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Document 61997TJ0167

Judgment of the Court of First Instance (Fourth Chamber) of 11 June 1998.
Kyriakos Skrikas v European Parliament.
Officials - Decision not to promote an official - Action for annulment - Admissibility - Act adversely affecting an official - Consideration of the comparative merits - Interinstitutional transfer - Article 45(1) of the Staff Regulations.
Case T-167/97.

European Court Reports – Staff Cases 1998 I-A-00287; II-00857

ECLI identifier: ECLI:EU:T:1998:121

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

11 juin 1998 ( *1 )

«Fonctionnaires - Décision de non-promotion - Recours en annulation - Recevabilité - Acte faisant grief - Examen comparatif des mérites - Transfert interinstitutionnel - Article 45, paragraphe 1, du statut»

Dans l'affaire T-167/97,

Kyriakos Skrikas, fonctionnaire du Parlement européen, demeurant à Luxembourg, représenté par Mes Jean-Noël Louis, Thierry Demaseure et Ariane Tornei, avocats au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de la fiduciaire Myson SARL, 30, rue de Cessange,

partie requérante,

contre

Parlement européen, représenté par M. Yannis Pantalis, membre du service juridique, en qualité d'agent, ayant élu domicile au secrétariat général du Parlement européen, Kirchberg,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d'annulation de la décision du Parlement européen de ne pas promouvoir le requérant au grade C 3 au titre de l'exercice de promotion 1996,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),

composé de Mme P. Lindh, président, MM. K. Lenaerts et J. D. Cooke, juges,

greffier: M. J. Palacio Gonzalez, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 23 avril 1998,

rend le présent

Arrêt

Faits et procédure

1

Le requérant est actuellement fonctionnaire du Parlement européen. Il est entré au service de la Commission le 1er août 1987 en tant que fonctionnaire stagiaire de grade C 5. Le 1er janvier 1992, il a été promu au grade C 4.

2

Le 1er janvier 1996, à la suite d'un transfert interinstitutionnel, il est entré au service du Parlement, à la division «procès-verbal» de la direction «séance plénière» de la direction générale Greffe (DG 1). A cette occasion, il a été classé au grade C 4, avec une ancienneté de grade au 1er janvier 1992 et une ancienneté de catégorie au 1er août 1987.

3

Pour l'exercice de promotion 1996, le comité consultatif de promotion C a inscrit le requérant sur la liste des fonctionnaires susceptibles d'être promus au grade C 3, en seizième position, avec un total de 66,50 points, sur la base de son rapport de notation, de son âge, de son ancienneté dans le grade et de son ancienneté dans la catégorie.

4

Lors de ses délibérations du 6 mai 1996, ce comité a examiné les mérites de tous les fonctionnaires de grade C 4 susceptibles d'être promus. Bien qu'il eût décidé d'inscrire sur la liste des fonctionnaires proposés à la promotion au grade C 3 les fonctionnaires de grade C 4 disposant d'un total de points égal ou supérieur à 66,25 points, il n'a pas inscrit le requérant sur ladite liste au titre de l'exercice de promotion 1996.

5

Le 12 juillet 1996, le secrétaire général du Parlement, autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après «AIPN») compétente pour les promotions au grade C 3, a communiqué ses décisions de promotion au directeur général de la direction générale du personnel, du budget et des finances (DG 5) du Parlement. Ces décisions, qui ne reprenaient pas le requérant, ont fait l'objet d'un affichage du 3 au 18 septembre 1996.

6

Le 9 décembre 1996, le requérant a introduit une réclamation en vertu de l'article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après «statut») à l'encontre de la décision de l'AIPN de ne pas le promouvoir au grade C 3 au titre de l'exercice de promotion 1996.

7

Le 9 avril 1997, une décision implicite de rejet de la réclamation du requérant est intervenue.

8

Par note du 23 mai 1997, l'AIPN a notifié au requérant une réponse explicite de rejet de sa réclamation, dont l'intéressé prétend avoir pris connaissance le 2 juin 1997.

9

Par lettre du 27 mai 1997, le requérant a indiqué à l'AIPN qu'il s'étonnait que le Parlement n'ait réservé aucune suite à sa réclamation.

10

Par requête enregistrée au greffe du Tribunal le 28 mai 1997, et en vertu de l'article 91, paragraphe 2, du statut, il a introduit le présent recours contre la décision de l'AIPN de ne pas le promouvoir au grade C 3 au titre de l'exercice de promotion 1996.

11

Par mémoire déposé au greffe du Tribunal le 2 juillet 1997, le Parlement a soulevé une exception d'irrecevabilité à l'encontre dudit recours, conformément à l'article 114 du règlement de procédure.

12

Le requérant a présenté ses observations sur cette exception par mémoire déposé le 18 septembre 1997.

13

Par ordonnance du 9 octobre 1997, le Tribunal (quatrième chambre) a décidé de joindre l'exception au fond et de réserver les dépens.

14

Sur rapport du juge rapporteur, il a décidé d'ouvrir la procédure orale sans procéder à des mesures d'instruction préalables. Toutefois, à titre de mesures d'organisation de la procédure, il a invité le requérant et le Parlement à déposer certains documents, ce qu'ils ont fait dans les délais respectivement impartis.

15

Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions du Tribunal lors de l'audience qui s'est déroulée le 23 avril 1998.

Conclusions des parties

16

Le requérant conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

annuler la décision de ne pas le promouvoir au grade C 3 au titre de l'exercice de promotion 1996;

condamner le Parlement aux dépens.

17

Le Parlement conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

rejeter le recours comme irrecevable;

subsidiairement, le rejeter comme non fondé;

statuer sur les dépens conformément aux dispositions applicables.

Sur la recevabilité

Arguments des parties

18

Le Parlement estime que le recours est irrecevable, dès lors que, d'une part, le requérant n'invoque aucun acte de l'AIPN lui faisant grief au sens des articles 90, paragraphe 2, et 91, paragraphe 1, du statut et que, d'autre part, sa demande se confond avec une demande de promotion.

19

A l'appui de son premier argument, il fait valoir que seule la promotion d'un ou de plusieurs autres fonctionnaires est susceptible de constituer un acte faisant grief au requérant. Or, celui-ci ne contesterait aucune des décisions prises à l'égard des fonctionnaires promus.

20

A l'appui de son second argument, le Parlement prétend que, par son recours, le requérant demande en fait une promotion au grade C 3 en sa faveur. Une telle demande ne concernerait pas une décision «imposée par le statut» au sens des articles 90, paragraphe 2, et 91, paragraphe 1, de celui-ci, le statut ne conférant aucun droit à une promotion, même aux fonctionnaires qui réunissent toutes les conditions pour pouvoir être promus (arrêt du Tribunal du 30 novembre 1995, Branco/Cour des comptes, T-507/93, RecFP p. II-797). En outre, les juridictions communautaires ne seraient pas compétentes pour donner des injonctions aux autres institutions (arrêt du Tribunal du 14 mai 1996, Gómez de Enterria y Sanchez/Parlement, T-82/95, RecFP p. II-599).

21

Le requérant souligne que le Tribunal a estimé qu'il serait contraire aux principes de bonne administration et de proportionnalité de contraindre un fonctionnaire à attaquer les décisions de promotion prises en faveur de ses collègues, dans la mesure où le grief qu'il allègue est étranger aux mérites de ceux-ci (arrêt du Tribunal du 13 juillet 1995, Rasmussen/Commission, T-557/93, RecFP p. II-603). Il fait valoir que la décision établissant la liste des fonctionnaires de grade C 4 promus au grade C 3 implique nécessairement l'adoption d'une décision de ne pas promouvoir les autres fonctionnaires de grade C 4 susceptibles d'être promus. Le recours viserait à obtenir le respect des garanties que confère le statut au requérant dans le cadre de la procédure de promotion, et non pas à mettre en cause les mérites des fonctionnaires effectivement promus au grade C 3. Dans ces conditions, l'exception d'irrecevabilité devrait être rejetée.

Appréciation du Tribunal

22

II ressort de la jurisprudence que le recours introduit par un fonctionnaire visant à l'annulation de la décision de ne pas l'inscrire sur la liste des fonctionnaires promus au titre d'un exercice de promotion particulier est recevable. Ainsi, au point 29 de son arrêt du 21 novembre 1996, Michaël/Commission (T-144/95, RecFP p. II-1429), relatif à un recours introduit contre une décision de l'AIPN portant établissement d'une liste de fonctionnaires de la Commission promus au grade A 4, le Tribunal signale d'abord, au moment d'apprécier la recevabilité du recours, que ce dernier ne vise à l'annulation de la liste des fonctionnaires promus que dans la mesure où le requérant n'y figure pas et n'a donc pas été promu. Il relève ensuite que les moyens invoqués par le requérant ne mettent en cause que de prétendues irrégularités de la procédure de promotion ayant trait à l'examen de ses mérites et qu'ils ne mettent pas en cause l'appréciation des mérites des fonctionnaires promus. Il en déduit que la demande d'annulation de ce requérant ne concernait pas l'ensemble de la liste litigieuse, mais seulement la décision de ne pas l'avoir inscrit sur celle-ci.

23

Lorsque, comme en l'espèce, le requérant ne met pas en cause l'appréciation des mérites des fonctionnaires promus au titre d'un exercice de promotion déterminé, la décision de promouvoir certains fonctionnaires inscrits sur la liste des fonctionnaires susceptibles d'être promus et celle de ne pas promouvoir les autres fonctionnaires figurant sur cette liste, dont le requérant, constituent deux aspects d'un même acte qui, en tant que tel, fait grief à celui-ci, puisque ses effets affectent directement et immédiatement sa situation juridique, de façon définitive. Pour cette raison, ni le fait que le requérant n'a pas attaqué la décision de promouvoir une partie des fonctionnaires inscrits sur la liste des fonctionnaires susceptibles d'être promus, ni le fait qu'il n'a pas attaqué de façon conjointe la décision de promouvoir certains des fonctionnaires inscrits sur la liste des fonctionnaires susceptibles d'être promus et celle de ne pas promouvoir les autres fonctionnaires inscrits sur cette liste ne sauraient entraîner l'irrecevabilité du présent recours.

24

En demandant l'annulation de la décision de non-promotion, le requérant, à juste titre, met en cause l'aspect de l'acte faisant grief qui le concerne directement.

25

Aucun élément du présent recours ne permet d'établir que, ce faisant, il cherche en réalité à obtenir une décision de promotion en sa faveur. Au contraire, il ressort des termes mêmes utilisés par le requérant dans ses écritures que l'objectif poursuivi n'est pas une décision de promotion en sa faveur, mais simplement l'annulation d'une décision de l'AIPN. Dès lors, l'interprétation de la demande du requérant avancée par le Parlement ne saurait être retenue.

26

L'exception d'irrecevabilité doit donc être rejetée.

Sur le fond

27

Le requérant invoque deux moyens d'annulation qu'il tire, d'une part, d'une violation de l'article 45 du statut, d'une violation de la procédure de promotion, d'une violation du principe d'égalité de traitement et d'une erreur manifeste d'appréciation, ainsi que, d'autre part, d'une violation de l'obligation de motivation inscrite à l'article 25, deuxième alinéa, du statut.

Sur le premier moyen, tiré d'une violation de l'article 45 du statut, d'une violation de la procédure de promotion, d'une violation du principe d'égalité de traitement et d'une erreur manifeste d'appréciation

Arguments des parties

28

Le requérant conteste la légalité de la décision de non-promotion le concernant, fondée sur la circonstance qu'il n'a pas été au service du Parlement pendant la période prise en compte aux fins de l'exercice de promotion en cause. Selon la jurisprudence, une telle décision ne pourrait pas être justifiée par le fait qu'il a bénéficié le 1er janvier 1996 d'une mutation interinstitutionnelle (arrêts du Tribunal du 6 juillet 1995, Ojha/Commission, T-36/93, RecFP p. II-497, points 83 et 85, et du 18 avril 1996, Kyrpitsis/CES, T-13/95, RecFP p. II-503, points 52 et 53). Le comité consultatif de promotion C et l'AIPN n'auraient donc pas pris en considération ses mérites, contrairement aux exigences de l'article 45 du statut, au moment de procéder à l'examen comparatif des mérites.

29

Dans sa réplique, le requérant relève que le Parlement ne conteste pas ne pas avoir procédé à l'examen comparatif de ses mérites par rapport à ceux des autres fonctionnaires susceptibles d'être promus. La méthode d'appréciation des mérites, qu'il s'agisse de celle en vigueur à la Commission ou de celle en vigueur au Parlement, aurait pour seul but de guider l'AIPN pour promouvoir les fonctionnaires les plus méritants. A l'époque des faits litigieux, les rapports de notation en vigueur à la Commission et au Parlement auraient été comparables. Les différences n'auraient pas intéressé le cas du requérant. Le requérant prétend que, en tout état de cause, si le Parlement avait estimé que son système de notation ne permettait pas une comparaison des mérites des fonctionnaires, il aurait dû s'informer auprès de la Commission afin d'être en mesure d'apprécier les mérites réels du requérant. La thèse du Parlement conduirait à priver le fonctionnaire bénéficiant d'un transfert interinstitutionnel de toute promotion pendant deux à trois ans, c'est-à-dire pendant la période requise pour l'établissement d'un rapport de notation par sa nouvelle institution.

30

Le Parlement répond que le cas particulier du requérant, dont le transfert a coïncidé avec la date à laquelle ont pris effet les décisions de promotion en cause, ne permettait pas une appréciation de ses mérites dans les conditions requises par les dispositions statutaires et par la jurisprudence. Il relève que, si le requérant figurait en ordre utile parmi les fonctionnaires susceptibles d'être promus, sa position était le résultat d'une simple opération arithmétique de transposition de l'appréciation de ses mérites effectuée en dehors de l'institution et dans le contexte d'un système de promotion non identique à celui en vigueur au sein du Parlement. En particulier, le rapport de notation occuperait, au sein de la Commission, une place moins importante dans la quantification des mérites des fonctionnaires susceptibles d'être promus que celle qui est accordée, en nombre de points, au sein du Parlement.

31

En l'espèce, le rapport de notation établi par l'institution d'origine du requérant aurait été transposé immédiatement après son transfert, et le Parlement n'aurait pas pu établir un autre rapport pour la période allant du 1er janvier 1996 au mois de mai 1996, en vue des délibérations du comité consultatif de promotion C. Un tel rapport n'aurait pas été en concordance avec ceux établis pour les autres fonctionnaires susceptibles d'être promus.

32

Une proposition de promotion du requérant fondée exclusivement sur la transposition de son rapport de notation aurait empêché l'AIPN de procéder à une appréciation des mérites conforme à l'article 45, paragraphe 1, du statut. La comparaison des mérites prévue à cet article ne se limiterait pas uniquement à une comparaison des rapports de notation des fonctionnaires ayant vocation à la promotion. En outre, une proposition de promotion du requérant n'aurait pas non plus été conforme au principe d'égalité de traitement, puisqu'elle serait revenue à traiter de façon identique des situations différentes (arrêt de la Cour du 4 février 1982, Battaglia/Commission, 1253/79, Rec. p. 297, et arrêt du Tribunal du 30 novembre 1993, Perakis/Parlement, T-78/92, Rec. p. II-1299). Le comité consultatif de promotion C aurait donc considéré à juste titre qu'il convenait de vérifier les mérites du requérant à l'occasion du prochain exercice de promotion, conformément à la finalité de l'article 45 du statut, au principe d'égalité de traitement des fonctionnaires, à l'intérêt du service et à celui du requérant.

33

Quant à l'AIPN, elle aurait été dans l'impossibilité de remplir pleinement son devoir d'examen comparatif des mérites au sens de l'article 45, paragraphe 1, du statut. En effet, elle n'aurait disposé que de la transposition arithmétique du rapport de notation établi au sein de la Commission et d'un avis de réserve du comité consultatif de promotion C. Aucun autre élément d'appréciation utile lors de l'examen comparatif des mérites avec d'autres fonctionnaires du Parlement n'aurait été disponible, puisque le requérant était entré au service de ce dernier à l'expiration de la période de référence, le 1er janvier 1996. Il ne serait d'ailleurs pas établi que le requérant aurait obtenu une promotion au sein de la Commission au titre de l'exercice en question. Dans ces conditions, l'intéressé ne pourrait invoquer une entrave au développement de sa carrière à la suite de son transfert interinstitutionnel.

Appréciation du Tribunal

34

A titre liminaire, force est de constater que, même s'il invoque une violation du principe d'égalité de traitement et l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation au titre de son premier moyen, le requérant dénonce en réalité une violation de ses droits dans la procédure de promotion en cause, et en particulier une violation de l'article 45 du statut. En effet, il ne consacre aucune explication à la violation du principe d'égalité de traitement et à l'erreur manifeste d'appréciation alléguées.

35

II convient donc de vérifier s'il bénéficiait effectivement de droits dans le cadre de la procédure de promotion et, le cas échéant, si ces droits ont été violés.

36

L'article 45, paragraphe 1, du statut dispose:

«La promotion est attribuée par décision de l'autorité investie du pouvoir de nomination. Elle entraîne pour le fonctionnaire la nomination au grade supérieur de la catégorie ou du cadre auquel il appartient. Elle se fait exclusivement au choix, parmi les fonctionnaires justifiant d'un minimum d'ancienneté dans leur grade, après examen comparatif des mérites des fonctionnaires ayant vocation à la promotion ainsi que des rapports dont ils ont fait l'objet.

Ce minimum d'ancienneté est, pour les fonctionnaires nommés au grade de base de leur cadre ou de leur catégorie, de six mois à compter de leur titularisation; il est de deux ans pour les autres fonctionnaires.»

37

II ressort de cette disposition que tout fonctionnaire ayant vocation à la promotion, c'est-à-dire justifiant d'un minimum d'ancienneté dans son grade, a le droit de voir l'AIPN procéder à un examen comparatif de ses mérites et des rapports dont il a fait l'objet.

38

L'article 45, paragraphe 1, du statut ne distingue pas la situation des fonctionnaires ayant fait l'objet d'un transfert interinstitutionnel de celle des autres fonctionnaires. En effet, il ne formule aucune condition supplémentaire à celle du minimum d'ancienneté dans le grade pour que les fonctionnaires ayant fait l'objet d'un transfert interinstitutionnel puissent être considérés comme ayant vocation à la promotion au sens de cette disposition.

39

En l'espèce, il ne saurait dès lors être contesté que le requérant, fonctionnaire de grade C 4 depuis le 1er janvier 1992, remplissait, le 1er janvier 1996, la condition tirée du minimum d'ancienneté dans le grade, posée par l'article 45, paragraphe 1, du statut. A la demande expresse du Tribunal, le Parlement a d'ailleurs confirmé lors de l'audience que le simple fait que le comité consultatif de promotion C ait inscrit le requérant sur la liste des fonctionnaires susceptibles d'être promus au grade C 3 pour l'exercice de promotion 1996 indique qu'il le considérait comme un fonctionnaire ayant vocation à la promotion.

40

II s'ensuit que le requérant disposait du droit de voir l'AIPN , en l'occurrence le secrétaire général du Parlement, procéder à un examen comparatif de ses mérites ainsi que des rapports dont il avait fait l'objet, dans le cadre de la procédure de promotion litigieuse.

41

Or, dans sa décision explicite de rejet de la réclamation du requérant, datée du 23 mai 1997, l'AIPN a souligné:

«[...] S'agissant des décisions de promotion dans votre grade, l'AIPN a pris en considération dans l'examen des mérites des promouvables votre situation administrative selon laquelle votre transfert au Parlement européen a coïncidé avec la date d'effet des décisions de promotion pour l'exercice 1996. Ainsi, une appréciation de vos mérites uniquement sur base du rapport de notation, établi en dehors de l'institution, ne serait pas nécessairement conforme aux principes énoncés ci-avant par la jurisprudence. L'AIPN a, en conséquence, fait sienne l'estimation qu'il conviendrait, dans l'intérêt du service et le respect du principe de l'égalité de traitement des fonctionnaires de vérifier vos mérites lors du prochain exercice des promotions.»

42

II ressort, par conséquent, tant de cette décision de rejet que des écrits déposés par le Parlement dans le cadre de la présente procédure (voir ci-dessus points 32, 34 et 35) que, contrairement à l'obligation que lui impose l'article 45, paragraphe 1, du statut, l'AIPN a refusé de procéder à l'examen comparatif des mérites du requérant ainsi que des rapports dont il avait fait l'objet, alors même que ce dernier avait vocation à une promotion au grade C 3 le 1er janvier 1996, violant ainsi un droit incontestable du requérant dans le cadre de la procédure de promotion.

43

Le Parlement ne saurait se prévaloir, à cet égard, ni du transfert interinstitutionnel dont le requérant avait fait l'objet, ni des particularités de ce transfert interinstitutionnel pour justifier sa décision. En effet, les éventuelles caractéristiques qui peuvent distinguer les procédures de promotion au sein des différentes institutions des Communautés ne sauraient avoir pour conséquence d'ajouter une condition supplémentaire à la seule exigence d'un minimum d'ancienneté prévue par l'article 45, paragraphe 1, du statut, à savoir l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions pendant la période de référence.

44

Le Parlement prétend par ailleurs qu'il ne pouvait procéder à l'examen comparatif des mérites du requérant et des rapports dont il avait fait l'objet sans violer le principe d'égalité de traitement au détriment des fonctionnaires susceptibles d'être promus qui avaient été au service du Parlement pendant toute la période de référence. Cependant, il n'explique pas à quelles fins il a mis au point une méthode de transposition des rapports de notation des fonctionnaires en service en dehors du Parlement et à quel effet il a effectivement transposé le rapport de notation du requérant sur la base de cette méthode.

45

En réalité, son refus de procéder à un examen comparatif ne saurait être justifié au regard de l'obligation qui lui incombe sur la base du contenu de l'article 45, paragraphe 1, du statut. S'il est certes indéniable que la comparaison des mérites et des rapports d'un fonctionnaire venant de faire l'objet d'un transfert interinstitutionnel est moins aisée qu'une comparaison opérée entre les seuls fonctionnaires de l'institution de destination, elle n'est, en tant que telle, ni impossible ni discriminatoire. Elle demande en effet un effort supplémentaire pour rendre comparables des appréciations qui, à l'origine, ne l'étaient pas nécessairement, une telle démarche ne pouvant être assimilée à une violation du principe d'égalité de traitement.

46

Le seul fait que le Parlement ait de sa propre initiative effectué une transposition, même officieuse, du rapport de notation du requérant établi au sein de la Commission démontre que les difficultés qui pourraient survenir dans l'examen comparatif ne sont pas insurmontables. En outre, comme le suggère ajuste titre le requérant, rien n'empêche le Parlement, le cas échéant, de demander certaines précisions à l'institution d'origine du fonctionnaire faisant l'objet d'un transfert.

47

II résulte de tout ce qui précède que la procédure de promotion litigieuse est entachée d'une irrégularité constitutive d'un vice substantiel, en ce qu'il n'a pas été satisfait à l'examen comparatif des mérites de l'intéressé et des autres fonctionnaires susceptibles d'être promus, exigé par l'article 45, paragraphe 1, du statut (voir arrêt Michaël/Commission, précité, point 62).

48

Par conséquent, sans qu'il soit nécessaire d'examiner le second moyen d'annulation tiré d'une violation de l'article 25 du statut, il y a lieu de prononcer l'annulation de la décision attaquée.

49

En vertu de l'article 176 du traité CE, il appartiendra au Parlement d'assurer le réexamen, par le comité consultatif de promotion C et par l'AIPN, des mérites du requérant au regard de ceux des fonctionnaires promus au titre de l'exercice de promotion 1996 et de prendre les mesures nécessaires.

Sur les dépens

50

Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Le Parlement ayant succombé en ses conclusions, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions en ce sens du requérant.

 

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête:

 

1)

La décision du Parlement de ne pas promouvoir le requérant au grade C 3 au titre de l'exercice de promotion 1996 est annulée.

 

2)

Le Parlement est condamné aux dépens.

 

Lindh

Lenaerts

Cooke

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 11 juin 1998.

Le greffier

H. Jung

Le président

P. Lindh


( *1 ) Langue de procédure, le français.

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