ISSN 1725-2431

doi:10.3000/17252431.C_2010.255.fre

Journal officiel

de l’Union européenne

C 255

European flag  

Édition de langue française

Communications et informations

53e année
22 septembre 2010


Numéro d'information

Sommaire

page

 

I   Résolutions, recommandations et avis

 

AVIS

 

Comité économique et social européen

 

458e session plénière des 16 et 17 décembre 2009

2010/C 255/01

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Commerce et sécurité alimentaire

1

2010/C 255/02

Avis du Comité économique et social européen sur La crise financière internationale et son impact sur l'économie réelle (avis d'initiative)

10

2010/C 255/03

Avis du Comité économique et social européen sur Une action concertée pour améliorer la carrière et la mobilité des chercheurs dans l'Union européenne

19

2010/C 255/04

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Soutenir les PME dans leur adaptation aux évolutions des marchés mondiaux (avis d'initiative)

24

2010/C 255/05

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Programme d'aide à l'aviation européenne (avis d'initiative)

31

 

III   Actes préparatoires

 

Comité économique et social européen

 

458e session plénière des 16 et 17 décembre 2009

2010/C 255/06

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux dénominations des produits textiles et à l'étiquetage y afférentCOM(2009) 31 final/2 — 2009/0006 (COD)

37

2010/C 255/07

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant la lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales (refonte) mettant en œuvre le Small Business ActCOM(2009) 126 final — 2009/0054 (COD)

42

2010/C 255/08

Avis du Comité économique et social européen sur le Livre vert sur la révision du règlement (CE) no 44/2001 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commercialeCOM(2009) 175 final

48

2010/C 255/09

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Repousser les limites des TIC: une stratégie en matière de recherche sur les technologies futures et émergentes en EuropeCOM(2009) 184 final

54

2010/C 255/10

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Conseil portant suspension, à titre temporaire, des droits autonomes du tarif douanier commun à l’importation de certains produits industriels dans les régions autonomes de Madère et des AçoresCOM(2009) 370 final — 2009/0125 (CNS)

59

2010/C 255/11

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen et au Comité économique et social européen — Encourager la bonne gouvernance dans le domaine fiscalCOM(2009) 201 final

61

2010/C 255/12

Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions sur Un nouveau partenariat pour la modernisation des universités: le Forum européen pour le dialogue université-entrepriseCOM(2009) 158 final

66

2010/C 255/13

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Lutte contre le cancer: un partenariat européenCOM(2009) 291 final

72

2010/C 255/14

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil concernant une initiative européenne sur la maladie d’Alzheimer et les autres démencesCOM(2009) 380 final

76

2010/C 255/15

Avis du Comité économique et social européen sur le Livre vert — Promouvoir la mobilité des jeunes à des fins d'apprentissageCOM(2009) 329 final

81

2010/C 255/16

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions: vers un meilleur ciblage de l'aide aux agriculteurs établis dans les zones à handicaps naturelsCOM(2009) 161 final

87

2010/C 255/17

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 1999/62/CE relative à la taxation des poids lourds pour l'utilisation de certaines infrastructuresCOM(2008) 436 final — 2008/0147 (COD)

92

2010/C 255/18

Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions relative à la protection des infrastructures d'information critiques Protéger l'Europe des cyberattaques et des perturbations de grande envergure: améliorer l'état de préparation, la sécurité et la résilienceCOM(2009) 149 final

98

2010/C 255/19

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Objectifs stratégiques et recommandations concernant la politique du transport maritime de l’UE jusqu’en 2018COM(2009) 8 final

103

2010/C 255/20

Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission Un avenir durable pour les transports: vers un système intégré, convivial et fondé sur la technologieCOM(2009) 279 final et le thème Points de départ pour une politique européenne de transport après 2010

110

2010/C 255/21

Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions L'internet des objets — Un plan d'action pour l'EuropeCOM(2009) 278 final

116

2010/C 255/22

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Conseil concernant la communication à la Commission des projets d’investissement relatifs à des infrastructures énergétiques dans la Communauté européenne, et abrogeant le règlement (CE) no 736/96COM(2009) 361 final — 2009/0106 (CNS)

121

2010/C 255/23

Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions Aider les pays en développement à surmonter la criseCOM(2009) 160 final

124

2010/C 255/24

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant les parasites radioélectriques (compatibilité électromagnétique) produits par les véhicules à moteur (version codifiée) COM(2009) 546 final — 2009/0154 (COD)

132

2010/C 255/25

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil abrogeant la décision 79/542/CEE du Conseil établissant une liste de pays tiers ou de parties de pays tiers et définissant les conditions de police sanitaire, les conditions sanitaires et la certification vétérinaire requises à l’importation dans la Communauté de certains animaux vivants et des viandes fraîches qui en sont issuesCOM(2009) 516 final — 2009/0146 (COD)

133

FR

 


I Résolutions, recommandations et avis

AVIS

Comité économique et social européen

458e session plénière des 16 et 17 décembre 2009

22.9.2010   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 255/1


458E SESSION PLÉNIÈRE DES 16 ET 17 DÉCEMBRE 2009

Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Commerce et sécurité alimentaire»

(avis exploratoire)

(2010/C 255/01)

Rapporteur: M. CAMPLI

Corapporteur: M. PEEL

Par lettre datée du 21 janvier 2009, Mme Margot WALLSTRÖM, vice-présidente de la Commission européenne, a demandé au Comité économique et social européen, en vertu de l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, d'élaborer un avis exploratoire sur le thème

«Commerce et sécurité alimentaire».

La section spécialisée «Relations extérieures», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 19 novembre 2009 (rapporteur: M. CAMPLI, corapporteur: M. PEEL).

Lors de sa 458e session plénière des 16 et 17 décembre 2009 (séance du 16 décembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 191 voix pour, 1 voix contre et 6 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Conclusions

1.1.1   Le CESE considère comme un droit civique essentiel le droit à l'alimentation et celui, pour la société civile, d'intervenir sur tous les aspects de cette question; il estime que la sécurité alimentaire mondiale compte parmi les droits humains fondamentaux.

1.1.2   Dans un monde qui produit assez pour nourrir l'ensemble de la population, plus d'un milliard de personnes n'ont pas accès aujourd'hui à une quantité de nourriture suffisante. La cause essentielle de cette situation d'insécurité alimentaire est la pauvreté, dans un contexte de déstructuration des économies, des traditions alimentaires et des infrastructures de marché locales engendrée par les stratégies internationales suivies depuis les années 80.

1.1.3   Le CESE est conscient du fait que le commerce réglementé peut aider des individus et des groupes, dans le cadre de politiques de développement complémentaires visant à la réduction de la pauvreté et à l'augmentation des revenus, à sortir d'une situation d'insécurité alimentaire, notamment au moyen de l'essor des marchés régionaux.

1.1.4   Le recours généralisé à des mesures protectionnistes ne favorise pas la poursuite de la sécurité alimentaire globale, car il ne garantit pas la flexibilité nécessaire et va à l'encontre de toute forme d'intégration régionale concrète, en particulier en Afrique.

1.1.5   Le CESE estime qu'un commerce réglementé doit intégrer dans son processus de décision et ses mesures d'application les principes du droit à l'alimentation et que les États doivent s'abstenir de contracter des engagements internationaux en contradiction avec ces principes.

1.1.6   Le CESE est conscient du fait que les politiques visant à assurer l'autosuffisance alimentaire sont économiquement coûteuses et ne s'accordent pas avec une stratégie de gouvernance mondiale. Dans le même temps, il considère la recherche de la souveraineté alimentaire comme le droit légitime d'un peuple à définir de manière autonome les politiques destinées à assurer sa sécurité alimentaire et à nourrir durablement sa population, dans le respect de la souveraineté alimentaire des autres.

1.1.7   Le CESE soutient qu'il est indispensable de réformer les instruments, les organismes et les politiques de la gouvernance mondiale de la sécurité alimentaire et du commerce, conformément au principe et aux pratiques de la Cohérence des politiques pour le développement.

1.1.8   Le CESE estime que toutes les stratégies possibles et utiles pour lutter contre la pauvreté et augmenter la sécurité alimentaire peuvent donner des résultats avantageux et stables à condition qu'elles aillent de pair avec l'avancée des processus démocratiques et le renforcement de l'État de droit dans les pays en situation d'insécurité alimentaire.

1.2   Recommandations

1.2.1   Le CESE, par référence à une approche politique globale, recommande d'une manière générale:

1.2.1.1   que l'Union européenne mette en œuvre le «consensus européen pour le développement», de manière à suivre une stratégie politique unique qui soit lisible par les partenaires mondiaux et à devenir le fer de lance d'une réforme en profondeur du système FAO – PAM – FIDA;

1.2.1.2   que l'Union européenne intègre structurellement les principes du droit à l'alimentation dans ses politiques commerciales et lance une action de concertation appropriée avec les autres membres de l'OMC, de manière à ce que ces principes deviennent partie intégrante des négociations multilatérales;

1.2.1.3   que l'Union européenne examine de quelle façon l'on pourrait assurer, dans le cadre des politiques en matière de responsabilité sociale des entreprises (RSE), un suivi de l'impact sur la sécurité alimentaire mondiale des activités économiques et commerciales des sociétés européennes ou établies dans l'UE; à cet égard, le CESE s'engage à préparer un avis d'initiative sur le thème: «L'agro-industrie européenne dans le monde: stratégies, enjeux et bonnes pratiques»;

1.2.1.4   que l'Union européenne prévoie, dans les futurs accords de partenariat économique ainsi que dans d'autres accords de libre-échange, un rôle institutionnel pour la société civile, comme c'est déjà le cas dans l'accord CARIFORUM-CE;

1.2.1.5   que les institutions financières internationales élaborent une réglementation appropriée des marchés financiers afin d'empêcher la spéculation sur les matières premières agricoles;

1.2.1.6   que les organisations internationales actives dans les domaines de la santé humaine et de l'environnement découragent les régimes réservant une part excessive aux protéines animales;

1.2.1.7   que la communauté internationale crée un système de réserves alimentaires internationales fonctionnant en étroite coordination avec le système d'alerte précoce instauré par la FAO;

1.2.1.8   que la communauté internationale revoie la classification de l'ONU afin d'établir une claire distinction entre les PVD à revenu moyen et inférieur et les pays les moins avancés;

1.2.1.9   que tous les États membres de l'OMC et avant tout de l'Union européenne incluent dans les mandats de négociation les analyses d'impact et de vulnérabilité par pays et par groupes spécifiques de personnes;

1.2.1.10   que les pays membres de l'OMC reconnaissent le bien-fondé de restrictions temporaires à l'exportation qui, en permettant de limiter effectivement le prix des denrées alimentaires dans les PVD, aident à gérer l'apparition de crises alimentaires touchant des catégories sociales spécifiques;

1.2.1.11   que les gouvernements des PVD associent durablement les organisations d'agriculteurs à la programmation du développement agricole et consolident toutes les formes d'organisation de la production mises en place par les agriculteurs ainsi que celles soutenues par les travailleurs et les consommateurs.

1.2.2   Le CESE, se référant en particulier aux négociations APE (accord de partenariat économique) en cours, recommande à l'UE:

1.2.2.1   d'œuvrer, particulièrement en Afrique, en faveur du renforcement de l'intégration régionale comme outil puissant de promotion à la fois du développement et de la sécurité alimentaire, et comme élément capital de la révision de l'accord de Cotonou, prévue pour 2010;

1.2.2.2   de garantir une synergie entre les différentes initiatives d'intégration régionale qui se recoupent, ainsi qu'entre les APE intérimaires et les accords globaux;

1.2.2.3   de faire en sorte que les négociations puissent s'adapter facilement aux capacités et aux potentialités des pays ACP (Groupe des États d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique), et garantir des résultats immédiats dans des domaines tels que la simplification des règles d'origine;

1.2.2.4   d'encourager le plus grand nombre possible de pays ACP à choisir l'agriculture et le développement rural comme secteurs prioritaires;

1.2.2.5   d'accroître encore le montant de plus de 2 milliards d'euros fixé par l'UE au titre de l'aide au commerce et de l'assistance en matière commerciale, compte tenu des retombées de la crise économique;

1.2.2.6   de promouvoir le développement et la croissance des industries africaines de transformation, à haute valeur ajoutée, en particulier dans le domaine alimentaire, notamment grâce à l'amélioration des infrastructures;

1.2.2.7   d'encourager de manière significative la recherche et le développement technologique au niveau local, surtout dans les domaines liés à l'agriculture.

1.2.3   En ce qui concerne plus spécifiquement les négociations de l'OMC en cours, relatives au programme de Doha pour le développement (PDD), le CESE recommande:

1.2.3.1   que les membres de l'OMC utilisent le réexamen stratégique de la politique commerciale pour relancer le débat sur les modalités des futures négociations en matière de commerce agricole, dans le cadre desquelles un statut spécifique devrait être conféré à la sécurité alimentaire, et sur les formes futures de l'assistance technique aux pays en développement;

1.2.3.2   que les membres de l'OMC concluent le cycle de Doha pour le développement d'ici 2010, comme l'a demandé le G20, afin d'honorer les engagements pris tant en matière de développement qu'en ce qui concerne les objectifs du Millénaire pour le développement (OMD);

1.2.3.3   que l'UE consolide les concessions déjà obtenues par les pays en développement, plutôt que de chercher à en obtenir d'autres pour elle-même;

1.2.3.4   que l'UE étende l'initiative TSA (Tout sauf les armes) à tous les pays qui ont été répertoriés par la FAO comme étant en état de «crise alimentaire» ou en grand danger de l'être, même s'ils ne font pas partie des PMA ou des pays ACP;

1.2.3.5   que l'UE utilise des mécanismes commerciaux afin de promouvoir une plus grande sécurité alimentaire, comme la mise en œuvre anticipée de l'accord de facilitation des échanges proposé par l'OMC, l'assistance en matière sanitaire et phytosanitaire et le soutien aux petits agriculteurs indépendants qui ne font pas partie de la chaîne d'approvisionnement contrôlée.

2.   La sécurité alimentaire face aux deux crises

2.1   Définitions

2.1.1   Le CESE est d'accord avec la définition de la sécurité alimentaire établie lors du sommet mondial de l'alimentation (1996) et universellement acceptée, selon laquelle il y a sécurité alimentaire lorsque «tous les êtres humains ont, à tout moment, un accès physique et économique à une nourriture suffisante, saine et nutritive leur permettant de satisfaire leurs besoins énergétiques et leurs préférences alimentaires pour mener une vie saine et active».

2.1.2   Au regard de cette définition, le CESE souligne que la sécurité alimentaire se présente comme une problématique complexe dont il convient de prendre simultanément en considération les quatre aspects suivants:

a)

disponibilité d'une quantité suffisante de nourriture;

b)

accès physique, économique et social;

c)

utilisation appropriée;

d)

stabilité en matière de disponibilité, d'accès et d'utilisation.

2.2   La situation actuelle et les deux crises (alimentaire et financière)

2.2.1   L'analyse de l'insécurité alimentaire met en lumière les principales caractéristiques suivantes (1): a) elle est en augmentation, et à ce jour, après les deux crises, le nombre de personnes touchées a dépassé le milliard; b) elle est de plus en plus concentrée (elle concerne à 89 % l'Asie, le Pacifique et l'Afrique subsaharienne); c) elle reste fortement rurale (70 % des individus souffrant d'insécurité alimentaire résident dans les zones rurales), mais sa composante urbaine et périurbaine gagne en importance.

2.2.2   L'action conjuguée de la crise des prix agricoles et de la crise financière apparaît comme la cause principale de la dernière augmentation du nombre de personnes souffrant d'insécurité alimentaire. En outre, les catastrophes ayant une incidence sur la sécurité alimentaire tendent à se multiplier. Parmi les désastres provoqués par l'homme, ceux de nature socioéconomique prennent d'ailleurs de plus en plus d'importance par rapport aux guerres et aux conflits.

2.2.3   Au cours des trente dernières années, les prix des matières premières agricoles ont connu des fluctuations, avec toutefois une tendance décroissante en termes réels à moyen terme. La flambée des prix de 2007-2008 a été particulièrement violente, tant par son ampleur que par sa rapidité (en un peu plus de 12 mois, l'indice des prix alimentaires de la FAO a augmenté de près de 60 %). Il convient néanmoins de rappeler que même au plus fort de la crise (mars 2008), les prix sont restés en deçà des plafonds historiques enregistrés au début des années 70.

2.2.4   S'agissant des évolutions plus récentes, il faut souligner qu'à la suite de l'éclatement de la bulle spéculative, les prix agricoles ont enregistré une baisse sensible, mais se maintiennent à un niveau supérieur à celui antérieur à la crise de 2007-2008.

2.2.5   Le CESE observe que cette évolution fluctuante des prix et leur forte et croissante volatilité s'expliquent par une combinaison de causes structurelles, conjoncturelles et spéculatives.

2.2.6   Le CESE relève en particulier une corrélation étroite entre l'évolution récente des prix agricoles et le prix du pétrole, qui influe à la fois sur les coûts de production de l'agriculture et sur l'opportunité de produire des biocarburants, surtout avec le soutien d'aides publiques.

2.2.7   Parmi les autres causes concomitantes de la crise alimentaire, on peut mentionner la diminution progressive des investissements agricoles, la faible productivité chronique des rendements agricoles dans les pays pauvres, l'urbanisation accélérée, la hausse des revenus dans certains pays émergents (Chine et Inde), qui conduit la population à adopter une alimentation plus carnée, et le démantèlement des systèmes de réserves alimentaires.

2.2.8   Le CESE souligne que cette nouvelle donne s'accompagne d'une tendance accrue de la part des capitaux spéculatifs et des fonds d'investissement, y compris européens, à inclure dans leur portefeuille des titres liés aux matières premières agricoles, ce qui accentue la volatilité des prix et induit des distorsions sur le marché des contrats à terme.

2.2.9   Le CESE insiste donc sur le fait que si l'on n'intervient pas au moyen de réformes rapides et radicales des marchés financiers, les spéculations sur les prix des matières premières agricoles reprendront de plus belle dans les prochains mois et par la suite, ce qui risque d'avoir une incidence non négligeable sur l'augmentation de l'insécurité alimentaire.

2.2.10   La crise financière conjuguée à celle des prix des matières premières agricoles a amorcé dans les PVD des processus en chaîne tels que la réduction des flux de capitaux d'investissement étrangers, la diminution des transferts, l'impossibilité pour les gouvernements de mettre en œuvre des programmes de dépenses publiques, une tendance à revenir aux «aides liées», la baisse des investissements intérieurs, l'aggravation de la pauvreté, la réduction des semis, avec la perspective de récoltes moins abondantes et la reprise à la hausse des prix des aliments.

2.2.11   Les catégories sociales les plus touchées sont celles présentant les principaux facteurs de vulnérabilité: la population rurale sans terre, les ménages où le chef de famille est une femme et les urbains pauvres. S'agissant des différents pays, les plus touchés sont ceux dépendant de manière stratégique des importations, ce qui met en évidence la nécessité vitale d'un développement agricole local.

2.2.12   Face à ces scénarios, le CESE souligne l'urgence d'accroître les ressources financières internationales destinées au développement. À cet égard, le Comité défend l'idée d'une taxation des transactions financières (2), dont le produit pourrait financer les interventions en faveur de la sécurité alimentaire.

2.2.13   Il est également essentiel que les pays ACP utilisent différemment les subventions du FED afin d'augmenter la sécurité alimentaire; en effet, actuellement, alors que 70 % de la population souffrant d'insécurité alimentaire réside dans les zones rurales, les gouvernements des pays ACP n'ont affecté que 7,5 % des ressources du 9e Fonds européen de développement (2000-2007) au développement rural, et moins de 1,5 % à des activités expressément liées à l'agriculture.

2.3   Problèmes émergents

2.3.1   Une analyse de l'insécurité alimentaire à long terme requiert une prise de conscience simultanée d'autres phénomènes émergents et désormais structurellement liés:

Eau: le lien entre la sécurité alimentaire et la question de l'eau est affirmé dans la résolution de l'ONU du 20 avril 2001. Il est nécessaire que la notion de «droit d'accès à l'eau» fasse l'objet d'une reconnaissance politique et juridique dans la mesure où l'accès à l'eau potable est une condition fondamentale de la santé publique et fait partie intégrante d'une alimentation qualitativement adéquate.

Terres (bradées): un nouveau phénomène de nature économique et politique est récemment venu aggraver la pénurie de terres agricoles utilisables: l'acquisition de grandes superficies de terrains par des États, des sociétés privées et des fonds d'investissement, qui s'assurent le contrôle de la production et vont jusqu'à menacer l'indépendance des États (3). Il convient donc de définir au plus vite un cadre juridique, bilatéral et multilatéral, assurant une juste répartition des bénéfices du point de vue du travail, des normes environnementales, du développement technologique et de la sécurité alimentaire du pays concerné.

Climat: les individus les plus touchés par le changement climatique sont les petits propriétaires agricoles ayant une moindre capacité d'adaptation et les opérateurs du secteur de la pêche des PVD.

Biocarburants: le CESE a déjà souligné dans d'autres avis l'influence de la production de biocarburants sur l'augmentation des prix alimentaires et de leur volatilité.

Question démographique: ces dernières années, la croissance démographique mondiale ne s'est pas accompagnée d'une augmentation équivalente de la productivité agricole, compte tenu des faibles investissements réalisés dans ce secteur; par conséquent, des politiques démographiques spécifiques continueront de jouer un rôle déterminant, surtout dans les pays les plus à risque.

3.   Droit à l'alimentation

3.1   Le CESE souligne la nécessité d'adjoindre aux instruments de gestion des tendances des marchés et à leurs institutions spécifiques de nouveaux dispositifs du droit international. L'action combinée de la pleine affirmation du droit des peuples et de l'amélioration progressive des instruments de l'économie de marché peut instaurer un nouveau cadre stratégique pour la gestion dans sa globalité de la question complexe de la «sécurité alimentaire».

3.2   Pour que cette stratégie débouche sur des résultats intéressants et durables, il faut que la démocratie progresse parallèlement et que l'État de droit soit renforcé dans les pays en situation d'insécurité alimentaire.

3.3   Le CESE approuve la définition du droit à l'alimentation en tant que «droit d'avoir un accès régulier, permanent et libre, soit directement, soit au moyen d'achats monétaires, à une nourriture quantitativement et qualitativement adéquate et suffisante, correspondant aux traditions culturelles du peuple dont est issu le consommateur, et qui assure une vie psychique et physique, individuelle et collective, libre d'angoisse, satisfaisante et digne.» (4) Cette définition est étroitement liée au concept de sécurité alimentaire tel qu'il est défini au premier paragraphe du «Plan d'action du Sommet mondial de l'alimentation» et analysé au paragraphe précédent du présent avis.

3.4   En novembre 2004, les États membres de la FAO ont adopté des lignes «directrices volontaires» (5) concernant l'interprétation de ce droit social, économique et culturel et de recommandant la mise en œuvre d'actions pratiques pour la concrétisation du droit à l'alimentation.

3.5   Aujourd'hui, divers pays dans le monde disposent d'une constitution faisant explicitement référence au droit à l'alimentation, mais rares sont ceux qui ont adopté des lois internes garantissant le respect réel de ce droit. Parmi ceux-ci, l'Afrique du Sud et le Brésil ont également adopté une législation ordinaire dans laquelle ils reconnaissent que le droit à l'alimentation et à l'eau peut constituer le fondement d'une action légale (action en justice, etc.).

3.6   Allant plus loin dans cette direction, le rapporteur spécial des Nations unies sur le droit à l'alimentation, dans le cadre de sa mission auprès de l'OMC, a mis en avant quatre lignes directrices (6): le rôle du commerce doit être défini en liaison avec les droits de l'homme et les objectifs du développement; l'accent doit être mis sur l'importance d'un cadre multilatéral pour les échanges commerciaux; il faut adopter un nouvel angle de vue, en mesurant l'impact de la libéralisation non plus sur les valeurs agrégées (telles que le PIB par habitant), mais sur les besoins des personnes vivant en situation d'insécurité alimentaire; il y a lieu d'intégrer durablement dans les négociations l'impact sur la santé, l'alimentation et l'environnement. Les États devraient en conséquence s'abstenir de contracter des engagements internationaux allant à l'encontre de ces objectifs prioritaires.

3.7   Dans cet esprit, certains États ont commencé à développer des stratégies précises et à reconnaître à la sécurité alimentaire le statut de bien public. De nombreux PVD ont à leur tour réclamé des mesures concrètes afin de protéger leur sécurité alimentaire en introduisant la catégorie développement/sécurité alimentaire dans l'accord sur l'agriculture. D'autres pays ont proposé au cours des négociations la création d'une «clause de sécurité alimentaire» qui prenne en compte les besoins particuliers en matière de sécurité alimentaire. En vertu de cette clause, il serait possible d'insérer dans l'agenda des négociations d'éventuelles exemptions qui accordent à certains pays davantage d'autonomie pour protéger leur production alimentaire de base, la sécurité alimentaire étant considérée comme un fondement essentiel de la sécurité nationale.

3.8   Le CESE demande à l'UE une initiative politique forte en vue d'une adhésion formelle aux principes du droit à l'alimentation et de l'insertion dans les futurs mandats de négociation de l'«impératif» du droit à l'alimentation, tel que défini par l'ONU.

4.   Commerce et sécurité alimentaire

4.1   Interdépendances et conséquences

4.1.1   Le CESE reconnaît l'importance, pour l'amélioration de l'efficacité de la production agricole mondiale, de marchés internationaux ouverts mais encadrés par des règles.

4.1.2   Le CESE se montre toutefois préoccupé par la vulnérabilité accrue à laquelle s'exposent les pays qui, en se spécialisant, sont de plus en plus dépendants des marchés internationaux. La sécurité alimentaire peut être menacée par une dépendance excessive vis-à-vis de l'évolution des prix des denrées alimentaires exportées et de celles importées, particulièrement volatils ces dernières années.

4.1.3   Il est en outre à noter que l'ouverture des marchés produit des effets qui sont loin d'être neutres en matière de distribution et entraîne des coûts d'ajustement souvent insupportables pour certaines couches de la population.

4.1.4   Le CESE souligne que l'ouverture des marchés peut offrir des perspectives importantes de développement rural grâce à la croissance des exportations, à condition d'agir sur le déséquilibre du pouvoir de marché tout au long de la filière de production et sur les déficiences technologiques, institutionnelles ou en matière d'infrastructures, qui pourraient avoir pour effet de transformer en retombées négatives l'impact positif des marchés ouverts en ce qui concerne l'accès à la nourriture.

4.1.5   La plupart des personnes en situation d'insécurité alimentaire sont de petits propriétaires terriens ou des ouvriers agricoles. Ce sont surtout eux qui, ne disposant pas de crédits, d'infrastructures, ni de connaissances en matière de technologie et de marché, ne sont pas en mesure d'adapter leur mode de production de façon à pouvoir profiter des possibilités de développement offertes par l'ouverture des marchés.

4.1.6   Le CESE attire l'attention sur le phénomène de concentration croissante du commerce mondial des produits alimentaires dans les mains d'un petit nombre d'opérateurs, en particulier dans le secteur des céréales. Le CESE constate avec inquiétude que ce phénomène se développe dans l'ensemble de la filière agro-industrielle et alimentaire, à commencer par le secteur stratégique des semences.

4.1.7   Le CESE constate que si ce processus n'est pas convenablement géré et régulé, l'ouverture graduelle des marchés risque d'accentuer ces tendances de type oligopolistique. Il convient en conséquence de préserver la compétitivité des marchés, tout en veillant au respect des règles en vigueur en matière de concurrence.

4.1.8   Les liens entre le commerce et la sécurité alimentaire sont donc multiples et ont des effets contrastés. D'une manière générale, les analyses économétriques montrent que si elle n'est pas accompagnée par d'autres politiques et par des mesures complémentaires, la croissance économique induite par le processus de libéralisation commerciale n'est pas en soi suffisante pour réduire de manière significative le nombre de personnes vivant dans des conditions de pauvreté et d'insécurité alimentaire.

4.1.9   Une stratégie mondiale de sécurité alimentaire doit donc s'articuler selon les actions et les politiques suivantes: réduction de la pauvreté et augmentation des revenus; politiques de bien-être et de protection sociale; politiques agricoles et développement rural; recherche et développement; commerce et développement régional intégré; aide alimentaire; politiques démographiques; lutte contre la corruption.

4.2   Négociations commerciales: problèmes et défis actuels

4.2.1   Des mesures immédiates doivent être prises dans le contexte des négociations de l'OMC (cycle de développement de Doha); il est essentiel de relancer le programme de Doha pour le développement (PDD) afin de tenir les engagements pris et de conclure ces négociations d'ici 2010, comme proposé par le G20.

4.2.2   La Commission affirme que même si la politique commerciale a un rôle important à jouer dans le traitement de la crise alimentaire, elle n'en constitue pas l'élément essentiel. Le changement climatique, l'instabilité politique et le manque de sécurité, les déficiences en matière de gestion et d'État de droit, la corruption, la croissance démographique et la crise économique et énergétique sont autant de facteurs qui jouent un rôle clef à cet égard, sans oublier les menaces croissantes qui pèsent sur l'approvisionnement en eau dans de nombreuses régions du monde et l'augmentation du prix des carburants. Toutefois, la politique commerciale, si l'on en fait bon usage, peut contribuer à résoudre une partie du problème, mais elle peut aussi l'aggraver si elle est mal utilisée. Il est en outre important de bien faire la distinction entre aide alimentaire d'urgence et sécurité alimentaire à plus long terme.

4.2.3   Le CESE observe que sous la pression de la crise alimentaire et financière, certains pays ont adopté des mesures de type protectionniste (dont plus de 60 ont été notifiées à l'OMC en 2008) qui ne contribuent pas à l'établissement de la sécurité alimentaire, ne garantissent pas la flexibilité nécessaire, vont à l'encontre de toute forme d'intégration régionale concrète, en particulier en Afrique, et sont en contradiction avec une approche mondiale de la sécurité alimentaire.

4.2.4   Comme l'a souligné le CESE dans un avis (7) élaboré à l'occasion du 10e séminaire régional ACP-UE qui s'est tenu à Gaborone en juin 2009, le commerce international des produits agricoles et alimentaires ne concerne que 10 à 11 % (si l'on considère le tonnage) des réserves alimentaires actuellement disponibles dans le monde.

4.2.5   Il y a lieu néanmoins d'examiner la politique commerciale de l'UE à la fois à court et à long terme. À court terme, l'on citera en premier lieu les négociations multilatérales – actuellement bloquées – de l'OMC dans le cadre du cycle de Doha sur le développement, les séries de négociations commerciales bilatérales de l'UE telles qu'elles sont exposées dans la communication de la Commission d'octobre 2006, intitulée «Une Europe compétitive dans une économie mondialisée», ainsi que les négociations en cours sur les APE avec les pays ACP. Concernant ce dernier point, le seul APE conclu jusqu'ici est l'accord avec le Cariforum, accord qui comporte des implications importantes pour la participation future de la société civile. Toutefois, les APE intérimaires conclus avec d'autres pays ACP ont aussi un rôle important à jouer.

4.2.6   En ce qui concerne le long terme, un réexamen stratégique est essentiel. Il convient de conférer un statut spécial à la sécurité alimentaire. Il faudrait relancer le débat sur le type d'équilibre (en particulier entre pays développés et pays en développement, compte tenu du changement climatique, de la rareté de l'eau et d'autres problèmes similaires) qu'il y a lieu d'établir pour les futures négociations sur l'agriculture à l'OMC. L'on devra également définir le futur type d'assistance technique aux pays en développement, et examiner s'il faut maintenir les accords du type «engagement unique», lesquels sont souvent préjudiciables à ces pays. L'assistance technique devrait viser à développer les capacités de pays – ou de régions – à formuler et à négocier une politique commerciale plutôt que leur permettre simplement de faire face à la mise en œuvre.

4.2.7   À brève échéance, il importe d'étudier quels instruments commerciaux sont les plus valables dans un système d'échanges commerciaux ouvert et réglementé pour lutter contre l'insécurité alimentaire dans les pays les plus pauvres et réaliser le premier objectif du Millénaire pour le développement (OMD 1), afin de faire chuter le nombre de personnes souffrant de malnutrition et d'augmenter la production alimentaire mondiale en réponse à l'augmentation prévue de la demande.

4.2.8   La FAO (Organisation pour l'alimentation et l'agriculture) dresse une liste de 17 pays où règne l'insécurité alimentaire, pays qu'elle décrit comme étant en situation de crise alimentaire, 17 autres étant exposés à un risque élevé. Sur ces 34 pays (8), 23 sont membres de l'OMC, 25 autres font partie des PMA et 25 sont des pays ACP. Certains de ces pays sont membres de l'OMC de longue date, mais ne jouent qu'un rôle mineur dans les négociations de Doha. D'autres – le Kenya et le Zimbabwe par exemple – ont connu des périodes difficiles. Le Kenya est le pays le plus actif dans les négociations. À l'heure actuelle, seul le Nicaragua participe aux négociations bilatérales dans le cadre de l'initiative «Une Europe compétitive dans une économie mondialisée», alors que la plupart des pays participent aux négociations APE.

4.2.9   Eu égard à l'inclusion de certains PVD dans le G20, le CESE estime que la classification de l'ONU doit être revue en vue d'établir une distinction claire entre les PVD à revenu moyen et inférieur et les pays les moins avancés.

4.2.10   En ce qui concerne les négociations du cycle de développement de Doha relatives à l'agriculture:

Toutes les parties aux négociations considèrent qu'aux fins d'une plus grande sécurité alimentaire, un retour aux piliers «soutien interne» et «subventions à l'exportation» serait inapproprié.

Il n'est pas non plus nécessaire de changer radicalement l'approche de l'UE concernant le troisième pilier, l'accès au marché. Ce pilier couvre les niveaux de réduction tarifaire prévus et d'autres questions qui ont conduit à l'impasse actuelle dans laquelle se trouve le PDD, même si des progrès significatifs ont été accomplis fin 2008 dans de nombreux domaines, dont les nouvelles facilités accordées aux pays en développement qui sont «importateurs nets de produits alimentaires», un point dont le Comité se félicite tout particulièrement.

Le Comité invite fermement l'UE à consolider les concessions déjà consenties dans des domaines clefs tels que le mécanisme de sauvegarde spéciale (autorisant les pays en développement à relever leurs tarifs à titre temporaire dans l'éventualité d'une augmentation soudaine des importations et d'une crise des prix), le mécanisme relatif aux produits spéciaux (permettant aux pays en développement d'appliquer des réductions tarifaires moins importantes, notamment pour des raisons de sécurité alimentaire) ou les contingents tarifaires, plutôt que de défendre un accord plus avantageux aux dépens des pays en développement. Ces mesures ne doivent toutefois pas représenter une menace pour le développement du commerce Sud-Sud.

Le Comité invite également l'UE à étendre son initiative «Tout sauf les armes» (TSA) (qui a déjà donné de bons résultats), ainsi que les concessions en matière d'exemptions de droits de douane et de quotas accordées aux 49 PMA dans le cadre du PDD, aux 9 (9) autres pays figurant sur la liste de la FAO conformément aux APE intérimaires (sauf si cela est politiquement inacceptable), en se réservant la possibilité d'inclure d'autres pays si la FAO devait les ajouter à sa liste. C'est dans cet esprit que l'UE peut le mieux contribuer, au moyen d'instruments commerciaux, à une plus grande sécurité alimentaire.

4.2.11   Le Comité estime cependant que c'est par les négociations APE en cours que la Commission peut le mieux contribuer à la sécurité alimentaire mondiale, notamment grâce à la révision de l'accord de Cotonou, prévue pour 2010.

4.2.12   L'UE considère à juste titre le commerce comme l'un des six domaines prioritaires de sa politique de développement. Dans le cadre de ces négociations, l'UE et les pays ACP ont prévu de conclure sept nouveaux accords de commerce sur une base régionale, compatibles avec l'OMC et destinés à éliminer progressivement les barrières aux échanges et à favoriser la coopération dans tous les domaines liés au commerce. Ce dernier est conçu en premier lieu comme un instrument de développement. Il convient de rappeler que parmi les objectifs d'origine figuraient la promotion du développement durable, l'éradication de la pauvreté, l'intégration régionale et l'insertion progressive des pays ACP dans l'économie mondiale. Ces objectifs doivent demeurer au cœur de toutes les négociations en cours.

4.2.13   L'UE devrait s'efforcer, par le biais de ces négociations, de parvenir aux objectifs suivants:

accroître l'intégration régionale: c'est là un objectif essentiel, particulièrement en Afrique, car il constitue un outil puissant de promotion du développement et de la sécurité alimentaire et un élément essentiel de la révision de l'accord de Cotonou;

favoriser les synergies entre les différentes initiatives d'intégration régionale qui se recoupent, ainsi qu'entre les accords intérimaires APE et les accords globaux;

faire en sorte que les négociations puissent s'adapter facilement aux capacités et aux potentialités des pays ACP, et garantir des avantages immédiats, s’agissant notamment de la simplification des règles d'origine (destinée à promouvoir les industries basées sur l'agriculture) ou de la certitude juridique de pouvoir accéder aux marchés de l’UE sans que les produits ne soient soumis à des droits ou des quotas; toutefois, ces négociations ne doivent pas être utilisées pour soulever d'autres questions – notamment celle des marchés publics – qui ne seraient pas liées aux APE ni pour faire pression en vue de leur traitement;

encourager le plus grand nombre possible de pays ACP à choisir l'agriculture et le développement rural comme secteurs prioritaires (seuls 4 sur 78 l'ont fait pour l'agriculture, et 15 autres seulement ont choisi le développement rural pour le 9e FED (Fonds européen de développement), dans le cadre duquel l'UE offre quelque 522 millions d'euros pour l'intégration régionale et l'assistance liée au commerce), des ressources supplémentaires étant destinées à promouvoir de manière significative la R&D au niveau local dans les domaines de l'alimentation et de l'agriculture;

une nouvelle augmentation, en plus des 2 milliards d'euros déjà prévus par l'UE – et approuvés par le Comité – au titre de l'aide au commerce et de l'assistance liée au commerce en 2010; cette augmentation supplémentaire se justifierait compte tenu des répercussions de la crise économique mondiale.

4.2.14   Le CESE a fait valoir (10) que «le développement économique de l'Afrique passe d'abord et avant tout par l'approfondissement de son marché intérieur capable de développer une croissance endogène permettant de stabiliser et d'asseoir le continent dans l'économie mondiale. L'intégration régionale, le développement du marché intérieur sont des points d'appui, les tremplins qui permettront à l'Afrique de s'ouvrir positivement au commerce mondial». Le CESE réitère cet appel dans le but d'accroître la sécurité alimentaire.

4.2.15   Ce sont les industries de transformation qui créent les produits à haute valeur ajoutée, et l'UE devrait encourager leur développement et leur croissance. Dans le secteur agricole, en particulier, une industrie locale de transformation de produits alimentaires ne pourra se développer que s'il existe un marché local suffisamment vaste; néanmoins, le commerce intra-africain demeure terriblement limité, et représente moins de 15 % du total des échanges à l'intérieur du continent.

4.2.16   Les APE sont pour l'essentiel des accords régionaux ou bilatéraux. Il est important dès lors que ces accords ne fassent pas obstacle au multilatéralisme. Ils devraient être perçus comme un soutien à l'approche multilatérale et comme un élément non seulement compatible avec le multilatéralisme, mais susceptible en fin de compte de le renforcer (11). De fait, le Comité estime que les résultats obtenus au niveau régional et bilatéral peuvent stimuler le processus multilatéral, dans la mesure où ils donnent lieu à des discussions plus approfondies et se traduisent par un alignement plus strict des positions. Il importe que le pouvoir de négociation des PVD plus pauvres et des PMA ne soit affaibli à aucun niveau des négociations.

4.2.17   L'UE doit également chercher à apporter une plus grande contribution à la sécurité alimentaire mondiale à travers d'autres mécanismes liés aux échanges, dont les suivants:

des efforts plus importants et ciblés pour le renforcement des capacités des pays en situation d'insécurité alimentaire, notamment un système efficace d'aide au commerce en tant que partie intégrante des négociations multilatérales, surtout au moyen de la promotion de la R&D locale, de l'accroissement des transferts de technologie, de l'élaboration de meilleures normes de production, ainsi que d'un recours accru à l'assistance technique liée au commerce, comme le prévoient déjà les négociations pour les APE;

la facilitation des échanges commerciaux: conclusion et mise en œuvre de tout accord avant l'engagement unique au sein du PDD;

un renforcement de l'aide en matière de mesures sanitaires et phytosanitaires (SPS): questions de santé publique, animale et végétale, telles que le recours abusif aux antibiotiques, la grippe porcine ou la fièvre aphteuse;

des initiatives telles que le système de préférences généralisées plus (SPG+), dont les bénéficiaires doivent adhérer à des règles internationales en matière de droits de l'homme, de bonne gouvernance, de droit du travail et de normes environnementales, et le commerce éthique (en encourageant les principes du «commerce équitable et solidaire», qui prennent en compte la question de la traçabilité, en étendant ce concept afin d'inclure également les ventes aux enchères);

le soutien au développement de la capacité de transformation dans les pays en développement, notamment à travers le détachement d'acteurs clefs de l'industrie de l'UE, une expérience déjà pratiquée par la Commission avec la CNUCED;

l'examen d'éventuelles mesures de sauvegarde contre les effets délétères que la spéculation sur les denrées de base pratiquée ailleurs est susceptible d’avoir des sur les agriculteurs et sur la production (cacao, café, etc.).

4.2.18   Bien que les APE aient été lancés en partie pour remédier au problème de l'érosion des préférences, il subsiste des questions d'importance qui touchent plus directement les échanges commerciaux Sud-Sud. Certains pays d'Amérique latine aspirent à une libéralisation plus rapide et accrue des produits tropicaux, y compris la banane et le sucre, à l'origine de litiges commerciaux de longue date, ce qui va à l'encontre des intérêts d'autres pays, notamment les pays ACP. Ce qui est en jeu ici, c'est la possibilité pour certains pays exportateurs nets de produits alimentaires de vendre moins cher que d'autres certaines denrées, y compris le sucre, compromettant ainsi la viabilité économique de ces cultures dans les pays qui en ont peut-être le plus besoin. Ce problème est lui aussi au cœur de la question de la sécurité alimentaire.

4.2.19   Il convient en outre de tenir compte de l'incidence des pertes de recettes fiscales pour les PVD qui doivent réduire leurs droits de douane, avec des répercussions sur leurs politiques sociales.

4.2.20   L'UE doit néanmoins encourager le commerce Sud-Sud en général, d'autant qu'il est possible de parvenir non seulement à une croissance considérable, mais encore de contribuer à traiter en profondeur la menace d'un accroissement de l'insécurité alimentaire.

4.3   Réforme de la gouvernance mondiale

4.3.1   Le CESE tient avant tout à souligner qu'une situation de sécurité alimentaire suppose la mise en œuvre d'un projet mondial de développement socioéconomique, fruit d'une double convergence: celle entre les différentes politiques (sociales, économiques et territoriales) et celle entre les différentes institutions nationales et internationales. Cette gestion spécifique nécessite la mise à contribution et la collaboration de la société civile organisée.

4.3.2   S'agissant plus précisément de l'action des institutions et des instances actuellement chargées de la gouvernance mondiale de la sécurité alimentaire, le CESE ne constate pas tant la nécessité de nouveaux organismes que celle d'une réorganisation et réforme en profondeur des organismes existants, selon le double critère de la spécialisation de chacun d'entre eux dans des tâches particulières (de manière à éviter les chevauchements et la dispersion des ressources humaines et financières) et de l'unicité de la gouvernance mondiale, en référence notamment à l'organisation des Nations unies (FAO, FIDA et PAM), qui devrait prendre la direction des opérations en matière de sécurité alimentaire. Opportunément réformé et relancé, le Comité de la sécurité alimentaire (CSA) peut constituer un outil pour la coordination des politiques en matière de sécurité alimentaire ainsi que des différents niveaux auxquels celles-ci sont appliquées.

4.3.3   Le CESE souligne en outre l'impérieuse nécessité d'assurer également la coordination des actions en la matière de la Banque mondiale et d'autres institutions pertinentes, vis-à-vis desquelles l'UE doit absolument parler d'une seule voix.

4.3.4   Le CESE fait par ailleurs observer, en ce qui concerne les flux de denrées alimentaires internationaux dirigés du Nord vers le Sud, qu'il faut tenir compte du fait que les interventions sous forme d'aides alimentaires massives risquent de perturber fortement les marchés locaux et de compromettre la sécurité alimentaire des producteurs agricoles eux-mêmes. Le CESE soutient dès lors le PAM dans sa décision de s'orienter vers une approche différente en matière d'interventions.

5.   Les perceptions et le rôle de la société civile

Les perceptions de la société civile européenne

5.1   S'agissant de la problématique vitale de la nourriture, le CESE note les éléments essentiels suivants:

a)

une bonne partie des préoccupations quotidiennes dans la vie concrète des individus concernent l'alimentation (la nourriture synonyme de «nutrition»);

b)

une part importante des aspirations des individus par rapport à une vie bonne et agréable concerne l'alimentation (la nourriture synonyme de «culture et style de vie»);

c)

pour une très grande partie de l'humanité, aujourd'hui encore, au début du troisième millénaire, l'alimentation représente chaque jour une conquête incertaine (la nourriture synonyme de «facteur de survie»).

5.2   Par conséquent, le CESE, en tant que représentant de la société civile européenne organisée, souligne d'une part que la question actuelle de l'alimentation (aliments sains, de qualité et disponibles) est devenue une donnée permanente dans les relations entre les individus et les groupes sociaux et dans les circuits d'information des médias; il estime d'autre part que le pouvoir d'intervention de la société civile sur tous les aspects de l'alimentation fait partie des droits de citoyenneté, et que la sécurité alimentaire s'inscrit également dans le cadre des droits: l'accès à la nourriture doit donc être considéré comme un droit humain fondamental.

5.3   Le CESE constate en outre que dans le contexte de la crise alimentaire, tout d'abord, et financière, ensuite, l'on a pu observer, au sein des diverses composantes de la société civile, au niveau mondial et européen, des réactions diverses, voire opposées, qui confirment sa forte implication dans les dynamiques de l'alimentation, ainsi que sa désorientation: des révoltes de la faim (au moins 22, en 2008, avec des morts) à l'attention portée par une partie des consommateurs européens à des produits financiers spéculatifs spécifiques liés aux prix des produits agricoles, en passant par les préoccupations des producteurs agricoles partout en Europe et dans le monde, et de manière générale, les inquiétudes croissantes de tous les citoyens face aux questions de sécurité alimentaire, de santé publique et de gestion de l'eau.

Le rôle de la société civile

5.4   Dans le cadre de la recherche d'un juste équilibre entre sécurité alimentaire et commerce réglementé, le CESE souligne la nécessité de renforcer le rôle de la société civile et de mettre en place un dialogue plus structuré entre celle-ci et les pouvoirs décisionnels aux divers niveaux; il souligne en particulier la fonction de concertation des organisations de producteurs agricoles et l'importance des diverses formes d'organisation de la production mises en œuvre par leurs soins.

5.5   L'association des organisations de producteurs agricoles à l'élaboration des politiques nationales de développement et leur participation aux processus décisionnels et aux évaluations d'impact concernant les négociations commerciales et leur application revêtent donc, selon le CESE, une importance stratégique.

5.6   À cette fin, il est nécessaire de destiner des aides financières spécifiques à la formation professionnelle des agriculteurs, et en particulier des femmes, en raison de leur rôle stratégique dans les zones rurales, afin que les agriculteurs et agricultrices puissent s'affirmer en tant que protagonistes actifs des processus politiques et du développement technologique.

5.7   Le CESE souligne également l'importance de l'économie sociale et de ses entreprises et organisations dans les pays ACP, s'agissant notamment de la réponse apportée aux diverses retombées de la crise alimentaire et financière, en particulier en ce qui concerne les personnes travaillant dans l'économie informelle et dans les zones rurales. (12)

5.8   Enfin, le CESE réaffirme sa propre contribution active en la matière. En effet, son expérience lui permet de repérer dans d'autres pays, dans tous les secteurs de la société civile (producteurs, travailleurs et consommateurs), des partenaires potentiels en vue de renforcer leur rôle sur le terrain, d'une importance cruciale pour la résolution des problèmes au niveau local. Parallèlement, l'UE pourra disposer avec le CESE d'un «baromètre» permettant de mesurer si les initiatives qu'elle lance dans les différents pays portent leurs fruits et en améliorer l'efficacité. Le comité consultatif de la société civile CARIFORUM-CE est un bon exemple à cet égard.

Bruxelles, le 16 décembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  FAO, L'état de l'insécurité alimentaire dans le monde, rapport 2008 et rapport 2009.

(2)  Cf. l'avis du CESE sur le «Rapport de Larosière» (JO C 318 du 23 décembre 2009, p. 57.

(3)  FAO, IIED et FIDA, Land grab or development opportunity? (Accaparement des terres ou opportunités de développement?), 2009.

(4)  ONU, Le droit à l'alimentation, Commission des droits de l'homme, résolution 2001/25 et rapport établi par M. Jean ZIEGLER, Rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation, point 14, 7 février 2001.

(5)  Conseil de la FAO, «Directrices volontaires à l'appui de la concrétisation progressive du droit à une alimentation adéquate dans le contexte de la sécurité alimentaire nationale», novembre 2004.

(6)  Rapport du rapporteur spécial des Nations unies sur le droit à l’alimentation, M. Oliver De SCHUTTER, Mission auprès de l'Organisation mondiale du commerce, 9 mars 2009.

(7)  DI CESE 34/2009, «Garantir une sécurité alimentaire durable dans les pays ACP».

(8)  Cameroun, République centrafricaine, Comores, République démocratique du Congo, Côte d'Ivoire, Djibouti, Érythrée, Éthiopie, Gambie, Guinée, Guinée-Bissau, Haïti, Kenya, Lesotho, Libéria, Madagascar, Mongolie, Mozambique, Nicaragua, Niger, Palestine, Rwanda, Sénégal, Sierra Leone, îles Salomon, Somalie, Swaziland, Tanzanie, Tadjikistan, Timor Oriental, Yémen, Zambie et Zimbabwe.

(9)  Cameroun, Côte d'Ivoire, Kenya, Mongolie, Nicaragua, Palestine, Swaziland, Tadjikistan, Zimbabwe.

(10)  JO C 77 du 31.3.2009, pp. 148-156.

(11)  JO C 211 du 19.8.2008, pp. 82-89.

(12)  OIT, Déclaration et «Plan d’action pour la promotion des entreprises et organisations de l’économie sociale en Afrique», Johannesburg, 19-21 octobre 2009.


22.9.2010   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 255/10


Avis du Comité économique et social européen sur «La crise financière internationale et son impact sur l'économie réelle»

(avis d'initiative)

(2010/C 255/02)

Rapporteur: M. CEDRONE

Le 26 février 2009, le Comité économique et social européen a décidé, conformément aux dispositions de l'article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d'élaborer un avis d'initiative sur:

«La crise financière et son impact sur l'économie réelle».

La section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 13 novembre 2009 (rapporteur: M. CEDRONE).

Lors de sa 458e session plénière des 16 et 17 décembre 2009 (séance du 16 décembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 122 voix pour, 75 voix contre et 33 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le Comité estime que face à une crise telle que celle que nous traversons aujourd'hui, il convient de faire preuve d'une grande volonté de coordination des interventions, à travers des engagements communs à la mesure de la gravité de la situation, afin de définir des actions et des propositions à court et à long terme qui soient susceptibles de favoriser la reprise et d'éviter la répétition des événements à l'origine des dérèglements actuels.

1.2    Finance internationale : conformément aux orientations déjà proposées par le Comité, il convient de rappeler la nécessité en tout état de cause d'adopter à brève échéance un ensemble de règles qui, tout en autorisant la libre circulation des capitaux, introduisent parallèlement un système de surveillance et de sanctions en mesure d'empêcher la reproduction des effets pernicieux d'un système échappant à tout «contrôle». Ces règles doivent permettre le rétablissement d'un marché mieux intégré et plus transparent. La suppression des paradis fiscaux, du secret bancaire et de certains mécanismes pervers du passé liés aux titres spéculatifs peut également favoriser une telle évolution. Il y a lieu de revenir à la distinction entre banques commerciales et banques d'investissement.

1.3    Finance européenne : il y a lieu de créer un marché unique de la finance européenne, pour garantir non seulement une transparence accrue, l'assouplissement des échanges et la fourniture à tous les opérateurs d'informations appropriées, mais aussi un système de surveillance placé sous l'autorité de la BCE et du Système européen de banques centrales (SEBC-BCE) et chargé des tâches d'orientation et de coordination internationale des activités de surveillance. La gestion quotidienne, le contrôle et la surveillance des marchés financiers des différents pays pourraient quant à eux être confiés aux organes nationaux de surveillance (1).

1.4    Système monétaire : LE CESE considère qu'il est utile et nécessaire d'approfondir la question du système monétaire international, afin de stabiliser les marchés des changes et d'éviter une concurrence déloyale au sein de l'OMC en matière de commerce international.

1.5    Soutenir l'économie réelle et les entreprises : gouvernance économique

Il serait nécessaire:

d'élaborer un deuxième plan européen de soutien plus ambitieux pour ce qui est de la dotation financière et de l'articulation des interventions à mettre en œuvre au niveau national dans les divers secteurs économiques, notamment grâce à des réformes structurelles, ou du moins, à défaut, un plan étroitement coordonné, afin d'envoyer un signal positif aux entreprises et aux citoyens européens concernant la valeur ajoutée et la qualité de l'intégration européenne,

de revoir radicalement les différentes politiques relevant de la compétence de l'UE (fonds structurels, cohésion, PAC, environnement, formation, recherche, stratégie de Lisbonne, etc.), en commençant par simplifier les procédures et les règlements,

de financer un système de réseaux européens (énergie, transports, communication) grâce au lancement d'un «emprunt» communautaire et en soutenant le développement d'un partenariat public-privé,

d'adopter une ligne commune d'intervention pour les banques européennes afin de les inciter à rouvrir normalement les flux du crédit en faveur des entreprises, avec des modalités spéciales pour les PME, telles que, par exemple, la prolongation du crédit, la mise en place d'un fonds de garantie ou des financements directs par l'État et la BEI,

de permettre aux employés des PME d'avoir accès, lorsque ce n'est pas le cas, aux «amortisseurs sociaux», à l'aide en faveur des chômeurs,

de convenir d'interventions dans le domaine de la politique fiscale dans le but de stimuler la demande, la reprise et l'emploi, parallèlement aux interventions de nature macroéconomique et monétaire,

de rendre le marché du travail, trop segmenté à l'heure actuelle, «plus européen», c'est-à-dire plus intégré selon le principe des vases communicants, en éliminant les obstacles qui subsistent aussi bien au sein des pays qu'entre ceux-ci; un marché du travail inclusif est indispensable pour réintégrer non seulement les chômeurs de courte ou de longue durée, mais aussi ceux qui n'ont jamais eu d'emploi (près de 100 millions d'Européens). Bien évidemment, il conviendra de respecter ce faisant les normes sociales et économiques des travailleurs du pays de destination,

de prendre des mesures pour attirer les investissements dans l'industrie, y compris les investissements étrangers, en faisant en sorte que l'Europe offre des avantages par rapport à d'autres régions au plan du droit de la concurrence, des normes et accords favorisant l'emploi, de la productivité de la main-d'œuvre et des régimes fiscaux. L'ampleur du chômage indique à quel point les capacités de l'UE en ressources humaines sont ignorées des entrepreneurs et des entreprises internationales.

1.6    Venir en aide aux citoyens européens : cohésion et gouvernance sociale

Établir un accord entre toutes les parties concernées, un «pacte européen pour la croissance, le développement durable, la compétitivité et l'emploi», qui replace le citoyen, la cohésion et la solidarité au cœur du système économique et mette les citoyens et les travailleurs à l'abri des lourdes retombées de la crise,

prévoir des formes de participation des travailleurs à la vie des entreprises afin de créer ou d'étendre la «démocratie économique»; il convient également d'améliorer et de développer le dialogue social,

favoriser un changement dans la «politique de consommation», s'agissant aussi bien de consommation privée que publique, par exemple les grands réseaux, par le biais d'investissements qui améliorent la qualité et la disponibilité des services,

augmenter la dotation du fonds d'ajustement à la mondialisation; lancer (en coopération avec les universités) un programme en faveur des jeunes désireux de créer une entreprise et des travailleurs licenciés voulant s'établir à leur compte, en recourant également aux entreprises de l'économie sociale en tant qu'option de substitution,

adopter des mesures de réduction de la taxation du travail,

étendre progressivement le programme Erasmus à tous les étudiants universitaires souhaitant y participer,

SIMPLIFIER dans toute la mesure du possible l'ensemble des procédures communautaires,

étendre le pacte aux entreprises et aux entrepreneurs nationaux et internationaux, de telle sorte qu'ils réalisent leurs investissements dans les États membres et non ailleurs, et commencent ainsi à créer des emplois pour l'excédent de ressources humaines qui existe dans l'UE.

Construire une Europe politique proche du terrain : gouvernance politique (à terme)

1.7.1   Il faudra éviter à l'avenir que les citoyens continuent à payer le prix de la NON-Europe, telle qu'elle ressort amplement des limites de l'intervention communautaire déployée en réaction à la crise, limites dues non pas à un «excès d'Europe» mais bien au contraire à un «manque d'Europe». Le traité de Lisbonne représente une avancée dans cette direction qui est considérable. Le Comité prendra part aux nouveaux dispositifs institutionnels et communiquera ses positions spécifiques à la nouvelle Commission et au nouveau Parlement, dans le cadre des nouvelles compétences conférées par le traité.

1.7.2   L'UE doit axer sa réflexion sur la question du «déficit démocratique»et du fonctionnement démocratique de ses institutions, en faisant notamment appel à de nouvelles formes de participation directe de ses citoyens et de la «société civile», qui ne peut plus rester inerte face à l'émergence de nouvelles injustices et de nouveaux pouvoirs.

1.7.3   Au vu de cette situation, il est nécessaire de doter l'UE d'une représentation externe efficace et de créer un «espace politique européen», muni des instruments nécessaires pour contrebalancer les nouveaux équilibres économiques et politiques qui, à la suite de la crise, se mettent en place au niveau international et qui risquent non seulement d'appauvrir les citoyens mais aussi d'affaiblir leurs droits. Comme il a déjà été indiqué, le Comité soutiendra l'action du Haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité et continuera d'exprimer son point de vue pour ce qui concerne la société civile sur la scène internationale.

2.   Introduction

2.1   En tant que représentant de l'économie réelle et de la société civile organisée, le Comité économique et social européen (CESE) a jugé nécessaire d'élaborer le présent avis d'initiative afin de donner une vision d'ensemble de la crise et de soumettre des propositions à la Commission et au Conseil, en particulier en ce qui concerne le rétablissement des flux financiers destinés aux entreprises, ainsi que de la croissance et de l'emploi.

2.2   Des années durant, nous nous sommes en effet trouvés confrontés aux effets d'une euphorie généralisée (Samuelson), engendrée par une information imprécise tendant à amplifier la voix des «experts», lesquels garantissaient la «validité» des évènements, la supériorité du modèle «en vigueur», affirmant que le marché, tôt ou tard, régulerait tout et éliminerait les «excès».

2.3   Le Comité est convaincu que forts de leur responsabilité économique et sociale, les entreprises et les travailleurs, par leur engagement, parviendront néanmoins à imprimer un tour positif à la crise, s'ils sont soutenus comme il se doit par les pouvoirs publics nationaux et européens.

3.   Où en sommes-nous? La crise financière internationale

Origines : Les origines de la crise sont à présent trop bien connues pour qu'il faille les examiner encore une fois. Le Comité estime toutefois utile de rappeler au moins deux causes qui en constituent les prémisses: l'évolution de la finance internationale qui, soutenue par une culture économique ultralibérale, a fini par alimenter ses propres circuits plutôt que l'économie réelle, ce qui a provoqué une énorme «inflation» financière, et ce alors que les règles étaient rares, insuffisantes et peu respectées – il s'agit là de la seconde cause de la crise. Les règles existantes n'ont pas fonctionné ou n'ont pas été appliquées par les organes de surveillance et les agences de notation, dont le comportement a altéré la transparence des marchés  (2).

3.1.1   Il apparaît à présent clairement qu'à l'intérieur de la bulle financière, les banquiers étaient, sciemment ou non, engagés dans des activités à haut risque par rapport auxquelles les dispositions et les précautions étaient tout à fait inadéquates. Dans les services bancaires de détail, des prêts risqués, ayant pour seule garantie des hypothèques ou des cartes de crédit, ont été octroyés, dans le but de gonfler au maximum le chiffre d'affaires. Dans les services bancaires d'investissement, ces prêts et d'autres tels que le financement de LBO (acquisitions par emprunt) ont été regroupés dans des lots de produits dérivés complexes, puis vendus sans qu'il soit fait preuve de l'attention requise ou des réserves adéquates. Il est clair que des incitations inappropriées étaient en vigueur pour les dirigeants et les membres du personnel dont les activités affectaient le profil de risque de la banque et qu'en résultat de ces incitations, les rétributions individuelles ont pris le pas sur les intérêts de la plupart des parties prenantes du système bancaire et des citoyens ignorants qui avaient acheté des titres. Pareille situation ne justifie cependant pas les détournements et les abus pratiqués sans scrupules, auxquels nous avons assisté. Un tel comportement a porté atteinte au système financier dans son ensemble et terni son image.

3.2    Causes : si cette déliquescence a été possible, c'est à cause de la passivité des acteurs politiques, des négligences et des erreurs commises également par les gouvernements, non seulement dans le domaine de la finance mais aussi dans celui des politiques macroéconomiques et monétaires. Au niveau mondial, on peut pointer à titre d'exemple le laxisme de la politique budgétaire américaine, et ce dans un contexte caractérisé par une Union européenne privée d'instruments d'action appropriés, avec un modèle économique et social de toutes parts accusé d'être la cause de tous les maux. Cette période ne s'est que trop prolongée. Bien souvent, le pouvoir politique s'est retranché derrière la mondialisation, sempiternel bouc émissaire, et assume dès lors une lourde part de responsabilité dans l'apparition de la crise (1).

Conséquences : Les effets ont été désastreux, mais ne cédons pas au pessimisme. Une partie de l'économie financière, hélas, s'est laissée gouverner par l'euphorie, l'avidité et la spéculation et a sombré dans un climat d'irresponsabilité générale. De plus, la trop forte concentration bancaire (au point que l'on en est venu à se persuader que «les banques sont trop grandes pour pouvoir être mises en faillite»!) et l'échec de la gestion des risques ne pouvaient que provoquer la situation actuelle, par un effet domino que rien n'est venu arrêter. C'est ainsi que la crise, au départ financière, s'est muée en une crise macroéconomique et s'est propagée à l'économie réelle, en conséquence de quoi nous sommes aujourd'hui confrontés à une crise financière, qui s'est étendue aux secteurs de production, donnant naissance à une crise économique, monétaire, commerciale et sociale, et par voie de conséquence à une crise de confiance.

3.3.1   Il convient pourtant de reconnaître, en toute honnêteté, que les trente dernières années ont été celles d'un développement et d'une croissance économique sans précédent dans le monde entier et, en particulier, dans les pays en développement. Cette croissance a été rendue possible, notamment, par le développement des marchés financiers dont de nombreux acteurs ont tiré profit, croyant à tort qu'une telle évolution pourrait se poursuivre éternellement, sans aucune difficulté.

3.3.2   Il est certain que la récession aura des conséquences sur la réorganisation des pouvoirs à l'échelle mondiale et nationale, comme l'a déjà montré le sommet du G20 à Pittsburgh. Une nouvelle «géographie» économique et politique émergera de la crise. C'est ainsi que la crise financière de départ s'est transformée en crise macroéconomique, qui s'est transmise à l'économie réelle et s'est traduite par une baisse du PIB et une forte augmentation du chômage. Dans ce contexte, le Comité s'interroge sur la position et le rôle qui devraient être demain ceux de l'Union européenne.

4.   Que faire? Les instruments d'intervention et de lutte contre la crise

4.1   Réorganiser le système financier

Le Comité est satisfait des résultats du G20 de Londres et du G8 de L'Aquila, qui ont démenti les prévisions pessimistes formulées à la veille de ces rencontres et démontré que l'économie et la finance mondiales ne pouvaient être gouvernées que conjointement. Le principe de la «gouvernance mondiale» a été entériné, qui rend au politique la place qui lui revient. On peut espérer que les gouvernements européens en tireront eux aussi les conséquences qui s'imposent (voir paragraphe 4.4). Ces résultats doivent toutefois trouver une traduction concrète et efficace, au-delà des modifications introduites par les accords de Bâle 2, à travers un accord de Bâle 3, ouvrant la voie à la réorganisation et à la réforme des organisations internationales.

4.1.1.1   Il aurait certes été souhaitable que les bonnes intentions affichées lors du sommet suivant du G20 à Pittsburgh débouchent sur des actes. En fait, ce sommet a fait l'impasse sur les véritables problèmes en jeu: les règles et la réforme du système financier (1), les déséquilibres commerciaux entre les États-Unis et la Chine, la structure des sociétés par actions, la montée du chômage, etc. Faute d'intervention, le risque subsiste donc que certains représentants d'intérêts financiers ne prétendent «que cette crise n’était qu’un incident de parcours et que les agissements d’hier peuvent reprendre comme si rien ne s’était passé» (3).

4.1.2   Le Comité estime qu'il convient de renforcer (4) le rôle des organismes de surveillance mais, surtout, de les mettre dans les conditions requises pour qu'ils fonctionnent correctement, soient indépendants des pouvoirs politiques et disposent d'un pouvoir de sanction. Il convient de supprimer les paradis fiscaux ou de les rendre transparents, afin qu'ils ne servent pas au recyclage d'«argent sale», ni ne deviennent des instruments d'évasion fiscale. En effet, le principal problème réside dans le manque de transparence. La nature exacte des prêts bancaires, des actifs, des réserves et des profils de risque des banques doit être connue de tous.

4.1.3   Le Comité espère que les orientations et les (quelques!) décisions prises à Londres, à L'Aquila et à Pittsburgh contribueront à amorcer un virage, dans un délai raisonnable, à introduire (ou réintroduire), en matière d'économie et de marché, une nouvelle culture, moins idéologique et plus transparente. Il convient en outre d'être prudents lorsqu'on évoque la «morale» et «l'éthique» du marché financier, comme certains veulent le faire: pareil langage pourrait être perçu comme une provocation à l'égard des personnes qui, à l'heure actuelle, paient le prix fort de la crise. Mieux vaudrait parler de droits, de sanctions, de règles et d'instruments permettant de les appliquer.

4.1.4   Il s'agit là du moyen le plus convaincant et le plus efficace de rétablir la confiance des consommateurs et, par conséquent, de relancer la demande. Nous avons besoin d'un nouveau langage économique, un langage qui parle d'économie réelle, d'investissements, d'emplois, de risques, de droits, de devoirs, de préservation de la concurrence.

4.1.5   Le Comité estime que les acteurs de l'économie réelle, à savoir les entreprises et les travailleurs, doivent faire entendre leur voix et leurs arguments avec plus de force. Ils doivent se réapproprier leur rôle, qui est vital pour le développement économique et social, la compétitivité, l'innovation, la croissance et l'emploi. Il serait souhaitable que les responsables politiques en fassent autant.

Le système monétaire international devrait également être revu. En effet, lors des réunions du G20 à Londres, du G8 à L'Aquila et du G20 à Pittsburg, son fonctionnement et sa réforme, abstraction faite de la répartition des quotas au sein du FMI, n'ont pas été considérés comme une priorité centrale pour remettre l'économie mondiale sur la voie de la croissance durable. Pourtant, certains des engagements pris à ces occasions pourraient, s'ils étaient respectés, exercer une forte influence sur le marché des changes et donc sur les modalités de fonctionnement dudit système.

4.1.6.1   Les décisions qui ont été prises d'aider les pays en développement, en particulier l'Afrique, de tripler les ressources du Fonds monétaire international (pour les porter à 750 milliards de dollars) et de prévoir 250 milliards supplémentaires de droits de tirage spéciaux (DTS) en vue d'apporter un soutien financier aux économies des pays les plus touchés par la crise fournissent un premier élément de réflexion sur la masse considérable de dollars qui sera mise en circulation pour venir en aide à des pays qui accusent un déficit élevé de leurs comptes courants.

4.1.6.2   En deuxième lieu, l'augmentation de la dette publique des États-Unis (qui, dans les trois années à venir, les conduira à un endettement total équivalent à 100 % du PIB), favorisée par la nouvelle politique de dépenses financées par le déficit que mène le président Obama pour faire sortir le pays de la récession, fournira une impulsion supplémentaire à l'émission d'un volume considérable de dollars, avec de lourdes conséquences pour le système économique international. Une telle situation s'est déjà produite à partir de la seconde moitié des années 1960 et s'est terminée par la dévaluation du dollar et l'effondrement, en 1971, du système de taux de change fixes de Bretton Woods.

4.1.6.3   Cette situation préoccupe particulièrement les Chinois, qui craignent que l'affaiblissement du dollar n'entraîne une perte de valeur de leurs énormes réserves de change, lesquelles ont augmenté de plus de 5 000 milliards de dollars au cours de la décennie écoulée et continueront probablement à croître dans les années à venir, quoiqu'à un rythme plus contenu.

4.1.6.4   L'euro, qui est devenu en quelques d'années la deuxième monnaie de réserve internationale, ne constitue pas une solution valable comme monnaie de remplacement du dollar, si tant est qu'une telle hypothèse soit opportune et souhaitable; et il est encore plus impensable, comme le souhaitent les autorités monétaires chinoises, d'instaurer une «monnaie de réserve supranationale» qui serait constituée par les DTS et qui serait utilisée non seulement entre les gouvernements et les institutions internationales, comme c'est le cas aujourd'hui, mais aussi comme instrument de paiement dans les transactions commerciales et financières internationales. L'émission de nouveaux DTS est sans aucun doute un outil utile afin de créer des réserves supplémentaires pour les économies qui présentent des déficits courants mais ne peut représenter la solution à long terme de la crise actuelle.

4.1.6.5   Il est fort probable, et par ailleurs souhaitable, que l'euro présente de plus en plus les caractéristiques requises pour être une monnaie de réserve internationale et une devise de référence pour la définition des prix des biens sur les marchés mondiaux. Le Comité espère toutefois que la monnaie chinoise, vecteur d'une économie au rôle de plus en plus déterminant dans le concert économique mondial, s'affranchisse à son tour de la protection qui lui est accordée par les autorités chinoises. Pendant dix ans, le yuan renminbi a été étroitement indexé sur le cours du dollar et sa valeur n'est liée que depuis 2005 à un panier composé également d'autres monnaies. Le yuan renminbi doit devenir une devise librement convertible sur les marchés internationaux.

4.1.6.6   Le Comité considère que davantage d'efforts sont nécessaires sur le plan international; la Chine ne peut pas continuer, comme elle l'a fait jusqu'à présent, à miser sur une croissance soutenue par les exportations, en accumulant les excédents courants tout en demandant aux autres de se charger des problèmes de gestion des taux de change à l'échelle internationale qu'elle a contribué elle-même à produire, par des politiques monétaires et fiscales qui favorisent l'accumulation de l'épargne et freinent la dépense interne.

4.1.6.7   Le système monétaire mondial, qui repose sur des régimes de taux de change flottants, est caractérisé par des fluctuations incessantes et marquées des devises en raison de la spéculation. Cette situation, qui a des incidences extrêmement négatives sur l'économie mondiale, pourrait être corrigée par la conclusion d'un accord politique entre les banques centrales des principaux pays industrialisés. Dans ce cadre, celles-ci s'engageraient à intervenir de concert lorsqu'une monnaie subirait une pression trop forte à la hausse ou à la baisse, afin de contenir la volatilité des taux de change dans des marges raisonnables.

4.1.7   Créer des règles européennes dans le domaine de la finance – réaliser un marché unique européen de la finance (5). En dépit des règles en vigueur au niveau européen et de l'euro, cet objectif est encore loin d'être atteint, y compris dans la zone euro. La crise a montré la nécessité d'avancer sans attendre sur cette voie au moyen de réformes adaptées, en allant beaucoup plus loin que ce qui a été fait jusqu'ici, comme souhaité dans le rapport de Larosière et dans les propositions de la Commission. Cette démarche permettrait également à la BCE d'agir plus rapidement et avec plus de flexibilité. Il ne faut pas oublier que la raison d'être première de la finance est de soutenir les entreprises et de stimuler l'esprit d'entreprise, la croissance et l'emploi, mission dont l'accomplissement serait facilité par un marché financier réformé, plus concurrentiel, transparent et mieux intégré quant à ses divers aspects.

4.2   Soutenir l'économie réelle

4.2.1   La communication de la Commission au Conseil européen du printemps 2009, présentée sous le titre ambitieux de «L'Europe, moteur de la relance» (6), fait du rétablissement de la confiance des citoyens et des opérateurs économiques une des premières mesures d'intervention proposées afin de surmonter la crise actuelle, d'accroître la demande et de créer des emplois supplémentaires. Il est indispensable que les mesures proposées produisent des effets concrets et ne restent pas uniquement des manifestations de bonnes intentions.

4.2.2   Le Comité considère en particulier que la question de l'emploi et du manque de liquidités pour les entreprises est le principal problème à traiter (7). Des estimations récentes fournies par l'OIT font état de la perte de quelque 40 millions d'emplois depuis le début de la crise en décembre 2007 (dont 7 millions pour la seule OCDE) et les prévisions pour l'avenir sont plutôt pessimistes. Seul le rétablissement de la confiance dans le fonctionnement des marchés et la mise en œuvre d'interventions publiques en faveur de la croissance, de la compétitivité, de l'innovation et de l'emploi permettront de surmonter ce désastre social. L'Europe a besoin d'une politique économique et d'un programme qui attire les entreprises, les aides à se développer et à créer des emplois.

4.2.3   Le Comité partage entièrement l'objectif que s'est donné la Commission. Les interventions décrites dans la communication méritent d'être approuvées car elles concernent les mesures urgentes à prendre pour agir dans le secteur bancaire et financier, soutenir l'économie réelle et valoriser le marché intérieur européen. Elles témoignent toutefois d'une approche classique et assurément dépourvue d'esprit novateur, qui est axée sur une meilleure utilisation des politiques économiques sectorielles, qu'elles soient gérées directement par la Commission européenne ou coordonnées par ses soins.

4.2.4   Pour restaurer la confiance des opérateurs économiques et des citoyens européens dans la capacité des institutions communautaires et des autorités nationales à surmonter la crise, il est nécessaire de prendre conscience que celle-ci n'est pas imputable uniquement à des phénomènes qui seraient certes aigus mais de nature conjoncturelle, ni à des imperfections ou défaillances du marché.

4.2.5   La spécificité de la crise que vit l'économie mondiale – et européenne – vient précisément d'un facteur plus profond et plus systémique, en rapport avec les valeurs éthiques et morales (responsabilité, légalité, justice sociale) qui sont à la base de la société moderne et en inspirent les actions dans tous les domaines de la vie économique, sociale et civile. La confiance dans le fonctionnement des circuits économiques et financiers ne pourra pas être rétablie si nous n'agissons que sur les «mécanismes» de marché qui ont mal fonctionné; au contraire, elle passe aussi par la mise en œuvre de politiques macro- et microéconomiques européennes.

4.2.6   Si le tableau des problèmes actuels fait consensus, les solutions proposées dans la communication de la Commission apparaissent insuffisantes ou, en tout cas, d'une faible efficacité au regard des changements qu'il faudrait encourager, au sein des différents systèmes de production nationaux mais également au niveau des politiques européennes et internationales, afin de soutenir la croissance économique des États membres, et ce, alors que les effets négatifs de la crise se manifestent avec plus d'acuité en Europe (avec un recul du PIB) qu'aux États-Unis, qui ont quant à eux réagi par un programme ambitieux et uniforme et des interventions publiques plus massives et plus efficaces. L'UE devrait encourager l'adoption de mesures harmonisées au niveau des États membres. C'est pourquoi il est souhaitable qu'elle adopte un deuxième plan d'action, plus efficace et homogène que le premier.

4.2.7   Si l'on considère uniquement les mesures à mettre en œuvre à court et à moyen terme en vue de relancer l'économie européenne, le Comité estime que l'attention et les ressources financières de l'UE et des États membres devraient se concentrer prioritairement sur des mesures d'intervention qui soient en nombre limité mais développent des effets de grande ampleur sur les différents marchés et les opérateurs économiques en général. Ces interventions devraient porter sur le rétablissement de la confiance dans le fonctionnement du système financier, sur l'amélioration du plan européen pour la relance économique, sur les modifications à apporter aux principales politiques d'intervention de l'Union et sur un soutien aux États membres les plus touchés par la crise, à commencer par les pays de l'Est de l'UE.

Rétablissement de la confiance dans le fonctionnement du système financier. Il est possible de relancer l'économie européenne en restaurant la stabilité et l'efficacité des marchés financiers, dans le respect des nouvelles règles et des nouveaux systèmes de surveillance macro- et microéconomique qui en garantissent un fonctionnement ordonné et responsable à l'échelle internationale. La finance doit en revenir au rôle, traditionnel et irremplaçable qu'elle doit assumer pour promouvoir la croissance économique, à savoir le financement des activités réelles des acteurs de l'économie (entreprises, ménages, réseaux et services, infrastructures, environnement et énergie).

4.2.8.1   Le problème des interventions massives des États, malheureusement inévitables, pour soutenir le système bancaire reste toutefois sans solution. Le Comité considère que cette situation ne peut pas se prolonger dans la durée et qu'il est indispensable de définir, face à ces interventions, une «stratégie de sortie» imposant au système bancaire, dans le cadre d'une approche systémique, des conditions à respecter, telles qu'une restructuration interne, via l'amélioration quantitative et qualitative des réserves inscrites au bilan. Une telle stratégie devrait relancer un marché international du crédit et des finances, indépendant et transparent et permettre d'éviter que les événements récents ne se reproduisent.

4.2.8.2   Le Comité évaluera la proposition relative au renforcement du contrôle et de la transparence sur les opérations financières, tel que réclamé par la Commission et par les pays du G20 à Londres, du G8 à L'Aquila et du G20 à Pittsburgh, et compte tenu, par ailleurs, de la proposition de réforme du système financier européen annoncée par la Commission et le Conseil. Il est en tout cas d'avis que si la surveillance financière devait être confiée à un nouvel organisme autonome européen celui-ci devrait disposer d'un réel pouvoir d'intervention (8).

4.2.8.3   Ce choix devrait favoriser le processus d'harmonisation des différentes législations qui existent en Europe dans le secteur de la surveillance financière, tout en renforçant les capacités de sanction existantes.

4.2.9   Améliorations à apporter au plan européen pour la relance économique

4.2.9.1   Dans un avis antérieur (9), le Comité a avancé l'hypothèse qu'il serait opportun de revoir en profondeur le plan de relance proposé par la Commission, non seulement en ce qui concerne sa dotation financière, jugée insuffisante au vu de la gravité de la crise, mais aussi pour modifier l'articulation et l'approche des mesures à adopter au sein des États membres afin de promouvoir la reprise.

