ISSN 1977-0936 |
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Journal officiel de l'Union européenne |
C 246 |
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Édition de langue française |
Communications et informations |
60e année |
Numéro d'information |
Sommaire |
page |
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I Résolutions, recommandations et avis |
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AVIS |
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Comité économique et social européen |
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525e session plénière du CESE des 26 et 27 avril 2017 |
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2017/C 246/01 |
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2017/C 246/02 |
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III Actes préparatoires |
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COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN |
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525e session plénière du CESE des 26 et 27 avril 2017 |
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2017/C 246/03 |
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2017/C 246/04 |
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2017/C 246/05 |
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2017/C 246/06 |
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2017/C 246/07 |
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2017/C 246/08 |
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2017/C 246/09 |
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2017/C 246/10 |
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2017/C 246/11 |
FR |
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I Résolutions, recommandations et avis
AVIS
Comité économique et social européen
525e session plénière du CESE des 26 et 27 avril 2017
28.7.2017 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 246/1 |
Avis du Comité économique et social européen sur «Les femmes et les transports — Plateforme pour le changement»
(avis exploratoire demandé par la Commission)
(2017/C 246/01)
Rapporteure: |
Mme Madi SHARMA |
Consultation |
Commission européenne, 13 octobre 2016 |
Base juridique |
Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne |
Compétence |
Section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures et société de l’information» |
Adoption en section spécialisée |
11 avril 2017 |
Adoption en session plénière |
26 avril 2017 |
Session plénière no |
525 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
148/0/2 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
Le Comité économique et social européen (CESE) dispose d’une longue expérience de travail dans le domaine des politiques relatives au secteur des transports; plus récemment, il s’est intéressé à la dimension du genre dans ce secteur à prédominance traditionnellement masculine (voir l’avis TEN/573 sur «Les femmes et les transports») (1). En sa qualité d’institution de l’Union européenne représentant la société civile, le CESE possède une expertise en matière de consultation et de dialogue avec les parties prenantes au sujet des initiatives législatives. |
1.2. |
Le CESE reconnaît que les plateformes de parties prenantes constituent des forums efficaces pour le changement, pour autant qu’elles:
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1.3. |
Le CESE propose de créer une plateforme de l’Union européenne pour le changement (ci-après dénommée la «plateforme») afin d’agir pour l’égalité entre les hommes et les femmes dans le secteur des transports, en donnant la priorité, dans un premier temps, à une employabilité accrue des femmes dans ce secteur. Cet objectif initial pourrait être complété ultérieurement en intégrant le thème des «femmes en tant qu’usagères». Le secteur englobe les transports aériens, maritimes, routiers et ferroviaires, ainsi que la navigation intérieure et la logistique. La plateforme pourrait inclure dans ses rangs, sans que cette liste soit exhaustive, des organismes représentatifs de la sphère politique au niveau européen et national, les branches d’activités du secteur des transports, leurs organisations syndicales, des médias, des organisations représentatives des voyageurs et des ONG qui désirent s’engager afin d’agir de manière concrète pour lutter contre les inégalités entre les hommes et les femmes dans le secteur des transports. |
1.4. |
Le CESE entend promouvoir les visées consistant à mettre en œuvre des politiques qui tiennent compte de la dimension du genre, en fixant pour ce faire des objectifs clairs: les membres de la plateforme définiront, lors de la création de la plateforme, un cahier des charges et un champ d’action, assortis d’indicateurs. Cette démarche constituera un modèle de travail en partenariat et d’action coordonnée menés par les parties prenantes du secteur pour transposer, dans toute l’Europe, de nouvelles initiatives. |
1.5. |
Le CESE recommande de maintenir le caractère flexible et modulable de la plateforme dans toutes les dimensions du secteur ainsi qu’au niveau des politiques. Celle-ci devrait mettre l’accent sur la transparence et la responsabilité pour ses membres et dans son fonctionnement. Le suivi, l’évaluation et les rapports annuels sont des outils essentiels à sa crédibilité et à son succès. |
1.6. |
La plateforme ne pourra être une réussite qu’à condition que ses membres se l’approprient pleinement; c’est pourquoi le CESE propose de la doter d’un support en ligne pour répertorier ses membres et leurs activités et héberger une base de données relative aux actions menées, aux recommandations, au suivi et aux évaluations, permettant à d’autres acteurs de reproduire ou citer des informations. |
2. Contexte
2.1. |
L’emploi féminin est particulièrement faible dans le secteur des transports. En 2013, les hommes représentaient 78 % des travailleurs de ce secteur dans l’Union européenne. Il est essentiel d’attirer un plus grand nombre de femmes pour apporter un meilleur équilibre entre les sexes dans le secteur des transports, et le rendre ainsi plus convivial tout en compensant les pénuries de main-d’œuvre et en apportant une réponse aux défis posés (un tiers de l’ensemble des travailleurs du secteur est âgé de plus de 50 ans). |
2.2. |
Le CESE a adopté un avis exploratoire sur «Les femmes et les transports» le 1er juillet 2015 et a participé, en avril 2016, à une manifestation de suivi organisée par les commissaires Bulc et Jourová. La DG MOVE a ensuite mené diverses consultations auprès de groupes d’experts pour discuter des défis actuels et des recommandations formulées. La représentante du CESE a proposé à cette occasion de mettre en place une «plateforme pour le changement», idée qui a été approuvée par la Commission européenne comme un bon moyen d’encourager des actions concrètes et visibles en faveur de l’égalité des sexes dans les transports. Dans sa lettre du 13 octobre 2016, M. Frans Timmermans, vice-président de la Commission européenne, a indiqué qu’«une telle plateforme pourrait être lancée au cours du second semestre 2017 à l’occasion d’une manifestation conjointe du CESE et de la Commission». |
3. Plateforme pour le changement
3.1. |
La Commission européenne dispose de nombreux outils et organise de multiples activités pour consulter les parties prenantes. Une plateforme pour le changement pourrait axer ses travaux sur des actions volontaires, concrètes et mesurables, poursuivant les objectifs qui ont présidé à sa création. Une référence à cet égard est la plateforme de la DG SANTE relative à l’alimentation, l’activité physique et la santé. |
3.2. |
Par conséquent, le CESE propose à la DG MOVE de créer une plateforme des parties prenantes au niveau de l’Union européenne qui soit en mesure de mettre en pratique des engagements basés sur l’action en faveur d’une augmentation des possibilités d’emploi qui s’offrent aux femmes et visant l’égalité entre les sexes dans le secteur des transports, afin de mieux y intégrer les femmes et de stimuler une croissance économique, sociale et durable. Dans le cadre de ladite plateforme:
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3.3. |
En vue de créer une telle plateforme, le CESE propose à la DG MOVE de s’attacher dans un premier temps à suivre les étapes et traiter les aspects suivants (qui sont exposés plus en détail ci-après):
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4. Le rôle des institutions de l’Union européenne
4.1. |
Parallèlement à l’impulsion donnée par le président Juncker en faveur de la croissance et de l’emploi, la présidence maltaise a fait de l’égalité entre les sexes l’une de ses priorités. La plateforme pourrait introduire dans le mode d’élaboration classique des politiques un mécanisme offrant une «valeur ajoutée européenne» axé spécifiquement sur l’un des défis qui se posent à l’Union européenne, à savoir «offrir des perspectives dans le secteur européen des transports grâce à l’égalité entre les hommes et les femmes». Cette approche ciblée permet de mobiliser des parties prenantes concernées qui, sans cela, n’auraient pas pu entrer en interaction avec la Commission européenne. La plateforme pourrait de cette manière compléter les travaux menés par les institutions européennes. |
4.2. |
Il est crucial que la DG MOVE endosse un rôle de chef de file et que la commissaire qui est responsable de la plateforme en soutienne le fonctionnement, par exemple en assistant personnellement à son inauguration et, de manière générale, à ses réunions. Les membres de la plateforme, tout en mettant en œuvre les engagements à titre volontaire, reconnaîtront que c’est un privilège que d’être invités à remplir une mission de cette nature. C’est pourquoi il est crucial que les hauts responsables de la DG MOVE soient disponibles et interagissent avec eux. De même, il importe que si des institutions de l’Union européenne demandent à rejoindre la plateforme, elles s’engagent elles aussi à proposer des mesures ciblées. |
4.3. |
Les institutions de l’Union européenne et les représentants des ministères des transports des États membres jouent un rôle essentiel pour transmettre les principales conclusions au niveau national. Par conséquent, le CESE préconise de mettre en place un groupe de haut niveau afin de donner une vue d’ensemble aux gouvernements et à leurs responsables politiques, et d’instituer ainsi un mécanisme qui permettra de diffuser les bonnes pratiques, de renforcer le travail en partenariat et d’améliorer la communication entre les responsables politiques et la plateforme. Les parties prenantes qui choisissent de siéger en tant que membres de la plateforme doivent aussi s’engager à mener des actions concrètes. |
4.4. |
Le CESE souhaite que la DG MOVE soit responsable du fonctionnement de la plateforme. Elle serait chargée de l’allocation des budgets, du secrétariat et de certaines ressources. D’autres institutions de l’Union européenne pourraient communiquer aux parties prenantes des recommandations émanant de leurs réseaux et pourraient aussi mettre des salles à disposition et prendre en charge des services de traduction et d’interprétation. Les ressources des membres de la plateforme pourraient constituer d’autres sources de financement possibles. |
4.5. |
Un poste de dépense important sera celui de l’outil de communication central, à savoir la page web et la base de données, y compris sa maintenance. Différents organes de l’Union européenne ont déjà mis au point des ressources en ligne de ce type, et l’on considère que la DG MOVE pourrait être en mesure d’adapter un modèle préexistant. |
5. Composition
5.1. |
La plateforme ne devrait pas être un «forum de discussion»; il s’agit d’un processus conçu pour permettre aux parties prenantes de se rencontrer, débattre et réfléchir sur les défis et les possibilités qui se présentent pour les femmes dans le secteur des transports, puis de s’engager à mener des actions vérifiables. Bien comprendre la nature des intérêts représentés par les différents membres aidera à déterminer la mesure de leur intérêt et leur capital d’influence. Les acteurs les plus intéressés sont ceux qui sont directement confrontés aux défis qui se posent dans le secteur à l’heure actuelle. |
5.2. |
La plateforme pourrait inclure parmi ses membres les parties prenantes européennes et nationales suivantes: les entreprises, les associations de PME, les syndicats (partenaires sociaux), notamment les organisations spécialisées représentatives des femmes, les administrations publiques, notamment celles qui ont la capacité d’orienter les achats et les marchés publics, comme la BERD, les ONG, y compris les organisations faîtières de défense des droits des femmes et de l’égalité, les médias, les groupes de réflexion, ainsi que les instituts universitaires et de recherche. |
5.3. |
L’on pourrait également envisager d’y inclure ponctuellement: 1) des personnes qui participeraient à la définition des engagements sans qu’elles soient nécessairement nommées membres de la plateforme et 2) des décideurs et des personnalités influentes, issus notamment des rangs des institutions de l’Union européenne et des représentants et autorités publiques des États membres. |
5.4. |
L’adhésion à la plateforme devrait être gratuite et conditionnée au respect de critères et d’un cahier des charges. Aucun remboursement des frais encourus dans le cadre des activités menées par les membres ou au titre de leur participation à la plateforme ne serait envisagé dans un premier temps. |
5.5. |
La composition de la plateforme devrait être régie par les principes suivants:
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6. Définir l’objectif et le champ d’action de la plateforme
6.1. |
Cette plateforme pourrait se fixer pour objectif général d’accroître la participation des femmes et de faire progresser l’égalité entre les sexes dans le secteur des transports, en élargissant les possibilités offertes aux femmes, aux entreprises dirigées par des femmes et aux femmes exerçant des fonctions dirigeantes, ainsi qu’en améliorant les conditions de travail pour tous dans ce secteur, ce qui aura en définitive une incidence sur l’emploi, l’ouverture, l’innovation, la durabilité et la croissance. La priorité doit être d’assurer l’égalité entre les femmes et les hommes, et donc de promouvoir l’emploi et de corriger les défaillances du secteur. Cet objectif peut être atteint, entre autres, en améliorant la qualité des emplois et des conditions de travail pour tous, en luttant contre le harcèlement et les violences à caractère sexiste, en s’attachant à mieux concilier vie professionnelle, privée et familiale, en portant davantage de femmes à des postes à responsabilités et en améliorant l’image du secteur afin d’y attirer un plus grand nombre de femmes salariées, chefs d’entreprise, universitaires et innovatrices. Le champ d’action de la plateforme pourrait être élargi ultérieurement afin de couvrir des enjeux connexes, comme l’amélioration de l’expérience des usagers et l’accent mis sur les actions destinées aux femmes en tant qu’usagères. |
6.2. |
Le CESE préconise la mise en œuvre de politiques et l’élaboration de budgets prenant en compte la dimension du genre, en ce qu’elles constituent un outil essentiel pour atteindre les objectifs exposés ci-dessus. Ce concept nouveau est souvent mal compris: il ne s’agit pas d’augmenter globalement les dépenses, mais plutôt de fixer de nouvelles priorités et de réorienter les dépenses au sein des programmes, des unités et des services. L’élaboration de budgets intégrant la dimension du genre permet de gagner en clarté et crée des mécanismes qui rendent possible l’adoption d’une approche globale et transversale pour promouvoir une plus grande égalité entre les sexes. |
6.3. |
Le CESE recommande d’inscrire le champ d’action et les priorités de la plateforme dans la logique des politiques et de la législation de l’Union européenne, tout en respectant le dialogue entre les partenaires sociaux. La plateforme devrait conjuguer approches descendante et ascendante pour soutenir des politiques relevant du secteur privé comme du secteur public, en évitant de devoir modifier la législation. Tous les acteurs devraient considérer la plateforme comme un investissement positif et nécessaire. |
6.4. |
Le CESE souligne que les avantages d’une participation des parties prenantes sont les suivants:
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6.5. |
Le CESE considère que le champ d’action de la plateforme pourrait inclure les actions clés suivantes:
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6.6. |
À mesure que la plateforme s’étendra, il est possible qu’elle cherche à se concentrer sur certains secteurs clés qui pourraient ne pas concerner tous les membres. Cela tient à la diversité même du secteur des transports. Par conséquent, des sous-comités pourraient être créés afin de les concentrer sur certains domaines d’intérêt clés. |
7. Lignes directrices pour définir les priorités et veiller à ce que les actions soient adaptées aux priorités établies
7.1. |
Le CESE reconnaît que seuls les membres de la plateforme eux-mêmes peuvent mener à bien la définition de ses priorités. Les parties prenantes peuvent rejoindre l’initiative avec des intérêts qui leur sont propres, ce pourquoi l’impératif consistant à débattre collectivement afin de relever des défis communs doit toujours prévaloir dans l’esprit de chacun. S’engager à agir pour soutenir et provoquer le changement est une responsabilité qui encouragera les parties prenantes à s’approprier les enjeux, dans leur organisation comme au sein de la plateforme. |
7.2. |
Le CESE est d’avis que les engagements pris doivent être ambitieux et remettre en question le statu quo; ils doivent aussi exiger des membres qu’ils y investissent leurs propres ressources. Communiquer clairement et en toute transparence, sur la page web, au sujet des actions conduites apportera non seulement de la visibilité à ces engagements mais les soumettra aussi à l’examen des parties intéressées. Dès lors, une bonne communication et un dialogue entre les membres de la plateforme sont d’une importance capitale pour garantir un engagement pérenne et éviter les discordances entre les attentes. Il convient également d’encourager les activités conjointes. |
7.3. |
Le CESE propose de définir à titre complémentaire des objectifs spécifiques et des indicateurs en soutien des actions de la plateforme. Ces objectifs spécifiques et indicateurs devraient aider à mettre en œuvre et évaluer les mesures qu’il convient de prendre pour avancer vers des perspectives de recrutement et vers l’égalité et l’émancipation des femmes, s’agissant notamment de la mesure dans laquelle hommes et femmes se situent sur un pied d’égalité, quelle que soit la technologie utilisée. Les indicateurs de développement en tant qu’outils d’évaluation, qui font mieux ressortir les résultats dans un rapport d’avancement et permettent de mieux les y intégrer, contribuent à influencer la planification politique et stratégique en dressant l’inventaire des progrès réalisés. |
7.4. |
Des données statistiques d’ordre général sont disponibles auprès d’Eurostat. La DG MOVE pourrait collaborer avec Eurostat et les membres de la plateforme pour améliorer la collecte de données ventilées par sexe, afin de donner un aperçu plus complet de la situation. |
7.5. |
Les données, les objectifs spécifiques et les indicateurs doivent nourrir les réflexions sur l’égalité des sexes ainsi que sur les stéréotypes et les discriminations. Dépourvus de caractère normatif, ces éléments ont vocation à encourager les organisations à transcrire les problématiques de genre dans une communication transparente et compréhensible pour elles-mêmes comme pour le public, en leur permettant de faire l’analyse interne de leurs propres politiques et pratiques. |
7.6. |
Des indicateurs de référence pourraient être mis au point concernant les aspects suivants:
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8. Le suivi et l’évaluation
8.1. |
Le CESE propose que, dans le but de renforcer le travail en partenariat, les membres débattent avec leurs homologues au sein de la plateforme de leurs engagements et de leurs actions avant de les mettre en œuvre. Lorsqu’une action aura été menée à son terme, un rapport de suivi sera établi pour répertorier les activités, les échéances, les données recueillies ainsi que les principales conclusions, de sorte qu’elles puissent être analysées et évaluées au sein de la plateforme. Ces examens devraient être présentés de manière objective et impartiale, en s’appuyant sur des données factuelles et des évaluations qualitatives et en prenant en compte la pertinence par rapport aux objectifs de la plateforme. Si les ressources le permettent, l’on pourrait faire appel à cette fin à des consultants externes, comme c’est le cas pour les évaluations de la plateforme de la DG SANTE (voir le rapport de suivi annuel 2016). |
8.2. |
Le CESE est d’avis que les engagements doivent être bien conçus dès le départ et pertinents par rapport aux objectifs fixés. Les membres devraient envisager la possibilité d’adopter des engagements sur le modèle «SMART», qui nécessitent une préparation approfondie, avec des échéances et des objectifs spécifiques et généraux, qui rendent possibles des rapports efficaces, un suivi aisé et la communication sur les réalisations. |
8.3. |
Les engagements pris exigeront du travail et de la disponibilité de la part des membres, allant bien au-delà de leurs tâches habituelles. Cet investissement devrait apporter une valeur ajoutée à leurs travaux internes, qui ira plus loin que les exigences de la responsabilité sociale des entreprises et qu’ils pourront faire valoir auprès d’acteurs extérieurs comme preuve de leur volonté d’œuvrer pour un meilleur équilibre entre hommes et femmes au travail. La publicité de leurs actions doit permettre à d’autres acteurs de les reproduire. |
8.4. |
L’examen des activités de la plateforme devrait avoir pour effet d’intensifier le travail en réseau et de créer une dynamique de collaboration en vue d’atteindre les objectifs. Ces éléments concourent dès lors à accroître le nombre d’engagements communs, par les mécanismes suivants:
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Bruxelles, le 26 avril 2017.
Le président du Comité économique et social européen
Georges DASSIS
(1) JO C 383 du 17.11.2015, p. 1.
28.7.2017 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 246/8 |
Avis du Comité économique et social européen sur la«Numérisation et les modèles économiques innovants dans le secteur financier européen, conséquences sur l’emploi et sur la clientèle»
(avis d’initiative)
(2017/C 246/02)
Rapporteur:TBL
Carlos TRIAS PINTÓ
Corapporteur:TBL
Pierre GENDRE
Décision de l'assemblée plénière |
22 septembre 2016 |
Base juridique |
Article 29, paragraphe 2, du règlement intérieur |
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Avis d’initiative |
Compétence |
Commission consultative des mutations industrielles (CCMI) |
Adoption par la CCMI |
7 avril 2017 |
Adoption en session plénière |
26 avril 2017 |
Session plénière no |
525 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
150/1/3 |
1. Conclusions et recommandations
1.1 |
Au cours des quelques dernières décennies, la technologie, la réglementation, ainsi que les changements dans les besoins et les attentes des consommateurs, n’ont cessé de réinventer le secteur des banques et assurances. De nouveaux modèles d’investissement, d’épargne, d’assurance et de transfert de fonds permettent au plus grand nombre de participer à des projets de différentes tailles. |
1.2 |
Les entreprises de technologie financière (FinTech) et de technologie des assurances (InsurTech) sont les catalyseurs et souvent les partenaires des établissements de services financiers lorsqu’il s’agit de moderniser leurs prestations, en combinant leurs forces et leurs faiblesses respectives et en créant entre eux des synergies. De l’avis du CESE, le développement d’un écosystème de «coopétition (1)» novateur recèle un potentiel de création de valeur considérable. |
1.3 |
Il est absolument nécessaire de rétablir la confiance et la stabilité au sein du secteur financier et la gestion de la transition de l’ancien système (système bancaire traditionnel) au nouveau revêt une importance cruciale à cet égard. Sur ce point, le CESE réclame qu’une législation adéquate soit mise ne place dans le contexte européen d’un processus d'intégration de l’union bancaire et du marché unique numérique, de manière à soutenir la croissance et l’innovation tout en garantissant la protection des consommateurs et des travailleurs de l’industrie financière. |
1.4 |
Pour réaliser un marché financier européen qui soit véritablement unique, la politique de la Commission européenne doit favoriser des conditions de concurrence équitables en matière d’innovation. Sur un plan de principe et en ce qui concerne tant la réglementation que les droits des consommateurs, les conditions de travail et les obligations de surveillance, des conditions largement analogues sont nécessaires pour le secteur financier traditionnel comme pour les FinTech, conformément à la règle selon laquelle, pour une industrie donnée, une réglementation et une surveillance identiques doivent s’appliquer. De manière plus spécifique, il y a lieu de citer les éléments ci-après. |
1.4.1 |
Une approche réglementaire fondée sur les risques devrait être cohérente tout au long du cycle de vie de l’innovation, en fournissant un cadre réglementaire proportionnel et simplifié, afin que les établissements traditionnels et les nouveaux acteurs du marché puissent, les uns comme les autres, expérimenter les nouvelles technologies et nouveaux modèles d’entreprise en interaction avec les autorités de réglementation. La création d’un cadre européen pour l’expérimentation, en collaboration avec l’industrie et les parties prenantes au sens large, y compris les représentants des consommateurs et ceux des travailleurs, fournirait les outils requis pour être paré à soutenir l’innovation dans toutes leurs activités («bac à sable» pour l’innovation au sein des FinTech) (2). |
1.4.2 |
Afin que les conditions de ce secteur correspondent à celles des tierces parties, il est nécessaire d’envisager de traiter les logiciels comme un actif immatériel, pour éviter de déduire des fonds propres de base les importants investissements dans l’informatique déjà réalisés par les entités installées dans l’Union européenne et de suivre ainsi l’exemple des systèmes bancaires suisse et américain ou du secteur des assurances (3). |
1.4.3 |
La Commission européenne, l’Autorité bancaire européenne et les États membres doivent s’engager fermement à mettre en œuvre, de manière harmonisée et efficace, la directive révisée sur les services de paiement (DSP2), qui établit des critères de sécurité très stricts concernant l’introduction et l’exécution des paiements électroniques et la protection des données financières des consommateurs, en portant une attention toute particulière aux médias sociaux et aux géants du commerce. |
1.4.4 |
Il convient que le plan d’action pour les services financiers de détail (4) et le groupe ad hoc sur les services financiers (taskforce FinTech) examinent soigneusement les difficultés et les risques que la numérisation des services financiers induit pour les consommateurs, en garantissant une étroite coordination entre les directions générales de la justice et des consommateurs (JUST) et de la stabilité financière, des services financiers et de l’union des marchés des capitaux (FISMA), en particulier pour ce qui concerne les questions relatives à la protection des consommateurs, lorsqu’il s’agit, par exemple, de déterminer les types de données à utiliser pour évaluer la solvabilité, des moyens de garantir la compréhension des informations précontractuelles ou de la réalisation de contrôles d’identité efficaces, par une procédure de vérification. |
1.4.5 |
Il conviendrait de transposer sur-le-champ les mesures reprises dans la proposition de modification de la directive sur la lutte contre le blanchiment de capitaux (directive antiblanchiment) (5), en particulier celles contrant les risques de financement du terrorisme qui sont liés aux monnaies virtuelles et les dangers en rapport avec les dispositifs prépayés anonymes. |
1.4.6 |
Il y a lieu d’encourager le financement participatif et d’autres pistes relevant de l’économie collaborative en explorant la possibilité de créer un «label de qualité» qui favorise la confiance des utilisateurs, afin de mieux développer les communautés virtuelles et de faciliter les interactions entre les clients coopératifs. |
1.4.7 |
Il s’impose de soutenir l’introduction de solutions logicielles libres dans le secteur financier, afin de renforcer une concurrence commerciale saine, de réduire les coûts, et d’éviter la dépendance vis-à-vis des fournisseurs dans le secteur. |
1.4.8 |
Afin de favoriser une réduction de la taille des bilans, il convient de traiter simultanément les règlements relatifs au crédit entre pairs. |
1.4.9 |
La Commission doit soutenir le crédit hybride (fondé sur les exigences de fonds propres établies par Bâle 3). |
1.5 |
Le CESE tient à souligner que la numérisation ne doit jamais se substituer aux conseils judicieux et personnalisés d’un conseiller humain compétent (il convient que le service de proximité, reposant sur un réseau d’agences adaptées, ne disparaisse pas!). |
1.6 |
La maîtrise du domaine des FinTech requiert l’acquisition de nouvelles compétences par toutes les parties concernées, qu’il s’agisse des autorités de réglementation et de surveillance, des acteurs de l’écosystème financier ou de l’ensemble de la population. Afin de tirer parti de l’un des principaux avantages potentiels qu’offrent ces entreprises du point de vue de l’inclusion financière, les États membres de l’UE doivent développer l’éducation en matière de finances et les compétences numériques, en anticipant les nouveaux scénarios. Cette formation doit débuter dès l’école et inclure une information sur les produits financiers concernant la manière dont ils se présentent en ligne et leur relation avec le développement de l’internet des objets. |
1.7 |
La numérisation du secteur financier menace de nombreux emplois, contraignant les travailleurs à mettre à jour leurs compétences et leurs qualifications. Le CESE recommande de prévoir l’apprentissage et le perfectionnement à deux niveaux: d’une part, en interne, en permettant aux travailleurs d’effectuer de nouvelles tâches et en jetant des passerelles entre les salariés du secteur financier qui travaillent actuellement dans les établissements «classiques» et ceux des FinTech et InsurTech, et, d’autre part, en externe, en préparant les salariés qui ne peuvent rester dans le secteur à décrocher un emploi dans d’autres domaines. |
1.8 |
Le CESE demande que le Fonds social européen offre des programmes spécifiques de formation au titre de la nouvelle initiative phare «Coalition en faveur des compétences et des emplois numériques» (6), afin de soutenir la remise à niveau et le recyclage de la main-d'œuvre du secteur financier et de la préparer ainsi à l’utilisation des nouvelles technologies numériques. |
1.9 |
Le CESE invite les entreprises à imiter les codes de conduite et bonnes pratiques en matière de règlements internes qui posent des limites à l’obligation pour les salariés d’être en ligne à tout moment de la journée, ainsi qu’à émettre des recommandations qui les dissuadent de travailler durant les fins de semaine ou pendant leurs congés. Si les approches à base volontaire sont inopérantes, le CESE demande que des règles contraignantes soient édictées dans ce domaine. |
1.10 |
Pour parvenir à relever tous ces défis, il est essentiel d’informer et de consulter en temps voulu, dans le respect des directives de l’UE sur l’information et la consultation des travailleurs. La Commission et les États membres se doivent de garantir le respect de la législation applicable et, en particulier, du droit des représentants du personnel à être associé aux changements mis en œuvre au sein des entreprises. |
1.11 |
Le CESE recommande de renforcer et de compléter la proposition de directive sur la restructuration préventive et la seconde chance, car une entreprise pourra ainsi accéder plus facilement aux procédures de restructuration avant d’être déclarée insolvable d’une quelconque manière. |
2. Un secteur concentré et diversifié soumis à une transformation rapide
2.1 |
En Europe, le secteur de la banque et de l’assurance est placé sous le signe de la diversité, étant marqué par l’existence tant de grands établissements de taille européenne, voire mondiale, que de structures régionales ou locales, présentant des degrés d’indépendance variés, plus quelques spécificités propres à des pays donnés. Bien qu’un processus de concentration soit à l'œuvre dans la plupart des États membres, il reste encore morcelé au niveau européen. Les anciennes lignes de démarcation entre les groupes bancaires et les grandes compagnies d’assurances ont quasiment disparu, dès lors que des conglomérats financiers se sont constitués de fait. |
2.2 |
Dans le nouveau contexte de volatilité des marchés et de taux d’intérêt bas, les résultats du secteur bancaire continuent de s’éroder, du fait de la forte pression réglementaire, de la supervision et du contrôle, qui ont été imposés aux banques systémiques à la suite de la crise financière et dont les effets se combinent avec le processus de transformation numérique et l’accroissement de la concurrence, due aux nouvelles FinTech, ainsi que le comportement des consommateurs. L’arrivée de nouveaux modèles non bancaires sur le marché de l’économie numérique oblige à analyser l’interaction des quatre facteurs que sont les banques traditionnelles, les nouveaux intervenants du numérique, les autorités de réglementation et les consommateurs. |
2.3 |
L’utilisation d’internet continuant à augmenter, les banques développent des filiales en ligne et des agences virtuelles par l’intermédiaire desquelles la clientèle peut effectuer des opérations simples et entrer en relation avec un conseiller. Les stratégies des entreprises en faveur d’une réduction drastique des investissements en ressources humaines et la dégradation des conditions d’accueil ont abouti à ce que les agences soient moins fréquentées et que bon nombre d’entre elles soient fermées, à travers toute l’Europe. |
2.4 |
Dans le secteur des assurances, plusieurs modes de distribution coexistent: producteurs salariés, courtiers, agents généraux, bancassurance, ou encore agents indépendants travaillant pour une seule compagnie. Des contrats d’assurance sont désormais vendus sur internet ou via les téléphones intelligents. Le poids respectif de ces différents canaux de distribution varie selon les États membres de l’UE et selon les produits. L’assurance-vie, par exemple, est principalement distribuée par l’intermédiaire des réseaux bancaires, dans la filière dite de la «bancassurance». |
2.5 |
Les modes de paiement évoluent constamment et le mouvement devrait s’intensifier. L’utilisation du chèque et des espèces s’est réduite fortement depuis le début des années 1990. Dans le même temps, un basculement s’est opéré de manière de plus en plus marquée vers les paiements par carte bancaire, par prélèvement direct et par virement bancaire, garantissant une traçabilité, une sécurité et un contrôle accrus et fragilisant l’économie informelle. Le champ couvert par les paiements électroniques est encore susceptible de s’étendre, par exemple pour les transferts d’argent entre personnes ou le versement des prestations sociales. De nouveaux acteurs de la monnaie électronique s’associent au commerce en ligne, cependant que de nouvelles technologies, comme les paiements sans contact, se développent et prennent leur essor parallèlement aux cartes bancaires. En outre, il y a lieu de porter une attention particulière au développement des cryptomonnaies (bitcoin et autres). |
3. Les progrès technologiques dans le secteur financier européen et les nouveaux acteurs
3.1 |
Dans le secteur financier, l’innovation intervient sur l’internet, avec la banque en ligne, les mégadonnées, l’intelligence artificielle, la chaîne de blocs (blockchain), la cybersécurité, etc. Les données s’échangent à grande vitesse, de sorte qu’il est possible de réaliser des analyses de risques et de prendre des décisions financières en se fondant sur des algorithmes et les mégadonnées. |
3.2 |
Cette rupture technologique et les difficultés des banques classiques, confrontées à des problèmes de fonds propres et à un assèchement temporaire des liquidités, ainsi que le développement de canaux commerciaux de substitution qui ne sont pas soumis aux obligations réglementaires du secteur bancaire, ont facilité l’émergence des FinTech, des InsurTech et de la chaîne de blocs, et ont tout à la fois ouvert de nouvelles perspectives et créé des risques nouveaux pour le consommateur. |
3.3 |
Les FinTech et les InsurTech, dont le nombre ne cesse de progresser, marient les notions de finance, d’assurance et de technologie. Ces entreprises utilisent la technologie pour commercialiser des produits financiers de manière novatrice. Les domaines dans lesquels elles se développent tout particulièrement sont la gestion de l'épargne, les prêts aux particuliers, le financement des entreprises et le paiement en ligne. Elles jouent un rôle grandissant dans les activités de financement participatif (financement collectif et entre particuliers), en recourant à des plates-formes spécialisées et à des applications mobiles, aux monnaies virtuelles et au paiement électronique via internet et les téléphones intelligents. Par la concurrence qu’elles introduisent dans leur domaine d’activité traditionnel, elles exercent une pression considérable sur les banques et les compagnies d’assurance. Détenant un contrôle sur les mégadonnées, les grandes entreprises d’internet, notamment les «GAFA» (Google, Apple, Facebook, Amazon), développent elles aussi des projets en rapport avec le secteur financier. |
3.4 |
Les applications reposant sur la technologie des registres distribués (DLT) pourraient avoir la capacité de créer un nouveau type de confiance à l’égard d’un large éventail de services. La chaîne de blocs fonctionne sans organe central de contrôle, de manière transparente et sécurisée. Les entreprises comme les particuliers peuvent utiliser ce système pour effectuer certaines transactions en court-circuitant le secteur financier, notamment par l’utilisation de cryptomonnaies. De la même manière, PayPal offre la possibilité de régler des achats de biens en devises étrangères sans avoir à communiquer de coordonnées bancaires. |
3.5 |
Grâce aux FinTech, entreprises et particuliers peuvent avoir recours au financement participatif pour des projets précis, en utilisant des plates-formes spécialisées pour procéder à des levées de fonds sous forme de dons ou de prêts, voire de prise de participation. Ces plates-formes donnent aux particuliers la possibilité de se prêter de l’argent entre eux, y compris pour des prêts à la consommation ou des prêts personnels, sans passer par les banques, ainsi que de financer directement de très petites entreprises (TPE) et de petites et moyennes entreprises (PME). Elles sont en mesure de compléter ou de promouvoir le capital-risque, en particulier à destination des entreprises innovantes et, avec les applications mobiles qui leur sont liées, de communiquer en temps réel à leurs clients les informations financières nécessaires pour qu’ils puissent gérer leurs dépenses ou leurs choix d’investissement. |
3.6 |
Si ces nouveaux intervenants concurrencent les schémas classiques selon lesquels s’exercent les métiers de la banque et de l’assurance, banques et compagnies d’assurances commencent à coexister avec eux. Certaines ont déjà engagé un processus de coopération avec des FinTech et les InsurTech, d’autres disposent de leurs propres structures filialisées. Par ailleurs, les investissements dans les FinTech ont connu une forte accélération depuis quelques années, et cet intérêt s’est propagé aux InsurTech. |
4. Les clients sont-ils les gagnants de cette évolution?
4.1 |
Pour les grandes entreprises, cette adaptation à la numérisation des services financiers requiert des changements qu’elles sont en mesure d’intégrer dans leur gestion courante. La situation est différente pour beaucoup de PME classiques, et surtout pour les très petites entreprises, qui ne disposent pas en interne des connaissances et des ressources pour épouser avec aisance l’évolution rapide du monde financier. |
4.2 |
À l’heure d’internet et du téléphone intelligent, les clients ne présentent plus les mêmes profils mais l’attrait qu’ils ressentent pour la banque et l’assurance numérisées dépend de plusieurs facteurs, dont l’âge, le niveau d’éducation et l’activité professionnelle, par exemple. Toutefois, lorsqu’un conseil financier s’impose, ils n’en continuent pas moins, jeunes compris, d’avoir besoin d’être en contact avec une personne connaissant sa clientèle. |
4.3 |
Les agences virtuelles et les filiales de groupes de la banque ou de l’assurance utilisent de nouvelles applications pour offrir à leurs clients l’accès à des crédits, prêts ou contrats d’assurance sur internet et sur les téléphones intelligents. Ces offres sont assorties de conditions plus favorables: carte bancaire gratuite, taux d’intérêt bonifiés, prime à l’ouverture de compte, ou encore remise de plusieurs mensualités de cotisation pour une assurance ou une mutuelle. Ces avantages pour les clients s’inscrivent dans la période de transition entre le modèle commercial traditionnel des banques, des compagnies d’assurance et des mutuelles et celui qui prend son essor avec la numérisation. |
4.4 |
Pour le consommateurs, ce nouveau scénario comporte tout à la fois des risques et des perspectives:
|
4.5 |
Si la numérisation devrait insuffler plus de transparence dans la diffusion des produits financiers, l’apparente simplification des propositions commerciales peut masquer un manque d’équilibre dans la relation financière globale. L’utilisation des algorithmes ne garantit ni l’absence de vices cachés, ni la conformité des offres avec les normes européennes. En conséquence, l’éducation à la finance devra inclure une information sur les produits financiers et la manière dont ils sont présentés en ligne. |
5. Les autres sources de financement et la place de la finance éthique et responsable
5.1 |
En Europe, la forte dépendance actuelle des entreprises à l’égard du financement bancaire (elle dépasse 75 % en Europe contre 20 % aux États-Unis) et l’absence de culture de l'actionnariat font que les PME, qui représentent plus de 98 % de toutes les entreprises européennes, emploient les deux tiers des travailleurs et créent 58 % de toute la valeur ajoutée, sont potentiellement vulnérables au risque de contraction du crédit, tel qu’elle s’est produite durant les années de la crise financière mondiale. En conséquence, il y a lieu d’étudier des méthodes de financement complémentaire de type non bancaire et les risques qu’elles comportent, notamment en cas de crise. |
5.2 |
En ce qui concerne le financement des PME, il existe plusieurs filières de substitution qui les aident à développer leurs affaires et à réduire les risques, et qui s’ajoutent aux concours des fonds européens visant à stimuler la création d’emplois et la compétitivité des entreprises en réduisant les coûts de financement habituels, comme envisagé dans le plan Juncker. |
5.3 |
Il y a lieu de renforcer le modèle bancaire socialement responsable, transparent et durable et un système financier ancré dans l’économie réelle, vecteur de stabilité et de cohésion sociale et territoriale. Des banques durables adoptent une démarche volontariste favorisant une économie à triple bilan qui s’appuie sur des indicateurs de performance financière, sociale et environnementale de manière à financer des projets dépourvus d’externalités négatives en s’attachant à tisser une relation forte avec leurs clients et la communauté plus large des acteurs intéressés. |
5.4 |
Dans le développement de leur activité, les coopératives et mutuelles de banque et d’assurance ont longtemps insisté sur la création de valeur pour l’ensemble des parties prenantes (modèle reposant sur la «valeur partenariale»). Cependant, elles ont aussi adopté les pratiques des institutions commerciales classiques et n’ont pas échappé aux difficultés nées de la crise financière. À l’heure actuelle, la numérisation ne semble pas être un facteur décisif pour un retour à des pratiques commerciales qui seraient plus éthiques et attentives aux véritables besoins de la société. |
6. Les conséquences sur l’emploi et les conditions de travail
6.1 |
Selon l’agence Bloomberg, les banques ont supprimé quelque 600 000 emplois à travers le monde depuis la crise économique de 2008. Si ces réductions massives d’effectifs résultent avant tout de cette crise, elles sont également la conséquence du processus de numérisation. |
6.2 |
En Europe, on estime que les banques et les compagnies d’assurance fournissent près de quatre millions d’emplois, dont trois millions pour les premières et près d’un million pour les secondes. Selon les projections de CitiGroup, le secteur bancaire devrait, sur les dix prochaines années, réduire ses effectifs de 1,8 million de personnes en Europe et aux États-Unis. L’Europe, dont les banques emploient près de 2,9 millions de salariés en équivalents temps plein, n’en conserverait que 1,82 million en 2025. Cette tendance est illustrée par les nombreuses suppressions d’emplois récemment annoncées par plusieurs grands groupes bancaires européens. Dans plusieurs pays, on peut observer un recours croissant aux postes à temps partiel et à d’autres formes d’emplois dans le secteur financier. |
6.3 |
Il s’impose de prévoir des mesures de politique active du marché du travail, afin d’aborder les évolutions en cours et à venir pour les travailleurs concernés. À tous les niveaux, les partenaires sociaux peuvent jouer un rôle primordial pour trouver des réponses appropriées. Un exemple de bonne pratique à cet égard est le fonds général de recyclage qui a été créé pour tous les employés de banque en Autriche à la suite de la négociation collective menée au niveau sectoriel, et qui est financé par le secteur et par les pouvoirs publics tout à la fois. |
6.4 |
La contraction continue des réseaux d’agences bancaires s’accompagne d’une redéfinition du concept d’agence en fonction de la nature de la clientèle concernée. Avant même la fermeture d’agences, les effectifs avaient fondu, du fait de l’automatisation des opérations. Dans les assurances, le réseau des agents généraux et des courtiers résiste malgré une nette tendance à la réduction des effectifs. Les producteurs salariés connaîtront un déclin. |
6.5 |
Dans les salles de marchés, les achats et ventes d’actions d’entreprises, de devises ou encore de contrats d’échange sur risque de crédit (produits dérivés financiers dans lequel le vendeur indemnise l’acheteur en cas de défaillance d’une tierce partie) sont de plus en plus réalisés par des ordinateurs. |
6.6 |
Dérivée des mégadonnées, une nouvelle plate-forme cognitive, actuellement à l’essai dans un grand groupe bancaire, est capable de comprendre le langage naturel pour répondre à des questions dans une infinité de domaines, et de proposer aux conseillers clientèle des modèles de réponses préformatées. Cette technologie peut être utilisée comme un assistant virtuel dans le domaine bancaire comme dans celui de l’assurance. Les commerciaux pourraient figurer parmi les premiers touchés. |
6.7 |
Les conditions de travail sont devenues instables et les besoins de formation se sont accrus fortement, tant pour donner aux salariés les compétences numériques nécessaires que pour leur permettre de se reclasser dans d’autres métiers pour répondre aux besoins de la mobilité professionnelle. |
6.8 |
Étant donné que les avancées numériques nécessiteront un changement considérable dans les outils, les compétences et les qualifications dont les travailleurs doivent disposer, il s’impose que les entreprises soient disposées à investir dans le développement continu desdites compétences et qualifications. La négociation collective et le dialogue social doivent se concentrer sur l’enjeu que constitue l’adaptation de la formation professionnelle aux besoins futurs et s’attacher à la rendre possible, ainsi qu’exposer comment les nouvelles technologies sont d’ores et déjà utilisées dans le secteur. Il convient d’examiner au cas par cas quelles sont les compétences qui sont nécessaires pour que les actuels travailleurs du secteur financier restent compétents dans le futur et la manière dont ces compétences peuvent être enseignées. |
6.9 |
L’inquiétude augmente concernant les horaires de travail, après le lancement du travail en ligne et la disparition déjà engagée de nombreux postes de travail. La délocalisation accrue des activités financières au sein de l’UE et hors d’Europe vers des pays à bas coûts salariaux et à faible protection sociale constitue déjà une réalité patente. |
6.10 |
Il importe que les options numériques soient toujours au service des gens et contribuent à améliorer les normes sociales et les conditions de travail. Un approfondissement du dialogue social sectoriel s’impose à tous les niveaux, y compris à celui de l’Europe, afin de cerner les solutions qui sont les plus adaptées et éviter ainsi les drames sociaux. Au niveau du secteur et dans chaque entreprise, les employeurs doivent s’efforcer d’engager des négociations avec les représentants des syndicats pour garantir que des mesures efficaces sont prises en ce qui concerne les revenus, les conditions de travail, la protection sociale, la formation et l’aide à la mobilité géographique et professionnelle interne et au replacement externe. Ces mesures doivent intervenir le plus tôt possible, en anticipant sur les processus de restructuration, et non pas simplement lorsque les pertes d’emplois commencent à se produire. |
6.11 |
Une numérisation maîtrisée du secteur financier doit préserver un emploi de qualité et améliorer la relation clientèle, tout en préservant un accès suffisant à des conseils financiers personnalisés. Elle doit assurer une sécurité effective des transactions et une protection efficace des données personnelles, tant des clients que des travailleurs. Les salariés et les consommateurs de produits financiers, à travers leurs organisations représentatives, devraient être associés à la démarche, afin que leurs connaissances pratiques de terrain puissent être prises en considération. |
7. La réglementation et la supervision
7.1 |
Se combinant avec des services de commercialisation, de conseil et de consultance anonymes et automatisés, la complexité croissante des produits financiers et la vitesse de traitement des données génèrent des situations à haut risque que le propriétaire des fonds placés ou investis n’est bien souvent pas en mesure d’évaluer ou de contrôler. Le CESE observe avec inquiétude l’inadéquation des modèles de risque et de leur capacité à juger correctement du profil de risque des différentes catégories d’investissements non garantis. |
7.2 |
Le gouverneur de la Banque de France estime qu’à l’émergence de la finance numérique doit correspondre une réglementation qui, tout à la fois, doit s’adapter pour ne pas brider l’innovation et continuer à garantir un haut niveau de sécurité des transactions et de protection des consommateurs. Le CESE a la conviction que des normes d’une même exigence doivent couvrir à la fois l’industrie financière classique et les nouveaux modèles d’entreprises et d’activités du type FinTech. |
7.3 |
MiFID II constitue l’une des initiatives réglementaires qui joueront un rôle essentiel pour modifier la structure du marché et les modèles économiques. Les entreprises devraient gérer ces exigences réglementaires comme un tremplin stratégique. |
7.4 |
La nouvelle réglementation sur les paiements numériques (PSD2) vise à accroître les niveaux de sécurité des transactions en ligne, avec pour objectif de réduire l’ampleur de la fraude qui touche actuellement ce canal. |
7.5 |
Une nouvelle directive de l’UE relative à la lutte contre le blanchiment instaurera de nouvelles exigences en matière de vérifications en bonne et due forme au profit du client, ainsi que des obligations supplémentaires de faire rapport sur les transactions douteuses et de conserver des relevés des paiements effectués. |
7.6 |
Le cadre actualisé de coopération en matière de protection des consommateurs (règlement CPC) conférera aux pouvoirs publics nationaux des compétences étendues pour faire appliquer la législation sur la protection des consommateurs et améliorera l’indispensable coordination entre les États membres. |
7.7 |
Avec l’application de la législation Solvabilité II, pour les compagnies d’assurance, et des dispositions de Bâle 3 et de la directive sur les exigences de fonds propres (CRD IV), pour les banques, la question se pose de savoir comment une approche réglementaire supplémentaire pourrait prendre en compte les risques dont sont porteurs les nouveaux entrants dans le système financier, ainsi que celle de leur impact sur ce secteur dans son ensemble. |
7.8 |
Après les tests de résistance organisés en 2016 par l’Autorité bancaire européenne, la Commission a présenté des propositions qui font écho au débat mené actuellement par le Comité de Bâle sur le renforcement des exigences de fonds propres. Les normes universelles retenues devraient être proportionnelles à la taille et à la nature des établissements de crédit et des jeunes entreprises de la finance. Le CESE se félicite du récent train de mesures proposé par la Commission (7). |
7.9 |
Ces dernières années, la crise financière a provoqué un vigoureux essor des activités des fonds d’investissement direct (système bancaire parallèle). Il conviendrait que l’impact de la numérisation sur l’activité de ces fonds ne génère pas un déficit réglementaire préjudiciable à la stabilité du système financier. |
7.10 |
Compte tenu de la déficience des modèles traditionnels d’évaluation des risques, qui ne permettent pas d’évaluer correctement les modèles de financement non garantis, les autorités européennes de surveillance devraient intensifier les contacts avec les FinTech, dès lors que ce secteur nécessite de nouvelles compétences de leur part. |
Bruxelles, le 26 avril 2017.
Le président du Comité économique et social européen
Georges DASSIS
(1) Couvrant non pas la seule concurrence mais aussi la collaboration et le partenariat.
(2) La Commission étudie l’idée d’instaurer à l’échelle de l’UE une licence unique, qui autoriserait les entreprises technologiques du secteur des services financiers à travailler dans toute l’Europe, ainsi que de créer un «bac à sable» paneuropéen, ou un cadre réglementaire spécifique, pour l’ensemble de l’Union.
(3) Voir les exigences de la législation Solvabilité II.
(4) Lancé le 23 mars, COM (2017) 139 final, Plan d’action relatif aux services financiers pour les consommateurs et la consultation publique sur les Fintech.
(5) JO C 34 du 2.2.2017, p. 121.
(6) http://www.ec.europa.eu/digital-single-market/en/digital-skills-jobs-coalition.
(7) Avis du CESE (ECO/424) sur la «Modification du règlement sur les exigences de fonds propres (CRR) afin d’y intégrer les modifications au cadre de Bâle» (non encore publié au JO).
Glossaire
Bancassurance: vente de produits d’assurance par l’intermédiaire des réseaux d’agences bancaires. Ce type de partenariat stratégique rassemble les réseaux et crée des synergies d’entreprise.
Banque exponentielle: recourt aux technologies exponentielles (apparues à la suite de la révolution numérique) pour accroître la gamme et la qualité des services financiers ainsi que pour réduire les coûts.
Big Tech: géants technologiques comme Google, Apple, Facebook et Amazon (GAFA), qui commencent à étendre leurs activités aux multiples ramifications vers l’activité bancaire.
Bitcoin: monnaie virtuelle en phase expérimentale faisant l’objet d’une acceptation accrue sur le marché.
Chaîne de blocs (blockchain): plateforme technologique sur laquelle repose le bitcoin. Elle dispose d’une base de données très efficace qui peut être utilisée dans les finances ou dans de multiples applications.
Connectivité: en conséquence des progrès technologiques, nous pouvons désormais être connectés n’importe quand, n’importe où. Cela permet aux employés de travailler de manière plus flexible, dans la mesure où ils peuvent le faire depuis leur domicile ou depuis tout autre endroit (télétravail, travail intelligent), ainsi qu’à temps partiel. Les jeunes sont déjà habitués à cette manière de travailler, et il peut être utile de disposer d’un éventail de possibilités en la matière.
Cybersécurité: couvre les risques de cyberattaques et de vols de données tout en renforçant et en garantissant la confiance des consommateurs.
Expérience client: pratique qui consiste à connaître en profondeur chaque client de manière individuelle, en personnalisant son expérience dans tous les points d’interaction avec la banque. Les réseaux sociaux et les plateformes internet en sont des éléments essentiels.
Financement participatif (crowdfunding): financement réalisé au moyen de plateformes en ligne reliant les entrepreneurs avec les investisseurs. Il existe des plateformes qui contraignent les entrepreneurs à offrir une partie de leur société en échange d’un investissement («crowdfunding» ou «financement participatif sous forme de capital»).
FinTech/InsurTech: jeunes entreprises innovantes qui proposent à faible coût des solutions novatrices de banque ou d’assurance.
Génération Y (millennials): première génération de natifs du numérique, nés entre 1980 et 2000, qui composeront 75 % de la population active en 2025. Ils n’ont pas l’habitude de se rendre dans une agence bancaire.
Intelligence artificielle: machine dotée d’une capacité d’apprentissage. Par «robot-conseiller», on entend une machine capable d’offrir des conseils financiers et fonctionnant de la même manière qu’un cerveau humain.
Knowmads: nouveaux professionnels qui estiment que leurs connaissances sont leur principal apport, et qui accordent donc un degré de priorité élevé à la liberté de gérer leur travail et leur temps.
Mégadonnées (Big Data): stockage et traitement de données nombreuses transmises à grande vitesse. L’«analytique» consiste à convertir ces données en informations au moyen de méthodes mathématiques et statistiques en vue de la prise de décisions dans le secteur financier.
Modalités de paiement: tendance du commerce électronique, le paiement TPV est le mode de paiement mobile en ligne le plus répandu dans le monde. Relèvent également de cet écosystème l’option PayPal et les opérateurs technologiques Samsung Pay, Apple Pay, etc. Les services de paiements de personne à personne (P2P) représentent une alternative réelle pour la population de pays où le système bancaire est peu développé. De nos jours, les applications de banque mobile sont une réalité incontestable.
Multicanal: combinaison efficiente des avantages d’utilisation du canal numérique et du «face à face» avec le client pour les activités de banque. Le client est au centre de l’activité.
Néobanques: banques ne nécessitant pas de licence financière. Elles développent un logiciel en s’appuyant sur l’infrastructure d’une banque déjà existante.
Nuage (cloud): modèles de prestation de services basés sur l’internet.
Numérisation: concerne la technologie dans son ensemble (internet, technologies mobiles, mégadonnées, chaînes de blocs, intelligence artificielle, informatique en nuage, robotique, cybersécurité) lorsqu’elle est appliquée aux nouveaux modèles de relations avec les clients et à la gestion des opérations des banques et des compagnies d’assurance. La technologie est un moyen de mettre en œuvre la numérisation plutôt qu’une fin en soi.
Prêt hybride: prêt bancaire octroyé pour partie par une banque et pour partie par ses clients de banque privée. Cela permet aux banques de conserver des activités sans augmenter de manière significative leur bilan tout en satisfaisant leurs clients et d’autres investisseurs.
Prêt participatif (crowdlending): financement par l’intermédiaire de l’internet dans le cadre duquel un groupe de personnes prêtent aux entrepreneurs de l’argent qu’ils doivent rembourser à un taux d’intérêt prédéterminé.
RegTech: technologies innovantes qui sont utilisées pour faciliter le respect de la réglementation et réduisent les coûts et les ressources nécessaires pour ce type de tâches. La réglementation et la surveillance numériques constituent un défi pour le secteur financier (des conditions équitables de concurrence doivent être garanties).
Rupture: la transformation numérique n’est pas possible sans un nouveau modèle organisationnel et culturel. L’innovation est un élément clé de la compétitivité dans ce processus bancaire global. Le changement commence avec les gens.
STEM: l’étude des sciences, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques. Les professions qui se développent actuellement sont celles qui sont liées à ces domaines, les compétences numériques étant par ailleurs primordiales dans tous les secteurs. La formation est donc une priorité.
III Actes préparatoires
COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN
525e session plénière du CESE des 26 et 27 avril 2017
28.7.2017 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 246/18 |
Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (UE) no 560/2014 du Conseil du 6 mai 2014 établissant l’entreprise commune “Bio-industries”»
[COM(2017) 68 final – 2017/0024 (NLE)]
(2017/C 246/03)
Rapporteur général: |
Mihai MANOLIU |
Saisine |
Conseil, 21 mars 2017 |
Base juridique |
Articles 187 et 188 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne |
Compétence |
Section spécialisée «Marché unique, production et consommation» |
Décision du Bureau |
28 mars 2017 |
Adoption en session plénière |
27 avril 2017 |
Session plénière no |
525 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
160/0/4 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
Le CESE estime que la proposition de modification de règlement à l’examen vise à améliorer les dispositions du règlement du Conseil et à les simplifier davantage aux fins de la réalisation des objectifs de l’entreprise commune «Bio-industries». La proposition est cohérente avec les objectifs initiaux et les dispositions des politiques existantes. |
1.2. |
Le CESE est d’avis que l’entreprise commune «Bio-industries» cherche à créer des synergies avec d’autres programmes de l’Union relatifs, par exemple, à la politique de cohésion, à l’éducation, à l’environnement, aux PME, à la compétitivité, ou encore à la politique de développement rural, en renforçant au niveau régional et national les capacités de recherche et d’innovation, dans le contexte actuel des stratégies et des politiques de spécialisation intelligente. |
1.3. |
La Commission européenne mène des échanges opérationnels constants avec le consortium de Bio-industries, qui prennent notamment la forme de consultations et de discussions portant sur le mode de versement de la contribution financière par les membres de l’entreprise commune «Bio-industries». La proposition de modification à l’examen n’a aucun impact supplémentaire autre que celui que le règlement du Conseil initial lui-même était censé produire. Les modifications envisagées ne sont que de nature technique, de sorte qu’aucune analyse d’impact n’est requise pour l’initiative à l’étude. |
1.4. |
Le CESE se félicite que la proposition à l’examen réduise les charges administratives pour le consortium de Bio-industries s’agissant de son rôle d’intermédiaire entre les membres du consortium, qui sont tenus d’apporter des contributions financières, et les participants aux projets. Le consortium de Bio-industries reste responsable, en dernier ressort, de la fourniture des données chiffrées agrégées concernant les contributions financières de ses membres. |
1.5. |
Le CESE approuve les précisions essentielles apportées par le nouveau règlement:
|
2. Observations générales du Comité
2.1. |
Le CESE estime que le concept de bio-industrie s’inscrit dans le domaine plus large de la bioéconomie, définie comme la production et l’extraction de ressources biologiques renouvelables et leur transformation en produits fabriqués à base d’éléments biologiques, comme des denrées alimentaires, des aliments pour animaux ou encore de la bioénergie. Les trois quarts des terres arables de l’Union européenne sont exploitées à cette fin et ce secteur, dont le chiffre d’affaires s’élève à 2 000 milliards d’EUR, emploie entre 17 et 19 millions d’européens. Les entreprises du domaine de la connaissance au sein de la bioéconomie ont un chiffre d’affaires de 57 milliards d’EUR et emploient environ 305 000 personnes (2009). |
2.2. |
En Europe, la bioéconomie peut favoriser le développement, générer de la valeur ajoutée ainsi que de nouveaux emplois sûrs et décents, réduire sensiblement la dépendance à l’égard des importations, contribuer au mieux à l’utilisation rationnelle des ressources biologiques limitées mais renouvelables et concourir de façon substantielle au développement du commerce mondial. |
2.3. |
On observe souvent une concurrence à différents niveaux, entre les diverses technologies et utilisations des ressources biologiques. Ce problème est encore aggravé par la disponibilité limitée de ces ressources. Si la bioéconomie peut contribuer de manière significative à l’objectif d’une réduction de l’effet de serre généré par les émissions de CO2, laquelle aura un effet bénéfique sur la santé publique, on constate toutefois également un effet indésirable, qui se traduit par un surcroît d’émissions de gaz à effet de serre dont l’impact sur l’environnement ne peut être négligé. |
2.4. |
Le cadre politique européen de la bioéconomie est morcelé entre plusieurs politiques sectorielles: agriculture, pêche, forêts, climat, économie circulaire et recherche constituent autant de domaines d’activité couverts par différents actes législatifs et politiques sectorielles (1). |
2.5. |
Toutefois, une stratégie globale consacrée à la bio-industrie a été lancée en 2012 afin d’assurer une certaine cohérence politique, mais il apparaît que certaines incohérences subsistent. L’Union européenne assure le financement des activités d’innovation dans le domaine de la bioéconomie au moyen du programme-cadre pour la recherche et l’innovation «Horizon 2020» et d’un éventail d’autres instruments de financement. Le CESE estime nécessaire d’assurer la durabilité et une politique cohérente en la matière. |
2.6. |
Plusieurs communications de la Commission soulignent qu’il importe d’envisager un partenariat public-privé pour les bio-industries en tant qu’initiative technologique (2). |
2.7. |
La présente proposition de modification trouve sa base juridique dans les articles 187 et 188 du TFUE. Les États membres n’étant pas en mesure d’agir seuls, c’est l’Union européenne qui est capable de modifier le cadre juridique de l’entreprise commune. La proposition à l’examen vise à ajuster les dispositions du règlement du Conseil, de façon que les membres du consortium de Bio-industries aient concrètement la possibilité de s’acquitter de leur obligation de contribution financière. La proposition est conforme au principe de proportionnalité. Cette modification s’imposait également du fait qu’il n’existait aucune possibilité d’interpréter le règlement du Conseil de façon à permettre le versement de la contribution financière au niveau des projets. |
3. Observations particulières
3.1. |
Sur la base du programme-cadre pour la recherche et l’innovation, la Commission européenne a adopté en 2012 une stratégie relative à la bioéconomie, qui vise à assurer la cohérence politique entre les différents domaines d’intervention pertinents et les objectifs correspondants tant à l’échelon national qu’au niveau de l’Union européenne. Cette approche a été nécessaire pour accroître le financement public et les investissements privés touchant à la bioéconomie. Des modèles de gouvernance participative ont été mis au point. Cette stratégie a jeté les bases d’un plan d’action qui comporte douze mesures s’articulant autour des trois grands thèmes suivants:
|
3.2. |
Les mesures prises visaient à susciter une association des parties prenantes dans le domaine de la bioéconomie, ainsi qu’un observatoire des activités bioéconomiques, et ont favorisé l’émergence de nouveaux marchés grâce à la définition de normes, notamment en matière de durabilité et viabilité, fournissant ainsi la base de connaissances nécessaire à une intensification pérenne de la production primaire. Il a été prévu de revoir et de mettre à jour cette stratégie en 2017. |
3.3. |
La proposition de la Commission comprend une modification technique du document en vigueur, à savoir le règlement (UE) no 560/2014 du Conseil établissant l’entreprise commune «Bio-industries». |
3.3.1. |
L’entreprise commune «Bio-industries» est un organisme chargé de la mise en œuvre d’un partenariat public-privé, dont les membres sont l’Union, représentée par la Commission, et le consortium de Bio-industries. La finalité de cette entreprise commune est de mettre en application l’initiative technologique conjointe pour les bio-industries d’ici au 31 décembre 2024. |
3.3.2. |
Étant donné les difficultés du consortium à apporter sa quote-part financière selon le mode prévu par le règlement du Conseil, il est proposé d’introduire, à côté du mode existant de versement au niveau du programme, la possibilité de verser les contributions financières au niveau des projets. Cette solution remédie efficacement à la situation et contribue à la réalisation des objectifs initiaux du règlement du Conseil en permettant aux membres du consortium de Bio-industries de respecter leur engagement initial. La solution proposée est similaire à celle envisagée pour l’entreprise commune IMI 2 (Entreprise commune Initiative en matière de médicaments innovants 2), qui prévoit que les membres autres que l’Union peuvent verser des contributions financières tant au niveau du programme, méthode couramment utilisée par les fonds fiduciaires et les organisations caritatives, qu’à celui des projets, cette procédure étant employée par les entités commerciales. Cet amendement ne s’inscrit pas dans le programme REFIT. |
3.4. |
L’entreprise commune «Bio-industries» a pour objectif la mise en œuvre d’un partenariat public-privé composé, d’une part, de l’Union européenne, représentée par la Commission, et, d’autre part, du consortium de Bio-industries institué par le règlement (UE) no 560/2014 du Conseil. Ce partenariat vise à mettre en application l’initiative technologique conjointe pour les bio-industries, conformément aux statuts de l’entreprise commune «Bio-industries», d’ici au 31 décembre 2024. |
3.5. |
L’article 3 du règlement du Conseil définit concrètement les contributions de chaque partie à l’entreprise commune, les dépenses administratives et de fonctionnement, qui sont partagées et auxquelles s’ajoute un montant non précisé représentant les contributions en nature à l’exécution d’actions indirectes (CNCP) et les contributions en nature à l’exécution d’activités complémentaires (CNAC). Il résulte de l’interprétation du statut que la contribution du consortium de Bio-industries doit être introduite dans le budget de l’entreprise commune «Bio-industries»au niveau du programme. Les entités constituantes des membres autres que l’Union, qui sont celles participant à la mise en œuvre d’actions indirectes de financement, devraient apporter leurs contributions financières directement aux actions indirectes au niveau des projets. |
3.6. |
De nombreux membres du consortium de Bio-industries ont rencontré des difficultés en ce qui concerne le mode de versement. Ils estiment qu’il n’est pas commercialement viable d’effectuer une contribution financière au niveau du programme, étant donné que cette modalité ne garantit pas de bénéfices en contrepartie, notamment en ce qui concerne les résultats des projets et les droits de propriété intellectuelle connexes, et qu’elle pourrait avoir pour conséquence qu’un tel versement par un membre du consortium favorise ses propres concurrents. Il est proposé une modalité de substitution, le versement de la contribution financière au niveau du projet, dans laquelle les résultats du projet bénéficient aux participants qui y ont contribué financièrement. Cette procédure ne porte pas atteinte aux intérêts de l’Union. Il est souhaitable de préserver les intérêts des chaînes de valeur bioéconomiques, y compris dans le cas des PME, des centres de recherche et de technologie et des universités. |
3.7. |
La contribution financière des membres autres que l’Union doit satisfaire aux exigences suivantes:
|
3.8. |
Aux termes la proposition à l’examen, les membres du consortium de Bio-industries peuvent continuer à verser leur contribution financière au niveau du programme. En plus de cette modalité, ils auront aussi la possibilité de transférer la contribution financière directement à un autre participant au projet, conformément aux règles convenues d’un commun accord («accord de consortium»), au cadre juridique applicable [(transfert des membres du consortium de Bio-industries au consortium) et (transferts financiers des membres du consortium de Bio-industries aux bénéficiaires de projet)], à leur législation nationale et leurs pratiques habituelles en matière de comptabilité. Le consortium de Bio-industries sera chargé de faire rapport, sous forme agrégée, sur les contributions financières reçues. |
3.9. |
Le modèle de convention de subvention de l’entreprise commune «Bio-industries» sera modifié en conséquence. Il convient de noter que la proposition de modification à l’examen n’a ni incidence en rapport avec la protection des droits fondamentaux, ni en ce qui concerne les implications budgétaires. Il est estimé qu’une réduction budgétaire affecterait le milieu universitaire et les PME concernées, la contribution de l’Union étant principalement réservée aux activités de recherche et d’innovation. |
3.10. |
La modification est contraignante dans tous ses éléments et directement applicable dans tout État membre. Aucun document explicatif n’est requis. |
Bruxelles, le 27 avril 2017.
Le président du Comité économique et social européen
Georges DASSIS
(1) La PAC (politique agricole commune), la stratégie européenne pour les forêts, la PCP (politique commune de la pêche), la stratégie Europe 2020, le plan d’action européen en faveur de l’économie circulaire, 50 réseaux de l’Espace européen de la recherche et trois initiatives de programmation conjointe.
(2) COM(2012) 60 final: «L’innovation au service d’une croissance durable: une bioéconomie pour l’Europe»; COM(2014) 14 final: «Pour une renaissance industrielle européenne»; COM(2013) 494 final: «Partenariats public-privé dans le cadre d’Horizon 2020: un outil puissant pour atteindre les objectifs d’innovation et de croissance en Europe»; COM(2012) 79 final: «Le partenariat européen d’innovation: “productivité et développement durable de l’agriculture”».
