ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

12 juin 2019 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Marques – Directive 2008/95/CE – Article 4, paragraphe 1, sous b) – Risque de confusion – Impression d’ensemble – Marque antérieure enregistrée avec une déclaration de renonciation – Effets d’une telle renonciation sur l’étendue de la protection de la marque antérieure »

Dans l’affaire C‑705/17,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Svea hovrätt, Patent- och marknadsöverdomstolen (cour d’appel de Stockholm, siégeant en tant que cour d’appel de la propriété intellectuelle et des affaires économiques, Suède), par décision du 20 novembre 2017, parvenue à la Cour le 15 décembre 2017, dans la procédure

Patent- och registreringsverket

contre

Mats Hansson,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de M. E. Regan, président de chambre, MM. C. Lycourgos, E. Juhász, M. Ilešič (rapporteur) et I. Jarukaitis, juges,

avocat général : M. G. Pitruzzella,

greffier : Mme C. Strömholm, administratrice,

considérant les observations présentées :

pour le Patent- och registreringsverket, par Mmes K. Isaksson et M. Nowicka ainsi que par M. M. Ahlgren, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par MM. K. Simonsson et É. Gippini Fournier ainsi que par Mmes E. Ljung Rasmussen et G. Tolstoy, en qualité d’agents,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 13 décembre 2018,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 6 mars 2019,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 4, paragraphe 1, sous b), de la directive 2008/95/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2008, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 2008, L 299, p. 25).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant le Patent- och registreringsverket (office de la propriété intellectuelle, Suède, ci-après le « PRV ») à M. Mats Hansson, ressortissant suédois, au sujet du refus de l’enregistrement du signe verbal « ROSLAGSÖL » en tant que marque nationale.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

Les considérants 4, 6, 8, 10 et 11 de la directive 2008/95 prévoient :

« (4)

Il n’apparaît pas nécessaire de procéder à un rapprochement total des législations des États membres en matière de marques. Il est suffisant de limiter le rapprochement aux dispositions nationales ayant l’incidence la plus directe sur le fonctionnement du marché intérieur.

[...]

(6)

Les États membres devraient garder également toute liberté pour fixer les dispositions de procédure concernant l’enregistrement, la déchéance ou la nullité des marques acquises par l’enregistrement. Il leur appartient, par exemple, de déterminer la forme des procédures d’enregistrement et de nullité, de décider si les droits antérieurs doivent être invoqués dans la procédure d’enregistrement ou dans la procédure de nullité ou dans les deux, ou encore, dans le cas où des droits antérieurs peuvent être invoqués dans la procédure d’enregistrement, de prévoir une procédure d’opposition ou un examen d’office ou les deux. [...]

[...]

(8)

La réalisation des objectifs poursuivis par le rapprochement suppose que l’acquisition et la conservation du droit sur la marque enregistrée soient en principe subordonnées, dans tous les États membres, aux mêmes conditions. [...]

[...]

(10)

Il est fondamental, pour faciliter la libre circulation des produits et la libre prestation des services, de faire en sorte que les marques enregistrées jouissent de la même protection dans la législation de tous les États membres. Cela, cependant, n’enlève pas aux États membres la faculté d’accorder une protection plus large aux marques ayant acquis une renommée.

(11)

La protection conférée par la marque enregistrée, dont le but est notamment de garantir la fonction d’origine de la marque, devrait être absolue en cas d’identité entre la marque et le signe et entre les produits ou services. La protection devrait valoir également en cas de similitude entre la marque et le signe et entre les produits ou services. Il est indispensable d’interpréter la notion de similitude en relation avec le risque de confusion. Le risque de confusion, dont l’appréciation dépend de nombreux facteurs et notamment de la connaissance de la marque sur le marché, de l’association qui peut en être faite avec le signe utilisé ou enregistré, du degré de similitude entre la marque et le signe et entre les produits ou services désignés, devrait constituer la condition spécifique de la protection. Les moyens par lesquels le risque de confusion peut être constaté, et en particulier la charge de la preuve, devraient relever des règles nationales de procédure auxquelles la présente directive ne devrait pas porter préjudice. »

4

Aux termes de l’article 3, paragraphe 1, sous c), de la directive 2008/95 :

« 1.   Sont refusés à l’enregistrement ou sont susceptibles d’être déclarés nuls s’ils sont enregistrés :

[...]

c)

les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci ».

5

L’article 4, paragraphe 1, sous b), de cette directive énonce :

« 1.   Une marque est refusée à l’enregistrement ou, si elle est enregistrée, est susceptible d’être déclarée nulle :

[...]

b)

lorsqu’en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe, dans l’esprit du public, un risque de confusion qui comprend le risque d’association avec la marque antérieure. »

6

L’article 5, paragraphe 1, sous b), de ladite directive est ainsi libellé :

« 1.   La marque enregistrée confère à son titulaire un droit exclusif. Le titulaire est habilité à interdire à tout tiers, en l’absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires :

[...]

b)

d’un signe pour lequel, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services couverts par la marque et le signe, il existe, dans l’esprit du public, un risque de confusion qui comprend le risque d’association entre le signe et la marque. »

7

L’article 6, paragraphe 1, sous b), de la même directive prévoit :

« 1.   Le droit conféré par la marque ne permet pas à son titulaire d’interdire à un tiers l’usage, dans la vie des affaires :

[...]

b)

d’indications relatives à l’espèce, à la qualité, à la quantité, à la destination, à la valeur, à la provenance géographique, à l’époque de la production du produit ou de la prestation du service ou à d’autres caractéristiques de ceux-ci ».

8

La directive 2008/95 a été abrogée avec effet au 15 janvier 2019 par la directive (UE) 2015/2436 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2015, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 2015, L 336, p. 1), entrée en vigueur le 12 janvier 2016. Compte tenu de la date de la demande d’enregistrement en cause au principal, le présent renvoi préjudiciel doit cependant être examiné au regard des dispositions de la directive 2008/95.

9

L’article 37, paragraphe 2, du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque [de l’Union européenne] (JO 2009, L 78, p. 1), qui a succédé à l’article 38, paragraphe 2, du règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), rédigé en des termes identiques, prévoyait :

« Lorsque la marque comporte un élément qui est dépourvu de caractère distinctif et que l’inclusion de cet élément dans la marque peut créer des doutes sur l’étendue de la protection de la marque, [l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO)] peut demander comme condition à l’enregistrement de la marque que le demandeur déclare qu’il n’invoquera pas de droit exclusif sur cet élément. Cette déclaration est publiée en même temps que la demande ou, le cas échéant, que l’enregistrement de la marque [de l’Union européenne]. »

10

Le règlement (UE) 2015/2424 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2015, modifiant le règlement no 207/2009 et le règlement (CE) no 2868/95 de la Commission portant modalités d’application du règlement no 40/94, et abrogeant le règlement (CE) no 2869/95 de la Commission relatif aux taxes à payer à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (JO 2015, L 341, p. 21) a abrogé ledit article 37, paragraphe 2, du règlement no 207/2009.

Le droit suédois

11

Conformément à l’article 6 du chapitre 1er de la varumärkslagen (2010:1877) (loi no 1877 de 2010 sur les marques, ci-après la « loi de 2010 »), le droit exclusif conféré à une marque s’obtient par son enregistrement.

12

L’article 10, premier alinéa, point 2, dudit chapitre 1er de la loi de 2010 prévoit qu’il résulte du droit exclusif conféré à une marque enregistrée que nul, autre que son titulaire et en l’absence de son consentement, ne peut faire usage dans la vie des affaires d’un signe pour lequel, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque et en raison de l’identité ou de la similitude des produits couverts par la marque et le signe, il existe, dans l’esprit du public, un risque de confusion qui comprend le risque de l’impression d’une association entre l’utilisateur du signe et le titulaire de la marque du titulaire.

13

L’article 5 du chapitre 2 de la loi de 2010 précise que l’une des conditions générales à l’enregistrement posées par ce chapitre est que la marque doit être pourvue de caractère distinctif pour les produits ou les services qu’elle couvre.

14

Selon l’article 8, premier alinéa, point 2, du chapitre 2 de la loi de 2010, une marque est refusée à l’enregistrement en raison de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent lorsqu’il existe un risque de confusion, qui comprend le risque de l’impression d’une association entre l’utilisateur de la marque et le titulaire de la marque enregistrée.

15

L’article 12, premier alinéa, du chapitre 2 de la loi de 2010 prévoit que, si une marque comprend un élément qui ne peut pas être enregistré en lui-même et s’il existe un risque manifeste que l’enregistrement soit susceptible de faire naître des incertitudes concernant la portée du droit exclusif, cet élément peut être exclu de la protection lors de son enregistrement, par une renonciation.

16

Le deuxième alinéa dudit article 12 précise que, si, ultérieurement, ledit élément vient à satisfaire aux conditions d’un enregistrement, cette disposition permettra l’enregistrement soit de cet élément, soit de la marque dans son intégralité, dans le cadre d’une nouvelle demande d’enregistrement, sans une telle renonciation.

Le litige au principal et les questions préjudicielles

17

Au cours de l’année 2007, la société suédoise Norrtelje Brenneri Aktiebolag a fait enregistrer, pour des boissons alcoolisées relevant de la classe 33 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, en tant que marque nationale le signe verbal et figuratif suivant (ci-après la « marque antérieure ») :

Image

18

Cet enregistrement est assorti d’une déclaration de renonciation stipulant que l’« enregistrement ne confère pas un droit exclusif sur le vocable “RoslagsPunsch” ». L’inscription de ladite déclaration a été demandée par le PRV en tant que condition d’enregistrement de la marque antérieure, dans la mesure où le terme « Roslags » renvoie à une région de la Suède et le terme « Punsch » décrit l’un des produits visés par cet enregistrement.

19

Par acte du 16 décembre 2015, M. Hansson a sollicité auprès du PRV l’enregistrement du signe verbal « ROSLAGSÖL » en tant que marque nationale pour des produits relevant de la classe 32 au sens de l’arrangement de Nice, et, en particulier, pour des boissons non alcoolisées et des bières.

20

Par décision du 14 juillet 2016, le PRV a rejeté cette demande d’enregistrement en raison d’un risque de confusion entre ce signe et la marque antérieure. Le PRV a constaté que les signes en conflit débutent par le terme descriptif « Roslags ». Le fait qu’ils comprenaient par ailleurs d’autres vocables ou éléments figuratifs n’atténuerait en rien la similitude, car le vocable « Roslags » serait un élément dominant des deux signes. Par ailleurs, les signes viseraient des produits identiques ou similaires susceptibles d’être distribués par de mêmes circuits de vente et de s’adresser à la même clientèle.

21

M. Hansson a saisi le Patent- och marknadsdomstolen (tribunal de la propriété intellectuelle et des affaires économiques, Suède) d’un recours contre cette décision, faisant valoir l’absence de tout risque de confusion entre les signes en question. En ce qui concerne l’incidence de la déclaration de renonciation relative à la marque antérieure sur le sort à réserver au recours, le PRV a avancé devant cette juridiction que l’élément d’une marque qui a été exclu du bénéfice de la protection par la voie d’une renonciation doit, en principe, être considéré comme étant dépourvu de caractère distinctif. En l’espèce, l’enregistrement de la marque antérieure aurait été accordé avec une telle renonciation en raison du fait que ladite marque comprend un terme descriptif d’une région géographique, à savoir « Roslags ».

22

Or, la pratique du PRV relative au caractère non-distinctif de noms géographiques aurait, entre-temps, évolué, notamment dans le but de mettre en œuvre les enseignements figurant aux points 31 et 32 de l’arrêt du 4 mai 1999, Windsurfing Chiemsee, (C‑108/97 et C‑109/97, EU:C:1999:230). Le terme « Roslags » serait désormais susceptible d’être enregistré, en lui-même, en tant que marque et serait revêtu d’un caractère distinctif pour les produits en cause en l’espèce, de telle sorte qu’il pourrait même dominer l’impression d’ensemble de la marque antérieure. Il résulterait ainsi d’une appréciation globale des signes en conflit que, en raison de l’élément commun « Roslags », le public pertinent pourrait avoir l’impression que les produits visés par ces signes ont la même origine commerciale.

23

Le Patent- och marknadsdomstolen (tribunal de la propriété intellectuelle et des affaires économiques) a, contrairement à la position défendue par le PRV, accueilli le recours de M. Hansson et a approuvé l’enregistrement de son signe en tant que marque en constatant l’absence de risque de confusion. Cette juridiction a également précisé que, malgré la déclaration de renonciation, les termes visés par celle-ci doivent être pris en compte dans le cadre de l’appréciation dudit risque, dans la mesure où ils peuvent avoir une incidence sur l’impression d’ensemble dégagée par la marque antérieure et, partant, sur la portée de la protection de cette dernière. Selon ladite juridiction, cette déclaration aurait pour but de préciser que le droit exclusif résultant de l’enregistrement de la marque antérieure ne portait pas sur les termes qu’elle visait en tant que tels.

24

Le PRV a interjeté appel du jugement de la juridiction de première instance devant le Svea hovrätt, Patent- och marknadsöverdomstolen (cour d’appel de Stockholm, siégeant en tant que cour d’appel de la propriété intellectuelle et des affaires économiques, Suède).

25

Cette juridiction explique que, selon elle, la directive 2008/95 et la jurisprudence y afférente confirment que les règles matérielles relatives à la protection d’une marque nationale sont, en principe, pleinement harmonisées au niveau du droit de l’Union, tandis que les règles de procédure relèvent de la compétence des États membres. Ainsi, elle se demande si une règle nationale permettant d’introduire une déclaration de renonciation peut être qualifiée de « règle de procédure », bien qu’elle ait pour effet de modifier les critères sur lesquels repose l’appréciation d’ensemble à laquelle il doit être procédé pour examiner le risque de confusion, au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous b), de ladite directive.

26

À cet égard, elle s’interroge sur le point de savoir si cette disposition peut, notamment eu égard à la jurisprudence constante de la Cour exigeant que l’appréciation du risque de confusion soit fondée sur une impression d’ensemble et que la perception des consommateurs joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque, être interprétée en ce sens qu’une déclaration de renonciation peut influer sur cette appréciation du fait qu’un élément de la marque antérieure a été, lors de son enregistrement, expressément exclu de la protection au moyen de cette déclaration de renonciation, de telle sorte qu’il soit accordé à cet élément, dans le cadre de l’analyse de l’impression d’ensemble, une importance moindre que celle qui lui aurait été reconnue en l’absence d’une telle renonciation.

27

Si la directive 2008/95 devait s’opposer à une telle approche, se poserait alors la question de savoir si elle admet que la déclaration de renonciation a pour effet que l’élément sur lequel elle porte soit considéré comme n’ayant pas été visé par l’enregistrement de la marque antérieure et n’ayant donc pas bénéficié de la protection de cette marque, de sorte qu’il puisse être exclu de l’analyse du risque de confusion, au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous b), de cette directive. Cette approche semblerait, selon la juridiction de renvoi, avoir été suivie par l’EUIPO dans l’application de l’article 37, paragraphe 2, du règlement no 207/2009.

28

Par ailleurs, cette juridiction indique que la jurisprudence des juridictions nationales n’est pas uniforme concernant les effets de la déclaration de renonciation, telle que prévue par le droit national, sur l’analyse du risque de confusion, au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous b), de ladite directive.

29

Dans ces conditions, le Svea hovrätt, Patent- och marknadsöverdomstolen (cour d’appel de Stockholm, siégeant en tant que cour d’appel de la propriété intellectuelle et des affaires économiques) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

L’article 4, paragraphe 1, sous b), de la directive 2008/95 doit–il être interprété en ce sens qu’un élément d’une marque, qui a été explicitement exclu de la protection lors de l’enregistrement de celle–ci, à savoir par une déclaration de renonciation inscrite lors de l’enregistrement, peut avoir une incidence sur l’appréciation d’ensemble de tous les facteurs pertinents à laquelle il doit être procédé lors de l’examen du risque de confusion ?

2)

Si la réponse à la première question est affirmative : dans ce cas, la renonciation peut–elle avoir une incidence sur l’appréciation d’ensemble en ce sens que l’autorité compétente doit tenir compte de l’élément concerné, mais ne lui accorde[r] qu’une importance plus limitée, à savoir qu’il ne sera pas considéré comme étant pourvu d’un caractère distinctif, même si, de facto, ledit élément pourrait être distinctif et dominant de la marque antérieure ?

3)

Si la réponse à la première question est affirmative et qu’il est répondu par la négative à la deuxième question : la renonciation peut–elle néanmoins avoir une incidence d’une autre manière sur l’appréciation d’ensemble ? »

Sur les questions préjudicielles

30

Par ses questions préjudicielles, qu’il y a lieu d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, s’il convient d’interpréter l’article 4, paragraphe 1, sous b), de la directive 2008/95 en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale prévoyant une déclaration de renonciation qui aurait pour effet d’exclure un élément d’une marque complexe, visé par cette déclaration, de l’analyse des facteurs pertinents pour établir l’existence d’un risque de confusion au sens de cette disposition ou d’attribuer à un tel élément, d’emblée et de manière permanente, une importance limitée dans cette analyse.

31

À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que la fonction essentielle de la marque est de garantir au consommateur ou à l’utilisateur final l’identité d’origine du produit ou du service marqué, en lui permettant de distinguer sans confusion possible ce produit ou ce service de ceux qui ont une autre provenance (voir, en ce sens, arrêts du 16 septembre 2004, SAT.1/OHMI, C‑329/02 P, EU:C:2004:532, point 23, ainsi que du 8 juin 2017, W. F. Gözze Frottierweberei et Gözze, C‑689/15, EU:C:2017:434, point 41).

32

La directive 2008/95 qui s’applique, selon son article 1er, notamment aux marques de produits ou de services qui ont fait l’objet d’un enregistrement ou d’une demande d’enregistrement dans un État membre, procède, conformément à ses considérants 4, 6, 8 et 10, à un rapprochement des dispositions nationales ayant l’incidence la plus directe sur le fonctionnement du marché intérieur. Ainsi qu’il est précisé dans ces considérants, il est, à cette fin, fondamental de faire en sorte que les marques enregistrées jouissent de la même protection dans la législation de tous les États membres et que l’acquisition du droit sur la marque enregistrée soit en principe subordonnée, dans tous les États membres, aux mêmes conditions, tout en laissant à ces derniers la liberté de fixer les dispositions de procédure concernant, notamment, l’enregistrement desdites marques.

33

À cet égard, l’article 5, paragraphe 1, sous b), de la directive 2008/95 précise que la marque enregistrée confère à son titulaire un droit exclusif. Le titulaire est notamment habilité à interdire à tout tiers, en l’absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires d’un signe pour lequel, en raison de son identité ou de sa similitude avec cette marque et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services couverts par ladite marque et ce signe, il existe, dans l’esprit du public, un risque de confusion qui comprend le risque d’association entre ledit signe et la marque enregistrée.

34

L’article 4, paragraphe 1, sous b), de la directive 2008/95 prévoit, pour sa part, qu’une marque est refusée à l’enregistrement ou, si elle est enregistrée, est susceptible d’être déclarée nulle, lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que ces deux marques désignent, il existe, dans l’esprit du public, un risque de confusion qui comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

35

Lesdites dispositions visent ainsi à protéger les intérêts individuels des titulaires de marques antérieures et garantissent la fonction d’origine de la marque dans l’hypothèse d’un risque de confusion (voir, en ce sens, arrêts du 6 octobre 2005, Medion, C‑120/04, EU:C:2005:594, points 24 à 26, et du 22 octobre 2015, BGW, C‑20/14, EU:C:2015:714, point 26).

36

Or, ni ces mêmes dispositions ni aucune autre disposition de la directive 2008/95 ne contient une obligation ou une interdiction pour les États membres d’introduire dans leur droit national des dispositions prévoyant que l’enregistrement d’un signe en tant que marque puisse être assorti d’une déclaration de renonciation. Lesdites dispositions ne précisent pas non plus les effets d’une telle déclaration sur l’examen du risque de confusion, au sens de ladite directive.

37

Dans ces conditions, il convient de constater, à l’instar de M. l’avocat général, aux points 22 et 24 de ses conclusions, que les États membres demeurent, en principe, libres de prévoir dans leur droit national des dispositions autorisant l’inscription des déclarations de renonciation au moment de l’enregistrement des signes en tant que marques, que de telles déclarations soient déposées de manière volontaire par le demandeur ou sur demande de l’office national compétent pour ledit enregistrement, pour autant que lesdites déclarations ne portent pas atteinte à l’effet utile des dispositions de la directive 2008/95 et, notamment, à la protection offerte aux titulaires de marques antérieures contre l’enregistrement de marques susceptibles de créer un risque de confusion dans le chef des consommateurs ou des utilisateurs finals.

38

En outre, les effets de telles déclarations ne sauraient aboutir à remettre en cause les objectifs poursuivis par la directive 2008/95, rappelés aux considérants 8 et 10 de celle-ci, et qui consistent à assurer que l’acquisition du droit sur la marque enregistrée soit, en principe, subordonnée, dans tous les États membres, aux mêmes conditions et de garantir la protection égale des marques dans la législation de tous les États membres (voir, par analogie, arrêts du 26 avril 2007, Boehringer Ingelheim e.a., C‑348/04, EU:C:2007:249, points 58 et 59 ; du 19 juin 2014, Oberbank e.a., C‑217/13 et C‑218/13, EU:C:2014:2012, points 66 et 67, ainsi que du 22 septembre 2011, Budějovický Budvar, C‑482/09, EU:C:2011:605, points 30 et 32).

39

En l’occurrence, la juridiction de renvoi expose trois effets envisageables de la déclaration de renonciation, telle que prévue par le droit national, sur l’analyse du risque de confusion, au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous b), de la directive 2008/95. Selon cette juridiction, une première interprétation du droit national consisterait en ce que l’élément d’une marque complexe faisant l’objet d’une telle déclaration de renonciation soit exclu de l’analyse du risque de confusion. Selon une deuxième interprétation dudit droit, un tel élément serait certes pris en compte dans le cadre de cette analyse, son importance à cette fin devant toutefois être limitée même si, en réalité, il serait l’élément distinctif et dominant de ladite marque. Une troisième interprétation consisterait, en substance, à dire qu’il convient de tenir compte d’un tel élément dans ladite analyse d’une manière conforme aux principes applicables à l’analyse du risque de confusion dégagés dans la jurisprudence constante de la Cour.

40

À cet égard, il y a lieu de rappeler que constitue un risque de confusion, au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous b), de la directive 2008/95, le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement (voir, en ce sens, arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 29, et du 8 mai 2014, Bimbo/OHMI, C‑591/12 P, EU:C:2014:305, point 19 ainsi que jurisprudence citée).

41

Selon une jurisprudence constante de la Cour, l’existence d’un risque de confusion dépend de nombreux facteurs et notamment de la connaissance de la marque sur le marché, de l’association qui peut en être faite avec le signe utilisé ou enregistré, du degré de similitude entre la marque et le signe et entre les produits ou les services désignés. Le risque de confusion doit donc être apprécié globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce (voir, en ce sens, arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 16 ; du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 18, ainsi que du 10 avril 2008, adidas et adidas Benelux, C‑102/07, EU:C:2008:217, point 29).

42

Parmi ces facteurs figure également le caractère distinctif de la marque antérieure, qui détermine l’étendue de sa protection. En effet, la Cour a déjà précisé que le risque de confusion est d’autant plus élevé que le caractère distinctif de ladite marque s’avère important (voir, en ce sens, arrêt du 8 novembre 2016, BSH/EUIPO, C‑43/15 P, EU:C:2016:837, point 62 et jurisprudence citée).

43

L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte, et notamment la similitude des marques et celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement. L’interdépendance entre ces facteurs trouve son expression au considérant 11 de la directive 2008/95, selon lequel il est indispensable d’interpréter la notion de « similitude » en relation avec le risque de confusion (voir, en ce sens, arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 19).

44

De même, selon la jurisprudence de la Cour, le fait qu’une marque dispose d’un caractère distinctif faible n’exclut pas un risque de confusion, notamment lorsqu’existe une similitude des signes et des produits ou des services visés (voir, en ce sens, arrêt du 8 novembre 2016, BSH/EUIPO, C‑43/15 P, EU:C:2016:837, point 63 et jurisprudence citée).

45

Cette appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, auditive ou conceptuelle des marques en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par celles-ci. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir, en ce sens, arrêts du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 23 ; du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 25, et du 22 octobre 2015, BGW, C‑20/14, EU:C:2015:714, point 35).

46

Eu égard à ces principes ainsi qu’à l’ensemble de la jurisprudence rappelée aux points 40 à 45 du présent arrêt, force est de constater, en premier lieu, qu’une déclaration de renonciation prévue par le droit national qui aurait pour effet d’exclure un élément d’une marque complexe visé par ladite déclaration, en raison de son caractère descriptif ou non distinctif, de l’analyse des facteurs pertinents pour établir l’existence du risque de confusion au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous b), de la directive 2008/95, serait incompatible avec les exigences de cette disposition.

47

En effet, une telle exclusion pourrait amener à ce que soient incorrectement appréciés tant la similitude entre les signes en conflit que le caractère distinctif de la marque antérieure, ce qui aboutirait à une appréciation globale altérée du risque de confusion, au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous b), de la directive 2008/95 et ce d’autant plus que ces facteurs sont interdépendants comme il a été précisé au point 43 du présent arrêt, cette interdépendance visant, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général, au point 41 de ses conclusions, à faire concorder autant que possible l’intégralité de l’appréciation dudit risque avec la perception effective du public pertinent.

48

En ce qui concerne à cet égard, premièrement, l’appréciation de la similitude entre les signes en conflit, il convient de rappeler qu’elle ne peut pas se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause considérées chacune dans son ensemble, en tenant compte, notamment, des éléments distinctifs et dominants de celles-ci (voir, en ce sens, arrêt du 22 octobre 2015, BGW, C‑20/14, EU:C:2015:714, point 36 et jurisprudence citée).

49

Il y a lieu, dès lors, dans chaque cas individuel, d’analyser les composants d’un signe et leur poids relatif dans la perception du public dans le but de déterminer, en fonction des circonstances particulières de l’espèce, l’impression d’ensemble produite par les signes en cause dans la mémoire dudit public (voir, en ce sens, arrêt du 8 mai 2014, Bimbo/OHMI, C‑591/12 P, EU:C:2014:305, points 34 et 36). Il ne peut donc pas être considéré d’avance et de manière générale que les éléments descriptifs de signes en conflit devraient être exclus de l’appréciation de leur similitude (voir, à cet égard, ordonnance du 7 mai 2015, Adler Modemärkte/OHMI, C‑343/14 P, non publiée, EU:C:2015:310, point 38).

50

S’agissant, deuxièmement, du caractère distinctif de la marque antérieure, il ressort de la jurisprudence de la Cour que la détermination dudit caractère distinctif est fonction notamment des qualités intrinsèques de cette marque, y compris de la présence ou de l’absence des éléments descriptifs des produits ou des services pour lesquels ladite marque a été enregistrée (voir, en ce sens, arrêt du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, points 20, 22 et 23 ainsi que jurisprudence citée).

51

Or, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général, au point 43 de ses conclusions, la capacité du signe à identifier les produits ou les services, pour lesquels celui-ci a été enregistré en tant que marque, comme provenant d’une entreprise donnée, doit être évaluée par rapport au signe dans son ensemble et donc à la lumière de tous les composants de ce dernier, de telle sorte que l’exclusion de l’un des éléments de la marque antérieure de l’analyse du caractère distinctif de cette marque peut avoir une influence sur la portée de la protection de celle-ci.

52

Il convient de constater, en deuxième lieu, que, pour des raisons analogues à celles exposées aux points 48 à 51 du présent arrêt, une déclaration de renonciation, prévue en droit national, qui aurait pour effet d’attribuer d’emblée et de manière permanente à l’élément d’une marque complexe qu’elle vise un caractère non distinctif, de telle sorte qu’il n’aurait qu’une importance limitée dans l’analyse du risque de confusion, au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous b), de la directive 2008/95, serait également incompatible avec les exigences de cette disposition.

53

À cet égard, il y a lieu de relever, premièrement, que les éléments descriptifs, non distinctifs ou faiblement distinctifs d’une marque complexe, qu’ils soient ou non visés par une déclaration de renonciation telle que celle en cause au principal, ont généralement un poids moindre dans l’analyse de la similitude entre les signes que les éléments revêtus d’un caractère distinctif plus important, qui ont également une faculté plus grande de dominer l’impression d’ensemble produite par cette marque (voir, à cet égard, arrêt du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 23, et ordonnance du 27 avril 2006, L’Oréal/OHMI, C‑235/05 P, non publiée, EU:C:2006:271, point 43).

54

Néanmoins, la Cour a déjà précisé que l’appréciation individuelle de chaque signe afin de déterminer l’impression d’ensemble qui en ressort, telle que requise par la jurisprudence constante de la Cour, doit être effectuée en fonction des circonstances particulières de l’espèce et ne saurait être considérée comme étant soumise à des présomptions générales (voir, en ce sens, arrêt du 8 mai 2014, Bimbo/OHMI, C‑591/12 P, EU:C:2014:305, point 36).

55

Deuxièmement, lorsque la marque antérieure et le signe dont l’enregistrement est demandé coïncident dans un élément de caractère faiblement distinctif ou descriptif au regard des produits et des services en cause, il est vrai que l’appréciation globale du risque de confusion, au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous b), de la directive 2008/95, n’aboutira fréquemment pas au constat de l’existence dudit risque. Toutefois, il résulte de la jurisprudence de la Cour que le constat de l’existence d’un tel risque de confusion ne peut pas, en raison de l’interdépendance des facteurs pertinents à cet égard, être exclu d’avance et en toute hypothèse (voir, à cet égard, ordonnance du 29 novembre 2012, Hrbek/OHMI, C‑42/12 P, non publiée, EU:C:2012:765, point 63, ainsi que arrêt du 8 novembre 2016, BSH/EUIPO, C‑43/15 P, EU:C:2016:837, points 48 et 61 à 64).

56

Il découle de ce qui précède que l’attribution à un élément d’une marque complexe, visé par une déclaration de renonciation, d’un caractère non distinctif et, partant, d’un poids limité dans l’appréciation globale du risque de confusion, au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous b), de la directive 2008/95, pourrait certes correspondre, dans certaines situations, à la perception, par le public pertinent, des signes en cause. Toutefois, il ne saurait être considéré que tel sera nécessairement le cas dans chaque hypothèse, de telle sorte qu’une déclaration de renonciation ayant un tel effet pourrait aboutir à l’enregistrement de signes susceptibles de générer un risque de confusion dans l’esprit dudit public au sens de cette disposition.

57

En troisième lieu, il importe de souligner que l’interprétation retenue aux points 46 et 52 du présent arrêt ne saurait être remise en cause par la circonstance selon laquelle l’élément visé par la déclaration de renonciation en cause au principal est, en vertu du droit national et en raison de son caractère descriptif, exclu de la protection offerte à une marque enregistrée, de telle sorte que sa prise en compte dans l’analyse des facteurs pertinents pour constater le risque de confusion, au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous b), de la directive 2008/95, lui permettrait de bénéficier d’une protection dont il ne saurait jouir dans le système de ladite directive.

58

En effet, la constatation de l’existence d’un risque de confusion aboutit uniquement à la protection d’une certaine combinaison d’éléments sans toutefois protéger en tant que tel un élément descriptif faisant partie de cette combinaison (voir, par analogie, ordonnances du 15 janvier 2010, Messer Group/Air Products and Chemicals, C‑579/08 P, non publiée, EU:C:2010:18, point 73, et du 30 janvier 2014, Industrias Alen/The Clorox Company, C‑422/12 P, EU:C:2014:57, point 45). Par conséquent, le titulaire d’une marque complexe ne saurait, en tout état de cause, revendiquer un droit exclusif seulement sur un élément de ladite marque, que celui-ci soit ou non visé par une déclaration de renonciation prévue par le droit national.

59

Par ailleurs, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général, aux points 26 et 50 de ses conclusions, la directive 2008/95 prévoit des garanties suffisantes visant à assurer, d’une part, que les signes composés exclusivement de signes ou d’indications de nature descriptive de catégories de produits ou de services pour lesquelles l’enregistrement est demandé sont, en application de son article 3, paragraphe 1, sous c), refusés à l’enregistrement ou déclarés nuls et peuvent ainsi être librement utilisés par d’autres opérateurs économiques.

60

D’autre part, il résulte de l’article 6, paragraphe 1, sous b), de ladite directive que, dès lors qu’un signe est valablement enregistré en tant que marque, le droit exclusif conféré par cette marque ne permet pas au titulaire de celle-ci d’interdire à un tiers l’usage, dans la vie des affaires, des indications de nature descriptive pour les produits et les services visés, sous réserve du respect de certaines conditions (voir, à cet égard, arrêts du 4 mai 1999, Windsurfing Chiemsee, C‑108/97 et C‑109/97, EU:C:1999:230, points 25 et 28 ; du 10 avril 2008, adidas et adidas Benelux, C‑102/07, EU:C:2008:217, points 46 et 47, ainsi que du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, points 59 à 62).

61

En outre, il importe de préciser que ladite interprétation s’inscrit dans la poursuite des objectifs de la directive 2008/95 auxquels il est fait référence au point 32 du présent arrêt, dès lors qu’elle vise à garantir que la protection d’une marque nationale enregistrée contre un risque de confusion soit garantie suivant les mêmes critères et ainsi d’une manière uniforme dans tous les États membres, notamment eu égard à la circonstance que de nombreux États membres ne prévoient pas la possibilité d’enregistrer les signes en tant que marques avec de telles déclarations et que les conditions de l’inscription de ces déclarations et les effets de ces dernières peuvent varier entre les législations de ces États membres.

62

Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que l’article 4, paragraphe 1, sous b), de la directive 2008/95 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale prévoyant une déclaration de renonciation qui aurait pour effet d’exclure un élément d’une marque complexe, visé par cette déclaration, de l’analyse globale des facteurs pertinents pour établir l’existence d’un risque de confusion au sens de cette disposition ou d’attribuer à un tel élément, d’emblée et de manière permanente, une importance limitée dans cette analyse.

Sur les dépens

63

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (cinquième chambre) dit pour droit :

 

L’article 4, paragraphe 1, sous b), de la directive 2008/95/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2008, rapprochant les législations des États membres sur les marques, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale prévoyant une déclaration de renonciation qui aurait pour effet d’exclure un élément d’une marque complexe, visé par cette déclaration, de l’analyse globale des facteurs pertinents pour établir l’existence d’un risque de confusion au sens de cette disposition ou d’attribuer à un tel élément, d’emblée et de manière permanente, une importance limitée dans cette analyse.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : le suédois.