ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)

26 mars 2019 ( *1 )

« Pourvoi – Régime linguistique – Concours généraux pour le recrutement d’administrateurs – Avis de concours – Administrateurs (AD 5) – Administrateurs (AD 6) dans le domaine de la protection des données – Connaissances linguistiques – Limitation du choix de la langue 2 des concours aux langues anglaise, française et allemande – Langue de communication avec l’Office européen de sélection du personnel (EPSO) – Règlement no 1 – Statut des fonctionnaires – Discrimination fondée sur la langue – Justification – Intérêt du service – Contrôle juridictionnel »

Dans l’affaire C‑621/16 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 25 novembre 2016,

Commission européenne, représentée par Mme L. Pignataro-Nolin et M. G. Gattinara, en qualité d’agents,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant :

République italienne, représentée par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de M. P. Gentili, avvocato dello Stato,

partie demanderesse en première instance,

soutenue par :

Royaume d’Espagne, représenté par Mme M. J. García-Valdecasas Dorrego, en qualité d’agent,

partie intervenante au pourvoi,

République de Lituanie,

partie intervenante en première instance,

LA COUR (grande chambre),

composée de M. K. Lenaerts, président, Mme R. Silva de Lapuerta, vice–présidente, MM. J.–C. Bonichot, M. Vilaras, E. Regan, F. Biltgen, Mme K. Jürimäe et M. C. Lycourgos, présidents de chambre, MM. A. Rosas (rapporteur), E. Juhász, J. Malenovský, E. Levits et L. Bay Larsen, juges,

avocat général : M. M. Bobek,

greffier : Mme V. Giacobbo-Peyronnel, administratrice,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 25 juillet 2018,

rend le présent

Arrêt

1

Par son pourvoi, la Commission européenne demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 15 septembre 2016, Italie/Commission (T‑353/14 et T‑17/15, ci–après l’« arrêt attaqué », EU:T:2016:495), par lequel celui-ci a annulé l’avis de concours général EPSO/AD/276/14, pour la constitution d’une liste de réserve d’administrateurs (JO 2014, C 74 A, p. 4), et l’avis de concours général EPSO/AD/294/14, pour la constitution d’une liste de réserve d’administrateurs dans le domaine de la protection des données pour le Contrôleur européen de la protection des données (JO 2014, C 391 A, p. 1) (ci-après, pris ensemble, les « avis de concours litigieux »).

Le cadre juridique

Le règlement no 1/58

2

L’article 1er du règlement no 1 du Conseil, du 15 avril 1958, portant fixation du régime linguistique de la Communauté économique européenne (JO 1958, 17, p. 385), tel que modifié par le règlement (UE) no 517/2013 du Conseil, du 13 mai 2013 (JO 2013, L 158, p. 1) (ci-après le « règlement no 1/58 »), dispose :

« Les langues officielles et les langues de travail des institutions de l’Union sont l’allemand, l’anglais, le bulgare, le croate, le danois, l’espagnol, l’estonien, le finnois, le français, le grec, le hongrois, l’irlandais, l’italien, le letton, le lituanien, le maltais, le néerlandais, le polonais, le portugais, le roumain, le slovaque, le slovène, le suédois et le tchèque. »

3

L’article 2 de ce règlement prévoit :

« Les textes adressés aux institutions par un État membre ou par une personne relevant de la juridiction d’un État membre sont rédigés au choix de l’expéditeur dans l’une des langues officielles. La réponse est rédigée dans la même langue. »

4

Aux termes de l’article 6 dudit règlement :

« Les institutions peuvent déterminer les modalités d’application de ce régime linguistique dans leurs règlements intérieurs. »

Le statut des fonctionnaires

5

Le statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut des fonctionnaires ») est établi par le règlement (CEE, Euratom, CECA) no 259/68 du Conseil, du 29 février 1968, fixant le statut des fonctionnaires des Communautés européennes ainsi que le régime applicable aux autres agents de ces Communautés, et instituant des mesures particulières temporairement applicables aux fonctionnaires de la Commission (JO 1968, L 56, p. 1), tel que modifié par le règlement (UE, Euratom) no 1023/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2013 (JO 2013, L 287, p. 15).

6

Le titre I du statut des fonctionnaires, intitulé « Dispositions générales », comprend les articles 1er à 10 quater de celui-ci.

7

L’article 1er quinquies du statut des fonctionnaires énonce :

« 1.   Dans l’application du présent statut est interdite toute discrimination, telle qu’une discrimination fondée sur [...] la langue [...].

[...]

6.   Dans le respect du principe de non-discrimination et du principe de proportionnalité, toute limitation de ces principes doit être objectivement et raisonnablement justifiée et doit répondre à des objectifs légitimes d’intérêt général dans le cadre de la politique du personnel. [...] »

8

Aux termes de l’article 2 du statut des fonctionnaires :

« 1.   Chaque institution détermine les autorités qui exercent en son sein les pouvoirs dévolus par le présent statut à l’autorité investie du pouvoir de nomination.

2.   Toutefois, une ou plusieurs institutions peuvent confier à l’une d’entre elles ou à un organisme interinstitutionnel l’exercice de tout ou partie des pouvoirs dévolus à l’autorité investie du pouvoir de nomination, à l’exception des décisions relatives aux nominations, aux promotions ou aux mutations de fonctionnaires. »

9

Le titre III du statut des fonctionnaires est intitulé « De la carrière du fonctionnaire ».

10

Le chapitre 1er de ce titre, intitulé « Recrutement », comporte les articles 27 à 34 du statut des fonctionnaires, dont l’article 27, premier alinéa, de ce dernier dispose :

« Le recrutement doit viser à assurer à l’institution le concours de fonctionnaires possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité, recrutés sur une base géographique la plus large possible parmi les ressortissants des États membres de l’Union. Aucun emploi ne peut être réservé aux ressortissants d’un État membre déterminé. »

11

L’article 28 du statut des fonctionnaires prévoit :

« Nul ne peut être nommé fonctionnaire :

[...]

d)

s’il n’a satisfait, sous réserve des dispositions de l’article 29, paragraphe 2 [portant sur l’adoption d’une procédure de recrutement autre que celle du concours pour le recrutement du personnel d’encadrement supérieur et, dans des cas exceptionnels, pour des emplois nécessitant des qualifications spéciales], à un concours sur titres, sur épreuves ou sur titres et épreuves dans les conditions prévues à l’annexe III ;

[...]

f)

s’il ne justifie posséder une connaissance approfondie d’une des langues de l’Union et une connaissance satisfaisante d’une autre langue de l’Union dans la mesure nécessaire aux fonctions qu’il est appelé à exercer. »

12

L’article 29, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires, qui prévoit la possibilité d’ouvrir la procédure de concours sur titres, sur épreuves ou sur titres et épreuves afin de pourvoir aux vacances d’emploi dans une institution, dispose que « [l]a procédure de concours est déterminée à l’annexe III ».

13

Au chapitre 3 du titre III du statut des fonctionnaires, intitulé « Notation, avancement d’échelon et promotion », l’article 45, paragraphe 2, de ce statut dispose :

« Le fonctionnaire est tenu de démontrer, avant sa première promotion après recrutement, sa capacité à travailler dans une troisième langue parmi celles visées à l’article 55, paragraphe 1, du traité sur l’Union européenne. [...] »

14

L’annexe III du statut des fonctionnaires est intitulée « Procédure de concours ». L’article 1er de celle-ci prévoit :

« 1.   L’avis de concours est arrêté par l’autorité investie du pouvoir de nomination, après consultation de la commission paritaire.

Il doit spécifier :

a)

La nature du concours (concours interne à l’institution, concours interne aux institutions, concours général, le cas échéant, commun à deux ou plusieurs institutions) ;

b)

Les modalités (concours sur titres, sur épreuves ou sur titres et épreuves) ;

c)

La nature des fonctions et attributions afférentes aux emplois à pourvoir ainsi que le groupe de fonctions et le grade proposés ;

d)

[...] les diplômes et autres titres ou le niveau d’expérience requis pour les emplois à pourvoir ;

e)

Dans le cas de concours sur épreuves, la nature des examens et leur cotation respective ;

f)

Éventuellement les connaissances linguistiques requises par la nature particulière des postes à pourvoir ;

g)

Éventuellement, la limite d’âge ainsi que le report de la limite d’âge applicable aux agents en fonction depuis au minimum un an ;

h)

La date limite de réception des candidatures ;

[...] »

15

Aux termes de l’article 7 de cette annexe :

« 1.   Les institutions, après consultation du comité du statut, confient à l’Office européen de sélection du personnel [(EPSO)] la responsabilité de prendre les mesures nécessaires pour garantir l’application de normes uniformes dans les procédures de sélection des fonctionnaires de l’Union [...]

2.   Les tâches de l’[EPSO] sont les suivantes :

a)

à la demande d’une institution, organiser des concours généraux ;

[...]

d)

assumer la responsabilité générale de la définition et de l’organisation de l’évaluation des capacités linguistiques afin de garantir l’application harmonisée et cohérente des conditions établies à l’article 45, paragraphe 2.

3.   L’[EPSO] peut, à la demande d’une institution, exécuter d’autres tâches liées à la sélection des fonctionnaires.

[...] »

La décision 2002/620/CE

16

L’EPSO a été créé par la décision 2002/620/CE du Parlement européen, du Conseil, de la Commission, de la Cour de justice, de la Cour des comptes, du Comité économique et social, du Comité des régions et du médiateur, du 25 juillet 2002 (JO 2002, L 197, p. 53).

17

L’article 2, paragraphe 1, première phrase, de cette décision énonce que l’EPSO exerce, notamment, les pouvoirs de sélection dévolus par l’annexe III du statut des fonctionnaires aux autorités investies du pouvoir de nomination des institutions signataires de ladite décision.

18

L’article 4, dernière phrase, de la décision 2002/620 prévoit que tout recours dans les domaines visés par cette décision est dirigé contre la Commission.

Les autres textes applicables et les avis de concours litigieux

Les dispositions générales applicables aux concours généraux

19

Le 1er mars 2014, l’EPSO a publié au Journal officiel de l’Union européenne (JO 2014, C 60 A, p. 1) un document intitulé « dispositions générales applicables aux concours généraux ». Ce document contient, parmi d’autres spécifications, des dispositions sur les connaissances linguistiques exigées des candidats aux concours. Il est indiqué sur la première page de celui-ci que « [l]es présentes dispositions générales font partie intégrante de l’avis de concours et constituent, avec l’avis, le cadre contraignant de la procédure de concours ».

20

Le point 1.1 des dispositions générales applicables aux concours généraux, qui définit ces concours, expose que « les institutions européennes sélectionnent leurs futurs fonctionnaires au moyen de concours généraux ». Il ressort du point 1.3 de ces dispositions générales, intitulé « Éligibilité », que, au titre des connaissances linguistiques requises, il est en règle générale exigé du candidat qu’il dispose « de connaissances solides dans l’une des langues officielles de l’[Union] et de connaissances satisfaisantes dans une autre. [...] Sauf spécification contraire dans l’avis de concours, le choix de la deuxième langue sera normalement limité à l’anglais, au français ou à l’allemand ».

21

Le point 2 des dispositions générales applicables aux concours généraux est relatif aux étapes du concours. Au point 2.1.4 de celles-ci, intitulé « Complétez votre acte de candidature électronique », il est précisé, notamment, que « [t]outes les parties de l’acte de candidature électronique, y compris l’“évaluateur de talent”, doivent être complétées en anglais, en français ou en allemand, sauf spécification contraire dans l’avis de concours ».

22

Le point 3 desdites dispositions générales expose des « informations générales ». Le point 3.1.1 de celles-ci, intitulé « Communications d’EPSO adressées aux candidats », indique, notamment, que « [v]os résultats et toutes les convocations vous seront adressés uniquement via votre compte EPSO en anglais, en français ou en allemand ».

L’orientation générale sur l’utilisation des langues

23

Les lignes directrices générales sur l’utilisation des langues dans les concours EPSO, adoptées le 15 mai 2013 par le collège des chefs d’administration (ci-après l’« orientation générale sur l’utilisation des langues »), sont appliquées par l’EPSO lors de l’organisation de concours généraux, ainsi que cela ressort du point 1.3 des dispositions générales applicables aux concours généraux. Ces lignes directrices, qui figurent à l’annexe 2 de ces dispositions générales, prévoient :

« En règle générale, l’utilisation des langues dans le cadre des concours EPSO est confirmée comme suit :

[...]

les épreuves des centres d’évaluation seront organisées uniquement dans la deuxième langue des candidats au choix parmi l’anglais, le français et l’allemand.

[...]

La limitation du choix de la deuxième langue se justifie par plusieurs facteurs.

Premièrement, l’intérêt du service exige que les nouveaux recrutés soient immédiatement opérationnels et capables d’accomplir efficacement les tâches dans le domaine ou la fonction pour lequel/laquelle ils sont recrutés.

L’anglais, le français et l’allemand demeurent les langues les plus largement employées au sein des institutions. Ils constituent traditionnellement les langues des délibérations dans les réunions entre membres des institutions. En outre, ces trois langues sont les langues véhiculaires utilisées le plus souvent pour la communication interne et externe, comme le confirment les statistiques concernant les langues sources des textes traduits par les services de traduction des institutions.

Au vu des besoins réels des services des institutions en matière d’utilisation des langues dans la communication interne et externe, il est nécessaire d’imposer comme critère de sélection en vertu de l’article 27, paragraphe 1, du statut [des fonctionnaires], une connaissance satisfaisante d’une de ces trois langues et de la tester en simulant une situation de travail réelle. [...]

Deuxièmement, la limitation du choix des langues pour les étapes ultérieures des concours se justifie par la nature des épreuves. [...]

De nombreuses recherches scientifiques approfondies démontrent que le recours à des centres d’évaluation qui simulent des situations professionnelles réelles est le meilleur moyen de prévoir les performances. [...] Or, le recours à cette méthode exige, afin de permettre une évaluation homogène des candidats et la communication directe entre ceux-ci, les évaluateurs et les autres candidats également soumis à cet exercice, que l’épreuve organisée au centre d’évaluation se déroule dans une langue véhiculaire ou, dans certains cas, dans la seule langue principale du concours. [...]

[...] Étant donné que les usages historiques décrits ci-dessus correspondent toujours à la réalité interne actuelle, [l]e choix [de la langue véhiculaire des épreuves] doit être limité aux langues française, anglaise et allemande. Les centres d’évaluation ne procèdent à aucune évaluation des connaissances linguistiques, et une connaissance satisfaisante de l’une de ces trois langues en tant que deuxième langue suffit largement pour passer les tests (conformément aux exigences minimales énoncées à l’article 28 du statut [des fonctionnaires]). Ce niveau de connaissance linguistique est entièrement proportionné aux besoins réels du service décrits ci-dessus.

[...] L’obligation faite aux candidats de choisir une deuxième langue, différente de leur première langue (normalement la langue maternelle ou équivalente), parmi l’anglais, le français et l’allemand permet de les comparer sur une base homogène. [...]

[...] [L]a limitation du choix de la deuxième langue reflète les connaissances linguistiques de la population européenne. L’anglais, le français et l’allemand ne sont pas seulement les langues de plusieurs États membres de l’Union européenne, mais également celles les plus largement maîtrisées en tant que langues étrangères. Ce sont les langues les plus étudiées en tant que langues étrangères ainsi que celles que la population européenne considère comme les plus utiles à apprendre. Les besoins réels du service semblent donc raisonnablement refléter les capacités linguistiques que l’on peut attendre des candidats, d’autant plus que la connaissance linguistique au sens strict (erreurs de grammaire, d’orthographe ou de vocabulaire) n’est pas évaluée dans le cadre des tests portant sur les compétences. Ainsi, le fait de limiter le choix de la deuxième langue aux trois langues en question ne crée aucun obstacle disproportionné à l’accès des citoyens aux concours. En effet, au vu des informations disponibles, cela correspond assez bien aux habitudes et aux attentes des citoyens.

Le caractère proportionnel et non discriminatoire de la limitation du choix de la deuxième langue pour certaines étapes du concours est corroboré par des statistiques pertinentes. Ainsi, l’anglais, le français et l’allemand étaient aussi les deuxièmes langues les plus choisies par les candidats aux concours, lorsque ceux-ci avaient la possibilité de choisir leur deuxième langue parmi les onze langues officielles dans le cadre des grands concours généraux EU–25 pour administrateurs et assistants, en 2005. Les statistiques relatives aux concours après la réforme de 2010 ne démontrent aucune distorsion en faveur des ressortissants des pays dont l’anglais, le français ou l’allemand est la langue officielle. De même, il s’avère que ces trois langues continuent d’être choisies en tant que deuxième langue par un nombre non négligeable de candidats, comme le montrent les statistiques des épreuves du cycle AD 2010.

Pour les mêmes raisons, il semble justifié d’exiger des candidats qu’ils choisissent l’une de ces langues pour communiquer avec EPSO et compléter l’évaluateur de talent.

[...] »

Les avis de concours litigieux

24

Le Tribunal a exposé le contenu des avis de concours litigieux dans les termes suivants aux points 12 à 24 de l’arrêt attaqué :

« 12 Le 13 mars 2014, l’EPSO a publié au Journal officiel de l’Union européenne [les avis de concours litigieux]. [...]

13 Il est indiqué dans la partie introductive de chacun des [avis de concours litigieux] que les dispositions générales [applicables aux concours généraux] en font “partie intégrante”.

14 Au titre des conditions d’admission aux concours concernés par les [avis de concours litigieux], ces derniers exigent une connaissance approfondie d’une des langues officielles de l’Union, cette langue étant désignée comme la “langue 1” du concours et une connaissance satisfaisante d’une deuxième langue, désignée comme “langue 2” du concours, à choisir par le candidat parmi l’allemand, l’anglais ou le français, étant précisé qu’elle doit obligatoirement être différente de la langue choisie par le candidat en tant que langue 1 (partie III, point 2.3, des [avis de concours litigieux]) [(ci-après la “langue 2 du concours”)].

15 Des précisions sont fournies au point 2.3 de la partie III des [avis de concours litigieux], s’agissant de la limitation du choix de la langue 2 aux seules trois langues susmentionnées. L’avis de concours général EPSO/AD/276/14 relève, à cet égard, ce qui suit :

“Au vu de l’arrêt [du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752)], les institutions de l’Union souhaitent, dans le cadre du présent concours, motiver la limitation du choix de la deuxième langue à un nombre restreint de langues officielles de l’Union.

Les candidats sont donc informés que les deuxièmes langues retenues aux fins du présent concours ont été définies conformément à l’intérêt des services, qui exige que les nouveaux recrutés soient immédiatement opérationnels et capables de communiquer efficacement dans leur travail quotidien. Le fonctionnement effectif des institutions risquerait autrement d’être gravement entravé.

Eu égard à la longue pratique des institutions de l’Union en ce qui concerne les langues de communication interne, et compte tenu des besoins des services en matière de communication externe et de traitement des dossiers, l’anglais, le français et l’allemand demeurent les langues les plus largement employées. En outre, l’anglais, le français et l’allemand sont les deuxièmes langues les plus répandues dans l’Union et les plus étudiées en tant que deuxièmes langues. Cela confirme le niveau d’études et les compétences professionnelles qui peuvent être actuellement attendus des candidats à des postes au sein des institutions de l’Union, à savoir la maîtrise d’au moins l’une de ces langues. Par conséquent, dans la mise en balance de l’intérêt du service et des aptitudes des candidats, compte tenu du domaine particulier du présent concours, il est justifié d’organiser des épreuves dans ces trois langues afin de garantir que, quelle que soit leur première langue officielle, tous les candidats maîtriseront au moins l’une de ces trois langues officielles au niveau d’une langue de travail. L’appréciation des compétences spécifiques permet ainsi aux institutions de l’Union d’évaluer l’aptitude des candidats à être immédiatement opérationnels dans un environnement proche de celui dans lequel ils seront appelés à travailler.

Pour les mêmes raisons, il est indiqué de limiter la langue de communication entre les candidats et l’institution, y inclus la langue dans laquelle les actes de candidature doivent être rédigés. D’ailleurs, cette exigence assure l’homogénéité [dans la comparaison des candidats et dans le contrôle de leurs actes de candidature].

En outre, dans un souci d’égalité de traitement, tout candidat, même s’il a l’une de ces trois langues comme première langue officielle, est tenu de passer certaines épreuves dans sa deuxième langue, à choisir parmi ces trois langues.

