CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M ME ELEANOR SHARPSTON

présentées le 6 février 2014 ( 1 )

Affaire C‑398/12

Procura della Repubblica

contre

M

[demande de décision préjudicielle formée par le Tribunale di Fermo (Italie)]

«Article 54 de la convention d’application de l’accord de Schengen — Principe ne bis in idem — Décision de non-lieu éteignant l’action publique contre une même personne pour les mêmes faits — Non-lieu sous réserve de la survenance de charges nouvelles — Poursuites pénales dans un autre État membre en raison d’une infraction découlant des mêmes faits»

1. 

À la suite d’une instruction pénale approfondie, les autorités judiciaires d’un État membre (Royaume de Belgique) ont rejeté une demande de renvoi en jugement de la personne mise en examen (l’inculpé) et ont prononcé, à la place du renvoi, un non-lieu ( 2 ). Cette décision a effectivement mis fin aux poursuites (éventuelles) avant le procès, mais, selon le droit national, elle peut être écartée à la lumière de charges nouvelles. Par sa demande de décision préjudicielle, le Tribunale di Fermo (Italie) demande si, en vertu de l’article 54 de la convention d’application de l’accord de Schengen, signée à Schengen le 19 juin 1990 (ci‑après la «CAAS») ( 3 ), le principe ne bis in idem s’oppose à ce que cette personne soit poursuivie devant les juridictions pénales d’un autre État membre pour une infraction découlant des mêmes faits.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

2.

L’article 3, paragraphe 2, TUE dispose:

«L’Union offre à ses citoyens un espace de liberté, de sécurité et de justice sans frontières intérieures, au sein duquel est assurée la libre circulation des personnes, en liaison avec des mesures appropriées en matière de contrôle des frontières extérieures, d’asile, d’immigration ainsi que de prévention de la criminalité et de lutte contre ce phénomène.»

3.

L’article 67, paragraphe 1, TFUE prévoit:

«L’Union constitue un espace de liberté, de sécurité et de justice dans le respect des droits fondamentaux et des différents systèmes et traditions juridiques des États membres.»

4.

Selon le deuxième alinéa du préambule du protocole no 19 au TFUE ( 4 ), les parties contractantes veulent préserver l’acquis de Schengen et «développer cet acquis pour contribuer à la réalisation de l’objectif visant à offrir aux citoyens de l’Union un espace de liberté, de sécurité et de justice sans frontières intérieures».

5.

Conformément à l’article 2 de ce protocole, l’acquis de Schengen, qui comprend la CAAS ( 5 ), s’applique aux États membres visés à l’article 1er du protocole, dont le Royaume de Belgique et la République italienne.

6.

Le chapitre 3 du titre III («Police et sécurité») de la CAAS est intitulé «Application du principe ne bis in idem» et comprend les articles 54 à 58.

7.

L’article 54 dispose:

«Une personne qui a été définitivement jugée par une Partie Contractante ne peut, pour les mêmes faits, être poursuivie par une autre Partie Contractante, à condition que, en cas de condamnation, la sanction ait été subie ou soit actuellement en cours d’exécution ou ne puisse plus être exécutée selon les lois de la Partie Contractante de condamnation.»

8.

L’article 57 établit des règles visant à assurer que les autorités compétentes des Parties Contractantes coopèrent afin d’échanger des informations pour mettre en œuvre le principe ne bis in idem.

9.

L’article 50 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la «Charte») prévoit:

«Nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement en raison d’une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné dans l’Union par un jugement pénal définitif conformément à la loi.»

10.

Les explications relatives à la Charte ( 6 ) indiquent, en ce qui concerne l’article 50, que «la règle ‘non bis in idem’ ne s’applique pas seulement à l’intérieur de la juridiction d’un même État, mais aussi entre les juridictions de plusieurs États membres. Cela correspond à l’acquis du droit de l’Union; voir les articles 54 à 58 de la Convention d’application de l’accord de Schengen […] En ce qui concerne les situations visées par l’article 4 du protocole no 7 [à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la «CEDH»)], à savoir l’application du principe à l’intérieur d’un même État membre, le droit garanti a le même sens et la même portée que le droit correspondant de la CEDH».

La CEDH

11.

L’article 4 du protocole no 7 à la CEDH dispose:

«1.   Nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement par les juridictions du même État en raison d’une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné par un jugement définitif conformément à la loi et à la procédure pénale de cet État.

2.   Les dispositions du paragraphe précédent n’empêchent pas la réouverture du procès, conformément à la loi et à la procédure pénale de l’État concerné, si des faits nouveaux ou nouvellement révélés ou un vice fondamental dans la procédure précédente sont de nature à affecter le jugement intervenu.»

12.

Le rapport explicatif ( 7 ) sur le protocole no 7 à la CEDH précise ce qui suit en ce qui concerne l’article 4:

«29.   Le principe établi dans cette disposition s’applique uniquement après l’acquittement ou la condamnation de l’intéressé par un jugement définitif conformément à la loi et à la procédure pénales de l’État concerné. Cela signifie qu’il doit y avoir eu un jugement définitif, selon la définition rapportée ci-dessus, au paragraphe 22 [ ( 8 )].

30.   Le procès peut toutefois être rouvert, conformément à la loi de l’État concerné, à la suite de l’apparition de faits nouveaux ou nouvellement révélés, ou s’il apparaît qu’il y a eu un vice fondamental dans la procédure, susceptible d’affecter l’issue du procès soit en faveur, soit au détriment de la personne concernée.

31.   L’expression ‘des faits nouveaux ou nouvellement révélés’ englobe tous moyens de preuve relatifs à des faits préexistants. De plus, cet article n’exclut pas une réouverture de la procédure en faveur du condamné ni tout autre changement du jugement au profit du condamné.»

13.

Selon la définition contenue dans le rapport explicatif de la convention européenne sur la valeur internationale des jugements répressifs ( 9 ), une décision est définitive «si elle est, selon l’expression consacrée, passée en force de chose jugée. Tel est le cas lorsqu’elle est irrévocable, c’est-à-dire lorsqu’elle n’est pas susceptible de voies de recours ordinaires ou que les parties ont épuisé ces voies ou laissé passer les délais sans les exercer.»

Le droit national

Le droit belge

14.

L’article 128 du code d’instruction criminelle belge (ci-après le «CIC») dispose que, lorsque le renvoi en jugement d’un inculpé est demandé, «[s]i la chambre du conseil est d’avis que le fait ne présente ni crime, ni délit, ni contravention, ou qu’il n’existe aucune charge contre l’inculpé, elle déclare qu’il n’y a pas lieu à poursuivre». C’est ce que l’on appelle une décision de non-lieu.

15.

L’article 246 du CIC énonce:

«L’inculpé à l’égard duquel la chambre des mises en accusation aura décidé qu’il n’y a pas lieu au renvoi à l’une de ces cours ne pourra plus y être traduit à raison du même fait, à moins qu’il ne survienne de nouvelles charges.»

16.

L’article 247 du CIC dispose:

«Sont considérés comme charges nouvelles les déclarations de témoins, pièces et procès-verbaux qui, n’ayant pas pu être soumis à l’examen de la chambre des mises en accusation, sont cependant de nature soit à fortifier les preuves que la chambre des mises en accusation aurait trouvées trop faibles, soit à donner aux faits de nouveaux développements utiles à la manifestation de la vérité.»

17.

La Cour de cassation (Belgique) a jugé ( 10 ) que les articles 246 et 247 du CIC régissent non seulement le non-lieu prononcé par la chambre des mises en accusation, mais s’appliquent également dans tous les cas où les juridictions d’instruction, en ce compris la chambre du conseil, ont clôturé une instruction judiciaire par une décision de non-lieu.

18.

L’article 248 du CIC prévoit que, en cas de survenance de charges nouvelles, l’officier de police judiciaire ou le juge d’instruction adresse copie des pièces et des charges au procureur général près la cour d’appel. En vertu de la réquisition de ce dernier, le président de la chambre des mises en accusation indique le juge devant lequel il sera, à la poursuite du ministère public, procédé à une nouvelle instruction ( 11 ).

Le droit italien

19.

L’article 604 du Codice penale (code pénal italien) prévoit que les violences sexuelles commises par des ressortissants italiens, bien que perpétrées à l’étranger, peuvent être poursuivies en Italie.

Les faits, la procédure et la question préjudicielle

20.

M, ressortissant italien résidant en Belgique, a été mis en examen en Belgique, à la suite de plusieurs plaintes déposées au début de l’année 2004 par Q, sa belle‑fille, sur des allégations de multiples agissements constitutifs de violences sexuelles ou, à tout le moins, de comportements illicites à caractère sexuel. Entre les mois de mai 2001 et février 2004, M aurait commis ces actes sur le territoire belge à l’encontre de N, sa petite-fille mineure (née le 29 avril 1999).

21.

La police belge a diligenté une longue instruction ayant consisté à rassembler de nombreux documents, à auditionner des personnes, dont N, et à obtenir des rapports d’experts. Ces expertises concernaient, notamment, le point de savoir si N portait des traces des violences en question au niveau physique et/ou psychologique, si la plaignante Q pouvait être tenue pour fiable, et si M présentait une personnalité sexuellement déviante.

22.

À la suite de cette instruction, le 15 décembre 2008, la chambre du conseil du tribunal de première instance de Mons (Belgique) a rendu une ordonnance de non-lieu mettant fin à la procédure pénale plutôt que de renvoyer le dossier devant la juridiction de jugement. En effet, elle a estimé qu’il n’y avait pas de charges suffisantes aux fins d’étayer les accusations portées contre M.

23.

Le 21 avril 2009, la chambre des mises en accusation de la cour d’appel de Mons a confirmé l’ordonnance de non-lieu. Cet arrêt a été à son tour confirmé par la Cour de cassation, par arrêt du 2 décembre 2009. Cette dernière décision a définitivement clôturé la procédure en Belgique, sous la seule réserve de l’éventuelle survenance de charges nouvelles (tel que prévu aux articles 246 et 247 du CIC).

24.

Parallèlement, à la suite d’une plainte déposée par Q auprès de la gendarmerie italienne le 23 novembre 2006, des poursuites pénales ont été engagées en Italie, au Tribunale di Fermo, à raison des mêmes faits que ceux qui avaient déclenché l’enquête en Belgique. Il y a eu ensuite une longue instruction portant, pour l’essentiel, sur les mêmes éléments que l’instruction menée simultanément en Belgique. Le 19 décembre 2008 (c’est-à-dire quatre jours après que la chambre du conseil du tribunal de première instance de Mons a prononcé son non-lieu), le juge de l’audience préliminaire du Tribunale di Fermo a ordonné le renvoi en jugement de M devant cette juridiction, réunie en formation collégiale.

25.

Au cours de l’audience qui s’est tenue le 9 décembre 2009 devant le Tribunale di Fermo, M a affirmé être fondé à invoquer le principe ne bis in idem eu égard à l’arrêt rendu une semaine auparavant (le 2 décembre 2009) par la Cour de cassation belge, qui avait clôturé la procédure parallèle en Belgique.

