ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

14 septembre 2017 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Directive 2004/38/CE – Directive 2008/115/CE – Droit de libre circulation et de libre séjour sur le territoire des États membres – Séjour d’un ressortissant d’un État membre sur le territoire d’un autre État membre malgré une interdiction d’accès au territoire de cet État – Légalité d’une décision de retrait d’une attestation d’enregistrement et d’une seconde décision d’éloignement du territoire – Possibilité de se prévaloir, par voie d’exception, de l’illégalité d’une décision antérieure – Obligation de traduction »

Dans l’affaire C‑184/16,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Dioikitiko Protodikeio Thessalonikis (tribunal administratif de première instance de Thessalonique, Grèce), par décision du 23 mars 2016, parvenue à la Cour le 1er avril 2016, dans la procédure

Ovidiu- Mihăiță Petrea

contre

Ypourgos Esoterikon kai Dioikitikis Anasygrotisis,

LA COUR (première chambre),

composée de Mme R. Silva de Lapuerta, président de chambre, MM. E. Regan, J.‑C. Bonichot (rapporteur), A. Arabadjiev et C. G. Fernlund, juges,

avocat général : M. M. Szpunar,

greffier : M. R. Schiano, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 2 février 2017,

considérant les observations présentées :

pour M. Ovidiu-Mihăiță Petrea, par Mes S. Dima et A. Muntean, dikigoroi,

pour le gouvernement hellénique, par M. D. Katopodis et Mme A. Magrippi, en qualité d’agents,

pour le gouvernement belge, par Mmes C. Pochet et L. Van den Broeck, en qualité d’agents,

pour le gouvernement danois, par Mme M. S. Wolff et M. C. Thorning, en qualité d’agents,

pour le gouvernement du Royaume-Uni, par M. S. Brandon et Mme C. Brodie, en qualité d’agents, assistés de M. B. Lask, barrister,

pour la Commission européenne, par Mme E. Montaguti et M. M. Konstantinidis, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 27 avril 2017,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 27, 28 et 30 à 32 de la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, modifiant le règlement (CEE) no 1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE (JO 2004, L 158, p. 77, et rectificatifs JO 2004, L 229, p. 35, et JO 2005, L 197, p. 34), de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier (JO 2008, L 348, p. 98), ainsi que des principes d’effectivité et de protection de la confiance légitime.

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Ovidiu- Mihăiță Petrea à l’Ypourgos Dimosias Taxis kai Prostasias tou Politi (ministre de l’Ordre public et de la Protection du citoyen), devenu l’Ypourgos Esoterikon kai Dioikitikis Anasygkrotisis (ministre de l’Intérieur et de la Réforme administrative), au sujet de la légalité d’une décision administrative par laquelle ce dernier a retiré une attestation d’enregistrement qui avait été délivrée à l’intéressé et a ordonné son retour en Roumanie.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

La directive 2004/38

3

Le considérant 11 de la directive 2004/38 énonce :

« Le droit fondamental et personnel de séjour dans un autre État membre est conféré directement aux citoyens de l’Union par le traité et ne dépend pas de l’accomplissement de procédures administratives. »

4

L’article 8, paragraphes 1 et 2, de cette directive prévoit :

« 1.   Sans préjudice de l’article 5, paragraphe 5, pour des séjours d’une durée supérieure à trois mois, l’État membre d’accueil peut imposer aux citoyens de l’Union de se faire enregistrer auprès des autorités compétentes.

2.   Le délai imparti pour l’enregistrement ne peut pas être inférieur à trois mois à compter de la date d’arrivée. Une attestation d’enregistrement est délivrée immédiatement, qui précise le nom et l’adresse de la personne enregistrée ainsi que la date de l’enregistrement. Le non-respect de l’obligation d’enregistrement peut être passible de sanctions non discriminatoires et proportionnées. »

5

L’article 15, paragraphe 1, de ladite directive précise :

« Les procédures prévues aux articles 30 et 31 s’appliquent par analogie à toute décision limitant la libre circulation d’un citoyen de l’Union ou des membres de sa famille prise pour des raisons autres que d’ordre public, de sécurité publique ou de santé publique. »

6

Selon l’article 27, paragraphes 1 et 2, de cette même directive :

« 1.   Sous réserve des dispositions du présent chapitre, les États membres peuvent restreindre la liberté de circulation et de séjour d’un citoyen de l’Union ou d’un membre de sa famille, quelle que soit sa nationalité, pour des raisons d’ordre public, de sécurité publique ou de santé publique. Ces raisons ne peuvent être invoquées à des fins économiques.

2.   Les mesures d’ordre public ou de sécurité publique doivent respecter le principe de proportionnalité et être fondées exclusivement sur le comportement personnel de l’individu concerné. L’existence de condamnations pénales antérieures ne peut à elle seule motiver de telles mesures.

