ISSN 1725-2431

Journal officiel

de l'Union européenne

C 77

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Édition de langue française

Communications et informations

52e année
31 mars 2009


Numéro d'information

Sommaire

page

 

III   Actes préparatoires

 

COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN

 

447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008

2009/C 077/01

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant des normes de performance en matière d'émissions pour les voitures particulières neuves dans le cadre de l'approche intégrée de la Communauté visant à réduire les émissions de CO2 des véhicules légersCOM(2007) 856 final — 2007/0297 (COD)

1

2009/C 077/02

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la sécurité des jouetsCOM(2008) 9 final — 2008/0018 COD

8

2009/C 077/03

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions Un marché unique pour l'Europe du 21e siècleCOM(2007) 724 final

15

2009/C 077/04

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Initiative européenne pour un développement du microcrédit en faveur de la croissance et de l'emploiCOM(2007) 708 final/2

23

2009/C 077/05

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 76/769/CEE du Conseil relative à la limitation de la mise sur le marché et de l'emploi de certaines substances et préparations dangereuses (dichlorométhane)COM(2008) 80 final — 2008/0033 (COD)

29

2009/C 077/06

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 68/151/CEE du Conseil et la directive 89/666/CEE du Conseil en ce qui concerne les obligations de publication et de traduction de certaines formes de sociétéCOM(2008) 194 final — 2008/0083 (COD)

35

2009/C 077/07

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant les directives 78/660/CEE et 83/349/CEE en ce qui concerne certaines obligations de publicité pour les entreprises de taille moyenne et l'obligation d'établir des comptes consolidésCOM(2008) 195 final — 2008/0084 (COD)

37

2009/C 077/08

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux inscriptions réglementaires des véhicules à moteur à deux ou trois roues (Version codifiée) COM(2008) 318 final — 2008/0099 (COD)

41

2009/C 077/09

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant le siège du conducteur des tracteurs agricoles ou forestiers à roues (Version codifiée) COM(2008) 351 final — 2008/0115 (COD)

41

2009/C 077/10

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil en matière de droit des sociétés concernant les sociétés à responsabilité limitée à un seul associé (Version codifiée) COM(2008) 344 final — 2008/0109 (COD)

42

2009/C 077/11

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement (CE) no …/… du Parlement européen et du Conseil du […] concernant le certificat complémentaire de protection pour les médicaments (Version codifiée) COM(2008) 369 final — 2008/0126 (COD)

42

2009/C 077/12

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelablesCOM(2008) 19 final — 2008/0016 (COD)

43

2009/C 077/13

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions Promouvoir une démonstration à brève échéance de la production durable d'énergie à partir de combustibles fossilesCOM(2008) 13 final

49

2009/C 077/14

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen sur la première évaluation des plans nationaux d'action en matière d'efficacité énergétique exigée par la directive 2006/32/CE relative à l'efficacité énergétique dans les utilisations finales et aux services énergétiques — Progresser ensemble sur l'efficacité énergétiqueCOM(2008) 11 final

54

2009/C 077/15

Avis du Comité économique et social européen sur L'Internet des objets

60

2009/C 077/16

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions sur les contenus créatifs en ligne dans le marché uniqueCOM(2007) 836 final

63

2009/C 077/17

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de Directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2005/35/CE relative à la pollution causée par les navires et à l'introduction de sanctions en cas d'infractionsCOM(2008) 134 final — 2008/0055 (COD)

69

2009/C 077/18

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil facilitant l'application transfrontière de la législation dans le domaine de la sécurité routièreCOM(2008) 151 final — 2008/0062 (COD)

70

2009/C 077/19

Avis du Comité économique et social européen sur Les négociations internationales sur le changement climatique

73

2009/C 077/20

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant l'information des consommateurs sur les denrées alimentairesCOM(2008) 40 final — 2008/0028(COD)

81

2009/C 077/21

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant la mise sur le marché et l'utilisation des aliments pour animauxCOM(2008) 124 final — 2008/0050(COD)

84

2009/C 077/22

Avis du Comité économique et social européen sur L'Incidence de l'évolution actuelle des marchés énergétiques sur les chaînes de valeur de l'industrie européenne

88

2009/C 077/23

Avis du Comité économique et social européen sur le Livre blanc — Ensemble pour la santé: une approche stratégique pour l'UE 2008-2013COM(2007) 630 final

96

2009/C 077/24

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Étendre les mesures de lutte contre la discrimination aux domaines au-delà de l'emploi — Pour une directive unique et globale de lutte contre la discrimination

102

2009/C 077/25

Avis du Comité économique et social européen sur le Multilinguisme

109

2009/C 077/26

Avis du Comité économique et social européen sur la Prise en compte des besoins des personnes âgées

115

2009/C 077/27

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Pour une évolution équilibrée du milieu urbain: Défis et opportunités

123

2009/C 077/28

Avis du Comité économique et social européen sur L'économie de l'UE: bilan de 2007 — Repousser la frontière de la productivité en Europe

131

2009/C 077/29

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen et au Comité économique et social européen — L'application des mesures de lutte contre les abus dans le domaine de la fiscalité directe au sein de l'Union européenne et dans les rapports avec les pays tiersCOM(2007) 785 final

139

2009/C 077/30

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Gouvernance et partenariat aux niveaux national et régional et base pour des projets dans le domaine de la politique régionale (saisine du Parlement européen)

143

2009/C 077/31

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Exonérations fiscales/introductions définitives de biens personnels des particuliers en provenance d'un État membre (codification)COM(2008) 376 final — 2008/0120 (COD)

148

2009/C 077/32

Avis du Comite économique et social européen sur La stratégie UE-Afrique

148

2009/C 077/33

Avis du Comité économique et social européen sur La relation UE-Ukraine: un nouveau rôle dynamique pour la société civile

157

FR

 


III Actes préparatoires

COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN

447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008

31.3.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 77/1


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant des normes de performance en matière d'émissions pour les voitures particulières neuves dans le cadre de l'approche intégrée de la Communauté visant à réduire les émissions de CO2 des véhicules légers»

COM(2007) 856 final — 2007/0297 (COD)

(2009/C 77/01)

Le 22 février 2008, le Conseil de l'Union européenne a décidé, conformément à l'article 95 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social sur la

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant des normes de performance en matière d'émissions pour les voitures particulières neuves dans le cadre de l'approche intégrée de la Communauté visant à réduire les émissions de CO2 des véhicules légers».

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a élaboré son avis le 15 juillet 2008 (rapporteur: M. IOZIA).

Lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 17 septembre 2008), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 138 voix pour et 4 voix contre.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Dans ses avis consacrés à la réduction des émissions de CO2, le Comité a toujours soutenu fermement toutes les initiatives de la Commission visant à faire respecter des plafonds concrets et visibles dans le domaine de la diminution des rejets de gaz à effet de serre, en tant que contribution essentielle à la lutte contre les changements climatiques.

1.2

Le Comité adhère aux objectifs du règlement à l'examen, qui ambitionne de procéder progressivement et concrètement à des réductions des émissions de CO2, en proposant d'atteindre pour 2012 un plafond de 130 g/km grâce à des améliorations technologiques apportées aux moteurs.

1.3

Le Comité souhaite par ailleurs un effort de toutes les parties intéressées afin qu'il soit possible, grâce à une approche intégrée, de respecter le plafond de 120 g/km pour 2012, comme le prévoient les communications de la Commission du 7 février 2007, et demande au Conseil et au Parlement européen d'approuver rapidement toute législation susceptible d'avoir une incidence favorable sur le changement climatique.

1.3.1

Le Comité recommande à la Commission de fixer des objectifs de long terme, comme indiqué par le Parlement européen: à partir de 2020, il sera nécessaire de dégager des solutions plus courageuses.

1.4

Le Comité appelle en particulier de ses vœux une approbation rapide de la directive COM(205) 261 final sur la fiscalité des voitures particulières et une amélioration de la directive 1999/94/CE concernant l'information sur les émissions de CO2 via des étiquettes spécifiques et il invite la Commission à coordonner et proposer des initiatives sur la publicité et les techniques de commercialisation du secteur automobile, afin de favoriser les véhicules les plus économiques du point de vue de la consommation.

1.5

La voie qui a été choisie, celle de l'intervention législative spécifique, fait figure de nécessité si l'on veut clore la phase des engagements volontaires pris par l'industrie automobile, qui se sont avérés insuffisants pour atteindre les objectifs assignés, même s'ils ont débouché sur des avancées appréciables en ce qui concerne les résultats obtenus afin d'améliorer les performances des véhicules particuliers du point de vue des émissions de CO2.

1.6

Tout en approuvant la stratégie et la démarche prévues, le Comité réclame des dispositions qui puissent être concrétisées de manière réaliste, en assurant un équilibre adéquat entre les indispensables progrès environnementaux, la préservation de l'emploi dans une industrie qui procure du travail à 13 millions de salariés et le maintien de la compétitivité des entreprises européennes d'un secteur dont l'importance stratégique est indéniable pour l'économie européenne.

1.7

Le Comité porte une appréciation positive sur l'option législative qui a été retenue, à savoir le règlement, car il s'agit d'un instrument propre à assurer un respect immédiat des décisions qui seront adoptées, évitant ainsi les éventuelles distorsions de concurrence. Il est essentiel d'évaluer attentivement et de répandre plus largement les rythmes et les bases concrètes des interventions proposées afin de sauvegarder et de renforcer la compétitivité des entreprises de l'Union dans un marché mondialisé et d'éviter que certains segments de la production du secteur ne bénéficient d'avantages artificiels par rapport à d'autres.

1.8

Dans ce but, le Comité propose à la Commission d'étudier s'il n'est pas possible de dépasser l'actuelle grille de définition de son système, où le plafond d'émission est fondé exclusivement sur le poids des véhicules, suivant le dispositif en vigueur au Japon, en approfondissant d'autres pistes de paramètres de substitution tels que l'empreinte, qui est déjà applicable aux véhicules de transport aux États-Unis et se calcule en multipliant leur poids par leur voie.

1.9

Le Comité demande qu'une attention approfondie soit accordée à la pente qui sera donnée à la fonction linéaire (c'est-à-dire son pourcentage de pente), car elle influera directement sur la répartition du fardeau entre constructeurs. Dans le document de synthèse de l'évaluation d'impact (SEC(2007) 1724), la Commission affirme elle-même qu'«à l'issue d'une première analyse, il semblerait qu'il convienne d'envisager des pentes situées dans une fourchette allant de 50 à 80 degrés pour réaliser un bon équilibre dans l'application de ces critères» et admet ainsi qu'il conviendra d'affiner largement l'étude d'impact menée sur un thème aussi sensible. Le choix d'une pente de 60 degrés laisse les problèmes ouverts et pourrait provoquer des contestations de la part de certains constructeurs, qui estiment que cette option n'est ni équitable, ni équilibrée. Le Comité recommande que la valeur qui sera retenue définitivement, une fois que la question aura été creusée autant que nécessaire, n'induise ni avantage ni handicap.

1.10

Un autre aspect qu'il y a lieu d'évaluer attentivement est celui de la mise en œuvre des pénalités prévues par l'article 7 du règlement qui fait l'objet du présent avis. S'il est partisan lui aussi de leur instauration, au motif de l'effet évident de dissuasion qui en découle, le Comité n'en estime pas moins, au vu de la forte progressivité qu'elles présentent, que l'industrie européenne ne sera pas à même d'adapter ses circuits à ces valeurs dans les délais prévus. Les mesures apparaissent déséquilibrées, tant par rapport à celles prévues pour les autres secteurs qu'à l'échelle intrasectorielle, entre les constructeurs de véhicules petits et moyens et ceux de grandes voitures, en ce qu'elles touchent nettement plus les premiers.

1.11

Le Comité juge que ces dispositions atteindront progressivement des niveaux forts élevés et se répercuteront in fine sur les tarifs en bout de filière, de sorte qu'elles seront supportées par l'acheteur, avec une éventuelle distorsion de concurrence, et ralentiront ainsi le renouvellement du parc automobile. Il invite la Commission à œuvrer pour que les éventuelles ressources dégagées par cette mesure restent dans les rouages du secteur automobile et puissent être utilisées pour promouvoir le remplacement des véhicules plus polluants, ainsi que des programmes d'information qui encourageront le consommateur à prêter davantage attention aux chiffres d'émission au moment de l'achat, ainsi que pour couvrir à titre complémentaire les immenses besoins de financement dans le domaine de la recherche et du développement.

1.12

Eu égard à l'importance des résultats qui pourraient en être tirés, le Comité considère en effet que la recherche scientifique joue un rôle capital pour les progrès qu'on attend du secteur, en partant de l'hypothèse qu'après une première phase où les avancées pourront s'obtenir par le recours à la technologie existante, on peut raisonnablement escompter qu'il faudra en arriver ultérieurement à une «rupture avec les technologies existantes», qui déploiera un niveau technologique plus élevé.

1.13

Pour le Comité, l'option de la recherche requiert d'énormes ressources et un effort tenace d'orientation, au départ de la nécessité de réaliser une coordination des initiatives déjà en cours dans les différents États membres, les universités et tous les centres technologiques d'excellence qui fonctionnent aux différents échelons, non sans prévoir et encourager une participation directe des entreprises de production du secteur.

1.14

Le Comité estime qu'à cette fin, il est possible d'arriver à mobiliser l'ensemble du monde scientifique en lançant une initiative technologique conjointe (ITC) à l'intention spécifique du secteur automobile.

1.15

Le Comité estime que l'analyse d'impact ne semble pas être suffisamment approfondie, comme le Comité des évaluations d'impact l'a fait lui-même remarquer. Le document SEC(2007) 1725 demande en effet que l'on éclaircisse l'incidence que la proposition pourrait avoir sur la composition de la flotte automobile européenne, en expliquant les éventuels écarts entre les résultats produits par l'étude ex ante et le modèle Tremove. Par ailleurs, toujours selon la même source, il conviendra de produire des analyses supplémentaires sur d'autres variables sensibles, comme le prix du carburant ou l'augmentation autonome de masse (AMI), et de consolider les analyses et l'évaluation concernant les répercussions régionales, notamment pour ce qui touche l'industrie des équipementiers fournisseurs du secteur automobile et la compétitivité internationale.

1.16

Si l'on veut qu'une stratégie ainsi approfondie soit couronnée de succès, le Comité pense qu'il est nécessaire de mettre en œuvre des mesures concrètes pour soutenir et protéger la structure industrielle des grandes entreprises du secteur qui sont actives en Europe, afin de défendre et, si possible, de renforcer leurs niveaux actuels de compétitivité et de sauvegarder des emplois de qualité dans cette branche. Le Comité pense qu'il est souhaitable de prévoir un phasage, qui prescrive d'arriver en 2012 à un niveau qui ne soit pas inférieur à 80 % des valeurs-cibles finales, en élevant progressivement ce seuil pour atteindre définitivement celles-ci en 2015.

1.17

Un facteur important pour atteindre les objectifs environnementaux et préserver la compétitivité consiste, de l'avis du Comité, à appliquer les limites d'émission de manière minutieuse et impérative à toutes les voitures particulières commercialisées en Europe mais produites à l'extérieur du territoire communautaire. Ces valeurs maximales devront être valables pour les véhicules importés.

1.18

Considérant que la proposition examinée dans le présent avis ne constitue que les premiers pas d'une démarche pour faire face globalement aux problématiques environnementales concernant les transports, le Comité demande à la Commission d'élaborer rapidement de nouvelles normes législatives propres à faire droit aux impératifs de la réduction des émissions de CO2 des véhicules légers de transport, des poids lourds et des deux-roues, en recueillant toutes les données relatives aux émissions de ces véhicules.

1.19

Le Comité note qu'en dépit de toute l'importance qu'elle revêt, la politique sectorielle menée sur le segment de l'automobile ne résume pas à elle seule l'effort, plus global, à déployer en matière de politique générale des transports mais qu'elle offre néanmoins une indication décisive pour emmener toute cette branche d'activités vers les visées que poursuivent déjà d'autres secteurs de la structure industrielle européenne.

1.20

Le Comité souligne, et ses souhaits vont dans le même sens, que parallèlement aux mesures prévues pour le secteur, il convient également de s'employer à obtenir les résultats escomptés en agissant sur l'axe de la demande de transport. Pour le Comité, il est indispensable de favoriser une politique énergique qui reporte des parts de marché de plus en plus importantes de la route vers des modes qui produisent moins de gaz à effet de serre, comme le rail, la navigation fluviale ou les transports en commun, recourant autant que possible à des véhicules à très faibles émissions.

1.21

Dans les termes où elle est formulée, la proposition de dérogation temporaire prévue par l'article 9 du règlement ne recueille pas l'assentiment du Comité, pour des motifs évidents d'inégalité de traitement entre les constructeurs. Il est indispensable, selon lui, de ne susciter l'apparition d'aucun avantage d'origine réglementaire qui fausse la concurrence.

1.22

Le Comité recommande l'élaboration d'un modèle qui internalise dans le calcul du CO2 l'ensemble des émissions qui sont en rapport avec la production des voitures. L'empreinte carbonique à prendre en compte devrait porter sur l'intégralité de leur cycle de vie.

1.23

Pour atteindre le seuil fixé, il est nécessaire d'ouvrir un débat concernant les styles de vie, sujet auquel le Comité a consacré récemment des avis spécifiques. On s'accorde en effet à penser que si nous poursuivons dans la même ligne d'une augmentation du nombre de véhicules prévus, d'un accroissement de leurs dimensions et de la préférence donnée à ceux qui produisent des niveaux élevés d'émissions de gaz à effet de serre et d'oxydes d'azote, il ne sera pas possible de respecter l'objectif d'une réduction de 20 % du CO2, alors qu'un tel échec est intolérable.

2.   Introduction: le contexte de la proposition

2.1

La convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, qui a été approuvée au nom de la Communauté européenne par la décision 94/69/CE du Conseil du 15 décembre 1993, impose à toutes les parties d'établir et de mettre en œuvre des programmes visant à atténuer lesdits changements.

2.2

Pour se conformer à cette prescription, la Commission a élaboré peu à peu une série d'actions législatives grâce auxquelles l'Union européenne a pu, en janvier 2007, proposer dans les négociations internationales de réduire globalement de 30 % les émissions de gaz à effet de serre par rapport aux chiffres de 1990, la diminution devant atteindre 20 % d'ici 2020. Par la suite, le Conseil et le Parlement européen ont entériné ces objectifs.

2.3

Dans le passage en revue qui a été effectué secteur par secteur, on a pu relever que si dans l'ensemble, les émissions de gaz à effet de serre ont régressé d'environ 5 % sur les années 1990 à 2004, celles qui sont dues au transport ont enregistré un bond de 26 % dans le même laps de temps.

2.4

Ce constat a mis en avant la nécessité de procéder à des interventions législatives spécifiques afin de ramener le secteur automobile dans la courbe générale de décroissance des émissions de gaz à effet de serre, en insistant tout spécialement sur les voitures particulières, car cette catégorie présente un tableau critique, dans la mesure où elle intervient pour 12 % dans les émissions totales de dioxyde de carbone (CO2), lequel constitue comme on sait le principal de ces gaz.

2.5

Le secteur automobile a connu, d'une part, un progrès technologique appréciable, qui lui a permis de diminuer de 12,4 % les rejets de CO2, grâce aux économies de carburant, et, d'autre part, un accroissement constant de la demande de transport et une augmentation ininterrompue de la taille des voitures, de sorte que ses avancées ont été totalement annulées et que les émissions de gaz à effet de serre imputables au transport ont même augmenté.

2.6

Du fait de cette évolution, il n'est guère probable qu'en l'absence d'initiatives spécifiques, le parc de véhicules neufs parvienne à respecter le plafond d'émissions moyennes de 120 g de CO2 par kilomètre qui a été prévu.

3.   Principales étapes de la stratégie de la Commission

3.1

C'est à partir de 1995 qu'a commencé à se dessiner la stratégie communautaire de réduction des émissions de CO2, basée sur les éléments suivants:

des engagements volontaires de réduction des émissions pris par l'industrie automobile,

l'amélioration de l'information des consommateurs,

la promotion, via des mesures fiscales, de voitures économes en carburant.

3.2

En 1998, l'Association des constructeurs européens d'automobiles s'est engagée à réduire les émissions moyennes des voitures neuves vendues à 140 g de CO2/km d'ici à 2008, à la suite de quoi l'Association des constructeurs japonais d'automobiles (JAMA) et l'Association des constructeurs coréens d'automobiles (KAMA) ont souscrit un engagement analogue pour 2009.

3.3

En la matière, la Commission a reconnu ces promesses, en émettant les recommandations 1999/125/CEE, 2000/303/CE et 2000/304/CE, portant respectivement sur les accords volontaires avec l'ACEA, la KAMA et la JAMA. En ce qui concerne le contrôle des émissions, elle a approuvé la décision no 1753/2000/CE du Parlement européen et du Conseil établissant un programme de surveillance de la moyenne des émissions spécifiques de CO2 dues aux véhicules particuliers neufs.

3.4

Le 7 février 2007, la Commission a adopté deux communications parallèles spécifiquement consacrées au secteur automobile:

la première porte sur les résultats du réexamen de la stratégie communautaire de réduction des émissions de CO2 des voitures et des véhicules utilitaires légers (COM(2007) 19 final; avis du Comité TEN/301, rapporteur: M. RANOCCHIARI)

et la seconde a trait à un cadre réglementaire concurrentiel pour le secteur automobile au vingt et unième siècle («Cars 21», COM(2007) 22 final; avis du Comité INT/351, rapporteur: M. DAVOUST).

3.5

Tout en soulignant les progrès accomplis pour réaliser l'objectif des 140 g de CO2/km à l'horizon 2008-2009, ces deux textes ont affirmé qu'en l'absence de mesures supplémentaires, il ne serait pas possible d'atteindre la valeur de 120 g de CO2/km pour les voitures nouvellement construites.

3.6

Les deux communications ont préconisé l'adoption d'une approche intégrée, articulée autour de deux axes:

une réduction obligatoire des émissions de CO2 par le biais d'améliorations technologiques des moteurs, afin de parvenir à la valeur moyenne de 130 g/km,

une réduction supplémentaire de 10 g/km, qui devra être atteinte via des mesures complémentaires, consistant en une série d'autres dispositifs technologiques à monter sur les voitures (indicateur de changement de vitesse, indicateur de pression des pneus, pneumatiques à faible résistance au roulement, systèmes de climatisation à haute efficacité, etc.), ainsi que par un recours accru aux biocarburants.

3.7

Dans ces communications toujours, la Commission indiquait que s'agissant du chiffre moyen fixé pour le parc automobile neuf, il convenait de tenir compte des éléments suivants:

neutralité du point de vue de la concurrence,

caractère socialement équitable et durable des choix opérés,

absence de tout effet de distorsion injustifiée de la concurrence entre les constructeurs,

compatibilité totale avec les objectifs de Kyoto.

3.8

Le fondement sur lequel repose le cadre proposé, qui a été confirmé par le Conseil «Compétitivité» comme par celui des «Transports», est l'assurance que tous les constructeurs automobiles intensifieront leurs efforts pour produire de voitures particulières plus écologiques, mais ce, en veillant à une efficacité maximale en ce qui concerne les coûts.

3.9

Il en résulte que la réduction des émissions de CO2 doit s'effectuer selon une approche intégrée, qui implique l'ensemble des intervenants, de sorte qu'il apparaît judicieux de formuler une proposition législative grâce à laquelle les objectifs fixés soient réalisés dans un cadre qui préserve la compétitivité globale de l'industrie automobile.

4.   La proposition de la Commission

4.1

La proposition de règlement qui fait l'objet du présent avis (COM(2007) 856) vise à «réduire les émissions de CO2 des véhicules légers» et à œuvrer pour que la norme d'émission de 130 g/km soit atteinte d'ici 2012. Elle s'applique aux véhicules à moteur de catégorie M1, tels qu'ils sont définis à l'annexe II de la directive 2007/46/CE, et aux véhicules visés à l'article 2, paragraphe 2, du règlement (CE) no 715/2007 qui sont immatriculés dans la Communauté pour la première fois sans l'avoir été auparavant en dehors de celle-ci.

4.2

La proposition, qui s'inscrit dans une approche intégrée, sera complétée par d'autres mesures destinées à réaliser une réduction supplémentaire de 10 g de CO2/km pour atteindre l'objectif communautaire des 120 g de CO2/km fixé dans la communication COM(2007) 19.

4.3

Pour définir les niveaux d'émission de CO2, le règlement tient compte des éléments suivants:

les implications de pareilles interventions pour les marchés et la compétitivité des constructeurs,

la stimulation de l'innovation,

la réduction de la consommation d'énergie.

4.4

Le règlement à l'examen entend par ailleurs:

inciter le secteur automobile à investir dans de nouvelles technologies,

encourager activement l'innovation compatible avec l'environnement,

prendre en compte les évolutions technologiques à venir,

renforcer la compétitivité de l'industrie européenne,

créer des emplois de haute qualité.

4.5

La Commission affirme que le projet de règlement se situe dans une ligne cohérente avec les autres objectifs et les politiques de l'Union et qu'il a vu le jour au terme d'une vaste consultation et intègre l'apport direct d'un groupe de travail spécialement constitué dans le cadre du programme européen sur le changement climatique (groupe «Cars 21»), avec la participation directe de toutes les parties intéressées.

4.6

Base juridique. La base juridique de la proposition est l'article 95 du traité instituant la Communauté européenne, qui apparaît approprié dans le cas présent, car il est nécessaire d'assurer l'égalité de traitement de l'ensemble des acteurs tout en garantissant un niveau élevé de protection de la santé et de l'environnement.

4.7

Principe de subsidiarité et de proportionnalité. La proposition respecte ces deux principes dans la mesure où même si elle ne relève pas de la compétence exclusive de la Communauté, elle évite l'apparition d'obstacles au marché intérieur et, grâce à l'adoption de mesures législatives au niveau communautaire, simplifie les interventions qui s'imposent pour une réduction harmonisée de l'incidence des voitures particulières sur le changement climatique.

4.8

Choix de l'instrument législatif. La Commission estime que la proposition de règlement constitue l'option la plus adéquate pour assurer un respect immédiat des dispositions qui seront prises, évitant des distorsions de la concurrence susceptibles d'avoir une incidence sur le marché intérieur.

4.9

Suivi. Les émissions spécifiques de dioxyde de carbone des voitures particulières neuves, qui seront mesurées sur une base harmonisée dans la Communauté conformément à la méthodologie établie dans le règlement (CE) no 715/2007, devront être recueillies par chaque État membre puis communiquées à la Commission, via la procédure prévue à l'article 6.

4.10

Certificat de conformité. En vertu de la directive 2007/46/CE, les constructeurs sont tenus de délivrer un certificat de conformité qui doit accompagner chaque voiture particulière et constituera le document indispensable sur la base duquel les États membres autoriseront l'immatriculation et la mise en service d'une voiture particulière neuve, à la seule exception des dérogations prévues à l'article 9 dudit règlement.

4.11

Prime sur les émissions excédentaires. L'article 7 du règlement à l'examen propose qu'en cas de dépassements d'émissions par rapport à l'objectif fixé, le versement d'une prime sur ces rejets excédentaires soit imposé à partir de 2012 au constructeur concerné ou, le cas échéant, à l'administrateur du groupement de constructeurs. Dans les années qui suivront cette date, l'ampleur de cette indemnité connaîtra une forte évolution à la hausse. Elle sera versée dans les recettes du budget de l'Union européenne.

5.   La proposition stratégique du Parlement européen

5.1

Dans la résolution qu'il a adoptée le 24 octobre 2007, le Parlement européen a accueilli favorablement la stratégie de la Commission, tout en proposant que les objectifs en matière d'émission s'appliquent à partir de 2011, de manière à ce qu'en 2015, les 125 g de CO2 par km soient atteints par le seul effet de l'évolution technologique. Le Parlement européen a mis l'accent sur la seconde phase, en fixant comme but de parvenir à long terme à une valeur de 95 g pour 2020 et en souhaitant par ailleurs que la perspective des 70 g soit réalisée d'ici à 2025, avec vérification en 2016 de l'évolution des résultats obtenus.

6.   Importance du comportement des consommateurs

6.1

Le comportement des consommateurs constitue un facteur d'une importance notable pour produire des résultats positifs en matière de réduction des émissions de CO2 des véhicules particuliers. Aussi la Commission adoptera-t-elle une modification de la directive 1999/94/CE concernant l'information des consommateurs sur les économies de carburant, afin qu'ils contribuent davantage à réaliser les objectifs escomptés.

7.   Observations générales

7.1

Comme il l'avait déjà fait dans les avis qu'il a précédemment consacrés aux propositions législatives de diminution des émissions de CO2 présentées par la Commission, le Comité confirme qu'il soutient toutes les initiatives communautaires visant à faire respecter des plafonds concrets dans le domaine de la réduction de gaz à effet de serre, qui représente un volet essentiel de la lutte contre les changements climatiques.

7.2

Le Comité marque son accord avec les objectifs proposés par le règlement, en l'assortissant des observations ci-après, et demande au Conseil et au Parlement européen d'approuver rapidement toute législation susceptible d'avoir une incidence favorable sur le changement climatique à l'œuvre aujourd'hui.

7.3

Le Comité lance un appel aux institutions européennes pour qu'elles approuvent rapidement la directive COM(2005) 261 sur la fiscalité des voitures particulières, qui contribuera à faire atteindre l'objectif fixé, en encourageant les entreprises à accroître leurs efforts, et pour qu'elles s'emploient à améliorer à bref délai la directive 1999/94/CE concernant l'information sur les émissions de CO2 via des étiquettes spécifiques, ainsi que, s'agissant de la publicité et des techniques de commercialisation du secteur, elles coordonnent et proposent des initiatives qui prévoient des mesures pour promouvoir les véhicules les plus économiques du point de vue de la consommation et interdisent la promotion publicitaire de ceux qui sont les plus polluants.

7.4

Dans le cas précis du règlement envisagé, le Comité approuve le choix de l'article 95 du traité comme base juridique, car il paraît propre à garantir l'égalité de traitement de l'ensemble des acteurs tout en assurant un niveau élevé de protection de la santé et de l'environnement.

7.5

Le Comité porte une appréciation positive sur l'option législative qui a été retenue, à savoir le règlement, étant donné qu'il s'agit d'un instrument adapté pour assurer un respect immédiat des dispositions qui seront adoptées, en évitant les éventuelles distorsions de concurrence. Il apparaît nécessaire de s'engager désormais sur cette voie, au sortir d'une période où les engagements volontaires pris par l'industrie automobile se sont avérés insuffisants pour atteindre les objectifs assignés, même s'ils ont produit des effets appréciables en ce qui concerne les résultats obtenus pour améliorer les performances des véhicules particuliers du point de vue des émissions de CO2.

7.6

Le Comité adhère à la proposition de réduire les émissions de CO2 à 130 g/km par le biais d'améliorations technologiques des moteurs tout en regrettant qu'il ne semble plus réalisable de viser l'objectif plus strict de 120 g/km prévu initialement pour 2012. Il reconnaît que la Commission propose à présent de réaliser ce dernier d'une manière différente, grâce à une approche intégrée qui inclut l'amélioration des normes pour les pneumatiques, la promotion de la sensibilisation des consommateurs et des incitations à un mode de conduite respectueux de l'environnement (1) mais aussi et surtout par l'utilisation accrue des biocarburants. Eu égard, toutefois, aux des doutes croissants qui planent sur la faisabilité et l'opportunité de l'objectif concernant le recours aux biocarburants dans le secteur des transports, le Comité ne considère pas que cette piste soit satisfaisante.

7.7

Par conséquent, le Comité recommande à la Commission d'établir dès à présent de nouveaux objectifs pour le secteur automobile dans le but d'améliorer les performances des véhicules en ce qui concerne les émissions de carbone dans les années à venir. Le Comité estime qu'établir dès à présent une série de seuils de plus en plus stricts pour les années avenir donnerait un signal clair en ce qui concerne les normes qui seront d'application dans le futur, permettant ainsi à l'industrie européenne d'adapter ses plans de production en conséquence.

7.8

Le Comité considère qu'en arrivant à respecter cette valeur-limite, l'industrie automobile contribuera fortement à la lutte contre les gaz à effet de serre dans le secteur des transports, car elle pourrait, sur cette période, réduire les émissions de CO2 de 400 millions de tonnes.

7.9

De l'avis du Comité, les ambitieuses valeurs-limites à respecter et celles qui sont souhaitées pour un horizon plus lointain exigent que l'on effectue en matière de recherche et développement un apport fondamental d'investissements substantiels, qui puisse fédérer et coordonner les initiatives en cours dans les différents États membres, les universités et tous les centres technologiques d'excellence que possède le secteur, tout en prévoyant également une participation directe des firmes de construction automobile.

7.9.1

Le Comité attire l'attention de la Commission et des États membres sur la nécessité d'instaurer, y compris sous la forme de dispositions fiscales incitatives, des mesures d'aide au revenu en faveur des familles nombreuses, qui sont contraintes d'utiliser de grands véhicules. Il conviendrait également d'étudier la situation qui prévaut sur les marchés des États membres de la partie orientale de l'Union, dont le parc automobile a une durée de vie moyenne fort élevée et où se vendent des voitures de seconde ou de troisième main qui sont des plus polluants. Il conviendrait d'y encourager le remplacement de ces autos, grâce à des dispositifs ad hoc. Il est évident que les pays dont le revenu par habitant est moindre ne pourront tirer parti des avantages d'une réduction généralisée des émissions, n'étant pas en mesure d'acquérir les nouveaux modèles, qui, pour être plus efficaces sur ce plan, sont aussi, selon toute vraisemblance, d'un prix plus élevé.

7.10

Il apparaît clairement que si pour les prochaines années, on peut raisonnablement atteindre les résultats visés en recourant à la technologie existante, il conviendra d'envisager dans l'avenir des processus de «rupture avec les technologies existantes», qui réalisent le passage à un niveau technologique plus élevé.

7.11

Le Comité estime qu'à cette fin, il est possible de susciter un degré élevé de mobilisation dans l'ensemble du monde scientifique en lançant une initiative technologique conjointe (ITC), sur la base d'un schéma de cofinancement assuré par un budget européen consistant et une contribution analogue des entreprises, ainsi qu'il a été récemment proposé d'en réaliser pour des secteurs importants comme les piles à hydrogène et à combustibles, l'aéronautique et le transport aérien, les médicaments d'innovation, les systèmes informatique et la nanoélectronique.

7.12

Le Comité est favorable à la démarche prévue à l'article 7 du règlement à l'examen, qui instaure des pénalités au cas où les objectifs proposés pour 2012 n'auront pu être atteints, car il juge lui aussi qu'elles auront un effet dissuasif, tout en considérant qu'il conviendra d'en affecter le produit à des actions telles que:

renforcer toutes les initiatives de recherche et développement qui auront été convenues,

investir dans le domaine de la formation professionnelle,

financer des mesures qui incitent les propriétaires de véhicules anciens et polluants à les remplacer,

réaliser des campagnes d'information en direction des consommateurs pour que les émissions de gaz nocifs soient un facteur auquel ils soient sensibles lorsqu'ils achètent un véhicule,

soutenir les transports publics locaux.

7.13

Le Comité est toutefois d'avis que ces mesures — et leur forte progressivité — ne sont pas proportionnées aux capacités dont dispose l'industrie européenne pour adapter ses filières productives propres aux nouvelles limites. L'ampleur de ces pénalités, qui fait qu'elles seront presque certainement répercutées sur la tarification finale des produits, apparaît particulièrement élevée, de sorte qu'elle peut constituer un élément de distorsion de concurrence et placer le secteur dans une position désavantageuse par rapport à d'autres domaines d'activité. Il conviendra de trouver une solution qui équilibrera ces charges, en tenant compte des coûts moyens supportés par d'autres branches de production qui sont concernées par la limitation des émissions de CO2.

7.14

Le Comité propose à la Commission d'étudier s'il n'est pas possible de substituer à l'actuelle grille de définition de son système, où les plafonds d'émission sont fonction de la masse des véhicules, d'autres paramètres tels que leur empreinte, laquelle se calcule en multipliant leur poids par leur voie.

7.15

La pente donnée à la fonction linéaire (c'est-à-dire son pourcentage d'inclinaison) influera sur la répartition du fardeau entre constructeurs et les résultats environnementaux. Plus elle se rapprochera des 100 %, moins les constructeurs de véhicule de masse élevée auront à supporter de charges et, inversement, plus elle tendra vers 0 %, plus il leur faudra fournir d'efforts pour atteindre les objectifs (une pente de 80 % permet un surplus d'émissions de 6 g, contre seulement 1,5 g si elle est de 20 %). La Commission suggère une inclinaison de 60 %, qui autorise à émettre 4,6 g de plus. Il lui est demandé par le Comité de réfléchir plus avant sur cette proposition, afin d'éviter absolument d'édicter un règlement susceptible de favoriser ou défavoriser une quelconque entreprise européenne.

7.16

Si la Commission devait s'en tenir à sa position actuelle privilégiant l'option de la masse, la révision de la pente en 2010 n'aurait guère de sens et l'augmentation de la masse devrait être prise en compte à partir de 2013.

7.17

Le Comité demande à la Commission d'élaborer rapidement de nouvelles normes législatives propres à limiter les émissions de CO2 des véhicules légers de transport, des poids lourds et des deux-roues, pour les émissions desquels il convient de disposer de données fiables et vérifiées.

7.18

À côté des incontournables aspects de défense de l'environnement, le Comité invite la Commission à évaluer comme il se doit les effets que le déploiement de cette procédure complexe peut produire pour l'emploi des treize millions de travailleurs qui travaillent actuellement dans l'ensemble de la filière du secteur automobile. Vu le renchérissement du pétrole et l'aspiration des consommateurs à consacrer moins d'argent au carburant, les constructeurs automobiles communautaires, en produisant des voitures plus efficaces et plus petites, bénéficieraient d'un avantage compétitif qui favoriserait l'emploi dans l'UE.

7.19

Le Comité juge qu'il y a lieu de mettre en œuvre des mesures concrètes et appropriées pour soutenir la recherche dans le domaine des technologies nouvelles, novatrices et efficaces, afin de préserver et, si possible, de renforcer les niveaux actuels de compétitivité de l'industrie automobile européenne et des emplois de qualité qu'elle fournit.

7.20

Pour le Comité, un élément important de cette démarche consiste à appliquer les limites d'émission de manière méthodique et impérative à toutes les voitures particulières commercialisées en Europe mais produites à l'extérieur du territoire communautaire, leur valeur étant calculée sur la base des importations.

7.21

Le Comité estime que les rapports sur les progrès accomplis, qu'il est prévu de présenter en 2010, constitueront un moment crucial pour une vérification de l'ensemble de la stratégie; aussi demande-t-il à être associé à de telles évaluations périodiques et d'avoir dès lors la possibilité de donner son avis à leur propos.

7.22

Le Comité estime que l'analyse d'impact ne s'avère pas suffisamment fouillée. L'avis du Comité des évaluations d'impact recommande lui-même que certains points essentiels soient étudiés plus en profondeur, vu l'importance du dossier.

7.23

Le document SEC(2007) 1725 demande en effet que l'on éclaircisse l'impact que la proposition est susceptible de produire sur la composition de la flotte automobile européenne et les effets qu'il pourrait avoir à son tour pour le respect des objectifs, en expliquant les éventuels écarts entre les résultats produits par l'étude ex ante et le modèle Tremove (2), que l'on analyse par ailleurs plus avant la sensibilité de certaines variables, comme le prix du carburant ou l'augmentation autonome de masse (AMI), et que l'on évalue les incidences régionales, en particulier sur l'emploi et il suggère pour terminer que l'on procède à une évaluation supplémentaire, concernant l'industrie des équipementiers fournisseurs du secteur automobile, en se plaçant du point de vue de la compétitivité internationale. Le Comité endosse ces recommandations et espère que l'analyse d'impact sera approfondie et complétée.

7.24

Le Comité souligne qu'il convient de compléter les mesures prévues par un renforcement de la politique de réduction de la demande de transport, en en reportant des parts de plus en plus importantes de la route vers des modes qui produisent moins de gaz à effet de serre, comme le rail, la navigation fluviale, les transports en commun, etc.

7.25

Le Comité n'adhère pas à la proposition de dérogation temporaire prévue par l'article 9 du règlement. Telle qu'elle est rédigée, elle contrevient au principe de l'égalité de traitement de toutes les entreprises, en aboutissant dans les faits à une distorsion de concurrence sur ce segment spécifique de marché, qui présente des produits similaires, aux caractéristiques identiques. Le Comité estime en effet que la dérogation doit être accordée à tous les constructeurs, qu'ils soient ou non liés à d'autres, qui sont en concurrence sur cette portion (0,2 %) du marché.

7.26

Le Comité recommande à la Commission de fixer des objectifs de long terme, comme indiqué par le Parlement européen: à partir de 2020, il sera nécessaire de dégager des solutions plus courageuses, en se montrant particulièrement attentif à leur faisabilité. Il est indispensable de continuer à réduire les émissions, en envoyant des signaux qui ne laissent aucun doute sur la volonté de poursuivre sur cette voie.

7.27

Le Comité recommande l'élaboration d'un modèle qui internalise dans le calcul du CO2 l'ensemble des émissions qui sont en rapport avec la production des voitures. Par exemple, il faut relever que dans certains pays, un grand nombre de composants automobiles arrivent de très loin, contribuant ainsi à augmenter les émissions que produit un véhicule avant sa mise en circulation. L'empreinte carbonique à prendre en compte devrait porter sur l'intégralité de son cycle de vie, en incluant jusqu'au CO2 nécessaire pour sa démolition.

7.28

Dans plusieurs avis récents, le Comité a engagé la Commission à lancer un débat sur les styles de vie. Tout en faisant siens les objectifs proposés, il relève que si le nombre de voitures particulières, de véhicules routiers d'acheminement de marchandises et d'unités d'autres modes de transport à haute production de gaz à effet de serre et de NOx continue à connaître les mêmes pourcentages de croissance qu'aujourd'hui et que par ailleurs, les projections d'augmentation avancées par la Commission se réalisent, il sera impossible d'atteindre l'objectif d'une diminution de 20 % des rejets de CO2 qui est prévu dans les récentes propositions de la Commission.

Bruxelles, le 17 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  Avis CESE, JO C 44 du 16 février 2008 (rapporteur: M. RANOCCHIARI).

(2)  Tremove est un modèle destiné à analyser les évaluations de l'efficacité que présentent par rapport à leur coût les mesures techniques et non techniques qui visent à réduire les émissions du secteur des transports dans son ensemble et à améliorer la qualité de l'air dans vingt et un pays, à savoir l'UE des Quinze, la Suisse, la Norvège, la République tchèque, la Hongrie, la Pologne et la Slovénie, ces quatre nouveaux États membres ayant été choisis en fonction de la disponibilité des données.


31.3.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 77/8


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la sécurité des jouets»

COM(2008) 9 final — 2008/0018 COD

(2009/C 77/02)

Le 17 mars 2008, le Conseil a décidé, conformément aux dispositions de l'article 95 du traité CE, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la sécurité des jouets».

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 15 juillet 2008 (rapporteur: M. PEGADO LIZ).

Lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 18 septembre 2008), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 49 voix pour, 1 voix contre et 8 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le CESE se félicite de l'initiative de la Commission de revoir la directive «sécurité des jouets», dont on peut juste regretter qu'elle intervienne tardivement et qu'elle manque d'ambition.

1.2

Le CESE constate que l'étude d'impact sur laquelle la proposition s'appuie remonte à 2004 et n'a pas pris en compte la totalité des États membres de l'UE.

1.3

Considérant le nombre croissant d'alertes concernant des jouets révélé dans le dernier rapport RAPEX (2007), le CESE s'étonne que cette même étude d'impact n'apporte pas de conclusion, non seulement quand au rapport directive/accidents avec des jouets dont sont victimes les enfants mais également en ce qui concerne la méconnaissance admise de l'incidence de la proposition à l'examen sur le nombre et la gravité de ce type d'accident à l'avenir, ce qui devrait être la préoccupation majeure et la justification ultime de l'initiative en question.

1.4

Compte tenu de la reconnaissance par la Commission du manque ou de l'insuffisance de données statistiques fiables et crédibles concernant les accidents causés par des jouets dans l'Union européenne, le CESE suggère qu'elle crée, avec la collaboration des autorités compétentes des États membres, un système adéquat d'information statistique pour ces accidents, d'un niveau au moins similaire à celui qui existe déjà dans certains ordres juridiques, accessible à tous les intervenants dans la chaîne de production et de commercialisation, de manière à prévenir la survenue d'accidents (1).

1.5

Le CESE estime que la base juridique de la proposition devrait plutôt être l'article 153 du traité et pas exclusivement l'article 95, étant donné que le plus important est effectivement la protection des enfants, qui doit prévaloir sur la simple facilitation du commerce transfrontalier de jouets.

1.6

Le CESE considère également que, compte tenu du champ d'application et de la nature de la nouvelle législation proposée ainsi que de l'expérience acquise dans le cadre de l'application de la directive actuelle dans les différents États membres, le règlement serait un instrument plus approprié que la directive dès lors qu'on accepte une harmonisation totale.

1.7

Le CESE salue la cohérence et le caractère bien structuré, du point de vue technique et juridique, de la proposition et approuve de manière générale les mesures innovantes, en particulier en ce qui concerne:

l'extension de la définition de «jouet» l'adoption du concept d'utilisation prévisible en fonction du comportement des enfants;

le renforcement du contrôle dans les États membres;

la fixation de règles adéquates pour la prévention et l'information relative à la sécurité des jouets: avertissements et instructions.

1.8

Le CESE regrette cependant que certains aspects d'un grand intérêt et d'une grande importance n'aient pas été envisagés, ou pas suffisamment, par exemple:

a)

une option claire en faveur du principe de précaution;

b)

une plus grande rigueur dans la formation et l'éducation des personnes responsables des enfants en contact avec les jouets;

c)

la concrétisation de certains concepts qui s'avèrent trop ambigus et imprécis, tels que celui de «jouet» et de l'extension du dommage;

d)

le fait que les importateurs et les mandataires ne sont pas mis sur un pied d'égalité avec les fabricants, avec pour conséquence la déresponsabilisation des intervenants dans la chaîne de distribution et de vente des jouets pour ce qui est de la réparation des dommages causés;

e)

la non-adaptation des procédures de vérification de conformité à la nature des PME.

1.9

Le Comité invite par conséquent vivement la Commission à revoir sa proposition dans le sens préconisé dans le présent avis, de manière à en faire un instrument plus crédible de protection et de sécurité effective des enfants lorsqu'ils utilisent des jouets.

1.10

Le Comité appelle le Parlement européen et le Conseil à prendre en considération les suggestions et les recommandations formulées ici et à les reprendre à leur compte dans le processus législatif conduisant à l'adoption de la nouvelle directive.

2.   Introduction: contenu essentiel de la proposition

2.1

C'est dans les années 70 que la Commission a fait connaître, pour la première fois, son intention d'intervenir législativement dans le domaine de la sécurité des jouets, au moyen de différentes propositions, par la suite retirées en l'absence de consensus politique. Ultérieurement, suite à la résolution du Conseil du 23 juin 1986 (2) sur la protection et la sécurité des consommateurs, une nouvelle proposition de la Commission a fait état, en termes plus consensuels, de la nécessité d'une harmonisation, au niveau européen, de la définition du «jouet», de ses règles de fabrication, des principales exigences de sécurité, des conditions de sa mise sur le marché et des garanties de non-dangerosité dans son utilisation par les enfants.

2.2

La directive 88/378/CE du 3 mai 1988, publiée alors (3), fut l'une des premières initiatives législatives issues de la «nouvelle approche» dans le domaine de l'harmonisation technique et de la normalisation, fondée sur la résolution du Conseil du 7 mai 1985 (4).

2.3

Le CESE a, comme il y était tenu, émis son avis sur la proposition de directive présentée à l'époque (5), accueillant favorablement le projet, tout en regrettant les longs retards enregistrés dans son élaboration. Partant du postulat selon lequel tous les jouets doivent être fiables et que tous les enfants sont vulnérables en cas de danger et doivent bénéficier d'une protection spéciale, il soulignait déjà la nécessité d'envisager la question de la sécurité des jouets dans le contexte plus général de la directive sur la sécurité des produits (6).

2.4

La directive de 1988 a par la suite fait l'objet de plusieurs rectifications (7), d'une importante modification par la directive 93/68/CEE du 22 juillet 1993 (8) et d'une communication de la Commission relative à son application (9).

2.5

En 1992 et 2001 ont été adoptées et publiées deux directives relatives à la sécurité générale des produits qui régissent, de manière générique, la sécurité des jouets (10), la dernière directive plaçant un accent particulier sur les «changements introduits dans le traité, en particulier dans les articles 152, concernant la santé publique, et 153, concernant la protection des consommateurs, et à la lumière du principe de précaution».

2.6

Vingt ans après la publication de la directive de 1988, la Commission propose une nouvelle directive relative à ce domaine, arguant que depuis lors, la réglementation en vigueur n'est plus d'actualité, que son champ d'application et les concepts utilisés devraient être reformulés pour les rendre plus clairs et adaptés aux nouvelles réalités de fait, qu'il était primordial d'assurer la cohérence de ses dispositions avec le cadre législatif général pour la commercialisation des produits récemment proposé (11), et à titre principal, que la transposition et la mise en œuvre de la directive dans les États membres auraient donné lieu à de graves lacunes et disparités en ce qui concerne son application, auxquelles il y a lieu de remédier.

2.7

La proposition aujourd'hui à l'examen se base sur trois études techniques importantes qui doivent être considérées comme faisant partie intégrante de la proposition: deux sont relatives aux exigences et à l'utilisation de certaines substances chimiques, supposées dangereuses, utilisées dans la fabrication de jouets, la troisième consistant en une étude d'impact général dont le rapport final remonte à 2004.

2.8

Au moyen de la proposition à l'examen, la Commission entend, en synthèse, poursuivre les objectifs suivants:

A)

Améliorer les exigences en matière de sécurité, en particulier s'agissant des éléments suivants:

a)

utilisation de substances chimiques;

b)

prévention et information des consommateurs et utilisateurs;

c)

risques d'étouffement et de suffocation;

d)

combinaison de jouets et de produits alimentaires;

e)

définition de l'obligation générale de sécurité.

B)

Application plus efficace et plus cohérente de la directive, notamment au moyen:

a)

du renforcement des mesures de surveillance du marché dans les États membres;

b)

d'informations sur les substances chimiques dans le dossier technique;

c)

de l'apposition du marquage CE;

d)

d'une évaluation de la sécurité.

C)

Alignement de la directive sur le cadre général proposé de la commercialisation des produits.

D)

Clarification du champ d'application et meilleure définition des concepts utilisés.

3.   Observations générales

3.1

Le CESE se félicite de l'initiative de la Commission qui pèche par son retard, étant donné que la directive en cours de révision a plus de vingt ans et que les paramètres et les méthodes de production et de commercialisation des jouets ont connu depuis de profonds changements de même que les goûts et les habitudes de leurs destinataires naturels ont beaucoup évolué. Le CESE estime d'ailleurs que la proposition à l'examen pourrait être plus ambitieuse dans ses objectifs, en intégrant dans le corps du texte les préoccupations suscitées par de récents événements dénoncés publiquement et relayés (12) du reste avec une certaine insistance non seulement dans des discours et des prises de position de la commissaire chargée de la protection des consommateurs mais également dans la résolution du PE de septembre 2007, dont le Comité reprend la teneur à son compte. Il regrette par conséquent que la discussion avec le CESE n'ait pas été accompagnée également par la DG SANCO, laquelle n'aura pas été directement associée à son élaboration.

3.2

Le CESE ne peut manquer de s'étonner que l'étude d'impact sur laquelle se base la proposition à l'examen remonte à plus de quatre ans et qu'elle n'envisage pas la situation dans la totalité des États membres. Il ajoute qu'il n'apparaît pas clairement dans quelle mesure elle a été prise en considération ni quel a été le degré effectif de la participation et de la consultation des représentants des consommateurs et des familles lors de son élaboration.

3.3

S'agissant de la dénonciation par la Commission de failles dans l'application de la directive, le CESE trouve étonnant que celle-ci n'ait pas pris d'initiatives pour faire respecter correctement la législation communautaire mentionnée.

3.4

Le CESE voit difficilement comment il est possible, avec les carences et les déficiences reconnues en matière statistique et que la Commission admet, de tirer des conclusions adéquates, que ce soit par rapport à la réalité sur laquelle on entend intervenir ou quant à l'efficacité des mesures proposées. L'on sait néanmoins que le marché des jouets en Europe, dont le poids est estimé à 17,3 milliards d'euros, au prix de détail de 2002 et avec un volume d'importations de plus de 9 millions d'euros, est un secteur prospère partagé par plus de 2 000 entreprises, petites et moyennes pour la majorité d'entre elles, employant directement plus de 100 000 travailleurs (13).

3.5

Le CESE estime que la nature même de la proposition en cause imposerait de considérer non seulement l'article 95 comme base juridique mais nécessairement aussi l'article 153 dans la mesure où elle ne relève pas exclusivement de la réalisation du marché intérieur mais concerne une catégorie particulièrement vulnérable de consommateurs, laquelle ne saurait en aucun cas être considérée comme celle du «consommateur moyen».

3.6

D'ailleurs, le fait que les enfants soient des consommateurs indirects de jouets dès lors que ce ne sont pas eux qui les acquièrent mais leurs parents ou les adultes qui les mettent à leur disposition devrait conduire la Commission à envisager avec plus de rigueur la nécessité de mentionner expressément dans le texte l'information et l'éducation de cette catégorie de consommateurs.

3.7

Comprenant que la Commission ait opté dans le cas présent pour l'harmonisation totale, le CESE réaffirme sa ferme conviction que dans des cas comme celui qui nous occupe, on aurait eu tout à gagner à recourir à l'instrument «règlement» au lieu de celui de la «directive» en raison des avantages évidents qui en auraient découlé en termes de certitude et de sécurité juridique et parce qu'il permet d'éviter les retards et les failles dans la transposition et les disparités dans l'application, problèmes qui se sont produits avec la directive actuelle (14), comme le reconnaît la Commission.

3.8

Compte tenu de la nature de la matière en question, de l'évolution constante de «l'état de l'art», et de la possibilité d'incidents de parcours, clairement mise en évidence avec les cas Mattel et Fisher Price, de l'augmentation préoccupante du nombre d'alertes concernant des jouets, qui ressort clairement du dernier rapport annuel RAPEX (de 1007), dont ils constituent de loin le secteur faisant l'objet du plus grand nombre de notifications (31 %) (15), l'on aurait pu espérer que dans la proposition à l'examen tous les enseignements eussent été tirés de ce qui s'est produit, notamment l'échec du système de «Post Market Surveillance», pour élaborer une directive plus pratique à mettre en oeuvre et plus facile à faire appliquer, qui pourrait conduire à un marché du jouet plus sûr. Ainsi, par exemple, il aurait fallu interdire dans le doute, tout ce qui l'on peut légitimement, sans en être pour autant totalement sûr, suspecter d'être dangereux, même si le risque est réduit, s'agissant de l'utilisation de jouets par des enfants et eu égard à leurs comportements imprévisibles. Ce n'est néanmoins pas le cas.

3.9

En ce qui concerne le marquage «CE», le CESE s'en tient à rappeler et à reproduire ici la position adoptée dans un de ses avis antérieur relatif au Cadre commun pour la commercialisation des produits à savoir que le manque de crédibilité du marquage CE porte atteinte à la crédibilité du système tout entier et compromet l'adéquation même de la législation dans le cadre de la nouvelle approche (16):

En conséquence, le CESE invite instamment la Commission à rendre compatible le texte final de la proposition à l'examen avec le texte adopté pour l'ensemble des propositions relatives au Cadre commun précédemment mentionné (17).

3.10

Le CESE souscrit entièrement à la suggestion du PE de créer un label de sécurité pour les jouets, qui serait délivré par des entités tierces indépendantes et regrette que la proposition n'ait pas donné entièrement satisfaction à l'ensemble des suggestions formulées dans la résolution de septembre 2007. Le CESE n'est pas sourd aux préoccupations des PME, non pas qu'il admettrait un degré inférieur de sécurité des jouets qu'elles produisent et commercialisent mais par rapport, comme il le faisait valoir dans l'avis précité, à la proportionnalité des moyens utilisés pour la certification de conformité, en particulier pour les produits qui ne sont pas produits en série ou qui sont produits en série limitée (18).

3.11

Le CESE estime que toutes les substances reconnues comme étant potentiellement dangereuses doivent être totalement interdites dans la fabrication des jouets, selon un cadre proportionnel, équilibré et praticable pour les fabricants responsables et facile à faire appliquer pour les autorités.

3.12

Le CESE se félicite de la récente décision de la Commission relative aux «jeux magnétiques» mais ne peut manquer de déplorer que la question ne soit même pas abordée dans le cadre de la proposition de directive à l'examen, la réaction de la Commission face à la gravité du danger des accidents constatés avec ce type de jouets n'étant pas assez ferme car se limitant à un simple «appel» aux États membres à apposer, chacun à sa manière, un «avertissement».

3.13

Concernant les sanctions, le CESE est d'avis qu'une définition plus précise de leur niveau et de leur nature se justifierait, à l'instar de ce que la Commission a déjà fait dans des domaines où les effets dommageables de comportements répréhensibles sont bien moindre au plan social.

3.14

De manière générale, le CESE regrette que l'on ne saisisse pas l'occasion de placer, dans ce domaine, la protection des enfants européens sous une protection d'un niveau au moins identique à celui qui est garanti, y compris à l'initiative des fabricants eux-mêmes, dans certains États membres et dans d'autres pays, où certains types de jouets sont purement et simplement interdits, comme il ressort d'une très récente étude commandée par le PE (19).

3.15

Enfin, le CESE appelle la Commission à être sensible aux préoccupations sociales liées à la fabrication des jouets, notamment dans des pays tiers dans lesquels les enfants très jeunes travaillent à leur confection dans des conditions humainement blâmables en termes d'heures et de lieux de travail et en manipulant quotidiennement des produits toxiques et extrêmement dangereux et l'invite à clairement se positionner en faveur de la défense du jouet «écologique» et du jouet «éthique».

4.   Observations spécifiques

4.1   Article premier et annexe I — Liste de produits qui ne sont pas considérés comme des jouets

Le CESE prend acte de l'intention de la Commission de procéder à la mise à jour de la définition du «jouet», ce qui permettrait d'appliquer ce terme à tous les produits qui ne sont pas conçus exclusivement à des fins ludiques.

Le CESE souligne toutefois que la définition actuelle ne suffit pas à couvrir la portée des objectifs proposés car non seulement elle ne permet pas la mise à jour nécessaire au développement du marché technologique mais de plus elle établit une liste de produits qui n'entrent pas dans le champ d'application de la directive, dont la pertinence est contestée, notamment pour ce qui est des objets décoratifs pour les fêtes et les célébrations, des bijoux fantaisie, des jeux comprenant des projectiles à pointe acérée, et des produits conçus pour être utilisés à des fins didactiques dans des écoles ou d'autres cadres pédagogiques et équipements sportifs.

La création d'un régime spécial de protection des utilisateurs de produits est en effet fonction de la nature de l'utilisateur, notamment de sa vulnérabilité. L'utilisateur ne distingue pas la finalité de chaque objet qui lui est présenté; très souvent, les produits sont considérés comme des jouets par les enfants, les parents et les commerçants eux-mêmes qui les cataloguent et les vendent comme tels. Aussi le Comité ne comprend-il pas par exemple pourquoi les jouets utilisés à des fins didactiques dans des écoles ne sont pas inclus dans le champ d'application de la directive dès lors qu'il n'y aucune différence quant à la nature de l'utilisateur.

Le CESE insiste sur la nécessité d'inclure dans le champ de protection de la directive tous les équipements et les produits accessibles et potentiellement utilisables en tant que jouets pour des mineurs de moins de 14 ans, conformément au principe de précaution.

Le CESE invite par conséquent la Commission à revoir la définition de l'article premier ainsi que la liste présentée, en les rendant compatibles.

4.2   Article 2 à 5

Le CESE marque son total désaccord en ce qui concerne la distinction établie entre le fabricant et l'importateur, dès lors que la directive 2001/95/CE du Parlement européen et du Conseil relative à la sécurité générale des produits met sur un pied d'égalité l'importateur et le producteur, en l'absence de représentant de ce dernier dans l'État membre. Le maintien de la distinction actuelle a pour inconvénient non seulement de ne pas sauvegarder le droit à réparation des dommages causés aux utilisateurs (la responsabilité incombant exclusivement au fabricant) mais également de ne pas permettre une harmonisation des législations communautaires, ce qui aura pour effet de compromettre les principes de certitude et de sécurité juridique.

Le CESE estime par conséquent qu'aux fins de l'application de la directive à l'examen, les représentants/mandataires et les importateurs (en l'absence de représentants officiels du fabricant) doivent être considérés comme des fabricants, contrairement à ce qui est prévu dans la proposition à l'examen qui ne les met sur un pied d'égalité que lors de la mise sur le marché de jouets sous leur propre nom ou leur propre marque ou que s'ils ont apporté une modification au produit, même s'ils n'influent pas sur le processus de fabrication.

Le CESE désapprouve la distinction établie en ce qui concerne la responsabilité entre le mandataire et le fabricant. En effet, le CESE craint que le maintien de la disposition compromette la sauvegarde des droits des consommateurs, notamment celui à la réparation des dommages, dans des situations où seul le mandataire est installé dans l'État membre.

De manière générale, le CESE est favorable au maintien des principes de la directive en vigueur qui coresponsabilise tous les intervenants de la chaîne de commercialisation en matière de sécurité des jouets.

En ce qui concerne la définition du dommage, le Comité estime qu'elle doit couvrir des situations qui peuvent survenir à long terme et qui soient la conséquence directe des accidents constatés.

4.3   Article 9

Le CESE approuve la modification concernant le paragraphe 2 de cet article, selon lequel, aux fins de vérification des dangers, l'utilisation prévisible du jouet, compte tenu du comportement des enfants, sera prise en considération (bien qu'il semble que le 16e considérant permette une interprétation dans le sens contraire).

Le CESE estime toutefois que le fabricant doit prévoir d'éventuelles utilisations moins appropriées du produit, mais raisonnablement acceptables par les enfants. D'ailleurs, le maintien d'un critère de prévisibilité s'avère incongru dès lors que l'exposé des motifs lui- même souligne la nécessité de prendre en considération le comportement fréquemment imprévisible des enfants lors de la conception des jouets.

Le CESE n'approuve pas la rédaction du paragraphe 3 de cet article car la disposition actuelle établit non seulement une présomption évidente mais également des critères vagues et indéterminés, tels que la «prévisibilité» et la «normalité», ce qui exclura en fin de compte l'obligation pour le fabricant de mettre à jour ses connaissances, de se tenir au courant des expériences scientifiques et techniques dans son domaine spécifique, tant que son produit circule sur le marché, corollaire du maintien de la sécurité générale des jouets (20).

En effet, le devoir d'éviter la présence de défauts dans le produit ne prend pas fin avec la mise sur le marché de celui-ci. Le fabricant ou son représentant local, s'il en existe un, a le devoir d'assurer un suivi, d'observer et de surveiller en permanence les jouets en circulation pour pouvoir déceler des imperfections inconnues et qui ne pouvaient pas être connues au moment de leur commercialisation ou des défauts liés à la détérioration, à l'usure, ou au vieillissement prématuré du jouet.

4.4   Article 10

Le CESE se félicite de l'intention de la Commission d'exiger que les avertissements soient clairs, visibles et lisibles dans les points de vente de manière à ce que l'utilisateur puisse en avoir une connaissance effective et préalable. Il considère néanmoins que ces avertissements doivent figurer non seulement sur l'emballage mais également sur le produit lui-même.

Le Comité est d'avis néanmoins que, dans les points de vente, les avertissements apposés devront comporter des informations portant non seulement sur l'âge minimum et maximum des utilisateurs mais également une indication sur le poids approprié des mineurs pour l'utilisation de certains jouets ainsi que des indications sur la nécessité de n'utiliser le produit que sous la surveillance des personnes qui en ont la garde.

Le Comité recommande également que les avertissements soient rédigés de manière appropriée aux utilisateurs et compte tenu de leur sensibilité particulière.

Le CESE renouvelle son appel à promouvoir des actions de formation destinées aux parents et accompagnants de mineurs afin de les sensibiliser aux précautions et risques liés à l'utilisation des jouets, tout en sachant néanmoins que le fait que la sécurité des enfants relève en dernière analyse de la responsabilité des parents, tuteurs et chargés d'éducation, professeurs, surveillants, etc., ne doit pas servir de prétexte à une moindre responsabilisation par rapport à la sécurité des jouets des producteurs, importateurs et détaillants.

Compte tenu du fait que le marquage est souvent rédigé dans d'autres langues que la langue nationale, le CESE estime qu'il conviendrait de stipuler au troisième paragraphe de cet article que les avertissements et les instructions de sécurité devront obligatoirement être rédigés dans la langue officielle de l'État membre où le produit est commercialisé et qu'il ne faut pas se limiter à la simple prérogative établie dans la disposition actuelle.

4.5   Articles 12 et 26

Admettant néanmoins la nécessité de maintenir la présomption de conformité, le CESE estime que l'instauration d'un régime d'inversion de la charge de la preuve en cas d'incident dommageable serait plus conforme à «l'état de l'art».

4.6   Article 17

Le CESE souligne l'option choisie par la Commission consistant à imposer aux fabricants une analyse des dangers découlant de l'utilisation du jouet, au lieu de permettre que celle-ci ne porte que sur les risques inhérents à leur utilisation. Il estime toutefois qu'elle doit être réalisée tout au long de la vie du jouet, indépendamment de la survenue de situations dommageables, afin de prévenir l'apparition de cas tels que celui de Mattel.

4.7   Article 18

Le CESE considère que la certification de conformité devrait s'appliquer à toutes les catégories de jouets, et pas uniquement aux situations énumérées au paragraphe 3, assurant une uniformité de critères et créant un label européen de sécurité, comme proposé par le PE (21).

Compte tenu en outre du fait que nous sommes dans un domaine technique pour lequel nous manquons de connaissances concrètes spécifiques ou de statistiques sur les accidents survenus dans le cadre de l'utilisation des produits, le CESE fait valoir qu'il est nécessaire que la Commission concrétise dans la proposition à l'examen le principe de précaution, dans les mêmes termes que dans le livre blanc sur la sécurité des aliments de janvier 2000 (22).

4.8   Annexe II — Exigences de sécurité particulières

Partie I — Propriétés physiques et mécaniques

Le CESE juge approprié d'étendre le champ d'application du 3e alinéa du paragraphe 4 en portant l'âge à 60 mois car jusqu'à cet âge la possibilité existe que l'enfant utilise les jouets sans les précautions ni la prudence nécessaires, en le mettant en bouche, même si telle n'était pas l'intention du fabricant lors de la conception du produit.

Par ailleurs, le CESE est d'avis que les aspects suivants n'ont pas été abordés:

les emballages des produits, plus précisément les sacs en plastique;

la possibilité que certaines parties des jouets puissent se détacher et être ingérées par les enfants;

les propriétés des jouets en cas de rupture.

Partie III — Propriétés chimiques

Tout en se félicitant des modifications proposées quant aux propriétés chimiques, le CESE souligne la nécessité d'appliquer immédiatement le principe de précaution en ce qui concerne les propriétés chimiques dès lors que les études réalisées par l'Organisation mondiale de la santé ont démontré que l'exposition des enfants à ces produits pouvait être la cause de quelques maladies chroniques qui perdurent chez l'enfant au-delà de l'âge de 3 ans.

En conséquence, le Comité souligne la nécessité d'interdire toutes les substances CMR, y compris de catégorie 3, pour autant qu'elles aient été dûment reconnues comme étant potentiellement dangereuses, dans la conception du produit mais aussi dans les matériaux internes qui le composent, en accord d'ailleurs avec la directive relative aux produits cosmétiques. Par ailleurs, le CESE met en garde la Commission quant à la permissivité excessive qui existe, non seulement pour ce qui est des limites de migration autorisées mais également en ce qui concerne les perturbateurs endocriniens, qui peuvent gêner le développement normal de l'enfant.

En ce qui a trait à l'utilisation des substances allergisantes, le CESE recommande à la Commission d'interdire le recours à toute fragrance et tout sensibilisateur car ils peuvent contenir non seulement des substances allergisantes, qui devront être interdites de manière imminente, mais également d'autres substances qui ont des répercussions directes sur le système immunitaire de l'enfant.

Pour être réaliste en termes de faisabilité et compte tenu de la structure de l'industrie du jouet, qui se compose d'une grande majorité de PME, ainsi que des changements substantiels que la directive apporte, en particulier en matière de propriétés chimiques, le CESE souhaite recommander une période transitoire de cinq ans.

Le CESE souligne enfin la nécessité de rendre compatible la proposition actuelle et la réglementation relative à la sécurité alimentaire, notamment en ce qui concerne les matériaux utilisés dans la fabrication de jouets destinés aux enfants âgés de moins de 36 mois. Aussi, le Comité invite-t-il instamment la Commission à n'autoriser, lors de la conception de ces jouets, que les substances autorisées pour les matériaux qui sont en contact direct avec les produits alimentaires.

Partie IV — Propriétés électriques

Le CESE estime que l'annexe en question devrait contenir des dispositions spécifiques pour les produits qui requièrent l'utilisation de piles, notamment au mercure.

4.9   Annexe V — Avertissements

Le CESE est d'avis qu'il faut prévoir à l'intention des enfants souffrant de certains handicaps physiques et mentaux des avertissements spécifiques relatifs à leur situation particulière de manière à ce que les parents ou les adultes en ayant la garde puissent avoir une connaissance préalable des risques inhérents à l'utilisation du jouet.

Quant à l'association de jouets à des produits alimentaires, le CESE estime qu'elle devrait faire l'objet d'une mention spécifique apposée de manière visible et indélébile sur l'emballage du produit précisant la présence de ce jouet, ce qui permettrait de le visualiser indépendamment de la manière dont il est lui-même emballé.

Bruxelles, le 18 septembre 2008.

le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  National Electronic Injury Surveillance System (NEISS) géré par la Consumer Product Safety Commission (CPSC) aux EUA.

(2)  JO L 167 du 5.7.1986, p. 1.

(3)  JO L 187 du 16.7.1988, p. 1. Avis CESE: JO C 232 du 31.8.1987, p. 22.

(4)  JO L 136 du 4.6.1985, p. 1.

(5)  COM (1986)541 final (JO C 282 du 8.11.1986, p. 4).

(6)  Avis CES 639/87 (rapporteur: Mme WILLIAMS), JO C 232 du 31.8.1987, p. 22).

(7)  JO L 281 du 14.10.1988, p. 55; JO L 37 du 9.2.1991, p. 42.

(8)  JO L 220 du 30.8.1993, p. 1. Avis CESE: JO C 14 du 20.1.1992, p. 15 et JO C 129 du 10.5.1993, p. 3.

(9)  JO C 297 du 9.12.2003, p. 18.

(10)  Directive 92/59/CEE du 29 juin 1992 (JO L 228 du 11.8.1992, p. 24 — Avis CESE: JO C 75 du 26.3.1990, p. 1) et directive 2001/95/CE du 3 décembre 2001 (JO L 11 du 15.1.2002, p. 4); le CESE a adopté sur la proposition à la base de cette directive, COM(2000) 139 final, l'avis CES 1008/2000 du 20 septembre 2000 (rapporteuse: Mme WILLIAMS; JO C 367 du 20.12.2000, p. 34). Antérieurement, le 8 décembre 1999, Mme WILLIAMS avait également fait adopter par le CES un avis d'initiative sur le même sujet (CES 1131/1999 — JO C 51 du 23.2.2000, p. 67).

(11)  Paquet de propositions COM(2007) 36, 37, et 53 final du 14.2.2007, ayant fait l'objet de l'avis INT/352/353/354 du CESE (CESE 1693/2007, du 13.12.2007, rapporteur: M. PEZZINI).

(12)  Voir pour tous le discours de Mme KUNEVA, du 12 septembre 2007, au PE et ses interventions lors de réunions avec le vice-président de Mattel International le 20 septembre 2007 et avec une délégation de fabricants de jouets, dont Hornby, Lego et Mattel, le 9 avril 2008 ainsi que la conférence de presse du 22 novembre 2007. Voir également la résolution du PE. Doc. P6-TA (2007) 0412 du 26 septembre 2007.

(13)  Données provenant du site de la Commission.

(14)  Directive 88/378 CEE du Conseil du 3 mai 1988 (JO L 187 du 16.7.1988, p. 1). Il importe de noter que, contrairement à la proposition relative aux produits cosmétiques (COM(2008) 49 final du 14.4.2008), la Commission a voulu à juste titre remplacer l'instrument «directive» par l'instrument «règlement». Il faut ajouter que la modification apportée au protocole relatif à la subsidiarité dans le traité réformateur, consistant à ne plus accorder la «préférence» à la directive, serait un argument de plus en faveur de cette solution à l'avenir.

(15)  Selon ce rapport, au cours du seul été 2007 plus de 18 millions de jouets ont été retirés du marché car ils contenaient des aimants et près de 2 millions à cause du plomb présent dans leur peinture.

(16)  Avis CESE 1693/2007, du 13 décembre 2007 (rapporteur: M. PEZZINI) (INT 352/353/354), paragraphe 5.2.12, où il est ajouté à juste titre que:

«La meilleure façon de renforcer le statut et la portée du marquage “CE”, comme indiqué dans la décision du Conseil 93/465 serait de revoir radicalement ce marquage, via les mesures suivantes:

expliquer qu'il ne doit pas être utilisé et considéré comme un système de marquage ou d'étiquetage destiné au consommateur ni comme une garantie de qualité, de certification ou d'approbation par des tiers indépendants, mais seulement comme une déclaration de conformité et de documentation technique que le fabricant ou l'importateur sont tenus de produire sous leur entière responsabilité, et conformément aux exigences du produit, vis-à-vis des autorités et du consommateur;

rationaliser les différentes procédures d'évaluation de la conformité;

renforcer la protection juridique du marquage “CE” en l'enregistrant en tant que marquage collectif permettant aux autorités publiques d'intervenir rapidement et de réprimer les abus, mais conserver la possibilité de marquages nationaux additionnels;

renforcer les mécanismes de surveillance du marché et les contrôles douaniers aux frontières;

inciter les producteurs et les consommateurs à lancer une étude en vue d'examiner les aspects positifs et négatifs d'un éventuel code de conduite volontaire concernant l'efficacité de la prolifération de marquages de qualité et de labels européens et nationaux — volontaires ou non — et leurs relations avec le marquage “CE”.»

(17)  COM(2007) 36, 37 et 53 final, du 14.2.2007.

(18)  Avis cité dans la note en bas de page 16, paragraphes 5.2.7.1 et 5.2.9. Voir également les avis du CESE relatifs aux mesures politiques en faveur des PME (INT/390) (rapporteur: M. CAPPELLINI) et aux produits cosmétiques (INT/424) (rapporteur: M. KRAWCZYK).

(19)  «Study on Safety and Liability Issues Relating to Toys» (PE 393.523), de AA Frank Alleweldt — Project Director; Anna Fielder — Lead Author; Geraint Howells — Legal Analist; Senda Kara, Kristen Schubert e Stephen Locke.

(20)  Voir à cet égard l'arrêt prononcé le 29 mai 1997 par la Cour de Justice de l'Union européenne (Affaire C-300/95 recueil de jurisprudence 1997 p. I-02649).

(21)  Résolution du PE du 19.9.2007 sur les jouets dangereux (Doc. P6-TA(2007) 0412 du 26.9.2007).

(22)  COM(1999) 719 final du 12.1.2000.


31.3.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 77/15


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions “Un marché unique pour l'Europe du 21e siècle”»

COM(2007) 724 final

(2009/C 77/03)

Le 20 novembre 2007, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions «Un marché unique pour l'Europe du 21e siècle».

La section spécialisée «Marché unique, production, consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 15 juillet 2008 (rapporteur: M. CASSIDY; corapporteurs: MM. HENCKS et CAPPELLINI).

Lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 18 septembre 2008), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 51 voix pour, 2 voix contre et 4 abstentions.

1.   Résumé — conclusions et recommandations

1.1

Le CESE souligne l'importance de la stratégie de Lisbonne en tant qu'elle contribue à préserver les avantages du marché unique et à garantir son développement et son renforcement.

1.2

Un marché unique bien rodé, compétitif et favorable aux innovations est essentiel pour que l'Europe puisse tirer le meilleur profit possible de la mondialisation tout en préservant ses niveaux de protection sociale. Le CESE est préoccupé dans ce contexte par les récents arrêts de la Cour de Justice européenne concernant le détachement des travailleurs dont il est en train d'analyser les répercussions pour l'acquis communautaire en matière de politique sociale (1).

1.3

Afin de développer le marché unique, le CESE insiste sur l'importance qu'il y a à promouvoir et à mettre à profit les fruits de la recherche et de l'innovation scientifiques, à aider les fournisseurs nationaux de technologies à promouvoir, au niveau européen, les produits et les technologies innovants et à encourager la diffusion et l'exploitation transnationale des résultats de la recherche. Le marché unique est un instrument fondamental pour la réalisation des objectifs de l'agenda de Lisbonne. Son objectif est de profiter aux consommateurs, à la croissance économique et à l'emploi en supprimant progressivement les obstacles à la libre circulation des personnes, des biens, des services et des capitaux, bien que nombre d'entre eux persistent. Les bénéfices d'une intégration plus étroite sont indéniables.

1.4

Le paquet de mesures proposé par la Commission européenne dans le cadre du réexamen du marché unique constitue une bonne base pour relancer ce dernier, mais son succès dépendra dans une large mesure de la capacité et de la volonté des gouvernements nationaux et de leurs partenaires sociaux de prendre leurs responsabilités et de fournir les moyens qui permettront de transformer cette théorie en pratique.

1.5

Une application correcte et uniforme de la législation et des normes en vigueur représente un des principaux défis. Pour cela, des analyses d'impact, la réduction des charges administratives et des coûts liés aux respects de la législation découlant de la fragmentation fiscale du marché intérieur et une meilleure consultation des partenaires sociaux et des acteurs concernés, notamment des PME, sont primordiales à la fois pour améliorer la compréhension des objectifs de la réglementation et pour mettre en évidence des solutions non réglementaires.

1.6

Les petites et moyennes entreprises apportent une contribution vitale au fonctionnement effectif du marché unique. Quelle que soit leur forme, les PME jouent un rôle particulièrement important dans le secteur des services et sont au cœur des compromis sociaux sur lesquels repose l'économie de l'UE. Le «Small Business Act» et la charte des PME reconnaissent l'importance de ces dernières dans les processus de décision politique et pour les institutions, que ce soit au niveau de l'UE ou des États membres. Le CESE estime néanmoins qu'il convient d'accorder une plus grande attention au rôle des PME lors de la mise en œuvre des politiques, plus précisément pour ce qui est de leur contribution à la réalisation d'objectifs économiques, environnementaux et sociaux.

1.7

Le CESE souligne que le Fonds européen d'ajustement à la mondialisation est un instrument de solidarité essentiel qui permettra de disposer de moyens expressément destinés à aider les travailleurs victimes de licenciements dus aux mutations des courants du commerce mondial à retrouver un emploi. S'il est vrai que l'on doit se réjouir du fait que ce dispositif s'applique aux salariés des PME, le Comité regrette, en revanche, que les travailleurs indépendants, qui sont vulnérables aux effets des mêmes mutations, ne puissent en bénéficier.

1.8

Le CESE appelle la Commission européenne et les États membres à consacrer des ressources suffisantes à une meilleure mise en œuvre des règles du marché unique. Des initiatives devraient en outre être développées afin d'instaurer des synergies entre la politique ayant trait au marché unique, la politique de la concurrence, et les politiques sociale et environnementale, qui sont essentielles au bon fonctionnement du marché unique.

1.9

La Commission et les États membres doivent s'assurer que les nouvelles initiatives réglementaires, appelées à contribuer au bon fonctionnement du marché unique, tiennent compte aussi bien de l'impact sur la compétitivité des entreprises européennes que des conséquences sociales et environnementales. Afin de garantir cohérence et sécurité juridique aux entreprises comme aux consommateurs, et d'éviter que de nouvelles initiatives ne se contredisent les unes les autres, les nouvelles propositions, qu'elles soient d'origine communautaire ou nationale, devraient subir un «test de compatibilité avec le marché unique» (2) et être évaluées quant à leur impact social.

1.10

Il convient d'offrir aux citoyens et aux entreprises un accès facile et abordable à la justice, notamment grâce à des voies de recours appropriées et à des mécanismes adéquats de règlement des litiges. À cet égard, il y a lieu d'améliorer la mise au point d'instruments de résolution extrajudiciaire des litiges.

1.11

Le CESE ne peut qu'approuver l'objectif de la Communication du 20 novembre 2007 portant sur les SIG visant à «consolider le cadre de l'UE applicable aux services d'intérêt général, y compris les services sociaux et de santé, en proposant des solutions concrètes aux problèmes concrets existants» et en combinant «actions sectorielles et actions portant sur des questions précises».

1.12

Le droit primaire ou les traités communautaires reconnaissant que les SIEG font globalement partie des «valeurs communes» de l'UE et contribuent à sa «cohésion sociale et territoriale», il est indispensable de conjuguer démarches sectorielles (prenant en compte les spécificités de chaque secteur) et problématique transversale.

1.13

En inscrivant dans le droit primaire la distinction entre services économiques et non économiques, tout comme la nécessité de faire respecter des principes communs de fonctionnement des SIEG, le Protocole SIG démontre combien un exercice de clarification des concepts et des régimes en jeu est plus que jamais nécessaire afin de ne plus être tributaires d'une approche exclusive au cas par cas, législative ou contentieuse.

1.14

Malgré une demande réitérée du Parlement européen qui réclame une réelle sécurité juridique pour les services sociaux d'intérêt général, les propositions retenues dans la Communication SIG se limitent à une série de réponses aux «questions fréquemment posées», certes utiles, mais sans valeur juridique contraignante.

1.15

Dès lors, le CESE propose une approche plurielle et progressive, combinant les dimensions sectorielle et thématique, qui conduirait à l'adoption d'initiatives législatives lorsqu'elles sont nécessaires et/ou à adapter ces principes et conditions aux différents secteurs concernés (approche horizontale à vocation sectorielle).

2.   Les principaux éléments des communications de la Commission

2.1

Le paquet de la Commission à l'examen propose un ensemble d'initiatives que sous-tendent cinq documents de travail et deux communications portent sur les services d'intérêt général et la dimension sociale du marché unique (3).

2.2

Au cours des années précédentes, le CESE a consacré des avis à l'ensemble de ces questions (4). Il a récemment adopté un avis d'initiative sur la dimension externe du marché unique et en prépare un autre sur ses dimensions sociale et environnementale (5).

3.   Observations générales — une application plus rigoureuse

3.1

Le Comité se félicite que le document COM(2007) 724 final insiste sur la nécessité de donner aux consommateurs et aux PME la possibilité de bénéficier des possibilités offertes par le marché unique et d'obtenir des réponses plus adéquates à leurs attentes et préoccupations. Il est donc satisfaisant de constater que la politique relative au marché unique accorde une attention particulière aux domaines liés au consommateur tels que l'énergie, les télécommunications, les services financiers de détail ou encore le commerce de gros et de détail.

3.2

Le succès de la future politique du marché unique dépend de l'aptitude des États membres et de la Commission européenne à améliorer son fonctionnement. Le marché est un «chantier en cours» et relève d'une responsabilité partagée. Les États membres doivent davantage se l'approprier. Souvent, les autorités nationales ne parviennent pas à s'acquitter de leur rôle relatif à la gestion du marché unique, ce qui engendre de nouveaux obstacles remettant en cause la confiance que devrait inspirer ce dernier. Il convient de reconnaître davantage le rôle important que jouent les partenaires sociaux lorsqu'il s'agit de soutenir le marché unique.

3.2.1

La Commission entend mettre davantage l'accent sur une application correcte du droit. Il y a lieu de créer des instruments qui garantiront un meilleur fonctionnement effectif de la législation. Afin d'en faciliter l'application, il est primordial que le droit communautaire soit transposé à temps et correctement et que les pratiques administratives soient simplifiées. Une transposition correcte de la directive sur les services est particulièrement importante pour que puissent être atteints ses objectifs en matière de création d'emplois et de croissance.

3.3

La résolution simple et rapide des problèmes que rencontrent les citoyens et les entreprises dans le cadre du marché unique devrait demeurer prioritaire. Le réseau SOLVIT est un instrument particulièrement utile mais, malheureusement, trop peu utilisé en raison d'une méconnaissance de son fonctionnement et de sa pertinence et d'un manque de ressources, notamment au niveau national. Il est fortement recommandé de privilégier toute initiative permettant de remédier à cette situation, notamment en allouant des ressources humaines et financières suffisantes aux centres SOLVIT et en élargissant leur champ d'action.

3.4

Le CESE approuve l'intention de la Commission européenne de simplifier et d'accélérer les procédures d'infraction en donnant la priorité aux cas d'infraction qui représentent le plus de risques et revêtent une importance économique, sans pour autant compromettre l'efficacité des mesures dissuasives existantes.

3.5

Il reste beaucoup à faire au niveau de la surveillance des marchés de produits fabriqués dans le pays ou importés. Cela relève à la fois de la responsabilité des autorités nationales et de celle la Commission européenne.

3.6

Le CESE souhaiterait que la Commission insiste davantage sur l'aide aux PME en orientant la politique qui les concerne vers les objectifs sociaux et environnementaux de l'UE et qu'elle abolisse enfin l'ensemble des obstacles nationaux non tarifaires, notamment ceux qui entravent la libre circulation des capitaux et des travailleurs (6).

3.7

D'une manière plus générale, il demeure primordial que la Commission continue à jouer un rôle de premier plan en tant que gardienne des traités et qu'elle exerce son droit d'initiative afin de garantir le bon fonctionnement du marché unique.

3.8

Le CESE confirme qu'il importe de déployer des efforts permanents afin de réduire encore davantage les coûts résultant de la fragmentation fiscale du marché unique, et ce en privilégiant l'adoption de réglementations communautaires qui favoriseront le développement d'activités transfrontalières et assureront la consolidation du marché unique

4.   Mieux légiférer

4.1

Le CESE se félicite de l'objectif qui consiste à rendre l'élaboration des politiques plus inclusive et du souhait d'impliquer davantage les acteurs concernés. Il est primordial que des études d'impact soient réalisées de manière systématique.

4.2

Lors de la préparation d'une étude d'impact, les acteurs concernés représentatifs doivent impérativement être consultés. Les évaluations devraient être contrôlées par un organisme externe composé d'experts qui inclurait également des groupes d'utilisateurs finaux de la législation.

4.3

Il convient en outre de garantir l'allégement des contraintes administratives pesant sur les entreprises sans pour autant compromettre les résultats obtenus dans le domaine social.

4.4

Dans l'intérêt de la cohérence et de la sécurité juridique pour les entreprises et les consommateurs et afin d'éviter que de nouvelles initiatives ne génèrent de nouveaux obstacles, un «test de compatibilité avec le marché unique» assorti d'une évaluation des conséquences sociales et environnementales (7) devrait être instauré à l'aune duquel seraient évaluées les nouvelles propositions, tant communautaires que nationales. Certaines lois opaques qui font souvent l'objet d'applications et d'interprétations divergentes engendrent des contradictions dans le droit communautaire.

4.5

Il est absolument crucial d'améliorer l'information et les données disponibles concernant la mise en œuvre concrète des règles du marché unique. La Commission devrait être davantage disposée à dévoiler des informations sur les États membres qui ne satisfont pas à leurs obligations et à faciliter la tâche aux partenaires sociaux nationaux en rendant les rapports nationaux plus cohérents et plus transparents.

5.   La dimension extérieure du marché unique (8)

5.1

Le CESE estime à l'instar de la Commission que la mondialisation représente une formidable source de dynamisme et de compétitivité et que le marché unique constitue un atout qui devrait servir de tremplin afin de répondre aux défis de la mondialisation.

5.2

La libéralisation des échanges commerciaux est considérée, à juste titre, comme le premier pilier de la stratégie déployée par l'UE dans ce domaine. Le succès de l'UE dépendra d'une conclusion ambitieuse du cycle de Doha et de l'achèvement des négociations portant sur un vaste accord de libre échange lancées dans le cadre de la communication intitulée «Une Europe compétitive dans une économie mondialisée».

5.3

Les questions relatives à la réglementation et aux normes déterminent de plus en plus la capacité des entreprises à opérer à l'échelle internationale. Des organisations européennes de normalisation telles que CEN, CENELEC et ETSI devraient, en coopération avec des organismes consultatifs tels que NORMAPME (9), veiller à ce que ces normes soient accessibles à l'ensemble des entreprises, notamment aux petites, et ce dans l'ensemble de l'UE ainsi que dans les pays en développement.

5.4

La Commission a raison d'insister sur la nécessité de parvenir, au niveau international, à une meilleure coopération réglementaire, à l'équivalence et à la convergence des normes. À long terme, l'objectif devrait être l'applicabilité générale d'une norme ayant subi un examen unique.

5.5

La législation communautaire doit préserver la compétitivité. Si l'on impose des charges excessives aux entreprises européennes, cela ne sera pas compensé par la reconnaissance internationale des normes en vigueur dans l'UE. La coopération réglementaire avec les pays partenaires ne saurait être couronnée de succès sans un esprit d'ouverture et d'innovation vis-à-vis des autres approches.

5.6

Le CESE se réjouit de l'engagement à comparer la réglementation communautaire avec les meilleures pratiques internationales, notamment celles des principaux partenaires commerciaux de l'UE. Une telle comparaison devrait être intégrée dans toutes les études d'impact européennes et l'UE devrait s'ouvrir à la coopération réglementaire avec ses grands partenaires commerciaux. Elle devrait accepter de soumettre les normes officiellement reconnues au niveau international à l'évaluation de conformité.

5.7

Il convient d'encourager les initiatives communautaires visant à conquérir une place de leader mondial pour l'édiction de règles et le développement de normes de grande qualité reposant sur des données scientifiques et régissant les produits industriels et alimentaires. Les normes communes devraient être assorties d'objectifs réglementaires communs. Le Comité recommande donc de privilégier les accords et les réseaux bilatéraux avec les autorités de réglementation internationales.

5.8

L'UE devrait continuer à soutenir la liberté des échanges tout en garantissant une surveillance du marché suffisante afin de prévenir l'importation de produits qui ne répondent pas aux normes de sécurité. Il incomberait cependant à la Commission de s'assurer que ces mesures, de même que les systèmes de normes privées qui voient le jour depuis peu, ne sont pas détournées pour être employées à des fins protectionnistes (10).

6.   La dimension sociale du marché unique

6.1

Le Comité partage l'avis selon lequel une dimension sociale contribuera à améliorer le fonctionnement du marché unique, dans le sens de la stratégie pour la croissance et l'emploi et grâce à l'importance qu'elle accorde à la bonne santé économique des PME.

6.2

Puisque le fait de s'intégrer sur le marché de l'emploi constitue la meilleure sauvegarde contre l'exclusion sociale, une utilisation optimale du potentiel de main-d'œuvre européenne dans des sociétés qui évoluent rapidement doit être au cœur du plan de la Commission intitulé «Opportunités, accès, solidarité». La Commission doit travailler de concert avec les partenaires sociaux afin de s'assurer que cela s'applique tout particulièrement aux groupes vulnérables, aux migrants et aux minorités.

6.3

Afin de relever les défis de la mondialisation que sont les innovations technologiques ou l'évolution des réalités sociales et environnementales, les efforts politiques doivent tendre à atteindre les objectifs sociaux en augmentant le taux d'emploi et à instaurer un cadre favorable à une forte croissance de la productivité.

6.4

Le CESE a souligné dans un avis (11) l'importance d'intégrer la notion de «flexicurité» (12) dans l'ensemble des politiques communautaires. Les PME, et tout particulièrement les travailleurs indépendants, sont d'une importance essentielle pour le fonctionnement efficace de marchés flexibles du travail. Il est nécessaire, à cet égard, de mieux comprendre le rôle des PME par rapport à la mise en œuvre d'une politique sociale.

7.   Un marché unique tourné vers l'innovation

7.1

Afin de développer le marché unique, le CESE insiste sur l'importance qu'il y a à promouvoir et à mettre à profit les fruits de la recherche et de l'innovation scientifiques, à aider les fournisseurs nationaux de technologies à promouvoir, au niveau européen, les produits et les technologies innovants et à encourager la diffusion et l'exploitation transnationale des résultats de la recherche. La capacité à innover de l'Europe peut être déterminée dans une large mesure par la qualité du marché unique. Il convient de coordonner, au niveau européen, les efforts en matière de recherche et de développement fournis par les «grappes» de PME, les grandes entreprises, les instituts de recherche, les universités et le nouvel Institut européen d'innovation et de technologie.

7.2

Il est crucial pour la capacité d'innovation de l'Europe que l'on progresse vers un système de brevet européen plus compétitif en termes de coût et de sécurité juridique. Il convient notamment de progresser dans la mise en place, d'une part, d'un système juridictionnel commun, pour toute l'Europe, en matière de brevets, qui devrait garantir la meilleure qualité, rentabilité et fiabilité à l'ensemble des entreprises, et d'autre part, d'un brevet communautaire qui répondrait également à ces critères et qui serait tout particulièrement dans l'intérêt des PME. Il y a également lieu de développer une protection stricte des droits de propriété intellectuelle et des mesures efficaces aux niveaux européen et international afin de lutter contre la progression du fléau que constituent la contrefaçon et le piratage.

7.3

L'innovation se rapportant à la gestion de la politique sociale devrait toucher l'ensemble des organisations de l'économie sociale (telles que les coopératives) qui peuvent rapprocher la prestation de services et les communautés d'utilisateurs, à condition qu'existe une surveillance réglementaire appropriée.

7.4

La nouvelle politique du marché unique doit jouer un rôle central dans la création d'une économie mondiale durable sur le plan de l'environnement.

8.   La politique de protection des consommateurs

8.1

Le bon fonctionnement du marché unique passe par une politique des consommateurs équilibrée. Le CESE estime que les consommateurs sont au cœur de la nouvelle vision qu'a la Commission européenne d'un marché unique véritablement inclusif. Il convient d'accorder une attention accrue aux expériences vécues par les consommateurs sur le marché, par exemple en procédant à des évaluations d'impact ou en intégrant les intérêts des consommateurs dans l'agenda de Lisbonne.

8.2

Il convient de mettre l'accent sur un seul marché unique profitant à la fois aux uns et aux autres et sur le rôle que peut jouer le secteur des services dans l'économie en renforçant la qualité des prestations et la confiance des consommateurs. Ces derniers devraient être en mesure d'accéder efficacement aux biens et aux services offerts dans l'ensemble de l'UE et les entreprises devraient pouvoir les proposer partout en Europe aussi facilement qu'elles le font sur leur marché national. Associée au principe de reconnaissance mutuelle, l'harmonisation fournit la base requise pour le développement de cette situation «gagnant-gagnant» (13).

9.   Communication sur «Les services d'intérêt général, y compris les services sociaux d'intérêt général: un nouvel engagement européen» (14)

9.1

Le CESE s'est préoccupé dans plusieurs avis (15) de l'insécurité juridique qui touche les SIG.

9.2

La communication souligne le rôle du Protocole particulier sur les services d'intérêt général annexé au traité de Lisbonne (Protocole SIG) appelé, selon elle, à livrer un cadre cohérent qui guidera l'action de l'UE tout en offrant une base solide pour la définition des services d'intérêt général (16).

9.3

En revanche, la communication sur les SIG ne fait que mentionner le nouvel article 16 du traité de Lisbonne, sans en développer les conséquences, alors que celui-ci introduit une nouvelle base juridique pour les services d'intérêt économique général (SIEG) en confiant au Conseil et au Parlement européen le soin d'établir, par voie de règlements, conformément à la procédure législative ordinaire, les principes et les conditions, notamment économiques et financières, qui leur permettent d'accomplir leurs missions.

9.4

La mise en œuvre effective du principe de primauté du bon accomplissement des missions des SIEG, désormais rendue possible par le nouvel article 16 du traité de Lisbonne, permettra d'avoir moins souvent recours à l'arbitrage de la Cour de justice.

9.5

Le traité de Lisbonne comporte plusieurs innovations, notamment le nouvel article 16 évoqué plus haut et une référence globale aux SIG et aux services non économiques d'intérêt général (SNEIG). Il contribue à repositionner la question des services d'intérêt général dans le champ de l'action communautaire selon le principe de subsidiarité.

9.6

Pour le CESE, le nouveau traité de Lisbonne (article 16 TFUE et Protocole SIG) n'est donc que l'amorce d'une nouvelle démarche pour une plus grande sécurité juridique et une réglementation plus cohérente des régimes nationaux et communautaire des SIG.

9.7

Le Protocole SIG constitue un mode d'emploi des règles concernant les SIG, tant économiques (SIEG) que non économiques (SNEIG), sans pour autant résoudre la difficulté consistant à distinguer entre ces deux catégories.

9.8

En inscrivant dans le droit primaire la distinction entre services économiques et non économiques, tout comme la nécessité de faire respecter des principes communs de fonctionnement des SIEG, le Protocole SIG démontre combien un exercice de clarification des concepts et des régimes en jeu est plus que jamais nécessaire pour offrir la sécurité juridique tant aux entreprises et organismes en charge de la gestion de ces services qu'à leurs principaux bénéficiaires.

9.9

La Communication SIG propose de «consolider le cadre de l'UE applicable aux services d'intérêt général, y compris aux services sociaux et de santé, en proposant des solutions concrètes aux problèmes concrets existants» et en combinant «actions sectorielles et actions portant sur des questions précises».

9.10

La démarche devra évidemment prendre en compte les spécificités de chacun des secteurs concernés. Mais le droit primaire ayant reconnu que les SIEG font globalement partie des «valeurs communes» de l'UE et contribuent à sa «cohésion sociale et territoriale», il est indispensable de conjuguer démarches sectorielles (prenant en compte les spécificités de chaque secteur) et problématique transversale.

9.11

Dès lors, le CESE propose une approche plurielle et progressive, combinant les dimensions sectorielle et thématique, qui conduirait à l'adoption d'initiatives législatives lorsqu'elles sont nécessaires et/ou à adapter ces principes et conditions aux différents secteurs concernés (approche horizontale à vocation sectorielle).

10.   La situation particulière des Services sociaux d'intérêt général

10.1

Le CESE souligne l'importance de la stratégie de Lisbonne en tant qu'elle contribue à préserver les avantages du marché unique et à garantir son développement et son renforcement.

10.2

La Commission a introduit la notion de services sociaux d'intérêt général (SSIG) dans son livre blanc sur les SIG et l'a déclinée dans deux communications (17) ainsi que dans un «document de travail interne» (18).

10.3

La communication ne propose pas de définition de ces SSIG. Elle préfère distinguer entre deux grands groupes de SSIG: d'une part, les régimes légaux et les régimes complémentaires de protection sociale; et, d'autre part, «les autres services essentiels prestés directement à la personne».

10.4

La prudence de la Commission démontre combien il est difficile d'appréhender les SSIG tant ils correspondent à des missions spécifiques et très variées, profondément ancrées dans les préférences collectives nationales, voire locales.

10.5

Lors de la consultation sur le livre vert de 2003, les acteurs du secteur des SSIG (autorités publiques locales, opérateurs, représentants des utilisateurs) ont très largement souligné qu'ils ressentaient une insécurité juridique croissante quant aux normes juridiques communautaires dont ils relèvent, au vu de leurs spécificités, en particulier en matière de mandatement. Ils ont souligné qu'ils faisaient partie d'une «zone grise» préjudiciable à l'accomplissement de leurs missions. Cela a amené à la fois:

la Commission à engager un processus de réflexion spécifique (communication, études, etc.),

le législateur à les exclure en grande partie du champ d'application de la directive sur les services (19),

le Parlement européen à réclamer à deux reprises davantage de sécurité juridique (20).

10.6

Pour autant, la Commission ne retient pas cette piste en contradiction évidente avec la démarche sectorielle qu'elle privilégie, et compte limiter ses propositions à une série de réponses aux «questions fréquemment posées» et à un service d'information interactif qui sera certainement utile, mais n'aura aucune valeur juridique contraignante.

10.7

Pour répondre aux demandes de sécurité juridique, notamment dans le cadre de l'application de l'article 16 TFUE, article qui ouvre de nouvelles perspectives concernant la place et le rôle des SIEG, y compris les SSIG, dans l'Union européenne, l'exercice de clarification des concepts et des régimes communautaires applicables aux activités de service public doit être poursuivi.

11.   Communication intitulée «Opportunités, accès et solidarité: vers une nouvelle vision sociale pour l'Europe du 21e siècle»

11.1

Le Comité accueille favorablement les objectifs définis dans la communication intitulée «Opportunités, accès et solidarité: vers une nouvelle vision sociale pour l'Europe du 21e siècle» (21), qui évoque les citoyens de l'UE, la société civile ainsi que les entreprises, y compris les PME, et qui repose sur des instruments communautaires majeurs tels que le marché unique, la stratégie de Lisbonne pour la croissance et l'emploi ou encore la stratégie de développement durable.

11.2

Les mutations actuelles que connaissent les sociétés européennes (avec ses vingt-sept États membres, l'UE compte désormais 500 millions d'habitants et fait notamment face aux changements démographiques, à la mondialisation, aux innovations technologiques ainsi qu'au développement économique) peuvent ouvrir des opportunités inédites en matière d'emploi et de compétences, mais l'adaptation à cette nouvelle donne comporte toujours un risque en termes de chômage et d'exclusion.

11.3

Le CESE est favorable à ce que l'UE s'efforce davantage de faciliter, d'anticiper et d'encourager de tels changements structurels tout en s'attachant à promouvoir les valeurs européennes sur la scène internationale. La communication esquisse une nouvelle vision pour l'Europe du 21e siècle favorisant les «chances de réussite» et tente de parachever la consultation qui a pris fin le 15 février 2008. Le débat sur les changements sociaux et sur le concept de réalité sociale européenne a, entre autres, recueilli la participation du Bureau des conseillers de politique européenne (BEPA), des États membres et des institutions de l'UE. Le CESE se félicite de l'objectif visant à s'assurer que les conclusions finales de ces discussions contribueront à la préparation du programme social renouvelé qui doit être présenté en 2008 et prendront en compte le nouveau cadre institutionnel instauré par le traité de Lisbonne.

11.4   Hypothèses et observations générales

11.4.1   Mutation des réalités sociales

Tous les États membres connaissent des changements rapides et profonds et les citoyens européens font part de leur inquiétude et de leurs préoccupations pour la génération future (voir également les précédents avis et initiatives du CESE, le document du BEPA qui présente un aperçu détaillé des tendances sociales actuelles ainsi que le rapport sur la situation sociale publié par la Commission européenne en 2007).

