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Dokument 62013CJ0376
Judgment of the Court (Ninth Chamber) of 23 April 2015. # European Commission v Republic of Bulgaria. # Case C-376/13.
Sodba Sodišča (deveti senat) z dne 23. aprila 2015.
Evropska komisija proti Republika Bolgarija.
Zadeva C-376/13.
Sodba Sodišča (deveti senat) z dne 23. aprila 2015.
Evropska komisija proti Republika Bolgarija.
Zadeva C-376/13.
Oznaka ECLI: ECLI:EU:C:2015:266
ARRÊT DE LA COUR (neuvième chambre)
23 avril 2015 (*)
«Manquement d’État – Réseaux et services de communications électroniques – Directives 2002/20/CE, 2002/21/CE et 2002/77/CE – Droits d’utilisation des radiofréquences de télédiffusion numérique terrestre – Appels à candidatures – Critères de sélection des soumissionnaires – Proportionnalité – Droits spéciaux»
Dans l’affaire C‑376/13,
ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE, introduit le 2 juillet 2013,
Commission européenne, représentée par MM. G. Braun et L. Malferrari ainsi que par Mme G. Koleva, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,
partie requérante,
contre
République de Bulgarie, représentée par Mmes D. Drambozova et E. Petranova ainsi que par M. J. Atanasov, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
LA COUR (neuvième chambre),
composée de Mme K. Jürimäe (rapporteur), président de chambre, MM. J. Malenovský et M. Safjan, juges,
avocat général: M. N. Jääskinen,
greffier: M. M. Aleksejev, administrateur,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 24 septembre 2014,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,
rend le présent
Arrêt
1 Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour de constater que:
– en limitant, en vertu du point 5a, paragraphes 1 et 2, des dispositions transitoires et finales de la loi sur les communications électroniques (Zakon za elektronnite saobshteniya, DV n° 41, du 22 mai 2007, ci-après la «ZES»), à deux le nombre des entreprises auxquelles est attribué un droit d’utilisation de fréquences du spectre radioélectrique de radiodiffusion numérique terrestre (ci-après les «fréquences») et auxquelles est délivrée une autorisation de fournir des services de communications électroniques correspondants, la République de Bulgarie a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 2, paragraphe 1, de la directive 2002/77/CE de la Commission, du 16 septembre 2002, relative à la concurrence dans les marchés des réseaux et des services de communications électroniques (JO L 249, p. 21, ci-après la «directive ‘concurrence’»);
– en interdisant, en vertu des articles 47a, paragraphes 1 et 2, et 48, paragraphe 3, de la ZES, à des fournisseurs de contenu télévisuel dont les programmes ne sont pas diffusés en Bulgarie, et aux personnes qui leur sont liées, de participer aux appels à candidatures pour l’attribution des fréquences et de fournir les services correspondants, la République de Bulgarie a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2002/20/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, relative à l’autorisation de réseaux et de services de communications électroniques (directive «autorisation») (JO L 108, p. 21), telle que modifiée par la directive 2009/140/CE du Parlement européen et du Conseil, du 25 novembre 2009 (JO L 337, p. 37, ci-après la «directive ‘autorisation’»), de l’article 9, paragraphe 1, de la directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques (directive «cadre») (JO L 108, p. 33), telle que modifiée par la directive 2009/140 (ci-après la «directive-cadre»), ainsi que des articles 2, paragraphe 2, et 4, paragraphe 2, de la directive «concurrence»;
– en interdisant, en vertu de l’article 48, paragraphe 5, de la ZES, aux adjudicataires des droits d’utilisation des fréquences d’établir des réseaux de communications électroniques pour la diffusion de programmes de radio et de télévision (ci-après des «réseaux de transmission»), la République de Bulgarie a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 7, paragraphe 3, de la directive «autorisation», de l’article 9, paragraphe 1, de la directive-cadre, ainsi que des articles 2, paragraphe 2, et 4, paragraphe 2, de la directive «concurrence».
Le cadre juridique
Le droit de l’Union
La directive «concurrence»
2 Le considérant 2 de la directive «concurrence» énonce:
«L’article [106] du traité [FUE] prévoit que la Commission veille à ce que les États membres, en ce qui concerne les entreprises publiques et les entreprises auxquelles ils accordent des droits spéciaux ou exclusifs, remplissent leurs obligations au regard du droit [de l’Union]. Conformément à l’article [106], paragraphe 3, [du traité FUE] la Commission peut, d’une part, préciser et clarifier les obligations découlant de cet article et, d’autre part, définir les conditions qui sont nécessaires pour qu’elle puisse accomplir le devoir de surveillance qui lui incombe en vertu dudit paragraphe.»
3 L’article 1er de cette directive définit les notions suivantes:
«1) ‘réseau de communications électroniques’: l’équipement de transmission et, le cas échéant, de commutation et de routage et les autres ressources permettant le transport de signaux par fils, par faisceaux hertziens, par moyens optiques ou par d’autres moyens électromagnétiques, y compris les réseaux de satellites, les réseaux terrestres fixes (à commutation de circuit et de paquet, y inclus l’Internet) et mobiles ainsi que les systèmes de câbles électriques, dans la mesure où ils sont utilisés pour transmettre des signaux, les réseaux utilisés pour la radiodiffusion sonore et télévisuelle, et les réseaux câblés de télévision, quelle que soit la nature de l’information transportée;
[...]
3) ‘services de communications électroniques’: les services en principe fournis contre rémunération qui consistent, en tout ou en partie, dans le transport de signaux par des réseaux de communications électroniques, y compris les services de télécommunications et les services de transmission sur des réseaux utilisés pour la radiodiffusion, mais qui excluent les services fournissant ou exerçant un contrôle rédactionnel sur le contenu transmis au moyen de réseaux et de services de communications électroniques; ils n’englobent pas les services de la société de l’information, tels qu’ils sont définis à l’article 1er de la directive 98/34/CE [du Parlement européen et du Conseil, du 22 juin 1998, prévoyant une procédure d’information dans le domaine des normes et réglementations techniques (JO L 204, p. 37)], qui ne consistent pas, en tout ou en partie, dans le transport de signaux par des réseaux de communications électroniques;
[...]
6) ‘droits spéciaux’: les droits accordés par un État membre à un nombre limité d’entreprises au moyen de tout instrument législatif, réglementaire ou administratif qui, sur un territoire donné:
a) désigne ces entreprises autorisées à fournir un service de communications électroniques ou à exploiter une activité de communications électroniques, ou en limite le nombre à deux ou plusieurs, selon des critères qui ne sont pas objectifs, proportionnés ni non discriminatoires, ou
b) confère à des entreprises, selon des critères autres que les critères susmentionnés, des avantages légaux ou réglementaires qui affectent substantiellement la capacité de toute autre entreprise de fournir les mêmes services de communications électroniques ou d’exploiter la même activité de communications électroniques sur le même territoire dans des conditions substantiellement équivalentes;
[...]»
4 L’article 2 de ladite directive, intitulé «Droits exclusifs et spéciaux pour les réseaux et les services de communications électroniques», dispose:
«1. Les États membres ne peuvent accorder ni maintenir de droits exclusifs ou spéciaux pour l’établissement et/ou l’exploitation de réseaux de communications électroniques ou pour la fourniture de services de communications électroniques accessibles au public.
2. Les États membres prennent toutes les mesures nécessaires afin de garantir à toute entreprise le droit de fournir des services de communications électroniques ou de mettre en place, d’étendre et d’exploiter des réseaux de communications électroniques.
[...]»
5 L’article 4 de la même directive, intitulé «Droits d’utilisation des fréquences», prévoit:
«Sans préjudice des procédures et des critères particuliers qu’ils ont adoptés pour octroyer des droits d’utilisation des radiofréquences aux fournisseurs de contenu de radio ou de télédiffusion, en vue de réaliser des objectifs d’intérêt général conformément au droit [de l’Union]:
[...]
2) l’attribution des radiofréquences pour des services de communications électroniques doit être fondée sur des critères objectifs, transparents, non discriminatoires et proportionnés.»
La directive «autorisation»
6 L’article 7 de la directive «autorisation», intitulé «Procédure visant à limiter le nombre des droits d’utilisation des radiofréquences à octroyer», est libellé comme suit:
«1. Lorsqu’un État membre examine s’il convient de limiter le nombre de droits d’utilisation des radiofréquences à octroyer, ou de proroger des droits existants selon des modalités autres que celles prévues par lesdits droits, il doit notamment:
a) prendre dûment en considération la nécessité d’apporter un maximum d’avantages aux utilisateurs et de stimuler la concurrence;
b) donner à toutes les parties intéressées, dont les utilisateurs et les consommateurs, la possibilité d’exprimer leur point de vue sur une limitation éventuelle, conformément à l’article 6 de la [directive-cadre];
c) rendre publique et motiver toute décision visant à limiter l’octroi ou le renouvellement de droits d’utilisation;
d) après avoir déterminé la procédure, lancer un appel à candidatures pour l’octroi de droits d’utilisation, et
e) réexaminer la limitation à intervalles raisonnables ou à la demande des entreprises concernées, pour autant que celle-ci soit raisonnable.