4.2.9.2   En dehors des secteurs actuellement considérés comme prioritaires sur le plan des besoins financiers (industrie automobile, secteur du bâtiment, PME), les conditions d'accès à ces interventions doivent garantir la cohérence et l'uniformité des mesures mises en œuvre, dans le respect absolu des règles définies par le marché intérieur européen.

4.2.9.3   En effet, il n'est pas souhaitable que sur la quote-part du budget communautaire ou celles qui ressortissent aux gouvernements nationaux, le plan européen finance, au titre des interventions d'urgence dans les entreprises, les secteurs ou les pays en crise, des initiatives isolées qui pourraient, d'une façon ou d'une autre, recréer des situations de privilège ou de protection pour certains secteurs industriels, au détriment d'autres.

4.2.9.4   Le marché unique représente un des moteurs fondamentaux de l'économie européenne: son renforcement et son développement constituent la meilleure garantie de la promotion d'initiatives productives et de la création d'emplois. La coordination et le contrôle à l'échelle européenne et nationale des mesures prévues par le plan doivent garantir aux citoyens européens que l'Union est capable de gérer les aides financières dans le respect de la législation communautaire et dans l'intérêt des populations et des territoires qui se sont révélés plus vulnérables face à la crise.

4.2.9.5   Dans le cadre de ces mesures de soutien aux activités productives, le Comité considère qu'une attention particulière doit être accordée aux PME (on pourrait songer à les faire bénéficier d'un plan spécifique de financements préférentiels et de procédures simplifiées, à l'instar par exemple du «Small Business Act»). Le plan européen n'explicite pas suffisamment la typologie des mesures qu'il entend lancer pour appuyer la relance des petites et moyennes entreprises. Pour ce qui est des entreprises de petite dimension, qui contribuent dans une mesure on ne peut plus importante à l'emploi global dans l'Union européenne, le Comité est d'avis que les initiatives doivent être formulées dans un cadre de référence macroéconomique qui tienne compte des spécificités nationales et locales, des différents niveaux de spécialisation sectorielle, de la variété des besoins du point de vue des nouvelles compétences, des technologies novatrices et des infrastructures de services aux entreprises.

4.2.9.6   En l'absence d'un cadre de référence européen et national adéquat sur les perspectives de croissance des PME, les interventions risqueraient, comme par le passé, d'être fragmentaires et cloisonnées, avec pour effet d'assister toutes ces entreprises sans pour autant aider aucune à s'agrandir ou à améliorer la qualité des produits et services proposés.

4.2.9.7   Le Comité estime en outre que le dialogue social et la concertation, et par conséquent, une participation plus importante des entreprises, des syndicats et des organisations de l'économie sociale, pourraient favoriser la sortie de crise.

4.2.10   Modifications à apporter aux principales politiques de l'Union européenne

4.2.10.1   Le Comité estime que le rétablissement de la confiance des opérateurs européens passe également par une modification en profondeur des modalités pratiques selon lesquelles la Commission a géré les politiques communes dans des secteurs économiques et sociaux cruciaux et, en particulier, la politique de cohésion. Concernant cette dernière, le Comité a déjà émis un avis (10) dans lequel il a avancé de nombreuses propositions de modifications.

4.2.10.2   La grave crise économique qui sévit actuellement dans tous les pays européens et pourrait se prolonger jusqu'en 2010, selon les prévisions, impose une réforme radicale de la gestion des fonds structurels (FEDER et FSE), ainsi qu'une révision des mesures définies pour la période de programmation 2007-2013. À l'heure actuelle, la Commission élabore bien quelques propositions de modifications afin de simplifier les procédures, d'accélérer les paiements et de redéfinir les cadres d'intervention de certaines politiques sectorielles mais ces dispositions sont encore insuffisantes. Or ces mesures s'avèrent nécessaires pour sauvegarder la cohésion de l'UE, aujourd'hui menacée par la crise.

4.2.10.3   L'effort que le Comité demande à la Commission en vue d'adapter les mesures prévues aux nouvelles réalités qui émergent de la crise internationale doit être plus conséquent et nécessite, en tout état de cause, que ces politiques soient intégralement repensées. L'antagonisme qui se dessine entre administrations centrales et administrations régionales pour gérer les ressources des fonds structurels allouées afin de faire face aux urgences constitue un élément supplémentaire qu'il conviendra, parmi d'autres, d'intégrer dans la réflexion sur la manière de «repenser» les aides pour les territoires les plus démunis de l'Union.

4.2.10.4   Pour ce qui est des politiques de cohésion, le Comité estime également qu'il y a lieu de formuler des priorités sectorielles et locales spécifiques pour chaque pays bénéficiaire de ces concours, afin de concentrer les ressources communautaires et nationales sur les programmes et projets considérés comme susceptibles d'avoir la plus grande incidence économique et sociale. Cohérence dans la sélection des interventions, coordination des politiques d'aide aux entreprises à l'échelle européenne et nationale, programmes communs pour la formation spécialisée et développement de nouvelles compétences: tels sont les principes dont doit s'inspirer la révision des orientations de la politique de cohésion.

4.2.10.5   En résumé, la crise devrait représenter pour l'Union l'occasion de mieux utiliser les politiques dont elle dispose mais également d'en appliquer de nouvelles, qu'il s'agisse d'améliorer les infrastructures ou, par exemple, de lancer un plan en faveur de l'environnement ou de la création de nouveaux réseaux européens pour l'énergie et la communication, comme la large bande, par le biais d'un financement public européen (sous forme d'euro-obligations?), initiatives qui donneraient une formidable impulsion à la relance économique.

4.2.10.6   Le Comité considère que la crise fournit une chance extraordinaire d'entamer une profonde réflexion sur le budget communautaire, tel qu'il se présente actuellement, sur le plan tant qualitatif que quantitatif, et pour mettre sur la table, éventuellement par le biais d'un groupe d'experts, la politique fiscale, qui est une question fondamentale pour la croissance et l'emploi et qu'il ne sera plus possible d'éluder ou d'instrumentaliser à des fins de concurrence par le moins-disant social et économique au niveau européen.

4.2.11   Soutien aux États membres les plus touchés par la crise, notamment les pays de la partie orientale de l'UE

4.2.11.1   Le Comité considère que la Commission doit prévoir, sinon un fonds ad hoc d'aide aux pays les plus touchés par la crise, proposition qui a été rejetée par les États membres les plus influents de l'Union, en tout cas un ensemble de dispositions financières, notamment via la BERD, en faveur des initiatives de stabilisation des économies les plus faibles de l'Union européenne, comme l'on commence à le faire. Les pays orientaux de l'UE doivent bénéficier d'une attention particulière dans ce contexte et il convient par conséquent de réserver des moyens spécifiques à cette fin, les raisons qui sous-tendent cette revendication étant multiples. À défaut, c'est le deuxième pilier de l'intégration, celui de l'élargissement, qui risque de s'effondrer, et avec lui le marché unique.

4.2.11.2   L'Union européenne devra affronter dans les mois – et les années – à venir des situations fort difficiles à résoudre: crise de l'économie et de l'emploi, conflits sociaux, réformes institutionnelles à entreprendre, divergences internes entre les États membres, le tout dans un climat d'euroscepticisme croissant, au niveau des partis politiques, des gouvernements nationaux de bon nombre d'États de l'Union et d'une opinion publique plutôt insatisfaite des décisions prises à l'échelon européen.

4.2.11.3   Pour restaurer la confiance dans le modèle économique et social européen, dans sa capacité à trouver des solutions qui soient adéquates et servent les intérêts de tous les États membres, il faut que l'UE prenne en charge les problèmes des pays les plus fragiles en les aidant à surmonter les difficultés dans lesquelles ils se trouvent.

4.2.11.4   La crise que subissent de nombreux pays de l'Est de l'UE dans les secteurs du crédit, des services financiers et des entreprises manufacturières ne revêt pas une ampleur telle qu'elle constitue un obstacle insurmontable pour l'Union. Bon nombre de ces activités sont nées de l'aide et des investissements directs en provenance de l'Union à quinze États membres et il est difficile d'imaginer qu'après le processus d'harmonisation qui leur a été imposé pour qu'ils deviennent membres effectifs de l'Union, l'on ne leur applique plus désormais, au nom de la politique du «cas par cas», que des interventions économiques minimes et de faible ampleur. Il s'agit là d'une erreur stratégique et économique irréparable à court ou à moyen terme et d'une forme d'aveuglement politique relativement grave, qui pourrait mettre en péril l'avenir de l'intégration européenne.

4.3   Venir en aide aux citoyens européens

4.3.1   «Après la crise, nous trouverons un nouvel équilibre, mais qui n'atteindra plus les niveaux d'avant: nous devons nous préparer à accepter un niveau de vie inférieur»: si cette prévision (11) se vérifie, la seule chose claire sera la certitude que d'aucuns auront de devoir se contenter – pour une courte durée, espérons-le – d'un niveau de vie encore «inférieur».

4.3.2   Le risque à éviter est que ce soient les entreprises et les travailleurs qui doivent, une fois de plus, faire les frais du sauvetage du marché, tandis que le capital continuera de s'évader vers des marchés plus sûrs, continuant ainsi à éluder l'impôt. Nous pourrions de la sorte assister à un nouvel affaiblissement des revenus du travail, propre à priver l'économie de marché de sa légitimité sociale. Si nous voulons éviter ce risque, nous devons renforcer et étendre le modèle européen de l'économie sociale de marché, en replaçant les gens au centre du système économique.

4.3.3   Pour ces différentes raisons, le Comité estime que la politique fiscale doit elle aussi retenir davantage l'attention des gouvernements et de l'Union, qui doivent renforcer encore la coordination afin d'éviter des situations de disparités contraires au marché unique. Par ailleurs, il conviendrait de privilégier les réformes tendant à élargir l'assiette fiscale plutôt qu'à augmenter les taux d'imposition, en se concentrant davantage sur le patrimoine que sur l'activité des entreprises et le travail.

4.3.4   Il faut en outre éviter que la crise financière n'ait des retombées désastreuses sur les régimes de retraite des États membres, comme on l'a vu aux États-Unis, où certains organismes chargés de la gestion de plans d'épargne-retraite ont accumulé de lourdes pertes à la suite de la crise des fonds spéculatifs, de sorte que les travailleurs ayant souscrit ces plans ont vu la valeur de leur épargne fondre de moitié. Le Comité est d'avis qu'il faudrait œuvrer à la définition de cadres réglementaires et de systèmes de retraite qui préservent les intérêts des citoyens et des travailleurs européens.

4.3.5   L'injustice et les inégalités croissantes ont réduit et risquent de réduire encore davantage les espaces de liberté; elles constituent une menace pour la démocratie dans les pays européens et en particulier au sein de l'Union, laquelle continue de souffrir d'un très important «déficit démocratique» qu'il y a lieu de combler; elles compromettent en tout cas l'adhésion des nouveaux pauvres aux politiques à mettre en œuvre pour surmonter la crise et favoriser un développement durable.

4.3.6   Le Comité estime que la crise constitue précisément pour l'Union européenne un moment privilégié pour témoigner de sa proximité en prenant des initiatives concrètes et tangibles en faveur des citoyens, des entreprises et des travailleurs les plus touchés par la crise.

Ces initiatives doivent se fonder sur des mesures destinées à protéger les droits: l'Union doit par conséquent pouvoir intervenir dans la politique sociale en menant à bien ses propres actions. La question sociale doit faire partie intégrante du pacte stratégique visé au point 4.4.3. Les interventions doivent également s'effectuer sur un autre front, celui des politiques économiques (par exemple en accordant un financement extraordinaire à la stratégie de Lisbonne) et actions de soutien aux entreprises les plus vulnérables, que l'Union se doit de mettre en œuvre, avec les États membres (paragraphe 4.2).

4.3.7.1   Il convient de promouvoir des interventions structurelles sur le marché du travail, lequel devrait être plus perméable et inclusif, par le biais de règles fixées à l'échelle européenne et par le recours au Fonds social européen, la simplification des procédures et l'anticipation des paiements.

4.3.7.2   Il faudrait promouvoir les actions en faveur des entreprises qui s'engagent à mettre en œuvre et à respecter le principe de la responsabilité sociale en Europe, ainsi que celui de la clause sociale hors Europe.

4.3.8   Le Comité souhaite et demande qu'en recourant notamment à des stimulants financiers, tels que les Fonds structurels, la Commission fasse tout son possible, en collaboration avec les partenaires sociaux européens, pour favoriser des accords ou trouver des solutions qui réduisent l'impact de la crise sur les entreprises et sur les travailleurs, y compris par la diffusion des bonnes pratiques observées dans certains pays.

4.3.9   Le Comité demande au Conseil de mettre en œuvre les mesures nécessaires, en instaurant un code européen qui indique dans quels domaines il convient d'agir afin de réduire les écarts salariaux et d'imposer une nouvelle justice distributive, y compris en dehors du secteur financier. La fourchette des rémunérations a conduit à une augmentation démesurée des inégalités, sans justification aucune. Il serait souhaitable pour ce faire d'adopter un accord européen associant toutes les parties concernées.

4.4   Vers une Union européenne politique et proche du terrain

4.4.1   Le Comité estime que pour affronter et surmonter la crise, l'Union européenne a besoin d'instruments de prise de décision qui lui font actuellement défaut et qui sont la cause principale de son déficit d'action, lequel risque aujourd'hui de la marginaliser vis-à-vis des grandes puissances que sont la Chine et les États-Unis. C'est pourquoi le Comité considère que l'Union européenne doit se doter d'une capacité d'action concrète, fût-ce avec des instruments provisoires, afin de ne pas réduire à néant le travail effectué et les engagements pris en cette période de profonds changements.

Gouvernance politique : Le Comité estime que l'une des causes principales de la crise actuelle tient aux divisions et aux erreurs des responsables politiques; dépourvus d'une vision homogène, ceux-ci ont été incapables d'agir, finissant par renoncer à leur rôle d'éclaireurs, que ce soit à l'échelle mondiale ou européenne. Les résultats de cette attitude apparaissent aujourd'hui au grand jour.

4.4.2.1    Gouvernance internationale : l'Union ne dispose pas encore d'une politique étrangère commune, ni d'un pouvoir autonome qui lui permette de gérer la crise, alors qu'il faudrait qu'elle puisse se faire entendre, au moins au niveau de la zone euro, dans les enceintes internationales, et contrebalancer, notamment au sein des instances qui sont sur le point d'être réformées, le pouvoir de décision des autres blocs économiques et politiques. L'UE représente le premier marché mondial de biens et de services, elle est le premier pourvoyeur d'aides publiques destinées à financer le développement des pays les plus pauvres et sa devise, l'euro, est la deuxième monnaie internationale de réserve. «Géant économique» à bien des égards, elle est en revanche un «nain politique» si l'on considère son pouvoir de décision au niveau international. Il s'agit là d'un véritable paradoxe, incompréhensible pour les citoyens européens. Les propositions et les «valeurs» européennes doivent au contraire influencer davantage la politique internationale.

4.4.2.2   En conséquence, les chefs d'État ou de gouvernement doivent avoir le courage de reconnaître cette limite et de se fixer un tel objectif. Aujourd'hui ils agissent comme un équipage sans capitaine, situation qui comporte des coûts économiques et politiques considérables. Il est inutile de convoquer ici les historiens ou les pères fondateurs pour s'en convaincre («Si l'Europe pouvait s'entendre, a dit en 1946 Winston Churchill, […], il n'y aurait pas de limite à son bonheur, à sa prospérité, à sa gloire, dont profiteraient ses 400 millions d'habitants»). Il convient de formuler rapidement un accord contraignant sur la gestion des crises, qui pourrait ensuite se transformer en une méthode communautaire, et non de faire l'inverse, comme c'est le cas aujourd'hui.

4.4.3    Gouvernance économique : l'objectif majeur est de doter l'UE des instruments nécessaires pour définir et développer des orientations communes sur le plan de la politique macroéconomique et des politiques sectorielles (au moins dans la zone euro, les retombées positives se diffusant alors dans les 27 États membres), et d'assortir la politique monétaire européenne, à partir de la zone euro, d'une politique économique commune, qui ne saurait se limiter à une simple mission de coordination et qui doit prévoir des interventions dans des domaines stratégiques d'intérêt européen (environnement, énergie, innovation, immigration, emploi, cohésion, etc.). Il convient d'élaborer un nouveau pacte européen pour la croissance, le développement durable, la compétitivité et l'emploi, qui valorise notamment l'économie sociale et environnementale de marché et vise à parachever le marché intérieur, conformément aux objectifs de la «stratégie de Lisbonne».

4.4.4    Gouvernance sociale : parmi les objectifs prioritaires de ce pacte européen doit également figurer la politique sociale et de cohésion. L'Union européenne devrait disposer d'une plus grande capacité d'intervention dans le domaine de la politique sociale (12) afin de définir un seuil minimum des droits sociaux fondamentaux. Toutes ces raisons plaident en faveur d'une Europe dotée d'une meilleure capacité d'action. Elle doit tout d'abord rappeler que l'Union européenne est née sous la forme d'un projet économique (la CECA, la CEE et l'euro) orienté vers des finalités politiques.

4.4.5   Le Comité estime dès lors nécessaire dans la période actuelle d'élargir la participation des citoyens, en particulier des jeunes, au processus de construction de l'Union européenne, en expérimentant de nouvelles formes d'implication des acteurs de terrain. Cette question ne doit pas être laissée au hasard. C'est ainsi, pour ne prendre que cet exemple, que le lancement par l'Union européenne d'une proposition efficace et non éphémère qui placerait les citoyens au premier plan, grâce à de nouvelles procédures de participation aux décisions sur les politiques européennes d'importance majeure, aurait un grand impact sur l'opinion publique. Ce serait un excellent moyen de rapprocher les citoyens européens de leurs institutions et de combler le déficit démocratique de l'UE. Il s'agit là d'une question vitale pour l'avenir de l'Union, sur laquelle on ne peut plus atermoyer, même si le traité de Lisbonne constitue à cet égard une légère avancée.

4.4.6   Une contribution déterminante en ce sens peut venir de la «société civile européenne», qu'il n'est pas permis de n'évoquer que sporadiquement, ni de confiner dans une sphère distincte ou d'utiliser comme simple caution. Il s'agit là d'un défi pour le Comité et pour son programme pour l'Europe.

Bruxelles, le 16 décembre 2009.

Le président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Cf. l'avis du CESE sur le «Rapport de Larosière» (JO C 318 du 23 décembre 2009, p. 57.

(2)  Cf. l'avis du CESE sur le «Rapport de Larosière» (JO C 318 du 23 décembre 2009, p. 57) et l'avis du CESE sur le «Plan européen pour la relance économique» (JO C 182 du 4 août 2009, p. 71).

(3)  Situation du système financier et bancaire – Article conjoint de Christine LAGARDE, ministre française de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, Anders BORG, ministre suédois des finances, Wouter BOS, ministre néerlandais des finances, Jean-Claude JUNCKER, ministre luxembourgeois des finances, Elena SALGADO MENDEZ, ministre espagnole des finances, Peer STEINBRÜCK, ministre allemand des finances, et Giulio TREMONTI, ministre italien des finances, publié dans plusieurs journaux européens le 4 septembre 2009.

(4)  Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la surveillance macroprudentielle du système financier et instituant un Comité européen du risque systémique – COM(499) final du 23 septembre 2009; Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil instituant une Autorité bancaire européenne – COM(501) final du 23 septembre 2009; Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil instituant une Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles -- COM (502) final du 23 septembre 2009; Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil instituant une Autorité européenne des marchés financiers – COM(503) final du 23 septembre 2009.

(5)  Voir note 3.

(6)  «L’Europe, moteur de la relance» (COM(2009) 114 final du 4 mars 2009.

(7)  Cf. avis du CESE sur les «Résultats du sommet pour l'emploi» (JO C 306 du 16 décembre 2009, p. 70).

(8)  Cf. l'avis du CESE sur le «Rapport de Larosière» (JO C 318 du 23 décembre 2009, p. 57). Lors de son intervention au CESE pendant la session plénière du 30 septembre 2009, M. BARROSO s'est lui aussi exprimé en ce sens.

(9)  Cf. l'avis du CESE sur le «Plan européen pour la relance économique», JO C 182 du 4 août 2009, p. 71.

(10)  Cf. avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions sur les résultats des négociations concernant les stratégies et programmes relatifs à la politique de cohésion pour la période de programmation 2007-2013», JO C 228 du 22 septembre 2009, p. 141.

(11)  John NASH, prix Nobel d'économie, octobre 2008.

(12)  Lors de son intervention au CESE pendant la session plénière du 30 septembre 2009, M. BARROSO s'est lui aussi exprimé en ce sens.


22.9.2010   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 255/19


Avis du Comité économique et social européen sur «Une action concertée pour améliorer la carrière et la mobilité des chercheurs dans l'Union européenne»

(2010/C 255/03)

Rapporteur unique: Pedro ALMEIDA FREIRE

Le Comité économique et social européen a décidé le 16 juillet 2009, conformément aux dispositions de l'article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d'élaborer un avis d'initiative sur

«Une action concertée pour améliorer la carrière et la mobilité des chercheurs dans l'Union européenne».

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 10 novembre 2009 (rapporteur unique: M. PEDRO ALMEIDA FREIRE).

Lors de sa 458e session plénière des 16 et 17 décembre 2009 (séance du 16 décembre), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 174 voix pour et 8 abstentions.

1.   Recommandations

Le renforcement des ressources humaines dans les domaines scientifiques et technologiques en Europe et la promotion de la mobilité sont des éléments clés de la mise en œuvre de l'espace européen de la recherche, ainsi que du maintien de la compétitivité de l'UE au niveau mondial et de la capacité de celle-ci à relever les principaux défis à venir.

Il convient de prendre d'urgence des mesures destinées à faciliter la coordination des politiques de l'éducation, de la recherche, de l'emploi et de la sécurité sociale pour assurer un déploiement coordonné des instruments des politiques éducative, scientifique et sociale en vue de répondre aux objectifs européens en la matière.

Le Comité économique et social européen propose un renforcement et une meilleure coordination des programmes existants en matière de ressources humaines et de promotion de la mobilité, et notamment de tirer parti de l'occasion offerte par le débat sur le 8e programme-cadre de recherche et de développement technologique pour, entre autres choses, accroître la place accordée au capital humain et promouvoir une plate-forme de formation avancée dans le cadre des activités de recherche.

Le CESE propose également la création d'un observatoire des ressources humaines pour la science et la technologie en Europe, capable de collecter, d’analyser et de fournir des informations cohérentes et comparables sur l'évolution de ce domaine et sur les politiques nationales en la matière, en Europe et dans le monde.

Le CESE appelle à une action coordonnée en vue de favoriser les carrières et la mobilité des chercheurs dans l'UE, en matière de conditions d'emploi, de développement de carrière, en particulier de recrutement, de progression dans la carrière et de droits sociaux.

Enfin, le CESE insiste pour que le nouveau pacte européen pour l'innovation que l'UE s'apprête à adopter et la future révision de la stratégie de Lisbonne prennent dûment en considération l'importance de l'augmentation et de la qualification des ressources humaines dans les domaines scientifiques et technologiques.

2.   Introduction

2.1   Les politiques de recherche, de développement technologique et d'innovation jouent un rôle sans cesse croissant dans le cadre de la stratégie de Lisbonne, que ce soit au niveau communautaire ou national.

2.2   La nouvelle impulsion donnée à l'espace européen de la recherche et, dans ce contexte, au développement du capital humain dans la stratégie européenne pour la compétitivité, la croissance et l'emploi, est la preuve que la promotion des ressources humaines dans les domaines scientifiques et technologiques et la mobilité jouent un rôle clé pour le succès de cette stratégie.

2.3   L'Union européenne se prépare à définir une nouvelle stratégie pour l'innovation, plus intégrée et plus sociale, dans laquelle le triangle de la connaissance devra être au centre des préoccupations. Dans ce contexte, les personnes sont essentielles pour s'assurer que l'UE maintienne sa compétitivité au niveau mondial et qu'elle soit capable d'affronter les principaux défis des prochaines décennies.

2.4   La libre circulation de la connaissance et la mobilité ont été reconnues par les chefs d'État et de gouvernement comme des éléments déterminants des politiques de l'éducation et de la recherche dans l'UE, ainsi que pour la coopération européenne. Plusieurs programmes européens s'emploient, dans leurs sphères d'action respectives, à répondre à ces défis: – le programme Erasmus pour la mobilité des jeunes dans l'enseignement supérieur; – le programme Erasmus Mundus pour le renforcement de la coopération avec les pays tiers par l'intermédiaire de masters et de doctorats conjoints, ainsi que de partenariats entre les établissements d'enseignement supérieur; – le programme-cadre de recherche et de développement technologique, dans lequel le programme spécifique «Personnes» visant à promouvoir la mobilité des chercheurs, plus connu sous le nom d'«actions Marie Curie», joue un rôle crucial. Quant au processus de Bologne, il a pour objectif de promouvoir la dimension européenne de l'enseignement supérieur, ainsi que la mobilité et la coopération dans ce secteur. En dépit des programmes existants et des efforts déployés, tout le monde s'accorde néanmoins à considérer qu'il reste beaucoup à faire.

2.5   Dans le prolongement de l'avis sur la communication de la Commission «Favoriser les carrières et la mobilité: un partenariat européen pour les chercheurs» (1), le Comité économique et social européen a décidé d'élaborer le présent avis d'initiative afin d'apporter une nouvelle fois sa contribution dans le cadre d'une stratégie de développement du capital humain dans l'Union européenne, ainsi que son appui en faveur d'une nouvelle politique de recherche et d'une nouvelle stratégie en matière d'innovation qui prennent en considération les ressources humaines dans la perspective des politiques d'intégration qu'il a toujours défendues et dans le contexte d'un agenda pour la politique sociale.

2.6   L'année 2010 verra le renouvellement de la stratégie de Lisbonne et le lancement du nouveau plan européen pour l'innovation, de même que l'adoption de la nouvelle «Vision 2020» pour l'espace européen de la recherche.

2.7   Dans le contexte de la crise économique, le soutien à un accroissement des investissements dans la recherche et le développement, tant dans le secteur public que privé, et le développement des ressources humaines pour la science et la technologie doivent rester des priorités des programmes politiques nationaux et communautaires.

2.8   Il est donc impératif de définir des objectifs communs au niveau de l'UE et d'encourager des actions en vue d'atteindre, dans le domaine de la recherche et du développement, le niveau des ressources humaines indispensable pour réaliser les objectifs ambitieux que s'est fixés l'UE.

2.9   Ces objectifs consistent, d'une part, à veiller à une croissance positive du flux de jeunes qui étudient les sciences et les technologies (des mathématiques aux sciences naturelles et de l'ingénierie aux sciences sociales et humaines) et des doctorats dans ces matières, notamment en favorisant une augmentation du pourcentage de femmes dans la communauté scientifique et, d'autre part, à garantir des conditions permettant d'attirer et de fixer en Europe des ressources humaines qualifiées dans le domaine de la science et de la technologie de manière à combler le déficit qui existe actuellement dans les relations transatlantiques et à établir des flux positifs dans les relations de l'Europe avec le reste du monde. Il s'agit de nouveaux objectifs qui doivent actualiser l'agenda de Lisbonne dans ce domaine.

2.10   Pour les mettre en œuvre, il est impératif de développer des centres et des réseaux de compétences d'un niveau exceptionnel à l'échelle mondiale, capables d'attirer les meilleurs talents à un niveau international et d'élargir la base sociale de l'éducation et de la culture scientifiques et technologiques.

3.   Nécessité d'une politique forte en matière de ressources humaines dans les domaines scientifiques et technologiques, à l'échelle nationale et européenne

3.1   Le CESE reconnaît les possibilités offertes par le Livre vert pour un espace européen de la recherche (2) dans lequel une des grandes priorités est un partenariat européen pour les chercheurs permettant d'améliorer les carrières et d'accroître la mobilité, ainsi que par la communication de la Commission susmentionnée, qui a fait l'objet d'un avis du Comité. Avec le présent avis, le CESE entend aller plus loin et soutenir les propositions contenues dans le document «Un partenariat visant à augmenter l'attractivité des carrières dans le domaine de la recherche et du développement technologique et à améliorer les conditions de mobilité des chercheurs en Europe - Actions prioritaires proposées», élaboré par les ministres portugais et luxembourgeois, respectivement MM. José Mariano GAGO et François BILTGEN, en collaboration avec leurs collègues, et daté du 30 avril 2009 (3). Il entend ainsi contribuer par des actions concrètes à faire progresser la politique de l'UE en matière de ressources humaines dans les domaines scientifiques et technologiques.

3.2   Le CESE reconnaît le travail considérable qui a déjà été accompli au niveau de l'UE dans cette matière. Le CESE lui-même a déjà élaboré plusieurs avis d'initiative sur des questions liées à ce thème.

3.3   Les ressources humaines dans les domaines scientifiques et technologiques font partie intégrante de la stratégie de l'UE depuis mars 2000. Au sommet de Barcelone, en 2002, l'UE s'est fixé l'objectif de porter à 3 % le pourcentage du PIB consacré à la recherche et au développement, jusqu'en 2010. La croissance des ressources humaines associée à cet objectif a été estimée à quelque 500 000 chercheurs supplémentaires (4).

3.4   La démonstration a donc été ainsi apportée de la nécessité d'une politique européenne en la matière qui aille bien au-delà de la «méthode ouverte de coordination» des politiques nationales, passant notamment par le changement des conditions d'emploi et d'évolution des carrières des chercheurs – en particulier des jeunes – en ce qui concerne le recrutement, la progression des carrières et les droits sociaux.

3.5   Bien que l'objectif en matière d'investissement dans la recherche et le développement implique que 2 des 3 % du PIB proviennent du secteur privé, il n'est pas possible pour l'industrie de fournir seule un tel effort. Les gouvernements ont donc une responsabilité accrue. Dans la mesure où la majorité des possibilités d'emploi pour les chercheurs seront offertes par l'industrie, il convient de créer de meilleures conditions pour le développement de la recherche dans le secteur privé en Europe, notamment pour les petites et moyennes entreprises, afin de pouvoir atteindre les objectifs définis, par exemple en encourageant la création de réseaux et de faisceaux (clusters) d'entreprises dans des secteurs clés de l'économie européenne.

3.6   En Europe, le niveau d'investissement public par chercheur est encore significativement plus bas qu'aux États-Unis et au Japon. Les conditions et les perspectives d'emploi dans le secteur public devraient donc faire partie intégrante des objectifs de la politique scientifique des gouvernements européens. D'autre part, il existe un écart considérable entre l'Europe, d'une part, et les États-Unis et le Japon, d'autre part, en ce qui concerne le nombre de chercheurs par rapport à la population totale. Il est de quelque 6 chercheurs pour 1 000 habitants dans l'UE contre 9 à 10 au Japon et aux USA.

3.7   Les institutions d'enseignement supérieur, en tant qu'acteurs principaux de la formation des chercheurs, doivent innover afin d'améliorer l'intégration de l'éducation et de la formation dans les programmes, ainsi que leur collaboration avec l'industrie, dans une perspective d'apprentissage tout au long de la vie. Il importe en fait qu'elles changent de perspective et d'attitude face à cette question relevant de leur mission de formation des ressources humaines pour une société de la connaissance, en modifiant les programmes, en misant sur la formation en association avec la recherche et le développement dans l'industrie, en offrant de nouvelles possibilités, notamment à ceux qui commencent une carrière de chercheur tardivement, en ouvrant l'accès aux femmes, aux minorités ethniques et aux groupes moins favorisés, notamment aux citoyens ayant des besoins spéciaux, qui peuvent trouver dans la recherche et la connaissance un terrain de valorisation sociale et personnelle dans une société moderne.

3.8   Les étudiants participent encore très peu à des activités de recherche dans le cadre de leur programme normal de formation, non seulement aux niveaux des deuxième et troisième cycles, mais aussi au niveau du premier cycle, y compris dans le secteur privé. Cette participation devrait être favorisée.

3.9   Des mesures doivent encore être prises pour rendre les carrières scientifiques, d'ingénieurs et technologiques plus attractives pour les jeunes, sans négliger les sciences sociales et humaines. Les carrières dans l'industrie et à l'université ou dans le secteur public présentent de grandes différences, mais les gouvernements nationaux et la Commission européenne devraient se coordonner pour jouer un rôle crucial par rapport à cette question. Il s'agit en effet d'un élément clé du déploiement de l'espace européen de la recherche, ainsi que de la prospérité et de la compétitivité futures de l'UE.

3.10   L'éducation scientifique est un autre facteur important pour stimuler la curiosité et l'intérêt des enfants et des jeunes pour les carrières scientifiques. Pour que l'espace européen de la recherche soit un succès, il est capital de miser sur les qualifications et la qualité de l'éducation, dès l'enseignement fondamental et secondaire, au moyen d'activités expérimentales et des contacts avec le monde scientifique et industriel, en plus des efforts consentis pour la qualification des professeurs (5).

3.11   Les stratégies de vulgarisation et de diffusion des connaissances scientifiques ont déjà été reconnues comme des éléments essentiels pour faire comprendre la science au grand public et pour la rapprocher de la société, en particulier des jeunes. Il convient cependant de les renforcer sans cesse, notamment au niveau européen, en soutenant les initiatives d'intérêt général, en raison de leur importance, en particulier dans un monde globalisé, dans lequel il est fondamental de pouvoir appréhender des questions controversées et de faire connaître les succès de la science.

3.12   La question de la place des femmes dans la science est un autre facteur d'une portée majeure. Même si le nombre de femmes dans ce secteur a considérablement évolué depuis 20 ans, elles continuent à être sous-représentées dans de nombreux domaines de la recherche scientifique et dans de nombreux pays. Surtout, elles n'accèdent pas à des postes de direction. Des efforts substantiels ont été consentis par la Commission européenne et plusieurs États membres, mais il reste encore beaucoup à faire. Elles restent le vivier de chercheurs le plus évident dans la perspective d'une augmentation des ressources humaines pour la science et la technologie, bien que les mesures d'encouragement soient affectées par l'absence d'un lien solide entre les politiques scientifiques et les politiques sociales et économiques en faveur des femmes.

3.13   La dimension internationale de l'espace européen de la recherche ne peut être négligée lorsqu'il est question des ressources humaines dans les domaines scientifiques et technologiques (6). L'UE devra se montrer compétitive à l'échelle internationale pour attirer les meilleures ressources humaines qualifiées et veiller à créer les conditions pour qu'elles restent en Europe, par une meilleure coordination entre les politiques nationales et communautaires. Toutefois, il conviendra de placer ces efforts dans une perspective de coopération visant à favoriser la circulation et le transfert des connaissances, ainsi que la mobilité, dans une optique de réciprocité. S'agissant en particulier des chercheurs des pays en développement, il faut que ces efforts contribuent simultanément à renforcer le niveau des qualifications dans leurs pays d'origine.

4.   Nécessité d'actions politiques concrètes pour réaliser des progrès immédiats par rapport aux objectifs européens en matière de ressources humaines dans les domaines scientifiques et technologiques

4.1   Le Comité souhaite souligner l'importance d'une approche commune au niveau européen, assortie d'actions politiques concrètes destinées à accomplir des progrès immédiats en matière de ressources humaines pour la science et la technologie en Europe.

Réaffirmant ce qu'il avait déjà indiqué dans son avis sur la communication de la Commission relative à un partenariat européen pour les chercheurs, en particulier concernant le recrutement des chercheurs et leurs conditions d'emploi, le CESE juge souhaitable et réaliste un développement durable et permanent dans l'UE, équivalent à une croissance moyenne de quelque 5 % au cours des dix prochaines années, ce qui permettrait en une seule décennie de faire progresser de plus de 50 % le niveau des ressources humaines dans les domaines scientifiques et technologiques. Le Comité propose que ces actions soient mises en œuvre notamment dans les domaines suivants:

4.2.1   augmenter le nombre et la proportion de jeunes choisissant d'étudier des matières liées aux sciences et aux technologies;

4.2.2   augmenter le nombre et la proportion de diplômés s'inscrivant pour un doctorat, tout en diversifiant les profils des doctorants et en renforçant les mécanismes d'assurance de la qualité;

4.2.3   attirer et retenir dans les établissements européens une proportion plus large d'étudiants et de chercheurs en sciences et en technologies en provenance d'Europe et du reste du monde, et doubler le nombre de doctorats effectués en dehors du pays d'origine;

4.2.4   rappeler l'importance d'établir un cadre juridique, administratif et financier qui stimule la mise en œuvre des actions décrites ci-dessus, en matière de coordination des politiques de recherche ainsi que des politiques sociales et de l'emploi.

4.3   Le nombre de jeunes qui optent pour des matières liées aux sciences et aux technologies a effectivement augmenté dans la plupart des pays européens, ce qui n'a pas été le cas de la proportion de ceux-ci par rapport au nombre total d'étudiants. Diverses mesures sont susceptibles d'attirer les jeunes vers ces matières, notamment: – améliorer l'enseignement des sciences et des technologies et faciliter la création de réseaux scientifiques réunissant au niveau tant national qu'international des écoles, des professeurs de sciences et des chercheurs; – soutenir les mesures et les institutions visant à promouvoir la culture scientifique et à élargir l'assise sociale du développement scientifique et technologique, notamment les centres scientifiques et les musées des sciences; – fournir des services d'information et des services d'orientation scolaire et professionnelle à même de répondre aux besoins sociaux en matière de formations en sciences et en technologies;

4.4   Sans perdre de vue l'assurance de la qualité, l'autre objectif immédiat devra consister à mettre en œuvre des mesures d'encouragement permettant d'augmenter le nombre de doctorants et de diversifier leurs profils, en associant l'industrie, le cas échéant. Au regard de cet objectif, des mesures pourraient être développées pour – augmenter la proportion de bourses de doctorat octroyées par concours général au niveau national ou international; – attirer en Europe des diplômés de pays tiers en vue d'un doctorat; – mieux faire connaître l'importance que revêtent désormais les études de doctorat pour atteindre un niveau élevé de compétence professionnelle, dans de nombreux domaines, qui ne se limitent pas aux carrières de chercheur;

4.5   L'attractivité à l'échelle internationale devrait être un objectif à atteindre, qui requiert – d'améliorer et d'encourager la mobilité des étudiants, des chercheurs et des enseignants entre les établissements et les secteurs et de part et d'autre des frontières, en particulier entre le monde universitaire et le monde de l'entreprise; – de favoriser un recrutement ouvert, compétitif et transparent des chercheurs; – d'améliorer les conditions de vie des familles des chercheurs et de faciliter l'accès des partenaires des chercheurs au marché du travail et – de réduire considérablement les contraintes administratives liées au financement public de la recherche.

4.6   L'amélioration des conditions de travail et d'emploi des chercheurs est un élément crucial pour accroître la mobilité et rendre les carrières scientifiques plus attractives, notamment en vue d'augmenter la proportion de femmes dans le domaine de la recherche en offrant une protection sociale adéquate. La généralisation progressive des contrats de travail afin de rendre les carrières scientifiques plus compétitives et attractives et l'octroi de conditions d'emploi adéquates pour les hommes et pour les femmes, notamment le congé de maternité et le congé parental, ainsi que d'autres mesures de sécurité sociale favorables à la mobilité des chercheurs, sont des éléments clés du succès de toute politique de la recherche et de l'innovation.

4.7   Le CESE appuie les efforts des États membres en vue de réfléchir à l'adoption de mesures facilitant le transfert des droits de retraite complémentaire des chercheurs mobiles, en tirant parti du cadre juridique existant et en concluant des accords bilatéraux et multilatéraux. Le CESE attend avec intérêt le résultat de l'étude de faisabilité relative à un éventuel fonds de pension paneuropéen pour les chercheurs de l'UE, qui est menée actuellement avec une aide financière communautaire; il appuie également toutes les mesures – qu'il juge urgentes – destinées à faciliter le transfert des droits à pension complémentaire des chercheurs.

4.8   Le Comité soutient et défend également les mesures urgentes visant à faciliter la coordination entre les politiques de l'éducation, de la recherche, de l'emploi et de la sécurité sociale afin d'assurer le développement coordonné des instruments de politique éducative et scientifique et de politique sociale de manière à pouvoir répondre aux objectifs européens en matière de ressources humaines pour la science et la technologie.

Au titre des mesures concrètes au niveau de l'UE en vue de réaliser les objectifs généraux et spécifiques exposés ci-dessus, le CESE souhaite:

4.9.1   dans le contexte du débat à ouvrir sous peu sur l'avenir du 8e programme-cadre de recherche et de développement technologique de l'UE, veiller à ce que les activités de recherche soutenues par ce programme constituent automatiquement une plate-forme pour les formations avancées, notamment pour les doctorants, sur la base d'une ouverture à la concurrence des étudiants de tout pays;

4.9.2   proposer la création d'un observatoire des ressources humaines pour la science et la technologie en Europe, chargé de fournir des informations cohérentes et comparables sur l'évolution de ce domaine et sur les politiques nationales en la matière, en Europe et dans le monde (7);

4.9.3   toujours dans le contexte du nouveau 8e programme-cadre, amplifier les actions Marie Curie de soutien à la mobilité des chercheurs et les mesures connexes, ainsi que renforcer la place de la coopération internationale en matière de ressources humaines et le programme Erasmus Mundus afin d'encourager la coopération avec les pays tiers dans le domaine de la formation avancée.

4.10   Enfin, le CESE demande que, lors de la prochaine révision de la stratégie de Lisbonne, il soit dûment tenu compte de l'importance de l'augmentation et de la qualification des ressources humaines dans les domaines scientifiques et technologiques, ainsi que de la nécessité de garantir un développement durable d'une politique commune en la matière au niveau de l'Union européenne.

Bruxelles, le 16 décembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  JO C 175 du 28.7.2009, p. 81.

(2)  Livre vert «L’Espace européen de la recherche: nouvelles perspectives» COM(2007) 161 final du 4 avril 2007.

(3)  Doc. 10003/09 du Conseil, du 18 mai de 2009.

(4)  Voir le rapport du groupe à haut niveau sur les ressources humaines pour la science et la technologie en Europe, «Report by the High Level Group on Increasing Human Resources for Science and Technology in Europe 2004», Communautés européennes 2004.

(5)  Voir les publications «Encouraging Student Interest in Science and Technology Studies», Forum mondial de la science, OCDE 2008, «Mathematics, Science and Technology Education Report, The Case for a European Coordinating Body», European Roundtable of Industrialists (ERT), août 2009.

(6)  Avis du CESE sur la «Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen - Un cadre stratégique européen pour la coopération scientifique et technologique internationale», rapporteur: Gerk WOLF (JO C 306 du 16.12.2009, p. 13).

(7)  Il s'agit d'une proposition déjà formulée par le groupe à haut niveau sur les ressources humaines pour la science et la technologie en Europe (voir note 4).


22.9.2010   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 255/24


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Soutenir les PME dans leur adaptation aux évolutions des marchés mondiaux»

(avis d'initiative)

(2010/C 255/04)

Rapporteur: M. CAPPELLINI

Corapporteur: M. PAETZOLD

Le 26 février 2009, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l'article 29 paragraphe 2 de son Règlement intérieur, d'élaborer un avis d'initiative sur le thème:

«Soutenir les PME (1) dans leur adaptation aux évolutions des marchés mondiaux».

La commission consultative des mutations industrielles, chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 26 novembre 2009 (rapporteur: M. CAPPELLINI; corapporteur: M. PAETZOLD).

Lors de sa 458e session plénière des 16 et 17 décembre 2009 (séance du 16 décembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 180 voix pour et 3 abstentions.

Première partie

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le Comité reconnaît que les PME empruntent de nombreuses voies en matière d'internationalisation: elles déploient des stratégies diverses et s'appuient sur des niveaux de soutien différents. Le présent avis entend donc présenter huit recommandations conçues pour orienter et inspirer les actions visant à soutenir l'adaptation des PME aux évolutions des marchés mondiaux. Le présent avis s'adresse aux institutions européennes, aux États membres, aux PME ainsi qu'à leurs associations, et à la société civile organisée européenne au sens large.

1.2   Recommandation no 1: respecter les entrepreneurs, leur droit à prendre des décisions et leur obligation d'en supporter les conséquences. Le soutien aux entreprises devrait aider les entrepreneurs à affronter les évolutions du marché mondial, mais ces mesures ne doivent en aucun cas se substituer à la propre décision du chef d'entreprise, ni protéger ce dernier du risque qui découle de sa décision. La politique de soutien aux PME devrait récompenser efficacement l'innovation (par la participation active aux plates-formes technologiques transsectorielles du 7e programme cadre de recherche (PC7)) et ne pas endosser le risque, si ce n'est en réponse à des défaillances particulières des marchés. Dans ces circonstances, les évolutions du marché mondial sont susceptibles d'avoir un impact disproportionné sur les petites entreprises (telles que celles dont le fonctionnement s'inscrit dans les chaînes de valeur mondiales ou dans les économies dominées par les petites entreprises).

1.3   Recommandation no 2: réduire les obstacles au commerce. Œuvrer en faveur de l'ouverture des marchés, par des négociations commerciales fructueuses et veiller à ce que les pays tiers fassent une utilisation juridiquement correcte des instruments de défense commerciale, appliquer les normes commerciales mondiales et maintenir le marché intérieur, sans pour autant négliger l'accès symétrique aux marchés, reste la façon la plus efficace de soutenir les PME qui exportent. La meilleure réponse politique consiste à garantir que les entreprises qui sont à même d'exporter ne soient pas empêchées de le faire par des barrières tarifaires ou non tarifaires.

1.4   Recommandation no 3: encourager la compétitivité commerciale en améliorant la qualité. Il serait opportun de faire connaître aux pays tiers, par l'intermédiaire de campagnes de marketing organisées par les États membres, la Commission européenne et des associations d'entreprises, les retombées positives et la qualité qu'engendrent le respect des normes et des exigences européennes ainsi que la pleine participation aux programmes de développement de la qualité, tels que le 7e PC ou le programme cadre pour l'innovation et la compétitivité (CIP). Dans le même temps, il conviendrait de souligner que le respect des normes européennes constitue une condition à l'importation de biens et de services dans l'Union européenne.

1.5   Recommandation no 4: la politique commerciale doit accorder la«priorité aux PME». Si l'on souhaite que des partenariats se nouent pour permettre l'accès aux marchés, il y a lieu de coordonner plus étroitement les PME afin de faire pendant à la complexité des négociations commerciales. La transparence des négociations pourrait être améliorée en mettant l'accent sur la dimension «PME» dans toutes les évaluations d'impact sur le développement durable. Il conviendrait aussi de prendre davantage conscience de la représentativité des représentants du monde des entreprises. La base de données de l'accès aux marchés et les bureaux d'assistance en matière de protection des droits de propriété intellectuelle sur les nouveaux marchés y concourront également. Davantage d'efforts peuvent aussi être consentis concernant les marchés publics et la rapidité de paiement au sein de l'UE afin d'améliorer les échanges commerciaux des PME.

1.6   Recommandation no 5: ajuster les politiques aux besoins des PME. Il existe une divergence entre les expériences qu'ont les PME des obstacles à l'internationalisation et la perception qu'en ont les décideurs politiques. Il convient que le soutien soit mis en œuvre, sous des formes pragmatiques et accessibles, par des intermédiaires locaux et nationaux qui connaissent bien les PME. Promouvoir les liens personnels d'entreprise à entreprise en subventionnant les premières visites en constitue un bon exemple. Il y a beaucoup à faire s'agissant de rapprocher la politique des besoins des PME, comme l'illustre l'exemple de l'accès au financement. Il y a lieu d'encourager les méthodes pragmatiques d'assistance aux PME telles que la médiation, les exonérations d'impôts, la rapidité de paiement et les mesures qui facilitent la dispersion rapide des fonds grâce aux exemptions dans le domaine des aides d'État, notamment dans les secteurs les plus exposés à la mondialisation et à la crise économique et financière (le secteur automobile entre autres).

1.7   Recommandation no 6: soutenir les PME par l'intermédiaire de leur personnel. L'objectif est de garantir que les PME puissent trouver sur le marché du travail une main-d'œuvre compétente et engagée. Afin de préserver la compétitivité des PME de l'UE, il y a lieu de maintenir l'offre de compétences du plus haut niveau, notamment dans les secteurs tels que l'ingénierie, la maintenance technique ou la construction. La communication de la Commission intitulée «Un engagement commun en faveur de l'emploi» confère de la valeur à ce processus. Le dialogue social, en particulier au niveau sectoriel, doit se préoccuper davantage d'aider les PME à travailler avec leurs employés à maintenir et à développer de nouvelles compétences de sorte à ce qu'elles soient les premières à tirer parti des nouvelles opportunités comme de celles qui existent au sein du marché intérieur. Pour faire face aux évolutions mondiales, il conviendrait de faciliter les partenariats européens et les projets de longue haleine impliquant les organisations de PME, les universités économiques et les organes de recherche en collaboration avec les institutions des économies émergentes.

1.8   Recommandation no 7: les réseaux comptent pour les PME, tout particulièrement lorsqu'elles se lancent dans l'arène mondiale. Les réseaux offrent des opportunités aux PME mais ils posent aussi des problèmes spécifiques ayant trait à la propriété intellectuelle et aux clients dominants, qui peuvent être mieux traités par une approche sectorielle. En qualité d'acteur mondial, l'UE n'a pas réalisé son potentiel pour améliorer la position des PME en tant qu'exportatrices et importatrices sur les marchés tiers. Le rôle que l'UE et les États membres peuvent jouer s'agissant d'appuyer les PME suffisamment compétitives pour se placer comme entreprises initiales et intermédiaires (EII) dans les chaînes de valeur revêt un intérêt particulier. Il convient de mettre davantage l'accent sur cette question, conformément aux indications précédentes de la CCMI et compte tenu des exigences de repositionnement des politiques industrielles de l'UE sur les marchés mondiaux.

1.9   Recommandation no 8: innover et évaluer. Les décideurs politiques doivent innover dans l'économie réelle, en particulier face à des conditions économiques, sociales et environnementales exigeantes. La politique doit répondre rapidement aux nouveaux enjeux; elle doit être évaluée sur la base d'éléments de qualité tangibles et nouer le dialogue avec des parties prenantes représentatives afin de tirer des enseignements des réussites exemplaires et des fluctuations de performance. Les PME pourraient apporter une contribution importante pour ce qui est de produits/services plus efficaces du point de vue énergétique et de ce que l'on appelle l'«économie verte».

2.   Les PME jouent un rôle crucial dans la réaction de l'UE aux évolutions des marchés mondiaux

2.1   Les 23 millions de PME que compte l'UE jouent un rôle crucial dans l'adaptation de l'économie européenne aux évolutions des marchés mondiaux. Elles emploient deux tiers des salariés du secteur privé, entretiennent le dynamisme du marché du travail et contribuent au développement d'une économie européenne compétitive, innovante et favorable à l'inclusion. Les processus de fragmentation économique et de spécialisation qui caractérisent la mondialisation créent des niches dont les PME peuvent tirer parti. Il convient d'accorder une plus grande reconnaissance à la contribution qu'apportent ces entreprises à la prospérité de l'UE ainsi qu'à ses divers modèles sociaux, économiques et culturels. Les PME forment la colonne vertébrale de l'appareil de production européen et elles pourraient accroître leur contribution à l'emploi et à la valeur ajoutée que l'UE apporte (2).

2.2   En tant que premier exportateur et donateur en matière d'aide au développement, l'UE est déjà tournée vers l'international. Les PME constituent un groupe hétérogène et nombre d'entre elles n'auront ni la force, ni les ressources, ni le désir de s'attaquer aux marchés mondiaux. Le Comité entend souligner que la «mondialisation» et l'«internationalisation» sont des questions importantes, même pour les PME qui approvisionnent ou investissent uniquement les marchés locaux et régionaux (3). La mondialisation a redéfini les compromis sociaux qui ancraient les PME dans les systèmes économiques nationaux et le Comité a conscience que la crise modifiera à nouveau les liens entre les PME et leurs marchés nationaux et internationaux (4). Il y a lieu de débattre du rôle renforcé de la Commission européenne et des États membres dans ce processus, et de l'inscrire à l'agenda politique de l'UE. Que l'UE parle d'une seule voix auprès des institutions financières internationales (ainsi que l'a déjà demandé le représentant de l'Eurogroupe au Conseil) et que l'Eurogroupe se dote d'une vision commune en matière de soutien à la zone Euro sont des éléments qui pourraient aussi renforcer le positionnement des PME sur la scène mondiale.

2.3   Plusieurs facteurs influencent la réaction des PME aux évolutions des marchés mondiaux. En dépit de l'engagement à faire du marché unique une réalité, rares sont les PME de l'UE27 qui exportent ou s'approvisionnent à l'étranger (5). Les petits pays et les grandes entreprises tendent à être davantage internationalisés (6). Le secteur des services, qui est dominé par les PME, concourt à hauteur de 70 % environ à la valeur ajoutée brute dans l'UE27, mais sa contribution totale aux échanges transfrontaliers ne s'élève qu'à 20 % pour l'année relativement prospère de 2006 (7). Les destinations et les secteurs d'internationalisation diffèrent, tout comme les voies empruntées (exportation ou entreprise commune) et la direction des échanges. Les obstacles à l'internationalisation varient également: la principale barrière à l'exportation que rencontrent les PME tient à leur manque de connaissance des marchés étrangers (13 % des PME exportatrices ont indiqué qu'il s'agissait de leur obstacle principal), suivie par les taxes à l'importation dans les pays de destination et le manque de capital (9 % dans les deux cas) (8).

2.4   Les PME ont une activité transfrontalière moindre que les entreprises de plus grande envergure, que ce soit au sein du marché intérieur ou au-delà de ses frontières. Ce constat peut donner la fausse impression que l'UE est pour les grandes entreprises et les États membres pour les PME. Le Comité souligne que les PME constituent la colonne vertébrale de l'économie de l'UE et qu'elles jouent un rôle important dans l'économie sociale européenne, notamment lorsque les grandes entreprises externalisent des activités dans des pays tiers.

Le Comité a bien conscience que les politiques européennes en faveur des PME se sont développées au fil du temps, depuis le programme d'action pour les PME de 1986, le programme intégré de 1994, les différents programmes pluriannuels, l'agenda de Lisbonne de 2000, la charte européenne des petites entreprises de 2000, le programme cadre pour l'innovation et la compétitivité, jusqu'au «Small Business Act» pour l'Europe.

2.5   Beaucoup d'entreprises fonctionnent sans se tourner vers les pouvoirs publics pour obtenir un soutien autre que la suppression des barrières administratives et juridiques. Pour elles, la principale justification des interventions communautaires en matière de politique des PME reste de corriger les défaillances du marché. Cependant, dans ses avis précédents (9), le Comité a clairement indiqué que, selon lui, le soutien aux PME doit être porté à une autre échelle si l'on souhaite satisfaire les ambitions du «Small Business Act» et les besoins des 23 millions de PME européennes. La Semaine des PME a étendu le champ de la politique des PME, dans la mesure où elle cherche à «informer», «aider», «motiver», «partager» et «encourager» les PME (10), comme l'ont déjà indiqué, concernant la mise en œuvre du «Small Business Act pour l'Europe», le CESE dans l'avis INT/445 et récemment le Comité des régions.

2.6   Le présent avis porte expressément sur les recommandations visant à soutenir les PME en matière d'exportation et la politique conçue pour aider les PME à gérer les évolutions des marchés mondiaux. Il s'adresse à la Commission européenne, au Parlement européen et aux États membres, ainsi qu'aux PME et à leurs associations, qu'elles soient transsectorielles ou sectorielles. L'avis commence par expliquer pourquoi la justification traditionnelle de l'intervention visant à agir sur les défaillances du marché peut constituer un élément essentiel de cette politique. Cependant, il avance aussi que les mécanismes en vertu desquels ces défaillances sont recensées, les solutions politiques définies et les responsabilités exécutives attribuées ne sont pas toujours clairs ni bien adaptés. Ce sont là les raisons pour lesquelles d'autres principes mis au point pour rapprocher la politique des PME et l'éloigner de la notion abstraite de «marché» doivent être développés. À cette fin, le CESE pourrait préconiser, aux côtés d'autres institutions européennes et nationales intéressées, l'élaboration d'un rapport semestriel au niveau mondial pour mesurer «le positionnement des PME sur le marché mondial au moyen d'indicateurs de marché adéquats».

3.   Recommandation no 1: c'est aux entrepreneurs qu'il revient de prendre les décisions

3.1   Les mesures doivent respecter les entrepreneurs, leur droit à prendre des décisions et leur obligation d'en supporter les conséquences. Les incitations à l'exportation peuvent se révéler extrêmement préjudiciables en créant des distorsions des marchés et en encourageant les entreprises à prendre des risques qu'elles ne sont pas prêtes à gérer. La politique devrait, par principe, récompenser l'innovation et soutenir la prise de risque commercial, sans toutefois endosser les risques commerciaux, à moins que ce ne soit en réponse à des défaillances de marché particulières.

3.2   La mondialisation confronte les PME et les décideurs politiques à des défis complexes, faits de risques et d'opportunités. Accéder aux marchés mondiaux nécessite des informations coûteuses, les fournisseurs doivent être dignes de confiance tandis que les chaînes de valeur placent les PME face à des enjeux relatifs aux droits de propriété intellectuelle (DPI). Les PME empruntent plusieurs voies en matière d'internationalisation, certaines ciblant d'emblée les marchés mondiaux tandis que d'autres apprennent lentement à s'adapter. L'enjeu pour les décideurs politiques consiste à veiller à ce que leur compréhension des besoins des PME soit en adéquation avec celle des PME qu'ils cherchent à soutenir. C'est pourquoi l'approche doit maintenir le soutien au centre de ses préoccupations, tout en souscrivant à la liberté de l'entrepreneur.

4.   Recommandation no 2: les marchés doivent être libres

4.1   L'accent mis sur la liberté des entrepreneurs constitue la justification fondamentale à la poursuite de la libéralisation des marchés et c'est également une hypothèse commune qui sous-tend la politique de l'UE en faveur des PME. Le «Small Business Act» vise à tirer un meilleur parti du «marché intérieur»; le Comité a fait valoir à cet égard que perfectionner le marché intérieur constituait le moyen le plus efficace d'accroître les capacités d'exportation des PME (11) tandis qu'améliorer l'accès des PME aux marchés d'exportation est un sujet fondamental du volet extérieur de la stratégie de Lisbonne (12). Réduire les obstacles au commerce et œuvrer en faveur de marchés ouverts et concurrentiels, en concluant des négociations commerciales, en appliquant les normes commerciales mondiales et en maintenant le marché intérieur demeure par conséquent la façon la plus efficace de soutenir les PME qui exportent, à condition que l'ouverture des marchés respecte «l'accès symétrique» et ne menace pas «l'acquis communautaire». La meilleure réponse politique consiste à garantir que les petites entreprises qui sont capables d'exporter ne soient pas empêchées de le faire par des barrières tarifaires ou non tarifaires. Parmi les initiatives bienvenues, citons:

a.

la conclusion du cycle de Doha, de l'OMC/des accords sur les marchés publics et des accords bilatéraux ainsi que d'autres négociations commerciales internationales afin de s'attaquer aux obstacles au commerce tant aux frontières (barrières tarifaires, procédures douanières) qu'«au-delà des frontières» (barrières non tarifaires, normes, spécifications et règlements techniques) (13);

b.

les actions pour remédier à la protection insuffisante des droits de propriété intellectuelle, à la lourdeur des procédures en la matière ainsi qu'aux problèmes qui s'y rapportent comme le transfert de technologies; l'on peut citer le réseau entreprise Europe, le service d'assistance en matière de DPI du projet IPeuropAware, le «China IPR SME Helpdesk» et le «Centre économique et technologique européen» créé en Inde, en 2008, auquel est associé l'Office européen des brevets;

c.

les actions continuelles pour s'attaquer aux règles nationales discriminatoires en matière d'octroi des marchés publics;

d.

les actions de la Commission européenne en réaction aux propositions du député européen Guardans Cambó, et sur lesquelles le Comité l'engage à communiquer (14).

5.   Recommandation no 3: encourager la compétitivité commerciale en améliorant la qualité

5.1   La complexité des questions qui entourent la décision d'un entrepreneur de propulser son entreprise sur la scène internationale implique que le soutien aux PME doit être en mesure de tenir compte de la voie empruntée, des alliances formées et des secteurs concernés. Le Comité souscrit donc au nouveau règlement général d'exemption par catégorie s'agissant de rendre le cadre des aides d'État plus réceptif aux besoins des PME. Celui-ci permettra d'apporter une assistance substantielle aux PME dans les cas où il existe des preuves que le marché n'a pas contribué à l'obtention de résultats concrets pour ces entreprises (15). Le Comité a émis un avis portant sur le fait qu'il est nécessaire que les PME participent pleinement aux programmes d'amélioration de la qualité tels que ceux qui sont proposés dans le 7e PC (16) et de faire usage du nouveau guide des aides d'État pour les PME élaboré par la Commission. Il conviendrait que les organisations de PME se penchent sur les actions de formation proposées par la Commission (17). Il serait opportun que les évolutions plus larges de la culture des milieux économiques, des chaînes de valeur, du positionnement sur le marché, en particulier pour les PME, fassent l'objet d'un suivi des politiques par secteur au niveau européen. Des progrès considérables doivent être réalisés dans ce domaine.

5.2   L'on exige que toutes les entreprises qui se lancent dans le commerce à partir de l'UE satisfassent aux normes les plus élevées en matière de sécurité des consommateurs, de responsabilité sociale des entreprises et de durabilité environnementale. Étant donné que l'UE oblige de la sorte les entreprises à consentir des investissements conséquents, davantage pourrait être fait pour en accroître le retour. Le Comité encourage dès lors les États membres, la Commission européenne et les associations de PME représentatives à réfléchir à des manières de signaler la qualité des produits/services de l'UE aux marchés extérieurs. Le marketing horizontal pratiqué en vue de sensibiliser à la qualité des produits de l'UE ne doit pas faire référence qu'aux seules campagnes «marquage CE» ou «fabriqué en Europe». Néanmoins, répandre sur les marchés tiers la prise de conscience de la qualité des biens dans le cadre d'une approche secteur par secteur constituerait un outil important de marketing, qui aiderait de nombreuses PME, notamment celles qui sont actives dans les nouveaux secteurs (tels que l'énergie verte). Les initiatives de «commerce équitable» au niveau régional/mondial qui ont pour but d'associer avec succès les organisations de PME européennes devraient faire l'objet de recherches et d'évaluations plus systématiques.

5.3   Les PME effectuent leurs achats hors du marché unique tout autant qu'elles exportent (5). Les PME des petits États membres, en particulier celles qui exercent leurs activités dans le domaine du commerce de gros, du commerce de détail et de la manufacture, ont tendance à s'approvisionner au-delà des frontières nationales (8) sans pour autant se tourner vers les pays tiers. Promouvoir sans relâche les normes européennes et le marquage CE de même qu'améliorer les capacités d'évaluation de la conformité et de surveillance des marchés dans les pays tiers augmenterait l'éventail des fournisseurs auprès desquels importer dans l'UE. Développer les moyens grâce auxquels les entreprises des pays tiers peuvent satisfaire aux exigences de l'UE apportera aussi un soutien aux entreprises conformément au programme «Aide pour le commerce» de l'UE et, comme l'a souligné le président du Comité des obstacles techniques au commerce de l'OMC, améliorera la confiance et stimulera la libéralisation des échanges ainsi que le commerce équitable (18).

6.   Recommandation no 4: la politique commerciale doit accorder la «priorité aux PME»

6.1   Le Comité relève que certains thèmes abordés dans le «Small Business Act» sont pertinents pour ce qui est de concevoir la politique commerciale. Les PME sont moins en mesure de s'atteler à la charge réglementaire, et de faire en sorte que leur point de vue soit entendu dans les cercles politiques (19). Ce constat se vérifie également pour les barrières douanières et non douanières. Conformément à la proposition de la Commission qui préconise «un partenariat renforcé pour assurer un meilleur accès aux marchés» (20), les organisations d'entreprises devraient être actives au sein du partenariat pour l'accès au marché et de son comité consultatif. En outre, il y a lieu de veiller à ce que les intérêts des PME soient pleinement pris en compte dans toutes les négociations commerciales. Les instruments de défense commerciale existants, tels que les mesures antisubvention ou antidumping, ne sont pas bien adaptés aux PME qui manquent des ressources et des compétences nécessaires pour déposer concrètement des plaintes. Les tables rondes UE-Chine et UE-Inde du CESE pourraient aussi faciliter le dialogue et les travaux préparatoires au sein des sociétés civiles respectives de l'UE (et notamment des catégories «PME» et «économie sociale»).

6.2   Le Comité convient que les opinions des PME sont relayées principalement par les États membres et le Comité de l'article 133, ainsi que par les associations commerciales et les fédérations industrielles qui interviennent auprès de la Commission à l'OMC. Les négociations commerciales n'en demeurent pas moins complexes et il y a lieu de développer et de mieux coordonner, à travers le réseau de la politique commerciale, des partenariats renforcés afin de ménager un meilleur accès au marché pour les PME. Il serait aussi opportun que la Commission européenne et les États membres accroissent la coordination des intérêts des PME afin que ceux-ci soient mieux représentés dans d'autres organismes de normalisation tels que l'Organisation internationale de normalisation (ISO). Les initiatives suivantes constituent des exemples d'action appropriée:

a.

les États membres et la Commission européenne devraient adjoindre aux évaluations de l'impact sur le développement durable des déclarations a posteriori portant sur les procédures mises en œuvre pour consulter les PME et sur la représentativité des associations qu'ils ont consultées (21);

b.

le Comité se félicite de la base de données de l'accès aux marchés et des ressources en matière de protection des droits de propriété intellectuelle, y compris les bureaux d'assistance qui y sont consacrés. Des stages réguliers de fonctionnaires de la Commission européenne effectués auprès de PME et dans les bureaux de contact en matière de DPI dans leurs pays respectifs amélioreraient significativement la compréhension des problèmes que l'on rencontre dans ces domaines commerciaux;

c.

les politiques discriminatoires en matière de marchés publics et les retards de paiement relèvent du domaine d'action de l'État et portent un préjudice disproportionné aux PME (22). Le Comité se félicite de l'étude de la mise en œuvre de la directive réalisée en 2006, mais attache de l'importance à ce que l'effet de la crise financière soit évalué. Une telle approche exercerait une pression morale et permettrait de recueillir les bonnes pratiques comme, par exemple, les dispositions officielles prises en juin 2009 par le gouvernement irlandais pour ramener de 30 à 15 jours le délai de paiement des services administratifs centraux envers leurs fournisseurs privés.

7.   Recommandation no 5: ajuster les politiques aux besoins des PME

7.1   Les politiques doivent être élaborées de sorte à satisfaire en priorité les besoins des entreprises, notamment ceux des PME, et non ceux qui relèvent du décideur politique, du mécanisme de mise en œuvre ou du principe de subsidiarité. Tant le sommet de l'OCDE/APEC sur l'internationalisation des PME tenu en 2006 que le groupe d'experts de la Commission ont donné un aperçu des entraves aux exportations que rencontrent les PME (23). De récentes études indiquent cependant que les points de vue des décideurs politiques et des PME divergent s'agissant de définir les obstacles rencontrés et par conséquent les solutions à y apporter (24). Les PME s'inscrivent dans des contextes juridiques et commerciaux différents et elles abordent l'internationalisation de plusieurs façons: par étapes, en adoptant un entrepreneuriat stratégique, par l'apprentissage ou grâce à la commercialisation de proximité et de niche, tandis que d'autres ciblent même d'emblée les marchés mondiaux, étant axées sur les marchés mondiaux depuis leur création (25).

7.2   Le Comité a préconisé une gamme de mesures non financières grâce auxquelles agir en faveur des PME (26). Il s'agit notamment des manifestations organisées dans le cadre de programmes de coopération (tels que le programme Interprise auquel il a été mis fin, ou des foires aux sous-traitants) qui facilitent les rencontres de visu (27) des entrepreneurs ou du programme de formation des formateurs qui vise à aider les organisations qui défendent les intérêts des PME afin qu'elles améliorent l'offre de conseils sur mesure aux PME.

7.3   Un exemple d'actualité qui illustre l'échec à ajuster les politiques aux PME réside dans l'accès au financement et à l'assurance crédit. Ce sont les principales préoccupations pour les PME, surtout pour celles qui exportent. En dépit du soutien financier massif accordé au système bancaire par les pouvoirs publics, les entreprises ressentent une insuffisance notoire de crédits et d'assurance de crédit à leur disposition, signe de défaillance institutionnelle des marchés financiers, ce qui incite à prendre des mesures particulières pour améliorer l'offre de crédit et d'assurance crédit aux entreprises (28). Le Comité souscrit donc aux conclusions de la table ronde de Turin, organisée par l'OCDE, où a été réaffirmée l'importance d'aborder le contexte dans lequel fonctionnent les établissements financiers en appelant à «des cadres fiables de gouvernance, de fiscalité et de réglementation, qui mettent toutes les entités économiques sur un pied d'égalité, quelle que soit leur taille» (29).

7.4   Le Comité fait également siennes les autres recommandations pratiques énoncées lors de la table ronde de Turin pour aider les PME dans leur gestion financière, notamment:

a.

rendre les garanties effectives en assurant une meilleure médiation entre les organismes de crédit et les PME;

b.

traiter les problèmes de trésorerie au moyen d'exemptions fiscales et de cotisations sociales favorables, ou de congés et de dispositifs d'exemption fiscale pour les investisseurs privés qui soutiennent les PME;

c.

bien que cela ne constitue pas un élément propre aux PME, il est impératif que les chaînes de valeur et les services administratifs s'acquittent rapidement de leurs paiements envers toutes les entreprises (30).

7.5   Le Comité applaudit aussi au Cadre communautaire temporaire pour les aides d'État approuvé en décembre et annoncé dans le plan de relance de l'économie européenne. Parmi les mesures remarquables, citons:

a.

le nouveau montant limité des aides compatibles qui s'élève à 500 000 euros sur une période de deux ans;

b.

l'autorisation donnée aux États membres d'accorder, sans devoir notifier chaque cas individuel, une réduction de la prime à verser pour les garanties de prêt amenées par l'État; une aide sous forme de bonification des taux d'intérêt applicable à tous les types de prêts; et des prêts bonifiés pour la production de produits verts impliquant une adaptation anticipée à de futures normes communautaires de produit ou qui vont au-delà de telles normes;

c.

les modifications apportées aux lignes directrices concernant les aides d'État en vue de porter le montant annuel autorisé du capital-investissement injecté dans les PME de 1,5 million d'euros à 2,5 millions d'euros, et une réduction du niveau de la participation privée de 50 à 30 %.

7.6   Il convient d'accorder aux PME un accès prioritaire aux 5 000 milliards de dollars promis sur deux ans dans le communiqué du G20 (31). Les allocations doivent être attentivement examinées pour garantir qu'elles atteignent bien les cibles visées. Les PME des nouveaux États membres sont en mesure de recevoir un soutien extraordinaire dans le cadre des traités actuels.

7.7   Que l'UE parle d'une seule voix auprès des institutions financières internationales par rapport à l'euro, et qu'elle se dote de politiques économique, industrielle et commerciale plus cohérentes et coordonnées à l'échelle mondiale seraient aussi des initiatives porteuses de retombées positives tant pour les PME (comme cela a déjà été signalé lors de certaines auditions organisées au printemps par le CESE sur le thème de la crise économique et financière actuelle) que pour les États membres.

8.   Recommandation no 6: soutenir les PME par l'intermédiaire de leur personnel

8.1   Les employés et les compétences qu'ils apportent sont au cœur de la compétitivité des PME. Dans l'UE, les PME emploient une part plus importante de la main-d'œuvre totale que ce n'est le cas aux États-Unis ou au Japon. Il est donc crucial de consentir davantage d'efforts pour associer les organisations représentatives de PME au dialogue social ainsi qu'à d'autres domaines de la politique. Ainsi, une plus grande offre de compétences d'ingénieurs qualifiés et d'employés dotés de compétences techniques serait envisageable si l'on pouvait assurer une participation plus effective des PME à la recherche (collective) ainsi qu'au développement et à l'exploitation commerciale de ce type de recherche (par le biais d'accords de licence par exemple).

8.2   Les PME devraient faire le meilleur usage possible du plan d'action pour l'emploi présenté en juin 2009 par la Commission et de ses politiques visant à mieux anticiper les mutations structurelles et industrielles. La communication intitulée «Un engagement commun en faveur de l'emploi» (32) avance trois priorités fondamentales: préserver les emplois, en créer de nouveaux et stimuler la mobilité; développer les compétences et répondre aux besoins du marché du travail et, enfin, améliorer l'accès à l'emploi. Parmi les questions dignes d'intérêt figurent:

a.

un instrument de microfinancement doté de 100 millions d'euros, qui revêt la forme de prêts allant jusqu'à 25 000  euros adaptés aux entreprises employant moins de dix personnes;

b.

cinq millions de stages et autres aides pour les jeunes confrontés au chômage;

c.

une analyse sectorielle du marché du travail de l'UE pour développer les compétences et répondre aux besoins du marché du travail, tant actuels que futurs (33);

d.

une boîte à outils pour que les entreprises et leurs collaborateurs gèrent mieux la restructuration;

e.

un guide de la formation dans les petites entreprises pour aider les PME à maintenir et obtenir les compétences dont elles ont besoin.

9.   Recommandation no 7: l'importance des réseaux dans l'internationalisation des PME

9.1   Beaucoup de PME s'alignent sur les prix établis: ce ne sont pas elles qui les fixent; par ailleurs, c'est moins par l'exportation que par le biais de chaînes de valeur ou de chaînes d'approvisionnement et de l'importation qu'elles s'engagent sur les marchés internationaux. Ces réseaux offrent des opportunités aux PME mais ils posent aussi des problèmes particuliers ayant trait à la propriété intellectuelle et aux clients dominants qui peuvent être mieux abordés par une approche sectorielle. En tant qu'acteur mondial, l'UE n'a pas réalisé son potentiel pour améliorer la position des PME sur les marchés tiers, qu'elles soient exportatrices ou importatrices. Le rôle que l'UE et les États membres peuvent jouer s'agissant d'appuyer les PME suffisamment compétitives pour se positionner comme entreprises initiales et intermédiaires (EII) dans les chaînes de valeur revêt un intérêt particulier. Il convient de mettre davantage l’accent sur les objectifs suivants:

a.

promouvoir les PME européennes dans les stades à haute valeur ajoutée du processus de production mondial (en les associant aux agendas de l'innovation, de la recherche et des compétences, y compris ceux des universités);

b.

présenter aux PME les investisseurs étrangers directs internationaux intéressés par les opportunités que recèle le marché intérieur de l'UE afin de favoriser des collaborations industrielles durables;

c.

aider les PME à faire face aux problèmes particuliers que leur posent les chaînes de valeur et les réseaux (droits de propriété intellectuelle, rapidité des paiements dans le respect des obligations statutaires et contractuelles, etc.);

d.

coordonner et soutenir les réseaux existants, y compris les groupements nationaux et européens constitués par des PME à des fins d'exportation, les clusters locaux et les organisations de PME représentatives, afin d'apporter aux PME une assistance sur mesure pour qu'elles puissent mieux tirer parti de leurs compétences tant sur le marché intérieur que sur les marchés voisins (par exemple les régions transfrontalières). L'appui fourni par le Réseau entreprise Europe de la Commission, les chambres de commerce et les chambres de commerce bilatérales pour l'exportation est utile, mais il pourrait être étendu et mieux coordonné entre ces différents organes ainsi qu'avec d'autres réseaux existants et les organisations de PME actives dans ce domaine. De nouvelles études et actions pourraient être entreprises au sujet de différentes formes d'association de PME et solutions d'appui technique aux entreprises compatibles avec les politiques en matière d'aides d'État et l'OMC.

9.2   Le Comité a présenté un certain nombre d'avis relatifs à l'externalisation et aux chaînes de valeur (34). Celles-ci ont des incidences directes sur l'économie européenne et surtout sur les PME qui internationalisent massivement grâce à ces relations uniques. Les PME tirent parti de ces réseaux mondiaux en partageant les risques de l'internationalisation, en accédant aux nouvelles technologies et en améliorant leur efficacité grâce à une externalisation accrue et une spécialisation dans leurs compétences clefs. Mais elles sont aussi confrontées à des défis particuliers s'agissant de comprendre comment elles s'intègrent aux autres maillons de la chaîne de valeur, comment protéger leur propriété intellectuelle au sein de celle-ci et comment se hisser à des stades plus rentables de la chaîne de valeur (35). Le Comité maintient que les politiques pour les entreprises initiales et intermédiaires font encore défaut et il a précisé les problèmes à traiter dans ses avis précédents.

10.   Recommandation no 8: innovation politique et évaluation

10.1   Le Comité recommande de consentir des efforts afin de mieux comprendre l'incidence des politiques mentionnées ci-dessus, grâce à un suivi efficace, à l'évaluation des résultats et à la réévaluation régulière des objectifs eu égard, en particulier, à l'internationalisation des PME confrontées aux mutations des marchés mondiaux par l'intermédiaire de l'innovation à court et à long termes:

a.

la méthode essai/erreur devrait être considérée comme une source importante d'innovation politique permettant aux systèmes politiques d'apprendre et de s'améliorer;

b.

le recours à une politique fondée sur des données concrètes devrait être généralisé pour prendre des décisions politiques en connaissance de cause, tandis que la collecte plus fréquente de données plus nombreuses, à partir d'un éventail de sources, devrait être mieux coordonnée (par exemple, par l'examen des performances des PME de l'UE) (36);

c.

une task-force multipartite sur l'internationalisation devrait soutenir la Commission européenne dans la mise en œuvre de ses politiques, en association avec des représentants des États membres, les organisations de PME représentatives, le CESE et le Comité des régions.

Bruxelles, le 16 décembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Pour la définition des PME, veuillez vous référer à la recommandation 2003/361/CE du 6.5.2003, JO L 124 du 20.5.2003 et suivantes.

(2)  Base de données «Statistiques structurelles sur les entreprises» (SBS) d'EUROSTAT, 2004-2005.

(3)  Commission européenne «L'internationalisation des PME», Observatoire des PME européennes no 4, 2003.

(4)  CESE, «Un programme pour l'Europe: les propositions de la société civile», présenté le 24 mars 2009.

(5)  Commission, Rapport final du groupe d'experts «Soutenir l'internationalisation des PME», décembre 2007.

(6)  Observatoire des PME européennes, Internationalisation des PME no 4, 2003.

(7)  L'Europe en chiffres – L'annuaire d'Eurostat 2008.

(8)  Flash Eurobaromètre no 196.

(9)  «Les différentes mesures politiques, hormis un financement approprié, susceptibles de contribuer à la croissance et au développement des PME», JO C 27 du 3.2.2009, p. 7; «Marchés public internationaux», JO C 224 du 30.8.2008, p. 32 et «Small Business Act», JO C 182 du 4.8.2009, p. 30.

(10)  «Qu'est-ce que la Semaine des PME? http://ec.europa.eu/enterprise/policies/entrepreneurship/sme-week/about/index_fr.htm».

(11)  «Un marché unique pour l'Europe du XXIe siècle», JO C 77 du 31.3.2009, p. 15.

(12)  Communication de la Commission COM(2008) 874 final.

(13)  Cf. «Une Europe compétitive dans une économie mondialisée http://ec.europa.eu/trade/issues/sectoral/competitiveness/global_europe_fr.htm» et «Politique d'accès aux marchés http://ec.europa.eu/trade/issues/sectoral/mk_access/index_fr.htm», «Réglementation des obstacles au commerce http://ec.europa.eu/trade/issues/respectrules/tbr/index_en.htm», etc.

(14)  Cf. le rapport du rapporteur Ignasi GUARDANS CAMBÓ, A6-0002/2008, adopté le 19 février 2008.

(15)  Pour des exemples de bonnes pratiques à l'initiative des États membres, consulter le guide 2008 des bonnes pratiques en matière de soutien à l'internationalisation des PME («Supporting the Internationalisation of SMEs – a good practice guide») de la DG «Entreprises et industrie».

(16)  «Programme de recherche et de développement visant à soutenir les PME», JO C 224 du 30.8.2008, p. 18.

(17)  Voir en particulier la page 24 du «Guide des règles communautaires applicables aux aides d'État en faveur des PME» de la Commission européenne, Bruxelles, 25.2.2009 http://ec.europa.eu/competition/state_aid/studies_reports/sme_handbook_fr.pdf.

(18)  Fiche documentaire sur l'Aide pour le commerce, Bruxelles, le 3 avril 2009, annexe A, paragraphe 2 du Guide de programmation pour les documents stratégiques: aide pour le commerce, Bruxelles, novembre 2008; rapport du président du comité OTC relatif à l'Atelier du Comité OTC sur le rôle des normes internationales dans le développement économique («TBT Committee Workshop on the Role of International Standards in Economic Development»), final, 19 mars 2009.

(19)  «Comment améliorer l'application de la législation communautaire», JO C 24 du 31.1.2006, p. 52.

(20)  Communication de la Commission intitulée «L'Europe dans le monde: un partenariat renforcé pour assurer aux exportateurs européens un meilleur accès aux marchés extérieurs», COM(2007) 183 final.

(21)  Cf. EIM «Étude sur la représentativité des organisations d'entreprises pour les PME dans l'UE» («Study on the Representativeness of business organisations for SMEs in the EU»), ZOETERMEER, mai 2009.

(22)  La Commission a publié une «Étude sur l'efficacité de la législation européenne en matière de lutte contre les retards de paiement» http://ec.europa.eu/enterprise/policies/single-market-goods/files/late_payments/doc/finalreport_fr.pdf.

(23)  OCDE APEC «Le plan d'action d'Athènes pour la suppression des obstacles à l'accès des PME aux marchés internationaux», adopté par la conférence mondiale de l'OCDE/APEC tenue à Athènes le 8 novembre 2006.

(24)  OCDE, «Supprimer les obstacles à l'accès des PME aux marchés internationaux» («Removing Barriers to SME Access to International Markets»), 2008; C. DANNREUTHER «Du zèle pour le zèle? La politique des PME et la politique économique de l'UE» («A Zeal for a Zeal? SME Policy and the Political Economy of the EU») Comparative European Politics 23, 2008, pp. 377-399; C. DANNREUTHER, «La politique des PME de l'UE: à deux doigts de la gouvernance» («EU SME policy: On the edge of governance») CESifo Forum, 2/2007.

(25)  Les entreprises qui se positionnent d'emblée sur les marchés mondiaux présentent quatre caractéristiques: une vision mondiale dès le commencement, des produits dotés d'un potentiel sur le marché mondial, l'indépendance et une aptitude à l'internationalisation accélérée. p. 389 de Mika GABRIELSSON, V.H. Manek KIRPALANI, Pavlos DIMITRATOS, Carl Arthur SOLBERG, Antonella ZUCCHELLA, «Born globals: Propositions to help advance the theory» (Mondiales dès leur création: propositions pour contribuer à faire progresser la théorie), International Business Review 17, 2008, pp. 385–401.

(26)  Cf. note de bas de page no 9.

(27)  Cf. http://ec.europa.eu/enterprise/entrepreneurship/partnership/interprise.htm

(28)  FMI, «Le financement des échanges commerciaux trébuche» («Trade Finance Stumbles»), Finance et développement, 2009.

(29)  OCDE, «Table ronde de Turin sur l'impact de la crise mondiale sur le financement des PME et de l'entrepreneuriat et les réponses en termes d'actions des pouvoirs publics», Banque Intesa Sanpaolo, Palazzo Turinetti, Turin, Italie, 26 et 27 mars 2009.

(30)  «Small Business Act», cf. note de bas de page no 9, et avis du CESE sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant la lutte contre les retards de paiement dans les transactions commerciales», JO C 407 du 28.12.1998, p. 50.

(31)  Déclaration des chefs d'État et de gouvernement du G20 «Le plan mondial de relance et de réforme», 2 avril 2009.

(32)  COM (2009) 257 final.

(33)  Communication intitulée «Des compétences nouvelles pour des emplois nouveaux», COM (2008) 868 final.

(34)  «Évolution des chaînes de valeur et d'approvisionnement», JO C 168 du 20.7.2007, p. 1, et «Intégration du commerce mondial et externalisation», JO C 10 du 15.1.2008, p. 59.

(35)  OCDE, «Renforcer le rôle des PME dans les chaînes de valeur mondiales» («Enhancing the Role of SMEs in Global Value Chains»).

(36)  OCDE, «Faire en sorte que les stratégies locales fonctionnent: construire le socle de preuves» («Making Local Strategies Work: Building the Evidence Base»), 2008.


22.9.2010   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 255/31


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Programme d'aide à l'aviation européenne»

(avis d'initiative)

(2010/C 255/05)

Rapporteur: M. KRAWCZYK

Corapporteur: M. PHILIPPE

Le 16 juillet 2009, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l'article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d'élaborer un avis d'initiative sur le thème:

«Programme d'aide à l'aviation européenne».

La commission consultative des mutations industrielles, chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 26 novembre 2009 (rapporteur: M. KRAWCZYK; corapporteur: M. PHILIPPE).

Lors de sa 458e session plénière des 16 et 17 décembre (séance du 17 décembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 167 voix pour et 2 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   La crise actuelle est sans précédent: elle affecte tous les éléments de la chaîne de valeur du transport aérien («la chaîne de valeur»), bien que de manière différente. Dans un environnement en partie libéralisé, où seul le dernier maillon de la chaîne (à savoir les compagnies aériennes) a fait l'objet d'une libéralisation en bonne et due forme, les autres composantes de la chaîne de valeur peuvent atténuer – en partie ou en totalité – les pertes de revenu générées par la diminution du trafic en recourant de manière impropre à ce que l'on appelle le «principe de recouvrement des coûts», ou bien moyennant un abus de leur position concurrentielle.

1.2   Il en va de la résistance de l'aviation européenne, et donc de sa compétitivité internationale. Alors que d'autres régions du monde ont rapidement pris des mesures efficaces pour pallier le fléchissement du nombre de passagers et du fret, leurs homologues européens sont confrontés à des problèmes d'une autre nature, qui s'accompagnent d'effets négatifs considérables pour leurs fournisseurs. Les taxes gouvernementales de toute sorte qui viennent encore augmenter les coûts d'utilisation des infrastructures (aéroports, ATC), le manque de fonds disponibles, les contraintes environnementales unilatérales ne sont que quelques exemples de la réalité du qu'affronte le secteur aéronautique européen.

1.3   Dans le présent avis sont proposées un certain nombre de mesures à court et moyen terme que les décideurs politiques sont invités à examiner et à mettre en œuvre pour que l'aviation européenne lutte efficacement contre la crise et en sorte aussi résistante qu'elle l'était auparavant.

1.4   Il convient que la restructuration de la chaîne de valeur soit comprise et suivie par tous les acteurs qui interviennent dans le trafic aérien: les aéroports, les prestataires de services de navigation aérienne, les prestataires de services d'assistance en escale, les compagnies aériennes et les constructeurs d'aéronefs.

1.5   Le Comité rappelle que le secteur aéronautique européen dans son ensemble est considéré comme étant d'une importance stratégique pour l'Europe; il constitue en effet un moteur de croissance grâce à son personnel très qualifié/compétent. C'est pourquoi les mesures qu'il y a lieu de prendre afin de surmonter la crise qui touche le secteur doivent permettre de préserver les compétences qui seront nécessaires pour assurer le développement de l'assise industrielle et technologique de l'Europe.

1.6   Afin de mieux anticiper les évolutions futures du secteur, il serait opportun d'encourager le développement du dialogue social entre les parties prenantes ainsi que les actions en faveur de la formation et de la gestion prévisionnelle des compétences et des emplois. Les acteurs publics et privés doivent s'engager dans des activités soutenant les échanges entre les écoles et l'industrie, de même qu'appuyer la recherche et développement nécessaire à l'expansion du secteur.

1.7   Le neuvième paragraphe du présent avis couvre les propositions en faveur d'un programme de soutien à l'aviation européenne. Celles-ci comportent des initiatives qui ont trait:

à l'ajustement des infrastructures et aux coûts;

aux enjeux financiers provoqués par le manque de financement disponible et la réduction des bénéfices;

aux préoccupations environnementales;

à l'environnement réglementaire;

à la concurrence internationale;

à la recherche et au développement.

2.   Impact de la crise sur le secteur aéronautique

2.1   L'Association du transport aérien international (IATA) estimait en mars 2009 que les pertes du secteur mondial de l'aviation s'élèveraient à 4,7 milliards de dollars en 2009. Ces prévisions ont toutefois été revues, les pertes pour 2009 ayant été estimées à 9 milliards de dollars en mai, puis à 11 milliards de dollars en septembre. Cette tendance devrait perdurer en 2010, à concurrence de 3,8 milliards de dollars de pertes.

2.2   En termes de demande, les membres de l'Association des compagnies européennes de navigation aérienne (AEA) ont enregistré une baisse du nombre de passagers de 8,2 % au premier semestre 2009. Le trafic à haut rendement a diminué de plus de 19,9 %. Les transporteurs de fret ont été touchés par une chute de la demande de 22,1 % au premier semestre 2009. Ces données sont confirmées par «Airports Council International» (ACI), qui estime la chute de la demande à 8,1 % pour le transport de passagers et 21,1 % pour le fret. Selon cette organisation, au cours des neuf premiers mois de l'année 2009, les 25 plus grands aéroports européens ont perdu 41 millions de passagers. L'Association européenne des compagnies d'aviation des régions d'Europe (ERA), qui représente les transporteurs opérant des vols à l'intérieur de l'Europe, a enregistré une chute collective du trafic passager d'une amplitude de 7,2 % au premier semestre 2009.

2.3   En 2008, le secteur du transport aérien pourvoyait environ 1,5 million d'emplois en Europe, les compagnies aériennes étant de loin le premier contributeur, à concurrence de 49 %. Au cours du premier semestre 2009 seulement, les membres de l'AEA ont réduit leurs effectifs de 34 000 personnes (soit quelque 8 % de la main-d'œuvre totale), avec des effets en cascade pour environ 90 000 emplois «indirects» dans toute l'Europe, dont la plupart sont hautement qualifiés. L'exemple de l'aéroport d'Amsterdam illustre aussi les réductions de personnel à grande échelle.

2.4   En Europe, les compagnies à bas prix ont réalisé de meilleurs résultats que les autres modèles économiques. Même si elles n'ont pas été épargnées par les faillites, puisque depuis août 2008, cinq d'entre elles ont fait défaillance, la part du marché européen qu'elles détiennent a triplé, pour atteindre 37 % en 2009, alors qu'elle était de 12 % en 2003. En juillet 2009, au pire de la crise, elles n'ont pratiquement pas procédé à des réductions de capacités, étant donné que la demande pour leurs services n'avait pas faibli, ou n'avait fléchi qu'à la marge. Cette situation peut s'expliquer pour partie par la capacité dont elles disposent d'éviter les plates-formes aériennes encombrées et de réorganiser ainsi leurs activités en fonction des impératifs financiers du moment. En ces temps de disette financière, leur dépendance vis-à-vis des aides, directes ou indirectes, des pouvoirs publics jettent toutefois un doute sur leur pérennité à moyen terme. Tout en notant que le développement des transporteurs à bas prix est devenu une réalité sociale, il y a lieu de s'interroger sur l'avenir de cette forme de transport et les effets qu'elle pourrait avoir sur l'ensemble de la chaîne de création de valeur.

2.5   En dépit de coupes claires dans les capacités du côté de l'offre, les résultats d'exploitation des transporteurs aériens traditionnels ont chuté, passant de –0,2 milliard d'euros au premier trimestre 2008 à –1,9 milliard d'euros au premier trimestre 2009. Selon l'IATA, les compagnies aériennes européennes seront les plus touchées, les pertes prévues étant de 3,8 milliards de dollars en 2009. L'ACI estime que les aéroports européens auront perdu en 2009 98 millions de passagers, les aéroports les plus petits étant les plus durement touchés.

2.6   En Europe, depuis le début de la crise (de septembre 2008 à septembre 2009), plus de 33 transporteurs ont déposé le bilan ou sont sur le point de le faire.

2.7   D'après les dernières analyses réalisées pour la Commission européenne concernant le marché du transport aérien européen en 2008, Airbus a enregistré en 2008 41,3 % de commandes de moins qu'en 2007, qui fut une année exceptionnelle en termes de carnet de commande.

2.8   Pour ce qui est des constructeurs, l'année 2009 a été jusqu'à présent tout aussi mauvaise. En octobre 2009, Boeing avait reçu 195 commandes et 111 annulations, avec un solde net de 84 commandes uniquement. Pour la même période, Airbus a enregistré 149 commandes et 26 annulations, avec un solde net de 123 commandes. À titre indicatif, l'année dernière, les deux entreprises ont respectivement reçu 662 et 777 commandes.

2.9   Confrontés à une chute des commandes ainsi qu'à la suspension et/ou à la réduction des livraisons, les constructeurs aéronautiques estiment disposer d'une marge de manœuvre réduite et tentent de protéger leurs résultats en diminuant les coûts. Dans le même temps, cette approche influence leur capacité à investir dans le développement de nouvelles technologies et de nouveaux aéronefs.

3.   Implications à plus long terme pour le secteur

3.1   La stratégie adoptée par les maîtres d'œuvre (Airbus, Boeing, Dassault, ATR, Alenia, Safran, Goodrich, Thales, Liebherr, etc.) vise à raccourcir les calendriers de développement et à réduire les coûts, tout en délocalisant les activités de production et de recherche, notamment hors d'Europe. Les fournisseurs et les sous-traitants sont dans l'obligation d'adopter cette stratégie vis-à-vis de leurs propres partenaires (1).

3.2   Si une baisse significative des commandes coïncidait cette stratégie des constructeurs, cela créerait des difficultés au niveau du volume de travail pour de nombreux sous-traitants, dont l'existence pourrait être mise en danger. Suivant la même logique, il convient de remettre en question les stratégies des entreprises qui prévoient des mesures de délocalisation et de transfert de technologie hors d'Europe, au vu de leur impact social (hémorragie des ressources financières, perte de compétitivité et de valeur ajoutée, incidences sur l'environnement et le tissu socio-économique).

3.3   À long terme, cette politique peut générer des pertes d'emplois hautement qualifiés considérables en Europe, qui pourront à leur tour sérieusement menacer la compétitivité du secteur en Europe.

3.4   La hausse du taux de chômage, la diminution des revenus des particuliers et la crise de confiance ont conduit les passagers à limiter leurs déplacements, à délaisser la classe affaires et à passer des transports aériens à des modes de transport alternatifs.

3.5   Si en 2001, les compagnies aériennes membres de l'AEA ont subi une chute de revenus de 7 % et ne sont sorties du rouge qu'après trois ans, la situation actuelle est deux fois pire. Une perte totale de 15 % semble indiquer que les compagnies aériennes auront besoin de plus de trois ans avant de revenir à la normale.

Les réductions de coûts réalisées par les compagnies aériennes ne sont pas appuyées par une action simultanée des aéroports et des prestataires de services de navigation aérienne. L'ensemble de la chaîne de valeur ne réagit pas de manière uniforme à la récession économique.

4.1   En outre, le réseau complexe de réglementations souvent contradictoires limite la capacité du secteur de l'aviation à réagir aux défis posés par la crise.

Les compagnies aériennes ne contrôlent directement que 37 % de ce qui constitue leurs coûts opérationnels. Près d'un autre tiers est généré par des éléments échappant à leur contrôle direct, dont voici un aperçu:

5.1   Les coûts opérationnels «externes» s'élevaient en 2008 à un montant total de 50,5 milliards d'euros. Même s'il s'agissait avant tout (à concurrence de plus de 45 %) des coûts de carburant, dont le prix est largement incontrôlé, les 55 % restants (soit 27,5 milliards d'euros) étaient notamment imputables aux redevances aéroportuaires et ATC.

5.2   Les redevances aéroportuaires, qui s'élevaient au total à 2,8 milliards d'euros l'an dernier, ont soudain augmenté de plus de 5 % dans de nombreux aéroports. Seuls quelques aéroports européens ont pu s'associer aux efforts déployés par leurs utilisateurs en réduisant les redevances de manière comparable. En moyenne, les redevances aéroportuaires par passager ont augmenté de 15 % au premier trimestre 2009.

5.3   La hausse des prix du pétrole constitue une menace à la viabilité des compagnies aériennes. Le prix du kérosène a grimpé de près de 50 % depuis le début de l'année. Selon l'IATA, le prix moyen du kérosène passera de 61 dollars par baril en 2009 à 72 dollars par baril en 2010.

5.4   De même, au premier trimestre 2009, les taux unitaires de redevance pour le contrôle de la circulation aérienne (ATC) à l'unité ont augmenté d'en moyenne 3,4 % en Europe. Cette hausse a été justifiée par le principe de «recouvrement des coûts» permettant à chaque prestataire de services de navigation aérienne de compenser une diminution du trafic par une augmentation des redevances.

5.5   L'idée d'un ciel unique européen, à ce jour une occasion manquée qui devait amener des réductions de coûts pouvant aller jusqu'à 5 milliards d'euros par an ainsi que des améliorations induites par un routage plus direct et la diminution des émissions de CO2 de 16 tonnes, sera sans impact sur la réalité économique à court terme (étant donné que les blocs d'espace aérien fonctionnels n'entreront pas en vigueur avant 2012).

5.6   Les compagnies aériennes sont exposées, en raison de leur structure de coûts, à la moindre fluctuation des prix du pétrole. Dans l'intérêt de l'économie et de la responsabilité sociale des entreprises, il est nécessaire de prendre de toute urgence des mesures immédiates afin de promouvoir l'utilisation de moteurs et de carburants «révolutionnaires». À cette fin, un appui massif au financement des activités de recherche et développement s'avère crucial.

5.7   Les coûts de développement des programmes aéronautiques sont en constante augmentation; le financement de la livraison de nouveaux avions en devient donc plus difficile. Lorsque les compagnies aériennes n'ont plus accès aux financements bancaires, c'est l'ensemble du secteur aéronautique qui est menacé.

5.8   Il est nécessaire d'examiner de nouvelles modalités financières en ce qui concerne le développement et la production d'aéronefs, permettant de libérer les industriels et les opérateurs des contraintes liées au déboursement de liquidités grâce à des mécanismes facilitateurs au moment du paiement de l'aéronef.

5.9   Historiquement, les marchés publics liés aux programmes aéronautiques militaires ont toujours soutenu le secteur (qui dans l'ensemble présente à la fois une composante civile et une composante militaire) durant les périodes de mauvaise conjoncture. Il est incontestablement nécessaire d'examiner de toute urgence la possibilité d'accorder un tel soutien coordonné à l'échelon européen, ce qui faciliterait également la réorganisation d'un secteur qui reste trop fragmenté.

5.10   L'utilisation de fonds publics pour soutenir les entreprises (déjà envisageable en vertu de la législation actuelle) devrait être évaluée sur la base des engagements à maintenir les emplois et les compétences dans les entreprises concernées.

Il est plus que jamais nécessaire d'instaurer des conditions de concurrence équitables au niveau international. La crise a amené de nombreux gouvernements de par le monde à se porter au secours de leurs compagnies aériennes en difficulté. La Chine a directement subventionné China Eastern Airlines (750 millions d'euros) et China Southern Airlines (320 millions d'euros) début 2009, tandis que les redevances aéroportuaires chinoises étaient suspendues et que le prix du kérosène était abaissé. En Inde, le gouvernement a octroyé 600 millions d'euros à Air India sous la forme de prêts participatifs et de prêts bonifiés.

6.1   Certains de ces transporteurs, appelés opérateurs de la cinquième et de la sixième liberté du transport aérien, utilisent l'Europe comme un grand réservoir riche en ressources où ils viennent puiser, comme par exemple les transporteurs du Golfe.

6.2   Ces transporteurs bénéficiant d'aides d'État maintiennent des opérations intercontinentales en dépit de la chute spectaculaire des taux d'occupation. Dans certains cas, ils parviennent même à les augmenter alors que les transporteurs européens, soumis à la réalité du marché, sont forcés de les réduire. Les transporteurs du Golfe ont ainsi accru de 14 % leurs capacités cette année, essentiellement par l'intermédiaire des principales plates-formes européennes.

7.   À ce jour, la réaction de la Communauté européenne à cette crise sans précédent a été la suivante: la dérogation estivale aux règles sur les créneaux horaires n'a pas suffi et est survenue trop tard. L'adoption finale et la publication de ce règlement fin juin, près de trois mois après le début de la saison estivale, ne lui ont pas permis d'aider le secteur à réagir avec plus de souplesse aux changements rapides des conditions sur le marché.

Bien que les associations de compagnies aériennes aient dès le départ rejeté l'idée d'aides d'État particulières, l'on a identifié plusieurs domaines nécessitant des mesures rapides de la part des régulateurs afin de lutter contre la crise.

8.1   La dérogation hivernale attendue vise à aider le secteur aéronautique, et en particulier les compagnies aériennes, à faire face à la crise économique en alignant leurs capacités sur la demande à la baisse. La mesure est non discriminatoire, elle profite à toutes les compagnies aériennes et à tous les modèles d'entreprise différents, et elle constitue une mesure à court terme et isolée. Elle doit être mise en œuvre à temps afin de faire sentir ses effets. Cette mesure recueille aussi l'assentiment de transporteurs à bas prix.

8.2   Étant donné que la crise a d'abord touché le secteur financier, la plupart des établissements financiers spécialisés dans le financement du secteur aéronautique ont disparu ou réorienté leur stratégie vers d'autres activités.

8.3   Afin de renouveler leur flotte, les compagnies membres de l'AEA ont commandé (situation de juillet 2009) 530 aéronefs qu'elles devraient recevoir dans les années à venir, pour une valeur s'élevant jusqu'à 29 milliards de dollars, soit une baisse en regard des 561 commandes enregistrées à la même période l'année dernière.

8.4   On estime que seules 75 à 80 % de ces commandes sont ou seront garanties ou financées par le secteur financier. Pour les 20 à 25 % restants, il faudra soit les annuler, soit trouver des modes de financement alternatifs n'existant pas aujourd'hui.

8.5   Rien qu'en 2008, la Banque européenne d'investissement a octroyé aux projets au sein des États membres des prêts pour une valeur de près de 52 milliards d'euros, dont seulement 2,7 milliards étaient destinés au secteur du transport aérien européen (compagnies aériennes, aéroports, ATC et constructeurs).

8.6   Dans son rapport final publié en mai 2009, le Groupe sur l'aviation internationale et les changements climatiques (GIACC) de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) a recommandé à l'OACI d'adopter trois objectifs globaux:

a.

sur le court terme jusqu'à 2012: améliorer l'efficacité moyenne en carburant de la flotte en service de 2 % par an;

b.

sur le moyen terme jusqu'à 2020: améliorer l'efficacité en carburant de 2 % par an;

c.

de 2021 à 2050: améliorer l'efficacité en carburant de 2 % par an au niveau mondial.

8.7   Il est vital que l'aviation internationale soit représentée au sommet COP15 de Copenhague en décembre, et qu'elle y soit traitée comme un secteur. Il est également essentiel que l'accord de Copenhague fixe un plafond aux émissions du secteur aéronautique mondial. La discussion devrait concerner à la fois les compagnies aériennes et les constructeurs aéronautiques.

8.8   Eu égard à leur inclusion dans le système communautaire d'échange de quotas d'émission en 2012, il est crucial que les transporteurs européens commencent à remplacer progressivement leurs aéronefs pour des appareils plus efficaces. La dernière génération des B737 ou des A320 permet de réduire les émissions jusqu'à 7 ou 8 % par rapport à la génération précédente. Il convient d'allouer des fonds afin de permettre des innovations technologiques radicales en ce qui concerne les moteurs, les cellules d'avion et le carburant.

8.9   La moyenne d'âge des flottes en service demeure relativement élevée, ce qui a d'ailleurs une incidence sur les résultats des compagnies aériennes. Aussi convient-il d'instaurer un secteur structuré pour le démantèlement. Les exemples actuels restent trop rares et insuffisamment coordonnés. Il y a lieu de créer un véritable secteur européen, sous les auspices des pouvoirs publics.

8.10   Les constructeurs et leurs sous-traitants devraient naturellement être associés à ces initiatives, qui pourraient créer de nouveaux emplois et générer des revenus supplémentaires en étendant l'activité industrielle à toute la durée de vie du produit, jusqu'à la mise hors service des aéronefs.

8.11   Les prestataires de services de navigation aérienne fonctionnent sur la base du principe de recouvrement des coûts. Ainsi, lorsque le niveau de trafic diminue, les coûts à l'unité augmentent, si bien que les compagnies aériennes sont «doublement touchées» par la crise. Les prestataires de services de navigation aérienne doivent ajuster leur base de coûts au nouvel environnement économique et à un trafic aérien sensiblement plus bas.

8.12   Le paquet «Ciel unique européen» concernera indirectement le principe de recouvrement des coûts en imposant des objectifs de performance aux blocs d'espace aérien fonctionnels et aux États membres. Sa mise en œuvre ne débutera toutefois qu'en 2012. SESAR, le programme conçu pour établir une architecture unique, devrait remplacer les 22 systèmes d'exploitation, les 30 langages de programmation et les 31 systèmes nationaux actuellement utilisés.

8.13   Étant donné que les États membres ont déjà adopté la directive sur les redevances aéroportuaires, ils devraient agir en cette période de crise comme si les principales dispositions de la directive étaient déjà d'application. La Commission est désormais effectivement compétente pour les redevances aéroportuaires dans l'UE.

8.14   L'an dernier, l'Agence européenne de la sécurité aérienne (AESA) s'est vue confier la compétence légale pour les règles de sûreté liées aux opérations de vol, aux licences du personnel navigant et à la surveillance des opérateurs de pays tiers.

8.15   Il y a lieu de continuer à soutenir l'amélioration de la sûreté au moyen d'analyses fondées sur les données et ciblées sur le risque. Les améliorations apportées à la sécurité à l'instigation du secteur, en partenariat avec les gouvernements, ont conduit à des progrès en matière d'amélioration de la sûreté aéronautique, et cette position de chef de file devrait se maintenir, dans la mesure où la sécurité se trouve au cœur du secteur aéronautique. Il convient de s'assurer que l'AESA traite exclusivement des considérations de sécurité.

8.16   Le secteur aéronautique attend depuis longtemps un accord final sur la reconnaissance mutuelle des mesures de sûreté par l'Union européenne et les États-Unis. Il convient désormais de prendre une décision politique afin de reconnaître que les mesures de sûreté américaines sont équivalentes. Cette reconnaissance profitera aux 6 millions de passagers venant des États-Unis et transitant par un aéroport de l'UE chaque année.

Le secteur aéronautique européen constitue une composante essentielle de l'économie, en ce qu'il contribue beaucoup à l'un de ses fondamentaux: la mobilité (des biens et des personnes). Il représente aussi une part importante de la forte assise industrielle, du développement technologique et de la croissance économique. Préserver cette base dans une perspective de long terme revêt une importance capitale, et les efforts allant dans ce sens doivent être encouragés. Ce secteur constitue également un élément moteur pour la relance économique, en ces temps de mondialisation. Dès lors, les objectifs prioritaires des gouvernements devraient consister à garantir la pérennité des piliers qui soutiennent leurs économies fragilisées, notamment l'aviation, mais aussi à créer les conditions d'un retour rapide à un environnement sain. C'est pourquoi le CESE recommande vivement que soient prises les actions et les mesures de soutien suivantes:

9.1   Les effets des cycles économiques et des pressions de la concurrence devraient se faire sentir sur la chaîne de valeur dans son ensemble (aéroports, constructeurs aéronautiques, fournisseurs de kérosène, prestataires de services d'assistance en escale, prestataires de services de navigation aérienne, compagnies aériennes). Des restructurations sont en cours afin de minimiser l'impact négatif du ralentissement économique.

9.2   La Commission devrait lancer toutes les procédures visant à faciliter et à mettre en œuvre une dérogation à la règle 80:20 en ce qui concerne l'utilisation des créneaux horaires pour la saison hivernale 2009-2010.

9.3   Si l'on sait qu'à moyen terme, le trafic aérien devrait augmenter de 4 à 5 % chaque année, et que 25 000 aéronefs pouvant accueillir plus de cent passagers pourraient être construits au cours des vingt prochaines années, il convient de gérer à bon escient les capacités de production européennes. Au cas où des restructurations seraient inévitables, le maintien des capacités et des compétences est un aspect qui devrait être pris en considération.

9.4   Le Comité plaide pour que les procédures d'information et de consultation des partenaires sociaux soient respectées en cas de restructuration. Il encourage tous les partenaires sociaux à développer un dialogue social structuré et anticipateur au sein des entreprises et aux niveaux national et européen.

9.5   Les pouvoirs publics devraient aider les entreprises vulnérables à maintenir leurs compétences et leurs emplois, par exemple en améliorant l'accès à la formation professionnelle en période de ralentissement économique. Les organes publics pourraient montrer l'exemple en promouvant le développement et l'acquisition des compétences nécessaires à moyen et à long terme. Dans ce contexte, le Comité considère qu'un dispositif de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences impliquant les partenaires sociaux doit être mis en place.

9.6   Dans ses avis (SOC/347, en dernière date), le Comité a souligné l'importance que revêtent un enseignement de grande qualité dans les écoles et les universités ainsi que de bons contacts entre l'industrie et les écoles/universités afin d'assurer la disponibilité d'une main-d'œuvre munie des connaissances et des compétences appropriées.

9.7   Ce type de soutien coordonné émanant des pouvoirs publics (EU, États, régions, etc.) est crucial pour faire face aux effets de la crise, qui touche le secteur industriel à un moment où de nombreuses personnes partent à la retraite. Si les compétences ne sont pas maintenues dans le secteur des constructeurs, il ne sera pas à même de relever les défis à long terme.

9.8   La Banque européenne d'investissement devrait revenir à sa politique d'avant 2007, lorsque les transporteurs européens pouvaient profiter de ses prêts. Ce mouvement devrait être rapide et concerner spécifiquement le financement de nouveaux aéronefs. Cela ne reviendrait pas à financer une expansion de la flotte.

9.9   Il conviendrait également de prévoir des mécanismes couvrant les risques financiers, tels que ceux induits par la fluctuation des taux de change (cf. paragraphe 4.6 de l'avis CCMI/047). Ceux-ci pourraient notamment revêtir la forme de garanties pour les prêts basées sur des avances remboursables, ou de prêts par la Banque européenne d'investissement.

9.10   Il convient de prévoir un financement supplémentaire pour la recherche et le développement dans le secteur aéronautique, afin de permettre au secteur de relever les défis futurs, et notamment de répondre aux exigences du système communautaire d'échange de quotas d'émission. Une approche mondiale, s'appliquant à l'ensemble du secteur sous l'égide de l'OACI, constituerait toutefois la meilleure des solutions pour atténuer internationalement les effets du changement climatique, s'agissant d'aider à résoudre un problème d'envergure planétaire.

9.11   Eu égard à l'importance innovatrice et stratégique du secteur aéronautique pour la base industrielle et technologique de l'Europe, l'on pourrait apporter un vif soutien à la recherche-développement, mise à mal par la crise, grâce à des efforts soutenus de l'UE allant de la phase de mise en œuvre du 7e programme-cadre pour la recherche jusqu'au 8e programme-cadre à venir. Il convient de ne pas réduire l'appui public à la recherche-développement, afin de garantir l'excellence de l'Europe en la matière. Aussi la R&D et la coopération sont-elles incontournables si l'on veut continuer à miser sur le développement d'une industrie aéronautique durable à long terme au moyen de carburants alternatifs et de mesures opérationnelles de substitution.

9.12   Les contractants de premier rang souffrent moins du ralentissement économique que leurs fournisseurs et sous-traitants, qui représentent la majorité des compétences et des emplois du secteur. Un processus de soutien pourrait revêtir la forme d'une mutualisation des emprunts et des garanties des sous-traitants. Les constructeurs devraient appuyer les efforts déployés par les fournisseurs en leur garantissant des revenus et une charge de travail à long terme.

9.13   Le paquet «Ciel unique européen II» doit être mis en œuvre de toute urgence. La fragmentation de l'espace aérien européen entraîne de lourdes charges supplémentaires non seulement pour les passagers, mais aussi pour les transporteurs. Le CESE a vivement appuyé le paquet «Ciel unique européen II» dans son dernier avis. L'aéronautique constitue un secteur global et l'interopérabilité s'imposera si l'on veut éviter des charges et des facteurs d'inefficacité supplémentaires. Il convient donc de constamment veiller à ce que soit assurée l'interopérabilité de SESAR et NextGen. Le mécanisme de financement de la mise en œuvre de SESAR doit être arrêté par la Commission en 2010 afin de permettre une large participation à cette entreprise révolutionnaire.

9.14   Il faut appeler tous les États membres à accélérer la mise en œuvre de la directive sur les redevances aéroportuaires. La Commission devrait envisager de faire usage de la compétence que lui confère la directive.

9.15   La Commission adressera une communication aux États membres et à EUROCONTROL afin d'instaurer un moratoire sur les redevances ATC. Le Comité a pleinement conscience des efforts qu'a déjà réalisés la DG TREN à ce sujet, et l'encourage fermement à accroître la pression sur les États membres.

9.16   Il convient que les institutions européennes encouragent la consultation entre les prestataires de services de navigation aérienne et les compagnies aériennes conformément aux exigences du règlement no 1794/2006 sur la tarification. Une nouvelle mise à jour de ce règlement est nécessaire afin de refléter le dispositif d'amélioration des performances mis en œuvre dans le paquet «Ciel unique européen II».

9.17   Il faut garantir le fait que l'AESA traite exclusivement des questions de sûreté. Il y a lieu de s'assurer que la sûreté des vols est préservée et améliorée.

Le principe de sûreté à guichet unique devrait être appliqué dans toute l'UE d'ici avril 2010 (date de l'entrée en vigueur des nouvelles règles européennes en matière de sûreté établies dans le règlement 300/2008). En outre, il convient que soit présentée aux États membres une proposition sur le principe de sûreté à guichet unique UE-États-Unis, sur la base de l'évaluation mutuelle des mesures de sûreté européennes et américaines, et qu'elle soit mise en œuvre le plus rapidement possible.

9.18   Davantage d'accords internationaux en matière d'aviation entre l'UE et des pays tiers sont nécessaires afin de créer des conditions de concurrence équitables au niveau international. L'accord conclu par la Commission avec le Canada a été vivement salué par le CESE dans son avis.

9.19   De manière générale, l'incidence croissante des cas de coopération régionale et internationale entre acteurs du secteur (opérateurs, constructeurs, pouvoirs publics) pourrait contribuer à stimuler l'offre et l'activité générale dans le secteur, pour autant que les modalités d'un tel «échange» soient socialement responsables et impliquent l'ensemble des partenaires sociaux.

Bruxelles, le 17 décembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  V. également l'avis du CESE sur «L'aéronautique européenne: Situation et perspectives» (JO C 175 du 28.7.2009, p. 50-56).


III Actes préparatoires

Comité économique et social européen

458e session plénière des 16 et 17 décembre 2009

22.9.2010   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 255/37


458e session plénière des 16 et 17 décembre 2009

Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux dénominations des produits textiles et à l'étiquetage y afférent»

COM(2009) 31 final/2 — 2009/0006 (COD)

(2010/C 255/06)

Rapporteur: M. CAPPELLINI

Le 27 février 2009, le Conseil de l'Union européenne a décidé, conformément à l'article 95 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux dénominations des produits textiles et à l'étiquetage y afférent»

COM(2009) 31 final/2 – 2009/0006(COD).

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a élaboré son avis le 17 novembre 2009 (rapporteur: M. CAPPELLINI).

Lors de sa 458 session plénière des 16 et 17 décembre 2009 (séance du 16 décembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 160 voix pour et 1 abstention.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le CESE soutient l'initiative de la Commission européenne en matière de dénomination et d'étiquetage des produits textiles. Elle est en effet susceptible d'améliorer les processus d'innovation et les solutions apportées aux problèmes sociaux auxquels l'industrie communautaire du textile est confrontée, ainsi que d'accroître la sensibilisation et l'information du consommateur européen, en particulier en période de crise. Comme il l'a déjà fait dans de précédents avis et rapports d'information sur l'avenir de l'industrie textile (1), le Comité économique et social européen souligne l'urgente nécessité que le secteur fasse l'objet de politiques cohérentes et intégrées, notamment en matière d'étiquetage, qui lui procurent un avantage compétitif.

1.2   Le CESE accueille favorablement le règlement et approuve l'article 4 relatif au cadre juridique national concernant le produit d'origine et les règles de concurrence.

1.3   Le CESE demande à la Commission européenne et aux parties prenantes de suivre la manière dont le règlement proposé influencera:

l'agenda stratégique de recherche européen, en ce qui concerne le développement et l'utilisation de nouvelles fibres et de produits textiles novateurs, ainsi que sur le plan de la transparence;

la simplification du cadre juridique existant et, partant, l'éclosion d'effets positifs potentiels pour les parties prenantes privées et les administrations publiques aux niveaux communautaire, national et régional;

une cohérence accrue du nouveau cadre réglementaire (2).

1.4   Le CESE confirme la nécessité pour les consommateurs de disposer d'informations claires, détaillées et complètes sur les produits, en particulier dans le cas des produits textiles, et il appuie l'initiative de la Commission visant à simplifier les procédures et à éviter les coûts imposés par la transposition d'une directive.

1.5   Le CESE souhaite que la société civile, les partenaires sociaux de l'ensemble du secteur textile et les acteurs institutionnels participent systématiquement au comité des dénominations et de l'étiquetage des produits textiles (article 20 de la proposition de règlement). Il conviendrait également d'étudier l'opportunité de réexamens périodiques du règlement en vue d'engranger des avantages compétitifs en matière de dénomination et d'étiquetage des textiles par rapport aux industries textiles de pays tiers (voir les marchés textiles de l'UE) (3). Une fois le règlement entré en vigueur, sa révision, ouverte à la participation du plus grand nombre, serait également susceptible de favoriser un débat ouvert sur la plupart des problèmes de santé (par exemple allergies, indices d'ionisation) liés aux produits textiles qui, sans être imputables aux fibres elles-mêmes, découlent de substances chimiques introduites dans la chaîne de production pour colorer ou adoucir les textiles, ou encore de processus mécaniques tels le peignage ou le cardage.

1.6   Pour accompagner l'application directe du règlement, le CESE propose une campagne d'information ciblée sur les dénominations et l'étiquetage des produits textiles, ainsi que des études spécifiques au secteur, à réaliser en collaboration avec les organisations de PME, les centres de recherche, les consommateurs et les producteurs textiles. Ces acteurs sont susceptibles de jouer un rôle majeur pour renforcer l'importance de fibres et de produits respectueux de l'environnement, ainsi que pour accroître la sensibilisation au potentiel du marché.

1.7   Cette initiative pourrait également favoriser un débat ouvert sur l'étiquetage «non obligatoire» de produits textiles finis tels que les vêtements, notamment s'agissant de leur entretien et de leur nettoyage (symboles relatifs au repassage, au lavage, au blanchissage, etc.), ces informations étant optionnelles dès lors qu'il n'y a pas d'obligation imposée au niveau de l'UE en la matière. L'introduction d'un système similaire à celui utilisé par Ginetex (4), conforme à la norme ISO 3758, voire l'adoption de la norme américaine ASTM D-5489, pourrait apporter une valeur ajoutée à l'utilisateur final. Cette démarche garantirait entre autres:

que la vie des produits textiles puisse être prolongée;

que les produits ne soient pas endommagés et n'en endommagent pas d'autres durant les opérations d'entretien;

que les établissements de nettoyage à sec puissent avoir la certitude d'utiliser des traitements appropriés;

que les produits conservent leur apparence;

que la décision d'acheter un article ou non puisse être prise en connaissance de cause.

De plus, l'utilisation généralisée d'étiquettes pour l'entretien et le nettoyage aura pour conséquence une réduction de la consommation d'énergie et d'eau associée aux soins apportés aux produits textiles.

1.8   La mise en œuvre d'une telle réglementation permettrait également à l'UE de se rapprocher des régimes en vigueur sur les marchés de pays tiers tels que les États-Unis (5), le Japon (6), l'Australie (7), etc.

1.9   Des milliers de substances chimiques sont utilisées par l'industrie textile, de même qu'un mélange indéterminé d'autres additifs, dont certains sont toxiques; ces produits sont utilisés pour la teinture ainsi que pour d'autres traitements textiles. Dans l'UE, les substances toxiques sont sélectionnées, éliminées ou traitées de façon préventive, conformément à la législation environnementale et sanitaire. Le CESE propose d'établir un rapport étroit entre le règlement relatif à l'étiquetage des produits textiles, d'une part, et le règlement ainsi que la plate-forme Reach, d'autre part, en vue de simplifier et d'accélérer les procédures, en évitant les doubles emplois.

2.   Historique

2.1   La législation de l'UE relative aux dénominations et à l'étiquetage des produits textiles repose sur l'article 95 du traité instituant la Communauté européenne. Elle vise à établir un marché intérieur des produits textiles tout en garantissant que le consommateur reçoive les informations appropriées. Dans les années 1970, les États membres ont reconnu la nécessité d'harmoniser la législation communautaire dans le domaine des dénominations textiles. Des dénominations de fibres textiles qui sont différentes (non harmonisées) dans les États membres de l'UE créent un obstacle technique aux échanges au sein du marché intérieur. De plus, les intérêts des consommateurs seraient mieux protégés si les informations fournies dans ce domaine étaient identiques sur tout le territoire du marché intérieur.

2.2   L'industrie textile européenne est engagée dans un long processus de restructuration, de modernisation et de progrès technique, à la suite aux défis économiques de taille auxquels le secteur a été confronté ces dernières années. Les entreprises européennes, en particulier les PME, ont amélioré leur position mondiale en se concentrant sur les avantages compétitifs tels que la qualité, le design, l'innovation et les produits à valeur ajoutée élevée. L'industrie de l'UE joue un rôle de pointe au niveau mondial en ce qui concerne la conception de nouveaux produits, les textiles techniques et les non-tissés pour les applications novatrices tels que les géotextiles, les produits hygiéniques, l'industrie automobile ou le secteur médical.

2.3   Un domaine clé pour la recherche est celui des fibres et des composites de fibres spécialisés destinés aux produits textiles novateurs, domaine qui constitue une priorité thématique de l'agenda stratégique de recherche établi par la Plate-forme de technologie européenne pour l’avenir des textiles et de l’habillement. L'innovation en matière de fibres en amont de la chaîne de création de valeur du secteur textile est une source abondante d'innovation en matière de produits, d'options de traitement et de domaines d'application dans de nombreux secteurs utilisateurs en aval (8). D'ailleurs, le nombre de demandes visant à ce que de nouveaux noms de fibres soient ajoutés à la législation communautaire a augmenté ces dernières années, tendance qui devrait se consolider à mesure que l'industrie textile européenne accroît sa composante novatrice.

2.4   Les demandes de nouvelles dénominations de fibres émanent de différents types d'entreprises, de grande comme de petite taille. Les professionnels du secteur indiquent qu'en général, 90 à 95 % des activités de recherche et développement portent sur des améliorations et développements apportés à des fibres existantes. Quoique 5 à 10 % seulement des activités de recherche et développement soient susceptibles de nécessiter qu'une fibre se voie dotée d'une nouvelle dénomination générique, ces nouvelles fibres génèrent souvent de nouvelles utilisations et de nouveaux processus technologiques dans de nombreux domaines, tels que l'habillement, la médecine, l'environnement et les applications industrielles.

2.5   Ces dernières années, huit nouvelles fibres ont été ajoutées aux annexes techniques des directives par voie d'amendements:

la directive 97/37/CE (9) a ajouté quatre fibres à la liste des dénominations (cashgora, lyocell, polyamide, aramide);

la directive 2004/34/CE (10) a ajouté une nouvelle fibre, le polylactide, à la liste des dénominations de fibres;

la directive 2006/3/CE (11) a ajouté une nouvelle fibre, l'élastomultiester, à la liste des dénominations de fibres;

la directive 2007/3/CE (12) a ajouté une nouvelle fibre, l'élastoléfine, à la liste des dénominations de fibres;

la directive 2009/121/CE (13) a ajouté une nouvelle fibre, la mélamine, à la liste des fibres.

2.6   Il est escompté que le nombre de nouvelles fibres ajoutées aux annexes techniques augmentera au cours des prochaines années. L'industrie textile (telle que représentée par le BISFA (14)) fait observer que les tendances à venir sont difficilement prévisibles. Elle laisse cependant entendre que deux demandes par an constituent une estimation réaliste (15).

2.7   La proposition à l'examen ne modifie pas l'équilibre politique entre les États membres et l'UE. Un comité est prévu pour assister la Commission et donner un avis sur les mesures de mise en œuvre proposées pour modifier le règlement, sur la base des règles régissant le comité de réglementation avec contrôle. C'est le système qui s'applique actuellement aux directives en vigueur.

2.8   Au cours des dernières années, l'idée d'une révision de la législation relative aux dénominations textiles est née à la suite de l'expérience résultant des modifications techniques régulières visant à introduire de nouvelles dénominations de fibres dans les directives existantes. La révision de la législation de l'UE relative aux dénominations et à l'étiquetage des produits textiles (16) a été annoncée en 2006 dans le «Premier rapport sur la mise en œuvre de la stratégie de simplification de l'environnement réglementaire» (17) et figure dans le programme législatif et de travail de la Commission pour 2008.

2.9   Cette révision vise les objectifs suivants:

simplifier le cadre juridique existant et produire ainsi des effets positifs potentiels pour les parties prenantes privées et les administrations publiques. Elle a donc pour but d'accélérer l'introduction et la disponibilité de nouvelles fibres;

simplifier et améliorer le cadre réglementaire existant du développement et de l'utilisation de nouvelles fibres;

promouvoir l'innovation dans le secteur du textile et de l'habillement et permettre aux utilisateurs et aux consommateurs de fibres de bénéficier plus rapidement de produits innovants;

améliorer la transparence du processus;

ajouter de nouvelles fibres à la liste des dénominations de fibres harmonisées;

introduire une plus grande flexibilité dans l'adaptation de la législation afin de suivre les besoins de l'évolution technique attendue dans l'industrie textile.

2.10   La révision ne vise pas à inclure dans la législation de l'UE des exigences en matière d'étiquetage autres que la composition de fibres et l'harmonisation des dénominations des fibres textiles couvertes par les directives actuelles.

3.   Processus de consultation sur la révision de la directive

3.1   Compte tenu de la portée limitée de la révision, il a été procédé à une consultation ciblée des parties intéressées. Les parties prenantes qui ont participé au processus de consultation sont l'industrie et les associations de distributeurs, les syndicats, les organisations de consommateurs, les organismes européens de normalisation et les administrations nationales.

3.2   Les parties prenantes et les représentants des États membres ont été invités à présenter par écrit leurs points de vue, leurs suggestions et leurs propositions entre janvier et août 2008 dans le cadre des réunions organisées par les services de la Commission.

3.3   Les enseignements tirés de cette consultation ciblée des parties intéressées peuvent être résumés comme suit:

l'introduction de nouvelles dénominations de fibres dans la législation européenne est importante pour promouvoir l'innovation dans l'industrie européenne et dans la perspective de l'information des consommateurs;

le contenu politique des modifications techniques de la législation relative aux dénominations textiles ne justifie pas les procédures complexes et les coûts liés à la transposition d'une directive;

dès lors, il convient de mettre en œuvre une solution législative plus simple.

3.4   Les résultats de la consultation sont repris dans le rapport sur l'analyse d'impact et ses annexes.

4.   Analyse d’impact

4.1   Sur la base des résultats de la consultation des parties prenantes et de l'étude sur l'impact de la simplification de la législation de l'UE dans le domaine des dénominations et de l'étiquetage des produits textiles (18), la Commission a réalisé une analyse d'impact des diverses options permettant d'atteindre les objectifs susmentionnés.

4.2   Le comité d'analyse d'impact de la Commission européenne a évalué le projet du rapport sur l'analyse d'impact élaboré par le service compétent et l'a approuvé sous réserve de quelques modifications (19).

4.3   L'analyse et la comparaison des diverses options et de leur impact ont conduit aux conclusions suivantes:

l'inclusion d'instructions relatives au contenu du dossier de demande et la reconnaissance des laboratoires chargés d'assister les entreprises dans l'établissement du dossier présentent des avantages potentiels s'ils ont pour effet de rendre la présentation des dossiers de demande plus conforme aux exigences des services de la Commission. Il pourrait en résulter des gains de temps significatifs pour l'industrie comme pour les administrations publiques;

les principaux avantages pour l'industrie découlent du raccourcissement du délai entre le dépôt d'une demande de nouvelle dénomination de fibre et la possibilité de commercialiser la fibre sous la nouvelle dénomination. Il en résulte des économies de coûts administratifs et l'obtention plus rapide de recettes tirées de la vente de la fibre;

les principaux avantages pour les États membres proviennent du remplacement des directives par un règlement, puisqu'ils ne devront plus transposer les modifications dans la législation nationale. Cela pourrait générer des économies significatives pour les États membres;

aux consommateurs, la révision donnera la garantie que les fibres dénommées répondent à des caractéristiques particulières. Les consommateurs pourraient également tirer des avantages supplémentaires du fait que les nouvelles fibres arrivent plus rapidement sur le marché.

5.   Objectifs généraux

5.1   Le règlement devrait avoir pour effet d'encourager la recherche et le développement, l'innovation et la technologie, de faciliter les partenariats entre les administrations publiques, de niveau européen, national ou régional et les centres de recherche, d'améliorer les formations et les qualifications techniques existantes, de permettre de commercialiser des produits à haute valeur ajoutée dans le marché intérieur et sur les marchés extérieurs (20) et de garantir le respect de modèles de développement et de consommation durables.

5.2   Le règlement devrait également apporter une contribution utile des points de vue suivants:

valeur ajoutée pour l'industrie textile et les industries connexes, pour le savoir-faire communautaire et pour la croissance économique;

transparence accrue pour les consommateurs et création de nouveaux modèles de consommation;

participation accrue de la société civile au suivi du règlement.

6.   Objectifs spécifiques

6.1   La dénomination d'une fibre textile doit apporter toutes les informations possibles sur la nature de celle-ci, par opposition à la réglementation américaine, dont l'approche est différente (21). Cette spécification est conforme à la méthodologie du BISFA, qui dispose que la dénomination générique d'une fibre fournit les informations chimiques sur l'unité monomère dominante du polymère de la fibre, ou encore des propriétés ou des processus de production essentiels qui lui sont particuliers.

6.2   Les informations figurant sur l'étiquette doivent correspondre à la réalité, quoique le règlement manque de clarté à cet égard. En effet, certains de ses articles n'exigent pas que les informations soient complètes, notamment l'article 9 (produits textiles composés de plusieurs fibres), qui prévoit la possibilité de choisir entre une identification complète et l'identification de la fibre qui représente au moins 85 % du poids total du textile. Les informations, bien qu'authentiques, ne sont pas complètes si l'option (a) ou (b) de cet article est choisie. Il faudrait dès lors que la composition des 15 % restants figure sur l'étiquette si l'on entend disposer d'informations authentiques et complètes.

6.3   Toutes les caractéristiques indiquées par le fabricant doivent figurer sur l'étiquette, conformément à ce que l'on peut attendre des premier, deuxième, troisième et sixième tirets de l'annexe II au règlement proposé.

6.4   Les délais de traitement des demandes seraient de l'ordre suivant, exclusion faite du temps nécessaire à la préparation de la demande (celui-ci dépendant du degré de rapidité avec laquelle le demandeur est susceptible de préparer son dossier) (22):

évaluation de la demande: de 1 à 3 mois;

convocation du groupe de travail: 3 mois;

essais par le CCR et essais circulaires: de 6 à 9 mois;

rapport sur l'examen technique: de 1 à 3 mois;

projets de propositions: de 1 à 3 mois;

modification du règlement: de 6 à 12 mois.

6.5   Deux scénarios ont été envisagés en ce qui concerne les économies pour l'industrie: l'un à coût élevé, et l'autre à coût peu élevé, chacun avec un coût maximal et un coût minimal. En fin de compte, les économies pourraient s'élever entre 47 500 et 600 000 euros pour chaque demande. Les avantages potentiels tiennent également compte du fait que l'on évite 6 à 21 mois de retard dans la commercialisation d'une fibre sur le marché, tant sous la forme d'un retard de revenu que d'une perte de revenu. Les économies se situent à cet égard entre 2 000 et 3 500 000 euros. Les économies de coûts pour les pouvoirs publics tiennent compte d'une économie de 25 % sur les coûts du CCR, entraînant une réduction de 75 000 à 100 000 euros par fibre (15).

6.6   En cas d'introduction rapide d'une nouvelle fibre sur le marché, les délais nécessaires aux différentes étapes de l'évaluation et de l'approbation des demandes les plus récentes (celles des cinq dernières années) ont été respectivement de 36 mois dans le meilleur des cas et de 66 mois dans le moins bon. Une fois le nouveau règlement d'application, il est estimé que cette procédure prendra entre 18 et 33 mois. Il en résulterait que les délais diminueraient de moitié tant dans le meilleur que dans le pire des scénarios (15).

Bruxelles, le 16 décembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Le secteur du textile, de l'habillement et de la chaussure constitue un élément essentiel de l'industrie manufacturière de l'UE à 27. Avec quelque 250 000 entreprises et un chiffre d'affaires d'environ 240 milliards d'euros, il représente à peu près 4 % de la valeur ajoutée globale de toute l'industrie manufacturière de l'UE à 27 (dont la moitié environ dépend du seul segment textile). Avec ses 3,2 millions de salariés, ce secteur, qui est le seul dans l'Union à compter une majorité de femmes (64,5 %), représente par ailleurs 9,3 % de l'emploi de l'industrie manufacturière de l'UE à 27, la majorité de ses employés travaillant pour le secteur de l'habillement (environ 1,5 million de personnes). L'UE est le principal marché de destination et le principal exportateur de ce secteur et détient une part mondiale proche de 20 % (données 2005). CCMI/041.

Pour de plus amples informations sur les caractéristiques et les tendances du secteur textile, on consultera le rapport d'information de la CCMI à l'adresse suivante:

http://eescregistry.eesc.europa.eu/viewdoc.aspx?doc=%5C%5Cesppub1 %5Cesp_public%5Cces%5Cccmi%5Cccmi041 %5Cen%5Cces1572-2007_fin_ri_fr.doc

(2)  L'une des directives (directive 96/74/CE) à laquelle le règlement à l'examen devait se substituer a déjà été remplacée par la directive 2008/121/CE. Si le nouveau règlement entre en vigueur, il convient de veiller à la cohérence entre celui-ci et la directive.

(3)  17 MARCHÉS CLÉS - Source: Euratex

ASIE: Chine, Japon, Inde, Corée du Sud, Taïwan, Indonésie, Pakistan, Thaïlande, Malaisie

AMÉRIQUE DU NORD: États-Unis, Canada

AMÉRIQUE CENTRALE: Mexique

AMÉRIQUE DU SUD: Brésil, Argentine, Chili

OCÉANIE: Australie

AFRIQUE: Afrique du Sud

(4)  GINETEX: Groupement international d’étiquetage pour l’entretien des textiles.

(5)  Care labelling of textile wearing apparel and certain piece goods - 16 Code des réglementations fédérales Partie 423 (Étiquetage pour l'entretien des vêtements et de certains articles).

(6)  Norme industrielle japonaise sur l'étiquetage d'entretien.

(7)  Norme australo-néo-zélandaise AS/NZS 1957:1998 – «Textiles – Care labelling».

(8)  Voir l'Agenda stratégique de recherche de la Plate-forme de technologie européenne pour l’avenir des textiles et de l’habillement.

(9)  JO L 169 du 27.6.1997, p. 74.

(10)  JO L 89 du 26.3.2004, p. 35.

(11)  JO L 5 du 10.1.2006, p. 14.

(12)  JO L 28 du 3.2.2007, p. 12.

(13)  JO L 242 du 15.9.2009, p. 13.

(14)  BISFA: Bureau international pour la standardisation de la rayonne et des fibres synthétiques.

(15)  Source: rapport sur l'analyse d'impact relative à la «Simplification de la législation de l'UE dans le domaine des dénominations et de l'étiquetage des produits textiles».

(16)  Directives 96/74/CE (telle que modifiée), 96/73/CE (telle que modifiée) et 73/44/CEE.

(17)  COM (2006) 690 final.

(18)  Étude disponible à l'adresse suivante: http://ec.europa.eu/enterprise/textile/documents/dir2008_0121_study.pdf

(19)  http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=SEC:2009:0091:FIN:EN:PDF.

(20)  Il faut garder à l'esprit que les textiles de l'UE sont souvent confrontés à des barrières non tarifaires lors de l'accès à des marchés tiers, sous la forme d'exigences ou de pratiques en matière de marquage, d'étiquetage ou de composition du produit qui sont discriminatoires par rapport aux produits domestiques.

(21)  Source: Rules and regulations under the textile fiber products identification act - 16 CFR Part 303.

(22)  BISFA: Bureau international pour la standardisation de la rayonne et des fibres synthétiques.


22.9.2010   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 255/42


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant la lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales (refonte) mettant en œuvre le Small Business Act»

COM(2009) 126 final — 2009/0054 (COD)

(2010/C 255/07)

Rapporteuse: Mme Ana BONTEA

Le 1er juillet 2009, le Conseil a décidé, conformément à l'article 95 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant la lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales (refonte) mettant en œuvre le

Small Business Act

COM(2009) 126 final - 2009/0054 (COD)

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 17 novembre 2009 (rapporteuse: Mme Ana BONTEA).

Lors de sa 458e session plénière des 16 et 17 décembre 2009 (séance du 17 décembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 145 voix pour, 3 voix contre et 2 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le Comité apprécie et défend la mise en œuvre du Small Business Act (SBA), ainsi que la proposition de directive, vu que l'amélioration du cadre législatif permettant de réduire les délais de paiement et la lutte contre les paiements en retard sont des mesures particulièrement importantes et utiles.

1.2   Les dispositions législatives, même si elles sont nécessaires et utiles, ne sont pas suffisantes pour éliminer les retards de paiement; il est nécessaire d'engager des actions multiples et complexes et d'amplifier la coopération à tous les niveaux. Les PME elles-mêmes et leurs organisations ont un rôle important à jouer dans ce processus.

1.3   Le Comité juge qu'il est nécessaire de fixer des délais de paiement courts et obligatoires pour toutes les autorités et institutions publiques, aux niveaux européen, national, régional et local. Le Comité félicite la Commission européenne pour les mesures adoptées qui visent les paiements qu'elle effectue en gestion directe et lui exprime son soutien pour la poursuite et le développement de ces dispositions à tous les niveaux. Eu égard aux délais nécessaires pour la transposition de la directive, il les appelle à en appliquer immédiatement les principes, afin de fournir, dans l'actuel contexte de crise, un soutien efficace aux entreprises.

Le Comité considère que la proposition de directive nécessite des améliorations, et propose principalement:

pour les marchés publics:

d'établir d'urgence une règle obligeant à régler les factures dans un délai maximal de 30 jours civils, en supprimant la dérogation à cette règle, ou au moins en la limitant à un maximum de 60 jours civils à partir de la livraison, les difficultés des pouvoirs publics à financer leurs activités ne pouvant être en aucun cas plus aiguës que celles des PME,

de supprimer, ou au moins de limiter dans son champ d'application, sur le même modèle, la dérogation à la durée maximale de 30 jours de la procédure de réception,

pour toutes les transactions commerciales:

concernant les retards de paiement, d'instaurer l'obligation légale de payer des intérêts, des compensations et un minimum de frais internes, en cas d'absence dans les contrats de clauses plus favorables aux créanciers,

de développer la réglementation sur les clauses contractuelles manifestement abusives et les dettes non contestées.

de faire prendre en compte, dans l'exercice de cette liberté contractuelle, les principes de concurrence loyale et d'éthique des affaires, en limitant les abus de droit.

1.4   Reprenant ses propositions antérieures (1), le Comité souligne que, pour atteindre pleinement l'objectif de la directive, il convient de prendre des dispositions qui permettent un accès plus large des PME aux marchés publics, de sorte qu'elles bénéficient davantage des normes fixées.

1.5   Dans la transposition de la directive et pour le suivi des mesures adoptées, il est important de favoriser la coopération et un dialogue social de qualité entre les pouvoirs publics, les partenaires sociaux et les organisations des PME.

1.6   Lorsque des marchés publics sont sous-traités, ainsi que dans les relations des PME avec les grandes entreprises, y compris de la grande distribution, il convient d'éviter que les délais de règlement ne soient allongés ou que les paiements ne soient effectués avec retard. Dans les secteurs où les durées de paiement présentent un fort risque de s'allonger de manière injustifiée, les autorités nationales pourraient, selon les cas, contrôler les délais de paiement, ou les édicter, sans imposer d'obligations ou de dépenses supplémentaires aux entreprises.

1.7   Le Comité recommande aux États membres d'intensifier la coopération et de prévoir des actions communes d'information et de soutien envers les PME, dans le cas des retards de paiement dans le cadre de transactions transfrontalières.

1.8   Au niveau européen, il pourrait s'avérer utile de créer un site Internet spécialisé, qui fournirait, dans toutes les langues véhiculaires, des informations pertinentes fournies par chaque État membre, concernant la transposition de la directive, le cadre légal, les procédures applicables pour le recouvrement des créances, y compris l'arbitrage et la médiation, ou encore d'autres informations pratiques. Au niveau national, il faudrait favoriser la large diffusion de ces informations, par l'intermédiaire des guichets uniques et des organisations des PME.

1.9   Les mesures visant à accélérer les paiements des pouvoirs publics sont également utiles sur le terrain du droit fiscal (remboursement de TVA, régularisation d'impôts, etc.), étant donné que pour ce domaine aussi, on relève dans certains pays des pratiques regrettables, qui ont provoqué des blocages financiers.

1.10   Le Comité réaffirme sa proposition antérieure visant la «création d'un comité consultatif ouvert aux parties intéressées, qui pourrait fonctionner avec l'appui du CES (2)».

2.   Introduction

2.1   L'état de la situation et les conséquences des retards de paiement

2.1.1   Dans les transactions commerciales de l'UE:

en règle générale, les paiements sont différés;

il existe de nombreux retards d'acquittement des factures, spécialement pour les marchés publics, où ils atteignent en moyenne 67 jours (3), contre 57 pour le secteur privé;

la «culture du retard de paiement» s'est développée dans certains États, pour devenir un comportement largement répandu, avec des effets économiques et sociaux qui sont particulièrement graves, puisqu'ils provoquent une faillite sur quatre et entraînent la perte de 450 000 emplois par an, et sont encore amplifiés en période de crise: du fait des pratiques inadéquates en la matière, les entreprises seront en 2009, dans l'impossibilité de toucher 270 milliards d'euros, soit 2,4 % du PIB de l'UE, à comparer aux 1,5 % du plan de relance de l'économie (4);

les retards de paiement sont utilisés comme substitut des crédits bancaires;

dans bien des cas, les délais de paiement sont d'une longueur injustifiée, étant bien souvent le résultat d'une position privilégiée, et cette situation peut être gravement préjudiciable, en particulier pour les entreprises de petite taille, artisanales, ou même moyennes.

2.1.2   Dans les négociations, les PME occupent une position précaire, eu égard:

à leur niveau de compétitivité actuel et leur place sur le marché,

à leur souci de ne pas compromettre leurs relations avec leur clientèle,

à leurs possibilités limitées de se montrer concurrentielles sur le plan des délais de paiement offerts à leurs clients,

à leur déficit d'expérience et de ressources humaines et matérielles pour lancer des procédures légales de recouvrement de dettes, ces difficultés étant encore accrues dans le cas de transactions transfrontalières.

2.1.3   Les retards de paiement

génèrent des coûts supplémentaires significatifs pour les entreprises créancières et compliquent leur gestion financière, vu qu'ils sont néfastes pour le flux de liquidités, leur imposent d'importants frais bancaires supplémentaires, réduisent leurs possibilités d'investissements et accroissent les incertitudes de nombre d'entre elles, principalement des PME, portant ainsi gravement préjudice à leur compétitivité, à leur rentabilité et à leur viabilité, surtout dans les périodes où l'accès au financement est limité et coûteux,

induisent souvent des retards pour les maillons ultérieurs de la chaîne, s'agissant du paiement des fournisseurs et des salariés (avec des effets sociaux significatifs), des impôts, taxes, contributions au budget national et à ceux des assurances sociales (avec des effets négatifs sur la perception des recettes publiques), mais aussi par le blocage de l'accès des entreprises au financement (par exemple, le retard de paiement des impôts, taxes et contributions aux caisses des assurances sociales qui résulte du non-encaissement de factures dans les délais limite l'accès aux aides d'État et aux programmes financés par les Fonds structurels),

sont responsables de la faillite d'entreprises qui seraient normalement viables, avec pour conséquence éventuelle d'en déclencher d'autres en cascade tout le long de la chaîne d'approvisionnement, qui produisent des effets négatifs considérables sur le plan économique et social,

dissuadent les acteurs économiques de participer aux procédures de marchés publics, la conséquence de cette situation étant non seulement de créer des distorsions de concurrence et de porter atteinte au fonctionnement du marché interne, mais aussi de réduire la capacité des pouvoirs publics à assurer une utilisation efficace des fonds publics et à donner un rendement optimal de l'argent des contribuables,

peuvent favoriser la corruption (dans le but de hâter le paiement des factures dans le cas de marchés publics) ou la passation de contrats dépassant les limites budgétaires approuvées,

ont des effets négatifs sur le commerce intracommunautaire: la majorité des entreprises considèrent que le risque de retard de paiement est très élevé pour les transactions commerciales intracommunautaires, une méfiance à leur égard et une augmentation de leur coût.

2.2   Le cadre légal

2.2.1   Au niveau communautaire, il n'existe qu'une seule disposition: la directive 2000/35/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 juin 2000 concernant la lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales (5).

2.2.2   Les règlements (CE) 44/2001 (6), 805/2004 (7), 1896/2006 (8) et 861/2007 (9) sont d'application pour l'acte introductif d'instance visant au recouvrement de créances imputables à des retards de paiement.

2.3   Les objectifs au niveau européen

2.3.1   Le «Small Business Act» (SBA) (10) a mis en lumière l'importance vitale des PME pour la compétitivité de l'économie, soulignant qu'il est primordial qu'elles aient un accès effectif au financement et qu'il convient d'exploiter plus efficacement les possibilités offertes par le marché unique.

2.3.2   Le plan européen pour la relance économique (11) fait valoir que l'accès des entreprises à des sources de financement à la fois suffisantes et abordables constitue une condition préalable au développement des investissements, à la croissance et à la création d'emplois dans un contexte de ralentissement économique et il invite l'UE et les États membres à veiller à ce que les pouvoirs publics règlent leurs factures dans un délai d'un mois.

2.3.3   La proposition de directive du Parlement européen et du Conseil contre le retard de paiement dans les transactions commerciales (refonte) met en œuvre et entend améliorer la capacité d'autofinancement des entreprises européennes, dans le but de faciliter le bon fonctionnement du marché intérieur, en éliminant les obstacles aux transactions commerciales transfrontalières.

3.   Observations générales

3.1   Le Comité porte une appréciation positive sur la mise en œuvre du SBA, ainsi que sur la proposition de directive, car il estime qu'entreprendre de toute urgence d'amender le cadre législatif concernant la lutte contre les retards de paiement constitue une mesure particulièrement importante et utile.

3.2   Le Comité s'est également déclaré favorable à la mise en application rapide du SBA, grâce à des actions proposées au niveau communautaire, et apporte un soutien tout particulier au «projet de directive révisée sur les délais de paiement, qui devrait alourdir les contraintes et les pénalités pour les autorités publiques en cas de paiement au-delà de trente jours» (12).

3.3   En soutenant ces mesures, le Comité songe aux retombées négatives, complexes et de grande ampleur, que produisent les retards de paiement pour les entreprises, en particulier les PME, ainsi que pour les salariés et les transactions commerciales intracommunautaires.

3.4   En plus de lutter contre les retards de paiement, il est très important de réduire aussi les délais de paiement; l'intitulé de la directive pourrait être complété en ce sens, et les mesures qu'elle contient groupées en fonction des deux objectifs.

3.5   Si les mesures législatives sont nécessaires et utiles, elles ne sont toutefois pas suffisantes pour combattre les retards de paiement, eu égard à leurs causes multiples et complexes, à la situation qui prévaut sur le terrain huit ans après l'adoption de la directive 2000/35/CE, et aux circonstances locales. Le Comité invite les États membres à s'impliquer activement en vue de définir et d'appliquer les mesures les plus adéquates dans la lutte contre les retards de paiement, et souligne l'importance que revêtent la coopération et un dialogue de qualité entre les autorités, les partenaires sociaux et les organisations des PME. Ces entreprises ont elles-mêmes un rôle important à jouer dans ce processus: elles doivent fournir des efforts accrus pour informer, améliorer leurs procédures internes et agir sur les débiteurs.

3.6   De l'avis du Comité, les mesures qui sont opportunes et susceptibles d'avoir des effets positifs sont:

l'instauration, pour les marchés publics, d'une obligation générale de paiement dans un délai de trente jours, mesure qui instituera des procédures normalisées et transparentes, lesquelles accéléreront les délais de paiement,

l'établissement, pour le créancier, du droit d'obtenir un dédommagement d'un montant d'au moins 5 % du solde restant, afin de dissuader les administrations d'effectuer des paiements tardifs,

le recouvrement des frais administratifs internes encourus par le créancier, prescription qui, s'ajoutant au paiement d'intérêts légaux, exercera sur les débiteurs un effet dissuasif,

l'élimination de la possibilité qui était prévue d'exclure les demandes d'intérêts d'un montant inférieur à 5 euros, s'agissant des petites transactions,

l'amélioration de la réglementation relative aux clauses contractuelles manifestement abusives, l'article 6 de la proposition de directive apportant des éléments importants dans ce domaine,

la transparence accrue concernant les droits et les obligations établies par la directive,

la création d'un système d'évaluation et de suivi, qui permettra d'étendre l'information et la participation des institutions européennes et de tous les acteurs concernés.

3.7   Le Comité estime cependant que la proposition de directive demande à être améliorée considérablement en ce qui concerne le contenu, afin que, sur un plan concret, de nombreuses entreprises puissent bénéficier à coup sûr de la réduction et du respect des délais de paiement et que l'efficacité des voies de recours vis-à-vis des débiteurs s'améliore.

4.   Observations particulières

4.1   Le Comité soutient que des délais de paiement courts et obligatoires sont nécessaires pour tous les pouvoirs publics, au niveau européen, national, régional et local

4.1.1   D'un point de vue pratique, on obtiendra un impact positif significatif en instaurant une obligation générale de paiement à trente jours maximum pour les achats publics, ainsi qu'en fixant un délai de trente jours pour l'exécution des procédures de réception et de vérification.

4.1.2   Pour toutes les autorités et institutions publiques à l'échelle européenne, nationale, régionale et locale, des délais de paiement courts et des obligations de paiement des factures devraient être institués et respectés.

4.1.3   Le Comité félicite la Commission européenne d'avoir établi de nouveaux objectifs plus stricts dans le domaine des paiements qu'elle gère directement, réduit les délais de versement des préfinancements et des paiements initiaux, simplifié les procédures générales préalables au lancement de projets, et incité à simplifier les mesures de contrôle; il lui exprime son soutien pour la poursuite et le développement de ces mesures à tous les niveaux. Le Comité invite les autorités nationales à adopter des mesures urgentes pour réduire et respecter les délais de paiement et recommande à cet égard de valoriser les bonnes pratiques observées.

4.1.4   Le Comité considère toutefois que l'article 5 de la proposition de directive relatif aux paiements des contrats de marchés publics ne concrétisera pas les attentes et objectifs louables que poursuit la Commission et formule les propositions suivantes:

Pour être logique et explicite vis-à-vis des destinataires de la proposition de directive et réaliser l'objectif proposé («les délais de paiement dans le cadre des marchés publics devraient donc, en règle générale, être limités à trente jours au plus» (13)), il conviendrait que l'article 5 établisse expressément l'obligation de payer les factures relatives à des marchés publics dans un délai maximal de trente jours civils et que l'on entreprenne ensuite de fixer une durée maximale pour la procédure de réception et de prévoir des mesures à mettre en œuvre en cas de défaut d'application de ces règles, en précisant qu'elles pourront être cumulées.

Le Comité fait part de sa préoccupation que les pouvoirs publics ne procèdent pas à une application correcte de la dérogation qui permet de négocier un allongement des délais de paiement dans des cas justifiés (article 5, paragraphe 4), étant donné qu'il n'est pas prévu de critères objectifs et précis pour évaluer la justification donnée ou les motifs qui sont recevables comme tels; les pouvoirs publics sont ici tout à la fois juge et partie et les difficultés qu'ils rencontrent pour assurer le financement de leurs activités ne sauraient en aucun cas être plus aiguës que celles des PME. En conséquence, le Comité propose que cette dérogation soit supprimée ou, à tout le moins, limitée, de sorte que les délais de paiement dans les cas concernés n'excèdent pas 60 jours civils à compter de la livraison.

Parallèlement, le Comité propose la suppression ou, au moins, la limitation du champ d'application de la dérogation introduite par l'article 5, paragraphe 3, concernant la durée maximale de trente jours prévue pour la procédure de réception.

4.1.5   L'application du principe de liberté contractuelle revêt des particularités qu'il convient de prendre en compte:

La directive ne comprenant pas de dispositions visant à limiter l'abus de droit en matière d'application de la liberté contractuelle; le Comité propose que dans le cadre de l'exercice de cette liberté, il soit tenu compte des principes de concurrence loyale et d'éthique des affaires. Il s'est déjà prononcé antérieurement dans ce sens: «Dans un souci de saine concurrence, inviter les États membres à prévoir des dispositions de droit de la concurrence, au niveau de la lutte contre les pratiques de commerce déloyales, pour rendre illicites des clauses abusives de délais de paiement anormalement élevés dépassant le cycle moyen de vente (au-delà de 60 jours) et sans raisons légitimes» (14).

Dans les contrats de marché public, des garanties de bonne exécution ne sont exigées que des entrepreneurs, alors que les autorités n'en accordent pas de semblables quant au paiement en temps voulu, situation qu'il conviendrait d'équilibrer.

Le principe de la liberté contractuelle ne peut jouer à plein quand il s'agit d'établir les délais de paiement et de réception pour les marchés publics, car les entreprises ne disposent pas d'un véritable pouvoir de négociation avec les pouvoirs publics.

La liberté contractuelle devrait s'exercer dans un sens qui instaure des clauses plus favorables au créancier, plutôt que par l'établissement de dispositions contraires aux règles générales. Aussi est-il proposé de remplacer, dans le membre de phrase «sauf disposition contraire dûment justifiée» (article 5, paragraphe 3), le mot «contraire» par l'expression «plus favorable au créancier»; proposition qui s'applique aussi à l'article 4, paragraphe 1, relatif aux dédommagements pour les coûts de recouvrement.

4.2   Établissement d'une obligation légale pour les débiteurs de payer des intérêts, des dédommagements et des remboursements de frais internes minimes

4.2.1   En Finlande et en Suède, les intérêts pour paiements tardifs peuvent être perçus automatiquement, sans nécessiter de décisions de justice: cette pratique devrait être généralisée. Le Comité propose que l'on érige en obligation légale (de droit) le paiement des intérêts, dédommagements et autres remboursements de frais internes minimaux en mettant en œuvre le principe de la liberté contractuelle dans le sens que soit réglementairement prévue la possibilité de négocier des conditions ou montants plus favorables au créancier, de telle manière que les PME puissent exercer ce droit sans devoir consentir de gros efforts ou hésiter à s'engager dans cette voie pour des motifs dus à la précarité de leur position.

4.3   Relations avec les organisations professionnelles

4.3.1   Pour la transposition de la directive et la mise en œuvre et le suivi des mesures adoptées en vue de réduire et de respecter les délais de paiement, il convient de consulter les organisations d'employeurs et celles des PME et de les associer à ce processus. Il s'impose de les aider à développer des services d'information, directs ou en ligne, ainsi que de conseil et d'assistance au bénéfice de leurs membres pour ce qui concerne les retards de paiement et les clauses abusives.

4.3.2   Le Comité propose que les «organisations du patronat et des PME» soient expressément mentionnées dans le libellé de l'article 6, paragraphe 3, relatif aux moyens d'action applicables pour suspendre les clauses manifestement abusives, tout en faisant remarquer que le terme choisi («organisations»), peut générer des problèmes de transposition.

4.3.3   Dans la mesure où les organisations d'employeurs, et particulièrement celles des PME, peuvent également apporter une contribution importante à l'élaboration du rapport visé à l'article 10 de la proposition de directive, il convient que leur point de vue y figure.

4.4   Le Comité estime qu'il est nécessaire de prévoir des voies de recours efficaces et agissantes à l'encontre des débiteurs

4.4.1   Le Comité souligne qu'il est particulièrement important, pour le recouvrement des dettes, de mettre en œuvre des procédures simples, rapides et agissantes, qui soient accessibles pour les chefs d'entreprise, en particulier de PME, et il réclame qu'un titre exécutoire puisse être obtenu dans un délai maximal de 90 jours en cas de dettes non contestées (article 9). Il est également nécessaire d'améliorer les procédures qui visent à constater l'existence des clauses contractuelles manifestement abusives.

5.   Autres observations et propositions

5.1   Le Comité réclame une amélioration de la réglementation sur les clauses contractuelles manifestement abusives (article 6), et propose qu'on l'effectue en définissant des critères les qualifiant, ainsi qu'en ajoutant à la liste des clauses toujours considérées comme manifestement abusives celles qui excluent le versement d'un dédommagement pour les coûts de recouvrement, la clause de réserve de propriété et la garantie de bonne exécution de l'obligation de paiement.