11.4.2   Une vision sociale pour l'Europe favorisant les «chances de réussite»: promouvoir le bien-être en développant les opportunités, l'accès et la solidarité

Opportunités — de bien démarrer dans la vie, de réaliser son propre potentiel et d'exploiter au mieux les perspectives ouvertes par une Europe novatrice, ouverte et moderne;

Accès — proposer des méthodes nouvelles et plus efficaces pour accéder à l'éducation, progresser sur le marché de l'emploi, obtenir des soins de santé et une protection sociale de qualité et participer à la vie culturelle et sociale;

Solidarité — promouvoir la cohésion sociale et la viabilité du modèle social, et veiller à ce que personne ne soit exclu.

11.4.2.1

À l'instar de la Commission, le CESE estime qu'il n'existe pas d'approche unique valable pour toute l'Europe et que les défis communs doivent être relevés grâce à une action conjointe étayée par une citoyenneté active.

11.4.2.2

La lutte contre l'exclusion sociale et l'amélioration du niveau de vie grâce à la création de nouvelles opportunités pour les individus sont essentielles pour maintenir la croissance économique et pour réduire les risques de lacunes du système de protection sociale. La confiance est primordiale pour le progrès, la modernisation et l'ouverture au changement.

11.4.3   Les principaux domaines d'action

Afin d'atteindre les objectifs en matière d'opportunités, d'accès et de solidarité, l'UE doit investir dans:

1)

la jeunesse: en raison des nouvelles mutations sociales et de la nouvelle économie fondée sur l'innovation et la technologie, une plus grande attention doit être accordée à l'éducation et aux compétences; les investissements consacrés à la jeunesse ont un impact positif tant sur le développement économique que sur la cohésion sociale. L'agenda de Lisbonne a placé l'éducation au cœur du système social et économique européen en définissant la connaissance comme un facteur de compétitivité de l'UE au niveau mondial;

2)

des carrières épanouissantes: une économie et un marché de l'emploi dynamiques nécessitent que les règles régissant ce dernier soient souples et qu'elles s'accompagnent de normes sociales élevées (voir la «flexicurité»);

3)

la longévité et la santé: l'allongement de l'espérance de vie pèse sur les systèmes de protection sociale, mais crée, dans le même temps, des opportunités économiques inédites en termes de nouveaux services, de nouvelles marchandises et technologies. L'Europe devrait encourager les futures politiques sociales à tirer profit de ces occasions et de remédier aux faiblesses des systèmes de protection actuels;

4)

l'égalité entre les hommes et les femmes: les nouveaux modèles économiques impliquent le renouvellement des schémas sociaux. Les politiques de l'emploi devraient, par exemple, s'adapter aux nouvelles exigences ayant trait à l'égalité entre les hommes et les femmes. Certaines propositions de la Commission traitent des écarts de rémunération, du régime fiscal et de pratiques favorables aux familles développées sur le lieu de travail;

5)

l'inclusion active et la non-discrimination: les récents élargissements ont montré qu'il existe de profondes disparités économiques et sociales entre États membres et entre régions. La Commission européenne souhaite promouvoir une nouvelle politique de cohésion qui repose sur l'acceptation de la diversité, l'inclusion active, la promotion de l'égalité et l'élimination des discriminations;

6)

la mobilité et une intégration réussie: le marché unique a accru la mobilité des citoyens, ce qui a également eu un impact sur les PME. Il convient, de ce fait, d'adopter de nouvelles approches européennes fondées sur l'intégration;

7)

la citoyenneté active, la culture et le dialogue: ces aspects sont d'importants facteurs de cohésion sociale et requièrent des ressources économiques liées à l'innovation et au développement technologique.

11.4.4   Le rôle de l'UE

11.4.4.1

Tout en rappelant que pour ce qui est de ces politiques, la principale compétence incombe aux États membres, le CESE souligne que l'UE et les partenaires sociaux jouent un rôle essentiel en guidant et en soutenant les actions et les réformes qui s'y rapportent. L'acquis communautaire est un instrument de poids, notamment si l'on songe aux politiques d'élargissement et de cohésion, au traité de Lisbonne ou bien à la Charte des droits fondamentaux.

11.4.4.2

Le CESE est favorable aux cinq stratégies évoquées ci-après, proposées dans la communication:

mettre en place les cadres d'action politiques: l'UE a d'ores et déjà défini des objectifs communs en faveur d'une harmonisation entre États membres en matière de stratégie pour l'emploi, d'agenda de Lisbonne et de politiques sociales. À présent, les efforts doivent avant tout viser à atteindre ces objectifs et à rendre ces principes communs opérationnels;

défendre les valeurs de l'Europe et garantir des règles du jeu égales: le cadre juridique communautaire contribue de manière décisive à faire converger les politiques nationales vers des objectifs communs;

partager l'expérience et les meilleures pratiques: le CESE estime, à l'instar de la Commission, que les meilleures pratiques, l'échange d'expériences, les évaluations communes et les examens par les pairs des innovations sociales devraient faire partie du grand débat politique au niveau national et européen. Les institutions nationales, régionales, et locales, les partenaires sociaux et les ONG devraient également y participer activement;

soutenir les actions au niveau local, régional et national: la politique de cohésion et les fonds structurels de l'UE ont contribué à la réduction des différences en matière de prospérité et de niveau de vie à l'échelle européenne. Ces dernières années, ces instruments ont été plus étroitement associés aux priorités du volet «croissance et emploi» de la politique conduite par l'Union (pour la période 2007-2013, plus de 75 milliards d'euros auront été consacrés, au titre du Fonds social européen, aux nouvelles compétences et aux entreprises innovantes). Le CESE souligne que le Fonds européen d'ajustement à la mondialisation est un important outil de solidarité qui devrait permettre la mise en œuvre de mesures concrètes visant à atténuer les effets de la mondialisation sur les groupes les plus vulnérables de même que sur les entreprises, y compris les PME. Il est donc primordial de prendre part au débat sur le budget communautaire après 2013 et d'y intégrer les résultats de la consultation sociale;

sensibiliser le public et créer un socle de connaissances solide: le CESE accueille favorablement des initiatives telles que l'Année européenne de l'égalité des chances pour tous (2007), celle du dialogue interculturel (2008) et celle de la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale (2010). Les fondations et les agences existantes, parmi lesquelles la Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail, l'Agence européenne des droits fondamentaux et l'Institut européen pour l'égalité entre les hommes et les femmes, contribueront de plus en plus à la prise de décision, à la sensibilisation de l'opinion et à la promotion de consultations systématiques (pas uniquement électroniques). Le CESE, les panels d'experts indépendants, les organisations représentatives et les instituts de recherche européens et nationaux devraient également être associés à ce processus. Le CESE préconise une plus grande contribution de l'ensemble des parties concernées à la sensibilisation de l'opinion et à l'amélioration de la qualité des résultats obtenus (fiabilité des données, des statistiques, des indicateurs communs, des systèmes de suivi, etc.) lorsque sont traitées les questions sociales.

Bruxelles, le 18 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  INT/416, R/CESE 1120/2008.

(2)  Comme l'a demandé le Parlement européen dans sa résolution du 4 septembre 2007 intitulée «Le réexamen du marché unique: combattre les obstacles et l'inefficacité par une meilleure mise en œuvre et une meilleure application» [2007/2024(INI)].

(3)  Le «paquet» de la Commission en date du 20 novembre 2007 consiste en une communication intitulée «Un marché unique pour l'Europe du 21e siècle» [COM(2007) 724 final], document qui présente un ensemble d'initiatives destinées à repositionner le Marché unique. Cette communication s'accompagne des cinq documents de travail [NdT: existant uniquement en anglais] suivants:

«The single market: review of achievements» [SEC(2007) 1521]

«Instruments for a modernised single market policy» [SEC(2007) 1518]

«Implementing the new methodology for product, market and sector monitoring: Results of a first sector screening» [SEC(2007) 1517]

«The external dimension of the single market review» [SEC(2007) 1519]

«Initiatives in the area of retail financial services» [SEC(2007) 1520].

Deux autres communications existent aussi en la matière:

Une communication intitulée «Les services d'intérêt général, y compris les services sociaux d'intérêt général: un nouvel engagement européen» [COM(2007) 725 final], avec plusieurs documents de travail [documents de travail de la Commission: SEC(2007) 1514, SEC(2007) 1515, SEC(2007) 1516]

Une communication intitulée «Opportunités, accès et solidarité: vers une nouvelle vision sociale pour l'Europe du 21e siècle» [COM(2007) 726 final].

(4)  CESE 267/2008, JO C 162 du 25.6.2008; CESE 1262/2007, JO C 10 du 15.2.2008 et CESE 62/2008, JO C 151 of 17.6.2008.

(5)  CESE481/2008, JO C 204 du 9.8.2008 et INT/416, R/CESE 1120/2008.

(6)  «Le rôle capital des petites et moyennes entreprises dans la stimulation de la croissance et de l'emploi. Une révision à mi-parcours de la politique moderne des PME» COM(2007) 592 final:

http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=CELEX:52007DC0592:FR:NOT.

(7)  Cf. avis CESE 794/2007.

(8)  CESE 481/2008, JO C 204 du 9.8.2008.

(9)  Bureau européen de l'artisanat et des petites et moyennes entreprises pour la normalisation.

(10)  Rapport de l'OMC sur le commerce mondial 2005 «Analyse des liens entre le commerce, les normes commerciales et l'OMC»:

http://www.wto.org/French/res_f/booksp_f/anrep_f/world_trade_report05_f.pdf.

(11)  CESE 767/2008 (SOC/283), COM(2007) 359 final: la flexicurité peut se définir comme une stratégie intégrée visant à améliorer simultanément la flexibilité et la sécurité sur le marché du travail.

(12)  CESE 999/2007, JO C 256 du 27.10.2007.

(13)  Comme le mentionnent les conclusions du Conseil européen des 13 et 14 mars 2008.

(14)  COM(2007) 725 final.

(15)  CESE 427/2007, JO C 161 du 13.7.2007; CESE 976/2006, JO C 309 du 16.12.2006; CESE 121/2005, JO C 221 du 8.9.2005 et CESE 1125/2003, JO C 80 du 30.3.2004.

(16)  COM(2007) 725 final du 20 novembre 2007 point 3, page 9.

(17)  COM(2006) 177 du 26 avril 2006«Mettre en œuvre le programme communautaire de LisbonneLes services sociaux d'intérêt général dans l'Union européenne» et COM(2007) 725 du 20 novembre«Les services d'intérêt général, y compris les services sociaux d'intérêt général; un nouvel engagement européen».

(18)  SEC (2007) 1514 du 20 novembre 2007: «Questions fréquemment posées relatives à l'application des règles des marchés publics aux services sociaux d'intérêt général».

(19)  Voir l'article 2, points 1 et 2 (j) de la directive sur les services.

(20)  Rapport RAPKAY du 14 septembre 2006 et rapport HASSE FERREIRA — de 2007.

(21)  COM(2007) 726 final.


31.3.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 77/23


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Initiative européenne pour un développement du microcrédit en faveur de la croissance et de l'emploi»

COM(2007) 708 final/2

(2009/C 77/04)

Le 13 novembre 2007, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Initiative européenne pour un développement du microcrédit en faveur de la croissance et de l'emploi».

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 15 juillet 2008 (rapporteur: M. PEZZINI).

Lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 18 septembre 2008), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis à l'unanimité.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le Comité accueille favorablement les initiatives de la Commission, visant à apporter un soutien renforcé à la création et à la croissance des microentreprises, à la consolidation et à la stimulation de l'esprit d'entreprise, afin d'élargir la base de production et d'emploi de la Communauté, dans l'optique d'une compétitivité accrue, d'une plus grande cohésion et d'une meilleure économie de la connaissance, conformément aux objectifs de la stratégie de Lisbonne renouvelée.

1.2

Tout en applaudissant à l'initiative visant à créer une nouvelle structure communautaire de soutien au microcrédit, le Comité juge insuffisante une simple action de stimulation à l'intention des États membres, étant donné que le secteur non bancaire, exclu des directives bancaires de l'UE, repose sur une base législative incomplète, et sur des dispositions fondamentales très diverses dans de nombreux États membres.

1.3

Une action pilote pour les micro-investissements, socialement responsables, qui réunirait des institutions de microcrédit bancaires et non bancaires dans un réseau européen — par le biais d'un protocole d'accord sur l'investissement socialement responsable entre les différentes institutions et avec le soutien des associations sectorielles — devrait s'adresser prioritairement, selon le Comité, aux groupes ayant de faibles chances d'obtenir un prêt bancaire, pour:

développer de véritables projets de travail productif et digne;

renforcer et élargir la base de production, de coopération et d'emploi;

réactiver les capacités de responsabilisation de l'individu, en mettant en place des processus d'approche, d'accompagnement et de valorisation des personnes risquant d'être exclues de la production, de l'économie et de la société.

1.4

Le Comité est convaincu que l'application innovante des nouvelles technologies au microcrédit permettra d'accroître, grâce à une mise en réseau, le rayon d'action de la microfinance, d'augmenter la concurrence et ainsi de réduire les coûts pour les utilisateurs.

1.5

De même, le Comité estime qu'une action de soutien au microcrédit doit s'accompagner d'une action de formation, afin de faciliter le développement et la réussite sur le marché, pour éviter les exclusions sociales et réaliser, de mieux en mieux, les objectifs de la stratégie de Lisbonne.

1.6

Tout en admettant que les changements relatifs au cadre institutionnel et juridique de soutien du microcrédit relèvent principalement du niveau des États membres et sont mis en œuvre par l'intermédiaire des mécanismes intégrés dans le cycle annuel de gouvernance du processus de Lisbonne, le Comité estime indispensable de renforcer le système de référence européen, en particulier pour:

réaliser un réseau d'accords sur les investissements socialement responsables entre le Fonds européen pour le microcrédit devant être créé et les différentes institutions de microcrédit présentes sur le territoire, de manière à ce que le réseau de microcrédit repose sur des normes compatibles de solidité, de solvabilité, de diversification du portefeuille (1), de transparence et de lutte contre l'usure;

mettre en place un système communautaire d'évaluation des IMF bancaires et non bancaires, afin d'en améliorer la qualité et la fiabilité, et de garantir la disponibilité d'informations sur les risques et les performances par l'adoption de formats communs permettant le dialogue et l'échange de bonnes pratiques, tout en conférant, de manière temporaire, une marque européenne de qualité et de visibilité aux IMC, pour attirer les fonds et augmenter la confiance des éventuels bénéficiaires;

activer des instruments communautaires d'information et de formation des acteurs intéressés par les mesures de microcrédit, tant sur les possibilités et les modalités d'intervention que sur les exigences et les modalités de présentation de projets de plan d'entreprise — sur la base d'un format simplifié et harmonisé — par les bénéficiaires éventuels;

mettre en place des instruments communautaires de formation permanente et de renforcement des capacités pour les cadres de direction et les opérateurs des IMF, sur la base d'un savoir-faire technique commun, pour répondre aux changements de la microfinance, aux nouvelles exigences des utilisateurs, à la nécessité de bases communes facilitant le dialogue et l'échange de bonnes pratiques dans un contexte européen;

créer un système européen ou un réseau de banques de données sur la base de critères harmonisés, qui permettrait la collecte et le traitement de données standardisées sur les transactions effectuées et les risques connexes, notamment pour réduire les coûts d'évaluation des risques inhérents à chaque opération de microcrédit.

1.7

En ce qui concerne la proposition de structure communautaire de soutien spécifique au sein du département Jeremie du FEI, le Comité estime que cette solution ne permettrait ni de donner une visibilité optimale à l'initiative — en limitant par ailleurs son rôle de coordination des diverses initiatives existantes — ni d'ajouter d'autres activités aux activités d'assistance technique. Le Comité est donc d'avis qu'il conviendrait de créer un département indépendant, qui pourrait faire office de Fonds pour le microcrédit.

1.8

Le financement et l'assistance technique apportés par cette nouvelle structure ne devraient d'ailleurs pas concerner uniquement les nouveaux IMC et les IMC non bancaires, mais s'adresser à tous afin de ne pas induire de distorsions de concurrence.

1.9

L'initiative communautaire en faveur du microfinancement devrait prévoir également le renforcement du dialogue social et du dialogue entre les divers acteurs de la société civile, ainsi que la valorisation des réseaux européens d'échange de bonnes pratiques, tels que le Réseau européen de la microfinance, le Centre de microfinance pour l'Europe centrale et orientale et la Plate-forme européenne de la microfinance.

1.10

Selon le Comité, l'initiative en faveur du microfinancement doit mettre en valeur le rôle des associations d'entreprises en ce qui concerne la vérification de la fiabilité et de la compétence des offrants, le développement d'un haut potentiel relationnel et fiduciaire, le soutien et l'accompagnement — également pour la formation et le conseil —, pour faire émerger les capacités d'autonomie des bénéficiaires et pour réduire et simplifier les frais administratifs, en particulier ceux liés à la préparation du plan d'entreprise.

1.11

L'institution d'un fonds pour le microcrédit, rationnellement relié aux institutions financières, aux administrations de l'État (2), aux organisations sectorielles et aux coopératives et consortiums de garantie, peut s'avérer importante pour orienter l'ingénierie financière vers des formes de «gestion sociale» du crédit.

1.12

Une vision sociale du crédit, pouvant être également à la base de la création d'un fonds pour le microcrédit, est étroitement liée aux principes de la responsabilité sociale des entreprises et aux valeurs d'emplois de meilleure qualité et plus répandus.

1.13

Le soutien de la certification environnementale EMAS peut, mieux que d'autres instruments, favoriser une croissance sociale des entreprises et faciliter la diffusion, consciente, d'un fonds pour le microcrédit.

2.   Introduction

2.1

En avril 2007, l'observatoire des PME européennes a indiqué que le principal obstacle à l'innovation de produits et de processus, pour les PME européennes, est l'accès au crédit, auquel vient s'ajouter la difficulté de trouver du personnel qualifié, tandis que pour les entreprises plus grandes, les problèmes sont surtout liés aux ressources humaines.

2.2

Les principales lacunes constatées sur le marché sont le manque de capitaux de démarrage, l'insuffisance de l'offre de fonds et l'inadéquation de la demande. Ces questions ont été abordées par la Commission dans sa communication intitulée «Mettre en œuvre le programme communautaire de Lisbonne: Financer la croissance des PMEpromouvoir la valeur ajoutée européenne»  (3), à propos de laquelle le Comité a eu l'occasion de se prononcer à plusieurs reprises (4).

2.3

Le CESE a en particulier fait observer qu'il conviendrait «d'intensifier les politiques destinées à faciliter la création et le développement d'entreprises, notamment en ce qui concerne la réduction du temps et des coûts nécessaires à la création d'entreprises, les mesures visant à améliorer l'accès au capital-risque, l'augmentation du nombre des programmes de formation au métier d'entrepreneur, des mesures destinées à faciliter l'accès aux réseaux et aux services d'utilité publique, et le renforcement de la densité du réseau de services d'assistance s'adressant aux petites entreprises» (5).

2.3.1

Le Comité rappelle, comme il l'a déjà souligné dans des avis précédents (6), que «des entreprises coopératives, des entreprises d'interconnexion et des sociétés de mutualisation ainsi que des start-ups innovantes et des microentreprises peuvent également contribuer à accroître la compétitivité et la capacité d'innovation de l'UE».

2.4

Par ailleurs, le Comité a souligné que «la simplification de l'accès aux marchés financiers est une question majeure» et «qu'il convient d'encourager les banques et les autres acteurs financiers concernés, tels que les fonds de capital-risque, à adopter une attitude plus positive par rapport à la prise de risque» (7).

2.5

En automne 2007, la Commission a annoncé l'examen d'une série d'initiatives en faveur des PME, dont une initiative européenne pour la création d'une nouvelle structure de soutien au microcrédit (8).

2.6

Le microcrédit est généralement reconnu comme étant un instrument financier influençant fortement l'esprit d'entreprise, le développement économique et l'inclusion sociale productive, mais présentant encore de nombreuses lacunes et imperfections, dues aux difficultés à obtenir des investissements dans le capital initial de l'entreprise, en particulier lorsque le demandeur est au chômage, est issu de l'immigration récente, appartient à une minorité ethnique ou réside dans une région de la convergence.

2.7

Un autre problème est lié au fait que l'institution financière peut faire des économies d'échelle en ce qui concerne les coûts fixes de la transaction, par exemple la collecte d'informations, l'évaluation, ou le suivi du prêt. Cela est particulièrement vrai dans le cas de microfinancements octroyés à des activités autonomes et à des PME n'étant pas suffisamment transparentes et ayant une capacité limitée à fournir une information adéquate à l'institution financière.

2.8

Selon la définition internationale, le microcrédit correspond à «des prêts de faible montant — inférieurs à 25 000 euros en Europe (9) et à 100 000 dollars aux États-Unis — destinés à des personnes à bas revenus, généralement exclues des banques parce que leur solvabilité est considérée comme insuffisante et/ou parce que les coûts de gestion de tels prêts sont jugés trop élevés» (10). Le crédit à la consommation n'est pas couvert par la définition du microcrédit.

2.9

Le Comité partage l'avis de la Commission sur le rôle important du microcrédit dans la réalisation de la stratégie de Lisbonne pour la croissance et l'emploi, ainsi que dans la promotion de l'intégration sociale, et estime essentiel de préserver sa fonction principale, qui est de promouvoir la croissance de l'emploi autonome et le développement des microentreprises, sans le transformer en simple aide sociale.

2.10

Selon le Comité, le microcrédit, dans l'UE, doit répondre aux problèmes mis en évidence par les défaillances du marché, en garantissant aux entrepreneurs un accès au crédit, nécessaire pour lancer ou développer des activités économiquement productives, également dans le cadre de la politique d'aide et de coopération au développement (11).

2.11

Au niveau communautaire, le PCI — guichet «Microcrédit», soutenu par le FEI (12), est un mécanisme de garantie du microcrédit octroyé par des institutions locales à des microentreprises (13). Il n'existe cependant pas actuellement de législation européenne spécifique sur le microcrédit, hormis celle pour le secteur du microcrédit bancaire, soumis à la réglementation bancaire européenne (14); divers programmes et initiatives communautaires font également référence au microcrédit (15).

2.12

Par ailleurs, le secteur du microcrédit est réglementé et géré différemment en fonction des États membres. Seuls deux États membres prévoient une législation spécifique régissant le secteur non bancaire de la microfinance (16), même s'il existe des lois interdisant les prêts usuraires dans quatre autres États membres (17).

2.13

Le Conseil européen de printemps a estimé, entre autres, qu'il fallait accorder une priorité immédiate à «un accès plus aisé au financement, y compris par l'intermédiaire des instruments financiers existants de l'UE» (18) et «promouvoir une participation accrue au marché du travail en général et lutter contre la segmentation pour garantir une inclusion sociale active».

2.14

Le Comité est d'avis qu'un cadre juridique et de soutien plus large pourrait contribuer à mieux promouvoir la création de nouvelles entreprises productives et favoriser leur consolidation, en en évitant les risques de marginalisation et d'exclusion du système productif qui peuvent alimenter des plaies sociales et criminelles, comme le recours à l'usure.

3.   La proposition de la Commission

3.1

La Commission formule deux lignes d'action:

lancement, par les États membres, d'un programme de réformes pour améliorer les conditions du microcrédit, en fonction de leur situation et de leurs priorités nationales, éventuellement avec l'aide de l'Union européenne pour la définition d'objectifs quantitatifs et de bonnes pratiques;

création d'une nouvelle structure communautaire de soutien au microcrédit, dans le cadre de Jeremie, qui dispenserait une assistance technique et un soutien à la consolidation des organismes/institutions de microfinancement, et mènerait des actions de diffusion et de communication adéquates.

4.   Cadre de développement du microcrédit en faveur de la croissance et de l'emploi

4.1

Le microcrédit constitue un levier d'insertion sociale et permet aux personnes et aux entreprises économiquement faibles et exclues du système bancaire classique d'accéder à des ressources financières, indispensables à la création et au développement d'activités génératrices de revenu.

4.2

Au niveau communautaire, le «Small Business Act» (19) pour l'Europe — dont l'objectif déclaré est de définir des principes et des mesures concrètes pour améliorer l'environnement des PME européennes, devrait permettre de recenser et lever les obstacles à la libération du potentiel des entreprises de moindre taille, par de plus gros efforts de simplification, un meilleur accès au crédit, et des règles appropriées en matière d'énergie et d'environnement.

4.3

Le Comité est d'avis qu'il conviendrait de mieux coordonner les nombreux instruments disponibles en la matière, en tirant parti de l'expérience de ceux qui ont été utilisés dans le passé et de ceux existant encore aujourd'hui, en matière de microcrédit, comme le rappelle la Commission dans sa communication (20), à savoir:

l'initiative Jeremie;

les garanties du PIC en matière de microcrédit (21); le REM et le MFC (22) du programme d'action communautaire visant à lutter contre l'exclusion sociale;

les initiatives du Fonds social européen;

les programmes de développement rural du FEADER (23);

le Fonds européen d'ajustement à la mondialisation et les actions du Fonds européen d'investissement;

le Mécanisme de financement des PME du programme PHARE.

4.3.1

Le Comité estime opportun que la définition de la nouvelle action communautaire en faveur du microcrédit tienne dûment compte des expériences positives réalisées dans le cadre de la mise au point et de l'application pluriannuelle concrète du programme-cadre UE/ACP sur la microfinance de la DG EuropeAid.

4.4   L'ingénierie financière et le «Fonds européen pour le microcrédit»

4.4.1

Les institutions financières, dès le début des années quatre-vingt (24), surtout grâce aux réflexions et suggestions issues des débats qui se sont tenus dans le cadre des «Conférences européennes de l'artisanat et des petites entreprises» (25), ont diffusé et encouragé, dans les États membres, la culture de l'ingénierie financière (26).

4.4.2

La nécessité de mettre effectivement en œuvre des lignes opérationnelles qui réduiraient les difficultés d'accès au crédit et contribueraient à organiser l'ingénierie financière, a poussé la Commission et la BEI, également sous la pression des organisations européennes de petites entreprises, à donner naissance au FEI (27), qui, après une première brève parenthèse pendant laquelle il a également octroyé son soutien aux réseaux de communication (28), s'est consacré au soutien, sous des formes diverses de garantie, et surtout au moyen d'actions d'ingénierie financière, des mesures destinées aux micro-, petites et moyennes entreprises (PME).

4.4.3

Grâce aux programmes pluriannuels de la Commission destinés aux micro-, petites et moyennes entreprises, grâce à la coopération, et dernièrement au moyen du premier programme spécifique du PIC (29), les actions d'ingénierie financières se sont développées de la façon suivante:

la garantie fidéjussoire sur les prêts, octroyée aux «coopératives et consortiums de garantie» des PME;

la garantie de titrisation (30) des fonds pour risques et charges (provisions) des consortiums de garantie;

la garantie fidéjussoire sur le capital, concédée par le biais du crédit «mezzanine» (31);

les investissements de capital-risque, le soutien à l'éco-innovation, le transfert de technologie;

les interventions des business angels.

4.4.4

Le CESE a eu l'occasion, à plusieurs reprises, de faire part de sa propre satisfaction concernant les mesures prises, surtout au cours des quinze dernières années, par la Commission, la BEI, et le FEI pour soutenir les entreprises de plus petite taille. Il a reconnu l'élargissement et la modernisation du soutien financier de la BEI aux PME (32), mais estime que les efforts pourraient être intensifiés, notamment par le biais de programmes définis en accord avec:

la BEI, pour les capitaux et le FEI, pour les garanties fidéjussoires;

les institutions financières des États membres;

les organisations représentatives des micro-, petites et moyennes entreprises;

les consortiums de garantie, qui fonctionnent déjà dans un régime d'ingénierie financière, en octroyant la garantie fidéjussoire, allant de 50 à 180 % du prêt consenti aux entreprises.

4.4.5

Au niveau des États membres, l'on pourrait créer un réseau de «fonds pour le microcrédit» doté de fonds de rotation alimentés par la BEI, avec les garanties additionnelles du FEI, qui aurait des antennes à divers niveaux. Au niveau régional (NUTS II) et provincial (NUTS III), l'octroi des prêts pourrait passer par les consortiums de garantie, lorsqu'ils existent (33). Ceux-ci possèdent déjà une grande expérience en matière de capital d'amorçage et, avec un fonds pour risques et charges adéquat, contregaranti par le FEI, pourraient à leur tour offrir une garantie fidéjussoire.

4.4.5.1

Cette nouvelle proposition devrait être clarifiée en ce qui concerne la création du fonds pour le microcrédit par la BEI et la Commission européenne. Cette initiative a pour objectif de soutenir les IMF en Europe par l'apport de fonds (subventions, prêts, crédits «mezzanine» ou participations en fonds propres) et l'assistance technique. Le FEI est actuellement en train de créer ce microfonds avec un capital initial d'environ 40 millions d'euros (dont 20 proviennent de la BEI) pour cette activité de soutien, et devrait, de l'avis du Comité, gérer ce fonds à l'avenir.

4.4.6

Le microcrédit pourrait suffire pour acheter du matériel ou un équipement simple, nécessaire pour lancer une entreprise, ou pour rénover un équipement, toujours nécessaire, dans une microentreprise (34).

4.4.6.1

Selon le Comité, il conviendrait de prêter une attention particulière au microcrédit destiné aux femmes entrepreneuses. Dans ce contexte, il faudrait attacher davantage d'importance à la flexibilité, aux modalités et aux critères d'octroi du crédit, afin d'éviter la création de conditions objectives de malaise social et psychologique pouvant devenir plus aiguës dans les cas suivants:

appartenance à des minorités;

situations familiales difficiles;

tendance à l'autoexclusion sociale.

4.4.6.2

Les modalités et la gestion du microcrédit destiné au développement de l'activité féminine devraient avant tout tenir compte des priorités d'insertion et de réinsertion sociale et économique des femmes dans le tissu productif de la société, eu égard à la nécessité de s'engager à lutter contre le mépris et de renforcer le développement de l'esprit d'entreprise et de la capacité à assumer davantage de responsabilités et de risques.

4.4.7

Le microcrédit devrait également offrir une chance aux jeunes animés du désir de monter leur propre affaire et dotés de qualifications professionnelles suffisantes, mais ne disposant pas des ressources financières nécessaires pour lancer une activité indépendante.

4.4.7.1

La première garantie du prêt, qui doit de toute façon être accordé par une institution financière, bancaire ou non, est constituée par l'équipement acheté. Mais ce qui incite les institutions financières à adopter une approche moins fiscale de l'octroi du prêt (35), c'est le fait qu'il existe un «Fonds européen pour le microcrédit» doté de ressources financières et de l'expertise requise, en mesure d'intervenir, périodiquement, par le biais du FEI, les consortiums de garantie, ainsi que les organisations sectorielles pour remédier aux éventuelles insolvabilités accumulées, tout en ayant également la capacité et la volonté de promouvoir des normes optimales de solidité, de diversification et d'amélioration de la production, de transparence et de lutte contre l'usure (36).

4.4.8

Les enquêtes sur les insolvabilités des micro- et petites entreprises, au cours des dix dernières années, dans les principaux pays européens, révèlent que les cas d'insolvabilité ne dépassent pas 4 % des prêts octroyés (37). Cela signifie que, le pourcentage étant inférieur à 5 %, le multiplicateur pouvant être utilisé pour garantir le crédit octroyé par l'institution financière est égal à 20.

4.4.9

Avec un multiplicateur égal à 20 et une garantie fidéjussoire couvrant 50 % de l'insolvabilité de chaque débiteur, un consortium de garantie disposant d'un fonds pour risques et charges d'un million d'euros pourrait garantir des prêts à concurrence de 40 millions d'euros, pour un grand nombre d'entrepreneurs (38).

4.4.9.1

Le système de «consortiums de garantie», grâce à l'octroi de garanties, a permis, en 2007, de financer les entreprises artisanales italiennes pour un montant d'environ 6 milliards d'euros.

4.4.10

Environ 500 000 nouvelles entreprises naissent chaque année dans l'UE-27. Le nombre d'entreprises qui disparaissent chaque année est légèrement inférieur (39). 99 % des entreprises créées annuellement sont des PME, et parmi celles-ci, au moins 240 000 ne se composent que de leur propriétaire (40).

4.4.11

Si nous revenons à l'exemple cité au paragraphe 4.4.9, l'on pourrait, avec un fonds pour risques et charges d'1 million d'euros, et grâce à l'ingénierie financière, garantir, par l'intermédiaire d'un microfonds, un prêt de 25 000 euros à 1 600 petites entreprises.

4.5   La gestion sociale du microcrédit

4.5.1

Comme nous l'avons déjà fait remarquer, le crédit est l'un des instruments fondamentaux du développement économique et social et de la réalisation d'une «économie sociale de marché».

4.5.2

C'est la raison pour laquelle on a vu apparaître progressivement de nouvelles conceptions du crédit, qui ont pris de plus en plus de place, et selon lesquelles le crédit n'est plus considéré simplement comme une relation entre le client et l'institution financière, mais comme un instrument de haute valeur sociale, en raison de ses liens avec des emplois de meilleure qualité et plus sûrs, et avec le développement économique.

4.5.3

Cette nouvelle vision, plus large, impose la répartition entre plusieurs acteurs des risques liés à l'octroi du crédit.

4.5.4

La répartition des risques du crédit entre plusieurs instances:

augmente les garanties vis-à-vis des institutions financières;

fait baisser le taux d'intérêt lié au crédit octroyé;

facilite l'octroi du prêt au demandeur.

4.5.5

En vertu de la valeur sociale, l'octroi d'un crédit doit être soumis de plus en plus et de mieux en mieux au principe de la responsabilité sociale de l'entreprise et demande, de la part de l'entrepreneur, qu'il se prépare et qu'il adhère aux valeurs du développement durable.

4.5.6

La certification environnementale EMAS (41), mieux que toute autre certification, pourrait être posée comme condition, dans le cadre d'un processus d'ingénierie financière, en lien avec la fonction sociale du crédit.

4.5.7

Ces dernières années, seules quelques dizaines de milliers d'entreprises ont pu profiter des instruments financiers communautaires (42). Il existe donc un écart important entre la phénoménologie du problème et les résultats obtenus. Cela doit nous inciter à réfléchir aux possibilités concrètes d'intervention au moyen de systèmes permettant d'impliquer davantage les institutions financières et de multiplier les résultats.

4.5.8

Les 20 et 21 novembre 1997, le Conseil européen extraordinaire de Luxembourg, consacré exclusivement au thème de l'emploi, unique point à l'ordre du jour, a lancé, entre autres, trois initiatives concrètes pour aider les entreprises à conserver leur compétitivité sur les marchés, et a invité la Commission à formuler des propositions en vue de permettre aux acteurs économiques de devenir plus forts et d'accroître l'emploi. Ces trois initiatives étaient l'aide au démarrage du mécanisme européen pour les technologies (MET), le programme «Entreprise commune européenne» («Joint European venture — JEV») et le mécanisme de garantie PME. Deux de ces trois initiatives — l'aide au démarrage du MET et le mécanisme de garantie PME — étaient destinées à faciliter l'accès au crédit.

4.5.8.1

À la fin de l'année 2003, plus de 277 000 (43) PME avaient bénéficié des mécanismes du programme croissance et emploi et du programme pluriannuel.

4.5.8.2

Le Mécanisme de garantie pour les PME est l'un des principaux programmes européens destinés aux PME (44).

4.5.9

Lorsqu'on parle de capital-risque pour les micro- (23 millions d'entreprises en Europe) et petites entreprises (1,1 million d'entreprises en Europe), dont 90 % sont constituées d'entreprises individuelles ou de sociétés de personnes, on se réfère en réalité uniquement à 5 ou 6 % de cet univers.

4.5.10

Le Comité estime donc qu'il faut nécessairement envisager des formes de soutien au crédit s'adressant également aux sociétés de personnes, comme c'est le cas pour les instruments de l'ingénierie financière, afin d'éviter que leur application ne reste marginale et empêche ainsi les micro et petites entreprises de croître en termes de culture financière.

Bruxelles, le 18 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  Cf. les études du prix Nobel Harry MARKOWITZ sur les corrélations entre diversification du portefeuille, réduction du risque et compensations dans les fluctuations des retours sur investissement (courbe d'efficacité), avec des effets de stabilisation du cycle économique.

(2)  Dans de nombreux États, les administrations régionales et locales soutiennent le développement des PME, au moyen de financements destinés aux consortiums de garantie.

(3)  COM(2006) 349 final du 29.6.2006.

(4)  Avis CESE 599/2007, JO C 168 du 20.7.2007, p. 1 — rapporteurs: MM. van IERSEL et GABELLIERI.

(5)  Avis CESE 982/2007, JO C 256 du 27.10.2007, p. 8 — rapporteuse: Mme FAES.

(6)  Avis CESE 1485/2005 sur un programme-cadre pour la compétitivité et l'innovation (2007-2013) — rapporteurs: M. WELSCHKE et Mme FUSCO.

(7)  Cf. notes 4 et 5.

(8)  La Commission, avec le FEI, a organisé dès 1997 le soutien au microcrédit au moyen du mécanisme de garantie PME.

(9)  SEC(2004) 1156; Programme-cadre pour l'innovation et la compétitivité, décision no 1639/2006/CE.

(10)  Voir Eurofi France, site internet: www.eurofi.net

(11)  Voir règlement (CE) no 1905/2006 du Parlement européen et du Conseil portant établissement d'un instrument de financement de la coopération au développement.

(12)  FEI: Fonds européen d'investissement.

(13)  Pour la définition d'une microentreprise, voir la recommandation 2003/361/CE.

(14)  Directive 2006/48/CE — CRD (directive relative aux exigences de fonds propres).

(15)  Cf. l'initiative Jeremie; l'initiative «Croissance et emploi» (décision no 98/347/CE); le programme pluriannuel pour les PME; le programme-cadre pour l'innovation et la compétitivité (décision no 1639/2006/CE); le FEADER (règlement (CE) no 1698/2005); le Fonds européen d'ajustement à la mondialisation (règlement (CE) no 1927/2006).

(16)  La France et la Roumanie. En outre, le Royaume-Uni et la Finlande, bien que ne disposant pas d'une législation spécifique, prévoient, dans leur système juridique, quelques exceptions en la matière.

(17)  La Belgique, l'Allemagne, l'Italie et la Pologne.

(18)  13 et 14 mars 2008, paragraphe 11.

(19)  Cf. à cet égard également l'avis CESE 977/2008 — rapporteur: M. CAPPELLINI.

(20)  Cf. COM(2007) 708, annexe 3.

(21)  PIC, Programme pour l'innovation et la compétitivité (2007-2013).

(22)  REM: Réseau européen de la microfinance; MFC: Centre de microfinance pour l'Europe centrale et orientale.

(23)  FEADER: Fonds européen agricole pour le développement rural.

(24)  1982: Année européenne de l'artisanat et des petites entreprises.

(25)  1990: Avignon; 1994: Berlin; 1997: Milan.

(26)  L'ingénierie financière part du principe que le soutien financier aux petits entrepreneurs souhaitant créer une nouvelle activité ou investir dans de nouveaux produits ou processus ne peut être limité au rapport entre le petit entrepreneur et l'institution financière et que, eu égard à la fonction sociale de l'entreprise, il convient d'y associer d'autres acteurs, qui assument des responsabilités à divers niveaux et peuvent répartir entre eux les risques et les coûts.

(27)  FEI: Fonds européen d'investissement. Né en 1994 grâce à l'impulsion de la DG XXIII de l'époque (il s'agissait de la direction générale chargée de soutenir les petites entreprises et l'artisanat, qui a également permis l'organisation des «conférences européennes») et de la DG II (économie et finances). À sa création, le FEI fut doté d'un milliard d'ECU apportés par la BEI, de 800 millions d'ECU fournis par la Commission et de 200 millions d'ECU provenant des institutions financières européennes à titre de quote-part, répartis en fractions de 2 millions chacune. Plus de cinquante institutions financières ont adhéré dès le départ à l'initiative.

(28)  Cf. Lille Métropole.

(29)  PIC, programme spécifique 1: programme pour l'innovation et l'esprit d'entreprise; programme spécifique 2: programme d'appui stratégique en matière de TIC; programme spécifique 3: programme «Énergie intelligente — Europe».

(30)  La titrisation est réalisée par la cession d'une partie ou de la totalité du montant de la dette d'un consortium de garantie (ou d'une banque) à des établissements financiers spécialisés, afin de permettre, notamment aux consortiums de garantie, d'accroître leur capacité de garantie du crédit vis-à-vis des entreprises.

(31)  Le financement «mezzanine» se base davantage sur les flux de liquidités qu'escomptent les entreprises financées que sur les garanties réelles. Il peut revêtir deux formes: 1) emprunt subordonné (prêt à taux fixe ou indexé); 2) clause de participation (equity kicker) (le créancier/investisseur a droit à un pourcentage de la plus-value du bien auquel est lié le prêt). L'échéance du financement «mezzanine» varie de 4 à 8 ans.

(32)  http://www.eib.org/projects/publications/sme-consultation-2007-2008.htm

(33)  Le système des consortiums de garantie est bien implanté dans plusieurs pays européens et est aussi activement présent au niveau d'une fédération européenne.

(34)  Les microentreprises représentent 94 % de toutes les entreprises privées non agricoles en Europe.

(35)  L'ingénierie financière, ôtant aux institutions financières un bon pourcentage de risque, leur permet d'octroyer des prêts plus facilement et à moindres frais, surtout aux nouveaux entrepreneurs, peu connus.

(36)  Des actions conjointes entre branches et associations sectorielles, visant à une meilleure gestion financière des microentreprises, avaient déjà été mentionnées dans les documents de la première conférence européenne de l'artisanat à Avignon en 1990 et de la deuxième conférence de Berlin en 1994; elles avaient été développées en particulier par le système des «banques populaires allemandes» et avec les organisations sectorielles (Union centrale de l'artisanat allemand — ZDH).

(37)  Cf. FedartFidi UE, Fédération européenne des consortiums de garantie de l'artisanat, des États dans lesquels il existe un système opérationnel de consortiums de garantie.

(38)  5 % de 40 millions font 2 millions, mais le consortium de garantie ne répond que de 50 % de la dette non honorée, soit 1 million d'euros, dont il dispose dans son propre fonds pour risques et charges.

(39)  Source: Observatoire européen des entreprises.

(40)  Dans l'UE, 49 % des microentreprises n'ont pas de salariés. Il s'agit d'entreprises individuelles.

(41)  Cf. les règlements 1836/93/CEE et 761/2001/CE.

(42)  Document de consultation sur un programme communautaire en faveur de l'esprit d'entreprise et de la compétitivité des entreprises (2006-2010), DG Entreprises, 2004, point 118.

(43)  Source: COM(2007) 235 — Rapport de la Commission au Conseil et au Parlement européen sur les instruments financiers du programme pluriannuel pour les entreprises et l'esprit d'entreprise, en particulier pour les petites et moyennes entreprises (PME) (2001-2006).

(44)  Au 31.12.2005, le taux d'utilisation moyen était de 67 % pour le volet Garantie de prêts, de 66 % pour le volet Microcrédit et de 65 % pour le volet Fonds propres.


31.3.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 77/29


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 76/769/CEE du Conseil relative à la limitation de la mise sur le marché et de l'emploi de certaines substances et préparations dangereuses (dichlorométhane)»

COM(2008) 80 final — 2008/0033 (COD)

(2009/C 77/05)

Le 10 mars 2008, le Conseil de l'Union européenne a décidé, conformément à l'article 95 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social sur la

«Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 76/769/CEE du Conseil relative à la limitation de la mise sur le marché et de l'emploi de certaines substances et préparations dangereuses (dichlorométhane)».

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 15 juillet 2008 (rapporteur: M. SEARS).

Lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 17 septembre 2008), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis à l'unanimité.

1.   Résumé et recommandations

1.1

La proposition à l'examen vise à modifier la directive 76/769/CEE du Conseil en ajoutant de nouvelles restrictions à la mise sur le marché et à l'emploi du dichlorométhane (DCM) lorsqu'il est utilisé comme constituant majeur dans les décapants de peintures à usages industriels, professionnels et domestiques.

1.2

Il s'agit de la dernière modification qui sera apportée à la directive 76/769/CEE du Conseil avant son remplacement, le 1er juin 2009, par le règlement (CE) 1907/2006 (REACH).

1.3

Le CESE reconnaît les importantes difficultés d'ordre scientifique et politique auxquelles est confrontée la Commission en proposant et recherchant un accord sur une modification proportionnée et d'un bon rapport coût-efficacité qui, comme l'impose la directive 76/769/CEE, préservera le marché intérieur tout en assurant un niveau de protection élevé de la santé humaine et de l'environnement.

1.4

Le Comité convient qu'il y a des preuves irréfutables établissant que de fortes concentrations en vapeur dues à la haute volatilité du DCM peuvent causer la perte de connaissance et la mort. Ces fortes concentrations résultent de mauvaises pratiques industrielles, y compris une ventilation inadéquate. Les preuves sont moins indiscutables lorsqu'il s'agit des risques sérieux encourus par les consommateurs en cas d'utilisation domestique occasionnelle. Par conséquent, la proposition d'interdiction de vente est disproportionnée et, étant donné les risques connus, mais encore à quantifier, des produits et processus de remplacement, ne semble pas devoir mener à une réduction globale du taux, par ailleurs assez faible, d'accidents enregistrés.

1.5

Le Comité note également, tout comme les consultants engagés par la Commission, que les risques particuliers liés au DCM ne sont pas entièrement couverts par les pictogrammes existants ou les phrases de risques et les phrases de sécurité. Ces observations s'appliquent également aux risques encourus par les enfants, plus fréquents dans le cadre domestique. Il s'agit là d'un défaut du système d'étiquetage; ce ne sont pas les produits ou les personnes concernées qui sont en cause. C'est pourquoi des recommandations en ce qui concerne l'emballage et l'étiquetage sont faites afin de remédier à cette situation.

1.6

D'autres problèmes sont mis en évidence, en particulier l'absence de valeurs limites d'exposition professionnelle (VLEP) fixées d'un commun accord, et l'absence de lignes directrices ou de règlementations en ce qui concerne les bonnes pratiques industrielles. Le TRGS 612 allemand (Prescriptions techniques pour les substances dangereuses) est considéré comme un excellent modèle à cet égard.

1.7

Plusieurs autres questions générales sont soumises à la réflexion de la Commission, du Parlement européen et des États membres dans l'espoir qu'un accord puisse se réaliser. Si cela ne se fait pas, une fracture se produira dans le marché intérieur. Les utilisateurs, tant sur leur lieu de travail qu'en dehors, resteront menacés.

2.   Base juridique

2.1

Comme indiqué précédemment, le règlement (CE) 1907/2006 du Parlement européen et du Conseil du 18 décembre 2006 concernant l'enregistrement, l'évaluation et l'autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances (REACH), entrera en vigueur le 1er juin 2009. Il abrogera et remplacera un certain nombre de règlements et directives existants du Conseil et de la Commission, y compris la directive 76/769/CEE du Conseil du 27 juillet 1976 relative à la limitation de la mise sur le marché et de l'emploi de certaines substances et préparations dangereuses.

2.2

L'annexe I de la directive 76/769/CEE du Conseil définit les limitations précises qui ont été apportées à la mise sur le marché et à l'emploi de certaines substances et préparations dangereuses et qui ont été convenues et mises en place au cours de ces trente dernières années. Le 1er juin 2009, elles deviendront la pierre angulaire de l'annexe XVII du règlement (CE) 1907/2006 (REACH).

2.3

Les modifications apportées précédemment à la directive 76/769/CEE du Conseil (dont l'objet était d'introduire davantage de limitations) l'ont été sous la forme de directives nécessitant une mise en œuvre par les États membres. La proposition à l'examen concerne une décision qui prendra effet immédiatement et non une directive. Elle ne doit donc pas être transposée dans des actes législatifs nationaux qui auront dû également être abrogés le 1er juin 2009, au moment de l'entrée en vigueur du règlement (CE) 1907/2006 (REACH).

2.4

Toutes les propositions ultérieures concernant la limitation de la mise sur le marché et de l'emploi de certaines substances et préparations dangereuses seront élaborées dans le cadre du règlement (CE) 1907/2006 (REACH).

2.5

Les substances (et toute préparation les contenant) pour lesquelles des limitations de mise sur le marché et d'emploi ont été jugées nécessaires, sont en général le résultat d'évaluations de certaines «substances prioritaires» désignées par les États membres et publiées, entre 1994 et 2000, dans quatre listes de substances prioritaires, en vertu du règlement (CEE) 793/93 du Conseil.

2.6

Un certain nombre de substances qui ne figuraient pas dans ces listes ont également fait l'objet d'une évaluation quant à leur impact sur la santé humaine et l'environnement, et/ou des propositions ont été avancées pour limiter leur mise sur le marché et leur emploi, de nouveaux problèmes ayant été examinés à la demande de certains États membres. Le dichlorométhane est l'une de ces substances. Un certain nombre d'États membres, pour différentes raisons, ont déjà imposé ou cherché à imposer des restrictions applicables à son utilisation, en particulier lorsqu'il entre dans la composition de décapants de peinture. D'autres États membres considèrent que ces mesures sont disproportionnées, coûteuses et susceptibles de produire des résultats moins satisfaisants pour les utilisateurs. Il y a des éléments (ou une absence d'éléments) qui plaident en faveur ou en défaveur des deux points de vue.

2.7

Le premier examen complet de la proposition par le Conseil a eu lieu au début juin 2008. Si un compromis peut être trouvé dans les mois qui viennent, la proposition suivra alors probablement le cours prévu. Dans le cas contraire, la proposition échouera et la fracture du marché intérieur pour les décapants de peinture à base de DCM subsistera, voire s'aggravera. Le DCM serait alors, en temps utile, évalué dans le cadre de l'application du règlement CE 1907/2006 (REACH), son utilisation dans les décapants de peinture étant l'une des nombreuses voies d'exposition à prendre en compte. Bien sûr, l'on ne peut savoir quelle serait l'issue d'un tel processus ni quand pourrait être présentée une recommandation définitive.

3.   Contexte

3.1

Le DCM est un hydrocarbure aliphatique halogéné incolore, à faible température d'ébullition et d'odeur douceâtre. Depuis de nombreuses années, il est largement utilisé comme solvant puissant et faiblement inflammable dans la production de produits pharmaceutiques, d'aérosols et d'adhésifs, ainsi que dans d'autres processus tels que le décapage de peinture, le dégraissage de métaux et comme solvant d'extraction pour les denrées alimentaires.

3.2

Bien qu'il soit considéré comme l'un des hydrocarbures halogénés de faible poids moléculaire les plus sûrs, le DCM doit tout de même être utilisé avec prudence. Il est classé en Europe comme un produit cancérogène de catégorie 3, c'est-à-dire comme faisant partie des «[s]ubstances préoccupantes pour l'homme en raison d'effets cancérogènes possibles. Néanmoins les informations disponibles à leur sujet ne permettent pas une évaluation satisfaisante». Il doit s'accompagner de la phrase de risque R40 («effet cancérogène suspecté — preuves insuffisantes»). Le DCM est également une substance prioritaire au titre de la directive-cadre sur l'eau.

3.3

Plus préoccupant est le fait que le DCM soit également un puissant narcotique qui agit comme un dépresseur sur le système nerveux central, et qui peut causer la perte de connaissance ou la mort. Son utilisation a conduit à une série d'accidents, mortels ou non, généralement associés à des pratiques de travail peu sûres et à une surexposition massive, le plus souvent au cours de manipulations industrielles à cuves ouvertes ou lors d'une utilisation professionnelle à grande échelle. L'utilisation du DCM en système fermé, lorsque cela est faisable, élimine ces risques.

3.4

Au fur et à mesure que d'autres produits deviennent disponibles, les niveaux de production du DCM en Europe (sur des sites de production qui se trouvent en Allemagne, en France, en Italie, en Espagne, aux Pays-Bas, au Royaume-Uni et en Roumanie) diminuent progressivement. Sur près de 240 000 tonnes produites actuellement en Europe, environ 100 000 tonnes sont exportées. 30 à 50 % de la production restante sont destinés à l'industrie pharmaceutique et 10 à 20 % sont commercialisés sous forme pure pour les décapants de peinture. Le DCM recyclé provenant de l'industrie pharmaceutique fournit un tonnage similaire. Cette proposition traite exclusivement de l'utilisation du DCM dans les décapants de peinture.

3.5

Le décapage de peinture est connu de la plupart des ménages comme un processus essentiel pour conserver et décorer les objets et les surfaces en bois, en métal, en pierre et en plâtre, situés tant à l'intérieur qu'à l'extérieur. Il concerne également un certain nombre de marchés plus spécialisés, tels que la restauration des œuvres d'art, le nettoyage de graffitis et la remise en peinture de véhicules de grande dimension tels que les trains ou les avions.

3.6

Les décapants de peinture sont répartis, quelque peu arbitrairement, en trois catégories: «usage industriel» (utilisation continue et à grande échelle sur un site unique); «usage professionnel» (utilisation par des spécialistes, des entrepreneurs et des décorateurs sur des sites multiples) et «usage domestique» (utilisation occasionnelle par des particuliers lors de travaux d'entretien).

3.7

Il est difficile de déterminer pour chaque groupe le nombre réel d'incidents. Étant donné que les symptômes d'une intoxication due au DCM ressemblent à ceux d'une crise cardiaque, ce nombre peut (ou non) être quelque peu sous-estimé. Les données présentées à la Commission par les consultants RPA (Risk and Policy Analysts Ltd) indiquent qu'il y a eu en Europe au cours des vingt dernières années, trois à quatre accidents par an, dont un mortel, dus à l'utilisation de décapants de peinture à base de DCM. Les accidents mortels se sont concentrés en France (6), en Allemagne (6) et au Royaume-Uni (5), les accidents non mortels se sont, quant à eux, concentrés au Royaume-Uni (36), en Suède (12) et en France (6). Dans le sud de l'Europe, un seul incident a été enregistré au cours de la période étudiée par le cabinet RPA (1930-2007) — un accident mortel en milieu industriel en Espagne, en 2000. Les conditions climatiques locales et les pratiques de travail peuvent avoir une importance significative. Dans les pays chauds, les fenêtres sont toujours ouvertes, la ventilation est bonne et les risques sont négligeables; sous des climats plus froids, ce peut être le contraire.

3.8

Les accidents mortels se sont répartis de manière égale entre utilisateurs industriels et professionnels. La majorité des accidents non mortels ont été enregistrés auprès des opérateurs classés comme «professionnels». Les décès sont survenus dans la presque totalité des cas du fait d'une ventilation inadéquate et d'une mauvaise utilisation des équipements de protection individuelle, en particulier à proximité de grandes cuves ouvertes.

3.9

Un possible accident mortel lors d'une utilisation domestique (ou professionnelle) a été signalé en France, en 1993, mais il s'avère aujourd'hui impossible d'en prouver la cause, et par conséquent, cette donnée de première importance est contestée. Le seul autre décès connu de consommateur est survenu aux Pays-Bas en 1960. Il se peut que d'autres facteurs soient en cause.

3.10

Il existe bien entendu des solutions de remplacement pour les décapants de peintures à base de DCM. Ces procédés sont généralement classés en 3 catégories — le «décapage physique/mécanique» (ponçage, grattage, grenaillage); le «décapage pyrolytique/thermique» (dans des fours, sur lit fluidisé chaud ou en utilisant un chalumeau ou un pistolet à air chaud); et le «décapage chimique» (en utilisant: des solvants très puissants, notamment le DCM; des liquides ou des pâtes corrosives, généralement très alcalines; de l'acide formique ou des mélanges à base de peroxyde d'hydrogène). Chacun de ces processus peut donner des résultats et peut être privilégié dans des circonstances précises. Tous, d'une manière ou d'une autre, présentent des risques de natures diverses: d'une part, impact de particules, chaleur, incendie, explosion, irritation des yeux ou de la peau, ou d'autre part, risques dus à la composition des couches à enlever (tout particulièrement le plomb dans les peintures appliquée avant 1960). Lorsque l'on se trouve en présence de couches multiples datant de 100 ans et plus, dans des édifices anciens mais encore utilisables, voire même très intéressants, ou de surfaces sensibles qu'il ne faut pas endommager, il est nécessaire d'essayer plusieurs méthodes et d'expérimenter quelque peu.

3.11

Nous ne disposons pas de données sur la part de marché globale qu'occupent les différentes solutions de remplacement relevant de ces trois catégories, ni sur les différences de coûts entre les unes et les autres par mètre carré décapé. L'on estime que le DCM reste le solvant le plus largement utilisé, en particulier par le grand public, étant entendu que les applications à base de soude caustique sont également répandues. Même au sein de la catégorie des décapants chimiques, il est difficile de comparer les coûts. De manière générale, l'on s'accorde à penser que les décapants de peinture à base de DCM semblent moins chers que les produits concurrents, pour un même volume. Il est probable que cet avantage disparaît si l'on prend en compte la totalité des coûts de l'équipement de protection (lorsqu'un tel équipement est utilisé) et de l'élimination des déchets (le cas échéant).

3.12

Les coûts totaux sont également déterminés par la durée des traitements. Les produits et les processus qui agissent plus lentement mais qui sont moins nocifs demandent des opérations plus coûteuses et réduisent les bénéfices. Les solvants dont le point d'ébullition est plus élevé permettent de recouvrir de plus grandes surfaces en une fois mais nécessitent davantage de temps pour produire leurs effets. Pour le consommateur, des temps d'exposition courts sont remplacés par des temps d'exposition plus longs et, éventuellement, davantage de désagréments au plan domestique. (L'hypothèse adoptée par RPA, selon laquelle les consommateurs sont moins sensibles au facteur temps du fait qu'ils se livrent généralement aux activités de décapage durant leurs loisirs, devrait à coup sûr être remise en question). De nouvelles méthodes de travail et des modifications du flux de travail deviendront essentielles pour tous les utilisateurs. Pour un utilisateur industriel, tout passage à des produits à base d'eau allège les coûts de ventilation, mais alourdit considérablement les coûts consacrés aux cuves et à la tuyauterie pour réduire le plus possible le risque de corrosion. Au vu de toutes ces variables, il s'avère très difficile de prédire les conséquences de toute limitation appliquée à l'une quelconque des méthodes en question. Dans ces circonstances, les consommateurs sont particulièrement exposés, et vu les divergences d'opinions qui se manifestent au niveau gouvernemental, rien ne prouve que leurs choix de produits ou de procédés de remplacement soient les choix les plus conformes à leurs intérêts.

3.13

L'un des produits fréquemment utilisés en remplacement du DCM en tant que solvant, est le N-méthyle-2-pyrrolidone (NMP). Il a récemment été classé dans la catégorie «toxique pour la reproduction de catégorie 2», ce qui, à terme, aura pour conséquence l'interdiction de vente au grand public (mais non aux utilisateurs professionnels et industriels) des préparations le contenant. D'autres solvants, tels le 1,3 dioxolane, sont fortement inflammables.

3.14

Les systèmes basés sur les esters dibasiques (DBE), c'est-à-dire des mélanges d'adipate, de succinate et de glutarate de diméthyle, semblent être actuellement les solutions de remplacement les plus prometteuses, et peu d'éléments portent à croire que des dangers significatifs soient à craindre pour la santé humaine ou pour l'environnement. Le sulfoxide de diméthyle (DMSO) et l'alcool benzylique paraissent également être relativement «sûrs». La réponse à la question de savoir si les utilisateurs considèreront ou non l'une quelconque de ces alternatives comme rentable dépend toutefois de nombreux facteurs, et l'on ne peut garantir qu'ils les choisiront en fin de compte comme solutions de remplacement «sûres» pour une utilisation généralisée.

3.15

Globalement, il n'existe, à l'évidence, pas de méthode qui se distingue des autres par son caractère totalement acceptable, et il est clair que des mesures inappropriées risquent fort de provoquer une augmentation du taux actuel, relativement faible, d'incidents recensés. Ce qui est difficile est de trouver une solution qui satisfasse toutes les parties, en particulier les États membres dont les expériences vécues sont différentes et qui (ce qui est tout à fait raisonnable) ont de fortes convictions sur le sujet.

4.   Résumé de la proposition de la Commission

4.1

La proposition de la Commission vise à protéger la santé humaine et l'environnement, sans porter atteinte au marché intérieur du dichlorométhane, en particulier pour ce qui concerne son utilisation comme constituant majeur dans les décapants de peinture pour usages industriels, professionnels et grand public.

4.2

La proposition vise à interdire toute vente de décapants de peinture à base de DCM au grand public ainsi qu'aux professionnels qui ne seraient pas spécialement formés et agréés par des autorités compétentes dans les États membres. Les ventes aux installations industrielles ne seraient possibles que si celles-ci appliquent une série de mesures de protection, en particulier une ventilation efficace ainsi que la mise à disposition et l'utilisation d'un équipement de protection individuelle adéquat. Toutes les préparations à base de DCM devraient porter la mention indélébile suivante: «Réservé aux usages industriels et professionnels» (et, sous-entendu, exclusivement aux utilisateurs dûment agréés).

4.3

Aucun nouveau décapant de peinture à base de DCM ne pourrait être mis sur le marché pour la vente au grand public ou aux professionnels dans un délai de douze mois à compter de l'entrée en vigueur de la décision. Toute vente à ces deux groupes d'utilisateurs serait interdite à la fin d'une nouvelle période de 12 mois.

4.4

La décision entrerait en vigueur le troisième jour suivant celui de sa publication au Journal officiel de l'Union européenne.

4.5

La proposition s'accompagne d'un exposé des motifs et d'un document de travail des services de la Commission (analyse d'impact). Des informations supplémentaires peuvent être trouvées dans les analyses d'impact élaborées pour la Commission par des consultants externes (RPA, TNO) ou dans des rapports sur des sujets spécialisés (ETVAREAD, sur l'efficacité des retardateurs d'évaporation). Ces documents, quant à eux, ont été examinés par le comité scientifique compétent (CSRSE, comité scientifique des risques sanitaires et environnementaux). Il n'y a aucun rapport d'analyse des risques (RAR) de l'UE, étant donné qu'aucune des parties concernées n'a désigné le DCM comme substance prioritaire, malgré les préoccupations déjà en cours de constatation.

4.6

Certains États membres de l'UE (ainsi que d'autres grandes économies et partenaires commerciaux importants, tels que la Suisse et les États-Unis) ont également effectué des études pour étayer certaines prises de position précises en matière réglementaire et politique, prises de position souvent très contradictoires. Les industries concernées ont créé une abondance de données sur les risques éventuels et les avantages comparés de différents produits et processus; là encore, il n'est pas surprenant de constater des résultats contradictoires. Les observations d'autres parties concernées ont été consignées lors de la Semaine européenne de la sécurité et de la santé au travail «Construire en toute sécurité», en 2004, après une conférence d'experts organisée par le syndicat danois de la peinture. Selon RPA, en avril 2007, le Bureau européen des unions de consommateurs (BEUC), la Fédération européenne des travailleurs des mines, de la chimie et de l'énergie (EMCEF) et la Confédération européenne des syndicats (CES) n'avaient pas encore émis d'avis officiel.

5.   Observations générales

5.1

Le CESE reconnaît les difficultés auxquelles la Commission doit faire face en proposant une modification proportionnée et rentable de la directive 76/769/CEE en ce qui concerne l'utilisation du DCM en tant que solvant dans les décapants de peinture. Il existe relativement peu d'incidents signalés et vérifiés. Il a pu y avoir (ou non) plus de cas réels que de cas signalés. La législation en vigueur n'a pas toujours été respectée, et en ce qui concerne l'étiquetage, cette législation paraît inadéquate. Des produits et processus de remplacement existent mais n'ont pas encore été évalués, et tous présentent des risques. Il y a de bonnes raisons pour que les points de vue des États membres diffèrent. L'on ne saurait garantir que le résultat global sera favorable à l'une quelconque des catégories les plus susceptibles d'être affectées.

5.2

Le Comité reconnaît également qu'en raison d'évidentes contraintes de temps, il s'agit ici de la dernière chance de pouvoir mettre en place de nouvelles mesures dans le cadre de la directive évoquée ci-dessus. Si les États membres et le Parlement européen ne peuvent convenir d'une position commune, et si la décision proposée (ou une variante) ne peut être adoptée et mise en œuvre, il n'y aura plus de nouvelle initiative jusqu'à ce que le DCM soit évalué en ce qui concerne toutes ses utilisations, au titre du règlement (CE) 1907/2006 (REACH).

5.3

Le Comité est convaincu qu'un tel retard n'est ni nécessaire ni souhaitable, lorsqu'il s'agit de protéger l'environnement et la santé de tous les utilisateurs sur le lieu de travail ou en dehors. Il déplorerait aussi profondément toute fracture du marché intérieur qui surviendrait à propos de cette question ou d'une autre. La nécessité de trouver une base d'accord devrait être une évidence pour toutes les parties concernées. Il conviendrait de partir d'une volonté de gérer les risques et non de remplacer un risque par un autre.

5.4

À ce sujet, le Comité constate que le DCM peut être fabriqué, stocké, transporté et utilisé en toute sécurité en système fermé. Le DCM est non inflammable et ne contribue pas à la formation d'ozone troposphérique. Toutefois, en système ouvert, par exemple lors du décapage de peinture, le DCM pose clairement des problèmes dus à sa volatilité (il s'évapore rapidement), à la densité de la vapeur qui en résulte (elle s'accumule au point le plus bas ou aux endroits où la ventilation est insuffisante), et à son effet narcotique (il provoque la perte de connaissance et la mort). Tout cela contribue à aggraver les risques pour les enfants. Le DCM est également classé produit cancérogène de catégorie 3, et c'est ce risque potentiel qui domine en matière d'étiquetage de tout produit contenant du DCM.

5.5

RPA et d'autres ont constaté que cela est à la fois trompeur et insuffisant pour protéger convenablement les utilisateurs sur le lieu de travail et en dehors. Les législations en vigueur n'imposent pas de phrases ou de pictogrammes R (risque) ou S (conseils de sécurité), et le dispositif révisé des Nations unies concernant un système général harmonisé de classification et d'étiquetage n'impose pas non plus les équivalents de ces phrases ou pictogrammes, pour mettre en garde de manière adéquate contre le risque de narcose (et le risque de décès qui s'ensuit) ou, ce qui est plus surprenant, contre les risques graves encourus par les enfants (avertissements qui, bien sûr, seraient applicables à de nombreux produits et processus utilisés dans un cadre domestique).

5.6

Le fait de privilégier l'éventuel risque de cancer, risque non prouvé à ce jour, est également trompeur. Le CSRSE, dans son avis sur le rapport d'ETVAREAD relatif aux retardateurs de vapeur, a constaté que le mécanisme métabolique de la souris n'est pas identique à celui des humains pour le point limite testé et que par conséquent, sur base des éléments présentés, le DCM n'est vraisemblablement pas cancérogène. L'on ne dispose que de peu d'informations basées sur son utilisation réelle. L'on attend toujours les résultats de deux grandes études épidémiologiques sur des cohortes exposées au DCM aux États-Unis, dans d'autres industries. Dans l'UE, des cohortes ont pu être exposées à d'autres cancérogènes connus, tels que le styrène. RPA n'a fourni aucune preuve de risques réels de ce type résultant d'une exposition au DCM présent dans les décapants de peinture. Dans ces conditions, la phrase obligatoire R68 («possibilité d'effets irréversibles» ) n'est pas des plus utiles.

5.7

Il convient également de noter que les statistiques de RPA se rapportant aux incidents survenus au cours de la période 1930-2007, ont clairement montré les dangers résultant d'une surexposition massive au DCM, généralement du fait de très mauvaises pratiques de travail. Il n'y a pas eu de collecte de données équivalentes pour les produits et processus de remplacement. L'on peut toutefois se demander dans quelle mesure la pertinence de ces données peut être étendue à l'utilisation par les «professionnels» ou le «grand public» dans un cadre domestique. Des signes d'effets chroniques (à long terme) sur la santé dans le contexte industriel peuvent (ou non) se rapporter à des problèmes d'exposition aigüe (à court terme) dans un cade domestique; il est plus difficile d'extrapoler à partir des statistiques d'accidents (ce que sont, peut-être, ces données).

5.8

Les études ont également mis en lumière le manque de cohérence en ce qui concerne les valeurs limites d'exposition professionnelle (VLEP) sur les lieux de travail en Europe. Ces limites varient considérablement pour une substance donnée (ici le DCM) entre États membres et également d'une substance à l'autre (notamment entre le DCM et le DBE ou le DMSO). Les fabricants doivent reconnaître qu'il est de leur devoir de protéger leurs travailleurs; les autorités de réglementation doivent pour cela fournir un cadre réglementaire précis et cohérent fondé sur des données.

5.9

À cet égard, le Comité a pris note en particulier des Prescriptions techniques pour les substances dangereuses (TRGS 612) pour les solutions de substitution aux décapants de peinture à base de DCM, prescriptions publiées par le ministère fédéral allemand du Travail et des affaires sociales (BMAS), version de février 2006. Ces prescriptions, nettement plus détaillées que la proposition de la Commission à l'examen, pourraient servir de modèle à suivre pour contribuer à garantir la sécurité sur les lieux de travail.

5.10

Dans la plupart des cas, il faudrait trouver, dans cet ordre, une réponse aux questions suivantes: (a) pouvez-vous améliorer la sécurité de votre processus par substitution? (b) si ce n'est pas le cas, pourquoi? et (c) avez-vous pris toutes les mesures appropriées pour garantir la sûreté sur lieu de travail? Les risques, aussi bien que les avantages, potentiels liés aux produits et processus de remplacement devraient être pleinement reconnus. Avant tout, il faut évaluer d'une manière ou d'une autre les résultats probables de toute décision de retirer d'un marché quelconque une quantité significative d'une substance donnée; que feront concrètement les utilisateurs et leur choix améliorera-t-il leur sécurité personnelle?

5.11

À titre d'exemple, dans un État membre qui a déjà mis en œuvre l'interdiction de vendre des produits à base de DCM aux utilisateurs industriels tout comme aux utilisateurs professionnels, ce sont les produits contenant du DCM qui sont interdits à la vente, mais non le DCM lui-même. Il y a toujours moyen d'obtenir un décapant de peinture puissant en mélangeant du DCM et du méthanol sur le lieu d'utilisation. Le produit obtenu est moins cher mais ne contient pas les agents tensioactifs ni les retardateurs de vapeur qui améliorent tant l'efficacité que la sûreté du produit préparé correctement. Voila donc un résultat qui n'est pas souhaitable.

5.12

Comme l'ont observé RPA et la Commission, il est difficile de justifier ou de maintenir dans la pratique les distinctions entre les différentes catégories d'utilisateurs. La seule différence véritable réside dans le fait que les opérations continues de décapage de peinture sur site unique, à haut débit, nécessitent de grandes cuves ouvertes contenant des agents chimiques dans lesquels les produits sont trempés, tandis que les opérations hors site n'impliquent généralement pas une immersion et ne font dès lors pas intervenir de grandes cuves ouvertes. Les sites uniques sont soumis à d'autres directives, telles que les directives sur les émissions des solvants et sur la qualité des eaux usées, qu'il conviendrait de respecter scrupuleusement; les opérations hors site dépendent davantage de la vigilance et du bon sens de chacun. Lorsqu'il y a un employeur, c'est bien sûr à lui qu'incombe l'obligation de vigilance pour faire en sorte de garantir le meilleur environnement de travail possible pour tous les employés concernés.

5.13

La catégorie des «professionnels» devrait également être scindée en deux parties: d'une part, les utilisateurs qui travaillent en permanence à des opérations de nettoyage spécialisées (nettoyage de graffitis, restauration de façades, remise en peinture de trains et d'avions) et d'autres part, les utilisateurs pour lesquels le décapage de peinture est une nécessité occasionnelle qui représente un prologue nécessaire, mais long, à une activité plus lucrative (entrepreneurs, décorateurs et «grand public»). Les besoins, les capacités et les fragilités de ce dernier groupe paraissent être identiques et il devrait être traité de la même manière.

5.14

Enfin, une proposition visant à former et à agréer certains opérateurs a été présentée en tant que possibilité de dérogation qui permettrait de trouver un compromis entre des points de vue différents. Il est cependant difficile de mettre sur le même pied l'utilisation de décapants de peinture à base de DCM et des opérations telles que le désamiantage ou la manipulation des déchets nucléaires, pour lesquelles des agréments sont évidemment requis. Étant donné les coûts élevés qu'entraînent l'installation et le suivi d'un tel système, il est difficile d'imaginer que cette proposition puisse satisfaire les besoins de qui que ce soit.

6.   Observations particulières

6.1

Vu ce qui précède, le Comité ne considère pas que la proposition à l'examen soit proportionnée ni qu'elle puisse, par elle-même, contribuer à réduire le nombre d'incidents sur le lieu de travail ou en dehors. Étant donné les grandes différences de nature pratique et politique entre les États membres, il convient d'envisager et de mettre en œuvre d'autres stratégies sans plus tarder.

6.2

Cela consisterait notamment à apporter des modifications à l'emballage et à l'étiquetage des décapants de peinture à base de DCM afin de réduire le plus possible les risques d'accident et de mettre en lumière les véritables dangers. Les ventes aux personnes n'effectuant pas en permanence des opérations de décapage, sur site ou hors site, qu'elles soient considérées comme appartenant à la catégorie des «professionnels» ou à celle du «grand public», devraient être limitées à 1 litre par récipient et par achat. Les récipients devraient être munis de fermetures de sécurité pour protéger les enfants, comme le prévoient les règlements et directives existants ou nouveaux de l'UE en ce domaine, et/ou les normes ISO EN 8317:2004 et 862:2005. Des récipients à col étroit seraient également utiles afin de réduire les pertes, bien que cela oblige à décanter avant utilisation avec un pinceau et limite donc les avantages de cette solution. Les fabricants devraient travailler activement à de nouveaux systèmes de distribution plus sûrs s'ils souhaitent assurer la viabilité à long terme de ces produits. Les ventes de grosses quantités à tous les autres utilisateurs pour un usage «industriel» ou un usage «professionnel» continu devraient se faire par minimum de 20 litres. Les fabricants et les fournisseurs devraient reconnaître leur obligation de vigilance dans ces conditions et veiller à ce qu'une information et une formations suffisantes soient fournies pour garantir la sécurité des opérations de manipulation et d'élimination dans toutes les conditions d'utilisation.

6.3

Il conviendrait de développer, d'urgence, de nouveaux pictogrammes et phrases R et S relatifs aux substances narcotiques et à la mise en garde contre les dangers encourus par les enfants, afin de compléter ceux qui sont déjà utilisés. En ce qui concerne les décapants de peinture à base de DCM (et autres produits aux effets similaires), le libellé des avertissements destinés à tous les utilisateurs pourrait être plus ou moins le suivant: «Substance narcotique: de fortes concentrations entraînent la perte de connaissance et la mort»; «Ne pas utiliser en présence d'enfants ou d'adultes vulnérables»; «Ne pas utiliser dans un espace fermé: les vapeurs lourdes sont asphyxiantes». Ces mises en garde semblent être justifiées par des éléments objectifs et correspondent à des besoins réels. Il importe que ces phrases ne soient pas noyées au milieu d'autres avertissements de moindre importance. Un avertissement efficace et un pictogramme sans ambigüité possible portant sur la nécessité de protéger les enfants auraient probablement plus d'effet que de nombreuses recommandations plus compliquées. L'actuelle phrase S2 («Garder hors de la portée des enfants») est inadéquate dans ce contexte.

6.4

Il apparaît aussi clairement qu'il est nécessaire de développer pour l'ensemble de l'UE, une série de valeurs limites d'exposition professionnelle (VLEP) normalisées et ayant une cohérence interne, afin d'améliorer encore la sécurité sur le lieu de travail. Cela devrait être considéré comme un résultat utile du programme REACH pour les prochaines années.

6.5

De bonnes pratiques de travail et le respect rigoureux de tous les contrôles existants sont sans conteste essentiels à la gestion des risques sur le lieu de travail et en dehors. Les fabricants et les détaillants se partagent la responsabilité de fournir de bons conseils et de veiller à ce que les recommandations puissent être suivies par le grand public et par ceux qui utilisent occasionnellement des substances ou des processus dangereux. Il conviendrait d'assurer la promotion des conseils de sécurité et des équipements de protection avec le même enthousiasme et les mêmes incitations que la promotion des substances pour lesquelles ces conseils et ces équipements sont requis.

6.6

La méthode utilisée dans les prescriptions TRGS 612 allemandes devrait servir de base à des contrôles pour l'ensemble de l'UE. Des conseils techniques supplémentaires sur la ventilation ou le traitement des déchets peuvent être ajoutés en fonction des besoins. Les meilleures pratiques devraient être publiées et partagées.

6.7

Les études en cours aux États-Unis sur les effets de l'exposition prolongée au DCM devraient être conclues le plus rapidement possible et les résultats présentés au CSRSE pour évaluation. Il conviendrait d'examiner les possibilités de mettre en évidence des cohortes significatives susceptibles d'être étudiées en Europe.

6.8

Il conviendrait d'entreprendre aussi une analyse systématique des risques liés au décapage de peinture, pour que tous les produits et processus puissent être évalués sur une base comparable. Cela permettrait une meilleure compréhension de leurs caractéristiques relatives d'efficacité et de leurs risques relatifs et à terme, cela donnerait aux utilisateurs la possibilité d'effectuer leur choix en meilleure connaissance de cause sur le lieu de travail et en dehors. Ni l'une ni l'autre de ces propositions ne devrait toutefois retarder l'adoption des mesures de contrôle évoquées plus haut.

Bruxelles, le 17 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


31.3.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 77/35


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 68/151/CEE du Conseil et la directive 89/666/CEE du Conseil en ce qui concerne les obligations de publication et de traduction de certaines formes de société»

COM(2008) 194 final — 2008/0083 (COD)

(2009/C 77/06)

Le 23 mai 2008, le Conseil de d'Union européenne a décidé de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 68/151/CEE du Conseil et la directive 89/666/CEE du Conseil en ce qui concerne les obligations de publication et de traduction de certaines formes de société».

Le 21 avril 2008, le Bureau du Comité a chargé la section spécialisée «Marché unique, production et consommation» de préparer les travaux du Comité en la matière.

Compte tenu de l'urgence des travaux, le Comité économique et social européen a décidé au cours de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 18 septembre 2008) de nommer M. IOZIA rapporteur général, et a adopté le présent avis par 72 voix pour et 1 abstention.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le CESE approuve le contenu de la directive à l'examen et considère cette intervention comme une nouvelle avancée dans le cadre d'une stratégie de simplification administrative, comme prévu par la communication Examen stratégique du programme «Mieux légiférer» dans l'Union européenne.

1.2

Cette évaluation fait suite au jugement positif émis par l'Observatoire du marché unique du CESE qui, dans de nombreux avis, a toujours appuyé les initiatives de simplification administrative prises en matière de droit des sociétés. Celui-ci estime que ces initiatives, en réduisant les coûts pesant sur les entreprises, contribuent de manière significative à la compétitivité des entreprises européennes, dès lors qu'elles ne remettent pas en question la protection des intérêts des autres parties concernées.

1.3

Le CESE souligne que la proposition à l'examen, qui modifie les directives 68/151/CEE (première directive sur le droit des sociétés) et 89/666/CEE (onzième directive sur le droit des sociétés), vise à simplifier et à réduire les charges administratives dans des domaines délicats tels que celui des obligations de publication et de traduction de certaines formes de sociétés, sur lesquelles pèsent souvent des charges disproportionnées et parfois injustifiées.

1.4

Le CESE soutient les interventions proposées, réalisées au prix de modifications mineures de l'acquis communautaire et qui, outre qu'elles réduisent les charges administratives des entreprises, comme le démontre l'analyse d'impact présentée, suppriment la possibilité d'élever au sein de l'Union des obstacles injustifiés à la libre circulation des biens et des services.

1.5

Le CESE évalue donc positivement les mesures proposées et s'associe au Conseil pour inviter la Commission à suggérer de nouvelles interventions à l'avenir pour réduire les charges injustifiées qui subsistent dans certains secteurs et qui, sans apporter aucune valeur ajoutée aux utilisateurs, pèsent sur les entreprises et restreignent leur capacité à relever les défis posés par la concurrence mondiale.

1.6

Le CESE recommande à la Commission d'inciter les États membres à poursuivre la simplification administrative pour les entreprises, en transférant sur Internet toutes les données dont la législation et à la réglementation en vigueur imposent la publication.

2.   Contexte

2.1

Après avoir procédé à différentes évaluations initiées en 2005, la Commission a lancé un programme de simplification législative visant à réduire les coûts et les charges administratives qu'imposent aux entreprises les dispositions législatives en vigueur, en partant du principe que les coûts inutiles constituent un frein aux activités économiques de la Communauté et nuisent à la compétitivité des entreprises.

2.2

Le 14 novembre 2006, la Commission a présenté une communication au titre significatif: Mieux légiférer dans l'Union européenne  (1) ainsi qu'un document de travail intitulé: La mesure des coûts administratifs et la réduction des charges administratives dans l'Union européenne  (2). Ces deux initiatives soulignaient la nécessité de parvenir à des avantages économiques concrets pour les entreprises lorsque cette simplification est possible sans effet négatif sur les utilisateurs de ces informations.

2.3

Cette orientation stratégique a ensuite été consolidée par un programme d'action de mars 2007 pour la réduction des charges administratives (3), non encore publié au Journal officiel, qui fixe l'objectif de réduire ces coûts de 25 % d'ici à 2012.

2.4

En mars 2007, un certain nombre de propositions ont été adoptées en procédure accélérée dans le but de réduire les charges administratives et le 10 juillet 2007, la Commission a présenté une communication présentant ses suggestions de simplification en matière de droit des sociétés, de comptabilité et de contrôle des comptes (4).

2.5

Lors de sa réunion des 13 et 14 mars 2008, le Conseil européen a invité la Commission à poursuivre sur la même voie en recensant de nouvelles propositions de réduction (5).

2.6

C'est dans ce contexte que s'inscrit la proposition de directive à l'examen relative aux obligations de publication et de traduction en matière de droit des sociétés, qui prévoit la réduction et/ou la suppression des obligations d'information qui n'offrent pas de valeur ajoutée pour les utilisateurs.

3.   La proposition de la Commission

3.1

Selon la Commission, la directive à l'examen a pour objet de renforcer la compétitivité des sociétés européennes grâce à la réduction et/ou l'élimination des obligations administratives découlant des dispositions en vigueur et qui, loin de répondre aux besoins des utilisateurs de ces informations, constituent au contraire un facteur de surcoûts inutiles pour les entreprises.

3.2

La proposition prévoit la modification de la directive 68/151/CEE (première directive) et de la directive 89/666/CEE (onzième directive) en ce qui concerne les obligations de publication et de traduction lors de la constitution de certaines formes de sociétés.

3.3

S'agissant de la première directive, la proposition à l'examen établit une nouvelle obligation minimale par rapport à celle actuellement prévue par l'article 3, paragraphe 4, de la directive 68/151/CEE sur le droit des sociétés. La modification de cet article vise à supprimer certaines des obligations actuelles de publication dans les bulletins nationaux d'informations relatives à la constitution de sociétés et à la publication des comptes annuels qui, conformément à la législation en vigueur, doivent être publiées chaque année.

3.4

Cette simplification ne représente aucune réduction de la valeur ajoutée pour les utilisateurs, en particulier à une époque où les informations des registres du commerce, pour lesquels les États membres doivent garantir l'accès aux informations nécessaires, sont accessibles en ligne grâce une utilisation de plus en plus généralisée des outils électroniques.

3.5

Les États membres doivent prévoir un accès électronique aux informations par ordre chronologique et ils ne conservent la faculté de prescrire des obligations supplémentaires qu'à condition que celles-ci n'entraînent aucun surcoût pour les sociétés.

3.6

S'agissant de la directive 89/666/CEE (onzième directive) sur le droit des sociétés, la proposition modifie la pratique actuelle qui impose également à une société qui enregistre une nouvelle succursale la traduction de tous les documents figurant dans son propre dossier.

3.7

L'article 4 de la nouvelle directive impose la publication des documents dans une langue officielle de la Communauté et juge suffisant que cette traduction soit certifiée selon une procédure reconnue par les autorités de tout État membre. Cette attestation doit être acceptée par tous les États membres qui ne peuvent imposer aucune autre obligation formelle en dehors de celles prévues aux paragraphes 1 et 2, dans l'objectif de ramener au strict minimum les coûts de traduction et de certification.

3.8

La base juridique de la nouvelle directive n'est pas modifiée par rapport aux directives précédentes et reste donc l'article 44, paragraphe 2, point g) du traité. La Commission estime en outre que les modifications proposées sont justifiées et respectent les principes de subsidiarité et de proportionnalité.

3.9

La Commission indique que les modifications prévues et l'analyse d'impact ont reçu après un examen minutieux l'assentiment général d'une très large représentation des parties intéressées (110 parties en provenance de 22 États membres). Ces résultats positifs sont publiés sur le site web de la direction générale Marché intérieur et services (DG MARKT).

3.10

D'après les calculs effectués par la Commission dans l'analyse d'impact, les économies réalisées devraient s'élever à environ 410 millions d'euros par an en ce qui concerne la publication des comptes annuels et à près de 200 millions d'euros par an pour la publication des modifications dans les registres. Quelque 22 millions d'euros devraient être économisés en termes de traductions et de certifications.

4.   Observations générales

4.1

Dans de nombreux avis élaborés dans le cadre de l'Observatoire du marché unique, le CESE a exprimé son soutien à la simplification administrative prévue dans le cadre de l'initiative Examen stratégique du programme «Mieux légiférer» dans l'Union européenne.

4.2

Les avis du Comité soutiennent pleinement ce programme qui contribue concrètement à l'amélioration de la compétitivité des entreprises européennes en réduisant les coûts supportés par celles-ci — lesquels, dans le secteur du droit des sociétés, apparaissent largement dépassés et excessifs — sans que les interventions proposées remettent pour autant en question la protection des intérêts des autres parties concernées.

4.3

Le CESE souligne que ce programme, en intervenant dans des domaines délicats tels que celui des obligations de publication et de traduction, contribue non seulement à réduire les coûts dans une mesure significative, comme le démontre l'analyse d'impact, mais améliore également la crédibilité de l'Union européenne en supprimant toute tentation potentielle de dresser en son sein des obstacles artificiels et injustifiés aux règles de la libre circulation des biens et des services.

4.4

Il prend acte du fait que les initiatives lancées à ce jour ont été prises à l'issue d'une évaluation soigneuse des objectifs poursuivis, en veillant strictement au respect des principes fondamentaux de la subsidiarité et de la proportionnalité, et après avoir procédé à une consultation approfondie de toutes les parties concernées.

4.5

Le CESE approuve dès lors le contenu de la directive à l'examen, qu'il considère comme une avancée appréciable dans le cadre d'une stratégie générale, et il s'associe pleinement au Conseil pour inviter la Commission à intervenir dans d'autres secteurs et dans d'autres domaines dans lesquels des mesures de simplification s'avèrent nécessaires pour réduire les multiples charges pesant encore sur les sociétés.

Bruxelles, le 18 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  Examen stratégique du programme «Mieux légiférer» dans l'Union européenne, COM(2006) 689 final, JO C 78 du 11.4.2007, p. 9.

(2)  La mesure des coûts administratifs et la réduction des charges administratives dans l'Union européenne, COM(2006) 691 final.

(3)  Programme d'action pour la réduction des charges administratives dans l'Union européenne, COM(2007) 23 final.

(4)  Simplification de l'environnement des sociétés en matière juridique, comptable et de contrôle des comptes, COM(2007) 394 final.

(5)  Présidence du Conseil européen de Bruxelles des 13 et 14 mars 2008, doc. 7652/08, Concl. 1.


31.3.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 77/37


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant les directives 78/660/CEE et 83/349/CEE en ce qui concerne certaines obligations de publicité pour les entreprises de taille moyenne et l'obligation d'établir des comptes consolidés»

COM(2008) 195 final — 2008/0084 (COD)

(2009/C 77/07)

Le 23 mai 2008, le Conseil a décidé, conformément à l'article 44, paragraphe 1, du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant les directives 78/660/CEE et 83/349/CEE en ce qui concerne certaines obligations de publicité pour les entreprises de taille moyenne et l'obligation d'établir des comptes consolidés».

Le 21 avril 2008, Bureau du Comité a chargé la section spécialisée «Marché unique, production et consommation» de préparer les travaux du Comité en la matière.

Compte tenu de l'urgence des travaux, le Comité économique et social européen a décidé au cours de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 18 septembre 2008), conformément à l'article 20 et à l'article 57, paragraphe 1, de son règlement intérieur, de nommer M. CAPPELLINI rapporteur général, et a adopté le présent avis par 59 voix pour et 1 voix contre.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le CESE approuve l'extension aux entreprises de taille moyenne des exemptions prévues pour les petites entreprises dans la quatrième directive sur le droit des sociétés, étant donné qu'elles permettent de réduire les obligations d'information faites à ces entreprises.

1.2

Le CESE se félicite également des propositions de modification à la septième directive dans la mesure où elles se cantonnent à clarifier les liens entre les règles consolidées fixées par cette directive et les normes internationales d'information financière (IFRS).

1.3

Le CESE salue en particulier le respect de l'objectif de simplification de l'information financière: cette simplification ne se traduit par aucune perte significative d'informations pour les utilisateurs de comptes, et les autres parties intéressées ne sont quasiment pas concernés. La simplification proposée tient compte des besoins des PME et des utilisateurs d'informations financières.

1.4

Nous n'avons pas été assez loin à ce jour dans la recherche dans ce domaine et nous ne disposons pas de suffisamment d'éléments pour déterminer les besoins des utilisateurs, qui peuvent varier d'un État membre de l'UE à l'autre. Avant d'apporter d'autres modifications aux obligations en matière d'information financière auxquelles sont soumises les PME, la position actuelle consistant à reprendre les options prévues dans les quatrième et septième directives devrait être envisagée. Cette étude devrait porter sur (a) le recours aux options existantes (b) les motifs cités par les États membres pour expliquer leur choix et (c) un bilan dans les États membres de la réalisation de leurs objectifs.

1.5

Le CESE recommande par conséquent d'entreprendre des recherches afin de disposer d'une base à partir de laquelle faire des propositions pour une politique rationnelle en la matière à l'avenir.

1.6

Les obligations comptables ont figuré parmi les premiers domaines législatifs à être harmonisés au niveau européen. Le CESE rappelle que cet aspect est essentiel pour parachever le marché intérieur et souligne l'importance de l'harmonisation en vue de créer des conditions équitables dans l'UE.

1.7

Le commerce transfrontalier des PME ne cesse de croître dans l'UE. Il y a donc là matière à harmoniser les cadres et les règles d'information financière pour a) soutenir cette croissance des échanges et b) créer des conditions équitables.

2.   Contexte

2.1

Dans ses conclusions, le Conseil européen des 8 et 9 mars 2007 avait souligné l'importance de l'allègement des charges administratives pour stimuler l'économie européenne, en particulier eu égard aux bénéfices qui peuvent en découler pour les petites et moyennes entreprises.

2.2

Il soulignait qu'un effort conjoint soutenu de l'Union européenne et des États membres était nécessaire pour réduire les charges administratives en simplifiant les règles de comptabilité pour les petites et moyennes entreprises. La base légale pour de telles mesures serait l'article 44, paragraphe 1, du traité instituant la Communauté européenne (1).

2.3

La comptabilité et l'audit ont été considérés comme des domaines pouvant faire l'objet d'une réduction des charges administratives pour les entreprises dans la Communauté (2).

2.4

Une attention particulière est accordée à un allégement des obligations de communication d'informations financières pour les petites et moyennes entreprises.

2.5

Par le passé, un certain nombre de changements avait été introduits pour permettre aux entreprises relevant du champ d'application des directives 78/660/CEE et 83/349/CEE de recourir à des méthodes comptables conformes aux normes internationales de communication d'informations financières (IFRS).

2.6

Conformément au règlement (CE) no 1606/2002 du Parlement européen et du Conseil du 19 juillet 2002 sur l'application des règles comptables internationales (3), les entreprises cotées en bourse dans un marché réglementé de n'importe quel État membre doivent préparer leurs comptes consolidés en accord avec les normes IFRS et sont par conséquent exemptées de la plupart des obligations imposées par les directives 78/660/CEE et 83/349/CEE. Toutefois, ces directives continuent de constituer la base de la comptabilité pour les petites et moyennes entreprises dans la Communauté.

2.7

Les petites et moyennes entreprises sont souvent soumises aux mêmes règles que les entreprises plus importantes, mais leurs besoins spécifiques en matière de comptabilité ont rarement été analysés. Le nombre croissant d'obligations en matière de publicité notamment pose problème pour de telles entreprises. En effet, la lourdeur administrative découlant du grand nombre de règles régissant la communication de l'information financière peut entraver l'utilisation efficace du capital à des fins productives.

2.8

L'application du règlement (CE) no 1606/2002 a également mis en évidence la nécessité de clarifier le rapport entre les règles de comptabilité requise par la directive 83/349/CEE et les normes IFRS.

2.9

Tandis que les frais d'établissement peuvent être traités comme des éléments d'actif dans le bilan, l'article 34, paragraphe 2, de la directive 78/660/CEE exige que ce type de dépenses fasse l'objet de commentaires dans les notes accompagnant les comptes.

2.10

Les petites entreprises peuvent être exemptées de ces obligations de publicité en application de l'article 44, paragraphe 2, de cette directive. Afin d'éviter des charges administratives inutiles, il devrait également être possible de libérer les petites et moyennes entreprises de telles obligations.

2.11

La directive 78/660/CEE impose la publicité concernant la ventilation du chiffre d'affaires par catégorie d'activité et par marché géographique. Cela est requis de toutes les entreprises mais les petites entreprises peuvent en être dispensées en application de l'article 44, paragraphe 2, de cette directive. Afin d'éviter des charges administratives inutiles, il devrait également être possible d'exempter les petites et moyennes entreprises de telles obligations.

2.12

La directive 83/349/CEE exige d'une entreprise mère de préparer les comptes consolidés même si son unique filiale ou toutes ses filiales considérées collectivement ne présentent qu'un intérêt négligeable aux fins de l'article 16, paragraphe 3, de la directive 83/349/CEE. En conséquence, ces entreprises tombent sous le champ d'application du règlement (CE) no 1606/2002 et doivent par conséquent préparer des états financiers consolidés conformément aux normes IFRS. Cette exigence est considérée comme une lourdeur administrative lorsqu'une entreprise mère n'a que des filiales présentant un intérêt négligeable.

2.13

Aussi devrait-il être possible d'exempter une entreprise mère de cette obligation d'établir des comptes consolidés et un rapport annuel consolidé si toutes ses filiales, prises individuellement ou dans leur ensemble, peuvent être considérées comme présentant un intérêt négligeable.

2.14

Dans la mesure où les objectifs de cette directive, notamment la réduction des charges administratives liées à certaines obligations de publicité pour les moyennes entreprises et à l'obligation d'établir des comptes consolidés pour certaines entreprises de la Communauté ne peuvent être pleinement atteints par la seule action des États membres et que par conséquent une intervention au niveau communautaire serait plus à même, en termes d'échelle et d'effets, de les réaliser, la Communauté pourrait adopter des mesures en accord avec le principe de subsidiarité tel que défini à l'article 5 du traité.

2.15

Conformément au principe de proportionnalité, tel que défini dans ce même article, cette directive ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour la réalisation de ces objectifs.

2.16

Les directives 78/660/CEE et 83/349/CEE devraient donc être modifiées en conséquence.

3.   Observations générales

3.1

L'objectif de la modification de la directive 78/660/CEE (4e directive sur le droit des sociétés) (4) est de simplifier la communication de l'information financière pour les moyennes entreprises (5) et de les soulager de certaines obligations en la matière dans une perspective à court terme. Ces changements devraient conduire à une réduction des charges administratives sans perte d'informations utiles.

3.2

L'objectif de la modification de la directive 83/349/CEE (7e directive sur le droit des sociétés) (6) est de clarifier l'interaction entre les règles de consolidation énoncées dans cette directive et les normes internationales d'information financière.

3.3   Consultation et analyse d'impact

3.3.1

Le débat relatif à une réduction considérable de certaines obligations imposées aux PME en application des quatrième et septième directive sur le droit des sociétés a été lancé en temps voulu par la Commission européenne parallèlement au processus de consultation et en tenant compte de l'objectif consistant à assurer la prospérité de cette catégorie d'entreprises dans le marché unique européen. Le problème des obligations imposées aux PME découle invariablement du fait que les réglementations sont initialement conçues pour des entreprises plus importantes. De telles réglementations ne sont pas nécessairement adaptées aux PME pour lesquelles elles représentent très souvent un surcoût et une surcharge administrative.

3.4   Simplification sur la base des besoins des PME et des utilisateurs de l'information financière

3.4.1

Il importe que les discussions soient axées non seulement sur la «simplification» mais également sur la «pertinence» pour les PME — par opposition aux grandes entreprises inscrites en bourse — des obligations en matière de communication d'informations financières. Le débat sur la simplification tend à focaliser l'attention sur les coûts tandis celui sur la pertinence touche aux bénéfices de l'information financière et aux utilisateurs particuliers de celle-ci ainsi qu'à leurs besoins.

3.4.2

La simplification de la directive comptable doit prendre pour point de départ les besoins réels des PME et les utilisateurs de leurs comptes. Pour l'utilité et la pertinence des états financiers, il est essentiel en effet d'étudier les utilisateurs de cette information et leurs besoins pour la mise en place d'un cadre européen d'information financière pour les PME. Les utilisateurs sont multiplies: institutions financières (notation), pouvoirs publics (fiscalité, blanchiment d'argent …).

3.4.3

Il importe également de rappeler que les PME sont elles-mêmes de grandes utilisatrices d'informations financières, par exemple en tant que fournisseurs et sous-traitants d'autres PME, dans des situations où il est important d'évaluer leur solvabilité.

3.4.4

Dans le contexte de la «simplification» des règles comptables pour les PME, il importe de procéder à des analyses d'impact rigoureuses, y compris l'évaluation du bénéfice de l'information financière ainsi que des coûts/charges administratives. Ces analyses d'impact devraient prendre en considération les raisons pour lesquelles les obligations en matière d'informations financières ont initialement été imposées et les intérêts des parties prenantes (transparence …) qu'elles étaient censées protéger.

3.5   Harmonisation en vue de créer des conditions équitables dans l'UE

3.5.1

Le commerce transfrontalier des PME ne cesse de croître dans l'UE (7). Il y a donc là matière à harmoniser les cadres et les règles d'information financière pour a) soutenir cette croissance des échanges et b) créer des conditions équitables. Cela peut impliquer moins d'options et plus d'harmonisation, en matière de publication de l'information financière et de l'accès public à cette information, par exemple.

3.6   Pas des normes comptables internationales obligatoires pour les PME

3.6.1

Le projet de l'IASB relatif aux PME est la conséquence des demandes des instances normatives, des comptables et autres parties prenantes pour une alternative aux «full IFRS». Bien que réticent au départ à s'engager dans ce projet, l'IASB s'est laissé persuader que la majorité des parties prenantes voulait aller de l'avant et que lui seul avait la crédibilité et l'autorité suffisantes pour établir des normes comptables de qualité élevée et applicables. Le point de départ pour ce projet était néanmoins les «full IFRS», ensemble de normes conçu pour les compagnies cotées en bourse.

3.6.2

Les «full IFRS» ont été élaborés en ayant présente à l'esprit l'utilisation des informations financières par les compagnies inscrites en bourse et leurs parties prenantes. Tel que mentionné précédemment, l'information financière pour les PME est plus souvent destinée à une utilisation interne ou moins formelle (en rapport avec les fournisseurs, les sous-traitants, les institutions financières, etc.) et moins dictée par des obligations légales ou autres d'informer un large éventail d'utilisateurs.

3.6.3

L'application obligatoire des normes IFRS, ou d'un ensemble différent de nouvelles règles, basées sur celles conçues pour les d'entreprises inscrites en bourse, créerait des charges administratives considérables et entraînerait un coût financier pour les PME, qui risquent de surpasser tout effet positif. L'étroite relation entre les comptes annuels et les déclarations fiscales obligerait également des PME dans les différents états membres à établir deux séries de rapports financiers, ce qui alourdirait encore la charge administrative.

3.7   Simplification des directives

3.7.1

Concernant les options possibles pour simplifier ces règles en faveur des PME dans les «directives comptables» des entreprises, qui consistent essentiellement en un élargissement des options existantes à cette catégorie d'entreprises dans le cadre de ces directives, il importe d'étudier comment ces options fonctionnent dans les États membres préalablement à l'introduction de nouvelles directives. Le CESE recommande en outre de systématiser le principe «Only once» à tous les niveaux et tous les échelons (8).

3.7.2

Avant d'introduire d'autres changements dans les obligations en matière d'information financière auxquelles sont soumises les PME, la position actuelle consistant à reprendre les options prévues dans les quatrième et septième directives devrait être envisagée. Cette étude devrait porter sur (a) le recours aux options existantes (b) les motifs cités par les États membres pour expliquer leur choix et (c) un bilan dans les États membres de la réalisation de leurs objectifs.

3.7.3

L'un des problèmes majeurs posés par la situation actuelle est l'approche du «haut vers le bas», qui se traduit par (a) des charges administratives pour les PME et (b) une perte de pertinence des cadres et normes d'information financière pour ces entreprises. Un examen futur de la communication de l'information financière dans l'UE devrait traiter ce problème en adoptant une approche du «bas vers le haut». Une telle approche mettrait l'accent sur les besoins des PME et des autres parties prenantes et serait étayée par une étude des utilisateurs et de leurs besoins, comme proposé précédemment.

Bruxelles, le 18 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  JO C 325 du 24.12.2002, p. 35.

(2)  Projet de l'UE pour la mesure de référence et la réduction des coûts administratifs, deuxième rapport d'étape, 15 janvier 2008, page 37. À ce jour, le rapport final n'a pas encore été rendu public. (Voir la note de bas de page no 6 du document COM(2008) 195 final).

(3)  JO L 243 du 11.9.2002, p. 1.

(4)  JO L 222 du 14.8.1978, p. 11. Directive telle que dernièrement modifiée par la directive 2006/46/CE du Parlement européen et du Conseil (JO L 224 du 16.8.2006, p. 1).

(5)  Définitions visées à l'article 27 (moyennes entreprises) de la 4e directive sur le droit des sociétés.

(6)  JO L 193 du 18.7.1983, p. 1, telle que dernièrement modifiée par la directive du Conseil 2006/99/CE (JO L 363 du 20.12.2006, p. 137).

(7)  Voir les avis du CESE sur l'importance du marché intérieur:

CESE 952/2006 sur «Une stratégie de simplification de l'environnement réglementaire» (INT/296), JO C 309 du 16.12.2006, p. 18;

CESE 89/2007 sur le «Réexamen du marché unique» (INT/332), JO C 93 du 27.4.2007, p. 25;

CESE 1187/2008 sur des «Mesures politiques pour les PME» (INT/390) (pas encore publié au JO);

CESE 979/2008 sur les «Marchés publics internationaux» (INT/394) (pas encore publié au JO).

(8)  Avis du Comité économique et social européen sur «Les différentes mesures politiques, hormis un financement approprié, susceptibles de contribuer à la croissance et au développement des petites et moyennes entreprises» (avis exploratoire), INT/390. Ce principe signifie que les entreprises ne devraient pas être tenues de fournir à nouveau l'ensemble des informations que les autorités ont déjà obtenues par un autre biais, et ce à tous les niveaux (européen, national, régional et local).


