ISSN 1977-0936

Journal officiel

de l'Union européenne

C 230

European flag  

Édition de langue française

Communications et informations

58e année
14 juillet 2015


Numéro d'information

Sommaire

page

 

I   Résolutions, recommandations et avis

 

AVIS

 

Comité économique et social européen

 

503e session plénière du CESE des 10 et 11 décembre 2014

2015/C 230/01

Avis du Comité économique et social européen sur Le développement local mené par les acteurs locaux en tant qu’instrument de la politique de cohésion 2014-2020 pour le développement local, rural, urbain et périurbain (avis exploratoire à la demande de la présidence grecque du Conseil de l’Union européenne)

1

2015/C 230/02

Avis du Comité économique et social européen sur Une stratégie de l’UE pour la région alpine (avis exploratoire)

9

2015/C 230/03

Avis du Comité économique et social européen sur les Capacités aéroportuaires dans l’Union européenne (avis exploratoire à la demande de la Commission européenne)

17

2015/C 230/04

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Achever l’Union économique et monétaire — le rôle de la politique fiscale (avis d’initiative)

24

2015/C 230/05

Avis du Comité économique et social européen sur Les mutations industrielles dans le secteur européen de l’emballage (avis d’initiative)

33

2015/C 230/06

Avis du Comité économique et social européen sur la contribution du secteur du travail du bois au bilan carbone (avis d’initiative)

39

2015/C 230/07

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Le cinéma européen à l’ère numérique (avis d’initiative)

47

2015/C 230/08

Avis du Comité économique et social européen sur la société civile en Russie (avis d’initiative)

52


 

III   Actes préparatoires

 

COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN

 

503e session plénière du CESE des 10 et 11 décembre 2014

2015/C 230/09

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Recherche et innovation comme sources de croissance renouvelée[COM(2014) 339 final — SWD(2014) 181 final]

59

2015/C 230/10

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — programme pour une réglementation affûtée et performante (REFIT): situation actuelle et perspectives[COM(2014) 368 final]

66

2015/C 230/11

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen — Vers un consensus renouvelé sur la protection des droits de propriété intellectuelle: un plan d’action de l’Union européenne[COM(2014) 392 final]

72

2015/C 230/12

Avis du Comité économique et social européen sur le Livre blanc — Vers un contrôle plus efficace des concentrations dans l’Union européenne[COM(2014) 449 final]

77

2015/C 230/13

Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions relative à un cadre stratégique de l’Union européenne en matière de santé et de sécurité au travail (2014-2020) [COM(2014) 332 final]

82

2015/C 230/14

Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions sur les possibilités d’utilisation efficace des ressources dans le secteur de la construction [COM(2014) 445 final], sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Vers une économie circulaire: programme zéro déchet pour l’Europe[COM(2014) 398 final] et sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2008/98/CE relative aux déchets, la directive 94/62/CE relative aux emballages et aux déchets d’emballages, la directive 1999/31/CE concernant la mise en décharge des déchets, la directive 2000/53/CE relative aux véhicules hors d’usage, la directive 2006/66/CE relative aux piles et accumulateurs ainsi qu’aux déchets de piles et d’accumulateurs et la directive 2012/19/UE relative aux déchets d’équipements électriques et électroniques [COM(2014) 397 final — 2014/0201 (COD)]

91

2015/C 230/15

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Plan d’action vert pour les PME: Permettre aux PME de transformer les impératifs environnementaux en nouveaux créneaux d’activité économique[COM(2014) 440 final], et la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Initiative pour l’emploi vert: Exploiter le potentiel de création d’emploi de l’économie verte[COM(2014) 446 final]

99

2015/C 230/16

Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil Meilleure connaissance de la situation grâce à une coopération renforcée entre les autorités de surveillance maritime: prochaine évolution de l’environnement commun de partage de l’information pour le domaine maritime de l’Union européenne[COM(2014) 451 final]

107

2015/C 230/17

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Stratégie pour la protection et le respect des droits de propriété intellectuelle dans les pays tiers (Communication)[COM(2014) 389 final]

112

2015/C 230/18

Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à l’importation dans l’Union de produits agricoles originaires de Turquie (codification) [COM(2014) 586 final — 2014/0272 (COD)]

117

2015/C 230/19

Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil suspendant certaines concessions relatives à l’importation dans l’Union de produits agricoles originaires de Turquie (codification) [COM(2014) 593 final — 2014/0275 (COD)]

118

2015/C 230/20

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant ouverture et mode de gestion de certains contingents tarifaires de l’Union pour la viande bovine de haute qualité, la viande porcine, la viande de volaille, le froment (blé) et méteil et les sons, remoulages et autres résidus (texte codifié)COM(2014) 594 final — 2014/0276 COD

119

2015/C 230/21

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant un plan pluriannuel pour les stocks de cabillaud, de hareng et de sprat de la mer Baltique et les pêcheries exploitant ces stocks, modifiant le règlement (CE) no 2187/2005 du Conseil et abrogeant le règlement (CE) no 1098/2007 du Conseil[COM(2014) 614 final — 2014/0285 COD]

120

2015/C 230/22

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux mesures de sauvegarde prévues à l'accord entre la Communauté économique européenne et la République d'Islande (texte codifié) [COM(2014) 308 final — 2014/0160 (COD)]

121

2015/C 230/23

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au régime commun applicable aux exportations (codification)[COM(2014) 322 final — 2014/0167 (COD)]

122

2015/C 230/24

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au régime commun applicable aux importations (codification)COM(2014) 321 final — 2014/0166 (COD)

123

2015/C 230/25

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au régime commun applicable aux importations de certains pays tiers (refonte)COM(2014) 323 final — 2014/0168 (COD)

124

2015/C 230/26

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au régime commun applicable aux importations de produits textiles en provenance de certains pays tiers non couverts par des accords, protocoles ou autres arrangements bilatéraux, ou par d'autres régimes d'importation spécifiques de l'Union (refonte)COM(2014) 345 final — 2014/0177 (COD)

125

2015/C 230/27

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil arrêtant des procédures de l'Union en matière de politique commerciale commune en vue d'assurer l'exercice par l'Union des droits qui lui sont conférés par les règles du commerce international, en particulier celles instituées sous l'égide de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) (texte codifié)COM(2014) 341 final — 2014/0174 (COD)

126

2015/C 230/28

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux mesures que l’Union peut prendre à la suite d’un rapport adopté par l’organe de règlement des différends de l’OMC concernant des mesures antidumping ou antisubventions (codification)[COM(2014) 317 final — 2014/0163 (COD)]

127

2015/C 230/29

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant certaines procédures d’application de l’accord de stabilisation et d’association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la République du Monténégro, d’autre part (texte codifié)[COM(2014) 374 final — 2014/0190 (COD)]

128

2015/C 230/30

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la défense contre les importations qui font l’objet de subventions de la part de pays non membres de l’Union européenne (texte codifié)[COM(2014) 660 final — 2014/0305 (COD)]

129


FR

 


I Résolutions, recommandations et avis

AVIS

Comité économique et social européen

503e session plénière du CESE des 10 et 11 décembre 2014

14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/1


Avis du Comité économique et social européen sur «Le développement local mené par les acteurs locaux en tant qu’instrument de la politique de cohésion 2014-2020 pour le développement local, rural, urbain et périurbain»

(avis exploratoire à la demande de la présidence grecque du Conseil de l’Union européenne)

(2015/C 230/01)

Rapporteur:

M. Roman HAKEN

Le 2 avril 2014, M. l’ambassadeur Theodoros N. Sotiropoulos, président du Comité des représentants permanents, a demandé au Comité économique et social européen, au nom de la présidence grecque du Conseil de l’Union européenne, d’élaborer un avis exploratoire sur:

«Le développement local mené par les acteurs locaux en tant qu’instrument de la politique de cohésion 2014-2020 pour le développement local, rural, urbain et périurbain».

La section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 18 novembre 2014.

Lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 11 décembre 2014), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 133 voix pour, 2 voix contre et 1 abstention.

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le CESE constate qu’au cours des vingt dernières années, l’approche Leader a prouvé sa viabilité. Elle a aidé les acteurs ruraux à jauger le potentiel à long terme de leur région et s’est avérée un instrument efficient et efficace pour mettre en œuvre les politiques de développement. La Commission européenne a également encouragé cette méthode de partenariat pour financer les idées de projets dans le cadre des initiatives de l’Union européenne URBAN, Urbact, EQUAL, ou encore de l’Agenda local 21, des Villes en transition et des pactes territoriaux pour l’emploi. C’est ainsi que s’explique l’apparition du développement local mené par les acteurs locaux (DLAL, également connu sous son sigle anglais CCLD: «Community-Led Local Development»), une mise à jour de l’approche Leader qui constitue en quelque sorte un changement transitoire.

1.2.

Le développement local mené par les acteurs locaux est un instrument spécifique à usage infrarégional, qui complète d’autres types de soutien au développement au niveau local. Il peut mobiliser et impliquer les communautés et organisations locales de manière à les faire contribuer à une croissance intelligente, durable et inclusive. Il renforce la cohésion territoriale et permet d’accomplir d’autres objectifs politiques spécifiques, également dans le cadre des relations avec des partenaires de pays tiers. Il permet de parvenir à une croissance durable grâce à une utilisation efficace des Fonds structurels et d’investissement européens (Fonds ESI) s’agissant de créer de nouveaux emplois de qualité et des entreprises en englobant les activités menées par les acteurs locaux en matière de changement climatique et de développement durable conformément à la stratégie Europe 2020.

1.3.

Il convient de transformer le plus rapidement possible le développement local mené par les acteurs locaux en un instrument «SMART» afin d’aider les acteurs locaux à sortir de la crise économique et sociale et à restaurer la confiance en la politique de l’Union européenne. Il convient de mettre l’accent sur les projets innovants, sur de nouveaux emplois de qualité et les entreprises, et de renforcer les mesures destinées à maîtriser les changements climatiques et à favoriser le développement durable et l’inclusion sociale, conformément à la nouvelle stratégie Europe 2020. Le développement local mené par les acteurs locaux constitue un nouveau type de partenariat, visant à soutenir la création d’innovations sociales.

1.4.

La plupart des États membres l’ont adopté dans le cadre de leurs accords de partenariat, ce qui témoigne de l’importance accordée aujourd’hui au développement local (1). Il conviendrait d’étendre ce mode de gestion multilatérale à l’ensemble des activités financées au travers des Fonds ESI, en fixant éventuellement un niveau d’utilisation obligatoire pour tous les fonds (5 % minimum). Le CESE est favorable à ce que tous les États membres de l’Union européenne utilisent progressivement cet instrument, en recourant au principe de partenariat et à l’échange des meilleures pratiques.

1.5.

Le CESE se félicite que les présidences grecque et italienne du Conseil en 2014 attachent une grande importance à la politique de cohésion qui constitue un moyen efficace de stimuler une croissance durable et de surmonter la crise économique qui sévit actuellement en Europe.

1.6.

Le CESE escompte que le présent avis servira à son tour de point d’appui pour réaliser les projets pilotes (financés notamment par des crédits de la Commission européenne) en vue de valider l’instrument du développement local mené par les acteurs locaux là où il n’est actuellement pas d’application, à savoir notamment dans les conditions du milieu périurbain et notamment urbain, et d’en élargir ainsi les perspectives d’utilisation. Le CESE approuve, pour la période 2014-2020 et là où se manifestera un intérêt pour cette méthode, son application à l’ensemble des fonds et à l’espace tant rural qu’urbain. Il s’agit de combiner les deux démocraties, représentative et participative. En somme, c’est un instrument qui permet aux représentants des administrations publiques de coopérer en partenariat avec la société civile organisée et les citoyens.

1.7.

Le CESE estime opportun de permettre aux acteurs locaux, c’est-à-dire aux citoyens, aux partenaires économiques et sociaux, aux organisations non gouvernementales (ONG) à but non lucratif et aux collectivités locales, de participer par exemple à la stratégie de développement local sur leur lieu de vie, à l’aide de la méthode du développement local mené par les acteurs locaux. Il importe également, sur la base des expériences menées dans les zones rurales avec l’approche Leader, de donner un contenu au développement urbain local mené par les acteurs locaux, de manière que les villes et les citoyens prennent conscience des mesures qui pourront être proposées dans le cadre du développement local mené par les acteurs locaux dans les villes.

1.8.

Le CESE a le regret de constater que les administrations publiques ne sont souvent guère favorables à la méthode du développement local mené par les acteurs locaux, et ce malgré son efficacité. Il est indispensable de s’attacher à une stratégie qui informe et oriente de manière qualifiée les acteurs et de s’adresser plus précisément aux autorités publiques afin de favoriser l’exploitation de cette occasion de développer et de mener des stratégies de développement local. La question de la «propriété des résultats» au sein de tels groupes revêt une importance cruciale pour la stabilité des stratégies de développement à long terme et pour réaliser les objectifs de la stratégie Europe 2020. Pour le succès de cet instrument, il est indispensable qu’il bénéficie d’un soutien politique à tous les niveaux (européen, national, régional et local).

1.9.

Le CESE relève que les partenaires sociaux et économiques ainsi que la société civile organisée doivent être davantage impliqués dans le développement local mené par les acteurs locaux, et qu’une condition nécessaire est de renforcer leurs capacités à jouer ce rôle. La participation directe de tous ces partenaires au partenariat avec l’administration publique constitue la base d’une véritable représentation des intérêts et des besoins des citoyens.

1.10.

Le CESE estime que le développement local mené par les acteurs locaux constitue une innovation dans le domaine de la politique régionale et qu’il n’y est pas suffisamment connu en tant que tel, aussi bien à l’échelon local qu’à celui de certains États membres ou au sein des plates-formes rassemblant les acteurs susceptibles de porter cette démarche. Afin d’aider à appliquer ce nouvel instrument du développement local mené par les acteurs locaux dans le cadre des politiques européennes, il convient d’analyser en détail, dans une optique d’évaluation, la manière dont l’État membre concerné l’aborde tout en y adjoignant des recommandations afin de procéder avec efficacité. Ainsi, l’on disposera également d’une étude exposant non seulement des exemples de bonnes pratiques, mais décrivant aussi les échecs dont il conviendra de se garder à l’avenir. Le CESE souhaite participer à l’élaboration d’une telle étude, conjointement avec les services compétents de la Commission européenne, du Parlement européen, du Conseil et du Comité des régions. Celle-ci pourrait servir de base à la création d’un intergroupe sur le développement local mené par les acteurs locaux, qui servirait de plate-forme interinstitutionnelle.

1.11.

En matière de développement local mené par les acteurs locaux, le CESE est favorable:

a)

aux financements multifonds: il s’agit de suivre et de renforcer la méthode du développement local mené par les acteurs locaux dans le cadre d’un financement multifonds qui s’applique de manière transversale en Europe et au sein des programmes de l’Union européenne, et de s’efforcer de lancer le plus rapidement possible la prochaine période de programmation;

b)

à l’unification des pratiques et approches: il s’agit de promouvoir au sein de l’Union européenne un degré élevé de qualité du développement local mené par les acteurs locaux, de normaliser les activités des GAL (groupes d’action locale) (2) et d’échanger réciproquement les bonnes pratiques, de favoriser la couverture des zones blanches sur la carte, de manière à permettre d’élargir l’approche Leader sur les plans territorial et thématique, ce qui conditionne le succès du fonctionnement de l’approche Leader/du développement local mené par les acteurs locaux dans le cadre des différents programmes de l’Union européenne;

c)

à la création de réseaux et à la coopération: c’est une condition fondamentale du bon fonctionnement de la méthode du développement local mené par les acteurs locaux; il s’agit de mener à bien des projets de coopération dans les réseaux existants mais aussi de mettre sur pied des réseaux aux échelons régional, national et européen, et de faire valoir la nécessité de l’éligibilité des charges liées à l’établissement et au fonctionnement de réseaux, y compris celles que constituent les contributions des membres;

d)

à l’élargissement de l’approche: il s’agit de soutenir l’application de la méthode du développement local mené par les acteurs locaux en débordant le cadre du territoire de l’Union, voire en dehors de ce dernier, par exemple dans le cadre des négociations de préadhésion ou de la politique de développement;

e)

à la simplification du processus: il s’agit de ne pas engorger ces entités de petite taille à l’échelon local par une charge administrative excessive, de réduire, partout où cela est possible, l’obligation de rapport à son plus faible niveau possible sans qu’elle ne perde de sa crédibilité, de ne pas permettre aux autorités compétentes de modifier les règles lors de la mise en œuvre des Fonds ESI, et de lancer immédiatement et partout les programmes qui procurent des informations, des séminaires qui autorisent les échanges d’expériences positives et qui soutiennent les acteurs locaux publics et privés;

f)

au renforcement des capacités des partenaires sociaux et économiques, ainsi que des acteurs de la société civile, de manière que le plus grand nombre possible de partenaires puisse proposer une approche active en matière de développement local mené par les acteurs locaux, avant que ne s’achève la période prévue à cet effet (c’est-à-dire avant le 31 décembre 2017).

1.12.

La méthode du développement local mené par les acteurs locaux est parfaitement applicable non seulement aux ressources des Fonds ESI, mais aussi à des fins de redistribution de moyens financés en propre (provenant des échelons local, régional et national). C’est pourquoi il importe d’établir les stratégies de développement, les projets spécifiques et les moyens de leur mise en œuvre non pas en fonction de la dotation prévue de l’Union européenne, mais de manière à ce qu’ils reflètent les besoins réels s’agissant de changer la qualité de vie de la communauté locale.

1.13.

Le CESE estime qu’il est essentiel de respecter strictement les principes fondamentaux de la méthode du développement local mené par les acteurs locaux. L’existence d’un partenariat équilibré auquel participent les communautés locales doit nécessairement constituer une condition ex ante pour l’obtention de fonds de subventions. Pour un développement local efficace, il est indispensable de ne pas tolérer les démarches purement formelles, lesquelles consistent, en vue d’obtenir des subventions, à se contenter de déclarer une approche de partenariat qui n’est nullement concrétisée. Il s’impose de développer un système efficace de contrôle et de surveillance contre le détournement du principe du développement local mené par les acteurs locaux.

1.14.

Le CESE constate que cette démarche présente des caractéristiques non négligeables, et ce non seulement en période de crise économique: transparence des flux financiers provenant des budgets publics, confiance accrue entre les organes des administrations publiques et les habitants et efficience des moyens investis. L’ONU, l’OCDE, la Banque mondiale et d’autres institutions plaident elles aussi en faveur de telles approches de partenariat. Il s’agit d’une approche élargie qui appuie le recours aux méthodes du développement local mené par les acteurs locaux ailleurs qu’en Europe, par exemple dans le cadre des négociations de préadhésion en matière de politique de développement et des efforts déployés en vue d’atteindre les objectifs de développement durable de l’ONU pour 2015 et de respecter les engagements concernant les changements climatiques.

1.15.

Le CESE discerne les possibles défis pour la prochaine période en matière de développement local mené par les acteurs locaux, s’agissant de simplifier et de limiter les charges administratives. Il s’agit:

a)

de soutenir la création et le développement de systèmes (ou plates-formes) alternatifs et indépendants d’arbitrage et/ou de conciliation composés d’experts, afin de résoudre rapidement et simplement les problèmes administratifs et financiers découlant d’éventuels conflits entre les instances gestionnaires des programmes opérationnels et la gestion de projet des différents partenariats individuels (dans un rôle comparable à celui des auditeurs financiers, mais dans un domaine qui ne soit pas exclusivement celui des finances);

b)

d’appliquer concrètement le principe selon lequel les organismes de mise en œuvre (y compris les contrôles des rapports de suivi) traitent a) des réalisations concrètes, des résultats, des bénéfices et des retombées des projets, b) du bien-fondé des charges et c) du respect des délais, et qu’ils ne se préoccupent pas des détails qui se trouvent sur la voie menant vers ces résultats;

c)

de publier également sur le territoire concerné les appels à «projets intégrés» présentés par plusieurs candidats (à l’instar de la démarche EQUAL);

d)

dans le domaine financier, de modifier la définition des irrégularités appliquée jusqu’à présent, ainsi que l’interprétation de la notion d’infraction à la discipline budgétaire, à savoir:

ne pas recourir à une interprétation d’une rigueur disproportionnée pour les cas d’importance mineure se chiffrant à «quelques euros»: ne pas vérifier et ne pas considérer comme entachés d’irrégularité les cas où sont mal comptabilisés ou manquent des montants inférieurs à, par exemple, 10 (ou 40) euros;

dans le même temps, s’il s’avère que le montant des dommages est inférieur à celui des charges liées à leur réparation (que ce soit pour le bénéficiaire ou l’organisme de contrôle), il convient de ne pas les traiter, quitte à les enregistrer et à les cumuler à d’autres dommages de faible montant.

1.16.

Le CESE recommande d’employer une terminologie distincte afin de différencier les divers types d’application du programme de développement local mené par les acteurs locaux, comme c’est le cas pour les groupes d’action locale ruraux et les groupes d’action locale de la pêche. Pour les GAL urbains, nous préconisons par exemple l’appellation de «partenariat urbain», pour le développement local mené par les acteurs locaux dans l’espace urbain, le sigle DLAL-U. Cela aiderait à mieux discerner le type d’espace dont il est question et à distinguer les flux financiers et leur destination. Nous recommandons dans le même temps d’étudier aussi, sur le modèle que constitue à cet égard la réussite du programme Leader, une nouvelle dénomination et un acronyme attrayant pour le développement local mené par les acteurs locaux, auxquels tous les acteurs seraient davantage susceptibles de se rallier. La dénomination est un élément à part entière de la campagne de promotion et l’expression de développement local mené par les acteurs locaux, en tant qu’intitulé de la méthode, peut rester «en note de bas de page».

2.   Introduction à la question: l’instrument du développement local mené par les acteurs locaux et sa création (programme Leader) — historique, conséquences et points de vue des institutions européennes

2.1.

Les principes fondamentaux de l’approche Leader — leur valeur ajoutée et leur application dans le cadre de la méthode du développement local mené par les acteurs locaux:

2.1.1.   Une approche territoriale

Afin de développer de manière pérenne un territoire défini de petite taille, le programme tire parti du potentiel réel de ce dernier. Il tient compte de ses atouts et de ses handicaps, et la stratégie de développement élaborée répond à ses besoins réels. Les limites de ce territoire ne sont pas définies uniquement par des frontières administratives et sont souples.

2.1.2.   Une approche ascendante

Lors de la décision et de la définition des priorités d’une stratégie de développement, nous attachons une grande importance à l’association de l’administration du territoire et de ses habitants. L’accent placé sur l’échelon le plus bas constitue le plus important des sept points du programme. Toutefois, ce dernier ne cherche pas à évincer ainsi l’échelon national supérieur, mais plutôt à favoriser les échanges entre ces deux échelons.

2.1.3.   Groupes d’action locale

Le soutien à la mise en place de groupes locaux constitue un élément important du programme. Les groupes locaux doivent rassembler les partenaires des secteurs public, privé et bénévole et conduire à un dialogue sur l’orientation du développement du territoire.

2.1.4.   Une approche innovante

Le programme soutient l’innovation. Il s’efforce de créer des produits, des processus, des organisations et des marchés nouveaux. L’octroi d’une flexibilité maximale aux groupes locaux permet de susciter l’innovation.

2.1.5.   Une approche intégrée et multisectorielle

La démarche du programme prévoit de mettre l’accent sur l’intégration des différents secteurs. Elle s’efforce de coordonner les domaines économique, social et culturel ainsi que les questions environnementales et de les intégrer dans des projets d’ensemble.

2.1.6.   Mise en réseau

Le programme soutient la création de réseaux afin que les participants échangent leurs expériences. Ces réseaux ont un caractère soit institutionnel lorsqu’ils sont financés par la Commission européenne, soit moins formel lorsqu’ils sont établis aux échelons national, territorial et local.

2.1.7.   Coopération

L’échange d’expériences au sein des réseaux ne constitue cependant pas l’étape ultime de la coopération prévue par le programme. Les groupes locaux peuvent coopérer directement autour d’un projet thématique.

2.1.8.   Animation du territoire

Pour réaliser un vrai travail avec les habitants d’un territoire donné, il est nécessaire non seulement de les informer, mais aussi de créer un environnement propice à la communication et de renforcer la confiance dans le principe que leurs idées seront objectivement évaluées et prises en compte.

2.2.

Le Comité des régions«considère le développement local mené par les acteurs locaux comme un instrument essentiel du développement harmonieux des zones urbaines et rurales; il renforce les capacités à développer des relations avec les zones périurbaines et rurales voisines» (3).

2.3.

Le Comité économique et social européen a élaboré une série d’avis sur la coopération et la participation en partenariat, notamment ceux dont les références figurent ci-dessous, en note de bas de page (4).

2.4.

La Commission européenne a publié des documents aux fins de la mise en œuvre du développement local mené par les acteurs locaux, fondés sur l’expérience de la méthode Leader, et intitulés «Fonds structurels et d’investissement européen — orientations pour les États membres et les autorités de programmes — orientations pour les bénéficiaires — orientations sur le développement local mené par les acteurs locaux» (5) et «Orientations pour le développement local mené par les acteurs locaux dans le cadre des Fonds structurels et d’investissement» (6).

2.5.

Il convient de diffuser plus efficacement ces documents dans le cadre d’une véritable stratégie volontariste d’information. Il est également nécessaire de prévoir un espace pour les réunions conjointes des acteurs du développement local mené par les acteurs locaux et des experts, offrant la possibilité de débattre et de comparer les approches ayant cours dans les différentes régions de l’Union européenne. Les installations nécessaires à ces activités pourraient, par exemple, être mises à disposition par le CESE.

3.   Les groupes d’action locale (GAL) dans l’espace rural et le soutien à leur action au cours de la période 2014-2020 — des budgets publics sous contrôle public

3.1.

Le groupe d’action locale est l’unité fondamentale du programme Leader. Il s’agit d’un partenariat local, où il existe une représentation proportionnelle tant des secteurs que des domaines d’intervention. Le GAL a la personnalité juridique et dispose d’un ensemble de procédures de gestion et de prise de décision. Le nombre total de GAL dans l’Union européenne soutenus par des programmes de développement rural et d’autres mesures de type Leader s’élève à 2  402; ils couvrent 77 % du territoire total de l’Union européenne (7), c’est-à-dire à peu près 90 % de l’espace rural et plus de 50 % de la population de l’Union européenne (8).

3.2.

L’approche Leader s’est avérée si efficace qu’il convient de l’élargir, dans la mesure du possible, à l’ensemble de l’espace rural de l’Union européenne. Il convient de veiller dans le même temps à la compatibilité des règles qui régissent la coopération internationale entre des GAL établis dans différents États membres.

3.3.

Parmi les priorités du programme proposées pour la période 2014-2020 figurent aussi notamment:

a)

les jeunes en milieu rural: il s’agit d’amener les jeunes des centres vers les zones rurales, par l’utilisation appropriée du développement local mené par les acteurs locaux, le renforcement de l’attractivité des zones rurales pour la jeune génération, le soutien au développement et à l’accessibilité des technologies de l’information, la promotion de l’éducation;

b)

l’économie locale: il s’agit de soutenir l’économie locale, les petites entreprises d’acteurs non agricoles (par exemple en revitalisant l’artisanat et les microentreprises) et les petites et moyennes entreprises;

c)

l’entrepreneuriat social, qu’il s’agit de renforcer à l’échelon local dans des secteurs novateurs ayant des retombées sur la création d’emplois et le développement durable (tels que le tourisme, les sources d’énergie renouvelable ou encore les activités culturelles et sportives). Il est essentiel que les acteurs locaux, nationaux et européens, ainsi que les autres partenaires économiques, reconnaissent l’économie sociale comme un facteur crucial pour le développement économique et social de l’échelon local. Il y a lieu que les institutions européennes conçoivent des campagnes pour mettre en valeur la contribution de l’économie sociale au développement local. Il convient en outre de définir des lignes directrices générales afin d’inclure les entreprises sociales dans les partenariats pour le développement local. C’est pourquoi le CESE propose de créer des coopératives et d’autres entreprises sociales en recourant à des services publics et privés de conseil appuyés par les entrepreneurs et les pépinières d’entreprises à l’échelon local. Le CESE soutient la promotion de partenariats entre les entreprises sociales locales et les administrations locales et régionales pour fournir les services nécessaires (par exemple en matière d’inclusion sociale, d’éducation);

d)

une production d’aliments sains et des produits régionaux;

e)

le développement des infrastructures techniques (telles que les stations d’épuration des eaux usées, y compris par épuration individuelle et par phytoépuration);

f)

la transition vers une société durable à faibles émissions de carbone: il serait possible de transcrire cet aspect dans les indicateurs et les objectifs du développement local mené par les acteurs locaux en matière de développement durable, d’émissions de carbone, de résilience et de réalisation des objectifs de l’Union européenne en matière de développement durable et de changements climatiques, tout comme dans les objectifs de l’ONU pour le développement durable pour 2015 et dans les engagements en matière de changements climatiques;

g)

l’utilisation efficace des réseaux existants (par exemple les Réseaux ruraux nationaux).

4.   L’espace périurbain et les groupes d’action locale de la pêche — défis spécifiques

4.1.

Les territoires où voisinent étroitement la ville et la campagne constituent un espace propice à une mise en œuvre efficace du développement local mené par les acteurs locaux. Ce type d’instrument permet de réagir aux évolutions du comportement de l’espace et de tenir compte des liens fonctionnels du territoire. Il existe des liens très forts entre la ville et la campagne périurbaine, qui méritent de faire l’objet d’une approche spécifique.

4.2.

L’espace périurbain présente des problèmes (défis) spécifiques, que l’on peut résoudre au moyen du développement local mené par les acteurs locaux. Les principaux défis sont une mobilité durable, la construction d’une société cohésive sur le plan social, l’établissement de priorités en matière d’utilisation des sols. L’espace périurbain entoure les villes de plus de 25  000 habitants. Il convient de mentionner ici le projet commun de recherche «Rurban» de l’OCDE et de la CE, qui vise à identifier et à évaluer les partenariats formels et informels entre les villes et les campagnes et leur contribution au développement local (9).

4.3.

L’approche de développement local est également utilisée depuis 2007 dans le cadre du Fonds européen pour la pêche pour soutenir le développement durable des communautés de pêcheurs au moyen des groupes d’action locale de la pêche (GALP).

5.   L’espace urbain — mobiliser la population et assurer le financement du développement local

5.1.

Il n’existe pas de définition unique de l’espace urbain; nous nous basons sur les règles et usages ayant cours aux niveaux national et local. En ce qui concerne l’espace rural, on recourt au critère de la taille maximale des villes, dont la population doit être inférieure à 25  000 habitants. Par analogie, on peut également l’appliquer aux zones urbaines (en fixant comme seuils une population minimale de 10  000 habitants et une population maximale de 1 50  000 habitants). L’administration publique participerait à travers ses représentants compétents pour le territoire concerné, issus dans l’idéal aussi bien de la mairie centrale de la ville que de celles des arrondissements ou autres divisions (par exemple d’un quartier donné, d’une localité exclue socialement, de zones de la ville confrontées à un certain type de problèmes, etc.).

5.2.

L’expérience concrète de certaines villes, acquise grâce à leur participation au programme opérationnel Urbact II, à la plate-forme européenne de développement des connaissances (10) (et, à brève échéance, à la plate-forme de développement urbain), peut être une source d’inspiration (11). Il convient également de faire état de l’expérience des Villes en transition et des communautés de permaculture, dans le cadre desquelles plusieurs milliers de communautés locales dans toute l’Union européenne ont promu avec succès le développement durable mené par les acteurs locaux.

5.3.

Vingt ans d’expérience en milieu rural, cela signifie également que les villes s’inspireront de la campagne, dans un premier temps, par exemple, pour une période transitoire qui fera l’objet d’une évaluation. Dans la pratique, avec en outre le soutien d’experts et une forme de tutorat, on parviendra à un transfert fructueux de cette approche.

5.4.

Dès la période de programmation 2007-2013, des organes consultatifs avaient été mis en place au niveau des villes sous la forme de groupes de soutien local Urbact, qui étaient associés au processus d’élaboration des plans d’action locaux. Mais, contrairement à ce que prévoient l’approche Leader et le développement local mené par les acteurs locaux, il ne s’agissait que de groupements consultatifs d’experts relativement informels au sein desquels n’était pas exigée une représentation des différents secteurs. La composition de ces groupes était déterminée par l’orientation thématique du projet concerné. Le programme opérationnel Urbact II ne soutenait pas financièrement les réalisations des groupes de soutien local. Afin d’accroître l’efficacité du fonctionnement du principe de partenariat également en milieu urbain, il convient de créer des partenariats sur la base du développement local mené par les acteurs locaux. Ces partenariats doivent disposer des moyens financiers nécessaires pour assurer leur fonctionnement. «Il est également possible d’appliquer cette approche dans les zones urbaines et dans celles que constituent les villes petites et moyennes avec leurs espaces fonctionnels dans leur rôle de centres locaux et infrarégionaux»  (12).

5.5.

Compte tenu des problèmes traités dans les villes, divers programmes opérationnels constituent un instrument adéquat pour financer des projets pilotes au moyen du développement local mené par les acteurs locaux. C’est pourquoi nous proposons d’utiliser cette approche et les stratégies qu’elle suscite dans le cadre de programmes pilotes, pour les financements destinés au territoire des villes (par exemple dans les domaines de l’environnement, de la protection des sites et du patrimoine culturels, etc.) (13).

5.6.

Il serait judicieux de rassembler les exemples de bonnes pratiques provenant de différents États membres en matière de développement des villes grâce à l’approche de partenariat, que l’on pourrait inclure dans l’étude mentionnée au paragraphe 1.10 ci-avant. Le code de conduite intitulé «Le principe de partenariat dans le cadre de la mise en œuvre des fonds relevant du cadre stratégique commun — Éléments en vue d’un code de conduite européen en matière de partenariat» (14) peut aussi guider les travaux menés dans le cadre d’un partenariat.

6.   Comment réussir à appliquer plus souvent et partout le développement local mené par les acteurs locaux?

6.1.

Le développement local mené par les acteurs locaux doit aider les citoyens à développer de manière pertinente et pérenne leurs communes et leurs villes. Grâce à lui, les citoyens peuvent participer directement à l’amélioration de la qualité de la vie au sein de leur communauté; il s’agit d’une réelle croissance inclusive dont les résultats sont visibles à l’échelon local. Il va de soi que, pour le mettre en œuvre, il est nécessaire d’allouer des ressources pour renforcer les capacités afin que tous les partenaires soient en mesure de jouer pleinement leur rôle, qu’ils ne restent pas de simples observateurs du processus et puissent participer pleinement au partenariat horizontal, dans l’esprit de la gouvernance à plusieurs niveaux. Il faut en outre soutenir l’assistance et le tutorat offerts par des acteurs et des experts plus expérimentés, c’est-à-dire le perfectionnement professionnel et la formation. La proposition actuelle doit dans le même temps analyser et expliquer les causes de l’efficacité et du succès de l’approche Leader et justifier les raisons pour lesquelles il convient d’étendre l’approche du développement local mené par les acteurs locaux à l’ensemble des programmes relevant des fonds SIE pour réaliser avec succès la politique de cohésion.

6.2.

Là où cette méthode n’a pas encore été adoptée, il y a lieu de recourir à une évaluation à moyen terme afin de lancer cette démarche dans le cadre des Fonds structurels et d’investissement européens (fonds ESI) pour la période 2014-2020.

6.3.

À cet égard, l’échange des connaissances spécifiques des partenaires sociaux et économiques, des représentants de la société civile, des collectivités territoriales et de l’administration d’État constitue un aspect essentiel. Il convient que nombre de parties soutiennent cet échange.

6.4.

L’élaboration de stratégies de développement local mené par les acteurs locaux requiert un certain temps; il importe néanmoins que l’on dispose également pour la période donnée de suffisamment de temps pour les mettre en œuvre, ainsi que d’un budget suffisant pour en financer les différentes mesures. Un délai trop long de préparation, en l’absence de retombées sur le territoire (sous la forme des projets réalisés), ainsi qu’un financement accéléré des activités (en raison de l’approche de la date limite d’utilisation), peuvent susciter de la méfiance à l’égard de cet instrument.

6.5.

Les autres problèmes qu’il faut affronter en vue d’une utilisation correcte du développement local mené par les acteurs locaux sont la bureaucratie et les obstacles administratifs excessifs, le remboursement tardif des paiements, le préfinancement des projets sur les ressources propres des bénéficiaires finals, ou par des emprunts qu’ils doivent contracter et dont les intérêts sont à leur charge. À cet égard, il est possible d’envisager des modèles de financement participatif, un financement public-privé et une participation organisée du secteur bancaire avec la garantie de l’État.

6.6.

Les États membres introduisent souvent, en sus des réglementations imposées par la Commission européenne, d’autres dispositions qui ne sont pas demandées, propres à leur bureaucratie «nationale», lesquelles compliquent grandement le recours aux subventions et découragent les demandeurs par leur complexité et leurs conséquences potentielles. Certaines autorités nationales s’efforcent également de réduire à un minimum les charges liées à l’animation des territoires et à l’administration des GAL de petite taille; néanmoins, cette démarche est susceptible d’aboutir à une crise du fonctionnement de l’ensemble du système.

6.7.

Le CESE réclame un entraînement des formateurs: il convient d’assurer la formation des acteurs nationaux ou régionaux dans le cadre de l’assistance technique sur la base de l’article 5 du règlement (UE) no 1303/2013 portant dispositions générales. De même, il convient de mettre en place les conditions nécessaires à l’établissement et à l’exploitation efficaces des réseaux aux échelons régional, national et international, dès lors que le travail en réseau apporte une valeur ajoutée significative.

6.8.

Il serait judicieux de rassembler les exemples de bonnes pratiques issus de différents États membres que l’on pourrait inclure dans l’étude mentionnée au paragraphe 1.10 ci-avant.

Bruxelles, le 11 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  Le règlement (UE) no 1303/2013 portant dispositions communes définit, pour la période 2014-2020, trois approches intégrées différentes. Le développement local mené par les acteurs locaux est l’une d’entre elles, avec l’investissement territorial intégré (ITI) et les plans d’action conjoints.

(2)  C’est-à-dire exiger et garantir des conditions égales, dans les différents États membres de l’Union européenne, pour le fonctionnement de l’instrument de développement local mené par les acteurs locaux, en conformité avec les principes de cette approche et en fonction des spécificités nationales et régionales.

(3)  Avis du Comité des régions sur «Le développement local mené par les acteurs locaux», JO C 17 du 19.1.2013, p. 18.

(4)  Avis du CESE: «Gouvernance et partenariat aux niveaux national et régional et base pour des projets dans le domaine de la politique régionale», JO C 77 du 31.3.2009, p. 143; «Stratégies et programmes relatifs à la politique de cohésion pour la période de programmation 2007-2013», JO C 228 du 22.9.2009, p. 141; «Partenariats efficaces dans la politique de cohésion», JO C 44 du 11.2.2011, p. 1; «Le rôle et les priorités des politiques de cohésion dans le cadre de la stratégie UE 2020», JO C 248 du 25.8.2011, p. 1; «La politique régionale et la croissance intelligente», JO C 318 du 29.10.2011, p. 82; «Leader en tant qu’instrument du développement local», JO C 376 du 22.12.2011, p. 15; «Dispositions générales applicables aux Fonds structurels européens», JO C 191 du 29.6.2012, p. 30.

(5)  http://ec.europa.eu/regional_policy/sources/docgener/informat/2014/guidance_clld_local_actors_fr.pdf

(6)  http://ec.europa.eu/regional_policy/sources/docgener/informat/2014/guidance_clld_local_actors_fr.pdf

(7)  Réseau européen pour le développement rural (REDR), information graphique sur Leader.

(8)  Voir Depoele, van L., «Local development strategies in the EU, The Case of Leader in Rural Development» (Les stratégies de développement local dans l’Union européenne, le cas de Leader dans le cadre du développement rural), p. 4: http://www.eurolocaldevelopment.org/wp-content/uploads/2013/03/local_development_strategies_in_the_eu-.pdf

(9)  http://www.oecd.org//regional/rurbanrural-urbanpartnerships.htm

(10)  www.eukn.org

(11)  http://www.emi-network.eu/Sharing_knowledge/News_on_EU_policy/Cohesion_Policy_2014_2020_negotiations_about_the_urban_dimension

(12)  Association des villes de Pologne, janvier 2014, http://ldnet.eu/CLLD+in+urban+areas

(13)  Parallèlement à la mise en place du développement local mené par les acteurs locaux, les investissements territoriaux intégrés (ITI) constituent également un outil intégré pertinent. L’application simultanée de ces outils conduira à des effets synergiques.

(14)  http://ec.europa.eu/regional_policy/sources/docoffic/working/strategic_framework/swd_2012_106_fr.pdf


14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/9


Avis du Comité économique et social européen sur «Une stratégie de l’UE pour la région alpine»

(avis exploratoire)

(2015/C 230/02)

Rapporteur:

M. Stefano PALMIERI

Le 27 octobre 2014, la Commission européenne a demandé au Comité économique et social européen, conformément à l’article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, d’élaborer un avis exploratoire sur le thème:

«Une stratégie de l’UE pour la région alpine (SUERA)».

La section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 18 novembre 2014.

Lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 10 décembre 2014), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 132 voix pour, aucune voix contre et 3 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le Comité économique et social européen (CESE) se félicite de l’attention particulière accordée à l’élaboration d’une stratégie de l’Union européenne pour la région alpine (SUERA), qui vise à soutenir la cohésion et la compétitivité de cette zone face à des défis qui ne peuvent être résolus de manière satisfaisante par des États membres ou des régions agissant isolément en recourant aux moyens classiques.

1.2.

Le CESE souligne à quel point les dynamiques de développement de la région alpine sont corrélées, y compris du point de vue de la composante d’identité et d’identifiabilité, au massif des Alpes, lequel constitue l’élément charnière entre tous les territoires associés à la stratégie, que ce soit du point de vue économique, social ou environnemental.

1.3.

Le CESE relève que les États concernés montrent un fort engagement politique en faveur de la SUERA et que le niveau de mobilisation et de participation des pouvoirs publics, tant nationaux que régionaux, est élevé. Cette sensibilisation découle d’un processus de coopération qui, dans cette zone, s’est enclenché à partir des années 70.

1.4.

Le CESE considère que les caractéristiques propres à la région alpine en constituent des éléments déterminants et typiques, qu’il s’agisse de l’existence de structures territoriales qui sont parmi les plus compétitives du monde, des déséquilibres économiques et sociaux entre les «zones rurales et de montagne» et les «zones urbaines et villes», du patrimoine naturel et culturel, ou encore des flux de transport qui y atteignent une concentration énorme.

1.5.

Tout en adhérant à la démarche générale de la stratégie, dont il estime que les objectifs, les piliers et les priorités se situent dans la logique des éléments exposés dans le document de discussion, le CESE estime par ailleurs que ces paramètres doivent être intégrés et affinés dans l’élaboration du «plan d’action».

1.6.

Le CESE constate que l’aire géographique sur laquelle porteront les activités de la SUERA se caractérise par des niveaux de développement économique, de durabilité environnementale et de cohésion sociale qui s’élèvent nettement au-dessus de la moyenne européenne. Ces caractéristiques n’empêchent toutefois pas que du fait de la crise économique et financière et des transformations induites par la mondialisation de l’économie et des marchés, la macrorégion à l’examen se trouve confrontée à des défis graves et complexes. Ces considérations amènent le CESE à penser que pour conforter la compétitivité économique de l’Europe et sa cohésion sociale, il est extrêmement important que la SUERA réussisse à atteindre son objectif général, qui est d’«assurer que cette région reste l’une des zones les plus attrayantes d’Europe, qui tire le meilleur parti de ses ressources propres et se saisisse des possibilités de se développer de manière durable et novatrice (1)».

1.7.

Le CESE juge qu’il est capital de renforcer l’approche globale adoptée par la SUERA vis-à-vis du développement, en définissant de nouveaux objectifs, plus qualitatifs, comme l’évoque le paragraphe 4.4.

1.8.

Le CESE souhaite que dans la définition du plan d’action de la SUERA, l’on s’emploie à renforcer l’imbrication et la cohérence entre les priorités qui se rapportent à la compétitivité (pilier 1) et celles visant à la durabilité (pilier 3), de manière à garantir ainsi que les objectifs de développement soient atteints sans qu’il soit porté préjudice aux besoins et aux perspectives des générations futures.

1.9.

S’agissant du premier pilier, le CESE juge essentiel de garantir une croissance durable et de promouvoir le plein emploi, l’innovation, la compétitivité et la cohésion au sein de la région alpine grâce à une solidarité mutuelle entre zones de montagne et zones urbaines. Pour ce qui est des priorités, on renverra au paragraphe 5.2.

1.10.

En ce qui concerne le deuxième pilier, le CESE est favorable à la promotion d’un développement territorial fondé sur la coopération entre les systèmes territoriaux internes et externes, l’accessibilité des services, la mobilité durable et le renforcement des transports et des infrastructures de communication. Pour les priorités, voir le paragraphe 5.3.

1.11.

S’agissant du troisième pilier, le CESE considère qu’il est capital de redoubler d’efforts pour assurer une gestion durable de l’environnement et sa protection, ainsi que pour valoriser les atouts géographiques de la zone. On se reportera au paragraphe 5.4 pour les priorités en la matière.

1.12.

Le CESE estime que si elle n’est pas dotée d’une gouvernance forte et ne dispose pas de ressources financières spécifiques aux fins de soutenir l’activité de développement des capacités, la SUERA risque de perdre son efficacité et son caractère stratégique. Dans cette optique et conformément aux conclusions du Conseil, le CESE préconise que le plan d’action élaboré ait pour base la complémentarité entre les programmes de financement, la coordination des instruments institutionnels et la définition de nouveaux projets d’ampleur macrorégionale (2).

1.13.

Rappelant les conclusions de son avis sur la gouvernance des stratégies macrorégionales (3), le CESE estime que la définition et la mise en œuvre de la SUERA réclament un dispositif de gouvernance spécifique, fondé sur la coopération et la coordination. Dans cette perspective, il est d’avis que pour assurer l’efficacité de ladite stratégie, il est nécessaire de la doter d’une gouvernance à multiniveaux (4), qui permette de tirer parti tout à la fois de la dimension tant horizontale, en l’occurrence la participation de la société civile, que verticale, à savoir celle des régions et des collectivités locales, dans le plein respect des principes de subsidiarité et de proportionnalité (5).

1.14.

Le CESE désire que la société civile organisée soit l’une des parties prenantes associées aux activités de développement des capacités et il porte une appréciation positive sur le lancement d’un forum permanent qui assure la représentation des partenaires sociaux et économiques de la région alpine et leur soutien.

1.15.

Le CESE considère qu’il est capital de favoriser l’emploi, en particulier des jeunes et des personnes touchées par le chômage de longue durée, ainsi que les actions destinées à soutenir les investissements sociaux et à adapter les régimes de protection sociale.

2.   La stratégie de l’UE pour la région alpine: observations générales

2.1.

Le présent avis du CESE a pour objectif d’évaluer le document de consultation publique sur la stratégie de l’UE pour la région alpine (6), ci-après dénommée «SUERA», en faisant notamment référence à ceux qu’il a déjà consacrés aux stratégies macrorégionales.

2.2.

Réunissant cinq États membres (Italie, France, Autriche, Allemagne et Slovénie) et deux pays tiers (Suisse et Liechtenstein), la région alpine couvre une superficie de 4 50  000 km2 et a une population de 70 millions de personnes.

2.2.1.

Les structures territoriales concernées par la SUERA sont fortement liées aux montagnes des Alpes qui, en plus de se muer en élément d’identité et d’identifiabilité, constituent l’élément charnière entre tous ces territoires, que ce soit du point de vue économique, social ou environnemental (7).

2.3.

Dans le contexte de la politique macrorégionale que l’UE poursuit depuis 2009, le positionnement géographique de la SUERA fait qu’elle revêt non seulement une valeur stratégique dans l’optique de la politique de cohésion européenne et s’inscrit dans la lignée des stratégies pour la mer Baltique (EUSBR) (8), pour le Danube (EUSDR) (9) et pour l’Adriatique et la mer Ionienne (EUSAIR) (10) mais représente également un élément d’une importance capitale pour favoriser la projection du concept de macrorégion en direction de la Méditerranée occidentale (11).

2.4.

À partir des années 70, les différents territoires de l’arc alpin, s’affranchissant des frontières nationales qui les avaient divisés au cours de l’histoire, ont développé une prise de conscience commune quant à la nécessité d’appréhender l’espace territorial alpin comme une réalité unique, qu’il convient de préserver et mettre en valeur. C’est précisément pour ces raisons qu’ont été lancées une série d’initiatives de coopération interrégionale, transnationale et transfrontalière, parmi les objectifs essentiels desquelles figurait celui de promouvoir la compréhension réciproque entre les peuples concernés, de manière à dépasser ainsi les clivages linguistiques, socio-économiques et ethniques et à favoriser une intégration accrue à l’échelon européen (12).

2.5.

La conférence des régions alpines qui s’est déroulée en juin 2012 à Bad Ragaz et celle de Grenoble, d’octobre 2013, ont été les principales étapes qui ont jalonné le processus de mise en œuvre de la SUERA, dont la trajectoire devrait déboucher sur son adoption par le Conseil, prévue d’ici la fin 2015 (13).

2.5.1.

La «résolution politique pour la mise en œuvre d’une stratégie de l’Union européenne pour la région alpine» qui a été entérinée lors de la conférence de Grenoble (14) a permis de déterminer quels sont les objectifs, les chances à saisir et les défis à relever dans trois grands domaines, à savoir «compétitivité et innovation, agriculture et sylviculture et tourisme», «eau, énergie, environnement et climat» et, enfin, «accessibilité, communications et transports».

3.   Le document de consultation: cadre général, but et objectifs

3.1.

Dans la SUERA, le massif alpin constitue l’élément qui détermine l’ensemble de l’espace de coopération. L’ampleur que revêt son hétérogénéité géographique constitue l’un des principaux traits qui différencient la région alpine d’autres parties du territoire européen, puisqu’on y trouve tout à la fois les aires de montagnes, celles de piémonts qui les entourent, les vallées aisément accessibles et celles qui sont reculées, les plaines et les hauts plateaux, des zones métropolitaines et des villes.

3.1.1.

Pour mieux cerner les domaines sur lesquels la SUERA devrait concentrer ses objectifs et priorités, nous énumérons ici les cinq catégories de contextes territoriaux qui sont caractéristique de la région alpine, à savoir les «métropoles alpines», les «villes alpines», les «zones rurales en phase d’essor», les «zones rurales en phase de déclin» et les «zones touristiques».

3.2.

La région alpine présente de nombreuses caractéristiques spécifiques, qui nécessitent une attention particulière et différencient la SUERA des stratégies macrorégionales pour la Baltique, le Danube ou l’Adriatique et la mer Ionienne: on trouve sur son territoire quelques-unes des aires parmi les plus développées du monde, bénéficiant d’une économie compétitive, d’une qualité de vie de haut niveau et d’une bonne stabilité sociale et politique; elle présente par ailleurs des déséquilibres criants, au plan économique et social, entre les aires rurales, les plaines et les territoires urbains; son patrimoine naturel et ses écosystèmes sont uniques, tandis que ses richesses culturelles représentent un élément fondamental pour la cohésion de sa société et pour son développement même; enfin, elle concentre des flux de trafic tels qu’ils sont devenus problématiques, au plan de la congestion des transports et de la protection de l’environnement.

3.3.

La démarche de la SUERA a pour objectif général de garantir que cette région reste l’une des zones les plus attrayantes d’Europe, qui tire le meilleur parti de ses ressources propres et exploite ses perspectives pour un développement durable et novateur.

3.3.1.

Cette visée sera concrétisée grâce à des actions dont la réalisation s’effectuera au titre de trois «piliers thématiques», à savoir «améliorer la compétitivité, la prospérité et la cohésion», «assurer l’accessibilité et la connectivité pour tous les habitants» et «promouvoir la durabilité environnementale».

3.3.2.   Premier pilier: améliorer la compétitivité, la prospérité et la cohésion de la région alpine

3.3.2.1.

Bien qu’elle constitue le plus grand pôle économique et productif d’Europe, doté d’un fort potentiel de progression, la région alpine souffre encore d’un manque de cohésion économique, sociale et territoriale. Les montagnes lui posent un défi pour qu’elle se développe de manière homogène. La SUERA entend favoriser la croissance d’une économie novatrice dans la région, en définissant un modèle plus équilibré, qui tienne également compte de la diversité de ses territoires et de leurs spécificités. Il y a lieu d’y soutenir une économie compétitive, qui sache combiner harmonieusement la prospérité, l’efficacité énergétique, la qualité de vie et les valeurs traditionnelles qui la caractérisent.

3.3.3.   Deuxième pilier: assurer l’accessibilité et la connectivité pour tous les habitants de la région alpine

3.3.3.1.

Il s’impose de soutenir un territorial équilibré, en mettant en œuvre des modèles de mobilité respectueux de l’environnement, des systèmes de transport durables, des services de communication et des infrastructures. La région alpine occupe une position stratégique dans le maillage des transports européens, puisqu’elle est située à l’intersection des axes de liaison nord-sud et est-ouest, tout à la fois. Elle accueille sur son territoire les principales plaques tournantes du transport en Europe, tandis que bon nombre de cols alpins s’inscrivent dans un environnement géographique marqué par une dimension de vulnérabilité écologique. Il est essentiel d’engager une politique coordonnée qui soit capable de satisfaire aux impératifs des transports et de respecter le bien-être de la population et l’équilibre environnemental. Eu égard à son hétérogénéité et aux aspects de complexité géographique qui la caractérisent, le concept de connectivité doit, dans le cas de la région alpine, s’étendre également aux infrastructures et aux services de communication.

3.3.4.   Troisième pilier: promouvoir la durabilité environnementale de la région alpine

3.3.4.1.

Préserver le patrimoine et encourager une exploitation durable des ressources naturelles et culturelles représente une nécessité incontournable pour la région alpine. L’eau, les ressources minérales, la diversité de paysages à la riche biodiversité et un patrimoine culturel abondant et diversifié constituent des spécificités qu’elle se doit de protéger et de mettre en valeur. Si elle s’effectue dans le respect de l’environnement, l’exploitation de son potentiel de ressources telles que l’eau et la biomasse joue un rôle capital pour soutenir sa compétitivité et sa cohésion, dans la mesure où elle peut l’aider à réaliser des objectifs stratégiques, comme parvenir à l’autosuffisance énergétique ou se doter de capacités de stockage de l’énergie, pour ne citer que ces exemples.

4.   Observations spécifiques sur la dimension macrorégionale de la région alpine

4.1.

La stratégie pour la région alpine bénéficie d’un engagement fort et d’une sensibilisation politique de niveau élevé dans les pays concernés et représente non seulement un défi mais également une grande chance pour l’UE elle-même. La SUERA a pour objectif de développer l’économie, d’établir un lien entre les territoires et de protéger l’environnement dans une région extrêmement importante pour la compétitivité économique et la cohésion sociale de l’Europe.

4.2.

Le processus d’élaboration de la SUERA exige que les différents acteurs concernés mènent un dialogue structuré afin de recenser les besoins spécifiques et d’y apporter une réponse conjointe. À cet égard, il y a lieu de prendre dûment en compte les spécificités environnementales, culturelles, économiques et sociales, ainsi que l’interdépendance étroite qui existe entre les zones urbaines et rurales. Il convient dès lors d’engager un dialogue ample et ouvert entre les parties prenantes afin d’élaborer une stratégie qui soit largement acceptée.

4.2.1.

Il importe en outre de coordonner les politiques afin de promouvoir la cohésion territoriale. Étant étroitement imbriquées, certaines questions liées à l’innovation économique, aux modes de transport et à l’environnement ne peuvent être traitées de manière dispersée à l’échelon local mais doivent s’inscrire dans la vision plus large qu’est susceptible d’offrir le niveau macrorégional.

4.2.2.

Compte tenu de la communication intitulée «Gouvernance des stratégies macrorégionales» (15), il est nécessaire de doter la gouvernance à niveaux multiples de la SUERA d’une véritable «dimension horizontale» (participation de la société civile), qui complète et enrichisse la «dimension verticale» (participation des régions et des collectivités locales) en respectant pleinement les principes «de subsidiarité et de proportionnalité».

4.3.

Le CESE considère que la SUERA est un instrument fondamental pour appuyer les mesures prises dans la région alpine dans des secteurs tels que la mondialisation de l’économie, le changement climatique, la société de l’information, l’économie de la connaissance, l’évolution démographique et la libre circulation des biens et des personnes.

4.4.

La SUERA permettra de renforcer le développement de la région alpine grâce à une approche holistique à même de mettre en œuvre et d’imbriquer les dimensions économique, environnementale et sociale. Afin d’illustrer concrètement cette approche holistique au moyen de finalités spécifiques, le CESE a recensé cinq objectifs stratégiques qui devraient figurer dans le plan d’action:

favoriser un tissu dynamique de PME et l’essor d’un esprit d’entreprise en mesure de soutenir l’emploi,

contribuer au renforcement des capacités basées sur les traditions et la diversité sociale,

promouvoir un accès équilibré et équitable aux services d’intérêt général dans toute la région alpine,

encourager la responsabilité partagée et la coopération équitable entre les territoires alpins,

soutenir la protection et la gestion durable de la biodiversité, des paysages et des ressources naturelles.

4.4.1.

Favoriser un tissu dynamique de PME et l’essor d’un esprit d’entreprise en mesure de soutenir l’emploi. La SUERA devra contribuer à faire en sorte que les territoires concernés puissent être compétitifs dans une économie mondialisée, en favorisant le maintien et la création de nouveaux emplois de qualité.

4.4.2.

Contribuer au renforcement des capacités basées sur les traditions et la diversité sociale. La SUERA doit soutenir la préservation des valeurs identitaires qui caractérisent les régions concernées tout en stimulant la capitalisation des savoirs et des traditions locales à l’appui du développement économique et de l’inclusion sociale.

4.4.3.

Promouvoir un accès équilibré et équitable aux services d’intérêt général dans toute la région alpine. La SUERA permettra de garantir le maintien et l’adaptation d’un cadre de services d’intérêt général pour répondre aux besoins des habitants de la région, plus particulièrement de ceux qui résident dans des zones à «handicaps géographiques».

4.4.4.

Encourager la responsabilité partagée et la coopération équitable entre les territoires alpins. La SUERA offrira la possibilité de développer de nouvelles approches en matière de responsabilité partagée et de coopération équitable entre les territoires de la région alpine, par exemple les liens verticaux entre les métropoles et les zones rurales et touristiques.

4.4.5.

Soutenir la protection et la gestion durable de la biodiversité, des paysages et des ressources naturelles. La SUERA contribuera à la protection et à la gestion durable de la biodiversité, des paysages et des ressources naturelles en réalisant un juste équilibre entre les mesures de conservation et celles qui sont axées sur une utilisation rationnelle des services et des produits des écosystèmes. Il est en outre nécessaire d’œuvrer en faveur de l’adoption de modèles de gestion écocompatibles visant à répartir de façon plus équilibrée les avantages liés à l’utilisation des produits et services écosystémiques entre les différents territoires de la région alpine.

4.5.

Le CESE considère que la SUERA doit être mise en œuvre conformément aux décisions adoptées par le Conseil, lequel estime que si une stratégie macrorégionale ne doit exiger ni ressources financières supplémentaires, ni réglementations nouvelles, ni organe de gestion additionnel (principe des «trois non»), il est cependant nécessaire de définir un plan d’action fondé sur la complémentarité des programmes de financement, la coordination des instruments institutionnels et la définition de nouveaux projets de niveau macrorégional. Une attention particulière devra être accordée aux mesures de renforcement des capacités.

4.5.1.

De l’avis du CESE, il est essentiel qu’outre les administrations publiques, des représentants de la société civile organisée soient associés aux activités visant à renforcer les capacités. Ces activités peuvent notamment être réalisées par la mise en place d’un «forum permanent» représentant les partenaires sociaux et économiques.

4.5.2.

Le CESE considère que les sommes importantes que l’UE a déjà engagées dans les programmes régionaux au titre des Fonds structurels et d’investissement européens prévus pour la période 2014 à 2020 (16) représentent des ressources adéquates, qu’il conviendra d’utiliser efficacement pour mettre en œuvre la stratégie, dans le cadre d’actions mieux coordonnées et s’inscrivant dans une approche stratégique unifiée. Au cours de la période de programmation 2014-2020, de nouvelles possibilités de financement seront disponibles au titre d’instruments européens tels que «Horizon 2020» (17), COSME (18), le mécanisme pour l’interconnexion en Europe (MIE) (19), le programme pour l’emploi et l’innovation sociale (EaSI) (20), Erasmus+ (21) et LIFE (22).

5.   Observations spécifiques concernant les trois piliers

5.1.

Afin de promouvoir la réalisation des objectifs stratégiques définis dans le document de consultation et des objectifs spécifiques mentionnés au paragraphe 4 du présent avis, le CESE juge qu’il est fondamental de définir des priorités plus spécifiques s’agissant des trois piliers de la SUERA.

5.1.1.

Le principal défi que la stratégie pour la région alpine devra contribuer à relever concerne l’harmonisation et le rééquilibrage des objectifs de durabilité économique, environnementale et sociale.

5.2.   Premier pilier: développement des Alpes — Améliorer la compétitivité, la prospérité et la cohésion au sein de la région alpine

5.2.1.

Pour le CESE, il est essentiel de garantir une croissance durable et de promouvoir le plein emploi, l’innovation, la compétitivité et la cohésion au sein de la région alpine en consolidant et en diversifiant des activités économiques spécifiques dans le but de créer une solidarité mutuelle entre zones de montagne et zones urbaines.

5.2.2.   Priorités

5.2.2.1.

Stimuler l’innovation et la compétitivité dans les entreprises en améliorant les modes d’accès au crédit, en renforçant leur capacité à se saisir des ouvertures qu’offrent les programmes européens 2014-2020 et le système des «marchés publics pour l’innovation» (et plus particulièrement les «achats publics avant commercialisation» (23)).

5.2.2.2.

Soutenir le renforcement des processus de développement liés à l’économie verte, notamment grâce à la création de nouvelles entreprises, en tirant parti des spécificités environnementales de la région alpine et des importantes capacités de production et d’innovation qu’elle recèle.

5.2.2.3.

Promouvoir les produits de la région alpine grâce à une politique de «notoriété de la marque» ou à des marques individuelles qui mettent l’accent sur l’appartenance et le marketing territorial. La valorisation des «produits et services écosystémiques» (24) constitue une valeur ajoutée supplémentaire pour stimuler la compétitivité de la région.

5.2.2.4.

Renforcer la coopération entre parcs scientifiques et technologiques, universités, centres de recherche et PME et accroître les capacités des infrastructures de recherche ainsi que leurs liens avec les institutions de pointe au niveau mondial. Il est souhaitable que le «plan d’action» de la SUERA définisse une priorité transversale à l’appui des activités de «recherche et innovation».

5.2.2.5.

Élaborer une stratégie commune afin de transformer l’espace macrorégional alpin en destination touristique durable de classe internationale en s’appuyant sur la valorisation du patrimoine naturel, culturel et historique.

5.2.2.6.

Faire en sorte que le facteur «emploi» soit une priorité centrale de la SUERA, en accordant une attention particulière aux jeunes et aux chômeurs de longue durée. Il est essentiel de favoriser la création de nouveaux emplois stables et de qualité et de lutter ainsi contre le problème de l’emploi saisonnier qui se pose essentiellement dans les zones touristiques montagneuses et rurales de la région alpine.

5.2.2.7.

Soutenir les initiatives relatives à la création d’un espace unique pour l’emploi, à la mobilité des travailleurs, à la mise en place de filières d’apprentissage et de stage à l’échelle transnationale, à la définition de parcours de formation et de carrières internationales, ainsi qu’à la pleine reconnaissance des diplômes et des qualifications professionnelles. Il convient d’accorder une attention particulière à la qualification des travailleurs du secteur touristique, qui sont les premiers à pâtir des problèmes liés à la saisonnalité.

5.2.2.8.

Appuyer la coopération entre les différents territoires de la région alpine et renforcer le rôle des régions métropolitaines et des villes, en tant que moyen de favoriser la compétitivité et la cohésion sociale.

5.2.2.9.

Contribuer à la mise en place de mesures visant à encourager les investissements sociaux et à adapter les systèmes de protection sociale en élaborant des politiques qui s’inscrivent dans le fil de la communication de la Commission européenne sur le thème «Investir dans le domaine social en faveur de la croissance et de la cohésion» (25).

5.2.2.10.

Soutenir les mesures d’insertion des personnes handicapées et de prévention des discriminations fondées sur l’origine raciale ou ethnique, l’âge, l’orientation sexuelle et le genre.

5.3.   Deuxième pilier: connecter les Alpes — Assurer l’accessibilité et la connectivité pour tous les habitants de la région alpine

5.3.1.

Le CESE soutient la promotion d’un développement territorial fondé sur la coopération entre les systèmes territoriaux internes et externes, l’accessibilité des services, la mobilité durable et le renforcement des transports et des infrastructures de communication.

5.3.2.   Priorités

5.3.2.1.

Appuyer l’adoption de solutions novatrices visant à garantir les services de base dans les zones de montagne et les zones rurales (instruction, santé, services sociaux et mobilité), à éliminer la fracture numérique et à promouvoir le développement du très haut débit dans l’ensemble de la région.

5.3.2.2.

Renforcer la mise en œuvre des technologies de l’information et de la communication dans tous les secteurs d’intérêt général (administration, services de santé, services de recherche d’emploi, formation à distance, commerce électronique de produits alpins, etc.) et garantir que les services publics disponibles soient suffisants pour répondre aux besoins des différents territoires de la région alpine, en veillant à réaliser un juste équilibre entre la densité et l’accessibilité des services mêmes.

5.3.2.3.

Promouvoir des modes de transport intégrés en favorisant les échanges au sein des différents territoires et améliorer la gestion des transports de marchandises et de passagers dans le but d’atténuer l’empreinte écologique et d’accroître les retombées bénéfiques pour les communautés locales. Le transfert du fret de la route vers le rail et les mesures visant à limiter l’utilisation des corridors alpins secondaires (par exemple péages uniformes pour tous les corridors de transit alpins) comptent parmi les principales actions à mettre en œuvre pour assurer le développement durable des transports dans la région alpine.

5.3.2.4.

Développer des programmes d’interopérabilité logistique au niveau macrorégional et renforcer les liaisons multimodales entre les nœuds d’infrastructures (ports, aéroports et plates-formes intermodales) et le réseau général ainsi qu’avec les tronçons menant aux voies de navigation intérieure.

5.3.2.5.

Promouvoir les réseaux thématiques transnationaux dans des secteurs importants pour le développement alpin, tels que la gestion des risques, le tourisme, le sport, la sylviculture, l’agriculture, l’énergie et les services technologiques.

5.3.2.6.

Consolider la gouvernance alpine en associant plus activement la société civile à la démarche tout en sensibilisant davantage les citoyens aux principales thématiques relatives à la région et en améliorant leurs connaissances en la matière.

5.4.   Troisième pilier: protéger la région alpine — Promouvoir la durabilité environnementale de la région alpine

5.4.1.

Le CESE considère qu’il est capital de redoubler d’efforts pour gérer l’environnement de façon durable et assurer sa protection, ainsi que pour valoriser les atouts géographiques de la région.

5.4.2.   Priorités

5.4.2.1.

Aligner les mesures visant à soutenir le développement économique de la région alpine sur les engagements pris en matière de lutte contre le changement climatique, en dissociant la croissance et la compétitivité des territoires de la SUERA de la consommation de ressources naturelles et de matières premières.

5.4.2.2.

Sensibiliser davantage les communautés locales de la région alpine à la valeur des services écosystémiques et à la gestion équitable et durable des atouts naturels de la région. Les Alpes sont la principale région d’approvisionnement en eau d’Europe; il est dès lors essentiel de renforcer les mesures destinées à améliorer la gestion de la réserve hydrologique et des bassins hydrographiques de la région alpine.

5.4.2.3.

Soutenir les initiatives visant à favoriser l’harmonisation des mesures de préservation de la biodiversité et des paysages de la région alpine et celles visant à les utiliser d’une manière respectueuse de l’environnement.

5.4.2.4.

Élaborer des instruments et procédures transnationaux en matière de prévention et de réduction des risques (inondations, éboulements, avalanches, incendies de forêt, etc.), de gestion intégrée des forêts (du point de vue de leur valeur tant écologique et naturelle qu’économique) et de questions liées à l’utilisation des sols (compactage du sol et expansion urbaine).

5.4.2.5.

Contribuer au passage à un système énergétique de l’après-carbone grâce à la mise en œuvre d’initiatives en matière d’efficacité énergétique, à la création de réseaux de distribution décentralisés basés sur des ressources renouvelables et à la valorisation de modèles urbains et de transports publics économes en énergie.

5.4.2.6.

Élaborer et mettre en œuvre des systèmes de mobilité intégrée afin de réduire la dépendance vis-à-vis de l’utilisation de la voiture, en favorisant les transports publics en tant que services d’intérêt général et, dans la mesure du possible, des moyens de transport alimentés par des énergies «renouvelables».

Bruxelles, le 10 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  Commission européenne, document de consultation sur la “stratégie pour la région alpine (SUERA)”.

(2)  Conclusions du Conseil européen, EUCO 23/1/11 REV 1, des 23 et 24 juin 2011.

(3)  JO C 12 du 15.1.2015, p. 64.

(4)  Livre blanc sur la gouvernance à multiniveaux (CONST-IV/020, 2009).

(5)  Commission européenne, Code de conduite européen sur le partenariat dans le cadre des Fonds structurels et d’investissement européens, C(2013) 9651 final.

(6)  http://ec.europa.eu/regional_policy/en/newsroom/consultations/eusalp/

(7)  http://ec.europa.eu/regional_policy/en/newsroom/consultations/eusalp/

(8)  http://www.balticsea-region-strategy.eu

(9)  http://www.danube-region.eu

(10)  http://www.ai-macroregion.eu

(11)  Avis du CESE «Vers une stratégie macrorégionale de l’UE en faveur du développement de la cohésion économique, sociale et territoriale dans le bassin méditerranéen» (JO C 170 du 5.6.2014, p. 1).

(12)  Arge-Alp, Alpe-Adria, Alp-Med, eurorégion Tyrol — Haut-Adige — Trentin, convention des Alpes, programme «Espace alpin», coopération transfrontalière.

(13)  Conseil européen des 19 et 20 décembre 2013, p. 25.

(14)  Conférence tenue le 18 octobre 2013 à Grenoble, avec la participation de représentants des gouvernements et des présidents des régions associées à la SUERA.

(15)  Gouvernance des stratégies macrorégionales, COM(2014) 284 final.

(16)  Règlement (UE) no 1303/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013.

(17)  Règlement (UE) no 1290/2013 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2013.

(18)  Règlement (UE) no 1287/2013 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2013.

(19)  Règlement (UE) no 1315/2013 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2013.

(20)  Règlement (UE) no 1296/2013 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2013.

(21)  Règlement (UE) no 1288/2013 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2013.

(22)  Règlement (UE) no 1293/2013 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2013.

(23)  Article 131 du règlement financier de l’UE no 966/2012.

(24)  Les biens produits par les écosystèmes englobent, par exemple, les denrées alimentaires, l’eau, les carburants et le bois; les services, quant à eux, comprennent l’approvisionnement en eau et la purification de l’air, le recyclage naturel des déchets, la formation du sol, la pollinisation et nombre d’autres mécanismes régulateurs naturels.

(25)  COM(2013) 83 final.


14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/17


Avis du Comité économique et social européen sur les «Capacités aéroportuaires dans l’Union européenne»

(avis exploratoire à la demande de la Commission européenne)

(2015/C 230/03)

Rapporteur:

M. KRAWCZYK

Le 4 septembre 2014, la Commission européenne a décidé, conformément à l’article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur les:

«Capacités aéroportuaires dans l’Union européenne» (avis exploratoire).

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l’information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 11 novembre 2014.

Lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 10 décembre 2014), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 117 voix pour et 1 abstention.

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Pour pallier le manque de capacité des aéroports, il convient d’utiliser plus efficacement leurs atouts actuels. Davantage d’intermodalité, une meilleure connectivité, une utilisation plus efficace des plates-formes aéroportuaires secondaires et des petits aéroports, des avions plus grands et une optimisation des procédures pourraient être des solutions appropriées, tout comme l’adoption du «paquet aéroportuaire» et la mise en œuvre du ciel unique européen (CUE) et de SESAR. La capacité aéroportuaire doit devenir un pilier à part entière du CUE.

1.2.

À long terme, la capacité aéroportuaire devra être développée sous forme d’infrastructures telles que des terminaux et des pistes d’atterrissage. Le principal objectif de l’expansion aéroportuaire doit être l’amélioration de la connectivité sur une base économique durable. Il convient de doter les plates-formes aéroportuaires de l’Union européenne de capacités qui leur permettront de répondre efficacement à la demande croissante, en prévoyant notamment un raccourcissement des processus de planification afin qu’elles puissent répondre rapidement à toute demande qui se présente.

1.3.

Les extensions d’aéroport — lorsqu’elles se justifient — doivent s’inscrire dans le cadre d’une approche équilibrée. Premièrement, les aéroports ont une incidence économique positive sur les zones voisines; il est évident pour le CESE qu’elle doit être préservée. Deuxièmement, les questions environnementales doivent être évaluées de manière transparente. Troisièmement, les extensions d’aéroports présentent une dimension publique. Prendre en compte tous ces éléments nécessite un dialogue public parmi les interlocuteurs duquel figureraient, par exemple, des représentants du contrôle aérien, des administrations aéroportuaires, des compagnies aériennes, des acteurs régionaux, des résidents locaux, du gouvernement, etc.

1.4.

Le CESE a la conviction qu’il est essentiel que les États membres prennent immédiatement des mesures en matière de planification et de gestion de l’affectation des sols. À défaut, le développement des aéroports sera entravé par toutes sortes d’obstacles imprévus et inutiles et, dans certains cas, les capacités aéroportuaires existantes seront également menacées.

1.5.

Les aéroports régionaux existants ne devraient être développés que s’il existe une demande claire d’augmentation du trafic. Les gouvernements des États membres devraient recenser les défis en matière de capacités et définir des stratégies pour y répondre. Sauf en cas d’obligation de service public, l’Union européenne devrait cesser de financer le développement de nouvelles capacités régionales, sans préjudice des obligations imposées par l’article 107 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

1.6.

Le CESE estime que les nouvelles lignes directrices de l’Union européenne sur les aides d’État aux aéroports et aux compagnies aériennes sont très appréciables, car elles apportent la sécurité juridique. L’opportunité de maintenir des aéroports régionaux non viables sera, en fin de compte, vérifiée sur la base de critères communs.

1.7.

Si l’on souhaite que les aéroports abordent en toute confiance la problématique de la saturation de leurs capacités, il est essentiel de garantir la cohérence et la clarté de la réglementation, afin de fournir des incitations propres à assurer des investissements à long terme dans les infrastructures.

1.8.

La problématique de la capacité aéroportuaire présente aussi une dimension politique. Le CESE est convaincu que l’Union européenne, de concert avec les États membres et les parties prenantes, dont les partenaires sociaux, doit prendre une décision stratégique générale pour déterminer quels sont les aéroports qui seront importants pour l’ensemble du système et devraient être prioritaires ces prochaines années. Pour maintenir la compétitivité du secteur aérien européen sur des marchés mondialisés, il est urgent d’élaborer une stratégie intégrée de l’Union européenne en matière d’aviation, qui prenne en compte tant les aspects économiques, environnementaux et sociaux que la création d’emplois.

1.9.

Il y a lieu d’évaluer les projets d’infrastructures aéroportuaires cofinancés par l’Union européenne ces dernières années. Le CESE se félicite de l’engagement de la Cour des comptes européenne à réaliser ce travail important, dont les conclusions et recommandations devraient faire l’objet d’un débat public.

1.10.

Le CESE est convaincu que la Commission européenne devrait simplifier et rationaliser les structures de gestion de l’aviation européenne et, en particulier, des aéroports de l’Union européenne. La Commission doit disposer de données et d’informations complètes et fiables sur l’activité des aéroports de l’Union européenne. Elles ne sont pas disponibles à l’heure actuelle. Aussi le CESE appelle-t-il les gestionnaires des aéroports et les pouvoirs publics à fournir ces données et informations.

2.   Introduction

2.1.

Si les aéroports de l’Union européenne constituent des atouts de valeur, plusieurs grands aéroports connaîtront une congestion accrue au cours des années à venir, tandis que nombre d’autres resteront sous-utilisés. L’on pourrait faire valoir que l’ensemble de l’Union européenne présente suffisamment de capacités, mais la question est de savoir si celles-ci se trouvent au bon endroit.

2.2.

Au cours des dernières années, le thème des capacités aéroportuaires a principalement fait l’objet de débats publics dans deux contextes: la perte de capacité des principales plates-formes aéroportuaires au profit de concurrents étrangers situés en dehors de l’Union européenne, tels que la Turquie et les pays du golfe Persique, et le «syndrome Ryanair», à savoir l’apparition des compagnies aériennes à bas coût, qui entraînent une augmentation rapide du trafic dans les aéroports régionaux de plus petite taille mais n’en sont pas pour autant des utilisateurs stables sur le long terme. Le problème est toutefois beaucoup plus profond.

2.3.

En 2007, la Commission européenne a publié sa communication intitulée «Un plan d’action pour renforcer les capacités, l’efficacité et la sécurité des aéroports en Europe», dans laquelle elle soulignait le fossé croissant qui se creuse entre la capacité et la demande sur un certain nombre de plates-formes aéroportuaires de l’Union européenne (1) et proposait plusieurs mesures destinées à mieux tirer parti des capacités existantes. En 2007, le Parlement européen a publié un rapport d’initiative dans lequel il se félicitait du plan d’action de la Commission et examinait la problématique de l’ampleur prise par la saturation de la capacité des aéroports (capacity crunch).

2.4.

En 2011, la Commission a publié, dans le cadre du «train de mesures pour de meilleurs aéroports», une autre communication (2) sur la capacité aéroportuaire, dans laquelle elle indiquait que les questions de capacité et de qualité sont les principaux défis des aéroports européens.

2.5.

L’organisation Eurocontrol a réalisé, en 2004, en 2008 et en 2013, plusieurs versions de son étude Challenges of Growth («Défis pour la croissance»), dans lesquelles elle a prédit une saturation de la capacité aéroportuaire dans les vingt ans à venir.

2.6.

Cette activité foisonnante montre qu’il est urgent d’aborder le problème des capacités. En l’espèce, l’industrie aéronautique a déjà obtenu des résultats importants. Elle a mis en œuvre, dans tous les domaines d’action, une optimisation de la capacité et de l’efficacité. Parmi les améliorations recensées figurent notamment:

l’amélioration et la multiplication des connexions intermodales à destination ou au départ de certains aéroports,

la réorganisation des procédures internes dans l’ensemble du système du transport aérien, y compris les processus de consolidation,

la mise en œuvre, dans un nombre croissant d’aéroports, d’un mécanisme de prise de décision en collaboration pour les aéroports (A-Collaborative Decision Making ou A-CDM).

2.6.1.

Depuis 2004, l’initiative «Ciel unique européen» (CUE) s’emploie à améliorer l’utilisation de l’espace aérien européen, en atténuant les conséquences négatives de sa fragmentation. Les aéroports qui y participent contribuent aussi à des objectifs qui en relèvent dans le cadre du programme «Single European Sky Air Traffic Management Research» (Programme de recherche sur la gestion du trafic aérien dans le ciel unique européen — SESAR). En effet, sans capacités au sol, sa réussite serait compromise.

2.7.

Avec les parties prenantes, au sein de l’Observatoire européen des capacités aéroportuaires, la Commission s’emploie actuellement à dégager des idées précises pour la prochaine stratégie aéroportuaire de l’Union européenne. La mission de l’Observatoire compte trois volets:

a.

assister la Commission dans le traitement des problèmes de capacité et de qualité aéroportuaires;

b.

promouvoir le partage des expériences et des meilleures pratiques, en Europe et au-delà;

c.

améliorer la perception du problème, en définissant ses incidences et les solutions possibles, y compris sur le plan politique.

Le CESE se félicite de la création de l’Observatoire et l’encourage à poursuivre ses travaux, dont la qualité n’est plus à démontrer.

3.   Le développement des aéroports européens sur la dernière décennie

3.1.

Alors qu’ils sont plus de 450, les aéroports européens risquent toujours la saturation imminente de leurs capacités.

3.2.

Le Conseil international des aéroports (ACI-CIA) Europe classe les aéroports selon les groupes suivants:

Groupe de l’aéroport dans le classement ACI

Taille de l’aéroport (millions de passagers par an)

Nombre d’aéroports en Europe

1

> 25

14

2

10-25

23

3

5-10

34

4

< 5

390

Une grande part du trafic aérien est assurée par un nombre relativement restreint d’aéroports. Cette situation s’explique par la diversité des modèles d’aéroports existants. Les aéroports des groupes 3 et 4, de taille plutôt modeste, offrent des connexions point à point, tout en alimentant le trafic vers les grands aéroports et en assurant des services publics. Autrement dit, beaucoup de grands aéroports sont tributaires des petits aéroports.

Un aéroport en étoile est «un aéroport unique où une ou plusieurs compagnies aériennes offrent un réseau intégré de services de connexion vers une large palette de destinations, à haute fréquence» (Association des compagnies européennes de navigation aérienne, European Airports, Bruxelles, 1995, p. 23).

3.2.1.

Dans le modèle de point à point, les passagers voyagent directement de leur point d’origine vers leur destination sans changement.

3.2.2.

Les deux systèmes sont complémentaires; ils ont simplement des objectifs différents: le système en étoile vise à assurer une connectivité maximale, tandis que le système de point à point doit offrir un degré maximal de mobilité et de flexibilité.

3.3.

L’Union européenne a financé un nombre considérable de projets d’infrastructure en lien avec les aéroports. Le CESE estime que l’on manque d’informations accessibles au public sur ces investissements et sur leur capacité à offrir aux citoyens une plus grande connectivité et davantage d’efficacité.

3.4.

Le CESE estime que les nouvelles lignes directrices de l’Union européenne (3) sur les aides d’État aux aéroports et aux compagnies aériennes sont très appréciables, car elles apportent la sécurité juridique. En outre, elles établissent une distinction entre les aéroports indispensables, par exemple, dans le cadre d’une obligation de service public, et ceux qui sont superflus, c’est-à-dire ceux qui ne sont pas en mesure de couvrir leurs frais de fonctionnement et ne servent pas non plus à maintenir des services publics.

4.   Perspectives de croissance

4.1.

Les marchés d’avenir pour l’aviation sont la région Asie-Pacifique, l’Amérique latine, l’Afrique et le Moyen-Orient. D’ici à 2032, l’on estime que le flux de passagers dans ces régions va croître en moyenne de 6 à 7 % par an. En Europe et en Amérique du Nord, il se situera autour de 3 % en moyenne.

De plus, d’énormes volumes de capacités aéroportuaires se développent en dehors de l’Europe. La Chine a construit près de 80 aéroports. La Turquie, Dubaï et Singapour sont en train de construire des plates-formes gigantesques qui pourront recevoir jusqu’à 160 millions de passagers — c’est-à-dire bien davantage que le plus grand aéroport du monde actuellement, Atlanta, qui en accueille 96 millions.

4.2.

Eurocontrol, dans son dernier rapport Challenges of Growth de 2013, prévoit une saturation des capacités dans les vingt ans à venir. Dans le scénario le plus probable, les contraintes de capacité empêcheront, en 2035, l’affrètement de 1,9 million de vols, soit 12 % de la demande. Vingt aéroports européens seront gravement saturés plus de six heures par jour, alors que ce n’est le cas que de trois d’entre eux aujourd’hui.

4.2.1.

Cette augmentation de capacité ne sera pas répartie équitablement entre les aéroports européens. La progression la plus forte interviendra en Europe orientale, alors que le trafic intra-européen et la part de marché de l’Europe du Nord-Ouest baisseront. Le CESE prend note de cette évolution et estime que les aéroports européens doivent répondre à ces défis.

5.   Les défis de la croissance

5.1.

Le CESE estime qu’il est indispensable d’accroître la compétitivité et le pouvoir d’attraction de l’Europe en tant que destinataire des investissements dans le secteur aérien. La question des capacités au sol est fondamentale à cet égard.

5.2.

Le CESE est convaincu que la mise en œuvre du CUE n’a que trop tardé et est indispensable pour répondre au défi de la saturation des capacités. Une simple diminution des retards aurait un effet immédiat sur la capacité du système et sur les aéroports qui le composent. Le CESE reconnaît avec l’ACI que le problème des capacités au sol devrait être un pilier à part entière de l’initiative CUE et que les objectifs concernant ces capacités devraient être alignés sur ceux de ladite initiative.

5.3.

Dans son étude Challenges of Growth, Eurocontrol propose six mesures qui, combinées, pourraient réduire le volume des demandes non satisfaites de 42 % en 2035. Ce pourcentage équivaut à 8 00  000 vols supplémentaires qui pourraient être effectués, soit 50 millions de passagers. Les solutions proposées sont les suivantes:

utiliser des avions plus gros,

augmenter le nombre de trains à grande vitesse,

utiliser des solutions de remplacement au niveau local: les compagnies aériennes devraient croître sur les sites où des capacités sont disponibles,

mieux tirer parti des aéroports de petite taille,

mettre en œuvre le programme SESAR,

consolider les plans de vol.

5.3.1.

Le CESE considère que ces mesures doivent être mises en œuvre pour réduire les demandes non satisfaites, mais estime qu’elles pourraient être insuffisantes pour répondre à toutes celles de demain. De plus, elles ne seront pas toutes applicables à chaque aéroport de l’Union européenne.

5.4.

Le CESE estime par ailleurs que l’adoption du train de mesures «Aéroports», tel que proposé par la Commission, favoriserait également une meilleure utilisation des atouts actuels des aéroports. Il espère que les travaux actuellement en cours au Parlement et au Conseil déboucheront sur des résultats ambitieux, à la hauteur des propositions qu’il a formulées dans son avis relatif à ce train de mesures (4).

5.5.

En définitive, il semblerait que la solution au problème de l’insuffisance des capacités aéroportuaires passe aussi par la construction de nouvelles capacités parallèlement à l’optimisation de celles qui existent actuellement. Or, une telle démarche est difficile, de nombreux aéroports n’étant plus en position d’investir dans de nouvelles capacités. Eurocontrol précise, dans l’édition de 2013 de son rapport intitulé «Challenges of Growth», que certains aéroports ont reconsidéré leurs plans d’extension en raison «du manque de recettes, de la difficulté à obtenir des financements et de la résistance croissante aux projets d’infrastructures de transport».

5.6.

Le CESE recommande vivement de procéder à une évaluation des avantages apportés par les investissements que l’Union européenne a réalisés jusqu’à présent dans les infrastructures aéroportuaires. Il se félicite que la Cour des comptes de l’Union européenne ait annoncé qu’elle travaille sur la question et il recommande d’utiliser un vaste échantillon de contrôle.

6.   Obstacles à l’extension des infrastructures aéroportuaires

6.1.

Lorsqu’ils prévoient de développer leurs infrastructures, les aéroports sont confrontés à plusieurs défis. Ces défis ou obstacles peuvent être classés comme suit:

défis économiques et financiers,

exigences réglementaires, notamment sur le plan environnemental,

défis sociétaux, par exemple, l’opposition croissante de la population, et

considérations politiques.

6.1.1.

À la suite de la récente crise économique, les aéroports tendent à se montrer très prudents en matière d’investissements: d’une part, leurs recettes ont eu tendance à diminuer; de l’autre, ils doivent assumer des coûts de plus en plus élevés pour la sûreté et la sécurité (frais de fonctionnement). Les récentes décisions revues concernant les aides d’État et les nouvelles lignes directrices concernant ces aides ont eu pour effet qu’il est plus difficile pour les petits aéroports de rester viables. Garantir des financements pour les projets d’infrastructures est devenu une réelle gageure pour les aéroports.

6.1.2.

Sur le plan réglementaire, les aéroports doivent satisfaire à une multitude d’exigences. Les procédures administratives sont d’une grande complexité, surtout s’agissant des problèmes de sécurité et d’environnement. Le CESE ne nie aucunement l’importance des exigences environnementales. Toutefois, il estime qu’il faut aborder ces questions en suivant une approche équilibrée. La Commission européenne a déjà fait des avancées significatives à cet égard, par exemple avec le règlement (UE) no 598/2014 relatif à l’établissement de règles et procédures concernant l’introduction de restrictions d’exploitation liées au bruit dans les aéroports de l’Union, dans le cadre d’une approche équilibrée. L’aviation européenne est un secteur industriel prometteur dans la perspective de la «croissance verte». Le CESE avertit tout particulièrement la Commission européenne du danger de s’attaquer aux problèmes environnementaux en mettant en œuvre des solutions qui ne seraient pas intégrées. Il insiste sur la nécessité d’adopter des approches intégrées et globales. Dans cet esprit, il pourrait être utile que la Commission européenne commence par commander un projet de grande ampleur qui établirait une radioscopie et un recensement des restrictions environnementales existantes qui ont une incidence sur les capacités des aéroports européens.

6.1.3.

Un problème relativement nouveau, parmi les défis publics qui prennent de l’ampleur, est celui de l’opposition grandissante de la population aux projets d’infrastructures. Des projets d’extension de grandes plates-formes aéroportuaires de l’Union européenne ont été ainsi suspendus, certains pour plus d’une décennie, s’agissant, par exemple, de la construction éventuelle d’un troisième aéroport parisien, de celle de pistes d’atterrissage supplémentaires pour les aéroports de Francfort et de Munich, ou encore des débats au Royaume-Uni et à Londres sur les meilleurs moyens de développer les capacités dans un environnement multimodal métropolitain.

6.1.4.

L’hostilité de l’opinion publique, alimentée entre autres par le problème de la pollution sonore, est grandissante. Par ailleurs, cependant, les aéroports et les compagnies aériennes dépensent de fortes sommes pour des mesures d’atténuation du bruit. Par exemple, l’aéroport de Vienne a lancé un programme de protection contre le bruit qui concerne 12  000 ménages. Le coût total estimé de l’opération s’élèvera à quelque 51 millions EUR, dont 37 millions pris directement en charge par la société Flughafen Wien AG. Le budget que les aéroports de Liège et de Charleroi consacrent au rachat ou à l’isolation phonique de 20  816 logements s’élève à 444 millions EUR. De son côté, l’aéroport de Londres Heathrow a dépensé, sur la période 2007-2011, 37 millions EUR pour appliquer des mesures d’atténuation du bruit.

6.1.5.

Les gouvernements des États membres devraient recenser les défis en matière de capacités et définir des stratégies pour y répondre. Dans ce contexte, il est évident que l’Union doit assumer un rôle dirigeant fort pour coordonner ces stratégies nationales en matière de capacités et fournir des orientations financières et un soutien appropriés. Il convient qu’elle définisse des critères extrêmement stricts pour le financement par l’Union européenne d’installations aéroportuaires sur de nouveaux sites. Elle devrait limiter le financement de tels projets à ceux qui sont financièrement viables ou qui répondent à certains critères d’obligation de service public.

6.1.6.

Le CESE entend faire remarquer que le débat sur les capacités comporte aussi une dimension politique. Il est convaincu que l’Union européenne, de concert avec les États membres et les parties prenantes, y compris les partenaires sociaux, doit prendre une décision stratégique générale pour déterminer quels sont les aéroports qui seront importants pour l’ensemble du système et devront être prioritaires ces prochaines années. Il conviendra que l’Union réévalue l’équilibre de ses priorités entre le dispositif des aéroports pivots et celui du point à point et qu’elle le corrige si nécessaire. Il est plus que jamais indispensable d’élaborer une stratégie intégrée de l’Union européenne en matière d’aviation, qui prenne en compte tant les aspects économiques, environnementaux et sociaux que la création d’emplois.

6.1.7.

Parallèlement à la Commission, plusieurs directions générales (entre autres, la DG Mobilité et transports, la DG Emploi, affaires sociales et inclusion, la DG Concurrence et la DG Justice et consommateurs) travaillent actuellement sur des thèmes connexes. Leur champ d’action dépend de leur domaine de compétence spécifique et les liens sont nombreux avec d’autres domaines, comme les relations internationales, les aides d’État, l’initiative CUE et la multimodalité. Ce dispositif ne s’est pas avéré efficace, alors que l’on recherche une approche intégrée du secteur aérien européen, portant sur toute la chaîne de valeur; une telle approche est désormais indispensable. Il est urgent que les activités de la Commission ayant trait au secteur aérien, et en particulier aux aéroports, soient beaucoup mieux intégrées.

6.2.

Comme tout processus de production, la capacité physique d’un aéroport est soumise à des contraintes, c’est-à-dire à des facteurs qui réduisent la capacité effective. Dans le cas de la capacité des pistes, ces facteurs sont:

les opérations à effectuer (hétérogénéité des modèles d’avions),

les conditions météorologiques,

les installations.

6.2.1.

En outre, tous les paramètres de la capacité aéroportuaire subissent généralement les effets des procédures d’exploitation et des réglementations; par exemple, les procédures spéciales d’approche ou de départ, ou les exigences concernant la conception de l’espace aérien pour répondre aux problèmes de bruits. Ainsi, la capacité aéroportuaire effective est habituellement bien inférieure à la capacité aéroportuaire physique. L’«approche équilibrée» préconisée par l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) fournit la méthode la plus efficace pour gérer les problèmes de bruit, tant dans l’enceinte qu’à proximité des installations aéroportuaires, d’une manière respectueuse de l’environnement et économiquement responsable.

6.2.2.

La Commission européenne, dans ses travaux sur la capacité aéroportuaire, tend à ne prendre en compte que la capacité des pistes. Comme nous l’avons montré ci-dessus, cette approche est incomplète. Aussi le CESE encourage-t-il la Commission européenne à prendre également en considération, dans ses travaux, d’autres facteurs décisifs de la capacité aéroportuaire, tels que la capacité de l’espace aérien à proximité des aéroports. L’interaction entre les aéroports et l’espace aérien (ou les prestataires de services de navigation aérienne) est fondamentale pour trouver des solutions au problème de saturation des capacités aéroportuaires. Toutefois, la manière dont cette interaction est gérée varie considérablement d’un pays à l’autre de l’Union européenne, voire au sein de chacun d’entre eux.

6.2.3.

Il est essentiel que les États membres prennent des mesures en matière de planification et de gestion de l’utilisation des terrains. Ces tâches incombent souvent aux collectivités locales ou régionales, qui devraient apprécier le rôle des aéroports dans les réseaux nationaux et européens, en particulier lorsqu’il s’agit de zones centrales de concentration de trafic où la pression en ce qui concerne l’utilisation des terres à d’autres fins est forte. L’Union européenne doit convenir de principes communs à cet égard et proposer un cadre en matière de droit et de planification afin d’optimiser la prise de décisions sur les nouvelles capacités.

6.3.

Il est nécessaire de susciter l’émergence d’un marché commun consolidé dans le secteur aérien civil de l’Union européenne. Le CESE tient toutefois à indiquer que les plates-formes aéroportuaires ne doivent pas être favorisées aux dépens des aéroports régionaux. Ces deux types d’aéroports sont complémentaires et devraient demeurer parties intégrantes du réseau central et global tel qu’il est défini dans la politique relative au réseau transeuropéen de transport (RTE-T). Il en résulte que parfois, saturation et croissance vont de pair.

6.4.

Le CESE encourage la Commission à examiner la question de la capacité de l’espace aérien européen sous l’angle à la fois de la compétitivité internationale, qui est naturellement fondamentale, et du bon fonctionnement du marché intérieur de l’Union européenne. Une utilisation plus efficace et rationnelle des capacités régionales pourrait contribuer à alléger la pression pesant sur les plates-formes aéroportuaires extrêmement chargées. L’utilisation actuelle, à titre expérimental, de tours de contrôle à distance du trafic aérien (par exemple, en Suède) représente, dans ce contexte, un outil intéressant pour diminuer les coûts de fonctionnement de ces aéroports régionaux tout en maintenant le plus haut niveau de sécurité.

6.5.

Le rôle de la Commission est déterminant. Cependant, il n’a pas encore été défini entièrement et dans tous ses détails: si l’on veut qu’il ne se résume pas à suivre les différents acteurs concernés et à leur seriner qu’ils doivent être plus efficaces, il faudrait, avant toute chose, qu’elle dispose de données et d’informations complètes et fiables sur l’activité des aéroports de l’Union européenne. De tels éléments ne sont pas disponibles à l’heure actuelle, de même qu’il n’existe ni critères définissant ce que devrait être un «aéroport efficace» ni chiffres officiels sur le volume des aides publiques versées par l’Union européenne au profit des aéroports.

Bruxelles, le 10 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  COM(2006) 819 final, p. 2.

(2)  COM(2011) 823 final.

(3)  JO C 451 du 16.12.2014, p. 123.

(4)  JO C 181 du 21.6.2012, p. 173.


14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/24


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Achever l’Union économique et monétaire — le rôle de la politique fiscale»

(avis d’initiative)

(2015/C 230/04)

Rapporteur:

Carlos TRIAS PINTÓ

Corapporteur:

Petru Sorin DANDEA

Le 27 février 2014, le Comité économique et social européen (le «Comité», ou le «CESE») a décidé, conformément à l’article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d’élaborer un avis d’initiative sur le thème:

«Achever l’Union économique et monétaire — le rôle de la politique fiscale».

La section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 18 novembre 2014.

Lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 10 décembre 2014), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 164 voix pour, 53 voix contre et 11 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le fait que l’Europe affiche une reprise plus lente que dans le reste du monde est symptomatique d’un niveau de dysfonctionnement auquel doit chercher à remédier une union économique et monétaire renforcée. Le présent avis est favorable au processus d’approfondissement de l’union économique et monétaire, en particulier dans la zone euro, du point de vue du rôle de la fiscalité. Il a été et il restera difficile d’accomplir des avancées en matière de coordination de la fiscalité directe, car cette politique continue à relever de la compétence des États membres et est enracinée dans le système que chacun d’entre eux a élaboré au fil des siècles pour financer les dépenses publiques qu’il perçoit comme nécessaires. Toute modification de la fiscalité doit aboutir à un régime fiscal plus compétitif et durable au niveau mondial.

1.2.

Pour permettre le bon fonctionnement de l’Union économique et monétaire, la nouvelle législature doit jeter les bases d’une union budgétaire et la faire progresser jusqu’à ce qu’elle soit à même de surmonter la grande diversité des règles nationales, qui entrave l’intégration effective et la réalisation d’un marché unique. Elle doit également s’engager sur la voie de l’établissement d’un budget commun quelque peu renforcé pour la zone euro.

1.3.

Il faut aussi créer concrètement, à moyen terme, aux côtés du pilier monétaire de la BCE, un «pilier budgétaire commun» garantissant la stabilisation macroéconomique au sein de l’UEM, en particulier en cas de «chocs asymétriques».

1.4.

Afin de remédier aux défaillances et aux lacunes de la politique fiscale, il convient de prendre des mesures plus ambitieuses dans la zone euro pour tenter de diminuer et d’homogénéiser les impôts, d’élargir les assiettes fiscales, d’harmoniser plus avant les taux d’imposition ainsi que de renforcer les instruments de coopération et d’échange d’informations afin de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales.

1.5.

La nouvelle législature doit coopérer étroitement avec l’OCDE et le G20 pour trouver rapidement une solution au problème mondial de l’érosion de la base d’imposition et du transfert de bénéfices. L’OCDE a réalisé des avancées notables en introduisant un modèle mondial de fiscalité des entreprises, qui vise à prélever l’impôt là où se situe la substance économique. Il devrait constituer la base de la fiscalité des entreprises dans l’Union européenne.

1.6.

Pour progresser vers une union budgétaire plus approfondie, il est essentiel de poursuivre la surveillance budgétaire, conformément aux deux règlements du «two-pack» et de créer à court terme un fonds de ressources propres dans la zone euro afin de corriger les déséquilibres macroéconomiques (1).

1.7.

Le Comité approuve sans réserve la poursuite du processus du semestre européen, qui devrait être révisé pour plus d’efficacité. Les recommandations par pays pourraient constituer un outil utile pour trouver un terrain d’entente.

1.8.

Il s’avère indispensable d’accroître le budget commun trop limité, qui atteint à peine 1 % du PIB de l’Union européenne, en particulier dans la zone euro. Les lignes directrices politiques du président de la Commission, M. Juncker, «Un nouvel élan pour l’Europe», recommandent un budget davantage axé sur la création d’emplois, la croissance et la compétitivité. Le CESE soutient cette approche et souligne la nécessité de saisir l’occasion de la révision du cadre financier pluriannuel à la fin de l’année 2016 pour jeter les bases d’un budget renforcé en vue d’assurer le bon fonctionnement de l’union monétaire.

1.9.

La Commission devrait donner suite à sa communication de mars 2013 «Vers une union économique et monétaire véritable et approfondie» (2) et créer un instrument de convergence et de compétitivité destiné aux accords contractuels pour que les États membres entreprennent les réformes dans l’intérêt national et européen afin de corriger les déséquilibres, ces réformes ne pouvant être entreprises sans aide financière. Ce fonds devrait évoluer en ressource budgétaire propre à même de fournir une aide financière temporaire pour remédier aux chocs régionaux (3).

1.10.

Le budget de la zone euro devrait contribuer à un meilleur fonctionnement de l’union monétaire, apporter une aide fiscale pour achever la mise en place d’une vraie union bancaire et compenser les chocs asymétriques. Ces fonctions ont fait défaut lorsque la crise économique s’est déclarée, ce qui a accentué de manière dramatique les inégalités qui ont dû faire l’objet de mesures fiscales.

1.11.

Conscient de la complexité de la question, le CESE propose une série de mesures à adopter progressivement, conformément aux objectifs fixés dans les traités européens (4).

À court terme (de 6 à 18 mois):

créer au niveau de l’Union européenne une «assiette commune consolidée» (5), en accord avec les positions défendues antérieurement par le Comité (6) et sur la base d’un paramétrage plus juste que celui de la proposition actuelle de la Commission (7). Les progrès réalisés par l’OCDE devraient également être pris en considération,

répondre aux évolutions mondiales au niveau de l’OCDE et du G20 concernant l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices [Base Erosion and Profit Shifting (BEPS)] afin de garantir la transparence des régimes fiscaux et de ne pas accorder de concessions fiscales inéquitables, ainsi que d’éliminer sans délai la pratique par des États membres de procédures consistant à octroyer des privilèges fiscaux spéciaux à de grandes entreprises choisies,

obtenir des engagements fermes dans la zone euro pour étendre l’introduction de la taxe projetée sur les transactions financières à d’autres États membres que les onze qui la soutiennent actuellement,

associer les citoyens à la lutte contre l’économie souterraine, l’évasion et la fraude fiscales, en encourageant le secteur privé à renforcer les instruments tels que les chèques-service, le recours à des formes de paiement électroniques qui laissent des traces et la coopération avec les autorités dans la poursuite de ces objectifs,

améliorer la coopération administrative au-delà du réseau et de la base de données relatives à la TVA existants en recourant à une coopération renforcée dans quatre domaines:

i)

développer la plateforme Eurofisc (8) pour en faire une sorte d’embryon d’agence de l’Union européenne jouant le rôle de chambre européenne de compensation de la TVA et de lutte contre la fraude fiscale, qui commencerait à fonctionner dans la zone euro afin de compléter la chaîne d’information de chaque trésor public national en vue de mettre fin ainsi à la «fraude carrousel» (9);

ii)

renforcer, à titre de base juridique applicable à l’échelle de l’Union européenne, l’application de la directive sur l’assistance mutuelle de 2011 (10) et, le cas échéant, conférer à certains de ces éléments la forme d’un règlement;

iii)

le CESE encourage vivement la Commission à mettre en œuvre la proposition de son «Plan d’action pour renforcer la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales» consistant à inscrire sur une liste noire les juridictions qui font office de paradis fiscaux, au mépris de la bonne gouvernance dans le domaine fiscal, et demande que les critères communs qui permettront d’identifier ces juridictions soient fixés au niveau européen pour éviter qu’ils soient appliqués de manière disparate. Le Comité invite instamment la direction générale de la concurrence à enquêter de manière exhaustive sur tout accord fiscal déloyal conclu entre des États membres et des sociétés individuelles. L’exploitation et l’implantation des entreprises sur ces territoires devraient en outre être explicitées dans les rapports relatifs à la responsabilité sociale des entreprises cotées en bourse;

iv)

créer un organisme européen de simplification des impôts à partir d’expériences menées antérieurement dans les États membres.

À moyen terme (de 18 mois à 5 ans):

en ce qui concerne l’impôt sur le revenu des sociétés: dans l’esprit du «serpent monétaire» des années 80, et afin de préparer le terrain pour une modification du traité, créer dans la zone euro un «serpent fiscal» des taux d’imposition minimaux, maximaux et effectifs en vue de les harmoniser progressivement,

générer une capacité budgétaire spécifique dans la zone euro (11) au moyen de la taxe précédemment mentionnée (taxe sur les transactions financières) et de quatre autres taxes: taxe sur la consommation d’énergies non renouvelables (limitée à celles qui ont enregistré des chutes de prix ces dernières années), contribution temporaire appliquée à l’excédent de la balance des paiements supérieur à 6 % du PIB (12), émission conjointe d’obligations et participation aux revenus de seigneuriage tirés des émissions monétaires,

créer dans la zone euro une autorité fiscale qui coordonnerait l’action des États membres dans la collecte de ces cinq impôts, le contrôle, l’inspection et la répartition des recettes,

instaurer de cette manière un budget fédéral supplémentaire dans la zone euro qui permette de financer une assurance-chômage commune, des politiques de cohésion ainsi que des investissements durables en rapport avec l’économie verte,

modifier dans la zone euro le modèle actuel de prise de décision en matière budgétaire, en mettant en place un système de majorité qualifiée. Le Comité reconnaît que cela exigerait une modification du traité susceptible d’être controversée.

2.   L’Union économique et monétaire et son cadre budgétaire et fiscal

2.1.   Le cadre

2.1.1.

Les 28 États membres de l’Union européenne ont enclenché une dynamique d’intégration avec des engagements et des obligations renforcés au sein de la zone euro, maintenant consolidée par une union bancaire en évolution et le traité intergouvernemental sur la stabilité, la coordination et la gouvernance dans l’Union économique et monétaire.

2.1.2.

La politique fiscale recouvre actuellement plus de 600 types d’impôts différents. Ces derniers produisent l’essentiel des recettes, qui représentent au total (impôts et cotisations sociales) 39,4 % du PIB des États membres (13) (40,4 % pour la zone euro). Il faut coordonner davantage les politiques fiscales des États membres de la zone euro pour compléter la politique monétaire commune de la BCE.

2.1.3.

Faire progresser l’union budgétaire permettrait, dans le cas de la zone euro, de dépendre de ses propres ressources, de s’engager dans un soutien effectif des réformes structurelles importantes au sein des économies en difficulté et d’activer des politiques de solidarité et de redistribution, qui sont indispensables pour absorber les chocs asymétriques.

2.1.4.

Comparée à d’autres économies avancées, l’Union européenne présente, notamment dans la zone euro, des taux de croissance (du PIB) et d’emploi inférieurs. La plupart des théories de l’intégration économique suggèrent des modèles incluant tant l’intégration monétaire que budgétaire. Toutefois, le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) impose de prendre les décisions en matière de fiscalité à l’unanimité, ce qui rend extrêmement difficile l’adoption d’actes législatifs.

2.1.5.

L’absence d’efficacité de la zone euro sur le plan macroéconomique peut s’expliquer en partie par l’inadéquation entre la politique budgétaire, qui est fortement décentralisée et relève de la compétence des États membres, et la politique monétaire, qui connaît une centralisation croissante au sein des pays de la zone euro sous l’égide de la BCE.

2.1.6.

Les pouvoirs limités de la BCE lui interdisent de financer les déficits budgétaires par la création de monnaie. C’est peut-être une bonne chose pour la stabilité des prix et la valeur de la monnaie, mais pas pour la croissance, l’emploi et d’autres objectifs. Peu de progrès ont été accomplis au sein de l’Union européenne sur la voie d’une union budgétaire depuis l’instauration de l’union monétaire, ce qui complique la mobilité du travail et du capital, ainsi que les réponses à la crise et aux chocs asymétriques.

2.2.   Tendances et problèmes en matière de recettes et de dépenses

2.2.1.

La coordination de la politique fiscale minimaliste appliquée jusqu’à présent suffit à peine à éviter une distorsion de la concurrence entre États membres et à atténuer le nivellement par le bas dû à la concurrence, qui concerne principalement les taux effectifs et nominaux des impôts sur le revenu des sociétés et celui des personnes physiques, ce qui serait positif si cela résultait d’une action concertée entre les États membres. Il s’agit là malheureusement d’un jeu à somme négative pour l’heure dont les gagnants sont les revenus du capital et les travailleurs hautement mobiles, tandis que la grande majorité des autres acteurs sont perdants.

2.2.2.

L’intégration budgétaire requiert un dispositif de transferts et une autorité budgétaire mais le budget de l’Union européenne est limité à 1 % du PIB. Les transferts nets représentent une part négligeable de ces ressources, en dépit des objectifs de cohésion et de développement durable de la stratégie Europe 2020 et du Projet Europe 2030.

2.2.3.

La feuille de route vers une vraie et pleine union économique et monétaire, élaborée à la fin de l’année 2012 (14), propose de progresser à moyen terme vers une union économique, monétaire et budgétaire, entre autres au moyen d’initiatives plus concrètes, tandis qu’il est prévu à court terme de renforcer la gouvernance budgétaire et économique («six-pack», pacte fiscal et «two-pack»), le semestre européen et ses recommandations et enfin, le traité intergouvernemental sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’UEM signé par 25 États, en dehors du TFUE. C’est un système à sens unique, rigide et compliqué qui n’offre pas la flexibilité suffisante pour traiter la situation économique immédiate en cas de crise et mettre au point un dosage des politiques de la zone euro.

2.2.4.

Il est à noter en effet que jusqu’à présent, seules des mesures relatives au volet dépenses de l’union budgétaire ont été prises tandis que son volet recettes a été complètement négligé.

2.2.5.

Outre l’absence d’autorité budgétaire de contrôle, la «troïka» s’est comportée comme un acteur politique, en imposant des politiques d’austérité aux États qui ont eu besoin d’assistance, s’attirant ainsi les critiques du Parlement européen (15) et du CESE en raison de leur manque d’efficacité et de transparence.

2.2.6.

Le CESE approuve les orientations politiques du président de la Commission, M. Juncker, exposées dans son programme «Un nouvel élan pour l’Europe» appelant notamment l’Union européenne à remplacer la «troïka» par une structure plus démocratique et davantage tenue de rendre des comptes, s’appuyant sur les institutions européennes, et assortie d’un contrôle démocratique renforcé tant au niveau de l’Union européenne qu’à l’échelle nationale.

2.2.7.

Entretemps, les politiques de dévaluation fiscale menées dans certains des États les plus vulnérables de la zone euro ont eu pour résultat d’endommager le modèle social européen (16) plutôt que d’accroître la compétitivité, car la réduction des charges sur le facteur de production qu’est le travail n’a pour ainsi dire pas contribué à améliorer la croissance, l’emploi et la situation concernant la dette, entraînant, à terme, une perte inutile de recettes fiscales. Néanmoins, dans certains États membres, la correction des déséquilibres commence à montrer des effets bénéfiques.

3.   Observations

3.1.   L’importance de la fiscalité des services financiers et numériques

3.1.1.

Les deux domaines qui illustrent toute la difficulté de progresser en matière d’intégration dans le domaine de la fiscalité sont les transactions financières et les transactions de l’économie numérique; la Commission doit sans délai réagir au développement rapide que connaît ce dernier phénomène en accord avec les enquêtes réalisées par la direction générale de la concurrence dans le domaine de la concurrence et les recommandations du groupe d’experts sur la fiscalité et l’économie numérique (17) ainsi que les premières propositions (18) de l’OCDE pour une approche internationale coordonnée en vue de lutter contre l’évasion fiscale des entreprises multinationales, dans le cadre du plan d’action BEPS (Base Erosion and Profit Shifting) sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices de l’OCDE/G20 (conçu pour créer un ensemble unique de règles internationales en matière de fiscalité afin de mettre un terme à l’érosion de la base d’imposition et au transfert artificiel de bénéfices vers certaines juridictions en vue d’échapper à l’impôt).

3.1.2.

Étant donné que la mise en œuvre de la taxe sur les transactions financières d’application dans toute l’Union européenne n’a pas progressé au-delà de la coopération renforcée instaurée par la directive de février 2013 y afférente, qui ne rassemble que onze États de la zone euro (19), il est urgent d’étendre son application tout au moins à la zone euro (en palliant à l’absence de progrès ces derniers mois).

3.1.3.

Le CESE accueille favorablement la proposition de modification de la directive en matière de fiscalité des revenus de l’épargne (20) afin d’améliorer la qualité de l’information et la prévention de l’évasion fiscale.

3.2.   Structures fiscales: assiettes et taux et exonérations

3.2.1.

L’Union européenne perd chaque année beaucoup plus de recettes fiscales que les États-Unis et d’autres pays, qui sont moins touchés par l’économie souterraine, la fraude sociale ou fiscale et l’évasion fiscale (21). Afin de prévenir des dysfonctionnements, tels que les paradis fiscaux, il est nécessaire de simplifier, d’harmoniser et d’accroître l’homogénéité entre les États s’agissant de leurs structures fiscales ramifiées et complexes. Il conviendrait d’engager ce processus au sein de la zone euro, sous la coordination de la Commission et de l’Eurogroupe, à partir d’un bureau européen chargé de la simplification, comme il en existe déjà dans quelques États (22).

3.2.2.

