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SOC/667

Union de l’égalité: stratégie en faveur de l’égalité de traitement
à l’égard des personnes LGBTIQ pour la période 2020-2025

AVIS

Comité économique et social européen

Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil,

au Comité économique et social européen et au Comité des régions
Union de l’égalité: stratégie en faveur de l’égalité de traitement

à l’égard des personnes LGBTIQ pour la période 2020-2025
[COM(2020) 698 final]

Rapporteur: Ionuț SIBIAN

Corapporteure: Maria del Carmen BARRERA CHAMORRO

Consultation

Commission européenne, 14/01/2021

Base juridique

Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

Section «Emploi, affaires sociales et citoyenneté»

Adoption en section

16/04/2021

Adoption en session plénière

27/04/2021

Session plénière nº

560

Résultat du vote (pour/contre/abstentions)

187/8/12



1.Conclusions et recommandations

1.1Le CESE salue le courage dont fait preuve la Commission européenne en adoptant la stratégie en faveur de l’égalité de traitement à l’égard des personnes LGBTIQ pour la période 2020-2025 et se félicite de cette avancée, qui vise à réduire la discrimination et à garantir la sécurité et les droits fondamentaux des personnes LGBTIQ dans l’ensemble de l’Union européenne par l’adoption de mesures législatives au niveau européen, mais aussi en exhortant les États membres à établir et mettre en œuvre, à l’échelon national, les plans d’action mentionnés dans la stratégie.

1.2Le CESE est fermement convaincu que pour la réussite de cette stratégie, la Commission doit mettre en place un mécanisme solide visant à la mettre en œuvre et à contrôler régulièrement son application, tant horizontalement que verticalement. À cet égard, la Commission doit promouvoir un vaste dialogue entre les institutions européennes et internationales, les États membres, les organisations de la société civile et les partenaires sociaux.

1.3Le CESE estime que, pour atteindre ses objectifs, la stratégie pour l’égalité de traitement à l’égard des personnes LGBTIQ doit s’inscrire dans une perspective transsectorielle; il importe donc de la mettre en corrélation avec d’autres stratégies européennes, comme la stratégie relative aux droits des victimes, la stratégie en faveur de l’égalité entre les hommes et les femmes, le plan d’action de l’UE contre le racisme, la stratégie sur les droits des personnes handicapées et la stratégie sur les droits de l’enfant.

1.4En matière de discrimination à l’égard des personnes LGBTIQ, l’une des questions les plus pressantes est la discrimination sur le lieu de travail et dans le cadre de l’accès au marché du travail. Il est par conséquent essentiel que la directive sur l’égalité de traitement en matière d’emploi (2000/78/CE) protège également les personnes transgenres, non binaires, intersexuées et queer contre la discrimination dans le milieu professionnel. En outre, le CESE salue la volonté de la Commission d’élargir l’applicabilité de la directive à d’autres domaines que l’emploi, estimant qu’il s’agit là d’une mesure efficace pour lutter contre la discrimination à l’égard des personnes LGBTIQ.

1.5Des politiques actives en matière d’emploi et l’introduction d’une perspective LGTBIQ dans les plans pour l’emploi sont nécessaires pour améliorer l’employabilité des personnes LGBTIQ. Il est également essentiel que les entreprises adoptent des plans en faveur de l’égalité de traitement à l’égard des personnes LGTBIQ afin de lutter contre la discrimination dont ces personnes sont victimes sur leur lieu de travail; les entreprises devraient en outre définir des mesures, des protocoles et des outils concrets pour combattre cette discrimination.

1.6Afin d’éviter aux personnes LGBTIQ d’être confrontées à des difficultés socio-économiques et à des taux élevés de pauvreté et d’exclusion sociale, il convient d’encourager les États membres à fournir des services médicaux et sociaux, des abris, des programmes d’aide et des lieux sûrs aux personnes LGBTIQ victimes de violences domestiques, de crimes de haine et de discours haineux, aux jeunes LGBTIQ sans soutien familial, etc.

1.7Le CESE est fermement convaincu que tous les États membres de l’UE devraient interdire les thérapies dites de conversion, car ces pratiques portent atteinte aux droits fondamentaux et sont considérées comme de la torture. La Commission européenne doit inciter les États membres à interdire toutes les formes de pratiques préjudiciables, y compris les interventions sur les personnes intersexuées qui ne sont pas justifiées d’un point de vue médical, et les aider à réformer leur législation relative à la reconnaissance juridique du genre, afin qu’elle soit conforme aux normes en matière de droits de l’homme portant sur l’autonomie décisionnelle.

1.8Le CESE demande à la Commission européenne de financer la formation des professionnels qui interagissent avec les personnes LGBTIQ, ainsi que de stimuler l’échange de bonnes pratiques entre les États membres. En outre, il importe de prévoir un financement européen destiné à la formation spécialisée des médecins, des enseignants et d’autres professionnels, afin qu’ils puissent mieux comprendre la situation et les besoins spécifiques des personnes LGBTIQ. Par ailleurs, le projet pilote EUHealth4LGBTIQ a permis de fournir des manuels de formation aux prestataires de soins de santé, aussi la Commission européenne devrait-elle aider les États membres à garantir la disponibilité de ces formations au niveau national.

1.9En ce qui concerne les financements accordés aux États membres et provenant du budget de l’Union, nous estimons que la Commission européenne doit mettre en œuvre un mécanisme solide visant à superviser l’utilisation de ces fonds par les États membres, conformément au principe européen de non-discrimination visé à l’article 2 du traité sur l’UE et dans le plein respect des droits fondamentaux énoncés dans la charte des droits fondamentaux. Cette supervision doit se faire non seulement au moyen d’une analyse ex ante, à savoir la réalisation d’un audit visant à évaluer le niveau de diversité, mais aussi d’une analyse ex post, tel que le prévoit le règlement portant dispositions communes pour la période de financement 2021-2027.

1.10La Commission européenne doit endosser le rôle de gardienne des traités de l’Union et intensifier ses efforts pour veiller à la mise en œuvre et à l’application intégrales, par les États membres, de la législation européenne en la matière et de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, notamment pour ce qui concerne la directive 2004/38/CE, de même que la législation en matière d’asile. Dans le contexte de la libre circulation et des situations transfrontalières, il importe également d’adopter un règlement clair, inclusif et non discriminatoire au niveau européen sur la notion de «famille», qui inclut les familles arc-en-ciel, ainsi que sur la reconnaissance des actes de naissance des personnes transgenres dans l’ensemble des États membres, indépendamment d’autres procédures administratives ou judiciaires.

1.11L’Union européenne se doit d’assumer le rôle qui est le sien s’agissant de contribuer à faire progresser les droits de l’homme dans le monde, et ceux-ci incluent la liberté et la dignité des personnes LGBTIQ. Pour y parvenir, l’ensemble des instances européennes doivent collaborer avec les institutions internationales et régionales afin de dépénaliser l’homosexualité et d’imposer le respect de la dignité et des droits fondamentaux des personnes LGBTIQ de façon universelle, dans le monde entier.

2.Observations générales

2.1Le CESE estime qu’il est essentiel que les institutions européennes et nationales mettent en place des politiques publiques pour protéger les personnes LGBTIQ, de sorte que les valeurs consacrées par la charte des droits fondamentaux ainsi que par le traité sur l’Union européenne (TUE), à savoir celles de «la dignité humaine, […], d’égalité, […], de respect des droits de l’homme, y compris des droits des personnes appartenant à des minorités», soient respectées dans toute l’Union 1 . Le CESE soutient la résolution du Parlement européen dans laquelle il déclare l’Union européenne «zone de liberté LGBTIQ».

2.2Les données 2 recueillies par l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne (FRA) indiquent que les personnes LGBTIQ forment un groupe vulnérable qui a besoin du soutien des institutions européennes et des autorités nationales des États membres. Nous estimons que la stratégie en faveur de l’égalité de traitement à l’égard des personnes LGBTIQ pour la période 2020-2025 constitue une première étape dans la lutte contre la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle, l’identité/l’expression de genre et les caractéristiques sexuelles, ainsi que dans la mise en place d’un espace sûr pour la communauté LGBTIQ dans toute l’Union européenne. 

2.3Le CESE se réjouit de constater que le document de la Commission se base sur l’intersectionnalité comme principe transversal: l’orientation sexuelle, l’identité ou l’expression de genre et/ou les caractéristiques sexuelles sont toutes prises en compte, de même que d’autres caractéristiques ou identités personnelles, telles que le sexe, l’origine ethnique ou raciale, la religion, la foi, le handicap et l’âge. Tous ces éléments sont également replacés dans le contexte de la crise de la COVID-19, qui a touché de manière disproportionnée les personnes LGBTIQ vulnérables.

2.4Toutefois, pour que la stratégie en faveur de l’égalité de traitement à l’égard des personnes LGBTIQ pour la période 2020-2025 soit appliquée de manière efficace et efficiente dans l’ensemble de l’Union européenne, la Commission européenne doit créer un mécanisme de mise en pratique et de suivi afin de vérifier si la stratégie a été mise en œuvre et dans quelle mesure. À cet égard, la Commission doit vérifier chaque année si et dans quelle mesure les institutions européennes et les États membres ont mis en œuvre les principales priorités de la stratégie. Cette évaluation devrait être réalisée en consultation avec les États membres et la société civile organisée.

3.Observations particulières

3.1Discrimination à l’égard des personnes LGBTIQ

3.1.1La discrimination touche les personnes LGBTIQ à toutes les étapes de leur vie. Dès le plus jeune âge, les enfants et les jeunes concernés, ainsi que les enfants issus de familles LGBTIQ ou arc-en-ciel, c’est-à-dire les familles dont l’un des membres appartient à la communauté LGBTIQ, sont souvent stigmatisés et, par conséquent, victimes de discrimination et d’agressions qui affectent leurs performances scolaires, leurs perspectives d’emploi, leur vie quotidienne, ainsi que le bien-être de l’ensemble de la famille. Il est donc nécessaire d’adopter des mesures de protection de l’enfance plus nombreuses et de meilleure qualité, en particulier dans le domaine de l’éducation, afin d’éradiquer la discrimination à l’égard des personnes LGBTIQ.

3.1.2En matière de discrimination à l’égard des personnes LGBTIQ, l’une des questions les plus pressantes est la discrimination sur le lieu de travail 3 et dans le cadre de l’accès au marché du travail. Il est par conséquent essentiel que la directive sur l’égalité de traitement en matière d’emploi protège également les personnes transgenres, non binaires, intersexuées et queer contre la discrimination dans le milieu professionnel. En outre, le CESE salue la volonté de la Commission d’élargir l’applicabilité de la directive à d’autres domaines que l’emploi et la formation professionnelle, estimant qu’il s’agit là d’une mesure efficace pour lutter contre la discrimination à l’égard des personnes LGBTIQ.

3.1.3En ce qui concerne la discrimination sur le lieu de travail, il convient d’accorder une attention particulière aux personnes transgenres, en raison des défis sociaux auxquels elles sont confrontées (par exemple, l’inadéquation entre la situation juridique et la situation réelle, causée par les procédures complexes de modification des documents d’identité en place dans la plupart des États membres, le manque de procédures médicales, les préjugés auxquels ces personnes font face, etc.). Ces défis sociaux peuvent engendrer des cas de harcèlement sur le lieu de travail, des licenciements et, de manière générale, de nombreux problèmes dès l’étape de la recherche d’emploi ainsi que par la suite.

3.1.4Nous insistons sur la nécessité pour l’Union européenne d’établir des lignes d’action relatives aux politiques actives en matière d’emploi, afin que les États membres et les autorités nationales élaborent des plans nationaux pour l’emploi incluant des mesures conçues spécifiquement pour favoriser l’inclusion des personnes LGBTIQ et limitant les effets du manque d’accès à l’emploi dont elles souffrent pour des raisons structurelles.

3.1.5Le CESE juge primordial d’étendre la réglementation européenne relative à l’égalité de traitement en matière d’emploi, en vue d’intégrer les personnes transgenres, non binaires, intersexuées et queer, et de protéger ainsi l’ensemble des personnes LGBTIQ contre toute discrimination en matière d’emploi fondée sur l’orientation sexuelle, l’identité ou l’expression de genre et les caractéristiques sexuelles.

3.1.6Le CESE accueille favorablement la proposition de la Commission européenne d’étendre la directive sur l’égalité de traitement à d’autres domaines que le travail et la formation professionnelle. À cet égard, nous estimons qu’il importe de soutenir la Commission dans sa demande au Conseil d’adopter la proposition, afin de combler les lacunes du droit de l’Union en matière de protection contre la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle, l’identité ou l’expression de genre, les caractéristiques sexuelles et le groupe familial.

3.1.7Le CESE souscrit à l’appel des institutions européennes aux États membres les invitant à ratifier la convention nº 190 de l’OIT relative à l’élimination de la violence et du harcèlement dans le monde du travail, qui fait référence à une série de comportements et de pratiques inacceptables ciblant les personnes en raison de leur sexe ou de leur identité de genre et qui fournit aux gouvernements et aux partenaires sociaux des orientations pour trouver des outils permettant de prévenir et de combattre ces formes de discrimination. La négociation collective à tous les niveaux et les conventions collectives peuvent contribuer à définir des mesures ciblées sur le lieu de travail, au même titre que la mise en œuvre de l’accord autonome qu’ont signé les partenaires sociaux européens contre la violence au travail.

3.1.8En raison des discriminations que subissent les personnes LGBTIQ dans l’espace même où elles devraient se sentir le plus en sécurité, à savoir leur environnement familial, de nombreuses personnes appartenant à la communauté LGBTIQ, en particulier des jeunes, se retrouvent sans abri. Dans de nombreux États membres, les pouvoirs publics ne sont pas en mesure de fournir des services sociaux et médicaux pour leur venir en aide. Il est donc essentiel que les personnes LGBTIQ bénéficient d’abris sécurisés et de services médicaux afin de pouvoir s’intégrer dans la société et trouver un emploi stable et sûr.

3.1.9Outre les propositions de la Commission visant à réformer le régime d’asile européen commun, il est essentiel que l’Union européenne alloue des fonds à la formation des juges, des procureurs et des garde-frontières, ainsi que des professionnels des services d’immigration et des interprètes, afin qu’ils comprennent les besoins spécifiques des demandeurs d’une protection internationale vulnérables, notamment les personnes LGBTIQ.

3.1.10À cet égard, le CESE estime primordial de restreindre l’application des politiques de retour des migrants aux frontières de l’UE, compte tenu du fait que nombre de ces personnes fuient les persécutions subies dans leur pays d’origine en raison de leur orientation sexuelle, de leur identité ou expression de genre et de leurs caractéristiques sexuelles. Un simple renvoi sans possibilité de demander une protection internationale viole les droits de l’homme les plus fondamentaux, les traités internationaux et, dans certains cas, les lois nationales en matière de protection internationale.

3.1.11Nous pensons que la Commission devrait envisager de reconnaître le droit des personnes transgenres à l’autonomie décisionnelle quant à leur genre, de manière à se conformer aux normes internationales les plus strictes en matière de respect des droits de l’homme et à promouvoir la reconnaissance de ces personnes dans les États membres et par les autorités nationales, afin que leur identité puisse être reconnue sans qu’un tiers doive en apporter la preuve.

3.1.12La Commission européenne devrait contrôler que les personnes transgenres aient accès à une couverture de soins de santé pour les traitements d’affirmation du genre et s’entretenir avec les États membres afin qu’ils exploitent pleinement les possibilités offertes par le cadre de l’UE en matière de soins de santé transfrontaliers pour combler toute lacune au niveau national.

3.1.13La Commission devrait encourager les États membres à adopter des stratégies au niveau national pour favoriser la surveillance, le contrôle et la prévention des maladies sexuellement transmissibles. Il est également essentiel, dans ce domaine, de donner la priorité aux fonds destinés aux professionnels de la santé et de leur proposer des formations conformément aux recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et à la 11e révision de la Classification statistique internationale des maladies et problèmes de santé connexes (CIM-11). En outre, les États membres doivent absolument encourager les spécialistes de la santé à échanger leurs expériences et pratiques avec leurs homologues des autres pays.

3.1.14Les États membres devraient être encouragés à interdire les «thérapies de conversion» dans l’ensemble de l’Union, ces pratiques dégradantes ayant de nombreuses répercussions sur la santé physique et mentale des personnes LGBTIQ. En outre, l’adoption par les États membres de mesures législatives interdisant les «mutilations des personnes intersexuées» doit elle aussi être encouragée, le but étant de garantir aux personnes intersexuées le droit de décider elles-mêmes si elles souhaitent ou non avoir recours à des procédures médicales afin de se voir attribuer un sexe particulier; une dérogation à cette règle ne serait autorisée que dans le cadre de besoins médicaux urgents, lorsque la vie de la personne intersexuée est en danger.

3.1.15Les programmes de financement de l’Union européenne devraient être étroitement liés et subordonnés aux valeurs de l’Union promues à l’article 2 du TUE. En outre, pour les projets de grande envergure financés par des fonds de l’UE, les États membres devraient être tenus de réaliser une analyse d’impact sur les groupes vulnérables, notamment les personnes LGBTIQ. Ainsi, au niveau des États membres, un audit visant à évaluer la diversité des financements de l’UE devrait être réalisé par une commission indépendante composée d’autorités publiques nationales locales ou centrales et d’organisations de la société civile 4 .

3.1.16En ce qui concerne la formation des experts appelés à réaliser cet audit de la diversité dans le cadre des programmes de financement de l’Union, un programme de formation élaboré au niveau européen devrait être déployé afin de développer les compétences et d’encourager les États membres à échanger leurs bonnes pratiques en matière d’incidence des programmes de financement de l’Union sur les groupes vulnérables, y compris la communauté LGBTIQ. Il convient, pour mettre en œuvre cette mesure dans toute l’Union, d’établir un mécanisme de surveillance au niveau de la Commission européenne.

3.1.17Les États membres devraient être encouragés à mener des campagnes et des programmes nationaux d’éducation et de sensibilisation afin de réduire et de combattre la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle ou l’identité de genre. À cet égard, les autorités nationales devraient veiller à ce que les programmes scolaires nationaux obligatoires comprennent des informations sur les droits de l’homme, y compris sur l’orientation sexuelle et sur l’identité et l’expression de genre, en vue de prévenir la discrimination, les préjugés et les stéréotypes. En outre, les écoles primaires et secondaires devraient dispenser des cours complets d’éducation sexuelle, grâce auxquels les enfants et les adolescents pourraient acquérir des connaissances et des compétences leur permettant de vivre plus sainement et de nouer des relations égalitaires.

3.2Garantir la sécurité des personnes LGBTIQ

3.2.1Nous savons que, dans plusieurs États membres, des référendums ont été menés en vue de modifier les constitutions nationales pour restreindre les droits des personnes LGBTIQ ou stigmatiser cette catégorie de personnes auprès du grand public. Étant donné que les informations circulent au-delà des frontières dans l’ensemble de l’Union, les États membres doivent garantir la transparence du financement public pour tous les acteurs qui participent à l’organisation de ces référendums.

3.2.2Le CESE soutient l’initiative visant à étendre la liste des «infractions pénales de l’UE» au titre de l’article 83, paragraphe 1, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) aux crimes de haine et aux discours haineux, notamment lorsqu’ils visent des personnes LGBTIQ. Il est donc nécessaire que la Commission adopte des mesures d’information et de sensibilisation à ce sujet au niveau européen. Elle devrait lancer une campagne de communication ayant pour but de contrer cette tendance et les comportements qui y sont associés en promouvant l’égalité de tous les citoyens européens. Nous proposons que cette campagne soit lancée à l’échelle européenne et qu’elle puisse s’adapter aux problèmes rencontrés dans chaque État membre à l’échelon local. Il conviendrait d’intégrer ces initiatives dans le cadre du plan d’action de l’UE en faveur de la démocratie. En outre, tous les pays européens se sont engagés à collecter des données pour l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) concernant les crimes de haine, lesquelles peuvent être utilisées dans ce contexte.

3.2.3La Commission devrait en outre, conjointement avec les États membres, prendre plusieurs mesures pour lutter contre la désinformation et les fausses informations, mais aussi contre les propos haineux, à la fois en ligne et hors ligne. À cet égard, la Commission doit mettre au point un mécanisme pour vérifier la bonne mise en œuvre de la directive «Services de médias audiovisuels» (directive SMA) au niveau des États membres, mais aussi adopter un cadre législatif européen pour lutter plus facilement contre les fausses informations et la désinformation.

3.2.4Dans le cadre de la lutte contre les discours haineux en ligne, nous estimons extrêmement encourageantes les démarches de la Commission visant à promouvoir et à mettre en œuvre le «Code de conduite pour la lutte contre les discours haineux illégaux en ligne», signé par Facebook, Microsoft, Twitter et YouTube. Ce type d’outil (un code de conduite destiné à lutter contre les discours haineux) devrait être mis en œuvre en tant que recommandation au niveau des États membres, tant en ligne que dans l’espace audiovisuel, afin de créer un espace sûr pour les personnes LGBTIQ, ainsi que pour d’autres groupes vulnérables qui peuvent rapidement devenir la cible de harcèlement ou de discours haineux en ligne 5 .

3.2.5La stratégie en faveur de l’égalité de traitement à l’égard des personnes LGBTIQ pour la période 2020-2025 devrait être liée à la stratégie de l’UE en matière de droits des victimes (2020-2025) afin que les personnes appartenant à des minorités sexuelles puissent se sentir suffisamment en confiance pour signaler les crimes de haine commis à leur encontre. Il est donc essentiel d’assurer la formation professionnelle continue des policiers, des avocats et des magistrats dans le domaine des crimes de haine, des préjugés et des stéréotypes, ainsi que de favoriser la coopération avec les ONG qui apportent un soutien aux personnes LGBTIQ dans ce domaine.

3.2.6La pandémie de COVID-19 nous a montré que la plupart des États membres ne disposaient pas des moyens nécessaires pour fournir un hébergement d’urgence ou de courte durée aux personnes LGBTIQ qui sont soit victimes de violences domestiques, en particulier les personnes transgenres, soit agressées par des membres de leur propre famille. Ainsi, la construction d’hébergements, de refuges et de centres d’aide et la fourniture de services d’assistance intégrés nécessitent la coopération des autorités nationales et des organisations non gouvernementales, ainsi qu’un financement de l’UE.

3.3Construire des sociétés inclusives pour les personnes LGBTIQ

3.3.1La Commission européenne doit assumer son rôle de gardienne du droit de l’Union européenne, tel qu’il découle des actes réglementaires européens et de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), pour veiller à l’application correcte et uniforme du droit de l’Union dans tous les États membres. Elle doit intensifier ses efforts et développer des mécanismes poussés de contrôle de l’applicabilité du droit européen et des décisions de la CJUE dans le cadre du droit national et des pratiques adoptées par les autorités nationales.

3.3.2En ce qui concerne le droit à la libre circulation, l’un des piliers du droit européen, la Commission européenne doit créer un mécanisme de contrôle afin de garantir que les droits conférés par la directive 2004/38/CE, en particulier le droit de circuler et de vivre librement, soient reconnus à tous les citoyens européens et à leurs familles, y compris les familles arc-en-ciel, dans l’ensemble de l’Union.

3.3.3Afin que toutes les personnes LGBTIQ puissent jouir de leur droit à la libre circulation dans l’ensemble de l’Union européenne, nous demandons à la Commission européenne, d’une part, d’élaborer un cadre réglementaire rendant la notion de «famille» autonome, indépendante du droit national des États membres, en particulier dans les situations transfrontières, et, d’autre part, de veiller à ce que les documents de naissance échangés à l’issue d’une procédure administrative ou judiciaire soient reconnus dans tous les États membres, dans le cadre de la libre circulation. La Commission européenne devrait coopérer avec les États membres afin de faciliter, pour les parents transgenres, l’enregistrement des liens de parenté selon l’identité de genre qui leur est juridiquement reconnue, en vue de protéger ces familles contre la révélation forcée de l’orientation sexuelle ou de l’identité de genre («outing»), la discrimination et la violence.

3.4Mener une campagne en faveur de l’égalité de traitement à l’égard des personnes LGBTIQ dans le monde

3.4.1Les institutions européennes doivent assumer un rôle de garant et de protecteur des droits fondamentaux de l’homme dans leurs actions tant au sein de l’UE qu’envers les pays tiers. Pour parvenir à exercer ce rôle, elles doivent collaborer avec d’autres institutions régionales et internationales, telles que le Conseil de l’Europe et les Nations unies, afin de garantir aux personnes LGBTIQ et aux défenseurs des droits de l’homme la sécurité et l’égalité de traitement qu’ils méritent. Outre leur soutien aux mesures de lutte contre la violence, la haine et la discrimination à l’encontre des personnes LGBTIQ par l’intermédiaire de l’instrument d’aide de préadhésion (IAP) dans les pays candidats ou candidats potentiels, les institutions européennes doivent aussi introduire ces critères dans leurs actions extérieures, en ce qui concerne les financements accordés aux pays tiers.

Bruxelles, le 27 avril 2021

Christa Schweng
Président
e de Comité économique et social européen

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(1)    Article 2 du traité sur l’Union européenne.
(2)     https://fra.europa.eu/sites/default/files/fra_uploads/fra-2020-lgbti-equality-1_en.pdf .
(3)    Sur le lieu de travail, les personnes LGBTIQ continuent de subir des discriminations lors de leur recrutement, dans le cadre de leur travail et à la fin de leur carrière, des pratiques qui violent la législation claire adoptée par l’UE à cet égard. De multiples obstacles empêchent nombre de personnes LGBTIQ de trouver des emplois stables et équitables, ce qui accroît le risque de pauvreté, d’exclusion sociale et de sans-abrisme.
(4)    Pour concrétiser cette mesure, il convient de constituer un groupe d’experts chargé d’évaluer dans quelle mesure les projets mis en œuvre par les États membres aident les groupes vulnérables, notamment la communauté LGBTIQ, et d’examiner l’analyse effectuée tant ex ante qu’ex post sur la mise en œuvre des projets financés par des fonds européens, sur la base d’une grille d’évaluation établie au niveau européen.
(5)    Les codes de conduite devraient s’inspirer des valeurs de l’Union européenne en matière d’égalité, de droits de l’homme, de diversité et de liberté d’expression, et leur élaboration devrait prévoir la création d’un groupe d’experts chargé de surveiller la mise en œuvre et l’utilisation de ces outils de travail, mais également associer des organisations de la société civile actives dans la défense des droits de l’homme et des groupes vulnérables.