Ces dispositions ne portent pas atteinte à l’apprentissage ultérieur d’une troisième langue de travail conformément à l’article 45, paragraphe 2, du statut [des fonctionnaires].”

16 L’avis de concours général EPSO/AD/294/14 fournit, en substance, les mêmes précisions.

17 La partie IV de l’avis de concours général EPSO/AD/276/14 prévoit l’organisation de tests d’accès, effectués sur ordinateur. Il s’agit d’épreuves de raisonnement verbal [test a)], de raisonnement numérique [test b)], de raisonnement abstrait [test c)] et de jugement situationnel [test d)]. Au point 3 de cette partie de l’avis, il est précisé que la langue des tests a) à c) est la langue 1 du concours, alors que la langue du test d) est la langue 2 du concours.

18 Par ailleurs, la partie IV de l’avis de concours général EPSO/AD/294/14 prévoit également l’organisation de tests d’accès. Il s’agit d’épreuves de raisonnement verbal [test a)], de raisonnement numérique [test b)] et de raisonnement abstrait [test c)]. Au point 3 de cette partie de l’avis, il est précisé que la langue des tests a) à c) est la langue 1 du concours.

19 La partie V de l’avis de concours général EPSO/AD/294/14 définit la procédure d’admission au concours et de la sélection sur titres. Il y est précisé que l’examen des conditions générales et spécifiques et la sélection sur titres sont effectués dans un premier temps sur la base des déclarations des candidats faites dans l’acte de candidature. Les réponses des candidats aux questions relatives aux conditions générales et spécifiques sont traitées afin de déterminer s’ils font partie de la liste des candidats qui remplissent toutes les conditions d’admission au concours, conformément à ce qui est prévu au titre III de l’avis EPSO/AD/294/14. Ensuite, le jury procède, pour les candidats qui remplissent les conditions d’admission au concours concerné, à une sélection sur titres, afin d’identifier les candidats qui possèdent les qualifications les plus pertinentes, notamment en ce qui concerne leurs diplômes et leur expérience professionnelle, par rapport à la nature des fonctions et aux critères de sélection décrits dans l’avis EPSO/AD/294/14. Cette sélection s’effectue uniquement sur la base des déclarations des candidats faites dans l’onglet “évaluateur de talent”, selon une notation établie dans la partie V, point 1, sous b), de l’avis EPSO/AD/294/14.

[...]

21 L’ultime étape des procédures de sélection concernées par les [avis de concours litigieux] consiste en un “centre d’évaluation” (partie V de l’avis EPSO/AD/276/14 ; partie VI de l’avis EPSO/AD/294/14).

22 Au point 3 de la partie V de l’avis EPSO/AD/276/14, il est indiqué que la langue du centre d’évaluation est la langue 2 du concours.

23 Selon le point 2 de la partie VI de l’avis EPSO/AD/294/14, dans le cadre de l’épreuve du centre d’évaluation, les candidats seront soumis à trois types d’exercice, visant à évaluer :

leurs aptitudes en matière de raisonnement, par le biais d’un test de raisonnement verbal [test a)], d’un test de raisonnement numérique [test b)] et d’un test de raisonnement abstrait [test c)] ;

leurs compétences spécifiques, par le biais d’un entretien structuré sur les compétences dans le domaine [test d)] ;

leurs compétences générales, par le biais d’une étude de cas [test e)], d’un exercice de groupe [test f)] et d’un entretien structuré [test g)].

24 Il est indiqué, par ailleurs, au point 3 de la même partie de l’avis EPSO/AD/294/14, que les langues du centre d’évaluation seront la langue 1 du concours pour les tests a) à c) et la langue 2 du concours pour les tests d) à g). »

La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

25

Par requêtes déposées au greffe du Tribunal, l’une, le 23 mai 2014 et, l’autre, le 15 janvier 2015, la République italienne a introduit des recours tendant à l’annulation de chacun des avis de concours litigieux. Ces affaires ont été enregistrées, respectivement, sous les numéros T‑353/14 et T‑17/15. La République de Lituanie est intervenue au soutien des conclusions de la République italienne dans cette dernière affaire.

26

Les affaires T‑353/14 et T‑17/15 ont été jointes aux fins de la procédure orale et de l’arrêt.

27

La République italienne a contesté la légalité de deux volets du régime linguistique instauré par les avis de concours litigieux, à savoir celui limitant à l’anglais, au français et à l’allemand le choix, d’une part, de la langue 2 du concours et, d’autre part, des langues de communication pouvant être utilisées dans les échanges entre les candidats et l’EPSO.

28

Après avoir rejeté la fin de non-recevoir opposée par la Commission, le Tribunal a, en premier lieu, examiné, de manière conjointe, les troisième et septième moyens de chacun des recours, portant sur le premier volet du régime linguistique contesté, à savoir la légalité de la limitation du choix de la langue 2 du concours à l’anglais, au français et à l’allemand, et tirés de la violation de l’article 6, paragraphe 3, TUE, de l’article 18 TFUE, de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE, de l’article 22 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, des articles 1er et 6 du règlement no 1/58, de l’article 1er quinquies, paragraphes 1 et 6, de l’article 27, deuxième alinéa, et de l’article 28, sous f), du statut des fonctionnaires ainsi que de l’article 1er, paragraphe 1, sous f), et paragraphes 2 et 3, de l’annexe III de celui-ci, d’une violation du principe de proportionnalité, ainsi que d’une « dénaturation des faits ». Il a fait droit à ces moyens et a annulé les avis de concours litigieux en tant qu’ils ont prévu de telles exigences linguistiques.

29

En second lieu, le Tribunal a examiné le sixième moyen de chacun des recours, portant sur le second volet du régime linguistique contesté, à savoir celui de la légalité de la limitation, à ces trois langues, du choix de la langue de communication entre les candidats aux concours et l’EPSO, tiré de la violation de l’article 18 TFUE, de l’article 24, quatrième alinéa, TFUE, de l’article 22 de la charte des droits fondamentaux, de l’article 2 du règlement no 1/58 ainsi que de l’article 1er quinquies, paragraphes 1 et 6, du statut des fonctionnaires. Le Tribunal a également accueilli ce moyen et, sans qu’il ait estimé nécessaire d’examiner les autres moyens des recours, a annulé les avis de concours litigieux en tant qu’ils ont imposé une telle limitation.

30

Enfin, le Tribunal a précisé que, nonobstant l’annulation des avis de concours litigieux, il n’y avait pas lieu de remettre en cause les résultats des concours concernés par ces avis.

Les conclusions des parties au pourvoi

31

La Commission demande à la Cour :

d’annuler l’arrêt attaqué ;

de rejeter, pour autant que le litige est en état d’être jugé, les recours en première instance comme non fondés ;

de condamner la République italienne aux dépens de la présente procédure et à ceux de la procédure en première instance, et

de condamner la République de Lituanie à supporter ses propres dépens.

32

La République italienne demande à la Cour :

de rejeter le pourvoi et

de condamner la Commission aux dépens.

33

Par décision du président de la Cour du 30 mars 2017, le Royaume d’Espagne a été admis à intervenir au soutien des conclusions de la République italienne.

Sur le pourvoi

34

La Commission soulève quatre moyens à l’appui de son pourvoi.

35

Le premier moyen porte sur l’erreur de droit commise par le Tribunal dans son appréciation de la recevabilité des recours présentés devant lui. Le deuxième moyen est relatif à l’erreur de droit commise par le Tribunal dans l’interprétation de l’article 1er quinquies du statut des fonctionnaires et dans l’interprétation de l’étendue de l’obligation de motivation qui pesait sur la Commission. Le troisième moyen est tiré, d’une part, d’erreurs de droit dans l’interprétation de l’article 28, sous f), du statut des fonctionnaires et, d’autre part, du fait que le Tribunal a excédé les limites du contrôle juridictionnel qu’il pouvait porter sur la limitation, aux langues anglaise, française et allemande, du choix de la langue 2 du concours. Enfin, le quatrième moyen concerne les erreurs de droit commises lors de l’appréciation de la limitation de la langue de communication entre les candidats aux concours et l’EPSO à l’une de ces trois langues.

Sur le premier moyen, relatif à la recevabilité du recours devant le Tribunal

Argumentation des parties

36

Le premier moyen se divise en quatre branches.

37

Par la première branche de ce moyen, la Commission reproche au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit en n’ayant pas considéré, aux points 47 à 52 de l’arrêt attaqué, que les dispositions générales applicables aux concours généraux et l’orientation générale sur l’utilisation des langues présentaient un caractère juridiquement contraignant. Par la deuxième branche dudit moyen, la Commission soutient que le Tribunal, en ayant jugé, aux points 53 à 57 de l’arrêt attaqué, que l’EPSO n’avait pas le pouvoir d’édicter des règles contraignantes générales et abstraites régissant le régime linguistique des concours qu’il organise, a commis une erreur de droit. Il aurait également motivé de manière contradictoire son appréciation sur ce point. Par la troisième branche de ce même moyen, la Commission fait valoir que le Tribunal, en ayant estimé, au point 58 de l’arrêt attaqué, que les dispositions générales applicables aux concours généraux et l’orientation générale sur l’utilisation des langues devaient être regardées comme étant des communications qui « annon[çai]ent » des critères pour une limitation du choix d’une langue en tant que langue 2 du concours, a interprété erronément la référence, au point 91 de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752), aux communications « stipulant » de tels critères.

38

Par la quatrième branche de son premier moyen, la Commission soutient que le Tribunal a procédé à une interprétation erronée, aux points 65 à 71 de l’arrêt attaqué, de la nature juridique des avis de concours litigieux, notamment en ce qu’il a estimé que ceux-ci ne constituaient pas des actes confirmatifs des dispositions générales applicables aux concours généraux. Il aurait également insuffisamment motivé son appréciation à cet égard.

39

La République italienne conteste l’ensemble de ces arguments.

Appréciation de la Cour

– Observations liminaires

40

Dans la mesure où la Commission reproche au Tribunal d’avoir jugé que les recours de la République italienne étaient recevables, ce moyen vise les points 43 à 71 de l’arrêt attaqué et critique, notamment, la conclusion, énoncée au point 71 de celui-ci, par laquelle le Tribunal a rejeté la fin de non-recevoir opposée par la Commission.

41

À cet égard, si le Tribunal a analysé, aux points 43 à 58 de l’arrêt attaqué, la nature et la portée juridique des dispositions générales applicables aux concours généraux, c’est en se fondant sur un examen de la nature juridique des avis de concours litigieux, figurant aux points 60 à 69 de l’arrêt attaqué, qu’il a rejeté la fin de non-recevoir opposée par la Commission. En effet, c’est au terme de cet examen, réalisé, ainsi qu’il ressort du point 59 de l’arrêt attaqué, « afin de statuer sur la recevabilité des [recours en cause] », que le Tribunal a constaté, au point 70 de cet arrêt, que « [c]es avis constituent des actes qui comportent des effets juridiques obligatoires quant au régime linguistique des concours en cause et constituent, ainsi, des actes attaquables ».

42

Dès lors que les conclusions que le Tribunal a tirées de son examen de la nature juridique des avis de concours litigieux ont ainsi été déterminantes pour le rejet de la fin de non-recevoir au point 71 de l’arrêt attaqué, il y a lieu d’examiner d’abord, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 45 de ses conclusions, la quatrième branche du premier moyen, portant sur la nature juridique de ces avis.

– Sur la quatrième branche du premier moyen, tirée d’une interprétation erronée de la nature juridique des avis de concours litigieux

43

Par la quatrième branche de son premier moyen, la Commission reproche au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit et d’avoir violé l’obligation de motivation en ce que celui-ci n’aurait pas apprécié, aux points 65 à 71 de l’arrêt attaqué, si les avis de concours litigieux avaient une portée purement confirmative par rapport aux dispositions générales applicables aux concours généraux. Selon elle, le Tribunal devait procéder à une comparaison du contenu de ces avis et de ces dispositions générales et, en tout état de cause, prendre en considération le fait que lesdites dispositions générales faisaient partie intégrante desdits avis. Une appréciation du contenu de ces instruments et de la relation entre ceux-ci aurait révélé que lesdites dispositions générales constituaient le régime contraignant des concours. Dans la mesure où les recours en annulation de la République italienne étaient uniquement dirigés contre les avis de concours litigieux, le Tribunal aurait dû déclarer qu’ils étaient irrecevables.

44

Il est de jurisprudence constante que le recours en annulation, prévu à l’article 263 TFUE, est ouvert à l’égard de toutes dispositions prises par les institutions, quelles qu’en soient la forme, qui visent à produire des effets juridiques obligatoires (voir, notamment, arrêts du 13 octobre 2011, Deutsche Post et Allemagne/Commission, C‑463/10 P et C‑475/10 P, EU:C:2011:656, point 36 ; du 13 février 2014, Hongrie/Commission, C‑31/13 P, EU:C:2014:70, point 54 ; du 25 octobre 2017, Roumanie/Commission, C‑599/15 P, EU:C:2017:801, point 47, ainsi que du 20 février 2018, Belgique/Commission, C‑16/16 P, EU:C:2018:79, point 31 ; voir également, en ce sens, arrêt du 11 novembre 1981, IBM/Commission, 60/81, EU:C:1981:264, point 9 ; ordonnance du 4 octobre 1991, Bosman/Commission, C‑117/91, EU:C:1991:382, point 13, et arrêt du 9 décembre 2004, Commission/Greencore, C‑123/03 P, EU:C:2004:783, point 44).

45

Les actes confirmatifs et les actes de pure exécution, en ce qu’ils ne produisent pas de tels effets juridiques, échappent au contrôle juridictionnel prévu à cet article (voir, en ce sens, arrêt du 12 septembre 2006, Reynolds Tobacco e.a./Commission, C‑131/03 P, EU:C:2006:541, point 55 ainsi que jurisprudence citée).

46

Aux fins de répondre à l’argumentation de la Commission, selon laquelle les avis de concours litigieux n’étaient, par rapport aux dispositions générales applicables aux concours généraux, que des actes confirmatifs ou des actes de pure exécution, le Tribunal a considéré, aux points 65 et 66 de l’arrêt attaqué, que « les termes de l’avis de concours constituent aussi bien le cadre de la légalité que le cadre d’appréciation pour le jury de concours » et que « le rôle essentiel d’un avis de concours est d’informer les intéressés d’une façon aussi exacte que possible de la nature des conditions requises pour occuper le poste dont il s’agit afin de les mettre en mesure d’apprécier s’il y a lieu pour eux de faire acte de candidature », « chaque avis de concours [étant] adopté dans l’objectif d’instaurer les règles régissant la procédure de déroulement d’un ou de plusieurs concours spécifiques, dont il arrête, ainsi, le cadre normatif en fonction de l’objectif fixé par l’[autorité investie du pouvoir de nomination] ».

47

Le Tribunal en a déduit, au point 67 de cet arrêt, qu’« un avis de concours, tel que les avis [de concours litigieux], qui, en tenant compte des besoins spécifiques des institutions ou des organes de l’Union concernés, instaure le cadre normatif d’un concours spécifique, y compris son régime linguistique, et ainsi comporte des effets juridiques autonomes, ne saurait, en principe, constituer un acte confirmatif ou un acte de pure exécution d’actes antérieurs ».

48

Afin d’apprécier la présente branche du premier moyen, il est nécessaire de déterminer si ces avis constituaient, comme l’a considéré le Tribunal, le cadre juridique contraignant des concours en cause. En effet, dans la mesure où les avis de concours litigieux produisaient, en eux-mêmes, des effets juridiques obligatoires, ils ne sauraient être qualifiés ni d’actes confirmatifs ni d’actes de pure exécution desdites dispositions générales et, partant, ce serait à bon droit que le Tribunal n’a pas procédé à une comparaison des contenus respectifs de ceux-ci.

49

Conformément à l’article 29, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires, la procédure de concours est déterminée par l’annexe III de celui-ci. À cet égard, il ressort de l’article 1er, paragraphe 1, de cette annexe que l’avis de concours est arrêté par l’autorité investie du pouvoir de nomination et doit spécifier, notamment, la nature et les modalités du concours, la nature des fonctions et les attributions afférentes aux emplois à pourvoir, les diplômes ou le niveau d’expérience requis pour ces derniers, la date limite de réception des candidatures, ainsi que d’autres conditions éventuelles, telles que les connaissances linguistiques requises par la nature particulière des postes à pourvoir. En outre, ladite annexe III comporte des dispositions régissant la publicité des avis de concours, les formulaires de candidature, la composition et les travaux du jury, ainsi que les conditions dans lesquelles les institutions de l’Union peuvent confier à l’EPSO des tâches relatives aux procédures de sélection.

50

Il s’ensuit que l’organisation d’un concours est régie par un avis dont les éléments essentiels doivent être prescrits conformément aux dispositions de l’annexe III du statut des fonctionnaires. Dans ces conditions, un avis de concours arrête, ainsi que l’a relevé le Tribunal au point 66 de l’arrêt attaqué, le « cadre normatif » d’un concours spécifique en fonction de l’objectif fixé par l’autorité investie du pouvoir de nomination, ce cadre régissant « la procédure du concours concerné, depuis le moment de la publication de l’avis en cause jusqu’à la publication de la liste de réserve comportant les noms des lauréats du concours concerné ».

51

Partant, dès lors que les avis de concours litigieux fixent un tel cadre normatif, ils produisent des effets juridiques obligatoires, au sens de la jurisprudence citée au point 44 du présent arrêt.

52

Cette appréciation de la nature juridique des avis de concours est, en l’occurrence, corroborée par le libellé des dispositions générales applicables aux concours généraux, adoptées par l’EPSO, ainsi que par celui des avis de concours litigieux eux-mêmes.

53

À cet égard, il résulte, d’une part, des indications figurant sur la première page des dispositions générales applicables aux concours généraux que celles-ci « font partie intégrante de l’avis de concours et constituent, avec l’avis, le cadre contraignant de la procédure de concours ». S’agissant des connaissances linguistiques exigées des candidats en vertu de ces dispositions générales, il est précisé, notamment aux points 1.3 et 2.1.4 de celles-ci, que le choix tant de la langue 2 du concours que de celle des actes de candidature est, « sauf spécification contraire dans l’avis de concours », limité aux langues anglaise, française et allemande. D’autre part, la partie introductive des avis de concours litigieux précise, en renvoyant auxdites dispositions générales, que « ces dispositions, qui font partie intégrante de l’avis de concours, vous aideront à comprendre les règles afférentes aux procédures et les modalités d’inscription ».

54

Dès lors que les dispositions générales applicables aux concours généraux ne constituent, selon leur libellé, le cadre contraignant de la procédure de concours qu’en combinaison « avec l’avis », celles-ci ne régissent pas, à elles seules, la procédure des concours visés par les avis de concours litigieux. Ainsi, bien que lesdites dispositions générales fassent « partie intégrante de l’avis de concours » et soient, certes, susceptibles d’être prises en considération à ce titre lors de l’analyse d’un avis de concours, celles-ci ne sauraient établir, en elles-mêmes, le cadre juridique des concours, tels que ceux régis par les avis de concours litigieux.

55

Par conséquent, c’est à juste titre que le Tribunal a jugé, au point 70 de l’arrêt attaqué, que les avis de concours litigieux constituaient non pas des actes confirmatifs ou des actes de pure exécution des dispositions générales applicables aux concours généraux, mais des actes qui comportaient « des effets juridiques obligatoires quant au régime linguistique des concours en cause ».

56

Dans ces conditions, et dès lors que le Tribunal pouvait tirer cette conclusion au vu du seul examen des avis de concours litigieux eux‑mêmes, il ne saurait être considéré qu’il a violé son obligation de motivation en ce qu’il n’a pas procédé, lors de l’analyse de la nature juridique de ces avis, à une comparaison du contenu de ces derniers avec celui des dispositions générales applicables aux concours généraux.

57

Par ailleurs, s’agissant des considérations figurant aux points 68 et 69 de l’arrêt attaqué, celles-ci ont été émises par le Tribunal à titre surabondant, dans l’hypothèse où les avis de concours litigieux devraient être qualifiés d’actes confirmatifs ou d’actes de pure exécution des dispositions générales applicables aux concours généraux. Or, au vu du constat opéré au point 55 du présent arrêt, ces considérations ne sauraient, même à les supposer entachées d’erreurs, entraîner l’annulation de l’arrêt attaqué. Les arguments dirigés contre celles-ci sont donc inopérants (voir, en ce sens, arrêt du 24 octobre 2013, Kone e.a./Commission, C‑510/11 P, non publié, EU:C:2013:696, point 69 ainsi que jurisprudence citée).

58

Dans ces conditions, il convient d’écarter la quatrième branche du premier moyen.

– Sur les première à troisième branches du premier moyen, tirées d’une interprétation erronée de la nature juridique des dispositions générales applicables aux concours généraux

59

Les première à troisième branches du premier moyen se rapportent aux points 45 à 59 de l’arrêt attaqué, qui portent sur la nature juridique des dispositions générales applicables aux concours généraux. Cependant, il résulte des termes mêmes du point 59 de l’arrêt attaqué que le Tribunal n’a émis les considérations figurant auxdits points qu’à titre liminaire afin de pouvoir statuer, par la suite, sur la recevabilité des recours devant lui.

60

Ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 58 de ses conclusions, dans la mesure où les avis de concours litigieux produisaient des effets juridiques obligatoires et, partant, pouvaient être attaqués indépendamment de la valeur juridique à attribuer aux dispositions générales applicables aux concours généraux, l’examen de la nature juridique de ces dernières n’était pas indispensable pour évaluer la recevabilité des recours présentés devant le Tribunal.

61

Il s’ensuit que les arguments développés dans les première à troisième branches du premier moyen sont dirigés contre des motifs surabondants de l’arrêt attaqué et ne sauraient, en tant que tels, entraîner l’annulation de celui-ci. Ils doivent donc être rejetés comme étant inopérants (voir, en ce sens, arrêt du 24 octobre 2013, Kone e.a./Commission, C‑510/11 P, non publié, EU:C:2013:696, point 69 ainsi que jurisprudence citée).

62

Par conséquent, le premier moyen doit être rejeté comme étant, en partie, non fondé et, en partie, inopérant.

Sur le deuxième moyen, pris d’une violation de l’article 1er quinquies du statut des fonctionnaires et de l’obligation de motivation

Sur la première branche du deuxième moyen, tirée d’une interprétation erronée de l’article 1er quinquies du statut des fonctionnaires

– Argumentation des parties

63

La Commission soutient que, au point 91 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a interprété de manière erronée l’article 1er quinquies du statut des fonctionnaires et l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752), en ayant jugé qu’il ressortait de cet arrêt que « la limitation du choix de la deuxième langue par les candidats à un concours à un nombre restreint de langues, à l’exclusion des autres langues officielles, constitu[ait] une discrimination en raison de la langue ». À cet égard, le Tribunal aurait également commis une erreur de droit en ayant estimé, au point 92 de l’arrêt attaqué, que l’article 1er quinquies du statut des fonctionnaires « interdi[sai]t » les discriminations fondées sur la langue, alors que cette disposition permettrait de justifier des différences de traitement, notamment en raison des considérations relatives à l’intérêt du service.

64

La République italienne conteste cette argumentation.

– Appréciation de la Cour

65

Au point 91 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté, sur la base, notamment, du statut des fonctionnaires ainsi que de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752), que « la limitation du choix de la deuxième langue par les candidats à un concours à un nombre restreint de langues, à l’exclusion des autres langues officielles, constitue une discrimination en raison de la langue ». À cet égard, le Tribunal a exposé que « par une telle stipulation, certains candidats potentiels, à savoir ceux qui possèdent une connaissance satisfaisante d’au moins une des langues désignées, sont favorisés, en ce qu’ils peuvent participer au concours et être ainsi recrutés en tant que fonctionnaires ou agents de l’Union, alors que les autres, qui ne possèdent pas une telle connaissance, sont exclus ». Ensuite, le Tribunal a considéré, au point 92 de l’arrêt attaqué, que l’argument, avancé par la Commission, relatif à l’absence en l’espèce de discrimination fondée sur la nationalité devait être rejeté comme étant inopérant, au motif que l’article 1er quinquies du statut des fonctionnaires interdisait non seulement la discrimination fondée sur la nationalité, mais également la discrimination en raison de la langue.

66

Au vu de ces éléments, il y a lieu de rappeler, d’une part, que, comme la Cour l’a exposé au point 82 de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752), aux termes de l’article 1er quinquies, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires, « dans l’application du présent statut est interdite toute discrimination, telle qu’une discrimination fondée sur [...] la langue [...] » et, d’autre part, que le paragraphe 6 de cet article prévoit une possibilité de déroger, sous certaines conditions, à l’interdiction énoncée au premier paragraphe de celui-ci.

67

Contrairement à ce que soutient la Commission, le Tribunal n’a manifestement pas entendu exclure, au point 91 de l’arrêt attaqué, la possibilité de justifier, dans certaines conditions, des limitations à l’emploi des langues officielles sur le fondement de l’article 1er quinquies, paragraphe 6, du statut des fonctionnaires. En effet, avant de constater, audit point 91, qu’une « limitation du choix de la deuxième langue par les candidats à un concours à un nombre restreint de langues, à l’exclusion des autres langues officielles, constitue une discrimination en raison de la langue », le Tribunal a rappelé, au point 88 de cet arrêt, que « l’article 1er quinquies du statut [des fonctionnaires] autorise des limitations » à l’emploi des langues officielles, notamment au titre de l’intérêt du service.

68

De même, c’est à bon droit que le Tribunal a estimé, au point 92 de l’arrêt attaqué, que l’article 1er quinquies du statut des fonctionnaires interdisait non seulement toute discrimination fondée sur la nationalité, mais également toute discrimination en raison de la langue.

69

Dans ces conditions, la première branche du deuxième moyen doit être écartée.

Sur la seconde branche du deuxième moyen, tirée d’une erreur de droit et d’un défaut de motivation lors de l’appréciation par le Tribunal de la motivation des avis de concours litigieux

– Argumentation des parties

70

La Commission soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit en ayant jugé que les avis de concours litigieux étaient insuffisamment motivés alors qu’il a omis d’examiner, aux points 98 à 104 de l’arrêt attaqué, si les dispositions générales applicables aux concours généraux comportaient une motivation suffisante permettant de justifier la limitation, aux langues anglaise, française et allemande, du choix de la langue 2 du concours. Il aurait également enfreint son obligation de motivation en ayant omis d’examiner si lesdites dispositions générales constituaient d’autres actes, tels que des communications stipulant les critères pour une limitation du choix d’une langue en tant que deuxième langue pour participer aux concours, au sens du point 91 de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752).

71

La République italienne conteste ces arguments.

– Appréciation de la Cour

72

Au point 103 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a considéré que le cadre normatif des concours en cause a été établi par les avis de concours litigieux, et non pas par les dispositions générales applicables aux concours généraux et par l’orientation générale sur l’utilisation des langues annexée à celles-ci, bien que lesdits avis renvoyaient à ces derniers textes. Il a également estimé à ce point que ces avis avaient établi des règles autonomes pour ces concours, y compris quant au régime linguistique applicable à ceux-ci. Aussi, a-t-il décidé, au point 104 de cet arrêt, d’examiner la motivation retenue par l’EPSO dans les avis de concours litigieux aux fins de justifier la limitation, aux langues anglaise, française et allemande, du choix de la langue 2 du concours.

73

Certes, ainsi qu’il a été jugé au point 51 du présent arrêt, les avis de concours litigieux produisaient des effets juridiques obligatoires et constituaient, partant, le cadre normatif des concours en cause. Pour autant, dès lors que les dispositions générales applicables aux concours généraux « font partie intégrante » desdits avis, il incombait au Tribunal d’apprécier le bien-fondé des motifs retenus par l’EPSO aux fins de justifier les exigences linguistiques en cause non seulement au regard des motifs figurant dans les avis de concours litigieux eux-mêmes, mais également au regard de ceux contenus dans lesdites dispositions générales.

74

Or, l’argument de la Commission selon lequel le Tribunal aurait limité son analyse au contenu des avis de concours litigieux n’est pas fondé, car ce dernier a également fait porter son examen, ainsi que cela ressort des points 115 à 117 de l’arrêt attaqué, sur la motivation pertinente à cet égard figurant dans les dispositions générales applicables aux concours généraux, ainsi que dans l’orientation générale sur l’utilisation des langues, en tant que « partie intégrante » des avis de concours litigieux.

75

S’agissant, en outre, de l’argument de la Commission selon lequel le Tribunal « a enfreint l’obligation de motivation, en ce qu’il a omis d’examiner si les dispositions générales applicables aux concours généraux étaient des communications ou d’autres actes, au sens du point 91 de l’arrêt [du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752)] », il suffit de constater que le Tribunal a rappelé, notamment aux points 58 et 69 de l’arrêt attaqué, que « les dispositions générales [...] doivent être interprétées comme constituant [...] des communications, au sens du point 91 de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752) ». Partant, cet argument doit être rejeté.

76

Par conséquent, il convient d’écarter la seconde branche du deuxième moyen et de rejeter comme non fondé le deuxième moyen dans son ensemble.

Sur le troisième moyen, relatif à la limitation aux langues anglaise, française et allemande du choix de la langue 2 du concours

Sur la première branche du troisième moyen, tirée d’une erreur de droit et d’une violation de l’obligation de motivation dans l’interprétation de l’article 28, sous f), du statut des fonctionnaires

– Argumentation des parties

77

La Commission fait valoir que le Tribunal a commis une erreur de droit dans l’interprétation de l’article 28, sous f), du statut des fonctionnaires, en ayant considéré, au point 106 de l’arrêt attaqué, qu’une différence de traitement fondée sur la langue n’était pas apte à faciliter le recrutement des fonctionnaires possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité, au sens de l’article 27, premier alinéa, dudit statut, au motif que ces qualités sont, selon lui, manifestement indépendantes des connaissances linguistiques d’un candidat. La Commission estime que les connaissances linguistiques relèvent des qualités de compétence requises au sens de cette dernière disposition.

78

La République italienne conteste ces arguments.

– Appréciation de la Cour

79

Au point 105 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a exposé l’argument de la Commission selon lequel, lorsque les institutions de l’Union déterminent les besoins linguistiques de leurs services, le principe de non-discrimination serait méconnu uniquement en cas de choix arbitraires ou manifestement inadéquats par rapport aux objectifs consistant à « disposer de candidats immédiatement opérationnels » et à « recruter des fonctionnaires possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité, au sens de l’article 27, premier alinéa, du statut [des fonctionnaires] ». Toutefois, le Tribunal a considéré, au point 106 de cet arrêt, que seul le premier de ces objectifs était capable de justifier, éventuellement, une différence de traitement fondée sur la langue, tandis que le second n’y était pas apte, étant donné que les compétences visées à l’article 27, premier alinéa, du statut des fonctionnaires étaient indépendantes des connaissances linguistiques d’un candidat.

80

À cet égard, il y a lieu de constater, d’une part, que l’article 27, premier alinéa, du statut des fonctionnaires énonce l’objectif selon lequel le recrutement doit viser à assurer que les fonctionnaires possèdent « les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité ». D’autre part, l’article 28 de celui-ci énumère les conditions requises pour leur nomination, au nombre desquelles figurent, notamment, celles d’être ressortissant d’un État membre, de jouir des droits civiques, d’être en position régulière au regard d’éventuelles obligations militaires, d’offrir les garanties morales, d’avoir réussi un concours, de satisfaire aux aptitudes physiques nécessaires, ainsi que de posséder les connaissances linguistiques requises.

81

Or, dans la mesure où la Cour a déjà jugé, au point 94 de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752), que l’objectif de recruter des fonctionnaires possédant « les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité », au sens de l’article 27, premier alinéa, du statut des fonctionnaires, peut être mieux préservé « lorsque les candidats sont autorisés à présenter les épreuves de sélection dans leur langue maternelle ou dans la deuxième langue qu’ils considèrent maîtriser le mieux », elle a reconnu que les connaissances linguistiques sont, en principe, indépendantes des compétences visées à cet article.

82

Ainsi, bien que les connaissances linguistiques d’un candidat puissent, voire doivent, faire l’objet d’une évaluation lors d’une procédure de concours, afin que les institutions s’assurent que ledit candidat possède les connaissances requises à l’article 28, sous f), du statut des fonctionnaires, cette évaluation poursuit un objectif indépendant de celle visant la détermination des « plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité », au sens de l’article 27, premier alinéa, du statut des fonctionnaires. Il s’ensuit que les connaissances linguistiques exigées à l’article 28, sous f), du statut des fonctionnaires ne sauraient être assimilées aux « compétences », au sens de l’article 27, premier alinéa, de celui-ci.

83

Dans ces conditions, c’est sans commettre d’erreur de droit que le Tribunal a jugé, au point 106 de l’arrêt attaqué, que « les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité » sont « indépendantes des connaissances linguistiques » d’un candidat. Il s’ensuit également que c’est sans violer son obligation de motivation qu’il n’a pas examiné la limitation aux seules langues anglaise, française et allemande du choix de la langue 2 du concours, figurant dans les avis de concours litigieux, au regard de l’objectif de recruter des fonctionnaires possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité, au sens de l’article 27, premier alinéa, du statut des fonctionnaires.

84

Par conséquent, il convient d’écarter la première branche du troisième moyen.

Sur la deuxième branche du troisième moyen, tirée d’une définition erronée de l’intensité du contrôle juridictionnel applicable et d’une interprétation erronée de l’orientation générale sur l’utilisation des langues

– Argumentation des parties

85

La Commission soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit lorsqu’il a procédé, aux points 107 à 117 de l’arrêt attaqué, au contrôle de la légalité des avis de concours litigieux en méconnaissant le large pouvoir d’appréciation dont dispose l’EPSO pour déterminer les critères de capacité linguistique exigés des candidats. Alors que la Cour aurait exigé, au point 90 de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752), l’adoption de critères « clairs, objectifs et prévisibles » de nature à justifier objectivement la limitation aux langues anglaise, française et allemande du choix de la langue 2 du concours, le Tribunal aurait exigé, de manière erronée, que l’EPSO fournisse une motivation détaillée, assortie d’« indications concrètes » sur les raisons de la limitation de ce choix. En tout état de cause, la motivation détaillée figurant dans l’orientation générale sur l’utilisation des langues et dans les avis de concours litigieux contiendrait de tels critères.

86

La République italienne conteste ces arguments.

– Appréciation de la Cour

87

Aux points 107 à 109 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a relevé que, nonobstant le large pouvoir d’appréciation dont disposent les institutions de l’Union « quant à la création d’un emploi de fonctionnaire ou d’agent, quant au choix du fonctionnaire ou de l’agent aux fins de pourvoir à l’emploi créé et quant à la nature de la relation de travail qui les lie à un agent », lesdites institutions doivent veiller au respect des dispositions pertinentes, y compris l’article 1er quinquies du statut des fonctionnaires. Il a également précisé qu’il appartenait au juge de l’Union de vérifier, le cas échéant, que d’éventuelles exigences relatives aux connaissances linguistiques spécifiques des candidats à un concours sont objectivement justifiées et proportionnées aux besoins réels du service.

88

À cet égard, il y a lieu de rappeler, en premier lieu, que, selon la jurisprudence constante de la Cour, les institutions de l’Union doivent disposer d’un large pouvoir d’appréciation dans l’organisation de leurs services et, en particulier, dans la détermination des critères de capacité exigés par les emplois à pourvoir et, en fonction de ces critères et dans l’intérêt du service, les conditions et les modalités d’organisation du concours (voir, en ce sens, arrêts du 16 octobre 1975, Deboeck/Commission, 90/74, EU:C:1975:128, point 29 ; du 9 février 1984, Fabius/Commission, 39/83, EU:C:1984:52, point 7, et du 9 octobre 2008, Chetcuti/Commission, C‑16/07 P, EU:C:2008:549, point 76). Ainsi, les institutions, tout comme l’EPSO, lorsque ce dernier exerce des pouvoirs qui lui sont dévolus par lesdites institutions, doivent pouvoir déterminer, en fonction de leurs besoins, les capacités qu’il convient d’exiger des candidats participant aux concours pour organiser leurs services de manière utile et raisonnable.

89

Cependant, ainsi qu’il a été rappelé au point 66 du présent arrêt, les institutions doivent veiller, dans l’application du statut des fonctionnaires, au respect de l’article 1er quinquies de celui-ci, qui interdit toute discrimination fondée sur la langue. Si le paragraphe 6 dudit article prévoit certes que des limitations à cette interdiction sont possibles, c’est à condition qu’elles soient « objectivement et raisonnablement justifiée[s] » et qu’elles répondent à des « objectifs légitimes d’intérêt général dans le cadre de la politique du personnel ».

90

Ainsi, le large pouvoir d’appréciation dont disposent les institutions de l’Union en ce qui concerne l’organisation de leurs services, de même que l’EPSO dans les conditions visées au point 88 du présent arrêt, se trouve impérativement encadré par l’article 1er quinquies du statut des fonctionnaires, de telle sorte que les différences de traitement fondées sur la langue résultant d’une limitation du régime linguistique d’un concours à un nombre restreint de langues officielles ne peuvent être admises que si une telle limitation est objectivement justifiée et proportionnée aux besoins réels du service (voir, en ce sens, arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission, C‑566/10 P, EU:C:2012:752, point 88). Dans ces conditions, c’est à juste titre que le Tribunal a estimé, au point 107 de l’arrêt attaqué, que le pouvoir d’appréciation de l’EPSO ne saurait le dispenser de l’obligation de respecter, notamment, l’article 1er quinquies du statut des fonctionnaires.

91

S’agissant, en deuxième lieu, du contrôle juridictionnel que le Tribunal est appelé à exercer sur une différence de traitement fondée sur la langue, telle que celle qui résulte de la limitation du choix de la langue 2 du concours à un nombre restreint de langues officielles de l’Union, il y a lieu de rappeler, ainsi qu’il résulte de la jurisprudence citée au point précédent, qu’une telle limitation peut, en principe, se justifier en vertu de l’intérêt du service, pour autant que cet intérêt soit objectivement justifié et que le niveau de connaissance linguistique exigé s’avère proportionné aux besoins réels du service. Il ressort, en outre, de cette jurisprudence que les règles limitant le choix de la langue 2 du concours doivent reposer sur des critères « clairs, objectifs et prévisibles » (voir, en ce sens, arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission, C‑566/10 P, EU:C:2012:752, points 88 et 90).

92

Dans la mesure où la légalité d’une limitation du choix de la langue 2 du concours dépend ainsi, conformément à l’article 1er quinquies du statut des fonctionnaires, du caractère justifié et proportionné de celle-ci, et que, selon la jurisprudence de la Cour, ce caractère doit être mis en exergue par des critères clairs, objectifs et prévisibles, c’est à bon droit que le Tribunal a jugé, aux points 108 et 109 de l’arrêt attaqué, que les juridictions de l’Union sont habilitées à contrôler si la limitation du choix de la langue 2 du concours est objectivement justifiée et proportionnée aux besoins réels du service.

93

Par ailleurs, s’agissant de l’argument selon lequel le Tribunal aurait, notamment au point 113 de l’arrêt attaqué, exigé de manière erronée des « indications concrètes » pour compléter la motivation des avis de concours litigieux relative à la limitation du choix de la langue 2 du concours, il y a lieu de préciser qu’il appartient à l’institution ayant mis en place une différence de traitement fondée sur la langue d’établir que celle-ci est bien apte à répondre à des besoins réels relatifs aux fonctions que les personnes recrutées seront appelées à exercer. En outre, toute condition relative à des connaissances linguistiques spécifiques doit être proportionnée à cet intérêt et reposer sur des critères clairs, objectifs et prévisibles permettant aux candidats de comprendre les motifs de cette condition et aux juridictions de l’Union d’en contrôler la légalité (voir arrêt de ce jour, Espagne/Parlement, C‑377/16, point 69).

94

Dès lors, afin que le Tribunal soit en mesure de contrôler si les règles régissant les concours en cause sont conformes à l’article 1er quinquies du statut des fonctionnaires, il lui incombait d’effectuer un examen in concreto desdites règles et des circonstances particulières en cause. En effet, seul un tel examen est susceptible de permettre d’établir les connaissances linguistiques qui peuvent objectivement être exigées, dans l’intérêt du service, par les institutions dans le cas de fonctions particulières et, partant, si la limitation du choix des langues pouvant être utilisées pour participer à ces concours est objectivement justifiée et proportionnée aux besoins réels du service.

95

Dans ces conditions, c’est à bon droit que le Tribunal a procédé, notamment au point 113 de l’arrêt attaqué, à l’examen de la question de savoir si les avis de concours litigieux, les dispositions générales applicables aux concours généraux ou encore les éléments de preuve fournis par la Commission comportaient des « indications concrètes » permettant d’établir, objectivement, l’existence d’un intérêt du service susceptible de justifier, en l’occurrence, la limitation du choix de la langue 2 du concours.

96

En troisième lieu, dans la mesure où la Commission fait valoir que la motivation détaillée figurant dans l’orientation générale sur l’utilisation des langues et dans les avis de concours litigieux contenait, en tout état de cause, « à l’évidence » des critères clairs, objectifs et prévisibles justifiant la limitation à l’anglais, au français et à l’allemand du choix de la langue 2 du concours, il importe de souligner, d’une part, qu’un tel argument n’est pas étayé, de sorte qu’il ne saurait prospérer.

97

D’autre part, pour autant que, par un tel argument, la Commission entendrait remettre en cause l’analyse faite par le Tribunal, aux points 110 à 117 de l’arrêt attaqué, du contenu des dispositions générales applicables aux concours généraux, y compris de l’orientation générale sur l’utilisation des langues, et des avis de concours litigieux ainsi que des écritures de la Commission devant lui, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, il résulte de l’article 256 TFUE ainsi que de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne que le pourvoi est limité aux questions de droit. Le Tribunal est, dès lors, seul compétent pour constater et apprécier les faits pertinents. L’appréciation de ces faits ne constitue donc pas, sous réserve du cas de leur dénaturation, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour dans le cadre d’un pourvoi (arrêt du 8 novembre 2016, BSH/EUIPO, C‑43/15 P, EU:C:2016:837, point 50). Or, la Commission n’a pas invoqué une telle dénaturation.

98

Eu égard à ce qui précède, la deuxième branche du troisième moyen doit être rejetée comme étant non fondée.

Sur la troisième branche du troisième moyen, tirée d’erreurs de droit commises par le Tribunal dans l’exercice de son contrôle juridictionnel

– Argumentation des parties

99

La Commission soutient que le Tribunal a excédé les limites de son contrôle juridictionnel et a substitué sa propre appréciation à celle de l’administration aux points 120 à 144 de l’arrêt attaqué et, notamment, aux points 129 à 131, 139, 140, 142 et 146 de celui-ci. Selon elle, le Tribunal devait se borner à établir le caractère arbitraire ou manifestement inadéquat des appréciations de l’EPSO relatives à la limitation aux langues anglaise, française et allemande du choix de la langue 2 du concours, dès lors que la définition de la politique du personnel et des critères de capacité des candidats à un concours comporte des évaluations complexes qui ne peuvent faire l’objet que d’un contrôle juridictionnel limité à la recherche d’éventuelles erreurs manifestes d’appréciation.

100

La République italienne conteste ces arguments.

– Appréciation de la Cour

101

Aux points 118 à 146 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a successivement réfuté les arguments de la Commission consistant à faire valoir, en premier lieu, que les trois langues auxquelles le choix de la langue 2 du concours a été limité dans les avis de concours litigieux constituaient les langues principales des délibérations des institutions de l’Union, en deuxième lieu, que la quasi-totalité des traductions de la Commission sont effectuées dans ces trois langues, en troisième lieu, que ces langues sont les langues les plus parlées par les fonctionnaires et les agents de la Commission et, en quatrième lieu, que ces langues sont les langues majoritairement étudiées et parlées, comme langues étrangères, dans les États membres de l’Union.

102

Dans la mesure où la Commission fait valoir que le Tribunal a indûment substitué sa propre appréciation à celle de l’EPSO, il importe de rappeler, ainsi qu’il a été relevé aux points 89 et 90 du présent arrêt, que, lorsque l’EPSO détermine les exigences linguistiques d’un concours, son pouvoir d’appréciation est, à l’instar de celui des institutions qui lui confient ses tâches, encadré par les exigences prévues à l’article 1er quinquies du statut des fonctionnaires, selon lesquelles toute différence de traitement fondée sur la langue doit être objectivement justifiée et proportionnée aux besoins réels du service.

103

Certes, il découle des principes rappelés au point 88 du présent arrêt que le Tribunal ne saurait substituer son appréciation à celle de l’EPSO en ce qui concerne la définition de la politique du personnel et des critères de capacité qu’il convient d’exiger, dans l’intérêt du service, de la part des candidats à un concours. Toutefois, ainsi qu’il a été exposé aux points 91 à 94 du présent arrêt, il n’en demeure pas moins qu’il incombe au Tribunal d’exercer un contrôle tant de droit que de fait sur les choix opérés par l’EPSO dans ce domaine afin de s’assurer que toute différence de traitement fondée sur la langue entre les candidats à un concours est, conformément à l’article 1er quinquies du statut des fonctionnaires, objectivement justifiée et proportionnée aux besoins réels du service et que ces choix reposent sur des critères clairs, objectifs et prévisibles.

104

En effet, ainsi que la Cour l’a jugé, même dans le cas des appréciations complexes, le juge de l’Union doit vérifier non seulement l’exactitude matérielle des éléments de preuve invoqués, leur fiabilité et leur cohérence, mais également contrôler si ces éléments constituent l’ensemble des données pertinentes devant être prises en considération pour apprécier une situation complexe et s’ils sont de nature à étayer les conclusions qui en sont tirées (voir, en ce sens, arrêts du 15 février 2005, Commission/Tetra Laval, C‑12/03 P, EU:C:2005:87, point 39 ; du 8 décembre 2011, Chalkor/Commission, C‑386/10 P, EU:C:2011:815, point 54, ainsi que du 6 novembre 2012, Otis e.a., C‑199/11, EU:C:2012:684 point 59).

105

Afin d’examiner si le Tribunal a substitué son appréciation à celle de l’EPSO dans l’arrêt attaqué et a ainsi dépassé les limites de son contrôle juridictionnel, il y a lieu d’examiner, en premier lieu, les points 120 à 126, 132 à 138 et 141 à 144 de l’arrêt attaqué, comportant les motifs énoncés par le Tribunal à titre principal.

106

Par les motifs figurant aux points 120 à 122 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a, tout d’abord, rejeté l’affirmation de la Commission, selon laquelle l’anglais, le français et l’allemand sont les langues principales des délibérations des institutions de l’Union, au motif qu’elle était « vague et générale ». À cet égard, il a estimé, notamment, que cette affirmation n’était corroborée ni par le régime linguistique de la Cour de justice de l’Union européenne ni par celui du Parlement européen. Il a ajouté, en substance, que, même à supposer que ladite affirmation soit exacte, il ne saurait être présumé, sans davantage d’explications, qu’un fonctionnaire nouvellement recruté et ne maîtrisant aucune des langues de délibération ne serait pas capable d’être immédiatement opérationnel. Ensuite, aux points 123 à 126 de cet arrêt, le Tribunal a réfuté la pertinence des statistiques avancées par la Commission relatives aux documents traduits par la direction générale de la traduction de cette institution en considérant, notamment, que celles-ci ne permettaient pas d’étayer la conclusion selon laquelle ces trois langues seraient les langues les plus utilisées dans l’ensemble des institutions. De même, aux points 132 à 136 dudit arrêt, le Tribunal a rejeté les conclusions que la Commission a tirées d’un tableau établi par celle-ci indiquant les langues majoritairement renseignées par ses fonctionnaires et ses agents comme langues principales. Il a estimé, d’une part, que ce tableau ne visait que le personnel de la Commission et, d’autre part, que cette information sur la langue principale des fonctionnaires et des agents de cette institution ne permettait pas, en tout état de cause, d’établir la proportion des langues parlées par ceux-ci, dès lors que ces derniers doivent maîtriser de manière satisfaisante au moins une autre langue, comme l’exige l’article 28, sous f), du statut des fonctionnaires. Enfin, aux points 141 à 144 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté les statistiques avancées par la Commission, selon lesquelles l’anglais, le français et l’allemand sont les langues étrangères les plus étudiées et parlées dans l’Union européenne, au motif qu’il ne saurait être présumé que ces statistiques reflètent les connaissances linguistiques des fonctionnaires de l’Union et que, en tout état de cause, cette circonstance n’aurait pu revêtir une pertinence que si la Commission avait démontré que la limitation en cause répondait à l’intérêt du service, ce qui n’était pas le cas.

107

Force est de constater que, à ces points, le Tribunal a critiqué la circonstance que les éléments factuels soumis par la Commission à l’appui de ses arguments ne permettent pas d’étayer les conclusions qui en sont tirées. Dans ces conditions, le Tribunal s’est borné à évaluer la pertinence et la cohérence des justifications et des preuves présentées par cette institution. Il ne saurait, dès lors, lui être reproché d’avoir substitué, dans ce contexte, son appréciation à celle de l’EPSO.

108

En outre, dans la mesure où la Commission reproche, en substance, au Tribunal de ne pas s’être limité à un contrôle de l’erreur manifeste des appréciations réalisées par l’EPSO, il y a lieu d’ajouter que, eu égard aux points 89, 90 et 102 du présent arrêt, rien ne justifie une telle limitation quant au contrôle du bien-fondé des motifs avancés par l’EPSO aux fins de justifier la limitation du choix de la langue 2 du concours.

109

S’agissant, en second lieu, des arguments de la Commission visant à faire constater que le Tribunal a outrepassé les limites de son contrôle juridictionnel aux points 127 à 131 ainsi que 139 et 140 de l’arrêt attaqué, lorsqu’il a considéré que, en tout état de cause, la limitation aux langues anglaise, française et allemande du choix de la langue 2 du concours ne saurait se justifier au motif que les données fournies par la Commission démontraient notamment l’écart considérable entre l’usage de la langue anglaise par rapport aux langues française et, en particulier, allemande, lesdits arguments sont dirigés contre des points de l’arrêt attaqué qui portent sur des motifs surabondants.

110

Dans ces conditions, même à supposer que le Tribunal ait outrepassé les limites de son contrôle juridictionnel lors de l’appréciation effectuée auxdits points, une telle circonstance ne saurait, en tout état de cause, entraîner, conformément à la jurisprudence rappelée aux points 57 et 61 du présent arrêt, l’annulation de l’arrêt attaqué. Par conséquent, les arguments visés au point 109 du présent arrêt sont inopérants.

111

Il y a lieu, dès lors, d’écarter la troisième branche du troisième moyen comme étant, en partie, non fondée et, en partie, inopérante.

112

Eu égard à ce qui précède, le troisième moyen doit être rejeté comme étant, en partie, non fondé et, en partie, inopérant.

Sur le quatrième moyen, portant sur la limitation aux langues anglaise, française et allemande du choix de la langue de communication entre les candidats et l’EPSO

Argumentation des parties

113

La Commission soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit en s’étant fondé, aux points 183 à 185 de l’arrêt attaqué, sur une lecture extensive des points 68 et 69 de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752), pour constater que le règlement no 1/58 était pleinement applicable aux communications entre des candidats aux concours et l’EPSO. Selon la Commission, lesdits points de ce dernier arrêt ne se rapportent qu’à l’obligation de publier les avis de concours dans toutes les langues officielles de l’Union. Bien que la Cour ait constaté que les candidats à un concours ne sont pas « totalement exclus » du champ d’application du règlement no 1/58, elle aurait cependant considéré que ceux-ci demeurent soumis au statut des fonctionnaires. Dès lors, le Tribunal aurait dû admettre que l’article 1er quinquies du statut des fonctionnaires permettait, le cas échéant, de limiter les langues de communication pouvant être utilisées dans le cadre d’un concours.

114

La République italienne conteste ces arguments.

Appréciation de la Cour

115

Ayant rappelé, au point 183 de l’arrêt attaqué, qu’il avait jugé, dans le passé, que le règlement no 1/58 n’était pas applicable aux relations entre, d’une part, les institutions de l’Union et, d’autre part, leurs fonctionnaires et agents, auxquels devaient être assimilés les candidats à de tels postes, le Tribunal a poursuivi son raisonnement dans les termes suivants :

« 184 Toutefois, à la suite de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752), ces considérations ne pourraient plus être considérées comme valables. En effet, la Cour a jugé que, en l’absence de dispositions réglementaires spéciales applicables aux fonctionnaires et aux agents, et en l’absence de dispositions à cet égard dans les règlements intérieurs des institutions concernées, aucun texte ne permet de conclure que les relations entre ces institutions et leurs fonctionnaires et agents sont totalement exclues du champ d’application du règlement no 1[/58]. A fortiori en est-il de même, selon la Cour, en ce qui concerne les relations entre des institutions et des candidats à un concours externe qui ne sont, en principe, ni fonctionnaires ni agents (arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission, C‑566/10 P, EU:C:2012:752, points 68 et 69).

185 Doit, à cet égard, être rejeté l’argument de la Commission [...] relatif à l’absence de pertinence de cette partie de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752), s’agissant de la légalité de la limitation des langues de communication entre les candidats et l’EPSO. En effet, dans cette partie de son arrêt, la Cour a examiné l’applicabilité du règlement no 1[/58] aux candidats à un concours et a conclu qu’il leur était applicable. Cette conclusion est également pertinente pour la question soulevée par le sixième moyen invoqué par la République italienne [portant sur la légalité de la limitation des langues pouvant être utilisées dans les communications entre les candidats et l’EPSO]. »

116

Estimant que le règlement no 1/58 régissait les communications entre les candidats et l’EPSO, le Tribunal a considéré, au point 188 de l’arrêt attaqué, que les avis de concours litigieux violaient ledit règlement en ce qu’ils prévoyaient que les candidats étaient tenus de communiquer avec l’EPSO dans une langue, choisie par eux, parmi les langues anglaise, française et allemande.

117

Il y a lieu de rappeler, dans la mesure où le présent moyen est tiré d’une interprétation erronée par le Tribunal de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752), que le raisonnement suivi par la Cour dans cet arrêt s’articulait en deux parties. Ainsi, d’une part, les points 62 à 78 dudit arrêt portaient sur l’appréciation des moyens de la République italienne relatifs à l’absence de publication au Journal officiel de l’Union européenne des avis de concours en cause dans toutes les langues officielles de l’Union. D’autre part, aux points 79 à 98 de cet arrêt, la Cour s’est prononcée sur les moyens tirés du fait que ces avis de concours imposaient de choisir la langue anglaise, française ou allemande en tant que langue 2 du concours, langue de communication entre les candidats et l’EPSO ainsi que langue devant être utilisée pour les épreuves des concours.

118

La Cour a, certes, considéré, aux points 68 et 69 de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752), que, en l’absence de dispositions réglementaires spéciales applicables aux fonctionnaires et aux agents dans les règlements intérieurs des institutions concernées par les avis de concours en cause, aucun texte ne permettait de conclure que les relations entre ces institutions et leurs fonctionnaires et agents étaient totalement exclues du champ d’application du règlement no 1/58. Elle en a déduit que cette conclusion devait s’appliquer, à plus forte raison, aux relations entre des institutions et des candidats à un concours externe.

119

Il importe toutefois de souligner que, ainsi qu’il ressort des points 62 à 78 dudit arrêt, cette précision relative au champ d’application du règlement no 1/58 en ce qui concerne les relations entre les institutions et des candidats au concours a été énoncée par la Cour, non pas au sujet des langues de communication entre l’EPSO et les candidats, mais au sujet des langues de publication des avis de concours. Ainsi, la Cour a jugé, notamment au point 71 de cet arrêt, que les avis de concours contestés dans cette affaire auraient dû être publiés intégralement au Journal officiel de l’Union européenne dans toutes les langues officielles de l’Union, conformément à l’article 1er, paragraphe 2, de l’annexe III du statut des fonctionnaires, lu en combinaison avec l’article 5 du règlement no 1/58.

120

En revanche, dans la partie de sa motivation consacrée à l’appréciation de la légalité de la limitation du choix de la langue 2 du concours à l’anglais, au français et à l’allemand et, notamment, de la condition selon laquelle ces trois langues étaient les seules langues de communication admises par les avis de concours en cause, la Cour a jugé, au point 88 de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752), que, lors des procédures de sélection du personnel de l’Union, des différences de traitement en ce qui concerne le régime linguistique des concours peuvent être autorisées, en application de l’article 1er quinquies, paragraphe 6, du statut des fonctionnaires, si elles sont objectivement et raisonnablement justifiées par un objectif légitime d’intérêt général dans le cadre de la politique du personnel. Il découle ainsi de ce point que, lors des procédures de sélection du personnel de l’Union, les institutions ne sauraient se voir imposer des obligations allant au-delà des exigences prévues à l’article 1er quinquies du statut des fonctionnaires.

121

Dans ces conditions, ainsi que l’a considéré M. l’avocat général au point 124 de ses conclusions, dès lors que la Cour s’est prononcée sur la question des langues imposées pour les communications entre les candidats aux concours et l’EPSO aux seuls points 79 à 98 de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752), le Tribunal ne pouvait valablement déduire des points 68 et 69 dudit arrêt, aux points 184 et 185 de l’arrêt attaqué, que la Cour avait jugé que les langues pouvant être utilisées dans ces communications étaient déterminées en application de l’article 2 du règlement no 1/58.

122

Par conséquent, le raisonnement suivi par le Tribunal, aux points 184 à 188 de l’arrêt attaqué, pour affirmer, en raisonnant par analogie, que le règlement no 1/58 régissait, à l’instar de ce qui avait été retenu par la Cour dans le contexte de la publication des avis de concours, toute limitation des langues officielles imposées pour des communications entre l’EPSO et les candidats aux concours, est erroné.

123

Toutefois, il convient de relever que, aux points 204 à 211 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a, en substance, ajouté que, en tout état de cause, les motifs avancés afin de justifier le choix des langues de communication n’étaient pas susceptibles de justifier, au sens de l’article 1er quinquies, paragraphes 1 et 6, du statut des fonctionnaires, la limitation du choix des langues de communication avec l’EPSO.

124

À cet égard, s’il n’est pas exclu que l’intérêt du service puisse justifier la limitation du choix de la langue 2 du concours à un nombre restreint de langues officielles dont la connaissance est la plus répandue dans l’Union (voir, par analogie, arrêt du 9 septembre 2003, Kik/OHMI, C‑361/01 P, EU:C:2003:434, point 94), et ce même dans le cadre des concours ayant une nature générale, tel que celui visé par l’« Avis de concours général – EPSO/AD/276/14 – Administrateurs (AD 5) », une telle limitation doit néanmoins, eu égard aux exigences rappelées aux points 92 et 93 du présent arrêt, impérativement reposer sur des éléments objectivement vérifiables, tant par les candidats au concours que par les juridictions de l’Union, de nature à justifier les connaissances linguistiques exigées, qui doivent être proportionnées aux besoins réels du service.

125

Or, dès lors que les avis de concours ne prévoient pas de tels éléments permettant de constater les raisons justifiant la limitation du choix de la langue de communication entre les candidats et l’EPSO à l’une des trois langues choisie au titre de la langue 2 du concours, ces avis ont été adoptés en méconnaissance de l’article 1er quinquies, paragraphes 1 et 6, du statut des fonctionnaires. Partant, le Tribunal devait, en tout état de cause, accueillir le recours de la République italienne en tant que celui-ci visait cette limitation.

126

Dans ces conditions, l’erreur de droit, exposée au point 122 du présent arrêt, dont est entaché l’arrêt attaqué n’est pas de nature à invalider ce dernier.

127

Partant, il y a lieu d’écarter le quatrième moyen de pourvoi et, eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, de rejeter le pourvoi.

Sur les dépens

128

Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, rendu applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, du même règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

129

La République italienne ayant conclu à la condamnation de la Commission aux dépens et celle-ci ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens.

130

L’article 140, paragraphe 1, du règlement de procédure, également applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de ce règlement, prévoit que les États membres et les institutions qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens. Conformément à cette disposition, il y a lieu de décider que le Royaume d’Espagne supporte ses propres dépens.

 

Par ces motifs, la Cour (grande chambre) déclare et arrête :

 

1)

Le pourvoi est rejeté.

 

2)

La Commission européenne est condamnée à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la République italienne.

 

3)

Le Royaume d’Espagne supporte ses propres dépens.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : l’italien.