Le CESE estime également qu’il convient de fixer comme priorité la convergence des politiques fiscales dans le cadre du semestre européen (en mettant à profit certaines recommandations par pays), étant donné que celui-ci vise à coordonner les efforts consentis par les États membres en matière de politique économique afin d’atteindre également, avec l’aide des autres politiques, les objectifs de la stratégie Europe 2020.

3.2.3.

Le CESE plaide en faveur d’un système d’une équité et d’une efficacité accrues où la réforme et l’harmonisation fiscales viseraient la transparence, l’élargissement de l’assiette fiscale et la prévention de l’évasion fiscale agressive, afin de permettre un abaissement des taux d’imposition et une nouvelle répartition des charges.

3.2.4.

Le CESE recommande de limiter le régime d’exonérations, en fonction de la nature de chaque impôt, en procédant à une analyse rigoureuse des coûts et des bénéfices économiques et sociaux, conformément à la doctrine internationale des «dépenses fiscales», consolidée depuis 1968, et en tenant compte du fait que durant les cinq dernières années de crise, les systèmes de prélèvement/prestations fiscales ont été en mesure de compenser dans une mesure considérable l’accentuation des inégalités de marché dans la plupart des États membres de l’Union européenne, comme il ressort des études réalisées par la Commission (23).

3.2.5.

Le CESE encourage l’Union européenne à participer plus activement, par l’intermédiaire de représentants de la zone euro, aux débats visant à coordonner ses travaux d’harmonisation et de simplification avec l’OCDE (24), le FMI (25) et le G20 (26), en commençant par les prix de transfert, la fraude et l’économie souterraine et, avant tout, les problèmes d’équité dans la répartition du poids de l’imposition.

3.2.6.

Le CESE estime que le plan d’action BEPS (27) (Base Erosion and Profit Shifting) sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices sera essentiel pour faire face à l’évasion fiscale et à la planification fiscale agressive au niveau mondial. Il encourage dès lors le G20, l’OCDE et tous les États membres de l’Union européenne à l’étendre et à créer un embryon de chambre européenne de compensation de la TVA et de lutte contre la fraude fiscale, en vue de mettre un terme au problème de «fraude carrousel» (28) qui se pose dans les transactions intracommunautaires et qui est plus nuisible que l’économie souterraine elle-même.

3.2.7.

Enfin, compte tenu du fait que les exonérations et dégrèvements fiscaux entraînent des taux effectifs nettement inférieurs aux taux nominaux, il faut les coordonner avec les objectifs européens en matière d’emploi, d’investissement productif, de compétitivité des entreprises et d’inclusion sociale, ainsi qu’avec les politiques de l’Union qui façonnent le modèle social européen.

3.3.   La fiscalité des sociétés

3.3.1.

Le CESE appelle à donner la priorité à l’harmonisation des impôts sur le revenu des sociétés pour progresser vers une union budgétaire et fiscale  (29) cohérente afin d’éviter que ce soient les PME qui paient le taux effectif le plus élevé. En outre, le CESE juge hautement répréhensibles les pratiques de certains États membres qui consistent à accorder à des sociétés internationales choisies des dégrèvements fiscaux spéciaux, sans en informer l’opinion publique; dans ce contexte, appelle la Commission européenne à entreprendre toutes les actions possibles pour éliminer de telles pratiques. Cette situation entraîne une distorsion de concurrence incompatible avec l’esprit du marché unique.

3.3.1.1.

L’une des actions principales et prioritaires devrait reposer sur la «création d’une assiette consolidée commune», une position défendue officiellement par le Comité en 2006 (30) et confirmée ultérieurement (31). En 1992 déjà, le rapport Ruding relevait la nécessité de disposer de règles communes pour la définition de la base d’imposition à partir des taux minimaux et maximaux.

3.3.1.2.

Dans l’esprit du «serpent monétaire» qui avait été conçu pour contrecarrer les fluctuations monétaires avant l’introduction de l’euro, le Comité suggère d’encourager les organismes compétents à coopérer dans l’établissement de plafonds et de seuils en matière d’impôt sur le revenu des sociétés. Il convient également d’éliminer de manière coordonnée les exonérations qui sont les moins propices à l’augmentation de l’emploi et de la productivité.

3.3.2.

Le CESE marque son accord sur la proposition de directive relative aux sociétés mères et filiales d’États membres différents, qui constitue l’une des 34 mesures énoncées dans le plan d’action visant à renforcer la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales  (32), que la Commission a présenté à la fin de l’année 2012. Néanmoins, il eût préféré une mise en œuvre par la voie d’un règlement.

3.3.3.

Concernant le commerce intracommunautaire de biens et de services, l’on constate un progrès plus important s’agissant de l’harmonisation de la TVA; à cet égard, l’on observe une amélioration de l’harmonisation des assiettes fiscales, mais aussi la persistance jusqu’à présent de fortes disparités dans les taux d’imposition.

3.3.4.

En dernier lieu, au vu de leur caractère stratégique, le CESE recommande d’accorder la priorité aux incitations fiscales à la recherche et au développement (33).

3.3.5.

Il convient de veiller à ce qu’aucune des mesures prévues ne porte atteinte à la compétitivité des entreprises européennes.

3.4.   La fiscalité des personnes physiques et des ménages

3.4.1.

Les personnes physiques sont assujetties tant à l’imposition directe qu’indirecte. L’on ne peut perdre de vue le fait que l’imposition indirecte est par nature régressive et, en particulier, que l’harmonisation vers le haut de ce type d’imposition est régressive et peut avoir des effets très néfastes sur les citoyens qui ont les plus bas revenus sans que cela ne soit compensé par des compléments de revenus.

3.4.2.

L’harmonisation de l’imposition directe des personnes physiques se limite à certains cas particuliers et la charge fiscale a cessé de converger.

3.4.3.

Dans la zone euro tout au moins, il conviendrait de revoir le nombre de dispositions juridiques relatives à l’impôt sur les revenus des personnes physiques et le coût des cotisations sociales afin d’éviter le «dumping» social et d’uniformiser davantage la pression fiscale sur le facteur travail et de favoriser ainsi la mobilité de celui-ci (34). La progressivité des prélèvements doit être étendue aux revenus du capital et aux richesses qui en découlent, en revitalisant les impôts sur le patrimoine, les successions et les donations, à titre d’instrument de contrôle. En outre, ces types de prélèvements freinent moins la demande que la fiscalité du travail.

3.4.4.

Étant donné la nécessité de mettre davantage l’accent sur l’investissement plutôt que sur la consommation, il importe de créer et d’harmoniser des serpents de convergence en ce qui concerne la fiscalité des revenus de l’épargne (35), l’imposition des dividendes versés à des personnes physiques et la fourniture transfrontalière des retraites professionnelles.

3.4.5.

Le CESE soutient la Commission dans sa recherche de solutions pour rendre les structures de l’impôt plus favorables à la croissance et déterminer quel rôle la fiscalité peut jouer dans la réponse à apporter aux besoins d’assainissement dans le contexte de l’élargissement des assiettes fiscales, en matière de taxes d’habitation par exemple. Ainsi, les recommandations aux États membres formulées par la Commission européenne dans le cadre du semestre européen allaient dans le sens d’un recours accru aux impôts fonciers récurrents, à des fins d’assainissement ou en tant que moyen parmi d’autres d’éviter que l’impôt ne frappe les revenus du travail (36).

3.4.6.

De même, le CESE propose d’adopter des mesures additionnelles pour harmoniser la fiscalité environnementale, en se basant sur la communication de la Commission relative à un cadre pour le climat et l’énergie à l’horizon 2030.

3.4.7.

Les citoyens contribueront à lutter contre le grave problème de la fraude fiscale et du travail au noir s’il existe des incitations à cet effet. Il y a lieu de renforcer les instruments tels que les chèques-service ou les exonérations et allègements fiscaux vers d’autres services de soutien aux personnes, parce qu’ils allient l’objectif de promouvoir le bien-être social et celui de légaliser l’économie souterraine.

3.4.8.

Pour combattre l’économie informelle, le CESE propose de créer des incitations fiscales à recourir à des formes de paiement, tels que les cartes ou les téléphones portables, qui laissent des traces et favorisent l’inclusion financière et numérique, au moyen de dégrèvements ou d’exonérations fiscaux harmonisés pour les particuliers ou les entreprises qui réduiraient l’utilisation du numéraire.

3.4.9.

De même, l’on pourrait renforcer la coopération des citoyens au moyen d’incitations financières en cas de détection éventuelle d’opérations frauduleuses, une pratique courante aux États-Unis.

3.5.   La fiscalité locale (les régions, les États et l’Union européenne)

3.5.1.

La grande diversité des régimes fiscaux favorise la fraude, la corruption et l’économie souterraine. Le CESE appelle les États membres de la zone euro à s’octroyer davantage de compétences dans les quatre principaux domaines de la fiscalité: la fiscalité directe des personnes physiques et morales (y compris la fiscalité des revenus de l’épargne et les impôts fonciers ainsi que d’autres prélèvements sur la fortune) et la fiscalité indirecte sous la forme de la TVA et d’autres taxes spéciales.

3.5.2.

Toute avancée en matière de gouvernance fiscale passe inéluctablement par une cession progressive de souveraineté de la part des États membres. Ainsi, la collecte de l’impôt pourrait demeurer une compétence relevant principalement des États, tandis que les contrôles, les inspections et la répartition des recettes feraient l’objet d’un traitement coordonné entre l’Union et ses États. À cette fin, le CESE propose de créer une autorité fiscale de l’Union européenne, au sein de la zone euro dans un premier temps.

3.5.3.

Conformément au principe de subsidiarité, il convient de respecter les impôts locaux, mais le CESE recommande d’entamer des travaux en vue de simplifier, de réduire, de regrouper et d’homogénéiser bon nombre d’entre eux.

3.6.   Dimension extérieure et lien avec les politiques publiques

3.6.1.

Une politique fiscale supranationale (37) serait un instrument efficace pour réaliser les objectifs du traité, notamment les politiques de cohésion et de développement durable.

3.6.2.

Le CESE appelle à établir un budget fédéral supplémentaire, tout au moins dans la zone euro, qui permettrait de collecter l’impôt et pourrait se charger progressivement des politiques qui peuvent mieux être mises en œuvre en commun, telles que l’assurance-chômage liée aux politiques actives du marché du travail (38), la recherche et développement, la défense, un mécanisme commun de compensation de la charge des intérêts de la dette (39), etc.

3.6.3.

Enfin, le CESE soutient fermement les initiatives de l’OCDE et du G20 en matière de coopération internationale dans le domaine fiscal et de lutte contre la fraude fiscale, et préconise de convertir en norme internationale l’échange automatique d’informations fiscales.

Bruxelles, le 10 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  Le système est néanmoins trop rigide, trop lourd et incapable d’offrir rapidement la flexibilité nécessaire pour faire face aux circonstances économiques immédiates et mettre au point un dosage des politiques dans la zone euro, et ce dans un contexte où les États membres n’ont plus la marge de manœuvre suffisante pour mettre en place des plans de relance de leurs économies, ce qui a pour conséquence un grande instabilité financière.

(2)  COM(2013)165 final.

(3)  Voir l’avis du CESE sur la création d’un instrument de convergence et de compétitivité et les grandes réformes des politiques économiques (JO C 271 du 19.9.2013, p. 45).

(4)  Voir notamment les articles 113 et 115 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.

(5)  Voir les points forts présentant un intérêt pour la section ECO tirés des orientations politiques pour la prochaine Commission présentées au Parlement européen par M. Jean-Claude Juncker. Voir également Juncker: Un nouvel élan pour l’Europe: Mon programme […], p. 6.

(6)  Avis du CESE sur l’ACCIS (JO C 24 du 28.1.2012, p. 63).

(7)  COM(2011) 121 final.

(8)  www.eurofisc.eu

(9)  Ventes fictives dans l’État membre de destination entraînant des pertes qui peuvent s’avérer colossales pour les trésors publics.

(10)  Directive 2011/16/UE.

(11)  Voir les avis sur la politique budgétaire: croissance et ajustements budgétaires (JO C 248 du 25.8.2011, p. 8) et «Achever l’Union économique et monétaire — Les propositions du Comité économique et social européen pour la prochaine législature européenne», ainsi que le projet détaillé pour une Union économique et monétaire véritable et approfondie [COM(2012) 777 final/2, point 3].

(12)  Voir l’avis «Achever l’UEM — La prochaine législature européenne» (JO C 451 du 16.12.2014, p. 10).

(13)  Données publiées par Eurostat (922/014) le 16 juin 2014.

(14)  COM(2012) 777 final/2.

(15)  Voir: Alejandro Cercas, Rapport: PE528.091v02-00.

(16)  http://www.eurofound.europa.eu/publications/annual-report/2014/eurofound-yearbook-2013-living-and-working-in-europe

(17)  Recommandations du groupe d’experts sur la fiscalité et l’économie numérique. À cet égard, la Commission a adopté le 22 octobre 2013 une décision instituant un groupe d’experts, dont elle a défini la même année la portée des travaux (en anglais) et la feuille de route (en anglais). Son avis final a été publié le 28 mai 2014.

(18)  http://www.oecd.org/tax/beps-2014-deliverables.htm

(19)  Voir: COM(2013) 71 final — 2013/0045 (CNS). Ces États sont: la Belgique, l’Allemagne, l’Estonie, la Grèce, l’Espagne, la France, l’Italie, l’Autriche, le Portugal, la Slovénie et la Slovaquie.

(20)  Directive en matière de fiscalité des revenus de l’épargne — Commission européenne.

(21)  Voir: Friedrich Schneider, «Shadow Economies and Corruption all over the World: Empirical Results for 1999 to 2003», in: numéro spécial du International Journal of Social Economics (IJSE), Série 1, Vol. 35, numéro 9, 2008.

(22)  Office of Tax Simplification, HM Treasury, qui dépend du gouvernement du Royaume-Uni, par exemple.

(23)  Note de recherche de la Commission 02/2013 «The effect of tax-benefit changes on income distribution in EU countries since the beginning of the economic crisis».

(24)  OCDE, projet sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, 2013.

(25)  Rôle du FMI dans la fiscalité internationale.

(26)  https://www.g20.org/sites/default/files/g20_resources/library/Saint_Petersburg_Declaration_ENG.pdf

(27)  Centre de politique et d’administration fiscales — OCDE.

(28)  Ventes fictives dans l’État membre de destination entraînant des pertes qui peuvent s’avérer colossales pour les trésors publics.

(29)  Voir la déclaration du CESE «Un plan d’action pour l’Europe», adoptée lors de la session plénière des 29 et 30 avril 2014. Voir aussi l’avis du CESE «Stratégies pour un assainissement intelligent de la politique budgétaire: le défi des moteurs de croissance à trouver pour l’Europe» (JO C 248 du 25.8.2011, p. 8).

(30)  Avis du CESE «Création d’une assiette consolidée commune pour l’impôt sur les sociétés dans l’Union européenne» (JO C 88 du 11.4.2006, p. 48).

(31)  Avis du CESE Assiette consolidée commune pour l’impôt sur les sociétés (JO C 24 du 28.1.2012, p. 63).

(32)  COM(2012) 722 final.

(33)  Voir: «Mettre la fiscalité au service de la recherche et du développement».

(34)  Déclaration de l’Eurogroupe du 8 juillet 2014: Programme de réformes structurelles — discussions thématiques sur la croissance et l’emploi — réduction de la pression fiscale.

(35)  http://europa.eu/legislation_summaries/taxation/l31050_fr.htm

(36)  Commission européenne 2014, réformes fiscales dans les États membres de l’Union européenne, p. 112.

(37)  Stefan Collignon, prendre l’intégration européenne au sérieux.

(38)  Voir les avis du CESE «Achever l’UEM — la prochaine législature européenne» et «Pour une dimension sociale de l’Union économique et monétaire européenne» (JO C 271 du 19.9.2013, p. 1).

(39)  Voir l’avis du CESE «Relancer la croissance» (JO C 143 du 22.5.2012, p. 10).


ANNEXE

à l’avis du Comité économique et social européen

L’amendement suivant, qui a recueilli plus du quart des suffrages exprimés, a été rejeté au cours des débats (article 54, paragraphe 3, du règlement intérieur):

Paragraphe 1.4

Modifier comme suit:

 

«Afin de remédier aux défaillances et aux lacunes de la politique fiscale, il convient de prendre des mesures plus ambitieuses dans la zone euro pour tenter de diminuer et d’homogénéiser les impôts, d’élargir les assiettes fiscales, d’harmoniser plus avant les taux d’imposition ainsi que de renforcer les instruments de coopération et d’échange d’informations afin de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales. Il convient à cet égard de veiller à ce que la charge fiscale globale dans la zone euro ne soit pas supérieure à celle des États limitrophes.»

Exposé des motifs

Comme l’avis à l’examen propose également d’instaurer de nouveaux impôts, il importe que la charge fiscale globale dans la zone euro ne soit pas supérieure à celle des États limitrophes. Dans le cas contraire, cette charge fiscale (élevée) pourrait avoir des répercussions négatives sur la zone euro et conduire à la situation où davantage d’entreprises délocaliseraient leurs sites et davantage de travailleurs partiraient.

Résultat du vote

Voix pour:

80

Voix contre:

129

Abstentions:

17


14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/33


Avis du Comité économique et social européen sur «Les mutations industrielles dans le secteur européen de l’emballage»

(avis d’initiative)

(2015/C 230/05)

Rapporteur:

M. Gonçalo LOBO XAVIER

Corapporteur:

M. Nicola KONSTANTINOU

Le 22 janvier 2014, le Comité économique et social européen (CESE) a décidé, conformément à l’article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d’élaborer un avis d’initiative sur le thème:

«Les mutations industrielles dans le secteur européen de l’emballage».

La commission consultative des mutations industrielles (CCMI), chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 13 novembre 2014.

Lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 10 décembre 2014), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 119 voix pour, 1 voix contre et 4 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le secteur européen de l’emballage est confronté à plusieurs défis. Le rôle essentiel qu’il joue au carrefour d’un certain nombre de secteurs le place au centre de la problématique de la compétitivité de l’économie européenne. L’Europe doit maintenir sa primauté dans ce secteur et suivre l’évolution des tendances concernant les questions liées à la viabilité environnementale, à la sécurité et aux marques en matière d’emballage. Le CESE estime que ce rôle de chef de file doit être basé sur quatre piliers principaux: utilisation efficace des ressources; R & D et innovation; dialogue social; durabilité et adaptation.

1.1.1.   Utilisation efficace des ressources

Les produits du secteur étant utilisés pour maintenir, protéger et conserver d’autres produits de consommation, et étant de ce fait souvent éliminés en tant que déchets, le secteur doit assumer un rôle pivot dans la croissance des taux de recyclage des États membres et de l’UE. Toutefois, à cette fin, il est encore nécessaire de fournir de l’aide aux entreprises, et le CESE estime que la Commission européenne pourrait fournir une assistance en donnant davantage d’informations sur les bonnes pratiques et sur l’utilisation optimale des ressources disponibles. Une autre méthode est d’encourager tous les acteurs concernés, y compris ceux qui exercent des activités en dehors de l’UE, à respecter l’environnement. L’utilisation efficace des ressources est un élément fondamental du processus d’emballage; c’est aussi une préoccupation environnementale. Le CESE estime que la Commission européenne pourrait fournir un cadre politique pour soutenir la transition nécessaire à la réalisation des objectifs de la stratégie Europe 2020 ainsi que régénérer et soutenir une industrie de l’emballage qui soit soucieuse de l’environnement.

1.1.2.   Défis

Le CESE est conscient des défis auxquels est confronté le secteur du fait de l’augmentation des prix de l’énergie, tant pour ce qui est de ses performances quotidiennes que du processus de recyclage. Le CESE fait remarquer que le processus de recyclage, essentiel pour le secteur de l’emballage, est organisé non seulement à l’intérieur de l’Union européenne, mais aussi à l’extérieur de ses frontières. Il estime que, s’agissant des mesures politiques concernant ce secteur spécifique, l’UE devrait examiner en priorité la question de l’équilibre du prix de l’énergie.

Pour contribuer davantage à la réalisation des objectifs de l’UE en matière d’émissions de carbone, chaque secteur devrait définir des objectifs réalistes en matière de recyclage, conformément à ceux qui sont définis dans la législation de l’UE (directive relative aux emballages et aux déchets d’emballages et directive-cadre relative aux déchets) en lien avec la stratégie Europe 2020, et par conséquent fournir des déclarations annuelles qui permettraient de mesurer les progrès accomplis. Malgré les efforts consentis par chaque État membre pour fournir des données, lesquelles sont publiées chaque année par Eurostat, il subsiste toujours une lacune en matière d’évaluation des données. Le CESE considère que la pratique consistant à utiliser davantage de matériaux d’emballage que nécessaire relève du gaspillage, qu’elle devrait être combattue par le secteur et que les consommateurs devraient y être sensibilisés. Une campagne de sensibilisation du public pourrait également permettre de promouvoir les «exigences essentielles» que la directive relative aux emballages et aux déchets d’emballages définit en matière d’excès d’emballage. À titre d’exemple, la Commission devrait fixer un calendrier précis en vue de demander l’interdiction complète des sacs en plastique jetables à usage unique au profit de sacs réutilisables ou biodégradables. Un tel calendrier devrait comprendre des phases de consultation avec les partenaires sociaux et des mesures d’accompagnement de la transformation du secteur.

1.1.3.   Recherche, développement et innovation

Sur la base des recherches réalisées pour cet avis et des discussions menées avec les parties prenantes et la Commission, il appert que les données relatives à plusieurs questions essentielles sont insuffisantes. Aussi l’appui de la Commission européenne serait-il bienvenu pour organiser une méthodologie améliorée aux fins de la collecte de données sur le secteur, qui permettrait de fournir aux partenaires sociaux des informations pertinentes pour garantir la viabilité du secteur à long terme. Pour le CESE, les principaux défis que le secteur doit relever en termes de R & D sont également importants et comprennent notamment l’efficacité des transports de marchandises, l’efficience des systèmes de traçabilité, la réduction des coûts et les problèmes de réglementation et de sécurité, parallèlement à l’écoconception et à la performance de l’emballage sur le plan du cycle de vie. Le CESE estime que, compte tenu de ces besoins et de cette approche spécifiques, il est très important que les financements d’Horizon 2020 en faveur de l’innovation soient une priorité et une chance à saisir pour le secteur européen de l’emballage. Il convient que les associations et les parties prenantes habituelles encouragent la capacité à participer à des consortiums européens pour stimuler les activités d’innovation.

Le CESE estime que des investissements continus sont nécessaires pour faire face à tous les défis existants. Il est essentiel, pour la survie du secteur sur le long terme, que des investissements en capital soient faits parallèlement à un investissement dans la force de travail du secteur. À cette fin, il est nécessaire de mettre en place une planification appropriée et un dialogue adéquat entre les travailleurs, les employeurs, les gouvernements, les institutions européennes et des parties prenantes recouvrant de plus larges pans de la société, notamment les instances nationales de l’éducation.

Il apparaît clairement que le secteur de l’emballage est en évolution constante, en raison de la pression exercée par de nouvelles tendances comme le commerce électronique. La croissance de ce dernier a été mise en évidence par les résultats de l’enquête Eurobaromètre de 2013, qui établissent que près de la moitié des citoyens européens avait fait des achats en ligne au cours des six mois précédents (1). La Commission estime que «le commerce électronique constitue un important moteur de développement pour l’Europe, avec un potentiel de croissance de l’économie et de l’emploi estimé à plus de 10 % par an entre 2013 et 2016» (2). Cette évolution pourrait inciter à mettre en œuvre de nouvelles solutions pour réduire les déchets d’emballage tels que les cartons et plastiques, et il est souhaitable que la R & D tienne compte de cette dynamique dans ses activités.

L’innovation dans le secteur de l’emballage s’avère aussi être une aubaine pour l’emploi des jeunes: ce marché d’avenir ouvre un large éventail de perspectives aux designers industriels, ingénieurs en matériaux et autres représentants de professions nouvelles. Le CESE considère que les secteurs qui utilisent beaucoup d’emballages ouvrent des possibilités d’innovation en matière de durabilité et de conception.

1.1.4.   Engagement citoyen, dialogue social au niveau de la main-d’œuvre, durabilité et adaptation

Le CESE estime que le défi central pour les employeurs et les travailleurs du secteur européen est de garantir que celui-ci maintient sa compétitivité, utilise pleinement les innovations technologiques et produit des biens de qualité respectueux de l’environnement. De l’avis du CESE, il convient aussi que les parties prenantes définissent les nouvelles compétences qui compteront pour l’avenir du secteur, afin d’adapter les systèmes d’enseignement à ce défi essentiel. De nouvelles tendances, comme les ventes en ligne, créent des enjeux qui doivent être examinés de manière approfondie, et dont l’influence et l’impact doivent être évalués.

Le CESE conclut que, pour leur majorité, les entreprises de l’emballage et leur main-d’œuvre sont disposées à s’adapter aux changements, mais que les parties prenantes ont besoin de plus d’informations pour prendre les bonnes décisions, tant pour le secteur dans son ensemble que pour l’emploi. Cette adaptation aux mutations du marché devrait s’opérer suivant un processus qui respecte les travailleurs tout en tenant compte des menaces posées par l’évolution rapide et les délocalisations.

Le CESE considère qu’il faut débattre de la durabilité du secteur par l’intermédiaire de la société civile et du dialogue social, aux niveaux national et européen. La création d’un comité de dialogue social sectoriel (CDSS) pour le secteur de l’emballage pourrait offrir cette possibilité.

2.   Introduction

Le principal objectif du présent document est de transmettre aux institutions européennes un certain nombre de recommandations que le CESE et la CCMI jugent fondamentales pour stimuler l’économie européenne, et en particulier le secteur de l’emballage. L’Europe doit assumer un rôle de chef de file et encourager le respect de la législation dans un esprit constructif pour soutenir une économie respectueuse de l’environnement, en vue de stimuler le marché intérieur: ce sont la confiance et le respect des prescriptions légales qui devraient être primordiaux, et non la protection.

2.1.

Le secteur de l’emballage sert de multiples desseins dans la vie quotidienne: protection du produit (prévention de la casse, de la détérioration et de la contamination; accroissement de la durée de stockage); promotion (ingrédients du produit; caractéristiques; messages promotionnels et marque); information (identification du produit, préparation et utilisation, informations nutritionnelles et concernant la conservation, informations de contact, instructions pour l’ouverture, gestion de fin de vie); commodité (préparation du produit, conditionnement, stockage et portionnage); utilisation (fourniture au consommateur, vente au détail et unités de transport); manipulation (transport du producteur vers le détaillant, exposition dans les points de vente); et réduction des déchets (traitement, réutilisation des produits de réemploi; énergie nécessaire au stockage et au transport).

2.2.

Étant donné l’immense diversité du secteur, l’industrie de l’emballage requiert nécessairement une approche large et diversifiée. L’importance du secteur justifie que l’on adopte à son égard une attitude prudente qui tienne compte de sa diversité, de l’obligation qu’il a de se conformer aux réglementations et à la législation et, bien évidemment, de sa compétitivité.

2.3.

Si un certain nombre de problèmes cruciaux sont communs à la plupart des secteurs, chaque sous-secteur est naturellement confronté à un ensemble de problèmes qui lui sont spécifiques. Cela est dû au fait que chaque produit spécifique est soumis à des exigences différentes, notamment sur le plan des normes et des certifications.

2.4.

Le recours aux emballages pour transmettre des informations sur l’innovation et la qualité est une opportunité pour l’Europe. À cet égard, le présent avis propose plusieurs mesures visant à indiquer clairement le degré de qualité et d’innovation des produits contenus dans un emballage donné. Il s’agit d’un défi permanent, qui est essentiel pour différencier les produits de l’UE de ceux en provenance d’autres parties du monde.

2.5.

Le CESE estime qu’il existe deux autres questions essentielles dans ce débat: le volet logistique du secteur de l’emballage, et la question de l’accès aux matières premières utilisées par le secteur.

À la lumière de celles-ci, l’on comprend aisément pourquoi les défis posés à l’industrie européenne de l’emballage sont si importants.

Le principal objectif du présent document est de transmettre aux institutions européennes un certain nombre de recommandations que le CESE et la CCMI jugent fondamentales pour stimuler l’économie européenne en général et le secteur de l’emballage en particulier. Comme dans d’autres domaines, l’Europe doit encore assumer un rôle de chef de file et encourager le respect des réglementations et de la législation qui aident véritablement l’économie et dont la mise en œuvre soit respectueuse de l’environnement, en vue de stimuler le marché intérieur: les mots d’ordre en la matière devraient être «confiance» et «respect des prescriptions légales», et non pas «protection».

2.6.

Le cas particulier des matières utilisées est un problème central qui demande une analyse attentive, dans le but de tenir compte de la liberté de marché et de garantir des conditions de concurrence équitables pour tous les acteurs du marché.

2.7.

Le CESE estime qu’instaurer un dialogue coordonné et inclusif entre les parties prenantes du secteur garantira la pérennité de celui-ci ainsi que sa capacité à fournir des emplois décents sur le long terme, à mieux faire face aux changements et à s’adapter aux besoins des consommateurs et aux exigences toujours plus importantes de la société. À cet égard, le potentiel qu’a le dialogue social de renforcer le secteur n’est pas pleinement réalisé et ce problème doit être abordé de toute urgence.

2.8.

En effet, pour s’adapter au changement et se transformer afin de répondre aux exigences du marché, le secteur doit inévitablement passer par une approche à canaux multiples en matière d’engagement des parties prenantes pour parvenir à des solutions durables et équitables. Afin de résoudre les problèmes liés au secteur, concernant sa structure, sa compétitivité et les questions connexes telles que l’emploi, les compétences, l’adaptation et la viabilité future du secteur et de sa main-d’œuvre, il convient que la Commission encourage un dialogue social bien structuré et organisé. En outre, afin de fournir une plate-forme pour l’expression d’intérêts par un public plus large (c’est-à-dire la société et les consommateurs, les travailleurs, les employeurs, les gouvernements, etc.), il faut créer un canal de communication bidirectionnel entre les différents acteurs et institutions. De cette façon, toutes les parties concernées peuvent être impliquées dans le secteur et associées, plus largement, au rôle central qu’il joue dans la société.

3.   Analyse/contexte

3.1.

Le secteur européen de l’emballage englobe une vaste gamme d’activités. S’il partage des préoccupations communes avec d’autres secteurs, il est aussi confronté à plusieurs défis importants qui lui sont propres, et qui concernent tant le moment présent que le court et le moyen terme. Le secteur est constitué d’entreprises spécialisées dans les emballages en verre, en métal, en plastique, en bois et en papier, lesquelles emploient au total plus de 6,5 millions de personnes en Europe (3) (Eurostat).

3.2.

Le secteur de l’emballage se caractérise non seulement par la grande diversité de ses produits, mais aussi par la variété des procédés distincts utilisés pour la fabrication de produits destinés à des marchés et à des utilisations spécifiques; chacun exige un environnement distinct et est associé à un ensemble de défis et de caractéristiques propres.

Par exemple, pour les entreprises produisant des emballages en verre, l’utilisation de l’énergie est un facteur de coût important. De plus, étant donné que jusqu’à 80 % des emballages en verre sont recyclés, l’industrie du verre est un contributeur important aux objectifs de l’UE en matière de recyclage et de diminution de l’empreinte carbonique de notre continent.

3.3.

Un aspect qui est également à prendre en considération est celui de la connectivité entre les matériaux utilisés pour l’emballage, tandis que l’accroissement des coûts de transport pour le transit des matériaux (par exemple, carton ondulé et tubes utilisés à des fins d’emballage) a eu un effet négatif sur le secteur. Ainsi, l’impact des coûts énergétiques tout au long de la chaîne d’approvisionnement d’un secteur donné se répercute sur le secteur de l’emballage (noter à cet égard la distance que parcourent des produits tels que le matériel imprimé avant d’être utilisés par les entreprises d’emballage).

3.4.

Le métal peut être recyclé à l’infini sans aucune perte de qualité, ce qui accroît la valeur ajoutée de la contribution qu’apporte le secteur aux objectifs de l’UE en matière de recyclage.

3.5.

Le verre d’emballage est utilisé pour produire des bouteilles et récipients et autres produits d’emballage; il s’agit du secteur le plus important de l’industrie européenne du verre; il contribue pour environ 60 % à la production totale de verre et emploie 90  000 personnes dans l’UE (Eurostat). Dans son ensemble, l’emploi du secteur du verre a décliné en raison de l’automatisation croissante, de la consolidation de l’industrie et de la concurrence de productions à bas coûts. Les importations en provenance de pays tiers accroissent la concurrence, et le nombre d’usines de production a augmenté dans des pays frontaliers ou voisins de l’UE où le coût du travail est inférieur et les réglementations moins rigoureuses. Cela crée un excédent de capacités à court terme en exerçant une pression sur les prix.

La France, l’Allemagne et l’Italie sont les plus grands producteurs de l’UE. Le verre est un matériau efficace dans l’utilisation des ressources, qui peut être recyclé à l’infini. Par exemple, pour les entreprises produisant des emballages en verre, l’utilisation de l’énergie est un facteur de coût important, davantage que pour d’autres secteurs. Étant donné que jusqu’à 80 % des emballages en verre sont recyclés, l’industrie du verre est un contributeur important aux objectifs de l’UE en matière de recyclage et de diminution de l’empreinte carbonique de notre continent. Toutefois, en raison des matériaux qu’ils utilisent et de la nature des produits qu’ils fabriquent, d’autres segments du secteur sont moins dépendants de l’énergie.

3.6.

S’agissant de l’utilisation de papier ou de matériaux similaires, la chaîne d’approvisionnement du secteur est plus complexe dans la mesure où les entreprises qui transforment le papier et le carton pour en faire des emballages (comme les cartons, le carton ondulé, le carton pour boîtes et le papier pour carton ondulé) tendent à produire leur propre papier ou carton et entrent dans un processus circulaire comprenant le défibrage et le désencrage de matériaux usagés, ainsi que l’utilisation de produits bruts dérivés du bois.

3.7.

D’autre part, le secteur de l’emballage plastique a lui aussi ses caractéristiques propres. Tous les sous-secteurs du domaine de l’emballage ne sont pas représentés par plusieurs organisations catégorielles. Le secteur de l’emballage en plastique fournit différents marchés parmi ceux mentionnés ci-avant, avec des utilisateurs finaux tels que les constructeurs automobiles, les entreprises fabriquant des cosmétiques, des produits sanitaires ou des conditionnements pour les denrées alimentaires préemballées. Cependant, il n’existe qu’une association professionnelle pour ce sous-secteur. Les emballages plastiques sont par ailleurs associés à des problèmes environnementaux, tels que la production de sacs en plastique pour les achats en magasin, et les difficultés concernant leur élimination et la décomposition de leurs éléments constitutifs.

3.8.

Dans ce contexte, cette variété des procédés de production a engendré une multiplication des organismes représentant les entreprises, ce qui crée en soi des obstacles à la coopération entre les entreprises et les organismes de représentation des travailleurs sur des questions importantes telles que la durabilité environnementale et la gestion des mutations. La nature segmentée des sous-secteurs de l’emballage, par exemple celui des emballages métalliques, est visible dans le nombre important d’organismes de représentation. Par exemple, les producteurs d’aluminium sont souvent des producteurs d’emballages en aluminium et possèdent leur propre organisation commerciale (Association européenne de l’aluminium). Toutefois, les spécialistes des emballages métalliques, qui produisent les canettes de boisson (en acier et en aluminium), ont leur propre organisation commerciale; et pour les entreprises du secteur de l’emballage spécialisées dans la réalisation de produits en acier, il existe une autre association commerciale.

3.9.

Étant donné l’importance du secteur, tant pour sa contribution au PIB que sur le plan de l’emploi, ces problématiques sectorielles spécifiques requièrent une attention particulière. Toutefois, tout segmenté qu’il soit, le secteur de l’emballage répond aux besoins des entreprises en amont dans toutes les économies, et bien au-delà de ses marchés traditionnels.

3.10.

L’emballage des produits sert de multiples desseins et recouvre des aspects tels que la protection du produit (prévention de la casse, de la détérioration et de la contamination), la fourniture d’informations promotionnelles (identification du produit, marque, préparation, utilisation, information nutritionnelle et sur la sécurité), la fourniture d’informations sur la manipulation (transport et exposition dans les points de vente), la réduction des déchets (traitement, stockage et énergie nécessaire au transport) et, ce qui est important dans le contexte des efforts pour réduire les émissions de carbone, la conception des emballages, un paramètre important pour optimiser l’espace disponible pendant le transport de marchandises. Concernant la réduction des déchets, le rôle joué par l’emballage lui-même est devenu d’autant plus important que des entreprises de vente en ligne, telles qu’Amazon, en font un très grand usage. Aussi la question de la «partie responsable» mérite-t-elle d’être posée.

Amazon, par exemple, utilise des systèmes certifiés d’«emballage à ouverture facile». En éliminant les plastiques et les attaches ou rubans adhésifs, cette société a, depuis 2008, radicalement changé d’approche concernant quelque 2 00  000 produits provenant de 2  000 fabricants; partant, elle a réduit de 5,4 millions de m2 sa consommation de carton, de 11  203,7 tonnes sa consommation de produits de base, et de 4 10  000 m3 le volume total de cartons d’emballage utilisés. En réalité, si le consommateur porte la responsabilité finale de l’utilisation d’emballages, le producteur ou l’utilisateur intermédiaire devraient se sentir concernés par la quantité d’emballages qui deviennent in fine des déchets.

3.11.

Les questions évoquées ci-après nécessitent un examen approfondi qui permette une compréhension globale de l’état actuel de la situation et propose des solutions possibles pour assurer que le secteur européen de l’emballage reste compétitif et viable du point de vue environnemental et fournisse des emplois décents aux milliers de travailleurs qui en dépendent.

3.12.

Toute modification de la disponibilité des matières premières aura une influence sur le prix et la disponibilité de produits d’emballage finis, et peut perturber sérieusement les activités du secteur. En conséquence, il convient de procéder à un examen des facteurs et des tendances des matières premières pour permettre à l’industrie d’anticiper les changements à venir en évitant les perturbations potentielles qui y sont associées. Par exemple, le secteur des emballages métalliques est soumis à une pression particulière du fait de la forte croissance conjuguée du coût des matières premières et des prix de l’énergie.

3.13.

En 2012, la Commission a lancé le partenariat d’innovation européen concernant les matières premières, avec pour objectif d’aborder les problèmes liés à la fourniture de matières premières minérales et à base de bois.

3.14.

La demande, principalement en provenance d’Asie, a entraîné une hausse du prix des matières premières secondaires utilisées pour les emballages de papier, dont les producteurs ne peuvent tout simplement pas répercuter ces coûts supplémentaires sur leurs clients. La demande chinoise a fortement contribué à l’augmentation du prix des matières recyclées pour les emballages en papier (le prix du papier récupéré a presque doublé depuis 2006, alors que dans la même période, le prix du papier recyclé a augmenté de près de 50 %). Ces augmentations sont susceptibles de se poursuivre dans l’avenir proche.

4.   Problèmes et tendances du secteur

4.1.

D’après Eurostat, le secteur des emballages métalliques (notamment en acier et en aluminium) emploie quelque 60  000 personnes en Europe, sur un total de 3 55  000 personnes employées dans le secteur européen de l’acier. Selon l’organisation Metal packaging Europe, 80  000 personnes sont employées dans le secteur de l’aluminium, et l’on peut porter ce nombre à 2 55  000 travailleurs si l’on considère la totalité de la chaîne de valeur de l’aluminium en Europe. Toutefois, le secteur a souffert et continue de souffrir de pertes d’emplois, à la suite d’opérations de consolidation dans le secteur ou à cause de la concurrence mondiale (4).

4.2.

Le défi pour les employeurs et les travailleurs du secteur en Europe est de s’assurer que le secteur conserve son avantage concurrentiel, utilise pleinement les innovations technologiques et produise des biens qui soient durables sur le plan environnemental et de haute qualité.

4.3.

La concurrence de l’étranger continue d’exercer des pressions à la baisse sur les conditions de travail des travailleurs du secteur — dont nous dépendons pour créer de la richesse, utiliser des technologies novatrices et, fondamentalement, maintenir le fonctionnement du secteur et lui garantir un avenir pérenne pour les générations futures.

4.4.

Le secteur européen de l’emballage continue à souffrir de surcapacité, ce qui accentue les effets de la concurrence étrangère et pèse sur les salaires et les conditions de travail. La tendance à la baisse du nombre d’emplois dans le secteur est le fruit tant de la concurrence que de la surcapacité.

4.5.

Le secteur de l’emballage, eu égard à sa capacité de recycler les matériaux, a le potentiel d’apporter davantage de bénéfices aux économies européennes. Les matériaux d’emballage qui sont recyclés ou sont eux-mêmes issus de matières recyclées provenant d’autres secteurs manufacturiers sont de plus en plus nombreux. Les avantages du recyclage pour l’environnement sont assez évidents et mis régulièrement en avant dans les documents de la Commission. Toutefois, le secteur peut améliorer le taux de recyclage des États membres. En même temps, il est susceptible de fermer le circuit de l’économie circulaire, en évitant l’exportation de déchets suspects et en interdisant l’accès des marchés européens aux importateurs d’emballages qui ne se conforment pas aux bonnes pratiques environnementales (5). Les entreprises spécialisées dans les emballages en métal ou en aluminium, ces derniers représentant 16 % du volume total des produits réalisés en aluminium en Europe, dépendent à la fois de l’extraction de la matière première (bauxite) et du recyclage de débris métalliques.

4.6.

La protection des consommateurs, qui passe par la fourniture d’informations essentielles sur les produits ou de conseils concernant leur utilisation, est aussi un volet significatif et important du secteur européen de l’emballage. C’est à bon droit que les consommateurs attendent de l’emballage qu’il protège les produits achetés et, dans le cas des nourritures et boissons, qu’il les conserve et écarte les risques sanitaires découlant d’aliments contaminés. Les détaillants ont des attentes similaires, avec en plus celle que l’emballage des produits qu’ils vendent maximise la durée de conservation de ceux-ci.

4.7.

La forme et la structure que revêtira le secteur dans l’avenir dépendront, de manière plus ou moins importante, de l’innovation et des investissements dans la technologie: l’impression 3D ouvre par exemple des perspectives tant pour le secteur que pour les consommateurs, mais la réussite de son implantation puis de son utilisation courante dans le secteur dépendra largement du niveau de coopération au sein de celui-ci et des attentes des consommateurs. Le secteur doit tirer parti des technologies disponibles et s’y adapter, au moyen d’un dialogue approprié.

4.8.

Les bonnes pratiques qui permettent de faire évoluer le secteur et de l’adapter au changement se diffusent de manière continue, mais ont besoin de la collaboration des institutions européennes pour maximiser leur potentiel. L’UE peut apporter son aide en ce sens, sous la forme d’un appui financier ou par la création d’un forum destiné à approfondir les discussions avec les partenaires sociaux. Le secteur gagnerait à s’associer à l’UE dans ce processus.

4.9.

L’on ne pourra trouver des solutions durables et opératoires que si les deux versants du secteur collaborent et si le dialogue social, au niveau national et européen, favorise cette collaboration. Aussi est-il essentiel, pour commencer à aborder plusieurs des problèmes mis en évidence dans le présent document, de créer un comité de dialogue social sectoriel pour le secteur de l’emballage.

Bruxelles, le 10 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  Eurobaromètre 398: Marché intérieur — octobre 2013.

(2)  MEMO-13-1151, Commission européenne, cité dans la communication de la Commission intitulée «Feuille de route pour l’achèvement du marché unique concernant la livraison de colis» [COM(2013) 886 final].

(3)  Dont 7 00  000 emplois directs.

(4)  Les chiffres d’Eurostat pour la dernière décennie montrent une baisse constante du nombre d’emplois dans le secteur de la fabrication des emballages en carton ondulé, plastique, métal, verre ou bois. Le nombre total d’emplois dans ces sous-secteurs de l’emballage a chuté de 1,2 million depuis 2003.

(5)  S’il existe une législation visant à garantir que les matériaux d’emballage respectent les normes environnementales, les producteurs européens d’emballages suivent en plus un certain nombre d’orientations afin de réduire les émissions et de promouvoir des bonnes pratiques vis-à-vis de l’environnement. Leurs concurrents non européens, s’ils sont tenus de respecter la législation européenne, peuvent ne pas adhérer à ces codes ou normes volontaires suivis par les entreprises européennes.


14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/39


Avis du Comité économique et social européen sur la contribution du secteur du travail du bois au bilan carbone

(avis d’initiative)

(2015/C 230/06)

Rapporteur:

M. Ludvík JÍROVEC

Corapporteur:

M. Patrizio PESCI

Le 27 février 2014, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l’article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d’élaborer un avis d’initiative sur le thème de:

«La contribution du secteur du travail du bois au bilan carbone»

La commission consultative des mutations industrielles (CCMI), chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 13 novembre 2014.

Lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 10 décembre 2014), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 119 voix pour, 1 voix contre et 5 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le Comité économique et social européen a élaboré les recommandations ci-après pour maximiser les avantages que les produits dérivés du bois offrent du point de vue du bilan carbone et renforcer la compétitivité de l’industrie européenne du travail du bois (1) et sa capacité à favoriser l’innovation.

1.2.

Le CESE s’accorde à reconnaître que la législation européenne et nationale a une forte incidence sur les industries du travail du bois. Aussi invite-t-il les États membres à explorer toutes les pistes en rapport avec l’utilisation qui est faite du bois, en tant qu’il constitue un matériau respectueux de l’environnement, afin de stimuler la compétitivité de ce secteur, de développer l’emploi et de soutenir la recherche et l’innovation.

1.3.

Le CESE demande à la Commission européenne d’élaborer, en consultation avec les parties prenantes intéressées, des orientations européennes en matière d’approvisionnement en bois, de manière à augmenter celui-ci et à promouvoir une utilisation durable des sources de bois. Des principes d’utilisation efficaces des ressources devraient être intégrés dans ces orientations. Les recommandations figurant dans le document intitulé «Good practice guidance on the sustainable mobilisation of wood in Europe (2010)» (Guide des bonnes pratiques concernant la mobilisation durable du bois en Europe) devraient être prises en considération et, le cas échéant, renforcées.

1.4.

Le CESE rappelle qu’il importe que «les palettes et le bois récupéré en aval de la consommation» soient exclus de la définition de la «biomasse tertiaire».

1.5.

Comme il l’a reconnu dans son avis sur le thème «Opportunités et défis pour un secteur européen du travail du bois et du mobilier plus compétitif», adopté en octobre 2011 (2), et s’inscrivant dans la logique des principes qui ont été établis par la récente communication de l’UE «Vers une économie circulaire: un programme zéro déchets pour l’Europe», le CESE souligne que le principe de l’«utilisation en cascade» constitue, lorsqu’il est économiquement et techniquement faisable au regard des caractéristiques propres de chaque région et de chaque pays, la manière idéale de tirer le meilleur parti possible du bois, du point de vue de l’utilisation efficace de la ressource. Le CESE est heureux de constater que, à la suite de sa demande de reconnaître l’importance du principe d’utilisation en cascade du bois, ce principe a été transposé dans plusieurs documents de l’UE tels que la Renaissance industrielle européenne, la nouvelle stratégie de l’UE en matière de forêts et le document de travail de la Commission intitulé «Blueprint for the EU forest-based industries (woodworking, furniture, pulp & paper manufacturing and converting, printing)» [Programme à l’intention des industries de la filière bois (travail du bois, mobilier, fabrication et transformation de pâte à papier et de papier, imprimerie)], accompagnant la communication intitulée «Une nouvelle stratégie de l’UE pour les forêts et le secteur forestier». Cependant, le CESE ne peut soutenir la notion de réglementation juridiquement contraignante et est favorable à une approche fondée sur la liberté de marché ainsi que la liberté des participants au marché.

1.6.

Les dispositifs destinés à gérer les matériaux de construction devraient comporter des mesures qui évitent que des matériaux recyclables, tels que le bois, ne soient mis en décharge. Le CESE demande à la Commission européenne et aux acteurs intéressés de définir des orientations et recommandations relatives à la collecte des déchets du bois et aux options pour assurer son traitement en phase de postconsommation.

1.7.

Le CESE appelle la Commission européenne à instaurer une norme qui traduise adéquatement les caractéristiques acoustiques des espaces fermés, étant donné que le bois peut jouer un rôle capital comme isolant phonique. Il est en effet capable d’assurer l’isolation acoustique des pièces vis-à-vis du bruit extérieur et de réduire le temps de réverbération. Il y a lieu d’explorer les perspectives liées aux revêtements de bois.

1.8.

Le CESE invite les États membres et les acteurs concernés à définir des plans d’action nationaux destinés à encourager l’emploi de bois dans les bâtiments et les infrastructures vertes. Les collectivités locales devraient être associées directement à leur mise en œuvre.

1.9.

Conscient que ce matériau n’est pas aussi familier que d’autres aux constructeurs et aux architectes, le CESE incite les États membres à lancer des initiatives qui promeuvent une culture du bois. En outre, les représentants des industries européennes du travail du bois et les partenaires sociaux au niveau de l’Europe devraient mettre au point des campagnes nationales coordonnées pour donner une image plus attrayante de leur secteur.

2.   Description du secteur européen du travail du bois: défis et ouvertures et incidence possible de la législation de l’UE sur sa compétitivité

2.1.

Les industries européennes du travail du bois génèrent un chiffre d’affaires annuel de quelque 122 milliards d’euros, sur la base d’une production d’une valeur de plus de 115 milliards d’euros. Selon Eurostat, elles regroupaient, en 2012, de plus de 3 11  000 entreprises. Celles qui sont également actives dans le secteur de l’ameublement sont environ 1 26  000. Au sein des industries du travail du bois au sens strict, l’activité de sciage concernait, grosso modo, 40  000 sociétés, tandis que les autres sous-secteurs en comptaient approximativement 1 45  000. Malgré les améliorations apportées en la matière, ces chiffres pourraient bien ne pas refléter fidèlement la situation réelle sur le terrain, étant donné que suivant les méthodes de recueil des données des États membres, ils ne comprennent pas toujours les petites entreprises. Celles-ci étant en nombre considérable dans les secteurs du meuble et des éléments de construction, le volume total de firmes pourrait être estimé à plus de 3 75  000.

2.2.

En 2012, le secteur du travail du bois a enregistré une chute brutale de ses effectifs sur tout le territoire de l’UE. Ces pertes ont été de 4,4 % en moyenne mais les chiffres varient de — 3,2 % jusqu’à atteindre — 13,7 % en Espagne. La Croatie et le Danemark présentent les plus fortes augmentations d’emploi, alors que les baisses les plus importantes en la matière ont été recensées, toujours en 2012, en Espagne (– 13,7 %), à Chypre (– 13,1 %) et en Slovaquie (– 11,5 %).

Les politiques européennes et nationales ont une forte incidence sur la compétitivité du secteur du travail du bois. Comme il est souligné dans le rapport 2014 sur la compétitivité de l’UE, les coûts du travail et des matières premières ont tendance à être nettement plus élevés en Europe que dans beaucoup d’autres régions du globe, exposant ainsi de larges pans de l’industrie du travail du bois à un risque de délocalisation. En conséquence, l’Europe devrait exiger que les produits qui entrent sur le marché de l’UE respectent les mêmes normes que ceux produits à l’intérieur de ses frontières, que ce soit du point de vue social ou sur le plan de l’environnement et de la sécurité. En outre, le CESE fait observer que l’industrie européenne du travail du bois reste confrontée à des hausses notables de ses coûts de production, notamment pour ce qui concerne les résines et l’énergie. Dans le cas de cette dernière, ils sont trois fois plus élevés qu’aux États-Unis.

2.3.

Le développement des énergies renouvelables et les subventions dont elles bénéficient réduisent les disponibilités en bois non transformé et les renchérissent. On estime qu’en 2012, quelque 15 % des 182 millions de m3 qui constituent le volume total de bois récolté dans la région couverte par Commission économique pour l’Europe des Nations unies (CEE-ONU) ont servi de bois de chauffe. L’édition la plus récente de l’enquête commune de la CEE-ONU et de la FAO qui est consacrée au bois-énergie (JWEE 2011) fait apparaître que celui-ci constitue la première composante du bouquet des énergies renouvelables, dans le total desquelles il intervient pour 38,4 %. Selon la récente étude sur l’offre et la demande en bois non transformé pour les besoins des industries de transformation du bois dans l’UE que la Commission européenne a commandée à Indufor (3), «si l’on voulait atteindre l’objectif fixé pour 2020 en matière d’énergies renouvelables, il faudrait que la quantité de bois utilisée à des fins énergétiques dans l’UE équivaille à la totalité de la récolte actuelle». D’ici à 2016, c’est un déficit de 63 millions de m3 qui apparaîtra par rapport aux besoins prévus par les États membres de l’UE dans leurs plans d’action nationaux en matière d’énergies renouvelables.

2.4.

Compte tenu de la nouvelle communication européenne sur le cadre pour le climat et l’énergie à l’horizon 2030, ainsi que de l’exigence de porter la part des énergies renouvelables à un minimum de 27 % d’ici à 2030, le CESE juge qu’il est capital d’envisager différentes manières d’améliorer la mobilisation du bois dans l’UE, par exemple en tenant compte des recommandations contenues dans le Guide des bonnes pratiques en matière de mobilisation durable du bois en Europe, publié en 2010, et de cerner des solutions de manière à éviter des distorsions de concurrence entre les différents utilisateurs des ressources de la biomasse.

2.5.

C’est en se plaçant dans cette perspective que le CESE invite les États membres à procéder à une évaluation de la quantité de biomasse de bois qui est clairement disponible, dans le pays ou dans la région concernée, pour une utilisation énergétique et les volumes que l’industrie de travail du bois utilise déjà comme matière première.

2.6.

Par ailleurs, le CESE déplore que plusieurs États membres conservent des prescriptions qui limitent l’utilisation du bois dans les immeubles à étages, ainsi que des réglementations d’incendie discriminatoires, lesquelles constituent, dans bon nombre de pays, le principal obstacle à l’utilisation de ce matériau dans le domaine de la construction. Bien que des normes européennes aient été adoptées en ce qui concerne la sécurité contre les risques d’incendie dans les immeubles, cette sécurité reste une compétence nationale. Il conviendrait que ces réglementations soient abrogées sur-le-champ, car il est clair qu’elles posent des entraves à l’essor des produits dérivés du bois dans le secteur de la construction (4).

2.7.

Enfin, le CESE regrette que les secteurs européens des panneaux à base de bois et celui du sciage ne figurent désormais plus sur la liste de ceux qui sont réputés être vulnérables au risque de fuite de carbone. Leur exclusion aura très vraisemblablement pour effet d’accélérer le mouvement, déjà en cours, de délocalisation de ces industries de production vers des pays hors UE. Il est capital de les garder l’un et l’autre sur ladite liste, afin de limiter les répercussions dommageables de la pression concurrentielle que toutes les entreprises concernées subissent, à cause de l’augmentation vertigineuse du coût du bois qui résulte de la concurrence avec le secteur de l’énergie produite par la biomasse. Entre 2008 et 2013, pour le seul secteur européen des panneaux à base de bois, pas moins de 51 fermetures d’usines ont été enregistrées, qui ont causé une perte de capacités de 10  386 millions de m3. Certaines de ces lignes de production ont été démontées pour être réassemblées au-delà des frontières de l’UE. Préserver les industries de production au sein de l’Union doit être une priorité pour tous les décideurs européens et, tout particulièrement, pour la Commission européenne, dont les directions générales concernées sont dès lors instamment invitées à prendre des mesures pour garantir la compétitivité des secteurs industriels européens et éviter que la production manufacturière ne soit délocalisée.

2.8.

Une nouvelle taxe énergétique sur le carbone, par exemple, qui éliminerait la discrimination des producteurs européens, pourrait constituer une mesure efficace afin d’assurer la compétitivité des secteurs industriels européens et d’éviter les délocalisations de la production.

3.   Renforcer l’utilisation de produits dérivés du bois afin de lutter contre le changement climatique en réduisant les émissions de CO2

3.1.

Le réchauffement de la planète est une préoccupation politique majeure. En effet, ce phénomène a de graves conséquences sur la santé humaine et sur les ressources naturelles. Les choix que nous faisons concernant les matériaux que nous utilisons peuvent avoir un effet significatif sur les émissions de dioxyde de carbone, qui sont l’une des principales causes du réchauffement de la Terre. Les produits qualifiés de «verts» ou de «respectueux de l’environnement» sont plus facilement acceptés par les producteurs et les consommateurs. Dans le même temps, des politiques nationales et européennes sont conçues pour encourager ces produits. Le CESE considère que les analyses du cycle de vie (LCA) (5)représentent un outil de gestion environnementale approprié pour l’avenir.

3.2.

