Résumé JURE

Résumé JURE

Cette affaire concerne un recours examiné par la Cour d’appel de Luxembourg, formé par la République slovaque (ci-après « la demanderesse »), contre une ordonnance du 21 mars 2013 (ci-après « l’ordonnance ») du Tribunal de première instance de Luxembourg, qui a déclaré exécutoire au Luxembourg une sentence arbitrale rendue le 7 décembre 2012 à Francfort-sur-le-Main, entre la société SOC1 BV (ci-après « la défenderesse ») et la demanderesse.

Dans le recours, la défenderesse a soulevé les demandes sollicitant une déclaration de nullité de l’ordonnance, le refus d’exequatur et la reformation de l’ordonnance. Elle a allégué une violation de l’article 3 de la loi sur le régime des langues et de l’article IV de la Convention de New York sur la reconnaissance de l’exécution des sentences arbitrales étrangères (1) (ci-après « la Convention de New York »). L’article 3 de ladite Convention prévoit qu’« en matière administrative, contentieuse ou non contentieuse, et en matière judiciaire, il peut être fait usage des langues française, allemande ou luxembourgeoise, sans préjudice des dispositions spéciales concernant certaines matières ». Selon la demanderesse, la sentence arbitrale a été rédigée en anglais et le magistrat, en émettant l’ordonnance, a apposé le tampon « grosse » avec la formule exécutoire sur la version anglaise, et non sur la traduction dans l’une des trois langues judiciaires.

La Cour d’appel de Luxembourg a constaté que la « grosse » contenant la sentence anglaise ne constitue pas elle-même la décision, bien qu’elle en fait partie, et que l’ordonnance a été rédigée en français. En outre, l’inobservation du régime des langues n’entraînerait pas une nullité de fond de la décision. La critique de la demanderesse a visé la grosse, mais n’a pas été justifiée à l’égard de ladite ordonnance. Par conséquent, la Cour a statué que la demande en nullité de la demanderesse est à rejeter.

Quant à la violation de l’article IV de la Convention de New York, la demanderesse a fait valoir que le fait qu’une traduction conforme de la sentence n’ait pas été soumise et que la sentence n’ait pas été certifiée par un notaire luxembourgeois, constitue une violation dudit article, qui prévoit que « l’original dûment authentifié de la sentence ou une copie de cet original réunissant les conditions requises pour son authenticité ».  La Cour d’appel a constaté que l’article IV n’interdit pas au juge de déclarer exécutoire la sentence arbitrale rédigée dans une langue qu’il comprend, même si elle n’est pas accompagnée d’une traduction dans l’une des trois langues judiciaires. L’article IV de la Convention de New York est à interpréter en ce sens que le juge peut refuser de déclarer exécutoire une sentence arbitrale si celle-ci n’est pas accompagnée d’une traduction et ainsi obliger le requérant à soumettre une traduction. Selon la Cour, ni l’article IV de la Convention de New York ni une autre disposition légale luxembourgeoise ne prescrivent, sous peine de nullité de la décision d’exequatur, le dépôt d’une copie de la sentence arbitrale certifiée conforme par un notaire luxembourgeois. La copie de ladite sentence était certifiée par un notaire néerlandais qui pouvait établir des actes authentiques pouvant être déclarés exécutoire en application de l’article 57 du règlement de Bruxelles I (2), le magistrat ayant déclaré la sentence a pu admettre que l’authenticité de la copie a été établie.

Par ces motifs, la Cour d’appel a déclaré le recours recevable et les demandes de la demanderesse non fondées.


(1) Convention de New York sur la reconnaissance de l’exécution des sentences arbitrales étrangères (New York, 1958).

(2Règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale.