ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

9 octobre 2014 ( *1 )

«Renvoi préjudiciel — Réseaux et services de communications électroniques — Directive 2002/22/CE — Article 32 — Services obligatoires additionnels — Mécanisme de compensation des coûts liés à la fourniture de ces services — Notion de ‘juridiction’ au sens de l’article 267 TFUE — Incompétence de la Cour»

Dans l’affaire C‑222/13,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Teleklagenævnet (Danemark), par décision du 22 avril 2013, parvenue à la Cour le 25 avril 2013, dans la procédure

TDC A/S

contre

Erhvervsstyrelsen,

LA COUR (troisième chambre),

composée de M. M. Ilešič, président de chambre, M. A. Ó Caoimh, Mme C. Toader, MM. E. Jarašiūnas (rapporteur) et C. G. Fernlund, juges,

avocat général: M. Y. Bot,

greffier: Mme C. Strömholm, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 19 mars 2014,

considérant les observations présentées:

pour TDC A/S, par Me O. Spiermann, advokat,

pour l’Erhvervsstyrelsen, par Me J. Pinborg, advokat,

pour le gouvernement danois, initialement par Mme V. Pasternak Jørgensen, puis par M. C. Thorning, en qualité d’agents, assistés de Mes J. Pinborg et P. Biering, advokater,

pour la Commission européenne, initialement par Mme M. Simonsen, puis par Mme L. Nicolae et M. G. Conte, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 12 juin 2014,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 32 de la directive 2002/22/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, concernant le service universel et les droits des utilisateurs au regard des réseaux et services de communications électroniques (directive «service universel») (JO L 108, p. 51), telle que modifiée par la directive 2009/136/CE du Parlement européen et du Conseil, du 25 novembre 2009 (JO L 337, p. 11, ci-après la «directive ‘service universel’»).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant TDC A/S (ci-après «TDC») à l’Erhvervsstyrelsen (Office danois des entreprises), au sujet du rejet d’une demande de compensation des coûts liés à la fourniture de services obligatoires additionnels.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

L’article 1er de la directive «service universel», intitulé «Objet et champ d’application», dispose à son paragraphe 1:

«Dans le cadre de la directive 2002/21/CE [du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques (directive ‘cadre’) (JO L 108, p. 33)], la présente directive a trait à la fourniture de réseaux et de services de communications électroniques aux utilisateurs finals. Elle vise à assurer la disponibilité, dans toute [l’Union européenne], de services de bonne qualité accessibles au public grâce à une concurrence et à un choix effectifs et à traiter les cas où les besoins des utilisateurs finals ne sont pas correctement satisfaits par le marché. Elle contient aussi des dispositions relatives à certains aspects des équipements terminaux, y compris des dispositions destinées à faciliter l’accès des utilisateurs finals handicapés.»

4

L’article 32 de la directive «service universel», intitulé «Services obligatoires additionnels», prévoit:

«Les États membres peuvent décider de rendre accessibles au public, sur le territoire national, des services additionnels, à l’exception des services qui relèvent des obligations du service universel définies dans le chapitre II, mais, dans ce cas, aucun mécanisme de compensation impliquant la participation d’entreprises spécifiques ne peut être imposé.»

Le droit danois

5

La loi relative à la concurrence et à la consommation sur le marché des télécommunications (Lov om konkurrence- og forbrugerforhold på telemarkedet), applicable au litige au principal, a transposé dans le droit danois la directive «service universel».

6

Selon le Teleklagenævnet (Commission des recours en matière de télécommunications), l’article 16, paragraphe 2, de cette loi, dans sa version codifiée par l’arrêté no 780, du 28 juin 2007, et modifiée par la loi no 1412, du 27 décembre 2008 (ci-après la «loi de 2007»), prévoyait que devaient être assurés, par la désignation d’un ou de plusieurs opérateurs de service universel, les services suivants: la téléphonie fixe, les services du réseau numérique à intégration de services (RNIS), les lignes louées, les services destinés aux personnes handicapées, les services de renseignements téléphoniques et les services de sécurité.

7

Il ressort également de la décision de renvoi que l’article 20 de la loi de 2007 comportait des règles relatives à la compensation des déficits dans le cadre de la fourniture du service universel. Ces règles ont été reprises dans des termes en substance identiques à ceux de cet article dans la loi no 169, relative aux réseaux et aux services de communications électroniques (lov nr. 169 om elektroniske kommunikationsnet og –tjenester), du 3 mars 2011 (ci-après la «loi no 169»).

8

À la suite de la notification, au Royaume de Danemark, d’une lettre de mise en demeure et d’un avis motivé par la Commission européenne, la loi no 169 a été modifiée par la loi no 250, du 31 mars 2012, et elle prévoit désormais la possibilité, pour l’entreprise concernée, d’obtenir la couverture des déficits apparus après le 1er avril 2012 dans le cadre des services de sécurité et d’urgence maritime, sans déduction des excédents réalisés au titre d’autres services relevant de l’obligation de service universel de cette entreprise.

Le litige au principal et les questions préjudicielles

9

TDC, qui appartenait à l’État jusqu’à sa privatisation intervenue au cours de l’année 1997, est, au Danemark, le principal opérateur dans le secteur des services de communications électroniques.

10

Depuis l’année 1998, TDC est chargée d’assurer, au Danemark et au Groenland, les services de sécurité et d’urgence maritime permettant aux navires de demander assistance lorsqu’ils sont en situation de détresse. Par ailleurs, TDC assure, au Danemark, des services relevant des obligations de service universel, au sens du chapitre II de la directive «service universel», et, notamment, la téléphonie de base.

11

En vertu de la loi de 2007, TDC ne pouvait percevoir de l’État une compensation du coût net lié auxdits services de sécurité et d’urgence maritime que si l’ensemble des obligations de service universel et des services obligatoires additionnels étaient déficitaires.

12

TDC, en faisant valoir que cette loi n’était pas conforme à l’article 32 de la directive «service universel», a déposé une plainte auprès de la Commission. Après plusieurs échanges de vues avec les autorités danoises et TDC, la Commission a adressé au Royaume de Danemark une lettre de mise en demeure et un avis motivé, respectivement les 27 janvier et 29 septembre 2011.

13

Le Royaume de Danemark a, ainsi qu’il ressort de la décision de renvoi, décidé de modifier la réglementation danoise en cause, avec effet au 1er avril 2012. Depuis cette date, l’État doit prendre en charge le coût des services de sécurité et d’urgence maritime assurés au Danemark et au Groenland. La Commission a, dès lors, renoncé à introduire un recours en manquement contre cet État membre.

14

À la suite desdites modifications, la réglementation danoise prévoit la compensation, par l’État, du coût net des services de sécurité et d’urgence maritime, indépendamment du fait que les autres obligations de service universel donnent lieu à un excédent ou à un déficit.

15

Le 29 juillet 2011, TDC a demandé à l’Erhvervsstyrelsen la compensation des dépenses liées à la fourniture des services de sécurité et d’urgence maritime exposées pour l’année 2010. Le 26 septembre 2011, cette entreprise a présenté une demande identique pour les années 2007 à 2009.

16

Le 24 novembre 2011, l’Erhvervsstyrelsen a rejeté ces demandes de compensation au motif que, notamment, la créance relative à l’année 2007 était prescrite, le délai dans lequel une telle demande pouvait être déposée pour les années 2008 et 2009 était expiré et la loi de 2007, alors en vigueur, ne permettait pas de faire droit à la demande de compensation afférente à l’année 2010, sans que soient déduits les excédents provenant des services relevant des obligations de service universel, au sens du chapitre II de la directive «service universel».

17

TDC a fait appel des décisions de l’Erhvervsstyrelsen rejetant ses demandes devant le Teleklagenævnet, qui a confirmé, par une décision du 17 septembre 2012, les décisions de l’Erhvervsstyrelsen portant sur les demandes de compensation relatives aux années 2007 à 2009.

18

S’agissant de la demande de compensation relative à l’année 2010, le Teleklagenævnet a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)

La directive [‘service universel’] et, en particulier, l’article 32 de celle-ci s’opposent-ils à ce qu’un État membre instaure des règles en vertu desquelles une entreprise n’a pas droit à la couverture spécifique par l’État membre du coût net de la fourniture d’un service obligatoire additionnel qui ne relève pas du chapitre II de cette directive, dès lors que les excédents réalisés par l’entreprise au titre d’autres services qui relèvent de ses obligations de service universel, au sens du chapitre II de ladite directive, sont supérieurs au déficit lié à la fourniture du service obligatoire additionnel?

2)

La directive ‘service universel’ s’oppose-t-elle à ce qu’un État membre instaure des règles en vertu desquelles les entreprises n’ont droit à la couverture par l’État membre du coût net de la fourniture de services obligatoires additionnels ne relevant pas du chapitre II de cette directive que si le coût net constitue une charge injustifiée pour les entreprises en question?

3)

Au cas où la deuxième question appellerait une réponse négative, l’État membre peut-il décider que la fourniture d’un service obligatoire additionnel ne relevant pas du chapitre II de la directive [‘service universel’] ne se traduit pas par une charge injustifiée lorsque l’entreprise a réalisé, globalement, un excédent dans le cadre de la fourniture de tous les services pour lesquels elle a une obligation de service universel, et notamment de la fourniture des services que l’entreprise aurait également assurée si elle n’avait pas été opérateur de service universel?

4)

La directive ‘service universel’ s’oppose-t-elle à ce qu’un État membre instaure des règles en vertu desquelles le coût net supporté par une entreprise désignée dans le cadre de son obligation de service universel, au sens du chapitre II de cette directive, est calculé sur la base de l’ensemble des recettes et des coûts qui sont liés à la fourniture du service en question, et notamment des recettes et des coûts que l’entreprise aurait également enregistrés si elle n’avait pas été opérateur de service universel?

5)

La réponse aux première à quatrième questions est-elle influencée par le fait que la gestion d’un service obligatoire additionnel doit être assurée au Groenland, qui, en vertu de l’annexe II du [traité FUE], est un pays ou un territoire d’outre-mer, dès lors que sa gestion est confiée par des autorités danoises à une entreprise établie au Danemark et que cette entreprise n’a pas d’autres activités au Groenland?

6)

Quelle est l’incidence des articles 107, paragraphe 1, [TFUE] et 108, paragraphe 3, TFUE, ainsi que de la décision [2012/21/UE] de la Commission, du 20 décembre 2011, relative à l’application de l’article 106, paragraphe 2, [TFUE] aux aides d’État sous forme de compensations de service public octroyées à certaines entreprises chargées de la gestion de services d’intérêt économique général [(JO 2012, L 7, p. 3)], sur la réponse aux première à cinquième questions?

7)

Quelle est l’incidence du principe de distorsion minimale du marché, énoncé notamment aux articles 1er, paragraphe 2, et 3, paragraphe 2, aux considérants 4, 18, 23 et 26, ainsi qu’à l’annexe IV, partie B, de la directive ‘service universel’, sur la réponse aux première à cinquième questions?

8)

Si les dispositions de la directive ‘service universel’ font obstacle aux régimes juridiques nationaux visés aux première, deuxième et quatrième questions, ces dispositions ou ces restrictions sont-elles assorties de l’effet direct?»

Sur la compétence de la Cour

19

Le caractère de juridiction du Teleklagenævnet, au sens de l’article 267 TFUE, a été mis en doute par la Commission, celle-ci relevant que cet organisme ne remplit pas tous les critères établis par la jurisprudence de la Cour pour pouvoir être qualifié de juridiction. La Commission souligne, d’une part, que la saisine de cet organisme n’est pas obligatoire, les recours introduits contre les décisions prises par l’Erhvervsstyrelsen pouvant être formés soit devant le Teleklagenævnet, soit directement devant les tribunaux. D’autre part, la réglementation danoise ne prévoirait pas de garanties particulières en ce qui concerne la révocation des membres du Teleklagenævnet ou l’annulation de la nomination de ces derniers et, par conséquent, elle ne serait pas de nature à empêcher les interventions ou les pressions indues du pouvoir exécutif sur les membres de cet organisme.

20

Dans la décision de renvoi, le Teleklagenævnet considère qu’il satisfait à tous les critères établis par la jurisprudence de la Cour pour qualifier un organisme d’un État membre de juridiction, au sens de l’article 267 TFUE.

21

En premier lieu, le Teleklagenævnet expose qu’il est un organisme public permanent de règlement des litiges, institué par la loi no 169, et que les modalités de son fonctionnement sont fixées par l’arrêté no 383, du 21 avril 2011.

22

En deuxième lieu, il précise qu’il statue définitivement en matière administrative sur les recours dirigés contre les décisions prises par l’Erhvervsstyrelsen et que ses décisions sont contraignantes pour les parties, sous réserve de l’exercice d’un recours devant les juridictions judiciaires, dans un délai de huit semaines. L’Erhvervsstyrelsen ne pourrait en principe introduire de recours contre les décisions du Teleklagenævnet, devant les juridictions judiciaires.

23

En troisième lieu, le Teleklagenævnet indique que ses membres sont nommés par le ministre de l’Entreprise et de la Croissance pour une durée de quatre ans, le renouvellement de leur mandat étant possible. Ce ministre pourrait désigner, parmi ces membres, un juriste en qualité de vice-président, lequel pourrait remplacer le président en cas d’empêchement ou de récusation de celui-ci. Lesdits membres seraient indépendants de l’administration sur les plans personnel et professionnel et ne seraient pas soumis à l’autorité dudit ministre. Le Teleklagenævnet serait composé d’un président, qui doit être juriste, et de quatre à six autres membres. Il statuerait à la majorité simple et, en cas de partage des voix, celle du président serait prépondérante.

24

En quatrième lieu, le Teleklagenævnet mentionne que la procédure suivie devant lui est purement écrite, mais qu’il doit être veillé à ce que les parties puissent présenter des observations afin de clarifier toutes les circonstances pertinentes de l’affaire, conformément au principe du contradictoire.

25

Ainsi, le Teleklagenævnet aurait une origine légale, il serait établi de façon permanente, ses membres offriraient toutes les garanties d’indépendance, sa juridiction aurait un caractère obligatoire, et il appliquerait les règles de droit ainsi qu’une procédure analogue à celle suivie devant les juridictions judiciaires, en respectant le principe du contradictoire.

26

Le gouvernement danois, en réponse à une question posée par la Cour, soutient que le Teleklagenævnet doit être qualifié de juridiction au sens de l’article 267 TFUE. Il souligne que cet organisme répond aux critères relatifs à l’origine légale, à la permanence et à l’application des règles de droit. Il indique en outre que si, certes, les conditions de révocation des membres de cet organisme ne sont pas définies de manière particulière par la réglementation danoise, ces membres sont protégés contre une révocation arbitraire et abusive, conformément aux règles générales du droit administratif et du droit du travail. Lors de l’audience, ce gouvernement a souligné que le pouvoir de révocation desdits membres appartient à la personne qui détient le pouvoir de nomination, à savoir le ministre de l’Entreprise et de la Croissance.

27

Il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, pour apprécier si l’organisme de renvoi possède le caractère d’une «juridiction» au sens de l’article 267 TFUE, question qui relève uniquement du droit de l’Union, la Cour tient compte d’un ensemble d’éléments, tels que l’origine légale de l’organisme, sa permanence, le caractère obligatoire de sa juridiction, la nature contradictoire de la procédure, l’application, par l’organisme, des règles de droit ainsi que son indépendance (voir, notamment, arrêt Belov, C‑394/11, EU:C:2013:48, point 38, et ordonnance Merck Canada, C‑555/13, EU:C:2014:92, point 16).

28

Il convient d’examiner en premier lieu le critère relatif à l’indépendance du Teleklagenævnet.

29

La notion d’indépendance, qui est inhérente à la mission de juger, implique avant tout que l’instance concernée ait la qualité de tiers par rapport à l’autorité qui a adopté la décision frappée d’un recours (arrêt RTL Belgium, C‑517/09, EU:C:2010:821, point 38 et jurisprudence citée).

30

Cette notion comporte deux aspects. Le premier aspect, externe, suppose que l’instance soit protégée contre les interventions ou les pressions extérieures susceptibles de mettre en péril l’indépendance de jugement de ses membres quant aux litiges qui leur sont soumis (voir, en ce sens, arrêts Wilson, C‑506/04, EU:C:2006:587, point 51, ainsi que Torresi, C‑58/13 et C‑59/13, EU:C:2014:2088, point 18).

31

Le second aspect, interne, rejoint la notion d’impartialité et vise l’égale distance par rapport aux parties au litige et à leurs intérêts respectifs au regard de l’objet de celui-ci. Cet aspect exige le respect de l’objectivité et l’absence de tout intérêt dans la solution du litige en dehors de la stricte application de la règle de droit (arrêt Wilson, EU:C:2006:587, point 52 et jurisprudence citée).

32

Ces garanties d’indépendance et d’impartialité postulent l’existence de règles, notamment en ce qui concerne la composition de l’instance, la nomination, la durée des fonctions ainsi que les causes d’abstention, de récusation et de révocation de ses membres, qui permettent d’écarter tout doute légitime, dans l’esprit des justiciables, quant à l’imperméabilité de ladite instance à l’égard d’éléments extérieurs et à sa neutralité par rapport aux intérêts qui s’affrontent (arrêt Wilson, EU:C:2006:587, point 53 et jurisprudence citée). Afin de considérer la condition relative à l’indépendance de l’organisme de renvoi comme remplie, la jurisprudence exige notamment que les cas de révocation des membres de cet organisme soient déterminés par des dispositions législatives expresses (arrêt D. et A., C‑175/11, EU:C:2013:45, point 97, et ordonnance Pilato, C‑109/07, EU:C:2008:274, point 24 et jurisprudence citée).

33

En l’occurrence, en ce qui concerne les règles de nomination des membres du Teleklagenævnet, il convient de relever qu’il ressort notamment des observations présentées par le gouvernement danois que ceux-ci sont nommés par le ministre de l’Entreprise et de la Croissance pour une période de quatre ans, le renouvellement de leur mandat étant possible.

34

S’agissant de la question de la révocation des membres du Teleklagenævnet, lors de l’audience, le gouvernement danois a confirmé que ces derniers pouvaient être relevés de leurs fonctions par ledit ministre, lequel dispose également du pouvoir de les nommer.

35

Or, il ressort de la décision de renvoi et des observations présentées par le gouvernement danois que, alors que la réglementation danoise prévoit une procédure particulière en ce qui concerne la révocation des juges des juridictions judiciaires, les membres du Teleklagenævnet peuvent être révoqués et que les conditions de leur révocation ne font pas l’objet d’une réglementation particulière, seules les règles générales du droit administratif et du droit du travail s’appliquant en cas de révocation abusive.

36

Ainsi, il n’apparaît pas que la révocation des membres du Teleklagenævnet soit soumise à des garanties particulières permettant d’écarter tout doute légitime quant à l’indépendance de cet organisme (voir, par analogie, ordonnance Pilato, EU:C:2008:274, point 28).

37

Par ailleurs, ainsi qu’il ressort du dossier dont dispose la Cour, un recours contre une décision du Teleklagenævnet peut être introduit devant les juridictions judiciaires. En cas d’introduction d’un tel recours, le Teleklagenævnet a la qualité de partie défenderesse. Cette participation du Teleklagenævnet à une procédure mettant en cause sa propre décision implique que, lorsqu’il adopte ladite décision, le Teleklagenævnet n’a pas la qualité de tiers par rapport aux intérêts en présence et ne possède pas l’impartialité requise (voir, en ce sens, arrêt RTL Belgium, EU:C:2010:821, point 47). Cette organisation des voies de recours contre une décision du Teleklagenævnet met ainsi en exergue le caractère non juridictionnel des décisions rendues par cet organisme (voir, par analogie, ordonnance MF 7, C‑49/13, EU:C:2013:767, point 19).

38

Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que, sans qu’il y ait lieu d’examiner le point de savoir si le Teleklagenævnet remplit les autres critères permettant d’apprécier si cet organisme possède le caractère de juridiction, au sens de l’article 267 TFUE, il convient de constater que la Cour n’est pas compétente pour répondre aux questions posées.

Sur les dépens

39

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) dit pour droit:

 

La Cour de justice de l’Union européenne n’est pas compétente pour répondre aux questions posées par le Teleklagenævnet (Danemark), dans sa décision du 22 avril 2013.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure: le danois.