AVIS
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Comité économique et social européen
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Évaluation des rapports Letta et Draghi / marché unique de l’UE
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Évaluation des rapports Letta et Draghi
sur le fonctionnement et la compétitivité du marché unique de l’Union européenne
(avis d’initiative)
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INT/1070
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Rapporteur: Matteo Carlo BORSANI
Rapporteur: Giuseppe GUERINI
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Rapporteur: Stefano PALMIERI
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Conseillers
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Eleonora TRENTO (pour le rapporteur Matteo Carlo BORSANI)
Samuel CORNELLA (pour le rapporteur Giuseppe GUERINI)
Marco CILENTO (pour le rapporteur Stefano PALMIERI)
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Décision de l’assemblée plénière
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11/7/2024
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Base juridique
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Article 52, paragraphe 2, du règlement intérieur
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Compétence
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Section «Marché unique, production et consommation»
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Adoption en section
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12/2/2025
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Adoption en session plénière
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26/2/2025
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Session plénière nº
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594
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Résultat du vote
(pour/contre/abstentions)
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222/2/6
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1.Conclusions et recommandations
1.1Le Comité économique et social européen (CESE) souscrit aux appels lancés par les rapports Draghi et Letta quant à la nécessité d’agir de toute urgence pour rendre l’économie européenne plus compétitive, et ce faisant «de nous défaire de l’illusion que reporter les échéances représente le seul moyen de préserver la concorde».
1.2Il est donc primordial de continuer à œuvrer pour parachever le marché unique, en l’étendant aux secteurs de la finance, des communications électroniques et de l’énergie, ainsi qu’en le renforçant dans le domaine des services.
1.3Les institutions de l’Union européenne et ses États membres doivent ouvrir un débat en bonne et due forme sur les règles fondamentales de l’Union et sur l’adéquation des traités en vigueur au regard des défis actuels, qui exigent de la célérité dans la pensée comme dans l’action.
1.4Le CESE invite les institutions européennes à aller de l’avant dans l’achèvement du marché unique, tout en restant très attentives à la durabilité environnementale, à la prospérité économique et à la cohésion sociale et territoriale, qu’elles devraient traiter comme des facteurs de compétitivité.
1.5Le CESE soutient l’analyse qu’effectuent les rapports Draghi et Letta quand ils rappellent qu’il est primordial qu’avec les valeurs et les règles qui sont les siennes, l’économie européenne retrouve sa compétitivité en consolidant sa place sur la scène internationale.
1.6Le CESE en appelle aux institutions de l’Union européenne pour qu’elles adoptent une politique industrielle capable de surmonter l’approche compartimentée qui prévaut aujourd’hui et se traduit par l’existence d’un faisceau de politiques industrielles nationales qui ne sont pas toujours coordonnées. De fait, présenter un front uni est la seule voie envisageable pour parvenir à proposer, en faveur du marché unique, cet arsenal efficace de dispositions fiscales, réglementaires, commerciales ou douanières et de mesures incitatives d’ordre financier dont on a besoin.
1.7Le CESE rappelle qu’il importe d’alléger la charge bureaucratique et les coûts de mise en conformité qui pèsent sur les entreprises, par l’amélioration de la réglementation et une réelle simplification des exigences administratives. Il serait très utile à cet égard de renforcer l’analyse qui est faite de l’impact des réglementations, notamment du point de vue de la compétitivité («contrôle de compétitivité»), afin de soutenir l’esprit d’entreprise et la création d’emplois de qualité, l’amélioration des conditions de travail ainsi qu’une croissance économique durable et la cohésion sociale.
1.8Le CESE espère que des choix réglementaires seront posés en vue de réduire les prix de l’énergie, et surtout de réduire les écarts de prix entre les États membres et entre l’Europe et d’autres économies. À ce titre, il serait souhaitable de recourir plus largement aux contrats d’écart compensatoire et de découpler le prix des énergies renouvelables et d’autres formes d’énergie peu émettrices de carbone de celui, plus volatile, des énergies fossiles. Il serait par ailleurs bienvenu et nécessaire d’augmenter les investissements dans le secteur des énergies renouvelables et des autres formes d’énergie à faible intensité de carbone.
1.9Le CESE considère qu’il y a lieu d’évaluer soigneusement le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) et il incite les législateurs de l’Union à se pencher sur les modalités adéquates pour calibrer le régime des exportations et importations de telle manière que l’industrie de l’Union européenne soit en mesure de rester compétitive sur les marchés internationaux.
1.10Le CESE relève que les actions proposées par les rapports Draghi et Letta nécessitent d’engager une série imposante d’investissements, et il invite en conséquence les institutions européennes à mener une réflexion sur une éventuelle émission d’actifs sûrs européens, auxquels il avait été recouru en réaction à la pandémie.
1.11Nonobstant la nécessité pour l’Union européenne de toujours se faire le champion de la paix, conformément à une vision de la sécurité qui dépasse la seule dimension militaire, le CESE constate que l’évolution des conditions géopolitiques appelle la mise en œuvre d’une politique européenne de défense, doublée d’une politique étrangère commune plus forte. Il faudra aussi augmenter les investissements dans la défense, notamment grâce à de nouveaux instruments de financement qui permettront de rehausser le niveau de développement technologique dans ce domaine.
1.12Le CESE espère qu’une réflexion nouvelle sera menée sur la question des biens publics européens, au terme de laquelle il sera possible de définir les priorités qui sont essentielles pour l’avenir de l’Union européenne. La fourniture de ces biens étant liée à des facteurs de nature économique, institutionnelle et politique, la démarche consistant à donner une garantie européenne sur ce terrain, en lieu et place de la multiplicité des approches nationales, apporterait une valeur ajoutée.
2.Introduction et contexte
2.1Le CESE apprécie les rapports Draghi et Letta, tant pour le large éventail de thèmes qu’ils abordent que pour avoir le courage d’avancer des propositions ambitieuses. Les deux documents partent d’une analyse générale pour procéder ensuite à un examen détaillé des initiatives qu’ils suggèrent de prendre pour renforcer le marché unique et la compétitivité de l’Union européenne. Le CESE entend ici analyser celles parmi les questions abordées dans les deux rapports qui apparaissent les plus urgentes.
2.2Après avoir recensé, dans la première partie du présent avis, les investissements qui sont les plus urgents dans différents domaines, le Comité exhorte les décideurs européens, dans son second volet, à suivre une acception du concept de compétitivité qui tienne compte de sa dimension sociale et qui englobe la cohésion économique, sociale et territoriale. Dans cette optique, le CESE souligne qu’il est important de soutenir les investissements consacrés au déploiement d’infrastructures au bénéfice de la société, et il renvoie aux conclusions du sommet de Val Duchesse, où l’Europe a renouvelé son engagement en faveur du dialogue social et réaffirmé son importance pour la mise en œuvre du socle européen des droits sociaux, ainsi qu’à la déclaration de La Hulpe.
2.3Le CESE fait valoir que l’Union européenne se trouve face à un choix stratégique fondamental, celui soit de se faire l’artisan actif de la transformation économique qui se dessine à l’échelle mondiale en augmentant significativement sa compétitivité, soit de s’ériger en gardienne des acquis du passé, et qu’elle doit dans le même temps veiller à ce que ses engagements antérieurs en matière de durabilité et de climat soient respectés.
2.4En conséquence, et pour faire écho aux arguments avancés dans les rapports Letta et Draghi, le CESE affirme à son tour qu’il n’y a plus un instant à perdre et qu’il nous faut agir promptement, et il invite les colégislateurs à s’appliquer en ce sens.
3.Le marché intérieur et son avenir
3.1Le CESE rejoint les rapports Letta et Draghi quand ils estiment que sous l’angle technique comme d’un point de vue politique, le marché unique constitue l’une des principales réussites à inscrire à l’actif du processus d’intégration européenne. Néanmoins, il s’impose que la forme sous laquelle il se présentait originellement soit revue pour l’adapter à la configuration géopolitique qui s’est formée depuis lors et à l’évolution démographique de l’Union, dont la main-d’œuvre disponible sera amputée chaque année de deux millions de travailleurs d’ici 2040. Le CESE souhaite être directement associé au groupe de travail sur le respect de l’application des règles du marché unique, compte tenu de l’importance centrale que revêt l’application en bonne et due forme de ces mêmes règles.
3.2Par ailleurs, le CESE juge qu’il est primordial de continuer à œuvrer pour parachever le marché unique, en l’étendant aux secteurs de la finance, des communications électroniques et de l’énergie, ainsi qu’en le renforçant dans le domaine des services, où, aujourd’hui encore, de nombreux obstacles freinent l’intégration.
3.3Un marché unique plus vigoureux et intégré induira des bienfaits économiques et sociaux. En conséquence, le CESE estime que les propositions qui, dans les deux rapports, sont avancées pour le renforcer, ainsi que la monnaie européenne commune, doivent se doubler de politiques budgétaires, sociales et environnementales propres à garantir que les avantages qu’il apporte profiteront à l’ensemble des citoyens et des travailleurs de l’Union européenne.
3.4Les rapports Draghi et Letta, de manière plus implicite pour ce qui est de ce dernier, tablent sur un partenariat rénové entre les États membres de l’Union européenne. Ce postulat nous rappelle que concernant les règles fondamentales de l’Union et l’adéquation des traités en vigueur par rapport aux réalités actuelles, il s’impose de mener un débat qui prenne appui sur les initiatives ambitieuses préconisées par l’un et l’autre texte, dont ont été d’ailleurs extraites certaines des instructions figurant dans les lettres de mission qui ont été adressées aux nouveaux commissaires.
3.5Le CESE considère toutefois que la mise en œuvre concrète des deux rapports Draghi et Letta pourrait poser des difficultés dans le nouveau cadre de la gouvernance économique européenne, en l’occurrence la version réformée du pacte de stabilité et de croissance, dans la mesure où ce nouvel encadrement crée des contraintes budgétaires qui jusqu’à présent se sont peut-être avérées trop restrictives, ainsi que le comité budgétaire européen l’a fait valoir
.
3.6Le CESE soutient l’appel lancé par le rapport Letta quand il préconise un marché unique tourné vers la durabilité environnementale et la prospérité économique, tout comme il soutient l’appel du rapport Draghi à faire des ambitions nourries par l’Europe en matière de durabilité un ingrédient de sa compétitivité. Depuis de nombreuses années, le CESE défend la transition d’une économie linéaire à une économie circulaire et fait valoir le rôle qui revient à la société civile à cet égard.
4.Une Union européenne en position de tête dans la course mondiale
4.1Le CESE adhère au constat qu’économiquement, l’Union européenne se trouve en compétition non seulement avec les États-Unis, mais également avec des économies émergentes telles que la Chine et l’Inde, dans un environnement international qui a gagné en complexité par rapport à celui où s’inscrivait le marché unique à sa création. Sur ce point, le rapport Draghi dessine trois domaines d’intervention essentiels, à savoir i) l’impératif de se positionner de manière compétitive dans la «course» planétaire, en rattrapant le retard que l’Union accuse en matière d’innovation, ii) l’enjeu que représente la réduction des dépendances stratégiques qui l’affectent à l’égard de chaînes d’approvisionnement situées hors de son territoire, et enfin iii) sa capacité à agir véritablement de manière unie.
4.2À la lumière de ces éléments, le CESE souligne qu’il est important pour l’Union européenne de faire preuve d’ambition dans sa politique commerciale et dans la coopération qu’elle mène avec ses partenaires au niveau mondial.
4.3Le CESE soutient l’analyse qu’effectuent les rapports Draghi et Letta quand ils rappellent qu’il est primordial qu’avec les valeurs et les règles qui sont les siennes, l’économie européenne retrouve sa compétitivité en consolidant sa place sur la scène internationale, nonobstant l’essor rapide et continu de grands blocs commerciaux non européens et une montée en puissance des tensions géopolitiques qui ne laisse pas d’inquiéter.
4.4L’Union européenne doit continuer à jouer un rôle exemplaire sur les questions liées au changement climatique, à la pollution et au recul de la biodiversité.
4.5Dans le contexte ainsi tracé, le CESE est d’avis que l’Union européenne ne doit pas renoncer à être un héraut de la paix et de la démocratie
, et qu’elle doit pour ce faire apporter sa contribution à la recherche de nouveaux équilibres planétaires, que ce soit en s’employant à conférer à l’euro un rôle plus affirmé sur la scène économique mondiale ou en renforçant sa capacité à parler d’une seule voix dans le domaine de la politique étrangère. Il demande que soit examinée la possibilité de recourir, en la matière, au vote à la majorité.
4.6Le CESE adresse une mise en garde contre le danger d’émiettement qui guette la gouvernance mondiale et le risque d’assister à une hausse des tarifs douaniers. La capacité à nouer des relations internationales bénéfiques connaît une crise qui risque d’alimenter une course aux avantages concurrentiels, laquelle est susceptible d’attiser des tensions et conflits porteurs de lourdes menaces pour la paix, les valeurs démocratiques et la réalisation d’objectifs sociaux et environnementaux. Par ailleurs, le CESE estime qu’une amélioration des conditions de vie et de travail de la population mondiale, conformément à la perspective de durabilité tracée par le programme des Nations unies à l’horizon 2030, compte également parmi les facteurs dont dépendra l’instauration d’une paix stable et durable à l’échelle de la planète.
5.Une politique industrielle de l’Union européenne
5.1Le CESE apprécie que le rapport Draghi décèle l’existence d’une corrélation forte entre la compétitivité industrielle et la durabilité du modèle social européen, lequel constitue véritablement le ciment du processus d’intégration dans l’Union et l’une de ses valeurs fondatrices.
5.2Le CESE souscrit à l’appel lancé par Mario Draghi quant à la nécessité d’une politique industrielle capable de surmonter l’approche compartimentée qui prévaut aujourd’hui et se traduit par l’existence d’un faisceau de politiques industrielles nationales qui ne sont pas toujours coordonnées. De fait, un effort européen structuré constitue la seule voie envisageable pour parvenir à proposer, en faveur du marché unique, cet arsenal efficace de dispositions fiscales, réglementaires, commerciales ou douanières et de mesures incitatives d’ordre financier qui constitue la marque distinctive des politiques industrielles les plus récentes qui sont menées par les États-Unis et la Chine. Un tel effort devra être fourni moyennant des initiatives législatives qui soient rationalisées pour être plus ciblées d’un point de vue qualitatif, de manière à pouvoir en évaluer l’impact sur les entreprises européennes et sur la création d’emplois de qualité.
5.3Le CESE est d’avis qu’il serait possible de remédier, en tout cas pour partie, à la modestie des sommes qui sont actuellement investies en Europe dans la recherche, le développement et l’innovation, ainsi qu’aux carences concernant l’adoption de technologies avancées, en augmentant pour ce faire les investissements publics et en les engageant de manière plus réfléchie, car selon Mario Draghi, Horizon Europe est par trop dispersé quant à ses objectifs. Le Comité approuve donc ledit rapport quand il appelle à concentrer les investissements sur des secteurs à haut potentiel de croissance et i) à cibler et coordonner les interventions, ii) à définir, en matière industrielle, une stratégie efficace, fondée sur la recherche et le développement ainsi que sur l’innovation technologique, et, enfin, iii) à soutenir les partenariats industriels, en renforçant les instruments relevant de l’échelon central, tels que les projets importants d’intérêt européen commun (PIIEC).
5.4En ce qui concerne les concentrations, le CESE soutient l’approche globale exposée dans ce même rapport Draghi, lequel propose qu’un équilibre soit trouvé entre la politique de la concurrence et celle de l’industrie et qu’il soit notamment accordé suffisamment de poids à des facteurs stratégiques comme l’innovation et la concurrence future ou potentielle, y compris au niveau international. En concordance avec le document de Mario Draghi, le CESE estime que pour faciliter pareille approche, il n’est pas indispensable de modifier le règlement européen sur les concentrations mais qu’il convient plutôt de mettre à jour les lignes directrices de la Commission. Il préconise en la matière beaucoup de prudence dans l’évaluation qui sera faite d’éventuelles concentrations dans des domaines stratégiques pour la sécurité des citoyens européens, comme les technologies de l’information et de la communication ou les technologies à double usage.
5.5S’agissant de l’article 101 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, le CESE reconnaît qu’il importe de fournir des orientations et des modèles clairs pour les accords de coopération horizontale conclus entre des entreprises de l’Union, ainsi que le propose encore le rapport Draghi, le but étant de favoriser les investissements de recherche et développement, la transition vers la durabilité et d’autres initiatives stratégiques.
6.Le cadre réglementaire de l’Union européenne
6.1Dans le prolongement de plusieurs de ses prises de position antérieures, le CESE rappelle qu’il importe d’alléger la charge bureaucratique et les coûts de mise en conformité que les réglementations, tant nationales qu’européennes, font peser sur toutes les entreprises, de manière à stimuler leur productivité et leur compétitivité, grâce au «mieux réglementer» et à une réelle simplification des exigences administratives.
6.2Le Comité appelle de ses vœux la mise en œuvre de la proposition de la Commission européenne qui vise à réduire de 25 % la charge déclarative pesant sur les entreprises, en élargissant le champ de cette mesure pour qu’elle englobe les contraintes bureaucratiques au sens large et en portant la barre à au moins 50 % dans le cas des petites et moyennes entreprises, sans nuire pour autant à l’engagement du secteur privé de conformer ses activités économiques aux objectifs communs en matière environnementale, dans le domaine social et du point de vue de la compétitivité.
6.3De ce fait, le CESE fait bon accueil au rappel en ce sens que formule le rapport Draghi, lorsqu’il fait observer que le poids de la bureaucratie est particulièrement pénalisant pour les petites et moyennes entreprises. Il apparaît nécessaire, à cet égard, de renforcer l’analyse d’impact à effectuer sur les futures dispositions, notamment en réalisant des simulations préalables basées sur des retours d’information de nature économétrique et quantitative. Dans cette perspective, le CESE est en outre favorable à l’idée d’analyser par anticipation l’impact de toute future législation de l’Union sur la compétitivité («contrôle de compétitivité») et d’élargir la portée de cette évaluation aux modifications et amendements de fond intervenant au cours de la procédure législative, afin de soutenir l’esprit d’entreprise et la création d’emplois de qualité, l’amélioration des conditions de travail ainsi qu’une croissance économique durable et la cohésion sociale.
6.4Le CESE recommande d’élaborer des mécanismes de bonne législation, qui respectent le principe de subsidiarité et mettent en vedette le rôle du dialogue social et l’association des partenaires sociaux et de la société civile. En outre, les gouvernements nationaux ne sauraient se prévaloir de l’activité législative européenne pour réduire la protection des travailleurs mais se devront au contraire de soutenir le travail décent grâce à des droits et mesures de protection, en favorisant le processus de convergence et l’amélioration des conditions de vie et de travail des citoyens européens, et en tenant compte aussi de la vitesse à laquelle évoluent les usages des nouvelles technologies.
7.L’union bancaire et celle des capitaux
7.1Le CESE rappelle l’importance stratégique de l’union des capitaux, lancée en 2015, et réitère dans le même temps l’appel qu’il a déjà lancé à maintes reprises quant à la nécessité de parachever l’union bancaire, tout en assurant la protection des petits épargnants et le respect des objectifs de l’épargne-retraite.
7.2Par ailleurs, il s’impose d’œuvrer en faveur d’un marché européen du capital-risque qui soit plus abouti: dans sa taille actuelle, représentant une part de 5 % du total mondial, il ne soutient absolument pas la comparaison avec ceux des États-Unis et de la Chine, qui comptent respectivement pour 50 % et 40 % à cette même échelle planétaire, et il en résulte que les acteurs européens de l’innovation, butant sur des difficultés objectives lors de la phase de démarrage et de montée en puissance, délocalisent alors leurs projets en dehors de l’Union européenne.
8.Une Union de l’énergie
8.1Le CESE souhaite que soient posés des choix réglementaires qui visent à faire baisser les prix de l’énergie, lesquels sont aujourd’hui plus élevés en Europe qu’ils ne le sont dans d’autres économies et lui infligent ainsi un handicap concurrentiel. Les raisons qui sont à la base de cette situation défavorable ne se ramènent pas uniquement à l’absence notoire de ressources naturelles sur le territoire de l’Union européenne mais sont également à mettre en rapport i) avec la lenteur qui préside à la réalisation de certains investissements stratégiques dans les énergies propres, ii) aux règles fiscales en vigueur, qui ne sont pas optimales et iii) à un fonctionnement du marché des produits dérivés qui peut favoriser la volatilité, selon le rapport Draghi. Par ailleurs, comme le souligne Enrico Letta, un facteur pénalisant supplémentaire réside dans l’absence d’une intégration complète des marchés de l’énergie, qui ouvrirait la possibilité de réduire les coûts d’accès et de promouvoir les investissements.
8.2En conséquence, les deux rapports proposent chacun de mettre davantage l’accent sur les avantages qu’apportent les énergies renouvelables et d’autres formes d’énergie non fossile, en recourant notamment à des contrats d’écart compensatoire et à un découplage du prix de ces énergies par rapport à celles d’origine fossile, qui présentent, comme on sait, une plus grande variabilité.
8.3Le CESE incite la Commission européenne à soutenir les investissements dans les énergies renouvelables, à évaluer la possibilité de le faire pour d’autres formes d’énergie non fossile et à mettre en place des mesures concrètes pour que la part qui, dans les recettes procurées par le système d’échange de quotas d’émission (SEQE), est allouée aux États membres, c’est-à-dire environ 75 % en l’état actuel des choses, soit investie dans des projets axés sur la décarbonation, comme, entre autres exemples, le développement de procédés pour le captage, le stockage et l’utilisation du carbone (CUSC) ou la production d’hydrogène et l’accélération de son déploiement.
8.4Bien qu’ils insistent l’un et l’autre sur l’importance que le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) revêt pour prémunir l’industrie européenne contre le danger de fuites de dioxyde de carbone par relocalisation, tout comme contre celui d’enclencher une surenchère à la baisse en matière environnementale, les deux rapports n’en décèlent pas moins quelques points contestables dans ce dispositif. Le rapport Letta fait valoir qu’il est nécessaire, notamment en réexaminant la portée dudit mécanisme, d’évaluer avec soin le risque de perte de compétitivité qu’il fait courir à l’industrie européenne. Le rapport Draghi, en revanche, va jusqu’à douter que ce dispositif puisse même aboutir, en insistant sur la complexité excessive de cette mesure, qui impose d’énormes charges administratives aux entreprises, cependant que sa mise en œuvre par les États membres risque de s’effectuer de manière fragmentaire.
8.5Le CESE souscrit à la proposition que formule le rapport Letta d’établir, en coopération avec la Commission européenne et la Banque européenne d’investissement, un dispositif de garanties vertes européennes (GVE) qui aurait pour but de mobiliser des fonds publics et privés en faveur des objectifs de durabilité. Face à la montée en puissance agressive de la Chine dans les industries des technologies propres, il conviendrait de soutenir les positions de force que les entreprises européennes occupent actuellement dans ce domaine.
9.Une Union de la connaissance
9.1Le CESE se félicite que le rapport Letta suggère de compléter les quatre libertés classiques de circulation au sein du marché unique européen par l’adjonction d’une cinquième, axée sur la connaissance, la recherche et l’innovation.
9.2Le CESE soutient les actions que recense le rapport Draghi concernant le développement des compétences dont l’Union a besoin pour relever les défis de l’avenir, de manière à combler son retard sur le terrain de l’innovation et à faciliter le passage du stade de cette même innovation à celui de la commercialisation des produits et des services concernés. Parmi les propositions appréciables qui sont ainsi formulées figurent i) le soutien à la mise à niveau des compétences et à la reconversion professionnelle, en particulier dans les domaines technologiques et numériques, ii) l’amélioration de la mobilité en ce qui concerne les compétences, iii) la simplification de l’accès aux financements, et iv) la mise en place de partenariats public-privé pour définir des normes de compétences et des programmes de formation pertinents.
9.3Le CESE relève toutefois que le rapport Draghi ne met pas suffisamment en valeur le rôle que le dialogue social est susceptible de jouer pour mobiliser les investissements et enclencher la négociation collective aux fins d’accompagner les transitions, pas plus que l’importance que revêt la formation continue pour les travailleurs.
10.Le rôle de l’intelligence artificielle
10.1Le CESE rappelle le rôle que l’intelligence artificielle joue et l’importance qu’elle présente tant pour ce qui est de développer une cinquième liberté de circulation, assise sur la connaissance, l’innovation et la recherche, que vis-à-vis de l’impératif plus général d’accroître la productivité de l’économie européenne de demain grâce à une «intégration verticale» de cette technologie dans les processus industriels.
10.2Le déploiement de l’intelligence artificielle doit s’effectuer dans le respect de la déclaration européenne des droits et principes numériques pour la décennie numérique, suivant un modèle de développement qui respecte le pluralisme en matière d’information, l’épanouissement de la petite et moyenne entreprise et la création d’emplois supplémentaires.
10.3Compte tenu des possibles débordements de l’intelligence artificielle et de nouvelles technologies émergentes, l’approche à adopter doit consister à éviter que les travailleurs ne subissent des effets dommageables en raison de l’utilisation de ces technologies. Les initiatives législatives devraient s’attaquer aux lacunes en matière de protection des droits des travailleurs sur leur lieu de travail et faire prévaloir le principe voulant que les êtres humains gardent la main dans toutes leurs interactions avec la machine.
11.Le rôle des investissements
11.1Le CESE relève que les différentes actions proposées par les rapports Draghi et Letta ne peuvent se concevoir sans se doubler d’une série imposante d’investissements, comme le souligne le parallèle que le premier cité trace entre ceux qu’il est nécessaire de consentir aujourd’hui et le plan Marshall de l’après-guerre.
11.2Aussi le CESE invite-t-il les institutions européennes à mener une réflexion sur une éventuelle émission d’actifs sûrs européens, auxquels il avait été recouru durant la pandémie et suivant une approche neuve, qui ne serait plus liée cette fois à une urgence spécifique mais destinée à réaliser des objectifs sur le long terme et à produire des biens publics européens. Dans ce contexte, le CESE estime qu’il y aurait lieu d’étudier la possibilité de créer un fonds d’investissement européen commun financé par divers instruments, et notamment par une émission conjointe de dette de l’Union qui serait axée sur des projets d’intérêt européen commun et dotée d’une gouvernance propre à garantir le dialogue social.
11.3Le CESE fait valoir qu’au cours des deux décennies écoulées, l’on a assisté à une baisse des dépenses d’investissement, qui a pour conséquence que dans de nombreux États membres de l’Union européenne, le stock de capital public s’est contracté. En plus d’induire des problèmes de sécurité, pareille détérioration de ce capital compromet la qualité des services publics ainsi que leur fourniture, risquant ainsi de mettre un frein à la croissance économique et, par là aussi, à d’éventuels investissements privés.
11.4Dans la réglementation relative aux aides d’État, il serait possible de procéder à des adaptations allant dans le sens suggéré par le rapport Letta, en la remaniant de telle sorte qu’elle se prête à réaliser des objectifs stratégiques comme la transition écologique et numérique, ou encore qu’elle facilite, notamment, la réinsertion professionnelle des personnes défavorisées et l’accès des entreprises au crédit. Dans le même temps, il conviendrait de mettre rapidement en place un fonds de l’Union destiné aux investissements stratégiques présentant un intérêt européen, qui pourrait l’aider à affûter sa compétitivité et donner de l’élan aux transitions écologique et numérique.
11.5Le CESE fait en outre observer que s’il y a lieu de réduire l’écart de compétitivité constaté par rapport aux États-Unis et à la Chine, il s’impose tout autant de signaler qu’à l’échelle mondiale, le modèle européen fait figure de parangon en matière de protection sociale, de solidarité, d’inclusion dans la société, de durabilité et de gestion des inégalités. En même temps qu’elle ne cessera de gagner en compétitivité et en productivité, l’Union européenne devrait, grâce à la promotion du rôle joué par l’économie sociale, préserver mais aussi réinventer la tradition de solidarité et d’égalité qui est la sienne.
11.6Il convient cependant de souligner que si l’Europe ne parvient pas à devenir plus productive, elle sera contrainte d’opérer un choix entre faire la course en tête dans le domaine du développement technologique, jouer un rôle en pointe en matière climatique ou assurer son indépendance sur la scène mondiale, avec toutes les difficultés qui en résulteront pour ce qui sera de financer notre modèle social avancé. Le coût de la transition doit être partagé collectivement, et c’est pourquoi le CESE a fait valoir la nécessité d’adopter un cadre d’action pour une transition juste,.
12.Une Union de la défense
12.1Rappelant qu’aux termes de l’article 3 du traité sur l’Union européenne, celle-ci «a pour but de promouvoir la paix, ses valeurs et le bien-être de ses peuples», le CESE estime qu’en présence d’un conflit, elle se doit de faire valoir envers et contre tout une action diplomatique qui lui soit propre afin d’œuvrer à un règlement pacifique.
12.2Le CESE constate que l’invasion de l’Ukraine appelle la mise en œuvre d’une politique européenne de défense que l’on ne saurait dissocier d’une politique étrangère commune. À cet égard, il juge nécessaire d’augmenter les investissements, notamment grâce à de nouveaux instruments de financement qui permettront de rehausser le niveau de développement technologique des appareils militaires, surtout pour défendre les frontières orientales de l’Union.
12.3En conséquence, le CESE accueille favorablement les prises de position des deux rapports lorsqu’ils prônent l’un et l’autre i) de mieux agréger et coordonner la demande au niveau européen, de manière à augmenter les économies d’échelle, notamment en procédant à des appels d’offres conjoints et ii) de mettre immédiatement en œuvre la stratégie pour l’industrie européenne de la défense (EDIS), le document Draghi, demandant aussi, pour sa part, que le programme pour l’industrie européenne de la défense (EDIP) soit rapidement adopté. Par ailleurs, le rapport Letta explique qu’il s’impose d’adopter, vis-à-vis des dépenses dans le secteur de la défense, une approche globale qui prévoie des dispositifs incitatifs axés sur le marché, au niveau européen comme à celui des États membres.
13.Une Union capable de fournir des biens publics européens
13.1De l’avis du CESE, il s’impose, tout particulièrement dans la foulée des deux rapports à l’examen, de lancer sur la question des biens publics européens une réflexion au terme de laquelle il sera possible de définir les priorités qui sont essentielles pour l’avenir de l’Union européenne. La fourniture de ces biens étant liée à des facteurs de nature économique, institutionnelle et politique, un rôle actif des institutions européennes sur ce terrain apporterait, en complément d’approches nationales plurielles, une valeur ajoutée qui se traduirait par des économies d’échelle et des externalités positives.
13.2De ce fait, le CESE considère qu’il est important de procéder à des investissements adéquats dans la défense, mais aussi d’encourager les investissements portant, entre autres domaines, sur i) la mise à disposition d’infrastructures numériques et énergétiques transfrontières, ii) le développement de plateformes d’acquisition et de partage de compétences professionnelles, iii) le lancement de programmes d’achat commun de matières premières critiques, iv) la fourniture en commun de vaccins et de dispositifs sanitaires, v) l’élaboration de programmes de formation et de perfectionnement professionnel en continu, vi) l’implantation de services d’assistance sanitaire et, enfin, vii) une action de renforcement en matière de logement social.
13.3Eu égard à ces observations, il conviendra que le prochain cadre financier pluriannuel (CFP) 2028-2034 soit orienté vers les priorités stratégiques mises en avant tant dans les deux rapports que dans le cadre des investissements qui auront été consentis en faveur des biens publics mentionnés dans le paragraphe précédent. Pour ce motif, le CESE escompte que par leur répartition quantitative, les enveloppes prévues dans le prochain cadre financier pluriannuel donneront à l’Union européenne les moyens de répondre à ses priorités stratégiques en matière d’environnement, d’innovation technologique, d’autonomie stratégique ouverte et de progrès social, ainsi que de relever de manière appropriée les défis planétaires.
13.4Le CESE déplore que, de par sa trop faible ampleur, la plateforme «Technologies stratégiques pour l’Europe» ou «STEP», instrument adopté dans le cadre de la révision à mi-parcours du cadre financier pluriannuel pour la période 2021-2027, soit loin de soutenir la comparaison avec les initiatives similaires qu’ont prises d’autres pays.
13.5Le CESE estime en outre que, vu les effets positifs que ce dispositif a produits durant la crise de la COVID-19, il y aurait lieu d’examiner la possibilité de reprogrammer un nouvel instrument SURE pour accompagner la reconversion et le perfectionnement professionnels, une double transition durable et juste, ou encore la réponse apportée à d’éventuels chocs ponctuels,.
13.6Le CESE espère que le prochain cadre financier comportera un instrument pour les investissements stratégiques au service de la compétitivité de l’Europe, à mettre en parallèle avec sa cohésion sociale, afin d’associer à la logique de la redistribution et aux perspectives qu’elle dessine une logique d’investissements, en particulier dans les domaines de la compétitivité technologique et de la transformation de l’industrie.
13.7Bienvenu, ce «nouveau cadre de coordination de la compétitivité» qui est proposé par le rapport Draghi, quand il préconise que toutes les politiques économiques pertinentes soient reliées aux priorités stratégiques convenues par le Conseil européen, devrait être coordonné avec la discipline budgétaire et avec le nouveau cadre de convergence sociale, par le truchement des procédures du Semestre européen.
13.8Le Semestre européen peut jouer un rôle central pour encourager la compétitivité, la productivité, la durabilité et l’équité sociale, pour autant que chacun de ces facteurs se voie accorder le même poids dans le nouveau cadre de référence. La mise au point du nouvel instrument de coordination de la compétitivité, combinée avec la mise en œuvre du Fonds européen pour la compétitivité, vise à soutenir la croissance économique en coordonnant les objectifs et les priorités de l’Union avec leurs pendants au niveau national.
13.9Le CESE souhaite par ailleurs rappeler le lien qui unit le Semestre européen et le nouveau cadre de convergence sociale, instrument utile pour suivre, évaluer et mettre en œuvre les investissements consentis par les États membres en vue d’atteindre les objectifs du socle des droits sociaux.
14.L’importance de la cohésion sociale et territoriale
14.1Il est fondamental de maintenir un pilotage centralisé pour la cohésion économique, sociale et territoriale. Le CESE fait observer que les rapports Letta et Draghi, tout en mettant en évidence que le marché intérieur entretient une connexion étroite, selon le premier, avec la cohésion économique, sociale et territoriale et, dans le cas du second, avec la compétitivité de l’Union et le modèle social européen, ont néanmoins tendance à diverger de manière substantielle dans leurs analyses et, par conséquent, à avancer des propositions concrètes qui diffèrent, lorsqu’ils abordent la thématique de haute importance que constitue ladite cohésion économique, sociale et territoriale.
14.2Le rapport Letta, en effet, attribue un rôle central à la cohésion, en ce qu’elle donne la possibilité de garantir que les bienfaits découlant du marché intérieur soient pleinement répartis entre tous les citoyens de l’Union et entre ses différents territoires, dans une perspective, pour reprendre son expression, de «liberté de rester là où l’on a choisi de vivre». C’est de manière privilégiée dans le contexte ainsi tracé que se manifeste toute l’importance qui s’attache aux services d’intérêt général, au sens de l’article 14 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et du protocole nº 26 annexé au traité sur l’Union européenne, en tant qu’ils se prêtent directement à garantir l’exercice de cette liberté de rester dans le lieu de vie de son choix. Plus particulièrement, Enrico Letta considère que le Semestre européen constitue le cadre politique adapté pour garantir que des règles appropriées s’appliquent en matière de cohésion et fournir ainsi un contrepoids à la surveillance budgétaire et macroéconomique de nature multilatérale qui est prévue par le pacte de stabilité et de croissance.
14.3Le CESE estime en conséquence que le Semestre européen a pour mission de définir des normes minimales et d’éliminer les obstacles à l’inclusion auxquels, aujourd’hui encore, se heurtent les catégories de population exposées au risque de pauvreté ou d’exclusion et les zones géographiques les plus vulnérables face aux mutations de l’économie, et au regard desquels il convient d’assurer un degré de cohésion adéquat.
14.4Le CESE relève que tout en insistant sur le lien qui existe entre la compétitivité et le modèle social européen, le rapport Draghi semble nourrir des doutes quant au rôle stratégique assigné à la politique de cohésion dans le cadre financier pluriannuel en cours, portant sur la période 2021-2027, tout comme il pourrait aussi minorer les effets sur la compétitivité de l’Union européenne qui découlent des investissements effectués dans le développement des infrastructures sociales, tant matérielles qu’immatérielles, pour soutenir les politiques menées en matière sociale, dans une visée redistributive ou en rapport avec le travail.
14.5Le CESE suggère également de mener une réflexion sur la dimension territoriale de la compétitivité, sur laquelle les deux rapports ne se sont hélas pas beaucoup attardés mais qui a été bien décrite par l’«indice de compétitivité régionale de l’UE 2.0». On estime en effet qu’il faudra aussi analyser la compétitivité de l’Union à l’échelon territorial pour pouvoir donner suite à bon nombre des propositions contenues dans les rapports Draghi et Letta.
14.6Le CESE entend mettre l’accent sur les risques induits par une stratégie de compétitivité qui se montrerait indifférente aux inégalités, car une telle démarche approfondirait le fossé entre d’une part les zones rurales, les îles et les territoires éloignés des grandes villes, menacés par le dépeuplement, et d’autre part les zones urbaines, ainsi qu’entre les différentes aires au sein du marché intérieur.
14.7Enfin, le CESE souhaite que dans le programme de son mandat, la Commission se montre capable d’accommoder les visions distinctes qui, sur la question de la cohésion, se dégagent des deux rapports, en s’efforçant d’opérer un réglage fin entre les politiques de compétitivité, d’une part, et celles tendant à la cohésion économique, sociale et territoriale et à la durabilité environnementale, d’autre part, car la compétitivité ne peut faire fi de la cohésion et de la solidarité sociale, dans la mesure où le développement harmonieux des territoires est essentiel aux fins tant du bon fonctionnement du marché unique que de sa croissance à l’avenir.
Bruxelles, le 26 février 2025
Le président du Comité économique et social européen
Oliver RÖPKE
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