ISSN 1977-0936

doi:10.3000/19770936.C_2013.271.fra

Journal officiel

de l'Union européenne

C 271

European flag  

Édition de langue française

Communications et informations

56e année
19 septembre 2013


Numéro d'information

Sommaire

page

 

I   Résolutions, recommandations et avis

 

AVIS

 

Comité économique et social européen

 

490e session plénière des 22 et 23 mai 2013

2013/C 271/01

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Pour une dimension sociale de l'Union économique et monétaire européenne (avis exploratoire)

1

2013/C 271/02

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Dix ans après, où va l’euro? L’avenir économique et politique de l’UE et le nouveau traité (avis d’initiative)

8

2013/C 271/03

Avis du Comité économique et social européen sur le thème L'économie verte — Promouvoir le développement durable en Europe (avis d'initiative)

18

 

III   Actes préparatoires

 

COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN

 

490e session plénière des 22 et 23 mai 2013

2013/C 271/04

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission — Projet détaillé pour une Union économique et monétaire véritable et approfondie: lancer un débat européenCOM(2012) 777/2 final

23

2013/C 271/05

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux informations accompagnant les virements de fondsCOM(2013) 44 final – 2013/0024 (COD) et sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux et du financement du terrorismeCOM(2013) 45 final – 2013/0025 (COD)

31

2013/C 271/06

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Conseil mettant en œuvre une coopération renforcée dans le domaine de la taxe sur les transactions financièresCOM(2013) 71 final – 2013/0045 CNS

36

2013/C 271/07

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la protection pénale de l’euro et des autres monnaies contre la contrefaçon, et remplaçant la décision cadre 2000/383/JAI du ConseilCOM(2013) 42 final – 2013/0023 (COD)

42

2013/C 271/08

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil — Vers une union économique et monétaire véritable et approfondie. Création d'un instrument de convergence et de compétitivitéCOM(2013) 165 final et sur la Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil — Vers une union économique et monétaire véritable et approfondie. Coordination préalable des projets de grandes réformes des politiques économiquesCOM(2013) 166 final

45

2013/C 271/09

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social et au Comité des régions — Vers un cadre européen global pour les jeux de hasard en ligneCOM(2012) 596 final

48

2013/C 271/10

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen — Nouvelle approche européenne en matière de défaillances et d’insolvabilité des entreprisesCOM(2012) 742 final et sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 1346/2000 du Conseil relatif aux procédures d’insolvabilitéCOM(2012) 744 final – 2012/0360 (COD)

55

2013/C 271/11

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Protéger les entreprises contre les pratiques commerciales trompeuses et garantir l'application efficace des règles — Révision de la directive 2006/114/CE en matière de publicité trompeuse et de publicité comparative COM(2012) 702 final

61

2013/C 271/12

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen sur l'état de l'union douanièreCOM(2012) 791 final

66

2013/C 271/13

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Plan d'action: droit européen des sociétés et gouvernance d'entreprise — Un cadre juridique moderne pour une plus grande implication des actionnaires et une meilleure viabilité des entreprisesCOM(2012) 740 final

70

2013/C 271/14

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Plan d'action Entrepreneuriat 2020 Raviver l'esprit d'entreprise en EuropeCOM(2012) 795 final

75

2013/C 271/15

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant la sécurité des produits de consommation et abrogeant la directive 87/357/CEE du Conseil et la directive 2001/95/CECOM(2013) 78 final – 2013/0049 (COD)

81

2013/C 271/16

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant la surveillance du marché des produits et modifiant les directives du Conseil 89/686/CEE et 93/15/CEE, les directives du Parlement européen et du Conseil 94/9/CE, 94/25/CE, 95/16/CE, 97/23/CE, 1999/5/CE, 2000/9/CE, 2000/14/CE, 2001/95/CE, 2004/108/CE, 2006/42/CE, 2006/95/CE, 2007/23/CE, 2008/57/CE, 2009/48/CE, 2009/105/CE, 2009/142/CE et 2011/65/UE, ainsi que les règlements du Parlement européen et du Conseil (UE) no 305/2011, (CE) no 764/2008 et (CE) no 765/2008COM(2013) 75 final – 2013/0048 (COD)

86

2013/C 271/17

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Investir dans le domaine social en faveur de la croissance et de la cohésion, notamment par l'intermédiaire du Fonds social européen, au cours de la période 2014-2020COM(2013) 83 final

91

2013/C 271/18

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d'un système d'entrée/sortie pour l'enregistrement des entrées et sorties des ressortissants de pays tiers franchissant les frontières extérieures des États membres de l'Union européenneCOM(2013) 95 final – 2013/0057 (COD), sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 562/2006 en ce qui concerne l'utilisation du système d'entrée/sortie (EES) et le programme d'enregistrement des voyageurs (RTP)COM(2013) 96 final – 2013/0060 (COD) et sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d'un programme d'enregistrement des voyageursCOM(2013) 97 final – 2013/0059 (COD)

97

2013/C 271/19

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de modification de la proposition COM(2011) 607 final/2 de la Commission — Règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au Fonds social européen et abrogeant le règlement (CE) no 1081/2006 du ConseilCOM(2013) 145 final – 2011/0268 (COD) et sur la Proposition de modification de la proposition de la Commission COM(2012) 496 — Règlement du Parlement européen et du Conseil portant dispositions communes relatives au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen, au Fonds de cohésion, au Fonds européen agricole pour le développement rural et au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche relevant du cadre stratégique commun, portant dispositions générales applicables au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen et au Fonds de cohésion, et abrogeant le règlement (CE) no 1083/2006 du ConseilCOM(2013) 146 final – 2011/0276 (COD)

101

2013/C 271/20

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions CARS 2020: plan d'action pour une industrie automobile compétitive et durable en EuropeCOM(2012) 636 final

104

2013/C 271/21

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Énergie propre et transports: la stratégie européenne en matière de carburants de substitutionCOM(2013) 17 final et la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur le déploiement d’une infrastructure pour carburants de substitutionCOM(2013) 18 final – 2013/12 (COD)

111

2013/C 271/22

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à l'accessibilité des sites web d'organismes du secteur publicCOM(2012) 721 final – 2012/0340 (COD)

116

2013/C 271/23

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Plan d'action pour la santé en ligne 2012-2020 — Des soins de santé innovants pour le XXIe siècleCOM (2012) 736 final

122

2013/C 271/24

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Une stratégie numérique pour l'Europe: faire du numérique un moteur de la croissance européenneCOM(2012) 784 final

127

2013/C 271/25

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant des mesures destinées à assurer un niveau élevé commun de sécurité des réseaux et de l'information dans l'UnionCOM(2013) 48 final – 2013/0027 (COD)

133

2013/C 271/26

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux gaz à effet de serre fluorésCOM(2012) 643 final – 2012/0305 (COD)

138

2013/C 271/27

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil fixant un taux d'ajustement des paiements directs prévu par le règlement (CE) no 73/2009 du Conseil en ce qui concerne l'année civile 2013COM(2013) 159 final – 2013/0087 COD

143

2013/C 271/28

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des Régions sur le thème Une vie décente pour tous: éradiquer la pauvreté et offrir au monde un avenir durableCOM(2013) 92 final

144

2013/C 271/29

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition modifiée de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la transparence des mesures régissant la fixation des prix des médicaments à usage humain et leur inclusion dans le champ d’application des systèmes publics d’assurance-maladieCOM(2013) 168 final – 2012/0035 (COD)

151

2013/C 271/30

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 450/2008 établissant le code des douanes communautaire (code des douanes modernisé), en ce qui concerne sa date d'applicationCOM(2013) 193 final – 2013/0104 (COD)

152

2013/C 271/31

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant la communication à la Commission des projets d’investissement relatifs à des infrastructures énergétiques dans l’Union européenne, et remplaçant le règlement (UE, Euratom) no 617/2010 du ConseilCOM(2013) 153 final

153

2013/C 271/32

Avis du Comité économique et social européen sur la sur la Proposition modifiée règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche [abrogeant le règlement (CE) no 1198/2006 du Conseil, le règlement (CE) no 861/2006 du Conseil et le règlement (CE) no XXX/2011 du Conseil sur la politique maritime intégrée]COM(2013)245 final – 2011/0380 COD et la Proposition modifiée du règlement du Parlement européen et du Conseil portant dispositions communes relatives au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen, au Fonds de cohésion, au Fonds européen agricole pour le développement rural et au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche relevant du cadre stratégique commun, portant dispositions générales applicables au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen et au Fonds de cohésion, et abrogeant le règlement (CE) no 1083/2006 du ConseilCOM(2013)246 final – 2011/0276 COD

154

FR

 


I Résolutions, recommandations et avis

AVIS

Comité économique et social européen

490e session plénière des 22 et 23 mai 2013

19.9.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 271/1


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Pour une dimension sociale de l'Union économique et monétaire européenne» (avis exploratoire)

2013/C 271/01

Rapporteur: M. Luca JAHIER

Co-rapporteur: M. DASSIS

Le 24 janvier 2013, le Président du Conseil européen a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur le thème

«Pour une dimension sociale de l'Union économique et monétaire européenne»

(Avis exploratoire).

Le sous-comité sur la dimension sociale de l'Union économique et monétaire européenne, chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 23 avril 2013 à la majorité, avec une voix contre.

Lors de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 22 mai 2013), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 161 voix pour, 50 voix contre et 47 abstentions.

1.   Synthèse des propositions

1.1

L'Union économique, sociale et politique européenne est encore à réaliser. L'Union monétaire a été lancée sans volets économiques et sociaux suffisants, mais avec des conséquences économiques et sociales considérables. Des avancées vers une Union financière, fiscale et bancaire sont actuellement en cours, mais sans moyens budgétaires européens conséquents pour soutenir la politique de croissance économique et de cohésion sociale qui s'impose. En même temps, les progrès vers l'Union sociale et politique sont à l'arrêt. Toutefois, les différents volets de l'Union économique, monétaire et sociale sont interdépendants; ils se soutiennent et se renforcent mutuellement. Ensemble, ils doivent garantir une Europe plus concrète, ancrée dans la vie réelle, avec laquelle les citoyens peuvent tisser des liens, à laquelle les investisseurs, les producteurs, les travailleurs et les consommateurs peuvent accorder leur confiance et adhérer; une Europe plus dynamique, capable de stimuler la compétitivité, une croissance intelligente et inclusive, les opportunités économiques, l'emploi, et de garantir la jouissance réelle de tous les droits sociaux. Sans cet équilibre, l'Union politique n'a pas d'avenir.

1.2

Le taux de chômage de l'UE-27 est passé entre 2008 et février 2013 de 7 à 10,9 %, soit un nombre total de 26,4 millions de personnes sans emploi, tandis que le taux de chômage dans la zone euro a atteint son point culminant à 12 %; le taux de chômage a suivi une courbe ascendante dans 19 pays et descendante dans 8 pays, 5,7 millions de jeunes sont aujourd'hui au chômage dans l'UE-27 (23,5 %), alors que début 2013, le taux de chômage global s'élevait à 7,7 % aux États-Unis et à 4,2 % au Japon (1). Ces données sont en contradiction totale avec les objectifs de la stratégie Europe 2020 et le CESE considère dès lors que juguler le déclin de notre compétitivité, générer davantage de croissance, créer des emplois et réduire la pauvreté est devenu une priorité absolue. Il est essentiel de mettre en œuvre d'un mécanisme de surveillance plus efficace de l'impact des politiques économiques et monétaires sur la situation sociale et sur le marché du travail des États membres, et il importe d'intégrer les politiques sociales et de l'emploi dans les mesures faisant l'objet du suivi des politiques économiques nationales, dans le cadre du semestre européen. Le CESE est d'avis que cette approche ne constitue pas uniquement la réponse pressante au caractère dramatique des chiffres précités mais qu'elle est également conforme à ce que prescrit l'article 9 TFUE, en ce qui concerne les objectifs de développement social et durable de l'Union. La dimension sociale de l'UEM a besoin d'instruments, d'indicateurs et d'objectifs qualitatifs et quantitatifs précis, qui soient aussi contraignants que les obligations économiques et financières de l'UEM. C'est avant tout grâce à cela que les responsables politiques de l'UE peuvent à nouveau rapprocher l'idéal européen de leurs citoyens

1.3

Un nouveau programme européen d'action sociale doit être lancé afin d'accompagner l'évolution vers une union financière, bancaire et fiscale plus étroite. Ce programme doit définir des objectifs clairs et concrets, tant qualitatifs que quantitatifs, qui viendront poursuivre et améliorer ceux qui sont déjà énoncés par la stratégie Europe 2020. Il s'agit notamment de soutenir les efforts visant à réindustrialiser l'Europe, de réduire et d'éradiquer le chômage de masse, de garantir les droits sociaux fondamentaux, de promouvoir l'esprit d'entreprise et de nouveaux emplois, de lutter contre la pauvreté, de soutenir l'intégration sociale, de faciliter l'investissement social, de promouvoir l'enseignement et la formation supérieurs et de développer la gouvernance sociale du projet européen ainsi qu'une adhésion participative à celui-ci. Le nouveau programme européen d'action sociale doit être lancé par le biais d'initiatives non législatives et législatives, le choix devant se porter sur celles qui s'avèrent les plus adaptées, et ce dans l'ensemble de l'UE ou sous la forme d'une coopération renforcée. Le programme doit englober des initiatives telles que le plan européen de relance économique, le plan d'investissement social, les évaluations européennes de l'impact social, la garantie européenne pour la jeunesse et le passeport européen unique des compétences, tout en garantissant le respect de la clause sociale horizontale, des droits sociaux fondamentaux et de la participation civique. Le programme devrait également explorer et promouvoir le droit du citoyen européen à un revenu minimum garanti.

1.4

Le CESE propose deux nouvelles initiatives exploratoires: 1) l'émission d'obligations sociales européennes destinées à des projets d'investissement social financièrement viables, gérés par le biais d'un Fonds européen d'action sociale, au fonctionnement duquel contribueront les autorités européennes compétentes, mais qui sera financé, détenu, géré et contrôlé de manière transparente par les acteurs de la société civile (acteurs privés et professionnels, et instances publiques); 2) la création d'un réseau européen de l'enseignement pour les travailleurs sans emploi, qui offrira des possibilités de formation à long terme efficaces et de grande qualité, en phase avec les besoins du marché de l'emploi, en émettant des bons de formation transfrontalière et en proposant des systèmes d'échange d'unités de cours tels qu'ERASMUS afin d'aider les travailleurs sans emploi à atteindre de nouveaux horizons, à développer de nouvelles compétences cognitives et professionnelles pour engager leur carrière sur de nouvelles voies, de réintégrer le marché européen de l'emploi. En même temps, une Europe de la libre circulation exige un cadre sécurisant de mobilité mis à jour (par exemple, des droits appropriés d'information et d'assistance pour ceux travaillant dans d'autres États membres), pour faciliter les mouvements des populations intracommunautaires à la recherche de travail dans l'UE assurant des conditions équitables et dans le domaine de la concurrence et dans le respect des droits fondamentaux sociaux et des conventions collectives.

2.   Pas de gouvernance économique sans dimension sociale

2.1

Le Comité économique et social européen déclare qu'il préconise d'effectuer une avancée globale vers une Union économique, sociale et politique.

2.2

Une Union économique doit comprendre une union financière et bancaire, qui dispose d'un mécanisme commun de garantie des dépôts, d'un fonds commun de résolution et d'une surveillance dans toute l'Union, ainsi qu'une union budgétaire fondée sur des instruments de dette conjoints, inscrite dans un cadre de discipline budgétaire, d'assainissement budgétaire et placée sous l'égide d'un modèle de croissance européenne plus dynamique, avec lequel les citoyens peuvent tisser des liens et auquel les investisseurs, les producteurs, les travailleurs et les consommateurs peuvent accorder leur confiance. Il conviendrait de lever les incertitudes persistantes concernant l'intégrité de la zone euro, car elles nuisent à la confiance des citoyens et des affaires. Le sommet de juin 2012, y compris le pacte pour la croissance et l'emploi et les 180 milliards d'euros que l'on a prévu de consacrer à ce projet, les appels de la BCE qui invite à briser à tout prix le cercle vicieux qui relie les banques les plus fragiles, les dettes souveraines et les écarts de taux d'intérêt intenables, constituent autant de raisons de faire davantage confiance au cadre économique européen qui est en train de se mettre en place. L'Europe a besoin d'un nouveau programme d'investissements (2), afin de mobiliser les ressources nécessaires pour soutenir les efforts visant à réindustrialiser l'Europe, de rétablir la croissance et de combattre le chômage.

2.3

Cependant, ce tableau n'est pas complet. Dans le même temps, les mesures d'austérité ont eu un effet dévastateur sur la cohésion et la protection sociales, sur un marché du travail inclusif et sur les niveaux de pauvreté. Il y a actuellement 26 millions de chômeurs et 120 millions de personnes confrontées à la pauvreté ou à l'exclusion sociale dans l'UE. Des objectifs tels que la relance économique, la stabilité monétaire, la croissance durable et la compétitivité ne pourront pas être atteints si l'on ne renouvelle pas également la dimension sociale. Lors de la réunion des 14 et 15 mars 2013, le Conseil européen de printemps a enfin reconnu cette réalité et appelé les États membres à faire«des politiques sociales le moteur de la gouvernance économique», notamment en réorientant l'approche du Semestre européen afin qu'il soutienne l'emploi, l'investissement social, l'inclusion sociale et qu'il intègre les objectifs sociaux (3). Le Comité économique et social européen prend note de cette nouvelle attention portée à la politique sociale à l'échelon national, mais considère qu'il importe également que l'UE dans son ensemble montre la voie en termes d'action sociale, d'investissement social et d'étalonnage des performances sociales.

2.4

Pour toutes ces raisons, il est temps de construire le pilier social de l'Union économique et monétaire dans le cadre d'une Europe sociale; sans elle, l'adhésion des citoyens à l'ensemble du projet européen demeure menacée. En effet, les écarts actuels que l'on observe en matière d'inégalités sociales en Europe compromettent non seulement des solutions durables pour la croissance économique et la cohésion sociale mais posent également un défi essentiel aux prochaines élections européennes de 2014 entre ceux qui comptent sur une dimension européenne pour la reprise économique et ceux qui se replient sur des alternatives nationales. Les élections européennes mobiliseront les esprits et les voix; elles doivent impérativement servir de tremplin, et non pas de frein, à plus d'Europe, à une Europe plus proche de ses citoyens, de ses familles et de ses entreprises, à une Europe plus sociale.

2.5

Les droits sociaux fondamentaux sont indissociables des droits civils et politiques et il y a une obligation juridiquement contraignante à les soutenir et à les promouvoir. La Commission et la BCE, en leur qualité de membres de la Troïka, doivent observer les obligations découlant des droits sociaux fondamentaux dans toutes leurs activités. Dans le cadre de la dimension sociale de l'UEM, la Commission devrait efficacement suivre, évaluer et garantir la pleine conformité à ces droits et obligations fondamentaux.

3.   Vers un nouveau programme européen d'action sociale et un pacte européen d'investissement social

3.1

En 2008, Le Comité économique et social européen a adopté un avis exploratoire que lui avait demandé la présidence française de l'UE et dans lequel il proposait le lancement d'un nouveau programme européen d'action sociale. L'avis faisait référence au rôle pionnier du Comité dans sa contribution au lancement de la Charte communautaire des droits sociaux des travailleurs, au programme d'action sociale de 1989 et à l'acquis social qui en est résulté en rapport avec le marché unique, le traité et l'action de l'UE en général. L'avis faisait valoir qu'un nouveau programme européen d'action sociale était nécessaire «pour permettre au développement social de l'UE de suivre l'évolution de l'économie et du marché.» Malheureusement, en dépit du soutien obtenu lors de la réunion ministérielle informelle sur l'emploi et les affaires sociales qui s'est tenue pendant la présidence française de l'UE, la proposition du Comité a vite été éclipsée par la crise économique et cinq années d'efforts frénétiques pour tenter de sauver l'UEM et parvenir à une cohésion économique accrue dans la zone euro. Le temps est certainement venu de revisiter l'idée d'un nouveau programme européen d'action sociale, afin de pouvoir mener une mise à jour et une mise en cohérence des nouvelles formes de gouvernance économique et de l'action en matière de cohésion sociale et de politique sociale, deux volets qui doivent aller de pair.

3.2

Dans son avis de 2008, le Comité appelait à une gouvernance «à plusieurs niveaux» d'un nouveau programme européen d'action sociale, basé sur une action législative, un dialogue social, un dialogue civil, une corégulation et une autorégulation, une méthode ouverte de coordination, une intégration de la politique sociale dans d'autres domaines politiques, une coopération renforcée et le droit d'initiative des citoyens. Il n'établissait aucune hiérarchie entre les formes d'action ou seulement en fonction de leur degré d'efficacité, et préconisait le maintien de la Méthode communautaire et le respect de la nouvelle clause sociale (Article 9, TFUE). Il appelait également à un engagement financier, au moyen par exemple d'un recours plus ciblé et accessible au Fonds social européen, à un éventuel fonds européen d'innovation sociale pour soutenir de nouvelles initiatives sociales à caractère expérimental, et à la création d'«une facilité de prêt européen pour le développement d'infrastructures sociales.»

3.3

Depuis lors, le Comité a multiplié les appels en faveur de l'application de la Méthode communautaire et du respect de la nature contraignante de la clause sociale horizontale. Il a également plus particulièrement proposé le lancement d'un Pacte européen d'investissement social destiné à garantir que les mesures d'austérité et les sanctions semi-automatiques adoptées dans le cadre de la gouvernance économique et de la mise en œuvre du semestre européen soient compensées par des évaluations d'impact social, le respect des droits sociaux fondamentaux, un réel engagement pour la réalisation des objectifs de lutte contre la pauvreté de la stratégie UE 2020 et le développement général de la «gouvernance sociale» européenne.

3.4

Le Comité est encouragé par le fait que le Parlement européen a récemment souligné la nécessité d'un«pacte social pour l'Europe», de l'application de «critères d'emploi et sociaux» dans le cadre d'une «surveillance contraignante de la discipline budgétaire», d'une prise en compte par l'examen annuel de la croissance de la «durabilité du modèle social» et enfin d'«un cadre intégré de politique pour l'emploi et de politique sociale en tant que cinquième élément de la feuille de route de l'UEM» (4). Il accueille aussi favorablement l'objectif déclaré du Conseil européen lors de sa réunion de juin 2013 (5) de présenter des mesures et une feuille de route assorties d'un calendrier pour «la dimension sociale de l'UEM». Le commissaire Andor a également fait valoir la nécessité d'une «union monétaire à visage humain» et selon lui, «la dimension sociale de l'UEM doit être comprise comme l'aptitude de ses règles, mécanismes de gouvernance, capacité budgétaire et autres instruments de politique à garantir que l'efficacité économique et l'équité sociale aillent de pair  (6).» Le Comité est également encouragé par les conclusions du président du Conseil européen Van Rompuy formulées lors du sommet social tripartite du 14 mars: «le modèle social européen demeure un atout important et un avantage concurrentiel au niveau mondial» et «nous devons trouver les mécanismes qui permettraient de réduire les inégalités sociales existant dans l'Union  (7)». Le «paquet investissements sociaux», qui a été publié par la Commission, et qui fournit aux États membres des orientations pour soutenir la protection et l'inclusion sociales (8), va dans la direction d'un développement des indicateurs de la dimension sociale. Toutefois, le Comité considère qu'un «tableau de bord» des inégalités de l'UE en matière d'emploi et de questions sociales exige également un cadre plus favorable à des actions sur l'ensemble de l'UE. Le Comité rappelle dès lors la nécessité d'un programme européen d'action sociale qui soit ambitieux, à mener dans le cadre d'une gouvernance à plusieurs niveaux, incluant les autorités, parties prenantes et organes européens compétents concernés aussi bien par l'action législative que non législative et ayant pour mission au moins et, de préférence, d'atteindre les objectifs sociaux définis dans la stratégie Europe 2020.

4.   Propositions particulières

Le CESE soutient les objectifs de la stratégie Europe 2020, en soulignant l'importance de juguler le déclin de notre compétitivité, de générer davantage de croissance, de créer plus d'emplois et de réduire la pauvreté. Conformément à l'article 9 TFUE, à savoir «… la promotion d'un niveau d'emploi élevé, (…) la garantie d'une protection sociale adéquate, (…) la lutte contre l'exclusion sociale ainsi qu'(à) un niveau élevé d'éducation, de formation et de protection de la santé humaine», le Comité appelle de ses vœux un programme d'action sociale européen plus contraignant et correctement financé et un engagement en faveur de celui-ci, notamment en tenant compte des objectifs spécifiques suivants:

4.1

La pratique du Semestre européen doit inclure des critères de référence pour l'emploi et l'inclusion sociale, au sein du même cadre de surveillance que celui qui régit la coordination de la politique économique et les réformes structurelles. Des objectifs européens quantifiables de performance sociale et d'emploi doivent être intégrés aux règles de stabilité et de croissance régissant les objectifs relatifs à la dette et au déficit et s'aligner sur elles. Il convient par la suite d'appliquer des mécanismes d'ajustement pour réduire les inégalités macroéconomiques et sociales, dans le but de promouvoir une croissance intelligente, durable, des emplois de qualité, un accès à des services d'intérêt général de grande qualité et abordables ainsi que la réduction des inégalités sociales sur l'ensemble du territoire de l'UE. L'efficacité économique sur le court terme ne doit pas être respectée aux dépens de l'investissement à plus long terme dans le capital social. Les mesures d'assainissement budgétaire doivent être évaluées en fonction de leurs impacts sur la croissance, l'emploi et l'inclusion sociale. Il importe que des mécanismes européens de solidarité accompagnent les réformes structurelles. Afin qu'une «véritable Union économique et monétaire» soit soutenue par les citoyens de l'UE, il y a lieu que les programmes nationaux de réforme soient accompagnés d'un dialogue civil et social approprié s'inscrivant dans une dynamique de dimension sociale européenne, qui ne déclenche pas un nivellement par le bas se traduisant par une concurrence à la baisse, une déflation salariale et une diminution de la demande globale. Il importe de garantir une négociation collective libre et autonome. Par ailleurs, le dialogue social européen devrait joue un rôle de premier plan dans le développement et la pratique de la nouvelle gouvernance économique. Enfin, il y a lieu de mieux contrôler et suivre la conformité des droits sociaux fondamentaux dans toute l'UE.

4.2

Il y a lieu que le Fonds social européen et le Fonds européen d'ajustement à la mondialisation soient promus au niveau correspondant à ce que le Président Van Rompuy en se référant à la situation sociale et de l'emploi en Europe, a qualifié de «drame humain et urgence sociale (9)». Cela exigera à l'évidence une «révision complète et obligatoire du CFP», comme l'a préconisé le Parlement européen, dans sa résolution du 13 mars (10). Dans le cadre des mécanismes de flexibilité qui y sont évoqués, de la négociation en cours entre le Parlement européen et le Conseil et de la révision structurelle du CFP plus que souhaitable après l'élection du nouveau Parlement européen, il importe de rétablir au minimum les montants prévus par la proposition initiale de la Commission européenne, en ayant également un recours plus adapté aux ressources propres de l'UE prévues, développant par ailleurs de manière significative les ressources allouées au Fonds de cohésion territoriale, au Fonds social, ainsi que les moyens financiers destinés à l'enseignement et à la formation et au Fonds d'ajustement à la mondialisation.

4.3

Parallèlement, il conviendrait que l'UE soutienne davantage les investissements socialement responsables et le rôle positif de l'économie sociale, notamment en réintroduisant les statuts européens pour les associations et les mutuelles, en intégrant de manière explicite dans les Fonds structurels la prévision de programmes pour les jeunes pousses et le développement d'entreprises sociales, en facilitant l'étiquetage social et en prévoyant des mesures compensatoires et des mécanismes de marché publics pour les entreprises disposant d'une valeur sociale avérée. Il y aurait lieu de créer un Fonds européen d'innovation sociale afin de rétablir des projets pilotes transnationaux valables destinés à lutter contre la discrimination et les inégalités sur le marché du travail, et qui ont été mis à mal par l'abandon du programme Equal par la Commission européenne.

4.4

Il est par ailleurs essentiel de prendre toutes les actions et mesures nécessaires en matière d'emploi, pour réindustrialiser l'Europe et atteindre l'objectif d'une industrie représentant 20 % du PIB d'ici à 2020. Le CESE souligne l'importance de la compétitivité pour les entreprises, qu'il convient d'atteindre par le biais d'un cadre européen cohérent.

4.5

Il faut que l'UE se mette «en mouvement pour la jeunesse», au risque d'aliéner de manière permanente les jeunes du projet européen dans sa globalité. Le niveau très inquiétant de la crise du chômage des jeunes en Europe exige un budget de l'UE plus crédible que les crédits inadaptés de 6 milliards d'euros proposés pour le Paquet sur l'emploi des jeunes et la Garantie pour la jeunesse, afin d'assurer un emploi, une formation ou un enseignement aux jeunes sans emploi, et particulièrement là où le besoin se fait le plus sentir. Sans un financement adéquat, la Garantie européenne pour la jeunesse risque d'être une imposture. Une impulsion plus décisive devrait également être donnée par l'UE en établissant un passeport européen unique des compétences, en élargissant le Cadre européen des certifications par une combinaison de l'ensemble des qualifications, compétences en matière d'enseignement formel, informel et non formel. À l'évidence, un cadre européen de partenariat entre les établissements scolaires, les entreprises et les partenaires sociaux est nécessaire, ainsi que des stratégies de synergies similaires plaçant l'enseignement supérieur et l'enseignement tout au long de la vie au centre de la création d'emplois, et prévoyant une résolution du problème de l'inadéquation des compétences, la promotion de l'employabilité, de l'innovation et de l'esprit d'entreprise. Le Semestre européen doit veiller à ce que l'investissement public dans l'enseignement et la formation ne soit pas compromis par des mesures visant à réduire les dettes souveraines et les déficits nationaux.

4.6

De vrais emplois, des emplois décents et la portabilité des droits sociaux doivent être au cœur d'un programme européen durable de redressement. Le modèle social européen est un atout pour attirer les investissements étrangers et contribuer au développement des entreprises en Europe; il conviendrait de l'apprécier en encourageant les incitants fiscaux aux activités créatrices d'emploi, y compris les micro-entreprises et le véritable emploi indépendant. Des normes sociales minimales et garanties doivent être soutenues dans les politiques européennes relatives à l'emploi et au marché du travail. La compétitivité et la flexibilité doivent aller de pair avec des emplois décents et des rétributions qui ne soient pas fixées au-dessous des seuils de pauvreté. Les partenaires sociaux européens ont la responsabilité particulière, dans le cadre de leur programme de travail, de trouver une solution au problème des travailleurs pauvres.

4.7

Il importe que l'UE s'engage plus sérieusement et de manière plus concrète dans la réduction et l'éradication de la pauvreté. En effet, les avantages économiques et sociaux pour l'Europe que l'on tire d'une réduction active de la pauvreté sont plus rentables que les dommages économiques et sociaux de longue durée, dus à l'inaction ou à des mesures qui, dans les faits, aggravent la pauvreté. À tout le moins, dans le cadre du Semestre européen, les engagements contenus dans les initiatives phares de la stratégie Europe 2020 visant à sortir de la pauvreté 20 millions de personnes, doivent être activement poursuivis et ne pas être entravés par des mesures de réduction des déficits. En premier lieu, cela exige une série d'indicateurs pour toute l'UE destinés à mesurer l'impact de la pauvreté et à garantir un suivi approprié et de possibles mesures correctives des programmes nationaux de réforme et des mesures d'austérité; ces dernières pourraient en réalité aggraver la pauvreté et menacer la reprise. Le CESE est également en train d'effectuer une analyse des systèmes de revenu minimum garanti dans les États membres, afin de recenser et de promouvoir les bonnes pratiques dans l'UE. Il a également soutenu la demande du Parlement européen d'étudier et d'envisager une proposition législative introduisant un revenu minimum approprié correspondant au minimum à 60 % du revenu médian dans chaque État membre (11). Un Fonds européen spécialisé de solidarité de lutte contre la pauvreté pourrait également être créé pour favoriser ces mesures de soutien au revenu, en tant que stabilisateur social et mécanisme d'ajustement du Semestre européen. Le Comité souhaite également réaffirmer sa proposition qui vise à ce que 20 % des ressources allouées au FSE soient affectées aux questions d'inclusion sociale et de pauvreté.

4.8

Un acte législatif sur l'accessibilité dans l'Union européenne est essentiel pour garantir aux personnes handicapées leurs droits à la liberté de mouvement et à l'accès aux biens, aux services et à l'environnement bâti. À cette fin, l'établissement d'une carte européenne de mobilité pourrait représenter un instrument concret et efficace. Il convient que la Commission mette également en place un instrument d'évaluation d'impact de la Convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées et prenne en compte de ces éléments dans le processus du Semestre européen.

4.9

Par ailleurs, il conviendrait d'élaborer une méthodologie et un cadre de l'UE relatifs à des indicateurs comparables et mesurables de protection de la santé et de réduction des inégalités en la matière, afin d'examiner la situation dans les États membres, dans le cadre du Semestre européen.

4.10

Des critères à l'échelle de l'UE sur les performances sociétales, ainsi que des lignes directrices sur la réconciliation de la vie privée et professionnelle, l'accès aux services d'accueil des enfants, le vieillissement actif, le volontariat, le droit au logement et la lutte contre le sans-abrisme devraient également être intégrés à la dimension sociale du Semestre européen.

4.11

Les travailleurs immigrés, masculins et féminins, apportent une contribution positive au développement économique et au bien-être de l'Europe. Les procédures en vigueur dans l'UE concernant l'immigration pour raisons de travail doivent être légales et transparentes. La législation sur l'immigration doit respecter les droits de l'homme et garantir l'égalité de traitement. Le CESE considère que l'UE doit renforcer les politiques d'intégration ainsi que la lutte contre le racisme, la xénophobie et la discrimination à l'égard des immigrés et des minorités.

4.12

Une reprise durable exige une symétrie économique et monétaire plus développée ainsi qu'une cohésion sociale accrue dans toute l'UE. Un programme européen d'action sociale comprenant les objectifs spécifiques énumérés précédemment contribuerait à établir une base sociale plus cohérente permettant de coopérer et de recréer un lieu entre les citoyens et l'UE. Un rééquilibrage social à deux niveaux tant de l'UE que de l'UEM est dès lors préférable, dans le respect de la subsidiarité dans son acception dynamique. Cependant, en l'absence d'un consensus suffisant ou d'une volonté politique en faveur d'une dimension sociale de l'UE ainsi redynamisée, le CESE proposerait l'option alternative d'une coopération renforcée au sein de l'UEM, disposant de ressources financières propres, d'un Fonds social additionnel et d'un Pacte pour le progrès social en Europe, sur la base des mêmes accords contractuels rigoureux et contrôlés démocratiquement qui régissent la convergence économique et monétaire, ainsi que des normes, des objectifs et des mécanismes de protection sociale (il conviendrait d'organiser un débat avec les partenaires sociaux et la société civile autour de l'utilité ou non de l'assurance chômage de l'UEM ou du système d'allocations de chômage), en harmonisant les mécanismes de stabilisation fiscaux, budgétaires et monétaires d'une Union économique et monétaire plus étroite, avec la dimension sociale correspondante.

4.13

Les «obligations contractuelles pour la compétitivité et la croissance» qui ont été présentées au cours du Sommet de décembre de l'UE doivent faire l'objet d'un contrôle démocratique et ne doivent pas mettre à mal le modèle européen d'économie sociale de marché, tel que défini à l'article 3, paragraphe 3 du TUE. Il est également nécessaire de mieux définir et de préciser les «mécanismes de solidarité et de soutien» des efforts consentis par les États; ils pourraient progressivement prendre la forme de véritables transferts financiers, être dotés d'un budget initial spécifique de 50-100 milliards d'euros, devant être financés par des mécanismes similaires à ceux régissant le Fonds européen de stabilité financière (FESF).

4.14

En vue de concrétiser cette perspective d'un équilibre accru et d'une meilleure adéquation à l'économie sociale de marché telle que prévue par le traité, il est nécessaire que le rôle accru du commissaire chargé des affaires économiques et monétaires au sein du Collège s'accompagne d'un renforcement de l'action du commissaire en charge de l'emploi et des affaires sociales. Il convient également que le rôle du Conseil des affaires économiques et financières (ECOFIN) soit contrebalancé par un renforcement correspondant du Conseil «Emploi, politique sociale, santé et consommateurs» (EPSCO).

4.15

Il est tout aussi urgent, dans ce cadre de gouvernance économique et sociale européenne, et notamment du Semestre européen et de la Stratégie Europe 2020, de renforcer l'action tant du Parlement européen que des parlements nationaux, et de garantir et développer la participation des partenaires sociaux et des organisations de la société civile à tous les niveaux de la négociation politique.

5.   Propositions exploratoires

5.1   Obligations sociales européennes

5.1.1

Parallèlement aux perspectives que nous venons d'énoncer, il conviendrait peut-être de se pencher davantage sur d'autres moyens d'impliquer les citoyens, la société civile et les acteurs du monde de l'entreprise européens dans la relance de l'action sociale européenne, c'est-à-dire par la mobilisation en faveur d'obligations sociales européennes et de leur émission. Cela permettrait également, dans la conjoncture actuelle où les moyens financiers publics sont limités, de mobiliser des ressources additionnelles en allouant à des d'objectifs très précis d'importantes réserves d'épargne privée non utilisée.

5.1.2

Cette initiative serait distincte des débats en cours sur l'émission d'obligations européennes de stabilité (pour contribuer à la mutualisation de la dette) et d'obligations destinées à stimuler la reprise et la croissance (en tant qu'élément du train de mesures de l'UE de relance économique). Au lieu de cela, les obligations sociales européennes ne seraient pas payées par les trésors publics nationaux ni cofinancées par des mécanismes budgétaires de l'UE, mais seraient achetées à titre d'investissement de particuliers, d'entreprises, d'organisations syndicales et de groupes issus de la société civile souhaitant exercer leur responsabilité sociale individuelle et d'entreprise, en participant à un Fonds européen d'action sociale, financé et géré par eux-mêmes, offrant des taux d'intérêt raisonnables et ayant un caractère non lucratif, contrôlé et réglementé de manière transparente, organisé et garanti à hauteur d'un montant approprié par les pouvoirs publics compétents de l'UE.

5.1.3

La logistique relative à l'émission d'obligations devrait être assurée par les autorités compétentes de l'UE et l'organisation de cette opération devrait avoir une assise populaire et devrait être gérée conjointement par les acteurs privés, du monde de l'entreprise et publics, qui choisissent de participer à ce dispositif et prennent la responsabilité du Fonds européen d'action sociale. Ces acteurs achèteraient, collecteraient et investiraient les obligations dans des programmes sociaux de leur choix, prioritairement dans le cadre du programme européen d'action sociale proposé, avec l'aide technique des institutions et des organes consultatifs compétents de l'UE, afin de vérifier leur viabilité financière et leur possible impact social. Ces investissements à caractère social pourraient inclure: le logement social, les entreprises coopératives et les entreprises d'économie sociale, le soutien aux groupes d'entraide, les mutuelles, les services sociaux et de santé des communautés, les réseaux d'éducation, de formation et de requalification, l'innovation sociale, la recherche et le développement; les prêts et les partenariats pour le développement des infrastructures, le tourisme rural, les échanges par les voyages, les activités culturelles, les actions caritatives…

5.1.4

D'autres dispositifs plus structurés de développement de ces obligations sociales européennes pourraient être étudiés, comme la mise en place d'une pluralité d'obligations de ce type, promues et gérées à l'échelon local et/ou national par les mêmes acteurs précités. En respectant la conformité aux critères du dispositif européen général prévu, ces obligations obtiendraient une certification européenne adéquate de participation au dispositif général, tant pour ce qui relève des contraintes liées à leur finalité que de celles relatives à leurs modalités de gestion, et, sur cette base, pourraient bénéficier d'allègements fiscaux destinés aux souscripteurs.

5.1.5

Le conseil d'administration du Fonds européen d'action sociale devrait être composé des parties prenantes participant au dispositif et disposant d'une représentation proportionnelle à l'importance de leurs investissements dans les emprunts obligataires sociaux européens et devrait bénéficier d'un soutien logistique et de conseils des instances européennes appropriées (notamment du CESE).

5.2   Réseau européen d'enseignement pour les travailleurs au chômage

5.2.1

Le chômage de masse en Europe ne sera pas résolu à court ou à moyen terme, quand bien même les prévisions de croissance devaient s'améliorer d'ici 2014 ou si le train de mesures de relance pour l'ensemble du territoire européen devait commencer à donner des résultats. Le marché du travail européen doit être mieux adapté en tant que moyen pour notre main-d'œuvre de circuler librement, d'apporter les compétences là où elles sont nécessaires et d'en apprendre d'autres pour les rapporter sur le lieu d'origine et les développer. Il est capital que notre main-d'œuvre demeure active, de préférence dans un emploi ou peut-être un emploi à temps partiel, et lorsque cela s'avère impossible, dans des dispositifs d'enseignement, de formation et de requalification. Il est important de s'assurer que l'éducation soit efficace, tournée vers l'avenir, innovante et adaptée aux besoins du marché de l'emploi. Plusieurs dispositifs d'enseignement et de formation ont tendance à être conçus sur le court terme, et n'offrent souvent aucun débouché viable à leur terme. Les travailleurs âgés au chômage sont moins susceptibles de bénéficier de ces dispositifs. Une approche sur le plus long terme associée à une perspective européenne pourrait être explorée, en s'appuyant également sur des expériences déjà réalisées en Europe et s'inspirant des meilleures pratiques, comme le programme d'éducation des adultes mis en œuvre en Suède de 1997 à 2002 ou le système de formation en alternance en Allemagne et en Autriche. L'UE pourrait favoriser la création d'un réseau européen d'enseignement pour les travailleurs au chômage afin d'offrir un dispositif de formation exhaustif d'une durée de deux ans en vue de réorienter les parcours professionnels, de participer à des expériences en matière d'emploi, de formation ou d'échange d'expériences d'enseignement dans d'autres États membres grâce à la délivrance de chèques formation transnationaux pour l'enseignement prévoyant des transferts de crédits d'enseignement et enfin d'obtenir une qualification professionnelle mutuellement reconnue à l'issue du dispositif.

5.2.2

S'il est doté de ressources adéquates et s'il est adopté à une grande échelle par les États membres, dans le cadre de mesures contractuelles précises pour les travailleurs participant à ces programmes sur une base volontaire, ce dispositif pourrait permettre de maintenir dans des emplois de grande qualité un nombre important de chômeurs de longue durée qui ne trouveraient certainement pas à terme d'autres possibilités d'emploi; ce dispositif serait dès lors utile tant pour les individus que pour le capital social global des États européens.

Bruxelles, le 22 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  Données Eurostat: http://ec.europa.eu/eurostat/euroindicators

(2)  Une sorte de nouveau plan Marshall: voir l'avis du CESE sur «La croissance et la dette souveraine dans l'UE: deux propositions innovantes», JO C 143 du 22.5.2012, paragraphes 2.8 et 2.13 – Voir le livre vert de la Commission sur le financement à long terme de l'économie européenne, COM(2013) 150 final/2 du 9.4.2013

(3)  Conclusions du Conseil européen des 14 et 15 mars 2013, EUCO 23/13.

(4)  Rapport du Parlement européen à la Commission sur le rapport des présidents du Conseil européen, de la Commission européenne, de la Banque centrale européenne et de l'Eurogroupe «Vers une véritable union économique et monétaire de l'Union» (2012/2151 (INI)), p. 29 et avis qui l'accompagne de la commisssion du PE de l'emploi et des affaires sociales, suggestion J et recommandation 6.

(5)  Conclusions du Conseil européen sur l'achèvement du l'UEM, adoptées le 14 décembre 2012, point 12 b.

(6)  Discours de László Andor, Commissaire européen chargé de l'emploi, des affaires sociales et de l'inclusion, prononcé devant la CES (28.1.2013, Madrid).

(7)  «Le thème principal de la réunion d'aujourd'hui, la dimension sociale du modèle social européen demeure un atout important et un avantage concurrentiel au niveau mondial» – Intervention de M. Herman Van Rompuy, Président du Conseil européen, à l'issue du sommet social tripartite, Bruxelles, le 14 mars 2013, EUCO 68/13.

(8)  Investir dans le domaine social en faveur de la croissance et de la cohésion, notamment par l’intermédiaire du Fonds social européen, au cours de la période 2014-2020, COM(2013) 83 final.

(9)  «En conséquence, un nombre croissant de personnes quittent tout simplement le marché du travail, abandonnent toute formation et s'exposent à la marginalisation (on parle même de 13 % pour la catégorie d'âge des 15-24 ans). Ceci constitue un drame humain et une urgence sociale.» Discours de Herman Van Rompuy, Président du Conseil européen au CESE, Bruxelles, 17 janvier 2013, EUCO13/13

(10)  Résolution du Parlement européen du 13 mars 2013 sur les conclusions du Conseil européen des 7 et 8 février concernant le Cadre financier pluriannuel (2012/2803 (RSP)), paragraphe 9.

(11)  Le CESE appelle de ses vœux l'élaboration d'une feuille de route détaillée pour la mise en œuvre des stratégies d'inclusion active à l'échelon local. Il soutient la position du Parlement européen, lequel demande à la Commission d'étudier l'impact d'une proposition législative introduisant un revenu minimum approprié d'au moins 60 % du revenu médian dans chaque État membre; (JO C 248 p. 130 du 25.8.2011).


19.9.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 271/8


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Dix ans après, où va l’euro? L’avenir économique et politique de l’UE et le nouveau traité» (avis d’initiative)

2013/C 271/02

Rapporteur: M. CEDRONE

Le 12 juillet 2012, le Comité économique et social a décidé, conformément à l’article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d’élaborer un avis d’initiative sur le thème:

«Dix ans après, où va l’euro? L’avenir économique et politique de l’UE et le nouveau traité»

La section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 4 avril 2013.

Lors de sa 490e session plénière, des 22 et 23 mai 2013 (séance du 22 mai 2013), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 134 voix pour, 27 voix contre et 22 abstentions.

1.   Conclusions et propositions pour l'avenir de l'Europe

1.1

Le CESE estime que la naissance de l'euro et de l'UEM a été l'étape la plus importante de la construction européenne. Elle s'inscrivait dans une conception stratégique de l'Union relevant elle-même de la vision qui avait inspiré la CECA et le traité de Rome. Ce fut un grand et courageux effort, un pari sur l'avenir, suscitant bien des espoirs, au point que tous étaient convaincus que la force de la monnaie unique aurait surmonté les résistances qui subsistaient encore et avaient empêché la réalisation d'une UEM et d'une union politique complètes, comme cela aurait été nécessaire. L'euro reste en tout état de cause la condition préalable à tout cela.

1.2

Force est toutefois de constater, après vingt longues années, qu'il en est allé autrement, peut-être parce que l'euro, durant toute cette période, n'a subi de graves secousses ni internes ni externes, ou peut-être en raison du manque de confiance qui persiste en Europe entre pays créditeurs et pays débiteurs, qui se traduit par un déficit de cohésion et un manque de confiance à l'égard des gouvernants. Ainsi, tous ont préféré se laisser porter par une mer calme et flotter sur le bien-être existant; tout semblait aller bien, mais ce calme n'était qu'apparent. En effet, la crise économique et financière internationale qui a déferlé sur l'UE a sonné le glas de ce système en faisant éclater les limites et les contradictions inhérentes à la structure de l'UEM et en enlevant à l'euro son potentiel d'attraction. On croyait à l'origine que quelques «règles comptables», comme le Pacte de stabilité, suffiraient pour faire fonctionner l'UEM, alors que le problème n'était pas de nature technique, mais économique et politique.

1.3

Le CESE est bien conscient de l’importance de la stabilité. Cependant, la stabilité ne doit pas concerner uniquement les prix et les institutions économico-financières, mais également la politique et les conditions sociales. Les citoyens ont, à juste titre, l’impression que ce sont eux qui doivent payer le prix fort pour la crise et rembourser la dette, et non les banques qui ont joué un rôle décisif dans la crise, et que cela est injuste. Le CESE est convaincu que l'austérité ne saurait rester longtemps viable du point de vue politique. De fait, les limites acceptables ont déjà été dépassées dans certains pays.

1.4

C'est pourquoi le CESE estime que la monnaie unique ne sera viable que si l'on parvient à faire converger les capacités économiques des pays de la zone euro et à accroître la compétitivité globale de celle-ci, objectifs qui demandent un engagement tant économique que politique. Il ne suffit pas de procéder sporadiquement à un léger entretien: il convient d'accomplir un saut qualitatif, qui permette d'unir non seulement la monnaie et l’économie, mais aussi la politique, la souveraineté, les personnes et la capacité de dialogue entre les peuples européens. Nous avons besoin d’une intégration politique accrue, de moins de dirigisme et d’une économie sociale de marché pour relancer la croissance et l’emploi et pour que l'euro soit à nouveau perçu comme un avantage, et non le contraire.

1.5

Le présent avis fait clairement apparaître que les propositions du CESE sont proactives tandis que les réponses à la crise formulées par la Commission et le Conseil ont été principalement réactives. Rappelons par exemple le fait que le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance met l’accent sur la stabilité, sans toutefois proposer d’instruments financiers conjoints en faveur de la reprise et de l’emploi – même si l'accord sur le mécanisme de surveillance unique (MSU) représente une avancée importante, en l'absence d'une feuille de route crédible et concrète sur l'union politique. En revanche, l'Europe doit recommencer à produire de la richesse pour pouvoir la redistribuer, et ce de manière équitable. C'est le meilleur moyen d'atténuer les protestations. L'on ne saurait se contenter d'imposer l'austérité.

1.6

Le CESE, comme il a entendu l'exposer à plusieurs reprises, demande plutôt que soit menée une opération VÉRITÉ sur l'euro et sur l'Europe, en vue de les préserver, qui porterait sur leurs limites politiques et économiques, sur leurs pertes et profits, sur les responsabilités qui ont conduit à la situation actuelle, et il demande que l'on agisse rapidement; il n'y a plus de temps pour la rhétorique, les tromperies et les fables. C'est l'unique manière d'éviter la dissolution de l'Europe, qui décline depuis déjà longtemps. À cette fin, il serait judicieux d'éviter de taxer de populisme ceux qui protestent contre les sacrifices imposés. L'Europe doit apprendre à écouter sans être hautaine. Elle ne peut continuer à faire la sourde oreille.

Propositions pour compléter l'UEM: les maillons manquants

Le maillon économique

1.7

Le CESE estime que la meilleure manière de compléter l'UEM, d’éviter la récession, de réduire la dette des pays et de stabiliser les budgets consiste à inverser le principe sur lequel se base actuellement la culture économique de l’UE, à savoir de partir de la croissance au lieu de l'austérité, en faisant de la croissance son principal objectif, en faveur d’un nouveau pacte pour promouvoir (mutualiser) la croissance, l’emploi et la stabilité, auquel seraient notamment associés les partenaires sociaux (la croissance pour la stabilité). Le Comité est convaincu que:

i)

des mesures de politique monétaire (comme la mise à disposition de fortes liquidités pour le système bancaire, des taux d’intérêt bas) et de politique budgétaire (actuellement limitée en raison de la nécessité d'un assainissement budgétaire dans de nombreux pays) ne suffiront pas à elles seules à déclencher la reprise qui doit également être insufflée par une augmentation des investissements dans le secteur des sources d'énergie alternatives, de l'environnement et des investissements sociaux, créant ainsi une demande de biens d’investissement et de services de la part du secteur privé, qui tienne également compte des besoins des familles;

ii)

grâce à cette formule, il est possible de faire baisser les niveaux de chômage très élevés et d’engendrer les recettes fiscales nécessaires pour réduire la dette publique et les déficits nationaux;

iii)

ces investissements ne devront pas être financés seulement par la formule «plus d’impôts – plus de dépenses publiques», mais plutôt par des obligations qui attireraient les excédents d'épargne mondiaux, privés de débouchés d’investissement, en soutenant ainsi la croissance tant au sein de l’UE qu’au niveau mondial, croissance qui serait alimentée par les rendements des projets financés plutôt que par des transferts budgétaires entre États membres;

iv)

il convient en priorité de renforcer la capacité financière des entreprises, en particulier des PME, dont beaucoup risquent actuellement de disparaître car elles ne disposent pas de crédits bancaires suffisants pour garantir l’achat de matériaux et de composants, mais aussi parce que les banques centrales exigent trop de sûretés pour les banques qui prêtent aux PME;

v)

il y aurait lieu de promouvoir, dans l'immédiat, les investissements publics en faveur de la croissance, en les maintenant hors budget et en appliquant des «règles d'or», c'est-à-dire un système de règles communes qui tiennent également compte du niveau d'endettement privé des pays, dans l'attente que soient mises en place des euro-obligations (1).

1.8

Mettre en place des politiques symétriques pour pérenniser l'euro et réduire l'écart entre les économies des pays, à travers un plan solidaire consistant à transférer des ressources pour les investissements vers les pays dont les économies sont plus faibles, grâce à des projets ciblés, en recourant si nécessaire à des transferts budgétaires, et avec l'intégration du marché du travail et de la politique sociale. Autrement dit, agir en recourant à des ajustements symétriques: fonds communs pour la protection des banques menacées de faillite, assurance européenne sur les dépôts, unionbonds, eurobonds, politiques communes visant à réduire le déficit extérieur de l'UE, etc. (création d'un fonds commun de compensation ou d'ajustement).

1.9

Créer un gouvernement économique de l'UE en surmontant la méthode actuelle de coordination des politiques qui n'a pas produit de bons résultats et en transformant l'Eurogroupe en un organisme décidant à la majorité, qui deviendrait le porte-parole de l'euro; disposer d'une union monétaire et d'une union bancaire tout en maintenant des séparations entre les politiques économiques n'est plus une option viable. En revanche, une gouvernance commune (telle que pratiquée pour le pacte budgétaire) aux niveaux macro et micro (lancement d'un pacte industriel) pourrait réorienter la politique économique et budgétaire vers la croissance, l'emploi et l'inclusion sociale.

1.10

Instituer un budget commun pour la zone euro, bien entendu régi par des règles communes, par l'unification de la politique commerciale et de la balance des paiements, qui présentent aujourd'hui des écarts importants; parvenir à l'assainissement budgétaire en agissant sur la structure des multiplicateurs, pour libérer des ressources en faveur de la croissance et de l'emploi, et lancer les réformes susceptibles d'augmenter la productivité des pays les plus faibles (2).

1.10.1

Ce qu'il faut en tout cas, c'est réduire et/ou diluer les mesures actuelles d'austérité pour les pays les plus endettés, et favoriser l'expansion de la demande dans les pays créditeurs. Les États membres doivent agir simultanément sur la dette et les réformes structurelles, tandis que l'UE doit relancer concrètement la croissance au moyen d'un plan fondé sur la solidarité, pour accroître l'emploi et la justice sociale. L'on ne peut ajouter l'austérité à la récession, comme le fait l'UE: accroître encore l'effort de réduction de la dette tout en restreignant le crédit a des effets délétères sur l'économie.

Le maillon monétaire et financier

1.11

De ce fait, il faut instituer un système capable de remédier aux erreurs et aux faiblesses des différents pays, lequel accompagne le processus de réforme et réduise le différentiel économique ainsi que les déséquilibres entre les pays de la zone euro, notamment par le biais de la politique monétaire.

1.12

La BCE elle-même a souffert des limites de l'UEM. En vertu du traité, elle a dû pratiquer une politique monétaire unique, presque fédérale, alors que les économies nationales étaient et sont différentes, accusant de graves déséquilibres entre elles. Il aurait été, et il serait encore aujourd'hui nécessaire, comme on l'a dit, que l’UE intervienne par des mesures correctives. Cela permettrait d'éviter la surexposition et rendrait plus efficace et plus équitable l’action de la BCE destinée à stabiliser les prix en réduisant les distorsions et les déséquilibres existants, dont la permanence peut remettre en question l'existence même de la monnaie unique, comme cela a été démontré lors de la phase la plus récente de la crise de la dette souveraine, que seule une intervention résolue du gouverneur de la BCE a permis d'éviter. C'est une nécessité pour favoriser l'intégration économique, qui est en retard sur l'intégration monétaire, au moins tant que la BCE ne jouit pas d'un mandat clair et que l’UE souffre d'un déficit politique.

1.12.1

La BCE a aujourd'hui un rôle surexposé. Pour mieux remplir son rôle et jouer à armes égales avec la Fed, elle devrait avoir les mêmes fonctions et la même mission que celle-ci, y compris en tant que prêteur de dernier ressort, afin de réduire les écarts entre les taux d’intérêt. Il doit donc s'agir d'un mandat complet qui permette à la BCE, le cas échéant, de servir de stimulateur de croissance.

1.12.2

Un débat fait aujourd'hui rage entre les banques centrales sur les stratégies qu'il convient d'adopter pour relancer la croissance. Il s'agit de la vieille question du rapport austérité/croissance, c'est-à-dire inflation/croissance et croissance/emploi. Il suffit de penser que la Fed, pour s'acquitter de sa mission consistant à ramener le taux de chômage à 6 %, émet mensuellement 85 milliards de dollars sur le marché (politique que la Banque d'Angleterre s'apprêterait à suivre elle aussi). La BCE, qui n'a pas de gouvernement ni de budget, se trouve ainsi en position de faiblesse par rapport aux autres banques centrales. Il en va de même pour le contrôle des rapports entre les monnaies. La BCE devrait également exercer une responsabilité en matière de politique de change, sous réserve uniquement du droit du Conseil, au titre du traité, de conclure des accords formels sur un système de taux de change pour l'euro par rapport aux monnaies des États tiers.

1.12.3

La dette: un autre élément important de l'UEM. Sur ce thème, le CESE a déjà présenté une proposition précise afin de retirer du marché 60 % du volume des dettes nationales et ainsi éviter les effets spéculatifs du marché sur la zone euro (3). Il est évident qu'avec l'achèvement de l'UEM et un budget commun pour l'Eurozone, il sera également loisible de prévoir des formes d'émission d'obligations communes (ce qui devrait de toute évidence intervenir dans le cadre d'un budget commun de la zone euro).

1.13

En ce qui concerne le système financier et bancaire dans son ensemble, le CESE estime qu'il faut mettre en œuvre dans les délais strictement nécessaires, qui seront donc brefs, tous les aspects des mesures lancées par l'UE (4), celles-ci comptant parmi les plus efficaces et les plus importantes pour achever l'UEM ainsi que pour préserver sa stabilité et le marché intérieur.

Le maillon politico-institutionnel

1.14

Le CESE estime que l'avenir de l'UE et de son agencement institutionnel doit sortir des références à un «modèle idéologique», même si le modèle «fédéral» nous semble le plus approprié, et cibler les aspects fonctionnels et les questions de fond pour que survive l'idée même d'Europe. Une Europe qui remette les personnes et la solidarité au centre de ses objectifs et fasse tourner l'économie autour de ce centre, et non le contraire. Il est désormais temps de donner le coup d’envoi d'un nouveau chantier, celui de la réalisation d'une union politique, sociale et économique. Mais la tentative timide et inappropriée du Conseil, si elle a le mérite d'exister, nous semble véritablement limitée. Il convient d'en finir avec l'égoïsme et l'«utopisme des intérêts», qui semble avoir investi l'Europe, pour s'engager en faveur de la solidarité; de suspendre ou de diluer les politiques d'austérité pour atténuer les souffrances; de remettre le travail et la croissance au centre des initiatives de l'UE.

1.15

Il faut donc converger vers une union politique et sociale afin de compléter l'UEM dans l'optique des propositions précitées. Rendre le processus décisionnel plus démocratique (vote à la majorité) et transparent, pour une intégration positive, moins déséquilibrée, et une gestion commune de la souveraineté, réduisant ainsi les écarts qu'accuse le processus d'intégration. Cela permettrait de doter l'UE d'un porte-parole unique, notamment au sein des organismes internationaux.

1.16

Nouveau traité: le CESE estime qu'une grande partie des propositions de nature économique indiquées dans l'avis peuvent être mises en œuvre sans modification du traité. Là où c'est nécessaire, il est possible d'agir au moyen d'une coopération renforcée entre les pays qui souscrivent aux propositions (comme cela est advenu pour le pacte budgétaire) notamment afin d'agir plus rapidement et d'éviter le risque d'une éventuelle dissolution de l'UE face à de nouvelles attaques extérieures et au maintien des politiques d'austérité. Une autre hypothèse, pour une intégration plus approfondie, pourrait être de donner un mandat constituant au prochain Parlement européen, la proposition qu'il formulerait pouvant également être soumise à référendum populaire de manière concomitante dans tous les pays intéressés.

Le maillon international

1.17

Ce qui se passe actuellement en Europe a également des conséquences au niveau international et vice-versa. C’est la raison pour laquelle il serait nécessaire de disposer d’organismes internationaux qui soient plus efficaces et dotés d’une capacité décisionnelle accrue afin de renforcer la gouvernance mondiale. L'UE, dans ce domaine, devrait être la seule représentante européenne, en tout cas pour la zone euro. Le G20, en particulier, devrait pouvoir constituer un «comité économique et social» en faveur du développement mondial et agir par l’intermédiaire d’une relance budgétaire.

1.18

Cependant, seul un agencement politique différent, plus cohésif et démocratique, peut permettre à l'UE une meilleure gouvernance interne, mais aussi une meilleure gouvernance vis-à-vis de l'extérieur, en la faisant s'exprimer d'une seule voix au niveau international. Cela est particulièrement vrai en ce qui concerne les rapports entre les monnaies, afin d'éviter des dommages économiques à l'UE, ainsi que pour le rapport entre les économies de niveau mondial, en particulier avec les pays en voie de développement.

1.19

Pour synthétiser, quatre propositions sont formulées pour achever la «maison de l'euro»:

i)

gouvernance économique de l'UE (pour la croissance, l'emploi, la cohésion économique et sociale); budget commun de l'Eurozone et réduction des asymétries économiques entre les pays de l'Eurozone;

ii)

gouvernance monétaire et financière: renforcement du mandat de la BCE; achèvement du marché intérieur pour la finance et les banques;

iii)

union politique et sociale;

iv)

renforcement du rôle international de l'UE et gouvernance mondiale.

2.   Introduction

2.1

L’UE traverse actuellement une période particulièrement difficile et dangereuse qui risque d’avoir des conséquences négatives bien plus graves que les conséquences économiques et sociales qui se manifestent déjà. Le présent avis d’initiative traite une série de questions dont la nécessité de respecter les engagements en matière de cohésion économique et sociale déjà pris en vertu du traité, de promouvoir une nouvelle politique économique et monétaire en faveur de la croissance et de l’emploi, des politiques innovantes qui soient davantage proactives; de créer un fonds européen de capital-risque pour les petites et moyennes entreprises et, enfin, d’œuvrer pour l'avenir de l'UE (5).

2.2

Nous faisons face également à d’énormes intérêts économiques qui, au lieu de converger, s'opposent au sein de l’UE. L’euro n’est aucunement responsable de ce qui se passe (6). L’euro est une monnaie qui, pendant longtemps, a été livrée à elle-même et qui attend encore que les «parties intéressées» (les gouvernements) décident quoi faire.

2.3

Le CESE a le devoir de relever ces défis, avec un langage franc et clair et une grande clairvoyance, en étant conscient des enjeux et du niveau de confrontation, sans cacher la réalité. Par l’intermédiaire du présent avis, il souhaite contribuer activement, sans réserve, à l'achèvement de l'UEM et à la résolution de la crise dans l’intérêt des travailleurs, des entreprises et des citoyens de l’UE, en particulier de la zone euro qui est la principale victime de la crise actuelle.

3.   Le traité de Maastricht: politique monétaire et cohésion

3.1   Union monétaire

3.1.1

L'adoption de la monnaie unique aurait été optimale pour les pays exposés à des chocs symétriques ou disposant d'un mécanisme d'absorption de chocs asymétriques. Des études empiriques démontrent que la probabilité de l'apparition de chocs asymétriques est plus élevée en Europe qu'aux États-Unis. Il est évident que la politique monétaire menée par la BCE ne peut réagir aux chocs asymétriques survenus dans les différents pays participant à l'euro, son objectif principal étant de défendre la stabilité des prix au sein de l'union monétaire. Par conséquent, il convient d'instaurer un autre mécanisme suffisamment efficace pour contrer les effets de ces chocs. La politique monétaire commune de la BCE sera d'autant moins adaptée aux besoins des pays membres de la zone euro que la mobilité des facteurs de production, l'ouverture des économies, la synchronisation des cycles économiques, la diversification de la production et l'intégration financière, l'étendue des échanges commerciaux effectués au sein de l'Union, sont limitées, que le marché du travail est rigide et que les différentiels d'inflation sont plus élevés entre les différentes économies des pays membres. Plus les capacités des mécanismes d'adaptation censés atténuer les effets négatifs des chocs asymétriques seront restreintes (flexibilité des prix et des salaires, mobilité des travailleurs et des capitaux entre les pays membres, fédéralisme fiscal) et plus il sera difficile pour le pays en question de composer avec la perte de sa propre politique monétaire.

3.1.2

L’UEM est peut-être le principal pilier du traité de Maastricht, mais ce n’est pas le seul. Après la chute du mur de Berlin, outre des motifs économiques, la source d'inspiration était principalement de nature politique. Nombre de pays sont restés spectateurs, surpris et indifférents devant ce nouveau paysage, y compris face à l'absorption quasi instantanée de l'Allemagne de l'Est et la parité entre les deux marks (1=1), avalisée par la Bundesbank. On a préféré remettre à plus tard l'achèvement de l'UEM, en créant une attente commune qui s'est révélée par la suite illusoire que l’union monétaire entraînerait l’union politique et que l'euro deviendrait le moteur d'une l'Europe fédérale; mais les choses se sont passées différemment.

3.1.3

En plus de faire parler la zone euro d’une seule voix, l’Union aurait dû doter l’euro de tout ce qui lui manquait. On pensait au contraire que quelques règles, comme le pacte de stabilité, avec des paramètres d'arbitrage, une autoréférentialité réputée infaillible, suffiraient pour tout faire fonctionner, mais ces attentes ont été déçues. Le mandat de la BCE est lui aussi unidirectionnel, plus limité que celui des autres banques centrales. Ces contradictions ont été brutalement révélées par la crise financière, dont l'UE a pris la mesure avec un sérieux retard, puis par la crise de la dette souveraine, qui a privé la monnaie unique de l'aura et du pouvoir miraculeux dont on l'avait parée à sa naissance, réduisant ainsi son potentiel d’attraction à un point tel qu’elle est aujourd’hui perçue comme une menace ou comme une arme insidieuse pour justifier les politiques d’austérité.

3.2   Il s'agit d'une politique qui met en péril la cohésion économique et sociale, autre pilier de l’Acte unique, du traité de Maastricht, qui mentionne comme objectif de l’UE un taux d’emploi élevé et un niveau de vie élevé. Sous l'effet de la crise actuelle, cet objectif avait en fait disparu de l'agenda européen. S'il a été récemment remis à l'ordre du jour, du moins en paroles, il ne dispose toujours pas d'instruments opérationnels et est donc sans aucun effet concret sur l'économie réelle et sur l'emploi.

4.   Les dix premières années d’existence de l’euro

4.1   Les avantages

4.1.1

Jusqu’en 2008, l’UEM a assez bien fonctionné du point de vue monétaire pour les États membres de la zone euro: simplification du commerce, élimination du risque de change, suppression des dévaluations compétitives, stabilité des prix (inflation annuelle moyenne de 2,03 %, abstraction faite de mouvements excessifs dans certains pays au moment du passage de l'ancien au nouveau système), diminution et convergence des taux de la dette (jusqu’en 2009!), croissance et emploi (14,5 millions de nouveaux emplois ont été créés) (7), équilibre de l’ensemble des paiements courants, rapport dette/PIB inférieur à celui du Japon et des États-Unis, taux de change contenu avec le dollar (environ plus 30 %), à cause des économies plus faibles.

4.1.2

Voilà pour la vue d’ensemble. Le contexte est différent si on examine la situation pays par pays. Les pays qui ont le plus profité de l’euro sont ceux dont l’économie a servi de base aux paramètres qui ont accompagné la naissance de l’euro: leur croissance et leur productivité ont augmenté, faisant monter en flèche leurs exportations (dont la valeur a été d'environ 2 000 milliards de dollars pour la seule Allemagne, entre 2000 et aujourd’hui) et renforçant ainsi leur balance des paiements (8), tandis que les autres pays n’ont bénéficié que d’avantages partiels, lorsqu'ils n'ont pas été carrément désavantagés, principalement en raison de l'asymétrie du système lié à la monnaie unique, si bien que les pays déficitaires sont tenus de faire des corrections, tandis que les pays excédentaires ne le sont pas. Il faut ensuite tenir compte des différentes réactions qu'il y a eu dans les pays en réponse aux conditions créées par l'euro.

4.2   Les coûts

4.2.1

Les coûts à prendre en considération sont ceux liés à la divergence en matière de compétitivité entre pays, à leur perte de souveraineté dans les domaines de la politique macroéconomique, du taux de change, des dévaluations compétitives, etc.

4.2.2

En l'absence d'une UEM adéquate et complète, d’autres coûts sont apparus en raison de la crise, comme le transfert des passifs bancaires vers les budgets publics, l’augmentation de la dette, et l’aggravation des difficultés pour les pays qui étaient déjà les plus endettés. L’Union en est sortie divisée en deux: d’une part, les pays créditeurs, de l’autre, les pays débiteurs, lesquels ressemblent en outre de plus en plus aux pays du tiers monde. En effet, entre autres effets négatifs, les pays créditeurs accroissent la pauvreté au Sud et la richesse au Nord. Il suffit de penser à l’excédent accumulé par l’Allemagne, non pas par l’intermédiaire de la comptabilité interne de la zone euro (si c’était le cas, le budget de l’UE serait en équilibre!), mais grâce à ses excédents avec l’étranger, si élevés qu’ils pourraient, à la longue, exposer les Allemands eux-mêmes à un risque financier de nature à nuire à leur économie.

4.3   Les imperfections

4.3.1

Les défauts structurels et les faiblesses du système de gestion de la monnaie sont multiples: les limites du Pacte de stabilité et de croissance que certains pays ont tenté de démanteler lorsqu’il leur posait des problèmes (Allemagne, France et Italie); l’absence de suivi des indicateurs de productivité, le manque d’instruments pour gérer la crise; les coûts de sortie de la zone euro et/ou de maintien dans la zone euro; le risque systémique; les déséquilibres économiques entre les pays; le maintien de la souveraineté fiscale et budgétaire des États.

4.3.2

Le risque de taux de change et les dévaluations compétitives n'ont toutefois pas été supprimés entre les États membres de la zone euro et ceux qui n'en sont pas, en particulier le Royaume-Uni, et une dépréciation significative de la livre sterling par rapport à l'euro pourrait survenir dans des délais relativement courts, sapant ainsi les conditions de concurrence équitable censées exister dans le marché unique.

4.3.3

Du point de vue économique, le problème le plus grave est celui des déséquilibres économiques, qui existaient dès avant 2000. Cette situation a pénalisé les pays les plus faibles, causant de véritables «chocs asymétriques», favorisés notamment par l’afflux massif de capitaux vers l’Allemagne. La BCE ne peut faire face à de tels chocs asymétriques avec les instruments dont elle dispose actuellement. Une autre difficulté, due au contexte international, n’a été mise en évidence que dans un deuxième temps par la crise financière (9).

4.3.4

La plus grande erreur a cependant été de croire qu’il était possible d’avoir une monnaie unique sans aucunement limiter la souveraineté des États, non seulement la souveraineté budgétaire, mais en particulier la gestion séparée de la dette, avec un système bancaire et financier national, de même que le système de surveillance.

4.3.5

Enfin, la critique la plus grave au niveau politique est la suivante: avoir créé la monnaie unique sans la doter d’une maison commune et sans la doter d'un porte-parole unique, abstraction faite des efforts fournis, de temps à autre, par la BCE pour pallier cette absence. La BCE est ainsi passée de l’autonomie «écrite» dans le traité à un rôle de suppléante de la fonction politique pour éviter que la monnaie unique et l’UE (10) ne subissent des dommages, de la même manière que la croissance a mis en évidence le rôle du pays le plus fort.

4.3.6

Le CESE considère quoi qu’il en soit que l’euro deviendra une monnaie plus viable si les «performances» économiques des pays de la zone euro convergent (pour favoriser une croissance plus homogène), et si une union politique (qui rende ces différences acceptables) est créée, car le problème n’est pas d’ordre comptable, mais politique, touchant notamment la question de la démocratie et, partant, celle d'une pondération plus équitable des votes au sein des différents organismes décisionnels. Insister uniquement sur l’aspect économique et «comptable» est une illusion et une erreur que nous ne pouvons plus nous permettre.

5.   Le contexte international

5.1

Ce qui se passe actuellement en Europe a également des conséquences au niveau international et vice versa; les économies, la dette, la finance, le commerce, le rapport entre les monnaies, etc., tous ces éléments sont très étroitement liés. Nous pensons, en particulier, au lien encore plus étroit entre les économies des deux rives de l’Atlantique; du moins jusqu’en 2009. Aujourd’hui, par contre, l’économie américaine repart, tandis que l’économie européenne est en récession, ce qui résulte en partie des différences entre deux écoles économiques, outre celles qui existent entre le rôle de la Fed et celui de la BCE.

5.2

Il serait dans tous les cas nécessaire pour l’ensemble de l’économie mondiale de disposer d’organismes internationaux qui soient plus efficaces et dotés d’une capacité décisionnelle accrue afin de renforcer la gouvernance mondiale (FMI, Banque mondiale, OIT, OMC). Quant au G20, il aurait besoin de voir sa structure renforcée pour prendre des décisions contraignantes; il devrait, par exemple, constituer un «Comité économique et social» pour le développement mondial, agir par l’intermédiaire d’une relance budgétaire, régir les rapports entre les monnaies, afin de réduire les discriminations en matière commerciale, notamment au moyen d'une capacité accrue d'intervention de la BCE.

5.3

Excédents d’épargne au niveau mondial. La croissance est en effet également essentielle pour le reste de l’économie mondiale. L’alerte lancée par le FMI, selon lequel l’Europe doit accompagner les mesures visant à réduire la dette et le déficit de dispositions visant à stimuler la croissance, est opportune et justifiée. Il existe des excédents d’épargne au niveau mondial qui ne trouvent pas de débouchés d’investissement. En effet, on a tenté en vain de trouver des cibles d’investissement pour des fonds de placement privés pour une valeur proche de 2 000 milliards de dollars américains (11). Le principal fonds souverain d’investissement de la Norvège réduit actuellement sa part d’investissements européens de plus de la moitié à deux cinquièmes (12). En 2011, le principal fonds souverain d’investissement asiatique, «China Investment Corporation», a enregistré une perte d’investissements dans ses fonds de placement privés, a réduit, de 50 % à 25 %, son portefeuilles de titres privés et est à la recherche de cibles d’investissement à plus long terme dans le secteur public plutôt que dans le secteur privé (13).

6.   Les actions en cours au sein de l’UE

6.1   FESF/MES: face à la tournure que prend la crise, qui s’est transformée en attaques spéculatives contre l’euro sans qu’aucune mesure ne soit prise contre les spéculateurs, l’union a essayé de réagir sur plusieurs fronts. Par exemple, le renforcement du Fonds européen de stabilité financière au moyen de l'octroi d'une licence bancaire en ferait un instrument efficace, même s’il est limité, pour aider les États qui risquent de faire défaut sans que cela relève de leur responsabilité, contre la spéculation sur les titres bancaires et sur la dette. Ce fonds ne constitue cependant pas la solution à la crise.

6.2   L’union bancaire en représente un autre pilier. Il est, en effet, impossible de préserver longtemps une zone caractérisée par une monnaie unique mais par 17 marchés financiers et de la dette, surtout depuis que la crise a accentué la fragmentation nationale. L’union bancaire devient, dès lors, un élément indispensable et prioritaire pour mutualiser le risque, protéger les déposants, y compris par la procédure de liquidation, redonner confiance au système, qui a cessé de fonctionner, et à nouveau faire circuler les financements pour les entreprises dans tous les pays sur la base de la population concernée et non de la taille des banques, en évitant le transfert de liquidités vers les pays considérés comme étant caractérisés par un risque moins élevé et en réduisant les écarts entre les taux. En outre, une union bancaire servirait également à réduire le risque systémique et à briser le lien entre dette publique et banques. Encore une fois, il ne faut pas oublier que l'euro est né alors qu'on a maintenu les systèmes bancaires séparés, ce qui est une grave faiblesse. Cela est principalement dû au fait que ceux de certains pays «forts» sont en grande partie des systèmes bancaires publics.

6.3   La surveillance bancaire européenne complète les mesures en cours. Il s’agit d’une compétence située au niveau de l’UE et directement exercée par une autorité unique. Afin de prouver que l’Europe offre une valeur ajoutée considérable, il est essentiel de promouvoir une transparence accrue au niveau des activités bancaires et d’empêcher les conflits d'intérêt et les pratiques incorrectes, comme la manipulation des taux d’intérêt LIBOR. Le CESE se réjouit de la proposition visant à créer un mécanisme unique de surveillance, sous l’égide de la Banque centrale européenne, qui couvrirait l’ensemble de la zone euro et serait accessible à tous les États membres (14).

6.4   Le CESE évalue positivement le nouveau programme OMT (Opérations monétaires sur titres) qui permet à la BCE d’acquérir des obligations d’État sur le marché secondaire pour mettre fin à la spéculation et réduire les écarts de taux sur la dette des États et, partant, pour l’euro. Cette mesure, qui s'ajoute aux autres mesures non conventionnelles de politique monétaire adoptées (ce qui s'est déjà produit par le passé) pour faire face à la crise financière, représente un tournant pour la BCE, même si c'est dans l’esprit du traité et dans la bonne direction. Dans ce cas également, il s’agit cependant d’instruments techniques qui n’apportent pas de solutions à la crise, mais qui donnent aux gouvernements et à l'UE le temps d'adopter les mesures nécessaires.

6.5   La BCE

6.5.1

La BCE a comme objectif «le maintien de la stabilité des prix» et, pour y parvenir, elle doit maintenir son indépendance politique, c’est-à-dire qu’elle ne peut ni «solliciter ni accepter des instructions» des gouvernements ou de l’UE. Ce statut est correct, même si le traité charge le Conseil de conclure des accords formels portant sur un système de taux de change pour l’euro vis-à-vis des monnaies d’États tiers (15). En l'absence de tels accords, ou dans l'intervalle entre deux accords, la BCE devrait considérer la politique de taux de change comme relevant de ses responsabilités. La BCE a également des objectifs secondaires tels que, par exemple, de contribuer à la stabilité financière, même si ses interventions pendant la crise peuvent être ramenées à son objectif principal, en tant qu'elles ont été dictées en grande partie par la nécessité de rétablir un mécanisme efficace de transmission de la politique monétaire, en maintenant ainsi la stabilité financière de l'ensemble des pays de la zone euro.

6.5.2

S'agissant de l'évolution des prix, une question essentielle se pose au sujet des critères de Maastricht; il s'agit de savoir s'il est pertinent que, pour le calcul du critère d'inflation, l'on utilise la moyenne des inflations des trois pays les plus prospères de l'Union européenne et non de la zone euro.

6.5.3

De manière générale, le mandat de la BCE est plus limité que celui des autres banques centrales. En premier lieu, la BCE n'a pas de mandat pour soutenir la croissance et l'emploi, comme c'est le cas de la Fed, même si leurs politiques monétaires se ressemblent. Il existe cependant des différences fondamentales entre les États-Unis (système fiscal centralisé) et l'Union européenne dans la mise en œuvre de la politique budgétaire. En outre, aujourd'hui, le rôle de la BCE de prêteur de dernier ressort (lender of last resort) est limité au système bancaire et ne concerne pas les gouvernements (gouvernement de l'UE), alors que cela est implicite dans les contextes «nationaux»; cela devrait être rendu possible dans le contexte d'une UEM complète. De plus, la politique monétaire unique de la BCE est compliquée par l'existence de divergences et de déséquilibres économiques entre les différents pays de la zone, sans que l’UE n’intervienne par des mesures correctives.

6.5.4

Il est malgré tout positif de constater que le principe d’«unicité» de la zone euro a poussé la BCE à déclarer que l’euro est «irréversible» et lui a permis, comme susmentionné, d’adopter, après une âpre confrontation, des mesures pour réduire les écarts entre les taux d’intérêt de la dette des différents pays grâce à la possibilité d’acheter des obligations sur le marché secondaire. Cette tâche exige que l'Europe, parallèlement à la reprise de la croissance, suscite un plan «européen» de réduction de la dette, pour accompagner ceux des États membres (16).

6.5.5

Une telle mesure permet au moins de réduire la distorsion de la concurrence au moyen des taux de financement de la dette et des investissements, une distorsion qui représente encore aujourd’hui un véritable différentiel financier et qui aggrave les déséquilibres déjà existants, y compris ceux de la balance des paiements.

6.5.6

En outre, le CESE estime qu’il est également nécessaire de réexaminer la question de la conditionnalité posée par la BCE et l'UE. Il est inacceptable de donner des liquidités aux banques à des taux très bas sans poser aucune condition, par exemple pour ce qui concerne la destination des fonds. De fait, au moins une partie de ceux-ci devrait être dévolue aux investissements; alors que des conditions très sévères sont imposées aux pays lors de l’achat de titres de la dette publique par la BCE (opérations monétaires sur titres, OMT), même si cela est une autre affaire. Cela est justifié par le fait qu’il faut répondre à la logique d'un «marché» en mutation et sans scrupules, anonyme et très rapide, qui en réalité ressemble bien peu à un «marché» (17). L’UE ne peut se prêter à ce jeu: austérité et sévérité pour les citoyens et les entreprises pendant la crise, neutralité pour les investisseurs/spéculateurs qui se cachent derrière les banques d'affaires et les fonds d'investissement internationaux, malgré la fermeté affichée par le gouverneur pour défendre l'euro aux moments les plus critiques de l'attaque.

6.5.7

En revanche, il serait nécessaire que l’action de la BCE puisse soutenir équitablement l’économie des différents pays afin de réduire les distorsions et les déséquilibres existants en commençant par utiliser les instruments existant déjà, avec comme objectif de résorber le déficit actuel de l’UE du point de vue de son mandat et de sa politique. Par exemple, il serait envisageable de relancer le marché interbancaire de certains pays de la zone euro au moyen de taux négatifs sur les dépôts au jour le jour auprès de la BCE.

6.5.8

Le CESE reste en outre convaincu qu’il convient de résoudre dans l'immédiat la question de la dette  (18), conformément à sa proposition, l’action de la BCE et du Conseil étant fondamentale pour y parvenir.

6.5.9

Le CESE considère qu'il serait judicieux de rendre les décisions de la BCE plus transparentes. L'on pourrait par exemple publier les résultats de vote lors des séances du Conseil des gouverneurs de la BCE, car cela renforcerait la responsabilité des gouverneurs des banques centrales nationales des pays membres de l'union monétaire. Cela les inciterait à prendre des décisions à la lumière de l'ensemble des facteurs économiques caractéristiques de la zone euro et non en fonction de l'évolution de la situation économique dans leurs pays respectifs.

6.5.10

Un autre problème qu'il serait utile de souligner est celui du système de vote au sein du Conseil des gouverneurs de la BCE (19), en particulier concernant les disparités entre les droits de vote et la contribution financière des États membres. Ce problème s'est déjà posé avec le système de paiement au sein du mécanisme européen de stabilité (MES) et pourrait resurgir à l'avenir, par exemple au sein de l'Union bancaire.

7.   L’avenir économique de l'UE: l'union économique et sociale – la croissance et l’emploi

7.1

Convaincu que la stabilité n’est pas en mesure de garantir à elle seule la reprise, qui dépend tant de la confiance des entreprises que de celle des consommateurs, le CESE estime que la reprise doit être guidée par les investissements écologico-sociaux  (20). Étant donné les perspectives limitées du secteur privé et les capacités non utilisées, les entreprises ne peuvent pas compter sur les profits futurs découlant des investissements actuels. Et si, à leur tour, les citoyens ne sont pas certains de pouvoir garder leur emploi ou d’en trouver un, ils préfèrent épargner ou réduire leurs dettes plutôt que de dépenser. Un taux de chômage plus élevé ne fait qu’augmenter le nombre de personnes qui ne peuvent dépenser.

7.2

C’est la raison pour laquelle, afin de promouvoir la confiance des entreprises et des citoyens, la reprise doit être guidée par les investissements, en suivant l’exemple du New Deal américain (21). À cette fin, les critères fondamentaux sont ceux adoptés par la BEI depuis le Programme d’action spéciale d’Amsterdam (1997) et le mandat pour promouvoir la cohésion et la convergence dans les secteurs de la santé, de l’instruction, de la rénovation urbaine, de l’environnement ainsi que des réseaux transeuropéens.

7.3

C’est un objectif qu’il est possible d’atteindre en remettant en circulation les excédents de l'épargne au niveau mondial, comme indiqué au paragraphe 5.3. En effet, certains fonds d’investissement sont à la recherche de débouchés à plus long terme pour les excédents d’épargne générés dans d’autres parties du monde. Cela présente des avantages mutuels pour les investisseurs des pays tiers et pour l’économie européenne. Dans ce contexte, les deux «institutions sœurs» du groupe de la Banque européenne d’investissement, à savoir la BEI et le FEI (Fonds européen d’investissement) peuvent jouer un rôle-clé.

7.4

Il convient dès lors de se réjouir de l’augmentation de capital de la BEI. Les obligations liées à des projets (project bond) peuvent aussi jouer un rôle important dans la reprise. Il convient cependant d’appeler «euro-obligation» (Eurobond) l’utilisation des excédents au niveau mondial à des fins d’investissement au sein de l’UE, même si les marchés utiliseront probablement la forme abrégée «€ bond». On connait la résistance de certains gouvernements envers les euro-obligations (eurobond), mais cela est dû à une supposition erronée, dans la mesure où les euro-obligations (eurobond), nécessaires pour soutenir la croissance, sont confondues avec les Union bonds, destinés à la dette (22).

