ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

16 juillet 2009 ( *1 )

«Manquement d’État — Évaluation des incidences de projets sur l’environnement — Directive 85/337/CEE — Accès à la justice — Directive 2003/35/CE»

Dans l’affaire C-427/07,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 226 CE, introduit le 14 septembre 2007,

Commission des Communautés européennes, représentée par Mme D. Recchia, MM. P. Oliver et J.-B. Laignelot, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

Irlande, représentée par M. D. O’Hagan, en qualité d’agent, assisté de M. M. Collins, SC, et de M. D. McGrath, BL, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de M. C. W. A. Timmermans, président de chambre, MM. J.-C. Bonichot, K. Schiemann, J. Makarczyk (rapporteur) et Mme C. Toader, juges,

avocat général: Mme J. Kokott,

greffier: Mme K. Sztranc-Sławiczek, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 27 novembre 2008,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 15 janvier 2009,

rend le présent

Arrêt

1

Par sa requête, la Commission des Communautés européennes demande à la Cour de constater que:

en n’adoptant pas, conformément aux articles 2, paragraphe 1, et 4, paragraphes 2 à 4, de la directive 85/337/CEE du Conseil, du 27 juin 1985, concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement (JO L 175, p. 40), telle que modifiée par la directive 97/11/CE du Conseil, du 3 mars 1997 (JO L 73, p. 5, ci-après la «directive 85/337 modifiée par la directive 97/11»), toutes les dispositions nécessaires pour que, avant l’octroi de l’autorisation, les projets susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement appartenant à la catégorie de construction routière couverte par l’annexe II, point 10, sous e), de la directive 85/337 modifiée par la directive 97/11 soient soumis, conformément aux articles 5 à 10 de cette directive modifiée, à une procédure de demande d’autorisation et à une évaluation en ce qui concerne leurs incidences, et

en n’adoptant pas toutes les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer aux articles 3, points 1 et 3 à 7, et 4, points 1 à 6, de la directive 2003/35/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 mai 2003, prévoyant la participation du public lors de l’élaboration de certains plans et programmes relatifs à l’environnement, et modifiant, en ce qui concerne la participation du public et l’accès à la justice, les directives 85/337/CEE et 96/61/CE du Conseil (JO L 156, p. 17), ou, en tout état de cause, en ne notifiant pas lesdites dispositions à la Commission,

l’Irlande a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu, respectivement, de la directive 85/337 modifiée par la directive 97/11 et de l’article 6 de la directive 2003/35.

Le cadre juridique

La réglementation communautaire

La directive 2003/35

2

L’article 1er de la directive 2003/35 dispose:

«La présente directive vise à contribuer à la mise en œuvre des obligations découlant de la convention d’Aarhus [sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement], en particulier:

a)

en prévoyant la participation du public lors de l’élaboration de certains plans et programmes relatifs à l’environnement;

b)

en améliorant la participation du public et en prévoyant des dispositions relatives à l’accès à la justice dans les directives 85/337[…] et 96/61/CE du Conseil.»

3

Aux termes de l’article 6 de la directive 2003/35:

«Les États membres mettent en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive au plus tard le 25 juin 2005. Ils en informent immédiatement la Commission.

Lorsque les États membres adoptent ces dispositions, celles-ci contiennent une référence à la présente directive ou sont accompagnées d’une telle référence lors de leur publication officielle. Les modalités de cette référence sont arrêtées par les États membres.»

La directive 85/337

4

Conformément à l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 85/337, tel que modifié par l’article 3, point 1, de la directive 2003/35, il y a lieu d’entendre par:

«[…]

public:

 

une ou plusieurs personnes physiques ou morales et, conformément à la législation ou à la pratique nationales, les associations, organisations ou groupes constitués par ces personnes;

public concerné:

 

le public qui est touché ou qui risque d’être touché par les procédures décisionnelles en matière d’environnement visé à l’article 2, paragraphe 2, ou qui a un intérêt à faire valoir dans ce cadre; aux fins de la présente définition, les organisations non gouvernementales qui œuvrent en faveur de la protection de l’environnement et qui remplissent les conditions pouvant être requises en droit interne sont réputées avoir un intérêt.»

5

Aux termes de l’article 2, paragraphes 1 et 3, de la directive 85/337, tel que modifié par l’article 3, point 3, de la directive 2003/35:

«1.   Les États membres prennent les dispositions nécessaires pour que, avant l’octroi de l’autorisation, les projets susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement, notamment en raison de leur nature, de leurs dimensions ou de leur localisation, soient soumis à une procédure de demande d’autorisation et à une évaluation en ce qui concerne leurs incidences. Ces projets sont définis à l’article 4.

[…]

3.   Sans préjudice de l’article 7, les États membres peuvent, dans des cas exceptionnels, exempter, en totalité ou en partie, un projet spécifique des dispositions prévues par la présente directive.

Dans ce cas, les États membres:

a)

examinent si une autre forme d’évaluation conviendrait;

b)

mettent à la disposition du public concerné les informations obtenues dans le cadre d’autres formes d’évaluation visée au point a), les informations relatives à la décision d’exemption et les raisons pour lesquelles elle a été accordée;

[…]»

6

L’article 4 de la directive 85/337 modifiée par la directive 97/11 dispose:

«1.   Sous réserve de l’article 2 paragraphe 3, les projets énumérés à l’annexe I sont soumis à une évaluation, conformément aux articles 5 à 10.

2.   Sous réserve de l’article 2 paragraphe 3, les États membres déterminent, pour les projets énumérés à l’annexe II:

a)

sur la base d’un examen cas par cas,

ou

b)

sur la base des seuils ou critères fixés par l’État membre,

si le projet doit être soumis à une évaluation conformément aux articles 5 à 10.

Les États membres peuvent décider d’appliquer les deux procédures visées aux points a) et b).

3.   Pour l’examen cas par cas ou la fixation des seuils ou critères fixés en application du paragraphe 2, il est tenu compte des critères de sélection pertinents fixés à l’annexe III.

4.   Les États membres s’assurent que les décisions prises par les autorités compétentes en vertu du paragraphe 2 sont mises à la disposition du public.»

7

L’article 5 de la directive 85/337 modifiée par la directive 97/11 prévoit:

«1.   Dans le cas des projets qui, en application de l’article 4, doivent être soumis à une évaluation des incidences sur l’environnement, conformément aux articles 5 à 10, les États membres adoptent les mesures nécessaires pour s’assurer que le maître d’ouvrage fournit, sous une forme appropriée, les informations spécifiées à l’annexe IV, dans la mesure où:

a)

les États membres considèrent que ces informations sont appropriées à un stade donné de la procédure d’autorisation, par rapport aux caractéristiques spécifiques d’un projet donné ou d’un type de projet et par rapport aux éléments environnementaux susceptibles d’être affectés;

b)

les États membres considèrent que l’on peut raisonnablement exiger d’un maître d’ouvrage qu’il rassemble ces données compte tenu, entre autres, des connaissances et des méthodes d’évaluation existantes.

[…]

3.   Les informations à fournir par le maître d’ouvrage, conformément au paragraphe 1, comportent au minimum:

une description du projet comportant des informations relatives au site, à la conception et aux dimensions du projet,

une description des mesures envisagées pour éviter et réduire des effets négatifs importants et, si possible, y remédier,

les données nécessaires pour identifier et évaluer les effets principaux que le projet est susceptible d’avoir sur l’environnement,

une esquisse des principales solutions de substitution qui ont été examinées par le maître d’ouvrage et une indication des principales raisons de son choix, eu égard aux effets sur l’environnement,

un résumé non technique des informations visées aux tirets précédents.