5.2   Le Comité réaffirme sa position relative aux situations des personnes physiques, lesquelles, du point de vue strictement juridique, sont en dehors du champ d'application de la directive sous sa forme actuelle, mais sont soumises à des conditions similaires dans leurs relations avec certaines entreprises et l'administration publique. Le Comité invite «la Commission à envisager des études sur ces questions afin de déterminer l'opportunité, soit d’inclure certains aspects de ces relations avec les consommateurs dans la directive, soit d’élaborer des propositions spécifiques» (14).

5.3   Le Comité propose que la notion de «dettes non contestées» (article 9) soit définie. Les contestations devraient devenir irrecevables dès lors qu'existe une facture signée par le bénéficiaire ou un document attestant qu'il a réceptionné les marchandises.

5.4   Le Comité attire également l'attention sur les points suivants:

il conviendrait que la disposition figurant à l'article 1, paragraphe 2, lettre b, qui exclut du champ d'application de la nouvelle directive les contrats conclus avant le 8 août 2002, soit biffée et rattachée à l'article 11, paragraphe 4, qui fixe la date de la transposition;

la définition des «intérêts» qui est donnée à l'article 2, paragraphe 5), devrait prévoir la possibilité de négocier leur montant, y compris avec les pouvoirs publics;

pour éviter les problèmes de transposition, il est nécessaire d'énumérer in extenso ces trois catégories de contrats de marchés publics (contrats de fournitures, de services et de travaux), ou de les désigner de manière générique, sous l'expression «contrats de marchés publics»; (article 5, paragraphes 1, 2 et 6, en omettant les contrats de travaux);

remplacer la formule «date de réception, par le débiteur, de la facture» par «date de transmission de la facture au débiteur» (articles 3, paragraphe 2, lettre b, et 5, paragraphe 2, lettre b) aboutirait à simplifier la charge de la preuve et à réduire les frais découlant de l'envoi postal ou de l'élaboration de factures électroniques;

à l'article 4, paragraphe 1, il conviendrait de préciser si la notion de «dette» ne couvre que la valeur du produit ou englobe également la TVA et les autres coûts, tels que le transport;

l'article 5, paragraphe 5, relatif au droit à compensation de 5 % de la somme due, devrait spécifier si une compensation supérieure à ce pourcentage est possible dès lors qu'il existe des preuves en ce sens.

5.5   Il conviendrait d'éviter d'imposer des délais de paiement d'une longueur injustifiée et des retards de paiement dans le cas:

de sous-traitance de marchés publics (il conviendrait d'appliquer aux sous-traitants les mêmes règles de paiement que celles établies pour les pouvoirs publics),

des fournitures dans le cadre de la grande distribution; le Comité a déjà proposé l'instauration d'«un code de conduite volontaire qui pourrait prendre appui sur des contrats écrits» pour «permettre aux PME d’accéder à la grande distribution avec un minimum de garanties» (15), tout en empêchant les grands distributeurs et/ou les fournisseurs d'exercer des pressions.

5.6   Il conviendrait que le rapport visé à l'article 10 soit élaboré et remis annuellement, au moins durant les trois premières années d'application de la directive, pour permettre une évaluation continue des résultats observés et faciliter l'échange de bonnes pratiques.

5.7   Le CESE soutient la valorisation et le développement des bonnes pratiques observées dans le domaine de la lutte contre les retards de paiement et la réduction des délais de paiement:

Commission européenne:

mesures pour réduire de 30 à 20 jours les délais concernant le paiement de préfinancement initial des financements non remboursables et des contrats UE (le montant en jeu représente 9,5 milliards d'euros); pour les autres paiements gérés de manière centralisée, l'objectif est de réduire les délais de paiement de 45 à 30 jours (en cas de subventions);

renforcement de l'utilisation de taux forfaitaires et de sommes forfaitaires pour les financements non remboursables et les contrats commerciaux gérés au niveau central;

simplification des procédures générales préalables au lancement de projets, qui peut contribuer à accélérer les paiements: des mesures sont proposées, qui offriraient aux services de la Commission la possibilité de publier des appels d'offre couvrant deux ans, et d'utiliser des procédures d'appel d'offre standardisées;

encouragement à simplifier les mesures de contrôle quand la possibilité existe.

Royaume-Uni: les pouvoirs publics se sont engagés à payer les factures dans un délai de 10 jours.

Irlande, Belgique, Pologne, Portugal, République tchèque: les gouvernements s'engagent à réduire les retards de paiement, en particulier dans le cas des pouvoirs publics.

Belgique: le gouvernement fédéral a créé un nouveau «crédit-pont» spécifique, relevant d'un fonds d'investissement fédéral, pour financer les retards de paiement, au niveau de tous les pouvoirs publics et non du seul État fédéral.

Espagne: pour 2009, l'Institut de crédit officiel (ICO) a instauré une facilité de liquidités de dix milliards d'euros pour des prêts préférentiels qui permettront aux PME et aux indépendants de combler leurs besoins en la matière. Ces fonds sont soumis à des règles de cofinancement, qui exigent, par exemple, que ces fonds émanent de l'ICO et des autres institutions de crédit à raison de 50 % pour le premier et de 50 % pour les secondes. En outre, la «facilité d'avance de paiement des collectivités locales» garantit le rassemblement des factures émises par des entreprises et des indépendants concernant des travaux et des prestations de services qu'ils effectuent pour les collectivités locales.

Bruxelles, le 17 décembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  JO C 224 du 30 août 2008; JO C 182 du 4 août 2009.

(2)  JO C 407/50 du 28 décembre 1998.

(3)  Avec de fortes disparités d'un État membre à l'autre et un fossé marqué entre le Nord et le Sud.

(4)  Intrum Justitia, Indice européen des paiements («European Payment Index») 2009.

(5)  JO L 200, du 8 août 2000.

(6)  JO L 12, du 16 janvier 2001.

(7)  JO L 143, du 30 avril 2004.

(8)  JO L 399, du 30 décembre 2006.

(9)  JO L 199, du 31 juillet 2007.

(10)  JO C 182/30 du 4 août 2009.

(11)  COM(2008) 800 final.

(12)  COM(2008) 394 final. JO C 182, du 4 août 2009, p. 30.

(13)  Préambule de la proposition de directive, considérant 16.

(14)  JO C 407/50, du 28 décembre 1998.

(15)  JO C 175/57 du 28 juillet 2009.


22.9.2010   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 255/48


Avis du Comité économique et social européen sur le «Livre vert sur la révision du règlement (CE) no 44/2001 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale»

COM(2009) 175 final

(2010/C 255/08)

Rapporteur: M. HERNÁNDEZ BATALLER

Le 21 avril 2009, la Commission a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur le

«Livre vert sur la révision du Règlement (CE) no 44/2001 concernant, la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale»

COM(2009) 175 final.

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 17 novembre 2009 (rapporteur: M. HERNÁNDEZ BATALLER).

Lors de sa 458e session plénière des 16 et 17 décembre 2009 (séance du 16 décembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 174 voix pour et 1 abstention.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le CESE partage le point de vue de la Commission selon lequel il faut procéder à la suppression de l'exequatur afin de faciliter la libre circulation et l'exécution des décisions de justice au sein du marché intérieur dans l'intérêt des citoyens et des entreprises.

1.2   Le CESE juge opportun l'élargissement du champ d'application du règlement 44/2001 aux décisions administratives et demande par conséquent à la Commission d'entamer les études nécessaires en vue de supprimer les obstacles existants en la matière.

1.3   De même, il lui apparaît important d'adopter des mesures qui facilitent le recours transnational à l'arbitrage et se prononce en faveur de l'établissement d'une règle de conflit supranationale et uniforme concernant la validité des conventions d'arbitrage renvoyant à la législation de l'État où se déroule l'arbitrage. Tout cela sans changer quoi que ce soit au mode de fonctionnement de la Convention de New York ou, tout du moins, en prenant cette dernière comme base pour l'adoption de nouvelles mesures.

1.4   Une approche commune à caractère supranational, qui établirait des règles claires et précises en matière de compétence nationale renforcera la protection juridique des citoyens et garantira une application harmonieuse de la législation communautaire à caractère contraignant. Pour ce faire, il faudrait inclure des règles relatives aux défendeurs domiciliés dans des pays tiers, créer des règles de compétence subsidiaire, adopter des mesures en vue d'empêcher la recherche du tribunal le plus favorable et promouvoir l'utilisation de clauses type en matière d'élection de for.

1.5   Il conviendrait également d'adopter des règles permettant d'accroître la sécurité juridique et d'abaisser les coûts élevés générés par la possibilité d'une duplication des litiges de propriété intellectuelle portés devant les tribunaux nationaux.

1.6   Pour les procédures judiciaires élucidant des droits à caractère impératif et de protection, comme ceux dérivant du contrat de travail ou de relations de consommation, il y aurait lieu de modifier le règlement 44/2001 afin de permettre la jonction d'actions en justice qui pourraient rendre effectif l'exercice d'actions collectives devant les tribunaux.

2.   Introduction

2.1   Dans le traité sur l'Union, figure, entre autres objectifs, celui d'établir et de développer «un espace de liberté, de sécurité et de justice» et l'article 65 du traité instituant la Communauté européenne prévoit que les mesures dans le domaine de la coopération judiciaire en matière civile qui ont une répercussion transfrontalière incluront «la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, y compris les décisions extrajudiciaires», et ce dans la mesure nécessaire au bon fonctionnement du marché intérieur.

2.2   Le Conseil européen de Tampere, tenu en octobre 1999, a transformé le principe de reconnaissance mutuelle (1) des décisions de justice en une véritable «pierre angulaire» de la coopération judiciaire tant en matière civile que pénale au sein de l'Union européenne.

2.3   Avec l'entrée en vigueur du traité de Nice, en février 2003, la procédure de prise de décisions visée à l'article 67 est remplacée par le vote à la majorité qualifiée et par la procédure de codécision en matière de coopération judiciaire civile, à l'exception du droit de la famille.

La Convention de Bruxelles de 1968 relative à la compétence judiciaire et à l'exécution des décisions de justice en matière civile et commerciale, constitue un apport très positif à l'acquis communautaire.

2.4.1   La jurisprudence de la CJCE sur la Convention et l'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam ont permis l'adoption du règlement (CE) no 44/2001 du Conseil, du 22 décembre, relatif à la compétence judiciaire, à la reconnaissance et à l'exécution des décisions de justice en matière civile et commerciale (2). Le CESE avait alors émis un avis (3) sur la proposition y relative, dans lequel il jugeait opportun de remplacer la Convention par un instrument communautaire.

2.4.2   Le règlement (CE) no 44/2001 établit des règles uniformes pour connaître des conflits de compétence judiciaire et faciliter la libre circulation des décisions, des transactions judiciaires et documents publics ayant force exécutoire dans l'Union européenne. Il s'est avéré être un instrument essentiel dans la pratique des procédures civiles et commerciales transfrontalières.

2.4.3   Initialement, le Danemark ne participait pas à la coopération judiciaire en matière civile. Depuis le 1er juillet 2007, le règlement s'applique également à ce pays en vertu de l'accord conclu entre la Communauté européenne et le Royaume du Danemark relatif à la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale (4).

2.4.4   Le traité de Lisbonne facilitera l'action au niveau européen dans le domaine de la coopération judiciaire civile en généralisant l'application de la méthode communautaire (5), grâce à l'adoption à la majorité qualifiée des propositions présentées par la Commission et en permettant au Parlement européen de jouer un rôle plus important, aux parlements nationaux d'exercer un contrôle démocratique et à la Cour de justice d'assumer une fonction de contrôle de la légalité.

3.   Le livre vert de la Commission

3.1   L'article 73 du règlement 44/2001 prévoit que, cinq ans après l'entrée en vigueur de celui-ci, la Commission présente un rapport sur son application, assorti de propositions destinées à l'adapter.

3.2   Le livre vert contient toute une série de propositions relatives aux aspects que la Commission juge les plus essentiels, à la lumière de l'expérience acquise dans la mise en œuvre du règlement no 44/2001 et de la jurisprudence de la CJCE en la matière.

3.3   Parmi les thèmes sur lesquels le livre vert entend engager un débat public figurent la suppression de l'exequatur  (6), le fonctionnement du règlement dans l'ordre juridique international, l'élection de for, la propriété industrielle, la litispendance et les actions connexes, les mesures provisoires, l'interface entre le règlement et l'arbitrage, le champ d'application et la compétence.

3.4   Le livre vert aborde également les questions de la reconnaissance et de l'exécution des décisions, en particulier de la libre circulation des documents publics, qui a été demandée dans la résolution du Parlement européen du 18 décembre 2008, ou la possibilité d'utiliser un formulaire normalisé commun dans la phase d'exécution.

4.   Observations générales

4.1   Le règlement (CE) no 44/2001 s'est avéré être un instrument juridique essentiel dans la pratique procédurale et commerciale. Le CESE partage le point de vue de la Commission et du Conseil selon lequel des mesures s'imposent en matière de coopération judiciaire dans le domaine civil pour le bon fonctionnement du marché intérieur.

4.2   Le débat proposé par la Commission s'avère pertinent, à la lumière de l'expérience acquise dans l'application du règlement au cours de ces dernières années. Il s'agit d'améliorer un droit fondamental des personnes, celui de l'accès effectif à la justice, qui est l'un des droits fondamentaux consacré dans la charte européenne des droits fondamentaux, à l'article 65 du traité CE, et qui constitue, dans le même temps, un principe général du droit reconnu par la jurisprudence de la CJCE.

La suppression de l'exequatur dans toutes les décisions adoptées par les juridictions des États membres en matière civile et commerciale est tout à fait cohérente avec la finalité de garantir leur efficacité et de préserver la sécurité juridique dans le marché intérieur et le droit fondamental à un procès équitable et à un recours effectif (7) à la justice, reconnu à l'article 6, paragraphe 1, de la Convention européenne des droits de l'homme et à l'article 47, paragraphe 1, de la Charte européenne des droits fondamentaux (8).

4.3.1   Par conséquent, cela est conforme à la clause de subsidiarité prévue implicitement au premier paragraphe de l'article 65, paragraphe 1, du traité CE, établissant que les mesures relatives à la coopération judiciaire dans le domaine civil qui ont une répercussion transfrontalière ne peuvent être adoptées que si elles sont nécessaires pour le bon fonctionnement du marché intérieur.

4.3.2   D'une part, en ce qui concerne les exigences à remplir pour que la décision ait force exécutoire au niveau supranational, les garanties prévues dans le règlement (CE) no 2201/2003, du 27 novembre 2003 (Bruxelles II-bis), pourraient s'avérer appropriées – les articles 41 et 42 de ce règlement accordant force exécutoire directe aux décisions en matière de droits de visite et de restitution de mineurs – pour autant que, dans les deux cas, les deux conditions suivantes soient remplies: les décisions sont exécutoires dans l'État membre d'origine et elles ont été certifiées dans l'État membre d'origine (9).

4.3.3   En ce sens, le seul empêchement qui pourrait survenir serait qu'une autre décision exécutoire ait été rendue postérieurement par une juridiction différente, mais cette circonstance serait très exceptionnelle dans le domaine sur lequel porte la modification du règlement (CE) no 44/2001 qu'envisage la Commission.

4.3.4   Par ailleurs, et en ce qui concerne la défense des droits du défendeur, une interprétation conforme au «principe de reconnaissance mutuelle» permet à la juridiction saisie d'appliquer les mêmes règles que celles exigées par l'ordre juridique national pour les cas de signification à des étrangers, ou à des nationaux non-résidents, du début de la procédure.

4.3.5   En l'absence de telles dispositions ou en cas d'inadéquation manifeste des règles existantes concernant le droit à un procès équitable (couverture linguistique, fiabilité des moyens de transmission et de réception de la demande, par exemple), il serait opportun de prévoir dans la législation supranationale des règles subsidiaires de garantie.

4.3.6   Le CESE serait néanmoins favorable à une procédure de réexamen supranationale plus harmonisée et généralisée en matière civile et commerciale, pour autant que le défendeur dispose d'une voie de recours effective a posteriori (réexamen exceptionnel), à titre de sauvegarde.

Conformément à la jurisprudence de la CJCE (10), le chapitre II du règlement 44/2001 en vigueur unifie les règles de compétence non seulement pour les litiges intracommunautaires mais également pour ceux qui comportent un élément d'extranéité, ce qui inclut les situations dans lesquelles le domicile du défendeur n'est pas situé dans un État membre.

4.4.1   Par conséquent, il serait possible d'établir des règles de compétences spéciales qui offriraient un cadre supranational pour ces cas alors qu'actuellement il est renvoyé au for intérieur (tribunal national), comme le prévoit l'article 4 du règlement (CE) no 44/2001, sous réserve de l'application des exceptions prévues aux articles 22 et 23 de ce même règlement.

En ce qui a trait à l'introduction de «règles de compétence subsidiaire», les trois chefs de compétence actuellement envisagés paraissent appropriés:

la compétence fondée sur l'exercice d'activités, pour autant que le litige porte sur ces activités (il existe une disposition similaire à l'article 3 du règlement 1346/2000 sur les procédures d'insolvabilité, selon laquelle l'État compétent est celui où se trouve le centre des intérêts principaux du débiteur);

la compétence fondée sur la localisation de biens réclamés pour apurer une dette, et

la compétence fondée sur un «forum necessitatis» (11), même si dans ce cas les termes selon lesquels le droit international reconnaît le «principe de territorialité objective» (12) et qui mettent l'accent sur la nécessité de prouver l'opportunité du renvoi à un for déterminé doivent être scrupuleusement respectés.

4.5.1   Le caractère exceptionnel du recours aux règles du «forum necessitatis» se reflète, entre autres dispositions, à l'article 7 du règlement no 4/2009 (13), qui permet à la juridiction d'un État membre de connaître d'un litige lorsqu'il n'existe pas de compétences reconnues un autre État membre à la lumière du règlement et lorsqu'il s'avère impossible d'engager une procédure dans un État tiers avec lequel le litige a un lien très étroit.

4.5.2   Cependant, en ce qui concerne l'extension du champ d'application de la règle, compte tenu du risque de procédures parallèles découlant de l'établissement de règles uniformes pour des requêtes formées contre des défendeurs de pays tiers, ccs règles uniformes supranationales doivent en tout état de cause être réservées aux situations procédurales suivantes:

lorsque les parties ont conclu un accord exclusif d'élection de for en faveur de juridictions de pays tiers;

lorsque le litige est, pour d'autres raisons, de la compétence exclusive de juridictions de pays tiers; ou

lorsqu'une procédure parallèle a été engagée dans un pays tiers.

Pour ce qui est de la reconnaissance et de l'exécution de décisions rendues par des juridictions de pays tiers ayant compétence exclusive sur un litige, il est nécessaire d'établir une procédure supranationale uniforme qui évite les dommages et les retards qu'entraîne la variété de régimes existant actuellement. Il s'agit en fait d'établir un régime commun relatif aux conditions à réunir pour reconnaître les décisions de juridictions de pays tiers, que le CESE juge important.

4.6.1   En ce sens, il est reconnu que l'Union européenne, sur la base de l'avis 1/2003 de la CJCE, a compétence exclusive pour conclure des conventions internationales qui soient pertinentes tant au niveau bilatéral qu'unilatéral. Aussi l'établissement d'une procédure supranationale uniforme est-elle jugée pertinente.

4.7   Litispendance

4.7.1   Comme on le sait, la règle de litispendance prévoit que lorsque deux demandes ayant le même objet et la même cause sont examinées par deux juridictions différentes, la juridiction saisie en dernier lieu devra se dessaisir de l'affaire en faveur de la première.

4.7.2   En ce qui concerne l'établissement de règles supranationales qui assurent l'efficacité des accords d'élection de for conclu entre les parties, lorsqu'il existe une procédure parallèle, il semble recommandé, pour des raisons d'efficacité, de rapidité et de sécurité juridique, de modifier la règle de litispendance dans le règlement en question en prévoyant, à titre de sauvegarde, une obligation de communication et de coopération directe entre les juridictions concernées.

4.7.3   La création d'un mécanisme de coopération et de communication entre les tribunaux concernés, imposant à la juridiction qui s'est dessaisie de rouvrir l'affaire si le tribunal premier saisi se dessaisit à son tour, est positive en ce qu'elle peut permettre d'éviter les conflits de compétence négatifs comme celui qui existe dans le règlement 2201/2003 (14).

4.7.4   En ce sens, la «litispendance assortie de sauvegardes» permettrait d'établir un délai déterminé dans lequel la juridiction déclarée compétente, car première saisie par ordre chronologique, en application de la règle de «priorité dans le temps», devra établir sa compétence et être obligée, si elle la retient, d'informer régulièrement l'autre juridiction du déroulement de la procédure, conformément à d'autres délais impératifs.

L'établissement d'une «règle de diligence» qui oblige à communiquer en temps voulu les développements à deux juridictions ou plus qui sont en situation de litispendance par rapport à une même affaire pour lesquelles elles se sont déclarées compétentes à titre exclusif, renforcerait de toute évidence la sécurité juridique.

4.8.1   Enfin, le CESE estime que l'inclusion d'une clause type d'élection de for, à caractère supranational dans le règlement 44/2001, faciliterait l'accès effectif à la justice des citoyens et des entreprises car elle permettrait d'éviter l'incertitude qui entoure la question de la validité de l'accord d'élection de for, le but étant d'éviter la recherche du tribunal le plus favorable.

4.9   Les mesures conservatoires

4.9.1   En ce qui concerne les mesures conservatoires, une révision de certains aspects des articles 31 et 47 du règlement 44/2001 précité serait utile, en particulier dans l'hypothèse où l'exécution de telles mesures serait demandée aux autorités judiciaires d'un État membre donné alors que c'est le tribunal d'un autre État membre qui est compétent pour connaître du fond.

4.9.2   Compte tenu du fait que les actions conservatoires devant un tribunal doivent être adoptées afin de protéger la situation procédurale de la personne qui les demande, si deux conditions sont réunies, de manière générale et dans la majorité des États membres, à savoir, le «fumus boni iuris» et le «periculum in mora» (15), et en vue d'éviter l'abus de droit, il conviendrait de limiter cette possibilité en posant des conditions restrictives.

4.9.3   Premièrement, l'obligation pour la juridiction saisie de cette demande d'informer le tribunal compétent quant au fond du litige et, une fois cette information évaluée, de décider de l'opportunité d'adopter ces mesures en ayant pour principal critère de mener à bonne fin la procédure.

4.9.4   Deuxièmement, l'obligation faite à la personne qui demande les mesures conservatoires ou provisoires de déposer une caution dont le montant sera fixé à titre prudentiel par la juridiction compétente en fonction de l'importance de l'affaire et de son effet dissuasif nécessaire pour éviter des abus de droit.

4.9.5   Dans les cas où il s'agit d'obtenir une obligation de faire ainsi que dans d'autres similaires qui n'impliquent pas le paiement d'une somme liquide, échue et exigible, il serait possible de réguler l'exemption de l'obligation de déposer une garantie en fonction de l'évaluation factuelle par le juge de toutes les circonstances à prendre en considération, afin de ne pas faire obstacle à l'obtention de la protection judiciaire.

4.10   Suppression de l'exequatur

4.10.1   De même, l'on maintient la possibilité de non reconnaissance, fondée sur des motifs spécifiques prévus à l'article 34 du règlement, touchant à l'ordre public, à l'incapacité des parties impliquées à assurer leur défense et à l'incompatibilité des décisions.

4.10.2   Ces circonstances accordent une marge de discrétion aux juridictions compétentes qui est difficile à contrôler et contribue manifestement à l'insécurité juridique et peut entraîner des retards qui n'on pas lieu d'être dans le déroulement de la procédure.

4.10.3   Par ailleurs, il semble raisonnable qu'aux fins de la suppression de l'exequatur dans l'autorisation de l'exécution des mesures provisoires, la modification de l'article 47 du règlement en question s'inspire de la formule prévue par l'article 20 en vigueur du règlement (CE) no 4/2009 (13), c'est-à-dire une copie de la décision, un extrait de la décision traduite, avec le formulaire correspondant.

4.10.4   Étant donné que le but des modifications prévues dans le règlement est de contribuer à l'application générale du principe de «reconnaissance mutuelle» dans son domaine d'application, il ne semble pas cohérent de continuer à faire la distinction entre «reconnaissance» et «exécution».

4.10.5   Il conviendrait par conséquent de la supprimer ou de procéder à une révision approfondie de ses conditions d'application.

4.10.6   Par ailleurs, si l'on veut que la «reconnaissance» des décisions couvre l'intégralité des domaines civil et commercial, il faudra modifier le contenu de l'article premier en vigueur afin d'élargir son champ d'application aux décisions, car cela permettrait aux citoyens et aux entreprises de tirer un meilleur parti du fonctionnement du marché intérieur.

4.10.7   Cette observation semble également valoir pour la proposition d'inclure dans le règlement des formules de pénalisation financière pour les débiteurs et celles qu'imposeraient les tribunaux ou autorités fiscales des États membres.

4.10.8   En vue de simplifier les démarches et d'accélérer l'exécution, l'on pourrait améliorer l'accès à la justice en établissant un formulaire normalisé commun disponible dans toutes les langues officielles de l'Union européenne, auquel serait joint un extrait de la décision.

4.10.9   Cela permettrait de réduire les frais d'exécution en supprimant l'obligation d'élire un domicile ou de désigner un mandataire «ad litem», devenue obsolète suite à l'adoption du règlement (CE) no 1393/2007 (16).

4.11   Le document public européen

4.11.1   Initialement, l'article 50 de la Convention de Bruxelles faisait référence aux «actes authentiques reçus et exécutoires», ce concept faisant l'objet d'une interprétation de la CJCE (17), selon laquelle il s'agit de documents ayant force exécutoire en vertu du droit de l'État d'origine, dont l'authenticité a été établie par une autorité publique ou par toute autre autorité habilitée à cette fin par l'État en question.

4.11.2   Dans le règlement 44/2001, ce concept a été introduit à l'article 57. Toutefois, le Parlement européen a demandé à la Commission d'entamer les travaux relatifs à un document public européen.

4.11.3   Le CESE préconise que la Commission engage les travaux nécessaires pour traiter de la question de la libre circulation des documents publics, qui pourrait aboutir à l'établissement d'un document public européen.

4.12   La protection des consommateurs

4.12.1   Selon le considérant 13 du règlement 44/2001, il est opportun, dans les contrats conclus par les consommateurs, de protéger la partie la plus vulnérable au moyen de règles de compétence plus favorables à ses intérêts que les règles générales. Cela a été confirmé par la jurisprudence de la CJCE (18).

4.12.2   Le Comité partage les inquiétudes de la Commission exprimées dans les considérants du règlement et la jurisprudence de la CJCE, car il a toujours été partisan du maintien d'un niveau élevé de protection des consommateurs par des règles à caractère impératif.

4.12.3   Pour des raisons de cohérence avec l'ordre juridique communautaire, il conviendrait d'aligner la rédaction de l'article 15, paragraphe1, lettres a) et b), du règlement, sur la définition du crédit à la consommation et du contrat de crédit y afférent fournie à l'article 3, lettres c) et n), de la directive 2008/48/CE (19).

4.12.4   Enfin, et en ce qui a trait aux actions collectives, ce type de sauvegarde a pour objectif de limiter les frais de procédure qui généralement finissent par dissuader le consommateur d'intenter une action en justice contre une entreprise domiciliée dans un autre État membre. Cela vaut en particulier pour les frais qu'entraîne une action en justice en dehors de son domicile habituel et pour ceux qui découlent de la nécessité d'exécuter «a fortiori» la décision dans un autre État membre lorsqu'il porte le litige devant son propre juge.

4.12.5   Étant donné qu'il n'est pas possible avec le règlement actuel (article 6, paragraphe 1) de joindre les actions intentées par différents demandeurs à l'encontre d'un même défendeur devant les tribunaux d'un État membre, il conviendrait de modifier cette disposition du règlement afin de faciliter les recours collectifs des consommateurs et les actions en dommages et intérêts pour infraction aux règles communautaires de défense de la concurrence, sur lesquelles le CESE s'est favorablement prononcé.

4.13   La propriété intellectuelle

4.13.1   Si la directive 2004/48/CE (20) relative au respect des droits de propriété intellectuelle a pour objectif de rapprocher certaines questions de procédure, il est nécessaire de prévoir des règles à caractère supranational afin de pallier le manque de sécurité juridique et de réduire les frais élevés qu'entraîne la duplication des procédures devant les tribunaux nationaux.

4.13.2   Aussi, le CESE considère-t-il qu'il y a lieu d'adopter des mesures destinées à empêcher la falsification de marques et encourage la Commission et les États membres à conclure la Convention sur le brevet européen, dans le plein respect de la pluralité linguistique.

4.14   L'arbitrage

4.14.1   Le CESE estime qu'il faudrait adopter, dans le cadre de la réforme du règlement 44/2001, les mesures appropriées pour faire en sorte que les décisions puissent circuler de manière fluide en Europe et empêcher les procédures parallèles.

4.14.2   Concrètement, la suppression (partielle) de l'exclusion de l'arbitrage du champ d'application du règlement permettra:

des mesures conservatoires à l'appui de l'arbitrage;

la reconnaissance des décisions sur la validité d'un accord d'arbitrage;

de faciliter la reconnaissance et l'exécution des décisions qui englobent une décision d'arbitrage.

4.14.3   Le CESE est favorable à l'adoption de mesures qui facilitent l'utilisation transnationale de l'arbitrage. Aussi, est-il partisan de l'établissement d'une règle de conflit supranationale et uniforme relative à la validité des conventions d'arbitrage, qui renverrait à la loi de l'État dans lequel se déroule cet arbitrage.

4.14.4   Quoi qu'il en soit, le CESE est d'avis que le mieux serait de ne pas changer le mode de fonctionnement de la Convention de New-York de 1958 en matière d'exécution des sentences arbitrales, ou, tout du moins, de s'en servir comme base pour l'adoption de nouvelles mesures.

4.15   Élargissement du champ d'application aux décisions administratives

4.15.1   Le CESE est conscient que le règlement 44/2001 ne s'applique qu'aux décisions en matière civile et commerciale. Il estime néanmoins que pour le bon fonctionnement du marché intérieur, la Commission et les États membres devraient étudier la possibilité d'élargir le champ d'application matériel de ce règlement aux décisions administratives définitives, selon les modalités qu'ils jugeraient appropriées, y compris celle visée à l'article 309 du traité CE.

Bruxelles, le 16 décembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Le principe de «reconnaissance mutuelle» garantit la libre circulation des décisions de justice sans qu'il soit nécessaire d'harmoniser les législations procédurales des États membres.

(2)  JO L 12 du 16.1.2001, p. 1.

(3)  JO C 117 du 16.4.2000, p. 51.

(4)  JO CE L 299 du 16.11.2005, p. 61.

(5)  La méthode communautaire se fonde sur l'idée selon laquelle l'intérêt général des citoyens est mieux défendu lorsque les institutions communautaires jouent pleinement leur rôle dans le processus décisionnel, dans le respect du principe de subsidiarité.

(6)  L'exequatur est la procédure qui a pour objet de déterminer s'il est possible de reconnaître un jugement prononcé par un tribunal qui échappe à la souveraineté de l'État dans lequel l'on souhaite l'exécuter et si l'on peut l'exécuter dans un État distinct de celui dans lequel la décision de justice a été rendue.

(7)  Le droit à un procès équitable fait partie du droit consacré à l'article 6-1 conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme (voir les arrêts Golder (21.02.1975, paragraphes 28 à 31) et Dewer, entre autres.

(8)  JOCE C 364 du 18.12.2000.

(9)  Les règlements 4/2009; 1896/2006 et 861/2007 vont également en ce sens.

(10)  Arrêt du 1.3.2005, Aff. C-281/02 OWUSU, et avis 1/03 du 7 février 2006, FJ 143-145.

(11)  Cela signifie qu'un tribunal reconnaîtra la compétence assumée par un tribunal étranger s'il juge que celui-ci a assumé cette compétence pour éviter un déni de justice, en l'absence d'une autre juridiction compétente. Il s'agit davantage d'un aspect relevant de l'accès à la justice que d'une reconnaissance des décisions.

(12)  Dans les arrêts de la CIJ du 7 septembre 1927, affaire «Lotus» et du 5 février 1970, affaire «Barcelona Traction», par exemple.

(13)  JO L 7 du 10.1.2009, p. 1.

(14)  JO L 338 du 23.12.2003, p. 1.

(15)  Les mesures conservatoires supposent, en principe, l'autorisation anticipée, et parfois partielle, d'une allégation avant que le jugement ait été rendu. Selon la doctrine procédurale classique (cf. Calamandrei, «Introducción al Estudio sistemático de las Providencias cautelares» (Introduction à l'étude systématique des mesures conservatoires), les deux conditions doivent être réunies pour l'adoption de telles mesures: apparence de bien fondé de la demande au principal (fumus boni iuris) et le danger qu'implique le retard dans l'exécution de sorte que le recours risque d'être sans résultat (periculum in mora). La CJCE a également reconnu cette doctrine dans l'ordonnance du président de la Cour du 19.7.1995, Commission/Atlantic Container Line et autre (Aff. C-149/95), dans l'ordonnance du président du TPI du 30.6.1999, Pfizer Animal Health/Conseil (affaire T- 13/99) et affaires Factortame du 19 juin 1990, et dans l'ordonnance du président de la Cour de justice du 28.6.1990.

(16)  Règlement (CE) no 1393/2007, relatif à la notification et à la transmission dans les États membres de documents judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale. JOCE L 324 du 10.12.2007.

(17)  Arrêt de la CJCE du 17.6.1999, affaire C-260/97, Unibank.

(18)  Arrêt de la CJCE du 17.9.2009, affaire C-347708, Vorarlberger Gebietskrankenkasse.

(19)  JO L 133 du 22.5.2008, p. 66.

(20)  JO L 157 de 30.4.2004, p. 45.


22.9.2010   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 255/54


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Repousser les limites des TIC: une stratégie en matière de recherche sur les technologies futures et émergentes en Europe»

COM(2009) 184 final

(2010/C 255/09)

Rapporteure: Mme DARMANIN

Corapporteur: M. WOLF

Le 20 avril 2009, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions – Repousser les limites des TIC: une stratégie en matière de recherche sur les technologies futures et émergentes en Europe»

COM(2009) 184 final.

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 17 novembre 2009. (rapporteure: Mme DARMANIN; corapporteur: M. WOLF).

Lors de sa 458e session plénière des 16 et 17 décembre 2009 (séance du 16 décembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis à l'unanimité.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le renforcement de la recherche et développement (R&D) et de l'innovation est un facteur essentiel pour surmonter la crise économique et financière actuelle.

1.2   Parmi les principaux thèmes de R&D, comme le climat, l'énergie et la santé, les technologies de l'information et de la communication (TIC) jouent un rôle crucial, en tant que technologies transversales ayant une incidence sur presque tous les aspects de la vie sociale, économique, scientifique et technologique.

1.3   En ce qui concerne la R&D sur les TIC, le sous-programme consacré aux «technologies futures et émergentes» (connues sous le sigle anglais FET: «Future and Emerging Technologies») joue un rôle de pionnier, car il peut aboutir, à long terme, à un renouvellement complet, et peut-être révolutionnaire, des technologies de l'information et de la communication.

1.4   Par conséquent, le Comité soutient pleinement les propositions que la Commission formule dans sa communication sur les technologies futures et émergentes. Il soutient également la proposition visant à augmenter le budget alloué aux technologies futures et émergentes dans le cadre des TIC à hauteur de 20 % par an.

1.5   Cependant, cette augmentation équivaut à celle du budget de l'ensemble des programmes de TIC, et ne modifie donc pas la part relative du programme FET. Or le Comité recommande de porter progressivement la part relative actuelle du programme FET à 15 % dans le cadre du 7e programme-cadre (7e PC) et de poursuivre cette tendance dans le cadre du 8e PC.

1.6   Eu égard aux «règles de participation au septième programme-cadre», le CESE invite les États membres et leurs organismes de financement à contribuer dans la mesure requise afin de pouvoir mettre en œuvre ce programme avec succès.

1.7   De plus, le CESE invite également les États membres à élaborer des programmes nationaux de R&D solides dans les domaines des TIC et des FET, afin qu'ils puissent devenir des partenaires forts dans le cadre de la coopération européenne et internationale. Il convient d'y consacrer une part plus importante des Fonds structurels. Le CESE considère que la réalisation de progrès dans ce domaine constitue un élément important de la nouvelle stratégie de Lisbonne (1), cet objectif devant être poursuivi en ayant recours à la méthode ouverte de coordination.

1.8   Le Comité soutient également la proposition de structurer le programme FET selon deux axes différents: «les nouveaux thèmes de recherche dans des domaines émergents» (FET Proactive), comprenant les initiatives phares récemment proposées, et «l'étude d'idées novatrices» (FET Open). L'ouverture des FET à des idées nouvelles est particulièrement importante pour stimuler le potentiel scientifique et intellectuel des États membres.

1.9   Le Comité approuve également d'autres caractéristiques du programme FET proposé, telles que l'approche pluridisciplinaire, la programmation conjointe entre États membres et la coopération internationale. Il convient cependant de s'assurer que des initiatives prometteuses ne se noient pas dans la complexité des procédures y afférentes et que des scientifiques et des institutions de premier plan soient encouragés à y participer.

1.10   Le Comité exige une action immédiate et concrète dans le domaine du brevet communautaire.

1.11   Le Comité lance un appel à la Commission et aux États membres afin d'attirer des talents exceptionnels dans ce domaine de la recherche et de prévenir la fuite des cerveaux des jeunes scientifiques les plus talentueux. Le CESE constate avec satisfaction que certains organismes de recherche ont d'ores et déjà mis en œuvre avec succès des programmes pour faire face à ce défi.

1.12   Le Comité réitère sa recommandation d'introduire une nouvelle catégorie les «TIC pour la science et la recherche» dans le programme global sur les TIC.

2.   La communication de la Commission

2.1   Dans le cadre du programme spécifique«Coopération», la recherche et développement sur les technologies de l'information et de la communication constitue le pilier central du 7e programme-cadre de recherche et développement technologique (2007-2013) (2) (7ePC). La recherche sur les technologies futures et émergentes ne constitue qu'une petite partie de ce programme de R&D relatif aux TIC, et environ 10 % de son budget spécifique. Alors que la majeure partie du programme relatif aux TIC implique principalement l'exploitation des connaissances scientifiques existantes en vue de développer des TIC innovantes, la recherche sur les FET joue, quant à elle, un rôle de pionnier pour le programme relatif aux TIC, abordant des questions scientifiques plus fondamentales, dont la solution pourrait aboutir, à long terme, à des technologies de l'information et de la communication résolument innovantes et probablement révolutionnaires.

2.2   La communication de la Commission expose l'objectif de renforcer la recherche sur les technologies futures et émergentes dans le cadre du programme sur les TIC. Ces mesures complèteront et renforceront les actions décrites dans la récente communication de la Commission «Une stratégie pour la R&D et l'innovation en matière de TIC en Europe» (3).

2.3   Doté actuellement d'un budget annuel de 100 millions d'euros, le programme FET soutient des scientifiques et des ingénieurs qui s'engagent dans des domaines inexplorés et franchissent les limites des TIC traditionnelles. La Commission européenne soutient l'augmentation de 20 % par an, entre 2011 et 2013, de la part du budget du 7e PC allouée à la recherche sur les technologies futures et émergentes. Elle invite les États membres à fournir un effort similaire par des augmentations budgétaires du même ordre.

2.4   Le programme européen de recherche sur les technologies futures et émergentes est unique en ce qu'il combine les caractéristiques suivantes:

Il est novateur: il jette de nouvelles bases pour les futures TIC en étudiant des idées et des modèles scientifiques innovants et non conventionnels dont la réalisation nécessiterait trop de temps ou présenterait trop de risques pour la recherche industrielle.

Il est transformatif: il se fonde sur des idées qui bousculent et peuvent profondément modifier notre compréhension des concepts scientifiques sur lesquels reposent les technologies de l'information existantes.

Il est à haut risque: ces risques sont toutefois contrebalancés par le niveau élevé de résultats potentiels et par la perspective de découvertes révolutionnaires.

Il est ciblé: son objectif est d'avoir un impact sur les futurs programmes de recherche industrielle sur les TIC.

Il est pluridisciplinaire: il s'appuie sur les synergies et l'enrichissement mutuel entre différentes disciplines (biologie, chimie, nanosciences, neurosciences et sciences cognitives, éthologie, sciences sociales ou économie, par exemple).

Il privilégie la collaboration: il rallie les meilleures équipes de recherche d'Europe et, de plus en plus, du reste du monde, afin qu'elles collaborent sur des thèmes de recherche communs.

2.5   Le programme sur les FET est mis en œuvre au moyen de thèmes de recherche dans des domaines émergents («FET Pro-active») et de l'étude d'idées novatrices sur une base ouverte et non contraignante («FET Open»).

2.6   Dans sa communication, la Commission propose une stratégie à plusieurs niveaux, tels que:

renforcer le programme FET dans le cadre du domaine thématique des TIC;

lancer des initiatives phares dans le domaine des FET;

œuvrer à une programmation et à des initiatives conjointes en matière de FET dans le cadre de l'espace européen de la recherche;

renforcer la participation des jeunes chercheurs à la recherche sur les FET;

faciliter une exploitation plus rapide des connaissances scientifiques et accélérer l'innovation;

faciliter la collaboration avec des chercheurs de pointe internationaux et attirer les meilleurs chercheurs du monde entier en Europe.

2.7   La Commission invite les États membres à approuver les objectifs, les cibles et la stratégie proposés, et à encourager, à l'échelle nationale et régionale, les autorités, les universités, les organismes publics de recherche et les parties prenantes du secteur privé à participer à la préparation d'actions futures.

3.   Observations générales

3.1   Les TIC dans le 7e programme-cadre (7e PC). Dans son avis relatif au 7e PC communautaire (2), le Comité constatait que «des activités de recherche et de développement efficaces, bénéficiant de subventions suffisantes et se distinguant par leur excellence, sont en effet la condition sine qua non de l'innovation, de la compétitivité et du bien-être, et partant aussi du développement culturel et des prestations sociales. Les investissements dans la recherche et le développement ont pour effet d'accroître – avec un net effet multiplicateur – la puissance économique». Ces constatations sont plus valables que jamais dans le contexte actuel de grave crise économique et financière, qui en sus des problèmes énergétiques et climatiques existants, démontre l'urgente nécessité de poursuivre les efforts de recherche en faveur d'innovations radicales.

L'impact des TIC. Dans ce contexte, les TIC jouent un rôle crucial, car ces technologies transversales constituent le support des systèmes et des processus de presque tous les domaines de la vie moderne. Au cours des dernières décennies, les TIC et les technologies connexes ont entraîné des changements et des progrès révolutionnaires dans le mode de fonctionnement de la société, notamment en ce qui concerne le style de vie des particuliers, l'industrie, le commerce, l'administration et les sciences.

3.2.1   Les TIC en tant qu'instrument de recherche. Les TIC sont un instrument qui permet de poursuivre et de développer la recherche sur d'autres champs d'innovation, comme l'énergie, le climat (4), la santé et le vieillissement de la société, ainsi qu'un grand nombre de problèmes socio-économiques. Les TIC représentent donc non seulement un domaine d'innovation en soi, mais aussi un instrument d'innovation dans d'autres domaines des sciences, de la société et des technologies. La poursuite du développement des TIC devrait accélérer et favoriser ces avancées.

3.3   La R&D dans le domaine des TIC. La R&D dans le domaine des TIC exploite les connaissances scientifiques existantes pour développer ou améliorer de nouveaux dispositifs, méthodes et instruments de calcul et de communication. Elle concerne des domaines allant des grilles informatiques à l'UMTS; l'ensemble des projets peut être consulté sur: http://cordis.europa.eu/fp7/ict/projects/home_en.html.

3.4   Le programme FET. La R&D sur les TIC requiert une meilleure compréhension des lois qui régissent la nature et, notamment, de celles selon lesquelles la nature traite l'information, afin de dépasser nos limitations actuelles et d'explorer des champs résolument nouveaux de la connaissance porteurs d'un potentiel nouveau pour les TIC et l'innovation. Tel est l'objectif du programme FET qui a déjà suscité l'intérêt de l'élite scientifique internationale.

3.5   Un rôle de pionnier. Le CESE estime que le programme FET de la Commission a été couronné de succès et a effectivement joué un rôle de pionnier. Le Comité appuie donc la poursuite et l'extension de ce programme, comme le propose la Commission. Le CESE est également favorable à l'augmentation proposée de la part du budget allouée à la recherche sur les FET de 20 % par an, ainsi qu'au principe de se lancer dans des domaines inexplorés et de rechercher de nouvelles opportunités fondamentales.

3.6   L'augmentation de la part relative du programme FET. Le CESE reconnaît que les investissements d'aujourd'hui dans les FET portent en germe les TIC de demain. De ce fait, puisque l'augmentation annuelle de 20 % du budget alloué équivaut simplement à l'augmentation prévue du budget de l'ensemble des programmes de TIC, et ne modifie donc pas la part relative du programme FET, le CESE recommande de porter progressivement la part relative actuelle du programme FET à 15 % dans le cadre du 7e PC, et de poursuivre cette tendance dans le cadre du 8e PC.

3.7   Les deux volets du programme FET. Le Comité approuve également la structure du programme FET en deux volets distincts: une partie de recherche proactive «les nouveaux thèmes de recherche dans des domaines émergents» («FET Proactive») – comprenant les initiatives phares (5) proposées (sur les systèmes décentralisés auto organisés, par exemple) – et «l'étude d'idées novatrices» («FET Open») qui adopte une approche ascendante et ouverte aux chercheurs proposant des idées résolument novatrices. L'ouverture du dispositif FET à de nouvelles idées est très importante pour stimuler le potentiel scientifique et intellectuel des États membres.

3.8   Les États membres et les règles de participation. Alors que les industries et les petites et moyennes entreprises (PME) (6) sont le principal vecteur du développement des TIC, le programme FET dont il est ici question concerne au premier chef les universités et les institutions publiques de recherche de l'UE. Conformément aux «règles de participation (7)» au 7e PC, le programme FET stimule la coopération entre États membres et le financement par ces derniers. Le CESE invite donc les organismes de financement des États membres à contribuer dans la mesure requise afin de faciliter ou de renforcer la participation à cet important programme.

3.9   Les programmes nationaux des États membres en matière de R&D concernant les FET. De plus, le CESE invite également les États membres à élaborer des programmes nationaux de R&D solides dans les domaines des TIC (8) et des FET, afin qu'ils puissent devenir des partenaires forts dans le cadre de la coopération européenne et internationale. Il convient d'y consacrer une part plus importante des Fonds structurels.

Les caractéristiques et les critères de sélection du programme. De l'avis du Comité, l'objectif principal visant à traiter et à soutenir les nouvelles idées thématiques, méthodologiques et technologiques est excellent et mérite d'être appuyé, les autres objectifs mentionnés aux paragraphes 2.4 et 2.6 étant également intéressants et importants. Le CESE note avec satisfaction que les caractéristiques et les domaines visés aux paragraphes 2.4 et 2.6, en particulier lorsqu'ils sont combinés, sont propices à l'originalité et l'excellence scientifique, critères primordiaux de sélection. Le CESE est convaincu que l'originalité, l'excellence et la pertinence revêtent une importance majeure. Cela a été le cas par le passé et devrait le rester à l'avenir.

3.10.1   Pas d'approche unique et uniforme. Le programme FET devrait dès lors éviter d'adopter une approche unique et uniforme dans l'application de ses instruments. Bien que le programme présente et associe différentes caractéristiques (9) valables et importantes, les projets à soutenir ne devraient pas être sélectionnés sur l'ensemble de ces critères; en d'autres termes, il ne devrait pas être obligatoire de prendre en compte l'ensemble de ces critères.

3.11   Accepter le risque d'échec. L'exploration de domaines nouveaux étant souvent payante, eu égard au caractère «hautement risqué» des projets du programme FET, il convient d'accepter les échecs, de ne pas stigmatiser les chercheurs impliqués et de ne pas remettre en cause l'appui fourni par le 7e PC. Même dans le cadre des projets-phare, le risque d'échec ne peut être exclu. Le CESE se félicite donc de ce que la Commission ait introduit et mis ce principe en exergue dans son document.

3.12   Le programme FET et la liste ESFRI. Il convient d'encourager et de soutenir la feuille de route du Forum stratégique européen pour les infrastructures de recherche (liste ESFRI (10)) afin de tirer pleinement profit du potentiel des infrastructures de recherche nouvelles et existantes, et afin de favoriser le développement de liens entre elles et le programme FET.

4.   Observations particulières

Ces observations concernent certains des problèmes soulevés aux paragraphes 2.4 et 2.6 ci- dessus.

4.1   L'approche pluridisciplinaire. Le CESE reconnaît et souligne les enjeux présentés dans la communication de la Commission. L'un d'eux concerne le soutien à la coopération entre disciplines, qui est une condition essentielle du succès des technologies futures et émergentes. Le CESE se félicite donc que l'approche pluridisciplinaire soit un prérequis des projets sélectionnés ainsi que des thèmes des initiatives phare (11) récemment proposées.

4.2   La participation des industries, des PME et de la société. Il convient de faire participer des représentants des industries, des PME et de la société civile aux comités consultatifs compétents, afin de garantir une mise en œuvre adéquate des futures applications industrielles ou sociétales du programme FET à caractère plus fondamental. Le CESE constate que c'est bien le cas (12), et recommande de poursuivre cette pratique à l'avenir. Le CESE plaide en outre en faveur d'une participation plus active des chercheurs dans les domaines sociaux.

4.3   Attirer les cerveaux et prévenir leur fuite. Attirer les talents exceptionnels dans le domaine de la recherche et prévenir la fuite des cerveaux, notamment des jeunes scientifiques les plus talentueux, constitue un sérieux défi que le CESE a mis en lumière à plusieurs reprises (13). Le CESE constate avec satisfaction que certains organismes de recherche (14) ont d'ores et déjà mis en œuvre avec succès des programmes pour faire face à ce défi. Le CESE recommande que davantage d'organismes dans les États membres agissent en ce sens et que la Commission soutienne cette politique. En outre, le CESE prône un renforcement des programmes pour les étudiants, de manière à attirer les jeunes diplômés vers des domaines spécifiques de recherche; ce faisant, il convient, de manière générale, d'éveiller l'intérêt des lycéens pour l'innovation, la science et la recherche. La mise en œuvre de tels programmes devrait permettre de détecter l'excellence avant la fin des études.

4.4   La programmation conjointe  (8). Le CESE rappelle que la majeure partie de la R&D sur fonds publics est menée ou financée par les États membres. Il réitère donc son appel à ces derniers pour qu'ils coordonnent les procédures entre eux afin de pouvoir pleinement exploiter leur potentiel de R&D en s'appuyant sur le programme-cadre communautaire pour la R&D.

4.5   La collaboration des chercheurs dans les domaines des FET. Le CESE réaffirme les positions formulées dans son récent avis (8) sur la question et accueille favorablement les recommandations de la Commission de remédier à la fragmentation des efforts de recherche déployés actuellement par l'Europe dans des domaines sélectionnés et de renforcer la collaboration dans des domaines choisis de recherche sur les FET. Dans la mesure où les exigences posées par les règles de participation ne sont pas encore satisfaisantes, le CESE recommande à la Commission de convier aussi tôt que possible les États membres à lancer des initiatives conjointes dans le cadre de la programmation conjointe de l'initiative pour la recherche, dans des domaines tels que les technologies quantiques et neuronales de l'information pour lesquels il existe une feuille de route de la recherche européenne et à élargir ultérieurement ces initiatives à d'autres domaines des FET qui revêtent un intérêt commun. Le CESE considère que la réalisation de progrès dans ce domaine constitue un élément important de la nouvelle stratégie de Lisbonne (1), cet objectif devant être poursuivi en ayant recours à la méthode ouverte de coordination.

4.6   La collaboration internationale. Le Comité s'accorde à penser avec la Commission que la recherche sur les FET se prête particulièrement bien à la collaboration internationale (mondiale) car elle établit les fondements de l'avenir des TIC et doit relever des défis scientifiques mondiaux. Le Comité se réfère à son récent avis sur ce thème (15). Le CESE s'accorde à penser avec la Commission que les principaux concurrents de l'Europe ont compris que la recherche fondamentale était indispensable pour occuper et conserver une position dominante dans le domaine des TIC.

4.7   La complexité des procédures. En ce qui concerne les problèmes soulevés dans les paragraphes 4.4 et 4.5, le CESE reconnaît également que les procédures y afférentes peuvent accroître considérablement la complexité des projets techniques et scientifiques. Il convient de faire en sorte que des initiatives prometteuses ne se noient pas dans ces problèmes procéduraux, et que des scientifiques et des institutions de premier plan soient encouragés à y participer.

4.8   La nécessité d'un brevet communautaire. Le Comité souligne qu'un brevet communautaire contribuerait à mieux protéger, et plus rapidement, les droits de propriété intellectuelle résultant des investissements européens dans la R&D. Le Comité déplore vivement l'absence de progrès concrets en la matière depuis 10 ans.

4.9   Les TIC pour la science et la recherche. Le CESE réitère sa recommandation précédente (15) d'introduire une nouvelle catégorie «TIC dans le domaine de la science et de la recherche» dans le programme global sur les TIC, avec un accent particulier sur les logiciels. Selon le Comité, une telle mesure ne pourrait qu'être bénéfique pour le programme FET élargi.

Bruxelles, le 16 décembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  JO C 277 du 17.11.2009, p. 1.

(2)  JO C 65 du 17.3.2006, p. 9.

(3)  COM(2009) 116 final.

(4)  Voir également C(2009) 7604 final du 9.10.2009.

(5)  Voir la version finale du rapport du comité consultatif des technologies pour la société de l'information (ISTAG), le 31 juillet 2009.

(6)  Dans ce contexte, le Comité attire aussi l'attention sur l'utilité du rôle d'EUREKA qui permet aux partenaires de projets de recourir rapidement à de nombreuses connaissances, compétences et expertises dans toute l'Europe et d'accéder plus facilement aux dispositifs de financement nationaux publics et privés (voir: http://www.eureka.be/about.do).

(7)  JO C 309 du 16.12.2006, p. 35.

(8)  JO C 228 du 22.9.2009, p. 56.

(9)  COM(2009) 184 final, paragraphe 2.

(10)  JO C 182 du 4.8.2009, p. 40.

(11)  Voir, par exemple, le rapport de la Commission sur les consultations FET 2007-2008, Technologies futures et émergentes, ISBN 978-92-79-09565-8, septembre 2008.

(12)  Membres du comité consultatif des technologies pour la société de l'information (ISTAG), voir: http://cordis.europa.eu/fp7/home_fr.html.

(13)  JO C 110 du 30.4.2004, p. 3.

(14)  Par exemple, l'association Helmholtz des centres allemands de recherche et la fondation Max Planck.

(15)  JO C 306 du 16.12.2009, p. 13.


22.9.2010   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 255/59


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Conseil portant suspension, à titre temporaire, des droits autonomes du tarif douanier commun à l’importation de certains produits industriels dans les régions autonomes de Madère et des Açores»

COM(2009) 370 final — 2009/0125 (CNS)

(2010/C 255/10)

Rapporteur général: M. SOARES

Le 7 septembre 2009, le Conseil a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de règlement du Conseil portant suspension, à titre temporaire, des droits autonomes du tarif douanier commun à l’importation de certains produits industriels dans les régions autonomes de Madère et des Açores»

COM(2009) 370 final - 2009/0125 (CNS).

Le 17 novembre 2009, le Bureau du Comité économique et social européen a chargé la section spécialisée «Marché unique, production et consommation» de préparer les travaux du Comité en la matière.

Conformément à l'article 20 de son règlement intérieur, le Comité économique et social européen a décidé, lors de sa 458e session plénière des 16 et 17 décembre 2009 (séance du 17 décembre 2009), de nommer M. SOARES rapporteur général et a adopté le présent avis par 133 voix pour et 2 voix contre.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le Comité marque son accord avec la proposition de règlement présentée par la Commission.

1.2   Le Comité estime que vu le caractère de régions ultrapériphériques que présentent les îles Açores et Madère, il est totalement justifié d'adopter des mesures d'appui au développement de l'économie locale de ces zones, dont le fondement traditionnel est assuré presque exclusivement par les revenus du tourisme. À l'heure actuelle, d'autres régions ultrapériphériques, comme les îles Canaries, bénéficient également d'un régime analogue.

1.3   Les dispositions proposées favorisent la pérennité et le développement d'activités économiques autres que celles en lien direct avec le tourisme et contribuent ainsi à consolider et maintenir l'emploi local, lequel sera dès lors moins sensible aux aléas du secteur touristique.

1.4   Le Comité juge que cette action est positive pour le développement économique de la région et la préservation de l'emploi local.

2.   Synthèse de la proposition de règlement présentée par la Commission

2.1   Champ d'application

2.1.1   La Commission propose une suspension temporaire des droits autonomes qui sont imposés par le tarif douanier commun pour importer dans les régions autonomes de Madère et des Açores une série de produits destinés à un usage agricole, commercial ou industriel, tels que précisés à l'annexe I, ainsi que pour les importations, dans ces mêmes régions, de matières premières, pièces détachées ou composants qui sont utilisés à des fins agricoles, en vue d'une transformation industrielle ou pour l'entretien et sont repris à l’annexe II.

2.1.2   Les produits finis devront être utilisés sur les îles par des entreprises locales pendant au moins deux ans avant de pouvoir être vendus librement à d’autres entreprises implantées sur le reste du territoire douanier de la Communauté.

2.1.3   Quant aux matières premières, pièces détachées et composants, ils devront servir à des fins agricoles, à une transformation industrielle ou à l'entretien sur le territoire insulaire.

2.1.4   Afin d’éviter tout abus ou toute modification des flux commerciaux traditionnels des marchandises concernées, il est prévu de procéder à des contrôles sur leur utilisation finale.

2.2   Durée

La suspension proposée couvre la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2019.

2.3   Spécificité de cette disposition par rapport au régime appliqué antérieurement

2.3.1   Les bénéficiaires de cette mesure sont tous les acteurs économiques implantés sur le territoire des régions susmentionnées.

2.3.2   Jusqu'à tout récemment, le bénéfice de cette disposition était réservé, en vertu du règlement (CEE) 1657/93 du Conseil, aux seuls intervenants implantés dans les zones franches des Açores et de Madère. Ce texte étant venu à expiration le 31 décembre 2008 sans avoir produit les effets initialement escomptés, la Commission a décidé, à la suggestion des pouvoirs régionaux des Açores et de Madère et avec le soutien de l'État portugais, de proposer une extension de sa couverture, par l'instauration d'un nouveau règlement dont le champ d'application sera élargi à tous les acteurs économiques situés sur les territoires concernés.

2.4   Base juridique

La base juridique du règlement proposé est l'article 299, paragraphe 2, du traité instituant la Communauté européenne.

2.5   Justification de la mesure

La raison d'être du règlement proposé est de soutenir les secteurs économiques qui ne sont pas directement tributaires des ressources du tourisme, afin de compenser les fluctuations de cette industrie et, partant, de stabiliser l’emploi local.

Bruxelles, le 17 décembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


22.9.2010   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 255/61


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen et au Comité économique et social européen — Encourager la bonne gouvernance dans le domaine fiscal»

COM(2009) 201 final

(2010/C 255/11)

Rapporteur: M. BURANI

Le 28 avril 2009, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen et au Comité économique et social européen – Encourager la bonne gouvernance dans le domaine fiscal»

COM(2009) 201 final.

La section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 13 novembre 2009 (rapporteur: M. BURANI).

Lors de sa 458e session plénière des 16 et 17 décembre 2009 (séance du 17 décembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis à l'unanimité.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   La communication à l'examen représente la contribution de la Commission à la lutte contre l'évasion fiscale et les paradis fiscaux, annoncée par le G-20 et confirmée par le Conseil Ecofin et le Conseil européen. L'objectif de la bonne gouvernance en matière fiscale n'est pas nouveau: il a fait l'objet de règles concernant la coopération entre les pays de l'UE et avec les pays tiers, ainsi que l'assistance mutuelle, la fiscalité de l'épargne et le recouvrement des créances fiscales. Un code de conduite a également été adopté afin d'éviter toute concurrence fiscale dommageable. Toutes ces mesures démontrent l'importance essentielle que l'Europe attache – ce dont ses actions témoignent concrètement – à une bonne gouvernance dans le domaine fiscal.

1.2   La communication à l'examen expose les principales mesures que la Commission entend prendre, s'agissant notamment du suivi des initiatives de l'OCDE; ces mesures constituent un ensemble structuré de réglementations, de négociations et d'innovations concernant les principes directeurs de certaines politiques. Le Comité économique et social européen (CESE) marque son plein accord avec l'ensemble des mesures proposées et des réflexions de la Commission. Sur un point en particulier, celui de la cohérence entre l'aide financière accordée à de nombreux pays selon des modalités diverses et leur niveau de coopération dans le domaine fiscal, il souhaite que l'UE adopte une attitude ferme et responsable: en d'autres termes, il conviendrait de mettre fin à la politique des aides inconditionnelles, sans contrepartie.

1.3   Il serait de peu d'intérêt de passer en revue les points recueillant notre accord: cela allongerait inutilement le texte sans y apporter la moindre valeur ajoutée. Le CESE entend plutôt évoquer certaines questions de fond, qui selon lui mériteraient un examen attentif.

Dans son introduction, la Commission considère la gouvernance dans le domaine fiscal comme un moyen d'apporter une «réponse coordonnée» au blanchiment d'argent, à la corruption et au terrorisme, réaffirmant ainsi le principe d'une lutte globale contre ces phénomènes. Dans les faits toutefois, cette affirmation suscite certains doutes: la gouvernance fiscale ne peut répondre à elle seule aux nécessités de la lutte contre d'autres phénomènes ayant ou non une portée fiscale, mais dont l'origine est autre: le blanchiment en tant que produit du crime organisé, du terrorisme et de la corruption.

1.4.1   La troisième directive sur le«blanchiment» (1) considère la fraude fiscale comme une «infraction grave», qui à ce titre devrait être soumise aux dispositions de ladite directive. Dans la pratique, tel n'est pas le cas: l'évasion (ou fraude) fiscale fait l'objet de plusieurs directives spécifiques, en vertu desquelles elle échappe à la compétence et aux pouvoirs des autorités de lutte contre le blanchiment des capitaux et est du seul ressort des autorités fiscales. L'on se trouve donc confronté à un problème de chevauchement de règles, ou plutôt à la nécessité de délimiter clairement les pouvoirs et les compétences: la directive sur le «blanchiment» devrait se limiter à son objectif déclaré, en excluant les délits fiscaux et financiers lorsqu'ils n'ont pas une origine criminelle ou terroriste sous-jacente. À l'inverse, les directives fiscales devraient exclure du champ de compétence des autorités fiscales les infractions d'origine clairement criminelle ou terroriste. Il y aura certes toujours une «zone grise» à la jonction de ces deux phénomènes, mais du moins des principes de base clairs auront été établis.

1.4.2   Les directives «antiblanchiment» et les directives fiscales semblent suivre aujourd'hui deux voies distinctes. La responsabilité ne doit cependant pas en être attribuée à la Commission, mais plutôt à un morcellement des pouvoirs et des compétences: au niveau mondial, la lutte contre le blanchiment et contre le crime organisé est placée sous l'égide du GAFI (2), tandis qu'au niveau européen elle est sous la responsabilité du Conseil Justice et affaires intérieures. L'évasion fiscale est traitée par le G-20 et en Europe par le Conseil Ecofin. Dans aucun document on ne trouve la moindre allusion à la nécessité d'une coopération, d'un échange d'informations et d'un partage des tâches entre les différentes autorités. Le CESE demande qu'il soit mis bon ordre à cette situation, qui fait de la finalité de la «lutte globale» un objectif abstrait et impossible à atteindre.

1.5   Avec le problème de la lutte globale se pose celui des paradis fiscaux, qui ne retient l'attention que lorsqu'il est question d'évasion fiscale, tandis que la question de l'argent lié au crime organisé ou destiné au financement du terrorisme reste occultée. Ce phénomène ne concerne pas seulement les centres les plus connus, avec lesquels les autorités fiscales ont entamé des pourparlers, mais aussi et surtout certains centres financiers émergents, situés dans des zones dans lesquelles des considérations de nature géopolitique peuvent peser sur la disponibilité à engager des négociations.

1.6   La question des pavillons de complaisance  (3), source d'un énorme flux de capitaux parfaitement légaux mais échappant à toute fiscalité, pose un problème difficile et passé sous silence. Ces capitaux ont généralement pour destination temporaire les paradis fiscaux, dont ils repartent pour être réinvestis. Bien que discutables à certains égards, les pavillons de complaisance existent avec l'accord tacite de tous les pays. Dans la lutte contre les paradis fiscaux, il faudra veiller à éviter des retombées indésirables sur des activités légales et le détournement de capitaux vers des centres moins désireux de coopérer.

1.7   En conclusion, le CESE observe qu'en matière de lutte contre l'évasion fiscale, de même qu'en ce qui concerne les aspects financiers de la lutte contre le crime organisé et le terrorisme, l'Europe a fait et continue de faire beaucoup. Mais il souhaite attirer l'attention des législateurs sur plusieurs insuffisances: une coordination systématique entre la lutte contre l'évasion fiscale et la lutte contre la criminalité fait défaut, de même qu'une claire délimitation des tâches et des compétences respectives des autorités chargées de lutter contre ces différents phénomènes. Ces derniers présentant souvent des aspects liés à la fois à l'évasion fiscale et à la criminalité ou au terrorisme, il est difficile de les classer dans telle ou telle catégorie, ce qui constitue un argument de plus en faveur d'une coopération structurée entre les diverses autorités. Nulle part dans les programmes du Conseil et de la Commission il n'est fait mention d'une telle coopération.

2.   Le contenu de la communication

2.1   Le document de la Commission contient un ensemble de réflexions relatives à la gouvernance fiscale. Ces réflexions font écho aux résultats de plusieurs réunions: celle des pays du G-20 en novembre 2008, le Conseil Ecofin de décembre 2008, celle des ministres des finances et des gouverneurs des banques centrales du G-20 du 14 mars 2009, le Conseil européen des 19 et 20 mars 2009, et enfin le sommet du G-20 du 2 avril 2009. Des conclusions de ces rencontres émerge la volonté de prendre des mesures à l'encontre des juridictions qui ne coopèrent pas, y compris les paradis fiscaux, en appliquant des sanctions visant à protéger les finances publiques et les systèmes financiers. Comme il a été dit notamment lors du sommet du G-20, «l'ère du secret bancaire est révolue».

2.2   La communication a pour objet de définir la contribution possible de l’UE à la bonne gouvernance dans le domaine de la fiscalité directe: ce document passe en revue dans trois chapitres distincts la manière dont cette gouvernance peut être améliorée, les outils permettant de la promouvoir concrètement et le rôle que peuvent jouer les États membres à l'appui des initiatives de l'OCDE et de l'ONU, en menant des actions coordonnées au sein de l'UE et au niveau international.

2.3   La bonne gouvernance dans le domaine fiscal est un objectif que la Commission poursuit depuis longtemps par le biais de la coopération au sein de l'UE et, à une plus large échelle, grâce à la coopération avec l'OCDE dans la lutte contre le blanchiment par l'entremise des paradis fiscaux.

D'une manière générale, le cadre législatif et réglementaire de l'UE en matière de coopération fiscale peut être jugé satisfaisant: des directives en matière d'assistance mutuelle, de fiscalité de l'épargne et de recouvrement des créances fiscales ont été adoptées ou sont en cours d'examen. Reste à savoir comment et avec quelle diligence les États membres mettront ces règles communautaires en application.

2.4.1   En matière de concurrence fiscale dommageable, un «code de conduite dans le domaine de la fiscalité des entreprises» (4) a été adopté, qui a déjà permis d'atteindre des résultats encourageants, bien qu'il soit susceptible d'être encore amélioré. Ce code a été adopté par les États membres et par leurs territoires dépendants. Son extension à des pays tiers fait partie du programme de travail 2009-2010. Un thème revient de manière récurrente dans ce contexte: celui de la transparence. La Commission adopte également une position tranchée en ce qui concerne l'application des règles en matière d'aides d'État aux mesures relatives à la fiscalité directe.

La Commission a l'intention de proposer une action coordonnée des États membres afin de garantir un suivi approprié des initiatives de l'OCDE dans le domaine international, et attend pour l'instant la «mise en œuvre» des «importants engagements qui ont été pris récemment». Ces engagements portent sur deux volets: d'une part, l'OCDE souhaite démanteler les régimes fiscaux préférentiels de ses 30 pays membres et de l'autre, elle a entrepris – et entend continuer – d'exercer une pression sur les pays non membres, afin d'obtenir leur engagement politique à coopérer avec les pays de l'OCDE.

2.5.1   L'OCDE a pris contact avec de nombreux pays – le monde entier ou presque – et a déjà remporté de premiers succès: 35 pays non membres, y compris de nombreux paradis fiscaux, ont pris l'engagement politique de coopérer en matière de transparence et d'échange d'informations dans le domaine fiscal. Un certain nombre d'autres pays (5) se sont récemment engagés à respecter les règles de l'OCDE en matière d'échange d'informations sur demande, indépendamment des exigences nationales et du secret bancaire.

S'agissant de la politique internationale, l'action de la Commission vise à la conclusion avec plusieurs pays (6) d'accords concernant des pratiques de bonne gouvernance dans le domaine fiscal. De manière plus structurée, le Conseil Ecofin de mai 2008 a demandé qu'une disposition concernant cette bonne gouvernance soit incluse dans les accords conclus entre la Communauté et les pays tiers. En décembre de la même année, cette disposition a acquis un caractère encore plus contraignant avec l'exhortation à faire preuve de plus de détermination dans la lutte contre les paradis fiscaux et contre les juridictions refusant de coopérer.

2.6.1   En matière de fiscalité de l'épargne, la Commission a obtenu que certains pays tiers (7), ainsi que les territoires dépendants ou associés des États membres (dont certains étaient auparavant répertoriés comme paradis fiscaux) appliquent des mesures identiques ou équivalentes à celles des directives communautaires. Des pourparlers exploratoires sont en cours avec d'autres pays (8), mais des négociations formelles n'ont pas encore été engagées.

2.6.2   Diverses négociations sont actuellement menées avec les pays de l'Espace économique européen (EEE) (9) et avec la Suisse. Les pays EEE appliquent directement les principes du marché intérieur, tandis que des «règles équivalentes» sont en vigueur pour les aides d'État. Les relations avec la Suisse sont régies par l'accord de libre-échange de 1972, mais certains aspects ont été récemment remis en discussion. Des tractations sont engagées avec le Liechtenstein en vue d'arrêter un nouvel accord sur la lutte antifraude. En fait, une évolution est en cours dans tout ce domaine.

2.6.3   Les principes de transparence, de coopération et d'échange d'informations ont été inscrits dans les plans d'action et dans les accords conclus avec de nombreux pays dans le cadre de la politique européenne de voisinage et de la politique d'élargissement. La Commission s'efforce d'étendre ces principes à de nombreux pays tiers: les premiers contacts semblent prometteurs en ce qui concerne certains pays, mais il faudra définir la position à adopter vis-à-vis des pays qui se sont jusqu'ici montrés réticents.

2.6.4   Une attention particulière est accordée aux négociations avec les pays en voie de développement (PVD). Alors que certains affichent un esprit d'ouverture, d'autres opposent une résistance qu'il conviendra de surmonter, éventuellement en subordonnant les financements prévus par l'IEVP (Instrument européen de voisinage et de partenariat) et par le 10e FED (Fonds européen de développement) à l'acceptation des règles de bonne gouvernance dans le domaine fiscal.

2.7   La communication consacre un chapitre spécifique à la présentation des initiatives en cours: des initiatives internes, à savoir les directives mentionnées au paragraphe 2.4, et externes, pour donner un suivi pratique aux actions visées au paragraphe 2.5. Il est à noter que la Commission demande à juste titre que le Conseil lui accorde une latitude suffisante en matière de négociation, condition indispensable pour adapter la politique générale aux besoins propres à chaque pays. L'accent est mis sur les mesures d’incitation en matière de coopération au développement, à utiliser vis-à-vis des pays récalcitrants afin de les encourager à se montrer plus ouverts (voir ci-dessus, paragraphe 2.6.4).

2.8   La Commission conclut en attirant l'attention du Conseil sur l'importance des mesures proposées et sur la nécessité de garantir une transposition rapide au niveau national des directives déjà adoptées, d'accélérer la procédure pour celles qui sont en cours d'examen, d'appliquer des politiques plus cohérentes et mieux coordonnées au niveau de l'UE et enfin d'assurer une plus grande cohérence entre les positions des différents États membres et les principes établis en matière de bonne gouvernance.

3.   Observations et commentaires

3.1   Le CESE accueille très favorablement la communication de la Commission. En effet, il était plus que temps de définir une ligne d'action et de conduite dans le domaine complexe de la lutte contre l'évasion fiscale, dans le cadre d'une bonne gouvernance en matière fiscale. Le Comité ne peut que donner son appui et son plein accord aux différents points évoqués et aux mesures proposées par la Commission. Il estime par ailleurs devoir attirer l'attention sur certains problèmes de fond et d'autres aspects de moindre importance, qu'il convient selon lui d'examiner avec soin.

La Commission soulève la question de la cohérence entre le soutien financier de l'UE à certains pays et leur niveau de coopération en ce qui concerne les principes de bonne gouvernance dans le domaine fiscal (voir ci-dessus, paragraphe 2.7). La possibilité est évoquée de prendre «les mesures appropriées» lors de la prochaine évaluation à mi-parcours du Fonds européen de développement (FED) et d'introduire des mesures spécifiques dans l'accord de Cotonou (10). Ces mesures pourraient consister à réduire les aides allouées aux pays qui ne coopèrent pas et à proposer des incitations, sous forme d'assistance technique et de fonds supplémentaires, à ceux qui s'efforcent de respecter leurs engagements.

3.2.1   Il est donc proposé d'introduire dans la politique communautaire de soutien à d'autres pays le principe selon lequel les aides doivent être méritées, en ce sens que les pays concernés doivent démontrer concrètement leur volonté de coopérer, y compris – mais pas seulement – dans le domaine fiscal. Le CESE estime que les actes établissant les modalités d'octroi des aides doivent contenir une clause explicite en ce sens. Il convient d'imprimer un tournant radical et manifeste à la politique d'octroi de fonds, qui doit devenir un moyen de favoriser un processus tangible et contrôlable d'évolution morale, sociale et économique. Les gouvernements corrompus ne sont pas sensibles aux sollicitations de coopération: la seule façon de les convaincre est de menacer leurs intérêts. Il reste à savoir dans quelle mesure la politique proposée par la Commission pourra être mise en pratique, car des freins de nature politique et sociale pourraient peser de manière déterminante sur son application.

La déclaration initiale de la Commission, qui considère la bonne gouvernance en matière fiscale comme un moyen d'apporter une «réponse coordonnée» aux problèmes liés au blanchiment d'argent, à la corruption et au terrorisme, appelle certaines autres considérations. La communication réaffirme ainsi l'idée, évoquée à plusieurs reprises et partagée par le CESE, selon laquelle seule une lutte globale permettra de mettre en œuvre une stratégie de protection de la société contre les infractions financières de tous types, qu'elles soient de nature criminelle, terroriste ou fiscale.

3.3.1   Toutes les mesures évoquées par la Commission dans sa communication sont pertinentes du point de vue de la gouvernance fiscale. Mais le CESE relève l'absence de référence claire et systématique à une stratégie globale. Les actions en cours ou prévues dans le domaine fiscal devraient aller dans le même sens que celles en matière de blanchiment et de lutte contre la corruption, le crime organisé et le terrorisme et être en adéquation avec celles-ci. Il conviendrait au préalable d'éliminer certaines zones d'ombre et les incohérences constatées entre les directives fiscales et les directives «antiblanchiment».

Les directives relatives à la lutte contre la fraude fiscale ne font pas référence aux dispositions de la troisième directive sur le blanchiment de capitaux  (11), en dépit du fait que cette dernière inclue également parmi les«infractions graves» la fraude fiscale (ou du moins certains de ses aspects) (12). Cela amène donc à se demander si les dispositions de la directive sur le blanchiment de capitaux s'appliquent au domaine fiscal, en particulier en ce qui concerne les obligations de déclaration, le rôle des CRF (13), l'intervention de tiers, parmi lesquels les professions libérales (14). La réponse à cette question est en tout état de cause négative: dans les directives «fiscales», la lutte contre la fraude est confiée aux seules autorités fiscales, il n'est pas fait mention des compétences des CRF ou de liens avec ces dernières, et les dispositions de la directive «antiblanchiment» ne sont pas non plus prises en considération.

3.4.1   L'on constate donc l'existence dans les directives communautaires d'une discordance entre les aspects réglementaires et les aspects pratiques. Dans les faits, bien qu'il soit théoriquement possible de les définir, les limites entre la fraude fiscale et le blanchiment d'argent d'origine criminelle peuvent apparaître floues voire inexistantes: la fraude à la TVA par exemple peut être envisagée comme de la contrebande (blanchiment) ou comme une fraude fiscale, et peut mettre à jour l'implication d'entreprises apparemment «normales» dans le trafic de drogue, d'armes, etc. La corruption implique toujours une évasion fiscale, mais souvent elle recouvre des infractions beaucoup plus graves et d'une autre nature. Les transferts d'argent fiscalement «douteux» peuvent dissimuler des activités terroristes. Cela peut donner lieu à de multiples problèmes d'interprétation et conflits de compétence éventuels.

3.5   Toute la question doit donc être repensée et revue de manière systématique: il convient de ramener la directive sur le blanchiment d'argent à son objectif déclaré, à savoir la lutte contre le crime organisé et le terrorisme, en excluant expressément les infractions fiscales et financières lorsqu'elles n'ont pas une origine criminelle ou terroriste sous-jacente. Par ailleurs, les directives fiscales devraient exclure de la compétence des autorités fiscales toutes les infractions de nature clairement criminelle ou terroriste. En dehors de toute échelle de valeurs, la lutte contre la criminalité et le terrorisme a une portée politique et sociale encore supérieure à celle de la lutte contre l'évasion fiscale. Ces deux domaines sont d'ailleurs étroitement liés, non seulement en raison des incertitudes déjà évoquées concernant leur délimitation, mais aussi lorsqu'il s'agit de concrétiser le concept de«lutte globale», qui implique une obligation de coopération et d'échange d'informations entre les différentes autorités. Cette nécessité de coopération est il est vrai évoquée dans une communication de 2004 (15), mais elle n'est mentionnée dans aucune directive.

3.6   Le morcellement des compétences, ou leur chevauchement, reflètent la répartition des pouvoirs au niveau du Conseil: les problèmes d'évasion fiscale et de paradis fiscaux sont traités par le Conseil Ecofin, ceux de la lutte contre la criminalité et le terrorisme par le Conseil Justice et affaires intérieures. Les mêmes subdivisions se retrouvent du reste au niveau mondial: le G-20 et le GAFI (16) semblent appartenir à des mondes distincts. Au sein de l'OCDE, il existe un lien, mais uniquement à l'échelon central: au niveau national, ses interlocuteurs diffèrent selon les compétences ministérielles.

Les déclarations officielles laissent à penser qu'il existe une volonté politique de mener une lutte globale efficace. Mais les solutions pratiques paraissent encore lointaines, à moins d'une claire prise de conscience du problème aux plus hauts niveaux politiques et financiers. Un examen préliminaire de certaines questions de fond doit néanmoins être entrepris en priorité et sans plus attendre. Parmi celles-ci figure bien entendu l'évaluation du phénomène des paradis fiscaux  (17) dans sa globalité. Grâce à l'action de l'OCDE et de la Commission, de nombreux «paradis» ont accepté dernièrement de contribuer à la lutte contre l'évasion fiscale (18), en supprimant ou en atténuant le secret bancaire, de sorte que plus aucun pays ne figure sur la «liste noire» (19). L'avenir proche dira si et dans quelle mesure ces promesses auront été tenues.

3.7.1   Les différentes listes ne sont toutefois pas exhaustives, ou du moins elles comportent une marge d'incertitude. Un certain manque de transparence semble caractériser les centres financiers émergents, dont certains présentent, ou pourront présenter dans le futur, les caractéristiques de «refuge» – si ce n'est de «paradis» – fiscal ou autre: c'est le cas de certains pays du Sud-Est asiatique, des pays du Golfe, mais dans une certaine mesure aussi de l'Inde, de Singapour, de la Chine (Hong Kong n'étant que le bastion avancé de la finance chinoise). Bien que la question du financement du terrorisme figure parmi les clauses «standard», les négociations la survolent fréquemment, car ce financement transite par des canaux nullement désireux de se manifester, et encore moins de négocier. Ces problèmes, parmi d'autres, sont tellement sensibles que la discrétion qui les entoure est compréhensible, mais ils ne sauraient pour autant être ignorés.

3.7.2   D'autres aspects ne sont pas non plus évoqués, tels que le trafic d'armes, dans le cadre duquel les armes sont souvent vendues légalement et avec les autorisations officielles requises. Ce trafic alimente ensuite par des voies secrètes les guerres et le terrorisme dans de nombreux pays et il est souvent financé avec les recettes provenant du trafic de drogue. Le tout génère un flux d'argent considérable qui semble disparaître dans un «trou noir» insondable. Ce phénomène est bien connu, mais on ne saurait l'endiguer au moyen de directives, d'accords ou d'ententes: il est d'une tout autre nature et doit être traité dans le cadre de la politique internationale.

3.7.3   Il convient en conséquence de s'attaquer au problème des paradis fiscaux dans son ensemble, tout en gardant à l'esprit les considérations géopolitiques qui conditionnent sa résolution. S'agissant des possibilités pratiques, la lutte contre l'évasion fiscale et le blanchiment (mais surtout le terrorisme) doit être dans la mesure du possible globale, sachant qu'une victoire globale est encore loin d'être acquise. Mais avant tout, il faut veiller à prévenir le détournement d'activités de centres connus vers d'autres moins connus, voire hostiles ou moins disposés à négocier. La crise actuelle accélère l'évolution progressive des rapports de force entre les centres financiers mondiaux: l'Asie et le monde islamique sont les nouvelles puissances émergentes, dont la logique et le comportement ne coïncident pas nécessairement avec ceux prévalant traditionnellement dans le monde occidental.

Un autre problème, lié d'une certaine façon à celui des paradis fiscaux, concerne les pavillons de complaisance (en anglais FOC, «flags of convenience»), sous lesquels sont immatriculés 63 % des navires de la marine marchande mondiale et un nombre important de grands navires de plaisance: ces pavillons ont le plus souvent leur siège dans des paradis fiscaux où ils génèrent un important afflux de fonds d'origine parfaitement légale, bien qu'exonérés ou presque de toute fiscalité. Parmi les pays abritant de tels registres figurent également certains pays membres de l'UE. Les flottes naviguant sous pavillon de complaisance opèrent dans des conditions de concurrence privilégiées par rapport à celles arborant des pavillons nationaux, et les revenus générés par les redevances de fret échappent à la fiscalité «officielle», sans pour autant constituer une fraude. Qui plus est, ces flottes ne sont pas soumises aux obligations liées aux conventions collectives des gens de mer.

3.8.1   Aucune mesure fiscale n'est envisagée en ce qui concerne les pavillons de complaisance, ce non seulement en raison de l'absence de base légale pour une quelconque intervention, mais aussi parce que des mesures répondant à des considérations purement fiscales risqueraient entre autres choses de porter atteinte à une activité économique vitale pour le monde entier et de tarir un important flux d'investissements dans l'économie mondiale. Indépendamment de strictes considérations d'ordre moral, les pavillons de complaisance faussent la concurrence et ne respectent pas les conventions collectives, ce avec l'accord tacite, ou l'acceptation tacite, des gouvernements du monde entier. Au niveau communautaire, les seules dispositions les concernant sont celles relatives à la sécurité maritime et à la réglementation du trafic.

3.8.2   Ces aspects sont évoqués afin de montrer que l'argent qui afflue dans les paradis fiscaux et qui en ressort pour être investi dans les centres financiers mondiaux (20) ne relève pas entièrement de l'évasion fiscale, du blanchiment ou du financement du terrorisme. Dans cet esprit, il convient d'approuver les mesures proposées par le G-20 et développées par la Commission dans le domaine fiscal: elles doivent également porter sur les questions relatives au blanchiment de capitaux et au terrorisme, tout en veillant à éviter des retombées indésirables sur des activités et des flux financiers licites ou du moins non illégaux.

3.8.3   Obtenir des paradis fiscaux qu'ils fassent preuve de transparence et d'esprit de coopération représenterait un succès historique. Les zones d'opacité qui subsistent, et qui probablement demeureront, démontrent qu'au delà des grands principes, il convient de viser des objectifs raisonnables même s'ils ne sont pas optimaux. Il apparaît nécessaire en dernière analyse que les initiatives dans le domaine financier et fiscal soient guidées et contrôlées par les pouvoirs politiques dans le cadre des stratégies qui sont les leurs en matière de relations internationales. Dans ce dernier domaine, l'Union européenne a besoin d'une politique commune, objectif que les gouvernements devraient considérer comme prioritaire mais qui, en l'état actuel des choses, semble encore lointain.

Bruxelles, le 17 décembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Directive 2005/60/CE relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme, JO L 309 du 25.11.2005.

(2)  Groupe d'action financière, émanation de l'OCDE.

(3)  Un navire bat pavillon de complaisance (FOC, «flag of convenience», selon la dénomination anglaise usuelle) lorsqu'il est immatriculé dans un pays présentant une réglementation minimale dans le but de réduire les coûts d'exploitation ou d'échapper aux réglementations lourdes. La Fédération internationale des ouvriers du transport a dressé une liste de 32 «registres» qu'elle considère comme étant des pavillons de complaisance.

(4)  Adopté par le Conseil ECOFIN du 1er décembre 1997.

(5)  Notamment la Suisse, l'Autriche, la Belgique, le Luxembourg, Hong Kong, Macao, Singapour, le Chili, Andorre, le Liechtenstein et Monaco.

(6)  Pays des Caraïbes, îles du Pacifique.

(7)  Suisse, Liechtenstein, Saint-Marin, Monaco et Andorre.

(8)  Hong Kong, Macao et Singapour.

(9)  Islande, Liechtenstein et Norvège.

(10)  Accord de partenariat entre les pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique d'une part, et l'UE et ses États membres d'autre part, signé à Cotonou le 23.6.2000.

(11)  Directive 2005/60/CE relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme, JO L 309 du 25.11.2005, p. 15, connue sous l'appellation usuelle de 3e directive sur le blanchiment de capitaux (en anglais, Money Laundering Directive ou MLD).

(12)  Cf. l'art. 3, par.5, lettre d), de la directive sur le blanchiment de capitaux: «on entend par …» infraction grave «… la fraude, …, telle que définie à l'article 1er, paragraphe 1, et à l'article 2 de la convention relative à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes»: l'évasion fiscale, du moins en matière de TVA, est donc expressément incluse dans les infractions couvertes par la directive sur le blanchiment de capitaux.

(13)  Cellule de renseignement financier, cf. art. 21 de la directive sur le blanchiment de capitaux.

(14)  Cf. art. 2, par. 3 de la directive sur le blanchiment de capitaux.

(15)  Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen - Prévenir et combattre les malversations financières et pratiques irrégulières des sociétés, COM(2004) 611 final.

(16)  GAFI: Groupe d'action financière, émanation de l'OCDE.

(17)  Il est intéressant de noter que l'expression anglaise «fiscal haven» a été traduite dans la plupart des langues par «paradis fiscal». La différence entre «haven» (refuge) et «heaven» (paradis) ne semble pas imputable à une simple erreur de traduction: elle exprime une différence de mentalité.

(18)  En fait, les accords conclus avec les paradis fiscaux incluent une «clause standard» concernant le crime organisé et le terrorisme, mais l'aspect «fiscal» reste prédominant.

(19)  Il existe deux autres listes, «gris clair» et «gris foncé», suivant le degré de coopération affiché.

(20)  Selon les calculs, 35 % des flux financiers mondiaux transitent par les paradis fiscaux. L'on ignore toutefois sur quelles bases ces calculs se fondent.


22.9.2010   

FR

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C 255/66


Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions sur «Un nouveau partenariat pour la modernisation des universités: le Forum européen pour le dialogue université-entreprise»

COM(2009) 158 final

(2010/C 255/12)

Rapporteur: M. BURNS

Le 2 avril 2009, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions sur «Un nouveau partenariat pour la modernisation des universités: le Forum européen pour le dialogue université-entreprise»

COM(2009) 158 final.

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a élaboré son avis le 15 octobre 2009 (rapporteur: M. BURNS).

Lors de sa 458e session plénière des 16 et 17 décembre 2009 (séance du 17 décembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 60 voix pour, 12 voix contre et 11 abstentions.

1.   Recommandations

1.1   Le CESE considère que l'utilisation du terme «université» appliqué à toutes les institutions d'enseignement supérieur, sans tenir compte de leur dénomination ni de leur statut dans les États membres, porte à confusion. Le fait de favoriser les partenariats entre les institutions de l'enseignement supérieur et les entreprises nécessite au contraire de bien distinguer les disciplines pour lesquelles un tel partenariat est pertinent et de laisser les deux parties libres de juger de son caractère mutuellement avantageux. C'est pourquoi le CESE propose d'utiliser le terme «institutions d'enseignement supérieur», terme plus général, et par conséquent, de l'utiliser dans le titre du Forum.

1.2   La communication de la Commission européenne, ainsi que les forums de l'UE pour le dialogue entre les universités ou les institutions d'enseignement supérieur et les entreprises devraient focaliser leur attention sur une coopération et une intervention bien ciblées, ce qu'il convient d'analyser correctement à l'avance notamment dans le contexte de la crise actuelle qui ne permet pas de savoir avec certitude si les entreprises auront la possibilité d'investir directement dans les futurs diplômés (avec une vision à plus long terme). Les forums devraient servir à formuler l'intérêt général à long terme dans les domaines de l'éducation et de l'évolution du marché du travail.

1.3   La consultation des partenaires sociaux et des représentants de la société civile est à cet égard souhaitable. L'engagement au côté des entreprises et la création de forums doit avoir un sens et non devenir un mécanisme sans grande valeur outre la collecte de davantage de fonds destinés au financement des activités actuelles des universités. Ce processus d'engagement et de création de forums ne doit pas non plus devenir un instrument permettant aux entreprises de «dominer» les institutions d'enseignement supérieur.

1.4   Le CESE plaide pour l'instauration d'un partenariat plus équitable entre universités et entreprises, dans le cadre duquel les deux parties seraient encouragées à devenir des «moteurs» de changement et apporteraient de précieuses contributions, et reconnaîtraient leurs différences respectives en matière d'objectifs et de missions sociales, tout en identifiant et en mettant à profit les thèmes et les points de convergence pouvant donner lieu à une coopération (1).

1.5   S'agissant de l'apprentissage tout au long de la vie, il convient de mener une recherche empirique afin de déterminer clairement les tâches incombant aux entreprises et de définir des résultats à atteindre avant que les forums ne développent des objectifs en matière d'enseignement et de formation professionnels.

1.6   Les entreprises doivent assumer une responsabilité dans la définition des résultats concernant ce qui est réalisé, ou devrait l'être, sur le lieu de travail et en prenant en compte les besoins de formation des employés tout au long de leur vie.

1.7   L'accès aux programmes d'apprentissage tout au long de la vie ne devrait pas être lié à des prestations universitaires antérieures ou à l'obtention de qualifications spécifiques. Cet apprentissage doit se fonder sur les besoins du travailleur et du lieu de travail. Toute formation se déroulant sur le lieu de travail devrait être basée sur les résultats. L'obtention de qualifications ne devrait pas constituer le principal objectif de l'apprentissage tout au long de la vie.

1.8   Dans l'entreprise, rien ne remplace l'expérience pratique. Les forums devraient dès lors avancer des propositions de solutions permettant aux universitaires d'acquérir une expérience validante pratique dans de grandes comme dans de petites entreprises. Il existe déjà de nombreuses expériences dans ce domaine et il convient d'analyser les exemples de bonnes pratiques.

1.9   Il importe d'encourager les PME et les microentreprises à être plus actives dans les forums.

1.10   Il y a lieu de définir plus concrètement les PME dans le cadre des travaux des forums. Nous suggérons:

Catégorie d'entreprises

Membres du personnel

Moyenne

<100

Petite

<20

Micro

<5

2.   Aperçu du contexte

2.1   L'éducation et la formation ont été identifiées comme des facteurs cruciaux dans l'accomplissement des objectifs généraux de la stratégie de Lisbonne. Si la société européenne veut survivre et rester concurrentielle au sein de la nouvelle économie mondiale, ses citoyens doivent faire preuve d'un plus grand esprit d'entreprise. À cette fin, il convient de s'atteler à la modernisation des systèmes éducatifs européens et de reconnaître le rôle moteur de premier plan des universités et des entreprises dans ce processus.

2.2   Il existe déjà des partenariats entre de grandes entreprises multinationales et des universités, ainsi qu'entre des organismes de recherche et des entreprises. Les initiatives technologiques communes, les plates-formes technologiques européennes, les pôles d'excellence ainsi que l'Institut européen d'innovation et de technologie récemment créé constituent quelques beaux exemples des nouvelles formes de collaboration et de partenariat. Malheureusement, de semblables partenariats entre institutions d'enseignement supérieur et microentreprises ou PME ne sont pas encore suffisamment développés.

2.3   De nouveaux axes de recherche sont nécessaires afin de mieux connaître le monde de l'enseignement supérieur en mutation et le rôle des universitaires. Alors qu'on octroie aux universités un rôle central dans la construction d'une société européenne basée sur la connaissance, des études récentes ont montré que nos attentes par rapport aux universités sont de plus en plus grandes et que ces établissements font face à des pressions de plus en plus difficiles à gérer. En effet, on leur demande de développer davantage la recherche, d'être compétitives et rentables tout en dispensant un enseignement plus individualisé à un nombre croissant d'étudiants et en maintenant des normes universitaires élevées. La mission de l'université est donc brouillée et celle-ci court le risque de perdre son rôle dans la production et la diffusion de la connaissance (2).

2.4   La communication de mai 2006 sur la modernisation de l’enseignement supérieur (3) préconise une contribution des entreprises dans trois domaines:

gouvernance: le monde universitaire devrait intégrer des modèles de gestion d’entreprise;

financement: les entreprises pourraient contribuer au soutien financier apporté à la formation et à la recherche;

cursus: l'enseignement dispensé doit préparer les étudiants au monde du travail d'aujourd'hui et de demain. Les entreprises doivent s'investir dans ce processus et proposer des stages qui aideront les étudiants à réussir leur transition entre les études et la vie active. Il convient également d'encourager les entreprises à permettre à leurs salariés de se perfectionner et de mettre à niveau leurs compétences tout au long de leur vie professionnelle.

2.5   En 2008, la Commission a organisé un forum université-entreprise afin de soutenir la coopération entre les entreprises et les universités en vue d'aider ces dernières à répondre mieux et plus rapidement à ce que demandent les marchés et de développer des partenariats pour l’exploitation de la connaissance scientifique et technologique.

2.6   Établissements de l'enseignement supérieur, entreprises, associations professionnelles, intermédiaires et pouvoirs publics étaient représentés au sein de cette structure, qui a facilité les discussions sur l'échange de bonnes pratiques, le débat sur des problèmes communs et la recherche conjointe de solutions.

3.   Contenu essentiel de la proposition de la Commission

3.1   La Commission reconnaît la nécessité d'améliorer la coopération entre les universités et les entreprises. Dès lors, des mesures s'imposent afin de soutenir les États membres dans leurs efforts de modernisation de leurs systèmes d'enseignement supérieur.

3.2   La présente communication a pour objectifs:

de faire le point sur les enseignements de la première année du forum et d’autres activités pertinentes organisées au niveau européen concernant les problèmes et les obstacles rencontrés dans la coopération entre les universités et les entreprises. Un document de travail des services de la Commission développe cet aspect des travaux;

de formuler des propositions pour les prochains travaux du forum;

de définir des actions de suivi concrètes pour renforcer la coopération entre les universités et les entreprises.

3.3   Les conclusions principales du rapport qui auront une influence sur le travail du forum sont les suivantes:

le développement d'une culture entrepreneuriale au sein des universités requiert de profonds changements dans la gouvernance et la direction des universités;

la formation à l’entrepreneuriat doit être large et ouverte à tous les étudiants intéressés, dans toutes les disciplines universitaires;

les universités devraient associer les chefs d'entreprise ainsi que des hommes et des femmes d’affaires à l’enseignement de l’entrepreneuriat;

les professeurs et les enseignants devraient avoir l’occasion de se former à enseigner les techniques entrepreneuriales et être confrontés au monde des affaires;

les universités et les organismes publics de recherche devraient définir des stratégies claires, à longue échéance, pour la gestion des droits de propriété intellectuelle;

les difficultés particulières auxquelles sont confrontées les PME qui souhaitent nouer des partenariats avec les universités doivent être traitées;

l’éducation et la formation tout au long de la vie doivent faire partie intégrante des missions et des stratégies des universités;

l’actualisation ou la mise à niveau des compétences doivent être valorisées et reconnues par les employeurs sur le marché du travail;

l’offre d'éducation et de formation tout au long de la vie doit être développée en partenariat avec les entreprises, les universités ne pouvant la concevoir et la concrétiser seules;

les conditions-cadres nationales et régionales doivent créer un environnement propice à la coopération entre les universités et les entreprises;

la coopération universités-entreprises doit s’inscrire dans des stratégies institutionnelles; l’encadrement et la gestion efficace des ressources humaines sont indispensables à la mise en œuvre de cette coopération.

3.4   En vue de faciliter le débat à propos des objectifs susmentionnés, la Commission entend offrir au forum pour le dialogue université-entreprise une structure renforcée sous forme de réunions plénières et de séminaires thématiques. Une présence sur la toile est recommandée: elle permettra notamment de stimuler la participation d'autorités nationales et régionales et de contributeurs extérieurs à l'UE.

3.5   S'appuyant sur les résultats du forum, la Commission prévoit d'explorer de nouvelles formes de partenariat structuré entre les universités et les entreprises, en particulier les PME, et d'examiner comment ces partenariats pourraient être soutenus au travers de programmes européens. La Commission se penchera également sur la question de savoir si la portée du dialogue avec les entreprises peut être étendue à d'autres secteurs de l’éducation et de la formation.

4.   Observations/commentaires généraux du CESE

4.1   Le CESE se félicite des efforts de la Commission européenne visant à améliorer les relations entre les institutions d'enseignement supérieur et les entreprises. Il craint toutefois que le contenu de cette communication ne fasse que confirmer les critiques détaillées dans les précédents documents et qu'elle ne tire la même conclusion: «Nous avons un problème et il faut faire quelque chose pour y remédier». Néanmoins, le Comité se déclare préoccupé par le fait que, là où la Communication de la Commission propose certaines mesures pour améliorer la coopération entre les institutions de l'enseignement supérieur et les entreprises, elle opte pour une approche unilatérale. Par exemple: «les universités devraient adopter les structures managériales des entreprises, faciliter l'implication directe des praticiens en leur sein et introduire la formation à l'entrepreneuriat, etc». (voir point 3.3).

4.2   Le CESE est préoccupé par le fait que l'approche adoptée dans la communication soit trop académique et ses recommandations trop vagues et sujettes à interprétation. L'utilisation du terme «université» appliqué à toutes les institutions d'enseignement supérieur, sans tenir compte de leur dénomination ni de leur statut dans les États membres, porte à confusion. Des institutions d'enseignement supérieur différentes proposent des services différents aux entreprises. Les institutions enseignant des compétences offrent dès lors des produits différents de ceux que proposent les institutions distillant un savoir plus théorique. Par exemple, la fonction primaire des universités classiques où dominent les sciences humaines et sociales ainsi que la recherche fondamentale consistent à produire le savoir et à entretenir la continuité culturelle.

4.3   La plupart des employeurs comprennent le clivage traditionnel entre les universités et les autres formes d'enseignement supérieur. Ils attendent des universités qu'elles forment les étudiants afin qu'à l'obtention de leur diplôme, ces derniers soient arrivés à une compréhension approfondie de leurs sujets. Ils considèrent les diplômes davantage comme une indication du potentiel d'un étudiant plutôt que comme un certificat de compétence, tandis qu'ils attendent que les qualifications professionnelles et de l'enseignement supérieur indiquent une certaine compétence dans la réalisation de tâches données. La communication à l'examen et le document de travail de référence des services de la Commission ne contribuent à clarifier aucune de ces questions.

4.4   Le CESE est conscient des problèmes que comporte ce que l'on appelle la corporatisation des universités. Il estime qu'importer tels quels des procédures et des processus éducatifs des États-Unis en Europe ne donnera aucun résultat. Les universités européennes doivent trouver un nouveau moyen de travailler avec les entreprises et d'améliorer les services, les qualifications et les performances qu'elles ont à offrir, sans que cela nuise à leur capacité de recherche fondamentale qui est primordiale pour la survie de l'Union dans la compétition mondiale.

4.5   Dans le climat économique actuel, l'ensemble des institutions d'enseignement supérieur d'Europe doivent s'axer davantage sur le client et être plus conscientes de leur rapport coûts/bénéfices pour la société. Pour assister les institutions d'enseignement supérieur dans ce nouveau rôle, les forums universités-entreprises devraient s'imposer comme des partenaires idéaux. Il convient cependant de définir la notion de «client», et ce du point de vue à la fois de l'intérêt général, des employeurs et de celui de chaque étudiant.

4.6   Ce changement dans les priorités aura des implications financières pour les universités. La mesure dans laquelle le marché devrait déterminer les priorités de l'université est un facteur crucial qui mérite d'être étudié avec soin. Mettre l'accent exclusivement sur la compétitivité et considérer l'orientation vers l'entreprise comme une norme absolue pourraient notamment se traduire par une compression des programmes et une réduction des domaines de recherche. Cette tendance se manifeste dans le déclin des disciplines classiques observé à l'échelle du monde. Ce processus (4) ne concerne pas seulement les études littéraires mais également les disciplines scientifiques classiques telles que la chimie, la physique et les mathématiques, ainsi que l'économie et d'autres sciences sociales.

4.7   Dans sa communication, la Commission déclare que «l’Europe aspire à devenir la première économie et société de la connaissance du monde» et que toute recommandation en la matière a pour objectif principal de faire des universités européennes «les moteurs de cette ambition». Tout en reconnaissant qu'il s'agit d'un objectif tout à fait louable, il apparaît préoccupant que seules les universités sont identifiées comme les «moteurs». Le CESE préférerait l'instauration d'un partenariat équitable entre entreprises et universités, dans le cadre duquel les deux partenaires reconnaîtraient leurs forces et leurs faiblesses et assureraient dans une même mesure le rôle de moteur du changement. Les entreprises apporteraient l'expérience pratique et la connaissance du marché, les universités fournissant le contenu et le soutien intellectuels. Le CESE rappelle cependant que le «moteur» de cette ambition européenne est également constitué de nombreux autres facteurs et non des seules entreprises et institutions d'enseignement supérieur. Il convient de reconnaître cette ambition dans nombre de politiques européennes et nationales, et en particulier dans le soutien de la société à l'éducation et à la lutte contre le chômage.

4.8   Le CESE reconnaît la nécessité de faire correspondre ce qui est enseigné avec l'employabilité et accueille favorablement les références aux «résultats» dans le document de travail (5.2/5.2.3/5.5.5) mais continue de penser que ce ne peut être le seul rôle de l'université. Cependant, le CESE s'inquiète de la manière dont ces résultats seront définis et par qui, et comment l'enseignement, la formation et les qualifications professionnels seront insérés dans le schéma final des formations et qualifications universitaires et professionnalisantes. Le CESE estime que la définition de ces résultats est cruciale afin de faire correspondre les qualifications et les besoins des employeurs, en particulier en ce qui concerne les PME et les microentreprises, mais observe que compte tenu de la durée d'une formation face à l'évolutivité des marchés du travail européens qui ne sont pas harmonisés, la coïncidence entre formation et emploi dans l'entreprise sera difficile à atteindre. En ce qui concerne les spécialités étroitement liées à la réalité des entreprises, les universités doivent permettre aux étudiants et/ou aux diplômés de répondre aux nouvelles exigences d'un monde économique en mutation en leur transmettant les connaissances théoriques appropriées.

4.9   L'apprentissage tout au long de la vie est important à la fois pour les entreprises et les citoyens, mais la communication ne traite nullement de la problématique de l'égalité d'accès. Cette question constitue un problème grave, particulièrement en ce qui concerne les citoyens sans diplôme universitaire. Il est évident qu'en l'absence de recommandation spécifique, les titulaires d'un diplôme universitaire bénéficieront de davantage d'aide et de formation, tandis que les autres ne pourront accéder ni à l'université, ni à aucun programme universitaire d'apprentissage tout au long de la vie.

4.10   Dans les propositions, il semblerait que l'on parte du principe que la Commission sera à même de préciser les domaines où il existe un déficit de compétences au travers de simples réunions avec des employeurs et le monde universitaire. Il est paradoxal que, tout en s'efforçant de promouvoir la recherche scientifique, la Commission évite de recommander la moindre application de techniques scientifiques visant à établir avec précision les domaines où les compétences font défaut et à déterminer quels types d'enseignement et de formations doivent être dispensés afin de combler ces déficits. La création d'institutions (par exemple des associations) dans les universités, en collaboration avec les entreprises, permettrait de définir quels sont, dans la pratique, les besoins en matière de qualifications des diplômés, de manière à ce que ceux-ci puissent mieux répondre aux exigences de l'économie; en outre, ces institutions peuvent contribuer au placement des diplômés dans les entreprises.

4.11   Ce déficit de données est particulièrement important en ce qui concerne l'apprentissage tout au long de la vie. Il y a lieu de procéder à une recherche empirique afin d'identifier clairement les tâches dont se chargent les entreprises et celles qui doivent être réalisées. Une fois ces tâches identifiées, il convient de s'attacher à mettre en place la formation et les qualifications connexes afin de parvenir aux résultats recherchés. Du fait de l'aspect pratique de la définition des résultats des entreprises, il est essentiel que celles-ci jouent le rôle qui leur revient dans le processus de développement et identifient ces objectifs. L'information des intéressés sera cruciale. Par exemple, quand on sait qu'un secteur est fortement demandeur d'emploi, comme celui des métiers de la mer, il faudrait que les «étudiants» potentiels soient informés des universités (nationales ou européennes) où on forme à ces métiers, très variés, et pour certains, très qualifiés.

4.12   Le point 2 de la communication de la Commission déclare que «la coopération entre les universités et les entreprises met en présence deux communautés à la culture, aux valeurs et aux missions très différentes». Il poursuit en détaillant la manière dont des partenariats entre ces deux communautés ont été instaurés, avant d'admettre que «le niveau de coopération reste très inégal entre les pays, les universités et les disciplines. En outre, l’incidence de cette coopération sur la gouvernance ou la culture organisationnelle dans les deux secteurs concernés reste limitée. Peu d’universités possèdent une stratégie globale de coopération avec les entreprises, et celles qui peuvent s’en prévaloir se concentrent dans une poignée d’États membres».

4.13   Cette constatation illustre l'un des principaux problèmes des relations entre les entreprises et les universités. De nombreuses universités «à l'ancienne» n'essaient pas (ou peu) de comprendre la culture, les valeurs et la motivation des entreprises et estiment que tout effort de compréhension doit venir du monde entrepreneurial et non d'elles-mêmes. La vraie coopération exige que les représentants des entreprises tiennent compte de la fonction spécifique des universités et de leur responsabilité différente vis-à-vis de la société, ainsi que du fait que les contributions bénéfiques des institutions d'enseignement supérieur aux entreprises se réalisent par des voies indirectes surtout. Tant que cette question ne sera pas résolue, toute recommandation en matière de coopération entre les universités et les entreprises n'aura probablement que peu de poids.

4.14   Cette constatation met également en évidence le problème suivant: actuellement, la coopération se base sur la collaboration entre des universités et de grandes entreprises, souvent multinationales, dont les résultats socio-économiques sont reconnus. Cela pose question: dans quelle mesure les PME et les microentreprises peuvent-elles espérer influencer les universités si les grandes entreprises ont historiquement eu si peu d'influence? Cette question est soulevée au point 3.3: «Les difficultés particulières auxquelles sont confrontées les petites et moyennes entreprises qui souhaitent nouer des partenariats avec les universités doivent être traitées». On ne trouve cependant dans le document aucune suggestion pratique concernant la nature des défis éventuels et des solutions envisageables.

4.15   Nulle part le document ne définit clairement ce qu'est une PME. Ce terme est utilisé neuf fois dans la communication, dix fois dans l'analyse d'impact et 76 fois dans le document de travail des services de la Commission, mais l'impression générale qui se dégage des documents de la Commission est qu'il ne s'agit pas vraiment de petites entreprises mais plutôt des entreprises qui comptent plus de 200 employés et dont le chiffre d'affaires dépasse les 10 millions d'euros. La définition actuellement utilisée par la Commission européenne est la suivante:

Catégorie d'entreprise

Membres du personnel

Chiffre d'affaires annuel

 

Total du bilan annuel

Moyenne

<250

€50 millions

ou

€43 millions

Petite

<50

€10 millions

ou

€10 millions

Micro

<10

€2 millions

ou

€2 millions

Cette définition n'aide pas les institutions d'enseignement supérieur ou les forums dans l'identification des PME, surtout s'ils se basent sur les montants du chiffre d'affaires annuel. Le Comité est d'avis que recourir aux définitions des PME existant aujourd'hui entravera la recherche de partenaires dans le monde entrepreneurial. Il serait dès lors souhaitable de pouvoir disposer d'une définition des PME plus simple, reflétant mieux la réalité.

4.16   Il convient d'analyser en profondeur et d'illustrer d'exemples concrets la référence à la «promotion de l'entrepreneuriat» tout au long du système éducatif. Le CESE craint en effet que le forum ne soit pas le lieu approprié aux débats à propos de cette très vaste question. La nécessité de développer la créativité des enfants ainsi que les autres talents qu'ils utiliseront dans leurs futurs métiers, et celle, pour les adultes, d'avoir l'esprit d'entreprise au travail (notamment pour ce qui est de l'apprentissage tout au long de la vie) constituent des problématiques différentes.

4.17   Les entreprises sont préoccupées par le fait que l'«entrepreneurisme» soit devenu la nouvelle toquade de l'enseignement supérieur. Les universités ont bien un rôle à jouer dans la promotion et le développement d'une attitude plus entrepreneuriale mais, dernièrement, ce rôle a été élargi à la formation d'entrepreneurs. Le Forum économique mondial («Educating the next wave of Entrepreneurs» – Former la prochaine génération d'entrepreneurs, avril 2009) cite: «Ce que l'on entend sur l'esprit d'entreprise est en grande partie totalement faux. Il n'y a rien de magique, ni de mystérieux et les gènes n'y sont pour rien. Il s'agit d'une discipline et comme toutes les disciplines, celle-ci peut être apprise». Nous estimons que ce glissement récent observé dans certaines universités est fondamentalement erroné. Les universités peuvent apprendre à leurs étudiants comment s'acquitter de tâches d'entreprise telles que la comptabilité ou le marketing, comment appliquer des méthodes managériales mais personne, pas même un professeur d'université, ne peut enseigner comment évaluer et prendre des risques financiers et personnels qui, trop souvent, défient tout raisonnement logique.

4.18   Le CESE renvoie à son avis sur le «Partenariat entre les institutions d'enseignement et les employeurs» (5), qui formule également de nombreuses réflexions sur cette problématique

5.   Commentaires à propos du document de travail des services de la Commission

5.1   Le CESE s'inquiète de ce que le document de travail mentionné au point 2 de la communication apporte peu d'éléments nouveaux par rapport à cette dernière. Ce document de travail ajouterait même de la confusion en établissant des suppositions sans éléments probants (ou si peu) pour étayer les conclusions.

5.2   Il a clairement été rédigé d'un point de vue universitaire à propos de ce que les universités peuvent faire pour tirer avantage d'une coopération avec les entreprises. Le CESE s'en inquiète car le document ne donne pas de vision équilibrée de ce que devrait faire le forum. La distinction établie entre universités, institutions d'enseignement supérieur et autres organismes de formation est également extrêmement vague et il n'est pas aisé de déterminer si ce qui est suggéré consiste à transformer toutes les universités en institutions de formation ou l'inverse.

5.3   Le CESE estime que le document de travail représente une occasion manquée et qu'il n'offre pas de perspectives plus larges aux entreprises ni ne soulève les problèmes spécifiques rencontrés par les PME.

Bruxelles, le 17 décembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Voir l'avis du CESE sur le thème «Des universités pour l'Europe», rapporteur: M. Joost VAN IERSEL, (JO C 128 du 18.5.2010, p. 48) et l'avis du CESE sur le thème «Coopération et transfert de connaissances entre les organismes de recherche, l'industrie et les PME – un préalable important pour l'innovation», rapporteur: M. Gerd WOLF (JO C 218 du 11.9.2009).

(2)  Fondation européenne de la science (FES), 2008. Higher Education Looking Forward: An Agenda for Future Research (L'avenir de l'enseignement supérieur: un agenda pour la recherche du futur), John Brennan, Jürgen Enders, Christine Musselin, Ulrich Teichler et Jussi Välimaa.

(3)  Communication datant du 10 mai 2006 de la Commission au Conseil et au Parlement européen: «Faire réussir le projet de modernisation pour les universités - Formation, recherche et innovation» - COM(2006) 208 final.

(4)  Wilshire, Bruce. 1990. The Moral Collapse of the University: Professionalism, Purity and Alienation (L'écroulement moral de l'université: professionnalisme, pureté et aliénation), Albany: State University of New York Press; Readings, Bill. 1996. The University in Ruins (L'université en ruines). Cambridge, Harvard University Press.

(5)  Avis du CESE, rapporteur: M. MALOSSE (JO C 228, 22.09.2009, p. 9).


Annexe

à

l'avis

du Comité économique et social européen

L'amendement suivant, qui a obtenu au moins un quart des suffrages exprimés, a été rejeté au cours des délibérations (article 54, paragraphe 3, du règlement intérieur):

Paragraphe 1.2

Modifier comme suit:

Le forum de l'UE pour le dialogue entre les universités ou les institutions d'enseignement supérieur et les entreprises devraient focaliser leur attention sur une coopération et une intervention ciblées sur le niveau universitaire de premier cycle ou supérieurs (diplôme de premier cycle, master, licence en sciences). Ce n'est qu'après avoir acquis une expérience en la matière que le forum pourra étendre sa coopération à d'autres établissements d'enseignement.

Résultat du vote

Pour: 27

Contre: 49

Abstentions: 7


22.9.2010   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 255/72


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Lutte contre le cancer: un partenariat européen»

COM(2009) 291 final

(2010/C 255/13)

Rapporteuse: Mme Ingrid KÖSSLER

Le 24 juin 2009, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social sur la:

«Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions: Lutte contre le cancer: un partenariat européen»

COM(2009) 291 final.

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a élaboré son avis le 10 novembre 2009. (rapporteure: Mme KÖSSLER).

Lors de sa 458 session plénière des 16 et 17 décembre 2009 (séance du 16 décembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 176 voix pour et 1 abstention.

1.   Recommandations

1.1   Le CESE se félicite de l'initiative de la Commission qui lance un partenariat destiné à lutter contre le cancer. L'individu comme la société européenne paient encore un très lourd tribut au cancer, et c'est le diagnostic qui fait le plus grand nombre de victimes. En 2006, le cancer était la deuxième cause de mortalité après les maladies cardio-vasculaires, et il était responsable de deux décès de femmes sur dix et de trois décès d'hommes sur dix, ce qui représente presque 3,2 millions de personnes par an au sein de l'Union européenne (1).

Le CESE souligne l'importance d'une action conjointe au niveau communautaire, fondée sur l'échange d'informations ainsi que de compétences et de bonnes pratiques afin de soutenir les États membres dans leur lutte contre le cancer.

1.2.1   Le CESE souligne qu'il existe des différences inacceptables entre les États membres pour ce qui est de l'incidence du cancer et de la mortalité due à cette maladie, et soutient l'objectif que tous les États membres disposent de plans intégrés de lutte contre le cancer d'ici à la fin du partenariat.

1.2.2   Le CESE partage la conception de la Commission selon laquelle un début de stratégies intégrées contre le cancer nécessite des objectifs clairs comme moteurs pour leur mise en œuvre, de manière à permettre d'évaluer si les effets escomptés ont été atteints.

1.2.3   Le CESE est convaincu de l'importance des mesures préventives, qui peuvent encourager au bien-être et contribuer à un mode de vie plus sain ainsi qu'à allonger à l'avenir la durée de vie de chacun.

1.2.4   Le CESE considère le partenariat d'ici à 2013 comme un élément important après la première étape de 2003 (2), et conçoit la nécessité de poursuivre ultérieurement le partenariat sous l'une ou l'autre forme, et ce d'autant que plusieurs objectifs se situent plus avant dans le temps, à l'horizon 2020.

1.2.5   Le CESE souhaite souligner l'importance d'un mode de vie sain et considère le partenariat comme important pour convaincre les responsables nationaux et les personnes travaillant dans le domaine de la santé publique de fournir davantage d'efforts dans nos États membres.

1.2.6   Le CESE souhaite souligner que le partenariat va dans le sens de l'article 152 sur la santé publique, qui précise que l'action communautaire a pour but l'amélioration de celle-ci.

1.2.7   Le CESE entend soutenir ce partenariat et y participer activement grâce à ses contacts avec la société civile à l'échelon local et national.

1.2.8   Le CESE souhaite insister sur l'importance d'utiliser les fonds structurels destinés aux infrastructures dans le domaine de la santé et de la formation, mais également sur le fait que ces fonds ne sont pas exploités suffisamment dans les États membres.

2.   Contexte général

2.1   Le CESE réitère sa constatation que le cancer concerne et frappe de nombreuses personnes et leurs proches. Il est un grand problème de santé et de société, et c'est la maladie qui fait le plus de victimes parmi la population active.

2.2   Le nombre élevé de cas de cancer a également, pour cette raison, des conséquences socio-économiques considérables dans les États membres.

2.3   L'augmentation du nombre des cancers à laquelle on peut s'attendre va entraîner des difficultés supplémentaires.

2.4   Une prévention efficace peut permettre d'éviter presque un tiers de tous les cas de cancer, et le dépistage précoce peut permettre d'en traiter avec succès, et souvent même d'en guérir, un autre tiers.

2.5   Les cinq formes de cancer les plus courantes dans l'Union européenne sont les suivantes: cancer du sein, cancer du col de l'utérus et cancer colorectal, cancer du poumon et cancer de la prostate.

2.6   Les types de cancer les plus meurtriers au sein de l'Union à 27 sont, par ordre de taux de mortalité, le cancer du poumon, le cancer du col de l'utérus et le cancer colorectal, le cancer du sein, le cancer de la prostate et le cancer de l'estomac (1).

2.7   L'incidence et la mortalité de ces cinq formes de cancer pourraient être réduites par une amélioration des modes de vie.

2.8   Le cancer du poumon est le type de cancer le plus meurtrier dans l'Union européenne. En 2006, presque un cinquième de l'ensemble des décès était dû au cancer du poumon, et la majorité d'entre eux étaient provoqués par le tabagisme. Environ 335 000 personnes décèdent tous les ans suite à cette maladie en Europe (1).

3.   Contenu essentiel de la proposition de la Commission

3.1   La proposition de la Commission européenne d'établir un partenariat européen pour la lutte contre le cancer au cours de la période 2009-2013 a pour but d'aider les États membres à créer des plans intégrés de lutte contre le cancer, ce qui devrait réduire la charge que représente le cancer dans l'UE, en visant une réduction de 15 % à l'horizon 2020 (510 000 nouveaux cas).

3.2   Des actions (assorties d'objectifs à atteindre) sont proposées dans les quatre domaines suivants:

Domaine 1: Promotion de la santé et dépistage précoce

Objectif: améliorer l'application de la recommandation du Conseil relative au dépistage du cancer et promouvoir l'organisation de campagnes d'information à grande échelle sur le dépistage du cancer orientées vers le grand public et les prestataires de soins de santé.

Domaine 2: Recensement et diffusion des bonnes pratiques

Objectif: s'attaquer aux inégalités en matière de mortalité due au cancer en réduisant les disparités entre les États membres qui affichent les meilleurs résultats et ceux qui affichent les moins bons.

Domaine 3: Coopération et coordination en matière de recherche sur le cancer

Objectif: parvenir à la coordination d'un tiers des travaux de recherche, toutes sources de financement confondues, d'ici 2013.

Domaine 4: Comparaison des performances

Objectif: garantir la disponibilité de données exactes et comparables concernant le cancer.

4.   La santé et le dépistage précoce

4.1   Le CESE estime qu'il est nécessaire d'envisager une stratégie horizontale pour limiter l'incidence du cancer dans toute l'Union européenne.

4.2   De nombreux facteurs peuvent être à l'origine du cancer, mais il est possible de le prévenir dans bon nombre de cas. La prévention doit donc porter sur le mode de vie, les conditions de travail et l'environnement.

4.3   Le travail de prévention doit être guidé par le principe de «La santé dans toutes les politiques» (l'approche HIAP, Health in All Policies) et le partenariat peut être renforcé au travers de l'intégration des politiques de santé dans les autres domaines, tels que par exemple l'environnement ou l'agriculture, à la fois à l'échelon national et à l'échelon européen, conformément à la stratégie européenne en matière de santé.

4.4   Le CESE estime qu'il est spécialement important d'orienter la prévention sur les questions de mode de vie qui augmentent les risques de développer un cancer. Il est particulièrement important de faire prendre conscience à la jeune génération qu'un mode de vie sain limite les risques de développer un cancer. Développer ces connaissances auprès des jeunes, qui deviendront plus tard parents, peut avoir une grande importance pour leurs enfants et les générations futures.

4.5   L'on dispose aujourd'hui de connaissances concernant les facteurs qui augmentent les risques de cancer. Le premier facteur de risque entre tous est le tabagisme.

4.6   D'autres facteurs de risques sont l'obésité, l'inactivité physique, le bronzage excessif et une forte consommation d'alcool.

4.7   Ce sont, et de loin, la consommation de tabac, le surpoids et une consommation insuffisante de fruits et légumes, ainsi qu'une forte exposition aux rayons solaires qui provoquent le nombre de décès le plus important.

4.8   Le CESE estime important que le partenariat soit ciblé sur la prévention et les contrôles.

4.9   Le CESE est favorable à ce que soient proposés des objectifs généraux en matière de prévention et de dépistage, et souligne donc l'importance de définir des indicateurs afin d'assurer le suivi des objectifs dans les États membres.

4.10   La prévention et la détection précoce (dépistage) sont déterminantes au regard des possibilités de réussite des traitements et de guérison.

4.11   Le CESE rappelle qu'apposer un pictogramme d'avertissement sur les paquets de cigarettes est recommandé par l'UE depuis 2001. Seuls trois États membres en font usage. Il convient d'augmenter ce nombre. Le pictogramme d'avertissement fonctionne également bien pour les enfants et a un effet même sur ceux qui ne savent pas encore lire.

4.12   Le CESE souhaite souligner l'importance de prendre des mesures contre le tabagisme passif.

4.13   Le CESE estime important d'améliorer le mode de vie des jeunes en intégrant un enseignement sur le mode de vie dans les systèmes scolaires des États membres, de manière à apporter et diffuser très tôt les connaissances permettant d'allonger la vie. L'information sur les risques que représentent le tabagisme, de mauvaises habitudes alimentaires, une faible consommation de fruits, ainsi que l'information concernant les aspects négatifs de l'exposition au soleil doivent être apportées très tôt au cours de la vie. Il convient de mettre en place au moins deux à trois heures de gymnastique par semaine dans les écoles primaires des États membres. L'activité physique et l'intérêt pour le sport et les activités de plein air contribuent à diminuer le surpoids, y compris à l'âge adulte.

4.14   Le CESE insiste sur le rôle important des chercheurs, des travailleurs de la santé publique, des organisations de patients, des économistes, des enseignants, du personnel médical, des superviseurs, des responsables politiques, d'autres décideurs et de la société civile pour ce qui est de traduire les objectifs du partenariat en actions concrètes dans les États membres.

4.15   Le CESE souhaite souligner l'importance des organisations de patients à l'échelon européen, et le rôle important que celles-ci peuvent jouer dans le partenariat. D'autres réseaux et organisations volontaires peuvent jouer un rôle important pour faire passer le message sur la manière de prévenir l'incidence du cancer et l'importance de la détection précoce. Le Comité souhaite également souligner le rôle que peuvent jouer les médias pour améliorer la prise de conscience de l'importance d'un mode de vie sain et du dépistage précoce, ainsi que pour améliorer les mesures préventives.

4.16   Le CESE souligne que des mesures de prévention efficaces sauvent des vies à un horizon de 20 à 30 ans, et qu'elles comportent des avantages économiques étant donné que les coûts de ces mesures préventives sont sensiblement plus faibles que ceux des traitements de la maladie.

4.17   Le CESE souhaite souligner l'importance de trouver des indicateurs que l'on pourrait suivre dans le temps, en ce qui concerne la prévention primaire. Afin de mesurer dans la durée les actions de prévention primaire dans les États membres, il est proposé que ces derniers mesurent à intervalles réguliers le nombre de personnes de 15 ans qui fument, et procèdent également à des mesures de l'obésité (par exemple à l'aide de l'IMC). L'on peut envisager que les services de soins de santé maternelle, partout dans les États membres, soient utilisés pour suivre l'obésité chez les femmes, et que le recrutement dans les forces armées permette de suivre dans le temps la tendance chez les hommes.

Le dépistage

4.18   Le CESE souhaite souligner que le dépistage est un investissement destiné à améliorer la santé et éviter la maladie à l'individu.

4.19   Le CESE estime qu'il est important de pouvoir évaluer les programmes de dépistage qui sont mis en place.

4.20   Le CESE partage l'avis selon lequel les programmes de dépistage qui sont proposés devraient toucher le plus grand nombre de personnes possible en ce qui concerne le cancer du sein, le cancer du col de l'utérus et le cancer colorectal, conformément aux recommandations du Conseil sur le dépistage du cancer jusqu'en 2013. Des objectifs clairs ont été fixés dès 2003 mais n'ont pas été atteints.

4.21   Le CESE marque son accord sur le fait que les États membres devraient intensifier leurs efforts pour que les recommandations du Conseil relatives au dépistage du cancer soient intégralement mises en œuvre d'ici 2013. Le CESE serait heureux de voir l'ensemble des États membres adopter des objectifs raisonnables et progressifs pour travailler dans cette direction.

4.22   Le CESE estime qu'il est important de prévoir une information ciblée et un soutien destiné aux catégories exposées, afin qu'elles aussi prennent conscience de l'avantage de participer au dépistage. Il est également important d'attirer l'attention sur le stress et les tensions générés par l'appréhension de développer une maladie cancéreuse.

4.23   Le CESE espère que tout programme de dépistage futur qui pourrait être recommandé à l'échelon de l'UE reposera sur des preuves. Le CESE souhaiterait que la mise en œuvre à l'avenir des programmes de dépistage recommandés par l'UE prévoie des intervalles d'âge au moment de leur mise en œuvre dans les États membres. Des intervalles d'âge et de convocations communs à tous les États membres réduiraient les différences entre les résultats et seraient bénéfiques à la recherche.

4.24   Le CESE est favorable à un système pilote européen d'accréditation à participation volontaire.

5.   Repérer et diffuser les bonnes pratiques

5.1   Le CESE partage l'objectif de lutter contre les inégalités en matière de mortalité due au cancer en réduisant les différences entre États membres.

5.2   Le CESE souhaite souligner combien il importe que tous les États membres commencent à répertorier et mettre en place un registre des cancers afin de pouvoir atteindre cet objectif. Tout ceci repose sur des comparaisons ouvertes et exactes. Le minimum pour atteindre les objectifs est qu'il existe ou que soient créés dans chaque État membre un registre de la population, un système de recensement des nouveaux cas de cancer ainsi qu'un registre des causes de décès. Ainsi, l'on pourra disposer de données exactes sur l'incidence, la prévalence, la survie et la mortalité. Le CESE propose que dans un second temps, les registres des hôpitaux y soient liés, ce qui permettrait de comparer d'autant mieux les stratégies et les traitements.

5.3   Le CESE marque son accord sur le repérage des obstacles à la collecte des données et propose des investissements ciblés afin que les États membres qui ne disposent pas de registres puissent les mettre en place rapidement.

5.4   Le CESE marque son accord sur l'importance de la collecte de données concernant les coûts du cancer pour la société. Cela favorise la recherche de réponses à la question et peut étayer l'ampleur de ce problème de société.

5.5   Le CESE marque son accord sur l'organisation d'un sondage d'opinion dans l'Union européenne concernant l'enregistrement. L'on peut souligner en ce domaine les expériences des États membres nordiques qui constituent de bons exemples.

5.6   Le CESE partage l'avis selon lequel le cancer est lié à de nombreuses causes, telles que le mode de vie, les conditions de travail et l'environnement, et selon lequel le travail de prévention doit par conséquent être mené sur un large front.

5.7   Le CESE souhaite souligner tout spécialement l'importance de mesures préventives dans le domaine du tabagisme. Dans de nombreux États membres, surtout les plus récents, le nombre de fumeurs est très important. Souvent, ce sont les catégories socio-économiques les plus vulnérables qui fument le plus. Même le tabagisme dit passif comporte des risques pour la santé, ce qui devrait être mis en avant.

La recherche

5.8   Le CESE estime comme la Commission que l'échange de connaissances entre les pays pourrait devenir bien meilleur, et qu'il est important d'améliorer les infrastructures en matière de recherche.

5.9   Le CESE se félicite de la proposition de renforcer l'accès du public à l'information sur la recherche sur le cancer, en particulier les essais cliniques.

5.10   Le CESE souligne comme la Commission l'importance d'initiatives européennes communes de recherche sur la question de la prévention, par exemple la recherche sur les modes de vie qui est négligée, et qui est un domaine important et stratégique sur lequel investir conformément aux intentions du partenariat. Les risques d'effets indésirables et de dommages tardifs dus aux traitements sont également mis en évidence par la recherche dans ce domaine, de même que les questions socio-psychologiques.

5.11   Le CESE souligne l'importance de la concurrence au sein de la recherche, et estime que c'est principalement au niveau de l'infrastructure que la coopération en matière de recherche peut être améliorée. Le CESE est favorable à la mise en commun des banques biologiques communes et de la facilitation de l'échange de matériel, de l'échange de connaissances et des études cliniques, dans les cas où le matériel des différents États membres ne suffit pas, ou bien où la coopération entre plusieurs pays (centres d'études multi-européens) permet de progresser beaucoup plus rapidement.

5.12   Le CESE approuve la création d'une instance qui évalue la recherche et la pratique scientifique dans une perspective européenne. Une instance indépendante de ce type devrait pouvoir évaluer et examiner la totalité des données disponibles dans un domaine médical précis en Europe. Cela signifie comparer les recherches déjà menées dans ce domaine avec des critères de bonne recherche définis préalablement.

5.13   Le CESE serait favorable à ce que cette instance puisse, tout particulièrement, recenser les domaines se prêtant à des projets de recherche paneuropéens stratégiques dans le domaine du cancer, qui seraient des projets nécessaires mais ne présentant pas d'intérêt commercial.

Comparaison des performances

5.1.4   Objectif: garantir la disponibilité de données exactes et comparables concernant le cancer, nécessaires pour adopter des mesures politiques.

5.1.5   Le CESE souligne, comme la Commission, l'importance de disposer de données comparables et la nécessité de recenser les cancers dans les États membres.

5.1.6   Le CESE insiste également sur la nécessité de développer des indicateurs comparables et susceptibles d'être évalués. Une première étape est que tous les États membres mettent en place un recensement des cancers et communiquent les données à une seule et même instance. Le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) et l'Union internationale contre le cancer (UICC) pourraient être les destinataires de ces données. L'un et l'autre fonctionnent au niveau européen.

5.1.7   Le CESE estime que des comparaisons transparentes revêtent une grande importance pour ce qui est de mettre en évidence et de diffuser des exemples de bonnes pratiques.

5.1.8   Le fait de disposer de données comparables et de pouvoir davantage les échanger est d'une importance considérable pour la recherche.

5.1.9   Le CESE souligne que tous les domaines de la chaîne de soins tels que le traitement, la rééducation et les soins palliatifs ont leur importance pour réduire la charge que représentent les maladies cancéreuses et la souffrance à laquelle sont exposés les malades et leurs proches. Le CESE souhaite dans un premier temps que l'on mette l'accent sur la prévention primaire (mesures préventives) et la prévention secondaire (dépistage) afin de permettre de détecter le plus tôt possible les éventuelles pathologies cancéreuses, et commencer rapidement le traitement.

5.20   Le CESE juge important que les plans nationaux intégrés de lutte contre le cancer comportent des mesures intervenant tout au long de la chaîne des soins qui inclut le traitement, la rééducation et les soins palliatifs ainsi que la prévention primaire et secondaire.

Bruxelles, le 16 décembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Source: CIRC (Centre international de recherche sur le cancer), 2007.

(2)  Recommandation du Conseil du 2 décembre 2003 relative au dépistage du cancer (2003/878/CE), JO L du 16 décembre 2003, p. 34.


22.9.2010   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 255/76


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil concernant une initiative européenne sur la maladie d’Alzheimer et les autres démences»

COM(2009) 380 final

(2010/C 255/14)

Rapporteure: MmeO'NEILL

Le 22 juillet 2009, la Commission a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil concernant une initiative européenne sur la maladie d’Alzheimer et les autres démences»

COM(2009) 380 final.

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 10 novembre 2009 (rapporteure: Mme O'NEILL).

Lors de sa 458e session plénière des 16 et 17 décembre 2009 (séance du 16 décembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis à l'unanimité.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Conclusion

1.1.1   Le Comité accueille favorablement la «Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil concernant une initiative européenne sur la maladie d’Alzheimer et les autres démences», car ce problème revêt une importance extrême en Europe et a des incidences sur les individus, les familles et la société, étant donné le vieillissement de la population.

1.1.2   Le Comité reconnaît que c'est en premier lieu aux États membres qu'il incombe de lutter contre les démences et de pourvoir aux soins afférents, mais il se félicite que la communication ait attiré l'attention sur le rôle joué par l'Union européenne dans l'amélioration des performances nationales en la matière.

Note terminologique: le terme «maladie d'Alzheimer» ne recouvrant pas toutes les formes de démences, le présent document se réfère tantôt à «la maladie d'Alzheimer et autres démences», tantôt simplement à «la démence».

1.2   Recommandations (suivant l'agencement du texte, et non par ordre de priorité)

1.2.1   Le Comité recommande à la Commission de soutenir des campagnes de sensibilisation destinées à améliorer la connaissance de la démence auprès du grand public, afin d'établir des diagnostics plus précoces et de réduire la stigmatisation de la maladie.

1.2.2   Le Comité préconise d'élargir l'éventail des secteurs de recherche qui bénéficient d'un soutien.

1.2.3   Tout en se félicitant de l'approche de programmation commune pour la recherche, le Comité demande à la Commission de la mettre en œuvre au plus vite.

1.2.4   Le Comité recommande d'étendre la méthode ouverte de coordination au secteur de la santé, de sorte que la Commission puisse encourager activement le développement de stratégies et de cadres de référence de qualité pour aborder la démence qui soient propres à chaque pays.

1.2.5   Le Comité invite la Commission à promouvoir largement l'utilisation du programme «Santé» pour développer des modèles de soin ainsi qu'à collaborer activement avec les gouvernements nationaux sur la manière d'utiliser les fonds structurels européens pour élaborer et mettre en œuvre localement des formations à la prise en charge de la démence dans les services de soins intensifs, de soins de longue durée, et d'assistance à domicile.

1.2.6   Le Comité souligne avec force combien il est important d'appliquer la Convention européenne des droits de l'homme aux malades souffrant de démence.

1.2.7   Le Comité soutient le projet, énoncé dans la communication, de créer un réseau européen qui utiliserait les instruments fournis par le programme «Santé».

1.2.8   Le Comité appelle à faire connaître et appliquer la communication aux niveaux local, national, européen et international, en collaboration avec les associations qui se consacrent à la maladie d'Alzheimer, les gouvernements nationaux, la Commission et les autres organismes appropriés, dont le Comité lui-même.

2.   Antécédents de la communication

2.1   Le Livre blanc «Ensemble pour la santé: une approche stratégique pour l’UE 2008-2013» (1) a relevé et fait valoir explicitement qu'il importait d'encourager une meilleure compréhension des maladies neurodégénératives, comme la maladie d'Alzheimer et les autres formes de démence.

2.2   La Commission s'est fixé comme priorité de garantir que le problème fasse l'objet d'une prise de conscience appropriée, étant donné son ampleur et son incidence sur les personnes atteintes et celles qui s'en occupent, mais aussi son coût pour la société.

2.3   L'action de long terme qui est proposée sera axée sur les stratégies de prévention, l'intervention à un niveau non médical, l'acquisition de compétences pour les soignants, professionnels ou volontaires, et une attention particulière pour l'approche collaborative entre les États membres et la Commission dans le domaine de la recherche (2).

2.4   Par ailleurs, la Commission européenne articulera les éléments pertinents des futurs travaux sur la maladie d'Alzheimer au Pacte européen pour la santé mentale et le bien-être, conclu en 2008, l'idée étant que la santé mentale constitue une dimension spécifique de la maladie d'Alzheimer.

2.5   Le Parlement européen a lui aussi adopté une déclaration (3) sur les priorités en matière de lutte contre la maladie d'Alzheimer et les autres démences, pour manifester son engagement politique en faveur de la recherche, de la prévention et de la protection sociale, ainsi que son souci de mettre un terme à la stigmatisation des malades et de souligner qu'il importe d'aider les associations qui s'occupent de la maladie d'Alzheimer.

3.   Contexte

3.1   La démence se caractérise par une perte progressive des facultés mentales, causée par un ensemble de troubles dont le plus commun est la maladie d'Alzheimer, qui affecte quelque 50 à 60 % des personnes démentes. Les autres troubles comprennent la démence vasculaire et la démence à corps de Lewy. Un projet mené par la plateforme communautaire du patient (European Patient's Platform) et Alzheimer Europe a permis d'identifier, avec le soutien de la Commission européenne, les plus significatives des formes rares de la démence (4).

3.2   Il a été estimé que dans les 27 États membres de l'UE, 7,3 millions de personnes de 30 à 99 ans souffraient, en 2008, des différentes formes de démence. Ces maladies touchent davantage les femmes (4,9 millions) que les hommes (2,4 millions) (4).

3.3   En raison de l'augmentation générale de l'espérance de vie et du vieillissement de la génération des «baby-boomers», il est escompté que le nombre de personnes âgées va augmenter considérablement, les classes d'âge les plus élevées étant celles qui connaîtront la croissance la plus forte en termes relatifs. L'augmentation des pathologies liées à l'âge, et particulièrement de la démence, se poursuivra probablement; les prévisions actuelles annoncent que le nombre de personnes atteintes doublera sur les vingt prochaines années. Suivant l'estimation de Maladie d'Alzheimer International, 104 millions de personnes seront atteintes de démence dans le monde en 2050.

3.4   L'incidence des démences sur l'entourage familial et sur les soignants professionnels, sur la santé publique et le coût des soins, est significative et le restera. Selon les calculs d'Alzheimer Europe, réalisés en 2008, le coût total des soins directs et informels liés à la maladie d'Alzheimer et aux autres formes de démence s'élevait en 2005 à 130 milliards d'euros pour les 27 États membres – soit 21 000 euros par personne et par an, 56 % de ce montant étant imputable aux soins informels (5).

3.5   Durant de la conférence sur «La lutte contre la maladie d'Alzheimer et les maladies apparentées» qui s'est tenue lors de la présidence française, il a été souligné qu'il est vital que nous, Européens, partagions nos connaissances et mobilisions les compétences et expériences acquises dans les différents États membres pour mener la lutte contre cette maladie; ces conclusions ont été examinées par le Conseil «Santé» en décembre 2008.

3.6   C'est en premier lieu aux États membres qu'il incombe de lutter contre les démences et de pourvoir aux soins afférents. Toutefois, en vertu de l'article 152 du traité, relatif à la santé, il est attendu de l'Union européenne qu'elle apporte un soutien à l'action des États, et l'article 165 exige que la Communauté et les États membres coordonnent leurs activités de recherche et développement technologique afin d’assurer la cohérence réciproque des politiques nationales et de la politique communautaire.

4.   La communication de la Commission

L'objectif de la communication de la Commission est de déterminer les domaines et types d'actions communautaires qui peuvent apporter une valeur ajoutée en faveur des États membres.

4.1   La communication met en évidence cinq dossiers majeurs que l'action communautaire peut aborder:

assurer la prévention,

mieux comprendre les formes de démence (coordination des recherches),

partager les meilleures pratiques

garantir que les droits des personnes atteintes de démence sont respectés,

créer un réseau européen.

4.2   La Commission européenne et les États membres lanceront en 2010 une action commune, qui est exposée dans le plan de travail relatif à l'exécution du deuxième programme «Santé» (2008-2013) et contribuera à la réalisation de l'objectif général de la stratégie de Lisbonne touchant à l'amélioration des performances en matière de santé (6).

5.   La prévention

À l'heure actuelle, il n'est possible ni de prévenir ni de guérir la maladie d'Alzheimer ou les autres formes de démence et le déclin des facultés cognitives a souvent été considéré comme un élément inéluctable du vieillissement. Grâce aux progrès des connaissances sur le vieillissement et le cerveau, des études sont toutefois menées actuellement sur la possibilité de développer des moyens de prévention.

5.1   Étant donné que les démences peuvent être plus ou moins liées à des problèmes cardiovasculaires, leur prévention suppose d'avoir de bonnes habitudes alimentaires (7), de surveiller pression sanguine et cholestérol, ainsi que de ne pas fumer, de ne consommer d'alcool qu'en faibles quantités (8) et de faire de l'exercice.

5.2   Les autres stratégies préventives comprennent l'activité, l'engagement et l'assistance au plan social, ainsi que la stimulation intellectuelle.

5.3   Se maintenir en bonne santé physique et mentale tout au long de son existence peut aider au maintien des facultés cognitives de la personne. Ce comportement est parfois appelé «mode de vie pour un cerveau sain» (9).

5.4   Les arguments à l'appui de ces stratégies sont encore limités; aussi le Comité soutient-il la Commission lorsqu'elle appelle à développer une recherche plus ciblée pour mieux comprendre les stratégies potentielles de prévention. Le réseau Alzheimer Europe apporte son soutien sur ce point.

5.5   Le Comité approuve le projet d'introduire un volet relatif à la démence dans les actions actuelles et à venir de l'UE en matière de prévention sanitaire, y compris dans le domaine éducatif, et de travailler avec les États membres pour élaborer et fournir des orientations, afin de diffuser les informations le plus largement possible auprès du public et des organisations d'assistance sanitaire et sociale.

5.6   Un enjeu essentiel est de permettre un diagnostic plus précoce et plus fiable de la maladie. Il dissiperait les incertitudes des individus concernés et de ceux qui s'occupent d'eux, de sorte qu'ils puissent prendre les dispositions adéquates, sur le plan juridique, financier, médical, ou d'un autre ordre.

5.7   L'une des entraves au dépistage précoce est que les personnes ne reconnaissent pas les symptômes, ou les considèrent comme un effet normal du vieillissement. S'y mêle aussi un sentiment de déni et de crainte, en raison du caractère infamant associé à la démence aux yeux du public. Une enquête récente a montré que le délai moyen entre l'apparition des symptômes et le diagnostic varie considérablement d'un pays européen à l'autre, allant de 10 mois en Allemagne jusqu'à 32 mois au Royaume-Uni.

5.8   Le Comité n'en est pas moins préoccupé par le nombre de personnes qui, dans l'ensemble de l'UE, pourraient ne pas avoir accès à un diagnostic en raison d'un manque de connaissances ou de l'absence de pareils services, notamment en zone rurale et dans les communautés défavorisées.

5.9   Le Comité se joint à l'appel lancé par Alzheimer Europe à la Commission européenne et aux gouvernements nationaux pour qu'ils soutiennent des campagnes de sensibilisation qui viseront le grand public et un large éventail de parties prenantes au niveau local, régional et national, médias compris, afin d'améliorer la reconnaissance des symptômes de la démence et de réduire sa stigmatisation (10).

6.   Une meilleure compréhension des troubles de démence – coordination de la recherche

6.1   Le Comité relève que la Commission s'engage à soutenir la recherche, via des programmes-cadres concernant les investigations sur le cerveau, l'étiologie de ses affections, les stratégies de prévention permettant de vieillir en bonne santé et la santé publique.

6.2   Le Comité souligne toutefois qu'il est également nécessaire de mener des recherches sur l'efficacité des différents modèles de prise en charge, sur les interventions psychosociales et non pharmacologiques, ainsi que sur l'impact que les changements démographiques, comme le divorce, le remariage, la cohabitation, les migrations et l'urbanisation, produisent sur l'expérience de la maladie, pour le malade et son entourage.

6.3   Bien que l'UE ait financé des recherches considérables sur la relation entre les technologies de l'information et de la communication (TIC) et les soins liés à la démence, il est indispensable d'aller plus loin. Les principales conclusions de ces travaux suggèrent que si elle est utilisée de manière éthique et intégrée à des plans de soins, la technologie peut contribuer à aider les personnes atteintes de démence à faire des choix et à rester sans risque à domicile, ainsi qu'à améliorer leur qualité de vie, quel que soit leur environnement.

6.4   Le Comité salue l'engagement de la Commission en ce qui concerne les actions spécifiques de recherche sur les technologies de l'information et de la communication au sein des programmes-cadres, ainsi que les projets pilotes d'envergure qui ont été lancés entre l'UE et 23 pays européens sur les produits et services liés à ces technologies (11).

6.5   Étant donnée la fréquence accrue de la démence, il est essentiel qu'une coopération se noue entre les instituts de recherche et les organismes de financement dans les États membres. Le Comité se félicite de l'approche de programmation conjointe qui, sur une base volontaire, vise à garantir que les fonds mis à disposition par les États membres et les programmes de l'UE soient dépensés de manière optimale.

6.6   Le Comité juge par conséquent essentiel que les États membres s'engagent dans cette recherche et son financement, ainsi que dans un fonctionnement collaboratif.

7.   Partage des bonnes pratiques

7.1   Eu égard au besoin reconnu d'un approfondissement de la recherche, à l'importance d'un diagnostic précoce et à toute l'étendue des traitements et services sanitaires et sociaux qui sont disponibles dans l'ensemble des États membres, la méthode ouverte de coordination joue un rôle déterminant pour évaluer l'efficacité de l'offre en matière de protection sociale, d'intégration dans la société et de services de soins de longue durée.

7.2   Il est essentiel de fournir des services de qualité aux personnes atteintes de démence et à leurs soignants. Pour certains États membres, cette dimension est intégrée dans une stratégie d'ensemble, mais à la date d'aujourd'hui, seuls deux pays de l'Union européenne ont officiellement créé un tel dispositif; le Comité estime qu'en étendant la méthode ouverte de coordination au secteur de la santé, la Commission peut encourager la mise en place tant de stratégies nationales spécifiques que de chartes de qualité susceptibles de servir de références aux autres États membres et d'améliorer la politique suivie, les services, la formation et la recherche.

7.3   Le Comité salue l'engagement qui a été pris de dispenser, dans une approche globale, une formation spéciale aux personnels de santé et de soins et aux membres des familles des malades de démence. Il est convaincu que le programme «Santé» de l'Union européenne permettra de développer des modèles de soins avec le concours des États membres, qui utiliseront les fonds structurels européens pour les mettre en place. Ce point est particulièrement important, compte tenu de la pénurie de personnels qualifiés dans le domaine des soins et de l'assistance sociale (12). Il est essentiel de dispenser au personnel de soins intensifs, de soins de longue durée et d'assistance à domicile une formation qui permette d'améliorer leur compréhension de la maladie d'Alzheimer et de la démence et de développer une pratique éthique.

7.4   Le Comité appuie l'idée de développer, dans les domaines de prévention et de services qui ont été retenus, un partage des bonnes pratiques qui améliorent la qualité de vie des personnes atteintes de maladie d'Alzheimer et d'autres formes de démence.

7.5   Le Comité est très favorable au renforcement des responsabilités assumées par les associations nationales, européennes et internationales qui se consacrent à la maladie d'Alzheimer. Ces groupements offrent toute une gamme de services aux personnes souffrant de démence et à celles qui s'en occupent et jouent un rôle important pour prévenir l'exclusion sociale et la discrimination, tout comme pour défendre les droits des personnes atteintes de démence.

7.6   Ces organisations sont une source d'informations précieuses (13), qui peuvent influer la recherche, les politiques et les pratiques et les orienter, tout en donnant aux malades de démence et à ceux qui s'en occupent la possibilité de se faire entendre. Le Comité souhaiterait les faire profiter de son soutien et de son influence en s'engageant dans un travail de mise en contact avec un certain nombre de ces groupements, tant dans les États membres qu'à l'échelon international.

7.7   Le Comité adhère à l'appel lancé par Alzheimer Europe aux gouvernements nationaux pour qu'ils reconnaissent l'importante contribution apportée par les associations qui se consacrent à la maladie d'Alzheimer et qu'ils les financent, dans le cadre de la solidarité paneuropéenne, afin qu'elles puissent faire face à l'accroissement attendu du nombre de personnes touchées par cette affection et les autres démences.

8.   La garantie du respect des droits des personnes atteintes de démence

8.1   «D'abord et avant tout, les personnes atteintes de démence sont des amis, des parents, des voisins et nos concitoyens. Le fait qu'ils souffrent d'un trouble de santé particulier est secondaire» (14). Le Comité soutient le droit des individus atteints de maladie d'Alzheimer ou d'autres démences à être traités avec dignité et bénéficier de celui d'être autonomes.

8.2   Le diagnostic, tout comme la perte progressive des capacités, peuvent être traumatisants pour les malades et ceux qui les entourent, et les conduire à l'isolement social, avec les conséquences qui en résultent pour leur santé et leur bien-être. Le Comité appelle la Commission et les gouvernements nationaux à informer et éduquer la société, afin d'éliminer la stigmatisation associée à la démence.

8.3   Le Comité recommande instamment que les droits des personnes atteintes de démence soient respectés, dans le cadre tracé par la Convention européenne des droits de l'homme, qui a été renforcée par des dispositions sur les droits liés au handicap et les droits des patients (15). Des informations doivent être fournies tant sur la maladie que sur les services disponibles et il importe d'associer les malades et leurs soignants à la prise des décisions qui les concernent.

8.4   Le Comité soutient la Commission dans sa volonté d'influer sur la prise de décision politique dans l'UE, s'agissant de reconnaître aux personnes âgées handicapées la possibilité de faire valoir leurs droits et d'être préservées de toute négligence et maltraitance (16).

9.   La création d'un réseau européen

9.1   Le Comité estime qu'il est absolument essentiel d'établir un réseau européen, dans le cadre du programme «Santé». Ce dispositif devrait ouvrir la possibilité d'échanger les bonnes pratiques, contribuer à développer, dans l'ensemble des États membres, des normes et approches cohérentes (17) concernant les personnes âgées vulnérables et créer une occasion de mettre en place des principes et des définitions communs touchant aux droits des personnes atteintes de démence.

9.2   Un réseau européen pourrait en outre concourir à améliorer, à travers tous les États membres:

la formation d'une fraction plus importante des personnels de santé et d'aide sociale à la problématique de la démence et de la manière d'assister les malades et les personnes qui les prennent en charge,

l'action pédagogique sur la démence, pour en réduire la stigmatisation et en favoriser le diagnostic précoce,

la coordination des soins entre les professionnels travaillant auprès des malades de démence et ceux qui les entourent, afin de répondre au mieux aux besoins de chacun en particulier (18).

9.3   Ce réseau pourrait comporter une collaboration avec les gouvernements nationaux pour mettre en place un système de déclarations anticipées, par lesquelles les malades lorsqu'ils ont encore leur capacité de consentement, pourraient se prononcer sur le traitement médical, les soins, l'assistance et les aspects financiers et légaux et auraient la possibilité de désigner à l'avance une personne de confiance pour parler en leur nom.

9.4   Le Comité préconise une collaboration étroite entre ce réseau et Alzheimer Europe afin d'assurer une fourniture d'informations fiables et cohérentes sur la démence, qui revêtent une importance capitale pour réduire sa stigmatisation, encourager les gens à rechercher des conseils médicaux et développer leur connaissance sur les services et les aides disponibles, ainsi que pour promouvoir les droits des malades, de manière à ce qu'ils puissent faire respecter leur dignité et leur autonomie.

Bruxelles, le 16 décembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  JO C 77 du 31.3.2009, p. 96.

(2)  Alzheimer Europe, Dementia Year Book 2008 («Annuaire 2008 de la démence»).

(3)  Déclaration du Parlement européen, PE-414.434.

(4)  COM(2009) 380 final.

(5)  Alzheimer Europe (2008), Dementia in Europe Yearbook.

(6)  Décision no 1350/2007/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2007 établissant un deuxième programme d'action communautaire dans le domaine de la santé (2008-2013) Voir Europa - Santé publique - Information sur la santé - Établissement d'indicateurs de la santé et collecte de données. Cf. http://ec.europa.eu/health/programme/policy/2008-2013/index_en.htm

(7)  JO C 24 du 31.1.2006, p. 63.

(8)  JO C 318 du 23.12.2009, p. 10.

(9)  Dementia Risk Reduction: The evidence (La réduction du risque d'Alzheimer: les pièces du dossier). Alzheimer's Australia Paper, 13 septembre 2007.

(10)  Alzheimer Europe, Déclaration de Paris relative aux priorités politiques du mouvement Alzheimer (2006).

(11)  Décision no 742/2008/CE du Parlement européen et du Conseil du 9 juillet 2008, COM(2007) 332 final, JO L 201 du 30.7.2008, p. 49.

(12)  JO C 317 du 23.12.2009, p. 105.

(13)  L'organe The European Collaboration on Dementia (EuroCoDe) a pour vocation de publier des indicateurs consensuels et d'entreprendre des enquêtes conjointes.

(14)  Alzheimer Europe Year Book 2008.

(15)  JO C 10 du 15 janvier 2008, p. 67.

(16)  JO C 44 du 16 février 2008, p. 109.

(17)  JO C 204 du 9 août 2008, p. 103.

(18)  Baseline assessment of current information provision to people with dementia and their carers («Évaluation de départ sur la situation actuelle de la fourniture d'informations aux personnes souffrant de démence et à leurs soignants»), Alison Bowes, Agence écossaise d'amélioration de la qualité du Service national de santé et Centre de développement des services pour la démence de Stirling (Écosse).


22.9.2010   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 255/81


Avis du Comité économique et social européen sur le «Livre vert — Promouvoir la mobilité des jeunes à des fins d'apprentissage»

COM(2009) 329 final

(2010/C 255/15)

Rapporteure: MmePÄÄRENDSON

Le 8 juillet 2009, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur le

«Livre vert – promouvoir la mobilité des jeunes à des fins d'apprentissage»

COM(2009) 329 final.

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 4 décembre 2009 (rapporteure unique: Mme PÄÄRENDSON).

Lors de sa 458e session plénière des 16 et 17 décembre 2009 (séance du 16 décembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 173 voix pour, 4 voix contre et 2 abstentions.

1.   Recommandations

1.1   Le CESE soutient pleinement les efforts fournis par la Commission européenne pour promouvoir la mobilité des jeunes à des fins d'apprentissage (dénommée ci-après la mobilité d'apprentissage). Afin de renforcer concrètement cette mobilité, il convient d'encourager les hôtes potentiels à adopter une approche qui permettra d'attirer les jeunes vers leurs pays et leurs villes.

Les objectifs en matière de mobilité d'apprentissage ne pourront être atteints que grâce à une coopération et des efforts généralisés impliquant tous les niveaux (l'UE, les États membres, les régions, les établissements éducatifs, les partenaires sociaux et les organisations de la société civile ainsi que les jeunes eux-mêmes).

1.2.1   La Commission européenne et les États membres devraient redoubler d'efforts pour éliminer les barrières à la mobilité et pour échanger les meilleures pratiques. Le Comité invite les États membres à mettre correctement en œuvre le droit communautaire et à lever les obstacles administratifs et juridiques ayant trait aux permis de séjour, aux droits de sécurité sociale ou à la non-reconnaissance des cartes d'étudiants étrangères. La mobilité d'apprentissage était essentielle au succès du processus de Bologne et de l'Espace européen de l'enseignement supérieur. Le Comité estime que la mobilité peut également permettre le développement d'un Espace européen de l'éducation et de la formation tout au long de la vie. La création d'un «statut de stagiaire européen» ou d'un «statut d'étudiant européen» garantira l'égalité de traitement et répondra à de nombreuses craintes concernant des enjeux tels que la reconnaissance des diplômes, les soins de santé et l'aide aux étudiants.

1.2.2   La validation et la reconnaissance des formations formelles et non formelles requièrent que la Convention de Lisbonne sur la reconnaissance des qualifications soit officiellement reconnue, signée et ratifiée.

1.3   Afin d'apporter un plus grand soutien à la mobilité d'apprentissage, y compris sur un plan financier, il est primordial que l'ensemble des parties aient conscience des avantages de celle-ci et les reconnaisse. Il convient d'expliquer plus clairement et de mettre en exergue le lien entre la mobilité d'apprentissage et l'employabilité.

Pour préserver la compétitivité de l'Europe ainsi que sa position de principal chef de file technologique, il faut non seulement promouvoir la mobilité des jeunes européens, mais aussi attirer en Europe les meilleurs étudiants originaires de pays tiers. Le Comité est fermement convaincu que les obstacles à la mobilité liés aux problèmes de visa requièrent une solution immédiate. Le Comité estime en outre qu'à long terme, l'élargissement progressif des programmes de mobilité d'apprentissage à des pays tiers tels que la Chine, l'Inde, le Japon et les États-Unis constituerait un investissement raisonnable.