26.

Dans ces conditions, le Tribunale di Fermo a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

«Un jugement définitif de non-lieu rendu par un État membre de l’Union européenne, signataire de la CAAS, à l’issue d’une longue instruction menée lors de l’enquête diligentée dans le cadre d’une procédure qui pourrait faire l’objet d’une réouverture sur présentation de preuves nouvelles fait-il obstacle à l’ouverture ou au déroulement d’un procès tenu pour les mêmes faits et à l’encontre d’une même personne dans un autre État membre?»

27.

Des observations écrites ont été présentées par Q, les gouvernements belge, allemand, italien, autrichien, néerlandais, polonais et suisse ainsi que par la Commission européenne. Lors de l’audience qui s’est tenue le 12 septembre 2013, Q, les gouvernements néerlandais et polonais ainsi que la Commission étaient représentés et ont été entendus en leurs plaidoiries.

Appréciation

28.

La réponse à la question soulevée par la juridiction de renvoi dépend de l’interprétation de l’expression «définitivement jugée» figurant à l’article 54 de la CAAS. Un non-lieu, tel que celui prononcé dans la procédure menée en Belgique, a-t-il pour effet que la personne qui en bénéficie est considérée comme définitivement jugée de telle sorte que le principe ne bis in idem consacré à l’article 54 de la CAAS est applicable dans ce cas?

29.

La jurisprudence existante de la Cour sur l’article 54 de la CAAS et le principe ne bis in idem ( 12 ), concernant des décisions clôturant une procédure pénale, prises avant et après le procès, n’apporte pas de réponse sans équivoque à cette question.

30.

Lorsque la décision a été rendue à l’issue du procès, la jurisprudence établit que le principe ne bis in idem s’applique, que le prévenu ait été acquitté ou reconnu coupable. Cela vaut pour un verdict de culpabilité rendu à la suite d’un procès par contumace (malgré une obligation, en vertu du droit national, d’engager une nouvelle procédure en cas d’arrestation ultérieure du contumax) ( 13 ) et pour un acquittement pour insuffisance de preuves au terme d’un procès complet ( 14 ). Dans ce dernier cas, la Cour a expressément refusé de se prononcer sur la question générale de savoir si un acquittement qui ne repose pas sur une appréciation sur le fond peut relever de l’article 54 de la CAAS. Elle s’est bornée à confirmer qu’un acquittement pour insuffisance de preuves «est fondé sur une telle appréciation» ( 15 ) et que, dès lors, le principe ne bis in idem consacré à l’article 54 de la CAAS s’appliquait.

31.

Lorsque la décision est rendue avant l’issue d’un procès, la Cour adopte également une approche libérale. Le principe ne bis in idem s’applique lorsque, sans l’intervention d’une juridiction, le ministère public met fin à des procédures contre des prévenus qui ont accepté de payer des amendes pour leur comportement ( 16 ). Dans ce contexte, la Cour a constaté que l’objectif de l’article 54 de la CAAS consiste à «éviter qu’une personne, par le fait d’exercer son droit de libre circulation, ne soit poursuivie pour les mêmes faits sur le territoire de plusieurs États membres», et a en outre dit que, en vue de la réalisation complète de cet objectif, l’article 54 de la CAAS doit s’appliquer «à des décisions mettant définitivement fin aux poursuites pénales dans un État membre, bien qu’elles soient adoptées sans l’intervention d’une juridiction et ne prennent pas la forme d’un jugement» ( 17 ).

32.

Le principe ne bis in idem est également applicable en cas d’extinction de l’action publique par la prescription dans un «premier» État membre ( 18 ), bien que, en matière de délais de prescription, une harmonisation des législations des États contractants n’ait pas eu lieu et que, partant, il se pourrait qu’il n’y ait pas prescription de l’action publique dans le «deuxième» État membre. (L’argument de la Commission en l’espèce, selon lequel seule une décision de relaxe ou d’acquittement pour insuffisance de preuves prononcée à l’issue d’un procès devrait donner lieu à l’application de l’article 54 de la CAAS, me semble donc voué à l’échec à la lumière de cette jurisprudence ( 19 ).) Dans l’arrêt Gasparini e.a., précité, la Cour a souligné que le principe ne bis in idem implique nécessairement qu’il existe une confiance mutuelle des États contractants dans leurs systèmes respectifs de justice pénale et que, par conséquent, chacun de ces États reconnaît l’application du droit pénal en vigueur dans les autres États contractants, quand bien même la mise en œuvre de son propre droit national conduirait à une solution différente ( 20 ).

33.

En revanche, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Miraglia ( 21 ), une procédure pénale aux Pays-Bas avait été suspendue au motif que des poursuites avaient été engagées à l’encontre du même prévenu, pour les mêmes faits, en Italie. La décision ordonnant la suspension interdisait toute poursuite aux Pays‑Bas pour les mêmes faits délictueux et toute coopération avec des autorités étrangères, à moins qu’il n’y ait de nouvelles preuves ( 22 ). La Cour a jugé qu’une telle décision judiciaire, qui avait été prise sans qu’aucune appréciation ait été portée sur le fond, ne pouvait pas constituer une décision jugeant définitivement cette personne au sens de l’article 54 de la CAAS et empêchant la poursuite de l’action publique en Italie ( 23 ). Si la décision néerlandaise (prise précisément en raison de poursuites qui étaient en cours en Italie) avait été considérée comme suffisante pour la mise en œuvre du principe ne bis in idem, cela «aurait [eu] pour effet de rendre plus difficile, voire de faire obstacle à toute possibilité concrète de sanctionner dans les États membres concernés le comportement illicite reproché au prévenu» ( 24 ). La Cour a donc souligné l’importance d’assurer la libre circulation des personnes, en liaison avec le maintien des mesures appropriées en matière de prévention de la criminalité et de lutte contre ce phénomène ( 25 ) (ce qui constitue, ainsi qu’il résulte de l’article 3, paragraphe 2, du TUE, la finalité des dispositions du titre V établissant un espace de liberté, de sécurité et de justice).

34.

Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Turanský ( 26 ), une décision ordonnant la suspension de poursuites pénales avait été prise avant l’inculpation de la personne concernée. Selon le droit national, cette décision ne faisait pas obstacle à de nouvelles poursuites engagées pour les mêmes faits. La Cour a jugé que la décision de suspension ne constituait pas un jugement définitif de nature à déclencher l’application du principe ne bis in idem ( 27 ). À cet effet, la Cour a défini les «critères de l’arrêt Turanský», précité, permettant de déterminer si une personne a été «définitivement jugée». La décision «doit […] mettre fin aux poursuites pénales et éteindre l’action publique d’une manière définitive» ( 28 ); et «il convient à titre liminaire de vérifier […] que le droit national de l’État contractant dont les autorités ont pris la décision en cause considère celle-ci comme étant définitive et obligatoire, et de s’assurer qu’elle donne lieu, dans cet État, à la protection conférée par le principe ne bis in idem» ( 29 ). Ces critères ont été confirmés et appliqués dans l’arrêt Mantello (dans le cadre d’une affaire concernant le mandat d’arrêt européen) ( 30 ).

35.

De manière générale, l’approche adoptée jusqu’à présent par la Cour ne me semble pas tellement différente de celle de la Cour européenne des droits de l’homme en ce qui concerne l’article 4, paragraphe 1, du protocole no 7 à la CEDH. La garantie visée à cet article «entre en jeu lorsque de nouvelles poursuites sont engagées et que la décision antérieure d’acquittement ou de condamnation est déjà passée en force de chose jugée» ( 31 ). Ainsi que le rapport explicatif pertinent sur ce protocole le précise en outre, «[t]el est le cas lorsque [la décision] est irrévocable, c’est-à-dire lorsqu’elle n’est pas susceptible de voies de recours ordinaires ou que les parties ont épuisé ces voies ou laissé passer les délais sans les exercer» ( 32 ).

36.

La formulation du principe ne bis in idem retenue à l’article 50 de la Charte reflète celle figurant à l’article 4 du protocole no 7. Les explications relatives à la Charte indiquent que l’article 50 ne s’applique «pas seulement à l’intérieur de la juridiction d’un même État, mais aussi entre les juridictions de plusieurs États membres», en ajoutant qu’«[e]n ce qui concerne les situations visées par l’article 4 du protocole no 7, à savoir l’application du principe à l’intérieur d’un même État membre, le droit garanti a le même sens et la même portée que le droit correspondant de la CEDH».

M est-il une personne définitivement jugée en Belgique compte tenu de la décision de non-lieu?

37.

En règle générale, les juridictions de l’État membre dans lequel l’exception ne bis in idem a été soulevée (en l’occurrence la République italienne) doivent trancher une telle question en se fondant sur les renseignements et l’aide fournis conformément à l’article 57 de la CAAS par l’État membre dans lequel a été rendue la décision invoquée pour déclencher l’application du principe ne bis in idem (en l’occurrence le Royaume de Belgique) ( 33 ). Les critères à appliquer sont ceux définis par notre Cour dans l’arrêt Turanský, précité ( 34 ). Comme dans le présent cas d’espèce, le juge national peut, le cas échéant, solliciter également l’aide de cette Cour en formant une demande de décision préjudicielle.

38.

Il résulte de la décision de renvoi en l’espèce que, selon le droit belge, l’arrêt de la Cour de cassation du 2 décembre 2009 s’oppose à ce qu’une procédure pénale soit poursuivie à l’encontre du prévenu à raison des mêmes faits. L’action publique n’a pas été simplement «laissée en suspens», elle a été officiellement éteinte. Certes, après une décision de non-lieu, il est possible de rouvrir la procédure en cas de survenance de charges nouvelles, mais cette possibilité de reprise des poursuites est limitée. Ces charges nouvelles doivent être de nature soit à fortifier les preuves que la chambre des mises en accusation (ou, comme en l’espèce, la chambre du conseil) aurait trouvées trop faibles, soit à donner aux faits de nouveaux développements utiles à la manifestation de la vérité (article 247 du CIC). La procédure ne peut être rouverte que sur la réquisition du ministère public qui est libre de faire ou non une telle demande (article 248 du CIC) ( 35 ). D’après mes recherches, il semblerait qu’une partie civile ne puisse pas obliger le ministère public à essayer de rouvrir la procédure pénale ni lancer, sur le fondement des charges examinées, une citation directe, après que la décision de non-lieu a été rendue. En l’espèce, les voies de recours ordinaires ouvertes en ce qui concerne cette décision ont été exercées et épuisées à la suite de la décision de la Cour de cassation. La décision de la chambre du conseil du tribunal de première instance de Mons est ainsi passée en force de chose jugée et M, du fait de cette décision, est à l’abri de poursuites en Belgique. Les critères de l’arrêt Turanský, précité, sont par conséquent remplis.

39.

Le gouvernement belge a cependant fait valoir (dans ses observations écrites, étant donné qu’il n’a pas participé à l’audience de plaidoiries) qu’une telle décision n’est pas définitive en ce que la possibilité existe de rouvrir la procédure à la lumière de charges nouvelles et que le principe ne bis in idem énoncé à l’article 54 de la CAAS n’est par conséquent pas applicable. Il me semble qu’il existe deux volets de réflexion qui pourraient étayer un tel point de vue. Selon le premier volet, ce n’est que par un malencontreux hasard de calendrier que le procès pénal italien n’a commencé qu’une semaine après la décision de la Cour de cassation belge et lorsque (comme en l’espèce) les faits reprochés à une personne sont graves et pénibles, cette personne «devrait», dans la mesure du possible, être traduite en justice. Selon le deuxième volet, le principe ne bis in idem ne peut pas s’appliquer dans un «deuxième» État membre tant qu’il existe une possibilité, qu’elle soit faible ou éloignée, que la procédure pénale dans le «premier» État membre puisse être réactivée ou relancée. J’aborderai successivement chacun de ces aspects.

Une question de chronologie?

40.

L’un des aspects les plus frappants dans le présent renvoi tient à la succession des évènements dans le temps. Les deux instructions pénales approfondies, en Belgique et en Italie, ont eu lieu parallèlement. Les différentes juridictions des deux États membres sont ensuite intervenues dans l’ordre suivant: a) décision de non-lieu rendue par la chambre du conseil du tribunal de première instance de Mons (15 décembre 2008); b) renvoi en jugement de M par le juge de l’audience préliminaire du Tribunale di Fermo (19 décembre 2008); c) décision de non-lieu confirmée par la chambre des mises en accusation de la cour d’appel de Mons (21 avril 2009); d) arrêt de la cour d’appel de Mons confirmé par la Cour de cassation (2 décembre 2009), et, enfin, e) audience dans le procès pénal devant le Tribunale di Fermo, réuni en formation collégiale (9 décembre 2009).

41.

Il peut être utile d’examiner plusieurs moments à l’intérieur de cette séquence afin de voir si le prévenu M peut invoquer le principe ne bis in idem énoncé à l’article 54 de la CAAS et, dans l’affirmative, à quel stade et pourquoi il devrait pouvoir le faire.

42.

Le jour où le juge de l’audience préliminaire du Tribunale di Fermo a prononcé le renvoi en jugement de M (le 19 décembre 2008), la chambre du conseil du tribunal de première instance de Mons venait de rendre sa décision de non-lieu (le 15 décembre 2008). Toutefois, cette décision n’était pas devenue «définitive» selon le droit belge. Un appel de ladite décision pouvait encore être interjeté (et l’a été effectivement). Par conséquent, à ce stade, M n’aurait pas pu invoquer le principe ne bis in idem pour mettre fin aux poursuites en Italie.

43.

Si le procès de M en Italie avait suivi son cours et si un verdict avait été rendu avant le 21 avril 2009 (date de la décision de la cour d’appel de Mons), voire avant le 2 décembre 2009 (date de la décision de la Cour de cassation belge), l’analyse serait la même. Malgré l’existence dans ces deux cas d’une décision antérieure prononcée en ce qui concerne la même personne et les mêmes faits dans un autre État membre, ladite décision ne serait pas encore devenue définitive, selon le droit national.

44.

Toutefois, la situation change le 2 décembre 2009. À partir de cette date, M, s’il était en Belgique, serait à l’abri de poursuites grâce à la protection conférée par la décision définitive de la Cour de cassation confirmant le non-lieu. Certes, si des charges nouvelles surviennent, l’article 248 du CIC prévoit que, en ce cas, l’officier de police judiciaire ou le juge d’instruction adresse copie des pièces et des charges au procureur général près la cour d’appel. Cette étape est obligatoire. Le procureur général semble disposer ensuite d’un pouvoir d’appréciation ( 36 ). Il peut (vraisemblablement, s’il estime que les charges nouvelles joueraient un rôle décisif) demander au président de la chambre des mises en accusation d’indiquer le juge devant lequel il sera procédé à une nouvelle instruction. S’il estime que ces charges nouvelles n’ont aucune incidence ou sont insuffisantes, il ne fera vraisemblablement pas cette démarche. Toutefois, en l’absence de découverte de charges nouvelles et de mise en route de cette procédure, M serait à l’abri de poursuites ( 37 ).

45.

Une personne ne devrait pas perdre la protection dont elle bénéficie en vertu du droit pénal national en exerçant ses droits à la libre circulation. C’est pourquoi la décision de la Cour de cassation belge du 2 décembre 2009 fait nécessairement obstacle à ce que M soit jugé en Italie après cette date.

46.

Pour être complète, je devrai examiner quatre points supplémentaires.

47.

Premièrement, j’estime que la date qui importe est celle à laquelle une décision de justice a été rendue par une juridiction, et non la date (postérieure) à laquelle un procureur ou une juridiction dans un autre État membre a connaissance de ladite décision. L’exigence de sécurité juridique dicte cette approche. En effet, la date de la décision est certaine. La date de notification est en revanche variable et peut être influencée par des éléments extérieurs.

48.

Deuxièmement, une personne renvoyée en jugement est exposée au risque de subir une peine jusqu’au moment où la décision déterminant l’issue de son procès est rendue. Un certain délai (dont il faut espérer que, normalement, il ne sera pas aussi long que dans le présent cas d’espèce) peut s’écouler entre la date à laquelle une personne est renvoyée en jugement et la date à laquelle son procès s’ouvre, et le procès lui-même peut prendre un certain temps pour suivre son cours. Or, le principe ne bis in idem vise à éviter une double peine. Il s’ensuit, à mon sens, que le principe ne bis in idem ne cesse pas de s’appliquer lorsqu’une personne est renvoyée en jugement ou le jour où son procès s’ouvre. Au contraire, ce principe peut être invoqué jusqu’à ce que l’issue du procès soit déterminée.

49.

Troisièmement, une fois qu’une personne a été jugée et condamnée dans un «deuxième» État membre, la circonstance qu’une décision prise à l’encontre de la même personne à raison des mêmes faits dans le «premier» État membre devienne par la suite définitive est dénuée de pertinence. En effet, au moment où ladite personne a été jugée dans le deuxième État membre, il n’y avait pas (encore) de décision définitive dans le premier État membre. Bien entendu, la décision dans le deuxième État membre est susceptible de recours, conformément au droit national, sur le fondement de tout moyen reconnu par le droit pénal de cet État membre. L’article 54 de la CAAS ne peut cependant pas être invoqué.

50.

Quatrièmement, il convient de fournir quelques éléments de réponse à la question de savoir «ce qu’il en est du temps de la police et des fonds publics gaspillés dans une instruction approfondie dans le deuxième État membre si la règle ne bis in idem s’applique en pareilles circonstances et que la procédure pénale à l’encontre d’une personne déjà renvoyée devant une juridiction de jugement ne peut pas être poursuivie».

51.

Il existe assurément un problème de fond, digne d’être sérieusement pris en compte, ayant trait à la «course aux poursuites» et aux éventuels conflits de compétence en matière pénale. Actuellement, l’on ne dispose pas de règles convenues à l’échelle de l’Union sur l’attribution de compétence pénale ( 38 ). L’application du principe ne bis in idem résout le problème d’une manière limitée, voire parfois arbitraire ( 39 ). Cette solution ne saurait cependant se substituer de manière satisfaisante à une action visant à régler de tels conflits conformément à un ensemble commun de critères.

52.

Certaines dispositions existent maintenant dans le cadre du droit de l’Union en vue d’assurer l’échange d’informations entre les organismes d’enquête dans différents États membres ( 40 ). La décision-cadre 2009/948/JAI ( 41 ), qui a été publiée et est entrée en vigueur le 15 décembre 2009 (soit juste après la procédure italienne au principal), impose à l’autorité compétente d’un État membre de prendre contact avec l’autorité compétente d’un autre État membre si elle a des motifs raisonnables de croire qu’une procédure parallèle est en cours dans cet État, en vue d’engager des consultations directes. Ces consultations visent à éviter les conséquences négatives découlant de l’existence d’une telle procédure parallèle et peuvent, le cas échéant, conduire à la concentration de la procédure pénale dans un État membre.

53.

Dans une certaine mesure, cela répond au problème à l’origine de la présente affaire (et qui se posait déjà dans l’affaire Miraglia, précitée). Toutefois, la décision-cadre 2009/948 n’harmonise pas les lois et les procédures nationales dans ce domaine du droit. En particulier, elle n’oblige pas un État membre soit à renoncer à sa compétence, soit à l’exercer ( 42 ). En attendant que le législateur traite d’une manière plus complète la question des procédures parallèles, force est dès lors de recourir au principe ne bis in idem énoncé à l’article 54 de la CAAS pour combler les lacunes.

«Si la procédure peut (éventuellement) être rouverte, le principe ne bis in idem ne s’applique pas»

54.

Ni l’article 54 de la CAAS ni l’article 50 de la Charte n’abordent expressément ce qu’il advient du principe ne bis in idem en cas d’apparition de charges nouvelles. Les explications relatives à l’article 50 de la Charte indiquent utilement que, lorsque le droit visé par la Charte s’applique à l’intérieur d’un même État membre, «le droit garanti a le même sens et la même portée que le droit correspondant de la CEDH».

55.

S’agissant donc de la CEDH, l’on observera que l’article 4, paragraphe 2, du protocole no 7 énonce que les dispositions de l’article 4, paragraphe 1 (protégeant le droit à ne pas être poursuivi ou puni pénalement deux fois pour une même infraction), n’empêche pas la réouverture du procès «si des faits nouveaux ou nouvellement révélés» apparaissent. Le rapport explicatif sur le protocole no 7 précise ( 43 ) que l’expression «des faits nouveaux ou nouvellement révélés» englobe tous moyens de preuve relatifs à des faits préexistants. Par conséquent, la possibilité exceptionnelle, selon le droit belge, de rouvrir la procédure pénale à la suite d’une décision de non-lieu reflète étroitement ce qui est envisagé à l’article 4, paragraphe 2, du protocole no 7.

56.

Tel que je lis le protocole no 7 à la CEDH, l’article 4, paragraphe 1, établit une protection ne bis in idem. L’article 4, paragraphe 2, prévoit ensuite une dérogation permettant la réouverture d’un procès (conformément à la loi et à la procédure pénale de l’État concerné) alors que le principe ne bis in idem s’appliquerait autrement. Cela ne veut pas dire (et je dirai même qu’on ne peut assurément pas l’interpréter raisonnablement en ce sens) que, tant qu’il existe une possibilité théorique que des «moyens de preuve relatifs à des faits préexistants» soient découverts, le principe ne bis in idem n’est pas applicable. Théoriquement, des charges nouvelles peuvent toujours apparaître. L’interprétation prônée par le gouvernement belge viderait par conséquent de toute substance le principe ne bis in idem. Nonobstant le bénéfice d’une décision de non-lieu qui a été confirmée par la juridiction la plus élevée et qui est passée en force de chose jugée, une personne poursuivie serait privée de la protection même qui est censée lui être accordée selon le droit national. Si une seconde procédure avait été lancée en Belgique (plutôt qu’en Italie) sans des charges nouvelles, il est clair qu’elle aurait été empêchée en vertu de cette décision.

57.

La conclusion doit-elle être différente lorsque la seconde procédure est engagée dans un autre, un «deuxième» État membre?

58.

Je ne le pense pas. L’article 54 de la CAAS a précisément pour finalité d’éviter qu’une personne qui exerce ses droits de libre circulation perde la protection ne bis in idem dont elle aurait bénéficié autrement. Il est clair que le déclenchement du principe ne bis in idem provoqué par une décision dans un État membre (en l’espèce, le Royaume de Belgique) peut avoir pour effet d’éteindre l’action publique dans un autre État membre (en l’espèce, la République italienne) même si les juridictions du deuxième État membre sont parvenues à une conclusion différente quant à des charges qui sont essentiellement les mêmes. La possibilité de résultats différents découle cependant du fait que le principe ne bis in idem s’applique malgré l’absence d’harmonisation, en reposant sur l’existence d’un haut degré de confiance réciproque ( 44 ).

59.

Toutefois, d’un point de vue plus fondamental, il est clair que le principe ne bis in idem ne s’oppose pas à la réouverture d’une procédure en cas de survenance de charges nouvelles ( 45 ). Si, en l’espèce, le ministère public italien met les charges qui sont en sa possession à la disposition de ses collègues belges, ces derniers seront en mesure d’apprécier lesdites charges et de décider s’il y a lieu d’essayer d’obtenir la réouverture de la procédure belge en application des articles 246, 247 et 248 du CIC. Je souligne cependant que (à mon sens) toute nouvelle procédure poursuivie à l’encontre d’une personne qui bénéficie d’une décision définitive de non-lieu doit être engagée dans l’État membre sur le territoire duquel cette décision a été prise (c’est-à-dire dans le premier État membre). Il n’est pas loisible aux juridictions dans un deuxième État membre de court-circuiter le processus (et les garanties procédurales que le droit national du premier État membre accorde à la personne poursuivie) en décidant d’utiliser ce qui peut (ou non) constituer des charges «nouvelles» à l’encontre de ladite personne.

Conclusion

60.

Eu égard aux considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre comme suit à la question préjudicielle posée par le Tribunale di Fermo:

L’article 54 de la convention d’application de l’accord de Schengen, du 14 juin 1985, entre les gouvernements des États de l’Union économique Benelux, de la République fédérale d’Allemagne et de la République française relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes, doit être interprété en ce sens qu’une décision définitive de non-lieu rendue à l’issue d’une instruction approfondie dans le cadre d’une procédure pénale à laquelle elle met fin, faisant obstacle à de nouvelles poursuites à l’encontre de la même personne pour les mêmes faits, mais pouvant, selon le droit national, être annulée en cas de survenance de charges nouvelles, est une décision jugeant définitivement ladite personne et donne lieu à l’application du principe ne bis in idem consacré dans cet article.


( 1 ) Langue originale: l’anglais.

( 2 ) Note sans objet pour la version en langue française des présentes conclusions.

( 3 ) Convention d’application de l’accord de Schengen, du 14 juin 1985, entre les gouvernements des États de l’Union économique Benelux, de la République fédérale d’Allemagne et de la République française relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes (JO 2000, L 239, p. 19).

( 4 ) Protocole (no 19) sur l’acquis de Schengen intégré dans le cadre de l’Union européenne (JO 2012, C 326, p. 290).

( 5 ) L’annexe du protocole au traité d’Amsterdam intégrant l’acquis de Schengen dans le cadre de l’Union européenne (JO 1997, C 340, p. 93) énumère les accords et les dispositions connexes qui font partie de l’acquis de Schengen. Parmi ceux-ci figure, au paragraphe 2, la CAAS.

( 6 ) JO 2007, C 303, p. 17.

( 7 ) STE no 117.

( 8 ) Le paragraphe 22 renvoie à la définition contenue dans le rapport explicatif de la convention européenne sur la valeur internationale des jugements répressifs (voir point 13 des présentes conclusions).

( 9 ) STE no 070.

( 10 ) Cass. 7 septembre 1982, Pas. 1983, I, 27-30.

( 11 ) Note sans objet pour la version en langue française des présentes conclusions.

( 12 ) Arrêts du 11 février 2003, Gözütok et Brügge (C-187/01 et C-385/01, Rec. p. I-1345); du 10 mars 2005, Miraglia (C-469/03, Rec. p. I-2009); du 28 septembre 2006, Gasparini e.a. (C-467/04, Rec. p. I-9199); du 28 septembre 2006, Van Straaten (C-150/05, Rec. p. I-9327); du 11 décembre 2008, Bourquain (C-297/07, Rec. p. I-9425), et du 22 décembre 2008, Turanský (C-491/07, Rec. p. I-11039).

( 13 ) Voir arrêt Bourquain (précité à la note 12, points 39 et 40).

( 14 ) Voir arrêt Van Straaten (précité à la note 12, point 58). L’avocat général Ruiz-Jarabo Colomer a noté qu’aucun des intervenants ayant présenté des observations n’avait contesté la réalité du principe ne bis in idem dans un tel cas de figure à l’intérieur de l’ordre juridique national (voir point 73 de ses conclusions présentées dans cette affaire).

( 15 ) Ibidem (point 60).

( 16 ) Arrêt Gözütok et Brügge (précité à la note 12, point 48).

( 17 ) Ibidem (point 38).

( 18 ) Arrêt Gasparini e.a. (précité à la note 12, point 33).

( 19 ) En disant que le principe ne bis in idem s’appliquait dans l’affaire Gasparini e.a., la Cour a manifestement considéré qu’il importait peu que, du fait de l’application du délai de prescription, les prévenus n’aient jamais été exposés au risque de subir une peine dans la première procédure.

( 20 ) Arrêt Gasparini e.a. (précité à la note 12, points 29 et 30).

( 21 ) Précité à la note 12.

( 22 ) Ibidem (point 22).

( 23 ) Ibidem (point 35). À cet égard, voir également, dans le contexte du droit de la concurrence, arrêt du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschaappij e.a./Commission (C-238/99 P, C-244/99 P, C-245/99 P, C-247/99 P, C-250/99 P à C-252/99 P et C-254/99 P, Rec. p. I-8375, point 62), dans lequel la Cour a jugé qu’une décision d’annulation qui avait était prise sans qu’il ait été statué au fond ne pouvait pas être considérée comme un acquittement donnant lieu à l’application du principe ne bis in idem.

( 24 ) Arrêt Miraglia (précité à la note 12, point 33).

( 25 ) Ibidem (point 34).

( 26 ) Précité à la note 12.

( 27 ) Arrêt Turanský (précité à la note 12, points 39 et 40).

( 28 ) Ibidem (point 34).

( 29 ) Ibidem (point 35).

( 30 ) Arrêt du 16 novembre 2010 (C-261/09, Rec. p. I-11477, point 46). L’article 3, point 2, de la décision-cadre 2002/584/JAI du Conseil, du 13 juin 2002, relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres (JO L 190, p. 1) vise, parmi les motifs de non‑exécution obligatoire du mandat d’arrêt européen, le cas de ne bis in idem. Dans l’arrêt Mantello, la Cour (grande chambre) a reconnu (au point 40) que, «[e]u égard à l’objectif commun des articles 54 de la CAAS et 3, point 2, de la décision-cadre, […] il convient d’admettre que l’interprétation de cette notion fournie dans le cadre de la CAAS vaut également dans le contexte de la décision-cadre». La Cour a poursuivi (aux points 45 à 47) en citant la jurisprudence en ce sens et en confirmant les critères de l’arrêt Turanský, précité.

( 31 ) Voir Cour eur. D.H., arrêt Zolotoukhine c. Russie du 10 février 2009, no 14939/03, Recueil des arrêts et décisions 2009‑I, p. 291, § 83.

( 32 ) Précité au point 13 des présentes conclusions.

( 33 ) Voir, à cet égard, arrêt Mantello (précité à la note 12, points 48 et 49).

( 34 ) Voir point 34 des présentes conclusions.

( 35 ) Voir également point 44 des présentes conclusions.

( 36 ) L’expression «sur la réquisition du procureur général» implique en effet que celui-ci a la faculté de présenter ou non une telle demande.

( 37 ) Voir point 38 des présentes conclusions.

( 38 ) Pour des tentatives de régler le problème, voir le Livre vert de la Commission [SEC(2005) 1767] sur les conflits de compétence et le principe ne bis in idem dans le cadre des procédures pénales, et son annexe [COM(2005) 696 final], du 23 décembre 2005, ainsi que les réponses y afférentes. Voir également les observations de Fletcher, M., «The problem of multiple criminal prosecutions: building an effective EU response», Yearbook of European Law, vol. 26, 2007, p. 33 à 56. Pour des cas de ne bis in idem qui, du moins dans une certain mesure, tirent leur origine d’un mécontentement quant au fait que les autorités d’un autre État membre avaient été les premières à engager des poursuites, voir, notamment, les affaires ayant donné lieu aux arrêts du 9 mars 2006, Van Esbroeck (C-436/04, Rec. p. I-2333), et du 18 juillet 2007, Kraaijenbrink (C-367/05, Rec. p. I-6619).

( 39 ) Pour une discussion approfondie sur ce sujet plus vaste, voir Fletcher, M., Lööf, R., et Gilmore, B., «EU Criminal Law and Justice», Elgar European Law, 2008, p. 131 à 138, et, plus spécialement, p. 132 et 133.

( 40 ) S’agissant des organes institutionnels, voir décision 2002/187/JAI du Conseil, du 28 février 2002, instituant Eurojust afin de renforcer la lutte contre les formes graves de criminalité (JO L 63, p. 1), et convention sur la base de l’article K.3 du traité sur l’Union européenne portant création d’un office européen de police (convention Europol) (JO 1995, C 316, p. 2).

( 41 ) Décision-cadre du Conseil du 30 novembre 2009 relative à la prévention et au règlement des conflits en matière d’exercice de la compétence dans le cadre des procédures pénales (JO L 328, p. 42).

( 42 ) Voir considérant 11 de la décision-cadre.

( 43 ) Précité au point 12 des présentes conclusions (point 31).

( 44 ) Voir conclusions de la Présidence (no 200/1/99) lors du Conseil européen tenu à Tampere les 15 et 16 octobre 1999, ainsi qu’arrêt Gasperini e.a. (précité à la note 12, points 30 et 32).

( 45 ) Voir points 54 à 56 des présentes conclusions.