[…]»

8

L’article 6, paragraphes 2 à 6, de la directive 85/337, tel que modifié par l’article 3, point 4, de la directive 2003/35, est ainsi rédigé:

«2.   À un stade précoce des procédures décisionnelles en matière d’environnement visé à l’article 2, paragraphe 2, et au plus tard dès que ces informations peuvent raisonnablement être fournies, les informations suivantes sont communiquées au public par des avis au public ou d’autres moyens appropriés tels que les moyens de communication électroniques lorsqu’ils sont disponibles:

a)

la demande d’autorisation;

b)

le fait que le projet fait l’objet d’une procédure d’évaluation des incidences sur l’environnement et que, le cas échéant, l’article 7 est applicable;

c)

les coordonnées des autorités compétentes pour prendre la décision, de celles auprès desquelles peuvent être obtenus des renseignements pertinents, de celles auxquelles des observations ou questions peuvent être adressées ainsi que des précisions sur les délais de transmission des observations ou des questions;

d)

la nature des décisions possibles ou, lorsqu’il existe, le projet de décision;

e)

une indication concernant la disponibilité des informations recueillies en vertu de l’article 5;

f)

une indication de la date et du lieu où les renseignements pertinents seront mis à la disposition du public et des moyens par lesquels ils le seront;

g)

les modalités précises de la participation du public prévues au titre du paragraphe 5 du présent article.

3.   Les États membres veillent à ce que soient mis, dans des délais raisonnables, à la disposition du public concerné:

a)

toute information recueillie en vertu de l’article 5;

b)

conformément à la législation nationale, les principaux rapports et avis adressés à l’autorité ou aux autorités compétentes au moment où le public concerné est informé conformément au paragraphe 2 du présent article;

c)

conformément à la directive 2003/4/CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 concernant l’accès du public à l’information en matière d’environnement […], les informations autres que celles visées au paragraphe 2 du présent article qui sont pertinentes pour la décision en vertu de l’article 8 et qui ne deviennent disponibles qu’après que le public concerné a été informé conformément au paragraphe 2 du présent article.

4.   À un stade précoce de la procédure, le public concerné se voit donner des possibilités effectives de participer au processus décisionnel en matière d’environnement visé à l’article 2, paragraphe 2, et, à cet effet, il est habilité à adresser des observations et des avis, lorsque toutes les options sont envisageables, à l’autorité ou aux autorités compétentes avant que la décision concernant la demande d’autorisation ne soit prise.

5.   Les modalités précises de l’information du public (par exemple, affichage dans un certain rayon ou publication dans la presse locale) et de la consultation du public concerné (par exemple, par écrit ou par enquête publique) sont déterminées par les États membres.

6.   Des délais raisonnables sont prévus à chacune des différentes étapes afin que suffisamment de temps soit disponible pour informer le public et permettre au public concerné de se préparer et de participer effectivement à la prise de décision sur l’environnement en vertu des dispositions du présent article.»

9

L’article 7 de la directive 85/337, tel que modifié par l’article 3, point 5, de la directive 2003/35, prévoit:

«1.   Lorsqu’un État membre constate qu’un projet est susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement d’un autre État membre ou lorsqu’un État membre susceptible d’être affecté notablement le demande, l’État membre sur le territoire duquel il est envisagé de réaliser le projet transmet à l’État membre affecté, le plus rapidement possible, et au plus tard au moment où il informe son propre public, notamment:

a)

une description du projet, accompagnée de toute information disponible quant à ses incidences transfrontalières éventuelles;

b)

des informations quant à la nature de la décision susceptible d’être prise,

et il donne à l’autre État membre un délai raisonnable pour indiquer s’il souhaite participer aux procédures décisionnelles en matière d’environnement visé à l’article 2, paragraphe 2, et il peut inclure les informations visées au paragraphe 2 du présent article.

2.   Si un État membre qui reçoit des informations conformément au paragraphe 1 indique qu’il a l’intention de participer aux procédures décisionnelles en matière d’environnement visé à l’article 2, paragraphe 2, l’État membre sur le territoire duquel il est envisagé de réaliser le projet transmet à l’État membre affecté, s’il ne l’a pas encore fait, l’information devant être transmise en vertu de l’article 6, paragraphe 2, et mise à disposition en vertu de l’article 6, paragraphe 3, points a) et b).

[…]

5.   Les modalités précises de mise en œuvre du présent article peuvent être déterminées par les États membres concernés et doivent permettre au public concerné sur le territoire de l’État membre affecté de participer de manière effective, en ce qui concerne le projet, au processus décisionnel en matière d’environnement visé à l’article 2, paragraphe 2.»

10

L’article 9 de la directive 85/337, tel que modifié par l’article 3, point 6, de la directive 2003/35, dispose:

«1.   Lorsqu’une décision d’accorder ou de refuser une autorisation a été prise, la ou les autorité(s) compétente(s) en informe(nt) le public, conformément aux procédures appropriées, et met(tent) à sa disposition les informations suivantes:

la teneur de la décision et les conditions dont la décision est éventuellement assortie,

après examen des préoccupations et des avis exprimés par le public concerné, les principales raisons et considérations sur lesquelles la décision est fondée, y compris l’information concernant le processus de participation du public,

une description, le cas échéant, des principales mesures permettant d’éviter, de réduire et, si possible, d’annuler les effets négatifs les plus importants.

2.   La ou les autorité(s) compétente(s) informe(nt) tout État membre qui a été consulté conformément à l’article 7, en lui transmettant les informations visées au paragraphe 1 du présent article.

Les États membres consultés veillent à ce que ces informations soient mises, d’une manière appropriée, à la disposition du public concerné sur leur propre territoire.»

11

L’article 10 bis de la directive 85/337, inséré par l’article 3, point 7, de la directive 2003/35, est ainsi rédigé:

«Les États membres veillent, conformément à leur législation nationale pertinente, à ce que les membres du public concerné:

a)

ayant un intérêt suffisant pour agir, ou sinon

b)

faisant valoir une atteinte à un droit, lorsque le droit administratif procédural d’un État membre impose une telle condition,

puissent former un recours devant une instance juridictionnelle ou un autre organe indépendant et impartial établi par la loi pour contester la légalité, quant au fond ou à la procédure, des décisions, des actes ou omissions relevant des dispositions de la présente directive relatives à la participation du public.

Les États membres déterminent à quel stade les décisions, actes ou omissions peuvent être contestés.

Les États membres déterminent ce qui constitue un intérêt suffisant pour agir ou une atteinte à un droit, en conformité avec l’objectif visant à donner au public concerné un large accès à la justice. À cette fin, l’intérêt de toute organisation non gouvernementale, répondant aux exigences visées à l’article 1er, paragraphe 2, est réputé suffisant aux fins du point a) du présent article. De telles organisations sont aussi réputées bénéficier de droits susceptibles de faire l’objet d’une atteinte aux fins du point b) du présent article.

Le présent article n’exclut pas la possibilité d’un recours préalable devant une autorité administrative et n’affecte en rien l’obligation d’épuiser toutes les voies de recours administratif avant d’engager des procédures de recours juridictionnel dès lors que la législation nationale prévoit une telle obligation.

Ces procédures doivent être régulières, équitables, rapides et d’un coût non prohibitif.

Afin d’accroître l’efficacité des dispositions du présent article, les États membres veillent à ce qu’une information pratique soit mise à la disposition du public concernant l’accès aux voies de recours administratif et juridictionnel.»

12

L’annexe II de la directive 85/337 modifiée par la directive 97/11 énumère les projets visés à l’article 4, paragraphe 2, de cette directive modifiée. Au point 10, sous e), de cette annexe, sous le titre «Projets d’infrastructure», figurent les constructions de routes, de ports et d’installations portuaires, y compris de ports de pêche (projets non visés à l’annexe I).

La directive 96/61/CE

13

Conformément à l’article 2, points 13 et 14, de la directive 96/61/CE du Conseil, du 24 septembre 1996, relative à la prévention et à la réduction intégrées de la pollution (JO L 257, p. 26), tel que modifié par l’article 4, point 1, de la directive 2003/35, il convient d’entendre par:

«13)

‘public’: une ou plusieurs personnes physiques ou morales et, conformément à la législation ou à la pratique du pays, les associations, organisations ou groupes constitués par ces personnes;

14)

‘public concerné’: le public qui est touché ou qui risque d’être touché par une décision concernant la délivrance ou l’actualisation d’une autorisation ou des conditions dont elle est assortie ou qui a un intérêt à faire valoir à cet égard; aux fins de la présente définition, les organisations non gouvernementales qui œuvrent en faveur de la protection de l’environnement et qui remplissent les conditions pouvant être requises en droit interne sont réputées avoir un intérêt.»

14

L’article 15, paragraphes 1 et 5, de la directive 96/61, tel que modifié par l’article 4, point 3, de la directive 2003/35, est ainsi rédigé:

«1.   Les États membres veillent à ce que soient données au public concerné, en temps voulu, des possibilités effectives de participer au processus:

de délivrance d’une autorisation pour de nouvelles installations,

de délivrance d’une autorisation pour toute modification substantielle de l’exploitation d’une installation,

d’actualisation, conformément à l’article 13, paragraphe 2, premier tiret, d’une autorisation pour une installation ou des conditions dont elle est assortie.

La procédure décrite à l’annexe V s’applique aux fins de cette participation.

[…]

5.   Lorsqu’une décision a été prise, l’autorité compétente en informe le public selon les procédures appropriées et met à sa disposition les informations suivantes:

a)

la teneur de la décision, y compris une copie de l’autorisation et des conditions dont elle est assortie et des éventuelles actualisations ultérieures, et

b)

après examen des préoccupations et des avis exprimés par le public concerné, les raisons et considérations sur lesquelles la décision est fondée, y compris l’information concernant le processus de participation du public.»

15

L’article 15 bis de la directive 96/61, inséré par l’article 4, point 4, de la directive 2003/35, prévoit:

«Les États membres veillent, conformément à leur législation nationale pertinente, à ce que les membres du public concerné:

a)

ayant un intérêt suffisant pour agir, ou sinon

b)

faisant valoir une atteinte à un droit, lorsque les dispositions de procédure administrative d’un État membre imposent une telle condition,

puissent former un recours devant une instance juridictionnelle ou un autre organe indépendant et impartial établi par la loi pour contester la légalité, quant au fond ou à la procédure, des décisions, des actes ou omissions relevant des dispositions de la présente directive relatives à la participation du public.

Les États membres déterminent à quel stade les décisions, actes ou omissions peuvent être contestés.

Les États membres déterminent ce qui constitue un intérêt suffisant pour agir ou une atteinte à un droit, en conformité avec l’objectif visant à donner au public concerné un large accès à la justice. À cette fin, l’intérêt de toute organisation non gouvernementale, répondant aux exigences visées à l’article 2, point 14), est réputé suffisant aux fins du point a) du présent article. De telles organisations sont aussi réputées bénéficier de droits susceptibles de faire l’objet d’une atteinte au sens du point b) du présent article.

Le présent article n’exclut pas la possibilité d’un recours préalable devant une autorité administrative et n’affecte en rien l’obligation d’épuiser toutes les voies de recours administratif avant d’engager des procédures de recours juridictionnel dès lors que la législation nationale prévoit une telle obligation.

Ces procédures doivent être régulières, équitables, rapides et d’un coût non prohibitif.

Afin d’accroître l’efficacité des dispositions du présent article, les États membres veillent à ce qu’une information pratique concernant l’accès aux voies de recours administratif et juridictionnel soit mise à la disposition du public.»

La réglementation nationale

16

Selon les dispositions combinées de l’article 176 de la loi sur l’aménagement du territoire et le développement de 2000 (Public Act no 30/2000, Planning and Development Act, 2000), telle que modifiée par la loi sur l’aménagement du territoire et le développement (infrastructure stratégique) de 2006 [Public Act no 27/2006, Planning and Development (Strategic Infrastructure) Act, 2006, Order 2006, S. I. no 525/2006] (ci-après le «PDA»), et de l’annexe 5 des règlements sur l’aménagement du territoire et le développement de 2001 (Planning and Development Regulations 2001, S. I. no 600/2001), un rapport d’impact sur l’environnement et une évaluation des incidences sur l’environnement sont obligatoires pour certains projets, lorsque certains seuils sont dépassés, projets parmi lesquels ne figure pas la catégorie particulière des projets de voies privées.

17

La procédure de recours juridictionnel («judicial review») est régie par l’Order 84 des règles des cours supérieures (Rules of the Superior Courts), lesdites cours ayant compétence pour contrôler, sous certaines conditions, les décisions des tribunaux et des organismes administratifs.

18

Des moyens, tant de droit public que de droit privé, peuvent être soulevés dans le cadre de la procédure de recours juridictionnel, les moyens traditionnels de droit public ayant trait au contrôle de l’excès de pouvoir et au contrôle de l’exercice de leur compétence par lesdits tribunaux et organismes.

19

Le recours juridictionnel est une procédure en deux étapes. Une demande d’autorisation d’introduction d’un tel recours doit être déposée devant la cour, accompagnée de l’exposé des motifs identifiant la réparation demandée et d’une déclaration exposant les faits sur lesquels elle se fonde. Si l’autorisation est accordée, le demandeur peut introduire la procédure de recours juridictionnel.

20

Une procédure légale spécifique s’applique aux demandes de recours juridictionnel dirigées contre les décisions des autorités compétentes en matière d’urbanisme, qui est régie par les articles 50 et 50A du PDA.

21

Aux termes de l’article 50A(3) du PDA:

«La juridiction n’accordera pas l’autorisation prévue à l’article 50 avant d’avoir acquis la conviction

(a)

qu’il existe des motifs sérieux d’affirmer que la décision ou l’acte concerné est invalide ou devra être invalidé, et

(b)

que

(i)

le demandeur a un intérêt substantiel dans l’opération qui est l’objet de la demande ou

(ii)

lorsque la décision ou l’acte concerné porte sur un projet identifié par l’article 176, en vigueur actuellement, ou par des dispositions prises en application de celui-ci comme étant un projet susceptible d’avoir des effets importants sur l’environnement, le requérant

(I)

est une institution ou un organisme (autre qu’une autorité de l’État, un pouvoir public ou un organisme ou agence gouvernemental) dont les buts et objectifs concernent la promotion de la protection de l’environnement,

(II)

a poursuivi ces buts ou objectifs durant la période de douze mois précédant la date d’introduction du recours et

(III)

remplit les (éventuelles) conditions qu’un établissement ou organisme devrait remplir en cas de recours fondé sur l’article 37(4)(c) en vertu de l’article 37(4)(d)(iii) (et à cette fin, toute condition imposée par l’article 37(4)(e)(iv) s’appliquera comme si la référence qu’il contient à la classe d’opérations dont relève la décision contre laquelle est dirigé le recours était une référence à la classe d’opérations dont relève la décision ou l’acte qui est l’objet de la demande d’autorisation prévue à l’article 50).»

22

L’article 50A(4) du PDA précise que l’intérêt substantiel requis ne se limite pas aux intérêts immobiliers ou financiers.

23

L’article 50A(10) et (11)(b) du PDA engage les juridictions à traiter les procédures dont elles ont été saisies avec toute la diligence que permet une bonne administration de la justice. L’article 50(A)(12) du PDA permet d’adopter des règles additionnelles visant à accélérer la procédure.

La procédure précontentieuse

24

La Commission a regroupé dans le présent recours des griefs résultant de deux procédures précontentieuses.

25

En premier lieu, la Commission a enregistré, au cours de l’année 2001, une plainte dirigée contre l’Irlande et portant sur l’atteinte causée à une zone côtière située à Commogue Marsh, Kinsale, dans le comté de Cork, par un projet routier privé. Le 18 octobre 2002, la Commission a envoyé une lettre de mise en demeure à l’Irlande indiquant qu’aucune autorisation ne semblait avoir été accordée pour le projet en cause et qu’aucune évaluation préalable des incidences de ce dernier sur l’environnement n’avait été effectuée malgré le caractère sensible du site, contrairement aux exigences posées par la directive 85/337 modifiée par la directive 97/11.

26

Cet État membre a répondu à ladite lettre de mise en demeure le 5 mars 2003 en indiquant que le projet en cause faisait partie d’un chantier qui avait fait l’objet d’une autorisation.

27

N’étant pas satisfaite de cette réponse, la Commission a émis un avis motivé le 11 juillet 2003, invitant l’Irlande à prendre les mesures nécessaires pour se conformer à la directive 85/337 modifiée par la directive 97/11 dans un délai de deux mois à compter de la notification dudit avis.

28

L’Irlande a demandé, par lettre du 9 septembre 2003, une prolongation du délai de deux mois afin de répondre à l’avis motivé, ce qu’elle a fait par lettre du 10 novembre 2003.

29

En second lieu, la Commission a adressé à l’Irlande, le 28 juillet 2005, une lettre de mise en demeure portant sur la transposition de la directive 2003/35, invitant cet État membre à lui soumettre ses observations dans un délai de deux mois à compter de la réception de cette lettre.

30

L’Irlande a répondu par lettre du 7 septembre 2005, admettant n’avoir que partiellement transposé la directive 2003/35.

31

La Commission a émis un avis motivé le 19 décembre 2005 invitant l’Irlande à prendre les mesures nécessaires pour se conformer à ladite directive dans un délai de deux mois à compter de la réception dudit avis.

32

L’Irlande, par lettre du 14 février 2006, a précisé que des mesures de transpositions étaient en cours d’élaboration.

33

Le 18 octobre 2006, la Commission a émis un avis motivé complémentaire demandant à l’Irlande d’adopter les mesures nécessaires pour répondre audit avis dans les deux mois à compter de sa réception. Cet État membre a répondu le 27 février 2007, en dehors du délai imparti par la Commission.

34

N’étant pas satisfaite des réponses apportées par l’Irlande dans le cadre de ces deux procédures précontentieuses, la Commission a, en vertu de l’article 226, second alinéa, CE, introduit le présent recours.

Sur le recours

35

Le recours de la Commission repose sur deux griefs.

Sur le premier grief

Argumentation des parties

36

La Commission estime que la construction d’une voirie privée constitue un projet d’infrastructure qui relève de l’annexe II, point 10, sous e), de la directive 85/337 modifiée par la directive 97/11 et que, en conséquence, les autorités irlandaises sont tenues, conformément à l’article 2 de cette directive modifiée, de veiller à ce que, avant l’octroi de l’autorisation, de tels projets soient soumis à une évaluation en ce qui concerne leurs incidences sur l’environnement s’il est estimé que ceux-ci sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement.

37

La législation irlandaise, en limitant l’exigence d’effectuer une évaluation des incidences sur l’environnement aux projets de voiries publiques proposés par les autorités publiques, méconnaîtrait donc les exigences communautaires.

38

L’Irlande fait valoir que les projets de construction de voies privées, dont elle ne consteste pas qu’ils relèvent de l’annexe II, point 10, sous e), de la directive 85/337 modifiée par la directive 97/11, font presque toujours partie intégrante d’autres projets qui sont, pour leur part, soumis à l’exigence de l’évaluation de leurs incidences sur l’environnement en application des dispositions combinées de l’article 176 du PDA et de l’annexe 5 des règlements sur l’aménagement du territoire et le développement de 2001 lorsqu’ils sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement.

39

Cet État membre admet par ailleurs que la directive 85/337 modifiée par la directive 97/11 ne fait pas de distinction entre les projets routiers privés et publics et il indique avoir l’intention de modifier sa législation afin de faire des projets routiers une catégorie à part entière, soumise à l’exigence de l’évaluation des incidences sur l’environnement si le projet routier est susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement.

Appréciation de la Cour

40

Les États membres, en application de l’article 4, paragraphe 2, de la directive 85/337 modifiée par la directive 97/11, déterminent, pour les projets qui appartiennent aux classes énumérées à l’annexe II de cette directive modifiée, soit sur la base d’un examen cas par cas, soit sur la base de seuils ou critères, si lesdits projets doivent être soumis à une évaluation de leurs incidences sur l’environnement conformément aux articles 5 à 10 de ladite directive. Selon cette même disposition, les États membres peuvent aussi décider d’appliquer ces deux procédures.

41

Si les États membres se voient ainsi conférer une marge d’appréciation pour spécifier certains types de projets à soumettre à une évaluation ou pour fixer des critères et/ou seuils à retenir, celle-ci trouve ses limites dans l’obligation, énoncée à l’article 2, paragraphe 1, de la directive 85/337 modifiée par la directive 97/11, de soumettre à une étude d’incidences les projets susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement, notamment en raison de leur nature, de leurs dimensions ou de leur localisation (voir arrêts du 24 octobre 1996, Kraaijeveld e.a., C-72/95, Rec. p. I-5403, point 50; du 28 février 2008, Abraham e.a., C-2/07, Rec. p. I-1197, point 37, ainsi que du 30 avril 2009, Mellor, C-75/08, Rec. p. I-3799, point 50).

42

À cet égard, la Cour a déjà jugé qu’un État membre qui fixerait les critères ou les seuils à un niveau tel que, en pratique, la totalité d’une classe de projets serait d’avance soustraite à l’obligation d’étude d’incidences outrepasserait la marge d’appréciation dont il dispose en vertu des articles 2, paragraphe 1, et 4, paragraphe 2, de ladite directive modifiée, sauf si la totalité des projets exclus pouvait être considérée, sur la base d’une appréciation globale, comme n’étant pas susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement (voir arrêts Kraaijeveld e.a., précité, point 53, ainsi que du 16 septembre 1999, WWF e.a., C-435/97, Rec. p. I-5613, point 38).

43

Au titre des projets qui relèvent de l’article 4, paragraphe 2, de la directive 85/337 modifiée par la directive 97/11, l’annexe II, point 10, sous e), de cette directive modifiée vise la «construction de routes».

44

À cet égard, en ne soumettant les projets de construction de routes privées à une évaluation de leurs incidences sur l’environnement que dans l’hypothèse où ces projets s’inscrivaient dans le cadre d’autres projets, entrant dans le champ d’application de la directive 85/337 modifiée par la directive 97/11, et eux-mêmes soumis à l’obligation d’évaluation, la législation irlandaise, telle qu’applicable à l’expiration du délai fixé dans l’avis motivé, avait pour effet de faire échapper à l’évaluation de ses incidences sur l’environnement tout projet de construction d’une route privée réalisé isolément, même si ledit projet était susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement.

