 113.
( 29 ) En outre, Alajärven Sähkö et Elenia font valoir dans leurs observations écrites que, dans l’ordre juridique finlandais, les documents préparatoires à la loi, tels que les rapports des groupes de travail, les avis des comités et des commissions parlementaires ainsi que les projets de loi du gouvernement, jouent un rôle important dans l’interprétation de la législation et sont régulièrement utilisés pour aider à clarifier les intentions du législateur, et que plus les documents préparatoires à la loi sont détaillés et récents, plus leur poids réel dans l’interprétation et l’application de la législation est élevé.
( 30 ) Le gouvernement finlandais précise que cette loi, dans sa version initiale, prévoyait l’obligation de concevoir, construire et entretenir les réseaux de distribution de telle sorte qu’une panne de ces réseaux due à une tempête ou au poids de la neige n’entraîne pas une interruption de la distribution d’électricité supérieure à six heures en zone urbaine et à 36 heures dans les autres zones.
( 31 ) Voir arrêt du 8 mai 2024, Asociaţia Forumul Judecătorilor din România (Associations de magistrats) (C‑53/23, EU:C:2024:388, point 14 et jurisprudence citée).
( 32 ) Voir, en ce sens, Huhta, K., « C-718/18 Commission v. Germany : Critical Reflections on the Independence of National Regulatory Authorities in EU Energy Law », European Energy and Environmental Law Review, 2021, vol. 30, no 6, p. 255 à 265, en particulier p. 261. Selon cette auteure, l’arrêt Commission/Allemagne a obscurci davantage la démarcation entre les orientations de politique énergétique générale formulées par un État membre et les questions qui relèvent exclusivement de la compétence des autorités de régulation nationales dans la mesure où les États membres, et non les autorités de régulation, jouissent d’une large marge d’appréciation pour déterminer ce qui constitue un intérêt public. Ladite auteure a également souligné qu’aucune politique énergétique nationale ne peut éviter de prendre position sur les prix de l’énergie et la tarification de celle-ci, de sorte que les orientations générales de la politique énergétique sont fortement susceptibles d’affecter les conditions dans lesquelles les tarifs sont fixés.
( 33 ) Voir Huhta, K., op. cit., p. 261.
( 34 ) Voir arrêt Commission/Allemagne, points 114 à 116. Voir, également, arrêt du 3 décembre 2020, Commission/Belgique (Marchés de l’électricité et du gaz naturel) (C‑767/19, EU:C:2020:984, points 98 à 115).
( 35 ) Voir point 35 des présentes conclusions.