1.4.1   Le Comité recommande vivement que de sérieux efforts soient consentis simultanément pour éviter une fuite des cerveaux hors d'Europe et pour rendre celle-ci attrayante non seulement aux yeux des scientifiques d'origine européenne, mais aussi de ceux qui proviennent de pays tiers.

1.5   Si les ressources destinées au soutien de la mobilité d'apprentissage ne croissent pas de manière significative, l'Union européenne et les États membres ne profiteront pas des avantages sociaux et économiques que peut apporter l'augmentation du nombre d'apprenants mobiles. En période de crise, des investissements structurels devraient être consacrés à une Europe mieux formée et plus compétitive. Afin d'améliorer les financements disponibles, l'UE devrait mobiliser l'ensemble des mécanismes et des partenaires dont elle dispose et intégrer la mobilité dans l'ensemble des politiques concernées, en permettant de recourir aux fonds structurels et aux financements prévus par le programme-cadre pour la recherche et le développement. Le Fonds social européen (FSE) devrait devenir une source de financement supplémentaire, surtout pour l'enseignement et la formation professionnels, et s'ajouterait ainsi aux fonds que fournit actuellement le Programme pour l'éducation et la formation tout au long de la vie 2007-2013.

1.6   Une plus grande mobilité d'apprentissage ne pourra aboutir à des améliorations que si l'expérience d'apprentissage à l'étranger atteint un certain niveau de qualité. Le Comité recommande donc que l'ensemble des programmes de mobilité souscrivent à la charte européenne de qualité pour la mobilité.

1.7   Le Comité suggère en outre une réforme des programmes de mobilité existants (Erasmus, Leonardo, Comenius, Grundtvig et Marie Curie) afin de simplifier les procédures et de garantir une réduction maximale des obstacles administratifs. Il importe tout particulièrement d'associer à ce processus les établissements d'éducation, les collectivités locales et régionales, les partenaires sociaux et les organisations de la société civile.

1.8   L'engagement dans le domaine de la mobilité devrait se traduire par un critère de référence ambitieux en matière de mobilité, inscrit dans le nouveau cadre pour la coopération européenne dans le domaine de l'éducation et de la formation (ET2020); ce critère de référence devrait faire la distinction entre divers groupes cibles (étudiants participant à un enseignement ou à une formation de type professionnel, enseignants, éducation non formelle, enseignement supérieur et élèves) et devrait être basé sur un ensemble de données statistiques nettement plus exhaustif.

1.9   Afin de faire connaître plus largement les programmes de mobilité d'apprentissage et d'augmenter le nombre des étudiants à l'étranger, il est nécessaire d'agir dans le domaine de la sensibilisation de manière plus efficace qu'il n'a été fait jusqu'à présent.

1.10   Le Comité soutient le lancement, au niveau européen, d'un portail internet unique sur lequel on trouverait aisément toutes les données relatives aux programmes paneuropéens de mobilité d'apprentissage et où les entreprises pourraient consulter des informations (notamment des curriculums vitae) concernant les jeunes à la recherche de possibilités de stage ou d'apprentissage et réciproquement. Il convient d'encourager les réseaux d'entreprises européennes (y compris les organisations de PME) et les professionnels européens à publier, sur leur site Internet, des informations concernant les programmes de mobilité à l'attention des apprenants et à y sensibiliser leurs membres.

1.11   Afin de développer le processus politique qui fera suite au Livre vert, le Comité recommande de définir la notion de mobilité d'apprentissage et de préciser à quelle tranche d'âge appartiennent les personnes qu'elle concerne.

1.12   Le Comité est convaincu que, pour promouvoir la mobilité d'apprentissage, il y a lieu de donner la priorité à l'enseignement des langues dans les programmes des établissements d'enseignement et de formation de tous niveaux. Il convient également d'examiner la possibilité de rendre obligatoire, pour tous les professeurs qui enseignent des langues dans les établissements d'enseignement supérieur, un séjour d'une année à l'étranger et de demander aux États membres de déployer davantage d'efforts, dans le cadre de leur politique d'éducation, afin d'atteindre l'objectif selon lequel chaque citoyen de l'UE devrait pouvoir s'exprimer dans au moins deux autres langues européennes.

2.   Résumé du Livre vert de la Commission européenne

2.1   Le 8 juillet 2009, la Commission européenne a publié un Livre vert intitulé «Promouvoir la mobilité des jeunes à des fins d'apprentissage». L'objectif est d'ouvrir un débat sur la meilleure manière d'améliorer les possibilités pour les jeunes en Europe de développer leurs connaissances et leurs compétences en séjournant à l'étranger dans le cadre de leurs études, d'une expérience professionnelle, d'un travail communautaire ou d'une formation complémentaire suivie au titre de l'apprentissage tout au long de la vie.

2.2   L'objet du Livre vert est vaste puisqu'il a vocation à couvrir la situation de tous les jeunes quel que soit leur cadre d'apprentissage; il peut s'agir d'écoliers, d'étudiants universitaires en maîtrise, mastère ou de doctorants, de stagiaires, d'apprentis, de jeunes participant à des échanges, à un travail bénévole ou à une formation professionnelle dans l'Union européenne ou bien dans un pays tiers (1). Ce document entend promouvoir une mobilité structurée, en mettant l'accent sur la mobilité physique des jeunes (âgés de 16 à 35 ans), tout en reconnaissant la valeur de la mobilité virtuelle (notamment par le développement des partenariats, des formations et des jumelages virtuels). L'objectif est d'examiner de quelle manière on peut mieux utiliser les mécanismes et instruments existants et ceux qui vont être créés afin d'encourager la mobilité des jeunes et comment mobiliser dans cette optique les divers niveaux de pouvoirs publics (européens, nationaux, régionaux et locaux) ainsi que les autres acteurs concernés (entreprises, société civile et individus). Le Livre vert met en avant nombre de secteurs qui requièrent des efforts supplémentaires et propose les moyens d'action qui peuvent être envisagés. Lorsqu'ils sont applicables, des exemples de bonnes pratiques sont présentés. Les apprenants mobiles peuvent bénéficier de possibilités de financement, de programmes d'éducation et de formation, ainsi que de conseils pratiques mais il convient de diffuser davantage les informations qui s'y rapportent et de les rendre plus accessibles.

2.3   Avec ses vingt ans d'existence, le programme Erasmus illustre les bienfaits de la mobilité dans l'enseignement supérieur. Dans son rapport sur la stratégie de Lisbonne publié en décembre 2007, la Commission européenne a souligné que la mobilité de type Erasmus devrait faire partie intégrante de toute formation universitaire (2). Elle insiste sur l'importance des investissements consacrés à l'éducation et à la formation; il s'agit de promouvoir le savoir et les compétences afin de lutter contre la crise économique actuelle. La mobilité d'apprentissage devrait offrir à tous les jeunes en Europe la possibilité de contribuer à la compétitivité et à la cohésion de l'UE. La mobilité doit être la règle et non plus l'exception (3). La libre circulation des connaissances devrait devenir une cinquième liberté au sein de l'UE.

2.4   Le communiqué de Louvain-la-Neuve, adopté le 29 avril 2009 par les ministres chargés de l'enseignement supérieur dans les pays participant au processus de Bologne, établit qu'en 2020, au moins 20 % des diplômés de l'Espace européen de l'enseignement supérieur devraient avoir étudié ou suivi une formation à l’étranger (4).

2.5   Le Livre vert lance donc une consultation publique et invite à répondre aux thèmes et aux questions qui suivent:

Comment encourager un plus grand nombre de jeunes à séjourner à l'étranger dans le cadre de leurs études, d'une formation complémentaire, du volontariat ou d'une expérience professionnelle?

Quels sont les principaux obstacles à la mobilité qu'il faut surmonter?

Quel est le meilleur moyen pour les acteurs concernés (écoles, universités, entreprises, organisations d'entreprises, administrations gouvernementales, collectivités locales, organisations de la société civile et autres) de coopérer plus étroitement et plus efficacement, notamment afin d'encourager les jeunes originaires d'autres États membres à les rejoindre pour acquérir de l'expérience auprès d'eux. À cet égard, comment inciter les entreprises à accueillir des participants aux programmes de mobilité, notamment de jeunes entrepreneurs et des apprentis?

3.   Mobilité: avantages, obstacles, dangers

3.1   Comme le souligne à juste titre le Livre vert, la mobilité d'apprentissage «est un des meilleurs moyens pour les individus, et pour les jeunes en particulier, d'améliorer leur employabilité et leur épanouissement personnel».

En séjournant dans un pays étranger afin d'y étudier, dans le cadre de leur emploi, pour élargir leur expérience professionnelle ou au titre du volontariat, les jeunes bénéficient d'une véritable occasion d'élargir leur horizon. Cependant, les statistiques mentionnées dans le Livre vert indiquent qu'en 2006, les programmes de mobilité existants (5) ont offert des perspectives de mobilité à quelque 310 000 jeunes, soit seulement 0,3 % de la catégorie des 16-29 ans dans l'UE. Les données d'Eurostat montrent qu'en dehors de ces programmes, quelque 550 000 autres étudiants entreprennent chaque année des études à l'étranger.

3.2.1   En tout état de cause, la mobilité demeure faible et ce malgré les nombreux efforts déployés par les institutions européennes et par d'autres acteurs au moyen de programmes de soutien et d'autres aides. La mobilité est plus facilement accessible à certains étudiants qu'à d'autres; à titre d'exemple, les personnes en formation professionnelle ou les apprentis demeurent confrontés à de nombreux obstacles pratiques et pas moins de 80 % des fonds vont aux étudiants de l'enseignement supérieur.

3.3   Le Livre vert entend œuvrer pour que les séjours à l'étranger d'études ou de travail, plutôt qu'une exception, deviennent une étape systématique du parcours de tout jeune européen. Les jeunes doivent mieux comprendre les nombreux avantages que peut leur offrir une telle expérience, notamment pour améliorer leurs connaissances, linguistiques ou autres, ou pour élargir leurs compétences interculturelles, bagage qui leur sera utile tout au long de leur vie dans un monde de plus en plus multiculturel. La mobilité de formation professionnelle dote les jeunes d'un bon état d'esprit, notamment en développant leur sens de l'initiative, en les ouvrant sur l'extérieur et en leur donnant confiance. L'expérience montre que les personnes ayant étudié à l'étranger sont susceptibles d'être plus mobiles au cours de leur carrière.

3.4   Le CESE souscrit pleinement à l'objectif du renforcement de la mobilité des jeunes à des fins d'apprentissage et d'élargissement de leur expérience professionnelle, car il permettra d'accroître la mobilité de toutes les catégories d'âge. Pour y parvenir, il convient d'encourager les hôtes potentiels à adopter une approche qui attire les jeunes vers leur pays et leurs villes.

Les principaux bénéficiaires de la mobilité d'apprentissage sont les jeunes, les institutions d'enseignement et de recherche et les entreprises. À long terme, elle permettra d'améliorer la compétitivité de l'UE, en favorisant l'essor d'une société de la connaissance, et de promouvoir la citoyenneté européenne, en renforçant le sens de l'identité européenne et en éveillant chez les citoyens une attitude plus favorable à l'Europe. La mobilité contribue à l'apprentissage des langues et au multilinguisme.

3.5.1   La mobilité des apprenants concourt à la libre circulation du savoir qui pourrait être considérée comme la cinquième liberté de l'UE. Afin de promouvoir la mobilité d'apprentissage, les systèmes d'éducation et de formation et les institutions qui s'y consacrent devront s'ouvrir davantage, notamment pour accroître la coopération entre les établissements d'enseignement et pour rendre leur travail plus efficace. La mobilité entre les entreprises et entre le monde de l'entreprise et celui de l'enseignement et de la recherche aura elle aussi un impact nettement plus prononcé sur la constitution de «grappes» et les partenariats en matière technologique, renforçant ainsi la compétitivité et la capacité d'innovation de l'Europe.

3.5.2   Une plus grande mobilité sera particulièrement bénéfique aux institutions universitaires les plus prestigieuses, qui auront la possibilité d'améliorer leur diversité culturelle et de recruter des équipes de recherche vraiment exceptionnelles. Le développement de la mobilité offrira également un avantage aux entreprises au sein desquelles règne un climat multiculturel et polyglotte ainsi qu'à toute entreprise dont les activités ont une envergure internationale. Dans un monde où la compétitivité de l'UE est de plus en plus concurrencée par des pays qui se développent rapidement (Chine, Inde, Brésil, Afrique du Sud et bientôt beaucoup d'autres), l'avenir des entreprises européennes (et surtout les perspectives en matière de possibilités d'emploi de qualité) pourra être garanti soit par la position de pionnier qu'elle assumera dans le domaine des nouvelles technologies et des productions de niche, qui dépendra fortement de sa capacité à rester à la pointe de la recherche et du développement, soit grâce au secteur plus vaste des services.

Il conviendra cependant de faire face à un certain nombre d'obstacles et de dangers parmi lesquels:

une éventuelle concentration de la recherche de haut niveau - et de l'enseignement ainsi que de la formation s'y rapportant – autour de centres d'excellence moins nombreux, élitistes, attirant les meilleurs étudiants d'Europe au détriment de nombreux autres établissements moins renommés,

l'éventualité que l'enseignement soit de plus en plus dispensé dans les principales langues internationales (notamment en anglais, français, espagnol et allemand), au détriment des États membres dont les langues sont peu connues au-delà de leurs frontières,

le risque que compte tenu du fait que l'accent est de plus en plus mis sur l'anglais, les étudiants et les chercheurs mobiles préfèrent une destination du monde anglophone (les États-Unis, la Chine, le Japon, d'autres pays de l'Asie de l'Est, etc.), auquel cas il pourrait alors s'avérer difficile de les convaincre de revenir en Europe le moment venu. Toute initiative européenne en matière de mobilité devra comporter des dispositions suffisamment attrayantes pour inciter les universitaires mobiles à s'établir dans l'UE à long terme,

une fuite des cerveaux accélérée par l'émergence de nouvelles possibilités d'emploi dans les pays en développement à revenu intermédiaire (6),

la prédominance des étudiants des disciplines littéraires, au détriment de ceux des filières scientifiques, parmi les bénéficiaires de la mobilité, car nombre de petites entreprises du secteur scientifique risquent de ne pouvoir rémunérer que des personnes aux compétences de base, tandis qu'il leur sera plus aisé de s'attacher des profils aux qualifications linguistiques ou apparentées.

3.6.1   Afin de préserver sa position de chef de file technologique, l'Europe se doit absolument de produire les esprits les plus brillants. Actuellement, on considère que les États-Unis demeurent les vainqueurs de la «guerre des talents». Près de 400 000 Européens qui ont suivi une formation scientifique et technique vivent et travaillent dans ce pays, où l'on trouve également trente-six des cinquante meilleures universités du monde; seules dix d'entre elles sont situées dans l'UE. Cette domination américaine sera cependant elle aussi remise en cause. Le talent ne fleurit plus exclusivement dans les pays occidentaux. La Chine, l'Inde, le Brésil, la Russie et d'autres nations arrivent sur le devant de la scène dans la course mondiale au talent et à l'innovation. Les entreprises européennes seront confrontées à une concurrence acharnée pour ce qui est de cultiver, d'attirer et de retenir les plus talentueux.

Malgré plusieurs tentatives antérieures visant à promouvoir la mobilité d'apprentissage grâce à des programmes de soutien (7) et à d'autres instruments (8), il existe d'autres obstacles, s'agissant notamment:

de difficultés juridiques (charges administratives),

d'entraves pratiques (connaissances linguistiques, différences culturelles, insuffisance des moyens financiers, inégalités économiques, difficultés liées à la transférabilité des financements, manque d'informations facilement accessibles concernant les programmes de mobilité, notamment en raison du peu de sites Internet efficaces),

de problèmes de reconnaissance mutuelle des qualifications,

de la reconnaissance de la mobilité d'apprentissage dans les programmes nationaux et des difficultés liées au droit de séjour;

des très grandes disparités entre universités européennes pour ce qui concerne les pratiques et les contrôles de financement, certaines étant indépendantes (comme au Royaume-Uni), tandis que d'autres sont sous la tutelle plus étroite de l'État,

d'un engagement insuffisant des États membres (9) et du secteur privé (10).

3.7.1   La langue est un important obstacle à la mobilité (11), puisque si l'on ne parle pas la langue du pays où l'on séjourne, les expériences en matière d'apprentissage et de vie sociale seront sérieusement limitées. Il est à noter que les Européens ne sont que 18 % à avoir quitté leur région d'origine, 4 % à vivre dans un autre pays que celui dans lequel ils sont nés et 3 % d'entre eux à résider en dehors de l'Union européenne. Aux États-Unis, 32 % des citoyens vivent dans un autre État que celui de leur naissance. Cette situation pourrait être fondamentalement liée à la diversité linguistique qui existe dans l'UE (12).

Cependant, un obstacle fondamental qu'il convient de surmonter sera de garantir aux étudiants qui se rendent à l'étranger que leur séjour ne prendra pas la forme d'une mauvaise expérience, pour quelque raison que ce soit. Un vécu négatif sera contreproductif, surtout pour les étudiants les plus vulnérables, notamment pour ceux qui souffrant d'un handicap, appartenant à une minorité du fait de leur orientation sexuelle, provenant de milieux pauvres ou de groupes ethniques minoritaires, ou étant affectés par un autre désavantage, vivaient mal cette expérience, qui leur serait plus dommageable que profitable. La durée du séjour à l'étranger doit en outre être suffisamment longue pour que l'esprit de celui qui y participe puisse s'imprégner de nouvelles idées et que ses attitudes ainsi que son comportement gagnent en souplesse. La mobilité virtuelle peut être un précieux instrument pour les jeunes handicapés. Les jeunes qui sont privés de mobilité physique pourront participer à la mobilité d'apprentissage virtuelle en utilisant des outils informatiques. La mobilité d'apprentissage virtuelle ne doit pas pour autant remplacer la mobilité d'apprentissage physique.

3.8.1   Il est particulièrement important que les jeunes étudiants, surtout ceux en âge scolaire, soient suffisamment encadrés pour supporter le changement de pays, pour être aidés en cas de difficultés linguistiques, pour bénéficier d'un logement décent tout au long de leur séjour à l'étranger ainsi que de toutes les aides financières prévues et ce, en allant même au-delà des niveaux de financement actuellement accordés s'il s'avère nécessaire d'y apporter un complément, et, enfin, pour s'assurer qu'ils soient totalement acceptés dans leur nouvelle communauté.

4.   Solutions: répondre aux questions posées par le Livre vert

4.1   Il est essentiel que toutes les parties comprennent et reconnaissent les avantages que peut leur apporter la mobilité d'apprentissage. Il est nécessaire de convaincre les employeurs, et notamment les PME, qu'une telle mobilité peut offrir de la valeur ajoutée à leur entreprise, en encourageant par exemple l'apprentissage et les stages transnationaux ou en aidant ces entreprises à conquérir un nouveau marché. Néanmoins, dans le cadre d'un marché libre, il convient d'éviter toute réglementation excessive au niveau européen.

4.2   Préparer une période de mobilité: information et orientation

4.2.1   Le Comité estime que, souvent, les jeunes eux-mêmes ne tiennent pas compte des avantages que pourrait leur apporter la mobilité à des fins d'apprentissage, en améliorant notamment leurs chances sur le marché de l'emploi. Bien que des portails d'information (13) aient été ouverts sur Internet, entre autres par la Commission européenne, il est véritablement permis de se demander s'ils sont suffisamment conviviaux et accessibles. Le Comité soutient le lancement, au niveau européen, d'un portail Internet unique sur lequel on trouverait aisément toutes les données relatives aux programmes paneuropéens de mobilité à des fins d'apprentissage et où les entreprises pourraient consulter des informations (notamment des curriculums vitae) concernant les jeunes à la recherche de possibilités de stage ou d'apprentissage et réciproquement.

4.2.2   Il convient d'encourager les réseaux d'entreprises et de professionnels européens (y compris les organisations représentatives des PME) à publier, sur leur site Internet, des informations concernant les programmes de mobilité d'apprentissage et d'y sensibiliser leurs membres.

Les «points services» sont également importants car ils fournissent des conseils aux PME et aux autres entreprises intéressées et les encouragent à consentir davantage d'efforts pour offrir plus de stages aux jeunes.

4.2.3.1   Langues et culture

4.2.3.2   Si l'on souhaite vraiment supprimer l'un des principaux obstacles à la mobilité d'apprentissage et atteindre l'objectif selon lequel chaque citoyen devrait comprendre et parler au moins deux autres langues de l'UE (14), le Comité recommande d'examiner la possibilité de rendre obligatoire, pour tous les professeurs qui enseignent des langues dans les établissements d'enseignement supérieur, un séjour d'une année à l'étranger, ainsi que de demander aux États membres de déployer davantage d'efforts, dans le cadre de leur politique d'éducation, afin d'atteindre l'objectif selon lequel chaque citoyen de l'UE devrait pouvoir s'exprimer dans au moins deux autres langues européennes.

4.3   Aspects juridiques

4.3.1   Le Comité invite les États membres à mettre correctement en œuvre le droit communautaire et, par ailleurs, à lever les obstacles dans les domaines de l'administration et de la législation: (permis de séjour, droits de sécurité sociale ou non-reconnaissance des cartes d'étudiants étrangères). Le Comité est fermement convaincu que les obstacles à la mobilité liés aux problèmes de visa requièrent une solution immédiate. Concernant les étudiants originaires de pays tiers qui viennent dans l'UE à des fins d'études, de formation non rémunérée, d'échange d'élèves ou de volontariat pour une durée supérieure à trois mois, la directive 2004/114/CE prévoit des conditions spécifiques qui facilitent la procédure de visas. Néanmoins, les critères définis par la directive, qui concernent des groupes de personnes spécifiques, pourraient en fait entraver la mobilité (15). Le Comité approuve l'idée que les États membres de l'UE devraient envisager d'étendre l'application de la directive 2004/114/CE aux jeunes qui prennent part au service volontaire européen, à un échange d'élèves ou à une formation non rémunérée.

4.4   Comment favoriser une plus grande mobilité au départ et à destination de l'Union?

4.4.1   La mobilité doit tenir une place importante dans les relations entre l'UE et les pays qui l'entourent, lesquels devraient être associés aux débats consacrés à cette politique et à l'organisation de programmes.

4.4.2   Comme mentionné précédemment, la population européenne doit actualiser ses compétences afin de répondre aux défis liés à la mondialisation et à une concurrence croissante. Les chercheurs européens doivent avoir accès aux meilleurs instituts du monde afin que l'Espace européen de la recherche puisse bénéficier de leurs expériences et de leur expertise. Quant aux étudiants européens, ils doivent avoir la possibilité de s'inscrire dans les meilleurs établissements d'enseignement de la planète. Pour la compétitivité européenne de demain, il est tout aussi vital de promouvoir la mobilité des jeunes Européens que d'attirer en Europe des jeunes originaires de pays tiers. Pour être attrayante, l'UE doit disposer des meilleures universités. Ses établissements universitaires et ses entreprises recherchent des possibilités d'améliorer leur coopération afin de développer un avantage concurrentiel dans le domaine de la recherche et du développement (16).

4.4.3   Dans cette optique, le Comité estime qu'il est nécessaire d'augmenter le nombre de pays étrangers qui participent aux programmes de mobilité de l'UE sur le long terme. Le Comité juge qu'il était opportun d'élargir le champ d'application géographique du programme Erasmus Mundus et qu'il convient d'envisager la même extension pour le programme Erasmus pour jeunes entrepreneurs.

4.4.4   Le Comité considère qu'à longue échéance, l'élargissement progressif des programmes de mobilité d'apprentissage à des pays tiers tels que la Chine, l'Inde, le Japon et les États-Unis constituerait un investissement raisonnable.

4.4.5   Le Comité recommande vivement que de sérieux efforts soient consentis simultanément pour éviter une fuite des cerveaux hors d'Europe et pour rendre celle-ci attrayante non seulement aux yeux des scientifiques d'origine européenne, mais aussi de ceux qui proviennent de pays tiers.

4.5   Reconnaissance et validation

4.5.1   Un obstacle majeur à la mobilité est que la validation et la reconnaissance de l'apprentissage tant formel que non formel demeurent insuffisantes, quand elles ne sont pas tout simplement inexistantes. L'étude PRIME menée par le réseau des étudiants Erasmus (ESN) révèle qu'un tiers des étudiants rencontre des difficultés liées à la reconnaissance des études qu'ils ont effectuées à l'étranger. De toute évidence, les établissements d'enseignement supérieur et les gouvernements ont encore beaucoup de travail devant eux. Le Comité invite l'ensemble des États membres à entreprendre immédiatement de reconnaître, ratifier et mettre dûment en œuvre la Convention de Lisbonne sur la reconnaissance des qualifications.

4.5.2   Le Comité soutient l'idée que la mobilité d'apprentissage devrait être accessible à tous les jeunes, qu'ils suivent un enseignement ou une formation formelle, non formelle ou informelle. Il convient de promouvoir la mobilité dans l'enseignement entre les différents niveaux d'études. Des liens doivent être instaurés entre l'enseignement général, professionnel et supérieur et le système de crédits devrait être pleinement appliqué, afin de faciliter la mobilité au sein de l'enseignement et de la formation professionnels dont les structures nationales varient fortement. Il faut en outre instaurer davantage de passerelles entre formation initiale et formation continue. À cet effet, il est indispensable de garantir une mise en œuvre rapide et cohérente du cadre européen des qualifications.

4.5.3   Les différences entre les pays concernant les conditions requises pour suivre un cursus de l'enseignement supérieur, la reconnaissance des qualifications mutuelles, les aides au paiement des droits d'inscription et autres bourses, ainsi que certains autres critères, doivent être intégralement pris en compte le cas échéant. Par exemple, les conditions requises pour suivre un mastère européen ne sont pas les mêmes que pour un mastère japonais; un étudiant japonais devrait continuer à payer des droits d'inscription dans sa propre université, de sorte que ses études en Europe atteindraient un coût exorbitant.

4.6   Un nouveau partenariat dans le domaine de la mobilité d'apprentissage

4.6.1   Les objectifs en matière de mobilité d'apprentissage ne pourront être atteints que grâce à une coopération et des efforts généralisés impliquant tous les niveaux (l'UE, les États membres, les régions, les établissements éducatifs, les partenaires sociaux et les organisations de la société civile ainsi que les jeunes eux-mêmes). Une véritable volonté d'agir des États membres est indispensable si l'on souhaite que cette mobilité progresse.

4.7   Faut-il définir des objectifs en matière de mobilité dans l'UE?

4.7.1   Le Comité estime qu'il convient de consacrer davantage d'efforts aux données statistiques utilisées dans le Livre vert, puisque seules des informations exactes peuvent mesurer l'efficacité des programmes existants de mobilité d'apprentissage (17) et contribuer à l'élaboration de stratégies solides pour l'avenir, qui proposent de véritables objectifs (exprimés en termes de pourcentages) en matière de mobilité pour chacun des groupes ciblés.

4.7.2   Il est essentiel que le processus de Bologne définisse un objectif clair en matière de mobilité et il conviendrait d'en faire de même dans d'autres secteurs de l'éducation. Le Comité souscrit donc à la proposition de fixer des objectifs en matière de mobilité pour l'éducation et la formation professionnelle, pour le personnel enseignant, pour les écoliers et pour l'éducation non formelle. Ces objectifs ne devraient pas s'appliquer uniquement à l'UE dans son ensemble, mais également à chaque État membre. En outre, les régions et les établissements d'enseignement devraient définir leurs propres objectifs. La qualité de la mobilité d'apprentissage devrait être un élément central pour leur fixation.

Bruxelles, le 16 décembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  L'apprentissage peut être formel (s'il se déroule au sein du système éducatif) ou informel (dans le cadre d'organisations de la jeunesse ou du volontariat).

(2)  Rapport stratégique concernant la stratégie renouvelée de Lisbonne pour la croissance et l’emploi: lancement du nouveau cycle (2008-2010), COM(2007) 803.

(3)  Rapport du forum d'experts de haut niveau sur la mobilité, juin 2008, http://ec.europa.eu/education/doc/2008/mobilityreport_fr.pdf

(4)  http://www.ond.vlaanderen.be/hogeronderwijs/bologna/conference/documents/Leuven_Louvain-la-Neuve_Communiqué_April_2009.pdf

(5)  Erasmus, Leonardo, Comenius, Grundtvig, Marie Curie, programme «Culture», programme «Jeunesse en action», Service volontaire européen, programme «L'Europe pour les citoyens» dans le cadre du programme Jeunesse en action.

(6)  Tunisie, Brésil, Afrique du Sud.

(7)  Erasmus, Leonardo, Comenius, Grundtvig, Marie Curie, programme «Culture», programme «Jeunesse en action», Service volontaire européen, programme «L'Europe pour les citoyens» dans le cadre du programme Jeunesse en action.

(8)  Europass, le système européen de transfert et d’accumulation de crédits (ECTS – dans l'enseignement supérieur), le supplément au diplôme, le cadre européen des certifications pour l'éducation et la formation tout au long de la vie, le système européen de transfert d’unités capitalisables pour l’éducation et la formation professionnelles (ECVET), Youthpass, EURAXESS, la directive sur le visa d'étudiant et le paquet sur le «visa scientifique».

(9)  Les doctorats varient d'un État membre à l'autre et il existe une grande diversité de systèmes d'enseignement et de formation professionnels.

(10)  Le secteur privé n'est pas suffisamment informé au sujet des programmes visant à promouvoir la mobilité d'apprentissage, et on peut se demander quels avantages ils peuvent apporter aux entrepreneurs.

(11)  Les chiffres pour les années 2002-2003 montrent que dans les États membres, les élèves de l'enseignement secondaire inférieur et supérieur apprennent en moyenne respectivement 1,3 et 1,6 langue étrangère. Quant aux étudiants qui suivent un enseignement ou une formation professionnels, ils sont encore plus éloignés de l'objectif qui prévoit la maîtrise de deux langues étrangères.

(12)  En Europe, seuls 3 % des PME possèdent des filiales, des succursales ou des participations à l'étranger.

(13)  Ploteus (portail sur les opportunités d'études et de formation en Europe), portail européen de la jeunesse, Study in Europe, Euraxess – chercheurs en mouvement, le site reprenant toutes les actions Marie Curie, l'Europe est à vous, Euroguidance, Eures, Eurodesk, Erasmus pour jeunes entrepreneurs, et soutien de l'UE à la formation et à la mobilité à l'intention des PME.

(14)  Objectif défini en 2002 lors du Conseil européen de Barcelone.

(15)  La directive demande par exemple aux étudiants des pays tiers de disposer d'un minimum de moyens financiers pour couvrir leurs frais de subsistance.

(16)  Voir également la communication de la Commission européenne sur «Un nouveau partenariat pour la modernisation des universités: le Forum européen pour le dialogue université-entreprise» – COM(2009) 158 final.

(17)  Par ailleurs, il y aurait lieu d'envisager des analyses comparatives avec des programmes bilatéraux de mobilité à des fins d'apprentissage, comme le programme «Vulcanus», destiné aux étudiants en sciences et en ingénierie et associant l'Europe et le Japon, dans la mesure où ces dispositifs sont efficaces et bien ciblés.


22.9.2010   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 255/87


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions: vers un meilleur ciblage de l'aide aux agriculteurs établis dans les zones à handicaps naturels»

COM(2009) 161 final

(2010/C 255/16)

Rapporteure: MmeTODOROVA

Le 21 avril 2009, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions - Vers un meilleur ciblage de l'aide aux agriculteurs établis dans les zones à handicaps naturels»

COM(2009) 161 final.

La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 11 novembre 2009 (rapporteure: Mme TODOROVA).

Lors de sa 458e session plénière des 16 et 17 décembre 2009 (séance du 17 décembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 81 voix pour, 1 voix contre et 4 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Dans plusieurs avis (1), le CESE a souligné qu'il est de première importance qu'une indemnité compensatoire adéquate soit octroyée aux zones défavorisées, car il s'agit d'un instrument indispensable pour préserver le paysage rural et l'agriculture. Le soutien à ces zones défavorisées est essentiel pour garantir la poursuite de la production agricole et contribuer à la vitalité des zones rurales, afin de prévenir l'abandon des terres et la dépopulation dans les zones à handicap naturel.

1.2   Le régime de soutien aux zones défavorisées devrait également contribuer à préserver la capacité de production alimentaire, rôle susceptible de gagner en importance si les changements climatiques en cours réduisent les capacités de production dans d'autres zones du globe. Dès lors, le système devrait fonctionner selon le principe que la promotion du maintien d'une activité agricole dans les zones défavorisées, faute de laquelle des terres seraient susceptibles d'être abandonnées, offre des avantages publics.

1.3   Le régime de soutien aux zones défavorisées ne devrait pas être confondu avec les engagements agro-environnementaux pris sur une base volontaire. Ce régime doit, en principe, offrir une compensation aux agriculteurs qui opèrent dans des circonstances plus difficiles et sont les moins à-même d'obtenir une compensation du marché, tout en contribuant le plus à la préservation du paysage.

1.4   Les huit critères biophysiques proposés pourraient constituer une base appropriée pour délimiter les zones défavorisées, mais la disponibilité des données et la sélection de seuils corrects revêtent une importance cruciale. Le CESE recommande par conséquent que les États membres procèdent à une analyse approfondie de l'impact des critères proposés, y compris en établissant des cartes détaillées.

1.5   La communication suggère qu'une zone devrait être considérée comme défavorisée si 66 % de sa surface agricole utile remplit au moins l'un des huit critères. Le CESE souhaiterait analyser les résultats de l'exercice de délimitation des zones défavorisées et donner un avis sur les seuils fixés.

1.6   L'utilisation de critères cumulatifs reposant sur des preuves scientifiques dans des zones hétérogènes qui pâtissent simultanément de handicaps multiples est très utile, dans la mesure où ces critères abordent de manière pratique les interactions entre de nombreux facteurs pertinents. En outre, les critères de désignation proposés pourraient être étendus afin d'inclure des facteurs supplémentaires, tels que l'isolement, qui pourrait aussi être considéré comme un handicap naturel.

1.7   Après la désignation des zones défavorisées sur la base des critères biophysiques communs, il peut s'avérer nécessaire de procéder à un certain niveau d'affinement. Le cas échéant, le CESE estime que l'indicateur le mieux adapté que l'on puisse utiliser serait un indicateur lié à la production et reflétant la situation économique réelle de l'entrepreneur, y compris les coûts d'opportunité relatifs au travail familial et aux capitaux propres. La Commission garantira que les critères utilisés par les États membres sont objectifs et non discriminatoires, et qu'ils répondent aux objectifs du dispositif.

1.8   Le CESE demande donc que le travail supplémentaire demandé aux agriculteurs des zones défavorisées, ainsi que l'accroissement des frais d'investissement auquel ils sont confrontés, soient appréciés comme il se doit et qu'il en soit tenu compte dans la nouvelle formule de paiement établie par le règlement 1698/2005.

1.9   Il faut prévoir une période de transition (phasing-out) adéquate pour permettre aux exploitants agricoles de s'adapter au nouveau régime d'aide en faveur des zones défavorisées.

2.   Historique

2.1   Mises en place en 1975, les aides aux zones défavorisées (aujourd'hui rebaptisées «paiements compensatoires de handicaps naturels») soutiennent le maintien de l'activité agricole dans les zones de montagne, dans les zones défavorisées autres que les zones de montagne (les zones défavorisées dites «intermédiaires», qui font l'objet de la communication à l'examen) et dans les zones pénalisées par des handicaps spécifiques (par exemple les îles et les zones côtières, qui représentent 9 % de la superficie agricole). Les zones de montagne couvrent près de 16 % de la superficie agricole de l'Union européenne et sont définies selon l'altitude, la déclivité ou une combinaison de ces deux facteurs. Les zones situées au nord du 62e parallèle sont aussi considérées comme des zones de montagne. Environ 31 % des terres agricoles de l'Union européenne ont été classées en zones défavorisées intermédiaires sur la base de plus de 100 critères nationaux très différents, dont la diversité au sein de l'UE est considérée par la Cour des comptes européenne comme un élément susceptible d'entraîner des disparités de traitement entre les bénéficiaires (2). Toutes les exploitations situées dans ces zones ne perçoivent pas l'aide en faveur des zones défavorisées.

2.2   L'article 50, paragraphe 3, point a), du règlement FEADER (CE) no 1698/2005 (3) a redéfini les zones pénalisées par des handicaps naturels, hors zones de montagne et zones présentant des handicaps spécifiques, de la manière suivante: «zones affectées de handicaps naturels importants, notamment une faible productivité des sols ou des conditions climatiques difficiles, dans lesquelles il importe de maintenir une agriculture extensive pour la gestion des terres», tandis que son article 37 introduisait un changement au niveau du calcul des aides. Toutefois, en 2005, le Conseil n'était pas parvenu à s'accorder sur un système commun de classification de ces zones. Il avait décidé, par conséquent, de maintenir le régime existant pendant un temps limité et avait invité la Commission européenne à revoir le régime d'aides aux zones défavorisées. Le nouveau système de délimitation des zones sera vraisemblablement en place en 2014.

2.3   La classification actuelle des zones défavorisées intermédiaires se fonde sur les trois types d'indicateurs énoncés à l'article 19 du règlement FEADER (CE) no 1257/1999 (4): faible productivité des terres; résultats économiques sensiblement inférieurs à la moyenne dans le secteur agricole; faible densité ou tendance à la régression d'une population qui dépend de manière prépondérante de l'activité agricole. Cette classification repose en partie sur des critères socio-économiques qui, selon la Commission, ne reflètent plus les objectifs essentiels du régime de paiements compensatoires de handicaps naturels. De surcroît, il n'a pas été tenu compte de l'évolution des données démographiques et économiques exploitées pour actualiser la délimitation. Enfin, cette classification s'est faite sur la base d'un large éventail de critères nationaux rarement comparables au niveau européen.

2.4   Ce n'est qu'au niveau national que l'on peut collecter les informations nécessaires à l'analyse des résultats de l'application d'une nouvelle méthode de délimitation à une échelle suffisamment fine (par exemple au niveau de la commune, qui correspond au niveau LAU 2 de la nomenclature des unités territoriales statistiques). La Commission suggère d'inviter les États membres à procéder, sur leur territoire, à la simulation de l'application de huit critères biophysiques (la faiblesse des températures, le stress thermique, le drainage des sols, la texture des sols et la pierrosité, la profondeur d'enracinement, les propriétés chimiques des sols, le bilan hydrique des sols et la pente) et à établir des cartes des zones qui deviendraient admissibles au vu des résultats de ces simulations. On considère qu'une zone est pénalisée par un handicap naturel sévère lorsque 66 % au moins de sa surface agricole utile remplit au moins l'un des critères à la valeur-seuil.

2.5   À l'heure actuelle, 13 États membres utilisent plusieurs indicateurs combinés pour calculer un indice servant à la classification des zones en fonction de seuils ou de catégories spécifiques. Dans certains cas, on estime que les «systèmes d'indices» sont plus sophistiqués que les critères biophysiques et, partant, qu'ils sont plus à même de révéler la présence de handicaps dans une région donnée. Cela étant, du point de vue de la Commission, la mise en place d'un système d'indices commun à appliquer uniformément dans l'ensemble des États membres supposerait de consentir des efforts considérables de conception, de collecte de données, d'analyse et de mise en œuvre. C'est pourquoi l'instauration d'un système d'indices européen permettant de dûment établir la présence de handicaps naturels ne serait ni utile ni réaliste.

2.6   La Commission estime également que dans les cas où les handicaps naturels peuvent être surmontés, il est nécessaire d'affiner la méthode de zonage en appliquant des critères biophysiques en combinaison avec des indicateurs de production appropriés.

2.7   Selon la communication, une fois la procédure de zonage achevée, des règles d'admissibilité appropriées applicables aux exploitations sont un moyen efficace pour cibler l'aide. Selon la Commission, près de 150 critères différents d'admissibilité applicables aux exploitations existent aujourd'hui dans les États membres. Certains d'entre eux sont susceptibles de susciter certaines inquiétudes quant à leur compatibilité avec l'OMC, car ils excluent certains secteurs de production ou certaines activités agricoles du bénéfice des aides. Certains États membres excluent les exploitants agricoles à temps partiel du bénéfice des aides, alors que ceux-ci contribuent à la réalisation des objectifs poursuivis par la mesure.

2.8   Quatre options envisageables ont été soumises à consultation publique le 22 mai 2008:

Option 1: Statu Quo+

Dans ce scénario, les États membres seraient invités à renoncer aux indicateurs socio-économiques actuellement utilisés pour délimiter les zones défavorisées et à fixer les critères qu'ils jugent les plus appropriés pour définir les handicaps naturels pesant sur l'agriculture.

Option 2: Critères communs

Les zones défavorisées seraient classées sur la base des critères biophysiques communs.

Option 3: Règles d’admissibilité

La législation de la Communauté fournirait un cadre de référence pour les critères d'admissibilité, en indiquant les principes et le type de critères à utiliser pour exclure les modes d'exploitation intensifs (par exemple, densité de cheptel maximale, rendement moyen, marge brute standard).

Option 4: Haute valeur naturelle

Cette option impliquerait une délimitation plus ciblée des zones: seules les zones classées en terres agricoles à haute valeur naturelle à l'intérieur des zones pénalisées par des handicaps naturels pourraient être considérées comme étant des zones défavorisées.

3.   Position du Comité

3.1   L'agriculture est l'un des secteurs économiques les plus importants de l'UE, qui emploie près de 30 millions de personnes. Il est essentiel de préserver le modèle européen d'agriculture et la disponibilité de denrées alimentaires de qualité ainsi que d'assurer l'existence d'emplois pour préserver la continuité du tissu social dans les zones rurales, mais aussi pour permettre à celles-ci de s'acquitter de la responsabilité qui est la leur au sens large en matière de gestion du territoire. Cela contribuera également à protéger la riche diversité qui est la nôtre en termes d'alimentation, de traditions locales et d'artisanat. Une agriculture durable offre de nombreux effets secondaires positifs, car elle fournit des biens publics en préservant la biodiversité et l'habitat de la faune sauvage ainsi qu'en assurant la conservation de paysages attrayants et bien entretenus.

3.2   Les zones défavorisées non montagneuses abritent 30 % des exploitations agricoles de l'UE; elles représentent 39 % de la superficie agricole utilisée (SAU), 31 % de la main-d'œuvre agricole et 26 % du potentiel économique exprimé en termes de taille économique. Les zones rurales sont en cours de dépeuplement en Europe, et les zones dites défavorisées sont les plus vulnérables. Ce processus est susceptible d'avoir un effet très destructeur. C'est pourquoi le soutien apporté par le régime est essentiel pour garantir la poursuite de la production agricole et contribuer à la vitalité des zones rurales, afin de prévenir l'abandon des terres et la dépopulation dans les zones à handicap naturel.

3.3   Dans plusieurs avis, le CESE a insisté sur les difficultés auxquelles sont confrontés les agriculteurs dans les zones défavorisées et a souligné qu'il est de première importance qu'une indemnité compensatoire adéquate soit octroyée à ces zones afin de garantir que les terres continuent à être exploitées pour la production agricole. Le CESE considère l'indemnité compensatoire comme un instrument indispensable pour préserver le paysage rural et l'agriculture dans des localités particulièrement sensibles sur les plans économique, écologique et social. Le CESE accorde une attention toute particulière aux problèmes des régions septentrionales de l'UE.

3.4   Dans sa communication, la Commission s'emploie à identifier (par cartographie) les zones qui présentent de lourds obstacles à la production agricole. Les critères proposés peuvent, au cours d'une première phase, fournir une base adéquate à l'évaluation des handicaps naturels dans l'UE. Vu que le bon fonctionnement du régime est à ce point important pour l'avenir de la PAC, une évaluation minutieuse des critères suggérés est cependant nécessaire. Le CESE se félicite donc de la coopération déployée à cette fin entre la Commission et le Conseil (5).

3.5   Il est vital que des données relatives aux huit critères biophysiques soient disponibles pour que les zones agricoles intermédiaires puissent être délimitées et classifiées de manière claire et objective. Il est très important que les États membres procèdent à une analyse approfondie de l'impact des critères proposés, y compris au moyen de cartes détaillées. En outre, le fait de permettre aux États membres de fournir à la Commission des simulations concernant des critères supplémentaires et des seuils différents contribue également à mieux tenir compte des caractéristiques spécifiques de chaque État membre dans le débat. L'on pourrait considérer la délimitation des zones défavorisées au niveau des communes (LAU 2) comme présentant un degré de détail suffisant.

3.6   La communication suggère qu'une zone devrait être considérée comme défavorisée si 66 % de sa surface agricole utile remplit au moins l'un des huit critères. Cela est synonyme d'additionnalité, jusqu'à huit sous-totaux différents étant susceptibles d'être additionnés (abstraction faite des chevauchements éventuels) pour obtenir la superficie totale des terres répondant aux critères dans une région donnée. Alors que l'exercice tout entier de zonage vise à canaliser les aides vers les zones où elles sont cruciales pour le maintien de l'agriculture, il est estimé que la limite proposée est déjà trop élevée, ce qui est préoccupant, vu que cela pourrait mener à l'exclusion potentielle de zones actuellement considérées comme défavorisées. Le CESE estime que, faute de résultats de simulations, il convient de considérer le seuil de 66 % avec précaution, et qu'il ne peut en être discuté qu'une fois les simulations et les cartes disponibles.

3.7   Une attention particulière doit être accordée à l'utilisation de critères cumulatifs reposant sur des preuves scientifiques dans des zones hétérogènes qui pâtissent simultanément de handicaps multiples. L'avantage des systèmes précédemment utilisés, qui dans bien des cas étaient des «systèmes d'indices», résidait dans le fait qu'ils incorporaient plusieurs critères et qu'ils constituaient, partant, des instruments plus spécifiques et significatifs. Ils reflétaient beaucoup mieux les conditions sur le terrain ainsi que l'interaction ente elles. Le recours à un indicateur composite combinant plusieurs critères fondés sur des raisons objectives et scientifiques, pourrait permettre de classer une zone comme défavorisée même lorsqu'un critère pris isolément ne donnerait pas accès à cette classification. Une telle situation existe dans certains États membres pour la classification des zones de montagne, par exemple. Ces instruments sont très utiles, dans la mesure où ils abordent de manière pratique les interactions entre de nombreux facteurs pertinents.

3.8   Lorsque le handicap naturel a pu être surmonté par le progrès technique ou d'autres formes d'intervention (comme l'irrigation ou le drainage), la Commission propose un affinage qui devrait être utilisé uniquement pour exclure des zones qui seraient autrement désignées comme défavorisées et non pour inclure des zones supplémentaires. Les zones appelées à être exclues de la délimitation parce qu'elles ont surmonté leurs handicaps naturels par l'adaptation qui convenait de leurs pratiques agricoles posent toutefois un problème majeur. Il faut souligner que les handicaps naturels ne peuvent être considérés comme éradiqués quelle qu'ait été l'ampleur des interventions pratiquées. La charge des investissements, qui est presque toujours très élevée, ainsi que les coûts d'entretien, devraient également être pris en considération. En outre, il faut être attentif au fait que ces adaptations, dans la plupart des cas, ne sont possibles qu'au moyen de financements supplémentaires (méthodes de drainage et d'irrigation, par exemple).

3.9   Dans un avis précédent, le CESE a déjà appelé de ses vœux un juste équilibre entre les règles de l'UE et la marge de manœuvre dont disposent les gouvernements nationaux et les régions dans le cadre de l'élaboration détaillée de ces mesures (6). Consécutivement à l'application des critères biophysiques, il peut s'avérer nécessaire de procéder à un affinement des zones défavorisées ainsi délimitées. Le CESE considère que, le cas échéant, une telle pratique devrait être autorisée et qu'elle devrait être mise en œuvre au niveau des États membres. Selon le CESE, l'indicateur le plus approprié dans le cadre de cette étape secondaire serait un indicateur lié à la production et reflétant la situation économique réelle de l'entrepreneur, y compris les coûts d'opportunité relatifs au travail familial et aux capitaux propres. La Commission garantira que les critères utilisés par les États membres sont objectifs et non discriminatoires, et qu'ils répondent aux objectifs du dispositif. Cette nouvelle approche favorisera l'accès des petites et moyennes exploitations au soutien financier, tout en évitant de pénaliser des agriculteurs qui réalisent des investissements afin de surmonter des handicaps naturels. Afin d'éviter l'incertitude chez les exploitants agricoles, leur inclusion dans le régime devrait être valable au minimum pour l'ensemble de la période de programmation.

3.10   Il y a lieu de souligner l'absence totale dans la proposition d'une référence aux handicaps géographiques (isolement, éloignement par rapport aux centres de consommation, aux centres de décision et aux services, etc.), qui constituent pourtant l'une des principales contraintes auxquelles sont confrontées les exploitations agricoles situées dans des zones défavorisées. Il pourrait également être envisagé de permettre des ajustements fondés sur la dispersion des exploitations, sur l'accès au marché ou sur les possibilités de transport existant dans la région.

3.11   Les critères de désignation proposés pourraient être étendus. Le nombre de jours où l'humidité atteint 100 % de la capacité au champ pourrait constituer un critère supplémentaire, critère qui tient compte des limitations inhérentes aux sols humides non exploitables et qui permet donc une interaction entre les types de sols et le climat, par exemple s'agissant d'un climat maritime. En outre, certaines des valeurs seuils suggérées devraient être soigneusement analysées afin de mettre au jour les conditions qui prévalent réellement. Le taux de 15 % pour le critère de la pente, proposé par la Commission, en est un exemple. Le CESE a d'ores et déjà appelé de ses vœux une prise en compte des températures négatives accumulées en hiver (7).

3.12   Vu que les nouveaux critères sont susceptibles d'exclure certaines zones actuellement éligibles, il faut s'attendre à des conséquences très graves au niveau des exploitations. Le CESE juge qu'une période de transition (phasing-out) adéquate s'impose pour permettre aux exploitants agricoles de s'adapter au nouveau régime d'aide en faveur des zones défavorisées. Les orientations de la future PAC devraient également être intégrées dans ce processus.

3.13   Le régime de soutien aux zones défavorisées vise à canaliser les aides vers les exploitations situées dans des zones pénalisées par des handicaps naturels. Il est partie intégrante de la politique de développement rural, le deuxième pilier de la PAC. Ce régime devrait également contribuer à préserver la capacité de production alimentaire, rôle susceptible de gagner en importance si les changements climatiques en cours réduisent les capacités de production dans d'autres zones du globe. Dès lors, le système devrait fonctionner selon le principe que la promotion du maintien d'une activité agricole dans les zones défavorisées, faute de laquelle des terres seraient susceptibles d'être abandonnées, offre des avantages publics.

3.14   Le régime de soutien aux zones défavorisées ne devrait pas être confondu avec les engagements agro-environnementaux pris sur une base volontaire. Il y a lieu de considérer ces deux dispositifs comme complémentaires et non comme s'excluant mutuellement. L'octroi d'aides en faveur des zones défavorisées ne devrait pas être lié à des normes environnementales allant au-delà des dispositions relatives à la conditionnalité. À la différence du premier pilier de la PAC (paiements directs et soutien du marché), le régime doit, en principe, offrir une compensation aux agriculteurs qui opèrent dans des circonstances plus difficiles que celles prévalant dans les zones non défavorisées, et sont les moins à-même d'obtenir une compensation du marché tout en contribuant le plus à la préservation du paysage.

3.15   Les États membres seront tenus de calculer les paiements destinés aux zones défavorisées au moyen de la nouvelle formule de paiement établie par le règlement 1698/2005, qui précise que les paiements doivent compenser les coûts et les pertes de revenus. Le CESE demande donc que le travail supplémentaire demandé aux agriculteurs des zones défavorisées, ainsi que l'accroissement des investissements et des frais d'exploitation auquel ils sont confrontés, soient appréciés comme il se doit et qu'il en soit tenu compte dans les indemnités compensatoires.

3.16   Le nouveau système de paiement devrait accroître la transparence. Toutefois, des différences considérables perdureront entre les États membres et au sein de ceux-ci s'agissant du niveau des paiements aux zones défavorisées. Cela est inévitable si une marge discrétionnaire est laissée aux pouvoirs compétents quant aux modalités de déploiement des financements qu'ils reçoivent au titre du développement rural par l'intermédiaire du FEADER, y compris la liberté de ne prévoir aucun système d'aide aux zones défavorisées.

3.17   De nombreux États membres accordent un soutien insuffisant à leurs zones défavorisées. Le CESE demande instamment aux États membres de reconnaître la grande importance de l'aide aux zones défavorisées et de maintenir la part allouée à cette aide au sein de leur enveloppe nationale de développement rural, quel que soit le résultat de l'exercice actuel de délimitation des zones défavorisées.

Bruxelles, le 17 décembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  JO C 318 du 23.12.2006, p. 93; JO C 44 du 16.2.2008, p. 56; JO C 318 du 23.12.2009, p. 35.

(2)  JO C 151 du 27.6.2003.

(3)  JO L 277 du 21.10.2005, p. 1.

(4)  JO L 160 du 26.6.1999, p. 80.

(5)  Conclusions du Conseil des 22 et 23 juin 2009.

(6)  JO C 44 du 16.2.2008, p. 56.

(7)  JO C 318 du 23.12.2009, p. 35, paragraphe 1.7.


22.9.2010   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 255/92


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 1999/62/CE relative à la taxation des poids lourds pour l'utilisation de certaines infrastructures»

COM(2008) 436 final — 2008/0147 (COD)

(2010/C 255/17)

Rapporteur: M. DANTIN

Le 28 août 2008, le Conseil a décidé, conformément à l'article 71, paragraphe 1, du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 1999/62/CE relative à la taxation des poids lourds pour l'utilisation de certaines infrastructures»

COM(2008) 436 final - 2008/0147 (COD).

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures et société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 12 novembre 2009 (rapporteur: M. DANTIN).

Lors de sa 458e session plénière des 16 et 17 décembre 2009 (séance du 17 décembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 218 voix pour, 16 voix contre et 9 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le secteur des transports joue un rôle essentiel pour assurer la mobilité et le développement socio-économique de l'UE. Il est nécessaire d'en optimaliser les infrastructures si l'on veut répondre aux défis de la croissance et de la durabilité.

Une forte préoccupation est sensible au niveau européen vis-à-vis des effets du changement climatique, de la préservation de l'environnement et de toutes les problématiques liées à la santé et au bien-être social, en rapport avec l'utilisation rationnelle des transports.

1.2.1   De ce point de vue le Comité rappelle que la législation communautaire actuelle interdit aux États membres qui le souhaitent d'internaliser les coûts externes dans les péages sur les routes de passage. Il rappelle qu'un État, proche de l'UE et confronté à des difficultés comparables, a déjà mis en œuvre une telle politique d'internalisation des coûts externes et de report modal qui peut être positive dans certaines conditions tant d'un point de vue économique qu'environnemental.

1.3   La Commission s'efforce de longue date d'élaborer des mécanismes qui permettraient de mesurer et d'internaliser les coûts externes du transport. Elle s'inscrit dans une stratégie visant à «fixer correctement le prix des transports pour qu'il tienne mieux compte de l'utilisation réelle des véhicules, trains, avions ou bateaux et de leur impact en termes de pollution, congestion et changement climatique» (COM(2008) 436 final/2, exposé des motifs, point 1.1).

1.4   Dans un contexte de mondialisation des marchés, si la compétitivité du fret routier constitue un paramètre important le Comité considère que l'application du principe «pollueur-payeur» qu'il approuve ainsi que la recherche de l'intérêt général doit conduire à accompagner cette compétitivité de mesures visant notamment à réduire la pollution environnementale, les nuisances sonores, les dégâts sur le paysage, les coûts sociaux comme ceux liés aux atteintes à la santé, aux coûts indirects d'accidents, aux congestions et encombrements … qui génèrent des coûts économiques importants supportés par la collectivité et donc les citoyens européens. Ce faisant, le CESE peut accueillir favorablement le projet de directive mais, dans un souci de cohérence, à la condition que la Commission européenne prenne en compte les remarques faites par le CESE dans son avis de juillet 2009 relatif à la «Stratégie pour une mise en œuvre de l’internalisation des coûts externes» (1).

Le CESE réitère son approbation à la promotion par la Commission de la comodalité des transports, y compris le transport multimodal.

Alors qu'un des objectifs de la Commission est de veiller à la cohésion territoriale, économique et sociale, la mise en œuvre de l'internalisation des coûts externes par le truchement de la taxation des poids lourds pour l'utilisation des infrastructure permettra aux États membres de réduire une série de coûts provenant des conséquences des pollutions et inconvénients énoncés au point 1.4 qu'ils occupent une situation géographique centrale ou périphérique. L'éventuelle baisse de la compétitivité du transport routier qui en découlerait doit être appréciée de façon globale, dans le cadre de l'intérêt général à rechercher, au regard des bénéfices économique réalisés par la réduction des conséquences liées notamment aux pollutions et à la congestion du réseau.

Par ailleurs, l'internalisation devrait permettre, en la facilitant, de respecter les trois volets de la stratégie de Lisbonne – économiques, sociales, écologiques – en matière de transport; cette nouvelle ressource devrait les y aider.

1.5.1   Le Comité souhaite que soit créé, au niveau communautaire, un cadre intéressant la comptabilisation des coûts externes. Aucun État membre ne devrait pouvoir s’y soustraire. Ce cadre devrait comprendre une série de conditions générales auxquelles devraient satisfaire, à l’intérieur d’une fourchette, les prélèvements à facturer pour la neutralisation des coûts externes. Les prélèvements qui seraient dus devraient être liés à l’usage et non à la détention de moyens de transport. (2)

1.6   La modification de la directive actuelle aide à une programmation de mesures d'intensification de la recherche en faveur de l'écologisation de la route: système ITS (3), moteurs, carburants, tonnages, revêtements …

1.7   Il importe tout autant de souligner que si l'UE décide de la mener à bien, une politique de tarification des coûts externes doit être étendue à l'ensemble des modes de transport.

1.8   Malgré sa promulgation récente, le Comité estime nécessaire, tout comme le Conseil et le Parlement, que la directive 2006/38/CE soit modifiée afin qu'elle acquière une efficacité accrue. À cet effet le CESE considère que le projet de directive à l'examen, élaboré sous l'impulsion du Parlement européen est opportun.

1.9   Complémentairement la concrétisation de certaines mesures du plan d'action logistique pour le secteur du fret routier, parmi lesquelles on relèvera l'utilisation de systèmes intelligents de communication en rapport direct avec l'activation des applications du projet Galileo touchant au transport, contribuera sans aucun doute à en réduire les coûts externes.

1.10   Le Comité estime que si les transporteurs routiers sont aujourd'hui pénalisés par des coûts induits par la congestion du trafic en raison de l'impact de celle-ci sur la productivité du transport, toutes mesures visant à réduire cette congestion, ce qui est l'objet -pour partie- de la directive sous examen, conduiront à terme à améliorer la productivité des transports routiers et d'autres modes de transport.

1.11   Les gains générés par l'imposition doivent être utilisées pour améliorer la qualité du secteur du transport s'agissant des performances écologiques, sociales et économiques.

1.12   Le Comité estime qu'il est indispensable d'utiliser les péages électroniques afin de pouvoir instaurer la tarification pour l'usage des infrastructures, étant entendu que les différents systèmes en usage dans l'UE doivent être interopérables.

1.13   Le Comité juge que la directive devrait inciter les États membres à tenir compte, en fonction de critères qu'il conviendrait de définir de manière concertée, du niveau des émissions de gaz à effet de serre des véhicules soumis à la tarification d'usage des infrastructures et de l'effort réalisé pour les réduire.

1.14   Selon une étude d'évaluation d'impact réalisée par la Commission, il importe de prendre en considération les effets de l'internalisation sur l'ensemble de l'économie, qu'il s'agisse de bénéfices ou de coûts directs et indirects, et en ce qui concerne l'impact sur les coûts des marchandises transportées aussi bien à l'intérieur de la communauté européenne, qu'à l'importation comme à l'exportation.

2.   Introduction

2.1   Comptant actuellement une population de 497 millions d'habitants, sur une superficie de 4 324 782 km2, et un parc automobile de 294 millions de véhicules (4), l'Union a besoin de transports durables pour assurer ses besoins en mobilité. Elle constitue la première puissance économique de la planète, qui assure plus de 18 % du volume total des importations et des exportations mondiales. Les relations commerciales fondant l'essor économique et social de toute société moderne, il s'impose dès lors de chercher comment concilier développement et durabilité.

2.2   L'internalisation est un mécanisme conçu pour imputer les coûts externes que provoquent les moyens de transport sous la forme d'embouteillages, de bruit, de pollution atmosphérique et d'altération climatique, ainsi que pour garantir que les tarifs payés par leurs utilisateurs en reflètent le prix social. Elle constitue une manière de mettre en œuvre le principe du «pollueur-payeur», comme le Parlement européen l'a réclamé.

2.3   La Commission a déjà analysé et envisagé cette internalisation des coûts externes dans son livre vert de 1995 et son livre blanc de 1998, tandis que celui de 2001, dans sa version intermédiaire de 2006, a confirmé qu'elle était prête à élaborer une tarification efficace des infrastructures.

2.4   C'est en 1993 qu'a été adoptée la première directive sur la tarification de l'usage des infrastructures de transport routier, connue sous le nom d'«eurovignette».

Ultérieurement, ce texte a été complété par la directive 1999/62, relative à la taxation des poids lourds pour l'utilisation de certaines infrastructures.

2.5.1   La directive 2001/14, par son article 10, rend obligatoire pour les chemins de fer l’application, par transposition, des mesures adoptées dans d’autres modes de transport.

2.6   Au 10 juin 2008, les États membres ont été tenus d'adopter les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer aux prescriptions de la directive 2006/38/CE, qui régit la tarification de l'utilisation des infrastructures.

2.7   En 2006, le Parlement européen et le Conseil ont demandé à la Commission de présenter, avant juin 2008 (5), «un modèle qui soit généralement applicable, transparent et compréhensible pour l'évaluation des coûts externes de tous les modes de transport et qui puisse servir de base pour le calcul futur des coûts d'utilisation des infrastructures», étant entendu qu'il devra par ailleurs «être accompagné d'une analyse des effets de l'internalisation des coûts externes pour tous les modes de transport et d'une stratégie d'application progressive de ce modèle à tous les modes de transport».

2.8   En juillet 2008, la Commission a soumis au Conseil et au Parlement un paquet législatif sur l'écologisation des transports, lequel, outre la proposition de directive examinée dans le présent avis, comporte une communication qui, assortie d'un modèle et d'une stratégie, a pour objectif de fixer correctement les prix du transport, pour qu'ils reflètent mieux les coûts que l'utilisation réelle des véhicules, trains, avions ou bateaux induit en ce qui concerne la pollution, la congestion et le changement climatique, ainsi qu'une autre communication visant à réduire le bruit provoqué par le transport ferroviaire de marchandises. La communication stratégique mentionnée ci-dessus par le Parlement et le Conseil constitue donc la pierre de touche des deux propositions supplémentaires.

2.9   La directive sous examen est une directive d'harmonisation des péages routiers qui n'impose pas mais permet aux États membres qui le souhaitent de mettre en place l'internalisation d'un nombre limité de coûts externes (congestion, bruit, pollution).

Elle pourra permettre aux États membres, en particulier, de faire varier leurs péages en fonction de la congestion et, ainsi de mieux répartir le trafic en proposant des péages plus faibles aux transporteurs pour les inciter à rouler en dehors des heures de pointe. Les effets économiques d'une telle variation devraient être positifs tant pour le transport routier que pour les chargeurs.

2.10   Il convient de noter que la proposition de directive n'empêche pas les États membres d'instaurer des péages dans les zones urbaines.

3.   Observations générales

3.1   Le Comité, comme il l'a déjà indiqué dans ses avis précédents, approuve le principe «pollueur-payeur» et sa mise en œuvre qui est l'objet de la directive sous examen. L'application de ce principe ainsi que la recherche de l'intérêt général des citoyens européens qui en découlent sont au centre des préoccupations du Comité s'agissant du sujet traité. Il estime que la logique du principe «pollueur-payeur», dans son application impose de lutter contre les effets sociétaux et environnementaux des coûts externes du transport routier qui font l'objet de la directive sous examen, tout en misant sur la recherche de voies nouvelles pour y remédier.

Dans cette perspective, le Comité reconnaît l'effort que la Commission a accompli pour élaborer ses propositions et se félicite d'avoir la possibilité de se pencher sur toutes initiatives qui ambitionnent une amélioration de la durabilité du transport qui se traduirait par une amélioration de la situation sociale, environnementale et économique de l'UE. Ce faisant, le CESE peut accueillir favorablement le projet de directive mais, dans un souci de cohérence, à la condition que la Commission européenne prenne en compte les remarques faites par le CESE dans son avis de juillet 2009 relatif à la «Stratégie pour une mise en œuvre de l’internalisation des coûts externes» (6). Comme il le souligne à juste titre, le système de tarification proposé inciterait les entreprises du transport routier à utiliser des véhicules moins polluant, à choisir des itinéraires moins encombrés, à optimiser le chargement de leurs véhicules et, au final, à utiliser les infrastructures – financées par la collectivité au travers de la fiscalité – de manière plus rationnelle réduisant ainsi leur congestion.

3.2   Face aux répercussions que pourrait produire la mise en œuvre de la directive, le Comité s'interroge sur les implications que la proposition de modification de la directive 1999/62/CE pourrait avoir en ce qui concerne le positionnement des produits européens sur les marchés mondiaux. Il souhaite que la Commission soit attentive sur ce point.

En tout état de cause le Comité estime que l'intérêt général et collectif doit être au centre des préoccupations et que, de ce point de vue, les inconvénients éventuels liés à l'internalisation des coûts pourront être compensés par les gains induits, notamment, en matière de réduction de la pollution environnementale, des nuisances sonores, des dégâts sur les paysages, des coûts sociaux comme ceux liés aux atteintes à la santé, aux coûts indirects d'accidents … lesquels génèrent des coûts économiques importants supportés par la collectivité et donc par les citoyens européens. Ceci est l'objet de la directive sous examen.

3.3   Malgré la promulgation récente, le Comité estime nécessaire, tout comme le Conseil et le Parlement, que la directive 2006/38/CE soit modifiée afin qu'elle acquière une efficacité accrue.

À cet effet le CESE considère que le projet de directive à l'examen, élaboré sous l'impulsion du Parlement européen, est opportun.

Il permet par ailleurs à l'Union européenne d'envoyer un signal important au marché en vue d'améliorer ses performances économiques et environnementales indispensables à la réussite des objectifs que celle-ci s'est fixée dans le cadre «du paquet énergie».

3.4   Le Comité estime que la Commission doit veiller à garantir le bon fonctionnement du marché intérieur, prévenir les distorsions de concurrence entre les entreprises de transport des États membres et assurer la cohésion territoriale, économique et sociale de l'UE.

La mise en œuvre de la tarification d'usage des infrastructures imposera des réévaluations tarifaires aux pays périphériques et aux États de transit, qui subiront une augmentation des coûts d'importation et d'exportation de leurs produits sans commune mesure avec ce que leur coûte, aujourd'hui, la pollution, la détérioration des infrastructures, les embouteillages, les atteintes à la santé de leur citoyen et à l'environnement. Cependant, le CESE a conscience que dans un marché intégré, les mouvements de marchandises se font sans autre polarisation que celle de l'offre et de la demande, selon les moments, de la périphérie vers le centre ou l'inverse; la tarification d'usage s'appliquant à tous les transporteurs routiers a alors au sein de l'Union une vertu égalitaire entre professionnels, étant entendu que c'est toujours le consommateur final qui en a la charge ultime.

3.5   Le Comité a conscience que sur la somme totale des effets négatifs rapportés au transport routier, seule une partie peut être rapportée à celui des marchandises.

En conséquence, la tarification devrait être abordée selon une approche globale.

3.6   Le Comité considère que la Commission doit présenter dès que possible, comme l'exige la directive, un modèle d'évaluation de la totalité des coûts externes accompagné d'une analyse d'impact de l'internalisation des coûts externes de tous les modes de transport, ainsi que d'une stratégie d'application progressive et commune à tous les modes de transport, en évitant les mesures qui créent des distorsions de la concurrence entre ces modes de transport et qui gênent la bonne application de la comodalité.

3.7   Comme on l'a déjà fait valoir lors du réexamen de la politique européenne de transport, en 2006, c'est tout un éventail d'instruments politiques, tant communautaires que nationaux, qui sont nécessaires pour optimiser les chaînes logistiques européennes, arriver à rendre tous les modes de transport plus écologiques et efficaces et parvenir ainsi, en dernière instance, à transporter plus durablement grâce à la comodalité (7).

Dans cette logique, le Comité estime qu'à l'heure actuelle, il est opportun qu'indépendamment du contenu de la directive à l'examen, le programme de travail de la Commission accorde une plus large place à des mesures parallèles et complémentaires, à caractère positif, qui consisteraient par exemple à encourager l'achat de véhicules écologiques, l'utilisation de carburants de substitution, les investissements en recherche, développement et innovation ou la coopération intermodale, à promouvoir le recours aux transports publics, à mettre en œuvre des actions de formation à la sécurité routière et à la conduite économique, ou encore à réglementer et harmoniser l'application des restrictions au trafic en aménageant des corridors de libre circulation au niveau européen de manière à éviter la congestion et les encombrements artificiels: pareille action contribuera à améliorer la situation des travailleurs du transport international en leur permettant de revenir chez eux.

3.8   Le Comité souhaite que l'application du contenu opérationnel de cette directive soit accompagnée par le développement du transport multimodal afin de réaliser une véritable solution alternative à l'utilisation de l'infrastructure routière.

3.9   Le Comité prend en compte le fait que les transporteurs routiers sont aujourd'hui pénalisés par des coûts induits par la congestion du trafic en raison de l'impact de celle-ci sur la productivité du transport. Toutes mesures visant à réduire cette congestion, ce qui est l'objet – pour partie – de la directive sous examen, conduiront à terme à améliorer la productivité des transports routiers.

Sur ce point le Comité souligne l'importance du coût de la congestion, qui pourra être traité par les États membres dans le cadre du péage coûts externes proposé par la Commission. En effet, les coûts de la congestion représentent 1,1 % du PIB de l'Union européenne (8). En l'absence de nouvelles mesures, il est estimé que 29 % du réseau routier européen sera congestionné en 2020 avec des effets négatifs en termes de consommation de carburant (consommation supplémentaire de 10 à 30 % en cas de forte congestion) (9) et d'émission de CO2. La congestion représente 42 % de l'ensemble des coûts externes du transport routier. Les poids lourds ont un effet notoire causant jusqu'à 3,5 fois plus d'encombrement sur les routes interurbaines que les véhicules individuels. (10)

3.10   Le Comité considère que les rentrées fournies par l'imposition doivent être utilisées pour améliorer la qualité du secteur du transport s'agissant des performances écologiques, sociales et économiques.

Dans les affectations données aux rentrées procurées par la tarification des coûts externes, il convient de veiller avec une attention toute particulière à l'amélioration des conditions de travail des conducteurs, notamment, en construisant des aires de stationnement sécurisées, leur permettant de se reposer dans de bonnes conditions, à améliorer les flottes de transport, au moyen d'investissements dans la recherche, le développement et l'innovation, et à faciliter le respect de la législation sociale.

Dans cette logique, il serait possible d'inclure dans la directive une mention de nature sociale qui signalerait les effets que la destination donnée aux rentrées ainsi générées produirait pour l'amélioration des conditions de travail des conducteurs.

3.11   Le Comité demande à la Commission d'instaurer les dispositions adéquates pour que les transporteurs puissent répercuter sur leurs clients les coûts générés par les charges découlant de la mise en œuvre de la directive à l’examen. L'objectif étant de faire supporter le coût réel au transport des marchandises, mais pas de comprimer les conditions sociales des travailleurs du transport.

3.12   À l'instar de la Commission, le Comité juge lui aussi que par rapport aux cabines classiques de paiement, le recours aux systèmes électroniques représente un facteur essentiel pour éviter les perturbations de la fluidité du trafic, préjudiciables pour l'ensemble des usagers, et faire l'économie des retombées dommageables qu'infligent à l'environnement les files qui se forment aux barrières de péage. De ce point de vue une attention toute particulière devra être portée aux salariés qui se trouveraient privés d'emploi en raison de la mise en place de systèmes électroniques. Cette attention devra notamment porter sur la recherche d'emplois alternatifs dans le bassin d'emploi concerné et la mise en place des formations éventuellement nécessaires.

4.   Observations particulières

4.1   Le Comité apprécie que les péages et droits d'usage n'induisent aucune discrimination, de quelque nature que ce soit, mais que le même principe s'applique à tous, le but étant de rationaliser l'utilisation des moyens de transport concernés et d'éviter qu'ils ne produisent des coûts inutiles pour la société dans son ensemble.

4.2   Le Comité estime qu'afin de concilier un habitat de qualité pour la population et les besoins de communication des citoyens, les autorités doivent veiller plus attentivement à l'aménagement du territoire par les communes, en évitant les concentrations urbaines le long des voiries interurbaines, et qu'il convient d'encourager la recherche sur l'application de revêtements techniquement améliorés, qui induisent une réduction de la pollution acoustique et bénéficient ainsi aux habitants.

4.3   Considérant qu'éviter un taux élevé d'encombrement et de pollution sur les routes constitue un objectif social important, le Comité juge qu'il serait judicieux d'analyser l'éventail typologique des véhicules qui forment les bouchons, de manière à obtenir une vue plus réaliste des angles d'attaque possibles pour en réduire les nuisances autant que faire se peut.

4.4   Pour autant que soit assuré un niveau élevé d'objectivité, le Comité est satisfait de constater que le montant de la taxe pour les coûts externes sera fixé par une autorité indépendante de l'organisme chargé de la gestion et du recouvrement de tout ou partie de la redevance.

4.5   Le Comité pense qu'il est juste que les éventuelles majorations pour l'internalisation des coûts liés à des infrastructures des régions de montagne soient réservées au financement de la réalisation de projets prioritaires d'intérêt européen, favorisant la comodalité et représentant une alternative de transport combiné pour le mode de transport qui contribue au financement des infrastructures.

4.6   De l'avis du Comité, il est pertinent que si, lors d'un contrôle, un conducteur n'est pas en mesure de présenter les documents du véhicule attestant la classe d'émission Euro du véhicule, les États membres puissent appliquer des péages allant jusqu'au niveau maximal exigible, à la condition qu'une possibilité de régularisation ultérieure soit prévue, avec remboursement équivalant au trop-perçu.

4.7   Le Comité souhaiterait que les véhicules fassent l'objet d'un traitement différencié en fonction de leur niveau de pollution environnementale et sonore.

4.8   Le Comité juge positif que la mise en œuvre de la perception des péages et droits d'usage soit conçues de tells façon qu'ils gênent le moins possible la fluidité du trafic. Il considère en outre qu'il est indispensable de résorber les goulots d'étranglement qui existent aujourd'hui dans certains péages couplés à des postes-frontières.

Bruxelles, le 17 décembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  JO C 317 du 23.12.2009, p. 80.

(2)  Cf. avis cité dans note de bas de page no 1.

(3)  JO C 277 du 17.11.2009, p. 85.

(4)  Selon les données statistiques fournies par la direction générale Énergie et transports de la Commission européenne, le parc automobile de l'UE à vingt-sept États membres se composait en 2006 de 30 837 000 deux-roues, 229 954 000 voitures de tourisme, 797 900 autobus et 32 249 000 véhicules de transport.

(5)  L'article 11 de la directive 2006/38/CE dispose que le 10 juin 2011 au plus tard, la Commission présente au Parlement européen et au Conseil un rapport sur la mise en œuvre et sur les effets de la présente directive, en tenant compte des progrès techniques et de l'évolution de la densité de la circulation, y compris l'utilisation de véhicules de plus de 3,5 tonnes et de moins de 12 tonnes, et en évaluant son incidence sur le marché intérieur, y compris sur les régions insulaires, enclavées et périphériques de la Communauté et sur le niveau des investissements dans ce secteur, ainsi que sa contribution à la réalisation des objectifs fixés dans le cadre d'une politique des transports durable.

Les États membres communiquent les informations nécessaires à la Commission en vue de l'établissement dudit rapport le 10 décembre 2010 au plus tard.

Le 10 juin 2008 au plus tard, après avoir examiné l'ensemble des éléments, notamment les coûts relatifs aux aspects environnementaux, de bruit, de congestion et de santé, la Commission présente un modèle universel, transparent et compréhensible pour l'évaluation de tous les coûts externes, lequel doit servir de base pour le calcul des frais d'infrastructure. Ce modèle est accompagné d'une analyse d'impact de l'internalisation des coûts externes pour tous les modes de transport et d'une stratégie pour la mise en œuvre graduelle du modèle pour tous les modes de transport. Le rapport et le modèle sont accompagnés, le cas échéant, de propositions destinées au Parlement européen et au Conseil en vue d'une nouvelle révision de la présente directive.

(6)  Cf. note de bas de page no 1.

(7)  Par «comodalité», on entend l'utilisation efficace des modes de transport, qu'ils soient exploités seuls ou dans le cadre d’une intégration multimodale dans le système de transport européen, de façon à permettre une utilisation optimale et durable des ressources.

(8)  Commission européenne, communication sur l'écologisation des transports.

(9)  Commission européenne, étude d'impact sur l'internalisation des coûts externes. Page 55.

(10)  CE Delft Manuel IMPACT.


ANNEXE À L'AVIS

du Comité économique et social européen

L'amendement suivant, qui a recueilli au moins un quart des votes exprimés, a été soumi au vote et repoussé au cours du débat:

Paragraphe 3.9

Modifier comme suit:

«Le Comité prend en compte le fait que les transporteurs routiers sont aujourd'hui pénalisés par des coûts induits par la congestion du trafic en raison de l'impact de celle-ci sur la productivité du transport. Toutes mesures visant à réduire cette congestion, ce qui est l'objet – pour partie – de la directive sous examen, conduiront à terme à améliorer la productivité des transports routiers.

Sur ce point le Comité souligne l'importance du coût de la congestion, qui pourra être traité par les États membres dans le cadre du péage coûts externes proposé par la Commission. En effet, les coûts de la congestion représentent 1,1 % du PIB de l'Union européenne  (1) . En l'absence de nouvelles mesures, il est estimé que 29 % du réseau routier européen sera congestionné en 2020 avec des effets négatifs en terme de consommation de carburant (consommation supplémentaire de 10 à 30 % en cas de forte congestion)  (2) et d'émission de CO2 .

