Affaire T-299/08

Elf Aquitaine SA

contre

Commission européenne

« Concurrence — Ententes — Marché du chlorate de sodium — Décision constatant une infraction à l’article 81 CE et à l’article 53 de l’accord EEE — Imputabilité du comportement infractionnel — Droits de la défense — Obligation de motivation — Principe d’individualité des peines et des sanctions — Principe de légalité des peines — Présomption d’innocence — Principe de bonne administration — Principe de sécurité juridique — Détournement de pouvoir — Amendes — Circonstance aggravante — Dissuasion — Circonstance atténuante — Coopération durant la procédure administrative — Valeur ajoutée significative »

Sommaire de l'arrêt

1.      Concurrence — Règles communautaires — Infractions — Imputation — Société mère et filiales — Unité économique — Critères d'appréciation

(Art. 81 CE et 82 CE; règlement du Conseil nº 1/2003, art. 23, § 2)

2.      Concurrence — Procédure administrative — Communication des griefs — Contenu nécessaire — Respect des droits de la défense — Portée

(Règlement du Conseil nº 1/2003, art. 23 et 27, § 1)

3.      Concurrence — Règles communautaires — Infractions — Imputation — Société mère et filiales — Unité économique — Critères d'appréciation

(Art. 81, § 1, CE)

4.      Concurrence — Règles communautaires — Infractions — Imputation — Société mère et filiales — Unité économique

(Art. 81 CE et 82 CE; règlement du Conseil nº 17, art. 15, § 2; règlement du Conseil nº 1/2003, art. 23, § 2)

5.      Concurrence — Règles communautaires — Infractions — Imputation — Société mère et filiales — Unité économique — Critères d'appréciation

(Art. 81, § 1, CE)

6.      Actes des institutions — Motivation — Obligation — Portée — Décision d'application des règles de concurrence — Décision concernant une pluralité de destinataires — Nécessité d'une motivation suffisante particulièrement à l'égard de l'entité devant supporter la charge d'une infraction

(Art. 81, § 1, CE et 253 CE)

7.      Actes des institutions — Présomption de validité — Décision de la Commission imputant à une société mère l'infraction au droit de la concurrence commise par sa filiale

(Art. 249 CE)

8.      Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Caractère dissuasif

(Art. 81 CE; règlement du Conseil nº 1/2003, art. 23, § 2; communication de la Commission 2006/C 210/02, points 25 et 30)

9.      Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Non-imposition ou réduction de l'amende en contrepartie de la coopération de l'entreprise incriminée — Nécessité d'un comportement ayant facilité la constatation de l'infraction par la Commission

(Règlement du Conseil nº 1/2003, art. 18 et 23, § 2; communication de la Commission 2002/C 45/03, points 20, 21 et 23, b))

10.    Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Pouvoir d'appréciation de la Commission — Contrôle juridictionnel — Compétence de pleine juridiction du juge de l'Union

(Art. 229 CE; règlement du Conseil nº 1/2003, art. 31)

1.      Le comportement d’une filiale peut être imputé à la société mère notamment lorsque, bien qu’ayant une personnalité juridique distincte, cette filiale ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché, mais applique pour l’essentiel les instructions qui lui sont données par la société mère eu égard en particulier aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent ces deux entités juridiques. En effet, il en est ainsi parce que, dans une telle situation, la société mère et sa filiale font partie d’une même unité économique et, partant, forment une seule entreprise, ce qui permet à la Commission d'adresser une décision imposant des amendes à la société mère, sans qu'il soit requis d'établir l'implication personnelle de cette dernière dans l'infraction.

Dans le cas particulier où une société mère détient 100 % du capital social de sa filiale ayant commis une infraction aux règles du droit de la concurrence, d’une part, cette société mère peut exercer une influence déterminante sur le comportement de cette filiale et, d’autre part, il existe une présomption réfragable selon laquelle ladite société mère exerce effectivement une influence déterminante sur le comportement de sa filiale.

Dans ces conditions, il suffit que la Commission prouve que la totalité du capital social d’une filiale est détenue par sa société mère pour présumer que cette dernière exerce une influence déterminante sur la politique commerciale de cette filiale. La Commission sera en mesure, par la suite, de considérer la société mère comme solidairement responsable pour le paiement de l’amende infligée à sa filiale, à moins que cette société mère, à laquelle il incombe de renverser cette présomption, n’apporte des éléments de preuve suffisants de nature à démontrer que sa filiale se comporte de façon autonome sur le marché.

En effet, la Commission n’est pas tenue de corroborer ladite présomption d'exercice d’une influence déterminante par des indices additionnels. Quand bien même une pratique décisionnelle antérieure de la Commission aurait consisté à corroborer cette présomption par des indices additionnels, une telle constatation demeure sans incidence sur la conclusion selon laquelle la Commission est en droit de se fonder uniquement sur la constatation de la détention, par une société mère, de la quasi-totalité du capital social de sa filiale pour présumer qu’elle exerçait sur cette dernière une influence déterminante.

(cf. points 49-52, 59)

2.      Le respect des droits de la défense exige qu'une entreprise mise en cause pour violation des règles de la concurrence ait été mise en mesure, au cours de la procédure administrative engagée devant la Commission, de faire connaître utilement son point de vue sur la réalité et la pertinence des faits et des circonstances allégués, ainsi que sur les documents retenus par la Commission à l’appui de son allégation de l’existence d’une infraction au traité.

Le règlement nº 1/2003 prévoit, à son article 27, paragraphe 1, l’envoi aux parties d’une communication des griefs qui doit énoncer, de manière claire, tous les éléments essentiels sur lesquels la Commission se fonde à ce stade de la procédure, pour permettre aux intéressés de prendre effectivement connaissance des comportements qui leur sont reprochés et de faire valoir utilement leur défense avant que la Commission adopte une décision définitive.

Une telle communication des griefs constitue la garantie procédurale appliquant le principe fondamental du droit communautaire qui exige le respect des droits de la défense dans toute procédure. Ce principe exige notamment que la communication des griefs adressée par la Commission à une entreprise à l'encontre de laquelle elle envisage d’infliger une sanction pour violation des règles de la concurrence contienne les éléments essentiels retenus à l’encontre de cette entreprise, tels que les faits reprochés, la qualification qui leur est donnée et les éléments de preuve sur lesquels la Commission se fonde, afin que cette entreprise soit en mesure de faire valoir utilement ses arguments dans le cadre de la procédure administrative engagée à son encontre.

En particulier, la communication des griefs doit préciser sans équivoque la personne juridique qui sera susceptible de se voir infliger des amendes, elle doit être adressée à cette dernière et elle doit indiquer en quelle qualité cette personne se voit reprocher les faits allégués. C’est en effet par la communication des griefs que l’entreprise concernée est informée de tous les éléments essentiels sur lesquels la Commission se fonde à ce stade de la procédure. Par conséquent, c’est seulement après l’envoi de ladite communication que l’entreprise concernée peut pleinement faire valoir ses droits de la défense.

Ainsi, lorsque la Commission informe une société mère, dans une communication des griefs, qu'elle entend lui imputer, sur la base de la présomption d'exercice d'une influence déterminante, le comportement infractionnel de sa filiale, le fait que la Commission n'ait diligenté aucune mesure d'enquête à l'égard de cette société, avant de lui notifier ladite communication des griefs, ne viole pas les droits de la défense de cette entreprise. À cet égard, ladite société est mise en mesure, au cours de la procédure administrative, de faire utilement connaître son point de vue sur la réalité et la pertinence des faits et des circonstances allégués par la Commission dans la communication des griefs, tant dans ses observations en réponse à ladite communication que lors d'une audition auprès du conseiller-auditeur.

(cf. points 134-140)

3.      En vertu du principe d'individualité des peines et des sanctions, une personne physique ou morale ne doit être sanctionnée que pour les faits qui lui sont individuellement reprochés. Ledit principe est applicable dans toute procédure administrative susceptible d’aboutir à des sanctions en vertu des règles de la concurrence.

Toutefois, ce principe doit se concilier avec la notion d’entreprise au sens de l’article 81 CE. Ainsi, lorsqu'une entité économique enfreint les règles de la concurrence, il lui incombe, selon le principe de la responsabilité personnelle, de répondre de cette infraction.

En effet, ce n’est pas une relation d’instigation relative à l’infraction entre la société mère et sa filiale ni, à plus forte raison, une implication de la première dans ladite infraction, mais le fait qu’elles constituent une seule entreprise au sens de l’article 81 CE qui habilite la Commission à adresser une décision imposant des amendes à la société mère d’un groupe de sociétés.

Partant, la Commission n'enfreint pas le principe d'individualité des peines et des sanctions en condamnant une société mère pour une infraction qu'elle est censée avoir commise elle-même en raison des liens économiques et juridiques qui l’unissaient à sa filiale et qui lui permettaient de déterminer le comportement de cette dernière sur le marché.

(cf. points 178-181)

4.      Le principe de légalité des peines exige que la loi définisse clairement les infractions et les peines qu’elle réprime. Cette condition se trouve remplie lorsque le justiciable peut savoir, à partir du libellé de la disposition pertinente et au besoin à l’aide de l’interprétation qui en est donnée par les tribunaux, quels actes et omissions engagent sa responsabilité pénale.

Or, en vertu de l’article 15, paragraphe 2, du règlement nº 17 et de l’article 23, paragraphe 2, du règlement nº 1/2003, la Commission peut, par voie de décision, infliger des amendes aux entreprises qui commettent notamment une infraction aux dispositions de l’article 81 CE. Dans la mesure où une société mère et sa filiale ont été considérées comme formant une entreprise, au sens de ce dernier article, c'est sans violer le principe de légalité des peines que la Commission peut imposer une amende aux personnes morales faisant partie de ladite entreprise.

(cf. points 187-189)

5.      Le principe d'égalité de traitement requiert que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié.

Dans le contexte d'une décision de la Commission infligeant une amende à une société mère pour une infraction aux règles de la concurrence commise par sa filiale, en application de la présomption d'influence déterminante de la société mère détenant la quasi-totalité du capital social de sa filiale, la Commission dispose d'une marge d'appréciation pour décider s'il y a lieu d'imputer la responsabilité de l'infraction à la société mère.

Par conséquent, dès lors que la Commission dispose de la faculté, mais non de l’obligation, d’imputer la responsabilité de l’infraction à une société mère, lorsque les conditions d’une telle imputation sont remplies, le seul fait que la Commission n’ait pas procédé à pareille imputation dans un autre cas n’implique pas qu’elle soit obligée de porter la même appréciation dans la décision attaquée. Toutefois, une telle imputation est soumise au contrôle des juridictions de l’Union, à qui il appartient de vérifier que les conditions d’une telle imputation sont réunies.

(cf. points 196-198)

6.      La motivation exigée par l’article 253 CE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 253 CE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée.

Lorsqu’une décision d’application de l’article 81 CE concerne une pluralité de destinataires et pose un problème d’imputabilité de l’infraction, elle doit comporter une motivation suffisante à l’égard de chacun des destinataires, particulièrement pour ceux d’entre eux qui, aux termes de cette décision, doivent supporter la charge de cette infraction. Ainsi, pour être suffisamment motivée à l’égard des sociétés mères des filiales ayant commis l’infraction, la décision de la Commission doit contenir un exposé circonstancié des motifs de nature à justifier l’imputabilité de l’infraction à ces sociétés.

(cf. points 216-217)

7.      Les décisions de la Commission jouissent d'une présomption de validité et produisent des effets juridiques aussi longtemps qu'elles n'ont pas été annulées ou retirées. En outre, la Commission n'est pas tenue de suspendre la procédure engagée contre une société, pour infractions aux règles de la concurrence, jusqu'au prononcé de la décision du juge de l'Union dans un recours introduit par la même société contre une autre décision la sanctionnant pour d'autres infractions aux règles de la concurrence. En effet, aucune disposition légale n’impose à la Commission de suspendre l’adoption de décisions dans des affaires portant sur des faits différents.

(cf. point 241)

8.      Dans le cadre du pouvoir de la Commission d'infliger des amendes aux entreprises qui commettent une infraction à l'article 81 CE, il incombe, en principe, à la personne physique ou morale qui dirigeait l’entreprise concernée au moment où l’infraction a été commise de répondre de celle-ci, même si, au jour de l’adoption de la décision constatant l’infraction, l’exploitation de l’entreprise a été placée sous la responsabilité d’une autre personne. Aux fins de leur application et de leur exécution, les décisions prises par la Commission en application de l'article 81 CE doivent cependant être adressées à des entités dotées de la personnalité juridique. Ainsi, lorsque la Commission adopte une décision en application de l’article 81, paragraphe 1, CE, elle doit identifier la ou les personnes, physiques ou morales, qui peuvent être tenues pour responsables du comportement de l’entreprise en cause et qui peuvent être sanctionnées à ce titre, lesquelles se verront adresser la décision.

Les lignes directrices que la Commission adopte pour calculer le montant des amendes assurent la sécurité juridique des entreprises, étant donné qu’elles déterminent la méthodologie que la Commission s’est imposée aux fins de la fixation du montant des amendes. L’administration ne peut s’en écarter, dans un cas particulier, sans donner des raisons qui soient compatibles avec le principe d'égalité de traitement.

S'agissant de deux entreprises, à savoir une société mère et sa filiale, formant, à l’époque de la commission de l'infraction, une entreprise au sens de l’article 81 CE, mais n'existant plus sous cette forme au jour de l’adoption de la décision leur imposant une amende, la Commission est en droit, d’une part, d'infliger, conformément à l’article 23, paragraphe 2, du règlement nº 1/2003, une amende solidairement à ces deux entreprises qui doivent répondre de l’infraction commise, et, d’autre part, d'imposer, à la seule société mère, au titre du point 30 des lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l'article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement nº 1/2003, une majoration du montant de base de l’amende, étant donné que le chiffre d’affaires particulièrement important de celle-ci, par rapport aux autres entités sanctionnées au jour de l’adoption de la décision, lui permet de mobiliser plus facilement les fonds nécessaires pour le paiement d’une amende.

À cet égard, le fait que l'amende, imposée, au titre de la dissuasion, à la seule société mère, est calculée par rapport au montant de base de l'amende infligée solidairement aux deux sociétés, qui inclut déjà une majoration spécifique au titre de la dissuasion, ne saurait être inéquitable.

En effet, l’amende imposée solidairement aux deux sociétés correspond au montant de base de l'amende qui inclut une majoration additionnelle calculée en fonction d'un certain taux de la valeur des ventes de la filiale, conformément au point 25 desdites lignes directrices, « afin de dissuader les entreprises mêmes de participer à des accords horizontaux de fixation de prix, de répartition de marché et de limitation de production ».

En revanche, l’amende imposée à la seule société mère et comprenant une majoration importante du montant de base de l’amende vise, conformément au point 30 desdites lignes directrices, à « s'assurer que les amendes présentent un effet suffisamment dissuasif » pour les entreprises dont le chiffre d’affaires, au-delà des ventes des biens et des services auxquelles l’infraction se réfère, est particulièrement important.

Dès lors, d'une part, le montant additionnel appliqué en vertu du point 25 desdites lignes directrices et, d’autre part, la majoration spécifique imposée à la société mère, en vertu du point 30 de ces mêmes lignes directrices, répondent à deux objectifs distincts de dissuasion, dont la Commission peut à bon droit tenir compte dans la détermination de l’amende.

(cf. points 250-253, 255-256, 288-289)

9.      La Commission bénéficie d’un large pouvoir d’appréciation pour ce qui est de la méthode de calcul des amendes et peut, à cet égard, tenir compte de multiples éléments, au nombre desquels figure la coopération des entreprises concernées lors de l’enquête conduite par ses services. Dans ce cadre, la Commission est appelée à effectuer des appréciations factuelles complexes, telles que celles qui portent sur la coopération respective desdites entreprises. Dans le cadre de l’appréciation de la coopération fournie par les membres d’une entente, seule une erreur manifeste d’appréciation de la part de la Commission est susceptible d’être censurée, dès lors que celle-ci bénéficie d’une large marge d’appréciation pour évaluer la qualité et l’utilité de la coopération fournie par une entreprise, notamment par rapport aux contributions d’autres entreprises.

Si la Commission est tenue de motiver les raisons pour lesquelles elle estime que des éléments fournis par des entreprises dans le cadre de la communication sur l'immunité d'amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes constituent une contribution justifiant ou non une réduction de l’amende infligée, il incombe en revanche aux entreprises souhaitant contester la décision de la Commission à cet égard de démontrer que celle-ci, en l’absence de telles informations fournies volontairement par ces entreprises, n’aurait pas été en mesure de prouver l’essentiel de l’infraction et donc d’adopter une décision infligeant des amendes.

La réduction des amendes en cas de coopération des entreprises participant à des infractions au droit de la concurrence trouve son fondement dans la considération selon laquelle une telle coopération facilite la tâche de la Commission visant à constater l’existence d’une infraction et, le cas échéant, à y mettre fin. Eu égard à la raison d’être de la réduction, la Commission ne peut faire abstraction de l’utilité de l’information fournie, laquelle est nécessairement fonction des éléments de preuve déjà en sa possession.

Lorsqu’une entreprise ne fait, au titre de la coopération, que confirmer, et ce de manière moins précise et explicite, certaines des informations déjà fournies par une autre entreprise au titre de la coopération, le degré de la coopération fournie par cette entreprise, quoiqu’il puisse ne pas être dénué d’une certaine utilité pour la Commission, ne saurait être considéré comme comparable à celui de la coopération fournie par la première entreprise à avoir fourni lesdites informations. Une déclaration se limitant à corroborer, dans une certaine mesure, une déclaration dont la Commission disposait déjà ne facilite en effet pas la tâche de la Commission de manière significative. Partant, elle ne saurait être suffisante pour justifier une réduction du montant de l’amende au titre de la coopération. De plus, la collaboration d’une entreprise à l’enquête ne donne droit à aucune réduction d’amende lorsque cette collaboration n’a pas dépassé ce qui résultait des obligations qui lui incombaient en vertu de l’article 18 du règlement nº 1/2003.

(cf. points 340-344)

10.    S’agissant du contrôle exercé par le juge de l'Union sur les décisions de la Commission en matière de concurrence, au-delà du simple contrôle de légalité, qui ne permet que de rejeter le recours en annulation ou d’annuler l’acte attaqué, la compétence de pleine juridiction conférée, en application de l’article 229 CE, au Tribunal par l’article 31 du règlement nº 1/2003 habilite cette juridiction à réformer l’acte attaqué, même en l’absence d’annulation, en tenant compte de toutes les circonstances de fait, afin de modifier, par exemple, le montant de l’amende.

(cf. point 379)







ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

17 mai 2011 (*)

« Concurrence – Ententes – Marché du chlorate de sodium – Décision constatant une infraction à l’article 81 CE et à l’article 53 de l’accord EEE – Imputabilité du comportement infractionnel – Droits de la défense – Obligation de motivation – Principe d’individualité des peines et des sanctions – Principe de légalité des peines – Présomption d’innocence – Principe de bonne administration – Principe de sécurité juridique – Détournement de pouvoir – Amendes – Circonstance aggravante – Dissuasion – Circonstance atténuante – Coopération durant la procédure administrative – Valeur ajoutée significative »

Dans l’affaire T‑299/08,

Elf Aquitaine SA, établie à Courbevoie (France), représentée par Mes É. Morgan de Rivery et S. Thibault-Liger, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. X. Lewis, É. Gippini Fournier et R. Sauer, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet, à titre principal, une demande d’annulation de la décision C (2008) 2626 final de la Commission, du 11 juin 2008, relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] et de l’article 53 de l’accord sur l’Espace économique européen (EEE) (Affaire COMP/38.695 – Chlorate de sodium), dans la mesure où cette dernière la concerne et, à titre subsidiaire, une demande d’annulation ou de réduction des montants des amendes qui lui ont été infligées dans ladite décision,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mmes I. Pelikánová, président, K. Jürimäe (rapporteur) et M. S. Soldevila Fragoso, juges,

greffier : Mme C. Kristensen, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 2 juin 2010,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Par la décision C (2008) 2626 final, du 11 juin 2008, relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] et de l’article 53 de l’accord sur l’Espace économique européen (EEE) (Affaire COMP/38.695 – Chlorate de sodium), (ci-après la « décision attaquée »), la Commission des Communautés européennes a sanctionné, parmi d’autres entreprises, la requérante, Elf Aquitaine SA, qui était, jusqu’en 2006, la société mère d’Arkema France (anciennement Atochem SA, puis Elf Atochem SA, ensuite Atofina SA et Arkema SA), en raison de leur participation à un ensemble d’accords et de pratiques concertées concernant le marché du chlorate de sodium dans l’EEE, pour la période allant du 11 mai 1995 au 9 février 2000 en ce qui concerne la requérante et Arkema France (considérants 12 à 15 et article 1er de la décision attaquée).

2        Le chlorate de sodium est un agent fortement oxydant obtenu par l’électrolyse d’une solution aqueuse de chlorure de sodium dans une cellule sans diaphragme. Le chlorate de sodium peut être produit sous une forme cristallisée ou en solution. Il trouve sa principale application dans la fabrication du dioxyde de chlore, utilisé dans l’industrie de la pâte et du papier pour le blanchiment de la pâte chimique. Ses autres applications concernent, dans une bien moindre mesure, la purification de l’eau potable, le blanchiment textile, les herbicides et le raffinage de l’uranium (considérant 2 de la décision attaquée).

3        Les principaux concurrents sur le marché du chlorate de sodium dans l’EEE étaient, en 1999, les entreprises suivantes. Tout d’abord, EKA Chemicals AB (ci-après « EKA »), dont le capital social était intégralement détenu par le groupe Akzo Nobel, possédait une part de 49 % dudit marché. Finnish Chemicals Oy, dont le capital social était indirectement et intégralement détenu par Erikem Luxembourg SA (ci-après « ELSA »), possédait quant à elle une part de 30 % dudit marché. Ensuite, Arkema France, dont 97, 55 % du capital social était détenu par la requérante de 1992 à 2000, possédait une part de 9 % de ce marché. Enfin, Aragonesas Industrias y Energia SAU (ci-après « Aragonesas »), dont l’intégralité ou la majorité du capital social était directement ou indirectement détenu, entre 1992 et 2000, par Uralita SA, disposait, à l’instar de Solvay SA/NV, d’une part de 5 % de ce marché, tandis que d’autres producteurs disposaient cumulativement d’une part de 2 % dudit marché (considérants 13, 14, 25 à 30, 42 et 46 de la décision attaquée).

4        Le 28 mars 2003, EKA a déposé à la Commission une demande d’immunité au titre de la communication de la Commission, du 19 février 2002, sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO C 45, p. 3, ci-après la « communication de 2002 sur la coopération »), concernant l’existence d’une entente sur le marché du chlorate de sodium (ci-après « l’entente »). EKA a étayé ladite demande par des éléments de preuves documentaires et une déclaration orale (considérants 54 et 55 de la décision attaquée).

5        Le 30 septembre 2003, la Commission a adopté une décision accordant une immunité conditionnelle d’amende à EKA, conformément au point 15 de la communication de 2002 sur la coopération (considérant 55 de la décision attaquée).

6        Le 10 septembre 2004, la Commission a adressé des demandes de renseignements à Finnish Chemicals, à Arkema France et à Aragonesas, conformément à l’article 18, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 [CE] et 82 [CE] (JO 2003, L 1, p. 1) (considérant 56 de la décision attaquée).

7        Le 18 octobre 2004, Arkema France a présenté, dans sa réponse à la demande de renseignements de la Commission mentionnée au point 6 ci-dessus, une demande au titre de la communication de 2002 sur la coopération (considérant 57 de la décision attaquée).

8        Le 29 octobre 2004, Finnish Chemicals a déposé à la Commission une demande au titre de la communication de 2002 sur la coopération et lui a fourni oralement des renseignements relatifs à l’entente. Finnish Chemicals a confirmé ladite demande par courrier du 2 novembre 2004 et a fourni simultanément des éléments de preuve documentaires concernant sa participation à l’infraction en cause (considérant 58 de la décision attaquée).

9        À compter du 4 novembre 2004, la Commission a adressé des demandes de renseignements, conformément à l’article 18, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, notamment à Arkema France, à Aragonesas, à EKA et à Finnish Chemicals. Elle a également rencontré ces deux dernières. S’agissant de la requérante, elle lui a adressé une demande de renseignements pour la première fois le 11 avril 2008 (considérants 59 à 65 de la décision attaquée).

10      Par lettre du 11 juillet 2007, la Commission a informé Arkema France de son intention de rejeter sa demande au titre de la communication de 2002 sur la coopération (considérant 563 de la décision attaquée).

11      Par lettre du même jour, la Commission a également informé Finnish Chemicals de son intention de lui octroyer, conformément à la communication de 2002 sur la coopération, une réduction de 30 à 50 % du montant de l’amende à laquelle elle était exposée (considérant 583 de la décision attaquée).

12      Le 27 juillet 2007, la Commission a adopté une communication des griefs dont les destinataires étaient, outre la requérante, EKA, Akzo Nobel NV, Finnish Chemicals, ELSA, Arkema France, Aragonesas et Uralita. Elles y ont répondu dans le délai imparti (considérants 66 et 67 de la décision attaquée).

13      Le 20 novembre 2007, Arkema France et la requérante, notamment, ont exercé leur droit d’être entendues oralement, lors d’une audition auprès du conseiller-auditeur (considérant 68 de la décision attaquée).

14      Le 11 juin 2008, la Commission a adopté la décision attaquée, qui a été notifiée à la requérante le 16 juin 2008.

15      Dans la décision attaquée, la Commission relève, en substance, qu’Arkema France, EKA, Finnish Chemicals et Aragonesas ont mené une stratégie de stabilisation du marché du chlorate de sodium, dont le but ultime était de se répartir les volumes de vente de ce produit, de coordonner la politique de fixation des prix à l’égard de leurs clients et, ce faisant, d’optimiser leurs marges. Le fonctionnement de l’entente aurait reposé sur des contacts fréquents entre les concurrents sous la forme de réunions bilatérales ou multilatérales et de conversations téléphoniques, sans toutefois suivre un schéma fixé. Selon la Commission, ces pratiques collusoires ont eu lieu à partir du 21 septembre 1994 pour EKA et pour Finnish Chemicals, à partir du 17 mai 1995 pour Arkema France, à partir du 16 décembre 1996 pour Aragonesas et à partir du 13 février 1997 pour ELSA. Lesdites pratiques auraient perduré jusqu’au 9 février 2000, au moins en ce qui concerne Arkema France, EKA, Finnish Chemicals et Aragonesas (considérants 69 à 71 de la décision attaquée).

16      S’agissant en particulier du comportement infractionnel d’Arkema France, la Commission relève que les faits exposés dans la décision attaquée montrent que celle-ci a participé directement aux pratiques anticoncurrentielles en cause. La Commission relève également que, pendant toute la durée de l’infraction, la requérante détenait plus de 97 % du capital social d’Arkema France. Pour cette raison, la Commission estime qu’il y a raisonnablement lieu de penser qu’elle devait se conformer à la politique définie par sa société mère et qu’elle ne pouvait donc pas agir de manière autonome. La Commission conclut dès lors qu’il peut être présumé que la requérante a exercé une influence déterminante sur Arkema France, ce qui serait corroboré par des indices additionnels qu’elle énumère (considérants 384 et 386 de la décision attaquée).

17      S’agissant du calcul du montant de l’amende infligée notamment à Arkema France et à la requérante, la Commission s’est fondée sur les lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement nº 1/2003 (JO 2006, C 210, p. 2, ci-après les « lignes directrices ») (considérant 498 de la décision attaquée).

18      Tout d’abord, la Commission indique que, pour déterminer le montant de base de l’amende imposée à Arkema France, il y a lieu de prendre en considération un montant correspondant à 19 % de la valeur des ventes des produits affectés par l’entente en cause. D’une part, dans la mesure où Arkema France a participé à l’infraction pendant quatre ans et huit mois au moins, la Commission estime que ce montant devrait être multiplié par cinq pour tenir compte de la durée de l’infraction. D’autre part, afin de dissuader les entreprises en cause, et notamment Arkema France, de participer à des accords horizontaux de fixation de prix, la Commission estime nécessaire d’imposer un montant additionnel d’amende correspondant à 19 % de la valeur desdites ventes. Dès lors, elle en conclut qu’il convient d’imposer conjointement et solidairement à Arkema France et à la requérante une amende de 22 700 000 euros (considérants 510 et 521 à 523 de la décision attaquée).

19      De plus, s’agissant des ajustements du montant de base de l’amende, la Commission relève, au titre des circonstances aggravantes, qu’elle a, à la date d’adoption de la décision attaquée, déjà sanctionné Arkema France dans trois décisions dans lesquelles cette dernière a été tenue pour responsable pour de précédentes activités collusoires. D’une part, la Commission estime, en substance, que le comportement de récidiviste d’Arkema France justifie qu’une majoration de 90 % du montant de base de l’amende lui soit infligée. D’autre part, elle ne relève aucune circonstance atténuante au profit d’Arkema France ou de la requérante justifiant une réduction d’amende. En particulier, la Commission estime que, compte tenu de tous les faits en cause, « aucune circonstance exceptionnelle » n’est de nature à justifier l’octroi à Arkema France d’une réduction d’amende en dehors du champ d’application de la communication de 2002 sur la coopération (considérants 525, 526, 538 et 544 de la décision attaquée).

20      Ensuite, la Commission indique, en substance, que, afin de s’assurer que les amendes ont un effet suffisamment dissuasif, et compte tenu du fait que la requérante a un chiffre d’affaires particulièrement important, au-delà des ventes de biens auxquelles l’infraction se réfère et, enfin, que celui-ci dépasse de loin, en termes absolus, le chiffre d’affaires des autres entreprises concernées, il y a lieu de lui imposer une majoration de 70 % du montant de base de l’amende (considérants 545, 548 et 559 de la décision attaquée).

21      En outre, la Commission constate que les amendes dont doivent faire l’objet Arkema France et la requérante, en particulier, sont inférieures à 10 % de leurs chiffres d’affaires totaux respectifs en 2007 et que les amendes pouvant leur être imposées avant l’application de la communication de 2002 sur la coopération s’élèvent, d’une part, pour Arkema France à 43 130 000 euros et, d’autre part, pour la requérante, à 38 590 000 euros (considérants 551 et 552 de la décision attaquée).

22      Enfin, la Commission considère qu’Arkema France ne doit bénéficier d’aucune réduction d’amende au titre de la communication de 2002 sur la coopération, dès lors que les éléments d’information qu’elle lui a fournis n’ont apporté aucune valeur ajoutée significative au sens du point 21 de ladite communication. En revanche, la Commission considère que Finnish Chemicals lui a fourni des éléments de preuve d’une valeur ajoutée significative au sens du point 21 de cette même communication. Elle lui accorde en conséquence une réduction de 50 % du montant de l’amende qui lui aurait été autrement infligée (considérants 580, 588 et 591 de la décision attaquée).

23      Les articles 1er et 2 du dispositif de la décision attaquée sont libellés comme suit :

« Article premier

Les entreprises suivantes ont enfreint l’article 81 CE et l’article 53 de l’accord EEE en participant, pour les périodes indiquées, à un ensemble d’accords et de pratiques concertées dans le but de se répartir des volumes de ventes, de fixer les prix, d’échanger des informations commercialement sensibles sur les prix et les volumes de ventes et de surveiller l’exécution des arrangements anticoncurrentiels portant sur le chlorate de sodium sur le marché de l’EEE :

a)       [EKA], du 21 septembre 1994 au 9 février 2000 ;

b)       Akzo Nobel […], du 21 septembre 1994 au 9 février 2000 ;

c)       Finnish Chemicals […], du 21 septembre 1994 au 9 février 2000 ;

d)       [ELSA], du 13 février 1997 au 9 février 2000 ;

e)       Arkema France […], du 17 mai 1995 au 9 février 2000 ;

f)       [la requérante], du 17 mai 1995 au 9 février 2000 ;

g)       Aragonesas […], du 16 décembre 1996 au 9 février 2000 ;

h)       Uralita […], du 16 décembre 1996 au 9 février 2000.

Article 2

Les amendes suivantes sont infligées pour l’infraction visée à l’article 1er :

a)       EKA […] et Akzo Nobel […], conjointement et solidairement : 0 euros ;

b)       Finnish Chemicals […] : 10 150 000 euros dont, conjointement et solidairement avec [ELSA] (en liquidation) : 50 900 euros ;

c)       Arkema France […] et [la requérante], conjointement et solidairement : 22 700 000 euros ;

d)       Arkema France […] : 20 430 000 euros ;

e)       [la requérante] : 15 890 000 euros ;

f)       Aragonesas […] et Uralita […], conjointement et solidairement : 9 900 000 euros.

[…] »

24      À l’article 3 du dispositif de la décision attaquée, la Commission ordonne aux entreprises visées à l’article 1er de ladite décision, d’une part, de mettre fin, si elles ne l’ont pas déjà fait, à l’infraction en cause et, d’autre part, de s’abstenir de tout acte ou comportement tel que décrit à l’article 1er de ladite décision, ainsi que de tout acte ou comportement ayant un objet ou des effets identiques ou similaires.

25      L’article 4 du dispositif de la décision attaquée énumère les destinataires de la décision attaquée, qui sont les entreprises visées à l’article 1er de ladite décision.

 Procédure et conclusions des parties

26      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 1er août 2008, la requérante a introduit le présent recours.

27      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (deuxième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale. Le Tribunal a posé certaines questions à la requérante et à la Commission. Il a également demandé à cette dernière de produire certains documents. Sous réserve de la transcription de la demande orale d’immunité d’EKA, que la Commission a refusé de produire, les parties ont répondu à ces demandes dans le délai imparti.

28      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal à l’audience du 2 juin 2010.

29      Par ordonnance du 11 juin 2010, Elf Aquitaine/Commission (T‑299/08, non publiée au Recueil), le Tribunal a, d’une part, ordonné à la Commission de produire la transcription de la demande orale d’immunité d’EKA et, d’autre part, autorisé que ce document soit consulté par les avocats de la requérante au greffe du Tribunal. La Commission a produit dans le délai imparti ce document, que les avocats de la requérante ont consulté au greffe du Tribunal. En réponse à une question écrite du Tribunal, la requérante a indiqué que, si elle n’était pas en mesure de confirmer l’identité de ce document avec celui auquel il lui avait été donné accès dans le cadre de la procédure administrative devant la Commission, elle n’avait aucune raison de douter qu’il s’agissait du même document.

30      La procédure orale a été clôturée le 16 juillet 2010.

31      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        à titre principal, annuler, sur le fondement de l’article 230 CE, la décision attaquée, pour autant que cette dernière la concerne ;

–        à titre subsidiaire, annuler ou réduire, sur le fondement de l’article 229 CE, le montant des amendes qui lui ont été infligées à l’article 2, sous c) et e), de la décision attaquée ;

–        en tout état de cause, condamner la Commission aux dépens.

32      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

1.     Sur les conclusions, soulevées à titre principal, tendant à l’annulation de la décision attaquée

33      À l’appui de sa demande d’annulation de la décision attaquée pour autant que cette dernière la concerne, la requérante soulève dix moyens. Le premier moyen est tiré de la violation des règles gouvernant l’imputation de la responsabilité d’une infraction au sein des groupes de sociétés. Le deuxième moyen est tiré de la violation de six principes fondamentaux résultant de l’imputation qui lui a été faite de la responsabilité du comportement infractionnel en cause. Le troisième moyen est tiré de la dénaturation du faisceau d’indices qu’elle a rapporté. Le quatrième moyen est tiré d’une contradiction de motifs dans la décision attaquée. Le cinquième moyen est tiré de la violation du principe de bonne administration. Le sixième moyen est tiré de la violation du principe de sécurité juridique. Le septième moyen est tiré d’un détournement de pouvoir. Le huitième moyen est tiré du caractère non fondé de l’imposition d’une amende qui lui a été infligée à titre personnel. Le neuvième moyen est tiré de la violation des principes et des règles ayant gouverné le calcul de l’amende imposée solidairement à Arkema France et à elle-même. Le dixième moyen est tiré de la violation des dispositions de la communication de 2002 sur la coopération.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation des règles gouvernant l’imputation de la responsabilité d’une infraction au sein des groupes de sociétés

34      Le premier moyen de la requérante, selon lequel la Commission a violé, dans la décision attaquée, les règles gouvernant l’imputation de la responsabilité d’une infraction au sein des groupes de sociétés, se divise en cinq branches.

 Sur la première branche, tirée d’une erreur de droit dans l’imputation de la responsabilité du comportement infractionnel en cause à la requérante

–       Arguments des parties

35      La requérante soutient, en substance, que la Commission a commis une erreur de droit en estimant, au considérant 369 de la décision attaquée, qu’elle n’était pas tenue de corroborer par des éléments concrets la présomption selon laquelle, en substance, une société mère qui détient la totalité du capital social de sa filiale, exerce effectivement une influence déterminante sur cette dernière (ci-après la « présomption d’exercice d’une influence déterminante »).

36      Premièrement, il ressortirait tant d’une jurisprudence abondante que de la pratique décisionnelle antérieure de la Commission qu’il lui appartient de corroborer la présomption d’exercice d’une influence déterminante par des indices concrets attestant de ladite influence. Ces indices devraient montrer soit que la société mère était impliquée dans l’infraction, soit qu’elle en avait connaissance, soit que l’organisation interne du groupe lui permettait d’intervenir concrètement dans la politique commerciale de sa filiale. En particulier, la requérante soutient que la Commission a, pendant près de quarante ans avant l’adoption de la décision C (2004) 4876 final, du 19 janvier 2005, relative à la procédure d’application de l’article 81 [CE] et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire COMP/E-1/37.773 – AMCA) (JO 2006, L 353, p. 12, ci-après la « décision AMCA »), retenu des indices concrets corroborant la présomption d’exercice d’une influence déterminante. Elle précise également que, au considérant 574 de la décision du 1er octobre 2008, relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] et de l’article 53 de l’accord EEE (COMP/C.39181 – Cires pour bougies) (JO C 295, p. 17, ci-après la « décision Cires pour bougies »), la Commission a reconnu que, avant 2005, elle n’imputait pas la responsabilité d’une infraction à une société mère sans apporter des indices concrets corroborant ladite présomption.

37      Deuxièmement, la requérante fait observer que, dans la décision du 10 décembre 2003, relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] et de l’article 53 de l’accord EEE (Affaire COMP/E-2/37.857 – Peroxydes organiques) (JO 2005, L 110, p. 44, ci-après la « décision Peroxydes organiques »), la Commission n’a pas imputé la responsabilité de l’infraction sanctionnée dans cette décision à la requérante, ayant considéré qu’Arkema France était pleinement autonome sur le marché.

38      Troisièmement, la requérante soutient, en substance, que l’obligation pour la Commission de rapporter des indices additionnels corroborant la présomption d’exercice d’une influence déterminante dans le cadre de l’application de l’article 81 CE est confortée par la jurisprudence relative à l’imputation à l’État d’une mesure prise par une entreprise publique en droit des aides d’État. Elle renvoie à cet égard à l’arrêt de la Cour du 16 mai 2002, France/Commission (C‑482/99, Rec. p. I‑4397), et à l’arrêt du Tribunal du 26 juin 2008, SIC/Commission (T‑442/03, Rec. p. II‑1161). Selon elle, conformément à l’article 295 CE, un actionnaire privé d’un groupe de sociétés ne saurait, au nom du principe d’égalité de traitement, être moins bien traité qu’un actionnaire public.

39      Quatrièmement, la requérante fait valoir que l’appréciation de la Commission, figurant au considérant 369 de la décision attaquée, selon laquelle il n’appartient pas à cette dernière de corroborer la présomption d’exercice d’une influence déterminante par des indices additionnels prouvant le contrôle d’une société mère sur sa filiale s’oppose aux solutions retenues dans la plupart des États membres de l’Union, tels que la Belgique, la France, l’Italie et le Royaume-Uni, ainsi qu’aux États-Unis, dont l’influence sur le droit communautaire de la concurrence serait indéniable. D’une part, dans tous ces États, les autorités nationales de concurrence auraient recours à un faisceau d’indices visant à établir le comportement autonome d’une filiale par rapport à sa société mère. D’autre part, s’il est vrai que la Commission n’est pas liée par les solutions retenues par les autorités nationales de concurrence des États membres, la Commission devrait toutefois en tenir compte, étant donné les mécanismes de coopération renforcée qui gouvernent ses rapports avec lesdites autorités au sein du réseau européen de concurrence.

40      La Commission s’oppose aux arguments de la requérante.

–       Appréciation du Tribunal

41      Tout d’abord, il convient de relever que, après avoir rappelé, aux considérants 369 à 372 de la décision attaquée, la jurisprudence relative à l’imputabilité du comportement infractionnel d’une filiale à sa société mère, la Commission constate, aux considérants 386 et 387 de ladite décision, ce qui suit :

« (386) Pendant toute la durée de l’infraction, [la requérante] a détenu plus de 97 % des actions d’[Arkema France]. Compte tenu du fait qu’en pareilles circonstances, il y a raisonnablement lieu de penser que la filiale devra se conformer à la politique définie par sa société mère (ne pouvant donc pas agir de façon autonome) et que la société mère ne rencontrera aucun obstacle au moment de définir cette politique pour sa filiale, on peut présumer [que la requérante] a exercé une influence déterminante sur [Arkema France]. Il existe par ailleurs d’autres éléments corroborant la présomption selon laquelle l’influence exercée par [la requérante] a bien été déterminante. Pour commencer, les membres du conseil d’administration d’[Arkema France] étaient tous désignés par [la requérante]. En outre, entre 1994 et 1999, M. [P.] a été à la fois membre du comité de direction générale d’[Arkema France] et d[e la requérante] et membre du conseil d’administration d’[Arkema France]. Il en a été de même pour M. [I.], qui a été membre du conseil d’administration d’[Arkema France] entre 1994 et 1998 et du comité de direction générale d[e la requérante] entre 1994 et 1997. De même, M. [W.] a siégé au conseil d’administration d’[Arkema France] entre 1994 et 1999 et a été nommé au comité de direction générale d[e la requérante] en 1999. Par ailleurs, plusieurs autres personnes, telles que M. [D.] (1994-2000) et M. [R.] (1994-1997), ont été simultanément membres des conseils d’administration d’[Arkema France] et d[e la requérante]. Au vu des divers chevauchements de personnel entre les organes de direction et de contrôle d’[Arkema France] dont les membres (pour ce qui est des organes de direction) avaient été désignés et – il y a lieu de le supposer – auraient pu être révoqués par [la requérante], il est clair que cette dernière était informée de toutes les décisions prises par [Arkema France] et pouvait les influencer à tout moment. De plus, il n’existait aucun autre actionnaire important susceptible d’exercer une influence sur la politique commerciale de la filiale.

(387) Compte tenu de la présomption découlant de la participation d[e la requérante] dans [Arkema France] au moment de l’infraction (supérieure à 97 %) et des liens organisationnels, la Commission considère qu[e la requérante] a exercé une influence déterminante sur le comportement de sa filiale [Arkema France]. »

42      De plus, aux considérants 396 à 415 de la décision attaquée, la Commission rejette les arguments qu’Arkema France et la requérante ont soulevés dans leurs observations en réponse à la communication des griefs et qui visaient à contester l’imputation de la responsabilité de l’infraction en cause à la requérante.

43      Il ressort donc des motifs de la décision attaquée qui sont exposés aux points 41 et 42 ci-dessus que la Commission a imputé la responsabilité de l’infraction en cause à la requérante sur la base de la présomption selon laquelle une société mère qui détient plus de 97 % du capital social de sa filiale exerce une influence déterminante sur cette dernière. La Commission a également considéré, d’une part, que cette présomption était corroborée par des indices additionnels qu’elle avait exposés dans la décision attaquée et, d’autre part, que les arguments avancés par Arkema France et la requérante dans leurs observations en réponse à la communication des griefs ne permettaient pas de renverser ladite présomption.

44      Il y a donc lieu d’examiner si, comme le soutient la requérante, la Commission a commis une erreur de droit en concluant que la détention par elle de plus de 97 % du capital social d’Arkema France suffisait, à elle seule, pour lui imputer la responsabilité de l’infraction en cause.

45      Dans son arrêt du 10 septembre 2009, Akzo Nobel e.a./Commission, (C‑97/08 P, Rec. p. I‑8237, point 54), la Cour a rappelé que le droit de la concurrence visait les activités des entreprises (arrêt du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, Rec. p. I‑123, point 59) et que la notion d’entreprise comprenait toute entité exerçant une activité économique, indépendamment du statut juridique de cette entité et de son mode de financement (arrêts de la Cour du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, Rec. p. I‑5425, point 112 ; du 10 janvier 2006, Cassa di Risparmio di Firenze e.a., C‑222/04, Rec. p. I‑289, point 107, et du 11 juillet 2006, FENIN/Commission, C‑205/03 P, Rec. p. I‑6295, point 25).

46      La Cour a également précisé que la notion d’entreprise, placée dans ce contexte, devait être comprise comme désignant une unité économique même si, du point de vue juridique, cette unité économique était constituée de plusieurs personnes physiques ou morales (voir arrêt Akzo Nobel e.a./Commission, point 45 supra, point 55, et la jurisprudence citée).

47      Lorsqu’une telle entité économique enfreint les règles de la concurrence, il lui incombe, selon le principe de la responsabilité personnelle, de répondre de cette infraction (voir arrêt Akzo Nobel e.a./Commission, point 45 supra, point 56, et la jurisprudence citée).

48      L’infraction au droit de la concurrence doit être imputée sans équivoque à une personne juridique qui sera susceptible de se voir infliger des amendes et la communication des griefs doit être adressée à cette dernière. Il importe également que la communication des griefs indique en quelle qualité une personne juridique se voit reprocher les faits allégués (voir arrêt Akzo Nobel e.a./Commission, point 45 supra, point 57, et la jurisprudence citée).

49      Il résulte d’une jurisprudence constante que le comportement d’une filiale peut être imputé à la société mère notamment lorsque, bien qu’ayant une personnalité juridique distincte, cette filiale ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché, mais applique pour l’essentiel les instructions qui lui sont données par la société mère eu égard en particulier aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent ces deux entités juridiques (voir arrêt Akzo Nobel e.a./Commission, point 45 supra, point 58, et la jurisprudence citée).

50      En effet, il en est ainsi parce que, dans une telle situation, la société mère et sa filiale font partie d’une même unité économique et, partant, forment une seule entreprise, au sens de la jurisprudence mentionnée aux points 45 et 46 ci-dessus. Ainsi, le fait qu’une société mère et sa filiale constituent une seule entreprise au sens de l’article 81 CE permet à la Commission d’adresser une décision imposant des amendes à la société mère, sans qu’il soit requis d’établir l’implication personnelle de cette dernière dans l’infraction (voir arrêt Akzo Nobel e.a./Commission, point 45 supra, point 59, et la jurisprudence citée).

51      Dans le cas particulier où une société mère détient 100 % du capital social de sa filiale ayant commis une infraction aux règles de droit de la concurrence, d’une part, cette société mère peut exercer une influence déterminante sur le comportement de cette filiale et, d’autre part, il existe une présomption réfragable selon laquelle ladite société mère exerce effectivement une influence déterminante sur le comportement de sa filiale (voir arrêt Akzo Nobel e.a./Commission, point 45 supra, point 60, et la jurisprudence citée).

52      Dans ces conditions, il suffit que la Commission prouve que la totalité du capital social d’une filiale est détenue par sa société mère pour présumer que cette dernière exerce une influence déterminante sur la politique commerciale de cette filiale. La Commission sera en mesure, par la suite, de considérer la société mère comme solidairement responsable pour le paiement de l’amende infligée à sa filiale, à moins que cette société mère, à laquelle il incombe de renverser cette présomption, n’apporte des éléments de preuve suffisants de nature à démontrer que sa filiale se comporte de façon autonome sur le marché (voir arrêt Akzo Nobel e.a./Commission, point 45 supra, point 61, et la jurisprudence citée).

53      S’il est vrai que la Cour a évoqué, dans son arrêt du 16 novembre 2000, Stora Kopparbergs Bergslags/Commission (C‑286/98 P, Rec. p. I‑9925, points 28 et 29), hormis la détention de 100 % du capital social de la filiale, d’autres circonstances, telles que l’absence de contestation de l’influence exercée par la société mère sur la politique commerciale de sa filiale et la représentation commune des deux sociétés durant la procédure administrative, il n’en demeure pas moins que de telles circonstances n’ont été relevées par la Cour que dans le but d’exposer l’ensemble des éléments sur lesquels le Tribunal avait fondé son raisonnement et non pour subordonner la mise en œuvre de ladite présomption à la production d’indices supplémentaires relatifs à l’exercice effectif d’une influence de la société mère (voir arrêt Akzo Nobel e.a./Commission, point 45 supra, point 62, et la jurisprudence citée).

54      Il résulte de l’ensemble de ces considérations que, lorsqu’une société mère détient 100 % du capital social de sa filiale, il existe une présomption réfragable selon laquelle cette société mère exerce une influence déterminante sur le comportement de sa filiale (voir arrêt Akzo Nobel e.a./Commission, point 45 supra, point 63, et la jurisprudence citée).

55      Il ressort en outre de la jurisprudence du Tribunal que, si une société mère détient la quasi-totalité du capital social de sa filiale, il peut raisonnablement en être conclu que ladite filiale ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché et qu’elle forme par conséquent, avec sa société mère, une même entreprise au sens de l’article 81 CE (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 30 septembre 2003, Michelin/Commission, T‑203/01, Rec. p. II‑4071, point 290, et la jurisprudence citée).

56      En l’espèce, il convient de constater, d’une part, que la requérante ne conteste pas, comme la Commission l’a relevé au considérant 386 de la décision attaquée, qu’elle détenait plus de 97 % du capital social d’Arkema France à l’époque des faits en cause et, plus précisément, qu’elle en détenait 97, 55 %, comme cela a été constaté au considérant 13 de la décision attaquée. D’autre part, si la requérante soutient que l’absence d’un actionnaire autre qu’elle-même dans le capital social d’Arkema France n’est pas de nature à corroborer la présomption d’exercice d’une influence déterminante, elle n’avance toutefois aucun argument de nature à remettre en cause l’appréciation de la Commission, figurant au considérant 396 de la décision attaquée, selon laquelle la détention par une société mère de la quasi-totalité du capital social de sa filiale est assimilable à la détention de la totalité dudit capital, dès lors que, en principe, « les actionnaires minoritaires ne bénéficient dans ce cas d’aucun droit spécial, en dehors de leur simple intéressement aux bénéfices de la filiale ».

57      Par conséquent, c’est à bon droit que, conformément à la jurisprudence exposée aux points 45 à 55 ci-dessus, la Commission a présumé, dans la décision attaquée, que la requérante exerçait une influence déterminante sur Arkema France, sur la base du constat qu’elle en détenait la quasi-totalité du capital social.

58      Aucun des arguments avancés par la requérante n’infirme cette conclusion.

59      Premièrement, s’agissant des arguments selon lesquels, d’une part, il ressort tant de la jurisprudence que de la pratique décisionnelle de la Commission antérieure à l’adoption de la décision AMCA que la Commission est tenue de corroborer la présomption d’exercice d’une influence déterminante par des indices concrets, il y a lieu de les rejeter comme étant non fondés. En effet, comme il ressort des points 45 à 55 ci-dessus, c’est conformément à une jurisprudence constante que la Cour a rappelé, dans l’arrêt Akzo Nobel e.a./Commission (point 45 supra), que la Commission n’était pas tenue de corroborer ladite présomption par des indices additionnels. De plus, quand bien même, comme la Commission l’aurait indiqué dans sa décision Cires pour bougies, sa pratique décisionnelle antérieure à l’adoption de la décision AMCA aurait consisté à corroborer la présomption d’exercice d’une influence déterminante par des indices additionnels, une telle constatation ne peut que demeurer sans incidence sur la conclusion, énoncée au point 57 ci-dessus, selon laquelle la Commission était en droit, dans la décision attaquée, de se fonder sur la seule détention par la requérante de la quasi-totalité du capital social d’Arkema France pour présumer qu’elle exerçait sur cette dernière une influence déterminante.

60      Deuxièmement, il y a lieu de rejeter comme étant non fondé l’argument selon lequel la Commission a commis une erreur de droit en imputant la responsabilité du comportement infractionnel en cause à la requérante, alors même qu’elle n’avait pas procédé à une telle imputation dans la décision Peroxydes organiques. D’une part, dans la mesure où, comme il ressort des points 45 à 55 ci-dessus, c’est sur la base d’une interprétation exacte de la notion d’entreprise au sens de l’article 81, paragraphe 1, CE que la Commission a, dans la décision attaquée, imputé la responsabilité de l’infraction en cause à la requérante, le seul fait que la Commission n’ait pas procédé à une telle imputation dans une décision antérieure sanctionnant Arkema France ne saurait remettre en cause la légalité de la décision attaquée à cet égard. D’autre part, dès lors que la Commission dispose de la faculté, mais non de l’obligation, d’imputer la responsabilité de l’infraction à une société mère (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 24 septembre 2009, Erste Group Bank e.a./Commission, C‑125/07 P, C‑133/07 P, C‑135/07 P, Rec. p. I‑8681, point 82, et arrêt du Tribunal du 14 décembre 2006, Raiffeisen Zentralbank Österreich e.a./Commission, T‑259/02 à T‑264/02 et T‑271/02, Rec. p. II‑5169, point 331), le seul fait que la Commission n’ait pas procédé à une telle imputation dans la décision Peroxydes organiques n’implique pas qu’elle soit obligée de porter la même appréciation dans une décision ultérieure (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 20 avril 1999, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, dit « PVC II », T‑305/94 à T‑307/94, T‑313/94 à T‑316/94, T‑318/94, T‑325/94, T‑328/94, T‑329/94 et T‑335/94, Rec. p. II‑931, point 990).

61      Troisièmement, pour autant que la requérante fait valoir, en substance, que l’arrêt France/Commission, point 38 supra (points 50 à 52, 55 et 56), et l’arrêt SIC/Commission, point 38 supra (points 94, 95, 98, 99, 101 à 105 et 107), tendent à confirmer que la Commission est tenue d’apporter des indices additionnels corroborant la présomption d’exercice d’une influence déterminante sur laquelle elle se fonde dans le cadre de l’application de l’article 81 CE, cet argument doit être rejeté comme étant inopérant. En effet, les points en question, qui ont trait à la question de savoir si une mesure prise par une entreprise publique est imputable à l’État, et, partant, si une telle mesure peut être qualifiée d’aide d’État au sens de l’article 87 CE, d’une part, sont sans rapport avec les conditions d’imputation de la responsabilité d’une infraction à l’article 81 CE à une société mère, et, d’autre part, ne s’opposent pas à l’existence de la présomption d’exercice d’une influence déterminante en matière d’infraction à l’article 81 CE, dont les juridictions de l’Union ont expressément reconnu la légalité, comme il ressort de la jurisprudence exposée aux points 45 à 55 ci-dessus.

62      Quatrièmement, il y a lieu de rejeter comme étant inopérant l’argument selon lequel, en substance, la jurisprudence, dans plusieurs États membres de l’Union européenne et aux États-Unis, requiert que l’exercice d’une influence déterminante de la société mère sur sa filiale soit corroborée par des indices concrets. En effet, outre le fait que la jurisprudence desdits États ne lie pas la Commission et ne constitue pas le cadre juridique pertinent au regard duquel la légalité de la décision attaquée doit être examinée, l’absence de reconnaissance de la présomption d’exercice d’une influence déterminante par la jurisprudence desdits États, même si elle était avérée, n’impliquerait pas, en toute hypothèse, qu’elle soit illégale en droit communautaire.

63      À la lumière des considérations qui précèdent, la première branche doit être rejetée en partie comme étant non fondée et en partie comme étant inopérante.

 Sur la deuxième branche, tirée de la violation des principes d’autonomie juridique et économique des sociétés

–       Arguments des parties

64      La requérante soutient que, lorsque la présomption d’exercice d’une influence déterminante n’est pas, comme cela a été le cas dans la pratique décisionnelle de la Commission antérieure à l’adoption de la décision AMCA, corroborée par des indices additionnels confirmant l’ingérence de la société mère dans l’activité de sa filiale sur le marché concerné par l’infraction, une telle présomption est incompatible avec le principe d’autonomie de la personne morale, dès lors qu’elle entraîne la responsabilité automatique de la société mère pour les infractions commises par sa filiale.

65      Premièrement, la requérante fait valoir que ce n’est que par exception dûment justifiée au principe de l’autonomie économique de la personne morale qu’une société mère peut être reconnue comme faisant partie du périmètre de l’entreprise au sens de l’article 81 CE. En une telle hypothèse exceptionnelle, une société mère pourrait alors se voir imputer la responsabilité de l’infraction commise par sa filiale et être condamnée solidairement au paiement de l’amende qui est imposée à ladite filiale, mais elle ne pourrait être condamnée à une amende à titre personnel.

66      La requérante fait observer que le droit des sociétés, dans les États membres de l’Union, consacre le principe d’autonomie juridique des personnes morales, y compris pour les filiales dont le capital social est intégralement détenu par leur société mère. Ce principe découlerait des attributs de la personnalité morale et conférerait notamment une pleine capacité juridique et un patrimoine propre à chaque société, qui serait pleinement responsable de ses propres agissements, y compris des conséquences de son activité économique sur le marché. À cet égard, elle précise que le principe de l’autonomie économique d’une filiale, qui découle de l’autonomie juridique de cette dernière, a été reconnu par la jurisprudence. Ce principe constituerait également un élément fondamental du bon fonctionnement des économies modernes. Par conséquent, la requérante et Arkema France, en tant que personnes morales distinctes, disposeraient toutes deux d’une autonomie juridique et économique propre.

67      Deuxièmement, la requérante soutient que le principe d’autonomie économique de la filiale constitue la traduction concrète de l’utilisation par celle-ci de l’ensemble des attributs juridiques de sa personnalité morale. D’une part, l’analyse du droit de la majeure partie des États membres de l’Union montrerait que le principe d’autonomie de la personne morale fait partie des bases juridiques fondamentales sur lesquelles repose leur organisation sociale, auquel il ne saurait être dérogé que dans des circonstances exceptionnelles, comme cela ressortirait des différentes jurisprudences nationales. D’autre part, la Commission serait tenue, lorsqu’elle applique le droit de la concurrence, de ne pas ignorer la jurisprudence des juridictions des États membres de l’Union, sous peine de mettre en péril la nécessaire convergence des différents droits de la concurrence au sein des réseaux européen et international de la concurrence.

68      La Commission s’oppose aux arguments de la requérante.

–       Appréciation du Tribunal

69      La requérante soutient, en substance, que, en lui imputant la responsabilité de l’infraction en cause, la Commission a violé les principes d’autonomie juridique et économique des sociétés.

70      Or, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur la portée des principes d’autonomie juridique et économique des sociétés, ni même sur l’existence du second de ces principes, il suffit de constater que ceux-ci ne sauraient, en toute hypothèse, impliquer qu’une société dont la totalité ou la quasi-totalité du capital est détenue par une autre société agisse nécessairement de manière autonome sur le marché en raison du seul fait qu’elle dispose d’une personnalité juridique ou de moyens économiques propres. En effet, une telle supposition ferait totalement abstraction des nombreuses possibilités existant en pratique pour une société mère détenant la totalité ou la quasi-totalité du capital de sa filiale d’influencer le comportement de cette dernière de manière formelle ou informelle.

71      Dès lors, les prétendus principes d’autonomie juridique et économique que la requérante invoque en l’espèce n’ont pas été violés par la Commission.

72      Les arguments que la requérante soulève à cet égard ne sauraient prospérer. D’une part, s’agissant des arguments selon lesquels la présomption d’exercice d’une influence déterminante serait contraire au droit applicable dans certains États membres de l’Union, il convient de les rejeter comme étant non fondés, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 62 ci-dessus, à savoir notamment que le droit desdits États ne constitue pas le cadre juridique pertinent au regard duquel la légalité de la décision attaquée doit être appréciée. D’autre part, pour autant que la requérante soutient que, en lui imputant la responsabilité de l’infraction en cause, la Commission a violé le droit des sociétés applicables dans les États membres de l’Union et, partant, le principe de subsidiarité, il convient de constater que c’est conformément à l’article 81, paragraphe 1, CE que, lorsqu’une entité économique enfreint les règles de la concurrence, il lui incombe de répondre de cette infraction que la Commission est habilitée à sanctionner en vertu de l’article 23, paragraphe 2, du règlement nº 1/2003.

73      À la lumière des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter la deuxième branche comme étant non fondée.

 Sur la troisième branche, tirée de l’erreur relative au fait que les indices que la Commission a retenus dans la décision attaquée ne corroborent pas la présomption d’exercice d’une influence déterminante

–       Arguments des parties

74      La requérante fait valoir, en substance, que la Commission a commis une erreur de droit et des erreurs manifestes d’appréciation en considérant que les trois éléments additionnels exposés au considérant 386 de la décision attaquée (voir point 41 ci-dessus) corroboraient la présomption d’exercice d’une influence déterminante. À cet égard, elle soutient, en substance, que, d’une part, le fait qu’elle a nommé les membres du conseil d’administration de sa filiale et que, d’autre part, le fait que cinq membres du comité de direction générale ou du conseil d’administration d’Arkema France ont siégé à son comité de direction générale ou à son conseil d’administration ne permettent pas de corroborer ladite présomption.

75      La Commission s’oppose aux arguments de la requérante.

–       Appréciation du Tribunal

76      Selon la jurisprudence exposée aux points 52 à 55 ci-dessus, la Commission n’est pas tenue de corroborer par des éléments additionnels la présomption d’exercice d’une influence déterminante qu’elle est en droit de poser lorsque une société mère détient la totalité ou la quasi-totalité du capital social de sa filiale, mais il incombe, en revanche, à la requérante, pour renverser cette présomption, d’apporter des éléments de preuve suffisants, de nature à démontrer que sa filiale se comportait de façon autonome sur le marché.

77      Dès lors, même s’il devait être considéré que, comme l’affirme la requérante, la Commission s’est fondée à tort, au considérant 386 de la décision attaquée, sur des indices qui n’étaient pas susceptibles de corroborer la présomption d’exercice d’une influence déterminante, une telle erreur ne serait pas, en toute hypothèse, de nature à remettre en cause le fait qu’elle pouvait à bon droit se fonder sur la seule constatation de la détention par la requérante de la quasi-totalité du capital social de sa filiale pour présumer qu’elle exerçait une influence déterminante sur cette dernière.

78      Partant, la troisième branche doit être écartée comme étant inopérante, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les arguments de la requérante visant, en substance, à contester la pertinence des indices retenus par la Commission dans la décision attaquée aux fins de corroborer la présomption d’exercice d’une influence déterminante.

 Sur la quatrième branche, tirée du fait que la Commission a considéré à tort que la requérante n’avait pas fourni un faisceau d’indices renversant la présomption d’exercice d’une influence déterminante

–       Arguments des parties

79      La requérante soutient, en substance, que la Commission a considéré à tort qu’elle n’avait pas rapporté un faisceau d’indices convergents renversant la présomption d’exercice d’une influence déterminante et établissant, d’une part, l’autonomie d’Arkema France sur le marché et, d’autre part, l’absence d’immixtion de sa part dans la politique commerciale de sa filiale. Elle précise que, contrairement à ce qu’affirme la Commission, le faisceau d’indices qu’elle a rapporté ne se limite pas à établir le fait qu’elle n’avait pas participé à l’entente ou qu’elle n’en avait pas eu connaissance.

80      En premier lieu, la requérante fait valoir qu’elle a démontré par un faisceau d’indices convergents l’autonomie d’Arkema France sur le marché.

81       Premièrement, la requérante rappelle d’abord que, comme elle l’a fait observer dans le cadre de la première branche du premier moyen (voir point 37 ci-dessus), la Commission a reconnu l’autonomie d’Arkema France sur le marché dans la décision Peroxydes organiques. De plus, elle soutient que, si dans sa décision du 3 mai 2006, Peroxyde d’hydrogène et perborate (affaire COMP/F/38.620), (JO L 353, p. 54, ci-après la décision « Peroxyde d’hydrogène »), la Commission n’a, à aucun moment, tenté de corroborer par un quelconque élément concret la présomption d’exercice d’une influence déterminante, c’est qu’elle avait alors considéré qu’il n’existait aucun indice permettant de conforter ladite présomption. Enfin, dans la mesure où le chlorate de sodium appartient à la même famille de produits que ceux visés dans la décision Peroxydes organiques et dans la décision Peroxyde d’hydrogène et qu’il était géré au sein du groupe Elf Aquitaine exactement de la même manière que les produits concernés par ces deux décisions, la Commission ne pourrait prétendre à bon droit, dans le cadre de la présente affaire, que la requérante s’est ingérée dans la stratégie commerciale d’Arkema France.

82      Deuxièmement, la requérante soutient qu’Arkema France appartenait à un groupe caractérisé par une gestion décentralisée de ses filiales et que, en conséquence, la requérante n’opérait à la tête du groupe qu’en tant que société holding non opérationnelle, n’intervenant nullement dans la gestion opérationnelle de ses filiales. Pour ce motif, la Commission n’aurait pas dû lui imputer la responsabilité de l’infraction en cause, de même que, pour une raison identique, elle n’avait pas procédé à une telle imputation à l’égard de l’une des sociétés mères sanctionnées dans sa décision du 20 octobre 2004, relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] (Affaire COMP/C.38.238, Tabac brut – Espagne) (JO 2007, L 102, p. 14, ci-après la « décision Tabac brut Espagne »).

83      Troisièmement, la requérante soutient qu’Arkema France a toujours défini sa stratégie commerciale de manière autonome.

84      D’une part, contrairement à ce que la Commission aurait affirmé au point 324 de la communication des griefs et comme celle-ci l’aurait reconnu lors de l’audition auprès du conseiller-auditeur, la requérante n’aurait jamais arrêté ou approuvé le plan d’activité ou le budget des activités d’Arkema France spécifiquement liées au chlorate de sodium. Au contraire, Arkema France aurait disposé à l’époque des faits de tous les moyens et les ressources organisationnels, juridiques et financiers nécessaires à la définition de la stratégie commerciale des activités liées au chlorate de sodium ainsi qu’à la gestion de ces activités.

85      D’autre part, la requérante avance une série d’arguments visant à établir qu’Arkema France agissait de manière autonome sur le marché. Tout d’abord, Arkema France aurait joui du plein pouvoir de contracter sans l’autorisation préalable de sa société mère, ce qui lui aurait donné la possibilité de gérer de manière pleinement autonome sa politique commerciale. Ensuite, Arkema France aurait toujours défini librement la gamme des produits ou des services qu’elle commercialisait sur le marché du chlorate de sodium, dès lors que la requérante n’aurait jamais adressé aucune instruction ou directive à sa filiale concernant sa production, les prix pratiqués et les débouchés de sa production. En outre, Arkema France aurait bénéficié pleinement de la liberté de définir, sans intervention de sa société mère, ses objectifs de vente et ses marges brutes, aucun personnel de la requérante n’ayant été susceptible de s’immiscer dans ce type de décisions. Par ailleurs, la requérante n’aurait jamais été présente sur les marchés, ou en aval ou en amont des marchés, sur lesquels sa filiale opérait. Enfin, Arkema France serait intervenue sur le marché du chlorate de sodium en son nom et pour son propre compte et non en tant que son représentant ou son agent commercial.

86      Quatrièmement, selon la requérante, Arkema France disposait d’une pleine autonomie financière. Une telle constatation découlerait des considérations exposées aux points 81 à 85 ci-dessus ainsi que du caractère très modeste de son activité relative au chlorate de sodium au sein du groupe à l’époque des faits litigieux. Elle ajoute que le contrôle financier qu’elle exerçait sur Arkema France était très général et ne pouvait donc porter sur l’activité relative au chlorate de sodium.

87      Cinquièmement, la requérante soutient qu’Arkema France ne l’informait pas de son activité sur le marché et que la seule reddition des comptes à laquelle Arkema France procédait à son égard restait strictement dans les limites des obligations d’une holding au regard des règles comptables et de régulation financière applicables. Dès lors, cette reddition des comptes serait demeurée à un niveau très général et n’aurait pas concerné la politique commerciale d’Arkema France.

88      Sixièmement, la requérante fait observer que, à la lumière de l’ensemble des considérations exposées aux points 81 à 87 ci-dessus, d’une part, la Commission aurait dû constater que l’activité d’Arkema France n’était pas subordonnée aux instructions de sa société mère. D’autre part, il ressortirait tant de la jurisprudence que de la pratique décisionnelle de la Commission que l’ensemble des indices avancés par la requérante pour renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante seraient pertinents aux fins de démontrer l’autonomie de sa filiale. En rejetant les indices que la requérante lui a fournis, la Commission lui aurait, de facto, dénié ce mode de preuve pour renverser ladite présomption.

89      En deuxième lieu, la requérante fait valoir que la Commission a rejeté à tort, au considérant 370 de la décision attaquée, le caractère probant de l’absence de sa participation à l’infraction commise par sa filiale ainsi que celui de sa méconnaissance de ladite infraction pour écarter sa responsabilité, et ce alors même que la Commission a expressément reconnu dans la décision attaquée que la requérante n’avait jamais été impliquée directement ou indirectement dans l’infraction en cause. Or, la participation ou la connaissance d’une infraction seraient retenues comme un indice pertinent, par la Commission et par les juridictions de l’Union, dans le cadre de l’imputation de la responsabilité de cette infraction à une société mère.

90      En troisième lieu, la requérante relève que la Commission a considéré à tort, au considérant 403 de la décision attaquée, que le fait qu’elle n’intervenait ni sur le marché du chlorate de sodium dans l’EEE, ni sur les marchés en amont ou en aval de ce produit ne constituait pas une preuve de son indépendance. Une telle position serait incompatible avec la jurisprudence telle qu’elle ressort de l’arrêt du Tribunal du 12 septembre 2007, Prym et Prym Consumer/Commission (T‑30/05, non publié au Recueil).

91      La Commission s’oppose aux arguments de la requérante.

–       Appréciation du Tribunal

92      La requérante soutient, en substance, qu’elle a rapporté un faisceau d’indices démontrant l’autonomie d’Arkema France sur le marché du chlorate de sodium et l’absence d’immixtion de sa part dans la politique commerciale de sa filiale.

93      Il convient de rappeler que, d’une part, comme il ressort de la jurisprudence exposée en particulier aux points 52 à 55 ci-dessus, lorsque la Commission se fonde sur la présomption d’exercice d’une influence déterminante pour imputer la responsabilité d’une infraction à une société mère, il incombe à cette dernière de la renverser en apportant des éléments de preuve suffisants de nature à démontrer que sa filiale se comporte de façon autonome sur le marché. D’autre part, afin d’établir l’autonomie de sa filiale sur le marché et donc de renverser ladite présomption, il incombe à la société mère de soumettre tout élément relatif aux liens organisationnels, économiques et juridiques entre elle-même et sa filiale de nature à démontrer qu’elles ne constituent pas une seule entité économique.

94      En l’espèce, il y a donc lieu d’examiner si la Commission a considéré à bon droit que les éléments du faisceau d’indices que la requérante a rapportés ne permettaient pas d’établir l’autonomie d’Arkema France sur le marché et de renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante.

95      Premièrement, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la position retenue par la Commission dans la décision Peroxydes organiques et dans la décision Peroxyde d’hydrogène montre qu’Arkema France se comportait de manière autonome sur le marché, celui-ci doit être rejeté comme étant non fondé. Tout d’abord, il y a lieu de relever, d’une part, que la requérante interprète de manière erronée lesdites décisions, dès lors que la Commission n’y a nullement conclu qu’Arkema France agissait de manière autonome, soit, en particulier, sur le marché du chlorate de sodium soit, de manière générale, sur les autres marchés de produits qu’elle commercialisait. En effet, comme il ressort notamment de l’article 1er de la décision Peroxydes organiques, la Commission s’est contentée de sanctionner Arkema France (anciennement Atofina), sans se prononcer sur la question de savoir s’il y avait lieu d’imputer la responsabilité de cette infraction à la requérante. D’autre part, il y a lieu de constater que, dans la décision Peroxyde d’hydrogène, la Commission a conclu en substance, notamment au considérant 427 de ladite décision, que la responsabilité de l’infraction en cause dans cette décision devait être imputée à la requérante. Dès lors, ni l’une ni l’autre de ces décisions ne permettent de conclure que la Commission a considéré, dans des circonstances semblables à celles de l’espèce, qu’Arkema France agissait de manière autonome sur le marché.

96      De plus, dans la mesure où, comme il a été constaté au point 60 ci-dessus, la Commission dispose de la faculté, mais non de l’obligation, d’imputer la responsabilité d’une infraction à une société mère et où c’est sur la base d’une interprétation exacte de l’article 81 CE qu’elle a imputé, en l’espèce, la responsabilité de l’infraction en cause à la requérante, l’éventuel constat selon lequel la Commission, dans des affaires précédentes, soit aurait estimé qu’il n’y avait pas lieu de procéder à une telle imputation, soit aurait corroboré la présomption d’exercice d’une influence déterminante par des indices additionnels ne permettrait pas, en toute hypothèse, de conclure en l’espèce qu’elle a commis une erreur de droit en imputant la responsabilité de l’infraction en cause à la requérante.

97      Deuxièmement, s’agissant des arguments de la requérante selon lesquels l’autonomie d’Arkema France est attestée par la gestion décentralisée du groupe Elf Aquitaine et par le fait que la requérante n’était qu’une « holding non opérationnelle » qui n’intervenait pas dans la gestion opérationnelle de ses filiales et, partant, que la Commission n’aurait pas dû lui imputer la responsabilité de l’infraction, comme elle se serait par ailleurs abstenue de le faire, à l’égard d’une autre société mère, dans la décision Tabac brut Espagne, il convient également de les rejeter comme étant non fondés.

98      Tout d’abord, il y a lieu de relever, d’une part, que l’affirmation selon laquelle la requérante est une société « holding non opérationnelle » n’est étayée par aucun élément concret de nature à établir qu’elle n’exerçait aucune influence déterminante sur sa filiale. D’autre part, comme il découle de la jurisprudence exposée au point 60 ci-dessus, le fait que la Commission n’ait pas, dans la décision Tabac brut Espagne, imputé la responsabilité d’une infraction à une société mère ne saurait infirmer, en toute hypothèse, la constatation selon laquelle les conditions d’une telle imputation dans la décision attaquée étaient réunies.

99      De plus, et en toute hypothèse, dans le contexte d’un groupe de sociétés, une société holding a vocation à regrouper des participations dans diverses sociétés et a pour fonction d’en assurer l’unité de direction. Dès lors, il ne saurait être exclu que la requérante ait exercé une influence déterminante sur le comportement de sa filiale en coordonnant notamment les investissements financiers au sein du groupe Elf Aquitaine. En outre, la répartition interne des différentes activités de la requérante, s’apparentant à une gestion décentralisée, entre différentes divisions ou départements constitue un phénomène normal au sein des groupes de sociétés tel que celui à la tête duquel se trouve la requérante. Partant, cet argument ne renverse aucunement la présomption selon laquelle la requérante et Arkema France constituaient une seule entreprise au sens de l’article 81 CE.

100    Troisièmement, pour autant que la requérante soutient, d’une part, qu’Arkema France a toujours défini de manière autonome sa stratégie commerciale sur le marché du chlorate de sodium, dès lors qu’elle n’a jamais arrêté ni approuvé le plan d’activité et le budget des activités d’Arkema France spécifiquement liés à ce produit et que cette dernière disposait, en substance, de la capacité d’agir de manière autonome sur le marché et, d’autre part, qu’Arkema France disposait d’une pleine autonomie financière, dès lors que le contrôle qu’elle exerçait sur sa filiale était très général, ces arguments doivent également être rejetés comme étant non fondés.

101    En effet, outre le fait que les arguments de la requérante ne sont étayés par aucun élément concret, il y a lieu de relever d’abord que le fait que celle-ci n’a jamais arrêté ni approuvé le plan d’activité et le budget des activités d’Arkema France ne permet pas d’établir qu’elle ne pouvait ni les modifier, ni les rejeter, ni contrôler leur application.

102    De plus, il ne saurait être exclu que la requérante ait exercé une influence déterminante sur le comportement de sa filiale en coordonnant notamment les investissements financiers au sein du groupe Elf Aquitaine.

103    Enfin, si, comme l’a soutenu par ailleurs la requérante dans sa réponse à la communication des griefs (voir page 71 de ladite réponse) et comme il ressort du considérant 392 de la décision attaquée, elle contrôlait les engagements les plus importants de sa filiale, cette circonstance ne fait que renforcer la conclusion de la Commission selon laquelle ladite filiale n’était pas autonome par rapport à la requérante.

104    Quatrièmement, l’argument de la requérante selon lequel Arkema France ne l’informait pas de son activité sur le marché et ne procédait à une reddition des comptes à son égard qu’en termes très généraux, conformément au droit français et à ses statuts, doit être rejeté comme étant non fondé. À cet égard, outre le fait qu’il y a lieu de relever que cet argument n’est étayé par aucun élément concret, la reconnaissance par la requérante, comme il est exposé au point 103 ci-dessus, du fait qu’elle contrôlait les engagements les plus importants de sa filiale tend à contredire ledit argument.

105    Cinquièmement, pour autant que la requérante fait valoir qu’elle n’a jamais participé à l’infraction, qu’elle n’en avait pas connaissance et qu’elle n’intervenait ni en amont ni en aval du marché du chlorate de sodium, non plus que sur ledit marché, qui était pour elle d’une importance mineure, il convient de constater que de tels éléments ne sont pas susceptibles d’établir l’autonomie d’Arkema France. Tout d’abord, il convient de rappeler que, comme il ressort de la jurisprudence, ce n’est pas une relation d’instigation relative à l’infraction entre la société mère et la filiale ni, à plus forte raison, une implication de la première dans ladite infraction, mais le fait qu’elles constituent une seule entreprise qui habilite la Commission à adresser la décision imposant des amendes à la société mère d’un groupe de sociétés (arrêt Michelin/Commission, point 55 supra, point 290). Ensuite, aucune conclusion ne saurait davantage être tirée du fait que la requérante et Arkema France opéraient sur des marchés distincts ou que le marché du chlorate de sodium était, pour la requérante, d’une importance mineure. En effet, il y a lieu de considérer que, dans un groupe tel que celui à la tête duquel se trouve placée la requérante, la division des tâches constitue un phénomène normal, qui ne permet pas de renverser la présomption selon laquelle la requérante et Arkema France constituaient une seule entreprise au sens de l’article 81 CE. Partant, ces arguments doivent être rejetés comme étant inopérants.

106    Sixièmement, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la Commission lui a, de facto, dénié le droit de renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante en considérant que les indices qu’elle avait rapportés ne permettaient pas d’établir l’autonomie d’Arkema France, il y a lieu de le rejeter comme étant non fondé. En effet, dans la décision attaquée, non seulement la Commission n’a pas contesté le droit de la requérante de rapporter des indices de nature à renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante, mais c’est après avoir examiné le faisceau d’indices que la requérante lui avait fourni qu’elle a conclu à bon droit, comme cela ressort des constatations exposées aux points 95 à 105 ci-dessus, que les éléments dudit faisceau ne permettaient pas de renverser ladite présomption.

107    À la lumière de l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de conclure que la Commission a considéré à juste titre que la requérante n’avait pas rapporté d’éléments de preuve de nature à renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante.

108    Partant, il y a lieu de rejeter la quatrième branche du premier moyen en partie comme étant non fondée et en partie comme étant inopérante.

 Sur la cinquième branche, tirée de la transformation de la présomption d’exercice d’une influence déterminante en présomption irréfragable

–       Arguments des parties

109    La requérante soutient que, en rejetant le faisceau d’indices qu’elle a fourni à la Commission, cette dernière a transformé la présomption d’exercice d’une influence déterminante, qui devrait être une présomption réfragable, en une présomption irréfragable.

110    En premier lieu, la requérante fait valoir que la transformation d’une présomption réfragable en une présomption irréfragable porte atteinte au principe de la présomption d’innocence. Tout d’abord, cette transformation constituerait une probatio diabolica, c’est-à-dire une preuve impossible à remettre en cause et donc une preuve inadmissible au regard de la jurisprudence. Ensuite, lors de l’audience, la requérante a précisé qu’une telle présomption était contraire au principe de la présomption d’innocence consacré, d’une part, par la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la « CEDH »), tel qu’il a été interprété par la Cour européenne des droits de l’homme dans son arrêt Salabiaku c. France, du 7 octobre 1988 (série A n° 141-A, § 28), et, d’autre part, par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, proclamée le 7 décembre 2000 à Nice (JO C 364, p. 1), et qui a la même valeur juridique que les traités en vertu de l’article 6, paragraphe 1, premier alinéa, TUE. Enfin, en réponse aux questions du Tribunal à l’audience, elle a précisé qu’elle considérait que l’arrêt Akzo Nobel e.a./Commission, point 45 supra, était incompatible avec les dispositions susmentionnées.

111    En second lieu, la requérante soutient que la Commission a rendu la présomption d’exercice d’une influence déterminante qu’elle a posée dans la décision attaquée impossible à renverser.

112    Premièrement, il ressortirait des considérants 396 et 412 de la décision attaquée que la Commission reconnaît que le renversement de la présomption d’exercice d’une influence déterminante est, en pratique, presque impossible à effectuer, dès lors qu’elle y indique notamment que « cette présomption se vérifie presque dans tous les cas ».

113    Deuxièmement, la Commission aurait refusé de prendre en considération les indices que la requérante avait avancés pour renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante, alors même que de tels indices, lorsqu’ils sont invoqués par la Commission, permettent à cette dernière de corroborer ladite présomption.

114    Troisièmement, il ressortirait du considérant 401, in fine, de la décision attaquée que la Commission considère, à tort, qu’une société mère doit être tenue pour responsable d’une infraction, qu’elle ait interféré ou non dans l’activité de sa filiale, qu’elle l’ait laissée agir librement ou non, et qu’elle ait eu connaissance ou non des infractions commises par ladite filiale.

115    Quatrièmement, la Commission aurait manqué de tirer les conséquences appropriées de son erreur d’interprétation, qu’elle aurait reconnue lors de l’audition auprès du conseiller-auditeur, des observations formulées par Arkema France le 18 octobre 2004, en réponse à la demande de renseignements que celle-ci lui avait adressée le 10 septembre 2004, et dans lesquelles elle avait confondu Elf Atochem et la requérante.

116    Cinquièmement, la Commission se serait appuyée, dans la décision attaquée, non pas sur des éléments concrets démontrant l’exercice effectif d’une influence déterminante de la requérante sur la gestion commerciale d’Arkema France, mais sur de simples affirmations non étayées, qui constitueraient d’autres présomptions et suppositions qu’elle n’a jamais vérifiées.

117    Sixièmement, il devrait être déduit du rejet de l’ensemble des éléments du faisceau d’indices rapporté par la requérante que la Commission exige des preuves documentaires négatives de l’absence d’immixtion d’une société mère dans la politique commerciale de sa filiale.

118    La Commission s’oppose aux arguments de la requérante.

–       Appréciation du Tribunal

119    La requérante fait valoir, en substance, que, en rejetant les indices qu’elle lui avait fournis, la Commission a transformé la présomption d’exercice d’une influence déterminante en présomption irréfragable. Or, une telle présomption serait illégale tant au regard de la CEDH et de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne que de la jurisprudence des juridictions de l’Union européenne et de la Cour européenne des droits de l’homme.

120    À cet égard, il y a lieu de relever que, conformément à la jurisprudence citée au point 52 ci-dessus, il n’a pas été exigé de la requérante qu’elle rapporte une preuve de son absence d’immixtion dans la gestion de sa filiale, mais uniquement qu’elle produise des éléments de preuve suffisants pour démontrer que sa filiale se comportait de façon autonome sur le marché en cause.

121    Or, la circonstance que la requérante n’ait pas, en l’espèce, produit d’éléments de preuve de nature à renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante, comme il ressort de l’examen de la quatrième branche du premier moyen (voir points 95 à 106 ci-dessus), ne signifie pas que ladite présomption ne peut, en aucun cas, être renversée.

122    Pour ce motif, premièrement, il y a lieu de rejeter comme étant inopérant l’argument de la requérante exposé au point 110 ci-dessus, selon lequel, en substance, la présomption d’exercice d’une influence déterminante que la Commission a posée dans la décision attaquée et dont la Cour a reconnu la légalité dans l’arrêt Akzo Nobel e.a./Commission, point 45 supra, est contraire au principe de présomption d’innocence tel que ce principe a, d’une part, été reconnu dans la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et dans la CEDH et, d’autre part, tel qu’il a été interprété par la Cour européenne des droits de l’homme et par les juridictions de l’Union. Deuxièmement, il convient de rejeter comme étant non fondés les arguments exposés aux points 111 à 117 ci-dessus, selon lesquels, en substance, la Commission a considéré, à tort, que les indices que la requérante lui avait fournis établissaient qu’elle n’exerçait pas une influence déterminante sur Arkema France, dès lors que, comme il a été constaté dans le cadre de l’examen de la quatrième branche du premier moyen (voir points 95 à 106 ci-dessus), c’est en raison du fait qu’aucun des indices que la requérante avait rapportés ne permettait de conclure, en l’espèce, à l’autonomie sur le marché d’Arkema France que la Commission a, dans la décision attaquée, imputé la responsabilité de l’infraction à la requérante.

123    Dès lors, il y a lieu de rejeter, en partie comme étant non fondés et en partie comme étant inopérants, la cinquième branche du premier moyen et, par suite, le premier moyen dans son ensemble.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de six principes fondamentaux, résultant de l’imputation de la responsabilité du comportement infractionnel en cause à la requérante

124    La requérante soutient, en substance, que la Commission a violé six principes fondamentaux en lui imputant le comportement infractionnel d’Arkema France. Le présent moyen se divise donc en six branches.

 Sur la première branche, tirée d’une violation des droits de la défense de la requérante

–       Arguments des parties

125    La requérante considère, en substance, que ses droits de la défense ont été violés avant et après que la communication des griefs lui a été notifiée.

126    En premier lieu, la requérante fait valoir d’abord que l’appréciation de la Commission, figurant au considérant 406 de la décision attaquée, selon laquelle elle n’était pas tenue d’accomplir à son égard de diligences particulières préalablement à la notification de la communication des griefs, est infirmée par la jurisprudence telle qu’elle ressort des arrêts de la Cour du 2 octobre 2003, Thyssen Stahl/Commission (C‑194/99 P, Rec. p. I‑10921), et du 21 septembre 2006, Nederlandse Federatieve Vereniging voor de Groothandel op Elektrotechnisch Gebied/Commission (C‑105/04 P, Rec. p. I‑8725). En effet, elle considère que la Commission aurait dû faire usage de ses pouvoirs d’enquête, avant l’envoi de la communication des griefs, pour recueillir des indices corroborant la présomption d’exercice d’une influence déterminante auprès de la requérante, au lieu de se contenter de ceux fournis par Arkema France. À l’audience, elle a précisé qu’une telle obligation ressortait également de l’arrêt du Tribunal du 8 juillet 2008, AC-Treuhand/Commission (T‑99/04, Rec. p. II‑1501), et du code de bonnes pratiques de la Commission, relatif aux articles 101 TFUE et 102 TFUE (ci-après le « code de bonnes pratiques »), qui, à la date de l’audience, était disponible sur le site Internet de la Commission.

127    Ensuite, en l’absence de mesures d’enquête diligentées à son égard, la requérante aurait été privée de son droit d’expliquer, avant l’adoption de la communication des griefs, le mode de fonctionnement du groupe Elf Aquitaine, ses relations avec Arkema France et son rôle purement passif dans la gestion de son activité relative au chlorate de sodium. Elle aurait été également dans l’impossibilité de contrôler la véracité des informations fournies par Arkema France et pour lesquelles cette dernière avait demandé la confidentialité, telles que le chiffre d’affaires de la requérante qu’Arkema France avait fourni à la Commission en réponse à une demande de renseignements.

128    En outre, dès lors que l’enquête concernait la période postérieure au départ d’Arkema France du groupe Elf Aquitaine, le 18 mai 2006, la Commission n’aurait pu recueillir des réponses complètes aux questions qu’elle avait posées à celle-ci. La requérante aurait, dès lors, perdu une chance, d’une part, de faire modifier les griefs retenus à son égard, en démontrant, dès le stade de l’enquête, l’impossibilité de lui imputer l’infraction commise par Arkema France et, d’autre part, d’éviter de se voir imposer deux amendes distinctes. Elle a ajouté, à l’audience, que, dans la mesure où la communication des griefs lui était parvenue à une date à laquelle Arkema France ne faisait plus partie du groupe Elf Aquitaine et que quatre années s’étaient écoulées depuis le début de l’enquête, elle ne disposait plus de preuves lui permettant de se défendre utilement au jour de la notification de ladite communication.

129    Enfin, l’altération de la capacité de la requérante à se défendre aurait été aggravée par le caractère incohérent et contradictoire de la position prise par la Commission dans la décision AMCA, dans la décision C (2006 final), du 31 mai 2006, relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire COMP/F/38.64 – Méthacrylates) (JO 2006, L 322, p. 20, ci-après la « décision Méthacrylates »), dans la décision Peroxyde d’hydrogène et dans la décision attaquée.

130    Par ailleurs, à l’audience, la requérante a fait observer, d’une part, que la Cour avait reconnu le caractère pénal des amendes en matière de concurrence dans ses arrêts du 8 juillet 1999, Hüls/Commission (C‑199/92 P, Rec. p. I‑4287), du 22 mai 2008, Evonik Degussa/Commission et Conseil (C‑266/06 P, non publié au Recueil), et du 23 décembre 2009, Spector Photo Group et Van Raemdonck (C‑45/08, non encore publié au Recueil), et, d’autre part, que la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, qui est entrée en vigueur le 1er décembre 2009, était d’application immédiate aux litiges pendants devant le Tribunal. Dans ce cadre, elle soutient que ses droits fondamentaux ont été violés, dès lors que la Commission a considéré à tort que « c’était l’entreprise, et non pas chacune des personnes juridiques prises isolément, qui devait bénéficier de droits fondamentaux ».

131    En second lieu, la requérante soutient qu’il ressort des considérants 402 à 406 de la décision attaquée que la Commission a manqué d’examiner avec soin, en violation des exigences posées par la jurisprudence, l’ensemble des éléments du faisceau d’indices qu’elle avait rapportés pour renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante, dès lors qu’elle s’est contentée de rejeter lesdits éléments par des affirmations non motivées, des suppositions et des présomptions purement théoriques, qui ne correspondent pas à la réalité du fonctionnement du groupe Elf Aquitaine au moment des faits en cause.

132    La Commission s’oppose aux arguments de la requérante.

–       Appréciation du Tribunal

133    La requérante fait valoir que la Commission a violé ses droits de la défense, d’une part, en ne diligentant aucune mesure d’enquête à son égard avant de lui notifier la communication des griefs et, d’autre part, en manquant d’examiner avec soin, après la notification de ladite communication, l’ensemble des éléments du faisceau d’indices qu’elle avait rapportés afin de renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante.

134    Selon une jurisprudence constante, le respect des droits de la défense exige que l’entreprise intéressée ait été mise en mesure, au cours de la procédure administrative, de faire connaître utilement son point de vue sur la réalité et la pertinence des faits et des circonstances alléguées ainsi que sur les documents retenus par la Commission à l’appui de son allégation de l’existence d’une infraction au traité (arrêts de la Cour du 7 juin 1983, Musique Diffusion française e.a./Commission, 100/80 à 103/80, Rec. p. 1825, point 10, et du 6 avril 1995, BPB Industries et British Gypsum/Commission, C‑310/93 P, Rec. p. I‑865, point 21).

135    À l’instar du règlement n° 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d’application des articles [81 CE] et [82 CE] (JO 1962, 13, p. 204), qui a été abrogé et remplacé par le règlement n° 1/2003, ce dernier règlement prévoit, à son article 27, paragraphe 1, l’envoi aux parties d’une communication des griefs qui doit énoncer, de manière claire, tous les éléments essentiels sur lesquels la Commission se fonde à ce stade de la procédure (arrêt Aalborg Portland e.a./Commission, point 45 supra, point 67), pour permettre aux intéressés de prendre effectivement connaissance des comportements qui leur sont reprochés par la Commission et faire valoir utilement leur défense avant que celle-ci n’adopte une décision définitive. Une telle communication des griefs constitue la garantie procédurale appliquant le principe fondamental du droit communautaire qui exige le respect des droits de la défense dans toute procédure (arrêt de la Cour du 3 septembre 2009, Papierfabrik August Koehler e.a./Commission, C‑322/07 P, C‑327/07 P et C‑338/07 P, Rec. p. I‑7191, point 35).

136    Ce principe exige notamment que la communication des griefs adressée par la Commission à une entreprise à l’égard de laquelle elle envisage d’infliger une sanction pour violation des règles de la concurrence contienne les éléments essentiels retenus à l’égard de cette entreprise, tels que les faits reprochés, la qualification qui leur est donnée et les éléments de preuve sur lesquels la Commission se fonde, afin que cette entreprise soit en mesure de faire valoir utilement ses arguments dans le cadre de la procédure administrative engagée à son égard (voir arrêt Papierfabrik August Koehler e.a./Commission, point 135 supra, point 36, et la jurisprudence citée).

137    En particulier, la communication des griefs doit préciser sans équivoque la personne juridique qui sera susceptible de se voir infliger des amendes, elle doit être adressée à cette dernière et elle doit indiquer en quelle qualité cette personne se voit reprocher les faits allégués (voir, en ce sens, Papierfabrik August Koehler e.a./Commission, point 135 supra, points 37 et 38).

138    C’est en effet par la communication des griefs que l’entreprise concernée est informée de tous les éléments essentiels sur lesquels la Commission se fonde à ce stade de la procédure. Par conséquent, c’est seulement après l’envoi de ladite communication que l’entreprise concernée peut pleinement faire valoir ses droits de la défense (voir arrêt de la Cour du 25 janvier 2007, Dalmine/Commission, C‑407/04 P, Rec. p. I‑829, point 59, et la jurisprudence citée, et arrêt AC‑Treuhand/Commission, point 126 supra, point 48).

139    S’agissant du premier grief de la requérante, selon lequel la Commission a enfreint ses droits de la défense en ne diligentant aucune mesure d’enquête à son égard avant que la communication des griefs ne lui soit notifiée, il convient de relever que, si les parties n’ont pas fourni au Tribunal ladite communication des griefs, il ressort toutefois sans ambiguïté des observations de la requérante du 27 septembre 2007, en réponse à ladite communication, que la Commission l’a informé qu’elle entendait lui imputer le comportement infractionnel d’Arkema France sur la base de la présomption d’exercice d’une influence déterminante. La requérante a donc eu connaissance du grief retenu contre elle dans ladite communication et elle a été mise en mesure de répondre, et a effectivement répondu par écrit, à ladite communication. De plus, elle ne conteste pas qu’elle a été mise en mesure de présenter, et qu’elle a effectivement présenté, ses observations sur ladite communication lors de l’audition auprès du conseiller-auditeur.

140    Le fait que la Commission n’a diligenté aucune mesure d’enquête à l’égard de la requérante avant de lui notifier la communication des griefs, ou encore que, comme celle-ci le fait par ailleurs observer, la Commission lui ait, dans de précédentes décisions, imputé ou non la responsabilité d’autres infractions commises par sa filiale ne saurait remettre en cause la conclusion selon laquelle la Commission pouvait l’informer des griefs retenus à son égard, pour la première fois, dans ladite communication. En effet, la requérante a été mise en mesure de faire utilement connaître son point de vue au cours de la procédure administrative sur la réalité et la pertinence des faits et des circonstances alléguées par la Commission dans sa communication des griefs, tant dans ses observations en réponse à ladite communication que lors de l’audition auprès du conseiller-auditeur.

141    Dès lors, la Commission n’a pas violé les droits de la défense de la requérante en ne diligentant aucune mesure d’enquête à son égard avant de lui notifier la communication des griefs.

142    Les autres arguments soulevés par la requérante n’infirment pas cette conclusion.

143    Premièrement, s’agissant de l’argument soulevé par la requérante à l’audience, selon lequel la Commission a violé ses droits fondamentaux tels que reconnus par la jurisprudence communautaire et par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, en considérant à tort que c’était l’entreprise, et non chacune des personnes juridiques prises isolément, qui devait bénéficier de ces droits fondamentaux, il convient de le rejeter comme étant non fondé. En effet, outre le fait qu’il ne ressort ni de la décision attaquée ni de ses écritures que la Commission ait formulé une telle considération, il convient de constater, comme il ressort du considérant 66 de la décision attaquée et de l’article 4 du dispositif de ladite décision, que c’est à la requérante et à Arkema France, chacune prise séparément, que la Commission a adressé la communication des griefs ainsi que la décision attaquée, de sorte que, lors de la procédure administrative comme à l’issue de celle-ci, elle a respecté les droits de la défense de chacune de ces deux sociétés.

144    Deuxièmement, l’argument selon lequel il ressort de la jurisprudence citée au point 126 ci-dessus que la Commission a considéré à tort, en l’espèce, qu’elle n’était pas tenue d’accomplir des diligences particulières à l’égard de la requérante, doit également être rejeté comme étant non fondé.

145    Tout d’abord, dans l’arrêt Thyssen Stahl/Commission, point 126 supra (point 31), la Cour a jugé qu’il y avait lieu de constater que la Commission viole les droits de la défense d’une entreprise lorsqu’il existe une possibilité que, en raison d’une irrégularité commise par la Commission, la procédure administrative ait pu aboutir à un résultat différent. La Cour a également considéré, audit point, qu’une entreprise établissait qu’une telle violation avait eu lieu lorsqu’elle démontre à suffisance non pas que la décision de la Commission aurait eu un contenu différent, mais bien qu’elle aurait pu mieux assurer sa défense en l’absence d’une irrégularité, par exemple en raison du fait qu’elle aurait pu utiliser pour sa défense des documents dont l’accès lui avait été refusé lors de la procédure administrative. Or, en l’espèce, il y a lieu de constater que la requérante n’établit pas que le fait que la Commission ne lui a adressé aucune mesure d’enquête avant de lui notifier la communication des griefs aurait pu conduire cette dernière à retenir un résultat différent dans la décision attaquée. En effet, contrairement à ce qu’elle soutient, elle a eu l’opportunité de faire connaître, sur la base de la communication des griefs, ses observations relatives au mode de fonctionnement du groupe Elf Aquitaine, ses relations avec Arkema France ainsi que son prétendu rôle purement passif dans la gestion de son activité relative au chlorate de sodium.

146    Ensuite, dans l’arrêt Nederlandse Federatieve Vereniging voor de Groothandel op Elektrotechnisch Gebied/Commission, point 126 supra (points 48 à 50 et 56), la Cour a jugé notamment qu’il importait d’éviter que les droits de la défense puissent être irrémédiablement compromis en raison de la durée excessive de la phase d’instruction et que cette durée soit susceptible de faire obstacle à l’établissement de preuves visant à réfuter l’existence de comportements de nature à engager la responsabilité des entreprises concernées. Or, en l’espèce, il y a lieu de relever que la requérante n’avance aucun élément concret établissant que la phase d’instruction de la procédure ayant conduit à l’adoption de la décision attaquée aurait été d’une durée excessive et aurait, de ce fait, constitué un obstacle à ce qu’elle puisse fournir des indices de nature à renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante.

147    Enfin, dans l’arrêt AC-Treuhand/Commission, point 126 supra (point 56), le Tribunal a considéré que la Commission était tenue d’informer l’entreprise concernée, au stade de la première mesure prise à son égard, y compris dans les demandes de renseignements qu’elle lui a adressées au titre de l’article 11 du règlement nº 17, notamment de l’objet et du but de l’instruction. Au point 58 dudit arrêt, le Tribunal a également rappelé qu’il ressortait de la jurisprudence que ce n’est que si l’irrégularité commise par la Commission a été de nature à affecter concrètement les droits de la défense de l’entreprise en cause dans la procédure administrative qu’une telle irrégularité était susceptible de conduire à l’annulation de la décision finale de la Commission. Or, en l’espèce, outre le fait qu’il ne saurait être déduit dudit arrêt que la Commission serait tenue, comme l’affirme la requérante, de prendre des mesures d’enquête à l’égard d’une entreprise avant l’envoi d’une communication des griefs lorsqu’elle considère qu’elle dispose par ailleurs d’informations justifiant l’envoi d’une telle communication, force est de relever que la requérante n’avance aucun élément concret établissant qu’elle ait été, de ce fait, privée de la faculté de fournir la preuve qu’elle n’exerçait pas une influence déterminante sur Arkema France.

148    Troisièmement, s’agissant de l’argument selon lequel la Commission a violé le code des bonnes pratiques en ne lui adressant aucune mesure d’enquête, il y a lieu de constater, d’une part, que ledit code, qui ne doit s’appliquer, conformément à son point 5, qu’aux affaires en cours et futures à compter de sa publication au Journal officiel de l’Union européenne, a été adopté postérieurement à la décision attaquée et, partant, n’est pas applicable aux faits de l’espèce. D’autre part, et en toute hypothèse, il y a lieu de relever que le point 14 dudit code prévoit, en faisant référence à l’arrêt AC-Treuhand/Commission, point 126 supra (point 56) que, « au moment de la première mesure d’enquête (normalement une demande de renseignements ou une inspection), les entreprises sont informées du fait qu’elles font l’objet d’une enquête préliminaire ainsi que de l’objet et du but d’une telle enquête ». Dès lors, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur la portée juridique dudit code, il convient de constater, en toute hypothèse, que celui-ci ne crée aucune obligation pesant sur la Commission d’adresser des mesures d’enquête aux entreprises préalablement à l’adoption de la communication des griefs.

149    Partant, il y a lieu de rejeter comme étant non fondé le premier grief de la requérante.

150    S’agissant du second grief de la requérante, selon lequel la Commission a violé ses droits de la défense dans la mesure où elle n’a pas examiné avec soin l’ensemble des éléments du faisceau d’indices qu’elle avait rapporté pour renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante, il y a lieu de constater que, d’une part, comme le fait observer la Commission, la requérante n’identifie aucun élément de fait ou de droit évoqué dans la décision attaquée à propos duquel elle n’aurait pas pu s’expliquer dans la réponse à la communication des griefs. D’autre part, il convient de se reporter aux considérants 397 à 415 de la décision attaquée pour constater que la Commission a répondu aux arguments soulevés par Arkema France et par la requérante dans leurs observations en réponse à la communication des griefs de manière motivée et exhaustive. Par conséquent, il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir violé les droits de la défense de la requérante à cet égard.

151    Dès lors, le second grief de la requérante ainsi que la première branche dans son ensemble doivent être écartés comme étant non fondés.

 Sur la deuxième branche, tirée d’une violation du principe de l’égalité des armes


 Arguments des parties

152    La requérante fait valoir que la Commission a violé le principe de l’égalité des armes. Cette violation résulterait, en l’espèce, du fait que, au lieu de rapporter des éléments concrets permettant de donner un éclairage différent aux faits de l’espèce tels qu’ils ressortent du faisceau d’indices que la requérante avait fourni, la Commission se serait contentée d’avancer de nouvelles suppositions et présomptions, alors même que, conformément à la jurisprudence, la requérante avait apporté une autre explication plausible des faits s’opposant à celle retenue par la Commission.

153    À l’audience, la requérante a ajouté que le fait que la Commission a manqué de diligenter une enquête à son égard a entraîné une violation du principe de l’égalité des armes, dans la mesure où elle aurait pu « garder les preuves » et « se prémunir contre une accusation d’interférence avec sa filiale ».

154    La Commission s’oppose aux arguments de la requérante.

 Appréciation du Tribunal

155    La requérante fait valoir, en substance, que la Commission a violé le principe de l’égalité des armes, dans la mesure où, dès lors qu’elle avait fourni un faisceau d’indices constituant une explication plausible du fait qu’Arkema France exerçait son activité de manière autonome, il appartenait alors à la Commission d’apporter des éléments concrets corroborant la présomption d’exercice d’une influence déterminante.

156    Il convient de rappeler que le principe de l’égalité des armes, tout comme, notamment, celui du contradictoire, n’est qu’un corollaire de la notion même de procès équitable (voir, par analogie, arrêts de la Cour du 26 juin 2007, Ordre des barreaux francophones et germanophone e.a., C‑305/05, Rec. p. I‑5305, point 31; du 2 décembre 2009, Commission/Irlande e.a., C‑89/08 P, non encore publié au Recueil, point 50, ainsi que du 17 décembre 2009, Réexamen M/EMEA, C‑197/09 RX‑II, non encore publié au Recueil, points 39 et 40). Il implique notamment l’obligation d’offrir à chaque partie une possibilité raisonnable de présenter sa cause dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire (voir Cour eur. D. H., arrêts Dombo Beheer BV c. Pays-Bas du 27 octobre 1993, série A n° 274, § 33 ; Ernst e.a. c. Belgique du 15 juillet 2003, § 60, et Vezon c. France du 18 avril 2006, § 31).

157    En l’espèce, contrairement à ce que la requérante soutient, elle ne se trouvait pas dans une situation de net désavantage par rapport à la Commission en raison du fait que cette dernière lui avait opposé la présomption d’exercice d’une influence déterminante, fondée sur l’existence de liens capitalistiques avec Arkema France.

158    En effet, dès lors que, d’une part, comme il a été constaté au point 57 ci-dessus, la Commission a présumé à bon droit de l’exercice d’une influence déterminante de la requérante sur Arkema France sur la base du fait qu’elle en détenait la quasi-totalité du capital social et, d’autre part, comme il ressort des constatations formulées aux points 139 et 140 ci-dessus, il a été loisible à la requérante, dans ses observations en réponse à la communication des griefs et lors de l’audition auprès du conseiller-auditeur, de présenter tous les éléments de droit et de fait en vue de renverser cette présomption, la Commission n’a pas violé en l’espèce le principe de l’égalité des armes.

159    L’argument de la requérante, soulevé à l’audience, selon lequel la Commission a violé le principe de l’égalité des armes en ce qu’elle aurait pu, si une enquête avait été engagée à son égard, « garder les preuves » qu’Arkema France agissait de manière autonome et, ainsi, « se prémunir contre une accusation d’interférence avec sa filiale », doit être rejeté comme étant non fondé. En effet, il convient de rappeler, d’abord, que la requérante, qui était la société mère d’Arkema France lorsque la Commission a adressé à cette dernière une demande de renseignements, le 10 septembre 2004, pouvait dès cette date réunir d’éventuelles preuves de l’autonomie de sa filiale. De plus, l’argument de la requérante à cet égard n’est étayé par aucun élément concret établissant que des preuves qui auraient été utiles à sa défense auraient disparues ou que la décision attaquée aurait pu être différente si une mesure d’enquête lui avait été adressée avant la communication des griefs. Enfin, et en toute hypothèse, ledit argument n’infirme pas la conclusion, énoncée au point 158 ci-dessus, selon laquelle il a été loisible à la requérante, dans le cadre de ses observations en réponse à la communication des griefs et lors de l’audition auprès du conseiller-auditeur, de présenter tous les éléments de droit et de fait utiles aux fins de renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante.

160    Partant, il y a lieu de rejeter comme étant non fondée la deuxième branche du deuxième moyen.

 Sur la troisième branche, tirée d’une violation de la présomption d’innocence

–       Arguments des parties

161    La requérante soutient que la Commission a violé la présomption d’innocence, qui est un droit fondamental garanti par le traité CE et par l’article 6, paragraphe 2, de la CEDH.

162    En premier lieu, la requérante fait observer que, aux considérants 409 à 411 de la décision attaquée, la Commission l’a sanctionnée pour une infraction à l’article 81 CE, sur la base d’une présomption qui n’était confortée par aucun élément concret et qui a conduit la Commission à ignorer les preuves contraires qu’elle avait rapportées. Un tel constat formel de responsabilité reposerait sur de simples allusions, que le Tribunal a condamnées dans l’arrêt du 6 octobre 2005, Sumitomo Chemical et Sumika Fine Chemicals/Commission (T‑22/02 et T‑23/02, Rec. p. II‑4065, point 106).

163    Tout d’abord, la Commission aurait dû établir la culpabilité, d’une part, d’Arkema France et, d’autre part, de la requérante, de façon spécifique et séparée. Ensuite, et en tout état de cause, la culpabilité de la requérante n’aurait pas été établie, puisque sa responsabilité a été retenue en violation, d’une part, des règles gouvernant l’imputation de la responsabilité d’une infraction à une société mère et, d’autre part, de ses droits de la défense.

164    Enfin, à l’audience, la requérante a fait observer que l’absence d’enquête menée à son égard montre que la Commission a agi sur la base d’un préjugé. Selon elle, la décision attaquée repose sur ce préjugé, qui « a perduré du fait de la procédure devant la Commission qui [serait] parfaitement inacceptable aujourd’hui au regard des impératifs de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne », dans la mesure où la décision finale est adoptée par une institution qui est à la fois « chargée de l’enquête, de la poursuite, et de la décision ».

165    En second lieu, la requérante soutient d’abord que, en lui appliquant de manière automatique la présomption d’exercice d’une influence déterminante, la Commission a fait peser sur elle une présomption irréfragable de culpabilité, qui constituerait une probatio diabolica et serait inadmissible. Elle fait observer que, selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, toute présomption doit être encadrée par des limites préservant les droits de la défense (voir Cour eur. D. H., arrêt Salabiaku c. France, point 110 supra, § 28, et arrêt Janosevic c. Suède du 23 juillet 2002, n° 34619/97, § 101). Ensuite, en vertu de la jurisprudence communautaire, tout recours systématique à des présomptions de culpabilité devrait être exclu et toute présomption de culpabilité devrait pouvoir être renversée de manière effective par la personne à laquelle elle est appliquée.

166    La Commission s’oppose aux arguments de la requérante.

–       Appréciation du Tribunal

167    La requérante invoque, en substance, une violation de la présomption d’innocence, dans la mesure où la Commission l’a sanctionnée pour l’infraction commise par Arkema France, d’une part, sans corroborer la présomption d’exercice d’une influence déterminante et en ignorant le faisceau d’indices qu’elle avait rapporté, de nature à renverser selon elle ladite présomption, et, d’autre part, en violant ses droits de la défense.

168    Selon la jurisprudence, la présomption d’innocence implique que toute personne accusée est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie. Elle s’oppose ainsi à tout constat formel et même à toute allusion ayant pour objet la responsabilité d’une personne accusée d’une infraction donnée dans une décision mettant fin à l’action, sans que cette personne ait pu bénéficier de toutes les garanties inhérentes à l’exercice des droits de la défense dans le cadre d’une procédure suivant son cours normal et aboutissant à une décision sur le bien-fondé de la contestation (arrêt du Tribunal du 12 octobre 2007, Pergan Hilfsstoffe für industrielle Prozesse/Commission, T‑474/04, Rec. p. II‑4225, point 76).

169    En l’espèce, il est constant que l’infraction en cause a été reconnue par la filiale de la requérante. Ensuite, comme il a été exposé au point 57 ci-dessus, la Commission a présumé à bon droit, dans la décision attaquée, que la requérante était responsable du comportement de sa filiale, en raison du fait qu’elle en détenait plus de 97 % du capital social. Dans la mesure où, comme il a été constaté au point 107 ci-dessus, la requérante n’a pas renversé la présomption d’exercice d’une influence déterminante, c’est donc à bon droit que la Commission lui a imputé la responsabilité de l’infraction en cause.

170    En outre, comme il a été relevé dans le cadre de l’examen de la première branche du deuxième moyen, tiré de la prétendue violation de ses droits de la défense (voir points 139 et 140 ci-dessus), la requérante a été mise en mesure de faire utilement connaître son point de vue, au cours de la procédure administrative, sur la réalité et la pertinence des faits et des circonstances allégués par la Commission dans la communication des griefs, tant dans ses observations en réponse à la communication des griefs que lors de l’audition auprès du conseiller-auditeur, de sorte qu’elle a bénéficié de toutes les garanties inhérentes à l’exercice des droits de la défense dans le cadre d’une procédure suivant son cours normal et aboutissant à une décision sur le bien-fondé de la contestation.

171    Enfin, comme il a été exposé dans le cadre de l’examen de la cinquième branche du premier moyen (voir point 121 ci-dessus), la circonstance que la requérante n’ait pas, en l’espèce, produit des éléments de preuve de nature à renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante ne signifie pas que ladite présomption ne peut en aucun cas être renversée et que, comme le fait observer également la requérante, la Commission a fait peser sur elle une présomption irréfragable de culpabilité, qui constituerait une probatio diabolica, ou qu’elle ne l’a sanctionnée que sur la base d’un « préjugé » que la requérante n’aurait pas eu l’opportunité de renverser.

172    Il s’ensuit que la Commission n’a pas méconnu la présomption d’innocence en présumant l’exercice d’une influence déterminante de la requérante sur sa filiale.

173    Par ailleurs, pour autant que la requérante a soutenu à l’audience, en substance, que la présomption d’innocence, telle que reconnue dans la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, a été violée en l’espèce, dès lors que la Commission est une institution chargée de « l’enquête, de la poursuite et de la décision », il y a lieu de constater que, comme la Commission l’a fait valoir oralement, ce grief a été soulevé tardivement, dès lors qu’il a été formulé pour la première fois au stade de l’audience et qu’il ne saurait être considéré comme une ampliation du présent moyen tel qu’avancé dans la requête, selon lequel la présomption d’exercice d’une influence déterminante sur laquelle la Commission s’est fondée dans la décision attaquée est contraire à la présomption d’innocence. Il y a donc lieu de rejeter ce grief comme étant irrecevable, conformément à l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal.

174    Partant, la troisième branche du deuxième moyen doit être écartée en partie comme étant non fondée et en partie comme étant irrecevable.

 Sur la quatrième branche, tirée d’une violation du principe de responsabilité du fait personnel et d’individualité des peines

–       Arguments des parties

175    La requérante fait valoir que la Commission a violé le principe de la responsabilité personnelle et son corollaire, le principe de personnalité des peines, d’une part, en retenant l’existence et la responsabilité de la prétendue entreprise formée par elle-même et Arkema France, et, d’autre part, en la condamnant à s’acquitter, premièrement, d’une amende qui lui a été imposée solidairement avec Arkema France et, deuxièmement, d’une amende à titre personnel, alors qu’elle aurait dû reconnaître l’existence de deux entités économiques distinctes faute d’éléments concrets susceptibles de corroborer la présomption d’exercice d’une influence déterminante. La violation desdits principes serait confirmée par les considérants 313 et 315 de la décision attaquée, qui font référence aux notions de coauteur et d’auteur de l’infraction. La Commission aurait ainsi qualifié à tort la requérante de coauteur de l’infraction en cause.

176    La Commission s’oppose aux arguments de la requérante.

–       Appréciation du Tribunal

177    La requérante fait valoir, en substance, que, en lui imputant la responsabilité de l’infraction en cause, la Commission a enfreint les principes de responsabilité du fait personnel et de personnalité des peines.

178    En vertu du principe d’individualité des peines et des sanctions, une personne physique ou morale ne doit être sanctionnée que pour les faits qui lui sont individuellement reprochés (arrêt du Tribunal du 13 décembre 2001, Krupp Thyssen Stainless et Acciai speciali Terni/Commission, T‑45/98 et T‑47/98, Rec. p. II‑3757, point 63), principe qui est applicable dans toute procédure administrative susceptible d’aboutir à des sanctions en vertu des règles de la concurrence (arrêt du Tribunal du 4 juillet 2006, Hoek Loos/Commission, T‑304/02, Rec. p. II‑1887, point 118).

179    Toutefois, comme il ressort de la jurisprudence exposée aux points 45 à 50 ci-dessus, ce principe doit se concilier avec la notion d’entreprise au sens de l’article 81 CE. Ainsi, lorsque l’entité économique enfreint les règles de la concurrence, il lui incombe, selon le principe de la responsabilité personnelle, de répondre de cette infraction.

180    Or, comme il a été déjà exposé au point 105 ci-dessus, ce n’est pas une relation d’instigation relative à l’infraction entre la société mère et sa filiale ni, à plus forte raison, une implication de la première dans ladite infraction, mais le fait qu’elles constituent une seule entreprise au sens de l’article 81 CE qui habilite la Commission à adresser la décision imposant des amendes à la société mère d’un groupe de sociétés (voir, en ce sens, arrêt Michelin/Commission, point 55 supra, point 292). Dès lors, la requérante a été personnellement condamnée pour une infraction qu’elle est censée avoir commise elle-même en raison des liens économiques et juridiques qui l’unissaient à Arkema France et qui lui permettaient de déterminer le comportement de cette dernière sur le marché.

181    Il s’ensuit que l’imputation de la responsabilité de l’infraction en cause à la requérante ne viole pas le principe d’individualité des peines et des sanctions.

182    À cet égard, il convient de rejeter comme étant non fondé l’argument de la requérante selon lequel il ressort des considérants 313 et 315 de la décision attaquée que la Commission l’a considéré à tort comme coauteur ou auteur de l’infraction. En effet, outre le fait que, dans lesdits considérants, la Commission n’opère pas de telles qualifications à l’égard de la requérante, il ressort clairement de la lecture combinée, notamment, des considérants 367 à 375, 386, 387, 396 et 415 de la décision attaquée, qu’elle a estimé que, dans la mesure où la requérante exerçait une influence déterminante sur Arkema France et qu’elles constituaient donc une entreprise au sens de l’article 81 CE, ces sociétés qui composaient l’entreprise, au sens de l’article 81 CE, qui avait commis l’infraction devaient en être tenues pour responsables.

183    Partant, il y a lieu de rejeter la quatrième branche du deuxième moyen comme étant non fondée.

  Sur la cinquième branche, tirée d’une violation du principe de légalité des peines

–       Arguments des parties

184    La requérante fait valoir que, en violant les principes de responsabilité du fait personnel et de personnalité des peines, la Commission a violé le principe de légalité des peines. Elle soutient qu’elle a été condamnée en dépit de l’absence de toute disposition légale réprimant une infraction qui n’aurait pas été établie contre une entreprise. D’une part, l’article 23, paragraphe 2, du règlement nº 1/2003 autoriserait uniquement la Commission à sanctionner les entreprises « qui participent à [une] infraction ». D’autre part, les lignes directrices prévoiraient que le pouvoir de sanction de la Commission ne devrait être exercé que « dans les limites prévues [par le règlement nº 1/2003] ».

185    La Commission s’oppose aux arguments de la requérante.

–       Appréciation du Tribunal

186    La requérante fait valoir, en substance, que la Commission a violé le principe de légalité des peines en la sanctionnant, alors même que l’article 23, paragraphe 2, du règlement nº 1/2003 et les lignes directrices ne prévoient pas une telle sanction.

187    Selon la jurisprudence, le principe de légalité des peines exige que la loi définisse clairement les infractions et les peines qu’elle réprime. Cette condition se trouve remplie lorsque le justiciable peut savoir, à partir du libellé de la disposition pertinente et au besoin à l’aide de l’interprétation qui en est donnée par les tribunaux, quels actes et omissions engagent sa responsabilité pénale (arrêt Evonik Degussa/Commission et Conseil, point 130 supra, point 39).

188    Il convient de relever que, en vertu de l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17 et de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, la Commission peut, par voie de décision, infliger des amendes aux entreprises qui commettent notamment une infraction aux dispositions de l’article 81 CE.

189    En l’espèce, eu égard aux dispositions citées au point 188 ci-dessus et dans la mesure où il a été considéré que la requérante et sa filiale Arkema France formaient une entreprise, au sens de l’article 81 CE, c’est sans violer le principe de légalité des peines que la Commission pouvait imposer, conformément à la jurisprudence exposée au point 50 ci-dessus, une amende aux personnes morales faisant partie de ladite entreprise.

190    Partant, il y a lieu de rejeter la cinquième branche du deuxième moyen comme étant non fondée.

  Sur la sixième branche, tirée d’une violation du principe d’égalité de traitement

–       Arguments des parties

191    La requérante soutient que le principe d’égalité de traitement, selon lequel, conformément à la jurisprudence, des situations comparables ne sauraient être traitées différemment, a été violé en l’espèce à double titre.

192    En premier lieu, la requérante fait valoir que la Commission a violé le principe d’égalité de traitement dans la mesure où, dans la décision Peroxydes organiques, la responsabilité de l’infraction à laquelle Arkema France avait participé ne lui avait pas été imputée, alors même que, à l’époque des faits en cause dans cette décision, le groupe Elf Aquitaine était géré de la même manière qu’à l’époque des faits en cause dans la décision attaquée. Elle ajoute, à cet égard, que la Commission a également violé de ce fait le principe de sécurité juridique.

193    En particulier, la requérante fait observer que les arguments de la Commission selon lesquels le fait qu’elle ne lui ait pas précédemment imputé la responsabilité de l’infraction en cause ne l’empêcherait pas de procéder à une telle imputation dans la décision attaquée, qu’elle dispose d’une large marge d’appréciation en matière d’amendes et qu’elle n’est pas liée par sa propre pratique décisionnelle, doivent être rejetés. D’une part, il serait incohérent que, dans des situations identiques, la Commission puisse ou non lui imputer la responsabilité d’une infraction. D’autre part, une telle faculté ne relèverait pas du pouvoir d’appréciation qui lui est reconnu pour assurer une application efficace des règles de la concurrence, mais elle serait purement et simplement arbitraire, sans contrôle possible des juridictions de l’Union.

194    En second lieu, la requérante soutient que le principe d’égalité de traitement entre, d’une part, elle-même, et, d’autre part, Akzo Nobel et ELSA, a été violé. À cet égard, elle fait observer que, aux considérants 378 à 382 et 481 à 483 de la décision attaquée, alors que la Commission retient un faisceau d’indices concrets pour corroborer la présomption d’exercice d’une influence déterminante à l’égard d’EKA et d’ELSA, elle fait l’économie de rapporter des indices concrets à son égard pour lui imputer l’infraction commise par Arkema France. Or, rien ne justifierait une telle différence de traitement.

195    La Commission s’oppose aux arguments de la requérante.

–       Appréciation du Tribunal

196    Selon une jurisprudence constante, le principe d’égalité de traitement requiert que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (voir arrêt de la Cour du 3 mai 2007, Advocaten voor de Wereld, C‑303/05, Rec. p. I‑3633, point 56, et la jurisprudence citée).

197    S’agissant du premier grief de la requérante, selon lequel la Commission a enfreint tant le principe d’égalité de traitement que le principe de sécurité juridique, dans la mesure où elle ne lui a pas imputé la responsabilité de l’infraction en cause dans la décision Peroxydes organiques, il convient de le rejeter comme étant non fondé. En effet, d’une part, dès lors que la Commission avait, entre l’adoption de la décision Peroxydes organiques et celle de la décision attaquée, déjà imputé à la requérante la responsabilité des infractions constatées dans trois décisions, à savoir la décision AMCA, la décision Peroxyde d’hydrogène et la décision Méthacrylates, celle-ci ne pouvait ignorer les conditions d’une telle imputation. D’autre part, il convient de rappeler que, comme il a été exposé au point 60 ci-dessus, dès lors que la Commission dispose de la faculté, mais non de l’obligation, d’imputer la responsabilité de l’infraction à une société mère et que les conditions d’une telle imputation étaient remplies en l’espèce, le seul fait que la Commission n’ait pas procédé à une telle imputation dans la décision Peroxydes organiques n’impliquait pas qu’elle soit obligée de porter la même appréciation dans la décision attaquée.

198    Par ailleurs, l’argument de la requérante selon lequel le fait que la Commission dispose d’une marge d’appréciation l’autorisant à imputer une infraction commise par une filiale à sa société mère relèverait de l’arbitraire doit être rejeté comme étant non fondé. En effet, si la Commission dispose, conformément à la jurisprudence citée au point 60 ci-dessus, d’une marge d’appréciation pour décider s’il y a lieu d’imputer la responsabilité d’une infraction à une société mère, il n’en demeure pas moins que sa décision de procéder à une telle imputation n’échappe pas, comme en l’espèce, au contrôle des juridictions de l’Union, à qui il appartient de vérifier que les conditions d’une telle imputation sont réunies.

199    Dès lors, le premier grief de la requérante doit être écarté comme étant non fondé.

200    S’agissant du second grief de la requérante, selon lequel elle a fait l’objet d’un traitement discriminatoire dans la décision attaquée par rapport à Akzo Nobel et à ELSA, dans la mesure où, à la différence d’avec ces dernières, la Commission a fait l’économie de rapporter des éléments concrets à l’égard de la requérante pour lui imputer la responsabilité de l’infraction en cause, il convient de le rejeter comme étant non fondé.

201    D’une part, ce grief repose sur une lecture erronée de la décision attaquée. En effet, de la même manière que la Commission a avancé des indices additionnels pour corroborer la présomption d’exercice d’une influence déterminante d’Akzo Nobel sur sa filiale EKA (considérant 378 de la décision attaquée) et d’ELSA sur sa filiale Finnish Chemicals (considérant 481 de la décision attaquée), la Commission a relevé également des indices visant à corroborer la présomption d’exercice d’une influence déterminante de la requérante sur Arkema France (considérant 386 de la décision attaquée).

202    D’autre part, même si, dans la décision attaquée, la Commission n’avait corroboré la présomption d’exercice d’une influence déterminante qu’à l’égard d’Akzo Nobel et de sa filiale EKA, ainsi qu’à l’égard d’ELSA et de sa filiale Finnish Chemicals, mais non à l’égard de la requérante et de sa filiale, cela ne remettrait pas en question la légalité de ladite décision. En effet, comme il découle de l’appréciation exposée au point 77 ci-dessus, la Commission n’était pas tenue de corroborer ladite présomption, compte tenu du fait qu’Elf Aquitaine détenait la quasi-totalité du capital social de sa filiale. Dès lors, à supposer même que lesdites entreprises se seraient trouvées dans une situation comparable, le fait que la Commission ait décidé de corroborer la présomption d’exercice d’influence déterminante à l’égard de certains d’entre elles uniquement ne serait pas susceptible d’entraîner l’annulation de la décision attaquée.

203    Partant, il y a lieu de rejeter comme étant non fondés le second grief de la requérante ainsi que la sixième branche dans son ensemble.

204    Dans la mesure où les six branches du deuxième moyen doivent être écartées en partie comme étant non fondées, en partie comme étant irrecevables et en partie comme étant inopérantes, il y a lieu de rejeter ce moyen dans son ensemble.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une dénaturation du faisceau d’indices rapporté par la requérante

 Arguments des parties

205    La requérante fait valoir que les motifs exposés par la Commission, aux considérants 400 à 404 de la décision attaquée, pour rejeter les éléments du faisceau d’indices qu’elle a rapporté, montrent que la Commission a dénaturé certains de ces indices en recourant à des extrapolations, à des suppositions et à des présomptions non démontrées. De plus, l’affirmation de la Commission, figurant au considérant 404 de la décision attaquée, selon laquelle les faits de l’espèce seraient conformes à de telles supputations, conforterait le fait qu’elle a dénaturé lesdits indices.

206    La Commission s’oppose à cette argumentation.

 Appréciation du Tribunal

207    Tout d’abord, il y a lieu de constater que, à l’appui de ce moyen, la requérante n’avance aucun élément concret étayant son affirmation selon laquelle la Commission a dénaturé le faisceau d’indices qu’elle avait rapporté aux fins de renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante. Ensuite, pour autant que la requérante soutient, en substance, que la Commission a considéré à tort que le faisceau d’indices qu’elle lui a fourni ne renversait pas la présomption d’exercice d’une influence déterminante, il y a lieu de constater que ce moyen constitue une reformulation de la quatrième branche du premier moyen et, partant, de le rejeter pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 95 à 107 ci-dessus, aux termes desquels il a été jugé que le faisceau d’indices rapporté par la requérante ne permettait pas de renverser ladite présomption.

208    Dès lors, il y a lieu de rejeter le troisième moyen comme étant non fondé.

 Sur le quatrième moyen, tiré de l’existence de contradictions de motifs dans la décision attaquée

209    La requérante fait valoir que la décision attaquée contient trois contradictions qui l’entachent de nullité. En réponse aux questions du Tribunal à l’audience, elle a confirmé qu’elle invoquait à cet égard un défaut de motivation. Ce moyen se divise en trois branches.

 Sur la première branche, tirée d’une contradiction de motifs quant à l’application de la notion d’entreprise au sens de l’article 81, paragraphe 1, CE

–       Arguments des parties

210    La requérante soutient qu’il existe une contradiction de motifs dans la décision attaquée quant à l’application de la notion d’entreprise au sens de l’article 81, paragraphe 1, CE.

211    En premier lieu, la requérante fait observer que, s’il ressort des considérants 1 et 320 de la décision attaquée que la Commission a estimé que les destinataires de ladite décision étaient sanctionnés en raison de leur participation à l’infraction en cause, celle-ci relève, dans le même temps, de manière contradictoire, aux considérants 69, 384 et 385 de la même décision, qu’elle n’a jamais participé à l’infraction en cause.

212    En second lieu, la requérante fait valoir que la décision attaquée comporte une contradiction de motifs portant sur le « périmètre » de l’entreprise, au sens de l’article 81, paragraphe 1, CE, que la Commission a retenu.

213    Premièrement, la Commission aurait défini, aux considérants 16 et 385 de la décision attaquée, Arkema France comme étant l’entreprise unique responsable de l’infraction, alors que, aux considérants 375 et 415 de ladite décision, elle aurait estimé qu’il convenait de lui imputer l’infraction commise par Arkema France.

214    Deuxièmement, il existerait, dans la décision attaquée, des contradictions dans les motifs consacrés au calcul des deux amendes qui ont été imposées à la requérante. À cet égard, la requérante fait valoir que la Commission lui impose dans la décision attaquée une amende personnelle, alors même qu’elle n’a pas participé à l’infraction et qu’elle n’a pas eu connaissance de celle-ci et que les deux amendes qui lui sont imposées ont été calculées sur la base de paramètres qui étaient propres à Arkema France et sur lesquels elle n’a pu exercer aucune influence.

215    La Commission s’oppose aux arguments de la requérante.

–       Appréciation du Tribunal

216    Selon une jurisprudence constante, la motivation exigée par l’article 253 CE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 253 CE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt de la Cour du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C‑367/95 P, Rec. p. I‑1719, point 63, et la jurisprudence citée, et arrêt Hoek Loos/Commission, point 178 supra, point 58).

217    Il ressort également de la jurisprudence que, lorsqu’une décision d’application de l’article 81 CE concerne une pluralité de destinataires et pose un problème d’imputabilité de l’infraction, elle doit comporter une motivation suffisante à l’égard de chacun des destinataires, particulièrement pour ceux d’entre eux qui, aux termes de cette décision, doivent supporter la charge de cette infraction (arrêts du Tribunal du 28 avril 1994, AWS Benelux/Commission, T‑38/92, Rec. p. II‑211, point 26). Ainsi, pour être suffisamment motivée à l’égard des sociétés mères des filiales ayant commis l’infraction, la décision de la Commission doit contenir un exposé circonstancié des motifs de nature à justifier l’imputabilité de l’infraction à ces sociétés (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 14 mai 1998, SCA Holding/Commission, T‑327/94, Rec. p. II‑1373, point 80).

218    En l’espèce, sans qu’il soit nécessaire d’examiner chacun des considérants de la décision attaquée que la requérante invoque, il y a lieu de constater qu’il ressort sans ambiguïté des considérants 386 et 387 de la décision attaquée, exposés aux points 41 et 42 ci-dessus, que c’est sur la base de la constatation selon laquelle la requérante et Arkema France constituaient une seule entreprise au sens de l’article 81 CE, que la Commission a décidé de lui imputer l’infraction commise par Arkema France et de lui imposer des amendes.

219    Or, même si les contradictions de motifs dans la décision attaquée invoquées par la requérante étaient avérées, il n’en demeurerait pas moins que la motivation figurant dans ladite décision a permis, d’une part, à celle-ci de connaître les justifications de sa condamnation et des amendes qui lui ont été infligées, ce qui est établi par le fait qu’elle conteste notamment dans ses deux premiers moyens la légalité de la décision attaquée pour autant que la Commission lui a imputé la responsabilité de l’infraction en cause et dans ses huitième et neuvième moyens le fait qu’une amende lui ait été imposée solidairement avec Arkema France et à titre personnel et, d’autre part, au Tribunal d’exercer son contrôle.

220    Par ailleurs, pour autant que la requérante fait valoir une contradiction de motifs découlant du fait que les amendes qui lui ont été imposées à l’article 2, sous c) et e), de la décision attaquée ont été calculées sur la base de « paramètres propres » à Arkema France, cet argument doit être écarté comme étant non fondé. En effet, il convient de relever à cet égard que, outre le fait que la requérante n’a pas indiqué en quoi un tel calcul des amendes serait contradictoire, l’imposition d’une amende personnelle et le fait que cette dernière soit calculée sur le fondement de paramètres propres à Arkema France découlent directement de l’application des lignes directrices et ne nécessitent donc aucune motivation particulière dans la décision attaquée. Dans ces conditions, il y a lieu de rejeter la première branche du quatrième moyen comme étant non fondée.

 Sur la deuxième branche, tirée d’une contradiction de motifs dans la décision attaquée quant à la connaissance par la requérante de l’infraction en cause

–       Arguments des parties

221    La requérante fait valoir qu’il existe une contradiction de motifs dans la décision attaquée quant à la connaissance qu’elle pouvait avoir de l’infraction commise par Arkema France. En effet, dans un premier temps, la Commission affirmerait dans ladite décision que la requérante était nécessairement informée de l’activité d’Arkema France, en raison de la présence, au sein du personnel de la requérante et d’Arkema France, de mêmes personnes, puis, dans un second temps, elle relèverait de manière contradictoire, au considérant 401 de la décision attaquée, que la requérante avait pu ignorer les agissements anticoncurrentiels de sa filiale.

222    La Commission s’oppose à l’argumentation de la requérante.

–       Appréciation du Tribunal

223    Pour autant que la requérante soutient que certains motifs de la décision attaquée seraient contradictoires quant au fait qu’elle aurait eu connaissance de l’infraction en cause, il y a lieu de constater que, même si de telles contradictions étaient avérées, cela serait sans incidence sur le fait que, dès lors qu’Arkema France et la requérante constituaient une seule entreprise au sens de l’article 81, paragraphe 1, CE, la Commission pouvait imputer, conformément à la jurisprudence exposée aux points 45 à 55 ci-dessus, la responsabilité de l’infraction en cause à la requérante, indépendamment du fait qu’elle en avait connaissance ou qu’elle avait directement participé à ladite infraction, ce que la Commission n’était pas tenue d’établir. Dès lors, une éventuelle contradiction de motifs dans la décision attaquée à cet égard serait, en toute hypothèse, sans incidence sur la légalité de la décision attaquée.

224    Partant, la deuxième branche du quatrième moyen doit être rejetée comme étant inopérante.

 Sur la troisième branche, tirée d’une contradiction de motifs quant à la nature du contrôle qu’une société mère exerce sur sa filiale pour se voir imputer l’infraction commise par cette dernière

–       Arguments des parties

225    La requérante fait valoir une double contradiction de motifs dans la décision attaquée.

226    En premier lieu, la requérante relève que la Commission affirme à juste titre, au considérant 407 de la décision attaquée, que l’imputation de la responsabilité d’une infraction à une société mère est subordonnée à la preuve d’un contrôle effectif de cette dernière sur la politique commerciale de sa filiale. Or, l’examen par la Commission du faisceau d’indices rapporté par la requérante, tel qu’il ressort des considérants 403 et 404 de la décision attaquée, montrerait que la Commission a étendu le champ d’application de ce contrôle effectif de la requérante au-delà de la politique commerciale de sa filiale.

227    En second lieu, la requérante soutient que les considérants 403 et 404 de la décision attaquée sont en contradiction avec le considérant 413 de ladite décision, dans lequel la Commission soutient ne s’être fondée, dans la décision Peroxyde d’hydrogène, que sur une présomption d’exercice d’une influence déterminante de la requérante sur la politique commerciale de sa filiale.

228    La Commission s’oppose aux arguments de la requérante.

–       Appréciation du Tribunal

229    La requérante fait valoir en substance, par les deux griefs qu’elle soulève, qu’il existe des contradictions de motifs dans la décision attaquée quant à la nature du contrôle qui doit être exercé par une société mère sur sa filiale pour que la Commission puisse lui imputer la responsabilité d’une infraction.

230    En l’espèce, il y a lieu de constater que, même si les contradictions de motifs dans la décision attaquée étaient avérées, celles-ci seraient sans incidence sur la constatation selon laquelle la Commission n’a pas violé son obligation de motivation à cet égard, dès lors que, d’une part, comme il ressort de l’examen de la quatrième branche du premier moyen (voir points 95 à 107 ci-dessus), la requérante a été mise en mesure de connaître les motifs ayant conduit la Commission à conclure que les indices qu’elle avait rapportés ne permettaient pas de renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante et, partant, d’en contester la légalité, et d’autre part, le Tribunal était en mesure d’exercer son contrôle.

231    Dès lors, il convient de rejeter la troisième branche du quatrième moyen comme étant non fondée et le quatrième moyen dans son ensemble comme étant en partie non fondé et en partie inopérant.

 Sur le cinquième moyen, tiré d’une violation du principe de bonne administration

 Arguments des parties

232    La requérante fait valoir, en substance, que la Commission a violé le principe de bonne administration.

233    En premier lieu, la Commission n’aurait pas examiné avec soin et impartialité tous les éléments de fait pertinents et, en particulier, les informations que la requérante lui avait fournies dans ses observations en réponse à la communication des griefs, qui établissaient de manière claire et précise l’autonomie économique d’Arkema France sur le marché. De plus, la Commission n’aurait pas procédé à un examen individuel et concret de la situation de la requérante.

234    En deuxième lieu, le principe de bonne administration imposerait à la Commission d’appliquer aux entreprises les règles qu’elle s’applique à elle-même. Or, au considérant 358 de la décision attaquée, la Commission aurait rappelé qu’elle était en droit de se fonder sur un faisceau d’indices pour établir une infraction alors qu’elle dénie, de facto, ce mode de preuve à la requérante en l’espèce. Celle-ci renvoie aux quatrième et cinquième branches du premier moyen à cet égard.

235    En troisième lieu, la requérante fait valoir que, contrairement à ce qu’a relevé la Commission au considérant 314 de la décision attaquée, le principe de bonne administration exige, comme elle l’a soulevé dans ses observations en réponse à la communication des griefs, que la Commission suspende l’adoption de la décision attaquée jusqu’à ce que le Tribunal statue sur les recours qu’elle avait introduits contre la décision AMCA, contre la décision Peroxyde d’hydrogène et contre la décision Méthacrylates. Elle rappelle, à cet égard, que le fait d’obliger une requérante à introduire un nouveau recours en annulation dirigé contre une décision de la Commission peut être contraire à l’exigence d’économie de la procédure, comme le Tribunal l’a jugé dans son arrêt du 21 octobre 2004, Lenzig/Commission (T‑36/99, Rec. p. II‑3597).

236    La Commission s’oppose aux arguments de la requérante.

 Appréciation du Tribunal

237    Selon une jurisprudence constante, dans les cas où les institutions de l’Union disposent d’un pouvoir d’appréciation afin d’être en mesure de remplir leurs fonctions, le respect des garanties conférées par l’ordre juridique communautaire dans les procédures administratives revêt une importance d’autant plus fondamentale. Parmi ces garanties figure notamment l’obligation pour l’institution compétente d’examiner, avec soin et impartialité, tous les éléments pertinents du cas d’espèce (arrêt de la Cour du 21 novembre 1991, Technische Universität München, C‑269/90, Rec. p. I‑5469, point 14 ; arrêts du Tribunal du 24 janvier 1992, La Cinq/Commission, T‑44/90, Rec. p. II‑1, point 86, et du 20 mars 2002, ABB Asea Brown Boveri/Commission, T‑31/99, Rec. p. II‑1881, point 99).

238    En l’espèce, il convient d’examiner chacun des trois griefs de la requérante visant à établir que la Commission a violé le principe de bonne administration.

239    En premier lieu, s’agissant du grief de la requérante selon lequel la Commission n’a pas examiné avec soin et impartialité les indices qu’elle avait avancés afin de renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante et n’a pas examiné sa situation concrète, il y a lieu de le rejeter comme étant non fondé. En effet, outre le fait que la requérante n’avance aucun argument ou preuve spécifique étayant ce grief, il ressort des considérants 396 à 415 de la décision attaquée que la Commission a examiné et a rejeté explicitement les arguments soulevés par la requérante aux fins de renverser ladite présomption.

240    En deuxième lieu, s’agissant du grief de la requérante selon lequel, en substance, la Commission a violé le principe de bonne administration, dans la mesure où, en l’espèce, elle a rejeté de facto le mode de preuve par faisceau d’indices pour renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante, alors même que la Commission a eu recours à un tel mode de preuve, il convient de le rejeter comme étant non fondé. En effet, il importe de constater à cet égard, que, comme il a été exposé dans le cadre de la quatrième branche du premier moyen (voir points 95 à 107 ci-dessus), c’est après avoir examiné les éléments du faisceau d’indices rapporté par la requérante que la Commission a estimé qu’ils n’étaient pas de nature à renverser la présomption d’exercice d’une influence déterminante. La Commission n’a donc pas enfreint le principe de bonne administration à cet égard.

241    En troisième lieu, s’agissant du grief de la requérante selon lequel la Commission aurait dû, conformément aux principes de bonne administration et d’économie de la procédure, suspendre la procédure engagée à son égard dans la présente affaire, jusqu’à ce que le Tribunal se prononce sur les recours qu’elle avait introduits contre la décision AMCA, contre la décision Peroxyde d’hydrogène et contre la décision Méthacrylates, il y a lieu de le rejeter comme étant non fondé. En effet, il convient d’abord de constater que, outre le fait que les décisions de la Commission bénéficient d’une présomption de validité aussi longtemps qu’elles n’ont pas été annulées ou retirées (arrêt de la Cour du 15 juin 1994, Commission/BASF e.a., C‑137/92 P, Rec. p. I‑2555, point 48), aucune disposition légale n’impose à la Commission de suspendre l’adoption de décisions dans des affaires portant sur des faits différents. De plus, contrairement à ce qu’affirme la requérante, il ne ressort pas de l’arrêt Lenzing/Commission, point 235 supra (point 56), que la Commission était tenue, en l’espèce, pour des raisons d’économie de la procédure, de suspendre l’adoption de la décision attaquée jusqu’à ce que le Tribunal statue sur les recours que la requérante avait introduits contre d’autres décisions la sanctionnant. En effet, au point 58 dudit arrêt, le Tribunal a considéré, en substance que, lorsqu’une décision faisant l’objet d’un recours a été modifiée, les parties peuvent être autorisées à adapter leurs conclusions en raison de la survenance de ce fait nouveau dans la mesure où « il serait, en effet, contraire à une bonne administration de la justice et à une exigence d’économie de procédure d’obliger la requérante à introduire un nouveau recours en annulation devant le Tribunal » en pareille circonstance.

242    Partant, il y a lieu de rejeter comme étant non fondés le troisième grief de la requérante et le cinquième moyen dans son ensemble.

 Sur le sixième moyen, tiré d’une violation du principe de sécurité juridique

 Arguments des parties

243    La requérante fait valoir, en substance, que la décision attaquée met gravement en péril la sécurité juridique à laquelle elle pouvait légitimement s’attendre, compte tenu de la jurisprudence constante qu’elle a évoquée dans le cadre du premier moyen.

244    En premier lieu, l’imputation de la responsabilité de l’infraction en cause à la requérante dans la décision attaquée reposerait sur un critère aussi nouveau qu’incompréhensible, qui dépendrait du bon vouloir de la Commission en l’absence de toute preuve concrète d’une éventuelle immixtion de la société mère dans la politique commerciale de sa filiale.

245    En deuxième lieu, la Commission aurait condamné, dans la décision attaquée, pour la première fois, et sans aucune base légale, la requérante à deux amendes, distinctes mais cumulatives, dont une qui lui est personnelle, pour les mêmes faits.

246    En troisième lieu, la requérante soutient, comme elle l’a déjà fait valoir dans le cadre de la première branche du quatrième moyen, que, dans la mesure où les liens l’unissant à Arkema France sont identiques dans la présente affaire et dans l’affaire ayant conduit la Commission à adopter la décision Peroxydes organiques, il est incompréhensible que la Commission ait retenu des solutions complètement différentes dans ces deux affaires.

247    La Commission s’oppose à ces arguments.

 Appréciation du Tribunal

248    S’agissant, en premier lieu, du grief de la requérante selon lequel la Commission a enfreint le principe de sécurité juridique, dès lors qu’elle a décidé de lui imputer la responsabilité de l’infraction en cause selon un critère « nouveau » et « incompréhensible », il convient de le rejeter comme étant non fondé. En effet, d’une part, comme il a été constaté au point 197 ci-dessus, la Commission a, avant l’adoption de la décision attaquée, imputé à la requérante la responsabilité des infractions sanctionnées dans trois décisions, à savoir la décision AMCA, la décision Peroxyde d’hydrogène et la décision Méthacrylates. Dès lors, elle ne saurait prétendre à bon droit que les conditions d’imputation de la responsabilité d’une infraction à une société mère lui étaient inconnues. D’autre part, et en toute hypothèse, comme il ressort de la jurisprudence exposée aux points 45 à 55 ci-dessus, la présomption d’exercice d’une influence déterminante sur la base de laquelle la Commission s’est fondée dans la décision attaquée pour sanctionner la requérante n’est ni « nouvelle » ni « incompréhensible ».

249    S’agissant, en deuxième lieu, du grief de la requérante selon lequel la Commission a enfreint le principe de sécurité juridique en la condamnant pour la première fois, et sans aucune base légale, à deux amendes distinctes mais cumulatives, dont une qui lui est personnelle, pour les mêmes faits, il importe d’abord de constater que, conformément aux sanctions prévues à l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17 et à l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, la Commission peut, par voie de décision, infliger des amendes aux entreprises qui commettent une infraction à l’article 81 CE. Il est établi que les sanctions prévues à l’article 15 du règlement n° 17 et à l’article 23 du règlement n° 1/2003 ont pour but de réprimer des comportements illicites aussi bien que d’en prévenir le renouvellement (voir arrêt du Tribunal du 15 mars 2006, BASF/Commission, T‑15/02, Rec. p. II‑497, point 218, et la jurisprudence citée).

250    Selon la jurisprudence, il incombe, en principe, à la personne physique ou morale qui dirigeait l’entreprise concernée au moment où l’infraction a été commise de répondre de celle-ci, même si, au jour de l’adoption de la décision constatant l’infraction, l’exploitation de l’entreprise a été placée sous la responsabilité d’une autre personne (arrêt de la Cour du 16 novembre 2000, Cascades/Commission, C‑279/98 P, Rec. p. I‑9693, point 78).

251    Aux fins de leur application et de leur exécution, les décisions prises en application de l’article 81 CE doivent cependant être adressées à des entités dotées de la personnalité juridique (voir, en ce sens, arrêts Akzo Nobel e.a./Commission, point 45 supra, point 59, et PVC II, point 60 supra, point 978). Ainsi, lorsque la Commission adopte une décision en application de l’article 81, paragraphe 1, CE, elle doit identifier la ou les personnes, physiques ou morales, qui peuvent être tenues pour responsables du comportement de l’entreprise en cause et qui peuvent être sanctionnées à ce titre, lesquelles se verront adresser la décision (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 12 juillet 1984, Hydrotherm Gerätebau, 170/83, Rec. p. 2999, point 11).

252    En outre, il convient de rappeler que les lignes directrices que la Commission adopte pour calculer le montant des amendes assurent la sécurité juridique des entreprises, étant donné qu’elles déterminent la méthodologie que la Commission s’est imposée aux fins de la fixation du montant des amendes (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 8 février 2007, Groupe Danone/Commission, C‑3/06 P, Rec. p. I‑1331, ci-après l’« arrêt Danone de la Cour », point 23). L’administration ne peut s’en écarter, dans un cas particulier, sans donner des raisons qui soient compatibles avec l’égalité de traitement (arrêt de la Cour du 18 mai 2006, Archer Daniels Midland et Archer Daniels Midland Ingredients/Commission, C‑397/03 P, Rec. p. I‑4429, point 91).

253    Aux termes des points 9 à 11 des lignes directrices, la détermination du montant des amendes se fait en deux étapes. Dans un premier temps, en vertu des points 12 à 26 desdites lignes directrices, la Commission doit fixer un montant de base de l’amende qui est calculé à partir d’un pourcentage de la valeur des ventes des entreprises en cause multiplié par la durée de la participation à l’entente et auquel est ajoutée une somme correspondant à un pourcentage de la valeur desdites ventes afin de les dissuader de participer à des ententes. Dans un second temps, en vertu des points 27 à 29 desdites lignes directrices, la Commission peut prendre en considération des circonstances qui mènent à une réduction ou à une aggravation du montant de l’amende. Le point 28 desdites lignes directrices indique, en particulier, que, en substance, la récidive peut être sanctionnée par une majoration de 100 % du montant de base de l’amende pour chaque infraction identique ou similaire précédemment constatée. En outre, les points 30 et 31 desdites lignes directrices prévoient, dans certaines circonstances, un montant additionnel de majoration. En particulier, en vertu du point 30 desdites lignes directrices, « la Commission portera une attention particulière au besoin d’assurer que les amendes présentent un effet suffisamment dissuasif » et « à cette fin, elle peut augmenter l’amende à imposer aux entreprises dont le chiffre d’affaires, au-delà des ventes des biens et des services auxquelles l’infraction se réfère, est particulièrement important ». À cet égard, il importe de rappeler que le Tribunal a considéré que, dans la mesure où une entreprise disposant d’un chiffre d’affaires global nettement supérieur à celui des autres membres de l’entente est en mesure de mobiliser plus facilement les fonds nécessaires pour le paiement de son amende, la Commission est en droit de majorer à ce titre ladite amende en vue d’assurer un effet dissuasif suffisant à cette dernière (voir, en ce sens, arrêt du 29 avril 2004, Tokai Carbon e.a./Commission T‑236/01, T‑239/01, T‑244/01 à T‑246/01, T‑251/01 et T‑252/01, Rec. p. II‑1181, point 241).

254    En l’espèce, d’une part, il convient de relever que, comme il ressort des points 18 à 23 ci-dessus, la Commission a imposé dans la décision attaquée, conformément aux dispositions des lignes directrices, dont la teneur est résumée au point 253 ci-dessus, une amende, premièrement, d’un montant de 22 700 000 euros à Arkema France et à la requérante solidairement, qui correspond au montant de base de l’amende [voir article 2, sous c), de ladite décision], deuxièmement, d’un montant de 20 430 000 euros à Arkema France seule, qui correspond à une majoration de 90 % du montant de base de l’amende au titre de la récidive [voir article 2, sous d), de ladite décision] et, troisièmement, d’un montant de 15 890 000 euros à la seule requérante [voir article 2, sous e), de ladite décision], qui correspond à la majoration de 70 % du montant de base de l’amende liée à l’importance de son chiffre d’affaires, au-delà des ventes de biens auxquelles l’infraction se réfère.

255    D’autre part, il importe de souligner que, si la requérante et Arkema France formaient à l’époque de l’infraction en cause une entreprise au sens de l’article 81 CE, ladite entreprise n’existait plus au jour de l’adoption de la décision attaquée, dès lors que, comme il a été exposé au point 1 ci-dessus, Arkema France n’était plus contrôlée par la requérante à compter de l’année 2006.

256    Dans ces conditions, c’est conformément à l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 que la Commission pouvait, d’une part, infliger une amende solidairement à la requérante et à Arkema France, qui étaient les deux sociétés, à l’époque des faits litigieux, qui composaient l’entreprise, au sens de l’article 81 CE, et devaient répondre de l’infraction en cause, et, d’autre part, afin de tenir compte de la circonstance exposée au point 255 ci-dessus, imposer une majoration du montant de base de l’amende au titre du point 30 des lignes directrices à la seule requérante, dont, comme la Commission l’a constaté à juste titre aux considérants 548 et 549 de la décision attaquée, le chiffre d’affaires particulièrement important par rapport aux autres entités sanctionnées au jour de l’adoption de la décision attaquée lui permettait de mobiliser plus facilement les fonds nécessaires pour le paiement d’une amende.

257    Dès lors, la Commission, en imposant une amende solidaire à Arkema France et à la requérante, amende dont elle a ensuite majoré de 70 % le montant pour la seule requérante, a agi conformément au pouvoir de fixation du montant des amendes qu’elle détient en vertu de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 et qu’elle s’est engagée à appliquer conformément aux dispositions des lignes directrices. Le grief de la requérante selon lequel la Commission a enfreint le principe de sécurité juridique en la condamnant, sans aucune base légale, à deux amendes distinctes mais cumulatives, doit donc être écarté comme étant non fondé.

258    S’agissant, en troisième lieu, du grief de la requérante selon lequel la Commission a violé le principe de sécurité juridique en raison du « raisonnement à géométrie variable » qu’elle aurait tenu dans la décision attaquée et dans la décision Peroxydes d’hydrogène, il y a lieu de le rejeter comme étant non fondé. En effet, outre le fait que, dans ces deux décisions, la Commission a imputé de manière identique la responsabilité des infractions en cause à la requérante sur la base de la présomption d’exercice d’une influence déterminante, il convient de rappeler en toute hypothèse que, comme il ressort de la jurisprudence exposée au point 60 ci-dessus, même si la Commission n’avait pas, dans une décision antérieure, procédé à une telle imputation, cela ne l’empêchait nullement d’y procéder dans une décision ultérieure.

259    Partant, le sixième moyen doit être rejeté comme étant non fondé.

 Sur le septième moyen, tiré d’un détournement de pouvoir

 Arguments des parties

260    La requérante fait valoir que, en lui imputant la responsabilité de l’infraction en cause et en la condamnant à deux amendes cumulatives, la Commission a procédé à un détournement du pouvoir qu’elle détient en vertu du règlement nº 1/2003. En effet, les sanctions qui lui ont été infligées auraient été détournées de leur objectif légitime au regard dudit règlement, dès lors que la Commission aurait cherché à maximiser la sanction d’une autre entreprise que la requérante, en l’occurrence celle de sa filiale, qui a reconnu sa responsabilité dans l’infraction en cause.

261    La Commission s’oppose à cette argumentation.

 Appréciation du Tribunal

262    Selon une jurisprudence constante, une décision n’est entachée de détournement de pouvoir que si elle apparaît, sur la base d’indices objectifs pertinents et concordants, avoir été prise pour atteindre des fins autres que celles excipées (voir arrêt du Tribunal du 16 septembre 1998, IECC/Commission, T‑133/95 et T‑204/95, Rec. p. II‑3645, point 188, et la jurisprudence citée).

263    D’une part, pour autant que la requérante fait valoir, en substance, que la Commission a commis un détournement de pouvoir en lui imputant la responsabilité de l’infraction en cause, il y a lieu de rappeler que, comme il a été examiné dans le cadre des cinq branches du premier moyen, c’est à bon droit que la Commission pouvait procéder à une telle imputation, dès lors qu’Arkema France et la requérante constituaient une entreprise unique au sens de l’article 81 CE.

264    D’autre part, pour autant que la requérante fait valoir, en substance, que la Commission a commis un détournement de pouvoir en lui imposant une amende personnelle à l’article 2, sous e), de la décision attaquée, il y a lieu de rappeler que, comme il a été constaté dans le cadre de l’examen du deuxième grief du sixième moyen (voir points 249 à 257 ci-dessus), c’est en vertu de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 et conformément au point 30 des lignes directrices que la Commission a imposé une majoration du montant de base de l’amende à la seule requérante.

265    Partant, le septième moyen doit être rejeté comme étant non fondé.

 Sur le huitième moyen, tiré du caractère non fondé de l’imposition d’une amende personnelle à la requérante

 Arguments des parties

266    La requérante fait valoir, en substance, que l’amende qui lui a été imposée à l’article 2, sous e), de la décision attaquée n’est pas fondée en droit.

267    En premier lieu, la requérante considère que l’amende de 15 890 000 euros qui lui a été imposée est dénuée de base légale et viole plusieurs dispositions et principes de droit communautaire.

268    Premièrement, l’imposition d’une amende personnelle à la requérante serait contraire à l’article 81, paragraphe 1, CE et à l’article 23, paragraphe 2, du règlement nº 1/2003. D’une part, en l’absence d’unité économique avec Arkema France, l’amende personnelle imposée à la requérante ne saurait être justifiée, dès lors qu’elle n’a pas participé à l’infraction en cause. D’autre part, il serait contradictoire de soutenir que la requérante et Arkema France forment une seule et même entreprise et de sanctionner de manière personnelle la première citée, ce qui reviendrait à admettre l’existence de deux entreprises au sein du même groupe. Par ailleurs, seule la participation directe à une infraction impliquerait une responsabilité appelant une sanction personnelle. À l’audience, la requérante a fait également observer qu’une telle amende aboutissait à la sanctionner deux fois pour une même infraction, ce qui serait contraire à la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

269    Deuxièmement, l’imposition d’une amende personnelle à la requérante violerait le point 30 des lignes directrices, dès lors que ledit point ne fait référence qu’à la possibilité d’augmenter  « l’amende à imposer aux entreprises » et que, en l’espèce, la seule entreprise « pertinente » serait, au sein du groupe Elf Aquitaine, Arkema France.

270    Troisièmement, la requérante considère d’abord que l’amende personnelle qui lui a été imposée viole, en l’absence de toute base légale, la présomption d’innocence, les principes d’autonomie de la personne morale, de légalité, de responsabilité du fait personnel et de personnalité des peines. De plus, la Commission aurait commis, à cet égard, une seconde violation du principe de légalité, dès lors que le point 30 des lignes directrices ne précise pas les paramètres de calcul de « l’augmentation spécifique de l’amende en vue du caractère dissuasif ». L’augmentation du montant de l’amende de 70 % infligée à la requérante ne reposerait donc sur aucune base légale, en violation du principe de légalité, qui impose un degré de précision suffisant d’un texte répressif. À l’audience, elle a fait également observer que lesdites lignes directrices n’avaient pas, en toute hypothèse, la force juridique d’une disposition législative.

271    En deuxième lieu, la requérante fait valoir que, en faisant reposer, aux considérants 545 à 549 de la décision attaquée, l’amende personnelle infligée à Arkema France sur la prétendue nécessité d’assurer un caractère dissuasif « en raison de l’importance du chiffre d’affaires global de l’entreprise au-delà des ventes de biens et de services auxquelles l’infraction se réfère », la Commission a enfreint le droit communautaire à un double titre.

272    Premièrement, il serait, d’une part, inéquitable d’imposer une amende personnelle à la requérante au titre de la dissuasion, alors même que ladite amende est calculée en fonction du montant de base de l’amende infligée à Arkema France, qui inclut déjà une majoration spécifique au titre de la dissuasion. D’autre part, l’imposition d’une amende personnelle à la requérante serait dénuée de pertinence, dès lors que l’entreprise qu’Arkema France et la requérante constitueraient, selon la Commission, n’existerait plus depuis l’année 2006. Par ailleurs, si la dissuasion est un facteur que la Commission peut prendre en considération dans le calcul du montant de l’amende, il ne constituerait toutefois pas la base légale de l’amende elle-même.

273    Deuxièmement, la requérante estime que la Commission ne pouvait se fonder sur son seul chiffre d’affaires global pour lui imposer une amende personnelle et aurait dû uniquement prendre en considération la faible proportion du chiffre d’affaires du produit en cause dans le chiffre d’affaires global de l’entreprise pour déterminer le montant de l’amende. Elle rappelle, à cet égard, que, selon la jurisprudence, l’importance du chiffre d’affaires global de l’entreprise ne constituerait qu’un critère approximatif et imparfait pour fixer le montant de l’amende. Or, dans la mesure où elle ne serait pas présente sur le marché du chlorate de sodium dans l’EEE, sa capacité économique à causer un préjudice à la concurrence serait totalement nulle.

274    En troisième lieu, la requérante soutient que la Commission ne pouvait pas se référer à la décision Méthacrylates pour justifier la nécessité d’une amende qui lui avait été infligée à titre personnel dès lors que ladite décision fait actuellement l’objet d’un recours en annulation devant le Tribunal.

275    En quatrième lieu, la requérante fait valoir qu’il est inéquitable de calculer l’amende qui lui a été imposée à titre personnel à partir des facteurs de gravité, de durée et d’effets dissuasifs exposés aux considérants 511 à 523 de la décision attaquée, dont les paramètres lui échappent, dès lors qu’elle n’avait pas connaissance de l’infraction en cause et ne pouvait pas influer sur lesdits paramètres.

276    En cinquième lieu, la Commission n’aurait pas suffisamment tenu compte, dans le calcul de l’amende qui a été imposée à titre personnel à la requérante, de quatre facteurs. Tout d’abord, elle aurait dû prendre en considération le fait qu’Arkema France était impliquée dans l’infraction en cause durant une durée inférieure à celle d’EKA et de Finnish Chemicals. Ensuite, la Commission aurait dû prendre en considération la circonstance atténuante relevée au considérant 401 de la décision attaquée, relative à l’éventuelle négligence dont elle aurait fait preuve à l’égard de sa filiale. En outre, il y aurait lieu de prendre en considération les irrégularités procédurales constitutives d’une violation de droits fondamentaux énumérés dans son deuxième moyen. Enfin, la Commission aurait dû tenir compte de la coopération fournie par Arkema France au cours de la procédure administrative.

277    En sixième lieu, l’imposition d’une amende personnelle à la requérante enfreindrait le principe d’égalité de traitement à double titre.

278    Premièrement, la requérante serait la seule société mère, parmi les autres sociétés mères mises en cause dans la décision attaquée, à savoir Akzo Nobel, ELSA et Uralita, à se voir infliger une amende personnelle au titre de l’effet dissuasif, alors que cette amende repose de manière inéquitable sur une prise en compte par deux fois de l’effet dissuasif.

279    Deuxièmement, la requérante fait observer qu’il ressort du considérant 524 de la décision attaquée que la Commission n’a arrondi à la baisse le montant de base de l’amende imposée à Arkema France et à elle-même que de 54 000 euros, alors que les montants de base des amendes imposées à Finnish Chemicals et à EKA ont respectivement été arrondis à la baisse de 660 000 euros et de 213 500 euros. Or, c’est sur la base de ce premier montant de base que l’amende infligée à la requérante à titre personnel aurait été calculée.

280    La Commission s’oppose aux arguments de la requérante.

 Appréciation du Tribunal

281    La requérante conteste, en substance, l’amende de 15 890 000 euros que la Commission lui a imposée à l’article 2, sous e), de la décision attaquée. Dans ce cadre, elle soulève six griefs.

282    Par son premier grief, la requérante avance trois arguments relatifs à l’absence de base légale permettant à la Commission de lui imposer une amende personnelle.

283    Premièrement, pour autant que la requérante soutient que l’amende de 15 890 000 euros qui lui a été imposée à l’article 2, sous e), de la décision attaquée ne repose sur aucune base légale et viole l’article 81, paragraphe 1, CE et l’article 23, paragraphe 2, du règlement nº 1/2003 en l’absence d’une unité économique avec Arkema France et que l’imposition de cette amende viole le point 30 des lignes directrices, dès lors que ledit point ne fait référence qu’à la possibilité d’augmenter  « l’amende à imposer aux entreprises » et que, en l’espèce, la seule entreprise « pertinente » serait, au sein du groupe Elf Aquitaine, Arkema France, il convient de constater que cet argument constitue une reformulation du deuxième grief des sixième et septième moyens qu’il convient de rejeter pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 249 à 257 et 264 ci-dessus. En effet, c’est conformément à son pouvoir de fixation du montant des amendes qu’elle détient en vertu de l’article 23, paragraphe 2, du règlement nº 1/2003 qu’elle s’est engagée à appliquer conformément aux dispositions des lignes directrices que la Commission a infligé à la requérante une majoration de 70 % du montant de base de l’amende, compte tenu du fait qu’au jour de l’adoption de la décision attaquée, son chiffre d’affaires particulièrement important lui permettait de mobiliser plus facilement les fonds nécessaires pour le paiement de l’amende.

284    Deuxièmement, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel l’imposition, à son endroit, de l’amende de 15 890 000 euros viole la présomption d’innocence, les principes d’autonomie de la personne morale, de responsabilité du fait personnel et de personnalité des peines, il y a lieu de relever que, outre le fait que les violations qu’elle invoque ne sont étayées par aucune argumentation spécifique, cet argument doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés dans le cadre de la deuxième branche du premier moyen (voir points 69 à 73 ci-dessus) ainsi que dans le cadre des troisième (voir points 167 à 174), quatrième (voir points 177 à 183 ci-dessus) et cinquième (voir points 186 à 190 ci-dessus) branches du deuxième moyen. En effet, dès lors qu’Arkema France et la requérante constituaient une entreprise unique au sens de l’article 81 CE, c’est sans violer les principes d’autonomie de la personne morale, de la présomption d’innocence, de responsabilité du fait personnel et de personnalité des peines, que la Commission pouvait imposer à la seule requérante une majoration du montant de base de l’amende en raison de son chiffre d’affaires particulièrement élevé au jour de l’adoption de la décision attaquée.

285    Troisièmement, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la violation du principe de légalité serait d’autant plus caractérisée en l’espèce que le point 30 des lignes directrices ne préciserait pas avec un degré de précision suffisant qu’une majoration de 70 % du montant de base de l’amende peut être imposée en pareille circonstance, il convient de rappeler, d’une part, que les lignes directrices ne constituent pas la base légale pour la fixation du montant de l’amende, mais ne font que préciser l’application de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 (voir, par analogie, arrêt Danone de la Cour, point 252 supra, point 28), et, d’autre part, que, tandis que le montant de base de l’amende est fixé en fonction de l’infraction, la gravité de celle-ci est déterminée par référence à de nombreux autres facteurs, pour lesquels la Commission dispose d’une marge d’appréciation (arrêt Danone de la Cour, point 252 supra, point 25). C’est donc en vertu de l’article 23, paragraphe 2, du règlement nº 1/2003 et, conformément au point 30 des lignes directrices que la Commission s’est engagée à appliquer dans le cadre de l’exercice de son pouvoir d’appréciation, que cette dernière pouvait imposer une majoration de 70 % du montant de base de l’amende à la requérante en raison du fait qu’elle était en mesure, en raison de son chiffre d’affaires particulièrement important, de mobiliser des fonds plus facilement pour le paiement de l’amende que les autres entités sanctionnées en l’espèce.

286    Dès lors, c’est sans violer le principe de légalité que la Commission a agi en l’espèce. Il y a donc lieu de rejeter le premier grief de la requérante comme étant non fondé.

287    Par son deuxième grief, la requérante conteste, en substance, le montant de l’amende personnelle qui lui a été infligée à l’article 2, sous e), de la décision attaquée.

288    En effet, premièrement, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel, en substance, il est « inéquitable » de lui imposer une amende personnelle au titre de la dissuasion, alors même que ladite amende est calculée par rapport au montant de base de l’amende infligée solidairement à Arkema France et à la requérante, et qui inclut déjà une majoration spécifique au titre de la dissuasion, il convient de rappeler que, comme il ressort du considérant 523 de la décision attaquée, l’amende de 22 700 000 euros imposée solidairement à la requérante et à Arkema France correspond au montant de base de l’amende qui inclut un montant additionnel de 19 % de la valeur des ventes d’Arkema France (voir point 18 ci-dessus), conformément au point 25 des lignes directrices, « afin de dissuader les entreprises mêmes de participer à des accords horizontaux de fixation de prix, de répartition de marché et de limitation de production ». En revanche, l’amende de 15 890 000 euros imposée à la seule requérante correspond à 70 % du montant de base de l’amende et vise, conformément au point 30 desdites lignes directrices, à « s’assurer que les amendes présentent un effet suffisamment dissuasif » pour les entreprises dont le chiffre d’affaires, au-delà des ventes des biens et des services auxquelles l’infraction se réfère, est particulièrement important.

289    Dès lors, il convient de constater que, d’une part, le montant additionnel de 19 % de la valeur des ventes d’Arkema France prise en considération dans le calcul du montant de base de l’amende, conformément au point 25 des lignes directrices et, d’autre part, la majoration spécifique imposée à la requérante en vertu du point 30 desdites lignes directrices, répondent à deux objectifs distincts de dissuasion, dont la Commission pouvait à bon droit tenir compte dans la détermination de l’amende à infliger à la requérante. L’argument de cette dernière à cet égard doit donc être rejeté comme étant non fondé.

290    Deuxièmement, pour autant que la requérante soutient que la Commission aurait dû uniquement prendre en considération la faible proportion du chiffre d’affaires du produit en cause dans le chiffre d’affaires global de l’entreprise pour déterminer le montant de l’amende à titre personnel qui lui a été imposée, il convient de le rejeter comme étant non fondé. En effet, comme il ressort du point 30 des lignes directrices, c’est précisément dans le cas où le montant global du chiffre d’affaires de l’entreprise en cause dépasse de manière « particulièrement importante » la valeur des ventes des biens concernés par l’entente que la Commission est en droit d’imposer un montant additionnel au titre de la dissuasion.

291    Partant, il y a lieu de rejeter le deuxième grief de la requérante comme étant non fondé.

292    Par son troisième grief, la requérante soutient que la Commission ne pouvait pas se référer à la décision Méthacrylates pour justifier la nécessité de lui infliger une amende personnelle, dès lors que ladite décision fait actuellement l’objet d’un recours en annulation devant le Tribunal. À cet égard, d’une part, il convient de relever que, comme il ressort de la jurisprudence exposée au point 241 ci-dessus, les décisions de la Commission bénéficient d’une présomption de validité aussi longtemps qu’elles n’ont pas été annulées ou retirées. Dès lors, aucune disposition légale ne s’oppose à ce que, dans la décision attaquée, la Commission fasse référence à la décision Méthacrylates pour étayer son raisonnement. D’autre part, et en toute hypothèse, même si la décision Méthacrylates était annulée par les juridictions de l’Union, cela serait sans incidence sur la légalité de la décision attaquée dès lors que, comme il a été exposé aux points 256 et 257 ci-dessus, c’est en vertu de l’article 23, paragraphe 2, du règlement nº 1/2003 et conformément au point 30 des lignes directrices, que la Commission a imposé une amende à titre personnel à la requérante en l’espèce.

293    Partant, le troisième grief de la requérante doit être rejeté comme étant non fondé.

294    Par son quatrième grief, la requérante soutient qu’il est inéquitable de calculer l’amende personnelle qui lui a été imposée à partir des facteurs de gravité, de durée et d’effets dissuasifs propres à Arkema France, dont les paramètres lui échappent, et ce, alors même qu’elle n’avait pas connaissance de l’infraction en cause et ne pouvait pas influer sur lesdits paramètres.

295    À cet égard, il y a lieu de constater que la requérante n’avance aucun argument ou preuve visant à remettre en cause que, comme il a été constaté aux points 256 et 257 ci-dessus, c’est en vertu de l’article 23, paragraphe 2, du règlement nº 1/2003 et conformément au point 30 des lignes directrices, que la Commission a imposé une amende personnelle à la requérante. Le fait que cette dernière ait eu connaissance ou non de l’infraction en cause et que l’amende personnelle qui lui a été imposée repose sur des données propres à Arkema France n’est pas susceptible de remettre en cause cette conclusion.

296    Partant, le quatrième grief doit être écarté comme étant non fondé.

297    Par son cinquième grief, la requérante fait valoir que la Commission a manqué de prendre en considération quatre facteurs dans le calcul de l’amende personnelle qui lui a été imposée. Selon elle, la Commission aurait dû prendre en considération, premièrement, le fait qu’Arkema France était impliquée dans l’infraction en cause durant une durée inférieure à celle d’EKA et de Finnish Chemicals, deuxièmement, la circonstance atténuante reconnue par la Commission, au considérant 401 de la décision attaquée, tirée de l’éventuelle négligence dont la requérante aurait fait preuve à l’égard de sa filiale, troisièmement, des irrégularités procédurales constitutives d’une violation de ses droits fondamentaux énumérés dans le deuxième moyen et, quatrièmement, de la coopération fournie par Arkema France au cours de la procédure administrative.

298    À cet égard, il convient de rappeler que, comme il a été exposé au point 254 ci-dessus, l’amende imposée à la requérante de 15 890 000 euros correspond exclusivement à la majoration de 70 % du montant de base de l’amende prévue au point 30 des lignes directrices. Or, en vertu dudit point, même si les circonstances énumérées au point 297 ci-dessus étaient avérées, la Commission n’était nullement tenue de les prendre en considération pour retenir un tel taux de majoration.

299    Dès lors, il y a lieu de rejeter le cinquième grief comme étant non fondé.

300    Par son sixième grief, la requérante fait valoir que le fait qu’une amende personnelle lui ait été imposée enfreint le principe d’égalité de traitement à double titre.

301    Premièrement, la requérante soutient que le principe d’égalité de traitement a été violé dans la mesure où elle est la seule société mère, parmi les autres sociétés mères mises en cause dans la décision attaquée, à savoir Akzo Nobel, ELSA et Uralita, qui s’est vu infliger une amende personnelle en vertu du point 30 des lignes directrices, alors que cette amende repose de manière inéquitable sur une prise en compte par deux fois de l’effet dissuasif.

302    À cet égard, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, le principe d’égalité de traitement requiert que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (voir arrêt Advocaten voor de Wereld, point 196 supra, point 56, et la jurisprudence citée).

303    Or, il y a lieu de constater en l’espèce que, comme la Commission l’a relevé aux considérants 548 et 549 de la décision attaquée sans que la requérante le conteste, cette dernière a un chiffre d’affaires très largement supérieur aux autres entreprises à qui une amende est imposée dans la décision attaquée, dès lors que celui-ci est de 139 389 millions euros tandis que ceux d’EKA, d’ELSA et d’Uralita se montent respectivement à 550 millions euros, à 509 000 euros et à 1 095 millions euros. Dès lors, en raison de son chiffre d’affaires nettement supérieur à celui des autres entreprises sanctionnées, la requérante n’était pas dans une situation comparable à celles-ci, ce qui justifie que la Commission l’ait traitée différemment desdites entreprises.

304    En conséquence, la Commission n’a pas enfreint le principe d’égalité de traitement en augmentant l’amende imposée à la requérante conformément au point 30 des lignes directrices. Partant, le premier argument de la requérante doit être rejeté comme étant non fondé.

305    Deuxièmement, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel il ressort du considérant 524 de la décision attaquée que la Commission n’a arrondi à la baisse le montant de l’amende qui lui a été imposée solidairement avec Arkema France que de 54 000 euros, alors que les montants des amendes imposées à Finnish Chemicals et à EKA ont respectivement été arrondis à la baisse de 666 000 euros et de 213 500 euros, il y a lieu de rappeler d’abord que, en vertu du point 26 des lignes directrices, « dans la détermination du montant de base de l’amende, la Commission utilisera des données arrondies ».

306    Ensuite, comme il ressort de la lecture de la réponse de la Commission aux questions écrites du Tribunal et du document interne qu’elle a produit à cet égard expliquant la méthodologie qu’elle a utilisée aux fins d’arrondir à la baisse les montants des amendes imposées aux entités en cause dans la décision attaquée, il convient de constater, d’une part, que la Commission a réduit le montant de l’amende d’EKA et d’Akzo Nobel de 116 243 541 euros à 116 000 000 euros, celui de Finnish Chemicals de 68 773 445 euros à 68 000 000 euros, celui d’ELSA de 42 322 120 euros à 42 000 000 euros, celui d’Arkema France et de la requérante de 22 754 400 euros à 22 700 000 euros et, enfin, celui d’Aragonesas et d’Uralita de 9 969 300 euros à 9 900 000 euros. D’autre part, il ressort de ces arrondissements à la baisse que, comme la Commission l’explique en substance dans ledit document, elle a arrondi à la baisse les montants de chaque amende en cause, au million d’euros inférieur, lorsque l’arrondissement à la baisse n’entraînait pas une réduction supérieure à 2 % du montant de ladite amende, et, à la centaine de milliers d’euros inférieure, dans les cas où l’arrondissement à la baisse au million d’euros inférieur aurait entraîné une réduction supérieure à 2 % du montant de ladite amende.

307    Dès lors, si EKA et Akzo Nobel, Finnish Chemicals et ELSA ont bénéficié de réductions d’amende, à savoir respectivement d’un montant de 243 541 euros, de 773 445 euros et de 322 120 euros, qui sont plus importantes, en termes absolus, que celles reçues, d’une part, par Arkema France et la requérante et, d’autre part, par Aragonesas et Uralita, à savoir respectivement 54 400 euros et 69 300 euros, à la suite de l’application du point 26 des lignes directrices, il n’en demeure pas moins que la méthodologie retenue par la Commission a été appliquée de manière cohérente pour chacune des entreprises sanctionnées et que ladite méthodologie est objectivement justifiée dans la mesure où la Commission pouvait, conformément à son pouvoir d’appréciation dans le cadre de la fixation des montants des amendes, considérer que l’arrondissement à la baisse des montants desdites amendes ne devait pas conduire, en toute hypothèse, à une réduction d’amende supérieure à 2 %.

308    Partant, il y a lieu de constater que la Commission n’a pas enfreint le principe d’égalité de traitement dans le cadre de l’arrondissement à la baisse du montant de l’amende infligée solidairement à la requérante et à Arkema France. À la lumière de l’ensemble des considérations qui précèdent, le huitième moyen dans son ensemble doit être rejeté comme étant non fondé.

 Sur le neuvième moyen, tiré d’une violation des principes et des règles ayant gouverné le calcul de l’amende imposée solidairement à Arkema France et à la requérante

309    La requérante conteste, en substance, le montant de l’amende qui lui a été infligée solidairement avec Arkema France à l’article 2, sous c), de la décision attaquée. Ce moyen se divise en deux branches.

 Sur la première branche, tirée des erreurs dans le calcul du montant de l’amende imposée solidairement à Arkema France et à la requérante

–       Arguments des parties

310    La requérante prétend, en substance, que la Commission a manqué de tenir compte de certains éléments dans le cadre du calcul du montant de l’amende qui lui a été imposée solidairement avec Arkema France à l’article 2, sous c), de la décision attaquée.

311    En premier lieu, la requérante conteste le montant de l’amende qui lui a été imposée solidairement avec Arkema France à l’article 2, sous c), de la décision attaquée en renvoyant aux quatre arguments qu’elle a avancés dans le cinquième grief du huitième moyen dans lequel elle s’oppose à l’amende qui lui a été imposée à l’article 2, sous e), de la décision attaquée (voir point 297 ci-dessus). Dès lors, elle fait valoir, premièrement, que la Commission aurait dû prendre en considération le fait qu’Arkema France était impliquée dans l’infraction en cause durant une durée inférieure à celle d’EKA et de Finnish Chemicals. Deuxièmement, la Commission aurait dû tenir compte de la circonstance atténuante qu’elle a relevée, au considérant 401 de la décision attaquée, relative à l’éventuelle négligence dont la requérante aurait fait preuve à l’égard de sa filiale. Troisièmement, la Commission aurait dû prendre en considération les irrégularités procédurales constitutives d’une violation de droits fondamentaux énumérés dans son deuxième moyen. Quatrièmement, la requérante estime que la Commission aurait dû tenir compte de la coopération fournie par Arkema France au cours de la procédure administrative.

312    En second lieu, la requérante renvoie au premier argument qu’elle a avancé dans le sixième grief du huitième moyen (voir point 278 ci-dessus) par lequel elle fait valoir que la Commission a violé le principe d’égalité de traitement en lui imposant à elle seule une amende personnelle alors que les autres sociétés mères dans la décision attaquée ne se sont vues imposer qu’une amende solidaire avec leurs filiales.

313    La Commission s’oppose à cette argumentation.

–       Appréciation du Tribunal

314    En premier lieu, s’agissant des quatre arguments soulevés par la requérante visant à contester le calcul du montant de l’amende imposée à l’article 2, sous c), de la décision attaquée, premièrement, il y a lieu de rejeter comme étant non fondé son argument selon lequel ladite amende devrait être réduite en raison du fait que cette dernière a été impliquée dans l’infraction en cause durant une durée inférieure à EKA et à Finnish Chemicals. En effet, il convient de constater à cet égard que, comme il ressort expressément du considérant 522 de la décision attaquée, la Commission a pris en considération, conformément au point 24 des lignes directrices, un facteur multiplicateur de 5 pour Arkema France et la requérante correspondant à sa durée de participation à l’entente de 4 ans et 8 mois, tandis qu’elle a retenu un facteur multiplicateur de 5, 5 pour EKA et sa société mère ainsi que pour Finnish Chemicals et sa société mère en raison de leur participation à l’infraction en cause durant une période de 5 ans et 4 mois. Dès lors, l’argument de la requérante à cet égard doit être rejeté comme étant non fondé.

315    Deuxièmement, pour autant que la requérante invoque la circonstance atténuante que la Commission lui aurait reconnue, au considérant 401 de la décision attaquée, résultant de l’« éventuelle négligence » dont elle a fait preuve à l’égard de sa filiale, d’une part, il y a lieu de constater que cet argument repose sur une lecture erronée dudit considérant. En effet, audit considérant, la Commission n’indique pas, contrairement à ce que soutient la requérante, que la négligence dont cette dernière aurait fait preuve dans le contrôle des agissements de sa filiale constitue une circonstance atténuante, mais au contraire que « le manque de diligence dont ont fait preuve les directions d’[Arkema France] et d[e la requérante] dans l’exercice de leurs fonctions, concrétisé dans le fait que les organes statutaires et de gestion des deux sociétés ignoraient prétendument tout des actions entreprises par leurs employés, ne peut pas leur servir d’argument pour échapper à la responsabilité de leurs agissements ». D’autre part, et en toute hypothèse, la requérante n’avance aucun argument au soutien de sa prétention selon laquelle la Commission a considéré à tort que son « éventuelle négligence » dans la surveillance de sa filiale pouvait justifier l’octroi d’une réduction d’amende. Partant, cet argument doit dès être rejeté comme étant non fondé.

316    Troisièmement, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la Commission aurait dû prendre en considération les violations de ses droits fondamentaux qu’elle a exposées dans son deuxième moyen pour lui octroyer une réduction de l’amende qu’elle lui a infligée solidairement avec Arkema France, il y a lieu de rappeler que, comme il a été constaté dans le cadre de l’examen dudit moyen (voir point 204 ci-dessus), la Commission n’a commis aucune des violations qu’invoque la requérante. Dès lors, cet argument doit également être écarté comme étant non fondé.

317    Quatrièmement, s’agissant de l’argument selon lequel la Commission aurait dû tenir compte de la coopération fournie par Arkema France au cours de la procédure administrative, il convient de constater que la requérante n’avance, dans le présent moyen, aucun argument spécifique visant à contester les appréciations de la Commission, aux considérants 543 et 544 et 561 à 580 de la décision attaquée, selon lesquelles, en substance, la coopération offerte par Arkema France ne justifiait pas qu’elle se voit octroyer une réduction d’amende dans le cadre ou en dehors du cadre de l’application de la communication de 2002 sur la coopération. Dès lors, il convient de rejeter cet argument comme étant non fondé.

318    En second lieu, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la Commission a enfreint le principe d’égalité de traitement dans la mesure où elle est la seule, parmi les autres sociétés mères sanctionnées, à s’être vu imposer une amende personnelle, il y a lieu de le rejeter comme étant non fondé. En effet, il convient de rappeler que, comme il a été constaté dans le cadre du sixième moyen (voir point 254 ci-dessus), l’amende imposée à la requérante à l’article 2, sous e), de la décision attaquée correspond à la majoration de 70 % du montant de base de l’amende qui lui a été imposée solidairement avec Arkema France à l’article 2, sous c), de ladite décision, en raison du fait que son chiffre d’affaires particulièrement important par rapport à celui des autres entités sanctionnées au jour de l’adoption de la décision attaquée lui permettrait de mobiliser plus facilement les fonds nécessaires pour le paiement de ladite amende. Or, dans la mesure où il est constant que les autres sociétés mères sanctionnées dans la décision attaquée ne disposaient pas d’un chiffre d’affaires justifiant une telle majoration, il y a lieu de constater que la requérante ne se trouvait pas dans une situation comparable auxdites sociétés devant conduire la Commission à les traiter de manière identique.

319    Partant, il y a lieu de rejeter la première branche du neuvième moyen comme étant non fondée.

 Sur la seconde branche, tirée d’une violation du principe d’égalité de traitement liée à l’amende imposée solidairement à Arkema France et à la requérante

–       Arguments des parties

320    La requérante fait valoir que la Commission a violé le principe d’égalité de traitement, compte tenu du fait que l’amende imposée solidairement à elle-même et à Arkema France est la plus élevée parmi celles infligées aux entreprises sanctionnées dans la décision attaquée.

321    En premier lieu, comme la requérante l’aurait fait par ailleurs valoir dans le cadre du sixième grief de son huitième moyen (voir point 279 ci-dessus), l’arrondissement à la baisse du montant de base de l’amende imposée solidairement à elle-même et à Arkema France aurait été beaucoup plus faible que celui des montants de base des amendes infligées à Finnish Chemicals et à EKA.

322    En deuxième lieu, l’amende infligée solidairement à Arkema France et à la requérante ne tiendrait pas suffisamment compte, conformément aux lignes directrices, de deux facteurs. Premièrement, la Commission aurait insuffisamment tenu compte de la faiblesse du chiffre d’affaires d’Arkema France sur le marché EEE du chlorate de sodium par rapport à celui d’EKA qui bénéficie d’une immunité d’amende et de Finnish Chemicals qui est condamnée à une amende qui est quatre fois inférieure à celle infligée à Arkema France. Deuxièmement, la Commission aurait insuffisamment pris en considération la faible part de marché d’Arkema France, qui est de 9 % sur le marché du chlorate de sodium par rapport, d’une part, à celle d’EKA qui lui est cinq fois supérieure et, d’autre part, à celle de Finnish Chemicals qui lui est trois fois supérieure. À cet égard, la requérante fait également observer qu’il n’existe qu’une différence de quatre points entre les parts de marché d’Arkema France et celles d’Aragonesas et de Solvay.

323    En troisième lieu, la requérante soutient que l’amende qui lui a été imposée solidairement avec Arkema France tient insuffisamment compte de la moindre implication d’Arkema France dans l’infraction en cause par rapport à celle d’EKA et de Finnish Chemicals.

324    La Commission s’oppose à ces arguments.

–       Appréciation du Tribunal

325    S’agissant, en premier lieu, du grief de la requérante selon lequel l’arrondissement à la baisse du montant de base de l’amende imposée solidairement à elle-même et à Arkema France a été beaucoup plus faible que celui des montants de base des amendes infligées à Finnish Chemicals et à EKA, il y a lieu de constater que ce grief est strictement identique au sixième grief du huitième moyen (voir point 279 ci-dessus). Il convient donc de le rejeter comme étant non fondé pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 305 à 308 ci-dessus, aux termes desquels il a été constaté, en substance, que la méthodologie d’arrondissement à la baisse du montant de ladite amende avait été appliquée de manière cohérente pour chacune des entreprises sanctionnées dans la décision attaquée et que ladite méthodologie était objectivement justifiée.

326    S’agissant, en deuxième lieu, du grief de la requérante selon lequel la Commission a violé le principe d’égalité de traitement dans la mesure où elle a insuffisamment tenu compte, d’une part, du faible chiffre d’affaires d’Arkema France sur le marché EEE du chlorate de sodium par rapport à EKA et à Finnish Chemical et, d’autre part, de la faible part de marché d’Arkema France sur ledit marché, il convient de le rejeter comme étant non fondé.

327    D’une part, il y a lieu de constater que la requérante n’avance ni argument ni preuve visant à établir que, compte tenu des éléments qu’elle a pris en considération pour fixer l’amende imposée solidairement à elle-même et à Arkema France, la Commission aurait appliqué de manière discriminatoire les dispositions des lignes directrices dans la décision attaquée. D’autre part, s’il existe une différence importante entre le montant de l’amende imposée à Arkema France et à la requérante et les montants des amendes imposées solidairement à EKA et à Akzo Nobel ainsi qu’à ELSA et à Finnish Chemicals, en dépit du fait qu’Arkema France disposait d’une part du marché du chlorate de sodium dans l’EEE inférieure à celle d’EKA et de Finnish Chemicals, cela se justifie en raison du fait qu’EKA et Akzo Nobel ont obtenu une exemption totale d’amende et que le plafond de 10 % du chiffre d’affaires de Finnish Chemicals, qui a obtenu une réduction de 50 % de l’amende dans le cadre de l’application de la communication de 2002 sur la coopération, était de près de la moitié inférieur à celui de la requérante (voir les tableaux figurant aux considérants 524 et 552 de la décision attaquée).

328    S’agissant, en troisième lieu, du grief de la requérante selon lequel l’amende que la Commission lui a imposée solidairement avec Arkema France ne tient pas suffisamment compte de la moindre implication de cette dernière dans l’infraction par rapport à celle d’EKA et de Finnish Chemicals, il convient de relever que, outre le fait que la requérante n’avance aucun argument ou preuve dans ses écritures étayant ce grief, elle ne conteste pas les motifs que la Commission a exposés au considérant 536 de la décision attaquée pour rejeter les arguments de la requérante à cet égard, selon lesquels, notamment, « elle a gardé des contacts fréquents avec ses concurrents tout au long de sa participation à l’entente », « ces contacts initiaux démontrent déjà sa participation active aux accords anticoncurrentiels [en cause] », ou encore que l’affirmation de la requérante selon laquelle « elle n’a pas pu jouer un rôle de médiateur entre EKA et Finnish Chemicals en raison de sa part de marché limité est clairement réfuté[e] par les éléments de preuve rapportés [dans la décision attaquée] ».

329    Dès lors, il y a lieu de rejeter comme étant non fondés le troisième grief et, partant, le neuvième moyen dans son ensemble.

 Sur le dixième moyen, tiré de la violation des dispositions de la communication de 2002 sur la coopération

330    La requérante fait valoir que la Commission a commis des erreurs de fait et de droit en ne lui accordant pas une réduction d’amende en vertu de la communication de 2002 sur la coopération. Ce moyen se divise en deux branches.

 Sur la première branche, tirée du refus d’octroi d’une réduction d’amende au titre de la communication de 2002 sur la coopération

–       Arguments des parties

331    La requérante soutient que la Commission a violé la communication de 2002 sur la coopération en ne réduisant pas l’amende imposée solidairement à elle-même et à Arkema France, en raison du fait que les preuves fournies par cette dernière étaient insuffisantes. Elle considère à cet égard que, dans la mesure où la Commission est liée par les dispositions de ladite communication, cette dernière n’était pas fondée à rejeter soit de façon non motivée, soit de manière abstraite et « capricieuse », toute réduction pour les deux amendes infligées à la requérante.

332    En premier lieu, comme il ressortirait des considérants 554, 561, 581 et 584 de la décision attaquée, il serait constant qu’Arkema France était la première entreprise, après EKA, à avoir fourni à la Commission des preuves de l’entente.

333    En second lieu, selon la requérante, il ressort des motifs mêmes de la décision attaquée que, contrairement aux appréciations formulées par la Commission aux considérants 568 à 580 de la décision attaquée, la Commission s’est fondée sur les preuves fournies par Arkema France pour établir l’infraction en cause. Elle renvoie à cet égard, dans la décision attaquée, à ses considérants 38 et 46 et à sa note en bas de page nº 63, à son considérant 76 et à sa note en bas de page nº 116, à son considérant 94 et à sa note en bas de page nº 136, au considérant 98 et à sa note en bas de page nº 142, à ses considérants 243 et 251 et à sa note en bas de page nº 302, à ses considérants 254, 255, 259, 260, 273, 314, 344, 355, 589, 593 et 594 et à ses notes en bas de page nos 118, 259, 293, 337, 540 et 542. De plus, selon la requérante, les preuves rapportées par Arkema France ont permis de confirmer un certain nombre de faits afférents à l’infraction en cause, comme cela ressort des considérants 568, 569, 571 à 573, 575 et 576 de la décision attaquée. Par ailleurs, il ressortirait du considérant 344, in limine, de la décision attaquée qu’Aragonesas a considéré que les informations fournies par Arkema France avaient une valeur ajoutée significative.

334    La Commission s’oppose aux arguments de la requérante.

–       Appréciation du Tribunal

335    La requérante fait valoir, en substance, que la Commission a violé les dispositions de la communication de 2002 sur la coopération en n’octroyant pas à Arkema France une réduction d’amende de 30 à 50 % alors même qu’elle était la première entreprise, après EKA qui a obtenu l’immunité d’amende, à lui fournir des éléments de preuve d’une valeur ajoutée significative.

336    En vertu du point 20 de la communication de 2002 sur la coopération, « [l]es entreprises qui ne remplissent pas les conditions [pour obtenir une exemption d’amende] peuvent toutefois bénéficier d’une réduction de l’amende qui, à défaut, leur aurait été infligée ».

337    Le point 21 de la communication de 2002 sur la coopération dispose que, « afin de pouvoir prétendre à une [réduction d’amende au titre du point 20 de ladite communication], une entreprise doit fournir à la Commission des éléments de preuve de l’infraction présumée qui apportent une valeur ajoutée significative par rapport aux éléments de preuve déjà en possession de la Commission, et doit mettre fin à sa participation à l’activité illégale présumée au plus tard au moment où elle fournit ces éléments de preuve ».

338    Il est prévu au point 23, sous b), premier alinéa, de la communication de 2002 sur la coopération, trois fourchettes de réduction d’amende. En effet, la première entreprise à remplir la condition énoncée au point 21 de ladite communication est en droit d’obtenir une réduction d’amende comprise entre 30 et 50 %, la deuxième entreprise, à une réduction d’amende comprise entre 20 et 30 %, et les entreprises suivantes, à une réduction d’amende maximale de 20 %.

339    Le point 23, sous b), deuxième alinéa,  de la communication de 2002 sur la coopération dispose que, « pour définir le niveau de réduction à l’intérieur de ces fourchettes, la Commission prendra en compte la date à laquelle les éléments de preuve remplissant la condition énoncée au point 21 [de ladite communication] ont été communiqués et le degré de valeur ajoutée qu’ils ont représenté » et qu’« elle pourra également prendre en compte l’étendue et la continuité de la coopération dont l’entreprise a fait preuve à partir de la date de sa contribution ».

340    Selon la jurisprudence, la Commission bénéficie d’un large pouvoir d’appréciation pour ce qui est de la méthode de calcul des amendes et elle peut, à cet égard, tenir compte de multiples éléments, au nombre desquels figure la coopération des entreprises concernées lors de l’enquête conduite par ses services. Dans ce cadre, la Commission est appelée à effectuer des appréciations factuelles complexes, telles que celles qui portent sur la coopération respective desdites entreprises (arrêts de la Cour du 10 mai 2007, SGL Carbon/Commission, C‑328/05 P, Rec. p. I‑3921, point 81, et du Tribunal du 28 avril 2010, Gütermann et Zwicky/Commission, T‑456/05 et T‑457/05, non encore publié au Recueil, point 219).

341    De plus, dans le cadre de l’appréciation de la coopération fournie par les membres d’une entente, seule une erreur manifeste d’appréciation de la part de la Commission est susceptible d’être censurée dès lors qu’elle bénéficie d’une large marge d’appréciation pour évaluer la qualité et l’utilité de la coopération fournie par une entreprise, notamment par rapport aux contributions d’autres entreprises (arrêt SGL Carbon/Commission, point 340 supra, point 88). Il convient également de rappeler à cet égard que, si la Commission est tenue de motiver les raisons pour lesquelles elle estime que des éléments fournis par des entreprises dans le cadre de la communication sur la coopération constituent une contribution justifiant ou non une réduction de l’amende infligée, il incombe en revanche aux entreprises souhaitant contester la décision de la Commission à cet égard de démontrer que celle-ci, en l’absence de telles informations fournies volontairement par ces entreprises, n’aurait pas été en mesure de prouver l’essentiel de l’infraction et donc d’adopter une décision infligeant des amendes (arrêt Erste Group Bank e.a./Commission, point 60 supra, point 297).

342    En outre, la réduction des amendes en cas de coopération des entreprises participant à des infractions au droit de la concurrence trouve son fondement dans la considération selon laquelle une telle coopération facilite la tâche de la Commission visant à constater l’existence d’une infraction et, le cas échéant, à y mettre fin (arrêt Dansk Rørindustri e.a./Commission, point 45 supra, point 399, et arrêt du Tribunal du 14 mai 1998, Finnboard/Commission, T‑338/94, Rec. p. II‑1617, point 363). Eu égard à la raison d’être de la réduction, la Commission ne peut faire abstraction de l’utilité de l’information fournie, laquelle est nécessairement fonction des éléments de preuve déjà en sa possession (arrêt Gütermann et Zwicky/Commission, point 340 supra, point 220).

343    Par ailleurs, il ressort de la jurisprudence que, lorsqu’une entreprise ne fait, au titre de la coopération, que confirmer, et ce de manière moins précise et explicite, certaines des informations déjà fournies par une autre entreprise au titre de la coopération, le degré de coopération fournie par cette entreprise, quoiqu’il puisse ne pas être dénué d’une certaine utilité pour la Commission, ne saurait être considéré comme comparable à celui fourni par la première entreprise à avoir fourni lesdites informations. Une déclaration se limitant à corroborer, dans une certaine mesure, une déclaration dont la Commission disposait déjà ne facilite en effet pas la tâche de la Commission de manière significative. Partant, elle ne saurait être suffisante pour justifier une réduction du montant de l’amende au titre de la coopération (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 8 juillet 2004, Mannesmannröhren-Werke/Commission, T‑44/00, Rec. p. II‑2223, point 301 ; du 25 octobre 2005, Groupe Danone/Commission, T‑38/02, Rec. p. II‑4407, ci-après l’« arrêt Danone du Tribunal », point 455, et Gütermann et Zwicky/Commission, point 340 supra, point 222).

344    Enfin, la collaboration d’une entreprise à l’enquête ne donne droit à aucune réduction d’amende lorsque cette collaboration n’a pas dépassé ce qui résultait des obligations qui lui incombaient en vertu de l’article 18 du règlement nº 1/2003 (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 10 mars 1992, Solvay/Commission, T‑12/89, Rec. p. II‑907, points 341 et 342, et Danone, point 343 supra, point 451).

345    En l’espèce, il convient de relever, à titre liminaire, qu’il est constant que, comme il ressort du considérant 561 de la décision attaquée, Arkema France est la deuxième entreprise à avoir déposé une demande au titre de la communication de 2002 sur la coopération après EKA. Il convient donc d’examiner si, comme le soutient la requérante, il ressort de la lecture de chacun des considérants de la décision attaquée qu’elle énumère et qui sont exposés au point 333 ci-dessus, qu’Arkema France a fourni à la Commission des éléments d’une valeur ajoutée significative au sens du point 21 de la communication de 2002 sur la coopération.

346    En premier lieu, s’agissant du grief de la requérante selon lequel, en substance, elle aurait dû obtenir une réduction d’amende conformément à la communication de 2002 sur la coopération, dans la mesure où elle était la première entreprise à fournir les informations évoquées aux considérants 38, 46, 344, 355 et 589 de la décision attaquée, ainsi que de la note en bas de page n° 63 s’y rapportant, il y a lieu de constater que la Commission n’a commis aucune erreur manifeste d’appréciation en considérant que de telles informations n’étaient pas d’une valeur ajoutée significative.

347    Premièrement, s’agissant des considérants 38 et 46 de la décision attaquée, ainsi que de la note en bas de page n° 63 s’y rapportant, il convient de relever qu’ils concernent des informations fournies par Arkema France relatives à ses capacités de production ainsi qu’à la valeur des ventes et aux parts de marché des entreprises présentes sur le marché EEE du chlorate de sodium. Or, dans la mesure où lesdites informations ne dépassent pas, au sens de la jurisprudence citée au point 344 ci-dessus, ce qui résulte des obligations qui incombent à Arkema France en vertu de l’article 18 du règlement nº 1/2003, il y a lieu de constater qu’elles ne sont pas d’une valeur ajoutée significative.

348    Deuxièmement, s’agissant du considérant 344 de la décision attaquée, il convient de relever que la Commission y fait état d’un argument avancé par Aragonesas selon lequel « [l]es éléments de preuves présentés par la Commission s’appuient essentiellement sur les demandes [au titre de la communication de 2002 sur la coopération] introduites par EKA, Finnish Chemicals et [Arkema France] ». À cet égard, il convient de relever que, dès lors que, audit considérant, la Commission se contente de rappeler un argument formulé par Aragonesas, ledit argument ne saurait être considéré comme la reconnaissance par la Commission qu’Arkema France a fourni à la Commission des informations d’une valeur ajoutée significative ou comme établissant que la Commission ait commis une erreur manifeste d’appréciation en excluant que les informations fournies par Arkema France soient d’une valeur ajoutée significative.

349    Troisièmement, s’agissant du considérant 355 de la décision attaquée, la Commission y relève en substance que « les déclarations allant à l’encontre des intérêts du déclarant doivent, en principe, être considérées comme des éléments de preuve particulièrement fiables ». À cet égard, il convient de constater qu’une telle appréciation d’ordre général de la Commission ne permet pas de conclure que les informations fournies par Arkema France ont, en l’espèce, facilité la tâche de la Commission de manière significative en lui permettant d’établir les faits de l’infraction et, partant, qu’elles avaient une valeur ajoutée significative.

350    Quatrièmement, s’agissant du considérant 589 de la décision attaquée, la Commission y relève que, « aux fins de l’évaluation de la valeur des preuves fournies par Finnish Chemicals, il convient de souligner qu’au moment où [elle] a pris contact avec la Commission, [cette dernière] disposait déjà d’éléments probants qui lui avaient été soumis par EKA, [par] Finnish Chemicals (dans sa réponse à la demande de renseignements datée du 10 septembre 2004, dans la mesure où [Finnish Chemicals] n’a pas été au-delà de ce qui lui était demandé) et [par Arkema France] ». À cet égard, il convient de relever que, si le libellé dudit considérant pouvait être interprété en ce sens que la Commission a considéré qu’Arkema France a fourni des « éléments probants », une telle interprétation ne saurait toutefois être retenue en l’espèce, compte tenu du contexte dans lequel cette appréciation a été formulée par la Commission et des constatations qu’elle opère par ailleurs dans la décision attaquée. En effet, tout d’abord, dans la mesure où cette appréciation de la Commission a été faite dans le contexte de l’évaluation de la valeur ajoutée des informations rapportées par Finnish Chemicals, elle vise à souligner que c’est à la lumière des informations déjà disponibles dans son dossier que la Commission est tenue d’examiner si les informations fournies par Finnish Chemicals ont une valeur ajoutée significative, mais non qu’Arkema France a fourni des informations d’une valeur ajoutée significative. De plus, ladite appréciation ne remet pas en cause les constatations formulées par la Commission, aux considérants 561 à 580 de la décision attaquée, selon lesquelles il y a lieu d’écarter tous les arguments de la requérante et d’Arkema France exposés dans la décision attaquée, visant à faire valoir que cette dernière a rapporté des éléments d’information ayant une valeur ajoutée significative. Enfin, et en toute hypothèse, l’appréciation formulée par la Commission au considérant 589 de la décision attaquée n’est pas de nature à établir que, compte tenu des informations fournies par Arkema France, la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en considérant que lesdites informations n’avaient pas une valeur ajoutée significative.

351    En deuxième lieu, s’agissant des considérants 76, 254, 255, 259 et 273 de la décision attaquée, ainsi que des notes en bas de page nos 116 et 337 s’y rapportant, auxquelles la requérante renvoie, il y a lieu de constater que la Commission n’a commis aucune erreur manifeste d’appréciation en considérant qu’elles n’avaient pas une valeur ajoutée significative.

352    Premièrement, s’agissant du considérant 76 de la décision attaquée et de la note en bas de page nº 116 s’y rapportant, la Commission y décrit le fonctionnement général de l’entente qui était caractérisée notamment par « des contacts fréquents sous la forme de réunions bilatérales ou multilatérales et de conversations téléphoniques, sans toutefois suivre un schéma spécifique ». La Commission constate également que, « d’après [Arkema France], une liste des clients communs et des volumes de vente que chacun des producteurs de chlorate de sodium membres de l’entente était autorisé à leur fournir a été établie au tout début de l’entente » et qu’« [Arkema France] n’a toutefois pas présenté la liste en question à la Commission ». À cet égard, outre le fait qu’il ressort de la demande orale d’immunité d’EKA que cette dernière avait déjà informé la Commission de la nature des contacts qui existaient entre les entreprises en cause, cette information qu’Arkema France n’a étayée par aucune preuve documentaire n’était pas, au sens de la jurisprudence citée au point 343 ci-dessus, d’une valeur ajoutée significative.

353    Deuxièmement, s’agissant du considérant 254 de la décision attaquée et de sa note en bas de page nº 305, la Commission y relève qu’Arkema France a déclaré  que « [son représentant, M. L.] croit se souvenir d’une réunion entre Finnish Chemicals et [Arkema France] afin de comprendre pourquoi les règles de répartition applicables [au client] MODO n’étaient plus respectées » et que, « au cours de cette réunion, dont [M. L.] pense qu’elle s’est déroulée au premier trimestre de 1999 en Finlande, Finnish Chemicals a déclaré être devenue fournisseur exclusif de [MODO], suite à un accord par sa maison mère avec MODO, rompant ainsi l’accord existant entre EKA, Finnish Chemicals et [Arkema France] à propos de ce client ». À cet égard, il convient de relever que, au considérant 255 de la décision attaquée, la Commission ajoute que, « cependant, le contrat entre MODO et Finnish Chemicals n’ayant été conclu qu’en septembre 1999, la Commission considère que [M. L.] a confondu les dates et les lieux et qu’il évoque en réalité la réunion du 9 novembre 1999 à Copenhague ». Dès lors, outre le fait que l’information orale fournie par Arkema France est, de son propre aveu, incertaine (« [M. L.] croit se souvenir ») mais également imprécise, il y a lieu de constater, en toute hypothèse, que la Commission relève expressément, au considérant 255 de la décision attaquée, que ladite information est erronée, ce que la requérante ne conteste par ailleurs pas. Dès lors, la Commission n’a commis aucune erreur manifeste d’appréciation en excluant qu’une telle information puisse avoir une valeur ajoutée significative.

354    Troisièmement, s’agissant du considérant 259 de la décision attaquée, la Commission y fait état de relevés de frais de voyage du représentant d’Arkema France, M. L., qui couvrent la période allant des mois d’octobre à décembre 1999 et qui lui ont été fournis par Arkema France. Il est également indiqué audit considérant que ces documents contiennent la mention « 15/12 EKA Roissy » et qu’Arkema France en déduit que « cette mention pourrait se rapporter à une réunion avec des représentants d’EKA à l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle à Paris le 15 décembre 1999 ». Il convient de constater que, audit considérant, la Commission a relevé qu’EKA ne se rappelle pas d’une telle réunion. Partant, la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en considérant que cette information, dont Arkema France n’est pas certaine et qui n’a pas été corroborée, n’avait pas une valeur ajoutée significative. Il importe de souligner à cet égard que le fait que la Commission n’a pas retenu, compte tenu de l’absence d’éléments de preuve suffisants pour corroborer cette information, la réunion qui aurait eu lieu à l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle dans la liste des réunions et des appels téléphoniques concernant l’entente (voir annexe 1 de la décision attaquée) confirme que cette information n’a pas une valeur ajoutée significative.

355    Quatrièmement, s’agissant du considérant 273 de la décision attaquée, la Commission y précise qu’Arkema France fait état d’une réunion entre EKA, Finnish Chemicals et Arkema France « au printemps 2000 ». Or, il convient de relever que la Commission constate également audit considérant que ni EKA ni Finnish Chemicals n’ont confirmé la tenue de cette réunion. De plus, la Commission y relève qu’il y a lieu de considérer, sur la base des informations fournies par EKA telles qu’exposées au considérant 283 de la décision attaquée, qu’il s’agit en réalité de la réunion qui s’est tenue le 9 février 2000. Dès lors, outre le fait que cette information fournie par Arkema France est imprécise, la Commission a relevé sans que la requérante le conteste, qu’elle n’a pas été corroborée par d’autres éléments permettant à la Commission de la prouver. Dès lors, la Commission n’a commis aucune erreur manifeste d’appréciation en excluant que cette information ait une valeur ajoutée significative.

356    Cinquièmement, s’agissant de la note en bas de page n° 337 de la décision attaquée, il y a lieu de constater que la Commission y précise le contenu du considérant 284 de ladite décision dans lequel la Commission a relevé notamment que, « même si quelques appels téléphoniques et réunions ont encore eu lieu entre concurrents en janvier et en février 2000 […], le niveau de coopération [habituel] qui comprenait essentiellement des efforts visant à se répartir les volumes de vente et à fixer les prix, n’a pas été restauré [en 2000] en raison de la perte de confiance mutuelle et pour toute autre raison connexe mentionnée par les concurrents dans leur diverses déclarations ». Dans sa note en bas de page n° 337 de ladite décision, la Commission indique, concernant la date de fin de l’entente, qu’« EKA et [Arkema France] renvoient à leurs programmes [de respect du droit de la concurrence] respectifs qui ont été introduits en 1999 et en 2000 » et que « Finnish Chemicals indique que les contacts avec les concurrents sont devenus obsolètes une fois le contrat conclu avec [le client] MODO ». À cet égard, il convient également de relever que la Commission indique, au considérant 575 de la décision attaquée, que le représentant d’Arkema France, M. L., « s’est contenté de confirmer la déclaration d’EKA concernant l’effet de l’adoption des programmes [de respect du droit de la concurrence], sans apporter de nouveaux éléments de preuve à cet égard ». De plus, au considérant 593 de la décision attaquée et dans sa note en bas de page n° 540, la Commission relève que, « au moment où elle a reçu la réponse à la demande de renseignements et la demande de [coopération] de Finnish Chemicals, son dossier contenait déjà des informations, provenant de deux sources indépendantes [EKA et Arkema France], indiquant que l’infraction n’avait pas pris fin avant le printemps 2000 ». Enfin, au considérant 594 de la décision attaquée ainsi qu’à sa note en bas de page n° 542, la Commission précise qu’elle « avait déjà déduit de [l]a contribution [d’EKA] » que cette dernière avait pris ses distances par rapport à l’entente au printemps 2000.

357    À la lumière des constatations opérées par la Commission aux considérants de la décision attaquée exposés au point 356 ci-dessus, il y a lieu de considérer que l’information fournie par Arkema France à cet égard n’avait pas une valeur ajoutée significative au jour où elle l’a fournie à la Commission. En effet, outre le fait que l’information fournie par Arkema France selon laquelle l’entente a pris fin après l’introduction de programmes de respect du droit de la concurrence manque de précision par rapport à la date exacte retenue par la Commission pour établir la fin de l’infraction, soit le 9 février 2000 [article 1er, sous e), de la décision attaquée], c’est sur la base des précisions apportées par EKA, comme il ressort du considérant 290 de la décision attaquée, que la Commission a pu établir que l’infraction avait pris fin avec la réunion de l’association professionnelle CEFIC qui s’était tenue le 9 février 2000.

358    En troisième lieu, s’agissant, dans la décision attaquée, du considérant 94 et de sa note en bas de page n° 196, du considérant 98 et de sa note en bas de page n° 142, du considérant 243 et de sa note en bas de page n° 293, du considérant 251 et de sa note en bas de page n° 302, du considérant 260 et du considérant 593 et de sa note en bas de page n° 540, du considérant 594 et de sa note en bas de page n° 542, ainsi que de ses notes en bas de page nos 118 et 259, il y a lieu de constater qu’ils font état soit d’informations dont il ressort de la décision attaquée qu’elles étaient déjà en possession de la Commission au jour où Arkema France a déposé sa demande au titre de la communication de 2002 sur la coopération, soit d’informations insuffisamment précises ou étayées pour permettre à la Commission d’établir les faits de l’infraction, soit, enfin, d’informations que la Commission pouvait se procurer conformément à l’article 18 du règlement nº 1/2003.

359    Premièrement, s’agissant du considérant 94 de la décision attaquée et de sa note en bas de page n° 136, la Commission y indique que « [s]elon Finnish Chemicals, une réunion s’est tenue le 17 mai [1995] à l’hôtel SAS Royal de Copenhague, à laquelle [EKA, Finnish Chemicals et Arkema France] ont participé ». La Commission y fait observer que les relevés de frais de voyage du représentant d’Arkema France, M. D., ont confirmé sa présence à cette réunion. À cet égard, d’une part, il y a lieu de relever qu’il ressort des considérants 95 et 96 de la décision attaquée que la Commission a établi l’existence de cette réunion en retenant les éléments de preuves rapportés par Finnish Chemicals, ce que la requérante ne conteste pas. En effet, au considérant 96 de la décision attaquée, la Commission précise que les notes prises lors de la réunion du 17 mai 1995 par le représentant de Finnish Chemicals, M. S., « prouvent la participation d’[Arkema France] à l’entente ». D’autre part, et en toute hypothèse, il y a lieu de relever que la fourniture des seuls relevés de frais de voyage du représentant d’Arkema France permettant de confirmer sa présence à la réunion en question constitue une coopération qui ne dépasse pas, au sens de la jurisprudence exposée au point 344 ci-dessus, ce qui résulte des obligations qui lui incombaient en vertu de l’article 18 du règlement nº 1/2003. Dès lors, la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en considérant qu’Arkema France n’avait pas fourni des éléments d’une valeur ajoutée significative à cet égard.

360    Deuxièmement, s’agissant du considérant 98 de la décision attaquée et de sa note en bas de page nº 142, la Commission y indique notamment qu’« EKA rapporte également que, vers 1995, il a été décidé avec Finnish Chemicals et [Arkema France] de ‘procéder à une hausse des prix importante qui a fonctionné’ pour le Portugal compte tenu de la dépréciation de l’escudo » et ajoute que « les éléments de preuve présentés par EKA montrent qu’en 1995 l’entreprise a augmenté les tarifs qu’elle pratiquait à l’égard de ses clients portugais de 31 % et de 44 % par rapport aux prix pratiqués en 1993 ». En outre, la Commission indique qu’« [Arkema France] fait aussi état d’une hausse de prix réussie ». Il ressort donc du texte de la décision attaquée que cette hausse de prix en 1995 a été établie sur la base d’informations orales et de documents fournis par EKA, ce que la requérante ne conteste pas. Dès lors, même si l’information orale fournie par Arkema France confirme celle d’EKA, il y a lieu de constater, à l’instar de la Commission, que cette information ne saurait être considérée, conformément à la jurisprudence citée au point 343 ci-dessus, comme ayant une valeur ajoutée significative dès lors qu’Arkema France n’a pas fourni de détails sur ladite hausse de prix additionnels par rapport à ceux fournis par EKA.

361    Troisièmement, s’agissant du considérant 243 de la décision attaquée et de sa note en bas de page n° 293, la Commission y relève que « [d]ans leurs déclarations, EKA et [Arkema France] ont indiqué qu’une réunion entre leurs représentants s’était tenue en février ou en mars 1999 » et qu’« [Arkema France] a confirmé que M. [W.] représentait EKA lors de cette réunion ». À cet égard, il convient de constater que, audit considérant, la Commission reprend expressément les informations orales fournies par EKA. De plus, il y a lieu de constater que la Commission a également relevé, au considérant 245 de la décision attaquée, que, « même s’il n’a pas été possible d’établir avec une totale certitude que la réunion a eu lieu, la Commission considère qu’il est vraisemblable que les discussions entre les concurrents se soient poursuivies ainsi que l’a décrit EKA ». Dès lors, outre le fait que c’est sur la base des seules informations fournies par EKA que la Commission a été en mesure de connaître ladite réunion et sa teneur, elle considère, sans que la requérante le conteste, que cette information ne permet pas d’établir les faits de l’infraction avec certitude. Dès lors, il y a lieu de constater que la Commission n’a pas commis d’erreur en excluant que l’information fournie par Arkema France à cet égard avait une valeur ajoutée significative.

362    Quatrièmement, s’agissant du considérant 251 de la décision attaquée et de la note en bas de page n° 302 s’y rapportant, la Commission y relève que « Finnish Chemicals a informé la Commission d’une réunion qui s’est tenue à Copenhague le 9 novembre 1999 » en présence de représentants d’Arkema France et de Finnish Chemicals. Il y est également précisé qu’Arkema France « a confirmé que cette réunion avait bien eu lieu et [qu’elle] a transmis à la Commission les relevés des frais de voyage de [son représentant, M. L.], qui montrent qu’il s’est rendu à Copenhague le 9 novembre 1999 ». À cet égard, il y a lieu de relever, d’une part, que la fourniture des seuls relevés de frais de voyage du représentant d’Arkema France permettant de confirmer sa présence à la réunion en question constitue une coopération qui ne dépasse pas, au sens de la jurisprudence exposée au point 344 ci-dessus, ce qui résulte des obligations qui lui incombaient en vertu de l’article 18 du règlement nº 1/2003. D’autre part, la Commission reprend verbatim, au considérant 252 de la décision attaquée, les informations précises fournies par Finnish Chemicals exposant le contenu des discussions tenues lors de cette réunion, alors que le considérant 254 de la décision attaquée fait état de déclarations imprécises de la part d’Arkema France concernant cette réunion. Enfin, il ressort desdits considérants que les informations fournies par Arkema France n’ont pas permis de corroborer des éléments au dossier de la Commission au jour où ils ont été fournis, mais que ce sont les informations fournies par Finnish Chemicals qui ont permis à la Commission d’établir lesdits faits. Dès lors, la Commission n’a commis aucune erreur manifeste d’appréciation en considérant que les informations fournies par Arkema France à cet égard n’avaient pas une valeur ajoutée significative.

363    Cinquièmement, s’agissant du considérant 260 de la décision attaquée, la Commission y relève que « Finnish Chemicals a déclaré [par le biais de son représentant, M. S.] que les représentants d’[Arkema France] et de Finnish Chemicals s’étaient rencontrés une autre fois le 21 décembre 1999 […] à Stockholm » et que « cette réunion est aussi confirmée par les relevés de frais de voyage de M. [L.] transmis par [Arkema France] ». Il y a lieu de relever à cet égard que, outre le fait que, comme il ressort dudit considérant, la Commission n’a prouvé cette réunion que sur la base des informations fournies par Finnish Chemicals, la fourniture des seuls relevés de frais de voyage du représentant d’Arkema France permettant de confirmer sa présence à la réunion en question constitue une coopération qui ne dépasse pas, au sens de la jurisprudence exposée au point 344 ci-dessus, ce qui résulte des obligations qui lui incombaient en vertu de l’article 18 du règlement nº 1/2003.

364    Sixièmement, s’agissant de la note en bas de page n° 118 de la décision attaquée, la Commission y relève qu’« [Arkema France] a confirmé l’existence du mécanisme de partage du marché et du régime de compensation décrits par EKA ». À cet égard, il convient de relever que, outre le fait qu’il ressort de ce considérant que la Commission s’est reposée sur les déclarations orales d’EKA pour établir les faits de l’infraction, ce que ne conteste pas la requérante, la seule corroboration orale et imprécise de cette information ne saurait être considérée, comme il ressort de la jurisprudence citée au point 343 ci-dessus, comme ayant une valeur ajoutée significative.

365    Septièmement, s’agissant du considérant 207 de la décision attaquée et de la note en bas de page nº 259 s’y rapportant, la Commission y relève qu’« il convient de noter que dans le cadre de discussions entre Finnish Chemicals et [Arkema France] concernant [le client] MODO, M. [L., le représentant d’Arkema France] a appelé M. [B.] (le représentant de Quadrimex, l’importateur de Finnish Chemicals en France) afin de discuter des volumes perdus par [Arkema France] » et que « lors de ces appels, les 2 et 5 octobre 1998, M. [L.] s’est plaint de l’agressivité scandinave et a réclamé une compensation en volume pour [Arkema France] ». À cet égard, il ressort des documents cités à la note en bas de page nº 257 de la décision attaquée et du point 4.3.1.20 intitulé « 1998 – Conflit autour du client MODO », aux considérants 205 à 216 de ladite décision, que, pour établir la nature précise des contacts pris entre les concurrents à propos de l’approvisionnement du client MODO, les dates de ces contacts et les volumes répartis, la Commission s’est intégralement reposée sur les informations précises que Finnish Chemicals lui a fournies. La Commission n’a donc commis aucune erreur manifeste d’appréciation en excluant que l’information fournie par Arkema France à cet égard puisse avoir une valeur ajoutée significative.

366    En quatrième lieu, s’agissant des considérants 568, 569, 571 à 573, 575 et 576 de la décision attaquée qu’évoque la requérante, il convient de relever qu’il ressort desdits considérants que la Commission disposait de ces informations « en provenance de deux sources » au moment où Arkema France les lui a fournies (considérant 568 de la décision attaquée), qu’elle « a confirmé l’existence du système de répartition en termes généraux, mais n’a fourni aucun élément de preuve écrit datant de la période à laquelle les faits se rapportent, qui aurait renforcé la capacité de la Commission d’établir les faits en question » (considérant 569 de la décision attaquée), que les informations fournies par Arkema France concernant des contacts avec ses concurrents ont été « élémentaire[s] et ne lui ont pas permis d’établir les faits en question » (considérant 571 de la décision attaquée), que les informations concernant les hausses de prix de 1993 à 1995 ont confirmé « en termes très généraux » les informations déjà à sa disposition (considérant 572 de la décision attaquée), que les informations relatives à l’approvisionnement du client MODO avaient « déjà été bien attestée[s] par les documents fournis par EKA » (considérant 573 de la décision attaquée), qu’Arkema France s’est « contenté[e] de confirmer la déclaration d’EKA concernant l’effet de l’adoption de programmes de mise en conformité, sans apporter de nouveaux éléments de preuve à cet égard » (considérant 575 de la décision attaquée) ainsi que l’appréciation de la Commission selon laquelle « si [Arkema France] a pu confirmer certains aspects du fonctionnement de l’entente de façon très générale, elle ne l’a toutefois pas fait d’une manière susceptible de renforcer la capacité de la Commission de prouver l’infraction » (considérant 579 de la décision attaquée). Dès lors, il y a lieu de constater qu’aucun de ces considérants n’établit que les informations fournies par Arkema France avaient une valeur ajoutée significative.

367    À la lumière de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de conclure que la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en n’octroyant pas à Arkema France une réduction d’amende au titre de la communication de 2002 sur la coopération. Dès lors, la première branche du dixième moyen doit être écartée comme étant non fondée.

 Sur la seconde branche, tirée de la violation du principe d’égalité de traitement

–       Arguments des parties

368    La requérante fait valoir que la Commission a violé le principe d’égalité de traitement en n’accordant à Arkema France, à la différence d’avec Finnish Chemicals, aucun « crédit » pour les informations qu’elle lui a fournies et dont la Commission a toutefois reconnu, aux considérants 568, 569, 571, 572, 573, 575 et 576 de la décision attaquée, qu’elles permettaient de confirmer les faits de l’infraction. Cette différence de traitement aurait eu pour effet de « surenchérir » les amendes imposées à la requérante, qui aurait dû bénéficier avec Arkema France d’une réduction du montant de l’amende de 30 à 50 % par rapport aux amendes imposées aux entreprises en cause et en particulier à Finnish Chemicals.

369    La Commission s’oppose à cette argumentation.

–       Appréciation du Tribunal

370    La requérante soutient, en substance, que la Commission a violé le principe d’égalité de traitement, dès lors qu’elle a accordé à Finnish Chemicals, mais non à Arkema France, une réduction d’amende en vertu de la communication de 2002 sur la coopération.

371    Selon la jurisprudence rappelée au point 196 ci-dessus, le principe d’égalité de traitement requiert que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié.

372    En l’espèce, dès lors que, d’une part, comme il a été conclu à l’issue de l’examen de la première branche du dixième moyen (voir point 367 ci-dessus), la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en considérant que les preuves rapportées par Arkema France n’avaient pas une valeur ajoutée significative et, d’autre part, que la requérante ne conteste pas, dans ce cadre, l’appréciation de la Commission selon laquelle les informations fournies par Finnish Chemicals avaient, quant à elles, une valeur ajoutée significative, il y a lieu de constater qu’Arkema France et Finnish Chemicals ne se trouvaient pas dans une situation identique eu égard à l’octroi d’une réduction d’amende au titre de la communication de 2002 sur la coopération.

373    Il convient donc de constater que la requérante n’a pas établi que la Commission ait violé le principe d’égalité de traitement en n’octroyant aucune réduction d’amende à Arkema France au titre de la communication de 2002 sur la coopération.

374    Partant, il y a lieu de rejeter comme étant non fondés la seconde branche du dixième moyen et, partant, le dixième moyen dans son ensemble ainsi que le premier chef de conclusions de la requérante.

2.     Sur les conclusions, soulevées à titre subsidiaire, tendant à la réformation des montants des amendes

 Arguments des parties

375    Dans le cadre de son onzième moyen, la requérante fait valoir, que, dans l’hypothèse où le Tribunal n’annulerait pas la décision attaquée pour autant que cette dernière la concerne, les amendes qui lui ont été imposées devraient être annulées ou réduites.

376    Premièrement, la requérante soutient qu’il serait inéquitable de lui infliger l’amende la plus élevée parmi celles imposées aux entreprises visées par la décision attaquée, alors même que la responsabilité d’Arkema France dans l’infraction est considérablement moindre que celle d’EKA et de Finnish Chemicals. Elle fait observer, à cet égard, que les deux principaux acteurs de l’entente étaient EKA et Finnish Chemicals, comme cela ressort des motifs de la décision attaquée et que c’était notamment en réaction aux luttes entre ces deux concurrents pour se partager les marchés nordiques que les autres parties à l’entente telles qu’Arkema France ont été amenées à réagir et à protéger leurs marchés dans leurs zones.

377    Deuxièmement, la requérante considère que, dans le cadre de son pouvoir d’appréciation général, le Tribunal doit tenir compte, d’une part, de la moindre responsabilité d’Arkema France dans l’infraction en cause par rapport à celle d’EKA et de Finnish Chemicals et, d’autre part, des facteurs qu’elle a évoqués dans les premier et deuxième griefs du huitième moyen (voir points 267 à 273 ci-dessus), dans les première et seconde branches du neuvième moyen (voir points 310 à 312 et 320 à 323 ci-dessus) et dans le dixième moyen (voir points 331 à 333 et 368 ci-dessus).

378    La Commission s’oppose à l’argumentation de la requérante.

 Appréciation du Tribunal

379    Il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, s’agissant du contrôle exercé par le juge de l’Union sur les décisions de la Commission en matière de concurrence, au-delà du simple contrôle de légalité, qui ne permet que de rejeter le recours en annulation ou d’annuler l’acte attaqué, la compétence de pleine juridiction conférée, en application de l’article 229 CE, au Tribunal par l’article 31 du règlement n° 1/2003 habilite cette juridiction à réformer l’acte attaqué, même en l’absence d’annulation, en tenant compte de toutes les circonstances de fait, afin de modifier, par exemple, le montant de l’amende (voir arrêt de la Cour du 3 septembre 2009, Prym et Prym Consumer/Commission, C‑534/07 P, Rec. p. I‑7415, point 86, et la jurisprudence citée).

380    S’agissant, premièrement, de la demande de réformation du montant de l’amende imposée solidairement à la requérante et à Arkema France en raison du fait qu’elle ne tiendrait pas suffisamment compte de la moindre implication d’Arkema France dans l’entente par rapport à EKA et à Finnish Chemicals, le Tribunal considère qu’il n’y a pas lieu de faire droit à une telle demande dès lors que, comme il a été constaté au point 328 ci-dessus, la requérante n’avance aucun argument ou preuve établissant qu’Arkema France aurait joué un rôle mineur dans l’entente justifiant qu’une réduction dans le montant de l’amende lui soit accordée à ce titre.

381    S’agissant, deuxièmement, de la demande de réformation des amendes imposées solidairement à Arkema France et à la requérante ainsi qu’à titre personnel à la requérante, compte tenu des arguments soulevés dans les premier et deuxième griefs du huitième moyen, dans les première et seconde branches du neuvième moyen, et dans le dixième moyen, le Tribunal considère, à la lumière de l’ensemble des motifs exposés ci-dessus et en l’absence d’autres arguments avancés par la requérante à cet égard, que rien ne justifie une telle réduction.

382    Le deuxième chef de conclusions de la requérante doit dès lors être rejeté ainsi que le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

383    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Elf Aquitaine SA est condamnée aux dépens.

Pelikánová

Jürimäe

Soldevila Fragoso

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 17 mai 2011.

Signatures

Table des matières


Antécédents du litige

Procédure et conclusions des parties

En droit

1.  Sur les conclusions, soulevées à titre principal, tendant à l’annulation de la décision attaquée

Sur le premier moyen, tiré d’une violation des règles gouvernant l’imputation de la responsabilité d’une infraction au sein des groupes de sociétés

Sur la première branche, tirée d’une erreur de droit dans l’imputation de la responsabilité du comportement infractionnel en cause à la requérante

–  Arguments des parties

–  Appréciation du Tribunal

Sur la deuxième branche, tirée de la violation des principes d’autonomie juridique et économique des sociétés

–  Arguments des parties

–  Appréciation du Tribunal

Sur la troisième branche, tirée de l’erreur relative au fait que les indices que la Commission a retenus dans la décision attaquée ne corroborent pas la présomption d’exercice d’une influence déterminante

–  Arguments des parties

–  Appréciation du Tribunal

Sur la quatrième branche, tirée du fait que la Commission a considéré à tort que la requérante n’avait pas fourni un faisceau d’indices renversant la présomption d’exercice d’une influence déterminante

–  Arguments des parties

–  Appréciation du Tribunal

Sur la cinquième branche, tirée de la transformation de la présomption d’exercice d’une influence déterminante en présomption irréfragable

–  Arguments des parties

–  Appréciation du Tribunal

Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de six principes fondamentaux, résultant de l’imputation de la responsabilité du comportement infractionnel en cause à la requérante

Sur la première branche, tirée d’une violation des droits de la défense de la requérante

–  Arguments des parties

–  Appréciation du Tribunal

Sur la deuxième branche, tirée d’une violation du principe de l’égalité des armes

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur la troisième branche, tirée d’une violation de la présomption d’innocence

–  Arguments des parties

–  Appréciation du Tribunal

Sur la quatrième branche, tirée d’une violation du principe de responsabilité du fait personnel et d’individualité des peines

–  Arguments des parties

–  Appréciation du Tribunal

Sur la cinquième branche, tirée d’une violation du principe de légalité des peines

–  Arguments des parties

–  Appréciation du Tribunal

Sur la sixième branche, tirée d’une violation du principe d’égalité de traitement

–  Arguments des parties

–  Appréciation du Tribunal

Sur le troisième moyen, tiré d’une dénaturation du faisceau d’indices rapporté par la requérante

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur le quatrième moyen, tiré de l’existence de contradictions de motifs dans la décision attaquée

Sur la première branche, tirée d’une contradiction de motifs quant à l’application de la notion d’entreprise au sens de l’article 81, paragraphe 1, CE

–  Arguments des parties

–  Appréciation du Tribunal

Sur la deuxième branche, tirée d’une contradiction de motifs dans la décision attaquée quant à la connaissance par la requérante de l’infraction en cause

–  Arguments des parties

–  Appréciation du Tribunal

Sur la troisième branche, tirée d’une contradiction de motifs quant à la nature du contrôle qu’une société mère exerce sur sa filiale pour se voir imputer l’infraction commise par cette dernière

–  Arguments des parties

–  Appréciation du Tribunal

Sur le cinquième moyen, tiré d’une violation du principe de bonne administration

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur le sixième moyen, tiré d’une violation du principe de sécurité juridique

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur le septième moyen, tiré d’un détournement de pouvoir

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur le huitième moyen, tiré du caractère non fondé de l’imposition d’une amende personnelle à la requérante

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur le neuvième moyen, tiré d’une violation des principes et des règles ayant gouverné le calcul de l’amende imposée solidairement à Arkema France et à la requérante

Sur la première branche, tirée des erreurs dans le calcul du montant de l’amende imposée solidairement à Arkema France et à la requérante

–  Arguments des parties

–  Appréciation du Tribunal

Sur la seconde branche, tirée d’une violation du principe d’égalité de traitement liée à l’amende imposée solidairement à Arkema France et à la requérante

–  Arguments des parties

–  Appréciation du Tribunal

Sur le dixième moyen, tiré de la violation des dispositions de la communication de 2002 sur la coopération

Sur la première branche, tirée du refus d’octroi d’une réduction d’amende au titre de la communication de 2002 sur la coopération

–  Arguments des parties

–  Appréciation du Tribunal

Sur la seconde branche, tirée de la violation du principe d’égalité de traitement

–  Arguments des parties

–  Appréciation du Tribunal

2.  Sur les conclusions, soulevées à titre subsidiaire, tendant à la réformation des montants des amendes

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur les dépens



* Langue de procédure : le français.