ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)
9 novembre 2016 ( *1 )
«Renvoi préjudiciel — Directive 2008/48/CE — Protection des consommateurs — Crédit aux consommateurs — Article 1er, article 3, sous m), article 10, paragraphes 1 et 2, article 22, paragraphe 1, et article 23 — Interprétation des expressions “sur un support papier” et “un autre support durable” — Contrat faisant référence à un autre document — Exigence de la “forme écrite” au sens du droit national — Indication des informations requises par une référence à des paramètres objectifs — Éléments à indiquer dans un contrat de crédit à durée fixe — Conséquences de l’absence des informations obligatoires — Proportionnalité»
Dans l’affaire C‑42/15,
ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par l’Okresný súd Dunajská Streda (tribunal de district de Dunajská Streda, Slovaquie), par décision du 19 décembre 2014, parvenue à la Cour le 2 février 2015, dans la procédure
Home Credit Slovakia a.s.
contre
Klára Bíróová,
LA COUR (troisième chambre),
composée de M. L. Bay Larsen, président de chambre, MM. M. Vilaras, J. Malenovský, M. Safjan (rapporteur) et D. Šváby, juges,
avocat général : Mme E. Sharpston,
greffier : M. M. Aleksejev, administrateur,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 24 février 2016,
considérant les observations présentées :
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pour le gouvernement slovaque, par Mme B. Ricziová, en qualité d’agent, |
— |
pour le gouvernement allemand, par M. T. Henze et Mme J. Kemper, en qualité d’agents, |
— |
pour la Commission européenne, par Mme G. Goddin et M. A. Tokár, en qualité d’agents, |
ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 9 juin 2016,
rend le présent
Arrêt
1 |
La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 1er, de l’article 3, sous m), de l’article 10, paragraphes 1 et 2, de l’article 22, paragraphe 1, ainsi que de l’article 23 de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil (JO 2008, L 133, p. 66, et rectificatifs JO 2009, L 207, p. 14 ; JO 2010, L 199, p. 40 ; JO 2011, L 234, p. 46, et JO 2015, L 36, p. 15). |
2 |
Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Home Credit Slovakia a.s. à Mme Klára Bíróová au sujet d’une demande de paiement de sommes restant dues dans le cadre d’un crédit que cette société avait accordé à cette dernière et pour lequel celle-ci était en défaut de paiement. |
Le cadre juridique
Le droit de l’Union
3 |
Les considérants 7, 9, 10, 19, 30, 31 et 47 de la directive 2008/48 énoncent :
[...]
[...]
[...]
[...]
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4 |
Aux termes de l’article 1er de cette directive, intitulé « Objet » : « La présente directive a pour objet d’harmoniser certains aspects des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de contrats de crédit aux consommateurs. » |
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L’article 3 de ladite directive, intitulé « Définitions », énonce, à son point m) : « Aux fins de la présente directive, on entend par : [...]
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6 |
L’article 10 de la même directive, intitulé « Information à mentionner dans les contrats de crédit », dispose : « 1. Les contrats de crédit sont établis sur un support papier ou sur un autre support durable. Toutes les parties contractantes reçoivent un exemplaire du contrat de crédit. Le présent article s’applique sans préjudice de toutes les règles nationales relatives à la validité de la conclusion des contrats de crédit qui sont conformes au droit communautaire. 2. Le contrat de crédit mentionne, de façon claire et concise :
3. En cas d’application du paragraphe 2, point i), le prêteur met à disposition du consommateur, sans frais et à tout moment durant toute la durée du contrat de crédit, un relevé de compte sous la forme d’un tableau d’amortissement. 4. Dans le cas d’un contrat de crédit en vertu duquel les paiements effectués par le consommateur n’entraînent pas immédiatement un amortissement correspondant du montant total du crédit, mais servent à reconstituer le capital aux périodes et dans les conditions prévues par le contrat de crédit ou par un contrat accessoire, l’information requise en vertu du paragraphe 2 comporte une déclaration claire et concise selon laquelle les contrats de crédit de ce type ne comportent pas de garantie de remboursement du montant total du crédit prélevé au titre de contrat de crédit, sauf si une telle garantie est donnée. [...] » |
7 |
L’article 14 de la directive 2008/48, intitulé « Droit de rétractation », prévoit, à son paragraphe 1 : « Le consommateur dispose d’un délai de quatorze jours calendaires pour se rétracter dans le cadre du contrat de crédit sans donner de motif. Ce délai de rétractation commence à courir :
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8 |
L’article 22 de cette directive, intitulé « Harmonisation et caractère impératif de la présente directive », est libellé comme suit : « 1. Dans la mesure où la présente directive contient des dispositions harmonisées, les États membres ne peuvent maintenir ou introduire dans leur droit national d’autres dispositions que celles établies par la présente directive. [...] 3. Les États membres veillent, en outre, à ce que les dispositions qu’ils adoptent pour la mise en œuvre de la présente directive ne puissent être contournées par le biais du libellé des contrats, notamment en intégrant des prélèvements ou des contrats de crédit relevant du champ d’application de la présente directive dans des contrats de crédit dont le caractère ou le but permettrait d’éviter l’application de celle-ci. [...] » |
9 |
L’article 23 de ladite directive, intitulé « Sanctions », prévoit : « Les États membres définissent le régime de sanctions applicables en cas de violation des dispositions nationales adoptées conformément à la présente directive, et prennent toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte qu’elles soient appliquées. Les sanctions doivent être effectives, proportionnées et dissuasives. » |
10 |
L’annexe II de la directive 2008/48 portant sur les « Informations européennes normalisées en matière de crédit aux consommateurs » contient, à son point 2, intitulé « Description des principales caractéristiques du produit de crédit », une rubrique dénommée « Les versements échelonnés et, le cas échéant, l’ordre selon lequel ces versements seront répartis ». À cette rubrique correspond la description suivante : « Vous devrez payer ce qui suit : [Le montant, le nombre et la fréquence des paiements que le consommateur doit effectuer] Les intérêts et/ou les frais seront dus de la façon suivante : » |
Le droit slovaque
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La zákon č. 129/2010 Z. z. o spotrebiteľských úveroch a o iných úveroch a pôžičkách pre spotrebiteľov a o zmene a doplnení niektorých zákonov (loi no 129/2010 relative aux crédits à la consommation et aux autres crédits et prêts consentis aux consommateurs et modifiant certaines autres lois), dans sa version applicable au litige au principal (ci-après la « loi no 129/2010 »), vise à transposer en droit slovaque la directive 2008/48. |
12 |
Aux termes de l’article 9 de cette loi : « 1. Le contrat de crédit à la consommation doit être établi par écrit. Toutes les parties au contrat en reçoivent au moins un exemplaire sur papier ou sur un autre support durable, qui est à la disposition du consommateur. 2. Outre les mentions générales figurant dans le code civil [...], le contrat de crédit à la consommation doit contenir les éléments suivants : [...]
[...] » |
13 |
L’article 11, paragraphe 1, de ladite loi dispose : « Le crédit à la consommation consenti est réputé exempt d’intérêts et de frais si :
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14 |
L’article 40 de l’Občiansky zákonník (code civil) prévoit : « 1. Un acte juridique est nul s’il n’est pas établi sous la forme requise par la loi ou l’accord des parties. [...] 3. Tout acte juridique établi par écrit est valable s’il est signé par son auteur. Si plusieurs personnes participent à son élaboration, la signature de tous les participants ne doit pas nécessairement figurer sur le même document, à moins que la réglementation n’en dispose autrement. La signature peut être remplacée par des moyens électroniques dans les cas où l’usage le prévoit. 4. L’exigence de la forme écrite est respectée si l’acte juridique est accompli au moyen de télex, de télégrammes ou en ayant recours à des moyens électroniques permettant de matérialiser le contenu de l’acte juridique et d’identifier la personne qui en est à l’origine. L’exigence de la forme écrite est toujours respectée si l’acte juridique accompli en ayant recours à des moyens électroniques est revêtu d’une signature électronique avancée. [...] » |
15 |
Aux termes de l’article 46, paragraphe 2, du code civil : « La conclusion d’un contrat sous forme écrite implique uniquement l’existence d’une offre et d’une acceptation écrite. [...] » |
16 |
L’article 273 de l’Obchodný zákonník (code de commerce) est libellé comme suit : « 1. Une partie des clauses du contrat peut être déterminée par renvoi aux conditions générales du contrat rédigées par des organisations professionnelles ou d’intérêts, ou encore à d’autres conditions commerciales, qui sont connues des parties au contrat à conclure ou jointes à l’offre. [...] 3. Pour la conclusion d’un contrat, il est possible de recourir à un contrat type utilisé dans la pratique commerciale. » |
Le litige au principal et les questions préjudicielles
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Le 29 juin 2011, Home Credit Slovakia, en qualité de prêteur, a conclu avec Mme Bíróová, l’emprunteur, un contrat de crédit établi sur la base d’un formulaire type contenant des cases remplies à la date de l’octroi du prêt. |
18 |
Il ressort de la décision de renvoi que ces cases contenaient des informations portant, notamment, sur les données personnelles de l’emprunteur ainsi que sur son emploi, y compris son revenu. En outre, les données concernant le crédit même ainsi que la mise à disposition des fonds ont été spécifiées, à savoir notamment le montant total du crédit et le montant total dû par le consommateur, le montant des versements mensuels, le nombre de mensualités et les délais de paiement des échéances de remboursement du crédit, le taux débiteur, ainsi que le délai de remboursement intégral du crédit, à savoir 36 mois après la date de son octroi. Le taux annuel effectif global estimé étant situé entre 35 % et 37,5 %, son montant exact devrait être spécifié après l’octroi du crédit. |
19 |
Le montant total du crédit en cause s’élevant à 700 euros, le montant total dû par l’emprunteur a été fixé dans le contrat à 1087,56 euros. |
20 |
En outre, ce contrat prévoyait que le document intitulé « Conditions du contrat de prêt de la société Home Credit Slovakia a.s. – Prêt d’argent » (ci-après les « conditions générales ») faisait partie intégrante dudit contrat. |
21 |
Le contrat de crédit ainsi rédigé a été signé par Home Credit Slovakia et Mme Bíróová. Par ailleurs, selon les termes de ce contrat, cette dernière confirmait, par sa signature, qu’elle avait reçu les conditions générales, qu’elle en avait pris connaissance, que les clauses contenues dans ces conditions générales étaient claires et suffisamment précises et qu’elle marquait son accord pour être liée par lesdites conditions générales. |
22 |
Les conditions générales, quant à elles, n’ont pas été signées par les parties au contrat de crédit. |
23 |
Selon les termes de ces conditions générales, l’emprunteur pouvait demander au prêteur de mettre à sa disposition, sans frais et à tout moment pendant la durée du contrat de crédit, un relevé de compte sous la forme d’un tableau d’amortissement indiquant les paiements dus ainsi que les périodes et les conditions de paiement de ces montants, y compris la ventilation de chaque remboursement entre l’amortissement du capital, les intérêts et, le cas échéant, les coûts additionnels. |
24 |