Exposé des motifs

La note de bas de page 8 affirme – étonnamment sans indiquer de numéro de page –, que la dernière phrase «Les poids lourds ont un effet notoire causant jusqu'à 3,5 fois plus d'encombrement sur les routes interurbaines que les véhicules individuels» est extraite du manuel IMPACT de la CE Delft, uniquement disponible en anglais. Selon les propres recherches des auteurs du présent amendement, (voir p. 34 op. cit.), la phrase en question est cependant libellée comme suit: «This approach reflects the responsibility for congestion in proportion to the road space consumed»; le sens est donc tout différent. Il apparaît donc préférable de biffer cette phrase de ladite étude que de la reprendre, car celles qui la précèdent dans l'avis à l'examen sont tirées d'autres études, qui se rapportent à l'ensemble de la circulation routière tandis que l'extrait de l'étude de la CE Delft concerne le poids lourd pris individuellement, vu que le texte correspondant de l'étude se réfère uniquement à une unité de calcul standard et à la portion d'espace routier qui est occupée par chaque poids lourd. Il se fait toutefois que les congestions proprement dites sont dues soit à un manque de capacités d'infrastructure face à un certain flux de circulation de véhicules privés et de poids lourds à un moment précis, soit à un événement exceptionnel (accident ou mauvaises conditions météorologiques). Dans le premier cas de figure, le facteur décisif est l'intensité du trafic de véhicules particuliers et de poids lourds ou la répartition de ces deux éléments (selon les statistiques d'Eurostat pour l'UE à 27 États membres, la part des poids lourds n'atteint même pas 20 % du flux de trafic, les voitures particulières étant 230 millions, contre 34 millions d'autobus et de poids lourds). Pour ce qui est de la seconde hypothèse, les accidents survenus sur la période 1996-2006 n'ont été imputables aux poids lourds qu'à raison de 13 % en moyenne sur l'ensemble de l'UE, et, ici aussi, seule une partie d'entre eux provoquent des encombrements.

 

Voix pour: 91

Voix contre: 138

Abstentions: 10


(1)  Commission européenne, communication sur l'écologisation des transports.

(2)  Commission européenne, étude d'impact sur l'internalisation des coûts externes. Page 55.

(3)  


22.9.2010   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 255/98


Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la «Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions relative à la protection des infrastructures d'information critiques “Protéger l'Europe des cyberattaques et des perturbations de grande envergure: améliorer l'état de préparation, la sécurité et la résilience”»

COM(2009) 149 final

(2010/C 255/18)

Rapporteur: M. McDONOGH

Le 30 mars 2009, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions relative à la protection des infrastructures d'information critiques. «Protéger l'Europe des cyberattaques et des perturbations de grande envergure: améliorer l'état de préparation, la sécurité et la résilience»

COM(2009) 149 final.

La section spécialisée «Transport, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 12 novembre 2009 (rapporteur: M. McDonogh).

Lors de sa 458e session plénière des 16 et 17 décembre 2009 (séance du 16 décembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 179 voix pour et 4 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le Comité se félicite de la communication de la Commission relative au plan d'action pour la protection des infrastructures d'information critiques (IIC) en Europe. Le Comité partage la préoccupation de la Commission au sujet de la vulnérabilité de l'Europe face à des cyberattaques de grande envergure, des défaillances techniques, des attaques d'origine humaine et des catastrophes naturelles, ainsi qu'au sujet des dommages majeurs qui pourraient frapper son économie et le bien-être de ses citoyens. Le Comité s'accorde avec la Commission sur la nécessité d'une action urgente pour améliorer la coordination et la coopération au sein de l'UE et faire ainsi face à ce problème crucial. Le Comité convient également de la nécessité de mettre rapidement en place le cadre global d'une politique de protection des IIC.

1.2   Le Comité prend acte des conclusions de la conférence ministérielle consacrée à la protection des infrastructures d'information critiques (PIIC) et s'alarme de la faible préparation de l'Europe à répondre à des cyberattaques de grande envergure ou à des défaillances des IIC, du fait des approches souvent disparates et mal coordonnées des différents États membres en la matière. L'histoire de l'internet et un manque de réflexion à l'échelle des grands systèmes en matière de sécurité et de résilience des infrastructures de l'information sont à l'origine de la situation grave que nous connaissons. En tout état de cause, puisque la nécessité d'agir est maintenant reconnue, le Comité exhorte la Commission à le faire énergiquement et sans tarder pour remédier à ce problème.

1.3   Le Comité soutient le plan d'action de haut niveau articulé autour de cinq axes qu'esquisse la communication. Il félicite la Commission de ses travaux. Il est en effet extrêmement difficile de concevoir une approche intégrée, multipartite et multiniveaux pour renforcer la sécurité et la résilience des IIC, notamment face à un éventail aussi large de parties intéressés et à la complexité des infrastructures européennes de l'information. Le Comité reconnaît le soutien et la contribution de l'Agence européenne chargée de la sécurité des réseaux et de l'information (ENISA) pour atteindre les objectifs fixés par cette communication.

1.4   Le Comité constate la faiblesse des actions menées par les parties intéressées en vue d'appliquer la résolution du Conseil 2007/C 68/01 relative à la sécurité et la résilience des infrastructures TIC (1). Cette difficulté à concevoir des politiques efficaces de protection des infrastructures européennes d'information les plus cruciales ne rend service qu'à ceux qui veulent les attaquer à des fins lucratives ou pour des raisons politiques. Dans ces conditions, le Comité souhaite que la Commission affirme plus clairement la nécessité d'un leadership fort pour rassembler toutes les parties intéressées et pour mettre en œuvre des mesures efficaces afin de protéger l'Europe des menaces éventuelles sur ses infrastructures d'information critiques. Le Comité est d'avis que le plan d'action esquissé par la communication ne pourra donner les résultats voulus que si la responsabilité de sa mise en œuvre revient à une instance de réglementation appropriée.

1.5   Le Comité attire l'attention de la Commission sur ses précédents avis dans lesquels il soulignait la nécessité d'une société de l'information sûre, et exprimait ses préoccupations quant à la sécurité de l'internet et la protection des infrastructures critiques.

2.   Recommandations

2.1   L'Union européenne devrait charger une instance de réglementation appropriée, comprenant des membres de l’Agence européenne des Droits Fondamentaux, de protéger efficacement les infrastructures d'information dans l'ensemble de l'Union.

2.2   Chaque État membre devrait élaborer une stratégie nationale, mettre en place un cadre politique et juridique solide, des procédures nationales holistiques de gestion des risques ainsi que des mécanismes et des mesures de préparation adéquats. À cet égard, chaque État membre devrait constituer une équipe d'intervention en cas d'urgence informatique (CERT - Computer Emergency Response Team) et l'affilier au groupe des CERT gouvernementaux européens (EGC) (2).

2.3   La Commission devrait accélérer ses travaux visant à établir un partenariat public privé européen pour la résilience (EP3R) et les combiner avec ceux de l'Agence européenne chargée de la sécurité des réseaux et de l'information (ENISA) et ceux du groupe des CERT gouvernementaux européens (EGC).

2.4   La politique de protection des infrastructures d'information critiques (PIIC) doit se fonder à tous les échelons sur les meilleures pratiques de la gestion des risques. Il convient notamment de chiffrer les coûts liés à d'éventuelles défaillances de sécurité et de résilience et d'en informer les parties prenantes concernées.

2.5   Il convient d'infliger des sanctions pécuniaires et autres aux parties intéressées qui ne s'acquittent pas de leurs responsabilités en matière de politique de PIIC. Ces sanctions doivent être proportionnelles aux risques et aux coûts des défaillances engendrées par leur négligence.

2.6   La responsabilité de la sécurité et de la résilience des IIC devrait reposer plus fortement sur les acteurs importants – les gouvernements, les fournisseurs d'infrastructures et de technologies - et ces derniers ne devraient pas se défausser de leur responsabilité en la transférant à des entreprises ou à des particuliers.

La sécurité et la résilience doivent être impérativement prises en compte dans la conception de tous les systèmes des technologies de l'information et de la communication (TIC) mis en place dans l'Union. L'Union devrait encourager les parties prenantes dans la PIIC à s'employer sans relâche à améliorer certains domaines liés à la résilience- par exemple l'administration des réseaux, la gestion des risques et la continuité de l'activité.

2.7.1   L'élaboration et le contrôle des meilleures pratiques et des normes devraient constituer un élément essentiel de toute politique de prévention des défaillances, ainsi que des mesures de réaction à une situation donnée et de la récupération des IIC.

2.7.2   Priorité doit être donnée à l'installation des technologies IPv6 (le plus récent des protocoles pour les adresses internet) et DNSSEC (série de renforcements de la sécurité du système d’adressage par domaines) dans tout l'internet de l'ensemble de l'Union afin d'en renforcer la sécurité.

2.8   Le Comité encourage les parties intéressées, tant de droit privé que public, à coopérer régulièrement afin de tester leur niveau de préparation et leurs mesures de réaction, et ce à l'aide d'exercices. Le Comité s'associe pleinement à la suggestion formulée par la Commission dans sa communication de lancer le premier exercice paneuropéen en 2010.

2.9   Il convient de stimuler en Europe une industrie forte de la sécurité de l'information pour faire jeu égal avec les compétences d'une industrie nord-américaine qui dispose de très grands moyens financiers. Il y a lieu d'augmenter sensiblement les investissements dans la recherche et le développement relatifs aux questions de PIIC.

2.10   Il convient d'accroître les ressources financières affectées au développement des compétences et aux programmes pour la connaissance et la sensibilisation dans le domaine de la cybersécurité.

2.11   Il convient d'instituer des agences d'information et de soutien dans chaque État membre pour permettre aux PME et aux citoyens de saisir et de remplir leurs obligations dans le cadre d'une politique de PIIC.

2.12   Dans l'intérêt de sa sécurité, l'UE devrait avancer sa position sur l'avenir de la gouvernance de l'internet (3); cette dernière requiert une approche plus multilatérale qui respecte les priorités nationales des États-Unis mais reflète aussi les intérêts de l'Union européenne. L’action de l'Union en la matière devrait comprendre une réflexion approfondie à propos des interactions entre sécurité cybernétique et respect des libertés publiques et privées.

3.   Contexte

Menaces de cyberattaques de grande envergure sur les infrastructures d'information critiques.

3.1.1   Les infrastructures d'information critiques (IIC) comprennent les TIC qui constituent les plateformes d'information et de communication sous-jacentes à l'offre de biens et services essentiels, y compris des fonctions vitales pour la société comme les fournitures d'énergie, d'eau, de transports, de services bancaires, de services de santé et de première urgence.

3.1.2   Les IIC se caractérisent par un haut degré d'intégration de systèmes complexes, par une interdépendance avec d'autres infrastructures (par exemple l'électricité), ainsi que par des interconnexions transfrontalières. De ce fait, ces infrastructures complexes sont exposées à de nombreux risques, qui peuvent dégénérer en des défaillances de systèmes dont les incidences seraient catastrophiques pour les fonctions vitales de la société dans de nombreux États membres. Ces risques peuvent provenir d'erreurs humaines, de défaillances techniques, d'attaques intentionnelles (aux motivations criminelles ou politiques) et de catastrophes naturelles. L’étude des risques montre les failles de tels systèmes, et par là même révèle la possibilité de prise de contrôle avec pratiques, intentionnelles ou non, attentatoires aux libertés tant publiques que privées. La Commission est tenue de veiller au respect des droits fondamentaux dans l’élaboration du droit communautaire.

3.1.3   Les gouvernements et les fournisseurs de services vitaux ne divulguent pas les défaillances de sécurité et de résilience dont ils sont victimes, à moins que les événements ne les y contraignent. Quoi qu'il en soit, de nombreux exemples de menaces sur les infrastructures critiques du fait de défaillances de sécurité et de résilience ont défrayé la chronique:

des cyberattaques de grande envergure ont été lancées contre l'Estonie, la Lituanie et la Géorgie en 2007 et en 2008;

des ruptures de câbles transcontinentaux sous-marins se sont produites en Méditerranée et dans le Golfe persique en 2008 et ont entravé le trafic internet dans de nombreux pays;

en avril 2009, les services nationaux de sécurité ont annoncé que des «cyber espions» avaient pénétré le réseau électrique américain et y avaient laissé des programmes de logiciels qui pourraient être utilisés pour perturber le système;

en juillet, les États-Unis et la Corée du Sud ont dû faire face à des attaques très remarquées par déni de service (menée par 100 000 à 200 000 machines zombies) qui ont touché de nombreux sites internet gouvernementaux.

3.1.4   Ce problème est fortement aggravé par les intentions malveillantes d'organisations criminelles et l'utilisation de la guerre cybernétique pour des raisons politiques.

En exploitant les systèmes d'exploitation des ordinateurs personnels connectés sur l'internet, des organisations criminelles ont créé des réseaux de machines zombies – des ordinateurs personnels mis en réseau par des logiciels malveillants en un seul ordinateur virtuel qu'elles maîtrisent (comme des «zombies» ou des «drones»). Ces réseaux de machines zombies sont utilisés à toutes sortes de fins criminelles, et des terroristes ou des gouvernements en guerre cybernétique en louent l'usage à des organisations criminelles pour mener des cyberattaques. On estime qu'un de ces réseaux, dénommé «Conficker», maîtrise ainsi plus de 5 millions d'ordinateurs personnels.

3.1.5   Le coût économique d'une défaillance des IIC peut se révéler extrêmement élevé. Le Forum économique mondial a estimé que la probabilité d'une défaillance grave des IIC dans les dix prochaines années était de 10 à 20 %, que son coût potentiel, sur le plan mondial, avoisinerait 250 milliards de dollars, et qu'il provoquerait des milliers de morts.

Problèmes de préparation, de sécurité et de résilience.

3.2.1   L'internet est le socle qui supporte la plupart des IIC européennes. L'architecture de l'internet se fonde sur l'interconnexion de millions d'ordinateurs dont les fonctions de traitement, de communication et de contrôle se répartissent à travers le monde. Cette architecture décentralisée est la clé de la stabilité et de la résilience de l'internet: elle permet une récupération rapide des flux de trafic lorsqu'un problème se produit. Cependant, des cyberattaques de grande envergure peuvent être lancées de ses nœuds de bordure, comme dans le cas des réseaux de machines zombies, par n'importe quel voyou, à qui il suffit d'être mal intentionné et de disposer de quelques connaissances de base.

3.2.2   Les réseaux mondiaux de communication et les IIC requièrent un haut degré d'interconnexion transfrontalière. Ainsi, un faible niveau de sécurité et de résilience des réseaux dans un pays pourrait accroître la vulnérabilité et les risques des IIC dans tous les autres pays avec lesquels il est interconnecté. Cette interdépendance internationale oblige l'UE à concevoir une politique intégrée de gestion de la sécurité et de la résilience des IIC pour toute l'Union.

3.2.3   La plupart des parties prenantes et de nombreux États membres n'ont que peu conscience et connaissent mal les risques inhérents aux IIC. Très peu de pays ont élaboré des politiques complètes de gestion de ces risques.

3.2.4   Les réformes proposées du cadre réglementaire relatif aux réseaux et services de communications électroniques renforceront les obligations des opérateurs de réseaux visant à s'assurer qu'ils appliquent les mesures adéquates pour définir les risques, garantir la continuité des services et signaler les failles de sécurité (4).

3.2.5   La grande majorité des technologies qui appuient la plateforme des IIC est fournie par le secteur privé et la garantie d'une collaboration correcte pour assurer une protection efficace des IIC dépend largement d'un haut degré de compétence, de confiance, de transparence et de communication entre toutes les parties intéressées – à savoir les gouvernements, les sociétés commerciales et les consommateurs.

3.2.6   Une approche multipartite, multiniveaux et internationale est indispensable.

3.3   Le plan d'action en cinq axes

La Commission propose un plan d'action articulé autour des cinq axes suivants:

1.

préparation et prévention: garantir un état de préparation à tous les niveaux;

2.

détection et réaction: fournir des mécanismes d'alerte rapide adéquats;

3.

atténuation et récupération: renforcer les mécanismes de défense des infrastructures d'information critiques dans l'UE;

4.

coopération internationale: promouvoir les priorités de l'UE sur le plan international;

5.

critères pour secteur des TIC: soutenir la mise en œuvre de la directive concernant le recensement et la désignation des infrastructures d'information critiques (5).

Des objectifs spécifiques sont définis pour chacune de ces actions avec des délais d'exécution courant pour certains jusqu'à la fin de 2011.

4.   Observations

4.1   Il sera très difficile de concevoir et de mettre en œuvre une stratégie efficace de protection des IIC sur la base de l'approche préconisée par la communication, fondée sur la coopération, le volontariat et fortement consultative. Au regard de la gravité et de l'urgence de ce défi, le Comité recommande à la Commission d'examiner les politiques menées au Royaume-Uni et aux États-Unis, qui ont investi une autorité de règlementation adéquate de cette responsabilité et des pouvoirs afférents.

4.2   Le Comité approuve la résolution 58/199 de l’Assemblée générale des Nations Unies qui appelle à la création d’une culture mondiale de la cybersécurité et à la protection des infrastructures essentielles de l’information. Au regard de l'interdépendance des pays en matière de sécurité et de résilience des IIC – et selon l'adage: «une chaîne est aussi solide que son maillon le plus faible», il est alarmant que seuls neuf États membres aient institué des CERT (Computer Emergency response teams – centre de réponse rapide informatique) et rejoint le groupe des CERT gouvernementaux européens (EGC - European Government CERTs). La constitution de ces groupes doit être placée en haut de l'agenda intergouvernemental.

4.3   Est partie prenante de la cybersécurité de l'UE tout citoyen dont la vie peut dépendre de ces services vitaux. Ces mêmes citoyens sont responsables de la protection, au mieux de leurs possibilités, de leur connexion à internet contre des attaques. Une plus grande responsabilité encore incombe aux fournisseurs de services et de technologies de TIC qui pourvoient les IIC. Une information suffisante et adéquate de toutes les parties intéressées constitue un élément crucial de la cybersécurité. Il est donc fondamental pour l'Europe de disposer d'un grand nombre d'experts qualifiés dans le domaine de la sécurité et de la résilience des TIC.

4.4   Le Comité recommande à chaque État membre de disposer d'un organisme chargé d'informer, de former et de soutenir le secteur des PME pour les questions concernant la cybersécurité. Les grandes entreprises peuvent facilement obtenir l'expertise dont elles ont besoin, alors que les PME ont besoin d'y être aidées.

4.5   Puisque les fournisseurs d'IIC sont issus dans une large mesure du secteur privé, il est essentiel d'encourager un haut degré de confiance et de coopération avec et entre les entreprises responsables de ces infrastructures. Il convient de féliciter la Commission de l'initiative EP3R qu'elle a lancée en juin et d'encourager cette dernière. Cependant, le Comité estime qu'il convient de renforcer cette initiative par une règlementation obligeant les parties prenantes qui ne font pas face à leurs responsabilités à coopérer.

4.6   La gestion des risques est une discipline qui a pour objet de contribuer à résoudre les problèmes dont traite la communication. La Commission devrait insister sur le respect des bonnes pratiques de la gestion des risques là où son plan d'action le nécessite. Il convient notamment de quantifier les risques et leurs coûts pour chaque échelon des IIC. Lorsque l'on connaît la probabilité et le coût potentiel liés à un risque, il est bien plus aisé de motiver les parties prenantes à agir. Il est aussi plus simple d'engager alors leur responsabilité financière en cas de non-respect de leurs obligations.

4.7   Les acteurs les plus importants tentent de limiter leur responsabilité en usant de leur position de force sur le marché pour contraindre leurs clients ou leurs fournisseurs à accepter des conditions qui dégagent la grande entreprise de ses responsabilités, par exemple au moyen d'accords de licence sur des logiciels ou d'accords d'interconnexion ISP qui limitent leurs obligations en matière de sécurité. Ces accords devraient être réputés illégaux et la responsabilité devrait reposer sur l'acteur le plus important.

4.8   La sécurité et la résilience pourraient et devraient être prises en compte dans chaque réseau de TIC. Il convient d'étudier prioritairement la topologie des architectures de réseaux dans les États membres et au niveau de l'ensemble de l'UE, en vue de détecter les concentrations inacceptables de trafic de communications et donc les points où les risques de défaillance du réseau sont les plus élevés. La concentration du trafic internet, notamment sur un nombre très restreint de points d'échange Internet (Internet Exchange Points - IXP) dans certains États membres, constitue un risque inacceptable.

4.9   Le Comité renvoie également la Commission aux dispositions de son avis sur la communication COM(2008) 313 final «Faire progresser l'internet - plan d’action pour le déploiement du protocole internet IP version 6 (IPv6) en Europe» (6) qui soulignent les avantages en matière de sécurité de l'adoption du IPv6 sur l'ensemble de l'internet de l'UE. Le Comité recommande également que les technologies DNSSEC soient mises en place là où cela est possible afin d'élever le niveau de sécurité de l'internet.

4.10   Pour leur politique de sécurité dans le cyberespace, les États-Unis prévoient des dépenses budgétaires de 40 milliards de dollars en 2009 et 2010 en matière de cybersécurité. Cela encouragera également les entreprises de sécurité à devenir des leaders mondiaux. Ils injectent ainsi des moyens financiers immenses dans le secteur de la sécurité; de ce fait de nombreuses sociétés de technologie de la sécurité de l'information, y compris européennes, vont concentrer leurs efforts sur le marché américain. Il est hautement souhaitable que l'Europe dispose de sa propre industrie et des connaissances et des techniques lui permettant de concurrencer sur un pied d'égalité les sociétés américaines, et que l'attention et les efforts de l'industrie de la sécurité se portent sur les besoins des infrastructures européennes. Le Comité demande à la Commission de réfléchir à la manière de contrebalancer le stimulus financier majeur que les États-Unis ont mis en place.

4.11   Le Comité approuve la récente communication de la Commission sur l'avenir de la gouvernance de l'internet (3). Il estime que l'Union européenne doit influencer plus directement les politiques et les pratiques de l'ICANN (Internet Corporation for Assigned Names and Numbers, - Société pour l'attribution des noms de domaine et des numéros sur internet) et de l'IANA (Internet Assigned Numbers Authority - autorité d'internet chargée d'attribuer des numéros d'adresse) et que le contrôle unilatéral qu'exercent actuellement les États-Unis devrait faire place à des accords établissant une obligation de rendre compte multilatérale et internationale.

Bruxelles, le 16 décembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Voir: COM(2006) 251 final.

(2)  Voir: http://www.egc-group.org.

(3)  COM(2009) 277 final.

(4)  Voir les articles 13 bis et 13 ter dans COM(2007)697 (final) – propositions d'amendement de la directive 2002/21/CE.

(5)  Voir la directive du Conseil no 2008/114/CE.

(6)  JO C 175 du 28.7.2009, p. 92.


22.9.2010   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 255/103


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Objectifs stratégiques et recommandations concernant la politique du transport maritime de l’UE jusqu’en 2018»

COM(2009) 8 final

(2010/C 255/19)

Rapporteure: MmeBREDIMA

Le 21 janvier 2009, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions – Objectifs stratégiques et recommandations concernant la politique du transport maritime de l'UE jusqu'en 2018»

COM(2009) 8 final.

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a élaboré son avis le 12 octobre 2009 (rapporteure: Mme BREDIMA).

Lors de sa 458e session plénière des 16 et 17 décembre 2009 (séance du 17 décembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 187 voix pour, 7 voix contre et 15abstentions.

1.   Conclusions

1.1   Le Comité accueille favorablement la communication qu'il considère dans l'ensemble comme une base solide et réaliste en vue d'une future politique européenne des transports maritimes jusqu'en 2018, ce document reconnaissant la dimension de facto mondiale du transport maritime européen, eu égard à sa position compétitive à l'échelle mondiale, à la sécurité et à l'environnement ainsi que la nécessité d'un savoir-faire maritime de grande qualité.

1.2   La communication intervient à un moment critique où des défis sérieux se posent qui touchent le transport maritime: la crise économique et financière mondiale qui aggrave la crise structurelle et conjoncturelle du secteur du transport maritime; les débats portant sur les émissions atmosphériques des navires dans la perspective de la conférence de Copenhague de la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (décembre 2009) et la pénurie croissante de gens de mer. Ces enjeux sont exacerbés par la piraterie maritime et l'immigration illégale vers l'UE en provenance de la mer Méditerranée.

1.3   Il est absolument nécessaire d'«attirer» les jeunes vers les carrières maritimes, et d'assortir cet effort de mesures pour les y «retenir». Une approche plus coordonnée associant toutes les parties concernées (administrations maritimes, écoles, associations d'armateurs, syndicats de gens de mer) s'impose. Il convient d'améliorer la qualité de la formation professionnelle des gens de mer en Europe. Tous les États membres devraient pour ce faire instaurer des programmes de formation et des modalités en matière de lien au pavillon, afin de garantir le savoir-faire maritime en Europe. C'est pourquoi tous les États membres doivent développer plus avant les instituts de formation maritime sur le plan qualitatif. Il y a lieu d'élaborer des programmes à long terme visant à améliorer les conditions de travail et de vie à bord, et d'œuvrer à renforcer l'équipage des navires (système de garde en trois temps), afin de remédier aux problèmes et aux dangers posés par l'excès de fatigue. L'UE devrait adopter à cet égard une directive sur la composition minimale des équipages. En outre, le recours à l'internet ainsi que des programmes médiatiques et télévisés montrant la vie en mer sont nécessaires. La Commission est encouragée à traiter la question au niveau européen.

1.4   Le Comité, en coopération avec les conseils économiques et sociaux nationaux et d'autres parties prenantes de la société civile organisée, peut promouvoir le patrimoine et l'identité maritimes de l'Union européenne et communiquer autour des meilleures pratiques pour attirer les jeunes dans les carrières de marins. Une conférence sur les professions maritimes organisée par le CESE pourrait contribuer à délivrer ce message au niveau européen.

1.5   Le transport maritime européen est le tout premier au niveau mondial. Il serait opportun de renforcer cette position grâce aux orientations sur les aides d'État, afin de préserver des conditions de concurrence équitables et la compétitivité de la flotte européenne à l'échelle mondiale. Dans le même temps, le CESE plaide pour que la réglementation communautaire sur les aides d'État soit complétée. Il convient qu'à l'avenir, les aides d'État ne soient octroyées, en principe, qu'à des pavillons de l'UE et qu'il soit impossible de contourner les normes européennes.

1.6   Face à la crise mondiale, la communication fait référence, à juste titre, à l'engagement pris de longue date par l'UE en matière de concurrence ouverte et loyale. Davantage d'efforts devraient être déployés afin d'éviter les mesures protectionnistes, dans la mesure où celles-ci ne feraient que retarder encore un retour à des économies saines. Il est primordial de revenir aux principes de base du transport maritime, de restaurer la confiance et un comportement éthique des parties concernées. Il en va de même pour le secteur du financement des navires.

1.7   Il y a lieu de faire connaître l'accord maritime conclu entre l'UE et la Chine en tant que «meilleure pratique» (accord modèle) à appliquer avec les autres partenaires commerciaux, tels que l'Inde, le Brésil, la Russie, l'ANASE ou le Mercosur. La Commission devrait élaborer une stratégie de la mer Noire qui s'assure du transport des ressources énergétiques en provenance de la Caspienne vers l'Europe.

1.8   Le Comité invite la Commission à examiner l'existence d'accords maritimes bilatéraux en matière de partage des cargaisons entre les États membres de l'UE et des pays tiers, et, le cas échéant, à activer l'application de l'acquis communautaire (règlements 4055/86 et 4058/86).

1.9   Le Comité réitère son soutien à l'investissement dans la recherche et développement qui a trait aux navires, aux carburants et aux ports «verts», stimulant plus avant les emplois verts.

1.10   Dans la perspective de la conférence de Copenhague sur le changement climatique (décembre 2009), le Comité réaffirme qu'il est beaucoup plus difficile d'appliquer un système d'échanges de quotas d'émissions au secteur du transport maritime qu'à l'aviation. À l’égard de la protection de l’environnement, le CESE ajoute qu’il accueille favorablement la nouvelle impulsion qui devrait être donnée à la philosophie d’un transport maritime de qualité, et estime que l’Union ne doit pas oublier, compte tenu de la densité du trafic qu’elle a sur ses mers et le long de ses côtes, de lutter contre les pratiques de nettoyage des cuves en mer et les navires sous normes.

1.11   Appliquer les limites en soufre dans les zones de contrôle des émissions des navires, qui constitue au premier abord une mesure favorable à l'environnement, peut provoquer l'effet inverse, c'est-à-dire un transfert modal de la mer vers la terre. La politique européenne de comodalité et la promotion des services maritimes à courte distance ne devraient pas être menacées.

1.12   Le Comité réaffirme qu'il est nécessaire que l'UE agisse dans les plus brefs délais face à la recrudescence des actes de piraterie perpétrés à l'encontre des navires marchands en Asie du Sud-est et en Afrique. La Commission devrait œuvrer pour que soient établies des juridictions et créées des législations appropriées afin d'aborder de front l'impunité dont jouissent à l'heure actuelle les actes de piraterie. Il convient de chercher à intensifier la collaboration avec les organisations des Nations unies, afin d'améliorer la situation politique, économique et sociale dans les pays d'origine, notamment en Somalie. Le CESE s'oppose vivement à l'armement des gens de mer. Pour contrôler l'immigration illégale empruntant la voie maritime, l'UE devrait développer une politique de coopération avec les pays tiers d'origine et de transit des immigrants.

2.   Introduction

2.1   Le 21 janvier 2009, la Commission européenne a publié une communication portant sur les objectifs stratégiques et les recommandations concernant la politique du transport maritime de l'UE jusqu'en 2018 (1). La communication reflète des consultations intensives menées avec les parties prenantes, les États membres et un groupe de professionnels expérimentés du transport maritime; elle s'appuie aussi sur une étude des tendances dans le transport maritime.

2.2   Le Comité a adopté deux avis sur les documents qui préfiguraient la communication à l'examen, à savoir l'avis du 26 avril 2007 portant sur la communication intitulée «Vers une politique maritime de l'Union» (2) et celui du 22 avril 2008, relatif à la communication sur le thème «Une politique maritime intégrée pour l'Union européenne» (3). Le Comité constate avec satisfaction que la Commission a adopté la plupart des suggestions qu'il avait formulées. Il réaffirme son soutien marqué en faveur d'une approche globale qui couvre toutes les activités maritimes de sorte à éviter les effets inattendus que pourraient avoir des politiques sectorielles.

2.3   Le Comité accueille favorablement la communication qu'il tient dans l'ensemble pour une base solide et réaliste en vue d'une future politique européenne des transports maritimes jusqu'en 2018 qui mette l'accent sur le rôle crucial que joue le transport maritime européen pour le commerce européen et mondial comme pour la vie quotidienne des citoyens de l'UE. La communication reconnaît la dimension de facto mondiale du transport maritime européen, eu égard à sa position compétitive à l'échelle mondiale, à la sécurité et à l'environnement ainsi que la nécessité d'un savoir-faire maritime de grande qualité.

La communication intervient à un moment critique où des défis sérieux se posent qui touchent le transport maritime: a) la crise économique et financière mondiale qui aggrave la crise structurelle et conjoncturelle du transport maritime. Si l'élaboration de la communication a commencé avant la crise mondiale, les principes qui y sont établis restent aussi valables dans les périodes de crise; b) les débats relatifs aux émissions atmosphériques des navires, qui devraient culminer à l'approche de la conférence de Copenhague relevant de la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques organisée en décembre 2009; c) la pénurie croissante de gens de mer.

2.4   Ces défis sont exacerbés par la renaissance du fléau médiéval des mers qu'est la piraterie maritime, et par l'immigration illégale en provenance de la mer Méditerranée.

2.5   Il conviendrait de lire la communication à l'examen en la rapprochant de la communication intitulée «Un avenir durable pour les transports: vers un système intégré, convivial et fondé sur la technologie» (COM(2009) 279 final). Cette dernière recense en effet les questions d'urbanisation, de congestion du trafic, du vieillissement de la population européenne et de l'immigration illégale comme les tendances posant des défis à la politique des transports du XXIe siècle. La future politique maritime peut fournir des réponses à ces enjeux et contribuer à faciliter leur résolution.

3.   Ressources humaines, compétences et savoir-faire maritimes

Attirer les jeunes dans une carrière maritime afin de préserver le plus haut niveau de savoir-faire maritime dans le pôle d'activité maritime européen – le premier à l'échelle mondiale – constitue une nécessité absolue. Le Comité s'inquiète des taux élevés d'abandon d'études dans les écoles navales de certains États membres et d'abandon des carrières maritimes. La vocation maritime de l'UE pourrait être sérieusement menacée, à moins que ne soit mise au point une stratégie globale et immédiate pour rendre les professions maritimes plus attrayantes. Il conviendrait de mener encore plus loin les travaux effectués par les partenaires sociaux (ECSA et ETF) en matière de cartographie des carrières. Aux mesures destinées à «attirer» les Européens vers les métiers des gens de mer, il y aurait lieu d'associer des mesures destinées à «retenir» le personnel dans ce secteur.

3.1.1   En ces temps de crise mondiale et de chômage élevé, il serait opportun de ne pas laisser passer l'occasion de promouvoir les carrières maritimes. Malgré la crise, l'emploi à bord des navires de la flotte européenne s'est maintenu. La solitude et l'éloignement des familles sont les raisons principales à l'origine du peu d'attrait que suscitent les professions maritimes.

3.1.2   Une approche plus coordonnée associant toutes les parties concernées (administrations maritimes, écoles, associations d'armateurs, syndicats de gens de mer), le recours à l'internet ainsi que des programmes médiatiques et télévisés montrant la vie en mer sont nécessaires. La Commission est encouragée à traiter la question au niveau européen.

3.2   En 2003, les Associations d'armateurs de la Communauté européenne (ECSA) et la Fédération des travailleurs des transports (EFT) ont conçu un projet visant à éliminer le harcèlement et les persécutions à bord des navires et à mettre en œuvre des politiques efficaces en matière d'égalité des chances au sein des compagnies. Le projet répond à des objectifs clés du comité européen de dialogue social sectoriel pour transport maritime, en promouvant la présence de femmes au sein des équipages.

3.3   Il convient d'améliorer la qualité de la formation professionnelle des gens de mer en Europe. Tous les États membres devraient pour ce faire instaurer des programmes de formation et des modalités en matière de lien au pavillon, afin de garantir le savoir-faire maritime en Europe. C'est pourquoi tous les États membres doivent développer plus avant les instituts de formation maritime sur le plan qualitatif. Il y a lieu d'élaborer des programmes à long terme visant à améliorer les conditions de travail et de vie à bord. La Commission est appelée à étudier et analyser l'augmentation de la taille des équipages et les problèmes de fatigue afférents ainsi que les risques, afin de les atténuer et de prendre des mesures s'il y a lieu. Des dispositifs de promotion, d'enseignement et de formation doivent être établis. Il conviendrait d'améliorer les conditions de travail et de vie à bord en créant un contexte de concurrence équitable au niveau mondial grâce à la ratification de la convention du travail maritime de l'OIT (2006) et à la transposition par les États membres de la directive découlant de l'accord auquel sont parvenues les Associations d'armateurs de la Communauté européenne (ECSA) et la Fédération européenne des travailleurs des transports (EFT) au sujet de cette convention. Il y aurait lieu de respecter la législation internationale, en particulier la convention de l'OMI relative aux normes de formation des gens de mer, de délivrance des brevets et de veille (STCW, 1995) qui est actuellement en cours de révision.

3.4   Il conviendrait d'accroître encore les activités de promotion, l'éducation et la formation pour atteindre la plus haute qualité. La Commission devrait examiner les meilleurs pratiques en vigueur dans les États membres qui sont déployées au niveau de l'enseignement secondaire pour promouvoir les carrières maritimes. Le Comité approuve les propositions portant sur l'échange d'élèves-officiers (programme Erasmus), l'emploi de ceux-ci en mer au titre de leur enseignement maritime, et l'amélioration de la médecine à bord. Il réaffirme (4) que l'expérience d'université flottante mérite d'être explorée pour attirer les étudiants dans les carrières maritimes.

3.5   Le Comité insiste sur la nécessité de traiter équitablement les marins conformément aux lignes directrices de l'OMI/OIT sur le traitement équitable des marins en cas d'accident maritime. La criminalisation des marins devrait être traitée au niveau international. Il conviendrait que l'OMI procède à une analyse détaillée des cas où les États du pavillon qui en sont membres ont, de manière inacceptable, criminalisé des gens de mers, notamment en les plaçant en détention. En outre, le CESE souligne que la criminalisation des marins ternit l'image de la profession en ces temps où prévaut de par le monde une grave pénurie de gens de mers hautement qualifiés (5). La future législation de l'UE devrait être élaborée conformément aux principes convenus à l'échelle internationale et aux normes de la convention internationale sur la prévention de la pollution par les navires (MARPOL) et de la convention des Nations unies sur le droit de la mer (UNCLOS).

3.6   Le Comité demande instamment aux États membres de ratifier la convention du travail maritime élaborée par l'OIT en 2006, qui créera un contexte de concurrence équitable s'agissant des conditions à bord des navires et contribuera à attirer les jeunes dans une carrière maritime.

3.7   Le Comité, en coopération avec les conseils économiques et sociaux nationaux et les autres parties prenantes de la société civile, peut promouvoir le patrimoine et l'identité maritimes de l'Union européenne et communiquer autour des meilleures pratiques pour attirer les jeunes dans les carrières de marins. Une conférence sur les professions maritimes organisée par le CESE pourrait contribuer à délivrer ce message au niveau européen.

4.   Le transport maritime européen sur les marchés mondiaux

4.1   Le CESE accueille avec satisfaction le fait que la Commission reconnaisse la nécessité d'une réglementation mondiale pour une industrie mondiale, ainsi que l'importance d'une réglementation maritime internationale, et prône la recherche de solutions aux défis que doivent affronter, en matière de réglementation, les organismes internationaux (tels que l'OMI). Le transport maritime européen est le tout premier au niveau mondial. Il serait opportun de renforcer cette position grâce aux orientations sur les aides d'État, qui doivent faire l'objet d'une révision en 2011 et constituent un instrument essentiel s'agissant de préserver des conditions de concurrence équitables et la compétitivité de la flotte européenne à l'échelle mondiale. Il est nécessaire de proroger leur existence afin de maintenir le statu quo. Dans le même temps, le CESE plaide pour que la réglementation communautaire sur les aides d'État soit complétée. Il convient qu'à l'avenir, les aides d'État ne soient octroyées en principe qu'à des pavillons de l'UE et qu'il soit impossible de contourner les normes européennes.

4.2   Face à la crise mondiale, la Commission fait référence, à juste titre, à l'engagement pris de longue date par l'UE en matière de concurrence ouverte et loyale. Il conviendrait de se garder des mesures protectionnistes dans la mesure où celles-ci ne feraient que retarder encore un retour à des économies saines. L'environnement ne devrait pas servir d'excuse pour justifier l'adoption de mesures protectionnistes.

4.3   Le transport maritime devrait revenir aux principes de base et à un comportement éthique. Il y a lieu de restaurer la confiance tant dans le secteur du transport maritime que dans le secteur bancaire. La spéculation sur la construction de bateaux que ne sous-tend aucune nécessité économique devrait être écartée. Une nouvelle approche est nécessaire, qui articule le financement et la construction dans l'optique de projets de transport maritime dignes d'intérêt. Les États membres de l'UE devraient faire preuve de solidarité pour atténuer l'impact de la crise économique et financière (6) sur le secteur maritime.

4.4   Le secteur européen du transport maritime se distingue par l'esprit d'entreprise qui y prévaut. Le grand nombre d'entreprises de transport maritime privées (souvent familiales) constitue une caractéristique importante des flottes de l'UE. Il serait opportun de sensibiliser les législateurs européens à ce modèle ainsi qu'à ses caractéristiques et institutions spécifiques. La crise actuelle du transport maritime a prélevé un lourd tribut auprès des petites et moyennes entreprises, qui forment la colonne vertébrale du transport maritime européen. Dans le même temps, le CESE souligne qu'il faut éliminer les navires sous normes, quel que soit leur pavillon. Ces pratiques ne peuvent en aucun cas bénéficier d'aides d'État.

4.5   À la suite de l'abolition unilatérale de l'exemption des règles antitrust dont bénéficiaient les conférences maritimes dans l'UE (intervenue en 2006), la Commission est invitée à suivre les conséquences des régimes de concurrence non homogènes à travers le monde. Il existe à l'heure actuelle 110 juridictions compétentes en matière de concurrence, qui appliquent des régimes différents à une industrie mondiale telle que le transport de ligne (7).

5.   Un transport maritime de qualité

5.1   Le Comité estime que l'adoption récente du troisième paquet sur la sécurité maritime établit un cadre réglementaire adéquat pour la sécurité maritime, qui aboutira à un train complet de mesures de réglementation européenne en matière de sécurité maritime s'appuyant sur l'approche globale de l'OMI. Le paquet contribuera à cibler le transport maritime qui ne répond pas aux normes tandis qu'une nouvelle impulsion sera donnée à la philosophie de transport maritime de qualité. La base de données EQUASIS, créée par l'Agence européenne de la sécurité maritime, fournit des informations utiles sur la qualité des navires.

Dans le proche avenir, le transport maritime continuera son expansion afin de répondre aux besoins du commerce mondial en constante augmentation. Ses émissions totales sont donc vouées à augmenter. Des réductions considérables peuvent être obtenues au moyen de toute une gamme de mesures techniques et opérationnelles. Une expansion de la recherche-développement au sujet des groupes de propulsion et des combustibles alternatifs ainsi que de la forme des navires y contribuera également. Les performances des navires figurent parmi les meilleures dans le domaine des émissions atmosphériques, notamment concernant le CO2, du fait de leur modernisation constante et de leur efficacité énergétique et ce, en dépit des distances impliquées.

5.2.1   Dans la perspective de la conférence de Copenhague sur le changement climatique (décembre 2009), le Comité réaffirme (8) qu'il est beaucoup plus difficile d'appliquer un système d'échanges de quotas d'émissions au secteur du transport maritime – notamment au secteur du transport maritime à la demande («tramping») – qu'à l'aviation. Lorsqu'on s'interroge sur un éventuel instrument basé sur le marché pour le transport maritime, il y a lieu de ne pas obérer la compétitivité de la marine marchande européenne sur le marché mondial.

5.2.2   Appliquer les limites en soufre dans les zones de contrôle des émissions des navires est une mesure favorable à l'environnement. Il convient de chercher à étendre cet instrument à d'autres zones.

5.3   Le Comité renouvelle (2) sa demande d'une réglementation environnementale européenne qui s'applique aux bateaux de plaisance et, si possible, aux navires militaires (3). La politique environnementale devrait aussi examiner la pollution maritime non visible.

5.4   Le Comité propose (9) une stratégie équilibrée visant à améliorer les conditions sociales et environnementales sur les chantiers de recyclage tout en préservant leurs capacités afin de faire face à la pénurie mondiale de chantiers de démantèlement. Cette stratégie devrait être d'application durant la période temporaire précédant l'entrée en vigueur, au niveau international, de la «Convention internationale sur le recyclage sûr et écologiquement rationnel des navires» élaborée par l'OMI (2009).

6.   Collaboration à l’échelon international

6.1   Le Comité a sensibilisé l'UE aux problèmes de transport maritime concernant des zones géographiques particulières (3) (par exemple, l'océan Arctique, la mer Baltique ou la mer Méditerranée). Il est satisfaisant de constater que la Commission y a répondu en publiant des communications relatives à la voie arctique, à la stratégie de la mer Baltique et à la stratégie de la mer Méditerranée. Le Comité relève que la communication souligne l'importance stratégique que revêt la flotte européenne pour ce qui est d'assurer un approvisionnement fluide de l'UE en pétrole et en gaz. Il l'invite dès lors à élaborer une stratégie de la mer Noire qui associe tous les pays de ce bassin afin d'assurer le transport des ressources énergétiques en provenance de la Caspienne vers l'Europe.

6.2   Il conviendrait d'intensifier les efforts en vue de parvenir à un accord sur les services maritimes à l'OMC. L'accord maritime conclu entre l'UE et la Chine peut être considéré comme une «meilleure pratique» (accord modèle) à appliquer avec les autres partenaires commerciaux (tels que l'Inde, le Brésil, la Russie, l'ANASE ou le Mercosur).

6.3   Le Comité invite la Commission à enquêter sur l'existence d'accords maritimes bilatéraux en matière de partage des cargaisons entre les États membres de l'UE et des pays tiers, et, le cas échéant à activer l'application de l'acquis communautaire (règlements 4055/86 et 4058/86). Dans le même esprit, elle devrait également décourager les accords bilatéraux entre pays tiers.

6.4   En ce qui concerne la proposition consistant à accroître la visibilité de l'UE à l'OMI, dans les cas de compétences mixtes de l'UE et des États membres, une coopération/coordination renforcée des États membres est envisageable sans que leur participation individuelle s'en trouve menacée. Le Comité réaffirme que «la contribution que [les États membres de l'UE] peuvent apporter au sein de […] l'OMI en termes d'expertise jouit d'une très bonne réputation et qu'il serait opportun de promouvoir cet apport plutôt que de l'affaiblir» (2).

Le Comité réaffirme qu'il est nécessaire que l'UE agisse dans les plus brefs délais face à la recrudescence des actes de piraterie (10) perpétrés à l'encontre des navires marchands en Asie du Sud-est et en Afrique. L'absence de tribunaux et de législations adéquats encourage l'impunité des agissements des pirates. Aussi la Commission devrait-elle œuvrer pour que soient établies des juridictions et des législations pertinentes dans les zones contaminées. Il convient de chercher à intensifier la collaboration avec les organisations des Nations unies, afin d'améliorer la situation politique, économique et sociale dans les pays d'origine. Il est urgent de traiter les causes à l'origine de la piraterie, de restaurer la loi et l'ordre, et de rétablir la situation économique et sociale, notamment en Somalie. L'aide de l'UE au développement et l'action diplomatique devraient être utilisées à cet effet. Le CESE s'oppose vivement à l'armement des gens de mer.

6.5.1   Selon des données récentes (11), les attaques de pirates devraient coûter 16 milliards de dollars à l'économie mondiale. En 2008, 111 attaques de pirates se sont produites dans la région de la Corne de l'Afrique, tandis qu'au cours du premier semestre de l'année 2009, 240 ont été dénombrées, mettant en danger la vie de 1 000 marins. Au cours des 18 derniers mois, 150 millions de dollars ont été payés aux pirates somaliens à titre de rançon.

6.6   L'immigration illégale, outre ses implications humanitaires évidentes, est source de graves problèmes pour le transport maritime et la sécurité des frontières maritimes. Il est absolument indispensable de renforcer la surveillance maritime intégrée pour la Méditerranée (SafeSeaNet, FRONTEX). La Commission devrait développer une politique de coopération avec les pays tiers d'origine et de transit des immigrants afin de contrôler l'immigration illégale par voie maritime.

7.   Le transport maritime à courte distance

7.1   Dans le contexte des transports durables et de la promotion du transport maritime à courte distance, il conviendrait d'investir davantage dans l'amélioration des infrastructures portuaires et des liaisons avec l'arrière-pays. Le réexamen du RTE-T devrait pleinement tenir compte de ce paramètre. Le CESE invite la Commission à recenser les incompatibilités à l'interface entre les réseaux terrestres et maritimes afin de permettre que l'UE soit plus facilement raccordée aux pays voisins ayant des frontières communes.

8.   La recherche et l'innovation maritimes

8.1   Le CESE (8) a invité la Commission à se hisser au rang de numéro un mondial en matière de recherche et d'innovation maritimes. Il se réjouit de la réaction positive de la Commission.

8.2   Le CESE soutient l'investissement dans la recherche et développement ayant trait aux navires, aux carburants et aux ports «verts», qui stimulera également les emplois verts. Il y a lieu d'amplifier la recherche et le développement qui ciblent de nouvelles réductions des émissions des bateaux.

8.3   Dans ce processus, la Commission devrait favoriser les solutions aux défis environnementaux, énergétiques, sociaux et de sécurité qui articulent une politique maritime cohérente à venir avec la politique en matière de construction navale. Les chantiers navals européens devraient orienter leurs compétences démontrées vers la construction de navires «verts», en faisant appel à l'initiative Leadership 2015 et d'autres programmes pertinents.

Bruxelles, le 17 décembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  COM(2009) 8 final.

(2)  JO C 168 du 20.7.2007, pp. 50-56.

(3)  JO C 211 du 19.8.2008, pp. 31-36.

(4)  JO C 211 du 19.8.2008, pp. 31-36; cf. «New York Harbor School», www.newyorkharborschool.org.

(5)  D'après l'étude menée par consultants maritimes Drewry (Drewry Shipping Consultants - 2009), la flotte mondiale aura besoin de 42 700 officiers d'ici 2013.

(6)  Rapport d'information 397/2009 du CESE sur le thème «Les origines lointaines de la crise financière mondiale», rapporteur: M. BURANI, le 11 mars 2009.

(7)  JO C 157 du 28.6.2005, pp. 130-136;

JO C 309 du 16.12.2006, pp. 46-50;

JO C 204 du 9.8.2008, pp. 43-46.

(8)  JO C 277 du 17.11.2009, p. 20.

(9)  JO C 277 du 17.11.2009, p. 67.

(10)  COM(2009) 301 final.

(11)  Bureau maritime international (BMI) de la Chambre internationale du commerce, centre d'observation de la piraterie, rapport, août 2009. La récente communication sur le partenariat entre l'UE et l'Afrique définit la piraterie et la migration illégale par voie maritime comme des problèmes majeurs pour la coopération en matière de transport.


ANNEXE

à l'AVIS

du Comité économique et social européen

Le paragraphe suivant, qui a recueilli au moins un quart des voix, a été rejeté au cours du débat:

Paragraphe 1.5

«Le transport maritime européen est le tout premier au niveau mondial. Il serait opportun de renforcer cette position grâce aux orientations sur les aides d'État, afin de préserver des conditions de concurrence équitables et la compétitivité de la flotte européenne à l'échelle mondiale. Dans le même temps, le CESE plaide pour que la réglementation communautaire sur les aides d'État soit complétée. Il convient qu'à l'avenir, les aides d'État ne soient octroyées qu'à des pavillons de l'UE et qu'il soit impossible de contourner les normes européennes par le biais de l'affrètement coque nue.»

Résultat du vote:

pour l'amendement: 92

contre l'amendement: 91

abstentions: 7

L'amendement suivant, qui a recueilli au moins un quart des voix, a été rejeté au cours du débat:

Paragraphe 1.11

«Appliquer les limites en soufre dans les zones de contrôle des émissions des navires, favorable à l'environnement, . .»

Exposé des motifs

Aucun élément ne semble indiquer que l'introduction de zones de contrôle des émissions de dioxyde de soufre ait joué sur des transferts modaux favorisant le développement des transports terrestres au détriment du trafic maritime.

Résultat du vote:

pour l'amendement: 92

contre l'amendement: 96

abstentions: 18

Le paragraphe suivant, qui a recueilli au moins un quart des voix, a été rejeté au cours du débat:

Paragraphe 5.2.1

«Dans la perspective de la conférence de Copenhague sur le changement climatique (décembre 2009), le Comité réaffirme (1) qu'il est beaucoup plus difficile d'appliquer un système d'échanges de quotas d'émissions au secteur du transport maritime – notamment au secteur du transport maritime à la demande (“tramping”) – qu'à l'aviation. Lorsqu'on s'interroge sur un éventuel système d'échange de quotas d'émissions pour le transport maritime, il y a lieu de ne pas obérer la compétitivité de la marine marchande européenne sur le marché mondial».

Résultat du vote:

pour l'amendement: 112

contre l'amendement: 83

abstentions: 16

Le paragraphe suivant, qui a recueilli au moins un quart des voix, a été rejeté au cours du débat:

Paragraphe 5.2.2

«Appliquer les limites en soufre dans les zones de contrôle des émissions des navires, approche qui, au premier abord, semble favorable à l'environnement, peut provoquer l'effet inverse, c'est-à-dire un transfert modal de la mer vers la terre. La politique européenne de comodalité et la promotion des services maritimes à courte distance ne devraient pas être menacées. Il est crucial d'entreprendre les évaluations d'impact appropriées avant de prendre des décisions.»

Résultat du vote:

pour l'amendement: 94

contre l'amendement: 93

abstentions: 17


(1)  JO C 277 du 17.11.2009, p. 20.


22.9.2010   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 255/110


Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission «Un avenir durable pour les transports: vers un système intégré, convivial et fondé sur la technologie»

COM(2009) 279 final

et le thème

«Points de départ pour une politique européenne de transport après 2010»

(avis exploratoire)

(2010/C 255/20)

Rapporteur: M. Lutz RIBBE

Le 17 juin 2009, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur sa communication

«Un avenir durable pour les transports: vers un système intégré, convivial et fondé sur la technologie»

COM(2009) 279 final.

Le 2 juillet 2009, la présidence suédoise du Conseil de l'Union européenne a demandé au Comité économique et social européen d'élaborer un avis exploratoire sur le thème:

«Points de départ pour une politique européenne de transport après 2010»

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a élaboré son avis le 12 novembre 2009 (rapporteur: M. RIBBE).

Lors de sa 458e session plénière des 16 et 17 décembre 2009 (séance du 16 décembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 171 voix pour, 5 voix contre et 11 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le Comité partage l'analyse de la Commission sur la politique qui a été menée jusqu'à présent en matière de transports: les objectifs que l'on s'est fixés en matière de durabilité sont encore loin d'être atteints et des changements d'orientation fondamentaux s'imposent.

1.2   Le Comité fait observer qu'il convient non seulement de redoubler d'efforts en ce qui concerne les objectifs environnementaux (par exemple la protection du climat, la préservation des ressources, la biodiversité, le bruit, la pollution atmosphérique, etc.), mais que de nombreuses questions sociales restent encore en suspens dans le domaine des transports. Cette observation s'applique aux droits et aux conditions de travail et de rémunération des travailleurs actifs dans le secteur des transports mais également à la question de la disponibilité et de l'accessibilité des moyens de transports publics pour les handicapés, les jeunes et les personnes âgées. Il s'agit de plus du libre choix des usagers qui ne peuvent ou ne veulent pas disposer de leur propre automobile.

1.3   Le Comité soutient les objectifs formulés dans le document de la Commission mais ne voit pas que les instruments décrits suffisent à amorcer de changement fondamental.

1.4   Si une grande partie des objectifs mentionnés sont bien connus et que la Commission en mentionne certains depuis des années, c'est la mise en œuvre qui fait défaut. L'internalisation des coûts externes ou les exigences en matière de nouvelle politique des transports urbains peuvent être cités en exemple à cet égard.

1.5   La Commission devrait exposer dans la version définitive de son Livre blanc des axes d'intervention clairs et fixer des objectifs concrets et quantifiables.

1.6   Le Comité estime qu'il est crucial de mener un débat sur la question de savoir quels projets et décisions politiques induisent un surcroît de trafic ou comment ce dernier peut être évité. La Commission est invitée à accorder beaucoup plus d'attention à ces problématiques lorsqu'elle présentera un livre blanc ou de nouvelles orientations politiques.

2.   La communication de la Commission européenne

2.1   En 2001, la Commission a présenté un livre blanc (1) dans lequel elle avait alors proposé des orientations pour la politique européenne de transport à mener jusqu'en 2010. Ce programme a été mis à jour lors de l’examen à mi-parcours effectué en 2006 (2). Maintenant que cette période décennale touche à sa fin, la Commission estime que le temps est venu de porter à nouveau le regard vers l'avenir et de préparer la voie à de nouveaux développements en matière de politique des transports.

2.2   Par la communication à l'examen, la Commission, présente les premiers fruits de la réflexion menée et des ébauches d'observations, qui ont intégré les contributions de diverses études, débats et conclusions de consultations.

2.3   Dans le bilan qu'elle dresse, la Commission relève que «le transport est un élément essentiel de l'économie européenne». Dans l'UE, ce secteur représente environ 7 % du PIB et plus de 5 % de tous les emplois. La Commission décrit et souligne également l'importance qu'il revêt pour la cohésion sociale et économique des régions, de l'Europe et du monde, ainsi que pour la compétitivité de l'industrie européenne et la réalisation des objectifs de Lisbonne.

2.4   Dans le même temps, la Commission constate cependant aussi qu'en matière de politique des transports, «les résultats concernant les objectifs de la stratégie communautaire de développement durable ont cependant été plus limités: selon le rapport sur l'état d'avancement de 2007  (3) , le système de transport européen n'est pas encore engagé sur une voie durable en ce qui concerne plusieurs aspects».

2.5   Le texte explique par ailleurs que «c'est principalement dans le domaine de l’environnement que des progrès supplémentaires sont nécessaires. Dans l'UE, si l’on compare par rapport aux niveaux de 1990, le secteur des transports est celui où le taux de croissance des émissions de gaz à effet de serre (GES) est le plus élevé  (4) . Si l’on applique cette analyse à des évolutions passées dans le domaine des transports, on constate que l’activité de ce secteur a considérablement augmenté, alors que les progrès dans le sens d’une réduction de sa consommation d’énergie et des émissions de GES ont été insuffisants».

2.6   Dissocier la croissance des transports de la croissance du PIB était l’un des objectifs du Livre blanc de 2001 et de la stratégie communautaire de développement durable; cette dissociation a eu lieu pour l’activité de transport de passagers, mais non pour celui des marchandises. Cette situation s'explique notamment par le fait que «la croissance du transport de marchandises est également liée aux pratiques économiques – concentration de la production sur un nombre réduit de sites pour tirer profit des économies d'échelle, délocalisation, livraison en juste-à-temps, recyclage généralisé du verre, du papier et du métal – qui ont entraîné une diminution des coûts et, éventuellement, des émissions dans d’autres secteurs, avec comme contrepartie une augmentation des émissions dues au transport».

2.7   L'efficacité énergétique du transport (et de chacun des modes de transport) s'améliore mais sans que ces gains parviennent à compenser l'augmentation des volumes transportés (5). En d'autres termes, le problème réside également dans les quantités de fret, ainsi que dans la modestie des progrès réalisés «en ce qui concerne le transfert du mode routier vers des modes plus efficaces, notamment grâce au développement du transport maritime à courte distance».

2.8   Sous la rubrique «Tendances et défis», la Commission pose notamment les constats suivants:

le poids démographique des personnes âgées (plus de 65 ans) va augmenter rapidement dans l'UE, avec la double conséquence de modifier les comportements de voyage mais aussi d'obliger la collectivité à consacrer davantage de ressources publiques aux pensions, aux soins de santé et au personnel soignant. La Commission suppute que cette évolution limitera les moyens que les pouvoirs publics, à l'avenir, pourront consacrer aux transports,

les transports auront un rôle essentiel à jouer pour atteindre les objectifs communautaires de protection climatique et «une inversion de certaines tendances actuelles sera indispensable»,

la raréfaction des combustibles fossiles aura des retombées considérables sur le secteur du transport, d'un point de vue technologique, dans la mesure où ils assurent 97 % de ses besoins énergétiques, mais aussi structurel, étant donné que leur acheminement est actuellement à l'origine de la moitié, grosso modo, des cargaisons du transport maritime international,

la composante citadine de la population européenne va s'accroître (6), alors qu'on constate dès à présent que la circulation urbaine est responsable de quelque 40 % des émissions de CO2 et 70 % de celles d'autres polluants en rapport avec le transport routier,

au niveau mondial, l'accroissement de la population et l'augmentation du bien-être induiront une hausse de la mobilité et de l'activité de transport: certaines études sont citées qui estiment que le nombre de voitures dans le monde pourrait passer d’environ 700 millions aujourd’hui à plus de trois milliards en 2050, selon une évolution «qui créera de graves problèmes de durabilité, à moins d’opérer une transition vers des véhicules moins ou non polluants et de mettre en place un nouveau concept de mobilité».

2.9   Bref, la Commission est on ne peut plus fondée à affirmer qu'il y a lieu de développer «une vision à long terme pour une mobilité durable des personnes et des biens».

2.10   La Commission formule par ailleurs sept objectifs politiques d'ensemble:

la création de transports de qualité, sûrs et sécurisants,

un réseau bien entretenu et entièrement intégré,

des transports plus durables,

le maintien de l'UE en première ligne pour les prestations et technologies de transport,

la protection et le développement du capital humain,

des prix intelligents pour orienter les utilisateurs,

une planification qui tienne compte des transports: améliorer l'accessibilité.

3.   Observations générales

3.1   Le Comité se félicite que la Commission se saisisse à nouveau de cette problématique et, sur la question de l'avenir des transports, lance dans un vaste processus de consultation certaines idées préliminaires qui, au demeurant, présentent encore le défaut de n'être pas suffisamment concrètes. L'analyse que fait la Commission du secteur des transports est on ne peut plus claire: les objectifs que l'on s'est fixés en matière de durabilité sont encore loin d'être atteints; elle reconnaît que des changements fondamentaux s'imposent. En l'état actuel, on ne peut d'ailleurs pas dire que nous soyons en présence d'une vision aux contours bien cernés, assortie d'objectifs et d'instruments tangibles pour limiter et réduire, en particulier, les déplacements individuels motorisés. Cela devrait faire l'objet d'un plan d'action détaillé présenté par la Commission, accompagné d'objectifs quantitatifs.

3.2   Le Comité rejoint la réflexion de la Commission sur de nombreux points, par exemple, pour ne citer que ces quelques cas, lorsqu'elle estime qu'il y a lieu d'utiliser au mieux les infrastructures existantes, par des moyens qui couvrent également la création ou le perfectionnement de dispositifs ressortissant aux technologies de l'information et de la communication, d'établir «un système logistique intelligent et intégré», de propager des idées novatrices tout particulièrement dans le domaine du transport urbain, d'améliorer la comodalité, de privilégier l'orientation du trafic vers des modes transport plus écologiques ou encore d'utiliser des technologies innovantes qui permettent de réduire les émissions, etc. Du reste, ces conclusions n'ont rien d'une nouveauté et encore moins d'une vision nouvelle.

3.3   Ces dernières années, le Comité a élaboré dans ce domaine, sur les différentes politiques et la manière d'arriver à gérer les flux de trafic au mieux, sur le plan technique et organisationnel, toute une série d'avis auxquels il y a lieu de se référer ici, notamment: «Examen à mi-parcours du Livre blanc sur les transports publié en 2001» (7); «Stratégie pour une mise en œuvre de l’internalisation des coûts externes» (8); «Plan d’action pour la logistique du transport de marchandises» (9); «Faciliter l'application transfrontière de la législation dans le domaine de la sécurité routière» (10); «RTE-T: un réexamen des politiques» (11); «L'écologisation du transport maritime et fluvial» (12); «Une vision européenne des océans et des mers» (13); «Le transport routier en 2020» (14); «Vers un réseau ferroviaire à priorité fret» (15) ainsi que «Réseau ferroviaire européen pour un fret compétitif» (16); «Promotion du transport par voies navigables “NAIADES”» (17); «Une politique maritime intégrée pour l'Union européenne» (18).

3.4   Il importe aux yeux du Comité de souligner que la politique des transports de demain doit avoir une bien plus grande ambition que «se borner» à combler du mieux possible, au regard du développement durable, les besoins actuels ou escomptés en matière de flux de trafic. Sur ce point aussi, la communication de la Commission avance un certain nombre d'affirmations certes exactes mais vagues et abstraites - et ce défaut apparaît être une grave carence dans sa réflexion.

3.5   Ainsi, quand bien même la Commission précise qu'il faudra en arriver à modifier en profondeur le système actuel – dans le paragraphe 53, par exemple, il est expliqué que «le système de transport devra faire face à des changements importants», tandis que le paragraphe 70 fait état de la nécessité d'une «réorganisation substantielle du système de transport» et le paragraphe 37, d'un «nouveau concept de mobilité» –, il est à déplorer, de l'avis du Comité, qu'elle n'expose pas plus concrètement le sens exact qu'elle donne à ces énoncés.

3.6   De ce fait, le document de la Commission constitue assurément une synthèse, excellente, de toute une série de positions et d'idées déjà connues mais ne déploie pas encore de «vision» véritable. Bien des éléments restent encore et toujours dans l'ombre, comme la question, ouverte depuis des années, touchant à la manière dont il convient de procéder pour effectuer l'«internalisation des coûts externes».

3.7   Le Comité souhaite dès lors exploiter l'occasion que lui fournit le présent avis exploratoire pour aborder certaines problématiques tout à fait fondamentales auxquelles le document de la Commission n'a pas accordé tout le poids voulu. Il souhaite que la Commission reprenne et approfondisse ces points dans la suite de sa réflexion.

4.   Observations spécifiques

4.1   Mesurer essentiellement l'importance du transport à l'aune de sa contribution au PIB ou à l'emploi procède d'une approche trop réductrice. Du «trafic» se crée dès que des gens se rencontrent, que des biens s'échangent, c'est-à-dire dès qu'activité sociale ou économique il y a. En d'autres termes, on pourrait dire qu'en l'absence d'échanges de biens, de trafic, aucune société ne peut fonctionner et que le PIB serait quasi inexistant.

4.2   Les gens veulent et doivent être mobiles, tout comme ils veulent et doivent échanger des biens. En ce sens, la Commission a raison de considérer, dans les paragraphes 39 et 40 de sa communication, que «les transports sont la clé d'un grand nombre de nos libertés: la liberté de vivre et de travailler dans différentes régions du monde, la liberté de profiter de produits et de services divers, la liberté d'échanger et d'établir des contacts personnels. … La revendication de ces libertés sera probablement plus forte dans la société du futur, davantage multiculturelle et hétérogène».

4.3   Le transport revêt donc une importance extrême, sans toutefois être une fin en soi. On ne peut pas vraiment considérer que tout transport soit ipso facto «bon» pour la société, pour la simple et seule raison qu'il contribue à la circulation des personnes ou des biens. En effet, le trafic n'a pas que des effets positifs, comme la Commission l'explique elle-même de manière fort percutante dans son document. En conséquence, c'est une des missions fondamentales du politique que de définir un encadrement clair pour les «libertés» ainsi invoquées et même de leur imposer des limites, dès lors qu'elles affectent, voire menacent d'autres libertés ou besoins, par exemple lorsqu'il en va de la santé des gens, de notre environnement ou de notre climat, mais aussi et encore des besoins des générations à venir.

4.4   Dans le même temps, la politique des transports doit veiller à ce que soit garantie à tous les citoyens une bonne offre de moyens de transport, avec un accès assuré. En parfaite adéquation avec la logique de la durabilité, cet impératif vaut aussi et surtout pour les couches sociales plus vulnérables, les handicapés, les enfants, les jeunes, etc. Il convient également d'œuvrer en faveur d'une amélioration des conditions de travail des salariés du secteur des transports.

4.5   Par le passé, la politique des transports s'est souvent par trop simplifié la tâche: jusqu'à présent, elle ne s'est souciée, au premier chef, que d'orchestrer la satisfaction de la demande de transport; bien plus, c'est elle-même qui, à maintes reprises, a suscité le dit surcroît de demande et de besoin de trafic, que ce soit, entre autres, en entreprenant de subventionner en priorité les déplacements individuels motorisés, dans une démarche économiquement injustifiée, ou en favorisant une division économique du travail qui reposait exclusivement sur un pétrole bon marché et en répartissant en conséquence sites de production et zones d'habitat, et elle s'est imaginée que pour résoudre les problèmes ainsi créés, il n'était besoin que de recourir à des infrastructures ou de mobiliser les ressources de la technique. On a oublié – et un changement est nécessaire sur ce point – de débattre aussi la question de savoir comment se développe le trafic et si certaines opérations de transport ont un sens. Le Comité est tout à fait conscient que la Commission n'est pas seule responsable à cet égard, parce que dans la logique du principe de subsidiarité, de nombreuses décisions ont été prises au niveau national, régional ou communal.

4.6   Le Comité se félicite dès lors expressément que la Commission aborde certaines questions avec une telle ouverture d'esprit. Au paragraphe 59, elle écrit ainsi que «de nombreux services publics ont été progressivement centralisés afin d'en augmenter l'efficacité. Les distances entre les citoyens et les prestataires de services (établissements scolaires, hôpitaux, centres commerciaux) sont de plus en plus grandes. Les entreprises ont suivi le même mouvement en ne conservant qu'un nombre restreint d'infrastructures de production, de stockage et de distribution. La tendance vers une concentration des activités a donné lieu à une mobilité» forcée «accrue, en raison de la dégradation des conditions d'accessibilité». De l'avis du Comité, la communication de la Commission pèche toutefois sur un point, qui est de ne pas expliciter les conclusions politiques qui devraient être tirées de ce constat.

4.7   Personne ne devrait contester que certains paramètres d'encadrement de l'économie et diverses décisions d'ordre politique, comme la centralisation des institutions publiques mais aussi des entreprises, ont exercé une influence, directe ou indirecte, sur les tendances ainsi décrites. À l'avenir, il serait important de réaliser, en amont des décisions en matière de politiques ou de planification, une analyse nettement plus vigoureuse de leurs répercussions pour le transport ou le système de transport. A-t-on jamais vu projet qui n'aurait pas été concrétisé parce que l'on aurait décidé, au plan politique, que le trafic nouveau ou supplémentaire qu'il induirait serait inopportun?

4.8   Sur la toile de fond des constats, carences et besoins décrits dans la communication de la Commission, il serait donc utile que celle-ci indique, dans le cadre de la quête d'un «avenir durable pour les transports» qui a été entamée, quels sont les développements et dispositifs d'encadrement qu'elle estime indus, parmi tous ceux qui ont été mis autrefois en place au niveau européen et national. A-t-on bien fait de regrouper, comme certains État membre, les écoles et les administrations? Du point de vue de la durabilité (ainsi que du développement régional, par exemple), étaient-ils bien judicieux ces processus de concentration qui, dans le secteur des abattoirs et des laiteries, ont souvent été effectués avec le soutien des fonds structurels de l'UE? Le renforcement des infrastructures était-il réellement susceptible de favoriser un essor durable des régions, ou ne faut-il pas considérer que c'est précisément en menant une politique erronée dans le domaine de ces infrastructures de transport que l'on a abouti à vider les campagnes et faire émerger une mobilité forcée?

4.9   Pour prendre un autre exemple, l'Europe a importé des cargaisons d'aliments pour bétail à bas prix, dans le cadre de la division mondiale du travail. Ces importations ont provoqué des processus de concentration dans le secteur de l'élevage et donné naissance à de nouveaux flux de trafic. Si une telle évolution a pu avoir lieu, c'est essentiellement parce que ni les prix de ces aliments, ni le coût des transports ne sont fidèles à la «vérité écologique et économique», de même qu'ils ne reflètent pas leurs retombées sociales, souvent négatives. À elles seules, les coûteuses incidences des changements climatiques – lesquels sont précisément conditionnés, entre autres facteurs, par les transports – ou celles des dépenses de santé que le trafic provoque par ses nuisances sonores ou ses émissions suffiraient pour que l'on se pose des questions cruciales quant à la politique de mobilité ouverte sur l'avenir qu'il convient de mener dans l'UE. La situation actuelle doit-elle persister en l'état? Et quelles sont ses répercussions sur la politique de transport? Il s'agit là de questions auxquelles le document de la Commission n'apporte malheureusement pas de réponses.

4.10   Le Comité demande que soient évalués les effets d'induction de trafic de toutes les politiques sectorielles, de la politique économique et de la concurrence jusqu'à la celle de développement. Ainsi, la révision de la politique agricole commune dans le sens d'un renforcement des circuits économiques régionaux offre de grandes chances d'éviter du trafic et de raccourcir les trajets en Europe.

4.11   L'enjeu d'un tel débat ne se limite pas à la seule mobilité en tant que telle, c'est-à-dire au nombre de déplacements qui sont effectués, mais concerne tout autant leur longueur, leurs modalités, la manière dont ils sont couverts, en l'occurrence les dépenses qu'ils induisent et le mode de transport qui est utilisé.

4.12   Sur ce point précis, beaucoup de choses ont changé ces dernières années. La longueur des trajets a été considérablement multipliée et, pour les couvrir, ce ne sont justement pas les modes de transport les plus favorables à l'environnement qui sont employés. Ce constat s'applique tant aux déplacements de personnes qu'aux flux de marchandises, c'est-à-dire au transport de biens. Si les céréales continuent, au départ du champ, à parvenir au consommateur en bout de chaîne en transitant par un moulin puis une boulangerie, elles sont transportées par des voies qui se sont modifiées. Pour illustrer la nécessité d'agir, il n'est que de prendre l'exemple des pâtons prétraités, dont il s'avère, eu égard à l'encadrement en vigueur d'autres domaines et aux lacunes de l'harmonisation au sein de l'UE, qu'il est plus avantageux, du point de vue de la gestion des entreprises, de leur faire parcourir des centaines de kilomètres en camions frigorifiques et de ne procéder que sur place à la cuisson, qui les transformera en bretzels.

4.13   Depuis des générations, les gens n'effectuent pas plus de trois à quatre trajets quotidiens. En Allemagne, par exemple, la population accomplit actuellement chaque jour quelque 281 millions de déplacements, soit 3,4 par personne. Quotidiennement, ce sont environ 3,2 milliards de kilomètres (19) qui sont ainsi parcourus. En 2002, ce chiffre n'était «que» de 3,04 milliards.

4.14   Le trafic et la longueur des trajets résultent des décisions des particuliers, du monde politique et des entreprises. Le prix à supporter pour assurer le trafic concerné joue un rôle décisif à cet égard. À l'avenir, bien des choses pourraient et devraient changer en ce domaine, notamment avec l'augmentation du prix des matières premières, en particulier les combustibles fossiles, ou encore avec cette «internalisation des coûts externes» que le Comité a défendue et revendiquée à plusieurs reprises et le reflux des moyens publics sur lequel table la Commission en matière d'infrastructures. Il manque toutefois des messages politiques clairs quant aux conclusions qu'il convient de tirer de ces évolutions. Le Comité estime que les décisions sur les infrastructures devraient reposer davantage sur une vision d'ensemble du développement durable. Il convient également de prendre davantage en compte non seulement les améliorations des dessertes, les gains de productivité et les économies de temps, mais aussi les coûts qui en découlent pour l'environnement et la société.

4.15   Toute nouvelle mesure d'infrastructure en matière de transport est très chère et sa mise en œuvre a des effets qui s'étendent sur plusieurs décennies. Si la Commission constate que la proportion de personnes âgées dans notre société et la population urbaine vont continuer à croître (et qu'en conséquence la demande de mobilité va changer) et que moins de fonds publics seront disponibles pour les dépenses au titre des infrastructures de transport, alors il sera nécessaire de modifier radicalement les investissements d'infrastructure.

4.16   Aussi le Comité propose-t-il que dans le contexte de la «révision substantielle du système de transport» et du «nouveau concept de mobilité», la Commission et la présidence du Conseil procèdent à un débat pour creuser des questions fondamentales telles que les sources de trafic et la mobilité forcée. Il souligne cependant une fois de plus que cette discussion ne vise pas à rogner sur les libertés ou les besoins de mobilité mais qu'elle doit apporter l'indispensable clarification sur la forme à donner à la stratégie de développement durable, à laquelle la politique des transports est jusqu'ici beaucoup trop peu intégrée, l'objectif étant que les générations à venir jouissent encore du droit de se déplacer.

4.17   Dans le paragraphe 53, la Commission aborde un point important: «il se peut cependant que, dans certaines branches, des travailleurs du secteur des transports soient déplacés pour les besoins de l'adaptation à un contexte économique et énergétique radicalement différent. Il est important de garantir l'anticipation et la gestion efficaces de ce type d'évolution afin que les nouvelles conditions créent également de nouveaux emplois et que les travailleurs du secteur des transports puissent participer et réagir au processus

4.18   Cette «anticipation efficace» doit effectivement être au cœur du débat, impliquant notamment que l'on cerne le plus clairement possible quels seront les secteurs qui seront affectés, soit positivement, soit négativement. Beaucoup d'éléments sont déjà connus: ils doivent être soumis à un débat ouvert. Dans un de ses premiers avis sur le développement durable (NAT/229), le Comité a déjà souligné que ce sont précisément ces indispensables processus d'évolution qui suscitent craintes et résistances, en particulier dans les secteurs de la société qui tiraient auparavant profit du système actuel, non durable, et sont ainsi concernés au premier chef par les mutations structurelles.

4.19   Outre ces questions structurelles concernant l'origine du trafic et la longueur des déplacements, il y a lieu d'éclaircir celle des modalités concernant les moyens de transport. Le Comité salue les affirmations que la Commission avance dans sa communication, en particulier lorsqu'elle fait valoir:

que les montants élevés supportés par les usagers des transports (routiers) (20)«ne reflètent souvent pas beaucoup les coûts réels que représentent leurs choix pour la société»;

qu'une imputation correcte des coûts externes de tous les modes et moyens de transport aurait pour effet que la société renoncerait à une partie du trafic et choisirait mieux ses vecteurs de transport, qui seraient en l'occurrence plus compatibles avec la protection de l'environnement. Le Comité juge cependant qu'il manque des indications sur la manière de concrétiser cette «internalisation correcte»;

qu'il est «absolument nécessaire d'adopter des technologies différentes permettant de construire des véhicules moins ou non polluants». Sur ce point, le Comité pense qu'un rôle important sera joué par la réduction de la taille des véhicules, sur laquelle viendra se greffer le développement de la propulsion électrique, étant entendu que les calculs de l'Agence des énergies renouvelables démontrent que celle-ci n'apportera de contribution appréciable à la préservation du climat que si l'électricité qu'elle emploie est issue de sources renouvelables (21). La problématique ne se réduit d'ailleurs aux seules nouvelles technologies de propulsion, car elles ne permettent pas, par exemple, de résoudre la question des encombrements ni celle de la structuration des villes en fonction de la voiture;

Il s'impose tout particulièrement d'apporter un soutien massif aux moyens de transport publics, au vélo et à la marche dans les agglomérations dont l'extension se poursuit. Cette insistance recoupe les affirmations de la Commission émanant des «réseaux des citoyens» (22), dont le CESE vient encore tout récemment de déplorer que la mise en œuvre des idées qui y sont développées ne progresse que très timidement. C'est précisément en matière de politique des transports urbains que de nouveaux concepts sont nécessaires, qui remettent en question le rôle jusqu'à présent prédominant de la voiture;

Le Comité voit dans les politiques des transports urbains menées ces dernières années ou décennies, par exemple à Londres ou à Bielefeld, en Allemagne, la preuve que des décideurs engagés peuvent, s'ils en ont la volonté, inverser des tendances néfastes et mettre en œuvre une politique de transport durable.

Dans ce contexte, le Comité met en doute les affirmations de la Commission dans le paragraphe 32 de sa communication, selon lesquelles «l'extension des villes génère des besoins plus importants de modes de transport individuels». Ainsi, la concentration relativement faible de voitures personnelles dans de grandes villes comme Berlin ou Copenhague montre qu'une politique des transports adéquate peut conduire à une évolution de la répartition des différents modes de transport diamétralement opposée à celle que prévoit la Commission.

Le Comité escompte un solide débat sur les instruments qui seraient efficaces pour établir un classement des modes et moyens de transport selon leur degré de compatibilité avec l'environnement, à utiliser pour l'ensemble des investissements et des réglementations. Il escompte de même que des normes environnementales et sociales uniformes soient établies pour tous les modes de transport afin de garantir une concurrence loyale et un développement durable.

Il conviendrait en particulier de prendre également en considération l'efficacité des différentes politiques suivies en matière d'économie et d'aménagement du territoire, en s'appuyant sur l'exemple de tel ou tel État membre, ainsi que l'expérience accumulée lors des nombreux projets de l'UE auxquels participent des communes qui mènent une politique exemplaire pour, tout à la fois, faire l'économie du trafic motorisé et combler dans une très large mesure les besoins en matière de conditions d'existence et de mobilité. Le Comité est favorable à une instance de coordination qui, auprès de l'UE, recueillerait et diffuserait les bons exemples en la matière.

Bruxelles, le 16 décembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  COM(2001) 370 final.

(2)  COM(2006) 314 final.

(3)  COM(2007) 642 final.

(4)  Sauf mention contraire, la source des données est la direction générale Énergie et transports (2009), “EU energy and transport in figures. Statistical pocketbook 2009” (“L'énergie et les transports dans l'UE en chiffres – Vademecum statistique 2009”).

(5)  Le Comité fait observer que le bilan à mi-parcours du livre blanc sur le transport (COM(2006) 314, voir graphique 3-2) reprend des calculs de la Commission qui prévoient qu'en contradiction avec les objectifs de l'UE en matière de protection climatique, les émissions de CO2 dues au transport continueront à augmenter jusqu'en 2020.

(6)  Elle passera d'environ 72 % en 2007 à 84 % en 2050.

(7)  JO C 161 du 13.7.2007, p. 89.

(8)  JO C 317 du 23.12.2009, p. 80.

(9)  JO C 224 du 30.8.2008, p. 46.

(10)  JO C 77 du 31.3.2009, p. 70.

(11)  JO C 318 du 23.12.2009, p. 101.

(12)  JO C 277 du 17.11.2009, p. 20.

(13)  JO C 168 du 20.7.2007, p. 50.

(14)  JO C 277 du 17.11.2009, p. 25.

(15)  JO C 27 du 3.2.2009, p. 41.

(16)  JO C 317 du 23.12.2009, p. 94.

(17)  JO C 318 du 23.12.2006, p. 218.

(18)  JO C 211 du 19.8.2008, p. 31.

(19)  Étude «La mobilité en Allemagne», commandée par le ministère fédéral du transport, de la construction et du développement urbain.

(20)  Par exemple sous la forme de taxes sur les véhicules et l'énergie ou de péages et redevances pour l'utilisation des infrastructures.

(21)  Voir http://www.unendlich-viel-energie.de/de/verkehr/detailansicht/article/5/erneuerbaren-energien-koennen-strombedarf-fuer-elektroautos-spielend-decken.html («Les énergies renouvelables peuvent facilement couvrir les besoins énergétiques de la voiture électrique»).

(22)  Voir «Développer le réseau des citoyens - L'importance de bons transports locaux et régionaux de passagers et le rôle de la Commission européenne dans leur mise en place», COM(1998) 431 final, du 10 juillet 1998.


22.9.2010   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 255/116


Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions «L'internet des objets — Un plan d'action pour l'Europe»

COM(2009) 278 final

(2010/C 255/21)

Rapporteur: M. RUDZIKAS

Le 18 juin 2009, la Commission a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions

COM(2009) 278 final.

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 12 novembre 2009 (rapporteur: M. RUDZIKAS).

Lors de sa 458e session plénière des 16 et 17 décembre 2009 (séance du 17 décembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 60 voix pour et 2 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Compte tenu des spécificités de l'évolution des technologies de l'information et des communications (TIC) et de leur importance particulière pour les différents domaines du développement d'un État et de la vie de ses citoyens, le CESE accueille favorablement la communication de la Commission européenne intitulée «L'internet des objets – Un plan d'action pour l'Europe» (1), qui vise à instaurer un nouveau modèle général: le passage d'un internet connectant les personnes entre elles à un internet connectant des personnes à des objets ou des objets entre eux, bref un «internet des objets» (IdO).

1.2   Le CESE partage le point de vue de la Commission selon lequel l'IdO créera des emplois nouveaux et de meilleure qualité, des débouchés et de la croissance pour les entreprises, et un élan pour la compétitivité globale de l'Europe, tout en améliorant la qualité de vie des citoyens.

L'IdO apportera une précieuse contribution à la maîtrise des enjeux sociétaux, par exemple en ce qui concerne la surveillance de la santé, l'écologie et la protection de l'environnement, les transports et d'autres sphères de l'activité humaine. Les communications en réseau au moyen des applications IdO auront un impact considérable sur notre société et entraîneront peu à peu un véritable changement de modèle dans ce domaine.

1.3   Même s'il évalue positivement le document de la Commission et approuve d'une manière générale les considérations et les recommandations qui y sont formulées, le CESE déplore l'absence d'indications concrètes concernant notamment l'horizon temporel et le calendrier de mise en œuvre.

1.4   De par la nature internationale de l'internet, les initiatives, mesures et actes législatifs de la Commission européenne ne peuvent suffire à eux seuls pour assurer le contrôle de cette structure mondiale. Le rôle des organisations internationales et l'importance de négociations et d'accords ratifiés par une majorité d'États doivent être davantage mis en exergue. Un «protocole de Kyoto cybernétique» ou des équivalents cybernétiques à l'accord de Copenhague tant attendu sur le changement climatique s'imposent de toute urgence.

1.5   Le CESE recommande à la Commission d'émettre des propositions plus concrètes en ce qui concerne d'une part les principes de gouvernance de l'IdO, en vue d'assurer un équilibre entre gestion centralisée et décentralisée de l'internet, et d'autre part le suivi continu des questions relatives au respect de la vie privée et à la protection des données personnelles. Il ne suffit pas de «lancer le débat», il faut également prévoir d'autres mesures concrètes.

1.6   Le CESE reconnaît l'importance particulière qui revient à la normalisation des systèmes et des procédures dans l'édification de cette «tour de Babel» cybernétique. Toute normalisation devrait néanmoins s'opérer en tenant compte de la diversité et des spécificités des langues, des cultures et des traditions des différents pays.

1.7   S'agissant de l'IdO, le CESE soutient la volonté de la Commission de continuer de financer les projets de recherche relevant du septième programme-cadre. Mais ce n'est pas suffisant. Il importe en outre de financer les lignes de recherche liées au déploiement de l'IdO afin d'ouvrir la voie, grâce à un soutien prioritaire, à la réalisation d'un saut qualitatif dans ce domaine (nanotechnologies, optoélectronique, ordinateur quantique, calcul distribué et informatique en nuages, technologies de communication orale par ordinateur, entre autres). Ces activités doivent être mieux coordonnées.

1.8   Le développement rapide des TIC exige une mise à jour permanente des connaissances. C'est un domaine dans lequel le principe de l'apprentissage tout au long de la vie trouve toute son utilité. Les professeurs et les étudiants de l'enseignement supérieur, les enseignants et les élèves ainsi que tous les adultes doivent continuellement développer leurs connaissances. Les techniques de l'enseignement à distance seront particulièrement utiles à cet égard. Il est indispensable de prendre des mesures pour réduire la dimension géographique de la fracture numérique. La société civile organisée aura un rôle particulier à jouer dans la mise en œuvre de ces mesures.

1.9   Le CESE reconnaît l'importance des innovations et insiste auprès de la Commission sur la nécessité de mieux protéger la propriété intellectuelle et d'encourager le dépôt de brevets concernant les installations et les dispositifs, les procédures et les méthodes. La priorité doit aller aux projets destinés à protéger le patrimoine culturel, la diversité culturelle et linguistique et l'ensemble du patrimoine intellectuel des peuples.

1.10   Le CESE attire l'attention de la Commission sur la nécessité d'examiner de manière plus approfondie l'impact des ondes électromagnétiques sur les êtres humains. Même si les systèmes IdO n'émettent que de faibles impulsions, le nombre des sources de rayonnement risque de connaître une hausse exponentielle. Comme la plupart d'entre elles émettent un rayonnement continu, l'augmentation rapide de la «pollution électronique» risque de poser de gros problèmes à l'avenir. La science moderne n'a pas encore tranché définitivement la question de savoir s'il existe un seuil d'intensité à partir duquel un rayonnement inoffensif devient dangereux et quels sont les effets d'une exposition répétée. Parviendrons-nous jamais à maîtriser les forces que nous avons libérées en jouant aux apprentis sorciers?

2.   Spécificités de l'évolution des technologies de l'information et des communications

L'IdO ambitionne de déployer un réseau sans fil, intégré à l'échelle mondiale, d'installations et de dispositifs intelligents (les «objets») ainsi que de capteurs et d'actionneurs les plus divers permettant la communication d'objet à objet et d'objet à personne grâce à l'utilisation de protocoles normalisés. Ce réseau permettra d'interconnecter des milliards de personnes. Certaines particularités des TIC sont décrites ci-après.

2.1   L'une des caractéristiques des TIC tient à leur essor extraordinairement rapide, fulgurant, dont l'une des phases de développement a produit l'internet. Pratiquement en l'espace d'une seule génération, elles se sont diffusées à partir de quelques laboratoires scientifiques pour s'étendre à l'ensemble de la population. Les technologies de calcul parallèle et distribué (technologies de grille ou «Grid») ont connu un développement tout aussi foudroyant. En Lituanie, par exemple, des projets tels que BalticGrid I et II ainsi que les projets nationaux LitGrid et GridTechno sont déployés avec le soutien de l'UE.

2.2   Une autre caractéristique des TIC est qu'elles ne cessent d'évoluer, principalement grâce à l'interaction de plusieurs autres domaines scientifiques ainsi qu'à l'application et la synthèse de méthodes et de résultats, ce qui engendre un nouveau niveau de qualité.

2.3   Les TIC se montrent reconnaissantes et «s'acquittent de leur dettes» envers les autres sciences, en mettant à leur disposition des méthodes de recherche, des équipements et d'autres ressources et en venant même améliorer la vie quotidienne des citoyens. Autrefois considérées comme la reine des sciences (ou, selon certains, comme la science au service des autres disciplines), les mathématiques ont désormais été supplantées par l'informatique. On peut ajouter comme cela se disait dès le XVIe siècle, au seuil de l’autre révolution, celle de l'imprimerie, que «science sans conscience n’est que ruine de l'âme». (François Rabelais, philosophe français, in «Pantagruel»- chapitre VIII -1532).

2.4   Les TIC se distinguent également par leur caractère de science essentiellement appliquée, comme en témoigne la mise au point accélérée de dispositifs et d'installations faisant appel à elles. Il suffit de mentionner l'essor très rapide du secteur des téléphones mobiles, l'évolution des propriétés des ordinateurs, le développement des langages algorithmiques ou l'expansion de l'internet.

2.5   De par sa vocation, l'IdO devrait obligatoirement entraîner une «intellectualisation» généralisée de la technosphère environnante. Les objets, devenus «intelligents», seront en mesure de déterminer leurs propres propriétés et potentialités à un instant donné ainsi que celles de leur environnement, de prendre des décisions de manière autonome et d'agir de manière effective pour atteindre des objectifs fixés ou mener à bien les tâches qui leur auront été confiées. Il est concevable que les objets intelligents puissent s'acquitter des missions les plus diverses, remplir toutes sortes de fonctions et réagir à tout moment à leur environnement, en s'adaptant à celui-ci, en modifiant leur configuration, en réparant eux-mêmes leurs défauts de fonctionnement et même en choisissant les personnes pouvant disposer d'eux, ou encore en décidant de changer de propriétaires.

2.6   Le gigantesque marché mondial des TIC, qui connaît l'expansion effrénée décrite ci-dessus, nécessitant la mise au point et l'actualisation permanentes des connaissances scientifiques, constitue une niche économique particulièrement attrayante pour les pays européens disposant d'un haut niveau d'éducation et d'une vaste culture du travail.

2.7   Mais même pour les TIC, il y a un revers de la médaille: leur application contribue à améliorer la qualité de vie des citoyens, mais elles peuvent aussi avoir des retombées négatives. Il suffit de mentionner entre autres la menace qu'elles font peser sur la vie privée, les risques de terrorisme cybernétique et l'utilisation de l'internet comme outil de diffusion de la pornographie, de l'homophobie et du racisme. Il existe également, en particulier chez les jeunes, un risque de dépendance à l'égard de l'internet, qui conduit à occulter une grande partie du monde réel pour vivre dans un «monde virtuel».

2.8   Compte tenu des particularités des TIC et de leur «rejeton», l'internet, ainsi que de leur importance pour l'économie d'un pays et la qualité de vie de ses citoyens, le CESE attache depuis longtemps une grande importance à cette question. On se référera notamment à l'avis CESE 1514/2008 (TEN/342) sur «L'internet des objets» (rapporteur: M. RETUREAU) ainsi qu'à un certain nombre d'avis en la matière (2) adoptés ces dernières années de même qu'aux documents auxquels ils font référence.

3.   Observations générales

3.1   Compte tenu de l'importance particulière des TIC pour les différents domaines de développement d'un État et de la vie de ses citoyens, le CESE accueille favorablement la communication de la Commission européenne intitulée «L'internet des objets – Un plan d'action pour l'Europe», qui vise à instaurer un nouveau modèle: le passage d'un internet connectant les personnes entre elles à un internet connectant des personnes à des objets ou des objets entre eux.

3.2   Le CESE partage le point de vue de la Commission selon lequel l'IdO créera des emplois nouveaux et de meilleure qualité, des débouchés et de la croissance pour les entreprises, et un élan pour la compétitivité globale de l'Europe, tout en améliorant la qualité de vie des citoyens.

3.3   Le CESE approuve les investissements que la Commission européenne a déjà réalisés dans le développement des TIC, au moyen du programme-cadre de recherche et de développement (5e, 6e et 7e PC) et du programme-cadre pour l'innovation et la compétitivité. Certains progrès importants ont déjà été accomplis: la taille des dispositifs diminue sensiblement, au point qu'ils seront bientôt invisibles pour l'œil humain, et les objets, toujours plus mobiles, sont de plus en plus connectés sans fil, tandis que les systèmes se caractérisent par une hétérogénéité et une complexité croissantes. Les technologies les plus récentes telles que l'identification par radiofréquence (RFID), la communication en champ proche (NFC), le protocole Internet version 6 (Ipv6) et l'ultralarge bande sont de plus en plus largement appliquées.

Les avancées révolutionnaires réalisées dans ce domaine sont également attestées par le prix Nobel de physique 2009, qui a été décerné à trois scientifiques pour la découverte de la technologie des fibres optiques et sa contribution aux premières expériences réussies en matière de saisie et de transmission d'images à l'aide de capteurs optiques numériques. Cette percée a ouvert la voie au développement de l'internet moderne et à son évolution en un futur IdO.

3.4   Étant donné les bouleversements sociétaux considérables liés au développement de l'IdO, il est nécessaire de contrôler ce processus afin qu'il contribue réellement à la croissance économique et au bien-être des individus sans porter atteinte à la vie privée et à la sécurité de l'information.

Le CESE appuie toutes les mesures de la Commission visant à lever les obstacles au déploiement de l'IdO.

3.5.1   Il convient en priorité de veiller au respect de deux droits fondamentaux des citoyens de l'UE: le respect de la vie privée et la protection des données personnelles. Il y a donc lieu d'assurer un suivi continu de ces deux aspects et de réagir aux infractions constatées.

3.5.2   S'agissant du respect de la vie privée et de la protection des données personnelles, il est tout à fait essentiel que les composantes de l'IdO comportent dès le départ des fonctions intégrées de protection et de sécurité et répondent à toutes les exigences des utilisateurs, afin de créer un climat de confiance, d'acceptation et de sécurité. Dans les milieux économiques, la sécurité de l'information est liée à la disponibilité, la fiabilité et la confidentialité des données commerciales ainsi qu'à l'évaluation des risques émergents.

3.5.3   Toute perturbation de l'IdO pouvant avoir des répercussions graves sur l'économie et la société de certaines régions, voire du monde entier, il importe de protéger au mieux les infrastructures d'information correspondantes.

3.5.4   La normalisation, qui simplifie l'utilisation de l'IdO et qui permet aux entreprises de mieux soutenir la concurrence internationale, joue un rôle très important dans la diffusion généralisée de l'IdO. Pour être véritablement efficace, cette normalisation devrait aller de pair avec un déploiement rapide de l'Ipv6, car un nombre pratiquement illimité d'objets - ainsi que tous les habitants de la terre - pourraient ainsi recevoir directement une adresse internet.

3.6   Il convient de saluer tout particulièrement les mesures de la Commission en faveur de la recherche scientifique et du développement technologique dans ce domaine interdisciplinaire qui, à partir de l'intégration et de la synthèse des résultats de multiples lignes de recherche et technologies, conçoit un produit qualitativement nouveau, à savoir l'internet du futur, l'IdO. Pour résoudre ce problème fondamental, la Commission prévoit de soutenir les partenariats public-privé (PPP), ce dont il y a lieu de se féliciter.

Non seulement l'IdO offre de nouvelles perspectives à l'économie et à la production, mais il nécessite aussi des modèles commerciaux tout à fait nouveaux, en particulier dans le secteur des échanges électroniques.

3.7   Les systèmes IdO seront conçus, gérés et utilisés par de multiples parties concernées ayant des modèles commerciaux et des intérêts différents. Il convient en conséquence d'instaurer les conditions requises pour promouvoir la croissance et l'innovation, compléter les systèmes existants par de nouveaux éléments et adapter en souplesse les nouveaux systèmes à ceux existants.

3.8   Étant donné son impact transfrontalier, l'IdO sera un produit véritablement mondial. Aussi faudra-t-il mettre particulièrement l'accent, lors de son développement et de son déploiement, sur le dialogue international, l'échange des meilleures pratiques et la coordination des mesures communes actuelles.

3.9   Le CESE accueille favorablement les mesures et les moyens prévus par la Commission pour assurer la disponibilité en temps utile de ressources adaptées du spectre radioélectrique ainsi que pour surveiller et évaluer la nécessité de poursuivre l'harmonisation du spectre pour des besoins particuliers relatifs à l'IdO. Étant donné qu'un nombre croissant de dispositifs et d'objets émettent des ondes électromagnétiques, il faudra veiller à ce que tous les dispositifs et systèmes continuent de répondre à l'avenir aux exigences de la population en matière de sécurité et de santé.

3.10   Le CESE approuve la volonté de la Commission de mettre en place un mécanisme associant les différentes parties concernées au niveau européen (voire mondial?), afin de suivre l'évolution de l'IdO et d'évaluer les mesures complémentaires que les pouvoirs publics doivent prendre pour assurer la réalisation dans les meilleurs délais de cet ambitieux projet. Il sera nécessaire à cette fin d'assurer un dialogue permanent et de partager les meilleures pratiques avec les autres régions du monde.

3.11   Le CESE soutient notamment l'objectif de la Commission de faire en sorte, par une approche proactive, que l'Europe joue un rôle de premier plan dans la définition des modalités de fonctionnement de l'IdO, faisant ainsi de l'internet des objets un internet des objets pour les individus. Le CESE est disposé à participer à la réalisation de ces objectifs ambitieux mais réalistes. La société civile organisée a un rôle important à jouer à cette fin, et ses représentants doivent être consultés sur ce qui va concerner tous les aspects de la vie sociale et privée, notamment dans le sens de la préservation des libertés publiques et privées.

4.   Observations particulières

Le CESE accueille favorablement le document de la Commission, dont il approuve pour l'essentiel le contenu et les propositions. Mais il se sent tenu de formuler certaines observations, propositions et recommandations.

4.1   Le plan d'action et les quatorze lignes d'action énoncées ne contiennent aucune indication concrète en ce qui concerne les délais et le calendrier de réalisation. En toute fin du document seulement (chapitre 5: Conclusions), il est dit que «l'IdO n'est pas encore une réalité tangible, mais plutôt une idée des possibilités offertes par un certain nombre de technologies qui, ensemble, pourraient, dans les 5 à 15 prochaines années, modifier en profondeur le mode de fonctionnement de nos sociétés.» On peut donc supposer que ce plan d'action couvre un horizon d'une quinzaine d'années. Naturellement, la plupart des lignes d'action proposées seraient mises en œuvre, coordonnées ou tout au moins observées sur l'ensemble de cette période. Un délai pour la réalisation de certaines lignes d'action pourrait toutefois être indiqué ou précisé (concernant par exemple les lignes d'action no 1, 4, 8, 9 et 14).

4.2   De par la nature internationale de l'internet, tous les États du monde y auront tôt ou tard une part active. C'est pourquoi les initiatives, mesures et actes législatifs de la Commission européenne ne peuvent suffire à eux seuls pour assurer le contrôle de cette structure mondiale. Le rôle des organisations internationales et l'importance de négociations et d'accords ratifiés par une majorité d'États doivent être davantage mis en exergue. Un «protocole de Kyoto cybernétique» ou des équivalents cybernétiques à l'accord de Copenhague tant attendu sur le changement climatique s'imposent de toute urgence.

4.3   Le CESE recommande d'émettre des propositions plus concrètes en ce qui concerne d'une part les principes de gouvernance de l'IdO, en vue d'assurer un équilibre entre la gestion centralisée et décentralisée de l'internet, et d'autre part le suivi continu des questions relatives au respect de la vie privée et à la protection des données personnelles, afin de limiter autant que possible les risques relatifs à la vie privée et à la protection des données personnelles ainsi que la menace d'attentats terroristes.

4.4   Le CESE souligne que le «droit au silence des puces» (la possibilité pour les individus de se déconnecter de leur environnement réseau) ne représente pas une garantie suffisante pour la protection de la vie privée ou pour la sécurité des objets. Par exemple, le fait d'éteindre un téléphone portable n'empêche pas certains groupes de recueillir à propos de son propriétaire des informations intéressantes pour eux. Il ne suffit donc pas de «lancer un débat», il faut aussi prévoir d'autres mesures concrètes.

4.5   Le CESE reconnaît la grande importance qui revient dans l'édification de cette «tour de Babel» cybernétique à la normalisation des systèmes et des procédures, laquelle permet par exemple qu'un réfrigérateur puisse «communiquer» avec succès depuis la Chine avec un rayon de supermarché français approvisionné en pots de yaourts Danone. Mais la normalisation doit s'opérer en tenant compte de la diversité et des spécificités des langues, des cultures et des traditions des différents pays.

4.6   Le CESE soutient fermement la volonté de la Commission de continuer de financer au titre du septième programme-cadre les projets de recherche et le développement technologique dans le domaine de l'IdO. Mais il importe de financer en priorité ce domaine, car les progrès réalisés en la matière contribuent de manière déterminante à la compétitivité internationale de l'Europe et au bien-être de ses citoyens. Outre les domaines de recherche indiqués dans la ligne d'action no 7, il convient également de mentionner les nanotechnologies, le calcul distribué et l'informatique en nuages, l'optoélectronique, l'ordinateur quantique et d'autres secteurs de la physique et de l'informatique qui, grâce à un soutien prioritaire, ouvriraient la voie à la réalisation d'un saut qualitatif dans ce domaine. Ces activités doivent être mieux coordonnées.

4.7   Le développement et la diffusion rapides des TIC nécessitent des professionnels convenablement formés. Les professeurs d'université doivent actualiser de manière systématique le contenu de leur enseignement, de sorte que les étudiants aient accès aux informations les plus récentes et soient en mesure de participer à la conception et à l'utilisation de l'IdO. Les écoliers et lycéens doivent eux aussi y être préparés. Un système d'enseignement continu doit être prévu pour les adultes. Le principe de l'«apprentissage tout au long de la vie» et les techniques de l'enseignement à distance sont particulièrement appropriés à cet égard. Il est indispensable de prendre des dispositions pour réduire la dimension géographique de la fracture numérique. La société civile organisée et ses structures auront un rôle particulier à jouer dans la mise en œuvre de ces mesures.

4.8   Le CESE reconnaît l'importance des innovations et des projets pilotes et fait valoir auprès de la Commission la nécessité de mieux protéger la propriété intellectuelle et d'encourager le dépôt de brevets concernant les installations et les dispositifs, les procédures et les méthodes. Il est souhaitable que la Commission réagisse de manière plus déterminée et ne se contente pas de «chercher à …». La priorité doit aller aux projets destinés à protéger le patrimoine culturel, la diversité culturelle et linguistique (certains prétendent que les langues ne bénéficiant pas du soutien des outils informatiques sont vouées à disparaître) et l'ensemble du patrimoine intellectuel des peuples.

4.9   Le CESE attire l'attention de la Commission sur la nécessité d'examiner de manière plus approfondie l'impact des ondes électromagnétiques sur les êtres humains. Même si les systèmes IdO n'émettent que de faibles impulsions, le nombre des sources de rayonnement risque de connaître une hausse exponentielle. Comme la plupart d'entre elles émettent un rayonnement continu, l'augmentation rapide de la «pollution électronique» risque de poser de gros problèmes à l'avenir. La science moderne n'a pas encore tranché définitivement la question de savoir s'il existe un seuil d'intensité à partir duquel un rayonnement inoffensif devient dangereux et quels sont les effets d'une exposition répétée. Après tout, une impulsion électromagnétique au niveau quantique peut parfois suffire à déclencher le développement cancéreux incontrôlé d'une cellule. Parviendrons-nous jamais à maîtriser les forces que nous avons libérées en jouant aux apprentis sorciers?

4.10   L'IdO, dont le bon fonctionnement s'appuie sur des informations élaborées et structurées et sur des algorithmes complexes, se compose à l'évidence de modules d'objets centralisés et individuels«intelligents». Une telle structure d'organisation peut s'apparenter au mode de fonctionnement de l'Organisation européenne pour la recherche nucléaire (CERN), au sein de laquelle la collecte, l'analyse, le stockage et l'utilisation des données s'effectuent à l'aide d'une infrastructure technologique en grille («grid») reposant sur le projet EGEE (3) ainsi que sur d'autres initiatives. S'agissant toutefois de l'IdO, les processus de traitement des données sont beaucoup plus complexes encore. Le projet EGEE doit donc uniquement être considéré comme une base de départ pour le développement, la conception et l'introduction de composantes IdO appropriées.

Bruxelles, le 17 décembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  COM(2009) 278 final.

(2)  JO C 256 du 27.10.2007, p. 66-72; JO C 224 du 30.8.2008, p. 50-56; JO C 175 du 28.7.2009, p. 92-96; JO C 128 du 18.5.2010, p. 69 et avis CESE «Protection des infrastructures d'information critique», voir page 98 du présent Journal officiel.

(3)  Enabling Grids for E-sciencE, www.eu-egee.org.


22.9.2010   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 255/121


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Conseil concernant la communication à la Commission des projets d’investissement relatifs à des infrastructures énergétiques dans la Communauté européenne, et abrogeant le règlement (CE) no 736/96»

COM(2009) 361 final — 2009/0106 (CNS)

(2010/C 255/22)

Rapporteur unique: M. SALVATORE

Le 4 septembre 2009, le Conseil a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de règlement du Conseil concernant la communication à la Commission des projets d’investissement relatifs à des infrastructures énergétiques dans la Communauté européenne, et abrogeant le règlement (CE) no 736/96»

COM(2009) 361 final – 2009/0106 (CNS).

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 12 novembre 2009 (rapporteur: M. SALVATORE).

Lors de sa 458e session plénière des 16 et 17 décembre 2009 (séance du 16 décembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 177 voix pour et 1 abstention.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le Comité économique et social européen accueille favorablement la volonté de la Commission européenne d'introduire de nouvelles règles en ce qui concerne les projets d'investissement relatifs à des infrastructures énergétiques et soutient la proposition de règlement à l'examen, qui tient compte des évolutions récentes de la politique énergétique européenne. Cette proposition répond aux besoins conjoncturels du secteur en facilitant la collecte d'informations pertinentes, satisfaisantes et transparentes et en imposant une charge administrative proportionnée à leur utilité.

1.2   Le CESE approuve le principe qui est à la base de la proposition de règlement de la Commission, selon lequel il y a lieu de concilier la nécessité de garantir des informations régulières et cohérentes en vue de la réalisation d'analyses périodiques et transsectorielles du système énergétique avec l'objectif de réduire les coûts administratifs et de promouvoir la transparence. En se fixant de tels objectifs, la proposition de la Commission représente une nette amélioration par rapport au système actuel. En ce sens, la proposition à l'examen, qui a pour base juridique les dispositions des articles 284 du traité CE et 187 du traité EURATOM, apparaît pleinement conforme aux principes fondamentaux de subsidiarité et de proportionnalité.

1.3   Le CESE relève que les spécifications relatives aux seuils minimums visés à l'annexe de la proposition de règlement et au-delà desquels s'applique l'obligation de communication des informations ne sont pas adéquatement motivées par la Commission européenne. Il est nécessaire que les organes décisionnels européens et nationaux mènent une réflexion plus approfondie avec les opérateurs du secteur et les organisations de la société civile afin de définir les valeurs les plus appropriées pour ces seuils minimums, de manière à garantir la sécurité, le respect de l'environnement, la transparence et la viabilité économique.

1.4   Le CESE propose que les analyses périodiques de la Commission ne se limitent pas à anticiper les déséquilibres éventuels entre la demande et l'offre d'énergie et à déceler les lacunes en matière d'infrastructures, mais soient également un instrument de contrôle de l'état d'avancement des projets notifiés, afin d'assurer que leur réalisation s'effectue dans des délais raisonnables.

1.5   Le CESE attache la plus haute importance à la sécurisation des infrastructures existantes et à celle des nouveaux projets. Les investissements des opérateurs économiques doivent principalement viser la modernisation, l'entretien et l'adaptation technologique aux fins de la sécurité des réseaux énergétiques, afin de prévenir les problèmes et de garantir l'efficacité énergétique ainsi que la durabilité environnementale, à laquelle l'on ne peut ni ne doit déroger sous aucun prétexte.

1.6   Le CESE souligne que la collecte d'informations et de données relatives aux infrastructures d'intérêt communautaire permettra de renforcer le principe de solidarité énergétique entre les États membres. En outre, l'instrument des analyses périodiques favorisera la diversification des sources d'énergie, réduisant ainsi la dépendance énergétique à l'égard des différents pays exportateurs de sources conventionnelles et favorisant la sécurité d'approvisionnement.

1.7   S'agissant de l'électricité produite à partir des énergies renouvelables, le CESE juge important d'éviter d'imposer des charges administratives aux petites et moyennes entreprises, en particulier celles qui sont spécialisées dans les technologies vertes émergentes, lesquelles sont déjà défavorisées par des coûts de production plus élevés que ceux des sources d'énergie conventionnelles.

1.8   Le CESE suggère, afin de renforcer la transparence, objectif déclaré de la Commission européenne, que les États membres tiennent dûment compte des avis exprimés par les habitants des sites destinés à accueillir les nouvelles installations, à travers les associations représentatives de la société civile.

1.9   Le CESE recommande à la Commission européenne de veiller à ce que les coûts des investissements ne soient pas répercutés sur les consommateurs.

2.   Introduction

2.1   La libéralisation du marché intérieur de l'énergie offre de nouvelles perspectives pour les investissements dans ce secteur. Le nouveau contexte législatif impose la réalisation d'objectifs spécifiques dans le domaine des énergies renouvelables et des biocarburants.

Dans l'optique de l'augmentation prévue et souhaitable des investissements dans les infrastructures européennes, il est nécessaire de disposer d'un cadre harmonisé pour la collecte des données et des informations relatives aux projets de mise en service et de mise hors service d'installations énergétiques.

2.2   La Commission propose d'abroger le règlement (CE) no 736/96 et de le remplacer par un nouveau règlement visant à assurer le suivi des projets d'investissement dans les infrastructures de production, de transport et de stockage de l'énergie et du dioxyde de carbone.

2.3   La collecte de données pertinentes et appropriées concernant l'évolution des infrastructures énergétiques dans les États membres est indispensable en vue de la réalisation d'analyses périodiques et transsectorielles permettant de déceler à l'avance les lacunes structurelles et déséquilibres éventuels entre la demande et l'offre d'énergie. Il convient en outre d'assurer la transparence dans l'intérêt des agents économiques et de réduire les coûts administratifs.

2.4   Non seulement le règlement no 736/96 est obsolète dans la mesure où son champ d'application ne couvre pas une grande partie des installations utilisant des énergies renouvelables, mais il ne prévoit pas de système approprié pour la collecte d'informations et le suivi des projets énergétiques des États membres. Le système actuellement en vigueur peut donc compromettre la sécurité des investissements dès lors qu'il ne garantit pas la transparence. À long terme, il peut freiner la transition vers une économie à faibles émissions de CO2. Qui plus est, la réglementation actuelle ne semble pas offrir de garanties de sécurité en ce qui concerne les réseaux et les installations de production et de stockage d'énergie et de dioxyde de carbone.

3.   La proposition de la Commission

3.1   Le contenu de la proposition de règlement repose sur l'obligation faite aux États membres de communiquer à la Commission européenne les informations relatives aux projets d'investissement dans les infrastructures des secteurs du pétrole, du gaz, de l'électricité, des biocarburants, du captage, du stockage et du transport de dioxyde de carbone, dont la réalisation a déjà commencé ou devrait débuter dans un délai de cinq ans. Cette obligation concerne également la mise hors service d'installations existantes prévue dans un délai de trois ans.

3.2   Les données à communiquer concernent: la capacité de l'installation; le site, le nom, le type et les principales caractéristiques des infrastructures; la date probable de mise en service; le type de source d'énergie utilisé; les technologies employées pour assurer la sécurité des infrastructures; l'installation de systèmes de captage du carbone. En ce qui concerne la mise hors service d'installations, les informations nécessaires concernent: le type et la capacité des infrastructures; la date probable de mise hors service.

3.3   La Commission propose que les États membres communiquent les informations requises tous les deux ans à compter du 31 juillet 2010. Les acteurs du marché transmettent quant à eux ces informations à l'État membre sur le territoire duquel le projet sera réalisé avant le 31 mai de l'année de référence. Ces informations rendent compte de l'état d'avancement des projets à compter du 31 mars de l'année en question.

3.4   La Commission prône un modèle fondé sur la complémentarité, afin d'éviter la duplication des informations. Conformément à ce principe, les États membres sont dispensés de l'obligation de communiquer les données lorsqu'ils ont déjà transmis des informations équivalentes en vertu d'une disposition législative spécifique ou dans le cadre d'un plan d'investissement pluriannuel.

3.5   La Commission utilise les informations recueillies pour réaliser, tous les deux ans au moins, des analyses transsectorielles de l'évolution structurelle du système énergétique de l'UE, dont les résultats font l'objet de discussions avec les États membres et les parties intéressées. Ces résultats peuvent être rendus publics, sous réserve de la protection des données personnelles et commerciales sensibles.

3.6   La Commission peut adopter les mesures d'exécution nécessaires à la mise en œuvre du règlement, concernant en particulier les méthodes de calcul, les définitions techniques et le contenu des données recueillies. Un réexamen du règlement proposé est prévu dans un délai de cinq ans à compter de son entrée en vigueur.

4.   Observations générales

4.1   Le CESE accueille favorablement la proposition de la Commission compte tenu de l'importance de ce nouveau règlement pour les objectifs de la politique énergétique européenne. La solution retenue s'efforce de concilier la nécessité de contrôler et de recueillir des informations pertinentes concernant les projets d'investissement avec celle de limiter les coûts administratifs ainsi que de promouvoir la transparence.

L'objectif du règlement est de suivre l'évolution du système énergétique de l'UE en étudiant les données et les informations relatives aux projets d'investissement dans les infrastructures énergétiques, recueillies par la Commission et en particulier son observatoire du marché de l'énergie.

4.2.1   L'existence d'un marché intérieur et la nécessité de disposer d'un tel système de suivi opérant au niveau supranational suffisent à justifier le bien-fondé d'une mesure de réglementation mise en œuvre au niveau communautaire plutôt qu'à l'échelon national. En ce sens, l'intervention réglementaire proposée par la Commission est donc parfaitement conforme au principe général de subsidiarité.

4.2.2   Le choix de l'instrument juridique du règlement, en remplacement d'un règlement antérieur régissant les interventions dans ce domaine, et son contenu, qui prévoit l'obligation pour les États membres de communiquer les informations pertinentes – obligation tempérée par la nécessité de ne pas imposer à ceux-ci une charge administrative excessive –, attestent de la parfaite conformité de la proposition à l'examen avec le principe de proportionnalité.

4.3   La proposition de la Commission privilégie un mécanisme de communication complémentaire plutôt qu'un système intégré et exhaustif. Le CESE tient à souligner que cette option favorise un bon rapport coût-efficacité et la réduction des coûts administratifs pour les entreprises et les États membres, avec des répercussions positives sur le prix final de l'énergie, en évitant la duplication des données et en améliorant leur qualité.

4.4   Le CESE est d'avis que des informations régulières, complètes et de qualité permettent non seulement à la Commission de contrôler et de déceler les carences au sein des infrastructures énergétiques européennes, mais favorisent aussi la compréhension des problématiques relatives aux infrastructures énergétiques par l'ensemble des organismes nationaux et européens en charge des décisions politiques, ainsi que par les acteurs du marché et les investisseurs.

5.   Observations particulières

5.1   Le CESE se félicite de la clarté des définitions visées à l'article 2 de la proposition de règlement. Ces définitions, qui ne figurent pas dans le règlement (CE) no 736/96 actuellement en vigueur, facilitent la compréhension du texte législatif et en clarifient le champ d'application.

5.2   Le CESE considère que l'exercice biennal d'analyses transsectorielles permet un suivi adéquat de l'état d'avancement des projets d'infrastructures énergétiques en Europe.

5.3   Le CESE soutient depuis toujours que la question de la sécurité des infrastructures ne peut être dissociée de celle de la sécurité d'approvisionnement. Récemment encore (1), sur un sujet analogue à celui du présent avis, le CESE a insisté sur la nécessité de sécuriser les installations et les réseaux de transport d'énergie et de dioxyde de carbone. Aussi importe-t-il que la Commission tienne compte dans ses analyses périodiques des aspects relatifs à la modernisation et à l'entretien des installations et des réseaux existants.

5.4   Selon le CESE, les informations relatives aux projets d'intérêt communautaire revêtent une importance prioritaire. De la qualité de ces informations dépend la possibilité pour la Commission européenne d'orienter les États membres en ce qui concerne l'application du principe de solidarité énergétique et la diversification des sources d'approvisionnement, de façon à réduire la dépendance énergétique vis-à-vis des quelques exportateurs de sources d'énergie conventionnelles. Selon le CESE, les infrastructures énergétiques transnationales représentent une question d'intérêt éminemment communautaire. Le Comité a même déjà estimé dans des avis précédents que «des SIG communautaires sont indispensables pour poursuivre la construction en commun de l'Europe», et qu'une unification progressive des réseaux «d'énergie (gaz, électricité, pétrole) (…) pourrait réduire de manière sensible les coûts d'exploitation et d'investissement et inciter davantage à investir dans de nouveaux projets de réseaux [dans le cadre de partenariats publics (Union et États membres) et privés et, par là, augmenter la sécurité d'approvisionnement] (2)»

5.5   Le CESE observe que le système prévu par la Commission privilégie une approche centralisée de la production d'énergie, alors que de nombreux signaux indiquent qu'à l'avenir, le système énergétique européen pourra s'appuyer sur des installations décentralisées pour la production d'électricité à usage domestique (panneaux photovoltaïques, micro-cogénération, etc.). Il y a lieu de garantir l'accès aux réseaux pour le transport d'électricité à partir de ces installations, sans imposer de coûts administratifs excessifs aux petites et moyennes entreprises.

5.6   Le CESE relève que les spécifications relatives aux seuils minimums visés à l'annexe de la proposition de règlement et au-delà desquels s'applique l'obligation de communication des informations ne sont pas adéquatement motivées par la Commission européenne.

5.7   Le CESE invite à approfondir le débat sur l'utilité et la viabilité du procédé de piégeage et stockage du carbone (PSC), étant donné qu'il a déjà exprimé des réserves concernant l'intérêt et l'innocuité des projets de captage et de transport du CO2. Le CESE constate toutefois que la proposition de la Commission européenne prévoit dans les dispositions du règlement d'intégrer des informations relatives aux projets de transport et de stockage du dioxyde de carbone. Il convient donc d'interpréter ces dispositions comme visant uniquement à soumettre les infrastructures de ce type aux analyses périodiques du système énergétique européen.

5.8   Le CESE estime indispensable que la construction d'infrastructures énergétiques au niveau local n'aille pas à l'encontre de la volonté des habitants et de leurs représentants locaux. Il soutient l'esprit de transparence qui permet d'informer convenablement les citoyens de la portée des projets envisagés grâce à des évaluations d'impact économique, social et environnemental appropriées.

Bruxelles, le 16 décembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  JO C 306 du 16.12.2009, p. 51.

(2)  JO C 128 du 18.5.2010, p. 65.


22.9.2010   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 255/124


Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions «Aider les pays en développement à surmonter la crise»

COM(2009) 160 final

(2010/C 255/23)

Rapporteur: M. JAHIER

Le 28 avril 2009, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions: «Aider les pays en développement à surmonter la crise»

COM(2009) 160 final.

La section spécialisée «Relations extérieures», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 19 novembre 2009 (rapporteur: M. JAHIER).

Lors de sa 458e session plénière des 16 et 17 décembre (séance du 16 décembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 151 voix pour, 5voix contre et 8 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le CESE estime qu'une fois passée la phase de risque systémique majeur liée à la crise économique et financière internationale, il convient de ne pas négliger les retombées très lourdes que celle-ci induit pour la plupart des pays en voie de développement. Ces retombées compromettent les progrès accomplis durant les dernières décennies et viennent s'ajouter aux conséquences de la double crise énergétique et alimentaire, ce qui pourrait aggraver des situations existantes de conflit et d'instabilité politique.

Il revient à la communauté internationale de prendre dès à présent toutes les initiatives et les décisions de son ressort pour aider les pays les plus pauvres à surmonter cette crise, dont ils ne sont absolument pas responsables.

1.2   Le CESE accueille favorablement la communication de la Commission, qui a été la première décision-cadre à émaner de la communauté internationale et reste la plus positive et la plus complète parmi toutes celles adoptées jusqu'ici. Cette communication comporte un grand nombre de propositions et ouvre de multiples perspectives, y compris à moyen terme, qui devront être développées de manière appropriée.

Le CESE relève dans cette communication deux défauts principaux, à savoir d'une part qu'elle ne prévoit pas de ressources supplémentaires et d'autre part que les décisions relatives à la crise ont un effet limité dans le temps (comme le versement anticipé des aides au titre des crédits d'engagement pour l'année en cours).

1.3   Le CESE se félicite des résultats des derniers sommets internationaux (1), en particulier en ce qui concerne le dispositif des propositions avancées à l'intention des pays pauvres, la confirmation des objectifs relatifs à l'augmentation du volume et de la qualité des aides et la réaffirmation de la volonté de réformer celles-ci. Ces avancées s'avèrent néanmoins tout à fait insuffisantes pour répondre à des questions cruciales telles que:

la nécessité de disposer de toute urgence de ressources accrues et de recourir à de nouveaux instruments de financement du développement;

le processus de réforme du système des aides;

les liens entre gouvernance fiscale et développement.

1.4   Le CESE estime qu'avant toute chose, il y a lieu de respecter strictement tous les engagements contractés durant les dernières années – comme l'a déjà confirmé le président BARROSO – et il invite la Commission à rappeler les États membres au respect des calendriers d'augmentation des crédits définis dans le passé et jamais véritablement revus depuis lors, même si, dans les faits, ils ont déjà été concrètement désavoués par la décision prise par certains États membres de réduire les sommes allouées.

Le CESE est en outre convaincu de l'urgence de dégager une nouvelle enveloppe conséquente de crédits additionnels, comme le souhaitent toutes les grandes instances internationales, afin de pouvoir destiner aux pays pauvres de nouvelles aides et de nouveaux investissements. Le Comité fait également sienne la proposition d'affecter à la gestion de la crise 0,7 % au moins des sommes mobilisées par la communauté internationale, actuellement estimées à près de 7 000 milliards de dollars.

1.5   Compte tenu du double impact de la crise énergétique et alimentaire, le CESE juge nécessaire de définir des priorités plus précises pour les nouveaux investissements, dans le cadre d'une relance énergique de l'engagement vis-à-vis des objectifs du Millénaire pour le développement (OMD).

Il est dans l'intérêt à la fois des pays pauvres et de l'Europe de faire de l'agriculture et de la sécurité alimentaire une priorité stratégique, de même que des investissements dans les domaines prioritaires liés aux changements climatiques, de manière à relancer une nouvelle vague d'investissements soutenus dans les pays les plus pauvres, pour assurer un développement viable à long terme.

1.6   Le CESE invite la nouvelle Commission à jouer un rôle de chef de file au niveau international concernant l'engagement à initier une réforme en profondeur du système des aides et des investissements en faveur du développement, afin de relever les nouveaux défis de l'actuel millénaire, parmi lesquels une croissance verte et les flux migratoires, et de renouveler l'engagement à assurer une meilleure efficacité et transparence de l'ensemble du système des aides.

1.7   Le CESE considère que l'Union européenne ne doit pas revenir en arrière en ce qui concerne la reconnaissance des acteurs non étatiques et le soutien apporté à ceux-ci, en particulier ceux issus du secteur privé, des organisations syndicales et agricoles, des organisations représentatives des femmes et des consommateurs. Il s'agit là d'une spécificité de l'approche européenne.

Le CESE déplore le fait que la communication à l'examen ne fasse aucune allusion au rôle joué par ces acteurs face à la crise, ce d'autant plus que la société civile est l'un des rares acteurs internationaux en mesure de mobiliser des ressources additionnelles. Qui plus est, dans de nombreux pays pauvres, les retombées de la crise pénalisent fortement le secteur privé et affaiblissent la capacité d'action des partenaires sociaux et des diverses organisations de la société civile, dont le rôle est pourtant déterminant dans l'apport de réponses viables en ce qui concerne le développement à long terme.

1.8   Outre le respect des engagements pris en matière d'APD (aide publique au développement), le CESE soutient la création et l'adoption de nouveaux mécanismes innovants de financement du développement, notamment la «taxe Tobin». La reconnaissance du rôle central joué par les envois de fonds des travailleurs migrants s'avère particulièrement importante, avec la mise en œuvre de la décision du G8 de réduire de 50 % les commissions sur les transferts ainsi que la définition de stratégies assurant une meilleure protection des travailleurs migrants face à la crise.

1.9   Le CESE est d'avis qu'il convient de maintenir toutes les mesures d'ouverture des marchés, en réactivant les négociations de Doha, en soutenant les processus d'intégration régionale (2), et en renforçant les instruments de financement du commerce, tout en prêtant une attention particulière aux exigences d'un commerce juste et équitable pour les pays les plus pauvres. Il y a également lieu de relancer les investissements directs étrangers (IDE), notamment grâce à l'effet levier exercé par les lignes de financement innovantes mises en place par le FMI et la Banque mondiale (BM), grâce à de nouvelles émissions de droits de tirage spéciaux (DTS) par le FMI et à la mise en œuvre par la BM d'un Fonds approprié pour les plus vulnérables («Vulnerability Fund»).

1.10   Le CESE considère enfin qu'il est essentiel de faire de la lutte contre la corruption, la criminalité et la fraude fiscale (fraude et évasion) à l'échelle mondiale une priorité absolue, permettant de libérer de nouvelles et importantes ressources à destiner aux actions de développement. Le Comité encourage la Commission à se pencher sur ce dossier dans les plus brefs délais et à formuler des propositions en la matière.

2.   Introduction

2.1   Dans les premiers temps de la crise financière internationale, les analystes étaient convaincus qu'elle ne toucherait pas les pays en développement, en particulier les plus pauvres. Au fil des mois, les retombées possibles sur les pays en développement commencent à apparaître, en raison notamment du repli attendu de l'économie internationale. Ce n'est qu'en avril 2009, lors du sommet du G20 à Londres et des réunions du FMI et de la Banque mondiale, qu'il est devenu évident que la crise était en train de se propager aux principaux PVD, menaçant de plonger dans la pauvreté cent millions de personnes supplémentaires, venant s'ajouter aux plus de 160 millions de personnes vivant désormais au-dessous du seuil de pauvreté absolue, suite à la double crise énergétique et alimentaire des années 2007/2008.

2.2   Les estimations sont préoccupantes. Le 19 juin dernier, la FAO a dévoilé de manière anticipée les éléments marquants d'un rapport sur l'insécurité alimentaire dans le monde, selon lequel le nombre de personnes souffrant de la faim dépassera pour la première fois le cap du milliard en 2009, soit une augmentation globale de 11 %, ce qui provoquera des crises humanitaires majeures et risquera de réduire à néant les progrès enregistrés dans les années 80 et 90. Le 22 juin, la Banque mondiale a revu radicalement à la baisse l'ensemble de ses estimations, en pronostiquant une contraction de l'économie mondiale de 3 % environ en 2009, avec un recul du commerce mondial de 10 % et un effondrement des flux internationaux de capitaux privés, qui devraient passer de 1 000 milliards de dollars en 2007 et de 707 milliards de dollars en 2008 à 363 milliards de dollars en 2009. La croissance globale des PVD est désormais estimée à un peu plus de 1 %. Toutefois, si l'on exclut la Chine et l'Inde, l'ensemble des PVD enregistrent un recul de 1,6 % de leur PIB. L'Afrique apparaît comme le continent le plus touché, avec une prévision de croissance en 2009 réduite de 66 % par rapport à 2007. Enfin, selon l'OIT, 50 millions de personnes pourraient perdre leur emploi en 2009 et le nombre de travailleurs pauvres pourrait atteindre 200 millions.

2.3   La crise financière et économique a provoqué quatre chocs: a) la chute du volume global des échanges commerciaux, avec une nette réduction des recettes d'exportation et un déficit de financement pour les PVD, qui devrait être compris entre 270 et 700 milliards de dollars (3); b) la réduction des flux privés d'investissement, plus significatifs pour les pays à moyen revenu et pour ceux où des investissements structurels importants sont en cours; c) l'important recul des transferts émanant des travailleurs migrants, transferts qui dans certains PVD africains représentent 30 % du PIB et qui, pour la seule année 2006, ont atteint la somme de 270 milliards de dollars, c'est-à-dire plus de deux fois le montant global des aides au développement; d) la baisse incontestable de l'aide publique au développement (APD) de la part de nombreux donateurs bilatéraux en 2009 et en 2010. Ces deux derniers chocs, qui amplifient les effets de la précédente crise alimentaire et des prix de l'énergie, se font particulièrement sentir en Afrique, où ces flux sont souvent vitaux pour un grand nombre de budgets publics ainsi que pour la survie de ménages et de communautés locales.

2.4   Parmi les conséquences de ces chocs successifs et interdépendants, dont l'effet diffère bien entendu fortement suivant les régions et les pays, il faut signaler en particulier:

un ralentissement de la croissance ou un repli marqué des économies locales;

une expansion rapide du chômage, de la pauvreté et de la faim, notamment dans les zones urbaines, avec de graves retombées sur les catégories les plus vulnérables, notamment les femmes et les enfants;

une diminution des recettes fiscales, lourde de conséquences pour les budgets publics qui, en Afrique surtout, ont fait l'objet durant ces dix dernières années d'importantes opérations d'assainissement;

la remise en question des plans d'investissements publics, en particulier en ce qui concerne les infrastructures et leur entretien;

des problèmes accrus d'accès aux biens et aux services pour de larges couches de la population, en raison notamment de l'affaiblissement des systèmes déjà fragiles de protection et d'aide sociale;

une diminution des recettes tirées du tourisme;

des problèmes croissants d'accès au crédit et aux flux d'investissement, en particulier pour le secteur privé;

un impact fortement négatif sur la capacité à réaliser les objectifs du millénaire pour le développement (OMD), du reste déjà fortement compromis depuis au moins deux ans, après les résultats mitigés atteints pendant les années 2000-2005;

le risque de ne pas disposer de moyens appropriés pour faire face aux retombées du changement climatique.

2.5   Ce scénario est encore plus préoccupant si l'on considère son impact possible sur la stabilité politique et la sécurité intérieure et extérieure de différentes régions du monde. Une étude du gouvernement britannique datant de 2008 estimait déjà qu'en 2010, la moitié de la population mondiale la plus pauvre risquait de vivre dans des pays en conflit permanent ou quasi permanent.

2.6   Enfin, la crise pourrait entraîner de nouveaux flux migratoires, tant au sein des différents pays et au niveau régional qu'en direction des pays les plus riches. Ces divers développements, outre qu'ils risquent d'aggraver les tensions existantes, en particulier aux frontières de l'UE, pourraient entraîner de nouvelles pertes préoccupantes de ressources humaines vitales pour de nombreux pays pauvres.

3.   La réponse de la Commission

3.1   La Commission européenne a été la première à s'engager concrètement vis-à-vis du G20 de Londres, en partant du principe clair, tel que résumé par le président BARROSO, suivant lequel «la récession actuelle ne doit pas, ne peut pas et ne devra par servir d'excuse pour revenir sur nos promesses d'augmenter les aides».

3.2   La communication de la Commission représente l'une des décisions-cadres les plus positives présentées jusqu'ici au sein de la communauté internationale pour aider les pays pauvres à surmonter la crise. Tout en confirmant la nécessité d'honorer les engagements contractés en matière d'APD et de mobiliser de nouvelles ressources en faveur du développement (par exemple grâce à la proposition ambitieuse mais peut-être peu réaliste selon laquelle pour chaque euro d'aide, cinq autres euros devraient être dégagés pour des transferts autres que l'APD), la communication souligne également l'importance d'accélérer ou d'anticiper l'attribution des aides – cas unique parmi les donateurs – et d'adopter des mécanismes plus flexibles, en demandant à la BEI de mettre au point des instruments exerçant une action anticyclique, en particulier dans le domaine des infrastructures et de la finance. En outre, la Commission s'engage à accélérer les opérations d'aide budgétaire, en envisageant également dans des cas exceptionnels des mesures d'aide macroéconomique en faveur des pays de la politique européenne de voisinage (PEV).

3.3   Il est constaté dans la communication que l'inefficacité des aides est trop onéreuse et la nécessité est évoquée d'une révision en profondeur de tout le système international de l'APD. La Commission propose quant à elle aux pays membres de promouvoir des approches communes et coordonnées pour surmonter la crise. L'UE, en tant que premier donateur mondial, devrait dans le même temps encourager une réforme du système des aides au niveau international.

3.4   La communication s'attarde brièvement sur les mesures en faveur de la protection sociale et de l'emploi et prévoit à la fois des mécanismes de préservation des dépenses sociales et un soutien à la construction d'infrastructures nationales ou régionales, en prêtant une attention particulière, y compris en matière d'octroi de fonds, à la Méditerranée et à l'Afrique. La Commission se promet aussi d'œuvrer à la revitalisation de l'agriculture et à la croissance «verte», grâce à des formes innovantes de financement de la lutte contre le changement climatique et le soutien au transfert de technologies non préjudiciables à l’environnement.

3.5   La communication se conclut par la proposition d'adopter des mesures en vue de soutenir le système des échanges internationaux, en améliorant l'efficacité des programmes d'aide au commerce et en augmentant les crédits à l'exportation. La Commission recommande également d'encourager une discussion sur la restructuration de la dette publique des PVD et préconise aussi de promouvoir la gouvernance fiscale au niveau international, régional et national.

3.6   Le Conseil de l'Union européenne a pris acte des principales recommandations contenues dans la communication et les a approuvées, en réaffirmant l'importance pour les États membres d'honorer leurs engagements et en encourageant «les États membres, la Commission et la Banque européenne d'investissement (BEI) à prendre des mesures coordonnées … en se fondant sur des analyses conjointes par pays de l'impact de la crise, en coopération avec les institutions internationales et les pays partenaires, en vue de recenser les pays et les groupes de populations les plus vulnérables et les moins résistants» (4).

3.7   La limite la plus manifeste de l'ensemble des décisions prises par l'UE réside toutefois dans le fait qu'aucune contribution supplémentaire ne soit prévue, à l'exception des 100 millions d'euros alloués annuellement au Fonds fiduciaire UE-Afrique pour les infrastructures.

4.   L'APD menacée

4.1   Selon les données fournies par le Comité d'aide au développement (CAD) de l'OCDE, 2008 a représenté l'année de plus fortes dépenses en termes absolus au titre de l'APD. Cette aide a atteint près de 120 milliards de dollars, a augmenté de 10 % en termes réels et a représenté 0,30 % du PIB total des pays de l'OCDE. Les programmes bilatéraux sont eux aussi en hausse au cours de la dernière année, après la forte baisse des années 2006-2008.

4.2   L'UE enregistre une augmentation de 4 milliards d'euros par rapport à 2007, ce qui correspond à un total de 49 milliards d'euros en 2008, soit 0,40 % du PIB. Il convient de rappeler qu'à l'époque du consensus de Monterrey, en 2002, la Commission s'était fixé l'objectif intermédiaire de 0,39 % d'ici à 2006. Dans le même temps, il faut souligner que l'on est encore loin d'avoir atteint l'objectif consistant à consacrer 0,20 % du PIB aux pays les moins avancés (PMA). Aujourd'hui, 20 milliards de dollars américains seulement sont destinés à l'Afrique, par rapport à l'objectif de 50 milliards en 2010.

4.3   Il existe des doutes sérieux quant à la possibilité concrète pour l'UE de garantir les nouvelles augmentations, estimées à 20 milliards d'euros, nécessaires pour atteindre l'objectif de 0,56 % du PIB en 2010. Dans son rapport «AidWatch 2008», la plate-forme d'ONG européennes Concord a prévu une diminution des aides de 27 milliards de dollars pendant les deux années 2009-2010. En outre, toujours selon ce rapport, les données de l'UE devraient être revues, car elles incluent des chapitres de dépenses qui ne devraient pas être comptabilisés dans l'APD: 5 milliards au titre de l'annulation de la dette extérieure, 2 milliards destinés aux bourses d'étude des étudiants et 1 milliard pour les coûts liés aux réfugiés. Déduction faite de ces sommes, le montant atteint en 2008 n'a été que de 0,34 % du PIB selon Concord, soit une valeur bien éloignée de l'objectif de 0,56 % d'ici à 2010.

4.4   De même, selon le rapport de suivi mondial 2009 de la Banque mondiale, et en dépit de la croissance enregistrée en 2008 et des engagements déjà pris par certains grands donateurs, il apparaît tout à fait irréaliste à la lumière de la situation actuelle que les objectifs d'augmentation des aides souscrits à Gleneagles (130 milliards de dollars américains par an d'ici à 2010) puissent être atteints.

4.5   De plus en plus nombreux sont ceux qui prônent la nécessité de nouvelles ressources qui dépassent largement le cadre des engagements de Gleneagles. Le PNUD souligne qu'il ne s'agit pas seulement de respecter les engagements pris, mais aussi d'augmenter de manière substantielle les crédits, par exemple en réservant au moins 0,7 % de la totalité des fonds dégagés pour sauver les banques et relancer l'économie (estimés à quelque 7 000 milliards) afin d'aider les PVD à atteindre les OMD et de relancer les dépenses et les investissements directs et à long terme dans les pays pauvres. Comme l'a rappelé lui-même à plusieurs reprises le président de la Banque mondiale depuis le début de la crise, il est indispensable d'aller beaucoup plus loin dans la levée de ressources supplémentaires pour aider les pays pauvres à surmonter les effets dévastateurs de la crise, dans laquelle ils ne détiennent aucune part de responsabilité. Selon les estimations récentes de la Banque mondiale, les financements nécessaires, ne fût-ce que pour combler les diverses pertes enregistrées dans les PVD, oscillent entre 350 et 635 milliards de dollars, montants sans commune mesure avec les ressources que la communauté internationale a su mobiliser jusqu'ici, non seulement en ce qui concerne l'APD mais aussi d'autres formes additionnelles d'aides et de prêts.

4.6   De plus, si l'on fait abstraction des intentions exprimées par l'UE, le rapport de l'OCDE fait apparaître que pour la grande majorité des donateurs bilatéraux, la crise a entraîné un écart croissant entre les engagements et les sommes versées et souvent aussi de nouveaux retards et reports dans les paiements. Les aides en provenance de pays non membres du CAD gagnent en importance, mais leur volume global est encore bien loin d'influer de manière significative sur les tendances générales. Le montant total des aides déployées par les pays non membres du CAD qui ont communiqué leurs données à l'OCDE a été de 5,6 milliards de dollars américains en 2007.

4.7   Bien que les données disponibles soient très incomplètes, on relève une tendance positive en ce qui concerne les donateurs privés, dont les versements ont atteint 18,6 milliards de dollars en 2007, ce qui représente une augmentation de 25 % par rapport à 2006. Les seules données internes disponibles aux États-Unis, mais non communiquées à l'OCDE, évaluent à 37 milliards de dollars les montants alloués par des donateurs privés en 2007, tandis que la plupart des grandes fondations, telles que la fondation Gates, ont annoncé pour 2009 une hausse des versements pouvant aller jusqu'à 20 %.

5.   Efficacité des aides et lutte contre la corruption

5.1   En temps de crise, il est de la plus haute importance d'améliorer l'efficacité des aides. Le manque de prévisibilité des aides, la fragmentation des interventions et l'absence de coordination des donateurs engendrent des dommages économiques tout à fait évidents aujourd'hui. Selon les estimations de la Commission, la volatilité de l'APD peut majorer les coûts de 15 à 20 %, tandis qu'une application complète du programme pour l'efficacité de l'aide permettrait d'économiser de 5 à 7 milliards d'euros par an. En conséquence, il convient de mettre en œuvre sans attendre les dispositions prévues par la déclaration de Paris de 2005 et par le programme d'action d'Accra de 2008, compte tenu notamment des décisions déjà adoptées au sein de l'UE et grâce auxquelles il est réellement possible de faire la différence: répartition du travail entre les États membres et la Commission, meilleure utilisation des plans d'action nationaux, prévisibilité de l'aide et responsabilité accrue au regard des résultats, y compris une conditionnalité moins grande (5).

5.2   Au niveau de l'OCDE, l'on observe que les progrès relatifs à l'amélioration de la qualité de l'aide restent insuffisants pour le moment. Dans le monde entier, 225 agences bilatérales et 242 agences multilatérales financent chaque année des centaines de milliers d'activités. À simple titre d'exemple, l'on recense dans le monde plus de 90 fonds œuvrant dans le domaine de la santé, et l'OMS doit rendre compte à 4 600 donateurs et délivrer à ceux-ci près de 1 400 rapports par an. Le gouvernement d'un PVD reçoit en moyenne quelque 200 missions de donateurs officiels par an, auxquelles il doit répondre, à quoi s'ajoutent plusieurs autres centaines de missions de donateurs privés. De plus, il ressort de la dernière enquête de suivi de l'OCDE qu'en moyenne 45 % seulement des aides sont versées dans les délais prévus.

5.3   Si l'on souhaite atteindre les objectifs définis au niveau international, il faut donc passer à la vitesse supérieure. Avant tout, les 27 gouvernements des États membres de l'UE doivent faire preuve de la volonté politique requise en ce qui concerne les aspects suivants:

utilisation transparente des 12 indicateurs prévus par la déclaration de Paris;

application des codes de conduite de l'UE,

recherche plus générale de cohérence entre les politiques, en particulier pour ce qui est des politiques commerciale et de développement;

engagement résolu dans la réforme globale du système des aides internationales, afin de valoriser les acteurs non étatiques et de relancer une nouvelle phase d'action multilatérale.

5.4   Dans le cadre de cette approche, il convient également de prendre en considération les quantités colossales de ressources englouties dans de nombreux PVD par les phénomènes de corruption et de fuite illégale de capitaux, notamment en ce qui concerne les investissements liés à l'exploitation des matières premières et aux grands travaux d'infrastructure. Il est désormais prouvé qu'une part conséquente des flux d'aide est absorbée par la corruption, ce qui a des effets dévastateurs sur les populations locales et entraîne une perte de confiance des contribuables des pays donateurs. Selon le rapport 2008 de Transparency International sur la corruption dans le monde, celle-ci s'élève aujourd'hui à 50 milliards de dollars américains, ce qui représente près de la moitié du volume total de l'APD mondiale, et un montant équivalent aux investissements nécessaires à la réalisation des objectifs en matière d'eau potable et d'hygiène publique. Une nette amélioration de la gouvernance, en particulier en ce qui concerne la traçabilité des aides, et des systèmes de conditionnalité plus marquée de l'aide doivent devenir un élément déterminant de tous les engagements contractés par l'UE ainsi qu'au niveau multilatéral. Il est on ne peut plus regrettable que la communication reste muette à ce propos.

6.   Le rôle des acteurs privés et de la société civile

6.1   L'importance du rôle des acteurs non étatiques (ANE) – que l'accord de Cotonou définit comme étant le secteur privé, les partenaires économiques et sociaux, y compris les organisations syndicales, et la société civile sous toutes ses formes (art. 6) – est désormais largement reconnue. Le fait que la communication à l'examen ne fasse aucunement mention de leur rôle dans la gestion de la crise, alors qu'entre autres atouts ils sont les seuls en mesure de mobiliser des ressources additionnelles, a de quoi surprendre. En outre, dans de nombreux pays pauvres, les retombées de la crise pénalisent fortement le secteur privé et hypothèquent la capacité d'action des partenaires sociaux et des diverses organisations de la société civile, dont l'importance est pourtant cruciale lorsqu'il s'agit de garantir des réponses durables en ce qui concerne le développement à long terme.

6.2   Le 18 mai dernier, la Cour des comptes européenne a publié son rapport spécial sur la gestion par la Commission de la participation des ANE (6) à la coopération communautaire au développement, dans lequel, tout en marquant sa profonde satisfaction pour les investissements croissants de fonds communautaires canalisés par l'intermédiaire des ANE (7), elle exprime trois critiques essentielles:

une participation limitée des ANE au processus de coopération, ceux-ci étant souvent cantonnés dans le rôle de simples exécutants de projets ou de fournisseurs de services, consultés tout au plus de manière ponctuelle et tardivement;

une action insuffisante dans le domaine du développement des capacités, lequel privilégie du reste les systèmes de communication et de participation excluant de fait la plupart des petites et moyennes organisations de base et non urbaines;

de nombreuses lacunes dans les systèmes de contrôle et de mise en œuvre des procédures, qui sont souvent trop complexes et peu compréhensibles pour de nombreuses organisations et qui parfois ne fournissent pas de données appropriées quant à l'état d'avancement des initiatives et à leur impact final.

6.3   Les insuffisances relevées par la Cour nous incitent à réitérer avec force la thèse défendue depuis des années par le CESE quant à la nécessité de privilégier l'investissement dans les ANE, en renforçant l'ensemble des procédures permettant d'élargir réellement la participation et en multipliant par deux, jusqu'à atteindre 20 %, le volume des fonds véhiculés directement par l'entremise des ANE, comme le souhait en avait d'ailleurs déjà été exprimé dans un précédent avis du CESE (8).

7.   Vers une révision des aides et de nouveaux instruments de financement

7.1   La nécessité de mettre en chantier une vaste réforme des institutions financières internationales, à commencer par la Banque mondiale et le FMI, se pose aujourd'hui avec évidence, selon les orientations claires esquissées lors de la Conférence des Nations unies de juin dernier: les institutions financières internationales doivent être clairement orientées vers le développement et doivent faire l'objet de réformes qui «doivent refléter fidèlement les réalités nouvelles et renforcer le point de vue, la voix et la participation […] des pays en développement […]» (9).

Il est en effet paradoxal de constater que, dans cette situation de crise, 82 % des prêts accordés par le FMI ont bénéficié à des pays européens et 1,6 % seulement à des pays africains et qu'un peu plus de 20 milliards de dollars sont allés aux pays les plus pauvres, sur les 1 100 milliards de dollars mobilisés au total lors du sommet du G20 du 2 avril 2009 à Londres.

7.2   L'UE doit faire en sorte que ces rapports soient radicalement modifiés. Tout d'abord, elle doit veiller à ce que soit plus sérieusement prise en considération et mise en œuvre la proposition de la Banque mondiale de créer un nouveau fonds spécifique pour les plus vulnérables («Vulnerability Fund»), principalement destiné à financer la sécurité alimentaire, la protection sociale et le développement humain, grâce notamment à l'instauration d'un cadre commun spécifique entre la BM et les agences spécialisées des Nations unies. L'émission de nouveaux DTS par le FMI est également souhaitable, pour un montant minimum de 250 milliards de dollars, spécifiquement destinés à la fourniture de liquidités pour le financement du développement.

7.3   L'UE doit aussi jouer un rôle moteur pour que le financement du commerce et la relance rapide des négociations de Doha tournent autour des besoins des pays en développement et prévoient des mesures particulières de soutien et de sauvegarde pour les pays les plus pauvres et pour la sécurité alimentaire.

7.4   Le CESE est convaincu depuis longtemps qu'il convient de déployer tous les efforts possibles pour favoriser et multiplier les nouveaux instruments de financement du développement. Tout en déplorant le peu qui a été fait jusqu'ici, il y a lieu d'élargir la portée des initiatives et des décisions les plus récentes, telles par exemple que: l'IFFi (International Finance and Facility Fund for Immunisation, Facilité internationale de financement pour la vaccination) de novembre 2006, destinée au financement des vaccinations dans les pays pauvres; la garantie de marché («Advance Market Commitment») de la même période; l'initiative du sommet du G8 à L'Aquila visant à réduire de 50 % d'ici cinq ans les coûts de transaction officielle pour les envois de fonds des travailleurs migrants vers leur pays d'origine, qui pourrait induire une augmentation de ces transferts de 13 à 15 milliards de dollars par an. Le CESE est favorable à la proposition de lancer enfin la discussion à propos de l'application d'une taxation volontaire de 0,005 % sur les transactions financières internationales («taxe Tobin»), qui a récemment été remise sur la table par les gouvernements français et allemand lors du sommet du G20 de Pittsburgh. Ces nouvelles modalités de financement, qui doivent rester strictement additionnelles par rapport aux engagements de l'APD, devraient être plus clairement liées à la réalisation des différents objectifs du Millénaire ainsi qu'aux priorités du changement climatique et aux coûts que les pays pauvres auront à supporter dans les années à venir.

7.5   La réflexion sur la réforme de l'architecture de l'aide internationale, que la Commission vient opportunément proposer à nouveau au point 11 de sa proposition, est on ne peut plus urgente et l'UE peut clairement jouer un rôle de meneur dans ce contexte, tout au moins en ce qui concerne les aspects suivants:

la création d'un système international d'alerte qui soit en mesure de contrôler dans les années à venir l'impact de la crise sur les conditions de vie des populations et sur les perspectives de développement, afin d'orienter les aides et les investissements;

l'instauration d'un rigoureux système de compte rendu, afin de contrôler les progrès réalisés et de mesurer l'efficacité des actions menées, comme convenu lors du sommet du G8;

des investissements plus importants dans la stabilisation des zones de conflit, dans le développement des institutions, dans la gestion des crises, en renforçant les capacités locales et régionales de planification et d'intervention, en intensifiant la mise en place de systèmes universels de protection sociale et en prévoyant les investissements requis pour relever les nouveaux défis de la sécurité alimentaire et du changement climatique;

le renforcement et l'extension des possibilités d'accès au microcrédit, afin de soutenir les initiatives entrepreneuriales ne bénéficiant par ailleurs pas de financements bancaires.

7.6   Faire de la sécurité alimentaire et de la croissance verte deux objectifs d'investissement stratégique à long terme peut représenter le fil conducteur déterminant pour la relance du système d'aides et d'investissements, lequel trouve dans la crise une justification supplémentaire. Un tel système pourrait également être l'occasion de faire davantage appel de manière coordonnée aux ressources et aux compétences des pays émergents, tout en offrant une possibilité concrète de partenariat économique à l'Europe et à l'OCDE.

7.7   S'agissant de l'UE, il convient d'ajouter deux observations:

l'une concerne la nécessité d'évaluer attentivement l'évolution durant ces dernières années de l'instrument des aides budgétaires et d'étudier l'opportunité d'orienter plus précisément ces aides vers des objectifs sectoriels tels que la santé, le travail décent, l'éducation et la formation, les infrastructures, les services sociaux et la croissance verte, comme le souhaite le PE (10);

l'autre a trait à une redistribution des tâches au sein du nouveau collège des Commissaires, en particulier en confiant de nouveau au Commissaire responsable du développement le contrôle direct d'EuropAid, aujourd'hui assuré par le Commissaire en charge des relations extérieures.

7.8   Plus que dans tout autre domaine, c'est dans celui du développement que se manifeste avec le plus d'acuité l'urgence pour l'UE de parvenir dans une mesure croissante à parler d'une seule voix et à renforcer sa capacité d'action unitaire, en coordination avec les États membres, afin de se positionner dans la nouvelle donne internationale née de la crise et d'activer plus efficacement les potentialités existantes, qu'il s'agisse de son propre rôle ou de l'ensemble des ressources et des compétences déjà globalement disponibles aujourd'hui. Aujourd'hui plus que jamais, face aux nouveaux acteurs en présence sur la scène internationale, le développement des pays les plus pauvres et notamment de l'Afrique s'avère être d'un intérêt stratégique pour le développement futur de l'Europe (11).

7.9   Suite à la crise, le renforcement de la coopération internationale dans la lutte contre la corruption et l'évasion fiscale est aujourd'hui un fait acquis, en particulier en ce qui concerne la lutte contre les paradis fiscaux. Selon l'Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC), les trafics illicites et l'évasion fiscale représentent aujourd'hui entre 1 000 et 1 600 milliards de dollars, dont la moitié provient des PVD et des économies en transition. Sur ces 500/800 milliards de dollars, 3 % seulement sont imputables à la corruption, 30 % à des activités de nature criminelle et 67 % à l'évasion fiscale. En d'autres termes, l'évasion fiscale coûte aux PVD un montant oscillant entre 300 et 500 milliards de dollars, dont 285 seraient liés au secteur informel et 160 à l'évasion fiscale qui est le fait de nombreuses sociétés transnationales opérant dans ces pays (12). Selon le CESE, il est urgent d'effectuer dans ce secteur un changement de cap décisif, dont la possibilité apparaît plus réaliste aujourd'hui. Cela permettrait non seulement de dégager des ressources inespérées pour les investissements et l'aide au développement, mais aussi d'établir des systèmes fiscaux plus solides et plus équitables dans de nombreux pays pauvres, condition indispensable de la consolidation des institutions et de toute perspective viable de développement sur le long terme.

Bruxelles, le 16 décembre 2009.

Le président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  En particulier le sommet de l'ONU de juin 2009 et le sommet du G8 à l'Aquila en juillet 2009.

(2)  Cf. l'avis du CESE sur la communication de la Commission «Intégration régionale pour le développement des pays ACP», JO C 317, 23.12.2009, p. 126, rapporteur: M. DANTIN, corapporteur: M. JAHIER.

(3)  BM, 2009 et ADB, mars 2009. La fourchette indiquée reprend les chiffres extrêmes des prévisions actuellement disponibles.

(4)  Conclusions du Conseil UE «Relations extérieures», 18 mai 2009.

(5)  COM(2009) 160 final et session du Conseil UE du 22 juillet 2008.

(6)  La définition des ANE donnée par la Cour dans ce rapport inclut uniquement les organisations de la société civile et exclut le secteur privé.

(7)  Selon EuropeAid, le montant des contrats souscrits avec les ANE en 2006 et 2007 peut être estimé à respectivement 836,43 et 915,26 millions d'euros (à l'exception de l'aide humanitaire, qui est gérée par l'entremise d'ECHO), ce qui équivaut à 10 % des aides de l'UE aux PVD. 50 % environ des financements ECHO sont destinés aux ONG (ce qui représente approximativement 353 millions d'euros en 2007).

(8)  Avis de Mme Florio, OJ C 234, 2003, Société civile et politique de développement.

(9)  Conférence de l'ONU sur la crise économique et financière, juin 2009.

(10)  Projet de résolution de la commission DEVE, septembre 2009.

(11)  Cf. M. Jahier, avis OJ C 318, 2009, sur «L'UE, l'Afrique et la Chine», ainsi que l'avis OJ C 128, 2010, sur «La dimension extérieure de la stratégie de Lisbonne».

(12)  Cf. l'étude de la CIDSE (novembre 2008).


ANNEXE

L'amendement suivant, qui a recueilli plus du quart des suffrages exprimés, a été repoussé au cours des débats en session plénière:

Amendement proposé par M. Peel

Paragraphe 7.9

Modifier le paragraphe comme suit:

7.9

Suite à la crise, le renforcement de la coopération internationale dans la lutte contre la corruption et l'évasion fiscale est aujourd'hui un fait acquis, en particulier en ce qui concerne la lutte contre les paradis fiscaux. Selon l'Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC), les trafics illicites et l'évasion fiscale représentent aujourd'hui entre 1 000 et 1 600 milliards de dollars, dont la moitié provient des PVD et des économies en transition. Selon le CESE, il est urgent d'effectuer dans ce secteur un changement de cap décisif, dont la possibilité apparaît plus réaliste aujourd'hui. Cela permettrait non seulement de dégager des ressources inespérées pour les investissements et l'aide au développement, mais aussi d'établir des systèmes fiscaux plus solides et plus équitables dans de nombreux pays pauvres, condition indispensable de la consolidation des institutions et de toute perspective viable de développement sur le long terme.

Exposé des motifs

Ces chiffres doivent être supprimés car ils n'apparaissent pas dans le rapport de l'ONUDC, comme sous-entendu.

Vote

Pour: 59

Contre: 93

Abstentions: 9

Suffrages: 161


(1)  


22.9.2010   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 255/132


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant les parasites radioélectriques (compatibilité électromagnétique) produits par les véhicules à moteur» (version codifiée)

COM(2009) 546 final — 2009/0154 (COD)

(2010/C 255/24)

Le 9 novembre 2009, le Conseil a décidé, conformément à l'article 95 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant les parasites radioélectriques (compatibilité électromagnétique) produits par les véhicules à moteur» (Version codifiée)

COM(2009) 546 final – 2009/0154 (COD).

Ayant estimé que le contenu de la proposition est entièrement satisfaisant et n'appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 458e session plénière des 16 et 17 décembre 2009 (séance du 16décembre 2009), a décidé, par 179 voix pour et 2 abstentions, de rendre un avis favorable au texte proposé.

Bruxelles, le 16 décembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


22.9.2010   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 255/133


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil abrogeant la décision 79/542/CEE du Conseil établissant une liste de pays tiers ou de parties de pays tiers et définissant les conditions de police sanitaire, les conditions sanitaires et la certification vétérinaire requises à l’importation dans la Communauté de certains animaux vivants et des viandes fraîches qui en sont issues»

COM(2009) 516 final — 2009/0146 (COD)

(2010/C 255/25)

Le 27 octobre 2009, le Conseil a décidé, conformément aux articles 37 et 152 paragraphe 4 lettre b du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil abrogeant la décision 79/542/CEE du Conseil établissant une liste de pays tiers ou de parties de pays tiers et définissant les conditions de police sanitaire, les conditions sanitaires et la certification vétérinaire requises à l’importation dans la Communauté de certains animaux vivants et des viandes fraîches qui en sont issues»

COM(2009) 516 final – 2009/0146(COD).

Ayant estimé que le contenu de la proposition est satisfaisant et n'appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 458e session plénière des 16 et 17 décembre 2009 (séance du 16 décembre 2009), a décidé, par 178 voix pour et 4 abstentions, de rendre un avis favorable au texte proposé.

Bruxelles, le 16 décembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI