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Document 62017CO0395

Order of the Court (First Chamber) of 26 April 2022.
European Commission v Kingdom of the Netherlands.
Application for interpretation – Manifest inadmissibility.
Case C-395/17 INT.

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2022:335

ORDONNANCE DE LA COUR (première chambre)

26 avril 2022 (*)

« Demande en interprétation – Irrecevabilité manifeste »

Dans l’affaire C‑395/17 INT,

ayant pour objet une demande en interprétation de l’arrêt du 31 octobre 2019, Commission/Pays-Bas (C‑395/17, EU:C:2019:918), introduite le 29 octobre 2021, en vertu de l’article 43 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 158 du règlement de procédure de la Cour,

Royaume des Pays-Bas, représenté par Mmes M. K. Bulterman et P. Huurnink, en qualité d’agents,

LA COUR (première chambre),

composée de M. A. Arabadjiev, président de chambre, Mme I. Ziemele, MM. T. von Danwitz (rapporteur), P. G. Xuereb et A. Kumin, juges,

avocat général : M. M. Szpunar,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 159 bis du règlement de procédure de la Cour,

rend la présente

Ordonnance

1        Par requête déposée au greffe de la Cour le 29 octobre 2021, le Royaume des Pays-Bas a introduit une demande en interprétation des points 77 et 101 à 104 de l’arrêt du 31 octobre 2019, Commission/Pays-Bas (C‑395/17, ci-après l’« arrêt dont l’interprétation est demandée », EU:C:2019:918), ainsi que le point 1 du dispositif de cet arrêt.

 Le cadre juridique

2        Les dispositions du droit de l’Union, dans leurs versions applicables au litige ayant donné lieu à l’arrêt dont l’interprétation est demandée, figurent aux points 3 à 35 de cet arrêt.

3        L’article 11 du règlement (CE, Euratom) n° 1150/2000 du Conseil, du 22 mai 2000, portant application de la décision 94/728/CE, Euratom relative au système des ressources propres des Communautés (JO 2000, L 130, p. 1), disposait :

« Tout retard dans les inscriptions au compte visé à l’article 9, paragraphe 1, donne lieu au paiement, par l’État membre concerné, d’un intérêt dont le taux est égal au taux d’intérêt appliqué au jour de l’échéance sur le marché monétaire de l’État membre concerné pour les financements à court terme, majoré de deux points. Ce taux est augmenté de 0,25 point par mois de retard. Le taux ainsi augmenté est applicable à toute la période du retard. »

 L’arrêt dont l’interprétation est demandée

4        Les points 77 et 101 à 104 de l’arrêt dont l’interprétation est demandée sont libellés comme suit :

« 77      À la lumière de ces considérations, il y a lieu d’examiner, en premier lieu, si le Royaume des Pays-Bas est, en vertu des obligations lui incombant en tant qu’État membre au titre de l’article 4, paragraphe 3, TUE, responsable, vis-à-vis de l’Union [européenne], d’une éventuelle délivrance de certificats EUR. 1 par les autorités de Curaçao et d’Aruba en méconnaissance des décisions [91/482/CEE du Conseil, du 25 juillet 1991, relative à l’association des pays et territoires d’outre-mer à la Communauté économique européenne (JO 1991, L 263, p. 1), et 2001/822/CE du Conseil, du 27 novembre 2001, relative à l’association des pays et territoires d’outre-mer à la Communauté européenne (“décision d’association outre-mer”) (JO 2001, L 314, p. 1)], en deuxième lieu, s’il est tenu, en vertu de cette disposition, de compenser le montant, le cas échéant majoré d’intérêts de retard, d’une éventuelle perte de ressources propres de l’Union en résultant et, en troisième lieu, dans l’affirmative, si le manquement reproché au Royaume des Pays-Bas est fondé.

[...]

101      En ce qui concerne, plus particulièrement, le point de savoir si le montant d’une telle perte de ressources propres doit, le cas échéant, être majoré d’intérêts de retard, il suffit de relever que la seule compensation du montant des droits de douane qui n’ont pas pu être perçus ne saurait suffire à effacer les conséquences illicites d’une délivrance irrégulière d’un certificat EUR. 1.

102      Cette interprétation ne saurait être mise en cause par l’argument tiré du principe de sécurité juridique, invoqué par le Royaume des Pays-Bas et le Royaume-Uni [de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord], selon lequel une telle obligation de compensation ne saurait exister en l’absence de disposition expresse concernant celle-ci en droit de l’Union. En effet, l’obligation de compenser la perte de ressources propres résultant d’une délivrance irrégulière de certificats EUR. 1 ne constitue qu’une expression particulière de l’obligation, découlant du principe de coopération loyale, selon laquelle les États membres sont tenus de prendre toutes les mesures nécessaires afin de remédier à une violation du droit de l’Union et d’en effacer les conséquences illicites. Ainsi qu’il ressort de la jurisprudence constante rappelée au point 98 du présent arrêt, cette dernière obligation s’étend à toutes les conséquences illicites d’une violation de ce droit, notamment à celles qui sont de nature financière, telles que celles en cause en l’espèce.

103      Toutefois, les intérêts de retard ne commencent à courir qu’à partir de la date de la demande adressée à l’État membre concerné visant à compenser ladite perte de ressources propres.

104      Eu égard à l’ensemble de ces considérations, il y a lieu de conclure que l’État membre qui est responsable vis-à-vis de l’Union d’une délivrance irrégulière de certificats EUR. 1 par un [pays et territoire d’outre-mer (PTOM)] relevant de celui-ci est tenu, conformément au principe de coopération loyale, de compenser une éventuelle perte de ressources propres, majorée, le cas échéant, d’intérêts de retard. »

5        Au point 1 du dispositif de cet arrêt, la Cour a déclaré et arrêté :

« En n’ayant pas compensé la perte des ressources propres résultant de la délivrance irrégulière, au regard de la décision 91/482/CEE du Conseil, du 25 juillet 1991, relative à l’association des pays et territoires d’outre-mer à la Communauté économique européenne, puis de la décision 2001/822/CE du Conseil, du 27 novembre 2001, relative à l’association des pays et territoires d’outre-mer à la Communauté européenne, par les autorités de Curaçao et d’Aruba, de certificats de circulation des marchandises EUR. 1 en ce qui concerne, respectivement, des importations de lait en poudre et de riz en provenance de Curaçao pendant la période 1997/2000 et des importations de gruau et de semoule en provenance d’Aruba pendant la période 2002/2003, le Royaume des Pays-Bas a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 4, paragraphe 3, TUE. » 

 Conclusions et argumentation du Royaume des Pays-Bas

6        Le Royaume des Pays-Bas demande à la Cour :

–        de dire pour droit que les points 77 et 101 à 104 de l’arrêt dont l’interprétation est demandée ainsi que le point 1 du dispositif de cet arrêt doivent être interprétés en ce sens que l’élément punitif, à savoir la majoration de base de deux points et l’intérêt variable de 0,25 point par mois de retard, prévu à l’article 11 du règlement no 1150/2000, n’est pas applicable au calcul des intérêts de retard dus par le Royaume des Pays-Bas et

–        de condamner la Commission européenne aux dépens.

7        Au soutien de sa demande, le Royaume des Pays-Bas relève que l’arrêt dont l’interprétation est demandée a fondé sa responsabilité financière pour la perte de ressources propres résultant de la délivrance irrégulière de certificats EUR. 1 par un PTOM relevant de cet État membre, visée au point 1 du dispositif de cet arrêt, exclusivement sur le principe de coopération loyale consacré à l’article 4, paragraphe 3, TUE.

8        Tout en estimant qu’il n’existe aucune disposition en droit de l’Union régissant spécifiquement le calcul et le paiement d’intérêts de retard dans une telle situation, cet État membre fait valoir que, contrairement à ce que la Commission a soutenu dans le cadre de l’échange de lettres ayant eu lieu à la suite du prononcé dudit arrêt, l’article 11 du règlement no 1150/2000 n’est pas la base juridique correcte, en l’espèce, pour le calcul des intérêts de retard. Selon lui, ce calcul doit être fondé sur d’autres dispositions du droit de l’Union.

 Sur la recevabilité de la demande

9        L’article 159 bis du règlement de procédure de la Cour dispose, notamment, que, lorsqu’une demande en interprétation est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable ou manifestement non fondée, la Cour, le juge rapporteur et l’avocat général entendus, peut à tout moment décider de la rejeter, totalement ou partiellement, par voie d’ordonnance motivée.

10      Il convient de faire application de cette disposition dans la présente affaire.

11      L’article 158, paragraphe 1, du règlement de procédure dispose que, conformément à l’article 43 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, en cas de difficulté sur le sens et la portée d’un arrêt ou d’une ordonnance, il appartient à la Cour de l’interpréter, à la demande d’une partie ou d’une institution de l’Union justifiant d’un intérêt à cette fin.

12      Il est de jurisprudence constante que, eu égard à l’exigence relative  à l’existence d’une « difficulté sur le sens et la portée d’un arrêt » énoncée par ces dispositions, une demande en interprétation d’un arrêt doit, pour être recevable, viser le dispositif de l’arrêt concerné, en liaison avec les motifs essentiels de celui-ci, et tendre à dissiper une obscurité ou une ambiguïté affectant éventuellement le sens et la portée de l’arrêt lui-même en ce qu’il devait trancher l’espèce précise qui lui était soumise [voir, en ce sens, ordonnances du 3 septembre 2020, Commission/Grèce (Tsipouro), C‑91/18 INT, non publiée, EU:C:2020:654, point 8, et du 11 février 2021, WALLAPOP/EUIPO, C‑763/18 P‑INT, non publiée, EU:C:2021:109, point 6].

13      Il s’ensuit qu’une demande en interprétation n’est pas recevable lorsqu’elle vise des points qui n’ont pas été tranchés par ledit arrêt (ordonnance du 11 février 2021, WALLAPOP/EUIPO, C‑763/18 P‑INT, non publiée, EU:C:2021:109, point 7 et jurisprudence citée).

14      En l’occurrence, force est de constater que la présente demande en interprétation ne répond manifestement pas à ces exigences dès lors qu’elle porte sur une question qui n’a pas été tranchée par l’arrêt dont l’interprétation est demandée.

15      À cet égard, il convient de relever d’emblée que le recours en manquement porté devant la Cour, dans l’affaire ayant conduit à cet arrêt, ne concernait pas les modalités selon lesquelles d’éventuels intérêts de retard doivent, le cas échéant, être calculés.

16      Il ressort, en effet, du point 1 dudit arrêt que ce recours visait à la seule constatation que le Royaume des Pays-Bas avait manqué à son obligation de compenser la perte des ressources propres résultant de la délivrance irrégulière, au cours des périodes visées au point 1 du dispositif du même arrêt, de certificats EUR. 1 par un PTOM relevant de cet État membre. En particulier, ledit recours ne visait pas à demander à la Cour de constater le montant exact, le cas échéant, à compenser ni à lui demander de déterminer d’éventuels intérêts de retard.

17      En conséquence, aux points 101 à 104 de l’arrêt dont l’interprétation est demandée, la Cour s’est bornée à juger qu’un État membre qui est responsable vis-à-vis de l’Union de la délivrance irrégulière de certificats EUR. 1 par un PTOM relevant de celui-ci est tenu, conformément au principe de coopération loyale consacré à l’article 4, paragraphe 3, TUE, de compenser une éventuelle perte de ressources propres, majorée, le cas échéant, d’intérêts de retard.

18      Si la Cour a pris le soin de préciser que de tels intérêts ne commencent à courir qu’à partir de la date de la demande de compensation adressée à l’État membre concerné, elle ne s’est prononcée, en revanche, ni sur les modalités selon lesquelles de tels intérêts de retard doivent être calculés ni sur les dispositions du droit de l’Union applicables à un tel calcul. Partant, l’arrêt dont l’interprétation est demandée n’ayant pas abordé la question que cherche à clarifier la présente demande d’interprétation, il ne comporte pas d’élément susceptible de faire l’objet de l’interprétation demandée.

19      Compte tenu de ce qui précède, la demande en interprétation doit être rejetée comme étant manifestement irrecevable.

 Sur les dépens

20      En application de l’article 137 du règlement de procédure, il est statué sur les dépens dans l’ordonnance qui met fin à l’instance. En l’espèce, la présente ordonnance étant adoptée avant que la demande en interprétation ne soit signifiée aux autres parties à la procédure et, par conséquent, avant que celles-ci n’aient pu exposer des dépens, il convient de décider que le Royaume des Pays-Bas supportera ses propres dépens.

Par ces motifs, la Cour (première chambre) ordonne :

1)      La demande en interprétation est rejetée comme étant manifestement irrecevable.

2)      Le Royaume des Pays-Bas supporte ses propres dépens.

Signatures


*      Langue de procédure : le néerlandais.

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