Affaire C-241/09

Fluxys SA

contre

Commission de régulation de l’électricité et du gaz (CREG)

(demande de décision préjudicielle, introduite par

la cour d'appel de Bruxelles)

«Renvoi préjudiciel — Compétence de la Cour — Désistement partiel du requérant au principal — Changement du cadre juridique de référence — Réponse de la Cour n’étant plus nécessaire à la solution du litige — Non-lieu à statuer»

Sommaire de l'arrêt

Questions préjudicielles — Compétence de la Cour — Limites

(Art. 267 TFUE)

Il est indispensable que la Cour dispose du cadre factuel et réglementaire du litige au principal, car les informations fournies dans les décisions de renvoi servent non seulement à permettre à la Cour de fournir des réponses utiles, mais également à donner aux gouvernements des États membres ainsi qu’aux autres parties intéressées la possibilité de présenter des observations conformément à l’article 23 du statut de la Cour de justice. Il incombe à la Cour de veiller à ce que cette possibilité soit sauvegardée, compte tenu du fait que, en vertu de cette disposition, seules les décisions de renvoi sont notifiées aux parties intéressées. Partant, si la Cour doit pouvoir s’en remettre de la façon la plus large à l’appréciation du juge national en ce qui concerne la nécessité des questions qui lui sont adressées, elle doit être mise en mesure de porter toute appréciation inhérente à l’accomplissement de sa propre fonction, notamment en vue de vérifier, le cas échéant, comme toute juridiction en a l’obligation, sa propre compétence.

S'agissant d'une question préjudicielle en interprétation de la directive 2003/55, concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel et abrogeant la directive 98/30, posée dans le cadre d'un litige relatif à l'annulation d'une décision fixant les tarifs de transport du gaz en violation d'une loi nationale, la Cour ne se trouve plus en mesure de statuer sur la question qui lui est posée lorsque, après l'introduction de la demande de décision préjudicielle, d'une part, une telle loi a été annulée par la Cour constitutionnelle de l'État membre concerné et donc le cadre juridique national dans lequel s'inscrit le litige au principal n'est plus celui décrit par la juridiction nationale dans sa décision de renvoi, et que, d'autre part, la partie requérante a retiré ses moyens tirés de la violation de la loi nationale contestée.

(cf. points 30-31, 33-34)







ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

9 décembre 2010 (*)

«Renvoi préjudiciel – Compétence de la Cour – Désistement partiel du requérant au principal – Changement du cadre juridique de référence – Réponse de la Cour n’étant plus nécessaire à la solution du litige – Non-lieu à statuer»

Dans l’affaire C‑241/09,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par la cour d’appel de Bruxelles (Belgique), par décision du 29 juin 2009, parvenue à la Cour le 3 juillet 2009, dans la procédure

Fluxys SA

contre

Commission de régulation de l’électricité et du gaz (CREG),

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. J.‑C. Bonichot, président de chambre, MM. K. Schiemann, L. Bay Larsen, Mmes C. Toader (rapporteur) et A. Prechal, juges,

avocat général: Mme V. Trstenjak,

greffier: Mme R. Şereş, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 17 juin 2010,

considérant les observations présentées:

–        pour Fluxys SA, par Me R. Gonne, avocat,

–        pour la Commission de régulation de l’électricité et du gaz (CREG), par Mes L. Cornelis et P. de Bandt, avocats,

–        pour le gouvernement belge, par Mme M. Jacobs, en qualité d’agent, assistée de Me J.‑F. De Bock, avocat,

–        pour le gouvernement tchèque, par M. M. Smolek, en qualité d’agent,

–        pour le gouvernement du Royaume-Uni, par M. L. Seeboruth, en qualité d’agent,

–        pour la Commission européenne, par Mme O. Beynet et M. B. Schima, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 28 septembre 2010,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 1er, 2 et 18 de la directive 2003/55/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2003, concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel et abrogeant la directive 98/30/CE (JO L 176, p. 57, et – rectificatif – JO 2004, L 16, p. 75), ainsi que de l’article 3 du règlement (CE) n° 1775/2005 du Parlement européen et du Conseil, du 28 septembre 2005, concernant les conditions d’accès aux réseaux de transport de gaz naturel (JO L 289, p. 1).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Fluxys SA (ci-après «Fluxys»), entreprise chargée de la gestion du réseau de transport du gaz naturel en Belgique, à la Commission de régulation de l’électricité et du gaz (CREG) au sujet de la décision de cette dernière du 6 juin 2008 fixant les tarifs du transport du gaz destiné à être distribué sur le marché national pour la période allant de 2008 à 2011.

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

3        L’article 1er, paragraphe 1, de la directive 2003/55 énonce:

«La présente directive établit des règles communes concernant le transport, la distribution, la fourniture et le stockage du gaz naturel. Elle définit les modalités d’organisation et de fonctionnement du secteur du gaz naturel, d’accès au marché, ainsi que les critères et procédures applicables en ce qui concerne l’octroi d’autorisations de transport, de distribution, de fourniture et de stockage du gaz naturel, et l’exploitation des réseaux.»

4        L’article 2, point 3, de la directive 2003/55 définit, aux fins de celle-ci, la notion de «transport» comme suit:

«le transport de gaz naturel via un réseau de gazoducs à haute pression autre qu’un réseau de gazoducs en amont, aux fins de fourniture à des clients, mais ne comprenant pas la fourniture».

5        L’article 18, paragraphe 1, de la directive 2003/55 dispose:

«Les États membres veillent à ce que soit mis en place, pour tous les clients éligibles, y compris les entreprises de fourniture, un système d’accès des tiers aux réseaux de transport et de distribution ainsi qu’aux installations de [gaz naturel liquéfié]. Ce système, fondé sur des tarifs publiés, doit être appliqué objectivement et sans discrimination entre les utilisateurs du réseau. Les États membres veillent à ce que ces tarifs, ou les méthodes de calcul de ceux-ci, soient approuvés avant leur entrée en vigueur par l’autorité de régulation nationale visée à l’article 25, paragraphe 1, et que ces tarifs et les méthodes de calcul, lorsque seules les méthodes de calcul sont approuvées, soient publiés avant leur entrée en vigueur.»

6        Le règlement n° 1775/2005 précise en son article 3, paragraphe 1:

«Les tarifs, ou leurs méthodologies de calcul, appliqués par les gestionnaires de réseau de transport et approuvés par les autorités de régulation conformément à l’article 25, paragraphe 2, de la directive 2003/55[...] sont transparents, tiennent compte de la nécessaire intégrité et de l’amélioration du système, reflètent les coûts réels supportés, dans la mesure où ces coûts correspondent à ceux d’un gestionnaire de réseau efficace et ayant une structure comparable et sont transparents, tout en comprenant un rendement approprié des investissements, et prennent en considération, le cas échéant, les analyses comparatives des tarifs réalisées par les autorités de régulation. Les tarifs, ou leurs méthodologies de calcul, sont appliqués de façon non discriminatoire.

[...]»

 Le droit national tel qu’il ressort de la demande de décision préjudicielle

7        En Belgique, la distribution du gaz naturel est réglementée par la loi du 12 avril 1965 relative au transport de produits gazeux et autres par canalisations (Moniteur belge du 7 mai 1965, p. 5260). Il résulte de la décision de renvoi que les dispositions pertinentes quant au litige au principal au moment de cette décision étaient issues de cette loi telle que modifiée par la loi du 10 mars 2009 portant modification de la loi du 12 avril 1965 relative au transport de produits gazeux et autres par canalisations (Moniteur belge du 31 mars 2009, p. 25173, ci-après la «loi gaz»).

8        L’article 1er, 7° bis, de la loi gaz définit le «transit» comme suit:

«L’activité qui consiste à effectuer le transport de gaz naturel sans distribution ni fourniture de gaz naturel sur le territoire belge».

9        L’article 15/5 quater de cette loi énonce:

«§ 1er.      Le gestionnaire du réseau de transport de gaz naturel, le gestionnaire d’installation de stockage de gaz naturel, le gestionnaire d’installation de [gaz naturel liquéfié] soumettent individuellement une demande d’approbation de leurs tarifs respectifs à la [CREG] ainsi que des tarifs des services auxiliaires. Ils publient individuellement ces tarifs approuvés pour les activités respectives, conformément aux orientations du présent chapitre.

[...]

§ 4.      Les gestionnaires introduisent auprès de la [CREG], pour approbation, une proposition de revenu et de tarifs, élaborés sur la base du revenu total visé à l’article 15/5bis.

[...]»

10      L’article 15/5 quinquies, paragraphe 1, de ladite loi énonce:

«[...] les dispositions du présent chapitre et l’arrêté royal du 8 juin 2007 relatif à la méthodologie pour déterminer le revenu total comprenant la marge équitable, à la structure tarifaire générale, aux principes de base en matière de tarifs, aux procédures, à la publication des tarifs, aux rapports annuels, à la comptabilité, à la maîtrise des coûts, aux écarts de revenu des gestionnaires et à la formule objective d’indexation visés par la loi du 12 avril 1965 relative au transport de produits gazeux et autres par canalisations, dans sa version publiée au Moniteur belge du 29 juin 2007, sont applicables aux tarifs de transit de gaz naturel et au gestionnaire du réseau de transport de gaz naturel qui exerce une activité de transit, sous réserve des dérogations suivantes:

1°      les tarifs sont applicables pour les durées fixées contractuellement entre le gestionnaire du réseau de transport et les utilisateurs de ce réseau;

2°      afin de garantir la stabilité de prix à terme, la période régulatoire visée à l’article 15/5bis, § 2, peut dépasser quatre ans;

3°      la marge équitable pour le transit est déterminée conformément aux articles 4 à 8 de l’arrêté royal précité du 8 juin 2007, étant entendu que:

a)      la valeur initiale de l’actif régulé de transit au 31 décembre 2007 est approuvée par la [CREG] sur proposition du gestionnaire, en prenant en compte toutes les installations de transport situées en Belgique et utilisées pour le transit;

b)      le produit du coefficient bêta et de la prime de risque, comme composante du taux de rendement R visé à l’article 6 de l’arrêté royal précité, est fixé à 7 %;

[...]»

11      L’article 15/19 de la loi gaz dispose que les contrats qui sont conclus avant le 1er juillet 2004 conformément à l’article 3, premier alinéa, de la directive 91/296/CEE du Conseil, du 31 mai 1991, relative au transit du gaz naturel sur les grands réseaux (JO L 147, p. 37) (ci-après les «contrats historiques»), restent valables et continuent d’être mis en œuvre conformément aux dispositions de ladite directive.

 Le litige au principal et la question préjudicielle

12      En 2007, conformément à l’article 15/5 quater de la loi gaz, Fluxys a soumis, pour approbation, à la CREG des propositions tarifaires relatives, d’une part, aux activités de transport du gaz destiné à être distribué dans un autre État (ci-après le «transit») et, d’autre part, aux activités de transport du gaz destiné à la distribution en Belgique (ci-après l’«acheminement») et de stockage, l’ensemble portant sur la période allant de 2008 à 2011.

13      S’agissant des propositions tarifaires relatives aux activités de transit, la CREG a adopté deux décisions, respectivement les 15 mai et 6 juin 2008. Par arrêt de la cour d’appel de Bruxelles du 10 novembre 2008, les effets de ces décisions ont été suspendus en raison de leur caractère prima facie illégal.

14      S’agissant des propositions tarifaires de Fluxys relatives aux activités d’acheminement et de stockage, la CREG a refusé de les approuver et a déterminé elle-même, par décision du 19 décembre 2007, des tarifs provisoires, ordonnant en outre à cette entreprise de présenter un nouveau budget comportant de nouvelles propositions tarifaires. Par suite de la présentation de ces propositions, la CREG a adopté, le 6 juin 2008, une nouvelle décision par laquelle elle a fixé les tarifs provisoires pour les activités d’acheminement et de stockage. Dans cette décision, elle a indiqué n’être pas en mesure, sur la base des éléments fournis par Fluxys, d’établir l’allocation des coûts pour les différentes activités de transport exercées par celle-ci et avoir dès lors effectué un nouveau calcul en redistribuant les coûts entre ces activités. Sur la base de ce calcul, la CREG a décidé de fixer, pour l’activité d’acheminement, des tarifs qui sont inférieurs à ceux proposés par cette société.

15      Contestant la méthode appliquée par la CREG pour la fixation des tarifs d’acheminement et de stockage, Fluxys a intenté, le 27 juin 2008, une action devant la cour d’appel de Bruxelles en vue d’obtenir la suspension et l’annulation de ladite décision du 6 juin 2008 relative à ces tarifs. Elle a fait valoir que la CREG avait erronément procédé à la réallocation d’une partie des coûts opérationnels de l’activité d’acheminement à celle de transit. Fluxys a notamment soutenu que la CREG n’avait pas respecté la loi gaz, qui établit des règles de calcul des tarifs distinctes pour les activités de transit, d’une part, et pour celles d’acheminement et de stockage, d’autre part, en appliquant les mêmes règles pour l’ensemble de ces activités.

16      Dans le litige au principal, la CREG a relevé, entre autres, que la réglementation de l’Union européenne, en particulier la directive 2003/55, s’oppose à une réglementation nationale telle que celle en vigueur en droit belge, qui établit une méthode de tarification distincte pour les différents types de transport de gaz naturel.

17      Dans la décision de renvoi, la cour d’appel de Bruxelles souligne que la solution du différend est liée à l’examen de la législation belge, en particulier l’article 15/5 quinquies de la loi gaz, tel que modifié par la loi gaz de 2009, duquel il ressort que la méthode de fixation des tarifs des activités de transit est différente de celle applicable pour la fixation des tarifs des autres activités de transport de gaz naturel. Selon cette législation, pour la fixation des tarifs des activités de transit, les coûts liés à l’exploitation du réseau pour l’ensemble des activités du gestionnaire ne peuvent pas être pris en compte. Compte tenu de ces considérations, la juridiction de renvoi a suspendu la décision de la CREG du 6 juin 2008.

18      C’est dans ce contexte que la cour d’appel de Bruxelles a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

«Les articles 1er, 2 et 18 de la directive [2003/55] et l’article 3 du règlement [n° 1775/2005] s’opposent-ils à ce que les législations nationales créent un régime tarifaire spécifique à l’activité de transit, qui déroge aux règles qui régissent l’activité de transport, en créant au sein de l’activité de transport une distinction entre ‘acheminement’ et ‘transit’?»

 La procédure devant la Cour

19      Par courrier du 7 avril 2010, parvenu au greffe de la Cour le 28 avril suivant, les représentants de Fluxys ont informé la Cour qu’«un accord [avait] été atteint avec la CREG […] sur l’application d’un régime tarifaire qui ne repose plus sur une distinction entre le transport à des fins nationales et le transit, mais qui reflète, sur la base de la même méthodologie, les coûts des services fournis pour chaque activité et qui lui sont propres». Cette lettre faisait également état du fait que, «comme prévu dans cet accord, Fluxys a renoncé à tous les moyens invoqués devant la cour d’appel de Bruxelles contre les décisions de la CREG, en ce compris ceux liés à la distinction [entre] transit et transport national», sous la seule exception d’un moyen relatif aux contrats historiques bénéficiant d’une exception.

20      Par suite de cette lettre, la Cour a demandé à la juridiction de renvoi de lui indiquer les conséquences de cette renonciation en ce qui concerne la procédure préjudicielle.

21      Par courrier parvenu au greffe de la Cour le 17 mai 2010, la cour d’appel de Bruxelles a fait savoir qu’elle maintenait la demande de décision préjudicielle, car, nonobstant le désistement partiel de Fluxys, la décision de la CREG du 6 juin 2008 n’a pas été retirée et «Fluxys maintient sa demande d’annulation» de cette décision en ce qui concerne les moyens du recours autres que ceux retirés, qui portent sur le non-respect des règles de la loi gaz relatives à la méthode de calcul des tarifs. En outre, elle a informé la Cour que, en vertu de l’article 825 du code judiciaire belge, la validité du désistement partiel de Fluxys «est subordonnée à son acceptation par la partie adverse» et que, dans le cadre de la procédure au principal, la CREG n’a pas accepté ce désistement. Enfin, elle a ajouté que, «s’agissant [d’une] matière qui relève de l’ordre public», elle est investie d’une pleine juridiction, de sorte qu’elle n’est pas obligée de statuer uniquement sur la base des moyens invoqués par les parties.

22      Par courrier parvenu au greffe de la Cour le 1er juin 2010, le gouvernement belge a informé la Cour que, par suite d’une mise en demeure émise par la Commission européenne en vertu de l’article 258 TFUE et portant sur la loi gaz, celle-ci a été modifiée par la loi du 29 avril 2010 modifiant la loi du 12 avril 1965 relative au transport de produits gazeux et autres par canalisations en ce qui concerne les tarifs de transit (Moniteur belge du 21 mai 2010, p. 31397).

23      Il ressort également du dossier soumis à la Cour que, par un arrêt du 8 juillet 2010, la Cour constitutionnelle a annulé ex tunc la loi susmentionnée du 10 mars 2009 en raison notamment de sa contrariété avec la directive 2003/55 et le règlement n° 1775/2005.

 Sur la demande de réouverture de la procédure orale

24      Par une lettre du 17 novembre 2010, la CREG a demandé la réouverture de la procédure orale en faisant valoir, en substance, que doit être soumise à un débat contradictoire «la question de la validité ainsi que de l’application dans le temps de l’exception relative aux contrats [historiques] établie par l’article 32, paragraphe 1er, de la directive gaz», dès lors que Mme l’avocat général s’est fondée, dans ses conclusions, sur des éléments et des considérations qui seraient entièrement nouveaux et sur lesquels la CREG n’aurait pas pu présenter d’observations.

25      À cet égard, il convient de rappeler que la Cour peut d’office ou sur proposition de l’avocat général, ou encore à la demande des parties, ordonner la réouverture de la procédure orale, conformément à l’article 61 de son règlement de procédure, si elle considère qu’elle est insuffisamment éclairée ou que l’affaire doit être tranchée sur la base d’un argument qui n’a pas été débattu entre les parties (voir, notamment, arrêt du 8 septembre 2009, Liga Portuguesa de Futebol Profissional et Bwin International, C‑42/07, Rec. p. I‑7633, point 31 ainsi que jurisprudence citée).

26      En revanche, le statut de la Cour de justice de l’Union européenne et le règlement de procédure de celle-ci ne prévoient pas la possibilité pour les parties de déposer des observations en réponse aux conclusions présentées par l’avocat général (voir arrêt Liga Portuguesa de Futebol Profissional et Bwin International, précité, point 32).

27      La Cour considère, l’avocat général entendu, que, dans la mesure où il n’y a plus lieu de répondre à la question préjudicielle, il convient de rejeter la demande de réouverture de la procédure orale.

 Sur le renvoi préjudiciel

28      Il ressort de la jurisprudence de la Cour qu’il appartient aux seules juridictions nationales, qui sont saisies du litige et doivent assumer la responsabilité de la décision juridictionnelle à intervenir, d’apprécier, au regard des particularités de chaque affaire, tant la nécessité d’une décision préjudicielle pour être en mesure de rendre leur jugement que la pertinence des questions qu’elles posent à la Cour (voir, notamment, arrêt du 15 juin 1995, Zabala Erasun e.a., C‑422/93 à C‑424/93, Rec. p. I‑1567, point 14).

29      Néanmoins, en faisant usage de son pouvoir d’appréciation, le juge national remplit, en collaboration avec la Cour, une fonction qui leur est attribuée en commun en vue d’assurer le respect du droit dans l’application et l’interprétation du droit de l’Union. Dès lors, les problèmes que peut soulever l’exercice de son pouvoir d’appréciation par le juge national et les rapports qu’il entretient dans le cadre de l’article 267 TFUE avec la Cour relèvent exclusivement des règles du droit de l’Union (voir arrêt Zabala Erasun e.a., précité, point 15).

30      À cet effet, il est indispensable que la Cour dispose du cadre factuel et réglementaire du litige au principal, car les informations fournies dans les décisions de renvoi servent non seulement à permettre à la Cour de fournir des réponses utiles, mais également à donner aux gouvernements des États membres ainsi qu’aux autres intéressés la possibilité de présenter des observations conformément à l’article 23 du statut de la Cour de justice. Il incombe à la Cour de veiller à ce que cette possibilité soit sauvegardée, compte tenu du fait que, en vertu de cette disposition, seules les décisions de renvoi sont notifiées aux parties intéressées (arrêt du 1er avril 1982, Holdijk e.a., 141/81 à 143/81, Rec. p. 1299, point 6, ainsi que ordonnance du 28 juin 2000, Laguillaumie, C‑116/00, Rec. p. I‑4979, point 14).

31      Partant, si la Cour doit pouvoir s’en remettre de la façon la plus large à l’appréciation du juge national en ce qui concerne la nécessité des questions qui lui sont adressées, elle doit être mise en mesure de porter toute appréciation inhérente à l’accomplissement de sa propre fonction, notamment en vue de vérifier, le cas échéant, comme toute juridiction en a l’obligation, sa propre compétence (arrêt Zabala Erasun e.a., précité, point 16).

32      En l’occurrence, il ressort des courriers parvenus à la Cour après que la demande de décision préjudicielle a été déposée que, d’une part, Fluxys a renoncé aux moyens présentés devant la juridiction de renvoi portant sur l’illégalité de la méthode de fixation des tarifs appliquée par la CREG dans la décision attaquée devant la juridiction de renvoi et qu’elle ne poursuit plus l’annulation des décisions attaquées devant la cour d’appel de Bruxelles que pour ce qui concerne les contrats historiques bénéficiant d’une exemption conformément à l’article 32, paragraphe 1, de la directive 2003/55. D’autre part, par suite de l’arrêt de la Cour constitutionnelle du 8 juillet 2010, la réglementation nationale applicable par la juridiction de renvoi n’est plus celle prise en considération dans le cadre de la demande de décision préjudicielle.

33      Dans ces conditions, la Cour ne peut que constater, d’une part, que le cadre juridique national dans lequel s’inscrit le litige au principal n’est plus celui décrit par la cour d’appel de Bruxelles dans sa décision de renvoi, alors même que, selon cette juridiction, les règles nationales de nouveau applicables par suite de l’arrêt de la Cour constitutionnelle susmentionné susciteraient la même question quant à leur compatibilité avec le droit de l’Union que celles ayant été annulées par cet arrêt, et, d’autre part, que la partie requérante au principal ne se prévaut plus d’une violation par la CREG de l’article 15/5 quinquies de la loi gaz.

34      Il en résulte que, compte tenu de l’évolution du litige devant la juridiction de renvoi, tant du point de vue procédural que de celui du droit applicable, la Cour ne se trouve plus en mesure de statuer sur la question qui lui a été posée.

 Sur les dépens

35      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) dit pour droit:

Il n’y a plus lieu de répondre à la question préjudicielle posée dans l’affaire C‑241/09.

Signatures


* Langue de procédure: le français.