ISSN 1725-2431

Journal officiel

de l'Union européenne

C 88

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Édition de langue française

Communications et informations

49e année
11 avril 2006


Numéro d'information

Sommaire

page

 

II   Actes préparatoires

 

Comité économique et social européen

 

424ème session plénière des 14 et 15 février 2006

2006/C 088/1

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil établissant un programme d'action communautaire dans le domaine de la santé et de la protection des consommateurs (2007-2013)(COM(2005) 115 final — 2005/0042 (COD))

1

2006/C 088/2

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de Règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 1348/2000 du Conseil du 29 mai 2000 relatif à la signification et à la notification dans les États membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale(COM(2005) 305 final — 2005/0126 (COD))

7

2006/C 088/3

Avis du Comité économique et social européen sur Le rôle des gares dans les agglomérations et les villes de l'Union européenne élargie

9

2006/C 088/4

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Conseil relative aux conditions de police sanitaire applicables aux animaux et aux produits d'aquaculture, et relative à la prévention de certaines maladies chez les animaux aquatiques et aux mesures de lutte contre ces maladies et la Proposition de décision du Conseil modifiant la décision 90/424/CEE relative à certaines dépenses dans le domaine vétérinaire(COM(2005) 362 final — 2005/0153 + 0154 CNS)

13

2006/C 088/5

Avis du Comité économique et social européen sur les — Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil portant création du Fonds européen pour les réfugiés pour la période 2008-2013 dans le cadre du programme général Solidarité et gestion des flux migratoires — Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil portant création du Fonds pour les frontières extérieures pour la période 2007-2013 dans le cadre du programme général Solidarité et gestion des flux migratoires — Proposition de décision du Conseil portant création du Fonds européen d'intégration des ressortissants de pays tiers pour la période 2007-2013 dans le cadre du programme général Solidarité et gestion des flux migratoires — Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil portant création du Fonds européen pour le retour pour la période 2008-2013 dans le cadre du programme général Solidarité et gestion des flux migratoires(COM(2005) 123 final — 2005/0046 (COD) — 2005/0047 (COD) — 2005/0048 (CNS) — 2005/0049 (COD))

15

2006/C 088/6

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de recommandation du Parlement européen et du Conseil relative à la mobilité transnationale dans la Communauté à des fins d'éducation et de formation: Charte européenne de qualité pour la mobilité(COM(2005) 450 final — 2005/0179 (COD))

20

2006/C 088/7

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions sur la mise en œuvre, les résultats et l'évaluation globale de l'année européenne des personnes handicapées 2003(COM(2005) final 486)

22

2006/C 088/8

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen et au Comité économique et social européen Lancer le débat sur une approche communautaire en matière de programmes d'étiquetage écologique des produits de la pêche(COM(2005) 275 final)

27

2006/C 088/9

Avis du Comité Économique et Social européen sur La représentation des femmes dans les organes de décision des groupes d'intérêts économiques et sociaux de l'Union européenne

32

2006/C 088/0

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de Règlement du Conseil portant création d'une Agence des droits fondamentaux de l'Union européenne — Proposition de Règlement du Conseil autorisant l'Agence des droits fondamentaux de l'Union européenne à exercer ses activités dans les domaines visés au titre VI du traité sur l'Union européenne(COM(2005) 280 final — 2005/0124-0125 (CNS))

37

2006/C 088/1

Avis du Comité économique et social européen sur La représentativité des organisations européennes dans la société civile dans le cadre du dialogue civil

41

2006/C 088/2

Avis du Comité économique et social européen sur la Création d'une assiette consolidée commune pour l'impôt sur les sociétés dans l'UE

48

2006/C 088/3

Avis du comite economique et social europeen sur l'efficacite energetique

53

2006/C 088/4

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil instituant une procédure européenne pour les demandes de faible importance(COM(2005) 87 final — 2005/0020 (COD))

61

2006/C 088/5

Avis du Comité économique et social européen sur Le renforcement de la gouvernance économique — La réforme du pacte de stabilité et de croissance

68

2006/C 088/6

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Grandes orientations des politiques économiques (2005-2008)

76

2006/C 088/7

Avis du Comité économique et social européen sur Les relations UE-Mexique

85

FR

 


II Actes préparatoires

Comité économique et social européen

424ème session plénière des 14 et 15 février 2006

11.4.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 88/1


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil établissant un programme d'action communautaire dans le domaine de la santé et de la protection des consommateurs (2007-2013)»

(COM(2005) 115 final — 2005/0042 (COD))

(2006/C 88/01)

Le 2 juin 2005, le Conseil a décidé, aux termes de l'article 95 du Traité CE, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 23 janvier 2006 (rapporteur: J. PEGADO LIZ).

Lors de sa 424ème session plénière des 14 et 15 février 2006 (séance du 14 février), le Comité économique et social européen a adopté l'avis suivant par 130 voix pour, 2 voix contre et 1 abstention.

1.   Synthèse

1.1

La Commission a présenté sa proposition de décision pour «Un programme intégré unique» au niveau communautaire dans les domaines de la santé publique et de la protection des consommateurs pour la période 2007-2013, qui s'appuie sur un document stratégique inclus dans une communication et une analyse d'impact étoffée présentée dans un document de travail annexé.

1.2

C'est la première fois que la Commission définit une stratégie commune pour les politiques de santé publique et de protection des consommateurs, et que de plus elle le fait pour une période aussi longue (7 ans). Le CESE reconnaît l'effort consenti par la Commission pour tenter de donner un nouvel élan à ces deux politiques, administrativement regroupées au sein d'une même direction générale.

1.3

La Commission entend justifier cette innovation par des raisons d'ordre juridique, économique, social et politique et le CESE prend acte avec satisfaction de l'ensemble des éléments d'information fournis et du soin apporté à l'énoncé détaillé des différentes options possibles dans son analyse d'impact.

1.4

Une audition élargie organisée par le CESE et qui a réuni une multiplicité de représentants accrédités des principaux intérêts en cause ainsi que différentes initiatives menées à bien entre temps, tant par la Commission que par le Parlement européen, ont permis de recueillir les points de vue de ceux-ci quant à la teneur, au contenu, à la présentation et à la justification des propositions de la Commission.

1.5

Sur la base de l'analyse des documents présentés et des informations complémentaires fournies de manière exhaustive par la Commission comme des contributions apportées par les représentants de la société civile directement concernés par les domaines de la santé publique ainsi que de la défense et de la protection des consommateurs et compte tenu des différentes contributions écrites envoyées au Comité par un large éventail d'organisations représentatives en la matière, le CESE estime, de manière générale, que la proposition de décision relative à un programme commun d'action communautaire dans ces domaines n'est pas suffisamment motivée ni expliquée dans ses différents volets: les raisons invoquées ne suffisent pas pour convaincre de la validité de l'option choisie.

1.6

En particulier, le CESE est d'avis que l'on n'a pas dûment étayé l'existence des synergies invoquées qui découleraient de l'existence effective de points communs et complémentaires dans les deux politiques communautaires en question, lesquels ne pourraient pas être développés ni mis en œuvre au moyen d'actions spécifiques de coopération et de coordination compte-tenu de l'horizontalité essentielle des deux politiques en cause, à l'instar de ce qui se produit, par exemple avec la politique environnementale.

1.7

La nature juridique des deux politiques définies respectivement aux articles 152 et 153 du traité est profondément différente. Il convient donc de veiller à éviter deux effets négatifs: d'une part, l'alignement de la politique de protection des consommateurs sur les critères de complémentarité et de subsidiarité au sens strict qui président à la politique de santé publique, au détriment des compétences propres de l'UE en matière de protection et de défense des consommateurs et, d'autre part, une fâcheuse «consumérisation» de la santé publique, avec un mélange des notions d'«usagers» et de «consommateurs», au motif généralement invoqué que ces deux catégories de citoyens ont comme point commun l'appartenance à une même «citoyenneté».

1.8

Le CESE considère également que la politique des consommateurs peut sortir défavorisée du calcul général d'un budget de base unique et qu'une décision séparée pour chacune des politiques de l'UE, comme cela a été le cas jusqu'ici, présente des avantages pour les deux volets en question, en particulier dans une situation de crise institutionnelle et d'imprécision préoccupante quant aux perspectives financières comme celle que l'on est en train de vivre.

1.9

Le CESE estime que la proposition de décision n'aborde pas non plus quelques-uns des aspects fondamentaux des deux politiques et n'assure pas un financement approprié, de même qu'elle passe peut-être à côté de certains aspects décisifs, essentiels et d'actualité, sans oublier qu'elle n'encourage pas suffisamment l'innovation, la rigueur et l'engagement dans les modalités de mise en œuvre, de suivi et d'évaluation prévues.

1.10

Le CESE demande que l'«Institut du consommateur» soit doté de compétences et de fonctions mieux définies et ne soit pas considéré comme un simple «département» de l'Agence exécutive pour le programme de santé publique. C'est le seul moyen d'apporter la contribution décisive qui serait souhaitable pour une meilleure application du droit existant et une meilleure information et éducation des consommateurs.

2.   Introduction: résumé de la communication et de la proposition de décision de la Commission

2.1

Dans le cadre de la communication sur le thème: «Améliorer la santé, la sécurité et la confiance des citoyens; une stratégie en matière de santé et de protection des consommateurs», la Commission propose au Parlement européen et au Conseil d'adopter une décision en vue de définir un Programme d'action communautaire dans les domaines de la santé et de la protection des consommateurs pour la période 2007-2013.

2.2

Pour la première fois, la Commission présente une nouvelle stratégie et un programme d'action communautaire pour la période 2007-2013, qui supposent l'intégration des politiques de santé publique et de protection des consommateurs.

2.3

Dans sa communication, la Commission explique les motifs de cette nouvelle approche, signalant les objectifs communs aux deux politiques et le rôle qu'elles jouent dans le quotidien des citoyens. Par ailleurs, la Commission présente les avantages du nouveau programme commun en termes de synergies qui peuvent conduire à des économies budgétaires et à un allégement des procédures, avec pour résultat une efficacité accrue.

2.4

L'option stratégique de la Commission se fonde essentiellement sur la nécessité de créer des synergies entre les deux politiques, qui permettraient des économies d'échelle et des économies en matière de gestion des ressources financières ainsi qu'une efficacité accrue des procédures, en plus de permettre une plus grande cohérence entre les mesures prises et une visibilité accrue de ces questions dans l'ordre du jour politique.

2.5

Selon la Commission, les objectifs communs de cette politique commune seraient:

protéger les citoyens contre les risques et les menaces qui échappent à la maîtrise des individus;

accroître la capacité des citoyens à prendre de meilleures décisions concernant leur santé et leurs intérêts en tant que consommateurs;

intégrer les objectifs en matière de santé et de protection des consommateurs dans d'autres politiques communautaires.

2.6

Pour ce qui relève plus spécifiquement de la politique de la santé, les objectifs seraient:

protéger les citoyens contre les menaces pour la santé;

promouvoir les politiques conduisant à un mode de vie plus sain;

contribuer à réduire l'incidence des grandes maladies;

améliorer l'efficience et l'efficacité des systèmes de santé;

fournir plus d'informations et assurer une meilleure information.

2.7

En ce qui a trait à la politique des consommateurs, les objectifs seraient:

assurer un niveau élevé et égal de protection pour tous les consommateurs de l'UE;

accroître la capacité des citoyens à défendre leurs intérêts en tant que consommateurs;

élargir le champ d'action de l'Agence d'exécution pour la santé de manière à englober un Institut des consommateurs.

3.   Appréciation de la communication et de la proposition de la Commission

3.1   Observations générales: le programme dans son ensemble

3.1.1

La nature respective des bases juridiques des politiques communautaires de la santé publique et de la protection des consommateurs est totalement différente. En effet, si la politique de santé publique relève essentiellement des États membres, l'intervention de l'UE n'étant admise qu'à titre complémentaire pour appuyer les politiques nationales, en ce qui concerne les aspects spécifiques énoncés à l'article 152 (1), la politique des consommateurs quant à elle se voit conférer dans le traité, en particulier après Amsterdam, un caractère nettement commun en vue de la «promotion» des droits des consommateurs et de la protection de leurs intérêts, notamment lorsqu'il s'agit de réaliser le marché intérieur (2).

3.1.2

Par conséquent, il ne semble pas légitime d'invoquer une prétendue «identité» de nature juridique entre les articles 152 et 153 pour justifier une stratégie et un programme intégré d'action dans les domaines de la santé publique et de la protection des consommateurs.

3.1.3

Il faut ajouter que dans les États membres, la nature juridique et constitutionnelle du droit à la santé est également totalement différente de celle des droits du consommateur et que la protection de ces deux catégories de droits revêt des formes bien distinctes.

3.1.4

Cela ne veut pas dire que le CESE n'estime pas que les questions liées à la santé publique ont actuellement une importance fondamentale, qui justifierait à elle seule une politique forte pour la santé publique européenne, politique qui pourrait également être considérée comme un instrument de lutte contre la pauvreté et l'exclusion. L'on ne peut que déplorer que la non-approbation du texte constitutionnel ait pu contribué à l'absence d'avancées significatives en ce sens.

3.1.5

En effet, le CESE ne peut manquer de souligner que les concepts de «consommateur» et de «patient» ne coïncident pas et que les caractéristiques qui les déterminent ne sauraient être confondues; tout d'abord parce que la catégorie des «consommateurs» ne renvoie pas exclusivement à des individus et que le choix de ceux-ci est guidé par des raisons principalement économiques tandis que les «patients» ne peuvent pas être considérés comme de simples consommateurs de médicaments et de services médicaux. Leurs droits sont en effet d'une nature autre et pas exclusivement d'ordre économique et ne peuvent être comparés qu'aux droits à la justice ou à l'éducation, dont le respect se traduit par la prestation de services d'intérêt général par les États.

3.1.6

Le Comité reconnaît que les deux politiques présentent des aspects communs, mais il estime que cela n'est pas le propre, à titre exclusif ou principal, du rapport entre celles-ci (3). La Commission n'a par ailleurs pas démontré de manière irréfutable que les aspects communs des actions à mener à bien dans le cadre des deux politiques ne peuvent être traités que par la définition et la mise en œuvre d'un programme unique intégré ni que cette formule est la plus appropriée et la plus avantageuse (4).

3.1.7

Cette approche intégrée présente, selon certaines organisations des consommateurs, plusieurs inconvénients, dont certains sont admis par le CESE tels que:

la possibilité d'une perte de visibilité et d'une dégradation accrue de la politique des consommateurs du fait de son alignement sur la politique de santé, dans laquelle l'UE n'intervient qu'à titre complémentaire en appui des politiques des États membres (5), et/ou de sa subordination à celle-ci;

des difficultés accrues de dialogue et d'articulation avec les organisations et les entités nationales responsables qui, dans la grande majorité des cas, ne gèrent pas conjointement les deux domaines en question;

la difficulté peut-être accrue pour les ONG, tous secteurs confondus, pour accéder à des financements et négocier le cofinancement d'actions à entreprendre dans leurs domaines, en raison du fait que les ressources sont limitées ou attribuées à d'autres acteurs.

3.1.8

Aucune des six raisons fondamentales invoquées dans l 'analyse d'impact (p. 6-7) ne constitue un argument décisif pour justifier l'option d'un traitement unitaire de ces deux politiques, au lieu d'une coordination appropriée de celles-ci, notamment en application de l'excellente initiative de la Commission concernant la coopération administrative entre les autorités nationales (6).

3.1.9

La Commission ne parvient pas non plus à démontrer quelles sont les réelles synergies structurantes qui découleraient de ce rapprochement entre les deux politiques et qui ne seraient pas purement temporaires, ni à quantifier les économies d'échelle qu'il permettait de faire. Au contraire, il ressort de son analyse d'impact que la solution actuelle n'a pas d'incidence sur les coûts, dès lors que la somme pure et simple des deux politiques reviendrait exactement au même cadre financier (7).

3.1.10

Au contraire, à un moment particulièrement critique en ce qui concerne les perspectives financières de l'UE, la séparation des deux politiques pourrait présenter l'avantage d'ouvrir deux fronts de négociation et de rendre plus visibles les aspects relevant de chacune avec à la clé la possibilité d'obtenir de meilleurs résultats quant aux moyens alloués à chacune d'elles, selon les organisations représentatives des deux secteurs.

3.1.11

C'est d'ailleurs avec une extrême préoccupation que le CESE considère l'hypothèse d'une réduction radicale des perspectives financières 2007-2013, laquelle même si elle ne compromet pas totalement la viabilité du programme actuel, déjà insuffisamment doté, impliquerait, tout du moins, de revoir sa formulation, de le présenter à nouveau et de redéfinir les priorités et les actions dès lors qu'il n'est pas concevable, car infaisable, de procéder purement et simplement à une réduction en pourcentage et proportionnellement à la réduction générale des montants globaux budgétisés.

3.1.12

Enfin, les différents aspects soulignés à juste titre comme étant communs aux deux politiques peuvent faire l'objet d'actions communes et concertées tant au niveau communautaire qu'au niveau national, de même que dans d'autres domaines qui relèvent d'autres politiques communautaires tels que l'environnement, la concurrence, l'éducation et la culture, compte tenu du caractère horizontal des deux politiques, qui implique naturellement de les prendre obligatoirement en considération dans toutes les autres politiques, comme la Commission elle-même finit par en reconnaître la nécessité dans une série d'exemples figurant à l'annexe 2 de sa communication (p. 16).

3.2   Observations particulières

3.2.1

La tenue d'une audition publique avec les principaux représentants de la société civile organisée directement concernés par le programme de la Commission, qui a réuni près de 70 participants, a contribué de manière décisive à l'analyse de la communication et de la proposition de la Commission présentées maintenant, malgré les contraintes d'ordre logistique qui limitent les possibilités de mener à bien une analyse approfondie des différents aspects et éléments en cause. L'objectif est de procéder à une évaluation portant sur la définition des objectifs, des cibles à atteindre, des moyens nécessaires et de leur utilisation appropriée ainsi que des actions à mettre en œuvre avec ces moyens pour réaliser les objectifs visés.

3.2.2   Le volet «Consommateurs»

3.2.2.1

La Commission met en évidence à juste titre différentes actions qui devront être mises en œuvre en vue d'une protection plus équitable des consommateurs dans l'UE. Toutefois, cela est fait dans une perspective de protection minimaliste, conséquence de l'orientation qui vient de se matérialiser dans ses dernières initiatives législatives dans lesquelles elle privilégie une harmonisation totale généralisée à un bas niveau de protection. Par ailleurs, le CESE fait part de son appréhension quant au recours systématique au principe de l'application de la loi du pays d'origine et met en garde contre le risque d'une vision réductrice de la défense des consommateurs, qui serait ainsi ramenée à une simple information relative aux biens et aux services (8).

3.2.2.2

Le CESE estime que la Commission aurait pu être plus novatrice (9) et que les nouvelles propositions présentées auraient pu être plus concrètes (10). Le CESE a eu l'occasion d'attirer l'attention de la Commission sur certaines lacunes, qui persistent, lorsqu'il a élaboré l'avis sur la stratégie pour 2002-2006 (11). Plus récemment, il a adopté un avis d'initiative dans lequel cette question était largement développée et approfondie, avis aux conclusions duquel il est renvoyé (12).

3.2.2.2.1

Le CESE propose de faire référence à certaines problématiques, notamment:

la question du surendettement des familles;

la révision du régime de la responsabilité du producteur et la conclusion de la révision de la directive sur les clauses abusives ainsi que la réactivation de la CLAB;

l'opportunité de rouvrir le thème de la responsabilité du prestataire du fait de services défectueux;

la promotion de la sécurité du commerce électronique;

la nécessité de prévoir un renforcement de l'accès à la justice et, en particulier, des mécanismes de défense collective des droits des consommateurs;

la promotion des synergies entre les organisations de consommateurs des États membres les plus «anciens» et celles des plus «récents»;

la prise en considération de la situation particulière des États membres qui viennent d'adhérer à l'UE ainsi que de celle des pays qui vont certainement adhérer en cours d'exécution du programme (13);

l'encadrement de tout le programme dans la perspective d'une consommation durable et d'un commerce équitable.

3.2.2.3

En ce qui concerne les initiatives effectivement prévues et que l'on salue et soutient, il manque néanmoins souvent une indication de la manière dont on compte, concrètement, les mettre en pratique et leur calendrier n'est pas précisé. C'est le cas par exemple des suivantes:

développement d'un cadre commun de référence pour le droit européen des contrats prévu au paragraphe 4.2.2;

création d'un système d'identification précoce des professionnels malhonnêtes prévu au paragraphe 4.2.3;

garanties de consultation des consommateurs et de renforcement des capacités de leurs organisations représentatives, prévues aux paragraphes 4.2.2 et 4.2.4;

intégration horizontale de la politique des consommateurs dans les autres politiques à laquelle il est fait allusion aux paragraphes 4.1 et 4.2.2 mais dont on cherche en vain les modalités de concrétisation.

3.2.2.4

Le CESE constate qu'en ce qui concerne les objectifs d'accroissement de la participation de la société civile et des parties concernées à l'élaboration des politiques et à l'intégration de la politique de consommation aux autres politiques communautaires, les indicateurs prévus pour le suivi et l'évaluation des synergies du programme ne sont pas adaptés, hormis le premier, à la politique de consommation.

3.2.2.5

Le CESE estime par ailleurs qu'il serait utile de définir d'autres indicateurs d'évaluation de la politique des consommateurs de manière à garantir une plus grande fiabilité et à établir un lien plus étroit avec les objectifs définis à l'annexe 3 du programme.

3.2.2.6

Il est également à noter que des «programmes de travail annuels» pour l'exécution du programme dont la durée est désormais fixée à 7 ans sont prévus mais il semblerait que l'on n'ait pas envisagé l'utilisation de l'instrument qui faisait partie du programme 2002-2006 à savoir le réexamen du programme d'actions glissant (14), d'autant plus nécessaire pourtant que la période sur laquelle s'étale le programme a été allongée à 7 ans.

3.2.2.7

Le CESE remarque que l'organisation et le fonctionnement de l'Institut des consommateurs, intégré au sein de l'Agence d'exécution pour la santé, n'ont pas encore été fixés. Il recommande de garantir son indépendance et son autonomie dans le cadre d'attributions et de compétences bien définies pour éviter qu'il finisse par devenir un rouage bureaucratique de plus.

3.2.2.8

Enfin, en ce qui concerne les moyens financiers budgétisés pour la politique des consommateurs, l'on peut constater qu'ils correspondent à moins de 20 % du total, ce qui ne représente que 7 centimes d'euro par consommateur et par an sur les 7 sept années que durera le programme et que le doublement apparent du budget relativement au programme antérieur doit être apprécié à la lumière du rallongement de la durée du programme, de 4 à 7 ans.

3.2.2.9

Il faut ajouter que le simple fait d'envisager l'adhésion prochaine de nouveaux États membres aurait dû conduire à une proposition budgétaire plus que proportionnelle à la durée du programme, celui-ci s'avérant déjà insuffisant pour les actions qui doivent être menées à bien et une partie considérable devant être absorbée par le fonctionnement de l'Institut pour les consommateurs.

3.2.3   Le volet «Santé publique»

3.2.3.1

Le CESE tient à souligner les aspects positifs du programme de la Commission, et notamment son intention de donner un élan à la politique de santé publique, en la considérant comme une priorité, en lui conférant une plus grande visibilité et en adoptant des instruments plus efficaces, ce qu'il était urgent de faire. Il n'est même pas nécessaire en effet d'invoquer la menace de pandémie de grippe aviaire pour admettre la nécessité d'une concertation au niveau communautaire des aspects les plus significatifs de la santé publique, que la Commission met à juste titre en évidence (15).

3.2.3.2

En ce sens, le CESE accueille favorablement les grandes lignes directrices en matière de santé publique et en particulier l'idée d'intégrer les préoccupations y relatives dans les autres politiques communautaires et le fait de miser sur la prévention, l'analyse de l'information, le renforcement de la coopération et l'échange de connaissances ainsi que sur l'amélioration de la diffusion de l'information.

3.2.3.3

Le CESE se félicite également que la Commission ait accordée la priorité à la lutte contre les inégalités dans l'accès aux soins de santé, à la nécessité de promouvoir la santé dès l'enfance et aux situations provoquées par le vieillissement de personnes encore actives sur le marché du travail.

3.2.3.4

Par ailleurs, le CESE partage les préoccupations de la Commission en ce qui concerne les menaces globales qui pèsent sur la santé et la place de plus en plus grande que prennent les maladies liées à certains styles de vie. Il approuve également la stratégie décrite dans le programme et qui vise à renforcer l'action sur les déterminants de la santé.

3.2.3.5

Le CESE marque également son soutien à l'effort consenti par la Commission concernant l'encouragement des organisations actives dans le secteur de la santé par le renforcement de leur présence au sein des instances de dialogue, le souci de la mobilité des patients, le soutien à la coopération entre les systèmes de santé nationaux afin qu'ils puissent relever les défis qui se posent à eux et le renforcement des mécanismes d'échange d'informations en matière de santé publique.

3.2.3.6

Le CESE reconnaît ainsi que la Commission a accordé au volet «Santé publique» un traitement plus adapté aux besoins du secteur tant du point de vue de la définition des objectifs que de celle des actions ou encore des moyens alloués à leur réalisation, qui représentent près du triple de ce qui était prévu dans le programme antérieur et le quadruple de ce qui est prévu pour le volet «Consommateurs».

3.2.3.7

Cependant, le CESE estime que même ce volet ne fait pas l'objet d'innovations majeures (16) par rapport au contenu des programmes antérieurs. Les observations que le CESE avait formulées à propos plus particulièrement du programme 2001-2006 et du Plan européen «Environnement et santé» 2004-2010, notamment quant au manque persistant d'objectifs concrets et objectivement analysables et à l'absence d'un calendrier précis pour leur réalisation (17), demeurent par conséquent tout à fait valables.

3.2.3.8

Le CESE aurait souhaité que soient indiqués précisément les objectifs à atteindre concernant des aspects qui figuraient dans le texte légal antérieur et qui sont absents du texte actuel. Il s'agit par exemple de ceux liés à la lutte contre les inégalités en matière de santé, en particulier entre les hommes et les femmes, mais également de la situation des personnes âgées, des plus défavorisés et des communautés en marge de la société, ou encore de la confidentialité des données à caractère personnel, des facteurs personnels et biologiques, des effets néfastes des radiations et du bruit ainsi que de la résistance aux antibiotiques.

3.2.3.9

Le CESE aurait également souhaité que le programme traite avec cohérence certains thèmes d'une réelle importance, tels que l'obésité, le HIV/SIDA, la santé mentale (18), la santé des enfants et les maladies infantiles ou encore le vieillissement. En effet, bien qu'ils soient mentionnés dans des parties décisives du programme, ils ne font pas l'objet d'un traitement approprié dans le texte légal de la proposition de décision.

3.2.3.10

Mais ce qui ne peut manquer de surprendre, c'est la manière dont la proposition de la Commission passe à côté de certaines grandes questions de santé publique d'actualité telles que la santé dentaire, la vue, les soins palliatifs et le traitement de la douleur.

3.2.3.11

En règle générale, le Comité aurait apprécié que la Commission fasse preuve de plus d'engagement relativement à des aspects tels que la qualité de l'information à tous les niveaux et dans tous les domaines, la prévention globale des risques, les partenariats public/privé ainsi que la coopération entre les États membres et à l'échelle internationale.

3.2.3.12

Enfin, le CESE aurait également apprécié que le programme comporte des actions concrètes visant à permettre la comparabilité des différents systèmes de santé de l'UE (19), à promouvoir la protection des patients qui se déplacent dans l'UE («Assurance-maladie dans l'UE»), à encourager de manière plus décisive l'adoption de codes de «bonnes pratiques», à créer et à développer des «centres d'excellence» ainsi qu'à mettre sur pied un centre d'épidémiologie.

Bruxelles, le 14 février 2006.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  Comme l'ont bien rappelé tant le Directeur général de la DG SANCO, Robert MADELIN, à l'occasion de l'ouverture du «Forum ouvert de la santé 2005» (7 et 8 novembre 2005, Bruxelles) que les députés européens Miroslav MIKOLASIK, et Dorette CORBEY, du groupe socialiste, lors de leurs interventions dans le cadre d'une session parallèle au cours du même forum.

(2)  Voir par exemple: VANDERSENDEN, DUBOIS, LATHAM, VAN DEN ABEELE, CAPOUET, VAN ACKERE-PIETRY, GÉRARD et AYRAL; dans Commentaire Mégret, Vol. VIII, 2ème éd. 1996, pages 16 et suivantes et 41 et suivantes: la situation est devenue de plus en plus évidente dans le texte du projet de constitution, si l'on compare les dispositions de l'article III - 132, sur la protection des consommateurs, intégré dans le chapitre III du Titre III (JO C 169, du 18.7.2003) sur la «Politique dans des domaines spécifiques», qui sont mises sur un pied de parfaite égalité avec la politique sociale, la politique agricole ou celle de l'environnement, et l'article III - 179 sur la santé publique qui figure au chapitre V relatif à des domaines où «l'Union décide de mener une action de coordination, de complément ou d'appui» uniquement pour compléter les actions des États membres, la santé publique figurant aux côtés de la politique culturelle, de la jeunesse et des sports ou encore de la protection civile.

(3)  L'on peut d'ailleurs constater qu'il existe des points d'interpénétration des politiques de consommation et de santé dans d'autres domaines comme l'environnement, le tourisme, la concurrence, le marché intérieur ou la justice, points qui auraient dans l'absolu également pu justifier un traitement conjoint.

(4)  La simple invocation de ce qui figure dans les «Perspectives financières 2007-2013», COM(2004) 487 final, du 14.07.2005, paragraphe 3.3, p. 24), dans la situation actuelle d'impasse dans laquelle se trouvent leurs négociations, ne constitue pas un argument décisif en soi mais ne fait que démontrer la cohérence de la Commission dans sa proposition, ce qui n'est pas la même chose qu'une justification ou une démonstration de la validité de la solution proposée. C'est d'ailleurs ce qui est clairement ressorti du «Forum ouvert de la santé 2005» lors duquel l'on a fait valoir la nécessité d'une politique autonome et indépendante pour la santé publique au niveau européen.

(5)  Comme d'ailleurs la Commission l'admet expressément, lorsqu'elle affirme que «La stratégie et le programme proposés visent à appliquer les articles 152 et 153 du traité, qui concernent l'action consommateurs, en complétant les actions des États membres par des mesures à valeur ajoutée qui ne peuvent être prises au niveau national» (fiche législative financière, p. 41).

(6)  Règlement de 2006/2004, dans JO L 364, du 9.12.2004.

(7)  Au paragraphe 4.4 de l'«Analyse d'impact», on peut en effet lire que du point de vue purement financier, les avantages retirés de l'augmentation des dépenses budgétaires pour les deux programmes séparés ou un seul programme issu de la fusion de ces deux programmes sont pratiquement les mêmes.

(8)  La proposition de directive sur les pratiques commerciales déloyales illustre bien cette orientation, comme le faisait déjà la proposition de directive relative au crédit à la consommation, qui a été profondément remaniée en temps voulu et remplacée par une version améliorée, et dans une certaine mesure, la directive relative aux garanties liées à la vente de biens.

(9)  Comme la Commission le reconnaît d'ailleurs en affirmant que «En fait, ces objectifs ne feront pas l'objet de modifications majeures par rapport à la stratégie pour la politique des consommateurs 2002-2006» (Fiche financière législative).

(10)  Une référence à deux matières particulièrement importantes en l'occurrence s'impose, l'une positive, à la publication, enfin, d'une nouvelle proposition de directive relative au crédit à la consommation (COM(2005) 483 final, du 7.10.2005) et une autre, négative relative à la décision de retirer la proposition de règlement relative à la promotion des ventes (COM(2005) 462 final, du 27.09.05).

(11)  JO C 95, du 23.4.2003.

(12)  JO C 221, du 8.9.2005.

(13)  Ce qui fait l'objet, comme l'on sait, d'un projet de rapport intéressant du PE, dont le député Henrik KRISTENSEN est rapporteur [doc. 2004/2157 (INI), du 31.05.2005].

(14)  Réalisé le 15 septembre 2003 [doc. SEC(2003) 1387, du 27.11.2003].

(15)  Cela ressort clairement de l'ensemble des décisions que la Commission a récemment prises et publiées en la matière: décisions C (2005) 3074 et 3705 du 6 octobre 2005, 4068 du 13 octobre 2005, 3877 et 3920 du 17 octobre 2005, 4135 et 4163 du 19 octobre 2005 et 4176 du 20 octobre 2005, 4197 et 4199 du 21 octobre 2005, reprises respectivement dans les JO L 263 du 8.10.2005, 269 du 14.10.2005, 274 du 20.10.2005, 276 du 21.10.2005 et de 279 du 22.10.2005.

(16)  En effet, une analyse comparative des programmes 2007-2013 et 2001-2006 révèle que la teneur des paragraphes 1.1, 1.2, 1.3, 1.4, 1.6, 3.1, 3.2, 3.3, 3.4, 5.4, 5.6, 5.7 et 6 de la proposition actuelle coïncide avec le programme antérieur; c'est la numérotation qui a changé. L'on peut néanmoins trouver quelques innovations au paragraphe 1.5, dans le détail du paragraphe 2, bien que le thème de la réaction en cas d'urgence sanitaires figurât déjà dans le programme antérieur, dans les paragraphes 3.5, 3.6, et 3.7 et dans la totalité du paragraphe 4 qui n'était que vaguement énoncé dans la communication de la Commission qui fondait le programme antérieur, ainsi que dans les paragraphes 5.1, 5.2, 5.3, 5.5 et 5.8. En revanche, la référence aux actions dans le domaine de la coopération avec les pays candidats et les pays tiers a disparu du programme actuel et cette question n'est mentionnée qu'au paragraphe 2.2 de la communication de la Commission sur laquelle se base le programme.

(17)  JO C 116, du 20.4.2001, JO C 157, du 28.6.2005.

(18)  Ce qui est d'autant plus surprenant que la Commission vient de publier un excellent Livre vert relatif à une stratégie en matière de santé mentale dans l'Union européenne (COM(2005) 484 final, du 14 octobre 2005) à l'issue d'ailleurs de toute une série d'activités réalisées depuis 1997 dans ce domaine dont le rapport préparé par le professeur Ville LEHTINEN de décembre 2004 fait un bon compte rendu, et qui témoigne clairement de la possibilité de la Commission de mener à bien, en toute autonomie, des actions d'un grand intérêt, dans des domaines importants de la santé publique, qui n'ont rien à voir avec la politique des consommateurs.

(19)  Dont la nécessité a été à juste titre soulignée par le Dr Yves CHARPAK, de l'OMS, au cours du «forum ouvert de la santé 2005».


11.4.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 88/7


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de Règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 1348/2000 du Conseil du 29 mai 2000 relatif à la signification et à la notification dans les États membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale»

(COM(2005) 305 final — 2005/0126 (COD))

(2006/C 88/02)

Le 1er septembre 2005, le Conseil a décidé, conformément à l'article 95 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 23 janvier 2006 (rapporteuse: Mme SÁNCHEZ MIGUEL).

Lors de sa 424e session plénière des 14 et 15 février 2006 (séance du 14 février), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 134 voix pour et 2 abstentions.

1.   Conclusions

1.1

Le CESE félicite la Commission pour le contenu de la réforme proposée, qui facilite et clarifie la mise en œuvre du règlement, si importante pour rendre effectif l'espace de liberté, de sécurité et de justice dans l'UE. Toutefois, certains des nouveaux paragraphes peuvent être source de confusion lorsqu'il s'agit d'interpréter le contenu de ce règlement, en particulier le paragraphe 3 in fine de l'article 8. En effet, il établit une exception quant au calcul des délais, en cas de refus d'acceptation par le destinataire du document, au motif qu'il ne connaît pas la langue dans laquelle il est rédigé, pour protéger le requérant conformément aux dispositions nationales.

1.2

De même, à l'article 14 in fine, il conviendrait de préciser lorsqu'il est question de l'«envoi équivalent» à celui avec accusé de réception quels sont les autres systèmes de preuve valables de la notification et de la transmission par les services postaux de l'acte.

1.3

Il faudrait clarifier les deux points et surtout vérifier les différentes versions linguistiques, qui présentent parfois des discordances. Le problème peut être résolu avant la publication du règlement car il faut savoir qu'il sera appliqué par chaque État membre en fonction de sa version linguistique.

1.4

Le CESE exprime sa préoccupation quant au fait que la Commission n'a pas évalué la situation en ce qui concerne l'application du règlement dans les nouveaux États membres malgré l'adaptation des annexes à cette nouvelle donne.

1.5

En tout état de cause, le CESE tient à faire valoir que la procédure utilisée dans le cadre de la réforme est la procédure appropriée, dès lors qu'elle prend en considération toutes les parties impliquées et surtout, parce que l'on a recouru à l'un des instruments créés à cette fin, à savoir le Réseau judiciaire européen, qui permet de tenir compte des problèmes détectés dans l'application des deux procédures.

2.   Introduction

2.1

La Commission européenne présente cette proposition de règlement en vertu de ce qui est prévu à l'article 24 du règlement (CE) 1348/2000 (1), qui stipule qu'après examen de son application au cours de la période indiquée, qui prend fin le 1er juin 2004, la Commission procède à l'adaptation du contenu de ses dispositions à l'évolution du système de signification. Toutefois, la modification proposée va au-delà d'une simple révision formelle dès lors qu'elle s'inscrit dans le cadre du processus de simplification législative engagée par l'UE et prend en considération le corpus législatif étoffé proposé au cours de cette même période, en vue de mettre en œuvre la résolution du Conseil de Tampere relative au développement d'un espace de liberté, de sécurité et de justice de nature à garantir la libre circulation des personnes à l'intérieur des frontières de l'UE.

2.2

Ce règlement a une grande importance pour le bon fonctionnement du marché intérieur. Les opérations et les contrats transfrontaliers et surtout, les nouveaux systèmes de transaction, qui ont pour support les nouvelles technologies, rendent nécessaire une réglementation qui établisse la procédure de signification et de notification des actes judiciaires et extrajudiciaires d'un État membre à l'autre. Il y a lieu de signaler à cet égard que le CESE a déjà fait valoir (2) que l'instrument juridique à choisir pour réglementer cette procédure devait être un règlement plutôt qu'une directive et que le but à poursuivre était une harmonisation totale en la matière.

3.   Contenu de la réforme

3.1

Dans le cadre du processus de simplification visé dans la proposition de réforme, des modifications qui renforcent la sécurité juridique pour le requérant et pour le destinataire à l'examen ont été apportées, car l'on cherche un principe de base sur lequel asseoir durablement la confiance dans le marché intérieur.

3.2

En premier lieu, des dispositions claires sont établies pour le calcul des délais (art. 7.2), qui remplace les anciennes, le nouveau délai étant d'un mois à compter de la réception de l'acte et ce n'est qu'en ce qui concerne les relations entre les administrations de chaque État que la législation nationale sera celle qui s'applique dans chaque cas (art. 9.1 et 2).

3.3

Les modalités du refus de recevoir le document par le destinataire quand il est rédigé dans une langue qu'il ne connaît pas sont clarifiées et la possibilité de faire traduire ce document dans une langue connue de celui-ci est prévue, le délai commençant à courir à partir de la réalisation de la traduction (art. 8.1). Toutefois, dans le nouveau paragraphe 3, une exception est prévue pour les cas où les dispositions nationales prévoient des délais déterminés afin de protéger les droits du requérant, la date à prendre en considération étant dans ce cas celle de la signification ou de la notification de l'acte original.

3.4

Importante, également, la modification proposée concernant les frais de signification ou de notification (art. 11.2), selon laquelle chaque État membre établira un droit forfaitaire dont le montant est fixé à l'avance.

3.5

Concernant la signification ou la notification par les services postaux (art. 14), il est prévu que chaque État membre peut demander la preuve de celles-ci sous la forme d'un accusé de réception ou d'un «équivalent», sans que cela n'empêche les personnes impliquées dans une procédure judiciaire de faire procéder à la signification ou à la notification des actes judiciaires par l'intermédiaire d'officiers ministériels, de fonctionnaires ou de toute autre personne compétente dans l'État membre requis (art. 15).

4.   Observations relatives à la proposition de modification

4.1

Le CESE juge positive toute proposition de modification de la législation qui serait conforme au principe de simplification (3) et qui, dans le même temps, garantirait la sécurité juridique dans le domaine concerné. En conséquence, il se félicite que la Commission ait élaboré le rapport prévu dans le règlement même (art. 24), que les expériences tirées de son application aient été examinées et débattues dans le cadre des réunions du Réseau judiciaire européen (4), et que la Commission ait adopté, sur la base des informations ainsi réunies et des études pertinentes réalisées en la matière, le rapport (5) qui a servi de base à la proposition à l'examen.

4.2

Dans cet ordre d'idées, il faut reconnaître qu'un grand pas vers la simplification a été accompli avec l'inclusion dans la législation communautaire des calculs des délais pour la signification et la notification de l'acte, tandis qu'avant de multiples dispositions nationales jouaient, ce qui avait pour effet d'allonger la durée des procédures. Cette modification permet également aux parties de prendre connaissance des procédures sans devoir vérifier quelles sont celles qui sont en vigueur dans chaque État membre. Nonobstant ce qui précède, l'on admet l'applicabilité de la loi nationale pour les relations entre États, comme prévu à l'article 9 modifié, sans que cela ne porte préjudice aux particuliers concernés.

4.3

Le nouveau libellé proposé pour l'article 8 (6) relatif au refus par le destinataire de recevoir l'acte quand il ne connaît pas la langue dans laquelle il est rédigé ainsi qu'à l'obligation de faire traduire ce document, semble être plus en accord avec la défense des intérêts des parties intéressées que la rédaction actuelle, et ce surtout parce que les délais prescrits ne sont pas raccourcis mais commencent à courir à partir de la date de cette traduction. Toutefois, la rédaction du nouveau paragraphe 3 de l'article 8 pose un grave problème d'application pour les états membres en ce qui a trait à ce qui précède dès lors qu'elle introduit une exception, à savoir l'application des délais prescrits par la législation nationale, ce qui pourrait placer le destinataire en situation de ne pas pouvoir défendre ses droits.

4.4

Le CESE juge opportune l'inclusion d'un droit forfaitaire fixé à l'avance par chaque État membre car souvent, le fait que le montant des frais est indéterminé est source de méfiance entre les parties. La transparence de cette procédure se trouve ainsi renforcée.

4.5

Dans la droite ligne de l'avis du CESE (7), il nous apparaît nécessaire d'étudier l'utilisation, dans la procédure de signification et de notification des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale, des innovations techniques et des nouveaux moyens admis par les entités requises et d'origine, comme le courrier électronique ou Internet, à condition que la sécurité juridique des parties soit garantie.

4.6

Une autre question qu'il faudrait examiner est la manière de rédiger les formulaires présentés dans les annexes, qui sont destinés aux administrations judiciaires des États membres, c'est à dire les entités qui transmettent et qui reçoivent ces documents. Le CESE estime qu'il faudrait tenir compte en outre des intérêts de l'entité réceptrice et du destinataire, de manière à simplifier la rédaction et à la rendre intelligible pour les parties concernées dans le cadre des procédures judiciaires et extrajudiciaires.

Bruxelles, le 14 février 2006.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  JO L 160 du 30.06.2000.

(2)  JO C 368, du 20.12.1999 (par. 3.2).

(3)  JO C 24 du 31.01.2006.

(4)  Le Réseau judiciaire européen en matière civile et commerciale. JO C 139 du 11.5.2001.

(5)  Rapport sur l'application du règlement (CE) no 1348/2000. 1er octobre 2004 - COM(2004) 603 final.

(6)  Le nouveau libellé proposé pour l'article 8, relatif au refus par le destinataire d'accepter la notification de l'acte quand le document n'est pas rédigé dans une langue officielle de l'État membre requis, est conforme à la jurisprudence de la CJE. Voir à ce sujet l'arrêt récent C-443/03 du 8 avril 2005.

(7)  JO C 368 du 20.12.1999.


11.4.2006   

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Journal officiel de l'Union européenne

C 88/9


Avis du Comité économique et social européen sur «Le rôle des gares dans les agglomérations et les villes de l'Union européenne élargie»

(2006/C 88/03)

Le 10 février 2005, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l'article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d'élaborer un avis sur: «Le rôle des gares dans les agglomérations et les villes de l'Union européenne élargie»

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 31 janvier 2006 (rapporteur: M. TÓTH).

Lors de sa 424e session plénière des 14 et 15 février 2006 (séance du 14 février), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 139 voix pour, 2 voix contre et 4 abstentions:

1.   Recommandations

1.1

Le Comité économique et social européen insiste pour que le contenu du présent avis soit incorporé au document qui émanera du réexamen actuellement en cours du livre blanc sur «La politique européenne des transports à l'horizon 2010: l'heure des choix» (COM(2001) 370).

1.2

Au sein du réseau ferroviaire, la place des gares internationales de voyageurs doit faire l'objet d'un examen approfondi, en particulier dans la mesure où celles-ci constituent non seulement une partie de l'infrastructure ferroviaire mais aussi un élément des services proposés par la ville et une partie de l'héritage architectural de l'Europe.

1.3

Il convient, dans le cadre d'une large concertation tant à l'échelon des spécialistes de la profession qu'à celui de la société, de continuer à examiner quelles sont les exigences qui s'imposent aux gares, en prenant en considération les progrès technologiques et techniques du troisième millénaire. Il convient de définir les alternatives en présence quant aux formes de réglementation justifiées par des exigences réalistes, à l'échelon européen, national et régional, dans le respect du principe de subsidiarité.

1.4

Au cours de l'élaboration de la réglementation communautaire, l'amélioration générale de la sécurité des voyageurs ainsi que la protection face au terrorisme doivent figurer parmi les exigences dont font l'objet les gares pour le transport international de passagers.

1.5

Il importe d'accorder une attention particulière aux aménagements des gares, compte tenu du rôle moteur qu'ils peuvent jouer et des possibilités qu'ils recèlent en matière de garantie de la cohésion sociale et économique dans les nouveaux États membres.

1.6

Il est nécessaire, avec le concours de la Banque européenne d'investissement (BEI), d'examiner les possibilités de financement du développement structuré des gares internationales pour le transport des voyageurs, dans le cadre d'un mécanisme de partenariat public-privé ou d'autres mécanismes appropriés.

1.7

Il importe de veiller à ce que les gares remplissent prioritairement les fonctions liées à leur rôle premier, à savoir le transport, et évitent de se lancer dans d'autres activités et de devenir des centres commerciaux et de consommation.

1.8

Il convient de convaincre que les aménagements apportés aux gares d'une part contribuent à maintenir les emplois existants et d'autre part favorisent la création de nouveaux emplois. Dans le cadre de l'analyse de l'impact de tels développements, il importe naturellement de ne pas se limiter aux seules retombées directes mais de prendre également en considération les effets collatéraux.

1.9

Il importe de s'assurer que l'entretien et le développement des gares ne soient pas prioritaires uniquement dans le cas d'infrastructures situées dans les grandes villes et accueillant un trafic international, mais également dans celui des gares fréquentées par la population et les voyageurs des régions les plus défavorisées.

2.   Introduction

2.1

En bref, les gares sont la «vitrine» du trafic ferroviaire.

2.2

Le livre blanc sur «La politique européenne des transports à l'horizon 2010: l'heure des choix» publié en 2001 n'a pas changé les objectifs généraux de la politique communautaire tout en accentuant davantage le développement de modes de transport capables d'alléger la circulation routière et la nécessité de placer l'usager au cœur de la politique des transports.

2.3

Le rôle des gares est important pour la réalisation de la libre circulation des biens, de celle des personnes et de celle des services. Les gares peuvent contribuer à ce que le transport de personnes se déroule sans encombre, le plus rapidement et le plus efficacement possible, mais elles doivent pouvoir compter à cette fin sur le bon fonctionnement du marché unique, la suppression des obstacles administratifs et la neutralité concurrentielle.

2.4

La politique des transports de l'Union constitue également un instrument essentiel de la réalisation de la cohésion économique et sociale. En effet, elle accorde une attention particulière au libre jeu de la concurrence loyale, à l'amélioration de la sécurité des transports ainsi qu'à la mise en valeur des aspects liés aux relations avec l'environnement et aux impacts environnementaux.

2.4.1

Abordant la question de la redynamisation du secteur des chemins de fer, le livre blanc souligne les côtés absurdes qui caractérisent le secteur ferroviaire. En effet, on trouve d'une part des réseaux de chemins de fer à grande vitesse et à forte capacité qui desservent des gares modernes, et d'autre part des services assez souvent obsolètes et désuets qui sont proposés aux voyageurs. Il peut arriver que ces derniers se retrouvent dans des gares qui manquent d'entretien, voire comportent des risques d'accident, tandis que les lignes locales se mêlent à des services à longue distance bondés et que des retards sont constatés.

2.4.2

Le livre blanc attire l'attention sur la nécessité de stimuler par des investissements la collaboration entre le réseau ferroviaire à grande vitesse et le trafic aérien, en accordant une attention particulière aux gares qui desservent les aéroports. Il aborde à plusieurs reprises le rôle des gares dans l'offre de services facilitant la circulation des voyageurs, en particulier en ce qui concerne la gestion des bagages.

2.5

Avec l'adoption du premier et du deuxième paquet ferroviaire (1), l'Union a progressé sans discontinuer en matière de libéralisation de la circulation des biens, et ensuite en matière d'unification des exigences de qualité. Le CESE espère que le troisième paquet ferroviaire produira des effets similaires. En ce qui concerne le parachèvement et la mise en œuvre des différentes étapes relatives à la circulation des personnes, il s'agit de tâches auxquelles l'Union doit encore s'atteler. Le présent document porte sur l'établissement des normes de qualité du trafic international de voyageurs et leur diffusion dans les États membres.

3.   Environnement réglementaire

3.1

Plusieurs règlements et directives des Communautés européennes traitent des chemins de fer. Nous renvoyons à cet égard au règlement instituant une Agence ferroviaire européenne (2), ainsi qu'aux directives relatives à la sécurité ferroviaire (3), aux infrastructures ferroviaires (4),à la répartition des capacités ferroviaires (5), à l'interopérabilité du système ferroviaire européen (6) et au développement de chemins de fer communautaires (7). Ces différentes dispositions donnent à constater que la réglementation ne porte tout au plus qu'accessoirement sur le rôle des gares.

3.2

La Commission s'occupe en priorité d'établir un ensemble unique d'exigences techniques standardisées. Il s'agira par exemple d'uniformiser la hauteur des quais afin que les personnes à mobilité réduite puissent également les utiliser (directive 2001/16/CE). L'unification des réseaux électriques ferroviaires, des systèmes de sécurité et d'autres exigences techniques relève de la promotion de l'interopérabilité. Il en va de même de l'harmonisation en matière de licences de conducteur de train. Le handicap concurrentiel actuel du secteur ferroviaire est entre autres imputable au temps d'attente à la frontière avec certains pays, attente due à la disparité des exigences techniques (largeur des voies, nécessité d'apporter des modifications techniques à la locomotive et de changer de conducteur).