31.3.2009   

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Journal officiel de l'Union européenne

C 77/41


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux inscriptions réglementaires des véhicules à moteur à deux ou trois roues» (Version codifiée)

COM(2008) 318 final — 2008/0099 (COD)

(2009/C 77/08)

En date du 18 juin 2008, le Conseil de l'Union européenne a décidé, conformément à l'article 95 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux inscriptions réglementaires des véhicules à moteur à deux ou trois roues» (Version codifiée).

Ayant estimé que le contenu de la proposition est entièrement satisfaisant et n'appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 17 septembre 2008), a décidé à l'unanimité de rendre un avis favorable au texte proposé.

 

Bruxelles, le 17 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


31.3.2009   

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C 77/41


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant le siège du conducteur des tracteurs agricoles ou forestiers à roues» (Version codifiée)

COM(2008) 351 final — 2008/0115 (COD)

(2009/C 77/09)

En date du 7 juillet 2008, le Conseil de l'Union européenne a décidé, conformément à l'article 95 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant le siège du conducteur des tracteurs agricoles ou forestiers à roues» (Version codifiée).

Ayant estimé que le contenu de la proposition est entièrement satisfaisant et n'appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 17 septembre 2008), a décidé à l'unanimité de rendre un avis favorable au texte proposé.

 

Bruxelles, le 17 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


31.3.2009   

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C 77/42


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil en matière de droit des sociétés concernant les sociétés à responsabilité limitée à un seul associé» (Version codifiée)

COM(2008) 344 final — 2008/0109 (COD)

(2009/C 77/10)

En date du 7 juillet 2008, le Conseil de l'Union européenne a décidé, conformément à l'article 44 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil en matière de droit des sociétés concernant les sociétés à responsabilité limitée à un seul associé» (Version codifiée).

Ayant estimé que le contenu de la proposition est entièrement satisfaisant et n'appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 17 septembre 2008), a décidé à l'unanimité de rendre un avis favorable au texte proposé.

 

Bruxelles, le 17 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


31.3.2009   

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C 77/42


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement (CE) no …/… du Parlement européen et du Conseil du […] concernant le certificat complémentaire de protection pour les médicaments» (Version codifiée)

COM(2008) 369 final — 2008/0126 (COD)

(2009/C 77/11)

En date du 7 juillet 2008, le Conseil de l'Union européenne a décidé, conformément à l'article 95 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de règlement (CE) no …/… du Parlement européen et du Conseil du […] concernant le certificat complémentaire de protection pour les médicaments» (Version codifiée).

Ayant estimé que le contenu de la proposition est entièrement satisfaisant et n'appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 17 septembre 2008), a décidé à l'unanimité de rendre un avis favorable au texte proposé.

 

Bruxelles, le 17 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


31.3.2009   

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C 77/43


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelables»

COM(2008) 19 final — 2008/0016 (COD)

(2009/C 77/12)

Le 3 mars 2008, le Conseil a décidé, conformément à l'article 175, paragraphe 1, et à l'article 95 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelables».

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 16 juillet 2008 (rapporteur: M. RIBBE).

Lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 17 septembre 2008), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 105 voix pour, 38 voix contre et 10 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le CESE a accueilli favorablement les objectifs en matière de lutte contre le changement climatique fixés en 2007 par le Conseil européen et que la présente proposition de directive notamment doit concrétiser.

1.2

Il approuve explicitement la Commission lorsqu'elle affirme que l'objectif de développement des énergies renouvelables (abrégées ci-après ER) se justifie non seulement au regard de la lutte contre le changement climatique mais également parce qu'il a ou peut avoir un impact positif évident sur la sécurité de l'approvisionnement énergétique, sur les possibilités de développement régionales et locales, sur le développement rural, sur les perspectives d'exportation, sur la cohésion sociale et sur les possibilités d'emploi, notamment en ce qui concerne les petites et moyennes entreprises, ainsi que les producteurs d'électricité indépendants.

1.3

Le CESE approuve par conséquent la proposition de directive et l'objectif de 20 % concernant les énergies renouvelables. Il considère que les ER non seulement contribuent à la protection du climat mais aussi qu'elles constituent un objectif stratégique pertinent de la politique énergétique, susceptible de conduire à une meilleure autosuffisance énergétique et, partant, à une sécurité accrue des approvisionnements.

1.4

L'objectif d'une réduction des émissions de CO2 de 20 % d'ici 2020, qui doit être atteint par le biais d'autres directives (1), et celui de porter à 20 % la part de l'énergie produite à partir de sources renouvelables qui fait l'objet de la proposition à l'examen sont étroitement corrélés et se complètent mutuellement. Cela étant, il faut aussi les considérer séparément, et ce d'autant que les effets de certaines ER ne sont pas nécessairement favorables s'agissant de la lutte contre le changement climatique (voir la section 6 relative aux agrocarburants).

1.5

Dans la mesure où la restructuration, reconnue comme nécessaire, de notre système énergétique supposera des investissements coûteux, il convient de veiller à accorder aux États membres une grande souplesse, afin qu'en toute circonstance ils puissent intervenir là où le plus grand bénéfice peut être atteint au regard de la lutte contre le changement climatique et des créations d'emplois, et ce au moindre coût.

1.6

Le CESE souligne qu'il est favorable au développement des ER et conscient que, pour réaliser les objectifs ambitieux du Conseil (une réduction des émissions de CO2 comprise en 60 % et 80 % et une autosuffisance énergétique accrue), la part des ER devra à moyen et long terme être nettement plus élevée que l'objectif de 20 % d'ici 2020 visé dans la proposition.

1.7

Le CESE relève que l'exigence stratégique consistant à remplacer partiellement le diesel ou l'essence par des agrocarburants est l'une des mesures les moins efficaces et les plus chères pour lutter contre le changement climatique, et correspond donc à l'heure actuelle à une très mauvaise allocation des ressources financières. Le CESE ne voit pas pourquoi les mesures les plus coûteuses devraient précisément être celles qui bénéficient du plus fort appui politique, et ce d'autant qu'outre les aspects économiques, une kyrielle de questions environnementales et sociales restent totalement sans réponse (voir la section 6). Aussi le CESE rejette-t-il l'objectif spécifique de 10 % d'agrocarburants.

1.8

Le CESE se félicite que l'UE entende appliquer aux agrocarburants des critères de viabilité. Les critères environnementaux énoncés dans la proposition à l'examen ne vont toutefois pas assez loin, et le document fait l'impasse sur les questions sociales. La proposition de directive est par conséquent tout à fait insuffisante sur ce point (2).

2.   Introduction

2.1

La directive à l'examen entend fixer des objectifs contraignants s'agissant du développement des ER. D'ici 2020, la part des énergies renouvelables devra représenter 20 % de la consommation énergétique de l'UE, chaque État membre (3) devant atteindre un objectif contraignant minimum de 10 % (4) pour la part des biocarburants dans les transports.

2.2

L'objectif européen de 20 % doit être atteint par la réalisation d'objectifs contraignants fixés par chaque État membre, tels que visés dans la partie A de l'annexe I. Les États membres doivent déterminer dans leur plan d'action national des objectifs pour les secteurs de l'électricité, du chauffage et du refroidissement et des transports et des biocarburants, et prévoir les mesures permettant de les atteindre.

2.3

La directive s'appuie sur les conclusions du conseil européen du printemps 2007. La proposition de directive est motivée par la lutte contre le changement climatique par l'utilisation des énergies renouvelables. Dans le même temps, la Commission constate précisément que «le secteur des énergies renouvelables se distingue par sa capacité à exploiter les sources d'énergie locales et décentralisées et à stimuler les industries de haute technologie de niveau mondial».

2.4

D'après la Commission, «les sources d'énergie renouvelables sont en grande partie indigènes, elles ne reposent pas sur la disponibilité future des sources d'énergie conventionnelles et leur nature essentiellement décentralisée rend nos économies moins vulnérables à un approvisionnement énergétique incertain». Ainsi la sécurité des approvisionnements est-elle, outre la lutte contre le changement climatique et l'innovation et le développement économique, une autre motivation majeure de la proposition de la Commission.

2.5

La Commission fait valoir que «le développement d'un marché des sources d'énergie renouvelables et des technologies associées a […] un impact positif évident sur la sécurité de l'approvisionnement énergétique, sur les possibilités de développement régionales et locales, sur le développement rural, sur les perspectives d'exportation, sur la cohésion sociale et sur les possibilités d'emploi, notamment en ce qui concerne les petites et moyennes entreprises, ainsi que les producteurs d'électricité indépendants».

2.6

La proposition de directive à l'examen ne fixe pas uniquement les objectifs quantitatifs visés ci-dessus mais prévoit en outre:

comment est calculée la part de l'énergie produite à partir de sources renouvelables (article 5), compte tenu notamment des importations,

la garantie d'origine (articles 6 à 10),

l'accès au réseau d'électricité (article 14),

les critères de viabilité environnementale pour les agrocarburants, ainsi que leur pertinence s'agissant de la lutte contre le changement climatique (article 15 et suivants),

l'encadrement des systèmes nationaux d'incitations afin d'éviter les distorsions de concurrence.

2.7

La nouvelle directive abroge la directive 2001/77/CE relative à la promotion de l'électricité produite à partir de sources d'énergie renouvelables sur le marché intérieur de l'électricité qui fixait l'objectif de «21 % d'électricité produite à partir de sources d'énergie renouvelables dans la consommation totale d'électricité d'ici 2010», ainsi que la directive 2003/30/CE visant à promouvoir l'utilisation de biocarburants ou autres carburants renouvelables dans les transports avec un objectif de 5,75 % de biocarburants d'ici 2010.

3.   Observations générales concernant les grands objectifs de la proposition de directive et son action en matière de lutte contre le réchauffement climatique

3.1

En 2007, le Conseil européen a «[réaffirmé] que les engagements de réduction des émissions en valeur absolue constituent l'élément central d'un marché mondial du carbone et que les pays développés devraient continuer à montrer la voie en s'engageant à réduire collectivement leurs émissions de gaz à effet de serre de 30 % environ d'ici 2020 par rapport à 1990, en vue de réduire collectivement leurs émissions de 60 à 80 % d'ici 2050 par rapport à 1990».

3.2

Le projet de directive à l'examen est un élément qui concrétise cette résolution. Le CESE a accueilli favorablement les conclusions du Conseil européen en matière de climat et souligne que les économies d'énergie et l'amélioration de l'efficacité énergétique doivent s'imposer comme des priorités de premier ordre. Le développement massif des ER est non seulement inévitable au regard de la politique en faveur du climat mais sera tout bonnement indispensable en raison de la raréfaction prévisible des ressources fossiles à moyen ou long terme. Les augmentations brutales du prix des énergies fossiles observées actuellement contribueront à assurer plus rapidement la rentabilité économique de nombreuses ER.

3.3

Le CESE se félicite que, dans l'exposé des motifs de sa proposition, la Commission n'aborde pas uniquement les aspects climatiques mais accorde en outre une importance majeure aux questions de sécurité des approvisionnements et d'emploi. Elle rappelle à plusieurs reprises l'importance que peuvent revêtir des structures décentralisées d'approvisionnement en énergie, notamment pour l'économie régionale et les zones rurales (paragraphes 2.4 et 2.5). Le CESE partage cet avis. À l'aune de ces éléments, il considère en revanche indispensable d'aborder les différentes stratégies en matière d'ER de manière nettement plus différenciée qu'à l'heure actuelle.

3.4

Le CESE juge, à l'instar de la Commission, que se poser en chef de file du développement et de l'utilisation des ER peut se révéler positif pour l'Europe dans la lutte contre le réchauffement climatique tout en procurant à l'économie européenne des avantages compétitifs non négligeables lui permettant d'attirer les entreprises. La proposition de directive lance un signal clair en faveur d'une politique énergétique, environnementale et industrielle qui, dans l'optique des prochaines négociations internationales sur le climat, s'adresse également à l'ensemble de la communauté internationale.

3.5

La répartition concrète des charges, en d'autres termes les contributions nationales à l'objectif européen d'une réduction globale de 20 % des émissions de CO2, est fixée par la «proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative à l'effort à fournir par les États membres pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre afin de respecter les engagements de la Communauté en matière de réduction de ces émissions jusqu'en 2020» (COM(2008) 17 final) et par la «proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2003/87/CE afin d'améliorer et d'étendre le système communautaire d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre» (COM(2008) 16 final).

3.6

Le CESE approuve sur le plan politique et stratégique l'objectif d'une utilisation de 20 % d'ER d'ici 2020 et le considère réalisable tant au niveau technique qu'économique, ouvrant ainsi la perspective de passer à une politique énergétique de l'après carburants fossiles. Le CESE estime en outre que les objectifs chiffrés nationaux peuvent être atteints, et ce à plus forte raison qu'un éventail de possibilités parfaitement souples (rachat, participation à des projets etc.) sera mis à la disposition des États membres. Toute remise à plat du système énergétique aura à l'évidence un coût et n'ira pas sans d'importantes restructurations. Il convient d'investir non seulement dans les installations de production d'énergie électrique renouvelable, mais également dans des technologies et des capacités de stockage de l'énergie afin de compenser les variations dans la génération d'énergie dues à l'insuffisance de vent ou d'ensoleillement, ainsi que dans le développement des conduites d'énergie entre les États membres de l'UE. Mettre l'accent uniquement sur la production d'énergie ne permettra pas d'atteindre les résultats escomptés.

3.7

L'Allemagne encourage par exemple la production d'électricité à partir d'énergies renouvelables à travers une loi sur la mise en réseau. La part de l'électricité verte s'élève actuellement à 15 %. Les surcoûts, supportés par les consommateurs d'énergie du fait de la rémunération de la mise en réseau, représentent environ 3,5 milliards d'euros par an, un chiffre qui ne tient toutefois pas compte du bénéfice pour l'économie allemande, sous la forme de créations d'emplois, de la prévention des dommages environnementaux ou des nouvelles rentrées fiscales.

3.8

Afin de minimiser les coûts liés à la réalisation des objectifs, la proposition de directive prévoit que les valeurs-cibles nationales puissent également être atteintes en soutenant des mesures de promotion des ER dans d'autres États. L'importation d'électricité produite à partir d'ER — bénéficiant d'une garantie d'origine — est également possible, ce que le CESE considère en soi judicieux. Il soutient néanmoins le souhait de certains États membres de soumettre le commerce à autorisation afin d'éviter que les incitations en faveur des ER financées par un État membre (5) puissent être utilisées pour réaliser des économies dans un autre État membre.

4.   Limitation de la marge de manœuvre en matière de développement des énergies renouvelables

4.1

Le CESE approuve la démarche de la Commission qui fixe un objectif global pour les trois secteurs dans lesquels les ER entrent en jeu (à avoir l'électricité, le chauffage et le refroidissement et les transports) plutôt que des objectifs distincts pour chacun d'entre eux. Les États membres ont toute latitude pour articuler des mesures dans les trois secteurs de sorte que chaque pays atteigne l'objectif global qui lui a été assigné.

4.2

Cet assouplissement est néanmoins largement mis à mal dans la mesure où il est prévu d'assigner spécifiquement à l'un des trois secteurs un objectif contraignant, à savoir la substitution dans le secteur des transports du diesel et de l'essence.

5.   Le rôle particulier des agrocarburants dans la proposition de directive

5.1

La Commission confère en effet un rôle particulier aux agrocarburants.

5.2

De nombreuses études sur les agrocarburants publiées ces derniers mois font apparaître que, contrairement à l'énergie solaire, la biomasse est une ressource limitée et qu'elle entrera inévitablement en concurrence avec la production de denrées alimentaires ou la préservation de la biodiversité pour ce qui est de l'utilisation des surfaces. Seule l'ampleur de cette concurrence est encore controversée. Aussi faut-il, avant que les responsables politiques ne fixent le cap, mener une réflexion stratégique précise quant au type d'ER qui est la mieux adaptée à un secteur donné. Des analyses d'impact très précises sont donc nécessaires.

5.3

Dans une recommandation de novembre 2007 sur l'utilisation de la biomasse en tant que source d'énergie, le conseil scientifique du ministère allemand de l'agriculture a estimé qu'à long terme les énergies solaire et éolienne seraient les principales ER, notamment parce qu'elles présentent un potentiel nettement supérieur à celui de la biomasse. Le conseil énonce trois raisons pour étayer sa position:

a)

L'énergie solaire permet d'utiliser des surfaces qui n'entrent pas en concurrence avec la production de biomasse à des fins alimentaires. Par ailleurs, la production énergétique par unité de surface est sensiblement supérieure à celle de l'énergie produite à partir de la biomasse.

b)

La rareté des terres arables au niveau mondial se traduit, dans un contexte de hausse des prix du pétrole, par une augmentation des prix des bioénergies, si bien que le niveau général des prix agricoles est lui aussi tiré vers le haut. Cet état de fait conduit également à une hausse des coûts des matières premières destinées aux centrales de bioénergie, alors que les prix plus élevés du pétrole, du charbon et du gaz rendent plus rentable l'énergie solaire.

c)

Compte tenu de la rareté des terres arables, la forte extension des cultures énergétiques débouche nécessairement sur la mise en culture de surfaces jusqu'alors inexploitées (labour de pâturages, déforestation) ou, le cas échéant, sur une intensification de l'exploitation des terres. Cela provoque une augmentation des émissions de CO2 et de N2O si bien qu'en définitive l'extension des cultures énergétiques peut même se révéler contreproductive pour le climat.

5.4

Lorsque les ressources naturelles disponibles sont rares et que le passage à de nouveaux modes d'approvisionnement énergétique renouvelables et, dans toute la mesure du possible, décentralisés suppose des investissements relativement élevés, il faut tout particulièrement veiller à appliquer le principe d'une concentration des moyens financiers sur les stratégies les plus efficaces de lutte contre le changement climatique.

5.5

Certains des types de bioénergie retenus à l'échelle de l'UE, à savoir les agrocarburants et la production de biogaz à partir du maïs, bénéficient pour partie d'un soutien public et se caractérisent par des coûts d'évitement du CO2  (6) très élevés (compris entre 150 euros et 300 euros par tonne de CO2).

5.6

D'autres types de bioénergie, par exemple la production de biogaz à partir du lisier (dans l'idéal en cogénération), la cogénération d'électricité et de chaleur à partir de copeaux de bois (provenant de résidus de bois ou des exploitations à courte rotation) ou encore la coincinération de copeaux de bois dans de grandes centrales électriques, affichent des coûts d'évitement qui ne dépassent pas 50 euros par tonne de CO2  (7).

5.7

Le Centre commun de recherche de la Commission européenne constate que, pour réduire les émissions de gaz à effet de serre à l'hectare, il est nettement plus efficace d'utiliser la biomasse pour produire de l'électricité plutôt que des agrocarburants liquides (8). Les centrales biomasse modernes sont presque aussi efficaces que les installations utilisant des carburants fossiles, si bien que pour la production de chaleur et d'électricité, une mégajoule (MJ) de biomasse correspond à environ 0,95 MJ d'énergie fossile. L'efficacité énergétique de la transformation de la biomasse en carburant liquide destiné aux transports n'est en règle générale que de 30 % à 40 %. Une MJ de biomasse ne remplace ainsi qu'environ 0,35 à 0,45 MJ de pétrole brut utilisé dans les transports.

5.8

La production d'agrocarburants permet d'éviter le rejet d'environ 3 tonnes de CO2 par hectare, alors que ce chiffre atteint 12 tonnes par hectare s'agissant des types de bioénergie visés au paragraphe 5.6.

5.9

Dans ce contexte, le CESE se demande pourquoi la Commission entend fixer explicitement un objectif de 10 % d'agrocarburants. Il rappelle que le Conseil européen a déclaré au printemps que cet objectif devait être atteint dans un souci d'efficacité économique et que trois conditions devaient être réunies, à savoir:

une production durable,

la mise sur le marché d'agrocarburants de deuxième génération, et

la modification de la directive 98/70/CE concernant la qualité de l'essence et des carburants diesel.

5.10

S'agissant de la production durable, les questions sont plus nombreuses que les réponses (voir également la section 9), et les agrocarburants de deuxième génération ne sont pas encore disponibles. Ainsi, au moins deux des trois critères fixés par le Conseil européen ne sont pas respectés, ce qui n'empêche toutefois pas la Commission d'inscrire l'objectif de 10 % dans son projet de directive.

5.11

La Commission justifie sa position en faisant notamment valoir que, par rapport aux autres secteurs de l'économie, les transports sont le secteur qui enregistre la plus forte progression des émissions de gaz à effet de serre et que les agrocarburants «sont actuellement plus coûteux que d'autres formes d'énergies renouvelables, ce qui peut signifier qu'ils seraient très peu développés en l'absence d'exigence particulière».

5.12

Le CESE ne saurait approuver cet argument:

5.12.1

Les émissions de gaz à effet de serre du secteur des transports sont il est vrai hors de contrôle. Cela étant, de l'avis du CESE, ce ne sont pas des plafonds de rejet de gaz d'échappement plus rigoureux ni le remplacement de 10 % de l'essence et des carburants diesel qui règleront le problème. Ils ne pourront même pas compenser l'augmentation des répercussions du secteur des transports sur l'environnement attendues dans les années à venir.

5.12.2

Le CESE a rappelé à maintes reprises qu'il fallait pour remédier à ce problème opter pour une politique de réduction du trafic et modifier la répartition modale au profit de modes de transports plus respectueux de l'environnement, tels que le rail, les transports publics de passagers à brève distance et la navigation.

5.12.3

Sur le plan technique, le CESE ne considère pas que l'avenir des transports individuels motorisés soit dans le moteur à combustion interne mais plutôt dans la propulsion électrique alimentée par des ER. D'après des calculs de l'EMPA (9), pour qu'une Volkswagen Golf puisse parcourir 10 000 kilomètres, il faudrait cultiver chaque année 2 062 mètres carrés de colza destiné à la production d'agrodiesel. La production de l'énergie nécessaire pour parcourir cette distance à partir de panneaux solaires supposerait d'en recouvrir chaque année 37 mètres carrés soit environ un soixantième de la surface du champ de colza.

5.12.4

L'exigence stratégique de remplacer le diesel ou l'essence par des agrocarburants est par conséquent l'une des mesures les moins efficaces et les plus chères pour lutter contre le changement climatique et correspond à une très mauvaise allocation des ressources financières. Le CESE ne voit pas pourquoi les mesures les plus coûteuses devraient précisément être celles qui bénéficient du plus fort appui politique, et ce d'autant qu'outre les aspects économiques, une kyrielle de questions environnementales et sociales restent totalement sans réponse.

5.12.5

Dans ces conditions, le CESE est en désaccord avec la Commission lorsqu'elle affirme que «développer l'utilisation des biocarburants dans les transports (…) est l'un des moyens les plus efficaces» de faire face aux problèmes.

5.13

Sachant que la Commission entend autoriser les agrocarburants lorsqu'ils permettront de réduire d'au moins 35 % les émissions de gaz à effet de serre — par rapport aux carburants fossiles —, l'objectif de 10 % conduira ainsi, à trafic égal, à réduire les émissions de gaz à effet de serre rejetées par les transports motorisés d'à peine 3,5 %. Étant donné que les transports contribuent à hauteur d'environ un quart à l'ensemble des émissions de gaz à effet de serre, le potentiel global de réduction des émissions de gaz à effet de serre est par conséquent de 1 %, un chiffre sans commune mesure avec les moyens financiers investis ni avec les risques encourus.

5.14

Quand bien même la production d'agrocarburants pour les transports serait considérée comme une utilisation opportune de la biomasse, il faudrait veiller à la plus grande efficacité. Il ressort toutefois clairement de l'annexe VII à la proposition de directive à l'examen que la transformation de la biomasse en éther ou en bioéthanol n'est pas la voie à suivre. En effet, toute transformation moléculaire (industrielle) suppose d'utiliser et par conséquent de perdre de l'énergie. Il serait plus judicieux d'utiliser directement la biomasse sans transformation industrielle ou chimique.

5.15

Des constructeurs de tracteurs qui proposent désormais des moteurs fonctionnant avec de l'huile végétale pure ont démontré la faisabilité technique de cette méthode.

5.16

L'annexe VII fait apparaître que cette technologie permet de réaliser la plus importante réduction d'émissions de gaz à effet de serre: l'huile de colza pure présente une valeur par défaut de la réduction des émissions de gaz à effet de serre de 55 %, l'agrodiesel de colza de 36 % seulement et l'éthanol de blé de 0 % par rapport aux carburants fossiles. Le CESE ne comprend pas pourquoi la Commission ne présente pas explicitement cette option comme particulièrement pertinente, d'autant qu'elle a toutes les chances de déboucher sur la constitution de structures d'approvisionnement énergétique décentralisées, ainsi que sur des emplois dans l'agriculture et en milieu rural.

5.17

De l'avis du CESE, une bonne stratégie consisterait par exemple à promouvoir l'utilisation des huiles végétales pures, produites notamment à partir de cultures mixtes respectueuses de l'environnement, dans l'agriculture elle-même ainsi que pour alimenter en carburant les parcs automobiles municipaux et les bateaux (10). Ainsi, les agriculteurs pourraient être directement associés à la mise en place de réseaux énergétiques régionaux et en profiter directement. La stratégie misant sur les agrocarburants en ferait en revanche des producteurs de matières premières aussi bon marché que possible destinées à l'industrie pétrochimique, si tant est que les matières premières utilisées soient d'origine européenne.

6.   Observations relatives à l'argument de la sécurité des approvisionnements

6.1

La Commission émet l'hypothèse qu'une grande partie de la biomasse nécessaire à la production des agrocarburants sera cultivée dans des régions au climat favorable situées hors de l'UE. Remplacer les importations de pétrole par l'importation de biomasse ne réduit toutefois pas la dépendance vis-à-vis des importations mais ne fait que les diversifier.

6.2

La finalité de la politique énergétique de l'UE ne saurait raisonnablement consister à remplacer une dépendance par une autre.

6.3

La priorité devrait plutôt être de privilégier l'approche qui place véritablement les sources d'énergie décentralisées, disponibles au niveau local ou régional, au cœur de la nouvelle stratégie dans le domaine des ER. Les bioénergies peuvent et doivent s'intégrer dans ce dispositif mais pas celles envisagées dans le cadre de la stratégie qui mise sur les agrocarburants.

7.   Emploi

7.1

La Commission précise que l'énergie produite à partir de sources renouvelables «remplace de façon équivalente les énergies conventionnelles, et elles sont fournies au moyen des mêmes infrastructures et systèmes logistiques». Le CESE considère cette prise de position comme trompeuse: les ER produites à partir de structures décentralisées sont pour partie diamétralement opposées aux énergies «traditionnelles» produites le plus souvent à partir de grandes structures centralisées.

7.2

Toute stratégie en matière d'agrocarburants reposant sur des importations d'énergie et leur mélange aux carburants diesel et à l'essence utilise des énergies traditionnelles, en d'autres termes les structures centralisées des compagnies pétrolières internationales. Leurs structures de production et de distribution s'en trouvent ainsi renforcées, ce qui est tout à fait dans l'intérêt du secteur pétrolier. Cette approche ne créera toutefois guère d'emplois (11) en Europe.

7.3

En misant en revanche sur une utilisation plus efficace de la production de chaleur et d'électricité à partir de copeaux de bois par exemple ou sur les huiles végétales pures cultivées au niveau régional, voire sur un approvisionnement en biogaz des véhicules ou des régions en l'absence de réseau de gaz naturel, ainsi que sur des technologies solaires décentralisées etc., de nouvelles possibilités de production et de distribution apparaissent à l'échelon régional et ouvrent des perspectives significatives en matière d'emploi.

7.4

S'agissant de l'énergie solaire et de l'utilisation décentralisée de l'énergie photovoltaïque, les consommateurs (d'énergie) produisent eux-mêmes une part substantielle de l'énergie dont ils ont besoin, ce qui prouve du reste que l'organisation de l'approvisionnement énergétique à partir d'ER est tout à fait différente de la structure actuelle de l'approvisionnement en énergie.

7.5

D'autres mesures, visant par exemple à accroître l'efficacité énergétique ou les économies d'énergie, peuvent également créer des centaines de milliers d'emplois dans les petites et moyennes entreprises, et ce dès la phase de mise en place. L'isolation des bâtiments, l'installation d'équipements solaires et éoliens ou la construction de centrales à biogaz en sont autant d'exemples. Il appartient aux responsables politiques de veiller à ce que ces potentialités soient effectivement exploitées, la stratégie misant sur les agrocarburants mise en avant dans le projet de directive n'étant pas la solution la plus efficace.

7.6

Ainsi, s'agissant de la question de l'emploi, il faut impérativement procéder à un examen très minutieux et individualisé des différentes ER. Si les ER peuvent effectivement promouvoir et soutenir les structures économiques régionales, elles peuvent aussi contribuer à consolider les grandes structures centrales.

7.7

Il en va du reste de même des pays où la biomasse est cultivée en vue de produire des agrocarburants. En Allemagne, le ministère fédéral chargé de l'aide au développement conclut dans un document de mars 2008 intitulé «Agrocarburants et politique de développement» que, pour le développement économique, environnemental et social des pays en développement, une stratégie de production de biomasse en vue de son exportation destinée à répondre à la forte demande émanant des pays industrialisés comporte des risques élevés et ne crée aucun emploi. En revanche, la biomasse destinée à un approvisionnement énergétique décentralisé qui associe les petits producteurs a, d'une manière générale, un effet plutôt positif.

8.   Observations relatives aux critères de durabilité

8.1

Le CESE se félicite que la Commission prévoie de fixer également des critères de durabilité pour la production de biocarburants. Bien que cette mesure constitue une avancée majeure, le CESE considère que la proposition à l'examen est tout à fait insuffisante.

8.2

La Commission n'a elle-même de cesse de souligner l'importance de l'équilibre entre les piliers économique, environnemental et social de la politique de développement durable. Or, la mise entre parenthèse totale des questions sociales dans les critères énoncés justifie à elle seule que le CESE ne puisse en aucun cas considérer la proposition de directive comme la concrétisation d'une stratégie de développement durable avisée ou l'adoption de critères de durabilité pour les agrocarburants. Il convient par conséquent de revoir complètement la proposition de directive sur ce point.

8.3

De l'avis du CESE, il importe que, compte tenu des modifications indirectes à l'utilisation des terres, des critères environnementaux et sociaux efficaces soient définis, et ce non seulement pour les agrocarburants mais également pour l'ensemble des importations agricoles, y compris les aliments pour animaux.

8.4

Il est par ailleurs illusoire de croire que la fixation d'une date butoir (en l'espèce janvier 2008) pourrait mettre à l'abri les forêts vierges ou les tourbières par exemple contre une mise en culture en vue de la production d'agrocarburants. Cette option supposerait un cadastre et un dispositif administratif et de contrôle efficaces. L'expérience a montré que l'un comme l'autre n'existent pas dans la plupart des pays émergents et des pays en développement.

8.5

Le CESE considère que les critères énoncés à l'article 15, paragraphes 3 et 4, sont insuffisants pour préserver la biodiversité et éviter que des surfaces à forte teneur en carbone soient exploitées. Des surfaces autrement plus nombreuses qu'uniquement celles visées au paragraphe 3, lettres a) à c), sont importantes pour préserver la biodiversité. Il en va de même des teneurs en carbone visées au paragraphe 4, lettres a) et b).

8.6

À l'annexe VII, partie B, la Commission dresse la liste d'«estimations de valeurs types et de valeurs par défaut pour des biocarburants du futur» qui ne sont pas encore sur le marché ou dont la part de marché n'est que négligeable. Le CESE estime qu'il convient de fonder toute décision sur des valeurs tangibles et non sur des estimations.

Bruxelles, le 17 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  Voir le paragraphe 3.5.

(2)  Le CESE a déjà fait valoir dans ses avis «Rapport de situation sur les biocarburants» (TEN/286 — CESE 1449/2007, JO C 44 du 16.2.2008, p. 34) et «Réduction des émissions de gaz à effet de serre/transport routier» (NAT/354 — CESE 1454/2007) la nécessité de prévoir des critères de viabilité environnementale et sociale pour les agrocarburants.

(3)  Dans la proposition de directive, le terme officiel retenu est celui de «biocarburants». Le CESE a dans plusieurs avis attiré l'attention sur les nombreux problèmes environnementaux provoqués par ces «biocarburants». Dans la mesure où le préfixe «bio» laisse entendre qu'il s'agit d'un produit irréprochable sur le plan écologique (c.f. agriculture «bio»logique), le CESE opte dans le présent avis pour le terme plus neutre d'«agrocarburant» plutôt que de «biocarburant».

(4)  La proposition de directive précise: «(…) il est proposé que chaque État membre parvienne à une part minimum de 10 % d'énergies renouvelables (au premier rang desquelles les biocarburants) dans le secteur des transports à l'horizon 2020 (…)».

(5)  Ou les consommateurs d'un État membre.

(6)  Le terme de «coûts d'évitement» renvoie ici aux équivalents CO2.

(7)  Source: «Nutzung von Biomasse zur Energiegewinnung — Empfehlungen an die Politik» (L'utilisation de la biomasse pour la production d'énergie — Recommandations), conseil scientifique de la politique agricole du ministère fédéral de l'alimentation, de l'agriculture et de la protection des consommateurs, document adopté en novembre 2007.

(8)  Centre commun de recherche de la Commission européenne: «Biofuels in the European Context: Facts, Uncertainties and Recommendations», 2008,

http://ec.europa.eu/dgs/jrc/downloads/jrc_biofuels_report.pdf (disponible en anglais uniquement).

(9)  EMPA est un institut de recherche en sciences des matériaux et en technologie. Il est rattaché à l'université technique fédérale de Zurich (ETH). Source: Ökobilanz von Energieprodukten: Ökologische Bewertung von Biotreibstoffen. Schlussbericht, avril 2007, à la demande de l'agence fédérale allemande de l'énergie, de l'agence fédérale allemande de l'environnement et de l'agence fédérale allemande de l'agriculture. EMPA, laboratoire «technologie et société», St-Gallen: R. Zah, H. Böni, M. Gauch, R. Hischier, M. Lehmann, P. Wäger;

Voir: http://www.news-service.admin.ch/NSBSubscriber/message/attachments/8514.pdf

(10)  Voir également l'avis sur «Les énergies renouvelables» (TEN/211 — CESE 1502/2005 du 15 décembre 2005, rapporteuse: Mme SIRKEINEN, paragraphe 3.3.1).

(11)  Voir également l'étude du Centre commun de recherche de la Commission européenne mentionnée ci-dessus: «Biofuels in the European Context: Facts, Uncertainties and Recommendations», 2008,

http://ec.europa.eu/dgs/jrc/downloads/jrc_biofuels_report.pdf (disponible en anglais uniquement).


31.3.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 77/49


Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions «Promouvoir une démonstration à brève échéance de la production durable d'énergie à partir de combustibles fossiles»

COM(2008) 13 final

(2009/C 77/13)

Le 23 janvier 2008, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — «Promouvoir une démonstration à brève échéance de la production durable d'énergie à partir de combustibles fossiles».

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 16 juillet 2008 (rapporteur: M. SIMONS).

Lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 17 septembre 2008), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 143 voix pour, 3 voix contre et 5 abstentions.

1.   Conclusions

1.1

Le CESE est favorable aux mécanismes de promotion de la démonstration des techniques CSC (captage et de stockage du CO2) dans les centrales tel qu'exposé dans la communication de la Commission, mais se déclare préoccupé par le manque de capacité de financement et d'options de financement claires à moyen terme (2010-2020) et à long terme (2020 et au-delà).

1.2

De l'avis du Comité, il y a lieu de veiller à ce que le manque de capacité de financement par la Commission soit en partie compensé par les ressources provenant du système européen d'échange de quotas d'émissions, c'est-à-dire par la vente aux enchères de quotas d'émissions par le secteur de la production d'énergie après 2013. Il est important de noter que jusqu'ici, aucun mécanisme financier spécifique — pas même sur la sécurité nécessaire — n'a encore été suggéré au niveau de l'UE.

1.3

Il est important que les conditions financières soient clairement établies d'ici la fin 2009 au plus tard. Ce n'est qu'ainsi que l'on pourra garantir une base financière permettant de démarrer les préparatifs en vue de rendre opérationnels les sites de démonstration à grande échelle des technologies CSC en 2015.

1.4

Les recettes provenant du système européen d'échange de quotas d'émissions de l'UE devraient être perçues au niveau national, dans le cadre de la mise en œuvre de la directive révisée sur le système européen d'échange de quotas d'émissions à partir de 2013.

1.5

L'idée de la Commission consistant à organiser au niveau national des ventes aux enchères de quotas d'émissions tout en consacrant 20 % des recettes à des mesures visant à réduire les émissions de CO2 est totalement inappropriée et représente un gaspillage sur le plan financier. Il y a lieu d'inviter de toute urgence les États membres à modifier radicalement leur position sur les recettes émanant du système européen d'échange de quotas d'émission et à consacrer l'ensemble de ces recettes aux technologies à faible taux d'émission de carbone et aux technologies neutres au point de vue des émissions de carbone, en réservant une enveloppe destinée plus particulièrement aux technologies CSC. Ce serait une manière de trouver les milliards d'euros dont manque la Commission actuellement, mais qui sont indispensables pour soutenir la démonstration à brève échéance à des technologies CSC à grande échelle.

1.6

La Commission devrait élaborer un plan définissant l'organisation et le rôle de l'initiative industrielle européenne, et faire en sorte que cette initiative complète, sans les chevaucher, les autres initiatives telles que les projets soutenus dans le cadre du VIIe programme-cadre, à savoir la plate-forme européenne des centrales électriques à combustion fossile à taux d'émission zéro et le programme phare européen.

1.7

Le CESE rejoint la Commission sur la nécessité d'une infrastructure européenne commune pour le transport et le stockage du CO2. Un système de transport paneuropéen est indispensable afin de relier les États membres qui ne seraient pas en mesure de créer leurs propres capacités de stockage.

1.8

Compte tenu de l'importance du transport, élément essentiel pour la création d'une grande infrastructure de CSC, le Comité préconise l'adoption de l'abréviation CTSC: Captage, Stockage et Transport du Carbone, qui prend en compte l'élément «transport».

2.   Antécédents de l'avis (1)

2.1

Le développement de l'ensemble de la technologie CSC, qui comprend le captage, le transport et le stockage du CO2, se trouve toujours à une phase précoce, encore partiellement exploratoire. En revanche, le rendement des technologies conventionnelles de production d'énergie augmente progressivement. Considérant qu'il est urgent de remplacer la capacité de production des centrales au cours des prochaines décennies, le Comité recommande d'adopter une approche pragmatique, dans laquelle les deux technologies pourront être développées et utilisées en parallèle. Alors que le développement d'un niveau d'efficacité plus élevé peut être modulé en fonction du marché, il importe d'aider davantage les technologies CSC (les centrales comme les infrastructures) dans leur phase de démonstration et d'arrivée sur le marché.

2.2

La technologie CSC est développée dans deux directions: en tant que technologie intégrée à des centrales, dans lesquelles le CO2 est capté avant le processus de combustion, et en tant que technologie «post-combustion», au cours de laquelle le CO2 est ôté des fumées de la combustion («lavage du CO2»). Cette dernière méthode est à même, si elle est développée dans le sens correspondant, d'équiper déjà aujourd'hui de nouvelles centrales d'une grande efficacité, dans la mesure où celles-ci seraient déjà conçues pour l'utiliser («compatible avec le captage»). Ces deux voies technologiques ont en commun le fait que le CO2 capté sur le lieu de la centrale doit être transféré dans un autre lieu adapté pour y être stocké.

2.3

La question de la sécurité et de la durée à long terme du stockage du CO2 est capitale pour l'acceptation sociale et politique de cette méthode. C'est, en dernière analyse, la question environnementale la plus importante qui se pose par rapport à cette technique (2).

2.4

Lors d'une réunion tenue à Aomori, au Japon, le 9 juin 2008, les membres du Groupe des 8 pays les plus industrialisés (G8) a convenu de lancer 20 projets de capture et de stockage de carbone (CSC) et de démonstration à grande échelle d'ici 2010, en vue d'aider au développement de la technologie et à la réduction des coûts d'un large déploiement des CSC à partir de 2020.

2.5

La réunion du G8 a réuni des représentants venus du Royaume-Uni, du Canada, d'Italie, du Japon, de France, d'Allemagne, de Russie, des États-Unis, de Chine, d'Inde et de Corée du Sud.

2.6

Désireux de soutenir l'engagement du G8 en faveur des technologies CSC, le ministère américain de l'énergie a promis un financement destiné à permettre l'ajout de la technologie CSC au cycle combiné à gazéification intégrée (CCGI) à échelle commerciale et multiple, ou d'autres centrales utilisant des technologies avancées à faible taux d'émission de carbone dans le cadre de son programme FutureGen. Les États-Unis financent également sept partenariats régionaux de capture du carbone afin de démontrer l'efficacité du stockage terrestre à grande échelle et à long terme de dioxyde de carbone.

2.7

L'annonce du G8 concernant le CSC est conforme à la recommandation de l'Agence internationale de l'Energie (AIE), qui prône l'utilisation de la technologie CSC dans le cadre d'une solution d'ensemble visant à réduire de moitié les émissions de gaz à effet de serre d'ici 2050.

3.   Résumé du document de la Commission

3.1

Les technologies de captage et de stockage du CO2 (CSC) figurent parmi les principales technologies existantes et nouvelles susceptibles d'apporter les réductions d'émissions de CO2 requises pour atteindre les objectifs après 2020 (3).

3.2

Une application à grande échelle des technologies CSC dans des centrales électriques peut être commercialement viable d'ici 10-15 ans, permettant une exploitation autonome de ces technologies d'ici 2020 ou peu après, dans le cadre d'un dispositif reposant sur le système d'échange de quotas d'émissions, qui sera un instrument essentiel d'élimination des émissions de CO2 dans la production d'énergie à partir de combustibles fossiles.

3.3

Pour en arriver là, il est indispensable de démarrer immédiatement les phases préparatoires; il est particulièrement important d'effectuer sans tarder la démonstration des technologies CSC déjà développées au niveau mondial et utilisées dans d'autres applications pour pouvoir les adapter en vue d'une application à grande échelle dans le domaine de la production d'énergie.

3.4

En mars 2007, le Conseil européen a approuvé, et réitéré en mars 2008, la volonté de la Commission d'encourager la construction et l'exploitation d'ici 2015 d'un maximum de 12 installations de démonstration de technologies permettant d'utiliser les combustibles fossiles d'une façon durable pour la production commerciale d'énergie.

3.5

En complétant la proposition de la Commission relative à une directive sur le stockage géologique du CO2 qui établit un cadre juridique pour les technologies CSC en Europe, cette communication encourage la poursuite des efforts en matière de développement de la filière CSC, avec comme but la création d'une structure servant à coordonner et à soutenir efficacement les activités de démonstration à grande échelle des technologies CSC et les conditions d'un investissement notable de l'industrie dans plusieurs installations.

3.6

Il est impératif que l'Europe engage dès que possible une action de démonstration de la CSC dans un cadre politique intégré prévoyant notamment des activités ciblées de R&D et des mesures d'information et de sensibilisation du public. Selon la Commission européenne, un retard de 7 ans dans la démonstration entraînant un retard similaire dans l'introduction, au niveau mondial, des technologies CSC pourrait se traduire par un rejet évitable de plus de 90 Gt de CO2 dans le monde d'ici 2050 (4), soit l'équivalent de plus de 20 ans d'émissions actuelles totales de CO2 dans l'UE.

3.7

Des engagements clairs et décisifs de la part de l'industrie européenne, soutenus par des incitations et des garanties de la part de la Commission, sont essentiels si l'on veut obtenir des financements publics. Plus particulièrement, les États membres comptant utiliser le charbon pour leur production d'énergie future devraient adopter des mesures de soutien en faveur d'une démonstration à brève échéance des technologies CSC.

3.8

Les obstacles mentionnés sont de deux ordres:

obstacles de nature législative et obstacles liés à la sécurité: ces deux types d'obstacles peuvent être surmontés à temps et sans dépenses supplémentaires. Une fois que l'on disposera d'un cadre réglementaire garantissant la prise en compte des risques, l'on pourra aborder la question des barrières juridiques;

obstacles de nature économique: le coût de l'introduction des technologies CSC, estimé à environ 35 euros/tonne de CO2 d'ici 2020, pourrait être facilement couvert par la valeur des quotas d'émission.

Le document de la Commission suggère en outre que l'UE peut jouer un rôle de premier plan dans l'établissement d'une réglementation internationale sur les technologies CSC.

3.9

La proposition de la Commission de lancer une initiative industrielle européenne devrait réunir les efforts des pionniers qui cherchent à créer un réseau de projets de démonstration. Elle devrait aider aux échanges d'expériences et d'information, sensibiliser davantage l'opinion publique et contribuer à centrer les politiques établissant une chaîne de valeur complète pour les technologies CSC. En outre, l'on s'attend à ce que cette initiative industrielle européenne contribue à attirer des financements nationaux et internationaux.

3.10

La Commission déclare ne pouvoir fournir qu'une part minimale des fonds nécessaires; elle compte dès lors essentiellement sur la capacité des pionniers à générer des financements et sur des financements provenant de fonds publics fournis par les gouvernements des États membres et les ONG internationales.

3.11

Les actions définies sont au nombre de trois:

mobilisation des pionniers du secteur industriel par l'intermédiaire d'un programme phare et d'un avantage commercial réel;

bonne volonté de la Commission en ce qui concerne l'autorisation au cas par cas l'utilisation des aides d'état et d'autres mesures préférentielles émanant des États membres;

mobilisation de financements au niveau communautaire: initiative spécifique de la Commission et de la BEI afin d'élaborer des instruments de financement et de partage des risques.

En outre, il convient de souligner que plus l'industrie tardera à adopter les technologies CSC, plus les décideurs politiques se verront contraints d'envisager des mesures obligatoires.

3.12

La proposition de la Commission aborde également la question de la nécessité d'une infrastructure européenne commune en matière de transport et de stockage du carbone et prévoit la révision des orientations communautaires en matière de RTE-É, y compris en ce qui concerne les CSC.

4.   Contexte de la saisine de la Commission européenne

4.1

Suites aux décisions du Conseil de mars 2007 concernant l'évolution du climat et la sécurité de l'approvisionnement en énergie, la Commission a proposé une série de mesures, sous forme de documents séparés, permettant d'atteindre les objectifs formulés dans les décisions du Conseil. Ces mesures mettent en particulier l'accent sur l'efficacité énergétique, le développement de sources d'énergie renouvelables ainsi que le développement et l'utilisation de technologies novatrices dans ces domaines. Le Comité a élaboré, sur chacun de ces sujets précis, des avis spécifiques (5).

4.2

Dans ce cadre, les procédés permettant de réduire durablement les émissions de gaz à effet de serre provenant de l'utilisation de sources d'énergie fossile jouent également un rôle important. C'est le sujet du présent avis.

4.3

Le présent avis se situe dans l'esprit d'un avis du Comité (6) sur cette technique, portant sur la proposition de directive de la Commission relative au stockage géologique du dioxyde de carbone.

5.   Observations générales

5.1

La communication de la Commission insiste à plusieurs reprises sur le fait que le succès de ses plans passe par la démonstration à brève échéance a) de l'importance du rôle du système européen d'échanges de quotas d'émissions et b) de l'ampleur des avantages commerciaux réels. De toute évidence, ce système promet de générer un avantage commercial réel pour les pionniers; toutefois, il risque d'arriver trop tard si la Commission ne fournit pas avant la fin de l'année 2009 des règles claires et définitives concernant le système européen d'échanges de quotas après 2012.

D'ici la fin 2009, toutefois, l'industrie devra disposer d'une base solide pour pouvoir prendre des décisions en matière d'investissements et démarrer à temps la phase d'ingénierie et de construction pour que les premières installations de CSC soient opérationnelles en 2015. Le document de la Commission n'est pas assez précis sur ce point, surtout compte tenu du manque actuel de clarté concernant le système européen d'échange de quotas d'émission et du caractère vague des exigences de la Commission envers l'industrie et les gouvernements nationaux qui n'ont toujours pas réglé la question du financement.

5.2

Le système européen d'échange de quotas d'émissions constitue en effet un marché important pour le carbone qui peut être très efficace pour autant que l'on s'oriente vers la formation d'un prix des quotas d'émissions qui soit supérieur aux frais supplémentaires résultant de la mitigation du carbone. Faute de dispositions claires quant aux règles et à l'ampleur des enchères, d'un recouvrement approprié des recettes et d'un rôle dirigeant de la Commission les investisseurs potentiels seront tentés de rester dans l'expectative par suite des trop grandes incertitudes.

5.3

Une infrastructure européenne commune pour le transport et le stockage du CO2 permettrait de toute évidence de faciliter une mise en œuvre à grande échelle des technologies CSC dans l'ensemble de l'Europe. Il se peut que certains États membres ne soient pas en mesure de créer eux-mêmes leurs propres capacités de stockage (7). Dans la mesure du possible, il convient d'utiliser les infrastructures existantes tombées en désuétude ou d'intégrer de nouvelles facilités à d'autres infrastructures. Compte tenu de l'importance du transport, le Comité entend même préconiser l'adoption explicite de l'abréviation CTSC: Captage, Stockage et Transport du Carbone, qui inclut l'élément «transport», même si l'abréviation CSC est déjà connue — et reconnue — au niveau international.

5.4

La Commission fait porter un lourd fardeau aux gouvernements des États membres en ce qui concerne le financement des technologies CSC, dans la mesure où il n'existe aucune marge permettant une contribution importante dans le cadre du budget actuel. Compte tenu de l'intérêt de cette question au niveau européen et de la nécessité d'un encadrement pour garantir le succès des projets de démonstration, la Commission devrait assumer une part beaucoup plus importante du financement des projets en matière de CSC qu'elle ne l'envisage pour le moment — quitte à le compléter par des apports des États membres (8).

5.4.1

La vente aux enchères de droits d'émission dans le cadre du système européen d'échanges de quotas a permis d'aborder la question des carences de la Commission en matière de financement. À l'heure actuelle, seuls 20 % sont consacrés à soutenir les technologies à faible taux d'émission de carbone et les technologies neutres au point de vue des émissions de carbone. Il y a lieu d'inviter de toute urgence les États membres à modifier radicalement leur position sur les recettes émanant du système européen d'échange de quotas d'émission et à consacrer l'ensemble de ces recettes aux technologies à faible taux d'émission de carbone ou neutres du point de vue du carbone, en réservant une enveloppe destinée plus particulièrement aux CSC (9). Ce serait une manière de trouver les milliards d'euros dont manque la Commission actuellement, mais qui sont indispensables pour soutenir la démonstration à brève échéance des projets CSC à grande échelle.

5.4.2

De plus, comme l'a déjà suggéré le Comité, le budget Énergie du Septième programme-cadre (PC7) pourrait être augmenté de manière substantielle (15 %), ce qui se traduirait par une augmentation de 2 à 3 % du PIB investi dans la recherche et le développement. L'on apporterait ainsi, par le biais du PC7, une réelle contribution à la promotion de la démonstration des CSC.

5.4.3

Il existe un certain nombre d'autres mesures, dans le cadre du Septième programme-cadre, susceptibles de contribuer à la préparation de projets de démonstration à grande échelle. Il conviendrait d'établir clairement le lien entre ces différentes mesures et les mécanismes proposés afin de promouvoir la démonstration.

5.5

L'intégration de l'initiative industrielle européenne dans la palette des mesures et des initiatives dans lesquelles est engagée la Commission n'est pas mentionnée (10). Afin de parvenir à une approche intégrée, il y a lieu également d'indiquer quelles sont les mesures à prendre.

5.6

Le développement et la mise en œuvre des technologies CSC devraient avoir un impact substantiel et positif sur l'emploi en Europe. Certains grands fournisseurs d'équipements de CSC et d'insfrastructures sont basés en Europe. Ils pourraient développer, commercialiser et installer des équipements, des gazoducs et des oléoducs lorsque les technologies le permettront — et ce dans le monde entier. L'Europe est bien placée sur le plan mondial sur les CSC, et pourrait renforcer encore sa position, à condition que l'UE réussisse rapidement ses démonstrations à grande échelle des technologies CSC en Europe (11).

5.7

Le CESE proposer de parler de combustibles «propres» plutôt que «durables». Le mot «durable» convient mieux à l'énergie solaire et aux bio-énergies, par exemple, mais est moins adapté aux technologies CSC qui permettent d'utiliser les combustibles fossiles de manière propre en attendant que l'on réussisse à effectuer une transition complète vers une fourniture d'énergie durable.

5.8

En ce qui concerne la faisabilité du stockage sans risque de CO2, l'on dispose déjà d'une expérience considérable dans ce domaine, comme le montrent les exemples ci-dessous:

a)

gisements de gaz: la possibilité de confinement du gaz naturel/CO2 est prouvée; le potentiel de stimulation des gisements (accroissement de l'extraction de gaz à partir d'un gisement donné — EGR) reste à démontrer;

b)

gisements pétroliers: la possibilité de confinement du pétrole est prouvée; la possibilité de stimulation de gisement (accroissement de l'extraction du pétrole à partir d'un champ pétrolier donné) est une pratique courante dans le sud-ouest des États-Unis depuis le milieu des années 1970;

c)

gisement aquifères: potentiel important, mais grandes incertitudes; nécessité d'une évaluation site par site; bonne expérience depuis de nombreuses années avec le champ de Sleipner (aquifère salin d'Utsira);

d)

gisements de houille: niche intéressante pour améliorer l'extraction du méthane provenant d'un gisement de houille par injection de CO2. Cette technique en est encore au stade de la recherche;

e)

un important aspect des démonstrations à grande échelle sera de montrer et d'apporter la preuve à l'opinion publique que le stockage du CO2, notamment dans les gisements de gaz, est tout aussi sûr que la production de pétrole et de gaz à partir de gisements similaires. Le CESE demande à la Commission de prendre les mesures appropriées afin d'informer l'opinion publique.

6.   Observations particulières

6.1

Le Comité soutient dans les grandes lignes les mécanismes figurant dans la proposition et visant à promouvoir la démonstration des technologies CSC dans les centrales telle qu'elle est décrite dans la communication de la Commission, et formule les observations suivantes:

6.1.1

La stratégie de la Commission devrait avoir pour objectif de veiller à éviter tout recoupement/chevauchement entre l'initiative industrielle européenne et le programme phare européen de la ZEP — Plateforme des centrales électriques à combustion fossile à taux d'émission zéro. Ces différentes activités devraient être bien coordonnées et se renforcer mutuellement.

6.1.2

Il est question, dans la communication de la Commission, d'étendre le champ de l'initiative industrielle européenne au-delà d'un simple «réseau de projets». Le but visé par cette suggestion n'est pas clair. En outre, il est également précisé que les «choix de financements possibles pour une telle extension» restent à déterminer. Quelle est la valeur ajoutée d'une telle extension et quel est le rapport avec les autres initiatives déjà mentionnées dans le domaine des CSC?

6.2

Le Comité n'approuve pas la proposition de concentrer les moyens financiers pour les démonstrations des technologies CSC, dans la mesure où cette dernière ne va pas assez loin.

6.2.1

La proposition comporte une approche au cas par cas selon laquelle la Commission examine les initiatives qui lui sont soumises par les États membres et décide quelles sont les formes d'aides d'État et les autres mesures nationales à autoriser. Il serait souhaitable, pour le succès des projets de démonstration du programme phare européen, que la Commission joue un rôle central de coordination et de supervision. C'est elle qui doit se charger de la totalité du financement. En plus de la contribution de la Commission, le financement pourrait être complété par la suite par une contribution ad hoc des États membres concernés, lesquels se verraient alors autorisés à accorder des aides d'État. Dans le même temps, l'industrie devrait s'engager à assurer le financement et la mise en œuvre.

6.2.2

La Commission pourrait, dans des circonstances qui restent à préciser, garantir un financement européen proportionnel à une contribution nationale ad hoc; une telle initiative constituerait un encouragement pour les autorités des États membres. Un cofinancement prédéterminé contribuerait à dissiper les incertitudes relatives au financement des projets et pourrait en accélérer l'évolution.

6.2.3

Catalyser le financement de projets de démonstration par le biais de nouveaux instruments financiers est intéressant en soi. Mais en définitive, de tels concepts ne fonctionneront que si le risque est acceptable et si l'on sait avec précision comment, à long terme, les frais supplémentaires encourus seront récupérés.

6.3

Le Comité estime toutefois avec la Commission que l'intégration des CSC dans le système européen d'échange de quotas d'émissions constitue un stimulant important pour la création et la mise en œuvre de projets de démonstration à grande échelle dans un contexte européen. La communication de la Commission précise également que les pionniers doivent pouvoir retirer «un avantage commercial réel».

6.4

La Commission déclare cependant que le système européen d'échange de quotas pourrait de toute façon couvrir, voire excéder, les coûts supplémentaires. Dans l'état actuel des choses, cela ne peut toutefois être garanti, pour les raisons suivantes:

il n'existe encore aucune certitude quant au système européen d'échange de quotas après 2012;

l'intégration des CSC dans le système européen d'échange de quotas ne supprime pas les incertitudes sur la formation du prix des quotas d'émissions. Les principaux problèmes à cet égard sont notamment le caractère, l'ampleur et le calendrier des enchères au niveau des États membres dans le respect du plafond de l'UE ou encore l'influence du mécanisme de développement propre (MDP);

les frais réels des CSE après 2012 (démonstration à brève échéance) et après 2020 (mise en service commerciale) seront fortement tributaires des progrès dans le domaine de la recherche et du développement ainsi que des évolutions économiques (prix du carburants, coûts de la conception et de la construction).

6.5

Le système européen d'échange de quotas d'émissions peut procurer aux pionniers un avantage commercial réel vis-à-vis des tiers. Il reste toutefois à savoir comment créer, par le biais de ce système, un facteur économique fiable et durable qui donne un avantage concurrentiel aux pionniers. Enfin, il serait souhaitable d'insister davantage sur les autres facteurs économiques potentiels.

Bruxelles, le 17 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  Voir avis CESE 1203/2008 sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative au stockage géologique du dioxyde de carbone et modifiant les directives 85/337/CEE et 96/61/CE du Conseil, ainsi que les directives 2000/60/CE, 2001/80/CE, 2004/35/CE, 2006/12/CE et le règlement (CE) no1013/2006» COM(2008) 18 final — 2008/0015 (COD).

(2)  Voir en particulier le rapport de l'AIE, les modèles PRIMES (Energy Systems Analysis of CCS Technology) ainsi que les paragraphes 5.3.2, 5.15.1 et 5.15.2 de l'avis CESE 1203/2008 fin relatifs au stockage géologique du CO2.

(3)  Si des progrès en matière d'efficacité de la combustion du charbon sont indispensables, ils ne suffiront pas pour apporter les réductions nécessaires d'émissions de CO2.

(4)  Résumé de l'analyse d'impact.

(5)  NAT/399, NAT/400, NAT/401 et TEN/334, TEN/338, TEN/341.

(6)  Avis CESE 1203/2008 sur le stockage géologique du dioxyde de carbone.

(7)  Voir l'étude PRIMES mentionnée à la note 2 — et les dossiers joints en annexe.

(8)  Il existe cependant d'autres suggestions quant à la manière de sortir de l'impasse financière — voir l'article EurActive.com daté demercredi 27 février 2008«Financing woes plague EU Climate technologies».

(9)  Au Parlement européen, des propositions en vue d'allouer entre 60 et 500 millions d'euros des recettes des CSC à des projets de démonstration commerciaux à grande échelle sont actuellement en cours d'examen (modifiant le projet de directive modifiant la directive 2003/87/CE afin d'améliorer et d'étendre le système communautaire d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre (2008) 16 final).

(10)  L'on pense ici par exemple au Programme phare européen et à la Plateforme des centrales électriques à taux d'émission zéro.

(11)  Voir le rapport de l'AIE.


31.3.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 77/54


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen sur la première évaluation des plans nationaux d'action en matière d'efficacité énergétique exigée par la directive 2006/32/CE relative à l'efficacité énergétique dans les utilisations finales et aux services énergétiques — Progresser ensemble sur l'efficacité énergétique»

COM(2008) 11 final

(2009/C 77/14)

Le 23 janvier 2008, la Commission a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen sur la première évaluation des plans nationaux d'action en matière d'efficacité énergétique exigée par la directive 2006/32/CE relative à l'efficacité énergétique dans les utilisations finales et aux services énergétiques — Progresser ensemble sur l'efficacité énergétique».

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 16 juillet 2008 (rapporteur: M. IOZIA).

Lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 17 septembre 2008), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 142 voix pour, 6 voix contre et 3 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Dans quelques avis récents en matière d'efficacité énergétique en général (1) et d'efficacité énergétique des immeubles en particulier (2), le Comité économique et social européen s'est exprimé avec force et avec une conviction quasi unanime en faveur d'une politique sérieuse d'efficacité énergétique.

1.2

Le CESE déplore que les États membres n'aient pas préparé à temps les plans nationaux d'action en matière d'efficacité énergétique (PNAEE). Le CESE regrette également qu'à quelques exceptions près, les documents analysés ne révèlent pas un engagement fort et sérieux des États membres en vue de réaliser les objectifs, en particulier en ce qui concerne les domaines où la consommation est la plus importante, c'est-à-dire le transport privé et les habitations.

1.3

Seuls deux États membres ont respecté les délais, quinze autres ont eu des retards de deux à six mois, deux ont présenté leur rapport alors que le document d'évaluation de la Commission était terminé et huit autres ont accusé un retard encore plus important. Ce n'est que début avril 2008 que tous les plans ont été disponibles, avec un retard de dix mois sur la date prévue.

1.4

Le CESE fait remarquer que les économies découlant des plans en matière d'efficacité énergétique, dans les programmes de la Commission, devraient constituer la première contribution à la réduction des gaz à effet de serre. L'objectif de réduction de 20 % de la consommation d'énergie à l'horizon 2020 implique une diminution des émissions de CO2 de 780 Mteq. Avec des émissions s'élevant à 5 294 Mteq CO2 en 2006 pour l'UE-25 (rapport de l'Agence européenne de l'environnement 2006), la contribution essentielle pouvant être apportée par l'efficacité énergétique est évidente.

1.5

Le CESE rappelle que pour limiter l'augmentation de la température à 2 °C, la concentration des gaz à effet de serre (actuellement environ 425 ppm d'équivalent CO2 en volume) devra se situer bien en dessous de la limite de 550 ppm (3). Étant donné que chaque année, la concentration augmente de 2 à 3 ppm, une stabilisation à 450 ppm donnera une probabilité de 50 % d'atteindre l'objectif de maintien de l'augmentation de la température moyenne à moins de 2 °C.

1.6

Les États membres ont abordé la rédaction des plans de manière très différente. Certains PNAEE comportaient 13 pages, d'autres 221, ce qui rend toute comparaison pratiquement impossible. Plusieurs d'entre eux n'ont été rédigés que dans la langue nationale, ce qui accroît encore la difficulté de compréhension. Le CESE recommande l'adoption d'un modèle tel que celui défini dans le cadre du projet EMEES (concernant l'évaluation et le suivi de la directive européenne relative à l'efficacité énergétique dans les utilisations finales et aux services énergétiques), en collaboration avec l'Institut de Wuppertal pour le climat, l'environnement et l'énergie.

1.7

Les États membres ont par exemple défini avec l'AEE un modèle pour les relevés annuels appelé RNI (rapport national d'inventaire). Le CESE estime qu'il est possible d'adopter la même procédure, étant bien entendu que le modèle pourra être plus flexible, avec des annexes spécifiques pour les différents domaines d'intervention (habitations, transport, etc.).

1.8

Le CESE estime que l'instrument des accords volontaires à conclure avec les opérateurs nationaux est utile, mais les conventions jugées appropriées doivent préciser clairement qu'une réglementation contraignante sera appliquée en cas de non-réalisation des objectifs.

1.9

La Commission a d'ailleurs déjà pris quelques mesures, annoncées dès 2006, rendant obligatoires les économies d'énergie, et est sur le point de supprimer du marché, à l'instar de l'Australie, les lampes à incandescence, qui consomment 90 % d'énergie pour produire de la chaleur et 10 % pour produire de la lumière. Le CESE espère que les fabricants trouveront les moyens de réduire le coût des lampes fluorescentes, que les pouvoirs publics des États membres de l'UE encourageront le développement de leur production, que les lampes deviendront plus résistantes et compactes et que les problèmes liés à leur utilisation seront résolus.

1.10

Le prochain rapport de l'AEE, qui sera publié d'ici le mois de juin 2008, indique qu'entre 2005 et 2006, les gaz à effet de serre ont diminué de 35,8 Mteq CO2: il est intéressant de noter que la contribution majeure à cette réduction provient des habitations privées et des bureaux, qui ont permis d'économiser 15,1 Mteq CO2. La production d'électricité et de chaleur a toutefois entraîné une augmentation de 14 Mteq. Malgré cette diminution globale, le rapport démontre que les pays de l'UE-27 ont enregistré un progrès inférieur à 0,5 % par rapport à 1990, et certains États membres doivent de toute façon intensifier leurs efforts.

1.11

La libéralisation du marché de l'énergie pourrait donner lieu à une accélération des économies d'énergie, dans la mesure où le marché accueillerait des systèmes de production et de distribution d'efficacités diverses, qui pourraient stimuler la recherche et les investissements pour réduire la dispersion. Plus de 30 % de l'énergie est perdue dans la seule phase de génération. Dans un avis récent (4), le CESE a soutenu les propositions de la Commission relatives au troisième paquet «Énergie», visant à rendre effectif le marché européen de l'énergie.

1.12

Le CESE est convaincu qu'il convient de faire mieux et plus que ce qui a été réalisé à ce jour; il voudrait obtenir davantage de détails sur les évaluations des plans d'action par la Commission, et souhaiterait pouvoir émettre un avis sur les résultats de cette évaluation.

1.13

À plusieurs reprises, le CESE a rappelé la nécessité d'impliquer la société civile, tant au niveau de l'Europe qu'à celui des États membres, jugeant essentiel que les citoyens soient pleinement informés sur les objectifs d'efficacité énergétique et apportent tout leur soutien à leur réalisation. Il convient de prendre au sérieux les recommandations provenant de la société civile. Les mesures qui seront adoptées devront toujours tenir compte des difficultés que rencontrent plusieurs millions de citoyens face aux problèmes de la vie quotidienne. Les programmes d'économie d'énergie, qui ont forcément un coût, devront prévoir une sélection précise des mesures et des aides adéquates pour les moins aisés, qui pourraient devoir faire face à des dépenses croissantes en raison de l'augmentation des prix de l'énergie, sans avoir les moyens de les réduire en raison des frais que cela induirait, comme dans le cas des économies d'énergie dans les habitations.

1.14

Le CESE souligne que les initiatives en matière d'efficacité énergétique doivent absolument être concrètes et réalisables, et se demande s'il ne faudrait pas envisager sérieusement la nécessité de rendre au moins quelques mesures obligatoires, en vérifiant l'écart entre les plans et les résultats concrets, comme cela a été fait pour les émissions des véhicules, la réduction générale des émissions de CO2, les émissions de gaz à effet de serre, et les énergies renouvelables.

1.15

Les plans nationaux d'action n'exposent pas clairement quelles mesures et quelles ressources serviront à impliquer les utilisateurs finaux dans un grand projet européen d'efficacité énergétique et d'économie d'énergie. Le CESE a souligné à plusieurs reprises le rôle essentiel que pourrait jouer la société civile organisée dans la définition des meilleurs moyens d'information et de diffusion des bonnes pratiques. Le CESE souhaiterait débattre spécifiquement de la question avec les institutions européennes qui ne semblent pas être particulièrement engagées et sensibilisées.

1.16

Le CESE propose à la Commission européenne et aux États membres d'instituer un système spécifique de suivi intégré comme c'est par exemple le cas pour les politiques de l'eau. L'absence d'information et d'évaluation de l'incidence des politiques d'efficacité énergétique de l'Union européenne sur les utilisateurs finaux (en particulier les PME), l'absence d'une méthodologie permettant de vérifier la cohérence entre les objectifs internationaux et européens, ainsi que d'un processus de suivi des résultats obtenus par les utilisateurs précités rendent un tel système indispensable.

1.17

Dans certains secteurs tels que le logement social, le patrimoine bâti est constitué d'habitations vétustes et inefficaces. Plus de 25 millions de logements requièrent des interventions urgentes et complexes. Le CESE espère que seront lancés des plans de restructuration des logements publics, financés par des fonds de la BEI. Il n'y a pas la moindre trace de telles interventions dans les PNAEE.

1.18

Le CESE estime que des instruments de marché similaires à ceux qui fonctionnent déjà pourraient apporter une contribution appréciable. L'ouverture, aux consommateurs finaux également, d'un marché de négawatts, c'est-à-dire d'efficacité énergétique électrique, pourrait être utile pour inciter les citoyens à adopter de bons comportements. Si l'on considère que le seul remplacement des lampes à incandescence permet une économie équivalente à au moins 80 centrales de 1 000 MW (presque égale à la puissance brute installée en Italie), l'intérêt des entreprises productrices à soutenir l'efficacité énergétique est évident: elles pourront satisfaire davantage de clients avec une production d'électricité identique.

1.19

Le CESE espère que l'on redressera la barre et que les États membres feront plus grand cas de la politique d'efficacité énergétique et d'économie d'énergie, ce qui devrait se traduire par des plans nationaux sérieux, crédibles, réalistes et présentant des objectifs mesurables. Il faudra également que soient précisées les ressources que les États membres alloueront pour soutenir de manière adéquate les investissements nécessaires des citoyens et des entreprises.

2.   Introduction

2.1

Par sa communication sur la première évaluation des plans nationaux d'action en matière d'efficacité énergétique (PNAEE) intitulée «Progresser ensemble sur l'efficacité énergétique», la Commission s'acquitte de l'obligation qui lui incombe en vertu de l'application de la directive 2006/32/CE, dont l'article 14, paragraphe 5 prévoit la présentation, avant le 1er janvier 2008, d'un rapport d'évaluation des 27 plans nationaux d'action. Le deuxième rapport sera présenté avant le 1er janvier 2012 et le troisième avant le 1er janvier 2015.

2.2

Les objectifs auxquels se réfère la communication sont définis dans la même directive, en son article 4, paragraphe 1, qui rappelle que «Les États membres adoptent et s'efforcent de réaliser un objectif indicatif national global en matière d'économies d'énergie fixé à 9 % pour la neuvième année d'application de la présente directive, à atteindre par le biais de services énergétiques et d'autres mesures visant à améliorer l'efficacité énergétique».

2.3

La Commission relève que seuls deux États membres (la Finlande et le Royaume-Uni) ont respecté les délais prévus, et que quinze autres ont présenté leur plan avec retard (la Bulgarie, la République tchèque, le Danemark, l'Allemagne, l'Estonie, l'Irlande, l'Espagne, l'Italie, Chypre, la Lituanie, Malte, les Pays-Bas, l'Autriche, la Pologne et la Roumanie). La Belgique et la Slovaquie ont soumis leur PNAEE fin 2007, trop tard pour que ceux-ci soient inclus dans le document d'évaluation.

3.   La communication de la Commission

3.1

L'examen des plans nationaux révèle que cinq États membres se sont fixé des objectifs plus ambitieux que ceux de la directive; d'autres disent vouloir atteindre des objectifs bien supérieurs encore, mais n'ont pas pris d'engagements officiels. Sur les 17 plans évalués, 6 ne couvrent pas la totalité de la période prévue par la directive, c'est-à-dire jusque fin 2016. En ce qui concerne le rôle exemplaire à jouer par le secteur public, l'on signale que l'Irlande s'est fixé un objectif de 33 % d'économies d'énergie dans le secteur public d'ici à 2020, que l'Allemagne s'est engagée à réduire de 30 % les émissions de CO2 dans le secteur public d'ici à 2012, tandis que le Royaume-Uni a pour objectif que tous les bâtiments de l'administration centrale soient neutres du point de vue des émissions d'ici à 2012.

3.2

Des campagnes nationales ont été lancées: en Irlande, la campagne Power of One qui promeut l'échange par internet de bonnes pratiques publiques et privées; au Danemark, l'audit énergétique des bâtiments publics avec obligation d'appliquer les recommandations; en Allemagne, la mise aux normes des bâtiments fédéraux, à laquelle a été affectée une somme de 120 millions d'euros; à Malte, la désignation de Green Leaders, des fonctionnaires qui, dans chaque ministère, s'occuperont de l'efficacité énergétique et encourageront les énergies renouvelables.

3.3

Le Royaume-Uni appliquera le «code de l'habitat durable» en respectant le niveau 3 du code, à savoir un accroissement des performances énergétiques de 25 % par rapport au code du bâtiment de 2006. L'Autriche s'engage à faire en sorte que les performances énergétiques des bâtiments du secteur public dépassent les exigences légales, tandis que l'Espagne va remplacer les systèmes d'éclairage public par du matériel plus efficace et améliorera sensiblement l'efficacité énergétique dans le traitement et la distribution de l'eau potable.

3.4

La Pologne et la Finlande imposeront au secteur public des économies d'énergie au moins égales à l'objectif national, comme c'est déjà le cas au niveau des municipalités, tandis que les Pays-Bas ont l'ambition d'être des pionniers en prévoyant que d'ici à 2010, 100 % des marchés publics nationaux, et 50 % des marchés passés par l'administration locale et régionale, comprendront des critères de durabilité.

3.5

Les politiques d'incitation fiscale sont jugées très importantes. L'Allemagne et l'Autriche visent l'efficacité énergétique des immeubles, qui consomment 40 % de l'énergie, la Lituanie prévoit l'introduction d'un taux réduit de TVA de 9 % — au lieu du taux normal de 18 % — pour les logements financés par des fonds publics. Les Pays-Bas vont mettre en place une «déduction pour investissement énergétique» à l'intention des entreprises privées, tandis que l'Italie a instauré un régime prévoyant un abattement fiscal brut de 55 %, au maximum, lors de l'achat d'équipements ménagers à haute efficacité énergétique (réfrigérateurs de classe A+, chauffe-eau), pour le matériel d'éclairage et pour la modernisation énergétique des bâtiments.

3.6

Les accords volontaires sont considérés comme un instrument appréciable, en particulier en Finlande (au cours de la période concernée, ils couvrent 60 % de la consommation finale d'énergie, et l'objectif est d'atteindre 90 % d'ici 2016), aux Pays-Bas, où ils concernent essentiellement les entreprises, et au Danemark, où ils sont réservés aux marchés publics. L'Espagne, la Pologne, le Royaume-Uni, la Roumanie et l'Irlande déclarent vouloir y recourir comme instrument essentiel pour réaliser des économies d'énergie.

3.7

Les instruments de marché (certificats blancs), qui ne sont utilisés actuellement que dans quelques pays, gagnent de l'importance dans les plans nationaux. L'Italie prévoit de prolonger ce système jusqu'en 2014, la Pologne a l'intention de l'introduire, tandis qu'au Royaume-Uni l'«engagement en matière d'efficacité énergétique» (Energy Efficiency CommitmentEEC), sera prolongé jusqu'en 2020 et rebaptisé «objectif de réduction des émissions de carbone»; il aura pour but de doubler les économies d'énergie au cours de la période 2008-2011. Une importance essentielle est accordée aux SSE (sociétés de services énergétiques), qui n'ont pas encore connu le développement escompté. L'Autriche, l'Allemagne, l'Irlande, l'Italie, la Pologne et l'Espagne sont particulièrement intéressées.

3.8

La Bulgarie, la Roumanie et le Royaume-Uni prévoient l'instauration de fonds et de mécanismes de financement essentiellement destinés aux secteurs commercial et résidentiel. Les agences nationales de l'énergie, dont les compétences divergent, ne mènent pas des politiques d'éducation, de formation et d'information homogènes; quelques pays, comme le Danemark et l'Italie, ont décidé de décentraliser ces fonctions et de les confier à des agences régionales et locales.

3.9

Le transport, qui absorbe plus d'un tiers de la consommation d'énergie, fait l'objet de nombreuses critiques, mais dans la pratique, seules l'Autriche et l'Irlande proposent des mesures concrètes pour transférer le trafic vers les transports publics.

3.10

La majeure partie des plans présentés révèle une approche de statu quo, et l'on constate pour certains États membres un écart «notable» entre, d'une part, l'engagement politique et d'autre part, les mesures adoptées et les ressources qui y sont allouées.

3.11

La Commission suivra de près et contrôlera la transposition de la directive, mais s'efforcera également d'en faciliter l'application grâce au programme «Énergie intelligente — Europe». La Commission créera une plateforme internet pour recueillir et présenter les contributions des parties intéressées, qui seront associées à la mise en œuvre de la directive et qui sont invitées à participer à l'adoption des mesures nationales et à la rédaction des prochains PNAEE. Les plans nationaux d'action seront également évalués dans le cadre du projet de veille (Energy Efficiency Watch).

3.12

Dans ses conclusions, la Commission rappelle l'importance de la coopération internationale ainsi que son initiative relative à une plateforme internationale sur l'efficacité énergétique, qui vise à élaborer des normes techniques, les échanges et les transferts de technologie. Eu égard aux grands engagements auxquels l'Europe doit faire face et à la responsabilité qu'elle veut assumer en matière de changements climatiques, de sécurité et de durabilité de l'approvisionnement énergétique, et de réduction des émissions de gaz à effet de serre, il est indispensable de mettre en place des programmes efficaces et sûrs visant à améliorer l'efficacité énergétique.

4.   Observations spécifiques

4.1

Le premier élément négatif qui saute aux yeux à la lecture de cette communication est le fait que le délai prévu par la directive pour la présentation des plans nationaux d'action en matière d'efficacité énergétique n'a été respecté que par 2 pays sur 27; si 15 autres ont fini tant bien que mal par présenter leurs documents et que 2 l'ont fait après l'expiration du délai ultime, 8 pays n'ont laissé aucune trace. Un an après l'échéance du 30 juin 2007, un État membre manque toujours à l'appel.

4.2

Le deuxième élément négatif qui ressort des conclusions de la Commission est que les documents analysés ne permettent pas de déduire, à quelques exceptions près, un engagement aussi fort et sérieux que ne l'exigerait la situation. Il est de plus en plus fréquent que les chefs d'État et de gouvernement, représentant les États membres, approuvent à Bruxelles avec une grande légèreté des directives qu'ils ne peuvent/ne veulent pas respecter une fois rentrés chez eux. L'agenda de Lisbonne en est l'exemple le plus manifeste, mais l'histoire foisonne de ce type de comportements dichotomiques. Et ce n'est pas terminé.

4.3

Lorsque l'on parcourt les plans nationaux d'action, il apparaît qu'il manque un canevas de référence, que les plans ont été rédigés de manières et sous des formes tout à fait différentes; leur lecture est de ce fait difficile et ils sont quasiment impossibles à comparer. Dans le cadre du projet EMEES (concernant l'évaluation et le suivi de la directive européenne relative à l'efficacité énergétique dans les utilisations finales et aux services énergétiques), en collaboration avec l'Institut de Wuppertal pour le climat, l'environnement et l'énergie, un modèle a été élaboré, afin de faciliter la rédaction des plans nationaux d'action. La Belgique déplore dans un courrier le fait que ce modèle important n'ait été publié que le 11 mai, soit quelques jours seulement avant le délai de présentation des plans nationaux.

4.4

Les plans présentés comptent 13 pages pour la République tchèque et la Lituanie, 41 pour la Roumanie et 89 pour Malte, en ce qui concerne les nouveaux États membres; en ce qui concerne les pays les plus grands, le rapport de la France compte 37 pages, celui de l'Allemagne 102, celui de l'Espagne 211 et celui du Royaume-Uni 214; la Belgique constitue en soi un phénomène, puisqu'en raison de la nature fédérale de l'État, elle produit 4 documents totalisant 221 pages. Le total des pages présentées par 25 États membres (la Suède et le Portugal n'apparaissent pas à ce jour sur le site de la Commission) s'élève à 2 161, avec des données, des tableaux et des mesures hétérogènes. Chaque pays a choisi ses propres paramètres de référence, méthodologies et modèles de communication: le résultat est décourageant, car l'on ne parvient pas à dégager une orientation globale.

4.5

Le matériel publié par la France, la Slovénie, la Grèce (ébauche), les Pays-Bas et le Luxembourg est rédigé dans les langues nationales respectives (obstacle insurmontable pour le rapporteur). L'on imagine difficilement que l'échange de bonnes pratiques puisse se faire par la lecture des documents en version originale, mais il n'y a pas eu d'invitation, et encore moins d'obligation à utiliser une seule langue. La Commission a prévu de faire traduire tous les documents dans la même langue, mais les retards accumulés dans la présentation des PNAEE se sont répercutés sur les délais de traduction.

4.6

Le CESE souligne l'incohérence entre les objectifs des plans nationaux et les deux éléments précités. Qu'il s'agisse de plans encyclopédiques ou succincts, ni les uns ni les autres n'aident à comprendre exactement où l'on va. L'excès et l'insuffisance de détails ont tous deux le même effet: ils compliquent la lecture et la compréhension. Le modèle EMEES peut constituer un bon compromis entre ces deux extrêmes. Le CESE recommande vivement de prévoir, pour la prochaine édition des plans nationaux, l'adoption d'un modèle commun, facile à lire et à comprendre.

4.7

Hormis quelques exceptions louables, signalées dans le présent avis, le CESE dénonce le manque criant d'initiatives dans le secteur public et dans celui de l'agriculture. Les PNAEE font preuve de réticence à cet égard et passent sous silence ces secteurs cruciaux.

5.   Observations générales

5.1

En janvier 2007, le Conseil a demandé à la Commission de prévoir des dispositions dans le domaine de l'énergie et du changement climatique, afin de réaliser des objectifs ambitieux. Cela s'est concrétisé par le troisième paquet «Énergie», le paquet sur les énergies renouvelables et le changement climatique, la directive sur la réduction des émissions de CO2 pour les nouveaux véhicules, la nouvelle réglementation «Energy Star», le livre vert sur la mobilité urbaine (qui prévoit entre autres des mesures incitatives pour les moyens de transport efficaces), et le plan stratégique pour les technologies énergétiques.

5.2

Quels sont les éléments qui caractérisent ces dispositions? Quelques indications et de nombreuses règles. Malheureusement, les gouvernements, après avoir formellement approuvé ces dispositions, ne sont pas capables de résister aux pressions des entreprises nationales et de maintenir les choix effectués, comme cela a été le cas pour le CO2, et demandent une modification des mesures adoptées collégialement.

5.3

La raison pour laquelle les États membres ne semblent pas s'inquiéter davantage réside justement dans la directive. En effet, le 12e considérant précise: «Il s'ensuit que, même si les États membres s'engagent à faire des efforts afin de réaliser l'objectif visé de 9 %, l'objectif national en matière d'économies d'énergie est indicatif par nature et n'entraîne aucune obligation juridiquement contraignante pour les États membres d'y parvenir».

5.4

Cette pratique législative (l'adoption de directives aux objectifs non contraignants et ne prévoyant pas de sanctions en cas d'infraction) a caractérisé la législation adoptée certaines années spécifiques dans certains domaines déterminés. Il y quelques années encore, les États membres revendiquaient leur souveraineté en matière de choix énergétiques, de l'approvisionnement à la transmission en passant par la production. Cela impliquait une sorte de législation non contraignante, qui a caractérisé cette période. Ainsi, la directive 2003/30 sur les biocarburants fixait des objectifs quantitatifs, mais aucune obligation particulière de les réaliser.

5.5

Dans ces conditions et compte tenu de ces prémisses, l'objectif de réduction de la consommation de 20 % d'ici 2020, grâce à l'efficacité énergétique, est difficilement réalisable si des mesures et/ou objectifs complémentaires contraignants ne sont pas adoptés.

5.6

Le CESE a soutenu et soutiendra toutes les initiatives qui viseront à atteindre un niveau croissant d'efficacité énergétique, car il considère que les émissions de CO2 comme la dépendance énergétique de l'UE constituent deux problèmes de première importance.

5.7

Le CESE souligne en même temps la contradiction entre des mesures générales non contraignantes et des mesures spécifiques, axées sur les résultats, et obligatoires. L'ensemble n'est pas obligatoire, mais les éléments distincts le sont? La Commission elle-même devrait donner le bon exemple en publiant les résultats obtenus en matière d'efficacité énergétique et d'économies d'énergie dans ses propres immeubles, les initiatives entreprises, les fonds alloués. Une annexe présentant une approche «fédérale» aiderait à mieux comprendre l'importance de telles politiques.

5.8

Le CESE met l'accent sur l'écart important entre les attentes exprimées par rapport à l'adoption de mesures appropriées pour obtenir une augmentation significative de l'efficacité énergétique et les projets globalement décevants et peu ambitieux présentés par les États membres; il insiste sur la nécessité d'adopter des mesures concrètes à court, moyen et long terme, afin de donner de la substance aux objectifs fixés.

5.9

Au cas où l'on tirerait opportunément cette conclusion, le CESE recommande d'adopter des mesures permettant de réaliser les objectifs plutôt que d'entreprendre, une nouvelle fois, une action purement «cosmétique».

5.10

Le CESE avait accueilli favorablement tant la directive 2006/32/CE du Parlement européen et du Conseil, du 5 avril 2006, relative à l'efficacité énergétique dans les utilisations finales et aux services énergétiques (1), que, par la suite, le «Plan d'action pour l'efficacité énergétique: réaliser le potentiel» du 19 octobre 2006 (2), mais ces actes réglementaires et d'orientation avaient été publiés alors que les prix du pétrole étaient encore relativement bas. En effet, le prix du baril tournait autour de 42 $ au moment de la présentation de la directive, en 2004, et était légèrement inférieur à 62 $ vers la mi-2006.

5.11

Dans ce contexte, il était dès lors compréhensible que les objectifs fussent indicatifs et que la Commission n'eût pas prévu, dans la directive, d'obligation contraignante, pour les États membres, de réaliser les objectifs proposés. Le Comité économique et social écrivait que la meilleure énergie est celle que l'on économise, mais si cette économie est laissée au bon vouloir des États membres, sans aucune autre incitation que celle du sens des responsabilités, alors la réalisation de cet objectif devient vraiment aléatoire, voire impossible.

5.12

Mais l'Union peut-elle se permettre de ne pas atteindre les objectifs de réduction de l'intensité énergétique d'1,5 % par an? De renoncer à économiser 390 millions de tep produisant 780 millions de tonnes de CO2? D'une part, des objectifs ambitieux et contraignants sont définis — réduction de 20 % des émissions de gaz à effet de serre et accroissement à 20 % de la part des énergies renouvelables —, mais d'autre part, l'objectif pouvant être atteint le plus directement, et impliquant une économie immédiate, est laissé de côté comme un espoir hypothétique.

5.13

Le CESE fait remarquer que dans certains pays, l'application des plans relève de la responsabilité des gouvernements régionaux alors qu'il n'existe pas de niveau de coordination adéquat, ce qui entraîne de facto un manque d'harmonisation et de cohérence territoriale.

5.14

Le CESE déplore l'absence de réelles possibilités de choix du côté de l'offre et estime que pour atteindre rapidement les résultats escomptés, il convient de proposer un choix plus large, assorti de mesures incitatives destinées aux groupes plus faibles, surtout à l'ensemble des consommateurs et aux petites et moyennes entreprises. Dans certains pays, les mesures d'incitation ont donné des résultats très encourageants, notamment dans le cas de l'électroménager blanc.

5.15

Le CESE juge positive l'expérience des SSE et est d'avis qu'il convient d'encourager la diffusion de tels services aux citoyens et aux entreprises. Parmi les avantages des SSE figurent notamment la création de nouvelles professions, des opportunités d'emplois qualifiés, et de bons résultats en matière d'efficacité énergétique et de réduction des gaz à effet de serre.

5.16

Le CESE souligne que les États membres ne font pas suffisamment d'efforts pour atteindre les objectifs fixés et est convaincu que, comme dans le cas des émissions du transport, il est nécessaire de soutenir les initiatives de la Commission, si elles visent à renforcer les obligations des États membres. L'année dernière, la Commission a lancé des initiatives positives, notamment: la nouvelle réglementation Energy Star, dont les normes sont désormais obligatoires en ce qui concerne les appels d'offres pour des marchés publics de matériel de bureau; le livre vert sur la mobilité urbaine, qui propose entre autres de financer des véhicules plus efficaces; le troisième paquet «Énergie», qui renforce les pouvoirs des régulateurs nationaux en ce qui concerne l'efficacité énergétique; le plan stratégique pour les technologies énergétiques et la réglementation des émissions pour les nouvelles voitures.

5.17

D'autres initiatives sont programmées pour les mois à venir. Il s'agit de nouvelles directives sur les exigences d'efficacité énergétique ou de labels écologiques pour une multitude de produits (par exemple, l'éclairage public et l'éclairage des bureaux, modes «veille» et «éteint» avec des consommations minimes), et d'une nouvelle réglementation, prévue pour 2009, sur les téléviseurs, les réfrigérateurs et surgélateurs domestiques, les lave-linge et lave-vaisselle, les chauffe-eau et chauffe-bains, les ordinateurs personnel, le matériel de reproduction d'images, les moteurs électriques, les pompes à chaleur et climatiseurs. Toujours en 2009, la Commission prévoit d'adopter une initiative concernant les ampoules domestiques à incandescence, pour encourager leur remplacement à brève échéance. Les nouvelles stratégies dans le domaine des transports seront axées sur le réexamen de la directive sur l'étiquetage des véhicules, sur l'efficacité des pneus et des systèmes surveillant constamment leur pression et leur qualité.

5.18

Le CESE juge indispensable de réaliser un marché intérieur de l'énergie sur lequel, conformément aux directives sur l'électricité et le gaz, les prix sont le résultat d'une concurrence saine.

5.19

Le CESE attire l'attention sur la nécessité de prévoir, dans les États membres de l'UE, des plans de formation destinés aux écoles (qui devront par conséquent s'engager activement dans des programmes d'efficacité énergétique) ainsi que des programmes de communication visant à sensibiliser les citoyens à l'importance et l'obligation de consommer l'énergie de manière responsable et efficace.

5.20

En ce qui concerne les écoles, certaines compétitions entre instituts techniques, dont le but est de réaliser la meilleure économie d'énergie avec la participation active des élèves, présentent un intérêt particulier. Par exemple, en Italie, le concours «Datti una scossa» («Secoue-toi»), doté d'un prix de 25 000 EUR pour réaliser le projet présenté, a rencontré un franc succès; un autre bon exemple est l'écomarathon international, dans le cadre duquel un institut français a présenté un prototype ayant parcouru 3 039 km avec un litre d'essence! Une équipe danoise a réussi à produire un moteur à combustion dont les émissions ne dépassent pas 9 g/km, et a ainsi remporté le prix «Climate Friendly».

5.21

Les instruments économiques qui seront disponibles devront être efficaces et durables. Le CESE estime qu'il faudra accorder une attention particulière à la répartition des mesures incitatives, qui doivent être destinées aux consommateurs finaux. Il y a lieu de considérer également l'opportunité de réserver une partie des mesures incitatives aux fournisseurs de services énergétiques, de manière à créer un intérêt commun et convergent pour les politiques d'efficacité énergétique.

5.22

Afin de donner aux consommateurs les signaux de prix adéquats, favorisant une utilisation plus rationnelle et efficace de l'énergie, le CESE demande à la Commission européenne de veiller à la suppression des tarifs proposés au-dessous du prix coûtant, compte tenu de ce qui est admis par la législation européenne en ce qui concerne la promotion adéquate des énergies renouvelables et dans le respect des dispositions prévues par la directive gaz et électricité pour les consommateurs vulnérables.

Bruxelles, le 17 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  CESE 242/2006, rapporteur: M. BUFFETAUT, et CESE 1243/2007, rapporteur: M. IOZA.

(2)  CESE 270/2008, rapporteur: M. PEZZINI.

(3)  Parts par million.

(4)  CESE 758/2008, rapporteur: M. CEDRONE.


31.3.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 77/60


Avis du Comité économique et social européen sur «L'Internet des objets»

(2009/C 77/15)

Le 7 février 2008, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur le thème

«L'Internet des objets».

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 16 juillet 2008 (rapporteur: M. RETUREAU).

Lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 18 septembre 2008), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 118 voix pour et 1 abstention.

1.   Conclusions et recommandations

Le CESE encourage la Commission européenne:

1.1

À investir dans la recherche, à apporter son soutien aux activités de diffusion (telles que les manifestations organisées par la dernière présidence) et de normalisation, car il considère l'Internet des objets (IO) comme un domaine important.

1.2

À prendre des mesures visant à supprimer les barrières qui entraveraient l'adoption de cette technologie.

1.3

À évaluer si des dispositifs centralisés seront à même de gérer le volume de trafic attendu de la part des applications de l'IO et si une gouvernance locale (des noms et des services) constituerait une meilleure approche pour gérer le déploiement de masse.

1.4

À examiner si les directives actuellement en vigueur garantissent une protection des données adéquate et correspondent à des exigences de sécurité appropriées, ou s'il est nécessaire d'adopter de nouvelles mesures législatives.

1.5

Il convient d'envisager la question de la nécessité, pour certains laboratoires européens, d'articuler financement universitaire et financement privé, afin de garantir que les résultats des recherches soient exploités en Europe, et que les chercheurs ne disparaissent pas en direction des facilités de recherches et des entreprises se trouvant dans d'autres parties du monde (aux États-Unis).

1.6

Concernant d'éventuels risques électromagnétiques, il convient d'appliquer le principe de précaution à ces nouveaux environnements à densité élevée de lecteurs radiofréquence, en particulier pour les travailleurs évoluant dans ces environnements. Leur information sur les risques éventuels devrait être effectuée et des moyens de protection mis en place. Toutefois, cette question doit être évaluée sérieusement, au moyen d'études scientifiques.

1.7

Il ne faut pas oublier que le développement technologique doit se faire pour les citoyens, et qu'il est nécessaire d'évaluer les risques éthiques qui y sont liés.

1.8

En ce qui concerne les services transeuropéens, la Commission européenne, ou l'autorité administrative indépendante qui pourra être appelée à régulée le spectre à l'avenir, devraient prendre en considération les besoins de l'Internet des objets en matière de spectre.

1.9

La recherche sera cruciale pour gagner la course en vue de produire la capacité informatique nécessaire pour gérer les applications futures en temps réel de l'Internet des objets.

2.   Propositions de la Commission

2.1

Suite à sa communication de 2007 sur les tags RFID (1), et après la conférence tenue sur ce thème à Lisbonne en novembre dernier, la Commission passe, avec la présente communication, à l'étape suivante qui est celle de l'Internet des objets (2).

2.2

Il convient aussi de se référer à un nombre important de communications et initiatives du CESE au cours des dernières années (3): Le programme i2010 a fait l'objet d'un rapport intérimaire (4).

3.   Commentaires et analyses

3.1   Introduction

3.1.1

Le développement des TI constitue un enjeu crucial pour nos sociétés. D'autant qu'avec son marché unifié, l'Europe est bien placée pour devenir une région-clé de l'économie numérique, si elle s'en donne les moyens en termes de recherche fondamentale et de RD, ainsi que sur le plan politique de la gouvernance de cet Internet du futur.

3.1.2

Croissance et compétitivité européennes en dépendent fortement, et il est plus que temps de s'affirmer au niveau de la gouvernance politique de cet Internet, tout en développant les technologies et investissements, comme les savoirs et savoir-faire indispensables.

3.1.3

L'Internet, même au temps actuel du WEB2 interactif et mobile, est encore appuyé sur un réseau mondial de centaines de milliers de serveurs et de routeurs, c'est à dire d'ordinateurs fixes reliés par des moyens filaires ou de la fibre optique; mais les connexions aux terminaux mobiles, comme le téléphone portable ou les tablettes Internet, se font par ondes électromagnétiques et connaissent une expansion très rapide, avec des standards de connexion divers (.3G, 3G+-HSPDA, Edge, WiFi, WiMax).

3.1.4

Le WEB2 est interactif; l'usager est aussi un créateur ou un pourvoyeur de contenus, à titre individuel ou sous des formes coopératives et collaboratives (encyclopédie Wikipédia, logiciels libres … Un grand nombre de PMEs opèrent dans la fourniture de logiciels, de contenus créatifs et surtout de services très diversifiés (installation et maintenance de réseaux, sécurité informatique, formations …).

3.1.5

Les puces informatiques sont de plus en plus miniaturisées tout en devenant plus complexes et en réduisant leur consommation d'énergie. Elles s'insèrent dans des terminaux mobiles de plus en plus légers où les logiciels embarqués et la puissance de calcul se déploient dans une perspective d'intégration du téléphone, de l'accès Internet et de la géolocalisation (puces Sirf 3).

3.2   Vers l'Internet des objets

3.2.1

L'Internet des objets commence à se déployer dans un contexte technologique complexe, à partir du WEB2 et d'autres technologies associées, déjà existantes pour la plupart, et dont la fusion fait franchir une étape majeure vers l'Internet des objets:

les protocoles Ipv6 (5), HTTP (6), FTP, etc. et un nouveau standard HTML 5 universel pour la lecture des sites (qui reste à élaborer),

les étiquettes RFID (7) et les lecteurs radiofréquence, qui les connectent des bases de données,

la géolocalisation (GPS, et bientôt Galileo),

les réseaux interconnectés, et les capacités de stockage de données,

l'intelligence artificielle, notamment dans le web3 (web sémantique, dont le langage sera plus proche du langage naturel) et pour la gestion de données entre machines,

les nanotechnologies, notamment appliquées aux microprocesseurs,

les étiquettes 2D (codes barres, Datamatrix) qui restent utilisables, notamment en associant un contenu riche à une adresse Internet codée avec Datamatrix, photographiée par terminal portable qui connecte directement au site (usages divers, touristiques, publicitaires, informatifs, etc.).

3.2.2

Dans la montée en puissance des éléments des réseaux du futur, l'informatique massivement parallèle jouera un rôle croissant; des centaines ou des milliers de processeurs peuvent fonctionner en parallèle (8) et non par des opérations successives, ce qui permet d'accélérer puissamment les calculs, et ainsi de concevoir des univers virtuels complexes simultanés; d'ailleurs, la virtualisation permet déjà d'utiliser de manière bien plus complète la puissance des ordinateurs en faisant fonctionner virtuellement plusieurs machines sur une seule, y compris avec des systèmes d'exploitation différents et cette technique se déploie rapidement.

3.2.3

L'Europe a certainement besoin d'intensifier les recherches et de former des compétences de haut niveau théorique et pratique dans ces domaines, pour retenir les chercheurs «aspirés» par les grands laboratoires universitaires et privés américains et bientôt chinois ou indiens; le risque d'un retard technologique majeur devient évident en l'absence d'initiatives de grande ampleur dédiées à la maîtrise de l'Internet du futur.

3.2.4

Les technologies de stockage de masse évoluent rapidement; elles sont absolument nécessaires pour les bases de données qui contiendront la description des objets identifiés par leur adresse Internet. Ces capacités, combinées aux capacités de traitement des données, ouvrent la voie à l'Internet intelligent, qui accumulera de nouvelles connaissances dans des bases de données plus complètes par la combinaison et le traitement des données reçues des objets et des bases de données d'identification. En même temps, le réseau devient l'ordinateur, et stocke des programmes permettant l'utilisation des bases de données et les interventions humaines: requêtes complexes, rapports, etc.

3.3   Premières applications

3.3.1

Un certain nombre de réalisations sont en cours d'expérimentation, et certaines applications sont déjà opérationnelles avec les moyens actuels dans des secteurs économiques tels que:

le commerce de détail (Wall Mart),

la logistique des transports et le suivi des marchandises,

la sécurité dans certaines entreprises …

3.3.2

Les tags RFID incorporés dans des objets, sur des cartes d'accès, sur des produits en vente au supermarché, par exemple, fournissent à un lecteur situé à une distance relativement proche (distance en fonction de la fréquence utilisée) un accès simultané à l'adresse et aux caractéristiques de tous les objets lus en même temps (caddy, conteneur) et en tirent les conséquences (prix à payer, déclaration de douane détaillée). On peut déjà au Japon utiliser un tel système pour des achats, payés par une autre puce contenue dans le téléphone portable (terminal multifonctionnel, en fait).

3.3.3

Pour la logistique des transports, et en lien avec la géolocalisation, on peut tout connaître sur une commande en cours d'exécution y compris sa position géographique, en temps réel.

3.3.4

L'Internet des objets est ubiquiste; on parle aussi «d'Internet ambiant» dans lequel les informations transmises par les lecteurs à différentes étapes des processus de traitement peuvent être traitées de façon automatique.

3.3.5

Dans un certain nombre d'applications, les objets communiquent, le réseau «apprend» et peut prendre des décisions appropriées, par exemple dans des applications domotiques: bioreconnaissance des personnes, ouverture des portes, mise en fonction de décisions concernant la maison et ses approvisionnements, le traitement du chauffage, de la ventilation, des avertissements de sécurité pour les enfants, par exemple…

3.3.6

Les accès à certaines machines ou à certaines informations peuvent être déterminés par des lecteurs d'empreintes ou de reconnaissance de forme.

3.4   Ubiquité des réseaux et vie privée, sécurité

3.4.1

Mais ces traitements peuvent intensifier considérablement les risques d'atteinte à la vie privée ou à la confidentialité des affaires, aux relations clients fournisseurs de biens ou de services, car le bon fonctionnement d'un Internet ambiant suppose que les réseaux contiennent quantité de données personnelles voire confidentielles et strictement privées comme dans les applications médicales.

3.4.2

On doit se poser la question de savoir si les instruments juridiques communautaires de protection des données actuels sont suffisants pour les réseaux du futur proche.

3.4.3

Sans un renforcement des protections et de la confidentialité des données sensibles, le réseau ambiant pourrait devenir un instrument de transparence totale pour les personnes (comme déjà les animaux familiers dans le système d'identification européen).

3.4.4

Il conviendra surtout de surveiller les croisements de données éparpillées en régulant ceux concernant les objets et en interdisant ceux concernant les personnes; la diffusion de données suppose leur anonymisation préalable, ce qui écarte les arguments de ceux qui refusent de communiquer des données sociologiques au prétexte de la protection de la vie privée; il n'est pas besoin d'autorisation préalable des personnes si les données sont anonymisées, puis traités statistiquement avant publication des résultats.

3.4.5

Les données confidentielles à définir juridiquement devront être protégées par des cryptages forts pour n'autoriser l'accès qu'aux personnes (ou machines) autorisées.

3.4.6

La question de l'innocuité ou du risque attaché aux ultra-hautes fréquences plus puissantes bientôt largement utilisées reste ouverte, comme le reconnaît la Commission.

3.4.7

La législation sur la protection des travailleurs contre les ondes électromagnétiques risque de s'avérer très insuffisante pour une exposition permanente aux hautes et aux hyper hautes fréquences. Les études en la matière, en principe engagées sur les possibles conséquences des téléphones mobiles sur la santé des usagers sont restées inconclusives. Il faudrait d'urgence que les recherches s'accélèrent et s'amplifient sur les risques et parades éventuels avant que certains types de tags de nouvelle génération ne se développent de manière «sauvage» (9).

3.4.8

Des règles si possible universelles, et au moins européennes, doivent être établies pour l'usage des tags RFID, privilégiant le droit à la protection de la vie privée, dans une perspective qui aille peut-être au-delà des «natural persons» (personnes physiques), car la législation actuelle est inégalement appliquée et ne couvre pas toutes les situations liées aux usages actuels et futurs des tags RFID et de l'Internet des objets.

3.5   L'Internet du futur

3.5.1

L'Internet du futur, dans la mesure où il est envisageable de formuler des prévisions à moyen terme dans un domaine en évolution constante, sera vraisemblablement une combinaison du web3 et de l'Internet des objets.

3.5.2

Les divers composants de l'Internet du futur existent déjà pour la plupart, se perfectionnent ou se mettent en place, de façon à ce que cet Internet nouveau fasse prochainement son «coming out», se révèle comme un nouveau paradigme refondateur de la place et du rôle des réseaux ubiquistes dans la vie des citoyens et la croissance économique à une échelle encore difficile à concevoir, mais qui pourra provoquer un changement sociétal majeur et une source de développement sans précédent pour les firmes et les pays qui en maîtriseront les tenants et aboutissants, c'est-à-dire qui auront fait en temps utile les investissements nécessaires pour la recherche, la formation, la création de normes, de nouveaux services; cela pourrait entraîner des changements des rapports de force économiques et scientifiques à l'échelle globale. C'est un défi incontournable pour l'Europe.

3.5.3

Finalement, l'Internet des objets réalise une fusion du monde physique et du monde numérique, du réel et du virtuel; les objets intelligents (smart objects) s'insèrent dans le réseau ambiant auquel ils participent de plein droit (ubiquitous network) et y occuperont un espace bien plus grand que dans le réseau participatif humaniste du WEB 2 qui se fondra dans le réseau élargi à une échelle supérieure.

3.5.4

Enfin, le nouveau réseau pose des problèmes de gouvernance, par sa dimension et par ses contenus nouveaux, les exigences de nommage portant sur des centaines de milliards de noms, les normes universelles à employer; actuellement, les RFID font l'objet de normes privées, de rapports commerciaux avec EPC global, mais cela est-il praticable pour le plein développement de l'Internet du futur?

Bruxelles, le 18 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  COM(2007) 96 final, Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — «L'identification par radiofréquence (RFID) en Europe: vers un cadre politique».

(2)  Voir «Towards an RFID policy for Europe» (Vers une politique d'identification par radiofréquence pour l'Europe), actes de séminaire, éd. Maarten VAN de VOORT et Andreas LIGTVOET, 31 août 2006.

(3)  Par exemple l'avis du CESE «Identification par radiofréquences (RFID)», rapporteur: M. MORGAN, JO C 256 du 27.10.2007, p. 66 — TEN/293.

(4)  Communication «Préparer l'avenir numérique de l'Europe — examen à mi-parcours de l'initiative i2010» (COM(2008) 199 final).

(5)  Internet protocol version 6 (Protocole Internet version 6).

(6)  Hypertext Transfer Protocol (HTTP) est un protocole de communication pour le transfert d'informations sur Intranet et sur la Toile mondiale. Son objectif original était de donner une possibilité de publier et de récupérer des pages hypertexte sur l'Internet.

(7)  Radio Frequency Identification (Identification par radiofréquence).

(8)  L'Université de Stanford lance un nouveau laboratoire, le «Pervasive Parallelism Lab» financé par les plus grandes compagnies de l'industrie informatique des États-Unis, dont HP, IBM, Intel.

(9)  Une étude britannique scientifique sur les téléphones mobiles en montre l'innocuité sur plusieurs années; le rapport est disponible sur le site

http://www.mthr.org.uk


31.3.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 77/63


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions sur les contenus créatifs en ligne dans le marché unique»

COM(2007) 836 final

(2009/C 77/16)

Le 3 janvier 2008, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions sur les contenus créatifs en ligne dans le marché unique».

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 16 juillet 2008 (rapporteur: M. RETUREAU).

Lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 18 septembre 2008), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 115 voix pour, 1 voix contre et 5 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Droit des consommateurs

1.1.1

Le CESE est partisan d'une forte protection des consommateurs. À cet égard, il attend avec intérêt l'élaboration du guide pour les consommateurs et les utilisateurs de services de la société de l'information.

1.1.2

Selon le CESE ce guide devrait aborder, au moins les aspects suivants:

la neutralité du réseau pour renforcer le choix des consommateurs;

la protection adéquate des données personnelles, ainsi qu'un niveau élevé de sécurité de l'environnement électronique;

la mise en œuvre de règles volontaires et de marques de confiance pour le commerce électronique;

l'applicabilité des droits des consommateurs dans l'environnement numérique, en spécifiant les droits d'accès, le service universel ainsi que la protection contre les pratiques commerciales déloyales;

l'instauration de paramètres de qualité pour les services en ligne;

la mise à disposition en ligne d'un formulaire simple à caractère européen pour notifier les actes frauduleux;

un système de résolution de conflits extrajudiciaire en ligne.

1.2   Interopérabilité

1.2.1

Le CESE souligne que l'interopérabilité constitue un facteur économique central. Il constate en outre que les normes ouvertes sont essentielles pour faciliter l'interopérabilité et contribuent à renforcer la sécurité et la fiabilité.

1.2.2

L'absence permanente d'interopérabilité limite les citoyens européens dans leur accès aux équipements, services et contenus. Cela les oblige à payer des prix plus élevés pour les équipements et limite, dans le même temps, le choix de ces équipements, les forçant à utiliser des passerelles, car certaines parties concernées profitent de différences techniques inutiles pour créer des marchés monopolistiques.

1.2.3

L'idée de DRM (1) euro-compatibles semble au Comité une fausse bonne idée, qui pose plus de problèmes qu'elle n'en résoudrait, et qui pourrait exclure certains créateurs de la diffusion en ligne; de plus, le marché des contenus est mondial, comme le montre le zonage, qui limite les libertés des utilisateurs.

1.3

Le Comité estime que la taxation plus ou moins anarchique de toutes les variétés de supports numériques ou de machines à mémoire, et avec de grandes différences entre pays membres, conduit à des distorsions importantes de marché.

1.4

Les mesures pénales et les procédures d'exception mises en œuvre dans le projet de loi «Olivennes» en France vont bien au-delà des exigences de l'OMC contenues dans l'accord signé en 1994 à Marrakech. Comme la Cour de justice l'a indiqué dans l'arrêt Pro Musicae, le principe de proportionnalité doit être respecté dans le choix des moyens à utiliser pour faire respecter le droit d'auteur, et il s'agit de trouver un équilibre satisfaisant entre les droits et libertés et les intérêts en cause.

1.5

C'est la raison pour laquelle, le CESE attend avec intérêt la recommandation que la Commission a prévu d'élaborer sur les contenus créatifs en ligne, pour se prononcer concrètement sur la transparence (étiquetage) et sur des formes nouvelles de fixation et de gestion des droits numériques à l'échelle européenne; l'incitation et la contribution à des régimes innovants pour la diffusion des contenus créatifs en ligne, ainsi que la recherche des moyens effectifs pour mettre fin aux copies illégales à des fins commerciales et à toute autre forme de spoliation des créateurs.

2.   Proposition de la Commission

2.1

Les aspects majeurs de la communication et des questions de la Commission visent à:

réguler et harmoniser un marché européen des contenus créatifs en ligne;

un droit d'auteur et des droits voisins européens; des licences multi-territoriales; une meilleure protection des droits relatifs à la propriété littéraire et artistique;

des DRM européens, en fonction des supports, et interopérables, en particulier sur les contenus en ligne;

assurer la sécurité des communications et des règlements financiers, lutter contre le piratage et les escroqueries, afin de renforcer la confiance dans l'économie numérique et permettre le développement des services en ligne;

le plus gros problème à venir concernera sans nul doute les questions relatives à la copie privée, au centre de nombreuses polémiques en Europe. Car les différents membres de l'Union sont loin d'avoir une législation harmonisée sur la question.

2.2

Selon le document de travail des services de la Commission, publié séparément de la Communication et uniquement en langue anglaise (2), de 41 pages, compte tenu du caractère transfrontalier des communications en ligne et des nouveaux modèles commerciaux exigés par les nouvelles technologies, les politiques de l'Union devraient viser la promotion et la diffusion rapide de ces nouveaux modèles pour diffuser en ligne les contenus et savoirs. Les «contenus créatifs distribués en ligne» sont des contenus et services tels que les media audiovisuels en ligne (film, télévision, musique, radio), les jeux en ligne, la publication en ligne, les contenus éducatifs en ligne, ainsi que les contenus générés par les usagers (réseaux sociaux, blogs, etc.).

2.3

L'objectif premier, déjà affirmé dans i2010 (3), est de constituer un espace unique européen de l'information. Les problèmes rencontrés persistent alors que les plateformes technologiques de diffusion se diversifient et se déploient.

2.4

En ce qui concerne le problème de la confiance dans l'économie numérique, une question récurrente est celle de l'interopérabilité entre les matériels, les services et les plateformes, et certains estiment que la criminalisation des échangeurs de fichiers «peer to peer» (P2P) ou «Bit Torrent» et des régimes draconiens des droits de propriété intellectuelle ne créent pas un climat de confiance, d'autant qu'avec l'explosion des contenus créés par les usagers qui ajoute une nouvelle dimension à leur rôle dans l'économie numérique, un certain nombre de défis en résultent envers les politiques publiques, dans de multiples domaines, tels que la confiance et la sécurité.

2.5

L'usage des DRM est fortement critiqué par les organisations de consommateurs, qui considèrent qu'ils portent atteinte aux droits essentiels des consommateurs. Ils comportent aussi des risques pour la protection des données, et ne sont pas faciles à gérer pour les utilisateurs. Mais certains représentants de l'industrie les défendent et soutiennent que les problèmes d'interopérabilité viennent des fabricants de matériel et des concepteurs de logiciels.

2.6

Sur le marché mondial, les opérateurs de marchés nationaux font face à la diversité des langues et à l'étroitesse de certains marchés ainsi qu'à la diversité des règles nationales concernant les licences. Les FAI soutiennent les licences et les règlements multiterritoriaux, mais on est plutôt défavorable à cela dans d'autres secteurs de l'industrie. Les licences nationales permettraient une meilleure rémunération des auteurs; néanmoins un nombre important d'institutions de collecte des droits agissent dans plusieurs pays. En outre, les organisations musicales et les opérateurs mobiles veulent une simplification du recouvrement des droits.

2.7

Les FAI critiquent aussi la diversité des régimes de collecte et de montants des droits pour copie privée, de plus en plus lourds et complexes, et contestent leur utilité face à l'usage des DRM.

2.8

L'absence de disponibilité des contenus pour la distribution en ligne et la fragmentation du marché, ainsi que la diversité des contrats conclus pour diverses formes d'exploitation marginalisent la mise en ligne rapide des créations et constituent un frein sérieux au développement des services.

2.9

Le document de travail de la Commission reflète les résultats de deux consultations et montre la variété des positions des différents intérêts en cause; la Commission souhaiterait pourtant avancer sur les terrains (contestés) des licences multiterritoriales et d'un droit d'auteur européen, de la généralisation de DRM interopérables en particulier, et voir se constituer un véritable marché européen intégrant la diversité des cultures.

2.10

L'objectif est de faire en sorte que le marché européen du contenu en ligne (musique, film, jeux …) quadruple d'ici à 2010, pour passer de 1,8 milliard d'euros de revenus en 2005 à 8,3 milliards.

3.   Observations

3.1

Le Comité est pleinement conscient du fait que l'internet permet de collecter ou de distribuer sous forme numérique des biens et des services selon des méthodes qui violent le droit de propriété immatérielle des auteurs et distributeurs de contenus créatifs en ligne, ainsi que des attaques contre la vie privée, ou de nouvelles formes d'escroquerie contre les entreprises et les particuliers.

3.2

Les créations les plus mises en circulation de manière illégale sont les œuvres musicales contemporaines et, de plus en plus, les œuvres audiovisuelles, ainsi que les logiciels de toute nature. Le phénomène a pris une très grande ampleur durant la période où aucun modèle commercial prenant en considération les possibilités nouvelles d'enfreindre les droits de propriété immatériels n'a été proposé par les distributeurs. Il fallait aussi une pédagogie de l'usage de l'internet chez les adolescent(e)s dont aucune institution n'a pris l'initiative, et qui reste tout à fait insuffisante.

3.3

Les premières réactions ont été parfois extrêmes mais aussi, bien que plus rarement, laxistes. En général, les distributeurs ont mis en place des dispositifs contre la copie (les soi-disant «DRM») simultanément avec l'exigence de compensations financières pour les titulaires de droits et de mesures pénales extrêmement dissuasives, mais en pratique inapplicables compte tenu de la dimension de la fraude, sauf dans des cas de contrefaçons massives venues principalement de l'est de l'Europe et d'Asie. Quelques personnes ont été prises en faute afin de servir d'exemple dissuasif sans que l'on puisse mesurer la réalité de la dissuasion en l'absence d'enquêtes indépendantes et de chiffres réalistes sur les montants des pertes causées par les contrefaçons.

3.4

Mais le Comité exprime une certaine surprise devant la proposition de la Commission de créer des DRM «européens» et interopérables sur les contenus diffusés en ligne. En effet, en ce qui concerne la musique, des millions de titres sont déjà accessibles sur des sites commerciaux sans DRM; la tendance est à leur disparition progressive. Les firmes de distribution sont en train de mettre au point différents systèmes de distribution de cette catégorie de contenus, y compris des possibilités d'audition directe sans enregistrement ou d'abonnement spécial permettant de charger un certain nombre d'œuvres, la gratuité accompagnée de publicité «obligatoire», etc.

3.5

Les protections matérielles sur des supports mobiles, voire des terminaux, sont désormais vues plutôt comme des obstacles au «fair use» que comme des protections efficaces contre les pirates; elles peuvent aussi conduire à une intégration verticale (sites, codage propriétaire avec plus ou moins de perte de qualité, lecteurs dédiés: système de distribution Apple avec codage AAC et lecteur iPod ou iPhone) qui constitue un système anti-concurrentiel. Une protection fréquente, en particulier en ce qui concerne les logiciels ou les jeux, ou certaines publications en ligne, est fondée sur une clé numérique de déblocage de l'accès, adressée à l'acheteur après règlement de son achat à l'unité ou de son abonnement pour une certaine durée: ce système est assez efficace, et déjà largement répandu.

3.6

Les DRM numériques intégrés interopérables apparaissent au Comité comme des systèmes dépassés en pratique; sans doute serait-il préférable de bien observer les évolutions dans les différents secteurs du marché des contenus en ligne, qui semblent aller dans une direction favorable pour la protection des droits d'auteur et droits voisins, sur la base notamment de codes de conduite appropriés et de modèles commerciaux réalistes (4), plutôt que de figer par une initiative européenne, une situation transitoire et qui se modifie rapidement.

3.7

En ce qui concerne le droit d'auteur et les droits voisins, les accords et conventions internationaux existants constituent une base juridique en principe commune tant pour les États membres que dans les relations avec les pays tiers. Mais en pratique, des différences subsistent, en dépit du droit communautaire. Aussi, la proposition d'un «droit d'auteur européen» pour le marché intérieur rendrait la protection automatique dans tous les pays membres dès lors que ces droits sont reconnus dans l'un d'entre eux, et garantirait une protection uniforme.

3.8

À l'ère de l'internet et de la société de la connaissance, il est indispensable de trouver un véritable équilibre entre l'intérêt général et les intérêts privés. Les auteurs et distributeurs doivent être rémunérés équitablement. Les lecteurs ou auditeurs et usagers doivent pouvoir utiliser raisonnablement les contenus légalement acquis, dans un cadre privé, dans le domaine de la lecture publique ou dans l'enseignement dispensé aux différents niveaux des institutions éducatives.

3.9

Force est de constater l'existence d'un droit pénal rigoureux, protecteur du droit d'auteur et prévoyant à l'égard des particuliers qui n'en font pas commerce des sanctions exorbitantes dans divers pays, alors que les droits d'usage et de copie privés ont été restreints; par contre, les méthodes policières imposées aux fournisseurs d'accès à l'internet, qui peuvent s'avérer utiles pour la lutte antiterroriste paraissent disproportionnées et susceptibles de porter atteinte au droit à la vie privée dans un cadre judiciaire unilatéralement favorable aux distributeurs. Il est possible que ce type de législations soit finalement remis en cause devant la Cour européenne des droits de l'homme de Strasbourg, qui veille au respect de la vie privée. La Cour de Luxembourg pour sa part appelle au respect des principes de proportionnalité et à la recherche d'un équilibre entre les divers droits en présence (arrêt Pro Musicae).

3.10

En outre, des pays, souvent les mêmes, lèvent une taxe sur tous les types de supports numériques, en les considérant comme outils de piratage quels que soient les usages auxquels ils sont destinés. Bien que cette taxe soit souvent qualifiée de «taxe pour copie privée», elle génère en fait des revenus considérables dont la répartition est parfois loin d'être transparente. Cette approche assimilant toute copie privée ou de «fair use» à une violation des droits d'auteur et voisins est particulièrement insupportable pour les utilisateurs honnêtes des TIC, c'est à dire une très forte majorité, et pour les entreprises qui les utilisent à d'autres fins que la copie de chansonnettes ou de jeux. Au moins de tels prélèvements devraient-ils être modérés, et proportionnels au coût effectif du stockage des unités numériques (pourcentage du prix de vente du support divisé par la capacité en nombre de total de Go, par exemple, car on constate des distorsions considérables selon les supports.

3.11

Les droits des différentes parties prenantes doivent être respectés, mais dans le respect des directives en vigueur et selon le principe de proportionnalité, comme la Cour de justice l'a clairement exprimé dans son arrêt «Pro Musicae» (5).

4.   Observations complémentaires du Comité

4.1

Le Comité partage l'opinion selon laquelle l'interopérabilité, indispensable à la libre concurrence, peut uniquement être atteinte lorsque le consommateur peut utiliser le dispositif de son choix pour lire ses œuvres. La seule solution est pour cela que les œuvres soient encodées dans des standards ouverts, accessibles à tous. Or, tout système de DRM interdit par défaut la lecture d'une œuvre à tout dispositif, matériel ou logiciel, qui n'a pas été explicitement autorisé par l'éditeur du DRM. Par définition les DRM reposent sur le secret de leurs formats fermés dont les spécifications techniques ne sont pas accessibles publiquement. Les systèmes non autorisés et non certifiés par l'éditeur du DRM sont donc exclus de toute concurrence. Il n'existe d'ailleurs aucun DRM à ce jour reposant sur des standards ouverts. Cette solution impliquerait la mise en place de systèmes complexes de licences croisées, et certains créateurs pourraient se trouver exclus du marché du fait, par exemple, qu'ils n'utilisent pas de DRM. Tout un secteur de la création numérique, comprenant les instituts scientifiques et les centres de recherche, les universités, le logiciel libre, les créations sous des licences alternatives, pourrait être exclus du marché qui n'admettrait que des contenus commerciaux, ce qui paraît incompatible avec la société de l'information et de la connaissance à l'avant garde de laquelle l'Europe veut se placer.

4.2

Aucune de ces hypothèses n'est satisfaisante, par exemple pour l'importation des œuvres et contenus en provenance des pays tiers vers l'Europe et pour l'exportation en dehors de notre continent. Le ou les DRM logiciels européens devraient alors aussi être compatibles avec ceux des marchés extérieurs, beaucoup plus actifs souvent en matière audiovisuelle. Les DRM constituent une porte ouverte aux attitudes anticoncurrentielles et aux tentatives d'intégration verticale dans le secteur multimédia. Le cas de iTunes d'Apple qui utilise un DRM et un encodage propriétaires obligeant en pratique à utiliser un lecteur de type iPod ou iPhone illustre ce problème.

4.3

En ne dévoilant que les API (application programmer's interface) d'un DRM logiciel, et non la totalité du programme source, ce qui pourrait être une tentation assez forte chez certains fournisseurs, on courra toujours le risque de ne pas permettre une réelle interopérabilité.

4.4

Les pirates parviennent très rapidement à contourner ou reproduire l'équivalent de n'importe quel système de protection; au point que les fournisseurs de contenus n'ont plus confiance dans les DRM et sont à la recherche de nouveaux modèles commerciaux de diffusion, comme l'abonnement forfaitaire, l'écoute libre mais l'obtention de l'œuvre contre paiement, l'inclusion de publicité, etc. Il faudrait faire confiance au marché plutôt que de légiférer dans la hâte et la confusion, comme dans le cas français, où les textes se succèdent et donnent lieu à des jurisprudences contradictoires. La pression des lobbies des «majors» (cinq majors mondiales dominent la musique-chanson, six ou sept l'audiovisuel) a jusqu'ici été déterminante pour conduire certains pays à l'abandon du droit à la copie privée et à la criminalisation de l'échange de fichiers entre particuliers. Le dernier projet de loi français s'enlise dans cette voie sans issue de l'exagération répressive.

4.5

Comme le Comité l'a soutenu dans ses avis antérieurs, le droit pénal ne devrait s'appliquer qu'aux contrefaçons à but commercial (production et distribution, parfois par des maffias); dans certains pays membres, il est très facile, y compris sur des marchés ouverts, d'obtenir des contrefaçons de logiciels ou d'enregistrements musicaux et audiovisuels; une production européenne de contrefaçons existe, mais l'essentiel des copies proviennent d'Asie. C'est cette contrefaçon massive et à but commercial qu'il faudrait viser et sanctionner en priorité, de même que développer une coopération policière et judiciaire pour démanteler les réseaux criminels internationaux.

4.6

Vis-à-vis des échanges, en particulier entre adolescents, l'information sur la nécessité pour les auteurs et producteurs d'être équitablement rémunérés pour leur travail (surtout les auteurs qui souvent sont réduits à une portion congrue des droits perçus), l'éducation civique, sont à développer en priorité.

4.7

Tous les échanges massifs de fichiers ne sont pas nécessairement des échanges de fichiers protégés par des droits immatériels pécuniaires. Il peut s'agir d'échanges et publications gratuites de contenus divers (résultats d'expériences et travaux scientifiques, œuvres soumises à des licences non restrictives en ce qui concerne la copie ou la diffusion).

4.8

Cependant, c'est tout le réseau qui doit, selon le projet de loi en examen en France, faire l'objet d'une surveillance et de conservation sur une longue durée des données personnelles des internautes. Ces données devraient être ouvertes aux représentants des «majors», alors que si un tel système était mis en place, seules des autorités publiques munies d'un mandat judiciaire devraient pouvoir accéder à de telles données.

4.9

Le droit de copie privée devient une exception, soumise à de fortes restrictions, dans les «contrats» élaborés par les fournisseurs de contenus, en termes difficiles à comprendre, et qui sont contradictoires avec des achats d'impulsion, de mode souvent, de la part des consommateurs.

4.10

Si les auteurs et distributeurs professionnels sont en pratique les seuls à bénéficier d'une telle protection excessive de la loi, les producteurs individuels de contenus, ou les artistes encore inconnus du grand public, les utilisateurs de licences alternatives (GPL, LGPL, creative commons, etc. — une cinquantaine de variétés, environ) ne font pour leur part l'objet d'aucune protection spécifique, bien que ces licences soient régies par le droit d'auteur et ne soient pas obligatoirement gratuites; il leur faudra, eux, passer par le préalable d'un juge pour établir une plainte en contrefaçon, ce qui créerait une inégalité profonde devant la loi entre grands diffuseurs transnationaux et petites entreprises ou particuliers.

4.11

En fait, le Comité estime que la législation doit assurer la protection des consommateurs de bonne foi comme socle fondamental, ainsi que la juste rémunération des auteurs pour leur travail.

4.12

Les dispositions restrictives de l'usage d'une licence légalement acquise et l'accès aux données personnelles par des représentants des «majors» vont à l'encontre des buts poursuivis, car les contrefacteurs «commerciaux» sauront surmonter tous les obstacles techniques et dissimuler leurs traces sur le réseau, et ne seront de fait accessibles au contrôle que des échanges légaux ou illégaux de données par des internautes sans but commercial, même si un nombre important de ces échanges sont illégaux et doivent être combattus par des moyens appropriés à leur caractère de masse. Quelques condamnations «pour l'exemple» et la publicité qui en est faite pour «décourager» certains internautes ne suffiront pas à régler le problème, car les chances d'être pris sont statistiquement très minimes et n'inquiéteront pas, par exemple, des adolescents qui n'ont pas conscience des préjudices qu'ils causent à leurs auteurs préférés.

4.13

La conservation des données personnelles de tous les internautes par les FAI pour une longue durée constitue en soi une grave intrusion dans la vie privée des internautes; est-elle absolument nécessaire pour faire respecter le droit d'auteur et les droits voisins, ou ne serait-elle pas disproportionnée par rapport au but à atteindre? Ces derniers sont-ils des droits si absolus qu'ils exigeraient une atteinte permanente à la vie privée de tous les usagers d'internet?

4.14

Ces données conservées peuvent éventuellement servir à la lutte antiterroriste, mais en tout état de cause les internautes doivent bénéficier de garanties légales quant à la confidentialité de leurs connexions, qui peuvent cependant être levées dans un but d'intérêt général prédominant, par une autorité publique munie d'un mandat régulier et dans un but précis limité par les énonciations du mandat judiciaire.

4.15

Certains usages des données peuvent être autorisés de manière générale, à des fins de connaissance et d'analyse, sous certaines conditions, en particulier d'anonymisation des données. Par contre, il faudrait prohiber le croisement des fichiers nominatifs, le recueil de données nominatives à des fins de «profilage» dans un but d'efficacité publicitaire et leur conservation et croisement avec la liste des mots-clés utilisés dans les moteurs de recherche et autres pratiques déjà en usage, au profit notamment des «majors» et d'autres grandes sociétés, de telles pratiques portant aussi atteinte à la vie privée des citoyens.

4.16

Des taxes sont prélevées dans de nombreux pays sur tous les supports d'information, fixes ou mobiles, au bénéfice exclusif des titulaires de droits (surtout sur les contenus audio-visuels) y compris sur des supports non destinés à de tels usages; ce système considère tout usager d'un support numérique quelconque comme un pirate potentiel. Certaines catégories d'utilisateurs devraient être exonérées, notamment les entreprises. Par contre, les fournisseurs d'accès haut débit qui ont développé leurs réseaux sur l'usage illégal qui pouvait en être fait dans certains cas, pourraient être taxés à un taux assez bas mais lié à l'intensité du trafic entre particuliers afin de contribuer aux organismes de collecte des droits d'auteur et à la promotion de nouveaux contenus, mais les états ne devraient pas détourner à leur profit tout ou partie de ces taxes, hors des frais de collecte et de redistribution.

4.17

Les exemples de gestion des droits offerts par des pays scandinaves, en particulier la Suède, devraient être suivis plutôt que les législations et projets successifs français qui sont déséquilibrés et peu convaincants en ce qui concerne les aides aux jeunes créateurs de contenus et aux petites et moyennes entreprises.

4.18

Après une période de garantie de droits exclusifs d'une durée raisonnable, un système global pourrait prendre le relai, comme en Suède.

4.19

Lors de l'examen du projet de directive concernant la protection des «droits de propriété intellectuelle» (PI-PLA: Propriété industrielle, propriété littéraire et artistiques et autres droits voisins ou ad hoc reconnus et protégés dans l'Union), le Comité appelait déjà à une approche ferme mais mesurée de la lutte contre la contrefaçon à des fins mercantiles.

4.20

L'OMC de son côté mettait en garde, dans l'Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC) contre d'éventuels abus de la part des propriétaires de droits, qui pourraient restreindre la concurrence ou ne pas être conformes à l'intérêt général.

4.21

«Objectifs: la protection et le respect des droits de propriété intellectuelle devraient contribuer à la promotion de l'innovation technologique et au transfert et à la diffusion de technologie, à l'avantage mutuel de ceux qui génèrent et de ceux qui utilisent les connaissances techniques et d'une manière propice au bien-être social et économique, et à assurer un équilibre de droits et d'obligations».

4.22

Principes: … 2. Des mesures appropriées, pourvu qu'elles soient compatibles avec les dispositions du présent accord, pourront être nécessaires afin d'éviter l'usage abusif des droits de propriété intellectuelle par les détenteurs de droits ou le recours à des pratiques qui restreignent de manière déraisonnable le commerce ou sont préjudiciables au transfert international de technologie.

4.23

Les remarques précédentes du Comité, déjà contenues dans son avis du 29 octobre 2003 (6) sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux mesures et procédures visant à assurer le respect des droits de propriété intellectuelle», sont notamment conformes aux objectifs des ADPIC (article 7), et à leurs principes (article 8 paragraphe 2), qui devraient figurer dans les considérants de la directive, car les sanctions éventuelles ne peuvent être entièrement détachées du droit matériel, ni s'abstenir de considérer les possibles abus de droit de la part des titulaires de droits de PI-PLA (7).

Bruxelles, le 18 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  Digital Rights Management — Gestion des droits numériques (expression «politiquement correcte» pour signifier: dispositifs logiciels ou techniques empêchant la copie).

(2)  COM(2007) 836 final, Bruxelles, 3.1.2008 SEC(2007) 1710 Document de travail des services de la Commission.

(3)  «i2010 — Une société de l'information pour la croissance et l'emploi» (COM(2005) 229 final).

(4)  Le fait de vendre la musique sur internet au même prix que des CD vendus en magasin constitue une rente excessive pour les distributeurs, ce qui n'encourage pas la recherche de modèles réalistes tenant compte du prix de revient réel et d'un bénéfice commercial non disproportionné.

(5)  ARRÊT DE LA COUR (grande chambre) 29 janvier 2008.

Dans l'affaire C-275/06,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle

…, la Cour (grande chambre) dit pour droit:

«Les directives 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil, du 8 juin 2000, relative à certains aspects juridiques des services de la société de l'information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur (“directive sur le commerce électronique”), 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 mai 2001, sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information, 2004/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, relative au respect des droits de propriété intellectuelle, et 2002/58/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 juillet 2002, concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques (directive vie privée et communications électroniques), n'imposent pas aux États membres de prévoir, dans une situation telle que celle de l'affaire au principal, l'obligation de communiquer des données à caractère personnel en vue d'assurer la protection effective du droit d'auteur dans le cadre d'une procédure civile. Toutefois, le droit communautaire exige desdits États que, lors de la transposition de ces directives, ils veillent à se fonder sur une interprétation de celles-ci qui permette d'assurer un juste équilibre entre les différents droits fondamentaux protégés par l'ordre juridique communautaire. Ensuite, lors de la mise en œuvre des mesures de transposition desdites directives, il incombe aux autorités et aux juridictions des États membres non seulement d'interpréter leur droit national d'une manière conforme à ces mêmes directives, mais également de ne pas se fonder sur une interprétation de celles-ci qui entrerait en conflit avec lesdits droits fondamentaux ou avec les autres principes généraux du droit communautaire, tels que le principe de proportionnalité.»

(6)  JO C 32 du 5.2.2004, p. 15.

(7)  L'«accord ADPIC», qui constitue l'annexe 1 C de l'accord instituant l'Organisation mondiale du commerce (OMC), signé à Marrakech le 15 avril 1994 et approuvé par la décision 94/800/CE du Conseil, du 22 décembre 1994, relative à la conclusion au nom de la Communauté européenne, pour ce qui concerne les matières relevant de ses compétences, des accords des négociations multilatérales du cycle de l'Uruguay (1986-1994) (JO L 336, p. 1), est intitulé «Moyens de faire respecter les droits de propriété intellectuelle». Sous cette partie figure l'article 41, paragraphe 1 qui prévoit: «Les membres feront en sorte que leur législation comporte des procédures destinées à faire respecter les droits de propriété intellectuelle telles que celles qui sont énoncées dans la présente partie, de manière à permettre une action efficace contre tout acte qui porterait atteinte aux droits de propriété intellectuelle couverts par le présent accord, y compris des mesures correctives rapides destinées à prévenir toute atteinte et des mesures correctives qui constituent un moyen de dissuasion contre toute atteinte ultérieure. Ces procédures seront appliquées de manière à éviter la création d'obstacles au commerce légitime et à offrir des sauvegardes contre leur usage abusif …».


31.3.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 77/69


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de Directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2005/35/CE relative à la pollution causée par les navires et à l'introduction de sanctions en cas d'infractions»

COM(2008) 134 final — 2008/0055 (COD)

(2009/C 77/17)

Le 4 avril 2008, le Conseil a décidé, conformément à l'article 80, paragraphe 2 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur le thème

«Pollution causée par les navires — sanctions en cas d'infractions».

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 16 juillet 2008 (rapporteur: M. RETUREAU).

Lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 17 septembre 2008), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis à l'unanimité.

1.   Propositions de la Commission

1.1

Le Comité est consulté sur les modifications que la Commission propose d'apporter à la Directive de 2005 sur la lutte contre la pollution par les navires, afin de respecter la jurisprudence de la Cour de justice en matière de criminalité environnementale, en ce qui concerne les compétences respectives des institutions communautaires, l'effectivité de la législation communautaire, et la prééminence du TCE sur le TUE en ce qui concerne les politiques et objectifs communautaires définis dans les traités.

2.   Observations générales

2.1

En matière pénale, le Comité remarque à nouveau que la Communauté ne dispose en principe d'aucune compétence qui lui soit conférée par les traités.

2.2

Néanmoins, la Commission doit se préoccuper de l'effectivité du droit communautaire, dont elle a l'initiative, pour mener à bien les politiques inscrites dans le TCE qui relèvent de sa compétence; dans ce but, elle peut proposer dans ses initiatives législatives que les gouvernements prévoient, dans leur droit national, des sanctions proportionnées, efficaces et dissuasives, y compris de nature pénale, à l'égard des personnes physiques et morales lorsque ces personnes commettent des infractions, contre l'environnement, délibérément ou par négligence sérieuse, directement ou à titre de complices, ou qu'elles incitent à de telles infractions justifiant l'application desdites sanctions pénales.

2.3

Dans son avis précédent (1), le Comité avait critiqué les positions excessives prises par la Commission quant à l'étendue des compétences de la Communauté dans le domaine pénal, et avait soutenu une interprétation plus modérée, qui finalement s'est révélée en parfaite conformité avec la jurisprudence de la Cour de Justice (2); beaucoup de temps, depuis 2000, a été perdu dans un conflit interinstitutionnel qui est désormais tranché de manière claire, ce qui va permettre de mieux faire respecter les normes environnementales à l'avenir.

2.4

La crainte parfois exprimée que la future modification des traités conduirait à de nouveaux changements de compétences et donc, en conséquence, de la législation, qui manquerait ainsi de stabilité et de sécurité n'apparaît pas justifiée, ni en raison de la situation institutionnelle actuelle, ni si le Traité de Lisbonne s'était appliqué. En tout état de cause, les États membres ne paraissent pas disposés à se départir de leurs compétences dans la matière pénale, considérée comme une compétence de souveraineté appartenant au «noyau dur» des compétences étatiques. Même une évolution, qui ne serait pas radicale comme on peut facilement le concevoir, des compétences respectives des institutions législatives, ne serait pas ipso facto une justification à une modification fondamentale du droit.

2.5

Par ailleurs, dans le cas C.308/2006 soumis à la Cour concernant la légalité de la directive 2005/35/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 septembre 2005 à la lumière du droit international public, la Cour a décliné sa compétence, mettant ainsi fin à la contestation soulevée; en effet, même devant d'autres juridictions internationales, le cas ne saurait prospérer pour des raisons juridiques et politiques qui dépassent le cadre de cet avis, mais même si une juridiction acceptait de se prononcer sur un projet de droit communautaire au titre d'avis consultatif, cela ne suffit pas à défier le législateur communautaire qui est fort de la suprématie interne de son droit par rapport aux droits nationaux et au droit international, et de plus n'est pas sujet de ce dernier droit.

2.6

La proposition relative à la pollution par les navires enjoint donc, en parfaite concordance avec la jurisprudence communautaire, les États membres, dans un nombre restreint de cas graves qu'elle identifie et demande aux États membres de sanctionner pénalement de prévoir, et introduire dans leur législation pénale, au regard de ces infractions, des sanctions pénales efficaces, proportionnées et dissuasives, afin de lutter contre ces violations bien définies du droit communautaire.

2.7

Sans qu'il s'agisse d'harmonisation du droit pénal applicable, puisqu'il ne s'agit que d'inviter les États membres à qualifier et sanctionner pénalement des infractions que le législateur communautaire se contente d'identifier, la jurisprudence de la Cour permet néanmoins l'introduction d'obligations en matière pénale pour les États membres, ce qui constitue un moyen plus efficace de renforcer les normes européennes et leur respect lorsqu'elles concernent des questions majeures.

2.8

Le Comité salue donc et appuie la proposition de modification de la directive de 2005, et estime que les moyens nouveaux d'identification et de suivi des navires qui vont se mettre en place progressivement permettront d'en assurer le plein respect, en sanctionnant les pratiques illégales de façon efficace et systématique.

Bruxelles, le 17 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  JO C 220 du 16.9.2003, p. 72.

(2)  Voir arrêt de la Cour du 23 octobre 2007 Commission des Communautés européennes soutenue par Parlement européen contre Conseil aff. C-440/05.


31.3.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 77/70


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil facilitant l'application transfrontière de la législation dans le domaine de la sécurité routière»

COM(2008) 151 final — 2008/0062 (COD)

(2009/C 77/18)

Le 13 mai 2008, le Conseil a décidé, conformément à l'article 71, paragraphe 1, lettre c), du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social sur la

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil facilitant l'application transfrontière de la législation dans le domaine de la sécurité routière».

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 16 juillet 2008 (rapporteur: M. SIMONS).

Lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 17 septembre 2008), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis à l'unanimité.

1.   Conclusions

1.1

Dans la proposition de directive à l'examen, la Commission formule des propositions pour que les infractions routières commises dans un autre État membre que celui où est immatriculé le véhicule concerné soient poursuivies et contrôlées de manière plus efficace et énergique.

1.2

Elle présente cette proposition afin de pouvoir réaliser l'objectif qu'elle s'était fixé en 2001 de faire diminuer de moitié, sur la période 2001-2010, le nombre de personnes qui décèdent dans des accidents de la route.

1.3

Il ne sera pas possible de concrétiser cette visée s'il n'est pas pris de mesures complémentaires. Le texte qui fait l'objet du présent avis en constitue une et est axé sur le traitement réservé à ces infractions de roulage qui ont lieu dans un État membre n'ayant pas immatriculé le véhicule en cause.

1.4

Le Comité considère que le projet de directive offre un outil efficace pour une approche adéquate de ces violations des règles routières accomplies dans un pays différent de celui de l'immatriculation du véhicule concerné. Une telle action doit donc s'accompagner de contrôles et sanctions opérants et efficaces et le Comité lance dès lors un appel pressant au Conseil pour qu'il apporte des améliorations sur ce point.

1.5

Le Comité fait remarquer que pour rendre la directive plus prégnante, il y a lieu d'étendre la liste des manquements que la Commission dresse dans sa proposition en y intégrant tous ceux qui sont liés à l'amélioration de la sécurité routière.

1.6

Pour des raisons d'efficacité et de bon rendement, le Comité estime qu'aux fins de l'échange d'informations, il serait opportun d'utiliser un réseau électronique qui existe déjà, par exemple le système Eucaris, qui n'induit que des dépenses modérées. Sur ce point, il conseille à la Commission de réaliser ou faire réaliser une étude de faisabilité pour examiner s'il est possible de développer les dispositifs existants en y intégrant l'échange de données qui est envisagé.

1.7

En ce qui concerne les sanctions des infractions, le Comité suggère également qu'il soit envisagé de prendre en compte des éléments tels que le permis de conduire à points, la confiscation du véhicule ou le retrait temporaire de permis, qui peuvent être infligés au contrevenant en combinaison ou non avec des amendes.

1.8

Le Comité pense que dans l'intérêt d'une action efficace, la proposition de directive fait bien de prévoir que chaque État membre désigne une autorité centrale chargée de l'application des règles.

1.9

Le Comité ne voit pas quelle peut être la valeur ajoutée du modèle-type qui est proposé par la Commission pour l'établissement du formulaire de notification des infractions. L'enjeu, à ses yeux, ne réside pas dans la forme qui lui est donnée mais dans son contenu. Aussi la Commission doit-elle s'en tenir, à son sens, à fournir une description circonstanciée des données qui sont nécessaires aux fins de la directive.

1.10

Le Comité peut approuver la procédure comitologique que la Commission suggère pour l'exécution des mesures proposées.

2.   Introduction

2.1.1

Dans son livre blanc de 2001 sur la politique européenne de transport, l'UE s'est assigné pour objectif de parvenir d'ici 2010 à réduire de moitié le nombre de tués sur la route. Concrètement parlant, un tel impératif implique que ce chiffre, qui était de 54 000 morts en 2001 dans l'UE à vingt-sept États membres, soit ramené en 2010 à 27 000 victimes par an.

2.1.2

Entre 2001 et 2007, le total des personnes qui ont perdu la vie dans les accidents routiers a baissé de 20 %, alors qu'il aurait dû chuter de 37 % pour parvenir à une réduction de moitié pour 2010. Il est donc nécessaire de redoubler d'efforts.

2.2   La proposition de la Commission

2.2.1

Pour préparer la proposition de directive à l'examen, la Commission a organisé une séance publique d'information; de même, une réunion s'est déroulée avec des parties prenantes représentatives. C'est de ces rencontres qu'a découlé le texte du document qui fait l'objet du présent avis.

2.2.2

La Commission considère que la proposition de directive présentée offre un outil efficace pour atteindre quand même le but visé et veiller à ce que tous les citoyens de l'UE soient traités sur un pied d'égalité.

2.2.3

Elle vise à mieux faire poursuivre les infractions qui ont été commises dans un autre État membre que celui où est immatriculé le véhicule concerné.

2.2.4

À l'heure actuelle, les infractions de roulage commises au volant d'un véhicule immatriculé dans un autre État membre restent souvent impunies. On sait par exemple que la part des conducteurs étrangers dans le total des excès de vitesse varie de 2,5 % à 30 %.

2.2.5

Comme les données disponibles font apparaître que ces dépassements de la vitesse autorisée sont à la base de 30 % des décès de la circulation, s'y attaquer pourrait contribuer puissamment à en faire baisser les chiffres.

2.2.6

D'autres infractions reprises dans la proposition ont également un fort impact, qu'il s'agisse de la conduite sous l'emprise de l'alcool (25 %), de l'absence de port de la ceinture de sécurité (17 %) ou du franchissement de feux rouges (4 %).

2.2.7

La Commission n'a pas en vue d'harmoniser les règles gouvernant la circulation routière ou les amendes pour infractions au code de la route, qui restent du ressort de chaque État membre. Elle prévoit simplement des mesures de nature administrative qui mettent en place un système efficace et agissant afin de poursuivre par-delà les frontières les principales infractions routières, permettant ainsi d'arriver à l'objectif d'avoir, en 2010, divisé par deux le nombre de victimes qui trouvent la mort dans un accident de la circulation.

3.   Observations générales

3.1

Dans l'avis qu'il a adopté le 11 décembre 2003 sur la communication de la Commission intitulée «Programme d'action européen pour la sécurité routière — Réduire de moitié le nombre de victimes de la route dans l'Union européenne d'ici 2010: une responsabilité partagée», le Comité s'était déjà montré quelque peu dubitatif quant aux visées, trop ambitieuses à son sens, qu'elle s'était assignées. Il apparaît bel et bien à présent que leur réalisation nécessite des mesures supplémentaires.

3.2

Le Comité considère dès lors qu'une démarche européenne pour la poursuite transfrontalière des infractions de roulage recèle une valeur ajoutée manifeste. Il partage les vues de la Commission quand elle estime que tout doit être fait pour atteindre malgré tout l'objectif fixé en 2001 de réduire de moitié d'ici 2010 le nombre de morts sur la route et il est d'avis que le projet de directive qu'elle a soumis ouvre une possibilité d'accomplir un grand pas en ce sens, tout en devant dès lors s'accompagner également de contrôles et sanctions opérants et efficaces. Aussi le Comité lance-t-il un appel pressant au Conseil pour qu'il apporte des améliorations s'agissant de contrôler et de sanctionner.

3.3

L'approche exposée par la Commission paraît simple. Grâce à un réseau d'échange de données dont il conviendra de préciser les contours, chaque État membre sera en mesure de notifier aux conducteurs ressortissants d'autres pays de l'Union les infractions qu'ils ont commises sur son territoire. On ne voit pas clairement quel type de réseau et de dispositif envisage la Commission.

3.4

Dans l'article 4 du projet de directive, la Commission signale que l'échange d'informations doit s'effectuer rapidement, par le biais d'un réseau électronique européen qui devra être mis en place dans un délai de douze mois. Dans un autre passage de la communication, on peut lire, à propos de l'échange de données, qu'il sera fait usage d'un système d'information existant déjà dans l'UE, la démarche ainsi choisie ayant notamment pour effet de contenir le coût de l'opération. La Commission n'indique toutefois pas quel sera le système utilisé pour échanger les données. Tout comme elle, le Comité pense que pour épargner du temps et de l'argent, la meilleure solution est d'opter pour un système d'information de l'Union européenne qui existe déjà.

3.5

En termes concrets, le Comité songe en la matière à une approche d'un type analogue à celle employée dans le cadre de la décision du Conseil sur l'approfondissement de la coopération transfrontière en vue de la lutte contre le terrorisme et la criminalité transfrontière, qui recourt à la technologie Eucaris. Ce dispositif est actuellement utilisé par dix-huit pays de l'Union et il le sera par la totalité des vingt-sept États membres lorsque ladite décision sera entrée en vigueur. Comparé à d'autres structures en réseau, son coût est fort modique.

3.6

Le Comité préconise que la Commission fasse au moins réaliser une étude de faisabilité sur tous les systèmes existants, dont la technologie Eucaris pour voir s'il est possible de les étendre en y intégrant l'échange de données qui est envisagé.

3.7

Pour le Comité, Commission a raison de se borner à proposer de fixer les dispositions qui régiront la base juridique de l'échange des données concernant l'immatriculation des véhicules, tandis qu'il revient aux États membres de déterminer eux-mêmes la procédure de poursuite. Cette manière de faire ménage le principe de subsidiarité.

3.8

Le Comité souligne que l'efficacité des poursuites s'accroîtra si l'on peut disposer sur tout le territoire de l'Union de conventions dont la mise en œuvre et le contrôle s'effectuent d'une manière harmonisée dans tous les États membres, avec l'homogénéisation, par exemple, des vitesses maximales autorisées, du taux d'alcoolémie toléré, de la politique en matière de sanctions, etc. Il conviendrait donc que le Conseil arrive un jour à produire des résultats dans ce domaine.

4.   Observations spécifiques

4.1

Étant donné que l'on vise à parvenir pour 2010 à diminuer de moitié par rapport à 2001 le nombre de décès dus à des accidents de la route et qu'entre-temps, fin 2007, il a été constaté qu'il ne serait pas possible d'atteindre ce but sans prendre de mesures complémentaires, le Comité pense que la coopération transfrontalière, proposée par la Commission dans les quatre domaines suivants:

l'excès de vitesse,

la conduite en état d'ivresse,

le défaut de port de la ceinture de sécurité

et le franchissement d'un feu rouge,

représente un pas dans la bonne direction, car selon les données qu'elle fournit, l'initiative donnera la possibilité d'épargner chaque année de 200 à 250 morts sur la route.

4.2

Le Comité défend la thèse que la Commission se doit d'ajouter à l'article 1 du projet de directive d'autres infractions commises hors frontière, comme les appels téléphoniques passés sans dispositif mains libres, l'agressivité au volant, le non-respect d'une interdiction de dépassement, la circulation en sens interdit ou la conduite sous l'emprise de stupéfiants. Comme il l'avait déjà noté dans son avis sur la communication de la Commission concernant le «Programme d'action européen pour la sécurité routière — Réduire de moitié le nombre de victimes de la route dans l'Union européenne d'ici 2010: une responsabilité partagée», il s'impose d'expérimenter tous les moyens possibles pour parvenir à atteindre le but fixé.

4.3

En ce qui concerne les sanctions des infractions, le Comité suggère également qu'il soit envisagé de prendre en compte des éléments tels que le permis de conduire à points, la confiscation du véhicule ou le retrait temporaire de permis, qui peuvent être infligés au contrevenant en combinaison ou non avec des amendes.

4.4

Le Comité juge pouvoir se rallier à la Commission lorsqu'elle propose à l'article 6 du projet de directive que chaque État membre soit tenu de désigner une autorité centrale qui coordonnera l'application de ce texte.

4.5

Le Comité pose qu'au regard de la subsidiarité, il n'est pas souhaitable que la Commission prescrive un modèle de formulaire de notification comme elle le fait à l'article 5 de la proposition de directive. En effet, l'attention ne doit tant porter sur la forme que sur le contenu. À son estime, elle doit s'en tenir à fournir une description circonstanciée des données qui doivent être reprises.

4.6

Dans l'article 8 de la proposition de directive, la Commission propose qu'un comité pour l'application de la sécurité routière l'assiste pour la mise en œuvre du texte. Le Comité peut endosser la procédure de comitologie ainsi proposée.

Bruxelles, le 17 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


31.3.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 77/73


Avis du Comité économique et social européen sur «Les négociations internationales sur le changement climatique»

(2009/C 77/19)

Les 16 et 17 janvier 2008, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l'article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d'élaborer un avis d'initiative sur

«Les négociations internationales sur le changement climatique».

La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement» (Observatoire du développement durable), chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 2 septembre 2008 (rapporteur: M. OSBORN).

Lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 17 septembre), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 130 voix pour, 3 voix contre et 3 abstentions.

1.   Résumé et recommandations

1.1

Le changement climatique est l'un des principaux défis auxquels est confrontée la planète en ce XXIe siècle. Pour éviter des changements catastrophiques, les émissions mondiales de gaz à effet de serre doivent, dans leur ensemble, être réduites de manière substantielle, et celles des pays développés doivent être abaissées à 60-80 % des niveaux de 1990 d'ici le milieu du siècle.

1.2

Les négociations internationales sur le changement climatique, qui ont été lancées à Bali en décembre 2007, revêtent une importance cruciale car elles auront une influence décisive sur l'étendue des actions qui seront mises en œuvre au niveau mondial jusqu'en 2020. Il est indispensable que ces négociations débouchent sur des résultats positifs à Copenhague en 2009.

1.3

L'Union européenne s'est fixé pour objectif contraignant, à l'horizon 2020, de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 20 % par rapport aux niveaux de 1990 et dans le cadre des négociations, elle a offert de réaliser une réduction accrue, à savoir de 30 % par rapport aux niveaux de 1990, si d'autres pays prennent des engagements similaires. La Commission a ainsi présenté des propositions dans le cadre du train de mesures sur l'énergie du 23 janvier 2008, qui préconise des actions destinées à atteindre l'objectif d'une réduction de 20 à 30 %.

1.4

Le Comité soutient fermement l'initiative que l'UE a prise dans les négociations et en particulier son engagement unilatéral de réduire les émissions de 20 % d'ici 2020, pour faire avancer les négociations.

1.5

Nous estimons toutefois que le défi du changement climatique est d'une gravité telle qu'il faut tout faire pour aller plus loin. L'UE devrait avoir pour objectif d'opérer la réduction de 30 % qu'elle s'est proposé de réaliser, sous certaines conditions, d'ici 2020 et il conviendrait, dans le cadre des négociations, que nous tâchions d'obtenir des engagements comparables de la part des autres pays développés, ainsi que des engagements significatifs de la part des économies émergentes, dont les émissions sont en augmentation rapide.

1.6

Afin de maximiser son influence sur les négociations, l'UE doit être en mesure de montrer sa crédibilité, en tenant ses engagements. Un ensemble de mesures destinées à atteindre l'objectif de réduction de 20 % doit être bien en place avant la fin de 2008.

1.7

Nous estimons que pour atteindre l'objectif d'une réduction de 30 % d'ici 2020, qui devrait, selon nous, être le véritable objectif, un nouvel ensemble de mesures seront sans doute nécessaires aux niveaux européen et national. Nous appelons instamment à ce que des dispositions soient prises au plus vite pour mettre en place une seconde tranche de mesures qui permettront d'atteindre l'objectif de réduction de 30 %.

1.8

Nous attendons impatiemment les prochaines propositions que fera la Commission au sujet de l'adaptation au changement climatique et recommandons qu'elles soient complétées par des stratégies nationales d'adaptation pour chacun des États membres.

1.9

Nous préconisons le développement de nouvelles initiatives pour soutenir le renforcement des capacités et le transfert technologique dans le domaine de l'atténuation du changement climatique et de l'adaptation à ce phénomène.

1.10

Une réponse adaptée au changement climatique impliquera des changements majeurs au sein de l'économie mondiale ainsi que des flux d'investissements. Nous recommandons d'analyser plus en détail l'étendue des ressources nécessaires et de la palette d'instruments publics et privés nécessaire pour gérer ces flux. Nous pensons que l'étendue des efforts et du leadership requis est comparable à ce qui était nécessaire pour la création du plan Marshall pour la reconstruction de l'Europe après la seconde guerre mondiale. Dans ce contexte, l'UE devrait être une instigatrice majeure de ce plan indispensable.

1.11

Plus spécifiquement, des fonds seront nécessaires pour soutenir des mesures d'atténuation et d'adaptation dans les pays en développement. L'extension du mécanisme de développement propre (MDP) constitue une source de fonds mais il conviendrait d'adopter une position plus stricte sur les critères et la mise en œuvre. L'Europe pourrait fournir certaines des ressources additionnelles nécessaires par la mise aux enchères des permis d'échange de carbone.

1.12

Il faut une action de la part des organes publics de tous types à tous les niveaux, ainsi que de la part des consommateurs et du grand public.

1.13

L'UE a elle-même un rôle crucial à jouer pour guider et orchestrer cette grande transformation. Nous appelons instamment toutes les institutions de l'UE à jouer pleinement leur rôle pour atteindre l'objectif de l'UE en matière de climat. Le Comité fera tout son possible pour contribuer à mobiliser le soutien de la société civile dans le cadre de cette grande entreprise conjointe.

1.14

Les paramètres de l'accord d'échelon mondial qu'il convient de construire dans les négociations internationales au cours des dix-huit prochains mois doivent être mis en place aussi vite que possible, afin de pouvoir dès lors concentrer les efforts politiques sur des tâches consistant à communiquer le défi et à bâtir des appuis, de la confiance et un engagement de la part de tous les pans de la société partout dans le monde pour les mutations essentielles qu'il est nécessaire d'effectuer. Il ne s'agit pas là d'un accord que l'on peut obtenir à huis clos: l'ensemble de la société doit y être associé. Les mesures de réduction doivent s'avérer réalistes, être économiquement et socialement saines, et être réalisables dans le calendrier suggéré.

2.   Contexte

2.1

Le changement climatique est l'un des principaux défis auxquels est confrontée la planète en ce XXIe siècle. Le 4e rapport d'évaluation (4e RE) publié en 2007 par le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) fait état des changements qui ont déjà eu lieu en raison de l'immense augmentation des émissions de gaz à effet de serre dues à l'homme au cours des deux derniers siècles, et il prévoit des changements alarmants à l'avenir, à moins que des actions ne soient prises d'urgence pour limiter les émissions mondiales au cours des prochaines années. Le GIEC a déjà souligné qu'il convenait de se fixer pour objectif, au niveau mondial, de maintenir la température moyenne de la planète à une valeur qui ne dépasse pas de plus de 2 °C les niveaux préindustriels, si l'on veut éviter des conséquences catastrophiques. Pour atteindre cet objectif, les émissions mondiales de gaz à effet de serre devront être réduites de manière substantielle, et celles des pays développées devront être abaissées à 60-80 % des niveaux de 1990 d'ici le milieu du siècle.

2.2

Au cours des 20 dernières années, la communauté internationale s'est efforcée de parvenir à un accord pour mener une action collective en vue de limiter les émissions de gaz à effet de serre. Il a été convenu à Rio, en 1992, de mettre en place une Convention-cadre sur les changements climatiques, laquelle a ensuite été renforcée par le protocole de Kyoto de 1997, aux termes duquel les pays signataires s'engagent à des efforts spécifiques de réduction des émissions d'ici 2012. Toutefois, il est largement reconnu que ces accords et actions ne constituent qu'un début et que des mesures bien plus énergiques et globales sont nécessaires dans les années à venir pour atteindre l'objectif fixé à l'horizon du milieu du siècle. Les négociations internationales sur le changement climatique lancées à Bali en décembre 2007 sont par conséquent cruciales, en ce qu'elles auront une influence décisive sur l'étendue des actions qui seront prises au niveau mondial d'ici 2020. Il est essentiel que ces négociations débouchent sur des résultats positifs à Copenhague en 2009.

2.3

Objectifs pour 2020. La feuille de route de Bali fait référence à une section du 4e RE du GIEC qui montre que, d'ici 2020, les pays développés devront réduire leurs émissions de 25 à 40 % par rapport aux niveaux de 1990 pour que l'objectif de long terme d'une limitation du réchauffement climatique mondial à deux degrés au dessus des niveaux préindustriels puisse être atteint.

2.4

C'est assurément aux pays développés qu'il appartiendra de réduire de manière considérable leurs émissions en termes absolus, dans la mesure où ils ont été et restent les principaux agents du changement climatique, proportionnellement à leur nombre d'habitants. L'Europe devra remplir son contrat. Il convient en outre de faire en sorte que les États-Unis redeviennent parties prenantes de la stratégie internationale et qu'ils prennent des engagements réels en matière de réductions. La Russie devra également participer en acceptant un objectif plus réaliste que celui fixé lors du cycle de Kyoto.

2.5

L'Union européenne joue un rôle majeur dans ces négociations. Le Conseil a adopté une perspective à long terme, prévoyant la réduction des émissions de gaz à effet de serre de 60 à 80 % d'ici 2050. Dans l'optique d'atteindre ces valeurs à plus long terme, l'UE s'est fixé un objectif intermédiaire contraignant, à l'horizon 2020, qui consiste à réduire les émissions de gaz à effet de serre de 20 % par rapport aux niveaux de 1990 et elle a déposé, sur la table des négociations, une offre de réduction accrue, à savoir de 30 % par rapport aux niveaux de 1990, si d'autres pays prennent des engagements similaires. La Commission a ensuite présenté des propositions dans le cadre du train de mesures sur l'énergie du 23 janvier 2008, qui préconise des actions destinées à atteindre l'objectif d'une réduction de 20 à 30 %.

2.6

Il devient également important que les pays en développement prennent, de leur propre chef, des engagements sérieux afin de contribuer à limiter le changement climatique. Les grandes économies émergentes que sont la Chine, l'Inde et le Brésil, ainsi que quelques autres pays, sont d'ores et déjà, ou sont en passe de devenir, des sources importantes d'émissions de gaz à effet de serre, et il sera important qu'ils gèrent leurs économies d'une manière qui permette de réduire significativement le taux de croissance de leurs émissions par rapport aux valeurs qu'il atteindrait dans un scénario de maintien du statu quo.

2.7

L'accord auquel souhaitent aboutir les négociateurs au niveau mondial consisterait, en substance, à ce que les pays développés s'engagent à atteindre des objectifs ambitieux et à prendre des mesures pour réduire leurs émissions, et à ce qu'ils offrent aux pays en développement un soutien financier et technologique en contrepartie d'un engagement de ces derniers à gérer leur croissance et leur développement d'une manière qui limite, dans la mesure du possible, la croissance de leurs émissions de gaz à effet de serre.

3.   Observations générales

3.1

Pour sa part, le CESE a suivi, dès le départ, tant l'avancement général des négociations que le train de mesures proposé par la Commission pour permettre à l'UE de tenir ses propres engagements. Afin de suivre directement les négociations, le CESE a formé plusieurs petites délégations représentant la société civile qui se sont rendues, dans le cadre des délégations de l'UE, à la conférence des parties à la convention de Bali et à la rencontre intersessionnelle de Bonn qui a suivi. Le CESE met également à profit ses contacts avec les organisations et groupes de la société civile d'autres pays qui sont à la pointe dans ce domaine, pour examiner plus avant la position adoptée par ces derniers et le rôle que la société civile peut jouer pour promouvoir l'obtention d'un accord ainsi que la mise en œuvre.

3.2

Le Comité examine les différents éléments du train de mesures de la Commission sur le climat et l'énergie dans plusieurs avis distincts, qui sont résumés et cités en référence dans cet avis général. Dans le présent avis d'initiative, qui est destiné à donner une vision d'ensemble, le Comité examine les progrès et les perspectives des négociations en général ainsi que le rôle joué par l'Europe. À la suite de l'adoption de cet avis, le CESE souhaite organiser des manifestations en marge des réunions de négociation qui doivent se tenir à Poznań en décembre 2008 et à Copenhague en décembre 2009 afin d'aider la société civile à apporter une réponse et à se positionner dans le cadre des négociations en cours.

3.3

La feuille de route des négociations qui a été adoptée à Bali identifie quatre grands axes de négociation:

des engagements au niveau national et des mesures pour limiter les émissions de gaz à effet de serre d'ici 2020 et contribuer à l'atténuation du changement climatique;

des mesures pour gérer l'adaptation aux changements climatiques inévitables;

des mesures pour soutenir le transfert technologique et le renforcement des capacités pour l'atténuation du changement climatique et l'adaptation à ce phénomène;

la mise en place d'instruments financiers appropriés pour soutenir les mesures d'atténuation et d'adaptation, le transfert technologique, etc.

3.4

Les observations du présent avis s'articulent autour de ces quatre grands axes.

4.   Une atténuation plus vigoureuse du changement climatique, par la limitation ou la réduction des émissions (premier pilier)

4.1

Objectifs. Le Comité approuve l'évaluation du GIEC selon laquelle un objectif de réduction des émissions de 25 à 40 % par rapport aux niveaux de 1990 correspondrait, pour les pays développés, à un niveau d'ambition approprié à l'horizon 2020. Pour l'instant, il serait probablement impossible de réaliser des réductions plus importantes d'ici 2020.

4.2

Le Comité soutient vivement la position de chef de file prise par l'UE dans les négociations. Nous nous félicitons de l'initiative qu'a prise l'UE en s'engageant unilatéralement à réduire les émissions de 20 % d'ici 2020, afin de faire avancer les négociations. Nous pensons néanmoins que le changement climatique est un défi d'une telle gravité que tout doit être fait pour atteindre la réduction de 30 % qui a été proposée, sous certaines conditions, pour 2020, et pour s'efforcer d'obtenir des engagements similaires de la part des autres pays développés, ainsi que des engagements significatifs de la part des économies émergentes dont les émissions sont en augmentation rapide.

4.3

Dans le cas où les négociations ne permettraient d'aboutir qu'à un engagement de réduction de 20 % de la part de l'UE et à des engagements tout aussi modestes de la part des autres pays, cela constituerait, à nos yeux, un sérieux échec.

4.4

Mise en œuvre. Pour l'UE, les actions proposées par la Commission dans son train de mesures sur le climat et l'énergie constituent un plan de mise en œuvre très positif et constructif pour permettre à l'Europe de tenir son engagement de réduire les émissions de 20 % d'ici 2020. Le CESE a élaboré des avis distincts sur les différents éléments de ce plan. En résumé, nous soutenons toutes les composantes de ce plan, sous réserve des observations formulées ci-après:

Nous soutenons les réformes proposées et l'extension du système d'échange de quotas d'émission. Nous nous félicitons de la mise en place d'un plafond plus strict et de l'extension du recours à la mise aux enchères des quotas, dans la mesure où cette approche est conforme au principe du pollueur-payeur, évite les profits d'aubaine, fournit des incitations et génère des financements permettant d'investir dans les installations et les produits pauvres en carbone, et favorise l'innovation. Étant donné l'étendue des investissements nécessaires pour procéder aux transformations aussi bien en Europe que dans les pays en développement, nous appelons toutefois à ce que 50 % au moins des revenus issus de la mise aux enchères des permis soient alloués au soutien à l'atténuation du changement climatique et aux mesures d'adaptation, et non les 20 % proposés par la Commission (1). Nous saluons également la décision du Conseil et du Parlement européen d'intégrer l'aviation dans le système d'échange de quotas d'émission à partir de 2012.

Nous soutenons l'idée de propositions de partage des charges pour les secteurs ne faisant pas l'objet d'échanges internationaux et invitons les institutions à ne pas perdre de vue l'objectif global dans leurs discussions sur la base de partage des objectifs dans ce secteur (2).

Nous soutenons fermement l'objectif consistant à progresser rapidement en matière d'énergie renouvelable. Une proportion de 20 % d'énergie renouvelable en 2020 marquerait un premier pas vers l'augmentation de leur utilisation jusqu'à des niveaux beaucoup plus élevés pour 2050 (3).

Nous regrettons que la question cruciale de l'efficacité énergétique, pour laquelle l'objectif de croissance de 20 % d'ici 2020 n'est pas obligatoire, semble avoir reçu moins d'importance qu'elle n'en mérite, comme le montre clairement le rapport de la Commission sur les programmes nationaux d'amélioration de l'efficacité énergétique. La plupart des États membres n'ont pas élaboré leurs programmes nationaux dans les temps; la qualité des programmes est très variable et certains manquent clairement d'ambition bien qu'il soit souvent possible d'obtenir des gains importants d'efficacité énergétique moyennant un coût d'investissement initial relativement faible et avec une période d'amortissement très courte (4).

Nous nous félicitons du cadre législatif proposé par la Commission pour le captage et le stockage du carbone. Toutefois, nous sommes préoccupés par le fait que les financements pour les projets de démonstration prévus sont alloués trop lentement et que les progrès pour l'application à l'échelle industrielle prennent trop de temps, alors que cela sera très important si certains pays doivent compter substantiellement sur le charbon et les autres combustibles fossiles pour leur fournir de l'énergie pour de nombreuses années (5).

4.5

L'UE a engagé beaucoup de foi et de capital politique pour faire de son système de plafond et d'échange d'émissions un véritable moyen de parvenir aux réductions d'émissions qui seront nécessaires. Le système communautaire d'échange de quotas d'émission est désormais le système d'échange de quotas d'émissions le plus important au monde et il devrait se renforcer encore après 2012. Initialement, ce système n'avait qu'un impact limité sur les émissions européennes, les allocations et les plafonds initiaux ayant été fixés à un niveau assez généreux, qui avait pour conséquence que le prix du carbone était très bas. Avec l'abaissement des plafonds, le prix du carbone a augmenté, ce qui, en conjonction avec d'autres facteurs entraînant une hausse du prix des combustibles fossiles, est susceptible d'avoir plus d'impact sur la production d'électricité en Europe et sur les autres industries.

4.6

D'une manière générale, nous pensons que le renforcement du système d'échange de quotas d'émission de CO2 aura un impact positif sur les entreprises et l'emploi en Europe, en ce qu'il encouragera le développement rapide de processus et de produits dotés d'une efficacité énergétique plus forte et à faible intensité en carbone, qui occuperont les premières places sur le marché à l'avenir. Non seulement, il permettra de créer de l'emploi, mais également de réduire notre dépendance à l'égard des importations et ainsi de renforcer notre sécurité énergétique.

4.7

Si l'UE joue un rôle pionnier en la matière, il faut maintenant avoir pour objectif clé d'encourager le développement de systèmes d'échange aux États-Unis et dans d'autres pays et de relier tous ces systèmes dans le cadre d'un marché commun mondial du carbone. Le développement d'un marché du carbone réellement mondial pourrait apporter une contribution importante à la réduction des émissions de carbone dans le monde entier et ce de la manière la plus efficace et rentable possible. Nous soutenons vivement l'initiative de Partenariat international d'action sur le carbone (PIAC) qui vise à permettre aux différents systèmes d'échange, qui émergent dans les différentes parties du monde, d'évoluer harmonieusement vers un marché unique mondial. Le développement d'un marché international du carbone dans le cadre d'un système de plafonds mondiaux pour les émissions réduirait le risque que la position concurrentielle de l'Europe ne soit compromise en raison d'un système d'échange qui ne s'appliquerait qu'à l'échelle du continent.

4.8

Des accords sectoriels internationaux établissant des programmes et des stratégies plus détaillés en vue de réaliser des réductions progressives des émissions provenant des principaux secteurs concernés et de leurs produits pourraient également être utiles. Il ne faut toutefois le concevoir que comme une manière de soutenir la mise en œuvre d'objectifs nationaux fermes adoptés au niveau international, et non comme une solution de rechange permettant de se passer d'objectifs nationaux contraignants, étant donné que l'histoire des 20 dernières années montre que les accords sectoriels volontaires passés en la matière apportent des résultats trop limités et trop tardifs et qu'ils sont impossibles à mettre en œuvre de manière effective.

4.9

En ce qui concerne les transports, nous souhaitons réaffirmer qu'une stratégie de développement durable de long terme doit s'appuyer en premier lieu sur une réévaluation fondamentale des moteurs de la demande dans les transports, et sur un réexamen de la manière dont les politiques en matière d'aménagement du territoire, d'infrastructures et de transport public pourraient, au fil du temps, venir à bout de la croissance continue de la demande dans ce secteur, pour finalement même la réduire. L'aménagement du territoire ne doit pas partir de l'idée que la croissance du trafic est inévitable et que la seule manière de limiter les émissions dans le secteur des transports est de procéder à des améliorations techniques en matière de conception des carburants et des moteurs, aussi importantes que soient d'ailleurs ces dernières.

4.10

Du point de vue des mesures techniques, nous considérons que les objectifs stricts en matière d'émissions dues au secteur automobile ne doivent pas uniquement être définis à court terme (120 g de CO2 par km d'ici 2012/2015) mais également à moyen terme de façon à réduire encore davantage les émissions d'ici 2020 (6). Dans le même temps, il conviendrait de soutenir davantage le développement et l'introduction précoce des véhicules sans émissions de carbone, fonctionnant à l'électricité ou à l'hydrogène.

4.11

Nous avons une vision moins optimiste que la Commission concernant la possibilité d'atteindre un objectif de 10 % pour les biocarburants dans les transports. Compte tenu des problèmes liés à la production de la plupart des biocarburants concernant leur potentiel de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de l'impact environnemental et social de leur production, il faudra mettre en place des critères de durabilité plus stricts que ceux proposés par la Commission, afin de s'assurer que les biocarburants ne soient introduits qu'à la condition qu'ils ont un impact véritable et substantiel sur la réduction des émissions nettes de carbone, et qu'ils n'engendrent pas des pressions inacceptables sur les terrains et la production agricoles. De plus, les perspectives économiques suggèrent clairement que l'utilisation de la biomasse pour produire de l'électricité ou de la chaleur constitue (en tout cas à l'heure actuelle et dans un avenir proche) une solution beaucoup plus efficace que le recours aux biocarburants.

4.12

Mesures additionnelles pour atteindre l'objectif de réduction de 30 %. Si le train de mesures peut être adopté d'ici la fin de l'année 2008, et que sa mise en œuvre commence sans tarder en 2009, nous estimons que cela permettra de penser raisonnablement que l'UE atteindra son objectif de réduction de 20 % d'ici 2020.

4.13

Nous doutons toutefois qu'il soit possible d'atteindre l'objectif d'une réduction de 30 % des émissions d'ici 2020, simplement au moyen d'un relèvement des exigences fixées pour les différents éléments du train de mesures et d'une intensification du recours aux crédits du mécanisme de développement propre, comme l'a suggéré jusqu'à présent la Commission. Nous pensons que pour atteindre cet objectif plus ambitieux, un éventail plus large et plus complet de mesures sera sans doute nécessaire tant au niveau de l'Union européenne qu'à celui des États membres.

4.14

Au niveau communautaire, nous estimons que les éléments additionnels suivants devraient être envisagés pour un deuxième train de mesures:

un renforcement des actions de promotion de l'efficacité énergétique dans les principaux secteurs et pour les principaux produits, à travers la réglementation et la mise en place de normes;

de nouvelles mesures visant à accélérer le développement et l'introduction des énergies renouvelables;

un renforcement du soutien au développement des véhicules fonctionnant à l'électricité ou à l'hydrogène;

une extension du système d'échange du carbone afin d'y intégrer les émissions provenant du transport maritime (il n'est pas certain que les discussions en cours au sein de l'Organisation maritime internationale permettent d'aboutir à des actions suffisantes en un laps de temps suffisamment court);

davantage d'efforts collectifs pour adopter des objectifs nationaux plus stricts de réduction dans le cadre de l'accord de partage des charges.

4.15

Au niveau national, pour atteindre des objectifs individuels plus stricts dans le cadre de l'accord de partage des charges, le Comité estime que les États membres et leurs dirigeants politiques devraient davantage s'employer à associer le grand public, les entreprises, les syndicats et les autres organisations de la société civile au partenariat et à les faire participer à l'effort commun.

Il convient d'encourager et d'inciter les citoyens à apporter leur contribution à cet égard, par exemple en améliorant l'efficacité énergétique de leur logement et en utilisant des formes d'énergie plus vertes pour l'éclairage et le chauffage, en achetant des biens et services plus efficaces du point de vue énergétique et en réduisant l'impact en émissions de gaz carbonique de leurs déplacements et de leurs vacances. De notre point de vue, une proportion croissante de l'opinion publique et des organisations de la société civile serait déjà prête et désireuse d'agir à condition de recevoir un signal politique fort et concret au sujet des attentes placées en elles, qui soit accompagné de mesures incitatives appropriées.

Beaucoup de collectivités locales et régionales ont déjà démontré leur vision et fait preuve d'un courageux leadership politique en la matière. Elles doivent être encouragées et incitées à aller plus loin.

Il convient également d'inciter les entreprises à redoubler d'efforts. Il faut les inviter et les inciter à améliorer en permanence l'efficacité énergétique de leurs activités et à utiliser de l'énergie produite à partir de sources à faible intensité carbonique. Il faudrait recourir plus systématiquement et plus vigoureusement à la réglementation afin d'améliorer les performances énergétiques de tous les types de produits et de services. Il convient de charger le secteur de la construction de renforcer l'efficacité énergétique tant dans le cadre des processus de construction que du point de vue de la performance énergétique des bâtiments en cours d'exploitation.

Les syndicats ont eux-aussi un rôle important à jouer. Nombre de leurs membres sont en première ligne pour la mise en œuvre des améliorations en matière d'efficacité énergétique et la diffusion d'informations pratiques et il convient de reconnaître et d'encourager leur contribution potentielle. Les syndicats doivent également être pleinement impliqués dans le processus de transformation de l'industrie et de l'économie vers la voie de la réduction des émissions. Si elles sont bien gérées, les nouvelles méthodes de production devraient fournir autant de possibilités d'emploi que les anciennes méthodes de production intensives en carbone, tout en préservant de bonnes conditions de travail.

4.16

Pour renforcer la crédibilité de l'UE au niveau international, il est extrêmement important que tous les États membres fassent leur possible pour garantir que non seulement l'objectif global de Kyoto pour l'ensemble «UE des 15» sera atteint mais également qu'il en sera de même des objectifs individuels de Kyoto pour 2012. Dans son dernier rapport de situation sur la réalisation des objectifs de Kyoto (7), la Commission précise que seuls 3 États membres de l'UE des 15 sont sur la bonne voie pour atteindre leurs objectifs avec leurs politiques actuelles et que 8 seulement devraient atteindre leurs objectifs lorsque les effets des mécanismes de Kyoto, des puits de carbone et des politiques et mesures nationales complémentaires, qui sont en cours d'examen, seront pris en compte. Pour 3 États membres, il semble impossible d'atteindre l'objectif qui leur a été fixé à Kyoto. De plus, l'utilisation massive des crédits du mécanisme flexible de Kyoto, notamment du MDP, montre que, dans beaucoup d'États membres, il y a encore beaucoup à faire pour opérer la transformation si nécessaire de notre société en une société produisant peu de carbone.

5.   Adaptation au changement climatique (deuxième pilier)

5.1

Même si des mesures efficaces sont prises pour réduire les émissions mondiales à l'avenir, le réchauffement planétaire devrait connaître un nouvel accroissement au cours des prochaines décennies, en raison des émissions qui ont déjà été produites. Le Comité a adopté un avis en réponse au livre vert de la Commission sur l'adaptation au changement climatique (8). En résumé, il estime que l'UE se doit d'établir une stratégie globale de gestion de l'adaptation au changement climatique au sein de l'UE, dans le cadre de laquelle des plans d'adaptation nationaux plus détaillés devraient être élaborés par chaque État membre. Il conviendrait également d'accorder une priorité accrue à l'adaptation en matière de recherche et d'analyses, de budgets et de programmes d'investissement ainsi que d'autres mesures. Nous espérons que dans le livre blanc sur l'adaptation au changement climatique, qui est prévu pour l'automne 2008, la Commission proposera des mesures détaillées pour progresser en la matière.

5.2

En dehors de l'UE, il existe nombre de parties du monde en développement qui sont déjà gravement touchées par l'impact du changement climatique et le seront encore davantage à l'avenir, mais qui ont moins de ressources pour gérer ces phénomènes. L'UE et les autres pays de l'OCDE doivent ainsi avoir pour priorité d'accroître leur aide financière et les autres mesures d'assistance aux parties du monde qui sont particulièrement vulnérables afin de les aider à répondre au problème du changement climatique. Les considérations liées au changement climatique doivent être prises en compte dans l'ensemble des politiques de développement.

5.3

Il faudra également des efforts importants pour soutenir la gestion durable des forêts dans le monde en développement et pour réduire les pressions commerciales qui continuent à entraîner une déforestation de grande ampleur dans de nombreuses parties des systèmes climatiques de la planète. Le CESE élabore un avis séparé sur le changement climatique et la gestion des forêts.

6.   Action en matière de développement technologique et de transfert de technologie (troisième pilier)

6.1

Pour réussir la transition vers une économie à plus faibles émissions de carbone, le monde devrait opérer une nouvelle révolution industrielle. Il faudra une transition majeure vers des formes plus propres de production énergétique, de nouvelles technologies pour capturer les émissions de carbone et d'autres gaz à effet de serre et une pression continue pour transformer les modèles de produits et de consommation afin qu'ils deviennent plus efficaces et moins consommateurs d'énergie. À cet effet, les secteurs public et privé devront considérablement renforcer les programmes de recherche concernés et il faudra mettre en place des programmes d'investissement de grande ampleur pour rééquiper l'industrie et transformer les produits et les services. Les technologies nécessaires existent déjà en grande partie mais leur application doit être plus large qu'elle ne l'est actuellement.

6.2

Dans l'UE, il sera nécessaire de modifier radicalement les programmes de dépenses de l'UE et des gouvernements pour soutenir la recherche, le développement et les investissements dans ce domaine. Il faudra également des incitations, d'ordre fiscal et autre, à l'intention des entreprises et des autres acteurs pour que les investissements nécessaires puissent être réalisés.

6.3

Il sera nécessaire d'identifier les types de technologie et de services qui seront les plus adaptés pour permettre aux économies émergentes et aux pays en développement de gérer la poursuite de leur développement de la manière la plus durable et la moins intensive en carbone qui soit, et de soutenir un transfert technologique vers ces économies sur des bases appropriées. Dès l'identification de nouvelles technologies pouvant s'avérer particulièrement utiles pour les pays en développement afin qu'ils s'adaptent au changement climatique ou qu'ils atténuent l'impact de leur développement futur sur l'environnement, il conviendrait de parvenir à les introduire rapidement et largement de façon abordable. Il faut souligner que les économies émergentes sont elles-mêmes à l'origine de la conception ou du développement de certaines des nouvelles technologies qui seront nécessaires. Le transfert de technologie ne doit pas être considéré uniquement comme une voie à sens unique du Nord vers le Sud mais également comme un moyen de faciliter la diffusion rapide des technologies clés dans le monde, d'où qu'elles proviennent.

6.4

Le Comité invite l'UE à examiner sans tarder avec ses partenaires la façon dont les technologies les plus avancées et les plus efficaces en matière d'émissions de carbone peuvent être rapidement mises à la disposition du monde en développement à des conditions abordables, et notamment des technologies dans le domaine de l'électricité, des industries à forte intensité énergétique, du secteur des transports et, au fur et à mesure que la technologie se développe, du piégeage du carbone. Les pays qui sont susceptibles de rester fortement dépendants du charbon pour la production d'électricité auront besoin d'aide pour utiliser les dernières technologies de charbon propre et pour appliquer la technologie de piégeage du carbone dès qu'elle sera disponible.

6.5

Une telle assistance au transfert technologique devrait permettre aux pays en développement concernés de gérer leur développement d'une manière qui engendre moins d'émissions de carbone que ce qui pourrait être le cas dans l'hypothèse inverse, et elle pourrait raisonnablement être conditionnée dans une certaine mesure au respect des engagements pris par ces pays concernant la mise en œuvre d'autres mesures destinées à limiter l'augmentation potentielle de leurs émissions.

6.6

Parallèlement aux négociations sur le climat, l'UE et les États-Unis devraient lancer une nouvelle initiative de libéralisation des échanges concernant les biens et services respectueux de l'environnement, dans le cadre de l'OMC. Cette initiative devrait être conçue de sorte à ce que les pays développés, les pays en développement et les économies émergentes tirent tous avantage d'une telle libéralisation, par exemple en renforçant le développement des technologies et services environnementaux dans les pays en développement.

7.   Accroître les financements et l'investissement en faveur de l'atténuation du changement climatique et de l'adaptation à ses contraintes (quatrième pilier)

7.1

Les pays en développement auront besoin d'aide à grande échelle de la part du monde développé pour être à même de remplir leur part du contrat dans la réponse au défi du changement climatique, sans compromettre leurs objectifs de développement. Il sera particulièrement important de garantir que la future voie de développement dans les pays en développement est aussi respectueuse de l'environnement que possible et ne reproduit pas le schéma de la confiance excessive dans la production intensive en carbone qui a marqué (et gâché) le développement dans le Nord.

7.2

Les pays en développement les plus touchés par le changement climatique et disposant des ressources les moins importantes pour gérer l'adaptation auront également besoin d'une aide supplémentaire. Ils auront besoin de programmes renforcés pour les protections côtières, la prévention des inondations, l'atténuation des sécheresses, le réaménagement des terres agricoles, les nouveaux besoins de santé publique et autres.

7.3

Le Comité se félicite du fait qu'à Bali, tous les pays ont reconnu qu'il sera nécessaire de prévoir des ressources, des investissements et des mécanismes nouveaux et supplémentaires pour gérer ce transfert. Toutefois, à quelques exceptions honorables près, le monde développé ne s'est jusqu'à présent pas illustré lorsqu'il s'agissait d'honorer ses engagements en matière d'allocation de ressources additionnelles pour atteindre des objectifs de développement durable. À cette occasion, il est crucial pour l'ensemble de la planète qu'un véritable supplément de ressources soit mobilisé et engagé.

7.4

Le Comité prend note des estimations de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques et d'autres organismes, selon lesquelles des ressources s'élevant à plusieurs centaines de milliards de dollars par an pourraient devoir être allouées par les secteurs public et privé réunis, lorsque les programmes seront prêts. Il recommande, en tout état de cause, que des actions urgentes soient entreprises par la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, la Commission et/ou l'OCDE et les institutions financières internationales afin de quantifier plus précisément les besoins et de tenir les promesses et engagements nécessaires pour parvenir aux financements adéquats et pour que les programmes menés puissent avoir un impact décisif sur le problème mondial du changement climatique. Le produit de la vente des allocations dans des phases ultérieures du système d'échange de quotas d'émissions pourrait être une source de financement mais il est peu probable que cela suffise pour tout ce qui doit être fait.

7.5

Le MDP est parvenu à certains résultats s'agissant de destiner de nouvelles ressources à des investissements adaptés dans des pays autres que ceux de l'annexe I. Toutefois, la répartition des projets a fortement favorisé la Chine et d'autres pays émergents et de sérieux doutes pèsent sur l'additionnalité et la qualité de nombreux projets. Il est indispensable que les critères d'acceptation des projets soient respectés et correctement contrôlés, afin que le mécanisme puisse jouer son rôle dans la réduction des émissions de carbone aussi efficacement que possible.

7.6

Le Comité recommande que l'UE et les autres acteurs concernés étudient au plus vite comment supprimer les défauts de ce mécanisme sur la prochaine période et comment lancer l'ensemble du programme. À l'avenir, le MDP devrait accorder la priorité à des projets qui contribuent de manière significative non seulement à réduire les émissions, mais aussi à favoriser la transformation en économies à faible intensité en carbone. En particulier dans les économies émergentes, il ne semble pas nécessaire de continuer à financer directement des projets d'efficacité énergétique (des «fruits mûrs») qui seraient de toute façon réalisés par le pays concerné. Pour ces pays, des «MDP sectoriels», éventuellement combinés à des objectifs sans exposition au risque (9), pourraient constituer une option viable.

7.7

Partout dans le monde, il sera essentiel que le secteur privé investisse massivement dans la production moins intensive en carbone. Les mesures prises par l'UE et les gouvernements nationaux devraient notamment être axées sur l'incitation du secteur privé à réaliser de tels investissements.

7.8

Les coûts et les investissements nécessaires seront de l'ordre de plusieurs billions de dollars au cours des 50 prochaines années. Il s'agit de sommes importantes. Toutefois, de tels investissements deviennent déjà nécessaires dans la mesure où les sources d'approvisionnement mondiales en combustibles fossiles commencent à être plus limitées et que les prix augmentent. Abstraction faite du changement climatique, il devient par conséquent de plus en plus nécessaire, d'un point de vue économique, de diversifier les sources d'approvisionnement et de ne pas se cantonner aux combustibles fossiles ainsi que d'utiliser les ressources restantes de manière plus efficace. Les considérations sécuritaires pointent également dans la même direction, car aussi bien la rareté des combustibles fossiles que les changements climatiques déjà en cours constituent des sources potentielles d'instabilité et de conflit dans plusieurs régions du monde.

7.9

Dans cette optique, la nécessité de répondre rapidement à la menace du changement climatique ne représente pas une charge supplémentaire pour l'économie mondiale, mais simplement une bonne raison de plus pour réaliser rapidement la transformation économique et industrielle qui est dans tous les cas nécessaire. À un moment où le prix du pétrole était de 60 dollars le baril, le rapport Stern estimait que le coût des mesures nécessaires pour les 50 prochaines années afin de répondre au problème du changement climatique pourrait représenter jusqu'à 1 % du PIB mondial. Avec un baril de pétrole à plus de 100 dollars, les investissements dans les sources d'énergie renouvelables et les mesures d'efficacité énergétique de tous types semblent déjà beaucoup plus intéressants d'un point de vue économique. De même, les coûts nets additionnels des mesures destinées à répondre au défi du changement climatique devraient être beaucoup moins importants et pourraient même être négatifs pour certaines applications, ce qui montre qu'une action effective en matière de changement climatique apporterait en réalité un bénéfice net à l'économie mondiale dans les années à venir.

7.10

Aussi ne faut-il pas considérer que répondre adéquatement au défi climatique constitue une obligation de grande envergure, déprimante et pesante, qui constituera un frein à la croissance économique, mais plutôt qu'il s'agit d'une opportunité de se positionner en chef de file de la prochaine révolution économique et industrielle. L'UE a été aux avant-postes du débat politique sur le changement climatique, mais elle a encore à faire pour convertir cette position politique d'avant-garde en un environnement économique qui soit tout aussi actif et vigoureux et qui incite nos entreprises et nos sociétés à réaliser les investissements nécessaires pour occuper la première place au niveau mondial et pour être gagnantes en matière de compétitivité dans l'économie à faible intensité de carbone de l'avenir.

7.11

Certains évoquent la nécessité d'un nouveau plan Marshall. Cette comparaison présente l'avantage de donner une idée de l'ampleur du défi et des efforts qui seront nécessaires. Nous avons besoin d'une vision de l'envergure du plan Marshall afin d'unir les pays du monde entier pour faire face à une menace mondiale commune, les pays les plus puissants et les plus riches montrant l'exemple et aidant les autres autant qu'ils le peuvent.

7.12

Une action est nécessaire de la part des pouvoirs nationaux et publics de tous types, à tous les niveaux, de la part des entreprises de toutes sortes et de la part des consommateurs et du grand public.

8.   Conclusions

8.1

Les changements climatiques sont déjà à l'œuvre et ont d'ores et déjà de graves conséquences partout dans le monde. Ces problèmes devraient s'aggraver dans les prochaines années étant donné que le taux de concentration de gaz à effet de serre s'élève et que les températures augmentent plus rapidement. Le monde doit agir de toute urgence pour établir et mettre en œuvre des objectifs exigeants de réduction d'émissions à l'horizon 2020, donnant lieu à des réductions plus importantes les années qui suivront. Plus rapidement l'on parviendra à réduire les émissions, mieux cela contribuera au ralentissement du taux de croissance de la température.

8.2

Les pays développés enregistrent des émissions par habitant beaucoup plus importantes que dans le reste du monde; ils devraient être plus ambitieux et intensifier leurs actions en vue de la réduction de ces émissions. L'Europe doit s'assurer qu'elle respecte les engagements pris à l'horizon 2012 et ensuite s'engager à réduire les émissions de 30 % d'ici 2020, la valeur la plus élevée que l'on puisse viser. Pour que ses ambitions soient crédibles, l'Europe doit mettre en œuvre une nouvelle gamme de mesures sérieuses et réalistes, à même de garantir qu'elle pourra atteindre les objectifs fixés, et doit prévoir dès à présent les réductions supplémentaires qui seront nécessaires au-delà de 2020.

8.3

Il convient également de s'assurer de l'engagement des pays en développement et de consacrer un effort particulier à garantir que les secteurs les plus consommateurs d'énergie dans les économies émergentes soient dotés de modalités de production des plus performantes en termes d'efficacité énergétique et d'intensité de carbone. Ces pays auront besoin d'une aide importante et ciblée de la part du monde développé.

8.4

Il faut définir aussi promptement que possible les paramètres de l'arrangement mondial qui est à construire dans le cadre des négociations internationales au cours des dix-huit prochains mois, et ce pour permettre de concentrer ensuite les efforts politiques sur la communication du défi à affronter et sur la mobilisation de l'adhésion, de la confiance et de l'engagement de toutes les composantes de la société, dans le monde entier, à l'égard des évolutions majeures qu'il y a lieu de mener à bien. Il ne s'agit pas ici d'un marché que l'on pourrait conclure derrière des portes closes: toutes les composantes de la société doivent être associées à ces travaux. Il faut apporter la preuve que les mesures d'atténuation sont réalistes, saines du point de vue économique et social, et réalisables dans les délais proposés.

8.5

La nécessaire transformation à réaliser à l'échelle mondiale est comparable, par son ampleur, à la révolution industrielle des deux siècles écoulés, qui a consisté à acquérir la maîtrise de l'énergie contenue dans les combustibles fossiles pour parvenir à des augmentations massives de la capacité de production et du rendement productif de la société humaine. Le monde a maintenant besoin d'une deuxième révolution industrielle pour pouvoir remplacer les combustibles fossiles par d'autres formes d'énergie et pour assurer le plus haut niveau possible d'efficacité énergétique, afin de nous mettre en mesure d'atteindre des résultats comparables, en matière de production et de croissance, sans imposer à notre atmosphère des taux insupportables d'émissions de gaz à effet de serre. Cela requiert des investissements de grande envergure; il faudra procéder à des adaptations appropriées et précises des réglementations, de la fiscalité et d'autres instruments économiques; il faudra procéder aussi à des modifications non négligeables des comportements économiques et des modes de vie individuels. Il faut que chacun comprenne quel défi cela représente et que chacun s'engage au service des évolutions nécessaires.

Bruxelles, le 17 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  Voir l'avis CESE 1201/2008 adopté le 9 juillet 2008.

(2)  Voir l'avis CESE 1202/2008 adopté le 9 juillet 2008.

(3)  Voir l'avis CESE 1511/2008 adopté le 17 septembre 2008.

(4)  Voir l'avis CESE 1513/2008 adopté le 17 septembre 2008.

(5)  Voir l'avis CESE 1203/2008 adopté le 9 juillet 2008.

(6)  Voir l'avis CESE 1500/2008 adopté le 17 septembre 2008.

(7)  COM(2007) 757 final.

(8)  JO C 120, 16.5.2008, p. 38.

(9)  Objectifs sans exposition au risque: un engagement à réduire les émissions d'une valeur donnée, sans pénalité si l'objectif n'est pas atteint mais avec une possibilité de vente de crédits si les réductions excèdent les engagements.


31.3.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 77/81


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires»

COM(2008) 40 final — 2008/0028(COD)

(2009/C 77/20)

Le 10 mars 2008, le Conseil a décidé, conformément à l'article 95 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires».

La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 2 septembre 2008 (rapporteur: José Maria ESPUNY MOYANO).

Lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 18 septembre 2008), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 77 voix pour et 3 voix contre.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le CESE se félicite de cette initiative de la Commission, qui permettra de faciliter la compréhension du consommateur et entraînera une simplification législative.

1.2

Le CESE fait toutefois remarquer que l'information mentionnée au paragraphe 3.4.1, si elle n'est pas accompagnée au préalable d'actions de formation du consommateur final, perd une grand part de sa valeur et de ses objectifs. En ce sens, le CESE regrette que la proposition ne s'accompagne pas de mesures de soutien à la formation des consommateurs, aussi bien au niveau national que communautaire. Au minimum, un guide des actions prioritaires en ce sens annexé au règlement pourrait constituer un premier pas très utile.

1.3

En ce qui concerne la mention de l'origine, les dispositions de la réglementation actuelle sont maintenues. Sur ce point, le CESE, compte tenu de l'intérêt manifesté par les consommateurs pour l'origine des denrées alimentaires, regrette que la nouvelle proposition de règlement ne prévoie pas sa mention obligatoire sur l'étiquetage. Le CESE considère toutefois qu'il faudrait établir une différenciation entre produits de première transformation et produits de deuxième transformation, de telle sorte que l'obligation de mentionner les principaux composants agricoles de ces derniers soit déterminée au cas par cas.

1.4

Le CESE exprime sa profonde inquiétude quant au développement des «systèmes nationaux» supplémentaires décrits au chapitre VII de la proposition, qui n'apportent pas d'éléments positifs complémentaires, mais deviennent une excuse pour interférer sur la liberté de circulation dans le marché intérieur. Le risque est particulièrement important pour les PME étant donné que, comme le souligne la Commission dans sa proposition, plus de 65 % des opérateurs du secteur alimentaire commercialisent leurs produits dans d'autres États membres. Les PME auront donc plus de mal à vendre leurs produits dans un autre État membre, ce qui aura des répercussions sur leurs coûts et leur compétitivité. Ces effets négatifs ne pourraient être évités que si ces «systèmes nationaux» apportaient des informations complémentaires, non obligatoires sur l'étiquetage mais disponibles par ailleurs (Internet, lignes téléphoniques gratuites, …).

1.5

Le CESE comprend que, pour des raisons de cohérence, la Commission entende appliquer un régime d'exception identique aux produits alcoolisés, régime qui pourra être revu dans un délai de cinq ans, suite aux résultats du rapport obligatoire correspondant.

1.6

Le CESE suggère que les États membres tiennent compte de la liste des infractions et sanctions associées pour prévenir le non respect de ces dispositions communes, qui devraient être harmonisées afin que des conduites identiques soient sanctionnées de la même manière dans tous les États membres.

1.7

En ce sens, le CESE demande à la Commission et aux États membres de s'efforcer d'élaborer des outils d'information, et notamment une base de données publique sur les informations devant obligatoirement figurer sur l'étiquetage des denrées alimentaires, ce qui permettrait aux entreprises, consommateurs et pouvoirs publics d'utiliser une base commune lors de la mise en œuvre de la législation.

1.8

En ce qui concerne la lisibilité, le critère de 3 mm proposé par la Commission semble difficilement applicable. Il conviendrait de tenir compte de différents aspects tels que la quantité d'informations à fournir, la taille et la forme de l'emballage, etc. Une valeur de référence acceptable pourrait être celle des caractères utilisés dans le Journal officiel de l'UE.

1.9

Enfin, à des fins de clarté et de simplification, le CESE estime que les références aux textes abrogés devraient être plus explicites afin de faciliter la lecture et l'application de la réglementation.

2.   Résumé de la proposition de la Commission

2.1

La proposition entend consolider en un règlement la législation actuelle sur l'étiquetage et la présentation des denrées alimentaires ainsi que la publicité faite à leur égard (y compris l'étiquetage nutritionnel), à des fins de modernisation, de simplification et de clarification.

2.2

La proposition abrogera les dispositions en vigueur en matière d'étiquetage des denrées alimentaires, à savoir les directives 2000/13/CE, 90/496/CEE (dans un délai de cinq ans), 87/250/CEE, 94/54/CE, 1999/10/CE, 2002/67/CE, 2004/77/CE et le règlement 608/2004.

2.3

La proposition a pour principaux objectifs un niveau élevé de protection des consommateurs et le bon fonctionnement du marché intérieur.

2.4

Le champ d'application est élargi pour prendre en compte tout ce qui est lié à l'information sur les denrées alimentaires mise à disposition du consommateur final par les agents économiques et pour couvrir également les denrées alimentaires servies par les collectivités et celles destinées à leur approvisionnement.

2.5

Les principes généraux et les obligations d'étiquetage de la législation antérieure sont maintenus. Certains aspects sont renforcés, tels que les responsabilités de chaque maillon de la chaîne alimentaire ou l'éventuelle indication obligatoire du pays d'origine.

2.6

En ce qui concerne l'étiquetage nutritionnel, l'on observe une modification importante par rapport à la réglementation antérieure, à savoir l'obligation d'indiquer la présence de six nutriments ou substances, en quantité et en pourcentage de l'apport journalier recommandé.

2.7

Autre changement important: la cohabitation avec les «régimes nationaux» d'étiquetage nutritionnel, en plus du règlement, qui ajoutent aux modalités de présentation des informations nutritionnelles présentes sur les étiquettes des normes volontaires définies au niveau national.

2.8

Le projet prévoit que de nombreuses modifications à la proposition soient effectuées via la procédure de comitologie. Plusieurs périodes de transition sont prévues pour faciliter son entrée en vigueur.

2.9

Les annexes reprennent en détails certains points de l'exposé tels que: les ingrédients à l'origine d'allergies ou d'intolérances, les mentions obligatoires complémentaires, les produits exemptés d'étiquetage nutritionnel, la dénomination des denrées alimentaires, l'indication quantitative et la dénomination des ingrédients, l'indication de la quantité nette, la date limite de consommation, le titre alcoométrique, les apports de référence, la valeur énergétique, ainsi que l'expression et la présentation de la déclaration nutritionnelle.

2.10

Enfin, il est prévu que le règlement entre en vigueur 20 jours après son adoption, mais la mise en œuvre effective des mentions obligatoires et de la déclaration nutritionnelle est repoussée de 3 ans (5 ans pour cette dernière, dans le cas des PME).

3.   Observations générales

3.1   Consolidation, actualisation, simplification

3.1.1

Depuis presque 30 ans, la législation européenne sur l'étiquetage et la présentation des denrées alimentaires ainsi que la publicité faite à leur égard contribue au maintien d'un niveau élevé de protection des consommateurs et au bon fonctionnement du marché intérieur.

3.1.2

La proposition actuelle entend consolider, actualiser et simplifier la réglementation existante, réduire la charge administrative et accroître la transparence vis-à-vis des consommateurs. Le CESE partage ces objectifs mais regrette la complexité du texte proposé qui rendrait le règlement non directement applicable.

3.2   Développement de «régimes nationaux» additionnels

3.2.1

Il ne fait aucun doute qu'un règlement qui consoliderait et actualiserait la réglementation actuellement éparpillée améliorerait l'homogénéité du niveau de protection des consommateurs et l'harmonisation. Néanmoins, le CESE exprime son inquiétude face à l'introduction des «régimes nationaux» prévue aux articles 44 et suivants, étant donné qu'ils peuvent supposer une menace pour les objectifs d'harmonisation et d'homogénéité. Ces nouvelles dispositions permettront l'adoption, dans les différents États membres, de régimes nationaux de normes additionnelles qui, bien que volontaires, ajouteront des informations sur les étiquettes et pourraient être source de confusion chez les consommateurs.

3.2.2

Le problème est aggravé si l'on tient compte du fait que, sur chaque marché national, se vendent des produits provenant de nombreux autres États membres. Ces produits pourront comporter différentes indications élaborées dans leurs États d'origine et qui ne seront pas nécessairement comprises par un consommateur n'y étant pas habitué.

3.3   Exigences concernant des informations obligatoires

3.3.1

Le projet reproduit dans ses articles la grande majorité des mentions obligatoires prévues par la législation en vigueur, qui se sont avérées utiles à la protection de la santé et des intérêts des consommateurs (telles que la dénomination, la liste des ingrédients, la quantité, les dates, le nom ou la raison sociale et l'adresse d'un responsable). Certaines de ces mentions sont approfondies dans les annexes.

3.3.2

L'expérience de ces dernières années démontre que ces exigences sont utiles et doivent être maintenues. En s'appuyant sur cette expérience, le CESE souhaite que soit également obligatoire l'indication de l'origine des denrées alimentaires et des produits de première transformation ainsi que, sur base d'une évaluation au cas par cas, des produits de seconde transformation, et celle des principaux ingrédients utilisés pour leur élaboration.

3.4   Déclaration nutritionnelle

3.4.1

Il convient de mener une réflexion initiale sur la nécessité de l'éducation nutritionnelle destinée aux consommateurs européens afin qu'ils soient en mesure d'adopter un régime équilibré. Le consommateur européen a besoin d'une formation de base en nutrition, afin de comprendre et d'utiliser correctement les informations fournies. L'information nutritionnelle sera vraisemblablement renforcée mais il faut garder à l'esprit que, en l'absence d'une formation nutritionnelle, ces mesures n'auront pas l'effet escompté.

3.4.2

Compte tenu des déséquilibres nutritionnels de la population européenne, il conviendra d'accompagner toute mesure d'information d'un grand effort de formation.

3.4.3

La proposition suppose, pour différentes raisons, un changement substantiel par rapport à la législation actuelle. Premièrement, elle rend obligatoire l'information nutritionnelle alors que, dans la directive 90/496/CEE, elle était sur base volontaire. Deuxièmement, elle fixe comme mentions obligatoires les informations suivantes: valeur énergétique, lipides, acides gras saturés, glucides, sucres et sel. Troisièmement, il faudra indiquer non seulement la quantité de ces éléments mais également le pourcentage de l'apport journalier recommandé qu'ils représentent, afin d'informer le consommateur sur la quantité adéquate qu'il peut consommer dans le cadre d'un régime équilibré. Enfin, le projet dispose que, sur l'emballage, ces informations doivent se trouver dans la partie principale du champ visuel et être présentées dans un certain ordre.

3.4.4

Compte tenu de la quantité d'informations obligatoires figurant déjà sur les étiquettes, il faudra évaluer précisément quelles sont les informations nutritionnelles utiles pour le consommateur. Le passage d'un étiquetage nutritionnel volontaire à un étiquetage nutritionnel obligatoire constituera déjà en soi un changement d'envergure pour bon nombre de PME du secteur agroalimentaire. Les informations obligatoires pourraient donc se limiter à celles préconisées actuellement de manière facultative, à savoir l'indication de l'énergie, des protéines, des glucides et des lipides.