Le comportement de la personne concernée doit représenter une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société. Des justifications non directement liées au cas individuel concerné ou tenant à des raisons de prévention générale ne peuvent être retenues. »

7

L’article 28, paragraphe 1, de la directive 2004/38 prévoit :

« Avant de prendre une décision d’éloignement du territoire pour des raisons d’ordre public ou de sécurité publique, l’État membre d’accueil tient compte notamment de la durée du séjour de l’intéressé sur son territoire, de son âge, de son état de santé, de sa situation familiale et économique, de son intégration sociale et culturelle dans l’État membre d’accueil et de l’intensité de ses liens avec son pays d’origine. »

8

Aux termes de l’article 30 de cette directive :

« 1.   Toute décision prise en application de l’article 27, paragraphe 1, est notifiée par écrit à l’intéressé dans des conditions lui permettant d’en saisir le contenu et les effets.

2.   Les motifs précis et complets d’ordre public, de sécurité publique ou de santé publique qui sont à la base d’une décision le concernant sont portés à la connaissance de l’intéressé, à moins que des motifs relevant de la sûreté de l’État ne s’y opposent.

3.   La notification comporte l’indication de la juridiction ou de l’autorité administrative devant laquelle l’intéressé peut introduire un recours ainsi que du délai de recours et, le cas échéant, l’indication du délai imparti pour quitter le territoire de l’État membre. Sauf en cas d’urgence dûment justifié, ce délai ne peut être inférieur à un mois à compter de la date de notification. »

9

L’article 31 de ladite directive prévoit :

« 1.   Les personnes concernées ont accès aux voies de recours juridictionnelles et, le cas échéant, administratives dans l’État membre d’accueil pour attaquer une décision prise à leur encontre pour des raisons d’ordre public, de sécurité publique ou de santé publique.

2.   Lorsque le recours formé contre une décision d’éloignement est accompagné d’une demande en référé visant à obtenir le sursis à l’exécution de cette décision, l’éloignement effectif du territoire ne peut pas avoir lieu tant qu’une ordonnance de référé n’a pas été prise, sauf :

lorsque la décision d’éloignement se fonde sur une décision judiciaire antérieure, ou

lorsque les personnes concernées ont eu auparavant accès à un recours juridictionnel, ou

lorsque la décision d’éloignement se fonde sur des motifs impérieux de sécurité publique prévus à l’article 28, paragraphe 3.

3.   Les procédures de recours permettent un examen de la légalité de la décision ainsi que des faits et circonstances justifiant la mesure envisagée. Elles font également en sorte que la décision ne soit pas disproportionnée, notamment par rapport aux exigences posées par l’article 28.

4.   Les États membres peuvent refuser la présence de l’intéressé sur leur territoire au cours de la procédure de recours, mais ils ne peuvent pas lui interdire de présenter ses moyens de défense en personne, sauf si sa comparution risque de provoquer des troubles graves à l’ordre et à la sécurité publics ou lorsque le recours porte sur un refus d’entrer sur le territoire. »

10

L’article 32 de la directive 2004/38 énonce :

« 1.   Les personnes faisant l’objet d’une décision d’interdiction du territoire pour des raisons d’ordre public, de sécurité publique ou de santé publique peuvent introduire une demande de levée de l’interdiction d’accès au territoire après un délai raisonnable, en fonction des circonstances, et en tout cas après trois ans à compter de l’exécution de la décision définitive d’interdiction qui a été valablement prise au sens du droit [de l’Union], en invoquant des moyens tendant à établir un changement matériel des circonstances qui avaient justifié la décision d’interdiction du territoire à leur encontre.

L’État membre concerné se prononce sur cette demande dans un délai de six mois à compter de son introduction.

2.   Les personnes visées au paragraphe 1 n’ont aucun droit d’accès au territoire de l’État membre concerné pendant l’examen de leur demande. »

11

L’article 37 de cette directive précise :

« Les dispositions de la présente directive ne portent pas atteinte aux dispositions législatives, réglementaires et administratives d’un État membre qui seraient plus favorables aux personnes visées par la présente directive. »

La directive 2008/115

12

L’article 1er de la directive 2008/115 prévoit :

« La présente directive fixe les normes et procédures communes à appliquer dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, conformément aux droits fondamentaux en tant que principes généraux du droit [de l’Union] ainsi qu’au droit international, y compris aux obligations en matière de protection des réfugiés et de droits de l’homme. »

13

L’article 2, paragraphe 1, de cette directive dispose :

« La présente directive s’applique aux ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier sur le territoire d’un État membre. »

14

L’article 6, paragraphe 1, de ladite directive précise :

« Les États membres prennent une décision de retour à l’encontre de tout ressortissant d’un pays tiers en séjour irrégulier sur leur territoire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 à 5. »

15

L’article 12 de cette même directive énonce :

« 1.   Les décisions de retour et, le cas échéant, les décisions d’interdiction d’entrée ainsi que les décisions d’éloignement sont rendues par écrit, indiquent leurs motifs de fait et de droit et comportent des informations relatives aux voies de recours disponibles.