45

Il convient, en outre, de relever que le critère tenant à la nature privée ou publique d’une route ne revêt aucune pertinence quant à l’applicabilité de l’annexe II, point 10, sous e), de la directive 85/337 modifiée par la directive 97/11.

46

Partant, le premier grief est fondé.

Sur le second grief

47

Il ressort du dernier état des écritures de la Commission que, selon celle-ci et eu égard au retrait des griefs concernant l’article 4, points 1, 5 et 6, de la directive 2003/35, la transposition faite par l’Irlande reste incomplète en ce qui concerne les articles 3, points 1 et 3 à 7, et 4, points 2 à 4, de cette directive, d’où il résulterait un manquement aux obligations découlant de l’article 6 de ladite directive.

48

Par ailleurs, la Commission estime que, en tout état de cause, l’Irlande n’a pas communiqué dans les délais prescrits les dispositions censées mettre en œuvre les articles susmentionnés, contrairement aux prescriptions dudit article 6.

49

Le second grief, pris dans ses différentes branches, tel qu’invoqué en substance par la Commission porte ainsi exclusivement sur l’absence de transposition de certaines dispositions de la directive 2003/35, comme la Commission l’a, au demeurant, confirmé lors de l’audience, sans, dès lors, que la qualité de la transposition soit critiquée et, partant, puisse être utilement mise en cause par celle-ci dans le cadre de la présente affaire.

50

En outre, il convient de relever que les dispositions du PDA visées dans le présent recours sont celles qui résultent des modifications introduites par la loi modificative de 2006 mentionnée au point 16 du présent arrêt, lesdites modifications, ainsi que l’a relevé Mme l’avocat général au point 53 de ses conclusions, étant entrées en vigueur le 17 octobre 2006, soit avant l’expiration du délai fixé dans l’avis motivé complémentaire.

Sur l’exigence de transposition des dispositions de l’article 3, point 1, de la directive 2003/35

— Argumentation des parties

51

S’agissant de l’article 3, point 1, de la directive 2003/35, la Commission fait valoir que les autorités irlandaises doivent adopter des dispositions garantissant que les notions de «public» et de «public concerné» ne soient pas définies de manière plus restrictive dans la législation irlandaise que dans la directive 2003/35. Elle souligne que, en particulier, les droits conférés aux organisations non gouvernementales ne sont pas suffisamment garantis, ainsi que cela ressort de la jurisprudence, alors que ladite directive confère à ces dernières certains droits en tant que public concerné.

52

L’Irlande rétorque que, à la lumière de l’obligation générale d’interpréter le droit national conformément aux dispositions du droit communautaire qui s’impose en particulier aux juridictions, l’introduction de dispositions législatives visant à définir les notions de «public» et de «public concerné» n’est pas nécessaire pour donner plein effet à ces définitions. Elle ajoute que les droits nouvellement conférés sont déjà garantis à l’ensemble du public et qu’il n’est, dès lors, pas nécessaire de donner une définition particulière de la notion de «public concerné».

53

L’Irlande fait également valoir que, en application de l’article 50A(3)(b)(ii) du PDA, les organisations non gouvernementales qui œuvrent en faveur de l’environnement sont exonérées de l’obligation de démontrer qu’elles possèdent un intérêt à agir substantiel.

— Appréciation de la Cour

54

Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la transposition en droit interne d’une directive n’exige pas nécessairement une reprise formelle et textuelle des dispositions de celle-ci dans une disposition légale ou réglementaire expresse et spécifique et peut se satisfaire d’un contexte juridique général, dès lors que celui-ci assure effectivement la pleine application de la directive d’une façon suffisamment claire et précise (voir, notamment, arrêts du 16 novembre 2000, Commission/Grèce, C-214/98, Rec. p. I-9601, point 49; du 7 décembre 2000, Commission/France, C-38/99, Rec. p. I-10941, point 53, et du 30 novembre 2006, Commission/Luxembourg, C-32/05, Rec. p. I-11323, point 34).

55

Il résulte d’une jurisprudence également constante que les dispositions d’une directive doivent être mises en œuvre avec une force contraignante incontestable, avec la spécificité, la précision et la clarté requises, afin que soit satisfaite l’exigence de la sécurité juridique qui requiert que, au cas où la directive vise à créer des droits pour les particuliers, les bénéficiaires soient mis en mesure de connaître la plénitude de leurs droits (voir, notamment, arrêts du 13 mars 1997, Commission/France, C-197/96, Rec. p. I-1489, point 15; du 4 décembre 1997, Commission/Italie, C-207/96, Rec. p. I-6869, point 26, et Commission/Luxembourg, précité, point 34).

56

Au regard de la finalité de l’article 3, point 1, de la directive 2003/35, qui consiste à ajouter des définitions à celles figurant à l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 85/337, et en particulier à indiquer ce que, au sens de cette dernière directive, on doit entendre par «public concerné», et alors que parallèlement la directive 2003/35 reconnaît des droits nouveaux audit public, il ne peut être déduit du défaut de reprise expresse de ces définitions dans la législation irlandaise que l’Irlande n’a pas rempli l’obligation de transposition des dispositions en cause qui lui incombe.

57

En effet, la portée de la nouvelle définition du «public concerné» ainsi introduite par la directive 2003/35 ne peut être analysée, ainsi que l’a relevé Mme l’avocat général aux points 36 et 37 de ses conclusions, qu’au regard de l’ensemble des droits que ladite directive reconnaît au «public concerné» s’agissant de deux aspects indissociables.

58

À cet égard, la Commission n’établit pas dans quelle mesure le «public concerné», entendu comme le public qui est touché ou qui risque d’être touché par les procédures décisionnelles en matière d’environnement ou qui a un intérêt à faire valoir dans ce cadre, ne dispose pas des droits dont il est censé bénéficier en application des modifications introduites par la directive 2003/35.

59

Enfin, il convient de relever que les arguments avancés par la Commission relatifs à l’appréhension par la jurisprudence du rôle des organisations non gouvernementales qui œuvrent dans le domaine de l’environnement en tant qu’appartenant au «public concerné» portent, à titre principal, sur d’éventuelles carences dans la mise en œuvre effective des droits dont lesdites organisations peuvent se prévaloir, notamment en matière de recours juridictionnel, et se situent, en conséquence, hors le champ du grief tiré du défaut de transposition dont la Cour est exclusivement saisie.

60

Il résulte de ce qui précède que le second grief en tant qu’il concerne l’exigence de transposition des dispositions de l’article 3, point 1, de la directive 2003/35 n’est pas fondé.

Sur l’exigence de transposition des articles 3, points 3 à 6, et 4, points 2 et 3, de la directive 2003/35

— Argumentation des parties

61

Selon la Commission, les articles 3, points 3 à 6, et 4, points 2 et 3, de la directive 2003/35 n’ont pas fait l’objet d’une transposition complète.

62

S’agissant de ces dispositions, l’Irlande fait valoir qu’il y a eu transposition en ce qui concerne le régime du permis d’urbanisme, mais elle admet qu’il était encore nécessaire, au terme du délai fixé dans l’avis motivé complémentaire, de transposer ces dispositions par l’adoption de mesures législatives relatives à d’autres procédures d’autorisation.

63

S’agissant des dispositions de l’article 4, points 2 et 3, de ladite directive, l’Irlande reconnaît qu’elle devait encore adopter et notifier certaines mesures relatives à la pleine transposition de ces dispositions à l’expiration du délai fixé dans ledit avis motivé.