3.4.5

Le principal avantage du modèle d'étiquetage nutritionnel proposé par la Commission est d'apporter une information (quantités journalières recommandées) indiquant au consommateur la façon dont il doit intégrer le produit à son régime. Ce modèle d'étiquetage n'évalue pas le produit en lui-même mais dans le cadre d'un régime alimentaire, comme le préconisent les nutritionnistes.

3.5   Renforcement de l'information obligatoire sur le pays d'origine de la denrée alimentaire

3.5.1

La réglementation actuelle oblige déjà à indiquer le pays d'origine de la denrée alimentaire lorsque le consommateur risque d'être induit en erreur.

3.5.2

LE CESE considère que l'indication de l'origine non seulement répond aux exigences des consommateurs, mais contribue également de manière efficace à améliorer la transparence sur les marchés et à soutenir le développement futur du secteur agricole et des zones rurales de l'ensemble de l'UE. La création d'un lien direct avec le territoire dont sont issues les denrées alimentaires ainsi que l'indication des modes de production dont dépendent ces denrées, constituent les éléments essentiels sur lesquels s'appuie le modèle de développement européen; ce dernier se fonde sur le respect de règles visant à garantir la sécurité alimentaire, la sécurité environnementale, le bien-être des animaux et les normes appropriées de santé publique.

3.5.3

Ainsi, l'indication de l'origine doit être rendue obligatoire pour l'ensemble des produits agricoles et des denrées alimentaires qui ne sont pas transformés ou sont au stade de la première transformation. Pour ceux de seconde transformation, il y aura lieu d'évaluer au cas par cas s'il y a lieu d'obliger à indiquer la provenance des principales matières premières agricoles utilisées dans l'élaboration du produit final.

Bruxelles, le 18 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


31.3.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 77/84


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant la mise sur le marché et l'utilisation des aliments pour animaux»

COM(2008) 124 final — 2008/0050(COD)

(2009/C 77/21)

Le 18 mars 2008, le Conseil a décidé, conformément aux articles 37 et 152 paragraphe 4 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant la mise sur le marché et l'utilisation des aliments pour animaux».

La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 2 septembre 2008 (rapporteur: M. ALLEN).

Lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 17 septembre 2008), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis à l'unanimité.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le CESE se félicite de cette proposition de règlement de la Commission.

1.2

Le Comité accueille favorablement la proposition dont l'article 4, paragraphe 1 et l'article 5, paragraphe 1 spécifient que les sections pertinentes du règlement sur l'hygiène des aliments pour animaux et du règlement sur la législation alimentaire s'appliqueront aux aliments pour animaux familiers ainsi qu'aux aliments pour animaux producteurs de denrées alimentaires.

1.3

Il importe que les autorités de contrôle puissent accéder à toute information relative à la composition ou aux propriétés alléguées des aliments pour animaux mis sur le marché afin de pouvoir vérifier l'exactitude des informations données par l'étiquetage.

1.4

Les exploitants du secteur de l'alimentation animale qui commercialisent pour la première fois des aliments pour animaux sur le marché de l'UE et qui ont recours à des aliments ou des composants d'aliments importés d'un pays tiers doivent s'assurer que ces importations répondent aux mêmes normes que les produits fabriqués dans l'UE. Cette conformité doit pouvoir être vérifiée par les autorités de contrôle.

1.5

Un engagement doit être pris afin que la personne répondant au numéro d'appel gratuit indiqué sur l'étiquette des aliments pour animaux familiers soit dûment qualifiée pour examiner les interrogations des clients et faire en sorte qu'une réponse y soit apportée rapidement.

1.6

Les points a et b du paragraphe 1 de l'article 17 devraient s'appliquer dans tous les cas. Cela signifie que la catégorie d'animaux à laquelle l'aliment est destiné et une notice d'utilisation appropriée doivent toujours figurer sur l'étiquette d'un aliment composé pour animaux. Il convient dès lors de supprimer la dérogation proposée au paragraphe 5 de l'article 21.

2.   Historique

2.1

Actuellement, la circulation des matières premières pour aliments des animaux et des aliments composés pour animaux est réglementée par cinq anciennes directives du Conseil et quelque 50 actes modificateurs et d'exécution. La législation est très dispersée avec un grand nombre de références croisées et, partant, difficile à comprendre et à appliquer de manière uniforme dans les différents États membres. Par exemple, la directive a été appliquée de manière différente dans deux États membres en ce qui concerne la teneur autorisée en vitamine D3 dans les aliments composés pour animaux.

2.2

2,6 % seulement des aliments composés pour animaux produits font l'objet d'échanges intracommunautaires, ce qui laisse présager de possibles obstacles aux échanges et un manque de cohérence dans la mise en œuvre des directives existantes.

2.3

Il est à noter qu'en 2005, dans l'UE des 25, cinq millions d'éleveurs ont produit du lait, du porc, de la volaille, du bœuf et du veau pour une valeur totale de 129 milliards d'euros. Le secteur européen des aliments pour animaux (à l'exception des aliments pour animaux familiers) emploie directement environ 100 000 personnes dans quelques 4 000 usines.

2.4

En quantité, environ 48 % des aliments pour animaux utilisés sont des fourrages grossiers produits dans les exploitations agricoles tels que l'herbe, l'ensilage, le foin, le maïs, etc. 32 % des aliments pour animaux sont des aliments composés achetés.

2.5

Quelque 62 millions de ménages de l'UE ont des animaux familiers. Le marché de l'UE des aliments pour animaux familiers est estimé à quelque 9 milliards d'euros par an, et emploie directement 21 000 personnes.

2.6

L'étiquette est utile pour veiller à l'application de la législation, assurer la traçabilité, effectuer des contrôles et transmettre des informations à l'utilisateur.

2.7

D'aucuns ont exprimé la crainte que la législation actuelle sur l'étiquetage des aliments pour animaux familiers puisse induire les consommateurs en erreur quant à la qualité et à la nature des ingrédients des aliments pour animaux.

3.   Définitions des aliments pour animaux

3.1

Les aliments pour animaux se répartissent en 4 catégories:

a)

les matières premières pour aliments pour animaux qui peuvent être utilisées directement comme nourriture, comme l'herbe, les céréales ou les matières premières qui peuvent être incorporées dans les aliments composés pour animaux;

b)

les additifs pour l'alimentation animale qui sont des substances telles que des micro-organismes ou des préparations (autres que les matières premières pour aliments pour animaux et les prémélanges) ajoutées intentionnellement aux aliments pour animaux pour certaines fonctions bien précises;

c)

les aliments composés pour animaux qui sont un mélange de matières premières pour aliments pour animaux pouvant également contenir des additifs, destinés à l'alimentation animale par voie orale, sous la forme d'aliment complet ou d'aliment complémentaire pour animaux;

d)

les aliments médicamenteux pour animaux qui sont des aliments pour animaux contenant des médicaments vétérinaires destinés à être donnés aux animaux tels quels.

3.2

Les matières premières pour aliments des animaux et les aliments composés pour animaux sont de loin les aliments pour animaux les plus fréquemment utilisés.

4.   Proposition de la Commission

4.1

La proposition est incluse dans le programme glissant de simplification de la Commission. Elle est conforme à la politique de la Commission visant à mieux légiférer et à la stratégie de Lisbonne.

4.2

Actuellement, les règles générales pour la commercialisation des aliments pour animaux, y compris les aliments pour animaux familiers, sont dispersées sur plusieurs directives selon le type d'aliment pour animaux qui est concerné. La directive 79/373/CEE sur les aliments composés et la directive 93/74/CEE définissent les règles de circulation des aliments pour animaux visant des objectifs nutritionnels particuliers («aliments diététiques pour animaux» ). La directive 96/25/CE énumère les règles générales relatives à la circulation et à l'utilisation des matières premières pour aliments des animaux et la directive 82/471/EEC définit les conditions de commercialisation de certains produits appartenant à la catégorie des matières premières pour aliments des animaux, produits utilisés dans l'alimentation des animaux («bioprotéines»). La proposition de règlement rationalise, simplifie, actualise et modernise les dispositions susmentionnées.

4.3

Le règlement sur les encéphalopathies spongiformes transmissibles (999/2001) contenant l'interdiction de nourrir les animaux producteurs de denrées alimentaires avec des farines de viande et d'os. Le règlement sur les sous-produits animaux (1774/2002) établissant les conditions pour de tels produits en cas d'utilisation comme aliment pour animaux. Le règlement sur les denrées alimentaires et les aliments pour animaux génétiquement modifiés (1829/2003) établissant les règles pour l'utilisation des aliments pour animaux génétiquement modifiés. Le règlement sur l'hygiène des aliments pour animaux (183/2005) visant à assurer la sécurité durant le processus de production des aliments pour animaux. Ces règlements, établis selon la nouvelle approche intégrée en matière de sécurité alimentaire «de l'étable à la table», ne sont pas modifiés.

4.4

L'objectif général de la nouvelle proposition de règlement consiste à consolider, réviser et moderniser les directives existantes relatives à la circulation et à l'étiquetage des matières premières pour aliments des animaux et des aliments composés pour animaux.

4.5

Le principe de subsidiarité s'applique, la proposition ne portant pas sur un domaine relevant de la compétence exclusive de la Communauté. La proposition est conforme au principe de proportionnalité étant donné qu'elle harmonise le cadre réglementaire applicable à la commercialisation et à l'utilisation des aliments pour animaux.

4.6

La proposition supprime les obligations inutiles et inefficaces en matière d'étiquetage. Il est maintenant proposé que les exigences en matière d'étiquetage des ingrédients soient les mêmes que celles des denrées alimentaires. Les nouvelles règles n'exigeraient plus d'afficher le pourcentage de toutes les matières premières mais seulement de les indiquer par ordre décroissant de poids. Actuellement, toutes les matières premières pour aliments pour animaux utilisées dans les aliments composés pour les animaux producteurs de denrées alimentaires doivent être indiquées en pourcentage du poids total avec une tolérance de +/- 15 %. L'exploitant agricole ne peut dès lors pas connaître le pourcentage exact des ingrédients. La nouvelle proposition fait obligation au fabricant qui mentionne volontairement des pourcentages à donner des chiffres exacts. En outre, le pourcentage exact doit être indiqué pour les matières premières des aliments composés pour animaux qui sont mises en évidence sur l'étiquette. Enfin, l'exploitant agricole peut demander des informations sur la composition des aliments pour animaux autres que la liste des matières premières par ordre décroissant de poids, que le fabricant doit fournir sauf si elles relèvent du secret de fabrication.

4.7

Le nom de l'exploitant du secteur de l'alimentation animale qui commercialise pour la première fois des aliments pour animaux sur le marché de l'UE doit être clairement indiqué sur l'étiquette.

4.8

Toute information facultative mentionnée sur l'étiquette doit être exacte et compréhensible pour l'utilisateur final.

4.9

La Commission sera tenue de maintenir et d'actualiser une liste de matières premières dont la mise sur le marché est interdite. En outre, elle peut arrêter des orientations clarifiant la distinction entre les matières premières pour aliments destinés aux animaux, les additifs pour l'alimentation animale et les médicaments vétérinaires.

4.10

Les exigences en matière d'autorisation préalable à la mise sur le marché doivent être proportionnées au risque afin de pouvoir donner l'assurance nécessaire que la destination des nouvelles matières premières pour aliments destinés aux animaux est fixée de façon adéquate. L'approche intégrée en matière de sécurité alimentaire «de l'étable à la table» (dans le cadre du règlement 178/2002) permet, en toute confiance, de réduire la charge administrative dans ce domaine. Il n'est pas justifié que les bioprotéines et les nouvelles matières premières pour aliments des animaux soient toutes soumises à une procédure d'autorisation préalable à la mise sur le marché.

4.11

La tendance est à l'accroissement des livraisons de coproduits pour les rations d'aliments pour animaux en raison de la concurrence plus forte pour les céréales de base entre les aliments pour animaux, les denrées alimentaires et les combustibles. L'absence d'informations claires sur les produits contribue à une utilisation non optimale de ces matières premières.

4.12

Il est proposé que toutes les parties prenantes (et les utilisateurs) soient impliqués dans l'élaboration d'un catalogue des matières premières pour aliments des animaux plus complet et mieux adapté à l'évolution du marché que l'actuelle liste non exhaustive de la directive. Les parties prenantes seront également encouragées à élaborer des codes communautaires de bonnes pratiques en matière d'étiquetage dans le cadre de l'étiquetage facultatif, avec un code pour les aliments pour animaux et un autre code pour les aliments pour animaux producteurs de denrées alimentaires. La Commission donnera des conseils lors de la préparation du catalogue communautaire facultatif et des codes qui seront ensuite soumis à son approbation finale (corégulation).

4.13

L'étiquetage des additifs pour l'alimentation animale ne serait généralement obligatoire que pour les additifs sensibles. Les autres additifs pourraient être désignés sur une base volontaire, conformément à un code de bonne pratique déterminé par les parties concernées et approuvé par la procédure de corégulation.

4.14

Dans le cas des aliments pour animaux familiers, l'objectif consiste à améliorer la qualité des étiquettes pour éclairer l'acheteur afin d'éviter qu'il ne soit induit en erreur. L'exactitude scientifique de toute allégation nutritionnelle doit pouvoir être vérifiée. Conformément à l'article 19, l'étiquette d'un aliment pour animaux familiers doit comporter un numéro d'appel gratuit permettant à l'acheteur d'obtenir des informations en ce qui concerne les additifs pour l'alimentation animale et les matières premières pour aliments destinés aux animaux, désignées par catégorie.

4.15

Les aliments pour animaux visant des objectifs nutritionnels particuliers ne peuvent être commercialisés en tant que tels que s'ils possèdent les caractéristiques nutritionnelles essentielles, et s'ils sont autorisés et inclus dans la liste établie conformément à l'article 10. Selon l'article 13, paragraphe 3, l'étiquetage ou la présentation d'un aliment pour animaux ne doit pas comporter d'allégations selon lesquelles l'aliment possède des propriétés de prévention, de traitement ou de guérison d'une maladie.

4.16

L'étiquetage et la présentation ne doivent pas induire l'utilisateur en erreur. Les indications d'étiquetage à caractère obligatoire doivent être fournies dans leur totalité à un endroit bien visible de l'emballage.

4.17

L'exploitant du secteur de l'alimentation animale qui commercialise pour la première fois des aliments pour animaux sur le marché de l'UE est responsable des indications d'étiquetage et garantit leur présence et leur exactitude matérielle.

5.   Observations générales

5.1

La nouvelle législation alimentaire générale, le règlement sur l'hygiène des aliments pour animaux et leurs dispositions d'application ont permis d'accroître sensiblement le niveau de la sécurité des denrées alimentaires et des aliments pour animaux. L'amélioration du système de traçabilité et l'introduction des principes HACCP (principes d'analyse du risque et des points de contrôle) dans les entreprises du secteur de l'alimentation animale garantissent une meilleure sécurité des aliments pour animaux d'un bout à l'autre de la chaîne.

5.2

Il est essentiel qu'aucune des modifications proposées ne compromette les normes de sécurité nécessaires dans le cas des animaux producteurs de denrées alimentaires.

5.3

Les exploitants du secteur de l'alimentation animale doivent fournir aux autorités officielles toutes les informations nécessaires pour garantir que les règles soient correctement respectées.

5.4

Une réduction des contraintes administratives est en général très bien accueillie étant donné que de nombreux domaines sont devenus surréglementés en termes d'exigences administratives.

5.5

Le recours aux farines de viande et d'os pour nourrir les animaux ruminants producteurs de denrées animales ne doit en aucun cas être autorisé. Actuellement, le règlement sur les encéphalopathies spongiformes transmissibles (999/2001) contient l'interdiction de nourrir les animaux ruminants avec des farines de viande et d'os. Ces farines peuvent être utilisées dans les aliments pour animaux familiers. La proposition de règlement à l'examen ne recommande aucun changement en ce qui concerne l'utilisation des farines de viande et d'os dans la mesure où cette problématique n'entre pas dans le champ d'application de la présente proposition de règlement. Ce sujet devra être débattu dans le cadre de la proposition de règlement établissant des règles sanitaires applicables aux sous-produits animaux non destinés à la consommation humaine.

5.6

Les aliments composés pour animaux sont généralement produits à proximité des élevages. Les unités de production sont par conséquent souvent situées dans les zones rurales où les autres possibilités d'emploi sont limitées. S'agissant du transport des aliments pour animaux vers les fermes, il est avantageux d'avoir un réseau de distribution locale qui évite aux camions de livraison de devoir effectuer de longs trajets; l'on réduit ainsi les émissions de gaz à effet de serre.

5.7

La Commission souligne que le commerce intracommunautaire d'aliments composés pour animaux est assez limité et estime que le nouveau règlement améliorera la concurrence en favorisant la croissance des échanges intracommunautaires d'aliments composés pour animaux.

6.   Observations particulières

6.1

De manière générale, le CESE se félicite de la proposition visant à simplifier, rationaliser et améliorer l'efficacité administrative du secteur des aliments pour animaux.

6.2

Le nouveau règlement proposé confère une plus grande liberté et une plus grande responsabilité aux exploitants du secteur de l'alimentation animale. L'article 12, paragraphe 1 précise que le fabricant d'aliments pour animaux est responsable des indications d'étiquetage et garantit leur présence et leur exactitude matérielle. Il doit également remplir les obligations prévues par ce règlement et celles imposées par d'autres règlements pertinents tels que les règlements 183/2005, 178/2002 et 1831/2003. Alors que le règlement 88/2004 établit des règles générales pour la réalisation de contrôles officiels destinés à vérifier la conformité avec la législation, l'Office alimentaire et vétérinaire (OAV) doit veiller à l'application cohérente de cette même législation. Les exploitants du secteur de l'alimentation animale qui commercialisent pour la première fois des aliments pour animaux sur le marché de l'UE et qui ont recours à des importations de pays tiers doivent faire l'objet de contrôles afin de s'assurer que ces importations répondent aux mêmes normes que les produits fabriqués dans l'UE.

6.3

Le fait d'attribuer une plus grande responsabilité aux fabricants d'aliments dans la gestion de leurs activités signifie qu'en cas de problème grave de contamination d'aliments pour animaux par des substances toxiques ou d'aliments nocifs pour les animaux d'élevage ou pour l'environnement, en particulier en ce qui concerne les nouvelles matières premières pour aliments destinés aux animaux, le secteur des animaux producteurs de denrées alimentaires pourrait subir de graves dommages avant que des mesures appropriées ne soient prises pour remédier à la situation. Cela pourrait avoir des conséquences encore plus graves si le fabricant ne dispose pas de ressources financières suffisantes pour résoudre le problème.

6.4

L'acheteur d'aliments pour animaux, en d'autres mots l'exploitant agricole, doit, en cas de catastrophe, être bien protégé contre les pertes financières, sociales et économiques qui peuvent en résulter. Dès lors, il y a lieu d'envisager ces délibérations dans un cadre réglementaire spécifique et à la lumière du rapport de la Commission au Parlement européen et au Conseil sur «les dispositions juridiques, les systèmes et pratiques en vigueur dans les États membres et au niveau communautaire concernant la responsabilité des secteurs de production de denrées alimentaires et d'aliments pour animaux et sur les systèmes applicables de garanties financières dans le secteur de l'alimentation animale» (1).

6.5

Il y a lieu de respecter le principe de précaution dans ce domaine car de graves erreurs ont été commises dans le passé.

6.6

Il est peu probable que l'on observe une croissance importante du commerce intracommunautaire des aliments composés pour les animaux producteurs de denrées alimentaires car les acquéreurs ont tendance à privilégier les exploitants locaux. Cette situation pourrait changer si des entreprises multinationales prenaient le contrôle d'une part importante du secteur de l'alimentation animale.

6.7

Le risque existe que les entreprises multinationales cherchent à prendre le contrôle de segments importants du marché des aliments pour animaux, restreignant ainsi la concurrence. Un tel cas de figure pourrait entraîner une diminution importante du nombre de fabriques d'aliments pour animaux et accroître le commerce intracommunautaire. Cela ne veut pas dire que le marché deviendrait plus concurrentiel.

6.8

S'agissant des aliments pour animaux familiers, les propriétaires d'animaux familiers ont davantage besoin de conseils appropriés sur la qualité des aliments destinés à leurs animaux que de la liste des ingrédients. Il est également important d'indiquer les quantités appropriées à donner aux différents animaux et de préciser si l'aliment en question est un aliment complémentaire ou complet.

6.9

Étant donné que la demande mondiale de protéines augmente, il est indispensable d'intensifier considérablement les investissements dans la recherche et le développement pour le secteur des aliments pour animaux.

Bruxelles, le 17 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  JO C 246 du 20.10.2007, p. 12.


31.3.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 77/88


Avis du Comité économique et social européen sur «L'Incidence de l'évolution actuelle des marchés énergétiques sur les chaînes de valeur de l'industrie européenne»

(2009/C 77/22)

Le 17 janvier 2008, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l'article 29, paragraphe 2, de son Règlement intérieur, d'élaborer un avis sur

«L'incidence de l'évolution actuelle des marchés énergétiques sur les chaînes de valeur de l'industrie européenne».

La commission consultative des mutations industrielles, chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 24 juin 2008 (rapporteur: M. ZBOŘIL et corapporteur: M. KERKHOFF).

Lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 17 septembre 2008), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 62 voix pour, 5 voix contre et 5 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le Comité prend note du nouveau contexte des marchés énergétiques et reconnaît la nécessité d'atténuer le changement climatique anthropique (d'origine humaine) en réduisant les émissions de gaz à effet de serre (GAS). Les coûts du changement climatique et des modalités économiquement rentables permettant de réduire les émissions de gaz à effet de serre représentent des thèmes essentiels du débat dont fait l'objet la politique climatique. Ces questions sont d'autant plus importantes que l'approvisionnement énergétique mondial devra doubler d'ici 2050 pour répondre aux besoins de tous les habitants de la planète. Les politiques énergétiques et climatiques durables doivent être conçues de manière à atteindre leurs objectifs tout en préservant, dans le même temps, les chaînes de valeur industrielles, épines dorsales de l'économie européenne, et en tenant également compte des coûts des dégâts liés au changement climatique. Cela va dans le sens des intérêts de l'Union européenne.

1.2

En raison des grandes quantités d'énergie qui sont nécessaires pour transformer les matières premières en matériaux de base, les industries de matériaux de base sont fortement affectées par toute variation des coûts de l'énergie, par les taxes sur l'énergie et par les autres dispositions financières de même nature. Il convient toutefois de rapporter l'empreinte énergétique des matériaux de base à l'ensemble de la chaîne de valeur industrielle; il n'y a pas de sens à la traiter séparément.

1.3

Le Comité est d'avis que l'économie européenne ne pourra connaître la croissance et l'innovation que grâce à une base industrielle solide. Des industries de matériaux de base compétitives et innovantes sont la condition indispensable des chaînes de valeur industrielles. De fait, le soutien à l'écotechnologie et aux technologies renouvelables constitue un objectif important. Néanmoins, même le développement de technologies respectueuses de l'environnement requiert l'existence de chaînes de valeur industrielles très performantes. Celles-ci dépendent de la disponibilité et de l'expertise des industries de matériaux de base. Les innovations ayant trait à l'environnement ne peuvent, notamment, être mises en œuvre que s'il existe une coopération tout au long de la chaîne de valeur. Il n'y a pas de réussite possible sans une approche holistique couvrant l'ensemble de chaque chaîne de valeur.

1.4

Le Comité rappelle que les bâtiments, représentant 40 % de la demande finale d'énergie dans l'Union européenne, sont les plus gros consommateurs d'énergie. Jusqu'à la moitié des gains d'efficacité énergétique peuvent être réalisés dans le secteur des bâtiments, à un coût économique négatif. De telles économies pourraient à elles seules permettre à l'UE de respecter les engagements pris dans le cadre du protocole de Kyoto. En outre, ces économies d'énergie peuvent être réalisées en utilisant des technologies existantes. Par ailleurs, l'amélioration des performances énergétiques des bâtiments n'a que des effets positifs: création d'emplois utiles, réduction des frais de fonctionnement, meilleur confort et environnement plus propre. Cette question devrait être une priorité absolue pour l'Union européenne. Le Comité reconnaît également l'importance des matériaux de base nouveaux et les perfectionnements des matériaux de base existants en ce qui concerne les appareils domestiques et bureautiques, ainsi que d'autres secteurs tels que les transports ou l'énergie.

1.5

Une hypothétique délocalisation hors de l'UE des industries à haute intensité d'énergie réduirait sensiblement l'attractivité des sites industriels européens et se traduirait par des pertes de croissance économique et d'emplois et par la mise en péril du modèle social européen. En raison de l'interdépendance qui existe au sein des chaînes de valeur industrielles, il serait impossible, à court terme, de compenser ces pertes par l'essor d'autres secteurs, tels que les écotechnologies. Bien au contraire, ces secteurs perdraient eux-mêmes de leur compétitivité.

1.6

Les industries à haute intensité d'énergie doivent, en réalité, contribuer à la réalisation des objectifs de politique énergétique et climatique. Mais les exigences doivent être conçues de telle manière qu'elles permettent d'exclure dans une large mesure une importante perte de compétitivité sur la scène économique mondiale. Les industries des matériaux de base sont, par nature, extrêmement sensibles à l'impact des coûts énergétiques. Les instruments des politiques énergétiques et environnementales doivent par conséquent être soigneusement évalués et conçus en fonction de leur impact sur la compétitivité de ces industries.

1.7

Les industries à haute intensité énergétique nécessitent un approvisionnement énergétique sûr grâce à un bouquet énergétique européen adéquat n'excluant aucune source énergétique (ni le charbon, ni les énergies renouvelables, ni l'énergie nucléaire) et reposant sur une concurrence efficace sur les marchés de l'électricité et du gaz, qui se traduise au final par des prix raisonnables de l'approvisionnement énergétique. Les intérêts des politiques énergétiques nationales devraient être plus fermement ancrés dans une vision européenne intégrée car jusqu'à présent, le marché de l'énergie est loin d'atteindre les performances du marché unique des produits industriels. Afin de continuer à produire de l'électricité en utilisant la fission nucléaire dans l'UE, il faudrait également préserver le savoir-faire dont dispose l'Europe dans ce domaine, indépendamment de la décision de certains États membres de renoncer à l'énergie nucléaire. Il va de soi que le maintien de l'option nucléaire nécessiterait un niveau de sécurité très élevé et l'emploi d'un personnel bien formé (1).

1.8

La conclusion d'un accord international ambitieux sur le changement climatique est tout à fait essentielle pour lutter contre celui-ci. Un tel accord doit aboutir à des obligations de réduction des émissions pour tous les principaux pays émetteurs (en vertu du principe des responsabilités communes mais différenciées), obligations devant s'appliquer aussi aux industries à haute intensité d'énergie, de sorte que soient garanties une concurrence loyale et des règles du jeu identiques pour tous. En l'absence d'un tel accord, il conviendrait d'envisager l'attribution gratuite de droits d'émission aux industries à haute intensité d'énergie présentant des risques de «fuites de carbone» dans le cadre du système d'échanges de droits d'émission afin de prévenir les menaces pesant sur la compétitivité des sites industriels et sur la croissance économique de l'UE. Le choix final de la méthode d'allocation des quotas devrait être effectué en fonction des performances atteintes (par exemple après une évaluation comparative de celles-ci) sur la base des meilleures techniques disponibles.

1.9

Afin d'ouvrir la voie à une contribution à long terme aux politiques énergétique et climatique, le Comité recommande fortement de privilégier la recherche et le développement concernant les nouvelles technologies, en particulier en raison de la maturité qu'ont largement atteinte les processus de fabrication existants. Là où les solutions techniques font encore défaut, les objectifs concernant une meilleure efficacité énergétique et une réduction des émissions de CO2 ne peuvent être atteints. Certaines structures fonctionnent déjà, par exemple les plateformes technologiques, mais les efforts à fournir nécessitent une meilleure coordination comme le préconise notamment le Plan SET (2). Il convient néanmoins de prévoir des délais suffisants pour que soient réalisés les progrès technologiques requis et que soit atteinte la nécessaire viabilité commerciale en termes de compétitivité mondiale.

1.10

Fort de la relation privilégiée qu'il entretient avec les acteurs économiques, le Comité économique et social européen devrait souligner les problèmes des chaînes de valeur industrielles qui ne sont parfois pas suffisamment pris en compte par les institutions politiques.

2.   L'impact de l'énergie, en tant que facteur de production, sur les chaînes de valeur de l'industrie européenne

2.1

La fabrication de matériaux de base tels que l'acier, l'aluminium et les autres métaux non ferreux, les produits chimiques, le ciment, la chaux, le verre, la pâte à papier et le papier constitue le fondement indispensable à toute chaîne de valeur de l'industrie. Pour la construction et le fonctionnement, les produits industriels nécessitent des matériaux de base dotés de propriétés mécaniques, physiques et chimiques qu'ils ne possèdent pas à l'état naturel. De fait, les performances des produits industriels dépendent de l'utilisation spécifique des matériaux et de leur optimisation en termes de consommation de matière et d'énergie, de qualité, de fiabilité, d'efficacité économique, de durabilité, d'impact environnemental, etc. Le développement permanent de tels matériaux est donc un facteur essentiel du niveau d'innovation technologique qui caractérise chaque produit existant. Une chaîne de valeur correspond à un chapelet d'entreprises ou d'acteurs qui travaillent ensemble afin de satisfaire les demandes du marché relatives à des produits ou à des services spécifiques. Les industries situées en aval de la chaîne de valeur consomment moins d'énergie pour leurs processus de fabrication; ainsi, il n'est guère utile d'envisage le produit final de manière isolée. L'empreinte énergétique doit être évaluée sur l'ensemble de la chaîne de valeur. Une hausse des coûts énergétiques ne se répercute pas uniquement sur la production du matériau de base; elle peut, si le marché est en mesure de tolérer de telles hausses, entraîner simultanément, en aval, une augmentation du prix des produits industriels intermédiaires et finaux, en raison du coût plus élevé du matériau de base.

2.2

Une industrie des matériaux de base compétitive et innovante est déterminante pour le choix de l'emplacement des maillons ultérieurs de la chaîne de création de valeur industrielle, comme c'est le cas pour la production automobile, la construction de moteurs ou le bâtiment. Cela garantit le développement conjoint de matériaux conçus sur mesure et aptes à répondre aux exigences spécifiques de l'utilisateur. Les consommateurs souhaitant être livrés en «flux tendu», le fournisseur doit également être implanté à proximité. La chaîne de valeur de l'industrie perd sa capacité d'innovation et sa compétitivité si un matériau de base n'est plus disponible. Cela vaut essentiellement pour les petites et les moyennes entreprises. Nombre d'entre elles opèrent, par exemple, dans le secteur de la transformation de l'acier.

2.3

D'une manière générale, de grandes quantités d'énergie sont nécessaires pour produire des matériaux de base, surtout en comparaison avec les stades de fabrication ultérieurs. L'énergie consommée par unité de valeur par les industries à haute intensité d'énergie est dix fois (parfois même cinquante fois) plus importante que celle qu'utilisent les industries subséquentes telles que l'ingénierie mécanique. En Allemagne, par exemple, l'énergie primaire consommée pour la production de ciment est d'environ 4,5 kg, de 2,83 kg pour l'acier et de 2,02 kg SKE pour le papier, par unité de valeur ajoutée, tandis qu'elle n'atteint que 0,05 kg SKE dans le secteur de l'ingénierie mécanique (3). Cela s'explique par le fait que les matériaux de base doivent être obtenus grâce à la transformation physique ou chimique de matières premières naturelles. Des températures très élevées sont ainsi nécessaires aux processus de combustion, de fusion, de réduction, et l'électricité est indispensable pour les électrolyses. En outre, la fabrication de produits semi-finis implique aussi une forte consommation d'énergie. Dans de nombreux cas, les sources d'énergie primaire ne sont pas employées pour produire de la chaleur ni de l'électricité, mais comme matières premières ou agents réducteurs, notamment dans les processus de réduction qui interviennent dans la production du fer. Il est également important d'observer que la qualité des matières premières se dégrade progressivement et que leur transformation nécessite généralement de plus grandes quantités d'énergie.

2.4

Les besoins énergétiques globaux d'un produit industriel doivent être mis en relation à la fois avec les économies d'énergie que peuvent permettre les innovations apportées au produit en question et avec l'utilisation de celui-ci dans d'autres secteurs. Une telle comparaison, pour laquelle les matériaux nouvellement développés jouent un rôle considérable, ne peut résulter que de la coopération entre les fournisseurs de matériaux de base et les producteurs industriels en aval. À titre d'exemple, des centrales électriques plus efficaces qui consomment moins de sources d'énergie primaire nécessitent des aciers très performants et résistants aux températures élevées. D'autre part, pour ce qui est de la consommation de carburants dans le secteur des transports, il est possible de la limiter en utilisant des matériaux plus légers pour la construction des automobiles.

3.   La situation des différents marchés de l'énergie (charbon, pétrole, gaz, électricité) et l'impact sur les industries à haute intensité d'énergie (4)

3.1

Les industries produisant des matériaux de base tels que le ciment, l'acier, les métaux non ferreux, les produits chimiques, le verre, la pâte à papier et le papier utilisent des carburants fossiles non seulement à des fins énergétiques mais également comme matière première et subissent, à de nombreux égards, les coûts des diverses sources d'énergie. Le pétrole brut constitue, par exemple, une matière première pour l'industrie chimique lorsqu'il s'agit de fabriquer des matières plastiques ou bien d'autres produits pétrochimiques. Parallèlement, l'évolution des marchés pétroliers a également eu un impact sur le prix d'achat du gaz et de l'électricité, puisque les prix du gaz demeurent liés au prix du pétrole. La situation du marché du charbon détermine également le prix de l'électricité pour les industries à forte consommation d'énergie. Sans oublier que le secteur sidérurgique utilise le charbon et le coke comme matières réductrices.

3.2

Selon les prévisions, les réserves de pétroles, qui correspondent aux ressources qu'il est actuellement possible d'exploiter du point de vue technique et de manière rentable, devraient encore durer quarante ans. Ces réserves pourraient très bien s'accroître si, à l'avenir, de nouvelles ressources, et en particulier les réserves d'hydrocarbures non-conventionnelles comme le sable bitumeux, devenaient économiquement exploitables. Les prix du pétrole évoluent en fonction de la croissance que connaît la demande, notamment en Chine et en Inde. Les conséquences de cette situation sont accentuées par le pouvoir croissant qu'exercent les pays de l'OPEP sur le marché, ce qui rend la diversification des sources d'approvisionnement de plus en plus difficile en raison de la répartition inégale des ressources. La concentration régionale de la production dans des pays qui connaissent une importante instabilité politique et économique accroît l'incertitude liée à la nature imprévisible des futures réductions de l'approvisionnement, entraînant des effets concomitants sur les prix.

3.3

Envisagées à partir de notre situation actuelle, les réserves de gaz naturel devraient pouvoir couvrir les besoins durant (approximativement) soixante années, c'est-à-dire plus longtemps que les réserves de pétrole. Le gaz naturel est la source d'énergie primaire dont l'importance s'accroît le plus rapidement en Europe. La dépendance de l'UE vis-à-vis des importations de gaz naturel augmente même plus rapidement que la consommation de celui-ci. Les gisements de gaz et de pétrole que possèdent certains pays européens (tels que les Pays-Bas, la Norvège et le Royaume-Uni) s'épuisent progressivement, tandis que les importations, qui proviennent en majorité d'un exportateur unique, la Russie, gagnent en importance. À long terme, il convient de s'attendre à une augmentation des prix du gaz et de surcroît, une telle dépendance vis-à-vis d'un seul pays pourrait permettre à la Russie d'exercer une influence politique sur l'Union européenne. La probabilité d'une telle évolution est renforcée par le caractère naturellement limité des réserves stratégiques de gaz dont dispose l'UE.

3.4

Les réserves de charbon où celui-ci peut être extrait d'une manière économiquement viable sont nettement plus importantes celles de pétrole ou de gaz. L'on estime généralement qu'elles peuvent encore couvrir cent cinquante années de consommation. De plus, ces réserves sont réparties de manière beaucoup plus équitable entre les différents continents et se situent, dans l'ensemble, dans des pays politiquement stables tels que les États-Unis ou l'Australie. Comme ce fut le cas pour les autres sources énergétiques, le prix du charbon a sensiblement augmenté au cours des dernières années en raison de la demande croissante.

3.5

L'électricité est une énergie secondaire que l'on produit principalement à partir du charbon, du gaz, de l'énergie nucléaire et de sources d'énergie primaire renouvelables; dans certains États membres, une part importante de l'électricité provient également du pétrole. La composition du bouquet énergétique à partir duquel est produite l'électricité détermine dans une grande mesure les coûts de production. Le charbon et le nucléaire offrent une énergie fournissant une charge de base rentable. Dans l'UE, les énergies renouvelables doivent être davantage développées. Comparées aux autres sources d'énergie primaire, ces dernières se sont, jusqu'à présent avérées relativement onéreuses, notamment parce que dans leur majeure partie, les effets externes des énergies conventionnelles ne sont pas répercutés dans leurs tarifs. Dans le cas des énergies éolienne et photovoltaïque, une disponibilité faible et fluctuante pose des problèmes au niveau des réseaux qu'il conviendra d'adapter à la croissance future de la quantité d'électricité produite à partir d'énergies renouvelables. Selon la région où elles sont exploitées, certaines énergies renouvelables sont moins coûteuses que d'autres. Ainsi, l'énergie photovoltaïque, par exemple, peut s'avérer économiquement avantageuse dans des régions ensoleillées comme le sud de l'Europe, tandis qu'elle n'est pas rentable dans les pays du nord.

4.   Le contexte évolutif des marchés de l'énergie

4.1

Les marchés énergétiques s'inscrivent dans un environnement dynamique que façonnent de concert des influences économiques, politiques et sociales aux interactions complexes. L'industrie fait face à un changement des conditions et des coûts de l'approvisionnement énergétique qui se traduit par une imprévisibilité excessive. La dépendance croissante de l'Europe vis-à-vis des importations d'énergie et les nouvelles hausses que connaîtront probablement les prix de l'énergie aggravent l'inquiétude quant à la capacité de répondre, à l'avenir, à la demande d'énergie. L'on sait qu'il est vital, pour le développement économique et social, de garantir la sécurité et la fiabilité de l'approvisionnement énergétique à des prix abordables et stables; cet impératif devrait faire partie intégrante d'une politique énergétique saine et cohérente.

4.2

En raison des récentes évolutions rapides du contexte économique européen et mondial, le secteur énergétique doit développer de nouveaux concepts et de nouvelles politiques aptes à mieux répondre aux exigences de sécurité de l'approvisionnement énergétique. Alors que dans le passé, cette dernière était traditionnellement considérée comme une responsabilité incombant au premier chef aux gouvernements des États membres, la situation que connaissent actuellement les marchés de l'énergie en Europe exige que les forces du marché jouent un rôle complémentaire. Sur un marché libéralisé, la sécurité et la compétitivité ont un prix. Afin de garantir à long terme la sécurité des approvisionnements, la politique énergétique européenne acquiert une importance capitale (5).

4.3

Les sources d'énergie fossiles ne sont pas renouvelables. Une part importante des réserves de pétrole et de gaz naturel dont dispose l'Europe ont déjà été complètement épuisées. Il convient d'inscrire ce problème dans le contexte d'une consommation croissante de pays tels que la Chine et l'Inde. Pour ce qui est du pétrole, il existe un grand nombre de gisements non conventionnels (tels que les sables bitumeux) dont l'exploitation demeure difficile et onéreuse et génère d'importantes émissions de GES. Ces gisements risquent donc d'accroître les coûts d'exploitation et d'augmenter, au final, les prix.

4.4

Actuellement, près de 50 % des sources d'énergie primaire de l'Union européenne sont importées et 70 % devraient l'être dans un proche avenir (2030). L'UE dépend donc, principalement pour son approvisionnement en pétrole et en gaz, des importations provenant de quelques pays (ceux de l'OPEP et la Russie) qui jouissent d'une position puissante sur le marché. Étant donné que ces pays souffrent souvent de fortes instabilités politiques et économiques, un approvisionnement stable n'est pas assuré. Une hausse récente du prix du pétrole a révélé la vulnérabilité économique de l'UE. C'est pourquoi il importe que celle-ci se donne des ressources énergétiques qui lui appartiennent en propre et développe de manière durable les ressources qui existent dans l'Union européenne. La dépendance vis-à-vis des importations énergétiques a des conséquences significatives en matière de sécurité, et ce quelle que soit la source d'énergie, hormis le charbon, qui est importé de divers pays considérés comme stables. Malgré tout, l'Europe dispose aussi de ses propres gisements de charbon qui sont économiquement viables: dans l'UE, l'extraction de lignite est relativement peu coûteuse.

4.5

Les marchés de l'électricité et du gaz, qui se caractérisaient auparavant par des monopoles naturels et une dimension nationale connaissent un processus de libéralisation et d'intégration. Tandis que le réseau est réglementé, la concurrence en matière de production et de commercialisation devrait avoir pour effet de faire baisser les prix et de renforcer l'efficacité. Cette stratégie a abouti à une certaine convergence des prix entre pays voisins. Cependant, la segmentation nationale des marchés due aux goulets d'étranglement historiques au niveau du réseau de transporta, à de rares exceptions près, limité la concurrence entre les États membres.

4.6

De plus, les prix du gaz et des autres sources d'énergie primaire, qui représentent la majeure partie du coût de production de l'électricité (cf. plus haut, le paragraphe 3.5) ont très fortement augmenté au cours des dernières années. Enfin, la production d'électricité ne connaît plus de surcapacités et le secteur de l'électricité traverse une période d'investissements massifs. L'ensemble de ces facteurs a entraîné la hausse des prix, et ce malgré des progrès constants (cf., par exemple, l'intégration progressive de la région du centre-ouest: Belgique, France, Allemagne, Luxembourg et Pays-Bas). Le phénomène de concentration de la production et de la distribution de l'énergie existe aussi en dehors de l'Union européenne sans que l'on observe de corrélation entre cette concentration et les niveaux des prix du gaz et de l'électricité.

4.7

La décision politique prise par l'UE de restreindre le changement climatique anthropique en diminuant largement les émissions de gaz à effet de serre représente déjà un facteur déterminant pour les marchés de l'énergie et son importance ne cesse de croître. Dès lors, le renforcement de l'efficacité énergétique a fait l'objet d'un effort beaucoup plus soutenu et doit progresser de manière considérable afin que l'intensité de carbone de l'énergie utilisée puisse être réduite en toute sécurité. Dans cette optique, les combustibles fossiles contenant beaucoup de carbone sont de moins en moins bien acceptés, tandis que les sources énergétiques à faible teneur en carbone (comme le gaz) ou les technologies qui en sont quasiment exemptes (telles que les énergies renouvelables ou, dans une certaine mesure, le nucléaire), sont valorisées. Ce n'est toutefois pas le cas dans tous les États membres.

4.8

Garantir à l'UE un approvisionnement énergétique suffisant est devenu un défi capital, car il s'agit d'acquérir une technologie adéquate et disponible, et s'apparente en même temps de plus en plus à une course contre la montre. Par le passé, quelques États membres ont décidé de renoncer à l'énergie nucléaire, avec toutes les restrictions que cela impose au bouquet énergétique permettant de produire de l'électricité. De plus, la construction de centrales au charbon et d'infrastructures nécessaires au transport de l'énergie fait souvent l'objet de résistance de la part de la population. Ainsi, il pourrait arriver de plus en plus fréquemment que des projets de centrales électriques au charbon soient abandonnés, comme ce fut par exemple le cas à Ensdorf, en Allemagne, en raison de la mobilisation de groupes de citoyens. Même certaines sources d'énergie renouvelable, telles que les éoliennes, rencontrent une résistance de plus en plus prononcée. L'acceptation par l'opinion publique de toutes les sources d'énergie, et non pas seulement du nucléaire, est devenue un problème grave qu'il faut traiter avec la plus grande attention, pour pouvoir amener la production d'électricité au niveau des besoins des citoyens et de l'économie de l'UE.

4.9

De ce fait, la capacité de production d'électricité de l'UE stagne, seuls quelques projets sont actuellement développés et l'on ne peut totalement exclure que l'UE soit confrontée à l'avenir à des difficultés. La modernisation actuellement en suspens du parc nucléaire européen est à la fois un défi et une chance. Il est désormais absolument indispensable de donner aux investisseurs potentiels le signal que seuls les investissements dans les technologies à faible émission de carbone sont raisonnables.

5.   Les stratégies d'adaptation de l'industrie

5.1

Les industries qui produisent des matériaux de base en consommant de grandes quantités d'énergie sont pressées de toutes parts de s'adapter à la mondialisation des marchés et à la nouvelle donne qui caractérise les marchés de l'énergie. D'une part, les entreprises doivent pouvoir faire face à la concurrence internationale en développant des produits et des processus innovants. Mais d'autre part, elles doivent également absorber des coûts croissants de l'énergie, s'assurer qu'elles respectent les décisions politiques concernant la réduction des émissions de CO2 et des quantités d'énergie consommées.

5.2

Les interactions économiques au niveau international se sont intensifiées dans le cadre de la mondialisation. Les fournisseurs originaires des pays en développement ont rattrapé leur retard technologique et offrent désormais des conditions de production peu coûteuses à haute intensité de main-d'œuvre. Les fournisseurs de matériaux de base ont répondu à ce défi en optimisant leur processus de production, en se spécialisant dans la fabrication de biens de haute qualité technologique et en développant des produits sur mesure, en étroite coopération avec les consommateurs. Les partenariats entre ces derniers et les fournisseurs de matériaux se multiplient et offrent une grande variété de services.

5.3

L'énergie représente une part importante des coûts de production des matériaux dans les industries à haute intensité énergétique. Il est donc dans l'intérêt de ces industries de réduire leur consommation d'énergie. Dans ce domaine, des résultats remarquables ont été obtenus au cours des dernières décennies. Les industries européennes à haute intensité énergétique sont devenues des pionnières mondiales en matière de production énergétiquement efficace.

5.4

Les récentes exigences politiques concernant la réduction des émissions de CO2 et l'augmentation de l'efficacité énergétique imposent de nouveaux défis aux industries européennes à haute intensité énergétique. Dans de nombreux cas, les technologies et les processus de fabrication existants ont déjà atteint leurs limites physiques et chimiques (6). S'agissant, par exemple, des aciéries, la consommation d'agents réducteurs lors de la conversion en haut fourneau a d'ores et déjà atteint un minimum chimique/physique et ne saurait être restreinte davantage sans que l'on doive sacrifier la demande des consommateurs et les volumes de production. Un certain nombre d'avancées technologiques fondamentales, qui restent encore à préciser, à étudier et à développer, seront nécessaires pour que l'efficacité énergétique puisse être améliorée de manière significative. Pour cela, l'industrie doit consentir des efforts considérables. C'est la raison pour laquelle ont été mis en place des projets de recherche et de démonstration communs à long terme dans le cadre de plates-formes technologiques et d'initiatives telles que le captage et le stockage du CO2 (CSC). Il en va de même pour les autres secteurs responsables d'émissions inhérentes aux procédés, tels que les industries du ciment et de la chaux. Ainsi, en matière d'approvisionnement énergétique, la recherche et le développement représentent un important défi à long terme, par exemple pour ce qui concerne le CSC ou les énergies renouvelables.

5.5

Les industries produisant les matériaux de base s'efforcent de développer de nouvelles technologies de production révolutionnaires consommant moins d'énergie, mais cela prendra du temps. Tout en adoptant les progrès techniques, le déploiement des nouveaux processus doit être en phase avec les cycles d'investissement des entreprises. En dernière analyse, le préalable fondamental à l'introduction de nouveaux processus est leur viabilité économique qui doit, à son tour, être évaluée par rapport à la concurrence qui caractérise le marché mondial. De ce fait, et en raison d'autres facteurs encore (tels que les obstacles administratifs, l'insuffisance des ressources financières et les incertitudes économiques qui en découlent), plusieurs décennies seront nécessaires aux industries produisant des matériaux de base pour réaliser de nouveaux progrès significatifs en matière d'économie d'énergie. En cela, les industries à haute intensité énergétique se distinguent du secteur de la production d'électricité qui, tout en améliorant pas à pas l'efficacité énergétique, au rythme des cycles d'innovation, peut répercuter plus aisément sur des clients captifs les coûts de modernisation et les autres charges administratives qui s'y rapportent.

5.6

L'efficacité énergétique des produits industriels peut être sensiblement améliorée grâce à l'utilisation de nouveaux matériaux de base très perfectionnés fabriqués en partenariat avec d'autres secteurs, tels que les constructeurs automobiles et les concepteurs de centrales électriques. Grâce à cette collaboration ont pu être créées des composants plus légers ou bien pouvant résister à des températures plus élevées. Les systèmes de contrôle des processus améliorent également la qualité en termes d'efficacité énergétique. Les équipements destinés à la production d'énergies renouvelables sont, eux aussi, fabriqués dans des matériaux de base fonctionnels (c'est notamment le cas des turbines éoliennes composées d'acier et de matières plastiques très performantes). Même si le potentiel est considérable, l'importance de la recherche sur les matériaux est à la mesure de ce potentiel, car la plupart des innovations dans ce domaine ne sont pas encore à même d'être commercialisées.

6.   L'impact de la politique énergétique sur les chaînes de valeur de l'industrie

6.1

La politique énergétique affecte les marchés de l'énergie en combinant divers instruments. D'une part, un cadre réglementaire européen de mise en place d'un marché unique de l'électricité et du gaz progresse lentement, mais n'a toutefois pas encore abouti à la stabilisation des prix qui est son objectif. D'autre part, la production d'énergie et la consommation d'énergie des industries sont et seraient fortement affectées par le SCEQE, dont on veut qu'il joue le rôle d'instrument majeur d'incitation à la réduction des émissions. La valeur du SCEQE sera mesurée à l'aune de son impact sur les émissions européennes de GES, ainsi que par sa pertinence et sa capacité à provoquer une émulation qui soit susciterait des mesures au niveau mondial, soit lui permettrait de se transformer en un système mondial complet. La principale difficulté est liée au fait que le système n'est pas mondial et qu'il se limite à l'Union européenne, ce qui engendre un risque de fuites de carbone dans les industries internationales concurrentes. C'est également pour cette raison que l'UE doit insister, lors des négociations sur l'évolution du climat, pour que les échanges de gaz à effet de serre soient pratiqués au niveau international. Il convient donc de traiter les problèmes que pose le système tel qu'on propose de le modifier en prenant grand soin de réduire au minimum ses incidences prévisibles en termes de coûts.

6.2

Des plafonds absolus d'émissions de CO2 pour les centrales électriques et les installations des industries à haute intensité énergétique ont été introduits en 2005. Pour ce qui est des industries à haute intensité énergétique, les émissions étant étroitement dépendantes des volumes de production du fait des limites des technologies, le coût de toute croissance de la production au-delà des volumes autorisés se trouve fortement augmenté. La mise aux enchères des quotas d'émissions, qui devrait débuter en 2013, entraînera une hausse significative des coûts de production de tous les matériaux de base, qui ne pourra, dans la plupart des cas, pas être répercutée sur les clients en aval.

6.3

L'UE vise à réduire ses émissions de CO2, à maintenir sa dépendance vis-à-vis des importations à des niveaux gérables et à promouvoir les technologies pour l'exportation en développant la part des énergies renouvelables. Le financement du démarrage des énergies renouvelables constituerait une contribution raisonnable à ces objectifs, mais il convient d'éviter la mise en place de régimes permanents de subventions. À terme, les énergies renouvelables doivent devenir compétitives sur le marché. L'évolution actuelle des prix de l'énergie et les progrès technologiques réalisés en matière d'énergies renouvelables ont déjà fortement amélioré la compétitivité de ces énergies. Des régimes nationaux de subventions sont actuellement utilisés dans l'UE afin de promouvoir ces énergies dans le secteur de l'électricité en intégrant, à des degrés divers, des mécanismes de quotas avec échange de certificats et des systèmes de prix de rachat garanti pour les énergies renouvelables. Les coûts supplémentaires liés à celles-ci sont généralement pris en compte au niveau du prix auquel le client final paie l'électricité. Aujourd'hui encore, les industries à haute intensité énergétique doivent donc, comme tous les consommateurs, financer l'énergie renouvelable par l'intermédiaire des prix de l'électricité.

6.4

Bien que certains secteurs, par exemple dans l'ingénierie mécanique, profitent des marchés de l'énergie renouvelable, il convient de confronter l'ampleur de ces bénéfices avec les effets négatifs que subissent les industries de matériaux de base. De plus, leur chaîne de production et, par là-même, leur compétitivité, pourraient être affectées si les matériaux de base venaient à être évincés en raison des coûts supplémentaires liés au fait de subventionner les énergies renouvelables (7). L'on peut au moins éviter une telle évolution en introduisant des coûts maximum pour ces industries. S'il est vrai que le développement du marché des énergies renouvelables crée des possibilités d'exportation des technologies, notamment dans le domaine de l'énergie éolienne, vers les régions où elles peuvent être exploitées de manière rentable, il convient néanmoins de ne pas non plus perdre de vue que non seulement les entreprises européennes, mais aussi l'économie de l'UE bénéficient à leur tour des marchés subventionnés en Europe. Ainsi, par exemple, une grande partie des matériaux photovoltaïque utilisés en Europe est importée du Japon.

6.5

Le nucléaire est une composante importante du bouquet énergétique de nombreux États membres de l'UE; certains ont néanmoins décidé de ne plus l'utiliser pour produire de l'électricité. Ces pays ne disposent d'aucune source permettant de fabriquer de l'électricité à un prix raisonnable et en émettant une faible quantité de CO2 afin de fournir la charge de base, ce qui doit être compensé par les combustibles fossiles ou l'énergie renouvelable (8). Par conséquent, les prix de l'électricité augmentent ainsi que les émissions de CO2 et le prix des quotas, ce qui n'est pas sans affecter les industries à haute intensité énergétique.

6.6

Nombre d'États membres instaurent des taxes afin de réduire la consommation d'énergie ou les émissions de CO2. Dans un Livre vert sur les instruments économiques de la politique climatique, la Commission envisage d'harmoniser ces instruments au niveau européen et d'introduire de nouvelles mesures incitatives afin de réduire les émissions de CO2. Les industries à haute intensité d'énergie feraient face à une hausse considérable du prix de l'électricité et de l'énergie. Ces coûts ne pourraient être que partiellement compensés par les mesures visant à promouvoir l'efficacité énergétique qui ont été évoquées précédemment.

7.   L'environnement mondial

7.1

Les politiques menées dans les domaines de l'énergie et du changement climatique ne se limitent plus à un cadre national. La sécurité de l'approvisionnement, la pénurie de ressources énergétiques et, avant tout, le changement climatique, sont des défis d'envergure planétaire. La lutte contre le changement climatique ne pourra s'avérer efficace que si toutes les régions du monde participent à l'effort commun. À l'inverse, les politiques ambitieuses que souhaite mener l'UE pour réduire les émissions seront inefficaces aussi longtemps que dans les pays qui connaissent un développement rapide, tels que la Chine, la croissance industrielle pourra rapidement rendre inutiles ces réductions d'émissions.

7.2

Les interactions croissantes entre le commerce mondial et les mouvements de capitaux ont pour effet de renforcer la concurrence entre les régions du monde. En outre, les industries à haute intensité énergétique subissent de plus en plus une concurrence mondiale portant sur les clients et les capitaux. En premier lieu, il existe une concurrence immédiate avec d'autres fournisseurs de matériaux se trouvant dans des pays tiers. Puis, les secteurs de transformation industrielle, qui dépendent fortement des exportations tels que les constructeurs automobiles ou les fabricants de machines transmettent aux industries des matériaux la pression des facteurs coûts imposée par le marché mondial. Le contexte concurrentiel international distingue les industries à haute intensité énergétique des secteurs régionaux, tels que celui de l'électricité.

7.3

Associé à la concurrence industrielle mondiale, le défi global que représente la politique énergétique et climatique implique que des coûts excessifs imposés aux industries à haute intensité énergétique entraînent des délocalisations. Cela se produit lorsque des régions situées hors d'Europe n'imposent pas les mêmes contraintes de coûts à leurs industries. Tous les éléments de la politique climatique et énergétique de l'UE devraient solidement s'appuyer sur une évaluation réaliste des ressources (naturelles, humaines et sociales) et de leur potentiel de développement au cours du temps (stratégie de Lisbonne, etc.) afin que ces ressources puissent être exploitées dans l'intérêt de notre avenir commun durable. La réflexion stratégique de l'UE devrait rendre compte de ces données, qui, à cet égard, sont fondamentales.

7.4

La délocalisation des productions entraînerait probablement une hausse des émissions dans les régions situées hors d'Europe. Les processus de production présenteront une efficacité énergétique inférieure à celle des pays d'origine. Des émissions supplémentaires sont engendrées par le transport vers l'Europe des produits issus de ces processus. Même si la production était délocalisée vers des installations efficaces, le phénomène ne serait pas serait «soutenable», car privée de cette activité de production, l'Europe serait confrontée à une perte d'emplois et de savoir-faire technique, y compris dans le domaine des écotechnologies. Une réduction globale des émissions de gaz à effet de serre devrait devenir le principal critère de mise en place de la politique communautaire.

7.5

La délocalisation d'industries à haute intensité énergétique se traduirait par une baisse de l'emploi et un ralentissement de la croissance économique. La perte du chaînon des matériaux de base réduit également l'intérêt d'une implantation pour les chaînes industrielles en aval et entraîne une érosion à toutes les étapes de la chaîne de valeur. L'économie européenne a pourtant besoin de son socle industriel. Une économie qui repose uniquement sur les services n'est pas tenable, car parmi les services qui créent de la valeur de manière intensive, nombreux sont ceux qui sont liés à l'industrie, et ceux-ci risqueraient aussi de perdre leur base industrielle. De plus, pour pouvoir occuper une position de pointe en matière de technologie et d'innovation (dans l'intérêt aussi bien de la protection de l'environnement que d'autres activités), l'Union européenne a besoin d'industries de base sur son territoire.

Bruxelles, le 17 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  World Nuclear Association (association nucléaire mondiale), «World Nuclear Power Reactors 2006-2008 and Uranium requirements» (les centrales nucléaires dans le monde, 2006-2008, et les besoins en uranium)

http://www.world-nuclear.org/info/reactors.html

(2)  Plan SET — COM(2007) 723 final.

(3)  Selon les calculs effectués par Destatis.

(4)  Voir par exemple la revue statistique de la société BP présentant la situation énergétique mondiale, publiée en juin 2007.

(5)  Avis TEN/312 «Vers une politique commune de l'énergie» CESE 236/2008 fin.

(6)  Présentations lors de l'audition publique sur CCMI 052, tenue le 7 mai 2008, disponibles sur le site internet de la CCMI:

http://eesc.europa.eu/sections/ccmi/index_fr.asp

(7)  Voir, par exemple, Pfaffenberger, Nguyen, Gabriel (décembre 2003); «Évaluation de la situation de l'emploi et des incidences sur l'emploi dans le domaine des énergies renouvelables».

(8)  L'utilisation de l'énergie hydraulique, par exemple dans les pays scandinaves, demeure limitée à quelques pays dotés de conditions naturelles favorables.


ANNEXE 1

à l'avis du Comité économique et social européen

Les amendements suivants, qui ont recueilli au moins un quart des voix, ont été rejetés au cours du débat:

1.   Paragraphe 1.9

Insérer un nouveau paragraphe:

« À moyen et à long terme, il est néanmoins impératif que l'économie européenne se réoriente vers des méthodes de production et des produits à faible intensité de carbone. Si nous voulons que les pays industrialisés réduisent de 60-80 % d'ici à 2050 les émissions de CO2, objectif jugé nécessaire pour prévenir un changement climatique incontrôlable, il est contre-productif de protéger les secteurs industriels intensifs en CO2. Il faut au contraire que l'Europe progresse dans la reconversion de son économie, afin d'acquérir, en tant que fer de lance de l'innovation technologique, des avantages compétitifs et encourager le changement dans d'autres pays. En cas de maintien du statu quo, accompagné d'une augmentation modérée de l'efficacité des produits intensifs en énergie, il ne sera pas possible de mener à bien cette troisième révolution industrielle. »

Résultat du vote

Voix pour: 23 Voix contre: 27 Abstentions: 12

2.   Paragraphe 6.7

Insérer un nouveau paragraphe:

« À moyen et à long terme, il est néanmoins impératif que l'économie européenne se réoriente vers des méthodes de production et des produits à faible intensité de carbone. Si nous voulons que les pays industrialisés réduisent de 60-80 % d'ici à 2050 les émissions de CO2, objectif jugé nécessaire pour prévenir un changement climatique incontrôlable, il est contre-productif de protéger les secteurs industriels intensifs en CO2. Il faut au contraire que l'Europe progresse dans la reconversion de son économie, afin d'acquérir, en tant que fer de lance de l'innovation technologique, des avantages compétitifs et encourager le changement dans d'autres pays. En cas de maintien du statu quo, accompagné d'une augmentation modérée de l'efficacité des produits intensifs en énergie, il ne sera pas possible de mener à bien cette troisième révolution industrielle. »

Cet amendement propose le même texte que celui du paragraphe 1.9 (conclusions et recommandations) mais dans le chapitre 6 (L'impact de la politique énergétique sur les chaînes de valeur de l'industrie). Le paragraphe 1.9 étant rejeté, le paragraphe 6.7 devient caduc.

3.   Paragraphes 7.4 et 7.5

Résumer et modifier comme suit ces paragraphes:

« La Une délocalisation des productions pourrait entraîner entraînerait probablement une hausse des émissions dans les régions situées hors d'Europe si leurs . Les processus de production présenteront présentaient une efficacité énergétique inférieure à celle des pays d'origine, hypothèse qui, du fait de l'augmentation des prix de l'énergie, est cependant fort peu vraisemblable dans le cas d'installations nouvelles. Des émissions supplémentaires sont engendrées par le transport vers l'Europe des produits issus de ces processus. Même si la production était délocalisée vers des installations efficaces, le phénomène ne serait pas serait “soutenable”, car privée de cette activité de production, l'Europe serait confrontée à une perte d'emplois et de savoir-faire technique, y compris dans le domaine des écotechnologies. En conséquence, il reste déterminant de parvenir à un accord qui induise une Une réduction globale des émissions de gaz à effet de serre devrait devenir le principal critère de mise en place de la politique communautaire.

La délocalisation d'industries à haute intensité énergétique se traduirait par une baisse de l'emploi et un ralentissement de la croissance économique. La perte du chaînon des matériaux de base réduit également l'intérêt d'une implantation pour les chaînes industrielles en aval et entraîne une érosion à toutes les étapes de la chaîne de valeur. L'économie européenne a pourtant besoin de son socle industriel. Une économie qui repose uniquement sur les services n'est pas tenable, car parmi les services qui créent de la valeur de manière intensive, nombreux sont ceux qui sont liés à l'industrie, et ceux-ci risqueraient aussi de perdre leur base industrielle. De plus, pour pouvoir occuper une position de pointe en matière de technologie et d'innovation (dans l'intérêt aussi bien de la protection de l'environnement que d'autres activités), l'Union européenne a besoin d'industries de base sur son territoire. »

Résultat du vote

Voix pour: 21 Voix contre: 41 Abstentions: 3


ANNEXE 2

à l'avis du Comité économique et social européen

Les passages suivants de l'avis de la CCMI ont été rejetés au profit d'amendements adoptés par l'Assemblée mais ont obtenu au moins un quart des voix exprimées:

1.   Paragraphe 4.9

«Les risques liés à l'utilisation de certaines technologies sont exagérés, tandis que les avantages économiques de cette utilisation sont nettement sous-estimés. L'agence allemande de l'énergie prévoit, à titre d'exemple, qu'en 2020, la capacité garantie en matière de production d'électricité sera insuffisante et qu'il manquera entre 11 700 et 15 800 MW, selon l'évolution de la demande (1). On peut en déduire que la capacité de production électrique va sous peu s'avérer déficiente dans l'ensemble de l'UE et que le coût éventuel de l'inaction serait très élevé. D'autres études estiment qu'il est possible de compenser cette insuffisance par un accroissement de l'efficacité énergétique et de la production, en utilisant des sources renouvelables. Toutefois, un bouquet énergétique incluant l'ensemble des sources d'énergie serait nécessaire pour éviter la concrétisation de ce risque, et les acteurs concernés devraient informer clairement et de façon transparente les citoyens de cette nécessité.»

Résultat du vote

Voix pour: 36 Voix contre: 20 Abstentions: 5

2.   Paragraphe 6.3

«Il est possible d'y remédier en introduisant des coûts maximum pour les industries à haute intensité énergétique afin de concilier la promotion des énergies renouvelables et la compétitivité internationale des industries de matériaux de base. Cela mis à part, si le soutien apporté aux énergies renouvelables vient à être trop important, l'on fait peser un risque sur les chaînes d'approvisionnement de matériaux de certaines industries, notamment celle du bois (2). Ce risque pourrait, entre autres, aboutir à la disparition d'industries traditionnelles européennes, telles que la pâte à papier et le papier.»

Résultat du vote

Voix pour: 37 Voix contre: 20 Abstentions: 4


(1)  Agence de l'énergie allemande (DENA), “Kurzanalyse der Kraftwerks- und Netzplanung in Deutschland” (Brève analyse de la planification concernant les centrales électriques et les réseaux en Allemagne), mars 2008.

(2)  “La bioénergie et l'industrie européenne de la pâte à papier et du papier — une analyse d'impact”; McKinsey, Pöyry, pour la CEPI, août 2007.


31.3.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 77/96


Avis du Comité économique et social européen sur le «Livre blanc — Ensemble pour la santé: une approche stratégique pour l'UE 2008-2013»

COM(2007) 630 final

(2009/C 77/23)

Le 23 octobre 2007, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur le

«Livre blanc — Ensemble pour la santé: une approche stratégique pour l'UE 2008-2013».

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 18 juillet 2008 (rapporteuse: Mme CSER).

Lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 18 septembre 2008), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 114 voix pour, 4 voix contre et 7 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le CESE accueille favorablement le livre blanc intitulé «Ensemble pour la santé». En effet, le Comité souligne lui aussi le lien qui existe entre la santé d'une part et la prospérité économique et la compétitivité d'autre part, et reconnaît aux citoyens le droit d'avoir prise sur leur santé physique et mentale et de bénéficier de soins de santé de qualité.

1.2

Le CESE est d'accord avec la reconnaissance par le Conseil de valeurs européennes fondamentales et communes dans le domaine de la santé telles que l'universalité, le droit d'accéder à des soins de qualité, l'équité et la solidarité (1). Il attend des évolutions en matière de santé publique fondés sur ces principes fondamentaux, ainsi qu'une approche fondée sur le principe de «la santé dans toutes les politiques». C'est pourquoi il importe d'harmoniser la politique commerciale, la politique économique et celle de la concurrence dans le marché intérieur, et de les mettre au service de l'objectif politique de l'UE de garantir un haut niveau de santé publique afin de renforcer, de suivre et d'améliorer la santé humaine.

1.3

Le Comité partage et soutient l'opinion de la Commission selon laquelle aucune citoyenneté européenne active n'est possible sans la connaissance, la mise en exergue et la garantie des droits fondamentaux — et notamment des droits des malades — et sans une information adéquate. En l'absence de ces éléments, aucune politique européenne de la santé n'est imaginable.

1.4

Le Comité partage les priorités de la Commission en matière notamment de lutte contre les grands fléaux transfrontaliers et les menaces transfrontalières graves pour la santé et s'agissant des mesures concernant la surveillance des catastrophes, l'alerte dans de tels cas, la lutte contre le tabagisme et l'abus d'alcool, et la protection de la santé publique.

1.5

S'inspirer en permanence et de façon concertée du travail réalisé dans les agences gérées par l'UE (2) joue un rôle important dans la phase d'acceptation et de réalisation de la stratégie.

1.6

Le Comité soutient la mise en place au niveau communautaire d'une collecte des données plus ciblée ainsi que l'évaluation conjointe de ces données, en vue d'accroître les chances de réussite de la stratégie. En plus d'indicateurs réels et comparables, des efforts devront être déployés en vue d'actualiser les bases de données et de développer des méthodes de contrôle de l'exactitude des données collectées. Le Comité attire toutefois l'attention sur une protection particulièrement rigoureuse des données à caractère personnel.

1.6.1

Le CESE estime que les patients nécessitant des soins de santé transfrontaliers devraient être informés sur leur droit à bénéficier de soins de qualité. Les États membres devraient en outre veiller à ce que la libre prestation de services n'entraîne pas en la matière de dumping social car il serait préjudiciable aux personnels soignants, à leur professionnalisme, et finalement aux patients

1.7

Le CESE accueille favorablement la déclaration de la Commission en faveur de la suppression des profondes inégalités existant au sein même des États membres et entre eux. Il attire toutefois l'attention de la Commission sur le fait que soutenir le droit des patients à la mobilité et améliorer celle des travailleurs de la santé ne peut pas contribuer à accroître davantage ces inégalités.

1.8

Le CESE soutient l'intention de la Commission de renforcer et de promouvoir la prévention et se félicite de la promotion par la Commission de programmes favorisant les connaissances en matière de santé pour différentes catégories d'âge. La radio ou la télévision de service public, subsidiées par la région, l'État ou l'Union européenne, devraient avoir un rôle important à jouer; elles devraient cibler les pauvres, qui constituent une grande partie de la population de l'Union, et plus particulièrement les enfants et les jeunes, qui n'ont pas la possibilité d'accéder d'une autre manière à des connaissances et une information objectives et précieuses.

1.9

Le CESE propose de lancer une campagne de long terme sur le thème «Citoyen européen en bonne santé», qui accompagnerait la stratégie quinquennale jusqu'à son terme. Cela permettrait une évaluation continue et, le cas échéant, une adaptation, grâce à un programme annuel glissant et un retour d'informations. Le Comité recommande que la Commission étende la durée tant de la stratégie que du programme ou de la campagne de long terme à dix ans, afin de favoriser chez les citoyens de l'UE le développement d'un comportement plus attentif à la santé.

1.10

Le CESE insiste sur la nécessité d'associer largement les acteurs concernés aux efforts visant à faire connaître la stratégie, à susciter le débat autour d'elle et à la mettre en œuvre. C'est en effet ainsi, par la transparence et la coopération, que l'acceptation sera un succès et que la démocratie participative deviendra une réalité.

1.11

Le CESE attire l'attention de la Commission sur l'importance du rôle de la santé et de la sécurité sur le lieu de travail et demande de renforcer, dans les politiques communautaires, la coopération coordonnée en impliquant les partenaires sociaux, les États membres et en renforçant la prévention et la protection.

1.12

Le Comité propose que les spécialistes des différentes politiques et les représentants des partenaires sociaux, des organisations professionnelles et de la société civile créent des forums au niveau local, régional, national et communautaire. Ces forums de coopération à plusieurs niveaux pourraient constituer un réseau, favoriser l'échange d'informations et la présentation des différents intérêts et permettre de distinguer les politiques nationales et communautaires et de concourir à leur acceptation. L'éducation des citoyens aux comportements à tenir individuellement et collectivement en cas de crises sanitaires graves devrait faire partie de ces forums de coopération touchant un large public, et permettrait le cas échéant, une gestion efficace et dans l'intérêt de tous des périodes difficiles.

1.13

Le CESE recommande de garantir par la création, dans le domaine de la politique internationale de l'UE, de forums similaires, en travaillant conjointement avec les organisations internationales et en associant les acteurs concernés, la délibération des questions politiques ainsi que l'élaboration et la mise en œuvre des stratégies.

1.14

Le CESE soutient l'innovation dans les régimes de santé des États membres et se félicite du développement que connaît la santé en ligne. Cependant, pour que le principe de subsidiarité et l'exercice effectif des droits des patients soient garantis, il convient de poursuivre l'étude de la question et de continuer à proposer des solutions.

1.15

Le CESE déplore qu'une stratégie qui concerne chaque citoyen de l'Union ne dispose pas d'un budget autonome. Pour garantir une mise en œuvre efficace de la nouvelle stratégie, il préconise d'examiner le budget de l'UE (3), de définir les projets qui concernent la santé des citoyens et d'en assurer l'évaluation et le suivi, ainsi que l'harmonisation ultérieure. Pendant toute la durée de la stratégie, en plus des financements de type projet, il faut s'efforcer de mettre également sur pied, pour l'après 2013, le financement budgétaire de missions nouvelles qui se répètent.

2.   Observations générales

2.1

La santé et des soins de santé d'excellente qualité constituent un élément constitutif du modèle social européen, qui comprend des valeurs inestimables telles que la solidarité, et devraient être développés de manière éclairée (4).

2.2

Le droit d'avoir prise sur sa santé mentale et physique et d'accéder à des soins de santé mentale et physique figure parmi les droits fondamentaux des citoyens européens et constitue l'un des principaux moteurs d'une citoyenneté européenne active.

2.3

Il convient de placer le citoyen européen au centre et de travailler ensemble à la construction de notre culture communautaire de la santé et de la sécurité.

2.4

Dans l'Union européenne, il est primordial de lutter contre la pauvreté et de garantir l'accès de tous à des soins de santé de qualité, un indicateur fondamental de la réussite en matière de santé mais également de la promotion de la compétitivité (5).

3.   Contenu du livre blanc

3.1

La Commission européenne a tenu deux consultations sur le thème de la santé. L'audition a révélé un soutien général pour la mise en place en Europe d'une nouvelle stratégie en matière de politique de santé ainsi que le souhait de voir s'intensifier la coopération entre la Commission et les États membres pour améliorer encore la protection de la santé au sein de l'Union.

3.2

Plusieurs questions essentielles ont été soulignées au cours de la consultation publique:

la lutte contre les menaces pour la santé;

les inégalités en matière de santé, y compris celles liées au sexe;

l'importance d'informer les citoyens;

la qualité et la sécurité des soins de santé transfrontaliers;

la définition des principaux facteurs de santé liés au mode de vie, comme l'alimentation, l'exercice, la consommation d'alcool, le tabagisme et la santé psychique;

la nécessité de développer le système d'information européen à l'appui de la stratégie européenne en matière de santé.

3.3

Le traité de Lisbonne, signé le 13 décembre 2007, vient compléter et préciser l'article 152 du traité instituant la Communauté européenne en remplaçant la notion de santé humaine par celle de santé physique et mentale. Il élargit le contenu du traité en prévoyant la surveillance de menaces transfrontières graves pour la santé, l'alerte en cas de telles menaces ainsi que la lutte contre celles-ci.

3.4

Le livre blanc insiste sur les valeurs partagées telles que le droit d'accéder à des soins de qualité, l'équité et la solidarité. La Commission a élaboré la stratégie commune sur la base de quatre principes fondamentaux:

des valeurs de santé communes;

la santé comme le plus précieux des biens;

la nécessité qu'elle figure au cœur de chaque politique;

le renforcement du rôle de l'UE dans les questions de santé au niveau mondial.

3.5

Sur cette base, elle formule trois principaux objectifs pour les prochaines années:

la protection de la santé dans une Union européenne qui vieillit;

celle des citoyens par rapport aux menaces qui mettent en péril leur santé;

le soutien des systèmes de santé dynamiques et des nouvelles technologies.

La Commission soumet par ailleurs 18 propositions d'action en vue de réaliser ces objectifs.

4.   Observations particulières

4.1

Le CESE souscrit aux principes fondamentaux fixés dans le livre blanc. Pour cette raison, il accueille favorablement le principe de «La santé dans toutes les politiques» (l'approche HIAP, Health in All Policies). La promotion et la mise en œuvre de la stratégie nécessiteront une coopération beaucoup plus étroite entre la Commission, les partenaires sociaux, les organisations de la société civile, le monde académique et les médias.

4.2

Le Comité reconnaît les trois principaux défis auxquels fait face la santé publique mondiale: la lutte contre un monde microbiologique en mutation permanente, l'évolution des habitudes et modes de comportements humains, et le combat pour une plus grande visibilité et davantage de moyens financiers (6). Il identifie par ailleurs les défis qui se présentent à l'UE et les possibilités dont elle dispose:

le vieillissement de la population, qui constitue un défi récurrent tant en matière de diagnostics que pour les soins et les traitements;

les menaces pour la santé telles que les pandémies de maladies transmissibles et le bioterrorisme, qui constituent un sujet de préoccupation croissante;

le changement climatique et les dangers cachés de la mondialisation;

dans le même temps, le développement dynamique des nouvelles technologies et celui tout aussi dynamique des moyens de promotion de la santé, de prévention et de traitement des maladies.

4.3

Le CESE souligne l'importance que les acteurs concernés (les pouvoirs publics, les partenaires sociaux, les organisations de la société civile, et notamment les associations de malades représentatives et les associations de protection des consommateurs) puissent jouer un rôle actif et déterminant tant dans l'identification et la résolution des problèmes que dans le développement d'un comportement attentif à la santé.

4.4

Le Comité déplore que les partenaires sociaux, les acteurs de la société civile, les organisations professionnelles et les associations de patients représentatives n'aient pas été impliqués. Il suggère en effet qu'il est nécessaire de mettre en place une collaboration avec les pouvoirs publics — au niveau local, régional, national et européen — dans le cadre du partenariat social, tandis qu'une utilisation efficace des moyens financiers constitue une condition absolument indispensable à la réalisation de la stratégie en faveur de la santé et à la réussite économique de l'Union européenne.

5.   La santé des citoyens européens

5.1

Le CESE est d'accord avec la Commission que, dans le cadre de la mise en œuvre de l'Agenda citoyen, les droits civils et les droits des patients doivent constituer le point de départ central de la politique européenne de la santé. Pour le bien de la santé de chacun, il convient de développer activement la solidarité, force motrice du modèle social européen (7).

5.2

Le Comité soutient la citoyenneté européenne active dans le domaine de la santé, qui est inconcevable sans une attitude attentive à cette question. Cependant, malgré les efforts déployés jusqu'ici par l'UE et ses États membres, de grands écarts subsistent en ce qui concerne l'état de santé des citoyens (8), leur accès à un mode de vie sain et l'égalité des chances — notamment (9) entre les sexes et au niveau des groupes défavorisés ou fragilisés. Le CESE demande à la Commission de mettre au point, après avoir identifié les handicaps auxquels ces groupes sont confrontés, des solutions spécifiques et des systèmes d'aide, tout en favorisant la coopération entre les États membres. De plus, et pour tenir compte de l'évolution de la courbe démographique, promouvoir des programmes spécifiques destinés à l'évaluation et au maintien de la santé des seniors aurait des incidences positives sur la société dans son ensemble.

5.3

Considérant les écarts au sein des États membres et entre eux, le Comité appuie l'objectif commun selon lequel les politiques en matière de santé devraient contribuer aux stratégies visant à réduire la pauvreté et à l'éliminer. Bien que les coûts du secteur de la santé ne cessent de croître, cette augmentation ne peut en aucun cas entraîner une diminution du niveau de vie ou un appauvrissement des individus et des familles, que ce soit à l'intérieur ou à l'extérieur de l'UE. Aussi faut-il garantir une palette correspondante de services publics sociaux et de santé accessibles, l'égalité des chances en matière de soins de santé, ainsi que l'accessibilité financière et locale à ces services. Il importe d'éviter de creuser davantage le fossé qui existe dans notre société entre les riches et les pauvres.

5.4

Le CESE a la conviction que tous les citoyens européens devraient avoir prise sur leur santé physique et mentale et bénéficier d'une égalité de droits en matière de soins de santé physique et mentale. Elle ne pourra être réalisée que si les groupes défavorisés tels que les personnes marginalisées et connaissant une pauvreté durable, ou encore celles qui sont exclues pour des raisons religieuses bénéficient d'une attention particulière. L'amélioration de la santé publique requiert d'accorder plus d'attention à la santé mentale, tout particulièrement dans les groupes défavorisés (10).

5.5

Le CESE suggère que les États membres devraient continuer de promouvoir le dialogue interculturel en vue de soutenir les activités de l'UE et de ses citoyens, surtout en ce qui concerne l'offre et l'utilisation des services de santé. La reconnaissance et le soutien de la diversité culturelle et du multilinguisme peuvent contribuer considérablement à légitimer et à ancrer la sensibilisation à la santé, voire à stimuler l'assistance mutuelle (11) ainsi que le recours, à temps, aux services de santé, à la prévention et aux soins.

5.6

Le Comité demande à la Commission d'élaborer des propositions visant à développer un comportement attentif à la santé dans le but d'intégrer cette ambition à chacune des politiques de l'UE. L'objectif est de rendre une information indépendante sur la santé mentale et physique accessible également aux citoyens ne disposant pas d'un accès à Internet et aux personnes défavorisées, dont le nombre malheureusement ne cesse de croître. Comme moyen pour y parvenir, on devrait penser à une collaboration avec des radios et des télévisions non commerciales en vue de diffuser l'information sur la santé publique et des données relatives à la santé (et notamment à la prévention), et de communiquer des renseignements indispensables pour pouvoir trouver en temps voulu les institutions responsables du suivi et des soins. A cette même fin, on pourrait également recourir à des outils de communication comme l'Internet, accessible aux patients et aux travailleurs de la santé.

5.7

Le CESE souligne que la campagne de lutte contre le tabagisme, la définition de normes communes en matière d'étiquetage des denrées alimentaires, la recherche pharmaceutique ainsi que le développement et la diffusion de la santé en ligne apportent une valeur ajoutée. L'échange des meilleures pratiques et l'évaluation des performances peuvent jouer un rôle essentiel dans plusieurs domaines en matière d'utilisation efficiente et efficace de ressources financières limitées.

5.8

Le CESE estime que la politique de soutien à la famille, ainsi qu'une formation et une aide adéquates sont importantes pour développer une attitude attentive à la santé. Cette sensibilisation peut commencer dès la grossesse des futures mères (12). Le Comité recommande dès lors, pour promouvoir la citoyenneté européenne de lancer la campagne de long terme «citoyen européen en bonne santé».

5.9

S'il soutient la libre circulation des travailleurs et reconnaît les droits des patients, le CESE attire l'attention de la Commission sur le fait que la mobilité des patients et des travailleurs de la santé ne peut en aucun cas accroître davantage les inégalités existant déjà dans le domaine de la santé. Il convient même d'éliminer ces écarts (13).

5.10

Le CESE est d'avis que des services publics sociaux et de santé suffisants et de bonne qualité constituent une condition préalable indispensable à la formation adéquate et au nombre suffisant de travailleurs dans ces secteurs. Pour cette raison, il convient de mieux rémunérer ces travailleurs et de leur garantir une meilleure reconnaissance sociale et morale afin de rendre ces métiers plus attractifs auprès des jeunes. Le Comité se déclare préoccupé par l'état de santé des travailleurs sociaux et de la santé, qui vieillissent, souffrent du syndrome du Burn Out et subissent le stress professionnel. Pour cette raison, il juge nécessaire de valoriser davantage le travail accompli dans le secteur social et de santé et de mettre en exergue le fait que les professionnels du secteur réalisent un travail précieux pour promouvoir la santé dans l'ensemble de la société.

5.11

Au niveau national, il y a lieu de s'engager résolument dans l'élaboration d'une solide stratégie en matière de santé; celle-ci ne pourra être concrétisée qu'à condition d'y affecter suffisamment de moyens budgétaires et/ou de ressources issues des systèmes de sécurité sociale. Les États membres ne doivent en effet pas investir uniquement dans la prospérité de leur population, mais également dans le bien-être de leurs citoyens et ressortissants.

6.   Les questions transfrontalières et globales

6.1

Le CESE est d'accord que, dans les domaines de la mondialisation et de la santé, l'UE peut jouer un rôle important à l'intérieur comme à l'extérieur de ses frontières, en contribuant à la résolution des problèmes de santé mondiaux, en apportant des solutions européennes aux catastrophes, aux pandémies et aux nouveaux défis générés par le changement climatique, et en traitant la pénurie mondiale de travailleurs de la santé par le biais d'un fonds de compensation spécial (14). Elle peut également apporter une valeur ajoutée dans le domaine de la promotion de l'accès aux médicaments.

6.2

Les menaces actuelles (HIV/SIDA) et nouvelles pour la santé, qui dépassent les frontières, confirment toujours plus l'UE dans son rôle de génératrice d'une valeur ajoutée, étant donné que les États membres ne peuvent mener séparément une action efficace contre ces problèmes (problème de l'accessibilité aux trithérapies). C'est surtout vrai dans le cas des maladies transmissibles, quand il s'agit de renforcer les contrôles et la protection, et d'organiser de façon coordonnée la prévention.

6.3

Le CESE regrette l'absence de propositions d'actions spécifiques de la Commission au bénéfice des acteurs essentiels du succès de la stratégie européenne en faveur de la santé que sont les travailleurs de ce secteur. La corrélation entre le manque de travailleurs de la santé et les problèmes liés à l'insuffisance ou à l'absence de soins est sans ambiguïté.

6.4

Le CESE insiste sur l'importance d'un exercice éthique des droits des patients dans la relation médecin-patient-autre travailleur de la santé. Dans un monde qui change et qui se développe — on peut penser notamment au développement dynamique des technologies sanitaires — l'éthique et la protection des données à caractère personnel doivent jouer un rôle renforcé. Pour cette raison, il convient d'accorder une attention particulière à ces questions dans le cadre de l'enseignement et de la formation continue.

6.5

Le CESE attire l'attention sur le déficit croissant de travailleurs de la santé et sur le vieillissement de cette catégorie de la population. Pour cette raison, le recrutement des travailleurs exige aussi une approche véritablement éthique. La situation des travailleurs de la santé provenant des États membres ou de pays tiers nécessite aussi une politique adaptée en matière d'intégration, de connaissance et de salaire. Il convient de se pencher sur les moyens de favoriser le retour des travailleurs migrants de la santé qualifiés afin de contribuer au développement du système de santé de leur pays d'origine. En ce qui concerne les migrations intra-communautaires de personnels soignants, les États membres devraient veiller à ce que la libre prestation de services n'entraîne pas de dumping social, car cela serait préjudiciable aux personnels soignants, à leur engagement professionnel, et finalement aux patients.

7.   L'adoption et la mise en œuvre de la stratégie

7.1

Le CESE déplore l'absence de données et d'informations suffisantes, objectives, comparables et analysables sur la situation des citoyens européens. Il n'existe aucun système de suivi qui permettrait d'établir des comparaisons entre États membres ou entre régions. Les informations en provenance des milieux de la santé et de la sécurité au travail laissent elles aussi apparaître de très grands écarts et de nombreuses zones d'ombre (15). Certaines agences de l'Union européenne ont en la matière un rôle important à jouer.

7.2

Le Comité préconise de poursuivre les efforts au niveau régional, national et européen dans la définition des collectes de données statistiques et d'indicateurs pertinents.

7.3

La réussite de la stratégie de Lisbonne renouvelée dépend grandement de la santé et de la sécurité des travailleurs sur leur lieu de travail. Un adulte passant un tiers de sa vie sur son lieu de travail, les conditions qui y prévalent revêtent une importance particulière du point de vue de la santé. Par ailleurs, un environnement de travail dangereux et nuisible pour la santé peut se traduire par une perte de 3 à 5 % du PIB. La prévention constitue le principal moyen de veiller à la santé et la sécurité sur le lieu de travail et de les garantir en permanence. Les PME, qui emploient plus de 80 % des travailleurs, devraient bénéficier — dans la mesure où elles adoptent et respectent les conventions collectives — d'un soutien particulier car elles se trouvent dans une situation défavorable en termes de possibilités et de moyens financiers (par rapport aux multinationales). Le CESE déplore que les travailleurs indépendants ne soient pas parties à la protection du travail.

7.4

Le Comité soutient l'adaptation des systèmes de santé des États membres allant dans le sens d'une amélioration de la qualité des services. Dans le cadre de l'élimination des inégalités au sein des États membres et à l'extérieur de ceux-ci, il importe de se pencher non seulement sur la responsabilité des pays membres mais aussi sur le rôle que jouent les régions, un rôle qui ne peut aucunement se traduire par un détournement des compétences des États membres. Dans ce contexte, le CESE déplore vivement les réformes des systèmes publics de sécurité sociale et de santé actuellement menées dans certains États membres, qui visent à limiter les régimes publics d'assurance-maladie et à privatiser massivement les systèmes de santé publics

7.5

Le CESE appuie l'objectif de la Commission, qui favorise et renforce la prévention, son intention étant de travailler à l'amélioration de la santé des personnes âgées, des enfants et des jeunes, la concrétisation dépendra de cet objectif également fortement des propositions d'action en matière de tabac, d'alimentation, d'alcool, de santé mentale (y incluse la maladie d'Alzheimer) et de dépistage du cancer (16).

7.6

Le Comité se félicite des avancées du développement technologique. Toutefois, les exigences relatives à l'égalité des chances ne lui semblent pas garanties avec la solution relative à la santé en ligne qui est proposée. En effet, les conceptions des professionnels concernant cette question ne sont pas connues. S'il est justifié d'invoquer la baisse des coûts et une approche plus centrée sur la personne, l'exercice effectif des droits des patients et les missions des États membres en matière de développement et de contrôle ne se profilent pas de manière adéquate.

7.7

Le CESE soutient une coopération accrue et de nouvelles initiatives avec les organisations internationales. L'UE jouant un rôle majeur en matière d'aide internationale, le Comité est d'accord pour renforcer la coopération avec l'OMS.

7.8

L'Union ne pourra favoriser la réalisation des objectifs de l'OMS pour le XXIe siècle que si elle collabore efficacement avec les États membres, les agences des Nations unies, l'OMS, l'OIT, d'autres organisations internationales et l'Office international pour les migrations. Il importe également de renforcer les relations avec les organisations financières internationales que sont le FMI et la Banque mondiale et de favoriser l'émergence au niveau international de forums de discussions avec les partenaires sociaux et les organisations professionnelles et de la société civile, et plus particulièrement avec les associations représentatives de patients et de défense des consommateurs.

7.9

Le CESE recommande que, dans le cadre de la présence renforcée de l'UE au niveau international, un rôle plus actif lui échoie — dans les limites de ses compétences — dans les discussions internationales relatives à certaines questions, et notamment celles concernant les retombées sur la santé humaine des nouveaux défis générés par le changement climatique.

7.10

La stratégie en matière de santé doit devenir un thème permanent à l'ordre du jour de la politique européenne de voisinage et de la politique internationale de l'UE, justement pour faire face ensemble aux nouvelles menaces pour la santé et aux pandémies, aux retombées des catastrophes et aux nouveaux problèmes de santé résultants du changement climatique ou d'autres facteurs.

8.   Ressources et moyens financiers

8.1

Le CESE insiste sur l'importance de prendre en compte la stratégie pour la santé dans chacun des domaines de la politique européenne. Les ressources financières nécessaires doivent être garanties, étant donné que le livre blanc indique qu'aucun moyen supplémentaire n'est prévu dans ce but dans le cadre du budget. Le Comité doute dès lors des chances de succès du contrôle à l'échelon communautaire et des propositions relatives à un renforcement des mécanismes de surveillance et de traitement des menaces pour la santé si aucun financement approprié n'est prévu. Il serait judicieux, tant pour l'efficacité des financements de projets qu'à cause du caractère récurrent des politiques communautaires, de mettre sur pied un financement budgétaire continu spécifique à chaque mission (17).

Bruxelles, le 18 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  Conclusions du Conseil sur les valeurs et les principes communs dans les systèmes de santé de l'Union européenne (C 2006. 146/01).

(2)  L'Agence des droits fondamentaux basée à Vienne, l'Agence de Bilbao, le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies, etc.

(3)  Voir avis du CESE du 12 mars 2008 sur «La réforme du budget de l'UE et son financement futur» (rapporteuse: Mme FLORIO), JO C 204 du 9 août 2008.

(4)  Avis du CESE du 6 juillet 2006 sur la «Cohésion sociale: donner du contenu à un modèle social européen» (avis d'initiative), rapporteur: M. EHNMARK (JO C 309 du 16 décembre 2006).

(5)  Avis du CESE sur la «Mise en œuvre de la stratégie de Lisbonne: situation actuelle et perspectives futures».

(6)  Discours de Mme Margaret CHAN, directrice générale de l'OMS: «Allocution prononcée devant le Comité régional de l'Europe», 18 septembre 2007, Belgrade, Serbie:

http://www.who.int/dg/speeches/2007/20070918_belgrade/fr/index.html

(7)  Avis du CESE du 26 septembre 2007 sur «Les droits du patient» (avis d'initiative), rapporteur: M. BOUIS (JO C 10 du 15 janvier 2008).

(8)  Voir étude d'impact: en Italie, le nombre d'années de vie en bonne santé des hommes est de 71 ans, contre 53 en Hongrie.

(9)  Avis du CESE du 13 septembre 2006 sur la communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions sur «Une feuille de route pour l'égalité entre les femmes et les hommes 2006-2010», rapporteuse: Mme ATTARD (JO C 318 du 23 décembre 2006).

(10)  Avis du CESE du 17 mai 2006 sur le «Livre vertAméliorer la santé mentale de la populationVers une stratégie sur la santé mentale pour l'Union», rapporteur: M. BEDOSSA (JO C 195 du 18 août 2006).

(11)  Avis du CESE du 20 avril 2006 sur la «Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative à l'Année européenne du dialogue interculturel (2008)», rapporteuse: Mme CSER (JO C 185 du 8 août 2006).

(12)  Par exemple, le réseau des infirmières hongroises, qui accompagne, de la conception à leur dix-huitième anniversaire, les enfants et leurs familles.

(13)  Avis du CESE du 27 octobre 2004 sur la Communication de la Commission intitulée: «Suivi du processus de réflexion à haut niveau sur la mobilité des patients et l'évolution des soins de santé dans l'Union européenne», rapporteur: M. BEDOSSA (JO C 120 du 20 mai 2005).

(14)  Avis du CESE du 11 juillet 2007 sur le thème «Migration et développement: opportunités et défis» (avis exploratoire), rapporteurs: Mme CSER et M. SHARMA (JO C 256 du 27 octobre 2007).

(15)  Avis du CESE du 29 mai 2008 sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions «Améliorer la qualité et la productivité au travail: stratégie communautaire 2007-2012 pour la santé et la sécurité au travail», rapporteuse: Mme CSER, JO C 224 du 30 août 2008.

(16)  Avis du CESE du 30 mai 2007 sur la communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions sur le thème «Une stratégie de l'Union européenne pour aider les États membres à réduire les dommages liés à l'alcool», rapporteurs: Mme Van Turnhout et M. Janson (JO C 175 du 27 juillet 2007) et Avis du CESE du 28 septembre 2005 sur l'«Obésité en Europe: Rôle et responsabilités des différents partenaires de la société civile» (avis d'initiative, rapporteuse: Mme SHARMA (JO C 24 du 30 janvier 2006).

(17)  Avis du CESE du 5 juillet 2006 sur la «Proposition de décision du Conseil relative au système des ressources propres des Communautés européennes», rapporteuse: Mme CSER (JO C 309 du 16 décembre 2006).


31.3.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 77/102


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Étendre les mesures de lutte contre la discrimination aux domaines au-delà de l'emploi — Pour une directive unique et globale de lutte contre la discrimination»

(2009/C 77/24)

Le 15 janvier 2008, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l'article 29, paragraphe 2 de son règlement intérieur, d'élaborer un avis d'initiative sur le thème

«Étendre les mesures de lutte contre la discrimination aux domaines au-delà de l'emploi — Pour une directive unique et globale de lutte contre la discrimination».

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a élaboré son avis le 18 juillet 2008 (rapporteur: M. CROOK).

Lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 18 septembre 2008), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 112 voix pour, 3 voix contre et 2 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le droit à l'égalité est un droit universel et un principe fondamental de la législation communautaire. Il est proclamé dans la Charte des droits fondamentaux. Il prend sa source dans la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dans d'autres actes internationaux dont les États membres sont signataires et dans les traditions constitutionnelles qui leur sont communes.

1.2

Conformément à l'article 13 du traité CE, l'UE doit lutter contre toute discrimination fondée sur le sexe, la race ou l'origine ethnique, la religion ou les convictions, le handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle dans tous les domaines qui relèvent de sa compétence. Le traité de Lisbonne fait de la lutte contre la discrimination un objectif spécifique de l'UE.

1.3

La discrimination fondée sur les motifs stipulés à l'article 13 du traité peut compromettre les objectifs de la Communauté européenne tels que définis à l'article 2 du traité CE, notamment la promotion d'un niveau d'emploi et de protection sociale élevé, de l'égalité entre les hommes et les femmes, du relèvement du niveau et de la qualité de vie, de la cohésion économique et sociale et de la solidarité entre les États membres.

1.4

Il est important d'assurer une protection efficace contre la discrimination en dehors de l'emploi pour garantir le développement de sociétés démocratiques et tolérantes permettant l'expression de la diversité, la pleine participation et l'intégration de tous dans la vie économique et sociale.

1.5

Il est nécessaire d'agir face aux inégalités et à la discrimination qui se poursuivent au sein de l'UE. Cette discrimination porte préjudice aux personnes, mais aussi aux sociétés européennes en général. La législation communautaire actuelle dans ce domaine n'est pas appropriée. Aussi loin que l'emploi et le travail sont concernés, il existe une protection pour tous les motifs mentionnés à l'article 13. La législation communautaire protège également contre la discrimination fondée sur la race ou l'origine ethnique dans les domaines de la protection sociale, y compris la sécurité sociale et les soins de santé, des avantages sociaux, de l'éducation et de l'accès aux biens et aux services, notamment au logement, ainsi que contre la discrimination fondée sur le sexe dans le domaine de l'accès aux biens et aux services. En revanche, il n'existe aucune protection juridique au niveau communautaire contre la discrimination fondée sur la religion ou les convictions, le handicap, l'âge ou les préférences sexuelles dans les domaines extérieurs à l'emploi. La législation communautaire dans le domaine de la lutte contre la discrimination ne reconnaît pas la discrimination multiple et n'offre pas de protection en la matière.

1.6

La réalité de la protection juridique au sein de l'UE est complexe. Plusieurs États membres ont adopté des lois allant au-delà des exigences imposées par l'UE, même si le contenu, la nature et le degré de protection offerte varient largement, alors que d'autres appliquent à peine les prescriptions minimales. Malgré le fait avéré que les organismes spécialisés dans les questions de l'égalité jouent un rôle bénéfique dans la lutte contre la discrimination et la promotion de l'égalité, la législation communautaire n'exige l'intervention de tels organismes qu'en rapport avec l'origine raciale ou ethnique et l'égalité des sexes. De nombreux États membres ont mis en place des organismes de promotion de l'égalité dont le mandat couvre tous ou plusieurs motifs de discrimination visés à l'article 13.

1.7

Le CESE considère qu'il n'est aucunement justifié que dans un système législatif basé sur un engagement clair, inscrit dans le traité, de combattre la discrimination pour six motifs spécifiés, l'UE laisse persister des disparités, certains motifs de discrimination donnant lieu à un moindre degré de protection et à des garanties plus limitées en matière d'égalité de traitement. Sans une obligation contraignante de respecter une norme européenne commune, l'on ne peut pas vraiment encourager les États membres à adopter des lois offrant des droits identiques pour tous les motifs de discrimination.

1.8

Le CESE est préoccupé par le fait que ce schéma hiérarchisé de protection contre la discrimination risque d'entraver considérablement la concrétisation des objectifs de l'UE. Il peut constituer un obstacle à la liberté de mouvement des travailleurs et des biens; les travailleurs pourraient se montrer réticents à aller dans des pays où il y a moins de droits juridiquement garantis, alors que les fournisseurs de biens et de services pourraient subir des préjudices en raison de leur obligation de respecter des normes différentes en matière d'égalité dans différents pays. Cela va à l'encontre de la cohésion sociale et la participation à la société civile s'en trouve réduite.

1.9

Le CESE estime qu'il est désormais indispensable d'adopter une nouvelle législation communautaire pour combattre la discrimination fondée sur la religion ou les convictions, le handicap, l'âge ou les préférences sexuelles dans les domaines en dehors de l'emploi. Seule une action au niveau communautaire permettra d'instaurer une norme commune de protection juridique de niveau élevé dans l'ensemble des États membres, conformément aux principes de subsidiarité et de proportionnalité définis à l'article 5 du traité CE.

1.10

L'action communautaire devrait prendre la forme d'une directive unique couvrant les quatre motifs susmentionnés. Pour que la législation de l'UE et les lois nationales soient cohérentes et compatibles, la nouvelle directive devrait s'appliquer à tous les domaines autres que l'emploi et le travail couverts par la directive sur l'égalité raciale. Le CESE estime qu'une directive unique présente des avantages considérables: elle offrirait une clarté maximale aux entreprises et autres fournisseurs de biens et de services, en les encourageant à respecter rapidement ses dispositions; elle intégrerait plus efficacement la protection contre la discrimination multiple; enfin elle contribuerait à une plus grande cohésion sociale.

1.11

Le CESE se félicite donc de la décision de la Commission (annoncée le 2 juillet 2008) de proposer une nouvelle directive de mise en œuvre du principe d'égalité de traitement indépendamment de la religion ou des convictions, du handicap, de l'âge ou de l'orientation sexuelle.

1.12

Il est indispensable que la nouvelle législation garantisse que le droit à l'égalité n'est ni dilué ni atténué. Elle ne doit pas avoir pour conséquence de réduire la protection antidiscrimination offerte par la législation communautaire ou nationale existante. Une nouvelle directive devrait offrir un cadre permettant de respecter les exigences en matière d'égalité de traitement imposées par la convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées et comporter l'obligation de procéder à des aménagements raisonnables et de renforcer l'accessibilité pour permettre aux personnes handicapées de participer pleinement à la société. Elle devrait permettre l'adoption de mesures d'action positive et de traitement préférentiel sur la base de l'âge ou du handicap, lorsque cela est compatible avec le principe de l'égalité de traitement. Elle ne devrait pas permettre de justification générale de la discrimination directe, mais autoriser la discrimination qui sert à promouvoir l'égalité et le respect de la dignité humaine. Elle devrait prévoir la mise en place ou l'extension des compétences des organismes spécialisés de manière à couvrir l'égalité de traitement pour les quatre motifs restants.

2.   L'égalité est un principe fondamental du droit communautaire

2.1

Le droit à l'égalité est un droit universel et un principe fondamental de la législation communautaire. Il découle des actes internationaux dont tous les États membres sont signataires et de leurs traditions constitutionnelles et il est proclamé aux articles 21 et 22 de la Charte des droits fondamentaux.

2.2

Le droit à la non-discrimination entre les femmes et les hommes sur le lieu de travail, établi il y a plus de 30 ans, représente un des aspects essentiels du développement de l'Union. L'égalité de traitement entre les femmes et les hommes reste essentielle pour l'équilibre du marché intérieur, la liberté de circulation et la construction d'une société européenne forte et cohérente.

2.3

Durant les années 1990, l'on a de plus en plus pris conscience de la nécessité d'adopter des mesures visant à lutter contre la discrimination fondée sur des motifs autres que le sexe et dans des domaines extérieurs à l'emploi. L'incorporation de l'article 13 au traité d'Amsterdam a représenté une évolution importante, donnant lieu à de nouvelles compétences et à un engagement accru vis-à-vis de l'égalité de traitement. En vertu de l'article 13, l'Union est engagée à lutter contre toute discrimination fondée non seulement sur le sexe, mais aussi sur la race ou l'origine ethnique, la religion ou les convictions, le handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle.

