ARRÊT DE LA COUR (première chambre)
21 février 2013 ( *1 )
«Article 48 TFUE — Sécurité sociale des travailleurs migrants — Règlements (CEE) no 1408/71 et (CE) no 883/2004 — Assurance vieillesse et décès — Modalités particulières d’application de la législation nationale relative à l’assurance vieillesse — Calcul des prestations»
Dans l’affaire C‑282/11,
ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Tribunal Superior de Justicia de Galicia (Espagne), par décision du 9 mai 2011, parvenue à la Cour le 6 juin 2011, dans la procédure
Concepción Salgado González
contre
Instituto Nacional de la Seguridad Social (INSS),
Tesorería General de la Seguridad Social (TGSS),
LA COUR (première chambre),
composée de M. A. Tizzano (rapporteur), président de chambre, MM. Ilešič, E. Levits, J.-J. Kasel et Mme M. Berger, juges,
avocat général: M. J. Mazák,
greffier: Mme M. Ferreira, administrateur principal,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 24 mai 2012,
considérant les observations présentées:
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pour l’Instituto Nacional de la Seguridad Social (INSS) et la Tesorería General de la Seguridad Social (TGSS), par Mes A. R. Trillo García et P. García Perea, abogados, |
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pour le gouvernement espagnol, par M. A. Rubio González, en qualité d’agent, |
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pour la Commission européenne, par Mme S. Pardo Quintillán et M. V. Kreuschitz, en qualité d’agents, |
ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 13 septembre 2012,
rend le présent
Arrêt
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La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation du règlement (CEE) no 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l’application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CE) no 118/97 du Conseil, du 2 décembre 1996 (JO 1997, L 28, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) no 629/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 5 avril 2006 (JO L 114, p. 1, ci-après le «règlement no 1408/71»), et du règlement (CE) no 883/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale (JO L 166, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) no 988/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 16 septembre 2009 (JO L 284, p. 43, ci-après le «règlement no 883/2004»). |
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Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Mme Salgado González à l’Instituto Nacional de la Seguridad Social (INSS) (ci-après l’«INSS») et à la Tesorería General de la Seguridad Social (TGSS) au sujet du montant de la pension de vieillesse de la requérante au principal. |
Le cadre juridique
Le droit de l’Union
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L’article 3, paragraphe 1, du règlement no 1408/71 dispose: «Les personnes auxquelles les dispositions du présent règlement sont applicables sont soumises aux obligations et sont admises au bénéfice de la législation de tout État membre dans les mêmes conditions que les ressortissants de celui-ci, sous réserve de dispositions particulières contenues dans le présent règlement.» |
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Aux termes de l’article 45, paragraphe 1, de ce règlement: «Si la législation d’un État membre subordonne l’acquisition, le maintien ou le recouvrement du droit aux prestations en vertu d’un régime qui n’est pas un régime spécial au sens des paragraphes 2 ou 3, à l’accomplissement de périodes d’assurance ou de résidence, l’institution compétente de cet État membre tient compte, dans la mesure nécessaire, des périodes d’assurance ou de résidence accomplies sous la législation de tout autre État membre, que ce soit dans le cadre d’un régime général ou spécial, applicable à des travailleurs salariés ou non salariés. Dans ce but, elle tient compte de ces périodes, comme s’il s’agissait de périodes accomplies sous la législation qu’elle applique.» |
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L’article 46, paragraphe 2, dudit règlement prévoit: «Lorsque les conditions requises par la législation d’un État membre pour avoir droit aux prestations ne sont satisfaites qu’après l’application de l’article 45 et/ou de l’article 40, paragraphe 3, les règles suivantes sont applicables:
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L’article 47, paragraphe 1, du règlement no 1408/71 énonce: «Pour le calcul du montant théorique et du prorata visés à l’article 46 paragraphe 2, les règles suivantes sont appliquées: […]
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Conformément à l’article 89 de ce règlement, «[l]es modalités particulières d’application des législations de certains États membres sont mentionnées à l’annexe VI». |
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Le point 4 de la partie H, relative au Royaume d’Espagne, de l’annexe VI du règlement no 1408/71 dispose:
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L’article 90 du règlement no 883/2004 prévoit que le règlement no 1408/71 est en substance abrogé à partir de la date d’application du règlement no 883/2004. |
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L’article 87, paragraphe 5, du règlement no 883/2004 contient la disposition transitoire suivante: «Les droits des intéressés auxquels une pension était servie antérieurement à la date d’application du présent règlement dans un État membre peuvent, à leur demande, être révisés, compte tenu des dispositions du présent règlement.» |
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En vertu de l’article 91 de ce règlement, ce dernier est applicable à partir de la date d’entrée en vigueur du règlement d’application. |
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Le règlement (CE) no 987/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 16 septembre 2009, fixant les modalités d’application du règlement (CE) no 883/2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale (JO L 284, p. 1), est, conformément à son article 97, entré en vigueur le 1er mai 2010. |
Le droit espagnol
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Conformément à l’article 161, paragraphe 1, sous b), de la loi générale sur la sécurité sociale (Ley General de la Seguridad Social), telle que modifiée et approuvée par le décret royal législatif 1/1994, du 20 juin 1994, dans sa version applicable à l’affaire au principal (ci-après la «LGSS»), l’ouverture du droit à la pension de retraite nécessite notamment d’une période minimale de cotisation de quinze ans. |
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Aux termes de l’article 162, paragraphe 1, de la LGSS: «Le montant de base de la pension de retraite, de type contributif, est le quotient de la division par 210 des bases de cotisation de l’intéressé pendant les 180 mois précédant immédiatement le mois antérieur à celui de la réalisation du risque.» |
Le litige au principal et les questions préjudicielles
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Mme Salgado González a cotisé en Espagne au Régimen Especial de Trabajadores Autónomos (régime spécial des travailleurs autonomes) du 1er février 1989 au 31 mars 1999, soit 3711 jours, et au Portugal, du 1er mars 2000 au 31 décembre 2005, soit 2100 jours. |
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Elle a demandé le bénéfice d’une pension de vieillesse en Espagne. Le 9 novembre 2006, cette pension lui a été accordée par l’INSS, avec effet à partir du 1er janvier 2006. |
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Dans un premier temps, l’INSS a, en application de l’article 162, paragraphe 1, de la LGSS, fixé le «montant de base» de cette prestation à 341,65 euros par mois. |
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Ce montant a été obtenu en additionnant les bases de cotisations payées en Espagne du 1er janvier 1991 au 31 décembre 2005 et en divisant le résultat par 210, ce diviseur correspondant – ainsi qu’il résulte du dossier soumis à Cour – au total des cotisations ordinaires (douze par an) et extraordinaires (deux par an) versées pendant une période de 180 mois, c’est-à-dire quinze ans. |
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Ledit montant de base a été soumis à un premier ajustement, à savoir une réduction à 53 %, pour tenir compte des années de cotisation de Mme Salgado González. À la suite de ce premier ajustement, le montant de base s’élevait à 181,07 euros. |
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Ce montant a ensuite été à nouveau ajusté afin d’établir la partie de la pension de vieillesse qui était à la charge du Royaume d’Espagne. À ces fins, l’INSS a pris en compte la proportion des cotisations versées en Espagne par Mme Salgado González par rapport à l’ensemble de ses cotisations. La partie à la charge de cet État membre a été fixée à 63,86 % du montant de base ajusté, ce qui correspondait à 115,63 euros. Ce montant, revalorisé et comprenant les compléments, était finalement fixé à 371,36 euros. |
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Le 8 janvier 2007, Mme Salgado González, qui estime qu’il convient d’intégrer dans le calcul de la prestation vieillesse à laquelle elle a droit également les cotisations qu’elle a payées au Portugal, a demandé que ledit montant soit révisé et fixé à 864,14 euros mensuels. |
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L’INSS a rejeté cette demande et a, dans un second temps, fixé ce même montant à 336,86 euros par mois. |
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Il a été obtenu, par application de l’article 162, paragraphe 1, de la LGSS, en additionnant les bases de cotisations espagnoles du 1er avril 1984 au 31 mars 1999, soit pendant les quinze années précédant le paiement de la dernière cotisation par Mme Salgado González en Espagne, et en les divisant par 210. La requérante au principal n’ayant cependant commencé à cotiser à la sécurité sociale espagnole que le 1er février 1989, les cotisations comprises entre le 1er avril 1984 et le 31 janvier 1989 ont été comptabilisées comme nulles. |
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Sur ce montant de base, l’INSS a opéré les ajustements décrits aux points 19 et 20 du présent arrêt afin de fixer le montant effectif de la prestation. |
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Après avoir intenté sans succès des recours administratifs préalables, Mme Salgado González a formé un recours devant le Juzgado de lo Social no 3 de Ourense, qui a également été rejeté. |
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Saisie en appel, la juridiction de renvoi précise que, pour déterminer le montant de base de la prestation vieillesse à accorder à la requérante au principal, l’INSS a procédé à l’application combinée du point 4 de la partie H de l’annexe VI du règlement no 1408/71 et de l’article 162, paragraphe 1, de la LGSS. |
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La juridiction de renvoi indique qu’elle n’a aucun doute sur l’impossibilité d’inclure les cotisations payées au Portugal par Mme Salgado González dans le calcul du montant de base de la pension de retraite espagnole de celle-ci. Toutefois, elle estime que la méthode utilisée par l’INSS pour calculer ce montant n’est pas conforme aux exigences de la liberté de circulation des travailleurs concernant les prestations sociales visées à l’article 48 TFUE ni à l’égalité de traitement des travailleurs sédentaires et migrants prévue à l’article 3 du règlement no 1408/71. |
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En particulier, d’une part, le fait d’utiliser pour les travailleurs migrants communautaires le diviseur 210, alors même que les années de cotisation en Espagne sont inférieures à quinze, les place dans une situation d’inégalité par rapport aux travailleurs non migrants qui cotisent en Espagne. En effet, pour un effort de cotisation équivalent à celui d’un travailleur non migrant cotisant en Espagne, le travailleur migrant communautaire, qui a réparti ses cotisations entre le Royaume d’Espagne et un autre État membre, obtiendrait un montant de base d’autant plus faible que l’intéressé aura moins cotisé en Espagne. Un tel résultat serait contraire à l’objectif communautaire, prévu à l’article 48 TFUE, consistant à éviter que le travailleur migrant ne subisse une réduction du montant de la prestation qu’il aurait reçue s’il n’avait pas été migrant (voir arrêts du 9 août 1994, Reichling, C-406/93, Rec. p. I-4061, point 26, et du 12 septembre 1996, Lafuente Nieto, C-251/94, Rec. p. I-4187, point 38). |
