ORDONNANCE DE LA COUR (septième chambre)

26 novembre 2009 (*)

«Pourvoi – Article 119 du règlement de procédure – Règlement (CE) n° 1954/2003 – Recours en annulation – Irrecevabilité – Entité régionale ou locale – Actes concernant directement et individuellement cette entité – Pourvoi en partie manifestement irrecevable et manifestement non fondé»

Dans l’affaire C‑444/08 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice, introduit le 7 octobre 2008,

Região autónoma dos Açores, représentée par MM. M. Renouf et C. Bryant, solicitors,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant:

Conseil de l’Union européenne, représenté par MM. J. Monteiro et F. Florindo Gijón, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

Commission des Communautés européennes, représentée par Mme K. Banks, en qualité d’agent, ayant élu domicile à Luxembourg,

Royaume d’Espagne, représenté par Mme N. Díaz Abad, en qualité d’agent, ayant élu domicile à Luxembourg,

Seas at Risk VZW, anciennement Stichting Seas at Risk Federation, établie à Bruxelles (Belgique),

WWF – World Wide Fund for Nature, établie à Gland (Suisse),

et

Stichting Greenpeace Council, établie à Amsterdam (Pays-Bas),

parties intervenantes en première instance,

LA COUR (septième chambre),

composée de Mme R. Silva de Lapuerta, président de chambre, MM. T. von Danwitz (rapporteur) et D. Šváby, juges,

avocat général: Mme E. Sharpston,

greffier: M. R. Grass,

l’avocat général entendu,

rend la présente

Ordonnance

1        Par son pourvoi, la Região autónoma dos Açores demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 1er juillet 2008, Região autónoma dos Açores/Conseil, (T‑37/04, ci-après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a déclaré irrecevable son recours tendant à l’annulation de certaines dispositions du règlement (CE) n° 1954/2003 du Conseil, du 4 novembre 2003, concernant la gestion de l’effort de pêche concernant certaines zones et ressources de pêche communautaires, modifiant le règlement (CEE) n° 2847/93 et abrogeant les règlements (CE) n° 685/95 et (CE) n° 2027/95 (JO L 289, p. 1, ci-après les «dispositions litigieuses»).

 Le cadre juridique

 La réglementation antérieure au règlement n° 1954/2003

2        Le règlement (CE) n° 685/95 du Conseil, du 27 mars 1995, relatif à la gestion des efforts de pêche concernant certaines zones et ressources de pêche communautaires (JO L 71, p. 5) prévoit, à son article 1er, l’établissement de critères et de procédures pour l’instauration d’un régime de gestion de l’effort de pêche dans différentes zones maritimes, dont les zones CIEM X et Copace 34.2.0 comprenant la zone économique exclusive des Açores qui s’étend jusqu’à 200 milles marins des lignes de base des îles de l’archipel (ci-après les «eaux des Açores»).

3        L’annexe I du règlement n° 685/95 définit les pêcheries en fonction des engins de pêche, des espèces et des zones maritimes.

4        Le point 3 de l’annexe III dudit règlement porte sur la pêche des thonidés et est libellé comme suit:

«L’accès des navires espagnols aux eaux insulaires sous souveraineté ou juridiction du Portugal dans les zones CIEM X et COPACE et celui des navires portugais aux eaux insulaires sous souveraineté ou juridiction de l’Espagne dans la zone COPACE est exclu, à l’exception, le cas échéant, de l’accès des navires exerçant des activités de pêche au moyen d’engins traditionnels dans le cadre d’un commun accord entre ces deux États membres.»

5        Le règlement (CE) n° 2027/95 du Conseil, du 15 juin 1995, instituant un régime de gestion de l’effort de pêche concernant certaines zones et ressources de pêche communautaires (JO L 199, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) n° 149/1999 du Conseil, du 19 janvier 1999 (JO L 18, p. 3 et rectificatif JO L 234, p. 12, ci-après le «règlement n° 2027/95») établit, d’après son article 1er, un régime de gestion de l’effort de pêche pour les zones maritimes correspondant, notamment, aux eaux des Açores.

6        Ainsi qu’il ressort de l’article 2 dudit règlement, l’annexe de celui-ci fixe le niveau maximal annuel de l’effort de pêche par pêcherie pour chaque État membre. Cette annexe, qui définit les pêcheries en fonction des trois critères définis par le règlement n°685/95, prévoit, pour les espèces démersales et d’eau profonde présentes dans les eaux des Açores, un effort de pêche nul pour la pêche avec des engins traînants et attribue, pour la pêche desdites espèces dans ces mêmes zones, la totalité de l’effort de pêche avec des engins dormants à la République portugaise.

7        Le règlement (CE) n° 2347/2002 du Conseil, du 16 décembre 2002, établissant des conditions spécifiques d’accès aux pêcheries des stocks d’eau profonde et fixant les exigences y afférentes (JO L 351, p. 6), précise, à son article 2, sous a), que les «espèces d’eau profonde» aux fins de l’application de ce règlement sont les espèces de poissons énumérées dans la liste figurant à l’annexe I de celui-ci, laquelle comporte 24 espèces.