2.4

Reconnaissant qu'il était urgent d'agir en matière de discrimination fondée sur ces autres motifs, le Conseil a adopté, en l'an 2000, deux directives: la directive «égalité raciale» (2000/43/CE) relative à la mise en œuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d'origine ethnique et la «directive-cadre pour l'emploi» (2000/78/CE) portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail. En 2004, le Conseil a adopté la directive «égalité d'accès aux biens et aux services» (2004/113/CE) mettant en œuvre le principe de l'égalité de traitement entre les femmes et les hommes dans l'accès aux biens et services.

2.5

Chacune des trois directives renvoie dans son préambule à l'article 6 du traité sur l'Union européenne et confirme que le droit à l'égalité est un principe fondamental qui repose sur les droits inscrits dans les actes internationaux dont tous les États membres sont signataires et dans les traditions constitutionnelles qu'ils ont en commun.

2.6

Ce principe a été réaffirmé par la Cour de justice européenne dans l'affaire Mangold-v-Helm  (1). Répondant à la question préjudicielle sur l'interprétation de la directive 2007/78/CE du Conseil relative à la discrimination fondée sur l'âge; la Cour a estimé que:

«74 … aux termes de l'article 1er [de la directive 2000/78], cette directive a uniquement pour objet d'établir un cadre général pour lutter contre la discrimination fondée sur la religion ou les convictions, [le] handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle, le principe même de l'interdiction de ces formes de discrimination trouvant sa source, ainsi qu'il ressort des premier et quatrième considérants de ladite directive, dans divers instruments internationaux et les traditions constitutionnelles communes aux États membres.

75 Le principe de non-discrimination en fonction de l'âge doit ainsi être considéré comme un principe général du droit communautaire».

Il n'y a aucune raison de supposer que la Cour ne confirmerait pas de la même façon l'application de ce principe aux autres formes de discrimination prévues par la directive 2000/78.

2.7

Dans l'affaire Coleman-v-Attridge Law, où la Cour de justice européenne devait rendre une décision préjudicielle sur la portée de la directive 2007/78/CE du Conseil, l'avocat général a déclaré dans ses conclusions (2):

«8 L'article 13 CE exprime l'attachement de l'ordre juridique communautaire aux principes de l'égalité de traitement et de la non-discrimination. … La jurisprudence de la Cour est claire en ce qui concerne le rôle joué par l'égalité de traitement et la non-discrimination dans l'ordre juridique communautaire. L'égalité n'est pas seulement un idéal et une aspiration d'ordre politique, elle fait partie des principes fondamentaux du droit communautaire».

2.8

Aussi bien dans la directive sur l'égalité raciale (3) que dans la directive-cadre pour l'emploi (4), le Conseil affirme son sentiment que la discrimination fondée sur les motifs mentionnés à l'article 13 peut compromettre la réalisation des objectifs de la Communauté européenne définis à l'article 2 du traité CE, notamment la promotion d'un niveau d'emploi et de protection sociale élevé, de l'égalité entre les hommes et les femmes, du relèvement du niveau et de la qualité de vie, de la cohésion économique et sociale et de la solidarité entre les États membres.

2.9

Le traité de Lisbonne donne une importance nouvelle à la lutte contre la discrimination pour les motifs mentionnés à l'article 13 (5), en la définissant comme objectif spécifique de l'UE dans le cadre de la conception et de la mise en œuvre de ses politiques et actions. (6)

3.   L'importance d'assurer une protection efficace contre la discrimination dans les domaines au-delà de l'emploi

3.1

La directive-cadre pour l'emploi définit un cadre général pour l'égalité de traitement quels que soient la religion ou les convictions, le handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle. La directive relative à l'égalité raciale consacre le principe de l'égalité de traitement entre les personnes indépendamment de leur race ou de leur origine ethnique non seulement dans le cadre de l'emploi et du travail, mais aussi dans les domaines tels que la protection sociale, y compris la sécurité sociale et les soins de santé, les avantages sociaux, l'éducation ainsi que l'accès aux biens et aux services mis à la disposition de la population et la fourniture de ces biens et de ces services, y compris le logement.

3.2

La directive relative à l'égalité d'accès aux biens et aux services vient compléter la protection contre la discrimination fondée sur le genre dans le cadre de l'emploi et du travail, couverte par les directives adoptées sur la base de l'article 141 du traité CE (7), et met en œuvre le principe de l'égalité de traitement entre les femmes et les hommes dans l'accès à des biens et à des services et la fourniture de biens et de services.

3.3

Dans les directives sur l'égalité raciale (8) et sur l'égalité d'accès aux biens et aux services (9), le Conseil a reconnu que pour assurer la pleine participation de l'ensemble des citoyens, il convient d'étendre la protection contre la discrimination au-delà du cadre de l'emploi.

3.4

Le CESE a reconnu (10) l'importance de l'e-accessibilité dans la lutte contre la discrimination et pour la pleine participation de tous à la société et a recommandé que la législation au titre de l'article 13 prévoie des exigences communes élevées pour les mesures en faveur de l'e-accessibilité.

3.5

Le CESE estime que pour réaliser les objectifs de Lisbonne, il est indispensable d'éliminer la discrimination aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur du marché de l'emploi. Dans le cas contraire, la discrimination dans les domaines de la protection sociale, des soins de santé, de l'éducation ou du logement, ou bien dans l'accès aux services essentiels fournis par les secteurs public et privé, empêchera de progresser vers la croissance durable et la création d'emplois plus nombreux et de meilleure qualité.

4.   Situation actuelle en matière d'égalité des chances et de non-discrimination dans l'UE

4.1

L'année européenne de l'égalité des chances pour tous (2007) a offert aux institutions européennes, aux gouvernements nationaux et à la société civile une excellente occasion de réfléchir à l'importance que revêtent l'égalité des chances et l'élimination de la discrimination aux fins de l'avènement d'une société plus inclusive du point de vue social. Cette initiative a mis en évidence le fait évoqué clairement par le Conseil que des inégalités et des discriminations fondées sur le sexe, la race ou l'origine ethnique, l'âge, un handicap, la religion ou les convictions, ou l'orientation sexuelle «continuent d'exister dans l'UE, et ont un coût important pour les femmes et les hommes concernés et pour l'ensemble des sociétés européennes»  (11).

4.2

L'année européenne a également révélé les disparités de protection contre la discrimination qui persistent dans le cadre de la législation communautaire existante, décrites aux paragraphes 3.1 et 3.2 ci-dessus. Le CESE est préoccupé par le fait que l'absence d'égalité de traitement (notamment les comportements discriminatoires institutionnels) fondée sur l'un ou l'autre des motifs stipulés à l'article 13 dans les domaines tels que la protection sociale, l'éducation, l'accès aux biens et aux services et au logement pourrait contribuer à la persistance des inégalités dans l'accès à l'emploi et affecter profondément la qualité de vie des citoyens et leur capacité à participer pleinement à la société.

5.   Discrimination multiple

5.1

Selon le Conseil, «l'année européenne a mis en évidence les difficultés accrues qui frappent les personnes confrontées à des discriminations multiples»  (12).

5.2

La notion de «discrimination multiple» reconnaît la complexité identitaire de l'être humain. Il s'agit de discrimination ou de harcèlement dont une personne est victime en raison de plusieurs éléments qui font partie de son identité.

5.3

En décembre 2007, l'Institut danois pour les droits de l'homme a publié un rapport de recherche intitulé «Lutte contre la discrimination multiple: pratiques, politiques et lois» (13). Sur la base de leurs recherches académiques et juridiques et de la consultation des personnes concernées, les auteurs concluent: «La lutte contre la discrimination et les inégalités passe par l'identification de solutions réalisables pour combattre la discrimination multiple»  (14).

5.4

La législation de l'UE en matière de lutte contre la discrimination ainsi que les lois nationales transposant cette législation communautaire devraient être en mesure de garantir une protection et un droit de recours contre toute forme de discrimination multiple. Pour y parvenir, il est indispensable que la protection soit la même pour tous les motifs de discrimination. Au-delà du domaine de l'emploi, ce n'est pas le cas dans le cadre de la législation communautaire actuelle.

6.   Protection juridique contre la discrimination dans les différents pays de l'UE

6.1

Même si tous les États membres n'ont pas encore transposé comme il se doit la directive sur l'égalité raciale ou la directive-cadre pour l'emploi (15), plusieurs États membres ont adopté des lois interdisant la discrimination, qui vont au-delà des exigences des directives actuelles fondées sur l'article 13 du traité.

6.2

Une étude analytique (16), publiée en décembre 2006, a examiné les lois nationales interdisant la discrimination fondée sur le sexe, l'orientation sexuelle, le handicap, la religion ou les convictions et l'âge dans les domaines autres que l'emploi et le travail. Ses auteurs affirment:

«Les pays européens étudiés se caractérisent sans doute, en premier lieu, par le fait que la plupart d'entre eux assurent, sous des formes diverses, une protection légale à l'encontre de la discrimination fondée sur les principaux motifs envisagés dans le rapport; et, en second lieu, par la diversité de cette protection, qu'il s'agisse de sa nature ou de son niveau, d'un pays à l'autre»  (17).

6.3

Les auteurs ont constaté que des disparités importantes existaient en termes de motifs de discrimination faisant objet d'une protection, selon les domaines d'activité concernés, ainsi qu'en termes de cadre juridique de cette protection: constitutions nationales, lois antidiscriminatoires génériques, lois nationales ou régionales, ou lois spécifiques couvrant des domaines particuliers, tels que le logement ou l'éducation. Pour chaque motif ou domaine d'activité couvert, la nature et la forme des droits à la non-discrimination et l'ampleur des exceptions dont ils sont assortis varient d'un pays à l'autre (18). La comparaison entre les États membres réalisée par Bell, Chopin et Palmer (19) a confirmé ces résultats démontrant l'existence de variations et d'incohérences.

6.4

Comme le Conseil l'a reconnu dans sa résolution sur le suivi de l'année européenne, les organismes spécialisés de promotion de l'égalité sont déjà ou sont susceptibles de devenir les principaux moteurs de la lutte contre la discrimination et de la promotion de l'égalité de traitement dans chaque État membre; ils jouent notamment un rôle essentiel dans la sensibilisation de l'opinion publique. La directive sur l'égalité raciale, la directive sur l'égalité d'accès aux biens et aux services et celle sur l'égalité entre les femmes et les hommes (refonte) (20) font obligation aux États membres de mettre en place des organismes spécialisés pour défendre le droit à l'égalité sans distinction de race, d'origine ethnique ou de sexe, mais s'agissant de l'égalité de traitement indépendamment de la religion ou des convictions, du handicap, de l'âge ou de l'orientation sexuelle, la création de tels organismes n'est pas exigée. Les domaines de compétence des organismes spécialisés mis en place par les États membres varient largement: le mandat de certains est limité à la race ou l'origine ethnique, alors que d'autres couvrent l'ensemble des motifs visés à l'article 13 ainsi que des motifs supplémentaires (21). Il existe au niveau européen le réseau Equinet (22), composé d'autorités autonomes ou gouvernementales en charge dans les États membres de l'application de la législation antidiscriminatoire.

6.5

Suite à la révision de la protection juridique contre la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle dans l'UE (23), l'Agence européenne des droits fondamentaux a recommandé que la législation européenne garantisse l'égalité des droits et l'égalité de traitement pour l'ensemble des motifs au titre de l'article 13.

6.6

Le CESE considère qu'il n'y a aucune justification valable pour que dans un système communautaire de législation antidiscriminatoire basé sur un engagement inscrit dans le traité de combattre la discrimination pour des motifs de race ou d'origine ethnique, de religion ou de convictions, de handicap, d'âge ou d'orientation sexuelle, certains de ces motifs de discrimination donnent lieu, de manière persistante, à un moindre degré de protection et à des garanties plus limitées d'égalité de traitement.

6.7

En l'absence de législation cohérente au niveau communautaire couvrant l'ensemble des motifs, les États membres ne sont pas vraiment incités à adopter des lois cohérentes et la Commission ou le Conseil n'ont aucune base juridique qui justifierait leur intervention lorsque les niveaux de protection contre la discrimination sont inadéquats ou inégaux, comme c'est le cas actuellement.

6.8

Le CESE estime que le fait d'adopter des lois antidiscriminatoires ne suffit pas en lui-même à débarrasser un pays du fléau de la discrimination, mais il peut au moins être argué que cela démontre que l'État reconnaît le caractère nuisible de la discrimination pour les citoyens et la société et qu'il s'engage à utiliser des instruments juridiques pour y mettre fin. L'absence de lois antidiscriminatoires communique en revanche un message fort différent: elle donne l'impression (erronée) qu'il n'existe pas de discrimination ou que cette discrimination ne constitue pas un problème suffisamment grave pour nécessiter des mesures préventives formelles, ou bien, en termes politiques, elle signifie que la résistance des auteurs potentiels de discriminations face à toute forme de réglementation prend le pas sur le souci d'améliorer la qualité de vie de l'ensemble des citoyens et de parvenir à une plus grande cohésion sociale.

6.8.1

Il apparaît établi que les mesures informelles non législatives visant à promouvoir les bonnes pratiques n'ont pas réussi à éradiquer des comportements discriminatoires fortement ancrés.

6.8.2

Néanmoins, une législation en matière de lutte contre la discrimination ne suffit pas à elle seule à atteindre les objectifs visés si elle n'est pas accompagnée par un programme global de sensibilisation et d'éducation, ainsi que de mise en œuvre efficace.

7.   La hiérarchisation des droits en matière d'égalité de traitement nuit à la réalisation des objectifs de l'UE

7.1

Le CESE estime que le fait de laisser en place l'actuel système communautaire hiérarchisé et incohérent de protection contre la discrimination nuit à la réalisation des objectifs de l'UE:

Il entrave la libre circulation des travailleurs, qui sont confrontés à un niveau plus faible de protection juridique de leurs droits à la non-discrimination dans certains pays par rapport à d'autres. Par exemple, 69,2 % de personnes qui ont répondu à titre privé à l'enquête en ligne de la Commission sur le thème «La discrimination — est-ce important?» ont indiqué que le niveau de protection juridique contre la discrimination fondée sur l'âge, le handicap, la religion et l'orientation sexuelle en dehors de l'emploi influencerait leur décision de déménager dans un autre État membre (24).

Il peut entraver la libre circulation des marchandises, sachant que les fournisseurs dans différents États membres doivent respecter des normes différentes en matière d'égalité d'accès aux biens et aux services. Par exemple, 26,3 % des entreprises de l'échantillon d'entreprises européennes sélectionnées dans le cadre de la lutte contre les discriminations (25) ont indiqué que le niveau de protection juridique offert par un autre État membre contre la discrimination en raison de l'âge, du handicap, de la religion et de l'orientation sexuelle, en termes d'accès aux biens et services et au logement, limiterait leur capacité à y faire des affaires.

Il a une incidence sur la qualité de vie, étant donné qu'en l'absence d'interdiction juridique, la discrimination et le harcèlement sont susceptibles d'échapper à tout contrôle et les obstacles empêchant les individus de jouir pleinement et sur un pied d'égalité de leurs droits économiques et sociaux resteront en place.

Il va à l'encontre de la cohésion sociale, sachant qu'il n'assure pas de reconnaissance totale et équitable de tous les groupes faisant partie de la société.

Il limite la participation d'importants groupes et communautés à la société civile.

7.2

Dans sa résolution sur le suivi de l'année européenne de l'égalité des chances, exprimant sa préoccupation face à la poursuite des discriminations, le Conseil:

constate que «la discrimination peut mener à la pauvreté et à l'exclusion- sociale en empêchant la participation et l'accès aux ressources»;

prend acte que «le Parlement européen et la société civile ont demandé que la protection juridique concernant les discriminations soit étendue aux domaines autres que l'emploi et la profession»; et

invite les États membres et la Commission européenne à «redoubler d'efforts pour prévenir et combattre les discriminations … à l'intérieur ou à l'extérieur du marché du travail» et à «garantir et renforcer l'efficacité des organismes de promotion de l'égalité».

8.   Une nouvelle directive est nécessaire

8.1

Pour répondre aux préoccupations du Conseil et pour garantir des normes minimales cohérentes en matière de protection contre la discrimination sur l'ensemble du territoire européen, il est indispensable d'adopter une nouvelle législation mettant en œuvre le principe de l'égalité de traitement indépendamment d'un handicap, de la religion ou des convictions, de l'orientation sexuelle ou de l'âge en dehors du domaine de l'emploi.

8.2

Compte tenu de la nature et de l'ampleur des phénomènes affectés par le niveau actuel de la discrimination et de leur impact sur la réalisation des objectifs de l'UE, ainsi que de la nécessité d'assurer un niveau de protection élevé contre la discrimination, commun à tous les États membres, l'action menée par les États membres n'est pas suffisante et une action au niveau communautaire est donc nécessaire, conformément aux principes de subsidiarité et de proportionnalité consacrés à l'article 5 du traité CE.

8.3

Le CESE recommande que la nouvelle législation prenne la forme d'une directive unique interdisant la discrimination fondée sur un handicap, la religion ou les convictions, l'orientation sexuelle ou l'âge dans l'ensemble des domaines en dehors de l'emploi couverts par la directive sur l'égalité raciale et exigeant la mise en place ou l'extension des compétences des organismes de promotion de l'égalité de manière à ce qu'ils soient pleinement habilités à traiter tous les aspects relevant de cette législation. Il s'agissait là de l'une des principales recommandations de l'Agence européenne des droits fondamentaux (26).

8.3.1

S'il admet que les protections apportées par les actuelles directives antidiscrimination pourraient être renforcées, notamment en ce qui concerne la véritable reconnaissance de la discrimination institutionnelle, la priorité actuelle du CESE est de garantir la protection pour les motifs susmentionnés comme cela existe actuellement pour l'origine raciale et ethnique.

8.4

Le CESE est conscient que la première réaction de bon nombre d'organisations, notamment des petites entreprises, face à une nouvelle proposition législative sera une réelle inquiétude par rapport aux coûts de mise en conformité. Pour les entreprises, les multiples niveaux de réglementation rendent la mise en conformité «extrêmement difficile» (27). Le CESE n'est pas convaincu que l'adoption d'une directive unique définissant une norme européenne commune en matière de protection contre la discrimination dans les domaines autres que l'emploi entraînerait de nouveaux coûts considérables; dans la plupart des cas, les coûts liés à la mise en conformité des pratiques avec la loi seront plus que largement compensés par l'augmentation de la clientèle résultant de l'éradication de la discrimination. 89,8 % des entreprises de l'échantillon d'entreprises européennes sélectionnées dans le cadre de la lutte contre les discriminations pensent qu'il devrait y avoir une législation pour «garantir le même niveau de protection contre la discrimination dans l'ensemble de l'UE» (28).

8.5

Le CESE sait qu'il existe des arguments en faveur de directives séparées pour chaque motif de discrimination concerné, mais considère qu'une directive unique, englobant les quatre motifs, est fortement préférable:

pour donner un maximum de clarté et de transparence aux particuliers et aux fournisseurs de biens et de services; nous savons que les entreprises privées sont rarement favorables à de nouvelles formes de réglementation et si l'on définit des normes communautaires distinctes pour chaque motif de discrimination, à des moments différents, sans aucune certitude que leurs exigences seront cohérentes, les entreprises, surtout les petites entreprises ne disposant que des ressources limitées, auront beaucoup plus de difficultés pour s'y conformer.

pour pouvoir réagir et remédier efficacement à la discrimination multiple; l'existence d'une protection cohérente et équivalente pour tous les motifs de discrimination permettrait aux individus qui sont victimes de discrimination ou de harcèlement fondés sur plus d'un aspect de leur identité d'introduire un recours approprié.

pour rendre la législation accessible et facile à comprendre; dans sa résolution sur le suivi de l'année européenne, le Conseil mentionne le fait que la population connaît mal la législation en matière de lutte contre la discrimination (29). Il sera beaucoup plus difficile de mieux faire connaître la législation au grand public si des variations complexes des droits à l'égalité de traitement existent entre les différents motifs de discrimination et les différents domaines de la législation communautaire ou nationale.

pour éviter toute forme de hiérarchisation au sein du système communautaire des droits à l'égalité de traitement; la cohésion sociale est tributaire d'un engagement partagé et d'un sentiment d'appartenance de tous les membres de la société; elle sera beaucoup plus difficile à réaliser si les différents groupes constatent que dans les textes de lois, les droits à l'égalité de traitement de certains groupes ont davantage d'importance que les droits des autres groupes.

8.6

La directive sur l'égalité raciale a défini les principaux domaines en dehors de l'emploi relevant des compétences communautaires dans lesquels il serait utile et nécessaire de prévenir la discrimination fondée sur un handicap, la religion et les convictions, l'orientation sexuelle et l'âge, si l'on veut atteindre les objectifs fixés par l'UE. Le CESE recommande vivement d'inclure pleinement ces mêmes domaines dans le champ d'application de la nouvelle directive.

8.7

Le CESE admet que conformément au principe de subsidiarité, dans certains domaines d'action, tels que le logement, l'éducation ou quelques autres services publics, l'organisation et la prestation de services, ainsi que d'autres aspects réglementaires relèvent avant tout de la compétence des États membres, au niveau national et régional. Le Comité estime toutefois qu'aux termes de l'article 5 du traité CE, seule une législation au niveau communautaire permettra de garantir le respect nécessaire des normes communes globales de haut niveau en matière d'égalité de traitement dans tous ces domaines.

8.8

Le CESE se félicite donc de la décision de la Commission (annoncée le 2 juillet 2008) de proposer une nouvelle directive de mise en œuvre du principe d'égalité de traitement indépendamment de la religion ou des convictions, du handicap, de l'âge ou de l'orientation sexuelle dans les domaines au-delà de l'emploi couverts par la directive sur l'égalité raciale. Cet avis ayant été soumis à la Commission aux différents stades de son élaboration, l'on peut espérer que les arguments et conclusions préliminaires du groupe d'étude du CESE recommandant l'élaboration d'une directive sous la forme proposée actuellement ont aidé la Commission à prendre une décision. Nous espérons également que le présent avis, dans sa version finale, encouragera les États membres à reconnaître la valeur et l'importance de la législation européenne en la matière et les aidera à contribuer à son bon développement et à son approbation.

8.9

Le CESE soutient la décision de la Commission de proposer une directive aussi cohérente que possible avec les autres directives relevant de l'article 13, avec les mêmes définitions de la discrimination directe et indirecte, du harcèlement et des mesures d'action positive, applicable à l'ensemble des personnes présentes dans un État membre, y compris aux ressortissants des pays tiers, et des obligations identiques pour les États membres pour ce qui est d'assurer un droit de recours, des sanctions effectives, proportionnées et dissuasives, une protection contre la victimisation et l'incorporation du renversement de la charge de la preuve. Des obligations cohérentes de sensibiliser davantage les citoyens et d'encourager le dialogue avec les partenaires sociaux et les ONG sont tout aussi importantes.

8.10

Le CESE recommande que, lors de l'examen de la directive proposée, le Conseil et les autres institutions de l'UE tiennent compte des questions suivantes afin de garantir que, dans sa version finale, elle correspondra aux objectifs que nous avons décrits, à savoir:

8.10.1

Sauvegarde du niveau de protection: l'élaboration de la nouvelle directive ne doit pas servir de prétexte pour réduire la protection contre la discrimination dans un acte quelconque de la législation de l'UE et les États membres ne doivent pas être en mesure d'utiliser la mise en œuvre de la directive comme motif d'abaissement du niveau de protection contre la discrimination qu'ils ont déjà accordé.

8.10.2

Égalité de traitement et aménagements raisonnables pour les personnes handicapées: en dehors du domaine de l'emploi, la pleine participation des personnes handicapées est entravée par des obstacles similaires, sinon plus graves. La nouvelle directive devrait fournir un cadre à tous les États membres afin qu'ils respectent les obligations en matière d'égalité et de non-discrimination au titre de la convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées.

8.10.2.1

Toutes les personnes actives dans l'offre de protection sociale, y compris la sécurité sociale et les soins de santé, d'avantages sociaux, d'éducation ou des biens et des services, y compris le logement, devraient être tenues, en vertu de la nouvelle directive, d'anticiper les besoins en matière d'accessibilité pour les personnes handicapées, y compris l'accès à l'environnement physique, aux transports et à l'information, et de procéder à des aménagements raisonnables de manière anticipée en supprimant tout obstacle qui empêcherait les personnes handicapées de jouir des possibilités de participation et d'utilisation maximales.

8.10.2.2

La nouvelle directive devrait intégrer dans les formes de discrimination l'échec des initiatives visant à garantir une accessibilité raisonnable ou à procéder à des aménagements raisonnables pour une personne handicapée en particulier, à moins que les mesures à prendre constituent une charge disproportionnée pour le fournisseur.

8.10.3

Discrimination multiple: la directive devrait confirmer que le principe de l'égalité de traitement englobe la protection contre la discrimination multiple afin que cette protection devienne effective dans les lois nationales et communautaires.

8.10.4

Mesures d'action positive: les inégalités sont bien présentes dans les domaines d'activité autres que l'emploi et le travail, notamment l'éducation, les soins de santé, le logement et l'accès aux services tels que les hôtels, les restaurants, les services financiers ou les prestations de voyages. C'est pourquoi la nouvelle directive devrait autoriser explicitement les États membres à maintenir ou adopter des mesures visant à prévenir ou à compenser les désavantages liés à la religion ou aux convictions, à un handicap,, à l'âge ou à l'orientation sexuelle et ce, afin de garantir une égalité totale dans la pratique.

8.10.5

Traitement préférentiel en raison d'un handicap ou de l'âge: la nouvelle directive devrait reconnaître les pratiques existant dans les États membres d'accorder un traitement préférentiel aux personnes en raison de leur âge ou de leur statut de personne handicapée, dont la plupart contribuent à une meilleure insertion sociale des jeunes ou des personnes âgées, ainsi que des personnes handicapées. La nouvelle directive ne devrait pas décourager les organisations publiques ou privées d'offrir ce type d'avantages lorsque ceux-ci sont destinés à surmonter ou à atténuer les obstacles physiques, financiers ou psychologiques à une participation égale. Elle devrait permettre aux États membres d'autoriser ce genre de mesures à conditions que celles-ci répondent à un but légitime, compatible avec le principe de l'égalité de traitement et que les moyens de parvenir à ce but soient proportionnés.

8.10.6

Toutes les exceptions doivent être étroitement définies. Le CESE admet que dans certaines circonstances, le traitement différentiel fondé sur un des motifs de protection peut être approprié et nécessaire, mais s'oppose à l'introduction d'une justification générale pour la discrimination directe. Les exceptions à l'interdiction de la discrimination ne devraient pas être vastes au point de priver la directive de son effet de protection escompté; la directive ne devrait pas non plus être rendue inutilement complexe par une longue liste d'exceptions liées à des circonstances particulières ou à des motifs particuliers. Le traitement différentiel ne devrait être autorisé dans le cadre de la législation antidiscriminatoire que lorsqu'il sert à promouvoir et à renforcer l'égalité et la dignité humaine et qu'il ne neutralise pas l'effet des dispositions de lutte contre la discrimination.

8.10.7

Respect des droits: la nouvelle directive, en reconnaissant l'importance et la valeur de la société civile organisée, devrait garantir que les associations ou organisations ayant un intérêt légitime à garantir le respect des droits puissent lancer des procédures judiciaires ou administratives, qu'il s'agisse de représenter les personnes affectées par la discrimination ou de les soutenir.

8.10.8

Organismes spécialisés: il semble évident que l'existence d'un organisme indépendant disposant de ressources adéquates et de compétences pour remplir les fonctions définies dans la directive sur l'égalité raciale (30) et dans la directive sur l'égalité entre les femmes et les hommes en matière d'accès aux biens et aux services (31), ne peut qu'être grandement utile aux fins de la sensibilisation de l'opinion publique, de l'application des lois nationales et de la promotion de l'égalité de traitement. La nouvelle directive devrait exiger la mise en place d'un ou de plusieurs organismes (ou l'extension des compétences d'un organisme existant) pour lutter contre la discrimination fondée sur la religion ou les convictions, le handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle. De plus, ces organismes devraient être chargés d'évaluer régulièrement les résultats des politiques de lutte contre les discriminations.

Bruxelles, le 18 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  [2005] CJCE C-144/04 du 22 novembre 2005.

(2)  [2008] CJCE C-303/06 du 31 janvier 2008.

(3)  Considérant 9.

(4)  Considérant 11.

(5)  Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (version consolidée amendée par le traité de Lisbonne), article 19.

(6)  Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (version consolidée amendée par le traité de Lisbonne), article 10.

(7)  Par exemples, les directives 76/207/CE et 2002/73/CE.

(8)  Considérant 12.

(9)  Considérant 9.

(10)  Avis du CESE du 30 mai 2007 sur «La future législation sur l'e-accessibilité»; rapporteur: M. HERNÁNDEZ BATALLER (JO C 175 du 27.7.2007).

(11)  Résolution du Conseil du 5 décembre 2007 sur le suivi de l'année européenne de l'égalité des chances pour tous (2007), page 1.

(12)  Idem, page 3.

(13)  Office des publications officielles des Communautés européennes, 2007 ISBN 978-92-79-06954-3.

(14)  Idem, page 7.

(15)  Voir M. BELL, I. CHOPIN et F. PALMER, «Le développement de la législation contre les discriminations en Europeune comparaison entre les 25 États membres de l'Union», juillet 2007, Office des publications officielles des Communautés européennes, 2008, ISBN 978-92-79-06573-6.

(16)  Voir A. McCOLGAN, J. NIESSEN et F. PALMER, «Analyse comparative des mesures nationales de lutte contre la discrimination en dehors des domaines de l'emploi et du travail», VT/2005/062, Migration Policy Group et Human European Consultancy, décembre 2006.

(17)  Idem, page 3.

(18)  Op.cit. Tableaux comparatifs pages 36-45. Voir aussi M. BELL, I. CHOPIN et F. PALMER (cf. note de bas de page 15).

(19)  Op.cit. Tableaux comparatifs, pages 83-113.

(20)  2006/54/CE.

(21)  Voir M. BELL, I. CHOPIN et F. PALMER, «Le développement de la législation contre les discriminations en Europeune comparaison entre les 25 États membres de l'Union», juillet 2007, Office des publications officielles des Communautés européennes, 2008, ISBN 978-92-79-06573-6, pages 108-113.

(22)  Voir: www.equineteurope.org

(23)  «L'homophobie et la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle dans l'UE: partie I — analyse juridique»; Agence européenne des droits fondamentaux, 2008 (auteur: Olivier De Schutter).

(24)  Consultation en ligne entre juillet et octobre 2007.

(25)  12.7.2007-31.8.2007, question 4a.

(26)  «L'homophobie et la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle dans l'UE: partie I — analyse juridique»; Agence européenne des droits fondamentaux, 2008 (auteur: Olivier De Schutter).

(27)  Réponse de la Confédération des entreprises européennes à la consultation de la Commission européenne sur le thème «La discrimination — est-ce important?», le 12 octobre 2007.

(28)  12.7.2007-31.8.2007, question 4b.

(29)  Consultation en ligne entre juillet et octobre 2007, page 1.

(30)  Article 13.

(31)  Article 12.


31.3.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 77/109


Avis du Comité économique et social européen sur le «Multilinguisme»

(2009/C 77/25)

Dans une lettre en date du 4 février 2008, Mme Margot WALLSTRÖM, vice-présidente de la Commission européenne, a demandé au Comité économique et social européen, conformément aux dispositions de l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, d'élaborer un avis exploratoire sur le thème suivant:

«Multilinguisme».

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 18 juillet 2008 (rapporteuse: Mme LE NOUAIL-MARLIÈRE).

Lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 18 septembre 2008), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 144 voix pour, 8 voix contre et 13 abstentions.

Synthèse de l'avis et résumé des conclusions

Constatant que ce sujet devient de plus en plus politique et économique, Le Comité regrette de constater que loin de proposer un programme concret faisant suite à sa «nouvelle stratégie pour le multilinguisme» de 2005, la Commission a souhaité au contraire présenter une nouvelle stratégie pour la fin de son mandat.

Le Comité recommande à la Commission et aux États membres d'accélérer le débat sur les objectifs poursuivis avant de clarifier les décisions d'actions qui devraient être entreprises dans un cadre de coordination dans les domaines culturels et d'enseignement.

Concernant en particulier les choix de première langue vivante enseignée et apprise, il encourage les États membres et la Commission à valoriser les choix portés sur d'autres langues que l'anglo-américain, et à promouvoir l'apprentissage et la pratique de langues européennes au niveau des échanges extracommunautaires.

Constatant l'étroite corrélation entre les besoins des citoyens européens en matière linguistique, la stratégie européenne pour l'emploi, les objectifs de convergence de la programmation des fonds structurels européens, en particulier du fonds de cohésion, il les incite à utiliser ces derniers pour réaliser la connaissance de sa propre langue maternelle plus deux langues vivantes, et même à en faire une priorité de l'utilisation de ces fonds et ajoute que cet objectif devrait comporter deux objectifs qualitatifs: préserver la vivacité des langues européennes et diversifier la connaissance vers des langues non communautaires, utiles dans les échanges culturels, sociaux, politiques et économiques des européens, en promouvant la connaissance des cultures et la paix et l'amitié entre les peuples.

Constatant que rien ne bouge favorablement pour les populations les plus éloignées de l'emploi décent, c'est-à-dire déclaré et socialement protégé, ainsi que pour celles les plus éloignées des centres urbains ou touristiques, il demande que la Commission et les États membres veillent, dans les actions qu'ils envisagent, à ne pas créer de discriminations ou de différence de traitement, et que ces actions n'aboutissent pas à de nouvelles exclusions et de nouvelles frustrations. Pour ce faire il leur recommande en particulier de consulter les partenaires sociaux et les organisations de la société civile actives dans ces domaines.

Étant donné que la Commission s'attache à faire une consultation interservices internes, les mesures préconisées devraient tenir compte du contexte d'amélioration de la réglementation, en sorte qu'elles ne portent atteinte à la compétitivité des PME.

La Commission et les États membres devraient s'attacher à évaluer précisément dans le cadre du système européen de certifications les apprentissages informels autant que formels, afin d'en mesurer l'ampleur et de pouvoir faire l'objet de transferts et de reconnaissances de qualifications pour les citoyens et les travailleurs salariés quel que soit leur statut.

Dans le cadre de la concertation sociale, le Comité appelle également les États membres et la Commission à encourager les métiers liés aux langues, enseignants, traducteurs et interprètes, pour faire face à l'usage des langues officielles dans la communication institutionnelle, et rappelle que les besoins ne sont pas suffisamment couverts, non plus que dans les domaines économiques.

1.   Introduction

Le 6 septembre 2006, peu avant la création d'un nouveau portefeuille de Commissaire pour le Multilinguisme et le Dialogue interculturel, et la nomination du Commissaire Leonard ORBAN, le CESE a adopté un avis dans lequel il se prononçait sur «un nouveau cadre stratégique pour le multilinguisme» (1).

Quelque temps plus tard, le 25 octobre 2007, le Commissaire, à l'invitation du Président du CESE, M. DIMITRIADIS, s'est rendu lui-même devant la plénière du Comité et a manifesté son intérêt pour ses travaux.

Souhaitant présenter une nouvelle stratégie en la matière, le Commissaire a saisi le Comité d'un avis exploratoire.

Ainsi, le Comité se propose de:

évaluer les suites données à la précédente stratégie de la Commission, et aux recommandations qu'il avait soumises à ce moment-là;

résumer les actions entreprises par la Commission;

répondre à la consultation qui lui est faite dans le cadre plus général d'une vaste consultation publique organisée par la Commission et de l'audition du 15 avril 2008, en temps utile pour que la Communication que souhaite faire la Commission en septembre 2008 prenne en compte ses recommandations.

2.   Observations générales

2.1

Le Comité constate que ce sujet prend chaque jour plus d'ampleur, non pas à cause d'un phénomène de mode, mais dans un contexte bien réel de mondialisation qui met en présence des acteurs de plus en plus divers et nombreux. De nouvelles situations doivent trouver des solutions et des réponses nouvelles. Le monde change dans les domaines économiques et techniques, ainsi que dans les domaines sociaux, politiques, culturels et civiques. Certains phénomènes existent depuis toujours ou depuis longtemps, mais aujourd'hui prennent de l'intensité et deviennent visibles, voire même cruciaux.

2.2

Dans des domaines très divers, au travail comme dans les échanges d'affaires, de loisirs et de tourisme, la dimension culturelle prend une tournure que le CESE doit prendre à cœur de comprendre dans toutes ses dimensions, afin de porter les préoccupations de nos concitoyens et d'apporter des suggestions pratiques et intelligentes, auprès des institutions, notamment en participant aux consultations et en suscitant les débats.

La diversité et la richesse des opinions montrent l'intérêt des citoyens européens pour cette question qui porte la marque de leur commune humanité.

2.3

Dans son avis précité, le Comité recommandait que:

«la Commission éclaire les États membres, en leur indiquant plus précisément les liens ou compléments d'action à mettre en œuvre dans les plans nationaux demandés et explicite que le multilinguisme ou le plurilinguisme est un apport possible à l'intégration politique et culturelle de l'UE, est vecteur de compréhension et d'inclusion sociale;

l'étendue de l'offre d'enseignement soit concertée au niveau européen si l'on veut atteindre un résultat dans la durée, et que le réservoir potentiel de compétence ne soit pas réduit à un nombre restreint de langues;

toutes les pratiques multilingues dans les domaines professionnel, culturel, politique, scientifique, social, soient promues et encouragées;

les experts associés ne soient pas uniquement des spécialistes des disciplines sociales et scientifiques et incluent des praticiens linguistes, interprètes, traducteurs, enseignants et professionnels des langues;

les générations présentes d'adultes jeunes et moins jeunes soient dûment et mieux prises en considération dans ces orientations, au travers de la formation tout au long de la vie, et de leurs droits culturels lorsque la Commission entrera dans la phase programmatique;

la Commission s'appuie non seulement sur les travaux universitaires mais sur les actions des associations actives dans le domaine et soutienne les initiatives populaires en réseau de la société civile».

2.4

En somme, le CESE pointait la nécessité d'inclure le plus grand nombre possible de citoyens dans ces stratégies d'apprentissage, de pratique, de connaissance des langues et de trouver des moyens réalistes d'y parvenir. Il mettait en garde de ne pas créer de nouvelles discriminations sociales. Il appelait à penser globalement le nombre de langues ressources dans l'Union européenne afin de dépasser ses propres frontières linguistiques, culturelles, économiques. Il préconisait une approche équilibrée entre l'économique, le culturel, le civique, et un sérieux rattrapage quant aux aspects d'emploi et de travail.

2.5

Le Comité rappelait aussi que les aires linguistiques et culturelles ont évolué de même que les ensembles politiques et économiques dans le monde, et que malheureusement la tendance à l'extinction de certaines langues va de pair avec l'assimilation ou la disparition de certains groupes sociaux et politiques. L'Europe fait face aux mêmes défis que d'autres régions du monde, à savoir 1) la tendance à voir s'imposer une langue unique dans les rapports transnationaux, 2) face à la diversité de ses langues régionales, la même menace de voir s'éteindre certains parlers, avec des différences toutefois: le statut de ses langues officielles nationales dans cet ensemble politique et économique unifié (ou en voie de l'être, selon la vision que l'on a du degré d'intégration de l'UE).

2.6

L'UE est confrontée à la même anxiété identitaire à laquelle renvoie toute approche culturelle et linguistique, avec pourtant des atouts qu'elle s'est forgée au cours de sa construction. Citons par exemple les instruments au service de sa cohésion sociale et territoriale, des critères communs de démocratie représentative et participative, des modèles sociaux fondés sur une certaine solidarité.

2.7

Pourtant défis démographiques et intérêts culturels, lorsqu'ils sont associés, amènent quelques grandes questions qu'il faut avoir le courage de poser: quel intérêt des européens pour leurs propres langues, pour les partager, les préserver, les faire vivre et ne pas les laisser mourir, en un mot pour les parler entre eux et avec les autres?

3.   Observations particulières

3.1

La Commission a initié une procédure de consultation publique le 14 septembre 2007 qui s'est terminée le 15 avril 2008 par une conférence au cours de laquelle elle a présenté devant de nombreuses associations et organisations actives dans le domaine culturel ou pédagogique les résultats des groupes de travail suivants:

Le groupe des intellectuels présidé par M. Amin MAALOUF

Le «Business Forum», présidé par M. DAVIGNON

Le «Rapport Élan: Incidences du Manque de compétences linguistiques des entreprises sur l'économie européenne», du Centre national des langues

Les consultations formelles des Comités (CdR et CESE)

La consultation des États membres: Conférence ministérielle, février 2008

Les recommandations du groupe de haut niveau sur le multilinguisme

Les contributions reçues par ailleurs sur la consultation en ligne.

3.2

Lors des débats, plusieurs défis ont été soulevés:

Des défis économiques.

Des défis politiques (multilinguisme et intégration régionale).

Des défis dans le domaine culturel (multilinguisme et inter-culturalité).

La communication personnelle et collective peut conduire à considérer que la langue est un outil de communication comme les autres. L'avenir de la littérature?

Multilinguisme et plurilinguisme: certains se demandent s'il est nécessaire d'avoir des compétences personnelles plurilingues dans un environnement linguistique devenant monolingue.

Le Conseil de l'Europe a souligné la nécessité de protéger les langues minoritaires et de faciliter leur usage si on veut lutter efficacement contre les nationalismes: le multilinguisme au service de la diversité ne doit pas présenter de risques d'exclusion.

Un grand nombre de participants expriment la frustration et l'inégalité devant les langues, la confrontation des langues européennes entre elles et dans le monde, des politiques culturelles nationales juxtaposées.

Droits culturels et droits sociaux: Beaucoup se demandent de quels moyens l'on disposera pour de tels engagements. Le cas particulier des Roms a été soulevé concernant leur intégration en général, la possibilité d'apprendre et de conserver leur langue en particulier.

Concernant l'emploi et le travail, le droit de travailler dans sa propre langue sans se voir imposer des connaissances disproportionnées aux tâches en rapport avec l'emploi, ainsi que les questions de sécurité posées par un environnement multilingue mal ou pas maîtrisé.

3.3   Objectifs généraux présentés par la Commission lors de cette audition pour promouvoir la diversité linguistique

3.3.1

Diversifier les compétences linguistiques au sein de l'UE («l'anglais ne suffit pas»).

L'ambition du Commissaire au Multilinguisme, M. Leonard ORBAN, lors de l'allocution qu'il a faite durant cette audition, comme en d'autres circonstances, est clairement de tenter d'inverser la tendance du «tout anglais».

3.3.2

Dans le domaine social:

Affirmer le rôle des langues dans la cohésion sociale.

Faciliter l'intégration des migrants, encourager l'apprentissage de la langue des pays d'accueil, promouvoir l'usage et la conservation de sa langue natale, sa transmission aux descendants, considérer les langues des migrants comme une ressource et un enrichissement.

3.3.3

Dans le domaine économique:

Développer les compétences linguistiques en vue de l'emploi des travailleurs et de la compétitivité des entreprises.

Intégrer transversalement dans les politiques européennes les aspects ayant trait au multilinguisme en commençant par un recensement (état des lieux).

3.3.4

Aspect du multilinguisme concernant la politique extérieure de l'UE:

La Commission confirme «l'objectif de Barcelone», à savoir: 1 langue maternelle + 2 langues vivantes pour chaque citoyen, en le déclinant toutefois en 1 langue maternelle + 1 langue internationale + 1 langue dite «de cœur» ou encore «adoptive» (concept inspiré par le rapport du groupe présidé par M. Amin MAALOUF).

3.3.5

Moyens et les méthodes:

La Commission souhaite promouvoir l'apprentissage informel «business literacy system», qui accélère la compréhension et la facilité d'accès mais a donné peu de détails sur ce sujet. Elle précise qu'il s'agit de donner l'occasion aux citoyens européens d'être mis en présence d'éléments linguistiques étrangers, par exemple dans les bus ou d'autres lieux publics, et que l'apprentissage se ferait par «accoutumance».

3.3.6

Concernant l'avenir:

La Commission souhaite s'appuyer sur une coopération structurelle dans un cadre stratégique de moyen terme entre les États membres et apporter une valeur ajoutée européenne pour développer cette politique.

3.4   Rapport ELAN (2):

Le rapport Élan développe l'intérêt des entreprises à disposer d'une main-d'œuvre qualifiée plurilingue. Cependant il n'établit pas de typologie des besoins proportionnés aux emplois et postes occupés, ni par secteur d'activité. La Commission aurait avantage à faire évaluer par la Fondation pour l'amélioration des conditions de vie et de travail, siégée à Dublin (ou par un autre organisme européen) une typologie plus précise des besoins professionnels tant des entreprises que des travailleurs.

3.4.1

Rapport du Groupe Forum des Entreprises, présidé par M. DAVIGNON (3):

Ce rapport publié fin juin 2008, démontre pourquoi, du point de vue du Forum des Entreprises, il est important d'investir dans les compétences linguistiques. Il fait le point sur ce qui a déjà été fait pour promouvoir les langues dans le milieu des affaires et formule des recommandations aux entreprises pour améliorer leurs performances en matière de communication commerciale «multilingue»: «… dresser l'inventaire des compétences linguistiques en leur sein; réviser les politiques de recrutement et de développement stratégique en termes de ressources humaines; investir dans la formation linguistique; embaucher des locuteurs natifs de différentes langues; utiliser des technologies linguistiques des traducteurs et interprètes, des communicateurs et des médiateurs; améliorer la mobilité internationale du personnel». Le rapport formule aussi des recommandations à l'Europe et à ses institutions, et aux gouvernements locaux, régionaux, nationaux. Il développe des arguments en faveur du multilinguisme.

3.5   Rapport du groupe de M. Amin MAALOUF (4):

Le Comité approuve l'initiative de la Commission d'avoir consulté un groupe d'intellectuels de renom dont le rapport a été qualifié par le représentant du groupe, lors de l'audition du 15 avril, de «probablement le rapport le mieux écrit et le plus simple à lire de tous les rapports de la Commission jusqu'à présent» — ce qui est vrai d'une certaine manière — et qui propose de soumettre à la réflexion des européens l'apprentissage d'une langue internationale et d'une langue «affective, d'adoption», autrement dit, un apprentissage désintéressé, non économique, à vertu d'intérêt personnel. Bien que généreuse et reconnaissant le rôle de vecteur de culture et de communication des langues, cette proposition postule que tous les citoyens ont un intérêt égal et le temps pour ces préoccupations linguistiques, ce qui est loin d'être le cas, pour des raisons culturelles mais aussi parce que la majorité des citoyens européens n'a pas un pouvoir d'achat qui lui permette d'avoir des pratiques culturelles «qualifiantes», telles que définies par le professeur Pierre BOURDIEU.

Il est vrai qu'on peut dire par exemple qu'un nombre croissant d'européens ou de jeunes européens voit l'intérêt de pratiquer des langues vivantes étrangères européennes ou non européennes, mais un nombre croissant voit aussi ses difficultés à vivre et faire grandir ses enfants croître, et que — sans voir la lutte des classes partout — il demeure que la société européenne est segmentée et que les fonds de cohésion, notamment concernant les objectifs de Lisbonne devront être mis à contribution.

La contribution possible des programmes Grundtvig et de formation pour adultes, ainsi que la formation tout au long de la vie, devraient dès lors être quantifiée et chiffrée lors de la concertation entre les services de la Commission, avant d'être soumis aux États membres, au Conseil et au Parlement. Cela permettrait de compléter avec une valeur ajoutée européenne la compétence des États membres en matière d'éducation.

Le Comité note que cela ne résout pas la question du choix de l'anglais comme première langue vivante, à moins de s'en remettre entièrement aux États membres et aux parents, et que la Commission ne met pas franchement le sujet sur la table. Certes, «l'anglais ne suffit pas», mais il reste la langue acceptée par l'UE comme celle des échanges internationaux. La voie proposée est une amorce, elle n'est pas une solution. Le Comité attire l'attention de la Commission, des États membres, du Conseil et du Parlement européen sur ce point.

3.6   Projet d'avis du CdR (5):

L'avis du CdR considère que la question linguistique est de la plus haute importance pour les collectivités territoriales, étant donné qu'elle détermine non seulement les questions d'emploi, mais également celles de vivre ensemble entre européens et non-européens, à tous les niveaux de la société et dans tous les secteurs d'activité depuis la santé («pénurie de main-d'œuvre») jusqu'au tourisme, en passant par les services aux personnes, l'enseignement en milieu préscolaire et scolaire, ou l'intégration des migrants. De plus, elle structure la vie d'un nombre croissant de régions. Aussi le CdR préconise-t-il, à juste titre, d'avoir recours aux fonds de cohésion et d'être consulté en amont des décisions stratégiques.

3.7   Rapport d'information «Document de travail de la Commission: Rapport sur la mise en œuvre du plan d'action: Promouvoir l'apprentissage des langues et la diversité linguistique» (6)

Le Comité craint que le fait de nier la nécessité d'allouer des moyens européens ne conduise à l'inertie, c'est-à-dire à une progression des dispositions sans mesure commune avec la progression des besoins, et que le résultat s'avère décevant à moyen et à long terme. Le Comité invite les États membres à y réfléchir: la télévision ne suffit pas et les apprentissages informels doivent être mesurables. Cependant, le Comité reconnaît que la méthode de coordination que se fixe la Commission serait un progrès d'administration mais pas nécessairement un pas vers le citoyen.

4.   Conclusions

4.1

Le Comité estime que la bonne volonté manifeste de la Commission ressemble à une incantation mais ne propose pas d'action consistante de l'Union européenne au-delà de ce qu'elle demande aux États membres en matière d'adaptation des systèmes éducatifs.

4.2

Le Comité recommande que les États membres continuent l'approche tenant compte de la diversification vers d'autres langues de communication internationale que l'anglais.

4.3

Les États membres devraient continuer de promouvoir les liens de parenté et de proximité linguistique ou géographique dans l'offre de langues européennes qu'ils proposent à tous les niveaux d'enseignement (préscolaire, primaire secondaire supérieur et tout au long de la vie), en veillant à sa diversité.

4.4

La formation pour adultes telle que la Commission l'a envisagée  (7) doit tenir compte des besoins d'inclure davantage de citoyens dans l'effort qui leur est demandé de connaître leur langue maternelle plus deux langues vivantes, en adaptant l'offre et en suscitant l'intérêt et la motivation par des mesures de proximité concrètes, en associant les savoirs faire des organisations de la société civile déjà actives sur le terrain, les professionnels des secteurs public et privé, en facilitant le dialogue social et civil, en veillant que les nouvelles initiatives ne créent pas de discriminations inégalitaires entre citoyens ayant peu d'accès à l'échange interculturel.

4.5

La démocratisation et les apprentissages informels tels que promus par la Commission doivent faire l'objet d'évaluations précises dans le cadre du système européen de certifications, afin de:

mesurer l'impact des actions initiées par les États membres, par la Commission et par les autres acteurs étatiques et non étatiques impliqués;

pouvoir faire l'objet de transferts et de reconnaissances de qualifications pour les citoyens et les travailleurs salariés et ce quel que soit leur statut.

4.6

Associer concrètement les collectivités locales et territoriales dans le déploiement de l'offre pédagogique à venir, à la mesure des ambitions affichées par la Commission.

4.7

Les entreprises et les travailleurs salariés étant concernés au premier chef par les considérations de la Commission sur les besoins économiques des entreprises, il convient que les États membres et la Commission incitent les partenaires sociaux à mettre le sujet dans le dialogue social afin d'examiner ensemble les défis et de trouver les meilleures solutions et pratiques adaptées.

4.8

L'immersion en milieu vivant, nécessaire à la pratique d'une langue et indissociable d'un apprentissage consolidé, doit être permis et encouragé à tous les niveaux et pour tous les publics, mais peut-être les besoins sont-ils particulièrement aigus pour les couches les moins exposées aux échanges transnationaux, à savoir les populations les moins mobiles, et des moyens concrets et matériels devraient être trouvés. On ne peut obliger personne à voyager, mais certains ont moins les moyens que d'autres. L'anglais ne suffit pas, la télévision non plus.

4.9

L'accent devrait être mis, concernant les langues des migrants, sur la ressource qu'elles constituent. Plusieurs écoles sont en présence. Les uns pensent que les migrants ont l'obligation d'apprendre la langue des pays d'accueil pour s'intégrer, voire pour accéder au territoire de l'UE, tandis que d'autres pensent que les migrants ont le droit de connaître la langue du pays qui les accueille pour pouvoir y travailler, y vivre et y défendre leurs droits, et que les pouvoirs publics ont la responsabilité d'organiser cette formation. Quoiqu'il en soit, il y a loin de la théorie à la réalisation. Plusieurs expériences montrent que toutes les bonnes pratiques n'ont pas été encouragées, et qu'au contraire, de nombreuses associations ont vu s'éteindre leurs subventions. Aujourd'hui le défi pédagogique à relever est immense car on n'apprend pas à tout âge de la même façon. À cet égard le Comité recommande les recherches qui illustrent l'échange interculturel qui sous-tend tout apprentissage linguistique  (8). Le Comité insiste sur la nécessité de consulter et d'associer tous les professionnels de l'enseignement et de la pédagogie, depuis le préscolaire jusqu'à tout au long de la vie, en passant par la formation pour adultes. Les deux parties les plus concernées sont les apprenants et les enseignants, y compris pour la validation future des acquis dits informels (9).

4.10

Les langues parlées en Europe comprennent les langues régionales et nationales ainsi que les langues parlées par les migrants. C'est un apport considérable, et la gestion de la diversité culturelle en Europe se fera à l'aune de deux enjeux: promotion de la diversité culturelle européenne, tolérance et respect des migrants. La cohésion sociale et territoriale de l'UE n'est plus économique ou politique seulement, demain et déjà aujourd'hui elle est inextricable de sa dimension culturelle.

4.11

Aussi les langues des migrants, au même titre que les langues natives européennes, doivent-elles être transmises aux descendants, et comme aucune langue ne survit sans être parlée, les migrants devraient aussi être considérés comme ressources pour transmettre ou enseigner leur langue maternelle aux publics souhaitant diversifier leur communication.

4.12

Ceci veut dire que la société civile européenne a aujourd'hui d'autres aspirations et qu'il ne suffit pas de lui vanter les avantages présentés par le fait d'être plurilingue dans un environnement multilingue, mais qu'elle souhaitera voir reconnues ses propres initiatives au sein d'associations, voir reconnus ses besoins et souhaitera dans tous les cas des moyens d'y parvenir, qu'ils soient d'origine publique ou privée.

4.13

Ceci implique également que les partenaires sociaux acceptent de regarder le long terme et définissent ensemble les qualifications requises, les enseignements initiaux et tout au long de la vie à mettre en place, les investissements tant publics que privés à considérer, en veillant à améliorer la compétitivité des entreprises.

4.14

Si l'apprentissage des langues est aussi considéré comme une nécessité pour la compétitivité et les objectifs de la stratégie de Lisbonne, dès lors, la recommandation ci-dessus prend tout son sens.

4.15

La Charte des Droits fondamentaux prévoit en ses articles 21 et 22 de promouvoir la diversité linguistique et d'interdire les discriminations au motif de la langue. La Commission devrait dès lors examiner quels sont les États membres qui ont une législation en la matière, en saisissant en tant que de besoin l'agence des Droits fondamentaux, et examiner si le fait que les États membres ont des régimes d'application différents ne crée pas des distorsions et des inégalités de traitement entre européens, notamment dans la mobilité, le recrutement, etc. À cet effet, on doit par exemple distinguer deux niveaux de pertinence: le degré de connaissance linguistique nécessaire à l'exécution des tâches liées à l'emploi occupé (contact avec des publics ou des clients étrangers) d'une part, et d'autre part la transmission des consignes nécessaires à l'exécution des tâches dans la langue de celui qui les exécute.

4.16

Concernant cette mise en œuvre tout particulièrement, le Comité sera attentif à ce que proposera la Commission dans la stratégie qu'elle présentera en septembre 2008, et aux progrès par rapport à sa stratégie précédente.

4.17

Concernant les droits culturels des citoyens européens, des résidents non-européens et de la coopération extérieure de l'UE, la Commission devrait peut-être s'appuyer sur la convention de l'UNESCO pour la diversité, en proposant des lignes directrices qui tirent les conséquences de sa ratification par les États membres pour l'Europe, en concertation avec les associations et les ONG déjà actives dans le domaine culturel.

4.18

La mobilité est promue par les partenaires sociaux et attendue par un certain nombre d'employeurs, de travailleurs et de pouvoirs publics, dont la Commission, comme une panacée contre le chômage et la pénurie de main-d'œuvre. L'obstacle linguistique est encore trop peu pointé. Citons les difficultés de suivre, dans le cadre de la formation tout au long de la vie, à la fois une formation professionnelle et des objectifs en matière linguistique, ou encore l'impossibilité d'inscrire ses enfants dans les écoles de son choix lorsqu'ils accompagnent des parents professionnellement mobiles, par exemple les Roms dans divers pays d'Europe et certains groupes d'italiens en Allemagne. La Commission ne devrait pas s'en remettre aux seuls États membres, mais devrait souscrire une demande d'information en matière de discrimination sur base linguistique dans les écoles entre enfants de nationalités européennes.

4.19

Il faut aussi citer les difficultés rencontrées par les administrations des États membres dans l'application de la directive «détachement de travailleurs», ainsi que par les partenaires sociaux, pour des raisons de compréhension sur le terrain, qui n'ont pas été négligées par la Commission, mais qui devraient être dûment concertées avec les parties (Commission, États membres, partenaires sociaux, autorités locales, nationales, services de l'emploi, etc.) comme développé plus haut (10).

4.20

Il faut enfin penser aux moyens du régime linguistique des institutions au-delà de la communication institutionnelle officielle: le Comité observe que la question reste difficile car un grand nombre de documents publics ne sont pas traduits, ce qui pose une fois de plus la question des moyens. On citera notamment les pages suivant les pages d'accueil des sites internet des institutions européennes, notamment celles du Conseil européen ou de la Présidence de l'UE.

Bruxelles, le 18 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  Avis du CESE du 26.10.2006 sur la «Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions: Un nouveau cadre stratégique pour le multilinguisme», rapporteure: Mme LE NOUAIL-MARLIÈRE (JO C 324 du 30.12.2006).

(2)  Cf. Rapport ELAN «Incidences du manque de compétences linguistiques des entreprises sur l'économie européenne» à l'adresse:

http://ec.europa.eu/education/policies/lang/doc/elan_fr.pdf.

(3)  Cf. Rapport du Groupe Forum des Entreprises à l'adresse:

http://ec.europa.eu/education/languages/news/news1669_en.htm.

(4)  Cf. Rapport du Groupe des Intellectuels pour le Dialogue Interculturel, présidé par M. Amin MAALOUF: «Un défi salutaire — Comment la multiplicité des langues pourrait consolider l'Europe» à l'adresse:

http://ec.europa.eu/education/languages/pdf/doc1646_fr.pdf.

(5)  Cf. l'avis du Comité des régions sur le multilinguisme, rapporteur: M. Roberto PELLA (CdR 6/2008).

(6)  Cf. COM(2007) 554 final/2, du 15.11.2007.

(7)  Cf. notamment COM(2006) 614 final et COM(2007) 558 final.

(8)  Cf. www.newcomersinturkey.com — M. Noureddine ERRADI a travaillé de longues années pour les centres de formation de migrants aux Pays-Bas et a produit des outils pédagogiques à destination des formateurs et des conseillers politiques dans les agences et collectivités territoriales.

(9)  Avis de la section du 11.9.2008 sur la «Proposition de recommandation du Parlement européen et du Conseil établissant le système européen de crédits d'apprentissages pour l'enseignement et la formation professionnels (ECVET)», rapporteuse: Mme LE NOUAIL-MARLIÈRE (CESE 1066/2008).

(10)  Avis du CESE du 29.5.2008 sur le thème «Détachement de travailleurs dans le cadre de la prestation de services: en tirer les avantages et les potentialités maximum tout en garantissant la protection des travailleurs», rapporteuse: Mme LE NOUAIL-MARLIÈRE (OJ C 224 du 30.8.2008).


31.3.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 77/115


Avis du Comité économique et social européen sur la «Prise en compte des besoins des personnes âgées»

(2009/C 77/26)

Le 18 février 2008, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Prise en compte des besoins des personnes âgées».

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 11 septembre 2008 (rapporteuse: Mme HEINISCH).

Lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 18 septembre 2008), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 106 voix pour, 32 voix contre et 20 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Motivation

1.1.1

Le changement démographique en Europe se caractérise par une forte augmentation du pourcentage des personnes âgées dans une population générale par ailleurs en diminution (1). Le Conseil s'est prononcé à plusieurs reprises sur le vieillissement. Ce processus varie selon les régions. L'Union européenne se trouve de ce fait confrontée à d'importants défis sociétaux. La Commission adoptera d'ici fin 2008 une communication comportant des propositions permettant de mieux prendre en compte, avec le soutien des Fonds structurels, les besoins d'une population vieillissante (2).

1.1.2

Au premier plan de cet avis figurent la reconnaissance, l'estime, la prévention de la discrimination et la garantie de la dignité des personnes âgées. Il y a lieu de reconnaître que les personnes âgées ne constituent pas un ensemble homogène en termes de capacités, de sécurité financière ou de besoins en matière de services sociaux et de santé, de manière à ce que les politiques et les services rendent compte du caractère inapproprié d'une solution unique applicable à tous ou d'une segmentation par tranche d'âge.

1.1.3

Le présent avis traite dès lors de l'ensemble des questions qui concernent les individus de leur départ à la retraite jusqu'au quatrième âge. Cela inclut bien évidemment — sans qu'il soit besoin de le mentionner expressément à chaque fois — les hommes et les femmes, les personnes âgées handicapées et les personnes âgées issues de l'immigration.

1.1.4

L'avis n'examine pas des thèmes tels que «Les travailleurs âgés» ou «Les personnes âgées dépendantes», questions qui ont déjà fait l'objet de nombreuses propositions (3). Le CESE, cependant, souhaiterait souligner l'importance de l'approche fondée sur le «cycle de vie» appliquée à une société vieillissante afin d'éviter la discrimination et les stéréotypes, et insister également sur la nécessité de politiques intégrées qui dépassent les générations.

1.1.5

Afin que les personnes âgées puissent continuer à prendre part à la vie de la société et à mener une vie digne, il est essentiel qu'elles disposent d'une sécurité financière et d'un accès volontaire à des possibilités d'activités utiles y compris l'apprentissage tout au long de la vie, l'emploi, le bénévolat et l'utilisation des nouvelles technologies. Par ailleurs, il convient que les services en matière de transport, d'énergie, de logement et de santé soient disponibles, abordables et accessibles.

1.2   Recommandations

1.2.1

Afin d'assurer à la population croissante de personnes âgées dans les zones urbaines et rurales, compte tenu des changements, des conditions de vie acceptables et de lui offrir des possibilités d'emploi, le Comité propose les mesures suivantes:

élaboration régulière de rapports nationaux et régionaux sur l'état de la situation;

collecte et diffusion d'exemples de bonnes pratiques des États membres;

promotion d'une nouvelle image du vieillissement reconnaissant l'expérience des personnes âgées (migrant(e)s compris) et la dignité des personnes âgées dans la politique, l'économie et la société;

campagnes dans les médias sur le thème du «vieillissement actif»;

des mesures sont à prendre, particulièrement dans les domaines des services d'intérêt général, des infrastructures, de la fourniture de biens et services, des financements, du logement, des services de santé, de l'organisation de la fin de vie, de la participation à la vie sociale.

Destinataires: États membres, Parlement européen, Comité des régions, Comité économique et social européen

Constitution d'un groupe d'experts complémentaire «Vieillissement» dans le cadre du groupe d'experts chargé des questions de démographie (4) à la Commission européenne.

Création d'une Alliance européenne «Vie active des personnes âgées» sur le modèle de l'Alliance européenne pour les familles (5), qui organise notamment des ateliers européens et des conférences.

Institution d'un Centre européen de recherche sur le vieillissement chargé de la compilation et de la synthèse des connaissance ainsi que du relevé des recherches à poursuivre et de la promotion de la recherche;

création d'une dominante interdisciplinaire «Vieillissement» dotée d'un budget propre dans le 8e programme-cadre;

création d'un portail internet européen comportant des informations émanant de toutes les directions générales à l'intention de l'opinion publique sur les mesures relatives au vieillissement;

création de portails internet locaux, régionaux et nationaux sur le modèle du portail européen;

soutien à un Fonds démographique  (6) dans le cadre des Fonds structurels pour la compensation financière des régions, dans le but de lutter contre le changement démographique (par exemple en promouvant une politique active de la famille);

inclusion de nouvelles priorités dans le programme d'apprentissage tout au long de la vie (formation d'accompagnateurs chargés de faciliter la transition entre les différentes étapes de la vie).

Destinataires: présidences du Conseil de l'UE; Parlement européen; Commission européenne

1.2.2

Afin de parvenir à la réalisation de cet objectif, il convient de penser en termes de gestion durable, permettant de contribuer à l'application de la stratégie de Lisbonne pour la croissance économique et l'emploi.

2.   Observations générales

2.1

Le présent avis exploratoire vise à répondre au besoin d'action dans ce domaine dans les différentes régions d'Europe. Une redistribution des ressources disponibles est nécessaire (7) dans tous les pays, liée à un alourdissement des charges pour les citoyens des villes comme des zones rurales. Dans le même temps, des adaptations importantes s'imposent au niveau des infrastructures municipales (8). Des projets innovants et intégrateurs sont notamment nécessaires afin de permettre aux régions et aux communes de faire face au changement démographique.

3.   Inventaire des mesures à prendre

La garantie d'une vie active en bonne santé suppose le respect d'un certain nombre d'exigences fondamentales. L'on citera les domaines suivants:

3.1   Services d'intérêt général

3.1.1

Les services d'intérêt général sont une condition essentielle du respect de la dignité humaine et garantissent le droit de l'individu à la sauvegarde des droits fondamentaux. Ils contribuent à l'exercice réel des droits des citoyens.

Concrètement, ces services portent entre autres sur l'aménagement du territoire et l'environnement (9), plus particulièrement les infrastructures municipales. La diminution du nombre d'habitants, notamment dans les zones rurales (10), aura pour conséquence qu'à l'avenir, pour des raisons économiques, certains services essentiels ne seront plus disponibles ou plus rentables; soit ils seront totalement supprimés, soit ils ne répondront plus aux nouveaux besoins. Il s'agit dans ce contexte de satisfaire les besoins élémentaires de l'ensemble de la population. Il importe en particulier de prendre en compte les besoins des personnes âgées et dépendantes. Les domaines concernés sont les suivants:

approvisionnement en énergie, plus particulièrement en électricité, en gaz et en chauffage;

gestion de l'eau, gestion et prévention des déchets, sécurité et propreté des lieux publics;

services et administration publics.

3.1.2   Les infrastructures de transport et la fourniture de biens et de services pour la vie quotidienne

L'indépendance et la mobilité sont des conditions indispensables à la qualité de vie et à l'activité des personnes âgées (11)  (12). Pour ce faire, les éléments suivants sont nécessaires:

accès aux commerces de proximité vendant des biens de consommation courante à un prix abordable et présence de services indispensables tels que poste, banque, pharmacie, cimetière, bâtiments et équipements publics, possibilité de participation à la vie sociale de la commune (par exemple services administratifs, bureaux de citoyens, services de conseil, etc.);

présence de transports en commun (locaux) accessibles à des prix raisonnables;

services de transport garantis, en particulier dans les régions faiblement peuplées;

présence d'espaces publics accessibles (voies piétonnes, bancs publics, éclairage public, sécurité des transports, etc.).

3.1.3   Logement

L'offre actuelle de logements pourrait ne pas répondre aux besoins d'une population européenne vieillissante, en particulier en ce qui concerne la préservation d'une vie autonome au domicile. La conception et les normes des nouveaux logements doivent tenir compte de la perte des facultés physiques, sensorielles ou mentales et recourir aux systèmes d'efficacité énergétique et technique des bâtiments (par exemple systèmes d'assistance à l'autonomie à domicile) afin de permettre la poursuite d'une vie autonome. Cette approche serait également profitable par-delà les générations.

Les autorités des États membres chargées d'apporter une réponse aux besoins en logement devraient veiller à la présence de services d'assistance pour l'adaptation des logements existants et la promotion de nouveaux concepts de réalisation des logements ainsi que de vie en communauté, comprenant également des mesures financières et juridiques.

3.1.4   Services de santé

L'importance (13) de la présence de services de santé à proximité du domicile et orientés en fonction des besoins des personnes âgées s'accroît avec le vieillissement de la population. Dans les régions rurales faiblement peuplées et/ou isolées, ces services sont sérieusement menacés en raison de la baisse constante du nombre d'habitants, parallèlement au vieillissement des médecins encore en activité. Il y a lieu de mettre en place de toute urgence une couverture étendue de services médicaux, avec un solide maillage territorial. Cela comporte (y compris la protection des droits des personnes âgées en tant que patients) (14):

la prestation de soins médicaux, notamment gériatriques, et la rééducation par des médecins et un personnel ayant reçu une formation dans le domaine de la gérontologie et de la gériatrie;

des services de soins ambulants ainsi que des aides ponctuelles à domicile;

des services de soins palliatifs et d'aide psychologique aux familles;

des conseils et des informations sur les droits des patients et les possibilités d'aide;

des services de conseil et d'information ainsi que des équipements et des incitations à la prévention permettant de se familiariser avec une alimentation saine, une activité physique, la prévention des chutes et un mode de vie sain;

des moyens et des systèmes techniques d'assistance, sans pour autant remplacer l'assistance personnelle (voir chapitre «Technologies TIC»);

la promotion et, le cas échéant, la création de systèmes de soutien sociaux formels et informels, y compris, des bureaux de citoyens et des services de conseils, des groupes d'entraide, des groupes pour les aidants familiaux et l'entraide entre voisins.

Concernant ces systèmes de soutien, il existe déjà dans certains États membres des modèles ayant fait leurs preuves (15).

3.2   Dispositions concernant les situations d'urgence et une fin de vie digne

3.2.1   Situations d'urgence

Pour les situations d'urgence telle que les inondations, les périodes prolongées de canicule ou les catastrophes, des dispositions doivent être prises afin que les personnes âgées qui ne sont pas en mesure de se débrouiller seules soient secourues en temps utile.

3.2.2   Problèmes de la fin de vie

L'aménagement de la fin de vie est controversé et soumis à différentes législations nationales (euthanasie active et passive). Il y a lieu d'instaurer une sécurité juridique dans ce domaine, afin que la volonté des personnes âgées puisse être respectée même en cas de diminution progressive de leurs capacités cognitives, par exemple dans l'hypothèse d'un acharnement thérapeutique. Les instructions des patients peuvent être un moyen d'y parvenir, mais la protection, notamment, des personnes particulièrement fragiles doit être garantie. Les soins palliatifs et l'accompagnement des mourants jouent un rôle important dans ce domaine. La dignité doit demeurer jusqu'à la fin le principe directeur.

La mise en place d'un cadre incitant les États membres à instaurer dans leur droit des mesures créant la sécurité juridique nécessaire pour préparer sereinement la fin de sa vie est aujourd'hui nécessaire dans une Union composée pour 25 % d'une population de 60 ans et plus.

Le CESE souhaite dès lors encourager un débat entre les États membres sur le potentiel de développement d'un cadre centré sur les questions de fin de vie, qui pourrait conduire à l'élaboration de mesures juridiques dans les États membres.

3.3   Intégration sociale et participation à la vie sociale

L'intégration sociale et la participation à la vie sociale sont des besoins humains fondamentaux qui touchent à de multiples aspects de la vie des personnes âgées. Parmi ceux-ci, les principaux concernent les relations familiales et amicales, la participation à la vie active, le bénévolat et les activités utiles, ainsi que l'éducation à l'accompagnement et la participation à la vie culturelle et sociale.

3.3.1   Intégration sociale dans des réseaux familiaux et amicaux

L'environnement social des personnes âgées se modifie en profondeur (16). Le nombre de personnes âgées vivant seules est en augmentation. Dans les grandes villes, elles représentent parfois déjà 50 % des foyers. En conséquence, l'on constate un besoin de mesures de politique sociale et/ou organisationnelles, de même que des innovations techniques permettant de:

venir en aide aux réseaux familiaux et non familiaux (17) par le biais de mesures pertinentes dans le domaine de la conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale des personnes soignantes;

sur ce point le CESE prend note des travaux actuellement en cours de réalisation tant par la Commission dans le cadre de l'Agenda social rénové que par les partenaires sociaux européens en ce qui concerne la question de la compatibilité entre vie professionnelle et vie familiale;

contribuer aux activités transgénérationnelles (18);

promouvoir, d'une manière générale, les initiatives individuelles et l'engagement civique;

promouvoir la création de maisons intergénérationnelles.

3.3.2   Intégration et participation à des activités donnant du sens à la vie

Tant la participation à la vie active que les activités bénévoles peuvent favoriser l'intégration sociale et la participation à la vie sociale grâce à des activités. Pour permettre une vie socialement active aussi longue que possible, des interventions sont nécessaires dans les domaines suivants:

3.3.2.1   Implication dans la société grâce à la participation au marché du travail

Afin de permettre à ceux qui le souhaiteraient après leur départ à la retraite une participation à la vie sociale sous forme d'un travail (Destinataires: voir paragraphe 1.1.3), que les motifs soient de nature économique ou professionnelle, les mesures suivantes pourraient être envisagées:

conformément à la directive en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travai1 (19), renforcement de la capacité des personnes à assouplir la transition entre vie active et retraite; adaptation en conséquence des systèmes de retraite et de la fiscalité dans le cadre d'un projet pour l'emploi englobant toutes les générations adultes (20); et respect du principe de l'égalité dans le domaine des rémunérations. Les États membres ne devraient en principe utiliser les limites d'âge qu'en relation avec le droit d'un individu de quitter la vie professionnelle, et non pour lui interdire d'exercer par la suite un travail bénévole;

création d'emplois et d'un environnement de travail adaptés aux personnes âgées, y compris l'amélioration des contraintes physiques, de la santé, de la sécurité, de l'organisation et des rythmes de travail;

utilisation et, le cas échéant, adaptation des aides à la réalisation du travail;

élimination des éventuels obstacles et promotion de nouveaux types de contrats relatifs à cette période spécifique de transition entre vie pré- et post-retraite dotés de la sécurité juridique afin qu'ils ne créent pas de nouvelles précarités;

changement de mentalité dans l'entreprise afin de parvenir à une stratégie globale de l'emploi promouvant de manière ciblée les compétences individuelles, indépendamment de l'âge (21).

3.3.2.2   Participation par le biais d'un engagement volontaire et d'une activité donnant du sens à la vie

Afin de valoriser le potentiel des personnes âgées tout en leur confiant des missions utiles correspondant à leurs multiples compétences, les mesures suivantes doivent être prises:

collecte et sauvegarde du savoir acquis par l'expérience, y compris dans le domaine du comportement social et dans certaines activités artisanales et artistiques;

soutien aux formes innovantes de transfert de connaissances, y compris l'aide apportée à d'autres générations (22);

possibilité de transition souple entre vie professionnelle et retraite et de combiner engagement professionnel et bénévole sans perte financière;

aide aux activités d'engagement volontaire (23) par le biais de la formation permanente et de la participation à des projets locaux et suprarégionaux;

ouverture des institutions, afin de permettre le développement de la participation bénévole des personnes âgées sans supprimer pour autant des emplois rémunérés.

3.4   Éducation et participation à la vie de la société

La clef du succès de la participation des personnes âgées à la vie et aux activités de la société réside dans l'éducation et dans l'apprentissage tout au long de la vie, ainsi que dans l'engagement dans des activités. L'utilisation du potentiel des personnes âgées suppose d'adapter l'offre au niveau local, régional et suprarégional:

offres de formation continue à l'accompagnement afin de préserver notamment les capacités des travailleurs âgés. Les entreprises sont invitées dans ce contexte à adopter et à soutenir les mesures correspondantes. Parallèlement, il y a lieu de créer des incitations (par exemple de nature fiscale);

formation permanente générale (24) pendant toute la durée de la vie et à tous les niveaux (depuis les niveaux de base jusqu'à la formation universitaire);

contrôle et garantie de la qualité des offres de formation;

reconnaissance au niveau européen des diplômes (25), savoir-faire et compétences obtenus même à un âge avancé afin de permettre la mobilité transfrontalière (26) et valorisation des connaissances acquises de manière informelle;

offres de formation dans le domaine de la préparation à la retraite;

formation de «passeurs» chargés de faciliter la transition en vue de se préparer à une nouvelle étape de la vie (27);

apprentissage transgénérationnel et non déterminé par l'âge (apprendre à recevoir et à donner mutuellement);

formations en matière d'engagement transgénérationnel (par exemple services de grands-parents);

formation aux questions financières et juridiques de base (28) (afin de protéger les intérêts des personnes âgées, notamment en ce qui concerne le commerce en ligne sur internet);

formation aux nouvelles technologies de l'information et de la communication;

offres d'information disponibles et accessibles (journaux, radios, TV, Internet);

activités sportives différenciées tenant compte de la diversité des capacités et des intérêts;

activités de loisirs et tourisme (29) prenant en compte les besoins culturels spécifiques (30).

3.5   Les personnes âgées en tant que consommateurs

Les personnes âgées ont de multiples besoins qui concernent à la fois les biens de la vie quotidienne (voir 3.1.2) et les biens de consommation durables, mais aussi les systèmes techniques d'aide et d'assistance (voir 3.6) ainsi que des prestations en tous genres, ce qui devrait ouvrir des perspectives nouvelles d'emploi aux plus jeunes.

Les conditions indispensables à cet égard sont les suivantes:

conception générale de produits conformes au «concept universel» et à la «conception visant l'accessibilité universelle» (31), y compris des informations lisibles et compréhensibles sur les biens de consommation;

prévention de la discrimination liée à l'âge et au handicap en matière d'accès aux services, notamment financiers (32);

défense des droits des consommateurs pour les personnes âgées également;

le profil des retraités issus de l'immigration a changé au cours des années. Beaucoup d'entre eux se retrouvent avec de faibles ressources provenant de leur retraite et peuvent avoir des besoins en termes de soins de santé et de services sociaux que le système actuel de santé et de protection sociale ne prend pas suffisamment en compte. Les retraités issus de l'immigration tombent dans un vide réglementaire: les droits garantis au niveau national ne sont plus couverts par les politiques de leur pays d'origine et ne sont pas pris en charge par le pays d'accueil. Il y a lieu de mieux comprendre et de débattre plus largement de cette question dans l'UE entière pour procéder à des changements, pour lesquels le niveau européen est pertinent et bénéfique pour les citoyens.

3.6   Accès aux technologies de l'information et de la communication (TIC)

Les nouvelles technologies sont de plus en plus une condition indispensable à une vie active et autonome pour les personnes âgées que ce soit dans le domaine du logement, de la santé, de la participation à la vie sociale ou de la formation, de même que pour l'accès aux services administratifs en ligne. Cela vaut aussi bien pour les services d'intérêt général destinés aux personnes âgées elles-mêmes que pour les activités annexes de développement économique au niveau régional et suprarégional (33). En voici les éléments clefs:

travailler très en amont sur le software pour une accessibilité maximale et sur le hardware pour une utilisation optimale des possibilités des machines par ceux qui n'en sont pas (ou plus) familiers;

technologies de l'information et de la communication disponibles et accessibles, y compris les systèmes d'assistance à l'autonomie à domicile et les technologies d'apprentissage en ligne, de santé en ligne, de soins en ligne et de rééducation en ligne. Les technologies peuvent avoir une fonction d'aide mais ne doivent pas remplacer le contact personnel (34);

simplification de l'accès aux outils et aux réseaux techniques correspondants et de leur utilisation, compte tenu de la complexité croissante des systèmes; adaptation aux besoins spécifiques des personnes âgées (par exemple problèmes d'acuité visuelle, diminution du sens du toucher);

prise en compte des besoins des utilisateurs âgés et mesures visant à les inciter à faire davantage usage de ces outils;

implication de toutes les parties concernées et sauvegarde des critères éthiques et juridiques, notamment dans le recours à des systèmes électroniques de surveillance en cas de démence;

mesures d'accompagnement telles que services de conseil, d'installation et de maintenance, services sociaux;

prise en compte des changements découlant de l'évolution de la société ainsi que de l'expérience nouvelle et des intérêts des nouvelles générations de personnes âgées.

3.7   Garanties financières

Les États membres devraient être incités à garantir la sécurité et, dès lors, la dignité de l'existence des personnes âgées tout au long de leur retraite, et ce indépendamment de leur contribution à la vie de la société.

Avec les changements structurels en cours, les réformes des systèmes de retraite et des systèmes sociaux, l'augmentation du coût de la vie et la diminution du pouvoir d'achat, le nombre de personnes risquant de connaître le dénuement dans leur vieillesse s'accroît. Dans certains États membres en particulier, les femmes âgées et les travailleurs ayant connu de longues périodes de chômage vivent dans la pauvreté.

Pour préserver la durabilité des systèmes de protection sociale, les États membres doivent encourager les personnes encore en activité professionnelle à recourir à la prévoyance collective ou individuelle, et à veiller à la solvabilité des acteurs privés intervenant dans ce domaine. Ils doivent en outre garantir à tous un revenu minimum qui permette à toute personne âgée une vie décente, quels que soient les accidents de la vie rencontrés.

4.   Observations particulières et recommandations

Le Comité plaide en faveur de l'adoption de mesures afin de créer une base solide pour les stratégies nécessaires en matière de restructuration et d'innovation, tant au niveau des États membres qu'au niveau européen:

4.1   Mesures au niveau des États membres

4.1.1   Compilation de rapports sur la situation nationale et régionale

Il convient en premier lieu de procéder à une analyse précise des différentes situations au niveau régional. Le Comité invite la Commission à compiler à intervalles réguliers des rapports sur la situation de chaque État membre, et à fournir des informations sur le potentiel d'activité (employabilité) des personnes âgées.

4.1.2   Élaboration et diffusion de matériel d'information

De l'avis du Comité, il est essentiel que les informations, les connaissances, l'expérience et les résultats des recherches menées jusqu'ici ainsi que les nouvelles connaissances soient accessibles aux organismes professionnels, aux citoyens en général et aux personnes âgées elles-mêmes. Il convient notamment de faciliter la diffusion des résultats de la recherche entre les chercheurs, les responsables politiques et les utilisateurs (les personnes âgées et leurs représentants).

4.1.3   Traitement et mise en réseau de l'expérience existante dans les États membres

Le Comité invite la Commission à collationner, comparer et évaluer ces expériences au niveau régional afin de voir si elles sont utilisables dans d'autres domaines et transférables à d'autres régions. Le but visé est la compilation d'une liste de bonnes pratiques à l'usage de tous (35).

4.1.4   Promotion d'une nouvelle image de la vieillesse

Dans une société vieillissante, les personnes ne peuvent plus être considérées comme «inactives» dès qu'elles ont quitté la vie professionnelle. À cet égard, un changement de mentalité s'impose à tous les niveaux (politique, économie, société). Les États et les régions sont particulièrement bien placés pour mettre sur pied à intervalles réguliers des campagnes de promotion sur le thème du «vieillissement actif».

4.1.5

Le Comité préconise une campagne d'information européenne en vue de forger une image du vieillissement qui reconnaisse la contribution des personnes âgées (y compris celles issues de l'immigration) à la vie sociale et leur droit à une vieillesse digne.

4.2   Mesures au niveau européen

4.2.1

Création d'un groupe d'experts supplémentaire sur le vieillissement dans le cadre du groupe d'experts pour les questions de démographie auprès de la Commission européenne.

4.2.2

Création d'une Alliance européenne pour une vieillesse active sur le modèle de l'Alliance européenne pour les familles (36) dans le but de promouvoir une vieillesse active par le biais d'un échange d'expériences entre les États membres et d'encourager la coopération et l'apprentissage mutuel dans l'Union européenne. Cette Alliance serait idéalement placée pour organiser des conférences et des ateliers européens.

4.2.3   Création d'un centre européen de recherche sur le vieillissement

Les rapports relatifs à la situation et à l'expérience montrent quels sont les aspects et les spécificités régionales qui nécessitent des recherches supplémentaires (37). Il serait également souhaitable de rassembler les conclusions des programmes cadres de recherche précédents et de diffuser plus largement et d'intégrer dans les politiques et la pratique les données statistiques (38). Pour la compilation, l'intégration et la transmission des données statistiques et autres informations pertinentes déjà disponibles aux différents niveaux, la création d'un Centre européen de recherche sur le vieillissement, sur le modèle du «National Institute on Ageing» américain, serait appropriée.

4.2.4   Création d'une dominante interdisciplinaire «Vieillissement» dans le 8e programme-cadre de recherche

L'introduction d'une dominante interdisciplinaire «Vieillissement» dotée d'un budget propre dans le 8e programme-cadre de recherche garantirait le regroupement des activités de recherche.

4.2.5   Création d'un portail Internet européen commun

Un tel portail permettrait aux citoyens — et notamment aux personnes âgées — d'avoir accès à toutes les mesures des différentes directions générales en rapport avec le thème du vieillissement. Le matériel d'information devrait être accessible au moyen de liens correspondants.

4.2.6   Création de portails internet locaux, régionaux et nationaux sur le modèle du portail européen

4.2.7   Soutien au Fonds démographique dans le cadre des Fonds structurels (39)

Compte tenu de la situation particulièrement précaire de certaines régions en situation de déclin démographique, le Fonds européen pour la démographie devrait bénéficier notamment aux régions rurales et aux régions dont le taux de croissance est inférieur à la moyenne, et promouvoir les bonnes initiatives.

4.2.8

Inclusion de nouvelles priorités dans le programme d'apprentissage tout au long de la vie afin de promouvoir la formation d'accompagnateurs chargés de faciliter la transition entre les différentes étapes de la vie.

4.3

Sur la base des mesures proposées, il est possible d'élaborer des concepts en fonction des besoins afin de formuler des recommandations d'actions et de mesures politiques. Le CESE invite la Commission à prendre en compte ces propositions dans sa prochaine communication.

Bruxelles, le 18 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  Voir par exemple le rapport d'information de la section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté» CES 930/99 fin; SEC(2007) 638 document de travail de la Commission «L'avenir démographique de l'Europe: faits et chiffres».

(2)  Voir COM(2006) 571 du 12 octobre 2006; SEC(2007) 638; EPC et CE (DG ECFIN): «L'impact du vieillissement sur les dépenses publiques», rapport spécial no 1/2006.

(3)  Voir notamment l'avis du CESE du 16.12.2004 sur le thème «Stratégies/relever l'âge de sortie du marché du travail», rapporteur: M. DANTIN (JO C 157 du 28.6.2005); l'avis du CESE du 28.10.2004 sur le thème «Santé et soins des personnes âgées», rapporteur: M. BRAGHIN (JO C 120 du 20.5.2005); l'avis du CESE du 26.9.2007 sur le thème «Les droits du patient», rapporteur: M. BOUIS (JO C 10 du 15.1.2008); l'avis du CESE du 24.10.2007 sur le thème «Maltraitance des personnes âgées», rapporteuse: Mme HEINISCH (JO C 44 du 16.2.2008), et l'avis du CESE du 13.3.2008 sur le thème «Garantir l'accès aux soins de longue durée et un financement durable du système de soins de longue durée aux personnes âgées», rapporteuse: Mme KLASNIC (JO C 204 du 9.8.2008).

(4)  Décision de la Commission 2007/397/CE.

(5)  Voir http://ec.europa.eu/employment_social/families/index_fr.html.

(6)  Voir paragraphe 4.5.2 de l'avis du CESE du 13.12.2007 sur le thème «4e rapport de cohésion», rapporteur: M. DERRUINE (JO C 120 du 16.5.2008).

(7)  Voir l'avis du CESE du 14.3.2007 sur le thème «L'impact économique et budgétaire du vieillissement des populations», rapporteuse: Mme FLORIO (JO C 161 du 13.7.2007) et l'avis du CESE du 15.9.2004 sur le thème «Besoins en recherche et changements démographiques», rapporteuse: Mme HEINISCH (JO C 74 du 23.3.2005).

(8)  Voir l'avis du CESE du 14.2.2008 sur le thème «Les services d'intérêt général», rapporteur: M. HENCKS (JO C 162 du 25.6.2008).

(9)  Voir l'avis du CESE du 18.1.2007 sur le thème «Politiques structurelles et cohésion», rapporteur: M. DERRUINE (JO C 93 du 27.4.2007) et l'avis du CESE du 25.4.2007 sur le thème «Agenda territorial», rapporteur: M. PARIZA (JO C 168 du 20.7.2007).

(10)  À titre d'exemple: certaines zones rurales en France, en Espagne, au Portugal et dans l'est de l'Allemagne, certaines régions d'Europe de l'Est et certaines régions rurales périphériques de Suède et de Finlande; voir «The Spatial Effects of Demographic Trends and Migration», projet ESPON 1.1.4, rapport final 2002.

(11)  Voir l'avis du CESE du 29.5.2008 sur le thème «Livre vert: vers une nouvelle culture de la mobilité urbaine», rapporteur: M. HERNÁNDEZ BATALLER, corapporteur: M. BARBADILLO LÓPEZ (JO C 224 du 30.8.2008), l'avis de l'organisation «AGE» — Plate-forme européenne des personnes âgées sur le livre vert (COM(2007) 551 final; http://ec.europa.eu/transport/clean/green_paper_urban_transport/index_en.htm; Mollenkopf et al. «Enhancing mobility in later lifePersonal coping, environmental resources and technical support», Amsterdam, IOS Press.

(12)  On trouve des exemples de mesures complémentaires pour le maintien de l'autonomie notamment en France (Hautes-Corbières; CG Val-de-Marne; France — discours colloque ANDASS, en Allemagne (Berlin et Francfort) et au Royaume-Uni (Newcastle).

(13)  Voir par exemple la publication de la DG SANCO «Healthy Ageing: keystone for a sustainable Europe»

(http://ec.europa.eu/health/ph_information/indicators/docs/healthy_ageing_en.pdf)

(14)  Voir les avis du CESE 1447/2004; 1465/2007; 1256/2007; et 501/2008 (note no 3).

(15)  Citons les exemples de la Finlande: prévention à Jyväskylä — Finland.ppt et de la France: Poitiers.pdf, Strasbourg.pdf: «Le guide de l'aidant familial».

(16)  Voir l'avis du CESE du 15.9.2004 sur le thème «Besoins en recherche et changements démographiques», rapporteuse: Mme HEINISCH (JO C 74 du 23.3.2005). Voir également l'avis du CESE du 16.12.2004 sur le thème «Relations entre générations», rapporteur: M. BLOCH-LAINÉ (JO C 157 du 28.6.2005), l'avis du CESE du 14.3.2007 sur le thème «La famille et l'évolution démographique», rapporteur: M. BUFFETAUT (JO C 161 du 13.7.2007), l'avis du CESE du 11.7.2007 sur le thème «Le rôle des partenaires sociaux dans la conciliation de la vie professionnelle, de la vie familiale et de la vie privée», rapporteur: M. CLEVER (JO C 256 du 27.10.2007) et l'avis du CESE du 13.12.2007 sur le thème «Promouvoir la solidarité entre les générations», rapporteur: M. JAHIER (JO C 120 du 16.5.2008).

(17)  Voir par exemple les activités de l'association flamande VVSG (VVSG-Vergrijzing-GRV-2006.pdf) et de l'Association suédoise des collectivités locales et régionales (Sweden — care for the elderly in Sweden today.pdf).

(18)  Voir par exemple le programme du BMFSFJ «Generationsübergreifende Freiwilligendienste».

(19)  Directive 2000/78/CE.

(20)  L'exemple de la Finlande montre comment des incitations positives (au lieu de pertes financières) et une certaine flexibilité dans les limites d'âge (entre 63 et 68 ans) permettent l'élaboration de modes de départ de la vie active correspondant aux besoins des individus et à un allongement de la durée de la vie active.

(21)  Voir notamment G. NAEGELE et A. WALKER (2006) «A guide to good practice in age management», Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail, Dublin.

(22)  À titre d'exemple, le FSE finance au Royaume-Uni un projet qui donne aux anciens dirigeants de plus de 50 ans la possibilité de conseiller et de parrainer de jeunes collègues et diplômés dans plus de 200 PME.

(23)  Voir l'avis du CESE du 13.12.2006 sur le thème «Les activités volontaires: leur rôle dans la société européenne et leur impact», rapporteuse: Mme KOLLER (JO C 325 du 30.12.2006).

(24)  Voir l'avis du CESE du 9.2.2005 sur le thème «Instauration d'un programme d'action intégré dans le domaine de l'éducation et de la formation tout au long de la vie», rapporteur: M. KORYFIDIS (JO C 221 du 8.9.2005), l'avis du CESE du 18.5.2006 sur le thème «Compétences clés pour l'éducation et la formation tout au long de la vie», rapporteuse: Mme HERCZOG (JO C 195 du 18.8.2006), l'avis du CESE du 30.5.2007 sur le thème «Apprentissage tout au long de la vie», rapporteur: M. RODRIGUEZ (JO C 175 du 27.7.2007), et l'avis du CESE du 13.3.2008 sur le thème «L'éducation et la formation des adultes», rapporteuse: Mme HEINISCH (JO C 204 du 9.8.2008).

(25)  Sans préjuger de la directive 2005/36/CE relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles.

(26)  Par exemple à l'occasion d'un stage ou d'une activité bénévole en faveur des personnes âgées.

(27)  Citons ici à titre d'exemple le projet «Transition — Formation à l'accompagnement pour les processus de formation de la petite enfance» dans le cadre du programme Socrates Grundtvig 1.1

(http://www.elternverein-bw.de).

(28)  Voir la communication sur l'éducation financière COM(2007) 808 du 18 décembre 2007, p. 7.

(29)  Voir à cet égard le projet «Travelagents»

(www.travelagentsproject.org).

(30)  Voir par exemple le projet «AAMEE»

(http://www.aamee.eu/).

(31)  Voir à cet égard le «Euroäisches Netzwerk Design für alle und elektronische Zugänglichkeit»

(EDeAN: http://www.edean.org/).

(32)  Ainsi, l'octroi de petits crédits pourrait se révéler utile pour permettre à des personnes âgées de créer une activité indépendante lors de leur départ à la retraite ou en cas de chômage.

(33)  Voir l'avis du CESE du 29.5.2008 sur le thème «Personnes âgées/Nouvelles technologies de l'information», rapporteuse: Mme DARMANIN (JO C 224 du 30.8.2008); le rapport du Parlement européen RR\39694EN.doc, PE396.494v03-00; MALANOWSKI, N., ÖZCIVELEK, R. et CABRERA, M.: «Active Ageing and Independent Living Services: The Role of Information and Communication Technology» (Vieillissement actif et les services pour une existence autonome: le rôle des technologies de l'information et de la communication). JRC Scientific and Technical Report, EUR 2346 EN — 2008.

(34)  Voir à cet égard le plan d'action «Bien vieillir dans la société de l'information» (COM(2007) 332 final), le Ambient Assisted Living Joint Research Program (http://www.aal-europe-eu), les activités de recherche du 7e programme-cadre pour la recherche et le développement technologique (2007-2013) (http://ec.europa.eu/research/fp7/index_en.cfm) et «Seniorwatch 2Assessment of the Senior Market for ICT, Progress and Developments»

(http://ec.europa.eu/information_society/activities/einclusion/research/ageing/index_en.htm).

(35)  Au Pays de Galles, par exemple, une loi a créé la fonction de Commissaire aux personnes âgées, s'inspirant de celle de Commissaire à la protection de l'enfance, qui assure le suivi de la politique et de la législation adoptées en la matière et qui préconise et commande des recherches.

(36)  Voir http://ec.europa.eu/employment_social/families/european-alliance-for-families-de.html.

(37)  Voir l'avis du CESE sur la «Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social et au Comité des régions — Vers un espace européen de la recherche», rapporteur: M. WOLF (JO C 204 du 18.7.2000).

(38)  Recommandation du 6e programme cadre pour la recherche. Voir l'avis du CESE du 15.9.2004 sur le thème «Besoins en recherche et changements démographiques», rapporteuse: Mme HEINISCH (JO C 74 du 23.3.2005).

(39)  Voir le règlement (CE) no 1083/2006 du Conseil du 11 juillet 2006 portant dispositions générales sur le Fonds européen de développement régional, le Fonds social européen et le Fonds de cohésion (CE) et abrogeant le règlement no 1260/1999; voir aussi l'avis du CESE du 13.12.2007 sur le thème «4e rapport sur la cohésion économique et sociale», rapporteur: M. DERRUINE (JO C 120 du 16.5.2008).


31.3.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 77/123


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Pour une évolution équilibrée du milieu urbain: Défis et opportunités»

(2009/C 77/27)

Le 25 octobre 2007, en vertu de l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, M. Jean-Pierre JOUYET, secrétaire d'État auprès du ministre des Affaires étrangères et européennes, chargé des Affaires européennes, a saisi, au nom de la future Présidence française, le Comité économique et social européen d'une demande d'avis exploratoire sur le thème:

«Pour une évolution équilibrée du milieu urbain: défis et opportunités».

La section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale», qui était chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 14 juillet 2008 (M. van IERSEL, rapporteur, et M. GRASSO, corapporteur).

Lors de sa 447e session plénière, tenue les 17 et 18 septembre 2008 (séance du 17 septembre 2008), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis à l'unanimité.

MILIEU URBAIN: DÉFIS ET OPPORTUNITÉS

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Les villes, dans leur vaste diversité, se trouvent au cœur des évolutions démographiques et socioéconomiques de l'Europe. Leur impact et leurs performances dépendent de leur dimension, et de l'étendue de la gamme d'activités, ainsi que de la qualité de la vie et du travail, sur leur territoire.

1.2

Le CESE soutient les idées fondamentales inscrites dans la Charte de Leipzig sur la ville européenne durable et dans l'Agenda territorial de l'Union européenne (1). Le CESE note qu'un certain nombre de DG de la Commission, ainsi que des programmes et des agences européens, s'intéressent de plus en plus à des opportunités et à des défis liés à l'environnement urbain, souvent en faisant référence à l'ordre du jour de Lisbonne. L'on attend pour l'automne 2008 un Livre vert sur la cohésion territoriale.

1.3

Il est souhaitable d'approfondir et d'élargir encore davantage le débat européen par rapport à la volonté d'avoir des villes, des ville-régions et des zones métropolitaines qui aient «du ressort» et qui soient durables, dans l'ensemble de l'Europe. Pour ce faire, le CESE recommande la création, à l'échelon communautaire, d'un groupe de haut niveau sur «Le développement urbain et la durabilité».

1.4

Il conviendrait que se retrouvent au sein de ce groupe de haut niveau des connaissances approfondies concernant les intérêts propres aux zones urbaines. Le Livre vert sur la cohésion territoriale peut constituer un utile point de départ, à cet égard.

1.5

En coopération avec la Commission (le groupe interservices sur les affaires urbaines) ce groupe de haut niveau pourrait contribuer à un débat européen plus efficace et plus ciblé sur la question des villes, notamment en fixant un ordre du jour de nature prospective, à partir d'une liste de questions intéressant les villes, les zones métropolitaines et les pouvoirs publics  (2). La discussion pourra ainsi repartir sur de nouvelles bases. La coopération entre la Commission et le Conseil s'en trouvera rationalisée dans un sens opérationnel. Cela mettra aussi l'accent sur la responsabilité propre des gouvernements.

1.6

Comme il est d'une importance cruciale de pouvoir disposer de données fiables, la Commission et Eurostat peuvent apporter une contribution à cet égard en élargissant les notifications statistiques des niveaux 3 et 2 de NUTS (3) aux données concernant les villes et les zones métropolitaines, ainsi que leurs réseaux. Il est souhaitable de prendre des dispositions avec les États membres, les offices statistiques nationaux et des établissements de recherche (4) pour la construction de bases de données appropriées.

1.7

L'ORATE (5)est très bien placé, en tant que centre d'analyse et de connaissance, pour surveiller les évolutions; il est aussi très bien placé en tant que plate-forme d'échanges analytiques entre les États membres.

1.8

Dans un certain nombre de secteurs les gouvernements définissent le cadre, mais la mise en œuvre et l'action concrète se situent principalement à un niveau décentralisé; c'est notamment le cas pour ce qui concerne l'accessibilité interne et externe, l'environnement, l'éducation, les conditions de vie familiale, l'esprit d'entreprise, la connaissance et la recherche, l'emploi, l'immigration, les minorités et la diversité ethnique et culturelle, les investissements publics et les services publics, l'encouragement aux investissements (étrangers), le partenariat au sein du secteur public et entre le secteur public et le secteur privé, y compris les financements privés, etc.

1.9

L'Europe a besoin de villes et de zones métropolitaines bien équipées. La conséquence de la dynamique technologique et de l'intégration économique internationale est que les villes affrontent directement des tendances et une concurrence internationales. Il n'est pas étonnant, et il est prometteur, que de nombreuses villes et zones métropolitaines se donnent de nouvelles ambitions. Les meilleures d'entre elles sont des pôles de compétences et de connaissance à tous les niveaux, et aussi des pôles d'investissements tournés vers l'avenir.

1.10

En raison des décalages démographiques, de l'immigration, des exigences écologiques et des retombées des mutations économiques mondiales, ces mêmes villes doivent souvent affronter aussi des défis non négligeables, défis qui peuvent représenter pour elles une lourde charge et susciter parfois des divisions déplorables, sapant par là-même les perspectives positives.

1.11

Comme les villes, indépendamment de leurs différences culturelles et socioéconomiques, présentent manifestement des tendances et des caractéristiques identiques dans l'ensemble de l'Europe, un débat européen continu et des démarches à caractère européen apporteront une valeur ajoutée aux dispositifs et aux contextes nationaux. Outre les analyses et la définition des démarches souhaitables, en particulier l'étalonnage (benchmarking) et les meilleures pratiques de transparence dans le domaine des approches intégrées, l'utilisation de la méthode ouverte de coordination se révélera fructueuse.

1.12

Étant donné que les objectifs et les instruments des politiques gouvernementales (instruments juridiques, fiscaux et financiers) et la mise en œuvre régionale et locale sont nécessairement complémentaires, il est probable qu'un débat de haut niveau portant sur divers scénarios, ainsi que des analyses et des critères de référence (benchmarks) ouvriront de nouvelles perspectives, quelles que soient les différences culturelles et institutionnelles pouvant exister entre les États membres.

1.13

Le CESE souligne la nécessité d'une démarche organisée d'un commun accord entre les DG de la Commission pour ce qui concerne les villes et les zones métropolitaines. La visibilité de cette démarche commune devrait également constituer une incitation pour les gouvernements nationaux à s'orienter vers des démarches intégrées pour ce qui concerne les villes; cela correspond à une demande fréquemment exprimée par les villes à l'adresse des gouvernements et de l'Union européenne.