— Appréciation de la Cour

64

Il importe de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’existence d’un manquement doit être appréciée en fonction de la situation de l’État membre telle qu’elle se présentait au terme du délai fixé dans l’avis motivé (voir, notamment, arrêts du 4 juillet 2002, Commission/Grèce, C-173/01, Rec. p. I-6129, point 7, et du 10 avril 2003, Commission/France, C-114/02, Rec. p. I-3783, point 9).

65

Il est constant que, à l’expiration du délai fixé dans l’avis motivé complémentaire, l’Irlande n’avait pas adopté les mesures législatives, réglementaires ou administratives de nature à assurer une transposition complète des articles 3, points 3 à 6, et 4, points 2 et 3, de la directive 2003/35. Les changements intervenus par la suite, postérieurement à l’introduction du recours en manquement ne peuvent, par ailleurs et selon une jurisprudence constante, être pris en considération par la Cour (voir, notamment, arrêt du 6 mars 2003, Commission/Luxembourg, C-211/02, Rec. p. I-2429, point 6).

66

Le second grief en tant qu’il concerne le défaut de transposition des articles 3, points 3 à 6, et 4, points 2 et 3, de la directive 2003/35 est donc fondé.

Sur l’exigence de transposition des articles 3, point 7, et 4, point 4, de la directive 2003/35

— Argumentation des parties

67

La Commission soutient que l’Irlande n’a pas transposé les exigences découlant des articles 3, point 7, et 4, point 4, de la directive 2003/35, dispositions par lesquelles ont été insérés, respectivement, l’article 10 bis de la directive 85/337 et l’article 15 bis de la directive 96/61. La Commission fait valoir cinq arguments au soutien de cette branche du second grief.

68

Par le premier argument, qui porte sur la notion d’intérêt suffisant pour agir posée aux articles 3, point 7, et 4, point 4, de la directive 2003/35, la Commission affirme que le critère tenant à la démonstration d’un «intérêt substantiel», qui trouve à s’appliquer dans le cadre de la procédure légale spécifique applicable aux demandes de recours juridictionnel contre les décisions des autorités compétentes en matière d’urbanisme prévue à l’article 50 du PDA, ne répond pas à la notion d’«intérêt suffisant» prévue par ladite directive.

69

La fixation d’un tel critère, plus strict que celui utilisé à l’article 10 bis de la directive 85/337, inséré par l’article 3, point 7, de la directive 2003/35, et à l’article 15 bis de la directive 96/61, inséré par l’article 4, point 4, de la même directive, équivaut, selon la Commission, à une non-transposition des exigences posées par la directive 2003/35.

70

Enfin, la Commission indique que deux décisions de la High Court (Irlande), respectivement des 14 juillet et 8 décembre 2006, rendues dans l’affaire Friends of the Curragh Environment Ltd, démontrent que le système de contrôle juridictionnel en vigueur en Irlande ne peut être considéré comme mettant en œuvre la directive 2003/35, la High Court ayant indiqué, dans le second de ces arrêts, à propos de l’examen de l’«intérêt substantiel», que cette directive n’avait pas été transposée en droit irlandais.

71

L’Irlande conteste la pertinence desdites décisions de la High Court, dans la mesure où celles-ci traitaient d’abord de la question de l’effet direct de la directive 2003/35.

72

Elle ajoute que l’arrêt rendu par la High Court, le 26 avril 2007, dans l’affaire Sweetman, établit, à l’inverse, que les dispositions susmentionnées de ladite directive sont mises en œuvre par la procédure de recours juridictionnel complétée par les règles de procédure spécifiques prévues dans certains codes, notamment l’article 50 du PDA, le critère tiré de l’intérêt substantiel ayant été qualifié par le juge de flexible et considéré comme n’étant pas en contradiction avec l’article 10 bis de la directive 85/337, inséré par l’article 3, point 7, de la directive 2003/35.

73

Par le deuxième argument, la Commission invoque l’absence de transposition de l’article 10 bis de la directive 85/337, inséré par l’article 3, point 7, de la directive 2003/35, et de l’article 15 bis de la directive 96/61, inséré par l’article 4, point 4, de la même directive, au motif que n’aurait pas été transposée en droit irlandais, contrairement au premier alinéa de chacun de ces articles, l’exigence selon laquelle le requérant peut contester la légalité quant au fond des décisions, actes ou omissions relevant des dispositions de chacune des directives relatives à la participation du public.

74

L’Irlande fait valoir, à cet égard, que lesdits articles exigent non pas qu’un contrôle exhaustif du fond d’une décision soit prévu, mais simplement que la possibilité soit offerte de contester la légalité au fond d’une décision. Or, un tel contrôle existerait en droit irlandais.

75

L’Irlande affirme également que les exigences posées à l’article 10 bis de la directive 85/337, inséré par l’article 3, point 7, de la directive 2003/35, et à l’article 15 bis de la directive 96/61, inséré par l’article 4, point 4, de la même directive, sont pleinement transposées en droit irlandais du fait de l’existence de la procédure de recours juridictionnel prévue devant les tribunaux irlandais. L’objectif du recours juridictionnel est de permettre une forme de contrôle des décisions et des actions des tribunaux ainsi que des organes administratifs, afin de garantir que les missions conférées à ces autorités sont remplies correctement et légalement.

76

Par ailleurs, selon cet État membre, une procédure de recours juridictionnel spécifique s’applique aux recours dirigés contre les autorités compétentes en matière d’urbanisme, laquelle est régie par les articles 50 et 50A du PDA.

77

La Commission soutient, par le troisième argument, qu’aucune mesure n’a été prise par l’Irlande pour assurer la transposition des exigences tenant à la rapidité des procédures prévues à l’article 10 bis de la directive 85/337, inséré par l’article 3, point 7, de la directive 2003/35, et à l’article 15 bis de la directive 96/61, inséré par l’article 4, point 4, de la même directive.

78

Elle invoque, dans le quatrième argument, le même défaut de transposition en ce qui concerne l’exigence tenant au coût non prohibitif desdites procédures, faisant valoir qu’il n’existe pas, en matière de dépens, de plafond applicable au montant que le plaignant débouté sera tenu de payer, aucune disposition légale ne contenant de référence au coût non prohibitif des procédures.

79

Selon l’Irlande, les procédures existantes sont régulières, équitables et n’ont pas un coût prohibitif. Elles permettraient, par ailleurs, de contrôler rapidement les décisions visées par les directives 85/337 et 96/61 modifiées par la directive 2003/35.

80

Enfin, par le cinquième argument, la Commission reproche à l’Irlande de ne pas avoir mis à la disposition du public, comme l’article 10 bis, sixième alinéa, de la directive 85/337, inséré par l’article 3, point 7, de la directive 2003/35, et l’article 15 bis, sixième alinéa, de la directive 96/61, inséré par l’article 4, point 4, de la même directive, lui imposent de le faire, les informations pratiques concernant l’accès aux voies de recours administratif et juridictionnel.

81

L’Irlande estime avoir satisfait à cette obligation dès lors que l’Order 84 des règles des cours supérieures, mentionné au point 17 du présent arrêt, est une disposition législative et qu’existe, par ailleurs, un site Internet du service des tribunaux irlandais qui décrit les différentes juridictions et leurs compétences et permet l’accès aux arrêts de la High Court.

— Appréciation de la Cour

82

En ce qui concerne le premier argument relatif à l’intérêt pour agir, il résulte de l’article 10 bis, premier alinéa, sous a) et b), de la directive 85/337, inséré par l’article 3, point 7, de la directive 2003/35, et de l’article 15 bis, premier alinéa, sous a) et b), de la directive 96/61, inséré par l’article 4, point 4, de la même directive, que les États membres doivent veiller, conformément à leur législation nationale pertinente, à ce que les membres du public concerné ayant un intérêt suffisant pour agir ou faisant valoir une atteinte à un droit lorsque le droit national impose une telle condition puissent former un recours dans les conditions précisées par ces dispositions, tout en déterminant ce qui constitue un tel intérêt suffisant ou une atteinte à un droit en conformité avec l’objectif visant à donner au public concerné un large accès à la justice.

83

Il est constant que, en permettant aux requérants, membres du «public concerné», qui peuvent se prévaloir d’un intérêt répondant aux conditions énoncées à l’article 50A(3) du PDA, d’engager des recours contre certaines mesures de planification, l’Irlande a adopté des dispositions par lesquelles le droit à l’accès à la justice conféré dans ce domaine spécifique dépend directement de l’existence d’un intérêt pour agir desdits requérants, ainsi que l’a relevé Mme l’avocat général au point 57 de ses conclusions.

84

À cet égard, dans la mesure où, ainsi qu’il a été dit au point 49 du présent arrêt, la Commission ne conteste que l’absence de transposition de certaines dispositions, ayant par ailleurs indiqué expressément ne pas entendre faire valoir une transposition incorrecte ou incomplète, il n’y a pas lieu de vérifier si le critère tiré de l’intérêt substantiel tel qu’appliqué et interprété par les juridictions irlandaises coïncide avec celui tiré de l’intérêt suffisant pour agir posé par la directive 2003/35, ce qui conduirait à s’interroger sur la qualité de la transposition au regard, en particulier, de la compétence que ladite directive reconnaît aux États membres pour déterminer la notion d’intérêt suffisant dans le respect de l’objectif qu’elle poursuit.

85

En outre, le second arrêt de la High Court dans l’affaire Friends of the Curragh Environment Ltd, dont se prévaut à titre principal la Commission, a été rendu sous l’empire de la législation applicable antérieurement aux modifications introduites dans le PDA en 2006 et il n’est, en tout état de cause, pas suffisant pour prouver le défaut de transposition reproché.

86

Le premier argument n’est donc pas fondé.

87

En ce qui concerne le deuxième argument, il est constant qu’il existe, en droit irlandais, outre la procédure légale spécifique applicable conformément aux articles 50 et 50A du PDA, le recours juridictionnel régi par l’Order 84 des règles des cours supérieures. Ces recours permettent de demander l’annulation de décisions ou actes, dans le cadre du contrôle des décisions et des actions des tribunaux ainsi que des organes administratifs destiné à garantir que les missions conférées à ces autorités sont légalement remplies.

88

Les différents recours ainsi instaurés, introduits devant une instance juridictionnelle, peuvent trouver à s’appliquer aux décisions, actes ou omissions relevant des dispositions des directives 85/337 et 96/61 modifiées par la directive 2003/35 relatives à la participation du public, notamment dans le domaine spécifique de l’urbanisme, et peuvent donc être considérés comme constituant une transposition de l’article 10 bis de la directive 85/337, inséré par l’article 3, point 7, de la directive 2003/35, et de l’article 15 bis de la directive 96/61, inséré par l’article 4, point 4, de la même directive, en tant qu’ils exigent que le requérant puisse contester la légalité quant au fond ou à la procédure desdits actes, décisions, ou omissions.

89

Dès lors que la Cour n’est pas saisie d’un grief tiré d’une mauvaise transposition desdites dispositions, elle ne saurait examiner les arguments présentés par la Commission et relatifs à l’étendue du contrôle effectivement exercé dans le cadre du recours juridictionnel tel qu’il ressort en particulier de la jurisprudence de la High Court.

90

Le deuxième argument n’est donc pas fondé.

91

En ce qui concerne le troisième argument, relatif à l’absence de transposition de l’article 10 bis de la directive 85/337, inséré par l’article 3, point 7, de la directive 2003/35, et de l’article 15 bis de la directive 96/61, inséré par l’article 4, point 4, de la même directive, en tant qu’ils posent des exigences tenant à la rapidité des procédures, dans la mesure où il résulte de l’article 50A(10) et (11)(b) du PDA que les juridictions compétentes doivent traiter les procédures avec toute la diligence que permet la bonne administration de la justice, ledit argument n’est donc pas fondé au regard de ce qui a été indiqué au point 49 du présent arrêt.

92

S’agissant du quatrième argument, portant sur le coût des procédures, il résulte de l’article 10 bis de la directive 85/337, inséré par l’article 3, point 7, de la directive 2003/35, et de l’article 15 bis de la directive 96/61, inséré par l’article 4, point 4, de la même directive, que les procédures instaurées dans le cadre de ces dispositions ne doivent pas avoir un coût prohibitif. Ne sont visés que les coûts occasionnés par la participation à de telles procédures. Une telle prescription n’interdit pas que les juridictions puissent prononcer une condamnation aux dépens sous réserve que le montant de ces derniers réponde à cette exigence.

93

S’il est constant que les juridictions irlandaises ont la faculté de renoncer à condamner la partie qui succombe aux dépens et peuvent, au surplus, faire peser la charge des frais encourus par celle-ci sur l’autre partie, force est de constater qu’il ne s’agit là que d’une pratique juridictionnelle.

94

Cette seule pratique, qui ne revêt pas, par nature, de caractère certain, ne saurait, au regard des exigences posées par la jurisprudence constante de la Cour rappelée aux points 54 et 55 du présent arrêt, être considérée comme constituant une exécution valable des obligations qui résultent de l’article 10 bis de la directive 85/337, inséré par l’article 3, point 7, de la directive 2003/35, et de l’article 15 bis de la directive 96/61, inséré par l’article 4, point 4, de la même directive.

95

Le quatrième argument est donc fondé.

96

S’agissant du cinquième argument, il convient de rappeler que l’un des fondements principaux de la directive 2003/35 est de favoriser l’accès à la justice en matière d’environnement, dans la ligne de la convention d’Aarhus sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement.

97

À cet égard, l’obligation de mettre à la disposition du public une information pratique concernant l’accès aux voies de recours administratives et juridictionnelles prévue à l’article 10 bis, sixième alinéa, de la directive 85/337, inséré par l’article 3, point 7, de la directive 2003/35, et à l’article 15 bis, sixième alinéa, de la directive 96/61, inséré par l’article 4, point 4, de la même directive, doit être analysée comme une obligation de résultat précise, à la réalisation de laquelle les États membres doivent veiller.

98

En l’absence de dispositif légal ou réglementaire spécifique concernant l’information sur les droits ainsi offerts au public, la seule mise à disposition par la voie de la publication ou par la voie électronique des règles relatives aux voies de recours administratives et juridictionnelles ainsi que l’accès possible aux décisions de justice ne peuvent être considérés comme garantissant de manière suffisamment claire et précise que le public concerné est en mesure de connaître ses droits à l’accès à la justice en matière d’environnement.

99

Le cinquième argument doit donc être accueilli.

100

Il résulte de ce qui précède que le second grief, en tant qu’il concerne l’exigence de transposition des articles 3, point 7, et 4, point 4, de la directive 2003/35, pris dans ses quatrième et cinquième arguments, est fondé.

Sur le non-respect de l’article 6, premier alinéa, de la directive 2003/35, en tant que l’obligation d’information de la Commission n’a pas été respectée

— Argumentation des parties

101

La Commission fait valoir que les informations qui lui ont été fournies par l’Irlande à propos de la transposition des dispositions de la directive 2003/35 ayant créé les articles 10 bis de la directive 85/337 et 15 bis de la directive 96/61 ne sont pas suffisantes.