3.3

En matière de gares, ce sont essentiellement les directives mettant en avant la sécurité des voyageurs et leurs droits qui sont pertinentes (par exemple, la directive 2001/16/CE). Le troisième paquet ferroviaire, dont l'objectif est la réalisation des droits des voyageurs, est caractéristique en la matière. Il vise d'une part à leur assurer la possibilité d'obtenir leurs billets à temps, facilement et en bénéficiant de l'information adéquate — et de les changer dans la mesure du possible — et, d'autre part à veiller à ce que les voyageurs soient informés des conditions d'utilisation des billets. Un autre groupe de directives portent sur l'amélioration de la sécurité dans les gares. Il arrive souvent, en particulier aux heures de moindre affluence, que les gares des grandes villes et quelquefois les rames de train soient le théâtre d'actes de violence. L'établissement d'exigences accrues en matière de sécurité, ainsi que l'assurance d'obtenir une aide de la part du personnel de la gare ou du train en cas de survenance d'un événement non désiré ne manqueraient pas d'influencer favorablement l'envie de voyager.

3.4

Le CESE suit de manière continue, dans le cadre de son activité, les travaux de la Commission; en ce qui concerne le trafic ferroviaire, il a élaboré des avis ayant trait entre autres aux aspects sociaux, aux questions relatives au financement, aux aires métropolitaines européennes et aux réseaux transeuropéens de transport (8).

4.   La gare et l'intermodalité

4.1   La gare en tant que point nodal intermodal

4.1.1

L'apparition des réseaux à grande vitesse (TGV, HST, ICE) — phénomène qui, en parallèle, s'est traduit en Europe par la création des réseaux transeuropéens (RTE) — a été l'élément catalyseur qui a permis aux gares en déclin progressif de recouvrer leur importance pour la ville. Alors que se rationalisait le trafic ferroviaire passager sur des distances qui, auparavant, ne pouvaient en général être couvertes que par voie aérienne (600-800 km), la population de voyageurs attirée vers les gares s'est non seulement accrue, mais a également changé de nature, ce qui n'a pas manqué de provoquer une revalorisation de la gare au cœur de la ville.

4.1.2

Un autre facteur susceptible de transformer la perception de la gare ferroviaire en tant que point nodal du trafic ne se rattache pas directement au rôle des réseaux à grande vitesse mais plutôt à la modification du mode d'utilisation des banlieues et des zones d'agglomérations qui, de cités dortoirs monofonctionnelles, peuvent devenir des espaces urbanisés multipolaires et multifonctionnels. L'ensemble de ces changements, ainsi que la reconnaissance du fait qu'il n'est pas forcément possible de suivre la croissance du trafic automobile des navetteurs des banlieues en construisant de nouvelles routes, ont mis en avant la nécessité d'intégrer le trafic urbain et celui provenant des zones périurbaines ainsi que l'importance d'établir des relations de coopération entre les associations de transport, d'harmoniser les horaires, les tarifs et les systèmes de billetterie, et d'utiliser conjointement les infrastructures de trafic de voyageurs. L'agitation sociétale qui a secoué la banlieue parisienne fin 2005 met en évidence la nécessité d'employer plusieurs instruments à la fois pour agir en faveur de la cohésion sociale, et montre que les processus qui y contribuent ne peuvent pas être considérés comme terminés.

4.1.3

Les lignes de banlieue forment une partie importante de ces réseaux, voire, dans certains cas, un élément essentiel de leur charpente. De ce point de vue, les gares, qui s'y prêtent parfaitement, font logiquement office de centres de mobilité et d'éléments clés des systèmes d'information des voyageurs de ces réseaux de transport complexes et interconnectés.

4.1.4

Bien que, le plus souvent, les gares accueillant le réseau banlieue et les gares TGV soient différentes, la culture de l'intégration réunit les deux processus et, lors de rénovations ou de la construction d'une nouvelle gare, la garantie d'une intermodalité moderne et de haut niveau, aussi bien entre lignes internationales et nationales d'une part, qu'entre celles-ci et les transports urbains d'autre part, constitue une exigence de base.

4.2   La mise en place de normes européennes d'intermodalité

4.2.1

Les gares donnent lieu à la création progressive de normes et à l'émergence d'exigences. Autrefois, les gares ferroviaires constituaient un lien entre les membres de la nation tout entière et contribuaient à façonner l'identité nationale. Ce n'étaient pas les infrastructures en tant que telles qui construisaient l'identité commune (même si les rails, la voie ferrée étaient indispensables à sa construction), mais bien les gares, les règles, les modèles et les normes.

4.2.2

Aujourd'hui, l'uniformisation des gares ferroviaires qui se trouvent sur les RTE-T ne constitue pas un objectif. À l'heure actuelle, la mise en place de gares ferroviaires qui expriment une identité européenne ne doit pas se faire au moyen de la définition de normes architecturales, mais en fixant des normes de services. Il faut que l'une des plus importantes normes de ce type soit constituée par la mise en place de relations intermodales qui, tout en préservant la diversité des instruments locaux, répondent aux exigences de qualité qui s'imposent dans une Europe multilingue sur le plan de l'information des voyageurs, de leur orientation et de la prise en charge de la continuation de leur voyage. En la matière, il convient de distinguer trois domaines: les normes d'information des voyageurs, les normes d'intermodalité et la mise en place de la fonction de centre de mobilité.

4.2.3

Il serait bon que la mise en place, dans les gares qui se trouvent sur les RTE, de ces exigences de qualité en matière de convivialité pour les usagers devienne une recommandation ou une ligne directrice européenne, mais il importe que cela ne soit pas formulé comme un privilège limité aux RTE-T, et que cela intervienne dans le plus strict respect du principe de subsidiarité. Par conséquent, il ne serait bien entendu pas du tout problématique que ces normes en voie d'élaboration soient mises en œuvre également dans d'autres gares et dans d'autres points nodaux: elles ne nuiraient pas à la qualité des voyages, mais l'amélioreraient.

5.   Modèles de développement

5.1

Si l'on se livre à des recoupements sur le plan international, on constate que presque chaque pays en est venu au développement des gares à partir d'un point de départ différent (motivation liée à un objectif de développement des transports ou au développement urbain, initiative émanant des pouvoirs publics ou du secteur privé, ou mélanges divers de tous ces éléments). En Grande-Bretagne, où l'aménagement des gares a été laissé exclusivement aux mécanismes de marché, les développements ont été: a) limités aux espaces ferroviaires; b) propres à Londres intramuros; c) réalisés au cours de la période de boom immobilier; d) presque exclusivement consacrés à la construction de bureaux.

5.2

En Suisse a été mis en place un programme national de modernisation du réseau ferroviaire et de transports en commun, animé par des considérations environnementales, avec des systèmes de chemin de fer périurbains (S-Bahn: à Zürich, Bâle et Berne) et, bien que les difficultés financières des chemins de fer suisses aient rendu nécessaire la valorisation des propriétés environnant les gares, ce n'est pas une simple opération commerciale de vente qui s'est réalisée, mais un programme défini conjointement avec la compagnie ferroviaire (ainsi, ce ne sont pas seulement les intérêts des investisseurs qui ont été réalisés, mais aussi ceux des villes, des pouvoirs publics et de la compagnie ferroviaire).

5.3

En Suède, c'est la compagnie de chemins de fer, privatisée mais non fragmentée, qui a été à l'initiative du processus, avec les collectivités locales pour partenaires. L'objectif était la mise en place de centres modernes dédiés au voyage: trains, autobus, taxis et création d'espaces de parking, le tout réuni sous un même toit. Les arrangements qui ont été réalisés ont donc concerné les collectivités locales et les divers modes de transport.

5.4

En France, c'est la construction du TGV, décidée de manière centralisée et, dans ce cadre, l'enjeu de la mise en place d'un lien avec Paris, qui a constitué la principale force motrice. Le rôle de l'échelon local dans ce processus a surtout consisté dans un lobbying pour l'obtention d'une gare TGV.

5.5

Aux Pays-Bas, les services ministériels chargés respectivement des transports et de l'environnement ainsi que la compagnie ferroviaire ont annoncé en 1986 un programme de densification des environs des gares, conformément au principe du développement urbain compact et à la promotion des transports en commun. Dans la période précédant la privatisation, ce n'est qu'avec de grandes difficultés que la compagnie ferroviaire et les collectivités locales sont parvenues à y associer d'autres partenaires.

5.6

Les exemples mentionnés ci-dessus nous enseignent qu'il est important que les aspects représentant les intérêts du point nodal (de transport) et ceux représentant les intérêts du «lieu» (de la ville) soient pris en compte dès la conception du projet, et que l'on n'assiste pas à l'affirmation d'un point de vue de manière unilatérale. De la même façon, les aspects liés au marché et les aspects financiers doivent être placés au même niveau que les points de vue plus synthétiques des représentants des intérêts de la ville et du réseau, afin d'éviter que les processus ne soient décidés en prenant exclusivement en compte des intérêts conjoncturels à court terme, ou, à l'inverse, que le la question de la viabilité financière ne soit laissée de côté dans le cadre de la conception d'un projet ambitieux. Les ouvrages spécialisés montrent que des arrangements se trouvent plus facilement lorsque la gare est construite sur un terrain nouveau (Lille), car, dans d'autres cas, les affrontements d'intérêts déjà en place ont à de nombreuses reprises fortement compliqué la progression des projets.

6.   Les pistes de développement de l'Union

6.1

Il semblerait justifié que se développe au sein de la Commission européenne une coopération horizontale qui permet aux différents collaborateurs d'examiner en coupe sectorielle les différents projets en cours dans le cadre des Fonds structurels. Cet examen permettra ensuite de déterminer secteur par secteur l'ampleur de l'aide communautaire accordée à une activité donnée.

6.2

Il semble nécessaire de garder à l'esprit la question de la responsabilité que porte le développement des réseaux à grande vitesse dans l'émergence des contradictions caractérisant actuellement les chemins de fer, comme par exemple le mélange de traditionnel et de moderne. En effet, si la construction de ces réseaux est passée au premier plan de l'actualité, c'est parce qu'entre-temps, ils se sont détachés du système ferroviaire traditionnel. Le développement des réseaux à grande vitesse s'accompagnant de dépenses colossales, il a immanquablement privé de ressources financières d'autres projets d'aménagements potentiels. Ainsi en France, le développement du TGV a entraîné un tel délabrement sur certains tronçons du réseau traditionnel qu'il a fallu introduire d'importantes limitations de vitesse à de nombreux endroits. Cela signifie pour les utilisateurs (voyageurs, donneurs d'ordres dans le cas du transport de fret) une importante perte de temps et on peut se demander dans quelle proportion cette perte équivaut à un gain de temps pour les utilisateurs des lignes à grande vitesse.

6.3

Du point de vue de la politique de renforcement de la cohésion sociale et d'intégration des régions les moins prospères, le développement et la démocratisation des lignes de chemin de fer traditionnelles s'avèrent beaucoup plus utiles que ceux des lignes à grande vitesse, qui ne font que traverser ces régions à toute allure, sans leur permettre de prendre part au trafic. Peut-être serait-il parfois judicieux de conférer davantage d'importance à la rénovation des lignes de chemin de fer traditionnelles et des infrastructures adjacentes, parallèlement à la construction de lignes à grande vitesse. La gare constitue le point de contact premier entre tous ces développements et ces rénovations, d'une part, et les voyageurs, d'autre part.

7.   Considérations relatives au développement des gares

7.1

Il existe un danger sérieux qu'au moyen d'investissements importants, des intérêts de court terme prévalent — peut-être par pure spéculation immobilière — et que disparaisse ce qui constitue la valeur ajoutée manifeste du chemin de fer pour les voyageurs et pour la ville. Dans la pratique, cela pourrait prendre la forme de la mise en vente — justifiée par le caractère déficitaire des chemins de fer — des terrains du centre ville de grande valeur, et par la construction, à la place du chemin de fer, de bureaux et de centres commerciaux. Dans cette perspective, il serait opportun de se pencher sur les considérations suivantes.

7.2

La réalisation d'un lien direct de centre ville à centre ville présente un avantage important non seulement du point de vue des liaisons ferroviaires à grande vitesse, mais aussi pour toutes les liaisons ferroviaires internationales, et donc y compris pour tous les éléments des RTE.

7.3

C'est justement dans les espaces de centre ville qu'il est justifié de mettre en place un réseau dense de lignes de transport en commun assurant une bonne liaison entre la gare ferroviaire et d'autres parties de la ville.

7.4

La gare ferroviaire constitue un centre de mobilité, un point central d'information pour les modes de transport participant au réseau de transport.

7.5

Il est judicieux de mettre également en place une liaison entre la gare de centre ville et l'aéroport de la ville concernée.

7.6

Les espaces ferroviaires ne doivent pas être valorisés en tant que tels, de manière séparée: il faut, en articulant une estimation de l'importance de ces espaces sur le plan urbain et sur le plan logistique, atteindre une valeur ajoutée à long terme qui soit maximale pour la ville.

7.7

Les expériences montrent que les frontières distinctes qui existent entre le tissu urbain et la gare ferroviaire sur le plan fonctionnel ont tendance à s'estomper progressivement, et que c'est justement en accueillant les riches fonctions de service de la ville que la gare ferroviaire se transforme en un espace public rentable et en même temps attractif.