Cependant, lesdites conditions générales ne précisaient pas les proportions dans lesquelles chaque versement mensuel effectué par l’emprunteur à titre de remboursement de prêt serait destiné, d’une part, à payer les intérêts et les frais et, d’autre part, à amortir le capital. |
25 |
Après avoir payé deux mensualités, Mme Bíróová a cessé de rembourser le crédit accordé. Par conséquent, Home Credit Slovakia a demandé le remboursement anticipé de la totalité du crédit et a invité Mme Bíróová à payer le capital, les intérêts moratoires et les pénalités de retard prévues par le contrat de crédit. |
26 |
N’ayant pas obtenu le paiement demandé, Home Credit Slovakia a introduit un recours devant la juridiction de renvoi aux fins du recouvrement de sa créance. À cet égard, cette juridiction émettant des doutes sur la validité du contrat de crédit dans la mesure où ses conditions générales n’ont pas été signées par les parties, elle estime que la solution du litige dépend de l’interprétation de la directive 2008/48. |
27 |
Dans ces conditions, l’Okresný súd Dunajská Streda (tribunal de district de Dunajská Streda, Slovaquie) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :
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Sur les questions préjudicielles
Sur les première et deuxième questions
28 |
Par ses première et deuxième questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 10, paragraphes 1 et 2, de la directive 2008/48, lu en combinaison avec l’article 3, sous m), de cette directive, doit être interprété en ce sens que, en premier lieu, tous les éléments du contrat de crédit visés à l’article 10, paragraphe 2, de ladite directive doivent être contenus dans un seul document, que, en deuxième lieu, le contrat de crédit établi sur un support papier doit être signé par les parties et que, en troisième lieu, cette exigence de signature s’applique à tous les éléments d’un tel contrat. |
29 |
À cet égard, il convient, en premier lieu, de rappeler que, aux termes de l’article 10, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive 2008/48, les contrats de crédit sont établis sur un support papier ou sur un autre support durable. |
30 |
Rien dans ladite directive n’indique, toutefois, que les contrats de crédit, visés à cette disposition, doivent être établis dans un seul document. |
31 |
Ainsi qu’il ressort de l’article 10, paragraphe 2, de la directive 2008/48, lu à la lumière du considérant 31 de cette directive, l’exigence de mentionner, dans un contrat de crédit établi sur un support papier ou sur un autre support durable, de façon claire et concise, les éléments visés par cette disposition est nécessaire afin que le consommateur soit en mesure de connaître ses droits et ses obligations. |
32 |
Cette exigence contribue à la réalisation de l’objectif poursuivi par la directive 2008/48, qui consiste à prévoir, en matière de crédit aux consommateurs, une harmonisation complète et impérative dans un certain nombre de domaines clés, laquelle est considérée comme nécessaire pour assurer à tous les consommateurs de l’Union un niveau élevé et équivalent de protection de leurs intérêts et pour faciliter l’émergence d’un marché intérieur performant du crédit à la consommation (voir, en ce sens, arrêt du 21 avril 2016, Radlinger et Radlingerová, C‑377/14, EU:C:2016:283, point 61). |
33 |
Si, au regard de cet objectif, tous les éléments visés à l’article 10, paragraphe 2, de la directive 2008/48 ne doivent pas nécessairement être inclus dans un seul document, il importe, toutefois, d’observer que, compte tenu du paragraphe 1 de cet article, tous les éléments que ce paragraphe 2 énumère doivent être établis sur un support papier ou sur un autre support durable et faire partie intégrante du contrat de crédit. |
34 |
Dans la mesure où les éléments visés à l’article 10, paragraphe 2, de la directive 2008/48 doivent être mentionnés de façon claire et concise, il est nécessaire, ainsi que l’a relevé en substance Mme l’avocat général au point 52 de ses conclusions, que le contrat de crédit contienne un renvoi clair et précis aux autres supports papier ou aux autres supports durables contenant ces éléments, effectivement remis au consommateur préalablement à la conclusion du contrat, de manière à lui permettre de connaître réellement l’ensemble de ses droits et de ses obligations. |
35 |
En effet, en se référant, notamment, à la définition de « support durable » contenue à l’article 3, sous m), de la directive 2008/48, la Cour a jugé que ce support doit garantir au consommateur, de manière analogue à un support papier, la possession des informations concernées pour lui permettre de faire valoir, le cas échéant, ses droits. Est pertinente à cet égard la possibilité, pour le consommateur, de stocker les informations qui lui ont été adressées personnellement, la garantie de l’absence d’altération de leur contenu ainsi que leur accessibilité pendant une durée appropriée, et la possibilité de les reproduire telles quelles [voir en ce sens, en ce qui concerne la directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil, du 20 mai 1997, concernant la protection des consommateurs en matière de contrats à distance (JO 1997, L 144, p. 19), arrêt du 5 juillet 2012, Content Services,C‑49/11, EU:C:2012:419, points 42 à 44]. |
36 |
S’agissant, en deuxième lieu, de la question de savoir si le contrat de crédit établi sur un support papier doit être signé par les parties selon les modalités prévues par le droit de l’État membre concerné, il convient de relever que l’article 10, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive 2008/48 n’opère aucun renvoi au droit national et que, dès lors, les notions de « support papier » et de « support durable », visées à cette disposition ont une portée autonome. Leur interprétation ne saurait être déterminée par les dispositions nationales relatives à la forme sous laquelle les contrats de crédit doivent être établis. |
37 |
Alors que la notion de « support papier » n’est pas définie par cette directive, celle-ci prévoit, à son article 3, sous m), que le « support durable » signifie tout instrument permettant au consommateur de stocker des informations qui lui sont adressées personnellement, d’une manière qui permet de s’y reporter aisément à l’avenir pendant un laps de temps adapté aux fins auxquelles les informations sont destinées et qui permet la reproduction à l’identique des informations stockées. |
38 |
Il ressort des termes mêmes de l’article 10, paragraphe 1, de la directive 2008/48 que la notion de « support papier » se réfère au moyen sur lequel le contrat de crédit est établi, sans que la signature d’un tel support soit exigée. Cela étant, la juridiction de renvoi cherche, plus précisément, à savoir si cette directive s’oppose à ce qu’un État membre prévoie une telle exigence dans sa réglementation nationale. |
39 |
À cet égard, il importe de rappeler que, aux termes de l’article 10, paragraphe 1, second alinéa, de la directive 2008/48, cet article s’applique sans préjudice de toutes les règles nationales relatives à la validité de la conclusion des contrats de crédit qui sont conformes au droit de l’Union. |
40 |
L’exigence d’une signature par les parties d’un contrat de crédit établi sur un support papier, posée, ainsi qu’il ressort notamment du point 26 du présent arrêt, par le droit national en cause au principal en tant que condition de validité du contrat, relève d’une règle nationale relative à la validité de la conclusion des contrats de crédit, au sens de ladite disposition de la directive 2008/48. |
41 |
Or, ni la directive 2008/48, qui vise à prévoir, en matière de crédit aux consommateurs, une harmonisation complète et impérative dans un certain nombre de domaines clés, laquelle est considérée comme nécessaire pour assurer à tous les consommateurs de l’Union un niveau élevé et équivalent de protection de leurs intérêts et pour faciliter l’émergence d’un marché intérieur performant du crédit à la consommation (voir, en ce sens, arrêts du 27 mars 2014, LCL Le Crédit Lyonnais,C‑565/12, EU:C:2014:190, point 42 ; du 18 décembre 2014, CA Consumer Finance,C‑449/13, EU:C:2014:2464, point 21, ainsi que du 21 avril 2016, Radlinger et Radlingerová, C‑377/14, EU:C:2016:283, point 61), ni le droit de l’Union en général ne s’opposent à cette exigence. |
42 |
S’agissant, en troisième lieu, de la question de savoir si cette exigence de signature, prévue par la réglementation nationale, peut s’appliquer à tous les éléments de tels contrats, il importe d’observer que le « contrat de crédit », au sens de l’article 3, sous c), de la directive 2008/48, établi, conformément à l’article 10, paragraphe 1, de cette directive, sur un support papier ou sur un autre support durable doit mentionner, de façon claire et précise, les éléments visés à l’article 10, paragraphe 2, de ladite directive. |
43 |
Par conséquent, ainsi que l’a relevé Mme l’avocat général au point 35 de ses conclusions, tous ces éléments doivent obligatoirement être inclus dans un tel contrat. |
44 |
Dans ces conditions, lorsqu’un État membre prévoit dans sa réglementation nationale que l’exigence de signature s’applique à l’égard de tous les éléments de ce contrat, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier, ni la directive 2008/48 ni le droit de l’Union en général ne s’opposent à cette exigence. |
45 |
Eu égard à l’ensemble de ces considérations, il convient de répondre aux première et deuxième questions que l’article 10, paragraphes 1 et 2, de la directive 2008/48, lu en combinaison avec l’article 3, sous m), de cette directive, doit être interprété en ce sens que :
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Sur les troisième et quatrième questions
46 |
Par ses troisième et quatrième questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 10, paragraphe 2, sous h), de la directive 2008/48 doit être interprété en ce sens qu’il est nécessaire que le contrat de crédit indique chaque paiement à effectuer par le consommateur par référence à une date précise, ou bien qu’est suffisante à cet égard une référence générale, dans ce contrat, permettant d’identifier les dates de ces paiements. |
47 |
À cet égard, il convient de rappeler que, aux termes de cette disposition, le contrat de crédit mentionne, de façon claire et concise, le montant, le nombre et la périodicité des paiements à effectuer par le consommateur et, le cas échéant, l’ordre dans lequel les paiements seront affectés aux différents soldes dus fixés à des taux débiteurs différents aux fins du remboursement. |
48 |
Ainsi que l’a relevé Mme l’avocat général au point 55 de ses conclusions, l’objectif de ladite disposition est de garantir que le consommateur connaisse la date à laquelle chaque paiement à effectuer est exigible. |
49 |
Par conséquent, dès lors que les conditions de ce contrat permettent au consommateur d’identifier sans difficulté et avec certitude les dates de ces paiements, cet objectif est satisfait. |
50 |
Dans ces conditions, il convient de répondre aux troisième et quatrième questions que l’article 10, paragraphe 2, sous h), de la directive 2008/48 doit être interprété en ce sens qu’il n’est pas nécessaire que le contrat de crédit indique chaque échéance des paiements à effectuer par le consommateur par référence à une date précise, pour autant que les conditions de ce contrat permettent à ce consommateur d’identifier sans difficulté et avec certitude les dates de ces paiements. |
Sur les cinquième et sixième questions
51 |
Par ses cinquième et sixième questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 10, paragraphe 2, sous h) et i), de la directive 2008/48 doit être interprété en ce sens que le contrat de crédit à durée fixe, prévoyant l’amortissement du capital par les paiements consécutifs, doit préciser, sous la forme d’un tableau d’amortissement, quelle part de chaque paiement sera affectée au remboursement de ce capital et, en cas de réponse négative à cette question, si, au regard de l’article 22, paragraphe 1, de cette directive, ces dispositions s’opposent à ce qu’un État membre prévoie une telle obligation dans sa réglementation nationale. |
52 |
Afin de répondre à ces questions, il convient de relever que, ainsi qu’il a été rappelé au point 47 du présent arrêt, l’article 10, paragraphe 2, sous h), de cette directive prévoit que le contrat de crédit doit mentionner seulement le montant, le nombre et la périodicité des paiements à effectuer par le consommateur et, le cas échéant, l’ordre dans lequel les paiements seront affectés aux différents soldes dus fixés à des taux débiteurs différents aux fins du remboursement. |
53 |
Il ressort de l’article 10, paragraphe 2, sous i), et paragraphe 3, de ladite directive que c’est seulement à la demande du consommateur faite à tout moment au cours de la durée du contrat que le prêteur a l’obligation de lui transmettre sans frais un relevé sous la forme d’un tableau d’amortissement. |
54 |
Compte tenu du libellé clair de ces dispositions, il convient de constater que la directive 2008/48 ne prévoit pas d’obligation d’inclure dans le contrat de crédit un tel relevé sous la forme d’un tableau d’amortissement. |
55 |
S’agissant de la faculté, pour les États membres, de prévoir une telle obligation dans leur réglementation nationale, il importe de souligner que, en ce qui concerne les contrats qui relèvent du champ d’application de la directive 2008/48, les États membres ne sauraient adopter des obligations pour les parties au contrat non prévues par cette directive lorsque celle-ci contient des dispositions harmonisées dans la matière visée par ces obligations (voir, par analogie, arrêt du 12 juillet 2012, SC Volksbank România,C‑602/10, EU:C:2012:443, points 63 et 64). |
56 |
Or, il y a lieu de constater que l’article 10, paragraphe 2, de la directive 2008/48 procède à une telle harmonisation en ce qui concerne les éléments qui doivent obligatoirement être inclus dans le contrat de crédit. |
57 |
Certes, aux termes de l’article 10, paragraphe 2, sous u), de cette directive, le contrat de crédit doit mentionner, de façon claire et concise, le cas échéant, les autres clauses et conditions contractuelles. Toutefois, l’objectif de cette disposition est de prévoir l’obligation d’inclure dans le contrat, établi sur un support papier ou sur un autre support durable, toute clause et toute condition qui ont été convenues entre les parties dans le cadre de leur relation contractuelle portant sur le crédit. |
58 |
Ladite disposition ne saurait, cependant, être interprétée comme autorisant les États membres à prévoir dans leurs réglementations nationales l’obligation d’inclure dans un contrat de crédit des éléments autres que ceux énumérés à l’article 10, paragraphe 2, de ladite directive.. |
59 |
Il convient, dès lors, de répondre aux cinquième et sixième questions que l’article 10, paragraphe 2, sous h) et i), de la directive 2008/48 doit être interprété en ce sens que le contrat de crédit à durée fixe, prévoyant l’amortissement du capital par les paiements consécutifs, ne doit pas préciser, sous la forme d’un tableau d’amortissement, quelle part de chaque paiement sera affectée au remboursement de ce capital. Ces dispositions, lues en combinaison avec l’article 22, paragraphe 1, de cette directive, s’opposent à ce qu’un État membre prévoie une telle obligation dans sa réglementation nationale. |
Sur la septième question
60 |
Par sa septième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 23 de la directive 2008/48 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à ce qu’un État membre prévoie, dans sa réglementation nationale, que, dans le cas où un contrat de crédit ne mentionnerait pas tous les éléments requis à l’article 10, paragraphe 2, de cette directive, ce contrat serait réputé exempt d’intérêts et de frais. |
61 |
À cet égard, il convient, d’emblée, de rappeler que, aux termes de l’article 23 de la directive 2008/48, les États membres définissent le régime de sanctions applicables en cas de violation des dispositions nationales adoptées conformément à cette directive, et prennent toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte qu’elles soient appliquées. |
62 |
Toutefois, il ressort du considérant 47 de ladite directive que, si le choix dudit régime de sanctions est laissé à la discrétion des États membres, celles-ci doivent être effectives, proportionnées et dissuasives (voir, en ce sens, arrêt du 27 mars 2014, LCL Le Crédit Lyonnais,C‑565/12, EU:C:2014:190, point 43). |
63 |
La Cour a déjà jugé que la rigueur des sanctions doit être en adéquation avec la gravité des violations qu’elles répriment, notamment en assurant un effet réellement dissuasif, tout en respectant le principe général de proportionnalité (voir arrêt du 27 mars 2014, LCL Le Crédit Lyonnais,C‑565/12, EU:C:2014:190, point 45 et jurisprudence citée). |
64 |
À cet égard, dans l’arrêt du 27 mars 2014, LCL Le Crédit Lyonnais (C‑565/12, EU:C:2014:190), la Cour a déjà apprécié le respect de telles limites imposées au régime de sanctions défini par un État membre, en l’occurrence en ce qui concerne la sanction par la déchéance, en principe entière, du droit aux intérêts du prêteur dans le cas d’une violation de l’obligation précontractuelle, prévue à l’article 8 de la directive 2008/48, de vérification par le prêteur de la solvabilité du consommateur. |
65 |
Eu égard à l’importance de l’objectif de protection des consommateurs inhérent à l’obligation de vérification, par le prêteur, de la solvabilité de l’emprunteur, la Cour a jugé que, si la sanction par la déchéance des intérêts se trouvait affaiblie, voire purement et simplement annihilée, il en découlerait nécessairement que celle-ci ne présente pas un caractère véritablement dissuasif (voir, en ce sens, arrêt du 27 mars 2014, LCL Le Crédit Lyonnais,C‑565/12, EU:C:2014:190, points 52 et 53). |
66 |
S’agissant de l’omission, dans un contrat de crédit, de la mention de certaines informations relatives aux conditions de remboursement et aux frais liés à ce crédit, la Cour a également jugé que, eu égard à l’objectif de protection du consommateur, poursuivi par la directive 87/102/CEE du Conseil, du 22 décembre 1986, relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de crédit à la consommation (JO 1987, L 42, p. 48), telle que modifiée par la directive 98/7/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 février 1998 (JO 1998, L 101, p. 17) (ci-après la « directive 87/102 »), contre des conditions de crédit inéquitables et afin de lui permettre d’avoir une entière connaissance des conditions de l’exécution future du contrat souscrit, lors de la conclusion de celui-ci, l’article 4 de ladite directive exigeait que l’emprunteur détienne l’ensemble des éléments susceptibles d’avoir une incidence sur la portée de son engagement (voir arrêt du 9 juillet 2015, Bucura, C‑348/14, non publié,EU:C:2015:447, point 57). |
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Ainsi, la mention du taux annuel effectif global dans le contrat de crédit a été jugée comme revêtant une importance essentielle dans le contexte de la directive 87/102, notamment dans la mesure où elle permet au consommateur d’apprécier la portée de son engagement (voir, en ce sens, ordonnance du 16 novembre 2010, Pohotovosť,C‑76/10, EU:C:2010:685, points 70 et 71). |
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Or, la directive 87/102 a été interprétée en ce sens qu’elle permettait au juge national d’appliquer d’office les dispositions transposant en droit interne l’article 4 de cette directive et prévoyant que l’absence de mention du taux annuel effectif global dans un contrat de crédit à la consommation avait pour conséquence que le crédit consenti était réputé exempt d’intérêts et de frais (voir, en ce sens, ordonnance du 16 novembre 2010, Pohotovosť,C‑76/10, EU:C:2010:685, point 76). |
69 |
À la lumière de la jurisprudence visée aux points 63 à 68 du présent arrêt, il convient de constater que la violation, par le prêteur, de l’obligation revêtant une importance essentielle dans le contexte de la directive 2008/48 peut être sanctionnée, conformément à la réglementation nationale, par la déchéance de ce prêteur du droit aux intérêts et aux frais. |
70 |
Revêt une telle importance essentielle l’obligation de mentionner, dans le contrat de crédit, notamment des éléments tels que le taux annuel effectif global, visé à l’article 10, paragraphe 2, sous g), de la directive 2008/48, le nombre et la périodicité des paiements, conformément à l’article 10, paragraphe 2, sous h), de cette directive, ainsi que, le cas échéant, l’existence des frais notariaux, les sûretés et les assurances exigées, comme le prévoit l’article 10, paragraphe 2, sous n) et o), de ladite directive. |
71 |
Dans la mesure où l’absence de mention, dans le contrat de crédit, de ces éléments est susceptible de mettre en cause la possibilité pour le consommateur d’apprécier la portée de son engagement, la sanction par la déchéance du prêteur de son droit aux intérêts et aux frais, prévue par la réglementation nationale, doit être considérée comme étant proportionnée, au sens de l’article 23 de la directive 2008/48 et de la jurisprudence rappelée au point 63 du présent arrêt. |
72 |
Cependant, ne saurait être considérée comme proportionnée l’application, conformément à cette réglementation nationale, d’une telle sanction, produisant des conséquences sérieuses à l’égard du prêteur, en cas d’absence de mention d’éléments, parmi ceux visés à l’article 10, paragraphe 2, de la directive 2008/48, qui, par leur nature, ne sont pas susceptibles d’affecter la capacité du consommateur d’apprécier la portée de son engagement, tels que, notamment, le nom et l’adresse de l’autorité de surveillance compétente visée à l’article 10, paragraphe 2, sous v), de cette directive. |
73 |
Dans ces conditions, il convient de répondre à la septième question que l’article 23 de la directive 2008/48 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à ce qu’un État membre prévoie, dans sa réglementation nationale, que, dans le cas où un contrat de crédit ne mentionnerait pas tous les éléments requis à l’article 10, paragraphe 2, de cette directive, ce contrat est réputé exempt d’intérêts et de frais, pour autant qu’il s’agisse d’un élément dont l’absence est susceptible de mettre en cause la possibilité pour le consommateur d’apprécier la portée de son engagement. |
Sur les dépens
74 |
La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement. |
Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) dit pour droit : |
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Signatures |
( *1 ) Langue de procédure : le slovaque.