1.14

Il faut que les analyses et les critères de référence (benchmarks) portent en priorité sur un large éventail de questions dont la récapitulation se trouve au paragraphe 4.12: aspects interconnectés d'un agenda de cohésion des zones urbaines et d'un agenda de la ville durable de l'avenir. Ces aspects traduisent en grande partie une expression régionale de l'ordre du jour de Lisbonne, qui constitue un cadre extrêmement approprié. D'importants travaux sont déjà en cours, travaux menés par des établissements et des agences publics et privés, ainsi que par un certain nombre de grandes villes elles-mêmes, mais il manque encore une démarche globale, transparente et cohérente.

1.15

La plupart des grandes villes et zones métropolitaines sont confrontées à des choix complexes et difficiles. Un engagement et un soutien à caractère paneuropéen en ce qui concerne les analyses peuvent certainement les aider à tirer parti des opportunités et à affronter les défis. À titre d'exemple, il serait souhaitable de créer des prix (annuels) ou des labels européens pour les problèmes urbains. Il existe des réalisations remarquables dans tous les secteurs: urbanisme, conception des bâtiments, immigration, minorités et diversités, mobilité, technologies et marché, projets écologiques, économies d'énergie et logement de qualité, etc. Il conviendrait de les mettre en valeur dans toute l'Europe.

1.16

La gouvernance est un problème à caractère crucial et très critique (6). Souvent, l'on oublie ou l'on néglige la question de savoir qui est responsable et comptable de quoi. Il semble que pour les villes, le leadership, la hauteur de vues et la cohérence soient, de toute façon, un préalable nécessaire (7).

1.17

Les structures administratives complexes qui existent d'un bout à l'autre de l'Europe et qui datent généralement de périodes reculées ne sont pas conçues, en règle générale, pour l'application de politiques régionales modernes et de long terme dans des zones à forte densité de population. Au niveau européen, une discussion sur la manière de rendre plus efficace la gouvernance à plusieurs niveaux pourrait être des plus utiles. Il en va de même de nouvelles formes de partenariat au sein du secteur public et entre secteur public et secteur privé dans les villes, formes de partenariat qui représentent de plus en plus un soutien indispensable.

1.18

Un ordre du jour européen à long terme, un engagement plus prononcé de la Commission et un suivi au niveau européen pourraient aider à définir un sens cohérent de l'orientation au niveau régional et dans les villes. L'agenda de Lisbonne apporte un cadre pour cela. La cohérence est également indispensable pour susciter l'engagement d'autres intervenants et opérateurs publics et privés, ainsi que de professionnels de l'urbanisme, dans des programmes et des projets. Parmi ces derniers, figurent les établissements scolaires et les établissements de formation, l'enseignement supérieur, les architectes et les urbanistes, les partenaires sociaux régionaux, les chambres de commerce, les entreprises, les promoteurs, et notamment les financements privés, les services de santé, les organisations culturelles, et d'autres encore.

1.19

Un ordre du jour européen favoriserait un nouveau modèle de développement polycentrique équilibré en Europe, et ferait naître de nouvelles formes de collectivités vivantes, ce qui bénéficierait aussi à la société dans son ensemble. Ce processus est en cours, et il conviendrait, de l'avis du CESE, de le reconnaître et de le soutenir pleinement.

2.   Contexte

2.1

Le paysage démographique de la planète se modifie. Depuis 2007, pour la première fois dans l'histoire, plus de la moitié de la population mondiale vit dans des villes. Le phénomène d'urbanisation croissante s'observe sur tous les continents. Et il tend à s'intensifier.

2.2

À l'heure actuelle, plus de 80 % de la population de l'Europe habite dans des zones urbaines, et une grande partie de ce pourcentage habite dans des villes et des agglomérations de plus de 500 000 habitants. Dans un certain nombre de cas, ces chiffres tendent également à augmenter.

2.3

À côté du «grand Londres» et de l'Île-de-France, ainsi que des grandes villes traditionnelles, dont la plupart sont des capitales, d'autres conurbations, souvent ambitieuses, apparaissent sous l'effet de l'attraction de résidents et d'activités économiques.

2.4

Les politiques de l'UE tiennent compte, dans une certaine mesure, de ce déplacement démographique et des conséquences sociales et économiques qui l'accompagnent. Les villes et l'urbanisation prennent de plus en plus d'importance dans un certain nombre de DG: recherche, environnement, énergie et transports, entreprises et industrie, emploi, affaires sociales et égalité des chances. La politique régionale de l'UE s'intéresse aussi à l'urbanisation, comme en témoignent les programmes urbains tels qu'URBACT, JEREMIE et JESSICA (8), ainsi que les projets urbains qui se déploient dans le cadre du Fonds social de l'UE (9). Au sein de la Commission, a été créé un groupe interservices sur les affaires urbaines.

2.5

Cette image reflète l'intérêt croissant et l'activité focalisée qui existent dans les États membres eux-mêmes en matière de développement de l'urbanisation et des zones métropolitaines.

2.6

Outre un nombre croissant d'analyses et d'études concernant les villes et l'urbanisation dans les États membres, l'ORATE produit de nombreuses cartes géographiques faisant apparaître clairement des tendances démographiques et socioéconomiques actuelles.

2.7

La Commission a amorcé en 1997 une démarche globale par rapport aux villes avec une communication intitulée: «La question urbaine: orientation pour un débat européen»  (10).

2.8

Dans le cadre d'une série de réunions ministérielles informelles portant sur le développement urbain et la cohésion territoriale, réunions qui se sont tenues de novembre 2004, à Rotterdam, à mai 2007, à Leipzig, le Conseil des ministres chargés de l'aménagement du territoire et des affaires urbaines a souligné l'importance du développement urbain et de la cohésion territoriale en Europe, et a mis en évidence de nombreux domaines d'intérêt commun.

2.9

Ce processus a abouti à l'adoption, à Leipzig, en mai 2007, de la Charte de Leipzig sur la ville européenne durable et de l'Agenda territorial. Pendant la présidence slovène, un suivi s'est concrétisé sous la forme d'un projet intitulé «Coordination urbaine — territoriale».

2.10

Parallèlement aux réunions ministérielles informelles, les contacts et les échanges au plus haut niveau entre fonctionnaires nationaux s'intensifient également. Parfois, des établissements de recherche sont invités à approfondir des aspects précis du développement urbain (11).

2.11

Malgré les analyses et les énumérations des secteurs du processus dynamique d'urbanisation une démarche globale de la Commission et du Conseil vis-à-vis de l'urbanisation et de son évolution future en Europe manque encore de clarté.

2.12

En février 2008, le Parlement européen a adopté un rapport intitulé «Suivi de l'agenda territorial et de la charte de Leipzig — vers un programme d'action européen en faveur du développement spatial et de la cohésion territoriale» (12). Ce rapport insiste sur l'importance d'une démarche intégrée vis-à-vis de la planification régionale et urbaine, démarche visant à renforcer la capacité des régions et des villes à améliorer leur adaptabilité aux évolutions économiques, dans l'intérêt de la qualité de vie des citoyens européens.

2.13

En novembre 2007, le Comité des régions a adopté un avis concernant le «Quatrième rapport sur la cohésion économique et sociale» (13). Dans cet avis, le Comité «demande, compte tenu du rôle central joué par les villes européennes dans la réalisation des objectifs des stratégies de Lisbonne et de Göteborg et dans l'intégration sociale, par exemple celle des immigrés, qu'un chapitre spécial soit consacré à la dimension urbaine dans le cinquième rapport sur la cohésion».

2.14

Il existe des différences non négligeables parmi les villes européennes (entre les grandes et les petites villes, entre celles qui sont fortement urbanisées et celles qui sont moins peuplées, entre les paysages, par exemple, de grandes villes et de groupes de villes, entre les villes prospères et celles qui sont moins développées). Mais l'on est aussi frappé du dénominateur commun, qui est qu'un déplacement démographique spontané vers les villes est en cours et que l'attraction économique des grandes villes s'exerce de plus en plus fortement, alors que dans le même temps, ces mêmes villes sont confrontées à des défis identiques.

2.15

Le tableau des opportunités et des défis apparaît d'autant plus clairement que de nos jours, l'urbanisme réussi ne se limite pas seulement à l'aménagement du territoire et au logement, mais prend également en compte de manière explicite tous les facteurs socioéconomiques pertinents dans ce que l'on appelle une perspective holistique. De plus en plus, des projets urbanistiques et d'aménagement de plus en plus tournés vers l'avenir s'élaborent sur la base de notions intégrant les aspects territoriaux, écologiques, économiques et sociaux.

2.16

Néanmoins, bien que les gouvernements donnent leur préférence à un développement progressif des villes, les démarches restent souvent ambiguës. La manière dont les évolutions se réalisent et la manière dont elles sont gérées avec succès diffèrent parfois fortement d'un pays à l'autre, et même d'une ville à une autre. Il est clair que cela est aussi le cas concernant le développement des villes-régions ou des zones métropolitaines.

2.17

Le CESE a défini ses positions globales sur l'urbanisation dès 1998, dans un avis intitulé «La question urbaine: orientations pour un débat européen». À ce document ont fait suite d'autres textes, parmi lesquels deux avis expressément consacrés au thème «Les aires métropolitaines européennes: implications socioéconomiques pour l'avenir de l'Europe», en 2004 et 2007. De même, en 2007, a été publié un avis sur l'ordre du jour territorial de l'UE. Outre ces documents, un certain nombre d'autres avis du CESE examinent des domaines précis qui présentent de l'intérêt au regard de la problématique des villes et de l'urbanisation (voir en annexe).

3.   Analyse et évolution

3.1

Les villes et la façon dont les gens vivent en collectivités reflètent les époques historiques et l'évolution correspondante de la société.

3.2

Outre les raisons stratégiques et politiques, dans des cas précis, l'économie et la sécurité ont été des forces motrices importantes dans la création des caractères propres aux collectivités et aux villes et dans leur interconnexion.

3.3

L'histoire moderne des villes en Europe a débuté lorsque des sociétés agricoles arrivées à maturité et leur exposition économique et commerciale leur ont donné naissance d'un bout à l'autre du continent. Plus tard, les stades ultérieurs de l'industrialisation ont modifié les villes existantes, et ont fait apparaître également de nouvelles villes. À partir de la fin du XIXe siècle, l'industrialisation a provoqué une croissance exponentielle de ces villes. La longue évolution historique, y compris le patrimoine culturel, les zones industrielles, le logement, etc., est tout à fait visible dans la plupart d'entre elles.

3.4

Au cours des dernières décennies, les bassins industriels traditionnels ont connu des changements fondamentaux. Un certain nombre d'entre eux ont fréquemment subi, et subissent encore, des restructurations pénibles, parce que les processus industriels traditionnels s'éteignent progressivement.

3.5

De nouveaux processus sont en train de se constituer, en raison de la dynamique technologique et de l'internationalisation. Une transition se fait de la production de masse vers des productions «sur mesure» et des spécialisations nombreuses, ainsi que par un renouvellement continu, d'une part, et par une forte extension du secteur des services, d'autre part. La mobilité s'accroît dans des proportions gigantesques et des déplacements démographiques résultent notamment du mouvement des zones rurales vers les villes et de l'immigration.

3.6

L'environnement devient, pour les populations du monde occidental, illimité et virtuel, avec de très larges horizons, tandis que les mêmes évolutions font aussi sentir leurs effets sur l'environnement physique quotidien de tous les domaines d'activité humaine.

3.7

Cet environnement quotidien, pour un très grand nombre de gens, n'est plus le village, la petite ou la grande ville en tant que réalités distinctes; il consiste de plus en plus en entités régionales plus larges, ce qui crée un nouveau type d'urbanisation.

3.8

Les villes ou régions en réseau se renforcent spontanément et/ou de manière délibérée. Il suffit d'observer l'évolution des grandes villes et des zones métropolitaines en Europe. L'on observe, dans la société moderne urbanisée, l'apparition d'une nouvelle réalité géographique, qui se compose de zones d'influence économique dominantes et d'un grand nombre de «zones subordonnées» qui, souvent, en règle générale, ne correspondent plus aux délimitations administratives existantes.

3.9

L'une des caractéristiques essentielles de ces nouvelles «villes-régions» est leur échelle critique, telle qu'elle est nécessaire pour permettre de gérer l'urbanisation correctement, dans l'intérêt de tous les citoyens, ainsi que de la qualité de leur vie et de leur travail. L'échelle critique peut varier dans des proportions considérables selon les cas, en fonction d'éléments géographiques, économiques et démographiques précis.

3.10

Après une décennie d'études et de discussions, à l'échelon national, sur la «future carte» de l'Allemagne, l'on a mis en évidence, en 2004, onze zones métropolitaines, qualifiées de zones dominantes d'influence économique. Malgré des réactions initiales de scepticisme, l'on poursuit maintenant l'approfondissement de cette notion. Le rapport et l'interdépendance qui existent entre zones métropolitaines et zones rurales sont un problème d'actualité.

3.11

Au cours de la même période, des études ont été effectuées en France par la DIACT (14), études suivies de la mise en évidence d'un certain nombre de métropoles. En janvier 2008, a été présenté un document d'orientation intitulé «Imaginer les métropoles d'avenir» (15), document qui pourrait inciter à une promotion accrue de ces conurbations en France, et inciter aussi à l'élaboration d'une législation appropriée à cet effet. Au Royaume-Uni également, l'on observe une importante activité en ce qui concerne les villes-régions.

3.12

D'autres gouvernements et/ou collectivités régionales et locales prennent des initiatives dont les priorités sont plus ou moins les mêmes. Dans des pays tels que la Scandinavie, les pays baltes, l'Irlande et l'Autriche, et dans la Randstad, aux Pays-Bas, cela concerne principalement les capitales et leurs environs. Dans les grands États membres, tels que l'Espagne, l'Italie et la Pologne, l'on voit apparaître un nombre plus important de conurbations prédominantes.

3.13

À côté des conurbations principales, l'on observe l'apparition d'un phénomène de conurbations «secondaires», phénomène qui conduit à constater que l'urbanisation, sans être, bien sûr, également répartie sur l'ensemble du continent, est une caractéristique importante du paysage européen.

3.14

Les évolutions sociales et économiques donnent naissance à une Europe urbanisée polycentrique qui ne se limitera plus à une zone géographique précise, comme la traditionnelle «banane bleue», ou à un groupe fermé de capitales.

4.   Défis et opportunités

4.1

Une question cruciale qui se pose est celle-ci: que sera et que doit être, dans l'Europe de l'avenir, la ville durable pour constituer un milieu de vie prometteur pour ses citoyens? Dans la perspective d'un débat européen sur la complexité des évolutions urbaines, l'on doit distinguer un certain nombre de facteurs et de tendances prédominants qui recouvrent des réalités souvent différentes à l'intérieur des grandes villes ou des «villes-régions» et d'une grande ville ou d'une «ville-région» à l'autre, dans l'ensemble de l'Europe.

4.2

Parmi ces facteurs et ces tendances, l'on peut citer:

les évolutions démographiques, et notamment:

le vieillissement de la population,

les villes en tant que pôles d'attraction pour les jeunes professionnels,

une diversité ethnique et culturelle accrue, conséquence de l'immigration;

des groupes de villes et de municipalités sont qualifiés de villes et régions en réseau ou de zones métropolitaines;

les transports et la mobilité: les zones d'influence économique sont de plus en plus interconnectées d'un bout à l'autre de l'Europe, et au-delà;

les investissements internationaux et les sièges internationaux d'entreprises, ce qui suppose aussi des services aux entreprises;

un nombre croissant de centres de connaissance et de recherche;

l'apparition de secteurs nouveaux de l'industrie et des services, et l'importance donnée à la créativité;

des marchés du travail dynamiques et en mutation;

le développement de voies d'accès;

des logements modernes et une planification spatiale adaptée;

la création de nouvelles alliances dans les zones urbanisées;

la revitalisation de centres urbains et la réduction du développement urbain tentaculaire;

les loisirs et les manifestations;

l'importance donnée à la culture (notamment au patrimoine historique et naturel), ainsi qu'aux équipements culturels.

4.3

Pendant ce temps, dans les villes, les problèmes existants se font plus aigus et de nouveaux défis apparaissent:

durabilité, aspects environnementaux, énergie;

dépeuplement des centres urbains;

limitation de l'étendue des espaces publics urbains et défis en rapport avec leur qualité;

infrastructures, systèmes de transport et accessibilité;

gestion de la mobilité;

défis pour les personnes faiblement qualifiées: emploi, enseignement, logements;

défis suscités par le vieillissement de la population;

manque d'esprit d'entreprise suffisant, notamment dans les zones en difficulté;

immigration illégale;

éducation et compétences;

échecs ou négligences, à un stade antérieur, en matière d'aménagement du territoire, par exemple dans les banlieues;

communautés marginalisées et criminalité;

risque de terrorisme.

4.4

Le paysage démographique des grandes villes est souvent cause de difficultés, mais il offre aussi certaines possibilités. Le tableau diffère d'une ville à l'autre, en fonction de la composition de la population et en fonction des chances économiques, mais aussi en fonction des politiques nationales. La réussite de politiques intégrées dans les pays d'accueil a ordinairement pour conséquence un degré (plus) élevé d'inclusion.

4.5

Les rapports entre les zones rurales et les villes constituent un vrai défi. Tout à fait à l'opposé des conceptions populaires et politiques généralement admises, l'existence d'une relation harmonieuse entre les zones rurales et les villes au plan des conditions de vie et de travail dans les zones métropolitaines est d'une importance cruciale et se situe aux antipodes de la perception commune des antithèses du type «ceci ou cela» ou «eux et nous». Cela coïncide parfaitement bien avec le nouveau modèle de développement polycentrique.

4.6

Bien que les points de départ, pour les villes, puissent être différents, en raison des différences de niveaux de développement, la plupart des différences sont relatives. Essentiellement, le mode d'urbanisation des nouveaux États membres traduit les mêmes phénomènes, même si, jusqu'à présent, un certain écart demeure. La rénovation est l'un des objectifs primaires. Étant donné que la croissance économique donnera lieu à une augmentation des dépenses publiques, des investissements privés et des niveaux de revenus, l'urbanisation présentera progressivement les mêmes caractéristiques dans toute l'Europe.

4.7

Dans les projets d'orientation et les propositions de projets concernant l'urbanisation, la Commission fait maintenant systématiquement référence à l'ordre du jour de Lisbonne. De plus en plus, les documents du Conseil et les documents nationaux établissent avec insistance le même lien. Dans les lignes directrices stratégiques communautaires, la Commission qualifie les villes de moteurs de développement régional et de centres d'innovation, mais elle parle également de la nécessité d'améliorer la cohésion interne en combattant l'exclusion sociale et la criminalité, et de la nécessité d'améliorer la qualité de la vie dans les quartiers déshérités.

4.8

L'ordre du jour de Lisbonne a débuté sous la forme d'un processus «descendant». Dans le même temps, la Commission et le Conseil ont acquis la conviction qu'il fallait activer aussi les forces «ascendantes» («bottom-up»). Parmi ces forces «ascendantes», les villes qui sont en plein développement sont des acteurs importants: une part décisive de la modernisation des structures territoriales et socioéconomiques européennes se fait principalement par le moyen d'investissements publics et privés, ainsi que par le moyen de mesures concrètes dans les régions et les villes. Les villes sont d'ordinaire le niveau géographique le plus approprié pour permettre au secteur public, au secteur privé et à l'enseignement supérieur, en collaboration avec la société civile, d'interagir pour créer l'indispensable innovation en Europe.

4.9

C'est là la raison pour laquelle le CESE estime que les grandes villes et les zones métropolitaines doivent définir leur propre ordre du jour de Lisbonne dans les domaines de la compétitivité, du développement durable et de la cohésion et de l'inclusion sociales. Cet ordre du jour devrait permettre aux responsables politiques et à toutes les autres parties concernées au niveau régional de disposer d'une structure tournée vers l'avenir et d'un programme à long terme. Cela favorisera du même coup la confiance des villes et des «villes-régions» dans leurs propres capacités, leur permettant de mieux se faire entendre, au plan national et international.

4.10

Il faut qu'un ordre du jour régional à long terme dans les zones à forte densité de population en Europe soit intégré ou holistique, c'est-à-dire que tous les aspects doivent être interconnectés. Plus les investissements privés bénéficient de conditions favorables, plus nombreuses sont les possibilités de créer des emplois et de fournir des services publics, ainsi que d'agir en faveur des catégories vulnérables, telles que les personnes âgées (seules) et les personnes peu qualifiées (16). En portant une attention particulière et ciblée à la durabilité et à la qualité globale de l'environnement construit, l'on contribuera à rendre ces villes et ces régions plus attrayantes, tant pour la population que pour les investissements (internationaux). Une amélioration des dispositifs de cohésion sociale facilitera la création d'emplois. Des stratégies globales et soutenues renforceront la crédibilité auprès de la population (17).

4.11

Il convient aussi de ne pas perdre de vue le fait que souvent, ce sont des rigidités tenant à l'aménagement du territoire qui empêchent les marchés de fonctionner: logement, politique de développement, infrastructures, transports et mobilité. En règle générale, la solution à ces rigidités se trouve au niveau métropolitain. L'intégration des marchés peut aussi avoir pour effet de rendre désuètes les frontières nationales (18).

4.12

Les aspects interconnectés d'un ordre du jour pour des zones urbanisées de qualité et la ville durable de l'avenir se caractérisant par la cohésion sont les suivants:

créer les conditions d'un développement économique moderne, pour les PME ainsi que pour les investissements internationaux et les sièges d'entreprises, de manière à promouvoir le «clustering» économique;

mise en œuvre correcte du droit communautaire et simplification des réglementations régionales et locales;

politiques de l'emploi et dialogues sociaux à l'échelon régional;

éducation et formation à tous les niveaux, pour toutes les catégories d'enseignement, et notamment l'apprentissage tout au long de la vie, les filières d'apprentissage au travail et l'enseignement en ligne;

des conditions de vie compatibles avec la vie de famille, ce qui suppose, par exemple, des services de garde d'enfants, qui soient des services offerts à des prix raisonnables;

R & D, c'est-à-dire des installations de recherche, des universités technologiques et des parcs scientifiques, de l'innovation;

infrastructures physiques:

participation aux réseaux transeuropéens,

gestion de la mobilité (19),

systèmes de transport en commun multimodaux,

partenariats entre le secteur public et le secteur privé, et notamment les financements privés;

infrastructures virtuelles:

télécommunications,

les TIC comme exigence fondamentale, et diffusion de l'accès à haut débit et de l'interconnectivité;

développement durable:

mise en œuvre de politiques environnementales,

prévention des aspects négatifs de l'expansion urbaine anarchique, et favoriser la densité urbaine,

domaines précis, tels que la gestion des déchets, la gestion de l'eau et l'efficacité énergétique, par exemple dans la construction et le logement, dans les transports (en commun), par la tarification de l'usage des routes, etc.;

cohésion sociale (20):

urbanisme et architecture durables,

logements sociaux pour les catégories sociales vulnérables,

services d'intérêt public de qualité égale (santé, éducation, sécurité) dans l'ensemble de la région,

réseaux de transport en commun dans l'ensemble de la région, et notamment liaisons avec les quartiers défavorisés,

attention ciblée portée à la diversité ethnique et culturelle et au dialogue interculturel,

élimination des obstacles qui compliquent la vie d'une partie de la population, en particulier les personnes plus âgées et les handicapés,

mesure des pouvoirs publics pour faire diminuer les taux élevés de chômage parmi les jeunes dans les quartiers déshérités: éducation et formation, nouvelles activités économiques, promotion de l'esprit d'entreprise, organisation de manifestations,

culture, équipements culturels, manifestations culturelles,

sports et loisirs,

tourisme,

promotion d'un sentiment d'identité régionale commune.

4.13

Pour la ville et la ville-région modernes, une «Baukultur» (21) correspondant à l'état de l'art est d'une importance décisive; il faut entendre par là le concept architectural global qui se fonde sur une démarche holistique dans laquelle les architectes, les planificateurs, les concepteurs, l'industrie du bâtiment, les promoteurs et les utilisateurs finaux collaborent pour créer et pour entretenir un environnement bâti de qualité, afin d'apporter des solutions pour les villes durables (22).

5.   Urbanisation et gouvernance

5.1

L'Europe a besoin de villes qui aient du «ressort» et qui soient durables, ainsi que de villes-régions ou de zones métropolitaines qui puissent projeter leur image à l'échelle internationale.

5.2

Cela place la «gouvernance» au premier rang de l'ordre du jour. Il existe un large consensus sur l'analyse des chances et des défis, et il y a de plus en plus d'échanges de vues entre les villes, mais, mise à part la différence de conditions d'une ville à l'autre, une question reste peu claire: celle de savoir qui est responsable de quoi dans les situations concrètes:

Il est souhaitable de poser d'un commun accord des définitions concernant les grandes villes et les villes-régions (23),

l'on constate des variations considérables dans la répartition des tâches entre les gouvernements nationaux, les grandes villes et les zones métropolitaines, et dans ce que l'on attend de ces intervenants,

il existe souvent de la confusion et des malentendus dans les pays où plus d'un ministère est compétent pour certains aspects relatifs aux affaires urbaines,

quel devrait être le rôle de la Commission?

les obstacles administratifs régionaux et locaux liés à la «gouvernance» au niveau régional ou local constituent souvent une entrave à l'adoption de mesures nécessaires,

une gouvernance à plusieurs niveaux qui ne fonctionne pas de manière satisfaisante est souvent cause de problèmes compliqués,

il existe des différences considérables dans la manière dont les villes communiquent avec la population et les intervenants importants, dans le cadre de l'organisation de la «démocratie participative»,

le rôle des organisations spécialisées non gouvernementales, par exemple en ce qui concerne le «logement», l'enseignement, les minorités, les entreprises, et d'autres domaines, est souvent défini de manière imprécise, et il en va de même de la manière dont les villes et les villes-régions en tirent avantage,

il n'existe pas toujours de démarche cohérente en matière de partenariat au sein du secteur public et entre le secteur public et le secteur privé, pour ce qui concerne les programmes urbains, les investissements cruciaux et les solutions imaginatives,

il existe un besoin de démarches à long terme par rapport à la ville durable de l'avenir,

la transparence et la légitimité sont des outils indispensables des stratégies à long terme.

5.3

La pratique démontre que pour les villes, le leadership, la hauteur de vues et la cohérence sont, en règle générale, la condition d'une gestion réussie des mutations, et la condition d'un progrès constant.

5.4

Puisque les grandes villes et les zones métropolitaines constituent des pôles d'attraction pour un grand nombre de personnes, ainsi que leur environnement quotidien, et que leur importance socioéconomique potentielle pour l'Europe est indiscutable, le CESE juge nécessaire de débattre en profondeur de l'impact global de leur existence, non seulement à l'échelon national, mais également au niveau de l'UE.

5.5

Étant donné que le traité ne contenait jusqu'à récemment aucune disposition concernant l'aménagement du territoire, et aussi en raison de subsidiarité, le rôle de la Commission et du Conseil est resté ambigu. Par le moyen d'une consultation directe avec les villes, les DG de la Commission réalisent cependant de plus en plus une grande variété de projets dans des zones urbanisées. Les problèmes qui se posent concernent la R & D, l'environnement, l'emploi et les transports (24).

5.6

Les villes tendent à devenir, elles aussi, plus proactives vis-à-vis de Bruxelles, parce que la législation de UE les touche directement. Les thèmes abordés sont les règlementations environnementales, les marchés publics, le chômage des jeunes, l'ordre et la sécurité publics, l'immigration, les zones déshéritées.

5.7

L'on peut en dire autant de l'ordre du jour de Lisbonne en général. Les critères européens concernant les différents sujets sont de plus en plus évalués par rapport à une application régionale: quels sont les effets de l'application des propositions et/ou du règlement adopté au niveau urbain et métropolitain? Des exemples prouvent que si l'on ne tient pas compte de situations urbaines particulières, la mise en œuvre peut s'avérer plus coûteuse que l'avantage des contributions apportées aux projets par les Fonds structurels.

5.8

Dans ce contexte, le CESE se félicite de l'initiative de la Commission, qui a l'intention de présenter sous peu un livre vert sur la cohésion territoriale. Le débat sur le livre vert donnera également l'occasion d'approfondir la charte de Leipzig sur les villes européennes durables.

5.9

L'agenda évoqué plus haut, au paragraphe 4.12, est impressionnant. Les situations sont généralement très compliquées. Jusqu'à présent, l'on n'a développé de perspective stratégique cohérente concernant les grandes villes et les «villes-régions» que dans un nombre limité de cas. Fréquemment, l'on constate une certaine absence d'orientation claire, ce qui s'explique en partie par les positions ambiguës des gouvernements et les divergences de vues qui existent au sein des administrations nationales, ainsi qu'au niveau métropolitain lui-même.

5.10

D'autre part, une vision et une cohérence à long terme au niveau métropolitain sont indispensables pour gagner l'adhésion des collectivités existantes et, en définitive, des collectivités nouvelles, ainsi que pour les intervenants privés et pour la création d'alliances bénéfiques au sein de la société civile organisée. À l'heure actuelle, cela semble d'autant plus difficile que la notion de zones métropolitaines est un phénomène assez récent, qui ne rend que plus souhaitable un débat fructueux en Europe (25).

5.11

Cela ne signifie pas que tous les cas se ressemblent, bien au contraire. Outre les différences démographiques et socioéconomiques que l'on observe d'un bout à l'autre de l'Europe, il existe un large éventail de traditions administratives et culturelles différentes selon les pays et les régions. Concrètement, les situations, les modes de vie et les conceptions de l'organisation varient considérablement. Dans certains cas, une seule idée ou conception d'avenir a joué un rôle décisif. Plus généralement, l'ordre du jour de Lisbonne pourrait se révéler utile pour permettre de parvenir à des positions communes dans le débat et dans la démarche.

5.12

Souvent, le gouvernement central ne laisse pas suffisamment de marge de manœuvre aux villes pour qu'elles puissent prendre en charge leur propre destin. Les politiques sont avant tout descendantes, et il en va de même des procédures administratives. À l'inverse, l'encouragement à l'autodétermination pourrait créer des conditions favorables à une mise en œuvre bien adaptée de stratégies et de politiques souhaitables. Une redéfinition de la position des grandes villes et des «villes-régions», ou des zones métropolitaines, pourrait permettre de faire de celles-ci de véritables «communautés de responsabilité».

5.13

L'autodétermination et un respect mutuel entre les villes et les zones qui les environnent renforceront la responsabilité des collectivités locales et régionales et leur capacité à rendre des comptes et contribuera à l'évolution qu'il faut souhaiter vers une attitude proactive de la société civile et du secteur privé.

5.14

Pour être efficace, il sera nécessaire, dans de nombreux cas, de remodeler les entités administratives locales et régionales existantes (municipalités et autres), ainsi que leurs compétences.

5.15

La population des villes européennes pourrait devenir encore plus diversifiée, à la fois du point de vue des emplois et des revenus et du point de vue culturel. Potentiellement, tous les éléments sont en place pour créer une urbanisation enrichie, mais si les processus ne sont pas gérés correctement et si les potentialités ne sont pas exploitées, la cohésion de la société risque de s'en trouver compromise.

5.16

Des discussions ciblées, l'établissement d'un ordre du jour et un suivi efficace au niveau européen peuvent contribuer, au plus haut point, à permettre de définir un sens cohérent de l'orientation au niveau régional. Non seulement cette cohérence est nécessaire pour les intervenants publics, mais elle sera indispensable pour gagner l'adhésion d'autres intervenants et professionnels de l'urbanisme, du secteur public et du secteur privé.

Bruxelles, le 17 septembre 2008.

Le président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  «Charte de Leipzig sur la ville européenne durable» et «Agenda territorial de l'Union européenneVers une Europe plus compétitive et durable avec des régions diverses», adoptés lors de la réunion ministérielle informelle sur le développement urbain, tenue à Leipzig les 24 et 25 mai 2007.

(2)  Sur le contenu de cet agenda on pourrait prendre comme ligne directrice ce que M. FALCO, secrétaire d'État français à l'Aménagement du territoire a déclaré devant la commission REGI du Parlement européen le 16 juillet 2008«… nous souhaitons, en partenariat avec les décideurs locaux, élaborer un référentiel commun de la ville durable et solidaire. Il s'agira plus concrètement de lancer un processus partagé pour l'élaboration de critères et d'indicateurs communs de manière à donner un contenu opérationnel aux recommandations de la Charte de Leipzig».

(3)  Nomenclature des unités territoriales statistiques établie par EUROSTAT. NUTS 2: de 800 000 à 3 000 000 habitants; NUTS 3: de 150 000 à 800 000 habitants.

(4)  TNO, qui est un établissement de recherche néerlandais, a construit un outil de suivi fondé sur un vaste arsenal de variables concernant le niveau métropolitain: la démographie, l'économie (valeur ajoutée, productivité du travail), le marché de l'emploi (chômage, éducation, main-d'œuvre), environnement (qualité de l'air), infrastructures, marché des espaces de bureaux, tourisme, etc. Les données proviennent d'Eurostat et d'autres sources encore, et servent à comparer la conurbation Randstad Holland avec 19 autres métropoles principales d'Europe sur la période 1995-2006. Les données d'Eurostat sont mises en compatibilité avec celles de l'OCDE. Elles sont révisées chaque année. Il serait possible d'appliquer ce suivi à d'autres zones métropolitaines.

(5)  Observatoire en réseau de l'aménagement du territoire européen.

(6)  Cf. le chapitre 5 «Urbanisation et gouvernance».

(7)  À cet égard, le développement méthodique de BILBAO aux cours des vingt dernières années constitue un exemple impressionnant et convaincant.

(8)  URBACT II (2007) fait partie de l'initiative de la Commission «Régions, actrices du changement économique», qui s'inscrit dans la mise en œuvre de la stratégie de Lisbonne-Göteborg. JEREMIE (Joint European Resources for Micro to Medium Enterprises: ressources européennes communes pour des entreprises allant de la microentreprise à la moyenne entreprise) est une initiative conjointe de la Commission, de la Banque européenne d'investissement et du Fonds européen d'investissement. JESSICA (Joint European Support for Sustainable Investment in City Areas: soutien conjoint de l'Europe à l'investissement durable dans les zones urbaines) (2006) est une initiative conjointe de la Commission, de la Banque européenne d'investissement et de la Banque de développement du Conseil de l'Europe.

(9)  Cf. Aussi le guide de la«Dimension urbaine des politiques communautaires 2007-2013» du groupe interservices de la Commission sur le développement urbain.

(10)  COM(97) 0197 final, JO C 226 du 20.7.1998, p. 36.

(11)  Un projet qui mérite, à cet égard, d'être remarqué est celui du Nicis Institute, qui est la branche hollandaise du Réseau européen de connaissances sur les politiques urbaines (http://i.ville.gouv.fr/EUKN/EUKN_index.php). Ce projet est mené en coopération avec les États membres et porte sur les instruments administratifs, juridiques et fiscaux permettant de promouvoir des villes durables. Sa réalisation s'inscrit dans le cadre de la Présidence française, à la demande de la Délégation Interministérielle de la Ville. Le Réseau européen de connaissances sur les politiques urbaines est une organisation en réseau à laquelle participent 16 États membres.

(12)  P6_TA-PROV(2008)0069.

(13)  CdR 97/2007 fin.

(14)  Délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires (ancienne DATAR).

(15)  «Imaginer les métropoles d'avenir», rapport de M. Dominique PERBEN, député, ancien ministre des Transports, élaboré à la demande de M. le Président SARKOZY et de M. FILLON, Premier ministre. M. PERBEN établit d'abord un diagnostic de l'urbanisation et des métropoles en Europe et en France, puis évoque des défis et des mesures pour les grandes villes et les «villes-régions» de plus de 500 000 habitants en France. Il présente aussi dix-neuf propositions concrètes d'actions et de législation. Ce sujet sera aussi abordé pendant la Présidence française de l'UE, au deuxième semestre 2008.

(16)  Conférence DG Emploi, Affaires sociales et Égalité des chances «Harnessing an Entrepreneurial Spirit for Inclusive Local Employment Development» (mobiliser un esprit d'entreprise pour un développement inclusif de l'emploi local), 25 avril 2008.

(17)  En Allemagne, existe un nouveau concept de zone métropolitaine que l'on désigne par les termes «eine neue Verantwortungsgesellschaft», c'est-à-dire une «nouvelle communauté de responsabilité». Cf. Manfred SINZ, ministère fédéral des Transports, de la Construction et des Affaires urbaines: «From Metropolitan Regions to Communities of Responsibilities» (Des régions métropolitaines aux communautés de responsabilité).

(18)  Un exemple en est la capacité d'absorption du marché financier de Londres. Dans un autre contexte, l'on peut citer comme exemples des régions telles que Lille-Courtrai, Copenhague-Malmö et Vienne-Bratislava.

(19)  Cf. aussi «Vers une nouvelle culture de la mobilité urbaine», COM(2007) 551 final.

(20)  Cette question est traitée de manière approfondie dans un rapport français intitulé «Une Nouvelle Politique pour les banlieues», Palais de l'Elysée, 8 février 2008. Ce rapport présente un certain nombre de propositions pour lutter contre le risque de création de ghettos urbains. En particulier, il fait état d'initiatives nationales et régionales ou locales concernant l'éducation, la formation et la création d'emplois et d'entreprises dans les quartiers défavorisés. La Présidence française prévoit d'organiser plusieurs conférences communautaires qui seront consacrées à cette question.

(21)  «Baukultur as an impulse for growth. Good examples for European Cities» («La Baukultur comme moteur de croissance. Bons exemples pour les villes européennes») — étude du ministère fédéral allemand des Transports, du bâtiment et des affaires urbaines, publiée en avril 2007.

(22)  Conférence du Conseil de l'Europe des architectes: «Designing for the Future: Architecture and Quality of Life» («Concevoir pour l'avenir: architecture et qualité de la vie», Bruxelles, 10 avril 2008.

(23)  Cf. aussi, à titre d'exemple utile, la «Metropolitan Statistical Area» («zone statistique métropolitaine») (MSA) aux États-Unis; l'ancienne appellation était: «Standard Metropolitan Statistical Area» (zone statistique métropolitaine normalisée) et datait de 1959.

(24)  Un exemple parlant en est le rapport de la DG Politique régionale concernant un large éventail de projets et intitulé «Régions et innovation», mars 2007.

(25)  Les conseils sociaux et économiques au niveau national ou régional peuvent également jouer un rôle positif. Un exemple parlant en est un rapport sur l'avenir de la Randstad, aux Pays-Bas, présenté par le Conseil social et économique en avril 2008

http://www.ser.nl/~/media/Files/Internet/Talen/Engels/2007/2007_04.ashx


31.3.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 77/131


Avis du Comité économique et social européen sur «L'économie de l'UE: bilan de 2007 — Repousser la frontière de la productivité en Europe»

(2009/C 77/28)

Le 17 janvier 2008, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l'article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d'élaborer un avis d'initiative sur le thème:

«L'économie de l'UE: bilan de 2007 — Repousser la frontière de la productivité en Europe».

La section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 3 juin 2008 (rapporteur: M. MORGAN).

Lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 18 septembre 2008), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 108 voix pour, 4 voix contre et 5 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le présent avis est le dernier-né des avis du CESE sur les questions de gouvernance économique dans l'UE. Il est fondé sur la communication de la Commission (COM(2007) 721 final) intitulée «L'économie de l'UE: bilan de 2007Repousser la frontière de la productivité en Europe».

1.2

Le bilan de 2007 repose sur la constatation suivante: l'Union européenne est l'une des économies les plus avancées et les plus productives au monde. Toutefois, il subsiste un écart significatif de niveau de vie (mesuré par le PIB) entre l'Union européenne et l'économie la plus avancée au monde, à savoir les États-Unis. Cette situation découle principalement d'évolutions divergentes de la productivité dans de nombreux secteurs de l'industrie et États membres.

1.3

Si les données sur les États-Unis constituent une référence utile pour évaluer les performances des États membres, l'avis s'intéresse davantage aux comparaisons entre États membres de l'UE. Des facteurs tels que les modèles sociaux, les heures de travail et la participation sur le lieu de travail affectent les comparaisons avec les États-Unis mais ces questions ne sont pas le sujet de l'avis. Cet avis cherche uniquement à comprendre pourquoi certains pays de l'UE créent plus de richesse et d'emplois que d'autres.

1.4

L'idée centrale du rapport de la Commission est que la mise en œuvre de l'agenda de Lisbonne aidera les États membres à accroître à la fois l'emploi et la richesse. Un certain nombre de politiques fondamentales peuvent y contribuer. Elles doivent cibler:

la promotion de niveaux plus élevés d'investissement en R&D,

l'essor d'établissements éducatifs et d'organismes de recherche de niveau international travaillant en étroite collaboration avec l'industrie,

la mise en place d'un marché unique ouvert et compétitif qui fonctionne parfaitement,

la promotion d'une approche intégrée en vue de renforcer à la fois la flexibilité et la sécurité sur le marché de l'emploi — le CESE rappelle que cette approche doit être négociée par les partenaires sociaux,

l'amélioration de la qualité des finances publiques.

1.5

Ces politiques prennent encore plus d'importance à la lumière des évolutions de l'économie mondiale depuis le Conseil européen de Lisbonne en 2000. Parmi les nouveaux défis, citons la crise financière actuelle mais aussi l'équilibre entre l'offre et la demande pour les combustibles fossiles, le changement climatique avéré, les pénuries alimentaires croissantes et, d'une manière générale, l'envol de la demande pour les matières premières. Ces problèmes ne peuvent que renforcer l'importance de l'investissement en R&D et de la recherche de niveau international. Ils soulignent la nécessité d'un marché unique compétitif reposant sur des principes efficaces de flexicurité sur le marché du travail et sur des finances publiques de haute qualité.

1.6

Les facteurs macroéconomiques, aussi bien du côté de la demande que de l'offre,ont fait l'objet d'un examen approfondi dans les avis précédents du CESE sur la gouvernance économique de l'UE présentés en introduction. Le Comité y soulignait que, pour améliorer la compétitivité, outre les mesures qui concernent l'offre, il convient de doser les politiques macroéconomiques de manière à encourager le revenu, la demande et l'emploi. L'objectif de cet avis est de montrer que, malgré les facteurs de la demande, il existe une importante corrélation entre les réformes de l'offre dans le cadre de l'agenda de Lisbonne et la croissance du PIB.

1.7

Dans le «tableau de bord» de Lisbonne pour l'année 2007 (1) publié récemment, les 7 premiers pays sont, dans l'ordre: le Danemark*, la Suède*, l'Autriche*, les Pays-Bas*, la Finlande*, l'Irlande* et le Royaume-Uni*, suivis de l'Allemagne et de la France (2). Parmi les nouveaux États membres, les mieux classés sont la Slovénie* et l'Estonie*. Les moins bien classés de l'UE des 15 sont l'Espagne, la Grèce, le Portugal et l'Italie. Les Pays-Bas, l'Autriche et l'Estonie se distinguent par l'efficacité de la mise en œuvre du processus de Lisbonne. La Grèce et l'Italie sont les moins efficaces à cet égard. En quoi la bonne mise en œuvre du programme de Lisbonne influe t-elle sur la productivité et l'emploi?

1.8

Même si beaucoup d'autres facteurs sont à prendre en compte, le présent avis nous amène à conclure qu'il existe en effet un lien étroit entre la mise en œuvre du processus de Lisbonne et la croissance de l'emploi et du PIB par habitant. En général, l'inverse est également vrai: les pays qui ne mettent pas en œuvre les réformes de Lisbonne ont tendance à avoir de mauvais résultats. En s'appuyant sur ces conclusions, le CESE encourage les États membres à mettre en œuvre la totalité du programme de Lisbonne dans les plus brefs délais.

1.9

Il convient de souligner l'importance de chaque élément du programme. En particulier, le Comité tient beaucoup à l'augmentation des investissements en connaissances, éducation et R&D. Il ne fait aucun doute que la concurrence stimule l'innovation; les économies de l'UE doivent donc être en concurrence afin de pouvoir relever les défis de la mondialisation. Le redéploiement des facteurs de production des industries et secteurs défaillants vers les industries et secteurs émergents et prospères est nécessaire afin de maximiser la productivité des économies des États membres. Cela implique que les États membres engagent des ressources en faveur de la flexicurité. Enfin, il est évident que la performance économique des États membres dépend largement de la bonne gestion de leurs finances publiques.

1.10

Dans l'avis soumis par le CESE au Conseil de Lisbonne de mars 2000 (3), nous affirmions: «Le Comité est persuadé que l'Europe possède bel et bien l'esprit d'innovation, la créativité, le savoir et le goût d'entreprendre nécessaires pour figurer en bonne place dans le nouveau modèle (la société de l'information). Encore faut-il qu'elle laisse s'exprimer tout ce potentiel. Au lieu de le brider, elle doit désormais le stimuler. Les mesures pénalisantes doivent céder le pas à des initiatives d'encouragement. La dernière décennie du vingtième siècle a été celle de la libéralisation des industries européennes. L'enjeu est à présent de libérer les énergies des Européens et des Européennes». En 2008, il reste encore beaucoup à faire mais l'agenda de Lisbonne est la solution.

2.   Introduction

2.1

Le présent avis est le dernier-né des avis du CESE sur les questions de gouvernance économique dans l'UE. Il a été élaboré en réponse à la communication de la Commission (COM(2007) 721 final) intitulée «L'économie de l'UE: bilan de 2007Repousser la frontière de la productivité en Europe». L'avis précédent, de septembre 2007, portait sur le bilan de 2006 («Renforcer la zone euro: principales priorités politiques»).

2.2

Dans le présent avis, le CESE entend rattacher la croissance de l'emploi et le PIB par habitant des États membres aux différentes recommandations politiques contenues dans la communication de la Commission. À cet égard, cela diffère donc des conclusions de l'avis précédent sur le bilan de 2006 qui expliquait les situations socioéconomiques nationales et les différents objectifs politiques motivant les actions des États membres.

2.3

Les avis antérieurs, d'octobre 2006 (4) et février 2006 (5), traitaient des grandes orientations des politiques économiques (GOPE) pour la période 2005-2008. En mars 2004, nous avions donné notre avis sur les grandes orientations des politiques économiques pour la période 2003-2006 (6). Le CESE a reçu la recommandation de la Commission pour les GOPE 2008-2010 mais il observe qu'elles sont identiques à celles pour 2005-2008. À la vue de ses précédents travaux sur les GOPE, le CESE a décidé de s'appuyer sur le bilan 2007 de l'économie européenne pour l'élaboration du présent avis.

2.4

En octobre 2006, le CESE a examiné les règles affectant les objectifs généraux que sont la stabilité des prix, la croissance et l'emploi. Dans le présent avis, nous nous intéressons davantage aux politiques qu'aux règles. En février 2006, le CESE a publié son avis sur les GOPE pour la période 2005-2008. Cet avis portait sur de nombreux aspects mais, en matière de croissance de l'emploi et de la productivité, il s'appuyait globalement sur le même calendrier que celui qui est à la base du présent avis. Dans ces deux avis, le CESE s'intéressait aux facteurs économiques affectant la demande. Dans le présent avis, nous analysons les propositions de la Commission pour les réformes de l'offre.

2.5

Le Comité souligne toutefois que pour améliorer la compétitivité, outre les mesures qui concernent l'offre, il convient de doser les politiques macroéconomiques de manière à encourager le revenu, la demande et l'emploi. S'agissant du caractère adapté de la politique, le Comité renvoie à son avis de mars 2004, toujours d'actualité.

2.6

Le document de la Commission, «L'économie de l'UE» no 8/2007, est composé de la communication intitulée «Repousser la frontière de la productivité en Europe» et de quatre chapitres, soit 149 pages au total:

1.

Tendances de la productivité en Europe: le moment critique est-il enfin passé?

2.

Évaluation de la productivité au niveau industriel

3.

Doit-on choisir entre la productivité et l'emploi?

4.

Politiques de hausse de la productivité: un autre regard.

Le Comité regrette qu'en matière de renforcement de la compétitivité, la Commission se limite à des recommandations concernant l'offre.

Le présent avis évalue les politiques présentées au chapitre 4.

3.   Contenu essentiel de la communication de la Commission

3.1

Le bilan de 2007 repose sur la constatation suivante: l'Union européenne est l'une des économies les plus avancées et les plus productives au monde. Toutefois, il subsiste un écart significatif de niveau de vie (mesuré par le PIB) entre l'Union européenne et l'économie la plus avancée au monde, à savoir les États-Unis. Cette situation découle principalement d'évolutions divergentes de la productivité dans de nombreux secteurs de l'industrie et États membres.

3.2

En adoptant la stratégie de Lisbonne en 2000, l'UE a prouvé qu'elle accordait une importance capitale à l'amélioration de sa productivité et à l'obtention d'une solide croissance de l'emploi. Les principaux éléments de cette stratégie étaient le renforcement des connaissances, le renforcement des forces concurrentielles et un accroissement de la flexibilité.

3.3

Le renforcement des connaissances implique un accroissement quantitatif et qualitatif de l'investissement en R&D et en capital humain. L'efficacité et la maitrise des coûts dans l'éducation doivent être assurées sur l'ensemble du territoire de l'Union européenne.

3.4

La stimulation de la concurrence est primordiale pour le niveau et le taux de croissance de la productivité. La recherche empirique confirme les effets positifs de l'ouverture des marchés à la concurrence sur la productivité et la croissance, mais également sur l'emploi.

3.5

Une plus grande flexibilité est nécessaire pour pouvoir adapter sans heurts les structures de production à une plus grande spécialisation et à une diversification accrue dans de nouveaux domaines présentant un avantage comparatif relatif. Ces dernières années, des mesures ont été prises par les États membres de l'UE pour faciliter la mobilité des entreprises et des travailleurs, mais d'autres initiatives plus larges sont nécessaires.

3.6

En conclusion, un changement de mentalité s'impose. Un certain nombre de politiques fondamentales peuvent y contribuer. Elles doivent cibler:

la promotion de niveaux plus élevés d'investissement en R&D,

l'essor d'établissements éducatifs et d'organismes de recherche de niveau international travaillant en étroite collaboration avec l'industrie,

la mise en place d'un marché unique ouvert et compétitif qui fonctionne parfaitement,

la promotion d'une approche intégrée en vue de renforcer à la fois la flexibilité et la sécurité sur le marché de l'emploi — le CESE rappelle que cette approche doit être négociée par les partenaires sociaux,

l'amélioration de la qualité des finances publiques.

3.7

Certaines croyances largement répandues sont fausses. En effet, les grands pays et les grandes entreprises ne sont pas les seuls à pouvoir être des leaders technologiques; le commerce n'est pas le principal véhicule de la diffusion de la technologie; les petits pays peuvent être leaders dans certaines spécialités; les petites entreprises lancent souvent de nouvelles technologies innovantes; la mobilité internationale des travailleurs et du capital financier est le principal véhicule de la diffusion de la technologie.

3.8

Un large consensus se dégage actuellement concernant les facteurs qui entravent la croissance de la productivité et les mesures nécessaires pour l'accroître. Les restrictions concernant les marchés de l'emploi et des produits, le manque d'ouverture à l'investissement direct étranger et les obstacles à l'accès ou la création de nouvelles technologies et à leur diffusion figurent parmi les principaux éléments susceptibles de freiner la croissance de la productivité sur de longues périodes.

3.9

La réalisation de gains de productivité dépendant de la sortie du marché des entités les moins productives, les politiques en faveur de la redistribution des ressources sont importantes. Si les gains de productivité font augmenter les revenus, l'on peut s'attendre à ce que la demande des consommateurs s'oriente vers les services. De nombreuses activités de service ayant une forte valeur ajoutée et une forte productivité, l'économie sera alors également en mesure de créer de nouveaux emplois dans des secteurs où la productivité est vraiment faible.

4.   Productivité et emploi

4.1

Le PIB par habitant ne dépend pas uniquement de l'agenda de Lisbonne. Il dépend de facteurs tels que le développement de marchés émergents, de l'Europe de l'Est et de la Russie, l'évolution des prix et des marchés de l'énergie et des matières premières, les évolutions technologiques et, plus généralement, la mondialisation. La demande intérieure est influencée par les niveaux de salaire et d'emploi et par le pouvoir d'achat. Le contrôle de la demande est avant tout une composante de la politique fiscale et monétaire alors que le crédit pour alimenter la demande des entreprises et des consommateurs dépend finalement des banques centrales. Les marchés financiers sont en crise; il est probable que l'offre de crédit diminue, la demande va en pâtir, de même que le PIB.

4.2

Les facteurs macroéconomiques ont fait l'objet d'un examen approfondi dans les avis précédents du CESE sur la gouvernance économique de l'UE présentés en introduction. L'objectif de cet avis est de montrer que, malgré les facteurs de la demande, il existe une importante corrélation entre les réformes de l'offre dans le cadre de l'agenda de Lisbonne et la croissance du PIB.

4.3

Le tableau no 1 présente les données sur le PIB par habitant relatif. Deux dates ont été retenues: 1999, année du lancement de l'euro, et 2007. Pour les nouveaux États membres (NEM), cette période encadre leur adhésion à l'UE. Sur cette période, les États-Unis sont passés de 161,8 à 150,9 % par rapport à l'UE des 27, mais les «anciens» États membres n'ont pas su profiter de ce déclin relatif aux États-Unis, l'UE des 15 passant de 115,3 à 111,7 % et la zone euro de 114,5 à 109,8 % de la norme de l'UE des 27.

4.4

Compte tenu de ces données sur le PIB, que nous apprennent les statistiques sur l'emploi? Le tableau no 2 présente les données de l'emploi pour les années 1998 (début des négociations d'adhésion avec les NEM) à 2006 (dernières données disponibles). Les chiffres du chômage sont donnés jusqu'en 2007. Aux États-Unis, l'emploi est passé de 73,8 à 72 % de la population active sur la période considérée et le chômage est passé de 4,5 à 4,6 %. Dans le même temps, la zone euro a commencé à se reprendre, avec les chiffres de l'emploi passant de 59,2 à 64,8 % et ceux du chômage de 10,1 à 7,4 %. Les chiffres sont un peu meilleurs pour l'UE des 15 et un peu moins bons pour l'UE des 25.

4.5

Dans le «tableau de bord» de Lisbonne pour l'année 2007 (7) publié récemment, les 7 premiers pays sont, dans l'ordre: le Danemark*, la Suède*, l'Autriche*, les Pays-Bas*, la Finlande*, l'Irlande* et le Royaume-Uni*, suivis de l'Allemagne et de la France. Parmi les nouveaux États membres, les mieux classés sont la Slovénie* et l'Estonie*. Les moins bien classés de l'UE des 15 sont l'Espagne, la Grèce, le Portugal et l'Italie. Les Pays-Bas, l'Autriche et l'Estonie se distinguent par l'efficacité de la mise en œuvre du processus de Lisbonne. La Grèce et l'Italie sont les moins efficaces à cet égard. En quoi la bonne mise en œuvre du programme de Lisbonne influe-t-elle sur la productivité et l'emploi?

4.6

En matière de PIB par habitant relatif, le Luxembourg et la Norvège dépassent les États-Unis. Les pays se situant dans un écart de 20 % par rapport aux États-Unis sont l'Irlande* (en première position), les Pays-Bas*, l'Autriche*, la Suède*, le Danemark*, la Belgique et (de justesse) le Royaume-Uni* et la Finlande*. Hors UE, l'Islande, la Suisse et le Japon sont tous à moins de 20 % des États-Unis. Parmi les NEM, Chypre et la Slovénie* sont les plus proches de la moyenne de l'UE des 27 et c'est l'Estonie* qui a progressé de la façon la plus spectaculaire, suivie de la Lettonie, la Lituanie, la Hongrie et la Slovaquie.

4.7

Sur le front de l'emploi, il y a beaucoup de parallèles avec les données sur le PIB. Aux États-Unis, l'emploi est juste au-dessus de 70 % de la population active. Dans le tableau, tous les pays hors UE, y compris le Japon et tous les pays hors zone euro (Danemark*, Suède*, Royaume-Uni*), affichent des niveaux d'emploi supérieurs à 70 %. Dans la zone euro, seuls les Pays-Bas* et l'Autriche* dépassent les 70 %, même si l'Irlande* et la Finlande* n'en sont pas loin. Parmi les NEM, Chypre et l'Estonie* sont en tête avec des chiffres proches de 70 %.

4.8

Au États-Unis, le chômage est à 4,6 %. L'Irlande*, les Pays-Bas*, l'Autriche*, le Danemark*, Chypre et la Lituanie font mieux que les États-Unis, de même que la Norvège. Le Luxembourg, le Royaume-Uni*, la République tchèque, l'Estonie* et la Slovénie* sont tous à moins d'un point des États-Unis. La Suède*, la Lettonie et Malte sont à moins de deux points des États-Unis.

4.9

Il est donc évident que nous devrions étudier les politiques et tendances des pays en tête du «tableau de bord» de Lisbonne (Danemark*, Suède*, Autriche*, Pays-Bas*, Finlande*, Irlande* et Royaume-Uni*) et des NEM en tête du classement (Estonie* et Slovénie*). Pour le présent avis, ces pays seront inscrits sur une «watch list» et sont marqués d'un astérisque. Nous étudierons le rôle joué par les politiques en matière de connaissances, de concurrence, d'innovation et de finances publiques dans la réussite relative de ces pays. Par opposition, les politiques de l'Espagne, de la Grèce, du Portugal et de l'Italie seront suivies en tant que «groupe de contrôle». En outre, les politiques mises en œuvre dans les poids-lourds de l'économie européenne que sont la France et l'Allemagne demeurent très importantes pour l'UE. Ces deux pays sont caractérisés par des politiques polarisées qui ont compliqué les réformes, bien que, dans une certaine mesure, les résultats commencent à se faire sentir.

5.   Investissement dans les connaissances

5.1

Le programme de l'OCDE pour l'évaluation internationale des étudiants est baptisé PISA. Le tableau no 3 présente une synthèse de l'étude de 2006 sur les compétences en lecture, en mathématiques et en sciences des enfants de 15 ans dans l'OCDE et dans des pays hors OCDE.

5.2

Outre la Corée, le Japon et la Suisse, les pays qui obtiennent un «A» dans chaque matière sont la Finlande* (le grand gagnant), les Pays-Bas*, la Belgique et l'Estonie*. Les pays obtenant deux «A» sont la République tchèque, l'Autriche*, la Slovénie* et l'Irlande*. Les pays de la liste obtenant un «A» sont le Danemark*, la Suède*, le Royaume-Uni*, l'Allemagne et la Pologne. L'Allemagne et le Royaume-Uni* obtiennent leurs «A» en sciences. Le Royaume-Uni* est le troisième pays le plus compétent en sciences (il atteint le niveau 6, derrière la Slovénie* et la Finlande*). Tous les pays figurant sur la «watch list» obtiennent des «A». Les pays du «groupe de contrôle» sont groupés avec les États-Unis en bas du classement.

5.3

Étant donné la forte corrélation existant entre les performances des systèmes d'éducation et les performances des économies des États membres, le CESE pense que la Commission a tout à fait raison de faire de la qualité de l'éducation une politique phare de l'UE.

5.4

L'université Jiao Tong de Shanghai a mis au point une méthodologie pour classer les universités. Il existe d'autres méthodologies mais celle de l'université Jiao Tong est conforme à l'accent mis par l'UE sur la science et la recherche.

5.5

Avec le programme d'évaluation PISA, les performances du système scolaire des États-Unis sont très ordinaires. C'est dans l'enseignement supérieur que les États-Unis sont compétitifs. Le tableau no 4 est extrait des classements effectués par l'université Jiao Tong. Dans le top 20, l'on trouve 17 universités américaines, deux britanniques et une japonaise. Le Royaume-Uni, avec dix entrées dans le top 100, figure sur la «watch list». Hors UE, le Japon (6 entrées), le Canada (4), l'Australie (2), la Suisse (3), la Norvège (1) et Israël (1) y figurent également. Cinq pays de la «watch list» figurent dans le top 100: Royaume-Uni*, Pays-Bas* (2), Danemark* (1), Suède* (4) et Finlande* (1). Aucun pays du «groupe de contrôle» n'y figure. Il est temps pour Bologne, Salamanque et Coimbra de retrouver leur gloire d'antan! En outre, il y a 6 entrées pour l'Allemagne et 4 pour la France.

5.6

Si l'on excepte le Royaume-Uni, l'UE n'a que 6 pays dans le top 100; les 20 pays restants ne sont pas représentés. La politique de la Commission semble être de combler ce vide par la création d'un Institut européen de technologie. Le CESE soutient ce projet mais l'on conçoit mal comment il pourrait voir le jour sans affaiblir la présence de l'UE dans le top 100. Une autre stratégie consisterait à examiner et réviser les politiques des États membres pour le développement de leurs meilleures universités. La première nécessité est d'instaurer un partenariat plus étroit entre les universités et l'industrie afin de développer les connaissances et les compétences permettant d'exploiter la science et la technologie du XXIe siècle à des fins de création de richesse et d'emploi.

5.7

Les données d'Eurostat sur le nombre de diplômés de troisième cycle en sciences et en technologie pour 1 000 habitants dans la fourchette 20-29 ans sont un autre élément de mesure de l'enseignement universitaire dans les États membres. Pour les États-Unis, ce chiffre est de 10,6. Les États membres s'écartant de moins d'un point de pourcentage des États-Unis sont la Belgique, l'Allemagne, la Grèce, l'Italie, la Lettonie, l'Autriche*, la Pologne, la Roumanie, la Slovénie* et la Slovaquie. Les États membres obtenant de bien meilleurs résultats sont le Danemark* (14,7), l'Irlande* (24,5), la France (22,5), la Lituanie (18,9), la Finlande* (17,7), la Suède* (14,4) et le Royaume-Uni* (18,4). Les pays marqués d'un astérisque (*) figurent sur la «watch list». L'Italie et la Grèce sont les seuls pays du «groupe de contrôle» à apparaître ici. Les systèmes d'éducation secondaire et tertiaire des États membres doivent mettre l'accent sur l'augmentation du nombre de diplômés en sciences et en technologie.

5.8

L'un des objectifs de la stratégie de Lisbonne est de faire passer les dépenses en recherche-développement de l'UE à 3 % du PIB, dont 2 % doivent provenir du secteur privé. Deux pays de la «watch list», la Suède* et la Finlande*, dépassent déjà les 3 %. Deux autres, le Danemark* et l'Autriche*, dépensent entre 2 et 3 %, de même que l'Allemagne et la France. Les pays qui dépensent entre 1 et 2 % sont la Belgique, la République tchèque, l'Estonie*, l'Irlande*, les Pays-Bas*, la Slovénie*, l'Espagne et le Royaume-Uni*, qui figurent pour la plupart sur la «watch list». Tous les autres États membres dépensent moins de 1 %, à l'exception de la Hongrie et de l'Italie (tous les deux à 1 %); l'Italie et l'Espagne sont dans le «groupe de contrôle». Pour resserrer l'écart, il paraît raisonnable d'attendre des gouvernements qu'ils contribuent aux efforts de recherche-développement à hauteur de 1 % du PIB. Dans l'idéal, cela serait destiné aux universités et aux instituts de recherche afin de les aider à renforcer leur réputation et leur présence au sein de la communauté scientifique mondiale. À l'heure actuelle, les gouvernements de l'UE des 15 contribuent aux dépenses à hauteur de 0,30 à 0,40 %, alors que les gouvernements des NEM le font à hauteur de 0,50 à 0,60 %. Il est possible et nécessaire d'aller plus loin, notamment pour améliorer la recherche scientifique destinée à lutter contre le changement climatique et la pollution.

5.9

En ce qui concerne les allégements fiscaux pour la recherche-développement dans le secteur privé, le CESE a déjà présenté son avis à la Commission (8). Il pense que tous les États membres devraient adopter les bonnes pratiques et introduire des incitations fiscales pour encourager les investissements en recherche-développement dans le secteur privé, notamment de la part des PME.

5.10

Il existe une relation circulaire entre l'éducation, la recherche, l'innovation, les connaissances techniques et les tendances de l'emploi. Dans un cercle vertueux, la base nationale de connaissances et de compétences attire les investissements étrangers, le transfert de connaissances et l'immigration. En l'absence d'un cercle vertueux, les travailleurs qualifiés sont tentés de rechercher un environnement de connaissances où leurs qualifications sont valorisées, ce qui peut engendrer un cercle vicieux de l'émigration et une fuite des cerveaux.

5.11

En conclusion, en matière de politiques de recherche et d'éducation, les systèmes d'éducation secondaire et tertiaire de nombreux États membres doivent être remaniés et les gouvernements doivent augmenter leurs dépenses en faveur de la recherche-développement. L'efficacité de ces politiques influe directement sur l'emploi et la productivité, comme le montre l'analyse de la «watch list» et du «groupe de contrôle».

6.   Concurrence et innovation

6.1

Dans sa communication, la Commission met en avant trois politiques visant à promouvoir la concurrence. Il s'agit de la libéralisation et la régulation des industries de réseau, de la politique de concurrence proprement dite et des effets positifs du marché intérieur.

6.2

Les bénéfices tirés du marché intérieur sont l'incitation à innover résultant de l'exposition à la concurrence étrangère, les économies d'échelle au niveau de la production, de la distribution et de la commercialisation, qui sont désormais réalisables sur un marché plus étendu, et les transferts de technologie résultant de l'ouverture aux investissements étrangers.

6.3

Les États membres de l'UE ne sont pas tous aussi ouverts et attirants pour les IDE (investissements directs étrangers). En termes de transfert de technologie, de méthodes de gestion, de présence sur le marché et de dépenses d'investissement, les États membres qui n'ont pas bénéficié des IDE sont pénalisés. Les données sur les IDE collectées par la société Ernst & Young montrent que, pour la période 1997-2006, les dix principaux pays récepteurs d'IDE en Europe (en nombre de projets) sont:

Royaume-Uni

5 539

France

3 867

Allemagne

1 818

Espagne

1 315

Belgique

1 190

Pologne

1 046

Hongrie

1 026

Irlande

884

République tchèque

849

Russie

843

6.4

Les IDE ont revêtu une importance capitale pour la croissance économique des NEM. La concurrence s'intensifiant dans le monde entier pour attirer les IDE, y compris en Inde et en Chine, les NEM vont devoir se lancer dans l'économie de la connaissance pour garantir la croissance et les emplois. Les pays asiatiques excellent dans les tests de compétence PISA et leurs universités produisent des centaines de milliers de diplômés en sciences et technologie (maîtrises ou autres diplômes).

6.5

La libéralisation et la régulation des industries de réseau peuvent fortement réduire les coûts et améliorer la productivité de l'ensemble de l'économie. Cette politique comporte trois étapes: la privatisation dans un premier temps; ensuite, la régulation pour permettre aux nouveaux arrivants d'entrer en concurrence avec les entreprises présentes sur le marché; enfin, la dissociation de la propriété des réseaux et des services de réseau. Dans son «Rapport sur l'état d'avancement de la création du marché intérieur du gaz et de l'électricité»  (9), la Commission faisait du changement de fournisseur une mesure en faveur de la concurrence effective. Le tableau suivant est révélateur:

Pourcentage de changement de fournisseur

 

 

Électricité

Gaz

Allemagne

Grandes entreprises

41

 (10)

 

PME

7

 (10)

 

Ménages

5

 (10)

France

Grandes entreprises

15

14

 

Ménages

0

0

Espagne

Grandes entreprises

25

60

 

PME

22

60

 

Ménages

19

2

Royaume-Uni

Grandes entreprises

50+

85+

 

PME

50+

75+

 

Ménages

48

47

La concurrence est globalement plus développée dans certains pays de la «watch list», même si l'Italie et l'Espagne ont également progressé.

6.6

La mise en œuvre de la politique de concurrence est destinée à promouvoir l'efficacité et la productivité pour le bien des consommateurs. Cette politique répond tout à fait à l'équilibre que le CESE tente de préserver entre les intérêts de ses différentes composantes.

6.7

Dans sa communication, la Commission conclut que la concurrence est vitale aussi bien pour la productivité même que pour son taux de croissance. Il est frappant de constater que les économies des pays figurant sur la «watch list» sont les plus ouvertes de l'UE. Elles ont la plus forte productivité, les niveaux d'emploi les plus élevés et la meilleure capacité à absorber les travailleurs migrants. C'est une erreur pour les gouvernements des États membres d'essayer de protéger leurs économies par peur de la concurrence.

7.   Politiques de redistribution

7.1

Par «redistribution», la Commission entend le redéploiement des facteurs de production des industries et secteurs défaillants vers les industries et secteurs émergents et prospères.

7.2

La thèse centrale de la communication est que, dans la mesure où la croissance économique dépend du recul de la frontière technologique, l'économie est exposée au changement structurel. Les nouveaux secteurs de haute technologie gagneront des parts de marché au détriment d'autres secteurs qui perdront du terrain. De nouvelles entreprises pourraient devenir des acteurs importants et les entreprises bien implantées pourraient se voir contraintes de s'adapter ou disparaître.

7.3

Puisque l'économie sera en tout état de cause exposée au changement structurel, il est indispensable qu'elle dispose d'une capacité d'adaptation afin de pouvoir retirer un bénéfice maximum du changement technologique et de la mobilité des connaissances. La Commission pense toutefois que les États membres ont des capacités d'adaptation limitées en la matière compte tenu des limites à la flexibilité imposées par les institutions et les réglementations du marché du travail.

7.4

Dans sa communication, la Commission propose quatre mesures clés pour améliorer la redistribution des ressources: faciliter l'entrée sur le marché, réduire la charge administrative, réglementer le marché du travail et intégrer les marchés financiers.

7.5

Le CESE a déjà élaboré des avis sur plusieurs politiques visant à faciliter l'entrée sur le marché. Il s'agit notamment de réduire la charge administrative liée à la création d'entreprises, de mettre en place divers mécanismes de soutien aux PME nouvellement créées et de modifier les législations sur les faillites d'entreprises. L'accès au financement et l'application d'une politique garante de bonnes conditions de concurrence sont des éléments importants de toute stratégie de redistribution des ressources via la création d'entreprises.

7.6

Si les grandes et petites entreprises doivent toutes supporter des coûts administratifs, ces derniers pèsent bien plus lourdement sur les petites entreprises, compte tenu de leur taille. La réduction de la charge administrative est l'un des cinq principaux objectifs de l'UE mais, comme le reconnaît la Commission dans sa communication, il est difficile de réduire la réglementation et les coûts administratifs car la plupart des mesures ont été introduites pour des raisons bien spécifiques. «Elles servent à remédier aux carences du marché, à protéger les acteurs du marché ou à fournir des informations aux décideurs» (11). De nombreux acteurs européens ont tendance à souligner que la protection sociale rendue possible par cette réglementation est un élément clé de l'acquis communautaire. L'impact cumulé de cette réglementation impose néanmoins d'importants coûts économiques.

7.7

Les travaux de la task-force «Better Regulation» (BRTF) du gouvernement britannique, corroborés par les travaux menés par le Bureau central de planification néerlandais (CPB), suggèrent que les coûts pourraient représenter 3 à 4 % du PIB (12). L'on a estimé qu'une réduction de 25 % des coûts administratifs dans l'UE ferait augmenter le PIB réel de 1 % dans un premier temps. Les effets à long terme seraient encore plus importants. La réduction de ces coûts est tout à fait souhaitable mais rien ne permet de penser que cette initiative portera ses fruits. L'UE étant institutionnellement préoccupée par le risque de carence du marché, il est peu probable que de telles améliorations interviennent. En outre, le CESE, qui tient à protéger autant que possible les acteurs du marché, ne soutiendra pas une réduction importante de la charge administrative.

7.8

Les structures du marché du travail ont un effet important sur le redéploiement de la main-d'œuvre. L'impact des réformes de marché sur la productivité et l'emploi est plus important lorsque les marchés du travail sont flexibles. S'il n'existe aucune étude sérieuse sur la flexibilité du marché du travail, le niveau d'emploi des pays de la «watch list» constitue sans aucun doute une façon de mesurer la capacité d'adaptation de leur législation de l'emploi.

7.9

La législation visant à protéger les emplois dans l'UE fait débat, à juste titre. Au lieu de modifier la protection accordée par les contrats à durée indéterminée, de nombreux États membres ont introduit des contrats temporaires en parallèle. Et ce sont ces mêmes contrats temporaires qui sont en grande partie responsables de l'augmentation des chiffres de l'emploi étudiée au point 4 ci-dessus. Si les données fournies ne sont pas en ETP (équivalent temps plein), le niveau de la croissance de l'emploi est toutefois encourageant et l'emploi structurel est en baisse.

7.10

Il est bien entendu nécessaire d'atténuer les perturbations lorsque les législations du travail sont suffisamment flexibles pour optimiser la redistribution des ressources. Les États membres sont donc invités à introduire en parallèle des politiques d'accompagnement. La flexicurité est essentielle dans ce processus. Il faut trouver les ressources nécessaires pour que l'apprentissage tout au long de la vie renforce l'adaptabilité et l'aptitude à l'emploi, que les systèmes de sécurité sociale incitent à prendre part au marché du travail et facilitent le redéploiement et que les politiques de l'emploi aident à gérer le changement et le chômage lors des périodes de transition vers un nouvel emploi sûr. De telles politiques s'avèrent indispensables lorsque la protection du travail est assouplie. L'intégration des marchés financiers est la dernière des politiques de redistribution des ressources. En général, le degré de fragmentation du système financier européen pourrait être considéré comme un obstacle à la productivité et à l'emploi, notamment en ce qui concerne les start-ups. Les directives sur les services financiers tentent de remédier à ces carences.

7.11

Parallèlement au présent avis, le CESE prépare un avis sur l'investissement transfrontalier de capital-risque (13). Dans le cadre du changement structurel, c'est en matière de financement des start-ups que le rôle d'un système financier efficace apparaît le plus évident.

8.   Assainissement des finances publiques

8.1

Le tableau no 5 présente des données d'Eurostat sur les finances publiques des États membres. La dette publique moyenne de la zone euro des 12, à 68,8 % du PIB dépasse le critère de convergence de l'UEM (60 %) et les moyennes de l'UE des 15 (63 %) et de l'UE des 25 (61,9 %). En général, la dette publique des États de la «watch list» est inférieure à 50 % du PIB et souvent de façon spectaculaire. L'Autriche* (61,7 %) fait exception. De plus, tous les États de la «watch list» ont réduit leur dette publique entre 1999 et 2006. La réduction a été particulièrement marquée en Irlande*, aux Pays-Bas* et en Suède*. Dans le «groupe de contrôle», seule l'Espagne a une dette publique inférieure à 50 % du PIB, suite à une réduction spectaculaire durant cette période. L'Italie (106,8 %) et la Grèce (95,3 %) sont en queue de peloton.

8.2

Dans l'UE des 15, la Belgique, l'Irlande*, l'Espagne, le Luxembourg, les Pays-Bas*, la Finlande*, le Danemark* et la Suède* avaient un budget positif. Les autres pays accusaient des déficits de moins de 3 % sauf l'Italie (– 4,4 %) et le Portugal (3,9 %). Parmi les NEM, la Bulgarie et l'Estonie* sont en positif alors que la Hongrie, la Pologne et la Slovaquie accusent des déficits de plus de 3 %. Chypre et la Slovénie* se distinguent, avec un déficit de seulement 1,2 %. Parmi les pays de la «watch list», le Royaume-Uni, avec un déficit de 2,7 %, s'est égaré. Il n'a pas su équilibrer son budget durant les périodes d'activité économique favorables et joue désormais sa place parmi les leaders. Dans le «groupe de contrôle», l'Espagne se distingue alors que l'Italie et le Portugal confirment leur classement généralement médiocre.

8.3

Dans ses avis annuels sur l'économie de l'UE, le CESE plaide pour l'assainissement des finances publiques. À cet égard, les performances des pays de la «watch list» et du «groupe de contrôle» montrent que l'existence de finances publiques saines contribue largement aux bons résultats en matière d'emploi et de productivité dans les États membres.

8.4

L'analyse des performances des pays de la «watch list» et du «groupe de contrôle» pose la question de l'effet de l'impôt. Le rapport d'Eurostat sur les impôts dans l'UE en 2005 montre que le taux moyen d'imposition en pourcentage du PIB dans l'UE des 27 s'élève à 39,6 %, soit environ 13 points de pourcentage de plus qu'aux États-Unis ou au Japon. Parmi tous les pays de l'OCDE hors UE, seule la Nouvelle-Zélande a un taux effectif d'imposition supérieur à 35 %. Suite à la tentative des États membres de réduire la charge fiscale, la tendance s'est inversée et le taux d'imposition moyen est désormais redescendu au niveau de 1995.

8.5

En termes de charge fiscale, la Suède*, le Danemark* et la Finlande* figurent dans le top 5 aux côtés de la Belgique et de la France. L'Autriche* et la Slovénie* sont dans le groupe suivant avec l'Italie. Les Pays-Bas* et le Royaume-Uni* sont respectivement en 12e et 13e positions. Seules l'Estonie* et l'Irlande*, aux places 22 et 23, ont un faible niveau d'imposition. Dans le «groupe de contrôle», l'Italie a une charge fiscale inférieure ou égale à celle de 5 pays de la «watch list». L'Espagne, le Portugal et la Grèce ont des charges fiscales inférieures à celles de tous les pays de la «watch list», à l'exception de l'Irlande et de l'Estonie. On ne peut pas dire a priori que les pays du «groupe de contrôle» sont surtaxés.

8.6

L'UE a une charge fiscale supérieure à celle des zones concurrentes. Le régime fiscal d'un État membre est fortement influencé par les sommes dépensées pour la protection sociale. D'un point de vue purement communautaire, il est difficile de plaider en faveur de la réduction des impôts lorsque les économies les plus performantes de l'UE sont celles qui ont les taux d'imposition les plus élevés. Toutefois, d'un point de vue mondial, les zones concurrentes ont des niveaux d'imposition inférieurs et cela contribue probablement à leurs niveaux élevés d'innovation et de création d'entreprises.

Bruxelles, le 3 juin 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  Centre for European Reform: The Lisbon Scorecard VIII, Is Europe ready for an economic storm (février 2008).

(2)  Les États membres marqués d'un astérisque figurent sur une «watch list» des pays les plus performants, comme expliqué au paragraphe 4.9.

(3)  Avis du Comité économique et social sur le thème «Emploi, réforme économique et cohésion sociale — Vers une Europe de l'innovation et de la connaissance» (sommet de Lisbonnemars 2000, JO C 117 du 26.4.2000, p. 62, paragraphe 2.16.

(4)  Avis du Comité économique et social européen sur «Les grandes orientations des politiques économiques et la gouvernance économiqueLes conditions d'une cohérence accrue dans l'élaboration des politiques économiques en Europe», JO C 324 du 30.12.2006, p. 49.

(5)  Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Grandes orientations des politiques économiques (2005-2008)», JO C 88 du 11.4.2006, p. 76.

(6)  Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Grandes orientations des politiques économiques (2003-2005)», JO C 80 du 30.3.2004, p. 120.

(7)  Centre for European Reform: The Lisbon Scorecard VIII, Is Europe ready for an economic storm (février 2008).

(8)  Voir l'avis du CESE sur le thème «Vers une utilisation plus efficace des incitations fiscales en faveur de la recherche et du développement», JO C 10 du 15.1.2008, p. 83.

(9)  Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen: «Rapport sur l'état d'avancement de la création du marché intérieur du gaz et de l'électricité» — COM(2005) 568 final, 15.11.2005.

(10)  Les chiffres du marché du gaz ne sont pas disponibles pour l'Allemagne.

(11)  «Moving Europe's Productivity Frontierthe EU Economy 2007 Review» («Repousser la frontière de la productivité en Europe — L'économie de l'UE: bilan de 2007»), Commission européenne, DG «Affaires économiques et financières», p. 136.

(12)  «Moving Europe's Productivity Frontierthe EU Economy 2007 Review» («Repousser la frontière de la productivité en Europe — L'économie de l'UE: bilan de 2007»), Commission européenne, DG «Affaires économiques et financières», p. 137.

(13)  «Éliminer les obstacles aux investissements transfrontaliers des fonds de capital-risque» (INT/404).


31.3.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 77/139


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen et au Comité économique et social européen — L'application des mesures de lutte contre les abus dans le domaine de la fiscalité directe au sein de l'Union européenne et dans les rapports avec les pays tiers»

COM(2007) 785 final

(2009/C 77/29)

Le 10 décembre 2007, la Commission a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen et au Comité économique et social européen — L'application des mesures de lutte contre les abus dans le domaine de la fiscalité directe au sein de l'Union européenne et dans les rapports avec les pays tiers».

La section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 14 juillet 2008 (rapporteur: M. BURANI).

Lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 17 septembre 2008), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis à l'unanimité.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le document de la Commission vise à jeter les bases d'une discussion entre les États membres concernant la fiscalité directe appliquée dans le cadre des opérations transfrontalières. Il se propose en particulier de trouver des solutions «coordonnées» en matière d'application des règles antiabus, un domaine dans lequel la collaboration entre les différentes administrations laisse à désirer en recourant à des solutions inspirées par des approches purement nationales.

1.2

Le Comité se félicite de cette initiative — qui du reste s'inscrit dans une perspective à long terme —, notamment parce que sa réalisation aboutirait — tout au moins dans son intention — à la création d'une sorte de «corpus juris» communautaire fondé sur les nombreux arrêts de la Cour de justice européenne. L'éventail des cas étudiés par la CJCE est suffisamment vaste pour constituer un point de référence valable pour les autorités fiscales nationales, lesquelles ne semblent il est vrai pas toujours décidées à s'en inspirer.

1.3

Cette initiative s'appuie au départ sur un accord entre les États membres concernant ce qu'il y a lieu de considérer comme «abus» et partant la distinction à faire entre «fraude fiscale» et «évasion fiscale». Le Comité souligne l'importance des arrêts de la CJCE, selon lesquels — alors que dans le premier cas il s'agit indubitablement d'un délit — dans le second il y a lieu d'opérer une distinction: l'évasion ne constitue un délit que si elle fait appel à des «montages purement artificiels», c'est-à-dire à la création de situations fictives. La création de filiales dans le but de profiter d'aides d'État accordées par d'autres pays ne doit pas non plus être considérée comme illicite: dans l'hypothèse où ces aides ne seraient pas conformes au traité, cette distorsion doit être combattue par d'autres moyens, en s'attaquant à la source du problème et sans impliquer les opérateurs privés.

1.4

Un aspect particulièrement important concerne la «sous-capitalisation», c'est-à-dire l'apport de financements à des filiales extérieures en lieu et place d'une augmentation de capital. Les administrations font preuve à cet égard d'un degré élevé de subjectivité et il s'avère particulièrement difficile de formuler un jugement lorsqu'il s'agit d'institutions financières.

1.5

Laissant de côté l'étude de cas, pour laquelle on se référera au texte du présent avis, le CESE attire l'attention sur certains principes fondamentaux sur lesquels les États membres devraient s'entendre, au besoin en les adoptant dès à présent: tout d'abord, il y a lieu de trouver un équilibre entre l'intérêt de l'État et celui du contribuable, en appliquant toujours le principe de la proportionnalité lorsqu'il s'agit de juger les cas de «montages purement artificiels»; d'où la nécessité de règles afin de distribuer de manière équitable la charge de la preuve, mais surtout d'une réglementation qui définisse les modalités de collecte des preuves par les autorités fiscales, dans le respect des lois.

1.6

En définitive, le CESE considère qu'une matière aussi multiforme et hétérogène requiert de la bonne volonté et un esprit de coopération de la part des États membres, qui doivent trouver un équilibre entre d'une part leur intérêt, qui est de protéger leurs finances, et d'autre part la place centrale du citoyen et le respect de ses droits. Dans le même temps, il estime qu'il est de son devoir de mettre en avant le rôle qui devrait être celui des administrations financières dans la lutte non seulement contre les abus, mais aussi et surtout contre les montages artificiels (voire même réels) qui dissimulent des activités criminelles.

2.   Introduction

2.1

Comme elle l'avait annoncé en 2006 (1), la Commission a engagé une action en vue de coordonner les systèmes de fiscalité directe des États membres. Le problème se pose en termes relativement clairs: en appliquant des mesures fiscales impliquant les activités transfrontalières des contribuables, toute administration nationale se doit d'assurer à son pays les recettes appropriées, mais la disparité des systèmes peut donner lieu à des différences d'interprétation ou d'application de la part d'autres administrations. Les contribuables peuvent jouer de ces différences de manière abusive afin de se soustraire totalement ou partiellement à leurs obligations. Par ailleurs, il y a lieu d'éviter l'apparition de cas de double imposition.

2.2

Afin d'éviter de tels cas de figure, la plupart des États membres ont adopté une série de «règles antiabus»: il s'agit de dispositions à caractère spécifique ou général qui divergent d'un pays à l'autre. Il peut arriver dans ce contexte — et c'est effectivement le cas — que des litiges surviennent dans les relations avec les contribuables et parfois entre les États membres eux-mêmes. La Cour de justice européenne (CJE), invitée à se prononcer sur divers cas particuliers, a émis des arrêts qui, en l'absence d'une législation communautaire en la matière, fournissent d'utiles repères jurisprudentiels. La Commission s'est appuyée sur ces arrêts pour élaborer la communication à l'examen.

2.3

Cette communication représente «une initiative visant à poser le cadre des nouvelles discussions qu'il y a lieu d'engager avec les États membres et les parties prenantes afin d'explorer le spectre des solutions coordonnées envisageables». La Commission estime en effet qu'il est urgent de trouver «un juste équilibre entre l'intérêt public de lutter contre les abus et la nécessité d'éviter toute restriction disproportionnée des activités transfrontalières au sein de l'UE». Il conviendra en outre de coordonner l'application des mesures antiabus dans les relations avec les pays tiers.

2.4

La Commission a l'intention d'engager un débat entre les États membres sur ces questions, avec le concours des parties prenantes, en vue d'aboutir à des conclusions communes débouchant sur une coordination volontaire des règles et des procédures. Il n'est pas question ici d'«harmonisation», trop difficile à mettre en œuvre à court terme, ni de mesures législatives, pratiquement impossibles à établir.

3.   Le contenu de la communication

3.1

Le document de la Commission s'attache particulièrement à définir la terminologie et les conditions cadres régissant cette matière, en s'appuyant sur les arrêts de la CJE qui ont établi certains principes fondamentaux. Il donne pour commencer une définition de l'abus: «il n'y a abus que lorsqu'en dépit d'un respect formel des conditions fixées par les dispositions communautaires applicables, l'objectif de ces dispositions n'est pas atteint et qu'il existe une intention d'obtenir un avantage aboutissant à créer artificiellement les conditions d'obtention de cet avantage» (2). Une distinction est établie par rapport à l'évasion fiscale, définie comme des «montages purement artificiels dont le but serait d'échapper à l'emprise de la législation fiscale de l'État membre concerné».

3.2

Le fait que «la nécessité de prévenir l'évasion fiscale ou les abus peut constituer une raison impérieuse d'intérêt général de nature à justifier une restriction des libertés fondamentales» constitue un autre principe essentiel. Mais pour être licites, ces règles restrictives doivent respecter le principe de proportionnalité et en outre «avoir spécifiquement pour objet de faire obstacle aux montages purement artificiels ».

3.3

La CJE a retenu des critères précis pour définir les cas n'entrant pas dans le cadre des montages purement artificiels: en soi, l'établissement d'une filiale à l'étranger ne rentre pas dans ce cadre, même s'il est avéré que les activités de l'établissement secondaire exercées dans un autre État membre auraient pu être exercées par la société mère. Et le fait que des considérations fiscales aient déterminé la décision d'établir un établissement secondaire ne saurait constituer un argument suffisant: en l'absence d'abus, il est parfaitement légitime de profiter de la fiscalité plus favorable d'un autre État membre. Enfin, l'établissement d'une filiale décidé pour profiter des aides d'État octroyées par un autre État membre ne rentre pas non plus dans cette définition: les distorsions résultant d'aides d'État incompatibles avec le traité doivent être combattues à la source par d'autres moyens, mais cela n'autorise pas l'adoption de mesures unilatérales pour en combattre les effets néfastes.

3.4

La CJE a toutefois fixé des limites à une interprétation extensive de ces principes: ceux-ci ne s'appliquent pas lorsqu'il existe un élément supplémentaire caractérisant l'abus, comme par exemple l'établissement d'une filiale «boîte aux lettres» ou «écran», ou lorsque les conditions générales des transactions financières entre sociétés apparentées établies dans différents États membres s'écartent de celles qui auraient été convenues entre des parties non apparentées. Un critère de prédominance du fond sur la forme s'applique donc.

3.5

La Commission fait observer que les critères mentionnées ci-dessus s'appliquent à des cas particuliers, mais qu'il serait utile d'examiner leur application pratique à différents types d'activités et de structures commerciales.

3.6

S'agissant de la proportionnalité, la CJE admet que les États membres peuvent prévoir une «sphère de sécurité», c'est-à-dire des critères permettant de cibler les situations correspondant à la plus haute probabilité d'abus. L'établissement de critères de présomption raisonnables renforce la sécurité juridique au profit de l'assujetti tout en facilitant la tâche de l'administration fiscale.

3.7

La Commission attire l'attention sur la nécessité d'adopter des critères d'équité: la charge de la preuve ne doit pas peser uniquement sur l'assujetti, et celui-ci devrait pouvoir se défendre sans avoir à supporter de charges administratives excessives et en ayant la garantie que l'évaluation effectuée par l'administration fiscale sera soumise à un contrôle juridictionnel indépendant. En outre, il convient que le revenu imposable évalué à l'aune de l'application des règles antiabus soit limité aux montants imputables au montage purement artificiel. Les transactions au sein d'un même groupe devraient en outre être examinées à la lumière du principe de libre concurrence. Mais tous ces critères ne devraient pas empêcher en fin de compte les États membres d'imposer des sanctions aux assujettis coupables d'avoir usé de mécanismes abusifs dans le but d'éluder l'impôt.

3.8

Une fois posés les principes généraux, le document de la Commission traite de l'application concrète des règles. Le chapitre «Observations particulières» reviendra en plusieurs occasions sur le contenu de cette partie (voir plus loin).

4.   Observations générales

4.1

Le CESE accueille très favorablement l'initiative de la Commission, qui vise en premier lieu à coordonner les règles et les procédures sans céder à la tentation d'imposer des interventions d'en haut, selon une approche réaliste qui tient compte des dispositions du traité mais aussi de la sensibilité des États membres, et en second lieu vise à trouver un équilibre entre «l'intérêt public» (de chaque État membre) et «la nécessité d'éviter toute restriction disproportionnée» au sein du marché intérieur.

4.1.1

Le CESE recommande pour sa part que l'on prenne en considération la position centrale occupée par le citoyen/contribuable: la coordination, si coordination il y a et lorsqu'elle interviendra, devra avant tout faire preuve d'équité à son égard, principe qui semble guider les arrêts de la CJE mais dont l'application n'est pas évidente dans la pratique.

4.2

Cette préoccupation du CESE semble du reste partagée par la CJE et par la Commission: lorsqu'il est question du principe de proportionnalité (cf. paragraphe 2.2 du présent avis) à respecter pour éviter des dispositions excessivement restrictives en cas de «montages purement artificiels» (cf. paragraphe 3.3), il est évident que cette recommandation ne se réfère pas à des cas théoriques. Les cas d'infraction aux règles sont nombreux et ne sont probablement pas tous découverts. Tout aussi nombreux sont les cas de filiales établies à l'étranger et dont la légitimité est mise en doute ou contestée. Le respect par les administrations fiscales des principes contenus dans les arrêts de la CJE permettrait aux entreprises d'opérer dans des conditions de sécurité juridique, sans formalités excessives et sans risque de double imposition.

4.3

L'observation de la Commission (cf. paragraphe 3.5), selon laquelle l'éventail des cas légaux et illégaux est trop diversifié pour servir de base à l'établissement de principes généraux, est certainement fondée, raison pour laquelle il conviendrait d'étudier leur application pratique à différents types d'activités et de structures commerciales. Cela étant, l'examen des cas particuliers à la lumière des arrêts de la CJE permettrait déjà aux sociétés de faire elles-mêmes une étude préliminaire afin de savoir quelles sont les probabilités que leurs décisions de créer des filiales à l'étranger ne soient pas contrecarrées. Cela suppose naturellement que les administrations acceptent d'aligner leur conduite sur la jurisprudence de la CJE, tout en ayant la possibilité de l'adapter à chaque cas particulier. Une approche au «cas par cas» permettrait d'évaluer en toute équité les situations particulières, en évitant d'appliquer des solutions standardisées privilégiant la forme par rapport au fond.

4.4

En se comportant de la sorte, tant les sociétés que les administrations permettraient d'identifier plus facilement les filiales «boîtes aux lettres» ou «écrans» (cf. paragraphe 3.4), qui constituent une fraude manifeste. L'étude des cas relevés dans ce domaine pourrait aider les États membres à adopter des critères de sécurité (cf. paragraphe 3.6) restreignant les libertés fondamentales.

4.5

La question des critères d'équité évoquée par la Commission (cf. paragraphe 3.7) mérite une attention particulière. Parmi les principes du droit naturel en matière pénale figure la présomption d'innocence, qui laisse à l'accusation la charge de la preuve. Même si le droit fiscal ne s'inspire pas toujours de ces règles, il est incontestable que d'éventuels comportements vexatoires de la part des administrations constitueraient une charge aussi bien pour les entreprises que pour les particuliers.

4.5.1

Le CESE est d'accord avec la recommandation relative à l'institution de règles visant à distribuer de manière équitable la charge de la preuve: le respect des libertés fondamentales et la présomption d'innocence doivent régir les relations entre les administrations fiscales et les contribuables. Il y a lieu de prévoir en la matière une réglementation qui définisse les modalités de collecte des preuves par les autorités fiscales et les limites de leur autonomie en présence de délits passibles de poursuites pénales, comme en cas d'évasion fiscale réalisée par des moyens illicites et à considérer comme une fraude fiscale.

5.   Observations particulières: application des règles au sein de l'UE/EEE

5.1

La Commission évoque le principe selon lequel «les mesures antiabus [doivent être] très précisément ciblées sur les montages purement artificiels conçus pour contourner la législation nationale (ou la réglementation communautaire dans sa transposition en droit national)», principe avec lequel il est facile d'être d'accord, mais qui laisse une grande marge d'interprétation. Il en va de même de la recommandation qui préconise d'éviter que les règles ne soient disproportionnées par rapport à l'objectif de limitation des abus.

5.2

Le CESE estime que seul un examen conjoint par les États membres, avec le concours de la Commission, des mesures adoptées, pourrait conduire à leur coordination, à la condition toutefois qu'il existe une volonté sincère de parvenir à ce résultat. Les règles appliquées par chaque administration sont dictées par le souci de protéger le bien public, en vertu de doctrines découlant de traditions et de situations diverses. On peut espérer une atténuation des divergences, mais il faudra du temps avant que les résultats ne soient concrétisés dans la pratique.

5.2.1

Le CESE est d'accord avec le document de la Commission, qui met en avant la nécessité d'éviter que les mesures conçues pour lutter contre l'évasion fiscale transfrontalière soient appliquées à des situations strictement circonscrites au cadre national, dans lesquelles le risque d'abus est nul: une telle extension serait inutile, selon la CJE, et contre-productive en termes de compétitivité.

5.3

L'interprétation des concepts de dettes et de fonds propres constitue un autre aspect important: un État membre peut considérer une transaction comme un apport de capitaux, tandis qu'un autre peut la considérer comme un prêt autorisant par conséquent la déductibilité des intérêts. Le même constat vaut pour les entités hybrides, considérées comme une société anonyme par un État membre et comme une entité transparente par un autre, ce qui peut entraîner une double exonération ou une double imposition. Il s'agit là de cas bien connus, qui tirent profit ou pâtissent des différences existant dans la réglementation appliquée par les différents États membres mais aussi de l'attitude variable des administrations, selon qu'elles tendent à favoriser ou à décourager les investissements transfrontaliers.

5.3.1

Le CESE voit dans cet aspect l'un des problèmes les plus épineux, qui devrait constituer le point de départ des futures discussions.

5.4

Les règles relatives aux sociétés étrangères contrôlées (SEC) constituent un problème lié à celui évoqué au paragraphe précédent. Normalement, les bénéfices d'une SEC peuvent être attribués à la société mère et soumis à l'impôt dans le pays de cette dernière, mais avec un traitement fiscal particulier. La Commission considère que cette différence de traitement est discriminatoire, sauf si elle est justifiée par une «différence de situation objective qu'il importe de prendre en compte». De plus, ces règles empêcheraient la société résidente «de s'établir dans un autre État membre par l'intermédiaire de filiales».

5.4.1

Le CESE demande que les règles sur les SEC soient examinées avec attention et le cas échéant revues. Ces règles sont importantes pour toutes les sociétés, mais particulièrement pour celles opérant dans le secteur financier. Comme le dit la Commission, «il est crucial que les assujettis aient la possibilité de démontrer […] que leurs transactions étaient commercialement légitimes». Cette exigence, parfois difficile à respecter pour les sociétés commerciales, peut constituer un problème majeur pour les entreprises du secteur financier. Les règles en vigueur en la matière, tant dans le domaine juridique que dans celui du contrôle prudentiel, constituent en effet une garantie pour les sociétés régulièrement contrôlées. Mais dans le même temps, leur complexité et le fait qu'elles diffèrent d'un pays à l'autre pourraient fournir des subterfuges faciles pour une série d'activités irrégulières. L'on peut penser en particulier à des sociétés, parfois fictives, voire apparemment «normales», créées à des fins spéculatives ou même criminelles, qui ont recours à des techniques sophistiquées pour échapper à la fiscalité et au contrôle prudentiel. Des dispositions fiscales ciblées pourraient permettre, mieux que des contrôles prudentiels, de mettre à jour ces activités.

5.5

Les règles relatives à la sous-capitalisation (capitalisation par l'emprunt, une forme détournée de fonds propres), déjà rappelées au paragraphe 4.3 ci-dessus, constituent un autre aspect déterminant. En général, elles divergent fortement d'un État membre à l'autre car elles sont le fruit de différents points de vue et traditions juridiques. L'opportunité de financer les filiales par des fonds propres plutôt que par l'emprunt dépend des différences de traitement auquel sont soumis les dividendes et les intérêts et est évaluée par les entreprises en fonction du régime fiscal en vigueur dans le pays de la filiale. Il n'est pas rare que des filiales soient établies par la société mère dans des États membres différents et soient financées selon l'un ou l'autre système.

5.5.1

La Commission souhaite la suppression pure et simple des règles relatives à la sous-capitalisation ou du moins l'exclusion des accords avec les prêteurs résidant dans d'autres États membres. Cela permettrait d'éliminer les différences de traitement entre filiales résidentes qui se fondent sur la localisation du siège de leur maison mère. Elle ajoute «qu'il convient que les États membres soient en mesure de protéger leur assiette fiscale de toute érosion artificielle due à des montages de financement par l'emprunt, et ce même au sein de l'UE et de l'EEE». Le CESE est d'avis qu'il ne faut pas généraliser: il peut exister des cas où des nécessités contingentes rendent nécessaire ou en tout cas préférable le financement par l'emprunt, indépendamment des considérations fiscales.

5.5.2

Les réserves du CESE semblent trouver un écho dans l'arrêt «Thin Cap» de la CJE, qui a reconnu que «les mesures visant à faire obstacle à la sous-capitalisation ne sont pas condamnables en soi. Il convient cependant d'en limiter l'application aux montages purement artificiels». Ce type de capitalisation ne devrait donc pas être exclu: il s'agit simplement d'améliorer l'efficacité des contrôles pour éviter les abus et de définir des règles plus précises qui garantissent la transparence des transactions.

5.6

L'ensemble des observations qui précèdent amènent le CESE à constater l'apparition récurrente de concepts flous ou diversement interprétés, de manière tantôt restrictive tantôt extensive, dans le traitement des différents problèmes dans les États membres. Avant d'engager les discussions souhaitées par la Commission, il conviendra donc de s'entendre sur la terminologie à utiliser et sur la portée de chaque terme.

5.6.1

Il en va de même en ce qui concerne l'évasion fiscale: selon la CJE — mais non selon certaines autorités fiscales — celle-ci n'est pas un délit en soi mais elle le devient lorsqu'elle s'accompagne de «montages purement artificiels», devenant alors une fraude pouvant faire l'objet de poursuites administratives et/ou pénales. Ce principe doit lui aussi faire l'objet d'un accord préalable portant non seulement sur la portée mais aussi sur les modalités d'interprétation des «montages purement artificiels».

6.   Observations particulières: application des règles antiabus en ce qui concerne les pays tiers

6.1

Les règles SEC s'appliquent en principe également aux filiales de sociétés de pays tiers établies dans l'UE ainsi qu'aux filiales de sociétés de l'UE établies dans les pays tiers, à moins d'accord bilatéraux, lesquels sont fréquents. Les traitements discriminatoires concernant l'établissement de citoyens ou de sociétés d'États membres dans des pays tiers et inversement sont par ailleurs compatibles avec le droit communautaire. Tel devrait également être le cas des dispositions visant à interdire ou à réglementer la sous-capitalisation, de l'impôt sur les sociétés et en particulier des règles spécifiques antiévasion.

6.2

Le Comité n'a pas de commentaires particuliers à formuler concernant cet aspect, mais il souhaite souligner la nécessité de prêter fortement attention à l'application des règles antiévasion vis-à-vis des sociétés nouvellement ou récemment créées originaires de certains pays tiers et des filiales de sociétés UE dans ces pays. Compte tenu de la situation internationale, l'on assiste à une expansion préoccupante de la criminalité, financière ou non, au niveau mondial. À cet égard, plus encore que d'une coordination entre les administrations, c'est d'une coopération déterminée et efficace dont on a besoin avant tout. Il ne s'agit pas tant d'un problème fiscal que, bien plutôt, d'une question de sécurité. Les autorités fiscales peuvent fournir une contribution extrêmement précieuse dans ce domaine.

Bruxelles, le 17 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  COM(2006) 823 du 19.12.2006.

(2)  Affaire Emsland-Staerke C-110/99, points 52-53; affaire Halifax C-255/02, points 74-75 (note de la Commission).


31.3.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 77/143


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Gouvernance et partenariat aux niveaux national et régional et base pour des projets dans le domaine de la politique régionale» (saisine du Parlement européen)

(2009/C 77/30)

Le 22 avril 2008, le Parlement européen a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur le thème

«Gouvernance et partenariat aux niveaux national et régional et base pour des projets dans le domaine de la politique régionale».

Le 25 mai 2008, le Bureau du Comité a demandé à la section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale» de préparer les travaux du Comité en la matière. Le projet d'avis a été élaboré par M. van Iersel, rapporteur, et M. Pásztor, corapporteur.

Compte tenu de l'urgence de ces travaux, le CESE a nommé M. van IERSEL rapporteur général lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 18 septembre 2008) et adopté le présent avis par 96 voix pour, 1 voix contre et 2 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le CESE se félicite de l'initiative du Parlement européen sur la question de la gouvernance et des partenariats aux niveaux européen, national et régional dans la politique régionale.

1.2

De l'avis du CESE, la bonne gouvernance implique une «gouvernance à niveaux multiples» et des partenariats avec la société civile organisée représentative au niveau régional.

