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Document 62019TJ0265

Judgment of the General Court (Third Chamber) of 30 June 2021.
Italian Republic v European Commission.
EAGF and EAFRD – Expenditure excluded from financing – Expenditure incurred by Italy – Clearance of the accounts – Conformity clearance – Financial corrections – Regulation (EU) No 1306/2013 – Risk of financial loss – Regulation (EC) No 1290/2005 – Regulation (EC) No 885/2006 – Primary administrative or judicial finding – Existence of an irregularity.
Case T-265/19.

ECLI identifier: ECLI:EU:T:2021:392

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

30 juin 2021 (*)

« FEAGA et Feader ‐ Dépenses exclues du financement – Dépenses effectuées par l’Italie – Apurement des comptes – Apurement de conformité – Corrections financières – Règlement (UE) no 1306/2013 – Risque de préjudice financier – Règlement (CE) no 1290/2005 – Règlement (CE) no 885/2006 – Premier acte de constat administratif ou judiciaire – Existence d’une irrégularité »

Dans l’affaire T‑265/19,

République italienne, représentée par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de Mme R. Guizzi, M. A. Giordano et Mme L. Vignato, avvocati dello Stato,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par M. D. Bianchi, Mmes J. Aquilina et F. Moro, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation partielle de la décision d’exécution (UE) 2019/265 de la Commission, du 12 février 2019, écartant du financement de l’Union européenne certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) (JO 2019, L 44, p. 14), en tant qu’elle concerne certaines dépenses effectuées par la République italienne,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de MM. A. M. Collins, président, G. De Baere et Mme G. Steinfatt (rapporteure), juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le présent recours concerne deux corrections financières par lesquelles la Commission européenne a écarté du financement de l’Union européenne certaines dépenses déclarées par les organismes payeurs Agenzia della Regione Calabria per le erogazioni in agricoltura (ARCEA, agence de la Région de Calabre pour l’octroi d’aides dans le secteur agricole, Italie) et Agenzia Regionale Piemontese per le Erogazioni in Agricoltura (ARPEA, agence régionale piémontaise pour l’octroi d’aides dans le secteur agricole, Italie ; anciennement OPR Finpiemonte) au titre du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) et du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA), à savoir :

–        une correction financière, d’un montant brut de 766 522,66 euros (soit un montant net de 695 896,32 euros), appliquée à certaines dépenses déclarées par l’ARCEA pour l’exercice financier 2016, à la suite de l’enquête portant la référence CEB/2017/067/IT, relative à l’apurement des comptes pour cet exercice financier ;

–        une correction financière, d’un montant total de 362 017,10 euros, appliquée à certaines dépenses déclarées par l’ARPEA pour l’exercice financier 2007, à la suite de l’enquête portant la référence FA/2008/067/IT, relative à l’apurement des comptes pour cet exercice financier.

 Sur l’enquête portant la référence CEB/2017/067/IT

2        Dans le cadre de la procédure d’apurement des comptes de l’exercice financier 2016, couvrant la période allant du 15 octobre 2015 au 15 octobre 2016, de l’ARCEA, menée en vertu de l’article 51 du règlement (UE) no 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 17 décembre 2013, relatif au financement, à la gestion et au suivi de la politique agricole commune et abrogeant les règlements (CEE) no 352/78, (CE) no 165/94, (CE) no 2799/98, (CE) no 814/2000, (CE) no 1290/2005 et (CE) no 485/2008 du Conseil (JO 2013, L 347, p. 549), la Commission a constaté que l’organisme de certification désigné par les autorités italiennes pour vérifier, conformément à l’article 9 du même règlement, l’exhaustivité, l’exactitude et la véracité des comptes annuels de l’ARCEA avait relevé un certain nombre d’erreurs financières lors des tests de validation du FEAGA et du Feader.

3        S’agissant, plus particulièrement, du Feader, l’organisme de certification avait identifié quatre erreurs financières lors de l’examen d’un échantillon composé de 111 opérations. Parmi ces erreurs figurait une erreur d’un montant de 28 199,13 euros, concernant la demande de paiement no 54750617406 relative à des projets couverts par la mesure 321. Cette demande avait été présentée à l’ARCEA par le Comune di Vallelonga (commune de Vallelonga, Italie), qui avait succédé au bénéficiaire initial de l’aide visée par cette mesure, la Comunità Montana delle Serre Calabresi (communauté de montagne des Serres calabraises, Italie), à la suite de la mise en liquidation de cette dernière. L’erreur identifiée était liée au fait que, sans avoir reçu les pièces justificatives correspondantes, l’ARCEA avait payé à la commune de Vallelonga les dépenses faisant l’objet de sa demande de paiement et avait déclaré celles-ci au Feader au titre de l’exercice financier 2016 en vue de leur remboursement. Or, ladite commune n’avait réglé les factures, datant de décembre 2015 et de mars 2016, relatives aux dépenses en cause, que le 8 février 2017, après que les ressources financières qui constituaient le fonds de caisse de la communauté de montagne des Serres calabraises en liquidation avaient été mises à sa disposition, le 27 janvier 2017. La commune de Vallelonga n’avait ensuite transmis les preuves du paiement de ces factures à l’ARCEA que le 15 février 2017.

4        Par lettre du 18 mai 2017, la Commission a indiqué aux autorités italiennes, conformément à l’article 33, paragraphe 3, de son règlement d’exécution (UE) no 908/2014, du 6 août 2014, portant modalités d’application du règlement no 1306/2013 en ce qui concerne les organismes payeurs et autres entités, la gestion financière, l’apurement des comptes, les règles relatives aux contrôles, les garanties et la transparence (JO 2014, L 255, p. 59), que les comptes du Feader pour l’exercice financier 2016 ne pouvaient être apurés. Par la même lettre, elle a engagé la procédure d’apurement de conformité prévue à l’article 52 du règlement no 1306/2013, a communiqué à ces autorités, conformément à l’article 34, paragraphe 2, du règlement d’exécution no 908/2014, ses conclusions et leur a fait part de son intention de proposer d’exclure un montant de 766 522,66 euros du financement de l’Union à la charge du Feader. Dans l’annexe 6 de ladite lettre, elle a notamment indiqué que l’erreur d’un montant de 28 199,13 euros devait être considérée comme étant une « erreur aléatoire », et non une « erreur connue », au sens de la « ligne directrice no 2 des lignes directrices pour l’audit de certification des comptes du FEAGA/Feader – Exercice financier 2016 » du 15 septembre 2016. Partant, elle a estimé qu’elle ne pouvait accepter le calcul de l’« erreur totale » effectué par l’organisme de certification et, après avoir procédé à un nouveau calcul des montants communiqués par ce dernier, elle a fixé, à la suite d’une extrapolation, à un montant de 766 522,66 euros l’« erreur la plus probable » pour le Feader et à un montant de 1 676 349 euros la limite supérieure de l’erreur. Ces deux montants dépassant le seuil de signification correspondant à 2 % de la déclaration annuelle (35 281 803,08 euros x 2 % = 705 636,06 euros), elle a conclu que les comptes du Feader pour l’exercice financier 2016 ne pouvaient être apurés.

5        Par lettre du 17 juillet 2017, les autorités italiennes ont transmis leurs observations à la Commission.

6        Une réunion bilatérale s’est tenue entre la Commission et les autorités italiennes le 4 octobre 2017. Au cours de cette réunion, s’agissant du Feader, seule l’erreur financière relative à la demande de paiement no 54750617406 a été examinée, les trois autres erreurs financières relevées par l’organisme de certification ayant été acceptées par ces autorités dans leurs observations du 17 juillet 2017.

7        Le procès-verbal de la réunion bilatérale a été communiqué aux autorités italiennes par la Commission par lettre du 7 février 2018. Il ressort de ce procès-verbal que, lors de cette réunion, l’ARCEA a indiqué, s’agissant des dépenses en cause, que, le 16 janvier 2017, elle avait ouvert une procédure de recouvrement, mais que celle-ci avait été close sans aucun recouvrement le 17 février 2017 à la suite de la fourniture des pièces justificatives par le bénéficiaire. Selon l’ARCEA, aucune erreur financière n’avait donc été commise. Elle a ajouté que, dans l’hypothèse où une correction financière serait néanmoins proposée, l’erreur devrait être qualifiée de « connue ». Elle a justifié sa position en alléguant qu’elle avait déjà constaté l’absence des pièces justificatives avant que l’organisme de certification ne lui transmette les dossiers inclus dans l’échantillon d’opérations sélectionnées, même si aucune mesure n’avait été prise jusqu’alors. S’agissant de la Commission, il est rapporté, dans ledit procès-verbal, qu’elle a invité les autorités italiennes à lui fournir les pièces justificatives relatives à l’erreur en cause ainsi que la position finale de l’organisme de certification. Il en ressort également qu’elle a réaffirmé que cette erreur était à considérer comme étant une erreur aléatoire devant faire l’objet d’une extrapolation et qu’elle a conclu que les lacunes constatées avaient créé un risque pour le Feader en ce qui concernait l’exercice financier 2016.

8        Par lettre du 6 avril 2018, les autorités italiennes ont transmis à la Commission des informations complémentaires ainsi que les pièces justificatives relatives à l’erreur en cause, en faisant valoir que l’ARCEA avait pris toutes les mesures utiles pour protéger les intérêts financiers de l’Union. Elles ont également communiqué la position finale de l’organisme de certification, par laquelle ce dernier constatait qu’il ressortait de ces pièces que le bénéficiaire s’était acquitté du montant des actions financées par le Feader seulement en février 2017, soit tant après le paiement de la demande présentée par ce bénéficiaire qu’après le contrôle opéré par cet organisme et l’ouverture, par l’ARCEA, de la procédure de recouvrement.

9        Par lettre du 25 juin 2018, la Commission a officiellement communiqué ses conclusions aux autorités italiennes, conformément à l’article 34, paragraphe 3, troisième alinéa, du règlement d’exécution no 908/2014. Elle a indiqué que, après avoir analysé les informations complémentaires fournies par les autorités italiennes, elle souscrivait à l’analyse de l’organisme de certification selon laquelle il existait une erreur relative à la demande de paiement no 54750617406. Elle a constaté que l’ARCEA avait versé le montant correspondant aux dépenses en cause au bénéficiaire et déclaré celles-ci avant leur paiement par ce dernier. Elle a estimé que l’organisme payeur devait introduire dans les systèmes toutes les mesures correctives qui s’imposaient, afin de garantir que, le cas échéant, les déclarations de dépenses n’incluaient que les paiements effectués par cet organisme et justifiés par des factures acquittées ou d’autres documents équivalents qui démontraient que les dépenses avaient été effectivement engagées et payées par le bénéficiaire. Par ailleurs, elle a réaffirmé que l’erreur en cause ne constituait pas une erreur connue, mais une erreur aléatoire devant faire l’objet d’une extrapolation. Elle a ajouté que les autorités italiennes n’avaient apporté aucune preuve démontrant que l’ARCEA avait pris des mesures correctives avant la communication de l’échantillon par l’organisme de certification. Elle a conclu que les lacunes constatées avaient entraîné un risque pour le Feader. En conséquence, en application de l’article 12, paragraphe 3, de son règlement délégué (UE) no 907/2014, du 11 mars 2014, complétant le règlement no 1306/2013 en ce qui concerne les organismes payeurs et autres entités, la gestion financière, l’apurement des comptes, les garanties et l’utilisation de l’euro (JO 2014, L 255, p. 18), et des lignes directrices relatives au calcul des corrections financières dans le cadre des procédures d’apurement de conformité et d’apurement des comptes, qui figuraient dans sa communication C(2015) 3675 final, du 8 juin 2015, elle a proposé une correction financière d’un montant brut de 766 522,66 euros (soit un montant net de 695 869,32 euros).

10      Dans la même lettre, la Commission a indiqué aux autorités italiennes qu’elles pouvaient saisir l’organe de conciliation, conformément à l’article 40, paragraphe 1, du règlement d’exécution no 908/2014. Toutefois, par lettre du 6 août 2018, ces autorités ont fait part de l’impossibilité d’engager la procédure de conciliation au motif que le montant qu’il était envisagé d’exclure du financement de l’Union était inférieur à un million d’euros.

11      Le 12 février 2019, la Commission a adopté la décision d’exécution (UE) 2019/065, écartant du financement de l’Union européenne certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du FEAGA et du Feader (JO 2019, L 44, p. 14, ci-après la « décision attaquée »), qui a été notifiée sous le numéro C(2019) 869.

12      En vertu de la décision attaquée, la Commission a notamment écarté du financement de l’Union, en ce qui concerne la République italienne, le montant brut de 766 522,66 euros visé au point 9 ci-dessus. Elle a également communiqué aux autorités italiennes un rapport de synthèse reprenant notamment les lacunes constatées, les motifs de l’exclusion, les arguments que ces autorités avaient avancés ainsi que sa position finale.

 Sur l’enquête portant la référence FA/2008/067/IT

13      La seconde correction financière concernée par le présent recours trouve son origine dans la procédure d’apurement des comptes relative à l’exercice financier 2007, couvrant la période allant du 15 octobre 2006 au 15 octobre 2007, menée en vertu de l’article 30 du règlement (CE) no 1290/2005 du Conseil, du 21 juin 2005, relatif au financement de la politique agricole commune (JO 2005, L 209, p. 1), et concernant notamment l’ARPEA.

14      Par lettre du 28 mars 2008, la Commission a notamment, conformément à l’article 11, paragraphe 1, de son règlement (CE) no 885/2006, du 21 juin 2006, portant modalités d’application du règlement no 1290/2005 du Conseil en ce qui concerne l’agrément des organismes payeurs et autres entités ainsi que l’apurement des comptes du FEAGA et du Feader (JO 2006, L 171, p. 90), informé les autorités italiennes qu’elle considérait que l’ARPEA ne s’était peut-être pas pleinement conformée à certaines dispositions du règlement no 885/2006 et a engagé la procédure d’apurement de conformité prévue à l’article 31 du règlement no 1290/2005. Plus particulièrement, elle a relevé que des dettes à hauteur de 63 653,55 euros, de 428 141,61 euros et de 202 485,27 euros, respectivement, n’avaient pas été mentionnées dans les tableaux établis conformément aux modèles figurant dans l’annexe III du règlement no 885/2006 (ci-après les « tableaux de l’annexe III du règlement no 885/2006 ») et que des paiements à hauteur de 55 367 euros mis à la charge du FEAGA, pour lesquels les virements aux bénéficiaires n’avaient pas été effectués, n’avaient pas été crédités de nouveau au profit du fonds, contrairement à ce qui était prévu au point 2, sous le titre B « Procédures de paiement », de l’annexe I du même règlement. Partant, elle a annoncé son intention de proposer une correction financière d’un montant total de 749 647,43 euros.

15      Par lettre du 30 juin 2008, les autorités italiennes ont transmis leurs observations à la Commission.

16      Par lettre du 30 mai 2011, la Commission a invité les autorités italiennes à une réunion bilatérale, en exposant les points qui seraient discutés lors de celle-ci ainsi que les arguments des différents acteurs concernés. Elle a également demandé à ces autorités de fournir certaines informations et de produire certains éléments de preuve.

17      Par lettre du 8 juin 2011, les autorités italiennes ont répondu à la demande de la Commission.

18      Une réunion bilatérale s’est tenue entre la Commission et les autorités italiennes le 15 juin 2011.

19      Par lettre du 3 août 2011, la Commission a communiqué aux autorités italiennes le procès-verbal de la réunion bilatérale, en leur demandant de fournir des informations et des éléments de preuve supplémentaires.

20      Par lettre du 5 octobre 2011 et courriel du 1er juin 2012, les autorités italiennes ont répondu à la demande de la Commission.

21      Par lettre du 20 décembre 2012, la Commission a officiellement communiqué ses conclusions aux autorités italiennes, conformément à l’article 11, paragraphe 2, troisième alinéa, du règlement no 885/2006. Elle a estimé que, au vu des éléments de preuve présentés, il n’était pas nécessaire d’appliquer une correction financière pour les cas relatifs aux montants de 63 653,55 et de 202 485,27 euros. S’agissant des cas relatifs au montant de 428 141,61 euros, après avoir pris connaissance des informations communiquées par les autorités italiennes lors de la réunion bilatérale ainsi que dans leur lettre du 5 octobre 2011 et leur courriel du 1er juin 2012 (voir point 20 ci-dessus), elle a finalement proposé d’appliquer, sur le fondement de l’article 32, paragraphe 4, sous b), du règlement no 1290/2005, une correction financière d’un montant total de 330 771,05 euros, se décomposant en un montant de 305 122,74 euros et en un montant de 25 648,31 euros. Enfin, en ce qui concerne les paiements mis à la charge du FEAGA pour lesquels les virements aux bénéficiaires n’avaient pas été effectués et n’avaient pas été crédités de nouveau au profit du fonds, elle a proposé d’appliquer une correction financière d’un montant de 31 246,05 euros au lieu de celui de 55 367 euros initialement retenu (voir point 14 ci-dessus). À cet égard, elle a relevé que l’ARPEA avait indiqué que le montant initial s’élevait à 56 483,04 euros et comprenait une aide d’État d’un montant de 1 619,10 euros. Elle a déduit ce second montant du premier, pour aboutir à un nouveau montant de 54 863,94 euros, avant de relever que, lors de la réunion bilatérale, il avait été confirmé que, de ce dernier montant, 23 617,89 euros avaient été crédités de nouveau au profit du fonds tandis que 31 246,05 euros avaient fait l’objet d’un ordre de paiement en faveur des bénéficiaires concernés en juin 2008. Partant, elle a proposé d’arrêter une correction financière d’un montant total de 362 017,10 euros et a indiqué aux autorités italiennes que, conformément à l’article 16, paragraphe 1, du règlement no 885/2006, elles pouvaient présenter une demande de conciliation.

22      Par lettre du 7 février 2013, les autorités italiennes ont présenté une demande de conciliation au secrétariat de l’organe de conciliation. Par lettre du 4 avril 2013, l’organe de conciliation a rejeté cette demande comme irrecevable au motif que le montant en cause n’excédait pas un million d’euros et que les autorités italiennes n’avaient pas démontré qu’il s’agissait d’une question de principe relative à l’application de la réglementation de l’Union.

23      Le 12 février 2019, la Commission a adopté la décision attaquée, en vertu de laquelle elle a notamment écarté du financement de l’Union, en ce qui concerne la République italienne, un montant de 362 017,10 euros, s’agissant de l’enquête portant la référence FA/2008/067/IT. Elle a également communiqué aux autorités italiennes un rapport de synthèse reprenant notamment les lacunes constatées, les motifs de l’exclusion, les arguments que ces autorités avaient avancés ainsi que sa position finale.

 Procédure et conclusions des parties

24      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 19 avril 2019, la République italienne a introduit le présent recours.

25      Le mémoire en défense, la réplique et la duplique ont été déposés au greffe du Tribunal le 26 juillet, le 21 octobre et le 3 décembre 2019, respectivement.

26      Le 17 juin 2020, le Tribunal a posé des questions écrites à la Commission au titre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 de son règlement de procédure. La Commission a déféré à cette demande dans le délai imparti. Le 2 octobre 2020, la République italienne a présenté ses observations sur les réponses de la Commission.

27      En l’absence de demande des parties, le Tribunal (troisième chambre) a décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure, de statuer sans phase orale de la procédure.

28      La République italienne conclut à ce qu’il plaise au Tribunal d’annuler la décision attaquée en tant que la Commission y a appliqué des corrections financières la concernant à hauteur de 695 869,32 euros et de 362 017,10 euros à la suite des enquêtes portant les références CEB/2017/067/IT et FA/2008/067/IT, respectivement.

29      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la République italienne aux dépens.

 En droit

30      À l’appui du recours, la République italienne soulève deux moyens.

31      Le premier moyen concerne l’enquête portant la référence CEB/2017/067/IT, conduite auprès de l’ARCEA, et est tiré de la violation de l’article 2, paragraphe 2, du règlement (CE) no 1258/1999 du Conseil, du 17 mai 1999, relatif au financement de la politique agricole commune (JO 1999, L 160, p. 103), de l’article 31, paragraphe 2, du règlement no 1290/2005, de l’article 2, paragraphe 2, du règlement no 1306/2013, de l’article 5, paragraphe 4, TUE, du principe de proportionnalité, du principe de protection de la confiance légitime et de l’obligation de motivation ainsi que d’un abus de pouvoir.

32      Le second moyen concerne l’enquête portant la référence FA/2008/067/IT, conduite auprès de l’ARPEA, et est tiré de la violation du règlement no 1258/1999, du règlement no 1290/2005, de l’article 5 TUE, du principe de proportionnalité, du principe de protection de la confiance légitime et de l’obligation de motivation ainsi que d’un abus de pouvoir.

33      À titre liminaire, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 76, sous d), du règlement de procédure, la requête doit notamment contenir un exposé sommaire des moyens invoqués. Il ressort de la jurisprudence que cet exposé doit être suffisamment clair et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant sans avoir à solliciter d’autres informations (voir arrêt du 9 mars 2018, Portugal/Commission, T‑462/16, non publié, EU:T:2018:127, point 45 et jurisprudence citée). Il en découle que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels un recours est fondé doivent ressortir d’une façon cohérente et compréhensible du texte de la requête elle-même (voir arrêt du 4 juillet 2019, Italie/Commission, T‑598/17, non publié, EU:T:2019:482, point 29 et jurisprudence citée). Selon une jurisprudence constante, tout moyen qui n’est pas suffisamment articulé dans la requête introductive d’instance doit être considéré comme irrecevable. Des exigences analogues sont requises lorsqu’un grief est invoqué au soutien d’un moyen. Cette fin de non-recevoir d’ordre public doit être relevée d’office par le juge de l’Union (voir arrêt du 4 juillet 2019, Italie/Commission, T‑598/17, non publié, EU:T:2019:482, point 29 et jurisprudence citée).

34      En l’espèce, il y a lieu de constater que, comme le relève à juste titre la Commission, plusieurs griefs invoqués par la République italienne à l’appui de ses deux moyens ne sont assortis d’aucune argumentation spécifique (voir points 57 et 111 ci-après). Partant, faute d’avoir été explicités, ils doivent être écartés comme étant irrecevables.

 Sur le premier moyen, relatif à la correction financière établie à la suite de l’enquête portant la référence CEB/2017/067/IT

35      La République italienne fait valoir que, en appliquant une correction financière, d’un montant net de 695 896,32 euros, à certaines dépenses déclarées par l’ARCEA pour l’exercice financier 2016, en raison de leur non-conformité aux règles de l’Union, à la suite de l’enquête portant la référence CEB/2017/067/IT, la Commission a commis une violation des « règlements régissant les faits de l’espèce », du principe de proportionnalité, du principe de protection de la confiance légitime et de l’obligation de motivation ainsi qu’un abus de pouvoir.

36      En substance, la République italienne affirme que la « législation mentionnée dans le libellé du présent moyen, telle qu’interprétée à la lumière des principes réglementaires susmentionnés », subordonne l’exclusion du financement de l’Union à l’existence d’un préjudice certain et réel pour le budget de celle-ci. Au soutien de cette affirmation, dans la requête, elle cite, plus particulièrement, l’article 31, paragraphe 2, du règlement no 1290/2005, avant de relever, dans la réplique, que cette disposition a été reprise à l’article 52, paragraphe 2, du règlement no 1306/2013.

37      Or, en l’espèce, selon la République italienne, l’émission des mandats de paiement par l’entité bénéficiaire pour les dépenses déclarées et leur communication à l’ARCEA démontrent l’utilisation de l’aide par cette entité et, partant, l’absence de tout préjudice financier, même purement potentiel, pour le Feader. En outre, l’ARCEA aurait, « dans une réponse fournie en temps utile », non seulement produit toutes les preuves documentaires nécessaires, mais aussi établi avoir pris toutes les mesures correctives requises pour réduire, voire éliminer, tout risque financier pour le Feader. En effet, « les dépenses engagées [auraient] été prises en compte de manière rapide et adéquate ». Enfin, la Commission n’aurait pas apporté la preuve des conséquences financières des lacunes constatées.

38      Par ailleurs, la République italienne affirme que l’importance accordée par la Commission à la production tardive des pièces justificatives constitue une violation du règlement no 1290/2005 ainsi que du principe de proportionnalité dès lors que ce retard n’a entraîné ni préjudice ni risque de préjudice pour le Feader.

39      Enfin, la République italienne soutient que la décision attaquée est également illégale dans la mesure où la Commission n’a pas tenu compte des « circonstances exceptionnelles » qui ont été à l’origine de la communication tardive des pièces justificatives par l’entité bénéficiaire, et ce en violation de l’article 2, paragraphe 2, du règlement no 1306/2013. Elle relève, à cet égard, que, à la suite de la mise en liquidation de la communauté de montagne des Serres calabraises, des retards sont intervenus dans la nomination des commissaires liquidateurs ainsi que dans le transfert des ressources financières de cette dernière à la commune de Villalonga. Elle insiste sur le fait que la liste de circonstances exceptionnelles figurant dans la disposition précitée n’est pas exhaustive. En tout état de cause, les circonstances de l’espèce permettraient de qualifier de « raisonnable » au sens du considérant 26 du règlement no 1290/2005 le retard dans la présentation des pièces justificatives.

40      Dans la réplique, la République italienne invoque la décision d’exécution C(2019) 1065 final de la Commission, du 18 février 2019, relative à l’apurement des comptes de certains organismes payeurs en France, en Hongrie et en Italie en ce qui concerne les dépenses financées par le Feader pour l’exercice financier 2016, dont il ressortirait que les « comptes du Feader » pour cet exercice financier ont été apurés.

41      La Commission conteste les arguments de la République italienne, dont, à titre liminaire, elle souligne le caractère très imprécis. Tout d’abord, elle fait valoir qu’il est de jurisprudence que l’article 31, paragraphe 2, du règlement no 1290/2005 ne subordonne pas chaque correction financière à la démonstration d’un préjudice réel subi par le fonds concerné. Ensuite, elle soutient qu’il ressort du dossier que l’ARCEA a commis un manquement manifeste à l’obligation de vérifier les conditions d’éligibilité des dépenses déclarées en ayant effectué le paiement relatif à la demande de paiement no 54750617406 et déclaré les dépenses au titre de l’exercice financier 2016 sans avoir pris connaissance des pièces justificatives s’y rapportant. Par ailleurs, elle affirme que ce n’est pas la production tardive de ces pièces justificatives, mais le fait que l’ARCEA ait déclaré ces dépenses en l’absence desdites pièces justificatives qui constitue la violation de la réglementation de l’Union applicable et génère une lacune dans le système de contrôle, justifiant la décision d’exclusion du financement. Quant à la décision d’exécution C(2019) 1065 final qu’elle a adoptée le 18 février 2019, elle ne démontrerait en rien la validité des comptes de l’ARCEA relatifs à cet exercice financier. Enfin, en ce qui concerne la prétendue violation de l’article 2, paragraphe 2, du règlement no 1306/2013, elle fait valoir que les circonstances invoquées par la République italienne n’ont aucun lien causal direct avec le fait que, sans avoir pris connaissance des pièces justificatives se rapportant aux dépenses en cause, l’ARCEA a payé ces dépenses et les a déclarées à la Commission, et que ces circonstances ne sont pas expressément mentionnées parmi les circonstances exceptionnelles visées par cette disposition, ni de nature à être qualifiées d’« exceptionnelles » au sens de celle-ci.

42      Tout d’abord, il convient de constater que, ainsi que la Commission le fait remarquer à juste titre, la réglementation invoquée par la République italienne à l’appui du premier moyen inclut des textes qui n’étaient pas applicables ratione temporis au cas d’espèce, à savoir les règlements nos 1258/1999 et 1290/2005. En effet, la décision attaquée, dans la mesure où elle porte sur la correction financière contestée dans le cadre de ce moyen, a été adoptée sur le fondement de l’article 52 du règlement no 1306/2013, cette correction financière ayant été appliquée à des dépenses déclarées par l’organisme payeur pour l’exercice financier 2016. À cet égard, il y a lieu de relever que le règlement no 1258/1999 a été abrogé par le règlement no 1290/2005, entré en vigueur le 18 août 2005, et, en vertu de l’article 47, paragraphe 1, second alinéa, de ce dernier règlement, est demeuré applicable jusqu’au 15 octobre 2006 pour les dépenses effectuées par les États membres. Le règlement no 1290/2005 a lui-même été abrogé, à partir du 1er janvier 2014, par le règlement no 1306/2013. Si, à titre dérogatoire, l’article 31 du règlement no 1290/2005 n’a pas été abrogé à cette dernière date, il n’a toutefois, en vertu de l’article 119, paragraphe 1, second alinéa, du règlement no 1306/2013, continué de s’appliquer que jusqu’au 31 décembre 2014.

43      Ensuite, s’agissant de l’allégation de la République italienne selon laquelle l’exclusion de dépenses du financement de l’Union est subordonnée à l’existence d’un préjudice certain et réel pour le budget de celle-ci, il convient de comprendre la référence qu’elle fait, dans ce contexte, de manière générale, à la « législation mentionnée dans le libellé du présent moyen » et, de manière plus spécifique, à l’article 31, paragraphe 2, du règlement no 1290/2005 comme visant en réalité l’article 52, paragraphe 2, du règlement no 1306/2013, lequel était applicable ratione temporis au cas d’espèce. En effet, cette dernière disposition, dans la mesure où elle stipule, en ses première et deuxième phrases, que « [l]a Commission évalue les montants à exclure au vu, notamment, de l’importance de la non-conformité constatée [et] tient compte de la nature de l’infraction, ainsi que du préjudice financier causé à l’Union », reproduit presque à l’identique la première disposition.

44      Toutefois, cette allégation n’est pas fondée. En effet, ainsi que la Commission le rappelle à juste titre, il ressort de la jurisprudence, que l’article 31, paragraphe 2, du règlement no 1290/2005 n’instaure pas une condition subordonnant chaque correction à la démonstration d’un préjudice réel subi par le fonds concerné (voir arrêt du 16 décembre 2015, Grèce/Commission, T‑241/13, EU:T:2015:982, point 44 et jurisprudence citée). Eu égard à cette jurisprudence, qui est pleinement transposable à l’article 52, paragraphe 2, du règlement no 1306/2013, il y a lieu de constater que l’invocation de cette dernière disposition et de la prétendue absence d’un préjudice réel subi par le fonds concerné n’est pas susceptible de remettre en cause les conclusions de la Commission, qui reposent sur l’absence de conformité des dépenses effectuées avec les règles de l’Union.

45      À cet égard, il ressort du dossier et il est constant entre les parties que l’ARCEA avait payé à la commune de Vallelonga les dépenses faisant l’objet de la demande de paiement no 54750617406 et les avait ensuite déclarées au Feader au titre de l’exercice financier 2016 en vue de leur remboursement, et ce sans avoir reçu les pièces justificatives s’y rapportant et, partant, sans avoir vérifié que cette demande correspondait à un paiement qui avait été effectivement réalisé par le bénéficiaire. Du reste, ce paiement n’avait pas encore été effectué à ce moment-là.

46      Ce faisant, l’ARCEA a commis un manquement manifeste à l’obligation qui lui incombait, conformément à l’article 74, paragraphe 1, du règlement no 1306/2013, de vérifier si les conditions d’éligibilité des dépenses étaient remplies. Plus particulièrement, il a méconnu l’article 48, paragraphe 3, sous b), du règlement d’exécution (UE) no 809/2014 de la Commission, du 17 juillet 2014, établissant les modalités d’application du règlement no 1306/2013 en ce qui concerne le système intégré de gestion et de contrôle, les mesures en faveur du développement rural et la conditionnalité (JO 2014, L 227, p. 69), qui dispose notamment que « [l]es contrôles administratifs concernant les demandes de paiement comprennent notamment, et pour autant que cela soit approprié pour la demande en question, une vérification portant sur […] les coûts engagés et les paiements effectués ».

47      Ce manquement significatif de l’organisme payeur à l’application de règles de l’Union, qui traduit des lacunes dans le système de contrôle des dépenses déclarées au titre du Feader, a exposé ce dernier à un risque réel de préjudice financier ou d’irrégularité et justifie, conformément à une jurisprudence constante, l’application d’une correction financière (voir, en ce sens, arrêt du 6 décembre 2018, Portugal/Commission, T‑22/17, EU:T:2018:881, point 62 et jurisprudence citée). Le constat de lacunes dans les contrôles engendre, de manière objective, un risque financier pour le fonds puisque, en présence de telles lacunes, il ne saurait être exclu que des aides aient pu être versées à tort. Dans ce contexte, il y a lieu de faire remarquer qu’il ressort du rapport de synthèse que l’organisme de certification a relevé que, lorsque les bénéficiaires étaient des organismes publics, l’organisme payeur et ses organismes délégués n’avaient pas toujours appliqué correctement les procédures d’apurement pour démontrer que les dépenses avaient été effectuées et payées.

48      Contrairement à ce que laisse entendre la République italienne, il ne saurait être considéré que, en ayant engagé à l’encontre de la commune de Villalonga, le 16 janvier 2017, une procédure de recouvrement des montants indûment versés, l’ARCEA a pris les mesures correctives nécessaires pour réduire, voire éliminer, tout risque financier pour le Feader. En effet, comme le relève à juste titre la Commission, cette procédure a été engagée seulement après que l’ARCEA avait déjà été informée, par l’organisme de certification, lors de la procédure d’apurement des comptes, de l’absence des pièces justificatives, à savoir alors que les dépenses avaient déjà été déclarées au titre de l’exercice financier 2016 et que le risque de perte financière pour le Feader découlant du défaut de vérification était déjà intervenu. À cet égard, il convient de constater que l’allégation formulée par l’ARCEA lors de la réunion bilatérale du 4 octobre 2017, et reprise par la République italienne dans ses écritures, selon laquelle cet organisme avait détecté l’absence des pièces justificatives avant que l’organisme de certification ne la lui signale n’est aucunement étayée.

49      De même, comme l’avance à juste titre la Commission, le seul fait que, finalement, bien que tardivement, le bénéficiaire de l’aide s’est acquitté des factures relatives aux dépenses en cause et a communiqué les pièces justificatives qui s’y rapportaient à l’ARCEA ne remet pas en cause le constat selon lequel le système de contrôle des dépenses déclarées au titre du Feader mis en place par cette dernière présentait des lacunes rendant possible que des montants soient indûment payés. S’agissant de ce dernier point, il est à noter que l’ARCEA, en ayant engagé une procédure de recouvrement desdites dépenses auprès de la commune de Villalonga, reconnaît nécessairement que celles-ci avaient été indûment payées à cette dernière. Lors de la procédure d’apurement de conformité, les autorités italiennes ont contesté l’existence d’une quelconque erreur financière en l’espèce, mais n’ont pas démontré qu’aucune violation des règles de l’Union n’avait été commise, se bornant à tenter de justifier cette violation en invoquant des circonstances, au demeurant non pertinentes, liées à la mise en liquidation du bénéficiaire initial de l’aide (voir point 51 ci-après).

50      En réponse à l’allégation de la République italienne selon laquelle l’importance accordée par la Commission à la production tardive des pièces justificatives est contraire au règlement no 1290/2005 ainsi qu’au principe de proportionnalité, il suffit de rappeler que, comme la Commission le souligne à juste titre, la conduite qui constitue un manquement aux règles de l’Union applicables en l’espèce, n’est pas cette production tardive, mais le fait que l’ARCEA a payé les dépenses en cause et les a déclarées au Feader en vue de leur remboursement alors qu’elle n’avait pas reçu, ni a fortiori vérifié, les pièces justificatives qui s’y rapportaient.

51      Par ailleurs, s’agissant de l’argument de la République italienne tiré de ce que la Commission n’a pas tenu compte des « circonstances exceptionnelles » qui auraient été à l’origine de la communication tardive des pièces justificatives par l’entité bénéficiaire, et ce en violation de l’article 2, paragraphe 2, du règlement no 1306/2013, celui-ci doit être rejeté comme étant non fondé. Ainsi que la Commission l’avance à juste titre, les circonstances invoquées par la République italienne, à savoir, en substance, des contretemps de nature administrative liés à la mise en liquidation de la communauté de montagne des Serres calabraises, n’ont aucun lien causal direct avec le fait que l’ARCEA, sans avoir pris connaissance des pièces justificatives relatives aux dépenses faisant l’objet de la demande de paiement présentée par la commune de Villalonga, et donc en violation de l’obligation de vérification qui lui incombait, a payé ces dépenses et les a déclarées au Feader. Ces circonstances pourraient, tout au plus, justifier le retard pris par ladite commune pour régler les factures relatives aux dépenses en cause et envoyer ces pièces à l’ARCEA, mais en aucun cas l’insuffisance du contrôle opéré par cet organisme payeur. Avant toute autre action, ce dernier aurait dû intervenir auprès de cette commune dès réception de sa demande de paiement et lui réclamer la preuve du règlement des dépenses revendiquées. En outre, la survenance de contretemps administratifs de nature interne ne saurait constituer une circonstance exceptionnelle au sens de l’article 2, paragraphe 2, du règlement no 1306/2013, les circonstances énoncées de façon non exhaustive à cette disposition présentant un caractère exceptionnel bien plus élevé.

52      Dans le même contexte, c’est en vain que la République italienne prétend que le retard dans la présentation des pièces justificatives, résultant des circonstances qu’elle invoque, doit être qualifié de raisonnable au sens du considérant 26 du règlement no 1290/2005. Outre le fait que, comme cela a été indiqué au point 42 ci-dessus, ce règlement n’était pas applicable ratione temporis au cas d’espèce, force est de constater que ni ce considérant ni le considérant correspondant du règlement no 1306/2013, à savoir son considérant 37, ne contiennent une référence au caractère raisonnable du retard dans la présentation des pièces justificatives de dépenses à la charge du Feader. Ces considérants portent sur une question totalement différente, à savoir celle de l’instauration d’un système de responsabilité financière permettant de répartir de manière équitable entre l’Union et l’État membre concerné les conséquences financières du non-recouvrement de certains montants en raison d’irrégularités commises lors du recouvrement de montants versés par le FEAGA.

53      Enfin, la République italienne ne saurait utilement tirer argument de la décision d’exécution C(2019) 1065 final. À cet égard, il convient de relever que, comme le prévoit l’article 51 du règlement no 1306/2013, une décision d’apurement des comptes adoptée sur la base de cette disposition l’est sans préjudice des décisions que la Commission pourrait prendre ultérieurement, sur le fondement de l’article 52 du même règlement, en vue d’exclure du financement de l’Union les dépenses qui n’auraient pas été effectuées conformément au droit de celle-ci. Ainsi, en l’espèce, comme cela ressort de son article 2, lu conjointement avec son annexe II, la décision d’exécution (UE) 2017/926 de la Commission, du 29 mai 2017, relative à l’apurement des comptes des organismes payeurs des États membres en ce qui concerne les dépenses financées par le Feader pour l’exercice financier 2016 (JO 2017, L 140, p. 15), a expressément exclu de cet apurement les comptes, notamment, de l’ARCEA, en prévoyant qu’ils feraient l’objet d’une décision d’apurement ultérieure. Ce n’est qu’après avoir appliqué la correction financière contestée dans le cadre du présent moyen que la Commission a procédé à l’apurement des comptes de l’ARCEA pour cet exercice financier avec l’adoption de la décision d’exécution C(2019) 1065 final.

54      Il résulte des considérations qui précèdent que c’est à bon droit, et donc sans commettre d’abus de pouvoir comme le prétend la République italienne, que la Commission a appliqué en l’espèce une correction financière, d’un montant brut de 766 522,66 euros (soit un montant net de 695 869,32 euros), à certaines dépenses déclarées par l’ARCEA pour l’exercice financier 2016 au motif que cet organisme n’avait pas respecté les règles de l’Union applicables (voir point 46 ci-dessus) et, plus particulièrement, avait manqué à son obligation de vérifier les dépenses déclarées.

55      Ces conclusions ne sauraient être remises en cause par les principes généraux de droit de l’Union invoqués par la République italienne.

56      Premièrement, s’agissant du grief tiré de la violation du principe de proportionnalité, consacré par l’article 5, paragraphe 4, TUE, il a été rejeté au point 50 ci-dessus comme étant non fondé.

57      Deuxièmement, s’agissant du grief tiré de la violation du principe de protection de la confiance légitime, il doit, conformément à la jurisprudence citée au point 33 ci-dessus, être écarté comme étant irrecevable, la République italienne se limitant à invoquer, de manière générale et abstraite, ce principe et n’assortissant ce grief d’aucun argument spécifique.

58      Troisièmement, s’agissant du grief tiré de la violation de l’obligation de motivation, il convient de relever que la République italienne n’indique pas en quoi la décision attaquée, dans la mesure où elle concerne la correction financière faisant l’objet du présent moyen, serait entachée d’un quelconque vice de motivation.

59      En tout état de cause, force est de constater que cette décision est motivée à suffisance de droit. En effet, dès lors que, selon la jurisprudence, la motivation exigée à l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et faire apparaître d’une façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et au juge de l’Union d’exercer son contrôle (voir arrêt du 12 septembre 2012, Grèce/Commission, T‑356/08, non publié, EU:T:2012:418, point 113 et jurisprudence citée), il doit être considéré que, au vu de l’ensemble des éléments portés à sa connaissance au cours de la procédure administrative et donc du contexte ayant mené à l’adoption de la décision attaquée, la République italienne connaissait les éléments ayant fondé la position de la Commission telle qu’elle figure dans le rapport de synthèse et dans cette décision.

60      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le premier moyen doit être rejeté.

 Sur le second moyen, relatif à la correction financière établie à la suite de l’enquête portant la référence FA/2008/067/IT

61      La République italienne fait valoir que, en appliquant une correction financière, d’un montant total de 362 017,10 euros (se décomposant en un montant de 31 246,05 euros et en un montant de 330 771,05 euros, lui-même se décomposant en un montant de 305 122,74 euros et en un montant de 25 648,31 euros ; voir point 21 ci-dessus), à certaines dépenses déclarées par l’ARPEA pour l’exercice financier 2007, à la suite de l’enquête portant la référence FA/2008/067/IT, la Commission a commis une violation du règlement no 1258/1999, du règlement no 1290/2005, de l’article 5 TUE, du principe de proportionnalité, du principe de protection de la confiance légitime et de l’obligation de motivation ainsi qu’un abus de pouvoir.

62      La Commission critique le manque de clarté et de précision de l’argumentation développée par la République italienne à l’appui du second moyen et considère que celui-ci doit, en tout état de cause, être rejeté comme étant non fondé dans son ensemble.

63      En premier lieu, s’agissant du montant de 31 246,05 euros, il ressort du dossier que la Commission l’a exclu du financement de l’Union au motif que l’ARPEA avait méconnu la procédure visée au point 2, sous le titre B « Procédures de paiement », de l’annexe I du règlement no 885/2006.

64      L’article 1er, paragraphe 1, du règlement no 885/2006 prévoit que, pour être agréé, tout organisme payeur doit disposer d’une structure administrative et d’un système de contrôle interne satisfaisant aux conditions fixées à l’annexe I de ce règlement, en matière notamment d’activités de contrôle. À cet égard, s’agissant des procédures de paiement, le point 2, sous le titre B « Procédures de paiement », de l’annexe I du règlement no 885/2006 dispose :

« L’organisme payeur adopte les procédures qui s’imposent pour veiller à ce que les paiements soient effectués exclusivement sur des comptes bancaires au nom du demandeur ou de son cessionnaire. Le paiement est exécuté par le banquier de l’organisme ou, s’il y a lieu, par un service trésorier du gouvernement, dans un délai de cinq jours ouvrables à compter de la date d’imputation au FEAGA ou au Feader. Toutefois, pour les exercices financiers 2007 et 2008, les paiements peuvent également être effectués par ordre de paiement. Des procédures sont adoptées de manière à faire en sorte que tous les paiements pour lesquels les virements ne sont pas effectués soient crédités à nouveau au profit des fonds. Aucun paiement n’est effectué au comptant […] ».

65      En l’espèce, la décision attaquée, dans la mesure où elle exclut le montant de 31 246,05 euros du financement de l’Union, se fonde sur le fait que l’ARPEA avait déclaré ce montant au FEAGA pour l’exercice financier 2007, mais que les paiements correspondants n’avaient pu être encaissés par leurs bénéficiaires au cours de cet exercice financier en raison de certaines circonstances contingentes et avaient été réémis à ces derniers en juin 2008, sans avoir au préalable été crédités de nouveau au profit du FEAGA, comme cela est requis par le point 2, sous le titre B « Procédures de paiement », de l’annexe I du règlement no 885/2006.

66      À cet égard, la République italienne prétend que la Commission a commis un abus de pouvoir et une violation du principe de protection de la confiance légitime, « dans la mesure où elle n’a pas tenu compte de [ce montant,] bien que les paiements aux bénéficiaires concernés aient été effectués après l’apurement des comptes de l’exercice [financier] 2007 (en effet, la circonstance que les paiements n’avaient pas fait l’objet de remarques à ce stade avait créé pour l’entité en cause des attentes légitimes quant à la régularité des dépenses correspondantes) ».

67      La République italienne ajoute que, en l’absence de préjudice réel pour le budget de l’Union, il y a lieu de considérer que la « législation et les principes réglementaires susmentionnés », qui viseraient précisément à éviter de tels préjudices, n’ont pas été appliqués correctement.

68      Dans la réplique, la République italienne, se référant, sans toutefois le communiquer, à un tableau intitulé « Tableau 104 » et qu’elle date de mai 2008, affirme que le montant de 31 246,05 euros a été crédité de nouveau au profit du FEAGA, avec du retard, mais avant l’opération de réémission des paiements aux bénéficiaires.

69      La Commission souligne que sa décision d’écarter le montant de 31 246,05 euros du financement de l’Union n’est pas motivée par le fait que les paiements correspondants n’avaient été effectués qu’après l’apurement des comptes de l’exercice 2007, mais par la méconnaissance de l’obligation de garantir que les paiements qui n’avaient pas fait l’objet d’un virement soient de nouveau portés au crédit du fonds.

70      La Commission ajoute que, contrairement à ce qu’affirme la République italienne, c’est au cours de la procédure d’apurement des comptes de l’exercice financier 2007 qu’elle a relevé que les paiements en cause n’avaient pas été crédités de nouveau en faveur du fonds et a proposé une correction financière.

71      Enfin, la Commission conteste que le tableau en cause, qu’elle joint à la duplique, étaye l’allégation de la République italienne selon laquelle le montant de 31 246,05 euros a été crédité de nouveau au profit du FEAGA avant la réémission des paiements en juin 2008.

72      Il convient de relever que, lors de la procédure d’apurement de conformité, dans leurs observations du 30 juin 2008 (voir point 15 ci-dessus), les autorités italiennes ont notamment déclaré :

« Le montant de 55 367 euros […] n’a pas été crédité aux fonds communautaires mais a été retenu en vue d’un virement ultérieur au[x] bénéficiaire[s] étant donné qu’il ne s’agissait ni de créances ni d’irrégularités, mais de sommes revenant aux ayants droit qui, en raison de retards dans l’acheminement du courrier (expédition de chèques bancaires) ou de coordonnées bancaires erronées (virements) n’ont pas été encaissées en temps utile par le[s] bénéficiaire[s]. À ce jour, il ressort que la somme de 31 246,05 euros a été transférée aux bénéficiaires. Le reste a été crédité de nouveau aux fonds communautaires concernés. »

73      Il y a lieu de relever également qu’il ressort du procès-verbal de la réunion bilatérale que, selon les indications des autorités italiennes, le montant de 31 246,05 euros n’a pas été crédité de nouveau au profit du fonds parce que les paiements s’y rapportant ont été versés à leurs bénéficiaires en juin 2008. De même, dans la lettre de la Commission du 20 décembre 2012 (voir point 21 ci-dessus), il est notamment fait état de ce que, lors de la réunion bilatérale, il avait été confirmé que le montant de 31 246,05 euros n’avait pas été crédité de nouveau au fonds, à la différence de celui de 23 617,89 euros, mais avait fait l’objet de nouveaux ordres de paiement, en juin 2008, en faveur des bénéficiaires concernés.

74      Contrairement à ce que prétend la République italienne, le tableau en cause ne démontre nullement que le montant de 31 246,05 euros a été crédité de nouveau au profit du FEAGA avant l’opération de réémission des paiements aux bénéficiaires. Outre le fait que cette allégation est directement contredite par les éléments exposés au point 73 ci-dessus, force est de constater que, comme le fait correctement remarquer la Commission, ce montant n’apparaît pas comme tel dans ce tableau, qui présente une série de montants répartis dans quatre colonnes, ni ne peut se calculer à partir de ces derniers montants.

75      Il résulte donc des considérations qui précèdent que, en l’espèce, l’ARPEA a méconnu le point 2, sous le titre B « Procédures de paiement », de l’annexe I du règlement no 885/2006 dans la mesure où il y est stipulé que, lorsque des paiements ne sont pas effectués à leurs bénéficiaires au cours de l’exercice financier pour lequel ils ont été déclarés, ils doivent être crédités de nouveau au profit du fonds concerné. Il n’est dès lors pas admis que les montants correspondants soient simplement retenus par l’organisme payeur, pour être versés aux bénéficiaires lors d’un exercice financier ultérieur. Comme le souligne à juste titre la Commission dans ses écritures, il s’agit là d’une règle de base en matière de financements de l’Union dont, comme en l’occurrence, la gestion est partagée entre les États membres et l’Union, et qui veut qu’il n’est possible de réclamer au fonds concerné, pour un exercice financier donné, que les paiements qui ont été effectivement exécutés en faveur de leurs bénéficiaires au cours du même exercice.

76      Il convient donc de conclure que c’est à bon droit que la Commission a exclu du financement de l’Union le montant de 31 246,05 euros.

77      C’est en vain que la République italienne tente de remettre en cause cette conclusion en faisant valoir que la Commission a commis un abus de pouvoir et une violation du principe de protection de la confiance légitime.

78      En effet, d’une part, la circonstance que les montants concernés ont été effectivement versés aux bénéficiaires au cours de l’exercice financier 2008 n’a pas pour effet d’annihiler la violation des règles de l’Union constatée au point 75 ci-dessus et qui tient au fait que l’ARPEA a déclaré au FEAGA, pour l’exercice financier 2007, des paiements qui, en réalité, ont été effectués au cours de l’exercice financier suivant sans avoir été préalablement crédités de nouveau au profit de ce fonds.

79      D’autre part, s’agissant du grief tiré d’une violation du principe de protection de la confiance légitime, force est de constater qu’il manque en fait. En effet, comme le relève très justement la Commission dans ses écritures et comme il ressort du dossier, c’est précisément lors de la procédure d’apurement des comptes de l’exercice financier 2007 que cette dernière, sur la base du rapport de l’organisme de certification, a constaté que l’ARPEA avait commis le manquement en cause, à savoir n’avait pas crédité de nouveau au profit du FEAGA le montant correspondant aux paiements qui avaient échoué. De plus, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le droit de se prévaloir de ce principe appartient à tout justiciable dans le chef duquel une institution de l’Union, en lui fournissant des assurances précises, a fait naître à son égard des espérances fondées. Constituent de telles assurances, quelle que soit la forme sous laquelle ils sont communiqués, des renseignements précis, inconditionnels et concordants. En revanche, nul ne peut invoquer une violation de ce principe en l’absence desdites assurances précises. Les assurances données doivent, en outre, être conformes aux normes applicables (voir arrêts du 18 juillet 2007, AER/Karatzoglou, C‑213/06 P, EU:C:2007:453, point 33 et jurisprudence citée, et du 16 décembre 2010, Kahla Thüringen Porzellan/Commission, C‑537/08 P, EU:C:2010:769, point 63 et jurisprudence citée). Or, la prétendue absence de remarques de la part de la Commission pendant la procédure d’apurement des comptes de l’exercice financier 2007 ne saurait, en tout état de cause, constituer une assurance précise, inconditionnelle et concordante au sens de cette jurisprudence.

80      Quant à l’argument de la République italienne tiré de ce qu’aucun préjudice réel n’a été subi par le fonds, il doit être rejeté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 44 ci-dessus.

81      En deuxième lieu, s’agissant du montant de 305 122,74 euros, celui-ci s’inscrit dans le montant de 428 141,61 euros que la Commission avait initialement retenu dans sa lettre du 28 mars 2008 (voir point 14 ci-dessus). Ce dernier montant résultait de l’addition de différents montants figurant sur une liste de « dettes potentielles » que l’organisme payeur avait transmise pour information à l’organisme de certification pour l’exercice financier 2007. L’organisme payeur était toutefois d’avis que ces derniers montants ne devaient pas être mentionnés en tant que « montants à récupérer » à la fin de l’exercice financier dans les tableaux de l’annexe III du règlement no 885/2006 dans la mesure où la procédure administrative d’établissement des créances correspondantes était encore en cours. En d’autres termes, il estimait que, les montants qui seraient éventuellement à récupérer n’étant pas encore déterminés au moment de la présentation de ses comptes annuels pour cet exercice financier, ils ne pouvaient être considérés comme étant des « montants à recouvrer » au sens de l’article 6, sous f), du règlement no 885/2006. À la suite d’informations communiquées par les autorités italiennes lors de la réunion bilatérale ainsi que par leur lettre du 5 octobre 2011 et leur courriel du 1er juin 2012 (voir point 20 ci-dessus), la Commission avait finalement constaté que certains des montants figurant dans la liste des dettes potentielles, à hauteur de 97 370,56 euros, avaient été inscrits dans les tableaux pertinents ou avaient été récupérés. Elle a estimé que tel n’était cependant pas le cas pour le montant de 25 648,31 euros et pour le montant de 305 122,74 euros, soit un total de 330 771,05 euros.

82      Le montant de 305 122,74 euros concerne une contribution qui avait été versée en octobre 2003 pour la réalisation d’un nouvel équipement productif à un bénéficiaire unique, Cantina Viticoltori dell’Acquese Società Agricola Cooperativa, contre lequel une procédure de mise en liquidation administrative forcée avait été ouverte par décret du Ministero dello Sviluppo economico (ministère du Développement économique italien) du 3 avril 2007. Par lettre du 26 juillet 2007, la Région du Piémont (Italie) avait indiqué aux commissaires liquidateurs et à l’ARPEA que, s’il devait apparaître que Cantina Viticoltori dell’Acquese Società Agricola Cooperativa ne remplissait plus les conditions requises pour bénéficier de cette contribution, celle-ci serait révoquée. Le 28 janvier 2008, ladite Région avait également fait part aux commissaires liquidateurs de son intention de figurer parmi les créanciers privilégiés dans l’hypothèse où il aurait été nécessaire de procéder à cette révocation. Ultérieurement, les commissaires liquidateurs avaient répondu à cette Région que l’activité productive concernant le projet financé se poursuivait avec succès. C’est ainsi que la République italienne souligne que les conditions d’octroi de la contribution en cause ont toujours continué à être remplies, ce que la Commission ne conteste pas.

83      Dans la décision attaquée, la Commission a exclu le montant de 305 122,74 euros du financement de l’Union au motif que, d’une part, comme elle l’a précisé dans sa réponse aux questions écrites posées par le Tribunal au titre des mesures d’organisation de la procédure, il n’avait pas fait l’objet d’un premier acte de constat administratif ou judiciaire au sens de l’article 35 du règlement no 1290/2005 et, d’autre part, il n’avait pas été inscrit comme montant à récupérer dans les tableaux de l’annexe III du règlement no 885/2006. Cette correction financière a été imposée au titre de l’article 32, paragraphe 4, sous b), du règlement no 1290/2005.

84      La République italienne fait valoir que, en excluant ce montant du financement de l’Union, la Commission a violé l’article 31, paragraphe 2, du règlement no 1290/2005, l’obligation de motivation et le principe de proportionnalité. En effet, « il [ressortirait] clairement des pièces fournies que la dépense de 305 122,74 euros a été effectuée conformément à la législation de l’Union, étant donné que tous les engagements prévus dans l’avis relatif à la mesure financée ont été pleinement respectés », et aucun préjudice réel n’aurait été causé au budget de l’Union.

85      Par ailleurs, la République italienne considère que la Commission ne saurait lui reprocher, sur le fondement de l’article 32, paragraphe 4, du règlement no 1290/2005, de ne pas avoir agi rapidement pour recouvrer la créance découlant de la contribution versée. Elle expose que, si aucune procédure de recouvrement n’a été engagée en l’espèce, « c’est […] parce que les conditions de base aux fins de l’ouverture de procédures, à savoir le non-respect des engagements et l’existence effective de dettes, n’étaient pas réunies ». Elle souligne, dans ce contexte, que la Région du Piémont avait fait part aux commissaires liquidateurs de son intention de faire partie des créanciers privilégiés dans l’hypothèse où elle devrait révoquer celle-ci en raison du non-respect des conditions d’octroi de cette contribution.

86      Dans ses observations sur les réponses de la Commission aux questions écrites posées par le Tribunal, la République italienne soutient qu’il ressort de la définition de la notion de « premier acte de constat administratif ou judiciaire » figurant à l’article 35 du règlement no 1290/2005 que l’établissement d’un tel acte requiert l’existence d’une « irrégularité » fondée sur des « faits concrets » et ne se justifie donc pas en présence, comme en l’espèce, d’une simple irrégularité éventuelle ou d’un simple soupçon d’irrégularité. Par ailleurs, elle fait valoir qu’elle n’était pas tenue d’inscrire le montant en cause comme montant à récupérer dans les tableaux de l’annexe III du règlement no 885/2006, puisque, au moment de la présentation des comptes annuels pour l’exercice financier 2007, ce montant ne pouvait être considéré comme étant un montant à recouvrer au sens de l’article 6, sous f), de ce dernier règlement.

87      Tout d’abord, la Commission souligne que l’exclusion du montant de 305 122,74 euros du financement de l’Union n’est pas motivée par l’existence d’irrégularités dans le versement de la contribution à son bénéficiaire, mais par le fait que, bien que ce dernier ait fait l’objet d’une procédure de liquidation administrative forcée en 2007, cette contribution n’avait pas fait l’objet d’un premier acte de constat administratif ou judiciaire, ni n’avait été inscrite comme montant à récupérer dans les tableaux de l’annexe III du règlement no 885/2006 au moment de l’ouverture de cette procédure. Ladite contribution, qui avait été signalée en tant que dette potentielle par l’organisme payeur, n’aurait donc pas fait l’objet d’un suivi diligent de la part des autorités italiennes. L’inscription dans ces tableaux aurait notamment prévenu tout risque de retard dans le recouvrement du montant en cause au cas où il se serait transformé en une dette réelle, sans pour autant empêcher les autorités italiennes de demander la suppression de la dette potentielle une fois l’activité de suivi conclue avec succès. La circonstance que le bénéficiaire ait poursuivi l’activité financée par la contribution, en respectant les conditions requises pour son versement, et, par conséquent, qu’aucune activité de recouvrement n’ait été nécessaire en l’espèce n’aurait aucune pertinence en ce qui concerne la violation de l’obligation de diligence incombant aux organismes payeurs lors du suivi des dettes potentielles.

88      Dans ses réponses aux questions écrites du Tribunal, la Commission rappelle l’obligation générale de diligence s’imposant aux États membres dans le domaine du financement de la politique agricole commune et trouvant son expression, notamment, à l’article 9, paragraphe 1, sous a), du règlement no 1290/2005. Plus particulièrement, il incomberait aux États membres de gérer avec diligence le système par lequel les organismes payeurs agréés effectuent les paiements au titre de la politique agricole commune et, notamment, de s’assurer de la réalité et de la régularité des opérations financées par le FEAGA et le Feader, de prévenir et poursuivre les irrégularités et de récupérer les sommes perdues à la suite d’irrégularités ou de négligences. Cela impliquerait que les organismes payeurs sont tenus de vérifier que les conditions d’éligibilité pour l’octroi des subventions sont pleinement respectées, de contrôler que les subventions sont correctement versées et de détecter d’éventuelles irrégularités, qui pourraient rendre nécessaire l’ouverture d’une procédure de recouvrement, auprès des bénéficiaires, des fonds indûment versés. La Commission, ensuite, en déduit que, si une irrégularité survient dans le cadre d’un paiement, les organismes payeurs sont tenus de la consigner dans un premier acte de constat administratif ou judiciaire au sens de l’article 35 dudit règlement. Se fondant sur le fait que cet acte est défini par cette disposition comme constituant « une première évaluation » et que la conclusion quant à l’existence d’une irrégularité peut être révisée ou retirée ultérieurement, elle soutient que cette obligation s’applique même dans l’hypothèse d’un « soupçon d’irrégularité » ou d’une « irrégularité potentielle ». Enfin, elle affirme que, à la suite de l’établissement d’un premier acte de constat administratif ou judiciaire, l’organisme payeur est tenu, dans le cadre des obligations d’information lui incombant au titre de la procédure d’apurement en vertu de l’article 8, paragraphe 1, sous c), iii), de ce règlement, de présenter, avec les comptes annuels, les tableaux de l’annexe III du règlement no 885/2006. Il conviendrait également d’inscrire dans ces tableaux les dettes potentielles, une fois que le premier acte de constat administratif ou judiciaire correspondant a été établi.

89      Ensuite, la Commission affirme que, étant donné que plus de quatre ans s’étaient écoulés après le signalement de l’irrégularité, que l’enquête concernant celle-ci ne s’était pas conclue avant la fin de cette période et qu’aucune décision d’ouverture de la procédure de recouvrement n’avait été adoptée, elle a considéré que le montant en cause devait être proposé pour l’exclusion du financement de l’Union conformément aux dispositions de l’article 32, paragraphe 4, sous b), du règlement no 1290/2005.

90      Enfin, s’agissant de la prétendue violation de l’article 31, paragraphe 2, du règlement no 1290/2005, la Commission répète qu’il ressort de la jurisprudence que cette disposition n’instaure pas une condition subordonnant chaque correction à la démonstration d’un préjudice réel subi par le fonds concerné.

91      L’article 32, paragraphe 4, sous b), du règlement no 1290/2005, qui figure au chapitre 2, intitulé « Irrégularités », de ce règlement, prévoit notamment que, « [a]près avoir suivi la procédure prévue à l’article 31, paragraphe 3, la Commission peut décider de porter les sommes à récupérer à la charge de l’État membre […] lorsque le premier acte de constat administratif ou judiciaire n’a pas été établi ou a été établi avec un retard susceptible de mettre en péril le recouvrement […] ».

92      L’article 35 du règlement no 1290/2005 définit le « premier acte de constat administratif ou judiciaire » comme étant « la première évaluation par écrit d’une autorité compétente, qu’elle soit administrative ou judiciaire, concluant, sur la base de faits concrets, à l’existence d’une irrégularité, sans préjudice de la possibilité que cette conclusion soit à réviser ou à retirer ultérieurement à la suite des développements de la procédure administrative ou judiciaire ».

93      L’article 6 du règlement no 885/2006, intitulé « Contenu des comptes annuels », dans sa version originale, prévoit, sous f), que les comptes annuels visés à l’article 8, paragraphe 1, sous c), iii), du règlement no 1290/2005, à savoir ceux des organismes payeurs agréés, doivent comprendre « le tableau des montants à recouvrer pour la fin de l’exercice, établi conformément au modèle figurant à l’annexe III ». Cette annexe, intitulée « Modèles des tableaux à utiliser pour indiquer les montants à récupérer », présente différents modèles de tableaux récapitulatifs des procédures de recouvrement liées à des irrégularités affectant le FEAGA et le Feader au cours de l’exercice financier écoulé et qui doivent être utilisés pour fournir, pour chaque organisme payeur, notamment, les montants récupérés, les montants corrigés et les montants à récupérer.

94      En l’espèce, la Commission n’était pas fondée à reprocher à l’organisme payeur de ne pas avoir établi de premier acte de constat administratif ou judiciaire concernant le montant de 305 122,74 euros, figurant dans la liste des dettes potentielles qu’il avait transmise pour information à l’organisme de certification.

95      Plus particulièrement, est erronée la thèse de la Commission selon laquelle un tel acte doit être établi même en présence, comme en l’espèce (voir point 102 ci-après), d’une simple irrégularité potentielle ou d’un simple soupçon d’irrégularité, lesquels ne peuvent, à leur tour, donner lieu qu’à une dette purement potentielle.

96      En effet, il résulte de la définition de la notion de « premier acte de constat administratif ou judiciaire » prévue à l’article 35 du règlement no 1290/2005 qu’un tel acte présuppose, notamment, qu’il soit conclu, « sur la base de faits concrets », à l’« existence » d’une irrégularité. Or, l’emploi du terme « existence » implique nécessairement la réalité d’une irrégularité par opposition à la simple potentialité de celle-ci.

97      C’est en vain que, pour appuyer sa thèse, la Commission avance que le premier acte de constat administratif ou judiciaire ne constitue qu’une « première évaluation » des faits. En effet, même si les trois premiers éléments constitutifs de la notion de « premier acte de constat administratif ou judiciaire », à savoir une « première évaluation » « par écrit » « d’une autorité compétente », sont réunis, l’établissement d’un tel acte ne saurait être requis en l’absence de l’un des deux autres éléments constitutifs de cette notion, à savoir la constatation, « sur la base de faits concrets », de l’« existence d’une irrégularité ». En d’autres termes, si l’évaluation des faits opérée par l’autorité compétente ne permet pas de conclure à l’existence d’une irrégularité, il ne saurait, par définition, y avoir de premier acte de constat administratif ou judiciaire au sens de l’article 35 du règlement no 1290/2005.

98      Certes, la constatation de l’existence d’une irrégularité pourrait ultérieurement s’avérer incorrecte et devoir être révisée ou retirée, comme le précise l’article 35, in fine, du règlement no 1290/2005. Toutefois, c’est à tort que la Commission tire argument de cette précision pour soutenir qu’un premier acte de constat administratif ou judiciaire doit être établi même dans l’hypothèse d’une simple irrégularité potentielle. La première partie de cet article, qui contient la définition proprement dite de la notion de « premier acte de constat administratif ou judiciaire », est, en effet, indépendante de sa seconde partie, qui envisage cette possibilité de révision ou de retrait ultérieurs.

99      Si le législateur de l’Union avait entendu que les simples irrégularités potentielles fassent également l’objet d’un premier acte de constat administratif ou judiciaire, il l’aurait indiqué de façon expresse à l’article 35 du règlement no 1290/2005, dont le libellé aurait alors été formulé de manière différente, par exemple, en faisant référence à « l’existence ou l’éventualité d’une irrégularité ».

100    Or, le principe de sécurité juridique s’oppose à ce que la Commission, tout comme, au demeurant, le juge de l’Union, puisse élargir des obligations incombant aux États membres qui sont clairement et précisément définies par une réglementation de l’Union. Ainsi que la Cour l’a jugé au point 51 de son arrêt du 7 juillet 2005, Grèce/Commission (C‑5/03, EU:C:2005:426), le fait qu’une procédure soit perfectible ne justifie pas, en soi, une correction financière. Il doit exister une carence significative dans l’application des règles de l’Union explicites.

101    La Commission ne saurait non plus invoquer l’obligation générale de diligence s’imposant aux États membres en ce qui concerne le financement de la politique agricole commune pour étendre l’obligation d’établir un premier acte de constat administratif ou judiciaire à l’hypothèse d’une simple irrégularité potentielle. En particulier, est dénué de pertinence le renvoi qu’elle opère, dans l’une de ses réponses aux questions écrites du Tribunal, aux « paramètres généraux de diligence » indiqués par la Cour dans son arrêt du 11 octobre 1990, Italie/Commission (C‑34/89, EU:C:1990:353). En effet, dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, la Cour n’a pas eu recours à l’obligation de diligence pour créer une nouvelle obligation à l’égard des États membres, mais pour apprécier si, dans le cas d’espèce, les retards de quatre à dix ans pris par les autorités nationales compétentes dans l’engagement des procédures en répétition de sommes indûment payées constituaient une négligence au sens de l’article 8, paragraphe 2, du règlement (CEE) no 729/70 du Conseil, du 21 avril 1970, relatif au financement de la politique agricole commune (JO 1970, L 94, p. 13). L’obligation, pour les États membres, de prendre les mesures nécessaires pour assurer la récupération des sommes indûment payées était prévue de manière claire et inconditionnelle au paragraphe 1 du même article.

102    Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que la Commission a commis une erreur de droit en assimilant la seule possibilité d’une irrégularité à l’existence d’une irrégularité.

103    Or, en l’espèce, aucune irrégularité n’a pu être constatée. Il est incontestable qu’est susceptible de constituer une irrégularité le fait qu’une condition d’octroi d’une contribution cesse d’être remplie. L’article 1er, paragraphe 2, du règlement (CE, Euratom) no 2988/95 du Conseil, du 18 décembre 1995, relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes (JO 1995, L 312, p. 1), prévoit, en effet, qu'« [e]st constitutive d’une irrégularité toute violation d’une disposition du droit communautaire résultant d’un acte ou d’une omission d’un opérateur économique qui a ou aurait pour effet de porter préjudice au budget général des Communautés ou à des budgets gérés par celles-ci, soit par la diminution ou la suppression de recettes provenant des ressources propres perçues directement pour le compte des Communautés, soit par une dépense indue ». La République italienne elle-même, dans ses observations sur les réponses de la Commission aux questions écrites du Tribunal, reconnaît qu’« une irrégularité […] peut être constatée chaque fois que les conditions justifiant le financement ne sont pas remplies ou cessent d’être remplies, ou bien lorsque le bénéficiaire ne respecte pas les obligations qui lui incombent ».

104    Il n’en demeure pas moins que, en l’espèce, il est constant que les conditions d’octroi de la contribution en cause ont toujours été respectées par le bénéficiaire (voir point 82 ci-dessus), de sorte que, à aucun moment, il n’y a eu violation du droit de l’Union et, partant, aucune irrégularité n’est survenue en ce qui concerne cette contribution. Il convient d’ajouter que, comme le fait remarquer à juste titre la République italienne, la circonstance que le bénéficiaire d’une contribution fasse l’objet d’une procédure de mise en liquidation ne permet pas en soi de présumer l’existence d’une irrégularité lorsque, comme en l’occurrence, les projets financés continuent à être réalisés conformément aux conditions prévues. Cette seule circonstance ne saurait donc obliger les autorités nationales compétentes à établir un premier acte de constat administratif ou judiciaire.

105    Il ressort de l’ensemble des considérations qui précèdent que les autorités italiennes n’ont commis aucune violation du droit de l’Union en n’établissant pas de premier acte de constat administratif ou judiciaire en ce qui concerne la contribution d’un montant de 305 122,74 euros.

106    Partant, c’est également à tort que la Commission reproche à ces autorités de ne pas avoir inscrit ce montant en tant que « montant à récupérer » dans les tableaux de l’annexe III du règlement no 885/2006. En effet, selon sa propre argumentation (voir point 88 ci-dessus), l’obligation de procéder à une telle inscription est la conséquence de l’établissement d’un premier acte de constat administratif ou judiciaire en ce qui concerne le montant concerné.

107    Il convient donc de considérer que la Commission n’était pas fondée à imposer à la République italienne la correction financière d’un montant de 305 122,74 euros. Il s’ensuit que cette correction financière doit être annulée sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres arguments invoqués par la République italienne, à savoir ceux tenant à la prétendue violation de l’article 31, paragraphe 2, du règlement no 1290/2005 et de l’obligation de motivation (voir point 84 ci-dessus).

108    En troisième lieu, s’agissant du montant de 25 648,31 euros, celui-ci s’inscrit dans le montant de 428 141,61 euros que la Commission avait initialement retenu dans sa lettre du 28 mars 2008, avant de le réduire à 330 771,05 euros (voir points 14 et 81 ci-dessus). Le montant de 25 648,31 euros représente l’addition de sept montants que l’organisme payeur avait signalés comme correspondant à des dettes potentielles à l’organisme de certification pour l’exercice financier 2007, mais qu’il n’avait toutefois pas inscrits en tant que montants à récupérer dans les tableaux visés aux annexes III ou III bis du règlement no 885/2006, dans sa version résultant du règlement (CE) no 1233/2007 de la Commission, du 22 octobre 2007, modifiant le règlement no 885/2006 (JO 2007, L 279, p. 10). La Commission, considérant qu’une telle inscription s’imposait, a appliqué, au titre de l’article 32, paragraphe 4, sous b), du règlement no 1290/2005, une correction financière de 25 648,31 euros.

109    La République italienne reproduit, au point 41 de la requête, un tableau qui figurait dans sa lettre du 7 février 2013 au secrétariat de l’organe de conciliation, en se bornant à renvoyer aux arguments mentionnés au point 66 ci-dessus et à avancer que ce tableau « confirme pleinement les motifs invoqués pour justifier l’annulation de la décision au titre de la violation de la confiance légitime quant à la clôture du compte de 2007 et de l’illégalité pour ce qui est des mesures correctives prises ». Dans la réplique, elle précise que l’addition du montant en cause et de celui de 305 122,74 euros permet d’aboutir au montant de la correction financière totale de 330 771,05 euros auquel elle fait référence au point 40 de la requête.

110    La Commission rétorque que la République italienne n’avance aucun argument pour contester la correction financière de 25 648,31 euros. Elle affirme que, étant donné que la demande de conciliation des autorités italiennes avait été rejetée par l’organisme de conciliation au motif qu’elle concernait une correction d’un montant inférieur à la somme minimale d’un million d’euros, le tableau reproduit au point 41 de la requête n’avait jamais été notifié à ses services compétents et que, en tout état de cause, ce tableau confirme que, malgré l’existence de doutes quant au droit des bénéficiaires de recevoir les montants en cause, ceux-ci n’avaient jamais figuré dans les tableaux visés aux annexes III ou III bis du règlement no 885/2006.

111    Force est de constater que, comme le relève très justement la Commission, la République italienne n’avance aucun argument concret susceptible de remettre en cause le bien-fondé de l’application de la correction financière de 25 648,31 euros. Ce dernier montant n’est d’ailleurs même pas expressément mentionné dans les points de la requête consacrés au second moyen, et ne peut être décelé qu’en additionnant les différents montants figurant dans le tableau reproduit au point 41 de la requête, lequel, de surcroît, est présenté comme venant à l’appui de la contestation de la correction financière de 31 246,05 euros et omet de faire état de l’une des sept dettes potentielles concernées, s’élevant à 596,33 euros. Par ailleurs, la République italienne se contente de renvoyer, sans aucune explication, aux considérations reproduites au point 66 ci-dessus, qui, en outre, concernent la correction financière de 31 246,05 euros, adoptée par la Commission au motif de la méconnaissance du point 2, sous le titre B « Procédures de paiement », de l’annexe I du règlement no 885/2006, et non d’un défaut d’inscription dans les tableaux des annexes III ou III bis de ce règlement. Enfin, s’agissant du grief tiré de la violation du principe de protection de la confiance légitime, que la République italienne se borne à énoncer de manière abstraite, sans l’accompagner du moindre développement, il doit être écarté pour les motifs exposés aux points 33 et 34 ci-dessus.

112    Il s’ensuit que le second moyen doit être accueilli en tant qu’il concerne la correction financière d’un montant de 305 122,74 euros et rejeté pour le surplus.

113    Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que la décision attaquée doit être annulée dans la mesure où elle impose à la République italienne une correction financière d’un montant de 305 122,74 euros. Pour le surplus, il y a lieu de rejeter le recours.

 Sur les dépens

114    Aux termes de l’article 134, paragraphe 3, du règlement de procédure, chaque partie supporte ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs.

115    En l’espèce, tant la République italienne que la Commission ont, en partie, succombé en leurs conclusions, dans la mesure où le Tribunal annule partiellement la décision attaquée et rejette le recours pour le surplus. Dans ces circonstances, il y a lieu de décider que chaque partie supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision d’exécution (UE) 2019/265 de la Commission, du 12 février 2019, écartant du financement de l’Union européenne certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader), est annulée dans la mesure où elle écarte du financement de l’Union certaines dépenses effectuées par la République italienne, à hauteur d’un montant de 305 122,74 euros.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      La République italienne et la Commission européenne supporteront chacune leurs propres dépens.

Collins

De Baere

Steinfatt

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 30 juin 2021.

Signatures


*      Langue de procédure : l’italien.

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