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D’autre part, la juridiction de renvoi expose que, plus un travailleur cotise dans un État membre autre que le Royaume d’Espagne, moins il dispose de temps au cours de son parcours professionnel pour verser ses cotisations espagnoles – lesquelles sont les seules qui peuvent être prises en compte selon le point 4 de la partie H de l’annexe VI du règlement no 1408/71 – pendant la période de quinze ans visée à l’article 162, paragraphe 1, de la LGSS. Ces circonstances caractériseraient la différence de situation existant entre le travailleur migrant cotisant en Espagne et le travailleur non migrant cotisant également en Espagne, dans la mesure où ce dernier dispose de toute la durée de son parcours professionnel pour couvrir ces quinze années de cotisation. |
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Le Tribunal Superior de Justicia de Galicia a, dès lors, décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:
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Sur les questions préjudicielles
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Par ses questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi cherche, en substance, à savoir si les articles 48 TFUE et 3 du règlement no 1408/71 ainsi que le point 4 de la partie H de l’annexe VI de celui-ci ou encore l’annexe XI, rubrique «Espagne», point 2, sous a), du règlement no 883/2004 s’opposent à la réglementation d’un État membre, telle que celle en cause au principal, en vertu de laquelle le montant théorique de la pension de vieillesse du travailleur non salarié, migrant ou non, est invariablement calculé à partir des bases de cotisations de ce travailleur sur la période de référence fixe de quinze ans qui précède le paiement de sa dernière cotisation dans cet État, divisées par 210, sans que ni la durée de cette période ni le diviseur utilisé ne puissent être adaptés afin de tenir compte du fait que le travailleur concerné a exercé son droit à la libre circulation. |
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À titre liminaire, il y a lieu de constater que, conformément à l’article 91 du règlement no 883/2004, lu en combinaison avec l’article 97 du règlement no 987/2009, le règlement no 883/2004 n’est applicable qu’à partir du 1er mai 2010. |
33 |
Or, ainsi qu’il résulte du point 16 du présent arrêt, l’INSS a, le 9 novembre 2006, accordé à Mme Salgado González une pension de vieillesse avec effet à partir du 1er janvier 2006. En outre, comme l’a également relevé M. l’avocat général au point 30 de ses conclusions, aucun élément du dossier ne permet d’établir que Mme Salgado González se soit prévalue de la possibilité offerte par l’article 87, paragraphe 5, dudit règlement, visant à la révision de ses droits. |
34 |
Il s’ensuit que le règlement no 883/2004 n’est pas applicable ratione temporis à l’affaire au principal. |
35 |
Afin de répondre aux questions posées par la juridiction de renvoi, il convient de rappeler que le règlement no 1408/71 n’organise pas un régime commun de sécurité sociale, mais laisse subsister des régimes nationaux distincts et a pour unique objet d’assurer une coordination entre ces derniers. Ainsi, selon une jurisprudence constante, les États membres conservent leur compétence pour aménager leurs systèmes de sécurité sociale (voir arrêts du 1er avril 2008, Gouvernement de la Communauté française et gouvernement wallon, C-212/06, Rec. p. I-1683, point 43, ainsi que du 21 juillet 2011, Stewart, C-503/09, Rec. p. I-6497, point 75). |
36 |
Dès lors, en l’absence d’une harmonisation au niveau de l’Union, il appartient à la législation de chaque État membre de déterminer, notamment, les conditions qui donnent droit à des prestations (arrêt Stewart, précité, point 76 et jurisprudence citée). |
37 |
Dans l’exercice de cette compétence, les États membres doivent néanmoins respecter le droit de l’Union et, en particulier, les dispositions du traité FUE relatives à la liberté reconnue à tout citoyen de l’Union de circuler et de séjourner sur le territoire des États membres (arrêt Stewart, précité, point 77 et jurisprudence citée). |
38 |
À cet égard, il y a lieu de rappeler que, aux termes de l’article 45 du règlement no 1408/71, lorsque la législation d’un État membre subordonne à l’accomplissement de périodes d’assurance l’acquisition du droit à des prestations prévues par cette disposition, telle la pension de vieillesse, l’institution compétente de cet État membre tient compte, dans la mesure où cela est nécessaire, des périodes d’assurance accomplies sous la législation de tout autre État membre. Dans ce but, elle tient compte de ces périodes, comme s’il s’agissait de périodes accomplies sous la législation qu’elle applique. |
39 |
Dans l’affaire au principal, il n’est pas contesté que l’INSS, afin de vérifier si Mme Salgado González avait cotisé pendant la période minimale de quinze ans prévue à l’article 161, paragraphe 1, sous b), de la LGSS, a tenu compte tant des périodes accomplies en Espagne que de celles accomplies au Portugal, conformément à l’article 45 du règlement no 1408/71. |
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En revanche, la juridiction de renvoi s’interroge sur la question de savoir si le droit de l’Union s’oppose aux modalités de calcul du montant théorique de la prestation en cause utilisées par l’INSS. |
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À cet égard, il convient de rappeler que, selon l’article 46, paragraphe 2, sous a), du règlement no 1408/71, le montant théorique d’une telle prestation doit être calculé comme si l’assuré avait exercé toute son activité professionnelle exclusivement dans l’État membre en cause (arrêt du 21 juillet 2005, Koschitzki, C-30/04, Rec. p. I-7389, point 27). |
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Par ailleurs, l’article 47 du règlement no 1408/71 prévoit des dispositions complémentaires pour le calcul des prestations. En particulier, à son paragraphe 1, sous g), il dispose que lorsque la législation d’un État membre prévoit que le calcul des prestations repose sur une base de cotisation moyenne, l’institution compétente détermine cette base en fonction des seules périodes d’assurance accomplies sous la législation dudit État. Par ailleurs, la partie H de l’annexe VI du règlement no 1408/71, qui expose les modalités particulières d’application de la législation espagnole, précise, à son point 4, sous a), que, en application de l’article 47 de ce règlement, le calcul de la prestation théorique espagnole s’effectue sur les bases des cotisations réelles de l’assuré, pendant les années précédant immédiatement le paiement de la dernière cotisation à la sécurité sociale espagnole. |
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Ainsi qu’il ressort d’une jurisprudence constante, les articles 46, paragraphe 2, et 47, paragraphe 1, du règlement no 1408/71 doivent être interprétés à la lumière de l’objectif fixé par l’article 48 TFUE, qui implique notamment que les travailleurs migrants ne doivent pas subir de réduction du montant des prestations de sécurité sociale du fait qu’ils ont exercé leur droit à la libre circulation (arrêts précités Reichling, points 21 et 22, ainsi que Lafuente Nieto, point 33). |
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Or, dans le cadre de la liquidation de la prestation en cause au principal, l’INSS a procédé au calcul du montant théorique de la pension de vieillesse de Mme Salgado González en application de la règle prévue à l’article 162, paragraphe 1, de la LGSS, selon laquelle ce montant doit être calculé sur la base d’une cotisation moyenne. |
45 |
Certes, dans le but de reconnaître le droit à la prestation, elle a tenu compte des cotisations portugaises comme si celles-ci étaient des périodes accomplies sous la législation espagnole, en conformité avec l’article 45 du règlement no 1408/71. |
46 |
Toutefois, l’article 47, paragraphe 1, sous g), du règlement no 1408/71 implique que le calcul de la base de cotisation moyenne repose sur le montant des seules cotisations versées au titre de la légalisation concernée (voir, par analogie, arrêt Lafuente Nieto, précité, point 39). |
47 |
Il apparaît à cet égard que, dans le cadre du calcul du montant théorique de la prestation en cause au principal, l’INSS n’a pas calculé la cotisation moyenne de Mme Salgado González en fonction des seules périodes d’assurance accomplies en Espagne par celle-ci pendant les années précédant immédiatement le paiement de la dernière cotisation à la sécurité sociale espagnole, ainsi que l’impose l’article 47, paragraphe 1, sous g), du règlement no 1408/71 et le point 4, sous a), de la partie H de l’annexe VI de celui-ci. |
48 |
En effet, Mme Salgado González a cotisé au régime de sécurité sociale espagnol du 1er février 1989 au 31 mars 1999, pour un total de 3711 jours, soit environ dix ans et deux mois, alors que l’INSS ajoute au calcul une période fictive de cotisation allant du 1er avril 1984 au 30 janvier 1989 et cela afin de remplir la condition de cotisation portant sur une période de quinze ans précédant la dernière cotisation espagnole de Mme Salgado González. Par cette opération, l’INSS visait à fixer un numérateur auquel appliquer le diviseur de 210 prévu par l’article 162, paragraphe 1, de la LGSS et à calculer ainsi la base de cotisation moyenne nécessaire pour fixer le montant de base de la pension de retraite. |
49 |
Néanmoins, Mme Salgado González n’ayant pas cotisé entre le 1er avril 1984 et le 31 mars 1989, l’INSS a considéré dans le calcul des périodes d’assurance qui n’étaient pas accomplies en Espagne. Ces périodes ayant nécessairement été comptabilisées comme nulles, leur prise en compte a eu pour résultat une réduction de la base de cotisation moyenne de Mme Salgado González. |
50 |
Or, force est de constater qu’une telle réduction n’aurait pas eu lieu si Mme Salgado González avait cotisé uniquement en Espagne, sans exercer son droit à la libre circulation. En d’autres termes, contrairement aux exigences posées par l’article 46, paragraphe 2, sous a), du règlement no 1408/71, telles que rappelées au point 41 du présent arrêt, le montant théorique de la pension de vieillesse de Mme Salgado González n’a pas été calculé comme si celle-ci avait exercé toute son activité professionnelle exclusivement en Espagne. |
51 |
Il pourrait en aller autrement si, comme l’a relevé M. l’avocat général au point 44 de ses conclusions, la législation nationale prévoyait des mécanismes d’adaptation des modalités de calcul du montant théorique de la pension de vieillesse afin de prendre en compte l’exercice par le travailleur concerné de son droit à la libre circulation. En l’occurrence, eu égard aux modalités prévues à l’article 162, paragraphe 2, de la LGSS, le diviseur pourrait être ajusté pour refléter le nombre de cotisations pour les rémunérations ordinaires et extraordinaires dont l’assuré s’est effectivement acquitté. |
52 |
Eu égard à tout ce qui précède, il y a lieu de répondre aux questions posées que les articles 48 TFUE, 3, 46, paragraphe 2, sous a), et 47, paragraphe 1, sous g), du règlement no 1408/71 ainsi que le point 4 de la partie H de l’annexe VI de celui-ci doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à la réglementation d’un État membre, telle que celle en cause au principal, en vertu de laquelle le montant théorique de la pension de vieillesse du travailleur non salarié, migrant ou non, est invariablement calculé à partir des bases de cotisations de ce travailleur sur une période de référence fixe qui précède le paiement de sa dernière cotisation dans cet État, auxquelles est appliqué un diviseur fixe, sans que ni la durée de cette période ni ce diviseur ne puissent être adaptés afin de tenir compte du fait que le travailleur concerné a exercé son droit à la libre circulation. |
Sur les dépens
53 |
La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement. |
Par ces motifs, la Cour (première chambre) dit pour droit: |
Les articles 48 TFUE, 3, 46, paragraphe 2, sous a), et 47, paragraphe 1, sous g), du règlement (CEE) no 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l’application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CE) no 118/97 du Conseil, du 2 décembre 1996, tel que modifié par le règlement (CE) no 629/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 5 avril 2006, ainsi que le point 4 de la partie H de l’annexe VI de celui-ci doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à la réglementation d’un État membre, telle que celle en cause au principal, en vertu de laquelle le montant théorique de la pension de vieillesse du travailleur non salarié, migrant ou non, est invariablement calculé à partir des bases de cotisations de ce travailleur sur une période de référence fixe qui précède le paiement de sa dernière cotisation dans cet État, auxquelles est appliqué un diviseur fixe, sans que ni la durée de cette période ni ce diviseur ne puissent être adaptés afin de tenir compte du fait que le travailleur concerné a exercé son droit à la libre circulation. |
Signatures |
( *1 ) Langue de procédure: l’espagnol.