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Document 62019CO0103
Order of the Court (Seventh Chamber) of 2 June 2021.#Sindicato Único de Sanidad e Higiene (SUSH) de la Comunidad de Madrid and Sindicato de Sanidad de Madrid de la Confederación General del Trabajo (CGT) v Consejería de Sanidad de la Comunidad de Madrid.#Request for a preliminary ruling from the Juzgado Contencioso-Administrativo de Madrid.#Reference for a preliminary ruling – Article 99 of the Rules of Procedure of the Court of Justice – Framework agreement on fixed-term work concluded by ETUC, UNICE and CEEP – Clause 5(1) ‐ Successive fixed-term employment contracts in the public health sector – Concept of ‘objective reasons’ – Concept of ‘equivalent legal measures to prevent abuse’ – Substitution of the status of occasional regulated staff for that of interim regulated staff – Permanent need for temporary regulated staff.#Case C-103/19.
A Bíróság végzése (hetedik tanács), 2021. június 2.
Sindicato Único de Sanidad e Higiene (SUSH) de la Comunidad de Madrid és Sindicato de Sanidad de Madrid de la Confederación General del Trabajo (CGT) kontra Consejería de Sanidad de la Comunidad de Madrid.
A Juzgado Contencioso-Administrativo de Madrid (Spanyolország) által benyújtott előzetes döntéshozatal iránti kérelem.
Előzetes döntéshozatal – A Bíróság eljárási szabályzatának 99. cikke – Az ESZSZ, az UNICE és a CEEP által a határozott ideig tartó munkaviszonyról kötött keretmegállapodás – Az 5. szakasz 1. pontja – A közegészségügyi ágazatban az egymást követő, határozott idejű munkaszerződések – Az »objektív okok« fogalma – A »visszaélés megakadályozására irányuló megfelelő jogi intézkedések« fogalma – A kisegítő ideiglenes alkalmazottak helyettesítő alkalmazottakká való átminősítése – Az ideiglenes alkalmazottak iránti állandó szükséglet.
C-103/19. sz. ügy.
A Bíróság végzése (hetedik tanács), 2021. június 2.
Sindicato Único de Sanidad e Higiene (SUSH) de la Comunidad de Madrid és Sindicato de Sanidad de Madrid de la Confederación General del Trabajo (CGT) kontra Consejería de Sanidad de la Comunidad de Madrid.
A Juzgado Contencioso-Administrativo de Madrid (Spanyolország) által benyújtott előzetes döntéshozatal iránti kérelem.
Előzetes döntéshozatal – A Bíróság eljárási szabályzatának 99. cikke – Az ESZSZ, az UNICE és a CEEP által a határozott ideig tartó munkaviszonyról kötött keretmegállapodás – Az 5. szakasz 1. pontja – A közegészségügyi ágazatban az egymást követő, határozott idejű munkaszerződések – Az »objektív okok« fogalma – A »visszaélés megakadályozására irányuló megfelelő jogi intézkedések« fogalma – A kisegítő ideiglenes alkalmazottak helyettesítő alkalmazottakká való átminősítése – Az ideiglenes alkalmazottak iránti állandó szükséglet.
C-103/19. sz. ügy.
ECLI identifier: ECLI:EU:C:2021:460
ORDONNANCE DE LA COUR (septième chambre)
2 juin 2021 (*)
« Renvoi préjudiciel – Article 99 du règlement de procédure de la Cour – Accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée – Clause 5, point 1 – Contrats de travail à durée déterminée successifs dans le secteur public de la santé – Notion de “raisons objectives” – Notion de “mesures légales équivalentes visant à prévenir les abus” – Substitution à la qualité de personnel statutaire occasionnel de la qualité de personnel statutaire de remplacement – Besoin permanent de personnel statutaire temporaire »
Dans l’affaire C‑103/19,
ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Juzgado de lo Contencioso-Administrativo no 24 de Madrid (tribunal administratif au niveau provincial no 24 de Madrid, Espagne), par décision du 24 janvier 2019, parvenue à la Cour le 11 février 2019, dans la procédure
Sindicato Único de Sanidad e Higiene (SUSH) de la Comunidad de Madrid,
Sindicato de Sanidad de Madrid de la Confederación General del Trabajo (CGT)
contre
Consejería de Sanidad de la Comunidad de Madrid,
LA COUR (septième chambre),
composée de M. A. Kumin (rapporteur), président de chambre, M. T. von Danwitz et Mme I. Ziemele, juges,
avocat général : M. M. Bobek,
greffier : M. A. Calot Escobar,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 99 du règlement de procédure de la Cour,
rend la présente
Ordonnance
1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 2, premier alinéa, de la directive 1999/70/CE du Conseil, du 28 juin 1999, concernant l’accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée (JO 1999, L 175, p. 43), et de la clause 5, point 1, de l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée, conclu le 18 mars 1999 (ci-après l’« accord-cadre »), qui figure en annexe de cette directive.
2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant le Sindicato Único de Sanidad e Higiene (SUSH) de la Comunidad de Madrid (syndicat de la santé et de l’hygiène de la communauté de Madrid, Espagne) et le Sindicato de Sanidad de Madrid de la Confederación General del Trabajo (CGT) (syndicat de la santé de Madrid de la Confédération générale du travail, Espagne) à la Consejería de Sanidad de la Comunidad de Madrid (Servicio Madrileño de Salud) [ministère de la Santé de la communauté de Madrid (Service de santé de Madrid)] (ci-après le « Service de santé de Madrid ») au sujet de la modification de la qualité de personnel statutaire de certains agents temporaires occupant des postes vacants, employés par ce service.
Le cadre juridique
Le droit de l’Union
3 Aux termes de l’article 1er de la directive 1999/70, celle-ci vise « à mettre en œuvre l’accord-cadre [...], conclu [...] entre les organisations interprofessionnelles à vocation générale (CES, UNICE, CEEP) ».
4 L’article 2, premier alinéa, de cette directive prévoit :
« Les États membres mettent en vigueur les dispositions législatives réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive au plus tard le 10 juillet 2001 [...] [et doivent] prendre toute disposition nécessaire leur permettant d’être à tout moment en mesure de garantir les résultats imposés par la présente directive. [...] »
5 Les points 6 et 8 des considérations générales de l’accord-cadre sont rédigés comme suit :
« 6. considérant que les contrats de travail à durée indéterminée sont la forme générale de relations de travail et contribuent à la qualité de vie des travailleurs concernés et à l’amélioration de la performance ;
[...]
8. considérant que les contrats de travail à durée déterminée sont une caractéristique de l’emploi dans certains secteurs, occupations et activités qui peuvent convenir à la fois aux travailleurs et aux employeurs ».
6 Aux termes de la clause 1 de l’accord-cadre, celui-ci a pour objet, d’une part, d’améliorer la qualité du travail à durée déterminée en assurant le respect du principe de non-discrimination et, d’autre part, d’établir un cadre pour prévenir les abus résultant de l’utilisation de contrats ou de relations de travail à durée déterminée successifs.
7 La clause 5, point 1, de l’accord-cadre, intitulée « Mesures visant à prévenir l’utilisation abusive », prévoit :
« Afin de prévenir les abus résultant de l’utilisation de contrats ou de relations de travail à durée déterminée successifs, les États membres, après consultation des partenaires sociaux, conformément à la législation, aux conventions collectives et pratiques nationales, et/ou les partenaires sociaux, quand il n’existe pas des mesures légales équivalentes visant à prévenir les abus, introduisent d’une manière qui tienne compte des besoins de secteurs spécifiques et/ou de catégories de travailleurs, l’une ou plusieurs des mesures suivantes :
a) des raisons objectives justifiant le renouvellement de tels contrats ou relations de travail ;
b) la durée maximale totale de contrats ou relations de travail à durée déterminée successifs ;
c) le nombre de renouvellements de tels contrats ou relations de travail. »
Le droit espagnol
Le statut-cadre
8 La Ley 55/2003 del Estatuto Marco del personal estatutario de los servicios de salud (loi 55/2003 relative au statut-cadre du personnel statutaire des services de santé), du 16 décembre 2003 (BOE no 301, du 17 décembre 2003, p. 44742), dans sa version applicable à la date des faits au principal (ci-après le « statut-cadre »), dispose, à son article 9, intitulé « Personnel statutaire temporaire » :
« 1. Pour des raisons de nécessité, d’urgence ou pour le développement de programmes de nature temporaire, conjoncturelle ou extraordinaire, les services de santé peuvent nommer du personnel statutaire temporaire.
Le personnel statutaire temporaire peut être nommé en qualité d’agent de remplacement, d’agent occasionnel ou d’agent de substitution.
2. La nomination en tant qu’agent de remplacement est utilisée pour pourvoir temporairement un poste vacant auprès des centres ou des services de santé, lorsqu’il est nécessaire d’assurer les fonctions correspondant à ces postes.
Il est mis fin aux fonctions d’un agent de remplacement lors de la nomination, suivant la procédure prévue par la loi ou par le règlement, d’un agent ayant la qualité de personnel statutaire fixe à ce poste ou lorsque ce poste est supprimé.
3. La nomination en tant qu’agent occasionnel est utilisée dans les cas suivants :
a) pour la prestation de services déterminés de nature temporaire, conjoncturelle ou extraordinaire ;
b) lorsqu’elle est nécessaire pour garantir le fonctionnement permanent et continu des centres de santé ;
c) pour la prestation de services complémentaires pour compenser la réduction du temps de travail ordinaire.
Il est mis fin aux fonctions d’un agent occasionnel pour l’un des motifs expressément prévus dans la décision de nomination, à l’échéance du délai fixé dans cette décision ou lorsque les fonctions qui ont justifiées de recourir à cette nomination ont été supprimées.
Si plus de deux nominations surviennent pour la prestation des mêmes services pour une durée cumulée de 12 mois ou plus, sur une période de deux ans, il y a lieu d’examiner les causes de ces nominations pour déterminer, le cas échéant, s’il y a lieu de créer un poste structurel dans les équipes du centre.
[...] »
9 Aux termes de l’article 20, paragraphe 1, sous a), du statut-cadre, intitulé « Acquisition du statut de personnel statutaire fixe » :
« Le statut de personnel statutaire fixe s’acquiert lorsque les conditions suivantes ont été successivement remplies :
a) réussite aux épreuves de sélection. [...] »
Le statut de base des agents publics
10 Le Real Decreto Legislativo 5/2015 por el que se aprueba el texto refundido de la Ley del Estatuto Básico del Empleado Público (décret législatif royal 5/2015 portant approbation du texte de refonte de la loi sur le statut de base des agents publics), du 30 octobre 2015 (BOE no 261, du 31 octobre 2015, p. 103105, ci-après le « statut de base des agents publics »), prévoit, à son article 10, intitulé « Agents non titulaires » :
« 1. Sont agents non titulaires les personnes qui, pour des motifs de nécessité et d’urgence expressément justifiés, sont nommées en cette qualité pour exercer des fonctions propres aux fonctionnaires, en cas de survenance de l’un des cas de figure suivants :
a) l’existence de postes vacants non susceptibles d’être occupés par des fonctionnaires ;
[...]
[...]
4. Dans l’hypothèse visée au point a) du paragraphe 1 du présent article, les postes vacants pourvus par des agents non titulaires sont inclus dans l’offre d’emploi correspondant à l’exercice au cours duquel leur nomination intervient ou, si cela est impossible, au cours de l’exercice suivant, à moins qu’il ne soit décidé de supprimer le poste.
[...] »
11 L’article 61 du statut de base des agents publics, intitulé « Systèmes de sélection », prévoit, à son paragraphe 1 :
« Les procédures de sélection sont ouvertes et garantissent la libre concurrence, sans préjudice des dispositions du présent statut relatives à la promotion interne et à la discrimination positive. »
12 L’article 70 du statut de base des agents publics, intitulé « Offre d’emploi public », dispose, à son paragraphe 1 :
« Les besoins en ressources humaines bénéficiant d’une dotation budgétaire qui doivent être couverts par le recrutement de nouveau personnel font l’objet d’une offre d’emploi public ou sont pourvus au moyen d’un autre instrument similaire de gestion de la couverture des besoins en personnel, ce qui implique d’organiser les procédures de sélection correspondantes pour les postes prévus, jusqu’à concurrence de dix pour cent supplémentaires, et de fixer le délai maximal pour la publication des avis. En tout état de cause, la mise en œuvre de l’offre d’emploi public ou de l’instrument similaire doit se faire dans un délai non prorogeable de trois ans. »
13 Aux termes de la quatrième disposition transitoire du statut de base des agents publics, intitulée « Consolidation de l’emploi temporaire » :
« 1. L’administration publique peut publier des avis de concours en vue de consolider l’emploi à des postes structurels correspondant à ses différents corps ou catégories, postes dotés de ressources budgétaires et couverts par des agents non titulaires ou du personnel temporaire avant le 1er janvier 2005.
[...]
3. Le contenu des épreuves est en rapport avec les procédures, les tâches et les fonctions habituelles des postes faisant l’objet de chaque avis de concours. Lors de la phase de concours, pourront être appréciés, entre autres mérites, le temps de service accompli dans l’administration publique et l’expérience aux postes de travail faisant l’objet de l’avis. »
L’arrêté 406/2017
14 L’orden 406/2017 del Consejero de Sanidad, por la que se dictan instrucciones para el procedimiento extraordinario de transformación de nombramientos de personal estatutario eventual en nombramientos interinos por vacante del Servicio Madrileño de Salud [arrêté 406/2017 du ministre de la Santé de la communauté autonome de Madrid donnant instructions concernant la procédure extraordinaire de substitution à la qualité de personnel statutaire occasionnel de la qualité de personnel statutaire de remplacement pour les postes vacants du Service de santé de Madrid], du 8 mai 2017 (ci-après l’« arrêté 406/2017 »), prévoit, à son premier point, intitulé « Objet de la décision » :
« Le présent arrêté vise à donner les instructions nécessaires pour mener à bien une procédure extraordinaire de substitution à la qualité de personnel statutaire occasionnel de la qualité de personnel statutaire de remplacement pour occuper des postes vacants, conformément à l’article 9, paragraphe 2, du statut-cadre, dans les établissements de soins hospitaliers et dans le SUMMA 112 [service des urgences médicales de Madrid 112]. »
15 Le deuxième point de cet arrêté, intitulé « Champ d’application », dispose :
« Les dispositions du présent arrêté s’appliquent au personnel statutaire nommé, conformément à l’article 9, paragraphe 3, [du statut-cadre], en tant que personnel statutaire occasionnel, dans l’une quelconque des catégories statutaires, qui, à la date de publication du présent arrêté, est employé dans les établissements de soins hospitaliers et dans le SUMMA 112 du Service de santé de Madrid.
[...] »
16 Aux termes du troisième point dudit arrêté, intitulé « Conditions pour être nommé en tant que personnel statutaire de remplacement » :
« Peut être nommé en tant que personnel statutaire de remplacement, par la présente procédure extraordinaire, l’agent qui, à la date de publication du présent arrêté, est nommé en tant que personnel statutaire occasionnel et dont le contrat de travail a été renouvelé sans interruption pendant plus de deux années consécutives dans le même établissement et la même catégorie d’emploi, même s’il a été déplacé et placé sur un autre poste, à condition qu’il existe un poste vacant dans la liste des postes de l’établissement dans lequel le personnel statutaire occasionnel est employé. [...] »
Le litige au principal et les questions préjudicielles
17 Les requérants au principal ont introduit un recours en annulation contre l’arrêté 406/2017, qui prévoit une procédure extraordinaire de substitution à la qualité de personnel statutaire occasionnel de celle de personnel statutaire de remplacement. Ils demandent que cet arrêté soit déclaré nul et sans effet, au motif qu’il ne s’applique qu’aux travailleurs temporaires recrutés par le Service de santé de Madrid en tant que personnel statutaire occasionnel et non aux autres travailleurs temporaires ayant couvert des besoins permanents de ce service.
18 Il ressort de la décision de renvoi que 9 126 personnes recrutées en tant qu’agents statutaires occasionnels ont été reclassées dans la catégorie des agents statutaires de remplacement, sur le fondement dudit arrêté, pour occuper des postes vacants du Service de santé de Madrid. La juridiction de renvoi indique que ces postes sont occupés par des agents temporaires et qu’ils demeurent vacants jusqu’à ce qu’ils soient pourvus à la suite d’un concours sur titres et sur épreuves. Cette juridiction estime, d’une part, que, en intégrant les postes vacants dans l’« offre publique d’emploi », à savoir en les offrant aux personnes ayant réussi de tels concours, le Service de santé de Madrid reconnaîtrait l’utilisation de ces postes pour couvrir des besoins ordinaires et permanents du service, pérennisant ainsi le maintien d’une situation défavorable aux travailleurs à durée déterminée. Ladite juridiction expose, d’autre part, que seuls les agents temporaires qui ont bénéficié des dispositions de cet arrêté, à savoir les agents statutaires occasionnels qui ont été reclassés dans la catégorie des agents statutaires de remplacement et qui ont l’ancienneté requise, peuvent espérer stabiliser leur situation professionnelle, par la réussite aux concours sur titres et sur épreuves. À défaut, il serait mis fin à leur fonction, sans tenir compte de la durée de leur relation de travail avec le Service de santé de Madrid.
19 Selon la juridiction de renvoi, la procédure prévue par l’arrêté 406/2017 est incompatible avec l’accord-cadre tel qu’il a été interprété par la Cour, notamment dans l’arrêt du 14 septembre 2016, Pérez López (C‑16/15, EU:C:2016:679). En effet, d’une part, cet arrêté exclurait de son champ d’application tous les agents temporaires qui ont couvert des besoins permanents du Service de santé de Madrid et qui ne sont pas liés à ce dernier par une nomination en tant qu’agent statutaire occasionnel. D’autre part, ledit arrêté priverait d’effet et de sens la directive 1999/70, le Service de santé de Madrid procédant à un recours abusif à des contrats de travail à durée déterminée successifs, afin de couvrir ses besoins permanents et ordinaires. Ce service aurait ainsi examiné, avec un retard évident, la question de savoir s’il convenait de créer des postes structurels pour répondre à ces besoins. Il aurait substitué, à la qualité de personnel statutaire occasionnel des agents concernés, celle de personnel statutaire de remplacement, tout en maintenant le caractère temporaire de leur relation de travail, les agents statutaires de remplacement ne bénéficiant d’une relation de travail permanente et stable qu’après avoir réussi un concours public. De surcroît, cet abus ne serait pas sanctionné par la réglementation nationale. L’article 9, paragraphe 3, du statut-cadre ainsi que l’article 10, paragraphe 4, et l’article 70 du statut de base des agents publics n’auraient notamment pas été rigoureusement mis en œuvre, afin d’éviter un tel abus.
20 Dans ces circonstances, le Juzgado de lo Contencioso-Administrativo no 24 de Madrid (tribunal administratif au niveau provincial no 24 de Madrid, Espagne) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :
« 1) La réglementation nationale en cause au principal, à savoir l’[arrêté 406/2017], est-elle conforme à l’[accord-cadre], notamment à sa clause 5, à ses objectifs [et aux] points 6 et 8 [de ses considérations générales] ainsi qu’aux critères fixés par la Cour dans son arrêt du 14 septembre 2016, Pérez López (C‑16/15, EU:C:2016:679), dans la mesure où, dans une situation dans laquelle il a été procédé au renouvellement successif de nominations [pour des relations de travail] à durée déterminée dans le secteur de la santé publique, nominations fondées sur des dispositions du droit national qui permettaient les renouvellements afin de couvrir et de garantir des services de nature temporaire, conjoncturelle ou extraordinaire, alors que ces nominations servaient en fait à couvrir des besoins permanents et durables, l’instrument mis en œuvre [par ledit arrêté] consiste à transformer la nature de 9 126 postes de travail, le personnel statutaire occasionnel occupant ces postes devenant personnel statutaire de remplacement, le résultat de la procédure étant l’intégration de ces postes dans l’offre publique d’emploi et, partant, la fin de la relation de travail du travailleur temporaire ?
2) La juridiction de céans peut-elle à bon droit considérer que le mode de mise en œuvre de l’article 9, paragraphe 3, du statut‑cadre par l’arrêté 406/2017, tel que ce mode de mise en œuvre [par l’administration] est décrit [par la juridiction de céans], n’est conforme ni à la clause 5, aux objectifs [et aux] points 6 et 8 [des considérations générales] de l’accord-cadre ni aux critères fixés par la Cour dans son arrêt du 14 septembre 2016, Pérez López (C‑16/15, EU:C:2016:679), dans la mesure où, dans une situation dans laquelle il y a eu recours abusif aux relations de travail temporaires pour couvrir des besoins permanents et dans laquelle l’existence de défaillances structurelles est reconnue, une telle mise en œuvre permet que ledit abus ne soit jamais sanctionné, en violation des objectifs visés par la directive [1999/70], et que la situation défavorable des employés statutaires temporaires se maintienne ?
3) Est-il correct d’interpréter la clause 5, les objectifs [et les] points 6 et 8 [des considérations générales de l’accord-cadre] ainsi que les critères fixés par la Cour dans son arrêt du 14 septembre 2016, Pérez López (C‑16/15, EU:C:2016:679), comme le fait la juridiction de céans dans la présente décision, en ce sens que l’arrêté 406/2017 n’est pas conforme à l’article 2, premier alinéa, de la directive 1999/70, dans la mesure où l’État espagnol ne garantit pas les résultats imposés par cette directive, puisque, le recours abusif aux relations de travail à durée déterminée ayant eu lieu, les travailleurs ne se voient pas offrir de garanties effectives et équivalentes de protection pour sanctionner dûment cet abus et remédier aux conséquences de la violation du droit de l’Union, le recours abusif n’est pas sanctionné et il est ainsi permis que la directive [1999/70] ne s’applique pas dans le secteur de la santé ?
4) Puisque la réglementation nationale interdit d’une façon absolue, dans le secteur public, de transformer en contrat [ou en relation] de travail à durée indéterminée une succession de contrats [ou de relations] de travail à durée déterminée ou de donner un poste fixe au travailleur victime d’abus en la matière et qu’il n’existe pas, dans cette réglementation nationale, d’autre mesure effective pour éviter et, le cas échéant, sanctionner l’utilisation abusive de contrats [ou de relations] de travail à durée déterminée successifs, est-il correct d’estimer, comme le fait la juridiction de céans, que l’arrêté 406/2017 (qui met tardivement en œuvre l’article 9, paragraphe 3, du [statut-cadre]) et la procédure de sélection en libre concurrence ultérieure ne peuvent pas être considérés comme constituant des mesures effectives pour éviter et, le cas échéant, sanctionner l’utilisation abusive de contrats [ou de relations] de travail à durée déterminée, dans la mesure où, ainsi que la juridiction de céans l’estime et le réitère, l’application et le respect des objectifs imposés par la directive [1999/70] sont ainsi contournés ?
5) Convient-il de considérer qu’il n’est pas satisfait aux exigences fixées par la Cour dans son arrêt du 14 septembre 2016, Pérez López (C‑16/15, EU:C:2016:679), dans la mesure où, en violation de la [directive 1999/70], l’arrêté 406/2017 limite son champ d’application au seul personnel statutaire occasionnel, où, s’agissant des autres travailleurs temporaires dont la relation de travail a une durée excessive, l’administration ne procède pas, dans les délais indiqués par la réglementation nationale, à l’examen des causes de cette situation afin de déterminer s’il convient, le cas échéant, de créer un poste structurel dans la liste des postes de l’établissement, de sorte que la situation de précarité de ces travailleurs devient en fait permanente, où cet abus n’est pas sanctionné et où aucune mesure n’est appliquée en vue d’offrir à ces travailleurs des garanties effectives et équivalentes de protection pour sanctionner dûment cet abus et remédier aux conséquences de la violation du droit de l’Union ? »
La procédure devant la Cour
21 Par la décision du président de la Cour du 28 mars 2019, la procédure dans la présente affaire a été suspendue jusqu’au prononcé de l’arrêt du 19 mars 2020, Sánchez Ruiz e.a. (C‑103/18 et C‑429/18, EU:C:2020:219).
22 Par la lettre du 5 mai 2020, le greffe de la Cour a communiqué cet arrêt à la juridiction de renvoi et l’a invitée à lui indiquer si, à la lumière de celui-ci, elle souhaitait maintenir sa demande de décision préjudicielle.
23 Par ordonnance du 16 juin 2020, parvenue au greffe de la Cour le 17 juin 2020, le Juzgado de lo Contencioso-Administrativo no 24 de Madrid (tribunal administratif au niveau provincial no 24 de Madrid) a informé la Cour qu’il entendait maintenir sa demande de décision préjudicielle.
Sur les questions préjudicielles
24 En vertu de l’article 99 de son règlement de procédure, lorsque la réponse à une question posée à titre préjudiciel peut être clairement déduite de la jurisprudence ou lorsque la réponse à une telle question ne laisse place à aucun doute raisonnable, la Cour peut, à tout moment, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, décider de statuer par voie d’ordonnance motivée.
25 Il y a lieu de faire application de cette disposition dans le cadre de la présente affaire.
Sur les première à quatrième questions
26 Par ses première à quatrième questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si la clause 5, point 1, de l’accord-cadre doit être interprétée en ce sens que constituent des mesures adéquates aux fins de prévenir et, le cas échéant, de sanctionner les abus résultant de l’utilisation de contrats ou de relations de travail à durée déterminée successifs, au sens de cette disposition, des mesures nationales prévoyant le reclassement d’une catégorie d’agent temporaire couvrant des besoins permanents d’un service et la titularisation éventuelle de ces agents à l’issue de procédures de sélection.
27 La juridiction de renvoi se réfère, en particulier, à des mesures nationales, telles que celles adoptées, dans l’affaire au principal, sur le fondement de l’arrêté 406/2017, à savoir, selon les indications figurant dans la demande de décision préjudicielle, la substitution, à la qualité de personnel statutaire occasionnel, de celle de personnel statutaire de remplacement et l’organisation de procédures de sélection visant à pourvoir de manière définitive les postes occupés provisoirement par cette catégorie de personnel dans le cadre de relations de travail à durée déterminée.
28 Il convient de rappeler que la clause 5 de l’accord-cadre a pour but de mettre en œuvre l’un des objectifs poursuivis par celui-ci, à savoir encadrer le recours successif aux contrats ou aux relations de travail à durée déterminée, considéré comme une source potentielle d’abus au détriment des travailleurs, en prévoyant un certain nombre de dispositions protectrices minimales destinées à éviter la précarisation de la situation des salariés (arrêt du 19 mars 2020, Sánchez Ruiz e.a., C‑103/18 et C‑429/18, EU:C:2020:219, point 53 ainsi que jurisprudence citée).
29 En effet, comme cela résulte du deuxième alinéa du préambule de l’accord-cadre ainsi que des points 6 et 8 des considérations générales de celui-ci, le bénéfice de la stabilité de l’emploi est conçu comme un élément majeur de la protection des travailleurs, alors que ce n’est que dans certaines circonstances que des contrats de travail à durée déterminée sont susceptibles de répondre aux besoins tant des employeurs que des travailleurs (arrêt du 19 mars 2020, Sánchez Ruiz e.a., C‑103/18 et C‑429/18, EU:C:2020:219, point 54 ainsi que jurisprudence citée).
30 Dès lors, la clause 5, point 1, de l’accord-cadre impose aux États membres, en vue de prévenir l’utilisation abusive de contrats ou de relations de travail à durée déterminée successifs, l’adoption effective et contraignante de l’une au moins des mesures qu’elle énumère, lorsque leur droit interne ne comporte pas de mesures légales équivalentes [arrêt du 11 février 2021, M.V. e.a. (Contrats de travail à durée déterminée successifs dans le secteur public), C‑760/18, EU:C:2021:113, point 37 ainsi que jurisprudence citée].
31 La clause 5 de l’accord-cadre n’énonce pas de sanctions spécifiques dans l’hypothèse où des abus auraient été constatés. Dans un tel cas, il incombe aux autorités nationales d’adopter des mesures qui doivent revêtir un caractère non seulement proportionné, mais également suffisamment effectif et dissuasif pour garantir la pleine efficacité des normes prises en application de l’accord-cadre [arrêt du 11 février 2021, M.V. e.a. (Contrats de travail à durée déterminée successifs dans le secteur public), C‑760/18, EU:C:2021:113, point 57 ainsi que jurisprudence citée ].
32 Lorsqu’un recours abusif à des contrats ou à des relations de travail à durée déterminée successifs a été constaté, une mesure présentant des garanties effectives et équivalentes de protection des travailleurs doit pouvoir être appliquée pour sanctionner dûment cet abus et remédier aux conséquences de la violation du droit de l’Union. En effet, selon les termes mêmes de l’article 2, premier alinéa, de la directive 1999/70, les États membres doivent « prendre toute disposition nécessaire leur permettant d’être à tout moment en mesure de garantir les résultats imposés par [cette] directive » [arrêt du 11 février 2021, M.V. e.a. (Contrats de travail à durée déterminée successifs dans le secteur public), C‑760/18, EU:C:2021:113, point 59 ainsi que jurisprudence citée].
33 Il convient de rappeler, en outre, qu’il n’appartient pas à la Cour de se prononcer sur l’interprétation des dispositions du droit interne, cette mission incombant aux juridictions nationales compétentes, lesquelles doivent déterminer si les exigences édictées à la clause 5 de l’accord-cadre sont satisfaites par les dispositions de la réglementation nationale applicable (arrêt du 19 mars 2020, Sánchez Ruiz e.a., C‑103/18 et C‑429/18, EU:C:2020:219, point 89 ainsi que jurisprudence citée).
34 Il incombe donc, en l’occurrence, à la juridiction de renvoi d’apprécier dans quelle mesure les conditions d’application ainsi que la mise en œuvre effective des dispositions pertinentes du droit interne constituent une mesure adéquate pour prévenir et, le cas échéant, sanctionner l’utilisation abusive de contrats ou de relations de travail à durée déterminée successifs (arrêt du 19 mars 2020, Sánchez Ruiz e.a., C‑103/18 et C‑429/18, EU:C:2020:219, point 90).
35 La Cour, statuant sur renvoi préjudiciel, peut, néanmoins, apporter des précisions visant à guider ladite juridiction dans son appréciation (arrêt du 19 mars 2020, Sánchez Ruiz e.a., C‑103/18 et C‑429/18, EU:C:2020:219, point 91).
36 À cet égard, il convient de relever, en premier lieu, que les mesures nationales mentionnées au point 27 de la présente ordonnance ne semblent pas relever de l’une des catégories de mesures visées à la clause 5, point 1, sous a) à c), de l’accord-cadre, destinées à prévenir le recours abusif à des contrats ou à des relations de travail à durée déterminée successifs.
37 En effet, premièrement, il ressort du dossier soumis à la Cour que la réglementation nationale en cause au principal ne prévoit pas de limite concernant le nombre de renouvellements de tels contrats ou relations de travail, ni la durée maximale totale de ces contrats ou relations de travail, au sens du point 1, sous b) et c), de cette clause 5. L’article 9, paragraphe 3, troisième alinéa, du statut-cadre prévoit uniquement que « [s]i plus de deux nominations surviennent pour la prestation des mêmes services pour une durée cumulée de 12 mois ou plus, sur une période de deux ans, il y a lieu d’examiner les causes de ces nominations pour déterminer, le cas échéant, s’il y a lieu de créer un poste structurel dans les équipes du centre », et impose à l’administration compétente d’examiner s’il s’avère nécessaire, sous certaines conditions, de créer un poste structurel, ce qui, de surcroît, ne concerne que le personnel statutaire occasionnel.
38 Deuxièmement, même si une réglementation nationale permettant le renouvellement de contrats de travail à durée déterminée successifs pour remplacer du personnel dans l’attente de pourvoir les postes structurels créés est, en principe, susceptible d’être justifiée par une raison objective, au sens du point 1, sous a), de ladite clause 5, il convient de constater que la réglementation nationale en cause au principal ne comporte aucune obligation pour l’administration compétente de créer des postes structurels additionnels, afin de mettre un terme au recrutement de personnel statutaire temporaire. En revanche, il ressort des constatations faites par la juridiction de renvoi que les postes structurels créés seraient pourvus par la nomination de personnel statutaire de remplacement d’une nature toujours temporaire, sans qu’il existe à leur égard une limitation quant à la durée des contrats de remplacement ou quant au nombre de leurs renouvellements, de telle sorte que la situation de précarité des travailleurs se trouve, en réalité, pérennisée (voir, en ce sens, arrêt du 14 septembre 2016, Pérez López, C‑16/15, EU:C:2016:679, points 54 et 55).
39 De surcroît, la juridiction de renvoi fait état de l’existence d’un problème structurel du service public espagnol de la santé, à savoir le fait que des postes temporaires sont utilisés pour couvrir des besoins ordinaires et permanents de ce service. Ce fait serait notamment illustré par l’arrêté 406/2017 lui-même, sur la base duquel l’employeur public a pu uniquement modifier la catégorie à laquelle appartenaient 9 126 agents temporaires occupant ces postes, leur substituant la qualité de personnel statutaire de remplacement à celle de personnel statutaire occasionnel. En effet, conformément au troisième point de cet arrêté, une telle substitution est subordonnée à la condition que l’agent ait été « nommé en tant que personnel statutaire occasionnel » et que son « contrat de travail [ait] été renouvelé sans interruption pendant plus de deux années consécutives dans le même établissement et la même catégorie d’emploi ».
40 Or, une réglementation nationale qui permet le renouvellement de relations de travail à durée déterminée successives pour assurer des prestations de services déterminés de nature temporaire, conjoncturelle ou extraordinaire, n’est pas justifiée par des « raisons objectives », au sens du point 1, sous a), de la clause 5 de l’accord-cadre, lorsque, en pratique, cette législation nationale n’empêche pas l’employeur concerné de répondre, par de tels renouvellements, à des besoins permanents et durables en personnel (voir, en ce sens, arrêts du 14 septembre 2016, Pérez López, C‑16/15, EU:C:2016:679, point 56, ainsi que du 19 mars 2020, Sánchez Ruiz e.a., C‑103/18 et C‑429/18, EU:C:2020:219, point 80).
41 Dès lors, il convient de rechercher, en second lieu, si les mesures nationales mentionnées au point 27 de la présente ordonnance constituent des « mesures légales équivalentes visant à prévenir les abus », au sens de cette clause.
42 À cet égard, premièrement, s’agissant de la substitution, sur la base de l’arrêté 406/2017, à la qualité de personnel statutaire occasionnel, de la qualité de personnel statutaire de remplacement des travailleurs ayant été employés de manière abusive dans des relations de travail à durée déterminée successives, la juridiction de renvoi considère elle-même que cette mesure ne permet pas d’atteindre la finalité poursuivie par ladite clause. En effet, il ressort de la décision de renvoi que cette substitution est sans préjudice de la possibilité pour l’employeur de mettre fin aux fonctions de la personne nommée en tant que personnel statutaire de remplacement, lorsque le poste qu’elle occupe est effectivement pourvu dans le cadre d’une procédure de sélection ouverte à la libre concurrence.
43 Deuxièmement, une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, qui prévoit l’organisation de procédures de sélection visant à pourvoir de manière définitive les postes occupés provisoirement par des travailleurs à durée déterminée ainsi que des délais précis à cette fin, mais qui ne permet pas d’assurer que de telles procédures soient effectivement organisées, n’apparaît pas apte à prévenir le recours abusif, par l’employeur concerné, à des relations de travail à durée déterminée successives. Une telle réglementation n’apparaît pas non plus apte à sanctionner dûment le recours abusif à de telles relations de travail et à remédier aux conséquences de la violation du droit de l’Union, dès lors que son application n’a aucun effet négatif pour cet employeur (arrêt du 19 mars 2020, Sánchez Ruiz e.a., C‑103/18 et C‑429/18, EU:C:2020:219, point 97).
44 Il en va de même de la quatrième disposition transitoire du statut de base des agents publics, qui ne prévoit qu’une faculté, et non l’obligation, pour l’administration de consolider l’emploi à des postes occupés par des agents non titulaires ou du personnel temporaire au moyen de concours, même lorsqu’il a été constaté qu’elle recourait de manière abusive à l’utilisation de contrats ou de relations de travail à durée déterminée successifs (voir, en ce sens, arrêt du 19 mars 2020, Sánchez Ruiz e.a., C‑103/18 et C‑429/18, EU:C:2020:219, point 99).
45 Au demeurant, si l’organisation de procédures de sélection ouvertes aux travailleurs ayant été employés de manière abusive dans le cadre de relations de travail à durée déterminée successives peut permettre à ces derniers de prétendre à l’obtention d’un emploi permanent et durable et, partant, au statut de personnel statutaire fixe, les États membres demeurent néanmoins tenus de prévoir une mesure adéquate pour sanctionner le recours abusif aux contrats et aux relations de travail à durée déterminée successifs (voir, en ce sens, arrêt du 19 mars 2020, Sánchez Ruiz e.a., C‑103/18 et C‑429/18, EU:C:2020:219, point 100).
46 Or, dès lors que ces procédures, en vertu de l’article 61, paragraphe 1, du statut de base des agents publics, sont également ouvertes aux candidats qui n’ont pas été victimes d’un tel abus et ne confèrent aux travailleurs victimes d’un tel abus aucune garantie d’acquérir le statut de personnel statutaire fixe, au sens de l’article 20, paragraphe 1, du statut-cadre, elles ne sauraient constituer des mesures sanctionnant dûment le recours abusif à des contrats ou à des relations de travail à durée déterminée successifs.
47 En effet, l’organisation de telles procédures étant indépendante de toute considération relative au caractère abusif du recours à ces contrats ou relations de travail, elle n’apparaît pas apte à sanctionner dûment le recours abusif à de tels contrats ou relations de travail et à remédier aux conséquences de la violation du droit de l’Union. Elle ne semble donc pas permettre d’atteindre la finalité poursuivie par la clause 5 de l’accord-cadre (arrêt du 19 mars 2020, Sánchez Ruiz e.a., C‑103/18 et C‑429/18, EU:C:2020:219, point 101).
48 Partant, si la juridiction de renvoi devait constater qu’il n’existe, dans la réglementation nationale en cause au principal, aucune autre mesure effective pour prévenir et sanctionner les abus éventuellement constatés à l’égard d’agents du secteur public de la santé tels que ceux dont la qualité de personnel statutaire occasionnel a été remplacée, sur la base de l’arrêté 406/2017, par celle de personnel statutaire de remplacement, une telle situation serait de nature à porter atteinte à l’objectif et à l’effet utile de cette clause 5 et serait, dès lors, contraire à ladite clause (voir, en ce sens, ordonnance du 30 septembre 2020, Câmara Municipal de Gondomar, C‑135/20, non publiée, EU:C:2020:760, point 25).
49 Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de répondre aux première à quatrième questions que la clause 5 de l’accord-cadre doit être interprétée en ce sens qu’il incombe à la juridiction nationale d’apprécier, conformément à l’ensemble des règles de son droit national applicables, si des mesures nationales prévoyant le reclassement d’une catégorie d’agent temporaire, en substituant à la qualité de personnel statutaire occasionnel la qualité de personnel statutaire de remplacement, et la titularisation éventuelle de ces agents à l’issue de procédures de sélection visant à pourvoir de manière définitive les postes occupés provisoirement par ces derniers constituent des mesures adéquates pour prévenir et, le cas échéant, sanctionner les abus résultant de l’utilisation de contrats ou de relations de travail à durée déterminée successifs ou des mesures légales équivalentes, au sens de cette disposition. Dans l’hypothèse où tel ne serait pas le cas, il incombe à cette juridiction de vérifier s’il existe, dans la réglementation nationale applicable, d’autres mesures effectives pour prévenir et sanctionner ces abus.
Sur la cinquième question
50 Par sa cinquième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si la clause 5 de l’accord-cadre doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à une réglementation nationale qui réserve aux seuls agents ayant la qualité de personnel statutaire occasionnel, à l’exclusion des autres travailleurs employés à durée déterminée, la faculté d’obtenir la substitution à cette qualité de celle de personnel statutaire de remplacement, ces autres travailleurs faisant l’objet d’abus résultant de l’utilisation abusive de contrats à durée déterminée successifs à leur égard.
51 Il convient de rappeler que la clause 5 de l’accord cadre ne s’oppose pas, en principe, à ce qu’un sort différent soit réservé à la constatation d’un abus de recours à des contrats ou à des relations de travail à durée déterminée successifs selon le secteur ou la catégorie dont relève le personnel en cause, pour autant que l’ordre juridique de l’État membre concerné comporte, dans ce secteur ou à l’égard de cette catégorie de personnel, une autre mesure effective pour éviter et sanctionner les abus (arrêt du 21 novembre 2018, de Diego Porras, C‑619/17, EU:C:2018:936, point 98 et jurisprudence citée).
52 Or, en l’occurrence, selon les informations fournies par la juridiction de renvoi et ainsi qu’il ressort des points 36 à 48 de la présente ordonnance, il y a lieu de constater, sous réserve des vérifications qu’il incombe à cette juridiction d’effectuer, que la réglementation nationale en cause au principal ne paraît pas comporter de mesure adéquate aux fins de prévenir et, le cas échéant, de sanctionner les abus résultant de l’utilisation de contrats ou de relations de travail à durée déterminée successifs, au sens de la clause 5, point 1, de l’accord-cadre, à l’égard du personnel statutaire occasionnel ou de mesure légale équivalente, de sorte qu’il ne saurait être considéré qu’un sort différent est réservé à la constatation d’un abus de recours à des contrats ou à des relations de travail à durée déterminée successifs à l’égard des autres travailleurs à durée déterminée du fait de leur exclusion du champ d’application de l’arrêté 406/2017, tel que défini à son deuxième point.
53 Toutefois, à supposer que la juridiction de renvoi considère, à l’issue de l’examen qui lui incombe, visé au point 49 de la présente ordonnance, que la réglementation en cause au principal prévoit une mesure adéquate pour prévenir et sanctionner les abus résultant de l’utilisation de contrats ou de relations de travail à durée déterminée successifs ou une mesure légale équivalente, au sens de cette clause 5, qui est réservée au personnel statutaire occasionnel, à l’exclusion des autres travailleurs à durée déterminée, il reviendrait à cette juridiction de vérifier si la réglementation nationale prévoit une autre mesure effective pour prévenir et, le cas échéant, sanctionner les abus à l’égard de ces autres travailleurs à durée déterminée.
54 Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de répondre à la cinquième question que la clause 5 de l’accord-cadre doit être interprétée en ce sens qu’elle ne s’oppose pas à une réglementation nationale qui réserve aux seuls agents ayant la qualité de personnel statutaire occasionnel la faculté d’obtenir la substitution à cette qualité de celle de personnel statutaire de remplacement, dans l’hypothèse où cette substitution constitue une mesure adéquate pour prévenir et, le cas échéant, sanctionner les abus résultant de l’utilisation de contrats ou de relations de travail à durée déterminée successifs ou une mesure légale équivalente, au sens de cette disposition, dès lors qu’il existe d’autres mesures efficaces dans l’ordre juridique national pour prévenir et sanctionner de tels abus à l’égard des travailleurs à durée déterminée qui ne relèvent pas de la catégorie du personnel statutaire occasionnel, ce qu’il incombe à la juridiction nationale de vérifier.
Sur les dépens
55 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.
Par ces motifs, la Cour (septième chambre) dit pour droit :
1) La clause 5 de l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée, conclu le 18 mars 1999, qui figure à l’annexe de la directive 1999/70/CE du Conseil, du 28 juin 1999, concernant l’accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée, doit être interprétée en ce sens qu’il incombe à la juridiction nationale d’apprécier, conformément à l’ensemble des règles de son droit national applicables, si des mesures nationales prévoyant le reclassement d’une catégorie d’agent temporaire, en substituant à la qualité de personnel statutaire occasionnel la qualité de personnel statutaire de remplacement, et la titularisation éventuelle de ces agents à l’issue de procédures de sélection visant à pourvoir de manière définitive les postes occupés provisoirement par ces derniers constituent des mesures adéquates pour prévenir et, le cas échéant, sanctionner les abus résultant de l’utilisation de contrats ou de relations de travail à durée déterminée successifs ou des mesures légales équivalentes, au sens de cette disposition. Dans l’hypothèse où tel ne serait pas le cas, il incombe à cette juridiction de vérifier s’il existe, dans la réglementation nationale applicable, d’autres mesures effectives pour prévenir et sanctionner ces abus.
2) La clause 5 de l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée, conclu le 18 mars 1999, qui figure en annexe de la directive 1999/70, doit être interprétée en ce sens qu’elle ne s’oppose pas à une réglementation nationale qui réserve aux seuls agents ayant la qualité de personnel statutaire occasionnel la faculté d’obtenir la substitution à cette qualité de celle de personnel statutaire de remplacement, dans l’hypothèse où cette substitution constitue une mesure adéquate pour prévenir et, le cas échéant, sanctionner les abus résultant de l’utilisation de contrats ou de relations de travail à durée déterminée successifs ou une mesure légale équivalente, au sens de cette disposition, dès lors qu’il existe d’autres mesures efficaces dans l’ordre juridique national pour prévenir et sanctionner de tels abus à l’égard des travailleurs à durée déterminée qui ne relèvent pas de la catégorie du personnel statutaire occasionnel, ce qu’il incombe à la juridiction nationale de vérifier.
Signatures
* Langue de procédure : l’espagnol.