7.5

Depuis le début, le FEI considère qu’il pourrait émettre des obligations européennes pour financer des investissements sociaux à long terme (23) en augmentant son capital par rapport au niveau actuel – relativement bas – de 3 milliards d’euros, sans qu’une révision des traités ne soit nécessaire (24). Aucun des principaux ni des autres États membres de la zone euro n’inclut dans sa dette nationale les financements de la BEI et il devrait en être de même pour les financements du FEI. Les obligations émises par le FEI, comme celles émises par la BEI, peuvent être garanties par les rendements du financement de projets.

7.6

Innovation des produits et création de marchés: nous estimons, en outre, que l’Union doit mener une politique moins neutre dans le domaine de l’innovation. Au cours des années ’70, les politiques industrielles sont passées de mode parce que les gouvernements ne pouvaient «privilégier des opérateurs en particulier» ni des «champions au niveau national». Nous considérons cependant qu’il existe des raisons valables pour réviser cette approche (25).

7.7

Premièrement, il n’est pas certain que les politiques non interventionnistes soient vertueuses. Par le passé, elles ont en effet été à l’origine d’investissements erronés dans le secteur financier. Deuxièmement, il convient de lancer des initiatives qui soient davantage décisives pour lutter contre le changement climatique. Troisièmement, un nombre excessif de projets technologiques présentés dans le contexte des programmes-cadres est repoussé non pour des questions de mérite, mais plutôt par manque de ressources propres, problème qui pourrait être résolu en recourant à un fonds européen de capital-risque financé par l’émission d’obligations. Quatrièmement, les économies émergentes ont été capables de promouvoir une série de champions nationaux en obtenant des résultats très honorables (26).

7.8

Le financement des investissements par l’intermédiaire du transfert des excédents vers les euro-obligations (eurobond) devrait être rendu accessible à tous les États membres et produire des avantages cumulatifs sur le plan macroéconomique, social, politique et de l’emploi, démontrant la nécessité de promouvoir«plus d’Europe», approche qui suscite actuellement un scepticisme croissant auprès des électeurs et de certains gouvernements.

7.9

La croissance peut également contribuer à renforcer la stabilité. Sur la base du principe de la BEI selon lequel les financements obligataires ne doivent pas nécessairement être comptabilisés en tant que dette nationale, le financement d’euro-obligations (eurobond) visant à favoriser la reprise permettrait de réduire plus facilement la dette nationale et de libérer des recettes fiscales nationales pour réduire les déficits, ou les maintenir à un niveau bas, tout en protégeant les postes fondamentaux des dépenses sociales. À cet égard, il serait nécessaire que les pays et Eurostat définissent des paramètres et des critères communs pour une évaluation des données qui soit plus équitable et de meilleure qualité.

7.10

Il n’a d’ailleurs pas été tenu compte du fait que «l’hypothèse de l’éviction financière» (crowding out) suppose le plein emploi. Étant donné qu’actuellement, la majorité des États membres enregistrent des niveaux élevés de chômage, le financement – séparé ou commun – d’obligations liées à des projets (project bond) BEI-FEI pourrait provoquer une accumulation (crowding in) d’investissements du secteur privé, de revenus et d’emplois, avec un effet multiplicateur des investissements de trois maximum et des multiplicateurs fiscaux positifs dans la mesure où ils génèrent des recettes fiscales directes et indirectes (27).

7.11

À la lumière des difficultés qui touchent certains pays, en particulier la Grèce et Chypre, le CESE propose de revoir l’ajustement structurel à court terme demandé par la troïka, en tenant compte des perspectives à plus long terme pour ces pays à la suite de la découverte d’énormes réserves de pétrole et de gaz, essentiellement non exploitées, présentes en Méditerranée orientale (28).

8.   L'avenir politique de l'UE

8.1

Le CESE est dès lors convaincu qu’effectuer un simple «entretien» de l’UE de temps en temps ne suffit pas. L’UE ne peut prolonger le vide qui dure depuis l’époque du traité de Maastricht sans relever le défi engendré par l’euro, que la crise a fait exploser en mettant en lumière ses «déficits» internes, en premier lieu le déficit de démocratie (29). Il faut redonner un objectif au processus européen, afin d'éviter que l'idée d'Europe ne meure.

8.2

Le CESE estime que la monnaie unique ne sera viable que si on parvient à faire converger les capacités (performances) économiques des pays de la zone euro, ce qui exige un engagement économique et politique. Il est dès lors nécessaire de créer une union politique qui rende les différences acceptables et qui permette, le cas échéant, de transférer une partie de la richesse des zones fortes aux zones faibles, grâce à un mécanisme décisionnel transparent et démocratique et une nouvelle forme de solidarité entre pays (30).

8.3

La crise fait remonter à la surface les «anciennes différences» entre les Européens. C’est le retour du défaut consistant à se tourner vers le passé, en ressassant les fantômes ou les lieux communs qui avaient, pensions-nous, disparus, comme si l’austérité et la dette étaient dues à une faute et non aux erreurs des gouvernements sur les deux fronts. C’est notamment la raison pour laquelle les pays en difficulté ne peuvent faire endosser par l’UE (ou l’Allemagne) des responsabilités qui sont les leurs, tout comme les pays les plus riches ne peuvent ignorer les bénéfices majeurs qu’ils tirent de l’euro, en partie, au détriment des autres, à cause des déséquilibres économiques existants. Nous avons dès lors besoin d’une nouvelle capacité politique, culturelle et de dialogue entre les peuples européens, qui en retireraient indubitablement des avantages mutuels, comme le suggérait il y a longtemps déjà le poète allemand Hölderlin (31), s’inspirant de la culture grecque.

8.4

Il convient dès lors de réaliser un saut qualitatif, en réunissant non seulement l’économie, mais aussi la politique et la SOUVERAINETÉ de chacun. Il ne convient pas de discuter du «modèle» européen à réaliser, mais plutôt des instruments dont nous avons besoin, des instruments efficaces, démocratiques et transparents pour décider; pour réaliser le bien commun; pour unir le peuple européen, non pas pour le diviser.

8.5

Pour les mêmes raisons, le CESE estime que la question de savoir s'il convient de modifier le traité ou non ne se pose pas. De toute évidence, cela dépend de ce qu'il est nécessaire de faire pour achever l'UEM. En tout état de cause, la plupart de nos propositions peuvent être réalisées sans modifier le traité (croissance, débit, etc.), tandis que pour d'autres, une coopération renforcée peut suffire. L'important, c'est le but à atteindre pour le bien de l'économie, de l'euro et des citoyens de l'UE. Le traité n'est que l'instrument. Il faut expliquer cela aux citoyens de la façon la plus adéquate, en les associant directement aux décisions et/ou par l'intermédiaire du PE et des parlements nationaux.

8.6

Le CESE considère que la zone euro dispose des ressources pour écrire son propre avenir: une intégration politique accrue, moins de dirigisme, une économie sociale de marché, afin de relancer la croissance et l’emploi et de créer une union politique, économique et sociale.

9.   Intégration ou désintégration?

9.1

Faute de cette étape ultérieure, la manière dont la crise est affrontée à ce jour pourrait provoquer une désintégration de la zone euro et dès lors de l’UE. On ne peut pratiquer uniquement une politique d’austérité et de coupes budgétaires, comme c'est le cas pour la réduction de la dette, même lorsqu'elles sont opportunes. Il faut également agir avec d'autres instruments (accroissement de la demande dans les pays créditeurs) et à l'intérieur d'un cadre de solidarité. Il est nécessaire de faire comprendre aux citoyens des pays concernés que leurs excédents budgétaires découlent de la dette des autres et que les attaques contre l’euro ne dépendent pas du niveau de la dette (32), même s'il convient de réduire le niveau de celle-ci. Les citoyens du Sud doivent inciter leurs gouvernements à consolider la dette; gérer le budget de leur pays plus prudemment; éliminer les gaspillages et l’évasion fiscale; réduire les taxes, augmenter la croissance, l’emploi, la productivité et la compétitivité de leurs systèmes, pas uniquement par l’intermédiaire de quelques réformes, mais grâce à une solidarité accrue et à une politique économique différente de celle de l’UE et de la BCE (33).

9.2

Dans le cas contraire, aucun pays ne pourra réduire sa dette et assainir son budget. Il est donc nécessaire de desserrer la corde de l’austérité et de changer de politique économique, faute de quoi les risques iront en augmentant. L’histoire peut nous être utile à cet égard (34). Il est nécessaire d’affirmer une nouvelle perspective d’intégration, une intégration positive, qui ne soit pas négative, ni préjudiciable, ni forcée.

9.3

Il convient de considérer qu’aujourd’hui personne en Europe n’est à l’abri, hors de danger, même si une situation anormale s’est créée. En effet, la croissance économique de certains pays, favorisée en partie par l’euro, et la faiblesse des organismes de l’UE ont mené l’Allemagne, pays plus fort, à jouer un rôle central en Europe, souvent par opposition aux «périphéries», en particulier du Sud, mais pas uniquement. «Cette situation alimente la peur des autres» (H. Schmidt), en particulier en raison de la manière dont ce rôle est perçu. Des interventions visant à démentir cette perception seraient donc nécessaires (35).

9.4

De l'avis du CESE, aujourd’hui, ce sont plutôt l’égoïsme ainsi que les intérêts nationaux qui semblent prévaloir en Europe; nous sommes confrontés à un «utopisme des intérêts». L’approche économiste a pris le dessus en reléguant au second plan les valeurs sur lesquelles l’Europe a été fondée et sur lesquelles se base son existence; nous assistons à l’émergence d’une Europe égoïste, dénuée de solidarité. Les tensions de ces derniers temps soulèvent le risque d’une «dissolution psychologique» dangereuse de l’UE, qui concerne tant les citoyens que les gouvernements. Il faut y porter remède par l'écoute, sans adopter d'attitude hautaine et en apportant des réponses concrètes.

9.5

Nous nous trouvons à la croisée des chemins: le CESE se demande, en effet, comment il est possible que les retards et les doutes de l’Europe, la première économie du monde, risquent de faire mourir la Grèce, mère de ses principes fondateurs, une entité minuscule du point de vue économique (36), en imposant aux citoyens et aux entreprises des sacrifices sans les accompagner d'un plan d'aide à la croissance, seule manière d'apurer la dette, ni d'un plan visant à alléger les graves souffrances sociales d'une partie de la population grecque et européenne. Nous devons nous demander de quelle sorte d’Europe il s’agit là.

Bruxelles, le 22 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  JO C 143 du 22 mai 2012, p. 10.

(2)  JO C 133 du 9 mai 2013, p. 44.

(3)  JO C 143 du 22 mai 2012, p. 10.

(4)  JO C 44 du 15 février 2013, p. 68 et JO C 11 du 15 janvier 2013, p. 34.

(5)  JO C 143 du 22 mai 2012, p. 10.

(6)  «Toutes les discussions récentes concernant une crise présumée de l’euro ne sont rien d’autres que des bavardages», Helmut Schmidt.

(7)  Bien qu'avec des taux différents (croissance de 1,6 % en moyenne entre 2001 et 2006), alors que la croissance a été de 2,3 % dans les trois pays de l'UE-15 restés en dehors de la zone euro. De même, ces pays avaient un taux de chômage de près de 3 % inférieur à ceux de la zone euro.

(8)  «Ces excédents sont en fait des déficits pour les autres, de la même manière que les crédits représentent les dettes des autres pays envers l’Allemagne», H. Schmidt.

(9)  JO C 255 du 22 septembre 2010, p. 10 et JO C 143 du 22 mai 2012, p. 10.

(10)  «L’euro pourrait accentuer les tensions politiques entre les membres de l’UM, jusqu’au point de créer des conditions favorables à l’apparition de nouveaux conflits, y compris militaires», Martin Feldstein et Milton Friedman.

(11)  Bain & Company Global Private Equity Report for 2012.

(12)  Reuters (2012). Le fonds souverain d'investissement de la Norvège – 610 milliards de dollars américains – réduira son exposition en Europe, 30 mars 2012.

(13)  http://www.upi.com/Business_News/2012/07/25/Chinas-sovereign-wealth-fund-reports-loss/UPI-38111343274421/#ixzz2AcHV3HNp

(14)  JO C 11 du 15 janvier 2013, p. 34.

(15)  Article 219 du TFUE.

(16)  JO C 143 du 22 mai 2012, p. 10.

(17)  «Les marchés ne sont pas au service du peuple, mais contre lui. Notre devoir consiste à transférer vers les marchés et la finance l’esprit de solidarité de l’économie sociale», Angela Merkel, Chancelière allemande.

(18)  JO C 143 du 22 mai 2012, p. 10.

(19)  Décision du Conseil européen du 21.3.2003.

(20)  Voir la résolution du Conseil européen d'Amsterdam de 1997, point 9, et les conclusions du Conseil européen extraordinaire de Luxembourg de 1997, points 37-40.

(21)  JO C 143 du 22 mai 2012, p. 10.

(22)  Idem.

(23)  Stuart Holland (1993). The European Imperative: Economic and Social Cohesion in the 1990s. (Un impératif européen: la cohésion économique et sociale dans les années 1990), préface de Jacques DELORS. Nottingham: Spokesman Press.

(24)  En vertu de l’article 2, paragraphe 2, des Statuts du Fonds européen d’investissement, «Les activités du Fonds peuvent inclure des opérations d'emprunt». Sur le principe, le Fonds a confirmé qu’il pourrait émettre des obligations grâce à une simple décision de son Assemblée générale, à la suite de l’approbation d’une augmentation de capital, comme l’a récemment fait la BEI. Cependant, si l’UE entend reconnaître l’importance d’émettre des obligations tant pour financer une reprise guidée par les investissements sociaux que pour refaire circuler les excédents au niveau mondial, il est indispensable que cette décision reçoive une approbation plus explicite. Celle-ci pourrait en principe être donnée par le Conseil européen en tant que «politique économique générale» de l’union pour financer la reprise, plutôt qu’exclusivement par le Conseil Ecofin, et, si cela s’avérait utile, cette approbation pourrait engendrer une coopération renforcée, comme dans le cas de la proposition récente concernant une taxe sur les transactions financières, qui pourrait avoir également une valeur macroéconomique.

(25)  Philippe Aghion, Julian Boulanger et Elie Cohen. Rethinking Industrial Policy (Repenser la politique industrielle). Bruegel Policy Brief, avril 2011.

(26)  The Economist (2012), The Rise of State Capitalism: The Emerging World’s New Model. (La naissance du capitalisme d’État: le nouveau modèle du monde émergent), Rapport spécial, 21-27 janvier 2012.

(27)  Blanchard, Blot, Creel et al., études pour l’Observatoire Français des Conjonctures Économiques.

(28)  Dans ce contexte, il est inacceptable que la Troïka demande à la Grèce de vendre sa participation majoritaire dans la compagnie pétrolière nationale à des sociétés étrangères, en réalisant un profit limité de 50 milliards d'euros. Les citoyens grecs estiment à juste raison qu'il s'agit d'une mesure avantageuse pour les marchés, mais non pour les citoyens eux-mêmes. Le CESE propose donc que le Conseil européen demande à la Commission de réévaluer l'ajustement structurel qui est exigé à court terme de la Grèce afin de tenir compte des revenus exceptionnels qui sont prévus sur le long terme.

(29)  «Pour la première fois dans l’histoire de l’UE, nous assistons à une démolition de la démocratie», Jurgen Habermas.

(30)  «Un pays ne peut poser des actions qui nuisent à un autre pays de la zone euro», M. Draghi.

(31)  «…depuis que nous sommes en dialogue et nous entendons l’un l’autre», extrait du poème «Fête de la paix» de F. Hölderlin, poète, 1770-1843.

(32)  L’exemple de l’Espagne qui a une dette inférieure (68,5 % du PIB) à l’Allemagne (81,2 % du PIB) en est la preuve. Données Eurostat pour 2011.

(33)  Le rapport Spaak de 1956 reconnaît que l'intégration d'économies diversement efficaces pourrait aggraver les disparités structurelles, sociales et régionales et qu'elle doit être compensée par des politiques structurelles, sociales et régionales communes.

(34)  1933: conséquences de la politique déflationniste poursuivie par le chancelier allemand Heinrich Bruning après la crise de 1929.

(35)  «Nous n’avons pas besoin d’une Europe allemande, mais d’une Allemagne européenne», H. Kohl.

(36)  2 % du PIB UE.


19.9.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 271/18


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «L'économie verte — Promouvoir le développement durable en Europe» (avis d'initiative)

2013/C 271/03

Rapporteure: Joana AGUDO I BATALLER

Corapporteur: Pedro NARRO

Le 15 novembre 2012, conformément à l'article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, le Comité économique et social européen a décidé d'élaborer un avis d'initiative sur le thème:

«L'économie verte – promouvoir le développement durable en Europe».

La section spécialisée «Agriculture, développement rural et environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 26 avril 2013.

Lors de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 23 mai 2013), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 108 voix pour et 2 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

De l'avis du CESE, le développement de l'économie verte inclusive sera le principal défi auquel devra faire face l'Europe au cours des prochaines années si elle veut demeurer une puissance économique mondiale. Lors de la Conférence de Rio+20, elle a misé sur une économie verte en tant que forme de développement durable. Le temps est venu pour elle d'agir. Pour y parvenir, elle devra se doter d'un modèle de développement économique qui accorde la priorité aux investissements publics et définisse de manière appropriée les incitations nécessaires pour les investissements privés en matière d’infrastructures et de R+D+i «verte», dans le but, d’une part, de promouvoir l'activité productive afin de sortir rapidement de la situation de récession actuelle et, d’autre part, d'affronter en position de chef de file sur le plan économique et social la transition vers cette troisième révolution industrielle.

1.2

Le CESE estime que les changements profonds et nécessaires à introduire dans le mode de production et de consommation requièrent comme condition préalable essentielle d'associer la société civile à tout ce processus de transition vers une économie verte et inclusive - et ce à tous les niveaux, tout particulièrement aux niveaux sectoriel et territorial (européen, national, et régional). Une gestion participative est nécessaire pour vaincre le mieux possible les résistances et pallier autant que faire se peut les effets négatifs inhérents à toute transformation. C'est cette participation qui permettra de progresser aux plans économique, social et environnemental de manière durable

1.3

Le CESE constate avec préoccupation que les politiques d'incitations fiscales vertes ont subi des coupes radicales ces dernières années en raison des politiques d'«austérité budgétaire», qui font sentir leurs effets dramatiques: contraction de l'activité économique et destruction de l'emploi. Le FMI a reconnu que les effets de contraction réels de ces politiques sur l'activité productive ont été bien plus importants qu'on ne l'avait estimé jusqu'à présent.

1.4

Le CESE souligne que le développement de l'économie verte inclusive permettra d'accroître les possibilités de création d'emplois; l'on entend par «emplois verts» non seulement les emplois liés à certains des nouveaux secteurs émergents mais également tous les emplois découlant du «verdissement» des processus de production et des produits dans tous les secteurs. Une transition bien menée vers une économie verte requiert des politiques actives de l'emploi qui assurent la création de postes de travail décents, formations professionnelle et continue pour les travailleurs en activité comprises. L'emploi des femmes et des jeunes dans ces secteurs sera le moteur de cette croissance.

1.5

Le CESE estime qu'une politique industrielle résultant d'un consensus entre les acteurs sociaux est indispensable pour coordonner les efforts en matière d'innovation technologique et encourager les changements dans les infrastructures de production de nombreux secteurs européens affectés par la mise en place d'une économie à faible intensité de carbone et efficace dans l'utilisation des ressources. Cela exigera également des entreprises un effort d'investissement notable.

1.6

Pour le CESE, l'UE doit intégrer les objectifs de la stratégie du développement durable dans toutes ses politiques, principalement dans la stratégie Europe 2020 et dans les sept initiatives phares y relatives. À cet égard, une cohérence est nécessaire entre les différentes stratégies de l’UE et les commissaires doivent parler d'une seule voix s'agissant de ce thème. La Commission devrait en particulier tirer parti de l'examen à mi-parcours de la stratégie Europe 2020 pour renforcer les aspects touchant à son caractère durable et veiller à sa complète intégration avec la stratégie européenne de développement durable. Il conviendra de définir et d'utiliser des indicateurs qui se réfèrent à la qualité de la croissance et en permettent le suivi et l'évaluation.

1.7

Le CESE souligne le rôle important que peuvent et doivent jouer le semestre européen et l'examen annuel de la croissance afin de garantir le suivi des politiques de développement durable. Le CESE juge nécessaire de supprimer les subventions aux conséquences nuisibles pour l'environnement et de faire des recommandations spécifiques aux États membres visant à augmenter la fiscalité environnementale, ainsi que des recommandations relatives à la gestion des déchets et des eaux et à l'amélioration du recyclage. Dans ces domaines, les États membres devraient faire preuve d'une ambition et d'objectifs plus larges.

1.8

Le CESE est préoccupé par le fait que la réalité du cadre financier pluriannuel de l'Union européenne pour la période 2014-2020 présente une importante contradiction: les secteurs économiques qui émettent le plus de CO2 (logement, énergie, industrie et transports) ne sont pas ceux qui reçoivent le plus de fonds communautaires pour faciliter leur processus de transition vers une économie verte; il en résulte dès lors qu'il est indispensable d’augmenter ces fonds de manière substantielle et d'en garantir une utilisation efficace et efficiente.

1.9

Le CESE considère que les avancées en matière de fiscalité écologique, y compris les incitations fiscales pour les entreprises qui créent des fonds de réinvestissement contre le changement climatique, sont particulièrement bienvenues, pour autant que leur gestion se fasse en collaboration avec les travailleurs.

1.10

En ce qui concerne la politique commerciale de l'UE, le CESE estime qu'afin d'éviter les risques de délocalisation industrielle, l'on devrait envisager d'établir des droits de douane équivalents aux taxes sur le CO2, pour les pays qui n'acceptent pas les engagements internationaux de réduction des émissions.

2.   Introduction

2.1

En 2011, l'Organisation de coopération et de développement économique et les Nations Unies dans le cadre du Programme pour l'environnement ont élaboré deux rapports complets sur l'économie verte; l'Organisation internationale du travail a lancé le Programme «Emplois verts» et l'un des thèmes principaux de la Conférence Rio+20 de 2012 était «L'économie verte dans le contexte du développement durable et de l'éradication de la pauvreté».

2.2

Au niveau européen, la Stratégie de développement durable de l'UE a été rénovée en 2006 et en 2009 et le train de mesures relatives à l'énergie et au changement climatique visant à réduire de 20 % les gaz à effet de serre, à porter à 20 % la part des énergies renouvelables dans le bouquet énergétique et à améliorer à hauteur de 20 % l'efficacité énergétique à l'horizon 2020 a été lancé (1). L'UE doit procéder à des réductions plus importantes encore d'ici 2025 et 2030. En 2011, la Commission européenne a adopté les documents suivants: l'initiative phare «Une Europe efficace dans l'utilisation des ressources» (2), la «Feuille de route vers une économie compétitive à faible intensité de carbone à l’horizon 2050» (3), la «Stratégie de l'UE à l'horizon 2020 sur la biodiversité et la «Feuille de route pour une Europe efficace dans l'utilisation des ressources» (4).

2.3

Le CESE a toujours soutenu le concept de l'«écologisation» de l'économie comme contribution au développement durable et estimé qu'il fallait placer au premier plan de la politique européenne et nationale les propositions de la société civile pour la transition vers une économie verte inclusive, soulignant plus particulièrement la nécessité d'une étroite collaboration entre tous les acteurs sociaux. Aussi, plusieurs de ses avis ont-ils fait référence à ces différents aspects et aux propositions successives de la Commission. Le CESE a souligné que l'amélioration de l'économie «verte» et de la gouvernance doit aller de pair avec la promotion de la production, de l'emploi et de la consommation durables, la stratégie en faveur de l'égalité entre hommes et femmes, ainsi qu'avec le train de mesures de l'UE relatives au changement climatique.

3.   L'économie verte

3.1

L'économie verte inclusive doit trouver un équilibre entre la prospérité économique et une plus grande cohésion sociale d’une part et un plus grand souci de la préservation et de l'utilisation rationnelle des ressources naturelles d’autre part, de nature à préserver notre bien-être et celui des générations futures. Elle a pour objectif de dématérialiser la production, c'est-à-dire, dissocier la croissance économique de l'utilisation des ressources naturelles et de la génération de pollution et de déchets.

3.2

Selon l'Organisation internationale du travail, les emplois verts sont ceux qui permettent de réduire l'impact environnemental des entreprises et des secteurs économiques jusqu'à des niveaux soutenables, qui contribuent à réduire la consommation énergétique, de matières premières et d'eau, à «décarboniser» l'économie et à diminuer les émissions de gaz à effet de serre. Le concept d'«emplois verts» est relativement évolutif, étant donné que la ligne qui les sépare des autres emplois est fonction des processus d'innovation technologique. Dès lors, les emplois verts ne sont pas uniquement ceux qui sont liés à certains des nouveaux secteurs émergents mais tous ceux qui découlent du «verdissement» de processus de production et de produits dans tous les secteurs.

3.3

L'élan donné à l'économie verte provient de deux vecteurs principaux: l'un résultant de l'ensemble des politiques visant à lutter contre le changement climatique et l'autre découlant de la concurrence croissante des pays émergents pour l'obtention de ressources de plus en plus rares et de plus en plus chères.

3.4

L'économie verte ne se réduit pas à un simple ajustement sectoriel entre les secteurs émergents et d'autres plus traditionnels (opéré au moyen du seul vecteur technologique pour une transition vers une économie à faible intensité de carbone); elle inclut un processus de modernisation écologique des modes de production et de consommation afin d'intégrer les objectifs d'accroissement de la valeur ajoutée des entreprises et de leur viabilité environnementale en termes d'économie des matériaux, d'efficacité énergétique et d'organisation du travail, de même qu'en ce qui concerne la relation même des travailleurs avec leur entreprise dans le cadre de l'amélioration de la productivité de l'ensemble des facteurs.

3.5

Ces dernières années, l'on a pu constater les limites de la planète quant à sa capacité à fournir d’une part des ressources naturelles pour répondre à une demande croissante et d’autre part à absorber les déchets et la pollution.

3.6

Il ne faut pas oublier les répercussions du changement climatique sur la santé: plus grande prolifération d'épisodes météorologiques extrêmes, augmentation des niveaux d'ozone et de particules en suspension dans l'atmosphère ainsi que de leur toxicité en raison de températures plus élevées, et extension au continent européen de maladies infectieuses qui avaient été éradiquées.

3.7

Les transformations de la structure énergétique productive et de transport des principales économies développées et d'une grande partie de celles des pays émergents seront axées dans les années à venir sur le passage d'une économie à forte intensité de carbone faisant un usage intensif des combustibles fossiles à une économie nouvelle à faible intensité de carbone dans laquelle les sources d'énergies renouvelables et propres, à savoir celles qui n'émettent pas de gaz à effet de serre ni d'autres résidus dangereux, auront un rôle important dans la production d'énergie.

3.8

Cette transformation profonde des structures productives, que d'aucuns qualifient de «troisième révolution industrielle», ne sera pas neutre en termes de compétitivité internationale, surtout pour les pays qui sont demandeurs nets de sources énergétiques de matières premières, comme c'est le cas de la plupart des États membres de l'UE. Pour cette raison, dès 2009, de nombreux gouvernements de pays de l'OCDE ont mis en œuvre des plans d'encouragement dans le cadre desquels les investissements dans les infrastructures de R+D+i «vertes» jouent un rôle essentiel, dans le but d’une part de promouvoir l'activité productive afin de sortir rapidement de la situation de récession actuelle et d’autre part d’affronter en tant que chef de file la restructuration de l'appareil productif.

3.9

Toutefois, dans de nombreux pays de l'UE, le financement de ces programmes a été fortement réduit en raison notamment des politiques «d'austérité fiscale», à l'instar du budget de l'Union européenne. L'économiste en chef du FMI a reconnu que les effets de contraction de ces politiques sur l'activité productive sont bien plus importants qu'on ne l'avait estimé jusqu'à présent; selon l'étude réalisée dans 28 pays, le multiplicateur fiscal depuis le début de la crise en 2008 se situe entre 0,8 et 1,7 (5).

3.10

Ce ralentissement de l'encouragement à l'économie verte peut entraîner des problèmes considérables pour de nombreux pays de l'UE; en effet, actuellement, l'écart technologique entre les pays développés et les pays émergents est bien moins important et plus dynamique. Il n'est pas garanti que l'Europe dans son ensemble fera partie du peloton de tête des nations développées caractérisées par des économies à faible intensité de carbone, ce qui pourrait à long terme provoquer de fortes tensions dans l'UE, car cela pourrait compromettre sa capacité à poursuivre l'édification d'une société économiquement plus avancée, avec davantage de cohésion sociale et plus durable du point de vue environnemental. Il convient néanmoins de souligner que l'UE est très bien placée sur le plan technologique et productif dans plusieurs des secteurs industriels qui ont de toute évidence vocation à être des secteurs d'avenir.

3.11

Le développement de l'économie verte peut être synonyme de possibilités accrues de création d'emplois en Europe si l'on donne un coup de fouet aux investissements et aux incitations nécessaires. Il ne faut pas oublier les activités productives actuelles qui constituent l'assise économique des pays de l'UE. De nombreux postes de travail qui existent actuellement dans des industries considérées comme très polluantes deviendront des emplois verts dans la mesure où ils auront fait l'objet de processus leur permettant de gagner en efficacité énergétique, en économie de matières premières et en réduction de la pollution qu'ils génèrent. Quelques exemples: dans le secteur du transport routier, les entreprises qui développent et construisent des véhicules électriques et hybrides, ainsi que ceux destinés aux transports en commun. Autres exemples, les secteurs du génie civil travaillant à la construction de lignes de chemin de fer à grande vitesse, lesquelles permettent une économie d'énergie importante par passager comparé à l'avion et au train classique, ou encore ceux du bâtiment spécialisés dans la rénovation à des fins énergétique de logements très peu performants en termes d'efficacité énergétique. Cela doit se faire dans un cadre de développement et de renforcement du dialogue et de la concertation sociale, ainsi que de la négociation collective, de manière à ce que le solde final soit positif au plan de l'emploi (en quantité et en qualité) et de l'équité (pour les conditions de travail et les salaires). Cependant, huit pays de l'UE seulement disposent d'une définition officielle des emplois verts, ce qui donne lieu à des différences d'estimations découlant de la multiplicité des définitions et des méthodologies.

4.   La coopération de la société civile dans le cadre de la transition vers une économie verte caractérisée par l'innovation technologique comme facteur déterminant de la compétitivité des entreprises.

4.1

Une caractéristique totalement nouvelle de cette troisième révolution industrielle est le degré de développement atteint par les forces productives ainsi que la forte sensibilité et la pression de la société civile autour des thèmes de la durabilité et de l'environnement. En Europe, le développement considérable des organisations environnementales, des associations de consommateurs, des syndicats, des organisations patronales et d'autres acteurs de la société civile permet que les changements qui surviennent favorisent une économie qui soit au service d'un développement plus gouvernable et plus durable sur le plan social et environnemental, ce qui était impensable dans les processus antérieurs, où le changement technologique et productif était totalement déterminé par les décisions prises à l'échelle des entreprises.

4.2

L'Organisation internationale du travail souligne expressément, dans le Pacte mondial pour l'emploi adopté en juin 2009, que «le dialogue social est un mécanisme précieux pour la conception de politiques adaptées aux priorités nationales. En outre, il permet d’asseoir sur des bases solides la détermination des employeurs et des travailleurs à mener avec les gouvernements l’action commune requise pour surmonter la crise dans l’optique d’une reprise durable». Une politique industrielle qui serait le fruit d'un consensus entre les acteurs sociaux est indispensable pour coordonner les efforts en matière d'innovation technologique et déclencher les changements nécessaires dans les infrastructures de production de nombreux secteurs européens touchés par la transition vers une économie européenne à faible intensité de carbone et plus efficace dans l'utilisation des ressources.

4.3

L'innovation technologique est consubstantielle de l'économie verte. Les secteurs, entreprises et technologies qui favorisent la «décarbonisation» de l'économie bénéficieront dès lors d'un coup de pouce financier, public et privé plus important dans la mesure où ils accroîtront la compétitivité globale de l'économie européenne. C'est en ce sens que la Deutsche Bank a défini, dans l'objectif d'orienter les investissements privés, les axes d'action suivants comme étant prioritaires en ce qui a trait au changement climatique:

génération d'énergies propres et renouvelables;

infrastructures et systèmes de gestion de la distribution de l'énergie;

dans les systèmes de transport, promotion du transport ferroviaire et maritime ainsi que des véhicules hybrides à moyen terme et des biocarburants qui n'entreraient pas en concurrence avec les aliments s'agissant de l'utilisation des sols;

«chimie verte» et recherche dans le domaine de nouveaux matériaux;

industries de base plus économes en énergie et moins dépendantes de l’extraction de matières premières; utilisation accrue de nouveaux matériaux moins polluants (parmi lesquelles la sidérurgie et les cimenteries à faible empreinte carbonique, etc.);

activités de construction entraînant une amélioration de l'efficacité énergétique des bâtiments et de leur capacité à produire de l'énergie;

gestion des déchets;

agriculture (engrais et pesticides propres, entre autres éléments);

systèmes de purification, de dépollution et de désalinisation de l'eau.

4.4

Il conviendrait d'accorder une attention particulière au traitement des difficultés que rencontrent les PME européennes dans l'obtention de financements suffisants pour procéder aux investissements nécessaires qu'elles doivent réaliser en matière d'éco-innovation.

4.5

Pour que l'innovation soit un atout concurrentiel, le modèle d'organisation entrepreneuriale doit tenir compte de pratiques qui encouragent l'implication de ses travailleurs. Tirer parti du fait que la participation de la force de travail à l'organisation du travail et à la planification de l'entreprise est un facteur qui contribue de toute évidence à l'innovation et permet d'obtenir des gains de productivité. La modernisation du système des relations de travail et de négociation collective et leur articulation avec la gestion de l'entreprise constituent toutefois un défi.

4.6

La participation des travailleurs dans les entreprises est l'un des principaux éléments de nature à favoriser le rôle de chef de file de l'Europe en matière technologique dans de nombreux secteurs et à lui permettre d'assurer la continuité de sa capacité exportatrice. L'on ne saurait se placer du seul point de vue de la répartition de la richesse générée, étant donné que cette participation est en soi un élément déterminant de la production de la richesse, ainsi que le reconnaissent les entreprises elles-mêmes (6). Les difficultés en matière d'innovation sont dans une grande mesure liées à l'existence de structures organisationnelles rigides dans le cadre desquelles le travailleur est perçu comme un simple outil.

5.   L'économie verte dans les politiques européennes

5.1

Lors de la Conférence Rio+20, l'UE a plaidé pour une économie verte inclusive permettant de progresser sur la voie du développement durable. La Commission européenne entend promouvoir la croissance durable et inclusive, l'«écologisation» de l'économie figurant parmi les activités centrales de suivi du processus Rio+20. Les gouvernements, s’ils veulent obtenir l'indispensable participation de la société civile à ce processus, doivent développer le dialogue social.

5.2

Afin de faciliter la mise en œuvre de son initiative phare et de la feuille de route pour une Europe efficace dans l'utilisation des ressources, la Commission a créé en 2012 une plate-forme européenne, qui présentera un rapport intermédiaire en 2013 et un rapport final en 2014, de l'utilisation efficace des ressources. Cette plate-forme travaille à l'élaboration de propositions concrètes en vue du passage à une économie verte dans les domaines suivants: «Conditions cadre pour investir dans les énergies renouvelables» et «Fixer des objectifs et mesurer les progrès». Pour y parvenir, il y a lieu de bâtir un système solide d'indicateurs prenant en considération d’autres éléments que le PIB et indiquant les résultats de ces politiques dans les secteurs concernés et dans la société dans son ensemble (gains de compétitivité, amélioration des conditions de travail, taux de recyclage, efficacité énergétique et efficacité de l'utilisation des ressources, réduction de la pollution) et «Économie circulaire/écologiser l'économie».

5.3

Des avancées sont tout particulièrement souhaitables dans le domaine de la fiscalité écologique et de la réduction des subventions aux combustibles fossiles qui existent dans de nombreux pays de l'UE., étant donné que les prix de nombreux produits et services ne reflètent pas correctement la totalité des coûts de production du fait de l'externalisation du coût de la pollution. Les politiques en matière d'étiquetage écologique volontaire se sont révélées insuffisantes, d'autant plus dans un contexte de crise comme celle que nous traversons actuellement, où l'on constate que le nombre des consommateurs pour lesquels le plus important est le prix du produit et non sa qualité environnementale est en augmentation. Pour qu'une politique fiscale écologique obtienne un degré élevé de consensus social, il convient de prendre en compte ses effets sur la compétitivité des entreprises et ses répercussions sociales sur les citoyens, ce que l'on appelle «l’appauvrissement énergétique», et d'élaborer des politiques complémentaires (politiques industrielle, commerciale et d'aide aux groupes sociaux les plus défavorisés) qui en atténueraient l’impact. De même, il y a lieu d'encourager les entreprises, au moyen d’incitations fiscales, à réinvestir leurs bénéfices dans la réduction des émissions de CO2 (par le biais des fonds de réinvestissement contre le changement climatique) et autres impacts négatifs sur l'environnement, pour autant que leur gestion, dans les entreprises, se fasse en collaboration avec les travailleurs.

5.4

La Commission européenne a approuvé sa proposition de 7ème programme d'action pour l’environnement, qui fixe la contribution de la politique environnementale à la transition vers une économie verte. Le Parlement et le Conseil doivent approuver ce programme et le CESE a élaboré un avis spécifique (7) à son sujet. Cependant, la réalité du cadre financier pluriannuel de l'Union pour la période 2014-2020 présente une importante contradiction: les secteurs économiques qui émettent le plus de CO2 (logement, énergie, industrie et transport) ne sont pas ceux qui reçoivent le plus d’investissements en termes de fonds communautaires.

5.5

S’agissant de la politique commerciale de l'UE, il convient de tenir compte du fait que l'augmentation de la fiscalité sur le carbone devrait obliger, si l’on veut réduire le risque de délocalisation, à fixer des droits de douane équivalents pour les pays qui n'acceptent pas les engagements internationaux de réduction des émissions. Un droit de douane sur le carbone constitue une restriction au libre-échange, mais cela a déjà été accepté par la communauté internationale dans d'autres cas. Le protocole de Montréal, établi pour protéger la couche d'ozone, prévoyait la possibilité de fixer des restrictions commerciales afin d'en renforcer l'application, dans la mesure où le libre échange n'est pas une fin en soi mais le moyen de créer de la richesse d'une manière durable. Il ne fait aucun doute qu’éviter une catastrophe planétaire découlant du changement climatique est plus important que maintenir l’ouverture des marchés mondiaux à des produits responsables d’émissions importantes de gaz à effet de serre.

Bruxelles, le 23 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  Résumé dans COM(2011) 21, Annexe 1 et sur: http://ec.europa.eu/clima/policies/package/index_en.htm

(2)  COM(2011) 21 final.

(3)  http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=COM:2011:0112:REV1:EN:PDF

(4)  http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=COM:2011:0571:FIN:EN:PDF

(5)  Document de travail du FMI/13/1. Growth Forecast Errors and Fiscal Multipliers. Préparé par Olivier Blanchard et Daniel Leigh. Janvier 2013.

(6)  Projet EPOC de la Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail.

(7)  Avis du CESE sur le «7e programme d'action de l'UE en matière d'environnement», JO C 161 du 6.6.2013, p. 77-81.


III Actes préparatoires

COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN

490e session plénière des 22 et 23 mai 2013

19.9.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 271/23


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission — Projet détaillé pour une Union économique et monétaire véritable et approfondie: lancer un débat européen»

COM(2012) 777/2 final

2013/C 271/04

Rapporteur: M. Carmelo CEDRONE

Le 19 février 2013, la Commission a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Communication de la Commission – Projet détaillé pour une Union économique et monétaire véritable et approfondie: lancer un débat européen»

COM(2012) 777/2 final.

La section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 24 avril 2013.

Lors de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 22 mai 2013), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 149 voix pour, 12 voix contre et 25 abstentions.

1.   Conclusions et propositions

1.1

Sur le plan des méthodes comme du contenu, la communication de la Commission apporte une contribution importante pour lancer un débat sur l'UE, qui est des plus nécessaire, et constitue un progrès appréciable dans le domaine de l'Union économique et monétaire (UEM). De plus, elle donne pour la première fois des indications sur l'avenir politique de l'UE et son rôle international. Le CESE porte donc un jugement positif sur cette proposition, qui peut marquer un tournant historique, pour autant que le Conseil, rompant avec vingt années d'attentisme, veuille bien avoir le courage et la volonté nécessaires pour adopter et mettre en œuvre les éléments utiles afin d'atteindre les objectifs indiqués et de la concrétiser à bref délai.

1.2

Avec les décisions qu'il a prises durant les années 2011 et 2012, le Conseil européen a, en effet, lancé une réforme importante et bien structurée de la gouvernance européenne pour ce qui est de surveiller les déséquilibres macroéconomiques excessifs, de renforcer les règles budgétaires et de coordonner les politiques économiques des pays de la zone euro. Les instruments nécessaires en vue de garantir la stabilité de l'UEM sont constitués par les interventions non conventionnelles d'achat «conditionnel mais illimité» récemment décidées par la BCE à propos des obligations nationales d'États en difficulté, par l'instauration du mécanisme de surveillance unique, destiné à assurer une surveillance prudentielle rigoureuse et impartiale et à couper le lien entre les États et les banques, et, enfin, par l'établissement des règles de liquidation bancaire.

1.3

Le CESE adhère à la stratégie visant à renforcer la zone euro qui a été présentée dans la communication de la Commission et réitérée récemment par le président du Conseil européen, M. Herman Van Rompuy («Vers une véritable Union économique et monétaire»), tout en estimant cependant qu'elle ne suffit pas à donner aux États membres, aux citoyens et aux entreprises la garantie de pouvoir tirer pleinement profit de l'UEM, comme l'ont démontré les événements de ces dix dernières années. Le Conseil porte en la matière des responsabilités politiques, qui, résultant du traité de Maastricht, ont sévèrement bridé l'UEM qu'il avait institué. Aujourd'hui, nous en payons les conséquences. C'est la raison pour laquelle la Commission propose aujourd'hui un projet détaillé pour une UEM véritable et approfondie.

1.4

Pour pouvoir donner davantage de stabilité, à l'UEM et assurer la croissance économique et le développement de l'emploi dans les pays de la zone euro, il est nécessaire de procéder, non pas à moyen ou long terme, mais sur-le-champ et simultanément, à des interventions plus percutantes, par exemple sous la forme d'un plan de croissance ou de mécanismes plus vigoureux d'intégration économique, dont le Conseil doit assurer la mise en œuvre. Nous avons donc besoin de politiques macro- et microéconomiques bien dosées, d'une mobilisation soutenue, d'un esprit de solidarité, de confiance et de sollicitude entre les États membres, comme entre ceux-ci et l'UE, sans jamais perdre de vue que le but ultime des dispositions à l'examen est d'être bénéfiques pour la population dans son ensemble.

1.5

Tout en portant une appréciation positive sur la communication, le CESE fait observer que même dans l'hypothèse où elle serait intégralement mise en œuvre, elle ne pourrait que difficilement produire des effets substantiels, en particulier pour ce qui est de la méthode de prise de décision, car on n'y trouve pas de projet concret d'Union politique dans laquelle pourrait venir se loger l'euro. La même observation vaut pour ce qui concerne la dette, l'élimination des chocs asymétriques, la croissance, la compétitivité ou encore l'emploi, pour lequel il conviendrait de prévoir systématiquement des évaluations d'impact. Il s'agit là d'autant de limites en l'état actuel des choses.

1.6

Le CESE rappelle que sur la plus grande partie des propositions actuelles de la Commission européenne, il a déjà élaboré des avis et indiqué des pistes à suivre, s'agissant notamment des limites assignées à l'UEM et à la BCE, de la question de la croissance ou de celle de la dette souveraine. Les pas en avant que la Commission européenne et le Conseil ont effectués dans ce domaine offrent une bonne base pour poursuivre le travail en la matière (1). Aussi le Comité juge-t-il positif que la première se soit décidée à formuler, sur ces matières, des indications pour l'avenir et il souhaite que le Conseil sache saisir l'occasion pour prendre d'urgence des mesures concrètes concernant la dette et la croissance et accomplisse ainsi un saut qualitatif en bonne et due forme.

1.7

En effet, s'il y a lieu de se féliciter que les décisions les plus récentes de l'Union européenne dont la communication fait état confortent le cadre macroéconomique, ne serait-ce qu'en partie, on jugera insuffisantes les propositions faites au plan microéconomique, à propos des secteurs productifs, qui sont les seuls capables de relancer la croissance. Le texte de la Commission cherche à ouvrir un débat sur l'UEM, problématique qui va bien au-delà de l'assainissement budgétaire et des politiques macroéconomiques. Nous aurions également besoin de politiques microéconomiques, par exemple sous la forme d'un pacte véritable, en bonne et due forme, en faveur de l'industrie.

1.8

En outre, un soutien plus franc pourrait être apporté à la proposition de la Commission si les différentes étapes du calendrier défini pour engager les mesures requises afin de stabiliser et d'améliorer le fonctionnement de l'UEM comportaient une référence plus explicite à la nécessité de mener des politiques européennes conformes à cet objectif et définissaient les domaines d'intervention qu'il est envisagé d'ouvrir et les innovations à introduire pour rationaliser les dépenses européennes et améliorer leur efficacité.

1.9

La Commission peut et doit contribuer à la mise en œuvre des réformes indispensables pour améliorer la compétitivité des systèmes productifs et administratifs nationaux, en adoptant des méthodes et des critères d'intervention novateurs concernant le marché unique, la gestion des Fonds structurels et les principales politiques communes. En outre, elle devrait tirer parti des innovations introduites par la BCE et proposer des modifications tout aussi radicales, comme l'a demandé à plusieurs reprises le CESE, pour ce qui est de la mise en œuvre des politiques européennes qui concernent au premier plan les territoires, les régions et les secteurs les plus vulnérables de l'UE.

1.10

En qui concerne la BCE, il y a lieu de déployer totalement son dispositif en faveur de la croissance et de l'emploi et sa fonction de prêteur en dernier ressort. En affichant leur intention d'aller en ce sens, les pays de la zone euro contribueraient à renforcer la confiance dans la BCE et l'euro et à contrer les attaques spéculatives, en particulier vis-à-vis des pays confrontés aux difficultés budgétaires les plus graves.

1.11

Il n'est pas possible de s'en remettre exclusivement à la BCE et à la politique monétaire commune pour assurer la stabilité de l'euro, en laissant pleine liberté aux États membres pour mener leur politique en matière de fiscalité et de budget. Le CESE estime que l'union budgétaire, placée dans la perspective d'un budget unique de la zone euro, ne peut, comme le prévoit la communication, être renvoyée à une échéance plus lointaine mais qu'elle doit s'ajouter à la monnaie unique et la surveillance bancaire unifiée pour devenir le second pilier sur lequel pourra se construire, sur le court et le moyen terme, la stabilité de l'UEM, de manière à convaincre ainsi les marchés de la cohérence du projet européen.

1.12

S'agissant des propositions institutionnelles, la Commission européenne consent un effort de taille. Le CESE juge qu'il est utile d'inscrire, enfin, à l'ordre du jour la question institutionnelle, qui est à la base des recommandations novatrices de la Commission, y compris l'Union politique, qui constitue une proposition totalement neuve. Il considère cependant que la majeure partie des actions proposées restent dans la perspective de l'encadrement actuel et ne marquent qu'un progrès très limité et que par conséquent, elles ne résolvent rien si le Conseil ne va pas plus loin, en considérant qu'elles ne constituent qu'une incitation à l'action.

1.13

Les propositions de la Commission pourraient marquer une nouvelle étape intermédiaire mais, compte tenu des propositions déjà été avancées et approuvées, le CESE, qui devrait être intégré à ce processus, considère que l'heure n'est plus aux avancées partielles dans un nombre restreint de domaines: il faut maintenant accomplir plutôt un saut qualitatif, dans le contenu des politiques comme dans le processus décisionnel visant à les mettre en œuvre, en renonçant aux faux-semblants afin de cesser de répéter sans cesse qu'il faut de «véritables» politiques, une «véritable UEM», une «véritable» Union politique, etc. Ce dont nous avons besoin, c'est d'agir, avec davantage de détermination et de rapidité, dès maintenant, d'une part, pour juguler la récession qui a envahi une grande partie de l'UE et, d'autre part, pour combler les déficiences qui ont été longtemps laissées en suspens et auxquelles la crise financière internationale n'a fait que conférer une ampleur explosive.

1.14

Le CESE demande que le Conseil, s'inspirant des propositions de la Commission, fasse preuve de davantage de courage et de clarté en ce qui concerne le respect des accords conclus et les responsabilités à prendre lorsqu'il s'agit de soumettre des propositions à adopter et mettre en œuvre, en particulier en soutenant une extension du vote à la majorité à tous les domaines, à commencer par la politique économique et celle de l'emploi, dans une perspective de modification du traité.

1.15

Synthèse des propositions du CESE

1.15.1

Le CESE estime dès lors que pour réaliser une véritable UEM, il y a lieu d'entreprendre immédiatement, sans devoir modifier le traité, les actions suivantes:

lancer une initiative européenne pour la croissance, étant donné qu'il ne serait pas possible, par la seule austérité, de remplir aucun des critères fixés par l'Union;

aider à surmonter les inégalités entres les économies nationales, grâce à un mécanisme de convergence solidaire. Cette action pourrait passer par des interventions qui s'effectueraient au bénéfice des États touchés le plus durement par la crise et, ciblant le niveau microéconomique, viseraient à diminuer le chômage des jeunes, par exemple en octroyant une contribution de l'UE pour tout emploi de l'un d'entre eux, et agiraient donc avec une conditionnalité positive;

entreprendre de résoudre le problème de la dette, comme la Commission et le CESE le demandent, de manière à faire face aux problèmes de tous les pays qui ont adopté ou adopteront l'euro;

mettre rapidement à exécution l'union bancaire et la surveillance européenne;

parachever le marché unique dans tous les secteurs (fiscalité, finance, banques, énergie, services, recherche et innovation, etc.);

atténuer la fragmentation du marché du crédit de telle sorte qu'à égalité de conditions, le coût du crédit soit le même dans tous les États membres.

1.15.2

À moyen et/ou long terme, il convient, le cas échéant en modifiant le traité:

de compléter la gouvernance monétaire, financière et fiscale de l'Union européenne par un véritable gouvernement économique, afin notamment d'instaurer plus de cohérence entre les politiques menées au niveau central et celles qui sont décentralisées;

de compléter le mandat de la BCE;

de consolider le processus décisionnel et les structures au sein d'une entité unique, de manière à donner un «gouvernement» à l'euro, compléter et unifier le dispositif actuel et réaliser l'union budgétaire, grâce à la création d'un budget commun de la zone euro qui prévoie également un mécanisme de solidarité pour réduire les déséquilibres économiques entre pays;

de conclure un pacte social pour une union sociale; avec la participation des partenaires sociaux et de la société civile organisée;

d'instaurer une union politique, dans une démarche utilisant la coopération renforcée, le but étant notamment que la zone euro parle d'une seule voix et que soit mis en place un processus décisionnel plus démocratique et transparent. À cette fin, il pourrait être judicieux que le Parlement européen, pour son prochain mandat, et le Conseil soient dotés de pouvoirs constituants;

de donner à l'Union un rôle plus représentatif dans les organismes internationaux.

2.   Observations générales: approche critique

2.1

Le Comité a conscience de débattre d'un des dossiers les plus compliqués du moment. L'Europe entre dans une nouvelle phase de renforcement de son intégration, qui demande de poser une série d'étapes hardies. Le CESE salue avec enthousiasme le lancement d'un débat sur l'avenir de l'UEM, en tant qu'il pose un premier jalon en ce sens, et il fait observer que le paysage macroéconomique au sein de l'UEM est la résultante de décisions microéconomiques. Il conviendrait dès lors d'harmoniser les politiques suivies au niveau de la macroéconomie et de la microéconomie, de manière à ce qu'elles servent les mêmes objectifs généraux.

2.2

L'article 9 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, complété par l'article 151 et l'article 153, dispose en substance que la définition et la mise en œuvre des politiques et des actions de l'Union doivent prendre en compte la promotion d'un niveau d'emploi élevé, l'amélioration des conditions de vie et de travail et la lutte contre l'exclusion. Le Comité constate, avec étonnement, qu'aucun de ces paramètres n'est considéré par la communication à l'examen comme faisant partie de l'objectif d'une «Union économique et monétaire véritable et approfondie». Devant ce constat, le CESE, en plus de demander que ces objectifs soient explicitement énoncés, estime nécessaire que soit mise en place une surveillance accrue (études d'impact) des effets des politiques économiques et monétaires sur les situations sociales et le marché du travail et que soient élaborées des mesures visant à éliminer les conséquences économiques et sociales négatives qui pourraient être induites par ces politiques.

2.3

Aucune des propositions formulées par la Commission en faveur d'une UEM plus stable et crédible ne peut effectivement être réalisée, que ce soit à brève échéance ou sur le moyen ou long terme, si les États membres, et plus particulièrement les pays les plus touchés par la crise économique et financière, ne renouent pas avec la croissance et qu'ils ne résolvent pas leurs problèmes d'emploi et de chômage, en forte hausse, surtout chez les jeunes, et ne réduisent pas la question des disparités qui subsistent entre eux. On ajoutera cependant aussi que rien ne pourra être réalisé si le Conseil et l'Eurogroupe n'exploitent pas les propositions avancées par la Commission européenne afin de faire progresser les réformes nécessaires pour parachever l'UEM, en position d'attente depuis vingt ans, et si les États membres ne s'engagent pas résolument dans cette voie, pour gérer ensemble la partie de leurs attributions souveraines qui doit être mise en commun à cette fin.

2.4

La préoccupation essentielle de la Commission reste de garantir la coordination des politiques économiques des États membres, grâce à un ensemble structuré de mesures et d'instruments visant à renforcer la convergence des politiques budgétaires et des systèmes de surveillance; cette démarche devrait permettre d'atténuer les difficultés que rencontrent les États les plus endettés pour financer leur dette publique et de respecter les programmes très stricts proposés par la Commission et approuvés récemment par les États membres (pacte budgétaire) dans le but de réduire la dette et de la rendre soutenable. Pour regagner la confiance des citoyens et des marchés, les mesures lancées au niveau national devront toutefois s'inscrire dans une logique commune, européenne, et produire des effets concrets et positifs pour la population et les entreprises, d'où la nécessité d'une cohérence accrue, à instaurer au niveau national, entre politiques macroéconomiques et microéconomiques, concernant la jeunesse, le marché de l'emploi, la sécurité sociale, etc.

2.5

Un grand nombre des États membres de la zone euro sont entrés dans leur cinquième année de croissance négative et les prévisions pour les prochaines années ne font état que de changements minimes concernant les principales variables macroéconomiques. Pour être crédibles et faire l'objet d'un vaste débat partagé sur l'avenir de l'UEM, qui ne concerne pas seulement les experts mais l'ensemble de la société civile européenne, les propositions formulées par la Commission pour renforcer l'UEM, devraient prendre en compte les observations ou mesures suivantes:

2.6

Dans le respect des engagements contractés avec l'UE, les États membres de la zone euro sont appelés à maintenir, au cours des années à venir, des politiques budgétaires rigoureuses qu'il serait possible d'assurer au premier chef par des réformes visant à rationaliser la structure des budgets nationaux, sur le versant des dépenses comme sur celui des recettes de l'État, en prenant dûment en compte les impératifs d'une juste répartition et des effets multiplicateurs de la fiscalité. Cette voie permettrait d'engranger des gains d'efficacité dont les effets seraient neutres pour le solde budgétaire et de ne pas comprimer les dépenses dans des domaines cruciaux pour la croissance économique et le bien-être de la société, comme la santé, les régimes de sécurité sociale, l'enseignement, la recherche et l'innovation ou les infrastructures (2).

2.7

Ces mesures de caractère national doivent néanmoins être complétées par l'adjonction de dispositions de niveau européen qui sont nécessaires pour assurer la croissance économique, l'emploi et la reprise des investissements et parmi lesquelles on peut notamment ranger des actions comme améliorer le fonctionnement des marchés nationaux du travail, pour les intégrer au sein de la zone euro, entre autres moyens par le dialogue macroéconomique (3), mutualiser partiellement la dette publique, afin de freiner la spéculation, émettre des obligations de la Banque européenne d'investissement et du Fonds européen d'investissement pour financer la croissance et attirer les excédents d'épargne du niveau mondial (4), autoriser à sortir du périmètre de la dette publique certains investissements structurels nécessaires pour amorcer un cercle vertueux de croissance ou, enfin, augmenter l'attention portée à la politique industrielle, tant chez les gouvernements nationaux que chez les acteurs des décisions politiques à l'échelon européen.

2.8

Si la responsabilité de la mise en œuvre de ces politiques relève des gouvernements des États membres, la Commission doit, dans le cadre de ses prérogatives institutionnelles et des ressources du budget de l'UE qu'elle gère, en assurer la réalisation et contribuer ainsi à contrer les déséquilibres et les disparités géographiques qui subsistent.

2.9

Le CESE considère en outre que l'analyse faite par la Commission des aspects historiques de l'UEM ne fait pas état des véritables carences économiques et politiques qui étaient présentes lors de la création de l'euro et qui sont la cause principale de la crise qui a touché l'euro et l'UE. Il semble pour le moins étrange qu'une analyse de l'UEM ne comporte aucune référence ni évaluation concernant les critères de Maastricht, «l'unicité» de la politique monétaire et les asymétries économiques entre les États. Il semble en outre impossible de soutenir que la «responsabilité» de la crise de 2008 soit exclusivement imputée à la dette et non pas aussi à la faiblesse politique de l'UE et des gouvernements nationaux, si l'on songe notamment au refus que les États membres, dès le lancement de l'UEM, ont systématiquement opposé au lancement d'un débat sur la coordination des politiques fiscales et budgétaires.

2.10

Il serait urgent de créer une Union économique, un gouvernement économique de l'UE (en même temps que l'union bancaire ou avant elle, etc.) et la communication de la Commission jettent les bases de telles initiatives.

3.   Observations spécifiques sur le contenu des propositions: points forts et faiblesses

3.1

Sur le court terme , sept propositions sont avancées, dont certaines ne sont pas neuves puisqu'elles se réfèrent à des mesures récemment approuvées par l'UE: le semestre européen, la législation liée aux trains de six («six-pack») et deux («two-pack») mesures et la surveillance bancaire confiée à la BCE. Il s'agit là de jalons importants, qu'il convient de concrétiser pleinement, conformément à la réglementation européenne en la matière et aux recommandations spécifiques par pays qui ont été adoptées par le Conseil. Le CESE juge plus intéressantes les propositions ci-après.

3.1.1

La première consiste, dans la foulée du mécanisme de surveillance unique (MSU), à instaurer également un mécanisme de résolution unique (MRU) pour résoudre les problèmes des banques en difficulté, l'aspect le plus novateur étant ici que les coûts de résolution sont couverts par les actionnaires et les créanciers et que toutes les «ressources supplémentaires nécessaires pour financer le processus de restructuration» devront provenir du secteur bancaire même et ne plus être à la charge des contribuables (5).

3.1.2

La seconde concerne la création d'«un nouvel instrument de convergence et de compétitivité» pour appuyer les réformes structurelles dans les États membres de la zone euro. La proposition décrit de manière très circonstanciée (annexe 1 de la communication) la procédure à suivre concernant l'adoption et le respect des accords qui généreront cet instrument. Aucune précision n'est donnée sur le degré de participation et l'ampleur du soutien financier dont les États membres pourraient bénéficier, deux éléments essentiels pour garantir la viabilité du dispositif, même si la Commission se réserve le droit de présenter une proposition plus détaillée concernant ses modalités de mise en œuvre (voir la page 25 de la communication). Le CESE estime que l'instrument de convergence et de compétitivité devrait précéder les réformes structurelles, ou à tout le moins les accompagner, pour en atténuer les effets négatifs. En outre, il souligne qu'il ne pourra être efficace que s'il est utilisé, à chaque étape, d'une manière coordonnée avec les actions et mesures prises au niveau national.

3.1.3

En outre, la proposition relative au cadre financier pluriannuel semble toujours être perçue comme une sanction à l'égard de ceux qui ne respectent pas «le pacte entre les États membres et la Commission européenne», plutôt que comme un encouragement à mettre en œuvre les politiques définies au niveau européen. Les conditions macroéconomiques rigoureuses exigées des États membres devraient s'accompagner d'un plan pour la croissance et le développement de nouvelles sources d'emploi, qui s'adresserait plus particulièrement aux jeunes et serait élaboré avec le concours actif des partenaires sociaux et des acteurs de la société civile.

3.1.4

Le rôle plus percutant que l'euro et l'UE devraient jouer dans la gouvernance des organismes monétaires internationaux et le renforcement de la capacité de représentation extérieure de l'euro constitue l'un des aspects les plus importants soulevés par la Commission, mais aussi dans nombre d'avis du CESE, pour donner plus de poids et de force décisionnelle à l'Union et la monnaie unique dans le cadre de la gouvernance monétaire internationale. La Commission n'explicite toutefois pas les difficultés, qu'elles se posent au sein de la zone euro ou en dehors de celle-ci, que cette proposition suscite, compte tenu de l'attitude assurément défavorable de l'administration américaine (mais aussi anglaise) à l'égard de la montée en puissance de l'euro (et de la diminution en corollaire de l'importance du dollar) et des différences qui subsistent toujours entre les États membres de la zone euro concernant la défense d'intérêts économiques et politiques spécifiques dans de nombreux pays en développement bénéficiaires de l'aide du FMI.

3.2

Sur le moyen terme , les propositions concernent essentiellement la création d'un Fonds d'amortissement de la dette (FAD), qui est subordonné à des éléments de conditionnalité contraignants, pour limiter l'aléa moral, et l'instauration d'un nouvel instrument de la dette souveraine pour la zone euro (les obligations de l'Union européenne, ou Eurobills). Elles figurent depuis longtemps à l'ordre du jour des discussions des principales institutions de l'UE et des États membres. Le CESE a lui aussi souligné à plusieurs reprises dans ses avis qu'il était nécessaire, afin de mutualiser partiellement la dette, de recourir aux obligations européennes (Union bonds) en tant qu'instrument auxiliaire, tant pour faciliter, dans la zone euro, le financement de la dette souveraine par les États les plus endettés que pour réduire les coûts qu'ils doivent supporter pour en assurer le service (6).

3.2.1

Le CESE aurait dès lors préféré que la Commission présente une proposition de son cru et/ou fasse référence à celles qu'il a lui-même avancées auparavant, à celles des ministres de l'économie de l'UE ou à d'autres encore, même s'il reconnaît les mérites de celle du Conseil allemand des experts économiques, qui est reprise dans le texte de la Commission.

3.2.2

En insistant ainsi sur le FAD, la proposition omet cependant de voir que dans cette optique, le succès de la politique de réduction de la dette souveraine ne dépend pas seulement des progrès réalisés dans la diminution des dépenses publiques mais aussi et surtout de l'augmentation des recettes. C'est dans cette direction qu'il faut aller, et ce, sur une période bien plus longue que le moyen terme, si l'on veut ramener le rapport entre la dette et le PIB sous le plafond fixé par le traité de Maastricht. La meilleure voie reste peut-être celle des obligations de l'Union, comme le Comité l'a déjà expliqué de manière circonstanciée (7). Mais s'agissant de ce problème, l'enjeu ne réside évidemment pas dans l'outil technique à utiliser mais bien plutôt dans la solution à apporter.

3.2.3

En outre, la proposition s'inscrit globalement dans la logique du pacte de stabilité quant aux exigences imposées aux États membres, sans introduire aucun élément novateur qui marquerait un changement de cap des politiques concernées, lesquelles ne peuvent continuer à aller dans la même direction.

3.3

Sur le long terme , auquel est consacrée la partie la moins développée du document de la Commission, il est prévu que l'UEM évolue vers la réalisation de l'union bancaire, fiscale et économique. Le CESE peut assurément adhérer à ces objectifs, pour autant que soient définies les modalités requises pour les mettre en œuvre. Il considère lui aussi qu'il y a lieu d'arriver à intégrer pleinement les politiques économiques des États membres, surtout dans le domaine fiscal et économique, et à doter l'UE d'un budget unique, assorti de ressources propres et d'un pouvoir fiscal autonome.

3.3.1

S'agissant des aspects institutionnels, la communication se borne à en faire une simple description, en indiquant la base sur laquelle il sera possible de construire une Union économique et monétaire renforcée dans son architecture juridique et dans la gestion des principales politiques économiques, mais reste muette sur la question des conditions qui, au plan microéconomique et macroéconomique, doivent garantir la faisabilité des propositions sur le long terme.

3.3.2

Le CESE juge qu'un objectif aussi ambitieux peut réussir s'il existe une coopération renforcée qui entende aller dans le sens d'une union politique. Un tel processus pourrait se trouver facilité si, dans le contexte macroéconomique international, on avait mené à bien les réformes afférentes qui n'ont été engagées que partiellement, concernant les règles de fonctionnement des marchés financiers et marchés du crédit, les mécanismes de surveillance macro- et microprudentiels et la réduction des déséquilibres macroéconomiques qui, au départ des déficits américain et des excédents chinois, ont alimenté la crise financière. Sans avancées significatives dans cette direction, il sera difficile d'éviter de nouvelles crises économiques et financières.

4.   L'Union politique

4.1   Principes généraux

4.1.1

En tout état de cause, le CESE apprécie que la Commission s'efforce de s'attaquer au «déficit démocratique» actuel de l'UE, tout comme il l'approuve quand elle juge que le transfert de souveraineté constitue le nœud du problème. L'enjeu consiste en effet à lancer le processus visant une union politique, qui rassemble et soumette à une gestion commune certaines politiques «souveraines», restées nationales, en recourant à un processus décisionnel plus transparent et démocratique, afin de doter l'euro d'une seule voix et d'un «gouvernement» européen, autrement dit de la «seconde jambe» qui manque encore à l'UEM.

4.1.2

À cet égard, le Comité:

considère qu'à court terme, il n'est pas nécessaire de modifier le traité, comme il l'a abondamment expliqué dans ses propositions; aussi vaudrait-il mieux concentrer les efforts sur les propositions relatives au long terme,

estime que l'on peut affirmer à juste titre que le problème se pose de manière plus aiguë dans le cas de la zone euro, pour laquelle il est tout à fait inapproprié de continuer à parler de «coordination» des politiques micro- et macroéconomiques plutôt que de politiques économiques communes, comme on le fait pour l'union bancaire et la surveillance commune au niveau européen, pour la politique monétaire, etc.

4.1.3

Dès lors, la question qui se pose n'est pas tant de résoudre les difficultés qui se posent s'agissant de faire participer le Parlement européen à la démarche qu'à créer un processus décisionnel commun entre les États membres de la zone euro et, partant à y associer ce même Parlement. L'élément qui est désormais inacceptable est que des politiques économiques et industrielles propres à chaque État continuent à coexister avec une politique monétaire commune, car cette configuration pénalise les économies des États les plus faibles, en l'absence d'instruments de compensation.

4.2   Optimiser les responsabilités

4.2.1

Le CESE estime qu'il est bienvenu de faire participer le Parlement européen au débat sur les propositions relatives à la croissance, ainsi que d'y associer les Parlements nationaux. Il conviendrait d'en faire de même pour les programmes d'ajustement au lieu de s'en tenir à une simple «information». Nous n'en sommes toutefois encore qu'au stade des constructions formelles, bien éloignés des actes à poser pour conduire le processus décisionnel de l'UE.

4.2.2

En revanche, les propositions relatives aux partis politiques apparaissent être novatrices, lorsque la Commission avance qu'ils devraient devenir européens en acte et non plus seulement en parole et agir comme une structure européenne unique plutôt que comme la conjonction de toutes sortes d'intérêts nationaux spécifiques, dès lors que leur conduite est calquée sur celle qu'adoptent encore les différents États membres ou d'autres associations (syndicats, entrepreneurs, etc.).

4.2.3

Il serait opportun que, à l'échelle au moins de la zone euro, non seulement les partis, comme le propose la Commission, mais aussi les autres grandes organisations de niveau européen (par exemple les syndicats, les associations d'entrepreneurs, etc.) s'organisent et agissent avec une logique commune qui soit européenne et non plus nationale, et ce dès la perspective des élections de 2014. Nous enregistrerions alors une avancée considérable qui, toute insuffisante qu'elle soit, aurait néanmoins le mérite de montrer l'exemple à tous.

4.2.4

À l'occasion des élections, il faudrait donner au Parlement européen un pouvoir constituant qui lui permettrait, avec le Conseil et dans un délai préétabli, d'ouvrir la voie vers une union politique, en prévoyant que le vote à la majorité soit étendu à toutes les thématiques, et que les questions liées à la croissance et à l'emploi soient également soumises au vote du Parlement européen.

4.3   Les questions posées en cas de modification du traité

4.3.1

Le CESE est favorable à la fusion et à l'unification des politiques économiques et des politiques de l'emploi, qui constituent les deux faces d'une même médaille. Il s'agit cependant d'un problème économique, et non juridique. En revanche, nous avons besoin d'un processus décisionnel commun qui porte sur l'ensemble des politiques économiques et réunisse la stratégie Europe 2020, la coordination des budgets nationaux, les politiques macro- et microéconomiques et le marché du travail dans la zone euro, pour ne citer que ces quelques aspects, afin d'aller au-delà du schéma actuel de prise de décisions. On ne peut imaginer qu'il suffise, pour modifier l'UEM, que le Parlement européen crée une commission ad hoc.

4.3.2

En outre, penser qu'il serait possible d'améliorer la situation économique actuelle en octroyant un pouvoir de coordonner l'UEM au vice-président de la Commission chargé des affaires économiques, fût-ce en coopération avec le Parlement européen, ne semble pas témoigner d'une grande clairvoyance. Pour s'en persuader, il n'est que de songer à l'exemple de la politique extérieure. C'est bien pour cette raison que le commissaire ou un éventuel ministre devrait être doté de véritables pouvoirs.

4.3.3

L'on ne saurait résoudre une question aussi importante à coups de montages juridico-parlementaires de caractère formel, si l'on n'a pas décidé au préalable un transfert de souveraineté du niveau national au niveau européen en ce qui concerne les politiques économiques et monétaires et celles de l'emploi, comme le CESE l'a proposé à plusieurs reprises. Il conviendrait de créer un «gouvernement économique» de la zone euro géré par l'Eurogroupe, qui disposerait d'un pouvoir de décision et de vote à la majorité, avec le Parlement européen, en apportant au traité les modifications adéquates, avec tout l'empressement qui a présidé au lancement du pacte budgétaire, à l'examen de l'union bancaire etc. Il deviendrait alors possible de réaliser un marché unique pour les politiques économiques et industrielles, la croissance et l'emploi, avec une vision commune et des décisions solidaires entre les États, dans l'intérêt des citoyens de l'UE.

4.4   La représentation extérieure de l'UE

4.4.1

Le CESE est favorable à l'ensemble des propositions relatives à la représentation extérieure de la zone euro. Il s'agit d'un point essentiel de la communication, compte tenu des répercussions internationales de la crise et des rapports entre les devises. Aujourd'hui, l'euro fait en effet figure de pot de terre parmi les pots de fer. La stratégie définie par la Commission européenne pour renforcer cette présence de la zone euro au sein du FMI consiste, dans un premier temps, à lui confier un statut d'observateur puis, dans une seconde phase, à demander un siège unique. Il s'agit là de processus de longue haleine, qui affaiblissent la zone euro, alors qu'il faudrait qu'elle parle rapidement d'une seule voix au sein des différents organismes, comme le CESE le suggère depuis longtemps. En conséquence, les propositions de la Commission sont peut-être réalistes mais néanmoins timorées et insuffisantes sur le court et le moyen terme. Dans ce domaine également, tout dépendra des actes que posera le Conseil.

4.5   La BCE

4.5.1

L'approche adoptée concernant la BCE apparaît insuffisante. En outre, le CESE ne partage pas les vues de la Commission quand elle affirme que le traité doit «aborder spécifiquement le renforcement de la responsabilité démocratique de la BCE», étant donné qu'elle est un organe au sein duquel les décisions se prennent déjà à la majorité, à la différence du Conseil. De plus, les problèmes et le rôle de la BCE sont de nature différente et l'on ne peut, en l'occurrence, tout miser sur la surveillance, comme semble le faire la communication de la Commission: l'enjeu est d'étendre son mandat pour y inclure la croissance et l'emploi en plus de la stabilité et de l'inflation.

4.5.2

À cette fin, il convient également de s'assurer du bon fonctionnement des mécanismes par lesquels les politiques de la BCE diffusent leurs effets dans l'économie réelle. Les interventions non conventionnelles auxquelles elle procède depuis peu pour que ces courroies de transmission soient plus efficaces, que ce soit en fournissant des liquidités au système bancaire, par le programme d'achat d'obligations sécurisées (CBPP) et celui des opérations de refinancement à plus long terme (LTRO), ou en rachetant des obligations d'État sur le marché secondaire, grâce au programme pour les marchés de titres (SMP) et à celui des opérations monétaires sur titre (OMT), peuvent être vus comme des premiers pas effectués dans la bonne direction mais ne suffisent pas encore à lui conférer un comportement de prêteur en dernier ressort pouvant, au besoin, prendre ses propres décisions de manière autonome, statut qui demanderait, comme on sait, une modification des traités.

4.5.3

Il convient de renforcer l'autonomie décisionnelle et les instruments d'intervention de la BCE qui sont en relation avec son rôle de prêteur en dernier ressort, non pour accroître l'endettement des États membres ou de l'UE mais bien pour donner plus de crédibilité à l'euro et faire pièce aux attaques spéculatives menées contre la dette souveraine des pays les plus endettés. Concernant plus particulièrement les effets produits par les interventions de la BCE sur la soutenabilité de cette dette souveraine, le CESE rappelle que la seule annonce de cette action a contribué concrètement à réduire les tensions qui agitaient tant le marché des titres de la dette publique des pays de la zone euro que ses marchés de la finance et du crédit.

4.6   La Cour de justice

4.6.1

Le CESE juge qu'il est indiqué de renforcer le rôle de la Cour de justice mais pas dans le domaine proposé par la communication, à savoir la procédure d'infraction contre les États membres. Agir de la sorte revient à perpétuer la conviction que les problèmes économiques, y compris la dette, représentent des difficultés techniques ou juridiques et non des problématiques politiques à traiter dans le cadre d'un processus décisionnel démocratique et transparent de l'UE, qui ressortit à la souveraineté des citoyens.

Bruxelles, le 22 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  (JO C 143 du 22 mai 2012, p. 10.)

(2)  JO C 133 du 9 mai 2013, p. 44.

(3)  Ibid.

(4)  Voir note 1.

(5)  JO C 44, du 15 février 2013, p. 68.

(6)  Voir note 1 (JO C 299, du 4 octobre 2012, p. 60).

(7)  Ibid.


19.9.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 271/31


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux informations accompagnant les virements de fonds»

COM(2013) 44 final – 2013/0024 (COD)

et sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme»

COM(2013) 45 final – 2013/0025 (COD)

2013/C 271/05

Rapporteur: M. Christophe ZEEB

Le Conseil, a décidé le 28 et le 27 février 2013, conformément à l'article 114, et le Parlement, le 12 mars 2013, conformément aux articles 114 et 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme»

COM(2013) 45 final – 2013/0025 (COD)

et la

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux informations accompagnant les virements de fonds»

COM(2013) 44 final – 2013/0024 (COD).

La section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 24 avril 2013.

Lors de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 23 mai 2013), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 145 voix pour et 4 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le Comité économique et social européen (ci-après le «CESE») salue les propositions de la Commission visant à adapter le cadre réglementaire européen à la lumière des modifications apportées aux normes internationales de prévention et de lutte contre le blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme. Les criminels qui abusent du système financier et des facilités qu’offre le marché intérieur mettent en effet en danger les fondements mêmes de notre société. Aux yeux du CESE, il est essentiel de doter l’Union européenne et les États membres de moyens efficaces visant à renforcer l’intégrité et la transparence des opérations financières. À cet égard, les propositions de la Commission vont assurément dans la bonne direction.

1.2

Le CESE se félicite des précisions apportées aux obligations de vigilance que les professionnels doivent mettre en œuvre à l’égard des bénéficiaires effectifs des sociétés, d’une part, permettant ainsi de gagner en transparence quant aux personnes physiques qui agissent derrière l’écran que peut constituer une personne morale, ainsi qu’à l’égard des personnes politiquement exposées qui peuvent présenter un risque plus élevé de corruption en raison de leurs fonctions, d’autre part. Le CESE approuve également l’inclusion des prestataires de services de jeux d’argent parmi la liste des professionnels soumis à obligations alors que ce secteur peut être utilisé à des fins de blanchiment de capitaux.

1.3

Le CESE se félicite de l'ambition affichée par la Commission de faire de l'Union européenne le chef de file en matière de lutte mondiale contre le blanchiment d'argent et le terrorisme. Le Comité estime que l'effort collectif de toutes les parties prenantes concernées peut garantir l'effectivité du nouveau cadre réglementaire européen et ainsi permettre à l'UE d'être exemplaire en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux. Il accueille favorablement les clarifications apportées dans la proposition en vue de garantir la proportionnalité s'agissant des PME. Le CESE juge qu'il est justifié de fournir aux petites entités, par le biais d'instances intermédiaires telles que les chambres professionnelles, les associations et les fédérations, une assistance technique et professionnelle renforcée leur permettant de s'acquitter des obligations consignées dans la proposition.

1.4

Le CESE félicite la Commission de s’être prêtée au délicat exercice d’équilibre entre des enjeux qui semblent a priori difficilement conciliables que sont la protection des données personnelles et la lutte contre le blanchiment de capitaux. L’objectif de la collecte et l’analyse d’informations, y compris des données à caractère personnel, par un large spectre de professionnels vise la détection des activités criminelles uniquement. Les professionnels doivent par conséquent veiller à préserver, dans la mesure du possible, la vie privée de leurs clients tout en accordant une importance prioritaire à l'assistance aux autorités nationales dans la lutte contre la criminalité.

1.5

Le CESE accueille favorablement la proposition d’harmonisation européenne des sanctions applicables dans le secteur financier. La prévention de la criminalité doit être la plus efficace possible et des sanctions dissuasives et proportionnelles aux montants faisant l’objet de blanchiment doivent être prononçables à l’égard des professionnels. À cette fin, le CESE invite la Commission et les États membres à garantir l'application cohérente et correcte des sanctions administratives et des peines pénales.

2.   Le contexte

2.1

Le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et de la prolifération des armes de destruction massive constituent des menaces pour la sécurité mondiale et l’intégrité du système financier. Le Groupe d’Action financière (ci-après le «GAFI») est l’organisme chargé au niveau international d’élaborer des mesures, dénommées recommandations, de prévention et de lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et, depuis récemment, contre le financement de la prolifération des armes de destruction massive.

2.2

Durant près de trois ans, les recommandations du GAFI ont été révisées afin de renforcer les mesures de prévention et protéger davantage le système financier, en dotant les gouvernements d’outils plus robustes pour sanctionner les infractions graves. De nouvelles recommandations ont été ainsi adoptées par le GAFI en février 2012 (1).

2.3

Les modifications essentielles introduites par les nouvelles recommandations du GAFI sont les suivantes:

2.3.1

Les recommandations précisent davantage le concept d’approche fondée sur les risques que les pays et les entités soumises à obligations (ci-après «les professionnels») doivent mettre en œuvre afin de mieux appréhender les risques de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme (ci-après «BC/FT») auxquels ils sont confrontés et adapter leurs systèmes de vigilance, permettant ainsi d’affecter de manière appropriée leurs ressources en fonction de la nature des risques identifiés.

2.3.2

Les recommandations apportent les clarifications nécessaires quant à la nature des obligations incombant aux professionnels. Elles précisent la portée des obligations (i) de transparence relative à l’identité des bénéficiaires effectifs de sociétés et des bénéficiaires de virements électroniques ainsi que (ii) de l’identification des personnes politiquement exposées qui peuvent présenter un risque plus élevé de corruption en raison de leurs fonctions.

2.3.3

Les recommandations consacrent des moyens plus efficaces d’investigation des autorités de poursuite pénale et des cellules de renseignements financiers et renforcent les échanges d’informations en matière d’enquête, de contrôle et de poursuite des infractions graves.

2.4

Le GAFI commencera un nouveau cycle d’évaluation mutuelle de ses membres à partir de 2014 et se concentrera plus particulièrement sur l’efficacité de la mise en œuvre de ses nouvelles recommandations.

3.   Proposition de la Commission

3.1

Les propositions (i) de 4e directive de lutte contre le BC/FT et (ii) de 2e règlement sur les informations accompagnant les virements de fonds s’inscrivent dans l’actualisation du cadre réglementaire européen et ont pour objectif de refléter les modifications apportées aux recommandations du GAFI.

3.2

Les principales modifications apportées au cadre réglementaire européen par les propositions sont les suivantes:

3.2.1

Intègrent la liste des professionnels (i) les commerçants à partir du moment où ils concluent une transaction payée en espèces pour un montant supérieur à 7 500 EUR (2), (ii) les prestataires de services de jeux d’argent et de hasard et (iii) les agents de location.

3.2.2

L’infraction fiscale pénale est spécifiquement érigée en tant qu’infraction sous-jacente de l’infraction de blanchiment.

3.2.3

La proposition de directive précise que l’approche basée sur les risques, tant au niveau supranational, national qu’au niveau de chaque professionnel doit être mise en œuvre en fonction de degrés de vigilance étayés par une liste minimale de facteurs à prendre en considération ou par des orientations élaborées par les autorités européennes de surveillance.

3.2.4

Les autorités européennes de surveillance (ABE, AEAPP et AEMF) sont appelées à participer à l’analyse des risques de BC/FT au sein de l’Union européenne et à émettre des normes techniques de réglementation à l’attention des États membres et des établissements financiers.

3.2.5

Les professionnels doivent obtenir des informations sur les bénéficiaires effectifs et considérer les personnes politiquement exposées nationales ou travaillant pour des organisations internationales comme étant une catégorie de clientèle particulièrement risquée.

3.2.6

Une liste de sanctions administratives pour les cas de violation systématique des exigences fondamentales de la directive par les professionnels est établie.

3.3

Les modifications proposées se basent notamment sur l’étude (3) consacrée à l’application de la 3e directive de lutte contre le BC/FT établie par un cabinet d’audit indépendant ainsi que des prises de position reçues par la Commission lors de sa consultation publique.

3.4

Les propositions de directive et de règlement sont destinées à remplacer la directive et le règlement existants, qui seront abrogés.

4.   Observations générales

4.1

Le CESE approuve la nécessité d’adapter le cadre réglementaire européen existant en matière de lutte contre le BC/FT eu égard aux modifications intervenues au niveau international. Le CESE est conscient que le phénomène de BC/FT touche tous les secteurs de l’économie et qu’une attention toute particulière doit être maintenue sur l’effectivité du cadre réglementaire de prévention de l’utilisation du système financier à des fins criminelles.

4.2

Le CESE se félicite de l'ambition affichée par la Commission de faire de l'Union européenne le chef de file dans la lutte contre le blanchiment d'argent et le terrorisme. Il rappelle sa position, déjà exprimée dans un avis antérieur, approuvant «le perfectionnement des règles destinées à prévenir le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, car cela symbolise une Union européenne qui veille au maintien d'un niveau élevé de probité et de bonne conduite dans les affaires publiques et privées. Cette directive, en même temps qu'elle marque une action concrète en matière de gestion financière, constitue aussi un moyen de renforcer l'Union européenne» (4).

4.3

Le CESE estime qu'abaisser le seuil de 15 000 EUR à 7 500 EUR à partir duquel les marchands de biens doivent mettre en œuvre les obligations prévues par la proposition de directive constitue un nouveau pas dans la bonne direction pour promouvoir les paiements autres qu’en espèces. Le CESE a déjà souligné dans un avis antérieur (5) que les paiements en espèces sont considérés comme un facteur qui favorise l'économie souterraine et que les paiements autres qu'en espèces sont plus transparents sur le plan fiscal et économique, moins onéreux pour l’ensemble de la société, pratiques, sûrs et novateurs.

4.4   Soutenir les «petites entités»

4.4.1

Le CESE se félicite de la soumission des agents de location et des prestataires de services de hasard aux obligations de lutte contre le BC/FT, alors que ces entités ne sont pas visées par les recommandations du GAFI.

4.4.2

Le CESE accueille favorablement les clarifications apportées dans la proposition en vue de garantir la proportionnalité s'agissant des PME. Pour que les «petites entités» soient en mesure de remplir les obligations prévues dans la directive proposée, le CESE suggère de faire intervenir formellement des organes intermédiaires, telles des chambres professionnelles, associations ou fédérations représentatives des «petites entités» au niveau national et de les doter de pouvoirs de guidance, de soutien et d’intermédiation. Il est essentiel que les «petites entités» soient soutenues pour éviter qu’elles ne deviennent la cible prioritaire des blanchisseurs.

4.5   Concilier les exigences d’identification à l’ère numérique

4.5.1

L’obligation d’identification des personnes doit se faire en leur présence physique. À défaut, les professionnels doivent appliquer les mesures de vigilance renforcée en raison du risque lié à la transaction conclue à distance. Le CESE s’interroge si ce niveau d’exigences est en adéquation avec la mouvance de notre société vers le «tout numérique».

4.5.2

Le CESE appelle la Commission à réfléchir à des mesures permettant de concilier les obligations d’identification de la clientèle avec l’utilisation de plus en plus récurrente de paiements et communications électroniques.

4.6   L'équilibre entre la protection des données à caractère personnel et la lutte contre le blanchiment

4.6.1

Le CESE souligne l'importance de concilier les intérêts liés à la protection des données à caractère personnel, d’une part, et la sauvegarde de l’intégrité du système financier par le biais de la lutte contre le BC/FT, d’autre part.

4.6.2

Dans la mesure où le concept de lutte contre le BC/FT repose sur la collecte et l’analyse d’informations, y compris des données à caractère personnel, par un large spectre de professionnels, le CESE estime que les propositions satisfont dans une large mesure les exigences formulées tant à l’égard des États membres que des professionnels afin d’aboutir à un meilleur équilibre entre des enjeux a priori difficilement conciliables.

4.6.3

S'agissant de l’obligation prévue à l’article 39 de la proposition de directive consistant à détruire les documents et informations à la fin d'une période de 5 ou 10 ans après la fin de la relation d’affaires, le CESE demande instamment aux États membres de veiller à ce que leur législation prévoie des situations (procédures pénales, faillites, successions) dans lesquelles cette obligation ne devrait pas s'appliquer afin d'éviter d'aller à l'encontre de l'intérêt général.

4.6.4

Le CESE propose que la directive prévoit expressément l'obligation de préserver strictement le caractère confidentiel de l'identité des personnes effectuant des déclarations d’opération suspecte, sauf si ces personnes ont donné leur accord à la divulgation de leur identité, ou s'il est essentiel de la divulguer pour garantir une procédure juridictionnelle équitable dans le cadre d'une action pénale.

4.7   Asseoir la légitimité de l’intervention des autorités européennes de surveillance

4.7.1

Le CESE relève que les autorités européennes de surveillance seront impliquées au niveau européen à l’analyse des risques de BC/FT et pourront émettre des orientations et normes réglementaires à l’attention des États membres et des établissements financiers. Si le CESE souligne l’importance d’une concertation et d’une coopération avec les autorités européennes de surveillance en matière de lutte européenne contre le BC/FT, il note néanmoins que celles-ci ont une compétence de représentation et de réglementation limitée à l’égard du secteur financier. Pourtant un grand nombre de professionnels soumis à obligations ne relèvent pas du secteur financier et ne sont donc pas représentés au niveau européen. Aussi, le CESE propose-t-il que la Commission soit partie prenante au niveau européen dans l’analyse des risques et de l’émission d’orientations au nom des professionnels non-financiers soumis à obligations de lutte contre le BC/FT.

4.7.2

Le CESE est convaincu de la nécessité de disposer de recommandations et normes interprétatives harmonisées au niveau européen en vue d’assurer une application plus uniforme des règles de lutte contre le BC/FT dans les États membres.

4.8   Les sanctions administratives

4.8.1

Les propositions établissent une liste de sanctions administratives dans la continuité de la Communication de la Commission du 8 décembre 2010«Renforcer les régimes de sanctions dans le secteur des services financiers» avisé par le CESE (6) et qui se retrouve dans d’autres propositions récentes de la Commission (7).

4.8.2

Le CESE encourage l’harmonisation européenne des sanctions applicables dans le secteur financier. Force est de constater que la répression de la criminalité n’endigue pas la criminalité. Il est donc essentiel que la prévention de la criminalité soit la plus efficace possible et que des sanctions dissuasives et proportionnelles aux montants faisant l’objet de blanchiment soient prononçables à l’égard des professionnels qui ne respectent pas leurs obligations de lutte contre le BC/FT.

4.8.3

Le CESE s’interroge néanmoins sur le caractère purement «administratif» des sanctions envisagées et craint une possible remise en cause de la sévérité des sanctions administratives proposées eu égard à la hiérarchie des normes juridiques et de la proportionnalité des sanctions en matière pénale. S’il est vrai que les sanctions administratives envisagées ont un caractère dissuasif et poursuivent un objectif d’harmonisation européenne, il n’en reste pas moins que les sanctions pénales prévues pour l’infraction de blanchiment varient d’un pays à l’autre. Le CESE invite la Commission et les États membres à garantir l'application cohérente et correcte des sanctions administratives encourues par les professionnels pour défaut de mise en œuvre de leurs obligations de lutte contre le BC/FT et des peines pénales encourues en cas d’infraction de blanchiment.

4.8.4

Le CESE craint que la conformité du régime de sanctions administratives eu égard aux articles 6 § 1 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme ne puisse être remis en cause avec le risque de voir certaines sanctions administratives requalifiées en «peines» ne pouvant être prononcées que par un tribunal indépendant à l’issue d’un procès équitable, conditions que ne remplissent pas les autorités administratives compétentes. Le CESE invite la Commission à trouver les solutions juridiques adéquates afin de s’assurer que le régime de sanction proposé ne puisse aucunement être remis en cause.

4.8.5

Le CESE estime que l'introduction de règles de principe minimales pour ce qui est de l'application de mesures et de sanctions administratives, mentionnée dans la proposition, permettrait d'améliorer la réponse de l'ensemble de l'UE.

5.   Observations particulières

5.1

Le CESE recommande d’élargir la définition du financement du terrorisme donnée au paragraphe 4 de l’article 1er de la proposition de directive afin de viser «toute autre acte» en-dehors des infractions visées, conformément au libellé de la recommandation 5 du GAFI.

5.2

Le CESE relève que les annexes de la proposition de directive établissent une liste de facteurs et éléments de risque que les professionnels doivent vérifier dans le cadre de leurs obligations de lutte contre le BC/FT. Le CESE estime que les listes fournies dans les annexes ne sont pas exhaustives et que les professionnels devraient également tenir compte, conformément à l'approche basée sur le risque, d'autres facteurs qui sont étroitement liés à la situation de l'État membre et aux circonstances particulières des transactions qu'ils réalisent.

5.3

Le CESE est d'avis que détecter et couper les circuits financiers intervenant dans la piraterie constitue la clé qui permettra de résoudre ce problème. Au sein de l'UE, il y aurait lieu de dresser une liste noire des institutions financières impliquées dans le blanchiment de l'argent des flibustiers. La Banque mondiale, Interpol et Europol peuvent apporter une aide dans l'effort de traque des rançons, dont le cheminement doit être reconstitué et qui doivent être confisquées, afin qu'être pirate cesse d'être une occupation attrayante (8).

Bruxelles, le 23 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  www.fatf-gafi.org

(2)  Actuellement le seuil est de 15 000 EUR.

(3)  http://ec.europa.eu/internal_market/company/docs/financial-crime/20110124_study_amld_en.pdf

(4)  JO C 267, 27.10.2005, pp. 30–35

(5)  JO C 351, 15.11.2012, p. 52

(6)  JO C 248, 25.8.2011, p. 108.

(7)  COM(2011) 651 final, COM(2011) 656 final, COM(2011) 683 final.

(8)  JO C 76, 14.3.2013, p. 15


19.9.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 271/36


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Conseil mettant en œuvre une coopération renforcée dans le domaine de la taxe sur les transactions financières»

COM(2013) 71 final – 2013/0045 CNS

2013/C 271/06

Rapporteur: M. PALMIERI

Le 28 février 2013, le Conseil a décidé, conformément à l'article 113 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de directive du Conseil mettant en œuvre une coopération renforcée dans le domaine de la taxe sur les transactions financières»

COM(2013) 71 final – 2013/0045 (CNS).

La section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 24 avril 2013.

Lors de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 23 mai 2013), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 94 voix pour, 38 voix contre et 9 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le Comité économique et social européen (CESE), conformément aux positions exprimées par le Parlement européen (1) et le Comité des régions (2), et en conformité avec ses précédents avis (3), souscrit à la proposition de la Commission de créer la première taxe régionale au monde sur les transactions financières (TTF).

1.2

Tout en en étant conscient d'avoir préconisé l'application d'une TTF au niveau mondial, le CESE considère que sa mise en œuvre à l'échelon régional (UE-11+), prévoyant la participation de onze États membres (EM) de l'Union européenne (UE) (4), peut constituer une opportunité exceptionnelle en mesure de favoriser plus tard son application à l'échelle mondiale.

1.3

Le CESE rappelle l'importance que revêt la méthode de la coopération renforcée, en tant qu'instrument permettant aux EM, dans certains domaines prévus par les traités (5), de parvenir à un accord le plus large possible et de contrecarrer le blocage induit par la contrainte de l'unanimité, qui a souvent conduit à une impasse politique et économique de l'UE.

1.4

Le CESE est d'avis que l'un des atouts de la TTF proposée réside dans le fait qu'il s'agit d'une taxe reposant sur une large assiette fiscale et ayant deux taux de taxation peu élevés, limitant ainsi les effets néfastes de distorsion. Le CESE estime que l'introduction de la taxe dans l'UE11+ favorisera la mise en place d'un marché financier unique, et dès lors, considère opportune l'application effective de la taxe à compter du 1er janvier 2014 et, a contrario, inadaptées ses modalités progressives d'application.

1.5

Le CESE estime que pour maximiser l'impact de la taxe sur la croissance économique, il convient d'allouer les recettes récoltées grâce à elle au financement d'un programme d'investissement national et européen, en mesure de garantir une reprise de l'économie et de l'emploi sur le court terme.

1.6

Le CESE accueille favorablement le fait que la Commission, pour neutraliser ou tout au moins réduire au minimum le risque de délocalisation des activités financières, ait associé dans la nouvelle proposition de TTF les principes de résidence et de territorialité (proposées dans la version initiale) au principe du lieu d'émission, qui avait été proposé par le Parlement européen et vigoureusement soutenu par le CESE dans son précédent avis (6). Le CESE relève que l’application cumulative de ces principes pourrait impliquer que dans certains cas les établissements financiers des États membres non adhérents soient également soumis à la taxe. Aussi le CESE juge-t-il opportun, conformément à la proposition du Parlement européen, d'approfondir la question et d'entamer des négociations appropriées avec les pays tiers pour faciliter la perception de la TTF.

1.7

Le CESE estime, à l'instar du Parlement européen, que les principes de la résidence et du lieu d'émission devraient être complétés par le «principe du transfert du titre de propriété», qui est à même de faire de l'évasion fiscale liée à la TTF une activité véritablement coûteuse et risquée, garantissant ainsi une meilleure application de cette taxe.

1.8

Le CESE approuve les modifications introduites par la Commission visant à améliorer la gestion de la taxe, à lutter contre son contournement et contre la fraude. Le CESE donne son accord à l'introduction du principe selon lequel l'émission de parts d'organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) et de Fonds d'investissement alternatifs (FIA) n'est pas considérée comme n'étant pas une transaction du marché primaire, dans le but de soutenir le financement des entreprises.

1.9

Tout en déplorant que l'évaluation de l'impact micro et macroéconomique de la mise en œuvre de la TTF soit prévue seulement trois ans après l'entrée en vigueur de la législation à l'examen, le CESE demande que la Commission réalise une activité de contrôle et de suivi permanents (surveillance annuelle). Ainsi, il sera possible d'obtenir une évaluation immédiate de l'impact de la TTF, et de proposer dès lors en temps utile d'éventuelles mesures correctives pour l'application de cette taxe.

1.10

Ayant fait part de ses critiques sur l'insuffisante documentation d'évaluation qui accompagnait la proposition initiale de la TTF, le CESE accueille favorablement le fait que la Commission européenne ait pris les mesures pour remédier partiellement à cette déficience. Le CESE souligne que dans l'évaluation quantitative de l'impact des propositions il importe que la Commission améliore les modèles actuellement disponibles en les adaptant à l'évaluation d'hypothèses de politiques alternatives. Le Comité invite en particulier les services de la Commission à établir des estimations, lorsque cela est possible, corrélées aux caractéristiques réelles des propositions concrètes qui ont été soumises.

1.11

Le CESE déplore que l'inapplicabilité de la TTF à l'ensemble des 27 EM de l'UE entraîne la perte pour le budget de l'UE d'un pilier fondamental du système de ressources propres. Or ce système devait permettre de garantir à nouveau la nécessaire autonomie financière de l'UE, telle qu'elle était prescrite à l'origine par l'article 201 du traité de Rome.

1.12

Le CESE souligne que dans le cadre de la mise en œuvre de la TTF, il importe que les organismes de gestion, par une nécessaire coordination entre les États membres, limitent au maximum les risques de fraude et de contournement de la taxe et réduisent les coûts administratifs relatifs à la gestion.

1.13

Tout en réitérant qu'il est nécessaire de procéder à un suivi précis des effets de la taxe sur les fonds de pension et les futurs retraités bénéficiaires, le CESE ne préconise pas qu'ils soient exclus de l'application de la TTF.

1.14

Dans le cadre de son rôle d'organe consultatif de la Commission, du Parlement et du Conseil, le CESE s'engage à procéder à une surveillance constante du processus au travers duquel la proposition de la Commission sera traduite en termes législatifs.

2.   La proposition de la Commission de directive du Conseil mettant en œuvre une coopération renforcée dans le domaine d'un système commun de taxe sur les transactions financières (TTF)

2.1

La directive du Conseil proposée par la Commission européenne (7) reflète la précédente proposition formulée en septembre 2011 (8). Bien qu'elle n'ait pas bénéficié au sein du Conseil d'un accord unanime, cette proposition a permis néanmoins de rallier 11 EM de l'UE en vue de présenter à la Commission, le 28 septembre 2012, une demande officielle de lancement d'une coopération renforcée pour la mise en œuvre de la TTF.

2.2

Après avoir évalué la faisabilité de cette demande, la Commission, disposant qu'une coopération renforcée dans le domaine de la TTF n'aurait pas d'incidence négative sur le marché intérieur ou sur des obligations, droits ou compétences des EM ne participant pas au dispositif, a émis en décembre 2012 une décision d'autorisation, qui a été ensuite approuvée par le Conseil «Affaires économiques et financières» en janvier 2013.

2.3

La proposition de la Commission reflète pour l'essentiel la proposition initiale; certaines modifications ont été insérées dans le but de: i) améliorer la clarté juridique; ii) renforcer la réglementation contre les abus et l'évasion, conformément à la demande des onze EM.

2.3.1

Les trois objectifs initiaux sont confirmés et renforcés: i) renforcer le marché unique en neutralisant les systèmes nationaux divergents; ii) garantir, au même titre des autres secteurs, une contribution équitable du secteur financier au financement des recettes publiques; iii) promouvoir les investissements du système financier dans l'économie réelle.

2.3.2

Comme dans la proposition initiale, l'assiette fiscale est large et les taux minimaux de taxation sont faibles: 0,1 % applicable aux transactions financières portant sur des actions, obligations, participations à des valeurs de placement collectif, instruments du marché monétaire, accords de mise en pension, accords de prêt de titres; et 0,01 % applicable aux transactions financières relatives aux contrats dérivés.

2.3.3

Afin de ne pas entraver le fonctionnement normal de l'économie réelle, la taxe ne s'appliquera pas aux: i) activités financières quotidiennes des citoyens et des entreprises (prêts, services de paiements, contrats d'assurance, dépôts, etc.); ii) activités bancaires traditionnelles d'investissement dans le cadre de la levée de capitaux ou aux opérations financières réalisées dans le cadre de restructurations; iii) activités de refinancement, de politique monétaire ou à la gestion de la dette publique; iv) aux transactions du marché primaire de parts d'OPC et de FIA. Seront également exclues du champ d'application de la TTF les activités réalisées avec la Banque centrale européenne, les banques centrales, le Fonds européen de stabilité financière et le Mécanisme européen de stabilité ainsi que les opérations avec l'UE.

2.3.4

La proposition à l'examen confirme le principe de résidence ou de territorialité, sur la base duquel si un établissement financier participant à une opération réside dans la zone d'application de la TTF ou agit pour le compte d'un organisme qui réside dans cette zone, la transaction est soumise à la taxe, indépendamment de la zone géographique où elle est intervenue.

2.3.5

Afin de prévenir les tentatives de délocalisation d'activités en dehors de la zone d'application de la TTF, la proposition intègre le principe du lieu d'émission, conformément à la demande du Parlement européen, soutenue par le CESE. Ce principe prévoit qu'une transaction est soumise à la TTF, dès lors que le produit financier objet de la transaction est émis par un des onze EM parties prenantes à la coopération renforcée, même si les acteurs de la transaction résident en dehors de la zone d'application de la TTF, ou indépendamment du lieu où intervient la transaction.

2.3.6

L'action conjointe des deux principes (principe de résidence et du lieu d'émission) neutralise ou permet au moins de réduire de manière significative la tendance à délocaliser en dehors de la zone de la TTF pour éviter l'imposition. En effet, pour se soustraire à l'imposition, l'établissement financier devrait renoncer à ses clients résidents dans la zone de la TTF et à effectuer des opérations avec tous les produits financiers émis dans cette zone. Il convient de rappeler que c'est justement dans cette zone que sont créés les 2/3 du PIB de l'UE et 90 % du PIB de la zone euro. Ce facteur rend inopportune toute stratégie de non interaction avec ce marché, dans lequel l'homogénéité de l'imposition des marchés financiers constituera un élément important de réalisation du marché unique.

2.3.7

Sur la base des calculs effectués par la Commission, les recettes de cette taxe devraient s'élever à un montant compris entre 30 et 35 milliards d'euros par an. Ce montant correspond à environ 60 % des recettes qui avaient été estimées précédemment, dans l'hypothèse d'une application de la taxe à tous les EM de l'UE (rappelons que ce montant s'élevait à 57 milliards d'euros). Les recettes se répartiraient de la manière suivante: 13 milliards d'euros en provenance d'actions et de titres et 21 milliards d'euros issus de produits dérivés.

3.   Observations générales

3.1

Au cours des dernières années, de nombreux EM de l'UE ont adopté une mise en œuvre diversifiée de la TTF, renforçant ainsi les risques d'une disparité fiscale nuisible au fonctionnement du marché intérieur (assiette fiscale restreinte, diverses formes d'exonération, l'introduction d'une TTF régionale contribuera à créer un marché financier véritablement unique sans distorsions de la concurrence, provoquées par des systèmes de taxation inefficaces.

3.1.1

C'est la raison pour laquelle le CESE considère que la TTF doit entrer en vigueur en respectant le calendrier prévu par la Commission: le 1er janvier 2014, sans prévoir de dispositifs de mise en œuvre progressive qui, compte tenu de la réglementation en vigueur à l'échelon national entre les EM de l'UE-11+, pourraient engendrer des retards et des problèmes techniques.

3.2

L'introduction de la TTF par les 27 EM de l'UE, bien qu'étant souhaitable, n'est pas apparue réalisable; dès lors, son application par une coopération renforcée, n'entraînant aucune conséquence négative pour les EM non adhérents, est la voie à suivre en vue de garantir sa mise en œuvre future à l'échelon européen et mondial.

3.3

La non-application de la taxe dans les EM de l'UE peut entraîner dans certains cas l'apparition d'une double taxation dans les pays non adhérents. Cette problématique concerne une faible part des transactions et l'on peut en tout état de cause y remédier par la conclusion de conventions bilatérales de compensation.

4.   Observations particulières

4.1

Le CESE souligne que l'estimation initiale des effets macroéconomiques à long terme (40 ans) de la TTF sur l'économie européenne a été profondément modifiée par les services de la Commission, passant d'une estimation négative de – 1,76 % environ à une prévision favorable s'établissant à 1 % environ.

4.1.1

L'estimation introduite dans la proposition initiale a été modifiée, en y insérant tant les effets induits par les taux réels proposés que les effets «d'atténuation». Cette démarche a permis de passer d'une estimation de – 1,76 % du PIB à – 0,53 % (9).

4.1.2

Par la suite, la Commission a modifié ultérieurement cette estimation, en considérant qu'elle ne prenait pas en considération les caractéristiques spécifiques de la proposition et que, par ailleurs, elle s'appuyait sur des hypothèses de travail irréelles (par exemple: tous les nouveaux investissements des entreprises seraient financés par des instruments assujettis à la TTF). En effectuant cette correction, l'impact réel à long terme sur le PIB s'est contracté encore et a été évalué à – 0,28 %. Dans le cadre de cette analyse, la Commission a procédé à une autre évaluation d'impact, en tenant également compte des effets liés à l'utilisation des recettes de la TTF, soit comme alternative à d'autres formes d'imposition, soit en tant qu'instrument possible d'investissements publics. Par cette évaluation, en envisageant des recettes équivalentes à 0,16 % du PIB, l'impact de la TTF sur le PIB est devenu positif, variant entre 0,2 % et 0,4 % (10).

4.1.3

Il y a néanmoins lieu de considérer cette dernière hypothèse comme pénalisante car dans le cadre des recettes globales, elle ne tient pas compte de la composante issue des produits dérivés; or, cette dernière est intégrée dans la proposition de la Commission et ferait passer le total des recettes de 0,16 % à 0,4 % du PIB, entraînant un effet positif sur le PIB de la TTF de l'ordre de 1 % (11).

4.2

Sur la base des analyses réalisées par la Commission, l'introduction de la TTF peut avoir une efficacité maximale pour l'économie de l'UE, si l'on utilise les recettes de cette taxe, aussi bien à l'échelon européen que national, pour le financement d'un programme d'investissements publics qui soit en mesure d'assurer le développement de la croissance économique et de l'emploi.

4.3

Au cours de ces cinq dernières années qui ont coïncidé avec la crise, le CESE a élaboré une série d'avis dans lesquels il préconisait la nécessité d'un rééquilibrage des politiques européennes macroéconomiques, en soutenant des politiques d'investissement favorables à la croissance et à l'emploi (12). Si l'on suivait la préconisation du CESE les recettes issues de la mise en œuvre de la TTF pourraient assurer une efficacité maximale, justement en les allouant au financement d'un large programme d'investissement à l'échelon national et européen.

4.4

Le CESE est d'avis que l'un des atouts de la TTF réside dans le fait qu'il s'agit d'une taxe reposant sur une large assiette fiscale et ayant deux taux de taxation peu élevés. Cette caractéristique permettrait de réduire au minimum les effets négatifs de taxes, qui, en limitant le territoire assujetti à l'impôt et en rehaussant les taux d'imposition, provoqueraient d'importantes distorsions du marché. Dès lors, le CESE considère, d'une part, qu'il y a lieu de limiter au maximum les exclusions relatives à l'assiette fiscale et aux personnes assujetties et, d'autre part, encourage les 11 États membres adhérents à s'engager dans une démarche qui, au travers de l'application des taux proposés, tende à réaliser un véritable marché unique.

4.5

Le CESE estime opportun d'introduire le «principe du transfert du titre de propriété», en vertu duquel une transaction financière qui échappe à la TTF n'est pas juridiquement exécutoire et n'a pas pour effet de transférer le titre de propriété de l'instrument financier concerné.

4.6

Le CESE adhère à l'hypothèse consistant à exclure de l'assiette fiscale les transactions relatives à des parts d'OPC et de FIA, dans la mesure où il s'agit d'instruments directement liés au financement des entreprises, et dans le but d'obtempérer aux prescriptions de la directive 2008/7/CE. Le Comité souligne que la prévision de réduction des recettes découlant de cette exclusion avoisinerait un montant de 4 milliards d'euros.

4.7

Le CESE, tout en tenant compte de la nécessité de maîtriser les pressions éventuelles sur les taux d'intérêt de la dette publique, marque son accord avec la proposition de maintenir l'exemption portant sur des titres publics émis sur le marché primaire et l'imposition des opérations réalisées avec des titres publics échangés sur le marché secondaire; sur ce point il considère l'exemption comme opportune sur le marché secondaire uniquement pour les établissements mandatés par les pouvoirs publics pour effectuer des opérations liées à la gestion de la dette publique.

4.8

En ce qui concerne les fonds de pension, le CESE avait déjà indiqué la nécessité de soumettre les effets de la TTF sur les fonds de pension à un suivi approprié. L'exclusion des parts d'OPC et de FIA de l'assiette fiscale, de même que la non imposition sur le marché primaire des titres de la dette publique, représentent un élément très certainement positif pour les fonds de pension, compte tenu de la structure de leur portefeuille.

4.9

Tout en réitérant qu'il est nécessaire de procéder à un suivi détaillé des effets de la taxe sur les fonds de pension et les futurs retraités bénéficiaires, le CESE ne demande pas que ces derniers soient exclus de l'application de la TTF.

4.10

La mise en œuvre de la TTF, sans compromettre la liquidité du système, favorise les investissements des fonds de pension suivant des stratégies sur le long terme, réduisant ainsi les facteurs déstabilisateurs comme le courtage à haute fréquence des activités financières (13).

4.11

Dans la mise en œuvre de la nouvelle taxe, il importe de faire particulièrement attention aux modalités de gestion administrative, afin de réduire au minimum tant les risques de fraude et de contournement de la taxe que les coûts administratifs supportés par les États membres et les assujettis au paiement de la taxe. Il est dès lors opportun que les États membres et la Commission, en élaborant les actes d'exécution relatifs aux moyens de paiement et de vérification de la taxe, s'appliquent à réduire au minimum ces coûts administratifs et en vérifient attentivement l'évolution. En raison des effets de la proposition, le CESE invite également la Commission à proposer des modalités de coopération administrative entre les établissements financiers des États membres non adhérents et les États membres bénéficiaires de la taxe.

4.12

Ayant exprimé des critiques sur l'insuffisante documentation d'évaluation qui accompagnait la proposition initiale de la TTF, le CESE accueille favorablement le fait que la Commission ait pris les mesures pour remédier partiellement à cette déficience, par l'introduction des sept notes explicatives de l'analyse d'impact qui accompagnaient la précédente proposition (14), auxquelles il convient d'ajouter l'évaluation d'impact annexée à la proposition actuelle (15). Malgré ces améliorations, le CESE souligne la persistance d'une carence de documentation analytique sur la situation actuelle de la taxation des marchés financiers et les recettes dans les différents États, et en particulier dans ceux appartenant à l'UE-11+. Il conviendrait notamment d'évaluer plus largement les possibles incidences sur les épargnants et sur les futurs retraités, en tenant compte des différentes hypothèses de répercussion de la taxe.

4.13

Le CESE souligne que dans l'évaluation quantitative de l'impact des propositions, il importe que la Commission améliore les modèles actuellement disponibles, en les adaptant à l'évaluation d'hypothèses de politiques alternatives. Le Comité invite en particulier les services de la Commission à établir des estimations, lorsque cela est possible, corrélées aux caractéristiques réelles des propositions concrètes qui ont été soumises.

Bruxelles, le 23 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  2010/2105(INI).

(2)  JO C 113 du 18.4.2012, pp. 7–10.

(3)  JO C 44 du 11.2.2011, pp. 81-89, JO C 248 du 25.8.2011, pp. 64–67, JO C 248 du 25.8.2011, pp. 75–80, JO C 181 du 21.6.2012, pp. 55–63.

(4)  Autriche, Allemagne, Belgique, Espagne, Estonie, France, Grèce, Italie, Portugal, Slovénie et Slovaquie.

(5)  Le recours à la coopération renforcée est réglementé par l'art. 20 du TUE et par les articles 326-334 du TFUE.

(6)  JO C 181 du 21.6.2012, pp. 55–63.

(7)  COM(2013) 71 final.

(8)  COM(2011) 594 final.

(9)  SEC(2011) 1102 final, Volume 1, p. 52.

(10)  CE, 2012, Fiche technique: Incidences macroéconomiques.

(11)  Évaluation effectuée à partir de l'analyse publiée sur: Commission européenne, 2012, Rapport trimestriel sur la zone euro, Vol. 11 no 3 (2012).

(12)  Pour n'en citer que quelques-uns: JO C 133 du 9.5.2013, p. 44, JO C 299 du 4.10.2012, pp. 60–71, JO C 181 du 21.6.2012, pp. 45-51, JO C 248 du 25.8.2011, pp. 8-15, JO C 143 du 22.5.2012, pp. 10-16.

(13)  Réseau pour des marchés financiers durables (Network for Sustainable Financial Markets), 2012, «No Exemption – The Financial Transaction Tax and Pension Funds.(“Aucune exemption -La taxe sur les transactions financières et les fonds de pension”) Décembre. DIW, 2012, Financial Transaction Tax Contributes to More Sustainability in Financial Markets» («La taxe sur les transactions financières contribue à une plus grande durabilité des marchés financiers»). Discussion Papers 1198.

(14)  Publiées le 4 mai 2012 sur le site dédié.

(15)  SWD (2013) 28 final.


ANNEXE

à l'avis du Comité économique et social européen

L'amendement suivant, qui a obtenu au moins un quart des suffrages exprimés, a été rejeté au cours des délibérations (article 54, paragraphe 3, du règlement intérieur):

Nouveau paragraphe 4.7

Insérer un nouveau paragraphe après le paragraphe 4.6

« 4.7

Compte tenu des conclusions contrastées auxquelles ont abouti les analyses des effets de l'introduction de la TTF, le CESE recommande que soient suivis très attentivement les effets d'une telle initiative dans les pays qui l'ont d'ores et déjà mise en place. Il convient de prendre en compte l'influence de la diminution de la liquidité sur la volatilité du marché dans le contexte du coût de certains produits spécifiques tels que la garantie des assurances ou les plans de retraite, et d'évaluer de manière réaliste la justesse du rapport entre les recettes fiscales effectivement collectées et la hausse du coût des services financiers en période de crise, et ce non seulement pour les entreprises, mais aussi pour les épargnants. Le CESE estime que les résultats d'un tel suivi doivent être soigneusement analysés et que les mesures ultérieures doivent, le cas échéant, prendre rapidement en compte les nouvelles données mises ainsi en évidence.»

Vote

Pour

:

64

Contre

:

94

Abstentions

:

25


19.9.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 271/42


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la protection pénale de l’euro et des autres monnaies contre la contrefaçon, et remplaçant la décision cadre 2000/383/JAI du Conseil»

COM(2013) 42 final – 2013/0023 (COD)

2013/C 271/07

Rapporteur général: M. DE LAMAZE

Le 20 février 2013 et le 12 mars 2013, le Conseil et le Parlement européen respectivement ont décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la protection pénale de l’euro et des autres monnaies contre la contrefaçon, et remplaçant la décision cadre 2000/383/JAI du Conseil»

COM(2013) 42 final – 2013/0023 (COD).

Le 19 mars 2013, le Bureau du Comité a chargé la section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale» de préparer les travaux du Comité en la matière.

Compte tenu de l'urgence des travaux, le Comité économique et social européen a décidé, au cours de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 23 mai 2013), de nommer M. DE LAMAZE comme rapporteur général, et a adopté le présent avis par 130 voix pour, 1 voix contre et 3 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le CESE ne partage pas les arguments avancés par la Commission pour justifier la présente proposition. En l'absence de donnée scientifique pour étayer l'affirmation selon laquelle les disparités de sanction en matière de faux monnayage alimenteraient un phénomène de «forum shopping» de la part des contrefacteurs, il ne lui semble pas absolument justifié de réviser la décision-cadre de 2000 afin d'introduire la fixation d'un seuil minimal de peine au sein de l'UE, dont l'«effet dissuasif» attendu lui apparaît discutable.

1.2

Sous couvert de règles minimales, le CESE fait remarquer que la proposition de directive instaure, en réalité, un arsenal répressif très complet au service de la lutte contre la contrefaçon, ce qui semble aller au- delà de ce qu'autorise l'article 83, paragraphe 1, du Traité de Fonctionnement de l'UE (TFUE), d'autant qu'elle touche aussi à la compétence et à la procédure.

1.3

Tout en s'interrogeant sur la nécessité d'une telle approche répressive, susceptible, par définition, de porter atteinte aux droits et libertés fondamentaux, le Comité met en doute son efficacité dans la mesure où, en dépit de la fixation d'un seuil minimal de peine, la lecture de la peine fera toujours l'objet de divergences d'interprétation selon les traditions juridiques des États membres et en vertu du pouvoir discrétionnaire du juge.

1.4

De manière générale, le CESE reproche à la proposition de directive de ne pas assez prendre en compte, comme l'exige pourtant l'article 82, paragraphe 2, du TFUE, les différences de traditions et systèmes juridiques notamment quant à l'impact de ses dispositions sur les droits et libertés individuelles.

1.5

En tant qu'institution représentant la société civile européenne, le CESE attire l'attention sur le fait que les auteurs d'infractions peuvent être des citoyens à l'origine de bonne foi, qui, ayant reçu, à leur insu, de la monnaie contrefaite, se trouvent dans la nécessité de s'en défaire. Pointant le risque qu'il y aurait à faire peser des mesures disproportionnées sur ces personnes qui, de victimes, deviennent, des «délinquants»«malgré elles», le CESE considère que, derrière l'agissement, le contenu de l'intention est un élément primordial à prendre en compte, ce que la proposition de directive ne souligne pas assez dans ses considérants.

1.6

Le CESE s'inquiète qu'en matière de procédure, la proposition de directive ne prévoie pas, comme elle le fait dans la définition des sanctions, de gradation dans les moyens utilisés par les services d'enquête en fonction de la gravité de l'infraction. Aussi estime-t-il nécessaire de préciser, dans la proposition de directive, que le recours aux outils d'investigation applicables en matière de criminalité organisée doit être réservé aux infractions les plus graves.

2.   Contenu de la proposition

2.1

La présente proposition de directive vient renforcer le cadre actuel visant à réprimer pénalement le faux monnayage, qu'il s'agisse de l'euro ou des autres monnaies. Venant compléter, sur le territoire de l'UE, les dispositions de la Convention de Genève de 1929 – dont elle exige que les États membres soient parties contractantes –, la présente proposition remplace la décision-cadre 2000/383/JAI du Conseil, elle- même modifiée par celle de 2001 (2001/888/JAI), à laquelle elle ajoute certaines dispositions importantes.

2.2

Elle entend notamment lutter contre le phénomène de «forum shopping» auquel semblerait obéir, selon l'étude d'impact, la stratégie des réseaux criminels à la recherche de la législation la moins sévère. Pour ce faire, et sur la base de l'article 83, paragraphe 1, du TFUE, elle établit un seuil minimal commun de peine d'au moins six mois d'emprisonnement pour la fabrication et la distribution de fausse monnaie (à partir d'un montant de 10 000 euros). Parallèlement, la peine maximale d'au moins huit ans d'emprisonnement déjà prévue pour la production est étendue à la distribution (à partir d'un montant de 5 000 euros).

2.3

Lorsque des infractions sont commises pour leur compte, les personnes morales seront passibles de sanctions pouvant aller de l'exclusion d'un avantage ou d'une aide publique à la dissolution.

2.4

En matière de droit procédural, la présente proposition durcit également le cadre actuel. Les services d'enquête et de poursuite pourront recourir aux outils d'investigation utilisés dans la lutte contre la criminalité organisée ou d'autres formes graves de criminalité. Les autorités judiciaires seront, en outre, tenues de transmettre en cours de procédure des échantillons de fausse monnaie saisie en vue de leur analyse technique aux fins de détection des contrefaçons en circulation.

2.5

La proposition prévoit, enfin, que chaque État membre dont la monnaie est l'euro devra exercer compétence universelle pour les infractions se rapportant à l'euro commises en dehors du territoire de l'UE, lorsque l'auteur de l'infraction est sur son territoire ou que de faux euros liés à l'infraction sont détectés dans cet État membre.

3.   Observations générales

3.1

Tout en reconnaissant que la contrefaçon de l'euro, dont les moyens sont toujours plus complexes et perfectionnés, est un phénomène préoccupant contre lequel il importe de lutter efficacement, le CESE émet de sérieuses réserves aussi bien sur le contenu que sur le fondement même de la présente initiative.

3.2

Pointant le déficit de données scientifiques dont témoigne l'étude d'impact, le CESE a du mal à être convaincu par l'argument «du forum shopping», sur lequel se base la Commission pour élaborer sa proposition de directive. Il n'est pas sûr, selon lui, que les disparités de niveau de répression au sein de l'UE expliquent de quelque manière que ce soit la hausse des contrefaçons ni que la législation nationale en matière de répression pénale détermine prioritairement le choix du lieu d'agissement pour les contrefacteurs. D'autres facteurs, d'ordre matériel ou logistique, sont à prendre en compte pour expliquer la localisation des imprimeries de fausse monnaie.

3.3

De même, en l'absence d'analyse précise étayant l'affirmation selon laquelle les disparités de niveau de répression au sein de l'UE nuiraient à la coopération répressive et judiciaire et à l'efficacité de la lutte contre la contrefaçon dans les pays tiers, le CESE s'interroge sur les motifs mêmes de la présente proposition de directive.

3.4

Le CESE tient, en outre, à souligner que les dispositions prises sur le fondement de ces arguments créent un dispositif répressif particulièrement lourd. En plus de déterminer l'ensemble des infractions de contrefaçon et de fixer les peines dans leur minimum mais aussi dans leur maximum pour ce qui est de l'infraction de distribution, la proposition de directive touche encore aux aspects de compétence et de procédure.

3.5

Le CESE s'interroge tout particulièrement sur la présence de ces dernières dispositions relatives à la compétence et à la procédure qui vont au-delà de ce qui est annoncé dans l'exposé des motifs et de ce que l'article 83, paragraphe 1, du TFUE, autorise, c'est-à-dire l'établissement de «règles minimales relatives à la définition des infractions pénales et des sanctions». D'autant qu'il note que ces dispositions, prévoyant l'application de mesures exceptionnelles, sont d'une très grande portée répressive puisqu'elles conduisent à la création d'un cas de compétence universelle, par définition dérogatoire des solutions générales, pour les infractions de contrefaçon liées à l'euro, et à l'application des outils d'investigation applicables à la criminalité organisée.

3.6

Ce dernier point pose le plus de difficulté aux yeux du CESE. En effet aucune distinction n'est faite selon le degré de gravité des infractions définies dans la proposition de directive pour justifier le recours aux outils d'investigation applicables dans le cadre de la criminalité organisée. Une telle disposition lui semble comporter le risque d'une entorse grave au principe de proportionnalité et d'une atteinte aux droits fondamentaux (1).

3.7

Dans le souci d'éviter certaines dérives, le CESE tient, en effet, à rappeler au législateur européen la nécessité de prendre en compte l'ensemble des États membres dans leur plus ou moins récente tradition démocratique et sensibilité au respect des libertés individuelles.

3.8

De façon plus générale, le CESE rappelle que la construction d'un espace pénal européen appelle à un renforcement concomitant des droits de la défense, notamment dans le cadre d'Eurojust et d'Europol, afin de satisfaire à l'exigence de respect des droits fondamentaux inscrite dans les traités (article 67, paragraphe 1, et article 83, paragraphe 3, du TFUE).

3.9

En tant qu'institution représentant la société civile européenne, le CESE attire l'attention sur le fait que les auteurs d'infractions peuvent être des citoyens à l'origine de bonne foi, qui, ayant reçu, à leur insu, de la monnaie contrefaite, se trouvent dans la nécessité de s'en défaire. Pointant le risque qu'il y aurait à faire peser des mesures disproportionnées sur ces personnes qui, de victimes, deviennent, des «délinquants»«malgré elles», le CESE considère que, derrière l'agissement, le contenu de l'intention est un élément primordial à prendre en compte, ce que la proposition de directive ne souligne pas assez dans ses considérants.

3.10

Le CESE reconnaît que la gradation des sanctions prévue par la présente proposition en fonction du montant saisi (article 5, paragraphe 2, en particulier) permet en partie de prendre en compte ces cas de figure. Mais il demeure, selon lui, que la proposition de directive ne préserve pas du risque de faire porter de graves atteintes aux libertés individuelles. Elle ne semble pas en effet tenir compte de la diversité des traditions et systèmes juridiques au sein de l'UE et, en particulier, de la particularité des régimes inquisitoires, dans lesquels la personne mise en cause, y compris dans les cas de délinquance mineure, peut être retenue par les services de police un temps non négligeable avant de passer devant le juge.

4.   Observations particulières

4.1

Concernant la disposition fixant un seuil minimal de peine de six mois d'emprisonnement (article 5, paragraphe 4 de la proposition), et alors qu'elle constitue la mesure phare de la proposition censée répondre à l'argument du «forum shopping», le CESE s'interroge sur son utilité dans la mesure où une directive – qui s'adresse, par définition, au législateur et non au juge – ne peut imposer que cette peine soit effectivement prononcée. À cet égard, le CESE note avec satisfaction que l'exposé des motifs rappelle les principes de nécessaire individualisation de la peine – principe consacré par la Cour de Justice de l'Union européenne – et de pleine liberté d'appréciation du juge.

4.2

Le CESE tient, en outre, à ajouter que la prévision d'un minimum de sanction, même non obligatoire, est contraire à la tradition juridique de certains États membres qui ne prévoient pas de minimum de peine, sauf lorsque leur prononcé est obligatoire.

4.3

Article 9 de la proposition, modifier la rédaction comme suit: «Pour les infractions de contrefaçon les plus graves visées aux articles 3 et 4, les États membres prennent les mesures nécessaires pour que des outils d'investigation efficaces, tels que ceux qui sont utilisés dans les affaires de criminalité organisée ou d'autres formes graves de criminalité, soient mis à la disposition des personnes, des unités ou des services chargés des enquêtes ou des poursuites».

Bruxelles, le 23 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  Comme cela a pu être le cas pour le mandat d’arrêt européen (v., à ce sujet, D. Rebut, Droit pénal international, Dalloz, coll. «Précis», 2012, no 516, p. 311).


19.9.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 271/45


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil — Vers une union économique et monétaire véritable et approfondie. Création d'un instrument de convergence et de compétitivité»

COM(2013) 165 final

et sur la «Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil — Vers une union économique et monétaire véritable et approfondie. Coordination préalable des projets de grandes réformes des politiques économiques»

COM(2013) 166 final

2013/C 271/08

Rapporteur général: M. CROUGHAN

Le 14 mai 2013, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur le thème

«Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil Vers une union économique et monétaire véritable et approfondie – Création d'un instrument de convergence et de compétitivité»

COM(2013) 165 final

«Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil Vers une union économique et monétaire véritable et approfondie – Coordination préalable des projets de grandes réformes des politiques économiques»

COM(2013) 166 final

Le 16 avril 2013, le Bureau du Comité a chargé la section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale» de préparer les travaux du Comité en la matière.

Compte tenu de l'urgence des travaux à mener, le Comité économique et social européen a désigné M. CROUGHAN comme rapporteur général lors de sa 490e session plénière, des 22 et 23 mai 2013 (séance du 22 mai 2013), et a adopté le présent avis par 152 voix pour, 8 voix contre et 12 abstentions

1.   Conclusions et recommandation

1.1

Le Comité accueille avec réserve les deux communications de la Commission «Vers une Union économique et monétaire véritable et approfondie», en l'occurrence «Création d'un instrument de convergence et de compétitivité» (1) et «Coordination préalable des projets de grandes réformes des politiques économiques» (2). Celles-ci prolongent le débat sur deux questions soulevées dans le «Projet détaillé pour une union économique et monétaire véritable et approfondie» (3), dans la perspective de l'achèvement du cadre de gouvernance pour la coordination de la politique économique.

1.2

Le Comité est déçu que les communications donnent peu de précisions complémentaires sur les notions déjà décrites dans le «projet détaillé», ce qui en rend difficile l'évaluation.

1.3

Le Comité est préoccupé par le fait que l'on complique encore davantage un calendrier déjà surchargé d'instruments de gouvernance économique, qui comprend: le pacte de stabilité et de croissance, le pacte budgétaire, le paquet de six mesures (six-pack), le paquet relatif à la surveillance budgétaire (two-pack), la stratégie Europe 2020, le semestre européen, l'examen annuel de la croissance, les rapports sur le mécanisme d'alerte, les programmes nationaux de réforme, les programmes de stabilité et de convergence, les recommandations par pays, les procédures concernant les déficits excessifs, la procédure concernant les déséquilibres macroéconomiques, etc., et cela, en apportant relativement peu de valeur ajoutée.

1.4

Tout en reconnaissant que ces deux propositions pourraient aider les États membres en difficulté, le Comité s'inquiète du fait que les effets sur la restauration de la croissance et des capacités pour les zones qui en ont le plus besoin pourraient être contrecarrés ou retardés parce que la préoccupation essentielle est que les mesures prises soient également bénéfiques pour la zone euro dans son ensemble.

1.5

Le Comité doute que les États membres vont accepter de créer un nouvel instrument pour financer l'instrument de convergence et de compétitivité. Sa valeur ajoutée par rapport aux Fonds structurels existants n'apparaît pas clairement.

1.6

Le Comité se demande ce que la coordination préalable va ajouter concrètement au semestre européen et quelle est la charge bureaucratique supplémentaire qu'elle implique.

1.7

Le Comité s'inquiète du fait que les filtres utilisés pour la coordination préalable pourraient interférer avec les mesures de réforme adoptées par un État membre, dans la mesure où celles-ci modifient la compétitivité relative dans un autre État membre.

1.8

Le Comité estime que les retombées par l'intermédiaire des marchés financiers n'ont pas leur place dans la coordination préalable; tous les efforts doivent être orientés au contraire vers l'établissement d'une union bancaire.

1.9

Le Comité estime que les propositions visant à approfondir l'union économique et monétaire sont d'une importance cruciale pour l'avenir de l'UE; le Comité souhaite dès lors poursuivre le débat et formuler des propositions à une date ultérieure en fonction de l'évolution de la situation.

2.   Création d'un instrument de convergence et de compétitivité

2.1

Contexte : dans cette communication, la Commission propose que des arrangements contractuels et un mécanisme de solidarité convenus mutuellement soient mis en place pour les États membres de la zone euro en difficulté qui ont besoin de réformes structurelles nationales en matière de compétitivité et de croissance dont l'absence de mise en œuvre aurait des retombées sur les autres États membres de la zone euro. Il s'agirait d'un système ciblé de soutien financier, qui serait initialement financé par le cadre financier pluriannuel et à terme par un nouveau fonds/instrument financier fondé sur le revenu national brut (RNB), qui en renforcerait les capacités financières.

2.2

Le Comité considère qu’il est difficile de formuler un jugement sur les avantages de l'instrument de convergence et de compétitivité proposé sans indication chiffrée concernant la taille envisagée et sans évaluation de l’acceptabilité d’un tel fonds par les États membres. La proposition que les crédits proviennent en premier lieu du cadre financier pluriannuel laisse à penser que le fonds sera de taille réduite et aura peu d’impact.

2.3

Au regard des grandes difficultés qui ont marqué la négociation du cadre financier 2014-2020, le Comité doute que les États membres acceptent la création d'un nouvel instrument financier pour aller dans le sens d’une capacité budgétaire accrue, fondée sur le RNB, pour financer l'instrument de convergence et de compétitivité.

2.4

Le Comité convient de l’intérêt d’un mécanisme de convergence bénéfique et stimulant, mais s’interroge sur la nécessité d’introduire un nouvel instrument, en l’occurrence l'instrument de convergence et de compétitivité, alors que l’on ne voit pas clairement en quoi il apporte une valeur ajoutée par rapport aux soutiens fournis par les Fonds structurels existants, comme le Fonds de cohésion et le Fonds social européen.

2.5

Le caractère contractuel de l’instrument proposé semble présenter peu de différence par rapport à celui qui caractérise déjà le décaissement des Fonds structurels. Il conviendrait de donner quelques exemples concrets du type de projets ayant des retombées qui seraient éligibles et en quoi ils pourraient différer de projets déjà financés au titre d’autres fonds. Le CESE est préoccupé par le fait que l’incapacité d’obtenir des résultats dans le cadre des projets relevant de l’instrument pourrait avoir d’autres conséquences sur le financement de projets approuvés dans le cadre du programme national de réforme. Il est important que l’instrument proposé apporte une valeur ajoutée démontrable et ne débouche pas sur l’ajout d’une couche de bureaucratie supplémentaire.

2.6

L'instrument de convergence et de compétitivité est envisagé comme un instrument pour la zone euro, dont le fonctionnement nécessite impérativement une plus grande convergence économique. Eu égard à la taille probablement réduite du fonds, le Comité propose qu’il soit destiné spécialement aux États membres de la zone euro en difficulté, en n'excluant pas la possibilité de soutenir des projets dont les effets transfrontaliers sont particulièrement positifs. Il conviendrait en particulier qu’il soit ciblé sur les pays dont les déséquilibres sont considérés comme un danger particulier pour le fonctionnement de la zone euro. L’on ne voit pas très bien pourquoi les États membres qui font l’objet d’un programme d’ajustement seraient exclus de ce type de soutien alors qu’ils sont manifestement ceux qui ont le plus besoin d’une assistance financière.

2.7

Si le semestre européen fonctionne comme prévu, que les recommandations par pays font l’objet de débats parlementaires à l’échelon national, il y a lieu de prendre les mesures nécessaires pour que les gouvernements nationaux qui signent un accord contractuel dans le cadre du présent instrument tiennent d'abord un débat avec leurs parlements respectifs, conformément aux pratiques en vigueur, de la même manière que tout programme au titre des Fonds structurels peut faire l'objet d'un débat. La Commission pourrait être invitée à débattre ou à s’exprimer devant les instances nationales/locales. Il convient d'associer aux discussions la société civile, notamment les partenaires sociaux, comme c’est le cas pour d’autres projets gouvernementaux au niveau national/de l’UE. Il faut prévoir un délai suffisant pour que les parlements et la société civile, notamment les partenaires sociaux, puissent participer.

3.   Coordination préalable des projets de grandes réformes des politiques économiques

3.1

Contexte : dans cette communication, la Commission nous informe que le concept de coordination préalable des projets de grandes réformes des politiques économiques a été introduit par le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance dans l'Union économique et monétaire. Le cadre actuel de surveillance économique dans l'UE comporte un processus de coordination des politiques économiques. Celui-ci ne prévoit pas de discussion et de coordination préalables structurées des projets de grandes réformes économiques. La communication est une contribution au débat sur les modalités de mise en œuvre de la coordination préalable entre les acteurs concernés, en particulier le Parlement européen, les États membres et les parlements nationaux.

3.2

Le Comité est d’avis que toute amélioration significative de la coordination de la politique économique est souhaitable et que, dans la zone euro, elle est indispensable. Le Comité accueille favorablement la communication, tout en admettant que la coordination des politiques des différents États membres est encore fort éloignée d’une véritable gouvernance économique. Le fait que la communication ne précise pas suffisamment ce qui constitue une «grande réforme de la politique économique» rend difficile une évaluation des propositions. Qu’est-ce qui est considéré comme une grande réforme ou une réforme mineure? Les principales réformes énumérées en vue d’une prise en considération couvrent pratiquement tous les aspects du marché unique, y compris la pérennité financière et budgétaire.

3.3

Le Comité se demande en quoi la nouvelle initiative en vue de coordonner les grandes réformes économiques va différer fondamentalement du volet semestre européen des programmes nationaux de réforme et des recommandations par pays. Il est indispensable qu’elle possède une valeur ajoutée démontrable dans l’échéancier déjà surchargé du semestre européen. Pour les besoins de la transparence et de la simplicité, il importe également qu’elle n’ajoute pas une couche supplémentaire de surveillance, etc. Le Comité estime que ce processus doit être intégré dans le semestre européen et les programmes nationaux de réforme, lesquels doivent disposer de pouvoirs accrus. La coordination préalable pourrait être un moyen concret pour y parvenir.

3.4

Le Comité convient qu’il pourrait être utile, comme le prévoit la nouvelle proposition, qu’après accord avec un État membre sur ses recommandations par pays, la Commission et le Conseil puissent suggérer d'apporter des modifications à ses plans de réforme si cela se justifiait compte tenu des effets négatifs attendus pour l'Union économique et monétaire et pour les autres États membres. Toutefois, pour des raisons de légitimité démocratique, la procédure respecte pleinement les prérogatives décisionnelles nationales, et la décision en ce qui concerne le projet de réforme reste entre les mains de l'État membre. Il y a lieu de prévoir la possibilité d'associer aux consultations les parlements nationaux et la société civile, notamment les partenaires sociaux, ainsi que le temps nécessaire pour ce faire. De même, il faut veiller à ce que les parlements nationaux adoptent la décision finale relative à la mise en œuvre des réformes. Le Comité s'inquiète toutefois du fait que cette référence à la légitimité démocratique relève plus des apparences que de la réalité, car par ailleurs dans le cadre de la procédure concernant les déséquilibres excessifs, des sanctions peuvent être appliquées lorsque le Conseil conclut que l'État membre concerné n'a pas pris les mesures correctives recommandées.

3.5

L'objectif de la coordination préalable est de maximiser les retombées positives des grands projets de réforme économique d'un État membre et d'en réduire autant que possible les effets négatifs. La communication propose un système de trois filtres fondés sur les trois canaux par lesquels les retombées se diffusent. Ceux-ci suscitent quelques préoccupations de la part du Comité.

3.6

Le premier filtre est fondé sur les échanges et la compétitivité. Si un État membre adopte avec succès des mesures de réforme pour accroître sa compétitivité, il n'est pas exclu que cette amélioration se fasse au détriment d'autres États membres. La communication doit préciser de manière détaillée les conditions dans lesquelles la Commission interviendrait pour dissuader un État membre de poursuivre la mise en œuvre de telles mesures. De même, s'agit-il uniquement d'une approche unilatérale? La Commission va-t-elle formuler des recommandations à un État membre qui, dans le passé, a pris des mesures pour améliorer sa compétitivité qui ont maintenant pour résultat de forts excédents qui portent atteinte à la zone euro?

3.7

Le Comité doute que le second filtre concernant les retombées par l'intermédiaire des marchés financier ait une quelconque place ici. Le Comité pense qu'il serait bien plus efficace si toutes les ressources disponibles étaient mobilisées pour mettre en place selon le calendrier arrêté une union bancaire qui fonctionne.

3.8

Le troisième filtre, concernant les considérations d'économie politique et une «opposition interne à la réforme» nécessite une explication. L'«apprentissage mutuel» et l'«échange des bonnes pratiques» attendus – bien que valables en soi – risquent d'être aussi inefficaces que la stratégie de Lisbonne.

3.9

Aux yeux du Comité, il faut de meilleurs arguments pour justifier le fait que les réformes concernées par la coordination préalable doivent s'étendre à des domaines dans lesquels l'UE n'a aucune compétence. L'argument utilisé pour le justifier, selon lequel la décision reste entièrement du ressort de l'État membre, apparaît un peu léger au regard de la procédure concernant les déséquilibres macroéconomiques mentionnée précédemment.

3.10

Il conviendrait de prévoir dans ce cadre de la coordination préalable une dimension sociale axée en particulier sur l'incidence des grandes réformes économiques sur le niveau du chômage.

Bruxelles, le 22 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  COM(2013) 165 final.

(2)  COM(2013) 166 final.

(3)  COM(2012) 777 final.


19.9.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 271/48


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social et au Comité des régions — Vers un cadre européen global pour les jeux de hasard en ligne»

COM(2012) 596 final

2013/C 271/09

Rapporteure: Daniela RONDINELLI

Le 19 décembre 2012, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social et au Comité des régions – Vers un cadre européen global pour les jeux de hasard en ligne»

COM(2012) 596 final.

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 29 avril 2013.

Lors de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 22 mai 2013), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 122 voix pour et 4 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le CESE rappelle et confirme le point de vue qu'il avait exprimé dans son avis (1) relatif au livre vert sur les jeux d'argent et de hasard en ligne dans le marché intérieur (2), et regrette que la Commission n'ait adopté qu'une partie de ses conclusions. Il souligne en particulier que la lutte contre les jeux illégaux, qui représentent la principale menace en termes de protection des consommateurs, ne constitue pas la priorité de la communication à l'examen.

1.2

Le CESE invite la Commission à faire figurer au rang des priorités que la communication entend traiter la création de nouveaux emplois et la protection des emplois actuels dans le secteur, leur qualité et les éventuelles pertes d'emplois dans le secteur des jeux de hasard en présentiel au profit de celui des jeux en ligne.

1.3

Les jeux de hasard contribuent à accroître les recettes fiscales des États membres. Le financement de causes louables par le truchement des loteries nationales et des maisons de jeu permet de soutenir des activités de bienfaisance, sociales, sportives, de promotion du tourisme et liées à la sauvegarde du patrimoine culturel, artistique et archéologique. Le CESE considère que toute action entreprise au niveau européen dans le secteur du jeu doit tendre vers un modèle social européen qui permette aux citoyens de se divertir d'une manière saine et équilibrée.

1.4

Le CESE est profondément préoccupé par les risques élevés que les jeux de hasard comportent pour la santé publique. À cet égard, il réitère la demande qu'il avait adressée à la Commission et l'invite à procéder, sur l'ensemble du territoire de l'UE, à une recherche et à un suivi des dépendances et troubles associés aux jeux de hasard en ligne; il recommande par ailleurs aux États membres de consacrer une partie des recettes fiscales engrangées au financement de campagnes de sensibilisation, de mesures préventives et du traitement thérapeutique des ludopathies.

1.5

Le CESE accueille favorablement la décision de la Commission d'améliorer la coopération administrative et de procéder à un échange d'informations, d'expériences et de bonnes pratiques entre États membres et autorités de réglementation.

1.6

Le CESE approuve l'objectif de la Commission selon lequel chaque État membre doit disposer de sa propre autorité de réglementation, dotée de compétences précises et coopérant étroitement avec ses homologues des autres États membres.

1.7

Le CESE estime qu'il est indispensable de trouver un équilibre entre la nature hautement technologique et par conséquent transfrontière du secteur, et les risques inhérents à ce secteur en matière d'ordre public, d'ordre social, de légalité, de transparence et de santé des citoyens, au moyen d'initiatives plus contraignantes que les recommandations proposées par la Commission.

1.8

Le CESE prend note du fait qu'il est impossible d'envisager aujourd'hui une législation de l'UE spécifique au domaine des jeux de hasard en ligne. Bien qu'il appuie les initiatives proposées par la Commission en vue d'une coopération efficace entre les États membres, le Comité demande que l'Union intervienne, dans certains secteurs dans lesquels les compétences sont partagées, au moyen d'instruments normatifs plus efficaces, de préférence des directives, afin de protéger les consommateurs et les catégories les plus vulnérables et de lutter contre les opérateurs illégaux et le blanchiment d'argent. Ainsi, un ensemble minimum de normes de protection des consommateurs serait établi. Les gouvernements nationaux doivent cependant conserver le droit de définir des normes supérieures de protection des consommateurs pour leurs marchés nationaux s'ils le souhaitent ou de continuer à appliquer des normes existantes plus favorables (3).

Le CESE invite dès lors la Commission, le Parlement européen et le Conseil à prendre des mesures dans les domaines suivants, tout en respectant le principe de subsidiarité:

la protection des consommateurs ainsi que de la santé et de la sécurité des citoyens, en particulier des mineurs d'âge et des groupes vulnérables;

les pratiques publicitaires responsables;

la lutte contre les paris truqués dans le domaine du sport;

les garanties en matière de légalité et de transparence des jeux en ligne, assorties de l'engagement des États membres d'introduire des sanctions adéquates prévoyant, en cas de non-respect de ces principes, le blocage, la fermeture, la saisie ou le retrait des sites illégaux.

1.9

Le CESE se félicite que la Commission ait donné suite à sa demande visant à étendre à toutes les formes de jeux de hasard le champ d'application de la directive sur la lutte contre le blanchiment d'argent (4).

1.10

Le CESE approuve l'intention de la Commission d'examiner les possibilités offertes par le règlement sur l'utilisation de l'IMI (5), et espère que cet examen permettra d'améliorer la coopération administrative entre les régulateurs nationaux et l'échange de données entre les organismes nationaux et européens compétents.

1.11

Le CESE juge positive l'évaluation qu'effectuera la Commission quant à la possibilité d'échanger des données à caractère personnel entre États membres, dans la mesure où la majorité des données enregistrées par les opérateurs peuvent être partagées et croisées avec d'autres données, favorisant ainsi les contrôles par les autorités compétentes.

1.12

Le CESE considère qu'il est essentiel que les États membres organisent, de concert avec les autorités de réglementation, des campagnes de sensibilisation et d'information à l'intention des consommateurs afin d'orienter la demande vers les jeux de hasard en ligne légaux. Cette action devra être complétée par des mesures de lutte contre les opérateurs illégaux et par la publication des listes noires et/ou blanches élaborées par les autorités de réglementation nationales afin d'aider les consommateurs à identifier plus facilement les sites autorisés au moyen de l'apposition d'un logo de l'autorité de réglementation nationale sur la page d'accueil des sites de jeu, et les sites illégaux.

1.13

Dans le but de garantir la protection des consommateurs, le CESE demande que les logiciels utilisés dans le cadre des jeux de hasard en ligne répondent à une certification européenne minimale commune délivrée par des organismes externes spécialisés et fondée sur paramètres et normes identiques. Il exhorte en outre la Commission ainsi que les États membres à adopter une norme européenne minimale concernant les plateformes informatiques destinées aux jeux de hasard, et invite les États membres à prendre des mesures pour protéger les données relatives aux joueurs et n'autoriser que les moyens de paiement offrant les meilleures garanties en termes de sécurité et de traçabilité des transactions liées aux jeux en ligne.

1.14

Le CESE juge très positive l'expérience lancée par la Commission consistant à créer un groupe d'experts sur les jeux en ligne en vue d'échanger expériences et bonnes pratiques en matière de criminalité informatique. En effet, bien qu'il n'en soit encore qu'au stade embryonnaire, ce groupe est un outil très utile pour engager une coopération efficace entre les États membres. Le CESE espère que ce groupe évoluera au-delà de la nature informelle qui est actuellement la sienne et deviendra une instance dotée de missions et de compétences claires.

1.15

Le CESE rejoint la Commission concernant la nécessité pour les États membres de promouvoir une formation adéquate des professions judiciaires sur les questions liées à la fraude et au blanchiment de capitaux associés aux jeux de hasard.

1.16

Le CESE invite la Commission à mettre à jour et revoir les normes relatives aux domaines d'intervention identifiés dans la communication à l'examen en tenant compte des progrès qui auront été accomplis concernant l'application de ces normes par les États membres, en particulier les normes que ceux-ci auront mises en vigueur et de quelle manière, ainsi que les résultats qu'ils auront obtenus.

1.17

Le CESE demande aux États membres de charger la Commission de négocier et de soutenir activement le projet de convention internationale pour la protection et la promotion de l'intégrité sportive, dont les négociations seront lancées dans le cadre du Conseil de l'Europe.

2.   Introduction

2.1

La communication conjugue le nécessaire respect de la législation européenne en matière de libre prestation des services et la protection de certaines catégories.

2.2

L'utilisation des outils télématiques qui donnent un accès direct au réseau a fortement stimulé la consommation de jeux de hasard en ligne, lesquels connaissent une expansion rapide. En 2011, les jeux de hasard en ligne ont permis de récolter, dans les 27 États membres, un total de 9,3 milliards d'euros, ce qui représente 10,9 % du marché européen des jeux de hasard, et l'on estime que les recettes de ce secteur atteindront 13 milliards d'euros à l'horizon 2015.

2.3

Grâce à Internet, tout citoyen européen peut de fait accéder et se trouver exposé, dans son État de résidence, à des services illégaux offerts par un ou plusieurs opérateur(s) titulaire(s) d'une licence dans un autre État, que celui-ci soit membre de l'UE ou non. Compte tenu de son caractère extraterritorial et international, le secteur des jeux de hasard ne peut être régi par les États membres individuellement mais doit faire l'objet d'une approche intégrée et d'une coopération accrue. Pour protéger les consommateurs et les citoyens, il est essentiel d'adopter une définition commune des jeux illégaux. Le Comité rappelle que les jeux non autorisés dans l'État de résidence du joueur ou les jeux proposés par un opérateur ne disposant pas de la licence nationale requise sont illégaux, qu'ils soient proposés par un opérateur implanté dans un État membre de l'UE ou disposant d'une licence dans cet État, ou par un opérateur d'un pays tiers (6). L'opérateur qui n'est ni contrôlé, ni réglementé est tout aussi illégal.

2.4

S'agissant de la distinction entre «opérateur non autorisé» et «opérateur illégal», il y a lieu de se référer à la note de bas de page no 15 de la communication.

2.5

Il convient de se féliciter que la Commission ait créé un groupe d'experts sur les jeux de hasard dans le but d'échanger expériences et bonnes pratiques entre États membres, d'examiner les problèmes découlant d'une utilisation illicite et illégale des jeux de hasard, de dispenser une formation spécifique et actualisée aux professions judiciaires ainsi que d'améliorer l'information des consommateurs et d'accroître l'offre de jeux légaux.

2.6

Ces mesures sont une première étape utile pour lutter contre les opérateurs qui agissent illégalement et alimentent la fraude, le crime et le blanchiment d'argent.

3.   Synthèse du document de la Commission

3.1

La communication de la Commission met l'accent sur la diversité des législations nationales et propose un certain nombre de mesures définissant des actions prioritaires au niveau national et européen; elle propose par ailleurs des actions de coopération et de collaboration entre les États membres en suggérant certaines interventions et recommandations, ainsi qu'une coordination et une intégration administrative entre les États.

3.2

L'objectif premier est de garantir que les législations nationales respectent et appliquent les dispositions européennes en proposant aux États membres des actions directes et des recommandations. À cette fin, la Commission:

facilitera la coopération administrative et l'échange d'informations entre les autorités nationales de règlementation des jeux de hasard;

examinera d'éventuelles procédures visant à bloquer les sites illégaux;

promouvra le marché légal des jeux de hasard, y compris en établissant un dialogue avec les pays tiers;

protégera les consommateurs, en particulier les mineurs et les groupes vulnérables, y compris en vérifiant les instruments de contrôle d'accès à Internet;

examinera les effets de l'addiction aux jeux de hasard au niveau européen;

évaluera les performances du marché des services de jeux de hasard;

adoptera des recommandations sur les bonnes pratiques en matière de prévention et de lutte contre les paris clandestins.

3.3

La Commission considère qu'il est de l'intérêt des États membres de mettre en œuvre une politique efficace en matière de lutte contre la fraude et le blanchiment de capitaux et en matière de protection de l'intégrité des sports contre le phénomène des rencontres, des matchs et des paris truqués, notamment grâce à l'échange d'expériences en matière de criminalité et de réseaux informatiques.

4.   Observations

4.1   Conformité des cadres réglementaires nationaux au droit de l'UE

4.1.1

Le CESE est avant tout vivement préoccupé par la diffusion croissante des jeux de hasard en ligne et l'augmentation exponentielle des offres de jeux, qui touchent des couches toujours plus larges de la population et ont de graves répercussions sur les revenus des familles. Il est dès lors nécessaire de limiter efficacement les différentes formes de publicité, surtout la publicité télévisuelle, en ligne et affichée sur les moyens de transport.

4.1.2

La fourniture et l'utilisation des offres transnationales de jeux de hasard sont des activités économiques relevant de la libre circulation prévue dans le marché intérieur (art. 56 du TFUE). L'article 52, paragraphe 1, du TFUE admet toutefois des restrictions à la libre prestation des services garantie par l'article 56 pour des raisons d'ordre, de sécurité et de santé publics.

4.1.3

Le CESE rappelle que les États membres sont compétents pour organiser et réglementer les jeux de hasard sur leur territoire. Les jeux sont une activité susceptible d'être très dangereuse pour les consommateurs et de servir des fins criminelles, telles que le blanchiment d'argent, si elle n'est pas réglementée correctement ou si la réglementation n'est pas strictement appliquée. Dans ce contexte, bien que les jeux de hasard relèvent de la libre prestation des services au sens de l'article 49 CE (7), les différences existant entre les réglementations nationales ne permettent pas pour l'heure d'envisager une réglementation européenne sur les jeux de hasard en ligne. S'il soutient les initiatives que la Commission propose, en particulier en matière de coopération efficace entre États membres, le CESE demande toutefois que dans certains secteurs (voir paragraphe 1.8), l'on intervienne au moyen d'instruments plus efficaces, de préférence des directives, afin de protéger les consommateurs et les catégories plus vulnérables et de lutter contre les opérateurs illégaux et le blanchiment d'argent.

4.1.4

En vertu d'une abondante jurisprudence consolidée de la Cour de justice de l'Union européenne, des raisons impérieuses d'intérêt général telles que la protection des consommateurs, la prévention de la fraude et de l'incitation des citoyens à une dépense excessive liée au jeu (8) peuvent motiver des restrictions aux jeux de hasard. Les États membres peuvent restreindre ou limiter la prestation transfrontalière de la totalité des services de jeu en ligne ou de certains types d'entre eux pour des raisons d'intérêt public qu'ils entendent protéger face au jeu (9).

4.1.5

Les services de jeux de hasard ne sont pas régis par des règles uniformes dans l'ensemble de l'UE et les législations nationales diffèrent sensiblement pour des raisons culturelles, sociales et historiques propres à chaque État. Certains États interdisent les jeux en ligne, d'autres n'autorisent que certains jeux, d'autres encore appliquent un régime de monopole géré par un opérateur public ou privé bénéficiant d'une exclusivité. En l'absence de données actualisées sur les différentes situations nationales (10), le CESE invite la Commission à réaliser une cartographie de la situation telle qu'elle se présente dans les États membres.

4.1.6

Selon la jurisprudence de la Cour de justice, les États membres qui optent pour une libéralisation contrôlée du secteur peuvent légitimement créer un régime de concession, moyennant autorisation administrative préalable, qui repose sur des critères objectifs, transparents et de non-discrimination en raison de la nationalité (11).

4.1.7

Dans les jeux de hasard en ligne, il n'y a pas de relation directe entre les consommateurs et les opérateurs, ce qui augmente les risques de fraude des seconds à l'égard des premiers (12). Les offres de jeux illégaux et, partant, non contrôlés, constituent une menace sérieuse pour les consommateurs. Par conséquent, l'application rigoureuse par les États membres des mesures visant à lutter contre les opérateurs illégaux fournit les principales garanties et le meilleur outil pour protéger les consommateurs.

4.1.8

Les États membres sont libres de fixer les objectifs de leur politique en matière de jeux de hasard et de définir le niveau de protection souhaité. Les restrictions qu'ils imposent doivent toutefois satisfaire aux conditions de la jurisprudence de la CJUE et être non discriminatoires, proportionnées et s'inscrire dans le cadre d'une politique systématique et cohérente.

4.1.9

Les différents États membres ayant des législations divergentes et l'élaboration d'une réglementation européenne des jeux de hasard en ligne étant actuellement impossible, il convient de rapprocher les règles et d'aider les États membres à faire respecter les règles existantes pour garantir une sécurité juridique accrue dans le domaine de la protection des consommateurs, des mineurs et des catégories vulnérables, ainsi que dans le secteur de la publicité et de la lutte contre le blanchiment de capitaux. Les États membres devraient être invités à échanger leurs bonnes pratiques en ce qui concerne la lutte contre les opérateurs illégaux.

4.1.10

En vertu du principe de subsidiarité, l'UE doit intervenir lorsque son action améliore la situation et confère une valeur ajoutée aux systèmes de réglementation des États membres. Compte tenu de la spécificité du secteur et des changements liés à l'utilisation d'Internet, le CESE considère que l'action de l'UE devrait prendre la forme d'une coopération durable entre États membres et de la promotion des bonnes pratiques concernant la lutte contre les opérateurs illégaux, laquelle requiert une action transnationale.

4.2   Coopération administrative et application effective de la loi

4.2.1

L’UE doit renforcer le contrôle, la coopération administrative et l'application effective de la législation sur les jeux de hasard en ligne; les États doivent pour leur part coopérer afin de parvenir à ce résultat.

4.2.2

La mise à disposition ainsi que l'échange et le traitement des données à caractère personnel enregistrées par les opérateurs sont des éléments importants pour favoriser les contrôles, tout en garantissant la protection des données. Il convient d'encourager la coopération administrative entre les États au moyen d'un échange d'informations générales et de la mise en œuvre des meilleures pratiques afin d'intensifier l'échange de connaissances et d'expériences dans le but de créer une confiance et un intérêt réciproques.

4.2.3

La certification au niveau national des plateformes informatiques de jeux à distance permet de surveiller le marché des jeux de hasard. Il est important d'améliorer la coopération entre les États membres et de créer, dans chaque État, une autorité de réglementation des jeux de hasard en ligne disposant de compétences précises, qui garantisse une coordination étroite au niveau de l'UE.

4.2.4

Il conviendra d'évaluer la cohérence des politiques nationales avec la réglementation et la jurisprudence de l'UE ainsi que le caractère transparent et non-discriminatoire des systèmes de licence. En cas de non-conformité, des procédures d'infraction devront être appliquées.

4.2.5

Le CESE considère que les mesures de prévention et de répression adoptées jusqu'ici par les États membres pour lutter contre les jeux de hasard en ligne fournis par des opérateurs ne disposant pas d'une licence, c'est-à-dire illégaux, ne sont pas suffisantes pour lutter contre ce phénomène. Il propose dès lors de définir, au niveau national, un cadre normatif de principes qui garantisse la légalité et la transparence des sites et qui prévoie l'identification des sites illégaux et leur inscription sur une «liste noire»; l'identification des sites autorisés en vertu de la législation propre de chaque État membre et leur inscription sur une «liste blanche»; le blocage, la fermeture, la saisie et le retrait des sites illégaux (13); le blocage des flux financiers à partir de et en direction de ces sites ainsi que l'interdiction des communications commerciales et de la publicité pour les jeux illégaux.

4.3   Les consommateurs

4.3.1

Le CESE regrette que la Commission n'ait pas donné suite, dans sa communication, à la demande qu'il lui avait adressée, ainsi qu'aux États membres, concernant l'adoption de mesures sévères pour lutter efficacement contre les opérateurs illégaux qui constituent la principale menace pour les consommateurs. Il demande dès lors que l'on adopte au plus vite des mesures fermes pour mettre en œuvre les bonnes pratiques en matière de prévention et de lutte contre les jeux illégaux.

4.3.2

La Commission prévoit d'adopter en 2013 une recommandation sur la protection des consommateurs et les pratiques publicitaires responsables en matière de jeux de hasard. À cet égard, elle recense quatre domaines d'intervention: détourner les consommateurs des offres non réglementées et potentiellement nocives; faire en sorte que les mineurs ne puissent pas avoir accès aux sites de jeux de hasard; protéger les autres groupes vulnérables et prévenir l'apparition de troubles associés aux jeux de hasard. Le CESE invite la Commission à intégrer dans cette recommandation les bonnes pratiques en matière de lutte et de prévention contre les jeux illégaux après avoir procédé, au niveau de chaque État membre, à une évaluation des formes de jeu les plus dommageables pour les consommateurs.

4.3.3

Le CESE se réjouit de l'attention que la communication porte à la protection des consommateurs et aux personnes vulnérables, notamment concernant la publicité et la ludopathie. À cet égard, il insiste sur la nécessité d'adopter des mesures prévoyant une protection élevée et constate que les instruments prévus ne sont pas assez efficaces. Il propose dès lors d'adopter des instruments plus contraignants. En effet, l'offre de jeux illégaux disponible constitue, en raison de sa nature incontrôlable et dangereuse, la principale menace pour les consommateurs et requiert que chaque État membre prenne des mesures rigoureuses pour lutter contre les opérateurs illégaux qui ne respectent pas la législation nationale, qui est la première et la meilleure garantie de protection des consommateurs.

4.3.4

L'action de la Commission doit essentiellement viser à garantir que les États membres exercent leurs pleines compétences et responsabilités en définissant au niveau européen, pour l'ensemble des opérateurs autorisés à fournir ce type de services, un cadre réglementaire qui fasse échec aux jeux de hasard problématiques et prévoie des limites d'âge concernant l'accès aux différents types de jeux, l'interdiction de jouer à crédit pour les formes de jeux et de paris les plus dangereuses (casinos en ligne, le spread betting, le betting exchange) et des formes de publicités destinées aux mineurs et aux catégories vulnérables de la population.

4.3.5

Le CESE demande à la Commission et aux États membres de prendre, au niveau national et européen, des mesures efficaces et résolues pour lutter contre les jeux illégaux. Il invite les États membres à adopter des mesures telles que la «liste noire» et le blocage des sites illégaux, la définition de formes de paiement sûres et identifiables, le blocage des opérations financières ainsi que l'interdiction absolue de la publicité illégale. À cet égard, il convient de souligner que l'efficacité de ces mesures dépend largement de leur combinaison, qui renforce leurs effets contre les opérateurs illégaux.

4.3.6

Il est souhaitable de créer, dans chaque État membre, une autorité de réglementation spécialement compétente pour surveiller et garantir la mise en œuvre des règles européennes et nationales en matière de protection des consommateurs et de lutte contre les jeux illégaux. L'existence d'autorités de réglementation nationales est une condition préalable à la mise en œuvre d'une coordination et d'une coopération administrative efficace. Les États membres doivent veiller à ce que leur système de réglementation, conçu sur la base de leurs spécificités nationales et de leur cadre normatif, soit en mesure d'assurer cette mise en œuvre. Le CESE demande à chaque État membre de charger sa propre autorité de réglementation de fixer les critères d'octroi des concessions au sein de son propre marché.

4.3.7

Les consommateurs de l'UE doivent avoir la possibilité, dans chaque État membre, d'opérer la distinction entre les sites illégaux et les sites légaux, y compris pour pouvoir introduire une plainte. À cet égard, le CESE recommande que chaque État contraigne tous les opérateurs autorisés à fournir des jeux en ligne à faire figurer sur leur site Internet, bien en évidence et de façon permanente, le numéro d'autorisation et une vignette de l'autorité de réglementation nationale indiquant qu'ils possèdent une licence dans l'État membre concerné.

4.3.8

Le CESE demande que l'on adopte des mesures réglementaires présentant les garanties les plus larges possibles en matière de protection des mineurs, en prévoyant des outils appropriés de vérification de l'âge et en garantissant des contrôles effectifs de la part des opérateurs. Il convient de sensibiliser les parents aux risques liés à l'utilisation d'Internet et d'améliorer le contrôle parental. Des garanties adéquates doivent être adoptées pour protéger les personnes vulnérables qui passent beaucoup de temps chez eux (retraités, ménagères et chômeurs).

4.3.9

La crise actuelle pousse de plus en plus de personnes à jouer en ligne, car elles ont l'illusion qu'elles pourront résoudre leurs problèmes économiques grâce à des gains faciles. Cette attitude comporte cependant des risques majeurs pour l'équilibre psychologique, dans la mesure où elle crée une dépendance et des comportements obsessionnels et compulsifs. Pour lutter contre ces pathologies, le CESE recommande qu'une partie des recettes fiscales provenant des jeux soit destinée à des campagnes de sensibilisation et au traitement préventif et thérapeutique des ludopathies.

4.3.10

Même s'il préconise une intervention plus ferme et contraignante, le CESE se félicite que la Commission entende adopter une recommandation sur les pratiques publicitaires responsables en matière de jeux de hasard visant à compléter la directive sur les pratiques commerciales déloyales, dans le but d'informer correctement les consommateurs. Le CESE souligne que les interventions dans ce domaine doivent comprendre des mesures contre les opérateurs illégaux telles que l'interdiction de la publicité pour les opérateurs qui fournissent des jeux alors qu'ils n'ont pas de licence délivrée par l'autorité de réglementation nationale du pays de résidence du consommateur.

4.3.11

Il convient de trouver le juste équilibre entre les exigences que pose une extension contrôlée des jeux autorisés – pour rendre l'offre de jeux légale attrayante aux yeux du public – et la nécessité de réduire au maximum la dépendance à ces jeux.

4.3.12

Les pratiques publicitaires devraient être plus responsables et mieux réglementées, surtout pour protéger les mineurs, non seulement parce qu'elles sont extrêmement nocives pour la santé – en particulier la santé mentale –, mais aussi parce qu'elles déforment la réalité et sont trompeuses, dans la mesure où elles incitent le public à penser que jouer en ligne est «normal» et, partant, cautionnent des comportements sociaux malsains.

4.3.13

En dépit du projet Alice Rap (14), le CESE constate qu'aucune donnée fiable n'est encore disponible sur l'ampleur et la diversité des pathologies liées aux jeux de hasard. Il met l'accent sur la nécessité de surveiller de manière continue et constante la dépendance au jeu et les pathologies connexes afin d'obtenir des données satisfaisantes permettant au législateur national et européen d'adopter des mesures efficaces et ciblées pour prévenir et lutter contre ce problème.

4.4   Prévenir la fraude et le blanchiment d'argent

4.4.1

Les problèmes liés à la reconnaissance des personnes qui jouent à distance, perdent ou gagnent des sommes importantes et, partant, pourraient cacher des activités de blanchiment d'argent, doivent être résolus en identifiant ces personnes à titre préventif et en créant un compte de jeux spécifique pour chaque joueur.

4.4.2

L'usurpation d'identité ne concerne pas seulement les jeux de hasard en ligne mais est un problème plus vaste qui touche aussi tout le système de traitement et d'échange des données qui caractérise le monde télématique et Internet.

4.4.3

Les «randomisateurs» (Random Number Generator) doivent faire l'objet d'une certification solide de manière à répondre au principe de non-prévisibilité tout en garantissant que l'événement vérifié soit le seul possible et que toute fraude soit impossible et ce, afin de protéger le joueur et de respecter les règles fixées par les États en matière de gains.

4.4.4

Dans le but de sécuriser davantage les logiciels utilisés pour les jeux de hasard en ligne, le CESE propose qu'une certification européenne minimale commune soit élaborée par des organes externes spécialisés; cette certification devrait prévoir des paramètres et normes identiques, notamment pour identifier les jeux offshore illégaux et lutter contre ceux-ci.

4.4.5

L'une des manières de protéger l'accès aux jeux pourrait consister à définir des adresses IP (Internet Protocol Address). En effet, il est techniquement possible de bloquer le jeu si une personne accède à un système de jeu d'un État membre au moyen du système IP d'un autre pays.

4.4.6

Les jeux de hasard en ligne étant vulnérables au blanchiment de capitaux et à la fraude, il est souhaitable que le volume important d'informations et de données enregistré par les opérateurs puisse être mis à la disposition des organes chargés de veiller à l'ordre public, de manière à favoriser les contrôles en recoupant ces données avec d'autres.

4.5   Le sport et le trucage de compétitions

4.5.1

Le trucage de matchs, rencontres et compétitions lié à des paris est un type particulier de fraude qui va à l'encontre des intérêts des organisations sportives, des supporteurs, des consommateurs et des opérateurs de jeux de hasard légaux.

4.5.2

La Commission approuve la proposition formulée par le CESE, qui juge nécessaire de définir un cadre visant à coordonner les efforts de toutes les parties concernées pour lutter contre le problème de manière globale et éviter toute duplication des ressources; elle met également l'accent sur le fait qu'il faut renforcer la coopération entre les opérateurs de paris, les organismes sportifs et les autorités compétentes, y compris les autorités nationales et internationales de réglementation des jeux de hasard.

4.5.3

Le CESE réitère sa proposition consistant à créer un système qui ne se borne pas à enregistrer les déclarations relatives aux soupçons pesant sur un événement sportif donné, mais qui prévoie également des mesures préventives, éducatives et coercitives à même de lutter efficacement contre ce phénomène.

4.5.4

Le CESE se félicite de la volonté de la Commission d'adopter, d'ici à 2014, une recommandation sur les bonnes pratiques concernant la prévention et la lutte contre le trucage des matchs lié à des paris, même s'il considère que l'instrument choisi n'est pas suffisant. Bien que le trucage de compétitions soit contraire au principe d'équité des compétitions sportives et qu'il constitue une infraction dans tous les États membres, l'on constate cependant une augmentation des activités illicites ou suspectées de l'être. Il convient dès lors de prendre des mesures plus fermes pour lutter contre les compétitions truquées, au moyen de ressources, de compétences et d'outils nationaux qui conjuguent leurs synergies avec celles de l'UE.

4.5.5

Le CESE invite les États membres qui ne l'ont pas encore fait à considérer la corruption sportive, le trucage des compétitions et la manipulation des résultats sportifs comme des délits pouvant, en tant que tels, être sanctionnés. Il exhorte par ailleurs la Commission à s'accorder avec les États membres sur une définition commune de ces infractions pénales.

Bruxelles, le 22 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  JO C 24 du 28.1.2012, p. 85.

(2)  COM(2011) 128 final.

(3)  Cf. JO C 24 du 28.1.2012, p. 85 (Conclusions, paragraphes 1.3 et 1.6).

(4)  COM(2013) 45 final.

(5)  Système d'information du marché intérieur.

(6)  Dans les conclusions de son rapport d'étape du 11 mai 2010 (doc. 9495/10), la Présidence espagnole du Conseil indique que les jeux en ligne proposés par un opérateur ne disposant pas d'une licence dans le pays destinataire ou ne respectant pas la législation de ce pays sont illégaux et que par conséquent, les opérateurs de jeux en ligne doivent se conformer à la législation en vigueur dans les États membres dans lesquels ils opèrent.

(7)  Arrêts du 19 juillet 2012 (affaire C-470/11, SIA Garkalns, point 24), du 8 septembre 2010 (affaire C-316/07, affaires C-358/07 à C-360/07, C-409/07 et C-41007, Stoß et autres).

(8)  Arrêts du 19 juillet 2012 (affaire C-47011, SIA Garkalns, cit, point 39), du 8 septembre 2010 (affaire C-46/08 Carmen Media Group, point 55).

(9)  Affaires Ligue portugaise de football C-42/07 ou Anomar C-6/01.

(10)  Étude sur les jeux de hasard dans le marché intérieur de l'UE réalisée par l'Institut suisse de droit comparé (2006).

http://ec.europa.eu/internal_market/services/docs/gambling/study1_en.pdf

(11)  Arrêt du 24 janvier 2013 (affaires jointes C-186/11 et C-209/11 Stanleybet International LTD et autres, point 47).

(12)  Arrêt du 8 septembre 2009 – Affaire C-42/07 Liga Portuguesa de Futebol Profissional et autres.

(13)  COM(2010) 673 final du 22.11.2010 – Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil «La stratégie de sécurité intérieure de l'UE en action: cinq étapes vers une Europe plus sûre».

(14)  Addiction and Lifestyles in Contemporary Europe, Reframing Addictions Project (Addictions et modes de vie dans l'Europe contemporaine: projet de recadrage des addictions).


19.9.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 271/55


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen — Nouvelle approche européenne en matière de défaillances et d’insolvabilité des entreprises»

COM(2012) 742 final

et sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 1346/2000 du Conseil relatif aux procédures d’insolvabilité»

COM(2012) 744 final – 2012/0360 (COD)

2013/C 271/10

Rapporteur: M. Pedro Augusto ALMEIDA FREIRE

Le 12 décembre 2012, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen – Nouvelle approche européenne en matière de défaillances et d’insolvabilité des entreprises»

COM(2012) 742 final.

Le 15 janvier 2013 et le 5 février 2013, respectivement, le Parlement européen et le Conseil ont décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 1346/2000 du Conseil relatif aux procédures d’insolvabilité»

COM(2012) 744 final – 2012/0360 (COD).

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 29 avril 2013.

Lors de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 22 mai 2013), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 130 voix pour, 1 voix contre et 4 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Conclusions générales

1.1.1

L’Europe traverse une crise économique et sociale majeure, dont les effets frappent tous les échelons de la société.

1.1.2

Favoriser la survie des entreprises figure parmi les mesures que l’Union européenne a identifiées pour sortir de l’impasse. Les faillites ont en effet des répercussions qui vont au-delà des conséquences négatives pour les entreprises concernées, elles touchent globalement l’économie des États membres, et plus particulièrement le citoyen en sa qualité de contribuable, de salarié, et d’employeur.

1.1.3

Le CESE souscrit aux objectifs figurant dans la communication de la Commission, bien que selon lui, la «seconde chance» qui y est évoquée devrait bénéficier aux entrepreneurs ayant tiré les leçons de leur échec précédent, et capables de rebondir sur la base d’un projet entrepreneurial repensé.

1.1.4

Il soutient également la proposition de règlement, dont il regrette toutefois le manque d’ambition.

1.1.5

En effet, de nombreuses réflexions et actions concrètes doivent encore être menées, pour préserver les droits des créanciers, tout en veillant à trouver un équilibre entre les intérêts des entrepreneurs et des salariés, favoriser la restructuration des entreprises, empêcher le forum shopping, améliorer la coordination des procédures d’insolvabilité des groupes d’entreprises.

1.2   Recommandations sur la communication

1.2.1

Le CESE estime que les pistes de réflexion pour une harmonisation substantielle du droit de l’insolvabilité des entreprises sont intéressantes, même s’il déplore l’absence de réponse efficace à la crise économique et sociale que traversent les entreprises et les citoyens européens.

1.2.2

Il est plus favorable à la notion de Fresh start, selon le concept central du droit américain de l’insolvabilité, qu’à celle de «seconde chance» défendue par la Commission. Aussi, il l’invite à réfléchir sur l’apport de cette notion au droit européen de l’insolvabilité.

1.2.3

Il considère également que le salarié devrait être mieux protégé et se voir reconnaître le rang de créancier privilégié.

1.2.4

La question du soutien inapproprié des entreprises en difficulté doit aussi faire partie de la réflexion, le CESE souligne à cet égard que cette responsabilité peut viser d’autres personnes que des banques. Il invite donc à la Commission à envisager ces paramètres à leur juste valeur.

1.2.5

Il estime que la pénalisation du droit de l’insolvabilité n’est pas souhaitable car elle accroîtrait la judiciarisation des procédures d’insolvabilité et allongerait les délais d’examen.

1.2.6

Il ne lui semble pas que le recours systématique au juge soit la meilleure solution. Il invite la Commission à réfléchir sur l’idée de créer de nouvelles instances, par exemple liées au secteur de l'économie, dont la composition pluridisciplinaire (économique, financière, juridique) serait mieux à même de comprendre et agir rapidement pour aider les entreprises à vaincre leurs difficultés financières.

1.2.7

Enfin, il invite la Commission à considérer les propositions relatives à l’harmonisation du statut de syndic, telles que résultant de la résolution du Parlement européen du 11 octobre 2011 (1).

1.3   Recommandations sur la proposition de règlement

1.3.1

Le CESE soutient la proposition de règlement, même si elle se limite à des règles processuelles, et qu’elle ne vise pas à harmoniser les droits nationaux applicables aux cas d’insolvabilité d’entreprises.

1.3.2

Il salue l’obligation faite aux États membres d’améliorer les règles de publicité via un registre électronique, des décisions judiciaires pertinentes rendues dans des affaires d’insolvabilité transfrontalières, et l’interconnexion des registres nationaux d’insolvabilité.

1.3.3

Il invite néanmoins la Commission à veiller à ce que la charge, le coût et les délais des traductions ne ralentissent pas les procédures d’insolvabilité, car la rapidité est un gage de leur réussite.

1.3.4

Il soutient l’intégration des procédures civiles de surrendettement, mais pour autant, cet ajout ne devrait pas s’avérer défavorable aux débiteurs particuliers. En effet, un droit conçu pour les entreprises, destiné à satisfaire les exigences du commerce, est par essence moins protecteur que le droit de la consommation. Il recommande à la Commission d’être particulièrement vigilante à ce sujet.

1.3.5

Enfin, il invite la Commission à veiller à ce que le recours à la procédure de délégation pour modifier des annexes du règlement, prenne en considération l’article 290 du TFUE et l’apport de la jurisprudence sur la notion de «mesures essentielles».

2.   Introduction

2.1   L’objectif du «Paquet Insolvabilité»

2.1.1

Les initiatives comprises dans ce paquet législatif font partie de la réponse de l’UE à la crise économique et sociale que traversent les entreprises et les citoyens européens. L'objectif affiché est de favoriser la survie des entreprises et de donner une seconde chance aux entrepreneurs frappés par une situation d’insolvabilité.

2.1.2

La méthode choisie par la Commission européenne consiste à modifier le règlement (CE) no 1346/2000 (2) du Conseil du 29 mai 2000 dit «règlement sur l’insolvabilité» essentiellement relatif aux règles de droit international privé applicables aux procédures d’insolvabilité transfrontalières, et d'initier à une consultation sur la base d’une communication intitulée: «Nouvelle approche européenne en matière de défaillances et d’insolvabilité des entreprises».

2.1.3

Le CESE a décidé de se prononcer sur les deux textes dans un seul et même avis.

2.2   La proposition de règlement  (3)

2.2.1

Partant du constat de l’obsolescence du «règlement sur l’insolvabilité» du 29 mai 2000, et de l’identification de ses cinq écueils majeurs (4), la Commission propose de réviser ledit texte.

2.3   La communication

2.3.1

Elle constate à juste titre que sa proposition de règlement du 12 décembre 2012 se limite à mettre à jour le «règlement sur l'insolvabilité» du 29 mai 2000, en se contentant de porter sur la reconnaissance et la coordination des règles de procédures applicables aux cas nationaux d’insolvabilité, et ce sans harmoniser les droits nationaux applicables aux cas d'insolvabilité d'entreprises.

2.3.2

Elle tente de palier ce défaut en proposant des pistes de réflexion pour une harmonisation substantielle du droit de l’insolvabilité des entreprises, étant entendu que seuls les cas d’insolvabilités transfrontalières, sont visés.

3.   Observations générales sur la communication

3.1   Philosophie de la nouvelle approche

3.1.1

Elle se fonde sur la nécessité d’accorder une seconde chance aux entrepreneurs et de sauvegarder des emplois.

3.1.2

Le CESE considère pour sa part que les faillites d’entreprises, tout comme les créations d’entreprises d’ailleurs, font partie du cycle de la vie économique et de la dynamique du marché. Il serait donc à ce titre incorrect de les considérer comme des maux devant à tout prix être évités.

3.1.3

Dans cet ordre d'idées, le CESE pense que la «seconde chance» évoquée par la Commission devrait bénéficier aux entrepreneurs ayant tiré des leçons de leur échec précédent, et capables de rebondir sur la base d’un projet entrepreneurial repensé.

3.1.4

Il souligne également que les faillites d’entreprises peuvent avoir des causes internes, telles que la mauvaise gestion, mais aussi des causes externes provenant de règlementations aussi excessives qu’inadaptées. À ce titre, l’État a aussi une certaine responsabilité dans les faillites, en sa qualité de législateur, mais aussi de pouvoir adjudicateur dans le cadre de marchés publics (5).

3.1.5

Le CESE est plus favorable à la notion de Fresh start, selon le concept central du droit américain de l’insolvabilité (6) qu’à celle de «seconde chance» défendue par la Commission. Le Fresh start, concept largement culturel et non pas juridique, suppose que le débiteur soit, à certaines conditions, libéré de sa responsabilité personnelle sur ses dettes. L’étape de la décision judiciaire déclarant la faillite de l’entreprise est ainsi évitée et le débiteur peut commencer un nouveau projet, sans être identifié comme failli.

3.1.6

La communication laisse au contraire penser que la «seconde chance» consiste en une poursuite d’activité. Or, selon le CESE, il serait contre-productif de maintenir artificiellement tel que, des entreprises dans le tissu économique, en leur donnant une «seconde chance», alors que l'expérience a démontré que le modèle choisi n'était pas viable.

3.1.7

Des conséquences nocives sur la confiance des créanciers et fournisseurs résulteraient d’une telle démarche, et in fine nuirait à une concurrence saine entre acteurs économiques.

3.2   Le CESE soutient l’approche américaine du droit de l’insolvabilité, et selon lui, l’évaluation du Fresh start devrait intervenir avant même que le juge n’ait été saisi.

4.   Observations particulières sur la communication

4.1   Pour une harmonisation efficace

4.1.1

L'hétérogénéité des droits nationaux de l'insolvabilité est une source, notamment pour les sociétés ayant des activités transfrontalières, de désavantages concurrentiels qui pourraient nuire à la relance économique.

4.1.2

Elle incite au forum shopping, et entraine par voie de conséquence un affaiblissement du marché intérieur.

4.1.3

Aussi, le CESE se joint au Parlement européen (7) qui avait appelé de ses vœux une harmonisation de certains domaines du droit de l'insolvabilité.

4.1.4

Il demande lui aussi à la Commission de présenter, sur la base de l'article 50, de l'article 81, paragraphe 2, ou de l'article 114 du TFUE, une ou plusieurs propositions législatives pour un véritable cadre européen de l'insolvabilité des entreprises, ne se limitant pas à de simples règles processuelles de droit international privé.

4.1.5

En effet, les cas d’insolvabilité ont des répercussions qui vont au-delà des conséquences négatives pour les entreprises concernées, ils touchent globalement l’économie des États membres, et plus particulièrement le citoyen en sa qualité de contribuable, de salarié, et d’employeur.

4.2   Préserver les droits des créanciers

4.2.1

Tournées à l'origine exclusivement aux fins de désintéressement des créanciers, les procédures collectives ont progressivement eu pour finalité la pérennité de l'entreprise, le maintien de l'emploi et l'apurement du passif. Plus récemment, la tendance législative en Europe est de prévenir les problèmes de l'entreprise en amont de la cessation de paiements.

4.2.2

L’ouverture d’une procédure collective contre le débiteur est un évènement redouté par le créancier, qui ignore s’il pourra obtenir le paiement des sommes dues. La première frustration vient de ce que souvent, l’ouverture d’une procédure collective interdit de poursuivre le débiteur pour toute créance née avant le jugement d’ouverture et suspend les poursuites en cours. Chaque créancier doit donc déclarer sa créance dans le délai légal (8).

4.2.3

La seconde frustration du créancier survient dans le cas d’une insuffisance d’actif; en pratique, il est souvent proposé aux créanciers pendant la procédure collective, de choisir entre un paiement immédiat moyennant un abandon d’une partie non négligeable de leur créance, et un étalement de la dette sur une période donnée.

4.2.4

L’idéal pour le créancier est donc de prévenir toute situation d’insolvabilité, par exemple en sécurisant certaines opérations lors de la conclusion du contrat, en exigeant une constitution de garanties par un tiers (9) ou en exigeant des gages, nantissements ou hypothèques sur les actifs de l’entreprise (10).

4.3   Mieux traiter le sort des salariés dans les procédures d’insolvabilité

4.3.1

Les salariés sont en première ligne en cas de faillite de leur entreprise. Leurs salaires ne sont pas toujours réglés avant le dépôt de bilan et leur situation financière personnelle est difficile durant cette période d'inquiétude.

4.3.2

L'ouverture d'une procédure collective entraîne souvent l'élection d'un représentant des salariés, dont la mission est de contrôler les informations relatives aux créances salariales. Il constitue, outre les instances habituelles de représentation de salariés au sein d’une entreprise, un relais d'information entre le personnel, le tribunal et les intervenants de la procédure.

4.3.3

Les sommes dues aux salariés avant l'ouverture de la procédure collective, doivent être inscrites au passif de l'entreprise. Toutefois, cette mesure d'ordre général est en fait très atténuée par les divergences entre les législations et les pratiques nationales. Le défaut d’harmonisation relatif à l’ordre des créanciers rend donc l’issue des procédures collectives très incertaine pour les salariés.

4.3.4

Le CESE pense que le salarié devrait être mieux protégé en se voyant reconnaitre le rang de créancier privilégié et considère à ce titre qu’une harmonisation de sa protection serait utile.

4.4   Prévenir le soutien inapproprié d’entreprises mal en point

4.4.1

Les pratiques commerciales de certains établissements financiers peuvent conduire à soutenir des entreprises dont la situation est irrémédiablement compromise. Elles créent ainsi une apparence de solvabilité, qui nuit à une concurrence saine sur le marché et entache l'image du secteur bancaire.

4.4.2

Le CESE souligne que la responsabilité pour soutien abusif peut viser d’autres personnes que des banques y compris l'État. D'ailleurs, des juges nationaux considèrent que certains fournisseurs ou clients de l’entreprise peuvent également voir leur responsabilité engagée lorsque, par leur attitude, ils soutiennent abusivement l’activité d’une entreprise dont ils savent qu’elle est irrémédiablement compromise.

4.4.3

Ces paramètres devraient également être envisagés à leur juste valeur pour harmoniser le droit de l’insolvabilité des entreprises.

4.5   Le cas particulier des faillites frauduleuses

4.5.1

La majorité des faillites d’entreprises sont dues à des raisons objectives, exemptes de tout comportement frauduleux de leurs dirigeants.

4.5.2

Le phénomène des faillites frauduleuses ne saurait pour autant être ignoré. La Commission y fait d’ailleurs référence dans sa communication (11), et suggère de faire une distinction entre les faillites honnêtes et les faillites malhonnêtes. Selon elle, le non-respect volontaire ou irresponsable des obligations légales par un débiteur pourrait entrainer des sanctions civiles, voire pénales. À ce titre, les procédures de liquidation des faillites honnêtes devraient être accélérées.

4.5.3

Le CESE est quant à lui convaincu que l’harmonisation du délai de réhabilitation et une durée raisonnablement brève de ce dernier, seraient appropriées, notamment dans l’intérêt des salariés, mais il reste dubitatif quant à la distinction des procédures de liquidation selon l’honnêteté des dirigeants car cela accroîtrait la judiciarisation des procédures d’insolvabilité, leur donnerait un caractère pénal et allongerait les délais d’examen.

4.5.4

Cette pénalisation du droit de l’insolvabilité n’est pas souhaitable. Selon le CESE, l’appréciation de la nature frauduleuse de la faillite doit avoir lieu dans une procédure distincte de la procédure d’insolvabilité.

5.   Observations générales sur la proposition de règlement

5.1

Le CESE salue l’élargissement du champ d’application du règlement en incluant les procédures hybrides, les procédures de pré-insolvabilité, les procédures de décharge de dettes, ainsi que les procédures relatives aux personnes physiques.

5.2

Il salue également la clarification des circonstances permettant de renverser la présomption selon laquelle le centre des intérêts principaux correspond au lieu du siège statutaire.

5.3

L’amélioration du régime procédural précisant le champ d’intervention de la juridiction compétente pour les actions dérivant directement des procédures d’insolvabilité ou qui y sont étroitement liées, comme les actions révocatoires, est également positive.

5.4

Le fait que les procédures secondaires ne soient plus nécessairement des procédures de liquidation et que leur ouverture puisse être refusée lorsqu’elles ne sont pas nécessaires à la protection des intérêts des créanciers locaux, participe également à l’amélioration du règlement, tout comme l’extension de la coopération entre procédure principale et secondaire.

5.5

L’obligation pour les États membres d’améliorer les règles de publicité, en rendant accessible à tous, via un registre électronique, les décisions pertinentes rendues par les juridictions dans des cas d’insolvabilité transfrontières et l’interconnexion des registres nationaux d’insolvabilité, sont aussi des idées intéressantes.

5.6

Le CESE s’interroge néanmoins sur la charge, le coût et les délais des traductions, et rappelle que la rapidité est un gage indispensable à la réussite de la procédure.

5.7

Enfin il salue l’obligation des juridictions et des syndics de coopérer dans les procédures d’insolvabilité visant les membres d’un même groupe d’entreprises, car elle donne aux syndics les moyens d’être plus efficaces.

6.   Observations particulières sur la proposition de règlement

6.1

Le CESE s’interroge sur la coordination entre le règlement CE no 1215/2012 du 12 décembre 2012 (12), appelé à remplacer le règlement CE no 44/2001 sur la compétence juridictionnelle des tribunaux nationaux et les effets des jugements dans l’Union européenne, dit «règlement de Bruxelles I». Il se demande si le considérant 6 contenu dans la proposition de «règlement sur l’insolvabilité» clarifie suffisamment le critère de répartition des compétences résultant de la jurisprudence Gourdain (13). En effet, cette jurisprudence semble donner une interprétation restrictive, alors que certaines actions placées dans sous l’empire du «règlement de Bruxelles I» sont déterminantes pour la procédure d’insolvabilité. Par exemple, le jeu ou non d’une clause de réserve de propriété est déterminant pour définir l’étendue de l’actif du débiteur. L’enjeu est important au regard de l’objectif affiché de sauver les entreprises en difficulté, puisque la reconstitution de l’actif est la clé de la réussite du redressement des entreprises en difficulté.

6.2

S’agissant de la coopération entre les syndics, la Commission aurait pu proposer de modifier l’article 31 en incitant davantage à l’adoption de protocoles d’accord entre les syndics. En effet, la diversité du statut des syndics dans les États membres est une entrave à leur coopération professionnelle.

6.3

Les échanges entre syndics et juridictions devraient quant à eux concerner prioritairement l’inventaire, le passif du débiteur, la déclaration et la vérification des créances, ainsi que le règlement collectif coordonné des créanciers figurant dans les plans négociés.

6.4

Enfin, le CESE souligne que la Commission envisage de recourir à la procédure de délégation pour modifier les annexes du règlement, alors qu’il semble y être question de mesures essentielles, comme la notion de procédure collective ou la liste des personnes agissant comme syndic.

7.   Observations particulières quant au droit substantiel de l’insolvabilité

7.1

Une harmonisation des critères d’insolvabilité est nécessaire. En effet, dans certains États membres, la procédure d’insolvabilité n’est envisageable que lorsque le débiteur est avéré insolvable, dans d'autres, l’insolvabilité «probable dans un futur proche» est un critère suffisant.

7.2

Ces divergences favorisent le forum shopping, et devraient donc à ce titre être supprimées.

7.3

L’impératif de sécurité juridique appelle aussi une harmonisation des règles relatives à la production de créances.

8.   Intégrer les procédures civiles de surendettement

8.1

Le CESE soutient cette proposition de la Commission consistant en un nouveau considérant 9 (14).

8.2

Les considérants 9 et 10 du «règlement sur l'insolvabilité» du 29 mai 2000 s’y prêtent aisément (15).

8.3

Pour autant, cette intégration ne devrait pas s’avérer défavorable aux débiteurs particuliers. En effet, un droit conçu pour les entreprises, destiné à satisfaire les exigences du commerce, est par essence moins protecteur que le droit de la consommation. Le CESE invite donc la Commission à être particulièrement vigilante à ce sujet.

8.4

Il invite également la Commission à réfléchir à une harmonisation du droit de l’insolvabilité des particuliers, prenant en considération les intérêts du consommateur.

9.   Harmoniser le statut et les compétences des syndics

9.1

Les divergences nationales sur les statuts et compétences des syndics altèrent le bon fonctionnement du marché intérieur en compliquant les procédures d’insolvabilité transfrontalières (16).

9.2

Il va de l’intérêt des entreprises et de la relance économique qu’une harmonisation des aspects généraux concernant les exigences quant aux compétences et missions du syndic soit mise en œuvre rapidement. Aussi, le CESE se joint au Parlement européen (17) pour recommander les pistes de réflexions suivantes:

le syndic devrait être homologué par une autorité compétente d'un État membre ou mandaté par une juridiction compétente d'un État membre, jouir d'une bonne réputation et disposer du niveau de formation nécessaire pour l'accomplissement de ses fonctions;

il doit avoir compétence et qualité pour évaluer la situation de l'entité du débiteur et pour prendre en charge les tâches de gestion de l'entreprise;

il doit pouvoir recouvrer, par des procédures adaptées et prioritaires, des sommes dues à l'entreprise en amont du règlement des créanciers et en tant qu'alternative aux transferts de créances;

il doit être indépendant des créanciers ainsi que des autres parties concernées par la procédure d'insolvabilité;

en cas de conflit d'intérêts, il doit démissionner de sa charge.

9.3

La Commission devrait donc aller au-delà de ce qu’elle prévoit à l’article 31 de la proposition de règlement qui se limite à entériner la pratique et à porter sur la coopération entre syndic de procédure principale et syndic de procédure secondaire.

10.   Développer les règlements extrajudiciaires pour un soutien et un encadrement efficaces des entreprises

10.1

Favoriser les procédures négociées permettrait d’accroître la rapidité et l’efficacité des plans de restructuration des entreprises.

10.2

Leur délai moyen et le taux de succès généralement observés dans l’Union européenne, militent en faveur de l’adoption de cette approche.

10.3

D'ailleurs, il ne semble pas au CESE que le recours systématique au juge soit forcément la meilleure solution.

Il soutient ainsi l’idée de créer de nouvelles instances, par exemple liées au secteur de l'économie, dont la composition pluridisciplinaire (économique, financière, juridique) serait mieux à même d'agir rapidement pour aider les entreprises à vaincre leurs difficultés financières.

10.4

Ce système existe déjà dans plusieurs pays, et pourrait être généralisé à d'autres États membres.

10.5

Enfin, il serait utile que la Commission publie périodiquement des statistiques relatives aux cas d’insolvabilité soumis au «règlement sur l’insolvabilité» afin de pouvoir évaluer l’efficacité du système mis en place.

Bruxelles, le 22 mai 2013.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  Résolution du Parlement européen du 15.11.2011 – 2011/2006 (INI).

(2)  JO L 160 du 30.6.2000, p. 1 et JO C 75 du 15.3.2000, p. 1.

(3)  COM(2012) 744 final du 12.12.2012.

(4)  

champ d’application trop restreint;

persistance du forum shopping due à une application incohérente de la notion de «centre des intérêts principaux du débiteur»;

absence de coordination entre procédure principale d’insolvabilité et procédure secondaire;

publicité insuffisante des procédures d’insolvabilité;

vide juridique quant à l’insolvabilité des groupes multinationaux;

la Commission s’appuie sur les 134 réponses à une consultation publique initiée le 29 mars 2012, les conclusions d’une étude de droit comparé réalisée par les universités d’Heidelberg et de Vienne, ainsi que sur une analyse d’impact évaluant différents scenarii relatifs à des options de réforme, pour suggérer de palier les cinq lacunes susmentionnées, dans une proposition de «Règlement du Conseil relatif aux procédures d’insolvabilité».

(5)  Par exemple des règles relatives à la sécurité, l’environnement qui tout en étant légitimes dans leur esprit, peuvent nuire au fonctionnement des entreprises. Les délais de paiement pratiqués par l’acheteur public, dans le cadre des marchés publics contribuent aussi aux difficultés rencontrées par les entreprises.

(6)  Thomas H. Jackson,The Fresh-Start Policy in Bankruptcy Law, 98 Harv. L. Rev. 1393 (1985); Charles Jordan Tabb, The Scope of the Fresh Start in Bankruptcy: Collateral Conversions and the Dischargeability Debate, 59 Geo. Wash. L. Rev. 56 (1990).

(7)  Résolution du Parlement européen du 15.11.2011 – 2011/2006 (INI).

(8)  Les créances à déclarer sont non seulement les créances échues ou à échoir nées avant l’ouverture du jugement mais également certaines créances nées postérieurement lorsqu’elles correspondent à des prestations fournies avant la date du jugement d’ouverture ou sont jugées non nécessaires à la poursuite de la procédure.

(9)  Une banque ou le dirigeant.

(10)  Mobilier, fonds de commerce, marques, etc.

(11)  Point 3.1: Une seconde chance pour les entrepreneurs honnêtes en faillite. COM(2012) 742 final.

(12)  L’application du règlement est reportée au 10 janvier 2015, notamment pour permettre aux États membres d’adapter leurs règles de procédures en raison de l’abolition de l’exequatur.

(13)  CJCE Gourdain c/Nadler, 22 février 1979.

(14)  Considérant 9 «Le présent règlement devrait s’appliquer aux procédures d’insolvabilité…que le débiteur soit une personne physique ou morale, un commerçant ou un particulier».

(15)  En outre, le droit de certains Etats membres le prévoit déjà. En Belgique, la procédure de règlement collectif des dettes vise également les procédures applicables aux consommateurs (loi du 5 juillet 1988). L’Allemagne n’opère pas de distinction entre les procédures applicables aux commerçants et celles applicables aux particuliers (loi du 5 octobre 1994).

(16)  En effet, le syndic peut être un fonctionnaire ou une personne privée homologuée par l’État, désigné par le juge, mais payée par les créanciers.

(17)  Rapport du 11 octobre 2011 contenant des recommandations à la Commission sur les procédures d'insolvabilité dans le cadre du droit européen des sociétés (2011/2006(INI)).


19.9.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 271/61


Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Protéger les entreprises contre les pratiques commerciales trompeuses et garantir l'application efficace des règles — Révision de la directive 2006/114/CE en matière de publicité trompeuse et de publicité comparative

COM(2012) 702 final

2013/C 271/11

Rapporteur: Jorge PEGADO LIZ

Le 19 février 2013, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions - Protéger les entreprises contre les pratiques commerciales trompeuses et garantir l'application efficace des règles – Révision de la directive 2006/114/CE en matière de publicité trompeuse et de publicité comparative»

COM(2012) 702 final.

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière a adopté son avis le 29 avril 2013.

Lors de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 22 mai 2013), le Comité économique et social européen a adopté l'avis suivant par 129 voix pour et 8 abstentions:

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le CESE accueille favorablement la communication à l'examen et ses objectifs qui méritent selon lui une attention particulière et une réflexion.

1.2

Le CESE soutient la Commission dans le sens d'une réglementation plus stricte visant à interdire effectivement et à sanctionner de manière exemplaire et dissuasive certaines pratiques agressives de vente des sociétés d'annuaires.

1.3

Compte tenu de l'apparente urgence d'une prise de position immédiate sur cette question ainsi que de l'importance et de la gravité au plan économique des pratiques mentionnées au niveau européen, le CESE approuve que la Commission présente dès à présent une proposition législative axée exclusivement sur cette question, sur la base d'une étude d'impact.

1.4

Le CESE estime qu'il convient à cette fin d'adopter un règlement cadre, à mettre éventuellement en œuvre par l'intermédiaire d'actes délégués, ce qui permettrait de garantir une plus grande uniformité et efficacité de son application au niveau des États membres.

1.5

Compte tenu de sa nature, le CESE estime que la base juridique adéquate ne peut se limiter, sans les exclure, aux dispositions du traité relatif à l'achèvement du marché intérieur et son champ d'application ne doit pas être circonscrit aux transactions transfrontalières.

1.6

Par ailleurs, le CESE attire l'attention sur la nécessité d'être attentif au caractère transeuropéen de nombre de ces pratiques, ce qui exige une action coordonnée au niveau international.

1.7

Toutefois, le CESE considère que la meilleure façon de réaliser l'objectif d'une réglementation cohérente et consistante en matière d'interdiction de pratiques commerciales trompeuses serait de procéder à une révision conjointe des directives 2006/114/CE et 2005/29/CE, simultanément pour les relations entre entreprises (B2B) et entre entreprises et consommateurs (B2C), en préservant les particularités de chacune dans un cadre commun; aussi invite-t-il la Commission à engager le processus à brève échéance.

1.8

Le CESE exhorte la Commission à élaborer et à faire appliquer les mesures complémentaires pour une meilleure information et divulgation et une coopération accrue entre les autorités administratives, les plates-formes public-privé et les organisations représentatives des parties prenantes, ainsi que pour le perfectionnement des mécanismes de réaction rapide en vue de mettre un terme à ces pratiques et d'indemniser le préjudice causé, notamment en créant dès maintenant un système judiciaire européen pour les actions collectives, qui avait été annoncé il y a plus de trente ans et ensuite différé à plusieurs reprises.

1.9

Le CESE se dit prêt à participer avec ses membres aux travaux futurs en la matière, auxquels il pense pouvoir contribuer utilement grâce à l'expérience de ses membres qui représentent la société civile organisée au sein des trois groupes d'intérêts qui le composent.

2.   Antécédents et aspects socio-économiques de la proposition

2.1

Dans le domaine des communications commerciales entre les entreprises, il existe des règles essentielles à respecter impérativement pour que la concurrence ne soit pas faussée et que le marché fonctionne. Lorsque ces règles ne sont pas volontairement adoptées, il faut les rendre obligatoires et les faire appliquer.

2.2

Avec la communication à l'examen, la Commission a esquissé un ensemble de mesures ayant pour objectif de combattre certaines pratiques commerciales trompeuses de la part d'entreprises publicitaires, notamment celles auxquelles recourent les sociétés éditrices d'annuaires.

2.3

L'objectif est d'assurer une meilleure protection aux entreprises, en particulier aux PME, notamment en ce qui concerne la pratique consistant la sollicitation par les sociétés d'annuaires d'entreprises pour leur proposer l'insertion ou l'actualisation, non souhaitée et non demandée, de données dans un annuaire d'entreprises, en apparence gratuitement, alors que sont ensuite demandées des redevances annuelles non négociées ni préalablement acceptées.

2.4

La Commission, après avoir réalisé une consultation publique, a annoncé son intention de renforcer la directive 2006/114/CE sur la publicité trompeuse et la publicité comparative, en interdisant explicitement des pratiques telles que la dissimulation de l'intention commerciale dans un message publicitaire et, dans le même temps, de renforcer l'application des règles dans les situations transfrontalières.

2.5

La communication mentionne également:

a)

l'inexistence de campagnes d'information appropriées concernant ces pratiques;

b)

le manque de connaissances sur les mécanismes adéquats pour résoudre les conflits, lesquels sont peu efficaces, longs et coûteux et ne garantissent pas une indemnisation appropriée et en temps voulu du préjudice causé;

c)

l'inexistence d'un réseau centralisé de coopération entre les autorités administratives qui assureraient le suivi des plaintes des professionnels.

2.6

Pour la Commission, le montant du préjudice financier causé par ce type d'action se situe entre 1 000 et 5 000 euros par an et par entreprise.

3.   Observations quant à la teneur de la communication

3.1   Aspect liés au fonds

3.1.1

Le CESE, comme il a déjà dit dans un avis antérieur, reconnaît aux communications commerciales en général et à la publicité en particulier, sous toutes leurs formes, un rôle d'importance sociale et économique, bien résumé par l'association de la publicité (AIP), notamment pour ce qui est de diffuser l'innovation, d'induire créativité et le divertissement, de favoriser la concurrence et d'accroître les possibilités de choix (1).

3.1.1.1

Toutefois, s'il est vrai que certaines entreprises publicitaires recourent à des pratiques frauduleuses pour annoncer leurs produits et tentent d'attirer les clients, il importe alors que la Commission relève qu'un grand nombre de plaintes pour pratiques trompeuses concernent des entreprises de ce secteur d'activité, ce qui ne veut pas dire pour autant que même dans ce cas particulier des sociétés d'annuaires, il ne s'agisse pas d'une activité légitime et essentielle à la vie économique des entreprises qui les utilisent pour faire la publicité de leur activité.

3.1.2

Le CESE reconnaît la pertinence et l'opportunité de la communication à l'examen, malgré le fait qu'elle soit essentiellement centrée sur les problèmes découlant de la manière dont les sociétés éditrices d'annuaires tentent d'attirer les clients.

3.1.3

Il relève l'objectif pertinent que s'est fixé la Commission de souligner le caractère transfrontalier de ce problème et son intention de garantir non seulement une réglementation adéquate mais aussi de s'assurer que celle-ci soit efficacement mise en œuvre et que les pratiques en question puissent faire l'objet d'un suivi, d'un contrôle et d'une sanction.

3.1.4

Déplore que la communication n'ait pas été précédée d'une vraie étude d'impact qui aurait permis de justifier, de manière plus solide, les options proposées, dont les coûts et les bénéfices ne sont d'ailleurs pas clairement définis ni évalués.

3.1.4.1

D'ailleurs, l'étude d'impact annoncée par la Commission lors de sa réunion avec les parties prenantes du 1er mars 2013 lui semble tardive et, bien qu'on n'en connaisse pas encore toute la portée et la teneur, pas assez décisive pour permettre un choix bien étayé.

3.1.5

De plus, non seulement d'un point de vue de pure herméneutique juridique, mais s'agissant également d'une protection plus efficace et plus effective des entreprises, le CESE doute que le cas qui préoccupe essentiellement la Commission puisse s'inscrire correctement dans le cadre de la directive qu'il est proposé de revoir.

3.1.5.1

En effet, la pratique analysée, qui consiste en une communication commerciale au sens large, ne ressort pas d'une activité publicitaire et s'apparente plutôt à une pratique agressive et frauduleuse de vente, qu'il conviendrait de situer plutôt dans le contexte plus large des pratiques commerciales déloyales ou abusives et qui devrait relever du même droit pénal que celles-ci.

3.1.5.2

Est en effet exclu du champ du concept de publicité tout type de communication dans lesquelles il n'existe pas ou dont on ne peut déduire l'existence d'un but de promotion de certains biens ou services, voire les communications qui ont lieu dans le cadre d'une relation commerciale et qui ne visent pas la fourniture de nouveaux biens ou services.

3.1.5.3

À la lumière de la directive, 2005/29/CE, le concept de pratiques trompeuses renvoie quant à lui à une pratique commerciale considérée comme déloyale car elle fournit des informations fausses, non véridiques d'une manière ou d'une autre et induit ou peut induire, y compris dans sa présentation générale, le consommateur moyen en erreur, même si l'information est factuellement correcte, par rapport à un ou plusieurs éléments, et qui, dans les deux cas, est susceptible de conduire le consommateur moyen à décider de s'engager dans une transaction, décision qu'il n'aurait pas prise autrement. En d'autres termes, la définition de la pratique trompeuse ne peut pas être limitée à la promotion de produits mais peut couvrir des situations dans lesquelles l'on ne peut déduire la finalité de promouvoir un produit ou des communications qui ont lieu dans le cadre d'une relation commerciale.

3.1.6

Par ailleurs, dans le livre vert sur les pratiques commerciales déloyales dans la chaîne d'approvisionnement alimentaire et non alimentaire interentreprises en Europe (2), la Commission met en garde à juste titre contre les risques de conflit et de chevauchements que peuvent entraîner une série de mesures s'adressant aux mêmes destinataires et à des régimes similaires non coordonnés, ce qui serait source de confusion au niveau de la transposition des actes juridiques par les États membres (3).

3.1.7

Le CESE regrette que la Commission européenne n'ait pas à ce jour encore ouvert le débat sur les différentes options possibles et que celles-ci n'aient même pas fait l'objet d'une consultation publique, la Commission ayant préféré choisir une option qui pourrait s'avérer moins avantageuse pour les entreprises, notamment pour les PME. Dès lors que la Commission a apparemment déjà décidé de l'option qu'elle prendrait en octobre prochain, comme annoncé, il semble pour le moins inutile de présenter une étude d'impact portant sur cinq options alors que le choix est déjà fait d'entrée de jeu.

3.1.8

Compte tenu de l'urgence apparente d'une prise de position immédiate sur la question centrale des annuaires, d'ailleurs déjà exprimée dans des études et des résolutions antérieures du PE, et étant donné l'importance et la gravité au plan économique des pratiques mentionnées au niveau européen (4), le CESE accepte que la Commission présente d'ores et déjà une proposition législative axée exclusivement sur cette question, notamment pour prévenir les cas dans lesquels les entreprises seraient la cible d'un harcèlement permanent, sous la menace de poursuites judiciaires devant une juridiction étrangère, devant faire face à une accumulation de «dépenses administratives» croissantes et des appels téléphoniques incessants de la part d'entreprises de recouvrement des créances, qui s'apparentent presque à des menaces.

3.1.8.1

D'ailleurs, non seulement les PME, mais également les professions libérales, les organisations non-gouvernementales, les bibliothèques, les établissements d'enseignement privé et même certains services de l'administration publique, qui ont eux-aussi été la cible de telles pratiques et devraient éventuellement être inclus dans le champ d'application de la directive, au moyen de l'élargissement du concept de «commerçant» de manière à couvrir tous ceux qui peuvent être visés par ces pratiques et ne sont pas protégés par d'autres instruments législatifs.

3.1.9

Cependant, le CESE considère qu'une approche plus cohérente aurait consisté à élargir la notion de pratiques commerciales déloyales, sous forme d'actions trompeuses et agressives, ainsi que la liste noire y relative qui figure dans la directive 2005/29/CE, aux relations entre les entreprises.

3.1.10

L'élargissement du champ d'application de cette directive aurait également pour effet positif de garantir une harmonisation accrue, en évitant aux États membres de créer de nouvelles lois ou actes juridiques, en vue de la transposer, ceux-ci pouvant à cette fin se limiter à élargir le champ d'application de leur législation nationale existante sur les pratiques commerciales déloyales, ce qui garantirait une application correcte de la législation de l'UE (5).

3.1.11

Par ailleurs, une simple modification de la directive 2006/114/CE dans les termes ambigus proposés par la Commission ne garantira pas la protection des PME dans les situations mentionnées dans la communication. En effet, outre le fait que ces pratiques constituent des actions agressives et non trompeuses, aux termes de la directive 2005/29/CE, celles-ci découlent déjà d'une relation commerciale préalablement établie et ne peuvent par conséquent relever du cadre applicable à la publicité.

3.1.12

En ce sens et sans préjudice de ce qui est dit au paragraphe 3.1.8, le CESE fait valoir que la Commission devra, dans un avenir proche, réfléchir à l'adoption d'une approche horizontale, propice à une plus grande cohérence des règles en matière de droit de la concurrence, de propriété intellectuelle et industrielle et de nature à garantir une protection uniforme contre toutes ces pratiques commerciales aussi bien sur le marché de détail que dans l'ensemble des relations contractuelles entre les professionnels, dans l'optique de la résolution du Parlement européen sur un marché du commerce de détail plus efficace et plus équitable.

3.1.13

Le CESE souligne par conséquent la nécessité d'une coordination accrue entre les DG JUST, DG COMP, DG MARKT et DG ENTR dans le domaine des actions à entreprendre en la matière et pour les futures propositions politiques législatives conformément aux priorités politiques établies dans le Small Business Act.

3.1.14

Sans préjudice de ce qui a été dit antérieurement et au cas où la Commission prendrait une autre option, le CESE souligne la nécessité de définir concrètement et préciser le concept de pratiques commerciales «les plus préjudiciables» pour que l'on comprenne quelles sont les pratiques commerciales qui, selon elle, méritent d'être mieux protégées par rapport aux autres.

3.1.15

De même, le CESE apprécierait que la Commission fournisse déjà une indication plus précise de l'ensemble des situations qui doivent figurer sur la «liste noire», dont il approuve totalement l'existence, dans la mesure où l'énoncé des pratiques qui doivent être considérées tout à fait illégitimes doit être aussi précis et exhaustif que possible. Pour établir cette liste, la Commission peut trouver un fondement suffisant dans les réponses à son enquête et dans les interventions des différentes parties concernées lors de la réunion du 1er mars 2013 (6)

3.1.16

Le CESE apprécierait dans ce cas également que la Commission évalue l'opportunité de l'élaboration d'une liste grise de pratiques qui seraient considérées illégitimes en fonction de certaines circonstances concrètes sur décision du juge au cas par cas.

3.1.17

De même, le CESE est d'avis, qu'en plus de simples listes, il faudrait renforcer et clarifier les notions de pratiques de publicité trompeuse et de publicité comparative illégale, de manière à parvenir à un traitement systématique dans un cadre juridique élargi, garantissant que les nouvelles pratiques déloyales sont encadrées par les législations révisées.

3.1.18

Le CESE, sans préjudice de ce qui est dit au paragraphe 3.1.8, estime que le cadre juridique de la directive 2005/29/CE doit être élargi comme il se doit, compte tenu en particulier de la nécessité de prévoir pour certaines micro- et moyennes entreprises une protection égale à celle dont bénéficient les consommateurs ou d'élargir cette dernière à ces entreprises, option qu'il défend, de manière à établir avec précision et rigueur que leur situation est comparable, comme c'est déjà le cas dans certains ordres juridiques de plusieurs États membres et comme le revendiquent à juste titre les associations et les organisations représentatives de ces entreprises (7).

3.1.19

En effet, le CESE estime qu'il s'agit de deux volets d'une même réalité et que l'on aurait tout avantage à ce que la révision de la directive 2005/29/CE intervienne simultanément et en parallèle à la révision de la directive actuelle 2006/114/CE en raison de leur interconnexion et de leur complémentarité (8), sur la base de la récente évaluation de cette directive (9).

3.1.20

La nature de ces pratiques et le mode opératoire des entreprises malhonnêtes démontre la nécessité d'un mécanisme judiciaire collectif d'action du groupe capable de garantir une réaction efficace et une protection accrue des professionnels dans le règlement des conflits qui surviendraient, non seulement pour faire cesser ces pratiques (10), mais également pour garantir une juste indemnisation du préjudice subi.

3.2   Aspects formels

3.2.1

Le CESE estime que la Commission devrait d'ores et déjà préciser la base juridique sur laquelle elle entend fonder les mesures à prendre, notamment s'il s'agira uniquement de celles qui fondent l'achèvement du marché intérieur ou d'autres.

3.2.2

De même, le CESE est d'avis que l'instrument juridique le plus adéquat à cette fin est le règlement, qui garantit une plus grande certitude juridique et une harmonisation plus effective.

4.   Analyse de la méthodologie

4.1

Concernant le calendrier proposé, le CESE approuve les étapes prévues par la Commission, notamment la création immédiate d'un réseau d'autorités aux fins de l'amélioration de l'application de la directive relative à la publicité trompeuse et à la publicité comparative et en vue de procéder à l'échange d'informations.

4.2

Il accueille aussi favorablement la création d'une procédure de coopération en matière d'application de la législation, sous une forme identique à celle qui est prévue dans le règlement no 2006/2004 du Parlement européen et du Conseil relatif à la coopération entre les autorités nationales responsables de l'application de la législation en matière de défense des consommateurs, ce qui permettrait d'introduire aussi bien des obligations d'assistance mutuelle entre les États membres dans ce domaine que des mesures d'identification des autorités responsables de l'application de la législation, sans préjudice des options relatives aux plates-formes public-privé, à l'instar de ce qui se pratique aux Pays-Bas, ni de l'élargissement à la coopération avec les organisations représentatives des parties prenantes.

4.3

Suggère ainsi, s'inspirant de ce qui se pratique en matière de protection du consommateur (11) et de règlement des conflits, la création d'un réseau européen d'appui aux PME pour le règlement des conflits transfrontaliers, de manière à diriger les entreprises victimes de fraude vers les mécanismes juridiques les plus appropriés.

4.4

Estime également qu'il y a lieu d'encourager les actions de formation et d'information ainsi que le partage de bonnes pratiques à l'intention de toutes les entreprises en vue de les alerter sur les risques inhérents à leur activité.

4.5

Par ailleurs et compte tenu du fait que la plupart des pratiques trompeuses se produisent dans un environnement numérique, le CESE juge nécessaire de promouvoir une approche plus ferme et appropriée en matière de protection des PME, en prenant en considération les pratiques auxquelles recourent les prestataires intermédiaires d'Internet et les relations contractuelles découlant de plates-formes comme E-Bay ou de plates-formes créées spécialement pour les transactions commerciales entre les professionnels.

4.6

En outre, la Commission devra tenir compte de la dimension internationale de ces pratiques dans le cadre de sa représentation auprès de l'OCDE (12). L'UE et ses États membres sont encouragés à débattre avec l'OCDE de l'extension du champ d'application de ses «lignes directrices relatives à la protection des consommateurs contre les pratiques transfrontalières frauduleuses et trompeuses» aux relations entre entreprises.

Le CESE propose qu'Europol lance un projet de recherche sur la fraude par marketing de masse dans l'UE: quelle est l'ampleur des dommages financiers et à combien s'élève le nombre de victimes; quel rôle jouent les principaux acteurs transfrontaliers et dans quelle mesure les profits ainsi engendrés peuvent-ils être investis dans d'autres activités illicites.

4.7

Enfin, le CESE attire l'attention sur la nécessité que la Commission prévoit l'enveloppe financière indispensable à la concrétisation des mesures proposées.

4.8

S'agissant des travaux futurs, le CESE tient à manifester expressément sa disponibilité à participer avec certains de ses représentants aux travaux mentionnés auxquels il pense pouvoir apporter une contribution grâce à l'expérience et à l'expertise de ses membres qui représentent la société civile des trois groupes d'intérêts qui le composent.

Bruxelles, le 22 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  JO C 351 de 15.11.2012, p. 6.

(2)  COM(2013) 37 final.

(3)  Il faut rappeler à cet égard les problèmes qui se sont posés concernant la transposition de la directive 2005/29/CE, qui ont été reconnus par le Parlement européen (cf. State of play of the Implementation of the provisions on advertising in the unfair comercial practices legislation, IP/A/IMCO/ST/2010-04, PE 440.288).

(4)  Voir les données fournies par la plate-forme Fraude Helpdesk.nl. aux Pays-Bas.

(5)  D'ailleurs, le Parlement européen avait déjà dit dans sa résolution sur les pratiques commerciales déloyales et la publicité trompeuse avoir constaté avec une certaine préoccupation que plusieurs États membres avaient désagrégé la liste noire figurant à l'annexe I de la directive 2005/29/CE au moment de la transposition de la directive, ce qui avait entraîné une grande confusion chez les consommateurs et dans les entreprises.

(6)  À titre d'exemple, l'on peut citer les suivantes:

a)

pratiques utilisées dans le cadre de transactions en ligne dans lesquelles les informations relatives à la transaction ne sont pas fournies de la même manière à tous les intéressés, ce qui conduit à la discrimination de certains d'entre eux;

b)

pratiques utilisées dans le cadre de ventes aux enchères et de ventes en ligne (e-bay). Il est apparu que dans ce contexte, il est parfois plus intéressant de s'enregistrer en tant que consommateur, ce qui permet de bénéficier d'un plus grand nombre de garanties;

c)

pratiques supposant la présentation de produits certifiés ne faisant l'objet d'aucune certification;

d)

pratiques dans lesquelles les entreprises affirment appartenir à une autorité publique, obligeant le professionnel à souscrire un service donné ou acquérir un produit donné, en vue du respect supposé de normes fiscales ou de sécurité;

e)

pratiques supposant l'acquisition de biens, sur un marché transfrontalier, l'acquéreur étant informé, postérieurement, que la prestation de services après-vente ne pourra être assurée que dans le pays d'origine du produit;

f)

pratiques supposant la création de sites Web comparatifs qui visent essentiellement à conduire le professionnel à acquérir un produit donné, en le présentant comme étant le plus indiqué à son profil commercial. Certains de ces outils comparatifs, notamment dans le secteur financier, ne fournissent aucune information sur la nature du site et le mode de financement de celui-ci;

g)

pratiques de publicité «cachée» dans un environnement numérique notamment au moyen de réponses publiées sur des réseaux sociaux, par des consommateurs/entreprises (normalement des collaborateurs de l'entreprise payée par celle-ci) pour que les professionnels aient recours à cette entité;

h)

pratiques ayant pour objectif l'utilisation de tests comparatifs alors que ceux-ci sont déjà désactualisés voire inexistants;

i)

pratiques supposant le consentement implicite du professionnel dans l'acquisition d'un produit donné ou la souscription d'un service donné.

(7)  Cette solution consiste en l'option 5 de l'analyse d'impact en préparation.

(8)  Il y a lieu de citer l'Autriche comme un exemple de compatibilité entre la directive 2006/114/CE et la directive 2005/29/CE, compatibilité rendue possible par le remplacement lors de la transposition du terme «consommateurs» par l'expression «cible de pratiques commerciales», ce qui a permis de garantir clairement que les règles de la directive 2005/29/CE soient également applicables aux relations entre les professionnels (cf. IP/A/IMCO/ST/2010-04, PE 440.288 mentionnés dans la note n.o 3 supra).

(9)  COM(2013) 138 final du 14.3.2013.

(10)  Il est par conséquent indispensable d'ajouter le futur instrument législatif à la liste figurant à l'annexe I de la directive 2009/22/CE.

(11)  http://ec.europa.eu/consumers/ecc/contact_en.htm

(12)  La dimension internationale est mise en évidence par l'International Mass-Marketing Fraud Working Group (IMMFWG—Groupe de travail international sur la fraude par marketing de masse), un réseau indépendant formé par les organismes de répression, de réglementation et de protection des consommateurs de sept pays (Australie, Belgique, Canada, Pays-Bas, Nigeria, Royaume-Uni et États-Unis). L'objectif du Groupe est de faciliter les échanges internationaux d'informations et de renseignements, de coordonner les opérations transfrontalières visant à détecter, à interrompre et à faire cesser la fraude par marketing de masse, tout en renforçant la sensibilisation du public et les mesures d'éducation de l'opinion publique ayant trait aux systèmes de fraude par marketing de masse à l'échelle internationale. Cf. «Mass-marketing fraud: a threat assessment» (fraude par marketing de masse: évaluation de la menace), International Mass-Marketing Fraud Working Group, juin 2010.


19.9.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 271/66


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen sur l'état de l'union douanière»

COM(2012) 791 final

2013/C 271/12

Rapporteur: Jan SIMONS

La Commission européenne a décidé, le 21 décembre 2012, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen sur l'état de l'union douanière»

COM(2012) 791 final.

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 29 avril 2013.

Lors de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 22 mai 2013), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 139 voix pour et 7 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le Comité peut souscrire, dans les grandes lignes, à la communication de la Commission. Celle-ci se prononce en effet en faveur d'une solide union douanière qui puisse contribuer sensiblement à la compétitivité et au bon fonctionnement du marché intérieur au sein de l'Union.

1.2

Il invite la Commission à prendre expressément en considération, au moment de définir une marche à suivre, les enquêtes et les évaluations internes et externes qui ont été réalisées ces trois dernières années concernant le fonctionnement de l'union douanière.

1.3

Le Comité juge essentiel de mettre en place une politique douanière unique sur la base de procédures uniformes, transparentes, efficaces, efficientes et simplifiées, de façon à ce que l'Union européenne puisse affronter la concurrence mondiale et de manière à préserver les droits et la sécurité des entreprises et des consommateurs européens ainsi que la propriété intellectuelle, en évitant toutefois d'enserrer les États membres dans un carcan lorsqu'il s'agit d'appliquer la législation douanière afin qu'ils puissent continuer de prendre en considération l'ampleur de leurs flux commerciaux.

1.4

Plus particulièrement, la grande importance que la Commission accorde dans sa communication à la facilitation des échanges nécessite que les capacités de mise en œuvre des administrations douanières puissent être adaptées aux flux commerciaux nationaux, afin notamment d'accroître leur efficacité de manière à simplifier au maximum la vie des entreprises; à cet égard, il serait utile pour l'avenir d'entreprendre une harmonisation sur la base des «bonnes pratiques» et de développer une approche du contrôle axée sur les systèmes («systems-based approach»).

1.5

Le Comité aurait souhaité que la communication décrive plus en détail les actions concrètes à mettre en œuvre pour le court et le moyen terme. Les priorités n'ont été définies que pour l'année 2013. Pour les années ultérieures, la communication renvoie heureusement déjà au projet qui sera présenté en 2014.

1.6

Le Comité attire tout particulièrement l'attention sur la nécessité d’investir pour donner aux administrations douanières les moyens de mener une lutte contre la fraude et la criminalité qui présente un meilleur rapport coût-efficacité et pour réduire le ralentissement des flux commerciaux.

2.   Introduction

2.1

La troisième partie du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (l'un des traités de Lisbonne, en abrégé le «TFUE»), relative aux politiques et actions internes de l'Union, contient deux articles sur le marché intérieur, relativement courts et rédigés en des termes très généraux (articles 26 et 27 du TFUE). Le marché intérieur y est défini comme un espace sans frontières intérieures dans lequel la libre circulation des marchandises, des personnes, des services et des capitaux est assurée selon les dispositions du traité.

2.2

Il a fallu attendre l'Acte unique européen, en 1986, pour que ce sujet soit intégré aux Traités européens (article 8A du traité instituant la Communauté économique européenne, en abrégé le «traité CEE»). Celui-ci prévoyait l’achèvement du marché unique pour le 1er janvier 1993. Malheureusement, cet engagement n'est toujours pas tenu à l’heure actuelle.

2.3

Le processus fut heureusement bien plus rapide, et bien différent, pour l'union douanière, précurseur indispensable et composante essentielle du marché intérieur: inspirée du modèle de collaboration fructueuse qu'était le Benelux, elle figurait déjà dans le premier traité CEE (traité de Rome) de 1958.

2.4

Ce traité prescrivait en une vingtaine d'articles, de manière très détaillée, la marche à suivre et l'échéancier à respecter de façon à obtenir au plus tard après quinze ans, durée maximale prévue pour la période transitoire (article 8, paragraphe 5), une «interdiction, entre les États membres, des droits de douane à l'importation et à l'exportation et de toutes taxes d'effet équivalent» et «l'adoption d'un tarif douanier commun dans leurs relations avec les pays tiers» pour «l'ensemble des échanges de marchandises».

2.5

Ces dispositions figurent non seulement dans le traité de Rome (article 9 du traité CEE), mais aussi, plus de cinquante ans plus tard, dans le traité de Lisbonne (article 28 du TFUE). Cependant, puisqu'elles ont déjà toutes été mises en œuvre – suppression des droits de douane aux frontières nationales en 1968, suivie d'une série de réglementations sur les questions douanières et les règles d'origine, qui ont abouti au code des douanes communautaire de 1992 et au tarif douanier commun de 1987 –, le traité de Lisbonne peut se limiter à trois articles très courts sur l'union douanière (articles 30 à 32 du TFUE), contre une vingtaine d'articles détaillés dans le traité de Rome.

2.6

À côté des bases juridiques précitées, des instruments juridiques thématiques, tels que les règlements relatifs au respect des droits de propriété intellectuelle, aux précurseurs de drogues, aux biens culturels, aux contrôles des mouvements d'argent liquide et à la surveillance du marché ou les textes législatifs visant à protéger les citoyens et l'environnement, contribuent au contrôle de l’application de ces règles par les autorités douanières de l'Union.

2.7

Comme énoncé à l'article 3 du TFUE, l'union douanière fait partie des compétences exclusives de l'Union européenne, telles que décrites à l'article 2, point 1, du TFUE. La responsabilité de l'application de la législation douanière incombe aux États membres (pour mémoire, le marché intérieur est une compétence partagée entre l'Union et ses États membres, conformément à l'article 2, point 2, du TFUE).

2.8

La valeur ajoutée de l'union douanière est illustrée notamment par les chiffres suivants, fournis par la Commission européenne: 17 % du commerce mondial transitent par les douanes européennes, pour une valeur annuelle de 3 300 milliards d'euros.

3.   Communication de la Commission

3.1

La Commission a présenté le 21 décembre 2012 la communication à l’examen sur l'état de l'union douanière. Celle-ci est pour elle l'occasion de faire le point, à mi-mandat, sur sa situation, sur ce qui a été atteint par rapport aux objectifs fixés et sur les défis à venir.

Plus concrètement, la Commission indique que cette communication a pour objet de:

souligner la valeur ajoutée et l’importance fondamentale des services fournis par l’union douanière, qui constituent les fondements de la croissance, de la compétitivité et de la sécurité du marché intérieur et de l'Union européenne;

reconnaître que l’union douanière est confrontée à des défis qui requièrent une réponse au niveau européen; et de

définir une marche à suivre pour relever ces défis et réaliser une union douanière plus performante, plus solide et plus unifiée d’ici à 2020.

3.2

Dans le cadre de ces objectifs, la Commission considère cette communication comme le point de départ d'un débat sur trois points importants:

achever la modernisation débutée en 2003 en parachevant et en adoptant le nouveau code des douanes de l'Union et les actes délégués et d'exécution y afférents, et veiller à leur mise en œuvre rapide par les États membres;

recenser et combler les lacunes dans l'application de la législation douanière et définir les priorités à traiter. À cet égard, la Commission a réalisé il y a quelques années une auto-évaluation interne, et une évaluation externe du fonctionnement de l'union douanière sera publiée sous peu;

modifier la structure de gouvernance afin d'améliorer l'efficience et l'efficacité de l'union douanière. La Commission envisage de présenter un projet de réforme à ce sujet en 2014.

3.3

La Commission invite le Conseil et le Parlement européen à:

achever sans tarder la modernisation de l'union douanière;

définir les priorités de l'union douanière, dans le cadre d'un dialogue avec les parties intéressées et en tenant compte des résultats des récentes évaluations internes et externes et des analyses des lacunes;

réformer la gouvernance ainsi que les tâches et responsabilités des États membres et de la Commission en ce qui concerne la gestion opérationnelle globale de l’union douanière. L'une des prochaines étapes dans ce contexte devrait être l'élaboration d'un projet de réforme, qui devrait démarrer en 2014.

3.4

La Commission indique dans sa communication qu'en raison de la mondialisation accrue, les États membres ne seraient plus en mesure à eux seuls de répondre efficacement aux défis que celle-ci entraîne. Elle estime que la mondialisation exige un surcroît d'unité européenne, ce qui rend nécessaire une plus grande intégration.

4.   Observations générales

4.1

Le Comité se félicite que la Commission publie à mi-mandat cette communication sur l'état de l'union douanière. Il insiste également sur l'extrême importance de l'union douanière pour l'UE, notamment pour la croissance, la compétitivité et la sécurité du marché intérieur.

4.2

Le Comité constate l'existence de défis externes et internes que l'Union européenne se doit de relever.

4.2.1

Peuvent être cités comme des défis externes les flux commerciaux croissants, des chaînes logistiques nouvelles et complexes, de nouvelles formes de pression concurrentielle, une hausse de la criminalité, et notamment de la fraude, les activités terroristes ou encore les attentes, par exemple, d'autres organismes chargés de l'application des lois pour le compte desquels agissent les administrations douanières.

4.2.2

Le Comité considère comme des défis internes le manque d'efficience et d'efficacité résultant des différences entre les 27 États membres sur le plan de la mise en œuvre, du fait par exemple que chaque État membre développe ses propres systèmes d'informatisation, que différentes méthodes de travail sont utilisées et qu'il existe de grandes différences dans les niveaux de formation, ce qui nuit à l'application uniforme de la législation européenne par les États membres. La situation est encore aggravée actuellement par la crise économique généralisée.

4.3

Le Comité juge essentiel de mettre en place une politique douanière unique sur la base de procédures uniformes, transparentes, efficaces, efficientes et simplifiées, de façon à ce que l'Union européenne puisse affronter la concurrence mondiale et de manière à préserver les droits et la sécurité des entreprises et des consommateurs européens ainsi que la propriété intellectuelle.

4.4

Il a formulé une recommandation en ce sens dans un avis publié récemment (1) et la réitère avec force ci-dessus en raison de son importance.

4.5

Le Comité souligne en outre, avec tout autant de vigueur, qu'il y a lieu d'éviter que les États membres soient enserrés dans un carcan lorsqu'il s'agit d'appliquer la législation douanière afin qu'ils puissent continuer de prendre en considération l'ampleur des flux commerciaux concernés. À ce propos, le Comité souligne que les États membres ont multiplié les dispositifs pour faciliter les échanges: dématérialisation des formalités, procédures simplifiées, mise en œuvre du statut d'opérateur agréé.

4.6

Toute harmonisation doit par ailleurs être fondée sur les «bonnes pratiques» et non sur un niveau moyen européen.

4.7

Si l'on veut rationaliser les coûts, orienter les travaux sur la recherche de résultats, y compris en termes de revenus pour ce qui est de l'aspect financier, et obtenir de réelles avancées, il est souhaitable, selon le Comité, de centrer les contrôles pas tant sur les transactions individuelles que sur une approche axée sur les systèmes («systems-based approach») qui soit fondée sur une évaluation des risques.

4.8

Le Conseil «Compétitivité» des 10 et 11 décembre 2012 insiste lui aussi, dans ses conclusions, sur la nécessité «de continuer à promouvoir une application uniforme de la législation douanière et des approches modernes et harmonisées en ce qui concerne les contrôles douaniers tout en laissant, lorsque cela se justifie et compte tenu des incidences pour les opérateurs et les États membres, une certaine souplesse pour les solutions nationales» (2).

4.9

Il insiste également sur l'importance «de renforcer la coopération avec d'autres agences, tant au niveau national qu'au niveau de l'UE dans les domaines de la sécurité, de la santé, de la sûreté et de l'environnement, ainsi qu'avec des partenaires internationaux, tout en respectant la répartition des compétences entre l'UE et les États membres dans ce domaine» (3).

4.10

Le Comité peut également souscrire à l'opinion de la Commission européenne selon laquelle le développement de l'union douanière ne pourra se poursuivre que si un mécanisme permettant de mesurer et d'évaluer les performances de cette dernière est mis en place.

4.11

Le Comité attire également l'attention sur le fait que d'autres obstacles peuvent s'ajouter à la rigidité des procédures douanières, tels que des infrastructures déficientes aux frontières extérieures, qui nuisent au bon déroulement des opérations. Dans la mesure où des pays tiers sont concernés, il y a lieu de privilégier une gestion commune de cette problématique.

5.   Observations spécifiques

5.1

Le Comité s’inquiète de la disparité croissante entre, d’une part, l’augmentation constante de la charge de travail et, d’autre part, la diminution continue du nombre d’agents des douanes. L’informatisation d'un grand nombre de tâches n’empêche pas une augmentation de la charge de travail pour les agents des douanes. Une attention bien plus soutenue devrait être accordée à cette problématique, dont la formation et le perfectionnement constituent également des facettes importantes.

5.2

À cet égard, le Comité envisage à terme la fondation d’une haute école de formation douanière européenne, chargée d’amener au niveau requis le personnel des administrations douanières des États membres.

5.3

Le Comité considère la sûreté de la chaîne d'approvisionnement et la gestion des risques comme des questions de grande importance pour l’union douanière. Il rendra prochainement un avis sur la communication récemment publiée par la Commission à ce sujet [COM(2012) 793 final; INT/681, rapporteur: M. PEZZINI].

5.4

Le Comité attend avec tout autant d’impatience les propositions de la Commission susceptibles de s’attaquer aux problèmes qui résultent des différences d’approche concernant les infractions à la législation douanière européenne et l’application de sanctions, ne serait-ce qu'au nom du principe d'égalité. Il convient à cet égard de garder à l’esprit que, pour les États membres, la modification des régimes de sanctions nationaux dans leur propre législation douanière et pénale est une question sensible.

5.5

Le Comité propose, en guise de première étape, un rapprochement des types d'infractions, comme on l'a fait pour le transport par route (4).

5.6

Le Comité accueille favorablement la proposition de la Commission d’élaborer des procédures types à incorporer dans les actes législatifs qui seront adoptés à l’avenir, de manière à faciliter le contrôle, par les douanes, de l’application des lois imposant des interdictions et des restrictions pour les marchandises importées et exportées.

5.7

Le Comité aurait souhaité que la Commission décrive de manière plus concrète dans sa communication les conséquences de ses propositions sur le plan de la charge réglementaire et administrative.

5.8

Un meilleur exercice des missions douanières est primordial. Il conviendrait donc de développer les coopérations entre administrations douanières, renforcer les pouvoirs des agents et avoir de vraies stratégies européennes de lutte contre les fraudes. Il pourrait aussi être souhaitable, dans certaines circonstances, d'organiser un transfert de missions et d'activités des États membres individuels vers des institutions communes, liées ou non à la Commission ou aux États membres dans leur ensemble, par exemple si celui-ci permet de réaliser de substantielles économies financières et/ou de faciliter l'exécution des missions douanières.

5.9

Il s'attendait également à trouver davantage d'informations de fond dans cette communication. Ce n’est malheureusement pas le cas, ce qui rend difficile d'évaluer correctement la communication. Heureusement, comme l'ont explicitement indiqué les représentants de la Commission, les propositions législatives à venir seront accompagnées d'une analyse d'impact.

5.10

Comme la Commission, le Comité s'inquiète du constat selon lequel l'organisation actuelle de l'union douanière, et notamment des processus communs, a atteint ses limites en termes d'efficacité et d'efficience. Il estime que les administrations douanières doivent disposer d’un système de gestion moderne et efficient pour pouvoir continuer de travailler efficacement et à moindre coût.

5.11

Le Comité attire par ailleurs l’attention sur le fait que les administrations douanières devraient se voir accorder des moyens financiers suffisants, par exemple pour mettre à niveau leurs systèmes informatiques, de façon à pouvoir lutter efficacement contre la fraude et la criminalité, y compris en cette période de crise économique.

Bruxelles, le 22 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  JO C 229 du 31.7.2012, pp. 68-71.

(2)  Conclusions sur les progrès réalisés concernant la stratégie pour l'avenir de l'union douanière, 3208e réunion du Conseil «Compétitivité», Bruxelles, 10 et 11 décembre 2012.

(3)  Idem.

(4)  Règlement (CE) no 1071/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 établissant des règles communes sur les conditions à respecter pour exercer la profession de transporteur par route, et abrogeant la directive 96/26/CE du Conseil.


19.9.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 271/70


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Plan d'action: droit européen des sociétés et gouvernance d'entreprise — Un cadre juridique moderne pour une plus grande implication des actionnaires et une meilleure viabilité des entreprises»

COM(2012) 740 final

2013/C 271/13

Rapporteur: M. DE LAMAZE

Le 19 février 2013, la Commission a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions – Plan d'action: droit européen des sociétés et gouvernance d'entreprise – un cadre juridique moderne pour une plus grande implication des actionnaires et une meilleure viabilité des entreprises»

COM(2012) 740 final.

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 29 avril 2013.

Lors de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 22 mai 2013), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 135 voix pour, 1 voix contre et 11 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le CESE accueille favorablement les principales orientations du présent plan d’action se rapportant à la gouvernance d’entreprise.

1.2

Le CESE met en garde contre le risque d’alourdir le coût réglementaire de la conformité pour les entreprises cotées et rappelle le besoin vital, pour les entreprises, d’un marché financier ouvert. Le bon équilibre entre mesures législatives et normes juridiques «douces» –recommandations et codes de gouvernance – dépendra du détail de la mise en œuvre de chaque initiative présentée.

1.3

En particulier, concernant la mesure novatrice que représente l’obligation de transparence des entreprises vis- à-vis de leur politique de rémunération, le CESE attend de la Commission qu’elle fixe des exigences raisonnables afin de ne pas mettre en péril le développement de celles-ci par une augmentation de leurs coûts de fonctionnement. Il attire l’attention sur le fait que ces nouvelles règles devront s’attacher à préserver le «secret des affaires».

1.4

Sur le point essentiel que représente l’idée d’un vote des actionnaires sur la politique de rémunération, le CESE estime que la recherche d’une harmonisation européenne ne peut aller au-delà d’un vote consultatif sans remettre en cause le fondement du droit des sociétés.

1.5

Dans le cadre de l’étude d’impact annoncée, le CESE invite la Commission à examiner rigoureusement le bien-fondé de chaque initiative pour le cas spécifique des PME.

1.6

De façon complémentaire aux initiatives annoncées, le CESE estime que, dans la perspective d’un fonctionnement efficace de l’entreprise, notamment en période de crise, la nécessité de renforcer l’implication des salariés aurait mérité d’être soulignée.

1.7

Le CESE appelle, en outre, à un renforcement de la formation des administrateurs et fait valoir l’intérêt de favoriser l’échange de bonnes pratiques observées en la matière.

1.8

En matière de droit des sociétés, le CESE estime nécessaire de recentrer les priorités sur le projet de société privée européenne ainsi que sur des mesures visant à faciliter les transferts de siège au sein de l’UE. Dans un cas comme dans l’autre, l’implication des salariés doit être sécurisée et confortée, notamment en se basant sur la consultation spécifique des partenaires sociaux, qui est prévue dans les traités européens.

1.9

Le CESE n’est pas favorable à l’idée d’une reconnaissance de la notion d’«intérêt de groupe», qui, à terme, aurait pour conséquence de mettre à mal le principe de l'indépendance des personnes morales, en particulier lorsqu’elles sont non européennes, au sein du groupe de sociétés. Il s’inquiète, en outre, d’une logique visant à faire primer l’intérêt du groupe sur celui de la filiale auquel il pourrait se voir sacrifié.

2.   Contenu de la communication

2.1

Dans la continuité de sa communication «Europe 2020» où elle appelait à l’amélioration de l’environnement des entreprises en Europe, la Commission propose dans le présent plan d’action des initiatives visant à consolider le cadre de gouvernance d’entreprise de l’UE selon deux lignes directrices:

grâce à une transparence accrue tant à l’égard des actionnaires et du public que de l’entreprise: publication de la politique de diversification des conseils d’administration et de surveillance et de la politique de gestion des risques non financiers (risques stratégiques, opérationnels et de conformité …); amélioration des explications à fournir par les entreprises en cas de dérogation aux recommandations des codes de gouvernance; publicité quant aux politiques de vote des investisseurs institutionnels, identification des actionnaires;

grâce à une meilleure implication des actionnaires: surveillance de la politique de rémunération; extension de leur droit de regard sur les transactions avec des parties liées; encadrement de l’activité des conseillers en vote; clarification de la notion d’«action concertée»; encouragement à l’actionnariat salarié.

2.2

Parallèlement, sont annoncées diverses initiatives dans le domaine du droit des sociétés, qui concernent par définition, au-delà des sociétés cotées en bourse, toutes les sociétés anonymes: facilitation des opérations transfrontières (fusions et scissions transfrontalières, et, éventuellement, transfert de siège), examen de la suite à donner à la proposition de statut de société privée européenne (SPE), campagne d’information sur les statuts de la société européenne (SE) et de la société coopérative européenne (SCE), mesures ciblées sur les groupes d’entreprises (reconnaissance de la notion d’«intérêt de groupe» notamment), codification du droit européen des sociétés. Toutes ces initiatives feront l’objet d’analyses d’impact ex ante, et pourront être modifiées en conséquence.

3.   Observations générales

3.1   De façon générale, le CESE accueille favorablement les mesures annoncées dans le présent plan d’action qui, pour ce qui est de la gouvernance d’entreprise, va, sauf exception (examinée plus loin) dans le sens d’une consolidation plus que d’un remaniement en profondeur du cadre actuel.

3.2   Ce plan d’action semble témoigner d’une certaine recherche d’équilibre entre mesures législatives et normes juridiques «douces» – recommandations et codes de gouvernance –. Le CESE note que toute obligation supplémentaire en matière de transparence, et, en particulier en matière de politiques de rémunération, aura un impact sur les coûts de fonctionnement des entreprises.

3.3   Le CESE regrette que, si le plan d’action vise à améliorer l’implication des actionnaires, il ne vise pas, de façon complémentaire, à renforcer l’implication des salariés dont il avait souligné l’importance dans sa réponse au Livre vert de 2011 (1). Le CESE tient à rappeler, en effet, que la participation des salariés dans les processus de décision est reconnue comme contribuant au développement durable et à la performance de l’entreprise dans le droit de l’UE.

3.4   Au-delà du présent plan d’action, il reconnaît que cette notion de participation des salariés gagnerait à être précisée dans son contenu et ses contours exacts eu égard aux fondements du droit des sociétés qui pourraient s’en trouver modifiés (2). Le CESE est favorable à une approche en termes de parties prenantes multiples, laquelle correspond aux défis auxquels sont confrontés les entreprises qui recherchent un développement orienté sur le long terme, ainsi qu’un engagement vis-à-vis de leurs salariés et de leur environnement. Ce type d’approche implique un bon dialogue social et un climat de confiance basé sur des dispositions claires en matière d’information, consultation, et participation lorsque celles- ci existent. En ce sens, le CESE souhaite encourager l’exploration de voies nouvelles, telles que le concept d’entreprise durable (sustainable company) (3).

3.5   Dans la continuité de sa réponse au Livre vert de 2011, le CESE fait également valoir qu’une bonne gouvernance d’entreprise est aussi fonction des compétences – notamment en matière juridique et financière – des membres du conseil d’administration. Il souligne la nécessité d’adapter la formation de ces derniers au type d’entreprise, notamment à la taille de celle- ci, et encourage toute initiative visant à favoriser l’échange de bonnes pratiques en ce domaine. Cet aspect lui semblerait devoir utilement faire l’objet d’une prochaine recommandation de la part de la Commission. Pour des raisons de transparence et de sécurité juridique, notamment pour les PME et leurs employés, les mesures destinées à compléter le droit européen des sociétés doivent éviter tout «régime shopping» consistant à autoriser l’immatriculation ex nihilo d’entités européennes ou à séparer le siège administratif et le siège social de l’entreprise.

3.6   Concernant la gouvernance d’entreprise

3.6.1

Le CESE a déjà eu l’occasion de rappeler que la gouvernance d’entreprise répond au souci d’assurer la survie et la prospérité de l’entreprise (4) en instaurant les conditions de la confiance entre les différents acteurs (5). Comme en droit européen des sociétés, les initiatives en matière de gouvernance doivent contribuer à faciliter la vie et le fonctionnement des entreprises et concourir à leur compétitivité.

3.6.2

Au regard de la chute observée du nombre d’entrées en bourse et du nombre grandissant d’entreprises sortantes, le CESE rappelle que les entreprises, et les PME, en particulier, ont un besoin vital d’accès au marché financier. Les difficultés actuelles de financement de nombre d’entre elles freinent considérablement leur développement. Afin d’assurer un marché financier ouvert, le CESE estime primordial, de ne pas alourdir les contraintes déjà très fortes liées à la gouvernance d’entreprise pour les sociétés cotées en bourse, et notamment les PME, sous peine de décourager davantage encore l’accès à la cotation. Il pointe, en outre, le risque d’accentuer l’asymétrie, du point de vue de la concurrence, existant entre entreprises cotées et entreprises non cotées, ces dernières n’étant pas soumises aux obligations de transparence auxquelles sont soumises les premières et étant, par contre, les premières bénéficiaires des informations divulguées par celles-ci.

3.6.3

Le CESE regrette que la préoccupation exprimée par la Commission de prendre en compte la particularité des PME – en termes de taille mais aussi de structures d’actionnariat – ne soit formulée qu’en termes très généraux et ne soit pas déclinée et traduite concrètement pour chacune des initiatives annoncées.

3.6.4

Le CESE souligne, à cet égard, la nécessité de modifier la définition européenne de la PME afin de mieux prendre en compte les caractéristiques des valeurs petites et moyennes.

3.6.5

Plutôt qu’une approche normative, le CESE préconise, autant que possible, une approche qui s’en tienne à définir les principes, charge ensuite aux États de les adapter au mieux en fonction des caractéristiques nationales. En 2003 (6), la Commission soulignait déjà la remarquable convergence des codes nationaux de gouvernance d’entreprise. Le CESE note avec satisfaction que, sur les points essentiels du présent plan d’action, en particulier, l’amélioration des explications à fournir par les entreprises qui s’écartent des codes, la Commission semble adopter cette démarche.

3.6.6

Concernant l’objectif général de transparence, le CESE soutient les initiatives de la Commission visant à généraliser au sein de l’UE des règles ayant cours dans certains États membres, notamment celles qui favorisent la réalisation de performances de long terme des entreprises. Toute la difficulté lui semble de trouver le point d’équilibre entre les exigences légitimes de transparence et la nécessité de ne pas entraver leur croissance par un surcoût administratif et par la divulgation d’informations sensibles pour la concurrence.

3.6.7

Estimant que l’exigence ramassée sous la formule «se conformer ou s’expliquer» est au fondement des principes de la gouvernance, le CESE partage le constat selon lequel une mise en œuvre plus rigoureuse de celle-ci est nécessaire. Il se félicite d’une initiative de la Commission en ce sens.

3.6.8

Le CESE prend acte de la volonté de la Commission de renforcer le rôle des actionnaires, afin de trouver un équilibre satisfaisant entre les différents pouvoirs. Il est sensible au fait que, derrière les droits annoncés en vue de permettre aux actionnaires de s’impliquer davantage, se dessinent aussi des devoirs dont ils auront à s’acquitter.

3.6.9

Estimant pour cela nécessaire de favoriser le dialogue entre actionnaires et émetteurs, le CESE attache une importance particulière à l’initiative visant à favoriser la connaissance par les entreprises de leur actionnariat, qui en constitue le préalable indispensable. Le futur instrument européen en la matière devra tenir compte des différences de législation relative à la protection des données personnelles.

3.6.10

Le CESE soutient également la proposition visant à obliger les investisseurs institutionnels à divulguer leurs politiques de vote et d’engagement, et en particulier leur horizon d’investissement dans les sociétés dont ils acquièrent les titres.

3.6.11

Sur le point essentiel que représente l’idée d’un vote des actionnaires sur la politique de rémunération et le rapport concernant les rémunérations, le CESE estime que la recherche d’une harmonisation européenne ne peut aller au-delà d’un vote consultatif.

3.7   Concernant le droit des sociétés

3.7.1

Parmi les différentes initiatives annoncées, le CESE retient un autre ordre de priorités que celui proposé par la Commission.

3.7.2

À la différence de la Commission, le CESE considère qu’il importe de poursuivre les efforts sur le projet de SPE et d’essayer de trouver une solution qui puisse être consensuelle.

3.7.3

Le CESE estime qu’il est également prioritaire de faciliter les transferts de siège au sein de l’UE et que l’initiative en la matière qu’il appelle de ses vœux devra continuer, elle aussi, à sécuriser et conforter les conditions d’une implication active des salariés.

4.   Observations spécifiques

4.1   Concernant la gouvernance d’entreprise

4.1.1

Le CESE reconnaît la nécessité, pour les entreprises, d’améliorer la qualité des explications qu’elles sont tenues de fournir lorsqu’elles s’écartent des codes de gouvernance. Ces explications s’apparentent parfois à un pur exercice rhétorique, alors qu’elles devraient être, au contraire, dûment circonstanciées, mentionnant, le cas échéant, la solution de remplacement mise en œuvre.

4.1.2

Le CESE note avec satisfaction que la Commission laisse à la responsabilité des États et des codes nationaux le soin de préciser les modalités permettant d’améliorer les déclarations de pratiques de gouvernance.

4.1.3

Comme il a pu déjà le souligner (7), la bonne qualité des explications à fournir par l’entreprise va, avant tout, dans son propre intérêt, l’entreprise étant par ailleurs soumise à la sanction du marché en cas d’explications insuffisantes.

4.1.4

Dans la mesure où pourrait émerger le souhait de la part de la Commission de faire contrôler – voire certifier- la qualité de l’information relative à la gouvernance transmise aux marchés, le CESE tient à préciser qu’il n’est pas favorable à une démarche contraignante dans ce domaine. Il pointe, en outre, la difficulté technique à laquelle se heurterait un tel projet qui, à l’instar de la directive relative au contrôle légal des comptes instituant un comité d’audit, supposerait de définir des critères homogènes au niveau de l’UE applicables à l’ensemble des entreprises.

4.1.5

La mesure pouvant alourdir le plus significativement les charges administratives pour les entreprises concerne les exigences de transparence à l’égard des politiques de rémunération et du détail des rémunérations individuelles des administrateurs, qui relèvent pour l’instant des diverses recommandations et codes nationaux de gouvernance, et pour lesquelles la Commission prévoit, dans son plan d’action, un instrument contraignant au niveau de l’UE. Le CESE pourrait accepter une telle mesure pour autant seulement que sa mise en œuvre concrète n’alourdisse pas sensiblement le coût réglementaire pour les entreprises, lequel devra faire l’objet d’une évaluation rigoureuse lors de l’étude d’impact préalable. Le CESE met également en garde contre le risque que la divulgation des critères relatifs à la part variable de rémunération, pour les administrateurs exécutifs, mette en péril le «secret des affaires». Autant que sur le niveau lui-même des montants consentis, le CESE souligne l’importance de transmettre aux actionnaires des informations claires et exhaustives sur leur calcul et les critères de détermination.

4.1.6

L’un des points qui pose le plus de difficultés, aux yeux du CESE, concerne l’idée d’un droit de vote des actionnaires sur la politique de rémunération et le rapport concernant les rémunérations, sur les modalités de laquelle il appelle à une vigilance particulière. Le CESE remarque que la Commission reste relativement floue sur la question et ne précise pas la portée de ce vote – consultatif ou contraignant.

4.1.7

Au-delà des difficultés juridiques et techniques de mise en œuvre, un vote contraignant supposerait un transfert de compétences du Conseil vers les actionnaires. Le CESE ne peut soutenir une telle orientation qui modifierait en profondeur le droit des sociétés, même si chaque État membre doit, à ses yeux, pouvoir décider de la nature, consultative ou contraignante, du vote.

4.1.8

Le CESE s’est déjà prononcé sur cette question dans le sens d’un vote d’approbation en précisant par ailleurs que la résolution en matière de politique de rémunération proposée aux actionnaires lors de leur assemblée générale fasse l’objet au préalable d’une discussion et d’une adoption par le conseil dans son ensemble, comme c’est déjà le cas en Allemagne (8).

4.1.9

Concernant la part variable de la rémunération attribuée aux administrateurs exécutifs, le CESE tient à rappeler que l’approbation, lors de l’assemblée générale, par les actionnaires doit porter sur le système et les règles appliquées (critères de performance prédéterminés et mesurables), autant que sur le montant lui-même – tel que versé en application de ces règles (9).

4.1.10

Concernant l’activité des conseillers en vote, le CESE reconnaît la nécessité d’un encadrement plus strict de celle-ci. Il recommande en particulier qu’ils soient tenus aux obligations suivantes: divulguer leur politique de vote (avec motivation du sens de leurs recommandations); diffuser leur projet de rapport d’analyse auprès de la société avant de le transmettre aux investisseurs (de façon à ce que la société puisse leur faire part de ses observations); faire état des conflits d’intérêts susceptibles d’affecter leurs activités, notamment par les liens qu’ils peuvent entretenir avec la société et ses actionnaires, et mentionner les mesures qu’ils mettent en œuvre afin de prévenir de tels conflits.

4.2   Concernant le droit des sociétés

4.2.1

Le CESE considère qu’il importe de poursuivre le projet de SPE, dont la concrétisation devra être conforme aux dispositions du Traité ainsi qu’au droit des sociétés pris en application. Au-delà d’une harmonisation des législations nationales, un instrument uniforme tel que la SPE aurait, à ses yeux, un effet de levier important en faveur de l’activité transfrontalière des PME. L’implication active des salariés au sein de la SPE selon les mêmes règles que celles en vigueur pour la SE et la SCE est une exigence qui, aux yeux du CESE, ne saurait être remise en cause sans dénaturer le projet et constitue une condition essentielle de l’accord que le CESE invite à trouver sur celui-ci.

4.2.2

De même, sur la question des règles européennes à mettre en place en vue de faciliter les transferts de sièges entre États membres, le CESE aurait souhaité davantage de détermination de la part de la Commission, qui reconnaît elle-même que le besoin est réel en la matière. L’initiative en la matière qu’il appelle de ses vœux devra continuer à sécuriser et conforter, elle aussi, les conditions d’une implication des salariés. Les salariés doivent être informés et consultés sur le transfert proposé, conformément à l’article 4 de la directive 2002/14/CE et à la directive sur les Comités d’entreprise européens.

4.2.3

Le CESE est, par contre, très réservé à l’égard de toute initiative communautaire qui irait dans le sens d’une reconnaissance de la notion d’«intérêt de groupe», reconnaissance qui, à terme, ne pourrait manquer de mettre à mal le principe de l'indépendance des personnes morales, en particulier lorsqu’elles sont non européennes, au sein du groupe de sociétés. En dépit de l’attitude prudente et modérée de la Commission, il s’inquiète, en outre, d’une logique visant à faire primer l’intérêt du groupe sur celui de la filiale auquel il pourrait se voir sacrifié. En tout état de cause, si la Commission devait cependant maintenir cette orientation, celle-ci supposerait d’abord de travailler à une définition juridique commune, au niveau européen, de la notion de «groupe de sociétés», tâche particulièrement délicate et ardue, tant sont diverses les conceptions des États membres en la matière.

4.2.4

Étant donné l’ampleur du plan d’action, le CESE ne considère pas comme prioritaire, d’ici la fin de l’année, la codification du droit des sociétés de l’UE, tâche par définition très chronophage.

4.2.5

Le CESE doute en outre que celle-ci puisse se faire à droit constant, d’autant que la Commission exprime le souci de remédier aux vides juridiques et chevauchements involontaires de directives.

4.2.6

Le CESE pointe enfin la difficulté que représenterait un tel exercice dans la mesure où les directives visées, qui comportent des options, ont, pour la plupart, déjà été transposées dans les législations internes.

Bruxelles, le 22 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  JO C 24, 28.1.2012, p. 91.

(2)  Le droit des sociétés demeure, en effet, fondé sur les seules relations unissant actionnaires, conseil d’administration, exécutif.

(3)  JO C 161 du 6.6.2013, p. 35.

(4)  JO C 84 du 17.03.2011, p. 13.

(5)  Direction, représentation des travailleurs, investisseurs, collectivités territoriales.

(6)  Cfr. communication «Modernisation du droit des sociétés et renforcement du gouvernement d’entreprise dans l’UE – Un plan pour avancer», COM(2003) 284 final.

(7)  JO C 24 du 28.1.2012, p. 91.

(8)  JO C 24 du 28.1.2012, p. 91.

(9)  Conformément à ce que précisait la Commission dans sa Recommandation de 2004.


19.9.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 271/75


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Plan d'action “Entrepreneuriat 2020” Raviver l'esprit d'entreprise en Europe»

COM(2012) 795 final

2013/C 271/14

Rapporteur: Gonçalo LOBO XAVIER

Corapporteur: Ronny LANNOO

Le 18 mars 2013, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission – Plan d'action “Entrepreneuriat 2020” Raviver l'esprit d'entreprise en Europe»

COM(2012) 795 final.

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière a adopté son avis le 29 avril 2013.

Lors de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 23 mai 2013), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 61 voix pour, 8 voix contre et 13 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

L'Europe est confrontée à d'énormes défis et aucun État membre ne peut manquer de contribuer dans un esprit critique à la résolution des problèmes que la crise économique et financière a mis en évidence. L'un des principaux, le chômage, de quelque type qu'il soit et indépendamment des catégories de la société qu'il touche, exige des États membres des efforts communs et concertés qui doivent cadrer avec une stratégie commune tout en ayant des applications distinctes, en fonction des caractéristiques et des potentialités de chaque pays.

1.2

C'est dans ce cadre que la Commission européenne propose le Plan d'action «Entrepreneuriat 2020» en vue de promouvoir une culture de l'entrepreneuriat et de l'innovation qui rende possible la relance des économies et l'émergence d'un vrai «esprit d'entreprise européen» à même de mobiliser la société en général pour pouvoir réaliser les objectifs qui concernent tout un chacun.

1.3

Le présent avis analyse la valeur ajoutée de la création du «plan d'action «Entrepreneuriat 2020», qui est un engagement réaliste pour relancer l'esprit d'entreprise et d'entrepreneuriat en tant qu'instrument véritablement européen à même de contribuer à surmonter la crise, axé sur l'investissement dans des actions spécifiques et des politiques structurées à court, moyen et long terme, qui soient suffisamment efficaces pour faire évoluer la situation actuelle, au moyen du renforcement et de la promotion d'une attitude entreprenante et mobilisatrice de la société autour de l'innovation et de la croissance économique. Cette politique entrepreneuriale doit stimuler la création de toutes les formes d'entreprises. Il s'agit en outre de favoriser l'émergence d'indépendants, d'artisans, de professions libérales, d'entreprises familiales, de coopératives ou d'entreprises sociales.

1.4

Le CESE estime que l'entrepreneuriat doit être vu par la société non comme une solution à tous les problèmes mais plutôt comme une aide au changement d'attitude qui est nécessaire à la création d'une culture de l'innovation, tournée vers la recherche de connaissances et d'opportunités d'affaires, en vue d'une croissance économique durable et du bien-être social dans toutes les formes d'entreprises.

1.5

Le CESE craint que le cadre financier pluriannuel approuvé par le Conseil ne fragilise la mise en œuvre du plan d'action «Entrepreneuriat 2020» et que celui-ci ne soit versé au chapitre des bonnes intentions en l'absence de viabilité financière.

1.6

Le CESE attire l'attention du Parlement européen sur la nécessité d'allouer les ressources nécessaires pour la mise en œuvre du plan, de manière substantielle et durable, et l'invite à y réfléchir; il rappelle que les Fonds structurels peuvent jouer un rôle important dans ce contexte.

1.7

Le CESE rappelle la nécessité de doter les différents «acteurs» sur le terrain des moyens nécessaires pour diffuser et faire connaître les meilleures pratiques en matière d'entrepreneuriat, indépendamment de leur provenance (secteur public ou privé) ou du domaine d'activité.

1.8

Le CESE recommande que le plan d'action «Entrepreneuriat 2020» soit mis en œuvre par la Commission européenne et les États membres en étroite collaboration avec les différentes organisations représentatives des PME, en raison de l'étendue de leur secteur et de leur importance dans le contexte européen.

1.9

Le CESE reconnaît que les politiques de promotion de l'entrepreneuriat doivent être coordonnées avec les politiques de l'éducation, en associant le corps enseignant et en commençant à faire connaître le concept d'entrepreneuriat dès les premières années de la scolarité. Le CESE appelle également à une coordination de ces actions tant au niveau national qu'européen, afin d'assurer une application harmonieuse des actions proposées.

1.10

Le CESE préconise qu'à l'instar d'autres manifestations similaires, la Commission décrète que l'une des deux prochaines années sera l'«Année européenne de l'entrepreneuriat», en encourageant des initiatives communes pour donner un élan à la promotion du concept d'«entrepreneuriat européen». Cette proposition ne remet pas en cause la réalisation de la «Journée de l'entrepreneuriat de l'UE» mentionnée dans le présent document.

1.11

Le CESE invite la Commission à mettre en place un quatrième axe d'intervention destiné à renforcer les actions d'accompagnement, de conseil et d'assistance rendues aux entreprises, notamment les plus petites, grâce aux organisations intermédiaires.

1.12

Le CESE demande à la Commission, au Parlement européen et au Conseil de concevoir et de mettre en place, à partir des expériences de plusieurs États membres, des systèmes destinés à soutenir les seniors désireux de s'engager dans une activité indépendante pendant leur retraite et à simplifier le cadre de leur activité.

2.   La proposition de la Commission

2.1

Le CESE estime que le choix des trois axes d'intervention immédiate devant contribuer à un développement durable de l'esprit d'entreprise et de l'entrepreneuriat en Europe est approprié mais doit être assorti de mesures spécifiques et appliquées localement dans une perspective «européenne» et tournée vers les marchés mondiaux. Mais s'il est au plan conceptuel approprié, le CESE exhorte néanmoins la Commission à garantir la viabilité financière des actions à mener à bien.

Les axes d'intervention immédiate sont bien définis:

(a)

Promouvoir l'éducation et la formation à l'entrepreneuriat, afin de soutenir la croissance et la création d'entreprises.

(b)

Renforcer les conditions-cadres propices aux entrepreneurs, en levant les obstacles structurels existants et en soutenant les entreprises dans les phases cruciales de leur cycle de vie, sans oublier l'importance du financement dans le processus.

(c)

Dynamiser la culture de l'entreprise en Europe et favoriser le développement d'une nouvelle génération d'entrepreneurs.

Autrement dit, agir pour la préparation et la formation des personnes; faciliter la création de conditions propices à l'entrepreneuriat et promouvoir le concept sur la base des conditions créées entre-temps.

Le CESE réaffirme que l'approche est bien définie mais qu'il faut un engagement conjoint des États membres et une clarification quant à la viabilité financière du plan.

3.   Observations et remarques générales

3.1

L'entrepreneuriat est en soi un concept déjà défini et reconnu comme étant un marqueur des sociétés développées et qui doit caractériser de manière positive la culture qui prévaut (1).

3.2

Le changement d'attitude de la société européenne vis-à-vis de l'entrepreneuriat passe par le recours à de bonnes pratiques et à des exemples de réussite, combiné à des notions fondamentales associées à la culture d'entreprise, en sachant que l'investissement à réaliser doit se centrer sur la valorisation du très riche capital humain européen. La dotation du cadre financier pluriannuel devra tenir compte de cette nécessité de promouvoir et de disséminer, auprès des organisations et des représentants des PME des différents États membres, les bonnes pratiques existantes.

3.3

Pour réussir le changement d'attitude nécessaire, il faut avoir présents à l'esprit quelques concepts qui ne sont pas bien mis en évidence dans le document. Tel est le cas par exemple de la propriété intellectuelle et des droits d'auteur. Le CESE recommande dès lors vivement à la Commission d'intégrer ces concepts essentiels pour la réalisation des objectifs généraux du document (2) dans la conception des actions à mener à bien dans le cadre des programmes; il appelle à une position ferme de la Commission européenne et des États membres auprès des instances qui organisent le commerce mondial dans ces domaines.

3.4

Malgré ses bonnes intentions, le document est relativement vague quant aux modalités d'exécution et de suivi des politiques que les États membres devraient promouvoir. Le CESE estime qu'il faudra tenir compte du fait que nombre de ces politiques ne produiront des effets concrets que si les États membres prennent une part active au processus de changement culturel, ce qui, dans l'état actuel des économies, nous semble difficile sans recourir à des moyens financiers provenant des programmes européens. Le CESE rappelle que la mise en œuvre du plan d'action Entrepreneuriat 2020 sera d'autant plus efficace qu'elle associera les divers représentants des PME, garantissant ainsi la participation des acteurs concernés par les questions à aborder et par les changements de comportement nécessaires.

3.5

Le CESE constate à cet égard avec préoccupation l'absence d'un budget spécifique pour l'application du plan d'action et s'interroge sur la possibilité de le mettre en oeuvre si l'on ne peut s'appuyer sur un budget approprié qui permettrait de donner suite aux propositions présentées. Il rappelle également que les Fonds structurels peuvent jouer un rôle essentiel dans le processus et invite dès lors la Commission et les États membres à les utiliser de manière adéquate pour promouvoir l'entrepreneuriat dans le prochain cadre communautaire de référence. Le suivi et l'évaluation des actions devront être pris en considération dans le recours aux Fonds structurels.

3.6

Le CESE préconise qu'à l'instar d'autres manifestations similaires, la Commission décrète que l'une des deux prochaines années sera l'«Année européenne de l'entrepreneuriat», en promouvant des initiatives pertinentes et communes pour la promotion du concept d'«entrepreneuriat européen».

3.7

Le CESE se félicite des efforts qui seront faits par la Commission afin d'encourager la suppression de la bureaucratie dans le processus de création et de développement des entreprises et exhorte les États membres à adopter des mesures communes pour protéger le marché européen de la concurrence déloyale d'autres pays ou régions du monde

3.8

Le CESE souligne qu'il faut que les États membres s'engagent, dans le cadre de leurs programmes de promotion de l'entrepreneuriat, à inclure dans leurs systèmes de sécurité sociale des mesures spécifiques qui offrent aux entrepreneurs le même type de protection que celle dont bénéficient les travailleurs en général, ce qui contribuerait à une meilleure protection de ceux qui font du «risque» la clé du succès de leurs initiatives.

3.9

Le CESE prône la création d'une équipe virtuelle d'«ambassadeurs de l'entrepreneuriat», c'est-à-dire des personnes qui s'appuient sur le récit de succès réels, pour améliorer l'image de l'entrepreneur et du chef d'entreprise et modifier ainsi dans un sens positif la perception que l'on a d'elles dans la société. Cette équipe pourrait, dans chaque pays et de manière relativement coordonnée, diffuser les valeurs de l'entrepreneuriat et promouvoir des initiatives communes. La Commission a déjà fait le premier pas dans ce sens en publiant chaque année, lors de la semaine européenne des PME, la brochure «Secret of Success» incluant des entrepreneurs–ambassadeurs qui sont présents dans des États membres. Il en va de même pour l'initiative «Start up Europe» dans le cadre de l'agenda numérique.

4.   Observations particulières

4.1   Promouvoir l'entrepreneuriat et l'éducation à l'entrepreneuriat

4.1.1

Le CESE reconnaît et confirme qu'il est crucial d'investir dans la promotion de et l'éducation à l'entrepreneuriat pour atteindre les objectifs proposés, en particulier s'agissant de l'évolution culturelle qui doit se produire dans la société. Le CESE estime qu'il est essentiel de promouvoir cette notion dès les premières années de scolarité.

Il rappelle néanmoins qu'elle recouvre des réalités différentes selon les secteurs de la société et les différentes phases de la vie des citoyens. Aussi devrait-elle être promue sous cette acception large. La société civile par exemple est normalement un milieu favorable au développement de l'entrepreneuriat social, une dimension cruciale pour le développement du concept général d'entrepreneuriat. Le CESE recommande donc que cette notion fasse l'objet d'une reconnaissance et d'un soutien.

4.1.2

Il existe pour tous les États membres un ensemble non négligeable de bonnes pratiques qui peuvent et doivent être diffusées et appliquées en fonction des caractéristiques et des besoins de chacun d'entre eux. Une diffusion et une promotion bien menées des différentes initiatives peuvent contribuer à créer un environnement favorable à la perception de l'importance de l'entrepreneuriat et de la culture d'entreprise. Il importera que le cadre financier pluriannuel mobilise des ressources suffisantes pour que les autorités et les différents représentants des PME diffusent et promeuvent ces bonnes pratiques.

4.1.3

Sur le principe, le CESE accueille favorablement l'idée de faciliter la promotion des bonnes pratiques dans ces domaines mais attire l'attention sur le fait qu'il faut toujours prendre en considération les particularités de chaque État membre, de sorte que les mesures soient adaptées en fonction de ses caractéristiques.

4.1.4

Le CESE rappelle que l'on peut étudier les possibilités déjà offertes par le Réseau entreprise Europe (REE) pour promouvoir et informer les États membres sur le plan d'action. Afin de rendre ce travail possible, il faudra encourager la collaboration de ce réseau avec différentes organisations concernées par la promotion de l'entrepreneuriat, en particulier celles liées aux PME, en tenant compte toutefois du fait que ce réseau est plus ou moins dynamique selon les pays.

4.2   Promouvoir une culture d'entreprise

4.2.1

Le CESE accueille favorablement les politiques visant à mobiliser la société autour de l'entrepreneuriat sur la base de modèles de réussite et de cas déjà validés. Les bons exemples sont généralement copiés par la société, ce qui est une manière efficace de favoriser une perception positive de l'esprit d'entreprise auprès des différents groupes cibles.

4.2.2

Il est toutefois absolument nécessaire, comme cela a déjà été dit, de promouvoir très tôt la culture de l'entrepreneuriat auprès des jeunes. Il existe une relation de cause à effet dans les groupes-cibles auprès desquels sont encouragés l'entrepreneuriat et l'innovation. Les jeunes sont motivés et réagissent bien aux incitations de la promotion d'une culture et d'un environnement favorable à la «création de quelque chose de leur propre initiative» et sous leur propre responsabilité, s'enthousiasmant pour les réalisations vraiment personnelles. Plus tôt les jeunes s'immergeront dans des projets dans le cadre desquels ils peuvent apprendre au plan pratique à être entrepreneurs et devenir de bons exemples de culture d'entreprise et de coopération entre les individus qui partagent des valeurs et des objectifs communs, meilleurs seront les résultats à l'avenir. C'est pour cela que le rôle du professeur est essentiel dans le changement d'attitude et que le CESE est partisan d'initiatives à même d'aider le corps enseignant à diffuser et à promouvoir ce concept. Un bon exemple de programme mobilisateur pour l'entrepreneuriat est le «F1 in Schools» (3). Le CESE rappelle également les conclusions du rapport «Entrepreneurship in education» (l'entrepreneuriat dans l'éducation) qui fournit un aperçu des différentes stratégies appliquées en Europe pour promouvoir l'éducation à l'entrepreneuriat (4).

4.2.3

Le CESE souligne qu'il n'existe pas de culture uniforme de l'entreprise mais des cultures différentes selon la taille, la nature et le secteur d'activité. Les actions de promotion doivent donc d'une part concerner tous les types d'entreprises en se gardant de privilégier un modèle unique et devraient aussi s'adresser aux partenaires de l'entreprise, notamment les banques, les pouvoirs publics et les médias afin qu'ils tiennent compte de ces différences culturelles dans leurs informations et leurs choix de politiques.

4.2.4

Le CESE met l'accent sur la nécessité de protéger et de préserver la diversité des formes d'entreprises afin de valoriser et de réaliser pleinement le marché unique et le modèle social européen, et recommande aux institutions de l'Union européenne ainsi qu'aux États membres d'œuvrer dans ce sens. En effet, toutes les formes d'entreprise traduisent un aspect de l'histoire européenne, chacune étant porteuse de notre mémoire et de nos différentes cultures entrepreneuriales (5). Notamment dans le but de réaliser et de promouvoir l'esprit d'entreprise européen, un plan d'action européen doit expliciter et valoriser la diversité et le pluralisme des formes d'entreprise.

4.3   Promouvoir un environnement économique favorable

4.3.1

La nécessité de faire valoir auprès des différents publics que la création d'entreprise est le fruit d'un effort de toute la communauté qui reconnaît et apprécie la valeur ajoutée créée par le chef d'entreprise et l'entrepreneur et qui est disposée à recevoir cette valeur ajoutée paraît évidente. Dans la situation économique actuelle, il est encore plus essentiel que leur rôle soit perçu de manière constructive par tous.

4.3.2

Outre une promotion appropriée de la culture entrepreneuriale, il faut également créer des conditions réellement durables, surtout sur le plan législatif, pour qui veut investir et se risquer à développer une idée, un concept, une activité économique.

4.3.3

Le CESE rappelle qu'il est certes essentiel de promouvoir la création de nouvelles entreprises ou de faciliter la transmission des entreprises menacées de fermeture ou de faillite. Toutefois, il est tout aussi essentiel de soutenir les entreprises existantes. Entre la création et la fermeture, il y a toute la vie d'une entreprise qui demande des politiques spécifiques alliant meilleure réglementation pour générer emplois et activités économiques durables, innovation et compétitivité au sein du marché intérieur et dans l'économie mondialisée.

4.3.4

Les États membres doivent en définitive harmoniser dans le bon sens les conditions permettant de tirer parti d'un contexte optimal pour le développement des affaires et des activités entrepreneuriales et sociales, compte tenu de la grande diversité des types de structures d'entreprise. Une fois de plus, les exemples de réussite tels que les différentes formes de participation collective au capital des entreprises ou le statut de membre associé dans des coopératives, peuvent servir de catalyseur au changement que les États membres devront promouvoir (6).

4.3.5

Le CESE préconise que l'information sur les conditions de création d'une entreprise soient plus claires et harmonisées entre les États membres afin que l'établissement d'un cadre d'activité équitable soit un facteur d'encouragement de l'esprit d'entreprise. Il convient également de donner accès à des services de soutien prenant en compte les différentes formes d'entreprise.

4.3.6

Le CESE admet que la question du financement est une question européenne qui doit être traitée avec beaucoup de précaution par tous les États membres. Les liquidités financières sont limitées dans ce contexte et c'est le petit entrepreneur qui entend démarrer un projet donné qui souffre le plus de cette situation. Il devient par conséquent impératif de renforcer les mécanismes du financement qui soutiennent ce type d'initiatives, parmi lesquels les systèmes de garantie mutuelle ou les crédits bonifiés, outils essentiels pour les petits entrepreneurs qui n'obtiennent pas de financement sur les marchés «traditionnels» (7).

4.3.7

Le CESE approuve ainsi l'idée du renforcement des instruments de soutien aux projets innovants et à haut risque, risque qui est directement proportionnel au degré d'innovation intégrée. En ce sens, il juge également opportune l'option du renforcement de l'appui financier à l'expérimentation, à la démonstration et à la mise en œuvre des nouvelles technologies, compte tenu de leur effet multiplicateur dans la société.

4.3.8

Dans une période particulièrement complexe pour les entreprises, le CESE approuve les mesures visant à faciliter la transmission des entreprises car cette opération doit être considérée comme une occasion de relancer certains secteurs de l'économie, à même de dynamiser le marché du travail.

4.3.9

De même, de ce point de vue, la qualité de la législation en vigueur par rapport à l'encadrement du marché intérieur est particulièrement importante. Les États membres ont beaucoup de chemin à parcourir en la matière mais c'est une évolution irréversible.

4.4   Refuser la stigmatisation de l'«échec»: l'échec n'est pas la «fin du parcours», mais peut et doit être envisagé comme une phase de croissance, à condition de tirer les conclusions qui s'imposent.

4.4.1

L'on parle beaucoup d'une culture «américaine» ou «anglo-saxonne» de la «deuxième chance» après un «échec». Le CESE admet que la société dans son ensemble doit s'efforcer de voir les entrepreneurs de manière différente, en ce qui a trait à leur faculté de résilience face aux premiers échecs. Dès lors, il attire l'attention sur la nécessité de créer des mécanismes qui permettent à quiconque a l'esprit d'entreprise et veut effectivement créer quelque chose d'innovant de persévérer dans ses choix. La «faillite» d'une première tentative peut et doit être vue comme une occasion d'amélioration et de renforcement des capacités à se lancer dans de nouveaux projets d'entrepreneuriat, notamment à travers le système financier, et ne doit pas être considérée comme une «fin de parcours». Le CESE estime néanmoins que promouvoir exagérément une culture donnée peut également être contreproductif et que le bon sens et l'équilibre doivent toujours prévaloir.

4.5   Renforcer l'appui aux PME et autres représentants

4.5.1

Le CESE reconnaît que les règles s'appliquant aux entreprises doivent êtres simplifiées et clarifiées pour tous ceux qui entendent jouer un rôle actif dans leur création et leur développement. Le CESE salue l'effort de la Commission et des États membres visant à réduire et à moderniser les formalités administratives liées la création et à la modernisation d'entreprises. La création d'une entreprise, à vocation industrielle, de services ou technologique, doit être un processus simple et rapide mais suffisamment bien pensé afin d'éviter des exagérations ou des malentendus aussi bien pour les entreprises que pour les autorités réglementaires.

4.5.2

Le CESE approuve l'annonce de la Commission relative à la création d'un groupe de travail pour analyser les besoins spécifiques des professions libérales, en ce qui concerne des questions comme la simplification administrative, l'internationalisation et l'accès au financement. Le CESE rappelle également que le principe de subsidiarité et la fonction spécifique des professions libérales dans de nombreux États membres devraient être prises en considération afin d'encourager l'élaboration d'une «Charte européenne des professions libérales», similaire à la «Charte de l'UE des petites entreprises».

4.5.3

Le CESE approuve l'existence de mécanismes de conseil et d'assistance aux entreprises mais attire l'attention sur la nécessité de créer des équipes pluridisciplinaires et qui connaissent bien le marché ainsi que ses spécificités, raison pour laquelle il rappelle qu'il est possible de mettre à profit l'expérience accumulée par des entrepreneurs «anciens» et plus «expérimentés», tout en sachant qu'il leur faut de la disponibilité pour pouvoir transmettre leurs connaissances aux «nouveaux» entrepreneurs, en rendant possible un dialogue fructueux entre les générations. À cette fin, le CESE estime qu'il est important que ces activités ne soient pas uniquement basées sur le volontariat mais également soutenues au moyen d'incitations donnant la possibilité à des mentors et à des entrepreneurs de partager les fruits de la création de valeur générée. Cette approche est également un moyen d'intégrer des personnes qui peuvent encore apporter leur contribution à la société mais qui ne sont déjà plus présentes sur le marché du travail de manière totalement active.

4.5.4

Les réseaux de collaboration entre les PME devraient être encouragés parce qu'ils renforcent considérablement la viabilité des PME grâce aux économies d'échelle (partage de coûts dans le cadre du marketing, des achats ou autres services communs, coopération entre entités produisant des biens ou services complémentaires, possibilité d'innover et de s'internationaliser).

4.5.5

Outre les efforts de simplification administrative et d'accompagnement des nouveaux entrepreneurs, le CESE insiste sur le rôle essentiel du conseil (coaching et mentoring) exercé par les organisations d'entreprises. Sans ces actions, les PME, en particulier les microentreprises, ne peuvent par elles-mêmes accéder aux financements et aux fonds communautaires, innover, développer leur compétitivité et appliquer les mesures prioritaires de la stratégie UE 2020, bien qu'elles soient directement concernées. Le CESE regrette que le renforcement de l'action de coaching/mentoring des organisations d'entreprises ne figure pas dans le plan d'action. Le Comité demande de mettre en place un 4e axe d'intervention destiné à renforcer ces actions grâce à l'appui des organisations intermédiaires. Ces actions devront cibler tout particulièrement les plus petites entreprises.

4.6   Soutien à des groupes spécifiques

4.6.1

Le CESE salue les efforts particuliers qui ont été déployés pour mobiliser des groupes sociaux dont la contribution à l'effort commun en vue de la réalisation d'objectifs de cette nature est de plus en plus importante.

4.6.2

Le CESE approuve les politiques de mobilisation des groupes mentionnés dans le plan (chômeurs, femmes, seniors, jeunes, handicapés et immigrés) autour des thèmes de l'entrepreneuriat, de la création d'entreprises et de leur valeur pour la société. La promotion et la dissémination par ces groupes des bonnes pratiques existantes peuvent contribuer à une approche plus complète et la mise en oeuvre des politiques appropriées. Le CESE se félicite que ces groupes aient été identifiés comme étant susceptibles de mobiliser la société autour de ces thèmes et préconise des mesures de promotion des valeurs de l'entrepreneuriat et de l'innovation auprès d'eux, afin de stimuler leur participation aux efforts visant à relever ce défi européen.

4.6.3

Le CESE attire plus particulièrement l'attention des institutions sur la tendance croissante des seniors à la retraite, à créer ou recréer une nouvelle activité indépendante. Ce mouvement est notamment dû à l'allongement de la durée de vie, aux progrès en matière de santé ainsi qu'aux besoins de compléter des revenus en raison des effets de la crise sur le montant des retraites perçues. Le Comité demande à la Commission, au Parlement et au Conseil de concevoir et de mettre en place, à partir des expériences de plusieurs États membres, des systèmes destinés à soutenir les seniors désireux de s'engager dans cette voie et à simplifier le cadre de leur activité.

Bruxelles, le 23 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  JO C 48 du 15.2.2011, p. 45.

(2)  JO C 68 du 6.3.2012, p. 28. Les Droits de propriété intellectuelle (DPI) doivent continuer à jouer leur rôle traditionnel de moteur de l'innovation et de la croissance.

(3)  http://www.f1inschools.com

(4)  http://eacea.ec.europa.eu/education/Eurydice/documents/thematic_reports/135EN.pdf

(5)  JO C 318 du 23.12.2009, p. 22.

(6)  JO C 191 du 29.6.2012, p. 24.

(7)  JO C 181 du 21.6.2012, p. 125 et JO C 351 du 15.11.2012, p. 45.


19.9.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 271/81


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant la sécurité des produits de consommation et abrogeant la directive 87/357/CEE du Conseil et la directive 2001/95/CE»

COM(2013) 78 final – 2013/0049 (COD)

2013/C 271/15

Rapporteur général: M. HERNÁNDEZ BATALLER

Le 25 février 2013 et le 12 mars 2013 respectivement, le Conseil et le Parlement européen ont décidé, conformément à l'article 114 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant la sécurité des produits de consommation et abrogeant la directive 87/357/CEE du Conseil et la directive 2001/95/CE»

COM(2013) 78 final – 2013/0049 (COD).

Le 12 février 2013, le Bureau du Comité a chargé la section spécialisée «Marché unique, production et consommation» de préparer les travaux du Comité en la matière.

Compte tenu de la nature urgente des travaux, le Comité économique et social européen a décidé lors de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 22 mai 2013) de nommer M. HERNÁNDEZ BATALLER rapporteur général et a adopté le présent avis par 120 voix pour, 1 voix contre et 3 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le CESE approuve l'approche de la Commission d'établir un cadre juridique qui garantisse un niveau de protection élevé aux consommateurs et exige que les produits de consommation soient sûrs.

1.2

Le Comité considère qu'un règlement est l'instrument juridique approprié pour cette consolidation de textes juridiques existants, afin de les adapter au nouveau cadre législatif pour la commercialisation des produits. Le règlement permettra d'établir un même niveau de sécurité dans tous les pays de l'UE en définissant des critères communs.

1.3

Le règlement étant l'unique instrument permettant l'adoption des mêmes mesures avec le même appui pour les mêmes niveaux de risque dans tous les pays de l'UE, il est approprié que les termes de la proposition à l'examen puissent être interprétés avec la même portée dans tous les pays de l'Union.

1.4

Le CESE estime, qu'au vu de l'importance de la normalisation pour garantir la sécurité des produits, la Commission devrait accroître le soutien à la participation des consommateurs au CEN et à d'autres organismes similaires.

1.5

Dans la perspective de la pleine réalisation du marché intérieur, le Comité estime que la proposition représente une mesure de protection très importante pour les consommateurs dans la mesure où elle réduit les risques de blessures et de décès, permettant de rétablir la confiance; dans le même temps il voit la nécessité de transparence et d'équité dans les transactions commerciales, de sorte que ceux qui cherchent à produire et à vendre des produits dangereux ne disposent pas d'un avantage déloyal par rapport aux concurrents qui acceptent les coûts encourus pour rendre leurs produits sûrs.

2.   Introduction

2.1

La protection de la sécurité des consommateurs suppose que les biens et les services mis à leur disposition soient tels que, utilisés dans des conditions normales ou prévisibles, ils ne présentent pas de dangers pour la sécurité des consommateurs et que, s'ils présentent de tels dangers, ils puissent être retirés du marché par des procédures rapides et simples. Ceci constitue l'un des principes fondamentaux de la politique européenne de protection des consommateurs depuis son programme préliminaire de 1975 (1). Suite à la résolution du Conseil du 23 juin 1986 (2) sur la protection et la promotion des intérêts des consommateurs, une «nouvelle approche» a été engagée en matière d'harmonisation technique et de normalisation (3).

2.2

La première directive relative à la sécurité générale des produits qui a été approuvée en 1992 (4) a été remplacée par la directive 2001/95/CE du Parlement et du Conseil du 3 décembre 2001 (5), laquelle est entrée en vigueur le 15 janvier 2002. Le délai pour sa transposition dans le droit national par les États membres était fixé au 15 janvier 2004. En son temps, le CESE s'est prononcé (6) favorablement sur l'approche proposée par la Commission, tout en émettant des réserves concernant certains aspects.

2.3

La création du système d'alerte rapide pour les produits de consommation non alimentaires (RAPEX) a permis d'établir la circulation des informations entre la Commission et les autorités des États membres sur les mesures adoptées par les autorités des États membres et les opérateurs économiques concernant les produits qui présentent un risque grave pour la santé et la sécurité des consommateurs, afin de faire face aux «situations d'urgence». La Commission a approuvé en 2004 (7) des lignes directrices spécifiques pour garantir le bon fonctionnement de RAPEX.

2.4

Si les 27 États membres ont bien transposé la directive dans leurs droits nationaux respectifs, les modalités d'application ne sont pas les mêmes partout. Certains actes de transposition présentent des divergences, notamment:

les aspects relatifs à l'évaluation de la sécurité, que prévoit l'article 3 de la directive;

en matière de traçabilité, certains États membres exigent que soient indiquées sur le produit ou son emballage l’identité et les caractéristiques du produit, voire de l’importateur, alors que d’autres considèrent ces informations comme facultatives;

par ailleurs, dans certains États membres, la notification par les producteurs n’est requise qu’en cas de risque connu, et il n’existe pas d’obligation de notification lorsque le producteur «devrait connaître» le risque compte tenu des informations disponibles.

3.   La proposition de la Commission

3.1

La proposition de règlement fait partie de l'«ensemble de mesures en matière de sécurité des produits et de surveillance du marché» qui comprend également une proposition de règlement unique sur la surveillance du marché et un plan d’action pluriannuel en matière de surveillance du marché pour la période 2013-2015.

3.2

La proposition de règlement vise à compléter le cadre juridique de la sécurité des produits de consommation et de la commercialisation des produits, approuvé au cours des dernières années, qui porte sur les produits manufacturés non alimentaires, à l'exception de certains produits comme les antiquités. Elle exige que les produits de consommation soient «sûrs» et fixe des obligations précises aux opérateurs économiques. Elle contient également des dispositions sur l'élaboration de normes à l'appui de l'obligation générale de sécurité. La base juridique à laquelle la Commission a recours est l'article 114 du TFUE, qui s'applique aux mesures visant l'établissement et le fonctionnement du marché intérieur, et sert de fondement à l'exercice des compétences partagées entre l'Union et les États membres.

3.3

La Commission change d'instrument législatif en présentant une proposition de règlement au lieu d'une directive, avec l'objectif de parvenir au même niveau de sécurité dans tous les pays de l'UE et d'harmoniser la législation régissant cette matière, en définissant pour cela une série de critères communs, et sous réserve de la législation sectorielle. La proposition de règlement impose des normes claires et détaillées qui s'appliqueront de manière uniforme et simultanée dans l'ensemble de l'Union.

3.4

La Commission entend maintenir un niveau élevé de protection de la santé et de la sécurité des consommateurs, en rationalisant et en simplifiant le fonctionnement du système de sécurité et son interaction avec d'autres actes législatifs de l'Union.

3.5

La proposition vise à abroger les directives 87/357/CE et 2011/95/CE dont le contenu est réparti entre les deux propositions de règlement en cours d'élaboration. De cette manière, les dispositions relatives à la surveillance du marché et au système RAPEX, figurant actuellement dans la directive relative à la sécurité générale des produits sont transférées dans la proposition établissant un nouveau règlement unique relatif à la surveillance du marché, qui réunira toutes les dispositions sur cette matière dans un instrument unique, faisant de RAPEX le système d'alerte spécifique pour les produits qui présentent des risques.

3.6

D'autre part, la proposition à l'examen définit les obligations fondamentales des opérateurs économiques concernés (fabricants, importateurs et distributeurs) intervenant dans la chaîne d’approvisionnement des produits de consommation, pour autant qu’ils ne soient pas soumis à des exigences analogues au titre de la législation sectorielle d'harmonisation de l'Union. Sa fonction est donc restreinte à une application dans les situations qui ne sont pas réglées de manière sectorielle ou qui présentent un caractère résiduel par rapport à ces situations.

3.7

Elle part du principe général que tous les produits de consommation non alimentaires destinés à être commercialisés ou introduits sur le marché de l'Union doivent être sûrs. Les obligations plus détaillées relatives aux opérateurs économiques s'appliquent uniquement à ceux qui ne sont pas soumis aux obligations correspondantes définies par la législation d'harmonisation applicable au secteur d'un produit déterminé.

3.8

La proposition a été simplifiée grâce à l'établissement d'un lien clair avec la législation sectorielle et à la simplification des normes. Les produits de consommation qui respecteront les dispositions de la législation sectorielle d'harmonisation de l'Union visant à préserver la santé et la sécurité de la population seront aussi présumés sûrs en vertu du règlement proposé.

3.9

Par ailleurs, les définitions ont été actualisées et mises en concordance avec le nouveau cadre législatif sur la commercialisation des produits. En outre, la procédure permettant de déterminer si une norme européenne existe ou de demander l’élaboration d’une nouvelle norme européenne permettant de déterminer qu'un produit est présumé sûr a été considérablement simplifiée et alignée sur les dispositions du cadre général de normalisation.

3.10

Les obligations des opérateurs économiques portent entre autres sur l’étiquetage, l’identification des produits, les mesures correctrices à prendre en cas de produits non sûrs et l’information des autorités compétentes.

3.10.1

La proposition exige des opérateurs économiques qu’ils soient en mesure de préciser l’identité des opérateurs qui les fournissent et de ceux auxquels eux-mêmes fournissent un produit. La Commission est habilitée à adopter des mesures imposant aux opérateurs économiques la mise en place d’un système de traçabilité électronique ou l'adhésion à un tel système.

4.   Observations générales

4.1   Le CESE est favorable à l'existence d'une réglementation assurant un niveau élevé de protection de la santé et de la sécurité des consommateurs et, en particulier, de la sécurité des produits, et considère que la proposition de la Commission peut contribuer à la renforcer. Il souhaite néanmoins qu'il soit tenu compte des remarques formulées dans le présent avis en vue de clarifier la proposition.

4.2   Le CESE attire l'attention sur le fait que les informations détaillées figurant dans l'exposé des motifs de la proposition ne sont pas reprises ensuite dans le dispositif du règlement proposé. Ainsi, ses considérants mentionnent notamment que la nouvelle proposition s'applique à toutes les techniques de vente, notamment les ventes à distance, alors qu'elle omet cette question par la suite dans son dispositif. Compte tenu de l'instrument juridique envisagé, qui impose d'unifier les critères au préalable afin que la norme soit interprétée de manière uniforme dans tous les pays de l'UE, le CESE recommande d'insérer au moins une référence succincte à ces éléments dans le dispositif de la proposition de règlement.

4.2.1   Le CESE considère que la proposition par voie de règlement est pertinente et proportionnée, car c'est le seul instrument qui permet l'adoption des mêmes mesures avec le même appui pour les mêmes niveaux de risque dans tous les pays de l'UE. Il constitue le vecteur approprié pour abroger les directives 87/357/CEE et 2001/95/CE, pour autant que le niveau de protection établi dans les deux directives soit maintenu en ce qui concerne le degré de sécurité requis.

4.2.2   Cet instrument contribue à garantir la sécurité juridique du marché et des consommateurs. En plus de la simplification des mesures, il permet de réduire le coût économique de son adoption et de faire en sorte que ses termes soient interprétés avec la même portée dans tous les pays de l'Union.

4.2.3   Il importe de souligner que la proposition de règlement délimite son champ d’application par rapport à la législation sectorielle d’harmonisation de l’Union. C'est pourquoi il conviendrait aussi de mettre en évidence, dans son article premier, le caractère «général» et transversal du reste de la législation sectorielle relative à la sécurité des produits de consommation.

4.3   Comme la directive, la proposition de règlement exige que les produits de consommation soient «sûrs». Elle impose certaines obligations aux agents économiques et contient également des dispositions sur l’élaboration de normes, à l’appui de l’obligation générale de sécurité. Toutefois, le «principe de précaution», qui doit régir la sécurité des produits, ne figure pas dans le dispositif. Il conviendrait de l'y inclure expressément.

4.4   Définitions de la proposition

4.4.1

En ce qui concerne les définitions de la proposition, le CESE estime que certaines d'entre elles devraient être révisées car elles pourraient causer des problèmes dans le futur au moment d'appliquer le règlement que ce soit pour des raisons de terminologie, de traduction ou de traditions juridiques différant d'un État membre à l'autre.

4.4.2

La notion de produits «sûrs» est adéquate et couvre les différents aspects qui permettent d'évaluer la sécurité que les produits offrent concernant les caractéristiques que le consommateur doit connaître comme leur durée de vie, leur nature ou leur composition. Toutefois, le terme de «produit» devrait être complété par l'expression «manufacturé».

4.4.3

De même, les termes «normales» et «raisonnablement prévisibles» peuvent induire une certaine confusion dans la mesure où on pourrait déduire du critère relatif au caractère raisonnable qu'il permet d'inclure n'importe quel produit même s'il n'est pas sûr à condition qu'il soit utilisé de manière adéquate.

4.4.4

Quant au terme «normal», il conviendrait peut-être de le remplacer par le terme «habituel»; le cas échéant, cette notion ambiguë devrait être associée au consommateur à qui est destiné le produit. À cet effet, le CESE recommande de remplacer le terme en question par la formule «produit non sûr», car cela permettrait d'aligner ce concept avec celui qui figure dans la directive sur la responsabilité civile du fait des produits défectueux (8). Il conviendrait d'uniformiser le cadre juridique dans les États membres à cet égard, même si dans le contexte de la directive à l'examen la notion de produit est plus large.

4.4.5

En ce qui concerne la définition du terme «mandataire», il convient de signaler que la référence au «mandat écrit» pourrait donner lieu à des litiges à l'avenir dans les pays qui exigent que soit conclu au préalable un contrat de mandat. C'est pourquoi il y aurait lieu de le remplacer par la formule «commande écrite», qui laisse le champ libre aux États membres pour choisir la forme contractuelle la plus appropriée à leur droit national, tout en évitant que des problèmes de nature contractuelle se posent éventuellement à l'avenir.

4.4.6

Quant à la définition de «risque grave», le CESE conseille de l'étendre à toute «exposition, circonstance ou péril», ce qui renforce la protection des consommateurs; en d'autres termes, le «risque grave» devrait être lié à la nécessité d'action immédiate et d'adoption de mesures dès la prise de connaissance du risque.

5.   Observations spécifiques

5.1   La proposition de règlement accorde une attention particulière à la nécessité de regrouper et de simplifier les obligations qui s'appliquent aux opérateurs économiques. Le CESE y souscrit pleinement au vu de la confusion à laquelle sont confrontés ces opérateurs économiques et les autorités nationales.

5.2   À l'article 4, il conviendrait d'ajouter les mots «dans les conditions définies dans la suite du présent règlement», étant donné que le concept de sécurité employé ici peut ne pas coïncider avec les dispositions arrêtées dans d'autres normes sectorielles.

5.3   Il y a lieu de clarifier dans le dispositif la portée de la proposition en ce qui concerne l'inclusion des services dans le champ d'action du règlement. Le CESE espère toutefois que la Commission présentera une proposition complète sur la sécurité des services dans l'UE.

5.4   En ce qui concerne la mention des consommateurs «vulnérables» à l'article 6, lettre d), il conviendrait de préciser si la notion de consommateur vulnérable est définie sur la base d'un critère général (âge, santé, etc.) ou en fonction des caractéristiques du produit (manque de connaissances suffisantes). Le CESE estime que pour assurer une plus grande cohérence du droit de l'Union, il conviendrait d'utiliser des notions autonomes propres à l'ensemble de la réglementation de l'UE et de ne pas définir des concepts aux fins de chaque proposition législative.

5.5   L'article 6, paragraphe 2, lettre h), se réfère aux attentes légitimes des consommateurs en matière de sécurité. La notion de «légitimité» devrait être précisée avec des termes tels que «selon leur nature, leur composition et leur destination», qui donneraient davantage de sécurité juridique au dispositif.

5.6   Le CESE estime que les consommateurs ont le droit de disposer d'une information claire et précise sur l'origine des produits, qui devrait en toutes circonstances fournir leur provenance concrète, dans le respect des dispositions du droit de l'UE.

5.7   En outre, il conviendrait de revoir le libellé de cette disposition de telle sorte que les fabricants et importateurs soient tenus de «garantir» le respect des obligations prévues dans cette disposition.

5.8   Obligation des fabricants et des autres opérateurs

5.8.1

La proposition de règlement prévoit une réglementation relative à l'élaboration de la documentation par les fabricants et aux mesures qu'ils doivent prendre pour assurer la sécurité des consommateurs, que le Comité juge pertinente.

5.8.2

Ces obligations spécifiques consistent à mettre à l’essai des échantillons de produits commercialisés qu’ils prélèvent au hasard, à examiner les réclamations, à conserver un registre des réclamations, des produits non conformes et des rappels de produits et, le cas échéant, à tenir le fabricant et les distributeurs informés du suivi effectué.

5.8.3

Toutefois, la proposition ne précise pas les modalités de mise en œuvre en laissant à la discrétion de chaque État membre le soin d'arrêter les mesures qu'ils doivent prendre (comme la création d'un registre spécial). Il serait préférable d'harmoniser ces mesures afin de garantir l'existence d'un système d'alerte qui permette de tenir informé le marché à un stade suffisamment précoce pour prendre des mesures efficaces avant que des dommages ne soient causés.

5.9   Documentation technique

5.9.1

L'obligation d'informer les consommateurs doit concerner uniquement les questions liées à l'utilisation et à la nature des produits et ne pas s'étendre à la documentation dite technique pouvant contenir des données relatives à des secrets commerciaux et d'autres données confidentielles des fabricants qui doivent, quant à elles, être à la disposition des autorités; il y a lieu de définir à cet effet des règles communes claires qui ne sont pas énoncées dans la proposition.

5.9.2

Dans la mesure où il semble ressortir du texte que le fabricant est responsable des dommages occasionnés par un produit en raison de son manque de sécurité, il serait plus opportun de prévoir que le contenu de la documentation technique doit être valable pendant dix ans. Pour plus de clarté, il conviendrait qu'à l'article 8, paragraphe 6, la formule «Les fabricants s’assurent que» soit remplacée par «Il incombe aux fabricants de faire en sorte que», qui est plus conforme à l'obligation qui leur échoit. Le même changement devrait s'appliquer mutatis mutandis aux importateurs et à leur responsabilité, ainsi que l'obligation de mettre à jour la documentation technique pendant dix ans, au même titre que les autres opérateurs économiques.

5.9.3

Afin que les consommateurs puissent exercer leur droit à l'information sur un produit donné sans aucun type d'obstacle, il est recommandé de préciser qu'à l'article 8, paragraphe 7, qui impose au fabricant d'indiquer un lieu d'information unique où il peut être joint, que ce point de contact ne s'avère pas coûteux pour le consommateur afin d'éviter qu'il n'entraîne une pénalisation implicite de celui qui l'utilise.

5.10   Quant aux produits n'ayant pas l'apparence de ce qu'ils sont, le CESE demande un niveau maximal de protection, en particulier pour les articles ayant l'apparence de jouets, qui devraient être soumis aux règles de la directive relative à la sécurité des jouets pour atteindre un niveau élevé de protection des mineurs.

5.11   Le CESE est partisan de la traçabilité des produits tout au long de la chaîne d'approvisionnement dans la mesure où cela facilite l'identification des opérateurs économiques et les mesures correctrices contre les produits dangereux, comme les mesures de rappel ou, le cas échéant, de retrait du marché.

5.12   S'agissant des normes européennes dont le respect confère une présomption de conformité, le CESE considère que la proposition améliore le fonctionnement actuel du système. Toutefois, il conviendrait de clarifier les dispositions transitoires et la présomption de conformité pour garantir une plus grande sécurité juridique.

5.12.1   Au vu de l'importance de la normalisation, le CESE estime que les organismes européens de normalisation doivent se doter des ressources nécessaires pour augmenter leur productivité et garantir une qualité élevée. De même, les consommateurs doivent être représentés plus efficacement.

5.13   En principe, les règles relatives aux actes délégués semblent raisonnables, bien qu'il ne paraisse pas logique que la délégation soit octroyée pour une durée indéfinie. En outre, il importe que les actes délégués ne portent pas sur des questions essentielles et soient circonscrits aux limites de l'acte délégant. Ils devraient être utilisés principalement en cas de commercialisation de produits dangereux. C'est pourquoi l'adoption d'actes délégués dans les cas visés à l'article 15, paragraphe 3, lettre a) de la proposition est raisonnable, tandis qu'elle est discutable pour les actes délégués envisagés à la lettre b) du même article.

5.14   En ce qui concerne les sanctions, il convient de rappeler que le CESE est partisan d'une harmonisation des types d'infraction et des sanctions à appliquer, par exemple, en fonction de l'infraction commise (9), car la simple mention générique du fait que les sanctions doivent être effectives, proportionnées et dissuasives pourrait donner lieu à des distorsions dans le fonctionnement du marché.

5.14.1   Enfin, le CESE estime que les États membres devraient disposer de voies de recours et de réparation appropriées et efficaces devant les juridictions compétentes afin de mettre en œuvre les dispositions du règlement dans l'intérêt général des consommateurs.

Bruxelles, le 22 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  Résolution du Conseil, du 14.4.1975, concernant un programme préliminaire de la Communauté économique européenne pour une politique de protection et d'information des consommateurs (JO C 92 du 25.4.1975, p. 1).

(2)  JO C 167 du 5.7.1986, p. 1.

(3)  Qui est basée sur la résolution du Conseil du 7.5.85 (JO C 136 de 4.6.1985, p. 1).

(4)  JO L 228 du 11.8.1992, p. 24.

(5)  JO L 11 du 15.1.2002, p. 4.

(6)  JO C 367 du 20.12.2000, p. 34.

(7)  Décision 2004/418/CE de la Commission (JO L 151 du 30.4.2004, p. 84).

(8)  JO L 210 du 7.8.1985, p. 29.

(9)  Comme le prévoit par exemple le règlement (CE) no 1071/2009 (JO L 300 du 14.11.2009, p. 51).


19.9.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 271/86


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant la surveillance du marché des produits et modifiant les directives du Conseil 89/686/CEE et 93/15/CEE, les directives du Parlement européen et du Conseil 94/9/CE, 94/25/CE, 95/16/CE, 97/23/CE, 1999/5/CE, 2000/9/CE, 2000/14/CE, 2001/95/CE, 2004/108/CE, 2006/42/CE, 2006/95/CE, 2007/23/CE, 2008/57/CE, 2009/48/CE, 2009/105/CE, 2009/142/CE et 2011/65/UE, ainsi que les règlements du Parlement européen et du Conseil (UE) no 305/2011, (CE) no 764/2008 et (CE) no 765/2008»

COM(2013) 75 final – 2013/0048 (COD)

2013/C 271/16

Rapporteur général: M. LEMERCIER

Le 8 et le 12 mars 2013 respectivement, le Conseil et le Parlement européen ont décidé, conformément à l'article 114 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant la surveillance du marché des produits et modifiant les directives du Conseil 89/686/CEE et 93/15/CEE, les directives du Parlement européen et du Conseil 94/9/CE, 94/25/CE, 95/16/CE, 97/23/CE, 1999/5/CE, 2000/9/CE, 2000/14/CE, 2001/95/CE, 2004/108/CE, 2006/42/CE, 2006/95/CE, 2007/23/CE, 2008/57/CE, 2009/48/CE, 2009/105/CE, 2009/142/CE et 2011/65/UE, ainsi que les règlements du Parlement européen et du Conseil (UE) no 305/2011, (CE) no 764/2008 et (CE) no 765/2008»

COM(2013) 75 final – 2013/0048 (COD).

Le 12 février 2013, le Bureau du Comité a chargé la section spécialisée «Marché unique, production et consommation» de préparer les travaux du Comité en la matière.

Compte tenu de l'urgence des travaux, le Comité économique et social européen a décidé au cours de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 22 mai 2013) de nommer M. LEMERCIER rapporteur général, et a adopté le présent avis par 116 voix pour et 2 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le Comité apprécie positivement les dispositions du règlement proposé. Les dispositions actuelles applicables à la surveillance du marché et au contrôle des produits, sont trop dispersées dans de nombreux textes, aux contenus différents, ce qui complique indûment la tâche des autorités de surveillance et des fabricants, ainsi que celle des associations de consommateurs et des organisations de travailleurs. Le Comité est satisfait de noter que les dispositions verticales antérieures seront abrogées, pour être regroupées dans un règlement horizontal, unique et renforcé.

1.2

Le Comité exprime son accord avec la base juridique, mais il estime nécessaire de se référer également à l'article 12 TFUE qui précise que la protection des consommateurs est une politique transversale qui doit être «prise en considération dans la définition et la mise en œuvre des autres politiques et actions de l'Union».

1.3

L'instrument proposé est un règlement. Le Comité considère que c'est la forme la plus adaptée pour faciliter la coopération et les échanges entre les États membres et entre l'État membre et l'UE. Il considère que le paquet proposé par la Commission satisfait aux exigences de proportionnalité et de subsidiarité établies par les traités. Les États membres restent pleinement responsables de la surveillance de leurs marchés nationaux et des contrôles aux frontières extérieures de l'Union, et doivent en assurer le financement.

1.4

Le CESE appuie l'affirmation de la Commission selon laquelle les produits qui circulent dans l'Union doivent répondre aux exigences qui assurent un niveau élevé de protection des intérêts publics tels que la santé et la sécurité en général, la santé et la sécurité sur le lieu de travail, la protection des consommateurs, la protection de l'environnement et la sécurité publique.

1.5

Le Comité estime que le respect de secrets de fabrication ou le respect de secrets commerciaux ne peuvent faire obstacle au lancement d'alertes lorsque la santé ou la sécurité des usagers pourraient être affectées par un des composants du produit en cause. La pratique constante du système RAPEX, qui consiste à faire prévaloir l'intérêt public par rapport aux intérêts privés, devra donc continuer d'être respectée par les organes de surveillance-contrôle.

1.6

Les personnes membres ou employées des organes de surveillance et des douanes devront présenter toutes les garanties d'honnêteté et d'indépendance et être protégées contre les pressions ou les tentatives de corruption éventuelles dans l'exercice de leurs fonctions. Les personnes signalant des défauts ou des risques relatifs à un produit devront bénéficier d'une protection, notamment contre des poursuites; leur identité devrait rester confidentielle.

1.7

Le Comité demande d'inclure une base juridique dans la proposition de règlement concernant une base de données paneuropéenne des blessures qu'il conviendrait de considérer comme troisième pilier du système d'échange d'informations de surveillance, complémentaire aux systèmes RAPEX et ICSMS.

1.8

Enfin, le Comité souhaiterait vivement figurer parmi les destinataires des rapports périodiques que la Commission établira tous les cinq ans pour assurer le suivi de l'exécution du règlement.

2.   Introduction: les propositions de la Commission

2.1

La meilleure législation pour la sécurité des produits et l'harmonisation des règles dans le marché intérieur ne suffisent pas à offrir des garanties absolues de sécurité aux consommateurs pour les produits de consommation et aux travailleurs pour les produits destinés à un usage professionnel.

2.2

Comme le montrent de récents scandales, les fraudes pour augmenter les profits ou pour réduire les coûts de production restent d'actualité en Europe; de plus, les produits importés ne répondent pas toujours aux normes européennes et peuvent faire une concurrence déloyale aux produits d'origine européenne.

2.3

La surveillance des marchés comme le contrôle de la conformité des produits sont essentiels et exigent des services et des personnels qualifiés (douanes, services techniques, inspections, etc.) opérant sur le territoire de chaque État membre.

2.4

La directive 2001/95/CE «sécurité générale des produits», «DSGP» dont la transposition devait être achevée en 2004 et le règlement (CE) no 765/2008 entré en vigueur en 2010 «accréditation, surveillance des marchés», ainsi que les directives et décisions d'harmonisation sectorielle ont permis des progrès évidents. Cependant les dispositions en matière de surveillance du marché sont dispersées et se chevauchent, ce qui peut créer la confusion entre les règles de surveillance proprement dites et les obligations des opérateurs, compliquant leur tâche comme celle des législateurs et des fonctionnaires nationaux.

2.5

La Commission propose de clarifier le cadre règlementaire de la surveillance du marché en réunissant les dispositions pertinentes de ces dispositions dans un seul instrument juridique d'application horizontale pour tous les secteurs. Le nouveau règlement concernant la surveillance du marché des produits serait accompagné par un plan d'action pluriannuel pour la surveillance du marché couvrant la période 2013-2015.

2.6

Il s'agit d'une action majeure de l'Agenda du Consommateur Européen et de l'Acte pour le Marché Unique I et II. Cela répond aussi aux exigences du Nouveau Cadre Législatif.

2.7

Il faut déterminer, selon les mêmes modalités dans chaque pays, si les produits mis sur le marché y compris ceux provenant de pays tiers sont sûrs, et s'ils peuvent être mis sur le marché unique ou sinon procéder à leur retrait et à leur interdiction s'ils sont dangereux ou non conformes.

2.8

Or, la surveillance du marché et les contrôles de conformité ne sont pas assez efficaces, et un grand nombre de produits non conformes sont répandus sur le marché, en raison principalement d'un manque de coordination entre les autorités de surveillance nationales, et de la qualité et de la fiabilité des informations échangées.

2.9

Il revient donc à l'UE d'agir pour garantir une meilleure coordination des actions et rendre efficace la surveillance transfrontière du marché afin de protéger les citoyens. La Commission soutient que ce droit d'agir résulte des dispositions des articles 114, (bon fonctionnement du marché unique) et des articles 168 § 1 (protection de la santé) et 169 § 1 (protection des consommateurs) du TFUE. Il convient aussi de simplifier le cadre juridique applicable et d'en éliminer les ambiguïtés actuelles.

2.10

Une simplification de la procédure RAPEX, la mise en place d'un règlement relatif à la sécurité des produits remplaçant la DSGP, et un règlement nouveau relatif à la surveillance remplaçant les dispositions actuellement dispersées dans plusieurs textes de niveaux différents est nécessaire.

2.11

L'amélioration de la coordination et de l'efficacité des actions de surveillance et de contrôle serait effectuée non seulement par la procédure normale d'évaluation de la législation, mais encore par des enquêtes «Eurobaromètre» sur la perception des consommateurs, par les systèmes d'information GRAS-RAPEX et ICSMS, et la mise en place d'indicateurs permettant le suivi par les pairs. Les procédures de notification par les États seront rationalisées, avec un seul système de notification pour l'ensemble des produits.

2.12

Les contrôles aux frontières seront renforcés, et la circulation de tout produit suspect de présenter un risque devra être suspendue jusqu'à plus ample détermination de son statut par l'autorité de surveillance.

2.13

Le système de notification RAPEX pour les produits présentant un risque sera amélioré du point de vue des délais de notification et de la pertinence des informations sur les risques du produit notifié.

2.14

La Commission pourra décider de mesures restrictives appropriées envers les produits dangereux, qui seront d'application directe, quand les mesures d'urgence standard s'avèreraient insuffisantes ou inadaptées.

2.15

Un Plan d'action pluriannuel (PAP) sur la surveillance du marché est prévu par l'Acte pour le Marché Unique. Ce Plan devrait concerner les domaines où une coordination assurée par la Commission pourrait apporter une réelle valeur ajoutée et des améliorations sensibles.

2.16

Le PAP est l'outil principal d'action au niveau communautaire; il encouragera à une communication et à une coopération accrues. Des moyens informatiques permettront l'accès facile aux informations et aux meilleures pratiques au travers d'enquêtes et études stockées sur le système. Les besoins seront identifiés et des outils de formation, d'assistance technique et de conseil seront offerts dans ce cadre.

2.17

La Commission élaborera une approche commune des contrôles documentaires et techniques, des examens effectués en laboratoire. Une coordination renforcée des actions et programmes conjoints améliorera l'efficacité de la surveillance.

2.18

La mise en commun de ressources permettra une synergie et évitera les doubles emplois. Les données recueillies lors du travail des autorités nationales seront conservées dans la base ICSMS administrée par la Commission qui offrira les moyens et les formations nécessaires à l'utilisation de tout le potentiel de cette base de données.

2.19

Toutes les parties concernées devront être informées et consultées de manière régulière et souple.

2.20

Le rapport élaboré par la Commission en application du règlement (CE) no 765/2008 permet d'informer les institutions et les parties prenantes et d'évaluer les activités d'accréditation, de surveillance et de contrôle du marché qui font l'objet d'un financement communautaire.

2.21

Les moyens et les prérogatives des services de douanes et les contrôles aux frontières extérieures de l'Union et de l'Espace Économique Européen sur les produits entrant devraient être renforcés, ce qui demande l'affectation de ressources supplémentaires, notamment en formation et en outils techniques.

3.   Observations générales

3.1

Le Comité accueille favorablement l'initiative de renforcement de la surveillance et des contrôles de la sécurité des produits mis sur le marché, qu'ils soient d'origine communautaire, de pays EEE ou de pays tiers. En garantissant une meilleure sécurité des produits, elle constitue une action-clé de l'Acte pour le Marché Unique et répond à la nouvelle approche.

3.2

Le Comité remarque néanmoins que les procédures d'information et de consultation des acteurs économiques et sociaux restent très floues. Sans alourdir ni figer des procédures bureaucratiques, un cadre souple et approprié pourrait être mieux défini à différents niveaux.

3.2.1

Les entreprises concernées attendent beaucoup des informations juridiques et techniques qui leur permettraient de disposer de la sécurité juridique indispensable aux décisions d'investissement dans la fabrication ou de commercialisation de produits. L'information recueillie par les divers organes de surveillance et de contrôle doit leur être accessible pour les produits qu'ils présentent au contrôle ou à une évaluation de la conformité.

3.2.2

Les consommateurs et les travailleurs veulent légitimement s'assurer de l'innocuité des produits présents sur le marché, qu'ils doivent utiliser dans leur travail ou pour leur consommation. Ils sont en droit de connaître les actions mises en œuvre à cette fin aux niveaux national, communautaire ou sectoriel pour garantir que leur santé et leur sécurité ne sont pas mises en jeu.

3.2.3

Le Comité est convaincu que la confiance dans la sécurité des produits est essentielle au bon fonctionnement du marché unique et à la libre circulation des marchandises, ce qui a un impact favorable sur la croissance et l'emploi.

3.3

Il estime que la surveillance et les contrôles, et en particulier aux frontières extérieures de l'Union, relèvent principalement de la compétence des États membres, l'Union assurant les coordinations et les mesures indispensables à une action commune efficace, ainsi qu'à la normalisation des produits. Cette surveillance et les contrôles ont un impact sur les entreprises, et ont un coût important, tant pour les États membres que pour les opérateurs économiques pour la mise en conformité (normalisation, norme CE). Le Comité invite les États membres et la Commission à prendre dûment en considération, dans leurs activités, les charges administratives pesant sur les entreprises, et en particulier les PME, afin de ne pas obérer leur situation économique dans une période de crise et de chômage important.

3.4

La libre circulation des produits non alimentaires visés dans le projet de règlement ne peut souffrir de laxisme ou d'insuffisance dans le cadre réglementaire ni dans le nombre et la qualité des moyens et contrôles. Il convient donc que les États membres et la Commission affectent à la mise en œuvre des moyens de surveillance et de contrôle des ressources suffisantes pour en garantir la pleine efficacité. Même s'il reconnait que les budgets souffrent actuellement de contraintes, le Comité estime que les intérêts publics en jeu demandent que tous les efforts soient faits afin de garantir la santé et la sécurité des consommateurs comme la protection de l'environnement vis-à-vis de produits défectueux ou dangereux. Le bon fonctionnement du marché intérieur est indispensable à la reprise économique et à la création de nouveaux emplois.

3.4.1

À cet égard, le Comité considère que le système actuel de surveillance et de contrôle du marché présente de sérieuses lacunes ou insuffisances. La coopération entre les organes nationaux compétents, la Commission et les parties concernées doit être renforcée. L'organisation de consultations périodiques s'avère nécessaire. À l'initiative des organisations de consommateurs ou de travailleurs – comportant une garantie d'immunité pour ceux-ci – l'exercice d'un droit d'alerte vis-à-vis de certains produits doit être mis en place. Les organes compétents, autorités de surveillance, organismes techniques de certification, services douaniers, services de répression des fraudes, doivent coopérer et mettre à disposition les informations recueillies en vue d'éviter les doubles emplois, le gaspillage des ressources disponibles, et afin de renforcer sans cesse l'efficacité des contrôles effectués.

3.5

L'efficacité du système communautaire d'échange rapide d'informations (RAPEX) dépend entièrement de la célérité de l'envoi des notifications et de la pertinence des informations techniques concernant les produits douteux. Les lignes directrices établies pour la gestion de RAPEX devront être mises à jour de façon continue, et être suffisamment claires pour qu'il n'y ait pas de doute sur la nature et l'étendue des informations à notifier; des critères permettant d'identifier les risques graves doivent être établis dans le cadre de ces lignes directrices, et les mesures à prendre en conséquence doivent être clairement définies, comme la suspension provisoire, l'exigence de modifications techniques, jusqu'à l'interdiction pure et simple.

3.6

Même les risques modérés ou non vérifiés scientifiquement devraient faire l'objet de notifications dans RAPEX, afin d'envisager des mesures d'exécution, comme la suspension provisoire, en application du principe de précaution, le cas échéant, ou d'autres mesures appropriées comme des exigences supplémentaires d'information des consommateurs ou de mise en garde des utilisateurs qui s'ajouteraient aux exigences normales d'étiquetage des produits.

3.7

Lorsque, en cas de risques avérés, la Commission envisage l'adoption d'actes d'exécution concernant un produit ou une catégorie de produit en vue d'instaurer des conditions uniformes de contrôle de ces produits, le Comité souhaiterait que les organisations de consommateurs et celles d'employeurs et de salariés soient avisées et que leur avis soit pris en considération dans toute la mesure du possible. Il convient de noter que ces organisations peuvent rapidement répercuter les dispositions prises par la Commission auprès de leurs membres, ce qui aidera de manière importante à leur compréhension et à leur application rapide.

3.8

En ce qui concerne le Forum de la Commission et des États membres, nouvellement créé par le règlement, le Comité note que les organisations de la société civile seraient invitées à titre consultatif aux sous-organes sectoriels que pourrait créer le Forum. Il considère qu'en dépit de leur caractère consultatif, les opinions et propositions émanant de ces organisations devraient être dûment considérées et prises en compte dans toute la mesure du possible, compte tenu de leur rôle actif auprès des consommateurs et des milieux économiques et sociaux qu'elles représentent.

3.9

Il devrait en aller de même lorsque, face à certains risques, les autorités de surveillance d'un États membre lancent une alerte sur les risques présentés par certains produits et éventuellement les moyens de s'en prémunir; elles devraient coopérer avec les opérateurs économiques, afin d'écarter les risques présentés par certains produits, mais aussi avec les organisations compétentes de la société civile, qui peuvent apporter leurs connaissances et leurs moyens d'information auprès de leurs membres.

3.10

Finalement, le Comité considère que la proposition à l'étude répond, dans son ensemble, aux exigences du Nouveau Cadre Législatif (nouvelle approche) ainsi qu'à celles de la subsidiarité et de la proportionnalité. Il approuve également la base juridique sur laquelle les DG responsables ont établi leur proposition. Le Comité se réfère également à l'article 12 TFUE qui précise que la protection des consommateurs doit être «prise en considération dans la définition et la mise en œuvre des autres politiques et actions de l'Union».

4.   Observations particulières

4.1

Le Comité reste préoccupé par les possibles différences d'interprétation de la règlementation d'un pays à l'autre; l'action communautaire doit viser à rendre les interprétations et les pratiques vraiment uniformes, pour la sécurité juridique des opérateurs et la sécurité des utilisateurs.

4.2

Il est aussi préoccupé de l'application des dispositions concernant la confidentialité qui pourraient faire obstacle à la meilleure information sur les composants ou produits dangereux qui pourraient affecter la santé, la sécurité des personnes et la qualité de l'environnement, par exemple en matière de secrets de fabrication. Les intérêts publics en jeu sont en général supérieurs aux intérêts privés qui seraient protégés abusivement par une compréhension trop absolue du concept de confidentialité. Les informations doivent, en toutes circonstances, circuler entre les organes des États membres et ceux de l'Union chargés du système de surveillance et de contrôle. Il convient cependant de respecter les données personnelles protégées par la loi et de ne pas compromettre les enquêtes en cours.

4.3

Comme le règlement l'exige, les autorités publient des informations sur les produits dangereux et les risques qu'ils comportent, les mesures éventuelles de prévention, les décisions prises à l'égard des opérateurs, sur un site web spécialisé. Le Comité demande que la publication ne soit pas entravée par une notion excessive de confidentialité vis-à-vis de secrets commerciaux lorsque la santé et la sécurité des utilisateurs sont en jeu; c'est d'ailleurs la pratique suivie par la Commission dans la gestion du système RAPEX, pratique qui doit être maintenue.

4.4

Le Comité insiste sur les exigences d'indépendance et de transparence des organes de surveillance et de contrôle. Les agents de ces organes doivent être protégés de toute ingérence et de toute tentative de corruption dans l'exercice de leurs fonctions. Ils doivent être impartiaux et accueillir toutes les plaintes formulées par les consommateurs et usagers ou leurs organisations, et y donner suite le cas échéant. Les laboratoires de contrôle doivent aussi opérer en toute indépendance, ainsi que les organes chargés de la délivrance de labels normatifs, qui sont indispensables pour le choix des décideurs d'entreprises et des consommateurs.

4.5

Le Comité estime que le règlement proposé devrait également contenir des dispositions concernant la création d'une base de données paneuropéenne des blessures couvrant l'ensemble des lésions. Cette base de données permettrait:

d'aider les autorités de surveillance du marché à prendre des décisions d'évaluation des risques mieux informées;

de fournir une base pour mener des actions préventives et des campagnes publiques de sensibilisation ainsi que de permettre aux normalisateurs de développer de meilleures normes applicables aux produits;

d'aider les fabricants à appliquer la notion de sécurité aux nouveaux produits;

d'évaluer l'efficacité des mesures préventives et de définir des priorités dans l'élaboration des politiques.

4.5.1

Le Comité suggère dès lors:

d'inclure dans la proposition une disposition tirée du règlement (CE) no 765/2008 qui impose aux États membres de contrôler les accidents et les préjudices pour la santé que ces produits sont suspectés d'avoir provoqués;

d'établir une base juridique pour la création d'une base de données des blessures, selon laquelle la Commission européenne serait chargée d'appuyer la coordination de la collecte des données des États membres et d'assurer le bon fonctionnement de cette base de données.

Bruxelles, le 22 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


19.9.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 271/91


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Investir dans le domaine social en faveur de la croissance et de la cohésion, notamment par l'intermédiaire du Fonds social européen, au cours de la période 2014-2020»

COM(2013) 83 final

2013/C 271/17

Rapporteur: M. Oliver RÖPKE

Le 18 mars 2013, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions – Investir dans le domaine social en faveur de la croissance et de la cohésion, notamment par l'intermédiaire du Fonds social européen, au cours de la période 2014-2020»

COM(2013) 83 final.

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 23 avril 2013.

Lors de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 22 mai 2013), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 160 voix pour, 3 voix contre et 11 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le CESE se félicite du paquet Investissement social de la Commission européenne et du changement de modèle qu'il représente à cet égard, les investissements sociaux accrus n'étant plus uniquement considérés comme un facteur de coût mais aussi comme des investissements pour l'avenir, ainsi que pour la croissance et l'emploi, qui apportent une contribution essentielle à la réalisation des objectifs de la stratégie Europe 2020 et représentent un élément fondamental du modèle social européen.

1.2

Si des investissements sociaux ciblés sont source de progrès économique et social, ils permettent dans le même temps de renforcer la compétitivité. En particulier en cette période de chômage sans précédent et de pauvreté croissante, les investissements dans l'État-providence jouent par ailleurs un rôle déterminant pour le renforcement de la cohésion sociale, pour l'inclusion sociale, ainsi que pour la lutte contre l'exclusion sociale et la pauvreté.

1.3

Le marché du travail est l'élément clé pour affronter avec succès les mutations démographiques et pour assainir les budgets publics de manière pérenne. Le CESE estime que des investissements sociaux forts et ciblés améliorent durablement l'employabilité des personnes. Le paquet Investissement social peut donc très largement contribuer à un changement de politique aux fins d'un renforcement de la croissance et de l'emploi, s'il est mis en œuvre de façon cohérente dans la pratique.

1.4

Le CESE rejoint la Commission européenne sur le fait que l'aménagement de la politique sociale relève avant tout de la responsabilité des États membres et que chaque pays doit trouver son propre équilibre entre viabilité et pertinence de son système social et de l'organisation de ses services sociaux. Du fait de l'importance des disparités nationales, la Commission devrait jouer un rôle central pour l'échange de bonnes pratiques et d'approches innovantes entre les États membres et tous les acteurs concernés.

1.5

Le CESE se félicite que, dans sa communication, la Commission reconnaisse expressément la contribution importante de l'économie sociale, des entreprises sociales, de la société civile et des partenaires sociaux à la mise en œuvre du paquet Investissement social. Dans ce contexte, il adhère explicitement à la demande d'association fondamentale des partenaires sociaux et des acteurs de la société civile organisée au niveau des États membres et dans le cadre du processus de coordination du semestre européen.

1.6

Le CESE invite la Commission européenne à présenter un plan en vue de la mise en œuvre concrète du paquet Investissement social, à aider les États membres à prendre les mesures nécessaires et à favoriser les échanges entre les pays, les partenaires sociaux, les organisations de l'économie sociale, les organisations non gouvernementales, la société civile organisée et les prestataires de services sociaux. Ces acteurs disposent de l'expertise technique nécessaire dans les domaines des investissements sociaux, de l'innovation sociale et de la promotion de l'emploi.

1.7

Toutefois, le CESE regrette que la question du financement du paquet Investissement social reste en grande partie sans réponse. Sans modification de la politique unilatérale de réduction des dépenses, il semble irréaliste que les propositions puissent être mises en œuvre avec succès. S'il convient de se féliciter de la meilleure utilisation des Fonds structurels et d'investissement européens, ainsi que du niveau d'efficacité et de pertinence des mesures le plus élevé possible, ces éléments ne seront en aucun cas suffisants pour parvenir au changement de cap souhaité.

1.8

Le CESE réaffirme par conséquent qu'il est indispensable de trouver de nouvelles sources de recettes pour assainir les budgets publics. À cet égard, il convient aussi bien de mentionner des mesures telles que la modification et l'élargissement des assiettes fiscales, la suppression des paradis fiscaux, la fin de la concurrence fiscale (très préjudiciable), ainsi que la lutte contre la dissimulation fiscale et les contributions pour les différents types de patrimoines.

1.9

Dans ce contexte, le CESE réaffirme notamment expressément sa demande d'un programme européen de relance et d'investissement à hauteur de 2 % du PIB. Un tel programme permettrait de financer un pacte d'investissement social, qui rendrait possible dans les faits également, en dépit de l'assainissement budgétaire souhaité, le changement de priorités politiques au profit du développement des investissements sociaux ainsi que le renforcement et la modernisation de la politique sociale dans les États membres. Seul un financement suffisant permettra de mettre en œuvre avec succès le paquet Investissement social; dans le cas inverse, il faudra se contenter des déclarations d'intention.

1.10

Le CESE invite la Commission à refléter, dans le cadre du processus de coordination du semestre européen également, la plus grande place accordée aux investissements sociaux. Cette nouvelle priorité doit être explicitement prise en compte dans les recommandations spécifiques par pays ainsi que dans l'examen annuel de la croissance à venir (2014). Commission doit rapidement présenter des propositions concrètes dans ce sens. Il y a lieu de préciser qu'un renforcement des investissements sociaux est compatible avec un assainissement budgétaire «différencié et favorable à la croissance»

2.   Le paquet Investissement social en faveur de la croissance et de la cohésion

2.1

L'un des objectifs prévus par la stratégie Europe 2020 est de faire sortir de la pauvreté au moins 20 millions de citoyens d'ici à 2020. Les conséquences profondes de la crise et la nécessité de rétablir la croissance ont amené la Commission à prendre toute une série d'initiatives visant en règle générale à préserver et à créer des emplois, à assurer des transitions professionnelles sans heurts et à favoriser l'intégration sur le marché du travail (1).

2.2

Le 20 février 2013, la Commission a publié son paquet «Investissement social», attendu de longue date. Ce dernier recouvre une communication («Investir dans le domaine social en faveur de la croissance et de la cohésion, notamment par l'intermédiaire du Fonds social européen, au cours de la période 2014-2020») et une recommandation de la Commission («Investir dans l'enfance pour briser le cercle vicieux de l'inégalité»), accompagnées de sept documents de travail des services de la Commission.

2.3

Ce paquet propose d'améliorer les investissements sociaux dans le contexte du semestre européen et rationalise la gouvernance et la communication obligatoire de l'Union et de ses États membres en vue d'atteindre les objectifs de la stratégie Europe 2020 dans le domaine des politiques sociales, de l'emploi et de l'éducation.

2.4

La Commission constate que dans de nombreux États membres, la pauvreté, l’exclusion sociale et l'exclusion du marché du travail se sont accrues pour de nombreux citoyens de l'Union au cours de la crise qui perdure en Europe depuis 2008 et qu'en l'occurrence, des niveaux sans précédent ont été atteints, en particulier dans les groupes les plus vulnérables. Aussi, dans sa communication, la Commission invite-t-elle les États membres à accorder davantage d'importance aux investissements sociaux et à faire en sorte que les ressources soient utilisées de manière plus efficace.

2.5

Selon la Commission, les investissements sociaux aident les citoyens. Ils renforcent leurs capacités et leurs qualifications et favorisent leur participation à la société et au marché du travail. Ils produisent ainsi un surcroît de prospérité, relancent l'économie et aident l'UE à sortir de la crise à la fois renforcée, resserrée et plus compétitive.

2.6

Les systèmes de protection sociale remplissent à cet égard une triple fonction: investir dans le domaine social pour un avenir meilleur, assurer une protection sociale lors des périodes difficiles de la vie et, surtout, stabiliser les économies nationales.

2.7

En la matière, la Commission demande des mesures qui garantissent que les systèmes de protection sociale prennent en compte les besoins des citoyens lorsqu'ils traversent des périodes difficiles de leur vie. Pour y parvenir, la Commission réclame des mesures préventives sous la forme d'investissements aussi précoces que possible, plutôt que de réparer ultérieurement les dégâts, ce qui s'avère plus coûteux. De ce fait, il importe d'investir dans l'enfance et la jeunesse.

2.8

En posant des orientations, la recommandation de la Commission aux États membres précise plus avant cet aspect. La Commission est d'avis que l'on pourra obtenir les investissements afin de prévenir la pauvreté des enfants et l'exclusion sociale, qui doivent favoriser les intérêts supérieurs de l'enfant, grâce à un large éventail de mesures différentes.

2.9

Sous le mot d'ordre «Accroître l'efficacité des politiques sociales», la Commission demande dans sa communication d'utiliser plus efficacement les moyens financiers afin de garantir une sécurité sociale adéquate et durable, ainsi qu'une politique sociale de meilleure qualité et fondée sur des données probantes. Pour y parvenir, les États membres devraient simplifier la gestion des prestations et des services, accorder les prestations de manière plus ciblée tout en les liant à des conditions, telles que par exemple la participation à des actions de formation continue.

2.10

Dans sa communication, la Commission invite à plusieurs reprises les États membres à renforcer la participation de tous les acteurs pertinents, notamment des partenaires sociaux et des organisations de la société civile, à l'amélioration de la politique sociale dans le cadre de la stratégie Europe 2020.

3.   Observations générales sur le paquet Investissement social

3.1

Cela fait maintenant cinq ans que le programme politique de l'Union européenne est déterminé par la crise économique et financière et ses profondes répercussions sur la croissance et l'emploi, ainsi que sur la cohésion économique et sociale. Alors que, au début, les États membres ont réagi en mettant en œuvre une politique économique contracyclique de stabilisation de la conjoncture, les plans de sauvetage des banques notamment ont entraîné une augmentation considérable de la dette publique. Les efforts que les gouvernements ont déployés, lors du ralentissement de l'économie, pour assainir les budgets publics au moyen d'une politique unilatérale de réduction des dépenses sont globalement considérés comme un échec. La communication de la Commission sur les investissements sociaux apporte donc une nouvelle perspective pour lutter contre la crise, à savoir que, si les investissements sociaux sont évidemment liés à des coûts à court terme, ils sont toutefois associés à des gains de bien-être pour la société et à un accroissement des recettes au profit des budgets publics à moyen et à long terme, qui permettent en outre de réduire sensiblement les coûts futurs pour la société.

3.2

Le CESE se félicite donc expressément du paquet Investissement social de la Commission et du changement de modèle de programme tourné vers l'avenir qu'il représente à cet égard pour les institutions de l'UE. Désormais, la Commission invite expressément les États membres à accorder davantage d'importance aux investissements sociaux, ainsi qu'à moderniser et à renforcer la politique sociale, et à faire en sorte que les ressources disponibles soient utilisées de façon plus efficace. Il convient d'améliorer la viabilité de la politique sociale. De cette manière, il semble que la Commission corrige les errements de ces dernières années et cesse de considérer les investissements sociaux uniquement comme des facteurs de coût. Bien au contraire, ces investissements accroissent les qualifications et les capacités des citoyens, augmentent leurs chances d'intégration dans la société et sur le marché du travail et, partant, leur prospérité, ils ont des incidences favorables sur la croissance et aident l'UE à sortir de la crise renforcée et plus compétitive. Le paquet Investissement social pourrait ainsi représenter l'une des initiatives de politique sociale les plus importantes de ces dernières années, pour autant qu'il soit véritablement mis en œuvre de façon cohérente et ambitieuse. Un soutien durable de la Commission est nécessaire à cette fin.

3.3

L'aménagement des politiques sociales relève toutefois avant tout de la responsabilité des États membres. Les différentes situations au niveau national exigent que chaque État membre trouve son propre équilibre entre viabilité et pertinence de son système social, puisque aucun modèle unique n'est applicable à tous les États. La Commission devrait centraliser les meilleures pratiques, notamment pour ce qui est d'encourager les prestataires de services d'intérêt général au moyen des marchés publics et de la liberté de choix dans le domaine des services sociaux, et encourager les États membres à organiser leur système social de manière innovante et efficace en privilégiant l'emploi et l'intégration sur le marché du travail, de façon à atteindre l'objectif de lutte contre la pauvreté énoncé dans la stratégie Europe 2020.

3.4

En des temps où sévissent dans l'UE un chômage sans précédent et une pauvreté croissante, le rôle de l'État-providence est indispensable pour relever les défis qui se posent. Des investissements ciblés dans la protection sociale et l'État-providence permettent de résoudre des problèmes structurels et de créer des emplois. Il est possible de tirer un meilleur parti des possibilités existantes si on poursuit une stratégie active d'inclusion et de participation aussi globale que possible en faveur de couches aussi larges que possible de la population et si tous les États membres mettent en œuvre les recommandations relatives à l'inclusion active des personnes exclues du marché du travail, formulées en 2008.

3.5

Alors que les dépenses sociales étaient jusqu'à présent essentiellement associées à des «coûts» et que l'on réclamait la réduction des budgets sociaux, la communication à l'examen pourrait constituer dans une certaine mesure un changement de cap politique au niveau tant de l'UE que de certains États membres. Le CESE avait déjà défendu auparavant l'idée qu'il existe une très grande nécessité d'investissements, y compris sociaux, et que ceux-ci peuvent entraîner des retombées positives sur l'emploi, prévenir la pauvreté et lutter contre l'exclusion sociale. À cet effet, il y a lieu de mobiliser les investissements aussi bien privés que publics et de mettre en œuvre des réformes (2).

3.6

Le CESE se félicite également de la nouvelle vision et de la nouvelle logique d'intervention que représente l'approche en faveur des investissements sociaux orientée sur le cycle de vie et sur les besoins, adoptée dans la communication de la Commission, qui peut contribuer aussi bien à accroître les possibilités de chacun dans la vie et la cohésion sociale qu'à améliorer le développement économique. Renforcer les investissements sociaux a des effets positifs notamment à moyen et à long terme, mais aussi des effets positifs à court terme qu'il ne faut en aucun cas sous-estimer. Les investissements dans une politique sociale de meilleure qualité et fondée sur des données probantes donnent des résultats rapides et positifs avérés dans de multiples situations (3).

3.7

Outre leurs effets sur le marché du travail, les investissements sociaux jouent également un rôle déterminant pour le renforcement de la cohésion et de l'inclusion sociales, ainsi que pour la lutte contre l'exclusion sociale et la pauvreté. Du fait de la crise économique profonde en Europe, la situation sociale de nombreuses personnes s'est considérablement détériorée. Pour inverser cette tendance, il faudra absolument opérer un changement de cap et renforcer les investissements sociaux.

3.8

Dans ce contexte, la Commission européenne devrait préciser et circonscrire son exigence de «conditions» pour l'octroi de prestations sociales. Ainsi, dans le domaine des politiques actives du marché de l'emploi par exemple, il pourrait être judicieux de conditionner l'aide à la réalisation d'un objectif précis, tel que la participation à des actions de formation, mais ce principe ne doit en aucun cas s'appliquer d'une manière générale à toutes les mesures de politique sociale (garde d'enfants par exemple). Les prestations sociales doivent être considérées comme des droits auxquels on peut prétendre sur la base de critères prévisibles, et ces droits doivent être garantis juridiquement.

3.9

La recommandation et les documents de travail publiés avec la communication à l'examen reflètent les principaux domaines dans lesquels cette «nouvelle logique» d'investissements sociaux doit être appliquée. La Commission devrait désormais engager le dialogue avec tous les acteurs pertinents sur la façon dont cette logique d'investissements sociaux doit être appliquée concrètement dans ces domaines thématiques prioritaires et présenter un plan en vue de la mise en œuvre de sa communication, qui contiendrait un guide d'action destiné à aider les États membres.

3.10

Le CESE se félicite que la Commission européenne reconnaisse expressément l'importance de l'économie sociale, notamment des entreprises sociales et de la société civile, dans la mise en œuvre du paquet Investissement social (4). En plus d'apporter son expérience et un complément de ressources, l'économie sociale est souvent directement associée à la concrétisation des objectifs politiques, par exemple par la fourniture de services sociaux. Pour faciliter l'accomplissement de ces missions, l'accès aux fonds publics et aux capitaux privés doit être amélioré et simplifié. Il convient de se féliciter des propositions consistant à inclure des objectifs thématiques relatifs aux investissements sociaux et des investissements comme volets de soutien dans la politique de cohésion de l'UE pour la période 2014-2020. Ces propositions devraient être prises en compte dans les négociations sur les programmes entre les autorités nationales et la Commission européenne, auxquelles participent des représentants de la société civile.

3.11

Selon la Commission, l'innovation est un élément essentiel des stratégies dans le domaine des investissements sociaux, car la politique sociale doit sans cesse être adaptée à de nouveaux défis. C'est pourquoi les entreprises privées qui peuvent s'appuyer sur des commandes publiques jouent un rôle important en tant que solution de substitution ou d'appoint au secteur public.

3.12

Les États membres doivent davantage recourir à des formules de financement innovantes, comme la participation du secteur privé ou le recours à des obligations d’investissements sociaux qui, selon la Commission européenne, permettent de réaliser des économies budgétaires (5). Toutefois, les obligations d'investissements sociaux donnent lieu à des discussions particulièrement controversées et leurs répercussions doivent faire l'objet d'une série d'investigations plus approfondies. En outre, la Commission devrait préciser les domaines qui pourraient se prêter à un «financement innovant». Quoi qu'il en soit, le CESE souligne que ces instruments ne doivent en aucun cas entraîner une commercialisation de la politique sociale. L'État ne doit pas se soustraire à ses responsabilités en matière de politique sociale.

4.   Observations particulières

4.1

Dans les années qui viennent, du fait notamment des paquets de mesures d'assainissement des finances publiques de chacun des États membres de l'UE, il convient malheureusement de partir de l'hypothèse que perdureront une spirale économique et sociale descendante et une dynamique ralentie de l'économie. C'est pourquoi il convient de relancer une croissance économique durable en renforçant la demande (intérieure), par exemple grâce à une meilleure intégration des femmes sur le marché du travail. La croissance des services sociaux et de l'économie sociale, qui ont montré leur potentiel précisément pendant la crise, joue aussi un rôle clé à cet égard.

4.2

Le paquet Investissement social peut contribuer à cette relance de manière significative. Ainsi, le renforcement des services sociaux a des effets sur l'emploi plus importants que toute autre forme d'intervention financière publique. En outre, il est nécessaire d'investir dans les services sociaux pour répondre à la demande et aux besoins sociaux croissants. Les objectifs en matière d'emploi de la stratégie Europe 2020 prévoient en premier lieu d'accroître l'emploi des femmes, en sus de lutter contre le chômage (des jeunes) et de mieux intégrer les personnes âgées dans le monde du travail.

4.3

Il importe de reconnaître que le soutien des politiques nationales en matière d'inclusion sociale, de système de santé et de services sociaux prévu dans le paquet Investissement social devrait aussi comprendre des prestations sociales facilement accessibles, abordables et de grande qualité pour les groupes sociaux défavorisés, tels que les personnes handicapées et le nombre croissant de personnes qui vivent dans l'extrême pauvreté. Ces prestations augmentent les chances des personnes concernées de vivre dans la dignité, ainsi que de trouver et de conserver un emploi.