1.3

Par conséquent, le Comité partage l'avis du Conseil et de la Commission quant à l'opportunité de mettre en place de manière effective une gouvernance à niveaux multiples ainsi qu'une meilleure gouvernance dans l'utilisation des Fonds de l'UE et dans la mise en œuvre des politiques communautaires. La question n'est pas de savoir si mais comment cela se fera. Il s'agit d'affiner les initiatives ascendantes et les conditions-cadres imposées d'en haut.

1.4

Le CESE soutient la proposition du Parlement visant à créer formellement une formation du Conseil chargée du développement territorial. Cela permettrait de souligner l'importance de la «gouvernance à niveaux multiples». Le Conseil serait davantage tenu de débattre de cette question et de dégager des accords dans ce domaine.

1.5

Le CESE voit la gouvernance à niveaux multiples comme une structure flexible de relations entre la Commission, les gouvernements et les collectivités régionales et locales, conçue sur mesure pour certaines situations spécifiques et considérations thématiques, plutôt que comme un cadre hiérarchique de compétences entre différents échelons de pouvoir. La bonne gouvernance se caractérise par des relations ouvertes et une application moins stricte du principe de subsidiarité.

1.6

L'Europe a besoin de régions et de villes conscientes de leur valeur, fortes et durables. Comme l'indiquent plusieurs exemples, il arrive souvent que les régions et les villes bénéficient d'impulsions positives générées par les dynamiques d'internationalisation de l'économie. Elles découvrent de nouvelles manières efficaces de se faire connaître.

1.7

Malgré la grande — et souvent complexe — variété de structures administratives existant dans les États membres, le CESE plaide vigoureusement en faveur d'un avenir où les procédures et les méthodes de travail renforceraient la responsabilité des régions et des villes (1).

1.8

Des données pratiques indiquent que la responsabilité décentralisée favorise le développement de qualités telles que la direction stratégique et la vision. Ces qualités constituent généralement une base solide tant pour des partenariats public-public que pour des partenariats publics impliquant plusieurs parties prenantes telles que des partenaires sociaux, des chambres de commerce, des entreprises, des agences de développement, des organismes de logement, des organisations non gouvernementales quasi autonomes («quangos»), des agences environnementales, des organismes sociaux, des établissements d'enseignement à tous les niveaux, des architectes et des artistes.

1.9

Par conséquent, il conviendrait de permettre à la société civile organisée représentative au niveau régional de participer de façon responsable et transparente à la définition et à la mise en œuvre des programmes régionaux de l'UE. La prise en compte des points de vue locaux et régionaux (non gouvernementaux) contribuera à l'acceptation des valeurs de l'Union par les citoyens.

1.10

Le CESE estime que des consultations bien structurées peuvent conduire à des partenariats fructueux avec des acteurs non gouvernementaux à tous les maillons de la chaîne de la politique régionale (définition, suivi et évaluation) (2).

1.11

Une gouvernance à niveaux multiples flexible, une bonne gouvernance et des synergies correspondantes, axées sur des solutions sur mesure, pourraient s'avérer très utiles pour contribuer à l'objectif ultime de la politique régionale de l'UE et des États membres, à savoir activer les forces existantes et les potentiels cachés des régions et des villes.

1.12

Un programme d'échange européen pourrait être mis sur pied pour les fonctionnaires dans les régions et les villes, ainsi qu'un système bien structuré d'échange d'expériences et de diffusion des meilleures pratiques. Des instituts de recherche spécialisés et des universités pourraient apporter leur soutien.

2.   Contexte

2.1

Depuis 2001, la «gouvernance» a, à juste titre, occupé de plus en plus le devant de la scène à cause de la nécessité croissante de lier plus directement les politiques de l'UE au respect et à leur mise en œuvre dans et par les États membres (3).

2.2

Dans la même perspective, le CESE accueille favorablement le prochain rapport du Parlement européen sur la gouvernance et le partenariat aux niveaux national et régional (4). Le fait que le Parlement européen, en tant qu'institution de l'UE, montre un intérêt croissant pour la manière dont la politique régionale est élaborée concrètement dans les États membres est un signal positif.

2.3

Plus généralement, le document du Parlement européen démontre que les dynamiques de développement, comme l'internationalisation de l'économie et les mutations permanentes, nécessitent immanquablement de procéder à des adaptations dans la stricte application du principe de subsidiarité. Pour suivre les évolutions au niveau mondial et mettre en œuvre avec succès les politiques européennes définies conjointement, il convient de développer une interaction et des synergies plus flexibles entre les différents niveaux de pouvoir. Les procédures modifiées visant à réaliser la stratégie de Lisbonne, dans le cadre desquelles la Commission, le Conseil et les États membres partagent des responsabilités, constituent un exemple parlant de ce type d'interaction et de mise en œuvre.

2.4

Une gouvernance à niveaux multiples, dans laquelle la Commission, les administrations et les gouvernements nationaux, et les collectivités territoriales occuperaient chacun leur place tout en partageant des responsabilités dans un cadre commun, porterait l'empreinte de ces mêmes dynamiques.

2.5

Les politiques et les projets régionaux voient généralement le jour dans le cadre de pratiques administratives nationales et régionales qui sont généralement extrêmement compliquées et variées. Cependant, il est clairement dans l'intérêt des citoyens et des entreprises que les politiques et les projets soient mis en œuvre correctement et de manière cohérente à travers l'UE.

2.6

Tant l'attention du Parlement européen pour ce sujet que les nombreuses questions auxquelles il convient d'apporter une réponse pour promouvoir la convergence des pratiques à travers l'Union en vue d'optimaliser le succès des politiques régionales font écho à des considérations analogues présentées dans des documents de la Commission et du Conseil.

2.7

Un certain nombre de ces considérations et des principes correspondants sont développés dans le document de travail des services de la Commission intitulé «Innovation et politique régionale» (5), en préparation de la réunion ministérielle informelle sur la cohésion territoriale et la politique régionale, qui s'est tenue aux Açores (6). Ils ont déjà été appliqués et, dans une certaine mesure, mis en œuvre au cours de la période 2000-2006. La Commission ne cesse de soutenir que «les États membres ou les régions ne peuvent réaliser seuls la compétitivité renforcée. Une coopération étroite est nécessaire entre les pouvoirs publics concernés, les entreprises, les citoyens et les partenaires sociaux, en partenariat avec la Commission et les institutions européennes»  (7). En outre, une évaluation réussie requiert des capacités administratives et institutionnelles modernes.

2.8

La Commission argumente qu'il ne sera possible de progresser sur cette voie qu'en développant des systèmes à plusieurs niveaux pour une gouvernance novatrice, incluant notamment une coordination stratégique, une combinaison de plusieurs stratégies — il n'existe aucune «stratégie miracle» unique — convenant pour chaque région, dans la cadre de laquelle les réseaux, les grappes d'entreprises, les pôles d'excellence seront identifiés et éventuellement aidés par des agences régionales, pour la sélection.

2.9

Pour la période de programmation 2007-2013, la Commission a approfondi ses objectifs dans les Orientations stratégiques communautaires sur la cohésion, en se focalisant sur la compétitivité, la croissance et les ressources humaines. Elle a développé un objectif territorial européen axé sur «la coopération transfrontalière par le biais d'initiatives et d'objectifs locaux et régionaux conjoints, la coopération transnationale en faveur du développement territorial et la coopération et l'échange d'expériences entre les régions»  (8).

2.10

Les ministres de la cohésion territoriale et de la politique régionale ont défini un agenda pour les régions et les villes dans la charte de Leipzig et l'agenda territorial (9). Aux Açores, la réunion ministérielle informelle est passée à l'étape suivante en arrêtant les modalités de mise en œuvre de l'agenda pour les régions et les villes. Les ministres ont fortement insisté dans le Premier programme d'action (10) sur leur «conviction que la gouvernance multiple est un outil fondamental pour assurer un aménagement du territoire équilibré dans l'UE» et se sont proposé de «se réunir avec un panel d'acteurs concernés et des collectivités locales et régionales en vue de discuter de la mise en œuvre des priorités présentées dans l'agenda territorial».

2.11

Dans ce programme, les ministres ont aussi souligné que la meilleure manière de réaliser les objectifs de l'agenda territorial serait «conformément aux accords institutionnels en vigueur dans chaque État membre, par le biais d'une forte participation des parties prenantes et des pouvoirs nationaux, régionaux et locaux, et d'un dialogue avec la Commission européenne et les autres institutions de l'UE»  (11). Ici aussi, on peut noter l'accent mis sur la nécessité de discussions, d'actions et de soutien mutuels à tous les maillons de la chaîne de la gouvernance, des acteurs locaux à travers l'Europe à la Commission et vice-versa.

2.12

Dans les cinq lignes d'action, les ministres ont mis en évidence le besoin de renforcer la gouvernance territoriale à multiples niveaux, de mettre en place de nouvelles formes de partenariats et de gouvernance territoriale, et de doter les politiques sectorielles d'une dimension territoriale/urbaine.

2.13

On peut toutefois déplorer, bien que ce soit habituel, que, dans le Programme d'action, la mise en œuvre concrète, au moins dans sa définition, demeure une responsabilité quasiment exclusive des États membres et qu'il soit rarement fait mention des autorités locales et régionales et des autres parties prenantes en tant qu'acteurs indispensables du processus. La conception traditionnelle du principe de subsidiarité prévaut toujours.

3.   Remarques générales

3.1

Il existe des entraves à la transparence, à la cohérence et à l'efficacité dans la planification et la mise en œuvre de la politique régionale. Ces obstacles sont partiellement dus à l'organisation et aux méthodes de travail propres aux directions générales et à leurs interactions, ainsi qu'à celles des Fonds européens au niveau communautaire. Toutefois, ils sont en grande partie liés aux défauts et aux insuffisances dans le fonctionnement de la gouvernance à niveaux multiples et dans la mise en œuvre des politiques et des programmes.

3.2

Le projet de rapport du PE montre à juste titre que plusieurs initiatives positives ont été prises en vue d'améliorer la gouvernance au niveau européen. On peut par exemple penser à URBAN I et II, au programme LEADER et à Urbact.

3.3

Le CESE estime cependant que certaines de ces initiatives, comme l'agenda territorial, sont plutôt vagues. Par ailleurs, il n'existe aucune donnée pratique indiquant dans quelle mesure la gouvernance à multiples niveaux peut être considérée comme un facteur de succès dans les programmes mentionnés précédemment.

3.4

Bien que la gouvernance à niveaux multiples devienne une pratique mieux acceptée dans l'UE, des méthodes de travail transparentes et cohérentes ainsi qu'une bonne communication font toujours défaut. Cela est largement dû au fait que l'Union européenne ne fonctionne pas comme un État unitaire.

3.5

La manière dont les gouvernements nationaux et les parties prenantes telles que les collectivités décentralisées perçoivent la place de l'UE dans le concept de gouvernance à niveaux multiples est parfois très différente d'un pays à l'autre, en fonction des intérêts nationaux et des traditions culturelles.

3.6

Une troisième considération relative aux problèmes potentiels liés à la gouvernance à niveaux multiples découle de la grande variété de concepts administratifs et politiques qui existent dans les États membres eux-mêmes, dont les racines sont profondes et qui, généralement, sont inaptes au changement.

3.7

Ces éléments démontrent qu'une approche unique et uniforme au niveau européen en matière de planification et de programmation régionales est quasiment impossible. Les structures, approches et attitudes nationales et souvent aussi régionales demeurent décisives. Néanmoins, certaines situations concrètes, telles que l'évolution financière et socioéconomique actuelle sur le plan international, obligent à réexaminer les procédures afin de renforcer les régions et de les préparer au changement.

3.8

La politique régionale de l'Union européenne devrait être un processus aussi bien ascendant que descendant: ascendant en ce que les régions doivent identifier et améliorer leurs conditions socio-économiques, environnementales et de compétitivité et en ce que la politique régionale européenne (et nationale) doit nécessairement être mise en œuvre sur le terrain; descendant en ce que les ressources financières et les conditions cadres sont définies et fournies au niveau de l'Union européenne et des États membres. À aucun moment il ne s'agit d'une démarche à sens unique.

3.9

Il convient d'accueillir positivement les initiatives prises au niveau de l'UE et les bonnes intentions des États membres visant à promouvoir des approches administratives plus efficaces et convergentes à travers l'Europe. Toutefois, la bonne gouvernance dans la politique régionale requiert avant tout d'adapter les formes rigides de gouvernance à niveaux multiples, ce qui revient en fait à adapter les styles et les mentalités en matière de gouvernance.

3.10

Les documents mentionnés précédemment en partie 2 démontrent que le Conseil partage largement ce point de vue. C'est assurément un grand pas en avant. Cependant, entre les mots et leur mise en œuvre pratique, il y a souvent un long chemin à parcourir.

3.11

Une véritable mise en œuvre est plus facile à réaliser dans des pays et des régions caractérisés par une tradition de décentralisation que dans des systèmes administrativement centralisés. Certains États membres, qui ne connaissent pas de politique régionale perfectionnée et dans lesquels les autorités régionales n'existent pas encore complètement, présentent des complications supplémentaires.

3.12

Le CESE souligne la nécessité de disposer de statistiques européennes de meilleure qualité et plus précises, en tant qu'exigence fondamentale pour une bonne politique régionale.

3.13

Le CESE apporte son soutien à tout effort visant à améliorer la gouvernance européenne. Cette démarche devrait contribuer à améliorer et à rendre plus transparent le lien entre les politiques et les résultats. S'agissant des résultats, la participation des acteurs régionaux et locaux, publics et privés, est indispensable. Ils doivent être associés de manière plus visible. La participation génère souvent une responsabilité et un engagement partagés. Aux yeux du CESE, c'est un aspect particulièrement important.

4.   La «gouvernance à niveaux multiples»: interaction entre la Commission, les gouvernements et les régions

4.1

Au niveau de la Commission, la présentation des divers Fonds communautaires, liée à la politique régionale, devrait être plus cohérente. La vue générale des principes et des objectifs des politiques communautaires dans ce domaine est plutôt confuse pour les tierces personnes.

4.2

Une approche convenue conjointement par les différentes directions générales et la Commission s'impose. Dans ce contexte, le groupe interservices sur les affaires urbaines (12) peut être très utile.

4.3

Une présentation plus cohérente et la visibilité d'une approche commune au niveau européen peuvent également servir d'exemples pour les gouvernements et les ministères et les amener à des approches intégrées par rapport aux régions et aux villes là où elles font généralement défaut au niveau national. Quoi qu'il en soit, il sera utile de combler jusqu'à un certain point le fossé entre le niveau communautaire d'une part, et les régions et les villes d'autre part.

4.4

Une mise en œuvre flexible de la gouvernance à niveaux multiples et les synergies correspondantes peuvent se révéler un stimulant opportun en vue de l'adaptation des pratiques administratives dans les États membres. L'objectif ultime de la politique régionale étant d'activer autant que faire se peut les potentiels (non encore révélés) des régions et des villes, les structures gouvernementales doivent être organisées en conséquence, d'une manière transparente et cohérente.

4.5

Les Fonds communautaires, en coordination étroite avec des programmes nationaux, doivent proposer des stimulants efficaces afin de promouvoir ces potentiels.

4.6

La Commission a également un rôle plus large à jouer en reliant les régions et les villes à l'Europe et en soutenant les régions et les villes conscientes de leur valeur, fortes et durables: en expliquant, aussi au niveau décentralisé, l'importance de l'agenda de Lisbonne (qui, à ce jour, n'est pas bien comprise); en sensibilisant au rôle futur des villes et des aires métropolitaines; et en diffusant les approches réussies à travers l'Europe (13). Des instituts de recherche spécialisés et des universités pourraient apporter leur soutien dans ce cadre.

4.7

Pour le CESE cela n'implique certainement pas la mise en place de nouvelles procédures bureaucratiques, mais plutôt moins de bureaucratie et d'entraves administratives et une décentralisation ciblée et cohérente.

4.8

Aux yeux du Comité, la décentralisation a cela de très prometteur qu'elle accentue la responsabilité des collectivités locales et régionales et la renforce.

4.9

La responsabilité est centrale. Elle constitue la pierre angulaire des éléments fondamentaux nécessaires à tout développement régional: la direction stratégique, la vision et la cohérence. Il existe des exemples remarquables de cela en Europe (14).

4.10

L'Union européenne et les gouvernements nationaux devraient prendre en compte les mécanismes et les pratiques de travail des régions et des villes qui réussissent, zones métropolitaines comprises. Elles ne sont en aucun cas des «États» miniatures. Leur nature est autre et leur gestion diffère fondamentalement de celle d'un État.

4.11

Leur approche est souvent inspirée par des objectifs concrets qui stimulent le développement global (15). Quant à leur image, elle est souvent déterminée par l'amélioration des conditions pour l'investissement (étranger), les grappes d'entreprises et les ressources humaines. Dans le même temps, le développement durable occupe le sommet de l'agenda, tout comme l'inclusion sociale, la qualité du travail et les conditions de vie.

4.12

Un programme d'échange européen pourrait être mis sur pied pour les fonctionnaires des régions et des villes. Développer une connaissance transfrontalière mutuelle des différentes approches et stratégies, par exemple en matière d'aménagement du territoire, de promotion de l'attractivité économique et de logement social, serait très bénéfique.

4.13

Le CESE suggère de mettre en place des programmes de jumelage entre les régions et les villes dans toute l'Europe, à l'instar de ce qui existe déjà dans plusieurs autres domaines politiques, afin que les régions se familiarisent avec des programmes et des procédures décentralisés.

4.14

De tels échanges bien structurés au sein de l'Europe pourront contribuer à modifier les mentalités et les comportements en vue de promouvoir la capacité d'expression et la force des régions et des villes. Comme l'indiquent plusieurs exemples, il arrive souvent que les régions et les aires métropolitaines bénéficient d'impulsions positives générées par les dynamiques d'internationalisation de l'économie. Elles découvrent de nouvelles manières efficaces de se faire connaître.

4.15

Les programmes communautaires peuvent soutenir cette démarche de sensibilisation, soit par le biais de projets cofinancés par les Fonds, soit par celui de communications et d'avis ciblés émanant de fonctionnaires de la Commission. Ceux-ci peuvent être appuyés dans leur tâche par des organes consultatifs spécialisés actifs à travers les frontières. Un soutien du Parlement européen en faveur d'une structuration de ce processus déjà en cours serait également le bienvenu.

4.16

Le CESE approuve la proposition du PE de créer un conseil de l'UE formel pour le développement territorial. Cela permettrait de souligner l'importance de la gouvernance à niveaux multiples et constituerait une plate-forme appropriée pour le développement d'idées relatives à une approche globale pour les régions et les villes. Le Conseil serait davantage tenu de débattre de cette question et de dégager des accords dans ce domaine.

4.17

Sur la base du Premier programme d'action (2007) (16), un débat européen pourrait être initié sur la modernisation des pratiques et des systèmes administratifs et sur la relation entre l'État d'une part, et les régions et les villes d'autre part. Ses objectifs devraient être: diminuer les procédures bureaucratiques, bâtir la confiance, promouvoir des régions et des villes durables et fortes, améliorer la transparence, réduire la distance entre les niveaux décentralisés et celui de l'Union européenne.

4.18

Il convient de considérer ces suggestions comme des manières de contribuer à une meilleure gouvernance des relations entre les pouvoirs publics à tous les niveaux. Ceux-ci ne devraient pas ou plus être envisagés dans le cadre d'une hiérarchie de compétences entre différents échelons de pouvoir. Au contraire, le CESE voit la gouvernance à niveaux multiples comme un modèle flexible de relations entre la Commission, les gouvernements nationaux et les collectivités régionales et locales, un modèle conçu sur mesure pour des situations spécifiques et considérations thématiques.

5.   La bonne gouvernance implique des partenariats avec la société civile organisée

5.1

Le CESE estime que la gouvernance locale et régionale moderne nécessite une participation active des différents segments des communautés locales et régionales. Elles peuvent apporter des compétences et points de vue variés, qui répondent à des besoins spécifiques. De manière explicite ou non, le Conseil le reconnaît au travers de différents documents (17).

5.2

Le document de référence pour le «partenariat» est l'article 11 du règlement général sur les Fonds structurels, qui plaide en faveur du principe de partenariat, c'est-à-dire pour la consultation et la participation des opérateurs socio-économiques et de la société civile (18).

5.3

Le CESE considère que la bonne gouvernance en matière de politique régionale implique une participation responsable et transparente de la société civile représentative et légitime, composée d'acteurs clairement définis au niveau régional. La consultation et la participation devraient s'opérer au niveau de la définition, de la programmation et de l'évaluation des projets régionaux. Cette coopération devrait également exister dans le cas de projets interrégionaux et transfrontaliers, notamment dans le cadre des groupements européens de coopération territoriale (19).

5.4

Plus généralement, le CESE estime que la décentralisation est salutaire pour la promotion de la responsabilité et de la transparence des collectivités locales et régionales qui feront à leur tour participer des acteurs non gouvernementaux tels que des partenaires sociaux, des chambres de commerce, des entreprises, des agences de développement, des organismes de logement, des organisations non gouvernementales quasi autonomes («quangos»), des agences environnementales, des organismes sociaux, des établissements d'enseignement à tous les niveaux, des établissements de santé, des architectes et des artistes.

5.5

En dépit des intentions exprimées par le Conseil et d'un dialogue permanent entre la Commission, les États membres et les régions pour promouvoir de tels partenariats, ces derniers ne sont mis en pratique que dans un nombre de cas limité (20). La plupart du temps, ils sont tout simplement inexistants. Il conviendrait de diffuser les bons exemples.

5.6

La société civile représentative, pour sa part, doit également être organisée de façon satisfaisante au niveau régional et doit disposer des compétences adéquates. Cela n'est pas évident lorsqu'elle est peu développée ou lorsqu'elle reflète des intérêts très divers, parfois opposés.

5.7

Il faudrait donner à la Commission la possibilité de jouer le rôle de catalyseur et promoteur des courbes d'apprentissage en matière de gouvernance décentralisée.

5.8

La conscience de la nécessité de changement et d'adaptation dans les régions et les villes peut également jouer en faveur de partenariats plus nombreux et de meilleure qualité. L'expérience montre qu'une vision cohérente au sein des pouvoirs publics crée une marge de manœuvre pour une intensification de la coopération avec les autres parties prenantes. De même, il convient de tenir compte de l'article 11 du règlement général sur les Fonds structurels (concernant les partenariats).

5.9

Les possibilités sont nombreuses. L'amélioration de la gouvernance au niveau décentralisé rendra les sociétés dans leur ensemble plus fortes et prêtes à regarder l'avenir en face.

5.10

Étant donné que la Commission entend publier avant la fin de l'année un document portant spécifiquement sur la question des partenariats dans le cadre de la politique de cohésion de l'UE, le CESE propose d'examiner à nouveau ce sujet de manière approfondie dans un avis distinct.

Bruxelles, le 18 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  Pour le CESE, les concepts de «régions» et de «villes» ne renvoient pas nécessairement à des entités administratives existantes auxquelles ces termes renvoient généralement. Il s'agit plutôt de concepts dynamiques correspondant à des zones socio-économiques cohérentes qui englobent des régions-réseaux, des villes, avec leurs alentours, des municipalités interconnectées et des aires métropolitaines.

(2)  Voir avis du CESE «Partenariat pour la mise en œuvre des fonds structurels», JO C 10 du 14.1.2004, p. 21.

(3)  «Gouvernance européenne» COM(2001) 428 final présentait notamment une nouvelle vision quant à la manière dont l'UE pourrait et devrait fonctionner, en améliorant la participation, en veillant à plus d'ouverture, et en identifiant nettement le lien entre les politiques, la réglementation et les résultats concrets. Ce document visait explicitement à améliorer la relation entre l'Europe et ses citoyens.

(4)  PE407.823v01-00 — Rapporteur: M. Jean-Marie BEAUPUY.

(5)  SEC(2007) 1547 du 14.11.2007.

(6)  Sous la présidence portugaise, 23 et 24 novembre 2007.

(7)  Ibid, p. 6. Voir également p. 18: facteurs déterminants pour une région prospère.

(8)  Iibid, p. 17.

(9)  «Charte de Leipzig sur la ville européenne durable» et «Agenda territorial de l'Union européenne — Vers une Europe plus compétitive et durable avec des régions diverses», réunion ministérielle informelle sur le développement urbain, tenue à Leipzig les 24 et 25 mai 2007.

(10)  «Premier programme d'action relatif à la mise en œuvre de l'Agenda territorial de l'Union européenne», 23 novembre 2007.

(11)  Ibid, p. 8.

(12)  Le groupe interservices sur les affaires urbaines a été créé en … Toutes les DG traitant de domaines intéressant les villes sont représentées.

(13)  La Commission a développé une expertise pour 26 régions françaises, sous la forme d'une analyse comparative.

(14)  Parmi eux, Bilbao, où vingt années de direction stratégique, de vision et de cohérence ont donné naissance à une métropole moderne, tournée vers l'avenir, dans une région qui était totalement déprimée et en mauvais état au début des années 1980. Cette direction à Bilbao a bénéficié du soutien financier du gouvernement central et du gouvernement basque et de la province — un exemple de partenariat public-public efficace — et de celui de partenariats persuasifs avec la société civile organisée et le secteur privé.

(15)  Parmi ceux-ci, on peut citer des exemples intéressants comme la jonction de lignes à grande vitesse à Lille, les Jeux olympiques et le 500e anniversaire de la découverte des Amériques par Christophe Colomb à Barcelone, et un nouveau centre-ville tourné vers l'avenir à Birmingham. Dans tous ces cas, ces objectifs «moteurs» ont constitué un nouveau départ pour le développement local.

(16)  Voir Premier programme d'action, p. 5: «De nouvelles formes de gouvernance territoriale sont nécessaires pour favoriser une approche mieux intégrée et une coopération flexible entre les différents niveaux de territoire».

(17)  Voir partie 2.

(18)  Règlement du Conseil (CE) no 1083/2006 de juillet 2006, applicable à tous les programmes de la politique de cohésion de l'UE de 2007 à 2013. Il va sans dire que les partenariats au niveau national, aussi importants soient-ils, ne peuvent se substituer à des partenariats avec la société civile régionale.

(19)  Règlement (CE) no 1082/2006 de juillet 2006. Ce règlement sur les opérations transfrontalières est limité aux pratiques administratives.

(20)  À plusieurs reprises, le CESE a soutenu les partenariats dans la mise en œuvre de la politique régionale, par exemple dans ses avis sur le thème «Partenariat pour la mise en œuvre des fonds structurels», JO C 10 du 14.1.2004, p. 21 et sur «Le rôle des organisations de la société civile dans l'application de la politique communautaire de cohésion et de développement régional», JO C 309 du 16.12.2006, p. 126. Les partenariats régionaux devraient également exister dans d'autres domaines, tels que le Programme pour la compétitivité et l'innovation et le 7e programme-cadre, voir l'avis sur «La gouvernance territoriale des mutations industrielles: le rôle des partenaires sociaux et la contribution du programme-cadre pour la compétitivité et l'innovation», JO C 318 du 23.12.2006, p. 12.


31.3.2009   

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Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Exonérations fiscales/introductions définitives de biens personnels des particuliers en provenance d'un État membre (codification)»

COM(2008) 376 final — 2008/0120 (COD)

(2009/C 77/31)

Le 18 juin, le Conseil de l'Union européenne, a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur

«Exonérations fiscales/introductions définitives de biens personnels des particuliers en provenance d'un État membre (codification)».

Ayant estimé que le contenu de la proposition est entièrement satisfaisant et n'appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 17 septembre 2008), a décidé, à l'unanimité, de rendre un avis favorable au texte proposé.

 

Bruxelles, le 17 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


31.3.2009   

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Avis du Comite économique et social européen sur «La stratégie UE-Afrique»

(2009/C 77/32)

Par lettre, en date du 11 juillet 2007, le Commissaire Louis MICHEL, Commissaire au développement et à l'action humanitaire, a demandé au Comité économique et social européen d'élaborer un avis exploratoire sur

«La stratégie UE-Afrique».

La section spécialisée «Relations extérieures», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 17 juillet 2008 (rapporteur: M. DANTIN).

Lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 18 septembre 2008), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 89 voix pour 0 voix contre et 0 abstention.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Dans le contexte mondialisé de ce nouveau siècle la relation entre l'Europe et l'Afrique, tirant enseignement du passé, doit évoluer de façon considérable en tendant, notamment, vers un partenariat égalitaire en droit et en devoir. En effet après des décennies de coopération et d'aide au développement l'extrême pauvreté de l'Afrique s'aggrave et s'approfondie: les fruits d'une croissance mal orientée et peu riche en emplois sont inégalement répartis creusant les inégalités; plus de 55 % de la population de l'Afrique subsaharienne vit avec moins de 1 dollar par jour; près de 70 % du nombre total des emplois sont des emplois informels, de subsistances, dont plus de 57 % sont dans l'agriculture. Ceci renvoie l'image d'un manque dramatique d'emplois décents et productifs.

1.2

L'enjeu est d'importance surtout en termes de développement et de stabilisation du continent africain, mais aussi de sécurité du continent européen et de sa capacité à construire une croissance durablement soutenue.

1.3

Les politiques de développement conduites jusqu'à présent par l'Union européenne en application des différents accords (Lomé, Yaoundé, Cotonou), les financements qui y ont été consacrés, n'ont pas atteint les résultats souhaités notamment en matière de création d'emplois décents. Ce constat fait, les choses ne pouvant rester en l'état, la donne devant changer, le Comité se félicite du succès du sommet UE/Afrique tenu à Lisbonne des 8 et 9 décembre 2007.

1.3.1

Il se félicite en particulier de la prise en compte, de façon transversale, de la question de l'emploi.

1.4

En effet le CESE estime que le développement de l'emploi décent est au cœur de la réduction des inégalités, de la pauvreté, de l'intégration sociale, de la construction de vies dignes qui sont nécessaires à la résorption des extrémismes et des conflits et donc à la nécessaire stabilité des États.

1.5

Pour développer l'emploi décent le Comité juge nécessaire de conduire une action dans laquelle celui-ci serait l'objectif essentiel en agissant sur les paramètres énoncés dans les articles suivants, et qui bien qu'intrinsèquement différents, sont liés par de fortes synergies leurs confèrent une réactivité réciproque et dont l'ensemble constitue une politique.

1.5.1

La croissance reposant pour l'essentiel sur l'exploitation des richesses naturelles est peu riche en emplois. Elle doit être réorientée vers des produits de première transformation ou des produits finis. Les investissements doivent avoir cet objectif en visant des secteurs à forte valeur ajoutée.

1.5.2

Le secteur privé revêt une importance capitale et à travers lui les PME. L'UE doit faire du développement des PME l'un des axes de sa politique de coopération.

1.5.3

Le renchérissement actuel des matières premières est une donnée supplémentaire qui doit conduire à faire du secteur agricole la priorité stratégique du développement. En occupant une part importante du territoire et de la population rurale il doit concourir à l'autosuffisance alimentaire, au développement d'une industrie de transformation et par là même à freiner l'exode rural.

Il convient de planifier une politique agricole à court, moyen et long terme en veillant à dégager prioritairement un budget pour sa réalisation. L'élaboration de cette politique doit s'effectuer avec les organisations agricoles.

1.5.4

Le développement des ressources humaines est un facteur incontournable de toute stratégie de développement. Il convient dès lors de faire l'analyse des besoins en emplois, du marché du travail, d'effectuer des prévisions et d'anticiper les défis majeurs liés à l'adéquation emploi formation.

1.5.5

Si l'intégration économique régionale et sous régionale a sensiblement progressée, le potentiel commercial reste à exploiter. Il faut, en particulier, coordonner les mesures prises pour harmoniser les procédures douanières, développer les infrastructures, assurer la libre circulation des citoyens … De ce point de vue le Comté regrette que n'aient pas été conclues, jusqu'à présent, les négociations régionales des Accords de partenariat économique dont l'un des objets est l'intégration régionale.

1.5.6

Le dialogue social doit accompagner et bonifier toute politique de développement. Notamment au travers de négociations de conventions collectives. Il convient donc de créer ou de développer des organisations d'employeurs et de travailleurs fortes et indépendantes.

1.5.7

La participation des acteurs non étatiques est indissociable du développement de l'emploi et doit être au cœur de la stratégie commune UE/Afrique. À ce titre ils doivent être associés à l'élaboration et à la mise en œuvre des Plans indicatifs nationaux et régionaux.

1.5.8

La «bonne gouvernance» conditionne la confiance des investisseurs. De ce point de vue elle est essentielle pour l'emploi. Elle doit être envisagée dans sa globalité notamment pour ce qui est du respect des droits de l'homme et des travailleurs dont les libertés syndicales, les normes de travail et la corruption. Sur ce dernier point l'UE et les États membres doivent conditionner leurs aides financières à la traçabilité de leurs utilisations.

2.   Introduction

2.1

Par lettre, en date du 11 juillet 2007, le Commissaire Louis MICHEL, Commissaire au développement et à l'action humanitaire, a demandé au Comité économique et social européen d'élaborer un avis exploratoire «sur les questions diverses issues de la Communication “Du Caire à Lisbonne — le partenariat UE/Afrique”, notamment des questions sur comment réduire le déficit d'emplois en Afrique».

2.2

Le CESE se félicite de cette demande, qui tout en s'inscrivant dans le cadre des politiques de développement qui ont été conduites en Afrique depuis des décennies, vise à interroger l'avenir qui se dessine, en particulier, au travers des décisions du sommet UE/Afrique qui sont contenues dans la déclaration intitulée «Le Partenariat stratégique» accompagnées d'un «Premier Plan d'Action» (2008-2010) destiné à sa mise en œuvre.

2.3

En saisissant le Comité sur le thème de l'emploi la Commission montre son choix de faire de celui-ci l'objectif essentiel de sa politique de développement, tout comme elle indique que les acteurs économiques et sociaux ont un rôle à jouer dans l'éradication de la pauvreté par la création d'emplois décents. Le CESE s'en réjouit.

Cet avis s'attachera, après avoir procédé à un regard rapide sur les politiques passées et leurs résultats en considérant la situation de l'Afrique aujourd'hui ainsi que sur les politiques à venir, à mettre en exergue les actions essentielles qui doivent, selon le Comité, être menées pour contribuer à la création d'emplois décents. Cette recherche s'exercera à la lumière des orientations et du plan d'action qui ont été arrêtés au sommet UE/Afrique qui s'est tenu les 8 et 9 décembre 2007 à Lisbonne. Pour ce faire il s'appuiera, notamment, sur les travaux antérieurs du CESE concernant le développement de l'Afrique (1).

3.   Considérations générales

3.1

Le continent africain est composite. Il est constitué d'États souvent différenciés en terme d'histoire, de culture, d'ethnie, de richesses propres (minerais, pétrole, diamants …), de climat ou bien encore de démocratie, de bonne gouvernance et de respect des droits de l'homme … Ceci conduit à des niveaux économiques et sociaux variables. Il est donc délicat de l'appréhender, de le regarder, de façon globale et monolithique. Il n'en demeure pas moins qu'un certain nombre de caractères sont communs et en premier lieu les rapports à l'Europe, qu'ils soient passés ou futurs ou bien encore d'une histoire partagée qui donnera lieu à un avenir commun s'inscrivant dans une dynamique de changement, elle-même partagée.

3.2

En effet, dans le contexte mondialisé de ce nouveau siècle, la relation entre l'Europe et l'Afrique, tirant enseignement du passé, doit évoluer de façon considérable. Elle doit être fondée sur la prise de conscience de la nécessaire construction d'un avenir mutualisé qui doit se construire sur des enjeux et des risques communs, une logique d'intérêts mutuels, bien davantage que sur une histoire momentanément partagée, la compassion ou la fidélité, au risque de mettre certains partenaires, sur chacun des deux continents, face à leur contradictions.

3.3

L'enjeu est d'importance. À quinze kilomètres de la terre européenne, le continent africain concentre sur son territoire tous les «risques majeurs» du monde contemporain: migration incontrôlée, épidémies émergeantes, catastrophes climatiques et environnementales, menace terroriste … Mais c'est aussi celui dont le potentiel est le plus conséquent, qu'il s'agisse des ressources naturelles ou de la demande prévisible de consommation et d'investissement.

3.4

Certes, l'Union européenne demeure encore le premier partenaire économique du continent africain et son premier donateur. Mais ce monopole historique est désormais battu en brèche par l'offensive des «bailleurs émergeants», la Chine, d'abord, mais aussi l'Inde, les grands pays d'Amérique latine et les monarchies du Golf, voire l'Iran, ainsi que par le retour des États-Unis, soucieux tout à la fois de préserver la sécurité de leur approvisionnements énergétiques, de contrer la menace terroriste, d'élargir le terrain du combat pour les valeurs chrétiennes et de la démocratie, et de contrer l'«entrisme» chinois qui les inquiète (2).

3.5

Mais il est clair que, désormais, la sécurité du continent européen, comme sa capacité à préserver une croissance durablement soutenue, dépendront, de façon étroite et immédiate, du développement et de la stabilisation du continent africain. L'Europe ne saurait être, sur le moyen et le long terme, un îlot de prospérité à quinze kilomètres d'un continent ou la caractéristique est la misère. Il y va du développement durable de l'Union européenne qui doit prendre conscience que désormais l'Afrique est «sa frontière».

3.6

«La stratégie de l'Europe à l'égard de l'Afrique a longtemps été caractérisée par une relation asymétrique donateur bénéficiaire doublée d'une fausse bonne conscience idéologique, ainsi que d'une vision unilatérale de nos intérêts Cette vision archaïque, irréaliste, à été terriblement préjudiciable. Cette page doit être tournée au profit d'une nouvelle conception de partenariat, entre partenaires égaux en droits et en devoirs pratiquant une logique d'intérêts partagés et qui s'appuie sur des paramètres tels que le développement durable, la bonne gouvernance économique, fiscale, et sociale, les transferts de technologies …» (3).

3.6.1

Cette stratégie basée, donc, sur une relation asymétrique «donateur bénéficiaire» ou «bailleur de fonds — bénéficiaire» et notamment concrétisées dans le contenu des différents accords qui ont régis ou qui régissent les rapports entre l'UE et l'Afrique, au regard de ce qu'est, aujourd'hui, la situation économique et sociale de l'Afrique, est un «échec» (4). Il convient donc de modifier la donne.

Elle a mis les États africains dans un état de dépendance, notamment financière, les conduisant à hypothéquer le dynamisme nécessaire à une entrée positive dans l'économie mondiale.

3.6.1.1

En effet après des décennies d'aide au développement pratiquée par l'Union européenne, par nombres d'États membres (souvent anciens colonisateurs), par des organismes internationaux comme la Banque mondial, l'extrême pauvreté de l'Afrique s'aggrave et s'approfondie.

3.6.1.2

Alors que des Pays ou des régions émergentes comme la Chine, l'Inde, le sud-est asiatique, le Brésil deviennent des puissances économiques, s'inscrivent dans le commerce international l'Afrique ne décolle pas à quelques rares exceptions.

3.6.1.3

Pourquoi un pays comme la Corée du sud qui vivait, il y a encore peu d'années, «pour le riz et par le riz» est devenu l'un des champions mondial de la construction électronique et navale, des services en informatique, de la construction automobile … et pas l'Afrique?

3.6.1.4

L'Europe demeure encore le premier importateur de produits africains. Cependant malgré près de 25 ans de droits de douane asymétriques, le volume des exportations des pays africains vers l'UE a baissé de plus de la moitié passant de 8 % en 1975 à 2,8 % en 2000 au regard du volume du commerce mondial. Cette préférence concernant les droits de douane n'a pas suffi. L'absence de compétitivité des produits africains a obérée les capacités d'exportation de l'Afrique vers l'Europe.

3.6.1.5

Les fruits de la croissance, essentiellement dus à l'exploitation des ressources naturelles, sont inégalement répartis creusant les inégalités faisant des pauvres toujours aussi pauvres voir encore plus pauvres et des riches encore plus riches. Tout ceci bien loin d'une bonne gouvernance économique épousant des soucis éthiques. Nombre d'africains dénoncent cette situation:

«(Il faut) rapatrier les fonds illégalement acquis dans les pays d'origine et stockés dans les banques étrangères» (5).

«Nous sommes malades de la mal gouvernance, certains pays sont plus pauvres qu'avant l'exploitation du pétrole, des diamants … Certains pays ont des dirigeants dont les avoirs personnels sont supérieurs à la dette du pays! Le mal ne vient pas de l'extérieur mais de nous même» (6).

4.   Du Caire à Lisbonne: une nouvelle stratégie Afrique-Union européenne

4.1

Les politiques conduites jusqu'à présent, les financements qui y ont été consacrés n'ont pas toujours atteint les résultats souhaités notamment en matière de créations d'emplois décents. Ce constat fait, les choses ne pouvant rester en l'état, le Comité se félicite du succès du sommet de Lisbonne des 8 et 9 décembre 2007. Il se félicite de la volonté politique qui a permis de compléter, voire de redessiner en les réorientant, les coopérations et par là même les relations tant commerciales que politiques entre les deux continents.

4.2

En effet sept ans après le sommet du Caire, celui de Lisbonne a jeté les bases d'un nouveau partenariat stratégique «d'égal à égal» entre l'Afrique et l'Union européenne, fondé sur des valeurs, des principes et des intérêts communs pour relever ensemble des défis globaux sur la scène internationale: paix et sécurité, gouvernance et droits humains, migration, énergie et changement climatique, commerce, infrastructures et développement.

4.3

L'originalité et la novation de cette stratégie, au-delà de son contenu, est la mise en place au côté de la déclaration d'une phase opérationnelle, de huit plans d'action prioritaire (cf. annexe I du présent avis), sorte de feuille de route ou de plan de travail destiné à traduire en termes concrets la mise en œuvre des choix et priorités stratégiques, identifiés par les deux continents. Les progrès de la réalisation de ces huit plans, extrêmement ambitieux à l'image de l'accord de Cotonou, seront mesurés lors du prochain sommet en 2012.

4.4

Le Comité trouve positif, qu'au-delà des déclarations de principe certes importantes, il ait été arrêté une architecture de travail permettant leur traduction opérationnelle et concrète ce qui permettra, notamment, l'évaluation de leur mise en œuvre dès 2010.

4.5

Le CESE souligne que chacun des huit partenariats, traduits en plan d'action, peut contribuer au développement de l'emploi décent, dès l'instant où ce choix politique est fait et dans la mesure où ils sont accompagnés de politique d'emploi spécifiques (cf. chapitre 7).

4.6

Cependant, au-delà des écrits, la bonne volonté affichée de part et d'autre lors de ce sommet ne saurait dissimuler certaines difficultés et certains écueils dénoncés par certains responsables africains. Ceux-ci laissent percevoir qu'une nouvelle stratégie, aussi novatrice soit-elle en créant un partenariat équilibré, ne saurait gommer rapidement des relations dont les rapports sont jugés aujourd'hui encore de dominant à dominés:

on fustige la bureaucratie de l'UE alors «qu'avec la Chine il est si facile d'obtenir de suite les tracteurs dont on a besoin …»

on demande à l'UE soit de dédommager l'Afrique pour la colonisation et la spoliation de ses biens soit d'accepter ses immigrés …

on émet des doutes quant à la capacité des Accords de partenariat économique (APE) d'être conclus dans un véritable esprit de partenariat …

on dénonce les divergences très vives sur la crise du Zimbabwe …

Le chemin semble encore long et plein d'embûches pour que les deux parties gagnent leur pari dans une confiance retrouvée.

4.6.1

De ce point de vue le CESE estime, dans le cadre d'un partenariat équilibré, qu'il ressort en premier lieu de la responsabilité des gouvernements africains eux-mêmes d'assumer la responsabilité de la bonne gouvernance, de la lutte contre la corruption et de l'orientation des investissements directs ou étrangers pour la réduction de la pauvreté dans leur pays. Cette prise de responsabilité, confortant leur souveraineté, est le passage incontournable d'un partenariat renouvelé. Dès lors le principe effectif de l'adhésion à ce partenariat équilibré entre l'Union européenne et l'Afrique est essentiel et trouve tout son sens pour aller vers le développement de l'emploi décent.

4.7

Le CESE note avec satisfaction la place qui est faite à la société civile à la fois en terme institutionnel (relations entre le CESE de l'UE et l'ECOSOC de l'UA) (7) mais aussi pour ce qui est de l'ensemble des acteurs non étatique (ANE) constituant la société civile organisée (8). De ce point de vue, afin que la volonté affichée prenne forme et soit traduite dans les faits, il sera nécessaire de tenir compte, au risque d'échouer, des difficultés rencontrées sur ce point dans la mise en œuvre de l'Accord de Cotonou.

Au total, le Comité approuve l'orientation vers le progrès qui est donné à la stratégie UE-Afrique pour l'ensemble du continent.

5.   L'emploi décent, objectif indépassable d'une Stratégie UE-Afrique efficiente

5.1

L'article 55 de la stratégie UE-Afrique dispose: «Les questions d'emplois, et notamment la sécurité sociale, les possibilités d'emplois insuffisantes et la promotion du travail décent en Afrique seront abordées de manière conjointe, la priorité devant être donnée à la création d'emplois utiles dans l'économie formelles, à l'amélioration des mauvaises conditions de vie et de travail, conformément au programme pour un travail décent des Nations unies, et à l'intégration de l'économie informelle dans l'économie formelle …».

5.2

Le Comité se félicite de la prise en compte formelle de la question de l'emploi décent dans la stratégie UE-Afrique dans la mesure ou il estime que le développement de celui-ci est, en quantité mais aussi en qualité, au cœur de la réduction des inégalités, de la pauvreté, et de l'intégration sociale qui sont nécessaires à la résorption des extrémismes et des conflits et donc à la nécessaire stabilité des États.

6.   La situation de l'emploi en Afrique

Le taux de la population active est élevé (68,6 %). Si le taux de chômage est également élevé (10,3 %) c'est le manque d'emplois décents et productifs qui constitue le problème le plus grave: 46,2 % de la population, dont 55,4 % en Afrique subsaharienne vit avec moins de 1 dollar par jour. En d'autres termes, une proportion importante de la population active s'adonne à un travail informel généralement de subsistance. Il représente 68 % du nombre d'emploi total dont 57,2 % se situent dans l'agriculture primaire et sont occupés en proportion importante par des jeunes et des femmes alors que celles-ci jouent un rôle déterminant étant au centre de la communauté économique et de la famille constituant ainsi la trame de l'organisation du tissu économique et social africain (cf. annexe II du présent texte).

7.   Créer des emplois décents et productifs

Eu égard à ce qui précède la priorité pour l'Afrique est de créer des emplois décents et productifs, librement choisis, seuls capables de contribuer efficacement à l'éradication de la pauvreté, à la construction d'une vie digne, à la mise en place d'un protection sociale efficients et ouverte à tous, le tout en intégrant la dimension de genre à tous les niveaux, mais aussi celle des jeunes qui portent en eux l'avenir de l'Afrique et pour partie la solidarité entre les générations.

De fait, sans emplois productifs, il serait illusoire de prétendre à des niveaux de vie décents, au développement économique et social et à l'épanouissement de l'individu. Ces objectifs passent avant tout par le développement des ressources humaines et le développement des entreprises du secteur privé. Pour trouver sa plénitude cette dynamique doit s'inscrire dans un cadre favorisant son épanouissement où sont présents la démocratie, l'état de droit, la bonne gouvernance, le respect des droits humains et des droits sociaux …

La stratégie UE-Afrique, adoptée au sommet de Lisbonne, porte de façon transversale la dimension emploi. L'objet de ce chapitre est d'approfondir cette question centrale en termes d'analyses et de propositions d'orientations. Ceci passe par une réflexion sur les principaux leviers qui peuvent contribuer à l'approche de l'objectif: Cette démarche est pour l'essentiel macroéconomique. Cependant pour approcher la diversité des actions il serait utile de procéder, ultérieurement, à un inventaire des diverses actions menées par les ONG européennes intervenant en matière d'aide au développement en Afrique, faisant apparaître la diversité des programmes qu'elles mènent à bien en, particulier avec les collectivités et/ou les groupements locaux (coopératives, associations maraîchères, établissements scolaires ou sanitaires …) et qui participent au développement de l'emploi.

Cependant, au-delà de ce qui précède, le Comité tient à souligner avec force, que le développement de l'Afrique et donc la création d'emplois décents et productifs ne sauraient se réaliser que dans une stabilité accrue des États qui la composent. Or, un nombre conséquent de pays restent plongés dans des conflits interminables. Au cours de ces dix dernières années, en Guinée, au Libéria et en Sierra Léone, pays disposant de ressources naturelles notamment le diamant et le bois, les conflits ont plongés la région dans une crise sévère à l'origine d'un flux important de réfugiés. Sans parler du conflit du Darfour qui sévit au Soudan, de la «guerre oubliée» dans le nord de l'Ouganda, de l'insécurité persistante à l'est et au nord de la République Centrafrique et de l'instabilité au Congo … Eu égard à cette situation l'Union européenne et plus généralement la Communauté internationale ont un rôle important à jouer sur cette question déterminante pour l'avenir de ce continent. Car au-delà des atrocités commises, ce que personne ne saurait ni ignorer ni accepter, il est clair que si l'emploi peut contribuer à la stabilité des États, leur instabilité empêche leur développement et donc la création d'emplois.

7.1   Pour une croissance riche en emploi

7.1.1

S'agissant de la croissance économique, 2006 a été une année faste pour l'Afrique avec un taux de 6,3 % en Afrique du nord et de 4,8 %en Afrique subsaharienne avec de forts contrastes d'un pays à l'autre.

7.1.2

Ces chiffres sont conséquents, notamment comparés aux résultats de l'Union européenne, mais en raison d'une productivité qui stagne voir régresse, d'investissements mal orientés, d'une faible valeur ajoutée sur l'essentiel des productions industrielles ou agricoles, de l'explosion démographique et d'un énorme déficit d'emplois décents il faudrait une croissance à deux chiffres pour qu'il y ait à la fois une amélioration quantitative et qualitative des emplois. Selon les estimations il faudrait une croissance d'un minimum de 9 % pour commencer à appréhender positivement les Objectifs du Millénaire qui en tout état de cause, de façon regrettable, ne comportent pas d'objectifs emploi.

7.1.3

Cette croissance est pauvre en créations d'emplois parce que sa provenance est mal orientée. Elle provient souvent de l'augmentation de l'exploitation des richesses naturelles — caractérisée, souvent, par des conditions de travail confinant à l'inacceptable — dont la rentabilité a dernièrement explosée, dans les États pétroliers notamment, en raison de l'enchérissement du prix du baril de brut. Outre le fait que cette situation est aléatoire, car elle est sujette à la variation des cours, elle ne craie pas un emploi supplémentaire. Il en va de même pour les autres ressources naturelles dans la mesure où elles sont généralement exportées à l'état brut De plus lorsque les classes moyennes engrangent les bénéfices d'un regain d'activité, en général, elle consomme des produits importés. Cette consommation n'a pas, non plus, d'effet sur l'emploi local.

7.1.4

Il faut que les bénéfices tirés de l'extraction du pétrole brut, dont on ne sait pas toujours où et comment ils sont utilisés, soient investis dans la fabrication de produits de transformation à forte valeur ajoutée qui donneront une croissance riche en emplois. Il en va de même pour les autres ressources naturelles ou bien agricoles qui, elles, peuvent favoriser le développement d'une industrie agroalimentaire dans le cadre d'une politique agricole structurée, financée et prioritaire (cf. 7.4 et annexe IV du présent texte).

7.1.5

Une croissance créant des emplois en nombre optimum ne résultera pas de la simple exploitation des matières premières, ou des productions agricoles traditionnelles et de masse (canne à sucre, coton, banane, arachide, cacao …). Elle réside aussi dans le développement d'une industrie de transformation confectionnant des produits élaborés à forte valeur ajoutée ce qui, à long terme, est le meilleurs moyen d'éviter la détérioration des termes de l'échange, de participer à l'économie sous-régionale, régionale puis mondiale afin d'en tirer profit pour aller vers une nouvelle phase du développement.

7.2   Pour des investissements réorientés vers la diversification

S'il n'y a pas, ou peu, de création d'emplois sans croissance, il n'y aura pas de croissance sans investissements de qualité.

Il est généralement admis que pour obtenir un taux de croissance annuel conséquent pendant plusieurs exercices (cf. 7.1.2). Ceci nécessiterait un taux d'investissement oscillant entre 22 et 25 % du PIB, alors qu'il n'a été que de 15 % ces dernières années. Pour aller vers un tel rythme d'accumulation on peut distinguer deux sources d'investissements.

7.2.1   Les investissements endogènes

7.2.1.1

En premier lieu il s'agit d'investir sur des secteurs à forte valeur ajoutée et (ou) à forte capacité de production présentant un fort potentiel de créations d'emplois: infrastructures, agriculture et développement durables, conservation de l'environnement, industrie culturelle, transport, pêche, exploitation forestière, TIC, industrie (première transformation et produits finis). Il s'agit aussi d'investir sur des segments qui participent à la constitution d'un cadre propice à attirer les investissements directs étrangers (IDE). Il s'agit également d'aller vers la création d'un cercle vertueux: investissements endogènes — production — commerce — bénéfices … nouveaux investissements endogènes …

7.2.1.2

Les investissements endogènes, ou bien encore la mobilisation des ressources financières intérieures permettront à l'Afrique de déterminer, elle-même, ses propres priorités de développement au contraire des IDE.

7.2.1.3

Où trouver les fonds pour ces investissements endogènes?

la mobilisation des énormes bénéfices, visibles ou cachés, générés par l'exploitation des ressources naturelles (pétroles, gaz, charbon, diamant, bois, minéraux: chrome, platine, cobalt, or, manganèse, cuivre, fer, uranium …) (9). (Que deviennent-ils aujourd'hui? Et que deviennent, par exemple, les bénéfices provenant du sucre qui a été payé trois fois le cours mondial?);

l'introduction de taxes sur la valeur ajoutée (TVA) n'a permis d'accroître les recettes publiques que de façon limitée et incomplète. Ceci peut-être amélioré;

améliorer la collecte de l'impôt permettrait de doubler les recettes fiscales dans certains pays;

les variations importantes du ratio recettes fiscales/PIB (de 38 % en Algérie et en Angola à moins de 10 % au Niger, au Soudan et au Tchad) montrent que les pays ayant de très faibles ratios peuvent accroître sensiblement leur recette;

aller vers la formalisation du travail informel qui élargirait l'assiette fiscale permettrait d'accroître la base des ressources.

L'ensemble de ces améliorations devrait permettre de contribuer à l'accroissement quantitatif et qualitatif des politiques publiques.

dans un certain nombre de pays les envois de fonds des travailleurs immigrés sont une importante source de développement (10). Ils ont atteins quelques 16 milliards de $ US en 2004. Les fonds recensés et non recensés représenteraient plus de ressources financières que l'aide publiques au développement (ADP) et les investissements directs étrangers (I.D.E). Ces fonds, qui ne sont pas source d'endettement, en passant par le système bancaire officiel des pays africains — dès l'instant ou celui-ci serait sûr, crédible et efficient — pourraient avoir une incidence considérable sur les capacités d'investissements On voit ici, sur ce seul point, l'importance que revêt l'immigration pour les pays africains; Une telle importance justifie que toutes modifications des régulations des flux migratoires fassent l'objet de discussion approfondies entre l'UE, les États membres pris séparément et les pays africains concernés (11);

la fuite des capitaux continue de priver les pays africains d'une quantité considérable de ressources pour l'investissement. Cette évasion de capitaux représente deux fois la dette totale du continent africain  (12), ce qui conduit certains experts à dire que l'Afrique est un «créancier net» vis-à-vis du reste du monde. Ces ressources allouées à des investissements productifs permettaient de créer des emplois et de fournir des revenus à de larges segments de la population. Au-delà d'arrêter l'hémorragie, comme cela a été fait dans certains pays européens les gouvernements pourraient envisager d'instaurer une amnistie temporaire pour le rapatriement de ces capitaux.

Avec ces perspectives et en entreprenant les réformes nécessaires, en particulier dans les secteurs financiers et budgétaires, l'Afrique pourrait parvenir à mobiliser nettement plus de ressources intérieures pour financer les investissements productifs de son choix.

7.2.2   Les investissements directs étrangers (IDE)

L'apport des investissements directs étranger est crucial pour le développement économique du continent. En effet ils jouent un rôle important, lorsqu'ils sont bien orientés, dans le processus de développement des pays d'accueil, notamment en leur fournissant aussi bien les capitaux que les technologies, apportant les compétences, un savoir faire et l'accès au marché, ce qui contribue à une plus grande efficacité dans l'utilisation des ressources et une productivité accrue.

7.2.2.1

Alors que les flux des IDE annuels moyens à destination de l'Afrique ont doublé durant les années 1980 pour atteindre 2,2 milliards de $ US par rapport aux années 1970, ils ont sensiblement augmenté pour atteindre 6,2 milliards de $ US dans les années 1990 et 13,8 milliards de $ US dans les années 2000-2003. Néanmoins le continent représente à peine 2 à 3 % des flux mondiaux après avoir atteint un sommet de 6 % au milieu des années 1970 et moins de 9 % des flux destinés aux pays en développements par rapport à un sommet antérieur de 28 % en 1976.

7.2.2.2

Une des caractéristiques propre des flux d'IDE destinés à l'Afrique est l'attraction suscitée par les ressources naturelles. Ceci explique la répartition inégale des IDE à travers le continent. Vingt-quatre pays d'Afrique, classé comme dépendant du pétrole et du minerai ont reçu en moyenne les trois quarts des flux d'IDE au cours des deux dernières décennies.

7.2.2.3

Il convient de réorienter les IDE, notamment, vers des secteurs manufacturiers assurant une large diversification de productions compétitives facilitées par des transferts technologiques. Pour attirer des IDE diversifiés et pour qu'elles soient efficaces l'Afrique doit poursuivre ses efforts afin de créer un cadre général propice et attractif. En effet les IDE ne sauraient être présentes et contribuer au développement que si certaines conditions préalables sont remplies: qualité du tissus économique et des infrastructures, taille du marché concerné — d'où l'importance de l'intégration régionale — formation de la main-d'œuvre (cf. «Les ressources humaines»), renforcement et stabilité de la puissance publique et bonne gouvernance. De plus, pour être efficients les IDE doivent s'inscrire dans une vision de l'économie nationale et de son insertion dans le jeu sous-régional, régional et mondial. Pour ce faire l'élaboration d'une véritable stratégie nationale de développement doit être conçue comme ce fut le cas dans le sud-est asiatique dans les années 70-80.

7.2.2.4

Cependant les IDE ne sauraient tout résoudre et surtout pas la bonne gouvernance, la démocratie, l'état de droit, le respect des droits de l'homme, la corruption et l'évasion des capitaux … Au regard de ce constat il est utile de souligner que les IDE venus de Chine se sont considérablement accrus ces dernières années en raison, notamment, d'efforts diplomatiques considérables dont l'apogée à été le sommet Chine-Afrique. Les IDE chinoises se concentrent quasi exclusivement sur les industries extractives afin de se garantir les matières premières nécessaires à l'essor de son économie.

7.2.2.5

Le commerce sino-africain a été multiplié par vingt en dix ans en passant de 3 milliards de $ US en 1998 à 55 milliards de $ US en 2006. Mais du point de vue des intérêts africains, la méthode chinoise soulève de nombreuses questions. Elles confortent souvent les gouvernements dont les orientations politiques ne vont pas dans le sens de la démocratie, de l'état de droit, de la réduction de la pauvreté (13). De ce point de vue le conflit du Darfour est édifiant, comme l'est l'attitude chinoise au Zimbabwe. De plus, sur le plan du développement la méthode de la Chine est redoutable (cf. annexe III du présent avis).

7.2.2.6

Sur le plan des investissements en Afrique les États membres de l'UE sont très présents. Pour amplifier cette situation on peut envisager:

d'offrir des incitations tangibles aux entreprises de l'UE sous forme, par exemple de crédits d'impôts;

d'utiliser les instruments de développement existants après les avoir revus et renforcés. Renforcer, par exemple, la performance et la facilité d'investissement de la BEI et en améliorer la performance de manière à en faire une ressource utile pour le secteur privé;

mettre en place une facilité/un organe de garantie des investissements financés de manière adéquate, à l'instar de ce que précise l'article 77, paragraphe 4 de l'accord de Cotonou.

7.3   Faire des PME l'outil du développement économique

Le secteur privé, son renforcement et sa diversification revêt une importance capitale pour le développement durable, la création d'emploi et donc la réduction de la pauvreté.

Or dans la plupart des pays africains, il y a en quelque sorte un lien manquant entre, d'un côté, le secteur informel et les très petites entreprises (TPE) qui concernent d'avantage le secteur de la survie sociale que la stimulation de l'économie proprement dite et de l'autre les filiales des grandes entreprises étrangères ayant un fonctionnement quasi autarcique et contribuant peu, de ce fait, à l'économie locale.

Se pose donc la question de favoriser l'émergence d'entreprises petites et moyennes (PME) qui seraient constitutives d'un tissu économique cohérent contribuant au développement d'un secteur privé indispensable au développement du continent.

Pour favoriser le développement des PME il conviendrait notamment

d'approfondir l'intégration régionale (cf. article 7.8) afin de dépasser l'étroitesse des marchés locaux;

de réduire les lourdeurs administratives, d'accroître la crédibilité judiciaire, d'adapter les infrastructures, y compris immatérielles (infrastructures de communication) à leurs besoins;

d'ouvrir leurs possibilités financières (cf. article 7.2.1: les investissements endogènes) pour leur création et leur financement. Pour cela il faudrait, en particulier, améliorer l'environnement des affaires — en mettant en place, par exemple, des aides au marché et à la commercialisation — les aider à satisfaire aux exigences de la finance formelle et élargir l'offre de financements par un plus grand recours au secteur privé non financier;

L'Union européenne doit faire du développement des PME l'un des axes de sa politique de coopération en Afrique. Elle doit aux travers des États membres et de leurs entreprises favoriser et promouvoir la création de PME, notamment — en favorisant l'investissement par des incitations fiscales (crédits d'impôts, prêts bonifiés, rôle de la BEI …);

par des transferts technologiques systématiques (savoir-faire, faire savoir) pouvant, éventuellement, initier par la suite des programmes de recherche et développement. Toute entreprise européenne signant un contrat de fourniture d'équipements, de produits industriels, … devrait s'engager à transférer sa technologie (cela se fait bien avec la Chine: nucléaire, aéronautique … Pourquoi pas avec la l'Afrique sur des produits moins élaborés? Même si les enjeux financiers sont moindres);

par l'essaimage et la création de pépinières d'entreprises, ceci pouvant être favorisée en incluant dans les formations le souci de susciter l'esprit d'entreprise;

par le développement de co-entreprises ou entreprises communes mêlant des composants Africains et européens (capitaux, main-d'œuvre, direction …).

7.4   Construire une agriculture moderne et compétitive

L'agriculture, la pêche ainsi que la sylviculture, volets essentiels du développement rural, doivent être la première priorité stratégique du développement de l'Afrique. Ces secteurs sont à la base du développement primaire et de par leur assise sur une grande partie du territoire, sont structurants de la vie économique et sociale. Ce développement est indispensable pour tendre vers l'autosuffisance alimentaire, parce qu'il représente un domaine essentiel de l'économie des pays africains, contribuant à stabiliser les populations, d'autant plus qu'il représente une grande potentialité en termes de création d'emplois. Eu égard à l'importance de l'agriculture africaine — 7,2 % de la population active totale s'adonnent à l'agriculture contre 5 % dans les pays industrialisés — on ne peut que s'étonner de constater que seul 1 % du 9e Fonds européen de développement a été consacré à l'agriculture; cette constatation renforce l'idée de la nécessaire association de la société civile — et en particulier les agriculteurs — à l'élaboration des Plans indicatifs nationaux. Par comparaison la Banque mondiale a consacrée 8 % de ses ressources à l'agriculture reconnaissant elle-même que cela était insuffisant.

En cette période de renchérissement des prix des matières premières agricoles, et donc des produits alimentaires, sur les marchés internationaux, plus que jamais le développement progressif de l'agriculture ne pourra ce faire que via la mise en place d'une politique agricole sérieuse, structurée et panifiée sur le court, moyen et long terme. Cette politique doit recevoir la priorité budgétaire et financière au sens large du terme et être adaptée aux contraintes propres aux différents pays et au continent en même temps qu'elle doit intégrer l'approche régionale.

En vue d'assurer une réussite maximale à l'implantation d'une telle politique cette dernière ne devra s'élaborer et se mettre en œuvre qu'avec le concours des organisations agricoles africaines et devra, notamment, inclure des mécanismes de sauvegarde: est-il normal qu'au Sénégal on importe du riz d'Asie, alors qu'un potentiel irrigable existe le long du fleuve et n'est pas valorisé.

Une politique rationnelle de promotion de l'emploi dans le secteur agricole pourrait reposer, en particulier, sur les aspects relevés dans l'annexe IV du présent avis.

7.5   Les ressources humaines au cœur d'une politique pour l'emploi

Le développement des ressources humaines est un facteur incontournable de toute stratégie de développement. L'éducation et la formation jouent un rôle de premier plan dans ce processus en formant une main-d'œuvre flexible, en termes d'employabilité diversifiée, et de bonne qualité. Il s'agit dès lors pour les planificateurs des ressources humaines en lien avec les acteurs socio-économiques, de faire l'analyse des besoins en emplois, du marché du travail, d'effectuer des prévisions à moyen et à long terme, d'anticiper les problèmes et défis majeurs liés à l'adéquation formation/emploi. D'une façon générale l'exemple des pays émergeant, ou récemment développés comme la Corée est de ce point de vue édifiant.

L'UE et les États membres avec leur expérience en matière de formation et des financements ciblés et sélectifs dont la traçabilité serait assurée doivent jouer un rôle central. De ce point de vue, l'UE offre de nombreux programmes éducatifs auxquels peuvent participer les étudiants africains. Ceci est important car le développement de l'Afrique passe par une population instruite.

Les différentes actions qui pourraient être conduites afin de mettre les ressources humaines au cœur de la promotion de l'emploi sont développées à l'annexe V du présent avis.

7.6   L'intégration régionale

Il est largement admis qu'un potentiel énorme existe pour développer le commerce intra africain et créer de plus vastes espaces économiques.

Si l'intégration économique régionale et sous-régionale a sensiblement progressée, notamment par la création de l'Union africaine, le potentiel commercial reste à exploiter pleinement. Il convient de mieux coordonner les mesures prises pour harmoniser les procédures douanières, de réduire les obstacles tarifaires et non tarifaires, d'améliorer les transports et les communications par des investissements accrus dans le développement des infrastructures régionales et d'assurer la libre circulation des citoyens notamment en supprimant les visas, le tout s'inscrivant dans une politique d'aménagement du territoire de manière à assurer une cohérence d'ensemble.

Le développement économique de l'Afrique passe d'abord et avant tout par l'approfondissement de son marché intérieur capable de développer une croissance endogène permettant de stabiliser et d'asseoir le continent dans l'économie mondiale. L'intégration régionale, le développement du marché intérieur sont les points d'appuis, les tremplins qui permettront à l'Afrique de s'ouvrir positivement au commerce mondial.

De ce point de vue le Comité regrette que n'aient pas été conclues jusqu'à présent les négociations régionales des Accords de partenariat économique dont l'un des objets est justement l'intégration économique.

7.7   Le dialogue social

Il est nécessaire et central pour le développement de l'emploi décent et productif. Ce faisant il doit être partie intégrante de la mise en œuvre de la Stratégie commune. En effet, la pleine participation des partenaires sociaux à la vie économique et sociale, notamment au travers de la négociation de convention collective, répond non seulement à des exigences de démocratie mais est également source de développement social, de paix sociale et de compétitivité économique. Le dialogue social est l'instrument privilégié permettant d'arriver à des consensus socio-économique porteur de développement. En effet, il ne saurait y avoir de développement économique optimum sans que celui-ci soit parallèlement accompagné d'un développement social. Ces concepts doivent aller de pair afin de créer la dynamique nécessaire à la pleine efficience d'un progrès économique capable d'engendre une amélioration des modes de vie, des emplois décents et le bien être des populations. Il convient donc de créer ou de développer les libertés syndicales et de négociations collectives, des organisations de d'employeurs et de travailleurs fortes et indépendantes disposant des capacités et connaissances techniques nécessaires afin de remplir pleinement leur rôle.

7.8   La société civile organisée

La participation des acteurs non étatiques est indissociable du développement de l'emploi décent et doit donc être au cœur de la Stratégie commune. En effet leur participation en même temps qu'elle répond à des exigences de démocratie participative apporte les savoirs faire et les connaissances du terrain de ceux qui journellement entreprennent, produisent, cultivent … À ce titre ils doivent être associés à l'élaboration des programmes indicatifs nationaux et régionaux (PIN et PIR) et être considérés comme des acteurs du développement à par entière, bénéficier de l'aide publique au développement et aux dispositions de l'accord de Cotonou visant les aides à l'accroissement des capacités. On relira avec intérêt, notamment, le chapitre 3 de l'avis du Comité 1497/2005 sur la nécessaire organisation structurelle, voire institutionnelle, de la société civile organisée. (Plateforme, réseaux, Comité …) afin d'acquérir une unité de temps et de lieux nécessaire aux débats et à la définition de leurs orientations. De ce point de vue la création, par l'Accord de partenariat économique (APE) CARIFORUM-CE, qui a été conclu en décembre 2007, d'un Conseil Consultatif de la Société civile est un exemple à suivre en Afrique (cf. déclaration finale de la 25e Réunion des milieux économiques et sociaux ACP/EU tenue les 4, 5 et 6 mars à Bruxelles: Un meilleur partenariat pour un meilleur développement). En remplissant le mandat que lui a conféré l'accord de Cotonou le CESE, par l'entremise de son Comité de suivi ACP-UE, a joué un rôle conséquent en contribuant à la coordination, à la réflexion collective et en la mise en réseaux de la Société civile organisée.

7.9   La bonne gouvernance

La bonne gouvernance conditionne la confiance des investisseurs. De ce seul point de vue elle est essentielle pour le développement de l'Afrique. La promotion de la gouvernance démocratique, nécessaire à tous les échelons administratifs, est donc un élément central du dialogue du partenariat Europe Afrique. Elle doit être envisagée dans sa globalité et inclure le respect des droits humains et des travailleurs dont les libertés syndicales, les normes de travail ainsi que l'état de droit, le renforcement des institutions et de l'appareil d'état dont la faiblesse et les insuffisantes capacités sont souvent un frein à la mise en œuvre des actions de coopération, la participation de la société civile à une réelle démocratie participative ou encore la lutte contre la corruption. Sur ce dernier point l'Union européenne ainsi que les États membres doivent avoir des exigences dans le cadre des partenariats en conditionnant leurs aides financières à la traçabilité de leurs utilisations. En effet, sur cent milliards de dollars d'aide annuelle, trente milliards s'évaporent (14) (Cf. article 3.6.1.5 et 7.2.1.3 dernier tiret).

Bruxelles, le 18 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  CESE 1205/2004 «Le rôle des organisations des femmes en tant qu'acteurs non étatiques dans le champ de l'Accord de Cotonou», rapporteuse: Mme FLORIO, septembre 2004.

CESE 1497/2005 «Comment intégrer les aspects sociaux dans les Accords de Partenariats Economiques», rapporteurs: M. PEZZINI et DANTIN, décembre 2005.

CESE 753/2006 «Une nécessaire priorité à l'Afrique: le point de vue de la société civile européenne», rapporteur: M. BEDOSSA, mai 2006.

CESE 673/2007 «Migration et développement: opportunités et défis», rapporteur M. SHARMA, décembre 2007.

Rapports du Comité de suivi ACP/UE du CESE: «Les ressources humaines pour le développement», rapporteurs: Mme KING et M. AKOUETE, mai 2007.

(2)  Union européenne/Afrique: «Le partenariat stratégique» Nathalie DELAPALME, Elise COLETTE. Notes de la Fondation Robert SCHUMANN, décembre 2007.

(3)  Discours du Commissaire Louis MICHEL lors de la Conférence «UE-Chine-Afrique» organisée par la Commission européenne. Bruxelles, le 28 juin 2007.

(4)  Réponse du Commissaire MICHEL à un intervenant lors de l'Assemblée parlementaire paritaire de Kigali. 18, 19, 20, 21 et 22 novembre 2007.

(5)  Sommet extraordinaire de l'Union Africaine sur l'emploi et la lutte contre la pauvreté, du 3 au 9 septembre 2004 à Ouagadougou. Déclaration finale (article 16).

(6)  Intervention du Président du CES d'un État francophone de l'Afrique de l'Ouest lors de l'Assemblée générale de l'UCESA (Union des CES d'Afrique), 13 et 14 novembre 2007 à Ouagadougou.

(7)  Cf. articles 104 et 105 de la déclaration.

(8)  Cf. articles 106 à 110 de la déclaration.

(9)  À elle seule l'Afrique concentre presque la totalité des réserves mondiales de chrome (essentiellement au Zimbabwe et en Afrique du sud), 90 % des réserves de platine (Afrique du sud …) et 50 % des réserves de cobalt (RDC, Zambie …).

(10)  Cf. CESE 673/2007 «Migration et développement: opportunités et défis», rapporteur M. SHARMA, décembre 2007.

(11)  Deuxième rencontre conjointe CESE-UCESA (Union des CES Africains), Déclaration des Présidents.

(12)  «Le développement économique en Afrique», rapport de la CNUCED, 26 septembre 2007.

(13)  Assemblée parlementaire paritaire ACP/UE. Projet de rapport sur «Les IDE dans les États ACP», rapporteurs Mme Astrid LULLING et M. Timothy HARRIS, KIGALI, novembre 2007.

(14)  «Le développement économique en Afrique», rapport de la CNUCED 27.9.2007, interview du Secrétaire d'état du gouvernement français à la francophonie, journal «Le Monde», 16.1.2008.


31.3.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 77/157


Avis du Comité économique et social européen sur «La relation UE-Ukraine: un nouveau rôle dynamique pour la société civile»

(2009/C 77/33)

Lors de sa session plénière des 16 et 17 janvier 2008, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l'article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d'élaborer un avis d'initiative sur:

«La relation UE-Ukraine: un nouveau rôle dynamique pour la société civile».

La section spécialisée «Relations extérieures», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 17 juillet 2008 (rapporteuse: Mme HELLAM).

Lors de sa 447e session plénière des 17 et 18 septembre 2008 (séance du 18 septembre 2008), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 129 voix pour, 4 voix contre et 8 abstentions.

1.   Résumé

1.1

Par le présent avis, le CESE entend favoriser une meilleure application du principe d'ambitions partagées et de partenariat entre la société civile ukrainienne, le gouvernement ukrainien et les institutions de l'UE en approfondissant les relations entre l'UE et l'Ukraine et en faisant de la politique de l'UE envers l'Ukraine un instrument efficace de soutien aux réformes et à la modernisation du pays.

1.2

L'Union européenne est à la fois un objectif et un facteur de changement pour l'Ukraine. Le CESE considère que l'adhésion de l'Ukraine à l'Union européenne et les réformes dans ce pays exigent une société civile (1) forte et viable, ce qui suppose, tant de la part de l'UE que du gouvernement ukrainien, une politique de long terme en faveur de son développement.

1.3

Il faut, pour renforcer le rôle de la société civile, instaurer un environnement politique global favorable dans la relation UE-Ukraine.

1.4

À cet égard, la perspective de l'adhésion de l'Ukraine à l'Union européenne est importante. De la même manière, il convient de rendre plus crédible la perspective de la suppression des visas et de proposer à l'Ukraine une feuille de route en vue de la suppression des visas. Le CESE propose que ces éléments soient repris dans le nouvel accord d'association (2) entre l'Union européenne et l'Ukraine, afin qu'il puisse servir d'instrument de réforme et conférer un rôle significatif à la société civile.

1.5

S'agissant précisément des politiques en faveur de la société civile, il convient que le gouvernement ukrainien s'emploie à créer un cadre réglementaire propice à la société civile en Ukraine; il convient d'associer dans la durée les acteurs de la société civile à l'action politique et au dialogue civil. Parallèlement, l'UE doit concourir à concevoir une stratégie visant à renforcer les capacités de la société civile ukrainienne. Une attention particulière et un soutien constant doivent être accordés à la promotion du dialogue social à tous les niveaux.

1.6

Le CESE prend acte des progrès réalisés par l'Ukraine en matière de consolidation de la démocratie, de renforcement de l'État de droit et de respect des droits de l'homme, ce qui contribuera à améliorer ses relations avec l'UE, à approfondir l'intégration économique et à nouer des liens politiques privilégiés.

1.7

Le CESE préconise de conclure rapidement les négociations relatives à l'accord d'association. Il propose également, en étroite collaboration avec la société civile ukrainienne, que cet accord prévoie la création d'une instance commune de la société civile afin de permettre à la société civile de faire valoir ses points de vue dans le cadre des relations UE-Ukraine.

2.   L'UE et l'Ukraine: progrès globaux de la coopération et possibilités offertes par la situation actuelle

2.1

La promotion de la démocratie, de la bonne gouvernance et de l'économie de marché dans le voisinage de l'Union européenne reste au cœur des politiques extérieures de l'UE. L'Union européenne a par conséquent lancé la politique européenne de voisinage avec pour grands principes le partenariat et des ambitions partagées, une approche différenciée et une assistance sur mesure.

2.2

Dans le cadre de la politique européenne de voisinage, des consultations avec l'Ukraine en vue de l'établissement d'un plan d'action UE-Ukraine relatif à la politique de voisinage ont été lancées en janvier 2004 et le Conseil de l'UE l'a adopté en décembre 2004. Les conséquences de la «révolution orange» de décembre 2004, qui a mis en évidence le fort potentiel de la société civile ukrainienne, et la ligne pro-européenne du gouvernement «orange» du président Viktor IOUCHTCHENKO et de Ioulia TIMOCHENKO ont encouragé l'UE à compléter le plan d'action par des incitations supplémentaires. Le plan d'action, conclu pour une période de trois ans, a été officiellement adopté lors du conseil de coopération UE-Ukraine du 21 février 2005. Il prévoyait un cadre global et ambitieux pour la collaboration avec l'Ukraine et énumérait l'ensemble des grands domaines à réformer (dialogue et réforme politiques, réformes et développement économiques et sociaux, réforme réglementaire et du marché, coopération dans le domaine de la justice et des affaires intérieures, transports, énergie, société de l'information, environnement et contacts entre les peuples).

2.3

L'Ukraine s'est vu donner la perspective de l'ouverture de négociations sur le nouveau cadre contractuel (accord d'association) pour autant que des élections législatives libres et régulières se tiennent en 2006, ainsi que la perspective de l'ouverture de négociations sur une zone de libre-échange après l'adhésion de l'Ukraine à l'OMC. La facilitation de la délivrance de visas, des financements accrus et la multiplication des possibilités de contacts entre les peuples étaient autant d'autres incitations proposées à l'Ukraine dans le cadre du plan d'action.

2.4

Les négociations sur l'accord d'association ont débuté en mars 2007 et les négociations concernant les dispositions relatives à la zone de libre-échange ont été lancées en février 2008, après l'adhésion de l'Ukraine à l'OMC. Neuf cycles de négociations se sont déroulés entre mars 2007 et mai 2008. L'accord relatif à la facilitation de l'octroi de visas signé en 2007 est entré en vigueur en 2008.

2.5

La négociation de l'accord d'association aura des implications considérables pour la relation UE-Ukraine et pour les réformes en Ukraine. Ces négociations offrent aux pouvoirs publics ukrainiens une occasion unique d'engager une consultation transparente et systématique des organisations de la société civile. Ces consultations pourraient garantir l'adhésion de la population aux réformes envisagées dans le nouvel accord. Elles permettent également à la société civile ukrainienne de se renforcer afin de mettre en évidence leurs intérêts et de les faire valoir auprès des autorités chargées de négocier l'accord.

2.6

Il importe de veiller à ce que les négociations entre l'UE et l'Ukraine soient transparentes et tiennent compte des conséquences que cet accord peut avoir pour les différents groupes sociaux et les domaines à réformer en Ukraine. Il s'agit d'un accord sans précédent en ce sens que le niveau de la coopération politique et de participation au marché unique n'est pas déterminé à l'avance. Dans ces négociations, l'UE ne doit pas suivre une feuille de route contraignante, si bien que l'association des parties concernées en Ukraine et dans l'UE sera utile. De plus, le nouvel accord avec l'Ukraine doit devenir l'accord-type que l'UE négociera avec ses autres voisins.

3.   Activités du CESE concernant l'Ukraine

3.1

Depuis 2003, le CESE entretient des relations avec des organisations ukrainiennes de la société civile. En 2004, le Comité a consacré une étude et un avis à la société civile en Ukraine, en Russie, en Moldavie et au Belarus. Les relations entre l'Union européenne et l'Ukraine se sont intensifiées ces dernières années. Des négociations sont en cours en vue de conclure un accord d'association: la société civile et le CESE ont appelés à jouer un rôle plus large et plus important à l'avenir dans les relations entre l'UE et l'Ukraine. En février 2006, le CESE a organisé à Kiev une conférence sur le rôle de la société civile ukrainienne dans la mise en œuvre de la politique européenne de voisinage. Dans la déclaration finale de cette manifestation, le CESE s'est engagé à appuyer le développement de la société civile organisée en Ukraine.

3.2

Quelques mois plus tard, l'Ukraine a créé le conseil économique et social tripartite national (CESTN). Les 24 et 25 octobre 2007, une délégation du CESTN conduite par le ministre ukrainien du travail s'est rendue au CESE. Une réunion extraordinaire du groupe de contact «Voisins européens de l'Est» a été consacrée à la société civile ukrainienne.

3.3

Un consensus s'est dégagé quant à la volonté d'entamer une coopération structurée entre le CESE et CESTN. Le CESE tient toutefois à s'assurer que la société civile ukrainienne soit plus largement représentée, y compris les organisations non gouvernementales, les syndicats et les employeurs qui siègent au CESTN. Il convient par conséquent que la société civile ukrainienne mette en place une plateforme qui représente à la fois le CESTN et les représentants d'autres organisations de la société civile (OSC).

4.   Situation politique et questions économiques et sociales en Ukraine

4.1

Depuis 2004 et la révolution orange, l'Ukraine apparaît comme une jeune démocratie qui laisse derrière elle la majorité de ses voisins ex-soviétiques. Des élections libres et régulières vont désormais de soi en Ukraine et les libertés d'expression et d'association gagnées lors de la révolution orange ont été préservées.

4.2

Toutefois, l'euphorie de la révolution orange est retombée depuis 2005. L'Ukraine est entrée dans une phase d'instabilité et de rivalité politiques qui a conduit à des crises politiques majeures, l'ensemble des branches du pouvoir étant en conflit les unes avec les autres, ce qui discrédite le système judiciaire et les forces de l'ordre en Ukraine. La vie politique ukrainienne est depuis marquée par une instabilité politique et une incapacité à engager des réformes de grande ampleur. La politique européenne de voisinage et son plan d'action, même s'ils fixent un cap pour les réformes en Ukraine, ont dans l'ensemble échoué à mobiliser l'élite politique et la société en général autour de l'objectif d'adhérer à l'UE.

4.3

L'économie ukrainienne continue de croître. À plus de 16 % en 2007, le taux d'inflation est néanmoins très élevé et, le gouvernement n'ayant pas adopté de mesures afin de juguler l'envolée des prix, il continue d'augmenter en 2008. En dépit d'un fort recul de la pauvreté ces dernières années, plus de 20 % des Ukrainiens vivent toujours en dessous du seuil de pauvreté, et le revenu moyen en Ukraine s'élève à environ 150 EUR par mois. L'Ukraine reste un pays où la réglementation pose de nombreux obstacles aux investissements directs étrangers et à la création d'entreprises. D'une manière générale, l'Ukraine n'est pas parvenue à lancer de grandes réformes macroéconomiques et la croissance économique tient pour l'essentiel à des facteurs qui ne sont pas liés à la politique du gouvernement.

4.4

En dépit de nombreuses déclarations politiques, les progrès enregistrés en matière de lutte contre la corruption en Ukraine sont minces. Une étude de Transparency International de 2007 a fait apparaître qu'environ 70 % des Ukrainiens ne croient pas à l'efficacité de l'action des pouvoirs publics pour lutter contre la corruption. Des intérêts catégoriels et le népotisme prédominent et déterminent l'action politique. Il est urgent d'améliorer la structure de la représentation en Ukraine, les formes de médiation entre les pouvoirs publics et la société, l'État de droit et la lutte contre la corruption.

5.   La situation de la société civile et son rôle dans l'intégration européenne de l'Ukraine

5.1   Situation de la société civile en Ukraine

5.1.1

Des statistiques officielles font apparaître qu'il existe en Ukraine plus de 50 000 organisations de la société civile (OSC) répertoriées. Selon les autorités, 90 % d'entre elles disposent de budgets compris entre 50 000 USD et 300 000 USD par an. Cela étant, le fait que plus de 80 % des Ukrainiens ne participent à aucune organisation bénévole montre que le niveau d'engagement citoyen des Ukrainiens est faible par rapport à celui des citoyens des démocraties occidentales et des pays d'Europe centrale et orientale.

5.1.2

De nombreux facteurs expliquent la faiblesse de l'engagement citoyen en Ukraine: la méfiance de la population vis-à-vis des organisations et de la politique héritée des activités rituelles forcées de l'époque soviétique; la déception quant aux résultats des réformes démocratiques et des réformes du marché; l'absence d'une classe moyenne forte et la persistance de réseaux sociaux informels. Ces caractéristiques, ainsi que la défiance de l'État face à l'action citoyenne, ont cantonné l'Ukraine à sa situation actuelle d'État partiellement démocratique.

5.1.3

Quelques progrès ont néanmoins été enregistrés. En 2005-2006, un certain nombre d'organisations de la société civile travaillaient à une doctrine de la société civile afin de formuler les exigences des OSC à faire valoir auprès des pouvoirs publics. La plupart des propositions figurant dans cette doctrine sont été reprises dans le projet de soutien par les pouvoirs publics à l'institut de la société civile. En novembre 2007, des propositions claires concernant le développement de la société civile et du dialogue civil ont été adressées au gouvernement et au parlement récemment installés lors de la conférence nationale sur «Les politiques publiques visant à promouvoir le développement de la société civile. Nouvelles priorités».

5.1.4

Pour compléter la législation régissant les OSC, il faut adopter une nouvelle loi sur les organisations de la société civile qui prévoie une procédure d'enregistrement plus simple et moins coûteuse, l'autorisation pour les entités juridiques de créer des organisations, la suppression des restrictions territoriales en vigueur concernant les activités des OSC et l'autorisation de protéger les droits de toutes les personnes.

5.1.5

Le manque de fonds publics est un autre des obstacles au développement de la société civile en Ukraine. Selon certaines sources, le financement public ne s'élève qu'à 2 % du budget des OSC. Ce chiffre est extrêmement faible comparé aux montants de 30 % à 40 % dans les pays voisins d'Europe centrale. Dans la majorité des anciens États membres de l'UE, les financements publics sont la principale source de revenu des OSC.

5.2   Dialogue social

5.2.1

Les syndicats ont été regroupés au sein de la fédération des syndicats, de la confédération nationale des syndicats et des syndicats libres d'Ukraine. La confédération nationale des organisations syndicales d'Ukraine (NKPU) est une centrale syndicale nationale fondée en 2004. La NKPU est née de la scission avec la fédération des syndicats d'Ukraine. Malgré l'existence de ces structures officielles, les syndicats jouent à l'heure actuelle un rôle modeste dans la protection des intérêts de leurs adhérents, notamment pour ce qui est de la promotion de la sécurité au travail.

5.2.2

Pour ce qui est des associations ukrainiennes d'entreprises, plusieurs d'entre elles sont relativement puissantes et à même de faire valoir leurs intérêts (Fédération des employeurs d'Ukraine, Chambre ukrainienne de commerce et d'industrie). Il n'existe toutefois aucune législation régissant les groupes de pression en Ukraine ni canaux de consultation structurée pour promouvoir les différents intérêts.

5.2.3

Conformément au décret présidentiel (3) sur le développement du dialogue social en Ukraine, le Conseil économique et social tripartite national (CESTN) a été institué en 2006 en tant qu'institution consultative rattachée au président de l'Ukraine. Par ailleurs, des conseils économiques et sociaux tripartites territoriaux ont été créés à l'échelon régional.

5.2.4

Ces institutions visent à développer le dialogue social et à associer des représentants des travailleurs et des employeurs à la formulation et à la mise en œuvre de la politique économique et sociale nationale.

5.3   Le rôle de la société civile dans l'intégration européenne de l'Ukraine

5.3.1

Bien que, comme indiqué ci-dessus, la société civile en Ukraine soit plutôt faible, un certain nombre d'organisations de la société civile ont joué un rôle important dans la promotion des valeurs européennes en suivant l'action des pouvoirs publics, en s'engageant en faveur de certaines politiques, en mettant leur expertise au service des pouvoirs publics, en suivant l'état de l'opinion et en sensibilisant le public à l'Union européenne. Ces activités sont souvent menées avec le soutien financier d'un ensemble de donateurs internationaux, et ce quoiqu'elles correspondent souvent aux objectifs des programmes des pouvoirs publics et même s'il est juridiquement possible pour l'État de soutenir les activités des OSC.

5.3.2

Les effets de ces activités sur les progrès réels de l'Ukraine sur la voie de l'intégration européenne ou de son européanisation sont plutôt limités. Cela tient à la faiblesse de la société civile et à ses capacités insuffisantes. En effet, elle n'est pas assez solide et organisée pour peser sur les décideurs politiques. En outre, le lien entre les organisations de la société civile et l'homme de la rue est plutôt ténu. Ainsi, les organisations et les militants de la société civile ont une faible capacité de mobilisation des citoyens et de formation de l'opinion publique. De plus, l'instabilité politique constitue un autre obstacle majeur qui nuit à l'action de la société civile.

5.3.3

Lorsque les organisations de la société civile parviennent à promouvoir certaines décisions politiques, leur réussite tient à un personnel politique ou à des fonctionnaires ouverts et coopératifs. La nomination en décembre 2007 du vice-premier ministre chargé des affaires européennes a dynamisé la participation de la société civile. Les experts de la société civile sont désormais associés à l'élaboration des programmes nationaux dans le domaine de l'intégration européenne et sont consultés sur différentes questions relevant des compétences du vice-premier ministre.

5.3.4

Outre ce qui semble être un rôle actif joué par un nombre limité d'ONG, la société civile dans son ensemble perçoit l'intégration européenne comme une abstraction. Tant qu'ils n'auront pas saisis que l'intégration européenne concerne leur vie quotidienne et que les réformes qui auront des conséquences pour chacun, les différentes organisations de la société civile (syndicats, associations professionnelles, associations de consommateurs, etc.) continueront de jouer un rôle passif.

6.   Conclusions et recommandations en faveur d'un nouveau rôle dynamique de la société civile dans la relations UE-Ukraine

6.1

Il faut, pour renforcer le rôle de la société civile, à la fois un environnement politique global favorable dans la relation UE-Ukraine et des mesures spécifiques destinées à renforcer le rôle de la société civile.

6.2

S'agissant de l'environnement politique globalement favorable et de la dynamique de la relation UE-Ukraine, les éléments suivants apparaissent essentiels:

6.2.1

Il convient d'offrir à l'Ukraine une perspective d'adhésion à l'UE dans l'accord d'association. Les composantes favorables aux réformes s'en trouveront renforcées, de même que la société civile réformatrice. Les incitations que représente l'éventuelle adhésion à l'UE contribueront à appliquer les réformes dans la société et à contourner les acteurs qui s'y opposent. D'après la société civile ukrainienne et les experts internationaux, la seule mention de l'article 49 du TUE, qui dispose que tout État européen qui respecte certains critères peut présenter sa candidature, enverrait déjà un signal fort à l'Ukraine.

6.2.2

Il faut assurer la crédibilité de la perspective de la suppression des visas, tout en veillant à ce que la feuille de route en vue de la suppression des visas soit proposée à l'Ukraine. Compte tenu des obstacles qu'ils rencontrent actuellement lorsqu'ils souhaitent voyager, les acteurs de la société civile ont des possibilités limitées d'instaurer un partenariat réel avec leurs homologues de l'UE. D'une manière générale, un régime d'exemption de visa favorisera les contacts entre les peuples et contribuera à généraliser en Ukraine les normes, valeurs et pratiques européennes.

6.2.3

Il convient que l'UE et l'Ukraine mettent tout en œuvre pour veiller à ce que l'Ukraine bénéficie au mieux des programmes communautaires et les agences de l'UE existants (4). Dans le même temps, il faut dégager de nouvelles possibilités de renforcement de la dimension humaine et les élargir.

6.3

Les mesures spécifiques destinées à renforcer le rôle de la société civile doivent reposer sur les trois aspects suivants:

6.3.1

Il convient premièrement de conférer aux acteurs de la société civile un rôle important dans l'action menée (conception, mise en œuvre et suivi des mesures), notamment pour ce qui est de la politique européenne.

6.3.2

Les acteurs de la société civile doivent être consultés lors de la négociation de l'accord d'association entre l'UE et l'Ukraine, de la détermination des priorités annuelles de coopération (actuellement à travers les travaux d'institutions conjointes créées par l'APC puis, une fois l'accord d'association entré en vigueur, conformément aux dispositions du nouvel accord), de la révision à mi-parcours des perspectives financières actuelles (document de stratégie de l'IEVP 2007-2013 pour l'Ukraine) et de l'élaboration de programmes annuels au titre de l'IEVP (notamment de la fixation des priorités du financement pour l'Ukraine en tant que soutien budgétaire dans le cadre de l'IEVP).

6.3.3

Le suivi indépendant par la société civile doit être encouragé, soutenu et pris en considération par l'UE et l'Ukraine.

6.3.4

Deuxièmement, il convient que l'UE et le gouvernement ukrainien s'attachent à instaurer en Ukraine un cadre réglementaire favorable à la société civile, ce qui créerait notamment des possibilités de financement national (notamment de financement public par exemple à travers des contrats de service) pour les organisations ukrainiennes de la société civile et réduirait ainsi la dépendance actuelle des OSC ukrainiennes à l'égard des donateurs étrangers.

6.3.5

Troisièmement, l'UE devrait concevoir la stratégie de renforcement des capacités en faveur de la société civile ukrainienne. Pour la première fois, la société civile ukrainienne est plutôt fragmentée et pèse peu, voire pas du tout, sur l'action des pouvoirs publics. Il convient que la politique de l'UE et du gouvernement ukrainien vise à faire de la société civile un partenaire fort, le renforcement des capacités étant à cet égard un élément primordial. Cela suppose:

des possibilités de financement plus nombreuses et plus accessibles de la part de l'UE, notamment pour les OSC citoyennes, qui ne soient pas axées uniquement sur des projets mais également sur le développement institutionnel et le développement durable en général;

des programmes de formation au renforcement des capacités destinés aux OSC ukrainiennes qui mettraient l'accent sur la gestion de projets, la mise en réseau, les compétences en matière de défense d'intérêts etc. et qui contribueraient à mieux informer la société civile ukrainienne des possibilités que lui offre l'UE (y compris les possibilités de financement);

une assistance visant à renforcer les initiatives individuelles de la société civile, notamment la constitution de coalitions et de plateformes parmi les OSC ukrainiennes.

6.3.6

L'accord d'association entre l'UE et l'Ukraine doit de surcroît servir d'instrument de réforme et conférer un rôle accru à la société civile. Outre la perspective d'une adhésion de l'Ukraine à l'UE, évoquée plus haut, la décision du Conseil relative à l'accord d'association devrait mentionner l'article 310 du TCE (5) qui donne mandat à l'UE pour conclure des accords d'association avec des pays tiers.

6.3.7

Il convient que l'accord prévoie explicitement l'engagement des deux parties (l'UE et l'Ukraine) en faveur d'un renforcement de la société civile en Ukraine et de sa participation au dialogue civil et à l'action politique.

6.4

Cet accord devrait prévoir la création d'une instance commune de la société civile dans le cadre institutionnel des relations entre l'UE et l'Ukraine. Dans ce contexte, le CESE recommande de bâtir avec la société civile ukrainienne une relation durable et constructive. La première étape pour ce faire consiste à structurer nos relations, par exemple par l'organisation d'un atelier en octobre 2008 en vue d'examiner plus avant la mise en place de cette instance commune avec la société civile ukrainienne.

6.4.1

L'instance commune serait composée à parité de membres du CESE et de l'instance représentative de la société civile ukrainienne. La délégation ukrainienne pourrait être composée de membres du CESTN (représentants des employeurs, des syndicats et du gouvernement), ainsi que de responsables de la société civile qui n'est pas représentée au sein du CESTN. Cette instance commune serait présidée conjointement par deux coprésidents désignés par chacune des parties. L'instance commune se réunira deux fois par an (une fois à Bruxelles et une autre en Ukraine) et pourrait être consultée par le conseil conjoint ou examiner de sa propre initiative différents thèmes d'intérêt mutuel importants pour la société civile. Les principales missions de l'instance commune de la société civile UE-Ukraine pourraient être:

d'assurer la participation de la société civile dans les relations UE-Ukraine;

de promouvoir en Ukraine le débat public et la sensibilisation aux relations avec l'UE et à l'intégration européenne de l'Ukraine;

de favoriser l'association de la société civile ukrainienne à la mise en œuvre du plan national d'action et du nouvel accord d'association une fois qu'il sera entré en vigueur, et de renforcer la participation de la société civile à la prise de décisions au niveau national;

d'encourager de plusieurs manières le renforcement des capacités et la consolidation des organisations de la société civile en Ukraine, notamment par des contacts informels, des visites, des ateliers et d'autres activités;

de permettre aux représentants ukrainiens de se familiariser avec les consultations organisées au sein de l'UE et, plus généralement, avec le dialogue entre les partenaires sociaux et civils de l'UE.

Bruxelles, le 18 septembre 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  Dans le présent avis, la société civile désigne trois groupes d'organisations en fonction de leurs activités: 1) les organisations d'intérêts qui représentent et promeuvent les intérêts et les valeurs de certains groupes ou de la société dans son ensemble, 2) les organisations de services qui fournissent des services à leurs membres ou à un plus large éventail de clients, et 3) les organisations de soutien qui mettent à disposition des ressources pour aider les nécessiteux ou pour permettre la réalisation de certaines activités. Sont des organisations de la société civile les syndicats, associations d'employeurs et d'entreprises, organisations de défense d'intérêts, organisations fournissant des services sociaux ou représentatives de pans vulnérables de la société et d'intérêts particuliers, telles que les organisations de jeunes ou de consommateurs. A. Zimmer et E. Priller (éd.), «Future of Civil Society. Making Central European Nonprofit Organisations Work», VS Verlag für Sozialwissenschaften, p. 16.

(2)  Cet accord était jusqu'il y a peu appelé «nouvel accord renforcé». La déclaration conjointe du sommet UE-Ukraine tenu le 9 septembre 2008 appelle à la conclusion d'un accord d'association entre l'UE et l'Ukraine.

(3)  Décret du président de l'Ukraine no 1871 du 29 décembre 2005.

(4)  Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen concernant l'approche générale visant à permettre aux pays partenaires PEV de participer aux travaux des agences communautaires et aux programmes communautaires, COM(2006) 724 final.

(5)  Pour plus de détails, voir Sushko, O., Khorolsky, R., Shumylo O., Shevliakov, I. (2007), «The New Enhanced Agreement between Ukraine and the EU: Proposals of Ukrainian Experts». KAS Policy Paper 8. Voir également Hillion, C. (2007), «Mapping-Out the New Contractual Relations between the European Union and Its Neighbours: Learning from the EU-Ukraine “Enhanced Agreement”», in European Foreign Affairs Review 12, pp. 169 à 182.


ANNEXES

 

ANNEXE I

COMPOSITION DE LA SOCIETE CIVILE EN UKRAINE ET DEGRE D'ACTIVITE PAR REGION

52 693

ONG et leurs centres

20 186

Organisations religieuses

18 960

Syndicats

15 867

Partis politiques et leurs bureaux

10 705

Organisations caritatives

6 003

Syndicats de copropriétaires d'immeubles

5 480

Associations de consommateurs

982

Unions de crédit

473

Fédérations d'associations de consommateurs

Données en date du 1er juillet 2007 reprenant l'ensemble des organisations de la société civile enregistrées. Certains experts estiment toutefois que, sur la multitude d'organisations enregistrées, pas plus de 2 500 sont effectivement actives.

Parmi les régions les plus actives figurent:

Lvov et la ville de Kiev

plus de 4 000 OSC

Région de Zaporijia

environ 1 500 OSC

Région de Dnipropetrovsk

presque 1 000 OSC

Région d'Odessa

environ 1 000 OSC

Région de Lougansk

plus de 750 OSC

Source:

Latsyba M. (2008), «Development of Civil Society in Ukraine», Ukrainian Independent Centre for Policy Studies.

ANNEXE II

DOMAINES D'ACTIVITE PRIORITAIRES DES OSC UKRAINIENNES

Travail avec les enfants et les jeunes

45 %

Solution de problèmes sociaux

35 %

Protection des droits de l'homme

31 %

Éducation de l'opinion

28 %

Développement du secteur des OSC

19 %

Au 1er janvier 2007, le ministère de la justice avait répertorié 1 791 OSC exclusivement ukrainiennes:

412

organisations professionnelles

77

associations d'anciens combattants et de personnes handicapées

332

organisations sportives et d'éducation physique

56

organisations de protection de l'environnement

168

associations éducatives et culturelles

45

organisations de femmes

153

associations scientifiques, technologiques et artistiques

36

organisations de protection créées après la catastrophe de Tchernobyl

153

organisations de jeunes

13

organisations en faveur de l'enfance

137

organisations en faveur de relations nationales et amicales

9

organisations d'employeurs

114

syndicats et associations qui en dépendent

3

organisations de protection du patrimoine historique et culturel

Sources:

Latsyba M. (2008), «Development of Civil Society in Ukraine», Ukrainian Independent Centre for Policy Studies et Creative Centre Counterpart (2006), «NGO Status and Development Dynamics, 2002-2005». Cités dans Latsyba op.cit.

ANNEXE III

STRUCTURE COMPARATIVE DES REVENUS DES OSC

Pays

Sources de financement des OSC (en %)

Fonds publics

Rémunération pour des services fournis par les OSC

Fonds privés, coût du temps de travail des bénévoles exclu

Royaume-Uni

45 %

43 %

11 %

Allemagne

64 %

32 %

3 %

France

58 %

35 %

8 %

Pologne

24 %

60 %

15 %

Roumanie

45 %

29 %

26 %

Hongrie

27 %

55 %

18 %

Slovaquie

21 %

54 %

25 %

République tchèque

39 %

47 %

14 %

Russie

1 %

36 %

63 %

UKRAINE

2 %

25 %

72 %

Source:

Latsyba M. (2008), «Development of Civil Society in Ukraine», Ukrainian Independent Centre for Policy Studies à partir des sources suivantes:

 

Lester M. Salomon et al. (2003), «Global Civil Society. An Overview», The Johns Hopkins University, États-Unis;

 

Civil Society Institute (2005), «NGO Funding in Ukraine», Analytical Study, Kiev;

 

Municipal Economy Institute Foundation (2003), «The Role of Non-Commercial Sector in the Economic Development of Russia», Moscou.