ISSN 1977-0936

Journal officiel

de l’Union européenne

C 151I

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Édition de langue française

Communications et informations

65e année
6 avril 2022


Sommaire

page

 

II   Communications

 

COMMUNICATIONS PROVENANT DES INSTITUTIONS, ORGANES ET ORGANISMES DE L'UNION EUROPÉENNE

 

Commission européenne

2022/C 151 I/01

Communication de la Commission — Orientations à l’intention des États membres concernant les investissements directs étrangers en provenance de Russie et de Biélorussie compte tenu de l’agression militaire contre l’Ukraine et des mesures restrictives prévues dans les récents règlements du Conseil relatifs aux sanctions

1


FR

 


II Communications

COMMUNICATIONS PROVENANT DES INSTITUTIONS, ORGANES ET ORGANISMES DE L'UNION EUROPÉENNE

Commission européenne

6.4.2022   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

CI 151/1


COMMUNICATION DE LA COMMISSION

Orientations à l’intention des États membres concernant les investissements directs étrangers en provenance de Russie et de Biélorussie compte tenu de l’agression militaire contre l’Ukraine et des mesures restrictives prévues dans les récents règlements du Conseil relatifs aux sanctions (1)

(2022/C 151 I/01)

L’Union européenne est ouverte aux investissements étrangers, ce qui est essentiel à sa croissance économique et à sa compétitivité, de même qu’à l’emploi et à l’innovation. De nombreuses entreprises européennes sont bien intégrées dans les chaînes d’approvisionnement mondiales, qui doivent continuer à fonctionner. L’UE restera une destination attrayante pour les investissements directs étrangers (IDE). Notre ouverture n’est toutefois pas inconditionnelle et doit être compensée par des outils appropriés visant à préserver notre sécurité et notre ordre public.

En réponse à l’agression militaire non provoquée et injustifiée de la Russie contre l’Ukraine, soutenue activement par la Biélorussie, l’UE a adopté un vaste train de mesures restrictives («sanctions») contre la Russie et la Biélorussie. Les sanctions contre la Russie visent à compromettre la capacité du Kremlin à financer la guerre, à imposer des coûts économiques et politiques évidents aux élites politiques russes responsables de l’invasion et à réduire la base économique de la Russie. Compte tenu du soutien matériel apporté par la Biélorussie à l’invasion russe, l’UE a adopté de nouvelles sanctions contre la Biélorussie. Les sanctions contre la Biélorussie sont conçues pour avoir un impact similaire.

Le règlement (UE) 2019/452 (2) («règlement sur le filtrage des IDE») constitue un cadre essentiel à l’échelle de l’UE dans lequel la Commission européenne et les États membres peuvent coordonner leurs actions en matière d’investissements étrangers afin d’assurer la protection de la sécurité et de l’ordre public si ces objectifs sont menacés par des investissements directs étrangers. Les États membres peuvent également examiner les investissements qui ne relèvent pas du champ d’application du règlement sur le filtrage des IDE, à condition que ce contrôle soit effectué dans le respect des dispositions du traité relatives à la libre circulation des capitaux et à l’établissement.

S’il est vrai que le filtrage des IDE et les sanctions sont des instruments juridiques distincts, chacun ayant une finalité différente et une manière de fonctionner différente, l’agression militaire de la Russie contre l’Ukraine appelle néanmoins à une plus grande vigilance à l’égard des investissements directs russes et biélorusses au sein du marché unique. Cela va au-delà des investissements réalisés par des personnes ou des entités faisant l’objet de sanctions. Dans les circonstances actuelles, il existe un risque accru que tout investissement directement ou indirectement lié à une personne ou à une entité associée au gouvernement russe ou biélorusse, contrôlée par le gouvernement russe ou biélorusse ou soumise à l’influence de l’un ou l’autre, dans des actifs essentiels au sein de l’UE puisse donner des motifs raisonnables de conclure que l’investissement est susceptible de constituer une menace pour la sécurité ou l’ordre public dans les États membres.

En outre, les sanctions de l’UE s’appliquent à toute personne se trouvant sur le territoire de l’Union, à toute personne morale, toute entité ou tout organisme, à l’intérieur ou à l’extérieur du territoire de l’Union, qui est établi ou constitué selon le droit d’un État membre, ainsi qu’à toute personne morale, toute entité ou tout organisme en ce qui concerne toute opération commerciale réalisée en tout ou en partie dans l’Union. Par conséquent, les mesures restrictives de l’UE peuvent frapper les investissements directs de la Russie et de la Biélorussie de plusieurs manières. Par exemple, les opérations commerciales avec des personnes et entités qui ont été désignées ne peuvent être légalement effectuées à moins que la législation les autorise à titre exceptionnel, et les banques de l’UE gèlent les paiements reçus de toute banque russe désignée faisant l’objet d’un gel des avoirs. Ces règles sont rappelées plus en détail dans l’annexe de la présente communication.

Dans ses communications précédentes, notamment dans la communication intitulée «Réexamen de la politique commerciale — Une politique commerciale ouverte, durable et ferme» (3), la Commission a invité tous les États membres à mettre en place et à mettre en œuvre des mécanismes complets de filtrage des IDE afin de traiter les cas où l’acquisition ou le contrôle d’une entreprise, d’une infrastructure ou d’une technologie donnée créerait un risque pour la sécurité ou l’ordre public dans l’UE. Il est d’autant plus urgent de le faire dans le contexte actuel.

Dans le cadre institutionnel existant, la responsabilité du filtrage des IDE incombe aux États membres. Des mécanismes nationaux de filtrage sont déjà en vigueur dans 18 États membres (4). Le filtrage des IDE devrait tenir compte de l’incidence sur la sécurité et l’ordre public de l’Union dans son ensemble. Pour déterminer si un investissement direct étranger est susceptible de porter atteinte à la sécurité ou à l’ordre public, les États membres peuvent également tenir compte, en particulier, du fait que l’investisseur étranger est contrôlé directement ou indirectement par le gouvernement d’un pays tiers, y compris des organismes publics ou des forces armées, y compris au moyen d’une structure de propriété ou d’un financement important; le fait que l’investisseur étranger ait déjà participé à des activités portant atteinte à la sécurité ou à l’ordre public dans un État membre; or le fait qu’il existe ou non un risque grave que l’investisseur étranger exerce des activités illégales ou criminelles (5).

Le champ d’application du règlement sur le filtrage des IDE est limité aux cas où l’acquisition d’une entité de l’UE fait intervenir des investissements directs par une ou plusieurs entités établies en dehors de l’Union. A contrario, si les investissements sont réalisés exclusivement par une ou plusieurs entités établies dans l’Union, la situation ne relève pas du champ d’application du règlement, à l’exception des transactions qui font partie d’un système de contournement mis en place dans le but d’éviter l’application du règlement. Toutefois, ces investissements peuvent faire l’objet de contrôles ou de mécanismes de filtrage nationaux et des mesures peuvent être prises dans le respect du droit de l’Union et, en particulier, des dispositions du traité relatives à la libre circulation des capitaux et à la liberté d’établissement.

Dans les circonstances actuelles, il existe un risque considérablement accru que les IDE des investisseurs russes et biélorusses constituent une menace pour la sécurité et l’ordre public. Par conséquent, dans le cadre des règles applicables, ces IDE devraient faire l’objet d’un contrôle et d’un examen systématiques approfondis. Ces risques peuvent être exacerbés par le montant des investissements russes dans l’UE et par l’intensité des relations commerciales antérieures entre l’UE et les entreprises russes. En outre, il convient d’accorder une attention particulière aux menaces que représentent les investissements de personnes ou d’entités associées aux deux gouvernements, contrôlées par ceux-ci ou soumises à leur influence, car ces gouvernements sont fortement incités à interférer avec des activités critiques dans l’UE et à utiliser leur capacité à contrôler ou à diriger des investisseurs russes et biélorusses dans l’UE à cette fin.

À cette fin, la Commission européenne invite les États membres à:

utiliser systématiquement leurs mécanismes de filtrage pour évaluer et prévenir les menaces liées aux investissements russes et biélorusses pour des motifs de sécurité et d’ordre public;

assurer une coopération étroite entre les autorités nationales compétentes en matière de sanctions (6) et celles chargées du filtrage des investissements dans le cadre de la mise en œuvre des sanctions de l’UE, ainsi que de la détection des violations et de l’imposition de pénalités;

mettre pleinement en œuvre le règlement sur le filtrage des IDE, y compris par une participation active au mécanisme de coopération entre les États membres et entre ceux-ci et la Commission, afin de faire face aux risques liés à la sécurité ou à l’ordre public concernant les IDE en provenance de Russie et de Biélorussie;

veiller au plein respect des exigences de la directive anti-blanchiment (7) afin de prévenir l’utilisation abusive du système financier de l’Union; et

assurer une coopération étroite entre les autorités de filtrage des États membres, les autorités nationales compétentes en matière de sanctions et les banques et institutions nationales de développement, ainsi que les institutions financières internationales dont les États membres sont actionnaires, afin de recenser les investissements, en particulier en provenance de Russie et de Biélorussie, susceptibles de porter atteinte à la sécurité ou à l’ordre public dans l’UE et de faciliter le plein respect des sanctions dans les activités soutenues par les entités d’investissement publiques susmentionnées.

La Commission invite les États membres qui ne disposent pas actuellement d’un mécanisme de filtrage, ou dont les mécanismes de filtrage ne couvrent pas toutes les transactions d’IDE pertinentes ou ne permettent pas le filtrage avant la réalisation des investissements, à mettre en place d’urgence un mécanisme global de filtrage des IDE et, dans l’intervalle, à utiliser d’autres instruments juridiques appropriés pour traiter les cas où l’acquisition ou le contrôle d’une entreprise, d’une infrastructure ou d’une technologie donnée créerait un risque pour la sécurité ou l’ordre public dans l’UE.

La Commission invite les États membres qui sont en train de mettre en place un tel mécanisme de filtrage à accélérer son adoption et à préparer sa mise en œuvre, notamment en le soutenant au moyen de ressources appropriées.

Enfin, l’annexe de la présente communication décrit également les conditions dans lesquelles les États membres peuvent être autorisés à imposer des restrictions à la libre circulation des capitaux et à la liberté d’établissement. En dehors du cadre de l’UE pour le filtrage des IDE, les États membres qui ont mis en place des mesures en vertu desquelles ils sont autorisés à filtrer les investissements intra-UE pour poursuivre, de manière proportionnée, des objectifs légitimes de politique publique sont vivement encouragés à utiliser ces mécanismes dans toute la mesure du possible en ce qui concerne les investissements contrôlés en dernier ressort par des personnes ou entités russes ou biélorusses, pour faire face aux risques mis en évidence dans la présente communication.


(1)  Règlement (UE) n° 833/2014 du Conseil concernant des mesures restrictives eu égard aux actions de la Russie déstabilisant la situation en Ukraine (JO L 229 du 31.7.2014, p. 1) et ses modifications et règlement (CE) n° 765/2006 du Conseil du 18 mai 2006 concernant des mesures restrictives compte tenu de la situation en Biélorussie (JO L 134 du 20.5.2006, p. 1) et ses modifications.

(2)  Règlement (UE) 2019/452 du Parlement européen et du Conseil du 19 mars 2019 établissant un cadre pour le filtrage des investissements directs étrangers dans l’Union (JO L 79I du 21.3.2019, p. 1).

(3)  Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions intitulée «Réexamen de la politique commerciale – Une politique commerciale ouverte, durable et ferme» [COM(2021) 66 final].

(4)  Pour une liste complète des mécanismes nationaux de filtrage et des liens vers la législation nationale, voir: http://trade.ec.europa.eu/doclib/html/157946.htm.

(5)  Article 4 du règlement sur le filtrage des IDE.

(6)  La liste des autorités nationales compétentes en matière de sanctions est disponible à l’adresse suivante: https://www.sanctionsmap.eu/#/main/authorities

(7)  Directive (UE) 2015/849 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme, modifiant le règlement (UE) no 648/2012 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 2005/60/CE du Parlement européen et du Conseil et la directive 2006/70/CE de la Commission (JO L 141 du 5.6.2015, p. 73).


ANNEXE

1.   Aperçu des actifs russes et biélorusses dans l’UE (1)

1.1.   Investissements russes dans l’UE

Sur la base du nombre d’opérations réalisées entre 2015 et 2021, la Russie était le 11e investisseur étranger dans l’UE, représentant, en nombre, 0,9 % des investissements et, en valeur, 0,7 % des investissements en provenance de tous les pays et territoires non membres de l’UE. Cela correspond à 643 transactions, d’une valeur totale de 15 milliards d’euros (la valeur manque pour 34 % des transactions), comprenant des fusions et des acquisitions, des prises de participations minoritaires, des investissements de portefeuille et des investissements entièrement nouveaux. Si, ces dernières années, le flux entrant d’investissements russes apparaît relativement limité, les données de 2020 révèlent qu’environ 17 000 entreprises de l’UE (2) sont contrôlées par des ressortissants ou entités russes, que dans 7 000 autres, des actionnaires russes pourraient détenir une participation de contrôle (3) et que 4 000 autres encore comptent des actionnaires minoritaires russes (4). Dans de nombreux cas, les entreprises comptent de multiples actionnaires russes, chacun d’eux détenant une part de capital inférieure à 50 %, mais l’addition de toutes leurs parts représente plus de 50 % du capital de l’entreprise de l’UE. Dans 57,7 % des entreprises de l’UE sous contrôle ou influence russe, les actifs sont détenus par une personne physique, dans 9,7 %, ils sont détenus par une entreprise et dans 1,1 %, par une autorité publique/l’État.

Tableau 1

Nombre d’entreprises de l’Union à 27 sous influence ou contrôle russe, ventilation par type d’entité de contrôle

Type d’entité de contrôle (bénéficiaire effectif ou «Global Ultimate Owner»)

Nombre d’entreprises

Part

Une ou plusieurs personnes ou familles connues

17 510

57,7  %

Non disponible

9 204

30,4  %

Société commerciale

2 931

9,7  %

Autorité publique, État, gouvernement

343

1,1  %

Société de financement

149

0,5  %

Fonds de mutualisation & de pension/prête-nom/fiducie/fiduciaire

83

0,3  %

Banque

81

0,3  %

Fondation/institut de recherche

18

0,1  %

Compagnie d’assurance

1

0,0  %

Société de capital-investissement

1

0,0  %

Source: analyse du JRC, sur la base de données fournies par Bureau van Dijk. Chiffres basés sur les données de bilan 2020. Données obtenues en mars 2022. En cas d’influence russe (non de contrôle), l’entreprise de l’UE peut être contrôlée par une entité de n’importe quel autre pays. Les cas manquants («non disponible») concernent des entreprises de l’UE sous influence russe qui ne déclarent aucun actionnaire majoritaire.

Les actifs détenus par le gouvernement russe se trouvent dans des «sociétés commerciales» (5) dans 79,9 % des cas et dans des banques ou d’autres établissements financiers pour le reste (tableau 2).

Tableau 2

Nombre d’entreprises de l’Union à 27 sous le contrôle ou l’influence du gouvernement russe, ventilation par type d’entreprise de l’UE contrôlée

Type d’entité de l’entreprise de l’UE

Nombre d’entreprises

Part du total (%)

Société commerciale

262

79,9

Société de financement

37

11,3

Banque

17

5,2

Fonds de mutualisation & de pension

11

3,4

Société de capital-investissement

1

0,3

Source: analyse du JRC, sur la base de données fournies par Bureau van Dijk. Chiffres basés sur les données de bilan 2020. Données obtenues en mars 2022.

Les secteurs dans lesquels le contrôle russe est le plus présent sont le commerce de gros, les activités immobilières, les activités spécialisées, scientifiques et techniques et les activités financières et d’assurance. Les secteurs dans lesquels l’influence russe est la plus présente sont très similaires: le commerce de gros, les activités immobilières, les activités spécialisées, scientifiques et techniques et l’industrie manufacturière (tableau 3).

Tableau 3

Nombre d’entreprises de l’Union à 27 sous influence ou contrôle russe, ventilation par secteur cible, 2020

EU27

 

Contrôle

Influence

Total

Secteur

Nombre d’entreprises

Nombre d’entreprises

Participation (*1) %

Nombre d’entreprises

Agriculture, sylviculture et pêche

137

137

62

274

Industries extractives

19

15

28

34

Industrie manufacturière

904

883

56

1 787

Électricité, gaz, vapeur et air conditionné

61

45

40

106

Production et distribution d’eau; assainissement, gestion des déchets

32

24

56

56

Construction

744

621

50

1 365

Commerce

4 530

3 607

63

8 137

Transports et entreposage

666

417

51

1 083

Hébergement et restauration

612

675

52

1 287

Information et communication

763

668

55

1 431

Activités financières et d’assurance

1 199

625

46

1 824

Activités immobilières

2 714

2 470

70

5 184

Activités spécialisées, scientifiques et techniques

1 721

1 272

60

2 993

Activités de services administratifs et de soutien

886

746

55

1 632

Administration publique et défense

1

6

35

7

Enseignement

103

76

56

179

Santé humaine et action sociale

70

56

46

126

Arts, spectacles et activités récréatives

160

170

50

330

Autres activités de services

254

245

52

499

Source: analyse du JRC, sur la base de données fournies par Bureau van Dijk. Chiffres basés sur les données de bilan 2020. Données obtenues en mars 2022. Lorsqu’une entreprise compte plusieurs actionnaires russes détenant des participations minoritaires, la somme des participations de tous les actionnaires russes de cette entreprise est calculée.

1.2.   Investissements biélorusses dans l’UE

Les données de 2020 révèlent qu’environ 1 550 entreprises de l’UE sont contrôlées par des ressortissants ou entités biélorusses, que dans 600 autres entreprises, des actionnaires biélorusses pourraient détenir une participation de contrôle (6) et que 400 autres entreprises comptent des actionnaires minoritaires biélorusses (7). Comme dans le cas des investissements russes, certaines entreprises comptent de multiples actionnaires minoritaires biélorusses qui, ensemble, détiennent plus de 50 % du capital de l’entreprise de l’UE. Dans 63,2 % des entreprises de l’UE sous contrôle ou influence biélorusse, les actifs sont détenus par une personne physique, dans 5,1 %, ils sont détenus par une entreprise et dans 0,4 %, par une autorité publique/l’État (tableau 4).

Tableau 4

Nombre d’entreprises de l’Union à 27 sous influence ou contrôle biélorusse, ventilation par type d’entité de contrôle

Type d’entité de contrôle (GUO)

Nombre d’entreprises

Part

Une ou plusieurs personnes ou familles connues

1 687

63,18  %

Société commerciale

135

5,06  %

Autorité publique, État, gouvernement

11

0,41  %

Banque

1

0,04  %

Fonds de mutualisation & de pension/prête-nom/fiducie/fiduciaire

1

0,04  %

Société de financement

1

0,04  %

Fondation/institut de recherche

1

0,04  %

Non disponible

833

31,20  %

Source: analyse du JRC, sur la base de données fournies par Bureau van Dijk. Chiffres basés sur les données de bilan 2020. Données obtenues en mars 2022. En cas d’influence biélorusse (non de contrôle), l’entreprise de l’UE peut être contrôlée par une entité de n’importe quel autre pays. Les cas manquants («non disponible») concernent des entreprises de l’UE sous influence biélorusse qui ne déclarent aucun actionnaire majoritaire.

Les actifs détenus par le gouvernement biélorusse relèvent principalement de la catégorie Commerce, comme indiqué ci-dessous dans le tableau 5.

Tableau 5

Nombre d’entreprises de l’Union à 27 contrôlées par l’État ou une autorité publique de Biélorussie, ventilation par secteur d’activité de l’entreprise contrôlée

Secteur d’activité de l’entreprise de l’UE

Nombre d’entreprises

Total des actifs (millions d’euros)

Commerce de gros d’équipements automobiles

1

1,49

Intermédiaires du commerce de gros

1

-

Intermédiaires du commerce en combustibles, métaux, minéraux et produits chimiques

1

2,80

Commerce de gros de matériel agricole

2

38,98

Commerce de gros de combustibles et de produits annexes

2

26,14

Commerce de gros de produits chimiques

1

4,23

Transports aériens

1

-

Transports aériens de passagers

1

0,22

Source: analyse du JRC, sur la base de données fournies par Bureau van Dijk. Chiffres basés sur les données de bilan 2020. Données obtenues en mars 2022.

Les secteurs dans lesquels le contrôle biélorusse est le plus présent sont le commerce de gros, les activités spécialisées, scientifiques et techniques, les transports et l’entreposage et les activités immobilières. Les secteurs dans lesquels l’influence biélorusse est la plus présente sont très similaires: le commerce de gros, les activités immobilières, les activités spécialisées, scientifiques et techniques et l’industrie manufacturière (tableau 6).

Tableau 6

Nombre d’entreprises de l’Union à 27 sous influence ou contrôle biélorusse, ventilation par secteur cible, 2020

 

Contrôle

Influence

Total

Secteur

Nombre d’entreprises

Nombre d’entreprises

Participation (*2) %

Nombre d’entreprises

Agriculture, sylviculture et pêche

7

10

48

17

Industries extractives

1

0

N.A.

1

Industrie manufacturière

73

100

51

173

Électricité, gaz, vapeur et air conditionné

1

3

53

4

Production et distribution d’eau; assainissement, gestion des déchets

4

4

32

8

Construction

107

76

54

183

Commerce

568

377

60

945

Transports et entreposage

122

91

61

213

Hébergement et restauration

45

32

46

77

Information et communication

97

74

55

171

Activités financières et d’assurance

48

26

51

74

Activités immobilières

109

108

53

217

Activités spécialisées, scientifiques et techniques

141

116

47

257

Activités de services administratifs et de soutien

73

41

55

114

Enseignement

7

4

75

11

Santé humaine et action sociale

5

7

32

12

Arts, spectacles et activités récréatives

17

5

69

22

Autres activités de services

22

22

54

44

Source: analyse du JRC, sur la base de données fournies par Bureau van Dijk. Chiffres basés sur les données de bilan 2020. Données obtenues en mars 2022. Lorsqu’une entreprise compte plusieurs actionnaires biélorusses détenant des participations minoritaires, la somme des participations de tous les actionnaires biélorusses de cette entreprise est calculée.

2.   Effet des mesures restrictives (sanctions) sur les investissements directs étrangers en provenance de Russie et de Biélorussie et devoir de vigilance des entreprises de l’UE

Les mesures restrictives de l’UE s’appliquent, entre autres, à toute personne, à l’intérieur ou à l’extérieur du territoire de l’Union, qui est un ressortissant d’un État membre, à toute personne morale, toute entité ou tout organisme, à l’intérieur ou à l’extérieur du territoire de l’Union, qui est établi ou constitué selon le droit d’un État membre, ainsi qu’à toute personne morale, toute entité ou tout organisme en ce qui concerne toute opération commerciale réalisée en tout ou en partie dans l’Union.

Les mesures restrictives de l’UE peuvent affecter les investissements directs étrangers en provenance de Russie et de Biélorussie de plusieurs manières. Elles peuvent prendre la forme d’inscriptions individuelles sur la liste ou de mesures sectorielles.

Certaines personnes et entités russes et biélorusses font l’objet de restrictions financières individuelles, qui comprennent un gel des avoirs et une interdiction de mettre, directement ou indirectement, des fonds ou des ressources économiques à la disposition de ces personnes et entités figurant sur la liste.

Les personnes ou entités désignées ne sont pas en mesure d’utiliser leurs fonds (c’est-à-dire les actifs financiers et les avantages économiques de toute nature) et ressources économiques (actifs de toute nature) qui sont gelés et aucuns fonds ni ressources économiques ne sont mis à leur disposition. Cela signifie que les citoyens et les entreprises de l’UE ne doivent pas effectuer de versements en leur faveur, ni leur fournir des biens ou d’autres ressources. En effet, les opérations commerciales avec les personnes ou entités désignées ne peuvent être légalement effectuées à moins que la législation ne les autorise à titre exceptionnel.

La Commission estime que le gel des avoirs s’étend aux actifs de toute entité non désignée qui appartient à une personne ou entité désignée ou qui se trouve sous son contrôle, à moins qu’il ne puisse être prouvé que les actifs concernés ne sont en fait pas la propriété de la personne ou entité désignée ou ne relèvent pas de son contrôle. De même, des fonds ou des ressources économiques ne devraient pas être mis à la disposition d’une entité non désignée qui appartient à une personne ou entité désignée ou qui se trouve sous son contrôle, à moins qu’il ne puisse être prouvé que les fonds ou ressources économiques ne parviendront pas à la personne désignée (8). Les intérêts et dividendes sont considérés comme des «fonds» qui doivent être gelés.

En outre, les banques établies ou constituées en vertu du droit d’un État membre ou exerçant des activités commerciales dans l’UE gèlent les paiements reçus de toute personne ou entité désignée (faisant l’objet d’un gel des avoirs) énumérée à l’annexe I du règlement (UE) no 269/2014 du Conseil. Cela signifie que les transferts en provenance d’une personne désignée, ou en provenance d’une personne non désignée, mais effectués par l’intermédiaire d’une banque désignée (9), ne sont pas rejetés et les fonds ne sont pas renvoyés à l’expéditeur; ces fonds restent gelés dans la banque de l’UE. Il est possible de demander le déblocage de ces fonds à l’autorité nationale compétente en matière de sanctions, par exemple en vertu de la dérogation prévue par le règlement (UE) no 269/2014 du Conseil (10) concernant le paiement par une personne ou entité désignée dû au titre d’un contrat conclu avant la date de désignation.

L’Union a également adopté des mesures restrictives sectorielles. Par exemple, certaines banques russes et biélorusses ont été dissociées des services spécialisés de messagerie financière, notamment SWIFT, ce qui entrave considérablement leur capacité à effectuer des paiements internationaux. Les mesures restrictives ont aussi freiné les entrées financières dans l’UE en provenance de Russie et de Biélorussie, en interdisant l’acceptation, au-delà de certains seuils, de nouveaux dépôts de ressortissants ou de résidents russes et biélorusses et de personnes morales, d’entités ou d’organismes établis en Russie ou en Biélorussie, la détention de comptes de clients russes et biélorusses par les dépositaires centraux de titres de l’UE, ainsi que la vente de titres libellés en euros à des clients russes ou biélorusses. En outre, il est interdit aux opérateurs de l’UE de fournir des financements, y compris des fonds propres, à des opérateurs de pays tiers actifs dans le secteur de l’énergie en Russie. Cela peut avoir une incidence indirecte sur les investissements directs étrangers dans l’UE en fonction du dispositif de financement spécifique envisagé.

Par ailleurs, la cession de technologies contrôlées (y compris des connaissances ou des biens immatériels) à des personnes étrangères est une sorte de transfert intangible de technologies également connu sous le nom d’«opérations assimilées à des exportations». Le règlement (UE) no 833/2014 du Conseil et le règlement (CE) no 765/2006 du Conseil et leurs modifications ultérieures interdisent de vendre, de fournir, de transférer ou d’exporter, directement ou indirectement, certains biens et technologies faisant l’objet des mesures à toute personne physique ou morale, toute entité ou tout organisme en Russie et en Biélorussie, ou aux fins d’une utilisation en Russie et en Biélorussie, respectivement. Les exigences en matière de contrôle de l’assistance technique étendent également le contrôle aux ressortissants étrangers dans l’UE. Par conséquent, les entreprises devraient restreindre l’accès du personnel russe et biélorusse à ces connaissances ou technologies si ces connaissances et technologies seraient utilisées en Russie ou en Biélorussie.

Il est interdit aux entreprises de l’UE de participer sciemment et volontairement à des activités ayant pour objet ou pour effet de contourner les restrictions. Dans toutes les situations, les entreprises de l’UE, et en particulier celles qui ont des parties prenantes de nationalité russe ou biélorusse, devraient prendre des mesures de vigilance adéquates à l’égard de leurs partenaires commerciaux et de la destination finale des fonds ou des ressources économiques. Ces procédures peuvent comprendre le filtrage, l’évaluation des risques, le devoir de vigilance à plusieurs niveaux et le suivi permanent.

3.   Filtrage des investissements directs étrangers en provenance de Russie et de Biélorussie pour des motifs de sécurité ou d’ordre public conformément au cadre établi par le règlement (UE) 2019/452

Le règlement (UE) 2019/452 (11) (le «règlement sur le filtrage des IDE») couvre les investissements directs étrangers en provenance de pays tiers, c’est-à-dire les investissements «qui établissent ou maintiennent des liens directs et durables entre les investisseurs de pays tiers, y compris des entités publiques, et les entreprises exerçant une activité économique dans les États membres» (12).

Si les investissements sont réalisés exclusivement par une ou plusieurs entités établies dans l’Union, la situation ne relève pas du champ d’application du règlement. Ces opérations pourraient relever du champ d’application des législations nationales des États membres en matière de filtrage, dans les limites des dispositions du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) relatives au droit d’établissement et aux mouvements des capitaux. En particulier, le traité permet aux États membres de maintenir des mesures nécessaires pour des motifs d’ordre public ou de sécurité publique ou des mesures fondées sur des raisons impérieuses d’intérêt général reconnues par la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne. Le droit des États membres d’adopter de telles mesures restreignant la libre circulation des capitaux est expliqué plus en détail au point suivant. Le statut d’une société établie dans l’Union, et donc d’une société de l’Union au sens du TFUE, est fondé, en vertu de l’article 54 du TFUE, sur le lieu du siège statutaire, de l’administration centrale ou du principal établissement ainsi que sur l’ordre juridique sous lequel la société est constituée, et non sur la nationalité de ses actionnaires. Les investissements de ces entreprises ne relèvent pas du champ d’application du règlement sur le filtrage des IDE. Ledit règlement prévoit une exception à cette règle: les investissements réalisés par des entités de l’UE peuvent entrer dans le champ d’application lorsqu’ils relèvent de la clause anticontournement. Le règlement ne définit pas le contournement en tant quel tel; son considérant 10 précise néanmoins que les mesures visant à empêcher le contournement «devraient viser les investissements réalisés depuis l’Union au moyen de montages artificiels qui ne reflètent pas la réalité économique et contournent les mécanismes de filtrage et les décisions de filtrage, lorsque l’investisseur est, en fin de compte, détenu ou contrôlé par une personne physique ou une entreprise d’un pays tiers». Il est donc important de vérifier si l’investisseur fait partie d’un système de contournement mis en place dans le but d’éviter l’application du règlement. Certains investisseurs étrangers, par exemple, déclarent expressément que l’investisseur direct est une société de participation européenne qu’ils ont créée pour les besoins de l’opération proposée. Un tel montage pourrait être créé pour des motifs commerciaux légitimes. Toutefois, même sans preuve d’une intention subjective de contourner le règlement, l’absence d’activité économique de la société qui investit et l’aptitude objective des montages à éviter les règles énoncées dans le règlement suffisent à créer la présomption que le montage est artificiel. L’exemple le plus courant de contournement au sens du considérant 10 est celui d’un investissement étranger dans l’Union réalisé au moyen d’une «société-écran/boîtes aux lettres» établie dans l’UE, qui n’exerce ni directement ni indirectement une véritable activité économique et dont la seule fonction est de servir de véhicule juridique (13) à l’investissement. L’existence d’un contournement doit être établie au cas par cas, au regard des circonstances propres à chaque situation et à la lumière d’éléments de preuve pertinents.

Le règlement relatif au filtrage des IDE s’applique à tous les secteurs de l’économie et ne prévoit aucun seuil. La nécessité de filtrer une opération est souvent indépendante de la valeur de l’opération elle-même. Le règlement autorise les États membres à réexaminer les investissements relevant de son champ d’application pour des raisons de sécurité ou d’ordre public et à prendre des mesures pour faire face à des risques spécifiques.

Les notions de «sécurité» et d’«ordre public» ne sont pas définies dans le règlement. L’article 4 du règlement précise néanmoins les facteurs à prendre en considération pour déterminer si un IDE est susceptible de porter atteinte à la sécurité et à l’ordre public. Ces facteurs comprennent notamment les effets potentiels de l’IDE sur les infrastructures critiques, les technologiques critiques, l’approvisionnement en intrants essentiels, l’accès à des informations sensibles ainsi que sur la liberté et le pluralisme des médias. Les aspects propres à l’investisseur entrent également en ligne de compte dans cette évaluation, comme le fait que l’investisseur étranger soit contrôlé par un gouvernement. Par exemple, pour déterminer si un investissement direct étranger est susceptible de porter atteinte à la sécurité ou à l’ordre public, les États membres et la Commission peuvent également tenir compte du fait que l’investisseur étranger est contrôlé directement ou indirectement par le gouvernement d’un pays tiers, y compris des organismes publics ou des forces armées, y compris au moyen d’une structure de propriété ou d’un financement important; du fait que l’investisseur étranger ait déjà participé à des activités portant atteinte à la sécurité ou à l’ordre public dans un État membre; ou du fait qu’il existe ou non un risque grave que l’investisseur étranger exerce des activités illégales ou criminelles.

C’est aux États membres qu’incombent en dernier ressort l’examen et, le cas échéant, l’adoption, pour des raisons de sécurité ou d’ordre public, de mesures destinées à interdire ou à assortir de conditions un investissement relevant du champ d’application du règlement. La Commission peut adresser des avis pour recommander des actions spécifiques à l’État membre dans lequel est effectué l’investissement, en particulier lorsque celui-ci risque de porter atteinte à la sécurité ou à l’ordre public dans plusieurs États membres ou d’affecter des projets ou des programmes présentant un intérêt pour l’Union.

Dans la situation actuelle, il existe un risque considérablement accru que des IDE d’investisseurs russes et biélorusses, en particulier d’entités contrôlées par les gouvernements respectifs, puissent constituer une menace pour la sécurité et l’ordre public car les gouvernements russe et biélorusse pourraient être davantage incités à interférer avec des activités critiques dans l’UE et à utiliser leur capacité à contrôler ou à diriger des investisseurs russes et biélorusses dans l’Union à cette fin. Par conséquent, il convient de soumettre ces IDE à un contrôle et à un examen systématiques approfondis afin de déceler toute menace éventuelle.

Alors que le filtrage effectué par les États membres a généralement lieu avant la réalisation de la transaction d’IDE, le règlement relatif au filtrage des IDE permet aux États membres de disposer de mécanismes qui prévoient le filtrage d’une transaction d’IDE après sa réalisation. Si un État membre lance le filtrage formel d’un IDE, celui-ci est soumis au dispositif de coopération, qu’il soit prévu ou achevé. En outre, le dispositif de coopération peut être activé dans un délai de 15 mois après la réalisation de l’investissement lorsque celui-ci n’est pas soumis à un filtrage au niveau national (14). Tel peut être le cas lorsque l’État membre n’a pas de mécanisme de filtrage ou lorsque l’État membre dispose d’un mécanisme de filtrage mais que les parties n’ont pas soumis la transaction d’IDE en question pour un filtrage préalable. Cela peut amener l’État membre dans lequel l’investissement a eu lieu à adopter des mesures, notamment les mesures d’atténuation nécessaires.

4.   Actions envisageables pour restreindre les investissements dans les limites prévues par les règles relatives à la libre circulation des capitaux et à la liberté d’établissement

L’article 63 du TFUE prévoit la libre circulation des capitaux non seulement à l’intérieur de l’Union, mais aussi entre les États membres et les pays tiers. De même, l’article 49 du TFUE protège la liberté d’établissement des ressortissants d’un État membre sur le territoire d’un autre État membre. Ces deux dispositions interdisent toutes les restrictions à la circulation des capitaux à moins qu’elles ne poursuivent des objectifs légitimes de politique publique. Ces objectifs sont définis dans le traité ou dans la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne comme des raisons impérieuses d’intérêt général. Ils ne devraient pas être de nature purement économique (15).

Les États membres peuvent filtrer les investissements qui ne relèvent pas du champ d’application du règlement (UE) 2019/452, c’est-à-dire les investissements de portefeuille ou les investissements directs intra-UE tels que ceux contrôlés en dernier ressort par des entités russes ou biélorusses, pour autant qu’un tel filtrage soit effectué dans le respect du droit de l’UE et, en particulier, des dispositions du traité relatives à la libre circulation des capitaux et à la liberté d’établissement. Les investissements de portefeuille, qui ne permettent pas à l’investisseur d’exercer une influence effective sur la gestion et le contrôle d’une entreprise, pourraient également entrer en ligne de compte en termes de sécurité publique et d’ordre public, en fonction des circonstances.

Les États membres ne peuvent invoquer des motifs d’ordre public et de sécurité publique [énoncés à l’article 65, paragraphe 1, point b), du TFUE] pour restreindre des investissements qu’en cas de menace réelle et suffisamment grave, affectant un intérêt fondamental de la société (16) et si des mesures moins restrictives sont insuffisantes pour faire face à cette menace.

La Cour de justice a précisé que la notion de sécurité publique au sens de l’article 65, paragraphe 1, point b), du TFUE couvre à la fois la sécurité intérieure d’un État membre et sa sécurité extérieure (17). Des restrictions aux mouvements de capitaux peuvent également être prises pour répondre à des menaces pesant sur la stabilité financière (18).

Dans l’analyse de la justification et de la proportionnalité, les restrictions aux mouvements de capitaux à destination et en provenance de pays tiers peuvent se fonder sur des considérations différentes de celles des restrictions aux mouvements de capitaux à l’intérieur de l’UE (19). Par conséquent, en vertu du traité, des motifs supplémentaires justifiant une restriction peuvent être admis dans le cas de restrictions appliquées à des opérations impliquant un pays tiers.

5.   Respect des règles de lutte contre le blanchiment de capitaux

Les États membres sont invités à veiller au plein respect des exigences de la directive anti-blanchiment de l’UE (20) afin de prévenir l’utilisation abusive du système financier de l’UE, y compris en ce qui concerne la vigilance à l’égard de la clientèle et la coopération internationale. En outre, une réelle transparence relative aux bénéficiaires effectifs des personnes morales et constructions juridiques, telle que prévue par la directive anti-blanchiment, est nécessaire pour garantir l’application effective des sanctions.

Dans ce contexte, cela devient encore plus crucial pour améliorer la détection des transactions et activités suspectes et pour combler les failles dont profitent les criminels pour blanchir le produit d’activités illicites par l’intermédiaire du système financier. Un tel objectif est conforme au train de mesures en matière de LBC adopté par la Commission en juillet 2021.

6.   Coopération entre les autorités nationales compétentes en matière de sanctions, les autorités chargées du filtrage et les banques et institutions de développement des États membres, ainsi que les institutions financières internationales

Les autorités de filtrage des États membres et les banques et institutions nationales de développement (BIND), ainsi que les institutions financières internationales (IFI) dont les États membres sont actionnaires devraient échanger des informations et maintenir une coopération étroite (par l’intermédiaire des ministères ou organismes dont ces institutions dépendent et/ou de leurs organes de gouvernance) afin d’identifier les IDE, provenant en particulier de Russie et de Biélorussie, qui sont susceptibles de porter atteinte à la sécurité et à l’ordre public dans l’État membre concerné. Les autorités de filtrage des États membres sont invitées à sensibiliser aux facteurs qui peuvent être pris en considération pour déterminer si un IDE est susceptible de porter atteinte à la sécurité ou à l’ordre public.

Assurer une coopération étroite entre les autorités nationales compétentes en matière de sanctions, les autorités chargées du filtrage et les BIND des États membres, ainsi que les IFI dont les États membres sont actionnaires, y compris la Banque européenne d’investissement et la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, contribuera à protéger la sécurité et l’ordre public dans l’UE et favorisera le plein respect des sanctions dans le cadre des activités financées par les entités d’investissement publiques susmentionnées.


(1)  Aux fins de la présente analyse, on entend par «actif» toute entreprise enregistrée dans l’UE qui est contrôlée/influencée par un investisseur russe ou biélorusse.

(2)  Les entreprises de l’UE sont environ 23 millions (en 2018, dernière année pour laquelle on dispose de données, Eurostat business demography)

(3)  C’est le cas lorsque des actionnaires russes multiples détiennent une participation agrégée supérieure à 50 %, mais qu’aucun ne détient individuellement une participation supérieure à 50 %.

(4)  Nous observons 2 000 autres entreprises ayant déclaré un actionnaire russe sans pouvoir de contrôle, sans indication du volume de sa participation.

(5)  Cette catégorie comprend toutes les entreprises qui ne sont pas des banques ou des sociétés de financement ou des compagnies d’assurance.

(*1)  Les données dans le tableau correspondent aux participations moyennes dans les entreprises de chaque secteur. Suivant une approche prudente, nous ne tenons compte que des participations de premier niveau d’actionnariat (participations directes) et excluons les participations de plus haut niveau (actionnaires d’actionnaires).

(6)  C’est le cas lorsque des actionnaires biélorusses multiples détiennent une participation agrégée supérieure à 50 %, mais qu’aucun ne détient individuellement une participation supérieure à 50 %.

(7)  Nous observons 100 autres entreprises ayant déclaré un actionnaire biélorusse sans pouvoir de contrôle, sans indication du volume de sa participation.

(*2)  Les données dans le tableau correspondent aux participations moyennes dans les entreprises de chaque secteur. Suivant une approche prudente, nous ne tenons compte que des participations de premier niveau d’actionnariat (participations directes) et excluons les participations de plus haut niveau (actionnaires d’actionnaires..

(8)  https://ec.europa.eu/info/sites/default/files/business_economy_euro/banking_and_finance/documents/200619-opinion-financial-sanctions_fr.pdf

(9)  https://ec.europa.eu/info/sites/default/files/business_economy_euro/banking_and_finance/documents/190704-opinion-freeze-of-funds_en.pdf

(10)  Règlement (UE) no 269/2014 du Conseil du 17 mars 2014 concernant des mesures restrictives eu égard aux actions compromettant ou menaçant l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine (JO L 78 du 17.3.2014, p. 6).

(11)  Règlement (UE) 2019/452 du Parlement européen et du Conseil du 19 mars 2019 établissant un cadre pour le filtrage des investissements directs étrangers dans l’Union (JO L 79I du 21.3.2019, p. 1).

(12)  Voir le considérant 9 du règlement sur le filtrage des IDE.

(13)  Afin de s’attaquer au problème des sociétés-écrans dans l’UE, la Commission a présenté, le 22 décembre 2021, une proposition de directive du Conseil établissant des règles pour empêcher l’utilisation abusive d’entités écrans à des fins fiscales et modifiant la directive 2011/16/UE [COM(2021) 565 final]. Les États membres peuvent s’inspirer des normes de transparence établies dans la proposition en ce qui concerne le recours aux entités écrans, par exemple pour ce qui est des revenus, du personnel et des locaux.

(14)  Dans la pratique, un investissement étranger réalisé aujourd’hui (mars 2022) pourrait faire l’objet d’observations ex post de la part des États membres ou d’un avis de la Commission jusqu’en juin 2023 (15 mois après la réalisation de l’investissement).

(15)  Arrêt dans l’affaire C-463/00, Commission contre Espagne, ECLI:EU:C:2003:272, point 35.

(16)  Voir les arrêts dans les affaires C-54/99, Église de Scientologie, ECLI:EU:C:2000:124, point 17, C-503/99, Commission contre Belgique, ECLI:EU:C:2002:328, point 47, et C-463/00, Commission contre Espagne, ECLI:EU:C:2003:272, point 72.

(17)  Arrêt dans l’affaire T-315/01, Kadi contre Conseil et Commission, EU:T:2005:332, point 110.

(18)  Voir la déclaration de la Commission sur le contrôle des capitaux imposé par les autorités grecques du 29 juin 2015, disponible à l’adresse suivante: https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/STATEMENT_15_5271.

(19)  Arrêt dans l’affaire C-446/04, Test Claimants in the FII Group Litigation, ECLI:EU:C:2006:774, point 171.

(20)  Directive (UE) 2015/849 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme, modifiant le règlement (UE) no 648/2012 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 2005/60/CE du Parlement européen et du Conseil et la directive 2006/70/CE de la Commission (JO L 141 du 5.6.2015, p. 73).