8        L’article 10, sous a), du règlement (CE) n° 2371/2002 du Conseil, du 20 décembre 2002, relatif à la conservation et à l’exploitation durable des ressources halieutiques dans le cadre de la politique commune de la pêche (JO L 358, p. 59), intitulé «Mesures adoptées par les États membres applicables uniquement aux navires de pêche battant leur pavillon», dispose:

«Les États membres peuvent adopter des mesures en vue de la conservation et de la gestion des stocks dans les eaux relevant de leur souveraineté ou de leur juridiction, à condition que:

a)      ces mesures s’appliquent uniquement à des navires de pêche battant le pavillon de l’État membre concerné et immatriculés dans la Communauté […]»

 Le règlement n° 1954/2003

9        Le règlement n°1954/2003 met en place, à la suite de l’expiration de la période transitoire prévue par l’acte relatif aux conditions d’adhésion du Royaume d’Espagne et de la République portugaise et aux adaptations des traités (JO 1985, L 302, p. 23), un nouveau régime de gestion de l’effort de pêche applicable aux eaux communautaires de l’Atlantique du Nord-Est, dont font partie les eaux des Açores.

10      L’article 3, paragraphe 1, du règlement n° 1954/2003, intitulé «Mesures concernant la capture des espèces démersales ainsi que de certains mollusques et crustacés», dispose:

«[…] les États membres:

a)      évaluent les niveaux de l’effort de pêche exercé par des navires d’une longueur hors tout égale ou supérieure à 15 mètres, en moyenne annuelle de la période allant de 1998 à 2002 pour chacune des zones CIEM ou Copace visées à l’article 1er, pour les pêcheries démersales, à l’exclusion des pêcheries démersales qui font l’objet du règlement (CE) n° 2347/2002 […], comme il est prévu à l’annexe. […];

b)      allouent les niveaux d’effort de pêche résultant des évaluations visées au point a), dans chaque zone CIEM ou Copace, pour chacune des pêcheries mentionnées au point a).»

11      L’article 5, paragraphe 1, premier alinéa, dudit règlement prévoit:

«Dans les eaux qui s’étendent jusqu’à 100 milles marins des lignes de base des Açores, de Madère et des îles Canaries, les États membres concernés peuvent limiter la pêche aux navires immatriculés dans les ports de ces îles, à l’exception des navires communautaires pêchant traditionnellement dans ces eaux pour autant que cela n’entraîne pas un dépassement de l’effort de pêche qui y est traditionnellement exercé.»

12      L’article 11 du règlement n° 1954/2003 prévoit la procédure à suivre pour l’adoption d’un règlement fixant les niveaux maximaux d’effort de pêche annuel pour chaque État membre, ainsi que pour chacune des zones et chacune des pêcheries définies aux articles 3 et 6 dudit règlement.

13      Il résulte de l’article 15, paragraphe 1, du règlement n° 1954/2003 que les règlements nos 685/95 et 2027/95 sont abrogés à compter du 1er août 2004.

14      L’annexe du règlement n° 1954/2003 définit les pêcheries en fonction de l’espèce pêchée et de la zone maritime.

 Le recours devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

15      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 2 février 2004, la requérante a introduit un recours tendant à l’annulation partielle du règlement n° 1954/2003.

16      Par acte séparé, le Conseil de l’Union européenne a soulevé une exception d’irrecevabilité qui a été jointe au fond par ordonnance du 9 janvier 2006.

17      Par ordonnance du président de la troisième chambre du Tribunal du 21 juin 2004, la Commission des Communautés européennes et le Royaume d’Espagne ont été admis à intervenir au soutien des conclusions du Conseil. Par ordonnances datant, respectivement, des 16 février et 5 avril 2005, le président de la troisième chambre du Tribunal a fait droit aux demandes en intervention émanant de Seas at Risk VZW, World Wide Fund for Nature et Stichting Greenpeace Council et a rejeté celle formée par Oceana Europa.

18      Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté comme irrecevable le recours de la requérante en estimant que cette dernière n’était pas individuellement concernée par les dispositions litigieuses.

19      En réponse à l’argumentation de la requérante soutenant qu’elle est individuellement concernée par lesdites dispositions car elle bénéficie, en tant que région ultrapériphérique, d’une protection spécifique au titre de l’article 299, paragraphe 2, CE, le Tribunal a, au point 54 de l’arrêt attaqué, observé que la protection offerte par cet article ne suffisait pas à établir que la requérante était individuellement concernée par le règlement n° 1954/2003 et, partant, à lui conférer la qualité pour agir au sens de l’article 230 CE. Il a fondé cette appréciation, au point 55 de l’arrêt attaqué, sur l’arrêt du 22 novembre 2001, Nederlandse Antillen/Conseil (C‑452/98, Rec. p. I‑8973).

20      S’agissant de l’argumentation de la requérante selon laquelle cette qualité découlerait également du fait que le règlement n° 1954/2003 aurait des effets préjudiciables sur l’environnement marin spécifique des Açores et, par conséquent, également sur l’économie de la région des Açores, le Tribunal a fait observer, au point 53 de l’arrêt attaqué, qu’il ressortait de la jurisprudence communautaire que le système établi par les traités réservait aux seuls États membres, et non aux autorités régionales ou à des associations, la défense de l’intérêt général de leur territoire. De ce fait, les personnes morales agissant en vertu de l’article 230, quatrième alinéa, CE ne sauraient uniquement se prévaloir, afin de démontrer qu’elles sont individuellement concernées par un acte communautaire, des conséquences de ce dernier sur la collectivité ou sur l’ensemble de ses membres. Le Tribunal, ayant cependant estimé opportun de rechercher si le règlement n° 1954/2003 entraînait des conséquences dommageables pour la requérante, a conclu que tel n’était pas le cas, la requérante n’ayant notamment pas démontré la réalité de l’ouverture, dans les eaux des Açores, de la pêche des espèces d’eau profonde aux navires non portugais et le fait que l’accès des navires espagnols auxdites eaux nuirait aux stocks de poissons.

21      Le Tribunal a en outre, en réponse à un deuxième type d’arguments de la requérante, considéré que celle-ci n’avait pas démontré que les dispositions litigieuses l’empêchaient d’exercer ses pouvoirs législatif et exécutif en matière de pêche ou affectaient sa capacité à les exercer. En effet, la jurisprudence citée au point 82 de l’arrêt attaqué ne lui serait pas applicable, et, en tout état de cause, la requérante ne disposait pas, ni avant ni après l’entrée en vigueur du règlement n° 2371/2002, et en particulier de l’article 10 de celui-ci, du droit d’appliquer sa législation à l’ensemble des navires pêchant dans les eaux des Açores.

22      Enfin, le Tribunal a rejeté l’argument de la violation du principe de protection juridictionnelle effective, au regard de la jurisprudence bien établie selon laquelle cette exigence ne saurait aboutir à écarter les conditions posées à l’article 230, quatrième alinéa, CE.

23      Le Tribunal en a conclu que la requérante n’avait pas démontré qu’elle était individuellement concernée par les dispositions litigieuses et qu’il n’était donc pas nécessaire d’examiner si elle était directement concernée par celles-ci.

 Les conclusions des parties

24      Par son pourvoi, la requérante demande à la Cour:

–        d’annuler l’arrêt attaqué;

–        de déclarer, dans l’affaire T‑37/04, son recours recevable;

–        d’annuler les articles 3 et 11 du règlement nº 1954/2003 et l’annexe de celui-ci dans la mesure où ils:

–        prévoient que l’effort de pêche au titre du règlement nº 1954/2003 ne sera déterminé que par référence à l’espèce cible et à la zone CIEM/Copace, et non également par référence au type d’engins de pêche utilisés, qu’ils soient dormants ou traînants, et

–        excluent du champ d’application des articles 3 et 11 du règlement nº 1954/2003 les espèces d’eau profonde, à savoir les espèces démersales couvertes par le règlement nº 2347/2002;

–        d’annuler l’article 15 du règlement nº 1954/2003 dans la mesure où l’abrogation des règlements nos 685/95 et 2027/95:

–        supprime, d’une part, la compétence de la Communauté pour déterminer l’effort de pêche par référence non seulement aux espèces cibles et à la zone CIEM/Copace, mais également par référence au type d’engins de pêche utilisés, ainsi que, d’autre part, la détermination de l’effort de pêche qui avait été effectuée par le règlement nº 2027/95;

–        supprime, d’une part, le pouvoir de déterminer un effort de pêche annuel maximal par zone en ce qui concerne les espèces d’eau profonde, à savoir les espèces démersales couvertes par le règlement nº 2347/2002, et, d’autre part, la détermination de cet effort qui avait été effectuée par le règlement nº 2027/95, et

–        supprime l’interdiction d’accès des navires espagnols aux eaux des Açores pour la pêche au thon et aux thonidés;

–        d’annuler l’article 5, paragraphe 1, du règlement nº 1954/2003 dans la mesure où il ne maintient pas l’interdiction d’accès des navires espagnols aux eaux des Açores pour la pêche au thon et aux thonidés;

–        de renvoyer l’affaire devant le Tribunal si la Cour venait à juger que l’état de la procédure ne permet pas de rendre un arrêt définitif, et

–        de condamner le Conseil aux dépens exposés tant en première instance qu’à l’occasion du pourvoi.

25      Le Conseil, la Commission et le Royaume d’Espagne demandent à la Cour de rejeter le pourvoi et de condamner la requérante aux dépens.

 Sur le pourvoi

26      En vertu de l’article 119 de son règlement de procédure, lorsque le pourvoi est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, la Cour peut, à tout moment, sur rapport du juge rapporteur, l’avocat général entendu, rejeter le pourvoi, par voie d’ordonnance motivée, sans ouvrir la procédure orale.

27      La requérante invoque sept moyens à l’appui de son pourvoi. Il conviendra d’examiner, tout d’abord, le deuxième moyen, tiré de l’erreur de droit qu’aurait commise le Tribunal en estimant que les autorités régionales étaient privées du droit de défendre l’intérêt général de leur territoire, moyen qui se rapporte aux conditions de recevabilité du recours en annulation posées à l’article 230, deuxième alinéa, CE, avant d’examiner ensuite les autres moyens portant sur la question de savoir si la requérante peut être considérée comme individuellement concernée au titre de l’article 230, quatrième alinéa, CE.

