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Document 62013CO0520

Sklep Sodišča (sedmi senat) z dne 27. marca 2014.
Urszula Leśniak-Jaworska in Małgorzata Głuchowska-Szmulewicz proti Prokuratura Okręgowa w Płocku.
Predlog za sprejetje predhodne odločbe: Sąd Rejonowy Wydział Pracy i Ubezpieczeń Społecznych w Płocku - Poljska.
Zadeva C-520/13.

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2014:263


ORDONNANCE DE LA COUR (septième chambre)

27 mars 2014 (*)

«Article 53, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour – Absence de précisions suffisantes concernant le contexte factuel et réglementaire du litige au principal ainsi que les raisons justifiant la nécessité d’une réponse à la question préjudicielle – Irrecevabilité manifeste»

Dans l’affaire C‑520/13,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Sąd Rejonowy Wydział Pracy i Ubezpieczeń Społecznych w Płocku (Pologne), par décision du 12 septembre 2013, parvenue à la Cour le 30 septembre 2013, dans la procédure

Urszula Leśniak-Jaworska,

Małgorzata Głuchowska-Szmulewicz

contre

Prokuratura Okręgowa w Płocku,

LA COUR (septième chambre),

composée de M. J. L. da Cruz Vilaça, président de chambre, MM. G. Arestis et A. Arabadjiev (rapporteur), juges,

avocat général: M. Y. Bot,

greffier: M. A. Calot Escobar,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 53, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour,

rend la présente

Ordonnance

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 21 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ainsi que des articles 1er et 2 de la directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail (JO L 303, p. 16).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Mmes Leśniak-Jaworska et Głuchowska-Szmulewicz, procureurs, au Prokuratura Okręgowa w Płocku (ministère public régional de Płock) au sujet de leur classement, à compter du 1er janvier 2009, sur l’échelle des rémunérations applicable aux procureurs.

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

3        Aux termes de son article 1er, la directive 2000/78 «a pour objet d’établir un cadre général pour lutter contre la discrimination fondée sur la religion ou les convictions, [le] handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle, en ce qui concerne l’emploi et le travail, en vue de mettre en œuvre, dans les États membres, le principe de l’égalité de traitement».

4        L’article 2 de cette directive, intitulé «Concept de discrimination», prévoit:

«1.      Aux fins de la présente directive, on entend par ‘principe de l’égalité de traitement’ l’absence de toute discrimination directe ou indirecte, fondée sur un des motifs visés à l’article 1er.

2.      Aux fins du paragraphe 1:

a)      une discrimination directe se produit lorsqu’une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre ne l’est, ne l’a été ou ne le serait dans une situation comparable, sur la base de l’un des motifs visés à l’article 1er;

b)      une discrimination indirecte se produit lorsqu’une disposition, un critère ou une pratique apparemment neutre est susceptible d’entraîner un désavantage particulier pour des personnes d’une religion ou de convictions, d’un handicap, d’un âge ou d’une orientation sexuelle donnés, par rapport à d’autres personnes, à moins que:

i)      cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un objectif légitime et que les moyens de réaliser cet objectif ne soient appropriés et nécessaires, […].

[…]»

5        L’article 3 de ladite directive, intitulé «Champ d’application», dispose à son paragraphe 1, sous a) et c):

«Dans les limites des compétences conférées à [l’Union], la présente directive s’applique à toutes les personnes, tant pour le secteur public que pour le secteur privé, y compris les organismes publics, en ce qui concerne:

a)      les conditions d’accès à l’emploi, aux activités non salariées ou au travail, y compris les critères de sélection et les conditions de recrutement, quelle que soit la branche d’activité et à tous les niveaux de la hiérarchie professionnelle, y compris en matière de promotion;

[…]

c)      les conditions d’emploi et de travail, y compris les conditions de licenciement et de rémunération».

 Le droit polonais

6        L’article 62, paragraphe 1, de la loi sur le ministère public (ustawa o prokuratorze), du 20 juin 1985, telle qu’elle résulte de la loi du 20 mars 2009 portant modification du système des juridictions ordinaires et de plusieurs autres lois (Dz. U. z 2009 r. Nr 56, poz. 459, ci-après la «loi sur le ministère public»), prévoit, notamment, que la rémunération de base des procureurs occupant des emplois équivalents dans les ministères publics est équivalente et que le montant de la rémunération des procureurs occupant des emplois équivalents dans les ministères publics diffère selon l’ancienneté ou les fonctions exercées.

7        Selon l’article 62, paragraphe 1a, de la loi sur le ministère public, «[l]a rémunération de base du procureur se définit en échelons, dont le montant se calcule en appliquant des coefficients à l’assiette de la rémunération de base visée à l’article 61 a».

8        La loi du 20 mars 2009 portant modification du système des juridictions ordinaires et de plusieurs autres lois dispose, à son article 10, paragraphes 2 et 3:

«2.      L’échelon de la rémunération de base du juge est déterminé en tenant compte de l’ancienneté du juge dans l’emploi occupé au 1er janvier 2009, et, si c’est plus avantageux, de l’ancienneté du juge dans tous les emplois de juge et de procureur occupés jusque-là […].

3.      L’ancienneté générale comprend la période d’exercice des fonctions de juge en tant qu’assesseur […]».

9        L’article 11, paragraphes 1 et 2, de cette loi est rédigé comme suit:

«1.      À compter du 1er janvier 2009, la rémunération de base des procureurs du ministère public d’arrondissement sera fixée aux échelons 1 à 4, la rémunération de base des procureurs du ministère public régional est fixée aux échelons 4 à 7, et la rémunération de base des procureurs de la cour d’appel est fixée aux échelons 7 à 10. Les dispositions de l’article 10, paragraphes 2 à 5, sont applicables par analogie.

2.      À compter du 1er janvier 2009, la rémunération des procureurs nommés à partir de cette date à un emploi de procureur par le ministère public régional auprès du ministère public d’arrondissement sera fixée à l’échelon 4, et ceux nommés à un poste de procureur par la cour d’appel auprès du ministère public régional seront rémunérés à l’échelon 7.»

 Le litige au principal et la question préjudicielle

10      Mme Leśniak-Jaworska est, depuis le 1er octobre 2003, procureur auprès de la défenderesse au principal. Sa carrière a débuté le 1er janvier 1983 en tant que stagiaire de la Prokuratura Rejonowa w Żyrardowie (ministère public d’arrondissement de Żyrardów), puis assesseur au sein de ce ministère public. Depuis le 1er octobre 2003, elle exerce également les fonctions de chef des procureurs du Prokuratura Rejonowa w Gostyninie (ministère public d’arrondissement de Gostynin).

11      À partir du 1er janvier 2009, sa rémunération de base a été fixée au cinquième échelon, en appliquant un coefficient de 2,50 à la rémunération moyenne au cours du deuxième trimestre de l’année 2008. Au 1er janvier 2010, sa rémunération de base a été fixée au cinquième échelon, en appliquant un coefficient de 2,50 sur l’assiette de calcul de la rémunération de base du procureur, indiquée à l’article 61 a de la loi sur le ministère public.

12      Quant à Mme Głuchowska-Szmulewicz, elle est, depuis le 1er octobre 2002, procureur auprès de la défenderesse au principal. Sa carrière a débuté le 1er octobre 1989 en tant que stagiaire de la Prokuratura Rejonowa w Płocku, puis assesseur au sein de ce ministère public. Du 21 janvier au 30 septembre 2002, elle a été détachée pour l’exécution de «tâches de service» auprès de la défenderesse au principal.

13      À partir du 1er janvier 2009, sa rémunération de base a été fixée au cinquième échelon, en fonction de son ancienneté dans l’emploi de procureur auprès du ministère public régional et de son ancienneté globale. À partir du 1er janvier 2010, sa rémunération de base a été fixée au cinquième échelon en appliquant un coefficient de 2,50 à l’assiette de calcul de la rémunération de base du procureur, indiquée à l’article 61 a de la loi sur le ministère public. À partir du 1er octobre 2012, sa rémunération de base a été fixée au sixième échelon, en appliquant un coefficient de 2,65 à l’assiette de calcul de la rémunération de base du procureur, définie à cet article.

14      À partir du 1er janvier 2009, afin de mettre en œuvre les dispositions de la loi du 20 mars 2009 portant modification du système des juridictions ordinaires et de certaines autres lois, la rémunération des autres procureurs employés auprès du ministère public de Płock a également été fixée. La juridiction de renvoi relève que cela a conduit à une situation dans laquelle la rémunération de Mmes Leśniak-Jaworska et Głuchowska-Szmulewicz a été inférieure à celle d’une partie des procureurs bénéficiant d’une ancienneté moindre dans cette fonction que ces dernières.

15      Dans ces conditions, le Sąd Rejonowy Wydział Pracy i Ubezpieczeń Społecznych w Płocku a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

«Le droit [de l’Union], et en particulier l’article 21 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ainsi que les articles 1er et 2 de la directive [2000/78], doit-il être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale qui aboutit à une situation dans laquelle des travailleurs recrutés au même emploi et avec la même ancienneté perçoivent des rémunérations d’un montant différent en l’absence de circonstances justifiant ce type de différenciation?»

 Sur la recevabilité de la demande de décision préjudicielle

16      En vertu de l’article 53, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsqu’une demande ou une requête est manifestement irrecevable, la Cour, l’avocat général entendu, peut à tout moment décider de statuer par voie d’ordonnance motivée, sans poursuivre la procédure.

17      Il y a lieu de faire application de ladite disposition dans la présente affaire.

18      Il convient de rappeler que, dans le cadre de la coopération instaurée par l’article 267 TFUE, la nécessité de parvenir à une interprétation du droit de l’Union qui soit utile pour le juge national exige que celui-ci définisse le cadre factuel et réglementaire dans lequel s’insèrent les questions qu’il pose ou que, à tout le moins, il explique les hypothèses factuelles sur lesquelles ces questions sont fondées (voir, notamment, arrêt Centro Europa 7, C‑380/05, EU:C:2008:59, point 57; ordonnance Augustus, C‑627/11, EU:C:2012:754, point 8, et arrêt Mora IPR, C‑79/12, EU:C:2013:98, point 35).

19      La Cour souligne également l’importance de l’indication, par le juge national, des raisons précises qui l’ont conduit à s’interroger sur l’interprétation du droit de l’Union et à estimer nécessaire de poser des questions préjudicielles à la Cour (voir, notamment, arrêts ABNA e.a., C‑453/03, C‑11/04, C‑12/04 et C‑194/04, EU:C:2005:741, point 46, ainsi que Mora IPR, EU:C:2013:98, point 36).

20      Ainsi, étant donné que la décision de renvoi sert de fondement à la procédure devant la Cour, il est indispensable que le juge national explicite, dans la décision de renvoi elle-même, le cadre factuel et réglementaire du litige au principal et donne un minimum d’explications sur les raisons du choix des dispositions du droit de l’Union dont il demande l’interprétation ainsi que sur le lien qu’il établit entre ces dispositions et la législation nationale applicable au litige qui lui est soumis (voir, notamment, ordonnance Laguillaumie, C‑116/00, EU:C:2000:350, points 23 et 24; arrêts Asemfo, C‑295/05, EU:C:2007:227, point 33, ainsi que Mora IPR, EU:C:2013:98, point 37).

21      Ces exigences concernant le contenu d’une demande de décision préjudicielle figurent de manière explicite à l’article 94 du règlement de procédure.

22      Il importe de souligner, en outre, que les informations contenues dans les décisions de renvoi servent non seulement à permettre à la Cour de fournir des réponses utiles, mais également à donner aux gouvernements des États membres ainsi qu’aux autres parties intéressées la possibilité de présenter des observations conformément à l’article 23 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne. Il incombe à la Cour de veiller à ce que cette possibilité soit sauvegardée, compte tenu du fait que, en vertu de cette disposition, seules les décisions de renvoi sont notifiées aux parties intéressées (voir, notamment, arrêts Holdijk e.a., 141/81 à 143/81, EU:C:1982:122, point 6; Lehtonen et Castors Braine, C‑176/96, EU:C:2000:201, point 23, ainsi que ordonnance Calestani et Lunardi, C‑292/09 et C‑293/09, EU:C:2010:7, point 23).

23      Or, en l’occurrence, la présente demande de décision préjudicielle ne répond manifestement pas à ces exigences.

24      Tout d’abord, la juridiction de renvoi ne fournit pas d’indications suffisamment circonstanciées relatives au cadre juridique national qui permettraient aux parties intéressées de présenter des observations et à la Cour de fournir des réponses utiles. En effet, elle se limite à indiquer que la rémunération de base du procureur se définit en échelons, dont le montant se calcule en appliquant des coefficients à l’assiette de la rémunération de base visée à l’article 61 a de la loi sur le ministère public, mais n’expose pas la teneur précise de cette disposition.

25      Ensuite, la juridiction de renvoi n’explique pas non plus la raison pour laquelle les dispositions nationales concernées par la demande de décision préjudicielle ont conduit à une différence de traitement entre des procureurs ayant les mêmes fonctions et la même ancienneté. Elle s’est en effet bornée à indiquer, d’une part, que, «après avoir effectué le classement des procureurs du ministère public régional de Płock dans les différentes catégories auxquelles correspondent des échelons de rémunération de base, il est apparu que des procureurs ayant une ancienneté moindre ont bénéficié de rémunérations supérieures à celles de leurs collègues ayant une plus grande ancienneté». D’autre part, cette juridiction précise uniquement que, si Mme Leśniak-Jaworska avait été nommée à un poste de procureur auprès du ministère public régional trois mois plus tard, c’est-à-dire au 1er janvier 2009, elle aurait bénéficié, en application des dispositions polonaises, d’un classement au sixième échelon de rémunération, et non au cinquième échelon.

26      La juridiction de renvoi se borne à indiquer, à titre d’élément de comparaison, que, Mme Głuchowska-Szmulewicz bénéficiant d’une ancienneté dans l’emploi de procureur auprès du ministère public régional de plus de cinq ans au 1er janvier 2009, elle avait le droit d’accéder à l’échelon supérieur seulement dix ans après sa nomination à ce poste, c’est-à-dire au 1er octobre 2012, alors qu’une partie des procureurs du ministère public régional ayant une ancienneté inférieure à cinq ans a perçu une rémunération au cinquième échelon à partir du 1er janvier 2009, puis quelques mois plus tard, au sixième échelon, après avoir acquis une ancienneté de cinq ans depuis la date de nomination à un poste au sein du ministère public régional.

27      Enfin, la juridiction de renvoi n’explique nullement les raisons précises pour lesquelles l’interprétation du droit de l’Union sollicitée lui semble nécessaire aux fins de la solution du litige au principal. En particulier, la décision de renvoi ne contient aucun élément permettant d’établir un lien entre les dispositions nationales concernées par la demande de décision préjudicielle et l’un des motifs visés à l’article 1er de la directive 2000/78.

28      Partant, la demande de décision préjudicielle n’a pas atteint, conformément aux exigences rappelées aux points 18 à 20 de la présente ordonnance, le niveau de clarté et de précision suffisant pour permettre à la Cour de statuer.

29      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de constater, en application de l’article 53, paragraphe 2, du règlement de procédure, que la présente demande de décision préjudicielle est manifestement irrecevable.

 Sur les dépens

30      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Par ces motifs, la Cour (septième chambre) dit pour droit:

La demande de décision préjudicielle présentée par le Sąd Rejonowy Wydział Pracy i Ubezpieczeń Społecznych w Płocku (Pologne), par décision du 12 septembre 2013, est manifestement irrecevable.

Signatures


* Langue de procédure: le polonais.

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