ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

19 juin 2009 ( *1 )

«Concurrence — Concentrations — Marché des systèmes de télématique routière — Décision déclarant la concentration compatible avec le marché commun — Engagements — Erreur manifeste d’appréciation — Détournement de pouvoir — Obligation de motivation»

Dans l’affaire T-48/04,

Qualcomm Wireless Business Solutions Europe BV, établie à Waarle (Pays-Bas), représentée par Me G. Berrisch, avocat, et M. D. Hull, solicitor,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée initialement par Mme K. Mojzesowicz et M. A. Whelan, puis par Mme Mojzesowicz et M. X. Lewis, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

République fédérale d’Allemagne, représentée initialement par M. C.-D. Quassowski et Mme S. Flockermann, en qualité d’agents, puis par M. M. Lumma, en qualité d’agent, assisté de Mes U. Karpenstein et A. Rosenfeld, avocats,

et par

Deutsche Telekom AG, établie à Bonn (Allemagne),

Daimler AG, anciennement DaimlerChrysler AG, établie à Stuttgart (Allemagne),

et

Daimler Financial Services AG, anciennement DaimlerChrysler Services AG, établie à Berlin (Allemagne),

représentées par Mes J. Schütze et A. von Graevenitz, avocats,

parties intervenantes,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision 2003/792/CE de la Commission, du 30 avril 2003, déclarant une opération de concentration compatible avec le marché commun et avec l’accord EEE (Affaire COMP/M.2903 — Entreprise commune DaimlerChrysler/Deutsche Telekom) (JO L 300, p. 62),

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (troisième chambre),

composé de M. J. Azizi (rapporteur), président, Mme E. Cremona et M. S. Frimodt Nielsen, juges,

greffier: Mme K. Andová, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 1er juillet 2008,

rend le présent

Arrêt

Cadre juridique

1

Aux termes de l’article 2, paragraphe 2, du règlement (CEE) no 4064/89 du Conseil, du 21 décembre 1989, relatif au contrôle des opérations de concentration entre entreprises (version rectifiée JO 1990, L 257, p. 13), tel que modifié par le règlement (CE) no 1310/97 du Conseil, du 30 juin 1997 (JO L 180, p. 1) (ci-après le «règlement concentration»), les opérations de concentration qui ne créent pas ou ne renforcent pas une position dominante ayant comme conséquence qu’une concurrence effective serait entravée de manière significative dans le marché commun ou une partie substantielle de celui-ci doivent être déclarées compatibles avec le marché commun.

2

L’article 8, paragraphe 2, de ce même règlement prévoit que, lorsque la Commission constate qu’une opération de concentration répond, le cas échéant après modifications apportées par les entreprises concernées, au critère défini à l’article 2, paragraphe 2, elle prend une décision déclarant la concentration compatible avec le marché commun. Cette décision peut être assortie de conditions et de charges destinées à assurer que les entreprises concernées respectent les engagements qu’elles ont pris à son égard en vue de rendre la concentration compatible avec le marché commun. La décision déclarant la concentration compatible couvre également les restrictions directement liées et nécessaires à la réalisation de la concentration.

3

L’article 20, paragraphe 1, dudit règlement dispose que la Commission publie au Journal officiel des Communautés européennes les décisions qu’elle arrête en application de l’article 8, paragraphes 2 à 5.

Faits à l’origine du litige

4

La requérante, Qualcomm Wireless Business Solutions Europe BV (ci-après «Qualcomm»), propose en Europe un système de gestion de flottes de camions par satellite appelé «EutelTRACS». Par l’intermédiaire d’un réseau par satellite, elle récolte les informations transmises depuis des camions, telles que des données relatives à leur localisation, des informations sur le moteur et des messages des conducteurs, et les transmet au bureau de liaison de ces camions, qui est client auprès de Qualcomm. Par ailleurs, elle transmet des messages des bureaux de liaison vers les conducteurs des camions. À cet effet, elle fournit le matériel et l’infrastructure de services nécessaires. Elle est également active dans la fabrication de ce matériel et dans le développement du logiciel nécessaire au fonctionnement dudit système.

5

En 2002, le ministère fédéral des Transports, de la Construction et du Logement a organisé, pour le compte du gouvernement allemand, un appel d’offres public pour la création et pour la gestion d’un système de prélèvement automatique et manuel des péages dus par les poids lourds d’un tonnage égal ou supérieur à 12 tonnes (ci-après les «poids lourds») empruntant les autoroutes allemandes. Cet appel d’offres n’exigeait pas l’utilisation d’une technologie spécifique.

6

Le marché public a été attribué au consortium formé par DaimlerChrysler Services AG, Deutsche Telekom AG et la Compagnie financière et industrielle des autoroutes SA (Cofiroute) (ci-après, prises ensemble, les «entreprises de la concentration»).

7

Daimler Financial Services AG, anciennement DaimlerChrysler Services, est une filiale de Daimler AG, anciennement DaimlerChrysler AG, qui est active dans le secteur des services financiers et de la gestion de la mobilité. Ses activités comprennent la gestion de flottes composées de véhicules couvrant l’ensemble des marques de véhicules de Daimler. Cette dernière développe, construit et commercialise des voitures, des camions, des bus et des moteurs diesel.

8

Deutsche Telekom est un opérateur de télécommunications qui propose, notamment, des services de téléphonie mobile en Europe.

9

La Cofiroute est une entreprise active dans le domaine de la perception de péages autoroutiers.

10

Le consortium constitué par ces entreprises a, ensuite, créé Toll Collect GmbH pour élaborer et gérer le système de prélèvement des péages dus par les poids lourds empruntant les autoroutes allemandes.

11

Une solution télématique pour le prélèvement automatique des péages a ainsi été développée par Toll Collect. Cette solution consiste à installer des unités embarquées dans les poids lourds qui veulent recourir au prélèvement automatique des péages. Ces unités embarquées fonctionnent avec un récepteur GPS [Global Positioning System (système de repérage universel)] et un émetteur GSM [Global System for Mobile Communications (système mondial de télécommunication mobile)]. Le récepteur GPS détermine la position actuelle du poids lourd qui est introduite dans l’unité embarquée. Ces données sont ensuite échangées par l’intermédiaire de l’émetteur GSM entre l’unité embarquée et un central chargé des services d’application. Le central traite les données, c’est-à-dire, sur la base de la position déterminée et de la portion d’autoroute utilisée, calcule le péage dû et le facture au propriétaire ou à l’utilisateur du poids lourd. L’unité embarquée est fournie gratuitement par Toll Collect aux entreprises de transport contre une caution sous la forme d’un avoir sur les péages. Le propriétaire ou l’utilisateur du poids lourd supporte néanmoins le coût d’installation de l’unité embarquée. Outre leur fonction de prélèvement automatique des péages dus, les unités embarquées de Toll Collect ont la capacité d’être utilisées pour d’autres services télématiques et notamment ceux permettant la gestion d’une flotte de véhicules à distance. L’utilisation des unités embarquées de Toll Collect par un autre prestataire pour la fourniture de services télématiques n’est toutefois possible qu’après que la République fédérale d’Allemagne, en tant que pouvoir adjudicateur, a donné son autorisation pour une telle utilisation.

12

Le 11 novembre 2002, DaimlerChrysler Services et Deutsche Telekom ont notifié à la Commission, conformément à l’article 4 du règlement concentration, un projet de concentration par lequel elles acquièrent, par achat d’actions, le contrôle conjoint de Toll Collect.

13

À la suite de cette notification, la Commission a ouvert la première phase de la procédure de contrôle de l’opération de concentration. Au cours de cette première phase, les entreprises de la concentration lui ont transmis une première proposition d’engagements. Cette proposition a été soumise aux acteurs du marché, dont Qualcomm, pour avis.

14

Par décision du 20 décembre 2002, la Commission a estimé que l’opération de concentration soulevait des doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le marché commun et avec le fonctionnement de l’accord sur l’Espace économique européen (EEE) et a ouvert la deuxième phase de la procédure conformément à l’article 6, paragraphe 1, sous c), du règlement concentration.

15

Par lettre du 28 février 2003, la Commission a adressé aux entreprises notifiantes une communication des griefs dans laquelle elle indiquait que la première proposition d’engagements était insuffisante pour résoudre les problèmes de concurrence résultant de la concentration notifiée.

16

Le 11 mars 2003, les entreprises de la concentration ont soumis une deuxième proposition d’engagements à la Commission.

17

Les 19 et 20 mars 2003, la Commission a tenu une audition à laquelle Qualcomm a participé. Elle a notamment indiqué lors de cette audition que la deuxième proposition d’engagements était insuffisante pour résoudre les problèmes concurrentiels soulevés par l’opération de concentration notifiée.

18

Le 3 avril 2003, les entreprises de la concentration ont soumis une troisième et dernière proposition d’engagements à la Commission.

19

Par décision 2003/792/CE, du 30 avril 2003, la Commission a déclaré l’opération de concentration compatible avec le marché commun et avec l’accord EEE (Affaire COMP/M.2903 — Entreprise commune DaimlerChrysler/Deutsche Telekom) (JO L 300, p. 62, ci-après la «décision attaquée»), sous réserve du respect intégral des engagements pris par les entreprises de la concentration.

20

Dans la décision attaquée, la Commission a estimé que, sur le marché affecté par l’opération de concentration, à savoir le marché allemand des systèmes de télématique routière comprenant le matériel, les logiciels et les services destinés aux entreprises de transport et de logistique, l’opération de concentration soulevait des problèmes concurrentiels en ce que l’infrastructure pour la perception de péages devant être créée par Toll Collect pouvait être utilisée pour la fourniture d’autres services télématiques par les entreprises de la concentration. Cette utilisation de l’infrastructure de Toll Collect pour la fourniture de services de télématique routière allait permettre à DaimlerChrysler d’acquérir, par l’intermédiaire de Toll Collect, une position dominante sur le marché allemand des systèmes de télématique routière ayant pour conséquence qu’une concurrence effective serait entravée de manière significative dans le marché commun.

21

Plus particulièrement, la combinaison de la fourniture gratuite des unités embarquées de Toll Collect et des faibles marges avec lesquelles les entreprises de transport travaillent entraînerait la création d’une plate-forme dominante sur le marché allemand des systèmes de télématique routière pour les entreprises de transport et de logistique. Étant donné que DaimlerChrysler était le premier constructeur de camions en Allemagne et un fournisseur important de systèmes télématiques et qu’il serait en mesure de contrôler l’accès aux données générées par les unités embarquées de Toll Collect pouvant être utilisées par les services de télématique routière, il serait en mesure de verrouiller le marché allemand des systèmes de télématique routière et d’acquérir de la sorte une position dominante sur ce marché de nature à entraver de manière significative la concurrence effective dans le marché commun.

22

La Commission a toutefois considéré que la troisième et dernière proposition d’engagements soumise par les entreprises de la concentration était suffisante pour empêcher la création d’une telle position dominante de DaimlerChrysler.

23

Dans le cadre de cette troisième proposition, les entreprises de la concentration se sont engagées, premièrement, à développer un portail télématique central, exploité par une société indépendante, la Telematics Gateway GmbH (ci-après la «TGG»), qui doit permettre aux fournisseurs de services télématiques d’accéder aux fonctions et aux données de base des unités embarquées de Toll Collect sans discrimination (ci-après l’«engagement relatif au portail de la TGG»), deuxièmement, à développer une interface GPS pour les unités embarquées de Toll Collect, qui doit permettre à des prestataires de services télématiques tiers d’avoir recours à la fonction GPS des unités embarquées (ci-après l’«engagement relatif à l’interface GPS»), et troisièmement, à développer un module pouvant être intégré dans l’équipement des tiers de sorte qu’ils puissent créer leurs propres appareils de perception de péage (ci-après l’«engagement relatif au module de perception de péage»).

24

Enfin, les entreprises de la concentration se sont engagées, quatrièmement, une fois obtenue l’autorisation de la République fédérale d’Allemagne pour fournir des services de télématique routière par l’intermédiaire des unités embarquées de Toll Collect, à ne pas offrir ces services avant que la Commission n’en donne l’autorisation. Cette autorisation ne sera donnée par la Commission que lorsque les entreprises de la concentration auront installé une interface opérationnelle vers la fonction GPS des unités embarquées en cause et auront donné la possibilité aux tiers intéressés de développer leurs propres appareils, qui pourront être utilisés pour le prélèvement des péages une fois reliés aux modules de perception de péage développés par les entreprises de la concentration (ci-après le «moratoire qualitatif»).

25

Par télécopie du 23 mai 2003, Qualcomm a reçu la version non confidentielle de la décision attaquée adoptée, en allemand, par la Commission. Le 18 novembre 2003, la version non confidentielle de la décision attaquée a été publiée, en anglais et dans les autres langues officielles, au Journal officiel de l’Union européenne (JO L 300, p. 62), en application de l’article 20, paragraphe 1, du règlement concentration.

Procédure

26

Par requête déposée au greffe du Tribunal le 10 février 2004, Qualcomm a introduit le présent recours.

27

Par acte déposé au greffe du Tribunal le 28 mai 2004, la République fédérale d’Allemagne a demandé à intervenir au soutien des conclusions de la Commission. Cette demande a été accueillie par ordonnance du président de la troisième chambre du 16 juillet 2004.

28

Par acte déposé au greffe du Tribunal le 8 novembre 2004, Daimler AG, Daimler Financial Services AG et Deutsche Telekom ont demandé à intervenir au soutien des conclusions de la Commission. Cette demande a été accueillie par ordonnance du 21 janvier 2005 du président de la troisième chambre. La demande d’intervention de ces entreprises ayant été déposée après l’expiration du délai visé à l’article 116, paragraphe 6, du règlement de procédure du Tribunal, ces entreprises ont seulement été autorisées à présenter leurs observations, sur la base du rapport d’audience qui leur a été communiqué, lors de la procédure orale.

29

Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (troisième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale et a invité, au titre de l’article 64 de son règlement de procédure, les parties à répondre à une série de questions écrites. Les parties ont déféré à ces demandes dans les délais impartis.

30

Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience du 1er juillet 2008.

Conclusions des parties

31

Qualcomm conclut à ce qu’il plaise au Tribunal:

annuler la décision attaquée;

condamner la Commission aux dépens.

32

La Commission, soutenue par la République fédérale d’Allemagne, Deutsche Telekom, Daimler et Daimler Financial Services, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal:

rejeter le recours;

condamner Qualcomm aux dépens.

En droit

I — Sur la recevabilité

A — Arguments des parties

1. Arguments de la Commission et de la République fédérale d’Allemagne

a) Sur la notification de la décision attaquée

33

À titre principal, la Commission, soutenue par la République fédérale d’Allemagne, estime que le recours de Qualcomm est tardif, car la décision attaquée lui aurait été notifiée le 23 mai 2003 et elle n’aurait introduit son recours en annulation que le 10 février 2004, soit bien au-delà du délai de recours de deux mois et 10 jours prévu par le règlement de procédure.

34

La Commission estime que, bien que Qualcomm ne soit pas le destinataire de la décision attaquée, la transmission, le 23 mai 2003, de la décision attaquée à Qualcomm constitue une notification, au sens de l’article 230, cinquième alinéa, CE. Selon elle, il ressort de la jurisprudence qu’une décision peut être notifiée à une partie qui n’en est pas le destinataire, mais qui est directement et individuellement concernée par celle-ci (arrêt du Tribunal 15 septembre 1998, BP Chemicals/Commission, T-11/95, Rec. p. II-3235, point 52, et, a contrario, arrêts du Tribunal du 12 décembre 2000, Alitalia/Commission, T-296/97, Rec. p. II-3871, et du 27 novembre 2003, Regione Siciliana/Commission, T-190/00, Rec. p. II-5015, point 31) et que, pour que la notification d’une décision soit régulière, il suffit que cette décision ait été communiquée à une partie directement et individuellement concernée par la décision de sorte qu’elle ait pu en prendre connaissance (arrêt de la Cour du 21 février 1973, Europemballage et Continental Can/Commission, 6/72, Rec. p. 215, point 10; arrêts du Tribunal du 29 mai 1991, Bayer/Commission, T-12/90, Rec. p. II-219, et du 7 juillet 1994, Dunlop Slazenger/Commission, T-43/92, Rec. p. II-441, point 25). Or, la transmission, le 23 mai 2003, de la décision attaquée aurait toutes les caractéristiques d’une notification et Qualcomm serait, en tant que concurrent des entreprises notifiantes, directement et individuellement concernée par la décision attaquée.

35

Les termes de l’article 254, troisième alinéa, CE n’excluraient pas une notification à d’autres personnes que le destinataire. Au contraire, une telle notification serait conforme au système des voies de recours instauré par le traité en vertu duquel des personnes qui ne sont pas les destinataires d’une décision peuvent néanmoins demander son annulation lorsque cette décision les concerne directement et individuellement. Par ailleurs, en vertu de l’article 20, paragraphe 2, du règlement concentration, la Commission ne serait pas tenue de publier le texte complet des décisions adoptées au titre de l’article 8, paragraphe 2, dudit règlement, mais uniquement le nom des parties et les éléments essentiels desdites décisions. La Commission précise en outre que, depuis le 1er mai 2004, la version non confidentielle de ces décisions n’est plus publiée dans son intégralité et dans toutes les langues communautaires et qu’elle limite la publication des décisions adoptées au titre de l’article 8, paragraphe 2, du règlement concentration aux éléments essentiels visés à l’article 20, paragraphe 2, dudit règlement. L’article 230, cinquième alinéa, CE ferait état d’une notification au requérant et non au destinataire. En outre, Qualcomm ne saurait ignorer cette notification préalable à la publication de la décision attaquée dans l’intention de repousser le commencement du délai de recours en annulation et se placer ainsi, de facto, dans une position plus avantageuse que les autres tiers qualifiés ou les destinataires de la décision. Elle rappelle que les délais de recours ont été institués en vue d’assurer la clarté et la sécurité des situations juridiques et qu’ils répondent à la nécessité d’éviter toute discrimination ou tout traitement arbitraire dans l’administration de la justice.

36

Enfin, interrogée par le Tribunal sur la pertinence de l’arrêt du Tribunal du 15 juin 2005, Olsen/Commission (T-17/02, Rec. p. II-2031), la Commission estime que l’affaire à l’origine de cet arrêt se distingue de la présente affaire, d’une part, en ce qu’elle avait trait à la matière des aides d’État, dont les règles précisent expressément que les décisions sont notifiées aux États membres concernés par l’aide et, d’autre part, en ce que la communication de la décision en cause précisait expressément qu’il n’y avait pas de garantie que la décision envoyée correspondait à la décision notifiée à son destinataire. La Commission indique néanmoins que l’examen par le Tribunal de la communication dans l’affaire à l’origine de l’arrêt Olsen/Commission, précité, afin de déterminer si elle constituait une notification démontre qu’une décision peut être notifiée à une partie qui n’en est pas le destinataire. En outre, à la différence de la situation dans cette autre affaire, l’article 6, paragraphe 5, et l’article 8, paragraphe 8, du règlement (CE) no 139/2004 du Conseil, du 20 janvier 2004, relatif au contrôle des opérations de concentration entre entreprises (JO L 24, p. 1), prévoiraient la notification obligatoire aux États membres et aux «entreprises concernées» sans que ceux-ci ne soient les destinataires des mesures en cause, et ce alors que ce règlement prévoit la publication des décisions au Journal officiel de l’Union européenne.

37

La Commission souligne qu’aucune disposition du traité ou du règlement concentration n’interdit de notifier une décision à des tiers concernés. Une telle notification serait, par ailleurs, effectuée dans l’intérêt de la sécurité juridique des parties impliquées dans une concentration et dans l’intérêt de la continuité de l’action communautaire lors du contrôle des concentrations.

b) Sur la prise de connaissance

38

À titre subsidiaire, la Commission, soutenue par la République fédérale d’Allemagne, estime que, à supposer que la décision attaquée n’ait pas été notifiée à Qualcomm, celle-ci a, à tout le moins, pris connaissance de l’existence de cette décision et de son contenu précis le 23 mai 2003 de sorte que le délai du recours en annulation aurait commencé à courir à partir de cette date et que le présent recours est tardif.

39

La jurisprudence selon laquelle le critère de la date de la prise de connaissance de l’acte attaqué en tant que point de départ du délai de recours présente un caractère subsidiaire par rapport à ceux de la publication ou de la notification n’aurait trait qu’à la situation où les parties requérantes n’avaient pas pu prendre connaissance du texte précis de la décision attaquée avant sa notification ou sa publication (arrêts BP Chemicals/Commission, point 34 supra, point 47; Alitalia/Commission, point 34 supra, point 61, et Regione Siciliana/Commission, point 34 supra, point 30). En outre, ce ne serait qu’en combinaison avec la circonstance que l’acte avait été publié dans les deux mois suivant son adoption que la Cour aurait conclu que la date de publication faisait courir le délai du recours (arrêt de la Cour du 10 mars 1998, Allemagne/Conseil, C-122/95, Rec. p. I-973, point 38). Enfin, dans l’arrêt du 9 mars 1994, TWD Textilwerke Deggendorf (C-188/92, Rec. p. I-833, points 15 à 18), la Cour aurait considéré que des parties manifestement recevables à demander l’annulation d’un acte ne sauraient être autorisées à le remettre indéfiniment en question en invoquant d’autres règles procédurales. Ce raisonnement, qui est fondé sur la finalité du délai prévu par l’article 230, cinquième alinéa, CE, s’applique, selon la Commission, par analogie à une situation dans laquelle un tiers ayant manifestement qualité pour agir a été individuellement informé du contenu précis d’une décision.

2. Arguments de Qualcomm

40

Qualcomm estime que le recours a été introduit dans le délai prévu à l’article 230, cinquième alinéa, CE, puisque la décision attaquée a été publiée le 18 novembre 2003 au Journal officiel de l’Union européenne en application de l’article 20, paragraphe 1, du règlement concentration. La publication des décisions en matière de concentration en temps utile permet, selon Qualcomm, de garantir la sécurité juridique.

41

Par ailleurs, Qualcomm considère que la transmission, le 23 mai 2003, de la décision attaquée n’est pas une notification, car seuls les destinataires d’une décision pourraient se voir notifier celle-ci. Cette interprétation serait confirmée par les arrêts Europemballage Continental Can/Commission et Dunlop Slazenger/Commission, point 34 supra. Qualcomm estime encore que sa prise de connaissance de la décision attaquée, le 23 mai 2003, ne peut la priver du délai de recours ouvert à compter de la publication de celle-ci au Journal officiel de l’Union européenne.

42

Enfin, Qualcomm estime que l’arrêt Olsen/Commission, point 36 supra, confirme la recevabilité de son recours en indiquant que seuls les destinataires d’une décision pouvaient se voir notifier celle-ci.

B — Appréciation du Tribunal

1. Observations liminaires

43

Aux termes de l’article 230, cinquième alinéa, CE, un recours en annulation doit être formé dans un délai de deux mois à compter, suivant le cas, de la publication de l’acte, de sa notification au requérant ou, à défaut, du jour où celui-ci en a eu connaissance.

44

Selon l’article 102, paragraphe 1, du règlement de procédure, lorsqu’un délai pour l’introduction d’un recours contre un acte d’une institution commence à courir à partir de la publication de l’acte, ce délai court à partir de la fin du quatorzième jour suivant la date de la publication de l’acte au Journal officiel de l’Union européenne. Conformément aux dispositions de l’article 102, paragraphe 2, du même règlement, ce délai doit, en outre, être augmenté d’un délai de distance forfaitaire de dix jours.

45

En l’espèce, la décision attaquée a fait l’objet d’une publication au Journal officiel de l’Union européenne le 18 novembre 2003. Cependant, une version non confidentielle de la décision attaquée a été envoyée par la Commission à Qualcomm le 23 mai 2003. Le recours de Qualcomm contre la décision attaquée a été introduit au greffe du Tribunal le 10 février 2004, soit dans le délai imparti à compter du jour de la publication de la décision attaquée au Journal officiel de l’Union européenne.

2. Quant à la publication ou à la notification de la décision attaquée

46

Il y a lieu de rappeler que, dans l’arrêt Olsen/Commission, point 36 supra, il a été jugé que, au sens même de l’article 230, cinquième alinéa, CE, la notification est l’opération par laquelle l’auteur d’un acte de portée individuelle communique celui-ci à ses destinataires et les met ainsi en mesure d’en prendre connaissance. Cette interprétation découle également de l’article 254, troisième alinéa, CE, aux termes duquel les décisions sont notifiées à leurs destinataires et prennent effet par cette notification (arrêt Olsen/Commission, point 36 supra, point 74).

47

En l’espèce, seules DaimlerChrysler et Deutsche Telekom sont reprises dans la décision attaquée comme destinataires de celle-ci (voir article 4 de la décision attaquée). Puisque Qualcomm n’est pas l’un des destinataires de la décision attaquée, le critère de la notification de l’acte ne lui est pas applicable. Partant, la Commission ne peut pas alléguer que le recours de Qualcomm est irrecevable au motif que ce recours a été introduit après l’expiration du délai de recours, qui aurait commencé à courir à compter du jour où elle lui aurait «notifié» la décision attaquée, alors même qu’il ne s’agit pas d’un des destinataires formellement identifiés par cette décision.

48

Cette appréciation n’est pas remise en cause par les arguments avancés par la Commission pour faire valoir qu’une décision pourrait être notifiée, en application de l’article 230, cinquième alinéa, CE, non seulement aux destinataires identifiés dans la décision en cause, conformément à l’article 254, troisième alinéa, CE, mais également à d’autres personnes que ces destinataires. Il convient de rappeler, à ce propos, que l’article 20, paragraphe 1, du règlement concentration impose la publication au Journal officiel de l’Union européenne des décisions prises en application de ce règlement, de sorte que, pour les personnes qui ne sont pas des destinataires identifiés dans la décision attaquée, le calcul du délai de recours doit se faire sur la base du premier cas de figure visé par l’article 230, cinquième alinéa, CE, à savoir, à compter de cette publication.

49

Accepter l’interprétation extensive proposée par la Commission de la notion de destinataire, comprenant tant le ou les destinataires identifiés dans une décision que toute autre personne désignée comme telle par la Commission sans l’avoir été dans cette décision, reviendrait à remettre en cause les effets de l’obligation prévue par l’article 20, paragraphe 1, du règlement concentration tout en conférant à la Commission un pouvoir discrétionnaire afin d’identifier, parmi les personnes qui ne sont pas nommément reprises comme destinataires dans une décision, celles qui sont susceptibles d’intenter un recours à compter de la notification de cette décision et non à compter de sa publication. Or, l’octroi d’un tel pouvoir discrétionnaire risque d’entraîner une violation du principe d’égalité de traitement dans la mesure où, parmi les personnes qui ne sont pas nommément reprises comme destinataires dans une décision, certaines personnes auxquelles cette décision a été «notifiée» pourront attaquer celle-ci à compter de sa «notification» tandis que d’autres personnes auxquelles cette décision n’a pas été «notifiée» pourront attaquer cette décision à compter de sa publication. Or, toute personne qui est directement et individuellement concernée par la décision adoptée par la Commission est, en principe, recevable à attaquer cette décision. En outre, il n’est pas toujours possible pour la Commission d’identifier a priori les personnes susceptibles d’intenter un recours à compter de la notification d’une décision. Ainsi, par exemple, il est difficile d’identifier tous les concurrents actuels et potentiels qui pourront être affectés par l’opération de concentration visée par la décision attaquée.

50

Une telle discrimination ne saurait être justifiée par l’objectif consistant à garantir le plus rapidement possible la sécurité juridique en limitant la possibilité de remise en cause de la décision attaquée par un recours en justice à l’encontre de celle-ci. En effet, l’atteinte de cet objectif ne peut être assurée par l’interprétation extensive proposée par la Commission dès lors que celle-ci ne sera pas en mesure d’identifier a priori et de façon systématique les personnes directement et individuellement concernées par la décision attaquée. En outre et en toute hypothèse, l’atteinte de cet objectif est parfaitement assurée par l’obligation de publication au Journal officiel de l’Union européenne, qui incombe à la Commission en vertu de l’article 20, paragraphe 1, du règlement concentration.

51

En outre, l’argument de la Commission selon lequel il y a un traitement discriminatoire entre, d’une part, les parties notifiantes à une concentration qui ne peuvent intenter un recours en annulation contre la décision qui leur a été notifiée qu’à compter de cette notification et, d’autre part, des tiers qui ont participé à la procédure administrative aboutissant à cette décision et qui se sont vu «notifier» cette décision, mais dont le délai de recours ne commencerait à courir qu’à compter de la publication de celle-ci, est dénué de pertinence. En effet, il repose sur la prémisse que la Commission peut dûment notifier sa décision à des personnes autres que les parties notifiantes. Or, pour les raisons reprises aux points 49 et 50 ci-dessus tel ne peut être le cas.

52

Il y a également lieu d’observer que, en ce qui concerne la jurisprudence invoquée par la Commission aux point 34 ci-dessus, celle-ci ne se prononce pas expressément sur la question de savoir si une décision peut être considérée comme notifiée à une personne qui n’en est pas le destinataire alors même qu’une publication de cette décision est prévue par la réglementation applicable.

53

L’argument de la Commission tiré de la circonstance selon laquelle l’article 20, paragraphe 2, du règlement concentration ne prévoit qu’une obligation de publier les noms des parties et les éléments essentiels de la décision et que, depuis le 1er mai 2004, la version non confidentielle de ces décisions n’est plus publiée dans son intégralité et dans toutes les langues communautaires doit également être rejeté. En effet, il convient de constater à cet égard que, en l’espèce, la version non confidentielle de la décision attaquée a été publiée dans son intégralité au Journal officiel de l’Union européenne et était disponible dans toutes les langues officielles le jour de sa publication, y compris celle de Qualcomm et cela alors que la communication de la version non confidentielle de la décision attaquée à Qualcomm avait pour objet uniquement la version allemande de ladite décision, c’est-à-dire dans une langue distincte de celle des statuts de Qualcomm. La publication au Journal officiel de l’Union européenne a ainsi garanti l’accès à toutes les informations essentielles nécessaires à Qualcomm pour l’introduction d’un recours en annulation contre la décision attaquée.

54

Enfin, en ce qui concerne le règlement no 139/2004, il convient de relever qu’il est sans pertinence pour les besoins du présent litige, car il est applicable à partir du 1er mai 2004, soit après l’adoption de la décision attaquée.

3. Quant à la prise de connaissance de la décision attaquée

55

Il découle du libellé même de l’article 230, cinquième alinéa, CE que le critère de la date de prise de connaissance de l’acte attaqué en tant que point de départ du délai de recours présente un caractère subsidiaire par rapport à ceux de la publication ou de la notification (voir arrêt Regione Siciliana/Commission, point 34 supra, point 30, et la jurisprudence qui y est citée).

56

Par conséquent, la prise de connaissance par Qualcomm, le 23 mai 2003, de la décision attaquée ne peut être considérée comme le point de départ du délai de recours, en vertu de l’article 230, cinquième alinéa, CE étant donné que, le 18 novembre 2003, cette décision a été publiée au Journal officiel de l’Union européenne, en application de l’article 20, paragraphe 1, du règlement concentration. Seule cette dernière date fait courir le délai de recours dont dispose Qualcomm pour demander l’annulation de la décision attaquée en vertu de l’article 230 CE.

57

Cette appréciation n’est pas remise en cause par la jurisprudence invoquée par la Commission au point 39 ci-dessus. En effet, contrairement à l’interprétation de cette jurisprudence faite par la Commission, il ne peut en être déduit que, en cas de prise de connaissance avant la publication de la décision attaquée, le délai de recours commence à courir à compter de cette prise de connaissance.

4. Conclusion

58

Au vu de l’ensemble des éléments qui précèdent, il convient de conclure que, en l’espèce, le délai de recours visé par l’article 230, cinquième alinéa, CE a commencé à courir à la date de la publication de la décision attaquée au Journal officiel de l’Union européenne, à savoir le 18 novembre 2003, sans que la Commission ne puisse valablement se prévaloir du fait qu’elle a transmis, le 23 mai 2003, la version non confidentielle de la décision attaquée à une personne qui n’en était pas le destinataire pour remettre en question le point de départ de ce délai de recours et opérer ainsi une distinction entre les différentes personnes qui ne sont pas destinataires d’un tel acte selon que la Commission décide ou non de procéder à une notification à leur égard. Partant, le présent recours n’est pas tardif et il convient de rejeter l’objection soulevée par la Commission quant à la recevabilité du présent recours.

II — Sur le fond

A — Introduction

59

À la lecture des différents griefs soulevés par la requérante, il convient de distinguer trois moyens. Le premier moyen est tiré de l’erreur manifeste d’appréciation, de la constatation erronée des faits et du raisonnement contradictoire en ce qui concerne le caractère approprié des engagements aux fins de résoudre les problèmes de concurrence sur le marché en cause. Le deuxième moyen est tiré d’un détournement de pouvoir. Enfin, le troisième moyen est tiré d’un défaut de motivation.

B — Sur le premier moyen, tiré de l’erreur manifeste d’appréciation, de la constatation erronée des faits et du raisonnement contradictoire en ce qui concerne le caractère approprié des engagements aux fins de résoudre les problèmes de concurrence sur le marché en cause

1. Arguments des parties

a) Arguments de Qualcomm

— Introduction

60

Qualcomm considère que les engagements repris dans la décision attaquée ne permettent pas d’écarter les doutes quant au respect des règles en matière de concurrence. En particulier, l’engagement relatif à l’interface GPS et l’engagement relatif au module de perception de péage ne créeraient un «terrain de jeu égal» pour les entreprises proposant des systèmes télématiques sans recourir au portail de la TGG, d’une part, et pour les entreprises offrant des services télématiques qui opèrent par l’intermédiaire du portail de la TGG et de l’unité embarquée de Toll Collect.

61

Qualcomm soutient que les entreprises de transport n’utiliseront pas d’autre plate-forme que l’unité embarquée de Toll Collect parce qu’elles peuvent obtenir tous les principaux services télématiques en utilisant cette unité embarquée. Selon elle, le fait que l’engagement relatif au portail de la TGG prévoit que, pour utiliser l’unité embarquée en cause pour la fourniture de services télématiques, les entreprises de la concentration et tout autre fournisseur de services télématiques doivent opérer par l’intermédiaire du portail de la TGG, ne modifie pas cette conclusion parce que ces fournisseurs peuvent offrir des services identiques à ceux que les entreprises de la concentration, notamment DaimlerChrysler, auraient pu proposer s’ils avaient été autorisés à offrir directement des services télématiques en utilisant l’unité embarquée de Toll Collect. Ainsi, ni l’engagement relatif à l’interface GPS ni l’engagement relatif au module de perception de péage n’élimineraient l’avantage en matière de prix de l’unité embarquée de Toll Collect.

62

Qualcomm estime que l’observation de la République fédérale d’Allemagne selon laquelle les unités embarquées de Toll Collect distribuées conformément au contrat d’exploitation conclu entre la République fédérale d’Allemagne et Toll Collect pour l’exploitation d’un système de prélèvement de péages dus par les poids lourds empruntant les autoroutes allemandes, ne sont pas immédiatement en mesure d’être utilisées dans le cadre de la fourniture de services télématiques est irrecevable et erronée. Cette observation serait irrecevable en ce qu’elle se fonderait sur des développements survenus après l’adoption de la décision attaquée. En outre, elle serait erronée, car, par l’intermédiaire des unités embarquées en cause, Toll Collect serait en mesure de fournir des services télématiques de base sans nécessiter de mise à jour ou de mémoire ou de logiciel additionnels. D’après Qualcomm, l’argument de la République fédérale d’Allemagne selon lequel Toll Collect ne serait pas en mesure d’offrir des services télématiques parce qu’elle n’a pas encore obtenu l’autorisation de la République fédérale d’Allemagne serait également irrecevable, car il revient à remettre en cause une hypothèse, dûment étayée et non contestée au cours de l’adoption de la décision attaquée, selon laquelle la République fédérale d’Allemagne autorise Toll Collect à fournir des services télématiques. En outre, Qualcomm souligne que la République fédérale d’Allemagne ne soutient pas qu’il était déraisonnable à l’époque de l’adoption de la décision attaquée de considérer que l’autorisation nécessaire serait octroyée, mais uniquement qu’elle n’a pas encore été octroyée. L’argument de la République fédérale d’Allemagne manquerait de franchise en ce qu’elle n’affirme pas que l’autorisation ne serait pas accordée, mais uniquement qu’elle n’a pas encore été accordée.

63

Qualcomm estime, en outre, que la Commission a enfreint le règlement concentration en ce qu’elle a considéré, dans la décision attaquée, qu’il suffit que les engagements «limitent» ou empêchent «dans une large mesure» que l’unité embarquée de Toll Collect devienne une plate-forme dominante (voir considérants 71 et 72 de la décision attaquée).

— Sur l’engagement relatif à l’interface GPS

64

Qualcomm considère que la Commission n’explique pas pour quelles raisons les économies susceptibles d’être réalisées du fait de l’engagement relatif à l’interface GPS, estimées à un montant compris entre 150 et 200 euros par appareil, permettraient aux tiers de concurrencer l’unité embarquée de Toll Collect et de «limiter encore plus» la position dominante que devrait occuper la plate-forme constituée par les unités embarquées de Toll Collect. L’appréciation par la Commission de l’engagement relatif à l’interface GPS serait fondée sur des faits erronés et constituerait une erreur d’appréciation manifeste.

65

En premier lieu, Qualcomm estime que l’engagement relatif à l’interface GPS n’entraîne pas une économie de 150 à 200 euros par appareil. Elle indique, à ce propos, qu’il lui a été possible d’acheter des unités GPS destinés à équiper ses dispositifs télématiques pour des prix allant de 30 à 55 euros. En outre, elle fait observer que la Commission suppose que les économies susceptibles d’être réalisées du fait de cet engagement sont égales aux coûts d’une unité GPS. Or, les tiers utilisant l’interface GPS de l’unité embarquée de Toll Collect supporteraient des coûts supplémentaires qu’ils ne devraient pas supporter s’ils développaient leur propre système.

66

Ces coûts supplémentaires seraient les suivants: les frais de développement pour l’adaptation nécessaire de leur matériel et de leurs logiciels en vue de connecter leur système à l’interface GPS; le remboursement des frais liés au développement de l’interface, le payement d’une licence en vertu du point B.III.3 des engagements; les frais afférents à la nécessité de développer deux lignes de produits parallèles, à savoir un système «connectable» destiné à être utilisé en Allemagne et un système opérationnel avec une fonction GPS destiné à être utilisé en dehors de ce territoire.

67

Qualcomm estime que, même si, actuellement, ces coûts ne sauraient être quantifiés avec un degré suffisant de précision parce que les détails techniques de l’interface GPS ne sont pas encore connus, le montant total de ces coûts éliminerait probablement totalement les économies réalisées grâce à l’engagement relatif à l’interface GPS. Qualcomm fait également valoir qu’il serait économiquement plus intéressant de fabriquer et de vendre un dispositif télématique avec une unité GPS.

68

En deuxième lieu, Qualcomm considère que l’engagement relatif à l’interface GPS n’élimine pas l’avantage concurrentiel de l’unité embarquée de Toll Collect même s’il devait entraîner des économies de 150 à 200 euros par appareil. Elle rappelle que la Commission a constaté, au considérant 62 de la décision attaquée, que le prix des dispositifs télématiques actuellement sur le marché en cause varie entre 1000 et 2500 euros. Par conséquent, même si l’engagement relatif à l’interface GPS entraînait des économies de 150 à 200 euros par appareil et à supposer qu’il permette d’économiser les montants indiqués par la Commission dans son mémoire en défense, les tiers proposant des dispositifs télématiques seraient toujours confrontés à un important désavantage en matière de prix par rapport à l’unité embarquée de Toll Collect, qui est fournie gratuitement. En effet, outre le prix d’achat des dispositifs télématiques alternatifs, les entreprises de transport devraient également payer des frais d’installation et des frais d’immobilisation de leurs camions, ce que la Commission reconnaît au considérant 72 de la décision attaquée. Ces derniers frais s’élèveraient à environ 100 à 120 euros par camion. En outre, Qualcomm estime que la Commission ne fournit aucune explication ou preuve sur la manière dont les fournisseurs tiers pourraient faire ainsi concurrence à l’unité embarquée de Toll Collect.

69

En troisième lieu, Qualcomm laisse entendre que les tiers proposant des dispositifs télématiques susceptibles d’être connectés aux unités embarquées de Toll Collect par l’intermédiaire de son interface GPS doivent fournir un deuxième appareil qui prend de la place dans la cabine du camion.

— Sur l’engagement relatif au module de perception de péage

70

En premier lieu, Qualcomm s’oppose à l’affirmation, reprise au considérant 71 de la décision attaquée, selon laquelle les constructeurs de poids lourds et leurs équipementiers assumeront probablement le développement et la fabrication d’appareils susceptibles d’être utilisés pour le prélèvement automatique de péages et la fourniture de services télématiques. Qualcomm estime que, à l’exception d’une référence imprécise à une consultation des acteurs du marché, la Commission ne fournit aucune explication quant aux considérations et aux preuves sur lesquelles son affirmation est fondée.

71

En deuxième lieu, Qualcomm considère que l’engagement relatif au module de perception de péage n’élimine pas non plus le problème lié au fait que le système des tiers coûte toujours de l’argent, alors que l’unité embarquée de Toll Collect est gratuite, de sorte qu’aucune entreprise de transport n’achètera le système des tiers. L’engagement relatif au module de perception de péage ne permettrait donc aucune économie pour les tiers proposant des dispositifs télématiques intégrant ce module, puisqu’ils doivent payer, au minimum, entre 1000 et 2500 euros alors qu’ils peuvent obtenir gratuitement l’unité embarquée de Toll Collect. En outre, les tiers proposant des dispositifs télématiques n’auraient pas accès aux données générées par l’unité embarquée de Toll Collect de sorte qu’ils devraient générer l’ensemble des données destinées aux services télématiques eux-mêmes et fabriquer le matériel nécessaire (GPS, écran, unité de messagerie, système de communication mobile, etc.) et les logiciels.

72

Qualcomm affirme, enfin, que les entreprises qui créent leur propre module de perception de péage à la suite de l’engagement relatif au module de perception de péage seraient exposées à des frais additionnels. En se référant notamment au point B.IV.2.4 des engagements, Qualcomm explique qu’il ne s’agit pas de coûts insignifiants, puisque les tiers proposant des dispositifs télématiques supportent, notamment, les coûts suivants:

les frais de développement liés à l’adaptation nécessaire de leur système en vue d’intégrer le module de perception de péage;

les frais de développement liés au développement par les partenaires à l’entreprise commune du module de perception de péage et/ou la redevance liée à la licence facturée aux fournisseurs tiers;

les frais liés à la fourniture à titre onéreux des modules de perception de péage;

les frais de certification de leurs systèmes.

73

Étant donné que les détails techniques du module de perception de péage ne sont pas encore connus, il serait actuellement impossible de fournir des estimations précises de ces coûts additionnels.

74

En troisième lieu, Qualcomm considère que l’assurance donnée par la République fédérale d’Allemagne que les tiers proposant des dispositifs télématiques intégrant le module de perception de péage ne soient pas traités différemment en ce qui concerne les coûts de l’exploitation du système de péage (considérant 70 de la décision attaquée) n’élimine pas l’avantage en matière de prix de l’unité embarquée de Toll Collect, puisque, pour éliminer cet avantage, la République fédérale d’Allemagne aurait dû s’engager à couvrir l’ensemble des coûts que supportent les tiers pour fournir gratuitement des dispositifs télématiques intégrant un module de perception de péage.

75

En quatrième et dernier lieu, Qualcomm s’oppose à ce que la Commission fasse valoir, pour la première fois dans son mémoire en défense, que les constructeurs de poids lourds peuvent intégrer le module de perception de péage dans les dispositifs télématiques qu’ils montent en série dans leurs véhicules de sorte qu’ils n’achèteront pas les unités embarquées de Toll Collect. À cet égard, elle affirme, d’abord, que tous les poids lourds actuellement en circulation et ceux qui seront construits dans les deux à cinq prochaines années seront équipés d’un «terminal télématique» installé lors d’un second montage, ce qui signifie que les clients auront le choix entre l’unité embarquée de Toll Collect gratuite et un dispositif télématique payant offrant des services supplémentaires. Elle relève, ensuite, que, d’après son expérience, les gestionnaires de flotte ne sont pas favorables au montage en série de terminaux télématiques sur les poids lourds, puisqu’ils utilisent, en principe, différentes marques de véhicules. Elle soutient également que, si différents dispositifs télématiques sont montés en série sur chaque marque de véhicule, ces derniers ne peuvent pas communiquer entre eux. De plus, le central du gestionnaire de flotte ne serait pas équipé pour communiquer avec différents types de dispositifs télématiques et la formation des conducteurs serait rendue plus compliquée. Elle estime, enfin, que la Commission n’explique pas pour quelle raison le montage en série des dispositifs télématiques intégrant un module de perception de péage empêche nécessairement l’unité embarquée de Toll Collect de devenir la plate-forme dominante. Même si les clients devaient préférer les terminaux télématiques montés en série, la Commission n’a pas démontré que cette tendance empêcherait l’unité embarquée de Toll Collect de devenir la plate-forme dominante.

— Sur le caractère non fondé des arguments avancés par la Commission au cours de la procédure juridictionnelle

76

Qualcomm conteste l’argument de la Commission selon lequel, puisque l’engagement relatif au portail de la TGG suffit à préserver la concurrence effective sur le marché en cause dans son ensemble, l’impact des autres engagements sur ce marché importe peu. À cet égard, elle précise que si, dans la décision attaquée, la Commission a effectivement identifié le marché en cause comme le marché allemand des systèmes de télématique routière, elle a néanmoins analysé l’impact de Toll Collect sur ce marché dans deux sections différentes de celui-ci (voir sections IV.D.2.1 et IV.D.2.2 de la décision attaquée). La Commission aurait, ainsi, indiqué qu’il existe différents problèmes concurrentiels sur le marché en cause qui doivent être résolus par des engagements appropriés. Qualcomm s’est, dès lors, concentrée sur l’engagement relatif à l’interface GPS et l’engagement relatif au module de perception de péage, car ils sont destinés à ouvrir la concurrence sur le segment du marché en cause qui lui importe en tant que fournisseur de systèmes télématiques. Elle ajoute que, à supposer même que l’engagement relatif au portail de la TGG suffit à garantir une concurrence effective pour les services télématiques, cela ne suffirait pas à préserver la concurrence sur le marché en cause dans son ensemble, puisque, comme il est indiqué au considérant 30 de la décision attaquée, la plupart des opérateurs sur le marché en cause sont, comme elle, des «fournisseurs complets».

77

Par ailleurs, Qualcomm conteste le bien-fondé de la défense de la Commission selon laquelle les tiers proposant des dispositifs télématiques ou des solutions intégrées peuvent concurrencer l’unité embarquée de Toll Collect gratuite en proposant des services télématiques additionnels. Rien dans les considérants 71 à 73 de la décision attaquée n’indiquerait qu’il s’agirait d’une considération permettant à la Commission de conclure que l’engagement relatif à l’interface GPS et l’engagement relatif au module de perception de péage sont en mesure d’empêcher l’unité embarquée de Toll Collect de devenir la plate-forme télématique dominante. En outre, la Commission aurait déclaré aux considérants 62 et 63 de la décision attaquée que les services télématiques pouvant être fournis par l’intermédiaire de la génération actuelle des unités embarquées de Toll Collect représentent les fonctions télématiques de base nécessaires et que les entreprises de transport n’achètent pas de services télématiques additionnels si cela implique des dépenses additionnelles. La Commission aurait donc elle-même considéré que la possibilité de proposer des services télématiques additionnels ne saurait éliminer le désavantage en matière de prix.

78

De plus, il serait inexact de considérer, comme le fait la Commission, qu’il existerait un prix que les clients seraient disposés à payer pour un second terminal télématique afin d’obtenir des services supplémentaires dont ils n’ont pas besoin. Outre le fait que la Commission ne produirait pas la moindre preuve au soutien de son argument et, notamment, aucune indication concernant ce prix, Qualcomm relève que la Commission n’a pas tenté d’expliquer la contradiction entre, d’une part, la conclusion formulée aux considérants 54 et 63 de la décision attaquée, selon laquelle les entreprises de transport ne sont pas disposés à payer quoi que ce soit pour un dispositif télématique si l’unité embarquée de Toll Collect est offerte gratuitement et, d’autre part, l’affirmation, au considérant 72 de la décision attaquée, selon laquelle une économie de 150 à 200 euros par appareil permet aux tiers proposant des dispositifs télématiques de concurrencer les services fournis par l’intermédiaire des unités embarquées de Toll Collect. En effet, même si les suppositions de la Commission concernant les économies de coûts étaient exactes, il y aurait toujours une différence de prix de 800 à 2300 euros entre l’unité embarquée de Toll Collect et un dispositif télématique utilisant l’interface GPS.

79

Enfin, Qualcomm estime que l’étude de marché reprise dans le rapport de Frost & Sullivan, European Commercial Vehicle Telematics Markets, 2002 (ci-après le «rapport Frost & Sullivan») sur laquelle se fonde la Commission indique que, actuellement, peu de clients sont intéressés par des services qui vont au-delà de ceux proposés par l’intermédiaire de l’unité embarquée de Toll Collect et que cette situation ne changera probablement pas dans un proche avenir. En effet, cette étude de marché distinguerait les systèmes télématiques «de base», des systèmes télématiques «intermédiaires» et des systèmes télématiques «avancés». Selon cette étude, l’unité embarquée en cause devrait être qualifiée de système télématique «intermédiaire», notamment en raison de ses capacités de messagerie. Dans cette même étude, il serait également relevé que, en 2001, les parts de marché étaient les suivantes: 90% pour les systèmes télématiques de base, 9% pour les systèmes télématiques intermédiaires et 1% pour les systèmes télématiques avancés. Par ailleurs, il serait indiqué dans ladite étude que, en 2009, les parts de marché devraient être les suivantes: 78% pour les systèmes télématiques de base, 12% pour les systèmes télématiques intermédiaires et 10% pour les systèmes télématiques avancés. Qualcomm souligne que cette prévision suppose une concurrence loyale et sans distorsion de prix entre les différents types de systèmes et non une situation dans laquelle, comme en l’espèce, les entreprises de transport pourraient obtenir gratuitement des unités embarquées de Toll Collect, à savoir un système télématique de base, voire intermédiaire, alors qu’ils devraient payer s’ils veulent obtenir un système télématique avancé. En toute hypothèse, les preuves avancées par la Commission indiqueraient que le marché allemand des systèmes de télématique routière était très étroit en ce qui concerne les systèmes télématiques avancés. Qualcomm conteste, de surcroît, l’interprétation faite par la Commission de ladite étude de marché. Elle estime que, même si ladite étude était interprétée dans le sens préconisé par la Commission, il n’aurait pas été démontré que l’unité embarquée de Toll Collect ne serait pas la plate-forme dominante, puisque les systèmes télématiques de base représenteraient 78% du marché en volume et 45% du marché en valeur. Elle estime, en outre, que l’unité embarquée de Toll Collect est un système télématique intermédiaire et que, en 2009, les parts de marché cumulées des systèmes télématiques de base et des systèmes télématiques intermédiaires seront, selon les prévisions de l’étude reprise dans le rapport de Frost & Sullivan, de 90% en ce qui concerne le volume et de 68% en ce qui concerne la valeur. De plus, ces chiffres ne seraient que des projections pour 2009. Selon le rapport Frost & Sullivan, en 2004, à savoir l’année pertinente pour la décision attaquée, la part de marché des systèmes télématiques de base devrait être de 94% en ce qui concerne le volume et de 82% en ce qui concerne la valeur.

b) Arguments de la Commission et de la République fédérale d’Allemagne

80

À titre principal, la Commission, soutenue par la République fédérale d’Allemagne, estime que le premier moyen avancé par Qualcomm se fonde sur une incompréhension fondamentale de la décision attaquée en ce que celle-ci n’identifie pas un marché des équipements télématiques et un marché des services télématiques mais uniquement un marché des systèmes de télématique routière comprenant le matériel, les logiciels et les services.

81

Par ailleurs, la Commission estime que les arguments de Qualcomm sont intrinsèquement insuffisants pour remettre en cause son analyse globale des effets qu’auront l’ensemble des engagements sur le marché allemand des systèmes de télématique routière. En effet, à supposer même que l’engagement relatif à l’interface GPS et l’engagement relatif au module de perception de péage ne suffisent pas à régler le problème de concurrence identifié dans la décision attaquée, Qualcomm n’aurait pas démontré que la concurrence entre équipements télématiques routiers serait totalement éliminée et n’a rien dit à propos du fait que l’engagement relatif au portail télématique combiné au moratoire qualitatif empêcherait DaimlerChrysler de dominer l’ensemble du marché allemand des systèmes de télématique routière en garantissant un accès non discriminatoire à cette plate-forme.

82

Dans ce contexte, la Commission confirme qu’il lui importe, en application du règlement concentration, d’empêcher la création d’une position dominante et non de la limiter. Selon la Commission, si, en l’espèce, l’engagement relatif à l’interface GPS et l’engagement relatif au module de perception de péage limitent le caractère dominant de la plate-forme Toll Collect, les engagements, pris dans leur ensemble, empêchent la création d’une position dominante de DaimlerChrysler, par l’intermédiaire de la plate-forme Toll Collect, sur le marché allemand des systèmes de télématique routière.

83

À titre subsidiaire, la Commission, soutenue par la République fédérale d’Allemagne, conteste les allégations de Qualcomm relatives à l’engagement relatif à l’interface GPS et à l’engagement relatif au module de perception de péage.

84

En ce qui concerne l’engagement relatif à l’interface GPS, la Commission considère qu’elle pouvait déduire de l’accueil favorable réservé à une telle interface au cours de la procédure administrative par Qualcomm et d’autres concurrents des entreprises de la concentration, que celle-ci permettrait à ces entreprises de réaliser d’importantes économies au niveau des coûts. Par ailleurs, les informations recueillies au cours de la procédure administrative attesteraient que l’économie susceptible d’être réalisée par ces entreprises du fait de cet engagement, qui ne peut pas se calculer uniquement sur la base du prix d’achat d’un module GPS, mais inclurait d’autres coûts, était comprise entre 150 et 200 euros par appareil selon une estimation prudente. Enfin, la Commission estime que l’avantage conféré par l’engagement relatif à l’interface GPS permettra aux tiers proposant des systèmes télématiques, malgré l’installation d’un appareil distinct, de mieux concurrencer les services télématiques offerts par l’intermédiaire des unités embarquées de Toll Collect dès lors qu’ils pourront offrir des services plus avancés et diversifiés. L’existence d’un marché futur pour une offre de services plus avancés et diversifiés serait confirmée par le rapport Frost & Sullivan indépendamment de la classification des unités embarquées de Toll Collect en systèmes télématiques intermédiaires ou en systèmes télématiques avancés.

85

En ce qui concerne l’engagement relatif au module de perception de péage, la Commission, soutenue par la République fédérale d’Allemagne, réaffirme que celui-ci est susceptible d’empêcher que l’unité embarquée de Toll Collect fournie gratuitement devienne la plate-forme dominante. D’après la Commission, le rapport de Frost & Sullivan confirme que ce sont principalement les constructeurs de poids lourds et leurs équipementiers qui développeront et produiront de tels dispositifs télématiques susceptibles d’être utilisés pour le prélèvement de péages. Les dispositifs télématiques intégrant un module de perception de péage conféreraient aux constructeurs de poids lourds et à leurs équipementiers l’avantage de pouvoir offrir un éventail de fonctions et de services nettement plus étendu que les systèmes installés lors d’un second montage par Toll Collect. En outre, ils conféreraient aux constructeurs de poids lourds et à leurs équipementiers l’avantage d’intégrer l’appareil télématique à l’aménagement électronique modulaire des véhicules.

2. Appréciation du Tribunal

a) Introduction

86

Afin d’apprécier les différents griefs avancés par Qualcomm dans son premier moyen, il convient d’abord de rappeler, d’une part, la portée du contrôle de la Commission en matière de décisions statuant sur une opération de concentration, en particulier lors de décisions prises à la suite d’engagements, et, d’autre part, l’appréciation par la Commission, dans la décision attaquée, de l’opération de concentration et des engagements Ensuite, les griefs ayant trait au critère d’appréciation des engagements seront analysés. Enfin, les griefs tirés du caractère prétendument inadéquat des engagements relatifs au module de perception de péage et à l’interface GPS seront appréciés.

b) Considérations de principe

87

En vertu de l’article 8, paragraphe 2, du règlement concentration, la Commission adopte une décision déclarant l’opération de concentration compatible avec le marché commun, lorsqu’elle constate qu’une opération de concentration notifiée, le cas échéant après modifications apportées par les entreprises concernées, répond aux exigences de l’article 2, paragraphe 2, dudit règlement, à savoir, que cette opération ne crée pas ou ne renforce pas une position dominante ayant pour conséquence qu’une concurrence effective serait entravée de manière significative dans le marché commun ou une partie substantielle de celui-ci.

88

Un tel contrôle des opérations de concentration nécessite donc une analyse prospective qui consiste à examiner en quoi une telle opération pourrait modifier les facteurs déterminant l’état de la concurrence sur un marché donné afin de vérifier s’il en résulterait une entrave significative à une concurrence effective. Cette analyse prospective requiert d’imaginer les divers enchaînements de cause à effet afin de retenir celui dont la probabilité est la plus forte (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 15 février 2005, Commission/Tetra Laval, C-12/03 P, Rec. p. I-987, point 43).

89

Ainsi, en application de l’article 8, paragraphe 2, du règlement concentration, il a été jugé que la Commission n’est habilitée à déclarer compatible avec le marché commun une opération de concentration comprenant des engagements que si ces engagements lui permettent de conclure que l’opération de concentration ne crée pas ou ne renforce pas une position dominante ayant pour conséquence qu’une concurrence effective sera entravée de manière significative dans le marché commun (arrêts du Tribunal du 25 mars 1999, Gencor/Commission, T-102/96, Rec. p. II-753, point 318, et du 23 février 2006, Cementbouw Handel & Industrie/Commission, T-282/02, Rec. p. II-319, point 294; voir également, en ce sens, arrêt du Tribunal du 21 septembre 2005, EDP/Commission, T-87/05, Rec. p. II-3745, point 63). Il appartient donc à la Commission de démontrer, avec une probabilité suffisante, dans sa décision déclarant une opération de concentration compatible avec le marché commun que cette opération, telle qu’elle a été modifiée par les engagements proposés par les parties à l’opération, ne va pas créer ou renforcer une position dominante ayant pour conséquence qu’une concurrence effective sera entravée de manière significative dans le marché commun ou une partie substantielle de celui-ci. La charge de la preuve qui incombe ainsi à la Commission est toutefois sans préjudice de son pouvoir d’appréciation en ce qui concerne les appréciations économiques complexes (voir, en ce sens, arrêt EDP/Commission, précité, point 63, et la jurisprudence qui y est citée).

90

Il incombe donc au tiers intéressé dont le recours a pour objet l’annulation d’une décision déclarant une opération de concentration assortie d’engagements compatible avec le marché commun de démontrer que la Commission a erronément apprécié ces engagements de telle façon que la compatibilité de l’opération de concentration avec le marché commun est remise en cause.

91

Par ailleurs, il convient de relever que le juge communautaire exerce a priori un entier contrôle sur l’application faite par la Commission des règles en matière de concentration. Toutefois, il a été jugé que les règles de fond du règlement concentration, et en particulier son article 2, confèrent à la Commission une certaine marge d’appréciation, notamment pour ce qui est des appréciations d’ordre économique. En conséquence, le contrôle par le juge communautaire de l’exercice d’un tel pouvoir, qui est essentiel dans la définition des règles en matière de concentration, doit être effectué compte tenu de la marge d’appréciation que sous-tendent les normes de caractère économique faisant partie du régime des concentrations (arrêts de la Cour du 31 mars 1998, France e.a./Commission, dit «Kali & Salz», C-68/94 et C-30/95, Rec. p. I-1375, points 223 et 224, et Commission/Tetra Laval, point 88 supra, point 38; arrêt du Tribunal du 14 décembre 2005, General Electric/Commission, T-210/01, Rec. p. II-5575, point 60).

92

Si le juge communautaire reconnaît à la Commission une marge d’appréciation notamment en matière économique, cela n’implique pas qu’il doit s’abstenir de contrôler l’interprétation, par la Commission, de données de nature économique. En effet, le juge communautaire doit notamment vérifier non seulement l’exactitude matérielle des éléments de preuve invoqués, leur fiabilité et leur cohérence, mais également contrôler si ces éléments constituent l’ensemble des données pertinentes devant être prises en considération pour apprécier une situation complexe et s’ils sont de nature à étayer les conclusions qui en sont tirées (arrêt Commission/Tetra Laval, point 88 supra, point 39).

93

C’est au regard de ces principes régissant les exigences de preuve et la charge de la preuve en matière de concentration ainsi que le degré de contrôle devant être effectué par le juge communautaire dans ce domaine qu’il convient d’apprécier les arguments avancés par les parties dans la présente affaire.

c) Analyse par la Commission de l’opération de concentration et des engagements

94

Aux considérants 19 et suivants de la décision attaquée, il est précisé que Toll Collect a été créée par les entreprises de la concentration, à la suite de l’attribution d’un marché public, afin de percevoir, pour le compte de la République fédérale d’Allemagne, les péages dus par les poids lourds empruntant les autoroutes allemandes. En cette qualité, Toll Collect n’est pas en concurrence avec d’autres prestataires privés.

95

Toutefois, l’unité embarquée de Toll Collect destinée au prélèvement des péages a la capacité de saisir et de fournir des données destinées à des services télématiques. Un tel usage des unités embarquées de Toll Collect ne faisait pas l’objet de la procédure de passation de marché relative au système de prélèvement des péages dus par les poids lourds empruntant les autoroutes allemandes, mais le contrat d’exploitation conclu avec Toll Collect à la suite de cette procédure prévoit que Toll Collect pourra proposer d’autres services télématiques après avoir obtenu de la République fédérale d’Allemagne l’autorisation correspondante. Les entreprises de la concentration ont indiqué vouloir faire usage de cette possibilité afin d’offrir des services télématiques par l’intermédiaire de l’unité embarquée de Toll Collect. La Commission a donc estimé que, puisque l’offre de services télématiques par l’intermédiaire de l’unité embarquée de Toll Collect contribuera à l’objectif d’intérêt général de réduire les goulots d’étranglement dans le réseau de communication, la République fédérale d’Allemagne ne s’opposera pas à l’offre de tels services par l’intermédiaire de l’unité embarquée de Toll Collect et, par conséquent, que l’opération de concentration aura des répercussions dans le domaine du développement, de la fabrication et de la commercialisation des systèmes de télématique routière (considérants 20 à 22 et 47 à 49 de la décision attaquée).

96

Ces systèmes de télématique routière, que la Commission a identifiés comme étant le marché de produits en cause, comprennent le matériel, les logiciels et les services destinés aux entreprises de transport et de logistique. Du point de vue des clients que sont les entreprises de transport, ce marché englobe à la fois les «fournisseurs complets», c’est-à-dire des fournisseurs de logiciels, de matériel et de services télématiques, les «fournisseurs de matériel», c’est-à-dire des fournisseurs qui ne produisent que des terminaux, des logiciels et le matériel s’y rapportant, et les «fournisseurs de services», c’est-à-dire des fournisseurs qui n’offrent que des services de télématique routière (considérants 23 à 32 de la décision attaquée).

97

Après avoir défini le marché géographique en cause comme comprenant le territoire de l’Allemagne, la Commission a procédé à l’appréciation de la concentration au regard du droit de la concurrence en l’absence d’engagements de la part des entreprises à la concentration (considérants 33 à 36 de la décision attaquée).

98

Tout d’abord, la Commission a constaté que l’opération de concentration réunissait, d’une part, le numéro un des constructeurs allemands de poids lourds, DaimlerChrysler, qui, d’après ses propres déclarations, est en outre un des principaux prestataires de services de mobilité et de télématique et, d’autre part, Deutsche Telekom, un des principaux fournisseurs de téléphonie mobile en Allemagne. La Commission a estimé que ces deux entreprises sont dès lors très bien placées pour fournir des services de télématique routière (considérants 39 et 40 de la décision attaquée).

99

Ensuite, la Commission a rappelé, d’une part, que DaimlerChrysler a confirmé son intention d’offrir des services de télématique routière par l’intermédiaire de l’unité embarquée de Toll Collect et, d’autre part, qu’il peut être considéré comme acquis que la République fédérale d’Allemagne donnera l’autorisation nécessaire, en vertu du contrat d’exploitation, pour pouvoir fournir de tels services de télématique routière (considérants 43 à 50 de la décision attaquée).

100

Comme l’unité embarquée de Toll Collect sera fournie gratuitement et qu’elle a un intérêt pratique pour les entreprises de transport, la Commission estime que cette unité embarquée sera installée dans la majeure partie des poids lourds qui empruntent régulièrement les autoroutes allemandes. Le fait que ces unités embarquées, ayant la capacité de fournir des services télématiques, seront remises gratuitement aux assujettis au péage aura pour conséquence que la grande majorité des poids lourds qui seront équipés d’une unité embarquée de Toll Collect l’utiliseront également pour des services de télématique routière. En revanche, la Commission n’estime pas économiquement rationnel, du point de vue des entreprises de transport, d’installer à leurs frais une seconde unité embarquée pour utiliser des services de télématique routière proposés par des fournisseurs concurrents. Cela s’explique, selon la Commission, par les faibles marges avec lesquelles les entreprises de transport travaillent en Allemagne et en Europe (considérants 51 à 54 de la décision attaquée).

101

Par conséquent, la Commission estime que les unités embarquées de Toll Collect engloberont la quasi-totalité du parc de poids lourds en Allemagne et constitueront ainsi une plate-forme dominante sur le marché allemand des systèmes de télématique routière (considérant 56 de la décision attaquée).

102

La création de cette plate-forme dominante entraîne, selon la Commission, le verrouillage du marché allemand des systèmes de télématique routière pour les entreprises de transport et de logistique. Plus particulièrement, les fournisseurs de services de télématique routière deviendront dépendants de l’utilisation de l’unité embarquée de Toll Collect du fait de la création d’une plate-forme dominante pour les services de télématique routière. Les unités embarquées de Toll Collect, en tant que système protégé et fermé, permettront à DaimlerChrysler, par l’intermédiaire de Toll Collect, de contrôler l’accès du futur marché allemand des systèmes de télématique routière (considérants 57 à 59 de la décision attaquée). En outre, la plate-forme Toll Collect entraînera l’éviction des fournisseurs de systèmes télématiques actuellement présents sur le marché. Étant donné que ces unités embarquées disposent des fonctions essentielles qui sont également disponibles dans les systèmes de télématique routière actuellement proposés sur le marché et que ces unités embarquées seront fournies gratuitement, la Commission estime que les entreprises de transport dont les poids lourds ont déjà été équipés d’une unité embarquée de Toll Collect n’achèteront pas «un autre terminal télématique pour utiliser des services de télématique routière supplémentaires allant plus loin que l’unité embarquée [en cause] et offerts par des fournisseurs de systèmes concurrents». Ainsi, l’annonce de la gratuité de la solution télématique développée par Toll Collect a rendu très difficile pour les fournisseurs de systèmes de télématique routière présents sur le marché de capter de nouveaux clients et menace leur pérennité économique. La deuxième génération d’unités embarquées qui sera développée par Toll Collect intensifiera cette éviction eu égard aux nouvelles fonctions de ces unités embarquées (considérants 60 à 65 de la décision attaquée).

103

Partant, la Commission estime que, sans engagements, l’opération de concentration notifiée entraînera la création d’une position dominante de DaimlerChrysler, par l’intermédiaire de l’entreprise commune Toll Collect, sur le marché allemand des systèmes de télématique routière pour entreprises de transport et de logistique, ayant comme conséquence qu’une concurrence effective sera entravée de manière significative dans le marché commun (considérant 66 de la décision attaquée).

104

Cependant, la Commission a estimé que les engagements soumis par les entreprises de la concentration suffisaient à écarter les objections qu’elle avait soulevées (considérant 69 de la décision attaquée).

105

Plus particulièrement, s’agissant de l’engagement relatif au module de perception de péage, la Commission indique, au considérant 70 de la décision attaquée, que l’engagement pris par les parties de développer un module de perception de péage pour les appareils de tiers, d’accompagner l’adaptation de ces appareils aux modules de péage et de donner les autorisations nécessaires à l’utilisation des appareils permettra à des tiers de fabriquer leurs propres équipements télématiques dotés d’une fonction de péage. La Commission précise que le ministère fédéral des Transports, de la Construction et du Logement lui a assuré que les tiers proposant des dispositifs télématiques intégrant le module de perception de péage ne seront pas traités différemment, en ce qui concerne les coûts, que l’exploitant du système de péage pour poids lourds.

106

Au considérant 71 de la décision attaquée, la Commission a estimé que ce seront essentiellement «les constructeurs de poids lourds et leurs équipementiers qui développeront et produiront des équipements télématiques tiers avec module de péage». Compte tenu de ce fait et des résultats d’une consultation des acteurs du marché, la Commission estime qu’il faut «s’attendre à ce que cette possibilité donnée à des tiers d’intégrer un module de péage dans leurs propres équipements empêchera, dans une large mesure, Toll Collect de devenir la plate-forme dominante et le gardien du marché des systèmes télématiques pour entreprises de transport et de logistique en Allemagne».

107

S’agissant de l’engagement relatif à l’interface GPS, la Commission a estimé que la possibilité d’utiliser la fonction GPS de l’unité embarquée de TollCollect permet, selon son étude de marché, aux tiers proposant des dispositifs télématiques d’économiser environ 150 à 200 euros par appareil et leur permet de concourir, malgré la nécessité d’installer un nouveau terminal dans le véhicule, avec les services télématiques proposés par l’intermédiaire de l’unité embarquée de Toll Collect (considérant 72 de la décision attaquée).

108

S’agissant de l’engagement relatif au portail de la TGG, la Commission a estimé qu’il permettait aux tiers proposant des services télématiques d’accéder sans discrimination aux fonctions de base et aux données brutes des unités embarquées de Toll Collect par l’intermédiaire d’un portail télématique central, exploité de manière neutre et indépendante par rapport aux parties à la concentration (considérants 73 et 74 de la décision attaquée).

109

Enfin, la Commission a souligné l’importance du moratoire qualitatif empêchant la plate-forme Toll Collect de devenir la plate-forme dominante sur le marché allemand des systèmes de télématique routière tant que l’engagements relatif à l’interface GPS et l’engagement relatif au module de perception de péage ne sont pas remplis (considérant 76 de la décision attaquée).

110

Au vu de ces éléments, la Commission a considéré que, globalement, les engagements permettront de garantir le maintien de l’ouverture du marché des systèmes de télématique routière en Allemagne ainsi que le maintien de conditions de concurrence similaires pour les parties et les entreprises tierces. Ainsi, pour autant que les parties respectent les engagements, la Commission a estimé que l’opération de concentration notifiée n’entraînera pas la création d’une position dominante de DaimlerChrysler, par l’intermédiaire de Toll Collect, sur le marché allemand des systèmes de télématique routière (considérant 77 de la décision attaquée).

d) Sur le critère d’appréciation des engagements

111

Qualcomm reproche, en substance, à la Commission d’avoir apprécié les engagements sur la base d’un critère erroné lorsqu’elle indique que l’engagement relatif à l’interface GPS et l’engagement relatif au module de perception de péage ne font que limiter le caractère dominant de la plate-forme de Toll Collect.

112

À cet égard, le Tribunal rappelle que, en application du règlement concentration, il n’incombe pas à la Commission d’apprécier si les engagements permettent de limiter l’impact concurrentiel d’une concentration, mais bien d’apprécier si les engagements permettent d’exclure la création ou le renforcement d’une position dominante ayant pour conséquence l’entrave significative d’une concurrence effective dans le marché commun ou une partie substantielle de celui-ci (voir point 89 ci-dessus).

113

Il y a toutefois lieu de considérer, en l’espèce, que le fait que la Commission a considéré que l’engagement relatif à l’interface GPS «limit[ait] encore plus la position dominante que Toll Collect devrait occuper en tant que plate-forme télématique» et que l’engagement relatif au module de perception de péage «empêchera[it], dans une large mesure, Toll Collect de devenir la plate-forme dominante et le gardien du marché des systèmes télématiques pour entreprises de transport et de logistique en Allemagne» (considérants 72 et 71 de la décision attaquée), ne permet pas de considérer que la Commission a fait une appréciation de l’opération de concentration au moyen d’un critère erroné.

114

En effet, contrairement à ce que semble vouloir avancer Qualcomm, les réserves d’un point de vue concurrentiel formulées par la Commission à l’égard de l’opération de concentration n’ont pas pour objectif de déclarer incompatible avec le marché commun une éventuelle position dominante de la plate-forme constituée par les unités embarquées de Toll Collect (ci-après la «plate-forme Toll Collect») en tant que telle, mais se réfèrent à la circonstance que DaimlerChrysler puisse acquérir, par l’intermédiaire des unités embarquées de Toll Collect, une position dominante sur le marché allemand des systèmes de télématique routière (considérants 38 et 66 de la décision attaquée).

115

Les engagements des parties à la concentration que la Commission a considérés comme suffisants afin d’écarter les objections qu’elle avait soulevées visent à exclure la position dominante de DaimlerChrysler sur le marché en cause, premièrement, en limitant la position dominante de la plate-forme Toll Collect au moyen de l’engagement relatif à l’interface GPS et de l’engagement relatif au module de perception de péage, deuxièmement, en garantissant, au moyen de l’engagement relatif au portail de la TGG, un accès ouvert à la plate-forme Toll Collect afin de fournir des services de télématique routière et, troisièmement, en conditionnant la fourniture de services de télématique routière par l’intermédiaire des unités embarquées de Toll Collect au respect du moratoire qualitatif (considérants 70 à 76 de la décision attaquée).

116

Ce n’est qu’en appréciant ces engagements dans leur globalité que la Commission est arrivée à la conclusion que leur respect, par les entreprises de la concentration, n’entraînera pas la création d’une position dominante de DaimlerChrysler, par l’intermédiaire de Toll Collect, sur le marché allemand des systèmes de télématique routière (considérant 77 de la décision attaquée).

117

Il convient, dans ce contexte, de rappeler, d’une part, que Toll Collect n’est chargée que de concevoir et d’exploiter, pour le compte de la République fédérale d’Allemagne, le système de perception de péages dus par les poids lourds empruntant les autoroutes allemandes, de sorte qu’elle n’est pas active sur le marché en cause (considérants 7 et 19 de la décision attaquée), et, d’autre part, que la fourniture gratuite des unités embarquées de TollCollect (considérant 17 de la décision attaquée) était une exigence imposée par la République fédérale d’Allemagne pour l’exploitation, par Toll Collect, du système de péage autoroutier. Il s’ensuit que la création de Toll Collect et la fourniture gratuite des unités embarquées en cause ne pouvaient, en tant que telles, constituer l’objet de l’appréciation de la Commission dans le contexte de la procédure régie par le règlement concentration.

118

Au vu de ce qui précède, il convient de rejeter le grief de Qualcomm selon lequel la Commission aurait apprécié les engagements sur la base d’un critère erroné.

e) Sur l’engagement relatif au module de perception de péage et l’engagement relatif à l’interface GPS

Introduction

119

À titre liminaire, il convient de rappeler que le problème de concurrence identifié par la Commission à la suite de la notification de l’opération de concentration consiste en la création d’une position dominante de DaimlerChrysler, par l’intermédiaire de Toll Collect, sur le marché allemand des systèmes de télématique routière, qui comprend tant la fourniture de services de télématique routière que celle d’équipements permettant la fourniture de tels services.

120

Les engagements des entreprises de la concentration visent tant la fourniture de services de télématique routière que celle d’équipements au moyen desquels des services de télématique routière peuvent être offerts. Ainsi, l’engagement relatif au portail de la TGG, qui garantit un accès non discriminatoire pour les fournisseurs de services télématiques aux fonctions de base et aux données brutes des unités embarquées de Toll Collect, n’a trait qu’à l’offre de services de télématique routière. L’engagement relatif à l’interface GPS et l’engagement relatif au module de perception de péage ont, quant à eux, trait à l’offre d’équipements permettant la fourniture de tels services.

121

Les griefs de Qualcomm portent uniquement sur les engagements ayant trait à la fourniture d’équipements permettant la fourniture de services de télématique routière. En effet, Qualcomm ne conteste pas l’appréciation de l’engagement relatif au portail de la TGG.

122

Enfin, il y a lieu de souligner que c’est en prenant en compte ces engagements globalement que la Commission a considéré qu’ils permettraient de maintenir le marché des systèmes de télématique routière ouvert et de prévenir la création d’une position dominante de DaimlerChrysler, par l’intermédiaire de l’entreprise commune, sur le marché allemand des systèmes de télématique routière (considérant 77 de la décision attaquée).

Sur l’engagement relatif au module de perception de péage

— Introduction

123

En ce qui concerne les griefs avancés par Qualcomm quant à l’engagement relatif au module de perception de péage, il ressort des considérants 70 et 71 de la décision attaquée tels que repris aux points 105 et 106 ci-dessus que cet engagement garantit, de prime abord, aux tiers proposant des systèmes de télématique routière, dont les constructeurs de poids lourds, la possibilité de créer et de mettre sur le marché une unité embarquée susceptible d’être utilisée, comme celle de Toll Collect, pour percevoir des péages. Cet engagement évite aux entreprises de transport voulant utiliser des services de télématique routière autres que ceux offerts par l’intermédiaire des unités embarquées de Toll Collect de procéder à une deuxième installation.

124

Qualcomm estime cependant que cet engagement ne permettra pas aux tiers proposant des systèmes télématiques de faire concurrence à l’unité embarquée de Toll Collect car, d’une part, il n’éliminerait pas l’avantage en matière de prix de l’unité embarquée de Toll Collect qui est fournie gratuitement et, d’autre part, la réalisation, par des tiers, de leur propre unité embarquée avec perception de péage leur causerait des frais supplémentaires. Par ailleurs, Qualcomm met en doute l’affirmation de la Commission selon laquelle les fabricants de camions développeront des terminaux télématiques avec des fonctions de péage intégrées.

— Sur l’avantage tiré de la gratuité de l’unité embarquée de Toll Collect

125

Il est constant que les unités embarquées de Toll Collect seront fournies gratuitement aux entreprises de transport, moyennant le dépôt d’une garantie. Cette fourniture gratuite est une exigence imposée par la République fédérale d’Allemagne à Toll Collect à la suite de l’attribution du marché public en cause aux entreprises de la concentration par la République fédérale d’Allemagne.

126

Il est également constant que, en application du moratoire qualitatif, les unités embarquées de Toll Collect ne pourront être utilisées pour offrir des services de télématique routière qu’à compter du moment où la République fédérale d’Allemagne en donnera l’autorisation. Cette autorisation ne sera donnée que lorsque les entreprises de la concentration rempliront l’ensemble des engagements, dont l’engagement relatif au module de perception de péage.

127

Dans le cadre de la procédure administrative qui a précédé l’adoption de la décision attaquée, la République fédérale d’Allemagne a indiqué dans une lettre adressée à la Commission qu’une intervention financière de sa part au profit des entreprises de la concentration n’irait pas au-delà des coûts nécessaires pour la mise en œuvre de la perception des péages. La République fédérale d’Allemagne a confirmé cette position dans son mémoire en intervention ainsi qu’à l’audience.

128

Par ailleurs, s’agissant des coûts de l’unité embarquée de Toll Collect, la République fédérale d’Allemagne s’est engagée à ne pas traiter différemment les tiers proposant des dispositifs télématiques avec module de perception de péage et l’exploitant du système de péage pour poids lourds (considérant 70 de la décision attaquée). Cet engagement est attesté par la lettre de la République fédérale d’Allemagne à la Commission du 2 avril 2003. En outre, il a été confirmé par la République fédérale d’Allemagne à l’audience.

129

Ainsi, la fourniture gratuite de l’unité embarquée de Toll Collect n’implique nullement un avantage concurrentiel pour DaimlerChrysler au regard des coûts d’exploitation de Toll Collect. L’engagement de la République fédérale d’Allemagne de compenser de façon non discriminatoire le producteur des unités embarquées en cause et les tiers proposant leurs propres systèmes de télématique routière susceptibles d’être utilisés pour percevoir des péages, pour les frais qu’ils exposent pour la perception de péage au moyen de leurs équipements respectifs, a pour conséquence de ne générer aucun avantage concurrentiel pour Toll Collect ou pour DaimlerChrysler par rapport à ces tiers. L’égalité de traitement entre les entreprises de la concentration qui ont chargé Toll Collect de développer l’unité embarquée en cause et les tiers qui conçoivent d’autres unités embarquées à la suite de l’engagement relatif au module de perception de péage est ainsi garantie en ce qui concerne le financement des coûts de ces unités embarquées par la République fédérale d’Allemagne.

130

La Commission a ainsi raisonnablement pu considérer que cet engagement répondait au désavantage concurrentiel identifié dans la décision attaquée selon lequel les entreprises de transport ne seraient pas prêtes à payer pour une deuxième unité embarquée. En effet, en vertu de l’engagement relatif au module de perception de péage, les constructeurs tiers pourront proposer des systèmes télématiques comprenant un module de perception de péage en bénéficiant du même support financier que celui dont bénéficie Toll Collect pour la fourniture gratuite de ses unités embarquées.

131

Enfin et à titre surabondant, il convient de souligner que, même si, dans la décision attaquée, lors de l’appréciation de l’engagement relatif au module de perception de péage, la Commission ne fait pas expressément référence à la différence qualitative entre les services de télématique routière pouvant être offerts par l’intermédiaire de l’unité embarquée de Toll Collect et ceux pouvant être offerts par l’intermédiaire des appareils de tiers, il ressort de la décision attaquée, prise dans son ensemble, que cette différence qualitative est pertinente pour l’appréciation de l’impact concurrentiel de l’opération de concentration.

132

En effet, lors de son appréciation concurrentielle de l’opération de concentration en l’absence d’engagements, la Commission fait référence à cette différence qualitative (considérants 62 à 65 de la décision attaquée). Ainsi, la Commission a indiqué que les services de télématique routière accessibles par l’intermédiaire de l’unité embarquée de Toll Collect ne couvrent pas l’ensemble des services offerts par l’intermédiaire des terminaux télématiques déjà présents sur le marché, mais qu’ils «représentent des fonctions centrales qui font également partie des systèmes actuellement proposés sur le marché». En outre, elle a précisé, eu égard à la fourniture gratuite des unités embarquées de Toll Collect, qu’«[i]l [fallait] s’attendre à ce que les entreprises de transport dont les poids lourds ont déjà été équipés d’une unité embarquée [de Toll Collect] n’achètent pas un autre terminal télématique pour utiliser des services de télématique routière supplémentaires, allant plus loin que l’unité embarquée [en cause] et offerts par des fournisseurs de systèmes concurrents».

133

Or, cette différence qualitative confirme le bien-fondé de l’analyse de la Commission en ce qui concerne l’engagement relatif au module de perception de péage.

134

En effet, le rapport Frost & Sullivan, invoquée par la Commission à l’appui de son argumentation, indique qu’il existait en Europe, au moment de l’appréciation de l’opération de concentration, une demande pour des systèmes permettant l’offre de services de télématique routière plus avancés et confirme l’existence d’une croissance de cette demande pour les années à venir.

135

Par conséquent, la Commission pouvait raisonnablement considérer qu’il existait en Europe, au moment de l’appréciation de l’opération de concentration, une demande pour des systèmes permettant de proposer des services de télématique routière plus avancés et que cette demande était vouée à croître dans les années à venir. Par ailleurs, il est constant que l’unité embarquée de TollCollect n’était initialement susceptible d’être utilisée que pour des services télématiques peu élaborés (considérant 62 de la décision attaquée). Il peut donc être considéré que les fournisseurs complets offrant par l’intermédiaire de leurs systèmes, outre des services de péages, des services télématiques plus élaborés que ceux pouvant être offerts par l’intermédiaire de l’unité embarquée de Toll Collect ont un avantage concurrentiel par rapport aux fournisseurs de services opérant par l’intermédiaire de l’unité embarquée en cause.

136

Cet avantage qualitatif combiné avec la non-discrimination au niveau des coûts des tiers tirant bénéfice de l’engagement relatif au module de perception de péage, permettait à la Commission de considérer, sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation, que «l’engagement relatif au module de perception de péage empêchera[it], dans une large mesure, Toll Collect de devenir la plate-forme dominante et le gardien du marché des systèmes télématiques pour entreprises de transport et de logistique en Allemagne».

— Sur les frais supplémentaires

137

Qualcomm estime que les tiers proposant des systèmes télématiques supporteront des frais supplémentaires comprenant ceux de l’adaptation de leur système afin d’intégrer le module de perception de péage, ceux de la participation au développement et à la fourniture du module (voir clauses du point B.IV.2.4 des engagements) et ceux de la certification de leur système intégrant le module (voir clauses du point B.IV.2.4 des engagements).

138

À cet égard, le Tribunal observe qu’il ressort des engagements pris par les entreprises de la concentration que les unités embarquées de Toll Collect ne peuvent d’emblée fournir des services télématiques. En effet, en vertu des points A.3 et B.II.16.1 de ces engagements il convient d’installer un logiciel supplémentaire sur les unités embarquées en cause pour pouvoir proposer de tels services. Le point A.3 des engagements prévoit en son deuxième paragraphe qu’«[i]l n’est possible de fournir des services à valeur ajoutée directement par [l’intermédiaire] des fonctionnalités [des unités embarquées en cause] [qu’en] dotant [lesdites unités embarquées] d’un logiciel de pilotage supplémentaire (ce qui nécessite une intervention centrale).» Il s’ensuit que l’exploitation des unités embarquées en cause générera également certains frais d’adaptation pour que des entreprises puissent les utiliser comme système de télématique routière. En ce qui concerne les frais de la participation au développement et à la fourniture du module et ceux de la certification de leur système intégrant le module tels que repris dans les clauses du point B.IV.2.4 des engagements, il convient d’indiquer que Qualcomm ne démontre pas que ces frais seraient plus importants que ceux que Toll Collect a dû supporter pour le développement de son propre module de perception de péage. Enfin en tout état de cause, il convient de constater que Qualcomm ne donne aucune indication chiffrée, voire un début d’évaluation, de ces prétendus frais supplémentaires.

139

Par conséquent, Qualcomm n’a pas démontré, à suffisance, que les tiers proposant des systèmes télématiques supporteront des frais supplémentaires en faisant usage de l’engagement relatif au module de perception de péage de nature à remettre en cause l’appréciation de la Commission.

— Sur le développement par les fabricants de camions de terminaux télématiques avec fonction de péage intégrée

140

Qualcomm met également en doute l’affirmation de la Commission selon laquelle les fabricants de camions assumeront probablement la possibilité de développer des terminaux télématiques avec des fonctions de péage intégrées.

141

À cet égard, le Tribunal observe qu’il ressort du rapport Frost & Sullivan que, dès 2000, les fabricants d’équipements d’origine en Europe ont fait installer des systèmes télématiques dans leurs poids lourds lors de leur construction (voir les graphes 3-10 et 3-14 du rapport Frost & Sullivan). En outre, il a été considéré dans ce rapport que les constructeurs de véhicules ont l’intention de développer et de mener le marché télématique des utilitaires et que la combinaison entre la perception de péage électronique et les systèmes télématiques représente une opportunité importante (voir rapport Frost & Sullivan, p. 2-12). Dans ce même rapport, il est indiqué qu’il faut s’attendre à ce que les constructeurs de véhicules fassent du montage d’origine de systèmes de télématique routière une priorité (voir rapport Frost & Sullivan, p. 3-11). Enfin, les auteurs de ce rapport prévoient que, en 2009, les fabricants d’équipements d’origine auront atteint, en Europe, un taux de pénétration proche de 80% sur le marché de la télématique routière pour véhicules commerciaux lourds (d’un poids supérieur à 16 tonnes) et supérieur à 50% pour le marché combiné des véhicules commerciaux lourds et moyens (voir graphes repris aux pages 3-20, 3-21 et 3-22 du rapport Frost & Sullivan).

142

La Commission a donc pu raisonnablement déduire de ce rapport que les constructeurs de poids lourds et leurs équipementiers développeront leurs propres systèmes de télématique routière. En outre, au vu de l’opportunité importante que représente la combinaison entre des systèmes de péages automatiques et des systèmes télématiques, il n’est pas manifestement erroné de considérer que les constructeurs de poids lourds et leurs équipementiers intégreront le système de péage automatique dans leurs systèmes de télématique routière eu égard à l’engagement relatif au module de perception de péage.

143

Qualcomm estime cependant que, d’après son expérience, les gestionnaires de flotte ne sont pas favorables au montage en série de terminaux télématiques sur les poids lourds, car ils utiliseraient différentes marques de véhicules et le montage en série créerait des problèmes d’interopérabilité entre les systèmes montés en série des différents constructeurs, en particulier, au niveau du central du gestionnaire de flotte. En outre, l’installation de différents terminaux rendrait la formation des conducteurs plus compliquée.

144

Ces allégations doivent toutefois être écartées. En effet, il est indiqué dans le rapport Frost & Sullivan que les constructeurs de poids lourds développent des systèmes indépendants des véhicules afin de répondre à la question d’opérateurs ayant une flotte de poids lourds de différentes marques (voir rapport Frost & Sullivan, p. 3-21). Selon ce même rapport, le «standard FMS» est un pas vers des systèmes pouvant opérer sur tous les véhicules avec un degré de sophistication plus élevé. Par ailleurs, rien n’empêcherait les propriétaires de flottes comportant différentes marques d’installer, pour une partie de celles-ci, des équipements additionnels compatibles avec leurs véhicules. En outre et en tout état de cause, force est de constater que Qualcomm n’avance aucun élément démontrant que les gestionnaires de flotte ne sont pas favorables au montage en série de terminaux télématiques sur les poids lourds et que la plupart utilisent différentes marques de véhicules.

145

Partant, la Commission pouvait valablement considérer qu’il peut être envisagé que ce soient essentiellement les constructeurs de poids lourds et leurs équipementiers qui développeront et produiront les équipements télématiques visés par l’engagement relatif au module de perception de péage.

— Conclusion

146

Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, le Tribunal estime qu’il convient de rejeter le grief de Qualcomm tiré d’une erreur manifeste d’appréciation concernant l’engagement relatif au module de perception de péage. En effet, Qualcomm n’a pas démontré que cet engagement ne permettait pas de répondre aux préoccupations concurrentielles de la Commission en ce qui concerne les équipements permettant l’offre de services de télématique routière sur le marché des systèmes de télématique routière.

Sur l’engagement relatif à l’interface GPS

147

Qualcomm estime que l’appréciation faite par la Commission de l’engagement relatif à l’interface GPS est manifestement erronée, car cette interface GPS n’entraînerait aucune économie et, en toute hypothèse, cet avantage n’éliminerait pas l’avantage concurrentiel de l’unité embarquée de Toll Collect.

148

Le Tribunal considère toutefois que, prise dans son ensemble, la décision attaquée répond à suffisance aux préoccupations concurrentielles identifiées par la Commission dans celle-ci et, en particulier, à la préoccupation concurrentielle de Qualcomm eu égard à la fourniture gratuite des unités embarquées de Toll Collect.

149

À cet égard, il convient de rappeler que la fourniture gratuite de l’unité embarquée de Toll Collect constitue une obligation à la charge des entreprises de la concentration à la suite de l’attribution du marché public concerné aux entreprises de la concentration par la République fédérale d’Allemagne que la Commission ne pouvait pas, en tant que telle, remettre en cause dans son analyse de l’opération de concentration (voir point 117 ci-dessus).

150

Cette circonstance, combinée au fait que, au moment de l’appréciation par la Commission de l’opération de concentration, il n’était pas économiquement rationnel pour les entreprises de transport d’installer à leurs frais une deuxième unité embarquée, fait, certes, que l’unité embarquée de Toll Collect devrait occuper une place prépondérante sur le marché allemand des système de télématique routière. Toutefois, comme l’a relevé la Commission dans son appréciation de l’opération de concentration, il ne s’agit là que d’une conséquence directe de l’attribution du marché public concerné par la République fédérale d’Allemagne et non de l’opération de concentration.

151

Par ailleurs, en garantissant au moyen de l’engagement relatif au portail de la TGG — qui n’est pas contesté par Qualcomm en l’espèce — à des tiers la possibilité de fournir à des conditions non discriminatoires leurs propres services de télématique routière par l’intermédiaire de l’unité embarquée de Toll Collect, la Commission s’est assurée que DaimlerChrysler, par l’intermédiaire de Toll Collect, ne puisse pas verrouiller et dominer les services de télématique routière sur le marché en cause.

152

En outre, l’engagement relatif au module de perception de péage, combiné avec l’engagement de non discrimination de la République fédérale d’Allemagne en ce qui concerne sa contribution aux coûts du module de perception de péage, garantit aux tiers de pouvoir offrir leurs propres unités embarquées avec perception de péage dans des conditions concurrentielles. Il convient de rappeler que la gratuité des unités embarquées de Toll Collect ne constitue pas un avantage concurrentiel pour les entreprises de la concentration par rapport à Qualcomm étant donné cet engagement de la République fédérale d’Allemagne (voir points 122 et suivants ci-dessus).

153

Enfin, l’engagement relatif au moratoire qualitatif garantit que l’unité embarquée de Toll Collect ne puisse devenir une plate-forme dominante avant que les tiers n’aient pu bénéficier effectivement de l’engagement relatif à l’interface GPS et de l’engagement relatif au module de perception de péage.

154

Partant, il y a lieu d’estimer que c’est à juste titre que la Commission a considéré que, globalement, c’est-à-dire pris dans leur ensemble, les engagements empêchent que l’opération de concentration entraîne la création d’une position dominante de DaimlerChrysler, par l’intermédiaire de l’entreprise commune Toll Collect, sur le marché des systèmes de télématique routière pour entreprises de transport et de logistique en Allemagne.

155

Par ailleurs, dans la mesure où Qualcomm estime que l’engagement relatif à l’interface GPS n’entraîne aucune économie, il convient d’observer que le considérant 72 la décision attaquée ne précise pas que cette économie de 150 à 200 euros par appareil découle uniquement du prix d’achat des appareils, comme le sous-entend Qualcomm. Or, dans sa défense, la Commission affirme, sans être contredite par Qualcomm, que cette économie couvre également les coûts de l’antenne, du câblage et de l’installation de la fonction GPS devant être supportés par les tiers qui veulent fournir leur propre équipement télématique doté d’une fonction GPS. De plus, il y a lieu de considérer que cette estimation de l’économie des coûts effectuée par la Commission n’est pas erronée au vu des prises de position au cours de la procédure administrative d’opérateurs présents sur le marché. Ainsi, un premier opérateur a estimé qu’une interface GSM et GPS permettrait de réduire de 500 euros environ les coûts du système télématique, un deuxième opérateur a considéré qu’un appareil télématique sans module GPS et GSM ne coûterait que 500 euros et un troisième a affirmé que le coût du module GPS et GSM représentait plus de la moitié du coût de l’unité télématique, lui-même évalué à une somme comprise entre 1000 et 2500 euros dans la décision attaquée (considérant 62 de la décision attaquée). Par ailleurs, le Tribunal considère que la seule circonstance que des tiers proposant des systèmes télématiques par l’intermédiaire de l’interface GPS encourent des frais liés à l’adaptation de leur propre matériel et de l’unité embarquée de Toll Collect afin de pouvoir bénéficier de cette interface ne permet pas d’établir que l’estimation de la Commission est manifestement erronée. En effet, outre le fait que la Commission considère le montant de 150 à 200 euros par appareil comme étant une estimation prudente de l’économie susceptible d’être réalisée du fait de l’engagement relatif à l’interface GPS, Qualcomm admet que les frais devant être supportés pour l’adaptation du matériel des tiers et de l’unité embarquée de Toll Collect afin d’utiliser l’interface GPS ne peuvent actuellement être quantifiés avec un degré suffisant de précision. Enfin, force est de constater que l’affirmation de Qualcomm selon laquelle, en toute hypothèse, le montant total des coûts éliminera probablement totalement les économies réalisées sur une unité GPS n’est nullement étayée et n’est dès lors pas susceptible de remettre en cause l’appréciation de la Commission. Partant, il y a lieu de conclure qu’il ne peut pas être considéré que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en estimant que l’engagement relatif à l’interface GPS peut entraîner des économies allant de 150 à 250 euros par appareil pour les tiers proposant des systèmes télématiques.

156

Dans la mesure où Qualcomm considère que, même si l’engagement relatif à l’interface GPS entraîne des économies allant de 150 à 200 euros par appareil, cet avantage n’est pas susceptible d’éliminer l’avantage concurrentiel des unités embarquées de Toll Collect qui sont fournies gratuitement, il y a lieu de considérer que, pour les motifs repris aux points 148 et suivants ci-dessus, les autres engagements, pris dans leur ensemble, garantissent que l’opération de concentration n’entraîne pas la création d’une position dominante de DaimlerChrysler, par l’intermédiaire de Toll Collect, sur le marché allemand des systèmes de télématique routière.

157

Enfin, dans la mesure où Qualcomm conteste la recevabilité de l’argument de la République fédérale d’Allemagne selon lequel Toll Collect ne serait pas en mesure d’offrir des services télématiques parce qu’elle n’a pas encore obtenu l’autorisation de la République fédérale d’Allemagne pour ce faire, il convient d’observer que, en rappelant qu’elle doit autoriser la fourniture de services de télématique routière par l’intermédiaire de l’unité embarquée de Toll Collect et qu’une telle autorisation n’a, jusqu’à présent, été ni octroyée ni demandée par Toll Collect, la République fédérale d’Allemagne ne fait qu’énoncer une des conditions devant être remplies afin que des services de télématique routière puissent être offerts par l’intermédiaire du l’unité embarquée en cause. Un tel rappel n’est pas irrecevable.

158

Au vu de ce qui précède, le premier moyen avancé par Qualcomm doit être rejeté.

C — Sur le deuxième moyen tiré du détournement de pouvoir

1. Arguments des parties

159

Qualcomm estime que la Commission a commis un détournement de pouvoir en tenant compte, lors de son appréciation de l’opération de concentration, de considérations de politique générale. La Commission aurait ainsi, à tort, pris en compte le fait que le système de Toll Collect représentait une opportunité pour lancer les services de télématique en Allemagne et en Europe et qu’il ne fallait pas ralentir ce lancement.

160

La Commission conteste avoir commis le moindre détournement de pouvoir.

2. Appréciation du Tribunal

161

Selon une jurisprudence constante, la notion de détournement de pouvoir se réfère au fait, pour une autorité administrative, d’avoir usé de ses pouvoirs dans un but autre que celui en vue duquel ils lui ont été conférés. Une décision n’est entachée de détournement de pouvoir que si elle apparaît, sur la base d’indices objectifs, pertinents et concordants, avoir été prise dans le but exclusif, ou à tout le moins déterminant, d’atteindre des fins autres que celles excipées (arrêts de la Cour du 13 novembre 1990, Fedesa e.a., C-331/88, Rec. p. I-4023, point 24, et du 25 janvier 2007, Dalmine/Commission, C-407/04 P, Rec. p. I-829, point 99; arrêt du Tribunal du 6 avril 1995, Ferriere Nord/Commission, T-143/89, Rec. p. II-917, point 68). En cas de pluralité de buts poursuivis, même si un motif non justifié se joint aux motifs valables, la décision ne serait pas pour autant entachée de détournement de pouvoir, dès lors qu’elle ne sacrifie pas le but essentiel (arrêt de la Cour du 21 décembre 1954, Italie/Haute Autorité, 2/54, Rec. p. 73, 103, et arrêt EDP/Commission, point 89 supra, point 87).

162

En l’espèce, Qualcomm ne conteste pas que la décision attaquée ne contient aucune référence à des considérations de politique générale. Qualcomm se limite à indiquer que des considérations politiques ont sous-tendu l’approbation par la Commission des derniers engagements et invoque, à ce propos, les observations du chef de l’équipe de la Commission chargé de l’affaire au cours de l’audition du 20 mars 2003.

163

Les extraits du transcript de l’audition du 20 mars 2003 font apparaître que le représentant de la Commission a fait référence au fait que l’unité embarquée de Toll Collect sera probablement une très grande plate-forme télématique et permettra une plus grande pénétration du marché qu’en l’absence de cette plate-forme. Au vu de ces observations dites «plus stratégiques», le représentant de la Commission a demandé à des acteurs du marché leur observations sur les problèmes générés par Toll Collect, les implications au cas où DaimlerChrysler n’avait pas de contrôle sur cette plate-forme et les possibilités de connecter des équipements plus sophistiqués sur cette plate-forme.

164

Il ne peut toutefois pas être déduit de ces observations que la décision attaquée a été prise, et, en particulier, que les engagements ont été appréciés, dans un but autre que celui de garantir une concurrence effective sur le marché des systèmes de télématique routière. En effet, l’analyse de l’impact concurrentiel d’engagements proposés dans une procédure de concentration implique nécessairement des appréciations de la situation présente et de l’évolution future du marché en cause. Dès lors que la Commission a accepté des engagements garantissant une concurrence effective sur le marché en cause, la circonstance que la Commission ait accepté des engagements entraînant potentiellement un développement du marché en cause par une plus grande pénétration de systèmes de télématique routière ne démontre pas que la Commission a usé de ses pouvoirs dans un but autre que celui pour lesquels ses pouvoirs lui ont été conférés en vertu du règlement concentration.

165

Par ailleurs, le fait que d’autres engagements n’entraînant pas un tel développement du marché auraient également pu être acceptés ne saurait conduire à l’annulation de la décision attaquée dans la mesure où la Commission pouvait conclure que les engagements repris dans cette décision lui permettaient de déclarer la concentration en cause compatible avec le marché commun.

166

En tout état de cause, l’unique circonstance qu’un représentant de la Commission ait interrogé des entreprises concernées par l’opération de concentration en faisant état de possibles développements du marché à la suite de l’ouverture de la plate-forme Toll Collect à des services de télématique routière ne démontre pas que la Commission ait poursuivi l’objectif de ne pas affecter une plus grande pénétration, voire de ne pas retarder le lancement, des systèmes et des services télématiques en Allemagne et, encore moins, que la décision attaquée ait été adoptée sur la base de cet objectif.

167

Qualcomm n’a donc pas démontré, sur la base d’indices objectifs, pertinents et concordants, que la décision attaquée a été prise dans le but d’atteindre des fins autres que celles excipées par le règlement concentration. Partant, il convient de rejeter le deuxième moyen tiré du détournement de pouvoir.

D — Sur le troisième moyen tiré du défaut de motivation

1. Arguments des parties

168

Qualcomm soutient que la Commission a violé l’article 253 CE parce qu’elle n’a pas apporté de motivation suffisante à l’appui de sa conclusion selon laquelle les engagements suffisent pour écarter les objections qu’elle avait soulevées. En se référant à l’arrêt du Tribunal du 22 octobre 2002, Schneider Electric/Commission (T-310/01, Rec. p. II-4071, points 197 et 203), elle estime que la conclusion à laquelle arrive la Commission doit être étayée par une motivation détaillée concernant tous les aspects qu’elle qualifie de pertinents pour son évaluation de l’impact de la concentration sur la concurrence. En outre, les conclusions spécifiques à l’intérieur du raisonnement général doivent présenter une cohérence interne. Elle fait valoir que, en l’espèce, ces exigences n’ont pas été respectées.

169

Qualcomm estime que, lorsque la Commission a déterminé, dans le cadre de son appréciation de l’opération de concentration, si la plate-forme Toll Collect allait devenir la plate-forme dominante sur le marché et si cela allait entraîner la disparition des fournisseurs de systèmes télématiques alternatifs actuellement sur le marché, elle a examiné plusieurs questions détaillées (considérants 38 à 56 et 64 à 65 de la décision attaquée). Toutefois, lorsque la Commission a examiné l’engagement relatif à l’interface GPS et l’engagement relatif au module de perception de péage, elle n’aurait examiné aucune de ces questions.

170

Ainsi, en ce qui concerne l’engagement relatif au module de perception de péage, la Commission se serait contentée, au considérant 71 de la décision attaquée, de déclarer, sans explication à cet égard, que cette possibilité technique empêchait, dans une large mesure, l’unité embarquée de Toll Collect de devenir la plate-forme dominante sur le marché en cause. La même conclusion vaut, selon Qualcomm, pour l’affirmation de la Commission figurant au considérant 72 de la décision attaquée, selon laquelle l’engagement relatif à l’interface GPS permet à des tiers de concourir avec des services télématiques proposés par l’intermédiaire des unités embarquées de Toll Collect. Cette situation serait comparable à celle examinée par la Cour dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 9 janvier 2003, Petrotub et Republica (C-76/00 P, Rec. p. I-79, point 87). Dans cette dernière affaire, la Cour aurait constaté un défaut de motivation sur la base d’une affirmation purement péremptoire qui excluait tout élément d’explication de nature à éclairer les intéressés et le juge communautaire quant aux raisons ayant amené l’auteur aux considérations en cause.

171

En outre, le raisonnement de la Commission ne serait pas cohérent. En effet, aux considérants 62 et 63 de la décision attaquée, elle aurait estimé que l’avantage de l’unité embarquée de Toll Collect en matière de prix se situait entre 1000 et 2500 euros et elle aurait déclaré que les entreprises de transport ne payeraient pas pour des systèmes télématiques alternatifs s’ils pouvaient obtenir des services télématiques par l’intermédiaire des unités embarquées de Toll Collect. Toutefois, lors de l’examen des engagements concernant l’interface GPS, la Commission aurait déclaré qu’une économie de 150 à 200 euros par appareil serait suffisante pour permettre aux systèmes télématiques proposés par des tiers de concurrencer les unités embarquées de Toll Collect. D’après Qualcomm, même si l’unité embarquée de Toll Collect permet de réaliser une économie de 150 à 200 euros par appareil, l’avantage de l’unité embarquée de Toll Collect gratuite reste néanmoins «écrasant».

172

Au stade de la réplique, Qualcomm indique que, si l’interprétation de la Commission selon laquelle les engagements ne viseraient qu’à limiter le caractère dominant de l’unité embarquée de Toll Collect rend la motivation de la décision attaquée plus cohérente, elle est fondée sur des critères erronés. Cela placerait Qualcomm dans un dilemme concernant la motivation de la décision attaquée: soit elle est cohérente, auquel cas elle est fondée sur un critère juridique erroné, soit elle est fondée sur le bon critère juridique, mais elle est manifestement contradictoire.

173

La Commission estime, en substance, que la décision attaquée est suffisamment motivée et qu’elle ne comporte pas de contradiction dès lors qu’elle a seulement prétendu que l’engagement relatif à l’interface GPS et l’engagement relatif au module de perception de péage limiteraient la position dominante de DaimlerChrysler.

2. Appréciation du Tribunal

174

La motivation exigée par l’article 253 CE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle (arrêt de la Cour du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C-367/95 P, Rec. p. I-1719, point 63, et arrêt du Tribunal du 15 mars 2000, Cimenteries CBR e.a./Commission, T-25/95, T-26/95, T-30/95 à T-32/95, T-34/95 à T-39/95, T-42/95 à T-46/95, T-48/95, T-50/95 à T-65/95, T-68/95 à T-71/95, T-87/95, T-88/95, T-103/95 et T-104/95, Rec. p. II-491, point 4725). La question de savoir si la motivation satisfait aux exigences de l’article 253 CE doit être appréciée en fonction de la nature de l’acte en cause et du contexte dans lequel il a été adopté (arrêt de la Cour du 15 avril 1997, Irish Farmers Association e.a., C-22/94, Rec. p. I-1809, point 39).

175

Il s’ensuit que le défaut ou l’insuffisance de motivation constitue un moyen tiré de la violation des formes substantielles, distinct, en tant que tel, du moyen pris de l’inexactitude des motifs de la décision, dont le contrôle relève de l’examen du bien-fondé de cette décision (arrêts du Tribunal du 14 mai 1998, Gruber + Weber/Commission, T-310/94, Rec. p. II-1043, point 41, et BPB de Eendracht/Commission, T-311/94, Rec. p. II-1129, point 66).

176

En l’espèce, il convient de constater à la lecture des considérants 69 et suivants de la décision attaquée que ceux-ci font apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de la Commission.

177

En effet, dans ces différents considérants, la Commission expose pour chacun des engagements leur contenu ainsi que leur impact sur Toll Collect et/ou les services de télématique routière offerts par l’intermédiaire de Toll Collect. En outre, la Commission a conclu, après avoir considéré les engagements dans leur ensemble, que ceux-ci suffisaient à exclure la création d’une position dominante de DaimlerChrysler, par l’intermédiaire de Toll Collect, sur le marché des systèmes de télématique routière en Allemagne.

178

Ainsi qu’il ressort des points 119 et suivants ci-dessus, ces différents considérants ont permis au Tribunal d’exercer son contrôle à la suite de la contestation par Qualcomm de leur caractère bien fondé. Il ne peut dès lors être considéré que la Commission s’est limitée à des déclarations péremptoires ou que les contradictions soulevées par Qualcomm étaient de nature à entraîner un défaut de motivation. Qualcomm admet d’ailleurs elle-même, dans sa réplique, que la motivation de la Commission ne serait pas incohérente dès lors que les engagements relatifs à l’interface GPS ou au module de perception de péage visent seulement à limiter la position dominante de la plate-forme Toll Collect.

179

Enfin, dans la mesure où Qualcomm invoque les points 197 et 203 de l’arrêt Schneider Electric/Commission, point 168 supra, ainsi que des incompréhensions ou des contradictions dans le raisonnement de la Commission dans la décision attaquée, force est de constater que ces éléments ont trait à l’inexactitude des motifs de la Commission dans sa décision attaquée, ce qui relève de l’appréciation du bien-fondé de cette décision et non de sa motivation (voir, en ce qui concerne le bien-fondé, les points 86 et suivants ci-dessus).

180

Il s’ensuit que le moyen tiré du défaut de motivation doit être rejeté comme dénué de fondement.

181

Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de rejeter le recours intenté par Qualcomm.

Sur les dépens

182

Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

183

Qualcomm ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens conformément aux conclusions de la Commission en ce sens.

184

Deutsche Telekom, Daimler, Daimler Financial Services, ayant uniquement souscrit aux demandes de la Commission, mais n’ayant pas expressément conclu à ce que Qualcomm supporte leurs propres dépens, supporteront leurs propres dépens.

185

En application de l’article 87, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement de procédure, les États membres qui sont intervenus au litige supportent leurs dépens. La République fédérale d’Allemagne supportera donc ses propres dépens.

 

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête:

 

1)

Le recours est rejeté.

 

2)

Qualcomm Wireless Business Solutions Europe BV est condamnée à supporter ses propres dépens, ainsi que ceux de la Commission.

 

3)

La République fédérale d’Allemagne supportera ses propres dépens.

 

4)

Deutsche Telekom AG, Daimler AG et Daimler Financial Services AG supporteront leurs propres dépens.

 

Azizi

Cremona

Frimodt Nielsen

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 19 juin 2009.

Signatures

Table des matières

 

Cadre juridique

 

Faits à l’origine du litige

 

Procédure

 

Conclusions des parties

 

En droit

 

I — Sur la recevabilité

 

A — Arguments des parties

 

1. Arguments de la Commission et de la République fédérale d’Allemagne

 

a) Sur la notification de la décision attaquée

 

b) Sur la prise de connaissance

 

2. Arguments de Qualcomm

 

B — Appréciation du Tribunal

 

1. Observations liminaires

 

2. Quant à la publication ou à la notification de la décision attaquée

 

3. Quant à la prise de connaissance de la décision attaquée

 

4. Conclusion

 

II — Sur le fond

 

A — Introduction

 

B — Sur le premier moyen, tiré de l’erreur manifeste d’appréciation, de la constatation erronée des faits et du raisonnement contradictoire en ce qui concerne le caractère approprié des engagements aux fins de résoudre les problèmes de concurrence sur le marché en cause

 

1. Arguments des parties

 

a) Arguments de Qualcomm

 

— Introduction

 

— Sur l’engagement relatif à l’interface GPS

 

— Sur l’engagement relatif au module de perception de péage

 

— Sur le caractère non fondé des arguments avancés par la Commission au cours de la procédure juridictionnelle

 

b) Arguments de la Commission et de la République fédérale d’Allemagne

 

2. Appréciation du Tribunal

 

a) Introduction

 

b) Considérations de principe

 

c) Analyse par la Commission de l’opération de concentration et des engagements

 

d) Sur le critère d’appréciation des engagements

 

e) Sur l’engagement relatif au module de perception de péage et l’engagement relatif à l’interface GPS

 

Introduction

 

Sur l’engagement relatif au module de perception de péage

 

— Introduction

 

— Sur l’avantage tiré de la gratuité de l’unité embarquée de Toll Collect

 

— Sur les frais supplémentaires

 

— Sur le développement par les fabricants de camions de terminaux télématiques avec fonction de péage intégrée

 

— Conclusion

 

Sur l’engagement relatif à l’interface GPS

 

C — Sur le deuxième moyen tiré du détournement de pouvoir

 

1. Arguments des parties

 

2. Appréciation du Tribunal

 

D — Sur le troisième moyen tiré du défaut de motivation

 

1. Arguments des parties

 

2. Appréciation du Tribunal

 

Sur les dépens


( *1 ) Langue de procédure: l’anglais.