 Sur le deuxième moyen

 Argumentation des parties

28      Par son deuxième moyen, la requérante fait valoir que le Tribunal a jugé à tort, au point 53 de l’arrêt attaqué, que seuls les États membres, et non les autorités régionales, ont le droit de défendre l’intérêt général de leur territoire. En l’espèce, un assouplissement de cette position de principe serait nécessaire, dans la mesure où les recours alternatifs devant les juridictions nationales ne suffiraient pas pour protéger l’intérêt en cause. À cet égard, la requérante estime qu’une application par analogie de la solution dégagée dans l’arrêt du 22 mai 1990, Parlement/Conseil (C‑70/88, Rec. p. I‑2041), serait envisageable, la situation de la Região autónoma dos Açores et celle du Parlement européen présentant des similitudes, au regard de l’appréciation de la qualité pour agir.

29      Selon le Conseil, la Commission et le Royaume d’Espagne, la requérante méconnaît la distinction claire établie par le traité CE entre le droit de recours général, réservé aux États membres, et le droit plus restreint des personnes physiques et morales satisfaisant aux conditions posées à l’article 230, quatrième alinéa, CE.

 Appréciation de la Cour

30      La requérante soutient, en substance, qu’elle doit pouvoir défendre les intérêts de son territoire au même titre qu’un État membre.

31      Or, à cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence bien établie, le recours d’une entité régionale ou locale ne peut être assimilé au recours d’un État membre, la notion d’État membre au sens de l’article 230, deuxième alinéa, CE ne visant que les autorités gouvernementales des États membres. Cette notion ne saurait être étendue aux gouvernements de régions ou d’autres entités infra-étatiques sans porter atteinte à l’équilibre institutionnel prévu par le traité (voir ordonnance du 21 mars 1997, Région wallonne/Commission, C‑95/97, Rec. p. I‑1787, point 6, ainsi que arrêts Nederlandse Antillen/Conseil, précité, point 50, et du 2 mai 2006, Regione Siciliana/Commission, C‑417/04 P, Rec. p. I‑3881, point 21).

32      S’agissant de l’argument relatif à l’application par analogie de l’arrêt Parlement/Conseil, précité, il suffit de constater que le raisonnement de la Cour, qui se fonde sur la notion d’équilibre institutionnel communautaire, ne peut être transposé à une entité régionale.

33      Il s’ensuit que la qualité pour agir de la requérante ne peut être examinée qu’au regard de l’article 230, quatrième alinéa, CE (voir, notamment, arrêts précités Nederlandse Antillen/Conseil, points 50 et 51, ainsi que Regione Siciliana/Commission, point 24) et que le deuxième moyen du pourvoi est donc manifestement non fondé.

 Sur le premier moyen

 Argumentation des parties

34      Par son premier moyen, la requérante fait valoir que le Tribunal a commis une erreur de droit en jugeant que la protection qui lui est accordée par l’article 299, paragraphe 2, CE est insuffisante pour établir qu’elle est individuellement concernée par les dispositions litigieuses. Cette disposition imposerait en effet au Conseil de tenir compte, de manière individuelle, de chaque région ultrapériphérique, contrairement à la disposition en cause dans l’arrêt Nederlandse Antillen/Conseil, précité, invoqué par le Tribunal au point 55 de l’arrêt attaqué. Ainsi, dès qu’une mesure communautaire ne respectant pas ces prérogatives a un quelconque effet négatif sur ces régions, il y aurait lieu de les considérer comme individuellement concernées par cette mesure.

35      Le Conseil et la Commission considèrent que l’article 299, paragraphe 2, CE constitue une base légale permettant au législateur communautaire de mettre en œuvre une politique spécifique vis-à-vis de certaines régions ultrapériphériques, mais qu’il n’a pas pour effet de créer, à leur bénéfice, une dérogation aux critères établis par la jurisprudence relative à l’article 230, quatrième alinéa, CE. De plus, d’après la Commission, la position des régions ultrapériphériques serait strictement analogue à celle des pays et territoires d’outre-mer en cause dans l’arrêt Nederlandse Antillen/Conseil, précité.

 Appréciation de la Cour

36      Selon une jurisprudence constante, la condition, telle que prévue à l’article 230, quatrième alinéa, CE, selon laquelle les personnes physiques ou morales autres que les destinataires d’une décision doivent être individuellement concernées par cette décision, requiert que la mesure communautaire contestée les atteigne en raison de certaines qualités qui leur sont particulières ou d’une situation de fait qui les caractérise par rapport à toute autre personne et, de ce fait, les individualise d’une manière analogue à celle dont le destinataire d’une telle décision le serait (voir, notamment, arrêts du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission, 25/62, Rec. p. 197, 223, et du 22 novembre 2007, Sniace/Commission, C‑260/05 P, Rec. p. I‑10005, point 53).

37      La requérante affirme que la circonstance qu’elle soit individuellement concernée par les dispositions litigieuses résulte de l’article 299, paragraphe 2, CE, dans la mesure où cet article imposerait au Conseil de tenir compte, de manière individuelle, de chaque région ultrapériphérique, sans pour autant identifier la disposition précise de ce paragraphe dont résulterait une telle protection.

38      La requérante ne s’appuie en effet sur aucun élément normatif précis contenu dans cette disposition, duquel pourrait découler un droit à voir sa situation particulière prise en compte (voir, en ce sens, arrêt du 4 octobre 1983, Fediol/Commission, 191/82, Rec. p. 2913, point 25), tel que notamment un droit à être entendue au cours du processus législatif (voir, notamment, arrêt du 12 décembre 1996, Associazione agricoltori della provincia di Rovigo e.a./Commission e.a., C‑142/95 P, Rec. p. I‑6669, point 33, et ordonnance du 5 mai 2009, WWF-UK/Conseil, C‑355/08 P, point 43).

39      Or, si l’article 299, paragraphe 2, quatrième alinéa, CE a pour objet d’établir le cadre dans lequel le Conseil, sur proposition de la Commission et après consultation du Parlement, peut arrêter les mesures spécifiques fixant les conditions de l’application du traité aux régions ultrapériphériques en tenant compte des caractéristiques et des contraintes particulières de ces régions, il n’en demeure pas moins que la requérante se borne à se référer de manière générale à ce cadre, sans démontrer qu’il découlerait d’une telle prise en compte un droit précis qui serait en soi de nature à individualiser une région ultrapériphérique de manière analogue à celle d’un destinataire.

40      En outre, en premier lieu, c’est à bon droit que le Tribunal a rappelé, au point 55 de l’arrêt attaqué, que la Cour avait implicitement constaté, dans l’arrêt Nederlandse Antillen/Conseil, précité, que le simple fait que le traité comporte des dispositions spécifiques concernant les pays et territoires d’outre-mer ne dispensait pas ces collectivités, à savoir, dans ce dernier arrêt, les Antilles néerlandaises, de démontrer qu’elles étaient directement et individuellement concernées par les actes communautaires dont elles demandaient l’annulation. En second lieu, contrairement à ce qu’affirme la requérante, la protection découlant de l’article 299, paragraphe 2, CE n’est pas si différente de celle résultant des dispositions susmentionnées, de sorte que le Tribunal a pu, sans commettre d’erreur, comparer la situation de la requérante à celle des Antilles néerlandaises lors de son examen de la qualité pour agir.

41      Dans ces conditions, en l’absence de tout autre élément dans la requête permettant de considérer que la requérante serait individuellement concernée, en vertu de l’article 299, paragraphe 2, CE, par les dispositions litigieuses qui auraient des conséquences négatives sur son territoire (voir, en ce sens, ordonnance du 28 mars 1996, Kik/Conseil et Commission, C‑270/95 P, Rec. p. I‑1987, point 15), il convient de rejeter le premier moyen comme manifestement non fondé.

 Sur le troisième moyen

 Argumentation des parties

42      La requérante affirme, dans la première branche du troisième moyen, que le Tribunal a commis une erreur en ne distinguant pas, aux points 52 et 53 de l’arrêt attaqué, au sein des effets des dispositions litigieuses, l’atteinte à l’économie de la requérante de celle à l’environnement de celle-ci. Par la seconde branche de son moyen, elle estime que le constat de la singularité de l’environnement marin des Açores et la prise en compte des effets négatifs du règlement n° 1954/2003 sur celui-ci auraient dû conduire le Tribunal à la considérer comme individuellement concernée.

43      Le Conseil observe que la requérante cherche à obtenir, par ces arguments, une nouvelle appréciation des faits et que ce moyen est par conséquent irrecevable. Le Royaume d’Espagne et la Commission soulèvent que les considérations environnementales énoncées par la requérante sont dénuées de pertinence au regard de sa qualité pour agir.

 Appréciation de la Cour

44      Il convient à cet égard de rappeler que toute situation de fait particulière dans laquelle se trouve le requérant n’est pas à elle seule de nature à pouvoir l’individualiser au regard de l’article 230, quatrième alinéa, CE (voir, en ce sens, arrêt du 21 mai 1987, Union Deutsche Lebensmittelwerke e.a./Commission, 97/85, Rec. p. 2265, point 11; ordonnance du président de la Cour du 12 octobre 2000, Federación de Cofradías de Pescadores de Guipúzcoa e.a./Conseil, C‑300/00 P(R), Rec. p. I‑8797, point 41, ainsi que arrêt Nederlandse Antillen/Conseil, précité, point 72).

45      L’appréciation portée par le Tribunal sur la question de savoir si la requérante est individuellement concernée par les dispositions litigieuses est en réalité achevée au point 56 de l’arrêt attaqué, indépendamment de l’examen des effets préjudiciables desdites dispositions sur les stocks halieutiques des Açores, cet examen n’étant mené qu’à titre accessoire et revêtant, par conséquent, un caractère surabondant. A fortiori, la question de la nature du préjudice prétendument supporté par la requérante ne peut avoir de conséquences sur le fait de savoir si elle est individuellement concernée par les dispositions dont elle demande l’annulation.

46      Les considérations formulées au soutien de la première branche du troisième moyen étant dirigées contre des motifs surabondants de l’arrêt attaqué, même à les supposer fondées, elles ne sont pas de nature à entraîner l’annulation de cet arrêt. En conséquence, il y a lieu d’écarter cette branche comme étant inopérante (voir arrêts du 8 mai 2003, T. Port/Commission, C‑122/01 P, Rec. p. I‑4261, point 17, ainsi que du 19 avril 2007, OHMI/Celltech, C‑273/05 P, Rec. p. I‑2883, points 56 et 57).

47      Le grief avancé au soutien de la seconde branche de ce moyen, concernant les caractéristiques propres à l’environnement marin des Açores, est dirigé contre les mêmes motifs surabondants de l’arrêt attaqué.

48      Dès lors, le troisième moyen doit être écarté dans son ensemble comme inopérant.

 Sur le quatrième moyen

 Argumentation des parties

49      Par les première et troisième branches de ce moyen, la requérante affirme, en substance, que les articles 3 et 11 du règlement n° 1954/2003, lus en combinaison avec l’article 15 de celui-ci, entraînent une augmentation significative de l’effort de pêche dans les eaux des Açores. En effet, ce dernier article abroge, d’une part, le règlement n° 2027/95 qui fixait un effort de pêche maximum par zone pour les espèces démersales et d’eau profonde, interdisait le chalutage et interdisait aux navires non portugais de pêcher les espèces d’eau profonde et, d’autre part, le règlement n° 685/95, lequel interdisait aux navires espagnols de pratiquer la pêche au thon et aux thonidés dans les eaux des Açores. La pêche des espèces d’eau profonde serait ainsi désormais soumise au règlement n° 2347/2002 qui ne prévoirait pas de restrictions géographiques pour l’effort de pêche.

50      La requérante avance, par la deuxième branche de son moyen, que le Tribunal a dénaturé les faits et les preuves en affirmant, au point 61 de l’arrêt attaqué, que les dispositions litigieuses n’ont pas pour effet de permettre à des navires non portugais de pêcher les espèces d’eau profonde dans les eaux des Açores, dès lors que la totalité de l’effort de pêche pour les espèces démersales autres que les espèces d’eau profonde a été accordée à la République portugaise en vertu de l’article 3 du règlement n° 1954/2003 et que ces espèces sont pêchées conjointement.

51      Le Conseil considère que ce moyen est irrecevable car il conduirait la Cour à effectuer une nouvelle appréciation des faits de l’espèce. La Commission estime quant à elle, d’une part, que la partie de l’arrêt attaqué, critiquée par ce moyen, ne serait pas essentielle à la motivation de celui-ci et, d’autre part, que l’extrapolation faite par le Tribunal à partir des preuves qui lui étaient soumises ne serait pas constitutive d’une dénaturation des faits ou des éléments de preuve.

 Appréciation de la Cour

52      Il convient de rappeler que, conformément aux articles 225, paragraphe 1, CE et 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice, le pourvoi est limité aux questions de droit. En effet, le Tribunal est seul compétent pour constater et apprécier les faits pertinents ainsi que pour apprécier les éléments de preuve. L’appréciation de ces faits et de ces éléments de preuve ne constitue donc pas, sous réserve de leur dénaturation, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour dans le cadre d’un pourvoi. S’il ne soulève pas de question d’une telle nature, un pourvoi doit être rejeté comme manifestement irrecevable (voir, notamment, arrêt du 18 juillet 2006, Rossi/OHMI, C‑214/05 P, Rec. p. I‑7057, point 26, et ordonnance du 10 juillet 2009, Apple Computer/OHMI, C‑416/08 P, point 22).

53      Or, en vue de démontrer les effets négatifs sur son environnement marin découlant des dispositions litigieuses, la requérante soulève, au titre des première et troisième branches de son moyen, des arguments visant à démontrer la réalité de l’ouverture des eaux des Açores, d’une part, à la pêche des espèces d’eau profonde et des thonidés par des navires non portugais ainsi que, d’autre part, au chalutage. La requérante se borne donc, en réalité, à contester l’appréciation des faits à laquelle le Tribunal s’est livré.

54      En l’espèce, il y a certes lieu de relever que la requérante allègue, par la deuxième branche de ce quatrième moyen, que le Tribunal a commis une dénaturation de certains éléments de fait et de preuve, à savoir ceux exposés au soutien de la première branche de ce moyen. Toutefois, les griefs mentionnés dans cette première branche, en plus de viser une nouvelle appréciation des faits constatés par le Tribunal, sont également dirigés, au regard de la jurisprudence rappelée au point 44 de la présente ordonnance, contre un raisonnement surabondant, et sont, par conséquent, également inopérants. Ainsi, à supposer même que le Tribunal ait manifestement dénaturé les déclarations de la requérante et du Royaume d’Espagne relatives à la possibilité de pêcher séparément, dans les eaux des Açores, les espèces d’eau profonde et les autres espèces démersales, il n’en demeure pas moins qu’une telle dénaturation n’aurait aucune conséquence sur la question de savoir si la requérante peut être regardée comme étant individuellement concernée par les dispositions litigieuses. Partant, une telle dénaturation n’aurait également aucune conséquence sur le bien-fondé de l’arrêt attaqué (voir, en ce sens, arrêt du 2 avril 2009, Bouygues et Bouygues Télécom/Commission, C‑431/07 P, non encore publié au Recueil, point 160).

55      Par conséquent, il y a lieu d’écarter les griefs avancés au titre des première et troisième branches du quatrième moyen comme manifestement irrecevables et ceux de la deuxième branche de ce moyen comme inopérants, en vertu de la jurisprudence mentionnée au point 46 de la présente ordonnance.

56      Il résulte de ce qui précède que le quatrième moyen doit être rejeté comme partiellement manifestement irrecevable et partiellement inopérant.

 Sur le cinquième moyen

 Argumentation des parties

57      La requérante conteste, par la première branche de son moyen, la conclusion à laquelle est arrivé le Tribunal, figurant au point 83 de l’arrêt attaqué, selon laquelle il n’est pas nécessaire de rechercher si les dispositions litigieuses l’empêchent d’appliquer sa législation relative à la pêche des espèces d’eau profonde à l’ensemble des navires pêchant dans les eaux des Açores, dans la mesure où elle n’a pas, au préalable, démontré que, par le règlement n° 1954/2003, les navires non portugais ont été autorisés à pratiquer une telle pêche.

58      Au titre de la deuxième branche du cinquième moyen, la requérante affirme que le Tribunal a commis une erreur de droit, au point 84 de l’arrêt attaqué, en constatant que l’étendue de ses compétences en matière de pêche n’avait pas été réduite par le règlement n° 1954/2003, alors que celles-ci résultaient d’une interaction entre l’article 10 du règlement n° 2371/2002 et le règlement n° 2027/95. L’abrogation de cette dernière mesure aurait donc nécessairement affecté l’étendue des compétences de la requérante.

59      La requérante fait ensuite valoir, dans une troisième branche, que le Tribunal a commis une erreur de droit en constatant que sa jurisprudence concernant le droit des autorités régionales de contester les actes communautaires qui les empêchent d’adopter des mesures qu’elles pourraient légitimement adopter à défaut d’intervention communautaire, et notamment l’arrêt du 5 octobre 2005, Land Oberösterreich/Commission (T‑366/03 et T‑235/04, Rec. p. II‑4005), ne s’appliquait pas aux circonstances de l’espèce. La requérante estime qu’une application par analogie de la solution dégagée par la Cour dans l’arrêt du 18 mai 1994, Codorniu/Conseil (C‑309/89, Rec. p. I‑1853), est souhaitable, dans la mesure où la requérante détient, à travers ses compétences exclusives en matière de pêche, un droit spécifique comparable à celui dont pouvait se prévaloir la requérante dans cette espèce.

60      Le Conseil souligne que la circonstance qu’une région autonome soit concernée par un règlement communautaire résulte inévitablement de la nature de ce type d’acte et de la répartition des compétences au sein des États membres, mais qu’une telle circonstance ne saurait lui conférer le statut de personne individuellement concernée au sens de l’article 230, quatrième alinéa, CE. Le Royaume d’Espagne invoque, quant à lui, le fait que l’article 10 du règlement n° 2371/2002 n’autorise les États membres qu’à prendre des mesures concernant les navires battant leur propre pavillon. Selon la Commission, enfin, aucune application par analogie de la solution dégagée par le Tribunal dans l’arrêt Land Oberösterreich/Commission, précité, dans lequel ce Land a été considéré comme individuellement concerné par une mesure communautaire l’empêchant d’exercer à sa guise ses compétences propres conférées par l’ordre constitutionnel interne, ne serait possible. La requérante ne citerait en effet aucun acte qu’elle ait été empêchée d’arrêter. Le même raisonnement devrait également être opposé à l’argument de l’application par analogie de l’arrêt Codorniu/Conseil, précité.

 Appréciation de la Cour

61      À titre liminaire, s’agissant de la première branche de ce moyen, il suffit de constater qu’elle se rattache à la première branche du quatrième moyen et qu’un examen distinct n’est donc pas nécessaire.

62      S’agissant, ensuite, de la deuxième branche du moyen, selon laquelle le Tribunal aurait, à tort, considéré que l’étendue des mesures de gestion de la pêche dans les eaux des Açores, adoptées par la requérante, n’avait pas été réduite par les dispositions litigieuses, celle-ci disposant, antérieurement à l’entrée en vigueur desdites dispositions, du fait d’une application combinée de l’article 10 du règlement n° 2371/2002 et des dispositions du règlement n° 2027/95, du droit d’appliquer sa législation à tous les navires pêchant dans les eaux des Açores, force est de constater que la requérante ne tire en réalité aucune compétence de ces dispositions de droit communautaire, les seuls destinataires de ces règlements étant les États membres. Ainsi que la requérante l’admet d’ailleurs dans sa requête, la compétence qu’elle invoque résulte de normes internes à l’ordre juridique portugais.

63      Or, il est constant que des règles constitutionnelles nationales attributives de compétence ne sauraient déterminer la qualité pour agir des entités régionales (voir, en ce sens, ordonnances Région wallonne/Commission, précitée, point 6, et du 1er octobre 1997, Regione Toscana/Commission, C‑180/97, Rec. p. I‑5245, point 6, ainsi que arrêt du 22 mars 2007, Regione Siciliana/Commission, C‑15/06 P, Rec. p. I‑2591, point 35).

64      De plus, dans la mesure où la requérante avance que les dispositions litigieuses ont pour effet, en pratique, de l’empêcher d’appliquer ses mesures de gestion de la pêche à tous les navires, en ce qu’elles ouvriraient la pêche, dans les eaux des Açores, aux navires non portugais, il suffit de rappeler, eu égard à la jurisprudence citée au point 44 de la présente ordonnance, qu’une situation de fait n’est pas à elle seule de nature à individualiser un requérant.

65      En ce qui concerne, enfin, les arguments avancés au titre de la troisième branche du cinquième moyen, il suffit de constater que, au regard de la jurisprudence citée au point 63 de la présente ordonnance et des circonstances concrètes de l’espèce, la jurisprudence émanant du Tribunal relative aux recours d’entités régionales en matière d’aides d’État, invoquée par la requérante, ne trouve pas application au cas présent. En effet, ainsi que le Tribunal l’a constaté à juste titre au point 82 de l’arrêt attaqué, la requérante ne fait, en l’espèce, état d’aucun acte législatif concret relevant de sa compétence propre dont la validité serait remise en cause par les dispositions litigieuses.

66      De surcroît, l’argument relatif à l’application de la solution dégagée par la Cour dans l’arrêt Codorniu/Conseil, précité, est dépourvu de pertinence, la requérante ne détenant pas, ainsi qu’il a été constaté aux points 38 et 39 de la présente ordonnance, un droit à voir sa situation particulière prise en compte.

67      Le cinquième moyen doit, dès lors, être rejeté dans son ensemble comme manifestement non fondé.

 Sur le sixième moyen

 Argumentation des parties

68      Par son sixième moyen, la requérante allègue que, en raison de l’impossibilité dans laquelle elle se trouve de saisir les juridictions nationales afin de leur demander de poser à la Cour une question préjudicielle, seul le recours en annulation constituerait une voie de droit effective. Le Tribunal aurait ainsi commis une erreur de droit en n’estimant pas que l’absence d’autres recours juridictionnels effectifs constitue une situation de fait qui distingue individuellement la requérante de la même manière qu’un destinataire d’un acte communautaire.

69      Le Conseil et le Royaume d’Espagne font valoir, à cet égard, que le défaut de recours juridictionnel effectif ne constitue pas un critère permettant d’établir l’intérêt individuel.

 Appréciation de la Cour

70      Il suffit, en l’espèce, de rappeler la jurisprudence constante selon laquelle les conditions de recevabilité d’un recours en annulation ne sauraient être écartées en raison de l’interprétation que fait le requérant du droit à une protection juridictionnelle effective (voir, notamment, arrêts du 25 juillet 2002, Unión de Pequeños Agricultores/Conseil, C‑50/00 P, Rec. p. I‑6677, points 43 et 44, ainsi que Sniace/Commission, précité, point 64).

71      Il ressort de cette jurisprudence que l’argumentation de la requérante, selon laquelle le droit à une protection juridictionnelle effective devrait à lui seul lui permettre de former un recours en annulation, doit être rejetée. En effet, les conditions de recevabilité du recours en annulation doivent être satisfaites, alors même que, comme la requérante le prétend en l’espèce, elle serait dans l’impossibilité d’introduire un recours devant les juridictions nationales (ordonnance du 13 mars 2007, Arizona Chemical e.a./Commission, C‑150/06 P, point 41).

72      Or, il résulte de l’examen des considérations développées dans le cadre des cinq premiers moyens que la requérante n’a pas démontré qu’elle était individuellement concernée par les dispositions litigieuses. Dès lors, le sixième moyen doit être écarté comme manifestement non fondé.

 Sur le septième moyen

 Argumentation des parties

73      D’après la requérante, le Tribunal a erronément omis d’examiner, contrairement aux enseignements dégagés par la Cour dans l’arrêt Plaumann/Commission, précité, l’effet cumulé des différents facteurs qu’elle a invoqués afin d’établir qu’elle était individuellement concernée par les dispositions litigieuses dont elle demande l’annulation.

74      Le Conseil et le Royaume d’Espagne considèrent que la requérante n’a pas démontré en quoi un examen cumulé de ces différents facteurs aurait modifié l’appréciation portée par le Tribunal.

 Appréciation de la Cour

75      Force est de constater que la requérante s’appuie sur une interprétation de l’arrêt Plaumann/Commission, précité, qui s’avère manifestement erronée. En effet, il résulte d’une jurisprudence constante que la Cour distingue deux critères cumulatifs de recevabilité du recours en annulation introduit par une personne physique ou morale, à savoir le fait d’être individuellement et directement concerné (voir arrêts Plaumann/Commission, précité, p.197, 223, ainsi que du 10 septembre 2009, Commission/Ente per le Ville vesuviane, C‑445/07 P et C‑455/07 P, non encore publié au Recueil, point 45), sans pour autant affirmer qu’il serait nécessaire d’examiner cumulativement les différents facteurs invoqués par un requérant pour démontrer qu’il est satisfait à l’un de ces critères.

76      Dès lors, ce moyen doit également être écarté comme manifestement non fondé.

77      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le pourvoi doit, en application de l’article 119 du règlement de procédure, être rejeté dans son intégralité.

 Sur les dépens

78      Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 118 du même règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le Conseil ayant conclu à la condamnation de la requérante et cette dernière ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

79      En application de l’article 69, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement de procédure, également applicable en vertu de l’article 118 du même règlement, les États membres et les institutions qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens. Dès lors, il y a lieu de condamner le Royaume d’Espagne et la Commission à supporter leurs propres dépens.

Par ces motifs, la Cour (septième chambre) ordonne:

1)      Le pourvoi est rejeté.

2)      La Região autónoma dos Açores est condamnée aux dépens.

3)      Le Royaume d’Espagne et la Commission des Communautés européennes supportent leurs propres dépens.

Signatures


* Langue de procédure: l’anglais.