4.4

L'exemple de la garde des enfants montre précisément que des investissements ciblés permettent de concilier progrès économique et social et renforcement de la compétitivité. Intensifier les investissements dans la garde des enfants et dans les services sociaux au sens large (garde des personnes âgées, formation, soins, services aux personnes handicapées, résidences encadrées et médicalisées, etc.) permet d'une part d'accroître la «qualité de la place économique» et, d'autre part, joue un rôle important dans l'accroissement de la participation des femmes au marché du travail et des personnes les plus éloignées du marché du travail, telles que les personnes handicapées, et contribue à soulager les budgets publics à moyen et long termes. Ainsi que la Commission l'a déjà reconnu, il importe de veiller à ce que ces investissements répondent de manière ciblée aux besoins spécifiques d'une personne plutôt qu'à ceux d'un groupe, de façon à obtenir une aide individualisée et les meilleurs résultats possibles (6). En outre, le CESE estime qu'il faut prévenir tous les types possibles de problèmes sociaux, quel que soit l'âge des personnes concernées. La prévention devrait donc être une approche globale de la politique sociale, qui s'appliquerait à tous les groupes sociaux et non uniquement aux enfants.

4.5

Le marché du travail est l'élément clé pour affronter avec succès les mutations démographiques et pour assainir les budgets publics de manière pérenne. Il y a donc lieu de se féliciter de la demande de la Commission d'améliorer la participation à l'emploi, grâce également à une politique active du marché du travail et au renforcement de l'inclusion sociale. En tirant un meilleur parti du potentiel d'emploi disponible, il est possible de maintenir dans une large mesure la stabilité du rapport entre les cotisants et les bénéficiaires des prestations (7) malgré une augmentation massive du nombre des personnes âgées. Toutefois, le CESE réaffirme que les investissements sociaux doivent également concerner les groupes sociaux pour lesquels la perception de prestations sociales ne débouche pas sur leur intégration sur le marché du travail.

4.6

Par ailleurs, les investissements sociaux et l'amélioration de la politique sociale n'ont pas seulement des effets importants sur la politique de l'emploi. Une mise en œuvre cohérente de la politique d'inclusion sociale dans les États membres et la lutte résolue contre la pauvreté génèrent des bienfaits essentiels pour l'ensemble de la société et favorisent la paix et la cohésion sociales.

4.7

Le changement de cap esquissé dans la communication à l'examen constitue aussi une contribution importante à un assainissement durable des budgets publics. L'exigence d'une croissance inclusive et une augmentation sensible des taux d'emploi jusqu'en 2020 peuvent également permettre de dégager une marge de manœuvre supplémentaire pour les budgets nationaux, qui représente pour les 27 États membres jusqu'à 1 000 milliards d'euros (8).

4.8

Toutefois, s'agissant des changements de priorités esquissés dans la communication à l'examen et de leur intégration au semestre européen, des questions fondamentales restent sans réponse. Si le CESE se félicite de l'amélioration du suivi, il est néanmoins conscient que l'orientation générale de l'examen annuel de la croissance 2013 repose encore sur les priorités de l'année écoulée. Il estime que les recommandations spécifiques par pays pour le second semestre devraient davantage porter sur les investissements sociaux. Dans l'examen 2014, il conviendra de tenir compte expressément des investissements sociaux et d'intégrer les problèmes sociaux dans le prochain semestre européen. En outre, il convient de préciser explicitement, au cours du semestre, qu'un renforcement des investissements sociaux est compatible avec un assainissement budgétaire «différencié et favorable à la croissance».

4.9

Cependant, dans la communication à l'examen, les observations concernant le financement des mesures volontaristes sur les investissements sociaux et la modification des structures fiscales sont malheureusement plutôt décevantes et représentent un recul par rapport au paquet Emploi, dans lequel la Commission avait recommandé non seulement d'alléger la fiscalité sur le travail mais aussi d'augmenter l'impôt sur le capital. Pourtant, c'est uniquement lorsque le financement aura été garanti que le changement de cap annoncé dans le paquet Investissement social pourra se concrétiser et porter ses fruits.

4.10

Néanmoins, la question du financement du paquet Investissement social reste en grande partie sans réponse. Mieux utilisés, les fonds structurels et d'investissement européens, en particulier le FSE, peuvent certes être des instruments de financement importants, mais ils ne seront en aucun cas suffisants pour mener à bien le changement de cap politique prévu. Au contraire, le CESE rappelle que, en plus d'augmenter l'efficacité et la pertinence des dépenses publiques, il est indispensable d'exploiter de nouvelles sources de recettes pour assainir les budgets publics. Dans ce contexte, il faudra également prendre en compte les contributions possibles des différents types de revenus et d'avoirs (9). Les ressources disponibles devraient par ailleurs être mieux utilisées.

4.11

Le CESE fait observer que l'on peut aussi appliquer la logique des investissements sociaux en apportant des modifications et des améliorations aux volets des politiques qui se sont révélés inefficaces. À cet égard, des investissements supplémentaires ne sont pas requis en premier lieu. Le CESE invite la Commission à fournir des informations et des explications sur les nouvelles politiques sociales qui sont meilleures pour le consommateur final et dont le cadre financier est comparable ou moins important.

4.12

Le CESE préconise depuis longtemps de ne pas se concentrer exclusivement sur les dépenses mais aussi d'accroître les recettes publiques, par exemple en modifiant et en élargissant l'assiette fiscale, en prélevant une taxe sur les transactions financières, en supprimant les paradis fiscaux, en mettant fin à la concurrence fiscale et en prenant des mesures contre la dissimulation fiscale (10). C'est précisément à la lumière du paquet Investissement social et des défis connexes que le CESE insiste une nouvelle fois expressément sur ces exigences ainsi que sur la nécessité d'un programme européen de relance économique et d'investissement à hauteur de 2 % du PIB (11). Si le paquet à l'examen fixe les bonnes priorités, il ne contient aucune proposition en vue d'un «pacte pour l'investissement social», qui permettrait de ne pas s'en tenir aux déclarations d'intention mais de mettre en œuvre la nouvelle orientation politique.

4.13

En plus d'exiger une association accrue des partenaires sociaux et de la société civile organisée par les États membres, ce que le CESE approuve pleinement, la Commission devrait présenter rapidement des propositions concrètes pour une association accrue et continue au processus de coordination du semestre européen. Il s'agit là également, et avant tout, d'une orientation renforcée en faveur des investissements sociaux et de l'intégration active. Une telle association devrait être primordiale et permettre une influence réelle sur l'élaboration des politiques.

Bruxelles, le 22 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  Paquet Emploi, paquet Emploi des jeunes, initiative de l'UE sur les perspectives d'emploi des jeunes et initiative «Repenser l'éducation».

(2)  Voir: JO C 11 du 15.1.2013, pp. 65–70.

(3)  L'initiative «Housing First», aussi appelée «rapid re-housing», est une stratégie initialement appliquée dans le cadre de la politique sociale américaine pour faire face au problème des sans-abri. Elle est également mise en œuvre avec succès, depuis quelques années, en Autriche, au Danemark, en Finlande, en France, en Allemagne, au Portugal et au Royaume-Uni, comme solution de remplacement du système traditionnel d'abris d'urgence et de logement provisoire.

(4)  Voir: COM(2013) 83 final, p. 5.

(5)  Voir: COM(2013) 83 final, pp. 6 et 7.

(6)  Voir: COM(2013) 83 final, p. 8.

(7)  Voir: COM(2012) 55 final, Livre blanc de la Commission intitulé «Une stratégie pour des retraites adéquates, sûres et viables», p. 5.

(8)  Voir: document du CPE numéro 72, 2 novembre 2012: «1 000 milliards d'euros en jeu: comment stimuler l'emploi peut permettre de relever le défi des mutations démographiques et des déficits publics».

(9)  Voir: JO C 143 du 22.5.2012, pp. 94-101, par. 4.3, ainsi que JO C 306 du 16.12.2009, pp. 70-75, par. 3.4.2.

(10)  Voir: JO C 143 du 22.5.2012, pp. 23-28, par. 6.1.3.1.

(11)  Voir: JO C 133 du 9.5 2013, pp. 77-80, par. 3.2.4.


19.9.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 271/97


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d'un système d'entrée/sortie pour l'enregistrement des entrées et sorties des ressortissants de pays tiers franchissant les frontières extérieures des États membres de l'Union européenne»

COM(2013) 95 final – 2013/0057 (COD),

sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 562/2006 en ce qui concerne l'utilisation du système d'entrée/sortie (EES) et le programme d'enregistrement des voyageurs (RTP)»

COM(2013) 96 final – 2013/0060 (COD)

et sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d'un programme d'enregistrement des voyageurs»

COM(2013) 97 final – 2013/0059 (COD)

2013/C 271/18

Rapporteur général: M. Cristian PÎRVULESCU

Le Parlement européen, en date des 14 mars et 16 avril 2013, et le Conseil, en date du 27 mars 2013, ont décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur les propositions suivantes:

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d'un système d'entrée/sortie pour l'enregistrement des entrées et sorties des ressortissants de pays tiers franchissant les frontières extérieures des États membres de l'Union européenne»

COM(2013) 95 final - 2013/0057 (COD)

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 562/2006 en ce qui concerne l'utilisation du système d'entrée/sortie (EES) et le programme d'enregistrement des voyageurs (RTP)»

COM(2013) 96 final - 2013/0060 (COD)

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d'un programme d'enregistrement des voyageurs»

COM(2013) 97 final - 2013/0059 (COD).

Le 19 mars 2013, le Bureau du Comité a chargé la section spécialisée «Emploi, affaires sociales et citoyenneté» de préparer les travaux du Comité en la matière.

Compte tenu de l'urgence des travaux, le Comité économique et social européen a décidé au cours de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 22 mai 2013) de nommer M. PÎRVULESCU rapporteur général, et a adopté le présent avis par 125 voix pour, 4 voix contre et 3 abstentions.

1.   Introduction

1.1

La proposition législative fait partie du paquet «Nouvelle génération de contrôles aux frontières», une initiative stratégique du programme de travail 2012 de la Commission. Selon la Commission européenne, ce paquet répond à deux défis majeurs qui sont interdépendants, à savoir comment surveiller efficacement les flux de voyageurs et les déplacements des ressortissants de pays tiers qui franchissent les frontières extérieures de l'espace Schengen dans son ensemble et comment faire en sorte que les franchissements des frontières soient rapides et simples pour le nombre croissant de voyageurs réguliers qui constituent la grande majorité des personnes qui traversent les frontières.

1.2

Dans sa communication du 13 février 2008, intitulée «Préparer les prochaines évolutions de la gestion des frontières dans l'Union européenne», la Commission avait proposé la création d'un système d'entrée/sortie (EES).

1.3

Cette proposition a été entérinée dans le programme de Stockholm, adopté par le Conseil européen au mois de décembre 2009, qui réaffirmait le potentiel que pourrait offrir un système d'entrée/sortie permettant aux États membres d'échanger des données de manière efficace tout en garantissant le respect des règles de protection des données.

1.4

Les conclusions du Conseil européen des 23 et 24 juin 2011 appelaient à faire progresser rapidement les travaux concernant les «frontières intelligentes». En réponse à cet appel, la Commission a adopté, le 25 octobre 2011, une nouvelle communication sur les différentes options et la voie à suivre.

1.5

Le Comité économique et social européen a élaboré un certain nombre d'avis relatifs à la mise en œuvre des deux systèmes complémentaires (1). Ces avis ont mis en évidence la valeur ajoutée des engagements et des instruments de l'UE visant à relever les défis d'une mobilité transfrontalière croissante. L'UE a un rôle majeur à jouer et des responsabilités à assumer lorsqu'il s'agit de garantir la coordination entre les États membres. Compte tenu des récents défis liés à la mobilité et à la migration, le CESE a défendu les principes de proportionnalité et d'efficacité. Il a également souligné l'importance capitale de garantir la protection des droits fondamentaux dans le cadre de l'élaboration et de la mise en œuvre des politiques et des programmes.

2.   Observations générales

2.1

Étant donné l'accroissement prévisible de la mobilité aux frontières de l'UE, il convient d'accélérer les efforts visant à créer des systèmes fiables et efficaces de gestion et de contrôle des frontières.

2.2

Le CESE salue la logique sous-jacente du paquet «Frontières intelligentes», qui vise à trouver un juste équilibre entre la nécessité d'encourager la mobilité et d'apaiser les inquiétudes relatives à la sécurité, qui semblent avoir gagné du terrain dans l'ensemble de l'UE au cours des dernières années.

2.3

Le CESE reconnaît la valeur ajoutée d'un engagement, d'une gestion et d'un investissement à l'échelle de l'UE, et espère que les États membres coordonneront leurs efforts afin de garantir la réussite de la mise en œuvre des programmes envisagés.

2.4

Le CESE souhaite souligner que l'identité de l'Union européenne est explicitement et implicitement associée à l'ouverture et à l'interconnexion, non seulement à l'intérieur, mais aussi au-delà de ses frontières. L'UE constitue une espace culturel, social, politique et économique dynamique, et la mobilité transfrontalière s'avère essentielle pour maintenir son importance sur la scène internationale. Dans cet esprit, les institutions européennes et les États membres devraient s'assurer que les nouveaux systèmes n'aient pas d'incidence sur les voyages dans l'UE des ressortissants de pays tiers, ni sur leur volonté de s'y rendre.

2.5

De même, il y a lieu d'accorder une attention particulière à la perception par le public des deux systèmes et de leur fonctionnement, en expliquant clairement les règles aux ressortissants de pays tiers. L'UE et les États membres devraient coopérer avec les autorités des pays tiers afin de garantir que les voyageurs potentiels aient accès aux informations et à une assistance, en particulier en ce qui concerne leurs droits. Le paquet doit bénéficier d'un volet de communication doté des ressources adéquates.

2.6

Le CESE invite tous les acteurs et les institutions concernés à prendre en considération les droits fondamentaux au moment de développer davantage et de mettre en œuvre les deux systèmes. Malgré leur nature plutôt technique, les deux systèmes ont des incidences considérables sur les droits et les libertés fondamentaux des citoyens et de l'ensemble des ressortissants de pays tiers qui se rendent dans l'UE. Le CESE se félicite de l'attention portée aux questions liées à la protection et la confidentialité des données, et espère que la protection de l'ensemble des droits fondamentaux concernés fera l'objet d'une attention et d'une surveillance appropriées.

2.7

Le CESE insiste sur les différences significatives entre les cadres institutionnels et les capacités des États membres, nombre d'entre eux appliquant leur propre version des deux systèmes. Une transformation à une telle échelle, associant un nombre important d'institutions et de personnes, constitue une opération ambitieuse, voire à risques. Les institutions concernées devraient garantir que la transition ne nuise en aucun cas aux voyageurs.

2.8

Au vu des expériences précédentes, le CESE souhaite également attirer l'attention sur le problème des coûts et de leur estimation. De tels systèmes sont particulièrement coûteux et il convient de garantir que les dépenses soient proportionnelles et efficaces. En outre, les premières estimations devraient être les plus précises possibles.

2.9

Le CESE souhaite que l'on se penche davantage sur la différenciation des voyageurs, qui constitue un volet clé du programme «Frontières intelligentes». Il est possible que la différenciation s'apparente, dans la pratique, à de la discrimination. L'accès au programme d'enregistrement des voyageurs (RTP) dépendra de la situation, du revenu, des compétences linguistiques et de l'éducation. Ce risque peut être diminué si les pouvoirs compétents restent ouverts à tous les types d'activités et d'affiliations acceptables pour les voyageurs éventuels.

2.10

Le CESE prend note de l'absence de données pertinentes et spécifiques en matière de mobilité. Outre le manque de chiffres précis sur les personnes qui effectuent des séjours courts mais qui dépassent ensuite la durée de séjour autorisée, l'on ne dispose pas de données qualitatives qui pourraient permettre de comprendre ce phénomène. La politique ne devrait pas reposer uniquement sur des données quantitatives qui seraient recueillies une fois les systèmes en place. Des ressources supplémentaires sont nécessaires afin d'analyser les usages et les abus du système actuel.

2.11

Le CESE encourage l'UE et les États membres à accorder l'attention nécessaire à la formation du personnel qui travaille directement avec les voyageurs, en particulier les fonctionnaires consulaires et les agents des services de contrôle frontalier. En plus d'être très bien formés, ceux-ci devraient être capables d'aider les voyageurs à suivre des procédures qui sont techniquement compliquées et délicates sur le plan psychologique.

2.12

Bien qu'il reconnaisse les avantages de collecter des données biométriques, le CESE prend note des conséquences du relevé des empreintes digitales sur les voyageurs, qu'ils soient en situation régulière ou non. L'impact psychologique nuit à l'envie de voyager et, de manière générale, à la relation qu'entretient la personne avec la société qui l'accueille. En outre, le relevé des empreintes est traditionnellement associé aux activités criminelles et aux pratiques policières. Le CESE invite à examiner de manière plus approfondie la collecte de données biométriques dans le cadre des deux programmes, ainsi que les façons de limiter ses effets néfastes.

3.   Observations particulières

3.1

Le CESE estime qu'il convient d'appliquer le droit à l'information, notamment lorsqu'il est question d'utiliser des données personnelles. Les ressortissants de pays tiers doivent prendre connaissance de leurs droits. Dans certaines situations, les barrières linguistiques peuvent empêcher l'usage effectif de ce droit. Les bases de données Justice et affaires intérieures actuelles et futures devraient prévoir par défaut la non-discrimination vis-à-vis des ressortissants de pays tiers et la lier étroitement à la garantie du respect des principes de protection des données (le droit à l'information, à des voies de recours effectives et au consentement individuel en matière de traitement des données), tout en accordant une attention particulière aux catégories vulnérables en tant que personnes concernées.

3.2

Le CESE estime qu'une vision plus détaillée des bases de données Justice et affaires intérieures et des systèmes d'information est nécessaire. La Commission européenne devrait fournir régulièrement, si possible chaque année, un rapport consolidé de suivi de l'activité de tous les systèmes qui impliquent l'échange de données et d'informations dans le domaine de la justice et des affaires intérieures, indiquant le type d'informations partagées et l'objectif de ces échanges.

3.3

L'UE devrait encourager les gouvernements nationaux à soutenir de manière adéquate les institutions chargées du suivi et de la surveillance globale du système d'entrée/sortie.

3.4

Le Comité se félicite que l'octroi de l'accès au RTP passe progressivement d'une approche «centrée sur le pays» à une approche «centrée sur la personne». Il recommande qu'un entretien avec l'auteur d'une demande soit réalisé d'office, en particulier lorsque des précisions supplémentaires sont nécessaires. Le CESE attire également l'attention sur la logique du profilage (prise de décision automatisée) et de l'exploration des données qui est associée aux bases de données Justice et affaires intérieures et aux frontières intelligentes, et estime que l'utilisation potentielle de la race, de l'appartenance ethnique ou d'autres données sensibles comme base pour le contrôle statistique des données est difficilement compatible avec les principes de non-discrimination, le droit dérivé et les obligations en matière de droits fondamentaux.

3.5

Le CESE préconise une définition plus large des voyageurs réguliers, afin qu'elle couvre toute activité culturelle, économique et sociale. Il encourage les États membres à tenir compte pleinement de la diversité de la vie sociale. Il convient d'éviter d'accorder des traitements préférentiels à toute catégorie socioprofessionnelle.

3.6

Les ressortissants de pays tiers peuvent demander leur inscription au programme d'enregistrement des voyageurs aux consulats, dans les centres communs de dépôt des demandes et aux points de passage frontalier. Si cette possibilité est utile pour le candidat, elle constitue également un défi en matière de gestion. L'ensemble du personnel concerné devrait être informé et correctement formé sur le fonctionnement des systèmes.

3.7

Le CESE estime que la procédure liée à la preuve de prise en charge ou à l'attestation d'accueil privé pourrait être compliquée. Si elle est maintenue, elle devrait au moins prévoir un format minimal et standard pour l'ensemble de l'UE. De cette manière, les États membres ne se serviront pas de ce document comme un moyen de dissuasion.

3.8

Par principe, la délivrance de documents d'accompagnement nécessaires pour compléter une demande d'accès au RTP ne devrait pas entraîner de coûts inutiles et excessifs pour le demandeur, ni pour les organisations concernées. Il convient de calculer les frais encourus par l'auteur de la demande et les organisations de soutien dans le cadre des évaluations intermédiaires.

3.9

En ce qui concerne la période pendant laquelle les autorités compétentes doivent prendre une décision, nous recommandons une période maximale de 25 jours, tout en encourageant une prise de décision rapide.

3.10

Il y a lieu de préciser davantage les critères de rejet d'une demande d'accès au RTP. Les bases qui servent à évaluer le degré de menace pour l'ordre public, la sécurité nationale et la santé publique ne sont pas claires. Ce manque de clarté est susceptible d'entraîner des décisions arbitraires. Cette évaluation est réalisée par des milliers de personnes qui possèdent des expériences et des formations très différentes, et qui disposent d'informations très variées concernant le voyageur, ses activités et son pays d'origine. En outre, le fait de citer la menace pour les relations internationales d'un État membre parmi les critères de rejet est discutable.

3.11

Il est très important que les demandeurs non admis (demande non recevable/rejetée) puissent effectivement faire appel de la décision. Le CESE encourage la Commission et les États membres à aider les personnes qui souhaitent exercer leur droit de recours.

Bruxelles, le 22 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  JO C 88 du 11.4.2006, pp. 37–40, JO C 128 du 18.5.2010, pp. 29–35, JO C 128 du 18.5.2010, pp. 80–88, JO C 44 du 11.2.2011, pp. 162–166, JO C 376 du 22.12.2011, pp. 74–80, JO C 299 du 4.10.2012, pp. 108-114.


19.9.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 271/101


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de modification de la proposition COM(2011) 607 final/2 de la Commission — Règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au Fonds social européen et abrogeant le règlement (CE) no 1081/2006 du Conseil»

COM(2013) 145 final – 2011/0268 (COD)

et sur la «Proposition de modification de la proposition de la Commission COM(2012) 496 — Règlement du Parlement européen et du Conseil portant dispositions communes relatives au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen, au Fonds de cohésion, au Fonds européen agricole pour le développement rural et au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche relevant du cadre stratégique commun, portant dispositions générales applicables au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen et au Fonds de cohésion, et abrogeant le règlement (CE) no 1083/2006 du Conseil»

COM(2013) 146 final – 2011/0276 (COD)

2013/C 271/19

Rapporteur général: Mário SOARES

Le 25 mars 2013, le Conseil a décidé, conformément aux articles 164 et 177 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de modification de la proposition COM(2011) 607 final/2 de la Commission de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au Fonds social européen et abrogeant le règlement (CE) no 1081/2006 du Conseil»

COM(2013) 145 final – 2011/0268 (COD)

et sur la

«Proposition de modification de la proposition de la Commission COM(2012) 496 –Règlement du Parlement européen et du Conseil portant dispositions communes relatives au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen, au Fonds de cohésion, au Fonds européen agricole pour le développement rural et au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche relevant du cadre stratégique commun, portant dispositions générales applicables au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen et au Fonds de cohésion, et abrogeant le règlement (CE) no 1083/2006 du Conseil»

COM(2013) 146 final – 2011/0276 (COD).

Le 16 avril 2013, le Bureau du Comité a chargé la section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté» de préparer les travaux du Comité en la matière.

Compte tenu de l'urgence des travaux, le Comité économique et social européen a décidé au cours de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 22 mai 2013) de nommer M. Mário SOARES rapporteur général et a adopté le présent avis par 135 voix pour, 3 voix contre et 4 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Malgré ses réserves relatives au montant et à la manière dont sont financées les initiatives portant sur l'emploi et la Garantie pour la jeunesse, le CESE est d'accord avec la Commission quant à la nécessité de modifier, selon les axes tracés dans la proposition à l'examen, les règlements du Parlement et du Conseil relatifs au Fonds social européen et aux Fonds structurels.

1.2

Le CESE souligne la nécessité que les politiques qui seront arrêtées contribuent à la croissance et à la création d'emplois stables et de qualité, et qu'elles renforcent la cohésion sociale.

1.3

Le CESE regrette que les crédits destinés au financement de l'Initiative pour l'emploi des jeunes ne résultent pas d'un renforcement du budget de l'Union, mais qu'ils soient prélevés sur l'enveloppe budgétaire globale destinée à la cohésion, laquelle est déjà inférieure à celle qui était disponible pour la période 2007/2013.

1.4

Le CESE est convaincu que le montant prévu, à savoir 6 milliards d'euros, est insuffisant compte tenu de l'ampleur du problème et de l'urgence qu'il y a à le résoudre.

1.5

Dès lors que la crise n'est pas encore terminée et que la création d'emploi n'a pas commencé, le CESE propose davantage de flexibilité en ce qui concerne la fixation du pourcentage de chômage des jeunes donnant accès aux fonds disponibles, de façon à pouvoir évaluer l'évolution de la situation du chômage des jeunes, ou alors que ce pourcentage soit fixé à 20 %.

1.6

Le CESE recommande que la limite d'âge donnant accès à la Garantie pour la jeunesse soit portée à 30 ans, en particulier dans les pays où les taux de chômage des jeunes sont les plus élevés.

1.7

Enfin, le CESE exhorte les États membres à ne pas réduire les engagements financiers que la proposition de cadre financier pluriannuel prévoit de consacrer à la promotion de l'emploi des jeunes, et à accepter la suggestion de la Commission d'utiliser des ressources supplémentaires pour atteindre l'objectif consistant à éradiquer un problème qui met en jeu l'avenir de toute une génération de jeunes européens.

2.   Principaux éléments de la proposition de la Commission

2.1

Suite à la décision du Conseil européen du 28 février 2013 de créer une Garantie pour la jeunesse, la Commission présente deux propositions: la première modifie la proposition COM(2011) 607 final/2 de la Commission de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au Fonds social européen et abrogeant le règlement (CE) no 1081/2006 du Conseil (COM(2013) 145 final), tandis que la seconde modifie la proposition COM(2012) 496 de la Commission – Règlement du Parlement européen et du Conseil portant dispositions communes relatives à plusieurs fonds et abrogeant le règlement (CE) no 1083/2006 du Conseil (COM(2013) 146 final).

2.2

Ces propositions visent à pourvoir au financement de l'Initiative pour l'emploi des jeunes dans le cadre de la «Garantie pour la jeunesse», laquelle assurerait à tous les jeunes âgés de 25 ans au plus de se voir proposer une offre de travail décent, un complément de formation ou un stage professionnel dans les quatre mois suivant la fin de leurs études ou la perte de leur emploi.

2.3

Le financement total prévu pour la période 2014-2020 est de 6 milliards d'euros, dont 3 d'investissements du Fonds social européen et 3 de dotation spécifique allouée à l’Initiative pour l’emploi des jeunes dans le cadre de la sous-rubrique 1.b: «Cohésion économique, sociale et territoriale».

2.4

Le financement prévu est destiné aux régions de niveau NUTS 2 qui ont enregistré des taux de chômage des jeunes (15 à 25 ans) supérieurs à 25 % en 2012.

3.   Observations générales

3.1

La situation dramatique du chômage des jeunes enregistrée dans plusieurs États membres justifie amplement l'initiative décidée par le Conseil le 28 février 2013 de créer une Garantie pour la jeunesse, laquelle a été revendiquée à plusieurs reprises et sous différentes formes par les partenaires sociaux et les organisations de la société civile.

3.2

Selon la Commission européenne, l'Union compte 7,5 millions de NEETs (1), ce qui représente 12,9 % des jeunes européens âgés de 15 à 24 ans. Un grand nombre d'entre eux n'ont pas terminé leurs études secondaires et ont abandonné l'école avant la fin de leur scolarité; un grand nombre d'entre eux sont immigrés ou issus de catégories sociales défavorisées. Toutefois l'on enregistre également dans quelques pays une détérioration de la situation des jeunes appartenant à la classe moyenne (nouveaux pauvres) qui n'ont pas encore terminé leurs études et courent le risque de ne pas pouvoir les poursuivre.

3.3

Dans des avis antérieurs, le CESE a souligné les chiffres catastrophiques du chômage des jeunes dans l'UE et demandé à toutes les parties intéressées d'adopter des mesures urgentes, efficaces et définitives pour rompre ce cercle vicieux qui hypothèque l'avenir de toute une génération (2). Il ne s'agit pas que d'un problème concret affectant les personnes concernées mais également d'une menace qui pèse sur la cohésion sociale de l'UE, ce qui, à terme, pourra compromettre la croissance économique et la compétitivité de l'Europe.

3.4

Le CESE fait valoir que les politiques décidées à présent doivent contribuer à la reprise de la croissance et à la création d'emplois de qualité et stables, assortis des garanties et de la protection qui ont historiquement contribué à la construction du modèle social européen et à la cohésion sociale. Dans le même temps, il réaffirme l'importance de la pleine participation des partenaires sociaux et des organisations de la société civile à la planification, à la mise en œuvre et au suivi de ces politiques.

3.5

En réalité, l'Initiative pour l'emploi des jeunes, intégrée dans la Garantie pour la jeunesse, ne sera efficace que si elle va de pair avec un effort correspondant pour le volet «demande du marché du travail» (c'est à dire, s'il existe une croissance économique). En outre, l'éducation, les stages professionnels qualifiants et l'amélioration des compétences des millions de jeunes ayant de maigres perspectives d'intégration sur le marché du travail comportent en soi des risques énormes.

3.6

Le CESE observe avec préoccupation que le Conseil européen voit les difficultés économiques de l'Europe comme étant essentiellement un problème de consolidation budgétaire, sans même tenter de quantifier les coûts d'opportunité ou les conséquences négatives qui en découlent, comme le chômage de masse qui frappe les jeunes, la désillusion et le désespoir (3).

4.   Observations particulières

4.1

Les modifications présentées par la Commission visent à adapter le règlement régissant actuellement le Fonds social européen et le règlement général relatif aux différents fonds européens à la décision du Conseil européen des 7 et 8 février; aussi les observations suivantes ne concernent-elles pas les propositions de la Commission mais les lignes directrices décidées par le Conseil.

4.2

Dans un contexte de crise comme celui que nous vivons, le CESE ne peut que regretter que le Conseil propose pour la période 2014-2020 un budget de l'Union inférieur à celui de la période antérieure, ce qui a une incidence négative sur les ressources nécessaires pour affronter la situation actuelle.

4.3

Il résulte de cette décision que le financement proposé pour la lutte contre le chômage des jeunes ne consiste pas en une augmentation budgétaire mais en une réduction de crédits destinés à d'autres rubriques, à savoir – 3 milliards au Fonds social européen et 3 milliards à la politique de cohésion.

4.4

De plus, le montant global alloué de 6 milliards d'euros, répartis sur sept ans, est manifestement insuffisant (4).

4.5

En choisissant 2012 pour déterminer le pourcentage de chômage des jeunes (25 %) ouvrant droit aux fonds alloués aujourd'hui, l'on ne prend pas en considération l'évolution de la crise ni la récession actuelle et l'on risque de négliger des situations dramatiques qui pourraient se faire jour pendant cette période. Le CESE est par conséquent d'avis qu'une plus grande souplesse est nécessaire pour pouvoir évaluer l'évolution de la situation du chômage des jeunes ou, à titre préventif, qu'il faudrait abaisser ce pourcentage à 20 %.

4.6

Par ailleurs, le CESE recommande que la limite d'âge pour pouvoir bénéficier de la Garantie pour la jeunesse soit relevée à 30 ans, de manière à ce que les jeunes qui sortent plus tard de l'université ou se trouvent dans une phase de transition entre la formation et l'emploi puissent y avoir accès. Cela est particulièrement important pour les pays qui enregistrent les taux les plus élevés de chômage des jeunes.

4.7

Le CESE approuve la décision d'exempter les États membres du cofinancement s'agissant de la dotation spécifique pour l'emploi des jeunes (3 milliards d'euros), ainsi que celle de ne pas appliquer la réserve de performance de 5 % des ressources allouées à l'Initiative pour l'emploi des jeunes.

4.8

Enfin et réaffirmant, sous réserve néanmoins des observations formulées ci-dessus, que cette initiative doit être soutenue, le CESE préconise de la transformer en une mesure structurelle des politiques actives de l'emploi et de ne pas la limiter au statut d'instrument servant à affronter la crise économique actuelle (5).

Bruxelles, le 22 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  NEETs: se réfère à des jeunes qui n'étudient pas, ne travaillent pas et ont un faible niveau d'éducation et de formation.

(2)  Voir en particulier l'avis du CESE «Faire accéder les jeunes à l'emploi» - JO C 161, 6.6.2013, p. 67-72.

(3)  Le coût de la non-intégration des jeunes sur le marché du travail, en raison de transferts sociaux excessifs ou d'impôts non perçus, dépasse les 150 milliards d'euros.

(4)  Selon l'OIT qui a, avec prudence néanmoins, salué cette initiative, les besoins financiers pour pouvoir escompter une évolution significative de la situation seraient de l'ordre des 21 milliards d'euros.

(5)  En cohérence avec l'avis du CESE «Faire accéder les jeunes à l'emploi» (JO C 161, 6.6.2013, p. 67-72), l'Initiative pour l'emploi des jeunes doit être liée au Semestre européen.


19.9.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 271/104


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions CARS 2020: plan d'action pour une industrie automobile compétitive et durable en Europe»

COM(2012) 636 final

2013/C 271/20

Rapporteur: M. RANOCCHIARI

Corapporteure: Mme HRUŠECKÁ

Le 8 novembre 2012, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions – CARS 2020: plan d'action pour une industrie automobile compétitive et durable en Europe»

COM(2012) 636 final.

La commission consultative des mutations industrielles, chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 12 mars 2013.

Lors de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 23 mai 2013), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 147 voix pour, 1 voix contre et 6 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le Comité économique et social européen (CESE) se réjouit de l'approche adoptée par la Commission européenne, et plus particulièrement son vice-président et commissaire en charge de l'industrie, Antonio TAJANI, consistant à consulter toutes les parties prenantes dans le cadre du groupe de haut niveau CARS 21 afin de dresser un état des lieux de l'industrie automobile avant de lancer, sur la base des conclusions du groupe, un plan d'action pour remédier à la situation difficile que connaît le secteur et favoriser sa relance.

1.2

Le plan d'action présenté dans la communication CARS 2020 propose des réflexions et des recommandations que le Comité partage pleinement concernant au moins trois des quatre grands axes du document: la participation au financement de la recherche, une réglementation intelligente qui ne pèse pas inutilement sur les coûts du secteur et une internationalisation accrue de celui-ci. Pour ce qui est du quatrième axe, le Comité est favorable aux suggestions de la Commission concernant l'anticipation de l'adaptation, mais quelques doutes subsistent quant au processus de restructuration.

1.3

Il s'agit d'une stratégie ambitieuse, qui tente de trouver un équilibre entre la lutte contre le changement climatique et la nécessité d'accroître la compétitivité; en d'autres termes, l'objectif poursuivi consiste à disposer de véhicules toujours plus compétitifs et durables pour réussir à relever le défi que pose une concurrence extérieure et intérieure toujours plus agressive, en garantissant un mode de transition qui soit socialement acceptable.

1.4

Pour atteindre cet objectif, il est indispensable de mener une politique économique et commerciale commune et d'utiliser tous les moyens disponibles au niveau européen pour mettre en œuvre sans délai les mesures recommandées, de surmonter les désaccords qui n'ont pas permis, jusqu'ici, de prendre des mesures rapides et coordonnées pour lutter contre la crise et de réexaminer, le cas échéant, certaines orientations, voire certaines décisions, susceptibles d'entraver la réalisation du plan et, partant, la relance souhaitée du secteur automobile.

1.5

Un premier problème, dont on pourrait dire qu'il est inhérent aux temps qui courent, est la disponibilité limitée des moyens financiers nécessaires pour accompagner les investissements considérables toujours plus nombreux que les constructeurs et les équipementiers devront consentir dans la recherche, le développement et l'innovation pour atteindre les objectifs souhaités par la Commission au cours des prochaines années. Ce problème se pose avec plus d'acuité encore pour les PME de la filière automobile, ainsi que d'autres entreprises qui y sont liées et en dépendent souvent.

1.6

Le CESE se félicite que la Commission ait choisi de ne pas octroyer des incitations financières qui soient trop axées sur une technologie déterminée à l'exclusion de toutes les autres. Cette décision ne doit cependant pas signifier que des incitations pour le court ou le moyen terme (par exemple le méthane, le GPL, la dernière génération de moteurs à haute efficacité) doivent créer des obstacles au développement à moyen et long terme, comme les voitures électriques et à l'hydrogène.

1.7

S'agissant des règlements sur les émissions de CO2, le CESE considère que seule une approche fondée sur l'évaluation du cycle de vie (life cycle assessment - LCA) peut contribuer à atténuer l'empreinte écologique globale des véhicules.

1.8

Si la communication rappelle que l'industrie automobile européenne fait face à un important processus de restructuration (avec la fermeture possible d'usines) qui aura des répercussions sur l'emploi, elle n'analyse cependant pas la principale cause de cette situation – la capacité de production structurellement excédentaire en Europe – et ne fournit aucun détail à ce sujet. Même si l'on ne dispose pas de chiffres exacts quant à l'ampleur de ce phénomène, les analystes du secteur estiment la surcapacité entre trois et cinq millions de voitures. Le CESE invite la Commission à lancer rapidement une recherche plus détaillée pour être en mesure de fournir des chiffres plus précis sur l'emploi et la capacité excédentaire ainsi que sur le coût de la sous-utilisation de la capacité de production.

1.9

La position de la Commission, qui souhaite ne jouer qu'un rôle complémentaire par rapport aux entreprises, aux États membres et aux régions, semble dès lors trop défaitiste, notamment parce que le fait de ne pas apporter de solution consensuelle au problème risque de porter préjudice à l'amélioration de la compétitivité sur les marchés mondiaux, un autre objectif fixé par le plan d'action. Aussi le CESE considère-t-il que la question de la surcapacité ne peut être abordée de manière dispersée et qu'il faut au contraire un guide pour coordonner ce processus.

1.10

Le CESE regrette que cet aspect, qui revêt une importance énorme sur le plan social, ne soit pas pris en compte de façon appropriée dans le plan d'action, et invite la Commission européenne à exercer son droit d'initiative et à se saisir de la question en développant des lignes directrices et en collectant les bonnes pratiques du passé qui ont permis d'éviter les licenciements. Compte tenu de l'urgence de la situation, la Commission peut et, de l'avis du CESE, devrait, jouer un rôle de coordination et apporter éventuellement un soutien financier lors d'une opération de restructuration de grande ampleur qui, si elle n'est pas gérée de manière adéquate, pourrait avoir des répercussions déstabilisantes dans nombre de régions européennes en affectant lourdement l'emploi dans le secteur automobile. Le CESE recommande instamment que les collectivités régionales et locales soient associées étroitement à tout plan de restructuration.

1.11

Pour que cette opération soit couronnée de succès et que la base manufacturière de l'Union puisse être sauvegardée, il faut renforcer un dialogue social ouvert et constructif. C'est la seule manière de garantir un juste équilibre entre les différentes composantes du plan d'action et donner la priorité au capital humain, que ce soit en termes de recyclage de la main-d’œuvre ou de gestion des travailleurs en surnombre lorsque la suppression d'emplois est inévitable. Cela s'applique également aux industries connexes confrontées aux mêmes problèmes graves.

1.12

À court terme, il conviendrait de définir un cadre européen pour les mesures visant à résorber les disparités sociales afin d'éviter des distorsions sur le marché de l'emploi de l'UE, en tirant les enseignements de la crise de 2008/2009. Le rôle des partenaires sociaux est essentiel au cours de cette période de transition.

1.13

Pour conclure, le CESE considère que l'Union européenne doit renforcer l'ensemble de sa politique industrielle, plus particulièrement dans le secteur manufacturier. Les objectifs de la stratégie 2020 ne peuvent être réalisés sans un appareil industriel fort et compétitif, qui constitue le socle du développement économique de l'Union. Il y a lieu de mener des politiques proactives qui soutiennent l'innovation et le développement et transforment les problèmes qui se posent aujourd'hui en opportunités pour l'avenir. L'industrie automobile a besoin d'une politique industrielle axée sur la croissance durable et non sur le seul redimensionnement de la production. Il faut consentir des investissements en capital et en ressources humaines toujours mieux formées et qualifiées. Technologies, processus, design: tous ces éléments doivent concourir à faire en sorte que l'industrie automobile européenne redevienne numéro un mondial. Il convient d'affronter la concurrence mondiale en misant sur le développement et l'innovation. La fermeture éventuelle des usines ne suffit certainement pas à résoudre le problème.

2.   Introduction

2.1

Afin de mieux appréhender et évaluer le Plan d'action sur lequel le CESE est appelé à se prononcer, il convient de rappeler les travaux qui ont précédé son élaboration, les expériences enregistrées et les progrès réalisés depuis la première édition de CARS 21.

2.2

En janvier 2005, M. VERHEUGEN, qui était alors vice-président de la Commission et commissaire en charge de l'Industrie, a créé le groupe de conseillers à haut niveau CARS 21, heureux acronyme du titre «Competitive Automotive Regulatory System for the 21th. Century» (Un cadre réglementaire concurrentiel pour le secteur automobile au XXIe siècle).

2.3

L'objectif de CARS 21 était de définir une politique et, partant, une législation européenne en mesure de renforcer la compétitivité du secteur, appelé à se mesurer à une concurrence de plus en plus forte sur le marché mondial. Cette initiative était on ne peut plus utile compte tenu de l'importance du secteur automobile (1), qui emploie environ 12 millions de personnes en Europe (avec des installations de production dans 19 États membres), investit chaque année plus de 28 milliards d'euros en R&D, présente une balance commerciale positive d'environ 90 milliards d'euros et contribue à la fiscalité des États membres pour plus de 430 milliards d'euros, soit quasiment 4 % du PIB européen.

2.4

Les travaux de CARS 21 se sont achevés en décembre 2005 par l'élaboration d'un document qui énumérait 18 recommandations et fixait des lignes directrices sur lesquelles la Commission devait se baser pour élaborer ses propositions législatives. La politique réglementaire devait garantir un cadre favorable et fiable pour l'industrie grâce au principe de la «réglementation intelligente» qui vérifie, pour chaque proposition, le rapport coût-bénéfice, analyse soigneusement l'impact sur l'industrie et la société, reconnaît les délais minimums nécessaires pour chaque innovation technique requise et fixe des objectifs à long terme en associant toujours l'ensemble des acteurs concernés.

2.5

Dans les faits, ces recommandations n'ont pas toujours été appliquées de concert par toutes les Directions de la Commission et les services des autres institutions européennes mais, dans l'ensemble, les orientations définies par CARS 21 se sont révélées très utiles pour le secteur industriel mais aussi pour toutes les autres parties prenantes.

2.6

En 2010, compte tenu de la nécessité de disposer de véhicules toujours plus propres et efficaces et bien que le marché européen se trouve au beau milieu d'une crise sans précédent, le vice-président de la Commission et commissaire en charge de l'industrie, M. TAJANI, a très justement rappelé qu'il convenait de réactiver le groupe CARS 21 moyennant un certain nombre de changements fondés sur l'expérience enregistrée précédemment.

2.7

En effet, même s'il avait reçu un accueil favorable, le précédent groupe de haut niveau avait aussi essuyé un certain nombre de critiques en raison de sa composition; d'aucun estimaient qu'il ne représentait pas l'ensemble des acteurs concernés et réservait une place considérable aux constructeurs mais, surtout, qu'il n'associait pas l'ensemble des commissaires européens potentiellement concernés par la politique législative dans ce secteur.

2.8

L'on a dès lors veillé à associer, au sein du nouveau groupe, l'ensemble des acteurs publics et privés potentiellement concernés: huit commissaires européens, neuf États membres, des représentants des autres institutions de l'UE comme le CESE et le Comité des régions. Du côté du secteur privé, outre les constructeurs européens, ont été associés les autres participants de la filière automobile, comme les équipementiers, les réparateurs, les pétroliers ainsi que les syndicats, les représentants d'associations de protection de l'environnement ainsi que d'associations et de mouvements en faveur des nouvelles technologies automobiles. Au total, le groupe de haut niveau se composait de quelque 40 participants, assistés par des «sherpas» et des experts.

2.9

Les travaux du groupe de haut niveau ont débuté par une première réunion en novembre 2010, et se sont poursuivis par une série de rencontres qui ont abouti au rapport final, lequel a été examiné et adopté en juin 2012.

2.10

Cette initiative revêt une importance essentielle et il faut rendre hommage à la Commission, en particulier à la DG «Entreprises» qui a coordonné les travaux, d'avoir su élaborer, de manière professionnelle et efficace, un document qui a recueilli l'approbation générale des participants.

2.11

Comme l'a déclaré le vice-président TAJANI, la communication sur le plan d'action CARS 2020 que le CESE doit examiner repose sur ces expériences et ce dernier document.

3.   La communication de la Commission: le plan d'action CARS 2020

3.1

Le plan d'action présenté dans la communication repose sur quatre piliers essentiels:

l'investissement dans des technologies de pointe et le financement de l’innovation;

le renforcement du marché intérieur et l'application de la réglementation intelligente;

l'amélioration de la compétitivité sur les marchés mondiaux;

l'anticipation de l'adaptation et l'atténuation des conséquences sociales de la restructuration des activités de production.

Une série d'actions clés sont prévues au sein de ces quatre piliers, dont la réalisation sera gérée au travers de la mise en place du groupe de haut niveau CARS 2020, qui regroupera les mêmes acteurs que CARS 21, se réunira une fois par an de manière informelle et se fondera notamment sur des réunions d'experts concernant les thèmes liés à la compétitivité du secteur automobile.

3.2

L'investissement dans des technologies de pointe et le financement de l'innovation

La Commission:

continuera de coopérer avec la BEI afin d’assurer l’accès au financement pour les projets de R&D dans le secteur automobile;

coopérera avec l’industrie en vue d’élaborer une initiative européenne en faveur des véhicules verts au titre du programme «Horizon 2020» (2);

mettra en œuvre les objectifs fixés pour 2020 en matière d’émissions de CO2 pour les voitures et les camionnettes;

soutiendra l’élaboration d’un nouveau cycle d’essai de conduite et d’une nouvelle procédure d’essai pour mesurer la consommation de carburant et les émissions, qui seront plus représentatifs des conditions de conduite réelles;

poursuivra ses travaux dans le domaine de la sécurité routière, conformément aux objectifs de ses orientations politiques pour la période 2011-2020  (3);

élaborera une stratégie relative aux carburants alternatifs et présentera une proposition législative sur les infrastructures adaptées à leur utilisation.

3.3

Le renforcement du marché intérieur et l'application de la réglementation intelligente

La Commission:

engagera un dialogue entre les parties prenantes pour parvenir à un accord d'autoréglementation concernant la distribution des véhicules en Europe;

élaborera des lignes directrices sur les incitations financières mises en place par les États membres pour promouvoir des véhicules propres et économes en énergie;

réaffirmera le principe de la «réglementation intelligente» qui est l'un des principaux résultats de la première édition du groupe CARS 21, confirmé lors de sa réactivation, et intégrera dans les analyses d'impact des propositions législatives un examen de l’incidence sur la compétitivité;

procédera à une révision du cadre d’homologation des véhicules, et y inclura les dispositions relatives à la surveillance du marché.

3.4

L'amélioration de la compétitivité sur les marchés mondiaux

La Commission:

évaluera les effets de chaque accord de libre échange ainsi que l'incidence cumulée de l'accord sur la compétitivité du secteur;

réformera l'accord CEE-ONU (4) et y associera également les marchés de pays tiers;

intégrera, dans la mesure du possible, la réglementation multilatérale CEE-ONU avec la réglementation bilatérale dans le cadre d'accords commerciaux avec des États qui ne sont pas partie à l'accord CEE-ONU.

3.5

L'anticipation de l'adaptation et l'atténuation des conséquences sociales de la restructuration des activités de production

La Commission:

appuiera la création d’un Conseil européen des compétences dans l’industrie automobile avec la participation de toutes les parties concernées, y compris des représentants des prestataires d’enseignement et de formation, qui analysera les tendances en matière d’emploi et de compétences nécessaires dans le domaine de l’automobile et, partant, les carences professionnelles à combler;

encouragera le recours au Fonds social européen (FSE) pour la requalification des travailleurs et, dans les principaux cas de restructuration ou de fermeture, le recours au Fonds européen d'ajustement à la mondialisation (FEM);

surveillera les restructurations pour s’assurer du respect de la législation de l’Union européenne, en particulier en ce qui concerne les aides d’État et les règles du marché intérieur;

dans le domaine de la restructuration de la surcapacité productive, jouera un rôle complémentaire uniquement à celui de l'industrie, à qui il appartient de gérer le processus de restructuration.

4.   Observations du Comité économique et social européen

4.1

Le CESE accueille avec satisfaction la communication de la Commission qui confirme, dans son plan d'action, un grand nombre des recommandations proposées par le groupe CARS 21, mais s'engage également à maintenir le dialogue avec les membres de ce groupe afin de suivre, d'évaluer régulièrement et, le cas échéant, d'actualiser l'état de la mise en œuvre des recommandations approuvées dans le plan.

Capacité de production installée en Europe

4.2

À propos de ce qui précède, le CESE relève une lacune importante dans la communication: le problème de la surcapacité n'est pas traité avec l'attention qu'il mérite mais est simplement inclus dans le processus plus général de restructuration. Les dimensions du problème et les données y afférentes sont exposées ci-après.

4.3

Selon les estimations d'AlixPartners (5), «l'année dernière, une quarantaine d'usines automobiles européennes ont opéré en-dessous de leur propre point d'équilibre financier (financial break-even point), c'est-à-dire en utilisant 75 à 80 % de leur capacité de production (…)» et «une dizaine se situent en dessous de 40 %», et ce, alors qu'entre 2007 et 2012 les ventes de voitures en Europe ont chuté de 3,5 millions d'unités, soit une baisse d'environ 23 %, celle-ci étant de 34,6 % pour les véhicules commerciaux. La situation du secteur des motocyclettes est encore plus critique, qui a enregistré une baisse des immatriculations de 46 %, soit environ deux fois plus que les voitures.

4.4

Il convient d'ajouter que les analystes du secteur ne sont pas unanimes sur l'ampleur de cette surcapacité, les estimations variant entre trois et cinq millions de voitures en fonction des critères d'analyse adoptés. De l'avis du CESE, en dépit de la difficulté que présente un tel exercice, la Commission européenne doit procéder à une recherche plus détaillée afin d'obtenir des chiffres plus précis.

4.5

En outre, la surcapacité est également le premier élément d'une chaîne de causalité qui a d'importantes répercussions sur la compétitivité de l'industrie automobile: capacité de production excessive, coûts fixes élevés, guerre des prix, diminution de la rentabilité et aggravation de la situation financière, fermetures d'usines, limitation des investissements en général et en R&D en particulier, risque de réduction de la compétitivité sur le long terme. Aussi le CESE invite-t-il la Commission à ne pas sous-estimer le fait que l'excédent de capacité a aussi des effets sur le troisième pilier du plan d'action: l'amélioration de la compétitivité sur les marchés mondiaux.

4.6

Certes, ce thème ne peut être abordé de manière réductrice, dans la mesure où la situation varie d'un pays à l'autre et d'un constructeur à l'autre. Si, en 2012, 70 % en moyenne de la capacité de production a été utilisée en Europe, il existe toutefois des écarts sensibles entre États membres: le Royaume-Uni et l'Allemagne se situent autour de 80 %, l'Espagne de 70 %, la France de 60 % et l'Italie un peu au-delà de 50 % (source: The Economist). S'agissant des constructeurs, les différences dépendent d'une série de facteurs: le volume des exportations, raison pour laquelle les mieux lotis sont les constructeurs qui exportent beaucoup vers les pays tiers (par exemple BMW, Audi, Daimler), alors que d'autres, plus dépendants du marché national, sont en difficulté.

4.7

Un facteur supplémentaire de différentiation entre les constructeurs est le segment sur lequel ils se positionnent essentiellement: il ressort d'une analyse de Roland Berger que le taux d'utilisation des usines varie en fonction du segment: les constructeurs ou les marques spécialisées en véhicules économiques (Dacia\Logan, Chery, Hyundai, Chevrolet) ont un taux d'utilisation de 77 %, alors que ce taux est de 62 % pour les constructeurs généralistes spécialisés dans les véhicules de moyenne gamme (PSA, Renault-Nissan, Toyota, Suzuki, Fiat, Opel, VW) et de 83 % pour les constructeurs du segment haut de gamme (BMW, Mercedes, Audi, Lexus, Infinity, DS).

4.8

Il semble dès lors que le thème de la surcapacité ne puisse être abordé en ordre dispersé par les différents constructeurs et les différents gouvernements nationaux et régionaux. Le CESE estime au contraire qu'il faut un guide qui coordonne le processus même et que ce rôle peut être joué par la Commission.

L'investissement dans des technologies de pointe et le financement de l'innovation

4.9

Le plan n'annonce aucun financement supplémentaire par rapport aux financements qui ont été octroyés par le passé et sont disponibles. L'objectif annoncé par le vice-président TAJANI au moment de la conclusion des travaux de CARS 21, à savoir porter de un à deux milliards d'euros l'enveloppe d'Horizon 2020 consacrée à la voiture verte, ne figure pas dans la communication. De même, dans l'état actuel des choses, la possibilité de nouvelles interventions de la BEI n'est qu'un vœu pieu qui trouve son origine dans la récente augmentation de capital de 10 milliards d'euros.

4.10

L'ensemble de la filière automobile, qui est appelée à recourir massivement à la recherche, au développement et à l'innovation pour accomplir le saut technologique qui lui permettra de construire des voitures toujours plus «vertes» d'ici à 2020, aurait également besoin de davantage de fonds européens pour stimuler ses propres investissements qu'un marché européen ne semblant pas capable de sortir de la récession dans un futur proche rend plus difficiles.

4.10.1

Dans ce contexte, le Comité se félicite de la référence implicite à la neutralité technologique par rapport aux différents types de propulsion (véhicules équipés d'un moteur à combustion interne, véhicules électriques, véhicules hybrides et véhicules équipés de piles à combustible), qui devra guider le soutien de l'UE aux activités de R&D et d'innovation, le but étant de disposer d'un éventail diversifié de carburants pour réaliser les objectifs climatiques de l’UE.

4.10.2

Dans le fil de la neutralité technologique susmentionnée, le Comité se réjouit plus particulièrement que la Commission s'engage en faveur du développement d'infrastructures permettant la pénétration du marché par l'ensemble des carburants de substitution, sans préférence aprioriste: énergie électrique, hydrogène, biocarburants durables, méthane (gaz naturel et billot méthane) et GPL. À cette fin, la Commission a présenté une stratégie sur les carburants de substitution et une proposition législative sur les infrastructures connexes précisant le nombre minimal d'infrastructures de réapprovisionnement/recharge. Malheureusement, une récente proposition de directive (taxation de l'énergie) pénalise le diesel mais aussi les carburants de substitution tels que le méthane et le biométhane et compromet leur diffusion sur le marché, ce qui est manifestement en contradiction avec l'élargissement des structures que le plan entend promouvoir.

4.10.3

La position de la Commission concernant la «neutralité technologique» suscite par ailleurs deux réserves:

A)

la Commission ne se prononce pas sur les différents effets des diverses technologies, que ce soit en termes de délais (résultats à court terme contre résultats à long terme) ou de coût de chaque solution pour les entreprises et les pouvoirs publics (par exemple en ce qui concerne les incitations financières), la référence étant l'impact calculé «du puits à la roue»;

B)

la Commission n'aborde pas une question importante soulevée dans le rapport du groupe de haut niveau CARS 21, lequel suggère (p. 73) d'examiner si, à long terme, il est possible de réduire la forte intensité de main-d’œuvre du secteur automobile au fur et à mesure que la voiture électrique s'impose sur le marché, dans la mesure où ce type de véhicule comporte moins de composants et requiert donc moins de main-d’œuvre. L'électrification réduit la complexité du système de propulsion (plus ou moins 1 400 composants pour une transmission conventionnelle contre 200 pour une transmission électrique). Cette observation montre bien que la neutralité technologique ne s'accompagne pas d'une neutralité identique concernant l'impact social et économique sur la filière. À cet égard, la Commission doit publier sous peu une étude relative à l'impact des nouvelles technologies sur le cycle de production et l'emploi.

4.11

Les voitures sont une source importante d'émissions de CO2. Le Comité considère que les émissions de CO2 des véhicules peuvent être mesurées de manière plus globale en évaluant leur cycle de vie; celui-ci prend en compte l'ensemble des émissions dégagées pendant la durée de vie d'un produit, depuis la production des matières premières jusqu'à la fin de son cycle de vie.

4.12

Bien qu'elle confirme l'engagement qui a été pris d'atteindre les objectifs fixés en matière de réduction du CO2, la Commission n'évoque pas, dans sa communication, l'opportunité de procéder à une révision de la directive 1999/94/CE sur l'étiquetage afin de rendre obligatoire la mention des valeurs absolues d'émissions de CO2 pour chaque modèle automobile. Cette initiative serait des plus utiles à un moment où l'on est en train d'examiner le règlement qui fixe les nouvelles limites d'émissions à 95 gr/km pour les voitures, conformément aux recommandations formulées par le CESE dans l'un de ses récents avis (6).

4.13

Un autre élément intéressant est l'annonce d'une nouvelle initiative relative aux véhicules verts européens dans le cadre d'Horizon 2020 (laquelle s'inscrit dans le fil de l'initiative en partenariat public-privé «voitures vertes européennes»), qui bénéficiera donc de financements privés.

4.14

Dans le même temps, développer de nouvelles technologies se révélera insuffisant si aucune formation adéquate n'est proposée en parallèle à la main-d'œuvre. De nouvelles technologies exigeront en effet que les travailleurs acquièrent de nouvelles qualifications et de nouvelles compétences. Celles-ci font actuellement défaut dans ce secteur et doivent même, pour partie, être encore développées au niveau du système éducatif. Une telle entreprise nécessitera, d'une part, des efforts soutenus de la part des employeurs actifs dans ce secteur en vue d'introduire de nouveaux programmes d'apprentissage, mais aussi, d'autre part, une coopération avec les établissements d'enseignement et de formation et avec les structures de recherche et d'enseignement supérieur de façon à offrir de nouveaux programmes de formation.

La consolidation du marché intérieur et l'application de la réglementation intelligente

4.15

Il est bon de rappeler l'engagement qui a été pris de légiférer selon le principe de la réglementation intelligente; lequel devrait inspirer la réglementation du secteur au travers de l'application de paramètres tels que le rapport coûts-bénéfices, les délais de réalisation (lead time)  (7) et l'impact sur la position concurrentielle de l'industrie au niveau des marchés mondiaux.

4.16

Il est également très utile d'élaborer des lignes directrices concernant les incitations financières en faveur de véhicules propres, qui devront être basées sur des données objectives et disponibles telles que les émissions de CO2, ce qui évitera de fragmenter le marché en prenant des mesures non coordonnées.

4.17

S'agissant de l'applicabilité dans le temps, il faut également prendre en compte le comportement des consommateurs à l'égard des nouvelles technologies, en particulier électriques: à ce jour les résultats ne sont pas bons, ou en tout cas inférieurs aux attentes; il convient donc de se demander s'il ne serait pas plus utile, pour atteindre les objectifs environnementaux à court et moyens terme, d'investir davantage dans la recherche sur les dernières générations de moteurs à haute efficacité.

4.18

S'agissant de la propulsion électrique et de son développement futur, il convient également de rappeler que les estimations sont très variables et qu'elles divergent sensiblement en fonction des paramètres qui sont pris en considération; en comparant différentes prévisions (8), l'on arrive à des facteurs de multiplication qui vont de un à dix.

Le renforcement de la compétitivité sur les marchés mondiaux

4.19

Lors des discussions menées au sein du groupe CARS 21, il a beaucoup été question des accords de libre-échange en raison des critiques émises par le secteur industriel à l'égard de l'accord conclu avec la Corée du Sud (9). Ces discussions ont notamment mis en évidence la nécessité de réaliser une analyse d'impact cumulée de ces accords compte tenu de l'opportunité de coordonner étroitement les politiques industrielles et commerciales en Europe et d'éliminer définitivement les barrières non tarifaires aux exportations européennes. Le CESE soutient dès lors la décision de la Commission d'engager une étude sur les accords de libre-échange déjà conclus et sur ceux à venir (p.ex. avec le Japon), afin d'évaluer l'impact cumulé de ceux-ci sur la compétitivité du secteur automobile.

4.20

D'une manière plus générale, le CESE apprécie l'effort consenti par la Commission pour mettre en œuvre une politique commerciale visant à maintenir une base industrielle automobile forte en Europe en utilisant et en affinant les instruments disponibles, de la révision de l'accord de la CEE-ONU à l'élaboration d'un nouveau règlement sur un système international de réception des véhicules.

4.20.1

Néanmoins, les défis de l'industrie automobile européenne concernent également les marchés nationaux, sur lesquels sa capacité de réussite dans le futur sera affectée par l'évolution de la demande et des mentalités. Il s'agit d'une question qui devra également être traitée, parallèlement à celle de la compétitivité sur les marchés mondiaux.

L'anticipation de l'adaptation et la réduction de l'impact social des restructurations de l'activité de production  (10)

4.21

Une stratégie en faveur d'une industrie automobile florissante et durable en Europe doit reposer non seulement sur un investissement dans les nouvelles technologies et l'innovation associé à une réglementation intelligente et à une amélioration du marché intérieur, mais aussi, et surtout, sur un ancrage ferme de cette stratégie dans la politique industrielle globale de l'Union et sur le fait d'accorder autant d'importance et d'attention à la main-d'œuvre qu'à tous les autres aspects.

4.22

Pour maintenir une base industrielle en Europe, les entreprises doivent être en mesure d'adapter rapidement leurs capacités de production aux nouvelles technologies et à l'évolution des marchés, en disposant d'une main-d’œuvre qualifiée mettant constamment ses connaissances à jour. La création, en 2013, d’un Conseil européen des compétences dans l’industrie automobile est dès lors la bienvenue, qui réunira toutes les parties concernées pour formuler des recommandations, notamment à l'intention des responsables politiques, sur les compétences et besoins en enseignement et en formation requis dans ce secteur pour anticiper les changements attendus. Le développement continu des qualifications assure l'employabilité de la main-d'œuvre et constitue la meilleure réponse possible, que tous les acteurs concernés devraient s'efforcer de mettre en œuvre; une attention particulière devrait être portée aux PME et à leurs problèmes spécifiques dans ce domaine.

4.23

Les mesures visant à prévenir les répercussions négatives des restructurations sur l'emploi devraient exploiter tout le potentiel du dialogue social en général, mais surtout prendre en considération le droit de participation et de consultation des comités d'entreprise européens dans les situations de restructuration et leur capacité de jouer un rôle actif s'agissant de présenter des solutions de substitution. Une communication fonctionnelle entre les fournisseurs et les producteurs finals devrait garantir que, dans le cas extrême d'une fermeture d'usine, il n'y aura pas d'effet boule de neige sur les économies des différentes régions automobiles, la fermeture d'usines d'assemblage ayant des répercussions en amont et en aval de la filière.

4.24

Comme il ressort des paragraphes 4.2 à 4.8, le texte de la communication est toutefois évasif dans la mesure où il fait globalement référence à un processus de «restructuration» dont il ne rappelle pas les causes. En effet, dans cette partie du document, la Commission ne se réfère plus à ce qu'elle a souligné en page six, à savoir «le problème structurel persistant de la surcapacité», qui est la raison fondamentale de la fermeture d'usines par certains producteurs. En fait, le CESE considère qu'il faudrait examiner jusqu'à quel point la surcapacité est un déséquilibre temporaire entre la capacité de production, liée au contexte historique de la répartition géographique, et la demande en Europe, et est influencée par des facteurs tels que le pouvoir d'achat des consommateurs, la politique de produit, l'austérité et autres politiques publiques.

4.25

En d'autres termes, le plan d'action n'aborde pas la cause du processus de restructuration, pas plus qu'il n'en évalue l'ampleur; il en prend acte et propose simplement des mesures pour réduire son impact social. La Commission laisse donc le secteur industriel assumer la responsabilité de ce processus et se réserve simplement un rôle complémentaire à celui des États membres et des collectivités locales, évite d'assurer la coordination des mesures de restructuration et s'abstient de proposer des lignes directrices que devraient suivre les États membres dans le cadre de ces mesures.

4.26

Le CESE juge dès lors inapproprié le rôle complémentaire que la Commission assume par rapport aux acteurs, compte tenu de l'ampleur de la capacité de production inutilisée.

4.27

S'agissant des restructurations, la communication CARS 2020 propose en revanche des pistes intéressantes qu'il faudrait approfondir: à la page 20, la Commission affirme qu'elle «réactivera sa task-force interservices afin d’analyser et de suivre les principaux cas de fermetures d’usines ou de réduction substantielle d’activité dans l’automobile. Cette task-force s’est montrée, par le passé, active et très efficace dans certains dossiers relevant de l’industrie automobile» (faisant référence aux cas de VW Forest et MG Rover). Le CESE demande que soit mise à disposition une analyse spécifique de ces résultats et de la manière dont ils peuvent constituer un exemple de bonne pratique en l'occurrence.

4.28

Le CESE suggère d'étudier des solutions de substitution pour les processus de restructuration, en suivant des exemples qui ont fait leurs preuves par le passé et/ou qui sont proposés aujourd'hui, par exemple pour l'usine Opel de Bochum. Les représentants des syndicats et de la direction y ont convenu d'une large gamme de mesures afin de parvenir à une solution socialement acceptable dans la perspective de la fermeture de l'usine prévue pour la fin 2016.

4.29

Il est toutefois nécessaire de développer une perspective qui sous-tende une politique industrielle à long terme pour le secteur. C'est d'une importance primordiale en ce qui concerne toute décision à court terme relative à l'ajustement des capacités de production. Le simple fait de fermer des usines n'améliore pas la capacité globale du secteur à affronter de futurs défis, et engendre de lourdes répercussions pour l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement. Au contraire, il faut œuvrer en faveur d'une transformation du secteur et de nouvelles politiques menant à des produits plus conformes aux attentes des consommateurs, afin que l'automobile puisse devenir un secteur durable pour le 21e siècle.

4.30

À défaut, il existe un risque que, dans une situation caractérisée par de faibles niveaux de ventes sur une longue durée et par des pertes de profits subséquentes, les entreprises spécialisées dans le segment généraliste milieu de gamme décident de se décharger du fardeau de la baisse de production en fermant leurs usines en Europe occidentale et en transférant la production dans leur usines restantes, ouvertes pour la plupart récemment, dans de nouveaux États membres ou en dehors de l'Europe, afin de profiter des bas salaires et des conditions de travail inférieures.

4.31

Enfin, si le CESE se réjouit de l'engagement de la Commission à veiller au respect de la législation sur les aides d'État et les règles du marché intérieur, ainsi que de l'appel qu'elle lance aux États membres pour les inviter à recourir au FSE et au FEM, il considère cependant que ces mesures ne sont pas suffisantes.

Bruxelles, le 23 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  Ce terme couvre toute la filière de l'industrie automobile: la construction des véhicules, la fourniture d'équipements, la vente et le service après-vente. Les produits concernés sont les voitures particulières, les véhicules commerciaux légers et lourds, les motocycles et, d'une manière plus générale, les véhicules à moteur à deux, trois et quatre roues.

(2)  «Horizon 2020», COM(2011) 808 final et COM(2011) 809 final du 30 novembre 2011, est une proposition-cadre pour le financement de la recherche, du développement et de l'innovation au cours de la période 2014-2020, dont l'enveloppe globale escomptée est de 80 milliards d'euros.

(3)  COM(2010) 389 final.

(4)  Accord de 1958 de la Commission économique pour l’Europe des Nations unies (CEE-ONU) concernant l’harmonisation technique internationale dans le secteur des véhicules à moteur.

(5)  AlixPartners «Automotive outlook 2012 - An industry at the crossroads», Jens-Ulrich Wiese, IFF - Prague, 21 septembre 2012.

(6)  JO C 44 du 15.2.2013, p. 109.

(7)  Lead time: délai nécessaire à l'industrie pour satisfaire à toute nouvelle exigence qui nécessite des interventions structurelles sur le véhicule.

(8)  Roland Berger «Rebound of the US suppliers industry» (La reprise du secteur des composants automobiles aux Etats-Unis), Détroit, octobre 2012.

(9)  Au cours de la période du 1er juillet 2011 au 30 juin 2012, soit la première année de l'entrée en vigueur de l'accord, 433 000 véhicules ont été importés de Corée, ce qui représente une augmentation de 46 % par rapport aux 12 mois précédents (source: EUROSTAT).

(10)  Comme le rappelle la Commission dans son livre vert «Restructurations et anticipation du changement: quelles leçons tirer de l'expérience récente?» (COM (2012) 7 final), les restructuration font partie de la vie quotidienne des entreprises, des travailleurs, des pouvoirs publics et des autres parties prenantes. Restructurer peut signifier: réorienter des ressources vers des activités à plus forte valeur ajoutée; former des travailleurs; ajuster temporairement le temps de travail; supprimer certaines parties de la filière; fermer des usines.


19.9.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 271/111


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Énergie propre et transports: la stratégie européenne en matière de carburants de substitution»

COM(2013) 17 final

et la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur le déploiement d’une infrastructure pour carburants de substitution»

COM(2013) 18 final – 2013/12 (COD)

2013/C 271/21

Rapporteur: M. BACK

Le 24 janvier 2013, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions – Énergie propre et transports: la stratégie européenne en matière de carburants de substitution»

COM(2013) 17 final.

Le 5 février et le 8 février 2013 respectivement, le Parlement européen et le Conseil ont décidé, conformément aux articles 91 et 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur le déploiement d’une infrastructure pour carburants de substitution»

COM(2013) 18 final – 2013/12 (COD).

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 30 avril 2013.

Lors de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 22 mai 2013), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 147 voix pour, 1 voix contre et 5 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le CESE accueille favorablement le train de mesures «Énergie propre et transports» (1) ainsi que son objectif consistant à créer les conditions d'une diffusion massive des technologies de propulsion propre au moyen de sources d'énergie propre.

1.2

Le CESE approuve l'approche reposant sur le développement du marché et une couverture minimale des infrastructures de recharge/ravitaillement afin de susciter la confiance des consommateurs et de garantir la mobilité transfrontalière.

1.3

Le CESE accueille tout aussi favorablement l'accent placé dans les propositions sur l'information des consommateurs et la confiance des consommateurs pour contribuer à l'essor du marché de masse qui est indispensable pour des véhicules de prix abordable dotés de systèmes de propulsion alternatifs.

1.4

Le CESE se félicite de la contribution à la création de croissance et d'emplois que devraient apporter les nouveaux débouchés commerciaux et la compétitivité accrue de l'industrie européenne dus au développement de carburants de substitution et de leur infrastructure.

1.5

La mise en œuvre d'une stratégie pour des carburants propres ne doit pas se limiter à quelques carburants déjà éprouvés mais également aborder des questions à long terme liées à d'autres sources d'énergie propre, le développement ample et rapide de ce secteur et de la nécessité d'encourager l'innovation et l'introduction sur le marché.

1.6

Le CESE rappelle ici les questions soulevées dans son avis sur les changements indirects dans l'affectation des sols/biocarburants (TEN/502 – CES23632012), en particulier aux paragraphes 1.9-1.12, qui fait ressortir la complexité et le caractère à long terme de ces questions et la nécessité d'une réévaluation permanente.

1.7

Le Comité déplore par conséquent que la proposition ne développe pas davantage les objectifs stratégiques à long terme formulés dans la communication. Par exemple, le cadre d'action national pour les carburants propres et leur infrastructure que les États membres doivent créer conformément à la proposition devrait inclure toutes les sources d'énergie considérées comme importantes dans la communication, comme les biocarburants.

1.8

La proposition devrait donc définir une palette énergétique optimisée du point de vue économique et environnemental au niveau de l'UE, tandis que des politiques nationales coordonnées pourraient renforcer son développement et son déploiement. Il conviendrait de revoir dans cette optique les articles 3, 8 et 10 ainsi que l'annexe I de la proposition.

1.9

Le CESE doute qu'une infrastructure publique de recharge pour les véhicules électriques puisse être mise sur pied sans financement public, du moins durant la phase initiale, jusqu'à ce que le nombre de véhicules électriques soit devenu tel que des redevances pour la fourniture de carburant puissent raisonnablement financer l'investissement.

1.10

Le CESE souligne la nécessité de garantir une transition viable et sans heurts vers un bouquet énergétique modifié et l'importance de tenir compte du potentiel d'amélioration des prestations environnementales des carburants fossiles.

1.11

Le CESE attire l'attention sur le risque d'entraver le développement de nouvelles solutions techniques plus viables pour les différents modes et groupes d'utilisateurs des transports. C'est un risque que fait notamment courir le fort engagement en faveur du GNL pour les transports maritimes, alors que de nouveaux carburants moins chers prennent leur essor. De même, de nouvelles solutions, orientées vers les consommateurs, en matière d'énergie sont en train de voir le jour, par exemple pour les camions, les bus et les véhicules à deux roues.

2.   Introduction: contexte politique et présentation de la communication et de la proposition

2.1

La stratégie Europe 2020 pour une croissance intelligente, durable et inclusive, par ses initiatives phares «Une Europe efficace dans l’utilisation des ressources» et «Une Union de l’innovation», vise à répondre au changement climatique, à la pénurie d’énergie et à la raréfaction des ressources, à la nécessité de renforcer la compétitivité, ainsi qu'à améliorer la sécurité énergétique par une efficacité accrue dans l'utilisation des ressources et de l’énergie. Dans le domaine des transports, le livre blanc de 2011 sur la politique des transports appelle à mettre fin à la dépendance à l'égard du pétrole dans les transports et fixe l'objectif d'une réduction de 60 % des émissions de gaz à effet de serre pour ce secteur à l'horizon 2050. Dans ses dix objectifs pour un système de transport compétitif et économe en ressources, le livre blanc évoque le développement et le déploiement de nouvelles options durables en matière de carburants et de systèmes de propulsion. Ces objectifs figurent dans la liste des initiatives prévues dans le livre blanc au titre des initiatives 24 «Une feuille de route technologique» et 26 «Un cadre réglementaire pour des transports innovants». La communication et la proposition de directive évoquent tout ou partie de ces questions.

2.2

Dans plusieurs avis, le CESE a appelé de ses vœux une initiative de la Commission visant à promouvoir les carburants de substitution et les infrastructures connexes. Il s'agit notamment des avis suivants:

avis sur le livre blanc en matière de transport (2), paragraphes 4.19 et 4.20, où le CESE se félicite du développement et du déploiement de systèmes de propulsion plus propres et plus efficaces du point de vue de la consommation d'énergie et soutient l'initiative en faveur des voitures vertes ainsi que la stratégie 2010 visant à développer des véhicules propres. Au paragraphe 4.30, le CESE note avec satisfaction l'attention accordée au déploiement de véhicules électriques et des infrastructures nécessaires pour recharger leurs batteries, faisant référence à son avis sur le thème «Vers une large pénétration des véhicules électriques» (3), dans lequel il faisait part de son vif soutien aux mesures poursuivant cet objectif afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre et la dépendance par rapport aux importations de pétrole. Il évoque également l'importance des technologies intelligentes en vue de permettre l'utilisation des véhicules électriques à des fins de fourniture d'énergie aux heures de pointe;

avis sur la teneur en soufre des combustibles marins (4), dans lequel le CESE se félicite de l'intention de la Commission d'améliorer le respect des normes au moyen d'une «boîte à outils» comprenant des technologies telles que les combustibles alternatifs (GNL) et le transfert d'électricité terrestre vers les navires, à l'aide d'investissements tant du secteur privé que du secteur public;

avis sur la proposition de nouvelles orientations de l'Union pour le réseau transeuropéen de transport (5). Le CESE y fait valoir la nécessité de renforcer l'exigence portant sur la disponibilité de carburants propres alternatifs, dans la mesure où elle serait fondamentale pour lier les orientations relatives aux RTE-T à la future «stratégie relative aux carburants alternatifs».

2.3

Le «paquet» présenté par la Commission est composé des volets suivants:

la communication fournit un aperçu du contexte et des objectifs de la politique en la matière, ainsi qu'un panorama des principaux carburants de substitution actuels, et établit les domaines prioritaires pour la poursuite de l'action de l'UE;

la proposition vise à assurer la mise en place d’une infrastructure minimale pour les carburants de substitution et la mise en œuvre de spécifications techniques communes pour cette infrastructure dans l’UE, afin de garantir une mobilité et des économies d'échelle dans l'ensemble de l'UE.

2.4

Les carburants couverts par la communication sont le gaz naturel y compris le biométhane (GNL, GNC, GTL), l'électricité, les biocarburants (liquides) et l'hydrogène, qui présentent des caractéristiques et des utilisations différentes. La communication présente une stratégie pour tous les modes de transport. La stratégie vise à établir un cadre d'action à long terme pour orienter le développement technologique et les investissements dans le déploiement de ces carburants, dans le but de réduire la dépendance au pétrole, d'améliorer la sécurité de l'approvisionnement en carburants et de réduire les émissions. Les actions prévues dans le cadre de la stratégie couvrent quatre domaines:

une infrastructure pour les carburants de substitution devrait être mise en place et dotée d'une densité suffisante pour créer une certitude concernant ses possibilités d'utilisation et garantir la mobilité à travers l'Europe. Cela permettra une utilisation plus répandue des véhicules et navires fonctionnant aux carburants de substitution, avec un accent sur l'électricité, l'hydrogène, le GNC et le GNL. Les frais de mise en place de l’infrastructure nécessaire (estimés à 10 milliards d'EUR) seront rentabilisés avec l'essor du marché. Un financement public direct peut être évité en recourant à des instruments tels que les permis de construire, les concessions, la réglementation des marchés publics, les réglementations relatives à l’accès aux infrastructures de recharge et les incitations non financières;

des spécifications communes sont nécessaires en ce qui concerne les interfaces entre les véhicules électriques et les bornes de rechargement, mais aussi pour l'hydrogène, le GNC et le GNL;

l'adoption par les consommateurs est vitale. Une gamme de mesures tant financières que non financières, tels que des accès privilégiés pour les véhicules électriques et des campagnes d'information, peuvent permettre d'y parvenir;

la gestion des évolutions technologiques selon le plan suivant: (a) dans le cadre du programme Horizon 2020, des financements seront dégagés pour des projets de recherche, de démonstration ou axés sur le marché portant sur les carburants de substitution de chaque mode de transport; (b) des feuilles de route seront élaborées dans le cadre du Plan stratégique pour les technologies de transport (COM(2012) 501 final); (c) il conviendrait d'approfondir les partenariats public/privé et de recourir à des partenariats tels que l’initiative «Villes et communautés intelligentes» (C(2012) 4701 final); (d) l’Initiative industrielle européenne pour la bioénergie lancée dans le cadre du plan stratégique européen pour les technologies énergétiques figure parmi les projets spécifiques dont il est fait mention, tandis que de nouveaux centres de recherche pour l'interopérabilité des véhicules électriques et des réseaux intelligents sont prévus au Centre commun de recherche de l'UE.

2.5

La proposition met l'accent sur les infrastructures destinées aux carburants de substitution, la mise au point de spécifications techniques communes et l'information des consommateurs. Cependant, elle impose également aux États membres d’établir des cadres d’action nationaux pour le développement commercial des carburants de substitution et de leur infrastructure. Ces cadres incluront des exigences d'information, des actions et des mesures réglementaires visant à étayer le développement des infrastructures, des mesures de soutien, des activités de recherche, la fixation d'objectifs et une coopération avec les États membres: a) afin de garantir la cohérence internationale des infrastructures; et b) de rendre possibles les voyages à travers toute l'UE.

2.6

En même temps que la communication et la proposition, la Commission a également rendu public un document de travail établissant un plan d'action vers un cadre global pour l'UE en matière de GNL dans les transports maritimes. La Commission, en coopération avec l'AESM, prévoit de proposer d'ici la fin 2014 un ensemble détaillé de règles, de normes et d'orientations pour l'approvisionnement en GNL, son soutage et son utilisation dans les transports maritimes.

3.   Observations générales

3.1

Comme mentionné ci-dessus, le CESE a évoqué à plusieurs reprises la nécessité de carburants de substitution pour les transports et l'urgence de mettre sur pied une infrastructure adéquate pour un système crédible de recharge ou de ravitaillement étayant la mobilité transfrontalière. Il a également souligné la nécessité de mesures supplémentaires pour promouvoir l'essor du marché des véhicules électriques et pour octroyer suffisamment d'autonomie aux États membres s'agissant de la mise en œuvre de cette politique. Le CESE accueille donc favorablement l'initiative à l'examen.

3.2

Le CESE soutient l'approche présentée dans la communication et mise en œuvre dans la proposition, conformément à laquelle les États membres sont tenus d'adopter des cadres d'action nationaux pour le développement du marché des combustibles de substitution qui remplissent un certain nombre d'exigences minimales et font l'objet d'un système de notification et d'évaluation géré par la Commission.

3.3

En particulier, le CESE approuve l'accent placé sur l'infrastructure de recharge/ravitaillement en tant que moyen d'assurer l'essor du marché des véhicules et navires utilisant des carburants de substitution. Il est généralement reconnu que de telles mesures sont importantes pour créer chez les consommateurs une confiance dans les carburants de substitution, ce qui est essentiel pour que le marché décolle.

3.4

Le CESE se félicite également de l'établissement de spécifications techniques valides pour l'ensemble de l'UE en matière d'infrastructures de ravitaillement/recharge. Cette mesure est primordiale pour susciter la confiance dans les carburants de substitution en tant qu'alternative viable pour le transport transfrontalier. Le CESE suppose que la Commission utilisera le pouvoir que lui reconnaît la proposition d'adopter des actes délégués afin de mettre à jour les spécifications et de garantir ainsi qu'elles soient toujours compatibles avec celles qui s'appliquent sur le marché mondial.

3.5

Le CESE note que la proposition contraint les États membres à adopter un cadre d'action national pour les carburants de substitution. Cependant, l'article 3, paragraphe 3 semble autoriser les États membres à ne pas inclure certains carburants dans cette politique, tandis que les exigences en matière d'infrastructures établies aux articles 4 à 6 ne couvrent que l'approvisionnement en électricité, hydrogène et gaz naturel, alors que l'obligation d'information des consommateurs prévue à l'article 7 semble couvrir tous les carburants de substitution présents sur le marché. Il apparaît également que les biocarburants dits avancés sont un élément important du futur bouquet énergétique, du moins tel que les choses se présentent aujourd'hui, en tenant également compte des quotas minimaux prévus pour les biocarburants dans le futur bouquet énergétique. Le CESE estime dès lors que l'article 3 de la proposition législative devrait indiquer qu'il existe un noyau dur de carburants de substitution qui doivent être inclus dans les cadres d'action nationaux.

3.6

Selon l'article 3 de la proposition, les États membres doivent évaluer la continuité transfrontalière de la couverture assurée par les infrastructures destinées aux carburants de substitution. Le même article prévoit que les États membres coopèrent, au moyen de consultations ou de cadres d’action conjoints, pour veiller à la cohérence et à la coordination des mesures nécessaires à la réalisation des objectifs de la directive. La seule manière de garantir une mise en œuvre en bonne et due forme de cette obligation fondamentale semble être le mécanisme de notification et d'évaluation prévu à l'article 3, paragraphes 5 et 6. Le CESE se demande si cela est suffisant et s'il ne serait pas utile de créer une fonction permanente de coordination, à l'instar de celle que remplissent les coordinateurs de certains projets RTE-T dans le cadre des orientations RTE-T.

3.7

La communication semble supposer que le financement d'infrastructures destinées aux carburants de substitution peut être obtenu sans financement public direct, uniquement avec le soutien d'instruments d'action tels que les permis de construire, les concessions, la réglementation des marchés publics, les réglementations relatives à l’accès aux infrastructures de recharge et les incitations non financières. Selon le CESE, cela peut être vrai pour les points de ravitaillement non publics destinés aux véhicules électriques, mais il doute que cela puisse être le cas pour leurs homologues publics, lesquels ne semblent pas commercialement viables, les financements publics étant considérés comme la seule solution réaliste, du moins durant la phase de mise en place des infrastructures (voir par exemple «Fortschrittsbericht der Nationalen Plattform Elektromobilität (Dritter Bericht)», section 5.5, un rapport préparé à l'attention du ministère allemand des transports en juillet 2012).

3.8

En raison du niveau des coûts d'investissement et de l'incertitude des marchés, le CESE est d'avis que, de façon générale et à long terme, un financement public des infrastructures de ravitaillement/recharge est nécessaire pour les carburants de substitution. Le CESE estime donc que l'appréciation sur ce point figurant dans la communication devrait être réexaminée. Ces besoins de financement ont été pris en compte dans les récentes lignes directrices relatives aux incitations financières pour des véhicules propres et économes en énergie (SWD (2013)27), et ils devraient également l'être au moment d'établir des priorités, en ce qui concerne par exemple les financements RTE-T.

3.9

Le CESE remet aussi en cause le nombre de points de recharge prévu pour 2020 dans l'annexe II à la proposition. Ce sont par exemple 1 500 000 points de ravitaillement qui sont prévus pour l'Allemagne, dont 150 000 seraient publics. Le rapport sur la mise en œuvre du programme allemand pour l'électromobilité cité au paragraphe 3.7 ci-dessus prévoit un total légèrement en-deçà d'un million de points de ravitaillement pour environ le même nombre d'automobiles. De ces points de ravitaillement, 150 000 devraient être publics, quoique plus de 50 % d'entre eux ne soient pas encore confirmés. Le CESE suggère donc que les objectifs chiffrés figurant à l'annexe II fassent l'objet d'un réexamen et que soit établi un mécanisme simple pour la révision des prévisions figurant dans la même annexe.

4.   Observations spécifiques

4.1

Le CESE émet des réserves quant aux critères de rapport coût-efficacité des installations électriques à quai prévus à l'article 4, paragraphe 4 de la proposition. En effet, le texte ne fait pas clairement apparaître les critères d'efficacité à l'aune desquels les coûts doivent être appréciés.

4.2

Le CESE se félicite de l'exigence selon laquelle tous les points de ravitaillement publics doivent être équipés de systèmes intelligents de mesure. Cela facilitera le développement futur de fonctions telles que la sélection d'énergie verte pour la recharge et la fourniture d'électricité à partir des véhicules lors des heures de pointe. Le CESE se demande s'il ne serait pas également opportun d'imposer cette exigence pour les points de ravitaillement non publics.

4.3

Le CESE se demande si les dispositions de l'article 4, paragraphe 8 de la proposition sont suffisantes pour garantir un droit au roaming lorsqu'un véhicule électrique est utilisé lors d'un voyage transfrontalier. Selon le CESE, il convient de pondérer soigneusement une autre solution, qui serait d'imposer aux États membres l'obligation de garantir la possibilité de roaming au sein de l'UE à des prix raisonnables.

4.4

En comparant les paragraphes 1 et 2 de l'article 6 avec son paragraphe 4, le CESE s'interroge quant au caractère réellement satisfaisant du délai prévu à l'annexe III, point 3.1 de la proposition pour la disponibilité de spécifications techniques pour le GNL («d'ici 2014»), dès lors que la règle de 0,1 % de teneur en soufre pour les combustibles marins s'appliquera dans les zones de contrôle des émissions de soufre à partir du 1er janvier 2015. Cela ne laisse qu'un délai très court pour le travail à accomplir, sans parler de la nécessité de définir des conditions de financement. Le CESE suggère dès lors que des mesures soient prises pour garantir que les ports, les armateurs et les exploitants de navires puissent faire bon usage de la possibilité de s'adapter à l'exigence de 0,1 % en recourant au GNL sans risquer de ne pas respecter les règles de l'UE telles qu'établies dans la directive 1999/32/UE telle que modifiée par la directive 2012/33/UE, article 1, paragraphe 4.

4.5

Le CESE souhaiterait que la proposition, le cas échéant en son article 3, fasse référence à la nécessité de trouver des solutions appropriées afin de garantir la disponibilité d'infrastructures adéquates dans les zones faiblement peuplées, où des financements pourraient être particulièrement difficiles à trouver sans aide publique, et ce également après la fin d'une période de démarrage.

4.6

Enfin, le CESE relève que si le GNL est un carburant qui, selon son origine, peut être considéré comme un carburant fossile ou comme un biocarburant, le document de travail fait apparaître (section 1, dernier point), que la variété envisagée pour un usage maritime est d'origine fossile, même si elle possède de très bonnes caractéristiques environnementales. Le CESE suppose que des efforts seront déployés afin de promouvoir l'utilisation d'autres variétés de GNL ou d'autres systèmes de propulsion. Compte tenu du caractère éventuellement provisoire de la solution GNL, on peut une nouvelle fois s'interroger quant à l'opportunité du fort engagement exprimé en faveur des équipements GNL dans la proposition.

Bruxelles, le 22 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  La communication «Énergie propre et transports: la stratégie européenne en matière de carburants de substitution» (la communication), la proposition de directive sur le déploiement d’une infrastructure pour carburants de substitution (la proposition) et le document de travail des services de la Commission sur le GNL dans les transports (le document de travail).

(2)  Avis du CESE sur la «Feuille de route pour un espace européen unique des transports– Livre blanc», JO C 24 du 28.1.2012, p. 146.

(3)  Avis du CESE sur le thème «Vers une large pénétration des véhicules électriques», JO C 44 du 11.2.2011, p. 47.

(4)  Avis du CESE sur «La teneur en soufre des combustibles marins», JO C 68 du 6.3.2012, p. 70.

(5)  Avis du CESE sur «Les orientations pour le réseau transeuropéen de transport», JO C 143 du 22.05.2012, p. 130.


19.9.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 271/116


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à l'accessibilité des sites web d'organismes du secteur public»

COM(2012) 721 final – 2012/0340 (COD)

2013/C 271/22

Rapporteur: M. Ask Løvbjerg ABILDGAARD

Le 10 décembre 2012 et le 18 décembre 2012 respectivement, le Parlement européen et le Conseil ont décidé, conformément à l'article 114, paragraphe 1er et à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à l'accessibilité des sites web d'organismes du secteur public»

COM(2012) 721 final – 2012/0340 (COD).

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures et société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 30 avril 2013.

Lors de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 22 mai), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 148 voix pour, 1 voix contre et 6 abstentions.

1.   Observations générales et recommandations

1.1

Le CESE se félicite de l'initiative de la Commission européenne. L'importance de la proposition est évidente et révèle l'ambition de servir les intérêts tant des citoyens que des fournisseurs de services web dans l'UE, en facilitant la création d'un marché intérieur de l'accessibilité du web.

1.2

Le CESE exprime toutefois sa grande préoccupation par rapport à la pertinence des mesures proposées afin de concrétiser cette ambition. Un instrument juridique fort est nécessaire afin d'éviter que les contraintes budgétaires résultant de la crise économique actuelle ne servent indûment de prétexte pour justifier un éventuel défaut de mise en œuvre de la directive par les États membres.

1.3

Le champ d'application de la directive est limité, ce qui réduit les catégories de sites web d'organismes du secteur public répondant aux exigences de la directive. Il pourrait en résulter l’impossibilité d'accéder à certains services essentiels fournis par le biais de sites web publics ne relevant pas du champ d'application de la directive.

1.4

En outre, l'extension du champ d'application de la directive à tous les sites web du secteur public constituerait une condition nécessaire à la formation de la masse critique requise pour la création d'un marché européen de l'accessibilité du web et ainsi l'existence d'un secteur de l'accessibilité du web concurrentiel au niveau mondial qui pourrait offrir aux citoyens européens, handicapés ou non, de nouvelles possibilités d'emploi.

1.5

C'est pourquoi le CESE recommande vivement d'élargir le champ d'application de la directive afin qu'il couvre progressivement tous les sites web des organismes du secteur public, dans le respect de ce qui relève de l'ordre, de la sécurité et de la santé publics, ainsi que de la protection de toutes les données privées (1). Par ailleurs, le Comité conseille fortement à la Commission européenne de proposer une réglementation qui soumette également les institutions de l'UE aux obligations découlant de la directive à l'examen.

1.6

Par ailleurs, le CESE recommande vivement l'adoption d'une série de mesures d'accompagnement telles que des programmes de sensibilisation et de formation à l'accessibilité du web, la désignation de coordinateurs de l'accessibilité des sites web dans les grands organismes du secteur public et la possibilité pour les citoyens de rendre compte de l'accessibilité des sites web des organismes publics afin de faciliter la mise en œuvre de la directive. Les interlocuteurs sociaux doivent avoir un rôle plus proactif à jouer sur ces questions.

1.7

Le CESE recommande à la Commission européenne d'évaluer soigneusement les implications de la directive pour l'emploi tant dans le secteur public que privé, en accordant une importance particulière à l'effet net sur l'emploi, à la création d'emplois de qualité et aux emplois potentiels pour les personnes handicapées.

1.8

Le CESE encourage les organismes européens de normalisation à adopter sans délai la norme européenne évoquée dans la directive à l'examen afin de faciliter la bonne mise en œuvre de cette dernière. La mise en œuvre ne devrait pas pour autant être retardée par le processus d'adoption de la norme précitée, étant donné que la Commission européenne prévoit, dans le cadre de sa proposition, un dispositif juridique temporaire parfaitement satisfaisant.

2.   Contexte

2.1

L'accessibilité du web est une composante de nombreuses initiatives politiques au niveau européen: la stratégie européenne en faveur des personnes handicapées pour 2010-2020 (accessibilité des TIC), le plan d'action européen 2011-2015 pour l'administration en ligne (Exploiter les TIC pour promouvoir une administration intelligente, durable et innovante) et la stratégie numérique pour l'Europe (la Commission propose de garantir l'accessibilité totale des sites web du secteur public au plus tard en 2015).

2.2

En 2006, les États membres de l’UE se sont également engagés à améliorer l'accessibilité des sites web des organismes du secteur public en signant la Déclaration de Riga. Jusqu'à présent, les États membres n'ont pas encore réussi à concrétiser ces engagements de manière satisfaisante. Il s’agit là d’un élément important du contexte dans lequel la Commission européenne a élaboré la proposition de directive en question.

2.3

La proposition de directive sur l'accessibilité des sites web d'organismes du secteur public a pour objectif d'encourager les États membres à concrétiser leurs engagements nationaux en matière d'accessibilité du web, et ainsi de soutenir en particulier la souscription des États membres aux dispositions de la convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées en matière de sites web des organismes du secteur public. L'article 9 de la convention oblige les États membres, ainsi que l'UE, à prendre des mesures appropriées pour assurer aux personnes handicapées, sur la base du principe d’égalité, l’accès aux systèmes et technologies de l’information et de la communication, notamment, et en particulier à l’internet.

2.4

L'absence d'approches harmonisées de la question de l'accessibilité du web crée des obstacles au sein du marché intérieur. Étant donné que moins de 10 % des sites web sont accessibles, le marché européen relatif à l'accessibilité du web pourrait être appelé à prendre une ampleur significative. Par ailleurs, une harmonisation des approches pourrait faciliter ce processus en mettant un terme à la fragmentation du marché de l'accessibilité du web et en instaurant un climat de confiance.

Dès lors, l'accessibilité du web est un domaine dans lequel le marché intérieur pourrait être mis au service des citoyens européens dans une bien plus large mesure qu'il ne l'est actuellement. La législation en cette matière pourrait également faciliter la création d'un véritable marché européen de l'accessibilité du web, et ouvrir ainsi des marchés au sein des États membres où le risque d'insécurité juridique entrave le fonctionnement des développeurs de sites web issus d'autres États membres.

2.5

Enfin, une approche harmonisée de l'accessibilité du web dans l’ensemble de l'UE permettrait de réduire les coûts encourus par les sociétés de développement de sites web et par conséquent les coûts des organismes publics qui font appel aux services de ces sociétés.

2.6

En outre, il est important de souligner que les organismes publics et de nombreuses autres institutions très importantes pour les citoyens fournissent des informations et services essentiels par le biais de sites web. C'est pourquoi tous les citoyens, y compris les personnes handicapées, les personnes souffrant de troubles fonctionnels, les enfants, les personnes âgées et toute autre personne doivent avoir accès à ces sites web et leurs fonctionnalités. Cet impératif concerne tant les réglages techniques (la version du texte, la possibilité de changer la taille des caractères, la modification du contraste, la possibilité d'accéder aux sites avec d'autres navigateurs et avec l'aide de programmes facilitant l'accès) que des aspects tels que la clarté de la langue utilisée. Le nombre de sites web qui fournissent des services d’administration en ligne et de sites web du secteur public en général est en augmentation rapide. L'accès aux informations et services fournis par ces sites web jouera un rôle majeur dans l’exercice des droits fondamentaux des citoyens à l'avenir, y compris l'accès à l'emploi.

2.7

La proposition est également pertinente en termes d'insertion numérique puisque l'accessibilité du web est un outil utilisé dans le cadre des efforts consentis pour réaliser l'objectif consistant à intégrer les personnes handicapées au sein de la société et à offrir à tous les citoyens l'accès aux services proposés sur les sites web.

2.8

Pour le CESE, l'accessibilité doit se comprendre comme faisant partie intégrante du principe d'égalité des citoyens. À ce titre, en matière de sites web, elle doit devenir une mesure d'égalité, au même titre que d'autres préalables importants comme:

la généralisation des infrastructures garantissant à tous un accès à un internet rapide (broad band) (2);

la possibilité pour tous les citoyens de jouir de terminaux privés ou publics (hardware);

l'accessibilité des logiciels (software) à la compréhension de tous les publics garantissant la facilité d'usage, y compris les publics en situation d'exclusion (3).

3.   L'approche de la proposition de directive

3.1

La directive vise à rapprocher les dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en ce qui concerne l’accessibilité des sites web d'organismes du secteur public, et ce en définissant des exigences harmonisées.

3.2

Par ailleurs, la proposition établit les dispositions techniques qui permettront aux États membres de rendre accessible le contenu de certains types de sites web d'organismes du secteur public. Les types de sites web concernés proposent des informations et services revêtant une importance essentielle pour garantir la participation des citoyens à la vie économique, y compris au marché de l'emploi, et à la société dans son ensemble et permettre aux citoyens de l'UE de faire valoir leurs droits. Les catégories de sites web concernés sont tirées de l'analyse comparative des administrations en ligne (4) réalisée en 2001 et sont énumérées dans une annexe à la directive.

4.   Observations et recommandations

4.1   Champ d'application

4.1.1

L'article premier définit le champ d'application de la directive et se réfère à l'annexe qui comporte une liste de certains types de sites web tirée de l'analyse comparative des administrations en ligne réalisée en 2001. Les types de sites web qui figurent sur cette liste sont des sites web importants. Cependant, la liste des sites web concernés laisse de côté de nombreux services indispensables à l'intégration des citoyens au sein de l'économie et de la société dans son ensemble.

4.1.2

Exemples de secteurs clés ne relevant pas du champ d'application de la directive:

garde d'enfants;

enseignement primaire;

enseignement secondaire;

élections législatives et locales;

transports publics;

activités culturelles.

Cette liste n'est pas exhaustive. Les sites web du secteur public qui fournissent des informations et services dans ces secteurs clés ne sont pas concernés explicitement par la directive.

4.1.3

La Commission européenne évoque l'effet d'entraînement et les retombées positives éventuelles de la directive sur les sites web du secteur public qui ne relèvent pas explicitement du champ d'application de la directive.

4.1.4

Selon le raisonnement sous-tendant cette théorie de l'effet d'entraînement, les organismes du secteur public rendront accessibles les sites web ne relevant pas du champ d'application de la directive en même temps que ceux explicitement concernés, ou alors après ceux-ci, du fait que le processus aura été initié. Un facteur susceptible de contribuer à cet effet d'entraînement serait l'application de la législation européenne aux marchés publics: dans ce cadre, les acquéreurs publics auraient l'obligation, dans leurs spécifications techniques, de se référer aux normes européennes en matière d'accessibilité du web. Le rôle que pourrait jouer ce facteur dépend tant de la volonté politique des décideurs de l'UE que de la volonté et de la capacité des acquéreurs publics de traiter la question de l'accessibilité du web.

4.1.5

Le CESE s'inquiète toutefois de la fragilité des liens de causalité supposés provoquer cet effet d'entraînement. Selon le Comité, le bon fonctionnement de ce mécanisme n'a pas été démontré. Par conséquent, il se félicite de la mesure adoptée dans la directive, qui encourage les États membres à étendre l'application des exigences relatives à l'accessibilité du web à d'autres sites web que ceux explicitement mentionnés dans l'annexe de la directive. Dans les circonstances actuelles, le CESE reste préoccupé par rapport à la pertinence de cette mesure.

4.1.6

L’étude visant à mesurer les progrès de l'e-accessibilité en Europe (2006-2008) a fait apparaître une connexion évidente entre l'existence d'une législation dans les États membres et le degré d'accessibilité des sites web. L'effet de la législation en tant que telle a donc été démontré.

4.1.7

Le CESE fait part de sa préoccupation quant au fait que la Commission européenne, en définissant le champ d'application de la directive sur la base d'une étude comparative réalisée en 2001, introduit une rupture entre l'approche de la directive et la situation rencontrée par les développeurs de sites web, les organismes publics et les citoyens dans une société de l'information et de la communication en évolution constante. Depuis lors, les États membres ont revu leurs stratégies de numérisation du secteur public et continueront à le faire à l'avenir.

4.1.8

L'implication pour les citoyens, qui dépendent de l'accessibilité au web, est qu'ils seront confrontés au risque sérieux d'être privés partiellement ou totalement des services et informations fournis par le biais de sites web qui ne relèvent pas du champ d'application relativement limité de la directive. Le CESE estime que cette situation porterait atteinte au principe d'égalité des citoyens (art. 20 et 21 de la Charte des droits fondamentaux).

4.1.9

En conséquence, les organismes publics seront confrontés à des obligations juridiques différentes selon les types de sites web. Cela pourrait compliquer inutilement la mise en œuvre de la directive. Afin d'éviter ces complications, le CESE recommande au minimum que le texte de la directive précise que cette dernière s’applique à l'ensemble du site web sur lequel est fourni un service, et non au service seul.

4.1.10

Une autre implication pour le secteur public au sein des États membres serait le fait que les services qui sont inaccessibles pour certains citoyens devraient être fournis à ces personnes par d'autres canaux, ce qui entraînerait le traitement inégal de certains groupes de citoyens. Cela pourrait engendrer des coûts accrus afin de prévoir une assistance pratique personnalisée aux personnes handicapées, des solutions de transport spécialisées adaptées aux personnes handicapées et une assistance, notamment aux personnes âgées qui se rendent en personne au siège de l'organisme public en question.

4.1.11

L'implication pour les entreprises du secteur du web est qu'elles risquent de continuer de fonctionner sur un marché fragmenté en fonction des différents niveaux d'exigence concernant l'accessibilité du web. Le nombre de sites web d'organismes du secteur public soumis aux exigences cohérentes de la directive au sein de l'UE pourrait rester faible et les États membres pourraient étendre ou limiter ce champ d'application à des degrés divers.

4.1.12

Si le potentiel que recèle la mise en place d'un marché intérieur de l'accessibilité du web n'est pas exploité de manière optimale, la création d'emplois qui y est associée dans le secteur pourrait également être entravée. Il s'agirait d'une occasion manquée, en particulier eu égard au potentiel d'emplois spécialisés pour les personnes handicapées. Un cadre juridique européen clair et global constitue une condition nécessaire à la création d'un secteur européen de l'accessibilité du web compétitif au niveau mondial, et donc à la création d'emplois supplémentaires dans l'UE.

4.1.13

Sur cette base, le CESE recommande vivement de reconsidérer le champ d'application de la directive. Il estime opportun d'élargir le champ d'application à tous les sites web d'organismes publics qui offrent des services directement aux citoyens. Cet élargissement pourrait s'accompagner d'une extension des délais relatifs au respect des exigences de la directive concernant les sites web proposant des services à des groupes restreints, ce qui induirait une mise en œuvre progressive de la directive.

4.1.14

À tout le moins, le CESE recommande d'actualiser la liste des services tirée de l'analyse comparative des administrations en ligne réalisée en 2001, en y ajoutant les services clés qui occupent désormais une place importante dans les stratégies de numérisation des États membres. Un autre point à prendre en compte lors de la sélection de ces services clés supplémentaires est leur contribution potentielle à la création d'un marché intérieur des services associés à l'accessibilité du web. L'inconvénient de cette approche serait le nécessaire besoin d'actualisation permanente de cette liste en fonction de l'évolution technologique et de la numérisation du secteur public à travers l'UE.

4.1.15

Le CESE conseille vivement d'inclure explicitement dans le champ d'application de la directive les versions des sites web des organismes du secteur public destinées aux appareils mobiles, ainsi que les fonctions conçues pour faciliter l'accès mobile en général. Les appareils mobiles deviennent progressivement les agents utilisateurs de prédilection, ce dont la directive devrait tenir compte. Si les spécifications techniques concernant la mise en œuvre de la directive intègrent les appareils mobiles, la reconnaissance de cet aspect constituerait un signal fort et renforcerait la pertinence future de la directive.

4.1.16

Par ailleurs, le CESE recommande d'inclure explicitement dans le champ d'application de la directive les fonctions proposées par les sites web des organismes du secteur public qui sont extérieures au site web concerné, notamment par l'utilisation de liens Internet. Cette précision contribuerait à éliminer l'insécurité juridique relative à la responsabilité de l'accessibilité d'un service donné.

4.1.17

De plus, le Comité conseille fortement à la Commission européenne de proposer une réglementation qui soumette également les institutions de l'UE, y compris le CESE, désireux de jouer un rôle anticipateur et pionnier, aux obligations découlant de la directive à l'examen.

4.2   L'utilisation de normes et la neutralité technologique

4.2.1

La directive propose de prévoir une présomption de conformité aux normes harmonisées pour les sites web concernés afin de faciliter la conformité aux exigences en matière d'accessibilité du web. L'utilisation de normes harmonisées permet d'actualiser les normes concernées sans devoir nécessairement modifier la législation européenne ou nationale.

4.2.2

Il est précisé, dans un considérant de la directive, que la norme européenne résultant du mandat 376 et, par la suite, la norme harmonisée qui devrait être élaborée sur la base de ces travaux, devraient tenir compte des critères de succès et des exigences de conformité de niveau AA de la version 2.0 des règles pour l'accessibilité des contenus web (WCAG 2.0) établies par le Consortium World Wide Web (World Wide Web Consortium, W3C). Ces spécifications qui respectent la neutralité technologique constituent la base des exigences relatives à l’accessibilité du web telles qu'elles sont entendues dans la directive.

4.2.3

Le CESE félicite la Commission européenne d'avoir pris pour référence dans la proposition de directive des spécifications en matière d'accessibilité du web qui sont internationalement reconnues. Le CESE prend note du fait que le niveau AA des règles WCAG 2.0 constitue la référence en termes d'accessibilité du web et le restera dans un proche avenir. Par conséquent, l'adoption et la mise en œuvre de la directive ne devraient pas être retardées par la procédure de normalisation européenne.

4.2.4

Le CESE félicite également la Commission européenne d'avoir opté pour l'utilisation de normes harmonisées, qui permettra d’intégrer les évolutions futures des spécifications en matière d'accessibilité du web rendues nécessaires par une évolution technologique ou autre pour maintenir le niveau d'accessibilité envisagé par la directive.

4.2.5

Dans le même temps, il est essentiel que l'accès aux normes pertinentes reste libre et gratuit pour l'ensemble des parties concernées et que la responsabilité de leur mise en œuvre et de leur mise à jour ne soit pas laissée aux seuls organes de normalisation et acteurs commerciaux.

4.2.6

Dans un environnement TIC en évolution constante, la neutralité technologique est une condition préalable requise lorsqu'il est question d'accessibilité du web. Elle permet une innovation permanente. Dès lors, la neutralité technologique des règles WCAG 2.0 contribuera à la pertinence future de la directive.

4.2.7

Par ailleurs, le choix de spécifications internationalement reconnues accroît la probabilité de voir les développeurs de sites web qui fonctionnent au sein de différentes régions du monde, et pas seulement de l'UE, appliquer des critères convergents concernant l'accessibilité du web, et ainsi simplifier leur mise en œuvre dans le cadre des solutions en ligne fournies. C'est un aspect majeur à prendre en considération dans un marché qui est international et mondial de par sa nature même. Il importe que les utilisateurs bénéficient eux aussi de critères communs en ce qui concerne une possibilité homogène d'accès et de participation ainsi que la présentation et l'emplacement ou les emplacements d'autres éléments structurels qui faciliteraient notablement la navigation sur les sites web.

4.3   Sensibilisation et formation

4.3.1

À l'article 6, les États membres sont encouragés à introduire des mesures pouvant favoriser la sensibilisation, la conclusion d'accords de coopération sur l'accessibilité du web et la croissance du marché de l'accessibilité du web.

4.3.2

Le CESE préconise d'intégrer une obligation légale pour les États membres de sensibiliser les organismes publics, les développeurs de sites web et les autres parties prenantes à l'accessibilité du web. La connaissance de la question et de son importance constitue une condition préalable à la mise en œuvre effective de la directive.

4.3.3

Le CESE propose également d'introduire pour les États membres l’obligation légale d'établir des programmes de formation au personnel concerné au sein des organismes publics, par le biais d'une consultation avec les partenaires sociaux, afin de faciliter davantage la mise en œuvre concrète des exigences en matière d'accessibilité du web. La coordination et l'assurance de qualité de tels programmes au niveau européen présenteraient une valeur ajoutée significative et pourraient mettre en valeur les bonnes pratiques existantes.

4.3.4

Le CESE recommande fortement d'associer pleinement les partenaires sociaux au développement et à la mise en œuvre des programmes de formation et de sensibilisation. Ceux-ci pourraient jouer un rôle majeur en communiquant les idées et préoccupations du personnel et des gestionnaires responsables de l'accessibilité du web au quotidien. De plus, les partenaires sociaux pourraient contribuer à mettre la question de l'accessibilité du web à l'ordre du jour.

4.3.5

La sensibilisation et la formation des professionnels constituent toutes deux des outils nécessaires mais pas suffisants pour obtenir l'effet d'entraînement envisagé par la Commission.

4.4   Contrôle

4.4.1

Il convient de contrôler en permanence l'accessibilité des sites web en tenant compte des mises à jour régulières du contenu web. À l'article 7 de la directive, les États membres sont priés de contrôler les sites web concernés du secteur public, en appliquant la méthode mise au point par la Commission européenne, conformément à la procédure définie dans la directive. Les États membres doivent présenter tous les ans un rapport portant sur les résultats de ce contrôle, y compris sur l'éventuelle extension de la liste des types de sites web concernés, ainsi que sur des mesures supplémentaires prises dans le domaine de l'accessibilité des sites web publics. Le CESE estime que tous les États membres ne seront peut-être pas en situation de faisabilité à la fin de l'année 2015, ni dans la capacité d'inclure tous les citoyens, et que la Commission devrait en tenir compte. Le Comité est favorable à l'élaboration de normes européennes; le Parlement sera certainement attentif à ce que les actes délégués n'engendrent pas, sous la technique, de conséquences politiques qui porteraient préjudice aux citoyens européens.

4.4.2

Le CESE se félicite de la reconnaissance par la Commission européenne du besoin de contrôler en permanence l'accessibilité des sites web des organismes publics.

4.4.3

Le CESE préconise l'introduction d'une obligation pour les États membres de publier, sous des formes accessibles, les résultats de ces contrôles permanents, y compris les éventuelles conclusions générales tirées par les autorités compétentes sur la base du contrôle.

4.4.4

Le CESE recommande également vivement d'introduire une obligation pour les États membres de mettre sur pied des mécanismes par lesquels les citoyens et les organisations représentatives peuvent rendre compte de l'accessibilité et de l'inaccessibilité des sites web des organismes publics. Les informations recueillies dans ce cadre pourraient contribuer aux efforts de contrôle.

4.4.5

Le CESE demande à la Commission européenne d'envisager l'instauration pour les grands organismes du secteur public d'une obligation de désigner un coordinateur de l'accessibilité du web qui serait chargé de superviser la mise en œuvre des obligations contenues dans la directive et autres exigences liées. L'expérience montre qu'il est important d'associer les organismes lors de la mise en œuvre des obligations d'accessibilité.

4.5   Cohérence de l'environnement politique

4.5.1

Étant donné que la législation européenne sur les solutions d'identification numérique est en cours d'adoption et que la législation européenne relative à l'accessibilité pour les personnes handicapées dans d'autres secteurs de la société, c'est-à-dire l’acte législatif européen sur l'accessibilité, est en voie d'élaboration, il est important de s'assurer que tant les organismes du secteur public que les développeurs de sites web sont confrontés à un environnement politique cohérent au sein des différents secteurs. La pertinence de ce point est encore renforcée par le fait que le paquet législatif sur les marchés publics, qui est en cours d'adoption au niveau européen, devrait contenir également des dispositions sur l'accessibilité des personnes handicapées.

4.5.2

C'est pourquoi le CESE insiste fortement pour qu'une cohérence soit garantie entre les exigences de la directive qui fait l'objet du présent avis et celles d'autres propositions législatives relatives à l'accessibilité du web et ce, en procédant à une analyse juridique et technique approfondie.

4.6   Innovation et nouvelles solutions

4.6.1

La disponibilité, la fonctionnalité et l'utilisation des solutions TIC évoluent sans cesse. Une illustration parfaite de ce phénomène est le nombre croissant de services offerts par le biais d'applications pour téléphones intelligents (smartphones) et tablettes, notamment par des organismes du secteur public.

4.6.2

Le CESE recommande que les applications pour téléphones intelligents et tablettes qui offrent des services proposés par les sites web des organismes publics soient explicitement couvertes par la directive, étant donné que ces applications font déjà partie intégrante des interactions entre les citoyens et les organismes publics.

4.6.3

Il y a lieu de signaler que l'accès aux sites web est directement lié aux droits des personnes à accéder librement à l'information et à participer à la vie politique en qualité de citoyens. Un exemple de bonnes pratiques qu'il conviendrait de mettre en œuvre dans l'Union européenne consiste à développer sur les sites internet de tous les organes de l'administration publique une rubrique consacrée à la participation qui soit facilement accessible.

Bruxelles, le 22 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  Article 8 de la Charte des droits fondamentaux JO C 218, 23.7.2011, pp. 130-134; JO C 255, 22.9.2010, p. 98-102.

(2)  JO C 318, 23.12.2006, pp. 222-228.

(3)  JO C 318, 29.10.2011, pp. 9-18; JO C 24, 28.1.2012, pp. 139-145; JO C 175, 28.7.2009, pp. 8-12.

(4)  http://ec.europa.eu/digital-agenda/en/news/egovernment-indicators-benchmarking-eeurope


19.9.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 271/122


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Plan d'action pour la santé en ligne 2012-2020 — Des soins de santé innovants pour le XXIe siècle»

COM (2012) 736 final

2013/C 271/23

Rapporteure: Isabel CAÑO AGUILAR

Le 19 février 2013, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Plan d'action pour la santé en ligne 2012-2020 — des soins de santé innovants pour le XXIe siècle»

COM(2012) 736 final.

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 30 avril 2013.

Lors de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 22 mai 2013), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 154 voix pour et 4 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le CESE accueille avec intérêt la proposition relative au Plan d'action pour la santé en ligne 2012-2020. Toutefois, il déplore le fait que la communication à l'examen ne comporte pas de chapitre consacré au volet social des prestations de services et que les soins de santé et la protection sociale n'y soient pas davantage développés.

1.2

Le CESE rappelle que la responsabilité de la réussite du nouveau plan est essentiellement du ressort des États membres même si la Commission joue un rôle indispensable d'appui et de coordination.

1.3

La dimension humaine doit être au centre de la santé en ligne. Il faut éviter l'écueil de la «dépersonnalisation» et de l'absence de prise en considération des facteurs psychologiques.

1.4

Le CESE regrette tout particulièrement la diminution du nombre de professionnels de la santé alors même que les exigences qui pèsent sur les systèmes de santé ne cessent de croître.

1.5

Le CESE signale que la Communication ne comporte que des références partielles quant au mode de financement du nouveau plan. Il faut un cadre général qui définisse quels seront les apports respectifs du secteur public, privé et, le cas échéant, des patients et des contribuables en général.

1.6

Le CESE souligne la nécessité d'assurer une pleine coordination entre les programmes, les activités et les groupes de travail inclus dans la communication afin d'éviter les risques de chevauchement.

1.7

En matière de normalisation des fonctions nécessaires dans les équipements informatiques, il y a lieu de souligner la nécessité d'un contrôle adéquat de la part des pouvoirs publics pour éviter des situations d'abus de position dominante, comme cela est déjà advenu dans certains secteurs des TIC.

1.8

Le CESE salue la décision d'aborder un autre aspect fondamental de l'interopérabilité, à savoir les principales questions juridiques qui empêchent la mise en œuvre d'un système transfrontalier de télémédecine.

1.9

Le CESE souscrit à l'intention de la Commission de développer le tissu entrepreneurial lié à la santé en ligne, en particulier s'agissant d'appui aux PME, mais estime que les propositions en la matière ne sont pas suffisamment concrètes ni quantifiées pour permettre une appréciation plus détaillée.

1.10

Concernant le plan «Connecter l'Europe», le CESE souligne qu'il ne faut pas le limiter à une «connexion des systèmes» mais qu'il convient également de permettre aux personnes de connaître, comprendre et bénéficier d'une citoyenneté connectée».

1.11

Le nouveau programme de santé en ligne doit avoir pour objectif de garantir davantage d'égalité entre les citoyens européens en ce qui concerne l'accès aux services de santé. À cet égard, la généralisation de la bande large jouera un rôle fondamental.

Afin d'éviter que les inégalités existantes en matière d'accès à la santé se reproduisent dans le domaine de la santé en ligne, des actions de plus grande envergure et des investissements plus importants que ceux pouvant relever du FEDER (Fonds de développement régional) sont nécessaires.

1.12

Il conviendrait d'améliorer la maîtrise des outils numériques de santé. A) Dans le cas des patients: compte tenu de l'expérience du projet «Sustains», il est très important de permettre aux personnes d'utiliser et d'accéder à leurs données personnelles qui sont actuellement «séquestrées» dans les systèmes d'information des systèmes de santé. B) S'agissant des professionnels de la santé: il est indispensable d'inclure les connaissances en matière de santé en ligne dans les programmes de formation.

2.   Introduction

2.1

Depuis le lancement par l'UE de son premier plan d'action sur la santé en ligne (2004) des progrès ont été enregistrés; toutefois, des obstacles continuent de s'opposer à la mise en œuvre d'un système intégré européen, et ce notamment pour les raisons suivantes:

Les patients, les citoyens et les professionnels de la santé ne sont pas assez sensibilisés aux solutions de santé en ligne et ne leur font pas suffisamment confiance;

Les solutions de santé en ligne ne sont pas suffisamment interopérables.

Les cadres juridiques sont inadaptés ou fragmentés.

Selon les régions, les possibilités d'accès aux services des TIC sont différentes et l'accès est limité dans les régions défavorisées.

2.2

La prolifération en Europe de produits incompatibles entre eux est la conséquence inévitable de la situation de fragmentation du marché et de l'inexistence de normes de communication et d'échanges ou de la méconnaissance de la part de grands acheteurs de celles-ci. Il en résulte souvent une impossibilité de connecter les systèmes informatiques dans les pays et régions limitrophes, voire dans les centres de santé. Ainsi, il arrive parfois que certains hôpitaux disposent dans leur service de radiologie de logiciels sur mesure qui ne peuvent pas communiquer avec les programmes utilisés dans d'autres services du même centre hospitalier.

2.3

Conformément aux objectifs de la stratégie Europe 2020 et de la stratégie numérique pour l'Europe, le nouveau plan d'action vise à traiter ces obstacles et à les surmonter, ainsi qu'à fournir des éclaircissements sur le domaine d'action et à définir une approche de la santé en ligne en Europe.

2.4

Le marché mondial de la santé en ligne, qui enregistre une forte expansion, pourrait atteindre 27 300 millions de dollars en 2016. Les grandes entreprises européennes occupent, dans certains cas, une position de chef de file au niveau international et, dans l'ensemble, l'on estime que ce secteur compte quelque 5 000 entreprises.

3.   Les propositions de la Commission

3.1

La Commission identifie les difficultés auxquelles sont confrontés les systèmes de soins de santé européens. D'une part, les dépenses de santé publique des 27 États membres de l'UE pourraient atteindre 8,5 % du PIB en 2060 en raison de l'évolution démographique et d'autres facteurs, en même temps que l'on assisterait à une diminution de la population active et à une augmentation du nombre de personnes âgées de plus de 65 ans. Par ailleurs, une autre difficulté consiste à susciter une participation active de l'Europe sur le marché mondial de la santé en ligne.

3.2

Objectifs:

Parvenir à une interopérabilité étendue des services

Soutenir la recherche, le développement, l'innovation et la compétitivité

Faciliter l'adoption de la santé en ligne et en assurer un plus large déploiement

Promouvoir le dialogue politique et la coopération internationale dans ce domaine

3.3

Mesures envisagées: faciliter l'interopérabilité transfrontalière (éléments techniques et sémantiques, label de qualité, certification); adopter un livre vert sur la santé; améliorer les conditions commerciales pour les entreprises; accroître la maîtrise par les citoyens des outils numériques (programme-cadre pour l'innovation et la compétitivité et Horizon 2020), entre autres.

4.   L'avis du CESE. Observations générales

4.1

Le CESE accueille avec intérêt la proposition de plan de santé en ligne pour la période 2012-2020.

4.2

Toutefois, le CESE estime que ce plan devrait comporter un chapitre consacré au volet social de la prestation de services. Il s'agit concrètement de questions telles que l'approche appropriée à adopter en matière de fracture numérique, la disponibilité de la technologie et la capacité à l'utiliser ou l'analyse des inégalités sociales dans le domaine de la santé, problèmes qui risquent de s'accentuer. Il conviendrait également d'englober un développement plus large des soins de santé et de la protection sociale, qui pourrait être grandement facilitée par une utilisation correcte des TIC.

4.3

Le CESE rappelle que, vu la répartition des compétences, la responsabilité de la réussite du plan d'action relève pour l'essentiel des États membres. Or il existe des différences notables aujourd'hui entre eux s'agissant de la mise en œuvre de la santé en ligne.

La Commission remplit une fonction indispensable d'appui et de coordination, principalement sur la base juridique des articles 114, 168, 173 et 179 du traité sur le fonctionnement de l'UE. Une pleine collaboration et une participation active des États membres et de la Commission sont indispensables dans le cadre du réseau de santé en ligne (directive 2011/24/UE).

4.4

La santé en ligne doit favoriser la confiance mutuelle entre les patients et les professionnels, en évitant le risque dépersonnalisation et d'absence d'attention aux facteurs psychologiques. La dimension humaine doit être au centre de la santé en ligne. Cependant, le CESE constate que selon certaines organisations européennes représentatives des droits des patients, telles que le Forum européen des patients (FEP), le processus est davantage piloté par le progrès technologique que par les besoins des patients. C'est un aspect préoccupant dont il faut tenir compte.

4.5

Les carences en personnel ne peuvent être comblées par l'informatique. Le CESE déplore en particulier la diminution du nombre de professionnels de la santé en même temps qu'augmentent les exigences pesant sur le système de santé. Les TIC ne sont qu'un outil servant à aider les femmes et les hommes qui, au quotidien et avec abnégation, prodiguent des soins de santé aux patients et contribuent à ce que ces derniers aient une relation plus facile avec les professionnels des systèmes de santé.

4.6

Le CESE indique que la communication ne comporte que des références partielles quant au mode de financement du nouveau plan. Il faut un cadre général définissant quel apport l'on peut attendre des secteurs public et privé ainsi que, le cas échéant, des patients et des contribuables en général.

4.7

Eu égard aux programmes, activités, projets et groupes de travail mentionnés dans la communication de la Commission, le CESE met l'accent sur la nécessité d'une pleine coordination entre ceux-ci et sur la nécessité d'éviter les risques de chevauchements.

4.8

Il est essentiel pour la réussite du Plan d'action pour la santé en ligne d'aller plus loin dans le changement organisationnel des prestataires de services de santé. La responsabilité de l'établissement des accès à la santé en ligne ne saurait incomber aux seules hautes administrations ni reposer sur la population en tant qu'utilisatrice finale en la matière. Les organisations intermédiaires prestataires de services de santé doivent également faire un effort pour que leurs structures et leur personnel s'adaptent à ces nouveaux modèles de services.

5.   Observations spécifiques

5.1   L'interopérabilité

5.1.1   Les aspects techniques et sémantiques

5.1.1.1   Le CESE considère de manière générale que la proposition de la Commission sur l'interopérabilité est adéquate, tout en signalant qu'il ne suffit pas de mettre en place la possibilité d'échanger des données ou des documents au moyen de protocoles communs, dès lors que des problèmes de type sémantique, organisationnel ou juridique doivent encore être résolus.

5.1.1.2   Interopérabilité sémantique

Il conviendrait de clarifier, dans la proposition de la Commission, les relations entre les différents programmes, activités ou groupes de travail – comme le 7e programme-cadre et ISA, entre autres – et SNOMED CT (Nomenclature systématisée des termes cliniques en médecine), qui est la terminologie clinique intégrale et multilingue la plus complète au monde, codifiée par la International Health Terminology Standards Development Organisation (IHTSDO). Cette dernière est une organisation sans but lucratif dont sont membres plusieurs pays de l'UE, les États-Unis, l'Australie, etc.

5.1.1.3   Normalisation

Nombreux sont les fournisseurs de logiciels et de matériel en matière de santé en ligne. Il est vital, dans le cadre du règlement (UE) no 1025/2012, d'avancer dans le processus de normalisation des fonctions nécessaires en vue d’offrir à l'industrie et à ses utilisateurs – en particulier à ceux qui sont en position de prendre des décisions d'achat – un cadre plus intéressant, moins risqué, où les investissements sont plus rentables et plus utiles. Le CESE souligne la nécessité d'un contrôle adéquat de la part des pouvoirs publics pour éviter des situations d'abus de position dominante, comme cela est déjà advenu dans certains secteurs des TIC.

5.1.1.4   L'aspect organisationnel

De l'avis du CESE, la décision de la Commission de présenter des mesures concrètes visant l'intégration et la coopération dans l'UE est positive. Le projet pilote EPSOS (European Patients Smart Open Services) (1) facilitera l'élaboration des mesures concrètes que la Commission annonce pour intégrer les processus transfrontaliers de santé en ligne.

5.1.1.5   Questions juridiques

5.1.1.5.1   Le CESE se félicite de la décision de s'attaquer aux principales questions juridiques qui empêchent la mise en œuvre d'un système transfrontalier de télémédecine (2). À l'échelle mondiale, vu qu'il s'agit de technologies innovantes, des vides et obstacles juridiques perdurent, tout comme au niveau national.

5.1.1.5.2   Octroi de licences et d'autorisations aux professionnels de la santé et aux établissements médicaux

Selon la directive 2011/24/UE relative à l'application des droits des patients en matière de soins de santé transfrontaliers, c’est la législation de l'État membre de traitement qui est d'application (article 4, paragraphe 1, lettre a) (3). Le CESE suggère d'examiner l'opportunité de revoir la directive 2005/36/CE sur la reconnaissance des qualifications professionnelles, qui n'aborde pas la question des prestations transfrontalières.

5.1.1.5.3   Protection des données

Les informations sur la santé revêtent un caractère sensible. Les patients entendent contrôler à leur avantage ces informations et l'accès à celles-ci. La discussion sur le droit du patient à interdire l'accès à son dossier médical doit être menée de manière globale, afin de parvenir à des normes égales pour tous les citoyens européens.. Le CESE rappelle que le manque de confiance dans la sécurité des données sanitaires peut induire les patients à occulter des informations indispensables.

5.1.1.5.4   La protection des données personnelles est un droit fondamental garanti par le TFUE (article 16) et par la Charte des droits fondamentaux (articles 7 et 8). La directive 95/46/CE prévoit cette protection pour le traitement des données à caractère personnel et leur libre circulation (4). Cependant, la marge de manœuvre qui a été concédée aux États membres pour leur transposition a provoqué une grande disparité dans le niveau de protection, laquelle constitue aujourd'hui l'un des plus grands obstacles à la télémédecine transfrontalière. Le CESE doit dès lors réitérer son soutien à la proposition de règlement général sur la protection des données (5), selon les termes de son avis du 23 mai 2012 (6).

5.1.1.5.5   Remboursement

L'État d'affiliation (c'est-à-dire celui où les soins de santé sont reçus) doit garantir que, le cas échéant, les coûts de la prestation transfrontalière seront remboursés (directive 2011/24/UE, article 7, paragraphe 1). Avis du CESE: il faut que le patient soit clairement informé des conditions de remboursement.

5.1.1.5.6   Responsabilité du fait d'erreurs professionnelles et de fournitures de matériel médical

Il s'agit là d'une matière complexe, notamment parce que de multiples acteurs sont susceptibles d'intervenir. Dans le cas de prestations médicales transfrontalières, il existe un principe général – application de la législation de l'État membre de traitement (directive 2011/24/UE, article 4, paragraphe 1). Les produits défectueux sont régis par la directive 85/374/CEE qui établit le principe de responsabilité objective. Avis du CESE: vu les bases juridiques existantes, la casuistique doit être résolue par la jurisprudence.

5.1.1.5.7   Juridiction et législation applicable

Il s'agit là aussi d'une matière très complexe qui doit être traitée à la lumière des règles et des traités internationaux en vigueur. Le CESE suggère de prendre en considération les voies extrajudiciaires de règlement des conflits, telles que l'arbitrage et la médiation.

5.1.1.5.8   Droit d'accès

Le niveau d'accès des patients et des citoyens aux informations sanitaires et à leurs propres antécédents médicaux a augmenté. Certaines régions ont relevé le niveau des services au moyen de centres de soins offrant des services 24 heures sur 24, à l'ensemble de la population, à certains groupes de patients à risque ou à des régions entières. Les patients peuvent eux-mêmes prendre rendez-vous et jouir de l'accès qui convient aux informations contenues dans leur dossier médical. Cela incite le patient à prendre activement sa part de responsabilité en matière de soins de santé et de prévention. Avis du CESE: il convient de réglementer le droit d'accès en ce qui concerne les prestations transfrontalières.

5.1.1.5.9   Santé et bien-être mobiles

Le CESE salue la décision de la Commission d'aborder dans le Livre vert qu'elle présentera en 2014 les applications en matière de santé et de bien-être mobiles (santé en ligne mobile). Il s'agit d'un aspect particulier de la santé en ligne en forte expansion à l'heure actuelle de par la diffusion des dispositifs mobiles (smartphones, tablettes, etc.) et d'applications spécialement dédiées à ces dispositifs (APPS), dont la prolifération dans la population rend nécessaire une réglementation des aspects techniques et juridiques liés à leur utilisation.

5.2   RDI

5.2.1

Le CESE juge appropriés les domaines de recherche qui devraient, selon la Commission, être subventionnés au titre du volet «Santé, évolution démographique et bien-être» du programme Horizon 2020.

5.2.2

La décision sur l'enveloppe que l'UE allouera à la recherche médicale pour la période 2014-2020 n'ayant pas encore était arrêtée, le CESE rappelle que le National Institute of Health (États-Unis) investit annuellement dans celle-ci 30 900 millions de dollars.

5.2.3

À la lumière de propositions formulées par des organisations représentatives de la santé, telles que l'Alliance européenne pour la santé publique (EPHA), le CESE suggère que les programmes de recherche tiennent compte, entre autres, des éléments suivants:

la complémentarité avec d'autres programmes, tels que «Santé pour la croissance», en vue de l'établissement de statistiques fiables sur l'évolution de maladies chroniques dans la population: obésité, maladies cardio-vasculaires, cancer, diabète, etc.;

la coordination, dès lors que le monde de la recherche est caractérisé traditionnellement par une forte indépendance et un manque de communication entre les chercheurs;

les conditions d’octroi de brevets pour des travaux payés par le contribuable, afin d’éviter le risque de voir mutualiser les risques de la recherche tandis que les bénéfices en seraient privatisés (7).

5.3   Le CESE souscrit à l'intention de la Commission de développer le tissu entrepreneurial lié à la santé en ligne, en particulier s'agissant de l'appui aux PME, mais estime que les propositions en la matière ne sont pas suffisamment concrètes ni quantifiées pour permettre une appréciation plus détaillée.

5.4   Concernant le plan «Connecter l'Europe» sur la période 2014-2020, compte tenu des résultats du projet pilote EPSOS ainsi que d'autres projets et études, le CESE souligne qu'il ne faut pas le limiter à une «connexion des systèmes» mais qu'il convient également de permettre aux personnes de connaître, comprendre et bénéficier d'une «citoyenneté connectée».

5.5   Cohésion

5.5.1

Le nouveau programme de santé en ligne doit avoir pour objectif de garantir davantage d'égalité entre les citoyens européens en ce qui concerne l'accès aux services de santé. Comme l'a déjà signalé le CESE, il est évident qu'un accès à la bande large dans tous les pays et la connectivité totale sont des conditions essentielles pour le développement de la télémédecine, raison pour laquelle il y a lieu de renforcer l'équipement numérique dans les régions, surtout dans les zones rurales et ultrapériphériques (8).

5.5.2

L'actuelle période de programmation du FEDER arrivant à son terme, le CESE escompte que soient mises en œuvre dans la programmation 2014-2020 les propositions relatives au déploiement à grande échelle des technologies de dernière génération sur tout le territoire de l'UE, et surtout qu’elles soient dotées des moyens budgétaires qui conviennent. Toutefois, des actions de plus grande envergure et des investissements plus importants que ceux pouvant relever du FEDER sont nécessaires afin d'éviter que les inégalités existantes en matière d'accès à la santé se reproduisent dans le domaine de la santé en ligne.

5.6   Meilleure maîtrise des outils numériques de santé

5.6.1

Le CESE estime que dans le cas des patients, il est très important de permettre aux personnes d'accéder à et d'utiliser leurs données personnelles qui sont actuellement souvent «séquestrées» dans les systèmes d'information des systèmes de santé. À cet égard, le CESE mentionne le projet «Sustains», mis en place à ce jour dans treize régions européennes et qui vise à faciliter l'accès des personnes à leurs données médicales au moyen de «dossiers personnels de santé» et d'autres services ajoutés dans des environnements en ligne.

5.6.2

S'agissant de la communauté médicale, il est indispensable de promouvoir l'inclusion de connaissances en matière de santé en ligne dans les programmes de formation des professionnels, tant cliniciens que gestionnaires.

5.7   Évaluation des programmes

5.7.1

Le CESE est d'avis que l'établissement de valeurs communes et la mise en œuvre de programmes d'évaluation par la Commission sur les avantages de la santé en ligne est l'un des aspects les plus intéressants, étant donné que la rapidité des évolutions technologiques empêche souvent d'en constater l'utilité réelle. Les enquêtes qui ont été menées montrent que l'appui de la population et de la communauté médicale à la santé en ligne est directement lié à la conviction qu'elle suscite une amélioration tangible du système de santé.

5.7.2

Le CESE tient aussi à signaler qu'il est essentiel, pour la mise en place de modèles de santé basés sur les TIC, d'avoir une bonne connaissance des modèles et des technologies qui ont un impact positif et de les promouvoir effectivement. Pour y parvenir, des méthodologies d'évaluation souples et dynamiques, mettant l'accent sur l'évaluation globale du service presté et pas tant sur la technologie elle-même, sont indispensables. Il est également nécessaire d'inclure une évaluation de l'efficacité du service, à savoir son rapport coût - bénéfices global même si bien entendu l'efficacité économique ne devrait pas être le seul critère pour recommander l'utilisation de modèles de prise en charge de la santé basés sur les TIC.

5.7.3

En général, l'idée prévaut parmi les pouvoirs publics, dans les secteurs industriels et au sein des organisations représentatives que la santé en ligne (qui comprend des applications très différentes) peut apporter des avantages sur le plan de la santé. Le CESE partage ce point de vue, tout en faisant valoir qu'il faut également tenir compte des avis critiques, basés sur des expériences réelles, qui mettent en doute les économies de coût et pointent du doigt des problèmes: erreurs informatiques, clonage de rapports, possibilité de fraude, coût élevé, etc.

5.8   Promotion du dialogue politique et de la coopération internationale

Il est évident que le dialogue politique sur la santé en ligne doit avoir lieu au niveau mondial, comme le propose la Commission, dès lors que les pays en voie de développement réalisent aussi de grands efforts en la matière. Cela permettra d'orienter l'utilisation des TIC vers la réalisation des objectifs des Nations unies et leur application dans un esprit de solidarité.

Bruxelles, le 22 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  EPSOS établit des recommandations, des spécifications techniques, des descriptions de systèmes, des modèles d'organisation, des applications et des outils informatiques, etc. en vu d'améliorer l'interopérabilité à l'échelle multinationale. Des systèmes pilotes ont également été mis sur pied dans diverses régions.

(2)  Voir document de travail des services de la Commission sur l'applicabilité du cadre juridique de l'UE aux services de télémédecine, SWD(2012) 414 final.

(3)  Voir directive 2000/13/CE, article 3, paragraphes 1 et 2: «principe du pays d'origine».

(4)  Sont également d'application la directive 2002/58/CE sur la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques et la directive 2011/24/UE.

(5)  COM(2012) 11 final – 2012/0011 (COD).

(6)  Avis exploratoire du CESE sur le thème «Le marché numérique en tant que moteur de croissance», JO C 229, du 31.7.2012, p. 1.

(7)  Position de l'EPHA sur Horizon 2020 (juin 2012). http://ec.europa.eu/research/horizon2020/pdf/contributions/during-negotiations/european_organisations/european_public_health_alliance.pdf

(8)  JO C 317 du 23.12.2009, p. 84.


19.9.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 271/127


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Une stratégie numérique pour l'Europe: faire du numérique un moteur de la croissance européenne»

COM(2012) 784 final

2013/C 271/24

Rapporteur: M. McDONOGH

Le 18 mars 2013, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions - Une stratégie numérique pour l'Europe: faire du numérique un moteur de la croissance européenne»

COM(2012) 784 final.

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructure, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 30 avril 2013.

Lors de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai2013 (séance du 22 mai 2013), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 156 voix pour et 7 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le Comité accueille favorablement la communication sur la révision de la stratégie numérique de la Commission européenne qui est axée sur des actions prioritaires qu'il convient de mettre en œuvre de toute urgence en faveur de la croissance économique et de l'emploi.

1.2

L'économie européenne est en crise. Selon la Commission, le PIB de l'UE 27 est, au mieux, stagnant et se contractera encore de 0,25 % dans la zone euro en 2013. Le chômage a atteint un nouveau record en février 2013; plus de 26 millions de personnes sont sans emploi dans l'UE 27, soit 10,9 % de la population active (1). La Grèce et l'Espagne continuent à afficher les taux de chômage les plus élevés, soit 26,4 % et 26,3 % respectivement, alors que le taux de chômage des jeunes atteint 23,5 % en moyenne dans l'UE 27.

Le CESE convient avec la Commission que ce niveau de chômage inacceptable est une tragédie et que l'Europe doit mobiliser toutes les ressources disponibles pour créer des emplois et revenir à une croissance durable (2).

1.3

Malgré la crise économique, l'économie numérique bénéficie d'une croissance rapide et crée des emplois. En effet, suivant les estimations du secteur des technologies de l'information et de la communication (TIC), 700 000 emplois seront à pourvoir dans le secteur d'ici à 2015 en raison de la pénurie de compétences en la matière en Europe. En cette période de chômage de masse, il s'agit là d'une situation inadmissible.

1.4

L'Europe a impérativement besoin de la stratégie numérique pour accélérer la reprise et susciter une croissance durable et inclusive, notamment dans les régions de l'Union faisant face aux plus graves difficultés économiques. Le moment est bien choisi pour réviser cette stratégie et donner la priorité aux actions les plus décisives en matière de croissance économique et d'emploi.

1.5

Étant donné que le haut débit constitue l'infrastructure de base essentielle pour la stratégie numérique, le Comité a été extrêmement déçu par la décision prise par le Conseil en février (3) de réduire de 9,2 à seulement 1 milliard d'euros le budget consacré par le cadre financier pluriannuel (CFP) pour la période 2014-2020 aux infrastructures et aux services numériques, au titre du mécanisme pour l'interconnexion en Europe. Cette restriction budgétaire mettrait un terme au soutien qu'apporte le CFP au déploiement du haut débit et frapperait les régions les plus pauvres et les moins avancées de l'UE, ce qui ne ferait qu'aggraver encore la fracture numérique.

1.6

La communication de la Commission met en avant une série de propositions très ambitieuses visant à éliminer les entraves à la mutation numérique de l'Europe. Le CESE espère pouvoir examiner, en temps utile, les communications de la Commission portant sur chacune des grandes initiatives proposées; c'est à ce moment seulement qu'il sera possible de formuler des observations exhaustives sur les différentes mesures, leur incidence probable et les problèmes éventuels.

1.7

Compte tenu des contraintes en termes de temps et de ressources, le CESE estime que le recentrage de la stratégie numérique devrait porter en priorité sur les mesures de croissance suivantes:

fournir la connectivité internet à grande vitesse à l'ensemble des citoyens;

renforcer l'inclusion numérique et la culture numérique;

développer les compétences dans le domaine des technologies de l'information et de la communication (TIC), remédier à la pénurie de compétences en la matière, créer des emplois et soutenir l'entrepreneuriat;

instaurer la confiance et renforcer la cybersécurité;

protéger la vie privée et garantir la sécurité personnelle en ligne (en particulier pour les enfants);

élaborer une charte des droits numériques des utilisateurs;

accroître la participation de tous les segments de la société à l'élaboration et à la mise en œuvre des politiques;

mettre en œuvre une stratégie efficace de l'informatique en nuage, notamment une réglementation appropriée;

accroître la compétitivité à l'échelle mondiale dans le domaine des TIC et des services numériques, afin que les entreprises européennes se hissent au premier rang du marché mondial dans le domaine des technologies et des services clés;

mobiliser des synergies à partir des projets relatifs au GNSS européen et des systèmes Galileo et Egnos.

1.8

Le CESE se réjouit de constater qu'un grand nombre d'actions préconisées dans ses avis intitulés «Le marché numérique - un moteur pour la croissance» (4) et «Un marché intérieur numérique inclusif» (5) sont reprises dans la communication, notamment la connectivité à haut débit, l'interopérabilité, la sécurité en ligne, la neutralité de l'internet et l'internet ouvert, ainsi que l'harmonisation de la TVA.

1.9

Dans la mesure où il est essentiel de déployer le haut débit à grande vitesse dans l'ensemble de l'UE, le Comité appelle la Commission à recommander une série d'instruments de financement à même de soutenir le rythme accéléré des investissements dans les infrastructures de haut débit, en particulier lorsque les rendements du marché normal sont insuffisants pour attirer les fonds privés.

1.10

Des solutions novatrices, notamment une utilisation accrue des technologies sans fil, doivent être mises en œuvre le plus rapidement possible pour accélérer le déploiement du haut débit et remédier à l'accroissement de la fracture numérique entre les zones urbaines et rurales.

1.11

Le CESE souhaite que la Commission indique selon quelle modalité l'accès au haut débit à grande vitesse pourrait être reconnu comme un droit universel dont bénéficie chaque citoyen, quel que soit l'endroit où il se trouve.

1.12

Le CESE insiste sur la nécessité d'intégrer pleinement les TIC dans la politique d'éducation afin que tous les citoyens puissent acquérir, tout au long de leur vie, une culture numérique et les compétences liées aux TIC (6). Le Comité soutient également le développement d'une solide intelligence numérique dans l'ensemble de la société et de l'économie. Il estime en outre essentiel de mettre en œuvre des politiques pour promouvoir l'égalité hommes/femmes dans l'apprentissage des TIC.

1.13

Il convient d'accorder une attention toute particulière à la nécessité de permettre aux chômeurs d'accéder à une culture numérique ciblée et à une formation aux compétences numériques, ainsi que de proposer des cours de perfectionnement aux personnes qui travaillent déjà et qui ont besoin de nouvelles compétences pour conserver leur emploi dans l'économie numérique.

1.14

Le Comité invite la Commission à examiner de quelle manière l'utilisation des infrastructures publiques dans le domaine des TIC, et plus spécifiquement le haut débit et les ressources informatiques à l'école et dans les bibliothèques publiques, pourrait devenir un élément de la politique afin de soutenir les compétences informatiques et l'acquisition de la culture numérique dans l'ensemble de l'Union.

1.15

La confiance des consommateurs est fondamentale pour stimuler la demande de services numériques innovants. Cette confiance serait renforcée par l'instauration de dispositifs législatifs de protection des consommateurs plus efficaces, notamment l'application effective des «règles de non-conformité» lorsque les consommateurs n'obtiennent pas les vitesses de haut débit annoncées par les fournisseurs de services internet.

1.16

Le CESE appelle de nouveau la Commission à formuler des propositions relatives à l'introduction d'un label de confiance européen pour les entreprises. Des avis antérieurs du CESE (7) plaidaient en faveur d'un système européen de certification et de labellisation des commerçants en ligne, qui aurait pour effet de renforcer sensiblement la confiance des consommateurs dans le commerce électronique transfrontalier et aiderait les PME à développer leur activité dans ce même domaine.

1.17

Le Comité invite la Commission à se référer à son avis intitulé «L'Internet ouvert et la neutralité d'Internet en Europe» (8) et demande avec insistance que le principe de neutralité de l'internet soit formellement inscrit dans le droit de l'UE, et ce dès que possible.

1.18

Le CESE souhaiterait que soit promulguée une charte des droits numériques pour tous les citoyens, afin de renforcer la protection des consommateurs.

1.19

Le Comité appelle de nouveau la Commission à réaliser les vastes synergies que générerait l'intégration adéquate des programmes de GNSS dans la stratégie numérique.

1.20

Compte tenu du fait que la société numérique est en train d'évoluer et qu'un nombre accru de services publics importants sont fournis en ligne, le Comité estime que la Commission doit continuer à appuyer de manière ciblée des stratégies visant à renforcer l'inclusion numérique dans l'ensemble de l'Union. Il convient de veiller tout particulièrement à l'inclusion des citoyens défavorisés en raison d'un handicap, de difficultés en lecture et en écriture, de leur âge, d'un manque de moyens économiques ou de leur genre. Le CESE accueille favorablement la désignation de «champions du numérique» dans les États membres et attend avec intérêt l'élaboration de rapports sur l'efficacité de cette stratégie.

2.   Contenu de la communication de la Commission

2.1

Le taux de croissance de l'économie numérique est sept fois plus élevé que celui du reste de l'économie européenne et la moitié de tous les gains de productivité réalisés résulte des investissements dans les TIC. Plus de 4 millions de spécialistes des TIC sont employés dans de nombreux secteurs d'activité en Europe et leur nombre augmente de 3 % par an en dépit de la crise. En raison de leur capacité à susciter le changement, les TIC sont essentielles à la mutation structurelle dans des domaines tels que les soins de santé, l'énergie, les services financiers, le secteur manufacturier, les services publics et l'enseignement. Néanmoins, à l'heure actuelle, ce potentiel est entravé par un cadre politique paneuropéen fragmenté et des barrières structurelles.

2.2

La communication expose les plans conçus par la Commission pour stimuler la croissance économique et l'emploi en Europe en recentrant la stratégie numérique dans des domaines essentiels:

achèvement du marché unique du numérique  (9) d'ici 2015;

accélération de l'innovation numérique dans le secteur public en recourant au mécanisme pour l'interconnexion en Europe (MIE) (10);

accélération de la mise en place de la connectivité internet à grande vitesse;

mise en œuvre de la stratégie sur l'informatique en nuage  (11) qui permettra de réduire les coûts informatiques et de stimuler la productivité, la croissance et l'emploi;

mise en œuvre de la stratégie européenne en matière de cybersécurité  (12). La Commission propose en outre d'élargir l'alliance mondiale contre les abus sexuels commis contre des enfants via internet (13);

mise en œuvre d'une «grande alliance pour les TIC et l'emploi», afin de mener une action coordonnée dans toute l'UE pour dynamiser l'emploi et les compétences numériques;

un climat plus favorable à l'activité économique pour les jeunes entrepreneurs et un plan d'action destiné à soutenir les entrepreneurs du web;

Par la mise en œuvre des actions présentées dans la communication, l'on espère créer 3,8 millions de nouveaux emplois, à long terme, dans l'ensemble de l'économie.

mise en œuvre d'une nouvelle stratégie industrielle de l'électronique, en concentrant les instruments de financement de la R&D&I sur des exigences stratégiques dans des domaines technologiques clefs.

3.   Observations générales

3.1

Il reste encore beaucoup à faire pour parvenir au cercle vertueux envisagé par la stratégie numérique, reliant les infrastructures numériques, les contenus, les services, les marchés et l'innovation en vue d'accroître la productivité et la croissance. Le marché unique du numérique est encore loin d'être une réalité et le rythme du développement des infrastructures et des réformes de la réglementation varie considérablement d'un État membre à l'autre.

3.2

L'économie européenne est en crise. Plus de 26 millions de personnes, soit 10,9 % des actifs, sont sans emploi dans l'UE 27. La situation désastreuse de l'économie européenne contraste de manière défavorable avec celle de nos concurrents à l'échelle mondiale: en janvier, le chômage n'atteignait que 7,7 % aux États-Unis, le taux le plus bas depuis quatre ans, et 4,3 % au Japon.

3.2.1

Les derniers chiffres publiés par Eurostat (14) mettent également en évidence des différences notables entre les États membres. L'Autriche et l'Allemagne présentent des taux de chômage respectifs de 4,8 % et 5,4 % seulement, alors que celui de la Grèce et de l'Espagne dépasse les 26 %.

3.2.2

Le chômage des moins de 25 ans est particulièrement élevé. Plus d'un jeune sur deux est sans emploi en Grèce (58,4 %) et en Espagne (55,7 %).

3.3

La stratégie numérique fixe des objectifs ambitieux en matière de couverture en haut débit et de vitesse et exige des États membres qu'ils prennent des mesures, notamment des dispositions légales, pour faciliter les investissements dans le haut débit. Toutefois, selon la Commission (15), l'Europe accuse un retard croissant, par rapport à la concurrence mondiale, dans la mise en place des infrastructures de haut débit. Les investissements dans le haut débit à grande vitesse sont réalisés plus rapidement dans certaines régions d'Asie et aux États-Unis, d'où une couverture nettement meilleure et des vitesses plus élevées. En décembre 2011, la Corée du Sud, avec 20,6 % d'abonnements pour 100 habitants, comptait le taux de pénétration de la fibre optique le plus élevé au monde; il représente le double de la Suède (9,7 %), qui occupe la première place de l'Union européenne. Avec 17,2 %, le Japon se classe au deuxième rang mondial.

3.4

L'inclusion numérique devrait être un droit de tous les citoyens, quelle que soit leur place dans la société. Des efforts spécifiques doivent être consentis pour intégrer les citoyens défavorisés en raison d'un handicap physique, d'un manque de moyens économiques, de leur âge, de difficultés en lecture et en écriture ou de leur genre.

3.5

L'accès au haut débit à grande vitesse doit être reconnu comme un droit universel des citoyens de l'UE. En 2010 (16), la Commission avait soulevé la question d'une inclusion du haut débit dans l'obligation de service universel. Il faut de toute urgence répondre à cette question afin de promouvoir le bien-être des citoyens, l'emploi et l'inclusion numérique.

3.6

Les pouvoirs publics nationaux devraient faire en sorte que chacun puisse profiter de l'accessibilité numérique et de la culture numérique. Le Comité souhaiterait que chaque citoyen puisse se former dans le domaine des compétences numériques tout au long de sa vie, pour des motifs professionnels, personnels et de citoyenneté.

3.7

Dans le domaine du haut débit à grande vitesse, la fracture numérique tend à se creuser dans la mesure où les citoyens sont non seulement privés de l'accès à l'information, comme c'est le cas avec le haut débit de base, mais aussi des services numériques sur Internet qui ne sont disponibles qu'au moyen de connexions à grande vitesse, comme les services de santé en ligne, d'éducation en ligne et d'administration en ligne.

3.8

Le tableau de bord de la «stratégie numérique pour l'Europe» (17) et les derniers chiffres fournis par Eurostat (18) indiquent que la fracture numérique ne cesse de s'élargir et que les différences entre les États membres sont considérables. En 2012, 28 % des foyers de l'UE 27 sont privés de la connectivité à haut débit. Néanmoins, en Allemagne, en Finlande, en Suède et au Royaume-Uni, plus de 80 % des foyers ont accès au haut débit, tandis qu'en Bulgarie, en Grèce, en Italie et en Roumanie, moins de 60 % des foyers bénéficient d'une telle connexion. Par ailleurs, 90 % des foyers privés de haut débit vivent dans des zones rurales. Trente-cinq millions de foyers en zones rurales attendent toujours la connectivité à grande vitesse, et leur désavantage économique et social ne fera que s'aggraver si l'on n'accorde pas l'attention requise aux citoyens vivant en dehors des centres urbains.

3.9

La culture numérique et l'utilisation de l'internet dépendent dans une grande mesure de la connectivité à haut débit. De ce fait, si moins de 10 % des habitants de la Finlande et de la Suède n'ont jamais utilisé l'internet, ce chiffre augmente sensiblement pour la Bulgarie, la Grèce et la Roumanie, où il dépasse 40 % de la population.

3.10

La réforme des règlements d'aménagement, la planification intelligente des infrastructures, les mesures d'incitation en faveur des investissements et les technologies innovantes peuvent contribuer à combler la fracture du haut débit. Les citoyens doivent néanmoins aussi agir de manière responsable et favoriser le déploiement de la connectivité internet à grande vitesse.

3.11

La confiance et l'engagement sont indispensables pour atteindre les objectifs de la stratégie numérique. Sans la confiance, il n'y aurait qu'une faible demande pour des services innovants dotés d'un potentiel de croissance élevé, comme le commerce en ligne et l'informatique en nuage. Pour étayer cette confiance, il importe que les dispositions législatives parviennent à suivre l'évolution du marché unique du numérique du point de vue technologique et des transactions. Ce n'est malheureusement pas le cas et il est urgent d'accomplir de nouvelles avancées concernant des initiatives essentielles comme les recours collectifs, sujet sur lequel le Comité a appelé à élaborer une directive en 2009 (19).

3.12

Pour que la stratégie numérique soit un succès, il est essentiel que tous les segments de la société soient intégralement associés à son développement et à sa mise en œuvre et qu'ils soient bien représentés dans les consultations. Malheureusement, les consommateurs et les citoyens en général sont souvent sous-représentés dans les débats sur des questions critiques; la Commission doit dès lors s'efforcer davantage de garantir une représentation équitable des membres de la société civile dans l'ensemble des enceintes de discussion.

4.   Observations particulières

4.1

Dans la mesure où il est essentiel de déployer l'internet à grande vitesse dans l'ensemble de l'UE, le Comité appelle la Commission à proposer une série d'instruments de financement à même de soutenir le rythme accéléré des investissements dans les infrastructures de haut débit dont l'Europe a besoin, en particulier lorsque les rendements du marché normal sont insuffisants.

4.2

Le Comité se félicite de l'importance qu'accorde la Commission à la réduction des coûts de fourniture des infrastructures de haut-débit; il attire son attention sur l'effet multiplicateur de telles réductions sur l'économie et la qualité de vie, et appelle l'ensemble des parties prenantes à travailler assidûment sur cette question.

4.3

Le Comité appelle la Commission et les États membres à contribuer à atteindre rapidement l'objectif de couverture en haut débit en mettant intégralement en œuvre le programme en matière de politique du spectre radioélectrique (20).

4.4

Assurer la connectivité internet à grande vitesse exige de garantir que les nouveaux opérateurs disposent d'un accès équitable et compétitif aux infrastructures, car sans cela les consommateurs seraient confrontés à un choix de services limité ou faussé.

4.5

Le Comité estime qu'il importe de mettre au point des modèles de coûts pour le haut débit à grande vitesse, à l'intention des autorités réglementaires nationales, qui soient cohérents dans l'ensemble de l'UE, afin de garantir que les coûts soient universellement équitables et calculés sur la base des mêmes normes.

4.6

Les nouveaux emplois créés dans l'économie numérique exigent des travailleurs qu'ils disposent d'une culture numérique et, souvent, de compétences particulières en matière de TIC. Malheureusement, l'Europe ne parvient pas à former autant de travailleurs que ne l'exige la croissance de l'industrie des TIC. Alors que l'Europe enregistre des niveaux historiques de chômage, il y aura, suivant les estimations du secteur des TIC, 700 000 emplois à pourvoir dans le secteur d'ici à 2015. Il faut d'urgence remédier à cette pénurie de compétences en prenant toutes les mesures extraordinaires qui s'imposent.

4.6.1

Dans le cadre de sa «stratégie pour des compétences nouvelles et des emplois», la Commission s'est engagée à mettre en œuvre une approche et des instruments à l'échelle de l'UE pour soutenir les États membres dans le processus d'intégration des compétences informatiques et de la culture numérique dans les principales politiques d'apprentissage tout au long de la vie. L'Europe a besoin de cet élément de la stratégie Europe 2020 pour obtenir des résultats rapidement.

4.6.2

Le niveau élevé de chômage des jeunes est en partie dû à l'inadéquation entre les politiques d'éducation et les besoins des employeurs. Il est urgent que les États membres remédient à ce problème en introduisant de nouveaux programmes de compétences informatiques au niveau du cycle d'enseignement supérieur. Il est également essentiel que la politique d'éducation aux TIC promeuve l'égalité hommes/femmes.

4.6.3

Pour les personnes exerçant une activité professionnelle, les compétences numériques sont de plus en plus nécessaires pour maintenir la productivité et la flexibilité de l'emploi. Le risque d'être sous-employé, voir de devenir chômeur, s'accroît pour les travailleurs dépourvus des compétences numériques requises. Il est dès lors essentiel, pour soutenir la productivité et la compétitivité européennes, que les entreprises et les travailleurs coopèrent pour mettre en œuvre des programmes de formation sur le lieu de travail qui permettent aux personnes d'enrichir leur culture numérique et leurs compétences dans le domaine des TIC.

4.6.4

Par ailleurs, dans le cadre de la lutte contre le grave problème du chômage en Europe, il convient tout particulièrement de développer des programmes d'éducation spécialisés en matière de compétences informatiques et de culture numérique pour aider les chômeurs à retrouver un travail rémunéré.

4.6.5

Le haut débit et les ressources informatiques à l'école, dans les bibliothèques publiques et d'autres lieux publics pourraient devenir un élément de la politique afin de soutenir les compétences informatiques et l'acquisition de la culture numérique dans l'ensemble de l'Union.

4.7

Dans ses avis antérieurs, le Comité a appelé à instaurer une charte des droits en ligne des citoyens (21). Bien qu'il se félicite de la publication par la Commission européenne du «Code des droits en ligne dans l'UE» (22), le Comité estime que l'Union européenne devrait promulguer une charte des droits numériques afin de garantir une protection claire à tous les usagers, ce qu'il a récemment recommandé dans son avis sur «Un marché intérieur numérique inclusif» (23).

4.8

Dans toute l'Europe, les consommateurs se plaignent que leurs fournisseurs de services internet ne leur offrent pas les vitesses de connexion spécifiées dans les contrats. Ce problème de non-conformité contractuelle et de publicité mensongère entame la confiance que les consommateurs peuvent avoir dans le marché numérique. Il convient de remédier au problème par une législation et des mesures d'application plus contraignantes.

4.9

Le CESE rappelle à quel point il est essentiel d'achever le marché unique du numérique et de réaliser des avancées en ce qui concerne le plan d'action sur le commerce électronique, le livre vert sur les paiements par internet, carte et téléphone mobile, et l'agenda du consommateur européen.

4.10

Dans un avis précédent (24), le Comité avait fermement défendu la proposition de règlement européen sur la protection des données. Le CESE espère que la vaste réforme des règles de l'UE dans le domaine de la protection des données sera formellement adoptée dans les plus brefs délais. Il importe que les discussions relatives au règlement général sur la protection des données tiennent compte de son incidence éventuelle dans d'autres domaines politiques. Des obligations trop restrictives pourraient limiter les possibilités d'utiliser des données personnelles au profit de la société et d'atteindre les objectifs de la stratégie numérique (par exemple le contrôle des données de patients pour prédire le développement d'une maladie spécifique, ou la gestion de l'énergie par les réseaux intelligents).

4.11

Le Comité appelle de nouveau la Commission à faire progresser les propositions relatives à l'introduction d'un label de confiance européen pour les entreprises. Comme l'affirmaient déjà certains avis antérieurs du CESE (25), un système européen de certification et de labellisation des commerçants en ligne pourrait permettre aux consommateurs de bénéficier d'une protection universelle lorsqu'ils achètent des biens et services en ligne, indépendamment des frontières nationales; cela contribuerait dans une large mesure à accroître la confiance des consommateurs dans le commerce électronique transfrontalier et aiderait les PME à développer leurs échanges transfrontaliers en ligne.

4.12

Outre la mise en œuvre de l'interopérabilité paneuropéenne pour les dispositifs d'identification électronique nationaux, le Comité souhaiterait que la Commission envisage d'instaurer un système volontaire d'identification électronique accessible à l'ensemble des citoyens de l'UE, afin de fournir une identification électronique authentifiée au niveau européen pour les transactions commerciales en ligne.

4.13

Afin de stimuler l'économie numérique, les États membres et les autorités régionales devraient promouvoir des points d'accès Wifi gratuits dans les lieux publics.

4.14

Si le Comité salue l'intention de la Commission d'adopter une recommandation sur la préservation d'un internet ouvert pour les consommateurs, il demande avec insistance que le principe de neutralité de l'internet soit aussi formellement inscrit dans le droit de l'UE, et ce dès que possible. Le Comité attire l'attention de la Commission sur son avis intitulé «L'Internet ouvert et la neutralité d'Internet en Europe» (26), qui explique que la neutralité de l'internet vise à garantir que les entreprises fournissant des services internet traitent toutes les sources de données internet similaires de manière équitable, sans exercer de discrimination à des fins de profit.

4.15

L'utilisation de l'informatique en nuage rend d'autant plus nécessaire de protéger les citoyens, leurs données et leur vie privée, en particulier lorsque les données des entreprises et des consommateurs européens sont stockées à l'extérieur de l'UE ou par des sociétés non européennes. Le Comité renvoie la Commission à l'avis qu'il a récemment publié sur la stratégie informatique européenne en nuage (27), dans lequel il l'encourage à renforcer le cadre réglementaire portant sur:

la protection des données et de la vie privée;

les accès gouvernementaux aux données;

le contrôle des données et la gestion des conflits entre utilisateurs et fournisseurs;

la portabilité et l'interopérabilité.

Le CESE invite en outre la Commission à être vigilante et à prendre en compte la nécessité de vérifier que tout cadre d'informatique en nuage adopté au niveau de l'UE résiste à l'épreuve du temps, car cette technologie connaîtra une évolution extrêmement dynamique et imprévisible pendant encore un certain temps.

4.16

Le Comité note la publication de la stratégie de cybersécurité de l'Union européenne et attend avec intérêt d'examiner le train de mesures qui l'accompagne, notamment la proposition de directive sur la sécurité des réseaux et de l'information.

4.17

Il convient d'adopter des mesures spécifiques afin de protéger les intérêts des enfants et des personnes vulnérables en ligne, notamment en matière de protection des données, de fraude en ligne, contre les méthodes de commercialisation sans scrupule et les publicités qui exploitent la vulnérabilité des utilisateurs. Le CESE attire l'attention de la Commission sur les nombreux avis qu'il a consacrés à cette question (28), en particulier sur la «Stratégie européenne pour un Internet mieux adapté aux enfants» (29) et sur le «Cadre pour la publicité destinée aux jeunes et aux enfants» (30).

4.18

Comme le précise l'avis du Comité intitulé «Une stratégie numérique pour l'Europe» (31), les normes ouvertes rendent la concurrence plus aisée et permettent aux PME de grandir et de se poser en concurrentes à l'échelle mondiale. Dès lors, l'appui et le soutien aux normes ouvertes pour tous les produits et services liés aux TIC en Europe devraient figurer explicitement dans la stratégie numérique.

4.19

Ce sont les entreprises américaines et asiatiques qui dominent le secteur des TIC. Il est manifeste que l'Europe n'est pas parvenue à développer l'innovation en matière de TIC pour créer des entreprises géantes capables de dominer le marché, à l'image de Google, Microsoft, Apple et Samsung. Le Comité salue le projet de nouvelle stratégie industrielle dans les secteurs de la microélectronique et de la nanoélectronique, qui vise à rendre l'Europe plus attrayante pour les investissements dans la conception et la production et à accroître sa part de marché au niveau mondial. La politique de l'UE doit toutefois changer de paradigme pour garantir que les entreprises européennes disposent de l'écosystème favorable dont elles ont besoin pour se placer à la pointe des technologies et des services de TIC sur le marché mondial.

4.20

La Commission doit par ailleurs garantir que des pratiques de gestion des investissements adéquates soient appliquées dans le cadre de cette politique industrielle: les investissements doivent être accordés sur la base de bénéfices économiques et/ou sociaux espérés, et l'ensemble des investissements doivent faire l'objet d'une gestion rigoureuse afin de garantir la réalisation concrète des bénéfices attendus.

4.21

La gouvernance des investissements proposés en matière de R&D&I doit garantir une bonne coordination entre les programmes et les projets afin de maximiser les retombées positives et d'éviter les gaspillages dus à des doubles emplois.

4.22

Le CESE estime que les investissements massifs réalisés dans les technologies et les services de GNSS européens devraient contribuer au succès de la stratégie numérique. Le Comité appelle dès lors de nouveau la Commission à développer les vastes synergies que générerait l'intégration adéquate des programmes de GNSS dans la formulation et la mise en œuvre de la stratégie numérique. Le CESE a déjà attiré l'attention sur cette question dans son avis initial sur la stratégie numérique (32).

Bruxelles, le 22 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  http://epp.eurostat.ec.europa.eu/statistics_explained/index.php/Unemployment_statistics

(2)  http://www.euractiv.com/socialeurope/commission-calls-eu-unemployment-news-518852

(3)  http://www.consilium.europa.eu/uedocs/cms_data/docs/pressdata/en/ec/135344.pdf

(4)  JO C 229, du 31.7.2012, p. 1-6.

(5)  CES273-2012_00_00_TRA_AC_FR.DOC.

(6)  JO C 318, du 29.10.2011, p. 9-18.

(7)  JO C 54, du 19.2.2011, p. 58-64.

(8)  JO C 24, du 28.1.2012, p. 139-145.

(9)  JO C 143, du 22.5.2012, p. 69-73 et JO C 299, du 4.10.2012, p. 165-169.

(10)  JO C 143, du 22.5.2012, p. 116-119.

(11)  JO C 76, du 14.3.2013, p. 15-19 et JO C 24, du 28.1.2012, p. 40-47.

(12)  JOIN(2013) 1 final.

(13)  JO C 317, du 23.12.2009, p. 43-48, JO C 48, du 15.2.2011, p. 138-144 et JO C 24, du 28.1.2012, p. 154-158.

(14)  http://epp.eurostat.ec.europa.eu/statistics_explained/index.php/Unemployment_statistics

(15)  SWD(2013)0073 (partie 1).

(16)  COM(2008) 572 final.

(17)  https://ec.europa.eu/digital-agenda/en/scoreboard

(18)  http://epp.eurostat.ec.europa.eu/portal/page/portal/information_society/data/main_tables

(19)  JO C 128, du 18.5.2010, p. 97-102.

(20)  JO C 107, du 6.4.2011, p. 53-57.

(21)  JO C 229, du 31.7.2012, p. 1-6.

(22)  https://ec.europa.eu/digital-agenda/fr/code-eu-online-rights

(23)  CES273-2012_00_00_TRA_AC_FR.DOC.

(24)  JO C 229, du 31.7.2012, p. 90-97.

(25)  JO C 54, du 19.2.2011, p. 58-64.

(26)  JO C 24, du 28.1.2012, p. 139-145.

(27)  JO C 76, du 14.3.2013, p. 59-65.

(28)  JO C 54, du 19.2.2011, p. 58-64, JO C 128, du 18.5.2010, p. 69-73 et JO C 224, du 30.8.2008, p. 61-66.

(29)  JO C 351, du 15.11.2012, p. 68-72.

(30)  JO C 351, du 15.11.2012, p. 6-11.

(31)  JO C 54, du 19.2.2011, p. 58-64.

(32)  JO C 54, du 19.2.2011, p. 58-64.


19.9.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 271/133


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant des mesures destinées à assurer un niveau élevé commun de sécurité des réseaux et de l'information dans l'Union»

COM(2013) 48 final – 2013/0027 (COD)

2013/C 271/25

Rapporteur: M. McDONOGH

Le 21 février 2013 et le 15 avril 2013 respectivement, le Conseil et le Parlement européen ont décidé, conformément à l'article 114 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant des mesures destinées à assurer un niveau élevé commun de sécurité des réseaux et de l'information dans l'Union»

COM(2013) 48 final – 2013/0027 (COD)

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 30 avril 2013.

Lors de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 22 mai 2013), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 163 voix pour, 1 voix contre et 5 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le Comité prend acte de la directive proposée, qui doit être envisagée dans le contexte plus large de la stratégie de cybersécurité (1) publiée récemment, qui définit une vision d'ensemble en matière de sécurité des réseaux et de l'information (SRI), visant à garantir un développement sûr de l'économie numérique tout en continuant à promouvoir les valeurs européennes de liberté et de démocratie.

1.2

Le CESE accueille favorablement cette proposition de directive dont le but est d'atteindre un niveau commun élevé de SRI dans toute l'UE. L'harmonisation et la gestion de la SRI au niveau européen sont essentielles à l'achèvement du marché unique du numérique et au bon fonctionnement du marché intérieur dans son ensemble. Le Comité partage la préoccupation de la Commission quant aux énormes dégâts que pourrait entraîner une défaillance de la SRI pour l'économie et le bien-être des citoyens. Toutefois, la directive proposée ne répond pas aux attentes du Comité, qui aurait souhaité des mesures législatives énergiques dans ce domaine crucial.

1.3

Le Comité est très déçu du manque de progrès de nombreux États membres dans la mise en œuvre d'une SRI effective au niveau national. Le CESE déplore les risques accrus que cet échec fait peser sur les citoyens ainsi que son incidence négative sur l'achèvement du marché unique numérique. Tous les États membres devraient veiller à s'acquitter sans délai de leurs obligations.

1.4

Cette absence de progrès crée un nouveau fossé numérique entre l'élite disposant d'une SRI hautement développée et les États membres les moins avancés. Ce fossé a une incidence néfaste sur la confiance et la collaboration en matière de SRI au niveau de l'UE et en l'absence d'une solution rapide, il est susceptible de provoquer des défaillances du marché intérieur liées aux différences de capacités entre les États membres.

1.5

Comme il l'avait déjà indiqué dans de précédents avis (2), le CESE estime que les mesures vagues et volontaires ne fonctionnent pas, et que des obligations réglementaires absolues doivent être imposées aux États membres pour garantir l'harmonisation, la gouvernance et l'application d'une SRI européenne. Malheureusement, le CESE ne pense pas que cette proposition de directive fournisse la législation claire et décisive nécessaire. Afin de garantir le niveau commun élevé de SRI requis, la Comité est d'avis qu'un règlement assorti d'obligations contraignantes bien définies pour les États membres serait plus efficace qu'une directive.

1.6

Malgré l'intention de la Commission européenne d'adopter des actes d'exécution pour garantir une certaine uniformité des conditions de mise en œuvre des éléments de la directive, le Comité constate un manque de normes, de définitions claires et d'obligations catégoriques dans l'acte proposé, ce qui laisse aux États membres une trop grande flexibilité au niveau de l'interprétation et de la transposition d'éléments critiques. Le Comité aimerait voir dans l'acte des définitions beaucoup plus explicites des normes, exigences et procédures à respecter par les États membres, les pouvoirs publics, les opérateurs du marché et les principaux facilitateurs de services internet.

1.7

Afin de garantir une politique de SRI efficace et sa mise en œuvre effective dans l'UE, le Comité souhaiterait que soit créée une autorité européenne en la matière, analogue à l'autorité centrale de l'industrie de l'aviation (EASA) (3). Cet organe fixerait les normes et assurerait le suivi de la mise en œuvre de tous les éléments de la SRI dans l'Union, depuis la certification d'équipements terminaux sûrs et leur utilisation à la sécurité des réseaux et des données.

1.8

Le CESE a pleinement conscience des risques accrus qu'entraîne, en matière de cybersécurité et de protection des données, l'adoption en Europe de l'informatique en nuage (4). Le Comité souhaiterait que l'acte proposé prévoie explicitement des exigences et obligations de sécurité spécifiques supplémentaires concernant la fourniture et l'utilisation de services en nuage.

1.9

Afin de garantir une responsabilisation appropriée en matière de SRI, l'acte devrait préciser que les entités ayant des obligations en vertu de la directive proposée ont le droit de tenir les fournisseurs de logiciels et de matériel responsables de tout défaut dans leurs produits ou services en rapport direct avec des incidents liés à la SRI.

1.10

Le CESE invite les États membres à veiller tout particulièrement à accroître les connaissances des petites et moyennes entreprises (PME) en matière de SRI ainsi que leurs compétences dans le domaine de la cybersécurité. Le Comité attire également l'attention de la Commission sur l'importance des «concours de hackers» aux États-Unis (5) et dans certains États membres (6) pour la sensibilisation à la cybersécurité et la constitution d'une pépinière de futurs professionnels de la SRI.

1.11

Compte tenu de l'importance du fait que tous les États membres doivent se conformer aux règles de SRI applicables dans toute l'UE, le CESE demande à la Commission d'examiner dans quelle mesure le cadre financier pluriannuel (CFP) pourrait contribuer au financement ciblé de cette mise en conformité afin de soutenir les pays ayant besoin d'une aide financière.

1.12

Le programme-cadre de l'UE pour la recherche et l'innovation, Horizon 2020, devrait accorder la priorité au financement de la recherche, du développement et de l'innovation dans le domaine des technologies de SRI afin que l'Europe puisse suivre l'évolution rapide des changements sur le front des cybermenaces.

1.13

Afin de préciser quelles sont les entités ayant des responsabilités légales en vertu de l'acte proposé, le CESE souhaiterait que chaque État membre soit tenu de publier un répertoire en ligne de l'ensemble des entités concernées par les exigences prévues par la directive en matière de gestion des risques et de notification d'incidents. Cette transparence et l'obligation de rendre compte créeraient un climat de confiance et favoriseraient le respect des prescriptions.

1.14

Le Comité attire l'attention de la Commission sur ses nombreux avis précédents traitant de la sécurité des réseaux et de l'information dans lesquels il soulignait la nécessité d'une société de l'information sûre et de la protection des infrastructures critiques (7).

2.   Contenu essentiel de la proposition de la Commission

2.1

La proposition de directive sur la SRI a été publiée parallèlement à la stratégie européenne de cybersécurité, qui vise à renforcer la résilience des systèmes d'information, à réduire la cybercriminalité, à améliorer la politique de cybersécurité et de cyberdéfense internationale, et à développer les ressources industrielles et technologiques nécessaires à la sécurité du cyberespace, tout en promouvant les droits fondamentaux et autres valeurs essentielles de l'UE.

2.2

La RSI est liée à la protection d'internet et d'autres réseaux, des systèmes d'information et de ceux qui les sous-tendent, qui soutiennent le fonctionnement de notre société. La RSI est indispensable au bon fonctionnement du marché intérieur.

2.3

L'approche strictement volontaire en matière de SRI que l'UE a suivie jusqu'à présent ne fournit pas de protection suffisante contre les risques en matière de SRI. Les moyens de SRI existants ne sont pas suffisants pour suivre l'évolution rapide des changements sur le front des menaces et pour garantir un niveau commun élevé de protection dans tous les États membres.

2.4

Actuellement, les moyens disponibles et les niveaux de préparation sont très différents selon les États membres, ce qui se traduit par une fragmentation des approches dans l'UE. Étant donné que les réseaux et systèmes informatiques sont interconnectés, les États membres dont le niveau de protection est insuffisant affaiblissent l'ensemble de la SRI de l'UE. Cette situation nuit à la création d'un climat de confiance entre pairs, lequel est une condition préalable à la coopération et au partage d'informations. De ce fait, seule une minorité d'États membres disposant de moyens significatifs a établi une coopération.

2.5

La directive, proposée conformément à l'article 114 du TFUE, a pour objectif de faciliter l'achèvement et le bon fonctionnement du marché unique numérique:

en instaurant un niveau commun minimum de SRI dans les États membres et en relevant ainsi le niveau global de préparation et d'intervention en cas d'incident;

en améliorant la coopération en matière de SRI au niveau de l'UE en vue de faire face aux menaces et incidents transfrontaliers;

en créant une culture de gestion des risques et en améliorant le partage d'informations entre le secteur privé et le secteur public.

2.6

La proposition de directive définit des exigences juridiques, notamment:

(a)

L'obligation pour chaque État membre d'adopter une stratégie de SRI et de désigner une autorité nationale compétente dans ce domaine disposant de ressources financières et humaines adaptées pour prévenir, faire face et répondre aux risques et aux incidents.

(b)

La création d'un mécanisme de coopération entre les États membres et la Commission afin de mettre en commun le système d'alerte rapide sur les incidents et les risques dans le cadre d'une infrastructure sécurisée; l'obligation de coopérer et d'organiser régulièrement des évaluations par les pairs.

(c)

L'obligation, pour certaines entités spécifiques dans toute l'UE, d'adopter des pratiques de gestion des risques et de notifier à l'autorité nationale compétente tout incident majeur de sécurité affectant leurs services essentiels. Il s'agit notamment des opérateurs des infrastructures d'information critiques dans certains secteurs (services financiers, transport, énergie, santé), des facilitateurs de services de la société de l'information (entre autres les services informatiques en nuage, les plateformes de commerce électronique et de paiement par internet, les moteurs de recherche, les magasins d'applications en ligne et les réseaux sociaux) ainsi que les administrations publiques.

2.7

Les États membres devront mettre en œuvre la directive dans un délai de 18 mois à partir de son adoption par le Conseil et le Parlement européen (prévue en 2014).

3.   Observations générales

3.1

Le développement d'internet et de la société numérique influence profondément notre vie quotidienne. Cependant, plus nous dépendrons d'internet, plus notre liberté, notre prospérité et notre qualité de vie dépendront d'une sécurité solide des réseaux et de l'information (SRI): si internet est en panne et que les dossiers médicaux sont inaccessibles en cas d'urgence, des personnes mourront. Pourtant, la sécurité de l'infrastructure informatique européenne critique est de plus en plus menacée et notre niveau de SRI n'est pas suffisant.

3.2

L'année dernière, le directeur d'Europol s'est déclaré très préoccupé par cette énorme confiance mal placée dans l'infaillibilité d'internet (8). Il n'est pas rare que nous apprenions que des infrastructures essentielles ont été la cible de cyberattaques de criminels, de terroristes ou de gouvernements étrangers. En général, les cibles de ces attaques n'en parlent pas car elles craignent pour leur réputation; toutefois, ces dernières semaines, nous avons été témoins d'attaques d'infrastructures internet (9) et de systèmes bancaires (10) européens qui ont entraîné trop de perturbations pour pouvoir être dissimulées. Un rapport (11) a estimé que les Pays-Bas ont subi 92 millions de cyberattaques en 2011 et l'Allemagne 82 millions. Le gouvernement britannique estime que le Royaume-Uni a subi 44 millions de cyberattaques en 2001, qui ont coûté près de 30 milliards d'euros à l'économie (12).

3.3

En 2007, le Conseil de l'UE s'est penché sur le problème de la SRI en Europe (13). Cependant, l'approche politique suivie depuis lors (14) a principalement reposé sur des mesures volontaires des États membres et seule une minorité d'entre eux en a effectivement pris. Le Comité constate que plusieurs États membres n'ont ni publié de stratégie nationale de cybersécurité ni développé de plan national d'urgence à appliquer en cas d'incident informatique, et que certains n'ont pas créé d'équipe d'intervention en cas d'urgence informatique (Computer Emergency Response Team - CERT). En outre, certains États membres n'ont pas encore ratifié la convention du Conseil de l'Europe sur la cybercriminalité (15).

3.4

Dix États membres très avancés en matière de SRI ont constitué le groupe des CERT gouvernementaux européens (EGC) en vue de collaborer étroitement dans le domaine de la SRI et de l'intervention en cas d'incident. Il n'est désormais plus possible de rejoindre l'EGC: les 17 autres États membres et le CERT-UE (16) créé récemment sont actuellement exclus de ce groupe d'élite. Un nouveau fossé numérique se creuse entre les États membres très avancés en matière de SRI et les autres. À moins que ce fossé ne soit comblé, la fracture numérique s'attaquera au cœur du marché unique numérique, et limitera le développement de la confiance, de l'harmonisation et de l'interopérabilité. En outre, en l'absence de mesures énergiques, le fossé entre les pays très avancés et les autres est susceptible de s'élargir, tout comme les failles du marché intérieur associées aux différences de moyens entre les États membres.

3.5

La réussite de la stratégie de cybersécurité et l'efficacité de la directive proposée en matière de SRI dépendront de la puissance de l'industrie de la SRI en Europe et de la disponibilité d'une main-d'œuvre suffisante possédant des compétences spécialisées en la matière. Le CESE est heureux de constater que la directive proposée tient compte de la nécessité pour les États membres d'investir dans l'éducation, la sensibilisation et la formation à la SRI. Le Comité souhaiterait également que chaque État membre fournisse des efforts particuliers pour informer, éduquer et soutenir le secteur des PME en matière de cybersécurité. Les grandes entreprises peuvent facilement obtenir l'expertise dont elles ont besoin, alors que les PME ont besoin d'être aidées.

3.6

Le CESE tient beaucoup à coopérer avec l'Agence européenne chargée de la sécurité des réseaux et de l'information (ENISA) afin de promouvoir la SRI au cours du «mois de la cybersécurité» dans le courant de cette année. La stratégie de cybersécurité et la directive sur la SRI ont notamment pour objectif de développer une conscience de la sécurité dans toute l'Union et d'améliorer le niveau de compétences en matière de SRI; à cet égard, le Comité attire l'attention de la Commission sur les «concours de hackers» pour adolescents, qui ont permis de mieux sensibiliser le public dans certains États membres et aux États-Unis.

3.7

Le Comité se réjouit également de constater l'engagement de la stratégie de cybersécurité en faveur du financement de la recherche, du développement et de l'innovation dans le domaine de la SRI.

3.8

Le développement de l'informatique en nuage s'accompagne de plusieurs nouveaux risques pour la cybersécurité, auxquels il convient de s'attaquer. Ainsi, les cybercriminels disposent aujourd'hui d'une énorme puissance informatique à faible coût, et les données de milliers de sociétés sont désormais centralisées sur des serveurs vulnérables aux attaques ciblées. Le CESE a déjà réclamé une plus grande cyber-résilience pour l'informatique en nuage (17).

3.9

Le Comité a demandé précédemment l'introduction d'un système européen volontaire d'identification électronique pour les transactions en ligne, qui complèterait les systèmes nationaux existants. Un tel système renforcerait la protection contre la fraude et le climat de confiance entre les opérateurs économiques, réduirait les coûts de fourniture des services et améliorerait la qualité des services et de la protection pour les citoyens.

4.   Observations particulières

4.1

Il est regrettable que la proposition de directive sur la SRI présentée par la Commission soit si vague, manque de clarté et dépende trop largement de l'autoréglementation par les États membres. Le manque de normes, de définitions claires et d'obligations catégoriques, en particulier au chapitre IV de la directive, laisse aux États membres une trop grande flexibilité au niveau de l'interprétation et de la transposition d'éléments critiques de l'acte. Un règlement assorti d'obligations légales contraignantes et bien définies pour les États membres serait plus efficace qu'une directive.

4.2

Le Comité observe que l'article 6 de la directive exige que chaque État membre désigne une «autorité compétente» en vue de contrôler et de garantir l'application cohérente de la directive dans l'ensemble de l'Union. Le Comité observe d'autre part que l'article 8 prévoit la création d'un «réseau de coopération» qui, par les pouvoirs octroyés à ce dernier et à la Commission, assurera une fonction de direction, de gestion et, le cas échéant, d'exécution dans toute l'Europe jusqu'au niveau des États membres. Le CESE estime que sur la base de cadre de gouvernance, l'UE devrait envisager la création d'une autorité au niveau européen pour la SRI, similaire à l'Agence européenne de la sécurité aérienne (EASA), qui fixe des normes et gère l'application et le respect des mesures de sécurité pour les avions, les aéroports et les activités des compagnies aériennes.

4.3

L'autorité européenne de SRI proposée au paragraphe 4.2 ci-dessus pourrait être créée sur la base des travaux en matière de cybersécurité déjà réalisés, entre autres, par l'ENISA, le Comité européen de normalisation (CEN), les CERT et le groupe des CERT gouvernementaux européens (EGC). Une telle autorité fixerait les normes et assurerait le suivi de la mise en œuvre de tous les éléments de la SRI, de la certification d'équipements terminaux sûrs et de leur utilisation à la sécurité des réseaux et des données.

4.4

Étant donné le niveau élevé d'interdépendance entre les États membres pour garantir la SRI dans toute l'Union et le coût d'une défaillance de la SRI potentiellement très élevé pour toutes les parties, le CESE souhaiterait que la législation prévoie des sanctions explicites et proportionnées en cas de défaut de conformité; celles-ci devraient être harmonisées de manière à refléter la dimension paneuropéenne de la responsabilité et l'ampleur des dégâts éventuels, non seulement sur le marché national, mais aussi dans le reste de l'Union. L'article 17 de l'acte, qui traite des sanctions, est général, laisse trop de latitude aux États membres et ne donne pas suffisamment de lignes directrices pour pouvoir prendre en compte les effets transfrontaliers et paneuropéens.

4.5

Actuellement, les gouvernements et les fournisseurs de services vitaux ne divulguent pas les défaillances de sécurité et de résilience dont ils sont victimes, à moins que les événements ne les y contraignent. Cette absence d'information nuit à la capacité de l'Europe de réagir rapidement et efficacement aux menaces informatiques, et d'améliorer la sécurité générale des réseaux et de l'information par un apprentissage commun. Le Comité salue la décision de la Commission d'établir la notification obligatoire, au titre de la directive, de tous les incidents majeurs en matière de SRI. Le CESE ne croit pas que la notification volontaire de ces incidents pourrait fonctionner car les opérateurs pourraient être incités à passer sous silence des incidents en raison de craintes liées à leur bonne réputation et à une prise de responsabilités.

4.6

Cependant, l'article 14 de la directive, qui traite de la notification, ne définit pas ce qu'est un incident ayant un «impact significatif» sur la sécurité et laisse trop de latitude aux entités concernées et aux États membres en ce qui concerne la notification d'un incident. Pour être efficace, une législation doit poser des exigences claires. La directive proposée étant trop vague dans la définition d'exigences essentielles, il n'est pas possible de tenir les parties pour responsables des défauts de conformité faisant l'objet de l'article 17 de la directive.

4.7

Puisque les fournisseurs en matière de SRI sont issus dans une large mesure du secteur privé, il est essentiel d'encourager un haut degré de confiance et de coopération avec et entre les entreprises responsables de ces infrastructures et services d'information essentiels. Il convient de féliciter la Commission de l'initiative intitulée «Partenariat public-privé européen pour la résilience» (EP3R) qu'elle a lancée en 2009 et d'encourager cette dernière. Cependant, le Comité estime qu'il convient de renforcer et de soutenir cette initiative par une obligation réglementaire, dans l'acte relatif à la SRI, en vertu de laquelle les parties prenantes qui ne remplissent pas correctement leurs obligations seraient tenues de coopérer.

4.8

Chaque État membre devrait publier un répertoire en ligne de l'ensemble des entités concernées, dans sa juridiction, par les exigences prévues par l'article 14 de la directive proposée en matière de gestion des risques et de notification d'incidents. Cette transparence, ainsi que la clarification de la manière dont chaque État membre décide d'appliquer les définitions de l'article 3, contribueraient à instaurer la confiance et à encourager une culture de la gestion des risques parmi les citoyens.

4.9

Le CESE relève que les développeurs de logiciels et les fabricants de matériel sont explicitement exclus des exigences de la directive car ils ne sont pas fournisseurs de services de la société de l'information. Toutefois, le Comité estime que l'acte proposé devrait préciser que les entités ayant des obligations en vertu de la directive peuvent se retourner contre les fournisseurs de logiciels et de matériel pour tout défaut de leurs produits ou services en rapport direct avec des incidents liés à la SRI.

4.10

Bien que la Commission estime que le coût de la mise en œuvre de la directive proposée s'élèvera à environ 2 milliards d'euros par an, à répartir entre les secteurs public et privé en Europe, le Comité fait observer que certains États membres connaissant des difficultés financières devront se battre pour trouver les investissements requis pour assurer la conformité. Il convient d'examiner dans quelle mesure le CFP pourrait être utilisé pour financer la conformité en matière de SRI, grâce à divers instruments, y compris le Fonds européen de développement régional (FEDER) et éventuellement le Fonds pour la sécurité intérieure.

Bruxelles, le 22 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  «Un cyberespace ouvert, sûr et sécurisé», JOIN(2013) 1.

(2)  Avis du CESE sur «Protection des structures d'information critiques», JO C 255 du 22.9.2010, p. 98 et «Directive relative aux attaques visant les systèmes d'information», JO C 218 du 23.7.2011, p. 130.

(3)  Agence européenne de la sécurité aérienne: http://easa.europa.eu/

(4)  Avis du CESE sur «L'informatique en nuage en Europe», JO C 24 du 28.1.2012, p. 40 et «Exploiter le potentiel de l'informatique en nuage en Europe», JO C 76 du 14.3.2013, p. 59.

(5)  http://www.nytimes.com/2013/03/25/technology/united-states-wants-to-attract-hackers-to-public-sector.html?pagewanted=all&_r=0

(6)  http://www.bbc.co.uk/news/technology-17333601

(7)  Avis du CESE sur «Une stratégie pour une société de l'information sûre», JO C 97 du 28.4.2007, p. 21.

Avis du CESE sur «Protection des structures d'information critiques», JO C 255 du 22.9.2010, p. 98.

Avis du CESE sur «Règlement ENISA», JO C 107 du 6.4.2011, p. 58.

Avis du CESE sur «Règlement général sur la protection des données», JO C 229 du 31.7.2012, p. 90.

Avis du CESE sur «Attaques visant les systèmes d'information», JO C 218 du 23.7.2011, p. 130.

Avis du CESE sur «Transactions électroniques au sein du marché intérieur», JO C 351 du 15.11.2012, p. 73.

Avis du CESE sur «Exploiter le potentiel de l'informatique en nuage en Europe», JO C 76 du 14.3.2013, p. 59.

(8)  http://forumblog.org/2012/05/what-if-the-internet-collapsed/

(9)  http://www.nytimes.com/2013/03/27/technology/internet/online-dispute-becomes-internet-snarling-attack.html?pagewanted=all&_r=0

(10)  http://www.dutchnews.nl/news/archives/2013/04/online_retailers_demand_banks.php

(11)  http://www.securelist.com/en/analysis/204792216/Kaspersky_Security_Bulletin_Statistics_2011

(12)  UK Cyber Security Strategy – Landscape Review: http://www.nao.org.uk/wp-content/uploads/2013/03/Cyber-security-Full-report.pdf

(13)  Résolution du Conseil 2007/C 68/01.

(14)  COM(2006) 251 et COM(2009) 149.

(15)  http://conventions.coe.int/Treaty/Commun/ChercheSig.asp?NT=185&CM=&DF=&CL=FRE

(16)  Le CERT-UE est une équipe permanente d'intervention en cas d'urgence informatique pour les institutions, agences et organes de l'UE.

(17)  Avis du CESE sur «L'informatique en nuage en Europe», JO C 24 du 28.1.2012 p. 40 et sur «Exploiter le potentiel de l'informatique en nuage en Europe», JO C 76 du 14.3.2013, p. 59.


19.9.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 271/138


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux gaz à effet de serre fluorés»

COM(2012) 643 final – 2012/0305 (COD)

2013/C 271/26

Rapporteur: M. Mário SOARES

Le Conseil, le 21 novembre 2012, et le Parlement européen, le 19 novembre 2012, ont décidé, conformément à l'article 192, paragraphe 1, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux gaz à effet de serre fluorés»

COM(2012) 643 final - 2012/0305 (COD).

La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 26 avril 2013.

Lors de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 23 mai 2013), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 92 voix pour, 2 voix contre et 1 abstention.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le CESE soutient fermement la Commission dans ses efforts visant à renforcer la législation sur les gaz à effet de serre fluorés.

1.2

Le CESE souligne l'importance d'arriver rapidement à un accord mondial contrôlant les gaz fluorés à effet serre de manière à soumettre l'ensemble des économies de la planète à des règles identiques.

1.3

Dans le contexte de crise économique et sociale que nous connaissons aujourd'hui, la défense de l'emploi doit être une priorité. La transition vers une économie respectueuse du climat et de l'environnement doit s'appuyer sur un dialogue social fort de manière à gérer collectivement et démocratiquement les changements à venir. Le dialogue social, la négociation et la participation sont des valeurs et des outils fondamentaux, qui sous-tendent et permettent de concilier la promotion de la cohésion sociale et des emplois de qualité, la création d'emplois et le renforcement de l'innovation et de la compétitivité dans les économies européennes.

1.4

Le CESE appelle à réduire la charge financière et administrative liée à la mise en œuvre des différents éléments de ce règlement, en particulier pour les petites et moyennes entreprises.

1.5

Le CESE invite à davantage prendre en considération la consommation d'énergie sur l'ensemble du cycle de vie ainsi qu'à intégrer à l'analyse coût/bénéfice les éventuels inconvénients liés aux technologies alternatives proposées.

1.6

La Commission et les États membres doivent renforcer le soutien à la recherche et l'innovation industrielle, en particulier pour le développement de technologies alternatives aux gaz fluorés à effet de serre.

1.7

Des efforts importants devraient être entrepris, tant par les États membres que par les entreprises, afin de mettre en œuvre une transition socialement juste dans les politiques menées en vue de réduire l'utilisation et la production des gaz fluorés.

1.8

Le développement des programmes de formation adéquats pour préparer les travailleurs aux technologies alternatives aux gaz fluorés à effet de serre peut être nécessaire mais il faut prendre en considération la situation particulière des PME. La charge financière et administrative de la certification/formation devrait être limitée.

1.9

Il faudrait agir en amont de l'utilisation des gaz fluorés et, par conséquent, prévenir les fuites via un renforcement des exigences relatives à la conception des installations contenant de telles substances.

1.10

Les États membres devraient développer des systèmes de collecte sélective des appareils en fin de vie qui contiennent des substances fluorées, conformément aux principes de la directive 2002/96/CE relative aux déchets d'équipements électriques et électroniques.

1.11

Toutes les entreprises qui exécutent des activités liées à la production, à la distribution et au montage d'appareils contenant des gaz fluorés devraient être visées par ces programmes de formation du même que les programmes de formation devraient s'étendre aux technologies alternatives de manière à favoriser le processus de transition technologique.

1.12

Le CESE estime qu'il serait plus pertinent d'opérer une distinction entre les technologies afin d'organiser une «élimination progressive» plutôt qu'une «réduction progressive», à tout le moins lorsque c'est techniquement possible et économiquement réaliste.

1.13

Les restrictions qui s'imposent aux producteurs européens doivent aussi s'imposer aux produits importés dans l'Union européenne.

1.14

La Commission européenne sera principalement chargée de la mise en œuvre du système de quotas et devra en limiter le coût tout en veillant à en préserver l'intégrité environnementale.

1.15

La Commission devrait être habilitée aux procédures de contrôle, de vérification et de mise en conformité du présent règlement.

1.16

Le CESE est d'accord avec le choix de la protection de l'environnement comme la base juridique, mais il souligne la nécessité de veiller à ce que la mise en œuvre du règlement ne soit pas attentatoire à l'intégrité du marché intérieur.

2.   Introduction

2.1

En 2004 le CESE a émis un avis (1) sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à certains gaz à effet de serre fluorés (actuel règlement no 842/2006) où on soulignait que la concentration des gaz à effet de serre a augmenté en raison de l'activité humaine et que si cette tendance, et le réchauffement de la terre qui en découle, ne peut être réduite ou inversée, elle aboutira à un changement climatique permanent et potentiellement dangereux. Bien que soutenant l'objectif et l'approche générale de la Commission, l'avis de 2004 pointait certaines questions soulevées par le projet de règlement. Certaines de ces appréciations critiques semblent toujours valides et sont reprises dans le présent avis.

2.2

Les gaz fluorés sont de puissants gaz à effet de serre, générés par l'homme. Ils sont pour le moment repris dans deux accords internationaux selon qu'ils ont ou non des propriétés de destruction de la couche d'ozone stratosphérique. D'un côté, le protocole de Montréal (1987) – issu de la Convention de Vienne – organise des mesures de contrôle de la production et de l'utilisation de ces substances avec pour objectif ultime leur élimination. Ce protocole n'a cessé d'évoluer pour étendre son champ d'application à de nouveaux gaz et de nouvelles applications. De l'autre côté, le protocole de Kyoto inclut les émissions des gaz fluorés, qui n'ont pas d'impact sur la couche d'ozone, dans l'effort de réduction des émissions de gaz à effet de serre que ce traité met en œuvre. La coalition pour le climat et l'air pur, qui vise depuis 2012 à combattre les polluants à courte durée, a également placé les émissions de HFC au faîte de son agenda.

2.3

Au côté d'autres acteurs, l'UE est en première ligne pour lutter contre les gaz à effet de serre fluorés. En 2009, 2010, 2011 et 2012, plusieurs signataires du protocole de Montréal, y compris les États-Unis, ont présenté des propositions visant à limiter, à l'échelle mondiale, la production et la consommation d'hydrocarbures fluorés (HFC); 108 pays ont apporté leur soutien à ces initiatives.

2.4

Toutefois, peu de progrès ont été accomplis car la Chine, le Brésil, l'Inde, et les pays du Golfe persique entre autres, refusent de débattre de cette question dans le cadre du protocole de Montréal au motif que les gaz fluorés couverts par le protocole de Kyoto n'ont aucun impact sur la couche d'ozone stratosphérique.

2.5

L'Union européenne a adopté en 2009 des objectifs de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre pour 2020 et 2050. Pour 2020, les émissions de GES de l'UE devront être réduites de 20 % par rapport à leurs niveaux de 1990 et de 30 % pour autant qu'un accord global imposant des objectifs comparables aux grandes économies de la planète soit signé.

2.6

Afin que ces objectifs soient atteints, l'UE s'est dotée d'un ensemble d'instruments novateurs dont les plus significatifs sont: le système européen d'échange de quotas d'émissions (directive 2009/29/CE), la directive sur les énergies renouvelables (directive 2009/28/CE), la directive sur l'efficacité énergétique (directive 2012/27/UE) et la décision de partage de l'effort par les États membres (décision no 406/2009/CE). Pour 2050, l'UE a reconnu que les émissions des pays développés devront baisser de 80 à 95 % par rapport aux niveaux de 1990 pour respecter l'objectif de limiter le réchauffement de la planète à deux degrés Celsius.

2.7

La «Feuille de route vers une économie compétitive à faible intensité de carbone à l'horizon 2050» de la Commission européenne établit que les scénarios économiquement les plus efficaces supposent des objectifs de réduction des émissions, par rapport à 1990, de 25 % en 2020, de 40 % en 2030 et de 60 % d'ici à 2040.

2.8

Vu leur potentiel de réchauffement de la planète, les gaz fluorés à effet de serre font partie intégrante du cadre européen de lutte contre les changements climatiques. Deux actes législatifs principaux composent la législation européenne en matière de gaz fluorés:

le règlement 842/2006 établit principalement un système de prévention des fuites pendant l'utilisation et à la fin de la vie des équipements fixes et détermine un nombre limité d'interdictions qui concernent des applications spécifiques.

la directive 2006/40/CE qui porte sur les systèmes de climatisation mobiles.

2.9

L'ambition renforcée de l'UE de combattre le changement climatique et d'évoluer vers une économie «bas carbone» est la bienvenue mais elle doit être soutenue par un programme social crédible et les fonds nécessaires pour aider les secteurs et régions qui seraient touchés négativement au niveau de l'emploi suite à l'absence de progrès réalisés par les autres grands pays. Le contexte économique et énergétique mondial rend la question de la compétitivité extrêmement sensible, en particulier pour les secteurs exportateurs intensifs en énergie. Les efforts de décarbonisation de l'économie européenne doivent être davantage articulés à un projet de ré-industrialisation basé notamment sur l'efficacité dans l'utilisation des ressources, en ce compris l'énergie, et sur les technologies durables et novatrices.

3.   Synthèse et motivations de la proposition de la Commission

3.1   La proposition présentée par la Commission vise à:

3.1.1

remplacer le règlement (CE) no 842/2006 relatif à certains gaz à effet de serre fluorés afin de contribuer plus efficacement et à moindre coût aux objectifs de l'UE en matière de climat en décourageant l'utilisation des gaz fluorés à forte incidence sur le climat au profit de substituts énergétiquement efficaces et sans danger, et en continuant à améliorer le confinement et le traitement en fin de vie des produits et équipements contenant des gaz fluorés;

3.1.2

promouvoir une croissance durable, stimuler l'innovation et développer les technologies vertes en améliorant les débouchés commerciaux pour les nouvelles technologies et gaz de substitution à faible incidence sur le climat;

3.1.3

faire en sorte que l'Union européenne prenne en compte les derniers résultats scientifiques obtenus au niveau international, tels qu'ils sont consignés dans le quatrième rapport d'évaluation du GIEC, notamment en ce qui concerne les substances visées par le présent règlement et leur potentiel de réchauffement planétaire (PRP);

3.1.4

favoriser la formation d'un consensus sur un accord international au titre du protocole de Montréal en vue de réduire progressivement les hydrocarbures fluorés (HFC), qui constituent le principal groupe de gaz fluorés;

3.1.5

simplifier et expliciter les dispositions du règlement (CE) no 842/2006 afin de réduire la charge administrative conformément à l'engagement de mieux légiférer pris par la Commission.

4.   Observations générales

4.1

Le CESE soutient fermement la Commission dans ses efforts visant à renforcer la législation sur les gaz à effet de serre fluorés, vu leur important potentiel de réchauffement, il est crucial que des efforts supplémentaires soient accomplis pour limiter les émissions de ces gaz dans l'UE, tant pour la production que pour l'utilisation.

4.2

La réglementation en vigueur est en fait de bonne qualité, mais sa mise en œuvre s'est heurtée à de nombreuses difficultés que le CESE avait en grande partie identifiées dans son avis de 2004. Le CESE invite les États membres à intensifier les efforts pour appliquer leurs propres décisions.

4.3

Bien qu'il soit d'accord avec les initiatives de l'UE, le CESE souligne l'importance d'arriver rapidement à un accord mondial contrôlant les gaz fluorés à effet serre de manière à soumettre l'ensemble des économies de la planète à des règles identiques.

4.4

Tenant compte de l'existence de technologies de substitution techniquement fiables et économiquement viables, le renforcement de la législation s'appuie sur un rapport coût-efficacité intéressant de sorte que ses effets macroéconomiques généraux seront très limités, sauf pour certains secteurs spécifiques. Toutefois, les coûts générés par la mise en œuvre de la législation pourront être compensés par d'une part des gains d'efficacité énergétique et d'autre part un positionnement stratégique sur le marché des entreprises innovantes. Même si le rapport coût-efficacité des mesures proposées a été soigneusement étudié, le CESE insiste sur la nécessité de limiter autant que faire se peut la charge financière inhérente à la mise en œuvre des dispositions du projet de règlement. Par ailleurs, le CESE invite à davantage prendre en considération la consommation d'énergie sur l'ensemble du cycle de vie ainsi qu'à intégrer à l'analyse coût/bénéfice les éventuels inconvénients liés aux technologies alternatives proposées (inflammabilité, nature explosive, toxicité et dangerosité de la pressurisation). En outre, les niveaux de sécurité requis dans certains secteurs, comme les chemins de fer, peuvent empêcher l'utilisation de substances de remplacement même si elles ont été mises au point avec succès. Il est dès lors nécessaire, pour ces secteurs, de développer activement des solutions alternatives qui soient réalisables d'un point de vue écologique et économique.

4.5

Le CESE invite d'ailleurs la Commission et les États membres à renforcer le soutien à la recherche et l'innovation industrielle, en particulier pour le développement de technologies alternatives aux gaz fluorés à effet de serre. Dans le contexte de crise économique que traverse l'économie européenne, le soutien à l'innovation est un élément décisif d'une stratégie de ré-industrialisation. Néanmoins, il faut également prendre en considération l'absence de certitude quant à la possibilité de mettre au point à un coût acceptable des substances ou technologies capables de remplir des fonctions essentielles au fonctionnement de sociétés développées comme par exemple la réfrigération.

4.6

Il convient de saluer le fait que la proposition comporte un article consacré à la certification/formation, qui est de nature à renforcer l'efficacité de la législation et qui devrait favoriser le développement de synergies avec la législation européenne en matière de santé et de sécurité des travailleurs, notamment en abordant les risques liés aux technologies de substitution. Néanmoins, le CESE constate que le manque de formation adéquate de la main d'œuvre constitue souvent un obstacle important à la mise en œuvre de la réglementation. Des efforts importants devraient être entrepris, tant par les États membres que par les entreprises, afin de développer des programmes de formation nécessaires pour préparer les travailleurs aux technologies alternatives aux gaz fluorés à effet de serre. La situation particulière des PME devrait être prise en considération et la charge financière et administrative de la certification/formation devrait être limitée.

4.7

Le CESE souligne la nécessité de s'inspirer des bonnes pratiques mises en œuvre par certains États membres pour régler la question des gaz à effet de serre fluorés.

5.   Observations spécifiques

5.1

Le coût des mesures de confinement (c'est-à-dire contrôle d'étanchéité, détection de fuites, tenue de registres, etc.) étant très important pour les utilisateurs finaux qui sont souvent des PME, le CESE s'inquiète de la charge financière que la réglementation relative aux gaz à effet de serre fluorés représente pour ce secteur de l'économie déjà fragilisé par la crise économique. Le CESE souligne la nécessité d'agir en amont de l'utilisation et invite par conséquent à prévenir les fuites via un renforcement des exigences relatives à la conception des installations contenant des gaz fluorés.

5.2

Les obligations de récupération visées à l'article 7.4 concernent dans un certain nombre de cas des utilisations domestiques (climatiseurs, pompes à chaleur). Il semblerait préférable d'amener les États membres à développer des systèmes de collecte sélective des appareils en fin de vie qui contiennent des substances fluorées, conformément aux principes de la directive 2002/96/CE relative aux déchets d'équipements électriques et électroniques.

5.3   Formation et certification (article 8)

5.3.1

L'obligation d'établissement de programmes de formation est limitée aux entreprises qui exécutent les activités visées à l'article 8, paragraphe 1, pour le compte d'un tiers. Le CESE est d'avis que toutes les entreprises qui exécutent des activités liées à la production, à la distribution et au montage d'appareils contenant des gaz fluorés devraient être visées par ces programmes de formation. Le CESE souligne la nécessité d'étendre les programmes de formation aux technologies alternatives de manière à favoriser le processus de transition technologique.

5.3.2

Dans la mesure où les programmes de formation portent notamment sur des substances et procédés qui peuvent affecter la santé et la sécurité des travailleurs, les partenaires sociaux devraient être associés à l'établissement de ces programmes par les États membres. L'association des partenaires sociaux à l'élaboration de ces programmes permettrait de conformer la proposition aux principes généraux de la législation européenne relative à la santé et à la sécurité des travailleurs.

5.3.3

Compte tenu de l'incertitude quant au délai d'adoption de cette proposition de règlement, il serait opportun de remplacer la date mentionnée pour la communication des États membres à la Commission relative à leurs programmes de formation et de certification par une référence à une durée liée à la date d'entrée en vigueur du règlement.

5.4   Mise sur le marché et restrictions d'utilisation

5.4.1

Nonobstant les restrictions spécifiques prévues aux articles 9, 11 et 12, l'approche générale de la proposition de règlement préfère une «réduction progressive» (phasing down) à l'horizon 2030 à une «élimination progressive» (phasing out). En effet, l'article 13 prévoit une réduction de la mise sur le marché des hydrocarbures fluorés via un contingentement progressif qui ne distingue pas les différentes technologies concernées par la proposition de règlement.

5.4.2

Le CESE estime qu'il serait plus pertinent d'opérer une distinction entre ces technologies afin d'organiser une «élimination progressive» plutôt qu'une «réduction progressive», à tout le moins lorsque c'est techniquement possible et économiquement réaliste. Il serait opportun d'introduire un objectif d'interdiction pour le long terme qui soit compatible avec les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre de l'UE pour 2050, ainsi qu'avec le développement des technologies de substitution. Pour certains secteurs ou sous-secteurs, comme la réfrigération commerciale ou les grands systèmes de réfrigération industrielle, l'interdiction de mise sur le marché de nouvelles installations contenant des HFC pourrait être envisagée dès 2025. De la même manière, les conteneurs non-réutilisables (sprays ou aérosols) contenant des gaz fluorés devraient être prohibés, avec d'éventuelles dérogations pour certaines utilisations indispensables (par exemple dans le secteur médical) et pour lesquelles aucune alternative crédible n'a été démontrée.

5.4.3

Outre les avantages environnementaux évidents liés au remplacement complet de techniques génératrices de gaz à effet de serre particulièrement puissants et malgré le coût financier qui en découle, un effort de substitution plus systématique est favorable à l'innovation et permet aux entreprises innovantes d'obtenir un avantage compétitif sur les marchés qui découleront des réglementations en cours d'établissement.

5.5

Concernant l'étiquetage, il s'agit d'un vecteur essentiel d'information des travailleurs, amenés à manipuler les installations visées par le projet de règlement, et du consommateur final quant aux risques associés aux technologies qu'il utilise. Pour ce qui concerne les travailleurs, l'affichage technique doit fournir de manière exhaustive, claire et rigoureuse, toutes les informations qui sont nécessaires pour procéder aux opérations d'installation, de maintenance ou de démontage en limitant au maximum les risques environnementaux.

5.6

Afin de maximiser l'impact du message et compte tenu de la complexité technique du dossier, le message communiqué devrait privilégier des informations simples et compréhensibles du grand public. À cet égard, des synergies devraient être développées avec le système en vigueur dans le cadre de la directive «Écoconception» 2005/32/CE, de manière à privilégier, là où c'est techniquement possible, un système d'étiquetage environnemental harmonisé à l'échelle européenne.

5.7

Les restrictions qui s'imposent aux producteurs européens doivent aussi s'imposer aux produits importés dans l'Union européenne. L'interdiction de la précharge des équipements, permet de réguler l'importation des gaz fluorés d'une manière efficace tant du point de vue environnemental que du point de vue économique. Le CESE se demande toutefois si le chargement sur site industriel n'offre pas de meilleures garanties de fiabilité étant donné qu'il est effectué par un matériel spécifiquement adapté et du personnel spécialement formé à cette tâche. Le CESE invite par conséquent à ce que le règlement stipule explicitement que l'interdiction de pré-chargement ne s'applique pas aux équipements destinés à l'exportation. De la même manière, le CESE appelle à développer un régime de dérogations à l'interdiction de pré-chargement pour les équipements pour lesquels il est démontré que le pré-chargement se justifie pour des questions de fiabilité, de sécurité ou de performances environnementales.

5.8

Tous les producteurs et importateurs de gaz à effet de serre fluorés doivent respecter des quotas. Ces obligations n'incombent ni aux consommateurs, ni aux opérateurs d'équipements. Afin d'alléger la charge administrative, on applique le seuil d'une tonne métrique ou mille tonnes d'équivalent CO2 de gaz à effet de serre fluorés. Les quantités exportées ne sont pas comptabilisées au titre des quotas de mise sur le marché. La répartition des quotas sera fondée sur les émissions antérieures. L'alternative de la mise aux enchères n'a pas été retenue, car trop peu d'acteurs sont présents sur ce marché (en somme pas suffisamment d'acteurs pour créer un marché efficace) et cette procédure aurait accru les coûts administratifs. 5 % seront réservés aux «nouveaux entrants». La répartition des quotas sera établie en fonction des données fournies pour la période 2008-2011. Il est essentiel que les obligations d'enregistrement et de déclaration restent gérables afin de ne pas imposer une charge administrative excessive aux entreprises, et en particulier aux PME. De manière générale, la question du rapport coût/efficacité du système de quotas mérite d'être soulevée.

5.9

Le CESE invite la Commission européenne à publier des rapports réguliers établis sur la base des données récoltées en vertu des articles 17 et 18 du projet de règlement. Il conviendrait toutefois que ces rapports ne soient pas attentatoires au caractère confidentiel des données récoltées auprès des entreprises et qui concernent des procédés industriels protégés par un droit de propriété intellectuelle. La Commission devrait également veiller à limiter la charge administrative inhérente à la récolte des données tant auprès des entreprises concernées qu'auprès des États membres.

5.10

L'article 21 établit un comité qui a pour mission d'assister la Commission dans l'exercice de son pouvoir d'adoption d'actes délégués. Les représentants de toutes les parties concernées devraient faire partie de ce comité y compris les représentants des partenaires sociaux.

5.11

Le CESE déplore que l'article 22 ne comporte pas d'habilitation de la Commission relative aux procédures de contrôle, de vérification et de mise en conformité. Bien que les mesures de mise en œuvre soient une prérogative des États membres, il eut été opportun de permettre à la Commission d'établir en la matière des prescriptions minimales, à l'instar de ce qui est prévu aux articles 8 et 18.

5.12

Le CESE soutient la volonté de la Commission de fonder le règlement relatif aux gaz à effet de serre fluorés sur l'article 192, paragraphe 1, du traité sur le fonctionnement de l'union européenne, étant entendu que l'objectif principal du règlement est de garantir un niveau élevé de protection de l'environnement, en particulier par la lutte contre le changement climatique. Le CESE souligne toutefois la nécessité de veiller à ce que la mise en œuvre du règlement ne soit pas attentatoire à l'intégrité du marché intérieur.

Bruxelles, le 23 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  JO C 108 du 30.4.2004.


19.9.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 271/143


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil fixant un taux d'ajustement des paiements directs prévu par le règlement (CE) no 73/2009 du Conseil en ce qui concerne l'année civile 2013»

COM(2013) 159 final – 2013/0087 COD

2013/C 271/27

Rapporteure générale: Dilyana SLAVOVA

Le 8 avril 2013 et le 16 avril 2013, le Conseil et le Parlement européen ont respectivement décidé, conformément à l'article 43, paragraphe 2 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil fixant un taux d'ajustement des paiements directs prévu par le règlement (CE) le 73/2009 du conseil en ce qui concerne l'année civile 2013»

COM(2013) 159 final – 2013/0087 COD.

Le 16 avril 2013, le Bureau du Comité économique et social européen a chargé la section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement» de préparer les travaux du Comité en la matière.

Compte tenu de l'urgence des travaux, le Comité économique et social européen a décidé au cours de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 22 mai 2013) de nommer Mme SLAVOVA rapporteure générale, et a adopté le présent avis par 124 voix pour et 4 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le CESE soutient le fait de fixer le taux d'ajustement 2013 du mécanisme de discipline financière conformément à l'article 11 du règlement (CE) no 73/2009 (1). Il note toutefois que la proposition de la Commission, qui se base sur le cadre financier pluriannuel (CFP) convenu par le Conseil européen le 8 février 2013 (2), n'a aucune valeur juridique sans l'accord du Parlement européen.

1.2

Le CESE est d'avis que la Commission et le Parlement pourraient étudier les possibilités d'éviter que la future réserve pour les crises ponctionne les ressources du budget de la PAC. Si l'on insère la réserve à la rubrique 2 du CFP, il y a lieu de la garantir au moyen d'un financement supplémentaire. Il pourrait en résulter un pourcentage de taux d'ajustement des paiements directs moins élevé que celui proposé par la Commission, au bénéfice des agriculteurs.

1.3

Le Comité demande instamment au Conseil, au Parlement et à la Commission de déployer tous les efforts nécessaires en vue de parvenir à bref délai à un compromis définitif, assurant ainsi non seulement aux agriculteurs mais à l'ensemble des opérateurs de chaque secteur de l'économie européenne la sécurité juridique dont ils ont besoin pour leur propre planification financière.

2.   Contexte de l'avis

2.1

Afin de garantir que les montants destinés à financer la politique agricole commune (PAC) soient conformes au CFP, un mécanisme de discipline financière ajuste le niveau des paiements directs lorsque les prévisions indiquent que les sous-plafonds annuels relatifs aux dépenses de marché et aux paiements directs de la rubrique 2 du cadre financier seront dépassés.

2.2

En règle générale, les agriculteurs introduisant une demande d'aide pour des paiements directs au titre d'une année civile (N) reçoivent ces versements dans un délai de paiement déterminé relevant de l'exercice (N+1). Cela signifie que, pour l'année calendrier 2013, le délai de paiement relève d'un exercice couvert par le CFP 2014-2020, qui n'a pas encore été adopté.

3.   Observations générales

3.1

Tenant compte des conséquences de l'inégalité de la répartition des aides directes entre les petits et les grands bénéficiaires, le CESE attache une grande importance à ce qu'à l'avenir, la réduction continue d'être appliquée aux seuls montants supérieurs à 5 000 EUR.

Bruxelles, le 22 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  JO L 30 du 31.1.2009, p. 16.

(2)  EUCO 37/13.


19.9.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 271/144


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des Régions sur le thème “Une vie décente pour tous: éradiquer la pauvreté et offrir au monde un avenir durable”»

COM(2013) 92 final

2013/C 271/28

Rapporteure: Mme PICHENOT

Le 18 mars 2013, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur le thème:

«Une vie décente pour tous: éradiquer la pauvreté et offrir au monde un avenir durable»

COM(2013) 92 final.

La section spécialisée «Relations extérieures», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 25 avril 2013.

Lors de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 23 mai 2013), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 103 voix pour, aucune voix contre et 6 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Faire converger dans le cadre post-2015 deux processus parallèles OMD/ODD

1.1.1

Pour la première fois de son histoire, l'humanité dispose de connaissances, de ressources et de techniques pour éradiquer la pauvreté, au niveau mondial à l'horizon 2030. C'est un immense espoir pour plus d'un milliard d'êtres humains encore victimes de l'extrême pauvreté. Pour la première fois aussi, les États seront redevables à l'horizon 2050 de mieux gérer le capital naturel de la planète reconnu comme une ressource limitée, à protéger et à partager avec les générations futures.

1.1.2

Le cœur de la négociation qui commencera en septembre 2013 à l'ONU consiste à parvenir à une définition universelle des Objectifs du Développement durable (ODD) pour concilier dans le long terme, lutte contre la pauvreté, production et consommation durables et préservation des ressources naturelles. Ce processus doit être inclusif et convergent pour intégrer la révision prévue en 2015 des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD). Acteurs de la société civile, institutions internationales et États membres au sein de l'ONU se mobilisent dès maintenant pour préparer et accompagner cette négociation internationale. Dès la conférence de Rio+20 (1), le CESE s'est inscrit dans ce débat pour contribuer à définir le rôle de la société civile face à ces défis. Il poursuivra la démarche jusqu'en 2015 à travers d'autres avis (2) et initiatives.

1.1.3

Le Comité partage l'orientation de la Commission d'engager le débat européen sur la nécessité de rechercher une convergence des processus OMD/ODD et une responsabilisation des États par une communication intitulée «Vie décente pour tous: éradiquer la pauvreté et offrir au monde un avenir durable». Cependant s'il est possible de reconnaître que les Objectifs du Millénaire ont apporté un acquis sur des objectifs sociaux, il est encore prématuré de préciser des objectifs environnementaux et tout autant de cerner des objectifs économiques acceptables par tous les pays de la planète. Pour le Comité, il convient de mieux comprendre comment ces trois dimensions du développement durable interagissent afin de trouver des solutions équitables, sobres et efficaces.

1.2   Recommandations pour un processus convergent et inclusif

1.2.1

Au stade de l'élaboration d'une position commune européenne pour l'AG de l'ONU, le Comité considère que la communication de la Commission européenne constitue un jalon important pour nourrir le débat dans les institutions et au sein des États membres. Le Comité accueille avec satisfaction le travail conjoint des DG Environnement et DEVCO (3), témoignage d'une mise en cohérence qui englobe aussi l'apport du Service européen d'action extérieure en matière de sécurité dans la préparation de cette communication qui aurait toutefois, gagné à mieux intégrer la politique commerciale et agricole à cette démarche. Le Comité se félicite particulièrement du travail concerté au sein du Conseil européen, et encourage ce dernier à produire un document unique de conclusions lors du Conseil des Affaires étrangères de mai/juin 2013.

1.2.2

Le Comité relève que ce choix d'un cadre unique et global dont les objectifs doivent s'appliquer dans chaque pays mérite, un large consensus interne pour être présenté auprès des autres pays partenaires au sein de la communauté internationale et convaincre d'un traitement d'égal à égal en particulier avec les pays les plus pauvres, et la centaine de pays à revenu intermédiaire dont les pays émergents qui ont désormais un rôle prépondérant dans les négociations internationales. C'est en raison de la complexité de la négociation que le Comité considère la position européenne comme un jalon dans ce processus diplomatique qui va au-delà de l'ancienne distinction entre pays développés et pays en développement.

1.2.3

Le Comité plaide pour que l'UE fasse entendre sa voix dans les enceintes internationales sur la base de ce cadre de convergence des OMD/ODD y compris via le relais des États membres à l'ONU. Chaque pays devra élaborer avec la participation de la société civile une stratégie nationale inclusive de développement qui tiendra compte de son niveau de départ et participera ainsi à atteindre les objectifs communs de développement durable. Pour le Comité ce choix impliquera des procédures d'évaluation et de suivi des engagements nationaux consignés dans un registre mondial, assorti d'une amélioration nécessaire des indicateurs statistiques complémentaires au PIB.

1.2.4

L'Union européenne a des valeurs, sa pratique du consensus et des atouts qui devraient lui permettre, si la volonté politique est présente de s'engager résolument dans la transition vers le développement durable, et ainsi d'entraîner avec elle ses partenaires internationaux. L'Union européenne reste une référence comme le détaille les engagements concrets de l'annexe très importante de cette communication dans les domaines de politiques environnementales, du respect des droits de l'homme, de transferts internes en faveur de la cohésion territoriale ou de redistribution en matière de protection sociale. L'annexe amorce un cadre pour le suivi des engagements de Rio+20 au niveau européen et international.

1.2.5

Conçus comme des Objectifs universels, les ODD devront être déclinés par des politiques européennes et programmes nationaux de réforme des États membres. Le Comité recommande d'inscrire cette optique dans la préparation de la révision à mi-parcours de la stratégie UE2020 en conformité avec le suivi des engagements de Rio+20. L'écologisation du Semestre européen est attendue pour un nouvel élan (4). Pour le Comité cela implique une fusion de la Stratégie UE2020 et de la Stratégie de développement durable ainsi que la prise en compte d'une Union sociale  (5) étroitement liée à l'Union économique et monétaire européenne.

1.2.6

Un trait distinctif des nouveaux ODD est qu'ils sont conçus pour être universels, pour s'appliquer à tous les pays et tenir compte des limites de notre planète. Étant donné le caractère intrinsèquement limité des terres arables, de l'eau douce, des forêts et de nombreuses autres ressources naturelles du globe, il convient que les ODD comprennent des objectifs visant une utilisation plus efficace et un partage plus équitable de ces ressources. De même, les ODD doivent établir des objectifs définis sur une base équitable pour réduire le poids des émissions de gaz à effet de serre et des autres formes de pollution. Ces objectifs doivent être chiffrés et fixer des échéances pour atteindre l'objectif global convenu de longue date, de passer à des modèles de production et de consommation plus durables. À défaut de cette transition vers une économie plus durable au niveau mondial, il pourrait s'avérer impossible pour les pays en développement d'atteindre des objectifs du type des OMD, puisqu'à l'heure actuelle les problèmes d'épuisement des ressources, de changement climatique et d'autres formes de pollution qui sont croissants à l'échelle mondiale les empêchent déjà fréquemment d'obtenir des améliorations sur certains objectifs de développement traditionnels.

1.2.7

Les pays développés et les pays émergents sont responsables de la plus grande partie des problèmes croissants de surconsommation, de gaspillage et d'épuisement des ressources naturelles, ainsi que de pollution. Les ODD, qui se réfèrent à des modèles plus durables de consommation et de production, seront dès lors particulièrement pertinents pour eux et devraient comprendre des objectifs exigeants et ambitieux visant des améliorations au cours des quinze prochaines années. L'Union européenne, qui a toujours été active dans ce domaine, devrait servir de figure de proue pour définir, dans le cadre des ODD, des objectifs adaptés aux pays développés.

1.3   Recommandations pour un processus participatif ouvert aux sociétés civiles

1.3.1

Le Comité rappelle qu'à travers tous les avis cités se forment un noyau dur de recommandations portant sur le rôle de la société civile dans la bonne gouvernance, le soutien à une transition vers un nouveau modèle économique, la protection aux plus pauvres et aux plus vulnérables, l'accompagnement des mutations pour les travailleurs ainsi que la prise en compte de la lutte contre le réchauffement climatique et des limites des ressources de la Planète. En outre, le Comité considère qu'une société civile autonome et forte, et un système juridique garant de son indépendance forment ensemble, le socle fondamental de la démocratisation, d'un État de droit et contribue à la stabilité nécessaire à l'investissement et à la croissance durable (6).

1.3.2

Le Comité invite la Commission mais aussi les États membres à associer la société civile tout au long du processus d'élaboration puis de mise en œuvre et de suivi, notamment sur les ODD où cette participation est encore insuffisante. En 2013 et 2014 des débats nationaux y compris au sein des conseils économiques sociaux et environnementaux et/ou des conseils de développement durable incluant toutes les composantes de la société civile et aussi des débats organisés avec la société civile européenne et celle des pays partenaires devraient y contribuer. Ces travaux s'inscriront dans la préparation de l'Année européenne 2015 pour la coopération et le développement durable pour construire une vision partagée d'un monde futur et redonner aux citoyens du sens à l'action extérieure européenne (7). Concernant cette Année européenne pour le développement le Comité invite la Commission européenne à mobiliser des ressources suffisantes, à garantir un engagement actif de la société civile, à appuyer en priorité des initiatives existantes et portées par les partenaires de cette année européenne, et enfin à encourager des débats de fond sur les thèmes portés par le présent avis du CESE.

1.3.3

Les sociétés civiles ont un rôle de plaidoyer à assurer en faveur d'un autre modèle d'économie auprès des décideurs politiques nationaux et des diplomates internationaux avec en ligne de mire un découplage du niveau des activités économiques avec ceux du développement humain et de l'impact environnemental. Le Comité recommande de partager les connaissances et les apprentissages en particulier au cours de l'année thématique 2015 avec les autres sociétés civiles des pays et régions partenaires, domaine dans lequel le CESE a une expérience d'échanges féconds.

1.3.4

Le Comité invite les organisations de la société civile à participer et à se saisir des résultats des consultations internationales, nationales et thématiques en particulier celle actuellement lancée sur la durabilité environnementale par le PNUD et le PNUE accessible sur le site www.worldwewant2015.org/sustainability

1.3.5

Le Comité recommande que l'agenda post-2015 s'appuie plus systématiquement sur des études d'impact, des suivis effectués notamment avec le concours d'organisations de la société civile (par exemple sur droits humains, écosystèmes ou conditions de travail). De la même façon, l'intégration du dialogue social entre partenaires sociaux, l'un des marqueurs du respect des droits de l'homme au travail est un instrument essentiel de mise en œuvre et du suivi et de l'évaluation des OMD/ODD.

1.3.6

Le rôle de la société civile dans la planification, le suivi et l'évaluation sera majeur. La société civile européenne devra s'approprier l'information pertinente de manière à pouvoir agir à travers des mécanismes de surveillance sur la cohérence interne des politiques européennes en faveur du développement, principe inscrit dans le traité de Lisbonne. Le comité recommande d'associer la société civile aux choix des indicateurs complémentaires au PIB, à la lutte contre la corruption, aux négociations relatives au processus de paix, à l'élaboration des plans stratégiques nationaux et préconise de valoriser des innovations sociales qui émergent de façon pragmatique.

1.3.7

En vue de conforter un rôle de leadership européen vers un autre modèle d'économie, le Comité recommande de créer un forum  (8) multi-partie prenante de consultation dédiée à la promotion de la production et de la consommation durables au sein de l'UE. Dans chaque filière, il est indispensable de définir des étapes intermédiaires d'une transition négociée assortie de mesures d'accompagnement pour les secteurs, les entreprises, les territoires et les travailleurs concernés.

1.3.8

Dans la mise en œuvre de ce futur agenda, le comité recommande une approche fondée sur un renforcement des partenariats entre acteurs par exemple sur l'égalité de genre. Des coopérations fondées sur une contractualisation/partenariat volontaire entre acteurs pour des objectifs engageants à tous les niveaux territoriaux pourraient être encouragées. Par exemple, des initiatives conçues en synergie, entre des acteurs privés, publics ou associatifs qui s'engagent conjointement à atteindre des objectifs précis sur un champ territorial ou urbain. Ces approches innovantes paraissent indispensables pour prendre en compte l'aspect multidimensionnel de la pauvreté. Ces contractualisations seraient aussi propices à des coopérations Sud/Sud bénéficiant d'un appui financier du Nord.

1.4   Recommandations sur les perspectives d'un agenda post 2015

1.4.1

L'agenda post-2015 marque un changement de paradigme au-delà de l'aide et de la coopération internationale. Il devra être conçu comme un processus qui engage tous les pays dans la transition vers un modèle économique inclusif et vert, un changement de trajectoire vers une économie dé-carbonée. Le Comité souscrit à l'analyse de la communication qui juge «impératif de s'employer à parvenir à une économie verte inclusive grâce à des schémas de consommation et de production viables et à une meilleure utilisation des ressources qui passe par le recours à des systèmes énergétiques à faible taux d'émission».

1.4.2

Cohérence entre politique financière et politique économique et migratoire. Au-delà d'éléments économiques, il est indispensable de mettre en œuvre, selon le principe de cohérence, d'autres politiques qui ont une incidence majeure sur un changement de trajectoire vers le développement durable tels que l'imposition de taxes sur les émissions de carbone et toutes mesures incitatives à l'atténuation du changement climatique, un dispositif favorable à l'immigration temporaire ou circulaire en provenance des pays pauvres, le contrôle strict des ventes d'armes aux PED et une régulation financière pour réduire le blanchiment d'argent et stopper l'évasion fiscale.

1.4.3

Une définition d'Objectifs de développement durable doit prendre la mesure de la tension entre les questions de développement individuel et collectif et les questions de préservation des équilibres environnementaux de la planète. Pour le Comité, résoudre cette tension et trouver un équilibre entre les trois dimensions du développement durable, suppose la préservation des Biens communs globaux par des politiques publiques mondiales gérées par une communauté internationale formée d'États souverains. C'est le grand défi de l'agenda futur.

1.4.4

Cette thématique des biens publics mondiaux identifiés comme enjeu majeur post-2015 nécessite une cohérence plus importante entre les institutions internationales et les politiques mondiales. L'Union européenne doit y prendre sa place. Dans quelques avis, le CESE a amorcé des réponses à la prise en compte des Biens publics mondiaux notamment sur la sécurité alimentaire (9) le socle de protection sociale ou la régulation multilatérale du commerce et des investissements, le climat ou la biodiversité.

1.4.5

Le Comité regrette les allusions furtives à ce sujet dans la communication «Une vie décente pour tous» et considère que la prochaine communication au sujet des ressources financières annoncée à la mi-2013 doit inclure cette question pour bien s'assurer qu'elle sera assortie de sources de financement adéquates. L'aide publique au développement doit rester dédiée à la lutte contre la pauvreté. Il convient d'accorder une grande place aux avis du monde entier dans le cadre du processus de consultation sur la taxe européenne sur les transactions financières qui va se mettre en place en 2013 avec la participation initiale de onze pays.

1.4.6

En aucun cas, l'attente d'un accord international sur la définition des ODD ne peut servir de prétexte à différer ou à diminuer les engagements d'aide financière des pays développés. Le Comité se déclare très préoccupé du risque d'interruption dans la mise en œuvre de l'aide au développement faute d'un accord finalisé en 2015. Pour pallier ce risque, il recommande que des OMD révisés soient impérativement assortis des financements suffisants à cette échéance (10). Même en ce temps de difficulté budgétaire, le Comité exhorte l'Union et les États membres à maintenir leurs engagements et à faire le nécessaire pour atteindre en moyenne les 0,7 % dès la nouvelle étape.

1.4.7

Les objectifs du Millénaire nécessitent une actualisation et une adaptation aux nouveaux enjeux du XXIe siècle tenant compte des bilans et des leçons de l'expérience. Pour le CESE il convient d'ores et déjà d'ajouter au moins trois thématiques, l'accès à l'énergie pour tous  (11), le droit à l'alimentation et à l'eau, et le socle de protection sociale de base  (12). En outre, le travail décent intégré depuis la révision de 2006, doit être réaffirmé comme une priorité ainsi que l'impérieuse nécessité de remettre le développement agricole au cœur de la lutte contre toute pauvreté.

Aussi la convergence entre les deux agendas pourra se dessiner à partir de cette révision qui ne sera que la première étape d'un futur agenda global. Il faut reconnaitre la tension actuelle et l'incertitude entre l'ambition d'un agenda «idéal» et la réalité des «possibles».

1.4.8

Dans cette révision des OMD, le Comité suggère de développer une approche spécifique de développement pour les États fragiles ou affectés par des conflits en mettant la restauration institutionnelle au cœur des objectifs primordiaux pour ces pays afin d'apporter en préalable un effort de gouvernance ciblant sécurité et justice de proximité.

2.   Tirer les enseignements des objectifs du Millénaire

2.1

Pérennité de la Déclaration du Millénaire. Cette déclaration conserve toute sa valeur politique et symbolique comme pacte scellant un engagement même au-delà de 2015 entre tous les pays, riches et pauvres. Elle doit rester un fondement du futur agenda en caractérisant les grands défis et valeurs fondamentales qui doivent sous-tendre les relations internationales au XXIe siècle: paix, sécurité et désarmement, protection de notre environnement commun, droits de l'homme, démocratie et bonne gouvernance, protection des groupes vulnérables et la réponse aux besoins spécifiques de l'Afrique, ainsi que le droit au développement et la nécessité de créer un environnement favorable au développement. Cette déclaration avait déjà établi un lien clair entre les dimensions du développement durable en écho à la déclaration de Rio de 1992.

2.2

Malgré un bilan mitigé, par leur simplicité et leur lisibilité, les OMD ont contribué à la sensibilisation et la mobilisation des opinions publiques des pays développés. Reste à démontrer que ce soutien des opinions se soit traduit effectivement par une augmentation des volumes d'aide, par une lutte effective contre la corruption, par une réorientation vers les pays les plus en retard, voire ait été adapté aux pays en guerre ou fragilisés par des conflits internes.

2.3

Territoires, inégalités et pauvretés. Concernant l'indice de pauvreté, le Comité émet des réserves sur l'usage de revenu inférieur à 1,25 $ par jour utilisé pour apprécier la réduction de l'extrême pauvreté et le recours à des moyennes nationales. Ces outils masquent de profondes inégalités internes dans les sociétés nationales ainsi que les disparités territoriales en particulier au détriment des ruraux qui devraient pouvoir se maintenir dans les campagnes et accueillir par un développement rural, une partie de la croissance démographique des futures décennies. D'autre part, l'urbanisation mal maîtrisée accentue et alimente la pauvreté urbaine croissante et nécessite des analyses plus qualitatives.

2.4

L'égalité de genre reste une condition essentielle pour tout changement (13) pas seulement en raison du sort fait aux femmes mais aussi parce qu'il est au cœur de toutes les autres inégalités et en exacerbe les conséquences. Les réponses à la non-discrimination, à savoir les droits des femmes sont essentielles à la transition de nos sociétés. Les apports des femmes à la paix, au développement, aux activités économiques et à la sécurité deviennent des atouts majeurs d'un futur agenda. Ces valeurs doivent être reconnues par tous, hommes et femmes.

2.5

Résultats quantitatifs et outils méthodologiques. La feuille de route actualisée doit se traduire en objectifs et indicateurs d'avancement pertinents. La parution régulière des rapports de suivi des OMD ont fait apparaître des résultats substantiels et les carences. La qualité des évaluations constitue un acquis déterminant pour cette méthodologie de gouvernance par objectifs. Le futur agenda nécessitera une amélioration et une harmonisation des appareils statistiques nationaux en particulier concernant les données sexo-spécifiques et les personnes en situation de handicap. Pour cela il convient d'améliorer l'état-civil et de fournir des enquêtes qualitatives notamment en matière d'éducation

2.6

Au-delà du PIB. Pour l'agenda post-2015, des indicateurs de Développement durable (14) définissant le bien-être devront réunir dans un tableau restreint d'indicateurs économiques, sociaux et environnementaux plutôt qu'un indicateur unique agrégé. Associer au PIB d'autres indicateurs, est possible au niveau international comme cela existe déjà pour la définition des PMA qui comprend des critères de retard de développement humain et de vulnérabilité économique ou l'indicateur de développement humain et plus récemment celui sur les inégalités développé par le PNUD.

Pour combler le fossé entre politiques économiques, bien être et progrès social, il convient de s'appuyer sur des indicateurs complémentaires au PIB. Une nouvelle approche impose de cerner les composantes du progrès en entreprenant d'ouvrir la comptabilité nationale aux dimensions sociales et environnementales, d'utiliser des indicateurs composites et de créer des indicateurs-clés. Le chaînon manquant réside toutefois dans le développement d'instruments d'effectivité et de redevabilité qui sont nécessaires pour coupler, choix politiques et budgétaires avec performances des indicateurs. Mesurer le bien-être et le progrès ne constitue pas exclusivement un problème technique. La conception même de la notion de «bien être» révèle les préférences collectives et les valeurs fondamentales d'une société. Un moyen pour avancer dans le choix d'indicateurs consiste à associer aux travaux universitaires des citoyens et des organisations de la société civile pour les définir et voir leur usage.

2.7

Il incombe aux pouvoirs publics, gouvernement central et autorités locales de garantir la prestation effective d'un socle de protection sociale pour faire face aux risques majeurs de la vie notamment dans les domaines de la santé et du handicap, de la retraite et du chômage. Les organisations de la société civile (organisations syndicales, ONG, fondations, mutuelles, coopératives, PME, associations familiales ou de consommateurs) peuvent contractualiser avec les autorités publiques pour jouer un rôle déterminant dans la planification, le suivi, la fourniture des services et bénéficier d'aide publique, notamment dans le cas des PMA.

3.   Droits Humains, implication des sociétés civiles, démocratisation et contractualisation/partenariat entre acteurs, au cœur de l'agenda post-2015

3.1

Démocratisation et droits humains, socle des transitions vers des sociétés inclusives et des économies durables. L'appui permanent aux efforts de démocratisation reste la meilleure voie vers des sociétés transparentes et qui rendent compte à leurs citoyens. Dans les sociétés ouvertes du XXIe siècle, aucun changement d'envergure n'est atteignable sans participation, appropriation, adhésion et coresponsabilité des acteurs concernés. Dans le cadre de l'instrument financier pour la promotion de la Démocratie et des Droits de l'Homme et de la communication sur le rôle des sociétés civiles dans le développement, le Comité se félicite de l'importance accrue accordée à l'émergence d'une société civile indépendante (15) permettant ainsi de lutter contre la corruption quelle qu'en soit la source, de garantir la redevabilité auprès des citoyens, d'impliquer les acteurs économiques dans les études d'impact, dans le suivi des accords commerciaux ou de consolider la capacité d'alerte des défenseurs des droits des femmes ou encore de soutenir les défenseurs de l'environnement.

3.2

Transparence et redevabilité des pays partenaires, fondements du futur agenda. Les OMD puis l'agenda pour l'efficacité de l'aide qui en découle (Principes de Paris, Accra, Busan) ont contribué à renforcer la redevabilité au sein des pays partenaires et la prise en compte des situations particulières des États fragiles. Cependant, pour corriger les défauts majeurs de la coopération, le futur agenda doit permettre aux pays bénéficiaires d'être acteurs sur un pied d'égalité avec les pays donateurs. Il faudra surtout prendre en compte de façon spécifique les situations de conflits internes ou de guerre et de fragilité liée aux catastrophes naturelles en élaborant des réponses spécifiques pour ces pays par des objectifs préalables et prioritaires de rétablissement des institutions et de garantie de la sécurité, de la police et de la justice.

3.3

Une Coopération de sociétés à sociétés et la valorisation des échanges foisonnants d'acteurs et de réseaux internationaux. L'approche pluri-acteurs incite les partenaires du développement du Nord comme du Sud à dépasser le cadre diplomatique traditionnel d'engagements de gouvernements à gouvernements. Une vision plus inclusive de la société civile repose sur une contractualisation ou partenariat formalisé par un contrat d'objectifs et de moyens entre différents acteurs. Cela passe par une meilleure prise en compte des initiatives des villes et collectivités locales (réseaux de villes vertes, mouvement des villes en transition), ainsi que celles des organisations de la société civile (diplomatie non gouvernementale tel le Sommet à Rio) ou des entreprises de toutes formes (monde des affaires tels les réseaux d'entreprises responsables ou d'économie sociale)ou les confédérations syndicales internationales (acteurs-clés pour l'objectif de travail décent) ou encore d'universités et centres de recherche dès l'élaboration des objectifs mais aussi pour leur mise en œuvre et leur suivi. Le comité recommande de reconnaître et de valoriser dans le futur agenda les accords contractualisés entre partenaires privés, publics et associatifs sans négliger la multitude d'initiatives de solidarité internationale venant des citoyens eux-mêmes. Intégrer cette diversité d'acteurs sur un pied d'égalité est une condition clé d'une gouvernance plus efficace et plus inclusive qui prend en compte la voix des plus pauvres.

3.4

Pour cela le Comité comme bon nombre d'observateurs, préconise des améliorations primordiales en matière de bonne gouvernance et d'institutions démocratiques pour renforcer l'appropriation par les pays partenaires de leur propre stratégie nationale de développement. Les Objectifs du Millénaire ont permis à certaines sociétés civiles de pays en développement de renforcer leur position d'acteurs ou d'interpeller leurs gouvernements sur des choix d'investissements et de dépenses publiques. Dans le futur agenda plus inclusif, leur participation à l'élaboration de ces documents stratégiques de réduction de la pauvreté devra être renforcée et faire émerger des solutions innovantes sur le travail décent ou la protection sociale tout en acquérant expertise et planification, éléments contribuant à une meilleure gouvernance des États. Le comité préconise d'orienter en partie, l'aide au commerce pour renforcer les capacités des partenaires sociaux et organisations de la société civile en matière commerciale afin qu'ils contribuent à intégrer le commerce et la sécurité alimentaire dans leur stratégie nationale de développement.

4.   Refonder un consensus large pour un changement de trajectoire vers le Développement durable

4.1

Gouvernance mondiale et Biens collectifs environnementaux, sociaux, ou économiques. Parce qu'ils concernent l'ensemble de la planète, des biens ou services sont reconnus dans cette communication comme «des piliers essentiels de la vie» comme l'air, l'eau, les océans, les écosystèmes, le travail décent, la protection sociale, la sécurité alimentaire ou les règles commerciales… et présentés dans l'annexe. Ces Biens publics mondiaux (16) devront être intégrés dans l'agenda post 2015 par des politiques publiques mondiales sur les trois dimensions du Développement durable. Ils doivent être abordés dans un cadre concerté global mais doivent surtout être soutenus par des engagements internationaux conventionnels, des financements et des actions nationales, elles-mêmes déclinées en une multitude d'actions collectives et individuelles plus localement.

4.2

Diversité des Financements mondiaux adaptés au changement de trajectoire à l'horizon 2050. Les Nations Unies estiment qu'un montant évalué à 800 milliards d'euros chaque année serait nécessaire pour traiter durablement de la pauvreté et des défis environnementaux soit 1,5 % du PIB mondial. L'Aide publique au développement ne peut couvrir que 10 % à 15 % de ces besoins de financements internationaux. D'autres ressources domestiques et internationales s'avèrent donc indispensables. Dans le cadre de la future communication sur les sources de financement, il conviendra d'aborder sérieusement la question des ressources fiscales internationales qui permettront de mobiliser dans la transparence et la prévisibilité les financements nécessaires, à l'éradication de la pauvreté, à la préservation de l'environnement et à la gestion des Biens publics mondiaux. Les financements innovants et la taxe sur les transactions financières, prémices d'une telle politique, devraient être alloués en priorité à ces défis globaux. En outre la mobilisation de ressources fiscales domestiques ainsi que l'orientation vers l'activité productive du transfert de l'argent des migrants reste une condition indispensable à des avancées vers des objectifs déterminés localement.

4.3

Plus d'emplois dans une économie verte et inclusive. Le ralentissement économique actuel menace sérieusement l'atteinte des OMD en 2015 en raison de son profond impact sur les emplois et sur les entreprises. Mais la crise pourrait être l'occasion de mobiliser davantage en faveur d'une économie verte capable de provoquer des changements de trajectoire vers le développement durable. À cet égard le Pacte mondial pour l'emploi de l'OIT est un nouvel instrument destiné à accélérer une trajectoire riche en emplois en stimulant la demande de travail et de qualification, en instaurant un socle de protection sociale au niveau mondial et en intégrant le secteur informel par un plan national de travail décent.

4.4

L'agriculture mondiale a été particulièrement négligée par les institutions financières internationales pendant cet exercice du Millénaire. Il y a une urgence absolue à rééquilibrer des investissements porteurs d'emplois en faveur d'une agriculture familiale et agrobiologique.

4.5

Rôle des entreprises dans la transition vers un rapport annuel de soutenabilité. Au sein des Nations Unies, le secteur privé est représenté par le Pacte Global créé en 2000 pour faire de la Responsabilité sociale des entreprises, un outil au service des OMD en regroupant aujourd'hui 8 700 entreprises intervenant dans 130 pays qui ont souscrit un engagement sur les droits au travail, les droits de l'homme, l'environnement et la lutte contre la corruption. Des engagements volontaires comme traduction du DD à l'échelle de l'entreprise peuvent jouer un rôle majeur dans les chaînes de sous-traitance. Le Comité considère que les initiatives d'écoconception, d'écoproduction, de sobriété écologique ou de commerce équitable ainsi que celles économes en ressources naturelles sont des solutions innovantes pour la réalisation d'objectifs de développement durable (17). Le comité préconise donc la mise en œuvre de la recommandation incluse dans la déclaration de RIO+2012 qui prévoit de généraliser le reporting durable par un «Corporate Sustainability Report» annuel fourni par les entreprises au même titre que le rapport financier.

5.   Développement économique durable: responsabiliser et conforter le rôle des acteurs privés

5.1

En dépit de tentations d'un retour au protectionnisme au début de la crise, le système international a évité globalement des pratiques commerciales restrictives. Cependant l'impasse de la négociation multilatérale dite du «Développement» crée un profond malaise quant aux divergences d'intérêt avec les PED. Les pays émergents sont les grands bénéficiaires de la croissance des échanges tout en accentuant leurs inégalités internes sauf dans quelques pays comme au Brésil grâce à des politiques redistributives et de lutte contre la pauvreté.

5.2

En revanche l'ouverture commerciale n'a pas apporté les résultats attendus dans nombre de pays en développement pourvus en produits agricoles et matières premières faute de diversification, de transformation et d'infrastructures. Le Comité déplore les blocages autour des Accords de Partenariat Économique avec les pays ACP. Le comité souligne que l'accès préférentiel  (18) de l'UE accordé aux Pays les moins avancés (PMA) apporte des résultats très modestes tout autant que le recours à l'aide au commerce qui constitue un mode de coopération multilatérale de plus en plus important. Le CESE recommande d'encourager l'adoption d'une facilitation au commerce déjà conclue en leur faveur à l'OMC et de promouvoir l'ouverture commerciale généralisée sans droits et sans quotas des émergents aux PMA.

5.3

Le CESE préconise que l'UE intègre structurellement les principes du droit à l'alimentation  (19) dans ses pratiques commerciales et lance une action de concertation appropriée au sein de l'OMC et auprès des autres grands partenaires commerciaux afin que ces principes deviennent partie intégrante des politiques commerciales multilatérales et bilatérales. En outre le CESE préconise une libéralisation des Biens et services environnementaux dissociés de l'éventuel accord de Doha ainsi qu'une facilitation des transferts de technologies vertes dans les accords commerciaux bilatéraux (20).

5.4

Les acteurs économiques mais aussi les infrastructures doivent résolument se projeter dans le développement durable. À ce titre, la mise en place d'infrastructures  (21) et de réseaux d'échanges constituent un levier tant pour attirer des investissements étrangers que pour soutenir le développement des PME, promouvoir des industries de transformation de matières premières ainsi que développer le commerce électronique.

Bruxelles, le 23 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  Conférence CESE février 2012 «Déclaration Pensons durable, soyons responsables ! La société civile en route pour Rio».

(2)  Avis du CESE sur «Rio+20: bilan et perspectives» (supplément d'avis), JO C 44 du 15.2.2013, p. 64–67.

(3)  Développement et coopération-EuropeAid.

(4)  Avis du CESE sur «L'économie verte-promouvoir le développement durable en Europe 2013» (Voir page 18 du présent Journal officiel).

(5)  Avis du CESE sur le thème «Pour une dimension sociale de l'Union économique et monétaire européenne» (Voir page 1 du présent Journal officiel).

(6)  Avis du CESE – Vers une politique européenne globale en matière d'investissements internationaux, rapporteur PEEL, JO C 318 du 29.10.2011, p. 150–154.

(7)  À l'échelon international «Beyond 2015» est une plateforme d'associations de développement qui anime une campagne de sensibilisation sur les enjeux de ce débat et collecte des contributions sur leur site, www.beyond2015.org

(8)  Avis exploratoire du CESE sur «La promotion de la production et de la consommation durables dans l'UE», rapporteure Mme LE NOUAIL MARLIÈRE, JO C 191 du 29.6.2012, p. 6–10.

(9)  Avis du CESE sur le «Commerce et sécurité alimentaire», rapporteur: M. CAMPLI, corapporteur: M. PEEL, JO C 255 du 22.9.2010, p. 1–9.

(10)  Rapport européen sur le Développement 2013. «Après2015: une action mondiale pour un avenir inclusif et durable».

(11)  Avis du CESE sur le thème «Connecter les «îlots énergétiques» de l'UE: croissance, compétitivité, solidarité et développement durable au sein du marché unique européen de l'énergie», rapporteur M. COULON, JO C 44 du 15.2.2013, p. 9–15.

(12)  du CESE sur la «Protection sociale dans la politique de développement», rapporteur M. ZUFIAUR, JO C 161 du 6.6.2013, p. 82–86.

(13)  Égalité de genre dans la politique de développement de l'UE plan 2010-2015.

(14)  Avis du CESE sur «Le PIB et au-delà – L'implication de la société civile dans le processus de sélection d'indicateurs complémentaires», rapporteur M. PALMIERI, JO C 181 du 21.6.2012, p. 14–20.

(15)  Avis du CESE sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil instituant un instrument financier pour la promotion de la démocratie et des droits de l'homme dans le monde», rapporteur IULIANO, JO C 11 du 15.1.2013, p. 81–83.

(16)  L'annexe de la communication présente une typologie des principaux Biens Publics mondiaux.

(17)  Étude Concord: Apport du secteur privé au développement, décembre 2012.

(18)  Avis du CESE sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil appliquant un schéma de préférences tarifaires généralisées», rapporteur M. PEEL, JO C 43 du 15.2.2012, p. 82–88.

(19)  Avis du CESE sur le «Commerce et sécurité alimentaire», rapporteur: M. CAMPLI, corapporteur: M. PEEL, JO C 255 du 22.9.2010, p. 1–9.

(20)  Avis du CESE sur «Le commerce international et le changement climatique», rapporteure Mme PICHENOT, JO C 21 du 21.1.2011, p. 15–20.

(21)  Avis du CESE sur «La stratégie UE-Afrique», rapporteur M. DANTIN, JO C 77 du 31.3.2009, p. 148–156.


19.9.2013   

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Journal officiel de l'Union européenne

C 271/151


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition modifiée de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la transparence des mesures régissant la fixation des prix des médicaments à usage humain et leur inclusion dans le champ d’application des systèmes publics d’assurance-maladie»

COM(2013) 168 final – 2012/0035 (COD)

2013/C 271/29

Le 8 avril 2013 et le 16 avril 2013, respectivement, le Conseil et le Parlement européen ont décidé, conformément à l'article 114 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition modifiée de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la transparence des mesures régissant la fixation des prix des médicaments à usage humain et leur inclusion dans le champ d’application des systèmes publics d’assurance-maladie»

COM(2013) 168 final – 2012/0035 (COD).

Étant donné que le Comité s'est déjà prononcé sur le contenu de la proposition en objet dans son avis CES1573-2012, adopté le 12 juillet 2012 (1), le Comité, lors de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 22 mai 2013) a décidé, par 161 voix pour, 2 voix contre et 5 abstentions, de ne pas procéder à l'élaboration d'un nouvel avis en la matière, mais de se référer à la position qu'il a soutenue dans le document susmentionné.

 

Bruxelles, le 22 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  Avis du CESE sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la transparence des mesures régissant la fixation des prix des médicaments à usage humain et leur inclusion dans le champ d'application des systèmes publics d'assurance maladie, JO C 299 du 4 octobre 2012, p. 81.


19.9.2013   

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Journal officiel de l'Union européenne

C 271/152


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 450/2008 établissant le code des douanes communautaire (code des douanes modernisé), en ce qui concerne sa date d'application»

COM(2013) 193 final – 2013/0104 (COD)

2013/C 271/30

Le 15 avril 2013 et le 18 avril 2013 respectivement, le Parlement européen et le Conseil ont décidé, conformément à l'article 114 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 450/2008 établissant le code des douanes communautaire (code des douanes modernisé), en ce qui concerne sa date d'application»

COM(2013) 193 final – 2013/0104 (COD).

Ayant estimé que le contenu de la proposition est satisfaisant et que par ailleurs il avait déjà fait l'objet de son avis CESE 1297/2012, adopté le 23 mai 2012 (1), le Comité, lors de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 22 mai 2013), a décidé, par 161 voix pour, 2 voix contre et 5 abstentions, de rendre un avis favorable au texte proposé et de se référer à la position qu'il a soutenue dans le document susmentionné.

 

Bruxelles, le 22 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  JO C 229 du 31 juillet 2012, p. 68.


19.9.2013   

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C 271/153


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant la communication à la Commission des projets d’investissement relatifs à des infrastructures énergétiques dans l’Union européenne, et remplaçant le règlement (UE, Euratom) no 617/2010 du Conseil»

COM(2013) 153 final

2013/C 271/31

Le 20 mars et les 15 et 16 avril 2013, respectivement, la Commission européenne, le Conseil et le Parlement européen ont décidé, conformément à l'article 194, paragraphe 2 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social sur la

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant la communication à la Commission des projets d’investissement relatifs à des infrastructures énergétiques dans l’Union européenne, et remplaçant le règlement (UE Euratom) no 617/2010»

COM(2013) 153 final.

Ayant estimé que le contenu de la proposition est entièrement satisfaisant et n'appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 22 mai 2013), a décidé, par 161 voix pour, 2 voix contre et 5 abstentions, de rendre un avis favorable au texte proposé.

 

Bruxelles, le 22 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


19.9.2013   

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C 271/154


Avis du Comité économique et social européen sur la sur la «Proposition modifiée règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche [abrogeant le règlement (CE) no 1198/2006 du Conseil, le règlement (CE) no 861/2006 du Conseil et le règlement (CE) no XXX/2011 du Conseil sur la politique maritime intégrée]»

COM(2013)245 final – 2011/0380 COD

et la «Proposition modifiée du règlement du Parlement européen et du Conseil portant dispositions communes relatives au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen, au Fonds de cohésion, au Fonds européen agricole pour le développement rural et au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche relevant du cadre stratégique commun, portant dispositions générales applicables au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen et au Fonds de cohésion, et abrogeant le règlement (CE) no 1083/2006 du Conseil»

COM(2013)246 final – 2011/0276 COD

2013/C 271/32

Le 7 mai 2013, le Conseil a décidé, conformément à l'article 42, à l'article 43, paragraphe 2, à l'article 91, paragraphe 1, à l'article 100, paragraphe 2, à l'article 173, paragraphe 3, à l'article 175, à l'article 188, à l'article 192, paragraphe 1, à l'article 194, paragraphe 2 et à l'article 195, paragraphe 2 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition modifiée du règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche [abrogeant le règlement (CE) no 1198/2006 du Conseil, le règlement (CE) no 861/2006 du Conseil et le règlement (CE) no XXX/2011 du Conseil sur la politique maritime intégrée]»

COM(2013) 245 final – 2011/0380 COD

et la

«Proposition modifiée du règlement du Parlement européen et du Conseil portant dispositions communes relatives au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen, au Fonds de cohésion, au Fonds européen agricole pour le développement rural et au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche relevant du cadre stratégique commun, portant dispositions générales applicables au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen et au Fonds de cohésion, et abrogeant le règlement (CE) no 1083/2006 du Conseil»

COM(2013) 246 final – 2011/0276 COD.

Ayant estimé que le contenu de la proposition, qui consiste en un alignement des dispositions du FEAMP sur l'ensemble existant de règles applicables à la politique de cohésion, est satisfaisant et n'appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 22 mai 2013), a décidé, par 161 voix pour, 2 voix contre et 5 abstentions, de rendre un avis favorable au texte proposé.

 

Bruxelles, le 22 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE