ISSN 1977-0936 |
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Journal officiel de l'Union européenne |
C 293 |
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Édition de langue française |
Communications et informations |
66e année |
Sommaire |
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I Résolutions, recommandations et avis |
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AVIS |
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Comité économique et social européen |
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579e session plénière du Comité économique et social européen, 14.6.2023-15.6.2023 |
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2023/C 293/01 |
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2023/C 293/02 |
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2023/C 293/03 |
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2023/C 293/04 |
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2023/C 293/05 |
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2023/C 293/06 |
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2023/C 293/07 |
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2023/C 293/08 |
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2023/C 293/09 |
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2023/C 293/10 |
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III Actes préparatoires |
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Comité économique et social européen |
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579e session plénière du Comité économique et social européen, 14.6.2023-15.6.2023 |
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2023/C 293/11 |
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2023/C 293/12 |
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2023/C 293/13 |
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2023/C 293/14 |
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2023/C 293/15 |
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2023/C 293/16 |
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2023/C 293/17 |
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2023/C 293/18 |
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2023/C 293/19 |
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2023/C 293/20 |
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2023/C 293/21 |
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2023/C 293/22 |
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2023/C 293/23 |
FR |
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I Résolutions, recommandations et avis
AVIS
Comité économique et social européen
579e session plénière du Comité économique et social européen, 14.6.2023-15.6.2023
18.8.2023 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 293/1 |
Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Vers un Conseil européen de la politique alimentaire en tant que nouveau modèle de gouvernance dans le futur cadre de l’Union pour des systèmes alimentaires durables»
(avis d’initiative)
(2023/C 293/01)
Rapporteure: |
Piroska KÁLLAY |
Décision de l’assemblée plénière |
25.1.2023 |
Base juridique |
Article 52, paragraphe 2, du règlement intérieur |
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Avis d’initiative |
Compétence |
Section «Agriculture, développement rural et environnement» |
Adoption en section |
1.6.2023 |
Adoption en session plénière |
14.6.2023 |
Session plénière no |
579 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
179/1/2 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
Le système alimentaire de l’Union européenne (UE) se trouve à la croisée des chemins, confronté à une crise à multiples facettes qui englobe une série d’enjeux environnementaux, climatiques, sanitaires et sociaux, tous interdépendants. Face à l’urgence de la crise du système alimentaire et au besoin de faire évoluer rapidement les comportements, le Comité économique et social européen (CESE) estime que son appel à créer un «Conseil européen de la politique alimentaire» est plus que jamais d’actualité. |
1.2. |
Le CESE est d’avis qu’un tel organe contribuerait à instaurer une approche plus intégrée et participative pour ce qui est d’élaborer les politiques alimentaires, qu’il accélérerait l’alignement des politiques aux niveaux européen, national et local et, surtout, qu’il renforcerait la qualité et la légitimité de la politique alimentaire de l’Union. Cette démarche aiderait aussi à encourager un développement plus durable et plus équilibré entre zones rurales et urbaines. |
1.3. |
Le CESE se félicite de l’annonce relative à la mise en place d’un cadre de l’Union européenne pour des systèmes alimentaires durables, qui jettera les bases des changements systémiques auxquels tous les acteurs doivent procéder d’un bout à l’autre de la chaîne de valeur. Le Comité souligne que ce cadre devrait être proposé sans délai par l’actuelle Commission, afin de pouvoir relever en temps utile les défis que posent les systèmes alimentaires, tout retard risquant de compromettre la réussite de la stratégie «De la ferme à la table». Il invite la Commission européenne à s’engager en faveur d’une participation structurée des parties prenantes et de la société civile à la nouvelle gouvernance de ce cadre, et fait valoir que le projet d’un Conseil européen de la politique alimentaire y trouverait toute sa place. |
1.4. |
Le CESE relève l’existence de plateformes en rapport avec l’alimentation aux niveaux local, régional et national, mais juge que ces forums se révèlent insuffisants lorsqu’il s’agit de garantir effectivement, à l’échelle de l’Union, un système alimentaire durable et juste ainsi qu’une capacité de résilience. Le CESE estime donc qu’il y a lieu de consolider davantage la démocratie alimentaire et de l’intégrer dans le processus relatif à la politique alimentaire. |
1.5. |
Le CESE envisage le Conseil européen de la politique alimentaire comme une plateforme multipartite, multi-niveaux et fondée sur la science, et comme une structure institutionnelle indépendante, qui pourrait réunir en son sein:
Après une phase initiale, le Conseil européen de la politique alimentaire devrait également comprendre des représentants des échelons local, régional et national et des conseils de la politique alimentaire, garantissant ainsi une interconnexion organisée entre les niveaux concernés et le droit à une participation égale des représentants des États membres à l’échelon de l’Union européenne. À l’heure actuelle, les conseils nationaux de la politique alimentaire ne sont pas assez répandus pour garantir que tous les pays soient représentés de manière égale. |
1.6. |
Le Conseil européen de la politique alimentaire doit être une structure fiable et transparente, qui contribue à répondre aux enjeux alimentaires recensés comme autant de défis dans le cadre des objectifs de développement durable du programme des Nations unies à l’horizon 2030. Ce Conseil européen devrait en particulier: |
1.6.1. |
être un organe institutionnel au sein duquel les institutions de l’Union s’engagent et assurent une adhésion politique; |
1.6.2. |
représenter une source permanente de conseils avisés ainsi que de choix et recommandations politiques fondés sur des données probantes en ce qui concerne les orientations à donner au système alimentaire européen, un organe auquel les institutions de l’Union devraient être tenues de fournir un retour d’information et des réponses motivées; |
1.6.3. |
améliorer la cohérence entre les domaines d’action (comme la politique agricole commune, la politique commune de la pêche, le droit à l’alimentation, la législation relative à une alimentation saine, les marchés publics, les politiques en matière d’éducation, etc.) et promouvoir des innovations sociales qui favorisent le bien-être de tous les acteurs de la chaîne alimentaire, en tenant compte du renouvellement des générations qui s’impose parmi les agriculteurs. En particulier, le CESE estime important de définir, en associant à la fois le secteur agroalimentaire et les autorités éducatives compétentes, les thèmes relatifs à l’alimentation qui doivent être abordés en priorité dans le système éducatif; |
1.6.4. |
à terme, mettre en place un réseau de conseils de la politique alimentaire à l’échelle européenne, qui constituerait une plateforme permettant d’échanger de bonnes pratiques et des connaissances, en vue de guider et d’influencer les politiques de l’Union européenne. |
1.7. |
Le CESE est disposé à fournir un espace de rencontre au Conseil européen de la politique alimentaire. L’initiative conjointe du CESE et de la Commission que constitue la plateforme des acteurs européens de l’économie circulaire offre déjà un bon exemple de réussite. |
2. Informations contextuelles
2.1. |
Nos systèmes alimentaires sont confrontés à une crise à multiples facettes comportant différents enjeux interdépendants, notamment (1) d’ordre environnemental (dont les émissions de gaz à effet de serre liées à notre façon de produire, transformer et consommer nos aliments, la perte de biodiversité, l’épuisement des stocks halieutiques, l’appauvrissement en matière organique des sols et leur érosion) ou sanitaire (avec l’augmentation des pathologies liée à l’alimentation), ou en lien avec la disparition des exploitations agricoles, l’absence d’accès à une alimentation durable et de qualité, ou encore de mauvaises conditions de travail. Dans le même temps, ils pâtissent déjà de la pression exercée par les multiples chocs climatiques, l’évolution des conditions météorologiques, l’effondrement des écosystèmes et la dégradation des terres, des sols et des voies navigables. Enfin, les débats au sujet des systèmes alimentaires font de plus en plus souvent l’objet d’informations et de communications trompeuses. |
2.2. |
La Commission européenne élabore actuellement un nouveau cadre de l’UE pour des systèmes alimentaires durables, qui était prévu dans la stratégie «De la ferme à la table» et devrait être publié d’ici la fin de 2023. Ce cadre jettera les bases des changements systémiques qui doivent être opérés par toutes les parties prenantes du système alimentaire, y compris les décideurs politiques, les exploitants du secteur et les consommateurs, afin d’accélérer la transition vers un système alimentaire durable de l’UE. Il servira également de base au futur modèle de gouvernance des systèmes alimentaires et contribuera à la mise en œuvre des objectifs de développement durable (ODD), qui nécessite des solutions globales et coopératives associant divers services, ministères et secteurs ainsi que l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement alimentaire. Le CESE demande qu’un cadre législatif pour des systèmes alimentaires durables soit adopté de toute urgence afin de pouvoir relever en temps utile les défis auxquels les systèmes alimentaires sont confrontés, tout retard risquant de compromettre la réussite de la stratégie «De la ferme à la table». Ce cadre devrait comprendre des objectifs assortis d’échéances précises, des indicateurs permettant de mesurer les progrès accomplis et des mécanismes correcteurs à mettre en œuvre au cas où les objectifs ne seraient pas atteints. |
2.3. |
Dans des avis antérieurs (2), le CESE a insisté de manière toujours plus pressante, à l’instar d’autres experts et organisations de la société civile, sur la nécessité de renforcer la démocratie alimentaire en vue de favoriser une transition du système alimentaire vers des solutions plus durables. Compte tenu de l’urgence de la crise du système alimentaire (3), à laquelle contribue indubitablement la guerre en Ukraine, et de la nécessité de faire évoluer rapidement les comportements, le temps presse pour ce qui est d’encourager des dispositifs de gouvernance plus efficaces et plus légitimes. On estime qu’en faisant participer davantage le grand public et les parties prenantes du système alimentaire, les innovations démocratiques telles que les conseils de la politique alimentaire viendront accroître la qualité et la légitimité de l’élaboration des politiques alimentaires (4). |
2.4. |
Les conseils de la politique alimentaire sont définis comme des coalitions ancrées dans les collectivités, qui associent diverses parties prenantes collaborant pour répondre aux enjeux liés à l’alimentation dans une région géographique donnée (5). La pertinence du terme «politique» fait ici débat, puisque certains de ces conseils, coalitions alimentaires ou commissions ne veulent pas être perçus comme des acteurs politiques, tandis que d’autres se concentrent effectivement sur les programmes et les politiques. Les conseils de la politique alimentaire, soucieux de promouvoir l’inclusion et les principes démocratiques, associent des parties prenantes issues de l’ensemble du système alimentaire et rassemblent des particuliers, des collectivités locales, des organisations à but non lucratif et des représentants de différents secteurs économiques, comme l’agriculture, les soins de santé et l’éducation, pour collaborer à des initiatives en matière de politique alimentaire qui favorisent l’accès de tous les membres des collectivités où elles sont établies à une alimentation saine, abordable et durable. |
2.5. |
Les premiers conseils de la politique alimentaire sont apparus aux États-Unis dans les années 1980 (6) et depuis lors, ces structures n’ont cessé de se multiplier et de se diversifier. Bien que l’Europe ait tardé à rejoindre le mouvement, de tels conseils ont vu le jour à un rythme soutenu sur tout le continent au cours de la dernière décennie (7). Les experts estiment que la création de conseils de la politique alimentaire en Europe a réellement débuté avec la ratification, en 2015, du pacte de Milan de politique alimentaire urbaine, un accord international relatif aux politiques alimentaires urbaines signé par plus de 260 villes dans le monde, qui a encouragé la création de ces conseils dans plusieurs villes et régions européennes. Ces conseils ont aussi vu le jour dans des régions rurales ou suburbaines, sans être directement associés à une ville (8). |
2.6. |
Si la plupart des conseils de la politique alimentaire travaillent à l’échelle locale ou régionale, certains d’entre eux œuvrent au niveau d’un État fédéral, d’une province ou d’un pays. Ces structures offrent souvent un moyen de renouer les liens entre les villes et la production alimentaire issue des régions avoisinantes, et d’assurer une gouvernance efficace des politiques alimentaires locales et régionales, mais elles peuvent aussi se révéler utiles pour les collectivités non urbaines. Elles peuvent être vues comme des réseaux qui concilient l’objectif de durabilité avec les objectifs de démocratie et de bonne gouvernance en engageant des processus participatifs, collaboratifs et délibératifs entre les agriculteurs, les entrepreneurs du secteur alimentaire, les consommateurs et les autres parties prenantes. Parmi les principaux exemples dans l’Union européenne figure le conseil de la politique alimentaire catalan (9), créé en 2017, qui collabore avec 42 villes et dont l’organe de gestion compte 33 membres comprenant des collectivités locales et régionales, des acteurs clés de la chaîne alimentaire et des habitants des zones rurales, bien qu’il soit question de l’élargir à cinq nouveaux membres représentant notamment les ministères chargés de l’éducation, de l’égalité et du féminisme. Citons aussi le réseau des conseils de la politique alimentaire (2016), qui regroupe 30 conseils locaux (allemands pour la plupart) fonctionnant selon une approche ascendante et 40 initiatives fondatrices. |
2.7. |
Les exemples de conseils nationaux de la politique alimentaire sont plus rares au sein de l’Union européenne. En France, le Conseil national de l’alimentation (CNA) (10) est une instance consultative indépendante placée auprès de certains ministres, qui est consultée sur la définition de la politique de l’alimentation et émet des avis pour éclairer la décision publique et les différents acteurs de la chaîne alimentaire sur des sujets tels que la qualité des aliments, l’information des consommateurs, la nutrition, la sécurité sanitaire, l’accès à l’alimentation, ou encore la prévention des crises. Créé en 2000, Terres en ville, le réseau français des acteurs des politiques agricoles et alimentaires d’agglomérations (11), rassemble des villes françaises et des chambres d’agriculture (12) aux objectifs communs, pour élaborer les politiques agricoles et alimentaires métropolitaines selon une approche de co-construction associant élus locaux et monde professionnel. Ces projets alimentaires territoriaux sont financés et portés par les pouvoirs publics, ce qui entraîne parfois des tensions avec d’autres niveaux institutionnels. L’expérience montre que les citoyens sont insuffisamment associés à la conception des politiques alimentaires (au niveau local comme au niveau national). Au Portugal, un Conseil national de la sécurité alimentaire et nutritionnelle (CONSANP) (13) a vu le jour en 2018. Au Luxembourg, la création d’un organisme national multipartite appelé Conseil de la politique alimentaire a été intégrée dans l’accord de coalition 2018-2023 du Grand-Duché (14), sans toutefois être officiellement arrêtée à ce jour. Aux Pays-Bas, un sommet citoyen sur l’avenir de l’agriculture est en gestation, mais il ne bénéficie à ce jour d’aucun soutien ni financement de la part des responsables politiques (15). |
2.8. |
Il convient également de citer le Nordic Food Policy Lab (16) («laboratoire nordique de la politique alimentaire»), créé par le Conseil nordique des ministres et à son intention, dans le but de contribuer à répondre aux enjeux alimentaires recensés comme autant de défis dans le cadre des objectifs de développement durable du programme des Nations unies à l’horizon 2030. |
2.9. |
Dans de précédents avis (17), le CESE a plaidé en faveur de la création d’un «Conseil européen de la politique alimentaire», qui permettrait de parvenir à une approche plus intégrée et participative de l’élaboration des politiques alimentaires, d’accélérer l’alignement des politiques aux niveaux européen, national et local, de fournir une plateforme permettant aux parties prenantes d’apprendre les unes des autres grâce à l’échange de bonnes pratiques, et de veiller à ce que tous les points de vue des différents secteurs soient pris en compte. |
2.10. |
Le présent avis d’initiative entend formuler des idées concrètes portant sur la gouvernance des systèmes alimentaires et sur une participation significative et structurée de la société civile, y compris des jeunes, à l’élaboration, au suivi et à la mise en œuvre des politiques alimentaires. Il s’intéresse aussi aux moyens d’associer les autorités compétentes en matière d’éducation ainsi que les représentants de la société civile au sein des écoles et parmi les parents d’élèves, pour contribuer à sensibiliser les prochaines générations, dès le plus jeune âge, à une alimentation durable et saine, sur la base de récents travaux relatifs à l’éducation des jeunes (18) et au programme scolaire de l’Union européenne (19). |
3. Enseignements tirés des conseils de la politique alimentaire existant aux niveaux local et national
3.1. |
Les conseils de la politique alimentaire existants forment un ensemble très hétéroclite d’organisations présentant un éventail de formes et de structures juridiques et organisationnelles, de missions, d’objectifs et d’activités adaptés aux besoins et priorités de la communauté urbaine qu’elles assistent. Il peut s’agir d’organisations à but non lucratif, d’organismes publics (locaux), ou encore de formes hybrides. Ces conseils appliquent différentes approches et méthodologies participatives pour développer et transformer les systèmes alimentaires urbains. |
3.2. |
Ces organisations semblent toutes partager un même objectif principal, à savoir la nécessité de mettre en place un système alimentaire durable, plus sain, transparent et plus équitable pour tous. Parmi les autres objectifs, des conseils locaux et régionaux de la politique alimentaire figurent les mesures suivantes: assurer la souveraineté alimentaire, mettre en place des chaînes d’approvisionnement alimentaire plus courtes et locales, réduire le gaspillage alimentaire, créer des jardins communautaires, assurer une connexion entre les villes et les zones rurales, développer les marchés alimentaires locaux, promouvoir l’agriculture urbaine et favoriser une culture alimentaire dynamique. |
3.3. |
Pour y parvenir, ces organisations participent à une large gamme d’activités qui ne consistent pas nécessairement à élaborer ou à faire évoluer les politiques, ni à fournir des conseils en la matière. La plupart d’entre elles procèdent d’approches ascendantes et encouragent la mise en réseau, les activités de plaidoyer, l’éducation, la sensibilisation et le développement de projets, tandis que d’autres, comme en France, sont axées sur les politiques. |
3.4. |
Les conseils de la politique alimentaire ancrés dans les collectivités entendent faire de la «démocratie alimentaire» un principe directeur en matière de procédures. Des structures organisationnelles de coordination, de conseil, etc., permettent aux différentes parties prenantes de jouer un rôle de chef de file ou d’assumer des fonctions d’assistance, de partenariat et d’autres missions autonomes. La plupart des conseils de la politique alimentaire sont ouverts à toute personne qui est intéressée par les enjeux liés aux systèmes alimentaires durables et disposée à respecter les principes démocratiques. Au-delà de leurs membres habituels, ces conseils établissent souvent des partenariats institutionnels avec des agences gouvernementales, entreprises et organisations de la société civile qui œuvrent à la transformation des systèmes alimentaires actuels vers la durabilité; ces partenariats reposent eux aussi sur des pratiques démocratiques, dont une gestion et une prise de décision collectives. Dernier point, mais non des moindres, les conseils de la politique alimentaire travaillent de concert avec les pouvoirs publics (locaux), ce qui illustre bien le caractère démocratique de la gouvernance. |
3.5. |
Aux yeux de ces organisations, la durabilité du système alimentaire représente un objectif primordial, qu’elles s’efforcent d’atteindre en travaillant sur des objectifs stratégiques (généraux), parmi lesquels: soutenir des systèmes alimentaires résilients, faciliter l’accès à des régimes sains et durables et mieux les faire connaître, lutter contre le gaspillage alimentaire à l’aide de l’économie circulaire, étayer le développement économique, promouvoir l’équité dans le système alimentaire, encourager la durabilité environnementale, et accroître la demande de denrées saines et les connaissances sur ces dernières. |
3.6. |
En Europe, les conseils de la politique alimentaire revêtent essentiellement deux types de formes juridiques, à savoir le statut d’association ou celui d’organisation sans but lucratif, des structures ascendantes créées par la société civile ou des structures descendantes établies par les collectivités locales. La plupart de ces organisations rassemblent, outre des citoyens, un vaste éventail de membres, notamment des entreprises privées, des administrations publiques et des parties prenantes actives issues des secteurs de l’alimentation, de la santé et de l’éducation, ainsi que de nombreux représentants des divers groupes sociaux composant la communauté locale. |
3.7. |
Les modalités de financement des conseils de la politique alimentaire varient considérablement. En effet, certains s’appuient sur du personnel rémunéré ou de (vastes) programmes et projets financés, tandis que d’autres sont entièrement tributaires de contributions et de prestations bénévoles ou volontaires. Les sources de financement vont des aides publiques annuelles aux cotisations des membres, en passant par les subventions de recherche et autres subsides, la contribution de fondations privées et les dons. Les activités de collecte de fonds, les contributions des membres, les dons et les subventions ou aides publiques constituent les principales sources de financement des conseils de la politique alimentaire constitués en tant qu’organisations ou associations sans but lucratif, tandis que ceux qui sont mis en place par les autorités municipales s’appuient principalement sur un budget annuel alloué par le conseil municipal. |
3.8. |
Des écueils peuvent cependant surgir, comme le révèlent certaines études indiquant que les conseils de la politique alimentaire peuvent aussi comporter des inconvénients ou fonctionner de manière imparfaite (20), par exemple si les groupes les plus vulnérables sont sous-représentés ou si des intérêts particuliers jouissent d’une grande influence. Un autre grand défi tient au fait que la qualité des délibérations repose sur des conditions de participation égalitaires, une bonne facilitation des processus et une focalisation sur les connaissances et les valeurs plutôt que sur les intérêts. Le CESE souligne dès lors la nécessité de garantir des délibérations de qualité et une véritable inclusivité au sein de ces organisations, ce qui signifie qu’il ne suffit pas de permettre à tous d’y adhérer pour garantir une véritable représentativité, en particulier celle des groupes traditionnellement sous-représentés dans la société. |
3.9. |
Le CESE estime en outre que les conseils de la politique alimentaire devraient interagir avec les jeunes générations, notamment au moyen de l’éducation. Il convient de faire de l’éducation aux systèmes alimentaires durables une priorité pour les générations futures, en mettant l’accent sur les connaissances relatives à des régimes durables et sains, et à la chaîne de production, du premier maillon jusqu’au dernier, afin de cerner qui produit nos aliments et de quelle manière, et d’expliquer la distribution qui intervient dans notre système alimentaire, depuis l’agriculteur ou l’éleveur jusqu’à la consommation du produit final par le citoyen. Le CESE recommande donc que les autorités éducatives compétentes soient associées aux conseils de la politique alimentaire, afin de définir, en coordination avec le secteur agroalimentaire, les thèmes relatifs à l’alimentation qui doivent être abordés en priorité dans le système éducatif. En outre, l’éducation des enfants devrait être soutenue par l’apprentissage tout au long de la vie destiné aux parents, et par l’éducation des citoyens (21). |
4. Appel à la création d’un Conseil européen de la politique alimentaire
4.1. |
Si la tradition ascendante des conseils de la politique alimentaire représente une richesse, elle n’est toutefois pas parvenue à peser sur les progrès et la résilience au niveau européen. La réforme de la gouvernance des systèmes alimentaires est aujourd’hui incontournable. Elle doit être entreprise de manière à leur redonner un caractère démocratique et à y renforcer la responsabilisation. Le futur cadre de l’UE pour des systèmes alimentaires durables doit faire l’objet d’un suivi minutieux, de manière à garantir la coordination des évolutions entre les différents secteurs. Pour passer outre l’obstruction opposée par des opérateurs historiques peu enclins au changement, la meilleure voie consiste à renforcer la responsabilisation et la participation, ce qui permettra d’évaluer, de réexaminer et d’améliorer régulièrement les effets d’une politique alimentaire véritablement globale. Voilà pourquoi le CESE estime que la création d’un Conseil européen de la politique alimentaire marquera une étape cruciale vers la réalisation d’une vision globale de la politique alimentaire (22). |
4.2. |
Il conviendrait que le Conseil européen de la politique alimentaire remplisse les critères suivants: |
4.2.1. |
adopter une approche scientifique et garantir un mécanisme d’avis scientifique; offrir une source fiable d’avis fondés sur la recherche et la science; |
4.2.2. |
réunir en son sein:
|
4.2.3. |
après une phase initiale, le Conseil européen de la politique alimentaire devrait également comprendre des représentants des échelons local, régional et national ainsi que des conseils de la politique alimentaire, en assurant une interconnexion organisée entre les différents niveaux. À l’heure actuelle, les conseils nationaux de la politique alimentaire ne sont pas assez répandus pour garantir que tous les pays soient représentés de manière égale; |
4.2.4. |
constituer un organe institutionnel envers lequel les institutions européennes s’engagent et assurent une adhésion politique: un organe indépendant, non gouvernemental et digne de confiance (en sa qualité d’organe phare), qui ferait autorité en matière de planification à long terme, et viserait à faire office de levier pour contribuer à préparer l’avenir alimentaire en l’orientant vers des systèmes alimentaires plus durables; |
4.2.5. |
représenter une source permanente de conseils avisés ainsi que de choix et recommandations politiques fondés sur des données probantes en ce qui concerne les orientations à donner au système alimentaire européen, un organe auquel les institutions de l’Union devraient être tenues de fournir un retour d’information et des réponses motivées. Cet organe devrait s’intéresser aux moyens de respecter les engagements actuels de l’Union, de les contrôler en évaluant également les plans nationaux en matière de politique alimentaire, et de traduire ceux-ci en mesures permettant de réaliser le progrès social grâce à l’alimentation. Enfin, il devrait participer aux discussions sur le fonctionnement des systèmes alimentaires mondiaux; |
4.2.6. |
améliorer la cohérence entre les domaines d’action (tels que la politique agricole commune, la politique commune de la pêche, le droit à l’alimentation, la législation relative à une alimentation saine, les marchés publics, les politiques en matière d’éducation, etc.) et promouvoir des innovations sociales qui favorisent le bien-être de tous les acteurs de la chaîne alimentaire, en tenant compte du renouvellement des générations qui s’impose parmi les agriculteurs; |
4.2.7. |
soutenir les conseils de la politique alimentaire sur les plans financier et structurel, encourager les approches ascendantes qui favorisent la durabilité des systèmes alimentaires locaux, régionaux et nationaux, en luttant contre la fracture entre zones rurales et urbaines et contre la polarisation entre producteurs et consommateurs par un soutien au dialogue civil (en y associant notamment des représentants de la jeunesse, des groupes sociaux vulnérables et marginalisés, des acteurs ruraux et des partenaires sociaux), et permettre le développement systématique de ces conseils en renforçant les synergies entre autorités locales et société civile; |
4.2.8. |
à terme, mettre en place un réseau de conseils de la politique alimentaire à l’échelle européenne, qui constituerait une plateforme permettant d’échanger de bonnes pratiques et des connaissances, en vue de guider et d’influencer les politiques de l’Union européenne; |
4.2.9. |
dégager des synergies avec d’autres plateformes existantes au niveau de l’Union, telles que la coalition pour la politique alimentaire de l’UE (23), la plateforme sur le gaspillage alimentaire (24), la plateforme des acteurs européens de l’économie circulaire (PAEEC) (25) et le pacte rural de l’UE (26). |
4.3. |
Le CESE est disposé à fournir un espace de rencontre au Conseil européen de la politique alimentaire. L’initiative conjointe du CESE et de la Commission que constitue la plateforme des acteurs européens de l’économie circulaire offre déjà un bon exemple de réussite (27). |
Bruxelles, le 14 juin 2023.
Le président du Comité économique et social européen
Oliver RÖPKE
(1) Voir le rapport de l’Agence européenne pour l’environnement intitulé «Transforming Europe’s food system — Assessing the EU policy mix» (europa.eu) et la présentation donnée par Olivier De Schutter au CESE le 14 avril 2023.
(2) Voir notamment: avis du Comité économique et social européen sur «La contribution de la société civile au développement d’une politique alimentaire globale dans l’Union européenne» (avis d’initiative) (JO C 129 du 11.4.2018, p. 18) et avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Une stratégie “De la ferme à la table” pour un système alimentaire équitable, sain et respectueux de l’environnement» [COM(2020) 381] (JO C 429 du 11.12.2020, p. 268).
(3) Voir les rapports du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), https://www.ipcc.ch/report/sixth-assessment-report-cycle/
(4) Power to the people? Food democracy initiatives’ contributions to democratic goods, Jeroen J. L. Candel, mai 2022.
(5) Voir les définitions figurant dans les articles universitaires suivants: Opportunities and challenges of food policy councils in pursuit of food system sustainability and food democracy–a comparative case study from the Upper-Rhine region (Mooney, 2022) et Food Policy Councils: Lessons learned (Harper e.a., 2009).
(6) Le premier conseil américain de la politique alimentaire a été créé à Knoxville, dans le Tennessee, en 1982.
(7) À l’échelle européenne, on rencontre des exemples de conseils de la politique alimentaire ou d’initiatives similaires en matière d’alimentation urbaine dans certains projets Horizon 2020 et Horizon Europe consacrés aux politiques et outils agroalimentaires visant à améliorer les systèmes alimentaires, tels que Cities 2030, FoodSHIFT 2030, FoodCLIC, FEAST et FOOD TRAILS.
(8) Franzen-Castle, L., e.a., «Engaging Rural Community Members with Food Policy Councils to Improve Food Access: Facilitators and Barriers», Journal of Hunger & Environmental Nutrition 17, 207-223 (2022).
(9) Conseil catalan de l’alimentation.
(10) Le CNA: www.cna-alimentation.fr/
(11) Terres en villes: www.terresenvilles.org/
(12) En 2022, les agglomérations membres étaient les suivantes: Montpellier, Rouen, Voiron, Le Havre, Artois (Béthune, Bruay-en-Artois), Douai, Angers, Rennes, Saint-Nazaire, Nantes, Lorient, Toulouse, Grenoble, Saint-Étienne, Lyon, Besançon, Dijon, Nancy, Metz, Amiens, Lille, Auxerre, Poitiers.
(13) Conselho Nacional de Segurança Alimentar e Nutricional entra em funcionamento.
(14) Food Policy Council: https://food.uni.lu/projects/research-projects/food-policy-council/
(15) https://g1000landbouw.nl/
(16) Nordic Food Policy Lab: www.norden.org/en/nordic-food-policy-lab
(17) Voir notamment: JO C 129 du 11.4.2018, p. 18, et JO C 429 du 11.12.2020, p. 268.
(18) Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Donner aux jeunes les moyens de réaliser le développement durable grâce à l’éducation» (avis d’initiative) (JO C 100 du 16.3.2023, p. 38).
(19) Rapport d’information du CESE sur l’«Évaluation du programme de l’UE à destination des écoles».
(20) Power to the people? Food democracy initiatives’ contributions to democratic goods.
(21) JO C 100 du 16.3.2023, p. 38.
(22) Voir le rapport du panel international d’experts sur les systèmes alimentaires durables (IPES Food), et De Schutter, O., Jacobs, N., et Clément, C., 2020, «A “Common Food Policy” for Europe: How governance reforms can spark a shift to healthy diets and sustainable food systems», Food Policy 96.
(23) EU Food Policy Coalition.
(24) EU Platform on Food Losses and Food Waste (Plateforme de la Commission européenne sur les pertes et le gaspillage alimentaires).
(25) Plateforme des acteurs européens de l’économie circulaire.
(26) The rural pact. https://rural-vision.europa.eu/rural-pact_en
(27) Plateforme des acteurs européens de l’économie circulaire.
18.8.2023 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 293/8 |
Avis du Comité économique et social européen sur le thème «L’impact de la crise énergétique sur l’économie européenne»
(avis d’initiative)
(2023/C 293/02)
Rapporteure: |
Alena MASTANTUONO |
Décision de l’assemblée plénière |
25.1.2023 |
Base juridique |
Article 52, paragraphe 2, du règlement intérieur |
|
Avis d’initiative |
Compétence |
Section «Transports, énergie, infrastructures et société de l’information» |
Adoption en section |
16.5.2023 |
Adoption en session plénière |
14.6.2023 |
Session plénière no |
579 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
194/4/10 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
Les principales répercussions de la crise énergétique résident dans l’inflation et les contraintes exercées sur les finances publiques. Poussés par les prix du gaz et du pétrole, les prix de l’énergie ont été le catalyseur de l’inflation et ont durement touché les ménages à revenus faibles et intermédiaires ainsi que les entreprises grandes consommatrices d’énergie. Cette forte inflation a constitué le phénomène le plus marquant des performances économiques de 2022 et s’est répercutée sur d’autres éléments du panier de consommation, influant lourdement sur la consommation et les comportements. Le très grand nombre de déclarations de faillite au sein de l’Union européenne (UE) est un autre indicateur de la gravité de la situation. |
1.2. |
Les effets de la crise énergétique ont été amplifiés par les conséquences négatives antérieures de la pandémie de COVID-19, qui a sensiblement affaibli les performances économiques de l’UE après lui avoir fait connaître la plus forte chute de son PIB depuis de nombreuses décennies. Certains secteurs pourraient pâtir davantage de cet effet cumulatif. Celui-ci complique par ailleurs la capacité d’appréhender dans son ensemble l’incidence de la crise énergétique sur l’économie, compte tenu des effets persistants de la pandémie de COVID-19. Le fait que les données statistiques actuelles dans certains domaines tels que l’emploi soient relativement positives ne signifie aucunement que la situation est idéale. Une analyse précise de l’incidence économique de la crise ne pourra être réalisée que lorsque celle-ci sera derrière nous et que toutes les données détaillées seront disponibles. |
1.3. |
Les répercussions de la crise énergétique sur l’économie ont pris la forme d’une inflation élevée, d’une croissance économique anémique, d’une forte pression sur les finances publiques et le pouvoir d’achat des ménages et des entreprises, ainsi que d’une baisse de la compétitivité économique extérieure. Sur le modèle des recommandations de la Banque centrale européenne (BCE), le Comité économique et social européen (CESE) suggère d’établir comme critère un «triple T écologique» afin que les interventions futures soient adaptées aux besoins, ciblées et à l’épreuve de la transition (tailored, targeted and transition-proof). Dans une perspective à plus long terme, des mesures non ciblées concernant les prix ne feraient que prolonger la période d’inflation élevée. |
1.4. |
Le CESE est convaincu que les incidences négatives de la crise énergétique sur les performances économiques de l’UE constituent un enseignement qui doit se refléter dans les prochaines démarches stratégiques. La crise énergétique, qui résulte principalement de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, a révélé et mis en lumière une partie des faiblesses et dérèglements majeurs du système économique de l’UE, lequel doit être structurellement amélioré et ajusté pour pouvoir surmonter plus efficacement des chocs exogènes similaires, principalement sur les plans de la résilience, de l’efficacité et de l’autonomie stratégique. |
1.5. |
Le CESE estime que l’UE doit aller au-delà des réponses budgétaires d’urgence et se concentrer sur les changements structurels, afin de pouvoir s’émanciper plus rapidement des combustibles fossiles. Pour s’assurer un développement économique harmonieux et compétitif, l’Union doit pouvoir compter sur des livraisons fiables et sûres d’énergie abordable, en s’appuyant sur un marché intégré de l’énergie qui soit composé pour une large part d’énergies propres tout en étant résilient et capable de faire face aux perturbations et aux chocs. |
1.6. |
Le Comité soutient vigoureusement toutes les mesures visant à réduire durablement l’inflation au cours de l’année et est favorable à une reprise économique fondée sur des investissements dans les secteurs et industries écologiques, numériques et d’importance stratégique, qui soutienne la base industrielle de l’UE et sa compétitivité mondiale tout en tirant pleinement parti des avantages du marché unique. Il est absolument crucial que la production de technologies propres devienne une composante clé du modèle économique européen. Les partenaires sociaux entendent s’assurer à tout prix que les connaissances, les compétences et l’appareil productif ne quittent pas l’Europe. Si nous voulons garantir notre indépendance de manière avisée, l’industrie doit rester sur le territoire européen, tout comme les emplois qu’elle crée. Dès lors, la compétitivité et la création d’emplois de qualité doivent être intégrées dans notre mode de fonctionnement au quotidien et occuper une place centrale dans l’élaboration et la mise en œuvre de nos politiques. |
1.7. |
La mise en œuvre du pacte vert, qui englobe la transition vers une économie neutre en carbone et le maintien d’une industrie européenne compétitive, nécessite des investissements considérables provenant de sources publiques et privées. Or, l’Union ne dispose d’aucun cadre à long terme qui permettrait de financer massivement cette mise en œuvre. Le CESE demande donc que soit mis en place un cadre adéquat pour soutenir de manière simple et efficace les mesures de financement en faveur de la transition vers une économie neutre pour le climat. |
1.8. |
En période de crise et d’incertitude, une information objective et un leadership politique fort sont essentiels. C’est pourquoi le CESE recommande de continuer à assurer une communication appropriée, y compris tout au long de la gestion des conséquences de la crise. La réforme du marché de l’énergie et du système énergétique aura des répercussions sur l’ensemble des industries et des consommateurs, et il est capital que les parties prenantes puissent s’exprimer au cours du processus législatif, et qu’elles soient correctement informées sur cette transition fondamentale. |
2. Principaux éléments factuels et contextuels
2.1. |
La crise énergétique perdure et continue d’affecter la vie des citoyens et la prospérité des entreprises. Il est donc difficile de mesurer l’incidence globale qu’elle aura au bout du compte sur l’économie. Nous pouvons toutefois affirmer avec certitude qu’elle s’est principalement répercutée sur l’inflation (la plus élevée enregistrée depuis de nombreuses décennies) et sur les finances publiques (qui ont joué un rôle majeur s’agissant d’atténuer les effets de la hausse des prix et des coûts et qui ont soutenu massivement les investissements afin d’en réduire la vulnérabilité). Les prix élevés de l’énergie trouvent leur origine dans la flambée des prix du gaz (1). |
2.2. |
Il convient de rappeler les étapes clés de l’union de l’énergie, qui ont spécifiquement fixé le cap du développement futur du système énergétique. Certains de ses piliers, en particulier ceux liés à la sécurité énergétique, ont été sous-estimés ces derniers temps, principalement en raison de l’accent mis sur le gaz russe bon marché et de la préférence marquée accordée à ce dernier, considéré alors comme une source d’approvisionnement temporaire durant la transition écologique de l’économie, ainsi que de la décision hâtive, motivée par des raisons purement politiques, de se détourner des sources d’énergie propres et stables. |
2.3. |
Concernant la composition du bouquet énergétique, qui diffère d’un État membre à l’autre au sein de l’UE en fonction notamment de leurs conditions géomorphologiques spécifiques, le respect des objectifs de l’union de l’énergie est fortement tributaire des circonstances nationales. Ce facteur se reflète de manière visible dans la rapidité de la transition écologique de l’Union. Une évidence continue toutefois de s’imposer: la principale priorité de l’union de l’énergie durant la crise était la sécurité d’approvisionnement, allant parfois à l’encontre des objectifs de la transition écologique. |
2.4. |
La crise énergétique que nous traversons montre la profonde vulnérabilité du système énergétique européen et l’importance de viser, pour toute la chaîne industrielle de l’énergie, une autonomie stratégique ouverte sur le plan énergétique. Dans le même temps, elle fait la preuve de la capacité du système à affronter et à amortir de violents chocs exogènes et leurs conséquences. Cette crise énergétique a été provoquée par une conjonction d’éléments d’ordre économique, politique et technique. La crise a commencé par des bouleversements économiques consécutifs à la pandémie de COVID-19, faisant grimper la demande mondiale d’énergie, tandis que l’ingérence de pays tiers et les bas niveaux de stockage de gaz observés dans certains pays européens pendant l’hiver 2021/2022, conjugués à une demande accrue, ont fait ressortir la gravité de la situation. Ce contexte déjà difficile s’est ensuite aggravé lorsque la Russie a envahi l’Ukraine en février 2022: la situation, exacerbée par la dépendance de l’UE aux sources d’énergie fossiles, a influé de manière directe et significative sur les prix de l’énergie et la sécurité de l’approvisionnement. |
2.5. |
La crise énergétique a été préjudiciable à l’économie de l’Union. En 2022, elle a directement contribué à ce que l’inflation atteigne des valeurs records dans l’histoire récente de l’intégration européenne, avec un taux moyen de 9,2 % au sein de l’UE (2), qui devrait redescendre à 6,7 % en 2023 (un niveau encore très élevé) et à 3,1 % l’année suivante (3). Cette forte inflation a constitué le phénomène le plus marquant des performances économiques de 2022 et s’est répercutée sur d’autres éléments du panier de consommation, influant lourdement sur la consommation et les comportements. Cette situation a eu une incidence considérable sur les ménages et les entreprises. Les plus vulnérables ne sont pas les seuls à avoir souffert des hausses de prix: les ménages à revenus faibles et moyens ont été fortement touchés et il se pourrait que les taux de précarité énergétique augmentent. Tous ces facteurs ont lourdement pesé sur les finances personnelles et miné la confiance des consommateurs au sein de l’Union; la plupart d’entre eux ont modifié leurs habitudes pour faire face à la crise énergétique. Cette confiance est tombée à un niveau historiquement bas en septembre 2022, avant de remonter légèrement par la suite. |
2.6. |
La situation a également eu une incidence négative sur la position des entreprises. Les déclarations de faillite au sein de l’UE ont connu une augmentation substantielle de 26,8 % en glissement trimestriel, atteignant une valeur sans précédent de 113,1, selon un indice utilisé par Eurostat pour mesurer le niveau des faillites dans l’UE par rapport à une valeur de référence de 100, correspondant à l’année 2015. Les données montrent que l’indice a entamé une courbe ascendante au deuxième trimestre 2020 et a fortement augmenté tout au long de l’année 2022. Le chiffre enregistré au quatrième trimestre 2022 a montré une détérioration de la situation, les entreprises, en particulier les PME, étant confrontées à une baisse de la demande, à un durcissement des normes de crédit (4) et à un avenir sombre et incertain. |
2.7. |
La crise énergétique a aussi eu des répercussions négatives sur les performances économiques de l’Union, principalement pour ce qui est de la consommation privée (dont la baisse est perçue comme la cause principale de la stagnation du PIB), des investissements (malgré un énorme potentiel d’activités d’investissement, le déficit en la matière s’est en fait creusé depuis 2021) et de la compétitivité extérieure (marquée par une nette détérioration par rapport à la période antérieure à 2020). Après avoir enregistré une croissance substantielle de 3,5 % en 2022, le PIB global de l’Union ne devrait croître que légèrement (1,0 %) en 2023 et devrait connaître une modeste accélération (1,7 %) en 2024. |
2.8. |
Parmi les charges supplémentaires résultant directement de la crise énergétique figure la performance des finances publiques. En 2022, le déficit budgétaire moyen s’élevait à 3,4 % du PIB (5), et les estimations pour les deux prochaines années font aussi état de chiffres assez similaires, qui dépassent les seuils fixés par le pacte de stabilité et de croissance. La crise énergétique, conjuguée à la transition écologique, fait peser une lourde charge sur les dépenses publiques, tandis que la nécessité de maintenir l’équilibre budgétaire impose de faire preuve de prudence. Pour allouer des fonds en suffisance tout en restant prudent sur le plan budgétaire, il faudrait suivre un modèle consistant à recourir plus largement à l’effet de levier induit par les investissements privés, sur la base de systèmes de garantie (comme ceux du Fonds européen pour les investissements stratégiques — EFSI). |
2.9. |
Pour l’heure, les données statistiques agrégées concernant l’incidence de la crise énergétique sur le marché du travail ne dressent pas un tableau négatif. En décembre 2022, le taux de chômage s’établissait à 6,1 % au sein de l’UE, soit un chiffre stable depuis avril. Il s’agit là des valeurs les plus faibles depuis 2000. Le ralentissement de l’activité économique estimé pour la fin de l’année dernière et prévu pour le début de l’année 2023 devrait toutefois freiner le rythme de croissance de l’emploi. Les entreprises à forte intensité énergétique ont été durement touchées par la crise et des défis majeurs sont attendus pour le marché du travail de demain. |
2.10. |
En 2022, la crise énergétique associée à un hiver doux, à des mesures d’économies et à des interruptions d’activité a entraîné une baisse de la consommation d’électricité (-4,6 %). Selon l’Agence de l’Union européenne pour la coopération des régulateurs de l’énergie (ACER), la baisse de la demande s’est accentuée en cours d’année; elle était cinq fois plus marquée au quatrième trimestre 2022 qu’au premier trimestre, passant de -1,8 % au premier trimestre à -9,5 % au quatrième trimestre par rapport aux mêmes périodes de 2021. |
2.11. |
Dans le même temps, la crise a aussi eu des aspects positifs: premièrement, sous la forme de nouvelles solutions qui viennent améliorer radicalement l’efficacité énergétique et dynamiser les technologies propres, voire les «faire renaître» dans certains cas, certaines entreprises ayant mis sur le marché des solutions innovantes; deuxièmement, en soulignant la nécessité de mieux interconnecter les marchés de l’énergie et de renforcer la solidarité entre les États membres. Les institutions européennes ainsi que les États membres sont parvenus à intervenir et à réagir assez rapidement, en faisant preuve d’une grande souplesse pour accepter la nouvelle conjoncture. |
2.12. |
La crise a aussi obligé à adapter et à redéfinir les principaux piliers de la politique énergétique européenne: l’union de l’énergie, le pacte vert et ses composantes spécifiques (en particulier le paquet «Ajustement à l’objectif 55»), et le cadre sous-tendant la taxinomie de l’Union. La gravité de la situation en 2022 a notamment conduit à la mise en place d’outils structurels à long terme tels que le plan REPowerEU et le plan industriel du pacte vert pour l’ère du zéro émission nette, ainsi qu’à des actions immédiates ou à court terme visant à éviter que les conséquences les plus néfastes de la crise ne frappent les ménages et les entreprises. |
3. Observations générales
3.1. |
Le CESE souligne que la crise résulte principalement de la forte dépendance de l’UE à l’égard des fournitures de gaz russes et propose de définir une vision à long terme qui la rendra moins dépendante des pays tiers pour son approvisionnement en énergie, notamment en assurant son autosuffisance en matière de technologies propres. Il insiste sur le fait que toutes les mesures prises par l’Union et ses États membres doivent encourager cette transition stratégique afin de garantir l’autonomie stratégique de l’Europe. |
3.2. |
Le CESE a bien conscience que la priorité absolue est de s’attaquer non seulement aux conséquences, mais aussi et surtout aux raisons et aux causes de la crise, et il est prêt à en débattre et à proposer des solutions en la matière. Pour ce faire, il convient d’abandonner progressivement les mesures d’urgence au profit de réformes et d’investissements compatibles avec le marché et fondés sur des données probantes, étayés par des concepts stratégiques durables et réalisables. Ces derniers doivent bénéficier d’un soutien public adéquat et trouver un équilibre entre les priorités, les sources de financement (publiques et privées), l’environnement institutionnel et les conditions administratives (autorisations, respect de la législation européenne et nationale) qui les sous-tendent. |
3.3. |
Les mesures d’économie d’énergie prises par les ménages et les entreprises ont permis de parer à tout risque grave de pénurie énergétique. Toutefois, il ne faut pas perdre de vue que certaines économies n’ont été réalisées que du fait de la suspension des activités commerciales. Parmi les industries les plus vulnérables face à la crise se trouvent logiquement celles qui consomment le plus d’énergie (industrie chimique, producteurs d’engrais, industries du fer et de l’acier). Il convient de leur accorder une attention particulière, en mettant l’accent sur leur transition énergétique et sur le risque de désindustrialisation de l’UE (fuite de carbone). |
3.4. |
La transition écologique repose sur des infrastructures énergétiques solides et interconnectées; or, elles ont souffert d’un sous-investissement massif ces dernières années. L’investissement dans les infrastructures et la modernisation de celles-ci joueront un rôle clé dans les années à venir. Il est donc important que les nouvelles règles envoient un signal clair et pérenne aux investisseurs. La capacité des PME à investir dans la transition énergétique est cependant très limitée depuis le début de la crise initiale (celle de la COVID-19). Les réformes doivent respecter les objectifs de la politique énergétique de l’Union en matière de transition écologique, de résilience et de protection sociale, et tenir compte des profondes disparités qui caractérisent la structure du bouquet énergétique des différents États membres. La crise a eu de profondes répercussions sur la sécurité des investissements. |
3.5. |
Le CESE est convaincu que les principaux besoins en matière de réforme supposent avant tout de moderniser l’organisation du marché de l’énergie pour assurer une transition écologique durable. Il invite les colégislateurs à dégager un consensus quant aux principales catégories d’organisation du marché, de manière à influer directement sur la propension à investir dans ce secteur à l’avenir, notamment par l’intermédiaire de contrats à long terme, d’instruments de soutien et d’incitation en faveur des énergies renouvelables, d’un modèle servant de base à la formation des prix de l’énergie, et de dispositifs répondant aux enjeux de flexibilité globale. |
3.6. |
Le pacte vert pour l’Europe, complété par l’initiative REPowerEU, offre un potentiel d’investissement annuel de quelque 350 milliards d’euros jusqu’à la fin de la décennie (plus de 2 % du PIB annuel de l’UE), alors que les prévisions d’investissement à court terme de l’Union restent nettement inférieures. Il faut dès lors mobiliser des ressources financières supplémentaires pour satisfaire aux besoins d’investissement prioritaires. De tels investissements pourraient servir de tremplin à une reprise économique plus soutenue dans l’Union et à de nouveaux investissements dans les infrastructures, la numérisation des réseaux d’énergie, l’interconnexion et les capacités de stockage. |
3.7. |
Le CESE se rend bien compte que ce processus exige des ressources financières colossales. La transition écologique ne pourra être menée à bien sans investissements dans la recherche, l’innovation, les infrastructures et les personnes, qu’il convient de préparer correctement grâce à l’éducation ainsi qu’au perfectionnement et à la reconversion professionnels. Les financements nationaux publics et privés sont absolument essentiels pour en faire une réalité, et ce, malgré les importantes sommes prévues à cet effet dans le cadre des nouveaux programmes de financement de l’Union. Le Comité souligne que les financements doivent être simples, efficaces et faciles d’accès, et plaide en faveur de méthodes innovantes destinées à mobiliser des capitaux privés au moyen d’instruments financiers. Il prend acte également du rôle plus étendu que jouent les aides d’État et les financements publics en vue d’atteindre des objectifs spécifiques, mais recommande toutefois d’assurer des conditions de concurrence équitables au sein de l’UE. |
3.8. |
Les gouvernements de l’UE ont affecté et alloué 758 milliards d’euros à la protection des ménages et des entreprises entre septembre 2021 et janvier 2023. Seul un tiers des interventions budgétaires mises en place par les États membres s’adressait aux catégories vulnérables. Le CESE recommande d’instaurer, sur le modèle des recommandations de la BCE, le critère d’un «triple T écologique» afin que les interventions futures soient adaptées aux besoins, ciblées et à l’épreuve de la transition (tailored, targeted and transition-proof). Le Fonds monétaire international (FMI) a par ailleurs estimé que des mesures non ciblées concernant les prix créeraient les conditions d’une hausse prolongée de l’inflation à plus long terme. Retarder leur suppression progressive pourrait compromettre la capacité de la BCE à atteindre ses objectifs à moyen terme, ce qui se traduirait par un resserrement monétaire d’une durée supérieure à ce qui serait autrement souhaitable. |
3.9. |
Le CESE est convaincu que la relance économique pourrait ainsi déboucher sur de nouvelles perspectives d’emploi et améliorer la compétitivité extérieure de l’économie européenne, en faisant naître de nouvelles industries et de nouveaux projets commerciaux indispensables à la réussite de la transition vers une économie neutre pour le climat. Un perfectionnement et une reconversion professionnels de qualité seront déterminants pour mener à bien le processus de transition. Il est absolument crucial que la production de technologies propres devienne une composante clé du modèle économique européen. Les partenaires sociaux entendent s’assurer à tout prix que les connaissances, les compétences et l’appareil productif ne quittent pas l’Europe. Si nous voulons garantir notre indépendance de manière avisée, l’industrie doit rester sur le territoire européen, tout comme les emplois qu’elle crée. Il est urgent de regagner du terrain, et la transition vers l’économie écologique nous offre une occasion d’y parvenir pour peu qu’elle soit gérée correctement. Dès lors, la compétitivité et la création d’emplois de qualité doivent être intégrées dans notre mode de fonctionnement au quotidien et occuper une place centrale dans l’élaboration et la mise en œuvre de nos politiques. |
3.10. |
Avant même les nouvelles mesures de réforme, l’UE doit se concentrer sur la mise en œuvre et l’application de la législation adoptée dans le cadre du pacte vert. La question se pose également de savoir pourquoi ces mesures n’ont pas été mises en œuvre par les États membres. L’une des raisons en est que leur capacité à absorber une telle vague d’actes législatifs est extrêmement limitée. Il en va de même pour les entreprises, principalement les PME. |
4. Observations particulières
4.1. |
Le CESE invite la Commission européenne et ses colégislateurs à faire tout leur possible pour dégager un consensus quant aux principaux paramètres et catégories d’organisation du marché. Par exemple, dans le cas des accords d’achat d’électricité, il serait opportun de définir des règles européennes communes pour les appels d’offres publics correspondants, de fixer des exigences relatives aux garanties publiques y afférentes ou d’établir un cadre pour les mesures visant à inciter les entreprises à exploiter tout le potentiel de ces accords. Le Comité souhaite voir des résultats rapides en la matière. Sans cela, le manque de transparence et de prévisibilité à long terme poussera les investisseurs à reporter leurs décisions d’investissement ou à se retirer du marché, renonçant à leurs investissements tant que le cadre ne leur paraîtra pas parfaitement clair. |
4.2. |
Le CESE s’inquiète vivement des performances macroéconomiques enregistrées dans l’Union ces dernières décennies, et est pleinement conscient de leur gravité. Toutefois, il sait aussi que rien n’est joué et qu’il y a lieu d’intervenir pour améliorer la situation. Le Comité espère que le plus grand danger, à savoir l’inflation, est en passe d’être maîtrisé et estime qu’en l’absence de nouveau choc exogène, nous pourrions bientôt entrer dans l’ère d’un nouveau système énergétique propre, juste et résilient. |
4.3. |
Le CESE recommande vivement que les mesures extraordinaires concernant les recettes revêtent un caractère strictement temporaire. Les utiliser plus longtemps que nécessaire risque d’entraîner des changements de comportement, des conséquences d’ordre social et des distorsions inutiles du marché, et de dissuader les investisseurs des secteurs concernés d’investir. De manière temporaire, la politique de plafonnement devrait refléter de manière flexible la réalité économique et être ajustée aux évolutions du marché, sans quoi elle pourrait nuire aux consommateurs en cas de baisse des prix de l’électricité. |
4.4. |
Le CESE plaide vigoureusement en faveur d’un système renforcé de protection des consommateurs, afin de tirer les leçons des répercussions de la crise énergétique actuelle sur ces derniers. Il convient pour cela de prévoir un service complet, incluant une protection juridique, des services d’information et de conseil, des instructions détaillées, un échange de bonnes pratiques, etc. Les personnes exposées au risque de précarité énergétique devraient faire l’objet d’une attention particulière. |
Bruxelles, le 14 juin 2023.
Le président du Comité économique et social européen
Oliver RÖPKE
(1) Les prix de l’électricité ont très fortement augmenté, avec une incidence variable en fonction de l’importance locale du gaz dans le portefeuille de production, pour atteindre 150 à 300 EUR par MWh en 2022.
(2) L’édition 2023 de l’indice des prix à la consommation harmonisé publié par la Commission européenne montre que pour l’énergie, le taux d’inflation annuel a atteint 20 % en moyenne en 2022. Toutefois, la situation variait d’un État membre à l’autre, l’Italie atteignant un taux maximal de 65 %.
(3) Eurostat, Prévisions économiques du printemps 2023.
(4) Selon l’enquête sur la distribution du crédit bancaire publiée par la BCE en janvier 2023, les normes de prêt ont poursuivi leur durcissement marqué au quatrième trimestre 2022, tant pour les entreprises que pour les ménages. Les entreprises ont connu le plus fort durcissement net des normes de crédit depuis la crise de la dette souveraine de la zone euro en 2011.
(5) Eurostat, Prévisions économiques du printemps 2023.
18.8.2023 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 293/13 |
Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Deuxième ensemble de nouvelles ressources propres»
(avis exploratoire)
(2023/C 293/03)
Rapporteur: |
Philip VON BROCKDORFF |
Consultation |
Lettre de Maroš ŠEFČOVIČ, vice-président de la Commission européenne chargé des relations interinstitutionnelles et de la prospective, 20.1.2023 |
Base juridique |
Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne |
Compétence |
Section «Union économique et monétaire et cohésion économique et sociale» |
Adoption en section |
30.5.2023 |
Adoption en session plénière |
14.6.2023 |
Session plénière no |
579 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
140/67/12 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
Comme l’a fait valoir le Comité économique et social européen (CESE) dans son précédent avis sur la question (1), un accord entre les États membres est indispensable pour qu’il soit possible d’ajouter de nouvelles ressources propres à celles dont l’Union européenne (UE) dispose déjà, afin de rembourser la dette résultant des emprunts contractés pour les besoins du plan de relance NextGenerationEU, sans mettre en péril les budgets de ses programmes ni augmenter fortement la contribution des États membres aux ressources qui est fondée sur le revenu national brut (RNB). |
1.2. |
Le CESE souligne que l’élaboration de propositions relatives à de nouvelles sources de recettes propres devrait tenir compte des pressions budgétaires que subissent les États membres à la suite de la pandémie et des tensions internationales qui règnent à l’heure actuelle. Cette démarche a pris d’autant plus d’importance dans le contexte présent, marqué par des taux d’intérêt plus élevés, à cause desquels les nouvelles ressources propres proposées dans le paquet de 2021 de la Commission risquent de ne pas pouvoir couvrir les coûts du remboursement des dettes de NextGenerationEU. |
1.3. |
Le CESE note que la ressource propre fondée sur les déchets d’emballages en plastique non recyclés est entrée en vigueur. Il insiste sur l’importance d’adopter et de transposer de manière harmonisée la nouvelle proposition législative relative aux emballages et aux déchets d’emballages concernant les déchets d’emballages en plastique non recyclés. Le Comité considère par ailleurs qu’une recette propre fondée sur le volume des déchets municipaux constitue une autre option réalisable (à condition d’être faisable d’un point de vue technique et environnemental), qui soutiendrait également l’économie circulaire. |
1.4. |
Le CESE invite instamment la Commission à étoffer les propositions concernant l’initiative «Entreprises en Europe: cadre pour l’imposition des revenus» (BEFIT) dans les plus brefs délais. À cet égard, il lui demande de fixer des objectifs clairs s’agissant de simplifier le paysage fiscal et de garantir la compétitivité des directives nouvelles et existantes en matière de fiscalité. Le CESE souligne en particulier la nécessité de fonder les règles BEFIT sur des définitions et des normes harmonisées, ainsi que sur une estimation plus précise des recettes supplémentaires que pourrait dégager leur mise en œuvre. |
1.5. |
Le CESE juge qu’il est raisonnable d’étudier la possibilité d’appliquer les règles BEFIT également aux services financiers ou d’élaborer une taxe mondiale sur les transactions financières (TTF), comme le propose le Parlement européen, tout en évaluant les incidences de la proposition. |
1.6. |
Le CESE se félicite de l’accord intervenu entre le Conseil et le Parlement européen sur le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF). En outre, afin d’atteindre une plus grande égalité des conditions de concurrence en matière de conditions de travail, la Commission pourrait envisager d’imposer un prélèvement supplémentaire aux entreprises de l’Union qui importent des produits auprès de fabricants de pays tiers qui ne garantissent pas une protection adéquate à leurs travailleurs, à condition que ce prélèvement respecte les règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et soit appliqué selon des critères clairs. Dans le même temps, le Comité réaffirme la nécessité d’octroyer certaines exonérations des droits à l’exportation pour que les entreprises de l’UE soient en mesure de soutenir la concurrence sur les marchés tiers. |
1.7. |
Conformément au Cadre inclusif OCDE/G20, le CESE note qu’un délai de suspension et de retrait des taxes sur les services numériques a été convenu. Une taxe à l’échelle de l’UE sur les transactions numériques pourrait toutefois être envisagée pour augmenter les ressources propres si les règles du Cadre inclusif OCDE/G20 ne sont pas respectées par d’autres grands partenaires commerciaux. |
1.8. |
Le CESE souligne aussi que le deuxième ensemble de mesures relatives aux ressources propres devrait être conforme aux principes de proportionnalité et d’équité sociale. Il rappelle en outre que toutes les propositions relatives aux ressources propres devraient être étayées par une analyse d’impact concernant leur efficacité. |
2. Contexte de l’avis
2.1. |
L’article 311 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne dispose que, sans préjudice des autres recettes, le budget de l’Union est intégralement financé par des ressources propres, autrement dit, des flux de recettes directement alloués à l’UE sans que les États membres n’aient à prendre de décision supplémentaire. Cependant, dans la pratique, les recettes de l’Union consistent en majeure partie en contributions des États membres (2). |
2.2. |
Lors de la présentation de son programme de travail pour 2023, la Commission européenne a annoncé une proposition relative à un deuxième panier de nouvelles ressources propres, actuellement prévue pour le troisième trimestre de 2023, qui s’appuie notamment sur la proposition législative annoncée concernant un corpus unique de règles fiscales pour les entreprises en Europe (BEFIT). Cela fait avancer d’un an le calendrier de l’accord interinstitutionnel présenté en décembre 2020 (3). |
2.3. |
Le deuxième panier de ressources propres vient après le premier, qui a été présenté en décembre 2021 (4) et reposait sur trois nouvelles sources de recettes. La première est assise sur les revenus dégagés par le système d’échange de quotas d’émission (SEQE), la deuxième sur les ressources générées par le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) de l’Union et la troisième, enfin, sur la part des bénéfices résiduels des entreprises multinationales qui serait réattribuée aux États membres de l’UE dans le cadre de l’accord de l’OCDE/G20 sur une redistribution des droits d’imposition, formant le «pilier un». |
2.4. |
L’objectif de la proposition relative aux nouvelles ressources propres est de garantir à l’Union un flux de recettes stable et diversifié, en évitant à la fois d’opérer des coupes dans ses programmes et d’augmenter de manière excessive les contributions fondées sur le RNB que les États membres versent à son budget. |
2.5. |
Le nouveau cadre tiendra compte des effets à long terme sur le budget de l’UE du plan de relance NextGenerationEU, mis en œuvre pour faire face aux perturbations économiques et sociales causées par la pandémie, puisqu’il est conçu de manière à utiliser à bon escient le nouvel ensemble de ressources propres pour rembourser, en continu et d’ici à 2058 au plus tard, les fonds que la Commission a empruntés sur les marchés des capitaux au titre du volet «subventions» de NextGenerationEU. Il convient de souligner que le remboursement du principal et des intérêts doit être financé par le budget de l’UE conformément au cadre financier pluriannuel (CFP). |
2.6. |
Avant d’élaborer sa proposition relative à un deuxième ensemble de nouvelles ressources propres, la Commission a demandé au Comité économique et social européen de lui présenter son point de vue et ses recommandations afin qu’elle puisse les y intégrer et enrichir ainsi sa proposition. |
2.7. |
Le présent avis du CESE complète celui qu’il avait émis précédemment sur le même sujet (5), moyennant quelques adaptations afin de tenir compte du débat institutionnel en cours et des évolutions les plus récentes. |
3. Observations générales
3.1. |
Le CESE apprécie la possibilité qui lui est offerte d’exprimer à nouveau sa position sur une question cruciale et stratégique pour l’avenir du processus d’intégration européenne. |
3.2. |
À cet égard, le CESE tient à souligner qu’il convient de mener le débat sur l’origine des ressources propres et leur utilisation au titre du budget de l’Union conformément au principe d’universalité non seulement au sein des institutions européennes, mais aussi, de manière générale, avec la participation du monde des entreprises, d’autres partenaires sociaux et de la société civile, y compris des représentants du plus grand nombre possible de catégories de citoyens de l’UE, associant ainsi également les segments plus âgés et les groupes vulnérables. |
3.3. |
Comme il l’a fait valoir dans son avis sur la «Proposition de décision relative aux ressources propres», le CESE convient qu’il est nécessaire de prévoir de nouvelles ressources propres afin de soutenir comme il se doit le programme et les objectifs de l’Union, sans mettre en péril les budgets de ses programmes au titre du cadre financier pluriannuel (CFP) pour la période 2021-2027 ni augmenter fortement la contribution aux ressources fondée sur le RNB. |
3.4. |
Dans le même temps, le CESE note que l’introduction de la ressource propre fondée sur les déchets d’emballages plastiques non recyclés a permis de réduire la part importante que constitue la contribution des États membres fondée sur le RNB. Dans ce contexte, il insiste sur l’importance d’adopter et de transposer la nouvelle proposition législative relative aux emballages et aux déchets d’emballages de manière harmonisée afin d’alléger la charge de mise en conformité. |
3.5. |
Le CESE espère que le deuxième ensemble de mesures relatives aux ressources propres qui a été annoncé sera conforme aux principes de proportionnalité et d’équité sociale, assurant un juste équilibre entre, d’une part, la nécessité de disposer d’un budget financier solide à même de soutenir les objectifs de l’Union et, d’autre part, la cohésion sociale et un environnement favorable aux entreprises. |
3.6. |
Le CESE signale qu’il importe de faire la distinction entre les ressources propres de l’UE et ses politiques fiscales: tandis que les premières s’appuient sur des outils fiscaux pour garantir des flux de recettes appropriés qui alimentent le budget de l’Union, les secondes devraient avoir pour but de promouvoir l’intégration économique et de renforcer et approfondir le marché unique, plutôt que d’augmenter les charges fiscales et de nuire à l’intégration sociale et économique. |
3.7. |
Le CESE aimerait souligner que la proposition de la Commission devra prendre soigneusement en considération les effets délétères de l’attaque russe contre l’Ukraine, qui perdure, de même que les conséquences qui en découlent en matière de ralentissement économique mondial, d’incidence sur les chaînes d’approvisionnement et de tensions internationales, créant dès lors un contexte difficile à affronter, marqué notamment par une inflation élevée qui persiste et une hausse des taux d’intérêt destinée à atténuer cette même inflation. Tous ces facteurs rendent très difficile l’environnement économique dans lequel s’inscrit la proposition de la Commission. |
3.8. |
À la lumière du contexte décrit ci-dessus, le CESE relève qu’aux fins de l’élaboration de propositions de nouvelles sources de recettes budgétaires de l’Union, il y a lieu de tenir compte des pressions budgétaires que subissent les États membres à la suite de la pandémie et du fait des tensions internationales actuelles. Le CESE note que la perception des recettes au niveau de l’UE exerce une pression supplémentaire sur les budgets nationaux. En outre, le remboursement, sur le budget de l’UE, des emprunts contractés au titre de NextGenerationEU représente un engagement donné, qui, en l’absence de nouvelles ressources propres, pourrait donner lieu à une augmentation des contributions des États membres. |
3.9. |
Le CESE souligne dans le même temps que les nouvelles ressources propres proposées dans le premier paquet de la Commission, le 14 décembre 2021, ne suffiront probablement pas à couvrir l’ensemble des obligations actuelles de l’Union, compte tenu également du contexte caractérisé par des taux d’intérêt plus élevés. |
3.10. |
Le CESE juge important de disposer d’un budget de l’UE cohérent et solide, capable non seulement de garantir l’autonomie stratégique de l’Union européenne, mais aussi de soutenir convenablement la double transition écologique et numérique, étant donné l’ensemble des défis et adaptations que celle-ci impliquera pour les États membres, les régions et les collectivités locales, ainsi que pour les entreprises à travers l’Europe. |
3.11. |
Le CESE fait observer que, pour renforcer efficacement le budget et le cadre financier pluriannuel de l’UE, les subventions au titre de NextGenerationEU devront être remboursées au cours de la période spécifiée, sans nouvelle extension, afin de prévenir le risque que les coûts d’emprunt n’atteignent un montant exorbitant en raison d’une prolongation excessive du délai, ce qui nuirait à la croissance économique et au bien-être social des générations futures. Ce constat est particulièrement vrai en cette période marquée par une hausse des taux d’intérêt, qui rend l’endettement plus difficile à maintenir à long terme et les coûts de financement plutôt imprévisibles. |
3.12. |
Préalablement à toute proposition de ressource propre fondée sur la taxation des entreprises, le CESE demande à la Commission d’approfondir de toute urgence la proposition relative à un ensemble commun de règles visant à estimer la base imposable des sociétés établies dans l’UE qui font partie d’un groupe dont le chiffre d’affaires consolidé à l’échelle mondiale dépasse un certain seuil. Les règles BEFIT comprendront également des dispositions concernant la répartition des bénéfices entre les États membres sur la base d’une formule de répartition. Une fois répartis, les bénéfices seraient soumis à l’impôt sur les sociétés selon le taux des États membres respectifs. |
3.13. |
Le CESE prend note de l’annonce de la Commission selon laquelle elle s’efforcera de prendre pour base la proposition BEFIT afin de créer un flux supplémentaire de ressources propres de l’UE. Toutefois, il pourrait s’avérer plutôt difficile de trouver un accord politique sur une telle proposition, comme ce fut le cas par le passé pour les propositions relatives à l’ACCIS (6) de 2011 et de 2016. |
3.14. |
Le CESE plaide en faveur d’un débat associant toutes les parties prenantes concernées par les règles BEFIT, car cela contribuera à garantir la transparence quant à leur incidence. Il souligne en outre que l’initiative BEFIT doit être assortie d’objectifs clairs et de principes clés pour pouvoir aboutir à une simplification du paysage fiscal et garantir la compétitivité des directives nouvelles et existantes en matière de fiscalité. |
3.15. |
Le CESE fait observer que les éventuelles règles BEFIT devraient reposer sur des définitions et des normes harmonisées pour que la proposition puisse être appliquée correctement dans l’ensemble du marché intérieur, ainsi que sur une estimation plus précise des recettes supplémentaires que pourrait dégager leur mise en œuvre, si tant est qu’elle en génère effectivement (7). |
3.16. |
Le CESE signale qu’en tout état de cause, les recettes de l’impôt sur les sociétés sont soumises à une volatilité intrinsèque, qui pose des difficultés lorsqu’il s’agit d’estimer avec précision les futures recettes fiscales à compter parmi les ressources propres. Cela est d’autant plus vrai dans le contexte économique actuel, caractérisé par une inflation élevée et une hausse des taux d’intérêt. S’agissant de la question à l’examen, le CESE encourage la Commission à réaliser des études spécifiques et des simulations d’analyses d’impact dans le but d’établir un éventail fiable de ressources propres qui pourraient être collectées dans le cadre des règles BEFIT. Il met toutefois en garde contre tout coût supplémentaire de mise en conformité pour les entreprises. |
3.17. |
Étant donné que la proposition de la Commission sur l’initiative BEFIT s’appuiera sur l’approche à deux piliers adoptée par le Cadre inclusif OCDE/G20 concernant la répartition des bénéfices (pilier un) et les règles complémentaires (pilier deux), le CESE encourage la Commission à continuer de travailler en étroite coordination avec les instances internationales pour approfondir la proposition BEFIT. |
3.18. |
Comme l’a aussi suggéré le Parlement européen, la possibilité d’appliquer les règles BEFIT également aux services financiers ou d’élaborer une taxe mondiale sur les transactions financières pourrait être étudiée, tout en évaluant les incidences potentielles de cette mesure. Il conviendrait alors d’assortir les nouvelles dispositions fiscales de règles ciblées visant à définir une partie des recettes fiscales supplémentaires attendues comme des ressources propres de l’UE. |
3.19. |
Le CESE rappelle que l’unique objectif du MACF convenu entre le Conseil et le Parlement européen était d’inciter les partenaires commerciaux de l’Union à suivre son exemple et, tout comme elle, à décarboner leur production. Ce mécanisme fait partie des nouvelles sources de ressources propres proposées dans le premier paquet. Par ailleurs, la Commission pourrait étudier la possibilité d’imposer un prélèvement supplémentaire aux entreprises de l’Union qui importent des produits auprès de fabricants de pays tiers qui ne garantissent pas une protection adéquate à leurs travailleurs. Cette solution ne saurait être envisagée que pour autant qu’elle respecte les règles de l’OMC et soit appliquée selon des critères clairs. Ce prélèvement pourrait offrir aux travailleurs des pays tiers une certaine protection et faciliter petit à petit la mise en place de conditions de concurrence équitables en matière de conditions de travail entre l’Union européenne et d’autres blocs commerciaux. Dans le même temps, le Comité réclame une forme d’exonération des droits à l’exportation pour que les entreprises de l’UE puissent soutenir la concurrence sur les marchés tiers. Il l’avait déjà fait valoir dans un avis antérieur consacré au MACF. |
3.20. |
Le CESE estime que, conformément au Cadre inclusif OCDE/G20, en vertu duquel un délai de suspension et de retrait des taxes sur les services numériques a été convenu, une taxe paneuropéenne sur les transactions numériques pourrait être envisagée afin d’augmenter les ressources propres. Cependant, cela ne concernerait que les cas où d’autres grands partenaires commerciaux ne respecteraient pas les règles fixées par ledit cadre inclusif. |
3.21. |
Lorsqu’il s’avère possible, sur le plan technique et environnemental, de recycler les déchets municipaux, des ressources propres fondées sur les statistiques, et reposant sur le volume des déchets municipaux, constituent une autre option afin que la mise en décharge et l’incinération deviennent plus coûteuses que le recyclage, ce qui permettrait ainsi de soutenir l’économie circulaire dans l’ensemble du marché intérieur. |
3.22. |
Comme il l’a souligné dans son précédent avis sur la «Proposition de décision relative aux ressources propres», le CESE maintient qu’une démarche efficace et opérante en ce qui concerne la perception, la gestion et les décaissements ultérieurs des ressources propres est essentielle à tous les stades et s’avère stratégique pour garantir une exploitation adéquate et productive des ressources propres, en vue d’atteindre les objectifs ambitieux fixés dans le programme de la Commission. |
3.23. |
Enfin, et toujours dans le droit fil de son précédent avis sur la «Proposition de décision relative aux ressources propres», le CESE rappelle qu’il importe que toutes les propositions relatives aux ressources propres soient étayées par une analyse d’impact quant à l’efficacité des mesures proposées et tout particulièrement aux recettes que celles-ci sont censées générer. |
Bruxelles, le 14 juin 2023.
Le président du Comité économique et social européen
Oliver RÖPKE
(1) Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — «La prochaine génération de ressources propres pour le budget de l’UE» [COM(2021) 566 final], sur la proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (UE, Euratom) 2020/2093 fixant le cadre financier pluriannuel pour les années 2021 à 2027 [COM(2021) 569 final — 2021/0429 (APP)] et sur la proposition de décision du Conseil modifiant la décision (UE, Euratom) 2020/2053 relative au système des ressources propres de l’Union européenne [COM(2021) 570 final — 2021/0430 (CNS)] (JO C 323 du 26.8.2022, p. 48).
(2) Service de recherche du Parlement européen.
(3) Accord interinstitutionnel du 16 décembre 2020 entre le Parlement européen, le Conseil de l’Union européenne et la Commission européenne sur la discipline budgétaire, la coopération en matière budgétaire et la bonne gestion financière, ainsi que sur de nouvelles ressources propres, comportant une feuille de route en vue de la mise en place de nouvelles ressources propres (L433I/28).
(4) COM(2021) 566 final.
(5) Avis du CESE sur la «Proposition de décision relative aux ressources propres» (JO C 323 du 26.8.2022, p. 48).
(6) Assiette commune consolidée pour l’impôt sur les sociétés.
(7) L’initiative BEFIT a pour objectif la simplification et la consolidation efficace des bénéfices et des pertes, et pas nécessairement la perception de recettes supplémentaires.
ANNEXE
Les amendements suivants, qui ont recueilli au moins le quart des suffrages exprimés, ont été rejetés au cours des débats (article 74, paragraphe 3, du règlement intérieur):
AMENDEMENT 3
ECO/617 — Deuxième ensemble de nouvelles ressources propres
Paragraphe 3.18
Modifier comme suit:
Avis de section |
Amendement |
Comme l’a aussi suggéré le Parlement européen, la possibilité d’appliquer les règles BEFIT également aux services financiers ou d’élaborer une taxe mondiale sur les transactions financières pourrait être étudiée. Il conviendrait alors d’assortir les nouvelles dispositions fiscales de règles ciblées visant à définir une partie des recettes fiscales supplémentaires attendues comme des ressources propres de l’UE. Le CESE est toutefois conscient qu’une taxe sur les transactions financières serait susceptible d’affaiblir la compétitivité de l’Union, en particulier si elle n’est appliquée que sur son territoire. En outre, s’il est peu probable qu’une taxe généralisée sur les transactions financières génère beaucoup de recettes, elle pourrait toutefois avoir une incidence négative sur les entreprises et les ménages européens, ce qui risquerait de ralentir la croissance et d’exercer une pression supplémentaire sur les finances publiques. |
Comme l’a aussi suggéré le Parlement européen, la possibilité d’appliquer les règles BEFIT également aux services financiers ou d’élaborer une taxe mondiale sur les transactions financières pourrait être étudiée (9). Il conviendrait alors d’assortir les nouvelles dispositions fiscales de règles ciblées visant à définir une partie des recettes fiscales supplémentaires attendues comme des ressources propres de l’UE. Le CESE est toutefois conscient qu’une taxe sur les transactions financières serait susceptible d’affaiblir la compétitivité de l’Union, en particulier si elle n’est appliquée que sur son territoire. En outre, s’il est peu probable qu’une taxe généralisée sur les transactions financières génère beaucoup de recettes, elle pourrait toutefois avoir une incidence négative sur les entreprises et les ménages européens, ce qui risquerait de ralentir la croissance et d’exercer une pression supplémentaire sur les finances publiques. |
Exposé des motifs
Il importe au plus haut point d’ajouter cette information contextuelle, afin d’expliquer au lecteur de l’avis combien il est encore compliqué, sur le plan politique, d’introduire la TFF dans tous les États membres de l’UE, alors que l’initiative législative de la Commission remonte déjà à près de 12 ans. Cette situation prouve bien que les avantages liés à l’introduction de la TFF uniquement dans l’UE ou dans certains de ses États membres sont pour le moins discutables.
Résultat du vote:
Voix pour: |
80 |
Voix contre: |
122 |
Abstentions: |
14 |
AMENDEMENT 4
ECO/617 — Deuxième ensemble de nouvelles ressources propres
Paragraphe 3.19
Modifier comme suit:
Avis de section |
Amendement |
Le CESE rappelle que l’unique objectif du MACF convenu entre le Conseil et le Parlement européen était d’inciter les partenaires commerciaux de l’Union à suivre son exemple et, tout comme elle, à décarboner leur production. Ce mécanisme fait partie des nouvelles sources de ressources propres proposées dans le premier paquet. Par ailleurs, la Commission pourrait étudier la possibilité d’imposer un prélèvement supplémentaire aux entreprises de l’Union qui importent des produits auprès de fabricants de pays tiers qui ne garantissent pas une protection adéquate à leurs travailleurs. Cette solution ne saurait être envisagée que pour autant qu’elle respecte les règles de l’OMC et soit appliquée selon des critères clairs. Ce prélèvement pourrait offrir aux travailleurs des pays tiers une certaine protection et faciliter petit à petit la mise en place de conditions de concurrence équitables en matière de conditions de travail entre l’Union européenne et d’autres blocs commerciaux. Dans le même temps, le Comité réclame une forme d’exonération des droits à l’exportation pour que les entreprises de l’UE puissent soutenir la concurrence sur les marchés tiers. Il l’avait déjà fait valoir dans un avis antérieur consacré au MACF. |
Le CESE rappelle que l’unique objectif du MACF convenu entre le Conseil et le Parlement européen était d’inciter les partenaires commerciaux de l’Union à suivre son exemple et, tout comme elle, à décarboner leur production. Ce mécanisme fait partie des nouvelles sources de ressources propres proposées dans le premier paquet. Dans le même temps, le Comité réclame une forme d’exonération des droits à l’exportation pour que les entreprises de l’UE puissent soutenir la concurrence sur les marchés tiers. Il l’avait déjà fait valoir dans un avis antérieur consacré au MACF. |
Exposé des motifs
Identique à l’exposé des motifs de l’amendement au paragraphe 1.6.
Résultat du vote:
Voix pour: |
78 |
Voix contre: |
129 |
Abstentions: |
11 |
Les amendements suivants ont été adoptés au cours des débats, mais les voix en faveur du maintien du texte original représentaient au moins un quart des suffrages exprimés (article 74, paragraphe 4, du règlement intérieur):
AMENDEMENT 1
ECO/617 — Deuxième ensemble de nouvelles ressources propres
Paragraphe 3.18
Modifier comme suit:
Avis de section |
Amendement |
Comme l’a aussi suggéré le Parlement européen, la possibilité d’appliquer les règles BEFIT également aux services financiers ou d’élaborer une taxe mondiale sur les transactions financières pourrait être étudiée. Il conviendrait alors d’assortir les nouvelles dispositions fiscales de règles ciblées visant à définir une partie des recettes fiscales supplémentaires attendues comme des ressources propres de l’UE. Le CESE est toutefois conscient qu’une taxe sur les transactions financières serait susceptible d’affaiblir la compétitivité de l’Union, en particulier si elle n’est appliquée que sur son territoire. En outre, s’il est peu probable qu’une taxe généralisée sur les transactions financières génère beaucoup de recettes, elle pourrait toutefois avoir une incidence négative sur les entreprises et les ménages européens, ce qui risquerait de ralentir la croissance et d’exercer une pression supplémentaire sur les finances publiques. |
Comme l’a aussi suggéré le Parlement européen, la possibilité d’appliquer les règles BEFIT également aux services financiers ou d’élaborer une taxe mondiale sur les transactions financières pourrait être étudiée , tout en évaluant les incidences potentielles de cette mesure . Il conviendrait alors d’assortir les nouvelles dispositions fiscales de règles ciblées visant à définir une partie des recettes fiscales supplémentaires attendues comme des ressources propres de l’UE. |
Résultat du vote:
Voix pour: |
96 |
Voix contre: |
91 |
Abstentions: |
15 |
AMENDEMENT 2
ECO/617 — Deuxième ensemble de nouvelles ressources propres
Paragraphe 1.5
Modifier comme suit:
Avis de section |
Amendement |
Le CESE juge qu’il est raisonnable d’étudier la possibilité d’appliquer les règles BEFIT également aux services financiers ou d’élaborer une taxe mondiale sur les transactions financières (TTF), comme le propose le Parlement européen. Il est toutefois conscient qu’une telle taxe risquerait potentiellement d’influer sur la compétitivité et de ne pas générer d’importantes recettes supplémentaires. |
Le CESE juge qu’il est raisonnable d’étudier la possibilité d’appliquer les règles BEFIT également aux services financiers ou d’élaborer une taxe mondiale sur les transactions financières (TTF), comme le propose le Parlement européen , tout en évaluant les incidences de la proposition . |
Résultat du vote:
Voix pour: |
126 |
Voix contre: |
79 |
Abstentions: |
8 |
(9) Le 28 septembre 2011, la Commission a présenté une proposition de directive du Conseil établissant un système commun de taxe sur les transactions financières (TTF) et modifiant la directive 2008/7/CE. Cette proposition n’a pas été approuvée par le Conseil et, le 14 février 2013, la Commission a présenté une proposition visant à instaurer une taxe sur les transactions financières (TTF) dans onze États membres, au titre de l’instrument de la «coopération renforcée». Bien que le dossier soit régulièrement examiné au sein du Conseil Ecofin, la situation reste au point mort, y compris dans les États membres concernés.
18.8.2023 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 293/21 |
Avis du Comité économique et social européen sur la communication conjointe au Parlement européen et au Conseil — «La politique de cyberdéfense de l’UE»
(avis d’initiative)
(2023/C 293/04)
Rapporteur: |
Anastasis YIAPANIS |
Corapporteur: |
Alberto MAZZOLA |
Décision de l’assemblée plénière |
20.9.2022 |
Base juridique |
Article 52, paragraphe 2, du règlement intérieur |
|
Avis d’initiative |
Compétence |
Commission consultative des mutations industrielles (CCMI) |
Adoption en section |
27.3.2023 |
Adoption en session plénière |
14.6.2023 |
Session plénière no |
579 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
208/1/2 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
Le Comité économique et social européen (CESE) adhère à la proposition de politique de cyberdéfense de l’Union européenne (UE), mais aurait espéré que la société civile organisée se voie attribuer un rôle plus important dans l’élaboration de cette proposition. À ce stade, il est difficile pour le Comité d’évaluer si les futures initiatives décrites dans la communication conjointe seront mises en œuvre et si elles produiront les résultats escomptés. Il invite donc instamment les institutions et les États membres de l’Union européenne à donner la priorité aux initiatives annoncées et à les faire progresser rapidement. |
1.2. |
Le CESE insiste sur la nécessité de prendre des mesures supplémentaires afin de renforcer la capacité de l’Union à détecter les cybermenaces et recommande que le financement de la recherche et du développement soit axé sur le développement de capacités de pointe au sein de l’UE. La coopération entre les secteurs privé et public est essentielle et ne doit pas se faire à sens unique. Le CESE considère qu’il est nécessaire de favoriser la coordination au niveau de l’Union pour remédier à la fragmentation et garantir la coopération et les investissements conjoints entre les États membres. |
1.3. |
Le CESE est favorable à la création d’un Centre de coordination de l’UE en matière de cyberdéfense (EUCDCC) et recommande que les États membres s’engagent à fournir des réponses rapides à tout moment de la journée, 7 jours sur 7, et qu’ils évaluent le niveau de préparation en matière de cybersécurité et l’efficacité des mécanismes de réponse aux crises cyber de l’UE, en examinant en particulier les capacités militaires de même que les secteurs critiques tels que recensés par la directive (UE) 2022/2555 du Parlement européen et du Conseil (1) (directive SRI 2). Le Comité approuve l’extension du mandat du Centre de compétences européen en matière de cybersécurité (ECCC) qui le charge d’assister le Centre de coordination de l’UE en matière de cyberdéfense dans ses travaux. |
1.4. |
Le CESE estime qu’en vue de renforcer l’autonomie stratégique et la souveraineté de l’Union européenne en matière de cybersécurité, il conviendrait de mettre au point une plateforme dynamique permettant le partage d’informations et la conduite de tests en temps réel, ou d’adopter une telle plateforme existante dans le secteur privé, de manière à repérer les lacunes à combler dans les capacités actuelles. Cette plateforme pourrait également être utilisée pour diffuser les bonnes pratiques, signaler les cyberincidents et dresser une liste exhaustive des cybercriminels dans l’UE. |
1.5. |
Le CESE souligne la nécessité pour l’Union d’être mieux préparée aux cyberattaques telles que celles perpétrées par la Russie en Ukraine, qui ciblent en particulier les infrastructures critiques. La coopération entre les écosystèmes civils et militaires, notamment au moyen de simulations de cyberattaques, est indispensable à la gestion efficace des crises, ainsi que pour garantir l’interopérabilité et éviter la duplication des efforts et des investissements. |
1.6. |
Le CESE est d’avis que les investissements dans le domaine de la cyberdéfense devraient être consacrés en priorité à la protection des citoyens et des infrastructures critiques de l’Union, laquelle passe notamment par un recours à des fournisseurs de matériel et de logiciels de confiance. Il insiste sur l’importance de mettre à jour les priorités et les investissements en temps utile, sur la base d’une concertation entre l’UE et ses États membres, avec la participation des acteurs privés concernés. |
1.7. |
L’Union doit maintenir et développer les capacités nécessaires pour sécuriser son économie numérique, la société, la démocratie et les technologies critiques, ainsi que pour fournir des services essentiels en matière de cybersécurité. Pour garantir l’autonomie stratégique de l’Union, il est crucial de réduire ses dépendances à l’égard des pays tiers. Le CESE estime qu’il est essentiel que l’UE adopte une approche à moyen terme pour acquérir son autonomie s’agissant des technologies clés, et il plaide résolument en faveur de la mise en place d’infrastructures de recherche et de production par des entreprises établies dans l’UE, ainsi que d’une politique industrielle européenne adéquate et axée sur un écosystème cyber autonome. |
1.8. |
Les PME devraient bénéficier d’un soutien ciblé et avoir accès à des programmes de financement leur permettant de renforcer leur résilience face aux cyberattaques, ainsi qu’à des possibilités d’assistance, de formation et d’éducation concernant les risques relatifs à la cybersécurité et les moyens de s’en prémunir. L’Union européenne devrait prévoir un mécanisme d’incitation favorisant une familiarisation progressive des PME aux questions de cybersécurité ainsi que la création de PME innovantes actives dans ce domaine. |
1.9. |
Le CESE se félicite de l’intention de la Commission européenne de créer une Académie des compétences cyber et lui demande de coordonner et de financer des programmes de formation à grande échelle et des programmes d’enseignement et de formation professionnels auxquels tous les États membres peuvent participer et qui visent à constituer une main-d’œuvre qualifiée pour l’ensemble des agences et organisations concernées par la cyberdéfense, ainsi que pour les réseaux civils privés. |
1.10. |
Le Comité tient pour essentiel de sensibiliser les citoyens à la cybersécurité afin de réduire l’exposition aux cyberattaques et demande que soient créés des cursus d’éducation et des programmes de formation tout au long de la vie qui auront pour principal objectif de renforcer les compétences et les connaissances en matière de cybersécurité. Le CESE est favorable à ce que les questions de cybersécurité soient intégrées dans toutes les futures politiques de l’Union et à ce que l’on informe le grand public sur les cybermenaces. |
1.11. |
Le CESE estime que, dans les domaines militaires, une coopération étroite avec les alliés de l’OTAN doit être centrée sur la pleine coordination et la réciprocité, la mise sur pied de projets conjoints de recherche, développement et innovation, le partage de bonnes pratiques, la création de vastes programmes de formation et des simulations de cyberattaques, l’objectif premier étant d’améliorer la capacité de réaction commune. |
1.12. |
Le Comité invite le haut représentant à examiner les dialogues bilatéraux existants sur la cybersécurité et à nouer des dialogues supplémentaires avec d’autres pays et des organisations internationales compétentes, de manière à établir un cadre mondial pour le respect du droit international dans le cyberespace en mettant un accent particulier sur la réciprocité. Le Comité considère que l’Union européenne, compte tenu de son ancrage solide dans les libertés démocratiques fondamentales, est bien placée pour prendre la tête des débats à l’échelle internationale sur l’avenir de la cybersécurité, en particulier au sein des Nations unies. |
1.13. |
L’Union européenne devrait s’opposer fermement à tout type de système de notation sociale à l’encontre des citoyens. Le CESE souhaite affirmer explicitement qu’une véritable démocratie ne peut exister sans une protection effective des données à caractère personnel. Il estime en outre qu’une gestion responsable et efficace des données est essentielle pour faire de l’hyperconnectivité un avantage concurrentiel. |
2. Introduction et observations générales
2.1. |
L’expansion du numérique dans les sociétés s’accompagne d’un grand nombre de cybermenaces engendrées par les avancées technologiques. Ces dernières années, les cyberattaques se sont considérablement multipliées et sont devenues beaucoup plus élaborées, menaçant la sécurité des entités publiques comme privées. Qu’il s’agisse de rançongiciels, de logiciels malveillants, d’attaques par courriels, de violations de données, de désinformation, d’attaques collectives par saturation de service (ACSS) ou d’autres formes d’attaques, ces pratiques posent toutes une menace constante et continue à la sécurité de l’Union dans son ensemble. |
2.2. |
Le CESE se félicite de la communication conjointe sur «La politique de cyberdéfense de l’UE» (2) et juge qu’il est à présent temps d’agir d’urgence et de manière coordonnée au niveau de l’Union, en associant à la fois les écosystèmes du cyberespace civil et militaire et en veillant à ce qu’un cadre adéquat soit mis en place en ce qui concerne les investissements dans les capacités de cyberdéfense. Toutefois, le Comité fait observer que, dans sa communication, la Commission se contente de déclarer son intention d’agir et de dresser une liste des futures initiatives de l’UE qui devraient aboutir. De l’avis du Comité, il est impossible de déterminer si ces futurs engagements seront effectivement respectés, étant donné que les négociations qui auront lieu à l’avenir entre les colégislateurs influenceront sans nul doute le résultat final du plan d’action de l’Union en matière de cybersécurité. |
2.3. |
La cybersécurité figure parmi les premières priorités de l’UE en matière de menaces pour la sécurité depuis l’attaque russe contre le réseau satellitaire KA-SAT, qui a perturbé les communications au sein des forces armées ukrainiennes, et le récent scandale impliquant Éric Léandri, qui aurait effectué des missions de cyberespionnage pour le compte de certaines entreprises de défense. Si le RGPD, en vigueur depuis plusieurs années, constitue un acte législatif européen très efficace, il est évident que la quantité croissante de données disponibles entraîne une certaine vulnérabilité, et le risque de voir des tiers franchir la limite de la légalité augmente chaque jour. |
2.4. |
Compte tenu de la nature transnationale des cyberattaques, la coordination au niveau de l’Union est nécessaire pour réduire la fragmentation actuelle et veiller à ce que les États membres soient prêts à coopérer et à consentir des investissements conjoints. Cette coordination est particulièrement importante pour parer aux futures éventualités de menaces ciblant un État membre, auquel cas tous les autres États membres devraient avoir la possibilité de lui fournir un soutien immédiat. |
3. Agir ensemble pour renforcer la cyberdéfense
3.1. |
Le Comité prend note des initiatives ambitieuses annoncées, à savoir l’établissement d’un Centre de coordination de l’UE en matière de cyberdéfense (EUCDCC), la mise au point du projet CyDef-X, la création d’équipes d’intervention rapide en cas d’incident informatique (CRRT), le lancement d’une initiative de l’UE en matière de cybersolidarité et l’examen de la possibilité d’élaborer des schémas de certification de cybersécurité pour les produits, les services et les processus dans le domaine des TIC. Le CESE recommande que tous les États membres s’engagent à pouvoir fournir une réponse rapide à tout moment de la journée, 7 jours sur 7, et que l’EUCDCC participe à l’évaluation et à l’établissement de rapports réguliers en ce qui concerne la préparation des États membres en matière de cybersécurité et l’efficacité du mécanisme européen de réponse aux crises cyber, en mettant l’accent à la fois sur les capacités militaires et sur les secteurs critiques recensés dans la directive SRI 2. Chaque État membre devrait disposer d’experts spécialement formés pour intervenir en cas d’incident de cybersécurité et évaluer régulièrement leur capacité à intervenir dans d’autres États membres. |
3.2. |
Bien que la communication présente une longue liste d’améliorations à introduire de façon progressive, le CESE aurait espéré y trouver une feuille de route explicite quant à la mise en œuvre de ces initiatives, assortie d’instructions de gouvernance et de délais clairs pour leur soumission et leur adoption. En outre, le Comité aurait espéré que la société civile organisée se voie attribuer un rôle plus important dans l’élaboration de cette proposition. |
3.3. |
Le CESE est d’avis que les États membres doivent renforcer leur capacité interne à contrer les cybermenaces tout en prenant part à des projets de coopération et en partageant des informations et de bonnes pratiques avec les autres États membres. Il y a lieu de réaliser sans tarder des investissements dans les capacités de cyberdéfense, d’accélérer le déploiement des technologies (3) dans tous les États membres et d’améliorer la préparation collective à détecter les cyberattaques, s’en prémunir et s’en remettre. Le CESE estime qu’en vue de soutenir l’autonomie de l’Union européenne en matière de cybersécurité, il conviendrait de mettre au point une plateforme dynamique permettant le partage d’informations et la conduite de tests en temps réel, ou d’adopter une telle plateforme existante dans le secteur privé, laquelle viserait principalement à repérer les lacunes à combler dans les capacités actuelles. |
3.4. |
Le CESE partage le point de vue selon lequel les opérations militaires dans le cyberespace devraient, à ce stade, continuer à relever strictement de la compétence des États membres; le Comité est favorable à la coopération annoncée entre les équipes militaires d’intervention en cas d’urgence informatique de l’UE (milCERT), les centres de réponse aux incidents de sécurité informatique (CSIRT) et l’équipe d’intervention en cas d’urgence informatique pour les institutions, organes et agences de l’UE (CERT-UE). |
3.5. |
La directive SRI 2 et la directive sur la résilience des entités critiques (4), récemment adoptées, prévoient déjà des obligations nationales et sectorielles spécifiques au cadre de cyberdéfense de l’Union. D’autres mesures sont nécessaires pour améliorer la capacité de détection collective de l’Union, et le CESE préconise des investissements dans la recherche et le développement en vue de développer des capacités de pointe au niveau de l’UE. |
4. Sécuriser l’écosystème de défense de l’UE
4.1. |
Le CESE estime que l’écosystème de défense a été transformé par des complexités qui lui sont inhérentes et par des défis technologiques qui évoluent rapidement, et que la question de la cybersécurité est désormais commune aux secteurs militaire et civil, et concerne également les citoyens de l’Union. La coopération entre les écosystèmes civil et militaire est désormais plus importante que jamais; elle devrait contribuer à la gestion efficace des crises et permettre de progresser en continu, d’assurer l’interopérabilité, mais aussi d’éviter la duplication ou la multiplication des efforts et des investissements. Les États membres devraient être prêts à réaliser des tests de résistance des infrastructures critiques nationales, de sorte à évaluer et améliorer la résilience face aux futures cyberattaques. |
4.2. |
Le CESE est d’avis que les investissements dans le domaine de la cyberdéfense devraient être consacrés en priorité à la protection des citoyens et des infrastructures critiques de l’Union. Compte tenu de l’évolution rapide de la transformation numérique et du paysage de menaces, le Comité réclame instamment que soient mis à jour, en temps utile, les priorités et les investissements, sur la base d’une concertation entre l’UE et ses États membres, en prévoyant également une consultation approfondie des acteurs privés concernés. Les appareils de l’internet des objets sont souvent moins bien protégés que les appareils traditionnels. Dès lors, le CESE demande qu’un niveau de sécurité minimal soit garanti par l’intermédiaire de plateformes de gestion de l’identité et de l’accès. En outre, dans la mesure où la certification constitue une méthode essentielle de renforcement du niveau de sécurité, le Comité réclame une nouvelle approche de l’UE en matière de certification, qui mettrait davantage l’accent sur la sécurité de l’internet des objets. |
4.3. |
L’Union européenne doit renforcer sa résilience aux cyberattaques et élaborer des stratégies efficaces de cyberdissuasion. Il importe de protéger les infrastructures critiques contre les cyberattaques de toute nature, y compris au moyen des systèmes de défense de l’UE. Le Comité estime qu’il est dans l’intérêt stratégique de l’Union de maintenir et de développer les capacités nécessaires pour sécuriser son économie numérique, la société et la démocratie, afin de parvenir à une souveraineté numérique totale, puisqu’il s’agit du seul moyen de protéger les technologies critiques et de fournir des services essentiels efficaces en matière de cybersécurité. Il est également crucial, pour l’autonomie stratégique de l’Union, de réduire les dépendances à l’égard des pays tiers. Le CESE estime que les agences sectorielles de l’UE (ENISA, AESA, AFE, EMA, ABE, ESA, HADEA, etc.) devraient être associées à ce processus et fournir des orientations pour l’élaboration de mécanismes de cybersécurité. |
4.4. |
La pandémie de COVID-19 a accéléré la transition numérique et transformé les activités traditionnelles en travail hybride et/ou à distance, donnant ainsi lieu à de nouvelles relations de travail et de nouvelles attentes, ainsi qu’à une nouvelle classe de nomades numériques, dont le nombre ne cesse de croître. Le CESE attire l’attention sur les rapides mutations que connaît le marché du travail, qui ont mené à l’adoption d’une architecture «zéro confiance» par les entreprises, au moyen de solutions de gestion des identités et des accès (IAM, Identity and Access Management) et de gestion des accès privilégiés (PAM, Privileged Access Management). Le Comité considère que ce type de gestion des ressources des entreprises offre de nouvelles solutions aux cybermenaces, et qu’il convient donc d’aider le secteur privé à renforcer le niveau de sécurité de ses solutions numériques innovantes. |
4.5. |
Le CESE déplore que la Commission se contente de déclarer qu’«[u]n plan de mise en œuvre pourrait être établi en coopération avec les États membres», et est d’avis qu’un tel plan devrait être obligatoire, élaboré conjointement avec les États membres et mis en œuvre au plus tôt. Le Comité est préoccupé par l’approche trop superficielle adoptée par la Commission et demande instamment aux institutions de l’Union européenne et aux États membres de favoriser une progression rapide dans la mise en place des initiatives annoncées. |
5. Investir dans les capacités de cyberdéfense
5.1. |
Alors que les avancées technologiques progressent rapidement, le cyberespace est devenu le tout nouveau terrain de guerre, après la terre, la mer, les airs et l’espace. Ces évolutions ont aussi ouvert de vastes possibilités de criminalité aux acteurs malveillants du cyberespace, des pirates informatiques indépendants aux criminels professionnels, voire aux acteurs étatiques. |
5.2. |
Il est capital d’investir dans la recherche et le développement, et le CESE se félicite des fonds spécifiques existants au titre du programme pour une Europe numérique, du Fonds européen de la défense, du programme Horizon Europe et des plans nationaux pour la reprise et la résilience. Toutefois, le Comité apprécierait de voir naître davantage de projets transnationaux axés sur la coopération et l’interopérabilité entre les systèmes de cyberdéfense de tous les États membres, ainsi que davantage de synergies entre les instruments de financement, en particulier pour accompagner les PME innovantes. |
5.3. |
Le Comité fait observer que, selon la stratégie de cybersécurité de l’UE adoptée en 2020, l’unité conjointe de cybersécurité doit être créée cette année; il attend des informations sur la finalisation du processus et sur la préparation de l’Union européenne à réagir aux cyberincidents de grande ampleur. Le CESE s’attend à ce que cette unité améliore la connaissance de l’Union quant à la situation en matière de cybersécurité ainsi que sa capacité globale à réagir aux menaces et à s’en relever. |
5.4. |
Le CESE approuve l’extension du mandat du Centre de compétences européen en matière de cybersécurité (ECCC) qui le charge d’assister le Centre de coordination de l’UE en matière de cyberdéfense dans ses activités. Par ailleurs, ce réseau pourrait contribuer à la souveraineté numérique de l’Europe en bâtissant une base industrielle européenne compétitive pour les capacités technologiques clés, notamment par des travaux réalisés dans le cadre de partenariats public-privé contractuels. Les partenariats public-privé se sont révélés être l’approche la plus efficace pour améliorer la cybersécurité de l’écosystème numérique dans son ensemble, mais ils ne peuvent pas être introduits de manière unidirectionnelle: les institutions publiques doivent également partager avec le secteur privé les renseignements dont elles disposent. |
5.5. |
Le CESE fait valoir que pour faire face aux futures tentatives de piratage basées sur l’informatique quantique, l’Union doit investir sans délai dans des technologies de pointe telles que la cryptographie post-quantique. Le CESE estime qu’il est essentiel que l’UE adopte une approche à moyen terme pour acquérir son autonomie et plaide résolument en faveur de la mise en place d’infrastructures de recherche et de production par des entreprises établies dans l’UE. Le CESE tient pour important d’accroître les ressources de l’Union allouées à la recherche et à l’innovation dans le domaine numérique et de soutenir les investissements des opérateurs et des fournisseurs dans les nouvelles fonctionnalités techniques de sécurité, y compris celles qui sont liées à de nouvelles tendances telles que la réalité augmentée et le métavers. Il est particulièrement crucial de créer une infrastructure européenne d’informatique en nuage distribuée, fondée sur les réglementations européennes dans des domaines comme le stockage et le traitement des données (5). |
5.6. |
Les PME devraient bénéficier d’une attention particulière et avoir accès à des programmes de financement leur permettant de renforcer leur résilience face aux cyberattaques, ainsi qu’à des programmes d’assistance, de formation et d’éducation qui les aident à comprendre les risques relatifs à la cybersécurité et les moyens de s’en prémunir. L’Union européenne devrait prévoir un mécanisme d’incitation favorisant une familiarisation progressive des PME aux questions de cybersécurité. |
5.7. |
Selon les estimations de la Commission, le déficit de compétences en cybersécurité se chiffre à un demi-million de personnes. Par conséquent, le CESE accueille favorablement la proposition de créer une Académie des compétences cyber. Il est évident que les efforts déployés au niveau des États membres ne suffisent pas à réduire le déficit de compétences. C’est pourquoi le Comité propose qu’en sus du lancement de l’Académie des compétences cyber, la Commission s’appuie sur la nouvelle dynamique créée par l’Année européenne des compétences pour coordonner et financer, au niveau de l’UE, des programmes de formation à grande échelle et des programmes d’enseignement et de formation professionnels auxquels tous les États membres peuvent participer et qui visent à constituer une main-d’œuvre qualifiée pour l’ensemble des agences et organisations concernées par la cyberdéfense, ainsi que pour les réseaux civils privés. Une attention particulière doit être accordée à la formation de la main-d’œuvre, en particulier dans les domaines des sciences, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques (STEM). |
5.8. |
En outre, le CESE tient pour essentiel de sensibiliser les citoyens à la cybersécurité afin de réduire l’exposition aux cyberattaques, en particulier s’agissant de la cybercriminalité ordinaire qui cible la population dans son ensemble. Le Comité demande que soient créés des cursus d’éducation et des programmes de formation tout au long de la vie qui auront pour principal objectif de renforcer les compétences en matière de cybersécurité, de familiariser les citoyens à cette question, notamment les jeunes, et de rendre ce domaine plus attrayant à leurs yeux. Le CESE est favorable à ce que les questions de cybersécurité soient intégrées dans toutes les futures politiques de l’Union et à ce que l’on informe le grand public sur les cybermenaces, notamment par l’intermédiaire de programmes gratuits de formation destinés à la population dans son ensemble, d’applications mobiles informatives gratuites ou de communications diffusées à la télévision aux heures de grande écoute. En parallèle de ces actions, il y a lieu de promouvoir des avancées culturelles généralisées à tous les niveaux de la société, en vue de progresser vers une approche axée sur la cybersécurité. |
5.9. |
Le CESE estime qu’il est indispensable d’évaluer les profils de risque des fournisseurs et d’appliquer des restrictions pertinentes à ceux considérés comme à haut risque, y compris en procédant aux exclusions nécessaires en ce qui concerne les actifs et applications essentiels définis comme critiques et sensibles dans l’évaluation coordonnée des risques au niveau de l’UE, ainsi qu’en octroyant une certification aux fournisseurs de matériel et de logiciels de confiance. |
6. Établir des partenariats pour relever les défis communs
6.1. |
Le niveau de préparation aux futures cyberattaques varie fortement d’un État membre à l’autre. Le CESE considère que la première étape à mettre en place immédiatement est la création d’une plateforme intraeuropéenne de diffusion des bonnes pratiques, où les États membres les plus avancés en matière de cybersécurité pourraient partager leurs connaissances avec les autres pays, et leur faciliter ainsi l’adoption immédiate de telles mesures. Une telle plateforme contribuerait à accroître la confiance mutuelle entre les entités nationales. En outre, le Comité tient pour essentiel de renforcer la coopération entre les acteurs étatiques et non étatiques dans l’ensemble de l’Union afin d’améliorer le niveau de cybersécurité des produits et services sur le marché intérieur. Le CESE propose également que soit créée une plateforme commune européenne permettant de signaler les cyberincidents et comprenant notamment une liste noire de tous les cybercriminels dans l’UE. |
6.2. |
Le CESE estime que, dans le domaine militaire, une coopération étroite avec nos alliés de l’OTAN doit être centrée non seulement sur le renforcement des capacités et la détection précoce, mais aussi sur la mise sur pied de projets conjoints de recherche, développement et innovation, le partage de bonnes pratiques et les échanges entre experts, la création de vastes programmes de formation et des simulations de cyberattaques. L’objectif premier de cette coopération doit être d’améliorer la capacité de réaction commune et de créer des synergies pour contrer les futures menaces hybrides, dans la lignée des déclarations conjointes de Varsovie et de Bruxelles, de 2016 et 2018 respectivement. Plusieurs possibilités de coopération entre l’Union européenne et l’OTAN peuvent encore être exploitées, et des progrès immédiats peuvent faire une réelle différence s’agissant de garantir la sécurité de nos citoyens et de nos sociétés. |
6.3. |
Le Comité est d’avis que les discussions au niveau mondial et avec nos partenaires internationaux devraient ouvrir la voie à la promotion d’un cyberespace mondial et ouvert qui protège les droits de l’homme, les libertés fondamentales et l’état de droit, et se concentre sur l’élaboration de normes internationales contraignantes dans les secteurs caractérisés par un développement numérique rapide. Le CESE recommande au haut représentant d’examiner les dialogues bilatéraux existants sur la cybersécurité et de mener des négociations supplémentaires avec d’autres pays et des organisations internationales compétentes, de manière à promouvoir un cadre mondial pour le respect du droit international dans le cyberespace fondé sur une stricte condition de réciprocité. |
6.4. |
Enfin, le Comité estime que l’Union européenne, compte tenu de son ancrage solide dans les libertés démocratiques fondamentales, est bien placée pour prendre la tête des débats à l’échelle internationale sur l’avenir de la cybersécurité, en particulier au sein des Nations unies. L’UE doit également s’engager dans la lutte contre les régimes totalitaires qui exercent un contrôle sur les données des citoyens et violent leurs droits et leurs libertés, et elle devrait également prendre fermement position contre tout type de système de notation sociale à l’encontre des citoyens. Le CESE affirme explicitement qu’une véritable démocratie ne peut exister sans une protection effective des données à caractère personnel, et considère qu’une gestion responsable et efficace des données est fondamentale pour faire de l’hyperconnectivité un atout. |
Bruxelles, le 14 juin 2023.
Le président du Comité économique et social européen
Oliver RÖPKE
(1) Directive (UE) 2022/2555 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 concernant des mesures destinées à assurer un niveau élevé commun de cybersécurité dans l’ensemble de l’Union, modifiant le règlement (UE) no 910/2014 et la directive (UE) 2018/1972, et abrogeant la directive (UE) 2016/1148 (directive SRI 2) (JO L 333 du 27.12.2022, p. 80).
(2) Communication conjointe de la Commission européenne au Parlement européen et au Conseil sur «La politique de cyberdéfense de l’UE».
(3) Notamment l’accélérateur d’innovation de défense pour l’Atlantique Nord (DIANA), une initiative de l’OTAN.
(4) Directive sur la résilience des entités critiques.
(5) Citons à titre d’exemple l’initiative franco-allemande «Gaia-X».
18.8.2023 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 293/27 |
Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Négociations collectives vertes: bonnes pratiques et perspectives d’avenir»
(avis exploratoire)
(2023/C 293/05)
Rapporteure: María del Carmen BARRERA CHAMORRO
Corapporteur: Marinel Dănuț MUREȘAN
Consultation |
Lettre de la présidence espagnole du Conseil, 27.7.2022 |
Base juridique |
Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne |
Compétence |
Section «Emploi, affaires sociales et citoyenneté» |
Adoption en section |
31.5.2023 |
Adoption en session plénière |
14.6.2023 |
Session plénière no |
579 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
196/2/11 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
Le Comité économique et social européen (CESE) part du principe que les entreprises et les travailleurs doivent disposer de canaux adéquats pour participer à la protection de l’environnement et à la lutte contre le changement climatique. S’il respecte la mission dévolue aux systèmes nationaux de relations industrielles et l’autonomie des partenaires sociaux, il est néanmoins d’avis que les négociations collectives menées aux niveaux concernés pourraient mettre davantage l’accent sur les enjeux liés à la transition écologique. Il estime que la promotion de négociations collectives vertes, à tous les niveaux, constitue une bonne voie à suivre à cette fin. |
1.2. |
Le CESE considère que, dans le cadre des négociations collectives, les discussions relatives aux enjeux écologiques doivent porter sur des clauses qui peuvent être négociées entre les partenaires sociaux concernés par les conventions collectives ayant un effet direct ou indirect sur l’environnement. Ces clauses peuvent couvrir, entre autres, les aspects suivants:
Le CESE souhaite mettre en avant la négociation collective comme un outil essentiel qui peut aider les entreprises et les travailleurs à relever les défis posés par la crise climatique, y compris les coûts qui en découlent pour les entreprises. |
1.3. |
Le CESE tient à souligner que toutes les questions abordées dans le présent avis participent d’une reconnaissance et d’un plein respect de l’autonomie de la volonté des partenaires sociaux, qui est indépendante et souveraine. En conséquence, il précise que, pour les personnes négociant des conventions collectives, il ne faut en aucun cas comprendre ce qui est exprimé dans le présent avis comme relevant d’une quelconque imposition ou condition externe par rapport à leur fonction d’autoréglementation conventionnelle. |
1.4. |
Le CESE estime que la société civile, qui n’est pas directement concernée par la négociation collective dans la mesure où celle-ci incombe aux partenaires sociaux, peut aider à trouver des solutions démocratiques face aux défis et aux problèmes soulevés par la transition écologique, mais qu’elle peut aussi le faire en contribuant à la conception et à la mise en œuvre de mesures équitables visant à garantir que cette transition soit socialement juste. |
1.5. |
Le CESE a déjà souligné, dans son avis sur la transition énergétique et les politiques du marché du travail, que la transition écologique a une incidence significative sur l’emploi, les conditions de travail et les conditions de vie des travailleurs (1). Par conséquent, l’incidence de cette transition sur l’emploi et la cohésion territoriale et sociale, la création d’emploi, les transitions entre différents secteurs d’activité et la formation et la reconversion des travailleurs pour qu’ils acquièrent les compétences nécessaires, la vulnérabilité particulière des travailleurs âgés, la santé et la sécurité au travail, la mobilité dans les villes pour accéder aux lieux de travail, ainsi que l’efficacité énergétique dans les activités productives et dans l’exécution du travail sont autant de questions qui peuvent être abordées dans les négociations collectives, toujours dans une perspective de genre appropriée. |
1.6. |
Le CESE constate que des preuves scientifiques (2) toujours plus nombreuses font apparaître les vastes possibilités et les multiples avantages offerts par une négociation collective verte s’agissant de la promotion de la durabilité environnementale, de la décarbonation de l’économie, de la stimulation de l’économie circulaire et de la lutte contre le changement climatique, compte tenu de la contribution importante qu’apportent à ces objectifs des aspects propres à ses compétences, tels que la mobilité des travailleurs, les formes d’organisation du travail, l’autonomisation des travailleurs afin de faciliter les processus de transition écologique, la garantie d’environnements sûrs et sains, les questions d’égalité entre les hommes et les femmes, etc., comme le démontrent la déclaration des partenaires sociaux européens du 30 mai 2017 sur l’exploitation du potentiel de l’économie verte pour la création d’emplois ou leur recommandation commune du 7 octobre 2021 sur l’économie circulaire dans le cadre du dialogue social (3). |
1.7. |
Le CESE accueille favorablement la recommandation visant à assurer une transition équitable vers la neutralité climatique, adoptée lors du Conseil EPSCO de juin dernier (4), qui reconnaît l’importance d’associer activement les partenaires sociaux, dans le strict respect de leur autonomie, à toutes les étapes de la conception et de la mise en œuvre des différentes politiques publiques, y compris par le dialogue social et la négociation collective. |
1.8. |
La transition écologique, la décarbonation et l’économie circulaire, ainsi que la numérisation, ont toutes une incidence sur le monde du travail, en ce qu’elles modifient la nature des emplois et des tâches et donnent naissance à de nouvelles professions, tout en en faisant disparaître d’autres. Ces transformations sont étroitement liées et se renforcent mutuellement. Toutefois, le CESE constate que, jusqu’à présent, l’expérience de négociation verte dans l’Union européenne (UE) et dans les États membres reste faible et très inégale. Contrairement à ce qui advient en matière de transition numérique, une attention moindre a été accordée aux questions écologiques dans le cadre des négociations collectives. C’est pourquoi le CESE demande à l’UE, aux États membres et aux partenaires sociaux, dans le plein respect de l’autonomie collective, d’adopter des mesures plus engagées et plus efficaces qui favorisent le développement et accroissent l’importance des volets écologiques de la négociation collective aux différents niveaux appropriés. |
1.9. |
Le CESE rappelle que la négociation collective est un instrument particulièrement adéquat pour parvenir à des réglementations équilibrées aux fins d’évoluer progressivement et équitablement vers une économie de bien-être et de productivité accrus. Il demande dès lors de progresser plus rapidement et plus efficacement vers une négociation collective verte dans le cadre de laquelle les partenaires sociaux, aux différents niveaux de négociation, joueraient un rôle continu et significatif pour contribuer aux solutions équilibrées dont les entreprises ont besoin pour devenir des entités plus durables, résilientes et productives, au sein desquelles le travail décent est solidement ancré. |
1.10. |
Le CESE estime que les entreprises et les travailleurs doivent disposer de canaux appropriés pour contribuer aux débats sur la transition écologique. En effet, l’écologisation et la numérisation entraînent des répercussions sur la transformation des marchés du travail d’une rapidité et d’une ampleur telles qu’elles imposent d’associer les partenaires sociaux de manière précoce et efficace, en accord avec les systèmes nationaux de concertation sociale, afin de dégager des solutions qui soient adaptées aux secteurs au niveau local. Il lui semble donc utile et important de promouvoir non seulement le dialogue social mais aussi la négociation collective, selon les besoins, à tous les échelons de l’Union et des États membres, et même à l’échelle mondiale, tout en respectant pleinement l’autonomie des partenaires sociaux. En outre, l’UE et les États doivent promouvoir le développement de droits à l’information, à la consultation et à l’expression collective des représentants des syndicats et des travailleurs susceptibles d’être les plus efficaces en ce qui concerne l’impact environnemental de l’activité des entreprises. |
1.11. |
Le CESE prend acte de l’existence, depuis une décennie, de quelques expériences réussies de négociation collective verte, tant au niveau national qu’au niveau européen. À ce dernier niveau, il convient de mentionner la pratique de négociation «Responsible Care» (gestion responsable) (5) déployée dans le secteur chimique européen. En ce qui concerne les meilleures pratiques nationales, le CESE constate l’utilité des clauses conventionnelles figurant dans des conventions en Italie, en Espagne ou en France, par exemple, qui promeuvent dans les entreprises et/ou dans les secteurs d’activité concernés le rôle des délégués chargés de l’environnement, ainsi que celui de comités mixtes de gestion environnementale (prévus en outre dans les normes de certification telles que EMAS et ISO 14001). Tout aussi utiles sont les clauses sur la mobilité durable de la main-d’œuvre ou sur la reconnaissance de droits d’alerte syndicale en matière environnementale, pour n’en citer que quelques-unes. |
1.12. |
Le CESE invite l’UE et les États membres à soutenir davantage des actions et initiatives qui inciteront les employeurs et les travailleurs à s’adapter à la transition écologique, et à envisager d’élaborer, entre autres mesures, un concept de salariés désignés pour jouer le rôle de représentants de la transition environnementale ou de points de contact pour les questions liées à la transition environnementale et écologique du lieu de travail. Au sein des entreprises, les cadres et les représentants du personnel pourraient examiner s’il y a lieu de désigner des travailleurs qui assumeraient, en plus de leurs tâches principales, une mission spécifique de conseil pour les questions concernant l’adaptation de l’entreprise à la transition écologique. Le CESE invite les États membres à prévoir les incitations requises pour que chaque entreprise ou secteur d’activité désigne de tels représentants ou points de contact en matière de transition environnementale. Il est également recommandé de renforcer les capacités et connaissances environnementales des personnes au moyen de la formation professionnelle. |
1.13. |
Dans le cadre de leur programme de travail conjoint pour la période 2022-2024 (6), les partenaires sociaux de l’Union travailleront à l’élaboration d’un cadre d’action pour la transition écologique. Les États membres, quant à eux, devraient mettre en place un cadre adéquat pour favoriser la mise en œuvre d’accords interprofessionnels et les promouvoir, dans le plein respect de l’autonomie collective, afin de faciliter l’établissement de recommandations, de lignes directrices et de normes appropriées et équitables pour faire de la négociation collective verte un outil déterminant en vue de garantir des modèles de production équilibrés à même de protéger l’environnement. Compte tenu de l’ampleur et de la complexité du défi, le CESE est convaincu de la nécessité d’associer tous les niveaux de négociation collective, sectoriels et d’entreprise, européens et étatiques, y compris internationaux, à l’avènement d’une économie productive verte. |
1.14. |
Le CESE estime que la qualité de l’air est un aspect important de la santé et de la sécurité et reconnaît que l’OMS a fixé de nouvelles valeurs et défini de nouvelles lignes directrices au niveau mondial. Il propose de les prendre en compte dans le cadre des négociations collectives vertes. Compte tenu d’EMAS et de la directive sur la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises, il importe de promouvoir la participation des travailleurs et les programmes de formation en matière de gestion environnementale. |
1.15. |
Le CESE invite les États membres à transposer intégralement la directive (UE) 2019/1937 du Parlement européen et du Conseil (7) sur la protection des personnes qui signalent d’éventuelles infractions au droit de l’Union, y compris le droit de l’environnement. |
2. Contexte, justification et principaux thèmes de l’avis
2.1. |
Le CESE partage l’ambition de l’UE de jouer un rôle moteur dans la transition écologique en accélérant le déploiement des politiques, des ressources — notamment financières — et des technologies nécessaires pour parvenir à une décarbonation rapide du système productif, tout en garantissant une transition juste, selon l’approche exposée dans l’avis du CESE sur le thème «Politique énergétique et marché du travail» (8). Le dialogue social et la négociation collective, dans le plein respect de l’autonomie des partenaires sociaux et des caractéristiques des systèmes nationaux de relations du travail, sont essentiels à cette fin. |
2.2. |
Le CESE est conscient que la transition écologique et la décarbonation de l’économie dans l’Union européenne auront des conséquences sur l’emploi ainsi que sur les conditions de vie de la population, en particulier des couches les plus vulnérables. Il est impératif que la transition se déroule de manière équitable, afin de mitiger ses effets sur les entreprises, les travailleurs et les citoyens en général. Elle devrait également constituer une occasion d’améliorer la situation des personnes les plus vulnérables. |
2.3. |
Le CESE rappelle que dans ses «Principes directeurs pour une transition juste vers des économies et des sociétés écologiquement durables pour tous» de 2015 (9), l’Organisation internationale du travail (OIT) insiste sur le rôle que jouent les gouvernements et les partenaires sociaux pour assurer la cohérence des politiques et mettre en place des dispositions institutionnelles en vue d’une transition juste pour tous, et qu’elle fait figurer parmi ces principes la nécessité de faciliter l’intégration de dispositions environnementales dans les négociations collectives à tous les niveaux. Il souligne également les avantages des engagements en matière de formation portant spécifiquement sur ces questions pour les cadres et les employés. |
2.4. |
La Commission européenne, dans ses lignes directrices concernant les systèmes volontaires de management environnemental (EMAS), reconnaît toute l’importance que revêtent les canaux permettant d’associer efficacement les travailleurs et leurs représentants à la gestion écologique des entreprises. À cet égard, le moyen le plus approprié de faire progresser cette participation de la main-d’œuvre à la gestion environnementale consiste à associer les partenaires sociaux et à recourir, le cas échéant, à la négociation collective, en accord avec les systèmes et pratiques de concertation sociale de chaque État membre. Le principe no 8 du socle européen des droits sociaux insiste sur la nécessité de favoriser le dialogue social et la participation des travailleurs aux politiques sociales, économiques et de l’emploi, et d’inviter les partenaires sociaux à négocier des conventions collectives. Qui plus est, la recommandation du Conseil du 16 juin 2022 visant à assurer une transition équitable vers la neutralité climatique souligne le rôle important des partenaires sociaux dans la gestion des effets de cette transition sur l’emploi (considérant 18). |
2.5. |
Toujours animé par la reconnaissance et le plein respect de l’autonomie de la volonté des partenaires sociaux, le CESE prend note de la déclaration du gouvernement espagnol, qui assume la présidence de l’UE et demande le présent avis exploratoire, s’agissant de promouvoir un cadre réglementaire et une politique d’incitations favorisant les négociations collectives vertes. Le présent avis constitue la réponse du Comité à la demande de la présidence espagnole et contient ses propositions à cet égard. |
3. Contexte européen et apports des données scientifiques sur le rôle de la négociation collective dans la transition verte
3.1. |
Le CESE constate que des preuves scientifiques toujours plus nombreuses font apparaître les vastes possibilités et les multiples avantages offerts par une négociation collective verte s’agissant de la promotion de la durabilité environnementale, de la décarbonation de l’économie, de la stimulation de l’économie circulaire et de la lutte contre le changement climatique, compte tenu de la contribution importante qu’apportent à ces objectifs les différents aspects propres à cette négociation, tels que la mobilité des travailleurs, les formes d’organisation du travail, l’autonomisation des travailleurs afin de faciliter les processus de transition écologique, la garantie d’environnements sûrs et sains, les questions d’égalité entre les hommes et les femmes, etc., comme le démontrent la déclaration des partenaires sociaux européens du 30 mai 2017 (10) sur l’exploitation du potentiel de l’économie verte pour la création d’emplois, ainsi que le rapport final du 7 octobre 2021 (11) sur leur projet commun en matière d’économie circulaire et les recommandations qui en découlent. |
3.2. |
Le CESE est d’avis que les négociations collectives vertes à tous les niveaux font partie intégrante du principe de la participation démocratique des citoyens, qui s’exprime ici par le rôle particulier des partenaires sociaux sur le marché du travail et qui est essentielle pour faire face de manière efficace et socialement équitable à l’urgence climatique et à la transition écologique de l’économie et de la société. |
3.3. |
La réussite des politiques déployées dans l’Union européenne en matière d’énergies renouvelables nécessite que l’on recherche des équilibres entre les objectifs économiques, environnementaux et sociaux. Nous avons dès lors besoin de nouveaux outils pour assurer une bonne cohérence entre ces processus de transition écologique dans l’Union et pour promouvoir l’intégration des citoyens et de la population active dans le monde professionnel. La négociation collective verte offre un bon outil pour atteindre ces équilibres. |
3.4. |
Dans un contexte de changement climatique accéléré, il est essentiel de recenser les secteurs d’activité économique et de travail qui sont ou seront les plus touchés par la crise climatique et ses effets directs, tant sur le plan des conditions économiques, de travail, de santé et de protection sociale que sur celui des attentes, y compris s’agissant de la mobilité des entreprises et de la main-d’œuvre, afin d’établir les mesures adéquates pour en limiter les conséquences. |
3.5. |
L’UE est à la pointe des processus innovants de production d’énergie propre visant à inverser les déséquilibres environnementaux et sociaux, assortis de transformations économiques qui offrent de nouvelles possibilités d’emploi décent, comme l’illustrent les énergies renouvelables. Le CESE demande à ce que soit renforcées la recherche dans ce domaine ainsi que les aides financières à l’investissement des entreprises concernées. |
3.6. |
Le CESE note avec satisfaction que de plus en plus d’entreprises adoptent un système de responsabilité sociale des entreprises (RSE) qui comporte des engagements effectifs en faveur d’une gestion durable de l’environnement. Il prend acte des études montrant que les programmes de RSE auxquels les entreprises participent dans le cadre d’accords ou de conventions garantissent davantage de sérieux et d’efficacité. |
3.7. |
Le principal moyen de structurer la participation des travailleurs aux processus de transition juste consiste à inclure des clauses en ce sens dans les conventions collectives établies pour les différents niveaux et selon les spécificités de chaque système de relations de travail. Celles-ci peuvent être très utiles pour encourager la coopération entre employeurs et travailleurs s’agissant d’élaborer une réponse commune en matière de transition écologique. |
3.8. |
À l’heure actuelle, des clauses de responsabilité sociale sont progressivement introduites dans les conventions collectives, de sorte que la négociation collective vient compléter les marchés publics écologiques relevant de la responsabilité sociale. On peut citer pour exemple le secteur de la chimie, qui fait figure de pionnier en la matière. La mise en œuvre du pacte vert pour l’Europe nécessite un nouveau cadre d’étiquetage spécifique et homogène qui fournisse des informations économiques et écologiques pertinentes pour la prise de décision publique et privée. Cette stratégie européenne en matière d’éco-étiquetage mènerait à une amélioration s’agissant des marchés publics durables et pourrait encourager la circularité et le flux d’informations. Elle doit néanmoins répondre à certains critères importants, tels que le rapport coût-efficacité, la confidentialité et la proportionnalité. |
3.9. |
La qualité de l’air est un volet majeur des questions de santé et de sécurité dans les espaces de travail intérieurs et extérieurs. Elle a ainsi une incidence sur les conditions de travail et devrait aussi être abordée dans le cadre des négociations collectives. Récemment, l’OMS a défini de nouvelles valeurs et lignes directrices mondiales en ce qui concerne la qualité de l’air et ses effets sur la santé humaine, y compris pour ce qui est de la santé au travail des personnes travaillant dans des environnements extérieurs. Il se pourrait que les règles actuellement en vigueur dans l’UE doivent être modifiées en conséquence. En outre, ces changements auront une incidence sur les négociations collectives relatives aux environnements de travail et aux conditions environnementales de prestation de services, ainsi que sur les coûts d’investissement. |
3.10. |
L’Union s’est dotée de cadres réglementaires qui encouragent l’intégration de la gestion environnementale dans les entreprises, mais ces dispositifs ne peuvent être réellement efficaces que si les travailleurs et leurs représentants y sont activement associés. C’est le cas des systèmes volontaires de gestion environnementale [EMAS (12)] et de la directive 2014/95/UE du Parlement européen et du Conseil (13) (la directive sur la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises). Ils mettent l’accent sur la promotion de la participation des travailleurs et des programmes de formation à la gestion environnementale. |
3.11. |
Le CESE prend note du nombre croissant d’études au niveau européen qui mettent en évidence les vertus des négociations collectives vertes en tant qu’outil pour stimuler des processus productifs durables au moyen de conventions incluant des clauses d’autorégulation écologique. La négociation collective, menée dans le respect de l’autonomie des partenaires sociaux et des spécificités des systèmes nationaux de concertation sociale, peut aider à faciliter la formation de consensus sur les mesures spécifiques que les entreprises doivent prendre pour promouvoir une transition juste. |
4. Observations générales
4.1. |
Le CESE note que les études sur la négociation collective dans les pays de l’UE concluent que l’importance de la thématique environnementale dans les conventions collectives est faible. Il invite l’UE et les États membres à soutenir davantage les actions et initiatives qui inciteront les employeurs et les travailleurs à s’adapter à la transition écologique, en tenant compte des pratiques en matière d’information et de consultation sur le lieu de travail. |
4.2. |
Bien gérée, la transition vers une économie à émissions nulles est non seulement essentielle pour répondre à l’urgence climatique, mais peut stimuler une relance économique durable et inclusive. Cependant, il est nécessaire de prendre des mesures à long terme, qui appellent quant à elles des mécanismes de financement solides et durables, et une gouvernance participative et stable. |
4.3. |
Dans ce modèle de gouvernance participative, la négociation collective est un outil d’adaptation du monde du travail au nouveau défi d’un modèle productif durable à tous les points de vue. Il en va ainsi en raison de sa capacité de réaction immédiate, de sa proximité avec les réalités sectorielles et de sa capacité à apporter des solutions adaptées, y compris pour ce qui est de la protection de l’emploi et des entreprises. |
4.4. |
Le CESE recommande à la Commission et aux États membres d’examiner, en concertation avec les partenaires sociaux sectoriels, la valeur ajoutée que peut apporter la réalisation d’études sur les effets de l’urgence climatique et des transitions vertes sur le milieu du travail dans les différents secteurs productifs, de manière à recenser et à proposer des mesures permettant de répondre efficacement aux besoins des milieux économiques et d’aider les différentes unités de négociation collective à piloter la transition juste dans leurs conventions et accords collectifs. |
4.5. |
Le CESE encourage les partenaires sociaux à intégrer les processus de transition écologique dans les conventions collectives, en tenant compte de leurs priorités interprofessionnelles et sectorielles, le cas échéant. Un bon exemple à cet égard dans l’expérience européenne est l’inclusion du programme mondial «Responsible Care» (gestion responsable) dans les conventions collectives du secteur chimique en Europe. |
5. Observations particulières
5.1. |
Le CESE considère que, dans le cadre des négociations collectives, les discussions relatives aux enjeux écologiques doivent porter sur des clauses qui peuvent être négociées entre les partenaires sociaux concernés par les conventions collectives ayant un effet direct ou indirect sur l’environnement. Les conventions collectives peuvent couvrir, entre autres, les aspects suivants:
Le CESE souhaite mettre en avant la négociation collective comme un outil essentiel qui peut aider les entreprises et les travailleurs à relever les défis posés par la crise climatique, y compris les coûts qui en découlent pour les entreprises. |
5.2. |
Le CESE juge nécessaire que la Commission européenne, au titre des articles 154, 155 et 156 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), encourage les États membres à promouvoir l’intégration de la gestion environnementale des entreprises dans le dialogue social et dans la négociation collective. La négociation collective est un mécanisme utile pour ce qui est de faciliter l’adaptation des organisations, de l’emploi et des conditions de travail aux effets du changement climatique, et elle permet d’évaluer et de présenter les coûts d’investissement des entreprises afin de les préserver et de les adapter aux exigences de concurrence équitable. |
5.3. |
Tout en respectant l’autonomie des partenaires sociaux et la diversité des systèmes de négociation collective des États, le CESE juge approprié que les cadres juridiques et les accords interprofessionnels au niveau national fournissent un cadre permettant d’intégrer l’objectif qui consiste à réaliser une transition écologique socialement juste, en conciliant, d’une part, les changements productifs (y compris l’évaluation des coûts, tant pour les entreprises que sur le plan social, ainsi que leur répartition équitable), et d’autre part, la qualité et la sécurité du plus grand nombre possible d’emplois. Compte tenu des différents systèmes de relations industrielles, on pourrait envisager:
|
5.4. |
Le CESE invite l’UE et les États membres à soutenir davantage des actions et initiatives qui inciteront les employeurs et les travailleurs à s’adapter à la transition écologique, et à envisager d’élaborer, entre autres mesures, un concept de salariés désignés pour jouer le rôle de représentants de la transition environnementale ou de points de contact pour les questions liées à la transition environnementale et écologique du lieu de travail. Au sein des entreprises, les cadres et les représentants du personnel pourraient examiner s’il y a lieu de désigner des travailleurs qui assumeraient, en plus de leurs tâches principales, une mission spécifique de conseil pour les questions concernant l’adaptation de l’entreprise à la transition écologique. Le CESE invite les États membres à prévoir les incitations requises pour que chaque entreprise ou secteur d’activité désigne de tels représentants ou points de contact en matière de transition environnementale. Il est également recommandé de renforcer les capacités et connaissances environnementales des personnes au moyen de la formation professionnelle. |
5.5. |
Le CESE invite les États membres à mettre en place un cadre et des conditions propices à promouvoir, dans les conventions collectives, des clauses relatives à la mobilité qui incluent des programmes de mobilité durable, saine et sûre de la main-d’œuvre dans l’ensemble de l’environnement de travail, de sorte à réduire ainsi l’utilisation de la voiture privée et, partant, des émissions. Les États devraient mettre en place des systèmes efficaces et efficients en vue de la mise en place de telles mesures. |
5.6. |
Le CESE invite les États membres à transposer intégralement la directive (UE) 2019/1937 sur la protection des personnes qui signalent d’éventuelles infractions au droit de l’Union, y compris le droit de l’environnement. Ces dispositions aideraient grandement à contrôler le respect des politiques européennes de relance sur la base d’une transition économique écologiquement durable et socialement juste. |
5.7. |
Le CESE demande aux partenaires sociaux d’envisager et de faciliter la mise en place de relations adéquates ainsi que de recommandations, de lignes directrices et de politiques équitables visant à faire de la négociation collective verte l’un des meilleurs outils de qualité pour garantir et promouvoir un modèle productif équilibré sur le plan de la compétitivité et de la protection de l’ensemble de l’environnement local et mondial. |
Bruxelles, le 14 juin 2023.
Le président du Comité économique et social européen
Oliver RÖPKE
(1) Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Politique énergétique et marché du travail: conséquences pour l’emploi dans les régions en transition énergétique» (avis d’initiative) (JO C 146 du 27.4.2023, p. 4). https://www.eesc.europa.eu/fr/our-work/opinions-information-reports/opinions/politique-energetique-et-marche-du-travail-consequences-pour-lemploi-dans-les-regions-en-transition-energetique
(2) https://www.epsu.org/article/what-green-collective-bargaining
(3) https://www.businesseurope.eu/sites/buseur/files/media/reports_and_studies/2021-09-24_final_report_sp_project_on_circular_ecenomy_and_the_world_of_work.pdf
(4) Cette recommandation indique notamment qu’«[a]fin de faire avancer la transition écologique de manière inclusive et démocratique, en intégrant dès le départ des objectifs de transition équitable dans l’élaboration des politiques à tous les niveaux et en garantissant une approche efficace englobant l’ensemble de la société dans le cadre des politiques de transition équitable, les États membres sont invités à: […] associer activement les partenaires sociaux au niveau national, régional et local, tout en respectant leur autonomie, à toutes les étapes de l’élaboration et de la mise en œuvre des politiques prévues par la présente recommandation, y compris par le dialogue social et la négociation collective s’il y a lieu; promouvoir, en outre, la pleine participation des partenaires sociaux à la conception et à la mise en œuvre des trajectoires de transition pour les écosystèmes industriels dans le cadre de la nouvelle stratégie industrielle mise à jour […]».
(5) Soucieuses de toujours améliorer les performances des activités de l’industrie chimique en matière de sécurité, de protection de la santé et de l’environnement, conformément aux principes du développement durable et au-delà du respect de la législation en vigueur et des dispositions de l’accord en question, ses parties signataires s’engagent à promouvoir l’adhésion des entreprises au programme international de l’industrie chimique «Responsible Care» et la réalisation des objectifs poursuivis par cette initiative volontaire, ouverte et active émanant des entreprises chimiques, et à collaborer à cet effet. Voir ici: https://www.feique.org/programa-responsible-care/
(6) https://www.businesseurope.eu/publications/european-social-dialogue-work-programme-2022-2024
(7) Directive (UE) 2019/1937 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2019 sur la protection des personnes qui signalent des violations du droit de l’Union (JO L 305 du 26.11.2019, p. 17).
(8) Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Politique énergétique et marché du travail: conséquences pour l’emploi dans les régions en transition énergétique» (avis d’initiative) (JO C 146 du 27.4.2023, p. 4).
(9) https://www.ilo.org/wcmsp5/groups/public/---ed_emp/---emp_ent/documents/publication/wcms_432864.pdf
(10) https://www.etuc.org/sites/default/files/document/files/2017-05-29_kick_off_draft_declaration_eu_social_partners_on_green_jobs_final.pdf
(11) https://www.businesseurope.eu/sites/buseur/files/media/reports_and_studies/2021-09-24_final_report_sp_project_on_circular_ecenomy_and_the_world_of_work.pdf
(12) Règlement (UE) 2018/2026 de la Commission du 19 décembre 2018 modifiant l’annexe IV du règlement (CE) no 1221/2009 du Parlement européen et du Conseil concernant la participation volontaire des organisations à un système communautaire de management environnemental et d’audit (EMAS) (JO L 325 du 20.12.2018, p. 18).
(13) Directive 2014/95/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2014 modifiant la directive 2013/34/UE en ce qui concerne la publication d’informations non financières et d’informations relatives à la diversité par certaines grandes entreprises et certains groupes (JO L 330 du 15.11.2014, p. 1).
18.8.2023 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 293/34 |
Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Mesures de lutte contre la stigmatisation des personnes atteintes du VIH»
(avis exploratoire à la demande de la présidence espagnole)
(2023/C 293/06)
Rapporteur: |
Pietro Vittorio BARBIERI |
Corapporteure: |
Nicoletta MERLO |
Saisine du Comité par la présidence espagnole du Conseil |
Lettre, 8.12.2022 |
Base juridique |
Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne Avis exploratoire |
Compétence |
Section «Emploi, affaires sociales et citoyenneté» |
Adoption en section |
31.5.2023 |
Adoption en session plénière |
14.6.2023 |
Session plénière no |
579 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
201/0/6 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
Le Comité économique et social européen (CESE) salue l’initiative de la présidence espagnole, dont l’objectif est d’éliminer la stigmatisation et la discrimination liées au VIH en Europe d’ici à 2030. Cette question a été mise de côté pendant trop longtemps, même si les données disponibles montrent sans équivoque qu’elle continue d’avoir des conséquences néfastes dans différentes régions du monde, dans des contextes sociaux précis et au sein des populations clés. Le CESE partage donc l’avis de la présidence espagnole: mettre fin à la stigmatisation et à la discrimination liées au VIH devrait être considéré comme l’une des priorités politiques du programme de l’Union européenne (UE). |
1.2. |
Le Comité estime également que les institutions européennes doivent élaborer une déclaration de haut niveau en vue de la présenter au Parlement européen le 1er décembre 2023, et s’engage à la soutenir et à y contribuer, à tous les niveaux, par tous les moyens et dans toutes les enceintes possibles. |
1.3. |
Pour lutter contre la stigmatisation, la discrimination et les stéréotypes inexacts, le CESE estime qu’il est essentiel de promouvoir, surtout dans les écoles, les actions de sensibilisation, de formation et d’information en associant les organisations de la société civile, les jeunes et les organisations d’étudiants. |
1.4. |
Il convient d’identifier et de supprimer les obstacles à la prophylaxie préexposition (PPrE), car un meilleur accès aux médicaments et des progrès dans la mise en œuvre de cette technique sont nécessaires pour atteindre une population plus large, de sorte à accélérer l’évolution vers la fin de l’épidémie de sida d’ici à 2030. Les interventions préventives telles que la prophylaxie préexposition, la prophylaxie post-exposition (PPE) et le traitement comme prévention (TasP) pourraient avoir une incidence significative sur le contrôle du VIH et d’autres infections sexuellement transmissibles. |
1.5. |
Dans le monde du travail, les personnes atteintes du VIH doivent bénéficier des mêmes possibilités d’accès à l’emploi et de développement professionnel que les autres. Elles doivent aussi pouvoir jouir d’aménagements particuliers, comme des horaires flexibles ou des congés prolongés pour se rendre à des rendez-vous médicaux, et ce avec une garantie de confidentialité. |
1.6. |
Le CESE insiste sur l’importance de prendre des mesures spécifiques en faveur des populations clés: pour gérer efficacement l’épidémie de VIH, il faut que des informations ciblées et des programmes de prévention mis en œuvre sur le plan institutionnel atteignent ces groupes de population, afin que les services concernés puissent les contacter de façon proactive, en passant éventuellement par des associations non gouvernementales ancrées dans les communautés. |
1.7. |
Étant donné que l’Ukraine est le deuxième pays le plus touché par l’épidémie de sida en Europe orientale et Asie centrale, le CESE insiste sur l’importance que les pays d’accueil assurent la continuité et la gratuité du dépistage et des traitements du VIH pour les réfugiés ukrainiens, en améliorant leurs chances de se faire tester, quel que soit leur statut de résidence. Puisque la plupart des réfugiés ukrainiens sont des femmes et des enfants, l’idéal serait peut-être de les tester davantage au sein des hôpitaux, des centres de soins de santé primaires et des organisations communautaires. |
1.8. |
Les traitements antirétroviraux peuvent jouer un double rôle, en améliorant la santé des personnes atteintes du VIH tout en empêchant efficacement la transmission du virus, puisqu’ils sont très efficaces pour supprimer sa charge virale. |
1.9. |
Les bases du contrôle de la propagation de la contamination sont le diagnostic en temps utile de l’infection par le VIH, le lancement rapide du traitement et le maintien (la continuité) des soins. Étant donné que plusieurs pays ont déjà rempli l’objectif 90-90-90, le CESE plaide en faveur d’une nouvelle cible plus ambitieuse, devant être atteinte par tous les pays d’ici à 2030: augmenter les taux de couverture jusqu’à 95 % pour le dépistage, le traitement et la suppression virologique. |
1.10. |
Tant la continuité des soins que celle de la prévention constituent une approche globale pour lutter contre l’épidémie de VIH, et elles devraient donc être développées et mises en œuvre. |
1.11. |
Le CESE recommande de définir de nouvelles stratégies innovantes pour améliorer le diagnostic précoce et informer davantage de personnes au sujet de leur infection en développant des approches diversifiées et accessibles en vue d’élargir la disponibilité des moyens de dépistage du VIH tels que les tests rapides, les tests au sein des communautés et les autotests, ainsi qu’une méthode intégrée pour dépister le VIH et les hépatites B et C. |
1.12. |
Les organisations communautaires jouent un rôle essentiel dans la lutte contre le VIH, en encourageant la prise de responsabilité, en menant des actions de prévention, en organisant des activités et en contribuant à des innovations cruciales pour un progrès durable. |
1.13. |
Pour soutenir et accélérer les avancées vers la réalisation de ces objectifs, le CESE demande instamment que des efforts supplémentaires soient consentis au niveau de la conception et de la mise en œuvre de nouveaux programmes visant à étendre la sensibilisation à la séropositivité et à la couverture thérapeutique, à réduire la circulation du virus et donc la transmission du VIH, ainsi qu’à limiter les sources de discrimination, notamment dans le cadre de l’accès à l’emploi ou aux services financiers. |
2. Le VIH en Europe
2.1. |
La transmission du VIH reste un problème de santé publique majeur qui touche plus de 36 millions de personnes dans le monde, dont 2,3 millions vivent dans la région européenne de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), principalement dans sa partie orientale. En 2021, dans la région européenne, le VIH a été diagnostiqué chez près de 107 000 personnes, dont environ 17 000 au sein de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen (EEE). Les diagnostics de VIH connaissent une tendance à la baisse depuis 2012; un déclin plus marqué a été observé en 2020 et en 2021 (- 24 %), probablement à la suite des effets de la pandémie de COVID-19 sur le recours aux soins de santé, ou d’une baisse de la transmission imputable aux mesures de santé publique imposées pendant cette période. |
2.2. |
En Europe, le VIH touche davantage les populations marginalisées et les personnes dont le comportement est socialement stigmatisé, telles que les consommateurs de drogues par voie intraveineuse et leurs partenaires sexuels, les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes, les personnes transgenres, les travailleurs du sexe, les prisonniers et les migrants. |
2.3. |
Les données font état de modèles et de tendances épidémiologiques différents selon les pays de la région européenne de l’OMS: dans l’UE, l’EEE et la partie occidentale, le principal mode de transmission est la relation sexuelle entre des hommes, alors que ce sont les relations hétérosexuelles et l’absorption de substances par voie intraveineuse qui sont à la source du plus grand nombre de transmissions dans la partie orientale. |
2.4. |
Le dépistage tardif du VIH reste un problème pour la plupart des pays de la région, plus de 50 % des personnes ayant été diagnostiquées alors que le nombre de cellules CD4 était inférieur à 350/mmc. |
3. Continuité des soins liés au VIH pour les réfugiés ukrainiens
3.1. |
Depuis le début de la guerre, le 24 février 2022, plus de 13,5 millions de personnes ont été déplacées à l’intérieur du pays ou contraintes de se réfugier dans les pays voisins. Parmi elles, on trouve des personnes vivant avec le VIH, entre 10 000 et 30 000 selon les estimations, ainsi que des populations clés. |
3.2. |
L’Ukraine est le deuxième pays le plus touché par l’épidémie de sida en Europe orientale et Asie centrale. Le nombre de nouveaux diagnostics du VIH est passé de 14 240 en 2016 à 16 270 en 2019, diminuant légèrement pour atteindre 15 660 en 2020, probablement en raison de la crise de la COVID-19. Selon les données de surveillance, entre 9 000 et 10 000 de ces cas sont la conséquence d’une relation hétérosexuelle, et environ 5 000 de toxicomanie par voie intraveineuse. |
3.3. |
Avant le début de la guerre, le pays progressait fortement dans la lutte contre le sida: des soins et des traitements contre le VIH étaient dispensés gratuitement dans les cliniques publiques du VIH de tout le pays et un nombre croissant de personnes atteintes du virus bénéficiaient d’un traitement antirétroviral. En 2021, on estimait que, sur 240 000 personnes atteintes du VIH (soit 0,6 % de la population ukrainienne), plus de 150 000 (62 %) suivaient un traitement antirétroviral. Chez 94 % de ces individus, la fonction et la réplication du virus avaient été supprimées ou réduites. |
3.4. |
Dans le pays, les agences des Nations unies et les partenaires sur le terrain, comme le fonds d’urgence du Programme commun des Nations unies sur le VIH/sida (ONUSIDA), ont travaillé en étroite collaboration avec les collectivités locales pour atteindre et aider les personnes qui en avaient besoin. Plus récemment, elles ont fourni une aide humanitaire à des territoires durement touchés, qui viennent seulement d’être rendus accessibles. Une coalition formée par les pouvoirs publics, la société civile et des organisations internationales a été et continue d’être la pierre angulaire de la réponse efficace au VIH en Ukraine pendant la guerre. |
3.5. |
L’ONUSIDA continuera de soutenir les mesures de prévention du VIH, son dépistage, son traitement, les soins en la matière et l’aide aux personnes de toute l’Ukraine qui sont touchées par la guerre ou déplacées à la suite du conflit. |
3.6. |
Dans un document (1) publié en juillet 2022, le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC) présente les principales considérations permettant d’éclairer la prise de décision et la mise en œuvre pratique des services qui visent à maintenir les normes de qualité dans les soins fournis aux réfugiés ukrainiens en matière de VIH, et surtout l’importance pour les pays d’accueil d’assurer la continuité des soins et du dépistage gratuit du VIH pour ces personnes, améliorant ainsi leurs chances d’être testées indépendamment de leur statut de résidence. En effet, un accès restreint au traitement antirétroviral augmente le risque de maladie, de décès, d’apparition de souches résistantes et de transmission potentielle à d’autres personnes. Puisque la plupart des réfugiés ukrainiens sont des femmes et des enfants, l’idéal serait peut-être de les tester davantage au sein des hôpitaux, des centres de soins de santé primaires et des organisations communautaires. |
4. Le VIH dans le monde
4.1. |
Il existe un large consensus mondial sur le fait que nous disposons désormais des outils pour mettre fin à l’épidémie de sida. Ces vingt dernières années, de plus en plus d’études dans différents contextes ont démontré que les traitements antirétroviraux peuvent jouer un double rôle, en améliorant la santé des personnes atteintes du VIH tout en empêchant efficacement la transmission du virus (traitement par prévention) puisqu’ils sont très efficaces pour supprimer la charge virale du VIH (moins de 200 copies/ml). |
4.2. |
Au cours des dernières années, la stratégie largement mise en place consiste à prévoir, comme éléments de base pour contrôler la propagation de l’infection, un diagnostic en temps utile de l’infection par le VIH, le lancement rapide du traitement et le maintien (la continuité) des soins. En 2014, l’ONUSIDA a lancé l’objectif 90-90-90, qui implique que 90 % des personnes vivant avec le VIH soient diagnostiquées, que 90 % d’entre elles soient sous traitement et que 90 % de ces personnes sous traitement aient une charge virale indétectable. Si cet objectif est atteint, 73 % de tous les individus infectés par le VIH auront une charge virale indétectable, et ne pourront donc pas transmettre le virus. |
4.3. |
Il est avéré qu’à la fin de l’année 2020, plusieurs pays présentant des caractéristiques géographiques, un niveau de revenu et un statut épidémiologique différents avaient déjà rempli l’objectif. Selon les experts, ces résultats pourraient potentiellement indiquer la possibilité que tous les pays atteignent d’ici à 2030 une nouvelle cible plus ambitieuse, à savoir, augmenter les taux de couverture jusqu’à 95 % pour les tests, le traitement et la suppression virologique. Pour soutenir et accélérer les progrès accomplis en vue de réaliser ces objectifs de lutte contre l’épidémie de VIH, des efforts supplémentaires doivent être consentis au niveau de la conception et de la mise en œuvre de nouveaux programmes visant à étendre la sensibilisation à la séropositivité et à la couverture thérapeutique (approche de dépistage et de traitement universel), pour réduire la circulation du virus et donc sa transmission. De tels nouveaux programmes ne devraient pas se concentrer uniquement sur l’application de mesures standard, ils devraient aussi être mis en œuvre en respectant les besoins et les demandes spécifiques des personnes atteintes du VIH. |
4.4. |
Depuis peu, une approche similaire à la continuité des soins liés au VIH, la continuité de la prévention du VIH, gagne du terrain. Elle vise la population exposée au risque d’infection par le VIH afin de s’assurer que les individus ne soient pas contaminés. La continuité de la prévention du VIH se base sur le dépistage du virus, ainsi que sur l’établissement d’un lien entre les personnes qui ne sont pas infectées et les services de prévention, la rétention dans les services et l’adhésion aux services offrant des conseils continus liés à la réduction des risques et à l’utilisation constante du préservatif pour prévenir l’infection par le VIH et sa transmission. La rétention est également importante pour garantir un dépistage régulier du VIH, ainsi qu’un diagnostic rapide en cas d’infection. Les individus récemment contaminés doivent recevoir rapidement des soins et un traitement contre le VIH, et bénéficier d’autres outils tels que le test du partenaire, l’utilisation d’un préservatif, et les médicaments antirétroviraux à des fins de prévention. Au niveau de la population, plusieurs études ont montré que tant la continuité des soins et celle de la prévention constituent une approche globale pour lutter contre l’épidémie de VIH. |
4.5. |
De nouvelles stratégies innovantes sont nécessaires pour améliorer le diagnostic précoce et informer davantage de personnes au sujet de leur infection en développant des approches diversifiées et accessibles en vue d’élargir la disponibilité des moyens de dépistage du VIH tels que les tests rapides, les tests communautaires et les autotests, ainsi qu’une méthode intégrée pour dépister le VIH et les hépatites B et C. |
4.6. |
L’OMS recommande un ensemble complet de services sanitaires pour la prévention du VIH, qui mettent spécifiquement l’accent sur les populations clés. Il est particulièrement important d’intégrer les services de prévention du VIH à ceux qui concernent la santé sexuelle et génésique, la santé mentale, la prévention et les soins relatifs aux violences sexuelles et sexistes, le traitement de la toxicomanie, la prévention et les soins liés à l’hépatite C, le contrôle de la tuberculose, la santé carcérale, les maladies non transmissibles ainsi que l’aide juridique et sociale. |
4.7. |
La possibilité d’accéder de diverses manières à un test de dépistage du VIH peut permettre de diagnostiquer en temps utile différentes populations vulnérables à l’infection à ce virus. |
4.8. |
L’ONUSIDA recommande d’adopter une approche de «prévention combinée» du VIH. Étant donné qu’aucune stratégie de prévention ne suffit à elle seule à endiguer la propagation de la maladie, cette approche nécessite des interventions biomédicales, comportementales et structurelles qui sont spécialement sélectionnées et adaptées en fonction des besoins locaux exprimés par les communautés touchées. Pour être couronnées de succès, elles doivent être coordonnées, efficaces, cohérentes et inspirées par un engagement collectif à atteindre des objectifs communs. |
5. La réponse communautaire au VIH
5.1. |
Depuis toujours, l’ONUSIDA atteste et reconnaît le rôle des organisations communautaires de personnes vivant avec le VIH, de groupes marginalisés et vulnérables, de femmes et de jeunes dans la fourniture de services liés au VIH, la recherche et le développement de médicaments, les actions de plaidoyer, la responsabilité sociale et politique, la mobilisation des ressources, la protection des droits sociaux et des droits de l’homme (2). Ces trente dernières années ont démontré que les organisations communautaires de personnes atteintes du VIH et leurs pairs jouent un rôle déterminant pour maintenir l’engagement et le plaidoyer en matière d’équité dans le domaine de la santé et de financement de la santé, ainsi que pour garantir que les droits de tous les êtres humains soient reconnus et respectés. La qualité et l’intégration efficace des systèmes de soins et des soins de santé universels peuvent être conçues, mises en place et soutenues plus utilement si un rôle central est accordé aux organisations communautaires de personnes atteintes du VIH et à leurs pairs. L’influence et la participation des organisations communautaires ont directement contribué à améliorer les résultats en matière d’accès aux services de traitement, de prévention, de soutien et de soins liés au VIH dans le monde entier. |
5.2. |
Les organisations communautaires jouent un rôle essentiel dans la lutte contre le VIH, en encourageant la prise de responsabilité, en menant des actions de prévention, en organisant des activités et en contribuant à des innovations cruciales pour un progrès durable. Lorsqu’il est question d’atteindre des populations marginalisées et mal desservies, les plateformes de prestation de services gérées par les organisations communautaires sont souvent plus efficaces que leurs équivalents formels basés dans des établissements de soins, surtout dans des contextes où la stigmatisation et la discrimination sont répandues. Les organisations communautaires sont bien placées pour identifier les lacunes dans les services, les contraintes qui freinent la fourniture et l’utilisation des services, mais aussi les occasions de reconnaître ces services comme faisant partie des droits fondamentaux de l’individu et de les rendre plus centrés sur les personnes, plus pratiques et plus efficaces. |
5.3. |
Les organisations communautaires, c’est-à-dire les groupes d’associations et d’organisations non gouvernementales impliquées au quotidien dans la lutte contre le sida et la défense des droits des personnes atteintes du VIH, jouent un rôle clé pour faire entendre la voix des populations les plus vulnérables et les plus à risque, et proposent des solutions efficaces pour endiguer l’épidémie de VIH et de sida. Leur rôle est si important que, le 1er décembre 2019, l’Organisation mondiale de la santé, et plus particulièrement l’ONUSIDA, leur a dédié la Journée mondiale contre le sida, avec le slogan «Les organisations communautaires font la différence». |
5.4. |
Il convient également d’envisager un suivi constant de l’ensemble des politiques et des cadres législatifs qui ont été adoptés dans chaque État membre en matière de soins de santé, et d’analyser leur incidence, en associant des acteurs indépendants et impartiaux, notamment en vue de dégager de bonnes pratiques à partager et à proposer au niveau européen. |
5.5. |
Malgré la sensibilisation et l’objectif de «normalisation» de la séropositivité, il est conseillé de respecter la vie privée de chaque individu, que ce soit lors des contacts avec les établissements de santé permettant d’accéder aux services ou dans tous les aspects qui concernent la vie quotidienne, c’est-à-dire à l’école, au travail, etc. Dans tous les États membres, les règles doivent donc viser à protéger les droits et les libertés fondamentales de l’individu atteint du VIH, ainsi que la dignité inhérente à sa personne. |
5.6. |
Pour lutter contre la stigmatisation, la discrimination et les stéréotypes inexacts, il est essentiel de promouvoir, surtout dans les écoles, les actions de sensibilisation, de formation et d’information associant les organisations de la société civile telles que les associations et communautés locales, les jeunes et les organisations d’étudiants. |
6. La prophylaxie préexposition (PPrE) pour prévenir les infections par le VIH
6.1. |
La prophylaxie préexposition (PPrE) est une approche biomédicale de la prévention du VIH, dans le cadre de laquelle les personnes présentant un risque élevé d’être infectées par le virus prennent des médicaments antirétroviraux par voie orale. Son efficacité est bien documentée, lorsque le traitement est pris selon les indications. Il s’agit d’une composante essentielle de la «prévention combinée» nécessaire pour atteindre l’objectif de développement durable consistant à mettre fin à l’épidémie de sida d’ici à 2030. Son utilisation est recommandée par des lignes directrices nationales et internationales. Le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC) recommande aux pays de l’Union d’envisager d’intégrer la PPrE à leurs programmes existants de prévention du VIH à l’intention des populations clés et des personnes les plus exposées au risque d’infection par le virus. |
6.2. |
Différentes études ont montré que l’adoption de la PPrE est lente dans les environnements hospitaliers, et que la rétention dans les soins est perfectible. La prise en continu du traitement de PPrE a été considérée comme le moyen le plus efficace pour réduire l’incidence du VIH. Pourtant, de nombreux patients interrompent leur traitement durant la première année, et moins de la moitié d’entre eux le poursuivent. Il existe de nombreuses raisons d’arrêter la PPrE: changement du comportement sexuel durant certaines périodes de la vie, effets indésirables des médicaments, mais aussi faible perception du risque, craintes que la protection offerte par la PPrE soit insuffisante, stigmatisation, perturbation de la routine quotidienne et consommation de drogues, coût et absence de couverture par l’assurance et d’aide financière, ou encore nécessité de se rendre fréquemment chez un médecin. |
6.3. |
En Europe, la disponibilité de la PPrE est fragmentée, complexe et variable. La répartition géographique de la fourniture de la PPrE montre de grandes disparités au sein de l’Europe et de l’Asie centrale. Il convient d’identifier et de supprimer les obstacles à la prophylaxie préexposition (PPrE), car un meilleur accès aux médicaments et des progrès dans la mise en œuvre de cette technique sont nécessaires pour atteindre une population plus large, de sorte à accélérer l’évolution vers la fin de l’épidémie de sida d’ici à 2030. |
6.4. |
Les interventions préventives telles que la prophylaxie préexposition, la prophylaxie post-exposition et le traitement comme prévention pourraient avoir une incidence significative sur le contrôle du VIH et d’autres infections sexuellement transmissibles. |
7. Populations clés
7.1. |
Malgré d’excellents résultats obtenus ces dernières décennies en matière de réduction des infections par le VIH dans différentes régions du monde, et une diminution significative des décès dus au sida, toutes les mesures combinées de prévention du VIH est sont loin d’être «universellement» disponibles. Là où il n’y a pas de traitement contre le sida, le VIH continue de provoquer un nombre d’infections disproportionné et reste mortel. |
7.2. |
Le VIH se propage toujours dans des populations qui, pour différentes raisons, n’ont pas accès aux mesures préventives ou qui, une fois infectées, ne peuvent pas bénéficier du traitement antirétroviral actuellement disponible. Ces personnes plus vulnérables au VIH, qui sont notamment les toxicomanes, les travailleurs du sexe, les hommes homosexuels et les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH), les prisonniers, les migrants et leurs partenaires respectifs, sont appelées «populations clés». Elles sont caractérisées par des taux de morbidité et de mortalité plus élevés que dans la population générale ainsi que par un moins bon accès aux services de santé, et elles jouent un rôle charnière dans la propagation de l’épidémie. Toutefois, les services combinés de prévention du VIH n’ont réussi à toucher que la moitié des personnes de ces groupes, ce qui montre qu’ils restent marginalisés et laissés de côté lorsqu’il est question des dernières avancées en matière de lutte contre le sida. |
7.3. |
La vulnérabilité de ces sous-groupes de la population peut dépendre à la fois des pratiques spécifiques qui y règnent, et de la difficulté d’accéder aux services liés au VIH en raison de la pauvreté et des conditions engendrées par la marginalisation et l’isolement subis dans divers contextes sociaux et pour différentes raisons, qui peuvent être de nature culturelle, religieuse, et même juridiques. |
7.4. |
Pour pouvoir atteindre plus facilement chacune des populations clés, y compris celles qui habitent dans les zones périphériques, il faudrait étendre et renforcer le rôle des équipes de rue, notamment pour offrir des services de base tels que des tests rapides. Pour les personnes vivant dans des zones périphériques ou difficilement accessibles, les services mobiles pourront également servir de premier point de contact avant une prise en charge plus efficace et plus durable de l’individu dans des lieux plus adaptés. |
7.5. |
Dans certaines situations, les femmes sont plus désavantagées que les hommes, sont plus défavorisées sur le plan économique, ne sont pas toujours en mesure de poser des conditions aux relations sexuelles, et sont souvent victimes de violences (3). Dans d’autres, la discrimination liée à certaines pratiques, tout comme les préjugés, l’intolérance ou même les lois répressives qui criminalisent l’homosexualité, empêchent d’avoir librement accès aux services. De plus, différents facteurs qui amplifient la vulnérabilité se chevauchent très souvent. |
7.6. |
Dans le monde du travail, les personnes atteintes du VIH doivent bénéficier des mêmes possibilités d’accès à l’emploi et de développement professionnel que les autres. Elles doivent aussi pouvoir jouir d’aménagements particuliers, comme des horaires flexibles ou des congés prolongés pour se rendre à des rendez-vous médicaux, et ce avec une garantie de confidentialité. Dans certains pays, les personnes infectées par le VIH ne peuvent pas exercer certaines professions, notamment au sein de la police, des services douaniers et des centres de détention (4). Les personnes touchées par le VIH sont toujours confrontées à des difficultés et à des primes ou taux plus élevés lorsqu’elles cherchent à contracter une assurance, ou à demander un crédit hypothécaire ou un prêt, et ce même si certains États membres ont pris des mesures pour faciliter l’accès à ces services et limiter l’augmentation de ces tarifs pour les personnes souffrant de maladies graves. Le CESE plaide en faveur de conditions reflétant l’amélioration au niveau des traitements, de la santé et de l’espérance de vie. Les données statistiques anonymisées disponibles dans l’espace européen des données de santé devraient donc être utilisées pour améliorer l’accès à de tels services financiers. |
7.7. |
L’urgence épidémiologique liée à la COVID-19 a eu de profondes répercussions sur les systèmes de santé du monde entier, accentuant encore les inégalités existantes et rendant les objectifs de l’OMS plus difficilement atteignables, surtout dans les pays disposant de ressources limitées. De même, on estime que les perturbations des mesures de prévention ont provoqué une augmentation inévitable du nombre de cas de VIH, laquelle est suffisante pour neutraliser tous les progrès accomplis grâce aux efforts déployés au cours des années précédentes. |
7.8. |
En Europe, les populations clés les plus touchées par le VIH sont les toxicomanes, les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes et les migrants. La prévalence varie géographiquement, en fonction des pays concernés. Pour gérer efficacement l’épidémie de VIH, il faut que des informations ciblées et des programmes de prévention mis en œuvre sur le plan institutionnel atteignent ces groupes de population, afin que les services concernés puissent les contacter de façon proactive, en passant éventuellement par des associations non gouvernementales ancrées dans les communautés. |
7.9. |
Tous les individus bénéficient du droit inaliénable aux soins médicaux (5). Les personnes atteintes du VIH doivent donc toutes disposer d’un accès libre et garanti à des soins de santé et à des services de bien-être répondant à une norme de qualité minimale commune, et ce sans discrimination ni limitation, selon les recommandations de la classification internationale des maladies, comme c’est le cas pour toute autre affection. Le respect des principes d’égalité et d’efficacité doit faire l’objet d’un suivi et d’un contrôle minutieux. |
8. Toxicomanes
8.1. |
La toxicomanie intraveineuse a toujours été associée à la transmission du VIH, en raison de l’échange de matériel infecté utilisé pour la consommation de drogue. Toutefois, la consommation de drogues par d’autres moyens peut aussi être associée à des pratiques sexuelles dangereuses, et donc à un risque de contracter et de transmettre le VIH et d’autres infections sexuellement transmissibles. Plus particulièrement, l’utilisation de stimulants tels que la cocaïne, le crack et la méthamphétamine est souvent associée à des pratiques sexuelles à haut risque. La transmission sexuelle du VIH parmi les toxicomanes ne doit donc pas être sous-estimée. |
8.2. |
En 2018, plus de 80 % des infections par le VIH en Europe de l’Est concernaient des toxicomanes, principalement des personnes très jeunes et des femmes. Les jeunes femmes sont souvent plus touchées que les hommes, notamment en raison de la prostitution qui est étroitement liée à la consommation de drogue. Des épidémies localisées de VIH ont également été recensées dans les populations marginalisées de consommateurs de drogues par injection en Europe occidentale. |
8.3. |
Les prisonniers consomment davantage de drogues et présentent des modes de consommation plus nocifs que la population générale, notamment par voie parentérale, ce qui rend les toxicomanes incarcérés particulièrement vulnérables. |
8.4. |
Les toxicomanes ont de faibles taux d’accès au dépistage, et sont plus susceptibles de recevoir des diagnostics tardifs. Même en Italie, les toxicomanes bénéficiant d’un dépistage du VIH représentaient un faible pourcentage de l’ensemble des utilisateurs des services locaux liés à la dépendance, étant donné qu’ils étaient moins susceptibles de se voir proposer un test en l’absence de symptômes imputables au VIH. |
8.5. |
Il est indéniable que l’accès au traitement est très limité pour les toxicomanes, même si les chiffres varient d’un pays à l’autre. Globalement, on estime que seuls 8 % d’entre eux bénéficient d’un traitement antirétroviral et que, parmi les personnes qui suivent un tel traitement, seules 20 % sont des toxicomanes. Par rapport aux personnes atteintes du VIH dans la population générale, les toxicomanes sont également moins susceptibles d’obtenir une suppression virologique. En effet, le taux d’observance du traitement est plus faible chez ces personnes, qui arrêtent souvent tout simplement de le prendre. Ce comportement augmente le risque de décès à la suite du sida au sein de la population séropositive de toxicomanes. |
8.6. |
Des programmes visant à atteindre plus efficacement les toxicomanes sont nécessaires si nous voulons atteindre l’objectif consistant à garantir un accès universel aux traitements contre le VIH, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des frontières européennes. |
9. Hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH)
9.1. |
Globalement, les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes, ou HSH, sont 27 fois plus exposés au risque de contracter le VIH que la population en général (6). Certains facteurs biologiques favorisent l’infection par le VIH. La plupart des HSH contractent le VIH lors de relations sexuelles anales non protégées, qui constituent la pratique sexuelle la plus risquée en matière de contamination par le VIH. Dans ce groupe de population, le nombre élevé de partenaires sexuels et l’utilisation généralisée de substances récréatives, et notamment de drogues par voie intraveineuse (qui impliquent souvent des relations sexuelles appelées «chemsex»), peuvent également contribuer à la forte prévalence du VIH chez les HSH. |
9.2. |
La disponibilité croissante des traitements antirétroviraux, qui a globalement entraîné une diminution significative de la propagation du VIH, n’a pas eu le même effet parmi les HSH. Au contraire, la prévalence du VIH au sein de cette population a augmenté dans de nombreux pays occidentaux au cours des dernières années (7), et la proportion de cas attribuables à la transmission par des hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes a aussi connu une hausse progressive. |
9.3. |
Bien que les préservatifs aident à prévenir la transmission du VIH et d’autres infections sexuellement transmissibles, leur utilisation n’est pas si répandue, en raison de barrières culturelles et éducatives et d’obstacles en matière d’approvisionnement, qui reflètent des contextes sociaux et des services de santé différents. |
9.4. |
Plusieurs difficultés dues à la stigmatisation, à l’homophobie et à la discrimination entravent l’accès aux outils de prévention dans de multiples pays et en raison de nombreuses circonstances individuelles, ce qui complique le recours aux services de santé et à des informations correctes. Dans bon nombre de cas, des lois répressives criminalisent les personnes ayant des relations homosexuelles, les poussant à agir clandestinement et à cacher leur orientation sexuelle voire, pire encore, leur identité. Même lorsque la législation n’est pas ouvertement discriminatoire, la stigmatisation et la peur découragent les personnes d’avoir recours à des services liés au VIH, et elles ne connaissent donc pas les outils disponibles pour prévenir l’infection par ce virus. |
9.5. |
La stigmatisation a également une incidence sur l’accès au dépistage et au diagnostic. Beaucoup de HSH craignent d’être jugés par les professionnels de la santé et diffèrent les tests, ce qui donne souvent lieu à des diagnostics tardifs. Comme ils ne sont pas conscients de leur statut infectieux, ils n’ont pas accès aux traitements antirétroviraux, lesquels, en plus d’avoir des effets sur leur santé personnelle, permettraient pourtant de réduire le risque de transmission à leurs partenaires sexuels. |
9.6. |
De nombreux hommes déclarent préférer être testés en dehors des établissements de soins traditionnels. Les programmes de dépistage portés par les organisations communautaires (associations non gouvernementales) pourraient, dans différentes situations, être un bon moyen de promouvoir la prévention et de faire en sorte que les personnes les plus à risque aient accès au dépistage, là où les taux d’infection sont les plus élevés. |
9.7. |
Les communautés et les institutions doivent absolument coopérer pour que l’objectif 90-90-90 puisse également être atteint parmi la population de HSH. |
10. Migrants
10.1. |
On estime à environ 231 millions le nombre de migrants dans le monde. La migration place les personnes dans des situations d’extrême vulnérabilité à l’infection par le VIH en raison de facteurs politiques et économiques. Dans certains pays, elle a même été identifiée comme le facteur de risque le plus important pour ce virus. Les migrants sont confrontés à des obstacles quotidiens, qui compliquent l’accès aux soins de santé et aux services sociaux. En particulier, l’exclusion sociale les rend extrêmement vulnérables au VIH. |
10.2. |
Plus d’un tiers des nouveaux diagnostics de VIH au sein de l’Union concernent des migrants (8). Même si ce chiffre est en baisse, la moitié des migrants chez qui le VIH a été diagnostiqué proviennent de pays fortement endémiques, par exemple d’Afrique subsaharienne, ce qui porte à croire qu’ils auraient été infectés sur leur continent d’origine. De plus en plus d’éléments montrent qu’une part considérable des infections sont contractées après la migration, dans le pays d’accueil (9). Il convient en outre de ne pas sous-estimer la possibilité d’être infecté lors d’un retour temporaire dans le pays d’origine. |
10.3. |
Les femmes représentent une part importante des étrangers atteints par le VIH. La proportion de citoyennes de l’Union chez qui un nouveau cas de VIH a été diagnostiqué atteint 16 %, chiffre qui grimpe à 40 % parmi les étrangères, qui sont principalement des Africaines. |
10.4. |
Un rapport entièrement consacré aux migrants atteints du VIH, publié par l’ECDC en 2017, montre que les étrangers ont des difficultés à accéder aux services de prévention et au dépistage du VIH en Europe. Les principaux obstacles signalés sont la stigmatisation et la discrimination (y compris de la part de professionnels de la santé), tout particulièrement envers les personnes originaires de pays à forte prévalence d’infection. En conséquence, les étrangers atteints du VIH reçoivent leur diagnostic plus tard que les citoyens européens, quand ils présentent déjà des symptômes d’immunodéficience. Après avoir reçu leur diagnostic, les étrangers, et surtout ceux qui n’ont pas de titre de séjour légal, rencontrent des difficultés pour accéder au traitement. Quinze pays ne leur fournissent pas de traitement antirétroviral adéquat, échouant une fois de plus à tenir les engagements pris en 2004 dans la convention de Dublin en ce qui concerne la lutte contre la discrimination et les violations des droits des populations les plus faibles et les plus vulnérables, qui ont toujours été moins protégées. |
Bruxelles, le 14 juin 2023.
Le président du Comité économique et social européen
Oliver RÖPKE
(1) Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC), Operational considerations for the provision of the HIV continuum of care for refugees from Ukraine in the EU/EEA («Considérations opérationnelles pour la continuité des soins liés au VIH pour les réfugiés ukrainiens au sein de l’UE/EEE», en anglais), 5 juillet 2022, Stockholm.
(2) En 2016, les dirigeants mondiaux ont signé la déclaration politique des Nations unies visant à vaincre le sida, dans laquelle ils ont reconnu le rôle essentiel des organisations de pairs en matière de plaidoyer, de participation à la coordination de la lutte contre le sida et de fourniture de services. Ils ont en outre reconnu que les ripostes communautaires au VIH doivent être intensifiées, et se sont engagés à faire en sorte qu’au moins 30 % des services soient pilotés par les pairs d’ici à 2030.
(3) Même si l’Union européenne a signé la convention d’Istanbul en 2017, celle-ci n’a pas encore été ratifiée par certains États membres.
(4) La réglementation date souvent des prémices de l’épidémie de VIH, alors que les connaissances liées à la transmission étaient moins bonnes et qu’il n’existait pas de traitement.
(5) Comme le précisent l’article 25 de la Déclaration universelle des droits de l’homme et l’article 35 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.
(6) Si, au niveau mondial, le risque de contracter le VIH est plus élevé pour les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes, les taux d’infection varient d’une zone géographique à l’autre: les HSH représentent 50 % de l’ensemble des nouveaux cas signalés en Amérique du Nord et en Europe occidentale, 47 % de ceux qui sont signalés en Amérique latine, environ 20 % de ceux qui sont signalés en Europe orientale, en Asie, au Moyen-Orient et en Afrique du Nord et 12 % de ceux qui sont signalés en Afrique.
(7) En Europe occidentale, le nombre de personnes séropositives parmi la population de HSH a augmenté de presque 20 % entre 2010 et 2014. En Italie, la plupart des nouveaux diagnostics du VIH chez les hommes concernent des HSH.
(8) La proportion de migrants parmi les nouveaux cas de VIH diagnostiqués varie d’un pays à l’autre, allant de 70 % au Luxembourg et en Suède à 5 % dans certains pays de l’Est tels que la Pologne, la Lituanie et la Roumanie. Dans plus de dix pays, ce chiffre grimpe à plus de 50 %.
(9) Les estimations du taux d’infection par le VIH après la migration vont de 2 % pour les migrants d’Afrique subsaharienne vers la Suisse à 62 % pour les HSH noirs originaires des Caraïbes qui se rendent au Royaume-Uni.
18.8.2023 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 293/42 |
Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Suivi des mesures extraordinaires et de la résilience de l’Union européenne dans le domaine de l’énergie»
(avis exploratoire à la demande de la présidence espagnole)
(2023/C 293/07)
Rapporteur: |
Andrés BARCELÓ DELGADO |
Consultation |
Présidence espagnole du Conseil de l’UE, 8.12.2022 |
Base juridique |
Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne Avis exploratoire |
Décision de l’assemblée plénière |
13.12.2022 |
Compétence |
Section «Transports, énergie, infrastructures et société de l’information» |
Adoption en section |
16.5.2023 |
Adoption en session plénière |
14.6.2023 |
Session plénière no |
579 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
198/2/5 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
Le processus de relance après la pandémie de COVID-19 et l’agression injustifiée de l’Ukraine par la Russie ont provoqué de graves perturbations du système énergétique européen, qui ont accru les préoccupations en matière de sécurité énergétique, fait grimper les prix de l’énergie à des niveaux record et mis en évidence la dépendance excessive de l’Union européenne (UE) à l’égard du gaz, du pétrole et du charbon russes. |
1.2. |
La société européenne est profondément préoccupée par la question de savoir comment faire face à ces perturbations de manière à permettre une croissance substantielle et durable et à assurer la cohésion sociale dans l’Union. Ce défi concerne non seulement l’énergie, mais aussi la résilience de l’UE, son autonomie stratégique ouverte, sa société et la compétitivité de l’industrie européenne. |
1.3. |
Lorsque la crise énergétique a causé une flambée sans précédent des prix du gaz et de l’électricité et suscité de vives inquiétudes quant à la sécurité de l’approvisionnement énergétique, la réaction immédiate de la Commission et du Conseil a été de lancer plusieurs boîtes à outils et mesures d’urgence afin de réduire la dépendance à l’égard des combustibles fossiles russes et d’atténuer les hausses des prix de l’énergie. |
1.4. |
Les mesures extraordinaires adoptées par les institutions européennes se sont révélées efficaces pour diversifier les sources de combustibles fossiles de l’Union et s’éloigner des combustibles fossiles russes, mais moins pour faire baisser les factures énergétiques, ce qui a entraîné un fléchissement de la demande d’énergie, favorisée également par la saison hivernale douce. En outre, l’incidence des prix élevés du gaz et de l’électricité s’est principalement fait ressentir sur la demande d’énergie industrielle et les ménages à faibles revenus, qui sont plus sensibles à la volatilité des prix du marché. |
1.5. |
Dans un souci d’efficacité, il semble plus indiqué d’adopter des mesures uniformes entre les États membres de manière à garantir des conditions de concurrence équitables, sauf en ce qui concerne les aspects relatifs aux installations ou infrastructures essentielles. Les mesures prises au niveau national varient d’un pays à l’autre, ce qui permet l’adoption de politiques fiscales, réglementaires et de subventions différentes, tandis que les prix de l’énergie restent à des niveaux élevés. |
1.6. |
L’inefficacité des mesures prises pour lutter contre les prix élevés de l’énergie a pour conséquence l’érosion de la compétitivité industrielle et du revenu disponible des ménages en raison de l’impact sur les taux d’inflation, ce qui entrave sérieusement la capacité à garantir une croissance économique durable, l’emploi et la protection sociale. |
1.7. |
Dans son action politique, l’Union européenne doit renforcer sa vision à long terme pour réaliser la double transition en s’engageant à mettre tout en œuvre pour que personne ne soit laissé de côté, et dépasser la simple adoption de mesures temporaires qui visent à atténuer la flambée des prix de l’énergie à court terme. Le Comité économique et social européen (CESE) souligne qu’il importe d’accélérer le déploiement à grande échelle des sources d’énergie à émissions de CO2 nulles en simplifiant les procédures d’autorisation pour qu’il soit possible de remédier rapidement à la dépendance à l’égard des combustibles fossiles provenant de pays tiers, de respecter les engagements en matière de lutte contre le changement climatique et de renforcer la compétitivité. |
1.8. |
La transition vers une consommation d’énergie totalement décarbonée devrait s’accompagner de prix de l’énergie abordables et stables, qui permettent des investissements massifs dans la décarbonation des grandes industries, des PME et des ménages. Pour être stables et prévisibles, les systèmes de rémunération des énergies renouvelables doivent donc être axés sur des coûts de production réels à long terme et être dissociés des prix des combustibles fossiles. Cette stratégie apportera une contribution positive à l’amélioration de la résilience et de l’autonomie énergétique. |
1.9. |
Des prix abordables permettraient de remplacer autant que possible les combustibles fossiles par l’électrification et d’utiliser des gaz renouvelables dans les industries où la réduction des émissions est difficile à réaliser. |
1.10. |
L’accès aux matières premières critiques est essentiel si l’on veut s’assurer que les industries opèrent dans un environnement stable, progresser sur la voie de la décarbonation, éviter les ruptures d’approvisionnement, et protéger ainsi la chaîne d’approvisionnement. |
2. Contenu essentiel de la demande de la présidence
2.1. |
La future présidence espagnole a demandé au CESE d’élaborer un avis exploratoire sur le thème «Suivi des mesures extraordinaires et de la résilience de l’Union européenne dans le domaine de l’énergie». |
2.2. |
La demande intervient au lendemain de la pandémie de COVID-19 et dans un contexte marqué par les conséquences de l’agression russe contre l’Ukraine, laquelle a provoqué de graves perturbations du système énergétique mondial, qui ont accru les préoccupations en matière de sécurité énergétique, fait grimper les prix de l’énergie à des niveaux record et mis en évidence la dépendance excessive de l’Union européenne à l’égard du gaz, du pétrole et du charbon russes. |
2.3. |
Le coût des approvisionnements étrangers dans l’UE, notamment dans les domaines de l’énergie, des denrées alimentaires et des matières premières, y compris les matières premières critiques, a augmenté, et la société européenne est désormais préoccupée par la question de savoir comment relever ce défi de manière à permettre une croissance durable de l’économie européenne. |
2.4. |
Le champ d’application de l’avis demandé couvre les mesures adoptées pour faire face à la crise énergétique, la résilience de l’UE, son autonomie stratégique ouverte, sa société et la compétitivité de l’industrie européenne. |
2.5. |
Il est quasi certain que les évolutions récentes observées aux États-Unis auront une incidence sur le déploiement des sources d’énergie renouvelable et notamment sur leur base industrielle, mais cet aspect fera l’objet d’un avis distinct. |
2.6. |
Le concept d’autonomie stratégique est désormais plus large qu’auparavant, l’industrie, l’énergie, la technologie et le commerce ayant été ajoutés aux questions traditionnelles de sécurité et de défense. Le plan de l’UE pour la reprise et la résilience, Next Generation EU, donnera certainement une impulsion considérable au développement de l’autonomie stratégique ouverte de l’Union dans les différents domaines recensés. |
2.7. |
Par rapport à ses principaux partenaires commerciaux, l’Union européenne plaide pour un libre-échange et un commerce équitable réels, efficaces et fondés sur des règles, et elle est l’un des principaux promoteurs d’une économie ouverte, où le protectionnisme n’a pas sa place. Toutefois, la nécessité de trouver un équilibre entre une politique industrielle autonome et une ouverture au commerce constitue un défi majeur dans le contexte international actuel.
L’Union européenne doit attirer les investissements et stimuler la production industrielle, garantir l’approvisionnement en énergie et en matières premières critiques et, dans le même temps, promouvoir la transition industrielle vers une société décarbonée, en conservant la primauté technologique dans les domaines stratégiques et en préservant le marché unique, qui constitue la pierre angulaire précieuse de l’Union européenne. Tel est le meilleur moyen de garantir une société européenne plus prospère en protégeant et promouvant des emplois de qualité dans l’UE. |
2.8. |
La nécessaire double transition industrielle et sociale, écologique et numérique doit protéger le modèle européen, en veillant à ce que les citoyens demeurent la priorité: la protection des emplois et la promotion de nouveaux emplois de qualité supposent la reconversion et le perfectionnement professionnels de la main-d’œuvre, ainsi qu’un engagement fort pour que personne ne soit laissé de côté. |
2.9. |
Les alliances industrielles actuelles promues par la Commission doivent canaliser les investissements et l’innovation afin de contribuer à garantir la disponibilité des matières premières, à stimuler le recyclage et à promouvoir la technologie dans des domaines spécifiques. Dans le même temps, il faut toujours veiller à ce que les chaînes d’approvisionnement mondiales nécessaires respectent les règles et les lignes directrices de l’UE et de l’OCDE. |
2.10. |
En conclusion, dans ce nouveau scénario géopolitique, ces trois questions, à savoir celles des dépendances critiques, de l’autonomie stratégique et de la sauvegarde des chaînes d’approvisionnement en ressources stratégiques et énergétiques, se révèlent être des questions stratégiques qui définiront les relations entre les États et les blocs. L’Europe doit devenir plus autonome en ce qui concerne l’accès aux ressources énergétiques durables et aux matières premières dans le but de garantir des conditions de concurrence équitables pour l’industrie. |
2.11. |
C’est la raison pour laquelle la présidence espagnole a demandé un avis sur la résilience, l’autonomie stratégique, la société et la compétitivité de l’industrie, afin, à terme, de procéder à une relocalisation vers le marché unique, d’assurer une meilleure coordination et de mettre en place une politique industrielle mieux intégrée dans les dépendances stratégiques, créant ainsi un fondement solide pour la double transition. |
2.12. |
Toutefois, cet objectif de renforcement de l’industrie doit aller de pair avec des efforts visant à défendre un commerce international libre et équitable assorti de normes minimum en matière sociale. Il est essentiel de préserver des conditions de concurrence équitables dans l’UE en améliorant la panoplie d’outils dont celle-ci dispose pour faire face aux effets de distorsion des subventions étrangères sur le marché unique. |
2.13. |
Enfin, il convient d’assurer un suivi de la résilience énergétique et du modèle réglementaire énergétique actuel, lequel ne répond pas aux appels des consommateurs (ménages et entreprises) en faveur d’une énergie garantie, propre et abordable. |
3. Contexte
3.1. |
L’Europe connaît une crise énergétique sans précédent, caractérisée par des prix extrêmement élevés du gaz et de l’électricité et des préoccupations majeures quant à la sécurité de l’approvisionnement énergétique, qui entraînent des effets subséquents sur l’ensemble de l’économie en raison de l’importance que revêt la consommation d’énergie en tant qu’intrant essentiel pour la production de la plupart des biens et des services, et sont encore aggravés par le manque d’accès aux matières premières. L’agression russe contre l’Ukraine a exacerbé l’impact des prix de l’énergie, mettant en péril la compétitivité de l’industrie européenne et les revenus et moyens de subsistance des ménages. |
3.2. |
Face à cette situation, différentes politiques ont été mises en œuvre, tant au niveau européen qu’à l’échelon national, dans le but d’atténuer les conséquences sociales et économiques de la flambée des prix de l’énergie. En outre, la crise énergétique a suscité un débat public non seulement sur la dépendance énergétique, mais aussi sur l’autonomie stratégique. |
3.3. |
L’avis général selon lequel l’économie européenne doit accélérer la transition «verte» et «juste» vers une économie et une société totalement décarbonées afin de réduire notre dépendance énergétique extérieure est l’un des piliers des mesures adoptées en 2022. Parmi les avantages directs tirés du déploiement massif de sources d’énergie renouvelables figurent des prix de l’énergie abordables et stables, ainsi qu’un leadership dans le domaine des technologies liées aux énergies renouvelables, avec les avantages ultérieurs du maintien de la création de valeur dans l’UE, permettant ainsi une croissance économique durable et garantissant la cohésion sociale. |
3.4. |
Les prix de l’énergie ont amorcé une hausse significative au second semestre 2021, lorsque les économies de l’UE ont commencé à renouer avec leur niveau d’activité d’avant la pandémie. Toutefois, l’Union a également été touchée par les conséquences de l’agression russe contre l’Ukraine, avec ses effets indésirables sur des aspects essentiels tels que la sécurité de l’approvisionnement énergétique. Le risque découlant de cette situation s’est matérialisé sur les marchés de l’énergie à la suite de la décision de la Russie de suspendre les livraisons de gaz à plusieurs États membres de l’UE. |
3.5. |
La réponse européenne a immédiatement suivi à la fin du mois de mars 2022, lorsqu’il a été convenu de supprimer progressivement la dépendance extérieure de l’Union à l’égard des combustibles fossiles russes. Cette initiative a finalement pris fin avec l’accord intervenu au Conseil de mai 2022 visant à interdire près de 90 % de l’ensemble des importations de pétrole russe d’ici la fin de 2022. Cette mesure s’est accompagnée d’un appel à diversifier l’approvisionnement et les sources d’énergie, à accélérer le déploiement à grande échelle des énergies renouvelables et à améliorer l’efficacité énergétique et les infrastructures énergétiques, conformément au plan REPowerEU. |
3.6. |
La première mesure a été la promotion de la solidarité entre les États membres de l’UE en cas de pénurie de gaz. Les achats conjoints ont également été encouragés afin de diversifier et de sécuriser l’approvisionnement en gaz, dans le but de limiter l’impact de son prix sur les marchés du gaz et de l’électricité avec un nouveau prix de référence qui reflète mieux le passage de l’utilisation de gazoducs aux terminaux GNL. La plateforme gazière virtuelle Title Transfer Facility (TTF) communément acceptée a été considérée comme n’étant plus efficace. |
3.7. |
En outre, un mécanisme direct de réduction de la dépendance extérieure au gaz consiste à réduire la demande, ce qui influe non seulement sur la consommation de gaz conventionnel, mais aussi sur la production d’électricité à partir d’unités marginales à cycle combiné. Un accord a donc été conclu qui prévoit une réduction de 15 % de la demande de gaz. |
3.8. |
Enfin, un élément essentiel permettant de garantir l’approvisionnement en gaz a été la reconstitution des stocks de gaz dans les installations de stockage en vue de garantir l’approvisionnement énergétique tout au long de la saison hivernale. Au final, des objectifs de taux de remplissage de 80 % pour l’hiver 2022/2023 et de 90 % pour les saisons hivernales à venir ont été adoptés. |
3.9. |
Parallèlement aux mesures envisagées pour garantir l’approvisionnement en gaz, la hausse spectaculaire des prix de l’énergie a également appelé l’adoption de mesures permettant d’éviter la perte de compétitivité industrielle et celle des revenus disponibles des ménages. Le 6 octobre 2022, le Conseil a adopté trois mesures visant à lutter contre les prix élevés de l’énergie. La première concernait la demande d’électricité et prévoyait un objectif volontaire de 10 % de réduction de la demande et un objectif contraignant de 5 % de réduction de la demande aux heures de pointe jusqu’à la fin de la saison hivernale. La seconde instaurait un plafond de prix de 180 EUR/MWh pour les technologies inframarginales afin d’éviter le phénomène des bénéfices exceptionnels résultant des prix élevés du gaz, assorti de l’obligation de redistribuer aux utilisateurs finaux toute recette supplémentaire supérieure au plafond de prix de manière à alléger leurs factures d’énergie. Enfin, un prélèvement de solidarité pour le secteur des combustibles fossiles a été approuvé ciblant les entreprises ayant enregistré des bénéfices dépassant une augmentation moyenne de 20 % depuis 2018. Toutes ces mesures relatives aux factures d’énergie ont finalement été complétées par un mécanisme visant à limiter les prix du gaz TTF à 180 EUR/MWh sous certaines conditions approuvées le 19 décembre 2022, parallèlement à un plafonnement du prix du pétrole à 60 USD le baril pour le pétrole russe. |
3.10. |
Il convient de souligner qu’une certaine marge de manœuvre a généralement été laissée aux États membres pour mettre en œuvre ces règles. |
3.11. |
L’idée sous-jacente selon laquelle les mesures les plus efficaces pour réduire la dépendance énergétique extérieure sont celles liées au déploiement des énergies renouvelables est également encouragée par les efforts accomplis pour faciliter les procédures d’autorisation plus rapides pour ces énergies. De telles procédures accélérées ont dès lors été temporairement approuvées pour les actifs renouvelables. En outre, un large débat a déjà été lancé au sujet de l’organisation actuelle du marché de l’électricité et de sa capacité à fournir les incitations appropriées pour attirer les investissements tout en garantissant l’approvisionnement énergétique et le caractère abordable des prix pour les utilisateurs finaux. Enfin, ce dispositif est complété par la proposition de règlement «zéro émission nette» dans le but de renforcer l’écosystème européen de fabrication de produits issus de la technologie à zéro émission nette. |
4. Sécurité de l’approvisionnement, demande énergétique et prix de l’énergie
4.1. |
La crise énergétique ayant propulsé les prix du gaz et de l’électricité à des niveaux record, la Commission et le Conseil ont décidé de recourir aux mesures d’urgence prévues à l’article 122 et à l’article 194 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), en lançant plusieurs boîtes à outils et des mesures d’urgence qui ont eu une incidence mineure sur la volatilité des prix de l’énergie dans les États membres. En fait, l’exposition à la volatilité extrême des marchés a été entièrement absorbée par les prix de l’énergie payés par les utilisateurs finaux, étant donné que la plupart des contrats du marché couvrent généralement des périodes d’une année. |
4.2. |
Le marché du CO2 a explosé depuis 2020: le prix moyen d’un quota d’émission de l’UE était de 24,84 EUR en 2020, comparé à 80,87 EUR en 2022 et 89,23 EUR en mars 2023, avec un record mensuel moyen de 91,82 EUR en février 2022, soit un niveau très éloigné de la moyenne record de seulement 19,83 EUR observée en mars 2020, pendant le confinement lié à la COVID-19. Aucune mesure extraordinaire n’a été adoptée pour atténuer cette incidence sur les prix de l’énergie pour les utilisateurs finaux. |
4.3. |
Le CESE soutient l’initiative visant à garantir l’approvisionnement énergétique et, plus particulièrement, l’approvisionnement en gaz. Il considère dès lors comme positives à court terme les actions prioritaires mises en œuvre pour tenter de répondre de manière appropriée aux principales préoccupations relatives aux sources de gaz et à la capacité de remplacer les importations de gaz russe par des approvisionnements en GNL. |
4.4. |
Les statistiques mensuelles de l’UE relatives aux sources de gaz indiquent clairement depuis mai 2022 un remplacement significatif des approvisionnements en gaz provenant des gazoducs russes, qui sont bien en deçà des flux historiques, et une augmentation de l’approvisionnement en GNL, principalement en provenance des États-Unis. Par conséquent, les mesures prises par les agents du marché sont parfaitement alignées sur les mesures extraordinaires de l’UE visant à remplacer totalement à court terme le gaz russe par d’autres sources. |
4.5. |
Toutefois, le CESE observe également que la demande de gaz et d’électricité a considérablement diminué depuis le début de la guerre. La hausse des prix de l’énergie en Europe et les préoccupations majeures concernant la sécurité de l’approvisionnement expliquent probablement cette baisse, étant donné que la baisse de la demande coïncide avec des pics de prix extrêmement élevés au troisième trimestre. En outre, des conditions météorologiques clémentes durant la saison hivernale ont favorisé cette baisse de la demande. |
4.6. |
Il convient de souligner que la demande d’électricité est proportionnellement plus élevée au niveau des PME, tandis que la demande de gaz conventionnel sert principalement à des fins industrielles et de chauffage. Cela signifie que les effets des prix élevés du gaz et de l’électricité se sont principalement fait ressentir sur la demande d’énergie industrielle, qui est plus vulnérable à la volatilité des prix du marché. Au niveau des ménages, les clients vulnérables ont été durement touchés par l’augmentation des prix des deux vecteurs énergétiques. |
4.7. |
Le CESE en conclut que les mesures extraordinaires adoptées par l’UE se sont révélées efficaces pour diversifier les sources de gaz, mais moins pour faire baisser les factures énergétiques, ce qui a eu une incidence considérable sur la demande d’énergie. |
4.8. |
Le CESE reconnaît pleinement l’énorme défi que représente la garantie de l’approvisionnement en gaz, et qui émerge alors que la saison d’hiver 2022/2023 arrive à son terme. L’objectif d’un taux de remplissage de 90 % pour le stockage du gaz en vue des prochaines saisons hivernales est essentiel pour assurer l’approvisionnement énergétique. À l’heure actuelle, les capacités de stockage de gaz de l’UE se situent à des niveaux historiquement élevés pour le premier trimestre. En outre, l’initiative relative aux achats conjoints de gaz peut contribuer à atténuer le risque en matière d’approvisionnement. Toutefois, l’UE doit se concentrer avant tout sur la réduction à zéro de la dépendance à l’égard du gaz naturel. |
4.9. |
Le CESE estime qu’il serait plus indiqué d’adopter des mesures uniformes entre les États membres de manière à garantir des conditions de concurrence équitables, sauf en ce qui concerne les aspects relatifs aux installations ou infrastructures essentielles. Les mesures adoptées au niveau de l’Union pour lutter contre la hausse des factures énergétiques ne sont pas alignées sur celles adoptées à l’échelon national, ce qui permet l’adoption de politiques fiscales, réglementaires et de subventions différentes, tandis que les prix de l’énergie restent à des niveaux élevés. |
5. Résilience, autonomie énergétique et rôle de l’industrie
5.1. |
Les prix de l’énergie sont les principaux facteurs à l’origine des taux d’inflation observés dans l’UE. Ils érodent à la fois la compétitivité industrielle et le revenu disponible des ménages, ce qui nuit gravement à la capacité à assurer une croissance économique durable, l’emploi et le bien-être social. |
5.2. |
Une réaction rapide, impliquant la mise en œuvre de mesures extraordinaires, s’est révélée efficace au niveau européen pour atténuer les hausses des prix de l’énergie dans l’ensemble de l’économie. L’exception ibérique, qui a permis une réduction de 18 % des prix du marché de gros en 2022, constitue un bon exemple d’initiative nationale. Elle a permis à l’Espagne d’afficher actuellement l’un des taux d’inflation les plus bas. Toutefois, il a été clairement démontré que les prix de l’énergie sont responsables de la hausse de l’inflation et que les mesures temporaires n’ont pas suffi à réduire cette tendance. |
5.3. |
À cet égard, les mesures temporaires mises en place ont été entièrement consacrées à atténuer la flambée des prix de l’énergie à court terme. Cependant, la politique de l’UE a besoin d’une vision à long terme qui permettra de préparer de manière adéquate la double transition. |
5.4. |
Le CESE souligne l’importance d’accélérer le déploiement à grande échelle des sources d’énergie à émissions de CO2 nulles, une question qui doit être traitée sans délai, en facilitant les procédures d’autorisation. Dans la pratique, cela devra permettre de remédier rapidement à la dépendance à l’égard des combustibles fossiles provenant de pays tiers, de respecter les engagements en matière de lutte contre le changement climatique et de renforcer la compétitivité. |
5.5. |
Le CESE souligne que la transition vers une consommation d’énergie totalement décarbonée devrait s’accompagner de prix de l’énergie abordables, qui permettent des investissements massifs dans la décarbonation des grandes industries, des PME et des ménages. |
5.6. |
Le caractère abordable des prix ne pourra être assuré qu’en encourageant les investissements à grande échelle dans les technologies d’énergies renouvelables parvenues à maturité et la flexibilité grâce à un cadre concurrentiel. Cette stratégie apportera une contribution positive à l’amélioration de la résilience et de l’autonomie énergétique. |
5.7. |
Le CESE estime que, pour tirer pleinement parti de cette stratégie, les systèmes de rémunération des sources d’énergie renouvelables doivent être axés sur des coûts de production réels à long terme. Le fait de dissocier les prix de l’électricité des prix des combustibles fossiles est donc le principal moteur permettant d’en assurer le caractère abordable. En outre, l’élimination des obstacles aux contrats à long terme est un élément essentiel de stabilité et de prévisibilité. |
5.8. |
Dans ce nouveau paradigme, les ménages et les industries seraient mieux à même de supporter les dépenses liées à la réalisation des objectifs de transition énergétique. Ce processus consiste essentiellement à remplacer autant que possible les combustibles fossiles par l’électrification et à promouvoir l’utilisation du gaz renouvelable. |
5.9. |
Il convient de souligner que les nouvelles utilisations de l’électricité et du gaz renouvelable nécessitent l’accès à des matières premières critiques dans de nombreux processus d’importance stratégique, non seulement dans le domaine de la production et de la consommation d’énergie, mais aussi tout au long de la chaîne d’approvisionnement. Par conséquent, la priorité de la politique de l’UE doit être de s’assurer que les industries opèrent dans un environnement favorable afin d’éviter des ruptures d’approvisionnement. |
5.10. |
L’industrie joue un rôle clé principalement à deux égards: premièrement, elle doit garantir l’utilisation de matières premières critiques dans les produits de base afin de se doter des actifs nécessaires pour la production d’énergie et d’autres biens essentiels pour l’économie et, deuxièmement, en tant que l’un des principaux émetteurs de gaz à effet de serre, elle doit utiliser de l’énergie décarbonée dans ses processus internes. Dans ce contexte, elle doit toujours être guidée par le principe de primauté de l’efficacité énergétique. |
5.11. |
Enfin, la transformation de l’industrie doit satisfaire à deux exigences essentielles supplémentaires afin de réaliser les transitions écologique, numérique et juste qui ne peuvent être reportées: la première concerne la protection de la chaîne d’approvisionnement, comme cela a déjà été souligné, et la seconde consiste à faire en sorte que la main-d’œuvre soit suffisamment qualifiée pour s’adapter aux évolutions en cours, en prévoyant notamment des programmes de formation et de qualification et des garanties d’embauche, ainsi que des possibilités de reconversion et de perfectionnement. |
Bruxelles, le 14 juin 2023.
Le président du Comité économique et social européen
Oliver RÖPKE
18.8.2023 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 293/48 |
Avis du Comité économique et social européen sur le thème «L’égalité de traitement des jeunes sur le marché du travail»
(avis d’initiative)
(2023/C 293/08)
Rapporteur: |
Michael McLOUGHLIN |
Décision de l’assemblée plénière Base juridique |
20.1.2022 Article 52, paragraphe 2, du règlement intérieur |
|
Avis d’initiative |
Compétence |
Section «Emploi, affaires sociales et citoyenneté» |
Adoption en section |
31.5.2023 |
Adoption en session plénière |
15.6.2023 |
Session plénière no |
579 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
217/0/6 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
La récente directive sur le caractère adéquat des salaires minimaux dans l’Union européenne (UE) n’a pas examiné en détail la question des «salaires minimaux pour les jeunes». Cette directive ne propose pas une approche universelle, mais tient compte au contraire, en tant que cadre horizontal, des différentes traditions et différents points de départ, tout en renforçant le rôle des partenaires sociaux et des négociations collectives. Le traitement réservé aux «salaires minimaux pour les jeunes» n’est ainsi pas le même d’un État membre à l’autre, et une analyse de la situation s’impose. Le Comité économique et social européen (CESE) invite la Commission européenne, les États membres et les partenaires sociaux à examiner cette question en respectant à la fois les dispositions de la directive et l’esprit de la proposition de recommandation du Conseil relative au renforcement du dialogue social dans l’Union européenne, et encourage les États membres et les partenaires sociaux à exercer leur pouvoir discrétionnaire de manière non discriminatoire. |
1.2. |
De l’avis du CESE, l’Année européenne de la jeunesse 2022 a fourni l’occasion de se pencher sur les grandes questions qui touchent les jeunes et de lancer des initiatives politiques décisives qui profitent à ces derniers ou visent à améliorer leur condition dans la société. Il importe que les jeunes participent de manière fructueuse au marché du travail et, dès lors, leur entrée sur ce marché doit constituer une expérience positive, tandis que les mesures qui les défavorisent du seul fait de leur âge se révèlent contre-productives. À cet égard, le Comité se félicite de l’Année européenne des compétences, lancée officiellement le 9 mai 2023, qui imprime un élan politique en faveur de l’apprentissage tout au long de la vie et crée ainsi une nouvelle dynamique en vue d’atteindre les objectifs sociaux de l’Union européenne pour 2030. |
1.3. |
L’existence de règles différentes pour les jeunes en matière d’allocations de chômage et de prestations d’assistance sociale peut influer sur leur situation sur le marché du travail et sur leur capacité à exercer leurs droits à la libre circulation dans l’Union. Chaque État membre est compétent pour décider de la structure et du contenu de son système de sécurité sociale. Le CESE invite chacun d’eux à respecter le principe de non-discrimination dans le cadre de cet exercice, en particulier dans le contexte de la libre circulation. Il recommande à la Commission de collaborer étroitement avec les États membres et les partenaires sociaux afin de compiler les données et les pratiques nationales, notamment à la lumière de la nouvelle proposition de recommandation du Conseil relative au renforcement du dialogue social dans l’Union européenne, au moment d’examiner cette question plus en détail. |
1.4. |
Les stages en milieu professionnel proposés aux jeunes constituent souvent une étape décisive sur la voie de leur intégration dans le monde du travail. Ceux qui ne font l’objet d’aucune rémunération ni compensation peuvent peser de manière très négative sur le vécu des jeunes face au marché du travail. Nous prenons acte de la résolution du Parlement européen et de celle adoptée par le Comité lors de sa session plénière de décembre 2022, et invitons les autres institutions et organes de l’UE, dont la Commission, à s’intéresser davantage à cette question pour marquer concrètement leur engagement envers les jeunes à l’issue de l’Année européenne de la jeunesse. Il peut arriver que les stages de formation ayant fait l’objet d’une reconnaissance et d’un accord officiels et les périodes d’expérience professionnelle de très courte durée ne soient pas rémunérés. À l’inverse, les stages à plus long terme consistant en un travail analogue à celui effectué par les salariés devraient être rémunérés. Il ressort de l’enquête Eurobaromètre sur le sujet que la majorité des stagiaires interrogés étaient rémunérés et avaient accès à la protection sociale (1). |
1.5. |
Dans le sillage de cette manifestation et d’autres initiatives, les questions liées à la jeunesse ont récemment bénéficié de plus d’attention. Il a notamment été proposé de mettre en place une évaluation d’impact de l’UE du point de vue des jeunes, afin que toute nouvelle politique intègre une évaluation de son incidence sur la jeunesse. Cette idée, soutenue par le Forum européen de la jeunesse, a fait l’objet d’un avis (2) du CESE en 2022, dans lequel ce dernier soutient fermement cette approche de l’élaboration des politiques. |
1.6. |
La crise de la COVID-19 et la guerre en Ukraine ont considérablement ébranlé l’économie européenne, entraînant des conséquences sur les citoyens européens et en particulier les jeunes, même si les entreprises ont fait de leur mieux pour maintenir l’emploi. |
1.7. |
Les stages sont devenus une porte d’accès majeure au monde du travail pour les jeunes. Pour faciliter l’accès à l’emploi, ils devraient offrir des contenus d’apprentissage de qualité et des conditions de travail adéquates, et ils ne sauraient se substituer à un emploi régulier ni être une condition requise pour un placement professionnel. Au vu de la situation actuelle, il semblerait que l’on craigne de plus en plus, notamment chez les jeunes, que la crise sanitaire et les répercussions de la guerre en Ukraine n’entraînent une détérioration des conditions de stage. La Commission entend vérifier si le cadre de qualité pour les stages est correctement appliqué. |
2. Introduction
2.1. |
L’année 2022 a été désignée Année européenne de la jeunesse et, dans son avis relatif à cette initiative, le CESE a exprimé le souhait qu’elle se concentre sur des domaines stratégiques clés pour les jeunes, sans se limiter à des manifestations et à des opérations de publicité. Les jeunes ont fait part de sentiments et points de vue similaires, d’autant plus que cette Année européenne a été introduite de manière plutôt précipitée. Le parcours des jeunes en matière d’accès et de participation au marché du travail est clairement l’une des questions politiques essentielles pour cette génération, tant à l’échelon national qu’au niveau européen. |
2.2. |
Le monde de l’après-COVID-19 accorde une importance nouvelle à l’évolution des besoins du marché du travail, aux nouvelles formes de travail, aux nouvelles compétences, aux difficultés liées au retour sur le lieu de travail et aux éventuelles formes de travail hybride, avec toutes les possibilités et tous les risques qui y sont associés. Plus important encore, nous savons que les jeunes ont beaucoup souffert de la pandémie de COVID-19; c’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles 2022 a été désignée Année européenne de la jeunesse. La pandémie a privé les jeunes de certains jalons essentiels de leur développement personnel et social. Elle a par ailleurs eu une incidence majeure sur leur éducation et leur participation au marché du travail. |
2.3. |
L’Union européenne s’est dotée de plusieurs politiques pertinentes concernant les jeunes, qui visent à leur assurer une intégration aussi complète que possible au sein de la société et à leur permettre de bénéficier des mêmes perspectives que tous les autres groupes qui la composent. Dans la déclaration de Bratislava de 2016, les dirigeants européens ont appelé à construire un avenir économique prometteur pour tous, à préserver notre mode de vie et à offrir de meilleures perspectives aux jeunes. De même, le socle européen des droits sociaux précise en préambule que «[l]es États membres doivent souvent faire face à des défis similaires, bien que d’une ampleur diverse: inégalités criantes, chômage de longue durée et chômage des jeunes, solidarité intergénérationnelle». |
2.4. |
La stratégie de l’UE en faveur de la jeunesse constitue la principale politique consacrée aux jeunes au niveau européen. Son objectif premier est de donner aux jeunes les moyens d’agir et de renforcer leur résilience en mettant l’accent sur trois domaines d’action, articulés autour de trois mots clés: «mobiliser», «connecter» et «autonomiser». La stratégie reconnaît qu’il est essentiel pour le fonctionnement de la démocratie et pour la société dans son ensemble de donner aux jeunes des possibilités de participer à la vie démocratique. Sous l’intitulé «engager», elle vise à encourager une participation civique, économique, sociale, culturelle et politique effective des jeunes. Elle considère que la mobilité des jeunes leur offre les possibilités suivantes:
|
2.5. |
La stratégie reconnaît notamment l’importance de l’animation socio-éducative comme «catalyseur de l’autonomisation» des jeunes, affirmant qu’elle apporte des avantages uniques aux jeunes en transition vers l’âge adulte en leur offrant un environnement sûr qui leur permet de gagner en confiance et d’apprendre de façon non formelle (3). |
2.6. |
Le CESE a fait valoir que la stratégie devrait se concentrer sur l’approche intersectorielle, en adoptant une vision globale des jeunes, de leurs besoins et de leurs droits dans tous les domaines d’action, et que le coordonnateur de l’UE pour la jeunesse, nouvelle fonction créée, devrait s’attacher en premier lieu à piloter une action intersectorielle. Le Comité a aussi exprimé le souhait que la politique de l’UE en faveur de la jeunesse soit intégrée au processus du semestre européen, afin de mettre davantage l’accent sur l’obtention de résultats, en particulier dans les domaines intersectoriels (4). |
2.7. |
Le CESE a recommandé de doter la stratégie de très hautes visées pour le travail intersectoriel concernant les autres politiques connexes de l’Union, notamment en matière d’emploi, d’éducation, de santé, de migration et d’égalité. Il a en outre préconisé que la stratégie accorde davantage d’attention aux problèmes d’emploi et d’éducation dont pâtissent les jeunes, s’agissant notamment du débat sur l’avenir du travail, ainsi qu’au développement des compétences et à d’autres questions sociales telles que la santé mentale et l’égalité. |
3. Les jeunes, le marché du travail et les compétences
3.1. |
Les analyses concernant le marché du travail accordent généralement une attention particulière à la jeunesse et à ses perspectives d’emploi. Cette considération s’explique principalement par l’incidence à long terme que peuvent avoir les premières expériences auxquelles les personnes sont confrontées lorsqu’elles participent au marché du travail. Le cas du décrochage scolaire en offre une parfaite illustration. Celui-ci touche par ailleurs près de 20 % des personnes handicapées, soit un taux plus de deux fois supérieur à celui des autres jeunes âgés de 18 à 24 ans (5). Nous avons aussi constaté, au cours de la pandémie de COVID-19 et de la crise financière qui l’a précédée, que les jeunes sont plus vulnérables aux chocs et aux ralentissements économiques, qu’ils sont souvent les premiers à perdre leur emploi, qu’ils travaillent, dans les deux cas, dans des secteurs tels que les services, et qu’ils sont surreprésentés dans les emplois précaires. L’Organisation internationale du travail (OIT) a ainsi constaté que la majorité des travailleurs de plateforme étaient âgés de moins de 35 ans et que les jeunes travailleurs souffraient d’une plus grande insécurité de l’emploi. En Grèce, c’est le secteur du tourisme qui emploie la majeure partie des jeunes travailleurs, lesquels ont été sévèrement touchés par la pandémie. En Espagne, en Italie et au Portugal, on note une proportion extrêmement élevée (plus de 60 %) de contrats temporaires parmi les jeunes, qui pourraient rapidement se retrouver au chômage en cas de crise. |
3.2. |
Aujourd’hui, notre priorité doit être de redresser l’économie européenne grâce à une mise en œuvre cohérente des plans nationaux de relance (6) et à l’instauration de conditions qui permettent aux entreprises de renouer avec la croissance et de créer des emplois de qualité. Alors que les entreprises sont confrontées à une pénurie de main-d’œuvre, qu’elles ne parviennent pas à trouver des travailleurs qualifiés et qu’elles font face à de graves difficultés d’embauche, il est dans leur intérêt de tirer parti du potentiel de toute la population, y compris des jeunes. |
3.3. |
Pour la plupart des gens, mais surtout pour les jeunes, les possibilités d’emploi et l’acquisition des compétences correspondantes offrent l’une des premières sources de sécurité et de perspectives de vie. Les répercussions de la pandémie de COVID-19 et les retombées de la guerre en Ukraine touchent non seulement les citoyens, mais aussi les entreprises, en sapant leur capacité à créer de la valeur et des emplois et à assurer une transition efficace d’un emploi à l’autre. |
3.4. |
Nous remarquons que les jeunes qui ne parviennent pas à opérer la transition entre l’école ou l’université et le monde du travail risquent de rencontrer des difficultés plus tard. Si le chômage représente une épreuve pour quiconque y est confronté, cette expérience peut se révéler bien plus difficile pour les jeunes, qui ne possèdent pas nécessairement les réseaux nécessaires pour progresser sur un marché du travail en constante mutation. De même, le fait qu’une fraction disproportionnée d’un segment de la société soit privée d’emploi porte atteinte à la cohésion sociale et à nos valeurs démocratiques, et pourrait, dans des cas extrêmes, conduire à des troubles sociaux, comme certains pays en développement en ont fait l’expérience. |
3.5. |
Il importe donc de voir l’égalité de traitement des jeunes sur le marché du travail comme faisant partie intégrante d’un besoin plus large de participation civique et démocratique. Tout comme nous estimons qu’il est essentiel que les jeunes participent à la communauté et pratiquent des activités sportives en tant que citoyens actifs, un autre aspect important de la citoyenneté réside dans leur capacité à comprendre leur rôle et leur place sur le marché du travail et, de fait, à faire valoir leurs intérêts. De même, le marché du travail devrait constituer un espace de solidarité intergénérationnelle où règne un juste équilibre entre vie professionnelle et vie privée, et où les travailleurs peuvent prendre la mesure de la contribution qu’ils apportent à la société. Alors que, dans de nombreux pays, le chômage des jeunes constitue un problème structurel, certains pays comme l’Espagne accordent des aides en cas de retraite différée (jusqu’à 12 000 EUR) afin de garantir la viabilité du système de retraite. Or, comme le souligne l’avis, l’économie risque ainsi de ne pas bénéficier du gain de productivité que peuvent apporter les jeunes. Par ailleurs, il existe des professions où il est très difficile de continuer à travailler après 65 ans. |
3.6. |
Sur le plan économique, un taux élevé de chômage des jeunes, conjugué à l’absence d’approches intergénérationnelles efficaces au sein des entreprises, peut entraîner une baisse de la productivité, puisque les jeunes travailleurs sont moins nombreux à introduire de nouvelles compétences et innovations dans les processus de production. Il faut aussi tenir compte des coûts économiques que représente pour l’État l’existence d’un grand nombre de chômeurs, en raison des recettes fiscales non perçues, des versements de prestations sociales et des coûts liés aux dispositifs connexes. Selon Eurofound, en 2011, les jeunes ne travaillant pas et ne suivant pas d’études ou de formation (NEET) représentaient un coût économique de quelque 153 milliards d’EUR. Ces préoccupations ont été intégrées dans les avis du CESE sur les thèmes «Travail précaire et santé mentale» (7) et «La démocratie sur le lieu de travail» (8). Enfin, le taux de chômage des jeunes personnes handicapées âgées de 25 à 34 ans est presque deux fois supérieur à celui des personnes non handicapées (18 % contre 9,7 %) (9). |
3.7. |
Sur le plan personnel, chez les jeunes, le chômage peut entraîner une détérioration de la santé mentale et du bien-être ainsi qu’un moindre niveau de bonheur, et peut se traduire par une plus forte sollicitation des services de santé publique. En outre, le risque est plus grand de voir la société morcelée du fait des diverses formes d’exclusion sociale auxquelles les jeunes chômeurs peuvent être confrontés. Le fait d’être au chômage dans sa jeunesse augmente le risque de le rester par la suite et influe négativement sur la quantité d’argent gagnée plus tard lorsque l’on décroche un emploi, pour autant que l’on y parvienne. Les jeunes chômeurs sont également plus susceptibles de subir une déqualification ou de faire face à l’exclusion sociale dans un certain nombre de domaines. Par ailleurs, l’incidence de la COVID-19 sur la santé mentale des jeunes est amplement démontrée. |
3.8. |
Il importe aussi de remédier à la situation des jeunes travailleurs «découragés» et des jeunes qui ont beaucoup de mal à s’insérer dans le monde professionnel. Le décrochage scolaire et les changements dans la scolarité comportent des difficultés et exposent les jeunes au risque de perdre le contact avec la réalité du marché du travail. |
3.9. |
L’un des moyens d’accroître l’activité économique des jeunes est de les motiver à devenir entrepreneurs, en encourageant leur esprit d’entreprise, leur créativité et leurs approches innovantes. Les activités menées dans le cadre de l’Année européenne des compétences peuvent généraliser la formation à l’esprit d’entreprise et s’appuyer sur certains modèles de bonnes pratiques, tels que les programmes et concours destinés aux jeunes entrepreneurs. |
3.10. |
L’Union européenne a pris le problème du chômage des jeunes à bras-le-corps et sa principale réponse politique réside dans la garantie «renforcée» pour la jeunesse. À l’origine, l’objectif de la garantie pour la jeunesse était d’assurer aux jeunes de 18 à 24 ans un emploi, une expérience professionnelle, un apprentissage, une formation ou une formule associant travail et formation, dans un délai déterminé à l’issue de leurs études ou après une perte d’emploi. La Commission européenne a recommandé que la garantie pour la jeunesse soit offerte aux jeunes dans les quatre mois suivant le début de leur période de chômage. La garantie renforcée pour la jeunesse est un engagement pris par l’ensemble des États membres pour garantir que tous les jeunes âgés de moins de 30 ans se voient proposer un emploi de qualité, une formation continue, un apprentissage ou un stage. |
3.11. |
Pour assurer une transition efficace d’un emploi à l’autre, il nous faut progresser dans la réforme de l’éducation, en remédiant à l’inadéquation des compétences et en mettant l’accent sur l’apprentissage tout au long de la vie, l’éducation des adultes ainsi que la reconversion et le perfectionnement professionnels. Le CESE note les progrès accomplis par la Commission en vue de créer un espace européen de l’éducation, de promouvoir le cadre pour la coopération européenne en matière d’enseignement et de formation professionnels (EFP), et de poursuivre la mise en œuvre du plan d’action en matière d’éducation numérique. |
3.12. |
Le CESE prend aussi acte de la nouvelle initiative de la Commission sur les comptes de formation individuels (CFI), notamment en ce qui concerne les microcrédits et le nouveau train de mesures relatif aux universités. On observe une nouvelle dynamique qui vise à doter les jeunes des compétences adéquates et à soutenir la mobilité des jeunes étudiants, apprentis et entrepreneurs. |
4. L’incidence de la COVID-19
4.1. |
D’après Eurostat, les jeunes ont été plus durement touchés par la pandémie de COVID-19 que les personnes plus âgées. Au troisième trimestre de 2020, dans l’Union, le taux d’emploi des jeunes (de 15 à 29 ans) avait chuté de 2,8 points de pourcentage par rapport à la même période en 2019, soit avant la pandémie. Toutefois, on a assisté à une reprise au troisième trimestre de 2021, au cours duquel la baisse du taux d’emploi était de 0,1 point de pourcentage par rapport au troisième trimestre de 2019. Si l’on compare le troisième trimestre de 2020 avec le même trimestre en 2019, tous les pays ont enregistré un recul du taux d’emploi des jeunes. |
4.2. |
Eurostat a par ailleurs constaté que ces tendances présentaient des variations au sein de l’Union. Au troisième trimestre de 2021, la plupart des États membres (16 sur 27) n’affichaient pas encore une reprise complète, le taux d’emploi des jeunes restant inférieur à celui du troisième trimestre de 2019. Les plus fortes baisses étaient enregistrées au Portugal, en Bulgarie, en Lettonie, en Tchéquie et en Pologne, avec, dans tous ces pays, un recul d’au moins 3 points de pourcentage au troisième trimestre de 2021 par rapport à la même période en 2019. À l’inverse, l’Irlande, la France et la Slovénie ont enregistré la plus forte progression du taux de personnes actives parmi les 15-29 ans par rapport à la situation prépandémique, avec, dans tous ces pays, une augmentation d’au moins 2 points de pourcentage au troisième trimestre de 2021 par rapport au même trimestre en 2019. |
4.3. |
Eurofound a précisé qu’en dépit des efforts stratégiques déployés par l’Union et les États membres pour soutenir la jeunesse à l’issue de la crise financière de 2008, les jeunes ont aussi été les plus durement touchés par les pertes d’emplois pendant la pandémie de COVID-19. Ils étaient en effet surreprésentés dans les secteurs les plus touchés par les restrictions liées à la pandémie, et les plus susceptibles de travailler à temps partiel ou sous contrat temporaire. Ainsi, 12 % des 18-29 ans ayant répondu à au moins deux cycles de l’enquête en ligne «Vivre, travailler et COVID-19» indiquaient avoir perdu leur emploi, alors que 12 % des étudiants étaient eux aussi confrontés au chômage. Des répercussions du même ordre ont été signalées en matière d’épargne, de santé mentale et de pauvreté. |
4.4. |
Selon une enquête de l’INSEE (10), le premier confinement lié à l’épidémie de COVID-19 au printemps 2020 a provoqué un recul historique de l’activité: 73 % des entreprises déclarent une baisse de leurs ventes supérieure à 10 %, et 35 % une baisse supérieure à 50 % durant cette période. Un tiers des entreprises ont fermé pour une durée moyenne de 57 jours, le plus souvent à la suite de restrictions administratives d’accueil du public (65 %), mais aussi pour des questions d’approvisionnement (8 %) ou de débouchés (7 %). Cette suspension d’activité a touché en priorité les activités les plus étroitement en contact avec le public: la restauration, l’hébergement, les services à la personne, les activités culturelles et récréatives, et les transports aériens. En septembre 2020, 1 % des entreprises étaient encore fermées. |
4.5. |
Pour faire face à la chute brutale de l’activité, plus de quatre entreprises sur cinq ont fait appel aux aides mises en place par les pouvoirs publics: chômage partiel (70 % des entreprises), report des échéances sociales (53 %), prêt garanti par l’État (41 %). Le recours à ces mesures a été particulièrement fréquent dans la restauration (97 %), le commerce et la réparation automobiles (96 %) ou l’hébergement (95 %). |
4.6. |
Une autre vague de la pandémie a été enregistrée en 2021 et, en février 2022, l’économie européenne a été frappée par le conflit militaire en Ukraine, qui s’est accompagné d’une hausse des prix de l’énergie, d’un accès limité aux matières premières et de perturbations dans la chaîne d’approvisionnement, ainsi que d’une forte inflation. |
4.7. |
En dépit de ces circonstances, les entreprises opérant sur le marché unique européen ont fait de leur mieux pour maintenir les emplois et en créer de nouveaux. |
4.8. |
Pour ce qui est de l’éducation, le Forum européen de la jeunesse a souligné que la qualité de l’enseignement à distance avait été inégale pendant la pandémie, près d’un jeune étudiant sur dix n’ayant bénéficié d’aucun cours, enseignement, ni test. Quelque deux tiers des étudiants estimaient apprendre «un peu moins» ou «beaucoup moins». Les trois quarts des jeunes marginalisés considéraient avoir appris «un peu moins» ou «beaucoup moins». Néanmoins, la situation a pu être sensiblement différente d’un individu à l’autre. L’incertitude en matière d’éducation et les enjeux liés à l’apprentissage en ligne ont alimenté le stress et les problèmes de bien-être chez les jeunes. Les bouleversements en matière d’éducation risquent d’avoir des effets négatifs à long terme sur l’emploi, les résultats scolaires, la santé et le bien-être, bien que l’ampleur de ces répercussions reste à déterminer. Il se peut néanmoins que cette situation entraîne aussi des effets secondaires positifs, ouvrant la voie à un système éducatif combiné utilisant différentes formes d’apprentissage et des outils technologiques accessibles à tous les jeunes, y compris les jeunes handicapés ou ceux vivant dans des régions reculées. |
4.9. |
Toutefois, certaines des conséquences les plus dramatiques de la pandémie de COVID-19 ont porté sur la santé mentale des jeunes. Les symptômes dépressifs, tels que l’anxiété, l’épuisement, l’isolement et les pensées suicidaires, sont en augmentation. Les inquiétudes quant à l’avenir constituent une source de préoccupations. Des recherches menées en Autriche montrent que la plupart de ces jeunes n’ont bénéficié d’aucune aide, parce qu’ils ignoraient l’existence de ces possibilités, mais aussi en raison d’inégalités régionales et économiques. En Espagne, le suicide est devenu la première cause de décès parmi la tranche d’âge la plus jeune. La pandémie a révélé une souffrance psychologique, puisque 3 941 suicides ont été enregistrés en 2020, dont 300 concernaient des jeunes de 14 à 29 ans. Les systèmes de santé publique ne disposent pas des ressources nécessaires pour aider les jeunes confrontés à des problèmes de santé mentale. En Irlande, les derniers chiffres d’une étude longitudinale portant sur les jeunes et les enfants ont montré que les cas de dépression et de maladie mentale avaient effectivement doublé chez les jeunes. |
4.10. |
Par ailleurs, il est évident que sur le marché du travail, les jeunes présentant un handicap, qu’il soit physique ou intellectuel, ne devraient pas être discriminés sur la base de leur âge, en plus de leur handicap ou indépendamment de celui-ci. De même, il convient d’accorder une attention particulière aux jeunes issus de zones rurales reculées et à ceux qui subissent une discrimination fondée sur le sexe. |
4.11. |
Les données statistiques sur l’emploi des jeunes personnes handicapées sont également fragmentaires: les indicateurs quantitatifs tels que le taux de chômage devraient être complétés par d’autres informations, telles que le niveau de formation, la nature des contrats proposés (à durée déterminée, à durée indéterminée ou temporaires), le taux d’emploi dans un environnement de travail ordinaire, le taux d’emploi assisté ou celui de chômage de longue durée, combinées à des données sur la situation sociale et financière de ces jeunes. |
5. L’égalité de traitement des jeunes sur le marché du travail
5.1. |
L’égalité constitue l’un des principes et droits fondamentaux de l’Union européenne, fondé sur le traité de l’UE et la charte des droits fondamentaux de l’UE, et étayé par le droit dérivé de l’Union. Un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail est établi par la directive 2000/78/CE du Conseil (11), dont la pertinence n’est pas remise en cause. |
5.2. |
Il apparaît ainsi que l’avenir de la jeunesse constitue une préoccupation majeure de l’Union et que les perspectives des jeunes sur le marché du travail occupent une place très importante dans leur développement. L’Union dispose d’un éventail de stratégies et d’instruments qui ciblent les jeunes et leur position sur le marché du travail. Conformément au TFUE et au principe de subsidiarité, les États membres ont compétence sur bon nombre de ces questions et leurs politiques figurent donc au cœur du présent rapport. |
5.3. |
Les jeunes ont souffert davantage que d’autres groupes pendant la pandémie, et ce, à divers égards. Étant donné l’importance accordée à cette question, il serait donc opportun d’examiner les aspects particuliers de la politique du marché du travail et de s’appuyer sur cette analyse pour déterminer si les jeunes sont, d’une quelconque manière, défavorisés du seul fait de leur âge. Ce thème peut être très vaste et il importe donc de préciser l’objet du présent avis. L’accent est mis ici sur les cas les plus manifestes et les plus directs de dispositions législatives ou politiques qui défavorisent les jeunes du seul fait de leur âge. Bien entendu, ce rapport se concentre sur les domaines pour lesquels nous disposons de plus de données et de clarté. Il s’agit des points suivants: les salaires minimaux, les règles en matière de sécurité sociale et d’assistance sociale et, dans une moindre mesure (au vu des travaux existants), les stages non rémunérés. |
6. Salaires minimaux
6.1. |
Conformément au TFUE (12) et au principe de subsidiarité, les salaires minimaux relèvent de la compétence des États membres, mais l’Union européenne peut adopter des mesures, et notamment des directives, destinées à encourager la coopération entre États membres. En préparant la directive (UE) 2022/2041 du Parlement européen et du Conseil (13) relative à des salaires minimaux adéquats dans l’Union européenne, à présent adoptée, la Commission a relevé que les salaires minimaux n’étaient pas réellement adéquats et/ou que la protection offerte par les salaires minimaux présentait une couverture lacunaire dans la majorité des États membres, même si tous prévoient une telle protection par l’intermédiaire de dispositions législatives («salaires minimaux légaux») ou de conventions collectives. La proposition procède du socle européen des droits sociaux. |
6.2. |
La directive vise à faire en sorte que les travailleurs de l’Union soient protégés par des salaires minimaux adéquats leur permettant de vivre dignement, quel que soit l’endroit où ils travaillent. Pour parvenir à ce résultat général, la proposition établit un cadre visant à rendre les salaires minimaux plus adéquats et à améliorer l’accès des travailleurs à la protection qu’ils offrent. Ces objectifs sont pertinents tant pour les systèmes de salaire minimal légal que pour ceux qui font appel aux négociations collectives. La directive est conçue de manière à atteindre ces objectifs tout en prenant en considération et en respectant pleinement les spécificités des systèmes nationaux, les compétences nationales, l’autonomie des partenaires sociaux et la liberté contractuelle. |
6.3. |
Le salaire minimal fait partie des domaines où l’on note, parmi les États membres de l’Union, des inégalités de traitement considérables à l’égard de la jeunesse. Les jeunes sont particulièrement tributaires des salaires minimaux, puisque d’après le Forum européen de la jeunesse, plus d’un jeune sur quatre perçoit un salaire minimal, contre un adulte sur dix. Un certain nombre d’États membres ont instauré spécifiquement des «salaires minimaux pour les jeunes», qui sont systématiquement inférieurs au salaire minimal général applicable à d’autres tranches d’âge, tandis que dans d’autres États membres, les moins de 18 ans ont été exclus du champ d’application de la législation sur les salaires minimaux. C’est le cas en Belgique, en France, en Irlande, au Luxembourg, en Allemagne, à Malte et aux Pays-Bas. Si les dispositions appliquées en France ne sont pas strictement liées à l’âge, elles ont néanmoins des implications pour de nombreux jeunes. La rémunération de l’apprentissage fait aussi l’objet de taux réduits, mais ceux-ci ne font pas l’objet du présent rapport et sont généralement fixés d’un commun accord entre les partenaires sociaux. Le Royaume-Uni autorise, lui aussi, des salaires inférieurs au minimum légal pour les jeunes. L’annexe fournit de plus amples détails à ce sujet. |
6.4. |
Ces salaires minimaux pour les jeunes bafouent le droit de ces derniers à un salaire égal pour un travail égal, alors que les recherches de l’OIT ont montré à plusieurs reprises l’inefficacité de telles mesures pour stimuler le taux d’emploi des jeunes. Le principe d’une rémunération identique pour un même travail reste au cœur du problème. En effet, des organisations de jeunesse ont été informées par des jeunes qu’après avoir travaillé un certain temps, ceux-ci pouvaient être amenés, malgré une rémunération inférieure, à superviser ou à former des collègues plus âgés occupant le même poste, voire qu’ils pouvaient être invités à assumer des fonctions de supervision pour un salaire inférieur à celui de leurs collègues du fait même de ces réglementations. |
6.5. |
Aussi, bien que les jeunes soient autorisés dans ces États membres à conduire, à voter et à s’engager dans l’armée, bien qu’ils y soient considérés comme des adultes à tous les autres égards, ils n’ont pas le droit de percevoir l’intégralité du salaire minimal accordé aux adultes. Aux Pays-Bas, pour la tranche d’âge la plus jeune, le salaire minimal ne dépasse pas 30 % de celui des adultes, ce qui entrave lourdement leur capacité à vivre en toute indépendance et à jouir d’un niveau de vie décent. Alors même que l’Union a fait de 2022 l’Année européenne de la jeunesse, la position politique convenue dans le cadre du processus législatif présenté n’a pas pris en compte de manière significative le traitement différencié réservé aux jeunes. |
6.6. |
L’OIT a récemment mené une méta-analyse relative à l’incidence des salaires minimaux pour les jeunes, passant en revue 43 publications scientifiques parues depuis 1990. Cette étude a révélé que, dans l’écrasante majorité des cas, les salaires minimaux ont un effet très faible, voire nul, sur l’emploi des jeunes. Dans certains cas, le relèvement du taux de salaire minimal pour les jeunes a même stimulé le taux d’emploi de ces derniers. Dans son analyse d’impact accompagnant la directive, la Commission européenne cite les résultats d’études menées au Portugal, en Belgique et aux Pays-Bas qui concluent que les salaires minimaux pour les jeunes n’ont pas d’effets significatifs sur le taux d’emploi de ces derniers. |
7. Allocations de chômage
7.1. |
Les périodes de chômage comptent parmi les autres domaines dans lesquels les jeunes peuvent faire l’objet d’un traitement différencié. Là encore, cette question relève essentiellement de la compétence des États membres, notamment pour ce qui est des critères applicables, ainsi que des taux et échéances de paiement. Au sein de l’Union, les systèmes nationaux présentent une diversité et une complexité considérables. Cependant, dans certains cas, il se peut que ces disparités influent sur des enjeux tels que l’emploi et la libre circulation au sein de l’Union. Les jeunes risquent aussi d’être désavantagés par les systèmes d’allocations de chômage, faute d’avoir cotisé assez longtemps pour en bénéficier. |
7.2. |
Au-delà de ces régimes, les États membres fournissent des prestations d’assistance sociale qui présentent des divergences considérables, puisque les régimes d’assistance sociale relèvent eux aussi de la compétence nationale. Ainsi, certaines sont subordonnées à des conditions de ressources, d’autres non. Par ailleurs, le tableau est assez complexe pour ce qui est de l’âge, et ni ces aides, ni le présent rapport ne suffisent à faire le tour de la question. On note inévitablement des divergences concernant certains facteurs, notamment la période d’acquisition et la durée de cotisation. Nous avons absolument besoin de meilleures données et de plus de clarté pour approfondir cette analyse. Cependant, nous pouvons déjà dresser quelques rapides constats, repris ci-dessous:
|
8. Stages non rémunérés
8.1. |
Le Parlement européen a appelé à interdire cette pratique. Le Comité européen des droits sociaux, organe du Conseil de l’Europe, a quant à lui estimé que les lacunes de la législation belge permettaient d’exploiter les jeunes comme de la main-d’œuvre gratuite dans le cadre de stages non rémunérés. Dans sa décision, qui fait suite à une réclamation collective déposée par le Forum européen de la jeunesse, il a constaté que les systèmes d’inspection du travail en place en Belgique ne protégeaient pas suffisamment les jeunes travailleurs vulnérables et défavorisés.
Le cadre réglementaire en général et la rigueur des normes applicables en particulier varient fortement d’un type de stage à l’autre et d’un État membre à l’autre. Dans certains pays de l’Union, la notion de stage n’est pas définie juridiquement. |
8.2. |
La recommandation du Conseil relative à un cadre de qualité pour les stages, adoptée en 2013, vise à garantir que les stages facilitent efficacement le passage du système éducatif au monde du travail et contribuent ainsi à une plus grande employabilité des jeunes. Elle trace des lignes directrices susceptibles de garantir un contenu d’apprentissage de haute qualité et des conditions de travail correctes. |
8.3. |
Les stages non rémunérés peuvent être définis comme des périodes de travail, similaires à celles effectuées par des employés rémunérés, qui ne sont pas liées à un processus formel et explicite d’éducation, de formation, de volontariat ou de placement. |
8.4. |
Si les jeunes qui se lancent sur le marché du travail ont absolument besoin d’acquérir une expérience professionnelle et d’apprendre à travers leurs expériences, les acteurs qui appellent à agir contre les stages non rémunérés estiment que trop de jeunes se retrouvent pris dans un cercle vicieux de stages non rémunérés et d’expériences professionnelles médiocres, source de profondes désillusions vis-à-vis du marché du travail au sein de cette tranche d’âge. |
8.5. |
Le Forum européen de la jeunesse a passé en revue une série de pays et leurs politiques en matière de stages non rémunérés. En France, les stages sont strictement réglementés et ne peuvent avoir lieu que dans le cadre de cursus d’enseignement formel. Si leur durée est inférieure ou égale à deux mois, les stages réalisés dans le cadre d’une formation peuvent être non rémunérés. En Roumanie, les stages sont rigoureusement encadrés par une législation spécifique et les stagiaires perçoivent 50 % du salaire minimal. Les stages non rémunérés sont illégaux sur le marché du travail ouvert, bien que la réglementation soit souvent contournée. |
8.6. |
En Croatie, les stages ne sont pas courants sur le marché du travail ouvert, et il n’existe pas non plus de définition ni de réglementation en la matière, mais il existe d’autres formes de stages qui sont réglementées. En Bulgarie, il est fréquent et tout à fait légal de proposer des stages non rémunérés hors du cadre de la législation consacrée aux stages. En revanche, pour les stages effectués sur le marché du travail ouvert et qui relèvent de cette législation, les stagiaires perçoivent au moins le salaire minimal national. |
8.7. |
En Autriche, les stages sur le marché du travail ouvert sont théoriquement rémunérés sur la base de conventions collectives sectorielles. Néanmoins, il est légal de ne pas rémunérer ces stages s’ils s’inscrivent dans le cadre d’une relation de formation, ce qui est souvent le cas. Bien que le travail non rémunéré soit illégal en Irlande, il arrive souvent que cette règle ne soit pas appliquée en matière de stages: les stages non rémunérés constituent une pratique courante et sont généralement proposés publiquement. |
Bruxelles, le 15 juin 2023.
Le président du Comité économique et social européen
Oliver RÖPKE
(1) Récente enquête Eurobaromètre sur le thème «Integration of young people into the labour market with particular focus on traineeships» (Intégration des jeunes sur le marché du travail, notamment en lien avec les stages), avril 2023 (europa.eu).
(2) Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Évaluation d’impact de l’UE du point de vue des jeunes» (avis d’initiative) (JO C 486 du 21.12.2022, p. 46).
(3) Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative à une Année européenne de la jeunesse 2022 [COM(2021) 634 final — 2021/0328(COD)] (JO C 152 du 6.4.2022, p. 122).
(4) Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative à une Année européenne de la jeunesse 2022 [COM(2021) 634 final — 2021/0328(COD)] (JO C 152 du 6.4.2022, p. 122).
(5) https://www.disability-europe.net/downloads/1046-ede-task-2-1-statistical-indicators-tables-eu-silc-2018
(6) Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Comment garantir un travail décent aux jeunes et veiller à l’inclusion des jeunes ne travaillant pas et ne suivant pas d’études ou de formation (NEET) grâce à l’élaboration de plans nationaux de relance adéquats» (avis d’initiative) (JO C 152 du 6.4.2022, p. 27), NEET et plans nationaux pour la reprise et la résilience (PNRR).
(7) Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Travail précaire et santé mentale» (avis exploratoire à la demande de la présidence espagnole) (JO C 228 du 29.6.2023, p. 28).
(8) Avis du Comité économique et social européen sur le thème «La démocratie sur le lieu de travail» (avis exploratoire à la demande de la présidence espagnole) (JO C 228 du 29.6.2023, p. 43).
(9) https://www.disability-europe.net/downloads/1046-ede-task-2-1-statistical-indicators-tables-eu-silc-2018
(10) Institut national de la statistique et des études économiques (2020), «L’impact de la crise sanitaire sur l’organisation et l’activité des entreprises», https://www.insee.fr/fr/statistiques/4994488
(11) Directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail (JO L 303 du 2.12.2000, p. 16).
(12) TFUE, article 153, paragraphe 2, points a) et b).
(13) Directive (UE) 2022/2041 du Parlement européen et du Conseil du 19 octobre 2022 relative à des salaires minimaux adéquats dans l’Union européenne (JO L 275 du 25.10.2022, p. 33).
ANNEXE (1)
Tableau
Taux inférieurs au minimum pour certains États membres de l’UE et pour le Royaume-Uni, en janvier 2021
Pays |
Catégorie de travailleurs |
Pourcentage du taux plein |
Salaire minimum en 2021 (en EUR, sauf indication contraire) |
||||
Belgique |
Travailleurs de 16 ans ou moins (sans contrat étudiant) |
70 |
1 138 /mois |
||||
Travailleurs de 17 ans (sans contrat étudiant) |
76 |
1 236 /mois |
|||||
Travailleurs de 18 ans (avec contrat étudiant) |
82 |
1 333 /mois |
|||||
Travailleurs de 19 ans (avec contrat étudiant) |
88 |
1 431 /mois |
|||||
Travailleurs de 20 ans (avec contrat étudiant) |
94 |
1 528 /mois |
|||||
France |
Travailleurs de 15 et 16 ans avec moins de 6 mois d’expérience dans le secteur; travailleurs de moins de 16 ans travaillant pendant les vacances d’été |
80 |
1 244 /mois |
||||
Travailleurs de 17 ans avec moins de 6 mois d’expérience dans le secteur |
90 |
1 399 /mois |
|||||
Jeunes sous contrat de professionnalisation (2); selon l’âge et les qualifications antérieures |
55 à 100 |
855 à 1 555 /mois |
|||||
Apprentis; selon l’âge, l’ancienneté et la convention sectorielle applicable |
27 à 78 |
420 à 1 213 /mois |
|||||
Stagiaires (3) |
Sans objet |
3,70 /heure |
|||||
Travailleurs handicapés employés dans des centres spécialisés dans l’insertion de ces travailleurs |
55 à 100 |
855 à 1 555 /mois |
|||||
Allemagne |
Salaire minimum non applicable aux moins de 18 ans |
Sans objet |
550/mois |
||||
Irlande |
Travailleurs de moins de 18 ans |
70 |
7,14 /heure |
||||
Travailleurs de 18 ans |
80 |
8,16 /heure |
|||||
Travailleurs de 19 ans |
90 |
9,18 /heure |
|||||
Lettonie |
Personnes condamnées (purgeant une peine de prison) |
50 |
250/mois |
||||
Luxembourg |
Travailleurs de 15 et 16 ans |
75 |
1 651 /mois; 9,55 /heure |
||||
Travailleurs de 17 ans |
80 |
1 762 /mois; 10,18 /heure |
|||||
Travailleurs non qualifiés de 18 ans et plus |
100 |
2 202 /mois; 12,73 /heure |
|||||
Malte |
Travailleurs de moins de 17 ans |
95 |
171/semaine |
||||
Travailleurs de 17 ans |
96 |
174/semaine |
|||||
Pays-Bas |
Travailleurs de 15 ans |
30 |
505/mois |
||||
Travailleurs de 16 ans |
34,5 |
581/mois |
|||||
Travailleurs de 17 ans |
39,5 |
666/mois |
|||||
Travailleurs de 18 ans |
50 |
842/mois |
|||||
Travailleurs de 19 ans |
60 |
1 011 /mois |
|||||
Travailleurs de 20 ans |
80 |
1 348 /mois |
|||||
Travailleurs de 21 ans |
100 |
1 685 /mois |
|||||
Portugal |
Travailleurs en apprentissage et en stage |
80 |
621/mois |
||||
Travailleurs handicapés |
50 |
388/mois |
|||||
Royaume-Uni |
Travailleurs de moins de 18 ans |
47,6 |
4,15 GBP (4,62 EUR)/heure |
||||
Travailleurs de 18 à 20 ans |
52,2 |
4,55 GBP (5,06 EUR)/heure |
|||||
Travailleurs de 21 à 24 ans |
74 |
6,45 GBP (7,17 EUR)/heure |
|||||
Apprentis de moins de 19 ans, ou apprentis de 19 ans et plus en 1re année d’apprentissage |
94 |
8,20 GBP (9,12 EUR)/heure |
|||||
|
(1) Version modifiée du tableau 2 du rapport Eurofound (2021), Salaires minimaux en 2021: examen annuel. Rapport complet en anglais: https://www.eurofound.europa.eu/sites/default/files/ef_publication/field_ef_document/ef21015en.pdf
(2) En France, ces contrats permettent aux jeunes salariés d’acquérir une qualification professionnelle et favorisent leur insertion ou réinsertion professionnelle.
(3) Éventuellement non rémunéré, si la durée est inférieure à deux mois.
18.8.2023 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 293/58 |
Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Protocole sur le progrès social»
(avis exploratoire à la demande de la présidence espagnole)
(2023/C 293/09)
Rapporteure: |
María del Carmen BARRERA CHAMORRO |
Corapporteur: |
Diego DUTTO |
Saisine du Comité par la présidence espagnole du Conseil |
Lettre, 8.12.2022 |
Base juridique |
Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne |
|
Avis exploratoire |
Compétence |
Section «Emploi, affaires sociales et citoyenneté» |
Adoption en section |
31.5.2023 |
Adoption en session plénière |
15.6.2023 |
Session plénière no |
579 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
134/100/7 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
Le Comité économique et social européen (CESE) rappelle qu’en vertu des traités, la réalisation de l’«économie sociale de marché hautement compétitive» qui est visée à l’article 3, paragraphe 3, du traité sur l’Union européenne (TUE) passe par la promotion du marché intérieur et de la politique sociale en vertu de la «clause sociale horizontale», au titre de l’article 9 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), selon lequel l’Union doit, dans la définition et la mise en œuvre de toutes ses politiques et actions, chercher à promouvoir des marchés du travail inclusifs ainsi que des systèmes de protection sociale adéquats. |
1.2. |
Le CESE souscrit à la proposition avancée dans le rapport final sur la conférence sur l’avenir de l’Europe, publié en mai 2022, qui consiste, pour développer cette économie sociale de marché (1), à adresser une demande à l’Union, aux États membres et aux partenaires sociaux afin qu’ils prennent, entre autres, des mesures pour garantir la mise en œuvre intégrale du socle européen des droits sociaux adopté en novembre 2017 et du plan d’action de mars 2021 qui s’y rapporte, ainsi que, surtout, des objectifs qui sont les plus importants au regard du programme à l’horizon 2030, au niveau européen, national et régional, en incluant dans les traités un protocole sur le progrès social. |
1.3. |
Le CESE se réjouit que la conférence sur l’avenir de l’Europe ait préconisé une amélioration, sous la forme d’un protocole sur le progrès social, des garanties visant à protéger efficacement les droits sociaux lorsqu’ils entrent en conflit avec les libertés économiques (voir mesure 5, proposition 13), évitant ainsi toute régression desdits droits (mesure 2, proposition 14). |
1.4. |
Le CESE accueille favorablement la proposition de la Commission européenne d’ouvrir la voie à une éventuelle révision des traités, comme elle l’a évoqué dans le dernier discours sur l’état de l’Union, et juge opportun, ainsi que le propose le Parlement européen, d’inclure, parmi les questions qui feront l’objet de cette réforme, un protocole sur le progrès social. Le CESE estime que les conclusions de la conférence sur l’avenir de l’Europe offrent une feuille de route appropriée pour mener à bien cette réforme. |
1.5. |
Le protocole sur le progrès social servirait un triple objectif:
|
1.6. |
Le CESE voit dans la présidence espagnole de l’Union une formidable occasion de promouvoir cette proposition, et il invite les institutions de l’Union, dans le cadre du dialogue social européen, à faire avancer ce processus. |
1.7. |
À cette fin, le CESE encourage la présidence espagnole à solliciter, à l’issue d’une analyse en bonne et due forme par des experts de haut niveau et notamment par les partenaires sociaux, la tenue d’un Conseil des ministres des affaires sociales dans le but de convenir d’une proposition commune qui, le cas échéant, puisse être adoptée à l’occasion d’un sommet européen qui lui serait spécialement consacré. L’importance que revêt cette question appelle la plus grande implication des différentes institutions de l’Union, toutes compétences confondues. |
1.8. |
Le CESE estime que la proposition de la conférence sur l’avenir de l’Europe et du Parlement européen devrait être concrétisée sous la forme d’un protocole à insérer dans le TFUE ou d’une clause transversale moyennant la modification de l’article 9 du TFUE, mais qu’il n’en existe pas moins d’autres instruments politiques susceptibles de contribuer aux objectifs du protocole sur le progrès social. En outre, le CESE considère qu’un protocole sur le progrès social est essentiel pour renforcer l’autonomie des partenaires sociaux et pérenniser le lien indissociable qui doit exister entre le fonctionnement du marché intérieur et ses libertés économiques, y compris pour ce qui concerne une concurrence équitable entre les États membres ainsi que le respect et la promotion des droits sociaux collectifs. |
1.9. |
Le CESE est convaincu qu’en adoptant un protocole sur le progrès social, l’Union pourra devenir un moteur de croissance économique et favoriser ainsi le bien-être du plus grand nombre possible de ses citoyens, dans une démarche qui se traduira aussi par la création et le développement d’entreprises plus robustes et plus durables. À cette fin, le protocole doit établir clairement que les libertés économiques du marché unique n’équivalent pas à une interdiction des restrictions, mais qu’elles prévoient l’égalité de traitement entre les opérateurs économiques comme un moyen de garantir, sur tous les marchés, l’exercice d’une concurrence loyale dans des conditions équitables. |
1.10. |
Le CESE regrette que l’Union n’ait toujours pas honoré l’obligation qui lui incombe en vertu du traité de Lisbonne, d’adhérer à la Convention européenne des droits de l’homme ainsi que le prévoit l’article 6, paragraphe 2, du TUE. Cette adhésion est cruciale pour soumettre l’ordre juridique de l’Union, au même titre que tout ordre juridique fondé sur la démocratie et l’état de droit, à un contrôle externe des droits de l’homme. À cette fin, et dans le but de promouvoir une coexistence harmonieuse entre le droit de l’Union européenne et les dispositions du Conseil de l’Europe en matière sociale, le CESE recommande également que l’Union adhère à la charte sociale européenne du Conseil de l’Europe. |
2. Contexte, justification et principaux thèmes de l’avis
2.1. |
Le CESE rappelle que, fruit de l’histoire et de la culture de l’Union européenne et érigé en normes dans les traités fondamentaux, le «modèle social européen» constitue l’une des principales contributions de l’Union au progrès de l’humanité et à la paix. Ce modèle se réfère à un paradigme économique qui veut que la recherche d’un rendement économique maximal soit indissociable du bien-être et du progrès social. La réalisation de cette «économie sociale de marché hautement compétitive», qui est visée à l’article 3, paragraphe 3, du TUE et revêt désormais un caractère constitutionnel, est moins une fin en soi que, d’abord et avant tout, comme il ressort des articles 9 et 151 du TFUE, un instrument destiné à assurer le bien-être de l’ensemble des citoyens européens. |
2.2. |
Le CESE juge en outre nécessaire d’évoquer le caractère transversal du lien étroit établi entre la promotion du marché intérieur et la politique sociale en vertu de la «clause sociale horizontale» visée à l’article 9 du TFUE, selon lequel l’Union doit, dans la définition et la mise en œuvre de toutes ses politiques et actions, chercher à promouvoir des marchés du travail inclusifs ainsi que des systèmes de protection sociale adéquats. |
2.3. |
L’économie sociale de marché repose sur deux piliers bien distincts mais complémentaires: le premier est celui de l’application des règles de la concurrence, et le second est celui des mesures de politique sociale qui visent à garantir la justice sociale en corrigeant les effets négatifs et en renforçant la protection sociale (2). Le CESE note par ailleurs que des limites institutionnelles, juridiques et touchant à l’action politique ont été définies pour garantir la réalisation de ce juste équilibre entre, d’une part, la dimension économique de l’Union, qui accorde la priorité aux libertés relatives à l’économie, en particulier la liberté de concurrence, et, d’autre part, sa dimension sociale, qui prévoit la garantie effective des droits sociaux fondamentaux et l’interdiction du dumping social. |
2.4. |
Eu égard à ce contexte, et dans le but de corriger ce déséquilibre, un protocole sur le progrès social servirait un triple objectif:
|
2.5. |
En privilégiant la stabilité financière et la croissance économique au détriment du progrès social, les politiques d’austérité adoptées dans l’Union et ses États membres pour lutter contre la crise financière par le recours à la méthode de la «troïka», que le Parlement européen a lui-même contestée (3), ont en outre remis le risque d’affaiblissement des droits sociaux sur le devant de la scène. Cette situation contraste avec le principe de progrès social ancré dans la charte sociale européenne, comme l’a souligné à plusieurs occasions le Conseil de l’Europe, lequel a condamné les politiques et règles d’austérité mises en œuvre par des États membres de l’Union européenne au détriment des droits sociaux. En revanche, la Cour de justice de l’Union européenne n’a constaté aucune incompatibilité entre ces mesures et la clause sociale. |
2.6. |
Les cas où il existe un conflit entre les libertés économiques et les politiques menées par l’Union dans d’autres domaines, d’une part, et les droits sociaux, d’autre part, soulèvent d’importantes questions quant au risque d’incohérence entre l’ordre juridique de l’Union et les instruments et normes qui, au niveau européen et international, régissent les droits de l’homme. Dans ces situations, les États membres se trouvent confrontés à des obligations contradictoires lorsqu’ils s’emploient à respecter la législation de l’Union, mais aussi et par ailleurs les engagements qu’ils ont contractés en vertu des instruments européens et internationaux applicables dans le domaine des droits de l’homme. Le protocole sur le progrès social a vocation à résoudre ce dilemme, en précisant que dans les situations où ces aspects entrent en conflit, les libertés économiques garanties par les traités de l’Union ne constituent pas un droit fondamental susceptible de contrebalancer les droits humains fondamentaux, notamment en matière sociale et dans le domaine du travail. Cet impératif consistant à ménager, entre les intérêts économiques et sociaux, un équilibre soucieux des droits fondamentaux quand ces deux aspects entrent en conflit revêt une importance primordiale pour garantir que le principe de primauté du droit de l’Union ne s’applique pas en violation des normes européennes et internationales relatives aux droits de l’homme. |
2.7. |
Les conclusions et recommandations du rapport final de la conférence sur l’avenir de l’Europe, publiées en mai 2022, préconisent, parmi les 49 propositions et 300 mesures exposées, d’améliorer le fonctionnement des marchés du travail afin qu’ils garantissent des conditions de vie et de travail plus équitables sur le plan social, en particulier pour les jeunes et les groupes vulnérables [propositions 13 et 14 (4)].
Le CESE se félicite que le rapport de la conférence adresse, à cette fin, une demande à l’Union, aux États membres et aux partenaires sociaux afin qu’ils prennent, entre autres, des mesures pour garantir la mise en œuvre intégrale du socle européen des droits sociaux adopté en novembre 2017 et du plan d’action de mars 2021 qui s’y rapporte et, surtout, des objectifs qui sont les plus importants au regard du programme à l’horizon 2030, au niveau européen, national et régional, en incluant dans les traités un protocole sur le progrès social. Ce protocole vise à introduire des garanties plus efficaces afin de protéger pleinement les droits sociaux en cas de conflit avec les libertés économiques (voir mesure 5, proposition 13), et d’éviter d’affaiblir lesdits droits (mesure 2, proposition 14). |
2.8. |
À la lumière des crises récentes ou toujours en cours, et afin de mettre en œuvre les propositions et mesures figurant dans le rapport de la conférence sur l’avenir de l’Europe, le Parlement européen a adopté, en juin 2022, une résolution invitant le Conseil européen à lancer le processus de révision des textes fondateurs de l’Union. Le CESE se félicite que les réformes proposées par le Parlement européen visent à veiller à ce que le socle européen des droits sociaux soit pleinement mis en œuvre et à intégrer dans les traités le progrès social, en lien avec un protocole sur le progrès social, dans le respect des compétences des institutions concernées ainsi que des principes de subsidiarité et de proportionnalité. Le CESE relève que le Parlement européen a également lancé des appels similaires, en faveur d’un protocole sur le progrès social, dans sa résolution de décembre 2020 sur une Europe sociale forte pour des transitions justes. |
2.9. |
Le CESE émet le présent rapport à la demande expresse que lui a adressée l’Espagne, laquelle assumera la présidence tournante de l’Union au second semestre 2023, afin qu’il élabore un avis exploratoire définissant sa position relative à un protocole sur le progrès social. |
3. Contexte européen et contributions institutionnelles, juridiques et scientifiques concernant l’opportunité d’intégrer un protocole sur le progrès social dans les traités
3.1. |
Le CESE se réjouit que les trois institutions de l’Union soient disposées à accorder toute leur attention au suivi de la conférence sur l’avenir de l’Europe et de ses propositions, dans le respect des compétences que les traités de l’Union européenne confèrent à chacune d’elles. Le CESE constate que des jalons concrets ont été posés en vue de mettre en œuvre les propositions issues de la conférence, le but étant d’améliorer la vie quotidienne des citoyens dans de nombreux domaines, notamment en promouvant une économie compétitive socialement équitable et durable sur le plan environnemental (domaine thématique 9 de la conférence sur l’avenir de l’Europe). |
3.2. |
Le CESE signale également qu’en novembre 2022, le rapport sur les résultats finaux de la conférence sur l’avenir de l’Europe a fait l’objet d’une évaluation préliminaire actualisée de ses mesures et propositions par le secrétariat général du Conseil (5), dont il résulte:
|
3.3. |
Le CESE fait observer que la conférence sur l’avenir de l’Europe réclame une action plus ambitieuse et plus ferme de la part de l’Union européenne, des États et des partenaires sociaux, en vue d’accroître le bien-être des citoyens européens dans le cadre d’un contrat social renouvelé, ainsi que d’améliorer en permanence les conditions de vie et de travail. À cet égard, si le cadre réglementaire en vigueur permet de mener des politiques sociales plus engagées, d’autres politiques nécessitent toutefois, d’après le rapport final de la conférence (6), une réforme des traités. |
3.4. |
En outre, attribuer à la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne la même valeur juridique qu’aux traités, même si elle n’en fait pas partie intégrante, améliore l’équilibre constitutionnel entre les droits sociaux et les libertés économiques en évitant que les premiers ne soient considérés comme des exceptions aux secondes. Dans la même veine, la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne réaffirme, comme indiqué dans son préambule, les droits tels qu’ils résultent notamment des traditions constitutionnelles et des obligations internationales communes aux États membres, parmi lesquelles figurent notamment la Convention européenne des droits de l’homme et la charte sociale européenne du Conseil de l’Europe. L’entrée en vigueur du traité de Lisbonne a amélioré l’équilibre constitutionnel en accordant à la charte des droits fondamentaux de l’Union la même valeur juridique qu’aux traités. Malgré tout, l’expérience montre que les libertés économiques ont toujours tendance à primer sur les droits sociaux en cas de conflit entre ces deux aspects. |
3.5. |
Le CESE observe par ailleurs que le droit de l’Union et la jurisprudence de la Cour de justice évoluent favorablement dans le sens d’une interdiction du dumping social, afin de garantir un modèle où la concurrence économique sera non seulement libre mais aussi loyale. L’arrêt prononcé par la grande chambre de la Cour le 8 décembre 2020 dans l’affaire C-620/18 constitue un exemple clair qui affirme la nécessité de garantir des conditions sociales équitables dans le cadre de l’exercice des libertés économiques, en l’occurrence la prestation de services. Malgré tout, l’expérience montre que les libertés économiques ont toujours tendance à primer sur les droits sociaux en cas de conflit entre ces deux aspects. |
4. Observations générales
4.1. |
Le CESE note que, bien qu’il existe, au niveau européen, des normes minimales, contraignantes ou non contraignantes, pour faire progresser la mise en œuvre du socle européen des droits sociaux, il est nécessaire, si l’on veut promouvoir et garantir une véritable économie sociale de marché compétitive et durable, de disposer d’un protocole sur le progrès social afin de renforcer les atouts de ce système d’économie sociale de marché propre à l’Europe, et d’en éliminer dans le même temps les points faibles en l’adaptant afin qu’il puisse affronter les défis de demain. Le CESE estime que les conclusions de la conférence sur l’avenir de l’Europe offrent une feuille de route appropriée pour promouvoir un protocole de ce type. Il invite dès lors les institutions européennes à prendre les mesures nécessaires pour que cette proposition de la conférence soit mise en œuvre. |
4.2. |
Le CESE estime que la proposition de la conférence sur l’avenir de l’Europe et du Parlement européen devrait être concrétisée sous la forme d’un protocole à insérer dans le TFUE ou d’une clause transversale moyennant la modification de l’article 9 de ce traité, mais qu’il n’en existe pas moins d’autres instruments politiques susceptibles de contribuer aux objectifs du protocole sur le progrès social. |
4.3. |
En outre, et il s’agit là d’un aspect fondamental pour le progrès social, le CESE considère que ledit protocole permettrait de préserver et de renforcer l’autonomie des partenaires sociaux, et d’établir un lien clair entre le fonctionnement du marché intérieur et ses libertés économiques, y compris pour ce qui concerne une concurrence équitable entre les États membres ainsi que le respect et la promotion des droits sociaux collectifs. Cette garantie doit toujours être interprétée dans un sens qui respecte l’autonomie des partenaires sociaux et le bon fonctionnement des mécanismes nationaux de dialogue social et des relations entre ses interlocuteurs. |
4.4. |
Le CESE estime qu’il est non seulement souhaitable, mais aussi nécessaire, de s’assurer que le protocole sur le progrès social prévoie un principe excluant tout retour en arrière en matière de normes sociales, lequel figure déjà dans les dispositions de la charte sociale européenne et la jurisprudence du Comité européen des droits sociaux (CEDS), mais n’est encore reconnu ni par le droit de l’Union, ni par la Cour de justice. |
4.5. |
De l’avis du CESE, un protocole sur le progrès social constitue un élément fondamental d’un nouveau modèle de l’Union en matière d’économie et de gouvernance, dont les fondements doivent aller au-delà du PIB et construire un bien-être européen socialement équitable, c’est-à-dire inclusif, et durable. |
5. Observations particulières
5.1. |
Le CESE est convaincu qu’en adoptant un protocole sur le progrès social, l’Union sera en mesure de réaliser une convergence non seulement vers la croissance économique mais aussi vers le progrès et de favoriser le bien-être du plus grand nombre possible de ses citoyens, en préservant le modèle social européen, dans une démarche qui se traduira aussi par la création et le développement d’entreprises plus robustes et plus durables. En ce sens, le protocole sur le progrès social apporterait aussi une contribution importante à la réalisation des objectifs de développement durable de l’Union dans le cadre du programme des Nations unies à l’horizon 2030. |
5.2. |
Le CESE estime que, par analogie avec le contenu du protocole no 27 sur le marché intérieur et la concurrence, l’Union doit disposer des compétences suffisantes pour prendre, si nécessaire, des mesures garantissant un progrès social effectif, et ce, au titre des dispositions des traités, dont l’article 352 du TFUE. |
5.3. |
Le CESE recommande que l’Union honore l’obligation qui lui incombe en vertu du traité de Lisbonne, d’adhérer à la Convention européenne des droits de l’homme. Enfin, et dans le but de promouvoir une coexistence harmonieuse entre le droit de l’Union européenne et les dispositions du Conseil de l’Europe en matière sociale, l’Union devrait aussi adhérer à la charte sociale européenne du Conseil de l’Europe. |
Bruxelles, le 15 juin 2023.
Le président du Comité économique et social européen
Oliver RÖPKE
(1) https://www.europarl.europa.eu/resources/library/media/20220510RES29211/20220510RES29211.pdf
(2) «Building a social market economy in the European Union», discours de László Andor, commissaire à l’emploi, aux affaires sociales et à l’inclusion.
(3) Voir la résolution du Parlement européen du 13 mars 2014 sur l’emploi et les aspects sociaux du rôle et des opérations de la Troïka (BCE, Commission et FMI) dans les pays du programme de la zone euro [2014/2007(INI)].
(4) https://data.consilium.europa.eu/doc/document/ST-10033-2022-ADD-1-REV-1/en/pdf
(5) https://www.consilium.europa.eu/fr/policies/conference-on-the-future-of-europe/
(6) Rapport sur les résultats finaux de la conférence sur l’avenir de l’Europe, voir par exemple à la page 53.
ANNEXE
L’amendement ci-après, qui a recueilli au moins le quart des suffrages exprimés, a été rejeté au cours des débats (article 74, paragraphe 3, du règlement intérieur):
AMENDEMENT 1
SOC/756 — Protocole sur le progrès social
Remplacer intégralement par le texte ci-après l’avis présenté par la section SOC (l’explication/exposé des motifs figure à la fin du document):
Amendement du CdR |
||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
1. Conclusions et recommandations
2. Historique, contexte européen et national et cadre institutionnel et juridique
|
Exposé des motifs
Le texte ci-dessus comprend un amendement qui vise à exprimer une position globalement divergente par rapport à l’avis présenté par la section, et doit donc être considéré comme un contravis. Il expose les raisons pour lesquelles le CESE estime qu’il n’est pas nécessaire de réviser les traités dans le but d’instituer un protocole sur le progrès social. Au lieu que l’Union européenne propose ce protocole sur le progrès social, qui viendrait rompre l’équilibre entre les libertés économiques et les droits sociaux et qui empiéterait sur des compétences bien définies de l’Union et des États membres, il importe de progresser vers une conception commune de ce qu’est la valeur ajoutée de l’Union pour l’emploi et les politiques sociales.
Résultat du vote:
Voix pour: |
101 |
Voix contre: |
133 |
Abstentions: |
7 |
(1) Contribution du CESE au sommet social de Porto, paragraphe 7.
«1. |
Quelle évaluation le CESE fait-il de cette proposition, et quelle est sa position à son égard, à un moment où l’actuelle présidente de la Commission européenne a évoqué la possibilité de discuter d’une réforme des traités dans son dernier discours sur l’Union? |
2. |
Juge-t-il opportun et utile, pour faire avancer cette proposition, d’inscrire cette ambition au programme de la présidence espagnole? |
3. |
Dans l’affirmative, à quels niveaux de compétence serait-il intéressant de l’inclure (sommet européen, Conseil des ministres des affaires sociales, experts, niveau technique)?». |
(3) Initialement proposé en 2008 et actualisé en 2022.
(4) Rapport sur les résultats finaux.
(5) https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/TA-9-2022-0244_FR.html
(6) Proposition de la CES relative à un protocole sur le progrès social, actualisée en 2022.
(7) Rapport sur le travail conjoint des partenaires sociaux européens sur les arrêts de la CJE dans les affaires Viking, Laval, Rüffert et Luxembourg.
(8) Proposition de règlement du Conseil relatif à l’exercice du droit de mener des actions collectives dans le contexte de la liberté d’établissement et de la libre prestation des services.
(9) Douze des 40 parlements nationaux ou chambres des parlements (19 voix sur 54 attribuées) ont estimé que le contenu de la proposition n’était pas conforme au principe de subsidiarité. La Commission a retiré en fin de compte sa proposition.
(10) Au cours d’un débat au sein de la commission des affaires européennes du Parlement danois.
(11) Affaire C-341/05, points 91 et 93.
(12) En vertu du principe de proportionnalité, le contenu et la forme de l’action de l’Union n’excèdent pas ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs des traités.
(13) JO C 125 du 21.4.2017, p. 10, paragraphe 2.6.
(14) Voir également l’avis du CESE sur le thème « Renforcer le dialogue social » (non encore publié au JO).
18.8.2023 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 293/68 |
Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Coopération dans le domaine de la jeunesse»
(avis exploratoire à la demande de la présidence espagnole)
(2023/C 293/10)
Rapporteure: |
Nicoletta MERLO |
Saisine du Comité par la présidence espagnole du Conseil |
Lettre du 8.12.2022 |
Base juridique |
Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne Avis exploratoire |
Compétence |
Section «Emploi, affaires sociales et citoyenneté» |
Adoption en section |
31.5.2023 |
Adoption en session plénière |
15.6.2023 |
Session plénière no |
579 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
224/3/10 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
Pour faire en sorte que la stratégie de l’Union européenne (UE) en faveur de la jeunesse puisse porter ses fruits et afin de poser un cadre et un point de référence à partir desquels on mettra en avant des programmes dans ce domaine dans tous les États membres, le Comité économique et social européen (CESE) souligne qu’il est important de disposer de données précises et actualisées. On pourra ainsi contrôler et évaluer l’impact asymétrique de crises telles que celle de la COVID-19 sur les jeunes (1) ainsi que l’effet produit sur eux par les politiques qui sont menées (2), et définir de bonnes pratiques pour s’adresser directement et exclusivement aux jeunes ou avoir sur eux une influence significative. |
1.2. |
Le CESE apprécie les améliorations qui sont constamment apportées au «dialogue de l’Union européenne en faveur de la jeunesse», et il estime qu’il est crucial de renforcer ce dialogue et d’associer de façon constructive les organismes représentant la jeunesse tout au long du processus d’élaboration des politiques, en reconnaissant le rôle qui est le leur et en tenant dûment compte des nouveaux canaux par lesquels les jeunes d’aujourd’hui dialoguent, débattent et se mobilisent, souvent par l’intermédiaire des technologies et des réseaux sociaux. |
1.3. |
Le dialogue de l’UE en faveur de la jeunesse devrait être étroitement lié au programme de l’Union. Des manifestations telles que «Votre Europe, votre avis» ou la Rencontre des jeunes européens devraient être mieux intégrées avec le dialogue de l’Union en faveur de la jeunesse; les organisations et réseaux de jeunes qui y contribuent devraient bénéficier d’un meilleur soutien financier et à plus long terme. |
1.4. |
Pour renforcer la participation des jeunes à la vie politique, le CESE se propose volontiers de travailler aux côtés du prochain trio de présidences, qui seront assumées par l’Espagne, la Belgique et la Hongrie, à des stratégies pour mobiliser les primo-votants et améliorer, partout en Europe, la participation des jeunes aux élections, en tant qu’électeurs et en tant que candidats. |
1.5. |
Le CESE est attaché au renforcement du dialogue social, dans la même logique que celle de la Commission européenne qui a proposé d’agir en ce sens dans l’Union. Il y aurait lieu, dans la perspective du dialogue social et de la négociation collective, d’apporter un soutien accru aux partenaires sociaux, et parmi eux notamment aux jeunes, afin de renforcer leurs capacités. |
1.6. |
Le CESE juge essentiel que l’ensemble des lois, des actes juridiquement contraignants, des politiques, des stratégies, des programmes, des mesures et des investissements publics des États membres fassent l’objet d’une consultation pour en évaluer les effets sur les jeunes — un «test jeunesse», et donnent lieu à une analyse d’impact, à un travail de conception autour des politiques menées et à des propositions de mesures correctrices, et enfin que ces dispositifs préviennent les atteintes aux droits des jeunes et les discriminations à leur encontre. |
1.7. |
Afin de lever les obstacles économiques, l’Union et ses États membres devraient se fixer pour priorité à la fois d’intégrer les jeunes dans le marché du travail, moyennant des emplois de qualité, et d’améliorer leur capacité à s’adresser aux jeunes ne travaillant pas et ne suivant pas d’études ou de formation, les «NEET». |
1.8. |
Dans le contexte de l’Année européenne des compétences, le CESE met en exergue l’importance de l’apprentissage tout au long de la vie et les besoins en compétences transversales. Les jeunes doivent acquérir une culture financière, connaître les droits dont jouissent les travailleurs et développer leurs compétences entrepreneuriales. Une plus grande attention doit être portée à la promotion des compétences dans le domaine du numérique ainsi qu’en sciences, technologies, ingénierie et mathématiques (STIM), en particulier auprès des jeunes filles. |
1.9. |
Pour favoriser une bonne santé mentale et combattre la violence et le harcèlement, le CESE souligne qu’il est important de veiller à l’acquisition par les adolescents de compétences socio-émotionnelles et d’offrir, dans les établissements scolaires et d’autres grandes structures, un accompagnement social et psychologique gratuit. Une Année européenne de la santé mentale serait utile pour sensibiliser à ces questions. |
1.10. |
Le CESE juge important, pour améliorer leur santé physique et mentale, que tous les jeunes aient la possibilité de s’adonner à une pratique sportive et de s’impliquer dans la société et dans des activités culturelles. |
1.11. |
Le CESE estime qu’il est crucial d’aider les jeunes à assumer le coût de leur logement et d’encourager les politiques publiques menées dans ce domaine pour garantir l’accès à un logement décent, d’inciter les jeunes à vivre en autonomie et de les aider lorsqu’ils projettent de fonder une famille. Les États membres doivent intensifier leurs efforts pour transposer la directive sur l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée, notamment en ce qui concerne la disponibilité et l’accessibilité des services et structures d’accueil de la petite enfance, dont l’importance est cruciale pour les jeunes ménages. |
1.12. |
Le CESE préconise un dialogue plus constructif avec les jeunes autour de l’action pour le climat et des enjeux environnementaux, et souligne l’importance de développer des compétences dans ces domaines. |
1.13. |
Le CESE invite l’Union et ses États membres à tenir dûment compte de la corrélation existant entre les problèmes climatiques et la santé mentale chez les jeunes, et à intensifier la recherche en faveur de l’action pour le climat ainsi que la réaction des pouvoirs publics face à cet enjeu. |
1.14. |
Dans le traitement des problématiques exposées plus haut, il est important de ne pas perdre de vue les jeunes marginalisés et d’adopter une approche intersectionnelle, en prêtant attention au genre, à l’ethnicité, au handicap, etc. |
2. Contexte
2.1. |
L’Union déploie depuis 2002 un programme européen de coopération dans le domaine de la politique de la jeunesse qui repose sur les principes d’une participation active et de l’égalité des chances (3).
En décembre 2018, le Conseil a adopté la stratégie de l’Union européenne en faveur de la jeunesse pour la période 2019-2027 (4). Celle-ci fournit un cadre d’objectifs, de principes, de priorités et de mesures pour la coopération dans le domaine de la politique de la jeunesse, qui est destiné à l’ensemble des parties prenantes concernées, en tenant dûment compte de leurs compétences respectives et du principe de subsidiarité (5). L’exercice régulier du «dialogue de l’Union européenne en faveur de la jeunesse» permet d’en faciliter la mise en œuvre ainsi que celle de ses onze «objectifs pour la jeunesse» (6). Il s’agit là d’un mécanisme de dialogue entre les jeunes et les responsables politiques, tant au niveau national qu’au niveau européen. Il est nécessaire de renforcer ce processus et d’en appliquer les recommandations, et ce même à l’échelon national. |
2.2. |
C’est pour ces raisons que la présidence espagnole a demandé au CESE d’élaborer un avis exploratoire afin qu’il recense les principaux défis, problèmes et difficultés qui touchent les jeunes en Europe, en se penchant plus particulièrement sur les facteurs qui les empêchent de vivre leur vie pleinement et dans l’inclusivité, et de jouir sans entraves de leurs droits fondamentaux et de l’égalité des chances, sans devoir en subir aucun contrecoup. |
2.3. |
Le CESE estime que le programme déployé par l’Union en faveur de la jeunesse doit, à l’heure actuelle comme dans l’avenir, répondre aux principaux défis, problèmes et obstacles auxquels se heurtent les jeunes en Europe, et qui sont recensés à l’aide du dialogue de l’Union en faveur de la jeunesse et de l’Eurobaromètre. Ce programme devrait aussi déterminer les moyens par lesquels l’Union pourrait aider les jeunes à surmonter ces écueils. L’Union devrait encourager les États membres à renforcer les mesures qui sont directement destinées à corriger le manque d’équité entre les générations et à favoriser la justice intergénérationnelle, en prévoyant de solides mécanismes de coordination et de contrôle afin d’assurer la cohérence des politiques menées (7). Les États membres doivent aussi renforcer les mesures transversales qui ont un effet positif sur les jeunes parce qu’ils en sont potentiellement les principaux bénéficiaires (8) et qu’elles réduisent l’écart entre les générations (9). |
2.4. |
Un autre aspect que le CESE juge fondamental est celui de la collecte de données: recueillir des données ventilées sur les jeunes, qui soient de bonne qualité, accessibles et mesurables, aux niveaux européen et national, est une condition préalable si l’on veut analyser la situation actuelle à partir de différents points de vue, évaluer les mesures à prendre et en vérifier les effets. |
3. Observations générales
3.1. L’amélioration du dialogue de l’Union en faveur de la jeunesse et la participation des jeunes
3.1.1. |
Les jeunes ont le droit de participer à l’élaboration des politiques en faveur de la jeunesse et, plus généralement, de toutes les politiques. Le CESE apprécie les améliorations qui sont constamment apportées au «dialogue de l’Union européenne en faveur de la jeunesse», et il estime qu’il est crucial de renforcer ce dialogue et d’associer de façon constructive les organismes représentant la jeunesse tout au long du processus d’élaboration des politiques, de leur conception jusqu’à leur mise en œuvre, leur évaluation et leur suivi. Il est tout aussi essentiel de veiller à inclure les groupes de jeunes marginalisés et d’adopter une approche intersectionnelle. Cette démarche sera garante d’une coopération concrète et effective entre les jeunes et les institutions publiques à tous les niveaux. |
3.1.2. |
Le dialogue de l’UE en faveur de la jeunesse devrait être étroitement lié au programme de l’Union et aux manifestations telles que «Votre Europe, votre avis», et la Rencontre des jeunes européens devrait être mieux intégrée avec ce dialogue. |
3.1.3. |
Le CESE préconise qu’un meilleur soutien financier à long terme soit apporté aux organisations et réseaux de jeunesse qui contribuent au dialogue de l’UE en faveur de la jeunesse et/ou promeuvent les valeurs de l’Union telles que la citoyenneté active. |
3.1.4. |
Le CESE tient pour impératif que les institutions européennes, nationales et locales reconnaissent l’importance des organisations représentant la jeunesse, dans toute leur diversité, ainsi que le rôle joué par celles-ci. Il est crucial également de tenir dûment compte des nouveaux canaux, souvent informels, par lesquels les jeunes d’aujourd’hui dialoguent, débattent et se mobilisent, souvent par l’intermédiaire des technologies et des réseaux sociaux. |
3.1.5. |
Afin de garantir une participation active des jeunes générations, le CESE considère qu’il est important d’inventorier et de surmonter les obstacles sociaux, économiques et culturels à une pleine participation des jeunes, notamment les plus vulnérables. L’Union et ses États membres devraient par ailleurs trouver des modalités pour financer le travail effectué auprès des jeunes et maintenir en Europe des espaces civiques qui leur soient dévolus, où ils puissent exercer leurs droits d’expression, d’information, d’association, de réunion pacifique et d’autres libertés connexes. |
3.1.6. |
Si les jeunes générations s’avèrent favorables à l’Europe, la participation des jeunes aux scrutins locaux, régionaux, nationaux et européens, en tant qu’électeurs et, de manière active, en tant que candidats, est traditionnellement très faible. Le CESE se propose volontiers de travailler aux côtés du prochain trio de présidences, qui seront assumées par l’Espagne, la Belgique et la Hongrie, à des stratégies pour mobiliser les primo-votants et améliorer, partout en Europe, la participation des jeunes aux élections, en tant qu’électeurs et en tant que candidats. |
3.1.7. |
Une communication efficace est cruciale pour s’adresser aux jeunes: le CESE recommande à toutes les institutions publiques d’employer un langage accessible et adapté aux jeunes, et à faire un usage plus efficace des réseaux sociaux pour faire passer des informations essentielles et communiquer autour de leurs actions et politiques. |
3.1.8. |
Le CESE est attaché au renforcement du dialogue social, dans la même logique que celle de la Commission européenne qui a proposé, en janvier 2023, d’agir en ce sens dans l’Union. Il y aurait lieu, dans la perspective du dialogue social et de la négociation collective, et de la mise en œuvre des accords autonomes des partenaires sociaux conclus au niveau de l’Union, d’apporter un soutien accru aux partenaires sociaux, et parmi eux notamment aux jeunes, afin de renforcer leurs capacités. |
3.1.9. |
Dans le même temps, le CESE reconnaît aussi le rôle que jouent d’autres organisations de la société civile, comme les chambres de commerce et d’industrie, pour développer et actualiser les compétences professionnelles et pour donner une traduction concrète aux politiques en matière d’EFP ainsi que dans d’autres domaines. Les organisations de jeunesse peuvent aussi permettre d’acquérir des compétences clés pour une participation active et effective à la société civile et au dialogue civil. |
3.1.10. |
Le CESE tient à souligner l’importance de renforcer la coopération avec les organisations de la société civile représentant les jeunes des pays désireux d’adhérer à l’Union, en particulier ceux qui sont sur la voie de l’adhésion. La coopération devrait également inclure le renforcement des capacités et l’échange continu d’informations. L’importance des jeunes dans le contexte de la poursuite de l’intégration européenne est cruciale, car ce sont eux qui sont les plus favorables à l’adhésion à l’UE. |
3.2. L’impact générationnel des politiques
3.2.1. |
Le CESE juge essentiel que l’ensemble des lois, des actes juridiquement contraignants, des politiques, des stratégies, des programmes, des mesures et des investissements publics des États membres fassent l’objet d’une consultation pour en évaluer les effets sur les jeunes — un «test jeunesse», et donnent lieu à une analyse d’impact, à un travail de conception autour des politiques menées (10) et à des propositions de mesures correctrices, et enfin que ces dispositifs préviennent les atteintes aux droits des jeunes et les discriminations à leur encontre dans les économies d’une société «ultra-vieillissante» (11) et de la mondialisation (12). |
3.2.2. |
Plusieurs projets pilotes ont été menés dans ce domaine en Europe et ont donné lieu à des études d’impact sous la forme de travaux de recherche et à des analyses de suivi (13), voire ont débouché sur des évaluations a posteriori ou des projets de loi en faveur des jeunes. Deux pays européens, l’Autriche et l’Allemagne (14), ont réalisé des évaluations ex ante et ex post qui sont particulièrement intéressantes. |
3.2.3. |
Le CESE renvoie à son avis consacré à l’«Évaluation d’impact de l’UE du point de vue des jeunes» (15) ou «test jeunesse», dans lequel il encourage les institutions européennes et nationales à s’assurer que les organisations représentant la jeunesse soient suffisamment associées à leurs démarches, à appliquer des mesures et des mécanismes pour garantir la prise en compte du point de vue des jeunes et à systématiquement effectuer une analyse de l’impact des politiques menées moyennant la pleine mise en œuvre de ce «test jeunesse». |
3.3. Lever les obstacles économiques
3.3.1. |
Même si le chômage des jeunes est retombé à un niveau inférieur à celui qui était le sien avant la pandémie de COVID-19 (16), l’emploi des jeunes est encore trop souvent précaire (17): travail temporaire, rémunéré par des chèques, via une plateforme, collaboratif, «petits boulots», etc. Ces postes ont tendance à être faiblement rémunérés, les horaires y sont irréguliers et la protection sociale y est limitée, voire inexistante (congés payés, pension, congés de maladie, etc.). |
3.3.2. |
Intégrer les jeunes dans le marché du travail moyennant des emplois de qualité et mieux s’adresser aux jeunes NEET devrait être une priorité pour l’Union et ses États membres. À cet égard, le CESE invite instamment la présidence espagnole à étudier les revendications de la jeunesse concernant les dossiers législatifs en cours d’examen qui revêtent un intérêt particulier pour les jeunes européens, en l’occurrence les mesures contraignantes pour garantir la qualité des stages (18) et la directive relative à l’amélioration des conditions de travail dans le cadre du travail via une plateforme, dans le respect du principe de subsidiarité et de l’autonomie des partenaires sociaux. |
3.3.3. |
Le CESE invite instamment les États membres à utiliser les fonds affectés aux plans nationaux pour la reprise et la résilience (PNRR), ceux du FSE+ et d’autres fonds existants pour développer l’activité économique, en particulier dans les PME et les secteurs essentiels à l’autonomie stratégique de l’Europe (tels que la double transition), pour promouvoir le travail indépendant et l’entrepreneuriat et pour créer du plein emploi productif et renforcer les compétences des jeunes, là où c’est nécessaire, priorité devant être donnée aux contrats à durée indéterminée et à des conditions de travail décentes qui limitent le risque de précarité dans le quotidien et au travail (19), et compte tenu des cadres juridiques et des conventions collectives en vigueur à l’échelon national. |
3.3.4. |
Les mutations rapides du marché du travail, occasionnées pour partie par les transitions écologique et numérique, mettent en lumière la nécessité de veiller à ce que les programmes d’enseignement et de formation ainsi que les qualifications restent d’actualité et pertinentes par rapport à l’évolution des besoins des employeurs. Il est fondamental de développer à la fois les compétences requises pour opérer la transition écologique et numérique et les initiatives de terrain visant à mettre à jour les programmes d’études. Il faut doter les jeunes de toute une série de compétences numériques, STIM (dans les domaines des sciences, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques), transversales, et de la capacité de s’adapter. Le renforcement des compétences dans le domaine du numérique et dans les disciplines STIM est vital pour assurer concrètement l’égalité des sexes, car il permettrait à plus de femmes de prétendre aux emplois de demain et réduirait l’écart de salaire qu’elles accusent par rapport aux hommes. La question de l’égalité des sexes doit devenir une composante des parcours éducatifs. Il est nécessaire de formuler et de mettre en œuvre des stratégies pour favoriser la prise en compte de cette question de l’égalité entre hommes et femmes. |
3.3.5. |
Il conviendrait de développer l’esprit d’entreprise au sein de l’Union européenne. Alors que 40 à 45 % des jeunes se disent intéressés par l’entrepreneuriat, seuls 7 % d’entre eux sont des travailleurs indépendants. Les jeunes représentent 11 % de la «pénurie d’entrepreneurs» dans l’Union (20). Ils se heurtent à divers obstacles majeurs dans la création d’entreprise, notamment un manque de compétences entrepreneuriales. |
3.3.6. |
Dans le contexte de l’Année européenne des compétences, le CESE met en exergue l’importance de l’apprentissage tout au long de la vie et les besoins en compétences transversales (21). Une culture financière et la connaissance des droits des travailleurs sont des compétences que chaque jeune doit acquérir et maîtriser pour réaliser son potentiel. Les États membres devraient envisager de mettre en place des parcours d’apprentissage flexibles (22) et de mieux reconnaître les compétences acquises dans le cadre de l’éducation non formelle et de l’apprentissage informel. |
3.3.7. |
Nombreuses sont les jeunes femmes qui doivent encore choisir entre leur famille et leur carrière face aux difficultés objectives qu’elles rencontrent pour équilibrer vie familiale et vie professionnelle. À cause de leurs responsabilités familiales, les jeunes femmes ont moins accès à l’emploi et sont donc plus susceptibles aussi de tomber dans la pauvreté, et elles ont moins d’outils à leur disposition pour s’en extraire. Investir dans les infrastructures matérielles et immatérielles (23) de garde d’enfants et de soins de longue durée pourrait grandement favoriser le plein emploi féminin. |
3.3.8. |
Il est fondamental que les jeunes parviennent à une autonomie sur le plan économique, qui leur permettra aussi de devenir des citoyens actifs. En Italie, un indice du fossé entre générations (24) mesure l’ampleur des obstacles qui se dressent devant les jeunes dans leur recherche de l’autonomie économique et sociale, et constitue le cadre central de la future «évaluation d’impact du point de vue des jeunes» (25). Un projet similaire d’indice de l’équité intergénérationnelle (Intergenerational Fairness Index), employant une taxinomie et des indicateurs légèrement différents (26), a été mené au Royaume-Uni et dépeint des perspectives toujours plus sombres pour les jeunes partout en Europe (27). L’Allemagne (28), l’Autriche (29) et la Flandre possèdent déjà une expérience en matière d’analyse de l’impact de la réglementation sur les jeunes (30). Le CESE reconnaît l’importance de ces pratiques et encourage tous les États membres à s’en inspirer comme d’exemples à suivre. |
3.4. Les violences sexuelles et sexistes
3.4.1. |
Même si des progrès substantiels ont été réalisés ces dernières années, de nombreux jeunes continuent de signaler des actes de violence motivés par l’orientation sexuelle ou l’identité de genre. Le CESE estime qu’il y aurait lieu d’améliorer les infrastructures, par exemple les abris, ainsi que les projets de réinsertion des individus dans la société afin de garantir l’existence d’outils permettant aux personnes concernées de gérer le traumatisme consécutif à ces actes et pour apporter un soutien aux victimes de violences et de discrimination sous toutes ses formes. Il est essentiel aussi de disposer de services juridiques, médicaux, psychologiques et d’une médiation sociale. |
3.4.2. |
Il y aurait dès à présent lieu d’entreprendre, dans les écoles et sur les lieux de travail, des campagnes de sensibilisation à ces questions pour promouvoir le respect de la diversité. En plus d’explorer ces sujets, les campagnes en question devraient être l’occasion de se mettre à l’écoute des victimes de violences sexistes et de discrimination et de dialoguer avec elles. Le CESE souligne qu’il importe, pour assurer le succès de ces initiatives, d’y faire jouer un rôle actif aux partenaires sociaux, à la société civile organisée et aux établissements d’enseignement. |
3.4.3. |
Dans l’Union européenne et à travers le monde, une femme sur trois a fait l’expérience de violences physiques ou sexuelles. À ce jour, une jeune fille sur cinq aura été la victime d’abus sexuels. La violence en ligne progresse et un jeune sur deux sera la victime de violences sexistes en ligne (31). Le CESE invite instamment les États membres qui ne l’ont pas encore fait à ratifier la convention d’Istanbul (32) dans les meilleurs délais. |
3.5. Les contraintes psychologiques et émotionnelles et la discrimination
3.5.1. |
Comme indiqué dans la charte de Genève pour le bien-être, un texte promu par l’Organisation mondiale de la santé et qui est le fruit de la dixième conférence mondiale sur la promotion de la santé organisée en 2021 (33), une conception positive de la santé intègre la dimension physique du bien-être avec ses dimensions mentale et sociale. |
3.5.2. |
De nombreux facteurs influent sur le bien-être et la santé des jeunes sur le plan mental. L’exclusion, la stigmatisation, un environnement familial fragile et un emploi précaire sont autant de facteurs qui aggravent le risque de manifester des problèmes de santé mentale. L’absence de traitement peut avoir des conséquences à l’adolescence qui perdurent à l’âge adulte et plus tard encore, compromettant la santé physique et mentale et limitant les possibilités de mener une vie épanouissante. |
3.5.3. |
Le CESE souligne qu’il est important de veiller à l’acquisition par les adolescents de compétences socio-émotionnelles et d’offrir, dans les établissements scolaires et d’autres grandes structures, un accompagnement social et psychologique gratuit, de promouvoir une bonne santé mentale et de combattre la violence et le harcèlement, où qu’ils se produisent et par quelque moyen que ce soit (notamment en ligne). |
3.5.4. |
Les jeunes mentionnent souvent la solitude ressentie au sein de la collectivité, c’est-à-dire le sentiment qu’ont aujourd’hui les gens d’être seuls parmi la foule qui les entoure. Ce problème en masque toutefois un autre, celui de l’inactivité due à un réflexe défensif d’isolement. Cette phobie sociale est un phénomène qui se développe rapidement et s’accompagne souvent de formes plus ou moins sévères de dépression, s’aggravant au fil du temps. Le CESE accueille favorablement les conclusions de l’Année européenne de la jeunesse, formulées lors de sa conférence de clôture du 6 décembre 2022 intitulée «Claim the Future», invitant à se focaliser davantage sur les soins de santé préventifs et la lutte contre les maladies mentales et la solitude. |
3.5.5. |
La santé mentale peut également influer sur la capacité du corps à se nourrir convenablement, ce qui peut avoir, dans des cas graves, des conséquences pour la santé physique. On a observé ces dernières années une multiplication des cas de boulimie, l’ingestion incontrôlée de nourriture, qui est souvent associée à l’obésité et au syndrome métabolique, mais qui est aussi le résultat de troubles de l’humeur et d’une augmentation du stress et de l’anxiété sociale. |
3.5.6. |
Adopter un mode de vie sain aide à prévenir certaines maladies chroniques non transmissibles telles que le diabète, les pathologies cardiovasculaires et certaines formes de cancer. La possibilité de s’adonner à une pratique sportive et de s’impliquer dans la société et dans des activités culturelles est non seulement un aspect extrêmement important du processus de développement personnel, mais elle est aussi étroitement corrélée à une meilleure santé mentale et physique; chaque jeune doit donc bénéficier de telles possibilités. |
3.6. Les défis sociaux
3.6.1. |
Faute de salaire décent, ou à tout le moins adéquat, les jeunes sont souvent empêchés de franchir certaines grandes étapes de leur vie, comme acheter ou louer leur propre logement ou fonder une famille. Ce phénomène entraîne une déstabilisation irréversible de l’équilibre démographique du continent, car les jeunes sont de plus en plus nombreux à renoncer à cette idée de bâtir une vie de famille. |
3.6.2. |
Cette situation est exacerbée par la crise du logement, notamment dans les grandes villes où les prix sont bien supérieurs aux salaires, et les jeunes éprouvent des difficultés à se financer auprès des banques à moins de pouvoir se prévaloir de garanties sous une forme ou une autre. Le CESE estime qu’il est crucial d’aider les jeunes à assumer le coût de leur logement et d’encourager les politiques publiques menées dans ce domaine pour garantir l’accès à un logement décent, d’inciter les jeunes à vivre en autonomie et de les aider lorsqu’ils projettent de fonder une famille. |
3.6.3. |
Par ailleurs, il ne faut pas oublier que les familles sont, sous leurs formes les plus diverses que l’on puisse imaginer, le fondement de la société moderne: les familles et le progrès (ou à tout le moins la stabilité) démographique sous-tendent le modèle de notre économie et de notre développement. Si nous ne parvenons pas à soutenir et encourager convenablement les jeunes familles, c’est l’intégralité de notre système de protection sociale, pour ne prendre que cet exemple parmi d’autres, qu’il va nous falloir repenser. |
3.6.4. |
En Europe, où le vieillissement de la population et le défaut de renouvellement générationnel entraînent une inversion des courbes démographiques, il est nécessaire de placer l’accent sur les familles et de concilier travail et parentalité. L’extension du congé parental et une accélération dans le développement de structures accessibles de garde d’enfants dans les États membres où il en manque sont des démarches essentielles pour renforcer et promouvoir l’égalité entre les hommes et les femmes, offrant aux deux parents la possibilité de passer plus de temps avec leurs enfants et encourageant une participation égale au marché du travail. |
3.7. Les défis écologiques et environnementaux
3.7.1. |
Les jeunes sont des vecteurs clés du changement et de l’innovation, et des partenaires essentiels dans la mise en œuvre du programme de développement durable à l’horizon 2030 et d’autres accords et instruments multilatéraux, notamment l’accord de Paris sur le changement climatique et le pacte vert pour l’Europe. Le CESE préconise un dialogue plus constructif avec les jeunes autour de l’action pour le climat et des enjeux environnementaux. |
3.7.2. |
L’éducation constitue la clé de la réussite en matière de développement durable, et l’importance que revêt le développement des compétences dans les domaines de l’atténuation du changement climatique et de l’adaptation à celui-ci, ainsi que pour l’économie circulaire, doit être prise en compte. L’éducation des enfants à la durabilité doit par ailleurs être soutenue par un apprentissage tout au long de la vie destiné aux parents et un travail d’éducation civique (34). |
3.7.3. |
Les zones rurales sont aujourd’hui confrontées au risque de leur dépeuplement à cause de l’absence ou du manque de services et d’infrastructures. Des investissements ciblés dans ces territoires peuvent y apporter des gains de compétitivité, des créations d’emplois et une meilleure qualité de vie, renversant ainsi cette tendance et encourageant les jeunes à s’installer dans ces régions. En outre, le développement de synergies raisonnées entre la durabilité, la production alimentaire locale et le tourisme pourrait offrir aux jeunes de nouvelles possibilités de s’investir dans des emplois constructifs et porteurs de sens, et contribuer ainsi à la croissance et au dynamisme de ces régions. |
3.7.4. |
Les jeunes font partie des publics les plus vulnérables et les plus sensibles aux effets environnementaux du changement climatique (35). Si le réchauffement planétaire se poursuit sans être infléchi, il aura des conséquences catastrophiques pour la santé des enfants et des jeunes: montée du niveau de la mer, vagues de chaleur, maladies, malnutrition, etc. Près de 70 % des moins de 18 ans sont très enclins à estimer que le changement climatique constitue une urgence planétaire (36), et ces inquiétudes ont une incidence néfaste sur le bien-être émotionnel et psychologique des jeunes. Une étude de 2021 conduite auprès de 10 000 jeunes du monde entier a montré que plus de 50 % des jeunes gens interrogés ressentaient de la tristesse, de l’angoisse, de la colère, de l’impuissance et/ou de la culpabilité à l’égard du changement climatique, tandis que 45 % déclaraient que leurs sentiments vis-à-vis du changement climatique avaient une influence négative sur leur quotidien et leurs activités (37). Le CESE invite l’Union et ses États membres à tenir dûment compte de cette corrélation et à intensifier la recherche en faveur de l’action pour le climat ainsi que la réaction des pouvoirs publics face à cet enjeu. |
3.7.5. |
Le CESE renvoie à son avis sur le rôle des jeunes dans la transition écologique (38), dans lequel il préconise une série de mesures pour faire en sorte que les jeunes se placent à l’avant-garde de la transition climatique et environnementale. |
Bruxelles, le 15 juin 2023.
Le président du Comité économique et social européen
Oliver RÖPKE
(1) OCDE (2020), Survey on COVID-19 and Youth, Paris.
(2) Forum économique mondial (2017), The Inclusive Growth and Development Report, Genève, janvier 2017.
(3) Résolution du Conseil du 27 novembre 2009 relative à un cadre renouvelé pour la coopération européenne dans le domaine de la jeunesse (2010-2018) (JO C 311 du 19.12.2009, p. 1). Résolution du Conseil et des représentants des gouvernements des États membres, réunis au sein du Conseil, du 27 juin 2002 relative au cadre de la coopération européenne dans le domaine de la jeunesse (JO C 168 du 13.7.2002, p. 2).
(4) Résolution du Conseil de l’Union européenne et des représentants des gouvernements des États membres, réunis au sein du Conseil, sur un cadre pour la coopération européenne dans le domaine de la jeunesse: la stratégie de l’Union européenne en faveur de la jeunesse 2019-2027 (JO C 456 du 18.12.2018, p. 1).
(5) Résolution du Conseil de l’Union européenne et des représentants des gouvernements des États membres, réunis au sein du Conseil, sur un cadre pour la coopération européenne dans le domaine de la jeunesse: la stratégie de l’Union européenne en faveur de la jeunesse 2019-2027 (JO C 456 du 18.12.2018, p. 1), voir le point 2 dans la partie commençant par les mots «constatent ce qui suit:».
(6) https://youth.europa.eu/eu-youth-dialogue_fr
(7) OCDE (2020), La gouvernance au service des jeunes, de la confiance et de la justice intergénérationnelle — Des politiques adaptées à toutes les générations?, Examens de l’OCDE sur la gouvernance publique, éditions de l’OCDE, Paris, https://www.oecd-ilibrary.org/governance/la-gouvernance-au-service-des-jeunes-de-la-confiance-et-de-la-justice-intergenerationnelle_57092ccc-fr
(8) C’est l’approche qui a été récemment adoptée par la présidence du conseil des ministres et le ministère de la jeunesse en Italie. Voir les Linee guida per la valutazione dell’impatto generazionale delle politiche pubbliche de juillet 2022. Dans la littérature spécialisée, voir MONTI, L., «The NRRP and the generational divide. From measuring to the impact assessment of youth policies», Social Policies, Year IX, 1/2022 janvier-avril, p. 113; CHEVALIER, T., LONCLE, P. (2021), «Introduction: the Development of Youth Policies in Europe in Past Decades», Youth and Globalization, 3(1), 1-11.; WALTHER, A. (2021), e.a., «Regimes of youth participation? Comparative analysis of youth policies and participation across European cities», Young, 2021, 29.2: 191-209; WALLACE, C., BENDIT, R. (2009), «Youth Policies in Europe: Towards a Classification of Different Tendencies in Youth Policies in the European Union», Perspectives on European Politics and Society, 10:3, 441-458.
(9) ROSOLIA, A., TORRINI, R. (2016), «The generation gap: a cohort analysis of earnings levels, dispersion and initial labor market conditions in Italy, 1974-2014», article hors-série no 366, Banque d’Italie, Rome (titre original: «Il gap generazionale: Un’analisi di coorte dei livelli e della dispersione dei salari e delle condizioni iniziali nel mercato del lavoro in Italia, 1974-2014»); MONTI, L. (2022), «The Italian Puzzle of the European Youth Guarantee», International Development Policy, vol. juillet 2022.
(10) ATKINSON, A. B. (2011), «Prosperity and fairness», version révisée de l’article présenté à la conférence annuelle sur la recherche de la DG ECFIN de novembre 2011.
(11) Forum économique mondial (2023), «The Economy of a Super-Ageing Society», Initiative pour une économie de la longévité, réunion annuelle, Davos, 18 janvier 2023, https://www.weforum.org/events/world-economic-forum-annual-meeting-2023/sessions/the-economy-of-a-super-ageing-society
(12) JOSEFSSON, J., WALL, J. (2020), «Empowered inclusion: theorizing global justice for children and youth», Globalizations, 17:6, 1043-1060, DOI: 10.1080/14747731.2020.1736853.
(13) Voir Martinelli, V., et Monti, L., «Misurare l’impatto generazionale delle politiche pubbliche: una sfida, un metodo», Amministrazione in Cammino, 29 mars 2021; Monti, L., «La valutazione di impatto generazionale delle politiche pubbliche: dalle linee guida del COVIGE al possibile Youth-check in Italia», Amministrazione in Cammino, 30 décembre 2022.
(14) Cioffi, C., Pierattini, S., «Contrastare il divario generazionale attraverso la valutazione delle politiche pubbliche rivolte ai giovani» [Combler le fossé générationnel grâce à l’évaluation des politiques publiques en faveur des jeunes], Amministrazione in Cammino, 2023.
(15) Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Évaluation d’impact de l’UE du point de vue des jeunes» (avis d’initiative) (JO C 486 du 21.12.2022, p. 46).
(16) Rapport annuel 2022 d’Eurofound, «Living and working in Europe», 4 mai 2023, https://www.eurofound.europa.eu/fr/publications/annual-report/2023/living-and-working-in-europe-2022
(17) https://www.cedefop.europa.eu/en/tools/skills-intelligence/involuntary-part-time-employment?year=2020&country=EU#2; https://www.youthforum.org/topics/platform-work#:~:text=Young%20workers%20who%20are%20at,any%20policies%20on%20this%20topic
(18) https://www.eesc.europa.eu/fr/documents/resolution/long-lasting-legacy-european-year-youth-youth-mainstreaming-and-empowerment: «Les stages qui ne font l’objet d’aucune rémunération ni compensation peuvent peser de manière très négative sur l’expérience qu’ont les jeunes du marché du travail et il s’impose de les proscrire.».
(19) Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Comment garantir un travail décent aux jeunes et veiller à l’inclusion des jeunes ne travaillant pas et ne suivant pas d’études ou de formation (NEET) grâce à l’élaboration de plans nationaux de relance adéquats» (avis d’initiative) (JO C 152 du 6.4.2022, p. 27).
(20) OCDE/Commission européenne (2021), «Pallier la pénurie d’entrepreneurs 2019 — Politiques de l’entrepreneuriat inclusif».
(21) Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative à l’Année européenne des compétences 2023 [COM(2022) 526 final — 2022/0326 (COD)] (JO C 100 du 16.3.2023, p. 123).
(22) https://www.iiep.unesco.org/fr/forum-international-de-politique-educative-sur-les-parcours-dapprentissage-flexibles-dans-13760
(23) Il est fait référence ici à la fois aux infrastructures physiques (crèches d’entreprises, accueil des jeunes enfants, etc.) et à des services spécifiques (soutien économique, services numériques ou autres), dans lesquels on pourrait investir directement ou «indirectement», en associant le tiers secteur et les prestataires de services à la personne et en reconnaissant leur travail.
(24) Fondation Bruno Visentini, Il Divario generazionale. La generazione Z e la permacrisi, V Rapporto 2022 [Le fossé entre les générations. La génération Z et la perma-crise], https://www.osservatoriopolitichegiovanili.it/v-rapporto-2022; MONTI, L., MARTINELLI, V. (2021), «Misurare l’impatto generazionale delle politiche pubbliche: una sfida, un metodo», Amministrazione in Cammino, 29 mars 2021.
(25) CIOFFI, C., PIERATTINI, S., (2023), «Contrastare il divario generazionale attraverso la valutazione delle politiche pubbliche rivolte ai giovani», Amministrazione In Cammino, Rome.
(26) MONTI, L. (2017), «Diminishing prospects for young people: À comparison of the intergenerational fairness index and generational divide index in addressing the problem», Review of European Studies, vol. 9, no 4, décembre 2017, p. 160-164, ISSN: 1918-7173.
(27) LEACH, J., BROEKS, M., ØSTENSVIK, K., KINGMAN, D. (2016), European Intergenerational Fairness Index: A crisis for the young, Intergenerational Foundation, Londres, https://www.if.org.uk/wp-content/uploads/2016/03/European-Intergenerational-Fairness-Index_Final-2016.pdf; LEACH, J., HANTON, A. (2014), «Integenerational Fairness Index», Intergenerational Foundation, édition de 2014, Londres.
(28) Centre de compétences Jugend-Check (2022), The Youth-Check in German Regulatory Impact Assessment for the Young Generation. The Youth-Check in Germany, avril 2022.
(29) https://www.bundeskanzleramt.gv.at/agenda/jugend/jugendpolitik/jugend-check.html. Voir aussi, dans le recueil du droit fédéral autrichien: Gesamte Rechtsvorschrift für WFA-Grundsatz-Verordnung, version du 1.5.2023.
(30) Centre de compétences Jugend-Check (2022), conférence internationale sur l’analyse de l’impact de la réglementation sur les jeunes du 9 mai 2022, Berlin, juin 2022.
(31) https://italy.representation.ec.europa.eu/notizie-ed-eventi/notizie/violenza-contro-le-donne-lue-istituisce-un-numero-di-assistenza-telefonica-livello-di-unione-e-2022-11-24_it#:~:text=%E2%80%9CLa%20violenza%20contro%20le%20donne,di%20violenza%20di%20genere%20online
(32) La convention d’Istanbul, qui reconnaît que les violences faites aux femmes constituent une violation des droits de l’homme, contribue à la mise en place, au niveau européen, d’un cadre juridique permettant de protéger les femmes contre les violences, et de prévenir, réprimer et éradiquer ce phénomène ainsi que celui des violences domestiques.
(33) Conférence mondiale sur la promotion de la santé, Organisation mondiale de la santé, Genève, 13-15 décembre 2021.
(34) Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Donner aux jeunes les moyens de réaliser le développement durable grâce à l’éducation» (avis d’initiative) (JO C 100 du 16.3.2023, p. 38).
(35) https://www.undp.org/publications/aiming-higher-elevating-meaningful-youth-engagement-climate-action
(36) PNUD et université d’Oxford, 2021.
(37) Marks e.a., 2021.
(38) Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Le rôle des jeunes dans la transition écologique» (avis exploratoire à la demande de la présidence suédoise) (JO C 184 du 25.5.2023, p. 13).
ANNEXE
La proposition d’amendement suivante, qui a recueilli plus d’un quart des suffrages exprimés, a été rejetée au cours des débats (article 74, paragraphe 3, du règlement intérieur):
AMENDEMENT 2
SOC/759 — Coopération dans le domaine de la jeunesse
Paragraphe 3.3.2
Modifier comme suit
Avis de section |
Amendement |
Intégrer les jeunes dans le marché du travail moyennant des emplois de qualité et mieux s’adresser aux jeunes NEET (ne travaillant pas, ne suivant pas d’études ou de formation) devrait être une priorité pour l’Union et ses États membres. À cet égard, le CESE invite instamment la présidence espagnole à étudier les revendications de la jeunesse concernant les dossiers législatifs en cours d’examen qui revêtent un intérêt particulier pour les jeunes européens, en l’occurrence les mesures contraignantes pour garantir la qualité des stages (1) et la directive relative à l’amélioration des conditions de travail dans le cadre du travail via une plateforme, dans le respect du principe de subsidiarité et de l’autonomie des partenaires sociaux. |
Intégrer les jeunes dans le marché du travail moyennant des emplois de qualité et mieux s’adresser aux jeunes NEET (ne travaillant pas, ne suivant pas d’études ou de formation) devrait être une priorité pour l’Union et ses États membres. À cet égard, le CESE invite instamment la présidence espagnole à étudier les revendications de la jeunesse concernant les dossiers législatifs en cours d’examen qui revêtent un intérêt particulier pour les jeunes européens, en l’occurrence les mesures permettant, grâce à la définition des objectifs conformément à la formation et à l’intégration professionnelle pour garantir la qualité des stages (1) et l’application de la directive relative à l’amélioration des conditions de travail dans le cadre du travail via une plateforme, dans le respect du principe de subsidiarité et de l’autonomie des partenaires sociaux. |
Résultat du vote:
Voix pour: |
89 |
Voix contre: |
137 |
Abstentions: |
10 |
(1) https://www.eesc.europa.eu/fr/documents/resolution/long-lasting-legacy-european-year-youth-youth-mainstreaming-and-empowerment: «Les stages qui ne font l’objet d’aucune rémunération ni compensation peuvent peser de manière très négative sur l’expérience qu’ont les jeunes du marché du travail et il s’impose de les proscrire».
(1) https://www.eesc.europa.eu/fr/documents/resolution/long-lasting-legacy-european-year-youth-youth-mainstreaming-and-empowerment: «Les stages qui ne font l’objet d’aucune rémunération ni compensation peuvent peser de manière très négative sur l’expérience qu’ont les jeunes du marché du travail et il s’impose de les proscrire».
III Actes préparatoires
Comité économique et social européen
579e session plénière du Comité économique et social européen, 14.6.2023-15.6.2023
18.8.2023 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 293/77 |
Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil établissant des règles communes visant à promouvoir la réparation des biens et modifiant le règlement (UE) 2017/2394 et les directives (UE) 2019/771 et (UE) 2020/1828
[COM(2023) 155 final — 2023/0083 (COD)]
(2023/C 293/11)
Rapporteur: |
Thierry LIBAERT |
Corapporteure: |
Émilie PROUZET |
Consultation |
Parlement européen, 17.4.2023 Conseil de l’Union européenne, 12.4.2023 |
Base juridique |
Article 114 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne |
Compétence |
Section «Marché unique, production et consommation» |
Adoption en section |
2.6.2023 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
66/0/0 |
Adoption en session plénière |
14.6.2023 |
Session plénière no |
579 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
178/1/1 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
Le Comité économique et social européen (CESE) félicite la Commission pour le paquet de propositions visant à faciliter la réparabilité des produits et à rendre cette possibilité effective et opportune en agissant de la conception à la fin du cycle de vie du produit. |
1.2. |
Le CESE est d’avis que certaines mesures développées ci-dessous pourraient contribuer à renforcer l’effectivité de ce droit à la réparabilité. |
1.3. |
L’amélioration de l’information du consommateur peut indubitablement contribuer au droit à la réparation. En ce sens, la mise en place d’une plateforme nationale rassemblant l’ensemble des informations est positive, mais les conditions de sa mise en place et de son actualisation doivent être précisées. |
1.4. |
Second point, pour faciliter le recours à la réparation, le CESE se félicite de l’équilibre des mesures portant sur la garantie légale qui renforce l’obligation de réparer tout en conservant le choix du consommateur de recourir au remplacement en cas de désagrément majeur. Le Comité soutient toutefois que le renforcement de l’obligation de réparer qui incombe au distributeur devrait s’accompagner d’une véritable mise en œuvre du plein droit de recours de ce dernier vis-à-vis du fabricant (notamment en ce qui concerne les pièces détachées et les coûts). En effet, les distributeurs ont un rôle d’interface avec les consommateurs, et doivent pouvoir être soutenus en ce sens. |
1.5. |
Pour faciliter le recours à la réparation en dehors de la garantie légale, il apparaît essentiel de soutenir le déploiement des prestataires de services de réparation, tant dans le cadre de la formation professionnelle de ces derniers qu’en garantissant à tous les réparateurs un accès aux informations indispensables en matière de réparation et d’entretien, ainsi qu’aux pièces détachées nécessaires et ce à un prix raisonnable. |
1.6. |
Favoriser la réparabilité des produits dès leur conception fait l’objet d’un projet de règlement distinct. Il y a lieu d’y contribuer également au-delà du stade de la conception, après la vente. Pour ce faire, dans le cadre de la modernisation en cours du cadre de la propriété intellectuelle (1), le CESE demande à la Commission d’évaluer l’opportunité de favoriser le partage des données pour les pièces détachées et la réparabilité des produits. Autre levier, l’accès aux pièces détachées issues d’impressions 3D ou aux pièces d’occasion sûres, ainsi que le soutien aux produits reconditionnés doivent être renforcés. |
1.7. |
Par souci de cohérence, ce droit à la réparation doit également s’appuyer sur une interdiction des pratiques intentionnelles, notamment la sérialisation, qui consistent à faire obstacle à la réparation dans les cas où il est évident que ces pratiques ne visent qu’à faire obstruction à la concurrence sur le marché des pièces détachées. |
1.8. |
Enfin, il convient d’agir sur la qualité, la sécurité et le coût de la réparation. La mise en concurrence des prestataires de services de réparation via le formulaire harmonisé sur la base d’informations comparatives est un bon outil pour faire évoluer le marché. Le CESE est toutefois d’avis qu’il est indispensable d’aller plus loin et de déterminer sur la base des expériences existantes au niveau national, les outils financiers les plus susceptibles d’inciter le consommateur à faire réparer ses produits. |
1.9. |
Le CESE rappelle que le sujet de la réparation concerne l’ensemble des parties prenantes et pas seulement les entreprises. Il appelle la Commission à encourager des campagnes de sensibilisation des consommateurs aux gestes d’entretien et d’utilisation des produits, ainsi que sur le thème de la réparation. |
2. Contenu essentiel du document de la Commission
2.1. |
La proposition de directive s’insère dans un ensemble de textes visant à favoriser le rôle du consommateur dans la transition écologique. Elle s’inscrit en cohérence avec une série de textes, notamment le pacte vert pour l’Europe (décembre 2019), le plan d’action pour une économie circulaire (mars 2020) et le nouvel agenda du consommateur (novembre 2020). |
2.2. |
Afin de favoriser la réparation des biens non conformes, la Commission européenne cherche ainsi à redonner du pouvoir au consommateur en lui donnant les moyens de faire le choix de l’économie circulaire à deux stades clés:
|
2.3. |
La proposition de directive établissant des règles communes visant à promouvoir la réparation de biens concerne les cas de défaut du produit ou de produits endommagés parallèlement et au-delà de la période de garantie légale. Elle prévoit principalement quatre obligations:
Un article modifie toutefois la directive (UE) 2019/771 du Parlement européen et du Conseil (2) sur les dispositions relatives aux recours du consommateur en cas de non-conformité (garantie légale). Il crée une primauté de la réparation sur le remplacement dans les cas où la réparation aurait un coût inférieur ou égal au remplacement du produit. |
3. Observations générales
3.1. |
Le CESE accueille favorablement les objectifs de la proposition de directive, à savoir la promotion d’un véritable droit européen à la réparation. Il considère que ce texte complète utilement les précédents textes relatifs à l’écoconception des produits, au renforcement du pouvoir du consommateur européen et à l’information du consommateur sur les allégations environnementales. |
3.2. |
Or, le développement de la réparation doit constituer une priorité européenne, comme l’a bien compris la Commission. La réparation est au centre du modèle économique que doit promouvoir l’Union, aux côtés des opérateurs économiques (fabricants, distributeurs…), des consommateurs et, plus largement, du citoyen européen. Le CESE souhaite ainsi partager une vision du «droit à la réparation»: il ne peut s’agir de se limiter à un droit «formel» ou «théorique». La législation européenne doit s’appuyer sur le principe de la garantie de l’offre et de la demande de réparation de qualité en garantissant l’accès effectif à la réparation et en encourageant le choix du consommateur concernant ce dernier. |
3.3. |
Sur le plan environnemental, l’allongement de la durée d’utilisation d’un produit est une mesure clé pour réduire l’impact de la consommation. Bien sûr, cet allongement doit s’entendre selon l’analyse du cycle de vie, tous les produits ne devant pas être éternellement prolongés. C’est pourquoi, le CESE soutient la mesure qui associe l’obligation de réparabilité à la durée de vie des produits définie dans les actes délégués par catégories de produits adoptés dans le cadre du futur règlement sur l’écoconception des produits. |
3.4. |
En outre, le CESE souscrit à la première liste des produits concernés reprise dans l’annexe 2. Il appuie en outre l’idée de compléter cette liste par les catégories de produits définis dans les actes délégués précités au paragraphe 3.3. La conception des produits et leur réparabilité sont ainsi automatiquement liées à l’information fournie au consommateur et à l’obligation de les réparer. |
3.5. |
Sur le plan social et économique, la réparation crée de la valeur et des emplois de qualité en Europe. Selon une étude de Gaïa (3), la réparation crée 404 emplois pour 10 000 tonnes traitées, soit cinquante fois plus que l’élimination des déchets. Toutefois, le CESE s’inquiète du fait que la formation professionnelle et les compétences techniques nécessaires pour rendre ce droit effectif sont insuffisantes. Ainsi, il invite la Commission à mettre en œuvre, en lien étroit avec les organisations professionnelles, tous les outils nécessaires pour développer la formation initiale et continue aux métiers de la réparation. |
3.6. |
En outre, la réparation présente un fort potentiel de gains de pouvoir d’achat notamment pour les catégories les plus défavorisées qui sont généralement contraintes de renouveler précocement leurs achats. |
3.7. |
Le CESE se réjouit que la Commission, dans sa proposition de directive, ait bien pris en compte le besoin d’agir tant sur le cadre de la garantie que sur la période hors-garantie. Ceci est d’autant plus important que le cadre régissant la durée de la garantie légale est disparate (2 ans dans la plupart des pays, 3 ans en Grèce, pour la durée de vie du produit estimée en Finlande et aux Pays-Bas). Une transparence et une clarté accrues des pratiques en matière de réparation à l’échelle européenne, voire une harmonisation par le haut des cadres légaux, constituent également une condition nécessaire au déploiement du droit à la réparation. |
4. Observations particulières
Les observations particulières reprennent les pistes d’amélioration sur la base des propositions de la Commission au regard de l’objectif suivant: rendre la réparation plus attrayante que le remplacement aux yeux du consommateur.
4.1. Améliorer l’information des consommateurs
4.1.1. |
Le CESE se réjouit que la Commission propose d’améliorer l’information du consommateur en s’assurant qu’il y ait, dans chaque État membre, une plateforme qui permette d’identifier les solutions de réparation. Il est important que les conditions de mise en place et de gestion de cette plateforme soient précisées pour s’assurer que les informations soient complètes et actualisées. |
4.1.2. |
L’acte de réparation impose d’avoir une visibilité sur les conditions associées à la réparation, en comparaison avec le remplacement du produit. La mise en concurrence des services de réparation et la transparence des prix, des modalités et de la qualité de la réparation induite par l’obligation d’établir un formulaire de réparation permettront au consommateur d’obtenir de meilleures offres et ainsi d’augmenter le nombre des réparations. Le CESE accueille donc favorablement la volonté d’harmoniser les informations transmises par les réparateurs en proposant un formulaire européen. Il invite les colégislateurs à garantir la cohérence entre cette proposition, celle relative à l’écoconception des produits et celles portant sur les allégations environnementales. |
4.1.3. |
Autre point, le CESE soutient la création d’un indice de réparabilité harmonisé au niveau européen et établi par catégorie de produits, tel que prévu par le projet de règlement sur l’écoconception des produits et conformément à ce qui a été recommandé par le Comité. Il appelle les États membres à s’engager à mettre en place un tel indice en cohérence avec le projet européen sous peine d’entraîner un accroissement des coûts pour les parties prenantes et une confusion pour le consommateur. |
4.1.4. |
Enfin, une campagne d’information et de sensibilisation à l’échelle européenne est nécessaire pour faire comprendre les intérêts de la réparation et du principe «acheter mieux et non pas plus». Cette campagne de sensibilisation doit veiller à clarifier l’information sur les gestes d’entretien à accomplir par le consommateur. En ce sens, le CESE appuie les mesures proposées par la proposition de directive relative aux allégations écologiques (green claims). |
4.2. Faciliter le geste de la réparation
4.2.1. |
Le geste de la réparation se comprend d’abord pendant la période de garantie. Sur ce point, la prévalence de la réparation sur le remplacement à neuf, déjà approuvée par le CESE dans son avis «Consommateurs et transition verte» (4), est opportunément mise en œuvre. En effet, pour un coût équivalent ou inférieur au remplacement, le vendeur devra réparer le bien sauf en cas de disproportionnalité ou d’impossibilité. Le choix du consommateur entre le remplacement et la réparation est donc lui aussi affecté. Toutefois, il conserve la possiblité de demander le remplacement en cas d’inconvénient important, ce qui peut être le cas avec des produits nécessaires à leur vie quotidienne ou professionnelle. |
4.2.2. |
En outre, le CESE est d’avis que la possibilité d’un recours du distributeur vis-à-vis du fabricant doit être inscrite dans une législation contraignante et donc garantie pour rendre cette mesure opérationnelle et viable économiquement. Une obligation de réparer pesant sur le distributeur quel que soit le coût doit être assortie d’un recours effectif de ce dernier vis-à-vis du fabricant quant à l’accès aux pièces détachées et au partage des coûts. Cette obligation doit être suffisamment simple à mettre en œuvre pour que les PME soient en capacité d’y répondre. |
4.2.3. |
Une des avancées fondamentales du texte réside aussi dans l’obligation qui incombe au producteur de réparer ses biens au-delà de la période de garantie légale. Pour des raisons de concurrence, il est essentiel que cette obligation vaille également pour les producteurs hors UE. Le CESE rappelle donc le besoin de mettre en œuvre la responsabilité des représentants autorisés voire des centres de distribution. |
4.2.4. |
Autre point, le maillage territorial de la réparation constitue une condition forte pour favoriser le recours à la réparation. Pour le CESE, il est nécessaire d’avoir davantage de réparateurs en Europe, et donc d’engager une politique volontariste de formation professionnelle à la réparation. Cette politique est d’autant plus nécessaire que le métier de réparateur a beaucoup évolué, à la suite de l’essor du numérique et des objets connectés. En dehors de la formation, il s’agira également d’offrir des emplois de qualité bien rémunérés, étant donné que beaucoup d’États membres souffrent déjà à l’heure actuelle d’une pénurie de main-d’œuvre qualifiée, notamment dans les métiers de l’artisanat. |
4.2.5. |
Développer les services de réparation implique que les réparateurs indépendants puissent avoir les mêmes opportunités que les réparateurs agréés par les producteurs. Le CESE est en outre d’avis que la Commission devrait aider et encourager le développement de nouveaux modèles économiques tels que les services de réparation professionnels, les ateliers de réparation, les «repair cafés», etc. Il préconise donc de multiplier les points d’accès à la réparation. |
4.3. Favoriser la réparabilité des produits dès leur conception et au-delà
4.3.1. |
Si les pratiques d’obsolescence programmée sont effectivement des obstacles à la réparation, le CESE considère qu’elles sont plus spécifiquement traitées par d’autres directives. |
4.3.2. |
Toutefois, il serait cohérent que la Commission prenne appui sur ce texte relatif à la réparation en demandant aux États membres d’interdire toute pratique d’irréparabilité intentionnelle. Il ne peut y avoir de droit à la réparation si des objets sont conçus pour être irréparables. |
4.3.3. |
Les pratiques de sérialisation ou d’appariement gênent ou bloquent le remplacement d’éléments d’un produit en marquant certaines pièces avec un numéro de série. En cas de remplacement d’un élément sérialisé, si le numéro n’est pas celui que la carte mère a enregistré, celle-ci altère ou bloque le fonctionnement de l’appareil. Cette pratique limite la capacité de réparation au seul réseau technique agréé ou certifié par le constructeur au détriment des réparateurs indépendants et des reconditionneurs, et rend également impossible l’utilisation de pièces issues de l’économie circulaire. Le CESE demande à la Commission et aux États membres d’interdire et de sanctionner ce type de pratiques qui font manifestement obstacle à la réparation. |
4.3.4. |
Le projet de règlement sur l’écoconception des produits prévoit la durée pendant laquelle les pièces détachées par catégorie de produits doivent être disponibles. Toutefois, au regard des enjeux liés à la pénurie des matières premières, le CESE demande à la Commission de favoriser la production de pièces détachées par impression 3D. Cela implique que les producteurs, comme certains l’ont déjà fait ces dernières années, publient leurs plans 3D lorsqu’ils cessent de produire ces pièces eux-mêmes. Dans le cadre de la révision à venir du cadre de la propriété intellectuelle, le Comité demande à la Commission d’évaluer l’opportunité de favoriser le partage des données pour ces pièces et une communication de ces informations via la plateforme. |
4.3.5. |
Le CESE souhaite que l’Union soutienne la filière de la remise à neuf des appareils, dans la mesure où celle-ci poursuit les mêmes objectifs économiques et environnementaux que la réparation. |
4.4. Agir sur le coût de la réparation
4.4.1. |
Le coût de la réparation étant l’un des principaux obstacles à celle-ci, il est nécessaire de compléter les dispositions de la proposition de directive par des propositions venant alléger le coût de la réparation pour le consommateur. |
4.4.2. |
Hors cadre de la garantie légale, pour le CESE, la généralisation du formulaire d’information permettant de connaître le prix de la réparation et de mettre en concurrence les réparateurs favorise l’acte de réparation et la baisse du coût de la réparation. |
4.4.3. |
Pour réduire le coût de la réparation, l’Union peut encourager l’utilisation de pièces détachées d’occasion. Le CESE regrette que le marché des matériaux de biens d’occasion ou de pièces détachées sûrs et recyclés soit pour l’instant assez limité et peu compétitif en raison du manque d’infrastructures et de l’absence de législation adéquate. |
4.4.4. |
La Commission doit aussi aller plus loin en agissant concrètement pour que le signal relatif au prix de la réparation soit plus favorable. Elle doit enjoindre les États membres à prendre des mesures en ce sens. Ainsi, le CESE estime qu’il faut absolument promouvoir des incitations fiscales ou autres mesures compensatoires en faveur de la réparation. Il convient de déterminer, sur la base des expériences déjà mises en place au niveau national, quels sont les outils les plus adéquats pour stimuler le marché de l’occasion et de la réparation. |
Bruxelles, le 14 juin 2023.
Le président du Comité économique et social européen
Oliver RÖPKE
(1) https://single-market-economy.ec.europa.eu/industry/strategy/intellectual-property/industrial-design-protection_fr
(2) Directive (UE) 2019/771 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2019 relative à certains aspects concernant les contrats de vente de biens, modifiant le règlement (UE) 2017/2394 et la directive 2009/22/CE et abrogeant la directive 1999/44/CE (JO L 136 du 22.5.2019, p. 28).
(3) Gaïa, Zero Waste and Economic Recovery. The job creation potential of zero waste solution, 2021.
(4) Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant les directives 2005/29/CE et 2011/83/UE pour donner aux consommateurs les moyens d’agir en faveur de la transition écologique grâce à une meilleure protection contre les pratiques déloyales et à de meilleures informations [COM(2022) 143 final — 2022/0092 (COD)] (JO C 443 du 22.11.2022, p. 75).
18.8.2023 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 293/82 |
Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant les directives 2009/102/CE et (UE) 2017/1132 en ce qui concerne l’extension et l’amélioration de l’utilisation des outils et processus numériques dans le domaine du droit des sociétés
[COM(2023) 177 final — 2023/0089 (COD)]
(2023/C 293/12)
Rapporteure: |
Franca SALIS-MADINIER |
Consultation |
Parlement européen, 17.4.2023 Conseil de l’Union européenne, 21.4.2023 |
Base juridique |
Article 114 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne |
Compétence |
Section «Marché unique, production et consommation» |
Adoption en section |
2.6.2023 |
Adoption en session plénière |
14.6.2023 |
Session plénière no |
579 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
199/2/7 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
Le Comité économique et social européen (CESE) accueille favorablement la proposition à l’examen, qui poursuit le double objectif d’accroître la quantité de données sur les sociétés qui sont accessibles au public grâce au système d’interconnexion des registres du commerce (BRIS) et d’améliorer la fiabilité et la crédibilité de ces informations. Cette proposition devrait profiter non seulement aux PME, qui ont besoin d’informations fiables pour soutenir leurs activités transfrontières, mais aussi à d’autres parties prenantes pour lesquelles la transparence des sociétés est importante, comme les grandes entreprises, les actionnaires, les créanciers, les consommateurs ou les travailleurs. Elle devrait en outre aider les entreprises à réduire les coûts et à gagner du temps s’agissant de la fourniture des informations requises dans des situations transfrontalières. La proposition continuera par ailleurs à favoriser la pleine utilisation du marché unique et du marché unique numérique. |
1.2. |
Le CESE est favorable à une extension de l’utilisation des outils numériques pour assurer la communication entre les sociétés et les autorités dans le cadre d’activités transfrontières, ainsi qu’à la promotion du principe du «numérique par défaut», pour autant que personne ne soit laissé de côté. |
1.3. |
Le CESE soutient la proposition qui consiste à étendre le champ d’application de la directive aux sociétés de personnes, aux groupes de sociétés et aux succursales de sociétés de pays tiers (articles 7, 13, 13 bis, 14 et 36). Les sociétés coopératives et les fondations représentant également une part importante des activités commerciales, le CESE recommande d’étendre encore le champ d’application de la directive afin d’y inclure ces types de sociétés et d’exiger l’accès au BRIS lorsque des informations sur celles-ci figurent déjà dans les registres nationaux. |
1.4. |
Le CESE souscrit à l’obligation faite aux entreprises par l’article 14 d’inclure dans les registres nationaux et dans le BRIS des informations sur le lieu d’implantation de l’administration centrale et du principal établissement. Le CESE est favorable à l’ajout, dans la liste des informations à fournir et à mettre à jour sur une base annuelle, du nombre de salariés, des secteurs d’activité (code NACE) et, dans le cas des sociétés constituées en vertu du droit des sociétés de l’Union européenne (UE) (directive sur les transformations, fusions et scissions transfrontalières, législations relatives à la société européenne et à la société coopérative européenne), des accords sur les droits des travailleurs à l’information, à la consultation et à la participation. |
1.5. |
Le CESE souscrit à la connexion du BRIS au système d’interconnexion des registres de bénéficiaires effectifs (BORIS) et au système d’interconnexion des registres d’insolvabilité (IRI), ainsi qu’à l’utilisation de l’EUID (identifiant unique européen de l’entreprise) pour relier les informations stockées dans différents systèmes, comme le prévoit l’article 22. Le BRIS devrait également comporter des informations sur les administrateurs révoqués et permettre de rechercher des sociétés de manière plus efficace par secteur d’activité (code NACE) et par taille (nombre de salariés et revenus). |
1.6. |
Le CESE est favorable à l’obligation de vérifier, comme le prévoit l’article 10 sur le contrôle préventif, une liste harmonisée d’éléments lors de la constitution d’une société. Il préconise toutefois de vérifier également l’identité des personnes concernées par la constitution de ladite société, y compris les données précisant si ces personnes ont été révoquées de leurs fonctions d’administrateur dans un État membre de l’UE («administrateur déchu»). Le CESE recommande en outre d’étendre ce contrôle préventif à la réorganisation des entreprises constituées en vertu du droit des sociétés de l’UE (directive sur les transformations, fusions et scissions transfrontalières, législations relatives à la société européenne et à la société coopérative européenne) et d’élargir la liste des informations permettant de vérifier que les accords sur l’information, la consultation et la participation des travailleurs requis par cette législation ont bien été conclus. |
1.7. |
Il importe, pour le bon fonctionnement du marché unique et des activités transfrontalières des sociétés, que les informations disponibles soient fiables et crédibles. Si le CESE est favorable à l’obligation prévue par l’article 15 qui veut que les données stockées dans les registres soient tenues à jour, il recommande toutefois de renforcer les dispositions des articles 28 et 40 afin de veiller à ce que les sanctions en cas de non-respect de cette règle soient effectives, proportionnées et dissuasives. |
1.8. |
Le CESE se félicite de l’introduction du certificat d’entreprise de l’UE visé à l’article 16 ter. Il recommande toutefois que la liste des informations requises comporte également le nombre de salariés et le ou les secteur(s) d’activité NACE, données qui devraient être mises à jour sur une base annuelle. Il convient d’harmoniser la liste des informations demandées aux sociétés de personnes et celle que doivent fournir les sociétés à responsabilité limitée. |
1.9. |
Le CESE recommande de renforcer les dispositions de l’article 16 quater relatif à la procuration numérique de l’UE afin d’exiger le plus haut niveau de garanties concernant le contrôle de l’identité des personnes habilitées à représenter une société et de vérifier si la personne concernée a été révoquée de ses fonctions d’administrateur dans des États membres de l’UE. |
1.10. |
Le CESE soutient, sous certaines conditions, le principe «une fois pour toutes», selon lequel une société d’un État membre ne devrait pas fournir les mêmes informations plus d’une fois lorsqu’elle crée des filiales ou des succursales dans un autre État membre. Afin d’éviter que les États membres ne soient contraints de renoncer à effectuer des contrôles de validité s’ils ont des motifs raisonnables de penser que la fiabilité des informations reprises dans le registre d’un autre État membre ne présente pas le niveau de garanties adéquat, il convient d’élargir le champ d’application de l’article 16 sexies (Garde-fous en cas de doute raisonnable) pour permettre à un État membre de refuser d’accepter des informations provenant d’un autre État membre dans ce cas de figure. |
2. Observations générales
2.1. |
La proposition à l’examen vise à renforcer la transparence des entreprises et la confiance entre États membres ainsi qu’à créer des administrations publiques plus connectées, tout en réduisant la charge administrative qui pèse sur les sociétés et les autres parties prenantes dans des situations transfrontières. En particulier, la proposition entend rendre publiques davantage d’informations sur les sociétés au moyen du BRIS, faire en sorte que les données sur les sociétés figurant dans les registres du commerce soient exactes, fiables et à jour, et réduire les formalités administratives pour les sociétés lorsqu’elles utilisent des informations issues des registres du commerce dans le cadre d’activités transfrontières. |
2.2. |
La proposition a en outre pour but de réduire la charge et les formalités administratives en introduisant un certificat d’entreprise de l’UE, un modèle standard multilingue pour la procuration numérique de l’UE, en élargissant l’utilisation du principe «une fois pour toutes» à la création d’une société dans d’autres États membres de l’UE et en supprimant certaines formalités telles que la nécessité pour les documents d’entreprise de faire l’objet d’une apostille ou d’une traduction certifiée conforme. Comme l’indique l’analyse d’impact, ces modifications réduiront d’environ 437 millions d’euros par an le coût que ces obligations administratives font peser sur les sociétés européennes. |
2.3. |
Les objectifs en matière de numérisation définis dans la communication de la Commission intitulée «Une boussole numérique pour 2030: l’Europe balise la décennie numérique» (1) revêtent une grande importance dans le cadre de la proposition à l’examen. Laquelle répond à la nécessité largement reconnue d’améliorer le fonctionnement des registres et leur interaction avec les sociétés, les utilisateurs et les autorités publiques, y compris dans des situations transfrontières. Une autre initiative pertinente dans ce contexte concerne la réduction des obstacles qui entravent les activités transfrontières des PME, comme il ressort des communications de la Commission intitulées «Mise à jour de la nouvelle stratégie industrielle de 2020» (2) et «Une stratégie axée sur les PME pour une Europe durable et numérique» (3). Tant le principe de transmission des informations «une fois pour toutes» que la réduction des exigences en matière de traduction et d’apostille aident les PME à atteindre ces objectifs. |
2.4. |
Il est admis que la transparence des sociétés est un moyen efficace de lutter contre les pratiques abusives. La proposition à l’examen contribue à répondre à la nécessité de fournir davantage d’informations fiables sur les sociétés et de renforcer la transparence et la fiabilité des données fournies. Elle aborde par ailleurs le problème très répandu des pratiques abusives auxquelles se livrent certaines sociétés, notamment l’évasion fiscale, le non-respect des normes de travail, le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et la fraude à la consommation (4) (5). Ces pratiques sont rendues possibles grâce à des mécanismes tels que les sociétés boîtes aux lettres, l’usurpation d’identité, le manque de transparence des groupes de sociétés et de la chaîne de propriété, l’exploitation des disparités qui existent entre les régimes réglementaires nationaux et les difficultés auxquelles se heurte la coopération transfrontière dans le cadre de l’application de la législation (6). Il ressort d’une étude récente que les sociétés boîtes aux lettres sont un phénomène courant dans l’UE (7). Des informations telles que le siège de direction et le lieu de la principale activité économique, qui sont essentielles pour les parties prenantes, figurent rarement dans les registres des sociétés. En outre, les informations fournies sont souvent obsolètes et il est difficile de savoir si elles sont fiables. |
2.5. |
Afin d’améliorer encore la transparence, la proposition à l’examen devrait également inclure les sociétés coopératives et les fondations dans le champ d’application de la directive et, dans la mesure où elles figurent dans les registres nationaux des sociétés, des informations les concernant devraient être mises à disposition au travers du BRIS. Étant donné qu’un nombre important de sociétés sont créées sous ces formes juridiques dans l’UE, ne pas les prendre en compte serait une lacune majeure en matière de transparence. |
2.6. |
Étendre la liste des informations que doivent fournir les sociétés au lieu du siège et de l’activité économique principale se justifie au regard de la nécessité, pour les autorités compétentes, de recenser les sociétés boîtes aux lettres et les pratiques abusives éventuelles avant de pouvoir délivrer le certificat préalable à la transformation visé à l’article 86 quaterdecies dans le cadre d’une transformation transfrontalière, ou le certificat préalable à la scission visé à l’article 160 quaterdecies dans le cadre d’une scission transfrontalière. Il importe en outre de connaître ces lieux pour déterminer le droit national qui s’applique en cas d’insolvabilité. Comme indiqué dans l’analyse d’impact, de nombreuses parties prenantes ont réclamé la mise à disposition d’informations supplémentaires et de nouvelles fonctionnalités de recherche dans le BRIS. Les représentants des travailleurs ont en effet besoin d’informations sur le nombre de salariés, dans la mesure où un nombre minimal ouvre de nombreux droits aux travailleurs, tels que le droit de créer un comité d’entreprise ou d’être représentés au conseil d’administration d’une entreprise. Il convient que les sociétés de personnes publient le même type d’informations que les sociétés à responsabilité limitée. |
2.7. |
Le nombre important de cas de fraudes impliquant une usurpation d’identité justifie d’élargir la liste des informations requises aux fins du contrôle préventif effectué lors de la constitution de sociétés à la vérification de l’identité des personnes clés. Ce contrôle préventif devrait également concerner les réorganisations transfrontières de sociétés par le biais de fusions, transformations, scissions ou transformations en société européenne ou société coopérative européenne. Il ressort de recherches menées par l’Institut syndical européen (ETUI) que, même si elles sont obligatoires en vertu du droit de l’Union, il n’est pas rare que les négociations avec les représentants des travailleurs sur les droits des salariés à l’information, à la consultation et à la participation ne soient pas conclues, voire même pas engagées, avant que l’autorité compétente n’approuve les réorganisations en question. Il convient d’intégrer un accord définitif avec les représentants des travailleurs dans la liste minimale des informations fournies. D’une manière générale, la directive devrait exiger le plus haut niveau de garanties s’agissant de l’identification des personnes, étant donné que des normes plus faibles, comme l’identification électronique, réduisent l’efficacité des contrôles contre la fraude à l’identité. |
2.8. |
Des données actualisées représentent un avantage considérable pour la sécurité de l’environnement économique et jouent un rôle important pour réduire le coût des activités transfrontières des sociétés et garantir leur responsabilité sociale. Les sanctions imposées par le droit de l’Union mais dont la définition est laissée à la discrétion des États membres sont susceptibles de ne pas satisfaire aux exigences d’efficacité, de proportionnalité et de dissuasion (voir la discussion menée actuellement sur le droit de la consommation de l’UE). Il convient de renforcer les articles 28 et 40 afin de garantir que les sanctions soient effectives, proportionnées et dissuasives et que les sociétés bénéficient d’un environnement compétitif et équilibré dans l’ensemble de l’Union européenne. |
2.9. |
La recommandation consistant à appliquer aux sociétés de personnes les mêmes obligations en matière de déclaration d’informations qu’aux sociétés à responsabilité limitée repose sur le principe de l’instauration de conditions de concurrence équitables pour les différentes formes de sociétés. Ce principe sous-tend également la recommandation visant à inclure les fondations et sociétés coopératives dans le champ d’application de la directive. |
2.10. |
Si le principe «une fois pour toutes» et la suppression des exigences en matière d’apostille sont des mesures importantes pour réduire les formalités administratives, leur mise en œuvre doit toutefois être équilibrée et préserver la fiabilité des informations fournies dans le cadre des registres des sociétés des États membres. L’identification électronique des personnes physiques devrait s’accompagner du plus haut niveau de garanties, et les États membres devraient avoir le droit de refuser les informations fournies par les registres des sociétés des États membres qui n’ont pas atteint un juste équilibre en la matière, par exemple parce qu’ils n’ont pas encore transposé des éléments clés de la directive sur les outils numériques (8) ou de la directive à l’examen (lorsqu’elle aura été adoptée). |
2.11. |
Afin d’éviter tout coût supplémentaire pour les sociétés, il appartient aux États membres et aux registres nationaux des entreprises de ne pas augmenter les redevances pour couvrir les dépenses générées par l’ajout des nouvelles données requises par la directive mise à jour. |
Bruxelles, le 14 juin 2023.
Le président du Comité économique et social européen
Oliver RÖPKE
(1) COM(2021) 118 final.
(2) COM(2021) 350 final.
(3) COM(2020) 103 final.
(4) Service de recherche du Parlement européen (2018), An overview of shell companies in the European Union (Un aperçu des sociétés-écran dans l’Union européenne, en anglais uniquement), https://op.europa.eu/fr/publication-detail/-/publication/e8534eeb-e071-11e8-b690-01aa75ed71a1/language-fr/format-PDF/source-search
(5) The impact of letterbox type practices on labour rights and public revenue (L’impact des pratiques de type «société boîte aux lettres» sur les droits des travailleurs et les recettes publiques, en anglais uniquement) (2016), SOMO et CES, avec le soutien de la Commission européenne.
(6) Commission européenne/ICF SA, en coopération avec Wavestone, le Centre pour l’étude de la démocratie, l’université de Trente et Victims Support Europe (2022), Study on online identity theft and identity-related crime (Étude sur l’usurpation d’identité en ligne et la criminalité liée à l’identité, en anglais uniquement), https://op.europa.eu/fr/publication-detail/-/publication/f85399b3-abed-11ec-83e1-01aa75ed71a1/language-fr/format-PDF/source-search
(7) Commission européenne/ICF Consulting Services (2021), Letterbox companies: overview of the phenomenon and existing measures (Sociétés «boîtes aux lettres»: aperçu du phénomène et des mesures existantes, en anglais uniquement), https://op.europa.eu/fr/publication-detail/-/publication/66764f95-5191-11ec-91ac-01aa75ed71a1
(8) Directive (UE) 2019/1151 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 modifiant la directive (UE) 2017/1132 en ce qui concerne l’utilisation d’outils et de processus numériques en droit des sociétés (JO L 186 du 11.7.2019, p. 80).
18.8.2023 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 293/86 |
Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la justification et à la communication des allégations environnementales explicites (directive sur les allégations écologiques)
[COM(2023) 166 final — 2023/0085 (COD)]
(2023/C 293/13)
Rapporteur: |
Angelo PAGLIARA |
Consultation |
Parlement européen, 1.6.2023 Conseil, 2.6.2023 |
Base juridique |
Article 114 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne |
Compétence |
Section «Marché unique, production et consommation» |
Adoption en section |
2.6.2023 |
Adoption en session plénière |
14.6.2023 |
Session plénière no |
579 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
205/2/3 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
Le Comité économique et social européen (CESE) est fermement convaincu que la durabilité est l’un des piliers du développement futur de l’Union européenne et que cette nouvelle proposition offre l’occasion de renforcer le rôle actif des pouvoirs publics et de la société dans la transition rapide vers une économie circulaire (1) et le développement de celle-ci. |
1.2. |
Le Comité encourage la Commission à continuer d’associer systématiquement les partenaires sociaux et les organisations de la société civile, en particulier les organisations de consommateurs, à ce processus, afin de protéger les consommateurs et les entreprises contre l’écoblanchiment. |
1.3. |
Le CESE demande instamment à la Commission de veiller à ce que les exigences énoncées dans la directive sur les allégations vertes deviennent un modèle pour un niveau minimal de protection contre l’écoblanchiment, à intégrer dans la législation sectorielle exclue du champ d’application de cette directive lorsqu’elle couvre certaines allégations volontaires et l’étiquetage. L’adoption d’une législation sectorielle ne devrait pas devenir un moyen de déroger aux dispositions de la directive sur les allégations écologiques, d’introduire des failles ou de réduire la protection des consommateurs. |
1.4. |
Le Comité se dit de plus en plus préoccupé par la multiplication des allégations environnementales fondées sur l’indemnisation au moyen de l’utilisation de crédits de compensation et invite la Commission à interdire clairement les créances fondées sur la compensation. |
1.5. |
Le Comité salue l’intention annoncée d’améliorer la sécurité juridique des allégations environnementales et invite la Commission à veiller à ce que les conditions propices au renforcement de la compétitivité du marché unique soient réunies, notamment par l’introduction de méthodes communes pour étayer les différents types d’allégations. |
1.6. |
Le Comité prend acte de la possibilité de participation volontaire pour les microentreprises et demande à la Commission de mettre en place toutes les mesures nécessaires pour les inclure dans les contrôles effectués par les États membres. En outre, le Comité se félicite de l’importance accordée au respect des règles sur le marché et souligne la nécessité de veiller à ce que la directive soit pleinement appliquée. |
1.7. |
Le Comité attire l’attention sur la prise de conscience croissante des questions environnementales et encourage la Commission à mettre au point des outils spécifiques pour soutenir les opérateurs économiques qui entendent accroître la durabilité environnementale et sociale de leurs méthodes de production et de leurs produits. |
2. Résumé du document de la Commission
2.1. |
La proposition de directive à l’examen a pour objet de compléter le cadre réglementaire visant à soutenir une consommation durable en abordant des aspects et des exigences spécifiques pour les allégations environnementales explicites en ce qui concerne leur justification, leur communication et leur vérification. |
2.2. |
Cette proposition était l’une des initiatives énumérées par la Commission pour mettre en œuvre le pacte vert pour l’Europe, complétant le cadre réglementaire applicable aux allégations environnementales, garantissant ainsi que des informations fiables, comparables et vérifiables soient mises à la disposition des acheteurs afin qu’ils puissent prendre des décisions plus durables (2). La nécessité de lutter contre l’écoblanchiment se reflète également à la fois dans le nouveau plan d’action en faveur de l’économie circulaire (3) et dans le nouvel agenda du consommateur (4). |
2.3. |
La proposition complète la proposition de directive visant à donner aux consommateurs les moyens d’agir en faveur de la transition écologique (5), modifiant la directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil (6). Ces actes établissent ensemble un système clair pour les allégations environnementales, y compris les labels environnementaux. |
2.4. |
La proposition comprend des ensembles de critères minimaux pour la justification et la communication des allégations environnementales; de nouvelles dispositions sur les labels environnementaux et les systèmes d’étiquetage; l’introduction d’une vérification ex ante des allégations environnementales et des systèmes d’étiquetage; et des mesures d’application telles que des contrôles de conformité réguliers et des sanctions. |
2.5. |
La directive ne prévoit toutefois pas de méthodes harmonisées. Elle introduit la possibilité d’adopter des actes délégués ou des modifications à une date ultérieure afin de prévoir des exigences supplémentaires sur des questions spécifiques telles que les allégations climatiques, la durabilité, la capacité à être réutilisé, réparé, ou recyclé, le contenu recyclé, l’utilisation du contenu naturel, y compris les fibres, la performance environnementale et la durabilité, les bioéléments, la biodégradabilité, la biodiversité, la prévention et la réduction des déchets. |
3. Observations générales
3.1. |
Le Comité invite instamment la Commission européenne à élaborer des instruments spécifiques pour promouvoir une culture de l’économie circulaire et, en particulier, à mettre en place des campagnes d’information pour diffuser une «culture circulaire», spécifiquement auprès des jeunes générations. Le Comité encourage également la Commission à recueillir les bonnes pratiques dans ce domaine que les États membres ont développées dans le cadre de leurs activités et à en envisager la diffusion. |
3.2. |
Le grand public, en particulier la jeune génération, est désormais plus attentif aux questions environnementales (7) (8) et, pour cette raison, le marketing écologique est de plus en plus utilisé comme un avantage concurrentiel. |
3.3. |
Les attentes des consommateurs et des parties prenantes en matière de durabilité et de protection de l’environnement sont de plus en plus élevées, mais la confiance dans les allégations environnementales est faible (9). Au-delà de la question de la confiance, il existe un malentendu généralisé quant à la signification de ces allégations. Cette constatation découle de nombreuses études menées non seulement par la Commission, mais aussi par des agences nationales, notamment sur la question des allégations climatiques (10). Il est donc primordial de donner maintenant aux consommateurs les moyens de prendre des décisions d’achat éclairées sur la base d’informations fiables. |
3.4. |
L’analyse d’impact a mis en évidence une série de problèmes qui suscitent des préoccupations croissantes chez les consommateurs, tels que: des pratiques commerciales trompeuses concernant la durabilité des produits; des allégations environnementales peu claires ou mal étayées; et des labels de durabilité qui ne sont pas toujours transparents ou crédibles. Au vu des résultats de l’analyse d’impact, le Comité soutient l’initiative de la Commission et estime qu’une action résolue est nécessaire dans ce domaine. |
3.5. |
Le Comité est convaincu que les consommateurs, s’ils sont mieux informés, peuvent jouer un rôle actif et essentiel dans la transition environnementale, contribuant ainsi à la réalisation des objectifs du pacte vert. Il est fondamental de veiller à ce que la durabilité joue un rôle plus important dans les processus de prise de décision des consommateurs, de sorte qu’elle ait une incidence tant au moment de l’achat que par la suite (en choisissant, le cas échéant, la réparation, lorsque c’est possible, plutôt qu’un nouvel achat, par exemple). Cela complétera les nouvelles exigences en matière d’information environnementale sur les produits, découlant d’initiatives telles que le règlement sur l’écoconception pour des produits durables. Elle garantira des règles communes pour les labels allant au-delà de la législation existante, comme le règlement sur le label écologique de l’Union, le système de management et d’audit environnemental (EMAS) et les règlements relatifs au label pour l’agriculture biologique, à l’étiquetage énergétique et au marquage CE. |
3.6. |
L’article 1er de la proposition exclut une grande partie de la législation sectorielle du champ d’application de la directive, lorsque la législation concernée contient ses propres exigences en matière d’allégations et de systèmes d’étiquetage. Le Comité suggère que la législation sectorielle reflète au moins le même niveau de protection contre l’écoblanchiment, à savoir, au minimum, un niveau équivalent de justification, de communication (pièces justificatives) et de vérification (par un tiers). Par ailleurs, il est nécessaire de préciser que seules les allégations couvertes par ces actes législatifs sont exclues, et non toute allégation concernant les produits visés par la législation sectorielle. Si certaines allégations ne comportent pas d’exigences spécifiques, elles devraient relever du champ d’application de la directive sur les allégations écologiques. Par exemple, l’article 1er exclut la législation relative aux emballages et aux déchets d’emballages, et cette législation ne couvre que les allégations relatives à la recyclabilité et au contenu recyclé. Dès lors, d’autres allégations (telles que l’incidence sur le cycle de vie de certains emballages) devraient relever de la directive sur les allégations écologiques. |
3.7. |
Le Comité reconnaît une préoccupation croissante quant à la prolifération des allégations environnementales fondées sur l’indemnisation au moyen de l’utilisation de crédits de compensation («climatiquement neutre», «avec compensation plastique», etc.), qui ont été reconnues par plusieurs autorités de protection des consommateurs — et dans plusieurs affaires judiciaires — comme scientifiquement inexactes et toujours trompeuses pour les consommateurs. Le Comité demande donc instamment à la Commission de tenir pleinement compte de ces enseignements et d’introduire une interdiction claire des allégations fondées sur la compensation, en plus des exigences relatives à la manière dont les entreprises communiquent leurs contributions aux projets de durabilité plutôt que de demander une compensation. Il s’agit précisément d’aligner pleinement la directive relative aux allégations écologiques sur la directive visant à donner aux consommateurs les moyens d’agir en faveur de la transition écologique. |
3.8. |
Le Comité prend acte de la décision d’exclure les microentreprises de certaines dispositions de la législation au motif que les procédures exigent que les entreprises qui font la demande investissent du temps et des ressources dans la collecte des informations nécessaires et dans le processus de vérification. Le Comité prend note de l’option de participation facultative pour les microentreprises, qui leur permet de tirer parti des avantages découlant des certificats de conformité, si elles décident d’investir des ressources dans ces derniers en passant par la procédure de vérification. Le Comité prend également acte des dispositions relatives au soutien aux PME en général dans le cadre de l’application des exigences découlant de la législation. Néanmoins, le CESE reconnaît qu’il est nécessaire de veiller à ce qu’aucune entreprise ne se sente autorisée à induire les consommateurs en erreur; il soutient pleinement le fait que la possibilité de participation au processus de la directive sur les allégations écologiques ne constitue pas une participation à la directive sur les pratiques commerciales déloyales. La Commission devrait introduire des exigences spécifiques pour veiller à ce que les microentreprises soient correctement incluses dans les contrôles effectués par les États membres, étant donné qu’elles ne sont pas de facto exemptées de la législation plus large sur les pratiques commerciales déloyales. |
3.9. |
Le Comité encourage la Commission à entamer les travaux en vue de l’adoption de règles communes pour étayer les allégations, comme le propose l’article 3, qui lui ouvre la possibilité d’élaborer et d’adopter des méthodes communes pour étayer des allégations spécifiques, sur la base des résultats d’un suivi régulier. Le Comité estime que la Commission devrait d’ores et déjà établir une liste prioritaire d’allégations pour lesquelles des règles communes sont nécessaires, sur la base des informations actuellement disponibles, et commencer à élaborer des méthodologies communes, au-delà de l’évaluation du cycle de vie. Ces mesures sont nécessaires pour garantir une mise en œuvre harmonisée dans toute l’Europe, avec des règles claires pour les autorités de vérification sur la manière d’évaluer les pièces justificatives fournies par les entreprises. Cela éviterait le risque que les entreprises choisissent de faire vérifier leurs allégations dans les pays où elles savent qu’elles ont de meilleures chances d’être certifiées. Cela apporterait également une clarté juridique aux entreprises et éviterait de créer une asymétrie entre, d’une part, les entreprises qui sont en mesure de mettre au point des méthodes internes ou d’accéder à des services externes pour adapter les méthodes à leurs stratégies de commercialisation et, d’autre part, les entreprises qui ne disposent pas de ressources pour le faire. |
3.10. |
Le Comité prend acte de la décision de la Commission de ne pas introduire les méthodes de l’empreinte environnementale de produit et d’organisation en tant qu’exigences à l’appui des allégations. Toutefois, dans les cas où cela est pertinent, le Comité encourage la meilleure utilisation de ces méthodes lors de la définition de méthodes communes de justification. En ce qui concerne l’article 3, paragraphe 1, point c), relatif à l’obligation de démontrer que certains éléments des allégations sont significatifs du point de vue du cycle de vie, le Comité invite instamment la Commission à préciser comment il convient d’évaluer cette importance. |
3.11. |
Le Comité recommande vivement à la Commission de préciser davantage les exigences concernant les allégations relatives à la performance environnementale future d’un produit ou d’une société, énoncées à l’article 5, paragraphe 4. Tout d’abord, les exigences devraient être pleinement alignées sur les dispositions de la directive visant à donner aux consommateurs les moyens d’agir en faveur de la transition écologique. Ensuite, les exigences devraient préciser que de telles allégations ne seront acceptées que lorsqu’elles ne sont pas uniquement fondées sur la compensation et lorsqu’elles sont étayées par des informations supplémentaires claires et compréhensibles fournies par le professionnel, qui définissent des engagements et des objectifs clairs, concrets, fondés sur des données scientifiques et vérifiables, ainsi qu’un plan de mise en œuvre au niveau des opérateurs comprenant des mesures de mise en œuvre et des objectifs intermédiaires concrets et vérifiables qui ne reposent pas sur des compensations et qui sont compatibles avec la réalisation d’un engagement à long terme. Le plan de mise en œuvre devrait être doté d’un budget adéquat et reposer uniquement sur les technologies existantes qui sont économiquement et techniquement viables. Le plan de mise en œuvre, ainsi que les progrès accomplis, devraient être mis à la disposition du public et inclus dans l’allégation en tant qu’informations supplémentaires, et des rapports réguliers devraient être présentés à ce sujet. Les allégations relatives aux performances environnementales futures devraient également faire l’objet d’un suivi indépendant afin de les vérifier et de suivre les progrès accomplis par les professionnels en ce qui concerne leurs engagements et objectifs, en plus du processus de certification prévu à l’article 10. Les allégations relatives aux performances environnementales futures ne devraient être autorisées qu’au niveau du professionnel et non au niveau du produit, autrement les allégations environnementales concernées pourraient induire les consommateurs en erreur. |
3.12. |
Le Comité se félicite que l’article 7 interdise les notations et les notes basées sur un indicateur agrégé des incidences sur l’environnement, à moins qu’elles ne soient introduites dans la législation de l’Union. Bien que leur caractère net et précis soit attrayant pour les consommateurs, le manque de clarté quant aux méthodes qui sous-tendent les notes et leur nombre croissant sont source de confusion et de malentendu. Le Comité encourage la Commission à préciser ce qui relève du champ d’application de cette interdiction, et en particulier ce qui est considéré comme un «impact environnemental». Par exemple, il semble que les scores de réparabilité ne soient pas inclus dans le champ d’application. Il convient de clarifier davantage ce point afin de garantir la sécurité juridique. |
3.13. |
Le Comité accueille favorablement les mesures proposées à l’article 8 pour mettre un terme à la prolifération de nouvelles allégations et étiquettes. Elles apporteront davantage de clarté aux consommateurs et garantiront que seules des informations précieuses et fiables sont communiquées. |
3.14. |
Le Comité se félicite de l’importance accordée à l’application de la législation. Si des exigences détaillées concernant la justification des allégations constituent un progrès évident, l’un des principaux problèmes persistants auxquels les consommateurs sont confrontés est le manque d’application des règlements qu’ils devraient pouvoir considérer comme acquis. Le système de vérification est susceptible de réduire le nombre de fausses allégations sur le marché, mais cela ne sera efficace que si des ressources suffisantes sont allouées aux travaux des autorités de surveillance du marché. Le Comité invite instamment la Commission à explorer tous les canaux possibles pour soutenir les autorités nationales et à encourager les États membres à fournir les ressources nécessaires au suivi. Le Comité accueille favorablement l’obligation de rendre compte des activités de contrôle de l’application de la législation. |
3.15. |
Le Comité se félicite également des dispositions de l’article 16 relatives à l’accès à la justice pour les consommateurs et les organisations de la société civile. Veiller à ce que les organisations de consommateurs puissent intenter des actions en justice contre des allégations trompeuses et non étayées afin de protéger les intérêts collectifs des consommateurs est un moyen efficace de soutenir l’application de la législation. |
3.16. |
Le Comité salue les dispositions de l’article 17, qui précisent les sanctions que les États membres devraient mettre en place. La Commission devrait examiner certaines bonnes pratiques dans ce domaine. |
3.17. |
Le Comité encourage la Commission à adopter toutes les mesures nécessaires — y compris la participation des partenaires sociaux au processus — pour protéger les consommateurs et les entreprises contre l’écoblanchiment. En particulier, le Comité suggère de prévoir des contrôles croisés réguliers entre les autorités nationales, d’une part, et les partenaires sociaux et la société civile au niveau national, d’autre part. En ce qui concerne les mesures prises au niveau européen, le CESE se félicite de la procédure de comité prévue à l’article 19 et demande à pouvoir participer au comité en tant que représentant européen de la société civile. Outre cette procédure de comité, il est nécessaire que les parties prenantes soient dûment associées, notamment aux discussions sur les méthodes communes de justification. Le Comité suggère d’associer des forums participatifs, tels que le forum consultatif sur l’écoconception et le comité de l’Union pour le label écologique, ou de créer une nouvelle table ronde spécifiquement dédiée à cette législation. |
Bruxelles, le 14 juin 2023.
Le président du Comité économique et social européen
Oliver RÖPKE
(1) Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Un nouveau plan d’action pour une économie circulaire — Pour une Europe plus propre et plus compétitive» [COM(2020) 98 final] (JO C 364 du 28.10.2020, p. 94) et avis du Comité économique et social européen sur «Les consommateurs dans l’économie circulaire» (JO C 353 du 18.10.2019, p. 11).
(2) COM(2019) 640 final, 11 décembre 2019.
(3) COM(2020) 98 final, 11 mars 2020.
(4) COM(2020) 696 final, 13 novembre 2020.
(5) Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant les directives 2005/29/CE et 2011/83/UE pour donner aux consommateurs les moyens d’agir en faveur de la transition écologique grâce à une meilleure protection contre les pratiques déloyales et à de meilleures informations, COM(2022) 143 final.
(6) Directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur et modifiant la directive 84/450/CEE du Conseil et les directives 97/7/CE, 98/27/CE et 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil et le règlement (CE) no 2006/2004 du Parlement européen et du Conseil («directive sur les pratiques commerciales déloyales») (JO L 149 du 11.6.2005, p. 22).
(7) Commission européenne, Behavioural Study on Consumers’ engagement in the circular economy (Étude comportementale sur l’engagement des consommateurs dans l’économie circulaire), 2018, p. 10.
(8) The Economist Intelligence — Unit Limited, An Eco-wakening:Measuring global awareness, engagement and action for nature (Un réveil écologique: mesurer la sensibilisation, l’engagement et l’action pour la nature à l’échelle mondiale), 2021 (WWF).
(9) Environmental claims for non-food products (Les allégations environnementales pour des produits non alimentaires), étude commandée par la DG JUST (2014), https://commission.europa.eu/publications/environmental-claims-non-food-products_en
(10) Authority for Consumers & Markets (Autorité néerlandaise des consommateurs et des marchés), ACM: consumers find claims regarding carbon offset unclear (ACM: Les consommateurs trouvent peu claires les allégations relatives à la compensation carbone) (consultée en janvier 2023), https://www.acm.nl/en/publications/acm-consumers-find-claims-regarding-carbon-offset-unclear
Verbraucherzentrale (septembre 2022), Klimaneutrale Produkte: 89 Prozent für klare Regeln und geprüftes Siegel, https://www.verbraucherzentrale.nrw/pressemeldungen/presse-nrw/klimaneutrale-produkte-89-prozent-fuer-klare-regeln-und-geprueftes-siegel-77472
ASA (octobre 2022), New Research into understanding of environmental claims (Nouvelle recherche sur la compréhension des allégations environnementales), https://www.asa.org.uk/news/new-research-into-understanding-of-environmental-claims.html
Kantar Public (2022), CO2 Offset claims — Consumer survey (Demande de compensation CO2 — Enquête auprès des consommateurs), https://www.acm.nl/system/files/documents/acm-publishes-behavioral-research-into-co2-compensation-when-purchasing-airline-tickets.pdf
18.8.2023 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 293/91 |
Avis du Comité économique et social européen sur le rapport de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions sur la mise en œuvre des stratégies macrorégionales de l’Union
[COM(2022) 705 final]
(2023/C 293/14)
Rapporteur: |
Stefano PALMIERI |
Corapporteur: |
Dimitris DIMITRIADIS |
Consultation |
Commission européenne, 2.5.2023 |
Base juridique |
Article 34 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne |
Compétence |
Section «Union économique et monétaire et cohésion économique et sociale» |
Adoption en section |
30.5.2023 |
Adoption en session plénière |
14.6.2023 |
Session plénière no |
579 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
169/1/2 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
Le Comité économique et social européen (CESE) reconnaît que les stratégies macrorégionales jouent un rôle important dans la cohésion sociale, territoriale et économique des régions et contribuent à l’intégration européenne des pays voisins. |
1.2. |
Le CESE souligne que les stratégies macrorégionales traitent de questions qui requièrent que plusieurs pays (et différents acteurs en leur sein) coopèrent sur la base d’une approche intersectorielle et de gouvernance à plusieurs niveaux. Les différents acteurs concernés devraient dès lors s’efforcer de faire coexister l’intérêt national et le principe de coopération et d’assouplir les procédures bureaucratiques et complexes qui rendent les stratégies macrorégionales moins attrayantes. |
1.3. |
Le CESE estime qu’il convient de redoubler d’efforts pour renforcer les stratégies macrorégionales afin qu’elles puissent être des moteurs de changement, inspirer la confiance et promouvoir les valeurs européennes, en particulier en ce qui concerne la cohésion sociale, territoriale et économique des régions et l’intégration des pays voisins, ainsi que le programme à l’horizon 2030. |
1.4. |
Le CESE note que les stratégies macrorégionales se sont avérées être des outils utiles pour faire face à la crise sanitaire et aux effets de l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Plus particulièrement, la stratégie de l’Union européenne (UE) pour la région du Danube (EUSDR) et celle pour la région de la mer Baltique (EUSBSR) ont joué un rôle de premier plan dans le renforcement des liens entre l’Ukraine et l’UE en vue de l’intégration des réfugiés ukrainiens et de la mise en place de couloirs sécurisés pour le transport de marchandises. |
1.5. |
Concernant les transitions écologique, numérique et sociale, le CESE note que le processus de mise en œuvre varie selon chaque stratégie macrorégionale, en raison des différents niveaux et capacités de mise en œuvre des politiques sectorielles, et du degré de préparation des pays tiers. Le CESE estime qu’il est pertinent de s’attaquer aux disparités au moyen de mesures spécifiques, en particulier en ce qui concerne les régions les plus défavorisées, afin d’éviter de transformer la compétitivité économique et la cohésion sociale en handicaps qui accentueront encore le fossé existant entre les territoires les plus «développés» et les autres. |
1.6. |
Le CESE juge essentiel de renforcer le lien entre les transitions écologique, numérique et sociale afin, dans le cadre d’un changement de perspective, de produire «mieux», plutôt que de produire «plus», en évitant ainsi le gaspillage de la surproduction, dans le plein respect du principe d’autonomie stratégique. En ce sens, il est important de valoriser les approches de spécialisation intelligente et de groupement d’entreprises, ainsi que d’assurer une offre d’éducation et de formation pertinente, adéquate et complète. |
1.7. |
Le CESE prend en considération le fait que les organisations de la société civile et les partenaires sociaux jouent un rôle essentiel s’agissant de contribuer à une meilleure prise de décision, notamment en rapprochant les collectivités locales et régionales des stratégies macrorégionales. Il encourage les États membres, mais aussi la Commission européenne, à associer encore davantage les organisations de la société civile, les partenaires sociaux et la gouvernance régionale et locale, de manière à renforcer le sentiment d’appropriation des programmes. |
1.8. |
De plus, il devient important, à des fins d’efficience et d’efficacité des quatre stratégies macrorégionales, de renforcer les capacités des acteurs étatiques et non étatiques locaux. Le CESE juge essentiel que des processus d’information et de formation soient lancés à leur intention. Dans ce contexte, il propose de mettre en place un système d’échange de courte et moyenne durée pour les fonctionnaires des régions couvertes par les stratégies, similaire au programme Erasmus. Le CESE accueille favorablement l’initiative visant à instaurer un dialogue citoyen institutionnalisé entre les macrorégions et estime qu’il pourrait contribuer à sa mise en place. Il importe également que le Comité, en tant que maison de la société civile organisée et des partenaires sociaux, joue un rôle plus actif et soit représenté au sein du conseil de direction de chaque stratégie macrorégionale. Cela permettrait de rendre les synergies et la coopération plus efficaces et plus visibles. À cet égard, le CESE propose d’organiser des forums avec les représentants de la société civile et des partenaires sociaux des États membres concernés par les stratégies macrorégionales. |
1.9. |
En outre, le CESE demande que toutes les stratégies macrorégionales explorent les possibilités de remédier à la participation insuffisante, et pourtant cruciale, des principaux moteurs locaux de développement (PME, pôles industriels existants, banques locales, entreprises sociales, syndicats, universités, ONG et autres OSC) ainsi que des entreprises multinationales et des institutions financières et banques internationales. Dans le cadre de ces stratégies, l’adoption du principe de partenariat devrait être pleinement mise en œuvre avec la pleine participation des parties prenantes concernées. |
1.10. |
Le CESE souligne l’importance d’aligner les stratégies macrorégionales sur les objectifs du programme à l’horizon 2030 et de créer une complémentarité avec ceux de la politique de cohésion pour la période 2021-2027 afin de rendre les initiatives macrorégionales plus efficaces. |
1.11. |
En dépit des efforts déployés par la Commission afin d’accroître la visibilité des stratégies macrorégionales, le CESE est d’avis qu’une meilleure communication ne dépend pas seulement d’un seul acteur de premier plan mais également d’une implication accrue des États membres et des pays tiers participant aux stratégies macrorégionales. Le Comité peut faire évoluer les choses dans ce sens. Il estime en outre qu’associer la société civile à cette démarche, à plusieurs niveaux, pourrait constituer un apport essentiel. |
1.12. |
Le CESE suggère d’envisager une approche différente de la gouvernance des stratégies macrorégionales. Le niveau politique étant représenté par les ministres des affaires étrangères, il conviendrait de renforcer le niveau opérationnel en intensifiant la coopération avec les ministères des affaires européennes et ceux responsables des fonds de l’UE. La participation des collectivités régionales, qui s’accompagnerait d’un renforcement de leurs capacités administratives et de l’aménagement du territoire, est également cruciale pour la mise en œuvre des stratégies macrorégionales. |
1.13. |
Le CESE espère qu’avec l’approbation du rapport de la commission du développement régional du Parlement européen, les conditions seront réunies pour qu’une stratégie macrorégionale soit également mise en œuvre dans les régions de la Méditerranée occidentale. |
1.14. |
Dans le cadre du processus d’évaluation de la future politique de cohésion, il conviendra d’évaluer soigneusement les améliorations à apporter aux stratégies macrorégionales afin de libérer leur plein potentiel. |
2. Introduction
2.1. |
Depuis 2009, l’Union européenne met en place des stratégies macrorégionales conçues comme des cadres intégrés de coopération renforcée, qui permettent à des pays situés dans la même région de résoudre ensemble des problématiques communes et de tirer le meilleur parti de leur potentiel commun. |
2.2. |
Ce sont les États membres et les pays tiers occupant une zone géographique commune qui définissent leur stratégie macrorégionale et en fixent les objectifs; le territoire concerné est délimité en fonction de critères physiques (bassin fluvial, bassin maritime, massif montagneux) et s’appuie sur des liens socioéconomiques et culturels historiques préexistants pour apporter la réponse nécessaire aux problèmes qui résultent d’une extension en mutation rapide de l’Union européenne. |
2.3. |
Les stratégies macrorégionales proposent un cadre intégré de coopération renforcée qui permet collectivement de relever des défis et d’exploiter des possibilités liés à des territoires spécifiques de l’Union européenne là où cela ne pourrait être fait individuellement au moyen d’instruments communs. En outre, compte tenu des circonstances actuelles, elles peuvent constituer un instrument important pour promouvoir une expansion géographique de l’influence de l’UE. |
2.4. |
Dans le présent avis, le CESE fait part de son évaluation du quatrième rapport sur la mise en œuvre des stratégies macrorégionales de l’Union européenne. Il tient compte du fait qu’au cours de la période sur laquelle porte le rapport, soit de la mi-2020 à la mi-2022, les 19 pays de l’Union et les dix pays tiers concernés par les stratégies macrorégionales ont fait preuve d’une résilience remarquable face à des chocs extérieurs graves et continus et ont dû adapter leurs activités habituelles de coopération à des fins de solidarité, pour pouvoir affronter ensemble la COVID-19 et ses conséquences ainsi que celles de l’agression militaire injustifiée de la Russie à l’encontre de l’Ukraine. |
3. Analyse générale de la mise en œuvre des stratégies macrorégionales
3.1. Stratégie de l’Union européenne pour la région de la mer Baltique (EUSBSR)
3.1.1. |
La stratégie de l’Union européenne pour la région de la mer Baltique, lancée en 2009, concerne huit États membres de l’Union et quatre pays tiers limitrophes. Elle a trois objectifs principaux: sauver la mer Baltique, désenclaver la région et accroître la prospérité, et se subdivise selon des axes thématiques en 14 domaines politiques interconnectés, notamment les risques, la bioéconomie, la santé et l’éducation. |
3.1.2. |
Le programme Interreg «Région de la mer Baltique» joue depuis le départ un rôle clé dans le financement du déploiement de la macrorégion. Pour la période 2014-2020, le programme Interreg a contribué à hauteur d’environ 278 millions d’EUR à la réalisation de projets dans la région. Pour la période 2021-2027, il sera doté d’un budget de 259 millions d’EUR. |
3.1.3. |
En 2021, le plan d’action de l’EUSBSR a été révisé de sorte à réduire le nombre d’activités réalisables, créer un système facilitant une coopération plus étroite entre les parties prenantes (y compris les partenaires économiques et sociaux) et mettre en place un nouvel outil de soutien administratif et technique à la gestion, au développement et à la communication: le Baltic Sea Strategic Point (point de contact pour l’EUSBSR). |
3.1.4. |
L’EUSBSR a aidé les territoires concernés à atteindre leurs objectifs de croissance intelligente et durable. Bien que la suspension de la coopération avec la Russie et la Biélorussie, à la suite de l’invasion de l’Ukraine, ait fait obstacle à la résolution des principaux problèmes rencontrés par la région, la stratégie présente un bon potentiel de résolution des difficultés nouvelles. |
3.2. Stratégie de l’Union européenne pour la région du Danube (EUSDR)
3.2.1. |
La stratégie de l’Union européenne pour la région du Danube, lancée en décembre 2010 et mise à jour en 2020, concerne 14 pays, à savoir neuf États membres de l’Union et cinq pays tiers. Elle repose sur quatre piliers centraux: 1) mettre en place des liaisons, 2) protéger l’environnement, 3) apporter la prospérité et 4) renforcer la région. Ces quatre objectifs sont subdivisés en douze domaines prioritaires. |
3.2.2. |
Au cours de la période 2014-2020, le principal soutien financier a été celui du programme transnational Interreg pour la région du Danube, pour un montant total de 231 millions d’EUR. Toutefois, pour la période 2021-2027, ce même programme prévoit un montant total de 213,1 millions d’EUR. |
3.2.3. |
En 2020, le plan d’action a été modifié par la mise en perspective des activités dans un contexte stratégique et les objectifs ont été réorganisés. Cette révision poursuit trois objectifs: rationaliser les activités en faisant passer leur nombre de 137 à 85, valoriser le plan d’action en tant que document d’orientation stratégique pour la mise en œuvre de l’EUSDR, et mettre le plan d’action en plus grande cohérence avec les autres instruments et programmes de financement, en particulier avec les programmes relevant de la politique de cohésion, mais aussi avec les autres instruments et programmes de financement de l’Union, ainsi qu’avec les financements nationaux, régionaux et locaux des pays du Danube. La révision du plan d’action a par ailleurs permis de faire correspondre les actions prévues par l’EUSDR aux nouvelles priorités de l’Union, notamment au pacte vert pour l’Europe. Les activités visant à associer la jeunesse ainsi qu’une meilleure collaboration avec les fonds de l’UE ont permis des avancées considérables. |
3.2.4. |
Cependant, malgré cette révision, les disparités socioéconomiques tangibles qui caractérisent la région du Danube, le manque de ressources financières et le déficit d’engagement politique des pays concernés viennent entraver et ralentir la mise en œuvre de la stratégie macrorégionale. Par ailleurs, les pays participants concentrent actuellement leurs efforts sur des questions plus larges, voire d’ordre mondial, telles que la relance post-pandémie, la lutte contre le changement climatique, ou encore la transition numérique, qui prennent ainsi le pas sur l’amélioration de la mise en œuvre de la stratégie de l’EUSDR. |
3.3. Stratégie de l’Union européenne pour la région de l’Adriatique et de la mer Ionienne (EUSAIR)
3.3.1. |
Lancée en 2014, l’EUSAIR rassemble dix pays (quatre États membres de l’Union et six pays tiers). La stratégie s’articule autour de quatre piliers principaux: croissance bleue, interconnexion de la région, qualité environnementale et tourisme durable. Le point de contact de l’EUSAIR fournit un soutien opérationnel au niveau de la coordination et de la mise en œuvre. |
3.3.2. |
Pour la période 2014-2020, le programme Interreg Adrion a mis à disposition 118 millions d’EUR en vue du financement de projets dans le cadre des quatre piliers de l’EUSAIR, notamment le soutien à la gouvernance de l’EUSAIR au titre de l’axe prioritaire no 4. Pour la période 2021-2027, un montant de 136,7 millions d’EUR sera disponible dans le cadre du programme Interreg Adrion. |
3.3.3. |
Le CESE note avec satisfaction les efforts déployés dans le cadre de l’EUSAIR en vue de la mise en place d’un conseil de la jeunesse pour cette stratégie. Il appelle à renforcer le fonctionnement des conseils de la jeunesse dans le cadre des autres stratégies macrorégionales et demande que toutes les stratégies macrorégionales donnent à ces conseils les moyens d’agir et institutionnalisent un dialogue avec eux, probablement dans le cadre des forums annuels. |
3.3.4. |
En novembre 2021, dans son rapport sur le repositionnement de la stratégie de l’Union européenne pour la région de l’Adriatique et de la mer Ionienne, la Commission a redéfini l’identité de la marque EUSAIR afin de la rendre plus compréhensible par le public auquel elle s’adresse. Elle souligne dans ledit rapport qu’il convient de renforcer la mise en cohérence de l’EUSAIR avec les priorités politiques de l’Union, telles que le pacte vert pour l’Europe et la transition numérique, tout en plaçant la société civile et les jeunes au cœur de ses priorités. |
3.3.5. |
En ce qui concerne les progrès de l’EUSAIR, malgré les résultats obtenus sur le plan de la stabilité de la région et de la convergence entre les pays concernés, il subsiste des possibilités inexploitées de créer des synergies avec d’autres initiatives multilatérales au sein de la macrorégion, ainsi que des disparités entre les pays membres de l’UE et ceux qui n’en font pas partie. La stratégie comporte en effet des dimensions trop nombreuses, porte sur un territoire très complexe et hétérogène et poursuit trop d’objectifs. |
3.4. Stratégie de l’Union européenne pour la région alpine (EUSALP)
3.4.1. |
La stratégie de l’Union européenne pour la région alpine (EUSALP), lancée en 2015, est la stratégie macrorégionale européenne la plus récente. Elle associe sept États, dont cinq membres de l’Union et deux pays tiers. La stratégie prévoit trois domaines thématiques: croissance économique et innovation, mobilité et connectivité, et environnement et énergie. Ces trois domaines thématiques sont intégrés dans une catégorie politique transversale axée sur la gouvernance, qui vise à mettre en place un modèle robuste de gouvernance macrorégionale pour l’arc alpin. |
3.4.2. |
En ce qui concerne les financements, le programme Interreg Espace alpin a mobilisé, au cours de la période 2014-2020, 139 millions d’EUR, tandis que pour la période 2021-2027, un montant total de 107 millions d’EUR est disponible. Ces financements interviennent en soutien à quatre priorités qui visent à faire de la région alpine une zone verte, résiliente au changement climatique et à zéro émission de dioxyde de carbone et de monoxyde de carbone. |
3.4.3. |
Malgré les fortes disparités relevées entre les zones urbaines et les zones rurales montagneuses, la macrorégion présente une forte interdépendance socioéconomique. Certains des membres de l’EUSALP (Allemagne, Autriche, Slovénie et Italie) participent à d’autres stratégies macrorégionales, ce qui a causé des difficultés. Un engagement accru dans les processus de gouvernance est de toute évidence nécessaire pour faire des chevauchements une complémentarité. |
3.4.4. |
En comparaison avec les autres stratégies macrorégionales, l’EUSALP est très structurée, la région alpine disposant d’un tissu institutionnel étroit, assorti d’une longue tradition de coopération, notamment dans le cadre de la convention alpine et d’initiatives telles que l’Arge Alp, Euromontana, l’Alliance dans les Alpes (autorités locales), l’Alparc (réseau d’espaces protégés) et le Comité scientifique international pour la recherche dans les Alpes, ainsi que d’autres organisations actives dans la région. Les deux pays de l’EUSALP non membres de l’Union, à savoir la Suisse et le Liechtenstein, disposent d’une forte capacité institutionnelle et administrative, qui leur permet de coopérer avec les États membres de l’Union sur un pied d’égalité. |
4. Le cadre macrorégional et la guerre en Ukraine
4.1. |
Les stratégies macrorégionales ont pâti, directement ou indirectement, des conséquences de la guerre en Ukraine. Les activités de coopération menées dans le cadre des macrorégions de l’Union ont en effet dû se concentrer sur des initiatives de solidarité visant à faire face collectivement aux effets de l’agression militaire injustifiée de la Russie à l’encontre de l’Ukraine. |
4.2. |
Parmi les quatre stratégies macrorégionales, ce sont l’EUSDR et l’EUSBSR qui ont certainement eu l’influence la plus «directe» sur la mise en œuvre des activités de coopération.
|
4.2.1. |
Néanmoins, bien que l’orientation à long terme des stratégies macrorégionales ne devrait pas être aisément modifiée, les changements structurels intervenus sur la scène géopolitique mondiale — et, à cet égard, la guerre en Ukraine constitue un événement majeur — affectent le contenu des quatre stratégies macrorégionales, car ils réaffirment l’importance de la cohésion et de la collaboration transrégionales/transfrontalières en Europe, ainsi que dans l’espace eurasien. |
5. Le rôle et l’incidence des stratégies macrorégionales dans la mise en œuvre des processus de transition écologique, numérique et sociale
5.1. |
Bien que les quatre stratégies macrorégionales interviennent toutes en appui à la concrétisation des objectifs liés à la transition écologique, numérique et sociale de l’Union, le processus de mise en œuvre varie évidemment selon chacune, en raison des différents niveaux et capacités de mise en œuvre des politiques sectorielles (environnementales, numériques/d’innovation et sociales), ainsi que du degré de préparation des pays tiers face aux défis inhérents à ces mêmes transitions. |
5.2. |
Il convient de souligner que ces disparités, en l’absence de mesures spécifiques de soutien et de financement, en particulier pour les stratégies macrorégionales qui connaissent le plus de difficultés, risquent de se transformer en handicaps qui viendront creuser le fossé existant entre les territoires les plus «développés» et les autres, au lieu d’être un moteur de compétitivité économique et de cohésion sociale. Cela est également problématique dans le cas des régions périphériques ou éloignées, qui sont toujours défavorisées par rapport aux régions centrales, urbaines ou métropolitaines. À cet égard, le soutien et les incitations en faveur de la coopération régionale et transfrontalière peuvent être très bénéfiques. |
5.3. |
Une lecture approfondie du 4e rapport à l’examen et l’analyse des projets financés par les programmes Interreg au cours de la période 2014-2020 font apparaître un lien étroit entre les transitions écologique et numérique. Plusieurs projets ont été lancés et déployés, mais il est difficile de déterminer si ces initiatives ont été réellement efficaces pour accompagner le changement. Le CESE juge opportun de prendre appui sur les résultats obtenus pour exploiter les possibilités offertes par les programmes Interreg pour la période 2021-2027. |
5.4. |
Pour le CESE, la faiblesse principale relevée dans toutes les stratégies macrorégionales est sans aucun doute le faible lien établi entre les processus de transition écologique et numérique, d’une part, et les processus sociaux, d’autre part, ce qui limite dans de nombreux cas la dimension sociale à des formes d’engagement et de participation de groupes non représentatifs des besoins et des intérêts de la société civile et des partenaires sociaux. Dans son avis exploratoire intitulé «Améliorer la convergence économique et la compétitivité au sein des macrorégions, à l’exemple de la stratégie de l’Union européenne pour la région du Danube — le rôle des groupements transnationaux» (1), le CESE a souligné que s’agissant de réduire les disparités sociales et géographiques et de renforcer la durabilité environnementale, les performances des stratégies macrorégionales demeurent modestes, très probablement en raison de la complexité de leur gouvernance et des arrangements intergouvernementaux, du niveau de bureaucratie, du manque d’homogénéité transrégionale ainsi que d’une association insuffisante des partenaires sociaux, des agents socioéconomiques et des organisations de la société civile. |
5.5. |
L’objectif des stratégies de transition écologique et numérique est de permettre de produire mieux, plutôt que de produire plus. Si cette approche semble juste et cohérente avec les orientations du CESE, elle présente des aspects qui, faute d’être traités, risquent de se transformer d’atouts qu’ils étaient en problèmes critiques. En effet, le taux d’emploi et les recettes fiscales sont étroitement liés à la croissance du PIB: si celui-ci se contracte, il devient plus compliqué de financer la santé, l’éducation et la justice sociale. |
5.6. |
La réponse apportée par l’Union à ce paradoxe est le pacte vert européen — un ensemble de mesures en faveur d’une croissance économique durable qui tienne compte de l’environnement, des ressources naturelles et de la cohésion sociale. Cependant, malgré la vision stratégique qu’il propose, de nombreux facteurs pourraient venir mettre en péril la capacité de ce pacte d’accompagner avec succès les transitions. La réduction du capital humain disponible ainsi que l’augmentation des dépenses de santé et de retraite risquent d’entraîner au sein des stratégies macrorégionales une réduction des ressources nécessaires pour soutenir les investissements dans les transitions écologique et numérique. |
5.7. |
La double transition (écologique et numérique), bien qu’indispensable, risque d’être insuffisante, en particulier au niveau des stratégies macrorégionales, et de requérir des mesures complémentaires pour parvenir à un développement économique global et durable de la société, parallèlement à la croissance économique. |
5.7.1. |
La spécialisation intelligente et les groupements d’entreprises sont importants pour la double transition: i) promouvoir la mise en réseau et la création de groupements d’entreprises constitue le moyen le plus abouti de soutenir l’innovation et le développement dans les rangs des PME; ii) les activités d’intermédiation sous la forme de conseils et de services administratifs (par le truchement des agences régionales de développement, des chambres de commerce, des gestionnaires de groupements, etc.) accroissent l’efficacité de la mise en réseau et de la création de groupements [comparé au contenu de l’avis exploratoire du CESE (2)]. |
5.8. |
En outre, le CESE est également d’avis que, pour faire de la double transition une réussite et une opportunité concrète, et non un poids, il y a lieu d’appuyer la transition sociale en créant des plateformes de codéveloppement au sein desquelles la société civile et les partenaires sociaux joueraient un rôle de premier plan, de sorte que les besoins et les problèmes des partenaires sociaux et économiques seraient placés au cœur des choix de développement et de cohésion. |
5.9. |
Les stratégies macrorégionales devraient être utilisées comme des plateformes d’expérimentation pour la définition d’instruments innovants, tels que des initiatives de «fiscalité durable» et de «régimes d’incitation» visant la création d’un système fiscal qui permette de répondre aux besoins de la société, même lorsque la croissance économique est faible ou négative. Ces interventions ouvriraient la voie à des formes évoluées de résilience, à même d’anticiper les crises qui frappent désormais cycliquement les territoires concernés par les stratégies macrorégionales. |
5.10. |
Il convient de souligner la nécessité d’utiliser les stratégies macrorégionales comme des outils de soutien au «changement de culture» pour la planification des stratégies et la mise en œuvre d’initiatives susceptibles de contribuer à la réalisation des objectifs de la politique de cohésion et du programme de développement durable à l’horizon 2030. À cet égard, le CESE souligne le défaut de coopération entre les différentes stratégies macrorégionales et, partant, la nécessité de consolider et de promouvoir les instruments transmacrorégionaux de renforcement des capacités. |
5.11. |
Afin de s’adapter plus particulièrement à la transition numérique, il convient de soutenir les stratégies macrorégionales, notamment en assurant une offre d’éducation et de formation adéquate et complète. Compte tenu de la diversité des pays participant aux stratégies macrorégionales (États membres de l’UE, pays candidats, etc.), il est nécessaire de combler l’écart entre eux à cet égard. Dans son avis exploratoire (3), le CESE soutient qu’à l’avenir, les stratégies macrorégionales bénéficieront largement de la mise en place de réseaux efficaces d’activités éducatives dans le contexte de la numérisation de la production, ainsi que d’initiatives sur les écosystèmes interrégionaux de recherche et d’innovation efficaces, dans les activités de R&D fondamentale et appliquée. |
6. La dimension territoriale des stratégies macrorégionales et la participation de la société civile et des partenaires sociaux
6.1. |
Bien que les stratégies macrorégionales correspondent à l’objectif général de la politique de cohésion, le CESE estime que, pour contribuer à renforcer la cohésion économique, sociale et territoriale, il convient de consolider et d’améliorer les initiatives partant du terrain, notamment en ce qui concerne les activités de programmation et de planification, telles que la définition des outils de mise en œuvre des financements européens en gestion indirecte. |
6.2. |
Le CESE est d’avis que la dimension territoriale doit prendre une place centrale dans la mise en œuvre des stratégies macrorégionales, à contre-courant de la tendance actuelle qui donne à ces dernières un rôle d’outil de mise en œuvre au niveau régional et local des stratégies européennes. Au contraire, les stratégies européennes devraient être le cadre dans lequel déployer des initiatives selon la formule du développement local participatif, de sorte que les interventions puissent être rattachées directement aux territoires où il faut agir. |
6.3. |
L’appropriation par les citoyens de même que leur participation et leur motivation peuvent être renforcées en associant davantage la gouvernance locale et régionale et en mettant en place de petits projets régionaux ou transfrontaliers dont les résultats sont immédiats et visibles. Parmi les bons exemples à cet égard figurent les projets de coopération en cas d’urgence sanitaire et hospitalière ou le projet de coopération en matière de gestion des catastrophes, d’une structure analogue, qui sont confrontés au même type de problèmes à résoudre, mais qui apportent également des avantages similaires. |
6.4. |
Les défis que les macrorégions ont dû relever, notamment en raison de la crise de la COVID-19 et de la guerre en Ukraine, et ceux qui se profilent pour les prochaines années exigeront non seulement un soutien politique fort, mais aussi une participation accrue de la société civile et des partenaires sociaux au processus de gouvernance et de mise en œuvre, ainsi que le renforcement du système entrepreneurial moyennant des mesures de soutien à la compétitivité des PME. |
6.5. |
Si des initiatives ont bien été mises en œuvre dans le cadre de chacune des stratégies macrorégionales, celles-ci doivent de toute évidence être dotées d’une véritable «dimension horizontale» (participation de la société civile) intégrant et informant la «dimension verticale» (participation des régions et des collectivités locales) et la gouvernance à plusieurs niveaux dans le plein respect des principes de subsidiarité et de proportionnalité, pour éviter que les objectifs d’un État ou d’un territoire ne prévalent sur les intérêts communs. |
6.6. |
Le CESE estime nécessaire d’encourager, au niveau régional et local, un processus aussi large que possible de formation, de débat et de partage des choix économiques, sociaux et environnementaux intéressant les macrorégions. Cet objectif pourra être atteint au moyen de méthodes éprouvées dans d’autres contextes, fondées sur des comparaisons entre les collectivités locales, les partenaires sociaux et économiques et d’autres organismes représentatifs de la société civile. |
6.7. |
Chaque stratégie macrorégionale devrait prévoir la création d’un «forum de la société civile et des partenaires sociaux», dont les activités devraient s’articuler avec celles des autres plateformes regroupant des parties prenantes et s’étoffer selon un mode opératoire qui permette la participation effective des représentants des partenaires sociaux et économiques à la mise en œuvre des stratégies au niveau macrorégional, régional et local. Des forums annuels de ce type pourraient assurer la continuité des stratégies macrorégionales et offrir des possibilités de nouvelles idées innovantes ainsi que de réunions entre entreprises (B2B). Enfin, ils contribueront à améliorer la visibilité et la communication des stratégies macrorégionales et à renforcer la coopération entre elles grâce à l’échange de bonnes pratiques, principalement entre stratégies voisines. Le CESE propose que ces forums spécifiques se tiennent suivant un principe de rotation dans différents endroits au sein des régions participant aux stratégies macrorégionales, et se dit prêt à soutenir activement ces manifestations. |
6.8. |
Il est fondamental de promouvoir les activités de renforcement des capacités pour accompagner tant les collectivités régionales que locales, et accroître la participation proactive de la société civile organisée et des partenaires sociaux aux processus de mise au point des stratégies macrorégionales. Dans ce contexte, il y a lieu de veiller à ce que le principe de partenariat s’applique aux projets menés dans le cadre des stratégies macrorégionales, afin que les acteurs locaux soient en mesure d’y participer activement. Ces activités devraient venir appuyer la sensibilisation des citoyens et leur permettre d’améliorer leur connaissance des principaux thèmes et activités liés aux stratégies macrorégionales. |
6.9. |
Le CESE propose en particulier de mettre en place un système d’échange de courte et moyenne durée pour les fonctionnaires des régions couvertes par les stratégies, similaire au programme Erasmus; il se déclare disposé à intervenir comme un des facilitateurs de cette initiative. Nous sommes intimement convaincus que cela contribuera considérablement au renforcement des capacités et à la sensibilisation, et permettra également de surmonter progressivement les obstacles bureaucratiques résultant des disparités entre les pays. |
7. Autres actions prioritaires pour améliorer l’efficacité des stratégies macrorégionales
7.1. |
La cohérence et la correspondance des stratégies macrorégionales avec la politique de cohésion et le programme de développement durable à l’horizon 2030 sont une priorité pour garantir que les intérêts particuliers ne prennent pas le pas sur l’intérêt général. Si la cohérence avec les priorités de la politique de cohésion est une obligation dans le cadre du processus de planification et d’élaboration des stratégies macrorégionales, certaines de ces stratégies ne correspondent que peu au programme à l’horizon 2030. |
7.2. |
En ce qui concerne la cohérence et la complémentarité des stratégies macrorégionales avec ce programme, il convient de souligner un processus vertueux mis en place par l’EUSBSR grâce à l’initiative «Baltic 2030 — Bumps on the Road» (Baltique 2030 — Obstacles et solutions). Cette initiative, qui met en lumière les objectifs de développement durable (ODD) les plus cohérents avec les priorités de la stratégie macrorégionale, a déployé un système efficace pour accompagner la planification des initiatives et la mesure des performances. |
7.3. |
La mise en correspondance des stratégies macrorégionales avec les objectifs du programme à l’horizon 2030 et la création de complémentarités avec la politique de cohésion pour la période 2021-2027 est sans aucun doute une activité stratégique qui viendra appuyer l’efficacité des initiatives macrorégionales. Cette activité devrait accorder la priorité aux ODD suivants: 3. bonne santé et bien-être; 4. éducation de qualité; 5. égalité entre les sexes; 7. énergie propre et d’un coût abordable; 8. travail décent et croissance économique; 9. industrie, innovation et infrastructure; 11. villes et communautés durables; 12. consommation et production responsables; 13. lutte contre les changements climatiques; 14. vie aquatique; 15. vie terrestre. |
7.3.1. |
Cependant, compte tenu à la fois du nombre élevé de domaines à traiter et des ressources limitées disponibles, il est souhaitable de hiérarchiser raisonnablement les tâches en fonction de deux aspects principaux distincts:
|
7.4. |
La réussite des stratégies macrorégionales dépend évidemment de leur capacité à garantir que les fonds européens, nationaux, régionaux et les autres fonds publics et privés puissent financer leurs priorités en soutenant leurs projets. Il est évident que cette priorité devra être épaulée par des plans de complémentarité et par des synergies entre les différentes solutions de financement. Il conviendra de favoriser, dans la mesure du possible, la bonne articulation des ressources financières transnationales et transfrontalières avec les ressources nationales et régionales, y compris par une approche multisectorielle. |
7.5. |
Il conviendrait de promouvoir les trajectoires adoptées par toutes les stratégies macrorégionales, ainsi que les réseaux de dialogue et de coopération, parmi les autorités de gestion du Fonds social européen, du Fonds européen de développement régional, du Fonds européen agricole pour le développement rural et du Fonds européen pour les affaires maritimes, la pêche et l’aquaculture afin de recenser les problèmes et les possibilités sur le plan thématique auxquels tenter d’apporter une réponse par la mise à disposition de différentes sources de financement. |
7.6. |
Enfin, la participation réelle aux stratégies macrorégionales des principaux moteurs locaux de développement (PME, pôles industriels existants, banques locales, entreprises sociales, syndicats, universités, ONG et autres OSC), ainsi que des entreprises multinationales et des institutions financières et banques internationales, est essentielle. Dans le cadre de ces stratégies, l’adoption du principe de partenariat devrait être pleinement mise en œuvre avec la pleine participation des parties prenantes concernées. |
7.6.1. |
Pour les PME, le problème est leur capacité limitée à obtenir les informations pertinentes et le manque de moyens techniques pour exploiter les possibilités qui en découlent. Le développement de pôles entre entreprises et entre entreprises et gouvernance pourrait être un moyen de résoudre le problème. |
8. Perspectives d’avenir
8.1. |
L’avenir réserve aux stratégies macrorégionales des défis encore plus complexes qui, s’ils ne sont pas traités de manière adéquate au niveau territorial, se transformeront rapidement en obstacles. Le CESE tient compte du fait que les organisations de la société civile et les partenaires sociaux jouent un rôle essentiel dans l’amélioration du processus décisionnel, notamment en rapprochant les communautés locales et régionales des stratégies macrorégionales, et encourage les États membres, mais aussi la Commission européenne, à associer encore davantage la société civile et les partenaires sociaux afin de renforcer leur implication dans les programmes. |
8.2. |
Le CESE prend par ailleurs acte du fait que les stratégies macrorégionales traitent de questions qui exigent une coopération entre plusieurs pays selon une approche de gouvernance intersectorielle et multiniveaux. Les stratégies macrorégionales devraient affiner l’identité des territoires qu’elles concernent en accroissant la responsabilité et la participation active des citoyens. La souplesse offerte par le cadre de coopération des stratégies macrorégionales devrait être considérée comme un avantage, car elle permet de trouver des solutions qui seraient difficiles à appliquer dans des contextes plus formels marqués par des intérêts nationaux concurrents. Dans les faits, il n’en va toutefois pas ainsi. Ce sont les autorités nationales et centralisées qui sont responsables de la mise en œuvre des stratégies macrorégionales, entraînant des procédures bureaucratiques complexes qui rendent au final les stratégies macrorégionales moins attractives. |
8.3. |
Le CESE accueille favorablement l’initiative visant à instaurer un dialogue citoyen institutionnalisé entre les macrorégions et fait offre de service à cet égard. Il est également important que le CESE, la maison de la société civile organisée, joue un rôle plus actif et siège au conseil de direction de toutes les stratégies macrorégionales. Ainsi, les synergies et les collaborations pourront devenir plus efficaces. |
8.4. |
Le CESE suggère d’envisager un type de gouvernance différent pour les stratégies macrorégionales. Le niveau politique étant représenté par les ministres des Affaires étrangères, le niveau opérationnel devrait quant à lui être rehaussé par une coopération renforcée avec les ministères des Affaires européennes et les instances chargées de la gestion des fonds européens. Par ailleurs, la participation des autorités régionales, grâce aux pouvoirs qui leur sont conférés, est fondamentale pour la mise en œuvre des stratégies macrorégionales. |
8.5. |
Le CESE estime qu’un lien plus étroit devrait être établi entre la transition énergétique et numérique et la dimension sociale de la politique de l’Union. 2023 ayant été choisie comme Année européenne des compétences, il convient d’accorder une plus grande attention aux modalités de la transition énergétique en ce qui concerne l’acquisition d’aptitudes et de compétences par les travailleurs. |
8.6. |
Les parties prenantes des stratégies macrorégionales sont encouragées à assurer un suivi plus étroit, à définir des projets, des programmes et des actions moins abstraits et plus ciblés, avec des points de départ et d’arrivée mesurables, de manière à surveiller les progrès qu’elles réalisent. |
8.7. |
Le CESE note que la Commission européenne a déployé des efforts considérables pour accroître la visibilité des stratégies macrorégionales. Toutefois, une meilleure communication ne dépend pas uniquement d’un acteur clé, mais aussi des États membres et des stratégies macrorégionales mêmes. Le CESE peut apporter une aide dans ce sens, la participation de la société civile et des partenaires sociaux pouvant être essentielle. |
8.8. |
Le CESE est d’avis que les stratégies macrorégionales jouent un rôle important dans la cohésion sociale, territoriale et économique des régions, et qu’elles contribuent également à l’intégration européenne des pays voisins. Dans ce contexte, il convient de consacrer davantage d’efforts à la transformation des stratégies macrorégionales de sorte qu’elles puissent devenir motrices du changement, du renforcement de la confiance et de la promotion des valeurs européennes. En outre, la durabilité, la continuité et l’interconnexion des initiatives et projets transrégionaux et transfrontaliers doivent être renforcées. Dans cet esprit, d’autres types de coopération transrégionale et transfrontalière institutionnalisée, tels que les GECT et les eurorégions, devraient être utilisés de manière globale, conformément aux champs d’application des stratégies macrorégionales. |
8.9. |
Sur le plan de l’environnement, il sera essentiel de renforcer la capacité opérationnelle des stratégies macrorégionales à appuyer la lutte contre le changement climatique en dotant la société civile d’outils utiles pour parer aux risques et adopter un mode de vie plus durable. |
8.10. |
Dans le domaine économique, la priorité sera de soutenir, aux niveaux territorial et local, un changement de modèle économique visant à réduire la consommation de ressources naturelles et de matières premières. Il faudra en outre étayer la transition vers des initiatives à émissions nulles, la mobilité durable, l’économie circulaire, le tourisme durable et la valorisation des économies locales. |
8.11. |
Pour que les innovations technologiques telles que la numérisation, la robotisation et les biotechnologies soient valorisées et deviennent accessibles à tous, une amélioration des compétences, des investissements accrus dans des infrastructures numériques sûres et durables et des initiatives d’accompagnement des entreprises, des administrations publiques et des citoyens sont indispensables, notamment dans la perspective de la numérisation des services publics. |
8.12. |
Les tendances démographiques et sociales actuelles se renforcent mutuellement. Le vieillissement, ainsi que les mouvements migratoires internes et intraeuropéens, la baisse du taux de natalité et la diminution du nombre de ménages représentent un défi pour les systèmes de protection sociale et pour le développement local et régional. Ces dynamiques démographiques ont de graves conséquences sur le plan social — notamment l’accroissement de l’exclusion sociale et des inégalités — et économique, dont la pénurie de travailleurs dans des secteurs à forte intensité de main-d’œuvre, tels que le tourisme. Il conviendra de prêter — autre priorité — une attention accrue à la qualité de vie, au travail décent, au bien-être et à la participation des jeunes. |
8.13. |
Avec l’approbation du rapport sur le rôle de la politique de cohésion face aux problèmes environnementaux pluridimensionnels du bassin méditerranéen (2022/2059 (INI)] par la commission du développement régional du Parlement européen, le CESE estime et espère que les conditions nécessaires à la mise en œuvre d’une stratégie macrorégionale parviendront également à maturité dans les régions de la Méditerranée occidentale. |
Bruxelles, le 14 juin 2023.
Le président du Comité économique et social européen
Oliver RÖPKE
(1) JO C 282 du 20.8.2019, p. 14.
(2) Avis du Comité économique et social européen «Améliorer la convergence économique et la compétitivité au sein des macrorégions, à l’exemple de la stratégie de l’Union européenne pour la région du Danube — le rôle des groupements transnationaux» (avis exploratoire) (JO C 282 du 20.8.2019, p. 14).
(3) Avis du Comité économique et social européen «Améliorer la convergence économique et la compétitivité au sein des macrorégions, à l’exemple de la stratégie de l’Union européenne pour la région du Danube — le rôle des groupements transnationaux» (avis exploratoire) (JO C 282 du 20.8.2019, p. 14).
18.8.2023 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 293/100 |
Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — «Mettre à profit les talents dans les régions européennes»
[COM(2023) 32 final]
(2023/C 293/15)
Rapporteure: |
Tatjana BABRAUSKIENĖ |
Consultation |
Commission européenne, 8.3.2023 |
Base juridique |
Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne |
Compétence |
Section «Union économique et monétaire et cohésion économique et sociale» |
Adoption en section |
30.5.2023 |
Adoption en session plénière |
14.6.2023 |
Session plénière no |
579 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
181/0/3 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
Le Comité économique et social européen (CESE) se réjouit que, dans sa communication intitulée «Mettre à profit les talents dans les régions européennes» (1), la Commission s’engage à soutenir la conception et la mise en œuvre de stratégies régionales et territoriales ciblées fondées sur la situation et les atouts spécifiques des régions, à appliquer de manière ambitieuse le socle européen des droits sociaux et la vision à long terme pour les zones rurales de l’Union européenne, ainsi qu’à utiliser de façon ciblée les fonds européens existants, en vue d’adapter leur déploiement aux tendances démographiques observées dans l’Union. Un marché du travail de qualité devrait être au cœur des mesures stratégiques qui ont été définies, couvrant les politiques inclusives du marché du travail, le soutien aux travailleurs, les environnements attrayants pour les entreprises, la mobilité équitable, la cohésion sociale, les services de base et l’accès à une formation de qualité ainsi qu’au développement des compétences, afin de renforcer la compétitivité européenne. |
1.2. |
Le CESE souligne qu’il y a lieu de garantir à tous, au sein de l’Union européenne, l’aspect fondamental de l’intégration européenne que constitue la liberté de circulation, tout en se concentrant sur une approche globale, visant le long terme, du développement régional et de l’intégration sur le marché du travail. Il importe également de protéger la liberté de circulation des personnes sur le marché du travail européen, laquelle doit rester un choix et une chance, plutôt qu’une pression que subissent, pour des raisons socio-économiques, les personnes confrontées à un manque de perspectives ou de possibilités dans leur propre région. |
1.3. |
Le CESE souligne qu’afin de mieux remédier aux pénuries de main-d’œuvre et de compétences, il est nécessaire de prévoir des solutions à long terme pour soutenir le développement régional, sous la forme, par exemple, de meilleures infrastructures, de ressources durables, d’emplois de qualité supérieure, de soutien efficace aux personnes qui ne travaillent pas, ne suivent pas d’études et ne sont pas en formation et aux chômeurs, d’une aide ciblée à une intégration équitable des ressortissants de pays tiers sur le marché du travail, de l’accès à des services publics de qualité, y compris à une éducation publique et à un apprentissage tout au long de la vie inclusifs et de qualité, ainsi que de l’accessibilité, pour tous les travailleurs, d’actions de reconversion et de perfectionnement professionnels qui soient inclusives et de qualité, ou encore de la participation des syndicats et des employeurs, s’agissant de recenser les aptitudes nécessaires aux différentes régions et d’assurer le développement des compétences. |
1.4. |
Le CESE se félicite que dans l’objectif de réduire les disparités régionales et de mettre en œuvre le socle européen des droits sociaux, il ait été procédé, au titre de la politique de cohésion, au déploiement d’une série d’instruments de financement de l’Union pour la période de programmation 2021-2027, à savoir le Fonds européen de développement régional (FEDER), le Fonds social européen plus (FSE+), le Fonds de cohésion (FC) et le Fonds pour une transition juste (FTJ). Il plaide en faveur d’une complémentarité et d’une coordination renforcées entre les fonds de l’Union pour la relance, la résilience et la cohésion, y compris le Fonds pour une transition juste, de manière à garantir qu’ils sont utilisés pour stimuler la création de postes, offrir des possibilités d’emplois de qualité et garantir l’amélioration des infrastructures matérielles, en réduisant les inégalités socio-économiques et en comblant l’écart de développement entre les régions de l’Union. Appuyée par les programmes Interreg, qu’il convient de soutenir davantage, la coopération transfrontière contribue à accroître l’attractivité des régions frontalières. |
1.5. |
Le CESE invite la Commission européenne et les États membres à mettre en place des politiques de cohésion et des fonds de l’Union visant à donner aux transitions sur le marché de l’emploi une configuration telle qu’aucun travailleur ni aucune région ne soit laissé de côté. Il est primordial de garantir des conditions attrayantes pour les entreprises tout en faisant droit à la nécessité qui s’impose à elles d’investir dans l’innovation et la compétitivité et de s’adapter à des besoins en constante évolution. Le Comité appelle la Commission européenne et les États membres à tenir compte de ces éléments lors du réexamen à mi-parcours du cadre financier pluriannuel (CFP). |
1.6. |
Afin de garantir que les ressources du Fonds de cohésion soient affectées équitablement à un développement régional efficace et de qualité, le CESE demande à la Commission européenne et aux États membres de lancer un débat sur les prochains processus qui sous-tendront le cadre financier pluriannuel pour ce qui est d’assurer l’évaluation des besoins et des fonds au niveau de l’Union et de parvenir à réaliser un développement régional efficace et créer activement des emplois. |
1.7. |
Le CESE invite la Commission européenne et les États membres à faire en sorte que le marché du travail et les politiques de cohésion de l’Union soient basés sur un investissement durable dans des emplois de qualité, l’accès à la formation et aux services essentiels, le dialogue social et les négociations collectives, en conformité avec le respect de l’autonomie des partenaires sociaux et avec les mécanismes nationaux de concertation sociale. |
1.8. |
Le CESE encourage la Commission européenne et les États membres à respecter les droits de l’homme et à lutter efficacement contre la corruption, préservant ainsi l’état de droit, qui joue un rôle essentiel afin de rendre les régions attirantes pour les acteurs du marché du travail, ainsi qu’à garantir que les audits de la Commission européenne veillent avec plus d’efficacité à une utilisation opérante des fonds de l’Union, en particulier les fonds décentralisés. |
1.9. |
Le CESE plaide en faveur d’un dialogue social efficace et d’une participation effective des organisations de la société civile (OSC) en ce qui concerne toutes les questions en lien avec cette stratégie, de sorte à parvenir à un développement régional de qualité, répondant aux besoins des personnes qui vivent et souhaitent vivre dans les régions concernées, tout comme à ceux des entreprises, en particulier pour ce qui est d’allouer les fonds du FSE+ de manière agissante pour lutter contre le chômage des jeunes. |
1.10. |
Le CESE attire l’attention sur la nécessité de garantir une gouvernance démocratique dans les politiques de développement des régions, ainsi qu’une coopération étroite entre leurs pouvoirs publics, les organisations de partenaires sociaux, les services de l’emploi et les prestataires régionaux d’enseignement et de formation. Il convient d’utiliser efficacement le dialogue social pour attirer des entreprises dans des zones défavorisées et y garantir des postes de travail de qualité, des salaires décents, une sécurité d’emploi grâce à des contrats classiques et à l’accès à la protection sociale, une offre d’apprentissage tout au long de la vie, des conditions de travail favorables dans un environnement sûr et sain, des horaires raisonnables, offrant un bon équilibre entre vie professionnelle et privée, une représentation syndicale et des droits en matière de négociation. |
1.11. |
Le CESE demande à la Commission européenne d’utiliser le semestre européen et le tableau de bord social de l’Union comme outils qui permettent de formuler des recommandations ciblées à l’intention des États membres afin de lutter contre les inégalités régionales. |
1.12. |
Le CESE invite les États membres à veiller à ce que dans le cadre de la loi européenne sur le climat et du mécanisme de protection civile de l’Union, soutenu par le plan industriel du pacte vert (2), un véritable appui soit offert aux régions (3) par les politiques qu’ils mènent en matière d’adaptation au changement climatique et de réduction des risques de catastrophe, ainsi qu’à associer les partenaires sociaux et la société civile à des analyses régulières de l’incidence socio-économique de ces interventions, de sorte à anticiper les changements et à créer des perspectives d’emplois de substitution dans les zones et les secteurs touchés par ces évolutions. |
1.13. |
Le CESE incite les États membres à assurer la mise en œuvre effective de la directive de l’Union relative à des salaires minimaux adéquats et de la recommandation du Conseil relative à l’accès des travailleurs salariés et non salariés à la protection sociale (2019) (4), ainsi qu’à améliorer les conditions de travail et les salaires en étendant la couverture des conventions collectives et en garantissant un accès égal à la protection sociale quel que soit le statut professionnel de l’intéressé, s’agissant d’éléments qui jouent un rôle essentiel pour que les régions séduisent les travailleurs de tous les niveaux de compétence, grâce à des emplois et à des salaires attirants. |
1.14. |
Le CESE souligne que les gouvernements, les collectivités locales et régionales, les services sociaux, les entreprises et les syndicats se doivent de travailler ensemble dans le cadre du dialogue social afin d’apporter des solutions efficaces aux travailleurs en ce qui concerne leurs besoins en matière de parentalité et de prise en charge de proches, en leur garantissant des services de garde d’enfants et de soins de longue durée inclusifs et de qualité (5). |
1.15. |
Le CESE insiste sur le rôle clé que la plateforme européenne visant à lutter contre le travail non déclaré, mise en place sous les auspices de l’Autorité européenne du travail (AET), pourrait jouer pour encourager la conversion du travail non déclaré en emplois décents et déclarés, et, ainsi, contribuer aussi au développement des régions en renforçant leur assiette fiscale et en améliorant l’accès des travailleurs à la protection sociale. |
1.16. |
Le CESE fait observer qu’une protection sociale assurant une couverture efficace, ainsi qu’une coordination opérante entre les régimes de sécurité sociale, constituent des éléments essentiels pour garantir que les travailleurs mobiles bénéficient d’un traitement équitable. Il appelle la Commission européenne à améliorer ses outils pour mieux soutenir l’employabilité dans les régions. |
1.17. |
Le CESE demande aux États membres d’élaborer des politiques en matière de compétences et d’apprentissage tout au long de la vie dans le cadre du développement régional, en les combinant avec des investissements et des mesures stratégiques complémentaires qui aient pour objectif, tout à la fois, d’améliorer la qualité de l’éducation et de la formation et leur accessibilité pour tous, de façon à préparer la population face aux besoins de la vie au quotidien et du marché du travail, et de rendre les régions plus attrayantes pour les apprenants, les travailleurs et les entreprises. En Europe, chacun devrait pouvoir bénéficier d’une carrière de qualité et d’une orientation en matière d’apprentissage tout au long de la vie, qui fournisse des informations fiables sur les possibilités d’emploi et d’apprentissage au niveau régional. |
1.18. |
Le CESE fait valoir que dans la perspective du développement régional, il est nécessaire de garantir l’égalité d’accès à des services publics de qualité, tels que la prise en charge de longue durée, des logements et services culturels d’un prix abordable, les transports, la fourniture d’énergie ou la connexion à l’internet, ainsi qu’à des prestations et infrastructures éducatives adéquates, comme des structures d’éducation et de soins pour les jeunes enfants et des mesures dans le domaine de l’enseignement, de la formation et de l’apprentissage tout au long de la vie, tout en mettant en œuvre des politiques efficaces en ce qui concerne les droits de l’homme et la lutte contre les discriminations. Il appelle les États membres à garantir que les autorités réalisent des investissements durables dans un enseignement public de qualité. |
1.19. |
Le CESE invite les États membres à lutter contre les pénuries d’enseignants (6) et à rendre cette profession attrayante, en offrant aux personnes qui la pratiquent des salaires justes, des conditions de travail décentes, une formation initiale et continue de qualité et des possibilités de développement de carrière, de manière à améliorer la qualité de l’enseignement dans les régions. Le dialogue social joue un rôle essentiel pour élaborer et mettre en œuvre les réformes de l’éducation liées à la transition écologique et numérique des établissements et structures d’enseignement, tout comme lorsqu’il s’agit d’améliorer les compétences et les aptitudes que les enseignants et les formateurs doivent acquérir au cours de leur formation professionnelle initiale et continue, y compris en ce qui concerne la transition écologique et numérique. |
2. Contexte
2.1. |
Le 17 janvier 2023, la Commission européenne a publié une communication intitulée «Mettre à profit les talents dans les régions européennes» (7), dans laquelle elle présente des mesures ciblées pour promouvoir et retenir les talents dans les régions en retard de développement et en faire des endroits plus attrayants. Il s’agit de la première initiative clé de 2023 ressortissant à l’Année européenne des compétences (8). Dans sa nouvelle politique, la Commission met avant tout l’accent sur les régions où la population en âge de travailler décline à un rythme accéléré et dans lesquelles les diplômés universitaires sont peu nombreux, ainsi que sur celles que les jeunes délaissent en nombre. |
2.2. |
Après avoir enregistré une baisse de 3,5 millions de personnes entre 2015 et 2020, la population de l’Union en âge de travailler devrait encore perdre 35 millions d’unités d’ici à 2050. Au sein de l’Union, 137 millions d’habitants, soit environ 30 % de sa population, résident dans des zones rurales. Or, 22 % des personnes interrogées dans le cadre de la récente enquête Eurobaromètre ont affirmé que, ces dix dernières années, leurs possibilités d’emploi dans ces aires de ruralité s’étaient détériorées (9). La proportion de jeunes qui ne travaillent pas ni ne suivent d’études ou de formation est bien plus élevée dans les régions concernées, s’élevant à 19 %, contre 13 % en moyenne pour l’ensemble de l’Union. Trop de jeunes n’achèvent pas le second cycle de l’enseignement secondaire et en sont réduits à n’avoir que de faibles perspectives d’emploi. Dans d’autres régions, le manque de perspectives professionnelles peut les dissuader de parvenir au stade des études supérieures ou en pousser certains à chercher un emploi ailleurs, de sorte que le taux de chômage des 15-34 ans y atteint 14,6 %, soit bien plus que la moyenne de l’Union, où il se situe à 11,1 %. |
2.3. |
Selon le huitième rapport sur la cohésion (2022) (10), les principales raisons de la migration et de la fuite des cerveaux qui affectent certaines régions de l’Union résident dans le manque de services publics et sociaux, surtout dans les secteurs des soins de santé et de l’éducation, ainsi que dans le déficit de possibilités d’emploi et les carences territoriales en matière de connexions et d’infrastructures matérielles, par exemple pour ce qui concerne les transports. L’objectif stratégique de la Commission consiste à promouvoir le développement de ces régions par une offre d’emplois de qualité et l’amélioration des services publics, dont, plus spécialement, les systèmes éducatifs. En outre, elle met l’accent sur le déploiement d’une meilleure connectivité numérique des régions moins développées, en particulier les zones rurales et isolées. C’est pourquoi la communication recense des secteurs spécifiques au sein du plan d’action rural de l’Union et définit, pour stimuler les talents dans ces zones en retard de développement, un mécanisme à huit piliers dit «de valorisation des talents». |
3. Observations générales
3.1. |
Le CESE se réjouit que, dans sa communication, la Commission s’engage à mettre effectivement en œuvre le socle européen des droits sociaux. Toutefois, son texte ne s’attache pas suffisamment à faire d’un marché du travail de qualité et, en particulier, du soutien aux actifs, le cœur même des interventions stratégiques qu’elle a définies. Pour garantir des emplois de qualité pour tous les travailleurs et dans toutes les régions, il s’impose d’adopter une démarche plus globale, embrassant des politiques équitables du marché du travail, une mobilité juste, la cohésion sociale, les services de base et l’accès à une formation de bon niveau et aux compétences. Si le développement régional doit effectivement avoir rang de priorité, il s’impose aussi de protéger la liberté de circulation des personnes sur le marché du travail européen. Il y a lieu de réaliser le développement régional en prenant dûment en considération les perspectives démographiques, économiques et sociales, ainsi que les causes du dépeuplement de certaines régions. Dans la conception de stratégies régionales opérantes visant à inverser les tendances au déclin démographique et à rendre les régions attrayantes pour la population, une place centrale doit être réservée aux aspects socio-économiques et environnementaux et à la durabilité. |
3.2. |
Le CESE souligne que l’élément fondamental de l’intégration européenne que constitue la liberté de circulation doit être garanti à tous au sein de l’Union. La mobilité des travailleurs ne peut toutefois constituer un expédient commode pour remédier aux pénuries de main-d’œuvre tout en se dispensant d’aborder certains problèmes sous-jacents, comme la nécessité d’améliorer la qualité des emplois et l’accès à la formation. Dans les faits, la plupart des États membres sont confrontés aux mêmes déficits de compétences. Ramener la mobilité des travailleurs à une simple question d’offre et de demande fait courir le risque d’exacerber les inégalités et les disparités sur les marchés du travail entre les pays et les régions de l’Union, d’où la nécessité de garantir que les politiques européennes et nationales adoptent, en ce qui concerne le développement régional et l’intégration sur le marché du travail, une approche globale et axée davantage sur le long terme. Dans le même ordre d’idées, combler les pénuries dans les secteurs à forte intensité de main-d’œuvre en donnant des emplois précaires à des travailleurs étrangers ou à des groupes marginalisés sans améliorer l’attractivité de ces branches d’activité risque d’avoir pour seul résultat de pérenniser les inégalités sociales et, ainsi, de priver les sociétés et les économies concernées de progrès inclusifs. |
3.3. |
Les politiques climatiques seront lourdes de conséquences pour les travailleurs et les industries et exigeront un effort massif en matière de formation, ainsi que de reconversion et de perfectionnement professionnels. Il y a lieu de mettre cette transition à profit pour créer des emplois de qualité, offrant de bonnes conditions de travail, dans l’ensemble des secteurs et des régions. Plutôt que de s’appuyer exclusivement sur des données globales, les stratégies en matière de climat doivent tenir compte des spécificités régionales et locales, et soutenir les régions les plus touchées. Pour ne pas compromettre l’adhésion de la communauté à l’indispensable transition, il convient aussi de veiller à ce que les travailleurs puissent trouver dans la région même où ils sont actifs actuellement des emplois de substitution qui soient de bonne qualité. |
3.4. |
Les collectivités régionales devraient échanger leurs expériences sur la manière de développer les zones rurales pour qu’elles soient des lieux où, grâce au soutien en faveur du développement économique et de la diversification qui leur est accordé, ainsi qu’à celles qui sont en retard de développement, il soit possible d’apprendre, mener son existence et travailler en bénéficiant d’une bonne qualité de vie et de services appropriés. Les stratégies de spécialisation intelligente, dans leur fonction d’outil visant à créer des emplois diversifiés et qualifiés, restent trop souvent axées sur les secteurs traditionnels. Il existe toutefois de bons exemples de transitions industrielles qui, étant le fruit du dialogue social, méritent d’être pris en compte. |
3.5. |
Le CESE invite la Commission européenne et les États membres à mettre en place des politiques de cohésion et des fonds de l’Union visant à donner aux transitions sur le marché de l’emploi une configuration telle qu’aucun travailleur ni aucune région ne soit laissé de côté. Il convient de garantir des conditions attrayantes pour les entreprises tout en faisant droit à la nécessité qui s’impose à elle d’investir dans l’innovation et la compétitivité et de s’adapter à des besoins en constante évolution. Il faut que les travailleurs aient la possibilité de vivre dans toutes les régions d’Europe, lesquelles doivent, quant à elles, être en mesure de prospérer grâce au travail, et être attrayantes pour les entreprises et les actifs. |
3.6. |
Pour réussir à gérer efficacement les transitions vers une relance juste et inclusive, il est nécessaire d’asseoir les politiques de l’Union concernant le marché du travail et la cohésion sur un investissement stable et à long terme dans des emplois de qualité, l’accès à la formation et aux services essentiels, le dialogue social et les négociations collectives. Le semestre européen et le tableau de bord social de l’Union constituent des outils clés pour formuler, à l’intention des États membres, des recommandations ciblées afin de lutter contre les inégalités régionales et de garantir que des emplois et des services de qualité soient disponibles dans chaque région. |
3.6.1. |
Le CESE invite la Commission européenne et les États membres à faire en sorte que le marché du travail et les politiques de cohésion de l’Union soient basés sur un investissement durable dans des emplois de qualité, l’accès à la formation et aux services essentiels, le dialogue social et les négociations collectives, en conformité avec le respect de l’autonomie des partenaires sociaux et avec les mécanismes nationaux de concertation sociale. |
3.7. |
L’attrait d’une région ne dépend pas seulement de ses atouts en rapport avec des possibilités d’emploi de qualité, offrant des rémunérations intéressantes, de bonnes conditions de travail, une solide formation et des perspectives d’évolution au cours de la carrière, mais est également déterminé par des conditions de vie d’un niveau décent, dont, entre autres exemples, l’accès au logement à des prix abordables, à une éducation et à des services publics de haute qualité, ainsi qu’à de bonnes infrastructures. Tout en reconnaissant le rôle que jouent la législation et les mécanismes de concertation sociale de chaque État membre, il convient de relever que les disparités entre les normes sociales et professionnelles, le faible taux de couverture des négociations collectives, le manque d’investissement et la confiance limitée dans les institutions peuvent vite devenir des facteurs qui creusent entre les régions des fossés structurels nuisant au développement d’un marché du travail européen équilibré. |
3.8. |
Le CESE est ravi de constater que, dans sa communication, la Commission vise à établir une coopération étroite entre les autorités régionales, les organisations de partenaires sociaux, les services de l’emploi et les prestataires d’enseignement et de formation. Il convient d’utiliser efficacement le dialogue social pour attirer des entreprises dans des zones défavorisées et y garantir des postes de travail de qualité, des salaires décents, une sécurité d’emploi grâce à des contrats classiques et à l’accès à la protection sociale, une offre d’apprentissage tout au long de la vie, des conditions de travail favorables dans un environnement sûr et sain, des horaires raisonnables offrant un bon équilibre entre vie professionnelle et privée, une représentation syndicale et des droits en matière de négociation. |
3.9. |
Le CESE estime que la communication ne devrait pas se borner à chercher à attirer des travailleurs hautement qualifiés, ou «talents», dans des régions désavantagées en vue de leur développement économique. Sur le marché du travail de nombreuses régions de l’Union, l’offre de travailleurs de toute catégorie est sous contrainte, alors que 26,4 % de la main-d’œuvre européenne inactive réside dans des régions défavorisées, en raison d’un manque de possibilités d’emploi de qualité, de la méfiance vis-à-vis des institutions publiques, de motifs familiaux, d’un travail dans l’économie clandestine, ou d’autres facteurs encore. Les entreprises ont besoin de conditions favorables, de travailleurs compétents et d’infrastructures de qualité pour pouvoir innover et être compétitives, et elles se doivent de promouvoir la reconversion et le perfectionnement professionnels de leur main-d’œuvre et de chercher à attirer des employés performants pour occuper des postes décents. La communication et les initiatives qui en découleront devraient plutôt se concentrer sur la façon dont une transition équitable vers une économie verte et numérique peut soutenir le renforcement des compétences de tous les travailleurs. |
3.10. |
Le CESE se félicite que pour la période de programmation 2021-2027, plusieurs instruments budgétaires de l’Union ressortissant du financement de la politique de cohésion, en l’occurrence le FEDER, le FSE+, le Fonds de cohésion et le Fonds pour une transition juste aient été mobilisés aux fins de réduire les disparités régionales et de mettre en œuvre le socle européen des droits sociaux. Dans les zones rurales et non urbanisées, l’aptitude à l’emploi et le développement économique peuvent être stimulés par des interventions ciblées. Dans cet objectif, il convient de garantir une complémentarité et une coordination plus poussées entre les fonds de l’Union pour la relance, la résilience et la cohésion, dont le Fonds pour une transition juste, pour stimuler la création de postes, offrir des possibilités d’emplois de qualité et réaliser des avancées en matière d’infrastructures matérielles. Il y a lieu de renforcer l’efficacité des fonds de cohésion, afin de réduire les inégalités socio-économiques et de combler les écarts de développement entre les régions de l’Union. Pour promouvoir des emplois décents, les aides d’État et l’utilisation de fonds en provenance du budget de l’Union doivent être soumises au respect de conditions sociales sévères, obligeant leurs bénéficiaires à respecter le droit du travail et les conventions collectives applicables. |
3.11. |
Les efforts visant à lutter contre la corruption et à préserver l’état de droit jouent un rôle essentiel pour qu’une région devienne attirante aux yeux des acteurs du marché du travail. Il est crucial de garantir que l’utilisation opérante des fonds de l’Union, en particulier les fonds décentralisés, soit surveillée plus efficacement par la Commission européenne et par les institutions de contrôle de l’Union, par exemple, la Cour des comptes européenne et l’OLAF. Afin de donner l’assurance que le Fonds de cohésion est affecté équitablement à un développement régional efficace et de bonne qualité, le CESE estime que la Commission européenne et les États membres se doivent de lancer un débat sur les prochains processus qui sous-tendront le cadre financier pluriannuel, de sorte à garantir que les besoins et les fonds feront l’objet d’une évaluation au niveau de l’Union. |
3.12. |
La gouvernance démocratique dans la gestion et la bonne répartition des fonds de l’Union peut être assurée grâce à la participation effective des partenaires sociaux et des organisations de la société civile concernées aux décisions sur l’utilisation de ces ressources européennes pour le développement régional. Le dialogue social et civique doit être utilisé efficacement, de manière à déboucher sur un développement régional de qualité, qui réponde aux besoins des personnes qui vivent et souhaitent vivre dans les régions concernées mais aussi à ceux des entreprises. |
3.13. |
La double transition, écologique et numérique, exerce une forte incidence sur les industries présentes dans les régions. Un environnement compétitif pour les entreprises, axé sur la croissance durable, peut aider à attirer des populations dans les régions et à rendre l’Union compétitive et attrayante à l’échelle mondiale. En collaboration avec les partenaires sociaux et les parties prenantes, les collectivités régionales doivent d’urgence mettre en place des stratégies efficaces qui tiennent compte de leurs besoins et possibilités de développement économique, afin de susciter l’intérêt des citoyens et des entreprises. Il convient d’assurer un équilibre entre les politiques de l’Union et celles des régions, dans le respect de la subsidiarité qui leur est applicable. |
3.13.1. |
Il conviendrait de mettre en œuvre les initiatives, récemment annoncées, du plan industriel du pacte vert, dont le développement des compétences constitue l’un des quatre piliers, et du règlement «zéro émission nette» en veillant à leur donner une forte dimension régionale, en particulier en ce qui concerne le projet de créer des académies des industries à zéro émission nette. |
3.14. |
Avec l’obligation qu’il impose de dépenser au moins 12 % des fonds dans les États membres où la proportion de jeunes qui ne travaillent pas et ne suivent pas d’études ou de formation est supérieure à la moyenne européenne, le FSE+ reste le principal outil d’intervention pour lutter contre le chômage des jeunes et assurer la mise en œuvre de la garantie européenne pour la jeunesse. Les États membres se doivent cependant de redoubler d’efforts afin que toutes les régions, y compris les plus défavorisées, présentent un attrait pour les jeunes étudiants et travailleurs. Les partenaires sociaux et les autres parties prenantes doivent être associés de manière significative à la conception et à la mise en œuvre des mesures, ainsi qu’à l’évaluation qui est effectuée de l’utilisation des fonds provenant du FSE+, de façon à garantir qu’ils encouragent effectivement à créer des emplois de qualité et des postes d’apprentissages et stages rémunérés intéressants pour les jeunes chômeurs. S’agissant de conférer un attrait aux emplois et à l’éducation, il conviendrait de prendre en considération les métiers en pénurie, et les partenaires sociaux doivent recevoir les capacités et le soutien voulus pour mettre en œuvre certaines politiques et mesures spécifiques qui redorent le blason de ces métiers confrontés à des pénuries de main-d’œuvre. |
3.15. |
Les régions peuvent être attrayantes pour les travailleurs de tous les niveaux de compétences si elles offrent des emplois et des salaires intéressants. À cet égard, une mise en œuvre effective de la directive de l’Union relative à des salaires minimaux adéquats, ainsi que l’amélioration des conditions de travail et des rémunérations, grâce à une augmentation de la couverture par les conventions collectives, constituent des facteurs qui jouent un rôle crucial. Les pouvoirs publics nationaux, les collectivités locales et régionales, les services sociaux, les entreprises et les syndicats se doivent de travailler ensemble dans le cadre du dialogue social afin d’apporter des solutions efficaces aux travailleurs en ce qui concerne leurs besoins en matière de parentalité et de prise en charge de proches, en leur garantissant des services de garde d’enfants et de soins de longue durée inclusifs et de qualité. |
3.16. |
La plateforme européenne visant à lutter contre le travail non déclaré de l’Autorité européenne du travail (AET) pourrait encourager la conversion du travail non déclaré en emplois décents et déclarés et, ainsi, contribuer aussi au développement des régions en renforçant leur assiette fiscale et en améliorant l’accès des travailleurs à la protection sociale. Il convient d’assurer un accès égal à la protection sociale, quel que soit le statut professionnel de l’intéressé, comme le prévoit la recommandation du Conseil relative à l’accès des travailleurs salariés et non salariés à la protection sociale, de 2019 (11). |
3.17. |
Une protection sociale assurant une couverture efficace et une coordination opérante entre les régimes de sécurité sociale constituent des éléments essentiels pour garantir que les travailleurs mobiles bénéficient d’un traitement équitable. Les outils numériques, tels que le passeport européen de sécurité sociale, peuvent améliorer l’identification et la vérification transfrontières et aider ainsi les travailleurs à détecter, exporter et revendiquer leurs droits cumulés en matière de sécurité sociale. Pour inciter les actifs à accepter des postes dans des régions défavorisées, il s’impose d’éliminer les traitements inéquitables, comme la double imposition ou les exonérations de sécurité sociale pour les travailleurs mobiles, afin de s’assurer que ceux qui ont exercé leur liberté de circulation ne s’en trouvent pénalisés ni par l’État membre qui les accueille, ni par leur pays d’origine lorsqu’ils y retournent. |
3.18. |
Si les politiques en matière de compétences jouent un rôle important dans le développement régional, cette action doit également se doubler d’investissements et de mesures complémentaires qui sont destinés à relever l’attrait des régions pour les travailleurs et les entreprises. Tous les niveaux de compétences étant nécessaires sur le marché du travail, le développement régional doit s’efforcer d’attirer dans les zones concernées des travailleurs de toutes les catégories, y compris ceux qui sont moyennement ou peu qualifiés, et non les seuls «talents» et les profils à hautes qualifications. |
3.19. |
Le CESE se réjouit que la communication vise à garantir l’égalité d’accès à des services publics de qualité, tels que la prise en charge de longue durée, des logements et services culturels d’un prix abordable, les transports, la fourniture d’énergie ou la connexion à l’internet, ainsi qu’à des prestations et infrastructures éducatives adéquates, comme des structures d’éducation et de soins pour les jeunes enfants, et des mesures dans le domaine de l’enseignement et de la formation. Ces dispositifs d’éducation doivent être bénéfiques et attirants non seulement pour les travailleurs hautement qualifiés, mais aussi pour ceux de tous les autres niveaux de compétences. |
3.20. |
Le portail Europass doit être amélioré, afin de fournir aux personnes des informations claires sur les possibilités d’emploi et de formation, sur l’accès aux services d’orientation et sur les procédures de reconnaissance. Dans ce cadre, le portail européen sur la mobilité de l’emploi (EURES) pourrait apporter une contribution plus poussée à une mobilité équitable de la main-d’œuvre, notamment en promouvant des pratiques de recrutement équitables, ainsi que des emplois directs de qualité, et en luttant contre les procédés abusifs de mobilité par-delà les frontières. Avant de pouvoir participer à EURES, les services privés de l’emploi devraient être à même de produire de sérieuses références en la matière. Dans le cadre de son mandat visant à garantir une mobilité équitable et efficace de la main-d’œuvre, l’Autorité européenne du travail doit non seulement soutenir les travailleurs désireux de faire usage de leur liberté de circulation, mais aussi ceux qui, ayant l’intention de retourner dans leur État membre d’origine, empruntent le chemin inverse. |
3.21. |
Le CESE se félicite que dans la perspective du développement régional, la Commission plaide pour la promotion d’une éducation, d’une formation et d’un apprentissage tout au long de la vie qui soient de haute qualité. Il est vital de fournir à tous les travailleurs, qu’ils se rattachent au secteur public ou privé, de même qu’aux adultes qui ne sont pas actifs sur le marché du travail, un accès équitable à l’éducation et la formation des adultes, en s’attachant à mettre en œuvre la résolution du Conseil sur un nouvel agenda européen dans le domaine de l’éducation et de la formation des adultes (2021-2030) (12), la recommandation du Conseil relative aux comptes de formation individuels (13) et la recommandation du Conseil relative aux microcertifications (14), afin d’atteindre l’objectif de 60 % de participation des adultes à des formations (15). Il convient aussi de dispenser un soutien efficace aux travailleurs pour qu’ils accèdent à la formation des salariés et aux congés de formation rémunérés, en veillant à ce que les différents systèmes de financement fassent l’objet d’une gouvernance conjointe, à laquelle les partenaires sociaux soient associés. Tout un chacun devrait avoir accès aux compétences entrepreneuriales et bénéficier d’une aide financière pour créer sa propre entreprise. |
3.22. |
Dans les régions concernées, il y a lieu d’améliorer l’éducation, la formation et l’apprentissage tout au long de la vie abordés dans une perspective globale et de les rendre attrayants pour les apprenants et les parents, étant entendu que les compétences clés, en particulier la citoyenneté démocratique, et les aptitudes de base et transversales, tout spécialement dans les matières relevant des sciences, technologies, ingénierie, arts et mathématiques (STIAM), jouent un rôle primordial à cet égard, en plus des aptitudes pertinentes pour le marché du travail. Des emplois de qualité devraient également être disponibles, afin d’encourager les jeunes des régions défavorisées à décrocher des diplômes de l’enseignement supérieur. Les collectivités régionales doivent en outre améliorer la qualité de l’éducation afin de construire une citoyenneté démocratique et des valeurs européennes communes. Pour l’Europe, disposer de citoyens qualifiés et bien informés constitue un enjeu qui va au-delà de l’éducation formelle et s’étend aux connaissances acquises de façon non formelle ou informelle. Ils doivent être en mesure de faire la démonstration des connaissances qu’ils ont acquises et de les utiliser au cours de leur carrière ainsi qu’aux fins de poursuivre leur éducation et leur formation. Il conviendrait d’améliorer la reconnaissance de l’apprentissage non formel et informel. |
3.23. |
La Commission européenne suggère de déployer des fonds de l’Union pour améliorer la connectivité numérique dans les zones rurales et isolées afin de faciliter l’éducation et la formation à distance et de réduire les déficits de compétences. Le CESE répète (16) qu’il est impératif de garantir l’accès à une connexion internet à haut débit dans les régions défavorisées, en consacrant au moins 10 % des fonds de NextGenerationEU à l’objectif spécifique de la numérisation en milieu rural. Il convient de doter les établissements d’enseignement et de formation, les étudiants, les enseignants et les formateurs d’équipements numériques, car des outils de coopération virtuelle sont susceptibles de faciliter l’accès à l’apprentissage dans les campagnes, ainsi qu’en ce qui concerne les aidants familiaux et les personnes handicapées. Toutefois, la condition sine qua non pour offrir une éducation de qualité et lutter contre le décrochage scolaire consiste à tisser des relations interpersonnelles entre les élèves, les enseignants et les parents, afin de mieux répondre au besoin de chaque apprenant. C’est pourquoi les emplois dans les établissements d’enseignement doivent être à même d’attirer des enseignants et des formateurs hautement qualifiés. |
3.24. |
Les enseignants jouent un rôle essentiel pour améliorer la qualité de la formation dans ces régions. Il convient d’apporter une aide opérante aux enseignants, dans chacune des composantes de l’éducation, ainsi qu’aux formateurs, le but étant d’améliorer la qualité de l’enseignement dispensé de manière à assurer le développement des compétences dans le cadre de la transformation écologique et numérique du secteur éducatif. Le dialogue social assume une fonction essentielle pour concevoir et mettre en œuvre les réformes liées à la transition écologique et numérique des écoles et définir les compétences et aptitudes que les enseignants et les formateurs doivent acquérir au cours de leur formation professionnelle, tant initiale que continue. |
Bruxelles, le 14 juin 2023.
Le président du Comité économique et social européen
Oliver RÖPKE
(1) COM(2023) 32 final.
(2) Un plan industriel du pacte vert pour l’ère du zéro émission nette (europa.eu), COM(2023) 62 final.
(3) Europe’s changing climate hazards — an index-based interactive EEA report («L’Europe face à des risques climatiques en mutation — un rapport interactif de l’AEE fondé sur des indices») — Agence européenne pour l’environnement (europa.eu).
(4) Recommandation du Conseil du 8 décembre 2022 sur l’accès à des soins de longue durée abordables et de qualité 2022/C 476/01 (JO C 476 du 15.12.2022, p. 1) et recommandation du Conseil du 22 mai 2019 relative à des systèmes de qualité pour l’éducation et l’accueil de la petite enfance (JO C 189 du 5.6.2019, p. 4).
(5) Recommandation du Conseil sur l’accès à des soins de longue durée abordables et de qualité 2022/C 476/01 (JO C 476 du 15.12.2022, p. 1) et recommandation du Conseil relative à des systèmes de qualité pour l’éducation et l’accueil de la petite enfance (JO C 189 du 5.6.2019, p. 4).
(6) Rapport de suivi de l’éducation et de la formation 2022 (europa.eu).
(7) COM(2023) 32 final.
(8) «La Commission lance les travaux sur l’Année européenne des compétences», direction générale de l’emploi, des affaires sociales et de l’inclusion, Commission européenne.
(9) Vision pour les zones rurales.
(10) Inforegio, «Eighth Report on Economic, Social and Territorial Cohesion» («Huitième rapport sur la cohésion économique, sociale et territoriale»).
(11) Recommandation du Conseil du 8 novembre 2019 relative à l’accès des travailleurs salariés et non salariés à la protection sociale 2019/C 387/01 (JO C 387 du 15.11.2019, p. 1).
(12) Résolution du Conseil sur un nouvel agenda européen dans le domaine de l’éducation et de la formation des adultes (2021-2030) 2021/C 504/02 (JO C 504 du 14.12.2021, p. 9).
(13) Recommandation du Conseil relative aux comptes de formation individuels en vue de renforcer la formation des adultes en âge de travailler.
(14) Recommandation du Conseil du 16 juin 2022 sur une approche européenne des microcertifications pour l’apprentissage tout au long de la vie et l’employabilité 2022/C 243/02 (JO C 243 du 27.6.2022, p. 10).
(15) Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — «Plan d’action sur le socle européen des droits sociaux», COM(2021) 102 final.
(16) Avis du Comité économique et social européen sur le thème «La transition énergétique et numérique dans les zones rurales» (JO C 486 du 21.12.2022, p. 59).
18.8.2023 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 293/108 |
Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) 2019/1009 en ce qui concerne l’étiquetage numérique des fertilisants UE
[COM(2023) 98 final — 2023/0049 (COD)]
(2023/C 293/16)
Rapporteur: |
John COMER |
Consultation |
Parlement européen, 13.3.2023 Conseil, 6.3.2023 |
Base juridique |
Articles 114 et 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne |
Compétence |
Section «Agriculture, développement rural et environnement» |
Adoption en section |
1.6.2023 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
38/0/2 |
Adoption en session plénière |
14.6.2023 |
Session plénière no |
579 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
209/0/4 |
1. Conclusions et recommandations
Le Comité économique et social européen (CESE) formule les considérations suivantes:
1.1. |
La mise en place d’un étiquetage numérique volontaire pour les fertilisants est une évolution très positive et il convient de tout mettre en œuvre pour encourager les opérateurs économiques à numériser les étiquettes. |
1.2. |
Il importe de surveiller attentivement le risque de fracture numérique. Même si la proposition dispose qu’une autre solution doit être disponible sur demande, la numérisation est susceptible d’exclure encore davantage certains groupes vulnérables. Il serait recommandé de définir un calendrier et d’apporter plus de clarté quant au fonctionnement effectif d’une telle solution de substitution. |
1.3. |
Les opérateurs économiques qui adoptent l’étiquetage numérique devraient prendre des mesures spécifiques, au-delà de ce que propose la Commission, pour recommander aux utilisateurs finaux de consulter l’étiquette numérique et les y encourager. |
1.4. |
Certains utilisateurs finaux expriment des préoccupations quant au traçage excessif auquel les sites d’étiquetage numérique pourraient donner lieu. Il convient de garantir comme il se doit qu’aucun traçage inutile n’aura lieu. |
1.5. |
Le CESE accueille favorablement la proposition à l’examen car elle vise à améliorer l’efficacité de l’utilisation des fertilisants, à réduire les coûts et à promouvoir la numérisation du secteur agricole, ce qui constitue une initiative bienvenue. |
1.6. |
Une recommandation de procéder à un échantillonnage des sols avant d’appliquer des fertilisants devrait figurer bien en évidence sur l’étiquette physique comme sur l’étiquette numérique. Agir de la sorte serait bénéfique pour l’environnement et permettrait de réaliser des économies. |
1.7. |
La proposition devrait préciser la conception et le format, y compris la taille de police minimale, des étiquettes physiques afin de garantir une communication plus claire. |
1.8. |
Il est recommandé que les emballages contenant 1 000 kg ou plus de fertilisants soient munis uniquement d’une étiquette numérique lorsque les opérateurs économiques décident d’avoir recours à ce type d’étiquetage. Les emballages de fertilisants de moins de 1 000 kg devraient toujours être munis d’une étiquette physique, même lorsque les opérateurs économiques décident d’utiliser une étiquette numérique. |
2. Contexte de l’avis
2.1. |
Le règlement (UE) 2019/1009 du Parlement européen et du Conseil (1) a introduit des exigences en matière d’étiquetage qui sont beaucoup plus étendues que celles prévues par le règlement (CE) no 2003/2003 du Parlement européen et du Conseil (2). Ce nouveau règlement reflétait les nouvelles exigences et préoccupations sociales, tout comme le fait que les nouvelles règles ouvraient le marché de l’Union à des fertilisants innovants et inconnus, pour lesquels des instructions plus détaillées à l’intention des utilisateurs finaux sont nécessaires. |
2.2. |
Les étiquettes surchargées sont difficiles à lire. La profusion d’informations est susceptible de masquer le message essentiel dont l’utilisateur final a besoin. |
2.3. |
Il est difficile, pour les opérateurs économiques, de gérer de telles étiquettes, lesquelles entraînent une hausse des coûts due à la nécessité de les mettre fréquemment à jour. |
2.4. |
La modification du règlement (UE) 2019/1009 qui est proposée est guidée par les mêmes objectifs généraux que le règlement en question, à savoir assurer un niveau élevé de protection de la santé humaine et de l’environnement et le bon fonctionnement du marché intérieur. |
2.5. |
La Commission a recensé deux problèmes spécifiques auxquels la proposition à l’examen tente de remédier:
|
2.6. |
Conformément à l’article 6, paragraphe 7, du règlement (UE) 2019/1009, l’étiquette physique doit satisfaire à l’ensemble des exigences en matière d’étiquetage énoncées à l’annexe III. |
2.7. |
La proposition à l’examen introduit la numérisation volontaire des étiquettes des fertilisants UE. Les fabricants, importateurs ou distributeurs de fertilisants UE peuvent décider de recourir ou non à l’étiquetage numérique. |
2.8. |
Les opérateurs économiques qui optent pour l’étiquetage numérique peuvent placer tous les éléments d’étiquetage requis au titre de l’annexe III sur une étiquette numérique lorsqu’ils fournissent des fertilisants à d’autres opérateurs économiques qui ne sont pas des utilisateurs finaux. Les fertilisants fournis en vrac ou dans des emballages de plus de 1 000 kg peuvent également être vendus à n’importe quelle entité, y compris des utilisateurs finaux, uniquement munis d’une étiquette numérique. |
2.9. |
Les opérateurs économiques qui vendent des fertilisants aux utilisateurs finaux dans des emballages de 1 000 kg ou moins munis d’une étiquette numérique devront aussi y apposer, en plus de celle-ci, une étiquette physique. |
2.10. |
L’étiquette physique doit contenir toutes les informations relatives à la protection de la santé humaine et de l’environnement, ainsi que les informations les plus importantes sur l’efficacité agronomique et le contenu du produit, ou d’autres informations nécessaires après l’achat, telles que celles concernant le stockage et l’élimination en toute sécurité. |
2.11. |
La proposition définit des règles générales relatives à la numérisation des étiquettes sans établir de distinction entre utilisateurs finaux professionnels et non professionnels. Les opérateurs économiques devront veiller en particulier à ce que l’étiquette numérique soit accessible gratuitement et facilement dans toute l’Union pendant une période de cinq ans à compter de la mise sur le marché du produit. L’étiquette physique doit contenir un support de données (par exemple un code QR ou une URL) permettant d’accéder facilement à l’étiquette numérique sans avoir besoin d’utiliser une application spéciale ou unique. Le site auquel renvoie l’étiquette numérique doit contenir les informations requises au titre de l’annexe III et les présenter de manière à ce qu’elles soient séparées des autres informations relatives à la commercialisation ou à d’autres offres spéciales. Aucun système de traçage inutile ne doit être rattaché au site d’étiquetage numérique. |
2.12. |
Les informations figurant sur les étiquettes numériques doivent également être mises à disposition par d’autres moyens, sur demande, afin de répondre aux besoins des utilisateurs vulnérables qui ne sont pas habitués aux étiquettes numériques ou ne souhaitent pas les utiliser. |
2.13. |
Si, pour une raison ou une autre, l’étiquette numérique devient temporairement indisponible, une solution de substitution doit être fournie sans qu’il soit nécessaire de la demander. |
2.14. |
La proposition confère à la Commission le pouvoir d’adapter davantage l’annexe III et de décider quels éléments d’étiquetage pourraient être fournis aux utilisateurs finaux sous forme numérique pour les emballages de 1 000 kg ou moins, en fonction de l’évolution de la société. |
2.15. |
La Commission affirme que la proposition est cohérente avec la politique que mène plus largement l’Union dans le cadre du pacte vert pour l’Europe, lequel vise à relever le double défi des transitions écologique et numérique. |
2.16. |
La proposition a pour objectif d’améliorer l’efficacité de l’utilisation des fertilisants, de réduire les coûts d’étiquetage et de promouvoir la numérisation du secteur agricole, tout en assurant la cohérence avec la plus vaste politique de l’Union en faveur d’un avenir durable et intelligent. |
3. Observations générales
3.1. |
Le CESE accueille favorablement la proposition à l’examen, qui vise à introduire un étiquetage numérique pour les fertilisants. Elle s’inscrit dans une tendance générale caractérisée par la numérisation accrue des informations sur les produits et de leurs étiquettes. |
3.2. |
Les stocks de fertilisants qui satisfont aux normes européennes en matière de santé, de sécurité et d’environnement (marquage CE) pourront se voir apposer une étiquette numérique contenant les informations requises. |
3.3. |
La surcharge des étiquettes représente un problème majeur. Les informations essentielles sont souvent difficiles à trouver, de sorte que les utilisateurs finaux ont parfois tendance à ignorer les étiquettes trop détaillées. En vertu de l’annexe III, telle qu’actuellement mise en œuvre, les informations à placer sur une étiquette physique sont manifestement trop nombreuses. La possibilité de recourir aux étiquettes numériques constitue un progrès majeur. Grâce à l’étiquetage numérique, l’étiquette physique peut contenir les informations absolument essentielles ainsi qu’un lien vers son pendant numérique. |
3.4. |
La proposition confère à la Commission le pouvoir d’adapter davantage l’annexe III et de décider quels éléments d’étiquetage peuvent être fournis sous forme numérique. La Commission est ainsi habilitée à déplacer des éléments présents sur l’étiquette physique pour les faire figurer sur l’étiquette numérique. |
3.5. |
L’étiquette numérique doit comporter des informations permettant d’identifier et de contacter le fabricant du produit, ainsi que le marquage CE et toute référence correspondante à un organisme notifié. |
3.6. |
La proposition ne contient aucune disposition visant à réglementer la taille et l’aspect de l’étiquette physique. |
3.7. |
L’utilisation plus efficace des fertilisants est un élément important de la stratégie «De la ferme à la table», qui fixe un objectif de réduction de 50 % des pertes de nutriments et vise à réduire l’utilisation d’engrais de 20 % d’ici à 2030. La Commission affirme que la proposition à l’examen soutient la tendance à améliorer l’efficacité de l’utilisation des fertilisants. Il n’existe aucune obligation d’inscrire sur l’étiquette physique une quelconque référence à l’analyse des sols, laquelle encouragerait pourtant une utilisation plus efficace des fertilisants. |
3.8. |
Lorsque les opérateurs économiques adoptent l’étiquetage numérique, l’utilisateur final devrait être fortement incité à consulter cette étiquette numérique de manière à tirer le meilleur parti des informations obligatoires sur le produit. |
3.9. |
L’adoption de l’étiquetage numérique est une initiative volontaire de la part des opérateurs économiques. Toutefois, il convient en priorité de les encourager à passer à l’étiquetage numérique afin de promouvoir un recours plus large à celui-ci. |
3.10. |
La communication de la Commission de 2022 sur les engrais (3) souligne la nécessité d’accroître l’efficacité de l’utilisation des fertilisants. Le recours aux outils numériques joue un rôle essentiel dans ce processus. |
3.11. |
L’utilisation de l’étiquetage numérique devrait permettre une meilleure communication sur les propriétés et l’utilisation la plus efficace des fertilisants, ce qui produira des effets bénéfiques pour l’environnement et conduira les utilisateurs finaux à réaliser des économies. |
3.12. |
Le CESE se félicite que les conditions de mise en œuvre de l’étiquetage numérique soient définies à l’échelon de l’Union, car cette démarche permet de créer des conditions de concurrence équitables et d’améliorer ainsi le marché intérieur, tout en garantissant un niveau élevé de protection, comme l’exige le règlement (UE) 2019/1009. En outre, toute modification de l’étiquetage numérique ne peut être apportée qu’au niveau de l’Union. |
3.13. |
La proposition prévoit que les emballages de plus de 1 000 kg devraient être considérés comme des livraisons en vrac. Il aurait été préférable que les emballages de 1 000 kg soient considérés comme des livraisons en vrac et que ceux de moins de 1 000 kg exigent une étiquette physique en plus de l’étiquette numérique. |
3.14. |
Il convient d’identifier plus clairement le risque de fracture numérique qui pèse sur les utilisateurs vulnérables. La proposition de la Commission prévoit qu’une solution autre que l’étiquette numérique doit être disponible sur demande. Toutefois, aucun calendrier n’est envisagé pour définir le délai dans lequel une telle solution de substitution devrait être mise à la disposition des utilisateurs finaux vulnérables. |
3.15. |
Le CESE insiste sur la nécessité de garantir qu’aucun système de traçage inutile ne soit rattaché aux sites d’étiquetage numérique. |
Bruxelles, le 14 juin 2023.
Le président du Comité économique et social européen
Oliver RÖPKE
(1) Règlement (UE) 2019/1009 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 établissant les règles relatives à la mise à disposition sur le marché des fertilisants UE, modifiant les règlements (CE) no 1069/2009 et (CE) no 1107/2009 et abrogeant le règlement (CE) no 2003/2003 (JO L 170 du 25.6.2019, p. 1).
(2) Règlement (CE) no 2003/2003 du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 2003 relatif aux engrais (JO L 304 du 21.11.2003, p. 1).
(3) Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Garantir la disponibilité et le caractère abordable des engrais [COM(2022) 590 final] (JO C 184 du 25.5.2023, p. 109).
18.8.2023 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 293/112 |
Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant les règlements (UE) 2019/943 et (UE) 2019/942 ainsi que les directives (UE) 2018/2001 et (UE) 2019/944 afin d’améliorer l’organisation du marché de l’électricité de l’Union
[COM(2023) 148 final — 2023/0077 (COD)]
(2023/C 293/17)
Rapporteur: |
Jan DIRX |
Corapporteur: |
Christophe QUAREZ |
Consultation |
Conseil de l’Union européenne, 31.3.2023 Parlement européen, 29.3.2023 |
Base juridique |
Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne |
Compétence |
Section «Transports, énergie, infrastructures et société de l’information» |
Adoption en section |
16.5.2023 |
Adoption en session plénière |
14.6.2023 |
Session plénière no |
579 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
209/11/9 |
1. Recommandations politiques
1.1. |
L’énergie, y compris les infrastructures assurant son transport et sa distribution, ne peut être traitée comme un bien parmi d’autres: elle constitue une composante essentielle de notre système économique et social et, partant, un élément central dans la fourniture de services publics. Par conséquent, la fourniture en énergie se classe parmi les services d’intérêt général. D’où la nécessité de créer les conditions requises pour que le cadre réglementaire applicable à l’énergie de demain, tout à la fois, garantisse un approvisionnement respectueux de l’environnement, d’un prix abordable et d’une fiabilité éprouvée, et assure le droit à l’énergie. Pareil objectif nécessite également que l’organisation du marché de l’énergie tienne compte des exigences liées à la décarbonation. Le Comité économique et social européen (CESE) estime que cette nouvelle architecture doit, afin d’assurer un approvisionnement énergétique de base abordable, garantir qu’il s’effectue sur la base de prix réglementés. |
1.2. |
Le CESE considère que la Commission aurait dû arrêter des mesures supplémentaires, dans sa proposition de réforme du marché de l’électricité, pour en adapter l’architecture à la nouvelle réalité, qui requiert de gérer simultanément trois objectifs, à savoir sa durabilité, le caractère abordable de ses prix et la sécurité de l’approvisionnement. Cette nouvelle réalité sera également fondée sur les énergies renouvelables et renforcera le rôle que les prosommateurs et les petits acteurs du marché jouent aux côtés des grands producteurs. |
1.3. |
Un système tenant compte de ces changements ne peut fonctionner que si le principe d’ordre de préséance économique est aboli et remplacé par un modèle dans lequel les prix de l’électricité se basent sur les coûts de chaque filière de production. Dans un tel système, la tarification doit s’effectuer en prenant en considération les coûts moyens. |
1.4. |
Dans le cadre d’une réforme du marché de l’électricité, la libéralisation doit être soumise à un examen critique sous l’angle de la durabilité, du caractère abordable des prix pratiqués et de la sécurité de l’approvisionnement. En outre, il convient de garder à l’esprit que la crise actuelle montre que les marchés de l’énergie libéralisés ne sont pas capables de répondre à ces besoins et qu’ils ne génèrent pas suffisamment d’incitations et de sécurité d’investissement en faveur des énergies renouvelables. En outre, c’est aux pouvoirs publics qu’il incombera de réaliser sur le long terme ces trois objectifs, de la durabilité, de prix à caractère abordable et de la sécurité de l’approvisionnement, car le marché ne parviendra pas de lui-même à les réunir et les concrétiser. |
1.5. |
Le CESE opte dès lors pour un modèle hybride, dans lequel les forces du marché et sa gestion centrée sur des objectifs se conjugueraient pour aboutir à ce qu’il fonctionne de manière optimale dans le cadre des visées poursuivies. Ce modèle est axé sur un «service complémentaire essentiel» mis en place par les pouvoirs publics, qui achèterait l’électricité aux producteurs et la revendrait aux acteurs qui la fournissent aux ménages, aux PME et aux communautés énergétiques citoyennes, ainsi qu’aux grands consommateurs et, lorsqu’il est opportun et possible de le faire, à d’autres pays, en recourant, pour guider ses décisions, aux trois objectifs susmentionnés. Ce «service complémentaire essentiel» conclurait des contrats à long terme avec les producteurs d’électricité sur la base d’appels d’offres. Les contrats afférents seraient de différents types, tels que des accords d’achat d’électricité (AAE), des contrats d’écart compensatoire (CEC) et des contrats à prix coûtant majoré. |
1.6. |
Le CESE soutient fermement la Commission quand elle propose de donner aux consommateurs les moyens d’agir en les dotant du droit de partager directement leurs énergies renouvelables. Cet objectif requiert, entre autres, que toutes les informations leur soient exposées clairement et accessibles, de manière à ce qu’ils puissent assumer un rôle d’acteurs indépendants du marché de l’électricité, comme utilisateurs et producteurs. Le CESE est également d’avis que le marché doit être organisé de manière que les consommateurs qui produisent également leur propre électricité, à savoir les prosommateurs, ou d’autres petits acteurs puissent retirer un bénéfice maximal de celle dont ils assurent la production, même s’ils l’injectent dans le réseau. La création d’une «banque d’électricité» pourrait fournir l’exemple d’une autre manière de procéder en ce sens, qui serait plus honnête à l’égard des petits producteurs. |
1.7. |
En plus de demander une montée en puissance dans le développement des gaz verts, le Comité invite la Commission à inclure dans le train de mesures sur l’hydrogène et les gaz à faibles émissions de carbone un règlement sur l’organisation du marché du gaz naturel. Instaurant ainsi, au niveau de l’Union, un marché du gaz naturel unique, intégré et sûr, ce texte législatif accélérerait l’électrification du système énergétique, en garantissant aux consommateurs des prix plus égaux et une sécurité accrue. |
1.8. |
Que le consommateur stocke et génère sa propre électricité ne s’avérera suffisant ni pour parvenir à un niveau élevé d’intégration des systèmes d’énergie renouvelable, ni pour accélérer la transition vers un système décarboné. La piste qu’il convient d’emprunter consistera à instaurer des marchés de la flexibilité qui, idéalement, signaleront aussi la situation qui prévaut sur le réseau. Lors de la mise en place de ces marchés de la flexibilité, il serait judicieux de faire la distinction entre les différents niveaux de tension. |
1.9. |
Étant donné qu’il faudra du temps pour que la réforme produise pleinement ses effets, le CESE recommande que le mécanisme de plafonnement des recettes inframarginales reste en place jusqu’à ce qu’elle soit complètement opérationnelle. Il conviendrait d’aiguiller les rentrées ainsi obtenues vers les consommateurs les plus vulnérables, en ménageant une possibilité de baisse des prix à la lumière d’évolutions intervenues de fraîche date dans les prix de gros. |
1.10. |
Le Comité demande instamment à la Commission de surveiller les effets que la réforme proposée produira sur le marché de l’électricité. Une telle mesure est essentielle, car le marché de l’électricité connaît actuellement un changement de paradigme qui est loin d’être terminé et nécessitera certainement d’autres adaptations au cours des prochaines années. La démarche est d’autant plus importante qu’aucune analyse d’impact n’a été élaborée pour l’actuelle proposition de la Commission, de sorte que les incertitudes entourant les effets que produira la réforme s’en trouvent accentuées. |
2. Justification des recommandations politiques
Observations générales
2.1. |
Le CESE prône depuis un certain temps une réforme du marché européen de l’électricité (1). La raison en est que, dans la pratique, les risques auxquels ce marché est exposé pèsent principalement sur les consommateurs, comme l’a conclu la Cour des comptes européenne dans son rapport spécial sur «L’intégration du marché intérieur de l’électricité» (2). |
2.2. |
Les augmentations que les prix de l’énergie avaient enregistrées en 2021 et 2022 se sont accélérées après le début de la guerre d’agression que mène la Russie contre l’Ukraine: ce conflit a eu des incidences sur les prix des combustibles fossiles, en particulier le gaz, et les hausses qui en ont résulté se sont répercutées sur les consommateurs, en suivant l’ordre de préséance économique (3). Il en ressort clairement que la structure actuelle du marché de l’électricité n’est pas en mesure de garantir que les prix de l’électricité restent supportables pour les consommateurs et les entreprises. |
2.3. |
Il importe également d’avoir conscience qu’il existe une raison économique fondamentale de réorganiser le marché de l’électricité, à savoir que les coûts marginaux des systèmes d’énergie renouvelable sont nuls. Il est évident qu’une structure de marché dotée d’un mécanisme de prix dans lequel ce sont les coûts marginaux de la dernière centrale électrique activée qui déterminent le prix d’équilibre sera inopérante dans un futur secteur de l’électricité dominé par des systèmes d’énergie renouvelable, ou un autre système à fortes dépenses en capital. C’est pourquoi nous avons besoin, en guise de système de rémunération de tous les producteurs d’énergie renouvelable, d’un contrat d’écart compensatoire (CEC) qui, pour établir le prix de référence, utilise les coûts actualisés de l’énergie ou coûts moyens. |
2.4. |
Les coûts marginaux des énergies renouvelables constituent le motif fondamental justifiant la mise en place d’un contrat d’écart compensatoire. Quoi que la Commission ait laissé entendre, la stabilité des prix qui découlera de cette mesure ne sera que partielle, voire nulle, du moins tant que le contrat d’écart compensatoire ne couvre que l’électricité telle qu’elle est produite, et non des produits plus complexes, comme une combinaison de production d’énergie renouvelable, de stockage et de gestion de la demande. La cause de cet écueil est que lors des périodes de basse production d’énergie renouvelable, il est nécessaire d’acheter l’énergie résiduelle, laquelle peut engendrer des coûts très élevés. La Commission ne tient pas compte de cet effet et fait aux consommateurs finals des promesses qu’elle ne pourra pas tenir à terme. |
2.5. |
Le CESE souligne que l’énergie, y compris les infrastructures assurant son transport et sa distribution, ne constitue pas un bien parmi d’autres, mais représente une composante essentielle de notre système économique et social et, partant, un élément central dans la fourniture de services publics. Par conséquent, la fourniture en énergie se classe parmi les services d’intérêt général. D’où la nécessité de créer les conditions requises pour que le cadre réglementaire applicable à l’énergie de demain, tout à la fois, garantisse un approvisionnement respectueux de l’environnement, d’un prix abordable et d’une fiabilité éprouvée, et assure le droit à l’énergie. Pareil objectif nécessite également que l’organisation du marché de l’énergie tienne compte des exigences liées à la décarbonation. Le CESE estime que cette nouvelle architecture doit, afin d’assurer un approvisionnement énergétique de base abordable, garantir qu’il s’effectue sur la base de prix réglementés. Le remboursement des coûts aux fournisseurs d’énergie devrait se fonder sur des justificatifs en la matière. En contrepartie, ils devraient en permanence être tenus de réserver à l’approvisionnement de base une certaine fraction de leur volume d’énergie. |
2.6. |
Il est clair que les changements qu’a récemment connus le marché de l’électricité ont mis en évidence qu’il importe d’y dégager un nouvel équilibre entre la place qu’y occupent le public et le privé. Le Comité a examiné cette question de manière approfondie dans son avis TEN/771 sur «Les investissements publics dans les infrastructures énergétiques comme élément de solution face aux problèmes climatiques» (voir note de bas de page no 1). Dans le même temps, le CESE est fermement convaincu qu’il est absolument nécessaire de procéder à des réformes sur ce marché pour atteindre les objectifs susmentionnés concernant sa durabilité, son caractère abordable et la sécurité de l’approvisionnement. |
2.7. |
Le 14 mars 2023, la Commission a publié une proposition législative en vue «de réformer l’organisation du marché de l’électricité de l’Union afin d’accélérer l’essor des énergies renouvelables et l’abandon progressif du gaz, de réduire la dépendance des factures des consommateurs par rapport à la volatilité des prix des combustibles fossiles, de mieux protéger les consommateurs contre les futures flambées de prix et les manipulations du marché et de rendre l’industrie de l’Union propre et plus compétitive» (4). |
2.8. |
Le CESE accueille favorablement cette proposition, en ce qu’elle constitue un premier pas dans la bonne direction, à savoir le système énergétique de demain, qui devrait être décarboné, fondé sur des sources d’énergie renouvelables et sans carbone et centré sur les consommateurs, lesquels doivent avoir accès à l’ensemble des informations à cet égard, qui doivent leur être présentées clairement, de manière à ce qu’ils puissent assumer un rôle d’acteurs indépendants du marché de l’électricité, comme utilisateurs et producteurs. |
2.9. |
Le Comité demande instamment à la Commission de surveiller les effets que la réforme proposée produira sur le marché de l’électricité. Une telle mesure est essentielle, car le marché de l’électricité connaît actuellement un changement de paradigme qui est loin d’être terminé et nécessitera certainement d’autres adaptations au cours des prochaines années. La démarche est d’autant plus importante qu’aucune analyse d’impact n’a été élaborée pour l’actuelle proposition de la Commission, de sorte que les incertitudes entourant les effets que produira la réforme s’en trouvent accentuées. |
2.10. |
La proposition de réforme du marché de l’électricité prévoit d’instaurer un service et des produits concernant l’écrêtement des pointes, c’est-à-dire la capacité des acteurs du marché de réduire la consommation d’électricité aux heures de pointe, telles que déterminées par le gestionnaire de réseau de transport. Aux termes de l’article 7 bis, les contrats relatifs à un produit d’écrêtement des pointes ne peuvent être conclus plus de deux jours avant son activation et sa durée contractuelle n’excédera pas un jour. Si un délai aussi bref est souhaitable pour prévenir les abus, en particulier dans le cas des grands consommateurs, il pourrait par ailleurs empêcher de nombreux autres consommateurs, ainsi que des agrégateurs indépendants, de fournir ces produits. Le Comité demande dès lors à la Commission d’examiner à quelles conditions il serait envisageable d’allonger cette durée contractuelle. |
2.11. |
Le Comité estime en outre que la Commission a soumis quelques bonnes propositions pour retoucher le marché de l’électricité. Il considère toutefois qu’elle aurait dû arrêter des mesures supplémentaires pour en adapter l’architecture à la nouvelle réalité, qui requiert de gérer simultanément trois objectifs, à savoir sa durabilité, le caractère abordable de ses prix et la sécurité de l’approvisionnement. En outre, sa configuration sera fondée sur les énergies renouvelables et elle renforcera, si l’on en croit la promesse faite par la Commission, le rôle que les prosommateurs et les petits acteurs y jouent aux côtés des grands producteurs (5). Toutefois, la proposition qu’elle formule ne reflète pas suffisamment cette dynamique, et le Comité avance donc deux autres idées qui pourraient s’inscrire dans la législation proposée. |
2.12. |
Un système tenant compte de ces changements ne peut fonctionner que si le principe d’ordre de préséance économique est aboli et remplacé par un modèle dans lequel les prix de l’électricité se basent sur les coûts de chaque filière de production. Dans un tel système, la tarification doit s’effectuer en prenant en considération les coûts moyens. |
Un service complémentaire essentiel assuré par les pouvoirs publics
2.13. |
Depuis 1996, l’Union européenne s’est employée à libéraliser le marché de l’électricité. Dans le cadre d’une réforme de ce marché, la démarche de libéralisation doit cependant être soumise à un examen critique, sous l’angle de la durabilité, du caractère abordable des prix pratiqués et de la sécurité de l’approvisionnement. Il convient de tenir compte des évolutions passées et futures du marché de l’électricité, y compris des changements majeurs intervenus dans les installations de production, dont les prix de revient sont très différents. Par ailleurs, c’est aux pouvoirs publics qu’il incombera de réaliser les trois objectifs susmentionnés sur une longue période, car le marché ne les réunira pas spontanément. |
2.14. |
Le CESE est d’avis qu’il serait préférable de choisir de conjuguer efficacement libéralisation et réglementation pour allier les avantages du marché libéralisé à l’orientation souhaitée par les pouvoirs publics, de manière à garantir que les objectifs soient dûment préservés. |
2.15. |
Comme il l’a déjà indiqué dans son avis TEN/771, il a la conviction qu’il convient de veiller tout particulièrement à ranger le développement des réseaux parmi les questions d’intérêt public majeur, de faire de la lutte contre le changement climatique un des objectifs de la régulation et, d’une manière générale, d’assurer une synchronisation plus efficace entre la planification des énergies renouvelables et le réseau électrique. Il est absolument nécessaire de disposer en la matière de dispositions concrètes relevant du droit européen. |
2.16. |
En conséquence, le modèle que le CESE expose dans le présent avis pour la réforme du marché de l’électricité a pour principe fondateur de le libéraliser chaque fois que possible et de le réglementer chaque fois que nécessaire. Il s’agirait d’un modèle hybride, dans lequel les forces du marché et sa gestion centrée sur des objectifs se conjugueraient pour aboutir à ce qu’il fonctionne de manière optimale dans le cadre des visées poursuivies. |
2.17. |
Ce modèle, qu’il est par ailleurs déjà possible d’établir sur la base de la réglementation actuelle, devrait créer un «service complémentaire essentiel» mis en place par les pouvoirs publics, qui achèterait l’électricité aux producteurs et la revendrait aux acteurs qui la fournissent aux ménages, aux PME et aux communautés énergétiques citoyennes, ainsi qu’aux grands consommateurs et, lorsqu’il est opportun et possible de le faire, à d’autres pays, en recourant, pour guider ses décisions, aux trois objectifs mentionnés ci-dessus. Ce «service complémentaire essentiel» conclurait des contrats à long terme avec les producteurs d’électricité sur la base d’appels d’offres. Les contrats afférents seraient de différents types, tels que des accords d’achat d’électricité (AAE), des contrats d’écart compensatoire (CEC) et des contrats à prix coûtant majoré. Parce qu’il a été conçu pour constituer un instrument destiné à promouvoir de nouveaux investissements produisant de l’électricité à partir de systèmes d’énergie renouvelable, le CEC ne doit pas empêcher le producteur de s’efforcer d’optimiser sa production d’électricité. Pour la mise aux enchères d’un contrat d’écart compensatoire, il y a lieu de définir un prix plancher, ou prix minimal, et un prix plafond, ou prix maximal, au moyen d’une base de comparaison dynamique fondée sur les coûts totaux moyens actualisés de l’énergie (LCOE) en rapport avec la technologie concernée, solaire, éolienne ou autre. Par conséquent, il convient que les États membres soient tenus de fixer des rémunérations minimales et maximales, afin que les producteurs d’électricité soient incités à tirer le meilleur parti de celle qu’ils produisent. Des dispositions particulières devraient s’appliquer à l’approvisionnement énergétique marginal, par exemple assuré par des gaz renouvelables ou des batteries. |
2.18. |
Compte tenu des possibilités de production disponibles et conformément aux trois objectifs précités, le service complémentaire essentiel pourrait passer des contrats avec différents types d’entreprises productrices. Ceux qu’il conclurait à long terme garantiraient tout à la fois que les utilisateurs finals bénéficient d’un prix acceptable garanti par l’État et que les producteurs puissent tabler sur une sécurité d’investissement. |
2.19. |
Le service complémentaire essentiel revendrait ensuite l’électricité ainsi achetée aux entreprises de distribution, aux grands consommateurs et aux autres acteurs du marché. À cet effet, il serait également possible de conclure différents types de contrats, dont les caractéristiques varieraient, pour partie, en fonction des souhaits des participants, tandis que des plafonds sont appliqués aux prix de revente pour éviter les surprofits. |
Banque d’électricité
2.20. |
Le Comité soutient résolument l’approche décrite dans la stratégie de la Commission relative à l’Union européenne de l’énergie, qui vise à autonomiser les consommateurs et à les placer au centre des politiques, notamment en instituant un droit de partager l’énergie renouvelable de façon directe. Il se réjouit donc qu’elle ait prévu dans sa proposition de leur donner la possibilité de vendre à leurs voisins l’électricité solaire excédentaire produite par les panneaux solaires installés sur leur toit. Le CESE est également d’avis que le marché doit être organisé de manière que les consommateurs qui produisent également leur propre électricité, à savoir les prosommateurs et les communautés d’énergie renouvelable, ou d’autres petits acteurs ou producteurs puissent retirer un bénéfice maximal de celle dont ils assurent la production, même s’ils l’injectent dans le réseau. La création d’une «banque d’électricité» pourrait fournir l’exemple d’une autre manière de procéder en ce sens, plus honnête à l’égard des petits producteurs, qu’il serait possible d’étudier plus avant et de perfectionner. |
2.21. |
Une telle banque d’électricité pourrait fonctionner de la manière suivante: quand les journées sont ensoleillées, le propriétaire de panneaux photovoltaïques installés sur sa toiture produit davantage d’électricité qu’il n’en consomme durant ces jours-là; par le truchement du réseau, il fournit cette production excédentaire à l’entreprise de distribution avec laquelle il a conclu un contrat; grâce au compteur intelligent dont il dispose, elle prend connaissance de la quantité d’électricité qu’il a livrée et la porte partiellement au crédit de son compte en kilowatt-heure, par exemple à hauteur de 70 à 90 %, selon la quantité qu’il a injectée dans le réseau, étant entendu que pour les fournisseurs de moindre envergure, ce pourcentage sera plus élevé que pour les autres. La production ne lui est que partiellement créditée, pour trois raisons: la première est de rémunérer les services assurés par l’entreprise, la deuxième étant qu’elle doit prendre en considération les éventuelles différences de prix entre le moment où l’électricité est fournie et celui où le consommateur souhaite l’acheter, et la troisième, que le système se devra de comporter des mesures incitatives pour augmenter la capacité de stockage, ne fût-ce que sous la forme d’un petit générateur, de manière que l’ensemble du réseau électrique gagne en résilience. À titre d’exemple, on prendra le cas d’un producteur qui, ayant livré 100 kWh, en est crédité de 80 par la banque sur son compte. Par la suite, il doit obtenir de l’électricité auprès de son fournisseur, par exemple pour ses besoins domestiques, ou pour recharger la batterie de sa voiture à une station de recharge, en utilisant pour ce faire une carte spéciale émise par ce même fournisseur d’électricité. Supposons qu’il ait besoin de 200 kWh: les 80 premiers seront débités de son compte et ne lui seront pas facturés. Pour les 120 kWh qu’il achètera, il devra payer le prix stipulé dans le contrat qu’il a conclu avec sa compagnie d’électricité. |
2.22. |
En conclusion, c’est en kilowatt-heure plutôt qu’en euros qu’il paiera les services de sa banque d’électricité. Le prix de l’électricité qu’il se procurera par l’intermédiaire du réseau inclura bien évidemment les coûts externes habituels, tels que les redevances de réseau, les majorations, les prélèvements et les taxes. |
Besoins en gaz vert, flexibilité et sécurité de l’approvisionnement
2.23. |
Pour l’instant, l’Union européenne a décidé d’avoir recours au gaz naturel liquéfié (GNL) pour remplacer le gaz russe. Il s’agit toutefois d’une solution à court terme qui a des incidences sur l’environnement, notamment pour ce qui est du gaz de schiste extrait aux États-Unis puis acheminé en Europe par la voie maritime, ainsi que des répercussions économiques, la molécule étant plus chère que dans le cas du gaz russe, ou encore géopolitiques, dans la mesure où l’Union risque de se retrouver dans une situation de dépendance vis-à-vis d’autres partenaires qui ne sont pas démocratiques ou ne respectent pas les droits de l’homme. Deux mesures revêtent donc une importance primordiale. La première consiste à réduire la position de marginalité qu’occupe le gaz. L’exploitation de centrales à gaz restera indispensable pour assurer fournir un système d’appoint flexible à moyen terme, de sorte qu’il sera nécessaire d’opérer une transition rapide vers le gaz vert, comme certaines formes de biogaz et l’hydrogène vert. La réforme devrait également s’efforcer de recenser les moyens d’y parvenir et imposer des objectifs contraignants pour les périodes de pointe. |
2.24. |
Selon les différents scénarios élaborés par la Commission, le gaz naturel continuera, à court terme, à jouer un rôle important afin de garantir que le système productif de l’Union européenne soit approvisionné en énergie thermique. La capacité de production de biogaz doit connaître une accélération et le coût de l’hydrogène vert diminuer afin qu’ils puissent remplacer le gaz naturel dès que possible. En plus de demander une montée en puissance dans le développement des gaz verts, le Comité invite la Commission à inclure dans le train de mesures sur l’hydrogène et les gaz à faibles émissions de carbone un règlement sur l’organisation du marché du gaz naturel. Instaurant ainsi, au niveau de l’Union, un marché du gaz naturel unique, intégré et sûr, la Commission accélérerait l’électrification du système énergétique en garantissant aux européens des prix plus homogènes et une sécurité accrue et en améliorant la coordination des actions menées en soutien à une élimination, progressive mais aussi rapide que possible, du recours au gaz naturel. |
2.25. |
En 2030, selon le scénario de modélisation de la Commission européenne, l’électricité renouvelable devrait représenter environ 70 % de la production électrique de l’Union. Pour atteindre un niveau aussi élevé dans l’intégration des systèmes d’énergie renouvelable et accélérer la transition vers une architecture énergétique décarbonée, il sera nécessaire de veiller à ce que le marché à court terme soit plus efficace, d’améliorer le stockage en facilitant l’accès aux financements et aux permis, et d’encourager les consommateurs à utiliser l’électricité qu’ils ont eux-mêmes produite. Toutefois, le stockage et la production de l’électricité de production propre ne seront pas suffisants et il est peu probable que le marché à court terme offre une solution efficace. La piste qu’il convient d’emprunter consistera à instaurer des marchés de la flexibilité qui, idéalement, signaleront aussi la situation qui prévaut sur le réseau. La réforme devrait en outre veiller à éviter tout risque de compartimentation, en surveillant attentivement la mise en œuvre des mesures nouvellement adoptées. |
2.26. |
Lors de la mise en place de ces marchés de la flexibilité, il serait judicieux de faire la distinction entre les différents niveaux de tension. Pour la moyenne et la haute tension, il est nécessaire de prévoir des solutions de flexibilité à grande échelle, telles que de grandes installations de stockage, et il serait envisageable d’autoriser ou d’obliger le gestionnaire du réseau à les intégrer à son exploitation en tant que ressources propres. En ce qui concerne la basse tension, l’enjeu consistera plutôt à combiner les solutions de flexibilité à petite échelle qui sont offertes par les prosommateurs, par exemple dans les ménages disposant de leur propre installation photovoltaïque, d’une petite capacité de stockage et d’une pompe à chaleur. Les plateformes numériques exploitées par le gestionnaire de réseau ou d’autres acteurs du marché pourraient acquérir un rôle très utile pour commercialiser la flexibilité sous forme d’une prestation de services et l’intégrer au système électrique. |
2.27. |
Une tarification à géométrie variable, y compris pour les redevances de réseau, peut fortement inciter les consommateurs finals à adopter des comportements bénéfiques pour le système. Toutefois, cette solution nécessite l’installation d’une infrastructure numérique, étant donné que ces tarifs différenciés doivent refléter l’état du réseau. En ce qui concerne les redevances de réseau, il importe par ailleurs d’inciter à produire de l’électricité à des moments proches de sa consommation, car une telle démarche peut constituer un des moyens de limiter l’expansion du réseau. |
Précarité énergétique
2.28. |
L’objectif de la réforme étant de protéger les consommateurs contre la volatilité du marché de gros, le CESE accueille favorablement la proposition qui vise à protéger le consommateur final, notamment en désignant des fournisseurs de dernier recours à son intention ou en lui évitant des interruptions de fourniture s’il est dans le besoin. Le Comité constate toutefois que le plafond des recettes inframarginales n’a pas été étendu. Étant donné qu’il faudra du temps pour que la réforme produise pleinement ses effets, il recommande que le mécanisme reste en place jusqu’à ce qu’elle soit complètement opérationnelle. Il conviendrait d’aiguiller les rentrées ainsi obtenues vers les consommateurs les plus vulnérables, comme les personnes en situation de précarité énergétique ou les petites et moyennes entreprises, en ménageant une possibilité de baisse de prix en fonction d’évolutions intervenues de fraîche date dans les prix de gros. |
2.29. |
Le CESE estime qu’afin d’assurer un approvisionnement énergétique de base abordable, la nouvelle organisation du marché doit garantir, pour une consommation énergétique de base, des prix réglementés. Il conviendrait que les coûts supportés par les fournisseurs d’énergie soient remboursés, sur la base de justificatifs. En contrepartie, ils devraient en permanence être tenus de réserver à l’approvisionnement de base une certaine fraction de leur volume d’énergie. |
3. Amendements à la proposition législative
3.1. Règlement (UE) 2019/943 du Parlement européen et du Conseil (6)
Amendement 1
Insérer un nouveau considérant 21 bis après le considérant 21:
Texte proposé par la Commission européenne |
Amendement |
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Exposé des motifs
Se référer au point 2, paragraphes 2.18 à 2.21, du présent avis.
Amendement 2
Insérer un nouveau considérant 50 bis après le considérant 50:
Texte proposé par la Commission européenne |
Amendement |
||
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Exposé des motifs
Se référer au point 2, paragraphes 2.22 à 2.24, du présent avis.
Amendement 3
L’article 1er est modifié comme suit:
Texte proposé par la Commission européenne |
Amendement |
||
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Exposé des motifs
Se référer au point 2, paragraphes 2.5 et suivants, du présent avis.
Amendement 4
L’article 1er est modifié comme suit:
Texte proposé par la Commission européenne |
Amendement |
||
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Exposé des motifs
Se référer au point 2, paragraphe 2.13, du présent avis.
Amendement 5
L’article 19 ter est modifié comme suit:
Texte proposé par la Commission européenne |
Amendement |
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3. […]
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Exposé des motifs
Se référer au point 2, paragraphe 2.19, du présent avis.
Amendement 6
L’article 7 bis, point c), est modifié comme suit:
Texte proposé par la Commission européenne |
Amendement |
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Exposé des motifs
Se référer au point 2, paragraphe 2.11, du présent avis.
Amendement 7
L’article 19 ter, paragraphe 3, est modifié comme suit:
Texte proposé par la Commission européenne |
Amendement |
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Exposé des motifs
Se référer au point 2, paragraphe 2.19, du présent avis.
3.2. Directive (UE) 2019/944 du Parlement européen et du Conseil (7)
Amendement 8
L’article 4 est modifié comme suit:
Texte proposé par la Commission européenne |
Amendement |
Les États membres veillent à ce que tous les clients soient libres d’acheter de l’électricité auprès du fournisseur de leur choix. Les États membres veillent à ce que tous les clients soient libres d’avoir plus d’un contrat de fourniture d’électricité en même temps et à ce que, à cette fin, les clients aient le droit de disposer de plus d’un point de mesure et de facturation couvert par le point de raccordement unique de leurs locaux. |
Les États membres veillent à ce que les prix de l’électricité facturés au consommateur reflètent les coûts réels de production, majorés d’une marge bénéficiaire appropriée, et à ce que tous les clients soient libres d’acheter de l’électricité auprès du fournisseur de leur choix. Les États membres veillent à ce que tous les clients soient libres d’avoir plus d’un contrat de fourniture d’électricité en même temps et à ce que, à cette fin, les clients aient le droit de disposer de plus d’un point de mesure et de facturation couvert par le point de raccordement unique de leurs locaux. |
Exposé des motifs
Se référer au point 2, paragraphe 2.9, du présent avis.
Amendement 9
L’article 4 ter, paragraphe 1, est modifié comme suit:
Texte proposé par la Commission européenne |
Amendement |
Les États membres veillent à ce que le cadre réglementaire national permette aux fournisseurs de proposer un contrat d’électricité à durée déterminée et à prix fixe et un contrat à tarification dynamique. Les États membres veillent à ce que les clients finals qui disposent d’un compteur intelligent puissent demander la conclusion d’un contrat d’électricité à tarification dynamique et à ce que tous les clients finals puissent demander la conclusion d’un contrat d’électricité à prix fixe et à durée déterminée d’une durée d’au moins un an, avec au moins un fournisseur et avec chaque fournisseur ayant plus de 200 000 clients finals. |
Les États membres veillent à ce que le cadre réglementaire national permette aux fournisseurs de proposer un contrat d’électricité à durée déterminée et à prix fixe et un contrat à tarification dynamique. Les États membres veillent à ce que les clients finals qui disposent d’un compteur intelligent puissent demander la conclusion d’un contrat d’électricité à tarification dynamique et à ce que tous les clients finals puissent demander la conclusion d’un contrat d’électricité à un prix fixe et abordable et à durée déterminée d’une durée d’au moins un an, avec au moins un fournisseur et avec chaque fournisseur ayant plus de 200 000 clients finals. |
Exposé des motifs
Se référer au point 2, paragraphe 2.9, du présent avis.
Amendement 10
L’article 27 bis, paragraphe 1, est modifié comme suit:
Texte proposé par la Commission européenne |
Amendement |
Les États membres désignent des fournisseurs de dernier recours au moins pour les clients résidentiels. Les fournisseurs de dernier recours sont désignés selon une procédure équitable, ouverte, transparente et non discriminatoire. |
Les États membres désignent des fournisseurs de dernier recours au moins pour les clients résidentiels. Les fournisseurs de dernier recours sont désignés selon une procédure équitable, ouverte, transparente et non discriminatoire. Tous les fournisseurs d’énergie doivent être disponibles à titre de fournisseurs de dernier recours en fonction de leur part de marché. |
Exposé des motifs
Pour des raisons d’équité, tous les fournisseurs d’énergie devraient pouvoir être désignés comme fournisseurs de dernier recours.
Amendement 11
L’article 27 bis, paragraphe 2, est modifié comme suit:
Texte proposé par la Commission européenne |
Amendement |
Les clients finals qui sont transférés à des fournisseurs de dernier ressort ne perdent pas leurs droits en tant que clients, en particulier les droits prévus aux articles 4, 10, 11, 12, 14, 18 et 26. |
Les clients finals qui sont transférés à des fournisseurs de dernier ressort ne perdent pas leurs droits en tant que clients, en particulier les droits prévus aux articles 4, 10, 11, 12, 14, 18 et 26. Les modalités contractuelles pratiquées par un fournisseur de dernier ressort ne peuvent être ni discriminatoires ni dissuasives. Elles doivent refléter les coûts réels de production, majorés d’une marge bénéficiaire appropriée. |
Exposé des motifs
Cet ajout est nécessaire pour garantir un traitement équitable des clients.
Amendement 12
L’article 66 bis est modifié comme suit:
Modifier les paragraphes 1 à 4 comme suit:
Texte proposé par la Commission européenne |
Amendement |
||||||||||||||
1. La Commission peut, par voie de décision, déclarer une crise des prix de l’électricité au niveau régional ou à l’échelle de l’Union, si les conditions suivantes sont remplies:
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1. Lorsque les conditions suivantes sont remplies:
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||||||||||||||
2. La Commission précise, dans sa décision déclarant une crise des prix de l’électricité au niveau régional ou à l’échelle de l’Union, la durée de validité de cette décision, qui peut être d’un an au maximum. |
2. Les États membres peuvent, aussi longtemps que la condition visée au paragraphe 1 s’applique, fixer, de manière exceptionnelle et temporaire, un tarif de fourniture de l’énergie qui est inférieur aux coûts, si les conditions suivantes sont remplies:
|
||||||||||||||
3. Lorsque la Commission a adopté une décision en vertu du paragraphe 1, les États membres peuvent, pendant la durée de validité de cette décision, effectuer des interventions publiques ciblées dans la fixation des prix pour la fourniture d’électricité aux petites et moyennes entreprises. Ces interventions publiques:
4. Lorsque la Commission a adopté une décision en vertu du paragraphe 1, les États membres peuvent, pour la durée de validité de cette décision, par dérogation à l’article 5, paragraphe 7, point c), lorsqu’ils effectuent des interventions publiques ciblées dans la fixation des prix pour la fourniture d’électricité conformément à l’article 5, paragraphe 6, ou au paragraphe 3 du présent article, fixer, à titre exceptionnel et temporaire, un prix de fourniture d’électricité inférieur aux coûts, pour autant que les conditions suivantes soient remplies:
|
3. L’indemnisation visée au paragraphe 2, point d), doit être financée au moyen des recettes dégagées par le plafonnement des revenus issus du marché pour la production d’électricité générée au moyen de technologies inframarginales. |
Exposé des motifs
Les prix actuels de l’énergie ont montré qu’en cas de distorsions du marché de ce type, des mesures sont nécessaires pour garantir un approvisionnement énergétique de base en énergie à l’intention des ménages, mais aussi des entreprises. Le mécanisme que propose la Commission à l’article 66 bis de sa proposition est toutefois compliqué et inefficace, et il exclut par ailleurs toute possibilité d’être cofinancé.
Nous proposons un mécanisme simple mais efficace, basé sur le système autrichien de la «loi de subvention pour le coût de l’électricité». Le dispositif pourrait entrer en vigueur de manière automatique et devrait être financé par un prélèvement sur les bénéfices exceptionnels.
— |
Le prix de l’électricité à l’achat d’un volume d’approvisionnement de base ne peut excéder 10 centimes net par kilowatt-heure. |
— |
Si, sur deux mois consécutifs, le prix moyen d’échange de l’électricité est supérieur à 100 EUR par mégawatt-heure, les fournisseurs contraints de vendre à un tarif inférieur à leurs frais réels d’acquisition ont le droit d’être indemnisés sur ce différentiel de coûts. |
— |
Les fournisseurs d’énergie doivent apporter la preuve des coûts supportés. |
— |
Ce frein tarifaire des prix est financé par un prélèvement sur les bénéfices exceptionnels dégagés dans le domaine de la production inframarginale. |
Bruxelles, le 14 juin 2023.
Le président du Comité économique et social européen
Oliver RÖPKE
(1) Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Les investissements publics dans les infrastructures énergétiques comme élément de solution face aux problèmes climatiques» (avis d’initiative) (JO C 486 du 21.12.2022, p. 67) et avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — «Interventions sur le marché de l’énergie à court terme et améliorations à long terme de l’organisation du marché de l’électricité — ligne de conduite»[COM(2022) 236 final] (JO C 75 du 28.2.2023, p. 185).
(2) https://www.eca.europa.eu/Lists/ECADocuments/INSR23_03/INSR_Energy_Union_FR.pdf
(3) L’ordre de préséance économique des centrales électriques consiste en leur classement en fonction du niveau de leurs coûts marginaux, allant des plus faibles aux plus élevés. Celles dont les coûts marginaux sont plus élevés sont activées suivant cet ordre jusqu’à ce que la demande soit satisfaite. Cette hiérarchie est la suivante: énergies renouvelables, nucléaire, charbon et, enfin, pétrole et gaz. Sur le marché actuel de l’électricité, les prix sont déterminés par les coûts marginaux de la dernière centrale électrique dans l’ordre de préséance économique, qui est généralement une installation fonctionnant au gaz.
(4) https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/IP_23_1591
(5) Par «petit acteur du marché», on entend, par exemple, une municipalité, une coopérative énergétique ou une région qui produit de l’électricité d’origine éolienne ou solaire et en fournit une partie au réseau au lieu de l’utiliser directement.
(6) Règlement (UE) 2019/943 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 sur le marché intérieur de l’électricité (JO L 158 du 14.6.2019, p. 54).
(7) Directive (UE) 2019/944 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité et modifiant la directive 2012/27/UE (JO L 158 du 14.6.2019, p. 125).
ANNEXE
Avantages d’un service complémentaire essentiel centralisé géré par les pouvoirs publics
— |
Achat à des prix variant en fonction de l’approvisionnement
|
— |
Vente à un prix fixé à long terme
|
— |
Garantie de la sécurité de l’approvisionnement grâce à un bouquet énergétique adéquat
|
— |
Maintien du contrôle par les pouvoirs publics et liberté du marché assurée |
18.8.2023 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 293/127 |
Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions sur la Banque européenne de l’hydrogène
[COM(2023) 156 final]
(2023/C 293/18)
Rapporteur: |
Thomas KATTNIG |
Consultation |
Commission européenne, 2.5.2023 |
Base juridique |
Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne |
Compétence |
Section «Transports, énergie, infrastructures et société de l’information» |
Adoption en section |
16.5.2023 |
Adoption en session plénière |
14.6.2023 |
Session plénière no |
579 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
162/0/2 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
Le Comité économique et social européen (CESE) accueille favorablement l’idée de la Commission européenne de créer une Banque européenne de l’hydrogène (BEH) et invite celle-ci, compte tenu des observations et recommandations détaillées qu’il a formulées dans son avis sur la stratégie européenne de l’hydrogène, à préciser les points suivants ou à les prendre en considération, sous l’angle de la politique économique, environnementale et sociale, lors de la conception et de la mise en œuvre de la BEH. |
1.2. |
Le CESE souligne que les combustibles fossiles ne doivent pas être subventionnés par des fonds de l’Union européenne (UE). Le principe de «ne pas nuire» doit donc également s’appliquer aux fonds en rapport avec la BEH: l’hydrogène (H2) ne doit bénéficier de financements de l’Union que si l’électricité utilisée pour le produire provient de sources compatibles avec le règlement sur la taxinomie et considérées comme apportant une contribution considérable au processus de décarbonation. |
1.3. |
Le financement au titre de la BEH devrait cibler en priorité la production d’hydrogène vert et doit être compatible avec les règles fixées par l’UE concernant l’hydrogène. Le CESE estime que pour gérer le plus efficacement possible la demande et la disponibilité dans les secteurs difficiles à électrifier (notamment celui de l’acier), il convient de faire de la BEH un outil de gestion de la demande. En outre, un mécanisme d’achat conjoint dans les secteurs difficiles à électrifier devrait contribuer à éviter la concurrence intraeuropéenne en matière de prix, en particulier durant la phase de démarrage. |
1.4. |
Le CESE n’est pas favorable à ce que les procédés d’électrolyse à forte intensité énergétique soient alimentés en énergie (non renouvelable) par l’intermédiaire des réseaux électriques européens, ce qui ferait augmenter la demande globale d’énergie. Il insiste sur la nécessité d’encourager l’utilisation de l’hydrogène en combinaison avec le développement des sources d’énergie renouvelables, et uniquement là où l’électrification directe n’est pas possible. |
1.5. |
En cette période de crises multiples, il est essentiel d’explorer pleinement le potentiel de création d’emplois dans les secteurs en développement. Le CESE demande donc à la Commission de procéder à une analyse qui permettrait de recenser, parmi les compétences des travailleurs actifs dans les industries en déclin, celles qui seraient utiles pour les nouveaux emplois dans le secteur de l’hydrogène. |
1.6. |
Le plan REPowerEU prévoit que d’ici à 2030, 10 millions de tonnes d’hydrogène vert seront produites dans l’Union européenne. Il conviendrait en priorité d’accélérer la création et le renforcement des capacités de production européennes afin de parvenir à l’indépendance énergétique et de ne pas contribuer à de nouvelles dépendances stratégiques. |
1.7. |
Le CESE est d’avis que lors de l’élaboration des lignes directrices sur l’allocation des fonds de la BEH, il convient de ne pas se focaliser exclusivement sur le rapport coût-efficacité des projets à financer. Il y aurait plutôt lieu d’inclure un certain nombre d’autres critères de qualité, dont des normes de durabilité environnementale et sociale. |
1.8. |
Le CESE estime que le système actuel d’échange de quotas d’émission de l’UE (SEQE-UE) doit encore être renforcé; il s’agit notamment d’assurer une protection efficace à l’égard des importations (mécanisme d’ajustement aux frontières). Une trajectoire de prix prévisible et moins volatile est susceptible de contribuer à la sécurité des investissements qui s’imposent dans le domaine de l’hydrogène vert. La Commission devrait accorder la priorité absolue à la sécurité des investissements dans le cadre du SEQE-UE, à la suppression des subventions pour le gaz naturel, ainsi qu’au soutien de la recherche, de la technologie et de l’innovation en matière de production et de distribution d’hydrogène vert. |
1.9. |
Le CESE souligne que des exigences élevées en matière de sécurité technique doivent s’appliquer à l’utilisation de l’hydrogène, en particulier dans les installations d’exploitation, et que des obligations et un suivi seront nécessaires pour recenser et réduire les risques. |
1.10. |
Le CESE déplore que la mise en œuvre de la stratégie dans les différents secteurs n’ait pas fait l’objet d’une réflexion suffisante et réclame une plus grande participation des citoyens à ce processus de transformation, tant au niveau des entreprises qu’au niveau politique. Il invite en outre la Commission à évaluer l’incidence du développement de l’hydrogène vert sur la facture énergétique des ménages. |
1.11. |
Le CESE recommande à la Commission de clarifier les périodes de transition pour l’industrie en fonction des besoins sectoriels, sur la base de trajectoires et d’objectifs de réduction des émissions. Il y a lieu de soutenir les industries de l’acier, du ciment et de la chimie dans la transformation de leurs systèmes énergétiques et de leurs méthodes de production, ainsi que certains segments du secteur des transports. Le Comité souligne que sans cela, ces industries grandes émettrices de CO2 pourraient ne pas survivre au changement. |
1.12. |
Le CESE est d’avis que la BEH, en coordination avec les États membres et leurs autorités et avec d’autres instruments et organismes de financement européens, devrait veiller à coordonner les fonds de manière à en garantir l’utilisation optimale, tout en évitant le surfinancement. |
1.13. |
Le CESE est d’avis que la BEH devrait inclure des dispositions similaires à celles de la loi américaine sur la réduction de l’inflation en ce qui concerne les salaires en vigueur, le développement de la main-d’œuvre et les stages. |
1.14. |
Le CESE partage l’idée sous-tendant la BEH selon laquelle il convient de mettre en place des mesures incitatives pour favoriser l’émergence d’un marché de l’hydrogène. Le durcissement prévu des règles en vue d’une dissociation des structures de propriété des sociétés verticalement intégrées briserait l’élan de nombreux projets municipaux, ce qui entraverait la montée en puissance de l’hydrogène et mettrait rapidement fin aux projets de services municipaux intégrés au niveau local. |
1.15. |
Le CESE demande que les programmes de financement de la BEH ne pénalisent pas les entreprises publiques et municipales par rapport aux sociétés commerciales. |
1.16. |
Le CESE est d’avis que l’Europe ne pourra réussir sa transition énergétique que si le commerce mondial des matières premières, et en particulier de l’énergie, repose également sur les principes de durabilité écologique et sociale et la promotion des sources d’énergie renouvelables. |
2. Contexte
2.1. |
La communication relative à la BEH (1) expose des idées générales sur la conception de cette dernière en tant qu’instrument financier permettant de lancer et de promouvoir la production et l’importation d’hydrogène vert au sein de l’UE, ainsi que le financement public et privé de telles démarches et, partant, la création de marchés et de chaînes de valeur en la matière. La BEH n’est donc pas une banque. L’initiative définit quatre piliers de la BEH qui devraient être opérationnels d’ici la fin de l’année 2023. L’idée est que la BEH comblera l’écart de coût entre l’hydrogène vert et les combustibles fossiles pour les premiers projets en instaurant un système de mise aux enchères et le paiement d’un prix forfaitaire par kilogramme d’hydrogène produit pour une durée maximale de dix ans. Il est prévu de mettre en place un système visant à garantir la transparence et la coordination en matière de disponibilité, comprenant notamment des arrangements ou des accords avec des pays tiers en vue d’acquérir de l’hydrogène. |
2.2. |
La communication n’établit pas de lien clair entre, d’une part, la politique de l’UE en matière d’hydrogène et son approche stratégique de l’autonomie ouverte et, d’autre part, la politique industrielle et de concurrence de l’Union. Elle ne contient que peu d’informations sur l’utilisation des moyens financiers du Fonds pour l’innovation, la réaffectation prévue des ressources et la relation attendue entre les investissements publics et privés. De même, elle ne fixe aucune priorité en ce qui concerne la production, l’utilisation et la distribution d’hydrogène vert. |
2.3. |
Dotée d’un budget de 3 milliards d’euros, la BEH devrait contribuer au développement d’un marché de l’hydrogène, à la diminution de la dépendance à l’égard des combustibles fossiles et à la réduction des émissions de gaz à effet de serre en vue d’atteindre le zéro émission nette d’ici à 2040. Les investissements nécessaires au développement de la production d’hydrogène ont été estimés à entre 335 et 471 milliards d’euros (2), ce qui signifie que la majeure partie des fonds nécessaires doit provenir des États membres et de sources privées, même si l’on tient compte des autres fonds disponibles de l’UE. |
2.4. |
À cet égard, la Commission souligne que l’hydrogène vert est un élément essentiel de la création d’un système énergétique souverain qui soit à la fois intelligent, mieux intégré, optimisé et sûr. L’hydrogène vert et sa chaîne de valeur ont un rôle important à jouer pour compenser les variations des flux d’énergies renouvelables et approvisionner de manière ciblée des secteurs qui se prêtent difficilement ou ne se prêtent pas à l’électrification. |
2.5. |
L’hydrogène peut être produit de différentes manières qui, souvent, ne sont ni respectueuses du climat, ni écologiques, ni même neutres pour le climat. Les sources d’énergie utilisées à cette fin sont déterminantes à cet égard: il existe par exemple de l’hydrogène «brun» (ou «noir») provenant de la gazéification du charbon, de l’hydrogène «gris» produit à partir d’énergies fossiles ou de l’hydrogène «rose» d’origine nucléaire. La production d’hydrogène «bleu» génère de grandes quantités de méthane (le dioxyde de carbone qui en résulte étant capté et stocké). On ne peut cependant parler d’hydrogène écologique que dans le cas de l’hydrogène «vert», fabriqué au moyen de l’énergie excédentaire issue de sources renouvelables telles que le vent, l’eau ou le soleil (3). À cet égard, le CESE attire l’attention sur son avis TEN/718 (4), dans lequel il se félicite des clarifications apportées par la Commission concernant la définition de l’hydrogène propre. Il ajoute cependant qu’à court et moyen termes, la stratégie garde la porte ouverte à d’autres formes d’hydrogène à faible teneur en carbone, obtenu à partir de combustibles fossiles avec captage et stockage du carbone (CSC), technologie encore en voie de déploiement. À l’échelle mondiale, l’hydrogène vert ne pourrait actuellement satisfaire que 1 % des besoins énergétiques: il s’agit d’une ressource extrêmement rare, peu commune et donc stratégique. |
2.6. |
Dans sa proposition relative au plan REPowerEU, la Commission a préconisé d’accélérer le développement de la technologie de l’hydrogène avant l’été 2023, de manière à déployer les infrastructures nécessaires pour produire, importer et transporter 20 millions de tonnes d’hydrogène d’ici à 2030 (5). |
2.7. |
Le programme InvestEU vise à soutenir les investissements publics et privés dans les technologies respectueuses du climat, notamment les technologies de propulsion à l’hydrogène. Le plan industriel du pacte vert propose de simplifier les procédures d’InvestEU et de les adapter aux besoins actuels. Le Fonds pour l’innovation vise à promouvoir les technologies et solutions innovantes qui contribuent à la décarbonation des industries à forte intensité énergétique, ainsi qu’au développement des énergies renouvelables et du stockage de l’énergie. Selon le plan industriel du pacte vert, 40 milliards d’euros seront mobilisés à cette fin au cours de la prochaine décennie. La BEH investira 3 milliards d’euros pour aider à construire le marché européen de l’hydrogène. L’essentiel des besoins d’investissement devra dès lors être couvert par les États membres et les investisseurs privés. |
2.8. |
Selon les estimations d’Hydrogen Europe, la production d’hydrogène au sein de l’UE créera environ 1 million d’emplois nouveaux, dont quelque 150 000 hautement qualifiés. |
3. Observations générales
Promouvoir l’hydrogène vert, sans exception
3.1. |
Le CESE souligne que les combustibles fossiles ne doivent pas être subventionnés par des fonds de l’UE. Le principe consistant à «ne pas nuire», qui est explicitement mentionné dans la taxinomie de l’UE, doit donc également s’appliquer aux fonds associés à la BEH. Le CESE souligne que la production d’hydrogène par électrolyse ne doit être financée par des fonds de l’UE que si l’électricité utilisée à cette fin (6) provient d’une source compatible avec le règlement sur la taxinomie et considérée comme apportant une contribution majeure à la décarbonation. À cet égard, il insiste sur la nécessité d’accorder la priorité à l’hydrogène vert dans le cadre de la BEH, en tant que seule option compatible avec les objectifs de neutralité climatique (7). |
3.2. |
À longue échéance, seule la production d’hydrogène vert devrait bénéficier d’un soutien financier. Le CESE recommande de limiter aux secteurs dits difficiles à électrifier le premier appel d’offres pour soutenir la production d’hydrogène vert, que la Commission a annoncé pour l’automne 2023. |
3.3. |
Dans le même temps, le CESE reconnaît qu’il sera nécessaire de recourir à l’hydrogène «bleu», pour autant qu’il soit disponible en quantité suffisante et à un prix acceptable. Afin de gérer la demande, la BEH devrait servir d’outil d’agrégation de celle-ci, offrir une vue d’ensemble de la demande d’hydrogène et de sa disponibilité dans les secteurs difficiles à électrifier et la centraliser, de manière à parvenir à un prix d’offre aussi bas que possible, soit un mode de fonctionnement comparable à celui de la plateforme énergétique de l’UE, comme le suggère la communication sur la BEH. |
3.4. |
Le CESE partage l’avis exprimé dans la communication sur la BEH selon lequel un mécanisme d’achat conjoint d’hydrogène dans les secteurs difficiles à électrifier peut contribuer à éviter la concurrence intraeuropéenne en encourageant plutôt la passation conjointe de marchés. Ces achats groupés peuvent favoriser la création de premières chaînes de valeur opérationnelles pour les importations dans l’Union. Le Comité note qu’en tant que responsable à la fois du financement et de la coordination, la BEH devra disposer de capacités professionnelles considérables dans plusieurs domaines différents. |
3.5. |
Le CESE n’est pas favorable à ce que les procédés d’électrolyse à forte intensité énergétique soient alimentés par des sources d’énergie non renouvelables au moyen des réseaux électriques européens, ce qui ferait augmenter la demande globale d’énergie; il convient plutôt de prévoir des règles claires et transparentes sur l’utilisation exclusive de l’électricité excédentaire produite à partir de sources d’énergie renouvelables pour accroître la production d’hydrogène vert. Il insiste sur la nécessité d’encourager l’utilisation de l’hydrogène en combinaison avec le développement des sources d’énergie renouvelables, et uniquement là où l’électrification directe n’est pas possible. |
3.6. |
Comme l’indique la Feuille de route pour l’hydrogène en Europe (8), l’hydrogène vert ne se prête pas à être utilisé au jour le jour de façon généralisée par les consommateurs finaux, en particulier pour ce qui est des transports privés et des systèmes de chauffage. |
3.7. |
Le CESE est d’avis que lors de l’élaboration des lignes directrices sur l’allocation des fonds de la BEH, il convient de ne pas se focaliser exclusivement sur le rapport coût-efficacité des projets à financer. Il y a plutôt lieu de considérer comme des critères essentiels la sécurité énergétique, la durabilité environnementale, la promotion et le maintien d’emplois de qualité et le caractère urgent des besoins d’investissement. Il conviendrait en outre de prévoir l’obligation d’assurer la compétitivité, d’instaurer des critères sociaux et environnementaux et de déployer les énergies renouvelables dans les pays fournisseurs. |
3.8. |
Le CESE estime que le SEQE-UE actuel doit encore être renforcé; il s’agit notamment d’assurer une protection efficace à l’égard des importations (mécanisme d’ajustement aux frontières). Une trajectoire de prix prévisible et peu volatile est susceptible de contribuer à la sécurité des investissements en ce qui concerne les investissements essentiels dans l’hydrogène vert. La Commission devrait accorder la priorité à la gestion efficace des quantités et à la sécurité des investissements dans le cadre du SEQE-UE, à la suppression des subventions pour le gaz naturel, ainsi qu’à l’aide aux technologies de production et de distribution de l’hydrogène vert par le financement de la recherche, de la technologie et de l’innovation. |
3.9. |
Le CESE souligne que le développement d’une économie de l’hydrogène sectorielle et à applications spécifiques requiert l’acceptation et la participation des citoyens, qu’il s’agisse des entrepreneurs, des travailleurs ou des consommateurs. Il déplore que la mise en œuvre de la stratégie dans les différents secteurs n’ait pas fait l’objet d’une réflexion suffisante et réclame une plus grande participation des citoyens à ce processus de transformation, tant au niveau des entreprises qu’au niveau politique. Il invite en outre la Commission à évaluer l’incidence du développement de l’hydrogène vert sur la facture énergétique des ménages. |
3.10. |
La Commission a déjà jeté les bases de l’investissement dans le développement de la technologie et des infrastructures relatives à l’hydrogène vert en approuvant le projet important d’intérêt européen commun «IPCEI Hy2Tech». Le CESE insiste sur la nécessité de garantir la cohérence entre, d’une part, les initiatives existantes, les programmes de financement et les PIIEC et, d’autre part, les activités de soutien de la BEH. |
Réduire les dépendances stratégiques
3.11. |
Le plan REPowerEU prévoit que d’ici à 2030, 10 millions de tonnes d’hydrogène vert seront produites dans l’Union européenne. Il conviendrait en priorité d’accélérer la création et le renforcement des capacités de production européennes afin de parvenir à l’indépendance énergétique et de ne pas contribuer à de nouvelles dépendances stratégiques. Dans cette optique, il faut également veiller à la diversification des sources et des contrats d’approvisionnement et à la prise en considération des valeurs européennes lorsque l’hydrogène est importé. Il y a lieu de tenir compte, dans le cadre de ce processus, des réalités géographiques (telles que les capacités de production et d’exportation d’un pays) et des objectifs fixés par l’UE en matière d’autonomie stratégique. Les accords avec les pays tiers devraient intégrer un engagement en faveur de la durabilité environnementale, sociale et économique. |
3.12. |
Le CESE est par ailleurs d’avis que des accords portant sur l’importation d’hydrogène vert ne devraient être conclus qu’à la condition que la valeur ajoutée profite également aux producteurs nationaux des pays fournisseurs et que l’hydrogène importé de pays tiers soit exclusivement produit à partir de l’électricité excédentaire issue des sources d’énergie renouvelables. Une telle approche servirait la transition de l’économie vers le zéro émission nette, aussi bien au sein de l’UE que dans les pays tiers. |
3.13. |
Le CESE estime que l’Europe ne pourra réussir sa transition énergétique que si le commerce mondial des matières premières, et en particulier de l’énergie, repose également sur les principes de durabilité écologique et sociale et la promotion des sources d’énergie renouvelables. La politique énergétique et industrielle de l’UE ne doit pas entraver les pays du Sud dans leur propre transition juste ni les empêcher de développer leurs propres capacités dans le secteur de l’hydrogène. L’extractivisme énergétique stratégique nuit sur le long terme à la transition énergétique mondiale et, partant, à celle de l’Europe également. Il convient plutôt de développer de nouvelles approches en vue de conclure des accords internationaux de coopération en matière de climat et d’énergie. |
Financement et mise en œuvre institutionnelle
3.14. |
Le CESE est d’avis que la BEH, en coordination avec les États membres et avec d’autres instruments et organismes de financement européens, devrait veiller à coordonner les fonds de manière à en garantir l’utilisation optimale, tout en évitant le surfinancement. Dans le même temps, l’allégement maximal des procédures administratives pour accéder aux financements est la clé du succès de la BEH, eu égard notamment à la simplicité de la loi américaine sur la réduction de l’inflation. Le Comité attire l’attention sur la nécessité de fournir aux investisseurs un environnement attractif et sûr pour éviter qu’ils n’aillent investir ailleurs, attirés par des conditions à long terme favorables telles que celles offertes par ladite loi. |
3.15. |
Le CESE est d’avis que la BEH devrait, à l’instar de la loi américaine sur la réduction de l’inflation, contenir des dispositions portant sur les salaires en vigueur, le développement de la main-d’œuvre et les stages, afin d’assurer l’accès d’un ensemble plus large et plus divers de travailleurs qualifiés à des emplois de qualité et de faire en sorte que les travailleurs disposent des compétences nécessaires en vue d’atteindre les objectifs fixés en matière d’énergie propre. |
3.16. |
Étant donné que l’investissement public doit s’accompagner d’investissements privés de grande ampleur, ses effets multiplicateurs doivent faire l’objet d’une estimation ex ante, qui doit s’inspirer de l’évaluation ex post détaillée des effets multiplicateurs des programmes récents (InvestEU, PIIEC, etc.). |
3.17. |
Le CESE estime qu’il convient de mettre en place des mesures incitatives, telles que le développement de réseaux intelligents, d’infrastructures, de capacités de stockage et de cadres juridiques, pour favoriser l’émergence d’un marché de l’hydrogène. Le durcissement prévu, à partir de 2023, des règles en vue d’une dissociation des structures de propriété des sociétés verticalement intégrées — qui sont souvent des régies municipales — susceptibles d’être actives dans la production d’hydrogène ou la gestion de réseaux briserait l’élan de nombreux projets municipaux, ce qui entraverait la montée en puissance de l’hydrogène et mettrait rapidement fin aux projets de services municipaux intégrés au niveau local. |
3.18. |
Le CESE demande que les programmes de financement de la BEH ne pénalisent pas les entreprises publiques et municipales par rapport aux sociétés commerciales. |
Dimension sociale
3.19. |
En ces temps de crises multiples, il est essentiel d’investir dans des emplois pérennes. Le CESE souligne par conséquent combien il importe d’assurer une formation de qualité de la main-d’œuvre et de renforcer l’attrait du secteur de l’énergie pour la jeunesse européenne. À cette fin, l’Union européenne pourrait créer des centres d’excellence pour la formation aux fonctions nécessaires en relation avec l’hydrogène vert. Il convient de veiller dans ce contexte à la cohérence avec les «académies des industries à zéro émission nette» proposées par la Commission dans le plan industriel du pacte vert. Ces académies devraient également déployer des programmes de perfectionnement et de reconversion professionnels dans les secteurs énergétiques et productifs stratégiques tels que celui de l’hydrogène vert. La Commission devrait en outre s’atteler, en étroite coopération avec les États membres, à mettre en place des procédures d’accréditation normalisées, à assurer la reconnaissance mutuelle des qualifications et à élaborer des lignes directrices concernant l’éducation et la formation dans ce domaine. |
3.20. |
Outre ces programmes de perfectionnement et de reconversion professionnels menés au niveau des différents secteurs et des entreprises individuelles, il convient de mettre davantage l’accent sur la formation et le perfectionnement professionnels au sein même de la société. Des efforts supplémentaires doivent être consentis dans l’ensemble du système éducatif afin de sensibiliser à la transition juste et de développer les compétences nécessaires à cette fin. |
3.21. |
Favoriser la création d’emplois grâce au déploiement de l’hydrogène vert implique de soutenir les petites et moyennes entreprises (PME), qui contribuent à près de deux tiers de l’emploi dans le secteur privé non financier européen (9). Le CESE invite la Commission à accorder une attention particulière au soutien des PME lors de la conception de la BEH. |
3.22. |
Le CESE note par ailleurs que pour améliorer la compétitivité de l’Union et renforcer sa résilience, il y a lieu de conserver le contrôle des actifs et des industries de l’UE et de faire front contre le dumping industriel provenant d’autres régions du monde. |
Exigences en matière de sécurité
3.23. |
Le CESE souligne que des exigences élevées en matière de sécurité technique doivent s’appliquer à l’utilisation de l’hydrogène, en particulier dans les installations d’exploitation, et que des obligations et un suivi seront nécessaires pour recenser et réduire les risques. |
Bruxelles, le 14 juin 2023.
Le président du Comité économique et social européen
Oliver RÖPKE
(1) https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:52023DC0156&qid=1681216991501&from=FR
(2) Document de travail des services de la Commission SWD(2022) 230, p. 28 (en anglais).
(3) Wasserstoff-Farbenlehre | SOLARIFY, ou, en français, https://energy-cities.eu/fr/lhydrogene-et-ses-50-nuances-de-gris-vert-bleu/
(4) Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Une stratégie de l’hydrogène pour une Europe climatiquement neutre [COM(2020) 301 final] (JO C 123 du 9.4.2021, p. 30).
(5) COM(2022) 230 final, p. 8 et 9, et SWD(2022) 230 final, p. 26.
(6) Par exemple, lorsqu’un exploitant d’électrolyseurs démontre qu’il reçoit l’électricité pour l’électrolyse directement d’une centrale d’énergie renouvelable nouvellement construite ou dispose d’un contrat de fourniture d’électricité qui n’est activé que lorsque les prix du marché de gros sont négatifs.
(7) Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Une stratégie de l’hydrogène pour une Europe climatiquement neutre [COM(2020) 301 final] (JO C 123 du 9.4.2021, p. 30).
(8) Entreprise commune «Hydrogène propre» (2019), Hydrogen roadmap Europe, A sustainable pathway for the European energy transition (Feuille de route pour l’hydrogène en Europe — Une trajectoire durable pour la transition énergétique européenne, disponible en anglais uniquement), Office des publications de l’Union européenne.
(9) https://www.touteleurope.eu/actualite/les-entreprises-dans-l-union-europeenne.html
18.8.2023 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 293/133 |
Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative au permis de conduire, modifiant la directive (UE) 2022/2561 du Parlement européen et du Conseil, le règlement (UE) 2018/1724 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 2006/126/CE du Parlement européen et du Conseil et le règlement (UE) no 383/2012 de la Commission
[COM(2023) 127 final — 2023/0053 (COD)]
et sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur l’effet à l’échelle de l’Union de certaines décisions de déchéance du droit de conduire
[COM(2023) 128 final — 2023/0055 (COD)]
(2023/C 293/19)
Rapporteur: |
Philippe CHARRY |
Consultation |
Parlement européen, 17.4.2023 Conseil de l’Union européenne, 20.4.2023 et 26.4.2023 |
Base juridique |
Article 91, paragraphe 1, et article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne |
Compétence |
Section «Transports, énergie, infrastructures et société de l’information» |
Adoption en section |
16.5.2023 |
Adoption en session plénière |
14.6.2023 |
Session plénière no |
579 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
210/1/2 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
Le paquet législatif proposé par la Commission européenne vise l’objectif de zéro mort sur les routes de l’Union européenne (UE) d’ici 2050. Le présent avis traite deux volets de la réforme consistant à, d’une part, instaurer un permis de conduire numérique, et d’autre part, à renforcer la répression des infractions à la sécurité routière dans toute l’UE. |
1.2. |
L’objectif de doter les conducteurs de l’Union européenne d’un permis de conduire numérique vise aussi à mettre fin aux divergences et lenteurs administratives entre les États membres dans le traitement des demandes d’échange de permis des automobilistes étrangers, qui entravent la liberté de circulation. Ce permis de conduire sera détenu sur le téléphone portable ou tout autre support numérique. Le Comité économique et social européen (CESE) soutient cet objectif, mais souhaite que les permis de conduire en format papier restent disponibles pour les conducteurs qui le souhaitent. En outre, pour des raisons d’inclusion numérique de tous les groupes d’âge, le Comité recommande une formation et un accompagnement personnalisés et gratuits pour l’utilisation des nouveaux permis de conduire numériques. |
1.3. |
Dans le même ordre d’idées, le CESE recommande de supprimer la réduction de la validité du permis de conduire en fonction de l’âge, prévue à l’article 10 de la proposition de directive sur les permis de conduire pour les personnes âgées de 70 ans et plus. Il préconise une approche non discriminatoire, fondée sur une évaluation médicale concrète, applicable à tous les conducteurs présentant des déficiences identifiées et affectant la capacité de conduire. |
1.4. |
Le CESE souhaite que la proposition de directive sur la déchéance du droit de conduire offre de meilleures garanties contre le risque de chevauchement avec le champ d’application de la coopération en matière pénale. En effet, l’échange d’informations qu’elle envisage sur les infractions commises par les conducteurs est fondé sur l’article 91, paragraphe 1, point c), du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) relatif à la politique commune des transports, alors que l’échange d’informations entre les autorités nationales prévu semble davantage porter sur des infractions pénales qui reposent sur les principes de la coopération policière, prévue à l’article 87 du TFUE, et sur ceux de la coopération judiciaire en matière pénale, prévue à l’article 82 du TFUE. |
1.5. |
Il constate que le paquet législatif met l’accent sur le facteur humain, alors que de nombreux accidents de la route sont dus à un défaut d’entretien des routes et qu’il garde le silence sur la responsabilité des gestionnaires d’infrastructures routières. Selon le CESE, l’interaction avec la directive (UE) 2019/1936 du Parlement européen et du Conseil (1) dont la Commission contrôle actuellement la transposition, voire le chevauchement des mesures, risquent de nuire à l’efficacité envisagée, en engendrant un arsenal juridique trop éparpillé. |
1.6. |
La proposition de directive sur la déchéance du droit de conduire prévoit qu’en cas de nécessité, le numéro d’identification nationale mentionné sur la carte d’identité fera partie des données électroniques échangées entre autorités nationales. Or, le numéro d’identification nationale permet aussi, dans de nombreux États membres, d’accéder au dossier médical de l’intéressé. Le CESE relève que le règlement général sur la protection des données à caractère personnel interdit en principe le traitement de données à caractère personnel relatives à la santé car ce sont des données «sensibles». Il appelle de ses vœux une clarification de la proposition de directive sur ce sujet. |
1.7. |
Le CESE souhaite que la disposition permettant l’adoption de mesures d’exécution de la directive sur la déchéance du droit de conduire avant même qu’elle n’ait été transposée dans les États membres soit retirée de la proposition législative, car elle enfreint les principes de sécurité juridique et de hiérarchie des normes et celui de leur application dans le temps. |
1.8. |
Le CESE prend acte de l’opportunité de permettre aux jeunes de s’initier à la conduite accompagnée de camions poids lourd dès l’âge de 17 ans. Il souligne qu’il faut également adapter la formation professionnelle des conducteurs de poids lourds et améliorer les conditions de travail et les salaires pour rendre le métier plus attractif. Il demande à la Commission d’encourager les employeurs à améliorer la situation par tous les moyens, comme renforcer la formation, ou développer des actions de sensibilisation dans les États membres. |
1.9. |
Le CESE recommande une harmonisation visant à ce qu’après la formation théorique à l’école de conduite et les leçons pratiques de conduite, l’apprenti conducteur de poids lourds acquière une expérience pratique de la conduite avec un moniteur spécialement formé dans cette perspective. La conduite de poids lourds par un conducteur de 17 ans ne serait autorisée qu’après une longue pratique accompagnée et un examen de conduite très sélectif. Le Comité appelle de ses vœux que la proposition de directive aille dans ce sens. |
2. Observations générales
2.1. |
Le paquet législatif proposé par la Commission vise l’objectif de zéro mort sur les routes de l’Union européenne (UE) d’ici 2050, et la réduction de 50 % du nombre de morts sur les routes d’ici à 2030. Elle propose d’introduire un permis de conduire numérique valable dans tous les États membres et d’améliorer l’application transfrontière de la déchéance du droit de conduire. La Commission a relevé que les camions, les voitures sont la cause de la majorité des accidents mortels, et qu’en zone urbaine, 70 % des accidentés sont des usagers vulnérables. |
2.2. |
Le présent avis porte sur deux des propositions du paquet législatif, qui comprend un volet préventif et un volet répressif:
|
2.3. |
L’attention particulière que le paquet législatif consacre aux véhicules électriques va aussi dans le sens des objectifs de réduction de l’empreinte carbone, des émissions de gaz à effet de serre et de la pollution sonore. |
2.4. |
Il prend également en considération l’évolution technologique des véhicules, la transition des boites de vitesse manuelles vers les boites automatiques, la modification du poids des véhicules. |
Le permis de conduire numérique
2.5. |
La proposition de directive COM(2023) 127 final envisage d’instaurer un permis de conduire numérique à partir de 2023. Elle comprend également des dispositions visant à faciliter la transition vers «des véhicules à émission nulle». |
2.6. |
Elle modifie la directive 2006/126/CE du Parlement européen et du Conseil (2) dont l’objet était d’améliorer la sécurité routière et de faciliter la liberté de circulation, en introduisant:
|
2.7. |
Deux raisons principales sous-tendent cette quatrième révision du permis de conduire. D’une part, les capacités, le comportement et la santé du conducteur jouent un rôle considérable dans de nombreux accidents mortels de la route, ou entraînant des conséquences sérieuses ou des blessures non mortelles. En effet, trop de titulaires du permis de conduire prennent le volant alors que leur aptitude à la conduite est défaillante. À cet égard, le critère de l’âge ne semble plus déterminant, car des études montrent que certains critères médicaux spécifiques relevant de la consommation de drogues, la santé mentale, l’épilepsie, le diabète, la condition cardiaque et l’apnée du sommeil ne sont pas spécifiquement liés à l’âge, et qu’ils sont plus pertinents que l’âge pour déterminer l’aptitude à la conduite. |
2.8. |
D’autre part, les connaissances, la pratique, la conscience du risque sont particulièrement limitées chez les jeunes conducteurs. Le nombre élevé d’accidents mettant en cause les jeunes conducteurs montre que les exigences liées à l’obtention du permis de conduire ne sont pas tout à fait adaptées à l’objectif de sécurité routière. |
2.9. |
De surcroît, le développement progressif de la conduite assistée, du freinage automatique d’urgence, des véhicules automatisés va avoir des conséquences sur la conduite, et rendre obsolète l’actuelle directive 2006/126/CE. |
2.10. |
Il apparaît également que la libre circulation des citoyens européens est entravée par les tracas administratifs liés à l’obtention, la reconnaissance, le maintien ou l’échange du permis de conduire dans un État membre autre que celui où il a été délivré. Certains critères de la directive 2006/126/CE, tels que celui de «résidence normale», donnent lieu à de multiples problèmes d’interprétation, au point que certains titulaires du permis de conduire ne peuvent pas conduire pendant parfois plus de six mois dans leur nouveau pays de résidence. En outre, des citoyens européens résidant dans un autre État membre ont parfois des difficultés à passer leur permis de conduire dans une autre langue que la leur, et ce d’autant plus que l’assistance d’un interprète n’est pas prévue. |
2.11. |
Par ailleurs, il n’existe pas des règles communes de reconnaissance des permis de conduire délivrés dans un État tiers à une personne établissant sa résidence dans l’UE, sans oublier qu’un permis délivré par un État membre peut ne pas être reconnu comme valable dans un autre État membre. |
2.12. |
Enfin, de nombreux États membres prévoient, ou ont déjà introduit, le permis de conduire numérique, valable sans obligation de montrer sa carte d’identité. Or, la directive 2006/126/CE ne prévoit que la reconnaissance des permis de conduire en format papier, ce qui engendre un nouvel obstacle à la libre circulation du citoyen européen. |
2.13. |
La proposition de directive s’inscrit également dans les objectifs de développement durable des Nations unies (3) pour contribuer à rendre, d’ici 2030, les villes et cadres de vie plus inclusifs, sûrs, résilients et durables, et pour fournir à tous un accès à des systèmes de transports sûrs, abordables, accessibles et durables. Elle s’inscrit aussi dans les objectifs du pacte vert pour l’Europe, en prévoyant de nouvelles règles sur les boites de vitesse automatiques et sur le poids maximum de la plupart des véhicules à zéro émission de la catégorie B. |
2.14. |
Elle consacre également une attention particulière aux usagers vulnérables de la route, tels que les cyclistes, les piétons, les usagers de trottinettes, les personnes handicapées ou à mobilité réduite, et facilitera le renouvellement des permis de catégorie C et D, ce qui est favorable aux entreprises de transport, qui sont en majorité des PME. |
La sécurité routière et le renforcement de la répression
2.15. |
En 2018, l’Union européenne s’est fixé l’objectif de réduire de 50 % le nombre de morts sur les routes d’ici à 2030. Malheureusement, les chiffres du dernier rapport publié en février 2023 sont alarmants: 20 600 personnes ont été tuées dans des accidents de la route en Europe l’année dernière. |
2.16. |
La proposition de directive sur l’effet à l’échelle de l’UE de certaines décisions de déchéance du droit de conduire [COM(2023) 128 final] prévoit pour sa part de réduire l’impunité, en permettant aux autorités nationales d’avoir accès aux registres nationaux des permis de conduire, et en améliorant la coopération entre elles pour le recouvrement des amendes. |
2.17. |
Elle propose que cette coopération, déjà existante en matière d’excès de vitesse, soit étendue à d’autres infractions, comme le non-respect des distances de sécurité avec les autres véhicules, les dépassements dangereux, notamment de lignes blanches, et les stationnements dangereux. |
2.18. |
La réforme proposée souhaite améliorer l’apprentissage de la conduite, car en Europe, deux accidents mortels sur cinq impliquent un conducteur de moins de 30 ans. Elle prévoit de durcir la répression en cas de conduite sous l’influence de l’alcool en introduisant une période probatoire d’au moins deux ans pour les conducteurs débutants titulaires d’un permis, assortie d’une «règle de tolérance zéro» sur l’alcool au volant (4). |
2.19. |
La proposition de directive vise aussi le cas des infractions commises par des conducteurs ne résidant pas dans l’État-membre où ils ont commis l’infraction. En effet, en 2019, plus de 40 % des conducteurs ayant commis une infraction dans un pays de l’UE autre que leur pays de résidence n’ont pas été poursuivis ou n’ont pas payé d’amende, et seulement 50 % des auteurs de ces infractions ont été identifiés. |
2.20. |
Elle considère que les résidents et les non-résidents devraient être traités de façon égale en cas d’infraction et que les amendes devraient pouvoir être payées sur un portail informatique. La proposition de directive précise néanmoins que chaque pays conservera sa législation relative aux textes d’incrimination et aux sanctions encourues. |
2.21. |
La réforme envisage donc de permettre aux autorités nationales d’avoir accès aux registres nationaux et d’améliorer la coopération entre elles pour le recouvrement des amendes. Cette coopération, déjà existante en matière d’excès de vitesse, sera étendue à d’autres infractions, comme le non-respect des distances de sécurité avec les autres véhicules, les dépassements dangereux, et les stationnements dangereux. |
2.22. |
La réforme prévoit aussi la possibilité de retirer le permis de conduire dans tous les États de l’UE et d’harmoniser les règles de suspension et d’annulation du permis de conduire grâce au principe de reconnaissance mutuelle, pour le non-respect des feux de signalisation, le dépassement dangereux de la limite de vitesse autorisée et le refus de se soumettre aux tests d’alcoolémie ou de drogue. |
3. Observations particulières
3.1. |
Le CESE considère que la proposition de directive sur la déchéance du droit de conduire, reposant sur l’article 91, paragraphe 1, point c), du TFUE, relatif à la mise en œuvre de la politique commune des transports, n’offre pas suffisamment de garanties contre le risque de chevauchement avec le champ d’application de la coopération en matière pénale. En effet, l’échange d’informations prévu porte sur des infractions pénales et suppose une coopération policière visée à l’article 87 du TFUE et une coopération judiciaire en matière pénale prévue à l’article 82 du TFUE; or la proposition de directive ne repose que sur le fondement de l’article 91, paragraphe 1, point c), du TFUE. |
3.2. |
Le CESE constate que cette proposition met l’accent sur le facteur humain, mais qu’elle omet que de nombreux accidents de la route sont dus à un défaut d’entretien des routes et reste silencieuse sur la responsabilité des gestionnaires d’infrastructures routières. Il considère que l’interaction entre la proposition de directive et la directive (UE) 2019/1936 dont la Commission contrôle actuellement la transposition, voire le chevauchement des mesures, risque de nuire à l’efficacité des mesures envisagées en engendrant un arsenal juridique éparpillé. |
3.3. |
L’article 5, paragraphe 2, point c), de la proposition de directive sur la déchéance du droit de conduire prévoit qu’en cas de nécessité, le numéro d’identification nationale mentionné sur la carte d’identité fera partie des données électroniques auxquelles les autorités nationales auront accès. L’article 6 de l’annexe I à la proposition de directive sur le permis de conduire numérique indique explicitement que le numéro de carte d’identité nationale sera une donnée contenue dans la micro-puce de la carte d’identité et lisible par lecteur de carte d’identité. Or, le numéro d’identification nationale permet aussi, dans de nombreux États membres, d’accéder au dossier médical de l’intéressé. |
3.4. |
Le CESE relève que le règlement général sur la protection des données à caractère personnel interdit en principe le traitement de données à caractère personnel relatives à la santé car ce sont des données «sensibles». Il appelle de ses vœux une clarification de la proposition de directive sur ce sujet. |
3.5. |
L’exécution de l’article 5, paragraphe 2, point c), pourra être fixée dans un acte d’exécution adopté par la Commission en application de la procédure de comitologie, et ce avant même la date de transposition. Le CESE déplore cette disposition permettant l’adoption de mesures d’exécution d’une directive avant même qu’elle n’ait été transposée dans les États membres, car elle nuit à la sécurité juridique en méconnaissant le principe de la hiérarchie des normes et de leur application dans le temps. |
3.6. |
Le CESE considère que l’opportunité de permettre aux jeunes de s’initier à la conduite accompagnée de camions poids lourd dès l’âge de 17 ans, afin d’encourager à choisir le métier de chauffeur routier, en pénurie, ne traite qu’une partie du problème. Il faut également adapter la formation professionnelle des conducteurs de poids lourds et améliorer les conditions de travail et les salaires pour rendre le métier plus attractif. Le Comité demande à la Commission d’encourager les employeurs à améliorer la situation par tous les moyens, comme renforcer la formation, ou développer des actions de sensibilisation dans les États membres. |
3.7. |
Le CESE considère que les États membres devraient pouvoir autoriser la conduite des bus et véhicules de catégories D/DE sur leur territoire par des conducteurs de 18 ans et plus, et ce sans la limitation de distance à 50 km. |
3.8. |
La réforme du permis de conduire prévoit d’autoriser la conduite de voitures à vitesse limitée par de jeunes conducteurs de 16 à 21 ans avec un permis B1. C’est une proposition intéressante pour limiter l’utilisation de motos légères ou de scooters peu sûrs et pallier l’absence de transports publics dans certaines régions, d’autant plus que les voitures à vitesse limitée peuvent également être utilisées par des conducteurs qui n’ont pas le permis B, voire servir de transition à des personnes âgées dont les capacités de conduite sont diminuées. Le CESE soutient ces avancées. |
3.9. |
Il devrait également être possible de limiter la vitesse des voitures par des moyens autres que la limitation de vitesse proposée par la Commission. En effet, les dispositifs électroniques de limitation de vitesse constituent une alternative fiable et moderne. Les États membres pourraient pour leur part prévoir de sanctionner la modification illicite de la limitation de vitesse des moteurs. |
3.10. |
Le CESE soutient également la possibilité envisagée de conduire des véhicules à carburant de remplacement pesant jusqu’à 4 250 kg avec un permis B, car cela pourrait accélérer l’électrification du parc des camions légers et atténuer la pénurie de conducteurs. Les fabricants de véhicules ont d’ailleurs déjà introduit un grand nombre de fourgonnettes électriques de 3 500 à 4 250 kg, qui ont une capacité de charge équivalente à celle des fourgonnettes diesel actuellement sur le marché. |
3.11. |
Selon le CESE, après la formation théorique à l’école de conduite et les leçons pratiques de conduite, l’apprenti conducteur de poids lourds devrait acquérir une expérience pratique de la conduite avec un moniteur spécialisé. Les moniteurs devraient être spécialement formés dans cette perspective. |
3.12. |
La conduite de poids lourds par un conducteur de 17 ans ne serait autorisée qu’après une longue pratique accompagnée et un examen de conduite très sélectif. La proposition de directive devrait donc être complétée en ce sens. |
Bruxelles, le 14 juin 2023.
Le président du Comité économique et social européen
Oliver RÖPKE
(1) Directive (UE) 2019/1936 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2019 modifiant la directive 2008/96/CE concernant la gestion de la sécurité des infrastructures routières (JO L 305 du 26.11.2019, p. 1).
(2) Directive 2006/126/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 décembre 2006 relative au permis de conduire (JO L 403 du 30.12.2006, p. 18).
(3) https://sdgs.un.org/fr
(4) Après échange avec la Commission, il ressort que la notion de tolérance zéro est entendue comme ce qui est techniquement raisonnable.
18.8.2023 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 293/138 |
Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant les règlements (UE) no 1227/2011 et (UE) 2019/942 afin d’améliorer la protection de l’Union contre la manipulation du marché de gros de l’énergie
[COM(2023) 147 final]
(2023/C 293/20)
Rapporteure: |
Alena MASTANTUONO |
Corapporteur: |
Lutz RIBBE |
Consultation |
Conseil de l’Union européenne, 31.3.2023 Parlement européen, 29.3.2023 |
Base juridique |
Article 194, paragraphe 2, et article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne |
Compétence |
Section «Transports, énergie, infrastructures et société de l’information» |
Adoption en section |
16.5.2023 |
Adoption en session plénière |
14.6.2023 |
Session plénière no |
579 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
217/5/5 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
Comme indiqué dans bon nombre de ses avis précédents, le Comité économique et social européen (CESE) estime qu’il est essentiel d’améliorer les conditions de fonctionnement des marchés de l’énergie, tout en luttant contre les manipulations de marché et d’autres phénomènes qui faussent les marchés et ont des répercussions négatives sur les entreprises, les ménages et la société dans son ensemble. |
1.2. |
Dans ce contexte, le CESE se félicite de l’objectif fondamental visé par la proposition de règlement qui consiste à renforcer la surveillance et la transparence des marchés de gros de l’énergie. Toutefois, le Comité souligne également que toute initiative doit être précédée d’un débat rigoureux et d’une analyse d’impact. |
1.3. |
Il regrette dès lors que les propositions relatives à l’organisation du marché de l’électricité n’aient pas fait l’objet d’une consultation et d’une analyse d’impact complètes. Il est d’avis qu’aucune réforme ne devrait être précipitée et que les consultations publiques et les analyses d’impact constituent des outils précieux dans le processus d’élaboration de la législation. |
1.4. |
En décrivant le contexte stratégique dans lequel s’inscrit la proposition de règlement, la Commission met en relief les préoccupations des consommateurs, de l’industrie et des investisseurs concernant l’exposition à la volatilité des prix à court terme induite par les prix élevés du gaz. Cette proposition ne comprend cependant pas de véritable analyse des abus de pouvoir et des manipulations de marché. À l’avenir, un suivi et une analyse continus sont nécessaires pour que des interventions appropriées et des réponses réglementaires puissent être apportées en temps utile et sur une base solide. |
1.5. |
Le CESE souligne qu’il importe que les pouvoirs publics coopèrent pour détecter et combattre les manipulations de marché. Il souscrit en outre au renforcement de la collaboration et du partage d’informations entre les autorités chargées de l’énergie, de la concurrence et de la réglementation financière. Dans la même optique, le Comité salue le fait que les définitions des informations privilégiées et des manipulations de marché sont alignées sur la réglementation des marchés financiers. |
1.6. |
Le CESE met également en avant l’importance de la coopération entre les autorités nationales et celles de l’Union. Il insiste sur la nécessité d’assurer une répartition appropriée et efficace des tâches entre les autorités de régulation nationales et l’Agence de l’Union européenne pour la coopération des régulateurs de l’énergie (ACER). Le renforcement des pouvoirs de l’ACER doit refléter ses capacités, les conditions dans lesquelles elle opère et, dans le même temps, ses limites au regard des compétences nationales, notamment en matière de responsabilité pénale. Il ne doit toutefois pas se substituer aux règles plus claires et plus harmonisées dont peuvent disposer les autorités nationales pour surveiller le marché. |
1.7. |
Tout en soulignant qu’il y a lieu d’améliorer la qualité des données et la transparence des échanges commerciaux, le CESE juge important de rationaliser les processus et les exigences en matière de données et d’informations afin de réduire au minimum la charge administrative. Il fait remarquer qu’au vu de l’évolution du marché, de nouvelles règles ne devraient pas décourager les nouveaux venus sur le marché. En ce qui concerne les nouvelles exigences relatives au trading algorithmique, la proposition pourrait contribuer à créer des conditions de concurrence inégales entre les acteurs du marché dans l’ensemble de l’Union européenne, étant donné que la périodicité des obligations d’information relève exclusivement de la compétence nationale. Le Comité demande qu’une certaine proportionnalité s’applique à la communication de données et que le principe de la transmission unique d’informations («une fois pour toutes») soit mis en pratique. La révision devrait viser à créer un système transparent et non discriminatoire, tout en évitant l’utilisation abusive des données collectées. |
2. Contexte et résumé
2.1. |
L’objectif de la proposition de règlement (ci-après «la proposition») est d’améliorer la protection de l’Union contre les manipulations de marché sur le marché de gros de l’énergie. À cette fin, elle suggère de modifier le règlement (UE) no 1227/2011 du Parlement européen et du Conseil (1) (règlement REMIT) et le règlement (UE) 2019/942 du Parlement européen et du Conseil (2) (règlement ACER). |
2.2. |
La proposition s’inscrit dans un train de mesures plus étendu présenté par la Commission pour réformer l’organisation du marché de l’électricité, qui vise à accélérer l’augmentation des énergies renouvelables, à protéger les consommateurs contre les flambées et les manipulations des prix, et à contribuer à la compétitivité des industries. En outre, elle est liée à la législation sur les marchés financiers, notamment le règlement relatif aux abus de marché, au moyen d’instruments financiers tels que les produits dérivés sur l’énergie. |
2.3. |
La proposition établit des obligations tant pour les acteurs du marché que pour les autorités. Elle met l’accent sur des procédures telles que la collecte et la gestion des données, la déclaration, le partage et la divulgation d’informations, ainsi que les enquêtes et les sanctions. Elle recommande également de modifier certaines définitions. Les principales suggestions sont les suivantes:
|
3. Observations générales
3.1. |
Le CESE se félicite que sa demande de révision du règlement REMIT ait été entendue par la Commission. Il souligne que cette révision doit établir un cadre pour réduire les risques d’abus de marché en améliorant la transparence et la qualité des données du marché. L’objectif général devrait être d’atténuer les effets de distorsion sur la fixation des prix résultant d’éventuels abus de marché et spéculations. Dans le même temps, il convient de prêter attention aux conséquences pouvant résulter de la liquidité du marché et des entraves à l’entrée sur le marché auxquelles les nouveaux acteurs du marché sont confrontés. Il est nécessaire que les règles du marché soient claires, se voient renforcées et ne nuisent pas à la concurrence. Le CESE indique que l’énergie ne constitue pas un bien parmi d’autres, mais bien une composante essentielle de notre système économique et social, et qu’elle présente donc les caractéristiques d’un bien public et devrait, à cet égard, être accessible à tous. |
3.2. |
Plusieurs États membres ont mis en place des plateformes de transparence du marché et le Réseau européen des gestionnaires de réseau de transport (REGRT) gère, pour sa part, une plateforme européenne. Toutefois, réaliser une analyse systématique et faire connaître au grand public les données disponibles sur ces plateformes permettraient aux consommateurs et aux petits acteurs du marché de mieux comprendre les irrégularités et d’y réagir. |
3.3. |
Le CESE approuve l’objectif fondamental de la proposition de remédier aux manipulations des marchés de l’énergie et de lutter contre celles-ci. À cet effet, il juge important de surveiller de manière efficace et transparente les activités sur le marché. Il accueille favorablement le fait que la révision du règlement REMIT complète la série de mesures prises par l’Union contre différentes formes de spéculation sur son marché, telles que celles qui empêchent les manipulations liées au non-remplissage des installations de stockage du gaz. Il soutient la proposition visant à élargir la définition des produits énergétiques de gros afin de couvrir également l’émission d’ordres dans des pays tiers susceptibles d’entraîner une livraison dans l’Union. |
3.4. |
Le CESE insiste sur le fait qu’il convient de prendre des mesures et de faire preuve de vigilance au niveau national, et il encourage les autorités nationales à coopérer autant que possible avec leurs homologues dans tous les États membres ainsi qu’avec les régulateurs européens. Ce n’est qu’à cette condition que le travail pourra être efficace. |
3.5. |
Le Comité souligne également que toute initiative doit être précédée d’un débat rigoureux et d’une analyse d’impact (3). Tout en sachant qu’une telle demande allongerait la durée de la procédure, il insiste sur la nécessité de mieux légiférer. Il regrette dès lors que les propositions relatives à l’organisation du marché de l’électricité n’aient pas fait l’objet d’une consultation et d’une analyse d’impact complètes. Il prend acte du document de travail des services de la Commission, mais indique que ce type de document ne suit pas la même procédure que les analyses d’impact. À cet égard, il précise que les nouvelles mesures doivent respecter le principe de proportionnalité et que les acteurs du marché ne devraient pas être surchargés d’obligations d’information. |
4. Observations particulières
4.1. |
Le CESE se félicite de la mise en place du système d’élaboration et de publication d’évaluations du prix et d’indices de référence pour le GNL. |
4.2. |
Tout en soulignant qu’il y a lieu d’améliorer la qualité des données et la transparence des échanges commerciaux, le CESE juge important de rationaliser les processus et les exigences en matière de données et d’informations afin de réduire au minimum la charge administrative. En ce qui concerne les nouvelles exigences relatives au trading algorithmique, la proposition pourrait contribuer à créer des conditions de concurrence inégales entre les acteurs du marché dans l’ensemble de l’Union, étant donné que la périodicité des obligations d’information relève exclusivement de la compétence nationale. |
4.3. |
Le CESE approuve le renforcement de la coopération et du partage d’informations entre les autorités compétentes en matière d’énergie, de concurrence et de réglementation financière. Dans la même optique, le Comité salue le fait que les définitions des informations privilégiées et des manipulations de marché sont alignées sur la réglementation des marchés financiers. |
4.4. |
Le CESE met également en avant l’importance de la coopération entre les autorités nationales et celles de l’Union. En même temps, il souligne cependant qu’il convient de veiller à ce qu’une répartition appropriée et efficace des tâches soit assurée entre les autorités de régulation nationales et l’ACER. L’élargissement des pouvoirs de contrôle de l’ACER suscite des inquiétudes quant à sa capacité à gérer toutes les tâches, compte tenu des défis auxquels elle est confrontée pour gérer le vaste programme actuel. Les autorités nationales doivent être renforcées et dotées de règles plus claires. L’ACER devrait se concentrer sur son rôle de coordinatrice. |
4.5. |
Le pouvoir d’effectuer des inspections sur place et de prendre des décisions en ce qui concerne les infractions au règlement REMIT devrait continuer de relever de la compétence nationale, étant donné que les conditions de la responsabilité pénale sont déterminées, en fin de compte, dans le cadre de la compétence exclusive des États membres. |
4.6. |
Le CESE convient que les sanctions doivent être efficaces, dissuasives et proportionnées. Dans ce contexte, le Comité note que les amendes proposées pour les personnes morales et physiques sont très élevées. |
Bruxelles, le 14 juin 2023.
Le président du Comité économique et social européen
Oliver RÖPKE
(1) Règlement (UE) no 1227/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l’intégrité et la transparence du marché de gros de l’énergie (JO L 326 du 8.12.2011, p. 1).
(2) Règlement (UE) 2019/942 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 instituant une agence de l’Union européenne pour la coopération des régulateurs de l’énergie (JO L 158 du 14.6.2019, p. 22).
(3) Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — «Interventions sur le marché de l’énergie à court terme et améliorations à long terme de l’organisation du marché de l’électricité — ligne de conduite» [COM(2022) 236 final] (JO C 75 du 28.2.2023, p. 185).
18.8.2023 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 293/142 |
Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la réception et à la surveillance du marché des engins mobiles non routiers circulant sur la voie publique et modifiant le règlement (UE) 2019/1020
[COM(2023) 178 final — 2023/0090 (COD)]
(2023/C 293/21)
Consultation |
Conseil de l’Union européenne, 4.4.2023 Parlement européen, 17.4.2023 |
Base juridique |
Article 114 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne |
Compétence |
Section «Marché unique, production et consommation» |
Adoption en session plénière |
14.6.2023 |
Session plénière no |
579 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
193/1/3 |
Ayant estimé que le contenu de la proposition est satisfaisant et n’appelle aucun commentaire de sa part, le Comité économique et social européen a décidé de rendre un avis favorable au texte proposé.
Bruxelles, le 14 juin 2023.
Le président du Comité économique et social européen
Oliver RÖPKE
18.8.2023 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 293/143 |
Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à l’établissement de l’action de soutien à la production de munitions
[COM(2023) 237 final — 2023/0140 (COD)]
(2023/C 293/22)
Consultation |
Conseil de l’Union européenne, 10.5.2023 Parlement européen, 8.5.2023 |
Base juridique |
Article 114 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne |
Compétence |
Section «Marché unique, production et consommation» |
Adoption en session plénière |
14.6.2023 |
Session plénière no |
579 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
193/2/9 |
Ayant estimé que le contenu de la proposition est satisfaisant et n’appelle aucun commentaire de sa part, le Comité économique et social européen a décidé de rendre un avis favorable au texte proposé.
Bruxelles, le 14 juin 2023.
Le président du Comité économique et social européen
Oliver RÖPKE
18.8.2023 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 293/144 |
Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) 2019/833 établissant des mesures de conservation et d’exécution applicables dans la zone de réglementation de l’Organisation des pêches de l’Atlantique du Nord-Ouest
[COM(2023) 108 final — 2023/0056 (COD)]
(2023/C 293/23)
Rapporteur général: |
Stefano PALMIERI |
Consultation |
Conseil, 10.3.2023 Parlement européen, 13.3.2023 |
Base juridique |
Article 43, paragraphe 2, et article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne |
Compétence |
Agriculture, développement rural et environnement |
Adoption en session plénière |
15.6.2023 |
Session plénière no |
579 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
151/0/1 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
Le Comité économique et social européen (CESE) réitère son point de vue sur la proposition de règlement tel qu’exprimé dans ses avis 2018/05155 (1), 2020/02842 (2) et 2022/01131 (3), dont les conclusions et recommandations sont présentées ci-après. |
1.2. |
Le CESE juge qu’il convient de transposer dans le droit de l’Union les mesures de conservation et de contrôle adoptées par l’Organisation des pêcheries de l’Atlantique du Nord-Ouest (OPANO) en vue de leur mise en œuvre uniforme et efficace au sein de l’Union. |
1.3. |
Toutefois, il considère que la proposition à l’examen ne met pas en place un mécanisme permettant de transposer rapidement les règles adoptées au sein de l’OPANO et ne répond pas à la nécessité de les mettre à jour chaque année. |
1.4. |
Le Comité est favorable à un dispositif plus rapide et plus simple et propose en conséquence un règlement constitué d’un article unique disposant que l’Union européenne doit impérativement appliquer à sa flotte les règles adoptées par l’OPANO. |
1.5. |
Le CESE insiste sur le risque lié à l’adoption du système des actes délégués, dans la mesure où il accorde à la Commission le pouvoir de légiférer sans devoir se soumettre aux procédures ordinaires. |
2. Synthèse de la proposition législative
2.1. |
La proposition présentée a pour objet principal d’intégrer dans le droit de l’Union les mesures de conservation et de contrôle adoptées par l’OPANO lors de sa réunion annuelle tenue en septembre 2022. |
2.2. |
Elle intègre des amendements concernant les nouvelles obligations incombant aux États membres du pavillon en rapport avec la présentation des programmes de recherches et avec les exigences applicables aux navires exerçant des activités de recherche, la réglementation du trait effectué à titre d’essai lors de la première entrée dans une division dans le cadre d’une sortie de pêche, les ajustements des fermetures de la pêche du sébaste dans la zone 3M, l’interdiction de débarquement, de transbordement et de conservation à bord de laimargue du Groenland et l’établissement de listes croisées des navires illicites, non déclarés et non réglementés (INN) avec d’autres organisations régionales de gestion des pêches. |
2.3. |
La proposition délègue à la Commission le pouvoir de modifier le règlement (UE) 2019/833 du Parlement européen et du Conseil (4) en ce qui concerne les obligations des États membres liées à la présentation des programmes de recherches et aux exigences auxquelles doivent satisfaire les navires pour exercer des activités de recherche, si l’OPANO modifie ces mesures à l’avenir. |
3. Observations générales
3.1. |
Le CESE estime qu’il est nécessaire de transposer dans le droit de l’Union européenne les mesures de conservation et de contrôle adoptées lors de la dernière réunion annuelle de l’OPANO, afin de garantir leur application uniforme sur tout son territoire. |
3.2. |
Toutefois, le Comité est d’avis que cette procédure de transposition ne prévoit toujours pas de mécanisme rapide, alors que ces mesures sont susceptibles d’être modifiées chaque année et que les procédures bureaucratiques de l’Union sont d’une très grande lenteur, qui aboutit à créer un décalage constant entre les règles adoptées par l’OPANO et la législation communautaire. |
3.3. |
Le CESE réaffirme qu’il y a lieu d’adopter une procédure plus souple, comme celle qu’il a proposée en 2019, 2020 et 2022, laquelle a par ailleurs reçu le soutien des administrations des États membres et des secteurs concernés. Elle prendrait la forme d’un règlement simple, comportant un article unique, qui prévoirait l’engagement, de la part de l’Union européenne, d’appliquer de manière impérative à sa flotte les règles adoptées chaque année par l’OPANO. Ce règlement simple sera subordonné à l’introduction d’une disposition prévoyant que lorsqu’une mesure adoptée par l’OPANO est incompatible avec le droit de l’Union, elle ne s’appliquera qu’après accord des colégislateurs sur la question concernée. |
3.4. |
Le Comité fait observer que continuer d’opter pour la voie du règlement à l’examen est susceptible de créer des conflits de normes de droit ou, pour le moins, des périodes d’insécurité juridique, tant pour les administrations que pour les entreprises elles-mêmes, qui ne savent pas si elles doivent se conformer à la réglementation antérieure, qui est celle en vigueur dans l’Union, ou aux nouvelles règles. En outre, cette situation produit des distorsions dans la mise en œuvre des mesures prises à l’encontre des flottes de pays tiers. |
3.5. |
Le CESE estime que le seul aspect qui se trouve facilité par l’introduction du système des actes délégués est qu’il donne à la Commission la possibilité d’arrêter certaines règles sans devoir se soumettre aux procédures ordinaires. |
4. Observations particulières
4.1. |
Le CESE reconnaît le rôle important que jouent les navires de recherche dans le suivi et l’évaluation de l’état écologique des eaux marines, en particulier en ce qui concerne les activités de pêche. Une détermination précise des communautés écologiques sous l’angle de la biodiversité et de la structure de leur réseau trophique est essentielle à leur conservation. La richesse de la faune locale dans une aire de population de poissons peut présenter, en fonction de la saison, des changements significatifs d’un point de vue statistique qui ne reflètent pas nécessairement ceux observés sur le plan de la biodiversité ou des caractéristiques fonctionnelles d’alimentation (5). |
4.2. |
La communauté scientifique a récemment proposé une approche novatrice de suivi et d’évaluation de l’état de l’écosystème marin, fondée notamment sur l’analyse et la modélisation de l’ADN environnemental (ADNe). Cette démarche introduit des techniques et des concepts susceptibles de soutenir une gouvernance et une gestion efficaces de la pêche (6). Le CESE reconnaît que l’ADNe constitue une donnée complémentaire, qui fournit des informations utiles sur l’état du réseau trophique et de l’écosystème marin. Étant donné que certains navires de recherche collectent de l’ADNe au cours de leurs campagnes d’observation, le CESE demande que sa collecte et son stockage soient pris en compte, en ce qu’il constitue une information précieuse, qu’il convient d’intégrer dans les données relatives aux captures de poisson. |
4.3. |
La plupart des pays respectent les piliers définis par le protocole de Nagoya, qui est entré en vigueur le 12 octobre 2014 et découle de la convention sur la diversité biologique. Ce protocole prévoit que des activités de recherche et de développement doivent être menées conformément à toute réglementation applicable en matière d’accès et de partage des avantages (APA), et qu’elles doivent être traçables. Le cas échéant, toutes les procédures requises en rapport avec l’accès et le partage des avantages doivent avoir été exécutées avec les autorités compétentes avant la mise en œuvre de tout programme de recherche nécessitant l’utilisation et le transfert de ressources génétiques, quel que soit le pays fournisseur. La majorité des pays ont signé le protocole de Nagoya, et seuls quelques-uns d’entre eux doivent encore le ratifier (7). |
4.4. |
La proposition instaure, pour les exploitants de navires de recherche, l’obligation de fournir certaines données, alors qu’elles peuvent s’avérer inadéquates, dans le cas où des facteurs externes, comme les conditions météorologiques ou des informations spécifiques, fournies par des satellites, sur la répartition des nutriments, imposent ou entraînent des changements rapides dans les campagnes d’observation. Certaines demandes, telles que la nécessité d’avoir à bord un observateur disposant d’une expertise suffisante et l’obligation pour les navires de changer de position en cas de prises accessoires, peuvent également rendre le processus moins efficace s’agissant de favoriser la conservation et la gestion d’écosystèmes marins sains et productifs, en particulier si les informations recueillies ne sont pas communiquées plus largement dans la communauté. |
4.5. |
Compte tenu de la difficulté rencontrée pour adapter le processus opérationnel aux exigences législatives, et inversement, le CESE est favorable à une approche plus pragmatique, fondée sur une diffusion transparente des informations. Dans ce contexte, il propose de prévoir de publier a posteriori les curriculum vitæ des experts désignés comme observateurs compétents, ainsi qu’un rapport succinct décrivant le motif et les détails du changement de position en cas de prises accessoires. Mettre ces informations à la disposition du public pourrait favoriser le partage des bonnes pratiques et améliorer la réputation des parties prenantes concernées. |
Bruxelles, le 15 juin 2023.
Le président du Comité économique et social européen
Oliver RÖPKE
(1) Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant des mesures de conservation et de contrôle applicables dans la zone de réglementation de l’Organisation des pêches de l’Atlantique du Nord-Ouest et abrogeant le règlement (CE) no 2115/2005 du Conseil et le règlement (CE) no 1386/2007 du Conseil [COM(2018) 577 final — 2018/0304 (COD)] (JO C 159 du 10.5.2019, p. 60).
(2) Avis du Comite économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) 2019/833 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2019 établissant les mesures de conservation et d’exécution applicables dans la zone de réglementation de l’Organisation des pêcheries de l’Atlantique du Nord-Ouest» [COM(2020) 215 final — 2020/95 (COD)] (JO C 429 du 11.12.2020, p. 279).
(3) Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) 2019/833 établissant des mesures de conservation et d’exécution applicables dans la zone de réglementation de l’Organisation des pêches de l’Atlantique du Nord-Ouest [COM(2022) 51 final — 2022/0035 (COD)] (JO C 290 du 29.7.2022, p. 149).
(4) Règlement (UE) 2019/833 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2019 établissant des mesures de conservation et d’exécution applicables dans la zone de réglementation de l’Organisation des pêches de l’Atlantique du Nord-Ouest, modifiant le règlement (UE) 2016/1627 et abrogeant les règlements (CE) no 2115/2005 et (CE) no 1386/2007du Conseil (JO L 141 du 28.5.2019, p. 1).
(5) Blackman e.a., Communications Biology (2022) 5:259.
(6) Gilbey e.a., Marine Policy (2022), 124, 104331.
(7) https://www.cbd.int/abs/nagoya-protocol/signatories/