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AVIS
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Comité économique et social européen
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Normes de qualité et de sécurité des substances d’origine humaine
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Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant les normes de qualité et de sécurité des substances d’origine humaine destinées à une application humaine et abrogeant les directives 2002/98/CE et 2004/23/CE
[COM(2022) 0338 – 2022/0216 (COD)]
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SOC/740
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Rapporteur général:
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Consultation
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Parlement européen, 12/09/2022
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Base juridique
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Article 168, paragraphe 4, et article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne
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Compétence
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Section «Emploi, affaires sociales et citoyenneté»
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Adoption en session plénière
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27/10/2022
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Session plénière n°
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573
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Résultat du vote
(pour/contre/abstentions)
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151/0/0
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1.Conclusions et recommandations
1.1Le Comité économique et social européen (CESE) soutient la proposition présentée par la Commission européenne d’un règlement du Parlement européen et du Conseil concernant les normes de qualité et de sécurité des substances d’origine humaine destinées à une application humaine et abrogeant les directives 2002/98/CE et 2004/23/CE, au regard de l’importance capitale que celui-ci revêt pour la protection de la santé publique, le bien-être des patients dans les États membres de l’Union européenne et le potentiel de cette dernière en matière d’innovation.
1.2Il est avantageux de définir des normes fondamentales communes de qualité et de sécurité des substances d’origine humaine (également désignées par l’abréviation SoHO, de l’anglais «substances of human origin») qui correspondent à l’état actuel du développement des sciences médicales, et le CESE convient de la nécessité d’une réglementation cohérente dans ce domaine.
1.3tient pour judicieux de définir le champ d’application du règlement en question de manière à tenir compte non seulement des substances d’origine humaine, telles que par exemple le lait maternel, qui ne relevaient pas jusqu’à présent de dispositions juridiques à l’échelon européen mais aussi de toute substance d’origine humaine susceptible d’être utilisée à l’avenir;
1.4Le CESE approuve les modifications d’ordre juridique qui contribuent à limiter les coûts que supportent les institutions de l’Union européenne, ses États membres et ses citoyens, notamment en supprimant du libellé de la réglementation les tests et les dépistages systématiques devenus obsolètes. Il y a lieu de surveiller en permanence l’efficacité des mesures prévues par les dispositions du règlement, en tenant compte de la nécessité de maintenir la sécurité et la qualité des substances d’origine humaine et de respecter les normes qui découlent de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne;
1.5Le CESE se félicite de l’établissement de normes fondamentales uniformes concernant la mise en place de registres des entités actives dans le domaine des substances d’origine humaine. L’établissement de la plateforme SoHO de l’Union européenne viendra conforter cette démarche et contribuera à améliorer la sécurité dans l’Union dans le domaine de la santé publique grâce à des échanges permanents et rapides d’informations;
1.6Le CESE approuve l’adoption de solutions qui renforcent les droits des donneurs de substances d’origine humaine et remédient aux lacunes de la réglementation en vigueur. Dans le même temps, le CESE fait valoir l’importance fondamentale de voir le principe de la gratuité du don de substances d’origine humaine réaffirmé par la proposition, afin d’éliminer les abus et d’assurer la sécurité de l’obtention desdites substances; Le Comité rappelle que le strict respect de ce principe constitue une exigence qui découle de l’article 3, paragraphe 2, point c), de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, conformément auquel dans le cadre de la médecine et de la biologie, il s’impose de respecter «l’interdiction de faire du corps humain et de ses parties, en tant que tels, une source de profit».
1.7Le CESE est d’avis qu’il y a lieu de prêter une attention particulière à la nécessité d’un contrôle fiable et systématique des entités SoHO pour ce qui est de la sécurité, de la qualité et des modalités d’obtention des substances d’origine humaine. Il importe tout particulièrement de surveiller en permanence les activités des entités SoHO importatrices et d’en contrôler la régularité. Les substances d’origine humaine importées dans l’Union européenne doivent obéir aux mêmes normes de qualité et de sécurité que celles obtenues sur le territoire de l’Union.
2.Introduction
2.1Le présent avis porte sur la proposition de la Commission européenne d’un règlement du Parlement européen et du Conseil concernant les normes de qualité et de sécurité des substances d’origine humaine destinées à une application humaine et abrogeant les directives 2002/98/CE et 2004/23/CE («règlement concernant les substances d’origine humaine» ou «règlement SoHO», selon l’abréviation tirée de l’anglais «substances of human origin»).
2.2Comme l’indique son exposé des motifs, le règlement concernant les substances d’origine humaine procure les assurances et les avantages suivants: 1) garantir la sécurité et la qualité pour les patients bénéficiant de thérapies SoHO et les protéger totalement contre les risques évitables liés aux substances d’origine humaine; 2) garantir la sécurité et la qualité pour les donneurs de substances d’origine humaine et pour les enfants nés de dons d’ovules, de sperme ou d’embryons; 3) renforcer et permettre l’harmonisation des pratiques de surveillance entre les États membres; 4) faciliter la mise au point de thérapies SoHO innovantes, sûres et efficaces; et 5) améliorer la résilience du secteur, en atténuant le risque de pénurie. Les solutions proposées remédient à l’insuffisance de la protection des patients et des donneurs de sang, de tissus, de cellules et de la progéniture issue de dons de gamètes, d’ovules ou d’embryons contre les risques évitables, du fait de règles techniques obsolètes, des approches divergentes des États membres en matière de surveillance qui entravent les échanges transfrontières de sang, de tissus et de cellules, de la vulnérabilité des patients face aux interruptions d’approvisionnement en sang, en tissus et en cellules, ainsi que d’une exploitation incomplète du potentiel du sang, des tissus et des cellules transformés ou utilisés sous de nouvelles formes.
3.Observations générales
3.1Le CESE est conscient des exigences nouvelles que suscite le développement des sciences médicales, et notamment celui des technologies du vivant, qui procurent de nouvelles possibilités de tirer parti des substances d’origine humaine dans de nombreuses modalités thérapeutiques pour les patients dans toute l’Union européenne. Dans le même temps, le CESE relève que du fait du développement de nouvelles thérapies, une partie des normes en vigueur jusqu’à présent perdent de leur validité.
3.2Le CESE se félicite de ce fait aussi de la proposition avancée par la Commission d’un règlement concernant les substances d’origine humaine. Cette proposition conçoit en effet lesdites substances d’une manière générique, qui recouvre «le sang, les tissus et les cellules». Il s’agit là d’une approche appropriée et prévoyante car des substances qui échappent actuellement à notre connaissance et susceptibles de trouver une application thérapeutique à l’avenir, seront couvertes en droit par des dispositions contraignantes en matière de sécurité et de qualité.
3.3Le CESE relève, pour s’en féliciter, l’adaptation du cadre juridique au principe de «neutralité financière» prôné par le comité de bioéthique du Conseil de l’Europe. La proposition harmonise également le cadre juridique actuel et, en particulier, elle renforce les dispositions relatives à la protection et au suivi des donneurs ainsi que la déclaration des affections génétiques dans la progéniture issue d’une procréation médicalement assistée.
3.4Le CESE tient pour appropriée la proposition, qu’il approuve, d’une approche fondée sur un règlement unique qui s’appliquera dans l’ensemble des États membres. Elle contribuera immédiatement à garantir le respect des normes de qualité et de sécurité des substances d’origine humaine dans les États de l’Union.
3.5Le CESE relève avec satisfaction les effets escomptés de l’entrée en vigueur du règlement, lorsqu’il s’agit notamment de définir des normes générales communes de sécurité et de qualité, d’intégrer dans le champ d’application du règlement l’ensemble des substances d’origine humaine qui ne font pas jusqu’à présent l’objet d’une réglementation, de simplifier les échanges de substances d’origine humaine entre les États membres, de faire valoir des obligations garantissant des moyens de préparation pour le cas de situations de crise à l’échelon de l’entité et à l’échelon national, ainsi que des obligations relatives au suivi de l’approvisionnement, ou encore de mettre en place un environnement juridique qui permet de favoriser les innovations et d’améliorer la sécurité, la disponibilité et l’efficacité des substances d’origine humaine, et qui ne perde pas de son actualité.
3.6Le CESE se félicite tout particulièrement que les lignes directrices techniques s’ancrent dans les conclusions établies par les groupes européens d’experts. Il s’agit là du moyen le plus efficace de faire en sorte que la législation demeure à jour, conformément à l’approche de la médecine fondée sur des données probantes.
3.7Le CESE relève avec satisfaction que les principes de volontariat et de gratuité, énoncés expressément jusqu’à présent par les normes régissant la procédure du don de sang, sont repris pour toutes les substances d’origine humaine utilisées actuellement telles que par exemple le lait maternel, ainsi que pour celles qu’il n’est pas possible de définir pour l’heure mais qui pourraient être utilisées à l’avenir. Il convient de relever que le règlement à l’examen autorise une indemnisation qui vise à éliminer les situations où le donneur se retrouve financièrement désavantagé par son don, tout en affirmant que cette indemnisation ne saurait jamais constituer une incitation susceptible d’encourager des donneurs potentiels à communiquer des informations erronées ou à faire des dons plus fréquemment que ce qui est autorisé. À cet égard, il convient de rappeler l’importance fondamentale que revêt le principe de la gratuité du don de substances d’origine humaine pour éliminer les abus et assurer la sécurité de l’obtention de ces substances. Le Comité rappelle que le strict respect de ce principe constitue une exigence qui découle de l’article 3, paragraphe 2, point c), de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, conformément auquel dans le cadre de la médecine et de la biologie, il s’impose de respecter «l’interdiction de faire du corps humain et de ses parties, en tant que tels, une source de profit». Les États membres doivent en tenir compte lorsqu’ils définissent dans le cadre de leur réglementation les principes régissant l’octroi de telles prestations.
3.8Le CESE approuve l’établissement de normes fondamentales uniformes concernant la mise en place par les États membres de registres des entités actives dans le domaine des substances d’origine humaine. L’établissement de la plateforme SoHO de l’Union européenne viendra conforter cette démarche et contribuera à améliorer la sécurité dans l’Union dans le domaine de la santé publique grâce à des échanges permanents et rapides d’informations; Il convient également de saluer la mise sur pied du comité de coordination SoHO, lequel peut constituer un instrument efficace pour une mise en œuvre opérante des normes de qualité et de sécurité posées par le règlement.
3.9La proposition indique que la responsabilité des décisions de nature éthique et organisationnelle incombe aux États membres. Il y a lieu de reconnaître le bien-fondé de ce point de vue à la lumière de la répartition des compétences prévue par les traités entre l’Union et ses États membres, ainsi que son caractère sensé dans le cadre du champ d’application des dispositions du règlement proposé, qui présente un caractère organisationnel et technique. Le règlement concernant les substances d’origine humaine vise en effet à garantir la qualité, la sécurité et la disponibilité desdites substances et à contrôler les processus de fabrication et de transport. Le CESE entend toutefois attirer l’attention sur le fait que, tout comme le contrôle de la sécurité et de la qualité, le développement des technologies du vivant appelle une évaluation à l’aune des normes qui découlent de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.
3.10Le règlement qui fait l’objet de la proposition à l’examen détermine les pouvoirs du personnel des autorités compétentes ainsi que des personnes exerçant les activités de surveillance. Le règlement fait état de leur préparation professionnelle adéquate et des formations régulières, notamment celles effectuées à l’échelon de l’Union. Toutefois, il omet de définir en détail la formation et l’expérience de ce personnel, à l’exception de son article 51 qui prévoit la qualification nécessaire pour le médecin désigné par les établissements SoHO. Toutefois, la nature spécifique du travail avec les substances d’origine humaine requiert la coopération au sein d’une équipe de nombreux spécialistes; si, bien souvent, un technicien du vivant possédera les compétences adéquates, dans d’autres cas, ce sera un médecin disposant de la spécialisation idoine et dans d’autres encore, il s’avérera indispensable de s’assurer de l’appui d’un spécialiste de l’éthique ou du droit. Le CESE propose donc de définir la composition des autorités compétentes de manière à ce qu’elles comprennent une équipe interdisciplinaire de spécialistes.
4.Niveau et portée de la réglementation
4.1Le CESE relève avec satisfaction que le règlement est conforme au principe de subsidiarité. Il est en effet bien plus difficile d’en réaliser les objectifs par les moyens propres des États membres ou il est impossible à ces derniers de les réaliser d’une manière qui soit efficace en comparaison. Le règlement apporte donc une valeur ajoutée manifeste. Les avantages qu’il procure découlent en particulier de l’adossement de l’application des normes aux groupes d’experts, tels que le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC) et la direction européenne de la qualité du médicament et soins de santé (EDQM), ainsi qu’aux échanges de données au moyen de la plateforme SoHO de l’Union européenne.
4.2Il est proposé de définir la «procréation médicalement assistée» comme la facilitation de la conception par insémination intra-utérine de spermatozoïdes, fécondation in vitro ou toute autre intervention en laboratoire ou intervention médicale favorisant la conception. Le CESE est d’avis que l’on peut préciser encore cette définition. Il semble raisonnable que le règlement doive englober dans son champ d’application les procédures touchant à l’utilisation des substances d’origine humaine ou à leur création. Toutefois, les termes utilisés dans la définition en question, à savoir «toute autre [...] intervention médicale favorisant la conception», font entrer dans ledit champ d’application d’autres méthodes qui ne font pas appel à l’utilisation de substances d’origine humaine et qui ne relèvent donc pas des normes du règlement à l’examen.
5.Sécurité des préparations et contrôle des entités SoHO
5.1Le CESE accueille favorablement le surcroît de précision apporté aux normes relatives à la qualité et à la sécurité des substances d’origine humaine, ainsi que l’application de mécanismes efficaces de contrôle des entités SoHO. Les solutions proposées contribueront à améliorer l’accès des patients à une thérapie de qualité et influeront favorablement sur l’état de la santé publique au sein de l’Union européenne.
5.2À cet égard, le CESE attire l’attention sur la nécessité pour les normes relatives à la qualité et à la sécurité de s’appliquer à l’ensemble des substances d’origine humaine utilisées sur le territoire de l’Union, y compris celles qui y sont importées. Le CESE attire l’attention sur la nécessité impérative de faire jouer efficacement et systématiquement les mécanismes de contrôle des entités SoHO importatrices prévus par le règlement, notamment pour ce qui est de la qualité et de la sécurité des préparations. Cet aspect revêt une importance toute particulière dans le contexte de l’application de mesures de simplification touchant à l’importation dans l’Union européenne de substances d’origine humaine. Le CESE demande aux autorités de l’Union de prendre toutes les mesures afin d’éviter que ne s’y développe une industrie lucrative du don de cellules et de tissus, laquelle connaît un essor certain dans d’autres régions du monde.
5.3Conformément aux dispositions de la proposition de règlement à l’examen, si un État membre choisit d’autoriser une nouvelle pratique, la sécurité et la qualité de cette pratique sont alors régies par la législation de l’Union européenne applicable en la matière aux substances d’origine humaine et figurant dans ledit règlement. Le CESE fait observer qu’il convient également que les nouvelles pratiques appliquées dans des pays tiers fassent l’objet d’une évaluation permanente de la part des groupes d’experts compétents à l’échelon de l’Union européenne.
5.4L’article 7 de la proposition de règlement pose l’exigence que les autorités compétentes garantissent l’indépendance de leur personnel de manière à éviter les conflits d’intérêts. Afin de réaliser dans les faits l’objectif voulu, le CESE propose d’élargir cette exigence également à la période qui précède immédiatement l’entrée en fonctions dudit personnel.
5.5L’article 29, paragraphe 7, de la proposition de règlement définit les compétences des inspecteurs en vue de vérifier si les établissements SoHO satisfont aux normes relatives à la protection des donneurs et des receveurs, à la communication d’informations et concernant le caractère volontaire et non rémunéré des dons. Le CESE est d’avis qu’il convient de renforcer les pouvoirs des inspecteurs, qui doivent permettre une procédure de contrôle complète.
6.Les droits des donneurs de substances d’origine humaine
6.1Le CESE se félicite vivement que la proposition de règlement concernant les substances d’origine humaine fasse état de solutions qui renforcent systématiquement les droits des donneurs de telles substances et remédient ainsi aux lacunes de la législation en vigueur.
6.2L’article 53 qui définit les normes relatives à la protection des donneurs de substances d’origine humaine prévoit en son paragraphe 1, point b), l’obligation de fournir aux donneurs ou aux personnes agissant en leur nom les informations d’une manière qui soit adaptée à leur capacité de compréhension. Afin de dissiper le moindre doute touchant à l’interprétation de cette disposition, le CESE estime qu’il s’impose de préciser que les informations fournies doivent être complètes et communiquées de manière claire afin de pouvoir satisfaire à la condition généralement admise dans le domaine de la médecine pour un consentement éclairé.
6.3L’article 55, paragraphe 3, point c), de la proposition pose l’obligation pour les entités SoHO d’informer les donneurs de leur droit de retirer leur consentement et de toute restriction à ce droit. De l’avis du CESE, le droit de retirer le consentement ne saurait être limité que par des circonstances matérielles, par exemple dans le cas d’une procédure déjà engagée. Afin d’empêcher des violations d’un des droits fondamentaux du patient, tel que celui à l’autonomie, il apparaît fondé de définir une liste limitative des situations dans lesquelles il est possible de restreindre le droit de retirer le consentement.
7.Protection des données
7.1Le CESE se félicite vivement que le règlement confirme la nécessité de maintenir les normes strictes de confidentialité qui découlent du règlement général sur la protection des données (RGPD) en matière de traitement des données à caractère personnel des donneurs et des receveurs de substances d’origine humaine, s’agissant notamment de limiter les finalités du traitement de ces données ou de les minimiser.
7.2Le CESE tient pour fondé de distinguer l’exigence actuelle d’un consentement libre et éclairé au don posée par les dispositions de la proposition de règlement de l’exigence spécifique du consentement au traitement des données à caractère personnel concernant la santé du donneur au sens du RGPD. En effet, ces deux exigences ne sont pas identiques.
Bruxelles le 27 octobre 2022
Christa Schweng
Présidente du Comité économique et social européen
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