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Document 61995TJ0185

Rozsudok Súdu prvého stupňa (tretia komora) z 24. septembra 1996.
Giovanni Sergio proti Komisii Európskych spoločenstiev.
Úradníci - Prevod práv na dôchodok - Všeobecné vykonávacie ustanovenia služobného poriadku - Lehota na podanie žiadosti.
Vec T-185/95.

ECLI identifier: ECLI:EU:T:1996:131

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

24 septembre 1996 ( *1 )

«Fonctionnaires — Transfert de droits à pension — Dispositions générales d'exécution du statut — Délai de présentation de la demande»

Dans l'affaire T-185/95,

Giovanni Sergio, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, représenté par Me Marc-Albert Lucas, avocat au barreau de Liège, ayant élu domicile à Luxembourg en l'étude de Me Evelyne Korn, 21, rue Nassau,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. Gianluigi Valsesia, conseiller juridique principal, et Mme Ana Maria Alves Vieira, membre du service juridique, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d'annulation de la décision de la Commission rejetant la demande de transfert des droits à pension de la partie requérante,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (troisième chambre),

composé de MM. C. P. Briët, président, B. Vesterdorf et A. Potocki, juges,

greffier: M. H. Jung,

vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 11 juillet 1996,

rend le présent

Arrêt

Cadre juridique et faits à l'origine du litige

1

Le requérant, entré au service de la Commission en 1967, a été titularisé le 1er février 1971. Auparavant, il avait été au service de l'administration communale de Cutro, province de Catanzaro (Italie), du 22 novembre 1961 au 21 novembre 1964. Selon le requérant, il a acquis, à ce titre, des droits à pension auprès du régime public italien de pension.

2

L'article 11, paragraphe 2, de l'annexe VIII du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après «statut») dispose que le fonctionnaire qui entre au service des Communautés a la faculté, «au moment de sa titularisation», de faire verser aux Communautés soit l'équivalent actuariel, soit le forfait de rachat des droits à pension d'ancienneté qu'il a acquis antérieurement, afin que ceux-ci soient pris en compte dans le régime de pension communautaire. Le paragraphe 3 du même article — inséré par le règlement (CEE, Euratom, CECA) no 2074/83 du Conseil, du 21 juillet 1983, modifiant le statut des fonctionnaires des Communautés européennes ainsi que le régime applicable aux autres agents de ces Communautés (JO L 203, p. 1) - dispose que le paragraphe 2 est également applicable au fonctionnaire «réintégré à l'expiration d'un congé de convenance personnelle prévu à l'article 40 du statut».

3

Les modalités d'exercice de cette faculté ont fait l'objet de dispositions générales d'exécution (ci-après «DGE»), arrêtées par la Commission en 1969 et ultérieurement modifiées à plusieurs reprises. Dans la version entrée en vigueur le 1er juillet 1969 et publiée au Courrier du personnel no 77, du 29 juillet 1969, il était prévu notamment que, sous peine de forclusion, la demande devait être présentée par écrit dans les six mois suivant la notification de la titularisation du fonctionnaire. L'expression «sous peine de forclusion» a été cependant supprimée du texte dans une nouvelle version arrêtée le 4 février 1972.

4

La version des DGE de l'article 11, paragraphe 2, du statut en vigueur à la date des faits litigieux a été adoptée en 1977 et publiée au Courrier du personnel du 19 octobre 1977 (ci-après «DGE de 1977»).

5

Son article 1er est libellé comme suit:

«Le fonctionnaire qui entre au service des Communautés, après avoir cessé ses fonctions auprès d'une administration, d'une organisation nationale ou internationale ou d'une entreprise, peut demander le transfert de l'équivalent actuariel ou du forfait de rachat à l'institution dont il relève.

La demande doit être introduite par écrit et dans un délai de six mois à compter, selon le cas, de la date:

de la notification de la titularisation du fonctionnaire,

où le transfert est possible,

d'entrée en vigueur des présentes dispositions.

La dernière de ces dates est d'application.»

6

Du 21 juin 1976 au 11 décembre 1978, le requérant a été en congé de convenance personnelle (ci-après «CCP»), congé au cours duquel il a accompli des études de sciences politiques à l'université d'Urbino (Italie). Selon le requérant, il est possible que la législation italienne lui ouvre pour cette raison des droits à pension ou la faculté de verser a posteriori des cotisations au régime italien des pensions.

7

Le 2 mars 1978, l'Istituto Nazionale Italiano della Previdenza Sociale, institut relevant du regime public italien de pension (ci-après «INPS»), et les Communautés européennes ont conclu un accord relatif au transfert des droits à pension acquis auprès de l'INPS vers le régime communautaire (ci-après«accord INPS»). Le texte de cet accord a été publié au Courrier du personnel no 391, du 14 juin 1978, à savoir à une date à laquelle le requérant était encore en CCP.

8

Le 29 juillet 1994, le requérant a introduit une demande au titre de l'article 90 du statut visant:

à ce que lui soit reconnue la faculté de transférer ses droits à pension acquis en Italie du 22 novembre 1961 au 21 novembre 1964;

à ce qu'il soit informé sur les conditions d'un rachat volontaire et d'un éventuel transfert des droits à pension au titre de ses études, relatifs à la période correspondant à son CCP.

9

Aucune suite n'ayant été réservée à cette demande dans le délai de quatre mois prévu à l'article 90, paragraphe 2, du statut, il a introduit, le 28 février 1995, une réclamation contre la décision implicite de rejet de sa demande. Le 10 juillet 1995, un rejet explicite de sa réclamation lui a été notifié.

Procédure et conclusions des parties

10

Par requête déposée au greffe du Tribunal le 8 octobre 1995, le requérant a introduit le présent recours.

11

Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal a décidé d'ouvrir la procédure orale sans procéder à des mesures d'instruction préalables.

12

Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries à l'audience publique le 11 juillet 1996.

13

Le requérant conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

annuler la décision attaquée;

lui reconnaître la faculté, sur la base de l'article 11, paragraphe 2, de l'annexe VIII du statut, de transférer ses droits à pension acquis en Italie du 22 novembre 1961 au 21 novembre 1964 au titre de son activité professionnelle auprès de l'administration communale de Cutro;

ordonner qu'il soit informé sur les conditions d'un rachat volontaire et d'un éventuel transfert des droits à pension au titre de ses études, relatifs à la période non couverte par des cotisations et correspondant à son CCP, à savoir du 21 juin 1976 au 8 décembre 1978;

condamner la partie défenderesse aux dépens.

14

La Commission conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

rejeter le recours comme partiellement irrecevable et pour le reste comme non fondé;

statuer comme de droit sur les dépens.

Sur la recevabilité des conclusions

15

La Commission rappelle que, selon une jurisprudence constante, s'il incombe aux institutions, conformément aux termes de l'article 176 du traité CE, de prendre les mesures adéquates d'exécution d'un arrêt en annulation, le Tribunal n'est cependant pas compétent pour prononcer des injonctions aux institutions à cet effet. Par conséquent, les chefs de conclusions du requérant seraient irrecevables dans la mesure où ils visent à obtenir que lui soit reconnue la faculté de transférer ses droits à pension acquis en Italie pour la période du 22 novembre 1961 au 21 novembre 1964 et qu'il soit informé sur les modalités d'un éventuel transfert au titre de ses études pour la période correspondant à son CCP.

16

Le requérant fait remarquer, dans sa réplique, qu'il s'en remet à l'appréciation du Tribunal sur ce point.

17

Le Tribunal relève que, pour les raisons invoquées par la Commission, les conclusions du requérant doivent être déclarées irrecevables pour autant qu'elles visent à ce que des injonctions soient adressées à la Commission (voir, par exemple, l'arrêt du Tribunal du 30 novembre 1994, G/Commission, T-588/93, RecFP p. II-875, point 26). Dès lors, seules sont recevables les conclusions visant à l'annulation de la décision attaquée et à la condamnation de la Commission aux dépens.

Sur l'annulation de la décision attaquée

Exposé sommaire des arguments des parties

18

Le requérant invoque un moyen unique tiré de ce qu'il aurait respecté le délai d'introduction de la demande de transfert de ses droits à pension.

19

Il relève, à titre liminaire, qu'il n'avait pas connaissance de l'accord INPS au moment de sa réintégration au service de la Commission en 1978, l'accord ayant été conclu et porté à la connaissance des fonctionnaires des Communautés durant la période de son CCP. En fait, il n'aurait eu connaissance des DGE de 1977 et de l'accord INPS qu'en 1987 ou 1988.

20

Le délai de six mois pour l'introduction d'une demande de transfert de droits à pension ne pourrait pas être opposé au fonctionnaire qui n'a aucune connaissance de la possibilité de transfert ouverte par la conclusion d'un accord avec l'État membre concerné (arrêt du Tribunal du 15 mars 1994, La Pietra/Commission, T-100/92, Rec. p. II-275, point 32, ci-après «arrêt La Pietra»).

21

Le requérant relève ensuite que, en 1987 ou 1988, lorsqu'il a eu connaissance de l'accord INPS et des DGE de 1977, il s'est informé auprès des services compétents de la Commission afin d'obtenir des renseignements sur les éventuelles possibilités d'un transfert de ses droits à pension vers le régime communautaire. Toutefois, il lui aurait été répondu que le délai de six mois prévu aux DGE de 1977 était un délai de forclusion et qu'il avait expiré six mois après la date de la publication de l'accord, soit le 14 décembre 1978.

22

A cet égard, le requérant invoque l'arrêt du Tribunal du 1er octobre 1992, Moretto/Commission (T-70/91, Rec. p. II-2321, ci-après «arrêt Moretto»), dans lequel il a été jugé que les DGE de 1977 n'ont pas instauré un délai de forclusion mais bien un délai simple et que, par conséquent, les fonctionnaires pouvaient se prévaloir, pour justifier une demande tardive, de situations exceptionnelles résultant de causes qui ne leur étaient pas imputables.

23

Il estime que les arrêts Moretto et La Pietra constituent des éléments qui lui ont permis d'introduire une demande de transfert dans un délai de six mois à partir du moment où il a eu une connaissance effective de ces deux arrêts. Selon lui, plusieurs approches permettent de justifier cette thèse.

24

En premier lieu, le requérant fait observer que l'arrêt La Pietra (points 31 et 32) se fonde sur une application par analogie de la jurisprudence relative au délai de recours, selon laquelle, à défaut de publication ou de notification, ce délai ne commence à courir qu'à partir du moment où l'intéressé a une connaissance exacte du contenu et des motifs de l'acte en cause, de manière à pouvoir se prévaloir valablement de son recours. Cependant, pour se prévaloir valablement de son droit au transfert des droits à pension, le requérant aurait dû savoir que le délai pour l'introduction d'une demande à cet effet ne commençait à courir qu'à partir du moment où il avait connaissance de l'accord INPS et que le délai prévu par les DGE de 1977 n'était qu'un délai simple. Les DGE de 1977 ne mentionnant ni la connaissance de l'accord comme un «dies a quo» ni le fait que le délai de six mois n'était qu'un délai simple, seule sa connaissance exacte du contenu et des motifs de l'arrêt Moretto ou de l'arrêt La Pietra aurait donc pu faire courir le délai pour l'introduction d'une demande de transfert de ses droits à pension.

25

En deuxième lieu, le requérant s'appuie sur la jurisprudence selon laquelle il est loisible de demander un réexamen de la situation administrative en fonction d'éléments nouveaux et substantiels (arrêts de la Cour du 12 juillet 1973, Tontodonati/Commission, 28/72, Rec. p. 779, point 4, du 6 octobre 1982, Williams/Cour des comptes, 9/81, Rec. p. 3301, point 14, et du 1er décembre 1983, Blomefield/Commission, 190/82, Rec. p. 3981, point 11). En effet, les arrêts La Pietra et Moretto pourraient être considérés comme des faits nouveaux et substantiels.

26

En troisième lieu, le requérant considère que, si le Tribunal a jugé que le délai instauré par la Commission n'était qu'un délai simple, la Commission ne pouvait pas soutenir le contraire durant des années sans enfreindre le principe de la sécurité juridique (voir notamment l'ordonnance du Tribunal du 7 juin 1991, Weyrich/Commission, T-14/91, Rec. p. II-235, point 48).

27

En quatrième lieu, il affirme qu'il ne pouvait prévoir ni l'évolution de la jurisprudence que l'arrêt La Pietra allait constituer ni le fait nouveau que constituerait l'arrêt Moretto, car les DGE de 1977 créaient une apparence de droit contraire à la réalité juridique. Dans ces circonstances, il y aurait eu une erreur invincible, constituant un cas de force majeure, dans l'appréciation du droit applicable. Cette erreur n'aurait cessé d'être invincible qu'à partir du moment où le requérant a eu connaissance des arrêts en cause. Au moins, pour ces mêmes raisons, le fait de ne pas avoir introduit de demande avant d'avoir eu connaissance des arrêts La Pietra et Moretto devrait être considéré comme excusable en raison d'une situation exceptionnelle résultant de causes non imputables au requérant (voir, en ce sens, l'arrêt Moretto).

28

Enfin, le requérant affirme qu'il venait de prendre connaissance de l'arrêt La Pietra au moment où il a introduit sa demande. En outre, même s'il avait connaissance de la procédure Moretto et du prononcé de l'arrêt, ce ne serait qu'en raison des références à l'arrêt Moretto faites dans l'arrêt La Pietra qu'il aurait eu une connaissance exacte du contenu de l'arrêt Moretto. A cet égard, le tract du 20 octobre 1992 relatif à l'arrêt Moretto, publié par le comité exécutif de l'Union syndicale dont le requérant est membre, n'établirait pas, contrairement à ce qu'affirme la Commission, qu'il avait à l'époque une connaissance exacte du contenu de l'arrêt. Au surplus, il ressortirait du document en cause que le comité exécutif n'a pas correctement interprété l'arrêt Moretto.

29

La Commission fait valoir que la demande du requérant du 29 juillet 1994 visant au transfert de ses droits à pension a été introduite tardivement.

30

Le délai de six mois pour l'introduction d'une demande de transfert des droits à pension du requérant aurait commencé à courir au plus tard au moment où il a eu connaissance de l'accord INPS et des DGE de 1977, à savoir, d'après l'aveu du requérant, en 1987 ou en 1988. A cet égard, la Commission souligne que les DGE de 1977 n'indiquent nullement que le délai de six mois est un délai de forclusion et que c'est, en effet, sur la base du libellé des DGE de 1977 que le Tribunal a, dans l'arrêt Moretto, jugé que la Commission avait commis une erreur de droit en ce qu'elle avait évoqué l'existence d'un délai de forclusion dans une communication adressée à son personnel.

31

Il s'ensuit, selon la Commission, que le requérant n'était pas empêché d'introduire à l'époque une demande formelle de transfert et d'utiliser, le cas échéant, les voies de recours qui lui étaient ouvertes. En effet, à supposer même que le requérant ait été persuadé qu'il était forclos en raison d'une conversation téléphonique — dont aucune trace n'a d'ailleurs pu être trouvée —, il aurait pu contester l'interprétation de la Commission à l'instar de ce qui fut, par exemple, le cas de M. Moretto.

32

En outre, la Commission fait valoir que, à supposer même que l'on doive — quod non — suivre l'argumentation du requérant selon laquelle ce n'est qu'à partir du moment où il a eu connaissance de la portée exacte de l'arrêt Moretto qu'il a pu réaliser que le délai n'était qu'un délai simple, il y aurait lieu de considérer que le requérant avait une telle connaissance plus de six mois avant l'introduction de sa demande du 29 juillet 1994.

33

A cet égard, la Commission renvoie, en premier lieu, au tract du 20 octobre 1992 du comité exécutif de l'Union syndicale, dont le requérant était membre, relatif précisément à l'arrêt Moretto. Elle conteste, en outre, que ce document démontre que le comité exécutif de l'Union syndicale, et en conséquence le requérant, n'avaient pas correctement interprété l'arrêt Moretto. En effet, s'il est vrai qu'il y est indiqué que «le Tribunal n'ayant pas statué sur le bien-fondé du délai de forclusion, la disposition de 1969 reste en vigueur», il n'en demeurerait pas moins que le document se réfère expressément aux DGE de 1969, les termes «sous peine de forclusion» ayant été supprimés dans les DGE de 1972 (voir, ci-dessus, point 3).

34

La Commission renvoie, en deuxième lieu, au procès-verbal d'une réunion interinstitutionnelle d'information du 30 novembre 1992, d'où il ressort que l'administration a eu l'occasion de préciser son interprétation de l'arrêt Moretto. Si le requérant n'a pas assisté personnellement à cette réunion, il aurait été parmi les invités en raison de sa qualité de secrétaire politique de l'Union syndicale et il y aurait lieu de considérer qu'il a eu une connaissance directe du procès-verbal de la réunion en cause, eu égard à ses fonctions et à son rôle au sein de l'organisation syndicale.

35

Enfin, en troisième lieu, la Commission renvoie à une lettre adressée en sa qualité de secrétaire politique de l'Union syndicale par le requérant au directeur général du personnel et de l'administration (annexe 5 à la duplique). Selon la Commission, cette lettre témoigne, d'une part, du véritable objet de l'action syndicale visant à remettre en question le délai de six mois et non pas la question d'un délai de forclusion, et, d'autre part, de l'intérêt direct que le requérant portait au dossier de par ses fonctions syndicales.

Appréciation du Tribunal

36

Il convient de rappeler, à titre liminaire, que les DGE de 1977 prévoient un délai de six mois pour l'introduction d'une demande de transfert de droits à pension auprès de l'administration communautaire. Il est constant que, s'il avait dû être calculé à partir des trois «dies a quo» expressément prévus aux DGE de 1977 (ci-dessus point 3), ce délai aurait expiré en l'espèce au plus tard en 1979.

37

Il convient de rappeler, en outre, que ledit délai de six mois prévu aux DGE de 1977 pour l'introduction d'une demande de transfert est raisonnable et permet une période de réflexion suffisante, sauf dans les cas où l'intéressé est confronté à une situation exceptionnelle résultant de causes qui ne lui sont pas imputables (arrêt Moretto, point 21). Cependant, il ne saurait courir qu'à partir du moment où l'intéressé a une connaissance exacte des actes administratifs qui lui ouvrent la possibilité d'introduire une demande de transfert de ses droits à pension (arrêt La Pietra, points 30 à 32).

38

En l'espèce, le requérant reconnaît avoir eu connaissance, au plus tard en 1988, des DGE de 1977 et de l'accord INPS, mais il soutient que, à l'époque, il n'a pas introduit une demande de transfert parce que le service compétent de la Commission lui avait indiqué, au cours d'une conversation téléphonique, que le délai pour l'introduction d'une demande était déjà expiré, ayant commencé à courir le jour de la publication de l'accord INPS.

39

A cet égard, le Tribunal constate que, à supposer même qu'un tel renseignement ait été donné au requérant, rien ne l'empêchait, en tout état de cause, d'introduire sa demande de transfert dans un délai de six mois à partir du moment, selon lui-même au plus tard en 1988, où il a pris connaissance effective des DGE de 1977 et de l'accord INPS. En cas de rejet de la demande, il aurait pu utiliser les voies de recours qui lui étaient ouvertes. Par conséquent, la décision du requérant de ne pas introduire à l'époque une demande formelle de transfert de ses droits à pension s'est fondée sur un choix libre de sa part, qui fait obstacle à ce qu'il soit considéré comme ayant été confronté à une situation exceptionnelle résultant de causes qui ne lui sont pas imputables.

40

En outre, il est de jurisprudence constante, en matière de délais de recours, que lorsqu'un fonctionnaire a laissé expirer le délai pour introduire un recours ou une réclamation contre une décision lui faisant grief une nouvelle jurisprudence relative à la question traitée par la décision faisant grief ne peut pas justifier la réouverture des délais (voir, par exemple, les arrêts de la Cour du 21 février 1974, Schots-Kortner e.a./Conseil, Commission et Parlement, 15/73 à 33/73, 52/73, 53/73, 57/73 à 109/73, 116/73, 117/73, 123/73, 132/73, 135/73, 136/73 et 137/73, Rec. p. 177, points 34 à 38, et du 8 mars 1988, Brown/Cour de justice, 125/87, Rec. p. 1619, points 14 et 15).

41

Le Tribunal considère que cette jurisprudence est transposable, mutatis mutandis, au cas d'espèce (voir, dans le même sens, l'arrêt La Pietra, points 30 à 32), de sorte que les arrêts La Pietra et Moretto ne sauraient avoir pour effet de rouvrir le délai pour l'introduction d'une demande de transfert.

42

Dans ces circonstances, la demande présentée le 29 juillet 1994 doit être considérée comme introduite hors du délai de six mois prévu par les DGE de 1977 et, dès lors, comme tardive.

43

Il y a lieu d'ajouter que l'arrêt Moretto ne laisse subsister aucun doute quant au caractère simple du délai de six mois (voir points 24 à 26 dudit arrêt). Il s'ensuit que, en tout état de cause, une éventuelle méconnaissance du droit de la part du requérant ne pouvait plus être considérée comme excusable à partir de la date à laquelle il avait pris connaissance de cet arrêt. Or, le requérant reconnaît avoir eu connaissance, à l'époque, de la procédure «Moretto» et du prononcé de l'arrêt dans cette affaire (voir, ci-dessus, point 28). De plus, sur la base des documents invoqués par la Commission, et notamment sur la base du tract du 20 octobre 1992 du comité exécutif de l'Union syndicale (voir, ci-dessus, point 33), comité dont le requérant était membre, il convient de constater que celui-ci avait connaissance du contenu dudit arrêt déjà en 1992. Dès lors, à supposer même que le délai de six mois pour l'introduction d'une demande de transfert de droits à pension ne doive être calculé qu'à partir de la date à laquelle le requérant a eu une connaissance effective de l'arrêt Moretto, force est de constater que la demande de transfert introduite par le requérant le 29 juillet 1994 doit, en tout état de cause, être considérée comme tardive.

44

Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le recours doit être rejeté.

Sur les dépens

45

Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Toutefois, selon l'article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. Dans ces conditions, chacune des parties supportera ses propres dépens.

 

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête:

 

1)

Le recours est rejeté comme irrecevable pour autant qu'il vise à ce que des injonctions soient adressées à la Commission.

 

2)

Le recours est rejeté comme non fondé pour le surplus.

 

3)

Chacune des parties supportera ses propres dépens.

 

Briët

Vesterdorf

Potocki

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 24 septembre 1996.

Le greffier

H. Jung

Le président

C. P. Briët


( *1 ) Langue de procédure: le français.

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