L’Europe peut diminuer radicalement ses émissions de CO2 en étendant le puits de carbone que constituent ses forêts (grâce à une gestion optimisée de celles-ci) et en renforçant l’utilisation de produits dérivés du bois qui sont fabriqués de manière durable. Il est scientifiquement prouvé que l’utilisation de produits dérivés du bois, dans la construction comme dans la vie quotidienne, a un effet positif sur le climat. La quantité de carbone stockée dans les arbres et dans les produits dérivés du bois dépend des espèces auxquelles ces arbres appartiennent, des conditions de leur croissance (environnement), de leur âge et de la densité des peuplements. Néanmoins, il a été démontré que substituer 1 m3 de bois à d’autres matériaux de construction produisait une économie significative, de 0,75 à 1 tonne de CO2 en moyenne. En outre, 1 m3 de bois stocke 0,9 tonne de CO2.

3.3.

Une récente étude menée sous la direction de l’Université Yale et intitulée «Carbon, fossil fuel and biodiversity mitigation with wood and forests» (6) (Atténuer les effets du carbone et des combustibles fossiles sur la biodiversité grâce au bois et aux forêts) est parvenue à la conclusion qu’une utilisation accrue du bois dans la construction des bâtiments et des ponts réduirait de manière substantielle les émissions de dioxyde de carbone ainsi que la consommation des combustibles fossiles à l’échelle mondiale. Les chercheurs ont découvert qu’augmenter l’utilisation des produits dérivés du bois pour atteindre l’équivalent de 34 % produirait des effets positifs et de grande portée. Entre 14 et 31 % des émissions mondiales de CO2 pourraient être évitées grâce au stockage du CO2 dans la cellulose et la lignine des produits dérivés du bois.

3.4.

Le CESE demande à la Commission européenne de soutenir les États membres et le secteur de la sylviculture européenne en mettant en place des mesures et, si possible, des dispositifs d’incitation en faveur de l’utilisation de produits ligneux récoltés dotés de cycles de vie longs (7). Plus le bois est utilisé et réutilisé longtemps, plus il emprisonne de dioxyde de carbone. Les déchets de bois (au sens strict du terme) peuvent être réduits au minimum, principalement parce que tous les composants du bois peuvent être utilisés et réutilisés efficacement et qu’en fin de course, il est toujours possible de le brûler pour en récupérer l’énergie (8). Si l’Europe veut lutter efficacement contre le changement climatique, les États membres et les institutions européennes devraient encourager l’utilisation de produits dérivés du bois et créer un contexte politique favorable dans lequel le cycle de vie du bois puisse être exploité au maximum de ses possibilités.

4.   L’utilisation du bois dans la construction

4.1.

La construction et l’entretien des bâtiments ont des effets significatifs sur l’environnement. En général, les bâtiments sont responsables d’un pourcentage de 20 % de l’ensemble de la consommation d’eau, de 25 à 40 % de l’utilisation de l’énergie et de 30 à 40 % des émissions de gaz à effet de serre. Le choix des matériaux utilisés pour construire ou rénover a une incidence notable sur l’environnement. Le CESE s’accorde dès lors à reconnaître que le bois joue un rôle important pour l’essor de la construction de bâtiments durables et respectueux de l’environnement. Les possibilités liées à l’utilisation du bois dans le secteur de la construction ne sont pas totalement exploitées et cette carence qui affecte la compétitivité des industries du travail du bois. Le CESE souhaite analyser comment il est possible d’améliorer cette situation sans pour autant créer d’effets préjudiciables à d’autres matériaux de construction.

4.2.

Le bois est reconnu depuis longtemps comme un matériau respectueux de l’environnement pour une gamme étendue de produits. Les études d’évaluation du cycle de vie qui ont été menées dans le monde entier ont prouvé que les produits dérivés du bois présentent des avantages considérables pour l’environnement. Le bois est l’un des rares matériaux de construction renouvelable à 100 %, il stocke le CO2 et est un isolant naturel, grâce aux poches d’air présentes dans sa structure cellulaire. Il constitue un matériau sûr, solide et fiable, qui résiste à des conditions extrêmes telles que des tornades, des tremblements de terre ou même des incendies.

4.3.

Réutilisation, recyclage et récupération sont trois des possibilités qui s’offrent aux matériaux de construction à la fin de leur cycle de vie. Dans la situation actuelle, on peut voir qu’un gros volume de déchets de construction continue à finir dans des décharges, dont ils aggravent la saturation et compliquent la gestion. Les matériaux tels que le bois peuvent être recyclés directement dans le même produit, dans le cadre d’une réutilisation, ou entrer, sous une forme reconstituée, dans la fabrication d’autres produits valorisables. Le CESE fait observer que le recyclage nécessite un retraitement qui n’est toujours tenable, économiquement parlant, excepté si une collecte efficace est organisée à proximité de la source de la matière première. Aussi demande-t-il à la Commission européenne et aux différentes parties prenantes associées de recueillir toutes les bonnes pratiques existant à l’échelon des États membres dans le but de définir des orientations et recommandations relatives à la collecte des déchets du bois et à leurs options de traitement dans la phase d’après-consommation. Réduire et recycler les matériaux de construction et ceux issus des démolitions peut réduire également le coût général de la construction et de l’élimination des déchets.

4.4.

Le secteur de la construction est le principal utilisateur de produits dérivés du bois. Dans un pays tel que la Finlande, quelque 70 à 80 % des produits issus du bois produit dans le pays aboutissent à être utilisés dans ce secteur. Depuis peu, la construction en ossature bois a gagné du terrain dans plusieurs pays européens, tout particulièrement au Royaume-Uni, en Irlande et en France. En tout état de cause, le CESE reconnaît que l’utilisation du bois pourrait favoriser le développement de l’économie verte et devrait dès lors être favorisée.

4.5.

Le CESE reconnaît que les connaissances relatives aux avantages de l’utilisation du bois dans la construction sont plutôt limitées. Les architectes ne sont pas les seuls concernés: les utilisateurs finaux, très souvent, ont une connaissance insuffisante des propriétés du bois. Cette situation aboutit souvent à limiter son utilisation et, par conséquent, à susciter des problèmes qui en affectent négativement l’image. En outre, le manque de travailleurs qualifiés dans le secteur de la construction de maisons à ossature en bois entrave le développement de cette méthode de construction dans de nombreux pays européens.

4.6.

Le CESE demande aux industries européennes du travail du bois et aux partenaires sociaux de ce secteur de mettre sur pied des campagnes coordonnées d’information qui visent à donner une image plus attrayante de leur secteur. Il convient d’encourager les jeunes à choisir des parcours d’éducation et de formation qui les préparent correctement à des carrières dans l’industrie du travail du bois.

5.   Aspects sociaux en rapport avec une utilisation accrue de matériaux en bois et un rôle renforcé des industries du travail du bois dans l’économie  (9)

5.1.

Le CESE souligne que la plupart des travailleurs du bois sont formés sur le tas et obtiennent leurs qualifications de manière informelle au contact des travailleurs expérimentés. Si la plupart d’entre eux apprennent en quelques mois les opérations mécaniques et les tâches de base, devenir un travailleur du bois qualifié nécessitera souvent deux années, voire davantage. On créera aussi des emplois en apportant aux travailleurs la formation et l’éducation qui sont adaptées aux besoins et aux demandes du marché du travail. En outre, le CESE rappelle que les programmes de recherche et d’innovation favoriseront la croissance et les emplois dans toute l’UE. Aussi encouragera-t-on le secteur du travail du bois à exploiter les ouvertures qui s’offrent dans le cadre du programme Horizon 2020.

5.2.

Les États membres devraient mettre en œuvre la récente communication de l’UE sur l’utilisation efficace des ressources dans le secteur de la construction d’une manière qui soit ambitieuse, afin de sécuriser les investissements en matière de rénovation des bâtiments et de créer des emplois.

5.3.

Le CESE convient que la pollution sonore dans les lieux publics a une incidence grave sur la santé humaine (10). Non seulement le bois est un matériau respectueux de l’environnement, mais, utilisé comme matériau d’isolation, il peut aussi présenter un certain nombre d’avantages sanitaires et sociaux. En effet, il peut jouer un rôle essentiel pour ce qui est de l’isolation phonique et en tant que matériau absorbant. Le bois est capable d’assurer l’isolation acoustique des pièces vis-à-vis du bruit extérieur et de réduire le temps de réverbération. Le CESE demande à la Commission européenne de mettre en place une norme qui reflète correctement les caractéristiques acoustiques des espaces fermés. Étant donné que le bois a la propriété de produire des sons (par frappement direct) et d’amplifier ou d’absorber des ondes sonores provenant d’autres organes, il conviendrait d’exploiter les possibilités liées à ses applications. Le bois a en outre un impact positif, démontré scientifiquement, sur la qualité de l’air et sur le confort à l’intérieur des bâtiments.

5.4.

Plusieurs initiatives existent à l’échelon national pour éduquer les citoyens aux possibilités d’utilisation du bois en tant que matériau respectueux de l’environnement mais une réelle coordination fait défaut. Une consommation croissante de produits dérivés du bois est clairement liée à des campagnes d’information qui devraient être menées à l’échelon national. Le principal objectif des campagnes d’éducation dans ce domaine est de créer des attitudes, à la fois techniques et culturelles, qui favorisent l’utilisation du bois.

5.5.

À titre d’exemple intéressant de bonne pratique, le CESE souhaite rappeler ici l’initiative intitulée «Wooddays» (les journées du bois). Cette manifestation (11) a été lancée le 21 mars 2014 à Milan. Elle a consisté en un programme de dix jours, ciblé sur les villes en plein essor et la densification urbaine intelligente et efficace du point de vue des ressources, qui recourt au bois. Elle a été organisée dans le but de présenter le bois comme un matériau de construction doté d’un potentiel méconnu jusqu’à présent, dans une configuration où la construction qui y recourt est appelée à jouer un rôle majeur à l’avenir, au cœur même de nos villes. Des répliques de ces journées se dérouleront également organisée dans d’autres villes européennes, qu’il s’agisse de Bratislava, de Ljubljana ou de Bruxelles.

5.6.

Le CESE aimerait souligner que les principaux programmes de construction verte varient quelque peu du point de vue du traitement qu’il réserve à l’utilisation des produits dérivés du bois. Certains mettent l’accent sur la performance plutôt que sur le matériau utilisé, tandis que d’autres formulent des «réserves» sur l’acceptabilité de ce matériau de construction, sans poser aucune «exigence» de ce genre pour d’autres produits de construction. Une utilisation accrue du bois aurait également une incidence positive sur l’économie de l’UE à maints égards. Le CESE recommande dès lors d’établir des objectifs contraignants pour l’utilisation du bois dans la construction, à l’instar de ce qui se fait en France.

6.   Exploitation du bois

6.1.

Augmenter l’utilisation du bois dans la construction et dans la vie quotidienne suppose d’apporter des solutions et de prendre des mesures de manière à renforcer l’exploitation qui est faite du bois, y compris par des processus conçus pour récupérer davantage de bois, de produits dérivés et de résidus à partir de rebuts industriels et de déchets d’après-consommation, à des fins de réutilisation et de recyclage, ainsi qu’à allonger le cycle de vie des produits dérivés du bois.

6.2.

Un approvisionnement durable et continu en bois non transformé est capital pour préserver une industrie compétitive des produits dérivés du bois. Les recommandations figurant dans le «Guide des bonnes pratiques concernant la mobilisation durable du bois en Europe» (2010) devraient être prises en considération et, le cas échéant, renforcées.

6.3.

Ces dernières années, l’approvisionnement en bois a été soumis à une forte pression, principalement en raison de mesures nationales et européennes qui, promouvant l’utilisation de sources d’énergie renouvelable, se sont traduites en partie par la combustion de bois. Le CESE rappelle qu’il importe que «les palettes et le bois récupéré en aval de la consommation» soient exclus de la définition de la «biomasse tertiaire». Les matériaux de ce type constituent un apport essentiel de matière première pour certains types de produits manufacturés réalisés par des fabricants de panneaux à base de bois et peuvent, dans certains cas, représenter 95 % de l’apport en bois (12).

6.4.

Le CESE souhaiterait souligner ici que le principe de l’utilisation «en cascade» (utilisation, réutilisation, recyclage, récupération d’énergie), lorsqu’il est faisable au regard des caractéristiques propres de chaque région et de chaque pays, et l’équilibrage de l’offre et de la demande de bois, représenteraient la manière idéale de tirer le meilleur parti du bois, du point de vue de l’utilisation efficace de la ressource du bois, la matière première naturelle. Cependant, le CESE ne peut soutenir la notion de réglementation juridiquement contraignante et est favorable à une approche fondée sur la liberté de marché ainsi que la liberté des participants au marché. L’utilisation du bois selon une approche «en cascade» garantit non seulement une utilisation économique optimale de la matière première mais dégage également d’importants avantages du point de vue du climat grâce au stockage continu du carbone et à l’effet de substitution qu’elle génère, avant qu’il ne soit utilisé comme source d’énergie.

Bruxelles, le 10 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  Le CESE suit la définition du «secteur du travail du bois» qui est fournie par la nomenclature européenne des activités économiques (NACE), sous le code C16, «Travail du bois et fabrication d’articles en bois et en liège, à l’exception des meubles; fabrication d’articles en vannerie et sparterie». Sciage et rabotage du bois. Fabrication d’articles en bois, liège, vannerie et sparterie. Fabrication de placage et de panneaux de bois. Fabrication de parquets assemblés. Fabrication de charpentes et d’autres menuiseries. Fabrication d’emballages en bois. Fabrication d’autres articles en bois; fabrication d’articles en liège, vannerie et sparterie.

(2)  Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Opportunités et défis pour un secteur européen du travail du bois et du mobilier plus compétitif» (avis d’initiative) (JO C 24 du 28.1.2012, p. 18).

(3)  Indufor est un groupe indépendant de consultance internationale, qui dispose de filiales en Finlande et en Nouvelle-Zélande et fournit des prestations de conseil à des clients tant privés que publics. Son approche englobe tous les aspects, économiques, sociaux et environnementaux, du développement durable, et son champ d’investigation couvre la gestion forestière durable, les investissements dans les terrains sylvicoles et les plantations, l’évaluation des forêts et les mesures de vigilance, l’industrie du bois et des fibres, les productions biologiques, l’estimation et le relevé des ressources forestières, le changement climatique et les services écosystémiques des zones forestières, l’action et les études stratégiques en rapport avec les forêts, ainsi que la consultance touchant à la durabilité et au développement en rapport avec une gestion forestière et un aménagement du territoire à caractère durable.

(4)  Dans beaucoup d’États, la réglementation nationale témoigne d’une tendance à limiter l’usage d’ossatures en bois pour la construction d’immeubles à étages. Leurs réticences à utiliser des matériaux inflammables procèdent de l’incertitude dans laquelle ils se trouvent sur la question des incendies de bâtiments. Des vastes activités menées en matière de recherche et de développement, il ressort toutefois qu’il est préférable d’édicter, en matière de construction d’immeubles, des réglementations qui ne sont pas fondées sur les matériaux utilisés et, depuis une décennie, les dispositions à base fonctionnelle sont devenues monnaie courante dans bon nombre de pays. Le bois brûle, certes, mais d’une manière contrôlée: il est en effet possible de calculer quel sera, dans une coupe transversale d’une pièce en bois, le pourcentage de matière que le feu aura laissée intacte après une heure de combustion. Le bois résiste très bien au feu: lorsqu’il brûle, il se forme à sa surface une couche de charbon qui contribue à préserver la solidité de sa masse interne et l’intégrité de sa structure, si bien que le risque d’effondrement s’en trouve diminué.

(5)  Les analyses du cycle de vie sont un outil destiné à repérer la dissémination de substances dans l’environnement et à évaluer les incidences associées à un processus, un produit ou une activité. Il s’agit également d’un instrument très utile pour l’industrie qui est à la recherche de modèles pratiques et conviviaux de prises de décision pour développer des produits sains du point de vue de l’environnement.

(6)  Journal of Sustainable Forestry 33, 2014, p. 248-275.

(7)  Comme l’a reconnu la décision européenne COM(2012) 93 final relative aux règles comptables concernant les émissions et les absorptions de gaz à effet de serre résultant des activités liées à l’utilisation des terres, au changement d’affectation des terres et à la foresterie et aux informations concernant les actions liées à ces activités, l’augmentation de l’utilisation durable des produits ligneux récoltés peut limiter de manière substantielle les émissions et renforcer l’absorption des gaz à effet de serre qui sont présents dans l’atmosphère.

(8)  Les données collectées dans la récente étude italienne intitulée «Analysis of the Life Cycle Assessment (LCA) and comparison between the use of post-consumer wood for the production of chipboard wood panels and for renewable energy use» [Analyse de l’évaluation du cycle de vie (LCA) et comparaison entre l’utilisation du bois d’après-consommation pour la production de panneaux de bois aggloméré et pour l’utilisation comme énergie renouvelable] ont montré que, compte tenu de son incidence sur le changement climatique, l’utilisation du bois brut recyclé dans une fabrique de production de panneaux est plus avantageuse que son emploi pour la combustion dans une centrale à biomasse. Cette étude a été menée par l’institut italien de recherche eAmbiante, hébergé au sein du parc scientifique et technologique de Venise VEGA. Elle a été présentée au cours de l’audition du CESE sur la contribution du secteur du travail du bois au bilan carbone organisée à Mestre, en Italie, le 19 septembre 2014.

(9)  Le CESE considère que les aspects sociaux et les observations qui sont présentés dans l’avis du CESE sur le thème «Opportunités et défis pour un secteur européen du travail du bois et du mobilier plus compétitif» sont toujours d’actualité.

(10)  «Les effets du bruit sur la santé sont la conséquence de niveaux sonores élevés. Des environnement professionnels ou autres dont le niveau sonore est élevé peuvent provoquer des troubles de l’audition, de l’hypertension, des maladies cardiaques ischémiques, de l’irritation et des troubles du sommeil. Des modifications du système immunitaire et des anomalies congénitales ont été attribuées à l’exposition au bruit», voir le rapport publié dans Passchier-Vermeer W — Passchier W. F. (2000), «Noise exposure and public health» (Exposition au bruit et santé publique), Environmental Health Perspectives, 108, Suppl 1: 123-3, doi:10.2307/3454637. JSTOR 3454637. PMC 1637786. PMID 10698728.

(11)  Cette manifestation des «Wooddays» est une initiative de la société pro-Holz Austria, agissant en coopération avec le département de construction en bois de l’Université technique de Munich et avec le soutien de l’Organisation européenne des scieries (EOS) et de la Fédération européenne des fabricants de panneaux à base de bois (EPF).

(12)  Le groupe italien Saviola, connu pour le slogan «Aidez-nous à sauver les arbres», est le numéro un mondial de la transformation des déchets de bois, avec une capacité annuelle de recyclage de 1,5 million de tonnes de bois d’après-consommation. La philosophie sur laquelle repose sa production consiste à récupérer et à réutiliser des matières brutes secondaires qui peuvent connaître une seconde vie et se prêter à une réutilisation, évitant ainsi, grâce à un processus durable du point de vue économique et écologique, la nécessité de devoir abattre de nouveaux arbres. Dans les types de bois récupérés par ce groupe figurent les palettes, les cageots à fruits ou les boîtes d’expédition.


ANNEXE

à l’avis de la CCMI

Le texte suivant de l’avis de la CCMI a été rejeté par la CCMI au profit d’un amendement, mais a obtenu plus d’un quart des suffrages exprimés.

Paragraphe 6.4

6.4.

Le CESE souhaiterait souligner ici que le principe de l’utilisation «en cascade» (utilisation, réutilisation, recyclage, récupération d’énergie), lorsqu’il est faisable au regard des caractéristiques propres de chaque région, représenterait la manière idéale de tirer le meilleur parti du bois, du point de vue de l’utilisation efficace de la ressource du bois, la matière première naturelle. Les combinaisons de bois qui s’y prêtent devraient être utilisées physiquement plutôt que servir de combustibles. L’utilisation du bois selon une approche «en cascade» garantit non seulement une utilisation économique optimale de la matière première mais dégage également d’importants avantages du point de vue du climat grâce au stockage continu du carbone et à l’effet de substitution qu’elle génère, avant qu’il ne soit utilisé comme source d’énergie.


14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/47


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Le cinéma européen à l’ère numérique»

(avis d’initiative)

(2015/C 230/07)

Rapporteure:

Anna Maria DARMANIN

Le 6 novembre 2014, le Comité économique et social a décidé, conformément à l’article 29, paragraphe 2 de son règlement intérieur, d’élaborer un avis d’initiative sur:

«Le cinéma européen à l’ère numérique».

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l’information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 11 novembre 2014.

Lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 10 décembre 2014), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 190 voix pour, 9 voix contre et 1 abstention.

1.   Recommandations

1.1.

Le CESE se félicite de la communication de la Commission intitulée «Le cinéma européen à l’ère numérique — associer la diversité culturelle et la compétitivité» [COM(2014) 272 final], qui soulève à juste titre certains aspects en vue d’une discussion et d’une réflexion au sein de ce secteur très important en Europe.

1.2.

Le CESE souligne qu’il est nécessaire de trouver un juste équilibre entre, d’une part, la valeur du secteur audiovisuel au sens commercial et en termes d’entreprises et, d’autre part, sa valeur pour l’Europe sur le plan du patrimoine culturel. Intrinsèquement, ces deux aspects ne peuvent être traités séparément.

1.3.

Le moment est venu d’envisager ouvertement un ou plusieurs nouveau(x) modèle(s) économique(s) novateur(s) pour ce secteur, afin de tirer parti des opportunités qui existent dans le monde numérique. Aussi le CESE encourage-t-il ce secteur, la Commission, ainsi que les gouvernements nationaux à se montrer ouverts à la discussion et disposés à promouvoir ces types de modèles économiques.

1.4.

Il conviendra d’aborder la question du financement; il faut rechercher la compétitivité, mais pas au détriment de la dimension culturelle du cinéma européen. Le financement relève principalement de la responsabilité des États membres. Toutefois, il conviendra d’envisager un débat ouvert sur les méthodologies aptes à garantir la maximisation du financement et sur les possibilités de financement non traditionnelles. Cela comprend les financements publics destinés à attirer des financements privés; une utilisation plus rationnelle des fonds publics et une complémentarité entre les financements de l’UE et ceux des États membres; ainsi que des financements privés provenant de nouveaux acteurs tels que les fournisseurs d’accès à l'internet et les entreprises de télécommunications.

1.5.

Renforcer l’environnement créatif devrait également être une priorité essentielle de la feuille de route de ce secteur. Il conviendrait que la communication de la Commission étudie cette approche, et que celle-ci tienne compte de l’environnement éducatif, des conditions de travail des employés du secteur, du développement du talent créatif, de l’expression de la créativité, de la manière de gagner de la valeur ajoutée et de la problématique d’une éducation cinématographique et d’un langage cinématographique européens.

1.6.

Le CESE soutient l’idée que le public devrait être au cœur des débats concernant le secteur audiovisuel, étant donné qu’il n’en est pas uniquement le bénéficiaire, mais souvent celui qui en façonne les tendances, et dirige donc son développement.

1.7.

Le CESE estime qu’il convient, pour une meilleure compréhension de ce secteur, de mettre davantage l’accent sur la collecte de données au niveau européen.

1.8.

Le CESE souligne que la communication de la Commission devrait aussi mettre en exergue, parmi les défis à relever, la situation actuelle concernant les conditions de travail dans ce secteur, en prenant en compte les employés, les travailleurs indépendants et les PME, qui connaissent tous, à des degrés divers, des conditions de travail précaires, résultant en partie des particularités de ce secteur spécifique, mais également d’une absence de compétitivité qui incite à faire des économies sur la masse salariale.

1.9.

Le CESE estime que l’éducation cinématographique est un aspect important si l’on veut encourager davantage de citoyens à rechercher et apprécier les films européens. C’est pourquoi le CESE recommande de promouvoir une éducation cinématographique, tant au niveau européen qu’au niveau national.

1.10.

L’accessibilité est également un domaine dans lequel le CESE estime que les efforts devraient être intensifiés, la recherche et l’innovation devraient donc viser à surmonter les barrières, qu’elles soient de nature linguistique ou bien liées au handicap.

1.11.

Le forum du film européen, dont la création est proposée par la Commission européenne, devrait regrouper toutes les parties prenantes du secteur audiovisuel et constitue un outil important pour rassembler tous les acteurs de ce secteur dans le but d’aborder les défis principaux auxquels celui-ci est confronté. Le CESE soutient ce forum de consultation qui était attendu depuis longtemps et souligne qu’il est essentiel d’y associer toutes les parties prenantes du secteur sur un pied d’égalité, y compris les groupes de parties prenantes les moins importants, tels que les représentants des consommateurs et des travailleurs.

1.12.

Un tel forum devrait être axé sur les principaux défis et possibilités propres à l’ère numérique, afin de faire déboucher les politiques et stratégies sur des mesures spécifiques au sein de ce secteur.

1.13.

De plus, le CESE souligne que le monde numérique (et notamment la perspective d’une communication satellite conformément aux projets de l’UE pour 2020), bien qu’il évolue vite et puisse être perçu comme déstabilisant pour ce secteur, offre néanmoins une multitude de perspectives à l’industrie cinématographique.

2.   Contenu essentiel du document de la Commission

2.1.

L’industrie cinématographique européenne, qui est l’un des instruments de notre diversité culturelle, présente des caractéristiques spécifiques tout en étant très créative. Si elle constitue un atout puissant du très riche patrimoine culturel de l’Europe, il s’agit néanmoins d’un secteur significativement menacé en raison de plusieurs difficultés.

2.2.

La Commission a, par le passé, publié un certain nombre de directives consacrées à des domaines particuliers de l’industrie cinématographique, tels que la propriété intellectuelle. La communication à l’examen est la première, dans un passé récent, à aborder ce secteur dans son ensemble.

2.3.

Le document de la Commission fait ressortir les défis particuliers auxquels le secteur cinématographique européen est aujourd’hui confronté. Il s’agit:

du public des films européens, peu d’entre eux parvenant à être diffusés dans les salles de cinéma ou sur les chaînes de télévision d’autres pays,

de l’évolution des modèles de consommation: si le visionnage de films reste le même, les supports évoluent. De moins en moins de personnes vont au cinéma, mais elles sont de plus en plus nombreuses à regarder des films à la télévision ou en vidéo à la demande,

des faiblesses dans la tentative d’accéder au marché mondial, parmi lesquelles la fragmentation du financement et les possibilités limitées d’internationalisation.

2.4.

Par conséquent, le document de la Commission entend, à titre de première base de discussion, cerner ces défis et leur apporter une réponse. Ces domaines sont les suivants:

financement,

modèle commercial au sein du secteur,

impulsion à donner au secteur de la création,

accès du public.

3.   Observations générales

3.1.

Le CESE se félicite de l’initiative de la Commission visant à poser les bases d’une discussion entre toutes les parties prenantes et d’autres acteurs du secteur de l’audiovisuel en Europe. Un tel dialogue est indispensable et était attendu depuis longtemps, non seulement en vue de tirer parti des avantages offerts par un monde numérique en évolution constante et aux technologies émergentes, mais aussi dans la perspective de renforcer encore cette industrie diverse et complexe.

3.2.

Le CESE partage l’avis de la Commission quant aux défis spécifiques mis en exergue dans le document. Toutefois, il aimerait ajouter un défi qui n’a pas été pris en compte, à savoir l’environnement de travail auxquels sont confrontés actuellement les salariés, travailleurs indépendants et entrepreneurs du secteur.

3.3.

Concernant les priorités à aborder, le CESE est d’accord avec les domaines évoqués dans le document. Il voudrait toutefois ajouter les éléments suivants à la liste des domaines nécessitant une discussion et des solutions:

l’environnement éducatif, sans le limiter à l’apprentissage de compétences entrepreneuriales dans le système scolaire,

les conditions et l’environnement de travail,

les relations entre théâtre et cinéma,

une collecte de données plus globales, et des exemples de bonnes pratiques,

le marché unique et le lien entre les DPI et les droits d’auteur et le secteur.

3.4.

De plus, le CESE souligne que le monde numérique, bien qu’il évolue vite et puisse être perçu comme déstabilisant pour ce secteur, offre néanmoins une multitude de perspectives pour l’industrie cinématographique. Citons notamment la perspective d’une communication par satellite conformément aux projets d’infrastructure satellitaire de l’UE pour 2020 et le recours aux satellites pour garantir une distribution des films plus flexible, plus respectueuse de l’environnement et plus rentable dans les cinémas.

4.   Observations particulières

Environnement du financement dans le secteur audiovisuel

4.1.

Le CESE souscrit à l’idée que le financement public du secteur audiovisuel ne doit pas être nécessairement augmenté, mais plutôt optimisé pour apporter de la valeur ajoutée à cette industrie. Le financement public relève de la responsabilité des États membres, et les fonds de l’UE devraient donc chercher à améliorer l’efficacité du financement au niveau local. Ces financements publics devraient toutefois servir à attirer davantage de financements privés.

4.2.

Le modèle de financement de l’industrie audiovisuelle a besoin de s’appuyer sur les aides accordées à différentes sortes de produits et sur une combinaison de subventions directes et de financements destinés à faciliter l’accès à ce marché pour les investisseurs privés. Le rôle de mobilisation des financements publics est essentiel pour parvenir à une utilisation plus rationnelle des fonds publics et à une concentration des efforts sur les produits culturels.

4.3.

Le CESE souligne qu’il y a un équilibre subtil à trouver entre la compétitivité et l’expression de la créativité; le financement public devrait donc servir un équilibre entre les deux aspects, et non viser exclusivement l’un ou l’autre.

4.4.

Pour compléter les questions soulevées par la Commission à titre de base de discussion sur la sphère du financement public, le CESE entend ajouter les points suivants:

4.4.1.

Au niveau supranational, il convient d’accorder l’attention requise à la mise en place d’un label «Europe» pour les films. L’identification nationale des films est importante et devrait toujours rester une partie intégrante des génériques de films; toutefois, il convient de poursuivre la mise en place d’une marque Europe, tant au niveau mondial qu’au niveau national.

4.4.2.

Des systèmes de fonds de garantie et des incitations fiscales sont les principaux instruments financiers à utiliser; les fonds de garantie, en particulier ceux qui remplissent les critères de Bâle, favorisent les prêts bancaires, tandis que les incitations fiscales encouragent les investissements en fonds propres, ou partiellement propres. Ces instruments financiers doivent être structurés de telle façon qu’ils viennent compléter les instruments européens, principalement l’initiative financière intitulée «Europe créative», les fonds de garantie pour les PME et les Fonds structurels européens.

4.4.3.

Il convient de recourir dans ce secteur à d’autres instruments de financement, tels que Horizon 2020 et Erasmus+, avec un équilibre approprié, sans se limiter au seul programme «Europe créative».

4.5.

La communication de la Commission cite les investissements privés comme moyen de financement du secteur. Le CESE recommande que les nouveaux acteurs du secteur numérique contribuent au financement de ce secteur, les acteurs de ce type étant, par exemple, les entreprises de télécommunications et les fournisseurs de contenus.

4.6.

Les initiatives isolées sont insuffisantes; les gouvernements et l’UE doivent développer une infrastructure financière pour l’industrie audiovisuelle visant à mettre en œuvre et favoriser plusieurs services financiers et non financiers — notamment des services de renforcement des capacités — s’adressant à l’ensemble de la chaîne de production du secteur: développement, production, distribution.

Un environnement commercial innovant

4.7.

Le CESE a participé au débat sur les droits de propriété intellectuelle, sur le marché unique du numérique et sur la directive relative aux services de médias audiovisuels (SMA). Néanmoins, il est partisan d’envisager des modèles économiques originaux qui s’avèrent judicieux dans le contexte des évolutions technologiques actuelles de l’ère numérique. Le CESE souligne également qu’une meilleure intégration de l’ensemble des politiques actuelles existant dans ce secteur est nécessaire.

4.8.

Il convient d’explorer de nouveaux modèles d’affaires et de promouvoir la capacité à prendre des décisions audacieuses. Toutefois, le CESE souligne que, pour y parvenir, il est nécessaire que toutes les parties prenantes participent ouvertement et complètement aux discussions destinées à faire évoluer les modèles d’affaires. De plus, un tel débat devrait être lancé par le secteur lui-même.

4.9.

Le CESE est fermement convaincu que cet aspect est essentiel pour la réussite du secteur et invite par conséquent toutes les parties prenantes à se montrer ouvertes à de tels nouveaux modèles économiques, non seulement pour tirer pleinement parti des avantages offerts par l’ère numérique, mais aussi pour s’adapter aux modèles de comportement changeants des consommateurs.

4.10.

Un changement culturel s’impose dans la mentalité des producteurs et des diffuseurs: à l’avenir, les produits destinés au cinéma et à la télévision vont coexister avec des produits conçus pour différents médias: les producteurs et les diffuseurs devront développer différents modèles d’entreprises en fonction des natures différentes des produits: ils doivent réfléchir aux différents budgets et aux différentes stratégies de publication, en fonction de la nature et du potentiel commercial des différents produits. Dans le même temps, les gouvernements doivent repenser le modèle de financement public en fonction d’une combinaison plus équilibrée des supports.

4.11.

Le CESE est circonspect quant à l’idée d’ajuster simplement les pratiques commerciales actuelles sans aborder la problématique sous un angle complètement novateur. Par exemple, se contenter de mettre en place des fenêtres de diffusion plus souples ne permettra pas nécessairement de trouver les solutions commerciales dont l’ère numérique a besoin.

Renforcement de l’environnement créatif

4.12.

Le CESE préconise la coopération entre les écoles de cinéma, dans la mesure où elle est essentielle pour l’amélioration du secteur. Le CESE souligne en outre que ce pan du secteur — les écoles de cinéma — doit être associé aux discussions entre parties prenantes qui ont lieu au niveau européen.

4.13.

Dans ce domaine, une réalité qui mérite davantage d’attention est celle des défis spécifiques rencontrés par les écoles de cinéma: la technologie évolue à un tel rythme que, bien souvent, les écoles de cinéma utilisent des technologies obsolètes au cours de la formation de leurs étudiants. Partant, en sortent des professionnels qui ne sont pas prêts pour l’environnement technologique auquel ils sont confrontés dans le secteur lui-même.

Accessibilité et élargissement du public

4.14.

Le CESE approuve l’idée selon laquelle le public doit lui aussi être un moteur du secteur. Pour cette raison, le CESE souligne à nouveau la nécessité de disposer de données appropriées au niveau européen et de faire participer les associations de consommateurs aux discussions des parties prenantes, tel le forum du film européen.

Collecte et analyse de données

4.15.

Le CESE estime qu’il convient, pour une meilleure compréhension de ce secteur, de mettre davantage l’accent sur la collecte de données au niveau européen. Les données ainsi obtenues devront comprendre non seulement les éléments relatifs aux spectateurs au sein du secteur, mais aussi ceux concernant l’utilisation des financements à différents niveaux, la compétitivité du secteur, ainsi que l’environnement et les conditions de travail.

4.16.

Le CESE reconnaît également la nécessité de développer une base de données aux échelons national et européen, qui comprendrait également des données utilisées par les intermédiaires financiers pour évaluer et gérer le risque en matière d’investissement.

Environnement de travail et conditions de travail

4.17.

Le CESE est fermement convaincu que le domaine des conditions de travail et de l’environnement de travail au sein de ce secteur doit être un sujet de débat et une priorité. À l’heure actuelle, le secteur est si diversifié qu’il arrive souvent qu’un manque de données sur les conditions de travail conduise à un manque d’attention à ce domaine.

4.18.

Malheureusement, le travail précaire tend à prendre de l’ampleur dans ce secteur, en partie en raison des particularités propres à celui-ci (par exemple, production des œuvres sur un court laps de temps), mais aussi à cause du manque de compétitivité, qui incite à faire des économies sur la masse salariale.

4.19.

C’est pourquoi le CESE invite la Commission à inscrire ce défi dans les priorités de la communication et à en faire un sujet des discussions. Les représentants des travailleurs du secteur cinématographique doivent être associés aux discussions des parties prenantes au sein du forum du film européen.

Le forum du film européen

4.20.

Le CESE est favorable à l’initiative de la Commission de créer un forum du film européen. Il est depuis longtemps attendu que ce secteur se rassemble pour débattre des questions jugées pertinentes pour la compétitivité de l’industrie dans l’ère numérique actuelle.

4.21.

Le CESE souligne qu’il est essentiel que toutes les parties prenantes participent de manière équitable à ce secteur. C’est également valable pour les groupes de parties prenantes moins importants, moins puissants, ainsi que pour les représentants des consommateurs et des travailleurs.

4.22.

Bien que le secteur de la télévision ne soit pas aussi durement touché par les répercussions de l’ère numérique que le cinéma, il est important de l’inclure également et d’en débattre dans un cadre plus large, étant donné qu’il s’agit d’une composante importante du secteur audiovisuel.

Promotion d’une éducation cinématographique européenne

4.23.

Le CESE estime que l’éducation cinématographique est un aspect important pour attirer davantage de citoyens vers les films européens et faire en sorte qu’ils les apprécient et les recherchent. C’est pourquoi il recommande de promouvoir une éducation cinématographique au niveau européen ainsi qu’au niveau national. Cette mesure bénéficiera non seulement à l’industrie européenne, mais elle mettra aussi en valeur un élément important de la manifestation de la diversité culturelle de l’Europe. Le CESE, conscient que le modèle spécifique de l’étude des films en contexte scolaire ne fonctionnera pas forcément, estime qu’il convient de mettre en place des dispositifs ou campagnes mettant en avant la réussite, la beauté et la dimension artistique du secteur cinématographique européen.

Accessibilité

4.24.

La question des langues peut être considérée comme une des barrières à la diffusion, en Europe et à l’échelle internationale. La langue est une barrière concrète, mais aussi une part de notre diversité culturelle. De plus, les films sont un vecteur formidable d’apprentissage des langues étrangères. Néanmoins, le CESE estime qu’une partie des financements au titre d’Horizon 2020 devrait également être dirigée vers une approche novatrice du doublage, de manière rentable, à l’aide des technologies de pointe et des technologies du futur.

4.25.

En outre, le CESE encourage fortement le secteur audiovisuel à utiliser les outils disponibles pour garantir qu’un public de personnes souffrant de déficiences visuelles et/ou auditives puisse également apprécier ses produits. La recherche devrait également étudier de quelle manière rendre ces outils d’accessibilité plus rentables.

Bruxelles, le 10 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/52


Avis du Comité économique et social européen sur la société civile en Russie

(avis d’initiative)

(2015/C 230/08)

Rapporteure:

Mme Mall HELLAM

Lors de la session plénière du 22 janvier 2014, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l’article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d’élaborer un avis d’initiative sur le thème:

«La société civile en Russie»

(avis d’initiative).

La section spécialisée «Relations extérieures», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 17 novembre 2014.

Lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 10 décembre 2014), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 118 voix pour, 6 voix contre et 5 abstentions.

1.   Recommandations générales

1.1.

Aujourd’hui, il apparaît plus important que jamais de renforcer la confiance mutuelle et de garantir la libre interaction entre la Russie et la société civile européenne, et de soutenir autant que possible les organisations indépendantes de la société civile russe (OSC).

1.2.

Il convient de promouvoir de manière plus active le cadre en matière de droits de l’homme et de démocratie, et d’accroître le rôle politique du représentant spécial de l’Union européenne pour les droits de l’homme. Les questions relatives à la société civile et aux droits de l’homme devraient faire partie intégrante de tout dialogue bilatéral et multilatéral avec la Russie. Il faut poursuivre le dialogue dans le domaine des droits de l’homme et associer au débat, autant que possible, des représentants de la société civile possédant une expertise pertinente en la matière. Le haut représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité devrait rencontrer la société civile et les OSC à chaque fois qu’il se rend en Russie.

1.3.

L’Union européenne devrait assurer la coordination et parler d’une seule voix, s’agissant de défis politiques et de répressions à l’encontre des organisations non gouvernementales (ONG) et des médias en Russie. Le CESE encourage l’Union européenne à suivre de près les différents aspects de la situation de la société civile en Russie et à s’exprimer régulièrement à ce sujet.

1.4.

Cependant, l’approche bilatérale ne doit pas être sous-estimée en tant qu’instrument permettant de faire avancer les négociations avec la Russie. L’Union européenne devrait adopter une position claire sur les sanctions et les responsabilités en rapport avec les répressions de la société civile. Cela étant, il faudra faire preuve d’une grande flexibilité pour faire sortir les relations entre l’Union européenne et la Russie de la crise actuelle. Une approche bilatérale pourrait être un bon moyen de relancer les relations.

1.5.

Sur le plan stratégique, il pourrait être intéressant d’envisager la coopération avec la société civile entre l’Union européenne et la Russie comme faisant potentiellement partie du futur accord de partenariat et de coopération (APC) (1) et de prévoir une ligne de financement séparée pour la plate-forme indépendante de dialogue avec la société civile UE-Russie. En dépit des circonstances politiques extraordinaires, l’Union européenne devrait continuer à faire usage de son pouvoir d’influence (2), en ayant recours à une approche discrète et intelligente, pour normaliser la situation et stopper la dérive de la Russie vers l’(auto-)isolement. À cet égard, il pourrait s’avérer utile de consulter les recommandations formulées par le CESE dans ses précédents avis relatifs à la dimension septentrionale (3) [y compris la politique arctique (4)], à la stratégie pour la mer Baltique (5), à la synergie de la mer Noire (6), au partenariat oriental (7) et à la stratégie pour le Danube.

1.6.

L’Union européenne devrait se tenir dûment informée des processus démocratiques et des défis qui se posent aux participants au dialogue. Lorsque la situation en matière de droits et de libertés se détériore rapidement, comme cela a été le cas en Russie depuis les deux dernières années, il convient de le reconnaître et d’y remédier sans tarder. Les institutions européennes et les États membres, en particulier ceux qui ne se sont pas encore impliqués, devraient apporter leur appui et investir dans des programmes d’échanges, des programmes d’aide à la coopération avec la société civile russe et de soutien aux ONG russes orientées vers la démocratie et œuvrant dans un domaine particulier, telles que les organisations de défense des droits de l’homme ou de protection de l’environnement, les associations de consommateurs, les différents partenaires sociaux tout comme d’autres organisations professionnelles indépendantes, etc. Sur la base de certaines conditions, il faudrait prendre des mesures appropriées afin de faciliter et de libéraliser le régime des visas.

1.7.

La diversité est la clé d’une société civile européenne en bonne santé: l’Union européenne devrait interagir avec un large éventail d’acteurs de la société civile représentant des régions et des secteurs différents, même et surtout dans un contexte de monopolisation et d’isolement grandissant de la Russie qui se retranche dans un modèle de comportement autoritaire. Le CESE appelle à davantage de contacts interpersonnels et surtout à un plus grand nombre d’échanges à large échelle dans le domaine de l’éducation et du dialogue interculturel, en tant qu’outil propre à améliorer la compréhension et la confiance mutuelles. De nouvelles plates-formes et de nouveaux formats de coopération entre les organisations de la société civile européennes et russes devraient se multiplier. L’on pourrait considérer que le forum de la société civile UE-Russie, analogue au forum de la société civile du partenariat oriental, constitue une des plates-formes existantes de développement, tout à fait adaptée pour jouer ce rôle. La participation des partenaires sociaux mérite également une attention dans le cadre de cette plate-forme ou de plates-formes similaires.

1.8.

L’Union européenne devrait revoir les procédures régissant les aides financières aux ONG au titre de l’instrument européen pour la démocratie et les droits de l’homme (IEDDH). Compte tenu de la campagne de répression et de persécution qui est en cours, une part relativement élevée de cofinancement représenterait un lourd fardeau pour de nombreuses ONG russes et leurs partenaires. C’est pourquoi il est important d’accroître les possibilités de financement et d’aménager un moyen sûr d’y accéder pour les ONG et les coalitions d’ONG russes. Par exemple, il est conseillé d’augmenter la dotation budgétaire de l’IEDDH prévue pour la Fédération de Russie (il est proposé de la faire passer de 3 millions d’EUR à 9 millions d’EUR par an). Pour améliorer la flexibilité et l’accessibilité des mécanismes de soutien, l’on pourrait envisager d’avoir recours aux réattributions.

1.9.

Une autre possibilité intéressante pourrait consister à ouvrir l’instrument européen de voisinage (IEV) aux participants russes dans le cadre de programmes transfrontaliers et multilatéraux avec des homologues de l’Union européenne et des pays du partenariat oriental. Le CESE recommande également d’élargir l’accès à l’instrument de partenariat (IP), au titre duquel 10 millions d’EUR par an sont actuellement alloués à la coopération avec la Russie, de manière à permettre l’introduction de demandes de la part des institutions de la société civile. Enfin, le mandat du Fonds européen pour la démocratie pourrait être étendu pour inclure la Russie. Les programmes de coopération régionaux et transfrontaliers concernés devraient soutenir davantage la société civile.

1.10.

Les politiques européennes actuelles en matière de financement ne devraient pas se concentrer uniquement sur des projets d’aide. Un soutien institutionnel et un renforcement des compétences professionnelles sont essentiels pour garantir la durabilité de la société civile dans des économies en transition, comme celle de la Russie. Stimuler les capacités des OSC et notamment des partenaires sociaux, aider à améliorer les compétences techniques, informatiques et de gestion au sein de la communauté des ONG ainsi que renforcer la coopération avec les homologues européens sont autant d’éléments importants pour faire progresser la société civile russe.

1.11.

Le CESE appelle à mettre en place de toute urgence un système d’alerte/d’action pour les groupes et les individus qui sont en danger ou en situation de crise. Un tel système devrait comprendre, par exemple, un meilleur accès à l’asile, l’octroi de visas ou de prolongations de visas, des bourses, etc. Il est de la plus haute importance d’apporter une aide et un soutien aux militants de la société civile qui ont déjà été contraints de quitter la Russie pour des raisons politiques.

1.12.

Le CESE plaide pour une multiplication des échanges et des liens entre les acteurs de la société civile russe et leurs homologues de la société civile ukrainienne, avec le leadership structuré et l’aide de l’Union européenne. Le CESE suggère d’étudier les possibilités d’associer des partenaires russes à des projets régionaux d’envergure avec les pays du partenariat oriental, en particulier dans le domaine de la démocratie, de l’environnement, de la santé publique, des transports, de l’efficacité énergétique, etc.

1.13.

L’Union européenne devrait s’atteler à assurer une participation plus structurée des représentants indépendants de la société civile au dialogue gouvernemental UE-Russie, s’agissant notamment de sujets d’intérêt mutuel tels que la migration, les relations interculturelles, le changement climatique, la sécurité des données, la sécurité des informations, etc. L’Union européenne devrait également élaborer de nouvelles formes interactives et transparentes pour la participation des citoyens à la fois en Europe et en Russie. Une rencontre du haut représentant de l’Union européenne avec des acteurs de la société civile opérant en dehors de l’Union européenne pourrait constituer un pas pour atteindre cet objectif.

2.   Le rôle du CESE

2.1.

Le CESE et les organisations indépendantes de la société civile de Russie devraient rechercher des moyens d’enrichir le dialogue entre l’Union européenne et la Russie au sujet des droits de l’homme et trouver de nouvelles pistes pour le poursuivre.

2.2.

Afin de renforcer l’interaction entre les sociétés civiles européenne et russe, il faudrait procéder de la manière suivante:

2.2.1.

envisager d’élargir le comité de suivi CESE-Russie dans le but d’offrir à un nombre plus important de membres la possibilité de participer aux échanges avec les partenaires russes;

2.2.2.

renforcer la coopération entre le CESE et le forum de la société civile UE-Russie afin de suivre les évolutions au sein de la société civile russe et d’explorer les moyens d’améliorer le dialogue entre l’Union européenne et les OSC russes indépendantes (y compris les organisations œuvrant dans les domaines de l’environnement, de la protection des consommateurs, de l’agriculture, de la protection sociale et d’autres organisations professionnelles et thématiques);

2.2.3.

créer et développer des contacts avec un large éventail de partenaires sociaux indépendants (par exemple, associations d’employeurs et syndicats) en Russie;

2.2.4.

soutenir, développer et définir comme prioritaires les efforts de participation visant à favoriser la coopération et encourager la société civile en Russie, en Ukraine et dans le reste de l’espace couvert par le partenariat oriental, sans oublier les relations professionnelles; prévoir un rôle particulier pour le CESE, celui d’organisateur de la coopération entre la Russie et l’Ukraine au niveau de la société civile;

2.2.5.

en raison de la situation politique, le CESE a suspendu l’organisation des séminaires conjoints avec la Chambre civique de la Fédération de Russie (CCFR); cependant, le comité garde des contacts thématiques avec la CCFR et établira également des liens avec le bureau du médiateur russe et d’autres organismes et professionnels concernés.

3.   Observations liminaires

3.1.

Début mars 2014, la Fédération de Russie a entrepris une démarche active pour annexer la République autonome de Crimée (Ukraine). L’on estime que depuis avril 2014, la Russie mène une guerre par procuration dans l’est de l’Ukraine, se traduisant par son soutien croissant aux séparatistes prorusses des prétendues République populaire de Donetsk et République populaire de Lougansk et par une incursion directe sur le territoire de l’Ukraine. Cette situation met à l’épreuve l’actuel système de sécurité européen qui est en place depuis des décennies et, plus généralement, les accords internationaux conclus après la Seconde Guerre mondiale. Depuis l’été 2014, l’Union européenne et les États-Unis ont imposé un arsenal de sanctions aux individus et aux entreprises russes en réaction à l’annexion de la Crimée et à la crise dans l’est de l’Ukraine. Le 21 septembre 2014, Moscou et d’autres grandes villes ont été le théâtre, selon toute vraisemblance, des manifestations antiguerre les plus importantes depuis plusieurs années (les estimations vacillent entre 25 et 50 milliers de personnes).

3.2.

Au cours des années 2013 et 2014, le président Vladimir Poutine et le gouvernement russe se sont consacrés à renforcer leur contrôle du pouvoir, en écartant toute opposition potentielle. Le gouvernement russe a fait passer récemment une série de lois rigoureuses en réponse aux protestations massives qui ont eu lieu entre décembre 2011 et mi-2012. Parmi d’autres restrictions, ces lois prévoient un contrôle accru sur les ONG et sur l’internet, une augmentation spectaculaire du montant des amendes pour participation à des manifestations de rue non autorisées et une définition élargie de la trahison.

3.3.

La situation en matière de droits de l’homme et de société civile en Russie est en train de se détériorer. Les amendements à la loi sur les organisations non commerciales (connue aussi sous le nom de loi sur les «agents étrangers») combinés à d’autres nouveautés législatives pénalisent les activités de sensibilisation, diabolisent les ONG aux yeux des citoyens et entravent par conséquent le développement de la société civile. Le nombre croissant de procès récents à l’encontre d’organisations de la société civile est un facteur inquiétant. Le climat politique et social général est de plus en plus hostile aux ONG et à l’expression de voix indépendantes.

3.4.

D’autres lois restrictives telles que celle interdisant la propagande des «relations sexuelles non traditionnelles» auprès des mineurs ont pour effet de générer des stigmatisations et d’accroître la discrimination et la violence à caractère homophobe. Par ailleurs, plusieurs évolutions récentes sur le plan législatif et administratif ont déclenché une répression des médias indépendants en Russie.

3.5.

Dans ses conclusions du 16 juillet 2014, le Conseil européen «invite la Commission à réexaminer les programmes de coopération entre l’Union européenne et la Russie en vue de décider éventuellement, au cas par cas, de suspendre la mise en œuvre des programmes de coopération bilatérale et régionale de l’Union européenne. Toutefois, les projets concernant exclusivement la coopération transfrontière et la société civile seront maintenus». Dans les circonstances présentes, il est indispensable d’évaluer de quelle manière les institutions et la société civile de l’Union européenne peuvent contribuer à améliorer les conditions dans lesquelles évoluent les groupes de la société civile en Russie et à favoriser un véritable dialogue civil et social.

4.   Situation globale de la société civile

4.1.

Au cours de ces dernières années, les principaux acteurs internationaux, au sein des Nations unies, de l’Union européenne, du Parlement européen, du Conseil de l’Europe et de l’OSCE, ont fait part de leurs préoccupations quant aux restrictions imposées à la société civile en Russie.

4.2.

La société civile russe — dans une acception large, y compris tous les types d’associations à but non lucratif — a connu une évolution considérable depuis le début des années 90. Plus récemment, les ONG ont été rejointes par plusieurs coalitions et groupes de citoyens peu structurés, réunis pour travailler sur des projets caritatifs, d’éducation, d’«éducation aux droits de l’homme», etc., bien que, par rapport à la période fondatrice d’il y a environ vingt ans, la communauté de la société civile russe soit actuellement confrontée à un climat peu propice à l’initiative individuelle et aux mouvements sociaux.

4.3.

Depuis le retour de Vladimir Poutine au Kremlin en mai 2012, une série de lois répressives ont été adoptées, et les autorités ont acquis des pouvoirs étendus pour restreindre les libertés fondamentales. Pour n’en citer que quelques-unes, la Russie a modifié la définition de la trahison de façon à permettre la pénalisation de la défense des droits de l’homme à l’échelle internationale. D’importantes amendes ont été imposées pour la participation à des manifestations «non autorisées». La loi interdisant la «propagande de l’homosexualité» est largement discriminatoire à l’encontre des personnes LGBT. Les responsables d’ONG sont désormais susceptibles d’être tenus pénalement responsables, à titre personnel, en cas de non-respect des nouvelles dispositions introduites par la loi sur les ONG.

4.4.

En substance, la société civile en Russie est confrontée à un dilemme existentiel (8). Certains observateurs des droits de l’homme pensent que l’ampleur de cette vague de répression à l’égard de la société civile est «sans précédent dans l’histoire post-soviétique du pays», et que celle-ci s’est même «intensifiée depuis le début de la crise ukrainienne» (9). Dans le même temps, l’État a mis des fonds considérables à la disposition de ce que l’on appelle les «groupes à orientation sociale», en introduisant un clivage supplémentaire au sein de la communauté des ONG.

4.5.

L’on assiste à la persécution de militants pour motifs politiques et aux mauvais traitements infligés aux opposants du parti au pouvoir comme à ceux qui le critiquent. Il est intéressant de noter que plusieurs prisonniers politiques ont été amnistiés et remis en liberté avant les Jeux olympiques de Sotchi en 2014 (y compris Mikhaïl Khodorkovski et les membres du groupe punk Pussy Riot). Toutefois, au cours de la même période, plusieurs dizaines de participants à la manifestation de la place Bolotnaya à Moscou, organisée le 6 mai 2012, ont été traduits en justice et condamnés pour «organisation d’émeutes de masse» et recours à la violence à l’encontre de la police (10). La proportionnalité et la pertinence des condamnations ont sans cesse été remises en question par des institutions locales et internationales de défense des droits de l’homme.

4.6.

Les amendements à la législation existante sur les ONG (connue sous le nom de loi sur les «agents étrangers»), adoptés en novembre 2012 (11), sont devenus l’une des pièces maîtresses dans la répression à l’égard de la société civile en Russie et ont marqué le début d’une campagne visant à marginaliser les ONG russes.

4.7.

Ce qui est inquiétant, c’est que la loi sur les «agents étrangers» tout comme de nombreuses lois répressives adoptées en Russie par la suite ont donné une mauvaise orientation au développement de la société civile dans l’ensemble de la région (12). La notion même d’«agent étranger» a immédiatement signé le retour de la rhétorique haineuse et lourdement chargée de l’ère soviétique et a doté les ONG d’une connotation claire d’«espions» («agents»).

4.8.

Dans un premier temps, la nouvelle loi obligeait toutes les ONG qui reçoivent des financements de l’étranger et participent à des activités dites «politiques» («advocacy» en anglais) à s’enregistrer en tant qu’«agents étrangers» auprès des autorités. Le non-respect de cette obligation était passible d’une suspension des activités de l’organisation, sans décision judiciaire. La mise en œuvre de la loi en février 2013 a commencé par une campagne nationale d’inspection de plus de 1  000 ONG (13) (en réponse aux critiques formulées, Vladimir Poutine a reconnu par la suite certains «débordements» dans l’application de la loi).

4.9.

Plus de 60 groupes de la société civile et de défense des droits de l’homme, connus pour la plupart, ont été accusés d’«infractions administratives» et ont fait appel des charges et des amendes résultant d’inspections (avec des degrés variables de réussite). Les activités de l’ONG «Golos», le groupe de suivi des élections le plus audacieux, ont été suspendues tout comme celles de quelques autres ONG. 13 ONG qui sont parties à une procédure juridictionnelle toujours en cours ont déposé une plainte auprès de la Cour européenne des droits de l’homme. Aucune ONG n’a effectué cet enregistrement de manière indépendante (14).

4.10.

En juin 2014, la loi a de nouveau été modifiée et le ministère de la justice a acquis la compétence de qualifier les ONG d’«agents étrangers» à sa seule discrétion, sans recourir à une intervention judiciaire. La liste des six premiers groupes a été publiée sur le site internet du ministère presque immédiatement après l’entrée en vigueur de la loi (15). Au 1er octobre 2014, 15 ONG figuraient sur la liste, dont plusieurs se consacrent à des actions en justice stratégiques et fournissent une aide juridique (16).

4.11.

Il y a très peu d’institutions publiques en Russie traitant des questions de la société civile et des droits de l’homme: le bureau du médiateur, le conseil présidentiel pour la société civile et, dans une certaine mesure, la Chambre civique (17). Cette dernière a été le partenaire du CESE pour les contacts officiels avec la partie russe (18). Toutefois, la capacité de ces institutions est insuffisante pour faire face aux dernières évolutions négatives concernant les ONG et les groupes de la société civile en Russie.

5.   Dialogue social

5.1.

Le comité tripartite est l’organe officiel russe chargé de réglementer les relations professionnelles et industrielles (suivant le concept de l’OIT). Le comité compte 30 représentants pour chacune des trois parties: les syndicats à l’échelle de toute la Russie, le gouvernement russe et les associations des employeurs. Actuellement, le fonctionnement du comité est régi par l’accord général 2014-2016 (19). Les conventions collectives sont négociées et signées au niveau de chaque entité concrète.

5.2.

Aussi bien les employeurs que les syndicats sont représentés au sein du comité par de grandes associations. L’Union russe des industriels et des entrepreneurs (RSPP) (20) est une importante association réunissant 361 employeurs issus de grandes industries. Les représentants de la RSPP participent aux réunions du comité tripartite côté employeurs. La RSPP propose à ses membres la médiation dans les conflits et assure la promotion de la coopération avec les entreprises de l’Union européenne. Les membres de la RSPP dans leur ensemble supervisent près de 6 millions d’employés. Par ailleurs, l’Union a signé la charte sociale des entreprises russes et a adhéré au Pacte mondial et à l’initiative GRI (General Reporting Initiative). Parmi les alliances des employeurs l’on compte la chambre de commerce et d’industrie (21) et Opora Rossii (petites et moyennes entreprises), etc.

5.3.

Le mouvement syndical dans la Russie actuelle n’a jamais été très fort en tant que forme d’expression indépendante; cependant, il existe quelques exemples rassurants sur ce front, que l’on trouve assez fréquemment dans l’industrie automobile.

5.4.

Le principal acteur dans ce domaine est la Fédération des syndicats indépendants de Russie (FNPR), successeur d’un modèle semblable à l’Union des syndicats qui existait à l’époque soviétique (VTsSPS). La FNPR s’est efforcée de devenir une passerelle entre les syndicats et les autorités; dans le même temps, la Fédération a été critiquée pour sa position clairement pro-gouvernementale et son absence générale de participation aux grèves et aux manifestations, etc. Une autre alliance syndicale de premier plan est la Confédération du travail russe (KTR) (22). Il en existe de plus petites, telles que Sotsprof, Union des syndicats de Russie, etc.

5.5.

Bien que la Russie soit signataire de toutes les conventions majeures de l’OIT, le respect du droit du travail et des droits économiques et sociaux dans le pays reste une source de préoccupations, partagées également par le CESE.

5.6.

La liberté de réunion en tant que droit du travail est un domaine extrêmement problématique: d’après les militants, il est quasiment impossible d’organiser une grève sans violer la loi (23). Dans le même temps, la législation russe ne fournit pas de définition claire de la discrimination, ce qui laisse aux employeurs la possibilité d’exercer des discriminations à l’encontre d’employés potentiels ou travaillant déjà pour eux sur la base de critères tels que le genre, l’âge ou l’appartenance à un syndicat. Les groupes défavorisés d’employés (prisonniers ou minorités, par exemple) sont particulièrement vulnérables, alors que les syndicalistes ne bénéficient pas de protection juridique effective contre les pressions et les persécutions (24).

5.7.

Le Centre pour les droits sociaux et du travail, le seul groupe de réflexion thématique en Russie, a présenté des rapports sur 1  395 actions de protestation liées au travail entre 2007 et 2013, et leur nombre ne fait qu’augmenter d’année en année (25).

6.   Médias et liberté d’expression

6.1.

La liberté d’information et les médias en Russie sont menacés. Après la repénalisation de la diffamation, une série de nouvelles lois visant à museler la presse et l’Internet ont été adoptées en 2014. Plusieurs canaux médiatiques indépendants — presse écrite, radio, médias en ligne — ont été fermés ou contraints de changer de propriétaire, de personnel et de politique éditoriale. Ces évolutions récentes sont indiscutablement en contradiction avec la lettre et l’esprit des obligations internationales de la Russie.

6.2.

La loi sur l’information et les technologies de l’information, modifiée en février 2014, autorise désormais le blocage de sites internet sur demande du procureur général s’il est estimé que ceux-ci contiennent des propos «extrémistes» ou appellent à des émeutes ou des rassemblements non autorisés.

6.3.

La législation antiterroriste a été modifiée en mai pour inclure de nouvelles dispositions concernant les blogueurs avec un lectorat de plus de 3  000 visiteurs par jour. Ces blogueurs ont désormais l’obligation de s’enregistrer auprès du Roskomnadzor et devront ensuite se conformer à la législation russe sur les médias pour animer leurs blogs (y compris se soumettre aux restrictions durant les élections, etc.). Ils pourront également être obligés à dévoiler leur vrai nom et d’autres informations, et être tenus responsables des commentaires publiés par des tiers sur leur blog. Le non-enregistrement est passible d’une amende.

6.4.

L’Union européenne et la communauté internationale sont extrêmement préoccupées par une autre initiative législative, qui prévoit de limiter les investissements étrangers dans les sociétés de médias en Russie à 20 % à partir de janvier 2016.

Bruxelles, le 10 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  Depuis plusieurs années, la Russie et l’Union européenne négocient l’adoption d’un nouvel accord de partenariat et de coopération (APC), un document clef établissant la base juridique et institutionnelle des relations entre les deux parties. Le précédent APC, d’une durée de dix ans, est entré en vigueur en 1997 et, depuis son expiration, est reconduit automatiquement tous les douze mois. De toute évidence, l’accord ne correspond plus aux besoins des relations entre l’Union européenne et la Russie.

(2)  Cette notion a été introduite dans le domaine des relations internationales par Joseph Nye, professeur de Harvard. D’après sa conception, le pouvoir de contraindre (militaire — «hard power») et le pouvoir d’influence (toute forme de diplomatie — «soft power») sont combinés pour accroître l’efficacité des relations internationales.

(3)  «L’avenir de la politique de dimension septentrionale», 5 juillet 2006 (rapporteur: M. Filip HAMRO-DROTZ, JO C 309 du 16.12.2006, p. 91).

(4)  «Politique arctique de l’Union européenne». Veuillez consulter également le site internet suivant: http://ec.europa.eu/maritimeaffairs/policy/sea_basins/arctic_ocean/index_fr.htm

(5)  «La région de la mer Baltique: le rôle de la société civile organisée pour améliorer la coopération régionale et identifier une stratégie régionale», 13 mai 2009 (rapporteur: Mme Marja-Liisa PELTOLA, JO C 277 du 17.11.2009, p. 42).

(6)  «La constitution d’un réseau d’organisations de la société civile dans la région de la mer Noire», 9 juillet 2008 (rapporteurs: MM. Mihai MANOLIU et Vesselin MITOV, JO C 27 du 3.2.2009, p. 144).

(7)  «Associer la société civile au partenariat oriental», 13 mai 2009 (rapporteur: M. Ivan VOLEŠ, JO C 277 du 17.11.2009, p. 30).

(8)  Anna Sevortian, European Human Rights Advocacy Centre Bulletin, hiver 2013. http://ehracmos.memo.ru/files/WinterBulletin2013ENGWEB.pdf

(9)  http://www.hrw.org/news/2013/04/24/russia-worst-human-rights-climate-post-soviet-era

(10)  Un des défendeurs a été condamné à une peine avec sursis et à des restrictions de déplacement, alors qu’un autre a été placé en détention forcée dans un établissement psychiatrique pour une durée indéterminée; tous les autres ont reçu des peines de prison allant de deux ans et demi à quatre ans et demi. Quatre autres personnes sont actuellement en cours de jugement pour des faits de participation à des émeutes de masse et de violence à l’encontre de la police.

(11)  La loi a également été validée par la décision de la Cour constitutionnelle de 2014.

(12)  En septembre 2013, une initiative semblable relative aux «agents étrangers» a été présentée devant le parlement du Kirghizstan, des idées similaires ont vu le jour au Kazakhstan, etc.

(13)  Pour la majorité des ONG, ces «contrôles» n’étaient pas ponctuels. Le travail de nombreuses organisations était perturbé par les inspecteurs, venant généralement en équipe constituée de représentants du bureau du procureur général, des autorités d’enregistrement, des autorités en matière de migrations ou en matière fiscale, de la police, des pompiers et même d’une équipe de télévision. En juin 2013, un autre projet de loi a commencé à circuler au sein de la Douma, visant à élargir la liste des motifs de vérifications aléatoires des ONG sans avis préalable.

(14)  http://www.hrw.org/reports/2013/04/24/laws-attrition

(15)  À savoir: association «Golos» (Moscou), «Golos» régionale (Moscou), Centre pour la politique sociale et les études de genre (Saratov), Les femmes du Don (Novocherkassk) et Centre de Kostroma pour le soutien des initiatives publiques (Kostroma).

(16)  Voir la liste sur la page web du ministère de la justice: http://unro.minjust.ru/NKOForeignAgent.aspx

(17)  La Chambre civique a été créée en 2005 en tant qu’institution publique dotée d’un pouvoir consultatif, qui est censée suivre les initiatives du Parlement et les politiques de l’État, et fournir des conseils à leur sujet. La Chambre civique est composée de 126 membres élus pour un mandat de deux ans. Pour la première convocation de la Chambre, le président Poutine a nommé un tiers des membres. Le bilan de la chambre n’est pas sans controverse.

Lors des dernières élections, la Chambre a obtenu un nouveau directeur, Alexandr Brechalov, président de «Opora Rossii», une organisation publique panrusse des petites et moyennes entreprises. Pour de plus amples informations, consultez le site internet: www.oprf.ru/en

(18)  Sur la base du protocole d’accord, 2008.

(19)  http://www.unionstoday.ru/news/social/2013/12/25/18878

(20)  La RSPP entretient des contacts officiels avec BusinessEurope et est membre de l’OIE et de l’OIT.

(21)  La Chambre de commerce et d’industrie de la Fédération de Russie est membre d’Eurochambres.

(22)  Toutes deux (FNPR et KTR) sont affiliées à la Confédération syndicale internationale (CSI) et à sa structure régionale pour l’Europe — le Conseil régional paneuropéen (CRPE).

(23)  http://www.unionstoday.ru/news/actual-18/2013/09/26/18592

(24)  Le Conseil présidentiel pour les droits de l’homme a récemment débattu sur ce sujet, le 18 avril 2014.

(25)  http://trudprava.ru/expert/analytics/protestanalyt/1047


III Actes préparatoires

COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN

503e session plénière du CESE des 10 et 11 décembre 2014

14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/59


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Recherche et innovation comme sources de croissance renouvelée»

[COM(2014) 339 final — SWD(2014) 181 final]

(2015/C 230/09)

Rapporteur:

Gerd WOLF

Le 10 juin 2014, la Commission européenne a décidé, conformément à l’article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen (le «Comité») sur la:

Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Recherche et innovation comme sources de croissance renouvelée

COM(2014) 339 final — SWD(2014) 181 final.

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 19 novembre 2014.

Lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 11 décembre 2014), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis à l’unanimité.

1.   Résumé et recommandations

1.1.

Le Comité se déclare expressément favorable à l’objectif présenté par la Commission, ainsi qu’aux mesures proposées à cet effet. Leur mise en œuvre relève toutefois principalement de la compétence et de la responsabilité des États membres.

1.2.

Compte tenu de l’effet de levier insuffisant attendu de la part de la Commission sur la politique des États membres en la matière, le Comité lance un appel à la bonne volonté, à l’attitude constructive et au pouvoir décisionnel de tous les acteurs concernés, pour que la priorité soit donnée à cette mission urgente mais difficile et pour qu’elle soit menée à bien avec ténacité et sans mécanismes bureaucratiques supplémentaires.

1.3.

De l’avis du Comité, les tâches suivantes sont prioritaires dans ce contexte:

développer et renforcer encore des capacités de recherche et de développement et des centres d’innovation d’excellente qualité; s’inspirer pour ce faire des meilleurs exemples en la matière; adapter l’enseignement supérieur, les équipements et la participation des universités à cet objectif,

accorder un soutien suffisant et durable à la recherche fondamentale afin de créer un terreau fertile pour les innovations futures,

encourager une attitude de la société qui promeuve, accepte et récompense l’innovation; identifier, évaluer, et le cas échéant diminuer ou bien éliminer les obstacles administratifs, économiques et sociétaux s’opposant à cette évolution,

fournir une protection et un soutien suffisants aux PME, aux jeunes pousses (start-up) et aux entreprises d’économie sociale en tant que piliers essentiels de toute politique efficace en matière d’innovation,

achever l’espace européen de la recherche et de l’innovation,

créer un marché de l’emploi européen attrayant et stable pour les chercheurs et supprimer enfin de manière efficace les désavantages sociaux spécifiques.

1.4.

Pour de plus amples détails, le Comité renvoie aux chapitres suivants.

2.   Contenu de la communication de la Commission (très fortement abrégé)

2.1.

La communication à l’examen a pour objet d’augmenter de manière substantielle le potentiel de la recherche et de l’innovation (R & I), indispensable moteur d’une croissance renouvelée. Cet objectif doit être atteint grâce à une meilleure qualité des investissements nécessaires à l’assainissement budgétaire, qui doivent être réalisés dans le cadre des stratégies des États membres en faveur de la croissance.

2.2.

À cet effet, la Commission propose les mesures suivantes:

i)

dans la logique d’un assainissement budgétaire propice à la croissance, les États membres doivent donner la priorité aux dépenses favorisant la croissance, notamment celles destinées à la R & I;

ii)

ces investissements doivent aller de pair avec des réformes visant à rehausser la qualité, l’efficacité et l’impact des dépenses publiques et des investissements privés dans la R & I;

iii)

ce faisant, les États membres doivent se concentrer sur trois grands axes de réforme:

la qualité du développement stratégique et du processus d’élaboration des politiques,

la qualité des programmes et des mécanismes d’aide,

la qualité des institutions actives dans le domaine de la R & I.

2.3.

Dans ce contexte, la Commission souhaite aider les États membres et tirer parti de l’expérience acquise dans le cadre de l’initiative phare (1) de l’Union de l’innovation et de l’espace européen de la recherche.

2.4.

En outre, il est indispensable de renforcer l’écosystème général de l’innovation et de mettre en place à cette fin des conditions-cadres adéquates pour les entreprises européennes.

2.5.

Même si de nets progrès ont été accomplis depuis le lancement de l’Union de l’innovation, des efforts supplémentaires doivent être consentis pour:

approfondir le marché unique,

faciliter et diversifier l’accès aux financements,

renforcer la capacité d’innovation du secteur public,

créer des emplois durables dans des activités à haute intensité de connaissances,

développer une base de ressources humaines possédant des aptitudes à l’innovation,

promouvoir la recherche aux frontières de la connaissance,

consolider la dimension extérieure de la politique de R & I, et

enraciner davantage la science et l’innovation dans la société.

2.6.

La Commission invite le Conseil à traiter cette question en s’appuyant sur sa communication et les propositions contenues dans celle-ci.

3.   Observations générales du Comité

3.1.

En lien étroit avec le processus historique des Lumières (2), la recherche et l’innovation ont apporté à l’humanité, sur une courte période, la contribution la plus importante qu’elle ait jamais connue en termes de développement des connaissances, de la santé, des capacités techniques et de la prospérité. Elles sont le moteur de la poursuite de la croissance économique et du progrès social.

3.2.

Les États extérieurs à l’Europe ont eux aussi reconnu cet état de fait. C’est pourquoi la course à l’innovation et à la connaissance ne fait que s’intensifier au niveau international. En Asie notamment, d’importants centres scientifiques et technologiques sont désormais créés, tandis que les dépenses de recherche et les capacités d’innovation connaissent un développement très soutenu.

3.3.

Le Comité soutient expressément l’objectif présenté dans la communication de la Commission et les mesures proposées à cet effet, qui sont conformes aux recommandations qu’il a maintes fois réitérées (3).

3.4.

Aussi la question de l’application des mesures proposées et des ressources disponibles à cette fin se pose-t-elle avec d’autant plus d’acuité. Comme l’indique la Commission, les problèmes mentionnés et les missions à mener à bien relèvent principalement de la responsabilité des États membres.

3.5.

Les ressources du programme Horizon 2020 sont le premier outil dont la Commission dispose pour peser financièrement et de manière ciblée sur la politique de recherche et d’innovation des États membres. Comme le Comité l’a rappelé à plusieurs reprises, ces ressources ne peuvent exercer qu’un effet de levier limité.

3.6.

Le Comité en appelle dès lors à la bonne volonté, à l’attitude constructive et au pouvoir décisionnel de tous les acteurs concernés, pour que la priorité soit donnée à cette mission urgente et pour qu’elle soit menée à bien graduellement, avec ténacité et sans mécanismes bureaucratiques supplémentaires.

3.7.

Pour ce faire, il est nécessaire de permettre à l’ensemble des États membres européens d’aller de l’avant. Il s’agit notamment de mettre en place et de renforcer, dans tous les États membres, en particulier les moins avancés dans ce domaine, des capacités de recherche et de développement et des centres d’innovation se distinguant par leur excellence et leur modernité, et d’adapter la formation et les équipements universitaires à cet objectif. L’Europe a besoin d’universités d’envergure mondiale. C’est pourquoi il convient de promouvoir en priorité les universités et les centres de recherche en tant que source de personnes et d’idées innovantes.

3.8.

Cela passe avant tout par la réalisation de réformes structurelles appropriées (notamment des contrôles de qualité internationaux) au niveau de ces institutions et aussi par la mobilisation et l’utilisation ciblée à cette fin des crédits des fonds structurels européens et du fonds de cohésion; la Commission doit exiger la mise en œuvre de ces mesures et en assurer le suivi. C’est là le moyen de libérer des synergies et de réduire la fracture en matière d’innovation au sein de l’Europe.

3.9.

Là où il n’existe pas de système moderne et performant dans le domaine de la science et de la recherche, il convient de le bâtir en se fondant sur l’échange d’expériences et sur les enseignements tirés des meilleures pratiques. Cela suppose de faire appel à des spécialistes expérimentés et de très haut niveau, en leur accordant la responsabilité et la liberté d’action nécessaires et en leur assurant un financement suffisant. L’approche dite du «jumelage pour l’excellence» (twinning for excellence), fondée sur le partenariat, dans le cadre de laquelle les pôles d’excellence déjà existants font office de partenaires, peut jouer un rôle utile dans ce contexte.

3.9.1.

Le CESE met toutefois en garde contre un excès d’uniformisation et la perte que cela implique en termes de compétitivité systémique, qui est le nécessaire terreau des innovations futures. Par conséquent, il met également en garde contre des critères d’évaluation trop formalisés. Un examen international par des pairs s’avère en revanche être la meilleure solution disponible, indispensable pour évaluer et garantir la nécessaire qualité de la R & D au niveau européen, en dépit de faiblesses éventuelles dans l’évaluation d’idées révolutionnaires.

3.10.

Toutefois, il s’écoule parfois un temps extrêmement long entre les investissements dans la R & I et la réussite des innovations qui en résultent, d’où la grande difficulté qu’il y a à prévoir et à évaluer un éventuel lien de causalité.

3.11.

Il est cependant apparu depuis longtemps qu’il existe une forte corrélation entre d’une part la puissance économique et la prospérité d’un État, pour autant qu’elles ne reposent pas pour l’essentiel sur la disponibilité de matières premières, et d’autre part ses investissements dans la recherche et l’innovation et la capacité d’innovation que cela lui confère.

3.12.

Il s’ensuit que l’Europe a besoin d’un espace commun de recherche performant, ouvert et attrayant pour les meilleurs talents du monde entier, qui oriente en ce sens sa politique d’immigration, et dans lequel les systèmes scientifiques nationaux qui le constituent coopèrent plus efficacement au niveau européen et développent davantage les activités en réseau vis-à-vis des instances de recherche qui connaissent les plus grands succès sur le plan international.

3.13.

De même, l’Europe a besoin d’un engagement politique et d’une attitude de la société qui tende à promouvoir, accepter et récompenser l’innovation, qui crée des conditions propices à un entrepreneuriat engagé. Cela nécessite notamment d’identifier, d’évaluer et le cas échéant d’atténuer ou d’éliminer les obstacles administratifs, économiques et sociétaux s’opposant à cette évolution, et donc d’améliorer et de renforcer l’écosystème général de l’innovation.

3.14.

Cela nécessite de la part des États membres de l’Union européenne de mener une politique de recherche et d’innovation qui relie les activités nationales aux initiatives européennes et internationales et qui instaure une synergie entre l’action politique, la science, l’économie et la société civile, y compris au niveau européen, tout en établissant aussi un lien avec les initiatives locales ou régionales.

3.15.

Car à côté de la R & I financée par des fonds publics, ce sont surtout les entreprises investissant elles-mêmes dans une mesure significative dans la recherche et le développement qui obtiennent aussi des succès commerciaux avec de nouveaux produits, services et procédés. Ces entreprises, y compris celles de l’économie sociale, contribuent dans une mesure déterminante à asseoir la position de l’Europe sur les marchés internationaux grâce à l’innovation, ainsi qu’à créer et préserver des emplois en Europe.

3.16.

Ce n’est malheureusement pas le cas de toutes les grandes entreprises. Cela peut s’expliquer par la crainte affichée par les dirigeants d’entreprise, pour des raisons systémiques, à l’égard des risques de marché liés aux technologies dites «révolutionnaires» (4). Pas plus que l’avion n’a été inventé et développé par l’industrie navale ou ferroviaire, les innovations développées par Microsoft et Apple ne sont le fait des entreprises d’équipements électriques et électroniques qui occupaient auparavant une position dominante sur le marché.

3.17.

Aussi n’est-il pas rare que les nouvelles idées viennent de personnalités issues de l’entreprise et d’équipes pluridisciplinaires, ou même d’acteurs extérieurs, ou bien qu’elles soient commercialisées par ceux-ci. C’est pourquoi les PME, les jeunes pousses et les entreprises d’économie sociale jouent un rôle tout à fait essentiel. L’un des axes majeurs de toute politique d’innovation soucieuse d’efficacité doit donc consister à accorder une protection et un soutien suffisants à ces entreprises.

3.18.

Comme cela a déjà été longuement exposé dans l’avis sur l’Union de l’innovation (5), toute la gamme des relations et formes d’organisation interpersonnelles, y compris les entreprises de l’économie sociale, recèle en outre un vaste potentiel d’innovation. Ces innovations recouvrent tous les domaines de l’activité scientifique, économique et sociale, comme évoqué dans les autres chapitres. Pour autant, l’innovation ne doit pas nécessairement être le produit d’actions systématiques de recherche et de développement, mais peut résulter du travail de terrain et des expériences réalisées dans ce contexte. Cela concerne notamment:

des lieux de travail innovants,

la coopération entre les partenaires sociaux et les représentants de la société civile,

les innovations sociales répondant à des besoins qui ne sont pas suffisamment pris en compte par le marché ou le secteur public,

le rôle des travailleurs en tant que source de connaissances et d’idées.

Le Comité exprime une fois encore (6) son soutien à l’objectif de la Commission européenne de promouvoir pleinement de telles innovations.

4.   Observations particulières du Comité

4.1.

Le Comité réaffirme que même s’il existe de fortes interactions entre la recherche et l’innovation, celles-ci présentent toutefois des caractéristiques distinctes et ont besoin de conditions de travail différentes pour prospérer (7). Il s’agit de reconnaître la spécificité de ces différentes conditions de travail tout en les reliant du mieux possible.

4.2.

S’agissant de l’utilisation des fonds publics, autrement dit des ressources financières tirées des impôts prélevés auprès des citoyens et de l’économie et orientées suivant des processus démocratiques, le Comité a récemment (8) précisé que tout soutien fourni par la Commission (et donc issu de fonds publics) devrait se concentrer sur les missions moins susceptibles de bénéficier d’un financement privé, et ce généralement pour les motifs suivants:

le développement du concept comporte des risques importants, contrebalancés, en cas de succès, par des bénéfices substantiels,

les coûts encourus sont très élevés et ne peuvent être assumés que collectivement, par de multiples sources de financement publiques,

le délai pour en retirer un avantage valorisable est trop long,

il s’agit de technologies clés ou génériques (par exemple de nouveaux matériaux),

le résultat n’est pas d’emblée commercialisable, mais il s’agit d’un besoin social général ou d’une nécessité environnementale.

4.3.

En ce qui concerne la promotion de la recherche et du développement, le Comité résume sa position comme suit. Il s’agit:

d’accorder un soutien suffisant à la recherche fondamentale, tant pour étendre et approfondir la connaissance de la nature que pour créer un terreau fertile pour de nouvelles idées et innovations fondamentales. Cette action ne doit en aucun cas se limiter au volet du programme Horizon 2020 supervisé par le CER, mais devrait être suffisamment mise en avant dans tous les autres volets aussi,

de respecter et protéger la liberté de la science et de la recherche,

de continuer de faire de l’excellence le critère d’évaluation suprême pour l’attribution de contrats de recherche,

de coopérer au niveau transfrontalier et de mettre en commun les capacités,

de créer un marché de l’emploi européen ouvert et attrayant pour les chercheurs et de supprimer ou compenser enfin de manière efficace les désavantages sociaux liés à la multiplication des contrats à durée déterminée et à la mobilité transfrontalière,

d’adapter le cadre général et les règles administratives aux besoins d’un secteur scientifique performant,

d’optimiser la diffusion et le transfert des connaissances scientifiques, ainsi que l’accès à ces connaissances (9),

de renforcer la dimension internationale de l’espace européen de la recherche.

4.3.1.

Le Comité renouvelle ses appels (10) à éliminer enfin efficacement les risques et inconvénients sociaux occasionnés aux chercheurs tant par la mobilité transfrontalière, nécessaire et souhaitée, que par le manque de postes stables. C’est pourquoi il accueille favorablement la récente initiative de la Commission (Resaver) (11) visant à faciliter la mobilité des chercheurs en Europe grâce à l’instauration d’un nouveau régime paneuropéen de retraite. Celle-ci devrait permettre aux chercheurs de passer d’un État membre à un autre sans avoir à craindre de perdre leurs droits à pension. Le Comité, sans pouvoir émettre dès à présent un jugement sur l’adéquation de l’approche choisie, y voit un pas dans la bonne direction.

4.3.2.

Dans le présent avis, le Comité n’aborde pas les thèmes de recherche spécifiques, ceux-ci ayant été examinés de manière approfondie dans son avis sur le programme Horizon 2020. Il répète qu’il faut là aussi exercer un effet de levier suffisant sur les objectifs des programmes des États membres.

4.4.

S’agissant de la promotion des innovations, le Comité résume sa position de la façon suivante. Les innovations naissent généralement:

en réponse à des besoins et des enjeux sociétaux ou pour pallier des manques, qu’ils soient de nature plutôt technique ou sociale,

dans le cadre du développement ou de l’amélioration des produits, dans le but d’en accroître la qualité ou d’en augmenter les ventes,

des nouvelles connaissances issues de la recherche fondamentale, afin d’apporter une meilleure réponse à des problèmes déjà connus,

à la suite de nouvelles idées, afin de créer des possibilités totalement nouvelles, telles que des moyens de locomotion (avion), de navigation (GPS) ou de communication (internet), et d’alléger le travail,

pour satisfaire des besoins qui jusque-là n’étaient pas reconnus,

en tant qu’outil ou sous-produit de la recherche. Il peut s’agir, par exemple, de nouvelles technologies clés. Le cas de la «toile mondiale» (world-wide-web) est à cet égard exemplaire: elle a été développée par le CERN (12), l’un des organismes phares au niveau européen en matière de recherche et d’initiatives de recherche, pour mettre les données de recherche à la disposition des universités et des instituts de recherche coopérant avec le centre de Genève et connecter ceux-ci au programme de recherche. Son énorme potentiel économique et social n’a malheureusement pas été reconnu ni exploité suffisamment vite au sein de l’Europe. Il est impossible à ce jour d’en mesurer toute la portée.

4.5.

Or, pour que ces idées soient converties en innovations et en produits innovants, il faut bien souvent commencer par créer de nouvelles entreprises. L’une des priorités politiques de la promotion de l’innovation consiste donc à soutenir et à faciliter la création de ces jeunes entreprises et leur survie pendant la phase critique des cinq à dix premières années de leur existence.

4.6.

Bien que les innovations aient jusqu’ici toujours bénéficié à la communauté humaine dans son ensemble et aient ainsi contribué dans une mesure déterminante à la prospérité et à la compétitivité, elles se heurtent parfois à des obstacles sociaux et économiques de taille. Car toute nouveauté est tout d’abord bien souvent perçue comme une menace par l’économie, le commerce, la société et le monde politique.

4.7.

En effet, les innovations peuvent entraîner des bouleversements économiques, voire sociaux, en évinçant certains secteurs et entreprises, et en supprimant dans un premier temps des emplois ou en affaiblissant des classes sociales dominantes, et ne révéler qu’à long terme toute l’utilité et les avantages qu’elles peuvent représenter pour la collectivité. On peut citer, entre autres exemples, le métier à tisser mécanique, l’introduction du partenariat social, le génie génétique, Google et Amazon, ou encore la mise en place de techniques destinées à utiliser les énergies renouvelables. En outre, la capacité d’adaptation de la société et de l’économie (cycles d’amortissement) peut être mise à mal par des bouleversements trop rapides liés à l’innovation.

4.8.

Les craintes que cela fait naître parmi certains groupes de la société ont amené la Commission à créer le concept (13) de «recherche et innovation responsables» (Responsible Research and Innovation) (14). Au vu des apports décisifs de la recherche et de l’innovation en tant que moteur et fondement de l’actuel niveau de vie et de connaissances, ainsi que comme terreau ayant joué un rôle déterminant dans le processus historique des Lumières, d’où sont issus les grands principes et idées relatifs aux droits de l’homme et à la séparation des pouvoirs étatiques, le Comité juge toutefois ce terme inadéquat et partial. Il recommande en conséquence de réfléchir à son incidence sur l’image de la recherche et de l’innovation dans la société.

4.8.1.

Bien entendu, la recherche et l’innovation doivent respecter la législation en vigueur et les principes éthiques.

4.8.2.

L’exigence ci-dessus vaut également pour tous les autres domaines de l’action sociale, qu’il s’agisse de la médecine, de l’économie, du journalisme, de la législation, de la politique ou de la jurisprudence. Le Comité considère donc qu’il n’est pas opportun d’imposer de manière explicite le principe de responsabilisation à la seule R & I.

4.9.

À côté de ces obstacles de fond, c’est aussi et surtout toute la réglementation à respecter aujourd’hui par les entreprises (laquelle est de surcroît fragmentée au sein de l’Union européenne), qui pose le plus de difficultés — avec les problèmes aigus de financement — aux créateurs d’entreprise innovants.

4.9.1.

C’est pourquoi le Comité réitère sa recommandation (15) d’accorder aux jeunes pousses, pendant un délai approprié, et pour autant qu’elles se situent en dessous d’une taille critique, une période de répit et une certaine liberté d’action. Cela pourrait se faire par le biais d’une clause d’exception qui exempte pendant cet intervalle de temps ces entreprises de la plupart des obligations et règles administratives de toutes sortes habituellement en vigueur, pour apporter d’emblée la preuve de leur potentiel de réussite économique et technique.

4.10.

Comme il l’a souligné dans des avis antérieurs, auxquels il renvoie explicitement pour d’autres recommandations détaillées — s’agissant par exemple de l’innovation sociale —, le Comité soutient donc fermement l’objectif de la Commission concernant le renforcement de l’écosystème général d’innovation et la mise en place de conditions-cadres adéquates pour inciter les entreprises européennes à innover. Cela suppose notamment d’identifier et d’éliminer les obstacles à l’innovation.

4.10.1.

Ainsi, des règles et restrictions techniques trop détaillées pourraient apparaître comme un carcan trop contraignant et une entrave à l’innovation. Cet aspect devrait par exemple être pris en considération en ce qui concerne les dispositions précises de l’initiative de la Commission sur l’efficacité énergétique.

4.10.2.

Les efforts en ce sens doivent correspondre à l’objectif de garantir le mieux possible et de façon durable, y compris à l’avenir, le bien-être, la santé et la sécurité des citoyens et des consommateurs.

4.10.3.

Il conviendrait également de vérifier, à l’aide d’exemples historiques, si un respect trop strict du principe de précaution, par exemple en matière de protection des consommateurs ou lors du développement de nouvelles procédures médicales, ne risquerait pas d’entraver l’audace nécessaire au développement de nouvelles solutions efficaces.

4.11.

De l’avis du Comité — en dépit de succès européens incontestables en matière de R & D de même que dans de nombreuses branches économiques —, cela requiert non seulement l’achèvement du marché intérieur et de l’espace européen de la recherche, mais aussi une analyse des raisons plus profondes pour lesquelles le climat qui prévaut en Europe est d’une manière générale moins favorable à l’innovation que ce n’est le cas aux États-Unis ou dans certains États asiatiques, par exemple. Pourquoi Google, Microsoft, Facebook ou Monsanto ne sont-elles pas des entreprises européennes? Ou encore un «meilleur» Google ou Monsanto, qui répondrait mieux aux préoccupations des citoyens et qui se serait développé au sein de la zone d’influence de la politique européenne?

4.12.

Il importe donc que la société adopte une nouvelle attitude face à l’innovation, qui ne doit plus être considérée avant tout comme un risque ou une menace, mais bien comme une chance pour la poursuite du progrès et la création d’emplois, pour la puissance économique et la compétitivité de l’Europe, pour l’élaboration du modèle social européen. Nous avons besoin d’un nouvel et meilleur équilibre, entre prudence et audace, entre petits risques et grands dangers, entre régulation et liberté d’action.

Bruxelles, le 11 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  COM(2010) 546 final.

(2)  Science as Public Culture, Jan Golinski, Cambridge University Press.

(3)  Par exemple JO C 132 du 3.5.2011, p. 39; JO C 181 du 21.6.2012, p. 111; JO C 44 du 15.2.2013, p. 88; JO C 76 du 14.3.2013, p. 31; JO C 76 du 14.3.2013, p. 43; JO C 341 du 21.11.2013, p. 35; JO C 67 du 6.3.2014, p. 132.

(4)  Voir par exemple Clayton M. Christensen, The Innovator’s Dilemma, Harper Business.

(5)  JO C 132 du 3.5.2011, p. 39.

(6)  Voir note de bas de page no 3.

(7)  JO C 218 du 11.9.2009, p. 8.

(8)  JO C 67 du 6.3.2014, p. 132.

(9)  Voir JO C 218 du 11.9.2009, p. 8.

(10)  Voir à ce propos JO C 110 du 30.4.2004, p. 3, ainsi que JO C 76 du 14.3.2013, p. 31.

(11)  Communiqué de presse de la Commission du 1er octobre 2014.

(12)  http://home.web.cern.ch/topics/birth-web

(13)  COM: Towards Responsible Research and Innovation in the Information and Communication Technologies and Security Technologies Fields, ISBN 978-92-79-20404-3.

(14)  Par exemple www.consider-project.eu

(15)  JO C 132 du 3.5.2011, p. 39.


14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/66


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — programme pour une réglementation affûtée et performante (REFIT): situation actuelle et perspectives»

[COM(2014) 368 final]

(2015/C 230/10)

Rapporteur:

Denis MEYNENT

Le 1er octobre 2014, la Commission européenne a décidé, conformément à l’article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comite des régions — Programme pour une réglementation affûtée et performante (REFIT): situation actuelle et perspectives»

COM(2014) 368 final.

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 19 novembre 2014.

Lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 10 décembre 2014), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 136 voix pour, 2 voix contre et 4 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le CESE prend acte de l’état d’avancement de l’exécution du programme REFIT établi par la Commission. Il se réjouit que la Commission cherche à en améliorer le processus et les instruments. Sur le principe, il rappelle ses avis antérieurs (1).

1.2.

Le CESE est favorable à la réduction des lourdeurs qui pèsent sur les petites, moyennes et microentreprises (test PME) et les citoyens lorsqu’il y a moyen de réaliser plus simplement l’objectif et la finalité pour lesquelles des réglementations ont été mises en place. Il rappelle toutefois la nécessité, pour une bonne gouvernance publique, de disposer des données et informations pertinentes et essentielles pour la mise en place, le contrôle et l’évaluation des politiques.

1.3.

Le CESE rappelle que le principe du Think Small First ne vise pas et ne peut viser à exempter les microentités et les PME de l’application de la législation. Il s’agit plutôt de prendre en compte, lors de la formulation de la législation, le fait qu’elle s’appliquera aussi à de petites structures, sans que la réalisation de l’objectif défini par la législation en soit affectée.

1.3.1.

Le CESE souligne que l’application de ce principe ne saurait entrer en contradiction avec l’intérêt général, qui suppose notamment que les citoyens, les travailleurs et les consommateurs soient protégés contre les risques qu’ils encourent.

1.4.

Le CESE se montre extrêmement préoccupé des constats qui sont faits s’agissant des lacunes des analyses d’impact social ou environnemental et de la suite réservée aux consultations. Il demande à la Commission d’être plus transparente et de justifier les raisons qui feraient que telle disposition ou proposition de disposition soit soumise, ou non, à une analyse d’impact et/ou une analyse ex post.

1.5.

Le CESE demande à la Commission d’assurer l’analyse intégrée et équilibrée des dimensions économique, sociale et environnementale. Il estime en effet que les objectifs visés par la Commission ne seront atteints que si toutes ces dimensions, ainsi que les préoccupations de l’ensemble des parties prenantes, sont prises en compte.

1.6.

Selon le CESE, une réglementation intelligente ne dispense pas de respecter la réglementation relative à la protection des citoyens, des consommateurs et des travailleurs, les normes d’égalité entre femmes et hommes ou les normes environnementales et ne peut avoir pour effet d’en empêcher les améliorations.

1.7.

Le CESE estime qu’une législation intelligente doit respecter la dimension sociale du marché intérieur telle que prévue par le traité, notamment au niveau de la transposition des accords négociés dans le cadre du dialogue social européen.

1.8.

Le CESE demande à la Commission de mieux prendre en considération les points de vue émis lors des consultations et de justifier la manière dont il en a ou pas été tenu compte. Plus généralement, il propose à la Commission de mieux structurer les consultations, notamment sur une base institutionnelle et représentative, en tirant parti des ressources des organes consultatifs représentatifs ou de leurs équivalents déjà en place, tant au niveau européen que dans les États membres et les régions.

1.9.

Le CESE entend répondre positivement à l’appel général à la collaboration des partenaires sociaux et de la société civile lancé par la Commission. Il est prêt à s’impliquer plus activement dans le programme, sans préjudice des autres formes du dialogue social européen.

1.10.

Le CESE peut souscrire à la réalisation des analyses ex post proposées par la Commission si elles sont réalisées avec un certain recul. Dans le cas contraire, REFIT serait source d’instabilité et d’insécurité juridique permanente pour les citoyens et les entreprises.

1.11.

Le CESE estime que la Commission a acquis l’expertise nécessaire en son sein afin d’améliorer le processus. Il ne souscrit à la proposition de la Commission visant à créer un nouveau groupe de haut niveau chargé d’accompagner les travaux à venir que si celui-ci apporte une réelle valeur ajoutée.

2.   Contenu essentiel du document de la Commission — programme pour une réglementation affûtée et performante: situation actuelle et perspectives

2.1.

Dans la droite ligne de ses communications REFIT antérieures (2) en lien avec ses communications sur le «Mieux légiférer» (3) et la «Réglementation intelligente», la Commission européenne rappelle que les réglementations de l’Union européenne jouent un rôle essentiel en faveur de la croissance et de l’emploi.

2.2.

Elle souligne que ceci suscite de nombreuses attentes tant du côté des entreprises (règles équitables et encouragement de la compétitivité) que des citoyens (protection de leurs intérêts, notamment en matière de santé et de sécurité, de qualité de l’environnement et du droit au respect de la vie privée).

2.3.

Le défi consiste à faire en sorte que cette législation reste simple. Il convient de ne pas aller au-delà de ce qui est strictement nécessaire pour atteindre les objectifs stratégiques et d’éviter les superpositions de réglementations.

3.   Observations générales

3.1.

Le CESE soutient les objectifs généraux du programme REFIT développé par la Commission et renvoie notamment à ses avis (4) traitant du programme «Mieux légiférer» et de la «Réglementation intelligente», y compris les réponses aux besoins des petites et moyennes entreprises.

3.2.

Le CESE est favorable à la réduction des charges et lourdeurs qui pèsent sur les petites, moyennes et microentreprises et sur les citoyens. La Commission devrait en effet porter son attention sur la qualité plutôt que sur la quantité et donner la priorité à la réduction des charges administratives, considérées comme autant de coûts pour les entreprises et de freins à leur compétitivité ainsi qu’à l’innovation et à la création d’emplois. Il va de soi que cette opération doit se faire en tenant compte de l’objectif et de la finalité pour lesquels des obligations ont été mises en place.

3.3.

Il y a lieu d’éviter toute redondance des informations réclamées mais, pour la bonne gouvernance, il convient de disposer des données et informations pertinentes et essentielles pour la mise en place, le contrôle et l’évaluation des politiques.

3.4.

Le CESE partage l’avis exprimé par la Commission selon lequel la nécessité d’une sécurité et d’une prévisibilité juridique ne plaide pas pour le recours à des solutions à court terme. Il estime en effet que toute révision de la législation doit être mûrement réfléchie et s’inscrire dans le long terme afin d’assurer prévisibilité, sécurité juridique et transparence.

3.5.

Le CESE rappelle qu’une réglementation intelligente ne dispense pas de respecter la réglementation relative à la protection des citoyens, consommateurs et travailleurs [«ni saper les droits des travailleurs, ni réduire leur niveau fondamental de protection, notamment sur le plan de la santé et de la sécurité au travail» (5)], ainsi que celle relative aux normes d’égalité entre femmes et hommes ou celle relative aux normes environnementales. Cette réglementation intelligente doit permettre les évolutions et les améliorations.

3.6.

À cet égard, le CESE se réjouit que la Commission rappelle que le programme REFIT ne saurait remettre en question les objectifs stratégiques établis ni agir au détriment de la santé et de la sécurité des citoyens, des consommateurs, des travailleurs ou de l’environnement. Le CESE souligne toutefois qu’il ne s’agit pas ici uniquement d’éviter de nuire à la santé des citoyens mais de veiller à agir au nom de l’intérêt général et de la protection appropriée des citoyens contre tous les risques qu’ils encourent, qu’ils soient ou non liés à leur santé. Le Conseil européen des 26 et 27 juin 2014 et le Parlement européen, en sa session du 4 février 2014, ont formulé des préoccupations similaires (6).

3.7.

Le CESE estime qu’une législation intelligente doit respecter la dimension sociale du marché intérieur telle que prévue par le traité, notamment au niveau de la transposition des accords négociés entre les partenaires sociaux dans le cadre du dialogue social européen.

3.8.

Selon le CESE, REFIT doit être un objectif partagé au niveau de l’Union européenne, des États, des partenaires sociaux et autres parties prenantes, comme le souhaite la Commission. Il est essentiel de créer la confiance et de faire en sorte qu’il ne subsiste aucun malentendu quant aux objectifs du programme. Certaines des mesures annoncées ou prises (7) ont en effet suscité la méfiance de certaines parties prenantes et des citoyens.

3.9.

Le CESE estime en effet que les objectifs visés par la Commission ne seront atteints que si les préoccupations de l’ensemble des parties prenantes sont prises en compte.

4.   Mise en œuvre du programme

4.1.

Le CESE prend acte de l’état d’avancement de l’exécution du programme REFIT. Il se réjouit particulièrement du fait que la Commission cherche à en améliorer les instruments en menant notamment une consultation sur la réalisation des analyses d’impact et sur le processus de consultation lui-même. Il est en effet essentiel que ces éléments horizontaux du programme ne souffrent aucune critique.

4.2.

La juxtaposition d’analyses ex post et d’analyses d’impact ne peut avoir pour conséquence que l’application effective des règles adoptées démocratiquement n’aie pas lieu. Le CESE peut souscrire à la réalisation des analyses ex post proposées par la Commission si elles sont réalisées avec un certain recul. Une analyse ex post n’a en effet de sens que si un certain nombre d’années se sont écoulées entre la date limite de transposition d’une règle en droit national et l’analyse ex post en question. Dans le cas contraire, REFIT serait source d’instabilité et d’insécurité juridique permanente pour les citoyens et les entreprises.

4.3.

Le CESE se réjouit que la Commission souligne à plusieurs reprises la nécessité d’impliquer les partenaires sociaux, la société civile et les PME. Il constate en effet que, jusqu’ici, il s’est plus agi d’une déclaration de principe que d’une pratique structurée visant à discuter et à tenir compte des propositions avancées.

4.3.1.

De même, le CESE estime que l’implication et la consultation, par les canaux les plus appropriés, des structures représentatives de la société civile, des syndicats et des PME sont indispensables.

4.4.   Sur les analyses d’impact

4.4.1.

Les rapports (8) 2012 et 2013 du comité d’analyse d’impact révèlent les lacunes du processus et les efforts mis en place pour l’améliorer.

Sont notamment épinglés:

le fait qu’un grand nombre d’analyses d’impact n’intègrent pas correctement les différents avis exprimés lors des consultations et en rendent compte de manière biaisée,

la nécessité de poursuivre les efforts, notamment en ce qui concerne la prise en compte de véritables options de substitution (clarté, justification, proportionnalité) et de fournir des informations suffisamment détaillées sur toutes les options (et pas seulement sur l’option privilégiée),

le fait que la qualité de l’analyse des impacts sociaux (positifs ou négatifs) est un sujet de préoccupation, de même que la portée et la profondeur de l’analyse des impacts environnementaux,

la nécessité d’évaluations ex post de la législation ou des programmes existants de l’Union européenne,

l’attachement à une analyse intégrée des impacts économiques, sociaux et environnementaux.

4.4.2.

Dans son rapport de 2013, le comité d’analyse d’impact note la réduction importante du nombre d’avis sur les impacts sur les PME et les microentités. Il l’explique par le fait que la Commission les prend mieux en considération, notamment au niveau de la charge de la preuve inversée pour les microentités. Le comité d’analyse d’impact souligne que le nombre d’analyses traitant de l’impact sur la compétitivité a considérablement augmenté par rapport à 2012 (+ 30 %). Le manque de transparence à propos des avis émis et des vues critiques exprimées lors de consultations est à nouveau pointé du doigt, de même que la nécessité d’expliquer comment les préoccupations exprimées ont été prises en considération.

4.4.3.

Le CESE se réjouit que la Commission et le comité d’analyse d’impact cherchent à améliorer la qualité du processus. Il relève que les analyses d’impact sur les PME et les microentités semblent mieux prises en compte que par le passé, ce qui est conforme à ses avis antérieurs concernant les principes du Small Business Act, du Think Small First et du test PME. Le CESE souligne que ces efforts doivent être poursuivis. Il rappelle que le principe du Think Small First ne vise pas et ne peut viser à exempter les microentités et les PME de l’application de la législation. Il s’agit plutôt de prendre en compte, lors de la formulation de la législation, le fait qu’elle s’appliquera aussi à des petites structures, sans que la réalisation de l’objectif visé par la législation en soit affectée. Il estime que ces principes ne sauraient justifier que le champ d’application d’une réglementation soit déterminé par la seule taille de l’entreprise ni entrer en contradiction avec l’intérêt général, qui suppose notamment que les citoyens, les travailleurs et les consommateurs soient protégés contre les risques qu’ils encourent.

4.4.4.

Le CESE est par ailleurs extrêmement préoccupé par certains des constats qui sont relevés plus haut. Il constate en effet qu’à côté des analyses d’impact en matière économique, sociale et environnementale, toute une série d’autres dimensions sont abordées (9), alors même que le comité d’analyse d’impact estime que la qualité des analyses sur les dimensions sociales et environnementales laisse parfois à désirer. Le CESE souhaite donc s’assurer que la Commission dispose des moyens pour réaliser l’ensemble de ces analyses de front et que celles-ci ne se fassent pas au détriment de la qualité, des équilibres, des objectifs, des instruments de mesure et des paramètres annoncés.

4.4.5.

Enfin, la raison pour laquelle certains projets ou propositions ne sont pas soumis à des analyses d’impact, notamment dans la filière Ecofin (two pack, six pack), n’est pas claire et alimente la perception, chez certaines parties prenantes, que le processus est plus orienté sur les aspects économiques (et de compétitivité) que sur les deux autres piliers. Comme le souligne la Commission, l’objectif de simplification doit être porté et partagé par tous et reposer sur des analyses robustes et crédibles.

4.4.6.

Le CESE réclame de la Commission:

qu’elle soit plus transparente et qu’elle justifie les raisons de soumettre ou non telle disposition ou proposition de disposition à une analyse d’impact,

qu’elle veille à la prise en compte de l’intérêt général,

qu’elle entreprenne des actions pour améliorer la prise en compte équilibrée des trois dimensions (économique, sociale et environnementale) de manière intégrée et assurer la qualité des analyses à ce niveau,

qu’elle prenne mieux en compte les points de vue émis lors des consultations et qu’elle justifie la manière dont il en a ou pas été tenu compte.

4.4.7.

Le CESE regrette que la communication de la Commission européenne ne fasse pas explicitement référence à son rôle d’organe consultatif de la société civile émettant des avis sur les aspects essentiels de la législation de l’Union européenne. Il entend répondre positivement à l’appel à collaboration plus général lancé aux partenaires sociaux et à la société civile par la Commission et est donc prêt à collaborer plus activement à l’amélioration du processus par voie de consultation ou d’apport d’expertise.

4.5.   Sur le processus de consultation

4.5.1.

La Commission insiste sur le rôle essentiel de la consultation des parties prenantes dans le processus, mais leur résultat n’est pas toujours pris en compte. Par ailleurs, le taux de réponses aux consultations ouvertes lancées par la Commission, la question de la représentativité des répondants et, par conséquent, le caractère parfois peu représentatif des réponses participent à un affaiblissement de la qualité du processus. Le CESE se demande si la multiplication des consultations et les moyens, le temps et la disponibilité qu’elles nécessitent pour y répondre en connaissance de cause ne peuvent pas expliquer ces constats. Par ailleurs, la manière dont les questions sont posées peut parfois sembler induire la réponse, ce qui peut entraîner un doute sur l’objectivité et l’impartialité du processus.

4.5.2.

La «consultation» est ce sur quoi reposent les propositions législatives de qualité fondées sur des données probantes. Une consultation précoce et adéquate des entreprises, en particulier des PME, et de leurs représentants permettrait de prendre des décisions découlant de l’analyse des faits, de l’expérience et des points de vue des destinataires du droit impliqués dans sa mise en œuvre. Il en va de même au niveau des diverses organisations représentatives des citoyens (travailleurs et allocataires sociaux, consommateurs, etc.).

4.5.3.

Le CESE demande qu’une absolue priorité soit donnée aux partenaires sociaux et aux organisations intermédiaires concernées. Consulter les PME et les consommateurs d’une façon directe et individuelle s’est avéré inefficace, anecdotique et non représentatif. Les organisations concernées doivent, de plus, disposer d’une réelle possibilité de participer à la préparation des consultations et questionnaires.

4.5.4.

Le CESE se demande dès lors s’il n’est pas préférable de mieux structurer cette consultation sur une base institutionnelle et représentative en tirant profit des ressources des organes consultatifs représentatifs déjà en place et, le cas échéant, en en créant d’autres si cela s’avère approprié.

4.5.5.

Le CESE propose que les consultations se fassent aussi au départ des organes représentatifs existant tant au niveau de l’Union que des États membres. Il rappelle qu’à défaut, il existe des structures de consultation qui peuvent en faire office.

4.5.6.

Le CESE recommande qu’il soit fait usage de l’expertise et du potentiel des fédérations européennes des employeurs, des entreprises, des syndicats et des ONG et qu’il leur soit également confié la tâche de mener les enquêtes et les études nécessaires plutôt que de s’en remettre aux seuls consultants privés.

4.5.7.

Le CESE est en tout cas prêt à assumer ses responsabilités dans ce cadre, sans préjudice des autres modalités de fonctionnement du dialogue social européen.

5.   Observations particulières

5.1.

Le CESE estime que le programme REFIT devrait être ambitieux et, dans le même temps, simple, clair et transparent.

5.2.

Le fait de multiplier la dénomination des agendas et programmes («Mieux légiférer», «Réglementation intelligente», Think Small First, etc.) a entraîné une certaine confusion.

La hiérarchie de ces programmes et de ces projets ainsi que leur interaction devraient être clarifiées afin que le public comprenne à qui ils s’adressent.

5.3.

La multiplication des instances intervenant dans le processus, des filières de consultation et du traitement des propositions nuit à la transparence des opérations.

5.4.

Dans la même logique d’efficacité et de transparence et vu les mécanismes existants, y compris au niveau du Parlement européen, le CESE ne souscrira à la proposition de la Commission visant à créer un nouveau groupe de haut niveau chargé d’accompagner les travaux à venir que s’il est démontré qu’il constitue une réelle valeur ajoutée. Il estime en effet que la Commission a acquis l’expertise nécessaire en son sein afin d’améliorer le processus.

5.5.

Le CESE note que la Commission estime que des analyses d’impact devraient avoir lieu à toutes les étapes du processus législatif, y compris sur les amendements introduits par les colégislateurs. Dans un système où il y a deux colégislateurs et où la recherche du compromis est la règle, il ne semble pas opportun que l’un d’entre eux ait le dernier mot en termes d’analyse d’impact (risque de dénaturer les règles établies par le traité en matière de prise de décision).

5.6.

Le CESE rappelle par ailleurs que l’objectif du programme REFIT est également lié à l’application du droit dans l’Union européenne. Les lignes directrices de la Commission en matière d’analyse d’impact prévoient également d’examiner si, dans certains cas, l’application effective du droit pourrait ne pas répondre au problème soulevé.

5.7.

Le CESE salue les efforts déployés par la Commission pour accompagner et contrôler la transposition effective des directives au niveau des États membres. Il souligne les constats dont fait état le 30e rapport annuel sur le contrôle de l’application du droit de l’Union européenne (10). Ce rapport mentionne que les retards et infractions touchent plus particulièrement les domaines de l’environnement, des transports et de la fiscalité. Le CESE s’inquiète du fait que, pour 2012, les problèmes se situent essentiellement, et en ordre décroissant, au niveau des transports, de la santé, des consommateurs, de l’environnement, du marché intérieur et des services.

5.8.

Le CESE estime en effet que l’octroi systématique de dérogations, dans quelque domaine que ce soit, ouvre la porte à une législation élaborée par les États membres à la carte au niveau national, ce qui peut contribuer à accroître la complexité législative ainsi que l’insécurité et l’incertitude juridiques dans le marché intérieur. Le CESE rappelle que, dans ses avis antérieurs, il demandait de recourir plus systématiquement, lorsque cela est approprié, à l’instrument du règlement, ce qui, en plus d’une meilleur sécurité juridique, réglerait pour partie ce problème.

5.9.

Le CESE rappelle ses avis antérieurs relatifs au «gold-plating» et à la réglementation intelligente, dans lesquels il réclamait une meilleure qualité des textes juridiques adoptés. Il estime nécessaire de poursuivre les efforts en ce sens dans l’intérêt de la mise œuvre effective des objectifs politiques poursuivis par l’Union européenne.

5.10.

Le CESE rappelle également que, dans certains cas, l’autorégulation et/ou la corégulation peuvent constituer un moyen de prévention efficace ou complémentaire utile à l’action législative, pour autant qu’elles soient dûment encadrées dans le contexte d’un vaste cadre législatif clair, bien défini et guidé par des principes de transparence, d’indépendance, d’efficacité et de responsabilité, entre autres.

Bruxelles, le 10 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  JO C 48 du 15.2.2011, p. 107, JO C 248 du 25.8.2011, p. 87 et JO C 327 du 12.11.2013, p. 33.

(2)  «Pour une réglementation de l’Union européenne bien affutée», COM(2012) 746 final, et «Programme pour une réglementation affûtée et performante (REFIT): résultats et prochaines étapes», COM(2013) 685 final.

(3)  Troisième examen stratégique du programme «Mieux légiférer dans l’Union européenne», COM(2009) 15 final; communication de la Commission sur une réglementation intelligente au sein de l’Union européenne, COM(2010) 543 final; communication de la Commission intitulée «Réglementation intelligente — répondre aux besoins des petites et moyennes entreprises», COM(2013) 122 final.

(4)  JO C 327 du 12.11.2013, p. 33, JO C 248 du 25.8.2011, p. 87 et JO C 48 du 15.2.2011, p. 107.

(5)  JO C 327 du 12.11.2013, p. 33.

(6)  Résolution du Parlement européen du 4 février 2014 «sur le caractère adéquat, la subsidiarité et la proportionnalité de la réglementation de l’Union européenne — 19e rapport «Mieux légiférer» couvrant l’année 2011 qui souligne, outre la nécessité de disposer d’une législation simple, efficace, efficiente, compréhensible et accessible à un coût minimal, que «l’évaluation de l’impact des nouvelles réglementations sur les PME ou les grandes entreprises ne peut avoir pour effet de discriminer les travailleurs en fonction de la taille de leur entreprise et ne peut entraîner de régression des droits fondamentaux des travailleurs, en ce compris les droits à l’information et à la consultation, les conditions de travail, le bien-être au travail et les droits en matière de sécurité sociale, et ne peut faire obstacle à une amélioration de ces droits ni à l’amélioration de leur protection sur le lieu de travail face aux anciens et nouveaux risques professionnels».

Le Conseil européen des 26 et 27 juin 2014 précisait quant à lui que «la Commission, les autres institutions de l’Union européenne et les États membres sont invités à poursuivre la mise en œuvre du programme REFIT de manière ambitieuse, en tenant compte de la protection des consommateurs et des travailleurs ainsi que des préoccupations touchant à la santé et à l’environnement».

(7)  Portant notamment sur Reach, l’environnement, l’acquis sur la santé et la sécurité au travail, la protection des travailleuses enceintes et un meilleur accès au congé parental, la santé et la sécurité au travail dans les salons de coiffure, les troubles musculo-squelettiques, les agents cancérigènes ou mutagènes, sur les tachygraphes, le temps de travail, le travail à temps partiel, le travail temporaire, l’information-consultation, l’information en matière de contrats de travail, l’étiquetage des produits alimentaires ou lié à l’environnement, les notices d’utilisation des médicaments, et les obligations relatives à l’information sur les coûts des services financiers.

(8)  IAB Report 2012, IAB Report 2013.

(9)  Liste de l’ensemble des documents de référence en matière d’analyse d’impact figurant sur le site de la Commission (en anglais): Commission Impact Assessment Guidelines (January 2009), Guidelines + annexes 1-13; autres documents de référence des DG: Operational Guidelines to Assess Impacts on Micro-Enterprises (Secrétariat général + DG Entreprises et industrie); Operational Guidance for Assessing Impacts on Sectoral Competitiveness within the Commission Impact Assessment System — A «Competitiveness Proofing» Toolkit for use in Impact Assessments; Operational Guidance on taking account of Fundamental Rights in Commission Impact Assessments; Assessing Social Impacts; Assessing Territorial Impacts: Operational guidance on how to assess regional and local impacts within the Commission Impact Assessment System.

(10)  http://ec.europa.eu/eu_law/docs/docs_infringements/annual_report_30/com_2013_726_fr.pdf


14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/72


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen — Vers un consensus renouvelé sur la protection des droits de propriété intellectuelle: un plan d’action de l’Union européenne»

[COM(2014) 392 final]

(2015/C 230/11)

Rapporteur:

Pedro Augusto ALMEIDA FREIRE

Le 16 juillet 2014, la Commission a décidé, conformément à l’article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen — Vers un consensus renouvelé sur la protection des droits de propriété intellectuelle: un plan d’action de l’Union européenne»

COM(2014) 392 final.

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 19 novembre 2014.

Lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 10 décembre 2014), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 144 voix pour, 3 voix contre et 2 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le CESE soutient l’approche générale de la Commission consistant à adopter:

un plan d’action pour lutter contre les atteintes à la propriété intellectuelle dans l’Union européenne. Ce plan d’action contient une série de mesures visant à recentrer la politique de l’Union européenne en matière de protection des droits de propriété intellectuelle (DPI) sur les infractions commises à une échelle commerciale, selon l’approche «Suivez l’argent» («Follow the money»), et

une stratégie pour la protection et le respect des DPI dans les pays tiers, dont l’objectif est de définir une approche à l’échelon international en examinant les récentes évolutions et en présentant des solutions afin d’améliorer les moyens d’action dont dispose actuellement la Commission, pour promouvoir des normes plus strictes en matière de propriété intellectuelle dans les pays tiers et pour éliminer le commerce de biens contrefaits,

dans la mesure où les atteintes à la propriété intellectuelle sont un phénomène global qui doivent de ce fait recevoir un traitement holistique.

1.2.

Le CESE soutient l’objectif du plan d’action visant à lutter contre les atteintes aux droits de propriété intellectuelle à une échelle commerciale, car elles nuisent aux investissements dans l’innovation et la création d’emplois durables dans l’Union européenne, et provoquent un manque à gagner fiscal.

1.3.

Le CESE prend bonne note du rôle de plus en plus crucial que joue l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (OHMI) en ce qui concerne l’élaboration et l’accompagnement des stratégies de la Commission européenne en matière de promotion et défense des droits de propriété intellectuelle, dont cette approche «multiobjectifs» qui fait l’objet du plan d’action.

1.4.

Le CESE se range à l’approche pragmatique de la Commission consistant à privilégier des outils tels que «Suivez l’argent» et l’implication des acteurs concernés.

1.5.

Le CESE peut faire sienne l’approche «multiobjectifs» de la Commission, à condition que ces objectifs soient mieux définis et que leurs aspects quantitatifs et qualitatifs soient précisés; il se félicite notamment des campagnes de communication de l’Observatoire européen des atteintes aux droits de propriété intellectuelle («l’Observatoire») pour sensibiliser les jeunes (1) aux répercussions des atteintes aux droits de propriété intellectuelle, mais aussi les juges et les praticiens du droit (2).

1.6.

Le CESE se félicite de l’attention accordée par la Commission aux PME pour faciliter leur accès aux voies de recours judiciaire et soutient aussi le projet européen IPorta, système de soutien des PME (3) prenant en considération les questions liées à la protection des droits de propriété intellectuelle et coordonnant l’assistance nationale.

1.7.

Le CESE appelle la Commission à s’assurer que les moyens d’accès et de protection effective de la propriété intellectuelle en Europe soient accessibles, y compris financièrement, à toutes les entreprises, quelle que soit leur taille.

1.8.

Il regrette néanmoins que l’approche de la Commission se limite à des instruments non législatifs, sans même évoquer l’opportunité d’évaluer les instruments législatifs existants et l’intérêt de les réviser. Le CESE souligne à cet égard que la Commission aurait pu être plus ambitieuse, et également prendre en considération ce paramètre.

1.9.

En outre, il fait part de son désaccord quant au rôle exagéré que la Commission attribue à la mise en œuvre de systèmes d’application volontaire, de protocoles d’accords volontaires et de bonnes pratiques dans un domaine qui relève de la contrefaçon et du piratage.

2.   Observations générales

2.1.

Le plan d’action de l’Union européenne «Vers un consensus renouvelé sur la protection des droits de propriété intellectuelle» comprend dix actions spécifiques prévoyant une nouvelle politique consistant à créer et utiliser des outils pour contrer en particulier les activités portant atteinte aux droits de propriété intellectuelle à une échelle commerciale. Ces activités sont les plus préjudiciables et représentent un défi majeur pour l’Union européenne car elles nuisent aux investissements dans l’innovation et la création d’emplois durables, et causent un manque à gagner fiscal.

2.2.

Ces nouveaux outils, qui sont pour le moment non législatifs, comprennent une série d’actions basées sur l’approche «Suivez l’argent» («Follow the money»), dont la finalité est d’empêcher les contrevenants agissant à une «échelle commerciale» d’accéder à des moyens de promotion et de distribution de produits contrefaits, et de les priver de leurs revenus.

2.3.

Les objectifs du plan d’action de l’Union européenne «Vers un consensus renouvelé sur la protection des droits de propriété intellectuelle» contenus dans la communication de la Commission faisant l’objet de cet avis, et ceux de la stratégie pour la protection et l’application des droits de propriété intellectuelle dans les pays tiers sont communs:

i)

utiliser tous les moyens possibles pour dissuader et empêcher efficacement l’entrée et la diffusion, sur le marché intérieur, de produits contrefaits provenant de pays tiers;

ii)

et stimuler l’investissement, la croissance et l’emploi dans les secteurs dépendant de la propriété intellectuelle, qui occupent une place essentielle dans nos économies.

2.4.

Rendre les consommateurs et les producteurs plus conscients des conséquences d’atteintes aux DPI grâce à des débats et de la sensibilisation est également un volet important de cet exercice.

2.5.

Au plan européen, les actions seront mises en œuvre par la Commission, le cas échéant en partenariat avec l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (OHMI), qui abrite depuis juin 2012 l’Observatoire (4). Dans une étude publiée par l’Observatoire le 25 novembre 2013 (5), il ressortait que les sondés, en particulier les plus jeunes, étaient peu sensibles à l’ampleur de l’impact que les atteintes aux DPI pouvaient avoir sur le maintien et la création d’emplois liés à la propriété intellectuelle. Elle a également fait apparaître que les jeunes européens avaient le sentiment que l’infrastructure de la propriété intellectuelle profitait surtout aux grandes entreprises.

2.6.

La Commission a donc opté pour une approche «multiobjectifs», prenant en considération l’analyse des raisons pour lesquelles les contrefaçons sont de plus en plus recherchées par la «génération numérique». Une partie de cette stratégie comprend le développement, par l’Observatoire, de moyens de communication destinés à sensibiliser les citoyens de l’Union aux répercussions des atteintes aux DPI, notamment sur l’emploi et l’économie.

3.   Observations particulières

3.1.

La Commission ne détaille pas pour l’instant le contenu de ces mesures, mais assure qu’elle procédera à une consultation sur les outils non législatifs comprenant l’approche «Suivez l’argent» («Follow the money»), dont la finalité est de priver les contrevenants agissant à une échelle commerciale des moyens de promouvoir et distribuer des biens contrefaits, ainsi que de les priver de leurs revenus. Ces outils seront élaborés de façon transparente et rigoureuse, afin de garantir leur efficacité dans la lutte contre les violations des droits de propriété intellectuelle.

3.2.

Le dispositif sera épaulé par des actions de coopération entre les autorités européennes et des discussions/négociations avec les pays tiers. Il s’agira par exemple «d’utiliser tous les moyens possibles pour dissuader et empêcher efficacement l’entrée et la diffusion des contrefaçons sur les marchés de l’Union européenne et ceux des pays tiers».

3.3.

Ces outils «non législatifs» s’appuieront sur la bonne volonté des acteurs, et donc sans recourir à de nouveaux instruments législatifs, mais ils s’appuieront en revanche sur des instruments législatifs existants. L’avantage de ces solutions négociées réside dans leur rapidité de mise en œuvre. Ces mesures préventives permettront d’améliorer l’efficacité des voies de recours devant les juridictions civiles. Cet objectif ne sera atteint qu’à la condition que ces mesures soient élaborées de façon transparente et qu’elles prennent également en considération les intérêts publics en présence.

3.4.

Le CESE estime que cette approche limitée de l’autorégulation, dans sa forme d’«accords volontaires» ou de «bonnes pratiques», ne saurait remplacer l’action législative dans des domaines qui doivent être régis par une réglementation efficace.

4.   La notion d’«échelle commerciale»

4.1.

La notion d’«échelle commerciale», qui s’applique à certaines des mesures énoncées dans le plan d’action de la Commission, est bien plus large qu’elle ne le laisse entendre. Le plan d’action est d’ailleurs assez laconique à cet égard, mais le CESE relève que la notion figure déjà dans l’acquis de l’Union et qu’elle permet de renforcer l’intensité des mesures d’injonction et des sanctions civiles.

4.2.

Le CESE souligne que l’«échelle commerciale» peut viser des opérations qui ne sont pas nécessairement effectuées à des «fins commerciales».

4.3.

La notion se retrouve dans la directive 2004/48/CE sur le respect des droits de propriété intellectuelle (6) et est le fondement du recours à certaines voies de droit civil. Par exemple, le critère d’«échelle commerciale» permet au juge national d’ordonner des mesures conservatoires, telles que la saisie conservatoire des biens mobiliers ou immobiliers du contrevenant supposé, y compris le blocage de ses comptes bancaires et autres avoirs (article 9, paragraphe 2, de la directive). Dans certains États membres, ce critère est également utilisé comme un déclencheur de sanctions pénales, bien que cela soit exclu de l’acquis de l’Union.

4.4.

D’autres instruments législatifs de l’Union européenne utilisent des notions similaires à celle d’«échelle commerciale»; ainsi, la directive 2001/29/CE sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information (7) fait référence aux concepts de «caractère commercial», «but commercial», «avantage économique ou commercial direct ou indirect», ou «utilisation commerciale».

L’article 13, paragraphe a), de la directive 98/71/CE du 13 octobre 1998 sur la protection juridique des dessins ou modèles (8), relatif à la limitation des droits conférés par l’enregistrement d’un dessin ou modèle, dispose que «les droits conférés dès l’enregistrement d’un dessin ou modèle ne s’exercent pas à l’égard d’actes accomplis à titre privé et à des fins non commerciales».

4.5.

En conclusion, il revient donc au juge de se prononcer au cas par cas, au risque de créer une jurisprudence incohérente, inadaptée et donc incertaine.

4.6.

Les services de la Commission, conscients de l’ambiguïté de la notion et de l’incertitude juridique qui en découle, ont encouragé l’Observatoire à collecter de la jurisprudence nationale relative à des violations de DPI, afin, entre autres, d’affiner le concept. En outre, à la suite d’un appel à manifestation d’intérêt lancé l’été dernier dans le milieu universitaire, afin d’analyser les concepts économiques de la propriété intellectuelle, un premier atelier économique a été organisé le 19 septembre 2014. À cette occasion, certains spécialistes ont discuté de l’utilisation en pratique des concepts d’«échelle commerciale» et de «finalité commerciale» dans le contexte des infractions à la PI (9) et des moyens de les appréhender dans une perspective économique.

4.7.

Compte tenu de l’enjeu de la réflexion, le CESE souhaiterait que les services de la Commission analysent cette question et fassent part de leurs conclusions aux parties intéressées, y compris à la société civile.

5.   «Suivez l’argent»

5.1.

La Communication vise aussi bien l’internet que les réseaux de distribution physique. Elle couvre les produits digitaux et non digitaux, les violations des droits de PI nuisibles à leur création, leur promotion, leur distribution et leur utilisation. L’approche «Suivez l’argent» consiste donc à dissuader les contrefacteurs de faire du commerce illicite de biens contrefaits.

5.2.

La mise en œuvre de cette approche veillera à ce que tous les acteurs pertinents du circuit à forte valeur ajoutée en PI prennent les mesures d’anticipation nécessaires pour préserver leur compétitivité sur le marché. Le fil conducteur de ces marchés doit rester l’innovation pour inciter des investissements dans les activités créatives et inventives.

5.3.

Ceci devrait renforcer la confiance dans les marchés numériques et permettre la distribution de produits compétitifs à forte valeur ajoutée en PI, ainsi que la croissance et l’essor de ces marchés. L’objectif visé est de passer d’une politique de la PI axée sur la sanction et la réparation des violations aux droits de PI à une perspective plus préventive et inclusive, garantissant et offrant au consommateur du marché intérieur une offre étendue et variée de produits à forte valeur ajoutée en PI.

5.4.

La Commission propose de publier tous les deux ans un rapport de suivi sur la mise en œuvre de cette politique. Le CESE insistera pour que le premier rapport contienne des indicateurs valables et soit publié en temps utile.

5.5.

Renforcer la sécurité des services de paiement avec des voies de recours en cas d’achat non intentionnel de biens contrefaits pourra également renforcer la protection des consommateurs et leur confiance dans le marché intérieur. La Commission annonce à ce sujet une consultation publique relative à l’impact des régimes de protection des consommateurs sur la lutte contre les violations des droits PI à l’échelle commerciale.

5.6.

Au regard du lien étroit unissant les deux initiatives de la Commission et de l’importance de l’approche «Suivez l’argent», le CESE souhaite que la Commission lance une consultation de grande ampleur sur la question cruciale de la protection des consommateurs dans le domaine des services de paiement et qu’elle l’étende également à l’approche «Suivez l’argent» de façon générale.

5.7.

Le CESE invite également les services de la Commission à consulter les acteurs économiques afin d’obtenir leur retour d’expérience s’agissant de la prise en compte du bénéfice du contrefacteur dans l’évaluation des dommages et intérêts dans les cas de contrefaçons (10).

6.   Les PME

6.1.

Dans certains États membres, la propriété intellectuelle n’est pas une thématique qui compte pour plus d’une PME sur deux (54 %), ou bien encore, la propriété intellectuelle est un sujet familier (46 %), mais perçu comme coûteux, complexe et long. C’est une situation étonnante dans une économie dominée par la connaissance, où des éléments immatériels tels que le savoir-faire, la réputation, le design ou encore l’image ont pris une importance capitale (11).

6.2.

Il apparaît en outre que les PME qui inscrivent la propriété industrielle dans leur stratégie de développement ont de meilleures performances économiques que les autres, comme le démontrent certains données chiffrées. Ainsi, les 32 lauréats en France des Trophées INPI (Institut de la propriété industrielle) de l’innovation 2010 dans la catégorie PME ont créé 614 emplois depuis 2006, multiplié par cinq leur chiffre d’affaires entre 2006 et 2009 et doublé leur chiffre d’affaires à l’exportation. Dans le même temps, ces entreprises ont accentué leur effort de R&D avec une augmentation de leur budget de 65,6 % (12).

6.3.

Le CESE soutient donc l’approche de la Commission tendant à améliorer l’accessibilité des voies de recours judiciaires aux PME de façon générale (13) et plus particulièrement dans leurs litiges en matière de propriété intellectuelle. En effet, le coût financier et la complexité des procédures judiciaires dissuadent souvent les PME innovantes de faire valoir leurs droits de propriété intellectuelle, y compris ceux découlant de brevets essentiels.

6.4.

Le coût financier est un facteur déterminant pour que les entreprises européennes investissent dans l’innovation. Dès lors, la protection de la propriété intellectuelle, le renouvellement des titres de propriété intellectuelle et leur protection doivent être abordables. Le brevet unitaire pourrait à cet égard inciter les entreprises, y compris les PME, les jeunes entrepreneurs et les start-up à protéger leurs inventions, pour autant que les coûts d’obtention soient raisonnables et non prohibitifs. Les entreprises devraient également se voir garantir un accès à la justice, y compris à la juridiction unitaire du brevet, à coût raisonnable.

6.5.

Les PME doivent également adopter des stratégies de commercialisation ou de distribution, mais beaucoup ne le font pas de façon efficace faute de compétences et d’expertise nécessaires pour protéger et promouvoir efficacement leurs droits de propriété intellectuelle, comme le souligne justement le plan d’action de la Commission.

6.6.

Le CESE soutient à cet égard le projet européen IPorta qui est un système de soutien (14) prenant en considération les questions liées à la protection des droits de propriété intellectuelle et coordonnant l’assistance nationale.

Bruxelles, le 10 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  https://oami.europa.eu/ohimportal/fr/web/observatory/news/-/action/view/1251336

(2)  Séminaire des juges sur la contrefaçon et le blanchiment d’argent des 16 et 17 octobre 2014 à l’Office d’harmonisation du marché intérieur (OHMI), https://oami.europa.eu/ohimportal/fr/web/observatory/news/-/action/view/1574263. Voir également JO L 354 du 28.12.2013, p. 73 et COM(2014) 144 final.

(3)  http://ec.europa.eu/enterprise/initiatives/ipr/what-are-iprs/index_fr.htm

(4)  Le règlement (UE) no 386/2012 du 19 avril 2012 confie à l’OHMI différentes tâches visant à faciliter et à soutenir l’action des autorités nationales, du secteur privé et des institutions de l’Union en matière de lutte contre les atteintes aux DPI. Ces tâches ne comprennent pas la participation à des opérations ou enquêtes individuelles menées par les autorités nationales, ni les domaines relevant du titre V de la troisième partie du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (par exemple la coopération en matière pénale et la coopération policière).

(5)  Voir le site oami.europa.eu. Cette étude se basait sur une revue de la littérature, sur une enquête qualitative auprès de 250 Européens âgés de 15 à 65 ans et sur une étape quantitative au cours de laquelle plus de 26  000 Européens ont exprimé leur avis lors d’entretiens téléphoniques.

(6)  Voir JO L 195 du 16.6.2004, p. 16.

(7)  Voir JO L 167 du 22.6.2001, p. 10.

(8)  Voir JO L 289 du 28.10.1998, p. 28.

(9)  http://ec.europa.eu/internal_market/iprenforcement/docs/workshops/140919-workshop_en.pdf

(10)  Par exemple, en France, le principe existe déjà (voir la loi no 2014-315 du 11 mars 2014, en vigueur depuis le 14 mars 2014). L’article L615-7 du code de la propriété intellectuelle (CPI) tel que modifié par l’article 2 de ladite loi dispose désormais que pour le calcul des dommages et intérêts, la juridiction devra prendre en considération distinctement les conséquences économiques négatives, le préjudice moral et les bénéfices réalisés par le contrefacteur, y compris les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels. Mais il semble difficile à mettre en œuvre, souvent en raison d’un problème de preuve du bénéfice réalisé par le contrefacteur.

(11)  http://www.picarre.be/assets/Documents/Rapport-PIPICARR-tlchargeable3.pdf

(12)  http://www.journaldunet.com/economie/magazine/propriete-industrielle.shtml

(13)  La Commission a récemment proposé de renforcer et d’améliorer l’actuelle procédure européenne de règlement des petits litiges, qui est une procédure uniforme disponible dans tous les États membres [règlement (CE) no 861/2007]. Voir JO C 226 du 16.7.2014, p. 43.

(14)  http://ec.europa.eu/enterprise/initiatives/ipr/what-are-iprs/index_fr.htm


14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/77


Avis du Comité économique et social européen sur le «Livre blanc — Vers un contrôle plus efficace des concentrations dans l’Union européenne»

[COM(2014) 449 final]

(2015/C 230/12)

Rapporteur:

M. Juan MENDOZA CASTRO

Le 16 juillet 2014, la Commission européenne a décidé, conformément à l’article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur le:

«Livre blanc — Vers un contrôle plus efficace des concentrations dans l’Union européenne»

COM(2014) 449 final.

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 19 novembre 2014.

Lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 10 décembre 2014), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 137 voix pour, 1 voix contre et 1 abstention.

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le CESE accueille favorablement le livre blanc dans la mesure où il renforce un des piliers de la politique de concurrence de l’Union et simplifie les procédures.

1.2.

Dans le livre blanc, la Commission cherche un équilibre entre l’intérêt général, en comblant une lacune dans le système de réglementation, et l’intérêt des entreprises, qui est de maintenir les coûts au niveau le plus faible possible. Il y a toutefois lieu de veiller à ce que l’ampleur des modifications apportées au règlement sur les concentrations n’aille pas à l’encontre de cet objectif. Il faut également tenir compte des avantages que les concentrations apportent aux entreprises.

1.3.

S’appuyant sur la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) et la pratique administrative, le CESE suggère que la théorie du préjudice sur laquelle se fonde le livre blanc:

a)

consiste à bien mettre en évidence de quelle manière la concurrence et, en dernière instance, les consommateurs, peuvent être victimes d’un préjudice;

b)

ait une cohérence interne;

c)

tienne compte des avantages qui motivent toutes les parties; et

d)

soit cohérente (ou du moins non contradictoire) avec les données empiriques.

1.4.

Le CESE recommande que le nouveau cadre réglementaire prenne également en compte les incidences sociales, notamment en termes d’emploi, et la capacité concurrentielle des entreprises sur les marchés mondiaux.

1.5.

Le Comité estime que, dans le système de transparence «sélectif» que propose la Commission, il y a lieu de dûment clarifier les notions de «concurrent» selon le critère applicable aux mesures antitrust, et d’«entreprise liée verticalement» (en envisageant l’établissement de seuils), la nature des liens pour que l’acquisition d’une participation soit «significative» et le cas des groupes d’entreprises actives dans de multiples secteurs.

1.6.

Le CESE juge important de préserver, voire d’accroître, le prestige acquis par le système de contrôle des concentrations de l’Union européenne.

1.7.

Bien que le livre blanc soit un pas dans la bonne direction, il y a lieu d’examiner l’opportunité d’élargir son approche en raison des changements intervenus au cours des 25 dernières années (augmentation du nombre de cas et d’autorités de contrôle) et des besoins de l’économie européenne au XXIe siècle.

1.8.

Il existe actuellement 28 autorités de contrôle dans l’Union européenne (31 si l’on considère l’ensemble de l’EEE) mais leurs critères ne sont pas homogènes. En conséquence, le CESE suggère de revoir le livre blanc en visant:

l’harmonisation de la réglementation des États membres,

une révision des exigences en matière de notifications obligatoires, et

des progrès accrus sur la voie d’un système de «guichet unique».

1.9.

Le livre blanc annonce des changements au niveau des règles procédurales qui méritent un accueil favorable de la part du Comité. Les modifications concernent:

la simplification du mécanisme de renvoi d’affaires en prénotification des États membres vers la Commission,

la suppression de l’élément auto-incriminatoire dans le cadre du renvoi en prénotification de la Commission vers les États membres, et

le renvoi d’affaires des États membres vers la Commission postérieurement à la notification.

1.9.1.

Les mesures de simplification des procédures qui sont le prolongement des «mesures de simplification» de 2013, notamment dans le cas des entreprises communes (joint ventures) en dehors de l’EEE, méritent également un accueil favorable de la part du CESE.

2.   Contenu du livre blanc

2.1.

Dix ans après la vaste refonte, en 2004 (1), du règlement de l’Union européenne sur les concentrations, le livre blanc de la Commission fait le point sur la manière dont le critère matériel de «l’entrave significative à une concurrence effective» a été appliqué et présente quelques idées sur la manière de favoriser encore davantage la convergence et la coopération entre la Commission et les États membres. Il présente en outre des propositions de modifications concrètes visant à rendre le contrôle des concentrations plus efficace dans l’Union européenne.

2.2.

Il se propose d’une part de faire en sorte que le règlement sur les concentrations traite de toutes les sources de préjudice potentiel pour la concurrence, et donc pour les consommateurs, consécutif à des concentrations ou restructurations d’entreprises, y compris lorsque celles-ci découlent de l’acquisition de participations minoritaires non contrôlantes.

2.3.

D’autre part, il vise à assurer une coopération plus étroite entre la Commission et les autorités nationales de concurrence (ANC) et une répartition adéquate des tâches dans le domaine du contrôle des concentrations, notamment en rationalisant les règles régissant le renvoi d’affaires de concentration des États membres vers la Commission et inversement.

3.   Observations générales

3.1.

Le CESE accueille favorablement le livre blanc dans la mesure où il renforce un des piliers de la politique de concurrence de l’Union et, avant tout, parce qu’il comporte des mesures qui contribuent à simplifier les procédures.

3.2.

La Commission fonde la proposition centrale du livre blanc — accroître sa capacité de contrôle afin de l’étendre aux participations minoritaires contraires à la concurrence — sur le fait que le règlement (CE) no 139/2004 ne peut s’appliquer que si les concentrations entraînent «un changement durable du contrôle» (article 3, paragraphe 1), ce qui n’est pas le cas dans cette hypothèse. Il considère en outre que les articles 101 et 102 du TFUE ne constituent pas à eux seuls une base juridique suffisante pour aborder le cas des participations minoritaires.

3.3.

De manière générale, la Commission, par ce livre blanc, cherche un équilibre entre l’intérêt public de combler une lacune dans le système de réglementation des concentrations d’entreprises et l’intérêt des entreprises de maintenir les coûts administratifs au niveau le plus faible possible.

3.4.

Le CESE estime toutefois qu’il y a lieu d’éviter que la portée des termes utilisés dans la formulation actuelle des propositions ne débouche en définitive sur une augmentation des coûts. Il convient néanmoins d’évaluer ce point à la lumière des avantages pour les entreprises qui découlent des nouvelles dispositions.

3.5.

Il estime de même nécessaire de clarifier certains aspects du livre blanc afin d’éviter que le résultat n’aille à l’encontre de l’objectif de faciliter le contrôle des concentrations sans augmenter la charge administrative.

3.6.

Le livre blanc signale que le cadre pour évaluer les concentrations est la «théorie du préjudice», laquelle a été adoptée par la Commission à partir de 2002 après avoir subi des revers judiciaires (2). La théorie du préjudice exige que son application:

a)

consiste à bien mettre en évidence de quelle manière la concurrence et, en dernière instance, les consommateurs, peuvent être victimes d’un préjudice;

b)

ait une cohérence interne;

c)

tienne compte des avantages qui motivent toutes les parties; et

d)

soit cohérente (ou du moins non contradictoire) avec les données empiriques (3).

3.6.1.

Ces principes — entérinés par la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne et la pratique administrative de la Commission (4) — doivent s’appliquer également aux participations minoritaires.

3.7.

Puisque le livre blanc propose un élargissement substantiel des compétences de la Commission, le CESE recommande que l’analyse des processus de concentration prenne également en compte les incidences sociales, notamment en termes d’emploi.

4.   L’Union européenne a besoin d’un espace européen en matière de concentrations qui répond aux exigences du marché intérieur du XXIe siècle

4.1.

Le système de contrôle des concentrations de l’Union européenne a acquis un certain prestige au fil des ans et sert de modèle sur d’autres continents. Le CESE estime qu’il est important de préserver celui-ci et même de l’accroître.

4.2.

Le Comité accueille favorablement l’objectif du livre blanc d’améliorer la coordination entre la Commission et les ANC et de progresser vers la création d’un «espace européen en matière de concentrations» propre à faciliter un traitement homogène des opérations et à contribuer à la sécurité juridique. Les mesures proposées doivent donc aller au-delà de réformes ponctuelles dans le règlement et entreprendre de manière plus large une révision du système de contrôle actuellement en vigueur.

4.3.

Au cours des 25 dernières années, le contrôle des concentrations s’est considérablement renforcé au sein de l’Union européenne, parallèlement à l’accroissement de la dimension et de l’internationalisation des entreprises européennes. En 1989, il n’y avait que trois autorités nationales compétentes en la matière; en 2000, y compris la Commission, on en comptait 14 et, actuellement, elles sont au nombre de 28 (31 si l’on considère l’ensemble de l’EEE).

4.4.

La disparité des normes et des critères d’application représente une charge supplémentaire pour les entreprises qui, dans de nombreux cas, se révèle inutile: moins de 5 % des opérations de concentration notifiées à la Commission sont considérées comme potentiellement dangereuses pour la concurrence (5). Le système de contrôle doit rendre compatible la protection des consommateurs et des utilisateurs et l’impérieuse nécessité pour les entreprises d’être concurrentielles sur les marchés mondiaux.

4.5.

Le CESE suggère dès lors de revoir le livre blanc et de l’inscrire dans un cadre plus large comprenant:

l’harmonisation de la législation des États membres pour éviter des disparités dans les critères d’application,

une révision des exigences en matière de notifications obligatoires, car l’expérience montre que, dans de nombreux cas, elles ne sont pas nécessaires,

des progrès accrus sur la voie d’un système de «guichet unique» en raison de la prolifération des autorités de contrôle.

5.   Observations particulières

5.1.   Le système de transparence «sélectif»

5.1.1.

La Commission propose un système de transparence «sélectif» reposant sur deux critères cumulatifs afin d’établir l’existence ou la non-existence de la condition requise d’entrave significative à une concurrence effective:

a)

l’acquisition de participations minoritaires chez un concurrent ou une entreprise liée verticalement; et

b)

le lien concurrentiel est considéré comme «significatif» lorsque la participation minoritaire est d’«environ» 20 % ou comprise entre 5 % et «environ» 20 % mais assortie de facteurs supplémentaires tels que des droits assurant à l’acquéreur une minorité de blocage de fait, un siège au sein du conseil d’administration ou un accès à des informations commercialement sensibles de la cible.

5.1.2.

Le CESE suggère, lors de la rédaction des modifications au règlement, de clarifier les aspects suivants:

en premier lieu, la notion de «concurrent» qui doit être considérée au sens de la définition applicable aux mesures antitrust sur des marchés géographiquement définis,

en deuxième lieu, les paramètres à prendre en compte pour l’application de la notion d’«entreprise liée verticalement». Il serait souhaitable d’envisager de fixer certains seuils, compte tenu de l’augmentation considérable du nombre d’avis d’information exigés par le règlement à laquelle peut donner lieu la formule générique,

en troisième lieu, la nature juridique des liens pour que l’acquisition de participations soit considérée comme «significative»,

enfin, il convient d’indiquer si l’analyse de l’entrave significative à une concurrence effective doit inclure également l’activité mondiale des groupes d’entreprises qui exercent leurs activités dans différents secteurs de l’économie.

5.2.   Simplification du mécanisme de renvoi d’affaires en prénotification des États membres vers la Commission

5.2.1.

Le CESE applaudit à la proposition visant à éliminer le système en deux temps exigé par l’article 4, paragraphe 5, du règlement (CE) no 139/2004 (mémoire motivé puis notification) et à le remplacer par une notification directe à la Commission. Le faible nombre de veto auquel ont droit les États membres justifie cette modification qui permettra d’accélérer les procédures.

5.2.2.

Le CESE accueille également favorablement la proposition de faciliter l’échange d’information entre les États membres et la Commission en transmettant la note d’information initiale des parties ou la demande en attribution de l’affaire aux États membres afin de les avertir de l’opération lors des prises de contact précédant la notification.

5.3.   Renvoi en prénotification de la Commission vers les États membres

5.3.1.

Il est proposé d’éliminer de l’article 4, paragraphe 4, du règlement (CE) no 139/2004 l’«élément auto-incriminatoire», qui prévoit que les parties participant à une fusion ou à une prise de contrôle puissent présenter un mémoire motivé informant la Commission que la concentration peut affecter de manière significative la concurrence sur un marché déterminé d’un État membre. Avec la réforme, il suffirait de démontrer que l’opération peut avoir sa principale incidence sur ce marché.

5.3.2.

La Commission estime que l’élimination de cette exigence dissuasive peut encourager l’utilisation de cette déclaration volontaire, critère que le CESE approuve.

5.4.   Renvoi des États membres vers la Commission postérieurement à la notification

5.4.1.

Dans le livre blanc, la Commission propose de modifier l’article 22 du règlement pour réserver aux seuls États membres compétents pour évaluer une concentration (la formule actuelle est «les États membres») la décision de la renvoyer à la Commission dans un délai de quinze jours ouvrables et en accord avec leur législation nationale. La Commission pourrait décider si elle accepte ou non la demande de renvoi. Si elle se prononçait de manière positive, elle serait compétente pour l’ensemble de l’EEE. Toutefois, si un (ou plus d’un) État membre compétent s’opposait au renvoi (sans être obligé de motiver son opposition), la Commission déclinerait sa compétence pour l’ensemble de l’EEE, et les États membres conserveraient leur compétence.

5.4.2.

De l’avis du CESE, même si la proposition permet de simplifier la procédure, son efficacité est limitée par le fait qu’au sein de l’Union européenne, seuls l’Allemagne, l’Autriche et le Royaume-Uni disposent de cette compétence en cas d’acquisition de participations minoritaires non contrôlantes.

5.4.3.

Modifier les renvois après notification suppose également d’accroître la compétence de la Commission, ce à quoi le CESE est favorable: en l’absence d’objection des autres États membres et si la Commission accepte la recommandation, elle serait compétente pour réviser l’opération sur tout le territoire de l’EEE et non plus seulement sur le territoire de l’État membre de référence (à moins que l’autorité d’un État membre n’ait déjà autorisé la transaction avant que la Commission n’ait assumé cette compétence).

5.5.   Autres modifications

5.5.1.

Outre l’approbation des «mesures de simplification» de 2013 (6), le livre blanc propose d’autres mesures ayant le même objectif et qui méritent un accueil favorable de la part du CESE.

5.5.2.

L’intention la plus remarquable est celle qui vise à exclure du champ d’application du règlement les accords de création d’entreprises communes (joint ventures) en dehors de l’EEE qui n’ont pas d’effet sur la concurrence dans l’EEE.

5.5.3.

Est mentionnée en outre la possibilité pour la Commission d’exempter de la notification préalable obligatoire certaines catégories de concentrations qui ne posent normalement pas de problème de concurrence.

Bruxelles, le 10 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  Règlement (CE) no 139/2004 du Conseil du 20 janvier 2004 relatif au contrôle des concentrations entre entreprises (JO L 24 du 29.1.2004).

(2)  En particulier affaires T-342/99, Airtours/Commission, Rec. 2002 p. II-2585; T-310/01, Schneider Electric/Commission, Rec 2002 p. II-4071; et T-5/02, Tetra Laval/Commission, Rec. 2002 p. II-4381.

(3)  Voir Hans Zenger et Mike Walker, «Theories of Harm in European Competition Law», http://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=2009296

(4)  Affaire IV/M.938 Guinness/Grand Metropolitan (15.10.1997) et affaire IV/M.1524 Airtours/First Choice (22.9.1999).

(5)  http://ec.europa.eu/competition/mergers/statistics.pdf

(6)  Règlement d’exécution (UE) no 1269/2013 de la Commission du 5 décembre 2013 (JO L 336 du 14.12.2013, p. 1) et communication de la Commission relative à une procédure simplifiée du traitement de certaines opérations de concentration en application du règlement (CE) no 139/2004 du Conseil (JO C 366 du 14.12.2013, p. 5); rectificatif: JO C 11 du 15.1.2014, p. 6.


14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/82


Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions relative à un cadre stratégique de l’Union européenne en matière de santé et de sécurité au travail (2014-2020)

[COM(2014) 332 final]

(2015/C 230/13)

Rapporteur:

Carlos TRINDADE

Le 6 juin 2014, la Commission a décidé, conformément à l’article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions relative à un cadre stratégique de l’Union européenne en matière de santé et de sécurité au travail (2014-2020)»

COM(2014) 332 final.

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 20 novembre 2014.

Lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 11 décembre 2014), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 189 voix pour, 23 voix contre et 20 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le CESE se félicite que l’Union européenne possède un cadre global, sophistiqué sur le plan économique et social, que viennent compléter les stratégies européennes pluriannuelles adaptées par les États membres en fonction des contextes nationaux. Le CESE considère toutefois qu’il existe des difficultés, des lacunes et de nouveaux défis auxquels il convient de trouver des solutions.

1.2.

Le CESE se réjouit de l’intention déclarée de la Commission de se concentrer sur la prévention, la simplification des règles — sans remettre en cause les niveaux de protection existants — et le respect de ces règles. La stratégie doit garantir l’équilibre entre un niveau élevé de protection et les charges administratives des entreprises.

1.3.

Le CESE se félicite de voir le grand intérêt que porte la Commission aux PME, des avis, des informations et des orientations qu’elle leur donne par le biais des TIC et du renforcement de la coordination entre les services publics dans le soutien aux PME.

1.4.

Le CESE considère comme indispensables une formation plus approfondie pour les inspecteurs du travail ainsi qu’un renforcement de leur nombre — sachant que, dans près de la moitié des États membres, le seuil minimal recommandé par l’OIT (soit 1 inspecteur pour 10  000 travailleurs) n’est pas atteint.

1.5.

Le CESE recommande à la Commission, compte tenu de la nécessité de créer chez les jeunes en général, les jeunes diplômés, les stagiaires et les apprentis une culture de prévention, d’adopter des mesures leur permettant de recevoir des informations ainsi que des formations à la fois appropriées et pratiques.

1.6.

De même, le CESE comprend le rôle de l’investissement dans la prévention et estime avec la Commission que ce dernier ne peut être laissé aux seules entreprises, mais que les États membres doivent également en prendre leur part. Il appelle les entreprises et les États membres à investir davantage et à garantir la participation des travailleurs.

1.7.

Le CESE souligne les difficultés rencontrées dans l’Union européenne en ce qui concerne l’existence de données et invite la Commission à se doter de toute urgence de statistiques et d’indicateurs qui tiennent en particulier compte du sexe et du cycle de vie des travailleurs. La liste des maladies professionnelles, y compris les accidents survenus pendant les heures de travail, et les règles de report et d’analyse statistique de ces données devront être réglementées et publiées au sein de l’Union européenne. Il estime qu’il y a lieu de renforcer et de diffuser largement les travaux des agences spécialisées et souhaite que la diffusion de l’information et des bonnes pratiques contribue à renforcer une culture de la prévention. Il estime de même nécessaire d’approfondir l’étude des nouveaux risques et de préparer des mesures (de nature législative ou autre) adaptées aux résultats des recherches entreprises.

1.8.

Le CESE considère que la participation des travailleurs et de tous les partenaires sociaux à tous les niveaux et sur le lieu de travail est fondamentale pour la mise en œuvre efficace de cette stratégie. Il invite la Commission à intensifier les discussions et les consultations auprès des partenaires sociaux et à développer des actions concertées. Les États membres devraient promouvoir le dialogue social et les conventions collectives.

1.9.

Le CESE critique le fait que la Commission ne définisse aucun objectif quantifié au niveau européen pour les accidents du travail et les maladies professionnelles, et recommande aux États membres d’intégrer cette quantification dans le cadre de leurs stratégies nationales.

2.   Importance de la santé et de la sécurité au travail

2.1.

L’importance stratégique de la santé et de la sécurité au travail en Europe est inscrite dans le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, qui aborde spécifiquement cette question dans ses articles 151 et 153, notamment avec l’objectif d’une harmonisation dans le progrès des conditions de travail.

2.2.

En dépit d’une enquête récente d’Eurobaromètre qui montre qu’une grande majorité des personnes interrogées (85 %) est satisfaite de la santé et de la sécurité sur le lieu de travail et que 77 % affirment qu’il existe des informations et/ou des formations dans ce domaine sur le lieu de travail, des améliorations demeurent possibles en matière de sécurité et de santé au travail dans l’Union européenne; en effet, la réalité actuelle est très préoccupante: chaque année, dans l’Union européenne, plus de 4  000 travailleurs meurent d’accidents du travail et plus de 3 millions sont victimes d’un accident du travail grave donnant lieu à une absence de plus de 3 jours. Environ un travailleur sur quatre estime que sa santé et sa sécurité sont en péril du fait de son travail ou que le travail a une incidence essentiellement négative sur sa santé. En Allemagne, 460 millions de jours d’arrêt-maladie ont donné lieu à une perte de productivité estimée à 3,1 % du PIB et au Royaume Uni, pour l’exercice 2010-2011, le coût pour l’État a été estimé à 2  381 millions de livres sterling.

2.3.

L’Organisation internationale du travail (OIT) fait état d’environ 1 60  000 cas de décès par suite de maladies liées au travail en 2008 dans l’Union européenne, le cancer constituant la première cause de décès (près de 96  000 cas). On estime qu’en Europe, toutes les trois minutes et demie, une personne décède à la suite d’un accident de travail ou à une maladie professionnelle. Néanmoins, l’Europe demeure à l’avant-garde en matière de santé et de sécurité au travail.

2.4.

Les coûts tels que la sécurité et la santé au travail doivent être compris comme un investissement et non uniquement comme une dépense. Par ailleurs, la Commission elle-même mentionne dans sa communication que, selon des estimations récentes, les investissements dans ce domaine peuvent générer des ratios de rentabilité élevés, équivalant en moyenne à 2,2 et allant de 1,29 à 2,89. D’autre part, il y a lieu de souligner que l’absence de bonnes conditions de travail engendre des coûts pour les entreprises et le fait que dans certains pays, les primes d’assurances sont relativement plus faibles pour les entreprises où il n’y a pas d’accidents du travail.

2.5.

Malgré un succès relatif de la stratégie européenne en matière de santé et de sécurité au travail pour la période 2007-2012 (1), que ce soit sur le plan de la clarification des règles européennes ou d’un plus grand engagement des États membres, le fait est que l’objectif visant à réduire l’incidence des maladies professionnelles n’a pas été atteint et que l’on trouve encore des lacunes considérables à l’échelon des microentreprises et des PME qui ont rencontré de grandes difficultés dans la mise en œuvre des exigences réglementaires en raison de l’insuffisance de leurs ressources financières et de leurs capacités techniques et humaines. Aux aspects négatifs, l’on peut ajouter le peu de prévention en matière de maladies professionnelles et de maladies liées au travail, l’insuffisance de données statistiques et de suivi, le manque d’interaction entre la santé et la sécurité au travail et l’environnement et les produits chimiques ainsi que la faible participation des partenaires sociaux. L’on dispose de données encore plus limitées sur la santé et la sécurité des travailleurs dans les secteurs où l’on pratique le travail non déclaré et le travail atypique (particulièrement dans certaines exploitations agricoles et dans les domaines de l’industrie et des services), le travail à distance, le travail indépendant et les services domestiques.

2.6.

Il convient de noter que la diminution du nombre d’accidents du travail constatée ces dernières années en Europe pourrait être imputable en partie aux pertes d’emplois dans les secteurs les plus exposés à des risques élevés, étant donné que l’on a observé de manière générale dans les États membres des réductions sensibles dans les domaines de la santé et de la sécurité au travail, notamment en ce qui concerne les activités liées à la législation, à l’inspection et à la prévention.

2.7.

Le CESE convient de la nécessité de recenser les principaux défis auxquels est confrontée l’Union européenne et plaide avec la Commission en faveur de politiques et de mesures fermes pour y faire face: l’amélioration du niveau de mise en œuvre par les États membres de mesures efficaces et efficientes visant à prévenir les risques en renforçant les capacités des microentreprises et des PME; le renforcement de la prévention des maladies liées au travail en réduisant les risques existants, nouveaux et émergents; et enfin, la mise en place d’une réponse cohérente et efficace aux changements démographiques.

2.8.

Si les efforts concertés des États membres se traduisent par une diminution du nombre des maladies professionnelles et des accidents du travail, ils protègent également l’investissement en ressources humaines en réduisant les besoins en soins de santé et en freinant l’augmentation des coûts sociaux, et promeuvent ce faisant une société européenne de bien-être.

3.   Contexte de la stratégie européenne en matière de santé et de sécurité au travail pour la période 2014-2020

3.1.

Des conditions de santé et de sécurité au travail décentes et conformes à la stratégie Europe 2020 peuvent contribuer de manière significative à une croissance intelligente, durable et inclusive. Le cadre stratégique et les règlements de l’Union européenne constituent, aux côtés des stratégies et des règles nationales, une garantie pour préserver la santé et la sécurité des travailleurs. Le CESE regrette le retard avec lequel cette communication est publiée et déplore le fait que les propositions contenues dans l’avis adopté à l’unanimité par le conseil consultatif pour la santé et la sécurité, qui représente de manière tripartite les intérêts divers de l’Union européenne, n’aient pas été prises en compte.

3.2.

Le CESE note que dans sa communication, la Commission ne prévoit pas de débloquer la législation, en particulier celle qui concerne les problèmes musculo-squelettiques et la révision de la directive existante sur la protection des travailleurs contre les agents cancérogènes. Le CESE constate également l’absence de références à la création d’un cadre juridique relatif à l’anticipation des évolutions, point sur lequel le Parlement européen a déjà insisté. Le CESE invite la Commission à apporter de toute urgence une réponse à ces questions.

3.3.

Le CESE, qui en temps utile s’était félicité de l’objectif européen de réduire le nombre d’accidents du travail de 25 % (2), ne peut que regretter l’absence de quantification de cet objectif pour la période 2014-2020. Le CESE avait également critiqué l’absence d’un objectif comparable pour la réduction des maladies professionnelles, absence remarquée également dans la communication à l’examen et qui mérite dès lors d’être pareillement condamnée. Il considère comme fondamental le développement d’instruments statistiques européens permettant de mesurer les accidents du travail, les maladies professionnelles et l’exposition aux différents risques professionnels.

3.4.

Les partenaires sociaux et la société en général reconnaissent largement la nécessité d’améliorer la mise en œuvre des normes et des réglementations européennes et nationales. Le CESE quant à lui, estime qu’il est impérieux de renforcer les capacités des micro et petites entreprises pour que des mesures efficientes et efficaces de prévention des risques puissent être mises en œuvre dans le cadre de l’application de la législation. Ce sont des actions prioritaires qui doivent être soutenues par des politiques publiques fondées sur des incitations accrues, des aides et des conseils techniques personnalisés.

3.5.

Les innovations technologiques et les nouveaux modes d’organisation du travail, notamment les nouveaux régimes d’emploi atypique, créent des situations nouvelles allant de pair avec de nouveaux défis et des risques nouveaux qui n’ont pas encore été dûment identifiés. La connaissance de ces risques et leur prévention, de même que la définition des maladies professionnelles actuelles et nouvelles sont des tâches urgentes. Il est fondamental et urgent de trouver des solutions en actualisant la législation existante ou en élaborant une nouvelle législation adaptée aux risques recensés.

3.6.

Les progrès réalisés en matière d’espérance de vie modifient la structure démographique de la population européenne et ne signifient pas automatiquement une progression de l’espérance de vie en bonne santé. Les conditions de travail jouent un rôle important dans les problèmes de santé, lesquels tendent à augmenter avec l’âge, ce qui est dû notamment à l’effet cumulatif de certains risques professionnels. Une meilleure prévention depuis le début de la vie professionnelle et tout au long du cycle de vie du travailleur contribue à vaincre les défis posés par l’évolution démographique. D’autre part, il est important de financer la recherche au niveau national comme européen, afin de recenser les questions fondamentales dans ce domaine.

3.7.

Le CESE constate que l’insécurité des travailleurs et les formes d’emploi atypique ont empiré dans l’Union européenne et que la crise économique a conduit certains États membres et certaines entreprises socialement irresponsables à réduire considérablement les activités liées à la santé et à la sécurité au travail. Cette situation est inacceptable.

3.8.

D’autre part, il convient de souligner que certaines entreprises, agissant de manière volontaire et allant au-delà de leurs obligations légales, ont mis en œuvre des mesures et des actions afin de promouvoir la santé, la sécurité et le bien-être de leurs travailleurs. L’attitude de responsabilité sociale de ces entreprises mérite d’être reconnue et soutenue par la Commission et par les États membres, au sens où elle contribue à généraliser dans la vie des entreprises, partout en Europe, une culture de responsabilité sociale et environnementale.

3.9.

L’Union européenne a été confrontée de manière persistante à une stagnation économique et des taux de chômage élevés. Le chômage constitue un aspect particulier de la santé au travail étant donné que, dans certains cas, il est associé à des maladies mentales. De même, les travailleurs actifs sur le marché du travail non déclaré sont davantage exposés à des risques élevés et à des accidents du travail. Le CESE est convaincu qu’outre la réalisation d’investissements structurants, l’amélioration des conditions de vie, notamment en termes de santé et de sécurité au travail, constitue un apport très important à la croissance économique et durable, à la promotion d’emplois de qualité et à la cohésion sociale.

4.   Observations générales

4.1.

L’élaboration du cadre global de santé et de sécurité au travail et son application effective dans toute l’Union européenne sont fondamentales pour une croissance économique durable. La majorité des participants à la consultation publique lancée par l’Union européenne (3) ont confirmé la nécessité de poursuivre les efforts de coordination au niveau de l’Union européenne (93 % des répondants) et soutenu l’objectif de maintien d’un niveau élevé de conformité avec les principes de santé et de sécurité au travail, quelle que soit la taille de l’entreprise.

4.2.

Bien qu’une certaine amélioration ait été constatée ces dernières années dans plusieurs États membres, principalement en ce qui concerne le nombre d’accidents du travail, amélioration qui peut également être due en partie au recul de l’emploi, la culture de la prévention ne s’est pas généralisée dans l’Union européenne, les PME étant confrontées à des difficultés au niveau des ressources et des capacités qui ne peuvent être surmontées qu’au moyen d’actions menées par des entités publiques dans les domaines de l’information, de la formation, du soutien technique et des services de conseil. Ces actions des pouvoirs publics devront s’adapter aux besoins des différents secteurs d’activité et être conçues de manière spécifique à chacun d’entre eux.

4.3.

La participation des représentants des travailleurs au niveau de l’entreprise et du lieu de travail, lorsqu’il s’agit de traiter la question des risques professionnels, est une caractéristique essentielle du dialogue social. Les soutiens financiers aux entreprises ne doivent être accordés que lorsque les normes en matière de santé et de sécurité au travail sont respectées. L’expérience de divers pays européens montre l’importance des accords paritaires qui permettent de créer des formes de représentation régionales ou sectorielles et qui stimulent le dialogue social et la prévention.

4.4.

Il existe des lacunes dans la coordination entre les différents services publics qui interviennent en matière de santé et de sécurité. L’on constate une certaine inefficacité et/ou une certaine sous-utilisation des mécanismes de participation des partenaires sociaux, à tous les niveaux de négociation et de conclusion d’accords sectoriels spécifiques, autant d’aspects qu’il y a lieu d’améliorer. Une coopération plus systématique entre les services de santé publique et les services de prévention sur les lieux de travail contribue à améliorer la prévention et facilite la détection des maladies professionnelles. Il y a lieu de créer dans les États membres des points de contact uniques qui facilitent le lien entre l’administration publique et les PME.

4.5.

Dans le contexte des difficultés budgétaires, les États membres, de manière générale, ont octroyé moins de ressources financières et humaines aux institutions et entités associées à la santé et à la sécurité au travail, notamment en ce qui concerne l’inspection du travail qui a connu une diminution sensible de ses activités de contrôle, de soutien et de conseil aux entreprises. Le CESE réclame le renversement de cette situation tout à fait inacceptable, d’autant plus que l’émergence de nouveaux risques importants s’est amplifiée et que la dégradation des conditions de vie et de sécurité des travailleurs (augmentation des risques psychosociaux due en partie au chômage et à l’insécurité sur le lieu de travail) s’est aggravée.

4.6.

Les États membres devraient encourager et promouvoir la négociation et les conventions collectives, garantissant ainsi un rôle important et effectif aux partenaires sociaux dans l’élaboration et la mise en œuvre des politiques de santé et de sécurité ainsi que dans la promotion d’un environnement sûr et sain sur le lieu de travail.

4.7.

Le CESE déplore les faibles progrès enregistrés au niveau des statistiques européennes relatives à la santé et la sécurité, et insiste sur l’importance et l’urgence d’établir des définitions et des systèmes de reconnaissance uniformes et de rapport au niveau de l’Union.

4.8.

Le CESE rejoint la Commission sur le principe selon lequel le fait d’associer les partenaires sociaux à tous les niveaux garantit l’efficience et l’efficacité dans l’élaboration et la mise en œuvre des politiques et des stratégies en matière de santé et de sécurité au travail. À cet égard, les structures européennes de dialogue social et le comité consultatif tripartite pour la santé et la sécurité au travail devront jouer un rôle clé. Ses propositions, souvent adoptées à l’unanimité, devront être davantage valorisées par la Commission lors de la définition de ses priorités.

4.9.

S’agissant des accords-cadres conclus dans le cadre du dialogue social, le CESE invite la Commission à examiner sans délai leur représentativité et leur conformité au droit communautaire et à s’engager par conséquent à prendre les mesures nécessaires pour garantir le respect de ces accords.

4.10.

Le CESE recommande aux États membres d’utiliser le Fonds social européen et les Fonds structurels et d’investissement européens (FSIE) pour financer les actions en faveur de la santé et de la sécurité au travail.

4.11.

Le CESE convient avec la Commission de la nécessité d’explorer plus attentivement les synergies entre la politique de santé et de sécurité au travail et les autres domaines d’intervention publique. Le CESE est fermement convaincu que les progrès accomplis dans ce domaine sont encore très limités dans l’ensemble des États membres.

5.   Observations particulières

5.1.   Stratégies nationales, application de la législation et contrôle

5.1.1.

Le CESE souscrit à la ligne directrice donnée par la Commission relative à la nécessité pour les États membres de procéder, en concertation avec les partenaires sociaux, à la révision des stratégies nationales à la lumière du nouveau cadre stratégique de l’Union européenne. Il recommande néanmoins d’effectuer une évaluation détaillée de l’impact de la stratégie nationale précédente. L’adhésion des partenaires sociaux à la stratégie 2014-2020 doit être essentielle pour tous les États membres. Il sera nécessaire de trouver des indices et des critères homogènes qui indiquent, de manière systématique, le niveau de cette adhésion et permettent un suivi et une évaluation systématiques.

5.1.2.

Le CESE convient avec la Commission qu’il est nécessaire que les États membres, en coopération avec l’Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail (EU-OSHA), créent une base de données sur la santé et la sécurité au travail et organisent régulièrement (au moins deux fois par an) des réunions, dans le cadre de l’EU-OSHA, du comité consultatif pour la santé et la sécurité au travail (CCSS) et du comité des hauts responsables de l’inspection du travail (CHRIT).

5.1.3.

L’apport d’un soutien financier et technique aux PME pour la mise en œuvre de l’évaluation des risques en ligne (EREL) ou d’autres instruments basés sur les technologies informatiques dans les États membres doit être considéré comme essentiel et se concentrer sur des secteurs prioritaires. Il conviendra de renforcer les ressources financières et humaines de l’EU-OSHA de sorte qu’elle puisse jouer un rôle déterminant. Le CESE regrette que les États membres n’aient que très peu fait usage du FSE pour financer les activités d’éducation et de formation.

5.1.4.

Le recensement des bonnes pratiques et des lignes directrices spécifiques, s’agissant notamment des PME, doit tenir compte des conditions particulières des secteurs et de la nature des activités économiques; de même, il est nécessaire que l’EU-OSHA renforce son intervention dans ces domaines et promeuve une culture de prévention.

5.1.5.

Il y aura lieu d’améliorer les opérations d’inspection du travail au sein des entreprises dans les différents États membres, notamment dans les domaines de l’information, de la consultation, des risques émergents, de la facilitation de l’application de la législation et lorsqu’il s’agit de recenser et de décourager le travail non déclaré. À cette fin, il est essentiel que l’inspection du travail dispose de ressources renforcées et de compétences.

5.1.6.

Le CESE souscrit aux actions d’évaluation du programme d’échange/de formations des inspecteurs du travail et aux mesures visant à renforcer la coopération entre les services d’inspection du travail dans le cadre du CHRIT.

5.1.7.

Le CESE rejoint la position du CHRIT sur les questions de santé et de sécurité devant être considérées comme des priorités stratégiques de l’Union européenne, notamment les problèmes musculo-squelettiques, les maladies à longue période de latence (cancers professionnels et maladies chroniques telles que les pneumopathies d’origine professionnelle), la bonne mise en œuvre de la réglementation REACH et les risques psychosociaux liés au travail (4). S’agissant des PME, il y a lieu d’améliorer leurs compétences en matière de santé et de sécurité, de les encourager à mieux se conformer aux exigences, de fournir des informations et des lignes directrices accessibles et actualisées et de faire en sorte que les grandes entreprises assument leurs responsabilités en ce qui concerne l’amélioration des performances des PME avec lesquelles elles interagissent.

5.2.   Simplification de la législation

5.2.1.

Le CESE estime qu’une éventuelle simplification de la législation en vigueur ne saurait en aucun cas remettre en cause les niveaux actuels ni l’amélioration constante des conditions de santé et de sécurité au travail des travailleurs européens. La consultation publique organisée par l’Union européenne fait apparaître des divergences entre les partenaires sociaux quant à la simplification de la législation existante consistant à introduire un nouvel instrument politique européen: 73,4 % des organisations de travailleurs, mais à peine 4,3 % des organisations d’employeurs se sont déclarées opposées à cette simplification (5). Sur l’ensemble des répondants (523 au total), 40,5 % sont en faveur de la simplification, 46,1 % y sont opposés et 13,4 % n’ont pas d’avis sur la question. Néanmoins, le CESE estime que certaines charges administratives pour les entreprises pourront être réduites, sans toutefois remettre en cause les conditions de santé et de sécurité des travailleurs.

5.2.2.

Il convient de souligner que, d’après l’Enquête européenne des entreprises sur les risques nouveaux et émergents (ESENER), les principales raisons pour lesquelles les entreprises effectuent des démarches en matière de santé et de sécurité au travail sont «le respect des obligations légales» (90 %), «la pression des travailleurs» (76 %) et «la pression de l’inspection du travail» (60 %), tous ces éléments étant soumis à une forte pression. Par ailleurs, cette enquête révèle que parmi les entreprises qui n’effectuent pas régulièrement des contrôles en matière de sécurité, à peine 37 % ont invoqué «une grande complexité des obligations légales» pour justifier le fait de ne rien faire.

5.2.3.

Le CESE recommande que le recensement de potentielles simplifications ou diminutions de contraintes administratives inutiles pour les entreprises, après analyse de la législation en vigueur, soit le résultat de vastes débats et de négociations avec la participation des partenaires sociaux, à tous les niveaux. Le CESE attire l’attention sur l’article 153 du traité, qui prévoit que la législation européenne établit des conditions minimales et autorise les États membres à maintenir ou adopter des prescriptions propres à assurer une meilleure protection des travailleurs. Cette disposition contribue au progrès et permet d’anticiper des initiatives européennes, comme le démontre l’interdiction de l’amiante, prise dans de nombreux États membres avant même qu’une décision en ce sens n’ait été adoptée par la Commission.

5.3.   Risques nouveaux et émergents

5.3.1.

Il est absolument nécessaire d’approfondir les connaissances scientifiques en ce qui concerne les nouveaux risques afin de prévenir les maladies liées au travail et les maladies professionnelles en concentrant les efforts au niveau de l’Union européenne. Une plus grande interaction/coordination entre les différentes institutions européennes et nationales est essentielle pour trouver les façons adéquates d’établir des stratégies et des mesures législatives afin de faire face aux nouveaux risques et aux risques émergents. Au regard des institutions existantes, le CESE ne voit pas la nécessité de créer un nouvel organisme scientifique consultatif indépendant.

5.3.2.

Le CESE a évoqué de manière systématique la nécessité de garantir de meilleures conditions de santé et de sécurité pour des catégories spécifiques de travailleurs (les jeunes, les femmes, les travailleurs âgés, les migrants, les travailleurs sous contrats de travail atypiques et les travailleurs porteurs de handicaps) et de faire face aux nouveaux problèmes résultant de mutations dans l’organisation du travail (en particulier le stress et les maladies mentales au travail), problématiques qui sont largement reconnues par les États membres, les partenaires sociaux et la société. Le CESE estime que ces problèmes doivent être traités car ils ne cessent d’augmenter et ont des coûts économiques et sociaux. Il souligne que la perspective de genre permet d’articuler les politiques de santé au travail avec les progrès dans le domaine de l’égalité.

5.4.   Données statistiques

5.4.1.

Les insuffisances criantes de données statistiques fiables et comparables au niveau européen, fournies en temps opportun, sont l’un des problèmes principaux en matière de santé et de sécurité au travail. Il convient de trouver une solution à cette situation regrettable qui s’éternise de manière incompréhensible au fil des ans. Le CESE soutient les actions de la Commission visant à surmonter ces difficultés, lesquelles méritent que la Commission et les États membres les considèrent comme une priorité importante et qu’ils élaborent, puisqu’ils le peuvent, s’ils en conviennent ainsi, des statistiques plus détaillées et adaptées aux contextes nationaux. Une collaboration avec l’OMS dans le cadre de l’élargissement de l’ensemble des données relatives aux classifications internationales des maladies ICD-10 rendra possible l’utilisation des bases de données sur les soins de santé, ce qui permettra d’accroître la rapidité et l’efficacité de la collecte de données.

5.4.2.

Le CESE regrette l’interruption de traitement des statistiques européennes relatives aux maladies professionnelles et réclame la reprise des enquêtes statistiques portant sur les expositions professionnelles aux agents cancérogènes, à l’instar du projet CAREX dans les années 1990. Le CESE considère comme positifs les efforts récents de la Commission en vue de la création d’une base de données et de l’élaboration d’un modèle permettant d’évaluer l’exposition professionnelle à une liste de produits chimiques dangereux dans les États membres de l’Union européenne et dans les pays de l’AELE/EEE (projet HAZCHEM).

5.5.   Collaboration avec les institutions internationales

5.5.1.

Le CESE estime que le renforcement de la collaboration avec des organisations internationales, en particulier l’OIT, l’OMS et l’OCDE, doit être prioritaire afin de réduire le nombre d’accidents et de maladies professionnelles dans le monde entier.

5.5.2.

Il convient d’accorder une attention particulière aux lacunes en matière de santé et de sécurité au travail dans les chaînes d’approvisionnement mondial, et de contribuer ainsi à l’existence de lieux de travail plus sûrs non seulement en Europe mais sur tous les continents. Il y a lieu d’envisager l’inclusion de cette question dans les accords conclus par l’Union européenne, afin de garantir la mise en œuvre des conventions et des recommandations de l’OIT par ses partenaires. Le CESE rappelle ses avis antérieurs sur l’amiante et demande à la Commission d’adopter une position concrète afin d’obtenir l’interdiction de l’amiante à l’échelle mondiale.

5.5.3.

Le CESE recommande aux États membres d’appliquer les normes et les conventions internationales et à la Commission d’élaborer des rapports systématiques sur leur mise en œuvre effective par les États membres.

Bruxelles, le 11 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  Entre 2007 et 2011, l’Union européenne a enregistré une réduction de 27,9 % du taux d’incidence des accidents de travail engendrant un arrêt de travail de plus de trois jours.

(2)  Voir JO C 224 du 30.8.2008, p. 88.

(3)  «Consultation publique sur le nouveau cadre politique de l’Union européenne en matière de sécurité et santé au travail», Emploi, affaires sociales et inclusion, juin 2014.

(4)  «Priorités stratégiques de l'UE», 2013-2020, doc. 2091_FR, février 2012.

(5)  Consultation publique sur le nouveau cadre politique de l’Union européenne en matière de sécurité et santé au travail, juin 2014.


ANNEXE

à l’avis du Comité économique et social européen

Les amendements ci-dessous ont été repoussés au cours des débats mais ont recueilli au moins un quart des voix exprimées:

Paragraphe 1.8

Modifier comme suit:

 

«Le CESE considère que la participation des travailleurs et de tous les partenaires sociaux à tous les niveaux et sur le lieu de travail est fondamentale pour la mise en œuvre efficace de cette stratégie. Il invite la Commission à intensifier les discussions et les consultations auprès des partenaires sociaux et à développer des actions concertées. Les États membres devraient promouvoir encourager le dialogue social sur des questions de santé et de sécurité entre les employeurs et les représentants des travailleurs et la négociation collective

Résultat du vote

Voix pour

:

66

Voix contre

:

143

Abstentions

:

17

Paragraphe 3.2

Modifier comme suit:

 

«Le CESE note que, dans sa communication, la Commission ne prévoit pas de débloquer la législation, en particulier celle qui concerne les problèmes musculo-squelettiques et la révision de la directive existante sur la protection des travailleurs contre les agents cancérogènes. Le CESE constate également l'absence de références à la création d'un cadre juridique relatif à l'anticipation des évolutions, point sur lequel le Parlement européen a déjà insisté. Le CESE invite la Commission à apporter de toute urgence une réponse à ces questions»

Résultat du vote

Voix pour

:

60

Voix contre

:

141

Abstentions

:

13

Paragraphe 3.5

Modifier comme suit:

 

«Les innovations technologiques et les nouveaux modes d’organisation du travail, notamment les nouveaux régimes d’emploi atypique, créent des situations nouvelles allant de pair avec de nouveaux défis et peuvent parfois engendrer des risques nouveaux qui n’ont pas encore été dûment identifiés. La connaissance de ces risques et leur prévention, de même que la définition des maladies professionnelles actuelles et nouvelles sont des tâches urgentes. Il est fondamental et urgent de trouver des solutions pour actualiser en actualisant la législation existante ou élaborer une nouvelle législation adaptée aux risques recensés.»

Résultat du vote

Voix pour

:

77

Voix contre

:

140

Abstentions

:

10

Paragraphe 3.9

Modifier comme suit:

 

«L’Union européenne a été confrontée de manière persistante à une stagnation économique et des taux de chômage élevés. Le chômage constitue un aspect particulier de la santé au travail étant donné que, dans certains cas, il est associé à des maladies mentales. De même, les travailleurs actifs sur le marché du travail non déclaré peuvent dans certains cas être sont davantage exposés à des risques élevés et à des accidents du travail. Le CESE est convaincu qu’outre la réalisation d’investissements structurants, l’amélioration des conditions de vie, notamment en termes de santé et de sécurité au travail, constitue un apport très important à la croissance économique et durable, à la promotion d’emplois de qualité et à la cohésion sociale.»

Résultat du vote

Voix pour

:

62

Voix contre

:

145

Abstentions

:

10

Paragraphe 4.6

Modifier comme suit:

 

«Les États membres devraient encourager et promouvoir le dialogue social entre les employeurs et les représentants des travailleurs la négociation et les conventions collectives, garantissant ainsi un rôle important et effectif aux partenaires sociaux dans l’élaboration et la mise en œuvre des politiques de santé et de sécurité ainsi que dans la promotion d’un environnement sûr et sain sur le lieu de travail.»

Résultat du vote

Voix pour

:

66

Voix contre

:

141

Abstentions

:

17


14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/91


Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions sur les possibilités d’utilisation efficace des ressources dans le secteur de la construction

[COM(2014) 445 final],

sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — «Vers une économie circulaire: programme zéro déchet pour l’Europe»

[COM(2014) 398 final]

et sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2008/98/CE relative aux déchets, la directive 94/62/CE relative aux emballages et aux déchets d’emballages, la directive 1999/31/CE concernant la mise en décharge des déchets, la directive 2000/53/CE relative aux véhicules hors d’usage, la directive 2006/66/CE relative aux piles et accumulateurs ainsi qu’aux déchets de piles et d’accumulateurs et la directive 2012/19/UE relative aux déchets d’équipements électriques et électroniques

[COM(2014) 397 final — 2014/0201 (COD)]

(2015/C 230/14)

Rapporteure:

Mme LE NOUAIL MARLIÈRE

Le 14 juillet 2014, le 28 juillet 2014 et le 20 octobre 2014, la Commission, le Parlement européen et le Conseil ont décidé respectivement, conformément aux articles 43, paragraphe 2, et 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions sur les possibilités d’utilisation efficace des ressources dans le secteur de la construction»

[COM(2014) 445 final],

sur la:

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — “Vers une économie circulaire: programme zéro déchet pour l’Europe”»,

[COM(2014) 398 final]

et sur la:

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2008/98/CE relative aux déchets, la directive 94/62/CE relative aux emballages et aux déchets d’emballages, la directive 1999/31/CE concernant la mise en décharge des déchets, la directive 2000/53/CE relative aux véhicules hors d’usage, la directive 2006/66/CE relative aux piles et accumulateurs ainsi qu’aux déchets de piles et d’accumulateurs et la directive 2012/19/UE relative aux déchets d’équipements électriques et électroniques»

[COM(2014) 397 final — 2014/0201 (COD)].

La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 12 novembre 2014.

Lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 10 décembre 2014), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 129 voix pour, 3 voix contre et 5 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le Comité accueille favorablement les deux communications et le paquet de modifications des directives «déchets»; il soutient les efforts menés pour sensibiliser l’ensemble des entreprises et des consommateurs à la nécessité d’abandonner progressivement le modèle économique linéaire actuel, qui consiste à «prendre-faire-consommer et jeter», et accélérer la transition vers un modèle circulaire fondé sur la régénération et conçu pour s’appuyer sur les énergies renouvelables de façon à limiter au maximum l’utilisation des ressources naturelles.

1.2.

Le Comité souscrit à l’objectif qui consiste à établir un cadre propice à cette transition, couvrant l’intégralité du cycle de vie des produits, de l’approvisionnement en matières premières à l’écoconception en passant par la distribution, les modèles d’entreprises et schémas de consommation, le réemploi et la retransformation ainsi que l’utilisation des déchets comme ressources.

1.3.

Le Comité déplore cependant que les propositions spécifiques avancées par la Commission mettent trop l’accent sur les politiques et la législation relatives aux déchets et qu’aucune proposition spécifique similaire ne couvre l’«amont» du cycle de vie des produits en vue d’améliorer celui-ci dans son ensemble. Il attend de la Commission qu’elle soumette à la fois une feuille de route en faveur de telles mesures, assortie d’indications claires concernant le calendrier, les procédures et les budgets, et des propositions concernant l’utilisation des instruments financiers innovants, tels que les obligations vertes.

1.4.

Le Comité invite la Commission à intégrer le cadre propice à une économie circulaire dans d’autres politiques européennes, telles que la politique énergétique et climatique et la politique industrielle, ayant notamment pour objectif la réindustrialisation de l’Union européenne. Il est favorable à ce que les grands objectifs de la stratégie Europe 2020 soient complétés par un objectif d’utilisation efficace des ressources, comme l’a suggéré la plate-forme européenne sur l’utilisation efficace des ressources et comme l’a envisagé la Commission dans sa communication intitulée «Vers une économie circulaire».

1.5.

Bien que la Commission se soit intéressée aux répercussions positives générales en matière d’emploi et qu’elle ait lancé une «initiative pour l’emploi vert» dans le cadre de son train de mesures en faveur de l’économie circulaire, le Comité déplore qu’elle n’ait pas saisi l’occasion d’étudier plus spécifiquement les répercussions, les risques et les avantages qu’entraînent de telles mesures sur le plan de l’emploi. En particulier, elle n’a aucunement tenu compte du potentiel qu’offrent la prévention des déchets, le réemploi et la retransformation en ce qui concerne l’emploi. Par ailleurs, il conviendrait de veiller davantage à garantir des conditions de travail décentes et à améliorer les normes de santé et de sécurité pour les travailleurs concernés.

1.6.

Le cadre proposé par la Commission européenne devrait répartir l’effort de sensibilisation et de modification des comportements de manière équitable entre les parties prenantes: la prospective, le progrès scientifique, l’introduction d’applications innovantes et la préservation de la compétitivité de l’Europe et de l’intérêt commun devraient tous être pris en ligne de compte.

1.7.

Il s’agit de responsabiliser les consommateurs et les producteurs. Les consommateurs doivent être informés pour acheter de manière responsable, la traçabilité doit être optimale et les producteurs doivent être tenus de rendre des comptes.

1.8.

L’interdiction progressive de la mise en décharge des déchets recyclables et la définition d’objectifs plus ambitieux en matière de recyclage des déchets, comme le propose la Commission, sont des mesures indispensables à la transition vers une économie circulaire; il y a lieu de les mener à bien. La Commission devrait aussi veiller à gagner l’adhésion du public en veillant à la crédibilité de ses objectifs — à leur acceptabilité et à leur qualité autant qu’à leur caractère proportionné.

1.9.

Le Comité apprécie également les mesures adoptées par la Commission en vue d’améliorer la mise en œuvre de la législation européenne en matière de déchets, en particulier en introduisant de meilleurs instruments de suivi et de gouvernance. Pour passer dans l’Union européenne d’un taux de recyclage des déchets municipaux de 42 % aujourd’hui à 50 % en 2020 et 70 % en 2030, il faudra garantir que certains pays fassent davantage d’efforts et recourent à des solutions avancées de gestion des déchets. Des mesures devraient également être prises afin d’améliorer la qualité des produits initiaux et de leurs composants ainsi que celle du processus de recyclage dans son ensemble.

1.10.

Le Comité constate que les propositions de la Commission ne tiennent pas compte de la hiérarchie de gestion des déchets définie dans la directive-cadre relative aux déchets, qui établit un ordre de priorité, à savoir la prévention des déchets, la préparation en vue du réemploi, le recyclage, la valorisation sous une autre forme (énergie) et l’élimination. Elles ne contiennent aucune analyse approfondie de l’option reposant sur des objectifs et autres mesures en matière de prévention des déchets, à l’exception d’un objectif non contraignant de réduction du gaspillage alimentaire. Le volume total des matières consommées et des déchets ultimes devrait dans tous les cas, à terme, être maîtrisé et réduit, pour le bien de l’environnement.

1.11.

À l’instar du réemploi (au niveau du produit), le recyclage multiple (au niveau du matériau) permet d’économiser des matières premières et de limiter la consommation d’énergie et les émissions de gaz à effet de serre. La révision du paquet relatif aux déchets offre aujourd’hui une occasion unique d’appliquer le principe du recyclage multiple aux matériaux permanents.

1.12.

L’économie circulaire ne doit pas seulement se mesurer à l’aune des déchets produits mais aussi induire une protection des ressources matérielles et humaines tout au long de la chaîne de valeur et viser à éliminer tout processus dangereux pour l’environnement ou la population.

1.13.

Le Comité recommande de compléter ce train de mesures par des mesures visant spécifiquement à soutenir la préparation des produits utilisés en vue de leur réemploi. Placer la préparation en vue du réemploi au même niveau que le recyclage, comme le fait la Commission dans ses objectifs de recyclage, va à l’encontre de la hiérarchie des déchets. Les circuits courts doivent recevoir la priorité. Le réemploi des produits, la préparation en vue du réemploi et la retransformation permettent d’exploiter au mieux la valeur intrinsèque des produits et augmentent les possibilités de conserver les chaînes de valeur au sein de l’Union européenne, de soutenir le développement territorial et de créer de l’emploi.

1.14.

Dans cette logique, l’Union européenne devrait aussi inciter tous les États membres à faire évoluer leurs plans «déchets» vers des plans territoriaux d’économie circulaire axés sur des mesures visant l’économie des ressources matérielles et la préservation du bien-être humain.

1.15.

Enfin, le Comité recommande d’élargir l’approche sectorielle afin de promouvoir l’économie circulaire.

2.   Introduction

2.1.

Le 2 juillet 2014, la Commission européenne a publié un ensemble de cinq propositions (1) comprenant:

a)

la communication COM(2014) 398 final, «Vers une économie circulaire: programme zéro déchet pour l’Europe»;

b)

la proposition COM(2014) 397 final en vue d’une nouvelle directive «modifiant la directive 2008/98/CE relative aux déchets, la directive 94/62/CE relative aux emballages et aux déchets d’emballages, la directive 1999/31/CE concernant la mise en décharge des déchets, la directive 2000/53/CE relative aux véhicules hors d’usage, la directive 2006/66/CE relative aux piles et accumulateurs ainsi qu’aux déchets de piles et d’accumulateurs et la directive 2012/19/UE relative aux déchets d’équipements électriques et électroniques»;

c)

la communication COM(2014) 445 final sur «les possibilités d’utilisation efficace des ressources dans le secteur de la construction»;

et les deux documents suivants, auxquels le CESE répondra par un avis distinct (2):

d)

le «Plan d’action vert pour les PME», COM(2014) 440 final;

e)

la communication «Initiative pour l’emploi vert», COM(2014) 446 final.

La Commission a aussi annoncé la publication ultérieure d’une communication sur l’alimentation durable.

3.   Observations générales

3.1.

Comment produire des biens et des services tout en limitant la consommation et le gaspillage des matières premières et des sources d’énergies non renouvelables? Un constat s’impose à tous: au fil de l’histoire industrielle du XXe siècle, le coût d’extraction et d’exploitation des ressources naturelles minérales et énergétiques a suivi une tendance structurelle à la baisse, essentiellement due aux gains de productivité progressifs.

3.2.

Or, en ce début de XXIe siècle, ce modèle linéaire s’est non seulement grippé mais risque à terme de devenir intenable, avec la raréfaction des ressources de la planète. La cote d’alerte est déjà dépassée, il ne s’agit plus de tenter d’imaginer un changement de paradigme économique mais bien, au pied du mur, de l’inventer de toute urgence.

3.3.

Extraire, produire, consommer, jeter, recycler: une mutation profonde doit s’engager pour que l’autosuffisance des populations et leur développement social et durable soient assurés sur le long terme.

3.4.

À l’heure actuelle, presque toutes les sociétés humaines sont mues par un modèle de développement prédateur qui est, pour ainsi dire, quelque peu hors de contrôle, faisant fi des populations les plus exposées à l’exploitation et à la surexploitation de leurs ressources, aux aléas du changement climatique et aux pollutions, ainsi que de l’avenir des générations humaines futures.

3.5.

Il s’agit que chacun puisse interroger ce modèle, secoué par la crise mondiale financière, économique, sociale, politique, énergétique, écologique et environnementale.

3.6.

Visant un retournement des modes de production et de consommation, la Commission européenne, à travers sa vision de l’économie circulaire, ouvre des perspectives qui engagent l’ensemble de la société, mais dont la mise en œuvre reste encore à gagner.

4.   Observations spécifiques en relation avec le document COM(2014) 398 final

4.1.

La communication «Vers une économie circulaire» explique le concept général d’économie circulaire et décrit ses avantages en matière de développement économique et d’emploi.

4.2.

Ses objectifs généraux sont clairs, et il est indispensable d’accomplir des progrès en vue de leur réalisation: notre modèle de production et de consommation a besoin d’un changement fondamental; il faut réduire notre utilisation des ressources et des matériaux et, en conséquence, accroître leur utilisation rationnelle.

4.3.

Toute la question est de savoir comment atteindre ces objectifs et comment ceux-ci s’insèrent dans un cadre politique global et exhaustif. Les défaillances et imperfections du marché peuvent et doivent être abordées de différentes manières: incitations fournies par le marché (signaux de prix et signaux fiscaux), réglementation (fixation d’objectifs contraignants, en laissant aux acteurs le choix des moyens de les atteindre), normes imposées aux acteurs.

4.4.

Un cadre politique global suppose également que toutes les conditions requises sont réunies, sur le plan économique, social, de l’emploi, de la santé et de la sécurité.

4.5.

Le document de la Commission spécifie que son objectif est de définir «un cadre politique favorable à la conception et à l’innovation au service d’une telle économie, au déblocage des investissements et à la mobilisation des entreprises et des consommateurs».

4.6.   Créer un cadre propice à l’économie circulaire

4.6.1.

Le CESE approuve le principe de mettre en place, en collaboration avec toutes les parties prenantes, un «cadre propice à l’économie circulaire». Ce cadre doit permettre le développement d’un nouveau modèle économique se substituant progressivement au modèle prédominant de la croissance économique linéaire. Le passage à une économie circulaire requiert une approche globale couvrant la totalité du cycle de vie des produits, allant de l’approvisionnement en matières premières à l’écoconception, à la distribution, aux modèles d’entreprises et schémas de consommation, au réemploi, à la retransformation ainsi qu’à la valorisation et à l’élimination des déchets. La communication de la Commission est axée, en principe, sur une telle approche globale. Toutefois, dans la pratique, la communication n’est pas équilibrée étant donné que les propositions politiques concrètes se limitent surtout au secteur des déchets. La Commission se contente d’annoncer la future mise en place d’un cadre d’action propice pour l’économie circulaire (3), sans donner d’indication claire sur le calendrier et le processus. Nous attendons de la Commission qu’elle présente sans tarder une proposition claire et transparente en la matière.

4.6.2.

Le concept d’économie circulaire s’appuie sur une analyse de l’utilisation des ressources prenant en compte tout le cycle de vie. Il se traduit en actions concrètes en faveur du recyclage mais aussi en faveur de la substitution de certaines ressources, de la durabilité et du réemploi des produits, de la réduction des gaspillages tout au long de la chaîne y compris à la source, de l’écoconception des biens et des services, de nouveaux modèles d’affaires, etc. Il introduit de nouvelles formes de gouvernance intégrant tous les acteurs de la société civile. Le Comité demande à la Commission d’élaborer une stratégie politique détaillée sur la transition vers une économie circulaire. Il espère également que la Commission sera moins vague dans ses propositions politiques concernant la promotion de l’écoconception, l’innovation et la stimulation des investissements, et qu’elle présentera des propositions claires, assorties d’informations sur le budget qui sera alloué au soutien des activités liées à l’économie circulaire et sur le recours à des instruments financiers innovants tels que les obligations vertes. Ainsi, la Commission devrait poursuivre ses travaux:

a)

en clarifiant davantage les relations entre ce nouveau cadre d’action et d’autres politiques européennes, en particulier la politique de réindustrialisation (matières premières, innovation, santé et sécurité des travailleurs, transports, etc.) et la politique «Énergie et climat»;

b)

en fixant, dans la stratégie Europe 2020 révisée, des objectifs chiffrés en matière d’efficacité des ressources, tenant compte des suggestions de la plate-forme européenne sur l’efficacité des ressources;

c)

en précisant mieux les mesures à prendre pour générer un véritable changement des modes de production et de consommation, intégrant la nécessaire réduction à la source de l’utilisation de certaines ressources (vu leur rareté ou leur toxicité), l’évolution vers une société moins matérialiste et davantage collaborative ainsi que l’amélioration du bien-être des travailleurs et de l’ensemble des citoyens.

4.6.3.

Dans cette perspective, le CESE rappelle son avis d’avril 2012 sur la promotion de la production et de la consommation durables dans l’Union européenne, qui recommande de «créer une vision commune renouvelée du modèle économique en associant toutes les parties de la société civile» (4).

4.7.   Définition du champ d’application

4.7.1.

L’approche adoptée par la Commission européenne concernant la mise en place d’une économie circulaire est muette sur les mesures à mettre en œuvre à cette fin aux niveaux local et régional. Le CESE estime que toute stratégie d’économie circulaire devrait intégrer une dimension de hiérarchie territoriale allant des collectivités locales à l’échelon mondial en passant par les niveaux régional, national et européen, la priorité étant partout accordée aux circuits courts et aux chaînes d’approvisionnement courtes à chaque fois que cela est possible.

4.7.2.

En effet, les avantages socio-économiques potentiels de l’économie circulaire peuvent se trouver d’abord au niveau strictement local — quartiers durables, villes vertes — puis au niveau des régions (de l’Union européenne) avant de se prolonger aux niveaux national et international.

4.7.3.

Dans cette perspective de territorialité se situe la lutte contre le dumping social et environnemental international et donc la possibilité de relocalisation à petite échelle d’une bonne part de l’économie. L’optimisation de la gestion des déchets implique notamment un certain nombre d’initiatives de la part des responsables locaux et régionaux: organisation de collecte sélective, création de déchetteries et centres de tri, réseaux de réparation — revente — réemploi, etc. Pour la bonne gestion des biodéchets, il est évident que les circuits courts sont à privilégier, y compris du point de vue de la création d’emplois.

4.7.4.

Dans cette logique, l’Union européenne devrait inciter tous les États membres à faire évoluer progressivement les plans «déchets» vers des plans territoriaux d’économie circulaire.

4.8.   Contrôler les impacts socio-économiques

4.8.1.

Si le «paquet» de la Commission crée bien des liens entre l’environnement (la gestion des déchets) et l’économie (emplois verts, plan d’action PME), il n’appréhende pas de façon systématique:

les potentialités d’emploi liées aux diverses phases de la mise en œuvre de la hiérarchie de gestion des déchets et spécialement la prévention et la préparation au réemploi,

les potentialités d’emploi que recèlent les diverses évolutions innovantes que peut engendrer l’économie circulaire (écoconception, symbioses industrielles, économie de fonctionnalité ou de partage, etc.),

les implications pour la santé et la sécurité des travailleurs des diverses activités économiques potentiellement liées au développement de l’économie circulaire.

4.9.   Compléter les approches sectorielles

4.9.1.

Outre que la nouvelle stratégie en faveur de l’économie circulaire devrait contribuer davantage à la définition de l’approche sectorielle des déchets, le CESE souhaiterait voir des développements sectoriels en dehors du domaine de la construction durable.

4.9.2.

Pour le CESE, l’approche sectorielle devrait être complétée par des propositions concernant l’alimentation durable et la construction durable, mais aussi d’autres secteurs tels que l’industrie manufacturière.

5.   Recommandations spécifiques en relation avec le document COM(2014) 397 final

5.1.   Une proposition législative à élargir

5.1.1.

Le CESE approuve l’orientation générale des amendements visant:

une augmentation des taux de recyclage des déchets municipaux et des déchets d’emballages ainsi que l’établissement de restrictions à la mise en décharge de certains déchets,

la mise en place d’un système d’alerte précoce pour contrôler le respect des objectifs de recyclage,

la fixation de conditions minimales de fonctionnement pour les régimes de responsabilité élargie du producteur et la normalisation des définitions,

une rationalisation des obligations de rapportage.

5.1.2.

Cependant, certaines options complémentaires — telles que la formulation d’objectifs chiffrés spécifiques pour la prévention et le réemploi, ou encore la consignation obligatoire de certains produits — semblent rejetées «à la légère» par l’étude d’impact. Les propositions de la Commission ne tiennent pas compte de la hiérarchie des déchets telle que définie dans la directive-cadre relative aux déchets (5), qui prévoit un ordre de priorité, à savoir la prévention des déchets, la préparation en vue du réemploi, le recyclage, les autres types de valorisation et l’élimination.

5.1.3.

L’article 9, point c), de la directive-cadre relative aux déchets impose à la Commission de transmettre au Parlement européen et au Conseil un rapport accompagné, le cas échéant, de propositions de mesures nécessaires pour la définition d’objectifs de prévention des déchets et de découplage à l’horizon 2020, ainsi que d’indicateurs de prévention des déchets. La prévention des déchets faisant partie intégrante de l’économie circulaire, il aurait été approprié de présenter ce rapport avec le «paquet sur l’économie circulaire». L’analyse d’impact accompagnant l’actuel train de mesures sur l’économie circulaire indique que la fixation d’un objectif global de prévention des déchets a été rejetée, sans fournir d’analyse approfondie sur ce sujet.

5.1.4.

De la sorte, l’écoconception des produits et des services ne semble pas suffisamment garantie, comme elle pourrait l’être, par exemple, par:

des clauses spécifiques à incorporer dans les marchés publics,

des prescriptions concernant certains produits à favoriser davantage par rapport à d’autres,

des obligations d’incorporer dans les produits un certain pourcentage de matières recyclées,

des incitants économiques en faveur des produits réutilisables si non recyclables (tels que des réductions de taxe sur la valeur ajoutée),

etc.

5.1.5.

Pour le CESE, la question de l’obsolescence programmée mériterait une stratégie comportant diverses actions d’ordre technique, commercial, normatif, éducatif et informationnel (6).

5.2.   Des objectifs chiffrés à compléter

5.2.1.

Des objectifs chiffrés pour la prévention sont quasi indispensables en vue de la bonne application de la hiérarchie des déchets, ainsi que l’ont déjà souligné le Parlement européen, le Comité des régions et un audit de la Cour européenne. Sur la base des programmes nationaux de prévention soumis par les États membres, la Commission devrait effectivement formuler de semblables objectifs.

5.2.2.

L’objectif de «moins 10 % de déchets municipaux» proposé par le Comité des régions mérite d’être soigneusement étudié (7). Sur la base des diverses expériences nationales et régionales de plafonnement des déchets ménagers, il conviendrait aussi d’envisager la fixation d’une limite au niveau européen (de l’ordre de 200 à 300 kilogrammes par habitant et par an).

5.2.3.

Les déchets municipaux (article 3 de la directive-cadre relative aux déchets) devraient être définis strictement comme des déchets ménagers et ne pas être élargis aux déchets commerciaux et industriels ou à ceux collectés sur la base de régimes de responsabilité élargie du producteur, afin que les rôles et responsabilités de chacun soient clairement définis.

5.2.4.

Les déchets commerciaux et industriels devraient être définis comme les déchets qui ne sont pas considérés comme des déchets ménagers, afin de pouvoir faire l’objet d’un objectif distinct en matière de recyclage.

5.2.5.

Le remblayage ne devrait pas être défini comme étant systématiquement une opération de valorisation; cette technique devrait être interdite pour les déchets dangereux et limitée aux déchets de construction et de démolition (article 3 de la directive-cadre relative aux déchets).

5.2.6.

La proposition de la Commission de définir un objectif chiffré de prévention limitée au gaspillage alimentaire devrait inclure un objectif complémentaire de réduction des emballages ou être associée à un tel objectif.

5.2.7.

Le Comité recommande de compléter ce train de mesures par des mesures visant spécifiquement à soutenir la préparation des produits utilisés en vue de leur réemploi. Placer la préparation en vue du réemploi au même niveau que le recyclage, comme le fait la Commission dans ses objectifs de recyclage, n’est pas conforme à la hiérarchie des déchets. La remise à neuf de produits et de pièces détachées recèle non seulement un énorme potentiel pour une utilisation plus efficace des produits et des matériaux mais offre également de belles occasions de création d’emplois au niveau local et régional. En outre, les activités de préparation au réemploi (par exemple, des emballages, des équipements électriques/électroniques, voire d’autres biens tels que les jouets et les langes) ne devraient pas être mises sur le même plan que les activités de recyclage: un objectif chiffré particulier — par exemple de l’ordre de 5 % — devrait les viser.

5.2.8.

La proposition législative prévoit de porter, d’ici à 2030, le recyclage/la réutilisation des déchets municipaux à 70 % et le recyclage/la réutilisation de déchets d’emballages à 80 %, d’interdire la mise en décharge des déchets recyclables d’ici à 2025 et de réduire les déchets alimentaires de 30 % d’ici à 2025. Ces objectifs sont indispensables et doivent être soutenus.

5.2.9.

Les objectifs chiffrés doivent faire partie intégrante du business model des acteurs économiques — notamment ceux du secteur de l’emballage et du commerce —, qui devraient trouver eux-mêmes la manière la plus efficace de les atteindre. Toutefois, il faut garantir que cette transition nécessaire s’accomplisse dans le respect d’autres principes et critères tout aussi importants. L’inquiétude majeure porte sur les conditions de travail et les normes de santé et de sécurité des travailleurs concernés. Les secteurs de l’emballage et de la gestion des déchets sont particulièrement exposés, en raison de la dureté du travail, de la précarité de l’emploi et des risques pour la santé et la sécurité qui y prévalent. Il convient de garantir que la réalisation de ces objectifs chiffrés ambitieux se produise sans détérioration des conditions de travail, et au contraire avec une amélioration de celles-ci (8).

5.2.10.

Il convient de prévoir un contexte de financement pour les collectivités locales: les conditions du cadre économique devraient permettre aux collectivités locales de réaliser les objectifs définis en ayant accès aux financements nécessaires. Si l’on impose aux collectivités des règles rigides en matière d’endettement, tout besoin supplémentaire d’investissement — par exemple dans la gestion des déchets — reviendra à réduire les dépenses liées à d’autres activités essentielles. Le cadre politique doit garantir un contexte financier approprié, si nécessaire à l’aide de budgets ad hoc, tels que les Fonds structurels de l’Union européenne et les fonds disponibles au titre de la stratégie Europe 2020.

5.2.11.

Concernant la réduction des déchets alimentaires, il faut veiller à ce que la sécurité alimentaire ne soit pas sacrifiée et que les normes de protection des consommateurs soient respectées. À cet égard, il convient d’associer et de consulter les organisations de protection des consommateurs et les organismes de sécurité alimentaire.

5.2.12.

Les déchets alimentaires étant des matières premières organiques, il convient, dans la mesure du possible, de les traiter ou de les réintroduire tels quels dans la production agricole. Par leur nature même, certains types de déchets alimentaires se prêtent tout particulièrement à être réutilisés comme aliments pour le bétail ou fertilisants pour les sols, ce qui est actuellement impossible en raison d’une série de dispositions restrictives. Aussi le CESE invite-t-il la Commission à examiner si ces restrictions sont utiles.

6.   Observations spécifiques en relation avec le document COM(2014) 445 final

6.1.

La communication sur les possibilités d’utilisation efficace des ressources dans le secteur de la construction vise à promouvoir une réduction des incidences générales de celui-ci sur l’environnement tout au long du cycle de vie. Elle propose un ensemble d’indicateurs permettant d’évaluer la performance environnementale des bâtiments afin de permettre aux concepteurs, constructeurs, entrepreneurs, autorités et utilisateurs de faire des choix informés. Il serait en effet essentiel de disposer d’un système transparent d’indicateurs, en particulier de statistiques normalisées et d’une série d’indicateurs comparables et conviviaux.

6.2.

Le paquet «économie circulaire» devrait comprendre aussi des mesures appropriées axées sur la demande (pull measures), ce qui permettrait la création d’un marché autosuffisant des matières premières secondaires (par exemple des produits présentant un contenu minimum de matières recyclées). Il convient de faire en sorte que les déchets soient considérés comme des matières premières bénéficiant d’une bonne liquidité de marché et puissent être commercialisés à un prix approprié sur le plan économique, humain et environnemental. Ce serait le meilleur moyen de stimuler la collecte des déchets.

6.3.   Enjeux de la qualification des produits — Prévention des risques sériels

6.3.1.

La prévention des sinistres sériels est un enjeu majeur pour les assurances; en effet, un défaut sur un objet utilisé à plusieurs dizaines de milliers d’exemplaires peut générer, directement et indirectement, des coûts de réparation de plusieurs dizaines, voire centaines de millions d’euros. Ainsi, certains des sinistres sériels de ces vingt dernières années résultent d’une incompatibilité chimique entre les différents composants d’un produit de construction donné.

6.3.2.

Ce type de sinistre sériel est en général dû à une réaction qui se développe dans le temps à la suite de l’intervention de paramètres extérieurs comme l’humidité ou la température. Certains de ces sinistres peuvent également être liés à des produits importés dont certaines caractéristiques n’avaient pas été correctement signalées à l’origine.

6.3.3.

L’utilisation de matériaux recyclés dans la fabrication de matériaux de construction n’est pas un obstacle en soi. Cependant, il faut connaître exactement les caractéristiques physico-chimiques du matériau à recycler pour prévenir tout risque d’incompatibilité lorsqu’il sera réutilisé. La difficulté est de bien définir et qualifier le matériau à recycler et de s’assurer de l’homogénéité du lot de produits à réutiliser.

6.3.4.

La révision du paquet relatif aux déchets offre une occasion unique d’appliquer le principe de recyclage multiple afin de stimuler l’utilisation efficace des ressources. Le recyclage multiple concerne les matériaux qui ne se dégradent pas structurellement lors du processus de recyclage — les «matériaux permanents» — mais qui peuvent être réintroduits encore et encore pour renforcer l’économie circulaire, ce qui évite que des matériaux fonctionnels soient gaspillés ou perdus en étant incinérés ou mis en décharge. Les matériaux permanents constituent de ce fait un atout dont la société peut tirer parti indéfiniment.

6.3.5.

La mise en place d’une traçabilité des matériaux de construction durant leur premier cycle de vie permettrait d’en maîtriser plus facilement le réemploi et il faudrait formaliser des règles de qualification des matériaux en fonction de leurs usages futurs, en mettant l’accent sur le niveau élevé de biodégradabilité et en instaurant des normes de qualité.

6.4.

La Commission devrait envisager la mise en œuvre de dispositions contraignantes et de sanctions pour éviter tout dumping consistant à exporter hors de l’Union européenne des matériaux devenus indésirables.

Bruxelles, le 10 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  http://ec.europa.eu/environment/circular-economy/

(2)  Voir page 99 du présent Journal officiel.

(3)  COM(2014) 398 final, p. 3.

(4)  JO C 191 du 29.6.2012, p. 6.

(5)  JO L 312 du 22.11.2008, p. 3.

(6)  JO C 67 du 6.3.2014, p. 23.

(7)  http://cor.europa.eu/en/news/regional/Pages/cities-and-regions-eu-waste.aspx

(8)  Pour des observations détaillées sur la gestion des déchets, voir le numéro 2014/9 du HesaMag de l’ETUI (Institut syndical européen): http://www.etui.org/fr/Topics/Health-Safety/HesaMag


14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/99


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Plan d’action vert pour les PME: Permettre aux PME de transformer les impératifs environnementaux en nouveaux créneaux d’activité économique»

[COM(2014) 440 final],

et la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Initiative pour l’emploi vert: Exploiter le potentiel de création d’emploi de l’économie verte»

[COM(2014) 446 final]

(2015/C 230/15)

Rapporteur:

M. PEZZINI

Le 16 juillet 2014, la Commission européenne a décidé, conformément à l’article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Plan d’action vert pour les PME: Permettre aux PME de transformer les impératifs environnementaux en nouveaux créneaux d’activité économique»

COM(2014) 440 final,

et la

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Initiative pour l’emploi vert: Exploiter le potentiel de création d’emploi de l’économie verte»

COM(2014) 446 final.

La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 12 novembre 2014.

Lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 10 décembre), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 135 voix pour, 1 voix contre et 1 abstention.

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le Comité économique et social européen (CESE) estime que la perspective d’une économie circulaire européenne est importante pour la compétitivité systémique de l’Union européenne à condition qu’elle repose sur une vision stratégique européenne commune à laquelle participent activement le monde du travail, les gouvernements, les employeurs et les travailleurs, les consommateurs et les autorités législatives et réglementaires aux différents niveaux.

1.2.

Le CESE est convaincu que la transition vers une économie circulaire peut ouvrir des perspectives favorables pour la réalisation des objectifs de la stratégie Europe 2020: elle peut devenir un moteur de croissance, générateur d’emplois et de compétences vertes, tout en renforçant la capacité de gestion soutenable des ressources naturelles dans une économie durable et compétitive.

1.3.

Le Comité réclame le lancement d’un exercice d’analyse de prospective au niveau européen, qui soit participatif et vise à définir concrètement la vision commune de tous les acteurs publics et privés en vue de préparer des politiques et des instruments cohérents et efficaces au niveau européen, national et régional, afin d’assurer une transition consensuelle vers l’économie circulaire et d’imprimer un élan concret au programme pour l’innovation verte. Il conviendrait également de soutenir les réseaux d’acteurs de la société civile plaidant en faveur d’une transition vers l’économie circulaire. Le Comité pourrait promouvoir activement ces réseaux et étudier aussi la possibilité de création et de gestion d’une plateforme européenne pour l’économie circulaire.

1.4.

Parallèlement, le CESE juge essentiel d’engager un dialogue structuré concernant les différents secteurs dans lesquels lancer des projets pilotes d’aide à l’expérimentation qui jouent un rôle moteur et révèlent l’ensemble des possibilités que recèlent des pratiques plus durables, avec la pleine participation des organisations de consommateurs, des micro- et petites entreprises et de l’économie sociale.

1.5.

Le Comité estime indispensable qu’une analyse coûts-bénéfices soit réalisée afin de déterminer sur quels acteurs est susceptible de retomber le poids d’une reconversion systémique des secteurs manufacturier, commercial, de la distribution et de la consommation; le système de l’obsolescence programmée doit être abandonné au profit de nouveaux modes d’utilisation et de consommation afin que les produits et composants conservent leur valeur ajoutée et la possibilité d’être réutilisés le plus longtemps possible.

1.6.

Le Comité considère que la transition vers le nouveau modèle d’économie circulaire, comprenant notamment le processus de retransformation et de reconsommation, ne saurait être dissociée de la diffusion généralisée des méthodologies liées au «territoire socialement responsable» qui permettent de développer une culture partagée de l’innovation et de la participation.

1.7.

Le CESE demande que l’Union européenne prévoie la possibilité de définir, sur la base de critères préétablis, un nombre significatif de zones précises propices à l’innovation — villes intelligentes, zones franches portuaires, pôles localisés, pacte vert — où l’on pourrait expérimenter le processus de transition vers l’économie circulaire, notamment en se basant sur les expériences positives réalisées avec des instruments européens tels que le pacte des maires.

1.8.

Le CESE se félicite dès lors des propositions du Plan d’action vert pour les PME et de l’Initiative pour l’emploi vert, mais déplore l’absence de mesures concrètes et d’orientations pratiques pour aider les PME à devenir plus durables et plus vertes. Il demande en outre que, conformément au Small Business Act, le principe «Penser en priorité aux PME» soit placé au cœur même du plan d’action.

1.9.

En particulier, le CESE juge fondamental que les partenaires sociaux et la société civile jouent un rôle actif dans l’élaboration, la mise en œuvre et le suivi des politiques nationales de développement durable et la transition vers une économie circulaire à durabilité environnementale élevée, à même de créer un nombre important d’entreprises et d’emplois verts.

1.10.

Le CESE est d’avis que les mesures proposées pour combler les lacunes en matière de compétences «vertes» doivent être renforcées grâce à une utilisation efficace et ciblée des Fonds structurels — en particulier le Fonds social européen, le Fonds européen de développement régional et les fonds pour l’agriculture et la pêche — et des instruments d’innovation tels que «Horizon 2020», COSME et LIFE, mais également grâce aux instruments de la BEI en faveur de la microfinance verte.

1.10.1.

Il convient également de:

procéder à une quantification réelle des gisements d’emplois durables et non délocalisables,

préserver l’équité et la durabilité du processus, en évitant les risques de pauvreté et de précarité énergétique grâce à un dialogue social structuré aux différents niveaux, s’inscrivant dans le cadre d’une vision stratégique commune,

mener une activité de sensibilisation et d’orientation développée conjointement par les partenaires sociaux,

veiller à une étroite interaction entre le monde du travail et celui de l’éducation et de la formation, en tirant parti des forces sociales.

1.11.

Le CESE est convaincu qu’une transition consensuelle et participative vers une économie européenne circulaire peut ouvrir de nombreuses perspectives aux micro-, petites et moyennes entreprises et à l’économie sociale, et devenir ainsi un important moteur pour la croissance, tant sur le marché intérieur qu’international. À cet égard, il y a lieu d’accorder la priorité:

au renforcement et à la généralisation du mécanisme volontaire d’audit environnemental de l’entreprise,

au développement de l’accès au crédit, notamment avec des systèmes de garantie,

au financement de l’éco-innovation des micro- et mini-entreprises, surtout dans le cadre de projets de démonstration de solutions éco-innovantes systémiques,

au renforcement de la formation entrepreneuriale et du mentorat en entreprise,

au soutien à un marché circulaire européen de matériaux, composants et produits intermédiaires, notamment grâce au lancement d’un eBay circulaire sur la base de normes techniques et réglementaires européennes et internationales, entres autres dans le but de stabiliser en Europe les ressources primaires et secondaires susceptibles d’être des éléments précieux pour la sécurité d’approvisionnement et les balances commerciales.

1.12.

Le Comité est convaincu que la transition vers une économie circulaire mérite un soutien ferme, en particulier en Europe. Il serait dès lors nécessaire:

de prendre en compte cette approche politique intégrée lors du réexamen à moyen terme de la stratégie Europe 2020 pour une croissance durable, intelligente et inclusive, afin d’en exploiter toutes les possibilités sur le plan économique et de l’emploi,

de mettre l’accent sur des idées nouvelles et/ou des secteurs hautement innovants et caractérisés par un niveau d’application technologique pratique élevé, y compris l’utilisation de technologies existantes et la prise en compte d’une innovation sociale durable,

de modifier l’approche politique et législative des différents niveaux (européen, national et territorial) qui de répressive doit devenir proactive, notamment au travers de l’élaboration, hautement souhaitable, d’un livre blanc sur l’économie circulaire, l’emploi et la croissance dans l’Union européenne, qui prenne en compte la grande variété des instruments et politiques concernés.

2.   Introduction

2.1.

Contrairement au modèle de l’économie linéaire, qui consiste à «extraire, fabriquer, utiliser et jeter», l’économie circulaire répond à la nécessité de créer une croissance durable afin que les produits conservent une valeur ajoutée le plus longtemps possible et que leurs composants puissent être réutilisés au maximum dans le cycle de production, ce qui permet de réduire de plus en plus la production et la mise en décharge des déchets ainsi que les pressions sur l’environnement.

2.2.

Selon une étude McKinsey, entre 60 et 80 % des ressources sont gaspillées au terme du cycle linéaire d’extraction, de fabrication, de consommation et de mise en décharge. Dans un monde où 3 milliards de consommateurs font partie de la classe moyenne, ce n’est plus viable.

2.3.

La transition vers une économie circulaire implique un changement radical de mentalité chez les producteurs, les travailleurs, les consommateurs et les citoyens concernant l’utilisation des ressources et des matières premières, la conception des produits, les modèles de marché et d’entreprise ainsi que la recherche de nouvelles méthodes de transformation des déchets en ressources.

2.4.

Les technologies requises pour assurer la traçabilité des matériaux tout au long de la chaîne de valeur existent. Par ailleurs, les ressources sont de plus en plus rares et les prix des biens proposés élevés. Pour les consommateurs, un service ponctuel peut s’avérer plus intéressant que le fait de posséder purement et simplement un produit.

2.5.

Un modèle de croissance verte implique une véritable révolution culturelle et doit s’accompagner d’une stimulation importante de la recherche et de l’innovation. Mais il exige aussi des investissements considérables en matière de technologie, d’éducation, d’organisation, de formation de nouveaux profils professionnels, de nouveaux modes de financement et de politiques adéquates.

2.6.

Il est essentiel d’adopter une approche politique intégrée afin de tirer pleinement parti des possibilités d’emploi sur la base d’un accès approprié aux nouveaux profils et de relever les défis liés au passage à une économie à cycle non linéaire, y compris en renforçant la communication afin de faire face à l’ensemble des grands défis en jeu, notamment grâce à de nouveaux modèles de formation, de travail et d’organisation.

2.7.

Si l’on veut garantir la compétitivité des industries européennes à l’avenir, il est essentiel de renforcer la capacité de fabriquer des biens durables en utilisant moins de matières premières, moins d’énergie et moins d’eau et en récupérant des ressources abandonnées sur le territoire. Il convient de concevoir et de fabriquer des biens susceptibles d’être réutilisés, réparés, régénérés et recyclés et d’organiser des services fonctionnels à cette fin.

2.8.

Les déchets générés à une étape donnée de la fabrication devraient pouvoir être transformés en ressources pour d’autres activités et, le cas échéant, en engrais pour les exploitations agricoles de la région. Au lieu de la gaspiller, il convient de récupérer la chaleur pour d’autres usages, par exemple pour chauffer des habitations ou des serres.

2.9.

Dans le cadre d’un modèle circulaire, chaque tonne de matériel, chaque joule d’énergie, chaque hectare de terre doit permettre de générer de la valeur ajoutée et des bénéfices accrus grâce à une utilisation parcimonieuse des matériaux, à leur réemploi et à leur recyclage.

2.10.

Pour tirer pleinement profit de la transition vers l’économie circulaire, il convient de prendre les mesures suivantes:

2.10.1.

éliminer les obstacles systémiques qui empêchent l’adoption, par les PME, de modèles d’entreprise circulaires ainsi que l’utilisation efficace des matériaux issus du flux des déchets et des réseaux d’information sectoriels et intersectoriels, notamment au niveau de l’Union européenne;

2.10.2.

former de nouveaux profils professionnels en matière de ressources humaines pour gérer ces processus, étant donné que l’éducation et la formation visant à rendre les emplois plus verts reposent sur une bonne formation de base assortie de mesures d’apprentissage tout au long de la vie active, y compris une formation axée sur l’écosensibilisation (1);

2.10.3.

se doter d’instruments financiers adéquats, en particulier pour la recherche et l’innovation, le développement des capacités et les analyses de marché, en recourant à des outils tels que le programme «Horizon 2020», les Fonds structurels, la BEI et les partenariats public-privé;

2.10.4.

simplifier et adapter, aux différents niveaux de gouvernance, les réglementations en passant d’un système d’interdictions à une approche proactive, afin de faciliter la création et le développement d’entreprises vertes génératrices d’emplois qualifiés et durables, en cohérence avec le Small Business Act;

2.10.5.

faire en sorte que les partenaires sociaux et la société civile jouent un rôle actif dans l’élaboration, la mise en œuvre et le suivi des politiques nationales de développement durable, la transition vers une économie circulaire à durabilité environnementale élevée et génératrice de nombreux emplois verts;

2.10.6.

fournir des lignes directrices et apporter un soutien technique concret aux microentreprises ainsi qu’aux petites et moyennes entreprises et aux coopératives en leur expliquant, avec le concours des forces sociales, comment rendre leurs processus de production plus verts, dans le cadre de la mise à disposition d’une «boîte à outils» pour de nouveaux modèles d’entreprises et de l’échange des meilleures pratiques;

2.10.7.

favoriser une culture du dialogue et de la coopération sur le lieu de travail, afin d’utiliser les ressources de manière plus rationnelle, de réduire les déchets, de recourir à des technologies et méthodes de travail propres et sans danger et d’améliorer la qualité de l’emploi.

2.11.

Le verdissement des emplois et la promotion des emplois verts dans les secteurs traditionnels comme dans les secteurs innovants devraient favoriser une économie durable sur le plan environnemental, compétitive et à faible empreinte de carbone, ainsi que des modes de consommation et de production durables, et contribuer de ce fait à la lutte contre le changement climatique.

2.12.

Le CESE a eu l’occasion de se pencher à plusieurs reprises et dans différents avis (2) sur cette vaste thématique; il a notamment souligné les éléments suivants:

l’ensemble des acteurs doivent être pleinement conscients de se trouver face à une nouvelle révolution industrielle, qui place la qualité de la vie et de l’environnement au centre du développement et impose un nouveau mode, intégré, de planification, de production, de consommation, de conservation et de gestion des ressources naturelles,

l’urgence de passer d’un comportement défensif et réactif à une attitude convaincue et proactive,

le soutien d’initiatives visant à développer une politique communautaire de consommation et de production durables, pleinement intégrée dans les autres politiques de l’Union européenne, dans le but de transformer les défis potentiels en opportunités compétitives pour l’industrie de l’Union européenne,

la nécessité d’un dialogue sérieux entre les institutions de l’Union européenne, les autorités nationales et locales et tous les partenaires sociaux sur le potentiel de changement des modèles de consommation et du modèle économique et social global.

2.12.1.

Nombre des progrès industriels accomplis ces trente dernières années découlent de l’adoption de législations et de normes qui ont obligé les industries à réduire la pollution et à rechercher de nouvelles pistes pour transformer les déchets en bénéfices. Il convient d’établir de nouvelles règles fiscales qui créent un équilibre entre l’économie et l’utilisation d’énergie ainsi que des dispositions appropriées permettant aux industries d’assumer la responsabilité de l’ensemble du cycle de vie des produits.

2.13.

En outre, dans un récent avis, le CESE a souligné que «les changements profonds et nécessaires à introduire dans le mode de production et de consommation requièrent comme condition préalable essentielle d’associer la société civile à tout ce processus de transition vers une économie verte et inclusive — et ce à tous les niveaux, tout particulièrement aux niveaux sectoriel et territorial (européen, national, et régional)» (3).

2.14.

De son côté, le Parlement européen a adopté, le 12 décembre 2013, une résolution intitulée «L’éco-innovation — emplois et croissance induits par la politique environnementale»  (4), dans laquelle:

il souligne notamment le double avantage, environnemental et économique, qu’offre une transition vers une économie verte et durable, en termes de création d’emplois durables,

il souligne que cette évolution devrait créer des emplois durables et de qualité pour les travailleurs qualifiés et non qualifiés,

il encourage les États membres à prévoir des mesures d’incitation à l’intention des entreprises, en particulier des PME, afin de stimuler les investissements privés dans la recherche et le développement.

2.15.

En octobre 2011, le Comité des régions (CdR) a adopté un avis sur l’initiative phare «Une Europe efficace dans l’utilisation des ressources», dans lequel il s’est dit favorable à «la création d’une plate-forme de transition sur l’efficacité dans l’utilisation des ressources qui regrouperait différents acteurs et devrait également inclure les décideurs appartenant à différents niveaux administratifs, représentant notamment le niveau régional et local».

3.   Observations générales

3.1.

Le Comité se félicite de la présentation du paquet «Économie circulaire» et plus particulièrement des deux initiatives relatives à l’emploi vert et au plan de développement des PME dans le cadre de la transition vers une économie circulaire, qui font l’objet du présent avis.

3.2.

Dans le même temps, il est cependant préoccupé par le fait que ces initiatives, en particulier le Plan d’action pour les PME, comportent certes une multitude d’informations, mais ne proposent pas aux PME et aux travailleurs concernés de mesures concrètes ni d’orientations pratiques pour rendre les processus de production et services plus verts de manière efficace, à moindres frais et en améliorant la qualité du travail sans perdre en compétitivité.

3.3.

Selon le CESE, la transition vers l’économie circulaire ne saurait avoir lieu sans la participation du secteur productif, des travailleurs et des consommateurs, mais aussi des autorités politiques et des administrations publiques aux différents niveaux, à commencer par l’échelon européen, qui devraient abandonner une approche fondée sur des interdictions au profit d’une approche proactive cohérente de soutien à la transition, notamment en introduisant des spécifications vertes pour l’ensemble des marchés publics.

3.4.

Il s’agit en effet de revoir la conception des processus de fabrication — ce qui impliquera que les entrepreneurs et les travailleurs acquièrent de nouvelles compétences —, de développer des systèmes organisationnels et de marché innovants, d’acquérir de nouveaux modes d’utilisation et de consommation, mais également, et peut-être surtout, de mettre en place une nouvelle culture industrielle et de services ainsi qu’une nouvelle culture législative et administrative.

3.5.

Le Comité réclame fermement le lancement, dans le cadre d’«Horizon 2020», d’un vaste exercice de prospective au niveau européen, qui soit participatif et vise à définir concrètement la vision commune de tous les acteurs publics et privés en vue de préparer des politiques et des instruments cohérents et efficaces au niveau européen, national et régional, pour une transition consensuelle et harmonieuse vers l’économie circulaire, au-delà des efforts positifs consentis par la plateforme européenne pour une utilisation efficace des ressources (EREP), et ce afin:

3.5.1.

d’associer les citoyens, travailleurs, consommateurs et entreprises au moyen d’incitants spécifiques innovants — y compris individuels — visant à récompenser un certain nombre de mesures et de comportements;

3.5.2.

de promouvoir la durabilité environnementale et sociale et de stimuler l’innovation et les investissements dans le capital humain, social et environnemental grâce à des cadres réglementaires et financiers européens;

3.5.3.

d’instaurer un cadre institutionnel cohérent et simplifié au sein duquel les entreprises, les travailleurs, les investisseurs et les consommateurs pourront participer activement au processus de transition;

3.5.4.

de garantir un soutien financier approprié de l’Union européenne, des États membres et des collectivités territoriales pour favoriser l’accès au crédit, en particulier pour les microentreprises;

3.5.5.

d’encourager les mesures d’incitation fiscale ciblées, les partenariats public-privé innovants et les politiques de marchés publics «verts», et de diffuser les meilleures pratiques visant à faciliter l’accès aux débouchés économiques et à rendre les marchés du travail plus inclusifs en préservant les ressources au niveau territorial;

3.5.6.

de créer une interaction durable entre le monde du travail et de l’entreprise et celui de l’éducation et de la formation en ce qui concerne la production, la consommation et les emplois verts (5);

3.5.7.

de fournir des services d’aide et de mentorat aux micro-, petites et moyennes entreprises grâce à des réseaux et centres d’excellence européens pour le développement des connaissances, des compétences et des marchés, mais surtout grâce à un soutien financier et à l’apport de formations.

3.6.

Parallèlement, le CESE juge essentiel d’engager un dialogue structuré concernant les différents secteurs dans lesquels initier des projets pilotes d’aide à l’expérimentation qui jouent un rôle moteur et révèlent l’ensemble des possibilités que recèlent des pratiques plus durables, avec la pleine participation des forces sociales, des organisations de consommateurs, des micro- et petites entreprises et de l’économie sociale.

3.7.

De l’avis du Comité, avant de prendre des mesures visant à créer de nouveaux emplois verts décents et durables et à élaborer des plans d’action verts pour les PME, il serait opportun de lancer un plan de lutte contre l’obsolescence programmée des produits.

3.8.

Les coûts des filières industrielles de recyclage et de réutilisation, la qualité et la pérennité des nouveaux emplois qui seront ainsi créés ne sauraient être uniquement réduits à un aspect de la politique environnementale: ils requièrent des systèmes de gouvernance proactive complexes et des mesures intégrées dans de nombreux secteurs stratégiques, tels que les questions liées aux consommateurs, aux transports, à l’agriculture et à l’énergie (6).

3.9.

L’innovation dans les marchés des matériaux recyclés doit pouvoir s’appuyer sur un cadre normatif européen renouvelé et cohérent qui permette de conjuguer innovation et utilisation des produits, à l’opposé des processus actuels de reconditionnement des matériaux de rebut et d’élimination des composants dans des pays où les coûts salariaux sont peu élevés et qui sont peu soucieux de la sécurité et de la santé des travailleurs (7).

3.10.

Le Comité considère que la transition vers le nouveau modèle d’économie circulaire, comprenant notamment le processus de retransformation et de reconsommation, ne saurait être dissociée de la diffusion généralisée de la notion de «territoire socialement responsable» (TSR).

4.   L’économie circulaire et la création d’emplois

4.1.

Le CESE juge insuffisantes les mesures proposées pour combler les lacunes en matière de compétences «vertes»: l’échange de bonnes pratiques au sein des réseaux existants n’apparaît pas suffisant pour garantir une meilleure évaluation des développements en matière de compétences et d’emploi. Selon le CESE, une meilleure définition européenne des compétences et emplois «verts» — notamment en vue d’améliorer les relevés statistiques — avec la participation active des partenaires sociaux, des PME et de l’économie sociale permettrait de réaliser des analyses plus claires et des exercices de prospective plus ciblés, non seulement pour les nouveaux profils professionnels mais aussi la reconversion des profils obsolètes — également en ce qui concerne la flexicurité et l’introduction du cadre de qualité de l’Union européenne (8).

4.2.

Le CESE estime qu’une utilisation efficace et ciblée des Fonds structurels — ainsi que des instruments d’innovation tels que «Horizon 2020», COSME et LIFE, mais également les instruments de la BEI en faveur de la microfinance verte — est essentielle pour promouvoir des emplois qualifiés, en particulier s’ils sont axés sur les plus petites entreprises et l’économie sociale et liés au processus consensuel de prospective soutenu par le Comité.

Il convient à cet égard:

4.2.1.

de procéder à une quantification réelle des gisements d’emplois durables et non délocalisables que pourrait générer au niveau local, sectoriel et intersectoriel la transition vers l’économie circulaire, compte tenu également de l’urgence, pour l’économie européenne, de renouer avec une croissance durable et génératrice d’emplois;

4.2.2.

de préserver l’équité et la durabilité du processus: le passage à l’économie circulaire ne doit pas poser de problèmes de justice sociale pour les travailleurs, les micro- et mini-entreprises et l’économie sociale;

4.2.3.

de mettre en place un dialogue structuré aux différents niveaux, pleinement incorporé dans la définition commune de la vision stratégique et des politiques intégrées, à mettre en place afin que l’économie circulaire dispose de manière synchrone des qualifications professionnelles et de la main-d’œuvre nécessaires à son développement;

4.2.4.

de veiller à une étroite interaction entre le monde du travail et celui de l’éducation et de la formation, en vue du développement favorable des compétences, avec de solides systèmes d’enseignement et de formation techniques et professionnels associant directement les forces sociales (9).

5.   Le plan d’action vert pour les PME

5.1.

Le CESE est convaincu que la transition vers une économie européenne circulaire peut ouvrir de nombreuses perspectives aux micro-, petites et moyennes entreprises et à l’économie sociale, et devenir ainsi un important moteur pour la croissance, tant sur le marché intérieur qu’international, ainsi que pour le renforcement de leurs capacités de gestion durable des ressources naturelles et pour la création de nouveaux emplois qualifiés.

5.2.

Le CESE demande que tout au long du processus législatif et de mise en œuvre, le Plan d’action suive et promeuve le principe «Priorité aux PME» et qu’une attention particulière soit accordée à la législation sur l’efficacité des ressources, conformément au Small Business Act, en appliquant le «test PME» en tant que facteur clé du processus de transition vers une économie circulaire.

5.3.

Selon le CESE, il y a lieu de remodeler en conséquence les instruments de soutien aux entreprises de plus petite taille et à l’économie sociale, étant donné que les instruments précédents, comme le plan d’action pour l’éco-innovation, n’ont produit que des résultats limités.

5.4.

Parmi les 34 actions décrites dans le document de travail de la Commission (10) annexé à la proposition, le Comité estime que la priorité devrait être accordée aux suivantes:

5.4.1.

renforcement et généralisation du mécanisme volontaire expérimental d’audit environnemental pour les PME en vue d’une vérification étendue, au moyen de subventions européennes, des technologies environnementales (ETV — Environmental technologies verification) liées à l’écoconception et aux processus, avec apposition éventuelle de la marque communautaire «verte» (de type Écolabel II);

5.4.2.

amélioration de l’accès au crédit: renforcer le rôle de la BEI pour permettre aux entreprises d’accéder au crédit dans le cadre de la transition vers l’économie circulaire, en consolidant le mécanisme de financement du capital naturel (Natural Capital Financing Facility — NCFF); créer des systèmes de garantie spécifiques pour les micro- et petites entreprises pour un accès aisé et rapide aux crédits, au microcrédit, au capital-risque et à l’instrument de financement privé pour l’efficacité énergétique (Private Finance for Energy Efficiency — PF4EE), à mettre en œuvre dans toute l’Union européenne;

5.4.3.

financement de l’éco-innovation pour les micro- et mini-entreprises: recours plus aisé aux instruments d’«Horizon 2020» en faveur des PME, au FEDER, au FEAMP, aux fonds LIFE et au Feader pour les projets de démonstration innovants dans l’Union européenne avec guichet unique interprogramme dans des secteurs bien définis et délimités, comme les projets de démonstration de l’éco-innovation systémique — par exemple dans des domaines tels que les villes intelligentes, les pôles territoriaux, les zones franches — sur lesquels il convient de concentrer les interventions, les mesures d’incitation et les exemptions, avec des objectifs intermédiaires quantifiables et bien visibles;

5.4.4.

renforcement des mesures en faveur de la formation entrepreneuriale et du mentorat en entreprise: privilégier la formation en entreprise grâce aux supports numériques — avec le soutien du réseau Entreprise Europe (EEN) et du futur Centre d’excellence en ressources — et le mentorat d’experts spécialisés en accordant des financements européens aux organisations professionnelles de micro- et mini-entreprises de proximité territoriale, et en recourant aux programmes Erasmus + et COSME pour une sélection de projets;

5.4.5.

création d’un marché circulaire de matériaux, composants et produits intermédiaires: lancement d’un eBay circulaire avec accès aisé et sécurisé pour les micro- et petites entreprises vertes et l’économie sociale, sur la base d’échanges reposant sur des normes technico-réglementaires renforcées (CEN-Cenelec-ETSI et ISO).

Bruxelles, le 10 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  JO C 318 du 29.10.2011, p. 142-149.

(2)  JO C 224 du 30.8.2008, p. 1-7; JO C 226 du 16.7.2014, p. 1-9; JO C 67 du 6.3.2014, p. 23-26; JO C 44 du 11.2.2011, p. 110-117.

(3)  JO C 271 du 19.9.2013, p. 18-22.

(4)  http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+TA+P7-TA-2013-0584+0+DOC+XML+V0//FR

(5)  JO C 311 du 12.9.2014, p. 7-14.

(6)  JO C 24 du 28.1.2012, p. 11-17.

(7)  JO C 107 du 6.4.2011, p. 1-6.

(8)  JO C 451 du 16.12.2014, p. 116.

(9)  JO C 311 du 12.9.2014, p. 7-14.

(10)  SWD(2014) 213 final.


14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/107


Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil «Meilleure connaissance de la situation grâce à une coopération renforcée entre les autorités de surveillance maritime: prochaine évolution de l’environnement commun de partage de l’information pour le domaine maritime de l’Union européenne»

[COM(2014) 451 final]

(2015/C 230/16)

Rapporteur:

M. POLYZOGOPOULOS

Le 20 novembre 2013, la Commission européenne a décidé, conformément à l’article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil «Meilleure connaissance de la situation grâce à une coopération renforcée entre les autorités de surveillance maritime: prochaine évolution de l’environnement commun de partage de l’information pour le domaine maritime de l’Union européenne»

COM(2014) 451 final.

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l’information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 11 novembre 2014.

Lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 10 décembre 2014), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis à l’unanimité.

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le CESE porte un jugement positif sur la communication à l’examen, en tant qu’elle s’inscrit dans la continuité logique des efforts déployés pour mettre en place une surveillance maritime efficace et plus rentable, financièrement parlant, laquelle constitue l’un des objectifs stratégiques de la politique maritime intégrée (PMI), et fait observer que l’amélioration de l’échange d’informations entre les autorités chargées de cette surveillance est un facteur lié de manière essentielle à la protection de l’Union, à sa sécurité, à son économie et à l’avenir de son environnement.

Le CESE reconnaît les progrès qui ont été réalisés aux niveaux européen et national depuis l’élaboration de la feuille de route de 2010 (1), en estimant toutefois qu’il serait plus particulièrement utile de jauger cette progression avec davantage d’exactitude par rapport aux objectifs et aux six étapes de ladite feuille de route et à la communication du 15 octobre 2009 (2).

1.2.

Ayant fait récemment observer (3) que les défis géopolitiques, stratégiques et environnementaux s’intensifient dans le domaine de la sécurité maritime, le CESE exhorte la Commission à préciser immédiatement et à accélérer le «processus d’évaluation de la mise en œuvre d’un CISE pour le domaine maritime et de la nécessité de prendre de nouvelles mesures» (4), qui est censé être lancé d’ici à 2018.

1.3.

Le CESE recommande que, dans le développement ultérieur du CISE («environnement commun de partage de l’information»), il soit tiré parti du champ d’intervention élargi et des possibilités qu’offre la récente communication sur la stratégie européenne de sûreté maritime (5) afin de développer une approche actualisée, cohérente et globale de la surveillance maritime.

1.4.

Le CESE incite la Commission à expliciter comment les États membres peuvent être «encouragés à poursuivre la modernisation de leur système de surveillance maritime» sans disposer à cette fin de moyens supplémentaires autres que «des financements […] pour soutenir les petites améliorations» (6), et il recommande de canaliser ou de réinvestir une partie des ressources économisées afin de combler les lacunes du CISE et de l’améliorer globalement.

1.5.

Dans la mesure où le projet repose sur une base volontaire et vu l’importance que revêtent en la matière la volonté politique ainsi que les obstacles culturels découlant, entre autres, d’états d’esprit, de stéréotypes et de méthodes de travail invétérés, le CESE encourage la Commission à concentrer ses efforts sur des actions d’éducation ou de formation et des initiatives propres à restaurer la confiance, tirant parti des expériences positives existantes, telles que le Forum des gardes côtières de l’Atlantique Nord ou l’Association internationale de signalisation maritime (AISM).

1.6.

Il invite également la Commission à définir plus clairement par quel dosage de mesures elle prévoit, à court et à long terme, de faire face aux obstacles juridiques et techniques qui compliquent la consolidation d’un CISE efficace.

1.7.

Le CESE prévient que l’évolution très rapide des moyens informatiques expose inévitablement tout nouvel environnement de partage d’informations sensibles, tel que le CISE, à des attaques (7) venues du cyberespace mais aussi de terroristes, avec des conséquences potentielles incalculables pour la sécurité des transports, des échanges, des ports, des navires, des équipages et des cargaisons, et demande dès lors à la Commission d’examiner immédiatement la question de la cybersécurité dans le transport maritime et de dégager des mesures précises pour protéger le CISE. Le rapport de 2014 de la direction de l’audit du Congrès des États-Unis sur la «Protection des infrastructures critiques maritimes» témoigne du caractère urgent de la situation en la matière (voir http://gao.gov/products/GAO-14-459).

1.8.

Le CESE souligne que la connaissance améliorée de la situation et la coopération renforcée entre les autorités de surveillance maritimes qui seront assurées au moyen du CISE contribueront à la protection de l’intégrité écologique du domaine maritime de l’Union européenne, en préservant mieux la biodiversité et les ressources marines des accidents nucléaires, du déversement illégal de substances toxiques, des incidents graves dans lesquels interviennent des substances polluantes, ainsi que des changements climatiques. En outre, l’amélioration de la sécurité des câbles et conduits sous-marins renforcera l’efficacité énergétique.

2.   Introduction

2.1.

Pour appréhender les risques et les menaces, il est d’une importance capitale d’avoir accès en temps utile à des informations précises et de pouvoir se faire une image commune et validée de la situation maritime. L’intégration de diverses sources de données et la coordination des autorités compétentes contribuent à une meilleure compréhension des enjeux maritimes en cours et créent de la valeur ajoutée, grâce à l’utilisation efficace de ressources limitées.

2.2.

Dans ce cadre, un échange optimal d’informations entre les autorités de surveillance maritime constitue l’un des objectifs stratégiques de la politique maritime intégrée. Le déploiement d’un environnement commun de partage de l’information pour le domaine maritime de l’Union européenne a fait l’objet de deux communications, publiées par la Commission en 2009 et 2010 (8).

2.3.

En 2012, le renforcement de la sécurité maritime grâce à la surveillance intégrée des mers a reçu valeur de composante de base du programme en faveur de la croissance bleue, qui vise à créer de la croissance et de l’emploi dans l’économie maritime (9).

2.4.

La récente (2014) communication conjointe sur la stratégie de l’Union européenne en matière de sécurité maritime (10) confirme, arguments à l’appui, l’importance de la surveillance maritime et de l’échange d’informations sur les affaires maritimes en tant qu’élément constitutif essentiel de la sécurité maritime.

3.   Les axes de la communication de la Commission

3.1.

La communication présente les progrès réalisés aux niveaux européen et national depuis le lancement de la feuille de route du CISE, lequel constitue un processus de collaboration volontaire permanente qui a pour objectif de renforcer la connaissance, l’efficacité, la qualité, les capacités de réaction et la coordination pour ce qui concerne les actions de surveillance du domaine maritime européen, ainsi qu’à encourager l’innovation.

3.2.

Au-delà de leur simple partage, l’Union européenne vise, avec le CISE, à ce que les informations fassent l’objet d’utilisations multiples et correctes par différentes communautés d’utilisateurs, sans doublons, grâce à un réseau décentralisé de surveillance maritime qui respecte les dispositions relatives à la protection des données et les règles internationales. Il ne remplace pas les systèmes et plates-formes d’échange d’informations qui existent actuellement et n’a pas d’incidence sur les structures afférentes ou sur la législation qui existent dans les États membres.

3.3.

Plus spécifiquement, la feuille de route (11) a fixé six étapes pour le développement du CISE, à savoir l’identification des communautés d’utilisateurs, la cartographie des jeux de données et l’analyse des carences en matière d’échange de données, la définition de niveaux communs de classification des données, la construction d’un cadre de soutien, la définition des droits d’accès et, enfin, l’établissement d’un cadre juridique cohérent.

3.4.

Le CISE se rapporte aux secteurs d’intervention suivants: 1) la sécurité maritime (y compris la recherche et le sauvetage), la sûreté maritime et la prévention de la pollution provoquée par les navires, 2) le contrôle des pêches, 3) la préparation et la réaction en matière de pollution marine accidentelle et la protection de l’environnement marin, 4) les douanes, 5) le contrôle aux frontières, 6) l’application générale de la législation et 7) la défense.

3.5.

Les économies potentielles que peut en tirer l’économie européenne, sur le plan des coûts administratifs et d’exploitation, sont de l’ordre de 400 millions d’euros par an, et, directement pour les pouvoirs publics, d’environ 40 millions l’année. Les investissements afférents sur les dix premières années sont estimés à quelque 10 millions d’euros sur une base annuelle.

4.   Observations générales

4.1.

Mettant l’accent sur l’importance quantitative de la marine européenne et la portée qu’elle revêt du point de vue de l’emploi et de l’économie, le CESE a entrepris, dans des avis antérieurs, de formuler des observations et des recommandations pertinentes sur une série de problématiques en rapport avec la politique maritime européenne (12) et s’est prononcé de manière circonstanciée tant sur les problématiques générales de la sécurité en mer que sur des questions touchant plus spécifiquement à la surveillance maritime intégrée, en indiquant que, pour assurer ladite surveillance, un dispositif intégré était nécessaire (13).

4.2.

Favorable à une approche transsectorielle de la gestion des mers, le CESE a souligné plus spécifiquement que, pour aboutir à un marché maritime véritablement intégré, il est indispensable que les services d’inspection, les garde-côtes et les marines de guerre des États membres nouent une coopération plus étroite, laquelle suppose d’établir une structure d’échange d’informations et un système intégré de surveillance de la mer (14).

4.3.

Le CESE s’est également prononcé en faveur d’un mécanisme de surveillance commun à l’ensemble de l’Union européenne, qui s’appuie sur un cadre juridique harmonisé et permette d’assurer le partage des informations, sensibles ou non, entre les autorités des États membres de l’Union, les agences et les utilisateurs (15).

4.4.

Le CESE souligne tout particulièrement qu’il importe de clarifier et d’affermir les structures de gouvernance et les ressources si l’on veut assurer la viabilité de l’initiative à l’examen, exceptionnelle de complexité et d’ambition, à laquelle prennent part plus de 400 autorités, qui gèrent un volume énorme d’informations en rapport avec la surveillance maritime et parmi lesquelles figurent les pouvoirs publics des États membres de l’Union européenne et de l’EEE, ainsi que différents organismes de l’Union européenne, tels que l’Agence européenne de contrôle des pêches (AECP), l’Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l’Union européenne (Frontex), l’Agence européenne pour la sécurité maritime (EMSA) et l’Agence européenne de défense (AED).

4.5.

Le CESE fait observer que comme cette action revêt un caractère volontaire et eu égard au principe de subsidiarité, ce sont les États membres qui, dans un contexte d’austérité budgétaire et de crise, assument un rôle central, qui induit des charges supplémentaires pour leurs autorités compétentes et de grosses dépenses pour moderniser et rendre compatibles leurs équipements informatiques respectifs, qui reposent pour une part importante, environ le quart d’entre eux, sur une architecture monolithique et vieillie. Sur ce point, on renverra au document de travail des services de la Commission SWD(2014) 224 final, «Analyse d’impact», et à Gartner, 2013, «Durabilité et efficacité des scénarios pour l’environnement commun de partage de l’information (CISE)», de la direction générale de l’environnement et des affaires maritimes de la Commission européenne.

4.6.

Compte tenu de l’étude qui a été réalisée sur l’évaluation des risques dans le domaine maritime de l’Union européenne pour les quinze prochaines années, le CESE estime que, dans la hiérarchisation des informations qui seront échangées, il y a lieu de donner la priorité à la détection efficace des dangers, des menaces et des points faibles, dans chaque secteur en particulier et ce, dans les zones maritimes mais aussi sur un plan plus général. On se reportera à cet égard à l’«Étude d’évaluation des risques, faisant partie intégrante de l’évaluation d’impact en faveur d’un environnement commun de partage de l’information (CISE) pour le domaine maritime de l’Union européenne», de Wise Pens International (2013, de la direction générale de l’environnement et des affaires maritimes de la Commission européenne).

4.7.

En tout état de cause, la confidentialité et la protection des données sensibles à caractère personnel ou commercial constituent des questions d’importance majeure. Le CESE estime qu’elles doivent faire l’objet de davantage d’attention et être précisées plus avant et il renvoie aux observations et recommandations qu’il a émises précédemment sur ce thème.

4.8.

Le CESE exprime sa satisfaction quant aux progrès qui ont été réalisés dans la mise en œuvre de la feuille de route relative au CISE, grâce aux programmes BlueMassMed, Marsuno et CoopP, qui ont confirmé la nécessité opérationnelle de l’échange intersectoriel d’informations et ont contribué à un éclaircissement en la matière; aussi encourage-t-il la Commission à étendre ces efforts.

4.9.

Le CESE juge également encourageantes les avancées, déjà signalées, s’agissant de la mise en œuvre de multiples dispositifs (16) qui servent les objectifs poursuivis dans divers secteurs d’action et, dans certains cas, couvrent plus d’un domaine.

4.10.

Le CESE souligne que la géographie maritime de l’Union européenne, avec ses six bassins marins, ses régions ultrapériphériques et les spécificités de ses aires insulaires, est unique en son genre et il fait valoir que, dans les situations de menaces et périls intenses prenant des dimensions mondiales, le renforcement des connaissances et l’efficacité du CISE ne peuvent se concevoir si l’on n’accroît pas aussi la coopération internationale, régionale et transfrontalière, en prêtant l’attention requise à l’échange d’informations choisies avec des pays tiers et à l’examen des questions de sécurité et de réciprocité de ces données.

4.11.

Le CESE estime qu’une approche cohérente de la surveillance maritime, dans l’Union européenne et à l’échelle internationale, devra prendre en compte les questions liées à la conception et la conduite des missions et opérations relevant de la politique de sécurité et de défense commune (PSDC).

4.12.

Le CESE se réjouit de l’importante amélioration apportée à l’échange d’informations entre autorités civiles et autorités militaires, qui comptent parmi les principaux détenteurs de données relatives à la surveillance maritime, et il invite la Commission à envisager l’exploitation ciblée des ressources de l’OTAN. Il rappelle en outre les solutions exemplaires de coopération entre civils et militaires, aux niveaux national et européen, qui ont été développées dans le cadre du système européen de surveillance des frontières (Eurosur).

4.13.

Le CESE invite la Commission à s’employer à mieux exploiter les ressources et données spatiales pour développer le CISE, étant donné que la surveillance maritime constitue un des domaines d’utilisation des systèmes satellitaires de l’Union européenne. À titre d’exemple, on relèvera que les services de surveillance maritime de Copernicus (auparavant, programme GMES de «surveillance mondiale de l’environnement et de la sécurité») soutiennent des actions destinées à lutter contre la piraterie, le trafic de stupéfiants, la pêche illégale, ou encore les rejets de déchets toxiques, en coopération avec des services tels que Frontex, l’EMSA ou le Centre satellitaire de surveillance des frontières terrestres de l’Union européenne, tout en contribuant à des applications de sécurité en ce qui concerne la surveillance des frontières maritimes extérieures de l’Union européenne.

4.14.

Le CESE demande à la Commission d’examiner immédiatement la question de la cybersécurité dans le transport maritime et de déterminer des mesures précises pour protéger le CISE, en prenant en considération qu’il est indispensable d’assurer une coordination horizontale particulièrement énergique des autorités concernées.

5.   Questions spécifiques

5.1.

Le CESE exhorte la Commission à intensifier ses efforts dans le domaine de la recherche, du développement et de l’innovation, afin de gérer les aspects techniques ardus que sont l’interopérabilité et l’architecture des applications, systèmes et services, s’agissant, par exemple des variations qualitatives des données entre les différents logiciels et dispositifs, qui ont des répercussions importantes sur la bonne mise en œuvre du CISE et sa fiabilité (17).

5.2.

Le CESE estime que créer un environnement commun de partage de l’information pour le secteur maritime offrira à l’Union européenne des perspectives d’emplois et d’activité entrepreneuriale novatrice, notamment pour ce qui est des technologies de l’information et de la communication (TIC). Aussi incite-t-il la Commission à mettre en exergue cet aspect important du projet.

5.3.

Le CESE invite la Commission à intensifier ses efforts en vue de surmonter les obstacles culturels à l’échange et à la diffusion d’informations et estime que, pour instaurer la confiance et promouvoir une mentalité soucieuse de «veiller à partager pour faire connaître» (care to share to be aware), tant dans les secteurs concernés qu’entre chacun d’eux, il ne suffit pas de publier un manuel non contraignant rassemblant des recommandations de bonnes pratiques pour la mise en œuvre du CISE.

5.4.

Les différences intersectorielles qui existent dans l’intégration de la surveillance maritime aboutissent à de fortes discordances dans les efforts qui sont déployés pour les articuler avec le CISE. Ainsi, certains pays ont procédé à une simplification des systèmes informatiques destinés à cette surveillance, tandis que d’autres ne l’ont pas fait. Quelques-uns ont lancé de vigoureux mouvements pour assurer la coopération électronique entre secteurs sur leur territoire, alors que d’autres présentent des dispositifs informatiques sectoriels qui restent fermés.

5.5.

Le CESE se félicite des initiatives de la Commission visant à développer des normes afin d’élaborer un modèle commun de données, en l’occurrence une liste de termes, définitions, conventions de dénomination, formats de données et relations entre les données, qui constituera un outil de «traduction» des données entre les systèmes d’information relatifs à la surveillance maritime, notamment entre les systèmes civils et militaires.

5.6.

Le CESE se réjouit du progrès accompli dans l’instauration de guichets nationaux uniques qui offrent des plates-formes centrales nationales d’échange d’informations pour soumettre des déclarations et partager des données concernant des navires, en articulation avec le système unifié d’échange d’informations maritimes de l’Union mais aussi d’autres systèmes. Les bonnes pratiques en la matière qui ont été relevées par la Commission économique des Nations unies pour l’Europe (CEE-ONU) et la recommandation no 33 de celle-ci concernant la facilitation des échanges commerciaux et des transports constituent également un point de référence utile pour le CISE.

5.7.

Le CESE estime qu’il convient de traiter la difficulté sérieuse que pose la dépendance des plates-formes informatiques vis-à-vis de leurs fournisseurs respectifs, qui complique leur interopérabilité, dans la mesure où, dans une proportion d’environ 85 %, les systèmes informatiques de surveillance maritime en usage dans les États membres reposent sur une infrastructure spécifique et n’ont pas bénéficié d’une normalisation, si bien qu’ils restent tributaires de ces mêmes fournisseurs pour leur éventuelle mise à jour ou adaptation.

Bruxelles, le 10 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  Calendrier relatif à «la mise en place de l’environnement commun de partage de l’information aux fins de la surveillance du domaine maritime de l’Union européenne», COM(2010) 584 final.

(2)  «Sur la voie de l’intégration de la surveillance maritime: un environnement commun de partage de l’information pour le domaine maritime de l’Union européenne», COM(2009) 538 final.

(3)  Avis du CESE sur la «Stratégie de l’Union européenne en matière de sécurité maritime», JO C 458 du 19.12.2014, p. 61.

(4)  COM(2014) 451 final, p. 9.

(5)  «Pour un domaine maritime mondial ouvert et sûr: éléments d’une stratégie de sûreté maritime de l’Union européenne», JOIN(2014) 9 final.

(6)  COM(2014) 451 final, p. 8.

(7)  Voir l’avis d’initiative du CESE sur «Les cyberattaques dans l’Union européenne», JO C 451 du 16.12.2014, p. 31.

(8)  COM(2009) 538 final et COM(2010) 584 final.

(9)  COM(2012) 494 final.

(10)  JOIN(2014) 9 final, p. 8.

(11)  COM(2010) 584 final.

(12)  Voir notamment: JO C 211 du 19.8.2008, p. 31; JO C 128 du 18.5.2010, p. 131; JO C 107 du 6.4.2011, p. 64; JO C 161 du 6.6.2013, p. 87, et JO C 255 du 22.9.2010, p. 103.

(13)  Voir notamment: JO C 44 du 11.2.2011, p. 173; JO C 67 du 6.3.2014, p. 32; JO C 76 du 14.3.2013, p. 15; JO C 168 du 20.7.2007, p. 57; JO C 32 du 5.2.2004, p. 21; JO C 61 du 14.3.2003, p. 174, et JO C 458 du 19.12.2014, p. 61.

(14)  JO C 107 du 6.4.2011, p. 64.

(15)  JO C 44 du 11.2.2011, p. 173.

(16)  COM(2014) 451 final, p. 5.

(17)  COM(2014) 451 final.


14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/112


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Stratégie pour la protection et le respect des droits de propriété intellectuelle dans les pays tiers (Communication)»

[COM(2014) 389 final]

(2015/C 230/17)

Rapporteur:

M. Jacques LEMERCIER

Le 16 juillet 2014 la Commission a décidé, conformément à l’article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Communication au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen — Commerce, croissance et propriété intellectuelle — Stratégie pour la protection et le respect des droits de propriété intellectuelle dans les pays tiers»

COM(2014) 389 final.

La section spécialisée «Relations extérieures», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 17 novembre 2014.

Lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 10 décembre 2014), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 127 voix pour, 0 voix contre et 4 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le CESE appuie la communication visant une amélioration de la protection et du respect des droits de propriété intellectuelle dans les pays tiers.

1.2.

Le CESE appuie particulièrement la démarche de la Commission dans sa lutte contre la contrefaçon dans les pays tiers, considérée comme prioritaire.

1.3.

Le CESE considère que la nouvelle approche, concernant les pays tiers, est équilibrée entre le maintien des aides européennes et les sanctions envisagées en cas de fraude avérée.

1.4.

Le CESE rappelle que les populations locales ne doivent en aucun cas pâtir de la réduction éventuelle de certains financements de l’Union européenne.

1.5.

Le CESE souligne la nécessité de mieux informer et sensibiliser la société civile européenne ainsi que celle des pays tiers des conséquences liées au non-respect des droits de propriété intellectuelle (DPI). Le secteur du luxe n’est pas le seul à être frappé par la contrefaçon. La contrefaçon touche des secteurs divers comme l’automobile, l’aviation, les médicaments, les produits phytosanitaires, l’hygiène ainsi que des produits de grande consommation tels que par exemple les jouets, les appareils électriques.

1.6.

Le CESE est convaincu qu’en complément des accords internationaux sur la protection des droits intellectuels, la signature d’accords de commerce bilatéraux assortis de l’apport d’une assistance technique aux pays tiers demeure le meilleur outil de défense des intérêts des différentes parties.

1.7.

Le CESE appuie la démarche «Follow the money» (suivez l’argent) engagée par la commission pour les DPI au niveau de l’Union européenne, mais s’interroge sur son efficacité réelle, au-delà de l’exemplarité de la démarche volontaire des principaux intermédiaires intervenant sur toute la chaîne de valeur de l’économie de l’internet.

1.8.

Enfin, le CESE estime que la Commission, qui n’a pas réussi à informer ni à sensibiliser le public au sujet de l’importance du respect des droits de propriété intellectuelle, doit lancer de nouvelles actions pour y remédier.

2.   L’essentiel de la communication de la Commission

2.1.

Cette communication a pour objet d’adapter la stratégie engagée par la Commission européenne en 2004, en proposant une nouvelle stratégie pour la protection et le respect des droits de propriété intellectuelle (DPI) dans les pays tiers. La commission considère que ces dix dernières années ont vu non seulement d’importantes mutations technologiques mais aussi une évolution considérable des enjeux et des risques pour la propriété intellectuelle des entreprises européennes, de même que du rapport que la société entretient avec les DPI. Le texte propose des solutions plus précises et efficaces concernant la défense de la propriété intellectuelle dans les pays tiers et la lutte contre les contrefaçons.

2.2.   Un constat sévère: l’appropriation illicite de la propriété intellectuelle est un frein à la croissance

2.2.1.

Les secteurs à forte intensité en DPI contribuent à hauteur de 39 % environ au PIB de l’Union européenne, soit 4  700 milliards d’euros par an, et représentent jusqu’à 35 % des emplois directs et indirects.

2.2.2.

Selon certaines estimations citées par la Commission, l’Union européenne perdrait près de 8 milliards d’euros de PIB par an en raison de la contrefaçon et du piratage. Au niveau mondial, le coût pourrait atteindre 1  300 milliards d’euros d’ici à 2015.

2.2.3.

Sachant que la part des pays BRICS (1) dans le commerce mondial a progressé, passant de 8 % en 2000 à 18,2 % en 2010, et que l’on estime que les pays en développement pèseront pour près de 60 % dans le PIB mondial d’ici à 2030, la contrefaçon, le piratage, le vol et les autres formes d’appropriation illicite de propriété intellectuelle risquent de se développer.

2.2.4.

L’internet est vital pour de nombreux secteurs, l’économie de l’internet étant estimée à l’origine de plus de 20 % de la croissance du PIB des pays du G8 entre 2006 et 2011. Cependant, l’essor des technologies numériques porte atteinte aux DPI à un niveau sans précédent, conduisant à une estimation selon laquelle les produits contrefaits et piratés représentaient 2 % du commerce mondial en 2008.

2.2.5.

La violation des DPI ne concerne pas uniquement les biens culturels numériques mais aussi des biens physiques, qui sont de plus en plus souvent négociés sur les plateformes de commerce électronique.

2.3.   De ce fait, la mise en place d’une véritable «infrastructure» de la propriété intellectuelle est nécessaire.

2.3.1.

Certes, l’accord OMC sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC) a poussé les pays tiers à de nombreuses réformes réglementaires. Mais les efforts de mise en œuvre sont entravés par un manque de volonté politique, par une formation insuffisante des responsables administratifs locaux, par des procédures judiciaires trop longues et par des sanctions trop faibles infligées par les tribunaux. En outre, le fait que l’internet ne connaît pas de frontières — à la différence des lois de propriété intellectuelle — complique l’élaboration de politiques équilibrées et pose la question de la responsabilité des intermédiaires, comme par exemple les fournisseurs de services internet quand ils hébergent des sites portant atteinte aux DPI, en particulier lorsqu’ils sont établis dans des pays tiers où une législation appropriée et/ou la volonté d’agir font défaut.

2.3.2.

Concernant le sujet spécifique de l’accès à des médicaments sûrs et efficaces à un prix abordable, l’Union européenne mène des politiques destinées à favoriser le commerce tant des médicaments innovants que des médicaments génériques. Un de ses objectifs demeure de lutter contre le commerce de médicaments contrefaits et falsifiés qui peuvent être dangereux pour les patients.

2.3.3.

Pour combattre ces dérives, la communication rappelle que l’Union européenne dispose de toute une série d’«outils», dont l’efficacité dépend trop souvent de la volonté des pays tiers de respecter ces droits.

2.4.   Améliorer la communication vis-à-vis des parties prenantes

2.4.1.

Il est à noter que le respect des droits fondamentaux ainsi que les «libertés de l’internet» ont conduit au rejet de la proposition d’accord commercial anti-contrefaçon (ACTA) en Europe et à celui des projets de «Stop Online Piracy Act» (SOPA) contre le piratage en ligne et de «PROTECT IP Act» (PIPA) pour la protection de la propriété intellectuelle aux USA. Ces échecs démontrent la difficulté de concilier le respect des DPI avec l’opinion publique. Ainsi, certains secteurs de l’opinion publique européenne considèrent que la contrefaçon et le piratage ne sont pas des délits ou méconnaissent les conséquences économiques liées à la violation des DPI.

Il faut donc mieux expliquer les objectifs de l’Union européenne et l’impact des atteintes aux DPI dans les pays tiers, et les efforts de l’Union pour faire respecter les DPI dans ces pays de sorte à créer un environnement favorable à la défense des droits des inventeurs.

2.5.   Fournir de meilleures données

2.5.1.

Certaines données, telles que l’étendue et l’impact des atteintes aux DPI, demeurent difficiles à obtenir.

2.5.2.

La création d’un Observatoire européen des atteintes aux droits de propriété intellectuelle est un acte important: il fournit des éléments sur le respect des DPI dans des pays non membres de l’Union européenne afin de dégager des priorités et d’informer les parties concernées.

2.6.   Harmoniser la législation européenne, pour une plus grande influence dans les pays tiers

Il apparaît qu’une législation harmonisée à l’échelon de l’Union européenne en matière de DPI facilite les négociations avec les pays tiers car elle établit une base claire pour définir la position que l’Union européenne adopte dans les négociations.

2.7.   Renforcer la coopération au sein de l’Union européenne

Il convient d’examiner la possibilité d’améliorer encore la coopération entre la Commission et les États membres (en ce qui concerne, notamment, l’échange d’informations) en s’appuyant sur le partenariat qui a, par exemple, été mis en place entre la Commission, les États membres et les entreprises pour la mise en œuvre de la stratégie d’accès aux marchés et donc pour une meilleure utilisation des ressources.

2.8.   Améliorer la protection et le respect des DPI dans les pays tiers

Comme l’a relevé l’étude d’évaluation de 2010, «la Commission a contribué activement au respect de la propriété intellectuelle au niveau multilatéral, en particulier au sein du Conseil des ADPIC de l’OMC, mais n’a rencontré que peu d’écho, principalement en raison de l’opposition de pays tiers».

2.9.   Règlement des différends et autres voies de recours

2.9.1.

Il est possible de recourir aux procédures de règlement des différends de l’OMC en cas de violation de l’accord sur les ADPIC.

2.9.2.

Lorsque des pays persistent à s’exonérer de leurs engagements internationaux en matière de respect de la propriété intellectuelle, la Commission peut envisager de réduire leur participation à certains programmes spécifiques d’assistance technique soutenus par l’Union européenne, ou la contribution financière dont ils bénéficient dans le cadre de ces programmes.

2.9.3.

Pour assurer un meilleur dialogue, et disposer d’une expertise sur place, plusieurs États membres ont des «attachés PI» (2) au sein de leurs délégations dans les pays clés. L’objectif est de fournir une assistance aux détenteurs de droits de l’Union européenne dans les pays tiers.

2.10.   Établir des priorités géographiques

Tous les deux ans, l’Union européenne mettra à jour sa liste de pays prioritaires où les DPI sont bafoués.

3.   Considérations clés

3.1.

La dernière étude réalisée par l’Observatoire européen des atteintes aux droits de propriété intellectuelle et l’Office européen des brevets se penche sur les industries utilisatrices de DPI dans l’Union européenne. L’étude évalue leur contribution aux résultats économiques et aux échanges commerciaux à l’échelle de l’Union européenne et procède à une analyse au niveau des États membres au cours de la période 2008-2010.

3.2.

Sur cette période, les industries utilisatrices de DPI comptent pour la plus grande part du commerce de l’Union européenne avec le reste du monde et génèrent un excédent commercial. 88 % des importations de l’Union européenne se composent de marchandises à forte intensité de DPI. 90 % des exportations se composent de marchandises à forte intensité de DPI. De fait, les industries à forte intensité de DPI contribuent positivement à la position commerciale de l’Union.

3.3.

Selon l’étude, les secteurs à forte intensité de droits de propriété intellectuelle représentent directement 26 % de l’ensemble des emplois au sein de l’Union européenne, soit environ 56 millions d’emplois directs auxquels s’ajoutent 20 millions d’emplois indirects. Au total, c’est un emploi sur trois dans l’Union européenne qui repose sur les secteurs à forte intensité de droits de propriété intellectuelle.

3.4.

Il serait important de mesurer l’impact économique et social du non-respect des droits de propriété dans les États membres de l’Union européenne et dans les pays tiers. Cette nécessité est justifiée par les difficultés économiques et sociales que traverse actuellement l’Union européenne.

3.5.   Certains secteurs restent très sensibles. L’accès aux médicaments en est un.

3.5.1.

Le CESE attire l’attention sur le cas particulier des licences obligatoires dans le cadre du commerce international. Les licences sont définies par l’article 31 de l’accord ADPIC et constituent un mécanisme permettant d’utiliser l’objet du brevet sans l’autorisation du détenteur de droit, par exemple à des fins de santé publique.

3.5.2.

En général, le titulaire d’un brevet est libre d’exploiter personnellement l’invention protégée ou bien d’autoriser une autre personne à l’exploiter. Pourtant, lorsque des raisons d’intérêt général le justifient, les autorités publiques nationales peuvent autoriser l’exploitation d’un brevet par une personne tierce sans le consentement du propriétaire.

3.5.3.

Ce dispositif peut être appliqué dans un pays tiers signataire de l’accord ADPIC ainsi que par les États membres de l’Union européenne, lorsque des molécules pouvant améliorer la santé publique sont mises sur le marché à un prix prohibitif par des entreprises implantées dans un pays tiers.

4.   Remarques du CESE

4.1.

Le CESE appuie la communication visant à améliorer la protection et le respect des droits de propriété intellectuelle dans les pays tiers.

4.2.

Le CESE se félicite notamment de la nouvelle approche concernant les pays tiers, approche équilibrée entre maintien des aides européennes et sanctions envisagées en cas de non-respect des DPI.

4.3.

Le CESE rappelle que les populations locales ne doivent en aucun cas pâtir de la réduction éventuelle de certains financements de l’Union européenne.

4.4.

Le CESE soutient l’affirmation du Conseil européen de mars 2014 qui rappelait que la propriété intellectuelle constituait un moteur essentiel de la croissance et de l’innovation.

4.5.

Le CESE appuie donc la Commission dans sa lutte contre la contrefaçon, considérée comme prioritaire.

4.6.

Le CESE rappelle que ce ne sont pas uniquement les secteurs du luxe qui sont touchés (vêtements, parfums, maroquinerie, etc.). La contrefaçon de pièces mécaniques pour le secteur de l’automobile, de pesticides à la composition souvent très dangereuse, de produits courants de consommation pour l’hygiène corporelle, se développe dangereusement, aux conséquences immédiates sur la santé et la sécurité.

4.7.

Le CESE rappelle que 90 % des exportations de l’Union européenne sont réalisées par des secteurs à forte intensité de DPI. Les conséquences sur l’économie et l’emploi sont loin d’être négligeables.

4.8.

Le CESE prend acte des mesures nouvelles pour combattre ces entorses au droit du commerce international.

4.9.

Le CESE souscrit au principe d’enquêtes périodiques systématiques permettant d’identifier lesdits entreprises ou États responsables de tels comportements.

4.10.

Le CESE se déclare favorable à des mesures proportionnées pour les contrevenants identifiés comme étant peu disposés à respecter les règles.

4.11.

Le CESE se dit donc favorable à toute politique qui visera en priorité les contrevenants agissant à une échelle dite commerciale avec l’objectif de les priver des revenus générés par le commerce illicite, en violation totale des DPI, et aux effets destructeurs sur la croissance, l’innovation et l’emploi.

4.12.

Le CESE souhaite à cet effet qu’il soit apporté la définition la plus précise possible à la notion d’échelle commerciale afin d’éviter d’être confronté à une portée trop limitée des sanctions envisagées, ou bien à un accroissement considérable des délais d’application.

4.13.

Le CESE souligne l’importance d’une bonne coopération avec les États membres. Le CESE rappelle, en particulier, l’existence de travaux réalisés par les États membres sur la protection et le respect des DPI dans les pays tiers.

4.14.

Enfin, le CESE estime que la Commission a échoué à informer et à sensibiliser le public au sujet des droits de propriété intellectuelle et l’engage à lancer de nouvelles actions pour y remédier.

Bruxelles, le 10 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud.

(2)  Attachés propriété intellectuelle (PI).


14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/117


Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à l’importation dans l’Union de produits agricoles originaires de Turquie (codification)

[COM(2014) 586 final — 2014/0272 (COD)]

(2015/C 230/18)

Le 20 octobre 2014, le Parlement européen a décidé, conformément à l’article 207, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à l’importation dans l’Union de produits agricoles originaires de Turquie (codification)»

COM(2014) 586 final — 2014/0272 (COD).

Ayant estimé que le contenu de la proposition est satisfaisant et n’appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 10 décembre 2014), a décidé, par 144 voix pour, 3 voix contre et 2 abstentions, de rendre un avis favorable au texte proposé.

Bruxelles, le 10 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/118


Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil suspendant certaines concessions relatives à l’importation dans l’Union de produits agricoles originaires de Turquie (codification)

[COM(2014) 593 final — 2014/0275 (COD)]

(2015/C 230/19)

Le 20 octobre 2014, le Parlement européen a décidé, conformément à l’article 207, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil suspendant certaines concessions relatives à l’importation dans l’Union de produits agricoles originaires de Turquie» (codification)

[COM(2014) 593 final — 2014/0275 (COD)].

Ayant estimé que le contenu de la proposition est satisfaisant et n’appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 10 décembre 2014), a décidé, par 145 voix pour, 2 voix contre et 5 abstentions, de rendre un avis favorable au texte proposé.

Bruxelles, le 10 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/119


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant ouverture et mode de gestion de certains contingents tarifaires de l’Union pour la viande bovine de haute qualité, la viande porcine, la viande de volaille, le froment (blé) et méteil et les sons, remoulages et autres résidus (texte codifié)»

COM(2014) 594 final — 2014/0276 COD

(2015/C 230/20)

Le 20 octobre 2014, le Parlement européen a décidé, conformément à l’article 207 paragraphe 2 du TFUE, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant ouverture et mode de gestion de certains contingents tarifaires de l’Union pour la viande bovine de haute qualité, la viande porcine, la viande de volaille, le froment (blé) et méteil et les sons, remoulages et autres résidus (texte codifié)»

COM(2014) 594 final — 2014/0276 COD.

Ayant estimé que le contenu de la proposition est satisfaisant et n’appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 10 décembre 2014), a décidé, par 150 voix pour, 2 voix contre et 6 abstentions, de rendre un avis favorable au texte proposé.

Bruxelles, le 10 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/120


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant un plan pluriannuel pour les stocks de cabillaud, de hareng et de sprat de la mer Baltique et les pêcheries exploitant ces stocks, modifiant le règlement (CE) no 2187/2005 du Conseil et abrogeant le règlement (CE) no 1098/2007 du Conseil»

[COM(2014) 614 final — 2014/0285 COD]

(2015/C 230/21)

Le 20 octobre 2014 et le 27 octobre 2014, respectivement, le Parlement européen et le Conseil ont décidé, conformément à l'article 43, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant un plan pluriannuel pour les stocks de cabillaud, de hareng et de sprat de la mer Baltique et les pêcheries exploitant ces stocks, modifiant le règlement (CE) no 2187/2005 du Conseil et abrogeant le règlement (CE) no 1098/2007 du Conseil»

COM(2014) 614 final — 2014/0285 COD.

Ayant estimé que le contenu de la proposition est satisfaisant et n'appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 10 décembre 2014), a décidé, par 152 voix pour, 1 voix contre et 2 abstentions, de rendre un avis favorable au texte proposé.

Bruxelles, le 10 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/121


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux mesures de sauvegarde prévues à l'accord entre la Communauté économique européenne et la République d'Islande» (texte codifié)

[COM(2014) 308 final — 2014/0160 (COD)]

(2015/C 230/22)

Le 15 septembre 2014, le Parlement européen a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux mesures de sauvegarde prévues à l'accord entre la Communauté économique européenne et la République d'Islande» (texte codifié)

COM(2014) 308 final — 2014/0160 (COD).

Ayant estimé que le contenu de la proposition est satisfaisant et n'appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 10 décembre 2014), a décidé, par 157 voix pour, 1 voix contre et 3 abstentions, de rendre un avis favorable au texte proposé.

Bruxelles, le 10 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/122


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au régime commun applicable aux exportations (codification)»

[COM(2014) 322 final — 2014/0167 (COD)]

(2015/C 230/23)

Le 15 septembre 2014, le Parlement européen a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au régime commun applicable aux exportations (codification)»

COM(2014) 322 final — 2014/0167 (COD).

Ayant estimé que le contenu de la proposition est entièrement satisfaisant et n'appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 10 décembre 2014), a décidé, par 147 voix pour, 1 voix contre et 4 abstentions, de rendre un avis favorable au texte proposé.

Bruxelles, le 10 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/123


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au régime commun applicable aux importations (codification)»

COM(2014) 321 final — 2014/0166 (COD)

(2015/C 230/24)

Le 15 septembre 2014, le Parlement européen a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au régime commun applicable aux importations (codification)»

COM(2014) 321 final — 2014/0166 (COD).

Ayant estimé que le contenu de la proposition est entièrement satisfaisant et n'appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 10 décembre 2014), a décidé, par 150 voix pour, 1 voix contre et 5 abstentions, de rendre un avis favorable au texte proposé.

Bruxelles, le 10 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/124


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au régime commun applicable aux importations de certains pays tiers (refonte)»

COM(2014) 323 final — 2014/0168 (COD)

(2015/C 230/25)

Le 15 septembre 2014 et le 8 octobre 2014 respectivement, le Parlement européen et le Conseil ont décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au régime commun applicable aux importations de certains pays tiers (refonte)»

COM(2014) 323 final — 2014/0168 (COD).

Ayant estimé que le contenu de la proposition est entièrement satisfaisant et n'appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 10 décembre 2014), a décidé, par 145 voix pour, 3 voix contre et 7 abstentions, de rendre un avis favorable au texte proposé.

Bruxelles, le 10 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/125


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au régime commun applicable aux importations de produits textiles en provenance de certains pays tiers non couverts par des accords, protocoles ou autres arrangements bilatéraux, ou par d'autres régimes d'importation spécifiques de l'Union (refonte)»

COM(2014) 345 final — 2014/0177 (COD)

(2015/C 230/26)

Le 8 octobre 2014, le Conseil a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au régime commun applicable aux importations de produits textiles en provenance de certains pays tiers non couverts par des accords, protocoles ou autres arrangements bilatéraux, ou par d'autres régimes d'importation spécifiques de l'Union (refonte)»

COM(2014) 345 final — 2014/0177 (COD).

Ayant estimé que le contenu de la proposition est entièrement satisfaisant et n'appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 10 décembre 2014), a décidé, par 151 voix pour, 2 voix contre et 5 abstentions, de rendre un avis favorable au texte proposé.

Bruxelles, le 10 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/126


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil arrêtant des procédures de l'Union en matière de politique commerciale commune en vue d'assurer l'exercice par l'Union des droits qui lui sont conférés par les règles du commerce international, en particulier celles instituées sous l'égide de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) (texte codifié)»

COM(2014) 341 final — 2014/0174 (COD)

(2015/C 230/27)

Le 15 septembre 2014, le Parlement européen a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil arrêtant des procédures de l'Union en matière de politique commerciale commune en vue d'assurer l'exercice par l'Union des droits qui lui sont conférés par les règles du commerce international, en particulier celles instituées sous l'égide de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) (texte codifié)»

COM(2014) 341 final — 2014/0174 (COD).

Ayant estimé que le contenu de la proposition est entièrement satisfaisant et n'appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 10 décembre 2014), a décidé, par 150 voix pour, 3 voix contre et 1 abstention, de rendre un avis favorable au texte proposé.

Bruxelles, le 10 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/127


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux mesures que l’Union peut prendre à la suite d’un rapport adopté par l’organe de règlement des différends de l’OMC concernant des mesures antidumping ou antisubventions (codification)»

[COM(2014) 317 final — 2014/0163 (COD)]

(2015/C 230/28)

Le 20 octobre 2014, le Parlement européen a décidé, conformément à l’article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux mesures que l’Union peut prendre à la suite d’un rapport adopté par l’organe de règlement des différends de l’OMC concernant des mesures antidumping ou antisubventions (codification)»

COM(2014) 317 final — 2014/0163 (COD).

Ayant estimé que le contenu de la proposition est entièrement satisfaisant et n’appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 10 décembre 2014), a décidé, par 148 voix pour, 3 voix contre et 6 abstentions, de rendre un avis favorable au texte proposé.

Bruxelles, le 10 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/128


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant certaines procédures d’application de l’accord de stabilisation et d’association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la République du Monténégro, d’autre part (texte codifié)»

[COM(2014) 374 final — 2014/0190 (COD)]

(2015/C 230/29)

Le 20 octobre 2014, le Parlement européen a décidé, conformément à l’article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant certaines procédures d’application de l’accord de stabilisation et d’association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la République du Monténégro, d’autre part (texte codifié)»

COM(2014) 374 final — 2014/0190 (COD).

Ayant estimé que le contenu de la proposition est entièrement satisfaisant et n’appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 10 décembre), a décidé, par 152 voix pour, 1 voix contre et 6 abstentions, de rendre un avis favorable au texte proposé.

Bruxelles, le 10 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


14.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 230/129


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la défense contre les importations qui font l’objet de subventions de la part de pays non membres de l’Union européenne (texte codifié)»

[COM(2014) 660 final — 2014/0305 (COD)]

(2015/C 230/30)

Le 12 novembre 2014, le Parlement européen a décidé, conformément à l’article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la défense contre les importations qui font l’objet de subventions de la part de pays non membres de l’Union européenne (texte codifié)»

COM(2014) 660 final — 2014/0305 (COD).

Ayant estimé que le contenu de la proposition est entièrement satisfaisant et n’appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 503e session plénière des 10 et 11 décembre 2014 (séance du 10 décembre 2014), a décidé, par 154 voix pour, 3 voix contre et 5 abstentions, de rendre un avis favorable au texte proposé.

Bruxelles, le 10 décembre 2014.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE