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Document 62019CO0621

Domstolens beslut (åttonde avdelningen) av den 8 oktober 2020.
Finančné riaditeľstvo Slovenskej republiky mot Weindel Logistik Service SR spol. s r.o.
Begäran om förhandsavgörande från Najvyšší súd Slovenskej republiky.
Begäran om förhandsavgörande – Artikel 99 i domstolens rättegångsregler – Gemensamt system för mervärdesskatt – Direktiv 2006/112/EG – Artikel 168 e – Avdrag för ingående mervärdesskatt – Varorna används endast för den beskattningsbara personens beskattningsbara transaktioner – Förekomst av ett direkt samband mellan de importerade varorna och den utgående transaktionen.
Mål C-621/19.

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2020:814

ORDONNANCE DE LA COUR (huitième chambre)

8 octobre 2020 (*)

[Texte rectifié par ordonnance du 29 octobre 2020]

« Renvoi préjudiciel – Article 99 du règlement de procédure de la Cour – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) – Directive 2006/112/CE – Article 168, sous e) – Déduction de la taxe payée en amont –Utilisation des biens uniquement aux fins des opérations taxables de l’assujetti – Existence d’un lien direct entre les biens importés et l’opération en aval »

Dans l’affaire C‑621/19,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Najvyšší súd Slovenskej republiky (Cour suprême de la République slovaque, Slovaquie), par décision du 16 avril 2019, parvenue à la Cour le 20 août 2019, dans la procédure

Finančné riaditeľstvo Slovenskej republiky

contre

Weindel Logistik Service SR spol. s r.o.,

LA COUR (huitième chambre),

composée de M. N. Wahl (rapporteur), président de chambre, M. F. Biltgen et Mme L. S. Rossi, juges,

avocat général : M. M. Szpunar,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

[Tel que rectifié par ordonnance du 29 octobre 2020] considérant les observations présentées :

–        pour le Finančné riaditeľstvo Slovenskej republiky, par Mme L. Wittenbergerová, en qualité d’agent,

–        pour le gouvernement slovaque, par Mme B. Ricziová, en qualité d’agent,

–        pour la Commission européenne, par Mme J. Jokubauskaitė et M. R. Lindenthal, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 99 du règlement de procédure de la Cour,

rend la présente

Ordonnance

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 168, sous e), de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO 2006, L 347, p. 1).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Weindel Logistik Service SR spol. s r.o. (ci-après « Weindel ») au Finančné riaditeľstvo Slovenskej republiky (direction des impôts de la République slovaque, ci-après la « direction des impôts ») au sujet du refus de cette autorité de faire droit à une demande de déduction de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA).

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

3        L’article 2, paragraphe 1, de la directive 2006/112 dispose :

« Sont soumises à la TVA les opérations suivantes :

[...]

d)      les importations de biens. »

4        L’article 30 de cette directive prévoit :

« Est considérée comme “importation de biens” l’introduction dans la Communauté d’un bien qui n’est pas en libre pratique au sens de l’article 24 du traité.

Outre l’opération visée au premier alinéa, est considérée comme importation de biens l’introduction dans la Communauté d’un bien en libre pratique en provenance d’un territoire tiers faisant partie du territoire douanier de la Communauté. »

5        L’article 70 de ladite directive énonce :

« Le fait générateur intervient et la taxe devient exigible au moment où l’importation de biens est effectuée. »

6        L’article 167 de la directive 2006/112 se lit comme suit :

« Le droit à déduction prend naissance au moment où la taxe déductible devient exigible. »

7        Aux termes de l’article 168 de cette même directive :

« Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de ses opérations taxées, l’assujetti a le droit, dans l’État membre dans lequel il effectue ces opérations, de déduire du montant de la taxe dont il est redevable les montants suivants :

[...]

e)      la TVA due ou acquittée pour les biens importés dans cet État membre. »

8        L’article 178 de cette directive dispose :

« Pour pouvoir exercer le droit à déduction, l’assujetti doit remplir les conditions suivantes :

[...]

e)      pour la déduction visée à l’article 168, point e), en ce qui concerne les importations de biens, détenir un document constatant l’importation qui le désigne comme destinataire ou importateur et qui mentionne ou permet de calculer le montant de la TVA due [...] »

9        L’article 201 de ladite directive prévoit :

« À l’importation, la TVA est due par la ou les personnes désignées ou reconnues comme redevables par l’État membre d’importation. »

 Le droit slovaque

10      En vertu de l’article 2, paragraphe 1, du Zákon č. 222/2004 Z. z. o dani z pridanej hodnoty (loi no 222/2004 Rec. sur la TVA), du 6 avril 2004, dans sa version en vigueur à l’époque des faits en cause (ci-après la « loi sur la TVA ») :

« Sont soumis à la taxe

[...]

d)      les importations de biens sur le territoire national. »

11      Aux termes de l’article 21, paragraphe 1, de cette loi :

« Lors de l’importation du bien, la taxe devient exigible au moment :

a)      de la mise en libre pratique,

b)      du placement sous le régime du perfectionnement actif (système du rembours),

c)      de l’apurement du régime d’admission temporaire en exonération partielle des droits à l’importation,

d)      de la mise en libre pratique à partir du régime du perfectionnement passif en cas de réimportation du bien,

e)      de l’introduction irrégulière du bien,

f)      de la soustraction à la surveillance douanière,

g)      de la naissance d’une dette douanière dans d’autres circonstances. »

12      L’article 21, paragraphe 2, de ladite loi énonce :

« La taxe sur le bien devient exigible, conformément au paragraphe 1, à la date d’acceptation de la déclaration en douane de placement du bien sous le régime douanier concerné ou à la date à laquelle la dette douanière a pris naissance autrement que par l’acceptation de la déclaration en douane. La taxe est due dans le délai imparti pour le paiement des droits de douane en vertu de la réglementation douanière. »

13      L’article 49, paragraphe 2, de la loi sur la TVA énonce :

« L’assujetti peut déduire de la taxe dont il est redevable la taxe sur les biens ou les services qu’il utilise aux fins de ses livraisons de biens et prestations de services en tant qu’assujetti, sous réserve des exceptions prévues aux paragraphes 3 et 7. L’assujetti peut déduire la taxe

[...]

d)      qui a été acquittée auprès de l’administration fiscale sur le territoire national à l’importation d’un bien. »

14      Aux termes de l’article 51, paragraphe 1, de ladite loi :

« L’assujetti peut faire valoir un droit à la déduction de la taxe en vertu de l’article 49 lorsque

[...]

d)      pour la déduction conformément à l’article 49, paragraphe 2, point d) il détient un document d’importation confirmé par les autorités douanières le désignant comme destinataire ou importateur. »

15      L’article 69, paragraphe 8, de ladite loi énonce :

« La taxe à l’importation de biens est due par la personne qui est redevable au sens de la réglementation douanière ou par le destinataire des biens si, lors de l’importation des biens, le redevable au sens de la réglementation douanière est une personne étrangère titulaire d’une autorisation unique délivrée en vertu de dispositions particulières par les autorités douanières d’un autre État membre et que ce redevable n’utilise pas les biens importés pour l’exercice de son activité économique. »

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

16      Au cours de l’année 2008, Weindel, entreprise active notamment dans le domaine des services de reconditionnement, a importé en Slovaquie des biens en provenance de Suisse, de Hong Kong et de Chine afin de les reconditionner. Conformément à l’article 21, paragraphe 1, sous a), de la loi sur la TVA, la TVA est devenue exigible à l’égard de Weindel lorsque les biens en cause ont été mis en libre pratique. Une fois reconditionnés sur le territoire slovaque, les biens ont été livrés dans d’autres États membres ou exportés vers des pays tiers. Le service de reconditionnement a été facturé au client, à savoir une entreprise suisse qui est restée propriétaire des marchandises concernées pendant toute la période en cause. Les factures émises par Weindel n’ont ainsi porté que sur les services de reconditionnement, et non sur les biens importés.

17      Weindel a versé la TVA et a invoqué le droit à déduction applicable en vertu de l’article 51, paragraphe 1, sous d), de la loi sur la TVA.

18      Par plusieurs décisions du 18 juillet 2011, le Daňový úrad Bratislava I (administration fiscale de Bratislava I, Slovaquie, ci-après l’« administration fiscale de Bratislava I ») a refusé à Weindel le droit à déduction de la TVA pour les exercices fiscaux des mois de février à décembre 2008, correspondant à un montant de 198 322,25 euros.

19      L’administration fiscale de Bratislava I a justifié ce refus au motif que Weindel avait enfreint l’article 49, paragraphe 2, et l’article 51, paragraphe 1, sous d), de la loi sur la TVA. Elle a expliqué, d’une part, que Weindel n’était pas propriétaire des biens importés et, d’autre part, qu’il n’existait aucun lien direct et immédiat entre les frais d’acquisition des biens et l’activité économique du prestataire de services. En d’autres termes, Weindel n’aurait supporté, pour disposer de ces biens, aucun des frais qui auraient pu être pris en compte dans le prix des opérations imposables en aval. En outre, Weindel n’aurait pas utilisé les biens importés pour la fourniture de ses services, ne les aurait pas vendus sur le territoire national, ne les aurait pas fournis dans un autre État membre de l’Union européenne ni exportés vers un pays tiers et elle ne les aurait pas utilisés aux fins de son activité économique en tant qu’assujettie.

20      Par des décisions du 13 octobre 2011, la direction des impôts a confirmé les décisions rendues par l’administration fiscale de Bratislava I.

21      Par décision du 20 juin 2012, le Krajský súd v Bratislave (cour régionale de Bratislava, Slovaquie) a rejeté le recours introduit par Weindel contre les décisions de l’administration fiscale de Bratislava I, du 18 juillet 2011, et de la direction des impôts, du 13 octobre 2011.

22      Le 15 janvier 2013, le Najvyšší súd Slovenskej republiky (Cour suprême de la République slovaque) a cassé la décision du Krajský súd v Bratislave (cour régionale de Bratislava), annulé les décisions contestées et renvoyé l’affaire pour suite à donner. Le Najvyšší súd Slovenskej republiky (Cour suprême de la République slovaque) a estimé que Weindel devait pouvoir faire valoir le droit à déduction de la TVA due sur les biens importés, puisque, en l’absence d’importation, elle n’avait pas été en mesure de fournir les services relatifs à ces biens. En outre, la condition relative à l’exercice d’un droit de propriété afin d’obtenir la déduction ne serait pas prévue par la loi. Enfin, la décision de la direction des impôts porterait atteinte au principe de neutralité fiscale.

23      Par de nouvelles décisions du 16 janvier 2014, l’administration fiscale de Bratislava I a, pour les mêmes motifs et en l’absence de toute modification de la situation de fait, refusé d’accorder à Weindel le droit à déduction de la TVA. Elle a complété la motivation de sa décision initiale en se référant aux conclusions de la 94e réunion du comité de la TVA du 19 octobre 2011 [document C – taxud.c.1(2012)243615 – 716]. Selon ces conclusions, le redevable qui importe des biens n’a pas le droit de déduire la taxe acquittée si, d’une part, il ne peut pas disposer desdits biens comme s’il en était le propriétaire et si, d’autre part, les frais d’acquisition des biens n’ont pas de lien direct et immédiat avec son activité économique. S’agissant de cette dernière condition, l’administration fiscale de Bratislava I a évoqué la jurisprudence de la Cour (arrêts du 8 juin 2000, Midland Bank, C‑98/98, EU:C:2000:300 ; du 22 février 2001, Abbey National, C‑408/98, EU:C:2001:110, et du 26 mai 2005, Kretztechnik, C‑465/03, EU:C:2005:320).

24      Weindel a formé un recours contre ces décisions du 16 janvier 2014, faisant notamment valoir que la condition tenant au droit de propriété, ou au droit de disposer des biens en tant que propriétaire, ne s’applique pas dans son cas.

25      À cet égard, premièrement, elle souligne avoir importé des biens qu’elle a utilisés pour exercer sa principale activité économique, à savoir le reconditionnement de biens. Il existerait ainsi un lien de causalité entre l’exercice du droit à déduction de la taxe sur les biens importés et l’activité économique, car, sans importation effective des biens, la requérante ne serait pas en mesure de fournir de service. Si l’administration fiscale de Bratislava I venait à subordonner l’existence d’un lien direct et immédiat entre la déduction de la taxe en amont et les opérations en aval à l’inclusion du prix des biens comme élément de coût, elle imposerait une condition impossible à satisfaire.

26      Deuxièmement, Weindel estime que la jurisprudence de la Cour à laquelle renvoient les décisions contestées n’est pas pertinente, les faits dans les litiges en cause n’étant ni identiques ni similaires. Les conclusions de l’administration fiscale de Bratislava I seraient donc contraires au principe de neutralité fiscale, qui est l’un des principes fondamentaux du fonctionnement du système commun de la TVA.

27      Troisièmement, Weindel renvoie aux motifs retenus précédemment par le Najvyšší súd Slovenskej republiky (Cour suprême de la République slovaque) dans la même affaire.

28      Par de nouvelles décisions du 7 avril 2014, la direction des impôts a confirmé les décisions adoptées par l’administration fiscale de Bratislava I, le 16 janvier 2014, et a rejeté le recours.

29      Par un recours introduit le 5 juin 2014, Weindel a contesté la légalité des décisions de la direction des impôts, du 7 avril 2014, arguant, notamment, que cette dernière n’avait pas suivi la décision contraignante adoptée par le Najvyšší súd Slovenskej republiky (Cour suprême de la République slovaque), même si la situation factuelle ou juridique n’avait pas été modifiée entre-temps.

30      Par décision du 1er décembre 2015, le Krajský súd v Bratislave (cour régionale de Bratislava) a annulé les décisions de la direction des impôts, du 7 avril 2014, et a renvoyé les affaires devant celle-ci.

31      La direction des impôts a formé un recours contre cette décision devant le Najvyšší súd Slovenskej republiky (Cour suprême de la République slovaque), tendant, notamment, à ce que la Cour soit saisie d’une demande à titre préjudiciel concernant l’interprétation de l’article 168, sous e), de la directive 2006/112. Weindel a également demandé que la Cour soit saisie d’une demande de décision préjudicielle tendant à l’interprétation de l’article 167 et de l’article 168, sous e), de cette directive.

32      Par une nouvelle décision du 31 janvier 2018, le Najvyšší súd Slovenskej republiky (Cour suprême de la République slovaque) a, d’une part, réformé la décision du Krajský súd v Bratislave (cour régionale de Bratislava) et rejeté le recours de Weindel en souscrivant aux arguments avancés par la direction des impôts, et, d’autre part, rejeté la demande tendant à la saisine de la Cour d’une demande de décision préjudicielle. Il a justifié cette décision en estimant que les arrêts de la Cour du 8 juin 2000, Midland Bank (C‑98/98, EU:C:2000:300), et du 26 mai 2005, Kretztechnik (C‑465/03, EU:C:2005:320) sont applicables à la présente affaire en ce qui concerne le droit à déduction de la TVA.

33      Weindel a formé un recours devant l’Ústavný súd Slovenskej republiky (Cour constitutionnelle de la République slovaque) contre cette décision, invoquant, notamment, une violation du droit à la protection juridictionnelle, ainsi que du droit à un procès équitable en vertu de la Constitution slovaque et de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950.

34      Par décision du 11 octobre 2018, l’Ústavný súd Slovenskej republiky (Cour constitutionnelle de la République slovaque) jugeant que le Najvyšší súd Slovenskej republiky (Cour suprême de la République slovaque) avait violé les droits fondamentaux de Weindel, a annulé ladite décision du 31 janvier 2018 et renvoyé l’affaire devant le Najvyšší súd Slovenskej republiky (Cour suprême de la République slovaque).

35      Dans sa décision du 11 octobre 2018, l’Ústavný súd Slovenskej republiky (Cour constitutionnelle de la République slovaque) a estimé que les conditions étaient réunies pour que le Najvyšší súd Slovenskej republiky (Cour suprême de la République slovaque), en tant que juridiction de dernière instance, suspende la procédure et pose à la Cour une question préjudicielle afin de clarifier l’interprétation de l’article 167 et de l’article 168, sous e), de la directive 2006/112.

36      C’est dans ces circonstances que le Najvyšší súd Slovenskej republiky (Cour suprême de la République slovaque) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)      L’article 167 et l’article 168, sous e), de la directive [2006/112] doivent-ils être interprétés en ce sens que le droit à déduction de la [TVA] due par le redevable sur les biens importés est subordonné au droit de propriété sur ces biens ou au droit d’en disposer en tant que propriétaire ?

2)      L’article 168, sous e), de la directive [2006/112] doit-il être interprété en ce sens que le droit à déduction de la [TVA] due par le redevable sur les biens importés ne prend naissance que si ces biens sont utilisés pour les besoins des opérations imposables du redevable telles que la vente desdits biens sur le territoire national, la livraison dans un autre État membre ou l’exportation vers un pays tiers ?

3)      La condition d’un lien direct et immédiat entre les biens acquis et les opérations en aval est-elle remplie dans ces circonstances ; en d’autres termes, est-il possible d’appliquer l’interprétation uniforme du droit à déduction de la taxe qui repose sur le lien direct et immédiat entre les biens acquis et les opérations en aval, en rapport avec le coût des éléments constitutifs du prix qui n’a pas été supporté pour ces biens et ne pouvait donc pas être pris en compte dans le prix de l’opération en aval ? »

 Sur les questions préjudicielles

37      En vertu de l’article 99 du règlement de procédure de la Cour, lorsqu’une question posée à titre préjudiciel est identique à une question sur laquelle la Cour a déjà statué, lorsque la réponse à une telle question peut être clairement déduite de la jurisprudence ou lorsque la réponse à la question posée à titre préjudiciel ne laisse place à aucun doute raisonnable, la Cour peut à tout moment, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, décider de statuer par voie d’ordonnance motivée.

38      Il y a lieu de faire application de cette disposition dans le cadre de la présente affaire.

 Sur les première et deuxième questions préjudicielles

39      Par ses première et deuxième questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 168, sous e), de la directive 2006/112 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à l’octroi d’un droit à déduction de la TVA à un importateur qui ne dispose pas des biens, à l’instar d’un propriétaire, et qui n’utilise pas ces biens pour les besoins de ses opérations imposables, dans la mesure où le coût des biens n’a pas de lien direct et immédiat avec son activité économique.

40      Afin de répondre à cette question, il convient de rappeler que le libellé de l’article 168 de la directive 2006/112 prévoit que l’assujetti peut déduire du montant de la TVA dont il est redevable la taxe due pour les biens importés lorsque ceux-ci sont utilisés pour les besoins de ses opérations taxées.

41      Or, selon une jurisprudence constante, l’application de l’article 168 de la directive 2006/112 nécessite, en règle générale, que les opérations en amont présentent un lien direct et immédiat avec les opérations en aval.

42      Ainsi, l’existence d’un lien direct et immédiat entre une opération particulière en amont et une ou plusieurs opérations en aval ouvrant droit à déduction est, en principe, nécessaire pour qu’un droit à déduction de la TVA en amont soit reconnu à l’assujetti et pour déterminer l’étendue d’un tel droit. Le droit à déduction de la TVA grevant l’acquisition de biens ou de services en amont présuppose que les dépenses effectuées pour acquérir ceux-ci fassent partie des éléments constitutifs du prix des opérations taxées en aval ouvrant droit à déduction (arrêt du 14 septembre 2017, Iberdrola Inmobiliaria Real Estate Investments, C‑132/16, EU:C:2017:683, point 28 ; voir également, en ce sens, arrêt du 26 mai 2005, Kretztechnik, C‑465/03, EU:C:2005:320, point 35 et jurisprudence citée).

43      Un droit à déduction est cependant également admis en faveur de l’assujetti, même en l’absence de lien direct et immédiat entre une opération particulière en amont et une ou plusieurs opérations en aval ouvrant droit à déduction, lorsque les coûts des services en cause font partie des frais généraux de ce dernier et sont, en tant que tels, des éléments constitutifs du prix des biens ou des services qu’il fournit. De tels coûts entretiennent, en effet, un lien direct et immédiat avec l’ensemble de l’activité économique de l’assujetti (arrêt du 14 septembre 2017, Iberdrola Inmobiliaria Real Estate Investments, C‑132/16, EU:C:2017:683, point 29 ; voir également, en ce sens, arrêt du 26 mai 2005, Kretztechnik, C‑465/03, EU:C:2005:320, point 36 et jurisprudence citée).

44      Dans sa décision, la juridiction de renvoi souligne que Weindel intervient seulement en tant que prestataire de services, sans avoir acquis les biens importés ni supporté le coût d’importation, ce qui laisse à penser que, dans l’affaire au principal, le lien entre le paiement de la TVA qui résulte de l’importation et le prix des services fournis par Weindel fait défaut. Dès lors, il appartiendra, en tout état de cause, au juge national de vérifier si tel est le cas en l’espèce.

45      S’agissant, plus particulièrement, de l’interprétation de l’article 168, sous e), de la directive 2006/112, la Cour a également précisé qu’un droit à déduction n’existe que dans la mesure où les biens importés sont utilisés pour les besoins des opérations taxées de l’assujetti. Selon la jurisprudence rendue en matière de droit à déduction de la TVA grevant l’acquisition de biens ou de services, cette condition n’est remplie que lorsque le coût des prestations en amont est incorporé dans le prix des opérations particulières en aval ou dans le prix des biens ou des services fournis par l’assujetti dans le cadre de ses activités économiques (arrêt du 25 juin 2015, DSV Road, C‑187/14, EU:C:2015:421, point 49).

46      En constatant que la valeur des marchandises transportées ne faisant pas partie des frais constitutifs des prix facturés par un transporteur dont l’activité se limite à transporter cette marchandise contre rémunération, les conditions d’application de l’article 168, sous e), de la directive 2006/112 ne sont pas réunies (arrêt du 25 juin 2015, DSV Road, C‑187/14, EU:C:2015:421, point 50), la Cour a précisé que les personnes qui importent des biens sans en être propriétaires ne sont pas en mesure de bénéficier du droit à déduction de la TVA, sauf à être en mesure d’établir que le coût de l’importation est incorporé dans le prix des opérations particulières en aval ou dans le prix des biens ou des services fournis par l’assujetti dans le cadre de ses activités économiques.

47      À cet égard, il y a lieu de souligner que le comité de la TVA, comité consultatif institué à l’article 398 de la directive 2006/112, a retenu une approche concordante à travers ses lignes directrices [94e réunion, du 19 octobre 2011, document C – taxud.c.1(2012)243615 – 716]. Aux termes de celles-ci, un assujetti désigné comme étant redevable du paiement de la TVA à l’importation n’a pas le droit de déduire la TVA lorsque deux conditions sont réunies, à savoir, d’une part, lorsque l’assujetti n’obtient pas le droit de disposer des biens en tant que propriétaire et, d’autre part, lorsque le coût des biens ne présente pas de lien direct et immédiat avec son activité économique.

48      Si ces lignes directrices sont dépourvues de valeur contraignante, elles n’en constituent pas moins une aide à l’interprétation de la directive 2006/112.

49      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre aux première et deuxième questions que l’article 168, sous e), de la directive 2006/112 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à l’octroi d’un droit à déduction de la TVA à un importateur lorsqu’il ne dispose pas des biens à l’instar d’un propriétaire et lorsque les coûts d’importation en amont sont inexistants ou ne sont pas incorporés dans le prix des opérations particulières en aval, ou dans le prix des biens et des services fournis par l’assujetti dans le cadre de ses activités économiques.

 Sur la troisième question préjudicielle

50      Compte tenu de la réponse apportée aux première et deuxième questions, il n’y a pas lieu de répondre à la troisième question.

 Sur les dépens

51      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (huitième chambre) dit pour droit :

L’article 168, sous e), de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à l’octroi d’un droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) à un importateur lorsqu’il ne dispose pas des biens à l’instar d’un propriétaire et lorsque les coûts d’importation en amont sont inexistants ou ne sont pas incorporés dans le prix des opérations particulières en aval, ou dans le prix des biens et des services fournis par l’assujetti dans le cadre de ses activités économiques.

Signatures


*      Langue de procédure : le slovaque.

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