[...]

2.   Sur demande, les États membres fournissent une traduction écrite ou orale des principaux éléments des décisions liées au retour visées au paragraphe 1, y compris des informations concernant les voies de recours disponibles, dans une langue que le ressortissant d’un pays tiers comprend ou dont il est raisonnable de supposer qu’il la comprend.

3.   Les États membres peuvent décider de ne pas appliquer le paragraphe 2 aux ressortissants d’un pays tiers qui ont pénétré illégalement sur le territoire d’un État membre et qui n’ont pas obtenu par la suite l’autorisation ou le droit d’y séjourner.

Dans ce cas, les décisions liées au retour visées au paragraphe 1 sont rendues au moyen d’un formulaire type prévu par la législation nationale.

Les États membres mettent à disposition des documents d’information générale expliquant les principaux éléments du formulaire type dans au moins cinq des langues les plus fréquemment utilisées ou comprises par les migrants illégaux entrant dans l’État membre concerné. »

Le droit grec

16

Le décret présidentiel 106/2007 portant libre circulation et séjour sur le territoire grec des citoyens de l’Union européenne et des membres de leurs familles (FEK A’ 135/21.6.2007) a transposé la directive 2004/38.

17

La loi 3907/2011 portant services d’asile et de premier accueil, retour des personnes en séjour irrégulier, permis de séjour e.a. (FEK A’ 7/26.1.2011) a transposé la directive 2008/115.

18

L’article 40, paragraphes 1 et 2, de cette loi prévoit :

« 1.   S’agissant du retour des personnes jouissant du droit à la libre circulation, conformément à l’article 2, point 5, du code frontières Schengen et au décret présidentiel 106/2007, les dispositions du chapitre C de la présente loi relatives aux autorités, aux procédures, aux garanties procédurales et à la protection juridictionnelle des étrangers sur le retour sont applicables, à moins que les articles 22 à 24 du décret présidentiel 106/2007 ne comportent des dispositions plus favorables.

2.   S’agissant des conditions matérielles et des modalités d’adoption des décisions de retour à l’encontre des personnes visées au paragraphe précédent, les dispositions des articles 22 à 24 du décret présidentiel 106/2007 continuent à s’appliquer. »

Le litige au principal et les questions préjudicielles

19

Il ressort de la décision de renvoi que M. Petrea, ressortissant roumain, a été condamné au cours de l’année 2011 par le Monomeles Plimmeleiodikeio Peiraia (tribunal correctionnel du Pirée, Grèce) à une peine d’emprisonnement de huit mois assortie d’un sursis de trois ans, pour le délit de vol en réunion.

20

Par décision du 30 octobre 2011, l’administration grecque a, d’une part, ordonné son éloignement vers la Roumanie au motif qu’il constituait une menace grave pour l’ordre public et la sécurité publique, et, d’autre part, l’a inscrit au registre national des étrangers indésirables ainsi que dans le système d’information Schengen, jusqu’au 30 octobre 2018, ce qui a eu pour effet de lui interdire l’entrée sur le territoire jusqu’à cette date.

21

Cette décision précisait que M. Petrea s’était vu communiquer, le 27 octobre 2011, un bulletin d’information destiné aux étrangers en cours d’éloignement, l’informant, dans une langue qu’il maîtrisait, de ses droits et des voies de recours dont il disposait, ainsi que de la possibilité de demander une traduction écrite ou orale des passages essentiels de la décision imposant le retour.

22

Le 1er novembre 2011, M. Petrea a déclaré par écrit qu’il renonçait à tout recours contentieux et qu’il souhaitait retourner dans son pays d’origine. Son éloignement vers cet État membre a eu lieu le 5 novembre 2011.

23

Le 1er septembre 2013, M. Petrea est revenu en Grèce et a introduit, le 25 septembre 2013, une demande d’attestation d’enregistrement en tant que citoyen de l’Union, laquelle lui a été délivrée le jour même.

24

Cependant, après avoir découvert que M. Petrea faisait toujours l’objet d’une interdiction d’accès au territoire, les autorités de police des étrangers ont décidé, le 14 octobre 2014, de retirer cette attestation et d’ordonner le retour de M. Petrea vers la Roumanie.

25

M. Petrea a introduit un recours administratif contre cette décision, dans le cadre duquel il a fait valoir non seulement l’absence de notification par écrit, dans une langue qu’il comprenait, de la décision d’éloignement du 30 octobre 2011, en méconnaissance des exigences de l’article 30 de la directive 2004/38, mais aussi le fait qu’il ne représentait plus, en tout état de cause, un danger pour l’ordre public et la sécurité publique.

26

Ce recours a été rejeté par décision du 10 novembre 2014, au motif que M. Petrea était toujours sous le coup d’une mesure d’interdiction du territoire. Lui a également été opposé le fait qu’il ne pouvait se prévaloir, par voie d’exception, de l’illégalité de la décision d’éloignement du 30 octobre 2011.

27

M. Petrea a demandé au Dioikitiko Protodikeio Thessalonikis (tribunal administratif de première instance de Thessalonique, Grèce) l’annulation de cette dernière décision et de celle du 14 octobre 2014.

28

Dans ces circonstances, le Dioikitiko Protodikeio Thessalonikis (tribunal administratif de première instance de Thessalonique) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

Les articles 27 et 32 de la directive 2004/38, interprétés à la lumière des articles 45 et 49 TFUE – compte tenu également de l’autonomie procédurale des États membres et des principes de [protection de] la confiance légitime et de [...] bonne administration – doivent-ils être interprétés en ce sens que sont imposées ou autorisées la révocation de l’attestation d’enregistrement d’un citoyen de l’Union qui avait précédemment été délivrée au ressortissant d’un autre État membre en vertu de l’article 8, paragraphe 1, du décret présidentiel 106/2007, ainsi que l’adoption par l’État d’accueil d’une mesure de retour à l’encontre de cet individu, dans un cas de figure où, nonobstant le fait qu’il avait été inscrit au registre national des étrangers indésirables lorsqu’il avait fait l’objet d’une mesure d’interdiction du territoire pour des motifs d’ordre public et de sécurité publique, l’individu est de nouveau entré sur le territoire de l’État membre concerné et a entamé une activité commerciale sans suivre la voie – prévue à l’article 32 de la directive 2004/38 – consistant à demander la levée de l’interdiction du territoire, cette interdiction du territoire étant érigée en un motif d’ordre public autonome qui justifie la révocation de l’attestation d’enregistrement d’un citoyen d’un État membre ?

2)

En cas de réponse affirmative à la question précédente : ce cas de figure est-il identique à un cas de séjour irrégulier du citoyen d’un État membre sur le territoire de l’État membre d’accueil, ce qui permettrait l’adoption – conformément à l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2008/115 – d’une décision de retour par l’autorité compétente pour révoquer l’attestation d’enregistrement, nonobstant le fait que, d’une part, ainsi qu’il est communément admis, l’attestation d’enregistrement ne constitue pas un titre légal de séjour dans le pays et que, d’autre part, seuls les ressortissants de pays tiers entrent dans le champ d’application ratione personae de la directive 2008/115 ?

3)

En cas de réponse négative à cette même question : lorsque les autorités nationales, agissant dans le cadre de l’autonomie procédurale de l’État membre d’accueil révoquent pour des motifs d’ordre public et de sécurité publique l’attestation d’enregistrement d’un citoyen d’un autre État membre, laquelle ne constitue pas un titre légal de séjour dans le pays, imposent simultanément à cet individu une mesure de retour, y a-t-il lieu de considérer qu’il s’agit là, selon une qualification juridique correcte, d’un seul et unique acte administratif d’éloignement administratif au titre des articles 27 et 28 de la directive 2004/38 qui est soumis à un contrôle juridictionnel selon les modalités fixées par ces dispositions, lesquelles instituent une procédure potentiellement exclusive d’éloignement administratif de citoyens de l’Union du territoire de l’État membre d’accueil ?

4)

Dans le cas où la réponse à la première et à la deuxième question serait soit affirmative soit négative : le principe d’effectivité s’oppose-t-il à une pratique jurisprudentielle nationale qui interdit aux autorités administratives puis aux juridictions compétentes saisies du litige d’examiner – dans le cadre de la révocation d’une attestation d’enregistrement d’un citoyen de l’Union ou dans le cadre de l’adoption par l’État membre d’accueil d’une mesure d’éloignement motivée par l’existence d’une interdiction de territoire à l’encontre du ressortissant de l’autre État membre – dans quelle mesure les garanties procédurales des articles 30 et 31 de la directive 2004/38 ont été respectées lors de l’adoption de la décision d’interdiction du territoire ?

5)

En cas de réponse affirmative à la question précédente : l’article 32 de la directive 2004/38 fait-il naître pour les autorités administratives compétentes de l’État membre une obligation de notifier au ressortissant concerné d’un autre État membre dans tous les cas, et indépendamment du fait que l’intéressé le demande ou non, la décision de son éloignement dans une langue qu’il comprend, afin qu’il puisse valablement exercer les droits procéduraux conférés par lesdites dispositions de la directive ? »

Sur les questions préjudicielles

Sur la première question

29

Il ressort des termes de la décision de renvoi que le Dioikitiko Protodikeio Thessalonikis (tribunal administratif de première instance de Thessalonique) considère que la décision d’éloignement du 30 octobre 2011 a eu pour objet, d’une part, d’ordonner la sortie de M. Petrea du territoire grec et, d’autre part, de lui interdire d’y entrer à nouveau jusqu’au 30 octobre 2018. Au regard des questions posées à la Cour, cette décision doit, dès lors, être regardée comme une décision d’interdiction du territoire.

30

Il convient, dans ces conditions, de regarder la première question comme visant, en substance, à savoir si la directive 2004/38, en particulier ses articles 27 et 32, ainsi que le principe de protection de la confiance légitime s’opposent à ce qu’un État membre retire une attestation d’enregistrement délivrée à tort à un citoyen de l’Union qui était toujours sous le coup d’une interdiction du territoire et prenne à son encontre une décision d’éloignement fondée sur le seul constat que la mesure d’interdiction du territoire était toujours en vigueur.

31

La juridiction de renvoi s’interroge notamment sur le point de savoir si l’article 27 de la directive 2004/38 impose aux autorités compétentes de vérifier, à cette occasion, si l’intéressé présente encore une menace réelle pour l’ordre public ou si elle doit s’en tenir à l’appréciation faite à la date de la décision initiale, en l’occurrence la décision du 30 octobre 2011.

32

S’agissant, tout d’abord, du retrait de l’attestation d’enregistrement, il a été jugé par la Cour que le droit des ressortissants d’un État membre d’entrer sur le territoire d’un autre État membre et d’y séjourner, aux fins voulues par le traité CE, constitue un droit directement conféré par celui-ci ou, selon le cas, par les dispositions prises pour la mise en œuvre dudit traité. Ainsi, la délivrance d’un titre de séjour à un ressortissant d’un État membre doit être considérée non comme un acte constitutif de droits, mais comme un acte destiné à constater, de la part d’un État membre, la situation individuelle d’un ressortissant d’un autre État membre au regard des dispositions du droit de l’Union (arrêt du 21 juillet 2011, Dias, C‑325/09, EU:C:2011:498, point 48 et jurisprudence citée).

33

Par conséquent, de même que ce caractère déclaratif empêche de qualifier d’illégal, au sens du droit de l’Union, le séjour d’un citoyen en considération de la seule circonstance qu’il ne dispose pas d’une carte de séjour, il fait obstacle à ce que soit considéré comme légal, au sens du droit de l’Union, le séjour d’un citoyen de celle-ci en raison du seul fait qu’une telle carte lui a été valablement délivrée (arrêt du 21 juillet 2011, Dias, C‑325/09, EU:C:2011:498, point 54).

34

Ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 42 de ses conclusions, une telle solution s’applique a fortiori dans le cadre du traité FUE, ainsi que l’énonce d’ailleurs le considérant 11 de la directive 2004/38.

35

Un tel caractère déclaratif s’attache dès lors, également, à l’attestation d’enregistrement prévue à l’article 8, paragraphe 2, de la directive 2004/38, de sorte que la délivrance de ce document ne saurait, en soi, fonder la confiance légitime de l’intéressé dans son droit à séjourner sur le territoire de l’État membre concerné.

36

Par ailleurs, dans l’affaire en cause au principal, aucune des circonstances décrites dans la décision de renvoi ne permet de considérer que les autorités compétentes auraient fait naître des espérances sur le droit au séjour de l’intéressé du fait d’assurances précises qu’elles lui auraient fournies.

37

Il ressort, en outre, du dossier à la disposition de la Cour que l’administration grecque a justifié le retrait de l’attestation d’enregistrement par des motifs légitimes, en particulier par la circonstance que celle-ci avait été délivrée par erreur.

38

Il résulte de ce qui précède que, dans des circonstances telles que celles au principal, ni la directive 2004/38 ni le principe de protection de la confiance légitime ne s’opposent au retrait de l’attestation d’enregistrement prévue à l’article 8, paragraphe 2, de cette directive.

39

S’agissant des modalités d’adoption d’une décision imposant le retour dans des circonstances telles que celles au principal, il convient de rappeler que l’article 27, paragraphe 1, de la directive 2004/38 prévoit, sous réserve des dispositions de son chapitre VI, la possibilité pour les États membres de restreindre la liberté de circulation et de séjour d’un citoyen de l’Union ou d’un membre de sa famille, quelle que soit sa nationalité, pour des raisons d’ordre public, de sécurité publique ou de santé publique. L’article 27, paragraphe 2, de cette directive précise notamment que le comportement de la personne concernée doit représenter une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société.

40

Quant à l’article 28, paragraphe 1, de ladite directive, celui-ci impose aux autorités compétentes de tenir compte notamment de la durée du séjour de l’intéressé sur son territoire, de son âge, de son état de santé, de sa situation familiale et économique, de son intégration sociale et culturelle dans l’État membre d’accueil et de l’intensité de ses liens avec son pays d’origine, avant de prendre une décision d’éloignement du territoire pour des raisons d’ordre public ou de sécurité publique.

41

Ces dispositions, qui valent pour toutes les décisions d’éloignement, s’appliquent donc en particulier aux décisions d’interdiction du territoire dont l’article 32 de la directive 2004/38 fait explicitement état.

42

Si la directive 2004/38 ne comporte pas de dispositions spécifiques pour le cas où une personne qui fait l’objet d’une telle interdiction revient dans l’État membre concerné en violation de celle-ci, il résulte de l’ensemble des dispositions de cette directive et plus particulièrement de celles consacrées à l’éventuelle levée d’une interdiction de ce type que les autorités compétentes disposent de pouvoirs propres à en assurer le respect.

43

Il y a lieu de relever, à cet égard, que la directive 2004/38 prévoit les conditions dans lesquelles les autorités compétentes peuvent accorder une levée de cette interdiction en raison d’un changement de circonstances.

44

L’article 32, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive 2004/38 précise en effet que les personnes faisant l’objet d’une décision d’interdiction du territoire peuvent en demander la levée après un délai raisonnable, en fonction des circonstances, et, en tout cas, après trois ans à compter de son exécution, en apportant des éléments tendant à établir un changement matériel des circonstances qui en avaient justifié l’adoption.

45

L’article 32, paragraphe 2, de cette directive indique toutefois que ces personnes n’ont « aucun droit d’accès au territoire » de l’État membre concerné pendant l’examen de leur demande.

46

Il résulte, par conséquent, explicitement du libellé de ces dispositions que la directive 2004/38 n’empêche nullement un État membre d’adopter une décision de retour à l’égard d’une personne qui a demandé la levée de l’interdiction du territoire dont elle fait l’objet, conformément à l’article 32, paragraphe 1, de cette directive, tant que l’examen de cette demande n’a pas abouti favorablement.

47

Il en va nécessairement de même lorsque, comme dans l’affaire au principal, l’intéressé est revenu sur le territoire de l’État membre concerné sans avoir demandé la levée de l’interdiction de territoire qui le frappe.

48

S’agissant de la question de savoir si les autorités compétentes doivent de nouveau vérifier si les conditions prévues aux articles 27 et 28 de la directive 2004/38 sont remplies, il découle de la nature même d’une mesure d’interdiction du territoire que celle-ci demeure en vigueur tant qu’elle n’a pas été levée et que le seul constat de sa violation permet à ces autorités de prendre à l’encontre de l’intéressé une nouvelle décision d’éloignement.

49

Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu, dès lors, de répondre à la première question que la directive 2004/38 ainsi que le principe de protection de la confiance légitime ne s’opposent pas à ce qu’un État membre, d’une part, retire une attestation d’enregistrement délivrée à tort à un citoyen de l’Union qui était toujours sous le coup d’une interdiction du territoire et, d’autre part, prenne à son encontre une décision d’éloignement fondée sur le seul constat que la mesure d’interdiction du territoire était toujours en vigueur.

Sur les deuxième et troisième questions

50

Par ses deuxième et troisième questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si le droit de l’Union s’oppose à ce qu’une décision de retour d’un citoyen de l’Union, telle que celle en cause au principal, soit adoptée par les mêmes autorités et selon la même procédure qu’une décision de retour d’un ressortissant de pays tiers en séjour irrégulier visée à l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2008/115.

51

La juridiction de renvoi justifie ces questions par le fait que le législateur national a rendu applicable aux ressortissants des États membres certaines des dispositions procédurales prévues par la directive 2008/115 pour les ressortissants de pays tiers, sous réserve des dispositions nationales plus favorables.

52

À cet égard, il doit être constaté que les États membres peuvent s’inspirer des dispositions de la directive 2008/115 pour désigner les autorités compétentes et définir la procédure applicable à l’adoption d’une décision imposant le retour d’un citoyen de l’Union telle que celle en cause au principal, si aucune disposition du droit de l’Union ne s’y oppose (voir, par analogie, ordonnance du 10 février 2004, Mavrona, C‑85/03, EU:C:2004:83, point 20).

53

En effet, la détermination des autorités compétentes pour adopter les différentes mesures prévues par la directive 2004/38 relève de l’autonomie procédurale des États membres, cette directive ne comportant aucune disposition à cet égard.

54

Quant à la procédure à suivre, il ressort de la décision de renvoi que non seulement la directive 2008/115 à laquelle renvoie le droit national en cause au principal prévoit l’application de garanties procédurales à son chapitre III mais aussi et surtout que ce droit réserve en tout état de cause l’application des mesures de transposition de la directive 2004/38 qui seraient plus favorables au citoyen de l’Union.

55

Par conséquent, aucun élément du dossier à la disposition de la Cour ne permet de considérer que la directive 2004/38 s’opposerait à ce qu’une décision de retour telle que celle en cause au principal soit adoptée par les mêmes autorités et selon la même procédure qu’une décision de retour d’un ressortissant de pays tiers en séjour irrégulier visée à l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2008/115.

56

Eu égard à ce qui précède, il convient de répondre aux deuxième et troisième questions que les directives 2004/38 et 2008/115 ne s’opposent pas à ce qu’une décision de retour d’un citoyen de l’Union, telle que celle en cause au principal, soit adoptée par les mêmes autorités et selon la même procédure qu’une décision de retour d’un ressortissant de pays tiers en séjour irrégulier visée à l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2008/115, dès lors que sont appliquées les mesures de transposition de la directive 2004/38 qui seraient plus favorables audit citoyen de l’Union.

Sur la quatrième question

57

Par sa quatrième question, la juridiction de renvoi demande si le principe d’effectivité s’oppose à une pratique jurisprudentielle selon laquelle un ressortissant d’un État membre qui fait l’objet d’une décision de retour dans des circonstances telles que celles au principal ne peut se prévaloir, à l’appui d’un recours dirigé contre cette décision, de l’illégalité de la décision d’interdiction du territoire précédemment prise à son encontre.

58

À cet égard, il résulte d’une jurisprudence constante de la Cour que, en l’absence de réglementation du droit de l’Union, il appartient aux États membres de désigner les juridictions compétentes et de régler les modalités procédurales des recours en justice destinés à assurer la sauvegarde des droits que les justiciables tirent du droit de l’Union. Toutefois, ces modalités ne doivent pas être de nature à rendre en pratique impossible ou excessivement difficile l’exercice des droits conférés par l’ordre juridique de l’Union (arrêts du 29 avril 2004, Orfanopoulos et Oliveri, C‑482/01 et C‑493/01, EU:C:2004:262, point 80, ainsi que du 13 mars 2014, Global Trans Lodzhistik, C‑29/13 et C‑30/13, EU:C:2014:140, point 33).

59

Le droit de l’Union ne s’oppose nullement à ce que la loi nationale ne permette pas de se prévaloir, à l’encontre d’un acte individuel, telle une décision de retour, de l’illégalité d’une décision d’interdiction du territoire devenue définitive, soit parce que le délai de recours à l’encontre de cette dernière a expiré, soit parce que le recours formé contre elle a été rejeté.

60

En effet, ainsi que la Cour l’a jugé à plusieurs reprises, la fixation de délais raisonnables de recours dans l’intérêt de la sécurité juridique, qui protège à la fois le particulier et l’administration concernés, est compatible avec le droit de l’Union (arrêt du 17 novembre 2016, Stadt Wiener Neustad, C‑348/15, EU:C:2016:882, point 41 et jurisprudence citée).

61

Toutefois, l’intéressé doit avoir disposé de manière effective de la possibilité de contester en temps utile la décision initiale d’interdiction du territoire et de se prévaloir des dispositions de la directive 2004/38.

62

Il ressort de la décision de renvoi que, dans l’affaire au principal, M. Petrea fait valoir que la décision d’interdiction du territoire du 30 octobre 2011, sur la base de laquelle a été prise la décision d’éloignement du 14 octobre 2014, ne lui a pas été notifiée dans des conditions qui satisfont aux exigences de l’article 30 de la directive 2004/38, c’est-à-dire d’une manière « lui permettant d’en saisir le contenu et les effets ». Dans un tel cas, le principe d’effectivité s’opposerait à ce que le délai de recours contre la première décision soit considéré comme étant expiré, et l’illégalité entachant cette décision pourrait encore être soulevée à l’appui du recours dirigé contre la seconde décision.

63

En l’occurrence, il semble résulter de la décision de renvoi que M. Petrea a eu connaissance de la décision du 30 octobre 2011, qu’il s’y est conformé et que, précédemment à son adoption, il a également été destinataire d’un bulletin d’information destiné aux étrangers en cours d’éloignement, l’informant, dans une langue qu’il maîtrisait, de ses droits et des voies de recours dont il disposait, ainsi que de la possibilité de demander une traduction écrite ou orale des passages essentiels de la décision de retour. Il apparaît en outre que l’intéressé aurait déclaré par écrit qu’il renonçait à tout recours contentieux contre la décision du 30 octobre 2011.

64

Dans de telles conditions, il y aurait lieu de considérer que l’intéressé disposait d’éléments suffisants pour se prévaloir en justice de la violation éventuelle des exigences de notification imposées à l’article 30 de la directive 2004/38, ce qu’il appartient néanmoins à la juridiction de renvoi de vérifier.

65

Par conséquent, il convient de répondre à la quatrième question que le principe d’effectivité ne s’oppose pas à une pratique jurisprudentielle selon laquelle un ressortissant d’un État membre qui fait l’objet d’une décision de retour dans des circonstances telles que celles au principal ne peut pas se prévaloir, à l’appui d’un recours dirigé contre cette décision, de l’illégalité de la décision d’interdiction du territoire précédemment prise à son encontre, pour autant que l’intéressé a disposé de manière effective de la possibilité de contester en temps utile cette dernière décision au regard des dispositions de la directive 2004/38.

Sur la cinquième question

66

À titre liminaire, il convient de relever que, dans le cadre de la cinquième question, la juridiction de renvoi se réfère à l’article 32 de la directive 2004/38, relatif aux effets dans le temps d’une interdiction du territoire, alors qu’il ressort manifestement de la teneur de sa question que celle-ci concerne l’article 30 de cette directive, relatif aux notifications des décisions prises en application de l’article 27, paragraphe 1, de celle-ci.

67

Il ressort par ailleurs de la décision de renvoi que l’intéressé n’a pas demandé la traduction de la décision du 30 octobre 2011.

68

Par conséquent, il convient de considérer que, par sa cinquième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 30 de la directive 2004/38 exige qu’une décision adoptée en vertu de l’article 27, paragraphe 1, de cette directive soit notifiée à l’intéressé dans une langue qu’il comprend, alors même qu’il n’a pas introduit de demande en ce sens.

69

Il importe, tout d’abord, de relever qu’une telle exigence ne découle pas du libellé de l’article 30, paragraphe 1, de ladite directive, qui prévoit, plus généralement, que toute décision prise en application de l’article 27, paragraphe 1, de cette même directive est notifiée par écrit à l’intéressé « dans des conditions lui permettant d’en saisir le contenu et les effets ».

70

Ensuite, il résulte des travaux préparatoires de la directive 2004/38, en particulier de la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres [COM(2001) 257 final], que l’article 30, paragraphe 1, de la directive 2004/38 n’implique pas que la décision d’éloignement soit traduite dans la langue de l’intéressé mais impose en revanche aux États membres de prendre toute mesure utile pour que celui-ci comprenne le contenu et les effets de cette décision, conformément à ce que la Cour avait jugé dans l’arrêt du 18 mai 1982, Adoui et Cornuaille (115/81 et 116/81, EU:C:1982:183, point 13).

71

Il importe, enfin, de constater que, s’agissant des décisions de retour adoptées à l’encontre des ressortissants de pays tiers, l’article 12, paragraphe 2, de la directive 2008/115 prévoit que les États membres fournissent, sur demande, une traduction écrite ou orale des principaux éléments des décisions liées au retour, y compris des informations concernant les voies de recours disponibles, dans une langue que le ressortissant d’un pays tiers comprend ou dont il est raisonnable de supposer qu’il la comprend.

72

Eu égard à ce qui précède, il convient de répondre à la cinquième question que l’article 30 de la directive 2004/38 impose aux États membres de prendre toute mesure utile pour que l’intéressé comprenne le contenu et les effets d’une décision adoptée en vertu de l’article 27, paragraphe 1, de cette directive, mais qu’il n’exige pas que cette décision lui soit notifiée dans une langue qu’il comprend ou dont il est raisonnable de supposer qu’il la comprend, alors qu’il n’a pas introduit de demande en ce sens.

Sur les dépens

73

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (première chambre) dit pour droit :

 

1)

La directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, modifiant le règlement (CEE) no 1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE, ainsi que le principe de protection de la confiance légitime ne s’opposent pas à ce qu’un État membre, d’une part, retire une attestation d’enregistrement délivrée à tort à un citoyen de l’Union européenne qui était toujours sous le coup d’une interdiction du territoire et, d’autre part, prenne à son encontre une décision d’éloignement fondée sur le seul constat que la mesure d’interdiction du territoire était toujours en vigueur.

 

2)

La directive 2004/38 et la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, ne s’opposent pas à ce qu’une décision de retour d’un citoyen de l’Union européenne, telle que celle en cause au principal, soit adoptée par les mêmes autorités et selon la même procédure qu’une décision de retour d’un ressortissant de pays tiers en séjour irrégulier visée à l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2008/115, dès lors que sont appliquées les mesures de transposition de la directive 2004/38 qui seraient plus favorables audit citoyen de l’Union.

 

3)

Le principe d’effectivité ne s’oppose pas à une pratique jurisprudentielle selon laquelle un ressortissant d’un État membre qui fait l’objet d’une décision de retour dans des circonstances telles que celles au principal ne peut pas se prévaloir, à l’appui d’un recours dirigé contre cette décision, de l’illégalité de la décision d’interdiction du territoire précédemment prise à son encontre, pour autant que l’intéressé a disposé de manière effective de la possibilité de contester en temps utile cette dernière décision au regard des dispositions de la directive 2004/38.

 

4)

L’article 30 de la directive 2004/38 impose aux États membres de prendre toute mesure utile pour que l’intéressé comprenne le contenu et les effets d’une décision adoptée en vertu de l’article 27, paragraphe 1, de cette directive mais n’exige pas que cette décision lui soit notifiée dans une langue qu’il comprend ou dont il est raisonnable de supposer qu’il la comprend, alors qu’il n’a pas introduit de demande en ce sens.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : le grec.