28.7.2017 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 246/22 |
Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux contrôles d’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement (CE) no 1889/2005»
[COM(2016) 825 final — 2016/0413 (COD)]
(2017/C 246/04)
Rapporteur: |
Javier DOZ ORRIT |
Corapporteur: |
Mihai IVAŞCU |
Consultation |
Parlement européen, 19 janvier 2017 Conseil de l’Union européenne, 19 janvier 2017 |
Base juridique |
Articles 114 et 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne |
Compétence |
Section spécialisée «Union économique et monétaire et cohésion économique et sociale» |
Adoption en section spécialisée |
6 avril 2017 |
Adoption en session plénière |
27 avril 2017 |
Session plénière no |
525 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
154/4/4 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
Le CESE estime que la lutte contre le terrorisme et son financement ainsi que la lutte contre le blanchiment de capitaux et d’autres formes de criminalité économique associées doivent constituer des priorités permanentes de la politique de l’Union européenne. |
1.2. |
Le CESE apporte son soutien aux mesures introduites dans la proposition de la Commission qui abroge le règlement précédent de 2005 afin d’adapter le cadre réglementaire au contexte actuel, et de remédier aux lacunes constatées dans plusieurs études consacrées à sa mise en œuvre. |
1.3. |
Le CESE estime que l’extension du champ d’application des contrôles ainsi que de la compétence des autorités de procéder aux contrôles et à la confiscation des biens, chaque fois que des éléments permettent raisonnablement de penser que l’on est en présence d’activités illicites, facilitera la découverte d’un nombre plus élevé de cas de fraude, et de recueillir davantage d’informations. |
1.4. |
Le CESE considère qu’il est nécessaire d’améliorer la coopération, tant entre les autorités compétentes qu’entre les États membres, dans le but d’obtenir un effet maximum de l’application du nouveau règlement. Il invite tous les États membres à mettre à la disposition d’Europol leurs bases de données anti-terrorisme. La Commission devrait également encourager les mesures de coopération propres à permettre à tous les États membres de se doter des moyens nécessaires à un contrôle efficace des différentes formes d’argent liquide ainsi que de leurs différents modes de transport. |
1.5. |
Le CESE propose qu’à la suite d’une étude et de consultations approfondies, la Commission soumette un plan de réduction de l’usage de l’argent liquide au sein de l’Union européenne. À cet égard, la question de savoir si le seuil d’obligation de déclaration fixé à 10 000 EUR est approprié mérite d’être examinée. |
1.6. |
Le CESE estime que la Commission devrait aller plus loin en fixant des sanctions en cas de non-respect de cette obligation. Les sanctions devraient être harmonisées entre les États membres et notifiées de manière cohérente à la Commission afin d’éviter de créer des failles favorables aux fraudeurs. |
1.7. |
Le CESE réitère ses inquiétudes déjà exprimées dans l’avis ECO/408 (1), concernant une série de facteurs susceptibles de limiter sérieusement l’efficacité du règlement. Le principal problème tient au fait que les paradis fiscaux où les phénomènes de blanchiment d’argent sont les plus massifs — et dont les flux d’argent liquide à destination ou en provenance de l’Union européenne devraient être tout particulièrement contrôlés — ne figurent pas sur la liste des régions et des pays considérés par la Commission comme présentant un risque élevé, qui est intégrée à sa proposition de règlement du 14 juillet 2016. |
1.8. |
L’enquête visant les flux criminels d’argent liquide est liée à d’autres infractions, notamment à la délinquance fiscale. Le CESE propose donc que les autorités fiscales puissent également avoir accès aux informations recueillies dans le cadre des contrôles de flux d’argent liquide. |
1.9. |
Le CESE considère qu’en plus de l’or, d’autres «marchandises très liquides» devraient être incluses dans la définition de l’argent liquide dès lors que le nouveau règlement sera adopté. |
1.10. |
Tout en reconnaissant la valeur sociale des cartes prépayées au sein de l’Union, le CESE attire l’attention sur le risque de détournement de ces instruments par des criminels et des terroristes pour financer leurs activités. |
1.11. |
En raison de l’augmentation du volume de données collectées et échangées entre les autorités, le CESE recommande de renforcer la protection de ces mêmes données, et d’examiner la possibilité d’appliquer des sanctions administratives et pénales plus sévères à l’encontre des fonctionnaires et des personnes qui en font usage de manière abusive ou illégale. |
1.12. |
Il s’agit là d’un problème d’ampleur internationale et, par conséquent, les institutions de l’Union européenne doivent elles aussi jouer pleinement leur rôle au côté des organisations internationales actives en la matière. |
1.13. |
Le CESE accueille favorablement le retrait de la circulation, à partir de 2018, des billets de 500 EUR, dont l’utilisation pour les paiements en espèces dans le cadre de trafics illicites est largement avérée, en raison de la facilité de transport et de stockage de grosses sommes d’argent prenant peu de place. |
1.14. |
Le CESE rappelle à la Commission que la protection des citoyens européens devrait demeurer une priorité de premier plan, indépendamment des coûts et des efforts qu’elle suppose. |
2. Contexte et proposition de la Commission
2.1. |
Conformément au plan d’action (2) destiné à renforcer la lutte contre le financement du terrorisme, la Commission propose un nouveau règlement relatif aux contrôles d’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement de 2005 (3) actuellement en vigueur. |
2.2. |
En mai 2015, l’Union européenne a adopté le quatrième paquet sur la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme comprenant, parmi d’autres initiatives, la quatrième directive relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme (quatrième directive antiblanchiment), et le règlement sur les informations accompagnant les virements de fonds (4), qui sont actuellement en phase de transposition. Le CESE a rendu son avis sur le paquet législatif dans son avis sur le train de mesures antiblanchiment d’argent (5). |
2.3. |
En février 2016, la Commission a publié son plan d’action destiné à renforcer la lutte contre le financement du terrorisme (6), mis en œuvre en deux phases législatives. Durant la première phase (juillet 2016), la Commission a soumis des propositions pour deux directives: la cinquième directive antiblanchiment, modifiant certains aspects de la quatrième directive antiblanchiment, la directive sur l’accès des autorités fiscales aux informations relatives à la lutte contre le blanchiment de capitaux (7) et le règlement délégué de la Commission (8) pour recenser les pays tiers à haut risque (paradis fiscaux) en complément des quatrième et cinquième directives antiblanchiment (9). Le CESE a adopté ses avis sur la cinquième directive antiblanchiment et sur le règlement, ainsi que son avis sur la deuxième directive (10). |
2.4. |
Au cours de la seconde phase (décembre 2016), en plus du règlement visé par le présent avis, la Commission a présenté une proposition de directive sur la lutte contre le blanchiment de capitaux au moyen du droit pénal (11) ainsi qu’un règlement sur la reconnaissance mutuelle des décisions de gel et de confiscation des avoirs d’origine criminelle (12). |
2.5. |
Le règlement de 2005 complète les dispositions de la directive antiblanchiment en introduisant des contrôles des envois d’argent liquide pour un montant de 10 000 EUR et plus. La proposition actuelle de la Commission (13) vise à: combler les failles de la législation actuelle en tenant compte des enquêtes menées par les services de police, de justice et de douanes; développer et compléter les quatrième (14) et cinquième (15) directives antiblanchiment pour s’attaquer au blanchiment d’argent et au financement du terrorisme; ainsi qu’à adapter la législation de l’Union pour la mettre en conformité avec les normes et recommandations internationales, notamment la recommandation no 32 du Groupe d’action financière sur le blanchiment de capitaux (GAFI). |
2.6. |
La proposition à l’examen s’attaque à un certain nombre de problèmes parmi lesquels le contrôle imparfait des mouvements transfrontières d’argent liquide, les difficultés dans l’échange d’informations entre les autorités compétentes, l’impossibilité de saisir des montants inférieurs à un seuil défini (10 000 EUR), la définition incomplète de la notion d’argent liquide, les écarts dans les sanctions pour non-déclaration entre les États membres et aux différents niveaux d’exécution. |
2.7. |
La proposition de nouveau règlement visant à remplacer la législation actuelle élargit et renforce la définition d’argent liquide, qu’elle divise en quatre catégories: la monnaie, les instruments négociables au porteur (chèques, chèques de voyage, billets à ordre et mandats), les marchandises servant de réserve de valeur très liquide (pièces et lingots d’or) et les cartes prépayées. |
2.8. |
La proposition introduit une obligation de déclarer l’argent liquide non accompagné, au sens d’argent liquide envoyé par la poste, par un service de messagerie ou de fret pour un montant égal ou supérieur à 10 000 EUR. Certains États membres procèdent à des contrôles de mouvements d’argent liquide au sein même de l’Union européenne. |
2.9. |
Elle confère aux autorités compétentes le pouvoir de procéder à des contrôles sur des envois d’argent liquide pour un montant inférieur à 10 000 EUR, ainsi que la possibilité de dénoncer et d’enquêter dès lors qu’apparaissent des indices sérieux d’implication criminelle. |
2.10. |
Elle autorise la rétention de fonds chaque fois qu’il s’agit d’envois en argent liquide non déclarés d’un montant de 10 000 EUR ou plus, ou lorsque les envois, quelle que soit leur valeur, présentent des signes d’une implication criminelle. |
2.11. |
Elle améliore l’échange d’informations en exigeant une communication active avec les cellules de renseignement financier (CRF); à l’heure actuelle, les autorités compétentes sont uniquement tenues de rendre accessibles les informations qu’elles détiennent. Les informations concernant des opérations irrégulières doivent également être mises à la disposition des autorités compétentes des autres États membres et de la Commission chaque fois qu’il existe des signes d’implication criminelle. Dans la proposition, ces informations peuvent aussi être communiquées à des pays tiers, sous réserve du respect d’un certain nombre d’exigences. |
2.12. |
Elle encourage l’introduction de sanctions dans tous les États membres en cas de manquement à l’obligation de déclaration, en complément des sanctions pénales prévues pour les activités criminelles. Les sanctions appliquées dans chaque État membre doivent être communiquées à la Commission. |
3. Observations générales
3.1. |
Le CESE se félicite de l’action continue de la Commission dans la lutte mondiale contre le blanchiment de capitaux et contre le terrorisme. Le CESE approuve également les modifications suggérées par la proposition à l’examen qui visent à améliorer la législation en vigueur. |
3.2. |
La Commission et les autres institutions de l’Union doivent redoubler d’efforts pour que l’opinion publique européenne soit pleinement convaincue de leur volonté de lutter contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, en ayant recours à tous les instruments légaux nécessaires, au renseignement ainsi qu’à l’action répressive et judiciaire. Le fait de savoir que les actions des institutions en la matière sont menées en coopération avec l’ensemble des États membres renforcera leur crédibilité et leur légitimité. Une série d’indicateurs en matière de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme sont déjà utilisés, mais ils ne peuvent être tous publiés. |
3.3. |
Le CESE invite l’Union européenne et les États membres à promouvoir la poursuite de la coopération au niveau international en matière de lutte contre le terrorisme, le blanchiment de capitaux et les actes criminels graves qui y sont associés. L’ensemble des institutions de l’Union devrait s’employer à garantir que les mesures proposées par la Commission soient également adoptées au niveau international. Elles seraient, ce faisant, plus efficaces. |
3.4. |
La proposition de nouveau règlement vise à lutter contre les flux d’argent liquide illégaux entre l’Union européenne et des pays tiers. Pour y parvenir, la Commission européenne doit coopérer avec les États membres afin de veiller à ce que leurs autorités compétentes respectives soient dotées des ressources techniques et humaines les plus efficaces, ainsi que de tous les autres moyens nécessaires (par exemple, de chiens renifleurs). |
3.5. |
Les systèmes de financement du terrorisme peuvent être très divers, allant de l’utilisation frauduleuse d’entreprises légales ou d’organisations à but non lucratif bénéficiant d’un statut officiel, à des activités criminelles ou à des violations du système commercial international. Les organisations terroristes font constamment évoluer leurs méthodes de financement afin de contourner les dispositions législatives existantes et, par conséquent, le cadre juridique doit être mis à jour en permanence. Les différences entre les législations des États membres sont généralement exploitées par les criminels et les terroristes, qui choisissent pour effectuer leurs transactions financières les pays où la législation est la plus laxiste. |
3.6. |
En conséquence de la mise en place du programme européen en matière de sécurité (16), de la réaction aux attentats terroristes perpétrés en Europe et ailleurs, et de l’intérêt de l’opinion publique pour les opérations de blanchiment de capitaux, de fraude et d’évasion fiscale menées par l’entremise de paradis fiscaux, la Commission a adopté de nombreuses initiatives législatives au cours des deux dernières années. |
3.7. |
Selon le rapport du GAFI (17), l’argent liquide est largement utilisé dans l’économie criminelle, et reste la ressource la plus importante pour financer le terrorisme. Il est difficile d’estimer le volume d’argent «blanchi» de cette manière, mais les estimations avancées dans le rapport du GAFI se situent entre quelques centaines de milliards et mille milliards d’USD par an. |
3.8. |
Une analyse de l’efficacité de la réglementation actuelle a révélé que le nombre d’envois d’argent liquide entrant dans l’Union ou qui en sortent restait élevé. Toutefois, les contrôles de mouvements d’argent liquide sont limités en nombre (100 000 par an pour l’ensemble des États membres), varient d’un pays à l’autre, et le nombre de cas suspects soumis à une enquête varie considérablement. Seuls neuf pays ont participé à la consultation la plus récente sur le sujet, et les données concernant tant le nombre de cas que les analyses correspondantes sont disparates et limitées. |
3.9. |
Des lacunes dans l’actuel règlement font que l’argent liquide envoyé par poste, messagerie ou fret n’est pas soumis à suffisamment de contrôles spécifiques. À plusieurs reprises, les autorités compétentes se sont trouvées dans la situation de ne pas disposer des outils nécessaires pour procéder à des contrôles suffisants. |
3.10. |
L’extension du champ d’application des contrôles et la reconnaissance du pouvoir des autorités compétentes de procéder à des contrôles et de confisquer des biens en cas de soupçon d’implication criminelle, même pour des montants inférieurs au seuil de 10 000 EUR, permettront d’améliorer la détection de cas de fraude et de recueillir des informations supplémentaires. À l’heure actuelle, les informations obtenues ne sont pas utilisées comme il se doit. Les informations sont mises à disposition de manière passive dans certains États membres, et aucune mesure n’est en place pour veiller à ce qu’elles soient traitées correctement. L’amélioration de la communication entre les autorités compétentes doit être considérée comme une nécessité: entre les autorités douanières qui sont pour l’essentiel chargées d’exécuter les contrôles, et les cellules de renseignement financier (CRF) chargées de recevoir et d’analyser les informations; entre les CRF et les autorités fiscales et judiciaires; entre les autorités compétentes des États membres et des pays tiers, en particulier de ceux qui sont responsables de l’augmentation des flux d’argent liquide illégaux en provenance et à destination de l’Union européenne, comme c’est le cas avec les paradis fiscaux. |
3.11. |
Les sanctions appliquées en vertu de la réglementation actuelle pour défaut de déclaration de l’argent liquide n’ont pas été harmonisées, et les analyses réalisées semblent indiquer qu’elles n’ont pas eu l’effet dissuasif escompté. Le nouveau règlement exige des États membres qu’ils introduisent des sanctions en cas de manquement à l’obligation de déclaration, indépendamment de tout soupçon d’implication criminelle, ou de la question de savoir si l’argent liquide est lié à des enquêtes portant sur d’autres actes criminels ou infractions; ces sanctions doivent être communiquées à la Commission. Le CESE suggère qu’il y a lieu d’établir une procédure de communication commune pour tous les États membres. Toutefois, chaque État membre est libre de fixer ses propres sanctions. Les sanctions prévues au titre de l’article 13 doivent être harmonisées pour ne pas créer d’occasions dont pourraient se saisir des criminels agissant dans certains pays. |
3.12. |
La mise en œuvre du règlement et des mesures de lutte contre le blanchiment d’argent susmentionnées permettra d’accroître considérablement le volume de données personnelles collectées, stockées et mises à la disposition des autorités et organismes compétents dans le domaine de la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Si l’on veut défendre les droits fondamentaux des personnes, et en particulier en matière de protection des données à caractère personnel, il importe d’évaluer la nécessité de nouveaux mécanismes de protection, le cas échéant, de les introduire et de promouvoir l’application de sanctions pénales plus sévères à l’encontre des fonctionnaires et de tous ceux qui utilisent ces informations illégalement. |
3.13. |
Le type de canaux et procédures utilisé pour lutter contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, y compris contre les envois d’argent liquide illicites, a conduit, à juste titre, la Commission à adopter des mesures législatives dont le champ d’application s’étend à ces deux infractions pénales. Ces dernières sont liées à d’autres infractions similaires ou de plus grande ampleur. Une coordination étroite passant par les mécanismes appropriés entre l’ensemble des autorités et organismes nationaux concernés et les États membres est essentielle à la mise en œuvre efficace du règlement et des autres mesures législatives pertinentes. Il convient de dire que la coopération entre les différentes autorités et institutions dans les États membres — police, renseignement, justice, douane et fisc — est loin d’être optimale. Le CESE est particulièrement préoccupé par le manque de coopération entre les forces de police nationales et l’Agence de l’Union européenne pour la coopération des services répressifs (Europol), comme en témoigne le fait que la plupart des États membres n’ont toujours pas ouvert l’accès à leurs bases de données dédiées à la lutte contre le terrorisme à Europol. Par conséquent, le CESE invite les autorités de l’Union européenne et des États membres à mettre un terme à cette situation. |
3.14. |
Un autre obstacle important à l’application effective du règlement et des autres dispositions législatives pertinentes pour combattre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme tient à l’absence de réelle volonté politique d’éradiquer les paradis fiscaux. La preuve la plus patente en est donnée par la liste «des pays tiers à haut risque présentant des carences stratégiques» qui figure à l’annexe du règlement (UE) 2016/1675 complétant les quatrième et cinquième directives antiblanchiment. Ne figure sur la liste aucun des paradis fiscaux cumulant la majorité des transactions illicites, en particulier les flux d’argent liquide décrits dans la proposition de règlement. Le CESE se trouve contraint de réitérer sa demande formulée dans son avis ECO/408: «La Commission devrait proposer une nouvelle liste de paradis fiscaux qui fusionne en une seule liste les pays tiers et les territoires qui ne coopèrent pas à la poursuite judiciaire de la criminalité financière et du financement du terrorisme.» |
4. Observations spécifiques
4.1. |
Le financement du terrorisme a clairement une composante mondiale, ce qui signifie que les opérations terroristes perpétrées dans un pays sont souvent financées par des activités criminelles menées dans un autre. Des contrôles de l’argent liquide et des changements législatifs profonds sont nécessaires pour bloquer les mouvements d’argent liquide, surveiller et limiter les opérations financières, ainsi que pour faciliter la collecte d’informations importantes sur les terroristes et ceux qui les financent. Pleinement conscient de la dimension extérieure du financement du terrorisme, le CESE préconise l’engagement sans réserve de toutes les institutions de l’Union européenne dans l’ensemble des organisations internationales concernées où elles sont représentées, afin que des mesures similaires puissent être mises en œuvre à l’échelle mondiale. |
4.2. |
Les envois d’argent liquide demeurent le principal canal par lequel opèrent les blanchisseurs de capitaux et les criminels financiers (18). Le CESE recommande que la Commission, après avoir effectué une étude approfondie, mené une consultation de toutes les parties concernées et instauré des relations de travail étroites avec les États membres, la BCE et les banques centrales nationales, élabore un plan visant à réduire l’utilisation de l’argent liquide au sein de l’Union. La suppression des coupures de 500 EUR constitue un pas dans la bonne direction. Dans le cadre de cette étude, la question de la pertinence de fixer à 10 000 EUR le seuil d’obligation de déclaration mérite d’être examinée. |
4.3. |
Le CESE demande à la Commission européenne d’accroître ses efforts pour que les dispositions de la Convention de Varsovie (19) soient ratifiées dans l’ensemble de l’Union de manière cohérente. À ce jour, seuls 17 États membres, sur les 26 qui l’ont signée, l’ont ratifiée. |
4.4. |
Le CESE reconnaît que le règlement proposé pourrait apporter des améliorations significatives aux outils que nous utilisons pour lutter contre le financement du terrorisme, tout en ayant, dans le même temps, une incidence minimale sur les petites et moyennes entreprises européennes. |
4.5. |
Le CESE estime que le développement de politiques de coopération financière avec les pays du voisinage et avec ceux qui sont à l’origine des flux migratoires particulièrement denses vers l’Union est indispensable pour faciliter la transparence des transactions financières et une diminution de leurs coûts. Les obstacles et les coûts élevés des transferts d’argent (entrant et sortant) avec ces pays encouragent le recours à des envois d’argent liquide et à des transactions opaques et, partant, l’utilisation de ces méthodes à des fins criminelles. |
4.6. |
Les récents attentats sur le sol de l’Union européenne ont révélé que des cartes prépayées avaient été utilisées par des terroristes, entre autres pour payer des nuits d’hôtel (par exemple lors des attentats de Paris du 13 novembre 2015). Même si la valeur sociale de ces instruments est évidente — puisqu’ils permettent à des personnes vulnérables ou exclues de procéder à des paiements aussi bien en ligne que hors ligne — le CESE attire l’attention sur le risque que des terroristes ou des criminels continuent d’utiliser de tels instruments à leurs propres fins. |
4.7. |
Le transport illégal d’argent liquide est lié à d’autres types d’infraction: infractions fiscales, blanchiment de capitaux et financement du terrorisme. La proposition de règlement de la Commission ne permet pas d’échanger régulièrement, à des fins fiscales, les données figurant dans les déclarations d’argent liquide. Le CESE estime que la poursuite de ces infractions devrait être menée dans le cadre d’une approche globale. En particulier, il considère que l’échange décrit plus haut devrait pouvoir intervenir, compte tenu du lien évident entre fraude fiscale et activités de blanchiment de capitaux, lesquelles supposent, dans de nombreux cas des mouvements d’argent liquide. |
4.8. |
Dans la mesure où les articles 2.2 et 14 de la proposition de règlement confèrent à la Commission le pouvoir d’adopter des actes délégués pour modifier l’annexe, notamment la section établissant que «les marchandises servant de réserve de valeur très liquide» sont considérés comme des formes d’argent liquide, le CESE estime qu’il n’y a aucune raison de limiter d’emblée cette catégorie à l’or seul. D’autres marchandises particulièrement précieuses, telles que les pierres ou les métaux précieux (bruts ou ouvragés), pourraient être intégrées à la première liste approuvée par le Parlement et le Conseil. |
4.9. |
Le CESE insiste sur le fait que la sécurité de nos citoyens devrait rester l’une des préoccupations principales de l’Union européenne et des États membres, quel que soit le prix de l’effort requis. |
Bruxelles, le 27 avril 2017.
Le président du Comité économique et social européen
Georges DASSIS
(1) JO C 34 du 2.2.2017, p. 121.
(2) COM(2016) 50 final.
(3) Règlement (CE) no 1889/2005 du Parlement européen et du Conseil (JO L 309 du 25.11.2005, p. 9).
(4) Directive (UE) 2015/849 du Parlement européen et du Conseil (JO L 141 du 5.6.2015, p. 73) et règlement (UE) 2015/847 du Parlement européen et du Conseil (JO L 141 du 5.6.2015, p. 1).
(5) JO C 271 du 19.9.2013, p. 31.
(6) COM(2016) 50 final.
(7) COM(2016) 450 final, 2016/0208 (COD) et COM(2016) 452 final, 2016/0209 (CNS).
(8) Règlement délégué (UE) 2016/1675 (JO L 254 du 20.9.2016, p. 1).
(9) JO C 34 du 2.2.2017, p. 121.
(10) JO C 34 du 2.2.2017, p. 127.
(11) COM(2016) 826 — 2016/0414 (COD).
(12) COM(2016) 819 — 2016/0412 (COD).
(13) COM(2016) 825 final — 2016/0413 (COD).
(14) Directive (UE) 2015/849 (JO L 141 du 5.6.2015, p. 73).
(15) Proposition pour la cinquième directive antiblanchiment.
(16) COM(2015) 185 final.
(17) Rapport du GAFI: Money laundering through the physical transportation of cash (Blanchiment de capitaux par le transport physique d’argent liquide), 2015.
(18) «Why is cash still king? — A strategic report on the use of cash by criminal groups as a facilitator for money laundering» (Pourquoi l’argent liquide est-il encore roi? — Rapport stratégique sur l’utilisation d’argent liquide par les organisations criminelles pour faciliter le blanchiment des capitaux). Groupe des renseignements financiers, Europol, 2015.
(19) Convention du Conseil de l’Europe relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime et au financement du terrorisme, 2005.
28.7.2017 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 246/28 |
Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d’un système européen d’autorisation et d’information concernant les voyages (ETIAS) et modifiant les règlements (UE) no 515/2014, (UE) 2016/399, (UE) 2016/794 et (UE) 2016/1624»
[COM(2016) 731 final — 2016/0357(COD)]
(2017/C 246/05)
Rapporteur: |
Jan SIMONS (NL/I) |
Saisine |
Commission européenne, 17 février 2017 Parlement européen, 19 janvier 2017 |
Base juridique |
Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne |
Compétence |
Section spécialisée «Emploi, affaires sociales et citoyenneté» |
Adoption en section spécialisée |
3 avril 2017 |
Adoption en session plénière |
27 avril 2017 |
Session plénière |
525 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
184/0/4 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
Le CESE estime que la volonté d’instaurer un système européen d’information et d’autorisation concernant les voyages (ETIAS), afin de détecter tout risque posé par des visiteurs exemptés de l’obligation de visa qui entrent dans l’espace Schengen, pose un jalon qui, à l’heure actuelle, est indispensable en réaction aux menaces posées par des circonstances externes et internes. |
1.2. |
Le Comité se félicite que l’ETIAS s’inscrive dans la stratégie générale migratoire et sécuritaire de l’Union européenne, telle que la Commission l’a définie dans son programme «Frontières intelligentes» de 2011, et que l’information recueillie grâce à ce système permettra de vérifier a priori les risques éventuels en matière de sécurité ou de migration irrégulière, de manière à protéger les citoyens de l’Union vis-à-vis de personnes qui pénètrent sur son territoire avec de mauvaises intentions. |
1.3. |
Le Comité souligne avec insistance que l’ETIAS se doit de respecter intégralement les droits fondamentaux des demandeurs et d’éviter toute discrimination. Il convient que toutes les données récoltées par le dispositif, en particulier pour ce qui est des informations sensibles concernant l’éducation, la santé, la criminalité, etc., soient protégées et que leur accès soit strictement réservé aux organismes qui enquêtent sur les activités criminelles, le terrorisme, l’immigration irrégulière ou d’autres menaces. L’ETIAS doit aussi tenir dûment compte du droit dont disposent les demandeurs de faire appel lorsque l’autorisation de voyage leur a été refusée ou retirée. |
1.4. |
Le Comité a conscience que s’agissant de l’ETIAS, de nombreuses questions techniques doivent être résolues, en particulier son interopérabilité et son interconnectivité avec d’autres dispositifs de collecte de données et sa gouvernance. L’ETIAS devrait être fondé sur le juste équilibre entre les risques et la sécurité, tout en évitant d’imposer des charges administratives supplémentaires et de poser de nouveaux obstacles aux voyageurs qui se rendent fréquemment dans l’Union européenne pour faire des affaires, étudier, bénéficier d’un traitement médical, etc. |
1.5. |
La Commission et le Conseil devraient également prêter attention aux enjeux politiques de la création de l’ETIAS. Il y a lieu d’informer les pays concernés sur les raisons pour lesquelles l’obligation d’obtenir une autorisation de voyage a été instaurée malgré l’existence d’un régime d’exemption de visas, ainsi que sur les avantages du dispositif, grâce auquel les voyageurs qui sont pourvus de ladite autorisation peuvent franchir la frontière de manière fluide et rapide. La Commission devrait également veiller à ce que toute mesure éventuellement adoptée par les pays concernés à titre de réciprocité à l’égard des citoyens de l’Union européenne soit proportionnée à celles qu’elle a elle-même prises. |
1.6. |
L’ETIAS devrait tenir compte des personnes qui ne sont pas en mesure de soumettre une demande en ligne et fournir à celles qui souhaitent en déposer une des «espaces de dépôt de demande» dans les principaux aéroports et ports maritimes de départ, ainsi qu’aux grands postes frontières terrestres. Tous les demandeurs devraient être autorisés à recourir aux services d’intermédiaires, par exemple des agences de voyage ou des entreprises de transport. Les délégations de l’Union européenne dans les pays tiers devraient toutefois surveiller et évaluer les frais qu’ils facturent pour leurs prestations. |
1.7. |
Il sera également nécessaire de définir correctement les critères utilisés pour définir les catégories proposées de ressortissants de pays tiers qui, en fonction de leur degré de risque migratoire, sécuritaire ou sanitaire, seront exemptées de l’obligation d’obtenir l’autorisation de voyage. |
1.8. |
Le Comité demande que des solutions soient dégagées pour les États membres qui n’ont pas encore intégralement mis en œuvre l’acquis de Schengen (Bulgarie, Chypre, Croatie et Roumanie) et n’ont par conséquent pas accès aux systèmes SIS, VIS et EES. |
2. Contexte
2.1. |
Les citoyens de l’Union européenne attendent des autorités qu’elles assurent leur sécurité dans une Europe ouverte. Ils comptent sur une gestion efficace des frontières extérieures de l’espace Schengen, qui prévienne l’immigration irrégulière, y assure tout à la fois une plus grande sécurité intérieure et la libre circulation et, dans un monde caractérisé par la mobilité, facilite le franchissement des frontières extérieures de l’Union européenne. |
2.2. |
Aujourd’hui, quelque 1,4 milliard de personnes originaires d’une soixantaine de pays à travers le monde (1) peuvent bénéficier de la possibilité de se rendre sans visa dans l’Union européenne, ainsi que du principe de réciprocité, et cette situation profite également aux citoyens de l’Union européenne, en ce qu’elle facilite leurs voyages à l’étranger sans visa. Le nombre de ressortissants de pays tiers exemptés de cette obligation de visa qui se rendent dans les pays de l’espace Schengen continuera de croître, puisque les chiffres pour les personnes de cette catégorie franchissant les frontières de Schengen devraient augmenter de plus de 30 % d’ici 2020, pour atteindre 39 ou 40 millions, contre 30 millions en 2014 (2). |
2.3. |
Ces chiffres illustrent la nécessité de mettre en place un système d’autorisation semblable à ceux qui existent déjà dans certains pays — aux États-Unis (3) depuis 2009, en Australie (4) depuis 1996, au Canada (5) depuis 2016 — en l’occurrence pour évaluer et gérer les risques potentiels en matière d’immigration irrégulière et de sécurité que posent les ressortissants de pays tiers qui se rendent dans l’Union européenne, mais d’une manière moins contraignante et plus conviviale pour les visiteurs que le régime classique de visas, conformément aux objectifs de la politique de l’Union européenne concernant la libéralisation dudit régime. |
2.4. |
Par comparaison avec les ressortissants de pays tiers qui sont soumis à l’obligation de visa, les autorités répressives et frontalières compétentes ne disposent, avant qu’ils n’entrent dans l’espace Schengen, que de peu d’informations sur ceux de pays tiers exemptés de ladite obligation, concernant les risques qu’ils peuvent poser. L’ajout de cette couche manquante de données et d’évaluation des risques posés concernant les visiteurs exemptés de l’obligation de visa étofferait considérablement les mesures existantes visant à maintenir et à renforcer la sécurité de l’espace Schengen, tout en permettant à ces visiteurs de profiter pleinement de leur exemption de visa. |
2.5. |
Dans son programme «Frontières intelligentes» de 2011, la Commission a fait valoir qu’il s’imposait d’instaurer une gestion plus moderne et plus efficace des flux de voyageurs aux frontières extérieures de l’Union européenne, en recourant aux nouvelles technologies afin de faciliter la vie des étrangers qui se rendent fréquemment dans l’Union et de mieux contrôler les ressortissants de pays tiers qui franchissent ses frontières. |
2.6. |
Face aux menaces et défis nouveaux qui sont apparus dans les années qui ont suivi, il est devenu nécessaire de revoir le programme initial «Frontières intelligentes» et, au terme d’études techniques et d’un processus de consultation, une nouvelle proposition législative de règlement portant création du système d’entrée et sortie a été publiée en 2016. Le CESE a adopté son avis sur ce dispositif en septembre 2016 (6). L’amendement qu’il a été récemment proposé d’apporter au code frontières Schengen (7) afin de renforcer les vérifications effectuées aux frontières extérieures au moyen de bases de données pertinentes (SIS, base de données d’Interpol sur les documents de voyage volés ou perdus et autres bases de données européennes) poursuit l’objectif d’instaurer un contrôle obligatoire pour l’ensemble des ressortissants de pays tiers et des citoyens de l’Union européenne, tant à l’entrée qu’à la sortie de son territoire. |
2.7. |
C’est pour compléter ce processus de réexamen que la Commission a publié une proposition visant à créer un système européen d’information et d’autorisation concernant les voyages (ETIAS), dont l’objectif est de renforcer les contrôles de sécurité sur les voyageurs sans visas (8). Il consistera en un système informatique automatisé, créé dans le but de détecter tout risque posé par des visiteurs exemptés de l’obligation de visa qui entrent dans l’espace Schengen — on estime qu’à partir de son lancement, en 2021, il devra traiter 40 millions de demandes (9). |
2.8. |
L’information ainsi collectée par ce système donnera la possibilité d’effectuer un contrôle préalable concernant les risques éventuels du point de vue de la sécurité ou de l’immigration irrégulière, en respectant intégralement les droits fondamentaux et les règles sur la protection des données. |
2.9. |
L’autorisation ETIAS ne constitue pas un visa. Les ressortissants de pays exemptés de l’obligation de disposer d’un visa continueront à pouvoir voyager sans en avoir un mais ils devront obligatoirement, pour entrer dans l’espace Schengen par un moyen de transport aérien, maritime ou terrestre, avoir obtenu avant leur voyage une autorisation d’entrée, soumise au versement d’une redevance dont il a été suggéré qu’elle soit fixée à un montant de 5 EUR. Pour décider d’accéder à une demande de voyage à destination de l’Union européenne ou de la rejeter, le système procédera à des contrôles préalables automatiques, qui devraient aboutir pour 95 % à un résultat favorable et auxquels d’autres, manuels, s’ajouteront si nécessaire, après quoi il émettra l’autorisation de voyage ou refusera son octroi. Le demandeur sera informé du résultat de la procédure dans un délai très bref: quelques minutes ou, au maximum, 72 heures si des vérifications supplémentaires sont requises. La décision définitive d’accorder ou de refuser l’entrée sera toujours prise par les garde-frontières nationaux qui effectuent le contrôle aux frontières selon le code frontières Schengen. |
2.10. |
Néanmoins, le contrôle préalable des voyageurs de pays tiers exemptés de l’obligation de visas aura pour effet de faciliter les contrôles aux frontières et de garantir que l’évaluation des risques liés à des ressortissants de pays tiers s’effectue de manière coordonnée et harmonisée, ainsi que de réduire sensiblement le nombre de refus d’entrée aux points de franchissement frontalier. Même si la durée de sa validité est de cinq années — ou court jusqu’à l’expiration de celle du document de voyage —, l’autorisation de voyager peut être révoquée ou annulée dès lors que les conditions qui avaient été remplies pour son émission ne sont plus réunies. |
2.11. |
Le règlement proposé inclut également pour principe général que l’ETIAS est fondé sur l’interopérabilité des systèmes d’information à consulter et sur la réutilisation des composantes développées à leur intention, en particulier le système d’entrée et sortie de l’Union européenne (EES). Une telle approche dégagera d’importantes économies sur les dépenses à consentir pour sa création et son fonctionnement. L’ETIAS et l’EES partageront un répertoire commun de données à caractère personnel de ressortissants de pays tiers, dans lequel d’autres données de la demande ETIAS (par exemple les informations sur la résidence, les réponses aux questions générales, l’adresse IP) et les fiches d’entrée-sortie de l’EES seront conservées séparément, tout en étant mises en relation avec ce fichier d’identification unique et partagé. Cette approche s’inscrit pleinement dans la stratégie d’interopérabilité et inclut toutes les garanties adéquates en matière de protection des données. |
2.12. |
Europol sera associé au projet pour l’élaboration des règles d’examen que suivront l’ETIAS et sa liste de surveillance, laquelle se composera de données en rapport avec des personnes qui sont soupçonnées d’avoir commis une infraction pénale ou d’y avoir participé ou pour lesquelles il existe des indices concrets ou des motifs raisonnables portant à croire qu’elles pourraient commettre une telle infraction ou présentent d’autres risques de sécurité ou de santé. |
2.13. |
C’est l’eu-LISA, l’Agence européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d’information à grande échelle au sein de l’espace de liberté, de sécurité et de justice qui assurera le développement du système d’information de l’ETIAS et sera également responsable de sa gestion technique. Le coût de son développement est estimé à 212,1 millions d’EUR et son coût d’exploitation annuel moyen à 85 millions d’EUR. Il est escompté qu’il soit opérationnel dès 2020. |
3. Observations générales
3.1. |
Le CESE estime que la volonté d’instaurer l’ETIAS pose un jalon qui, à l’heure actuelle, est indispensable en réaction aux menaces posées par des circonstances externes et internes. Il se peut que l’initiative ne réjouisse pas les voyageurs de pays tiers bénéficiant d’un régime d’exemption de visas mais elle s’inscrit dans la stratégie générale de l’Union européenne en matière de migration et de sécurité, telle que la Commission l’a définie dans son programme «Frontières intelligentes» de 2011. |
3.2. |
Le Comité relève que la proposition relative à l’ETIAS a pour visée de combler, en matière de gestion des frontières extérieures de l’Union européenne, la lacune qui permet à des citoyens d’États exemptés de l’obligation de visas de franchir les frontières de l’Union européenne sans que l’on dispose, avant qu’ils ne se présentent à la frontière Schengen, des informations adéquates à leur propos concernant les risques qu’ils peuvent représenter. |
3.3. |
La proposition relative à l’ETIAS se concentre sur les aspects techniques du système, sa gouvernance et les technologies de l’information qu’il requiert, ainsi que son interopérabilité et son interconnectivité avec d’autres systèmes de collecte et d’analyse de données (10). Le Comité est conscient de la haute complexité de ces problématiques et de la nécessité de résoudre de multiples questions techniques si l’on veut que le dispositif puisse être pleinement fonctionnel après son lancement, prévu pour 2021. L’ETIAS devrait établir le juste équilibre entre les risques et la sécurité, tout en évitant d’imposer des charges administratives supplémentaires et de poser de nouveaux obstacles aux voyageurs qui se rendent fréquemment dans l’Union européenne, en particulier pour y faire des affaires, travailler, effectuer de la recherche ou étudier. |
3.4. |
Le Comité a la conviction que la Commission et le Conseil devraient également prêter attention aux enjeux politiques de la création de l’ETIAS et expliquer aux pays concernés les raisons pour lesquelles il a été instauré, y compris les avantages qu’il comporte, à savoir donner aux voyageurs pourvus d’une autorisation de voyage la possibilité de franchir la frontière de manière fluide et rapide et assurer un niveau adéquat de sécurité, cependant que les demandes d’information à respecter pour obtenir ladite autorisation deviendront plus légères et moins contraignantes que dans la procédure normale de visa. La Commission devrait également veiller à ce que les mesures que les pays concernés adopteront éventuellement par réciprocité à l’égard des citoyens de l’Union européenne soient proportionnées à celles qu’elle a prises. |
3.5. |
Le Comité recommande d’informer bien à temps les pays intéressés à propos du système proposé et de mener les campagnes de communication requises pour que les voyageurs soient dûment instruits de la question, ainsi que d’instaurer le système par étapes, en lui donnant un caractère facultatif dans un premier temps, puis en ne le rendant obligatoire qu’une fois qu’il aura été mis en œuvre de manière adéquate et se sera avéré techniquement viable. |
3.6. |
Le Comité appelle la Commission à se prononcer sur les différentes formes qu’est susceptible de prendre la coopération avec les services de sécurité de l’Union européenne et à faire usage de leur expertise pour déterminer des profils à risque et établir la liste de surveillance spéciale de l’ETIAS. |
3.7. |
Dans son avis sur le train de mesures sur les frontières intelligentes, le Comité avait insisté sur la nécessité de respecter strictement les droits fondamentaux et le principe de la non-discrimination, ainsi que de recourir à des moyens procéduraux et institutionnels pour garantir que toutes les données collectées et stockées dans le système soient protégées et utilisées de manière appropriée (11). La recommandation s’applique en particulier aux données personnelles sensibles concernant l’éducation, la santé, la criminalité, etc. Sur ce point, il demande à nouveau, avec insistance, que l’accès aux données en rapport avec les autorisations de voyage soit strictement réservé aux organismes qui enquêtent sur les activités criminelles, le terrorisme, l’immigration irrégulière ou d’autres menaces. |
3.8. |
Le Comité approuve la structure qu’il est proposé de donner à l’ETIAS, qui devrait se composer d’un système d’information, d’une unité centrale ETIAS au sein du corps européen de garde-frontières et de garde-côtes (EBCG) et d’unités nationales. Il conviendra de s’assurer que la mise en œuvre de l’ETIAS par les États membres s’effectue de manière homogène et intégrale. Le Comité est favorable à la création d’un conseil d’administration du programme, qui est nécessaire pour assurer ces bons échanges entre l’équipe de développement à l’échelon central et les États membres qui se sont avérés d’une grande utilité dans l’élaboration de SIS II. |
3.9. |
Le Comité demande instamment que l’ETIAS présente une interopérabilité totale avec les autres systèmes d’information européens et une interconnexion avec les bases de données d’Interpol et qu’il soit possible d’y utiliser des éléments d’autres dispositifs européens, en particulier l’EES, tout en témoignant un plein respect pour les droits fondamentaux et la protection des données à caractère personnel. |
3.9.1. |
À cet égard, le Comité invite la Commission et les colégislateurs à prendre en considération les observations et les recommandations que le contrôleur européen de la protection des données a formulées dans son avis sur la proposition relative à l’ETIAS (12), en particulier les exigences qui concernent le respect de la distinction substantielle entre les domaines de la politique migratoire et de la politique de sécurité, la limitation de l’accessibilité des données à caractère personnel, l’examen de la fiabilité et de l’utilité des données collectées sur la santé, et une meilleure définition des outils de profilage pour l’examen automatique des demandes, entre autres choses. |
3.10. |
La liste de surveillance ETIAS se composera de données relatives aux personnes soupçonnées d’avoir commis une infraction pénale grave telle que définie dans la proposition ou d’y avoir participé, ou pour lesquelles il existe des indices concrets ou des motifs raisonnables portant à croire qu’elles pourraient commettre une telle infraction pénale grave ou présenter d’autres risques de sécurité ou de santé. Le Comité préconise que conformément aux normes européennes, les demandeurs aient le droit de connaître les raisons motivant le refus qui leur est opposé et disposent de la possibilité d’interjeter recours. |
4. Observations spécifiques
4.1. |
Le Comité convient que la durée de conservation des données devrait être fixée à cinq ans, comme dans le cas du règlement EES. |
4.2. |
Le Comité souligne qu’il conviendrait de faire que l’ETIAS soit à même de réagir de manière souple et efficace aux changements qui se produisent dans les circuits migratoires et en matière de sécurité et de risques sanitaires sans qu’il soit nécessaire de passer par de longues procédures législatives mais en recourant à des actes délégués et actes d’exécution, pour autant qu’ils soient soumis à un contrôle démocratique. |
4.3. |
Le dispositif de l’ETIAS devrait prendre en considération les personnes qui, pour toute raison valable, ne sont pas en mesure de déposer une demande en ligne. Le Comité est favorable à ce que, comme l’intention en est formulée, des «espaces de dépôt de demande» ad hoc soient mis à la disposition des demandeurs dans les principaux aéroports et ports maritimes de départ, ainsi qu’aux grands postes-frontières terrestres. Tous devront être autorisés à recourir aux services d’intermédiaires, par exemple des agences de voyage ou des entreprises de transport. Les délégations de l’Union européenne dans les pays tiers devraient toutefois surveiller et évaluer les frais qu’ils facturent pour leurs prestations. |
4.4. |
Dès lors que l’on s’attend à une augmentation de la fréquence des franchissements des frontières, surtout terrestres, il y a lieu, ainsi qu’il est signalé dans la description des objectifs du règlement, de tirer parti de toutes les occasions de renforcer l’efficacité des contrôles frontaliers. En conséquence, le Comité suggère que certaines informations contenues dans la demande d’autorisation de voyage soient tenues à la disposition des autorités frontalières. |
4.5. |
Le Comité souhaite que soient évités les goulets d’étranglement qui pourraient affecter l’ETIAS si on ne prévoit qu’un laps de temps trop court pour l’évaluation manuelle des demandes d’autorisation de voyage, car il est nécessaire de procéder à un examen de haute qualité sur les demandeurs, qui peut impliquer, au besoin, de mener des consultation avec d’autres États membres et avec Europol. En conséquence, il préconise que l’on allonge les délais impartis pour la vérification manuelle et que des critères stricts soient fixés pour cette extension. |
4.6. |
Il sera également nécessaire de définir correctement les critères utilisés pour définir les catégories proposées de ressortissants de pays tiers qui, en fonction de leur risque migratoire, sécuritaire ou sanitaire, seront exemptées de l’obligation d’obtenir l’autorisation de voyage. |
4.7. |
En ce qui concerne les droits qu’il est envisagé de percevoir pour une demande d’autorisation de voyage, le Comité demande le respect des critères suivants: il conviendrait que cette redevance, destinée à couvrir les frais inhérents au traitement des demandes et aux moyens à mettre en œuvre pour les récolter, n’empêche pas certaines catégories de population de demander une autorisation de voyage; par ailleurs, elle pourrait également jouer un rôle de filtre qui évite que de multiples demandes de ce type ne soient déposées. |
4.8. |
Il s’impose de disposer des garanties suffisantes, y compris grâce à une éventuelle utilisation future de données biométriques, pour assurer que l’ETIAS ne sera pas vulnérable à des fraudes sur l’identité. |
4.9. |
Le Comité appuie l’idée que les demandeurs disposent du droit de faire appel lorsque l’autorisation de voyage leur a été refusée ou qu’elle a été révoquée ou annulée. |
4.10. |
Le Comité fait observer que certains États membres (Bulgarie, Chypre, Croatie et Roumanie) n’ont pas encore intégralement mis en œuvre l’acquis de Schengen et qu’ils n’ont par conséquent pas accès aux systèmes SIS, VIS et EES. La proposition de règlement n’évoque pas la question de savoir comment l’ETIAS fonctionnera dans ces pays et le Comité demande que des solutions soient trouvées en ce qui les concerne. |
4.11. |
Le Comité souhaite faire observer que l’ETIAS devra s’appliquer au franchissement fluvial des frontières Schengen dans le cas du transport de passagers sur les voies de navigation intérieure, par exemple lors des croisières sur le Danube qui pourraient embarquer dans des pays hors UE ou hors Schengen de nouveaux passagers qui n’ont pas besoin de visa pour entrer dans l’Union. |
Bruxelles, le 27 avril 2017.
Le président du Comité économique et social européen
Georges DASSIS
(1) Albanie, Andorre, Antigua-et-Barbuda, Argentine, Australie, Bahamas, Barbade, Bosnie-Herzégovine, Brésil, Brunei, Canada, Chili, Colombie, Corée du Sud, Costa Rica, Dominique, El Salvador, Émirats arabes unis, État de la Cité du Vatican, États-Unis, Grenade, Guatemala, Honduras, Hong Kong, Îles Marshall, Îles Salomon, Israël, Japon, Kiribati, Macao, Macédoine, Malaisie, Maurice, Mexique, Micronésie, Moldavie, Monaco, Monténégro, Nicaragua, Nouvelle-Zélande, Palaos, Panama, Paraguay, Pérou, Saint-Christophe-et-Niévès, Sainte-Lucie, Saint-Marin, Saint-Vincent-et-les-Grenadines, Samoa, Serbie, Seychelles, Singapour, Taïwan, Timor-Oriental, Tonga, Trinité-et-Tobago, Tuvalu, Uruguay, Vanuatu, Venezuela, ressortissants britanniques du Royaume-Uni qui ne sont pas ressortissants du Royaume-Uni aux fins du droit de l’Union européenne.
(2) Le régime d’exemption de visas est aujourd’hui en cours d’adoption ou de négociation avec l’Ukraine, la Géorgie, le Kosovo et la Turquie.
(3) Par an, 30 millions de demandes.
(4) Par an, 1 million de demandes.
(5) Par an, 3 millions de demandes.
(6) Avis sur le système d’entrée/sortie — Rapporteur: Cristian Pîrvulescu (JO C 487 du 28.12.2016, p. 66).
(7) COM(2015) 670.
(8) Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d’un système européen d’autorisation et d’information concernant les voyages (ETIAS) et modifiant les règlements (UE) no 515/2014, (UE) 2016/399, (UE) 2016/794 et (UE) 2016/1624 [COM(2016) 731 final du 16 novembre 2016].
(9) Les volumes quotidiens escomptés, tels qu’estimés par la Commission européenne, sont de quelque 107 000 demandes, dont 5 % nécessitant un traitement manuel; entre 3 et 5 % de ces cas pourraient être résolus dans l’unité centrale, tandis que le restant incomberait à celles des États membres.
(10) SIS II, VIS, EES, EURODAC, ECRIS, Europol et les bases de données d’Interpol (SLTD, TDAWN).
(11) JO C 271 du 19.9.2013, p. 97.
(12) Avis du CEPD 3/2017 sur la proposition de système européen d’information et d’autorisation concernant les voyages, 6 mars 2017.
28.7.2017 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 246/34 |
Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur la gouvernance de l’union de l’énergie, modifiant la directive 94/22/CE, la directive 98/70/CE, la directive 2009/31/CE, le règlement (CE) no 663/2009, le règlement (CE) no 715/2009, la directive 2009/73/CE, la directive 2009/119/CE du Conseil, la directive 2010/31/UE, la directive 2012/27/UE, la directive 2013/30/UE et la directive (UE) 2015/652 du Conseil, et abrogeant le règlement (UE) no 525/2013»
[COM(2016) 759 final — 2016/0375/(COD)]
(2017/C 246/06)
Rapporteur: |
Brian CURTIS |
Consultation |
Parlement européen, 16 janvier 2017 Conseil de l’Union européenne, 20 janvier 2017 |
Base juridique |
Articles 191, 192 et 194 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne |
Compétence |
Section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures et société de l’information» |
Adoption en section spécialisée |
11 avril 2017 |
Adoption en session plénière |
26 avril 2017 |
Session plénière no |
525 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
103/0/1 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
Le règlement sur la gouvernance a pour but non seulement de fournir l’ensemble du cadre déterminant le fonctionnement des nombreux aspects de l’union de l’énergie, mais aussi de définir des responsabilités claires en matière d’élaboration des rapports et un processus permettant la réalisation de tous les objectifs climatiques et énergétiques de l’Union européenne dans un avenir prévisible. C’est un texte législatif complexe, ambitieux et d’une importance vitale. |
1.2. |
Il n’est pas exagéré d’affirmer qu’en l’absence d’un processus de gouvernance solide, l’union de l’énergie s’effondrera et que les chances qu’aura l’Union européenne de remplir les engagements qu’elle s’est elle-même fixés et ceux auxquels elle est liée au titre de l’accord de Paris seront fortement réduites. La participation et l’engagement de la société civile, la coopération et le soutien des États membres, de même que l’accord et l’engagement des partenaires sociaux sont essentiels à la réussite de ce processus. En particulier, il doit être clair que le règlement rend possible une transition énergétique juste, notamment en termes d’emplois et de coûts de l’énergie pour les ménages et les entreprises. |
1.3. |
Le CESE soutient la proposition de règlement sur la gouvernance. Ce dernier définit un cadre permettant aux États membres de choisir la solution la moins coûteuse pour leurs plans nationaux en matière d’énergie et de climat et d’atténuer les risques des actifs irrécupérables liés aux infrastructures. Cependant, il est peu probable que cela se produise, sauf si des modifications sont apportées au règlement. Il y a lieu de prévoir des mesures de soutien permettant de bâtir un consensus social aux niveaux national, régional et local quant à la meilleure façon de s’attaquer aux implications socioéconomiques et techniques découlant de la réalisation d’une transition énergétique juste. |
1.4. |
La solidarité et la sécurité énergétiques revêtent une importance capitale et, bien qu’elles constituent l’un des cinq principaux domaines d’évaluation et de déclaration dans le règlement, une attention particulière doit être accordée à la mise en place d’une diplomatie et d’une politique claires et consensuelles en matière d’énergie, à l’égard des pays tiers. |
1.5. |
Si la proposition de règlement sur la gouvernance n’est pas renforcée, c’est tout le concept d’union de l’énergie qui est menacé, du fait de l’affaiblissement de la légitimité du mandat de l’Union européenne à jouer un rôle moteur dans la transition énergétique. De même, le risque est grand que l’Union européenne soit de plus en plus perçue comme une entité technocratique éloignée des citoyens si des mesures concrètes ne sont pas prises pour faire participer les citoyens et exiger l’obligation de rendre des comptes. |
1.6. |
Parmi les termes qui devraient être clarifiés à l’article du règlement relatif aux «Définitions», figurent les termes suivants: «objectifs», «cibles», «contribution nationale», «consultation», «pauvreté énergétique» et «régional». |
1.7. |
Le règlement doit préciser clairement qu’il s’appliquera au-delà de 2030, inclure l’engagement explicite de l’Union européenne de parvenir à son objectif de réduction des émissions de GES d’ici à 2050 et, dans l’idéal, à son nouvel engagement international, à savoir zéro émission nette de GES d’ici à 2050. |
1.8. |
L’annexe au règlement doit comporter des valeurs de référence indicatives pour 2030 (meilleures estimations de la Commission) pour les contributions nationales des États membres en matière de sources d’énergie renouvelables et d’efficacité énergétique. |
1.9. |
Le règlement doit obliger les États membres à inscrire les contributions auxquelles ils se sont engagés à l’horizon 2030 dans leur droit national. |
1.10. |
Le règlement doit indiquer clairement qu’il est de la responsabilité individuelle des États membres de contribuer à la réalisation des objectifs généraux de l’Union européenne d’une manière qui soit à la fois adéquate et proportionnée. |
1.11. |
Il convient de souligner que les données fournies par les États membres doivent être pertinentes pour la période couverte et actualisées, et que des ressources suffisantes et des systèmes de soutien doivent être mis en place à cet effet. |
1.12. |
Les plans nationaux pour 2030 devraient être développés sur la base des connaissances et des orientations issues des stratégies à long terme en vue d’obtenir le plus d’avantages (par exemple, les choix à court terme seraient plus efficaces du point de vue du coût s’ils étaient effectués conformément à la stratégie à long terme). |
1.13. |
Le règlement doit prévoir un «mécanisme de cliquet» afin de contribuer à l’objectif ambitieux de l’accord de Paris de ne pas dépasser 1,5 oC de réchauffement par rapport aux niveaux préindustriels. |
1.14. |
Une «définition de référence» de la pauvreté énergétique devrait figurer en annexe afin de permettre l’analyse de données comparables et cohérentes. |
1.15. |
Le règlement devrait préciser clairement que les États membres ont l’obligation de publier les plans nationaux en matière d’énergie et de climat au stade le plus précoce possible et que les versions ultérieures des plans, y compris les observations et les réponses de la Commission, des États membres et des partenaires régionaux, tomberont toutes dans le domaine public. |
1.16. |
Il y a lieu de fournir davantage de détails sur l’évaluation des contributions financières de compensation et sur la nature de la «plateforme financière», ainsi que sur la possibilité de l’utiliser pour mobiliser des financements supplémentaires. Le champ d’application du fonds devrait être élargi pour inclure des mesures d’efficacité énergétique. |
1.17. |
La définition de la coopération «régionale» ne devrait pas se limiter à la proximité géographique mais devrait inclure des groupements d’États possédant des ressources énergétiques complémentaires, y compris d’États non membres de l’Union européenne. |
1.18. |
L’annexe devrait prévoir des dispositions spécifiques concernant la nature, l’étendue et les ressources de la consultation publique afin de permettre une sensibilisation et un engagement cohérents et informés des citoyens sur tout le territoire de l’Union européenne. |
1.19. |
La création, au sein de l’EEE, d’une unité européenne d’information spécialement consacrée à l’énergie devrait être envisagée. |
1.20. |
Un scénario «Brexit» devrait être élaboré parallèlement au «scénario à 28» et les deux scénarios devraient être examinés en parallèle lors de l’évaluation des contributions nationales. |
2. Introduction
2.1. |
Que ce soit sur le plan politique, économique ou technique, l’Europe fait face à l’heure actuelle à de nombreux défis qui ont des répercussions sur les citoyens et qui modèlent par conséquent la nature et l’avenir de notre démocratie. Pendant de nombreuses années, l’énergie a été un champ clos au sein duquel de puissantes forces politiques, techniques et économiques se sont livré bataille. L’union de l’énergie, dotée d’une vision pour l’avenir et d’une stratégie axée sur la cohésion, est le principal instrument dont dispose l’Union européenne pour veiller à ce que l’Europe dispose d’une énergie sûre, abordable et respectueuse du climat. |
2.2. |
Une gouvernance efficace de l’union de l’énergie ne consiste pas seulement à gagner la confiance des consommateurs et des investisseurs afin d’engranger un maximum de profits au meilleur coût — c’est un élément essentiel pour démontrer l’engagement de l’Union européenne à réaliser l’accord de Paris et à mettre tout en œuvre afin de dépasser les objectifs énergétiques et climatiques d’ici à 2050. Le succès du règlement sur la gouvernance offrirait dès lors à l’Europe une formidable occasion de démontrer la valeur ajoutée qu’elle apporte à ses citoyens, à ses États membres et au reste du monde. Ce serait d’autant plus important que l’on transcenderait ce faisant le clivage entre le système d’échange de quotas d’émission et le règlement sur la répartition de l’effort en vue d’amener les États membres à planifier la décarbonisation de l’économie dans son ensemble. |
2.3. |
En avril 2015, à la demande de la Commission européenne, le CESE a adopté un avis exploratoire sur le Développement du système de gouvernance proposé au titre du cadre pour le climat et l’énergie à l’horizon 2030 (1). La période qui s’est écoulée depuis lors a montré sans aucun doute la nécessité croissante d’agir dans les domaines de l’énergie et du climat et d’adopter une perspective à plus long terme s’agissant de la gouvernance de la transition vers une économie à faible intensité de carbone. La proposition de règlement à l’examen définit les exigences applicables aux plans nationaux intégrés en matière d’énergie et de climat ainsi qu’un processus d’établissement et de supervision harmonisé. Toutefois, ces deux dernières années, l’érosion de la confiance des citoyens dans la politique de cohésion et dans le leadership institutionnel et politique dans l’ensemble de l’Union européenne a rendu la question de la gouvernance à la fois plus nécessaire et plus difficile. |
2.4. |
En outre, l’accord de Paris de décembre 2015 est un accord international, signé conjointement et solidairement par l’Union européenne et ses États membres, lesquels s’engagent à fournir des contributions déterminées au niveau national (CDN), qui peuvent être considérées comme coïncidant avec celles prévues dans la proposition de règlement à l’examen. En outre, il a été convenu de poursuivre les efforts visant à limiter l’augmentation de la température mondiale à 1,5 oC par rapport aux niveaux préindustriels — une ambition nécessitant une planification à long terme et des objectifs exigeants, potentiellement plus ambitieux que ceux approuvés jusqu’à présent par l’Union européenne pour 2050. |
2.5. |
Dans son avis de 2015, le CESE a anticipé ces tendances et a adopté une approche pragmatique, soulignant la nécessité de renforcer et d’approfondir l’éducation, l’information et l’engagement des citoyens comme condition préalable à la réussite de toute proposition sur la gouvernance. Rien ne semble avoir été entrepris en ce sens. La gouvernance — avec ses conséquences en termes de prescriptions contraignantes concernant l’action souveraine des États membres — est un domaine sensible, en particulier dans le secteur de l’énergie où la situation peut varier considérablement d’un État membre à l’autre. En outre, tout processus, pour être couronné de succès, doit être complété par des mesures et des actions non législatives. |
2.6. |
En 2001, la Commission européenne a adopté un livre blanc sur la gouvernance (2). Ce document définit cinq principes de bonne gouvernance qui sont toujours valides (mais qui ne sont pas toujours mis en œuvre):
Ils reflètent les principes et les valeurs que le CESE promeut, mais nous souhaiterions ajouter un nouveau principe de «transition juste» à la proposition de règlement. |
2.7. |
Le système de gouvernance doit aussi permettre de tenir systématiquement compte de l’expression des points de vue, des préférences, des perceptions et des valeurs dans le cadre de la prise des décisions et de l’ajustement des politiques. La gouvernance doit reposer sur des processus de prise de décision solides et légitimes, mais également permettre de moduler ces choix en fonction des situations nationales et d’éventuels impondérables. Cela ne signifie pas pour autant qu’il faille changer de cap sans arrêt. Au contraire, cela signifie que l’orientation générale est protégée par l’engagement en faveur d’objectifs à court et à long terme compatibles avec les connaissances scientifiques en matière de climat, et par un processus stable de prise de décision quant à la manière d’atteindre ces objectifs – dans les faits, une plus grande cohérence et une dynamique inclusive. |
3. Contenu essentiel de la proposition de la Commission
3.1. |
La proposition de règlement sur la gouvernance, qui vise à garantir que les politiques et mesures qui configurent l’union de l’énergie soient cohérentes, complémentaires et suffisamment ambitieuses, repose sur deux volets. Le premier vise à rationaliser et à mieux intégrer les obligations en matière de planification, de communication d’informations et de suivi concernant les plans nationaux intégrés en matière d’énergie et de climat des États membres, la planification à l’horizon 2050 ainsi que les rapports d’avancement en la matière, grâce à un suivi intégré de la Commission au niveau de l’Union européenne; le second préconise un processus de gouvernance politique entre la Commission et les États membres concernant l’élaboration et la mise en œuvre des plans nationaux. Si la proposition est acceptée en l’état (une nouvelle mesure législative et des révisions de la législation dérivée existante), elle constituerait un nouveau mécanisme de coopération entre les États membres et la Commission. |
3.2. |
La proposition de règlement offre une base législative permettant d’intégrer ou d’abroger respectivement 31 ou 23 obligations existantes relatives à la planification, à l’établissement de rapports et au contrôle de l’acquis en matière d’énergie et de climat, soit plus de 50 obligations au total. Elle porte sur cinq dimensions de l’union de l’énergie: la solidarité et la sécurité énergétiques, le marché de l’énergie, l’efficacité énergétique, la décarbonisation et la recherche, l’innovation et la compétitivité. Elle définit en détail le contenu des plans nationaux intégrés en matière d’énergie et de climat qui, à compter de janvier 2019, et ensuite tous les dix ans, devront être élaborés par chaque État membre et porter sur l’ensemble de ces cinq dimensions. La consultation publique et la coopération régionale sont obligatoires, de même qu’une mise à jour du premier plan et des plans ultérieurs tous les cinq ans. Les principaux résultats sont les contributions nationales dans le domaine des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique, et la production des plans de décarbonisation de l’économie d’ici à 2050. |
3.3. |
Il est prévu que la Commission évalue les plans, les mises à jour de ces derniers ainsi que les mesures que devront prendre les États membres à la suite de ses recommandations. Un calendrier détaillé de présentation de rapports par les États membres tous les deux ans est également prévu, comportant des exigences détaillées concernant les politiques relatives aux gaz à effet de serre, aux mesures et aux projections, à l’adaptation des mesures nationales, au soutien financier et technologique aux pays en développement, aux recettes tirées de la mise aux enchères des quotas, aux énergies renouvelables, à l’efficacité énergétique, à la sécurité énergétique, au marché intérieur de l’énergie et à la recherche, à l’innovation et à la compétitivité. Une «plate-forme électronique d’élaboration de rapports» est également proposée. |
3.4. |
Le règlement comporte des clauses détaillées sur l’évaluation et le suivi ainsi qu’un mécanisme de recommandation et de réaction lorsque l’ambition ou les progrès accomplis sont jugés insuffisants. La mise en place d’un cadre contraignant pour les plans nationaux en matière d’énergie et de climat contribue à en garantir la comparabilité et la cohérence. Il existe une obligation pour les États membres d’apporter une contribution financière à une plate-forme financière destinée à couvrir les insuffisances constatées sur la base des objectifs convenus dans le domaine des énergies renouvelables. Le discours annuel sur l’état de l’union de l’énergie doit comporter des rapports complets sur ces domaines. L’Agence européenne pour l’environnement se voit attribuer un rôle spécifique et de grande envergure pour aider les services de la Commission. |
3.5. |
Le règlement est complémentaire et cohérent avec le semestre européen et, lorsque les questions de politique énergétique et climatique sont importantes pour certaines réformes macroéconomique ou structurelles, elles peuvent encore être abordées par l’intermédiaire des recommandations spécifiques par pays dans le cadre du semestre européen. |
4. Observations générales et spécifiques
4.1. Objectifs, cibles et contributions
4.1.1. |
Le règlement sur la gouvernance fournit un cadre détaillé pour les plans nationaux en matière d’énergie et de climat ainsi qu’un processus ultérieur de déclaration, d’évaluation et d’ajustement. Il s’articule autour de la fixation des objectifs, du suivi des cibles et de la réalisation des contributions. Toutefois, l’explication de ces termes ne figure pas à l’article 2 — «Définitions», omission qu’il conviendrait de corriger. |
4.1.2. |
Le CESE approuve et soutient les cadres détaillés prévus à l’annexe 1 pour les plans nationaux obligatoires en matière d’énergie et de climat. Ces cadres remplacent les anciens plans relatifs à l’efficacité énergétique et aux énergies renouvelables. L’obligation faite à chaque État membre de fixer le montant des contributions nationales dans ces domaines qui, cumulés, devraient atteindre au minimum l’ensemble des objectifs convenus au niveau de l’Union européenne, est particulièrement importante. |
4.1.3. |
Le CESE, dans ses avis précédents, a toujours plaidé avec force en faveur d’objectifs chiffrés nationaux contraignants (3). Son attitude en la matière était dictée par les nombreuses défaillances dues à la faiblesse, par le passé, de la mise en œuvre des politiques énergétiques. Si elles sont rigoureusement appliquées, adaptées et mises en œuvre, les contributions aux plans nationaux en matière d’énergie et de climat pourraient permettre d’obtenir un résultat équivalent à des objectifs contraignants. Toutefois, pour que cela devienne une réalité, il y a lieu de remédier à un certain nombre de faiblesses dans la proposition de règlement à l’examen. |
4.1.4. |
Les engagements convenus, que les États membres ont d’ores et déjà indiqués comme devant être atteints d’ici à 2020, constituent la valeur de référence pour les contributions nationales sur l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables. Toutefois, le règlement serait renforcé s’il comportait des valeurs de référence indicatives pour 2030 pour les contributions des États membres. En tout état de cause, ces dernières devront former la base du dialogue sur l’ajustement, et accéléreront le processus itératif qui est envisagé, pour autant qu’elles soient formulées et rendues publiques à un stade précoce. |
4.1.5. |
Certains pays ont transposé leurs objectifs chiffrés en matière énergétique à l’horizon 2020 dans leur droit national. Le CESE estime que le règlement devrait obliger les États membres à ancrer les contributions auxquelles ils se sont engagés pour 2030 dans leur droit national, afin de donner du poids à ces objectifs chiffrés grâce à des textes de loi contraignants. Toutefois, l’expérience montre que même les obligations juridiques ne garantissent pas nécessairement le respect des engagements. C’est la raison pour laquelle nous mettons l’accent sur l’importance de la bonne gouvernance en tant que processus stable susceptible de garantir des progrès; l’on verra plus loin que nous soulignons particulièrement l’importance de dispositions beaucoup plus fortes afin de permettre et de garantir l’engagement des parties prenantes en matière de gouvernance. |
4.1.6. |
Le règlement, pour renforcer encore l’importance des «contributions» nationales, doit préciser clairement, tant en ce qui concerne l’efficacité énergétique que les énergies renouvelables, qu’il est de la responsabilité individuelle des États membres de contribuer à la réalisation des objectifs généraux de l’Union européenne de manière adéquate et proportionnée. À l’heure actuelle, cette obligation est une responsabilité collective. |
4.2. Processus d’élaboration des rapports
4.2.1. |
Le CESE accueille favorablement le processus d’élaboration des rapports demandés aux États membres et le rôle analytique et/ou critique donné à la Commission concernant ces rapports, en liaison avec l’Agence européenne pour l’environnement. Une analyse précise, ferme et courageuse est essentielle si l’on veut que les recommandations et les avis de la Commission soient suivis d’effet. Il est également essentiel que les données soient pertinentes pour la période de référence et mises à jour, comme le souligne l’avis du CESE sur l’état de l’union de l’énergie en 2015 (4). |
4.2.2. |
Bien que les données exigées par la procédure d’élaboration des rapports soit alignée sur celle qui est requise au titre de l’accord de Paris sur le changement climatique, les mises à jour des plans nationaux en matière d’énergie et de climat sont effectuées avant l’achèvement du bilan global dans le cadre de l’accord de Paris, qui prendra cinq ans, ce qui aurait pour effet de retarder notablement la réponse à toute amélioration dans les contributions nationales de l’Union européenne. Il s’agit d’une atteinte inacceptable à l’harmonisation de la gouvernance étant donné que l’Union européenne a signé l’accord de Paris. Il conviendrait de mettre à profit cette situation afin de garantir un calendrier adéquat pour l’examen des contributions déterminées au niveau national par l’Union européenne et les Nations unies. |
4.2.3. |
Dans ce contexte, le règlement devrait prévoir en outre un «mécanisme de cliquet» afin de contribuer à l’objectif ambitieux de 1,5 oC de réchauffement par rapport aux niveaux préindustriels. Cela pourrait être réalisé par le biais de l’adoption de budgets carbone comportant de 5 à 10 étapes, dans lesquels l’Union européenne s’engagerait à parvenir à zéro émission nette de gaz à effet de serre d’ici à 2050. |
4.2.4. |
Le règlement exige que les plans nationaux en matière d’énergie et de climat comportent, entre autres, une analyse d’impact sur les questions sociales et, plus particulièrement, des objectifs nationaux en matière de pauvreté énergétique et un programme d’action. Le CESE, que cette question intéresse tout particulièrement, se félicite de cet ajout. Toutefois, les plans nationaux en matière d’énergie et de climat sont libres de déterminer leur propre définition de la pauvreté énergétique, ce qui rendra toute comparaison entre les données entre États membres impossible et compromettrait les chances de l’Union européenne de procéder à une transition juste, ainsi que la possibilité même d’une opposition de l’opinion publique à la transition. Par conséquent, nous préconisons que le règlement comporte une définition de référence simple. Les États membres ne seraient pas tenus d’adopter cette définition à des fins internes, mais celle-ci établirait ainsi un critère selon lequel les plans nationaux en matière d’énergie et de climat seraient tenus de faire rapport. Une telle définition pourrait par exemple être libellée comme suit: «Il y a pauvreté énergétique lorsqu’un ménage consacre plus de 10 % de son revenu disponible pour se chauffer ou pour rafraîchir son logement à un niveau de température adéquat.» Ce type de définition a permis à certains pays d’évaluer les progrès ou les régressions en matière de lutte contre la pauvreté énergétique, mais les multiples facteurs qui sont à l’origine du problème peuvent rendre nécessaire la recherche d’une définition comportant d’autres éléments. |
4.3. Transparence, obligation de rendre des comptes, mise en œuvre
4.3.1. |
Le Comité observe qu’une bonne partie de la législation antérieure en matière d’énergie a souffert de retards ou d’inexactitudes, qu’il s’agisse de transposition ou d’application. Les États membres doivent dès lors consentir un important effort, dans un esprit de solidarité et d’engagement, pour faire preuve de volonté politique et imposer les ressources administratives nécessaires à l’application effective du règlement. Le calendrier est extrêmement exigeant. Les projets de plans nationaux en matière d’énergie et de climat, qui ont fait l’objet au préalable d’un véritable processus de consultation et d’un dialogue au niveau régional, doivent être remis à la Commission le 1er janvier 2018. Cela implique que ces projets de plans nationaux en matière d’énergie et de climat, ainsi que les dialogues avec les parties prenantes et les partenaires régionaux qui en découlent sont déjà en cours d’élaboration. Le CESE se félicite que les exigences relatives à un nouveau cadre et à des objectifs pour la période 2020-2030 tirent ce processus vers le haut, mais craint qu’en l’absence de compréhension et d’engagement des citoyens, qui sont essentiels, la légitimité de la politique énergétique de l’Union européenne ne soit compromise, en particulier parmi les consommateurs confrontés à la hausse des coûts de l’énergie. |
4.3.2. |
Le processus de gouvernance envisagé comporte peu de sanctions manifestes pour cause d’ambition insuffisante ou pour non-conformité. La transparence et l’obligation de rendre des comptes sont essentielles si l’on veut que tous les acteurs, notamment les citoyens, exercent une influence. C’est pourquoi le CESE suggère de créer un organisme indépendant composé de parties prenantes afin de garantir une réelle représentation et une consultation véritable des parties prenantes dans chaque État membre, et préconise que cet organisme publie un rapport annuel sur le processus de gouvernance et le dialogue. (Voir le paragraphe 4.6.) |
4.3.3. |
La transparence est fréquemment mentionnée dans le règlement, mais le CESE est préoccupé par le fait qu’il n’est pas clairement précisé si la publication rapide et l’accès du public à chaque stade du développement des plans nationaux en matière d’énergie et de climat sont obligatoires ou non. Il est fait dans le préambule — mais non dans les articles du règlement — une référence à la convention d’Aarhus, que le Comité estime insuffisante. Le règlement devrait préciser clairement que les États membres ont l’obligation de publier les projets de plans nationaux en matière d’énergie et de climat au stade le plus précoce possible et que les versions ultérieures des plans, y compris les observations et les réponses de la Commission, des États membres et des partenaires régionaux, tomberont dans le domaine public. |
4.3.4. |
Étant donné le rôle essentiel de la transition vers les énergies renouvelables, il serait nécessaire de clarifier davantage la nature et le fonctionnement de la «plateforme de financement» (article 27), ainsi que la manière dont une valeur financière serait appliquée en cas de défaillance dans la fourniture d’énergie renouvelable. À titre d’exemple, est-il prévu que cette plate-forme permette de mobiliser des financements du secteur privé sur la base de «contributions» des États membres? Il est suggéré d’appliquer les ressources accumulées dans une plate-forme de ce type aux mesures en matière d’efficacité énergétique ainsi qu’à la fourniture d’énergies renouvelables. |
4.3.5. |
Des incertitudes subsistent quant à la manière dont les recommandations émises par la Commission à la suite de la procédure annuelle de rapport seront appliquées faute d’être rapidement mises en œuvre par les États membres. Si cela se fait au moyen de la procédure d’infraction habituelle, il est probable que le processus sera bien trop lent pour être efficace dans les délais. |
4.4. |
Nous soutenons pleinement les dispositions qui rendent obligatoire la coopération régionale entre les États membres afin d’améliorer l’efficacité et l’efficience des mesures et de promouvoir l’intégration des marchés et la sûreté de l’énergie. Toutefois, nous suggérons que le terme «régional» soit repris à l’article 2 «Définitions» afin de permettre à la Commission de proposer et de mettre en œuvre l’engagement en cas de nécessité. À l’heure actuelle, il existe une possibilité que le terme «régional» soit compris comme intra-étatique plutôt que comme interétatique, ou qu’une «région» soit définie géographiquement, par opposition à un groupement d’États disposant de ressources énergétiques complémentaires. |
4.5. |
En particulier, nous sommes extrêmement déçus de constater que l’article 10 relatif à la consultation publique, est imprécis, inapproprié et très éloigné de la proposition du CESE en faveur d’un vaste dialogue européen sur l’énergie — qui pourrait toucher les citoyens/consommateurs directement et de manière cohérente, et permettrait de sensibiliser l’opinion publique à une question qui, dans de nombreux États membres, sera difficile à faire accepter. Un tel dialogue est trop important pour être traité dans le cadre de la rubrique des «actions non législatives»; il conviendrait de lui donner davantage de substance en ajoutant un paragraphe à l’article 10. Cet article ne répond pas non plus aux normes de la directive sur l’évaluation environnementale stratégique, qui fixe les normes en faveur d’une gouvernance environnementale transparente et participative, dont la planification en matière d’énergie et de climat est un élément clef. |
4.6. |
Par conséquent, nous réaffirmons la position du CESE, à savoir que le processus de gouvernance tel qu’il est énoncé dans la proposition de règlement à l’examen ne permettra pas de produire les contributions déterminées au niveau national sans la participation et le soutien de la société civile dans toute l’Europe. Pour gagner la confiance et la participation des citoyens, un tel dialogue devrait être indépendant des gouvernements et du processus des plans nationaux en matière d’énergie et de climat. Il devrait être un élément de référence pour l’information des consommateurs, aider les fournisseurs d’énergie à s’engager et à construire la confiance, et permettre aux nombreuses préoccupations des différents groupes de s’exprimer, qu’il s’agisse de la sécurité ou du caractère abordable et durable de l’énergie. Le CESE a fait part de sa volonté de jouer un rôle dans ce processus, qu’il a appelé «dialogue européen sur l’énergie» (DEE) en organisant et en participant à certains aspects des consultations organisées au niveau national. Toutefois, la portée d’un tel dialogue doit pouvoir s’appuyer sur des ressources plus importantes et sur un vaste engagement au niveau national. En résumé, les mesures suivantes seraient nécessaires:
|
4.7. |
Le CESE suggère la création, au sein de l’EEE, d’une unité européenne spécialement consacrée à l’information sur l’énergie, qui assumerait la responsabilité du recueil des données et des processus d’évaluation découlant du règlement sur la gouvernance. Cette unité travaillerait en étroite liaison avec l’Observatoire européen de la pauvreté énergétique dont le CESE a proposé la création, et fournirait des services d’information pour le dialogue européen sur l’énergie au niveau national. |
4.8. |
La sécurité énergétique est l’un des cinq principaux domaines d’élaboration des rapports et d’évaluation prévus par le règlement et ce domaine, en particulier, nécessitera un dialogue régional approfondi. Le Comité a déjà fait observer que l’Union européenne avait besoin, vis-à-vis des pays tiers, d’une diplomatie et d’une politique claire et consensuelle en matière d’énergie (5). La sécurité et la solidarité énergétiques sont, selon la Commission, le premier pilier d’une union commune de l’énergie, mais aucun résultat ne peut être atteint sans accords ni partenariats solides avec les principaux acteurs mondiaux, sans politique commune de l’énergie. |
4.9. |
Le CESE est préoccupé par l’impact du Brexit sur le processus de gouvernance. Tout d’abord, en l’état actuel des choses, le processus prévu par le règlement suppose l’appartenance du Royaume-Uni à l’Union, et les contributions déterminées au niveau national seront évaluées sur cette base. La version finale des plans nationaux en matière d’énergie et de climat sera déterminée avant que le Royaume-Uni ne quitte officiellement l’Union européenne, mais à ce stade, il se peut que des ajustements importants soient nécessaires afin de permettre le retrait des contributions nationales du Royaume-Uni de la contribution globale de l’Union européenne. Nous proposons que la Commission élabore un scénario «Brexit» à côté du scénario à 28, et que les deux scénarios soient examinés en parallèle. Deuxièmement, le retrait du Royaume-Uni pourrait avoir une incidence majeure sur l’équilibre politique et diplomatique de la stratégie dans chacune des cinq catégories du champ d’application du règlement — en particulier la sécurité énergétique. |
Bruxelles, le 26 avril 2017.
Le président du Comité économique et social européen
Georges DASSIS
(1) JO C 291 du 4.9.2015, p. 8.
(2) COM(2001) 428 final.
(3) JO C 424 du 26.11.2014, p. 39 et JO C 75 du 10.3.2017, p. 103.
(4) JO C 264 du 20.7.2016, p. 117.
(5) JO C 264 du 20.7.2016, p. 117.
28.7.2017 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 246/42 |
Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2012/27/UE relative à l’efficacité énergétique»
[COM(2016) 761 final — 2016/0376 (COD)]
(2017/C 246/07)
Rapporteur: |
Mihai MANOLIU |
Consultation |
Conseil, 9 décembre 2016 Parlement européen, 12 décembre 2016 |
Base juridique |
Article 194, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne |
Compétence |
Section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures et société de l’information» |
Adoption en section spécialisée |
11 avril 2017 |
Adoption en session plénière |
26 avril 2017 |
Session plénière |
525 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
115/1/2 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
Il est nécessaire que les citoyens européens participent activement à la promotion de l’efficacité énergétique, qu’ils aient l’initiative et coopèrent dans le cadre de projets communs et qu’ils s’efforcent de lever les obstacles d’ordre économique, administratif et réglementaire. L’enjeu commun doit consister à réaliser les ambitions découlant de la COP 21, avec les avantages multiples qui en résultent: nouveaux investissements (rénovation des bâtiments, amélioration du confort, relevés de compteurs efficaces et équitables), propres à créer des emplois, recul du niveau de précarité énergétique, réduction de la pollution et amélioration de l’état de santé de la population, ou encore, diminution de la dépendance vis-à-vis des importations d’énergie. Le CESE réclame que les États membres s’engagent plus fermement dans la mise en œuvre de la directive sur l’efficacité énergétique, étant donné que les nouveaux objectifs proposés pour 2030 sont plus ambitieux que ceux définis pour 2020. |
1.2. |
L’efficacité énergétique est un sujet de grande importance pour l’avenir du système énergétique européen. Accroître l’efficacité énergétique dans tous les champs d’utilisation de l’énergie peut être un moyen puissant de diminuer les coûts pour l’économie européenne et, surtout, le principe d’efficacité énergétique est à même de se muer en un facteur d’amélioration de l’accessibilité financière. Ce principe fait qu’il est nécessaire de diminuer la demande d’infrastructures auxiliaires, fort coûteuses. Les obligations en matière d’économies d’énergie sont compatibles avec le développement durable (situation pérenne et sûre) et il convient d’utiliser les synergies pour soutenir une transition efficace vers un système énergétique intelligent, résilient et sobre en carbone (systèmes de distribution transrégionaux, gestion de la demande, systèmes de stockage). |
1.3. |
Le CESE prend note de la proposition de la Commission s’agissant d’atteindre un objectif contraignant d’efficacité énergétique de 30 % pour 2030, mais il estime qu’il conviendrait de justifier dûment l’initiative de porter l’objectif au-delà de 27 %, en mettant en évidence les avantages économiques afférents et le niveau des investissements nécessaires pour atteindre ces visées. Il importe au plus haut point que l’analyse d’impact prenne en considération l’ensemble des mesures visées par les paquets législatifs en matière d’énergie et de climat. |
1.4. |
Le CESE demande que, pour lever les principaux obstacles qui entravent l’application de l’article 7 de la directive relative à l’efficacité énergétique, l’on augmente le degré de sensibilisation des consommateurs finals, par des activités de promotion et de communication sur les systèmes d’efficacité énergétique, ainsi que sur les mesures alternatives. Il y a lieu de consentir des investissements supplémentaires, par lesquels chaque État membre devra mettre en place des actions crédibles d’information, de communication, d’éducation et d’assistance qui encouragent les citoyens et les entreprises, de manière à accélérer la réalisation de l’objectif politique en matière de climat et d’efficacité énergétique. |
1.5. |
Le CESE demande aux États membres d’accorder davantage d’attention aux ménages en situation de précarité énergétique et aux logements sociaux, pour lesquels il conviendrait de réduire de manière durable les coûts de l’énergie. Un autre objectif important à cet égard est d’améliorer l’efficacité énergétique du parc immobilier résidentiel et d’établir des normes minimales pour les logements loués (audits énergétiques). |
1.6. |
Le CESE fait observer qu’il importe d’éduquer le consommateur final en matière de techniques de production combinée d’énergie électrique et thermique (cogénération, climatisation), de relevés intelligents de la consommation et de plans de rénovation. Cette action est également essentielle pour encourager les investisseurs, les autorités publiques et les entreprises et leur insuffler la confiance nécessaire afin qu’ils réalisent des projets à grand potentiel d’efficacité et participent au financement de la recherche et du développement. |
1.7. |
Le CESE souhaite que les dispositions qui définissent les instruments financiers européens (prêts, garanties, capitaux propres pour attirer des fonds, subventions) soient telles qu’elles aient pour effet d’attirer également des financements privés destinés aux projets énergétiques. Il convient de ne pas négliger le volet des subventions pour les projets à fort impact social. De tels régimes financiers doivent être accordés aux projets s’adressant aux consommateurs à faibles revenus. Il est préconisé d’élaborer, pour les plans nationaux, des orientations en matière de transparence et de comparabilité. Le CESE estime qu’il convient de soutenir en priorité les ménages en situation de précarité énergétique, en garantissant ainsi un cadre politique stable à long terme pour les États membres, en vue d’un développement local durable. |
1.8. |
Le CESE estime que ce dispositif pourra être réalisé moyennant une assistance technique pour la mise en œuvre de la directive relative à l’efficacité énergétique, grâce à des systèmes de financement novateurs qui seront basés sur le marché. S’agissant de l’octroi d’incitants financiers, un élément quantitatif qui joue un rôle majeur est l’audit énergétique (définition des PME, élimination de la double certification, mise en place d’une approche uniforme en ce qui concerne le seuil de minimis étendu), lequel offre tout à la fois un instrument pour accroître l’efficacité énergétique et un avantage sur le plan de la compétitivité. Il convient également d’adopter une approche correcte en matière d’assurance de la qualité et de prévoir des programmes nationaux de formation pour les fournisseurs de services d’efficacité énergétique. |
1.9. |
Le CESE recommande qu’en vue d’augmenter l’efficacité énergétique pour les consommateurs, l’on réalise, au niveau national, des analyses confrontant avantages et coûts, qui aboutissent à faire baisser ces derniers. |
1.10. |
Le CESE préconise d’adopter une approche globale et de procéder à une amélioration de l’efficacité énergétique dans l’ensemble du système de transport, en s’appuyant sur les développements continus de la technologie des véhicules et des systèmes de propulsion, sur le passage à des modes de transport efficaces du point de vue énergétique et sur des systèmes de transport intelligents (STI) propres à accroître le taux d’utilisation des capacités disponibles. Une telle démarche doit également être envisagée pour l’aviation et le transport maritime. Les utilisateurs doivent être informés de la consommation de combustibles liée à chaque mode de transport, y compris pour ce qui est des limites correspondantes en matière d’émissions de CO2. |
2. Observations générales
2.1. |
Le CESE souscrit aux éléments suivants: «le principe de primauté de l’efficacité énergétique est l’un des éléments fondamentaux de l’union de l’énergie» et la proposition de modification à l’examen entend mettre en œuvre ce principe. «L’énergie la moins chère, la plus propre et la plus sûre est celle qu’on n’utilise pas. L’efficacité énergétique constitue l’une des manières les plus efficaces de soutenir la transition vers une économie sobre en carbone et de créer de la croissance, de l’emploi et des possibilités d’investissement». |
2.2. |
Toutefois, si l’objectif en matière d’efficacité énergétique a été fixé à 20 % pour 2020, plusieurs cibles chiffrées ont été analysées pour l’horizon 2030 (entre 27 % et 40 %). La plus ambitieuse est celle de la résolution du Parlement européen, qui préconise un objectif contraignant de 40 %. Après une analyse des avantages dégagés sur le plan de l’emploi et de la croissance économique, de la sécurité de l’approvisionnement, de la réduction des émissions de gaz à effet de serre, de la santé et de l’environnement, la Commission a proposé un objectif contraignant de 30 % en matière d’efficacité énergétique. Le CESE estime, eu égard à cette extension, qu’il importe au plus haut point d’analyser attentivement l’impact que les objectifs chiffrés en matière d’efficacité énergétique auront sur les autres cibles qui ont été fixées dans les propositions législatives relatives à l’énergie, et en particulier sur le système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne (SEQE-UE). |
2.3. |
Pour atteindre ces objectifs mobilisateurs, les États membres, avec l’aide des Conseils économiques et sociaux des différents pays, ainsi que les fournisseurs et distributeurs d’énergie, vont devoir prendre la mesure-clé de réaliser des économies d’énergie de 1,5 % par an en valeur. Le CESE estime qu’il est justifié de proposer de prolonger au-delà de 2020 l’obligation en matière d’économies d’énergie, en maintenant le taux de 1,5 % par an, par des mécanismes contraignants et des mesures alternatives flexibles, au niveau des États membres, concernant la mise en œuvre des obligations d’économie. |
2.4. |
La nouvelle approche, que le CESE soutient également, offrira, aux États membres comme aux investisseurs, une perspective à long terme nécessaire pour élaborer leurs stratégies et planifier leurs investissements afin d’atteindre l’objectif fixé pour l’échelon de l’Union européenne, par la mise en œuvre de politiques adaptées au niveau national et régional, et de dégager ainsi d’importants avantages d’ici à 2030, notamment une diminution de 17 %, par rapport à 2005, de la consommation d’énergie finale, un renforcement de la croissance économique correspondant à une augmentation de 0,4 % du PIB, une baisse des prix de l’électricité pour les ménages et les entreprises (de 161 à 157 EUR/MWh), la création de débouchés commerciaux ouvrant sur la création d’emplois corrects (adéquats), un endiguement de la pollution et des atteintes à la santé (avec des coûts réduits dans une fourchette de 4,5 à 8,3 milliards d’euros) et une amélioration de la sécurité énergétique (réduction des importations de gaz de 12 % en 2030). |
2.5. |
De l’avis du CESE, l’information des principaux acteurs du marché de l’énergie, la fourniture aux ménages et aux consommateurs industriels d’informations pertinentes, claires et concises sur leur consommation, ainsi que le renforcement de leurs droits légitimes en matière de relevés (lisibilité à distance des compteurs) et de facturation, notamment pour l’énergie thermique, constituent des éléments essentiels. Il convient de ne pas oublier les consommateurs vulnérables dont le confort et le niveau de vie devraient augmenter, grâce à la baisse de leurs factures d’énergie. |
2.6. |
Toutefois, la protection des consommateurs vulnérables requiert également que la directive n’impose pas le compteur individuel dans les pays où les propriétaires sont légalement tenus d’assumer les frais d’énergie de leurs locataires: cette nécessité se justifie en particulier du fait que cette législation sur la location d’immeubles incite grandement leurs détenteurs à entreprendre des travaux de rénovation pour une meilleure efficacité énergétique. Il convient également de souligner que dans certains États membres, le placement de bon nombre de ces compteurs individuels ne s’est effectué que récemment, dans un but de mise en conformité avec la législation européenne en vigueur, et que leur durée de vie s’étend bien au-delà de la date-butoir de 2027 fixée par la Commission pour leur remplacement par des appareils lisibles à distance. Les consommateurs de l’Union européenne seraient en droit de considérer que leur remplacement représente d’inutiles dépenses supplémentaires et qu’il conviendrait donc de s’en abstenir. |
2.7. |
Le CESE juge essentielle l’idée de renforcer les aspects sociaux liés à l’efficacité énergétique et à la lutte contre la précarité et la pauvreté énergétique, notamment dans le cas des consommateurs vulnérables. Les États membres de l’Union européenne se doivent d’accorder une plus grande attention aux mesures sociales. La mise en œuvre de la directive constitue un facteur essentiel de bien-être. |
2.8. |
Il y a lieu de ne pas oublier que les objectifs d’efficacité énergétique sont liés à ceux qui concernent le climat, par le truchement de la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Cet impératif débouche sur des politiques qui augmentent l’intensité et la vitesse avec lesquelles de nouvelles technologies sont adoptées. Celles-ci vont générer des économies d’énergie dans les transports, l’industrie et les bâtiments, ainsi que pour les ménages. Au final, selon l’article 7 de la proposition de directive (économies réelles d’énergie, mesures concrètes d’efficacité énergétique), les nouvelles technologies vont représenter pour les États membres une manière économiquement efficiente de respecter les objectifs nationaux du système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne («SEQE-UE») et de la décision relative au partage de l’effort. |
2.9. |
Pour ce qui concerne la législation sur l’efficacité énergétique actuellement en vigueur, le Parlement européen fait les constatations suivantes: «La directive relative à l’efficacité énergétique [constitue] un cadre de référence pour réaliser des économies d’énergie, malgré une mise en œuvre insuffisante»; «les réglementations concurrentielles freinent les progrès écologiques, alourdissent la bureaucratie et entraînent une augmentation des prix de l’énergie»; «davantage de cohérence [est] requise dans la législation en matière d’énergie»; «une efficacité énergétique accrue [conduit à] plus d’emplois et de croissance». |
2.10. |
Dans ce contexte, le CESE se dit convaincu que la nouvelle proposition législative en matière d’efficacité énergétique tiendra compte du présent avis, ainsi que des mesures proposées par le Parlement européen. |
3. Observations particulières
3.1. Base juridique, subsidiarité et proportionnalité
3.1.1. |
L’article 194, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) constitue, en combinaison avec la directive 2012/27/UE, la base juridique des mesures dans le domaine de l’énergie. En conséquence, une directive modificative représente un instrument approprié. |
3.1.2. |
Le CESE estime que jusqu’à présent, les objectifs d’efficacité énergétique n’ont pas pu être réalisés, l’une des raisons en étant qu’en la matière, les États membres ont agi indépendamment les uns des autres. Une action coordonnée à l’échelle de l’Union européenne est donc nécessaire pour encourager les activités au niveau de ses États membres. Les problèmes énergétiques posent des défis politiques, économiques (marché intérieur, développement, investissements, réglementations) et sociaux (consommation d’énergie, problèmes tarifaires, précarité, emplois), ainsi que des problèmes de sécurité de l’approvisionnement en énergie. Il convient de ne pas omettre par ailleurs les difficultés liées aux changements climatiques. |
3.1.3. |
Le CESE souligne avec force qu’il s’impose de respecter le principe de subsidiarité et de conserver de la souplesse en ce qui concerne les composantes du bouquet énergétique et les mesures en la matière, si l’on veut avoir la garantie de réaliser les économies auxquelles les États membres se sont volontairement engagés pour 2030. |
3.2. Mise en œuvre, suivi, évaluation et établissement de rapports
3.2.1. |
Différents niveaux de réduction de l’énergie primaire ont été évalués par rapport à la situation de référence de 2007 et, pour la formulation de l’objectif, il a été procédé à une analyse de la consommation d’énergie primaire et finale, dans une perspective d’économie d’énergie ou d’intensité énergétique. Les conclusions des débats ont montré que la majorité des acteurs intéressés se sont dits favorables à ce que l’objectif pour 2030 soit fixé à 30 %. |
3.2.2. |
Il est ressorti des analyses que les options privilégiées sont les suivantes:
|
3.2.3. |
Une des conclusions importantes concerne les incidences sociales: chaque investissement de 1,2 million d’euros dans le domaine de l’efficacité énergétique créerait environ 23 emplois directs dans ce secteur. |
3.2.4. |
Pour ce qui concerne la réduction des frais de combustibles obtenue grâce aux mesures d’efficacité énergétique pour les personnes se trouvant en situation de précarité énergétique, l’on s’attend à un résultat positif, qui pourrait aider à résoudre certains des problèmes liés à l’exclusion sociale. |
3.2.5. |
Le CESE estime que la proposition de modification de la directive aura une incidence positive sur les PME, grâce aux dispositions spécifiques qu’elle contient, aux régimes de soutien, prévoyant des dispositifs de prise en charge des coûts d’audit énergétique, et aux programmes visant à les encourager à effectuer de tels audits. Par la rénovation des bâtiments et du fait de la prolongation de l’article 7 jusqu’en 2030, au-delà de sa limite actuelle, les petites entreprises de construction pourront profiter de débouchés commerciaux. Les contrats de performance énergétique passés avec des fournisseurs sont également de nature à stimuler les entreprises de services énergétiques, qui sont souvent des PME. |
3.2.6. |
Le CESE estime dans le même temps que les mesures proposées en matière de relevés et de facturation de consommation d’énergie auront pour effet de clarifier et d’actualiser les dispositions en vigueur pour tenir compte des évolutions technologiques en ce qui concerne les dispositifs de mesure à distance de la consommation thermique (chauffage, climatisation). De même, les informations relatives à la consommation d’énergie seront correctes, individualisées et disponibles à une plus grande fréquence, conformément aux politiques nationales en matière d’énergie. |
3.2.7. |
Bien que sa durée d’application soit prorogée dans le temps, la proposition ne devrait pas avoir beaucoup de conséquences du point de vue du budget ou des coûts administratifs pour les autorités publiques des États membres, étant donné que ces derniers ont déjà mis en œuvre des mesures et des structures adéquates. Les coûts liés aux mesures en rapport avec les mécanismes d’obligations en matière d’efficacité énergétique seront répercutés sur les clients finals. Ces derniers profiteront toutefois de factures énergétiques réduites, en raison de la diminution de leur consommation d’énergie. La proposition n’a aucune incidence sur le budget de l’Union européenne. |
3.2.8. |
La nouvelle gouvernance énergétique garantira la mise en place d’un système souple et transparent d’analyse, de planification, d’établissement de rapports et de suivi, fondé sur les plans nationaux intégrés en matière d’énergie et de changements climatiques. Elle permettra de suivre la mise en œuvre des plans nationaux sous l’angle de l’accomplissement de leurs objectifs en matière d’efficacité énergétique, ainsi que les progrès dans la réalisation de l’objectif global de l’Union européenne. Ce dispositif reposera sur le suivi d’indicateurs de réussite conformes à l’option privilégiée: la transposition et la mise en œuvre correctes, l’intensification des progrès dans la réalisation des objectifs, une mise à disposition accrue d’informations aux consommateurs, la réduction de la charge administrative et, enfin, l’amélioration des rapports relatifs aux économies réalisées. |
3.3. Observations sur les dispositions spécifiques de la proposition de modification de la directive
3.3.1. |
L’objectif indicatif de 27 % a été remplacé par un autre, contraignant, de 30 % au niveau de l’Union européenne. Il incombe à chaque État membre de se fixer un objectif national en matière d’efficacité énergétique pour 2020, fondé sur la consommation d’énergie finale et primaire. La Commission évaluera les progrès en analysant tous ceux qui lui auront été communiqués, afin de déterminer les progrès accomplis dans la réalisation de l’objectif au niveau de l’Union européenne. Si l’Union n’est pas en bonne voie pour l’atteindre, elle pourra proposer des mesures en conséquence. Le processus d’évaluation sera défini en détail dans le cadre de la gouvernance de l’union de l’énergie. |
3.3.2. |
Il est fait obligation aux États membres d’établir une stratégie à long terme pour mobiliser les investissements nécessaires dans la rénovation de leur parc immobilier national. Le paragraphe où figure cette disposition sera déplacé de la directive sur l’efficacité énergétique à celle relative à la performance énergétique des bâtiments (directive PEB). Le CESE considère que celle-ci représente un instrument très important pour atteindre les objectifs que l’Union européenne s’est assignés, le parc immobilier étant le plus grand consommateur d’énergie en Europe (plus de 40 % du total de l’énergie finale). |
3.3.3. |
Le CESE estime que le concept de cogénération revêt une importance décisive, s’agissant d’assurer la production simultanée, dans une même installation (groupe formé d’un générateur avec une turbine à vapeur ou un moteur à combustion interne, etc.), d’énergie électrique et thermique, sous la forme d’eau chaude, de vapeur ou de fluide de refroidissement. La cogénération à haut rendement suppose que la production combinée garantisse la réalisation d’économies d’énergie primaire d’au moins 10 % par rapport aux valeurs de référence de l’énergie électrique et de l’énergie thermique qui seraient produites séparément. À la différence des centrales électriques classiques (à condensation), qui ne transforment que 33 % de l’énergie primaire en énergie électrique, celles de cogénération à haut rendement portent ce taux de conversion jusqu’à 90 %, en combinant les deux processus, à savoir la production simultanée d’énergie électrique et thermique. |
3.3.4. |
La cogénération présente de grands avantages: efficacité énergétique, souplesse dans le choix du combustible, facilité d’exploitation et d’entretien, confort pour le client, coût réduit sur le cycle de vie, baisse des exigences en capital et flexibilité dans la conception du dispositif. |
3.3.5. |
En plus de fournir de l’énergie à partir de sources adéquates (à émissions de carbone réduites) et d’optimiser la consommation énergétique, le stockage de l’énergie électrique peut constituer une solution pour des entreprises qui soit produisent de l’énergie renouvelable et souhaitent une optimisation de leur consommation en fonction des besoins, soit veulent parvenir à diminuer leurs coûts, en réduisant leur consommation électrique en période de pointe pour privilégier plutôt l’électricité moins chère disponible en dehors des heures de pointe. |
3.3.6. |
Le CESE est d’accord avec l’approche adoptée par la Commission concernant l’article 7, qui est modifié de manière à prolonger la durée de la période d’obligation en matière d’économies d’énergie jusqu’à 2030, en maintenant l’objectif de 1,5 % d’économies par an. Il sera procédé à une évaluation des progrès accomplis dans la réalisation des mesures en 2027 et, par la suite, tous les 10 ans, jusqu’à ce que les objectifs à long terme de l’Union européenne pour 2050 en matière de climat et d’énergie soient considérés comme atteints. |
3.3.7. |
Le CESE estime que la modification apportée aux articles régissant les relevés et la facturation est bienvenue, car elle clarifie des aspects relatifs au chauffage, au refroidissement et à l’eau chaude sanitaire qui proviennent d’une installation centrale. Il convient toutefois que la directive n’impose pas le compteur individuel dans les pays où les propriétaires sont légalement tenus d’assumer les frais d’énergie de leurs locataires, dans le cas d’un dispositif où les loyers englobent toutes les charges et sont négociés, sous l’égide de l’État, entre les organisations de locataires et de propriétaires. Pour ce qui est des relevés de la consommation de gaz, obligation est faite de fournir au consommateur final un compteur individuel, affichant clairement sa consommation. |
3.3.8. |
Les informations relatives à la consommation de gaz seront basées sur la consommation réelle, grâce à un système permettant au client final de relever lui-même son compteur. Il sera prescrit que les données relatives à la consommation et à la facturation soient mises à la disposition des fournisseurs de services énergétiques. Il est requis que la facture, sous forme électronique, soit claire et intelligible pour le consommateur. Compte tenu des améliorations proposées, le CESE formule le souhait que les États membres s’engagent plus avant dans la recherche de solutions qui soient adéquates, d’un point de vue tant social qu’économique, en ce qui concerne la résolution du problème du coût des compteurs (qui en assumera le coût?). Cette problématique est essentielle au regard de l’équité et d’une définition correcte des conditions d’un accès égal à l’énergie. |
3.3.9. |
Le secteur de l’énergie a demandé à plusieurs reprises que soit réexaminé le facteur de conversion en énergie primaire (Fep) de l’électricité, qui est basé sur la consommation d’énergie finale pour les économies d’électricité exprimées en kWh dans les États membres. La méthodologie et le nouveau facteur qui sont proposés représentent une amélioration majeure. Le CESE se félicite que le coefficient par défaut soit de 2,0 pour le Fep, étant entendu que les États membres peuvent appliquer un coefficient différent, en étant tenus de le justifier concrètement. Le secteur de l’énergie se dit préoccupé par le mode de calcul défavorable appliqué à l’énergie nucléaire, dans la mesure où il est estimé que le facteur approprié devrait être de 1 (rendements de conversion de 100 %), similaire à celui qui est en application pour les autres sources d’énergie sans émissions de carbone. |
Bruxelles, le 26 avril 2017.
Le président du Comité économique et social européen
Georges DASSIS
28.7.2017 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 246/48 |
Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2010/31/UE sur la performance énergétique des bâtiments»
[COM(2016) 765 final — 2016/0381 (COD)]
(2017/C 246/08)
Rapporteure: |
Baiba MILTOVIČA |
Corapporteure: |
Isabel CAÑO AGUILAR |
Consultation |
Parlement européen, 12 décembre 2016 Conseil de l’Union européenne, 21 décembre 2016 |
Base juridique |
Article 194, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne |
Compétence |
Section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures et société de l’information» |
Adoption en section spécialisée |
11 avril 2017 |
Adoption en session plénière |
26 avril 2017 |
Session plénière no |
525 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
157/0/1 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
La proposition de directive à l’examen affine et élargit les précédentes actions législatives en faveur d’une plus grande efficacité énergétique des bâtiments. Son efficacité sera évaluée à l’aune de sa contribution aux principaux objectifs de l’union de l’énergie mais, puisqu’elle se concentre sur l’environnement bâti, sa contribution aux objectifs économiques et sociaux (notamment la réduction de la précarité énergétique, le maintien de l’accessibilité financière des logements et le potentiel de réduction des coûts énergétiques) doit également être considérée comme essentielle. |
1.2. |
Le CESE estime fondamental que la directive contienne des propositions plus spécifiques pour s’attaquer à l’enjeu de la précarité énergétique. Celles-ci devraient inclure des indications plus claires sur le contenu requis des définitions nationales de la précarité énergétique, la formulation d’une définition de référence à l’aune de laquelle évaluer le caractère exhaustif des approches qui sous-tendent les plans nationaux, ainsi que la fourniture de conseils et la coordination des mesures prises par l’intermédiaire d’un «guichet unique» ou d’une agence qui agisse en toute indépendance et mette l’accent sur le consommateur. |
1.3. |
Le CESE est d’avis que les États membres, dans leurs plans nationaux, devront chercher à atteindre les objectifs plus élevés énoncés dans l’option stratégique III (telle qu’exposée dans l’analyse d’impact qui accompagne la communication de la Commission européenne), tout en restant dans les limites de l’approche législative définie dans l’option II, qui constitue la base des révisions présentées dans la directive. Une telle démarche sera nécessaire pour créer une trajectoire à long terme qui permette d’atteindre l’objectif ambitieux de l’accord de Paris. |
1.4. |
Il est recommandé que les stratégies nationales de rénovation des bâtiments soient soutenues par la directive à l’examen, au moyen d’une obligation de proposer des objectifs sectoriels spécifiques ainsi qu’une méthodologie de référence pour mesurer les améliorations. Il conviendrait également de fixer des lignes directrices concrètes établissant des niveaux minimaux de performance en matière d’efficacité énergétique pour la rénovation des bâtiments publics et commerciaux. |
1.5. |
La directive n’a pas saisi la possibilité d’encourager les emprunts hypothécaires «verts», les systèmes de chauffage urbain liés aux énergies renouvelables, les mesures de stockage de l’énergie dans un cadre résidentiel et commercial, l’amélioration des programmes de formation pour les installateurs et les rénovateurs, ou d’autres mesures techniques, financières et fiscales qui favoriseraient une meilleure efficacité énergétique des bâtiments. Bien que de telles mesures soient soutenues ailleurs, l’approche minimaliste de la directive ne peut se justifier que si elle encourage la flexibilité et des actions ambitieuses. Le CESE invite instamment la Commission à suivre de près la mise en œuvre et l’efficacité de la directive et à se tenir prête à activer rapidement le mécanisme d’actualisation et de révision inclus dans la proposition de règlement sur la gouvernance. |
1.6. |
Des mesures supplémentaires devraient être prises pour favoriser la comparabilité des méthodes de calcul liées aux certificats de performance énergétique entre les différents États membres, laquelle faciliterait à son tour la comparaison de ces certificats. |
1.7. |
De nouvelles manières d’inciter les bailleurs sociaux privés et non municipaux à investir dans la rénovation du bâti ancien devraient être proposées. |
1.8. |
La proposition non spécifique d’«indicateur d’intelligence» doit inclure la capacité des occupants d’un bâtiment non seulement d’en évaluer l’efficacité énergétique, mais aussi de contrôler et de faciliter leur propre production et consommation d’énergie renouvelable et de réduire leur facture énergétique. |
1.9. |
Le CESE invite en particulier à reconnaître la capacité des collectivités locales à stimuler et à coordonner les programmes en faveur de l’efficacité énergétique et souligne le potentiel croissant de la Convention des maires à cet égard. |
1.10. |
Le CESE insiste sur la nécessité d’encourager la construction et la rénovation des bâtiments, un secteur dont les PME représentent 83 % de l’emploi total (OCDE: Small Businesses, Job Creation and Growth). |
1.11. |
Le CESE constate qu’en l’absence d’innovation, il sera impossible d’accroître la performance énergétique des bâtiments. L’Union européenne perd sa position dominante dans les technologies énergétiques connexes à faibles émissions de carbone et représente aujourd’hui moins de 15 % des emplois du secteur. Un effort doit être réalisé en matière de formation afin d’adapter les compétences requises pour ces secteurs hautement spécialisés. |
1.12. |
L’initiative «Financement intelligent pour bâtiments intelligents» — et les possibilités de la mettre en relation avec les ambitions du plan Juncker — constitue une étape positive que le Comité accueille favorablement. |
2. Introduction
2.1. |
La directive à l’examen s’inscrit dans le train de mesures sur «Une énergie propre pour tous les européens», qui vise à donner corps à l’union de l’énergie et à accroître la prise de conscience et la compréhension du fait que la transition vers une énergie propre constitue le secteur de croissance de l’avenir. L’énergie utilisée dans les bâtiments représente 40 % de la consommation énergétique totale de l’Union européenne. Des avancées significatives continuent d’être réalisées en matière d’efficacité énergétique des bâtiments, et ce aussi bien dans les nouvelles constructions que dans la modernisation des bâtiments existants. Si ces progrès ont notamment été encouragés par quinze années d’intervention législative au niveau de l’Union, les possibilités d’amélioration n’en restent pas moins considérables en ce qui concerne l’efficacité et les autres avancées dans le domaine social. |
2.2. |
En dépit des progrès technologiques, de l’existence d’un ensemble de données qui sous-tendent les efforts en la matière et du recours aux fonds publics disponibles par l’intermédiaire des instruments financiers, les taux d’amélioration du parc immobilier existant n’ont pas sensiblement augmenté: 75 % des bâtiments au sein de l’Union européenne restent inefficaces sur le plan énergétique. |
2.3. |
Si les effets du changement climatique à l’échelle mondiale et la volonté de consolider la politique énergétique européenne ont poussé à agir plus rapidement, certaines questions complexes et fondamentales restent non résolues et l’on aurait pu espérer des avancées plus conséquentes. En l’absence d’actions en ce sens, les objectifs climatiques et énergétiques à l’horizon 2030 et 2050 seront extrêmement difficiles à atteindre. Il existe un potentiel de réduction de la consommation énergétique des bâtiments de 5 à 6 % et de diminution de leurs émissions de CO2 d’environ 5 %. Or, alors que 0,4 à 1,2 % seulement du parc immobilier est rénové ou amélioré chaque année, il apparaît clairement que le processus doit être accéléré. |
2.4. |
La directive à l’examen modifie la précédente directive de 2010 sur le même sujet, qui constitue elle-même une refonte de la directive de 2002. La refonte de 2010 a apporté certaines modifications tout à fait substantielles au texte de 2002. En particulier, elle a reconnu l’importance croissante du rôle de l’efficacité énergétique dans l’environnement bâti et dans la contribution aux objectifs stratégiques; elle a pris en considération les avancées dans le domaine des connaissances techniques, en procédant à des ajustements à la lumière de l’expérience pratique accumulée pendant huit ans, et a insisté sur la nécessité vitale de régulariser et d’améliorer l’approche des États membres à l’égard de ces questions. |
2.5. |
L’actuelle proposition de révision suit la même approche, bien qu’elle soit nettement plus limitée que la précédente directive. Elle prévoit en particulier l’intégration des stratégies à long terme de rénovation des bâtiments, l’utilisation des technologies intelligentes dans les bâtiments et la rationalisation des règles existantes. Elle fait suite à une évaluation approfondie de la directive de 2010 et à une analyse d’impact détaillée des pistes d’action ultérieure envisageables. Essentiellement pour des raisons de coûts à court terme, d’impact sur la subsidiarité et de réalisme politique, l’option stratégique III, axée sur des mesures à forte incidence, a été rejetée au profit de l’option II, prévoyant un moindre niveau de réalisations potentielles. |
2.6. |
Toutes les parties prenantes souhaitent cependant parvenir à des améliorations ambitieuses. Le secteur fournit 18 millions d’emplois directs et contribue pour environ 9 % au PIB de l’Union européenne; le défi est de trouver un juste équilibre entre, d’une part, le caractère abordable et les exigences des marchés de l’immobilier résidentiel et commercial et, d’autre part, les objectifs sociaux et climatiques. |
3. Contenu essentiel de la proposition de la Commission
3.1. |
La directive consiste en une série de modifications qui renforcent les dispositions de la directive 2010/31/UE en vigueur et en simplifient certains aspects. Ses points essentiels sont les suivants:
|
4. Observations générales et particulières
4.1. |
Le CESE apprécie que l’accent continue d’être mis sur l’efficacité énergétique des bâtiments mais s’inquiète particulièrement du traitement inadéquat de la précarité énergétique, qui est largement reconnue comme une préoccupation sociale majeure et que le Comité a lui-même définie comme telle dans ses précédents avis (1). |
4.2. |
Une approche plus large et plus ambitieuse est nécessaire. Les objectifs en matière de réduction des émissions et d’efficacité énergétique déjà fixés par l’Union européenne, et l’entrée en vigueur en octobre 2016 de l’accord de Paris, aux aspirations élevées, exigent des actions plus résolues, étant donné notamment que l’historique des précédentes propositions, qui n’ont pas été suffisamment respectées, montre que les bâtiments restent un secteur où beaucoup reste à faire. |
4.3. |
Le Comité émet certaines réserves quant au choix de l’option II (telle que définie dans l’analyse d’impact) comme fondement de cet exercice de modification de la législation. Bien que l’option stratégique III implique un niveau d’action obligatoire nettement supérieur à ce qui constitue le niveau optimal en fonction des coûts — une position à laquelle le CESE ne peut souscrire –, il est clair que les ambitions sensiblement plus élevées de l’option III, dont les effets sur les objectifs climatiques, sociaux et d’efficacité sont deux à trois fois supérieurs, sont sans doute nécessaires pour créer une trajectoire à long terme permettant d’atteindre l’objectif visé par l’accord de Paris. En conséquence, les États membres, dans leurs plans nationaux, devront chercher à atteindre les objectifs plus élevés énoncés dans l’option stratégique III (telle qu’exposée dans l’analyse d’impact qui accompagne la communication de la Commission européenne), tout en restant dans les limites de l’approche législative définie dans l’option II. |
4.4. |
Une analyse récente des stratégies de rénovation des bâtiments mises en œuvre par les États membres présente des résultats globalement positifs (JRC 2016: Synthesis Report on the assessment of Member States’ building renovation strategies). Cette question est couverte par la directive relative à l’efficacité énergétique, mais il n’existe à l’heure actuelle aucune norme commune sur ce qui constitue une «rénovation». Il serait utile d’inclure dans la directive sur la performance énergétique des bâtiments une obligation de proposer des objectifs sectoriels spécifiques ainsi qu’une méthode de référence pour la mesure des améliorations, assortie d’un seuil d’admissibilité ouvrant l’accès à une aide à la «rénovation». Il conviendrait d’accompagner ces objectifs de lignes directrices concrètes en vue d’atteindre des niveaux minimaux de performance en matière d’efficacité énergétique dans le cadre de la rénovation des bâtiments publics et commerciaux. |
4.5. |
La directive étend les exigences relatives à une base de données nationale en lien avec les certificats de performance énergétique; il pourrait par ailleurs être utile de disposer d’une base de données européenne accessible au public, contenant des données nationales anonymisées sur les stratégies nationales de rénovation, qui pourrait être liée à la plateforme de communication en ligne proposée dans le règlement sur la gouvernance de l’union de l’énergie. Parallèlement, la directive devrait contenir des orientations claires concernant la comparaison des méthodes de calcul, qui faciliterait à son tour la comparabilité des certificats de performance énergétique. |
4.6. |
Bien que rien ne justifie que les plans nationaux ne couvrent pas ce domaine, la directive ne propose aucune nouvelle manière d’inciter les bailleurs sociaux privés et non municipaux à investir dans la rénovation du bâti ancien. Lorsque les locataires paient directement leurs factures énergétiques, les propriétaires ne perçoivent souvent pas le bénéfice économique qu’ils peuvent eux-mêmes tirer d’une amélioration de l’efficacité énergétique des bâtiments. Dans certains pays, le secteur de la location résidentielle représente une part considérable du parc de logements. La performance énergétique des bâtiments a une incidence majeure sur l’accessibilité financière des logements et la précarité énergétique. La disponibilité d’instruments financiers qui soutiennent la rénovation est dès lors essentielle. Les prêts pour des projets complexes d’amélioration de l’efficacité énergétique d’immeubles à appartements sont principalement ouverts aux municipalités, aux associations de propriétaires et aux propriétaires. Des conditions contractuelles et de financement prohibitives et les difficultés d’accès au crédit constituent cependant un obstacle pour de nombreuses personnes. |
4.7. |
L’encouragement des emprunts hypothécaires «verts» est une mesure qui devrait être soutenue dans la directive. Il importe également de faciliter le regroupement des petits programmes de rénovation et de renforcement de l’efficacité constituant des bonnes pratiques en des cadres plus larges, ce qui permettrait de recourir à des formules de financement. |
4.8. |
La stratégie de 2016 en matière de chauffage et de refroidissement [COM(2016) 51 final] accordait une attention particulière aux bénéfices que permettraient d’engranger la rénovation et le remplacement des systèmes de chauffage urbain en lien avec les énergies renouvelables. Le chauffage urbain et les solutions urbaines sont généralement considérés comme une composante du système de bâtiment liée à l’infrastructure et nécessitent dès lors un encouragement spécifique pour que cela se reflète dans l’urbanisme, sous la forme d’une prise de position claire dans la directive. |
4.9. |
Il convient de noter que les objectifs en matière de climat et d’énergie sont associés à des technologies énergétiques à faibles émissions de carbone et à des bâtiments plus durables qui doivent respecter les objectifs d’efficacité énergétique. Ces derniers reposent de plus en plus sur l’utilisation de technologies clés génériques dans les matériaux avancés (métaux non ferreux, acier, verre, matières plastiques, etc.) et, sans innovation, il sera impossible d’accroître la performance énergétique des bâtiments. Environ 5 % des matériaux avancés produits aujourd’hui sont utilisés dans les technologies énergétiques à faibles émissions de carbone et dans des bâtiments plus durables, et ces marchés se développent rapidement. |
4.10. |
L’Union européenne en tant que telle est en train de perdre sa position dominante dans le domaine des technologies énergétiques à faibles émissions de carbone et représente aujourd’hui moins de 15 % des emplois du secteur (environ 1,1 million d’emplois directs et indirects). Dans le secteur des matériaux avancés nécessaires au développement de ces technologies, l’Union européenne doit également faire face à une concurrence mondiale croissante et, en l’absence de politiques appropriées pour impulser le développement des technologies et stimuler la demande du marché, l’innovation et la production continueront de déserter l’Union européenne. Il ne faut pas négliger non plus la formation en vue de l’acquisition des nouvelles compétences requises pour ces secteurs hautement spécialisés. |
4.11. |
Le CESE est favorable à l’émergence de solutions d’électromobilité en vue de parvenir à une décarbonation plus large de l’économie, mais s’interroge sur la nécessité de proposer des mesures aussi détaillées et sur leur incidence concernant l’accessibilité financière des logements et des bâtiments commerciaux ainsi que la liberté de choix des autorités publiques quant aux moyens de parvenir à l’électromobilité. Bien qu’il soit évoqué dans l’exposé des motifs, un autre domaine important et complémentaire, celui du stockage de l’énergie, n’est pas détaillé dans la directive, alors même que cette technologie pourrait connaître un développement rapide et devenir bientôt abordable. |
4.12. |
De même, la croissance manifeste de la production décentralisée d’énergies renouvelables crée des possibilités d’intégration avec les mesures en matière d’efficacité énergétique pour les bâtiments non reliés au réseau de distribution de gaz et un mouvement en faveur des énergies renouvelables pour le chauffage et le refroidissement. Il convient de promouvoir spécifiquement de telles évolutions. |
4.13. |
Les modifications visant à renforcer l’engagement en faveur des bâtiments intelligents (qu’ils soient publics, commerciaux ou résidentiels) sont relativement modestes et devraient être à la fois précisées et élargies. |
4.14. |
La proposition d’introduire un «indicateur d’intelligence» pour mesurer la capacité d’un bâtiment à utiliser les TIC et les systèmes électroniques afin d’optimiser son fonctionnement et ses interactions avec le réseau mérite d’être explicitée, mais le principe est néanmoins bienvenu. L’objectif devrait être de développer un indicateur transparent et éloquent qui apporte une valeur ajoutée au certificat de performance énergétique, mais sans imposer de collecte de données ou de charges analytiques qui ne se justifient pas. Un tel indicateur doit refléter la capacité des occupants d’un bâtiment non seulement d’en évaluer l’efficacité énergétique, mais aussi de contrôler et de faciliter leur propre production et consommation d’énergie renouvelable et de réduire leur facture énergétique. |
4.15. |
La précarité énergétique est considérée comme une question qu’il convient de traiter en fixant des jalons pour le recensement des progrès en matière de décarbonation du parc immobilier. La directive ne fournit cependant aucun cadre stratégique pour soutenir l’élaboration d’une approche de la précarité énergétique qui soit efficace sur le plan des coûts, l’une des causes qui contribuent à cette précarité étant l’inefficacité énergétique des bâtiments résidentiels. Le CESE estime qu’une telle démarche pourrait s’inscrire dans le cadre de cette directive et propose d’inclure un nouvel ensemble de modifications sur cette question en lien avec les articles concernés de la directive de 2012. Celles-ci soutiendraient les dispositions de la proposition de règlement sur la gouvernance de l’union de l’énergie qui imposent aux États membres d’évaluer et de détailler des politiques, mesures et actions visant à traiter la précarité énergétique. |
4.16. |
Le CESE recommande dès lors que la directive fournisse des critères à intégrer dans une définition de référence de la précarité énergétique et qu’elle propose sa propre définition de référence. Les États membres ne seraient pas contraints de l’adopter à des fins internes, mais elle illustrerait les critères sur la base desquels les plans nationaux en matière d’énergie et de climat seraient tenus de faire rapport. Ce type de définition a permis à certains pays d’évaluer les progrès — ou les régressions — en matière de lutte contre la précarité énergétique, mais le CESE reconnaît que les multiples facteurs qui sont à l’origine du problème peuvent exiger d’accorder la priorité à certains facteurs nationaux. |
4.17. |
Par conséquent, le CESE demande instamment aux États membres d’adopter une approche pleinement coordonnée de la précarité énergétique, qui intègre une compréhension du rôle et des effets non seulement de l’efficacité énergétique des bâtiments, mais aussi des interventions financières (y compris les tarifs sociaux et les méthodes d’atténuation de la précarité), des conseils aux consommateurs quant au choix de leur fournisseur et du mode de tarification, ainsi que des informations sur les mesures simples permettant d’économiser l’énergie. Pour une efficacité maximale, il est essentiel que les conseils soient fournis et que les mesures soient coordonnées par l’intermédiaire d’un «guichet unique» ou d’une agence qui agisse en toute indépendance et mette l’accent sur le consommateur. |
4.18. |
Plusieurs études indépendantes et rapports de la Commission ont souligné les différences de vitesse et d’efficacité avec lesquelles les États membres appliquent les dispositions de la directive sur la performance énergétique des bâtiments. Les questions soulevées portent notamment sur les points suivants:
|
4.19. |
Le Comité constate que dans la période de programmation 2014-2020, les Fonds structurels et d’investissement européens (Fonds ESI), et en particulier les fonds de la politique de cohésion, sont amenés à jouer un rôle majeur en ce qui concerne la rénovation et la construction des bâtiments. À l’heure actuelle, il existe de nombreux obstacles à surmonter, principalement l’accès limité aux financements, les coûts initiaux élevés, les périodes d’amortissement relativement longues, la perception d’un risque de crédit plus élevé en lien avec les investissements dans les énergies durables, l’existence de priorités concurrentes pour les propriétaires de biens immobiliers, etc. (Commission européenne: Technical guidance — Financing the energy renovation of buildings with Cohesion Policy funding). L’initiative «Financement intelligent pour bâtiments intelligents» constitue une étape positive pour surmonter certains de ces problèmes, et il existe des possibilités de s’appuyer sur les ambitions du plan Juncker pour mobiliser davantage d’investissements dans ce domaine. |
4.20. |
Dans ce contexte, il est essentiel de définir correctement les priorités et les responsabilités à l’échelon local pour faire en sorte que l’utilisation des ressources disponibles du programme produise un maximum d’effet, de manière à aller au-delà des exigences minimales (par exemple les exigences en matière de performance énergétique, les audits énergétiques, etc.) fixées au niveau des États membres, et le niveau de financement fourni devrait augmenter en même temps que le niveau d’ambition. |
4.21. |
Le CESE relève en particulier le potentiel de la Convention des maires à cet égard. Les signataires de la Convention, qui réunit aujourd’hui plus de 7 000 municipalités, s’engagent à prendre les mesures nécessaires en faveur de l’efficacité énergétique et des énergies renouvelables en adoptant des «plans d’action pour l’énergie durable». La mobilisation des villes, qui abritent la majeure partie de notre environnement bâti, est une initiative locale qui produit ses effets à l’échelle mondiale. |
4.22. |
Les intentions de la directive ont été largement saluées par la majorité des parties prenantes du secteur de la construction et par les représentants des propriétaires et des locataires, pour les bâtiments à vocation aussi bien commerciale que résidentielle. Néanmoins, un esprit de coopération, de dialogue et d’engagement positif sera nécessaire pour poursuivre les progrès déjà réalisés en matière d’efficacité énergétique. |
Bruxelles, le 26 avril 2017.
Le président du Comité économique et social européen
Georges DASSIS
(1) JO C 341 du 21.11.2013, p. 21; JO C 424 du 26.11.2014, p. 64; JO C 82 du 3.3.2016, p. 22; JO C 34, 2.2.2017, p. 78.
28.7.2017 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 246/55 |
Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables (refonte)»
[COM(2016) 767 final — 2016/0382(COD)]
(2017/C 246/09)
Rapporteur: |
Lutz RIBBE |
Corapporteur: |
Stefan BACK |
Consultation |
Parlement européen, 1er mars 2017 Conseil, 6 mars 2017 |
Base juridique |
Article 194 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne |
Compétence |
Section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures et société de l’information» |
Adoption en section spécialisée |
11 avril 2017 |
Adoption en session plénière |
26 avril 2017 |
Session plénière no |
525 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
108/1/2 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
Le Comité économique et social européen (CESE) réserve un accueil favorable à la proposition de directive révisée relative à la promotion des énergies renouvelables. Le développement des énergies renouvelables, combiné aux autres propositions contenues dans le paquet «hiver», joue un rôle déterminant en vue d’atteindre les objectifs de l’union européenne de l’énergie, ceux que l’Union européenne s’est fixés dans la lutte contre le changement climatique, ainsi que celui qui vise à ce que l’Europe redevienne le champion mondial des énergies renouvelables. La part des énergies renouvelables dans la consommation finale d’énergie devrait s’établir à 27 % en 2030. |
1.2. |
Si l’on veut atteindre les objectifs fixés en matière de lutte contre le changement climatique et réduire la dépendance aux importations, la cible «des 27 %» n’aura qu’un intérêt limité. Celle-ci doit être envisagée en accompagnement d’autres mesures tendant à limiter les émissions de CO2 (grâce, par exemple, à des gains d’efficacité) et pourrait dès lors être effectivement suffisante, en particulier si les règles en matière de gouvernance incitaient réellement les États membres à prendre encore d’autres mesures si nécessaire. Si l’on examine cette cible au regard de l’ambition de l’Europe de jouer un rôle de premier plan au niveau mondial dans le secteur des énergies renouvelables, et si l’on songe que selon la Commission, l’on parviendra dès 2030, sans réexamen de la directive, à une proportion de 24,7 % d’énergies renouvelables dans la consommation d’énergie finale, il est légitime de se demander si cet objectif est suffisamment ambitieux. |
1.3. |
S’il prend note des modalités de planification et de suivi prévues dans le système de gouvernance qui est proposé pour l’union de l’énergie, le CESE regrette une fois encore l’absence d’objectifs contraignants au niveau national. |
1.4. |
Le CESE souscrit, dans son principe, à l’objectif en vertu duquel les énergies renouvelables doivent affronter le marché. Il n’est pas envisageable, pour de multiples raisons, de subventionner indéfiniment les sources d’énergie, qu’elles soient fossiles, nucléaires ou renouvelables. |
1.5. |
Cependant, les énergies renouvelables ne pourront être intégrées avec succès dans les marchés de l’électricité que si l’on crée des conditions de concurrence équitables pour toutes les sources d’énergie. Le fait qu’il soit aujourd’hui encore nécessaire d’apporter une aide publique aux énergies renouvelables tient en grande partie au subventionnement massif de la production d’électricité à partir de sources conventionnelles. Dès lors, il est impératif d’éliminer les distorsions existantes qui sont défavorables aux énergies renouvelables, par exemple en combinant une fiscalité énergétique et un système d’échange de quotas d’émission de manière à prendre en compte tous les coûts externes (voir à ce sujet l’avis du CESE intitulé «Révision de la directive sur la performance énergétique des bâtiments», non encore publié au Journal officiel). Le CESE souligne que cette évolution peut et doit s’accompagner d’un surcoût aussi faible que possible pour les consommateurs ou les entreprises. |
1.6. |
La nouvelle politique énergétique devrait être structurée suivant trois grands axes: la décentralisation, la numérisation et la démocratisation. Le renouvelable passe également par la mise en œuvre d’une nouvelle organisation du marché, qui soit adaptée aux structures décentralisées de la production d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelables. |
1.7. |
Si le CESE est favorable au développement de structures de marché intelligentes et décentralisées comme le prévoit la Commission européenne, il insiste pour que la demande formulée par cette dernière, à savoir placer le consommateur et le citoyen au centre de la politique énergétique européenne, soit effectivement mise en application. La mise en place de nouvelles structures de marché intelligentes pourrait aussi libérer le potentiel «révolutionnaire» qui, selon la Commission, est inhérent à la transition énergétique, de telle manière à en maximiser les avantages sur le plan social et régional. |
1.8. |
Le CESE note avec satisfaction que le prosommateur est reconnu comme un acteur important du nouveau marché de l’énergie; l’on franchit ainsi une étape sur la voie de la démocratie énergétique en renforçant les moyens d’action des consommateurs, petits et gros, et des citoyens. Si les possibilités qui leur sont offertes dans la proposition à l’examen représentent un progrès certain par rapport à la situation actuelle, elles ne sont en aucune façon suffisantes, en comparaison par exemple avec un droit opposable d’accès aux réseaux publics/réseaux d’électricité et d’utilisation de ceux-ci. Pour cette raison, la proposition de la Commission ne saurait être considérée que comme une première étape sur le long chemin qui reste à parcourir pour concrétiser les réels avantages que des marchés orientés vers les prosommateurs procureraient sur le plan social, économique et régional. |
1.9. |
Le CESE souligne l’importance d’un déploiement rapide de réseaux intelligents afin de garantir un approvisionnement stable et sûr, d’assurer une intégration sectorielle en reliant au réseau la production de chaleur et de gaz à partir de l’électricité ainsi que les véhicules électriques, y compris à l’échelle microéconomique, et de rendre possible le bon déroulement de transactions «entre pairs» pour permettre aux prosommateurs de participer pleinement au marché de l’énergie dans des conditions d’égalité. |
1.10. |
La numérisation pourrait permettre aux prosommateurs de participer non seulement à la production d’électricité à partir de sources renouvelables, mais aussi à sa commercialisation. Par conséquent, le CESE recommande vivement de formuler un droit positif à cet effet. |
1.11. |
Le potentiel des énergies renouvelables pour les économies régionales, notamment celui des énergies d’origine biologique (y compris les carburants de substitution), est certes évoqué dans le préambule mais il n’est pas pris en considération dans le texte législatif proprement dit. Une stratégie adéquate, permettant de relier les énergies renouvelables au développement économique régional, fait défaut. Le rôle important des villes, communes et régions tout comme celui des PME, en tant que moteurs du changement, n’est pas non plus reconnu. |
1.12. |
Ce n’est pas uniquement du point de vue de l’économie des régions que la possibilité qui existe aujourd’hui de relier une politique énergétique renouvelée au développement régional revêt une importance certaine. La participation des parties prenantes au niveau local à des projets énergétiques décentralisés est importante aussi pour les faire accepter par les citoyens: si le fait qu’un parc éolien soit détenu par un fonds international de capital-investissement ou par des acteurs locaux n’a aucune influence sur la lutte contre le changement climatique ou la sécurité énergétique, il s’agit en revanche d’un paramètre crucial pour l’acceptation de cette installation par le public. |
1.13. |
La précarité énergétique est un problème de société qu’il convient de traiter dans le cadre de la politique sociale. Néanmoins, le CESE signale que l’action conjuguée de la production de chaleur et d’électricité à partir de sources renouvelables, des économies d’énergie, du lissage de la charge et du prosumérisme recèle un potentiel inexploité jusqu’à présent pour résoudre ce problème. Il convient pour ce faire de trouver des solutions appropriées afin de financer les investissements initiaux, par exemple au moyen de fonds sociaux ou de facilités d’investissement, et d’appliquer une politique systématique visant à lever les obstacles à l’accès aux capitaux. Chaque citoyen et chaque consommateur européen devrait avoir les moyens de devenir un prosommateur. |
1.14. |
Même s’il est question, dans le titre de la proposition de directive, de «promotion» des énergies renouvelables, le texte de la proposition ne décrit aucun mécanisme d’aide spécifique. Des règles claires en la matière sont pourtant indispensables pour garantir la sécurité des investissements. C’est pourquoi les communautés énergétiques et les prosommateurs ont besoin d’un régime d’aide spécifique, clair et précis. Le CESE demande d’actualiser la réglementation en vigueur en matière d’aides d’État afin d’assurer la plus grande sécurité juridique possible en vue d’attirer les investissements. |
1.15. |
Le CESE souscrit à l’objectif consistant à promouvoir les sources d’énergie d’origine biologique et les carburants de substitution durables mais regrette que, sur ce point, certaines dispositions de la proposition à l’examen ne soient pas suffisamment flexibles pour être adaptées aux contextes locaux en ce qui concerne l’utilisation des matières premières et des résidus. Il convient d’éviter, lors de l’abandon progressif des biocarburants produits à partir de sources non durable, de créer des actifs dits «irrécupérables». |
2. Observations générales sur la promotion des énergies renouvelables
2.1. |
Le CESE perçoit quatre grands avantages que les énergies renouvelables peuvent apporter à l’Union européenne. La Commission n’en traite réellement que deux dans sa proposition de directive, et de manière insuffisamment détaillée à certains égards. |
a) Lutte contre le changement climatique
2.2. |
Les énergies renouvelables sont essentielles pour atteindre l’objectif d’une «décarbonisation» plus ou moins complète du système énergétique européen. Deux conditions préalables doivent toutefois être remplies:
|
b) Sécurité de l’approvisionnement
2.3. |
Les énergies renouvelables apporteront une contribution indispensable à la sécurité de l’approvisionnement et réduiront la dépendance vis-à-vis des importations d’énergie à condition que l’on en coordonne la production et l’utilisation ainsi que la modulation de la demande. Encore faut-il prévoir des incitations spécifiques à cette fin. Le CESE n’est pas convaincu que les dispositifs de soutien figurant dans la proposition à l’examen et les mesures proposées concernant l’organisation du marché de l’électricité soient suffisants à cet égard. D’autres mesures seront très certainement nécessaires en raison du «problème du coût marginal nul» posé par les énergies renouvelables. |
c) Élimination de la précarité énergétique
2.4. |
La courbe des coûts liés aux énergies renouvelables est orientée à la baisse; elles n’ont même jamais été si peu chères, et sont désormais si peu coûteuses qu’elles pourraient dès à présent apporter une contribution notable pour atténuer le problème de la précarité énergétique. Le développement du prosumérisme offre à cet égard un levier très puissant. Ainsi, une étude du Centre commun de recherche (JRC Scientific and policy reports — Cost Maps for Unsubsidised Photovoltaic Electricity, disponible uniquement en anglais) montre que dès 2014, il aurait été moins cher pour 80 % des européens d’autoproduire leur électricité à partir de l’énergie solaire plutôt que de s’approvisionner sur le réseau. La Commission n’a cependant pas encore prévu de stratégie appropriée pour faire usage de cette option (voir l’avis TEN/598). |
2.5. |
En tout état de cause, l’accès aux capitaux revêt une importance fondamentale pour les catégories aux revenus les plus faibles, ce pourquoi des aides adaptées sont nécessaires. La dimension sociale n’est abordée nulle part dans la directive ni dans le paquet «hiver», en dépit de sa pertinence au regard de l’objectif de la Commission consistant à placer le citoyen au centre de la politique énergétique, conformément aux articles 17 et 21 de sa proposition. |
2.6. |
Dans ce contexte, le CESE estime opportun d’examiner toutes les options envisageables afin d’offrir à tous les citoyens, dans la mesure du possible, des possibilités de participer activement au marché de l’énergie, et ce, à des conditions équitables. Cela passe aussi par l’octroi de financements au titre du Fonds européen pour les investissements stratégiques (EFSI) ou de toute autre facilité d’investissement, y compris et en particulier pour les petites et très petites installations. Si les consommateurs à faibles revenus avaient accès à des capitaux pour mettre en place des installations décentralisées d’énergie renouvelable, ils auraient la possibilité de devenir des prosommateurs. En appliquant une facturation nette, comme c’est le cas dans certains États membres, notamment l’Italie, les Pays-Bas, la Belgique (en Wallonie), la Pologne et la Slovénie, il est possible d’alléger directement les coûts et d’estomper ainsi le problème de la précarité énergétique. |
d) Création de valeur régionale
2.7. |
Les énergies renouvelables sont par nature des ressources régionales, qui sont désormais potentiellement accessibles à tout un chacun sur le plan technique. Ce point est particulièrement important pour les régions disposant d’infrastructures insuffisantes, où de nouvelles possibilités de création de valeur pourraient être développées; la Commission mentionne à juste titre cet avantage à plusieurs reprises dans le préambule. |
2.8. |
Créer de la valeur au niveau régional implique toutefois d’associer les acteurs locaux et régionaux à des processus économiques, dans une démarche volontaire et stratégique, et de leur donner la possibilité de contribuer à les façonner et de participer ainsi à l’évolution de l’économie. Cela aura comme avantage collatéral non seulement de rendre plus acceptable le développement des infrastructures, mais aussi leur cofinancement. |
2.9. |
Le CESE déplore cependant l’absence d’une stratégie claire visant à relier le développement régional au déploiement des énergies renouvelables. Les États membres auraient déjà dû élaborer de telles stratégies après l’adoption de l’ancienne directive relative aux énergies renouvelables, ce qu’ils n’ont pas fait. |
3. Observations générales concernant la proposition de directive
3.1. |
Le CESE s’est constamment félicité des efforts consentis par la Commission européenne pour rétablir l’Union européenne dans sa position de numéro un mondial des énergies renouvelables. De fait, bon nombre des mesures avancées dans la proposition de directive vont dans la bonne direction; c’est le cas par exemple de la prévisibilité des cadres d’appui, et notamment de l’exclusion des mesures rétroactives prises par les États membres. Le risque demeure toutefois que les trois lacunes fondamentales décrites ci-après continuent de faire obstacle au développement des énergies renouvelables. |
a) Des mécanismes d’aide adaptés
3.2. |
La proposition de directive prend appui sur les objectifs qui ont été fixés par le Conseil européen en octobre 2014 et relève le niveau d’ambition de l’objectif précédent, qui prévoyait de porter à 20 % la part des énergies renouvelables dans la consommation finale d’énergie d’ici 2020, en visant désormais un niveau de 27 % d’ici 2030, soit une augmentation annuelle inférieure à un point de pourcentage. En l’absence de révision de la directive, cette part s’établirait à environ 24,7 % dans l’Union européenne en 2030; l’objectif est donc d’y ajouter 2,3 % de plus. |
3.3. |
Ce lent taux d’accroissement pourrait toutefois signifier que, si l’on veut atteindre les objectifs de la «feuille de route pour l’énergie à l’horizon 2050» [COM(2011) 885 final], il serait indispensable d’augmenter fortement, de manière exponentielle, la part des énergies renouvelables entre 2030 et 2050. Les mesures nécessaires pour y parvenir pourraient impliquer des coûts économiques supplémentaires. En tout état de cause, le développement des sources d’énergie renouvelables devrait être examiné de près, afin que les éventuelles mesures correctrices puissent être prises le plus tôt possible et de la manière la plus économique qui soit. |
3.4. |
L’analyse d’impact accompagnant la proposition de directive [SWD(2016) 418 final] conclut que des mesures de soutien seront nécessaires au moins jusqu’en 2030, et ce, dans un cadre juridique stable. Par conséquent, le CESE considère que la proposition de directive à l’examen devrait également exposer des régimes d’aide tout à fait clairs, qui seraient mis en œuvre promptement et efficacement. De tels éléments sont toutefois absents de la proposition. |
3.5. |
La «mise en œuvre» des mécanismes de soutien est laissée à l’appréciation des États membres, lesquels doivent respecter les prescriptions de l’Union européenne relatives aux aides d’État. Or la réglementation européenne en vigueur en la matière, qui impose des marges de manœuvre extrêmement étroites, doit impérativement être modifiée. |
3.6. |
En effet, en raison, entre autres facteurs, de la réglementation de l’Union européenne qui s’applique actuellement aux aides d’État, des instruments de soutien qui s’étaient jusqu’à présent avérés efficaces, par exemple l’accès prioritaire au réseau et les tarifs de rachat, et qui étaient très utilisés par les petits participants au marché et les nouveaux entrants, sont désormais frappés d’importantes restrictions. Dans certains cas, des instruments nouveaux tels que les appels d’offres constituent des obstacles presque insurmontables pour les prosommateurs, les communautés énergétiques et d’autres acteurs du marché. |
3.7. |
Les mesures de promotion exposées dans la proposition à l’examen portent essentiellement sur la structure de marché, et quelques dispositions générales concernent la nécessité de mettre en place des «dispositifs de soutien stables et conformes aux règles relatives aux aides d’État». Ces mesures seules ne sont pas suffisantes. Le CESE juge nécessaire de réviser dans les plus brefs délais a) le règlement d’exemption par catégorie pour les aides d’État de la Commission [règlement (CE) no 800/2008] ainsi que b) les lignes directrices concernant les aides d’État à la protection de l’environnement et à l’énergie pour la période 2014-2020, afin de veiller à leur compatibilité avec les objectifs fixés dans la proposition à l’examen, pour ce qui concerne notamment les besoins des prosommateurs et des PME. |
3.8. |
Par exemple, la dérogation applicable aux petits projets (points 125 et 127) prévue dans les lignes directrices concernant les aides d’État à la protection de l’environnement et à l’énergie doit être étendue, et les valeurs auxquelles elle se rapporte doivent être inscrites dans la directive relative aux énergies renouvelables afin de garantir une absolue clarté en la matière. |
3.9. |
Le CESE doute de l’efficacité de la mise en place de quotas concernant l’accès à des systèmes d’aide à l’installation dans d’autres États membres, en particulier dans le contexte de l’objectif consistant à promouvoir les énergies renouvelables décentralisées et le développement économique régional. |
b) Les distorsions du marché nuisent aux énergies renouvelables
3.10. |
Le message qui ressort du paquet «hiver» dans son ensemble ne saurait être plus clair: le credo de la Commission est que, désormais, les énergies renouvelables doivent affronter le marché, si possible rapidement. Néanmoins, cette approche, qu’il convient de saluer dans son principe, posera des problèmes aussi longtemps que l’on n’aura pas corrigé deux distorsions fondamentales qui règnent sur le marché. L’on constate tout d’abord a) que les centrales produisant de l’électricité à partir de sources fossiles continuent de faire l’objet de subventions nationales directes, ce à quoi il faut ajouter b) l’internalisation tout à fait insuffisante des coûts externes. Dès lors, l’électricité obtenue dans des centrales exploitant des combustibles fossiles, ainsi que d’autres formes d’énergie produite à partir de ressources fossiles également, sont systématiquement avantagées par rapport aux énergies renouvelables, pour lesquelles les coûts externes sont marginaux, voire nuls. Le Fonds monétaire international estime qu’au niveau mondial, les subventions aux énergies «sales» représentent 5 300 milliards de dollars (USD) par an, dont pas moins de 330 milliards d’USD par an dans l’Union européenne. |
3.11. |
Bien que ces distorsions du marché au détriment des énergies renouvelables soient connues depuis des années et qu’il ait été promis de mettre un terme à cette inégalité des conditions de concurrence, rien ou presque n’a été fait; cette carence préjudiciable aux énergies renouvelables est la plus importante à éliminer. |
3.12. |
Paradoxalement, des critiques ont récemment été émises concernant de prétendues distorsions du marché qui seraient dues à la promotion des énergies renouvelables. Ces reproches ne sont pas justifiés. En effet, le fait qu’il soit aujourd’hui encore nécessaire de soutenir les énergies renouvelables est en grande partie la conséquence du subventionnement de la production d’énergie conventionnelle. En d’autres termes, si l’on cessait de subventionner la production d’électricité dans des centrales utilisant des combustibles fossiles, il existerait dès lors des conditions de concurrence véritablement équitables et le soutien aux énergies renouvelables deviendrait dans une large mesure superflu. Le CESE réaffirme sa position selon laquelle il convient de créer des «conditions de concurrence équitables», à l’aide notamment d’instruments de marché, de manière à abolir les distorsions du marché et à lever l’obstacle qu’elles posent aux énergies renouvelables (voir l’avis du CESE intitulé «Révision de la directive sur la performance énergétique des bâtiments»). |
c) L’actuel marché de l’électricité n’est pas adapté aux énergies renouvelables
3.13. |
Le secteur de l’énergie est caractérisé par un nombre relativement restreint d’unités de production aux capacités toujours élevées. À l’inverse, un système énergétique faisant la part belle aux énergies renouvelables se distingue plutôt par des capacités de production de moindre envergure et plus décentralisées. |
3.14. |
Le CESE s’est déjà exprimé sur de nouveaux concepts envisageables pour l’organisation des échanges d’électricité dans des systèmes décentralisés, notamment l’«approche par cellules» (2). Ces modèles partent du principe que les petits opérateurs du marché peuvent eux aussi communiquer directement entre eux et effectuer des transactions de produits énergétiques. Il ne suffit donc pas d’améliorer les possibilités de production, mais aussi la participation aux échanges. |
3.15. |
Des transactions «entre pairs» de ce type rendraient possible une large participation de la société, qui ne se limiterait pas à la production et à l’autoconsommation d’énergie, mais s’étendrait aussi à la gestion active d’unités énergétiques de plus petite taille et à l’échelon régional, ouvrant ainsi de toutes nouvelles perspectives de création de valeur. L’intégration sectorielle s’inscrit notamment dans ce cadre. En effet, dans de nombreux cas, la chaleur et l’énergie nécessaire aux transports sont des biens locaux qui sont produits et consommés en petites unités. |
3.16. |
Le CESE fait observer qu’en raison d’obstacles administratifs et, d’une manière générale, des lacunes dans la réglementation, dans de nombreux États membres le commerce «entre pairs» n’est pas possible à l’heure actuelle. Si la proposition de directive à l’examen et celle relative à l’organisation du marché ont pour ambition de remédier à cette situation, le CESE relève cependant d’importantes faiblesses dans ces deux propositions. |
3.17. |
L’ouverture des marchés de l’électricité dans toute l’Union aux transactions «entre pairs» contribuerait à exploiter l’immense potentiel des énergies renouvelables pour la société et l’économie. En faisant abstraction de cette question et en ne tenant pas compte d’obstacles très pratiques comme par exemple les limites s’appliquant au commerce de l’énergie, la Commission manque une formidable opportunité, qui améliorerait nettement la situation des citoyens, des prosommateurs, petits et gros, et des petites et moyennes entreprises sur le marché de l’électricité, qui permettrait à des exploitants de plus grande taille d’exporter des «solutions énergétiques» vers les marchés des pays tiers et qui, d’une manière plus générale, rendrait la transition énergétique plus acceptable pour la société. |
4. Observations particulières sur le texte de la directive
a) L’absence d’objectifs nationaux
4.1. |
Le CESE réitère sa critique (3) selon laquelle la nouvelle directive, contrairement à celle de 2009, ne prévoit plus d’objectifs nationaux contraignants. Il exprime à nouveau des doutes quant à la capacité du cadre de gouvernance prévu d’«inciter» les États membres qui s’opposent à la fixation d’objectifs nationaux contraignants à se montrer plus actifs. La proposition ne prévoit aucun instrument concret permettant d’intervenir si l’objectif de 27 % n’est pas atteint (voir l’avis du CESE sur la «Gouvernance de l’union de l’énergie»). Le CESE prend toutefois acte de la responsabilité collective décrite à l’article 3 de la proposition de directive, attendu que, conformément à la proposition de règlement sur la gouvernance, des sanctions financières sont prévues si les objectifs ne sont pas collectivement atteints dans les plans nationaux en matière d’énergie et de climat. La manière dont ces éléments doivent être concrétisés n’apparaît cependant pas clairement. |
b) L’absence de stratégie pour le développement régional
4.2. |
Le CESE estime que la Commission ne tient pas compte de l’importance d’une participation active des acteurs locaux et régionaux, pour ce qui concerne tant leur adhésion à la politique mise en place que les conséquences de cette dernière pour les économies régionales. Rien que l’évolution prévisible de la mobilité électrique ouvre d’immenses perspectives inédites pour les économies régionales si l’on organise avec méthode le nécessaire développement de l’infrastructure de production et de distribution autour de modèles commerciaux décentralisés (4). |
4.3. |
Cela favoriserait aussi l’objectif d’abaisser autant que possible le coût de l’utilisation des énergies renouvelables pour les contribuables et les consommateurs. À cet égard, il ne suffit pas cependant de s’intéresser aux seuls prix de l’électricité, encore faut-il prendre en considération la dimension des économies nationales, mais aussi régionales. Par exemple, il convient de prendre en compte la dimension relative à la création d’emplois au niveau régional (voir le considérant 49). Le Comité souligne qu’un certain nombre d’États membres ont aujourd’hui encore tendance a) à appliquer des charges superflues et injustifiées à l’énergie produite et consommée localement et b) à se désintéresser totalement des aspects régionaux. |
4.4. |
En outre, les États membres ne prennent généralement pas en compte dans leur réglementation les coûts des réseaux et du système. Le CESE est convaincu que les solutions décentralisées aboutiront en définitive à une réduction de ces coûts; à cet égard, il souscrit à la position exprimée par la Commission au considérant 52. |
4.5. |
Ce considérant figurait déjà dans la directive 2009/28/CE, sans pour autant que les États membres n’aient développé de stratégies régionales spécifiques sur cette base au cours de ces dernières années. Le CESE a en tout état de cause constaté («Changer l’avenir énergétique: la société civile, acteur majeur de la production d’énergie» — étude du CESE sur le rôle de la société civile dans la mise en œuvre de la directive de l’Union européenne relative aux énergies renouvelables) que, dans de nombreux États membres, les aspects régionaux et locaux ne sont nullement traités dans la réglementation ni dans les programmes d’aide, ce que certaines administrations et certains gouvernements nationaux justifient même en invoquant le droit européen. Il convient donc, là aussi, d’exiger plus de précisions. Tout en créant les conditions formelles de la décentralisation et du développement régional, la proposition ne prévoit aucune obligation de mettre en œuvre une stratégie cohérente en ce sens. Le CESE estime qu’énoncer des principes sans les étayer suffisamment dans le droit ne constitue pas un mode efficace d’élaboration de la législation. |
4.6. |
Afin de clarifier davantage le considérant 49 du préambule, la Commission devrait préciser, dans le texte législatif, comment l’on doit interpréter le texte de la directive lorsqu’il est dit que «[c]’est pourquoi la Commission et les États membres devraient soutenir les mesures prises aux niveaux national et régional pour favoriser le développement […] et promouvoir le recours aux Fonds structurels dans ce domaine». Le contenu exact du considérant 50 est tout aussi vague lorsqu’il est dit dans la directive qu’«il est indispensable de tenir compte de l’impact positif sur les possibilités de développement régionales et locales, sur les perspectives d’exportation, sur les possibilités de cohésion sociale et d’emploi, notamment en ce qui concerne les PME ainsi que les producteurs d’énergie indépendants». Enfin, au considérant 52 [«[…] pour permettre le développement des technologies décentralisées qui utilisent des énergies renouvelables à des conditions non discriminatoires et sans entraver le financement des investissements d’infrastructure»], si le Comité se réjouit que la valeur des approches décentralisées soit reconnue, il y a lieu là aussi d’apporter d’importantes clarifications et précisions. |
c) Appliquer des règles plus claires pour le prosumérisme et donner des droits aux consommateurs
4.7. |
Il est positif de donner une définition, au moins partielle, du «chauffage urbain», de l’«autoconsommateur d’énergies renouvelables», de l’«autoconsommation d’énergies renouvelables», des «PME» ainsi que des «communautés énergétiques» (article 21) et, ce faisant, de conférer une valeur juridique pertinente à ces concepts aux fins de la politique énergétique et de la réglementation de l’énergie. Par le passé, le manque de clarté dans la terminologie a entraîné d’importantes incertitudes autour des investissements. L’on constate cependant deux problèmes. Premièrement, le prosumérisme n’est toujours pas clairement défini, et les définitions proposées dans le paquet «hiver» ne sont pas toujours utilisées de manière cohérente. Deuxièmement, le contenu juridique de la directive n’est pas adapté pour mettre véritablement ces approches en application. L’effet de ces règles sera conditionné à leur mise en œuvre efficace. Le CESE regrette que la Commission ne propose pas d’orientations claires pour cette mise en œuvre. |
4.8. |
Sur la question des autoconsommateurs d’énergies renouvelables:
Le CESE se félicite de la disposition relative à l’approvisionnement des bâtiments individuels qui est proposée au paragraphe 2, étant donné qu’elle mettrait fin à une profonde injustice qui dure depuis de nombreuses années. |
4.9. |
Concernant les obligations administratives et les autorisations, le CESE note que l’esprit des propositions visées aux articles 15 et 16 va fondamentalement dans le bon sens. Le texte proposé pose toutefois plusieurs problèmes. Premièrement, l’expression «dispositifs décentralisés» («decentralised devices»), à l’article 15, paragraphe 1, point d), n’est pas assez précise. Il convient d’en donner une définition. Deuxièmement, les États membres manquent régulièrement à l’objectif consistant à mettre les communautés énergétiques sur un pied d’égalité avec les grands acteurs du marché, souvent en raison de leur interprétation des règles en matière d’aides d’État. Tant que des règles plus claires ne seront pas établies pour les petits projets, l’autoconsommation et les prosommateurs, il n’y aura pas de conditions équitables. La Commission doit agir d’urgence sur cette question. Troisièmement, les propositions contenues aux articles 15 et 16 portent uniquement sur la production. Pour bénéficier d’un plein accès au marché de l’énergie, et surtout pouvoir effectuer des transactions «entre pairs», les acteurs du marché tels que les communautés énergétiques ont besoin de procédures simplifiées pour le stockage, le commerce et l’autoconsommation de l’électricité. |
4.10. |
Concernant les garanties d’origine, l’article 19 de la proposition à l’examen ne tient pas suffisamment compte des dysfonctionnements du marché actuel. Alors que l’objectif de la proposition est de faire en sorte que les choix des consommateurs incitent à développer des capacités de production d’énergie à partir de sources renouvelables, la législation européenne actuelle autorise les offres trompeuses sous couvert d’«électricité verte». Les fournisseurs sont autorisés à recourir aux garanties d’origine pour faire de l’affichage écologique alors qu’ils continuent de produire, acheter et vendre de l’électricité obtenue à partir de sources non renouvelables. À l’avenir, la législation de l’Union européenne devrait obliger les autorités de réglementation nationales à définir des exigences contraignantes applicables à tous les opérateurs du marché qui proposent des tarifs spéciaux pour une «électricité verte». Les fournisseurs devraient justifier les avantages supplémentaires qu’offrent ces tarifs du point de vue de l’environnement. En tout état de cause, la proposition de la Commission pourrait accroître la confusion des consommateurs et la surabondance des garanties d’origine. En outre, les communautés de prosommateurs qui commercialisent directement leur électricité devraient être dispensées de l’obligation d’indiquer l’origine de leur électricité, puisque celle-ci apparaît clairement, aussi bien dans le cadre de la prosommation que dans celui des communautés énergétiques. |
d) Plus d’ambition et de flexibilité pour les biocarburants et les carburants de substitution
Sur les biocarburants
4.11. |
Le CESE estime que l’approche retenue dans les propositions soumises à l’égard des biocarburants est trop rigide. Tout en se pliant à l’objectif consistant à ne pas empiéter sur la production alimentaire, il importe aussi de permettre un usage optimal des ressources disponibles. Par conséquent, le CESE maintient son point de vue selon lequel il convient de développer les biocarburants ne provenant pas de produits agricoles ni d’une utilisation des sols qui empiéterait sur la production alimentaire, mais qui sont obtenus à partir d’autres sources telles que les résidus, les sous-produits et les déchets, notamment de la sylviculture (voir l’avis du CESE intitulé «La décarbonisation des transports») (5). Le CESE souligne aussi que toute mesure d’élimination progressive devrait être mise en œuvre de manière à éviter les actifs irrécupérables. |
4.12. |
Dans son avis sur les «Changements indirects dans l’affectation des sols/biocarburants» (6) du 17 avril 2013, le CESE demandait quelle pouvait être la contribution en volume des «biocarburants avancés», et à quel coût. Ces questions sont restées à ce jour sans réponse. |
4.13. |
Il a également fait observer que par un recours accru, par exemple, à la culture et à l’utilisation des oléagineux produits suivant des méthodes d’agriculture particulièrement durables (le maître-mot est celui des cultures mixtes), l’on pourrait très bien développer des domaines d’application extrêmement utiles, par exemple pour le fonctionnement des machines agricoles et forestières. Toutefois, sur ce point aussi, la Commission ne semble pas encore disposer d’une véritable stratégie, et la proposition de directive ne règle pas ce problème. |
4.14. |
Le CESE considère qu’il est important de maintenir une dose de flexibilité dans la réduction des biocarburants, des bioliquides et des combustibles issus de la biomasse qui sont obtenus à partir de produits ou de cultures alimentaires, dès lors qu’ils respectent les critères de durabilité visés à l’article 27 de la proposition à l’examen. |
4.15. |
Le CESE soutient résolument les exigences fixées à l’article 26, paragraphe 5, afin de garantir une exploitation forestière durable. Le CESE recommande de reformuler la définition du «permis de coupe» figurant à l’article 2, point jj), afin d’intégrer toutes les formes d’autorisations juridiquement valables pour récolter la biomasse forestière. |
Électromobilité
4.16. |
Les quotas fixés par la directive en matière de carburants de substitution ne tiennent pas compte de l’important potentiel de croissance de l’électromobilité. L’électromobilité apparaît également comme un impératif à la lumière de l’augmentation rapide de la part des sources d’énergie renouvelables dans la production d’électricité, en ce qu’elle offre une formule souple qui peut, pourvu qu’elle soit convenablement amenée du point de vue stratégique, jouer un rôle majeur dans le développement de structures de prosommation. |
4.17. |
Outre les quotas applicables aux carburants de substitution, pour des raisons liées notamment à la politique industrielle et à la politique régionale et afin de mettre un terme à la dépendance énergétique de l’Europe, l’on pourrait fixer un objectif relatif à la part de l’électromobilité exploitant une électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables d’ici 2030 dans une fourchette de 10 à 20 %. Il importe aussi que les critères de durabilité visés à l’article 27, concernant la part maximale des énergies renouvelables dans la consommation finale d’énergie, s’appliquent également au secteur des transports afin de ne pas limiter de manière excessive l’utilisation des biocarburants dans ce secteur. |
e) Donner un nouvel élan aux énergies renouvelables dans les secteurs du chauffage et du chauffage urbain
Sur le gaz et le chauffage
4.18. |
L’augmentation d’au moins un point de pourcentage par an de la part des énergies renouvelables dans la production de chaleur et de froid de chaque État membre qui est proposée à l’article 23 n’est pas suffisante. Pour atteindre les objectifs de la politique climatique, il convient de fixer des cibles nettement plus ambitieuses. |
4.19. |
L’exigence relative à l’évaluation prévue à l’article 20, paragraphe 1, de la nécessité d’étendre le réseau gazier pour faciliter l’intégration du gaz produit à partir de sources renouvelables est judicieuse. Toutefois, il convient de garder à l’esprit que le gaz est lui aussi une source d’énergie fossile épuisable. Il est fait référence sur ce point à l’avis sur «La sécurité de l’approvisionnement en gaz naturel» (7). Lors de la définition des critères d’évaluation, il convient de veiller à ce que la dimension de l’intégration sectorielle soit prise en compte. |
4.20. |
Le Comité se félicite du renforcement prévu à l’article 20, paragraphe 3, et à l’article 24 des dispositifs de chauffage urbain, lesquels constituent des éléments importants pour favoriser l’intégration sectorielle, lutter contre la précarité énergétique et consolider les économies régionales. Dans le même temps, le Comité constate que dans le cadre de la législation actuelle de l’Union européenne, les solutions urbaines et régionales intégrées échouent souvent en se heurtant aux réglementations nationales. |
Bruxelles, le 26 avril 2017.
Le président du Comité économique et social européen
Georges DASSIS
(1) JO C 34 du 2.2.2017, p. 151.
(2) JO C 82 du 3.3.2016, p. 13 et JO C 34 du 2.2.2017, p. 78.
(3) JO C 291 du 4.9.2015, p. 8.
(4) JO C 34 du 2.2.2017, p. 78.
(5) JO C 198 du 10.7.2013, p. 56.
(6) JO C 198 du 10.7.2013, p. 56.
(7) JO C 487 du 28.12.2016, p. 70.
28.7.2017 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 246/64 |
Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen, au Comité des régions et à la Banque européenne d’investissement – Une énergie propre pour tous les européens»
[COM(2016) 860 final]
(2017/C 246/10)
Rapporteur: |
Ulrich SAMM |
Corapporteur: |
Toni VIDAN |
Consultation |
Commission européenne, 17 février 2017 |
Base juridique |
Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne |
Compétence |
Section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures et société de l’information» |
Adoption en section spécialisée |
11 avril 2017 |
Adoption en session plénière |
26 avril 2017 |
Session plénière no |
525 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
136/0/2 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
Le CESE accueille favorablement le train de mesures sur l’«énergie propre», qui vise à accélérer, modifier et consolider la transition de l’économie de l’Union européenne vers une énergie propre tout en continuant de poursuivre les objectifs majeurs que sont la croissance économique et la création d’emplois. |
1.2. |
Ce train de mesures entend placer les citoyens au cœur de l’union de l’énergie, ce qui suppose de les faire participer activement au processus de transition et notamment de mettre en place les conditions d’un cadre politique qui garantissent que les coûts de l’énergie sont abordables pour tous les groupes de notre société, y compris les plus vulnérables. Le CESE adhère à ces principes, mais se demande si les propositions réglementaires sont suffisamment précises pour en garantir l’application. |
1.3. |
Le CESE souhaite souligner que l’«énergie propre» n’est pas seulement bénéfique au climat mondial, mais aussi à la qualité de l’air à l’échelle locale, offrant ainsi un environnement meilleur et plus sain pour tous. |
1.4. |
Le train de mesures à l’examen est l’un des éléments qui permettra de respecter les engagements pris par l’Union européenne à l’issue de l’accord de Paris de 2015 sur l’atténuation du changement climatique. Les technologies d’exploitation des énergies renouvelables ainsi que les produits et services liés à l’efficacité énergétique seront essentiels, sachant que les énergies renouvelables sont encore loin de bénéficier de conditions de concurrence équitables dans lesquelles elles pourraient se maintenir sur le marché sans aide particulière. |
1.5. |
Le CESE approuve les différents éléments abordés par le train de mesures, à savoir le chauffage et le refroidissement des bâtiments, l’écoconception, le marché de l’électricité et le transport, qui sont des pas dans la bonne direction. Bien que ce train de mesures constitue une avancée de taille, le CESE s’inquiète toutefois de ce que des efforts considérables soient encore nécessaires pour établir des conditions de concurrence suffisamment équitables pour l’ensemble des acteurs du marché de l’énergie, tout en veillant à progresser vers une économie énergétique sans carbone. |
1.6. |
Le CESE apprécie l’optimisme du tableau brossé dans le train de mesures, qui avance des hypothèses plutôt positives concernant la hausse de la production industrielle liée aux énergies renouvelables et aux technologies à haut rendement énergétique, et le nombre d’emplois susceptibles d’être créés. Cependant, le CESE souhaite aussi insister sur l’existence de sérieux risques et dangers, notamment si le processus de transition est trop rapide ou trop lent et qu’il n’est pas planifié de façon intégrée. Il convient de prendre dûment en considération les possibilités comme les risques. |
1.7. |
En particulier la tâche monumentale consistant à transformer l’économie des régions qui aujourd’hui dépendent essentiellement de l’industrie charbonnière mérite d’être examinée de manière bien plus approfondie que ne le fait le train de mesure. |
1.8. |
Le Conseil européen a fixé un objectif d’au moins 27 % en ce qui concerne la part des énergies renouvelables dans la consommation énergétique de l’Union européenne à l’horizon 2030. Cet objectif minimal est contraignant au niveau de l’Union européenne mais ne se traduira pas par des objectifs contraignants sur le plan national. Le CESE regrette que les États membres n’aient pour l’heure pas dégagé de consensus sur une politique énergétique commune, et notamment sur des objectifs nationaux. La Commission cherche à résoudre ce problème en mettant en place un système de gouvernance des plans nationaux intégrés en matière d’énergie et de climat, au titre duquel les États membres s’engageront à verser des contributions. |
1.9. |
Le CESE considère que la proposition relative à la gouvernance est l’élément le plus épineux et crucial du train de mesures sur l’«énergie propre». Il est profondément préoccupé par le règlement proposé. Le contenu final des plans nationaux des États membres et de leurs contributions dépend de la conclusion d’un accord satisfaisant avec la Commission, qui sera le résultat de consultations, de l’évaluation de l’opinion publique, de l’influence de celle-ci et de la pression exercée par les pairs. Il n’y a notamment pas de description détaillée des «mesures» dont disposera la Commission, telles que la plateforme financière, si les objectifs généraux ne sont pas atteints. |
1.10. |
Le CESE souscrit pleinement à l’un des principes clé de la proposition, qui est de «privilégier l’efficacité énergétique». Cependant, cette dernière est un instrument de modernisation de l’économie européenne et non un moyen de réduire la pauvreté énergétique. Il serait trompeur de laisser entendre le contraire, car l’efficacité énergétique exige des investissements que les consommateurs vulnérables peuvent ne pas être en mesure de faire. |
1.11. |
Le CESE constate avec satisfaction que la Commission est en train de constituer un observatoire de la précarité énergétique, comme le Comité l’avait proposé en 2013. Cette structure pourrait être essentielle dans la mise en place d’une approche pleinement coordonnée à l’égard de la précarité énergétique et assortie de diverses mesures, telles que les tarifs sociaux, les efforts d’atténuation de la précarité, les conseils aux consommateurs ou l’efficacité énergétique. |
1.12. |
Compte tenu du climat d’austérité publique et de faible croissance au sein de l’Union européenne, le CESE s’inquiète des fondements financiers du train de mesures et se demande si les moyens envisagés par l’Union (et leur effet de levier) suffiront pour atteindre les objectifs fixés. |
2. Introduction
2.1. |
Le présent avis porte sur l’ensemble du train de mesures intitulé «Une énergie propre pour tous les européens», tandis qu’une série d’autres avis (TEN/617, 618, 619, 620, 621, 622, 623, 625 et NAT/702) traitent de ses volets respectifs relatifs aux différentes propositions législatives concernant l’efficacité énergétique, les énergies renouvelables, l’organisation du marché de l’électricité, la sécurité de l’approvisionnement et les règles de gouvernance de l’union de l’énergie. |
2.2. |
À l’origine, le train de mesures sur l’énergie propre a été envisagé non pas comme un ensemble, mais comme une série de propositions. Toutefois, compte tenu des liens entre ces propositions, le CESE approuve la décision de les regrouper en un seul train de mesures. En revanche, il critique le fait que l’ensemble compte un millier de pages, nombre bien trop élevé qui ne facilite pas la participation du public et de la société civile à l’examen et à la discussion approfondie de la proposition. |
2.3. |
Il importe de garder à l’esprit que le projet d’union de l’énergie est en cours depuis un certain temps et que l’Union européenne a déjà publié d’autres trains de mesures (par exemple, celui sur la sécurité de l’approvisionnement en gaz) fortement axés sur les préoccupations majeures que sont le changement climatique et la sécurité de l’approvisionnement en combustible. |
2.4. |
Le train de mesures sur l’énergie propre porte sur les cinq dimensions essentielles de l’union européenne de l’énergie, à savoir:
|
2.5. |
La communication intitulée «Une énergie propre pour tous les européens» sert également à formuler une vision ou une rhétorique pour l’union de l’énergie. |
3. Observations générales
3.1. |
Le train de mesures vise à accélérer la transition vers une énergie propre, tout en continuant de poursuivre les objectifs majeurs que sont la croissance économique et la création d’emplois en Europe. Les principales raisons qui sous-tendent ce train de mesures sont les suivantes:
|
3.2. |
Le CESE soutient cette stratégie, comme le montrent quelques-uns des avis qu’il a publiés sur ces questions (1). |
3.3. |
Le CESE se félicite de ce train de propositions réglementaires et des mesures de facilitation qui visent à accélérer, modifier et consolider la transition de l’économie de l’Union européenne vers une énergie propre. Il approuve particulièrement le fait que désormais, les domaines du chauffage, du refroidissement et des transports pèsent tout autant dans la balance que la production d’électricité. |
3.4. |
Dans sa communication intitulée «Une énergie propre pour tous les européens», la Commission brosse un tableau optimiste, et formule des hypothèses plutôt positives sur la hausse de la production industrielle et sur le nombre d’emplois susceptibles d’être créés. Le CESE en prend note, convaincu qu’il convient d’envoyer des signaux positifs de ce type pour maintenir la dynamique d’un processus de transition qui s’avère difficile pour certains. |
3.5. |
Dans le même temps, le CESE souhaite également souligner que la transition énergétique constitue un enjeu de taille pour l’Europe, qui comporte aussi des risques et des dangers graves, notamment si le processus est trop rapide ou trop lent et qu’il n’est pas planifié de façon intégrée. Une question particulièrement préoccupante est celle des grandes disparités économiques et politiques qui existent entre les États membres et qui sont supposées être traitées dans le nouveau règlement sur la gouvernance. Le CESE est convaincu que la transition énergétique ne peut aboutir que si les possibilités et les risques sont dûment pris en considération. |
4. La gouvernance de l’union européenne de l’énergie: une question clé
4.1. |
Bien que les États membres se soient engagés à fournir des contributions nationales en faveur de l’efficacité énergétique et des énergies renouvelables d’ici 2020, il n’existe pas de valeurs de référence indicatives correspondantes pour 2030. |
4.2. |
Le Conseil européen a fixé un objectif d’au moins 27 % en ce qui concerne la part des énergies renouvelables dans la consommation énergétique de l’Union européenne à l’horizon 2030. Si cet objectif minimal est contraignant au niveau de l’Union européenne, il ne se traduira pas immédiatement par des objectifs contraignants sur le plan national. Le CESE préconise l’adoption de mesures fortes pour soutenir les États membres affichant les objectifs les plus ambitieux. |
4.3. |
La proposition de règlement sur la gouvernance de l’union de l’énergie (voir avis TEN/617) fixe des exigences pour les plans nationaux en matière d’énergie et de climat, lesquels viennent remplacer les plans distincts en faveur de l’efficacité énergétique et des énergies renouvelables, ainsi qu’un processus rationalisé pour les établir et les superviser. La gouvernance — avec ses conséquences en termes de prescriptions contraignantes concernant l’action souveraine des États membres — est un domaine sensible, en particulier dans le secteur de l’énergie où la situation et les positions politiques peuvent varier considérablement d’un État membre à l’autre. |
4.4. |
Le CESE nourrit de profondes inquiétudes quant à la capacité du processus de gouvernance de faire appliquer des mesures et de produire des résultats concrets. L’on s’appuie trop souvent sur des consultations et l’influence des pairs, plutôt que sur des règles claires. Il convient de préciser la manière dont la Commission peut exiger des États membres qu’ils prennent les «mesures nécessaires» lorsqu’elle soupçonne l’existence d’une lacune, tant au niveau de l’ambition que de la mise en œuvre, notamment en ce qui concerne les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique. Il est en particulier nécessaire de clarifier davantage la nature et le fonctionnement de la «plateforme de financement» qui ferait office de sanction en cas de défaillance dans la fourniture d’énergie renouvelable. |
4.5. |
Le CESE est particulièrement déçu de constater que la notion de «consultation publique» est imprécise dans le règlement et qu’elle est très éloignée de la proposition du Comité en faveur d’un vaste dialogue européen sur l’énergie. Pour gagner la confiance et la participation des citoyens, un tel dialogue devrait être indépendant des gouvernements et du processus des plans nationaux en matière d’énergie et de climat. Il devrait être un élément de référence pour l’information des consommateurs, aider les fournisseurs d’énergie à s’engager, construire la confiance et permettre aux nombreuses préoccupations des différents groupes de s’exprimer, qu’il s’agisse de la sécurité ou du caractère abordable et durable de l’énergie. |
4.6. |
Dans le respect du principe de subsidiarité, et afin de tirer pleinement parti de la nature décentralisée et flexible des technologies liées à l’efficacité énergétique et aux énergies renouvelables, une part croissante de la politique et du processus décisionnel en matière d’énergie devrait être transférée de l’échelon national à celui des pouvoirs publics locaux et régionaux. L’Union européenne, les États membres et les collectivités locales et régionales, en coopération avec la société civile organisée, garante d’une participation publique et communautaire élevée, devrait faciliter ce transfert et veiller à ce qu’il soit accéléré et mis en œuvre d’une façon coordonnée, offrant un maximum d’avantages aux consommateurs et aux communautés. |
5. L’efficacité énergétique présente un énorme potentiel en matière d’économie d’énergie
5.1. |
L’amélioration de l’efficacité énergétique dans tous les secteurs (production d’énergie, industrie manufacturière et transports, électricité, chauffage, refroidissement et mobilité) est d’une importance capitale pour le futur système énergétique européen. Le CESE se réjouit que les politiques de l’Union européenne soient en passe d’accorder davantage d’attention à l’efficacité énergétique et que de nouvelles initiatives portent désormais aussi sur le chauffage, le refroidissement et les transports, comme ça aurait dû être le cas depuis longtemps (voir aussi l’avis TEN/618 sur la révision de la directive relative à l’efficacité énergétique). |
5.2. |
Une efficacité énergétique accrue — même à l’échelle la plus ambitieuse — ne peut à elle seule résoudre les problèmes liés au changement climatique, à la sécurité de l’approvisionnement ou à la précarité, mais elle peut être un outil efficace pour les atténuer. Elle peut participer à la réduction de la consommation d’énergie et, partant, freiner ou inverser la hausse des coûts associés, même lorsque les prix de l’énergie augmentent. |
5.3. |
Il importe de noter que l’accroissement de l’efficacité énergétique dépend toujours des investissements. En conséquence, une efficacité accrue n’entraîne pas nécessairement une réduction de la charge des coûts pour les consommateurs et l’industrie, comme la communication l’affirme à plusieurs reprises. Elle provoque évidemment toujours une baisse de la consommation énergétique et a donc des effets bénéfiques sur le climat. Cependant, une incidence positive sur les coûts dépend essentiellement de l’équilibre entre les investissements et les économies de coût de l’énergie. Le CESE souhaiterait que cet état de fait soit considéré de façon plus réaliste et critique. |
5.4. |
Le CESE accueille favorablement la révision de la directive sur la performance énergétique des bâtiments (avis TEN/620). Le chauffage et le refroidissement des bâtiments revêtent une importance considérable, sachant qu’ils représentent 40 % de la consommation totale d’énergie. Les économies d’énergie dans ce domaine sont réalisées grâce à la rénovation et à la construction de nouveaux bâtiments. Dans les deux cas, des investissements élevés sont nécessaires. Toutefois, alors que 0,4 à 1,2 % seulement du parc immobilier sont rénovés ou nouvellement construits chaque année, il apparaît clairement que ces processus doivent être accélérés. |
5.5. |
Les États membres sont tenus de déterminer une feuille de route comportant des jalons et des mesures bien définis pour réaliser l’objectif à long terme de décarbonation de leur parc immobilier national à l’horizon 2050, en prévoyant des jalons spécifiques pour 2030. |
5.6. |
Le CESE est déçu par le choix de l’option moins ambitieuse qui implique des économies d’énergie inférieures à ce qu’il est possible de réaliser. Il est conscient que la volonté politique des États membres d’obtenir de meilleurs résultats dans ce domaine ne peut être garantie, bien que l’efficacité énergétique des bâtiments constitue la meilleure des possibilités que l’on puisse discerner à ce jour. |
5.7. |
Le CESE apprécie la grande diversité des nouveaux instruments financiers proposés par la Commission. Il est essentiel que des instruments financiers d’aide à la rénovation soient disponibles, notamment pour inciter les bailleurs sociaux non municipaux et privés à investir dans la rénovation de biens plus anciens. |
5.8. |
Les propriétaires ou les locataires de bâtiments nouveaux ou rénovés profitent non seulement d’une consommation d’énergie réduite mais aussi d’un confort et d’une qualité de vie accrus. Dans de nombreux cas, on constate malheureusement un effet de rebond, à savoir une hausse des loyers des logements rénovés qui peut facilement l’emporter sur les économies de coûts énergétiques. La communication, pour sa part, exprime un point de vue assez optimiste sur les économies de coûts. Le CESE recommande d’aborder ce problème sous un angle plus critique. En l’espèce, il convient d’appliquer des critères économiques et sociaux, sous peine d’assister à l’émergence d’une nouvelle forme de pauvreté qui touchera les populations plus âgées. |
5.9. |
Le CESE se félicite de l’initiative exposée dans la directive, consistant à rendre obligatoire l’installation de points de recharge pour voitures électriques dans bon nombre de nouveaux bâtiments. Il importe toutefois de souligner que l’énergie électrique fera l’objet d’une demande accrue à l’avenir, ce qui nécessite une planification et une coordination avec les fournisseurs en raison du besoin supplémentaire d’investir à l’avance dans des transformateurs de haute puissance à proximité des zones résidentielles. |
5.10. |
Le CESE est convaincu que des systèmes de transport plus efficaces sur le plan énergétique, s’appuyant sur les évolutions technologiques en cours et la mise en place de systèmes de transport intelligents coopératifs, contribueront de manière significative aux efforts déployés par l’Union européenne en matière d’économies d’énergie (avis TEN/621). Les nouveaux plan de travail et règlement sur l’écoconception (avis NAT/702) apportent un élément important au marché commun européen, en fournissant des produits hautement efficaces et en soutenant l’économie circulaire. |
6. Les consommateurs au cœur de l’union de l’énergie
6.1. |
Le CESE se réjouit que la Commission souhaite placer les consommateurs au cœur de l’union de l’énergie. De nos jours, les transports, le logement, la communication et la consommation générale nécessitent l’utilisation d’un certaine quantité d’énergie minimale pour chaque citoyen. Aussi l’énergie ne doit-elle pas devenir un luxe. Toutefois, le phénomène de la précarité énergétique, souvent mentionné mais mal défini, traduit une tendance où les citoyens vulnérables éprouvent de plus en plus de difficultés à acquérir les services énergétiques minimaux dont ils ont besoin. Le CESE recommande de combattre cette tendance et d’adapter la politique énergétique en conséquence. |
6.2. |
Le progrès technologique a induit une baisse des coûts de la production d’électricité au cours des dernières années. Les consommateurs n’ont pas profité de cette baisse car elle a très souvent été contrebalancée par les taxes, les coûts de réseau, etc. Ce grave problème a des incidences négatives sur la précarité énergétique. |
6.3. |
Le CESE s’oppose à l’affirmation selon laquelle «l’efficacité énergétique est l’un des meilleurs moyens de remédier aux causes profondes de cette précarité». Le terme «précarité énergétique» est apparu quand les prix de l’énergie ont commencé à augmenter de manière significative, ce qui signifie que ce sont les prix élevés qui constituent la cause profonde de cette catégorie spécifique de précarité et qu’ils devraient être la principale cible de toute mesure visant à aider les personnes vulnérables. L’amélioration de l’efficacité y contribue bien entendu aussi, mais elle dépend inévitablement d’investissements importants, que les consommateurs vulnérables, en particulier, ne sont pas toujours à même d’engager (voir avis TEN/518). |
6.4. |
Le CESE constate avec satisfaction que la Commission est en train de constituer un observatoire de la précarité énergétique, comme l’avait proposé le Comité en 2013 dans l’avis TEN/516 sur la pauvreté énergétique. L’objectif principal de cette structure devrait être de définir, dans un premier temps, des indicateurs européens de la pauvreté énergétique. Cette démarche pourrait s’avérer essentielle pour que les États membres adoptent une approche pleinement coordonnée à l’égard de la pauvreté énergétique, et notamment pour qu’ils aient une bonne compréhension du rôle et de l’efficacité des divers instruments, tels que les tarifs sociaux, les efforts d’atténuation de la précarité, les conseils aux consommateurs ou l’efficacité énergétique. |
6.5. |
Le CESE tient à souligner le fait que, outre les questions mentionnées dans la communication (sécurité énergétique, efficacité énergétique et décarbonation), l’énergie propre est également très bénéfique pour la santé de tous les citoyens. |
6.6. |
Le train de mesures ne donne aux citoyens qu’un rôle limité lorsqu’il s’agit d’influer directement sur les décisions qui définiront leur vie quotidienne et leurs moyens de subsistance. Il est difficile de déterminer si les principes d’un dialogue sur l’énergie aboutissant à une participation utile sont et seront appliqués dans l’ensemble de l’Union (voir également avis TEN/617). Ce dialogue suppose la mise en place de conditions équitables, y compris sur le plan institutionnel. |
6.7. |
Le CESE se réjouit que le rôle croissant des citoyens qui participent au marché de l’électricité en tant que prosommateurs soit reconnu. Ils ont besoin d’un marché qui fonctionne selon de nouvelles modalités, qui cadre avec les structures décentralisées de production d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelables, et qui mette réellement les consommateurs et les citoyens au cœur de la politique énergétique européenne. |
6.8. |
Le CESE encourage l’idée d’énergie communautaire qui se réfère à un modèle d’entreprise dans lequel des citoyens sont copropriétaires et coacteurs de projets touchant aux énergies renouvelables ou à l’efficacité énergétique dans la région où ils résident. Les dispositions législatives du nouveau train de mesures devraient, dans la mesure du possible, permettre et encourager les initiatives de ce type. |
7. Les énergies renouvelables sur un nouveau marché
7.1. |
D’une manière générale, le CESE soutient l’objectif de la directive sur les énergies renouvelables (avis TEN/622), qui est de promouvoir une intégration accrue des fournisseurs d’énergies renouvelables sur le marché en conséquence des réductions des coûts de ces énergies. |
7.2. |
Néanmoins, le CESE s’inquiète du fait que les énergies renouvelables soient encore loin de bénéficier de conditions de concurrence équitables dans lesquelles elles pourraient se maintenir sur le marché sans aide particulière. Il reste encore beaucoup à faire pour supprimer les énormes distorsions présentes sur les marchés de l’électricité, qui découlent de subventions, de conditions liés aux limites structurelles et de l’absence de comptabilité transparente à l’égard des coûts externes. |
7.3. |
Le CESE approuve le récent rapport de l’Agence européenne pour l’environnement (AEE) intitulé «Transforming the EU power sector: avoiding a carbon lock-in» («Transformer le secteur de l’énergie électrique dans l’Union européenne: éviter une dépendance à l’égard du carbone»). Les combustibles fossiles continuent de contribuer à près de la moitié de l’électricité produite en Europe. L’étude de l’AEE compare l’évolution actuelle du marché de l’énergie électrique avec les objectifs climatiques de l’Union européenne à l’horizon 2030 et au-delà. Sortir d’un approvisionnement en électricité à forte intensité de carbone requiert des investissements accrus dans d’autres solutions, associés à des cadres politiques de soutien. |
7.4. |
Le CESE est préoccupé par l’absence de précisions concernant des mesures et des instruments de soutien spécifiques, ce qui peut nuire à la poursuite de la promotion des énergies renouvelables. |
7.5. |
Le CESE insiste sur le fait qu’il convient de réexaminer la sécurité énergétique lorsque le bouquet énergétique subit un changement brusque, aspect que le train de mesures n’aborde pas suffisamment. |
8. Ouvertures pour l’économie et l’emploi
8.1. |
La transition énergétique est un grand défi pour l’Europe et présente des ouvertures du point de vue de l’emploi, de la croissance économique et du bien-être de l’ensemble des citoyens. Compte tenu des risques et des dangers qui accompagnent une telle transition, il importe au plus haut point de développer une politique équilibrée qui prévoie des mesures adéquates afin d’éviter tout dommage pour notre société, par exemple pour les salariés (chômage et qualité de l’emploi), les consommateurs et les PME. Cet objectif ne peut être atteint qu’en associant les parties prenantes à toutes les étapes de cette transition, et notamment le CESE, en sa qualité de partenaire précieux et utile. |
8.2. |
Avoir la prééminence mondiale dans le domaine des technologies propres implique également d’exporter ces technologies, ce qui est bénéfique tant du point de vue économique qu’environnemental (avis NAT/690). |
8.3. |
La recherche et l’innovation sont essentielles pour soutenir la compétitivité et la prééminence mondiale de l’Europe dans le domaine des technologies énergétiques avancées et des solutions liées à l’efficacité énergétique. La stratégie spécifique visant à accélérer l’innovation dans le domaine des énergies propres (avis TEN/619) devrait permettre de mieux établir les priorités et d’engager des actions concrètes pour veiller à ce que les innovations visant à supprimer progressivement les technologies carbonées soient déployées plus largement et mises plus rapidement sur le marché. Le CESE regrette que la recherche fondamentale et la contribution qu’elle peut apporter soient trop peu mentionnées. Le plan SET est brièvement cité, mais malheureusement uniquement sous l’angle industriel. |
8.4. |
Le train de mesures fait régulièrement référence à l’industrie, à l’emploi et à la croissance pour définir l’innovation, mais cette dernière a une portée bien plus vaste. Le bien-être des citoyens et la protection de la nature sont des atouts importants qui vont au-delà des aspects liés à l’industrie. |
8.5. |
Le CESE se félicite de la proposition de la Commission concernant la création d’un «forum industriel sur l’énergie propre» qui pourrait, dans le cadre d’un processus ascendant, s’intégrer au concept plus large de dialogue avec la société civile et d’autres parties prenantes. Il met en avant l’importance d’apporter un soutien équilibré à la chaîne de la recherche et de l’innovation, depuis la recherche fondamentale, en passant par la recherche appliquée, jusqu’au développement de nouveaux produits. |
8.6. |
Étant donné l’ampleur de la tâche consistant à transformer l’économie de régions qui dépendent aujourd’hui largement de l’industrie charbonnière, le CESE estime que cette question mérite d’être examinée de manière bien plus approfondie que ne le fait le train de mesures. |
8.7. |
Pour ce qui est des nouveaux investissements dans les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique, les coûts du capital varient sensiblement d’un État membre à l’autre. Le CESE considère que des mesures budgétaires et institutionnelles radicales sont nécessaires pour éliminer ou minimiser de telles conditions discriminatoires pour les consommateurs et les investisseurs. |
8.8. |
L’Europe du sud-est présente un vaste potentiel en matière d’énergie renouvelable ainsi qu’une main-d’œuvre qualifiée qui ont jusqu’à présent été largement inexploités. Le CESE appelle de ses vœux une hausse significative du soutien aux parties prenantes qui poursuivent les objectifs de l’union de l’énergie dans cette région. Les consommateurs et les investisseurs locaux disposeraient ainsi de formidables possibilités de développement, conformément aux objectifs du train de mesures à l’examen. |
Bruxelles, le 26 avril 2017.
Le président du Comité économique et social européen
Georges DASSIS
(1) JO C 383 du 17.11.2015, p. 84; JO C 264 du 20.7.2016, p. 117; JO C 291 du 4.9.2015, p. 8; JO C 82 du 3.3.2016, p. 13; JO C 82 du 3.3.2016, p. 22; JO C 487 du 28.12.2016, p. 75; JO C 303 du 19.8.2016, p. 1.
28.7.2017 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 246/71 |
Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition concernant un nouveau consensus européen pour le développement: notre monde, notre dignité, notre avenir»
[COM(2016) 740 final]
(2017/C 246/11)
Rapporteur: |
M. Ionuț SIBIAN |
Corapporteur: |
M. Mihai MANOLIU |
Consultation |
Commission européenne, 27 janvier 2017 |
Base juridique |
Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne |
Décision de l’Assemblée plénière |
26 avril 2017 |
Compétence |
Section spécialisée «Relations extérieures» |
Adoption en section spécialisée |
4 avril 2017 |
Adoption en session plénière |
26 avril 2017 |
Session plénière no |
525 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
166/1/3 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
Le CESE accueille favorablement la proposition de la Commission relative à «Un nouveau consensus européen pour le développement: notre monde, notre dignité, notre avenir». Elle répond aux recommandations qu’il a formulées dans son avis REX/461 intitulé «Le programme à l’horizon 2030 — Une Union européenne engagée en faveur du développement durable à l’échelle mondiale», où il affirme: «Les institutions européennes et les États membres doivent de toute urgence trouver un accord sur la manière de progresser au plus haut niveau politique au moyen d’un accord interinstitutionnel entre la Commission, le Conseil et le Parlement européen, de manière à établir une base solide pour poursuivre leur action politique. Cet accord sur la mise en œuvre des ODD devrait servir de base à une stratégie globale pour intégrer le programme à l’horizon 2030 à toutes les politiques, dans le but de faire de l’Union européenne une union du développement durable.» Dans ce même avis, il recommande par ailleurs à la Commission de «pleinement intégrer et exploiter le programme à l’horizon 2030 dans le cadre du consensus européen pour le développement». |
1.2. |
Le CESE reconnaît le rôle joué par le consensus européen pour le développement de l’année 2006 dans la politique de coopération au développement de l’Union européenne et de ses États membres (1). Sa valeur ajoutée a consisté principalement à fournir une vision concertée par l’Union européenne et ses États membres, ainsi qu’un cadre de mise en œuvre au niveau de l’Union européenne, qui ont été ensuite traduits dans un certain nombre de documents d’orientation, de politiques et d’actions, à l’échelle de l’Union européenne comme à celle des États membres. On s’attend à ce que le nouveau consensus continue à jouer un rôle similaire. |
1.3. |
Le CESE salue l’engagement explicite du consensus au service de l’objectif global d’éradication de la pauvreté, reposant sur une approche de la coopération au développement fondée sur les droits et sur l’égalité des sexes tout en veillant, dans le cadre du programme à l’horizon 2030, à ce que personne ne soit laissé de côté, indépendamment de son lieu d’habitation, de son origine ethnique, de son sexe, de son âge, de son handicap, de sa religion ou de ses convictions, de son orientation sexuelle, de son statut de migrant ou de toute autre considération. |
1.4. |
De par ses références au programme à l’horizon 2030, et en maintenant l’éradication de la pauvreté au cœur de sa mission, le consensus apporte à la coopération au développement la reconnaissance qu’elle mérite et renforce sa visibilité en tant que domaine politique à part entière de l’Union européenne. Alors que la politique de développement doit être considérée comme l’un des piliers de l’action extérieure de l’Union européenne, le consensus devrait être vu comme une garantie que cette évolution se produit sur un pied d’égalité par rapport à d’autres domaines d’action de l’Union auxquels elle ne peut être subordonnée (sécurité, commerce, justice et affaires intérieures, etc.). |
1.5. |
La révision du consensus intervient à un moment très difficile, alors que les valeurs et les principes européens (énumérés à l’article 2 du traité sur l’Union européenne), ainsi que l’existence même de l’Union européenne sont de plus en plus menacés. Des crises multiples affectent la capacité et la volonté des gouvernements à allouer les ressources nécessaires à la mise en œuvre du programme à l’horizon 2030. Il est donc d’une importance capitale que tous les États membres et les institutions de l’Union européenne se consacrent pleinement à sa mise en œuvre et à son respect au moyen d’un consensus européen pour le développement, notamment en ce qui concerne ses implications financières. |
1.6. |
Le consensus devrait tenter de définir les rôles respectifs de la Commission et des États membres, en tenant compte de leurs avantages comparatifs spécifiques dans le domaine du développement. Cet impératif est devenu d’autant plus pertinent qu’il faut s’attendre à ce que l’enveloppe totale consacrée par l’Union européenne et ses États membres au développement va diminuer après le Brexit et dans le contexte d’un climat politique intérieur en évolution. Selon un rapport, commandé par la commission du développement du Parlement européen en 2013 (2), le coût économique de l’absence d’une coordination efficace entre les États membres et la Commission européenne en matière d’aide au développement a été évalué à quelque 800 millions d’euros. Ce montant pourrait être économisé chaque année sur les coûts des transactions si les donateurs concentraient leurs efforts en matière d’aide sur un nombre plus limité de pays et d’activités. Il a également été estimé possible d’économiser potentiellement 8,4 milliards d’euros supplémentaires chaque année si l’on améliore l’attribution des fonds au niveau de plusieurs pays. |
1.7. |
L’Union européenne et ses États membres ne devraient pas utiliser l’aide au développement comme levier pour imposer une coopération à leurs partenaires dans des objectifs de politique économique et étrangère, de sécurité de l’État et de contrôle des migrations. Au contraire, la coopération au développement devrait rester axée sur son objectif principal d’éradication de la pauvreté, d’égalité des chances, de dignité pour tous et de garantie de la viabilité de l’environnement. |
1.8. |
Le CESE attire particulièrement l’attention sur le rôle que joue l’agriculture dans la politique de développement. Renforcer les conditions propices à la production alimentaire locale, améliorer la situation des femmes dans les zones rurales, favoriser la constitution d’associations d’agriculteurs, ainsi que leur coopération, sont autant de facteurs importants pour éliminer la pauvreté et réaliser les objectifs de développement durable dans les pays les plus pauvres du monde. |
1.9. |
Le consensus reconnaît le rôle des partenaires sociaux et des organisations de la société civile, tant pour ce qui concerne la promotion du programme à l’horizon 2030 que pour la contribution qu’ils apportent à sa mise en œuvre. L’Union européenne devrait s’employer non seulement à apporter un soutien politique fort visant à leur garantir un cadre favorable, afin de leur permettre de jouer pleinement leur rôle, mais aussi à reconnaître, soutenir et protéger les organisations de défense des droits de l’homme, les organismes qui jouent un rôle de vigilance et les syndicats qui travaillent dans un contexte défavorable. En outre, l’Union européenne devrait s’efforcer de mettre en place des mécanismes financiers mieux adaptés pour aider un éventail plus large d’organisations de la société civile, afin de veiller à ce que des organisations locales plus petites et plus nombreuses aient accès aux programmes de l’Union européenne. À cet égard, le CESE a formulé une série de recommandations importantes dans son avis REX/461 intitulé «Le programme à l’horizon 2030 — Une Union européenne engagée en faveur du développement durable à l’échelle mondiale». |
1.10. |
Il convient que le dialogue social soit reconnu comme un instrument de mise en œuvre du programme pour le développement. Le dialogue social exige un environnement favorable et un cadre institutionnel efficace, conditions qui passent d’abord par le respect de la liberté d’association et le droit à la négociation collective. L’Union européenne devrait collaborer avec des organisations indépendantes d’employeurs et de travailleurs (partenaires sociaux) afin de promouvoir des pratiques saines en matière de relations de travail et une administration du travail fonctionnelle. |
1.11. |
Si les fonds fiduciaires de l’Union européenne (FFUE) constituent un instrument potentiellement positif, il n’existe pas suffisamment d’études qui montrent qu’ils permettent de répondre aux besoins d’appropriation et d’adaptation des pays en développement. Alors que la moitié des États membres de l’Union européenne augmentent leurs allocations d’APD au secteur privé, les investissements du secteur commercial réalisés au moyen d’argent public restent largement opaques et sans surveillance (3). Les partenaires sociaux et les organisations de la société civile devraient être soutenus et autorisés à contrôler les fonds alloués au développement, y compris ceux qui sont destinés au secteur privé. Ils devraient être véritablement impliqués dans l’élaboration, la mise en œuvre, le suivi et l’évaluation des programmes de développement afin que ceux-ci répondent aux besoins réels du plus grand nombre de personnes. |
1.12. |
La création d’emplois constitue un défi important dans les pays en développement, et le secteur privé est appelé à y jouer un rôle important. L’avis du CESE REX/386 sur la «Participation du secteur privé au cadre de développement pour l’après-2015» souligne que l’environnement des entreprises joue un rôle important dans la lutte contre la pauvreté dans le monde, «car il crée des emplois, produit des biens et des services, génère des revenus et des bénéfices et contribue par les impôts qu’il verse à la couverture des charges publiques». Toutefois, la création d’emplois ne devrait pas être un objectif en soi, à moins qu’elle ne garantisse des normes en matière de travail et d’environnement, ainsi que des conditions de travail décentes, notamment pour les femmes et les jeunes, conformément au programme pour un travail décent et aux normes de l’Organisation internationale du travail (OIT) et à d’autres documents internationaux (par exemple, les principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme, et les principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales). |
1.13. |
Le CESE estime que l’insertion et son caractère durable se fondent sur des emplois décents et stables (en particulier pour les femmes et les jeunes), qui génèrent des revenus suffisants et des chaînes de valeur durables pour toute une série de services publics renforcés. Il y a lieu de promouvoir de nouveaux modèles de production et de consommation dans le cadre de l’économie circulaire. Les catégories vulnérables seront mieux protégées, elles auront accès aux services financiers, et un secteur des entreprises honnête, équitable et durable développera de nouveaux modèles économiques (entreprises sociales fournissant des services locaux) et de nouvelles PME, convenablement réglementées. |
2. Contexte
2.1. |
La politique de développement est un élément essentiel de l’action extérieure de l’Union européenne, défini à l’article 21, paragraphe 2, point d), du traité sur l’Union européenne (TUE), qui consiste à «soutenir le développement durable sur le plan économique, social et environnemental des pays en développement dans le but essentiel d’éradiquer la pauvreté», conformément à l’énoncé qui figure également à l’article 208 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). |
2.2. |
La proposition de nouveau consensus européen pour le développement a pour objectif de fournir le cadre d’une approche commune en matière de politique de coopération au développement, qui sera appliquée par l’Union européenne et ses États membres. |
2.3. |
Dans le même temps, le consensus représente une déclaration forte lancée au monde, mettant l’accent sur la détermination de l’Union européenne à rester crédible, engagée et responsable sur la scène mondiale, et à montrer l’exemple. Il définit les principes et les priorités de l’Union en ce qui concerne les problèmes graves du monde et les moyens de remplir les engagements de l’Union européenne pris dans le cadre du programme à l’horizon 2030 et de l’accord de Paris. |
2.4. |
Le CESE observe que la révision du consensus européen pour le développement est bienvenue et extrêmement importante dans le nouveau contexte qui prévaut, dès lors qu’elle vise tout à la fois à orienter l’engagement de l’Union européenne et de ses États membres vers la mise en œuvre du programme de développement durable à l’horizon 2030 et à apporter une contribution à la réalisation des priorités de l’action extérieure de l’Union, telles qu’énoncées dans la stratégie globale pour la politique étrangère et de sécurité de l’Union européenne. |
2.5. |
La crise économique persistante, le Brexit, les changements politiques qui ont lieu aux États-Unis d’Amérique, les perturbations croissantes à l’Est, le conflit en Syrie et ses conséquences humanitaires, la montée du populisme et de la xénophobie dans les États membres, l’incidence économique du changement climatique sont autant d’éléments qui s’associent pour créer le plus grand défi auquel l’Union ait été confrontée depuis plus d’un demi-siècle. |
2.6. |
Comme l’a souligné la nouvelle stratégie globale concernant les questions de politique étrangère et de sécurité de l’Union européenne intitulée «Vision partagée, action commune: une Europe plus forte» (2016), le nouveau contexte intérieur et mondial a été à l’origine d’une augmentation de l’instabilité et de l’insécurité. Par conséquent, face à l’augmentation des menaces existentielles, l’Union européenne doit être plus forte et plus unie que jamais. |
2.7. |
L’Union européenne s’est collectivement engagée à consacrer 0,7 % de son revenu national brut (RNB) à l’aide publique au développement (APD) selon le calendrier du programme à l’horizon 2030. Si l’on veut réaliser les ambitions du consensus, l’Union européenne et ses États membres doivent atteindre leurs objectifs en matière d’aide. À l’heure actuelle, compte tenu du contexte politique en Europe, il existe de sérieux doutes quant à la volonté des gouvernements actuels et futurs de maintenir ce niveau d’engagement financier. L’évolution de la situation politique dans les États membres de l’Union européenne pourrait compromettre les engagements en matière de coopération au développement des gouvernements nationaux, étant donné la forte demande émanant des mouvements politiques populistes pour réduire la solidarité mondiale ainsi que les dépenses au titre de l’APD. |
2.8. |
Le Royaume-Uni ayant été le principal contributeur à l’aide au développement dans le cadre de l’Union européenne (avec plus de 14 milliards d’euros en 2015), le Brexit aura déjà une incidence directe sur le positionnement de l’Union européenne et sur sa capacité dans ce domaine politique en particulier, en limitant les ressources qu’elle envisageait d’engager pour mettre en œuvre les objectifs de développement durable (ODD). Il est estimé qu’à côté de la capacité autre que financière, le Brexit fera perdre à l’Union européenne environ 15 % de son budget d’aide. Il est de la plus haute importance que les États membres de l’Union européenne restent solidaires et respectent leurs objectifs en matière d’aide. |
2.9. |
L’Union européenne devrait veiller à ce que l’APD reste concentrée sur la lutte contre la pauvreté dans les pays en développement, vérifier que les fonds sont dépensés de manière efficace au bénéfice réel de ces pays et assurer la cohérence des politiques européennes au service du développement (CPD). Le rapport «AidWatch 2016» de la plate-forme d’ONG européennes Concord montre qu’en 2015 déjà, 17 % de l’aide accordée par l’Union européenne ne reflétait plus un réel transfert de ressources vers les pays en développement, car il s’agissait de dépenses consenties à l’intérieur des pays donneurs en faveur des réfugiés, de l’allègement de la dette, des étudiants ainsi que de paiements liés à des aides et des intérêts. Certains États membres de l’Union européenne ont augmenté les montants des aides déclarées, presque entièrement en raison des sommes consacrées aux réfugiés dans leur propre pays, devenant ainsi les principaux bénéficiaires de ces sommes. |
2.10. |
Par nature et pour des raisons qui ont été à la base de sa création, l’Union européenne est tenue de promouvoir et de défendre le multilatéralisme, un ordre mondial fondé sur des règles, la paix dans le monde et les droits de l’homme. Au fil du temps, l’Union est devenue un partenaire mondial nécessaire, responsable et respectant certaines valeurs, qui s’attaque aux causes profondes des conflits et de la pauvreté, promeut les droits de l’homme universels, donne l’exemple et use de son pouvoir d’influence pour apporter des changements positifs dans le monde. |
2.11. |
L’engagement de l’Union européenne et de ses États membres en tant qu’acteur mondial de premier plan dans le domaine de la coopération au développement est désormais partie intégrante de l’identité de l’Union et de son image à l’extérieur. |
2.12. |
L’Union européenne est le marché le plus ouvert au monde, qui offre des réductions généreuses en matière de droits de douane aux pays en développement qui ratifient et mettent en œuvre les principales conventions internationales relatives aux droits de l’homme et au droit du travail, à l’environnement et à la bonne gouvernance. |
2.13. |
Au-delà des flux financiers, l’Union européenne est un partenaire politique indispensable des pays en développement, car elle favorise des évolutions politiques et sociales positives et les aide à participer de manière plus équitable et plus complète aux processus politiques et économiques mondiaux. |
2.14. |
L’Union européenne a joué un rôle important dans la formulation et la mise en œuvre des objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) (2005-2015) et a été une force motrice essentielle dans l’adoption des objectifs de développement durable (ODD) (2016-2030), en contribuant de manière décisive à l’intégration des valeurs européennes telles que les droits de l’homme, la démocratie, l’état de droit et la justice sociale dans le nouveau programme mondial de développement. |
2.15. |
L’Union européenne est un acteur mondial de premier plan qui fait progresser les choses en matière de changement climatique, et elle a joué un rôle important pour créer une large coalition de pays développés et en développement qui ont permis l’adoption de l’accord de Paris en décembre 2015. L’Union européenne s’est engagée à consacrer 20 % de son budget à l’action en faveur du climat, dans un sens tant d’atténuation que d’adaptation, afin de soutenir l’accord de Paris. |
2.16. |
L’enquête Eurobaromètre sur la coopération internationale et le développement, publiée en février 2016, indique que près de neuf citoyens de l’Union européenne sur dix soutiennent l’aide au développement (89 % — soit une augmentation de 4 points de pourcentage depuis 2014). Dans les nouveaux États membres, les chiffres tendent à être légèrement plus bas que dans les États membres plus anciens. Les chiffres révèlent une augmentation de la proportion des citoyens qui estiment que la lutte contre la pauvreté dans les pays en développement devrait constituer l’une des principales priorités de l’Union européenne (avec cinq points de pourcentage, soit 69 %) et des gouvernements nationaux (avec cinq points de pourcentage, soit 50 %). Près de sept participants sur dix ont plaidé en faveur d’un renforcement de l’aide au développement octroyée par l’Union européenne (68 %), ce qui est un pourcentage supérieur à celui de ces dernières années. Près des trois quarts des participants à cette enquête ont convenu que l’aide au développement est un moyen efficace pour lutter contre les migrations irrégulières (73 %), et 80 % des européens pensent que le développement est dans le propre intérêt de l’Union européenne. 52 % pensent que l’Union européenne devrait tenir sa promesse d’augmenter l’aide aux pays en développement. |
3. Observations
3.1. |
L’interconnectivité est le socle principal du programme de développement à l’horizon 2030, un cadre d’action destiné à l’élaboration de stratégies nationales globales en matière de développement durable qui intègrera de manière équilibrée les dimensions économique, sociale et environnementale destinées à parvenir à des effets positifs dans les domaines qui y sont liés, tout en tenant compte de facteurs transversaux: égalité des sexes, jeunesse, mobilité, migrations, investissements et énergie durable. Les priorités définies par le programme à l’horizon 2030 sont axées autour des priorités suivantes: les personnes, la planète, la prospérité, la paix et le partenariat. |
3.2. |
Si le nombre de personnes vivant en situation d’extrême pauvreté a diminué de plus de moitié entre 1990 et 2015, plus de 800 millions de personnes vivent encore avec moins de 1,25 dollar américain par jour, et 80 % d’entre elles habitent en Afrique subsaharienne et en Asie du Sud. Le consensus met l’accent sur la nécessité d’éradiquer la pauvreté dans les pays très pauvres, fragiles ou touchés par des conflits, et de renforcer la résilience, notamment celle des populations vulnérables qui sont confrontées à des chocs environnementaux et économiques, à des catastrophes naturelles et d’origine humaine et aux menaces mondiales qui pèsent sur la santé. |
3.3. |
D’ici 2030, les populations pauvres seront concentrées dans les pays instables et exposés aux effets des conflits qui aggravent encore la pauvreté. Dans ces conditions, si l’on veut pouvoir aider les personnes pauvres, différentes approches sont nécessaires. En dépit du fait qu’un nombre plus élevé de personnes échappent à l’extrême pauvreté, les inégalités se sont creusées entre les pays et à l’intérieur de ceux-ci. En dehors de la pauvreté, des conflits et du changement climatique, l’inégalité est devenue la principale source d’instabilité dans la majeure partie du monde. |
3.4. |
Des éléments substantiels figureront au cœur de la politique de coopération au développement: la problématique de la discrimination et des inégalités, la volonté que personne ne soit laissé de côté, l’accent mis sur l’éradication de la pauvreté, éléments qui constituent la base du développement durable. De même, des progrès seront enregistrés sur le plan de la dignité humaine: éradication de la faim, accès universel à l’éducation et à la formation, systèmes de couverture sanitaire, travail décent pour tous, transition de l’économie informelle vers l’économie formelle, protection sociale suffisante et adéquate, environnement sain. Ces objectifs peuvent être mis en œuvre par le biais d’une gouvernance fondée sur des politiques consolidées qui soient opérantes au niveau national, et d’un socle de protection des personnes vulnérables. |
3.5. |
L’action commune de longue durée profitera aux populations en situation de pauvreté chronique, produira de la croissance économique, réduira les inégalités et transformera les possibilités en résultats. Il conviendra que les réalisations économiques concrètes s’accompagnent de politiques de redistribution des dépenses publiques, renforçant l’accès à des services de qualité, en particulier l’éducation et les services de santé et d’assainissement. |
3.6. |
En outre, cette démarche créera des services de protection sociale qui seront efficaces, durables et équitables et seront liés à un travail générateur de revenus, sur la base de la solidarité fondée sur l’emploi. À titre de service fondamental, l’on peut également prévoir la garantie d’un revenu minimum (en tant que nouvel instrument), nécessaire pour créer les conditions de la résilience, afin d’éviter les retours à des situations d’extrême pauvreté. Il convient de renforcer les structures sociales à moyen et long terme. |
3.7. |
Bien que le consensus ne le mentionne pas expressément, il est prévu de maintenir l’engagement, pris au titre du programme pour le changement, concernant un soutien continu à l’insertion sociale et au développement humain, représentant au moins 20 % de l’aide de l’Union européenne. |
3.8. |
Un élément fondamental est la protection et l’application des droits des femmes et des jeunes filles, avec le respect de la santé sexuelle et génésique et des droits connexes, facteur essentiel du développement humain. Dans le même temps, il convient de renforcer la résilience des populations vulnérables face aux chocs économiques et environnementaux, notamment les catastrophes naturelles et anthropiques. Il est nécessaire de mettre en place un système pour la fourniture de l’aide humanitaire qui soit cohérent et intégré, en vue d’assister les personnes déplacées (avec une attention particulière aux mineurs et aux autres personnes vulnérables) en renforçant l’accès à l’éducation et à des emplois décents. |
3.9. |
Pour maintenir sa capacité vitale, l’être humain doit avoir accès à une alimentation variée et suffisante, nourrissante, sûre et accessible à tous. Il est indispensable d’apporter un soutien aux communautés pauvres afin d’améliorer leur accès aux ressources foncières, à l’eau, y compris potable, à l’assainissement, ainsi qu’à des sources d’énergie propres, en continu, à un prix juste et équitable et avec des effets minimes sur l’environnement. Garantir cet accès permettra de réduire les formes de malnutrition et de sous-nutrition et le retard de croissance et favorisera l’autonomisation des enfants, ainsi que leur santé mentale. De même, l’accès à de meilleurs services (progrès technologique et innovation numérique) ouvrira la possibilité d’accroître la qualité de vie des populations rurales et urbaines en croissance rapide, en contribuant à l’amélioration de la santé, la prospérité et la dignité des citoyens, et en répondant à leurs besoins. |
3.10. |
La résilience et la durabilité sont des éléments essentiels, indispensables pour la mise au point de solutions viables dans la conjoncture mondiale actuelle qui est complexe, dynamique et imprévisible. La vulnérabilité aggrave les effets aigus de la pauvreté, tandis que l’extrême fragilité liée à la récurrence des crises structurelles continue à générer des situations d’urgence humanitaire, entravant le développement de certaines communautés. La persistance de conflits requiert plus de ressources que celles disponibles, fait obstacle à la mise en place des droits humains fondamentaux et provoque une augmentation du nombre de réfugiés et de personnes déplacées. Les progrès sont compromis par les difficultés récurrentes en matière de santé publique. |
3.11. |
L’accès à des services énergétiques abordables et durables (production d’énergie à partir de sources renouvelables, lutte contre la pauvreté énergétique) demeure limitée et constitue un obstacle à la croissance économique et à une industrialisation appropriée et efficace, adaptée aux conditions, aux besoins et aux possibilités locales (conformément au respect de la protection de l’environnement). L’accès aux ressources naturelles est limité, car les modes d’exploitation non durables provoquent leur épuisement. |
3.12. |
Une agriculture durable, des systèmes alimentaires rationnels et une pêche durable génèrent des produits qui peuvent satisfaire efficacement les besoins des populations, avec une croissance exponentielle, lorsque la pression sur l’environnement est faible. Le stress hydrique et la demande (non durable) en eau ont une incidence sur le changement climatique. |
3.13. |
Le consensus vise à accorder une attention particulière à l’atout démographique que représente la jeunesse dans les pays en développement, en exploitant tout le potentiel de 1,3 milliard de personnes qui sont le moteur d’une croissance inclusive et d’un développement durable, en créant de nouveaux emplois de qualité et en soutenant l’autonomisation des jeunes et leur participation aux économies, aux sociétés et à la prise de décision et à la conduite des affaires publiques à l’échelon local. |
3.14. |
Il est nécessaire de procéder à une mutation vers une économie circulaire, pour permettre une utilisation efficace des ressources disponibles et soutenir le vaste processus en faveur d’un développement adéquat et durable. Il existe un réel potentiel pour que de nouveaux acteurs du secteur privé proposent des partenariats et des solutions innovantes, ainsi que des mécanismes financiers efficaces, viables et éthiques qui peuvent devenir des modèles de progrès. La coopération, ainsi que les technologies de communication et d’information (réseaux et infrastructures résilients et efficaces), sont des facteurs clés de réussite, du moment que les ressources et les investissements sont réorientés vers la réalisation des ODD, afin de permettre des progrès en réaction aux défis mondiaux. |
3.15. |
L’éradication de la pauvreté et le développement durable requièrent la durabilité environnementale et un climat stable, qui constituent une chance pour les segments vulnérables de la société. Les processus économiques déséquilibrés peuvent menacer la paix et la stabilité et provoquer des migrations à grande échelle. Les préoccupations environnementales doivent être intégrées aux actions de prévention, avec notamment un renforcement de l’application du principe du «pollueur-payeur». Un secteur privé responsable peut jouer un rôle essentiel en promouvant l’utilisation efficace des ressources et la consommation et la production durables, éléments susceptibles de découpler la croissance économique et la dégradation de l’environnement, dans le cadre de la transition vers une économie circulaire. |
3.16. |
Le rôle du secteur privé dans la mise en œuvre du programme à l’horizon 2030 devrait être évalué en fonction de sa capacité à contribuer à la réalisation des objectifs de développement dans les pays bénéficiaires et s’appuyer sur les principes du Partenariat mondial pour une coopération efficace au service du développement. Si de nouveaux instruments de financement impliquant les acteurs privés peuvent constituer un outil efficace de nature à générer un développement économique, de l’emploi et des recettes publiques, il est essentiel que ces instruments soient soumis aux mêmes conditions de transparence et d’évaluation que les financements publics. L’Union européenne et ses États membres devraient financer des évaluations transparentes et indépendantes permettant aux parties prenantes, notamment au niveau local, d’estimer le rapport coût-efficacité et l’impact des activités de financement du secteur privé et commercial en matière de développement. L’Union européenne et ses États membres doivent convenir d’un discours cohérent sur le rôle du secteur privé dans le développement pour garantir qu’aucune région ou aucun pays dans le besoin ne sont laissés de côté. Il conviendrait d’examiner les mécanismes de financement novateurs en matière de développement, tels que les partenariats public-privé (PPP), à l’aune des principes d’efficacité au regard du développement et des coûts, afin d’éviter des aides conditionnelles et de garantir un environnement réglementaire qui permette aux gouvernements d’organiser leurs services publics. |
3.17. |
L’Union européenne doit promouvoir des instruments internationaux puissants dans le domaine de l’économie responsable afin d’encourager des pratiques d’affaires et des chaînes d’approvisionnement responsables. Étant donné l’intérêt croissant que suscite le secteur privé comme acteur du développement, il conviendrait que les instruments existants en matière de conduite responsable des entreprises acquièrent davantage d’importance. L’acceptation et l’application des orientations et principes internationalement reconnus sur le comportement des entreprises et de leurs mécanismes de justification devraient devenir des préalables fondamentaux à l’octroi d’aides au secteur privé au titre de la coopération au développement. L’éligibilité devrait être liée au respect de ces principes et un système de suivi adéquat devrait aboutir à une réévaluation de l’aide financière lorsqu’ils ne sont pas observés. |
3.18. |
Il est nécessaire de soutenir fermement les pratiques commerciales responsables, l’intégration des droits de l’homme et du travail ainsi que les conditions de travail décentes (conformément à la convention de l’Organisation internationale du travail et aux autres orientations et principes internationalement reconnus sur le comportement des entreprises), la responsabilité sociale des entreprises (en ce qui concerne les normes de travail et les conditions de travail décentes), l’intégrité financière, la lutte contre la corruption et les normes environnementales. Ce faisant, l’on évitera les abus et la corruption, ce qui permettra de soutenir la transition d’une économie informelle à une économie formelle. |
3.19. |
Le CESE estime qu’un accès non discriminatoire à une formation de qualité tout au long de la vie, garantissant que chaque citoyen possèdera les connaissances et compétences requises, est une condition fondamentale au développement durable. Une vie meilleure, plus digne et plus engagée, en fonction des capacités de chacun, permettra l’émergence d’adultes meilleurs et plus responsables, et de davantage de droits au sein d’une société juste fondée sur le bien-être social et la prospérité économique. |
3.20. |
Un autre facteur essentiel du développement durable consistera en la conception, la construction, la mise en fonction et l’exploitation d’infrastructures urbaines efficaces: réseaux de transport durables, interconnectés et sûrs, et d’autres infrastructures résilientes. Les villes doivent devenir des centres de croissance et d’innovation, favorisant l’inclusion, avec des communautés rurales environnantes dotées de services de base décents. Ces objectifs entrent dans le cadre du concept d’aménagement du territoire, de la gestion équitable des marchés financiers, ainsi que de la mobilité urbaine. |
3.21. |
L’inégalité, l’absence d’état de droit, l’exclusion et les violations des droits de l’homme et des besoins humains sont les causes premières de la pauvreté, de la fragilité, des conflits générant des déplacements forcés de populations. La gouvernance démocratique est la garantie de l’exercice des droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels (diversité culturelle), ainsi que religieux. Le dialogue politique permet d’agir; la réforme de la justice, l’accès à la justice pour tous, une justice indépendante, ouverte, responsable et efficace, permettront d’alléger la charge qui pèse sur les groupes sociaux vulnérables. Il est nécessaire de consolider l’état de droit, de lutter contre la violence et la criminalité urbaines, de maximiser la sécurité de la population, de renforcer les capacités de l’État, la responsabilité, la transparence et la prévention des conflits. Cela sera propre à développer la confiance entre le gouvernement et la population. |
3.22. |
Le développement durable nécessite des sociétés qui favorisent l’intégration et des institutions démocratiques promouvant des valeurs universelles: une bonne gouvernance à plusieurs niveaux, l’état de droit, des processus décisionnels transparents, des initiatives destinées à lutter contre la corruption, les droits de l’homme, une société libre, juste et ouverte et une société civile transparente, facteur d’insertion et résiliente aux chocs internes ou externes. |
3.23. |
Se plaçant du point de vue de la future stratégie de l’Union européenne dans le domaine des relations culturelles internationales (JOIN 2016/29 et avis REX/480 encore en cours d’élaboration), le CESE insiste sur l’importance qu’il convient d’accorder à la culture en tant que quatrième pilier du programme de développement et, en conséquence, préconise de l’intégrer dans les priorités du nouveau consensus européen pour le développement. |
3.24. |
Dans son avis SOC/268 de 2007 sur l’immigration et la coopération pour le développement, le CESE note que «les migrations sont bénéfiques, aussi bien pour les pays d’origine que pour les pays d’accueil». Il convient toutefois de souligner qu’une mauvaise gestion des migrations peut conduire à un refus du respect des droits de l’homme et de l’accès à l’éducation et à la santé. Les migrants risquent d’être victimes de la traite des êtres humains et du travail forcé. Il s’impose de réagir et de prendre des mesures rapides et fermes, tant dans les pays d’origine et de transit que dans ceux de destination finale. Il est nécessaire d’instaurer une coordination systématique, structurée et en synergie, afin de maximiser les retombées positives et de réduire la migration illégale. Cette approche coordonnée devra s’articuler avec l’aide humanitaire. La solution est d’appliquer une politique de développement durable, avec un effort continu dans les pays sources d’émigration. Le dialogue politique est une composante de la politique extérieure européenne et un levier permettant la limitation des migrations. |
3.25. |
Selon l’enquête Eurobaromètre sur la coopération internationale et le développement, lancée en février 2016, plus d’un tiers (36 %) des citoyens de l’Union ont au moins entendu parler des objectifs de développement durable, bien qu’un sur dix seulement (10 %) sache en quoi ils consistent. Les citoyens habitant les régions septentrionales et centrales sont les plus nombreux à avoir entendu parler des objectifs de développement durable, ou lu des informations à leur sujet. Il est évident que l’Union européenne doit consentir davantage d’efforts pour éduquer et informer les citoyens européens au sujet de la coopération au développement, en mettant tout particulièrement l’accent sur les États membres du Sud et de l’Est de l’Europe. Le CESE a également formulé cette recommandation dans son avis REX/461 intitulé «Le programme à l’horizon 2030 — Une Union européenne engagée en faveur du développement durable à l’échelle mondiale»: «La Commission européenne devrait organiser et mener des actions de sensibilisation et des campagnes visant à faire du programme à l’horizon 2030 un véritable programme européen. Elle devrait entreprendre des enquêtes Eurobaromètre périodiques, afin de mesurer le degré de sensibilisation et de compréhension des citoyens de l’Union vis-à-vis des ODD. Les organisations de la société civile ont un rôle capital à jouer au sein de ce processus». |
3.26. |
L’Union européenne a la capacité de jouer un rôle de premier plan en matière d’objectifs de développement durable, et elle est en mesure de l’assumer grâce à la puissance de sa solidarité, à ses politiques sociales et à ses partenariats économiques et commerciaux avec tous les acteurs intéressés qui partagent les mêmes valeurs. Son vaste réseau diplomatique garantit la cohérence et la logique de son action, un renforcement de sa crédibilité et de sa légitimité ainsi que sa valeur ajoutée, avec un impact positif. La diversité des expériences européennes, les approches différenciées, la valeur ajoutée ainsi que l’unité dans la diversité sont des éléments spécifiques de l’action extérieure de l’Union, et représentent pour elle un avantage concurrentiel. |
Bruxelles, le 26 avril 2017.
Le président du Comité économique et social européen
Georges DASSIS
(1) Document de travail des services de la Commission. Évaluer le consensus européen pour le développement de 2005 et accompagner l’initiative intitulée «Proposition d’un nouveau consensus européen sur le développement»
(2) The COST of Non-Europe in Development Policy: Increasing Coordination between EU Donors («Le coût de l’absence d’Europe dans la politique de développement: renforcer la coordination entre les donateurs de l’Union européenne»), Parlement européen (2013)
(3) Rapport AidWatch, Concord (2016),