2. Lorsqu’un État membre conclut que des droits d’utilisation de radiofréquences supplémentaires peuvent être accordés, il rend publique cette conclusion et lance un appel à candidatures pour l’octroi de ces droits.
3. Lorsque l’octroi des droits d’utilisation de radiofréquences doit être limité, les États membres accordent ces droits sur la base de critères de sélection objectifs, transparents, non discriminatoires et proportionnés. Ces critères de sélection doivent dûment prendre en considération la réalisation des objectifs de l’article 8 de la [directive-cadre] ainsi que les exigences de l’article 9 de cette directive.
[...]»
La directive-cadre
7 Les définitions des notions de «réseau de communications électroniques» et de «service de communications électroniques» fournies à l’article 2 de la directive-cadre sont, en substance, identiques à celles contenues à l’article 1er de la directive «concurrence».
8 L’article 7 de la directive-cadre, intitulé «Consolidation du marché intérieur des communications électroniques», prévoit:
«1. Dans l’accomplissement des tâches qui leur sont assignées en vertu de la présente directive et des directives particulières, les autorités réglementaires nationales tiennent le plus grand compte des objectifs énoncés à l’article 8, y compris ceux qui touchent au fonctionnement du marché intérieur.
2. Les autorités réglementaires nationales contribuent au développement du marché intérieur en travaillant entre elles et avec la Commission et l’[organe des régulateurs européens des communications électroniques (ORECE)], de manière transparente, afin de veiller à l’application cohérente, dans tous les États membres, des dispositions de la présente directive et des directives particulières. À cet effet, elles œuvrent en particulier avec la Commission et l’ORECE à déterminer les types d’instruments et des solutions les plus appropriés pour traiter des types particuliers de situations sur le marché.
[...]
4. Lorsque la mesure envisagée au paragraphe 3 vise à:
a) définir un marché pertinent qui diffère de ceux recensés dans la recommandation adoptée conformément à l’article 15, paragraphe 1, ou
b) décider de désigner ou non une entreprise comme disposant, individuellement ou conjointement avec d’autres, d’une puissance significative sur le marché, conformément à l’article 16, paragraphes 3, 4 ou 5,
et aurait des incidences sur les échanges entre les États membres et que la Commission a indiqué à l’autorité réglementaire nationale qu’elle estime que le projet de mesure fera obstacle au marché unique ou si elle a de graves doutes quant à sa compatibilité avec [le droit de l’Union] et en particulier avec les objectifs visés à l’article 8, l’adoption du projet de mesure est retardée de deux mois supplémentaires. Ce délai ne peut être prolongé. En pareil cas, la Commission informe les autres autorités réglementaires nationales de ses réserves.
[...]»
9 L’article 8 de cette directive, intitulé «Objectifs généraux et principes réglementaires», dispose:
«1. Les États membres veillent, dans l’accomplissement des tâches de réglementation spécifiées dans la présente directive ainsi que dans les directives particulières, à ce que les autorités réglementaires nationales prennent toutes les mesures raisonnables visant à la réalisation des objectifs définis aux paragraphes 2, 3 et 4. Ces mesures sont proportionnées à ces objectifs.
[...]
2. Les autorités réglementaires nationales promeuvent la concurrence dans la fourniture des réseaux de communications électroniques, des services de communications électroniques et des ressources et services associés, notamment:
[...]
b) en veillant à ce que la concurrence ne soit pas faussée ni entravée dans le secteur des communications électroniques, y compris pour la transmission de contenu;
[...]
d) en encourageant l’utilisation et la gestion efficaces des radiofréquences et des ressources de numérotation.
3. Les autorités réglementaires nationales contribuent au développement du marché intérieur, notamment:
a) en supprimant les derniers obstacles à la fourniture de réseaux de communications électroniques, de ressources et services associés et de services de communications électroniques au niveau européen;
[...]»
10 L’article 16 de ladite directive, intitulé «Procédure d’analyse de marché», prévoit:
«1. Les autorités réglementaires nationales effectuent une analyse des marchés pertinents en prenant en considération les marchés recensés dans la recommandation et en tenant le plus grand compte des lignes directrices. Les États membres veillent à ce que cette analyse soit effectuée, le cas échéant, en coopération avec les autorités nationales chargées de la concurrence.
[...]
4. Lorsqu’une autorité réglementaire nationale détermine qu’un marché pertinent n’est pas effectivement concurrentiel, elle identifie les entreprises qui, individuellement ou conjointement avec d’autres, sont puissantes sur ce marché conformément à l’article 14; l’autorité réglementaire nationale impose aussi à ces entreprises les obligations réglementaires spécifiques appropriées visées au paragraphe 2 du présent article ou maintient ou modifie ces obligations si elles sont déjà appliquées.
[...]»
Le droit bulgare
11 Les dispositions pertinentes du droit bulgare sont contenues dans la ZES et dans la loi modifiant et complétant la ZES (DV n° 105, du 29 décembre 2011, ci-après la «Zidzes»).
La ZES
12 L’article 47a de la ZES, dans sa rédaction initiale, disposait:
«(1) Un [fournisseur de contenu télévisuel] ne peut pas obtenir une autorisation de la [Commission de régulation des communications] pour l’utilisation [d’une fréquence] pour la fourniture de communications électroniques via des réseaux de communications électroniques de radiodiffusion numérique terrestre.
(2) La limitation en vertu du paragraphe 1 s’applique également à des personnes liées [au fournisseur] visé au paragraphe 1 au sens de la loi sur le commerce.»
13 L’article 47a de la ZES, dans sa rédaction issue de la Zidzes, prévoit:
«(1) Un [fournisseur de contenu télévisuel] qui relève de la juridiction de la République de Bulgarie ne peut pas obtenir une autorisation, de la part de la [Commission de régulation des communications], en vue de l’utilisation [d’une fréquence] ni en vue de la fourniture de communications électroniques via des réseaux de communications électroniques de radiodiffusion numérique terrestre.
(2) La limitation en vertu du paragraphe 1 s’applique également à des personnes liées [au fournisseur] visé au paragraphe 1 au sens de la loi sur le commerce.»
14 L’article 48, paragraphe 1, de la ZES dispose:
«La [Commission de régulation des communications], [...] lance un appel à candidatures en vue de la sélection d’une entreprise qui peut obtenir une autorisation d’utilisation [d’une fréquence] pour la fourniture de communications électroniques via les réseaux de communications électroniques de radiodiffusion numérique terrestre.»
15 L’article 48, paragraphe 3, de la ZES, dans sa rédaction initiale, était libellé comme suit:
«Une entreprise ou une personne qui lui est liée au sens de la loi sur le commerce, à laquelle est délivrée l’autorisation pour l’utilisation [d’une fréquence] pour la fourniture de communications électroniques via les réseaux de communications électroniques de radiodiffusion numérique terrestre, ne peut pas être un [fournisseur de contenu radio ou télévisuel] et n’a pas le droit de créer des programmes de radio ou de télévision.»
16 Dans sa rédaction issue de la Zidzes, l’article 48, paragraphe 3, de la ZES prévoit:
«Une entreprise ou une personne liée à celle-ci au sens de la loi sur le commerce, à laquelle il a été délivré une autorisation pour l’utilisation [d’une fréquence] en vue de la fourniture de communications électroniques via les réseaux de communications électroniques de radiodiffusion numérique terrestre, ne peut pas être un [fournisseur de contenu radio ou télévisuel] relevant de la juridiction de la République de Bulgarie.»
17 L’article 48, paragraphe 5, de la ZES dispose:
«Une entreprise ou une personne qui lui est liée, au sens de la loi sur le commerce, à laquelle a été délivrée une autorisation d’utilisation [d’une fréquence] pour la fourniture de communications électroniques via les réseaux de communications électroniques de radiodiffusion numérique terrestre n’a pas le droit d’établir un réseau de communications électroniques pour la transmission de programmes de radio ou de télévision.»
18 L’article 48, paragraphe 5, de la ZES a été déclaré contraire à la Constitution par la décision n° 3 du Konstitutsionen sad (Cour constitutionnelle), du 4 juin 2009 (DV n° 45, du 16 juin 2009).
19 Le point 5а des dispositions transitoires et finales de la ZES était libellé comme suit:
«(1) Dans le cadre d’une procédure en vertu de l’article 48, paragraphe 1, [de la ZES], la [Commission de régulation des communications] désigne une entreprise à laquelle elle délivre une autorisation d’utilisation [d’une fréquence] pour la fourniture de communications électroniques via les réseaux de communications électroniques de radiodiffusion numérique terrestre de portée nationale, conformément à ce qui est prévu pour la première étape du plan pour l’introduction de la diffusion de la télévision numérique par liaisons hertziennes terrestres (DVВ-Т) en République de Bulgarie, adopté par le Conseil des ministres.
(2) Parallèlement à la procédure visée au paragraphe 1, la [Commission de régulation des communications], [...] lance un appel à candidatures en vue de la sélection d’une entreprise, qui peut obtenir une autorisation d’utilisation [d’une fréquence] pour la fourniture de communications électroniques via des réseaux de communications électroniques de radiodiffusion numérique terrestre de portée nationale conformément à ce qui est prévu dans le cadre de la seconde étape du plan pour l’introduction de la diffusion de la télévision numérique par liaisons hertziennes terrestres (DVВ-Т) en République de Bulgarie, adopté par le Conseil des ministres.»
20 Le Konstitutsionen sad, dans sa décision n° 3, du 4 juin 2009, a déclaré le point 5a, paragraphe 1, des dispositions transitoires et finales de la ZES contraire à la Constitution en tant qu’il emploie les termes «procédure» et «entreprise» au singulier.
La Zidzes
21 Conformément au point 209 des dispositions transitoires et finales de la Zidzes:
«[...]
(5) À compter du 1er septembre 2013, la radiodiffusion télévisuelle analogique terrestre est abandonnée sur le territoire de la République de Bulgarie.
(6) Dans un délai de trois mois à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi, le Conseil des ministres adopte un plan d’introduction de la radiodiffusion télévisuelle numérique terrestre (DVB-T) en République de Bulgarie.
(7) Le plan visé au paragraphe 6 inclut les étapes, les délais et les conditions d’introduction de la radiodiffusion télévisuelle numérique terrestre (DVB-T).
[...]
(10) Dans le délai visé au paragraphe 5 et dans le respect des exigences du chapitre 5, la [Commission de régulation des communications] ouvre une procédure en vertu de l’article 48, paragraphe 1, [de la ZES] pour le choix d’une entreprise à laquelle il est accordé une autorisation d’utilisation d’une [fréquence] en vue de la fourniture de communications électroniques via un réseau de communications électroniques de radiodiffusion télévisuelle numérique terrestre de portée nationale.»
La procédure précontentieuse
22 Par lettre du 20 mai 2011, la Commission a mis la République de Bulgarie en demeure de formuler des observations sur la compatibilité des articles 47a et 48, paragraphes 3 et 5, de la ZES et du point 5a, paragraphes 1 et 2, des dispositions transitoires et finales de ladite loi avec les directives «concurrence», «autorisation» et la directive-cadre.
23 À cet égard, la Commission soutenait, premièrement, que, en limitant à deux le nombre des entreprises auxquelles un droit d’utilisation des fréquences est susceptible d’être attribué, le point 5a, paragraphes 1 et 2, des dispositions transitoires et finales de la ZES est de nature à restreindre la concurrence, puisqu’il entrave l’entrée sur le marché d’autres entreprises et protège de la concurrence les deux entreprises adjudicataires des fréquences.
24 Deuxièmement, la Commission considérait que l’interdiction prévue aux articles 47a et 48, paragraphe 3, de la ZES pour les fournisseurs de contenu télévisuel et les personnes qui leur sont liées de participer aux appels à candidatures pour l’attribution des droits d’utilisation des fréquences restreint la concurrence de manière disproportionnée.
25 Troisièmement, la Commission a attiré l’attention du gouvernement bulgare sur le fait que l’article 48, paragraphe 5, de la ZES pourrait restreindre la concurrence, puisqu’il interdit aux opérateurs d’un réseau de transmission de se porter candidats pour l’attribution de droits d’utilisation des fréquences.
26 La République de Bulgarie a répondu à cette mise en demeure par une lettre du 20 juillet 2011.
27 En premier lieu, cet État membre a répliqué que son choix d’attribuer, dans un premier temps, un nombre limité de droits d’utilisation des fréquences vise, d’une part, à protéger le droit constitutionnel des citoyens à recevoir un accès gratuit à l’information en préservant au maximum le pluralisme des opinions et, d’autre part, à garantir le succès de la transition de la télévision analogique à la télévision numérique. En outre, ladite limitation s’imposerait au regard des spécificités du marché de la télévision bulgare ainsi que du besoin de compétitivité des entreprises qui fourniront des services en tant qu’opérateurs de multiplexage.
28 Cependant, dans une lettre du 2 novembre 2011, la République de Bulgarie s’est engagée à lancer un nouvel appel à candidatures pour l’attribution d’un droit d’utilisation d’une fréquence supplémentaire avant la fin de l’année 2013. Dans une lettre du 6 février 2012, cet État membre a indiqué avoir adopté, à cet effet, le point 209 des dispositions transitoires et finales de la Zidzes prévoyant l’organisation d’un tel appel à candidatures.
29 En deuxième lieu, la République de Bulgarie a objecté que l’interdiction pour les fournisseurs de contenu télévisuel et les personnes qui leur sont liées de se porter candidats pour l’attribution des fréquences est justifiée au regard des objectifs d’intérêt général de promotion de la concurrence et de protection du pluralisme des opinions ainsi que de la diversité culturelle.
30 Toutefois, dans sa lettre du 2 novembre 2011, la République de Bulgarie a reconnu qu’il est disproportionné d’appliquer cette interdiction aux fournisseurs de contenu télévisuel qui ne relèvent pas de sa juridiction. Dans sa lettre du 6 février 2012, cet État membre a confirmé avoir supprimé cette interdiction.
31 En troisième lieu, la République de Bulgarie a fait valoir que l’interdiction, pour les adjudicataires des droits d’utilisation des fréquences, de mettre en place un réseau de transmission visait à assurer une concurrence effective sur le territoire bulgare. Par ailleurs, dans ses lettres du 2 novembre 2011 et du 6 février 2012, cet État membre a informé la Commission que l’article 48, paragraphe 5, de la ZES, a été déclaré inconstitutionnel par la décision n° 3 du Konstitutsionen sad, du 4 juin 2009.
32 Le 26 mars 2012, la Commission a émis un avis motivé, reçu par la République de Bulgarie le même jour, dans lequel elle invitait cet État membre à prendre les mesures nécessaires pour se conformer à cet avis dans un délai de deux mois à compter de la réception de celui-ci. Par ailleurs, la Commission a indiqué, dans cet avis, que les modifications législatives adoptées par la République de Bulgarie étaient, à elles seules, insuffisantes pour remédier aux manquements reprochés au motif que lesdites modifications n’ont pas remis en cause la validité des droits d’utilisation des fréquences attribués au cours de l’année 2009.
33 Par lettre du 24 juillet 2012, la République de Bulgarie a répondu audit avis en réitérant les arguments avancés dans sa réponse à la lettre de mise en demeure. Par ailleurs, cet État membre y soutenait avoir remédié au manquement étant donné que les articles 47a et 48, paragraphe 3, de la ZES ont été modifiés conformément aux recommandations de la Commission et que l’article 48, paragraphe 5, ZES n’est plus en application depuis le 19 juin 2009. Ledit État membre s’engageait également à nouveau à lancer un appel à candidatures de manière à permettre au nouvel adjudicataire de fournir ses services dès le 1er septembre 2013.
34 Estimant que ces modifications ne permettaient pas de remédier au manquement, la Commission a introduit le présent recours.
Sur le recours
Sur la recevabilité du recours
Argumentation des parties
35 La République de Bulgarie fait valoir que le recours de la Commission est irrecevable.
36 À cet égard, cet État membre avance, en premier lieu, avoir remédié à l’infraction qui lui était reprochée dans le délai imparti par la Commission dans l’avis motivé. En effet, premièrement, le point 5a des dispositions transitoires et finales de la ZES serait d’application unique, de sorte qu’il aurait épuisé ses effets juridiques avant le terme de ce délai, à savoir le 26 mai 2012. Deuxièmement, ce point ainsi que l’article 48, paragraphe 5, de la ZES auraient été déclarés inconstitutionnels par la décision n° 3 du Konstitutsionen sad, du 4 juin 2009, et n’auraient plus été en application à compter du 19 juin 2009, date à laquelle cette décision a pris effet. Troisièmement, les articles 47a et 48, paragraphe 3, de la ZES auraient été modifiés, à compter du 29 décembre 2011, dans un sens conforme aux recommandations de la Commission. Quatrièmement, il aurait été prévu, au point 209, paragraphe 10, des dispositions transitoires et finales de la Zidzes, entrée en vigueur également le 29 décembre 2011, de lancer un nouvel appel à candidatures pour l’attribution d’une fréquence supplémentaire.
37 En second lieu, la République de Bulgarie avance que, dans de telles circonstances, le principe de coopération loyale énoncé à l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, TUE exige que la Commission indique à l’État membre faisant l’objet d’un recours en manquement quels actes ou omissions continuent, selon elle, de constituer des infractions au droit de l’Union. Or, ni l’avis motivé ni la requête introductive d’instance n’exposeraient de manière claire, cohérente et concordante les actes ou omissions que la République de Bulgarie aurait continué à accomplir en violation du droit de l’Union, après les modifications susvisées, à l’échéance fixée dans l’avis motivé. Par ailleurs, la Commission devrait, le cas échéant, indiquer les mesures à prendre afin de remédier aux conséquences de l’infraction alléguée.
38 La Commission estime le présent recours recevable.
39 En premier lieu, elle souligne que la République de Bulgarie n’avait pas remédié aux infractions qui lui sont reprochées au terme du délai fixé dans l’avis motivé.
40 En effet, d’une part, les effets des dispositions nationales visées dans cet avis auraient perduré aussi longtemps que les droits d’utilisation des fréquences, attribués au cours de l’année 2009 sur la base desdites dispositions, sont demeurés en vigueur. Au soutien de cette thèse, la Commission invoque la jurisprudence de la Cour en matière de manquements à la réglementation relative aux marchés publics et, notamment, l’arrêt Commission/Allemagne (C‑20/01 et C‑28/01, EU:C:2003:220), dans lequel la Cour a jugé qu’un recours est recevable lorsqu’un contrat attribué sur la base de dispositions nationales contraires au droit de l’Union n’a pas été entièrement exécuté avant le terme fixé dans l’avis motivé, quand bien même lesdites dispositions avaient elles-mêmes cessé d’être applicables avant cette date. En l’occurrence, il serait constant que ces droits d’utilisation étaient toujours en vigueur au terme du délai fixé dans l’avis motivé.
41 D’autre part, le lancement d’un nouvel appel à candidatures conformément au point 209, paragraphe 10, des dispositions transitoires et finales de la Zidzes et l’entrée d’un nouvel opérateur sur le marché bulgare de la radiodiffusion numérique terrestre ne seraient pas de nature à remédier au fait que la République de Bulgarie a attribué cinq fréquences à deux opérateurs seulement et ainsi créé des droits spéciaux pour la fourniture de ces services. Par ailleurs, à supposer même que l’attribution d’une fréquence à un nouvel opérateur serait suffisante pour remédier aux infractions qui lui sont reprochées, cet État membre n’aurait lancé un appel à candidatures que le 21 janvier 2013, soit après la date fixée dans l’avis motivé.
42 En second lieu, la Commission estime avoir indiqué audit État membre, tant dans l’avis motivé que dans la requête introductive d’instance, que les modifications de la législation bulgare étaient insuffisantes et que les infractions reprochées persistaient au motif que les droits d’utilisation attribués au cours de l’année 2009 sur la base des dispositions nationales visées dans cet avis étaient encore en vigueur. En outre, il serait de jurisprudence constante que la Commission n’est pas tenue d’indiquer dans l’avis motivé ou la requête introduite devant la Cour les mesures qui permettraient de remédier au manquement reproché à l’État membre défendeur.
Appréciation de la Cour
43 Il y a lieu de rappeler que l’existence d’un manquement doit être appréciée en fonction de la situation de l’État membre telle qu’elle se présentait au terme du délai fixé dans l’avis motivé et les changements intervenus par la suite ne sauraient être pris en compte par la Cour (voir arrêt Commission/Suède, C‑185/09, EU:C:2010:59, point 9 et jurisprudence citée). En l’occurrence, le délai fixé dans l’avis motivé a expiré le 26 mai 2012.
44 À cet égard, le manquement reproché par la Commission dans le présent recours résulte de l’application des articles 47a et 48, paragraphes 3 et 5, de la ZES ainsi que du point 5a des dispositions transitoires et finales de ladite loi sur le fondement desquels la République de Bulgarie a, au cours de l’année 2009, organisé deux appels à candidatures pour l’attribution de droits d’utilisation de cinq fréquences.
45 Il convient dès lors de vérifier si, au terme du délai fixé dans l’avis motivé, les dispositions litigieuses continuaient de produire des effets (voir, en ce sens, arrêt Commission/Portugal, C‑20/09, EU:C:2011:214, point 33 et jurisprudence citée).
46 À cet égard, il ressort des observations écrites présentées par la République de Bulgarie que, à la date du 26 mai 2012, les articles 47a et 48, paragraphe 3, de la ZES avaient été modifiés dans un sens que l’État membre défendeur estime conforme aux recommandations de la Commission. De même, à cette date, l’article 48, paragraphe 5, de la ZES et le point 5a des dispositions transitoires et finales de ladite loi n’étaient plus en application.
47 Néanmoins, les droits d’utilisation des fréquences, attribués, sur le fondement de ces dispositions, pour une durée totale de 15 ans, étaient encore en vigueur au terme de ce délai.
48 Or, les directives «autorisation» et «concurrence» ainsi que la directive-cadre mettent en œuvre la libre prestation de services dans le domaine des réseaux et des services de communications électroniques (voir, en ce sens, arrêt Centro Europa 7, C‑380/05, EU:C:2008:59, points 79 et 80). Ces directives visent, notamment, à protéger les intérêts des opérateurs économiques, établis dans un État membre désirant offrir des réseaux et des services de communications électroniques dans un autre État membre.
49 Il y a lieu dès lors de considérer que la méconnaissance alléguée des dispositions des directives «autorisation» et «concurrence» ainsi que la directive-cadre est susceptible d’avoir subsisté pendant toute la durée des droits d’utilisation des fréquences attribués en violation de celles-ci (voir, par analogie, arrêt Commission/Allemagne, C‑20/01 et C‑28/01, EU:C:2003:220, points 35 et 36).
50 Par conséquent, les articles 47a et 48, paragraphes 3 et 5, de la ZES ainsi que le point 5a des dispositions transitoires et finales de ladite loi n’avaient pas épuisé tous leurs effets au terme du délai fixé dans l’avis motivé.
51 Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argument de la République de Bulgarie selon lequel cette dernière aurait remédié au manquement qui lui était reproché en attribuant, sur la base du point 209, paragraphe 10, des dispositions transitoires et finales de la Zidzes, une fréquence à un nouvel opérateur. En effet, il ressort des observations écrites présentées par cet État membre que ladite fréquence n’a été attribuée qu’au cours de l’année 2013, soit après le délai fixé dans l’avis motivé. Partant, conformément à la jurisprudence rappelée au point 43 du présent arrêt, l’attribution de cette dernière fréquence ne saurait être prise en compte par la Cour.
52 Quant à l’argument selon lequel la Commission aurait manqué au principe de coopération loyale en s’abstenant d’exposer à la République de Bulgarie la raison pour laquelle elle estimait que les modifications législatives intervenues dans cet État membre étaient sans incidence sur le manquement qui lui était reproché, il apparaît que la Commission a indiqué, dans l’avis motivé et la requête introductive d’instance, que les modifications législatives adoptées par la République de Bulgarie étaient, à elles seules, insuffisantes pour remédier aux infractions reprochées au motif que lesdites modifications n’ont pas remis en cause la validité des droits d’utilisation des fréquences attribués au cours de l’année 2009.
53 Enfin, s’agissant de l’argument de la République de Bulgarie concernant le fait que la Commission n’aurait pas indiqué à cet État membre les mesures permettant de remédier au présent manquement, il y a lieu de rappeler que le principe de coopération loyale n’impose pas à la Commission d’indiquer, dans l’avis motivé, les mesures qui permettraient d’éliminer le manquement reproché (voir, en ce sens, arrêt Commission/Grèce, C‑394/02, EU:C:2005:336, point 21 et jurisprudence citée).
54 En effet, la procédure précontentieuse a pour but de circonscrire l’objet du recours en manquement afin de donner audit État membre l’occasion de se conformer à ses obligations découlant du droit de l’Union ou de faire utilement valoir ses moyens de défense à l’encontre des griefs formulés par la Commission (arrêt Commission/Grèce, C‑394/02, EU:C:2005:336, point 22 et jurisprudence citée).
55 Étant donné qu’il revient aux États membres de déterminer les mesures à prendre afin de remédier à un manquement, ce n’est que lorsque la Commission entend faire du défaut d’adoption d’une mesure particulière l’objet de son recours en manquement qu’elle doit indiquer de manière spécifique quelle est cette mesure dans l’avis motivé (voir, en ce sens, arrêt Commission/Grèce, C‑394/02, EU:C:2005:336, point 23 et jurisprudence citée).
56 Or, l’objet du présent recours est limité à la constatation de différents manquements liés à la création de droits spéciaux pour la fourniture de services de communications électroniques et au caractère disproportionné des critères utilisés pour l’attribution des fréquences. Partant, il ne vise pas à la constatation d’un manquement fondé sur le fait que l’État membre concerné se serait abstenu de prendre une mesure spécifique.
57 Il s’ensuit que le recours de la Commission est recevable.
Sur le fond
58 Par le présent recours, la Commission reproche à la République de Bulgarie d’avoir manqué à ses obligations résultant des directives «autorisation» et «concurrence» ainsi que de la directive-cadre, dans le contexte de l’attribution, au cours de l’année 2009, des droits d’utilisation des fréquences pour la radiodiffusion numérique terrestre en Bulgarie aux entreprises Tauarkom Balgaria EAD et Hanu Pro Balgaria EAD.
59 Plus précisément, la Commission soulève trois griefs à l’encontre de l’État membre défendeur. Étant donné que les deuxième et troisième griefs présentent des éléments utiles à l’appréciation du premier grief, il y a lieu de les traiter en premier lieu.
Sur le deuxième grief relatif à l’exclusion des fournisseurs de contenu télévisuel des appels à candidatures
– Argumentation des parties
60 La Commission fait valoir que, en ayant interdit, en vertu des articles 47a, paragraphes 1 et 2, et 48, paragraphe 3, de la ZES dans leur version alors en vigueur, aux fournisseurs de contenu télévisuel dont les programmes ne sont pas diffusés en Bulgarie et aux personnes qui leur sont liées, au sens du droit bulgare, de participer aux appels à candidatures relatifs à l’attribution de droits d’utilisation des fréquences au cours de l’année 2009, la République de Bulgarie avait prévu des critères disproportionnés au regard de l’article 4, paragraphe 2, de la directive «concurrence», de l’article 7, paragraphe 3, de la directive «autorisation», et de l’article 9 de la directive-cadre. De ce fait également, la République de Bulgarie n’aurait pas garanti à toute entreprise le droit de fournir des services de communications électroniques, en violation de l’article 2, paragraphe 2, de la directive «concurrence». Or, cette interdiction, bien que modifiée, aurait continué à produire des effets à l’expiration du délai fixé dans l’avis motivé.
61 À cet égard, la Commission est d’avis qu’une telle interdiction était disproportionnée au regard des objectifs d’intérêt général avancés par la République de Bulgarie, à savoir préserver la concurrence et assurer la diversité des contenus télévisuels ainsi que garantir le pluralisme des opinions. En effet, les fournisseurs de contenu télévisuel et les personnes qui leur sont liées, qui ne sont pas autorisés à diffuser de tels contenus en Bulgarie dès lors qu’ils ne sont ni agréés ni enregistrés à cet effet, n’auraient ni intérêt ni la possibilité de privilégier le contenu télévisuel qu’ils sont aptes à fournir au détriment de celui des opérateurs de télédiffusion concurrents.
62 La Commission estime également que les objectifs avancés par la République de Bulgarie auraient pu être atteints par des moyens moins restrictifs, tels que l’imposition d’obligations de diffusion aux adjudicataires des fréquences ou encore la limitation du nombre des fréquences que chaque entreprise peut contrôler.
63 La République de Bulgarie rappelle, à titre liminaire, avoir modifié, à compter du 29 décembre 2011, les articles 47a, paragraphes 1 et 2, et 48, paragraphe 3, de la ZES, dans un sens conforme aux recommandations de la Commission. Ces dispositions seraient, depuis lors, applicables uniquement aux fournisseurs de contenu télévisuel autorisés à diffuser de tels contenus en Bulgarie parce qu’ils sont agréés ou enregistrés à cet effet.
64 En tout état de cause, interdire aux fournisseurs de contenu télévisuel et aux personnes qui leur sont liées de se porter candidats pour l’attribution des fréquences serait objectivement justifié par la nécessité d’assurer une concurrence effective et de préserver le pluralisme ainsi que la diversité des contenus télévisuels. À cet égard, la République de Bulgarie avance qu’il doit être tenu compte de la circonstance que les fournisseurs de contenu télévisuel les plus importants en Bulgarie font partie de sociétés internationales du secteur des médias qui proposent, via leurs plates-formes câble et satellite, essentiellement leurs propres programmes.
– Appréciation de la Cour
65 En vertu de l’article 4, paragraphe 2, de la directive «concurrence», de l’article 7, paragraphe 3, de la directive «autorisation» et de l’article 8, paragraphe 1, de la directive-cadre, les droits d’utilisation des radiofréquences doivent être attribués sur la base de critères objectifs, transparents, non discriminatoires et proportionnés. Cette dernière condition implique que ces critères soient propres à garantir la réalisation de l’objectif qu’ils poursuivent et n’aillent pas au-delà de ce qui est nécessaire pour qu’il soit atteint.
66 Par ailleurs, aux termes de l’article 2, paragraphe 2, de la directive «concurrence», les États membres prennent toutes les mesures nécessaires afin de garantir à toute entreprise le droit de fournir des services de communications électroniques ou de mettre en place, d’étendre et d’exploiter des réseaux de communications électroniques.
67 Il n’est pas contesté par la République de Bulgarie que, en vertu des articles 47a, paragraphes 1 et 2, et 48, paragraphe 3, de la ZES, dans leur version en vigueur au cours de l’année 2009 lors des appels à candidatures pour l’attribution des droits d’utilisation des fréquences, l’ensemble des fournisseurs de contenu télévisuel et des personnes qui leur sont liées, au sens du droit bulgare, ne pouvaient pas soumissionner aux appels à candidatures et espérer devenir adjudicataires de ces droits.
68 La République de Bulgarie avance cependant que cette interdiction visait à assurer une concurrence effective sur le marché bulgare.
69 Il y a lieu de constater que la promotion de la concurrence dans la fourniture des réseaux de communications électroniques, des services de communications électroniques et des ressources et services associés fait partie des objectifs, visés à l’article 8, paragraphe 2, de la directive-cadre, que les États membres doivent prendre en considération au titre des critères de sélection des adjudicataires des droits d’utilisation des fréquences, conformément à l’article 7, paragraphe 3, de la directive «autorisation».
70 Cependant, il apparaît que, comme le soutient la Commission, une mesure visant à interdire à l’ensemble des fournisseurs de contenu télévisuel et des personnes qui leur sont liées de participer aux appels à candidatures pour l’attribution des droits d’utilisation des fréquences va au-delà de ce qui est nécessaire pour promouvoir la concurrence.
71 En effet, s’il est possible de considérer qu’un opérateur intégré verticalement, en ce sens qu’il exploite à la fois une activité de fournisseur de contenu télévisuel et une activité en tant qu’opérateur de multiplexage, est susceptible de favoriser son propre contenu au détriment de celui des fournisseurs concurrents, un tel risque d’atteinte à la concurrence existe uniquement si cet opérateur intégré est autorisé à diffuser des programmes télévisés sur le territoire bulgare.
72 En l’occurrence, il ressort des observations écrites présentées par la République de Bulgarie que la diffusion de contenu télévisuel dans cet État membre s’effectue sur la base d’une licence attribuée par le Conseil des médias électroniques. Le risque d’atteinte à la concurrence allégué par l’État membre défendeur ne saurait donc exister en ce qui concerne les fournisseurs de contenu télévisuel qui ne disposent pas d’une telle licence.
73 Il s’ensuit que l’interdiction de participer aux appels à candidatures pour l’attribution des droits d’utilisation des fréquences, dans la mesure où elle concerne des fournisseurs de contenu télévisuel qui ne disposent pas d’une licence pour la diffusion de contenu télévisuel en Bulgarie, va au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l’objectif allégué par l’État membre défendeur.
74 Partant, l’exigence, pour les soumissionnaires des appels à candidatures pour l’attribution des droits d’utilisation des fréquences au cours de l’année 2009, de respecter l’interdiction alors édictée par les articles 47a, paragraphes 1 et 2, et 48, paragraphe 3, de la ZES constituait un critère disproportionné pour l’attribution desdites fréquences, contraire à l’article 4, paragraphe 2, de la directive «concurrence», de l’article 7, paragraphe 3, de la directive «autorisation» et de l’article 8, paragraphe 1, de la directive-cadre.
75 Certes, les articles 47a, paragraphes 1 et 2, et 48, paragraphe 3, de la ZES ont été modifiés à compter du 29 décembre 2011 par la Zidzes. Toutefois, comme il a été souligné aux points 47 à 50 du présent arrêt, ces articles continuaient de produire des effets à l’échéance fixée dans l’avis motivé. Partant, les modifications apportées à la législation bulgare par la Zidzes ne sauraient être prises en compte pour apprécier l’existence du manquement reproché dans le cadre du présent recours.
76 Il résulte de ce qui précède que le deuxième grief de la Commission est fondé.
Sur le troisième grief relatif à l’interdiction frappant les adjudicataires de droits d’utilisation de fréquences de développer un réseau de transmission de programmes de radio ou de télévision
– Argumentation des parties
77 La Commission fait valoir que, en interdisant, en vertu de l’article 48, paragraphe 5, de la ZES, aux opérateurs de multiplexage adjudicataires des droits d’utilisation des fréquences et aux personnes qui leur sont liées, au sens du droit bulgare, de développer un réseau de transmission de programmes de radio ou de télévision, la République de Bulgarie a prévu des critères disproportionnés pour l’attribution des droits d’utilisation des fréquences, au sens de l’article 4, paragraphe 2, de la directive «concurrence», de l’article 7, paragraphe 3, de la directive «autorisation» et de l’article 9 de la directive-cadre. La République de Bulgarie n’aurait, en outre, pas garanti à toute entreprise le droit de fournir des services de communications électroniques en violation de l’article 2, paragraphe 2, de la directive «concurrence».
78 En effet, une telle interdiction serait disproportionnée au regard de l’objectif allégué par la République de Bulgarie, à savoir la promotion d’une concurrence effective. D’une part, cette interdiction empêcherait les adjudicataires des fréquences de devenir opérateur d’un réseau situé dans un autre État membre alors qu’une telle circonstance ne serait pas de nature à perturber la concurrence sur le marché bulgare.
79 D’autre part, l’État membre défendeur aurait dû pallier à un éventuel problème de concurrence en recourant à des mesures ex ante dans le respect des critères et des procédures prévus aux articles 6, 7 et 15, paragraphe 3, de la directive-cadre au lieu d’exclure a priori les opérateurs de réseaux des appels à candidatures pour l’attribution des fréquences.
80 En outre, des mesures moins restrictives auraient pu être adoptées par la République de Bulgarie pour atteindre l’objectif allégué, à savoir l’imposition d’obligations de non-discrimination ou de diffusion obligatoire aux adjudicataires des droits d’utilisation des fréquences.
81 La République de Bulgarie rétorque que l’interdiction prévue à l’article 48, paragraphe 5, de la ZES a été déclarée inconstitutionnelle par le Konstitutionen sad et n’était plus en vigueur à compter du 16 juin 2009.
82 Cet État membre soutient, par ailleurs, que ladite interdiction était justifiée par l’objectif de préserver une concurrence effective sur le marché bulgare, en évitant qu’une entreprise ne possède tant l’infrastructure active que passive et n’acquière une influence décisive sur plusieurs marchés.
– Appréciation de la Cour
83 L’article 48, paragraphe 5, de la ZES prévoyait qu’une entreprise ou une personne qui lui est liée, au sens du droit bulgare, à laquelle il a été délivré un droit d’utilisation des fréquences n’a pas le droit de mettre en place un réseau de communications électroniques pour la transmission de programmes de radio ou de télévision. Comme le souligne la Commission, il y a lieu de relever qu’une telle interdiction a eu pour effet d’empêcher les opérateurs d’un réseau de télécommunications de se porter candidats pour l’attribution des droits d’utilisation des fréquences.
84 Ainsi qu’il a été relevé au point 65 du présent arrêt, les droits d’utilisation des fréquences doivent être attribués par les États membres sur la base de critères objectifs, transparents, non discriminatoires et proportionnés, cette dernière condition impliquant que ces critères soient propres à garantir la réalisation de l’objectif qu’ils poursuivent et n’aillent pas au-delà de ce qui est nécessaire pour qu’il soit atteint.
85 De même, il a été rappelé au point 68 du présent arrêt que la préservation d’une concurrence effective fait partie des objectifs visés à l’article 8 de la directive-cadre que les États membres sont tenus, conformément à l’article 7, paragraphe 3, de la directive «autorisation», de prendre en considération lors de l’établissement des critères d’attribution des droits d’utilisation des fréquences.
86 Néanmoins, il apparaît que l’interdiction édictée à l’article 48, paragraphe 5, de la ZES allait au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre un tel objectif.
87 En effet, cet objectif aurait pu être atteint en recourant à des mesures moins restrictives, telles que celles prévues par la directive-cadre, notamment à ses articles 7 et 16. Aux termes de l’article 7, paragraphe 4, de cette directive, ces mesures peuvent notamment inclure la désignation d’une entreprise comme disposant, individuellement ou conjointement, d’une puissance significative sur le marché, aux fins de lui imposer des obligations réglementaires spécifiques, conformément à l’article 16, paragraphe 4, de ladite directive.
88 Il ressort par ailleurs de l’article 16, paragraphe 1, de la directive-cadre que l’imposition de mesures ex ante visant à favoriser la concurrence ne se justifie que dans la situation où une analyse du marché pertinent a révélé un dysfonctionnement de la concurrence sur ce marché. Or, la République de Bulgarie n’a pas démontré avoir effectué une telle analyse de marché.
89 Partant, l’exigence, pour les soumissionnaires des appels à candidatures pour l’attribution des droits d’utilisation des fréquences au cours de l’année 2009, de respecter l’interdiction alors édictée à l’article 48, paragraphe 5, de la ZES constituait un critère disproportionné pour l’attribution desdites fréquences, contraire à l’article 4, paragraphe 2, de la directive «concurrence», de l’article 7, paragraphe 3, de la directive «autorisation» et de l’article 8, paragraphe 1, de la directive-cadre.
90 Enfin, ainsi qu’il a été relevé aux points 47 à 50 du présent arrêt, la circonstance que l’article 48, paragraphe 5, de la ZES ne serait plus en vigueur depuis le 16 juin 2009 ne saurait être prise en compte pour apprécier l’existence du manquement reproché par la Commission, cette disposition continuant de produire des effets à l’expiration du délai fixé dans l’avis motivé, à savoir le 26 mai 2012.
91 Il résulte de ce qui précède que le troisième grief de la Commission est fondé.
Sur le premier grief tiré de ce que la République de Bulgarie a limité à deux le nombre des entreprises susceptibles de se voir attribuer un droit d’utilisation des fréquences
– Argumentation des parties
92 Au soutien de son premier grief, la Commission relève que la République de Bulgarie a, au moyen d’un acte législatif, à savoir le point 5a des dispositions transitoires et finales de la ZES, limité à deux le nombre des entreprises pouvant recevoir un droit d’utilisation des fréquences et ainsi fournir des services en tant qu’opérateurs de multiplexage sur son territoire (ci-après la «limitation en cause»), alors que les fréquences disponibles aurait pu être attribuées à cinq entreprises différentes. En outre, cette limitation aurait été décidée sur la base de critères disproportionnés et non objectifs.
93 Selon la Commission, la République de Bulgarie a ainsi accordé des droits spéciaux pour la fourniture de services de communications électroniques par des réseaux de communications électroniques, au sens de l’article 1er, paragraphe 6, de la directive «concurrence», en violation de l’article 2, paragraphe 1, de cette même directive.
94 La Commission soutient également que la limitation en cause est disproportionnée au regard des trois objectifs d’intérêt général mis en avant par la République de Bulgarie pour la justifier, à savoir, d’abord, la nécessité d’assurer le succès du démarrage, de la réalisation et de la bonne fin de la transition de la télévision analogique à la télévision numérique (ci-après la «transition numérique»), ensuite, la protection du droit constitutionnel des citoyens bulgares d’accéder gratuitement à l’information en préservant au maximum le pluralisme des opinions et, enfin, la nécessité d’assurer la compétitivité des opérateurs de multiplexage.
95 En ce qui concerne le premier objectif invoqué par la République de Bulgarie, la Commission considère que la limitation en cause n’est pas apte à assurer la transition numérique. En effet, une plus forte pression concurrentielle, qui aurait pu être atteinte si cinq opérateurs disposaient d’un droit d’utilisation de fréquences, conduirait à des gains d’efficacité car elle inciterait chaque opérateur potentiel à accélérer la mise en place de son réseau afin d’être le plus rapidement possible, c’est-à-dire avant ses concurrents, en mesure de négocier et de conclure des contrats avec les fournisseurs de contenu télévisuel. Une telle concurrence serait de nature à accélérer la transition numérique.
96 En outre, il existerait des moyens moins restrictifs pour mener à bien la transition numérique. Selon la Commission, la République de Bulgarie aurait pu inclure dans les critères de participation aux appels à candidatures pour l’attribution des fréquences, notamment, des exigences liées à la capacité d’investissement des soumissionnaires ou encore l’obligation pour les adjudicataires de suivre un plan déterminé d’aménagement du réseau ainsi que des exigences opérationnelles déterminées.
97 Quant au deuxième objectif, relatif à la protection du droit constitutionnel des citoyens bulgares d’accéder gratuitement à l’information en préservant au maximum le pluralisme des opinions, la Commission estime que la limitation en cause n’est pas appropriée pour atteindre un tel objectif. En effet, cette limitation réduirait la pression concurrentielle pesant sur les opérateurs de multiplexage, ce qui serait de nature à entraîner une augmentation des tarifs de la diffusion. Une telle augmentation limiterait la possibilité, pour les fournisseurs de contenu télévisuel, de diffuser leurs programmes par la radiodiffusion numérique terrestre et, de ce fait, restreindrait le pluralisme des opinions ainsi que l’accès des citoyens à l’information. En revanche, un environnement plus concurrentiel obligerait les opérateurs de multiplexage à négocier la diffusion d’un plus grand nombre de programmes, ce qui favoriserait le pluralisme des opinions.
98 S’agissant de l’objectif d’assurer la compétitivité des opérateurs de multiplexage, la Commission est d’avis que celui-ci est purement économique et ne saurait être admis en tant que justification de la limitation en cause. Par ailleurs, la Cour a jugé, dans l’arrêt Ambulanz Glöckner (C‑475/99, EU:C:2001:577), que constituent précisément des droits spéciaux ceux qui sont de nature à empêcher l’entrée d’un concurrent sur le marché d’activité de leur titulaire ou sur un marché voisin pour des raisons relatives aux effets négatifs qu’aurait une telle entrée sur le fonctionnement et la rentabilité de l’activité dudit titulaire.
99 En outre, la Commission est d’avis que le fait que la République de Bulgarie s’est conformée aux exigences définies à l’article 7, paragraphe 1, de la directive «autorisation» n’implique pas que cet État membre a respecté les règles énoncées dans la directive «concurrence» et, en particulier, l’interdiction d’octroyer des droits spéciaux prévue à l’article 2, paragraphe 1, de cette dernière directive. À cet égard, le lancement d’une consultation publique et l’adoption d’une décision définitive, tels que prévus à l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), de la directive «autorisation», ne sauraient justifier des dispositions nationales contraires à l’article 2, paragraphe 1, de la directive «concurrence».
100 Enfin, la Commission estime que, malgré l’application prétendument unique du point 5a des dispositions transitoires et finales de la ZES, la limitation en cause produisait toujours des effets à l’échéance fixée dans l’avis motivé, puisque les droits octroyés dans le cadre des appels à candidatures lancés en application de cette disposition étaient toujours en vigueur à cette date.
101 La République de Bulgarie rétorque, en premier lieu, qu’elle n’a pas mis en place de droits spéciaux, au sens de l’article 2, paragraphe 1, de la directive «concurrence».
102 Elle avance, à cet égard, que le point 5a des dispositions transitoires et finales de la ZES était d’application unique et que les deux adjudications de droits d’utilisation des fréquences réalisées au cours de l’année 2009 sur cette base juridique ne constituent que les deux premières étapes de la transition numérique en Bulgarie. En effet, la décision de limiter initialement à deux le nombre d’entreprises obtenant un droit d’utilisation des fréquences se justifierait par l’absence de spectre disponible sur le territoire bulgare en 2009, une partie de ce spectre étant occupée par les autorités publiques, tandis que l’autre était utilisée par les opérateurs nationaux de télévision analogique.
103 En outre, cet État membre fait valoir que l’attribution de nouveaux droits d’utilisation en fonction de la libération de fréquences supplémentaires aurait été envisagée dès l’année 2006. C’est pourquoi une nouvelle procédure d’appel à candidatures aurait eu lieu au mois de janvier 2013 et qu’un nouvel opérateur serait d’ores et déjà entré sur le marché bulgare de la radiodiffusion numérique terrestre.
104 En second lieu, même en admettant que le point 5a des dispositions transitoires et finales de la ZES ait institué une limitation en ce qui concerne le nombre initial des entreprises pouvant obtenir un droit d’utilisation des fréquences, il ressortirait du considérant 11 et de l’article 7 de la directive «autorisation», lu en combinaison avec le considérant 8 de la directive «concurrence», qu’une procédure d’autorisation qui limite le nombre des opérateurs sur le territoire national peut être justifiée par des objectifs d’intérêt général, pour autant que les restrictions en découlant soient appropriées et n’aillent pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre lesdits objectifs. La Cour a également reconnu une telle possibilité dans son arrêt Centro Europa 7 (C‑380/05, EU:C:2008:59).
105 Au soutien de son argumentation, la République de Bulgarie avance les trois justifications évoquées au point 94 du présent arrêt.
106 À cet égard, premièrement, pour ce qui est de l’objectif de réaliser la transition numérique, visé au point 95 du présent arrêt, cet État membre soutient que le regroupement de plusieurs fréquences par opérateur et la mise en place d’un nombre limité de réseaux de diffusion assurent la viabilité des opérateurs adjudicataires et, en cela, le succès de la transition numérique. En effet, la limitation en cause permettrait des économies d’échelle, notamment lors de l’achat et de l’installation des équipements ainsi que de la mise en place des réseaux d’émissions des fréquences.
107 Deuxièmement, quant à l’objectif de garantir la protection du droit constitutionnel des citoyens bulgares d’accéder gratuitement à l’information en préservant au maximum le pluralisme des opinions, mentionné au point 97 du présent arrêt, ledit État membre soutient qu’une concurrence plus importante entre opérateurs risquerait d’entraîner une offre de contenu télévisuel plus homogène.
108 Troisièmement, en ce qui concerne la nécessité de garantir la compétitivité des opérateurs de multiplexage, visée au point 98 du présent arrêt, la République de Bulgarie justifie cette nécessité par les spécificités du marché de la radiodiffusion sur son territoire, lequel se caractérise par la prédominance des opérateurs de télédiffusion par câble et satellite.
109 Quatrièmement, enfin, l’État membre défendeur avance que les deux opérateurs de multiplexage adjudicataires des appels à candidatures de l’année 2009 ont été désignés dans le respect des procédures prévues à l’article 7 de la directive «autorisation».
– Appréciation de la Cour
110 En vertu de l’article 2, paragraphe 1, de la directive «concurrence», les États membres ne peuvent accorder ni maintenir de droits exclusifs ou spéciaux pour l’établissement et/ou l’exploitation de réseaux de communications électroniques ou pour la fourniture de services de communications électroniques accessibles au public.
111 À cet égard, aux termes de l’article 1er, paragraphe 6, de la directive «concurrence», on entend par «droits spéciaux » les droits accordés par un État membre à un nombre limité d’entreprises au moyen de tout instrument législatif, réglementaire ou administratif qui, sur un territoire donné, désigne ces entreprises autorisées à fournir un service de communications électroniques ou à exploiter une activité de communications électroniques, ou en limite le nombre à deux ou à plusieurs, selon des critères qui ne sont pas objectifs, proportionnés ou non discriminatoires, ou confère à des entreprises, selon des critères autres que les critères susmentionnés, des avantages légaux ou réglementaires qui affectent substantiellement la capacité de toute autre entreprise de fournir les mêmes services de communications électroniques ou d’exploiter la même activité de communications électroniques sur le même territoire dans des conditions substantiellement équivalentes.
112 En l’occurrence, il ressortait du point 5a des dispositions transitoires et finales de la ZES, dans sa version en vigueur au moment des appels à candidatures de l’année 2009, que, conformément à la première étape du plan pour l’introduction de la diffusion de la télévision numérique en Bulgarie, adopté par le Conseil des ministres, la Commission de régulation des communications devait désigner, dans le cadre d’un appel à candidatures, une première entreprise à laquelle elle devait délivrer un droit d’utilisation des fréquences pour la fourniture de services de communications électroniques via les réseaux de communications électroniques. Puis, conformément à la seconde étape dudit plan, cette même commission était tenue de lancer un appel à candidatures en vue de la sélection d’une entreprise distincte pour l’attribution d’un autre droit d’utilisation similaire.
113 Il apparaît que la République de Bulgarie avait par conséquent prévu, au point 5a des dispositions transitoires et finales de la ZES, que seules deux entreprises seraient titulaires de droits d’utilisation des fréquences pour la fourniture de services de communications électroniques via des réseaux de communications électroniques sur son territoire.
114 Il ressort également des observations écrites présentées par la Commission que, conformément aux prescriptions du point 5a des dispositions transitoires et finales de la ZES, seules deux entreprises, sélectionnées lors des deux appels à candidatures organisés au mois de juin 2009, disposaient, au terme du délai fixé dans l’avis motivé, d’un droit d’utilisation des fréquences aux fins de la fourniture de services commerciaux de communications électroniques en Bulgarie, circonstance que cet État membre ne conteste pas.
115 Contrairement à ce que soutient la République de Bulgarie, cette circonstance ne saurait s’expliquer par le caractère limité du spectre radioélectrique disponible dans cet État membre à l’époque des faits faisant l’objet du présent recours. En effet, il est constant que l’état du spectre disponible sur le territoire dudit État membre à cette époque permettait d’allouer cinq fréquences.
116 Or, comme l’a fait valoir la Commission lors de l’audience, le regroupement de ces cinq fréquences initiales en deux paquets, attribués pour une durée de 15 ans aux deux entreprises adjudicataires des appels à candidatures de droits d’utilisation des fréquences réalisés au cours de l’année 2009, a eu pour effet d’assurer à ces entreprises un avantage de nature à affecter substantiellement la capacité de toute autre entreprise de fournir les mêmes services de communications électroniques ou d’exploiter la même activité de communications électroniques sur le territoire bulgare dans des conditions substantiellement équivalentes, au sens de l’article 1er, paragraphe 6, de la directive «concurrence».
117 En effet, lesdites entreprises adjudicataires ont ainsi disposé d’une ressource significative en termes de spectre radioélectrique pour une durée de 15 années, acquise, qui plus est, plusieurs années avant l’entrée potentielle d’autres entreprises sur le marché des services de communications électroniques en Bulgarie, ce qui leur a permis de bénéficier d’un avantage concurrentiel certain, de nature à freiner l’arrivée de nouvelles entreprises sur ce marché. La République de Bulgarie a, par ailleurs, reconnu que la limitation en cause visait précisément à assurer la compétitivité des deux entreprises adjudicataires des appels à candidatures de l’année 2009.
118 Partant, il y a lieu de constater que, au moyen du point 5a des dispositions transitoires et finales de la ZES, la République de Bulgarie a limité à deux le nombre d’entreprises autorisées à fournir des services de communications électroniques sur son territoire, au sens de l’article 1er, paragraphe 6, de la directive «concurrence».
119 Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argument de la République de Bulgarie selon lequel cet État membre a organisé, sur la base du point 209 des dispositions transitoires et finales de la Zidzes, un nouvel appel à candidatures pour l’attribution d’une fréquence supplémentaire. En effet, comme il a été constaté au point 51 du présent arrêt, cette dernière fréquence a été attribuée au cours de l’année 2013, soit après l’échéance prévue dans l’avis motivé, de sorte que cette circonstance ne peut être prise en compte dans le cadre du présent recours.
120 Ensuite, il y a lieu de souligner que, au regard de la définition des droits spéciaux, au sens de la directive «concurrence», prévue à l’article 1er, paragraphe 6, de cette directive et rappelée au point 111 du présent arrêt, la seule constatation qu’un État membre a limité le nombre d’entreprises autorisées à fournir des services de communications électroniques sur son territoire ou accordé un avantage concurrentiel à un nombre limité d’entreprises n’est pas, en soi, suffisante pour conclure que cet État membre a mis en place des droits spéciaux. En effet, il ressort de cette définition que cette limitation ou cet avantage doivent en outre avoir été attribués sur la base de critères non objectifs, disproportionnés ou encore discriminatoires.
121 À cet égard, il est constant que deux des critères des appels à candidatures de l’année 2009 relatifs au droit d’utilisation de fréquences consistaient pour les soumissionnaires à respecter les interdictions énoncées aux articles 47a, paragraphes 1 et 2, et 48, paragraphes 3 et 5, de la ZES, lesquelles font l’objet des deuxième et troisième griefs de la Commission.
122 Or, la Commission a démontré à suffisance de droit, dans le cadre de ses deuxième et troisième griefs, le caractère disproportionné desdits critères. En effet, comme il a été constaté aux points 65 à 76 et 84 à 91 du présent arrêt, l’interdiction pour les fournisseurs de contenu télévisuel de se porter candidats aux adjudications des fréquences, en ce qu’elle concerne également les fournisseurs n’étant pas habilités à diffuser leurs programmes en Bulgarie, et l’interdiction pour les adjudicataires des droits d’utilisation de fréquences de développer un réseau de transmission allaient au-delà de ce qui était nécessaire pour atteindre l’objectif poursuivi par la République de Bulgarie.
123 Il s’ensuit que, en limitant à deux, au moyen du point 5a des dispositions transitoires et finales de la ZES, sur la base de critères disproportionnés, le nombre d’entreprises autorisées à fournir des services de communications électroniques sur son territoire, la République de Bulgarie a mis en place des droits spéciaux pour la fourniture de services de communications électroniques, en violation de l’article 2, paragraphe 1, de la directive «concurrence».
124 Au regard du caractère absolu de l’interdiction énoncée par cette disposition, il y a lieu de considérer que les droits spéciaux mis en place par la République de Bulgarie ne sont pas susceptibles d’être justifiés par les objectifs avancés par celle-ci.
125 Il s’ensuit que le premier grief de la Commission est fondé.
126 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de constater que:
– en limitant, en vertu du point 5a des dispositions transitoires et finales de la ZES, à deux le nombre des entreprises auxquelles peut être attribué un droit d’utilisation de fréquences et auxquelles est délivrée une autorisation de fournir des services de communications électroniques correspondants, la République de Bulgarie a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 2, paragraphe 1, de la directive «concurrence»;
– en interdisant, en vertu des articles 47a, paragraphes 1 et 2, et 48, paragraphe 3, de la ZES, à des fournisseurs de contenu télévisuel dont les programmes ne sont pas diffusés en Bulgarie et aux personnes qui leur sont liées de participer aux appels à candidatures pour l’attribution des fréquences et de fournir les services correspondants, la République de Bulgarie a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 7, paragraphe 3, de la directive «autorisation», de l’article 9, paragraphe 1, de la directive-cadre, ainsi que des articles 2, paragraphe 2, et 4, paragraphe 2, de la directive «concurrence»;
– en interdisant, en vertu de l’article 48, paragraphe 5, de la ZES, aux adjudicataires des droits d’utilisation des fréquences d’établir des réseaux de transmission, la République de Bulgarie a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 7, paragraphe 3, de la directive «autorisation», de l’article 9, paragraphe 1, de la directive-cadre ainsi que des articles 2, paragraphe 2, et 4, paragraphe 2, de la directive «concurrence».
Sur les dépens
127 Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République de Bulgarie et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.
Par ces motifs, la Cour (neuvième chambre) déclare et arrête:
1) En limitant, en vertu du point 5a, paragraphes 1 et 2, des dispositions transitoires et finales de la loi sur les communications électroniques (Zakon za elektronnite saobshteniya), à deux le nombre des entreprises auxquelles peut être attribué un droit d’utilisation de fréquences du spectre radioélectrique de radiodiffusion numérique terrestre et auxquelles est délivrée une autorisation de fournir des services de communications électroniques correspondants, la République de Bulgarie a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 2, paragraphe 1, de la directive 2002/77/CE de la Commission, du 16 septembre 2002, relative à la concurrence dans les marchés des réseaux et des services de communications électroniques.
2) En interdisant, en vertu des articles 47a, paragraphes 1 et 2, et 48, paragraphe 3, de la de la loi sur les communications électroniques, à des fournisseurs de contenu télévisuel dont les programmes ne sont pas diffusés en Bulgarie et aux personnes qui leur sont liées de participer aux appels à candidatures pour l’attribution des droits d’utilisation de fréquences du spectre radioélectrique de radiodiffusion numérique terrestre et de fournir les services correspondants, la République de Bulgarie a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2002/20/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, relative à l’autorisation de réseaux et de services de communications électroniques (directive «autorisation»), telle que modifiée par la directive 2009/140/CE du Parlement européen et du Conseil, du 25 novembre 2009, de l’article 9, paragraphe 1, de la directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques (directive «cadre»), telle que modifiée par la directive 2009/140, ainsi que des articles 2, paragraphe 2, et 4, paragraphe 2, de la directive 2002/77.
3) En interdisant, en vertu de l’article 48, paragraphe 5, de la loi sur les communications électroniques, aux adjudicataires des droits d’utilisation des fréquences du spectre radioélectrique de radiodiffusion numérique terrestre d’établir des réseaux de communications électroniques pour la diffusion de programmes de radio et de télévision, la République de Bulgarie a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2002/20, telle que modifiée par la directive 2009/140, de l’article 9, paragraphe 1, de la directive 2002/21, telle que modifiée par la directive 2009/140, ainsi que des articles 2, paragraphe 2, et 4, paragraphe 2, de la directive 2002/77.
4) La République de Bulgarie est condamnée aux dépens.
Signatures
* Langue de procédure: le bulgare.