102

Elle soutient, à cet égard, que l’Irlande n’a pas porté à sa connaissance la jurisprudence établissant l’accès du public concerné au contrôle juridictionnel ou les dispositions législatives précises permettant de démontrer que les droits et obligations prévues par ces dispositions ont été transposées, en particulier quant à l’exigence d’un contrôle juridictionnel régulier, équitable et rapide et d’un coût non prohibitif des procédures.

103

Elle ajoute qu’elle n’a pas été informée de la jurisprudence nationale utile concernant spécifiquement l’usage des voies de recours en relation avec la directive 2003/35, et en particulier qu’elle n’a pas été rendue destinataire par l’Irlande elle-même des arrêts rendus par la High Court dans l’affaire Friends of Curragh Environment Ltd, lesquels lui ont été communiqués par une source distincte.

104

L’Irlande reconnaît qu’elle ne s’est pas pleinement conformée à l’obligation d’information de la Commission posée à l’article 6 de la directive 2003/35. Elle précise toutefois que, dans la mesure où les dispositions des articles 3, point 7, et 4, point 4, de cette directive étaient déjà transposées par les dispositions légales existantes, elle n’était pas obligée de notifier ces dispositions.

— Appréciation de la Cour

105

Il convient de rappeler que si, dans le cadre d’une procédure en manquement en vertu de l’article 226 CE, il incombe à la Commission d’établir l’existence du manquement allégué, d’apporter à la Cour les éléments nécessaires à la vérification par celle-ci de l’existence de ce manquement, sans pouvoir se fonder sur une présomption quelconque, il appartient également aux États membres, en vertu de l’article 10 CE, de lui faciliter l’accomplissement de sa mission, consistant, notamment, selon l’article 211 CE, à veiller à l’application des dispositions du traité CE ainsi que des dispositions prises par les institutions en vertu de celui-ci (voir, notamment, arrêts du 12 septembre 2000, Commission/Pays-Bas, C-408/97, Rec. p. I-6417, points 15 et 16, ainsi que du 16 juin 2005, Commission/Italie, C-456/03, Rec. p. I-5335, point 26).

106

Aux fins rappelées par cette jurisprudence, l’article 6 de la directive 2003/35, à l’instar d’autres directives, impose aux États membres une obligation d’information.

107

L’information que les États membres sont ainsi tenus de fournir à la Commission doit être claire et précise. Elle doit indiquer sans ambiguïté quelles sont les mesures législatives, réglementaires et administratives au moyen desquelles l’État membre considère avoir rempli les différentes obligations que lui impose la directive. En l’absence d’une telle information, la Commission n’est pas en mesure de vérifier si l’État membre a réellement et complètement mis en application la directive. Le manquement d’un État membre à cette obligation, que ce soit par une absence totale d’information ou par une information insuffisamment claire et précise, peut justifier, à lui seul, l’ouverture de la procédure prévue à l’article 226 CE, visant à la constatation de ce manquement (voir arrêt du 16 juin 2005, Commission/Italie, précité, point 27).

108

Par ailleurs, si la transposition d’une directive peut être assurée par des règles du droit interne déjà en vigueur, les États membres ne sont pas dans cette hypothèse dispensés de l’obligation formelle d’informer la Commission de l’existence de ces règles afin que celle-ci puisse être en mesure d’apprécier leur conformité avec la directive (voir, en ce sens, arrêt du 16 juin 2005, Commission/Italie, précité, point 30).

109

En l’espèce, dans la mesure où le droit déjà en vigueur était censé assurer à lui seul la mise en œuvre des dispositions de la directive 2003/35 relatives à l’accès à la justice en matière d’environnement, il appartenait à l’Irlande de porter à la connaissance de la Commission les dispositions législatives ou réglementaires en cause, sans qu’elle puisse utilement tirer argument de précédentes notifications de ces règles de droit interne effectuées dans le cadre de la transposition des directives 85/337 et 96/61 telles qu’applicables avant les modifications introduites par la directive 2003/35.

110

Il appartenait également à l’Irlande, dès lors que cet État membre soutenait que la transposition avait été constatée par la jurisprudence des juridictions nationales en particulier celle de la High Court, de communiquer à la Commission un état précis de ladite jurisprudence, permettant ainsi à la Commission de vérifier si cet État membre avait effectivement mis en œuvre la directive 2003/35 du seul fait de l’application du droit national existant avant l’entrée en vigueur de celle-ci et d’assurer le contrôle qui lui incombe au titre du traité.

111

En conséquence, le second grief en tant qu’il concerne la violation de l’obligation d’informer la Commission est fondé.

112

Dès lors, eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de constater que l’Irlande,

en n’adoptant pas, conformément aux articles 2, paragraphe 1, et 4, paragraphes 2 à 4, de la directive 85/337 modifiée par la directive 97/11, toutes les dispositions nécessaires pour que, avant l’octroi de l’autorisation, les projets susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement appartenant à la catégorie de construction routière couverte par l’annexe II, point 10, sous e), de la directive 85/337 modifiée par la directive 97/11, soient soumis, conformément aux articles 5 à 10 de cette directive modifiée, à une procédure de demande d’autorisation et à une évaluation en ce qui concerne leurs incidences, et

en n’adoptant pas toutes les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer aux articles 3, points 3 à 7, et 4, points 2 à 4, de la directive 2003/35 et en ne notifiant pas certaines de ces dispositions à la Commission,

a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu, respectivement, de la directive 85/337 modifiée par la directive 97/11 et de l’article 6 de la directive 2003/35.

113

Le recours est rejeté pour le surplus.

Sur les dépens

114

Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. En vertu de l’article 69, paragraphe 3, du même règlement, la Cour peut répartir les dépens ou décider que chaque partie supporte ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, ou pour des motifs exceptionnels.

115

Dans le présent litige, alors que la Commission a demandé la condamnation de l’Irlande aux dépens, il convient de tenir compte du fait que la demanderesse a succombé sur une partie substantielle de ses griefs. Il y a donc lieu de décider que chacune des deux parties supportera ses propres dépens.

 

Par ces motifs, la Cour (deuxième chambre) déclare et arrête:

 

1)

L’Irlande,

en n’adoptant pas, conformément aux articles 2, paragraphe 1, et 4, paragraphes 2 à 4, de la directive 85/337/CEE du Conseil, du 27 juin 1985, concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement, telle que modifiée par la directive 97/11/CE du Conseil, du 3 mars 1997, toutes les dispositions nécessaires pour que, avant l’octroi de l’autorisation, les projets susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement appartenant à la catégorie de construction routière couverte par l’annexe II, point 10, sous e), de la directive 85/337, telle que modifiée par la directive 97/11, soient soumis, conformément aux articles 5 à 10 de cette directive, à une procédure de demande d’autorisation et à une évaluation en ce qui concerne leurs incidences, et

en n’adoptant pas toutes les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer aux articles 3, points 3 à 7, et 4, points 2 à 4, de la directive 2003/35/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 mai 2003, prévoyant la participation du public lors de l’élaboration de certains plans et programmes relatifs à l’environnement, et modifiant, en ce qui concerne la participation du public et l’accès à la justice, les directives 85/337/CEE et 96/61/CE du Conseil, et en ne notifiant pas certaines de ces dispositions à la Commission des Communautés européennes,

a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu, respectivement, de la directive 85/337, telle que modifiée par la directive 97/11, et de l’article 6 de la directive 2003/35.

 

2)

Le recours est rejeté pour le surplus.

 

3)

La Commission des Communautés européennes et l’Irlande supportent leurs propres dépens.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure: l’anglais.