Comité économique et social européen
TEN/697
La dimension sociale de l’aviation (Rapport)
AVIS Section «Transports, énergie, infrastructures et société de l’information»Rapport de la Commission au Parlement européen, au Conseil,
au Comité économique et social européen et au Comité des régions
Stratégie de l’aviation pour l’Europe: Maintenir et promouvoir des normes sociales élevées
[COM(2019) 120 final]
Rapporteur: Raymond HENCKS
|
Consultation
|
Commission européenne, 11/04/2019
|
|
Base juridique
|
Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne
|
|
|
|
|
Compétence
|
Section «Transports, énergie, infrastructures et société de l’information»
|
|
Adoption en section spécialisée
|
03/07/2019
|
|
Adoption en session plénière
|
DD/MM/YYYY
|
|
Session plénière nº
|
…
|
|
Résultat du vote
(pour/contre/abstentions)
|
…/…/…
|
1.Conclusions et recommandations
1.1Le CESE approuve le rapport de la Commission sur les conditions d’emploi du personnel navigant hautement mobile (pilotes et équipages de cabine) dont la situation peut être particulièrement compliquée en raison de la nature transfrontière de leurs emplois et qui bénéficient de droits et de niveaux de protection différents selon le droit national qui leur est applicable.
1.2Le CESE regrette que ce rapport n’arrive qu’à la fin du mandat de l’actuelle Commission avec les incertitudes sur le suivi qui s’ensuivent. Le CESE espère que la nouvelle Commission accordera à la résolution des problèmes constatés dans ledit rapport un degré de haute priorité, proportionnel à la gravité de la situation, et proposera des mesures concrètes.
1.3Le CESE approuve que le rapport précité mette en exergue qu’un bon nombre de problèmes et d’insécurités juridiques subsistent et qu’une meilleure application des règles de l’Union et nationales est essentielle dans toutes les formes d’emploi du personnel navigant pour éviter des pratiques qui constituent une violation ou un contournement du droit applicable, comme le travail non déclaré ou le faux travail indépendant, et pour garantir des conditions légales et égales pour le personnel navigant avec une priorité absolue pour la sécurité du personnel et des passagers. Le CESE approuve les actions envisagées par la Commission et invite les États membres à veiller à une interprétation et à une application uniforme de la réglementation sociale et du travail traitant du personnel navigant.
1.4Le CESE déplore l’absence de statistiques fiables sur le nombre d’emplois de personnel navigant, ainsi que sur le nombre d’externalisations et de travailleurs intérimaires. Ce manque de statistiques, que le CESE demande de redresser dans les meilleurs délais, accentue l’insécurité juridique qui plane sur les conditions d’emploi et sur les différents niveaux de protection du personnel navigant, favorise les conditions de concurrence inégales ou déloyales pour les transporteurs aériens de l’UE qui sont soumis à une très forte pression concurrentielles, et porte préjudice aux États membres qui sont privés de certaines recettes fiscales et cotisations de sécurité sociale.
1.5Vu la multitude de formes de contrats de travail avec les incertitudes qui, parfois, en résultent, le CESE réitère sa demande de promouvoir l’emploi direct, qui devrait rester la forme habituelle de l’emploi dans le secteur de l’aviation, et estime qu’il est indispensable de s’opposer à tout contrat atypique qui risque de nuire à la sécurité du personnel navigant et des passagers, étant entendu que le recours à un contrat temporaire ou intérimaire n’est pas automatiquement illicite ou créateur de dumping social.
1.6Comme le secteur du personnel navigant n’est pas exempt de régimes de travail illicites comme le travail non déclaré et le faux travail indépendant, ou la non-application de la directive sur le détachement, le CESE soutient la Commission, qui demande instamment aux États membres:
·de garantir, par les moyens appropriés, l’application, au niveau national, des règles du droit du travail en vigueur et de garantir également le respect du droit de l’Union tel qu’interprété par la Cour de justice de l’Union;
·de veiller à ce que les règles de sécurité aérienne de l’Union s’appliquent de manière correcte et identique au personnel de l’’aviation quelle que soit leur relation contractuelle avec la compagnie aérienne;
·de transposer correctement la directive relative à des conditions de travail transparentes et prévisibles dans l’Union européenne, qui s’appliquera quelle que soit la forme de contrat existante ou future, y compris le travail de faux indépendant.
1.7Le CESE espère que la future Autorité européenne du travail veillera à ce que les récentes modifications apportées à la directive concernant le détachement des travailleurs, qui établit le principe de l’égalité de rémunération pour un même travail effectué sur un même lieu, soient correctement transposées et appliquées par les États membres jusqu’au 30 juillet 2020. De même, le CESE estime que ladite Autorité devra également veiller à ce que tous les droits du personnel de l’aviation civile soient respectés.
1.8Le CESE rappelle que le droit de créer ou de s’affilier à un syndicat, de négocier des conventions collectives, de faire grève, etc., sont des droits de l’homme garantis aux niveaux international, européen et national qui doivent être scrupuleusement respectés.
1.9L’absence de normes mondiales en matière de travail dans l’aviation civile nuit à l’efficacité de la législation de l’Union et des États membres en matière de travail sur les liaisons intra- et extra-UE. Le CESE regrette qu’il n’y ait apparemment pas de consensus au sein de l’Organisation internationale du travail pour élaborer une convention sur les droits des travailleurs dans l’aviation civile, alors qu’une telle convention a été réalisée pour le personnel maritime. Le CESE encourage vivement l’Union européenne à intégrer d’ambitieuses clauses et normes sociales contraignantes, liées au travail dans tous les accords dans le domaine de l’aviation avec les pays tiers et approuve que la Commission entend agir en ce sens.
1.10En ce qui concerne la qualité de la formation, il est hautement inquiétant de lire dans le rapport de la Commission à l’examen:
·que les compétences acquises par les aspirants pilotes peuvent ne pas toujours correspondre aux compétences requises par les compagnies aériennes;
·qu’une proportion considérable des pilotes titulaires d’une licence de pilote de ligne ne satisfaisait pas aux exigences de base pour intégrer les compagnies aériennes.
1.11Le CESE rappelle que selon la nouvelle directive relative à des conditions de travail transparentes et prévisibles dans l’Union européenne, les États membres veillent à ce que, lorsqu’un employeur est tenu, par le droit national ou de l’Union ou les conventions collectives, de fournir une formation à un travailleur pour l’exécution du travail pour lequel il est engagé, cette formation soit fournie gratuitement au travailleur, soit considérée comme du temps de travail et soit organisée, dans la mesure du possible, pendant les heures de travail.
1.12Le CESE demande à la Commission d’être proactive et d’inviter toutes les organisations qui remplissent les critères pour être membre du comité du dialogue sectoriel européen pour le secteur de l’aviation civile à participer activement aux travaux dudit comité et d’utiliser cet outil au mieux pour trouver, grâce à la négociation, des solutions mutuellement satisfaisantes aux difficultés qu’elles rencontrent.
1.13Enfin, le CESE estime que le climat de travail du personnel navigant est non seulement fonction de ses conditions de travail, mais dépend également de facteurs externes comme par exemple le degré de satisfaction des passagers par rapport à la qualité du service aéroportuaire et à bord de l’avion. Il importe dès lors que les droits des passagers, y compris ceux des passagers à besoins spécifiques (personnes handicapées, âgées, en bas âge, femmes enceintes) soient dûment respectés.
2.Introduction
2.1Dans le transport aérien, la protection sociale et le droit du travail, à part des normes minimales définies par le droit de l’Union, relèvent essentiellement de la compétence et de la responsabilité des États membres, où les règles afférentes sont, à des degrés variés, appliquées de manière différente.
2.2Dans l’aviation civile, il n’existe plus de modèle uniforme d’emploi: certaines compagnies offrent des emplois de qualité et des contrats à durée indéterminée, alors que selon une récente enquête (
Study on employment and working conditions of aircrews in the EU internal aviation market
– étude «Ricardo»), entre 9 et 19 % des membres d’équipage de cabine et environ 8 % des pilotes ont déclaré qu’ils étaient employés via une certaine forme d’organisme intermédiaire.
2.3Le rapport de la Commission sous avis ne traite que du personnel navigant (pilotes et équipages de cabine) dont la situation peut être particulièrement compliquée en raison de la nature transfrontière de leurs emplois et qui bénéficient de droits et de niveaux de protection différents selon le droit national qui leur est applicable.
2.4S’y ajoute que la pression sur les coûts d’exploitation dans un marché très concurrentiel amène certaines compagnies aériennes à recourir à différents régimes d’emploi indirect en tant qu’alternative au contrat de travail à durée indéterminée qui, selon l’étude «Ricardo» demeure la principale forme d’emploi. Néanmoins, pour réduire les coûts d’exploitation, de nombreux transporteurs aériens:
·externalisent une partie de leurs activités;
· procèdent à l’emploi de personnel navigant via des agences intermédiaires, y compris des entreprises de travail intérimaire, parfois par le biais de différents régimes dans le cadre d’une chaîne complexe de relations d’emploi rendant difficile d’identifier le véritable employeur;
·engagent des travailleurs indépendants;
·affectent du personnel à une base opérationnelle située hors du territoire où la licence a été délivrée;
·pratiquent le «pay to fly» ( payer pour voler);
ce qui génère certaines incertitudes juridiques et rend parfois difficile de distinguer les situations illégales des situations très complexes mais légales.
2.5La Commission a annoncé en 2015, dans le cadre de sa stratégie de l’aviation pour l’Europe, faire de l’agenda social dans le secteur de l’aviation une question prioritaire. Néanmoins, en 2017, le Parlement européen, le Comité économique et social européen et le Comité des régions sont restés préoccupés par une situation qui n’avait guère changé et ont invité les États membres et la Commission à réagir aux problèmes sociaux persistants dans l’aviation, en particulier dans le cas du personnel navigant hautement mobile.
2.6En octobre 2018, au vu du manque de mesures concrètes sur la dimension sociale du transport aérien, et alertés par des grèves à répétition d’une partie du personnel de l’aviation, les ministres des transports européens de six États membres ont, dans une déclaration commune, invité la Commission à élaborer pour fin 2018 des mesures concrètes, notamment un agenda social ambitieux garantissant des conditions de travail équitables, qui met tous les acteurs du secteur, relevant de l’UE et des pays tiers, sur un pied d’égalité dans le cadre d’une concurrence loyale.
3.
Observations générales
3.1Dans sa stratégie pour l’aviation pour l’Europe de 2015 l’Union s’est engagée à renforcer l’agenda social et à créer des emplois de haute qualité dans l’aviation, entre autres, à examiner la nécessité de clarifier davantage le droit applicable et la juridiction compétente à l’égard des contrats de travail des travailleurs mobiles du secteur aérien.
3.2Pour se faire une meilleure idée de la situation actuelle sur le marché de l’aviation, la Commission a commandé une étude (dénommée étude «Ricardo») sur les conditions d’emploi et de travail du personnel navigant qui a été publiée en janvier 2019.
3.3Le CESE approuve que la Commission ait dressé un rapport sur l’état de la situation et des conditions d’emploi du personnel navigant qui, toutefois, n’arrive qu’à la fin du mandat de l’actuelle Commission avec les incertitudes sur le suivi qui s’ensuivent. Le CESE espère que la nouvelle Commission accordera à la résolution des problèmes constatés dans ledit rapport un degré de haute priorité proportionnel à la gravité de la situation et proposera rapidement des mesures appropriées.
3.4Le rapport précité confirme effectivement qu’un bon nombre de problèmes et d’insécurités juridiques subsistent et qu’une meilleure application des règles de l’Union et nationales est essentielle dans toutes les formes d’emploi du personnel navigant pour prévenir des pratiques qui constituent une violation ou un contournement du droit applicable, comme le faux travail indépendant, et pour garantir des conditions légales et égales pour tous.
3.5Le CESE déplore que depuis l’agenda social européen, qui a été défini dans la stratégie de l’aviation de 2015, la seule mesure concrète mise en œuvre par la Commission se limite à la publication d’un guide pratique sur le droit du travail applicable et les juridictions compétentes. Le rapport de la Commission n’apporte pas de réponse quant à savoir si elle envisage d’adopter des orientations interprétatives ou d’apporter des modifications réglementaires dans le domaine de l’aviation civile. La Commission chargera un groupe ad hoc, composé d’experts du domaine de l’aviation et du droit du travail issus des États membres, de faire le bilan des actions énumérées dans le rapport sous avis, et d’informer la Commission et les États membres de la manière dont le droit du travail peut être correctement appliqué dans le secteur de l’aviation. Le CESE demande, qu’à côté des experts des institutions, les partenaires sociaux soient dûment associés aux travaux de ce groupe.
4.
Observations particulières
4.1Le rapport sous avis de la Commission précise qu’on ne dispose d’aucun chiffre concernant spécifiquement le nombre d’emplois du personnel navigant. Le CESE se demande dès lors comment établir des prévisions fiables sur le nombre de pilotes et de personnel de cabine à former et à recruter à moyenne et à longue échéance. Cela vaut particulièrement pour la formation des pilotes, qui est longue et coûteuse.
4.2Il résulte également de ce manque de statistiques que le nombre d’externalisations des emplois du personnel navigant reste inconnu. On peut donc uniquement se référer à une enquête des partenaires sociaux européens de l’aviation civile de 2015 selon laquelle seulement 52,6 % des répondants travaillant pour des compagnies aériennes à bas prix affirment avoir un contrat d’emploi direct. Le CESE estime indispensable de parfaire l’outil statistique. Ce manque de statistiques accentue l’insécurité juridique qui plane sur les conditions d’emploi et sur les différents niveaux de protection du personnel navigant et rend difficile de faire la distinction entre des pratiques légales ou illégales, abus ou failles dans la réglementation. Il favorise des conditions de concurrence inégales pour les transporteurs aériens de l’UE qui sont soumis à une très forte pression concurrentielle, et porte préjudice aux États membres qui sont privés de certaines recettes fiscales et cotisations de sécurité sociale.
4.3L’Agence de l’Union européenne pour la sécurité aérienne (EASA) a signalé dans son guide pratique d’août 2017 que la fragmentation et l’externalisation des emplois liés à la sécurité, y compris ceux du personnel navigant, pourraient avoir des effets néfastes sur la sécurité et elle a soumis des mesures concrètes dans le cadre de l’externalisation de services critiques de sécurité et de contrats de location d’avions avec équipage.
4.4En ce qui concerne le travail intérimaire, l’Union ne dispose, une fois de plus, pas de données fiables. L’étude «Ricardo», indique cependant qu’entre 9 et 19 % des membres d’équipage de cabine et 8 % environ des pilotes ont déclaré qu’ils étaient employés via une certaine forme d’organisme intermédiaire, et que la grande majorité des personnes engagées via de tels intermédiaires travaillaient pour des transporteurs à bas coûts.
4.5Le CESE réitère sa demande
de promouvoir l’emploi direct, qui devrait rester la forme habituelle de l’emploi dans le secteur de l’aviation, et estime qu’il est indispensable de s’opposer à tout contrat atypique qui risque de nuire à la sécurité du personnel navigant et des passagers.
4.6L’application de la directive relative au travail intérimaire (2008/104) ne peut être que temporaire et ne peut être dénaturée en mesure permanente, étant entendu que le recours à un contrat temporaire ou intérimaire peut être indispensable et n’est pas automatiquement illicite ou créateur de dumping social.
4.7Concernant le travail non déclaré qui résulte, entre autres, du travail de faux indépendant, le séminaire qui sera organisé en fin d’année par la plateforme européenne sur le travail non déclaré avec un accent particulier sur le faux travail indépendant du personnel navigant est une étape importante pour rendre le problème visible et en discuter entre les inspecteurs du travail et les partenaires sociaux. Il importe que les États membres renforcent leurs services d’inspection du travail afin de pouvoir efficacement contrôler le respect des dispositions de l’Union et nationales en matière de conditions de travail dans l’aviation civile.
4.8Les règles de sécurité aérienne de l’Union renferment la notion de base d’affectation. En raison de la grande mobilité du personnel navigant, il peut être difficile de déterminer la législation en matière de sécurité sociale qui s’applique, le droit du travail dont il peut se prévaloir, ainsi que la juridiction devant laquelle il peut faire valoir ses droits. La base d’affectation sert également de référence pour calculer les limitations du temps de vol et de service. Le CESE invite instamment les États membres à veiller à la bonne application de la législation sociale de l’Union et nationale à l’égard du personnel employé par un transporteur aérien de l’Union exploitant des services aériens à partir d’une base d’exploitation située en dehors du territoire de l’État membre dans lequel ce transporteur a son principal établissement, conformément au règlement relatif aux services aériens.
4.9Le rapport de la Commission retient que le nombre de bases d’exploitation est en constante augmentation, et que les aéronefs et le personnel navigant d’une même compagnie aérienne sont de plus en plus souvent basés en dehors du principal établissement de la compagnie aérienne, sur le territoire d’autres États membres, voire parfois dans des pays tiers. Dans ce cas, la loi applicable est celle du pays de la base d’affectation, alors que certaines compagnies appliquent la loi du pays de l’établissement principal au lieu de celle du pays de la base d’affectation. Le CESE demande à la Commission de publier des lignes directrices concernant les bases d’affectation et d’exploitation et le droit applicable.
4.10Il existe plusieurs régimes de travail indépendant: le pilote indépendant directement ou via un organisme intermédiaire, ou une S.A.R.L. de pilotes indépendants. Le CESE soutient la Commission qui demande instamment aux États membres:
·de veiller à ce que les règles de sécurité aérienne de l’Union s’appliquent de manière correcte et identique au personnel de l’aviation quelle que soit leur relation contractuelle avec la compagnie aérienne;
·de garantir, par les moyens appropriés, l’application, au niveau national, des règles du droit du travail en vigueur et de garantir également le respect du droit de l’Union tel qu’interprété par la Cour de justice de l’Union;
·de transposer correctement la directive relative à des conditions de travail transparentes et prévisibles dans l’Union européenne, qui s’appliquera à tous les travailleurs, notamment ceux qui occupent des emplois nouveaux et atypiques.
4.11En ce qui concerne le détachement de travailleurs par le recours temporaire à du personnel en dehors de sa base d’affectation, la directive afférente n’est généralement, selon l’étude Ricardo, pas appliquée dans le cas du personnel navigant, alors qu’elle est en principe applicable à la prestation transnationale de services par des entreprises de travail intérimaire ou des agences de placement.
4.12La directive «détachement» s’applique également dans le contexte d’un contrat de location d’aéronefs avec équipage, s’il existe une relation d’emploi entre l’équipage et le bailleur pendant toute la durée de la location. Les membres du personnel navigant qui sont affectés à une nouvelle base d’affectation ne sont pas considérés comme étant détachés.
4.13Le CESE soutient la Commission qui se propose d’assister les États membres lors de l’application de la directive «détachement» révisée, en vue notamment d’améliorer l’égalité de traitement et de prévenir la fraude transfrontière.
4.14En outre, le CESE espère que la future Autorité européenne du travail veillera également à ce que les récentes modifications apportées à la directive concernant le détachement de travailleurs, qui établit le principe de l’égalité de rémunération pour un même travail effectué sur un même lieu, soient correctement transposées et appliquées par les États membres d’ici au 30 juillet 2020, tout comme elle devra veiller à l’application correcte de la législation sociale, tant au niveau européen que national, afin que tous les droits du personnel de l’aviation civile soient respectés, y compris celui de la liberté syndicale.
4.15Il revient au CESE que certaines compagnies aériennes interdisent l’affiliation à un syndicat qui n’est pas de leur convenance et, parfois, procèdent même à des licenciements pour raison d’adhésion à un syndicat. Le CESE rappelle aux États membres concernés que le droit de créer ou de s’affilier à un syndicat, de négocier des conventions collectives, de faire grève, etc. sont des droits de l’homme garantis au niveau international, européen et national et doivent être scrupuleusement respectés.
4.16En ce qui concerne les équipages de pays tiers, le CESE réitère sa demande (voir
JO C 13 du 15.1.2016, p. 110
) d’étendre le permis unique au personnel navigant afin d’assurer un traitement égal de tous les travailleurs de l’industrie conformément à la directive 2011/98/UE. L’étude «Ricardo» confirme qu’il n’est pas possible de déterminer, sur la base des données collectées, si cette pratique est courante ou non, ni si la base d’affectation de l’équipage utilisé est située dans un pays tiers ou dans l’Union.
4.17L’absence de normes mondiales en matière de travail dans l’aviation civile nuit à l’efficacité de la législation de l’Union et des États membres en matière de travail sur les liaisons intra- et extra-UE. Le CESE regrette qu’il n’y ait pas de consensus au sein de l’Organisation internationale du travail pour élaborer une convention sur les droits des travailleurs dans l’aviation civile alors qu’une telle convention a été réalisée pour le personnel maritime. À défaut d’une convention au niveau de l’OIT, le CESE encourage vivement l’Union européenne à intégrer dans tous les accords dans le domaine de l’aviation avec des pays tiers (à commencer par celui actuellement en instance entre l’UE et le Qatar) d’ambitieuses clauses sociales liées au travail qui soient contraignantes et susceptibles de sanctions en cas de non-respect.
4.18La formation de pilote est longue et coûteuse et se compose de trois étapes (formation de base, qualification de type pour piloter un type d’aéronef particulier et formation en vol de ligne pour acquérir l’ expérience de vol). Suivant les informations de l’étude «Ricardo», entre 2,2 et 6 % des pilotes interrogés ont dû payer pour acquérir de l’expérience de vol dans le cadre du «pay-to-fly» (payer pour voler). La directive relative à des conditions de travail transparentes et prévisibles dans l’Union européenne [COM(2017) 797 – 2017/0355 (COD)] prévoit que les États membres veillent à ce que, lorsqu’un employeur est tenu, par le droit national ou de l’Union ou les conventions collectives, de fournir une formation à un travailleur pour l’exécution du travail pour lequel il est engagé, cette formation est soit fournie gratuitement au travailleur, soit considérée comme du temps de travail et soit organisée, dans la mesure du possible, pendant les heures de travail. Le CESE espère que son application correcte sera régulièrement contrôlée tout en évitant de créer de nouvelles entraves bureaucratiques.
4.19En ce qui concerne la qualité de la formation, il est hautement inquiétant de lire dans le rapport de la Commission sous avis que:
·les compétences acquises par les aspirants pilotes peuvent ne pas toujours correspondre aux compétences requises par les compagnies aériennes;
·une proportion considérable des pilotes titulaires d’une licence de pilote de ligne ne satisfaisait pas aux exigences de base pour intégrer les compagnies aériennes.
4.20Le CESE regrette vivement que dialogue social européen, et particulièrement le comité du dialogue sectoriel européen pour le secteur de l’aviation civile, ne soit plus à même, depuis 2017, de mener un dialogue constructif, en raison d’un manque de représentativité des compagnies aériennes. Cela est d’autant plus désolant qu’un dialogue social constructif et des conventions collectives pourraient trouver des réponses à certains problèmes soulevés dans le rapport de la Commission.
4.21Le CESE encourage la Commission à être plus proactive et à persuader les partenaires sociaux de garantir une représentation adéquate des compagnies aériennes et du personnel navigant et à utiliser cet outil au mieux pour trouver, grâce à la négociation, des solutions mutuellement satisfaisantes aux difficultés qu’ils rencontrent.
4.22En ce qui concerne le climat de travail du personnel navigant, celui-ci est non seulement fonction de ses conditions de travail, mais dépend également de facteurs externes comme par exemple le degré de satisfaction des passagers par rapport à la qualité du service aéroportuaire et à bord de l’avion. Le CESE estime également que le personnel de cabine devra disposer de la formation et du temps requis pour répondre aux besoins spécifiques des passagers vulnérables (personnes handicapées, âgées ou en bas âge, femmes enceintes, etc.). Il faudra veiller à ce que les droits des passagers soient respectés et qu’ils aient accès à toutes les informations appropriées dans un langage clair et compréhensible. Le CESE soutient la Commission, qui invite instamment le Conseil à adopter rapidement les révisions proposées par le projet de règlement modifiant le règlement (CE) nº 261/2004 sur les droits des passagers aériens en cas de refus d’embarquement et d’annulation ou de retard important d’un vol.
Bruxelles, le 3 juillet 2019
Pierre Jean COULON
Président de la section «Transports, énergie, infrastructures et société de l’information»
_____________