7.8

Cela dit, les grandes gares déjà existantes ne constituent pas nécessairement des emplacements idéaux dans la perspective de la construction future de nouvelles gares ferroviaires à grande vitesse. En observant les actions qui ont été jusqu'à présent les plus couronnées de succès, on constate que c'est en construisant à l'intérieur de la ville un nouveau centre ville constituant une alternative au centre traditionnel qu'il est possible de faire le plus efficacement l'addition des énergies provenant du développement ferroviaire et de celles provenant de l'élan de développement urbain. (Il ne faut toutefois pas perdre de vue que les exemples les plus souvent cités, entre autres celui de Lille, sont tous deux particuliers et doivent être considérés comme des situations exceptionnelles pouvant difficilement être imitées).

7.9

L'examen des exemples renforce de manière générale la conclusion selon laquelle, en ce qui concerne le développement des gares de trafic international de voyageurs, l'État, les collectivités locales et entreprises pourvoyeuses de fonds peuvent, en coopération avec les compagnies ferroviaires, mettre en place des projets de développement qui, par la modernisation des gares de trafic international de voyageurs, permettent l'aboutissement d'une pluralité d'intérêts.

Bruxelles, le 14 février 2006.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  Premier paquet ferroviaire: Directive 2001/12/CE – JO L 75 du 15.3.2001, p. 1 (Avis du CESE – JO C 209 du 22.7.1999, p. 22); Directive 2001/13/CE – JO L 75 du 15.3.2001, p. 26 (Avis du CESE – JO C 209 du 22.7.1999, p. 22); Directive 2001/14/CE – JO L 75 du 15.3.2001, p. 29 (Avis du CESE – JO C 209 du 22.7.1999, p. 22).

Deuxième paquet ferroviaire: Directive 2004/51/CE – JO L 164 du 30.4.2004, p. 164 (Avis du CESE – JO C 61 du 14.3.2003, p. 131); Directive 2004/49/CE – JO L 164 du 30.4.2004, p. 44 (Avis du CESE – JO C 61 du 14.3.2003, p. 131); Règlement (CE) no881/2004 – JO L 164 du 30.4.2004, p. 1 (Avis du CESE – JO C 61 du 14.3.2003, p. 131); Directive 2004/50/CE – JO L 164 du 30.4.2004, p. 114 (Avis du CESE – JO C 61 du 14.3.2003, p. 131).

Troisième paquet ferroviaire: COM(2004) 139 final, COM(2004) 142 final, COM(2004) 143 final, COM(2004) 144 final, COM(2004) 140 final et SEC(2004) 236.

(2)  Règlement (CE) no881/2004 – JO L 164 du 30.4.2004, p. 1 (Avis du CESE – JO C 61 du 14.3.2003, p. 131).

(3)  Directive 2004/49/CE – JO L 164 du 30.4.2004, p. 44 (Avis du CESE – JO C 61 du 14.3.2003, p. 131).

(4)  Règlement (CE) no881/2004 – JO L 164 du 30.4.2004, p. 1 (Avis du CESE – JO C 61 du 14.3.2003, p. 131).

(5)  Directive 2001/12/CE – JO L 75 du 15.3.2001, p. 1 (Avis du CESE – JO C 209 du 22.7.1999, p. 22) et Directive 2004/51/CE – JO L 164 du 30.4.2004, p. 164 (Avis du CESE – JO C 61 du 14.3.2003, p. 131).

(6)  Directive 2004/50/CE – JO L 164 du 30.4.2004, p. 114 – Avis du CESE – JO C 61 du 14.3.2003, p. 131.

(7)  COM(2004) 139 final modifiant la directive 91/440/CEE.

(8)  CESE 130/2005, CESE 131/2005, CESE 119/2005, CESE 120/2005, CESE 257/2005, CESE 1426/2004, CESE 225/2005, CESE 968/2004.


11.4.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 88/13


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Conseil relative aux conditions de police sanitaire applicables aux animaux et aux produits d'aquaculture, et relative à la prévention de certaines maladies chez les animaux aquatiques et aux mesures de lutte contre ces maladies» et la «Proposition de décision du Conseil modifiant la décision 90/424/CEE relative à certaines dépenses dans le domaine vétérinaire»

(COM(2005) 362 final — 2005/0153 + 0154 CNS)

(2006/C 88/04)

Le 15 septembre 2005, le Conseil a décidé, conformément à l'article 37 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 25 janvier 2006 (rapporteur: M. Fakas).

Lors de sa 424e session plénière des 14 et 15 février 2006 (séance du 14 février), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 145 voix pour et 1 abstention.

1.   Conclusion

1.1

Le CESE considère que les initiatives proposées vont dans la bonne direction et soutient les mesures recommandées pour prévenir certaines maladies chez les animaux aquatiques et lutter contre celles-ci.

2.   Exposé des motifs

2.1

L'aquaculture est une activité très importante pour la Communauté, particulièrement dans les zones rurales et côtières. En 2004, le poisson, les mollusques et les crustacés d'aquaculture ont représenté plus de 2,5 milliards d'euros. Toutefois, les pertes financières dues aux maladies (mortalité, croissance réduite et moindre qualité) sont estimées à 20 % de la valeur de la production. La présente proposition a pour objet d'introduire des dispositions légales modernes et ciblées visant à réduire ces coûts. Une réduction des coûts de seulement 20 % permettrait déjà un gain de 100 millions d'euros par an.

2.2

La législation existante a été conçue il y a une vingtaine d'années alors que l'Union européenne ne comptait que douze États membres. Son objectif premier était de protéger la principale activité aquacole de l'époque, à savoir l'élevage des salmonidés (truites et saumons) et l'ostréiculture. Il est aujourd'hui nécessaire d'actualiser cette législation pour couvrir l'éventail plus étendu des pratiques et des espèces en présence dans le secteur aquacole de l'Union européenne élargie et prendre en compte l'importante évolution de ce secteur, l'expérience acquise en quinze années d'application de la législation existante ainsi que les avancées scientifiques réalisées dans ce domaine. Il est en outre nécessaire d'actualiser ces dispositions de manière à les mettre en conformité avec les normes et les accords internationaux (OMC/MSP et OIE, par exemple).

3.   Cadre général

3.1

La proposition à l'examen prévoit l'abrogation de la réglementation primaire existante (directives 91/67/CEE, 93/53/CEE et 95/70/CE du Conseil) et le remplacement de ces trois directives par une directive unique. L'objet de la nouvelle directive est d'actualiser, de refondre et de consolider les règles de police sanitaire applicables aux échanges de produits d'aquaculture, y compris en matière de prévention des maladies et de lutte contre celles-ci, de manière à améliorer la compétitivité des producteurs aquacoles de l'Union européenne.

3.2

La proposition comprend des exigences générales destinées aux fermes aquacoles et aux établissements de transformation, telles que les agréments, ainsi que des dispositions relatives à leur fonctionnement.

3.3

Elle prévoit des conditions de police sanitaire régissant la mise sur le marché d'animaux et de produits d'aquaculture ainsi que l'introduction dans la Communauté d'animaux d'aquaculture originaires de pays tiers.

3.4

Elle propose des dispositions relatives à la notification de certaines maladies, et aux mesures de lutte contre ces celles-ci, ainsi que des dispositions relatives à la déclaration du statut «indemne de maladie».

3.5

Elle prévoit également des exigences destinées aux autorités compétentes des États membres et aux laboratoires et contient des recommandations présentées dans les annexes.

3.6

La base juridique de la proposition est l'article 37 du traité. Elle respecte le principe de proportionnalité et précise que l'incidence sur le budget communautaire devrait être limitée.

3.7

L'incidence financière de la proposition concernera essentiellement deux secteurs:

a)

la compensation financière pour les mesures de lutte contre les maladies,

b)

la mise en œuvre du droit primaire, ainsi que l'adoption et la transposition du droit dérivé.

3.8

La deuxième proposition de décision du Conseil envisage les modifications nécessaires des procédures actuelles régissant la contribution financière de la Communauté aux mesures vétérinaires pour les animaux d'aquaculture établies par la décision 90/424/CEE du Conseil, afin de tenir compte des propositions en vue d'une nouvelle directive zoosanitaire pour les animaux aquatiques et du Fonds européen pour la pêche.

3.9

La deuxième proposition permet aux États membres d'utiliser le budget constitué dans le cadre des programmes opérationnels conformément au titre III du Fonds européen pour la pêche pour la lutte et l'éradication de certaines maladies des animaux d'aquaculture.

3.10

Les procédures relatives à l'aide financière doivent être adaptées aux procédures actuelles régissant la lutte et l'éradication des maladies chez les animaux terrestres.

3.11

La deuxième proposition respecte elle aussi le principe de proportionnalité et a pour base juridique l'article 37 du traité.

3.12

Conformément à la deuxième proposition, une contribution financière pour l'éradication des maladies des animaux aquatiques doit être mise à disposition par la Communauté dans le cadre du Fonds européen pour la pêche (COM (2004) 497, article 32). Il est toutefois difficile d'estimer l'impact de la proposition sur le Fonds européen pour la pêche, dans la mesure où il dépendra de la taille des fermes concernées, de la valeur des animaux élevés dans ces fermes, etc.

4.   Observations générales

4.1

La législation communautaire existante ne concerne que l'élevage du saumon, de la truite et des huîtres. Depuis l'adoption de cette législation, le secteur de l'aquaculture s'est considérablement développé (élevage des crustacés, des moules, des palourdes, etc.). Par conséquent, le CESE est d'avis qu'il est utile et nécessaire de modifier la législation de manière à ce qu'elle couvre d'autres animaux de l'aquaculture.

4.2

Le CESE accueille favorablement ces propositions, qui représentent un important effort en matière de prévention et de lutte contre certaines maladies chez les animaux aquatiques.

4.3

De l'avis du CESE, afin d'assurer le développement rationnel du secteur de l'aquaculture et d'accroître la productivité, il importe de fixer des règles de police sanitaire au niveau communautaire. Ces règles sont nécessaires pour contribuer à l'achèvement du marché intérieur et éviter la propagation des maladies infectieuses. Il importe que la législation puisse prendre en compte l'évolution constante et la diversité du secteur aquacole.

4.4

Le CESE considère que les mesures communautaires devraient être accompagnées d'efforts visant à accroître le niveau de sensibilisation et de préparation des autorités compétentes des États membres en ce qui concerne la prévention et l'éradication des maladies des animaux aquatiques et la lutte contre ces maladies.

4.5

L'actuel système communautaire d'autorisation est particulièrement strict, dans la mesure où il définit des exigences plus sévères que ne le font les concurrents de l'UE, ce qui a des conséquences sur la viabilité du secteur. Le CESE considère que les exigences sont couvertes par le registre des exploitations proposé qui comporte des informations détaillées sur le système de production de chaque exploitation, le responsable de l'exploitation aquacole et l'agrément existant.

4.6

Il est indispensable d'empêcher la propagation des maladies des animaux aquatiques au niveau communautaire. Il importe donc d'établir des dispositions de police sanitaire harmonisées relatives à la mise sur le marché des produits de l'aquaculture ainsi qu'un inventaire des maladies et des espèces sensibles à celles-ci.

4.7

Pour garantir une détection précoce de toute maladie éventuelle des animaux aquatiques, le CESE considère qu'il est indispensable d'exiger des personnes en contact avec des animaux aquatiques des espèces sensibles la notification de tout cas suspect aux autorités compétentes.

4.8

Il convient d'effectuer des inspections de routine, hors routine et d'urgence dans les États membres afin de veiller à ce que les responsables d'exploitations aquacoles connaissent et appliquent les règles générales de lutte contre les maladies.

4.9

Les connaissances dans le domaine des maladies inconnues des animaux aquatiques progressent sans cesse. Aussi le CESE juge-t-il essentiel que l'ensemble des États membres et la Commission soient informés de la présence réelle et suspectée d'un foyer ainsi que des mesures de lutte adoptées.

4.10

Afin de préserver l'état de santé des animaux aquatiques dans la Communauté, il est nécessaire de s'assurer que les lots d'animaux aquatiques vivants transitant par la Communauté répondent aux conditions de police sanitaire applicables. Il est également nécessaire de veiller à ce que les animaux et produits de l'aquaculture importés de pays tiers ne présentent pas de maladies infectieuses.

5.   Observations spécifiques

5.1

Le CESE entérine la thèse qui consiste à ne pas définir de dispositions spécifiques applicables à la mise sur le marché d'animaux aquatiques ornementaux et autres, qui sont placés dans des conditions contrôlées (aquariums ou bassins). En revanche, si ces animaux ne sont pas détenus dans des systèmes clos ou des aquariums ou s'ils sont en contact direct avec les eaux communautaires, le CESE considère que les dispositions générales de police sanitaire de la directive à l'examen doivent s'appliquer. Ceci est particulièrement vrai pour les populations de carpes (Cyprinidae), étant donné que des poissons ornementaux très appréciés tels que la carpe commune sont sensibles à certaines maladies.

5.2

Les États membres doivent déterminer le régime de sanctions applicables en cas de violation des dispositions de la directive. Le CESE est d'avis que ces sanctions doivent être effectives.

5.3

Le paragraphe 2 de l'article 5 dispose qu'avant tout refus d'agrément d'une exploitation aquacole telle que définie à l'article 4, un État membre doit tenir compte des mesures d'atténuation des risques, et notamment de la possibilité éventuelle de déplacer l'activité concernée. Toutefois, le CESE est conscient qu'il n'est souvent pas possible de relocaliser l'activité concernée lorsque les bassins de poissons sauvages contiennent des agents pathogènes. Le CESE considère que le risque de ces maladies peut être atténué en pratiquant une bonne gestion des bassins d'élevage fermés et sous contrôle, en observant une bonne hygiène et en appliquant le système de contrôle de la santé des animaux et toutes les autres mesures proposées par la directive à l'examen.

Bruxelles, le 14 février 2006.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


11.4.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 88/15


Avis du Comité économique et social européen sur les

«Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil portant création du Fonds européen pour les réfugiés pour la période 2008-2013 dans le cadre du programme général “Solidarité et gestion des flux migratoires”»

«Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil portant création du Fonds pour les frontières extérieures pour la période 2007-2013 dans le cadre du programme général “Solidarité et gestion des flux migratoires”»

«Proposition de décision du Conseil portant création du Fonds européen d'intégration des ressortissants de pays tiers pour la période 2007-2013 dans le cadre du programme général “Solidarité et gestion des flux migratoires”»

«Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil portant création du Fonds européen pour le retour pour la période 2008-2013 dans le cadre du programme général “Solidarité et gestion des flux migratoires”»

(COM(2005) 123 final — 2005/0046 (COD) — 2005/0047 (COD) — 2005/0048 (CNS) — 2005/0049 (COD))

(2006/C 88/05)

Le 20 juillet 2005, le Conseil a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur les propositions susmentionnées.

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 24 janvier 2006 (rapporteuse: Mme LE NOUAIL-MARLIÈRE).

Lors de sa 424e session plénière des 14 et 15 février 2006 (séance du 14 février), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 125 voix pour, 2 voix contre et 11 abstentions.

1.   Projet de la Commission et objectifs de la Communication

1.1

Cette communication établissant un programme cadre «Solidarité et gestion des flux migratoires» propose dans un ensemble d'autres propositions (1), un programme d'application qui met en œuvre les «Perspectives financières 2007/2013» (2) et les «Défis politiques et moyens budgétaires de l'Union élargie 2007/2013» (3); avis du CESE, rapporteur M. DASSIS (4), qui proposaient de doter l'espace européen de liberté, de sécurité et de justice de crédits d'engagements (Ligne 3, Citoyenneté, liberté, sécurité et justice) pour un montant global de 1.381 millions d'euros en 2006 devant progressivement atteindre le montant de 3.620 millions d'euros en 2013.

1.2

L'ensemble devrait viser à promouvoir avec le même degré d'intensité les trois objectifs que sont la liberté, la sécurité et la justice, dans le cadre d'une approche équilibrée, fondée théoriquement sur les principes démocratiques, le respect des libertés et des droits fondamentaux.

1.3

Sur l'ensemble initialement proposé (9.500 millions d'euros) le montant global prévu pour le programme cadre «Solidarité et gestion des flux migratoires» était de 5.866 millions d'euros pour la période 2007-2013, dont 1.184 millions d'euros prévus pour l'asile; 759 millions d'euros pour le Fonds pour le retour; 1.771 millions d'euros pour l'intégration des ressortissants de pays tiers et enfin 2.152 millions d'euros pour la gestion des frontières extérieures. Les montants attribués aux États membres et aux actions communautaires directes (ONGs et projets) ne sont pas transférables d'un Fonds à l'autre.

1.4

Le programme cadre «Solidarité», ne comprend pas les agences et autres instruments communautaires relevant du domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice, tels que l'Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures, active dans le cadre du programme cadre proposé et celui des nouvelles perspectives financières, le système Eurodac (comparaison des empreintes digitales), le système d'information sur les visas et le système d'information Schengen II, représentant des engagements de long terme dont les actes législatifs les instituant ne prévoient pas de disposition limitant leur durée.

1.5

Le présent programme cadre vise notamment à assurer la cohérence nécessaire entre les interventions dans chaque domaine d'action, en liant les finalités politiques aux ressources disponibles. La Commission tente de simplifier et de rationaliser le soutien financier actuel. Ce programme cadre a aussi pour ambition de renforcer la transparence et une meilleure souplesse dans la fixation des priorités.

1.6

D'après ce projet, la solidarité financière de l'Union européenne devrait ainsi pouvoir contribuer à quatre piliers constituant une approche globale et équilibrée des flux migratoires:

Instaurer un système commun intégré de gestion des frontières dans le cadre des accords de Schengen pour les états membres parties à l'accord: «Fonds pour les frontières extérieures pour la période 2007/2013»;

Adopter un programme d'action européen de retours, décidé en 2002 (5): «Fonds européen pour le retour pour la période 2008/2013»;

Apporter une «réponse crédible» à l'aspect multidimensionnel de «l'intégration» des ressortissants de pays tiers: «Fonds européen d'intégration des ressortissants de pays tiers pour la période 2007/2013»;

Équilibrer les efforts des États membres pour l'accueil des réfugiés et des personnes déplacées: «Fonds européen pour les réfugiés 2008/2013».

1.7

La proposition de la Commission a fait l'objet d'une étude d'impact (6) y annexée.

2.   Observations générales

2.1

Bien que le programme en appelle à la cohérence donnée par le Sommet de Tampere et le programme de La Haye, ainsi qu'au Traité articles 62 et 63, le cadre programmatique ne s'appuie que sur peu de législation harmonisée en dépit des efforts du Conseil pour adopter quelques mesures communes, dans le cadre du programme de Tampere (7). Ainsi, le Conseil européen tenu les 4 et 5 novembre 2004 a approuvé le deuxième programme pluriannuel pour la création d'un espace commun de liberté, de sécurité et de justice, dit programme de La Haye.

2.2

Le Comité observe que malgré le «programme de La Haye» il n'existe pas à proprement dire une orientation politique commune réellement satisfaisante à ce jour. Le Comité s'est prononcé dans son avis sur la «Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européenLe programme de La Haye: Dix priorités pour les cinq prochaines annéesUn partenariat pour le renouveau européen dans le domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice»  (8), de façon détaillée sur le plan d'action de la Commission afférant au programme de La Haye. Les États membres ont des pratiques bien différentes selon leur emplacement géographique. Ils sont conduits à des orientations et des responsabilités différentes, vis-à-vis des citoyens communautaires ou des ressortissants de pays tiers et entre États et à des juxtapositions de politiques parfois contraires ou antagonistes à l'intérieur de la Communauté, selon qu'ils sont ou non ou partiellement parties aux accords de Schengen (I et II), de Dublin I et II (9) ou encore aux programmes communautaires pour des solutions durables de réinstallation des réfugiés (10) pour exemple. L'expérience montre que pour conduire des politiques visant à améliorer les pratiques d'une part, équilibrer et intégrer les responsabilités vers un objectif commun d'autre part, il ne suffit pas d'instituer des Fonds et des instruments financiers.

2.3

Dans le domaine de l'asile politique ou humanitaire, l'établissement d'une liste des états tiers sûrs restant sujette à controverse en particulier de la part d'ONGs reconnues dans le domaine des droits de l'homme et actives dans l'aide humanitaire, le Comité n'estime pas pertinent de traiter l'asile et l'immigration dans le même cadre, alors que les contraintes et les marges d'action sont sensiblement différentes.

2.4

Bien que le Comité soit conscient de l'objectif global et holistique du programme, il est réservé sur la façon dont sont traités dans une même initiative la protection des frontières et l'intégration des migrants. Il considère cependant qu'il est nécessaire de gérer ces Fonds d'une manière coordonnée et cohérente, et ce pour les raisons suivantes:

Premièrement, les objectifs inhérents à ces deux programmes ne sont pas les mêmes. De plus, les acteurs de leur mise en œuvre (pouvoirs publics, services publics et associations d'aide aux migrants, etc.) c'est-à-dire les destinataires de Fonds, sont différents. Sauf à considérer que les États ont l'intention de confier la surveillance des frontières à des agences privées en délégation de service public, ce qui supposerait un débat démocratique approprié, ils ne devraient donc pas être traités de la même façon.

Deuxièmement, l'intégration des migrants comprend tout à la fois des volets impliquant les États dans leur fonction d'autorité publique, mais aussi des volets civils mis en œuvre par certains acteurs de la société civile organisée (associations), et enfin les citoyens eux-mêmes. Ces différents niveaux d'intervention, et de bénéficiaires des Fonds institués par le programme cadre nécessitent des procédures, des traitements et des garanties différenciées.

D'autre part, toujours en prenant en compte l'objectif global, le Comité insiste sur le fait que ces deux programmes doivent être suffisamment clairs pour éviter l'amalgame qui pourrait s'ensuivre.

3.   Observations spécifiques

3.1

Le Comité soulève que le Projet de Communication ne peut être le même avec ou sans ratification du Traité Constitutionnel et sans Charte des Droits fondamentaux intégrée au Traité.

3.2

Le Comité se prononce en faveur de l'institution de Fonds solidaires, mais incite la Commission à l'adapter en fonction du programme de La Haye, en tenant compte de l'avis du CESE (11).

4.   Cohérence du Projet

Quant aux objectifs proposés par la Communication, le Comité s'interroge de la cohérence entre les obligations découlant du droit international pour les États membres le degré d'harmonisation de la législation européenne et le programme cadre proposé.

Certains amalgames rendent le projet de Communication et de programme cadre fragiles.

4.1   Sur la Communication

4.1.1

Asile, Immigration, intégration, Aspect multidimensionnel, réponse crédible, durable font partie des objectifs poursuivis. Or pour compléter l'approche économique de la Commission dans le livre vert sur une approche communautaire de la migration (12), il conviendrait que la Communication approfondisse les aspects de droits individuels et universels en matière de migrations, en établissant des liens avec le programme général «Droits fondamentaux et justice», et elle devrait s'appuyer sur la Convention internationale de protection des migrants et de leurs familles (13).

Le Comité incite aussi la Commission à s'appuyer davantage sur le rapport d'évaluation établi tous les 4 ans par le Comité indépendant d'experts juristes et soumis au Comité intergouvernemental qui constitue le contrôle institutionnel de la Charte Sociale révisée du Conseil de l'Europe et en tenir compte dans ses propositions complémentaires.

Le Comité note que la plus grande part de ces Fonds structurels est destinée à une gestion déléguée aux États membres dans le cadre de leurs prérogatives, en vertu des principes de subsidiarité. Concernant le principe de proportionnalité et comme déjà spécifié dans son avis d'évaluation du programme de La Haye et du plan d'action, le Comité estime que «le programme de La Haye donne clairement la priorité à la mise en place de mécanismes d'évaluation sur les politiques existantes. Il faut procéder à une étude détaillée et indépendante de l'efficacité, la valeur ajoutée, la proportionnalité et la légitimité (en terme de respect des droits de l'homme et des libertés publiques) de ces initiatives avant de les adopter» (14).

Le Comité est également soucieux de la suite qui sera donnée à l'audition des ONGs et associations de la Société civile organisée et des partenaires sociaux du 14 juin 2005, concernant le livre vert précité, au cours de laquelle un grand nombre d'organisation se sont exprimé contre l'approche économique primant sur les droits des personnes et sur la nécessité d'appréhender les conséquences humaines, culturelles, sociales et juridiques dans toutes leurs dimensions pour l'ensemble des populations accueillies et d'accueil.

4.1.2

Enfin, le Comité aurait aimé retrouver dans l'initiative de la Commission les suggestions dont il a fait part dans ses avis antérieurs.

4.1.3

Le Comité souligne que les questions liées aux migrations des personnes ne devraient pas être traitées comme a priori un problème. L'immigration d'aujourd'hui donne lieu à une nouvelle réalité politique, économique et sociale qui s'ajoute à l'immigration plus ancienne que la société dans son ensemble doit porter en tenant compte du droit des personnes de choisir leur destin dans le cadre juridique international, européen et national adopté par les États membres et par lequel ils sont liés. (15)

4.1.4

Les retours retenus comme «solution» par la Commission ne devraient pas mettre en opposition les droits de supposés «légaux» et supposés «irréguliers». L'irrégularité n'est pas un état permanent délibérément choisi pour prétendument bénéficier d'un statut hypothétique. Il existe plusieurs et diverses causes d'irrégularité: Le Comité a produit plusieurs avis dans lesquels il a tenté d'éclairer les institutions européennes sur la réalité des enjeux économiques et sur celle des victimes (16).Toute politique de retour doit respecter les droits de l'homme et les libertés fondamentales. .

4.1.5

La «gestion» des frontières et des visas ne devrait pas primer sur les aspects humanitaire, social, politique, juridique.

Des causes profondément inscrites dans la durée comme par exemple la sécheresse qui sévit en Afrique subsaharienne demandent d'autres moyens en matière de développement, de coopération et de lutte contre le réchauffement climatique que 750 millions d'euros prévus pour des retours forcés et 2,15 milliards d'euros pour la gestion des frontières extérieures dans le domaine consulaire. Elle nécessite une appréciation politique et un ferme engagement dans l'action de long terme. Alors que la lutte contre la faim et la sécheresse ne figure malheureusement même pas aux objectifs du millénaire, le Comité incite la Commission et le Conseil à se préoccuper activement de cette question et:

1.

à engager une politique de réparation des effets (aide au développement local rural) en particulier dans le cadre approprié de l'Accord de Cotonou et de la politique de développement et de coopération;

2.

à formuler d'éventuelles nouvelles propositions et soutenir des propositions existantes dans le cadre international de coopération en liant la lutte contre un environnement dégradé et le développement durable.

Le Comité ne considère pas le report sur les pays de transit de la responsabilité du refoulement comme une solution appropriée ou acceptable. Il estime nécessaire d'améliorer la coordination entre d'une part les institutions de l'Union européenne et d'autre part les autorités de pays tiers d'où proviennent les immigrants. La question de l'immigration devrait aussi faire partie des relations extérieures de l'Union.

4.1.6

La libre circulation des personnes ne peut se «gérer», pour reprendre l'intitulé de la Communication, de la même manière que celle des finances ou des services.

4.1.7

Les quatre instruments financiers proposés par la Commission pour appuyer l'action des États membres en matière d'immigration devraient se traduire par l'application d'une politique coordonnée dans ce domaine, qui inclue, outre une gestion adéquate des flux migratoires, l'intégration de ressortissants de pays tiers résidant légalement dans les États membres aux mêmes conditions que les ressortissants nationaux.

Le Comité prend ici l'occasion de dénoncer le dumping social qui peut découler de la prestation de services transfrontaliers étant donné qu'elle constitue la principale voie d'immigration légale, ce problème concerne aussi les travailleurs des nouveaux pays membres de l'Union européenne du fait des normes transitoires les concernant.

Le travail des partenaires sociaux et des organisations de la société civile organisée joue à cet égard un rôle essentiel, qui doit être soutenu et considéré.

Les «mouvements secondaires irréguliers»: Du fait d'une réglementation très restrictive, et le Comité le rappelle, de la directive «Admission» non adoptée par le Conseil en 2002, malgré le soutien du Comité et de celui du Parlement, les mouvements secondaires «réguliers» sont en droit et en fait ceux des résidents de plus de 5 ans et qui font une deuxième demande de séjour dans un deuxième État membre ou des résidents de moins de 5 ans qui font une demande de séjour de courte durée dans un 2e État membre. Le Comité suppose donc que par «mouvements secondaires irréguliers» la Communication veut parler des déplacements de personnes en séjour irrégulier et des demandeurs d'Asile déboutés dans un premier pays d'accueil. Or, ceux-ci ont droit non seulement de déposer une demande ce qui ne leur est pas toujours permis dans tous les États membres, mais aussi à un examen individuel et à un recours judiciaire suspensif. Ces recours sont inexistants, rendus impossibles, ou non suspensifs dans certains États membres. Le Comité comprend que la mise en œuvre des accords de Dublin et Dublin II sur lequel il s'est exprimé doit pouvoir être facilitée par un instrument financier. Dans cette optique, même si la Commission doit garantir une distribution équitable des fonds et contribuer à une juste répartition des responsabilités, elle devrait accorder une attention particulière aux états membres les plus concernés par la pression migratoire en tenant compte non seulement de leur position frontalière mais également de leur taille (exemple: Chypre, Malte …) et de leur capacité générale d'accueil (Asile, réinstallation, immigration) et des meilleures pratiques en matière de respect de leurs obligations. La Communication ne fixe pas d'orientations suffisamment précises pour faire partager équitablement les responsabilités. Elle ne devrait pas octroyer de soutien financier aux états membres qui ferment ou réduisent la capacité de leurs centres d'accueil.

4.1.8

«Gestion intégrée» des retours: Le Comité dans son approche strictement consultative d'Assemblée représentant la société civile soulève qu'il s'agit d'êtres humains et de personnes individuelles. Il s'agirait plutôt de développer des coopérations durables qui satisfassent des objectifs pacifiques et de définir quels critères seraient retenus pour déterminer du degré de volontariat.

4.1.9

Le Comité est surpris de lire dans le texte proposé, que dans le cadre des objectifs spécifiques définis pour le Fonds européen pour le retour les actions pourraient «veiller à apporter une aide spécifique aux catégories vulnérables, comme les enfants, et les personnes victimes de la torture, d'un viol ou d'une autre forme grave de violence morale, physique ou sexuelle». Il faut toutefois rappeler que la Convention de Genève stipule les procédures, examens individuels et recours auxquels ont droit ces personnes. La législation européenne ayant adopté la directive «qualification et statut» (17), et les États membres étant partis à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés publiques, le Comité imagine mal que des personnes dans une telle situation puissent entrer dans le champ des «retours volontaires».

4.1.10

La Commission devrait réfléchir aux critères de réussite d'un projet de retour volontaire. Le Comité comprend qu'il ne s'agit pas ici de coopération ni de développement de projets personnels d'individus mais du rapatriement après décision judiciaire ou administrative et de décision de retour et d'éloignement. Le Comité défend la nécessité de respecter et de soutenir la Convention européenne des droits de l'homme et la Charte des droits fondamentaux et d'en suivre les principes applicables: aucune personne ne devrait être forcée au retour lorsque ce retour met sa vie en danger. A cet égard, il faudrait privilégier les moyens d'accès à la justice. Les recours devraient toujours être suspensifs. Enfin les retours ne devraient intervenir que de manière exceptionnelle en accord avec l'approche de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du Conseil de l'Europe. Ce n'est pas ce que laissent entendre certains termes de la proposition (chapitre 5.1.3 des dispositions financières par ex.).

La Commission devrait proposer des dispositions plus détaillées de mise en œuvre qui garantissent conseil, assistance matérielle et autres formes appropriées de soutien au retour. Elle devrait également proposer des dispositions incluant les modalités de suivi et de contrôle indépendants et crédibles en matière de sécurité, de protection et de bien être des personnes rapatriées.

5.   Conclusion

Un projet européen véritablement démocratique remis dans les mains des citoyens, conforme aux procédures budgétaires des institutions et de l'Union européenne et fondé sur des droits:

Le Comité soutient la proposition d'instituer un Fonds européen d'intégration des ressortissants de pays tiers pour la période 2007-2013, un Fonds européen pour les réfugiés dans le prolongement du Fonds existant, un Fonds pour les frontières extérieures,

Renvoie le Conseil à examiner et adopter ensemble la proposition de Communication définissant le cadre du programme général «Solidarité et gestion des flux migratoires» et les décisions portant création de Fonds spécifiques pour la mise en œuvre du programme général,

Invite la Commission à tenir compte dans son plan d'action afférant au programme de La Haye, des recommandations du CESE,

Recommande au Conseil et à la Commission d'assurer la transparence du fonctionnement de ces nouveaux Fonds structurels en donnant une cohérence explicite entre le programme de La Haye et la Communication à l'examen,

Prendre des dispositions concrètes dans les décisions d'instituer ces différents Fonds pour que les opérateurs non étatiques soient associés le plus en amont possible au cadre annuel et pluriannuel d'orientations définies par les États membres et par la Commission elle-même.

Bruxelles, le 14 février 2006.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  COM(2005) 122, COM(2005) 124.

(2)  COM(2004) 487 du 14.07.2004 (au demeurant non adoptées par le Conseil).

(3)  COM(2004) 101 du 10.02.2004.

(4)  Avis du CESE du 15.09.2004 sur la «Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen – Construire notre avenir commun: défis politiques et moyens budgétaires de l'Union élargie 2007-2013» (COM(2004) 101 final) (JO C 74/2005).

(5)  Conseil du 28 novembre 2002.

(6)  SEC 2005 435 du 06.04.2005.

(7)  Conseil européen de Tampere - Conclusions de la 15-16 octobre 1999.

(8)  Avis du CESE du 15.12.2005«Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen – Programme de la Haye: Dix priorités pour les cinq prochaines années – Un partenariat pour le renouveau européen dans le domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice» (CESE 1504/2005) (Rapporteur, M. PARIZA CASTAÑOS).

(9)  Avis du CESE du 20.03.2002«Proposition de règlement du Conseil établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des États membres par un ressortissant d'un pays tiers», Rapporteur: M. SHARMA (JO 125 du 27.05.2002).

(10)  Avis du CESE du 15.12.2004 sur la «Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen sur la gestion de l'entrée gérée dans l'Union européenne de personnes ayant besoin d'une protection internationale et sur le renforcement des capacités de protection des régions d'origine» - «Améliorer l'accès à des solutions durables», rapporteuse: Mme LE NOUAIL-MARLIÈRE (JO C 157 du 28.06.2005).

(11)  Voir footnote 8.

(12)  Avis du CESE du 09.06.2005«Livre vert»«Sur une approche communautaire de la gestion des migrations économiques» (COM(2004) 811 final), rapporteur: M. PARIZA CASTAÑOS (JO C 286 du 17.11.2005).

(13)  Avis d'initiative du CESE du 30.06.2004 sur «La Convention internationale des travailleurs migrants», rapporteur: M. PARIZA CASTAÑOS (JO C 302 du 07.12.2004 ).

(14)  Pararagraph 3.2.20 de l'avis du CESE du 15.12.2005«Communication de la Commission au Conseil et au Parlement Européen – Programme de La Haye: Dix priorités pour les cinq prochaines années – Un partenariat pour le renouveau européen dans le domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice» (CESE 1504/2005) (Rapporteur, M. PARIZA CASTAÑOS)

(15)  Ce cadre juridique inclut en particulier la Charte internationale des droits de l'Homme (Déclaration universelle des droits de l'homme) en ses articles 13 et 14, les Pactes internationaux et leurs protocoles régionaux des droits civils, politiques de 1966, et des droits économiques, sociaux et culturels de 1966 également, qui sont la traduction en droit secondaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme, le Traité de l'UE en son article 6.1 et 6.2 (Version consolidée de Nice: article 6.1: «L'Union est fondée sur les principes de la liberté, de la démocratie, du respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que de l'État de droit, principes qui sont communs aux États membres»), l'Accord de Cotonou, article 13, et la Convention de Genève de 1951, relative au droit d'asile.

(16)  Avis du CESE du 18.09.2002 sur le «Livre vert relatif à une politique communautaire en matière de retour des personnes en séjour irrégulier» (rapporteur: M. PARIZA CASTAÑOS - JO C 61 du 14.03.2003) et avis du CESE du 11.12.2002 sur la «Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen relative à une politique communautaire en matière de retour des personnes en séjour irrégulier» (rapporteur: M. PARIZA CASTAÑOS) (JO C 85 du 08.04.2003).

(17)  La Convention de Genève est claire à cet égard: («Aux fins de ladite Convention, le statut de réfugié sera accordé à toute personne craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n'a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner.» ), tout comme la directive 2004/83/CE du Conseil, du 29 avril 2004, concernant les normes minimales relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir prétendre au statut de réfugié ou les personnes qui, pour d'autres raisons, ont besoin d'une protection internationale, et relatives au contenu de ces statuts.


11.4.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 88/20


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de recommandation du Parlement européen et du Conseil relative à la mobilité transnationale dans la Communauté à des fins d'éducation et de formation: Charte européenne de qualité pour la mobilité»

(COM(2005) 450 final — 2005/0179 (COD))

(2006/C 88/06)

Le 10 octobre 2005, le Conseil de l'Union européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux en la matière, a adopté son avis le 24 janvier 2006 (rapporteur: M. Tomasz CZAJKOWSKI).

Lors de sa 424e session plénière des 14 et 15 février 2006 (séance du 14 février) le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 144 voix pour et 3 abstentions.

1.   Recommandations

1.1

Le CESE propose qu'une attention particulière soit accordée aux aspects suivants:

l'information sur les programmes qui est dispensée par les États membres, au niveau national et local,

les données fournies sur l'égalité des chances entre candidats,

la communication à destination des participants aux programmes, en ce qui concerne les assurances et les accords internationaux, ainsi que la couverture assurée dans l'État hôte,

les procédures appliquées aux participants potentiels, qui doivent être claires, transparentes et précises,

une enquête qui serait menée auprès des participants afin qu'à l'issue d'un programme, les personnes qui l'ont suivi puissent en donner une image et une appréciation claires. Cette démarche servira à améliorer encore la qualité de l'action et à augmenter la vitesse de réaction de la Commission et des organisations nationales qui en assument la responsabilité,

l'accent particulier qu'il convient de mettre sur la préparation linguistique des participants à un programme, afin qu'ils puissent exploiter pleinement le parcours d'apprentissage qui leur est présenté,

le rôle des tuteurs qui fourniront une assistance aux participants à l'étranger et veilleront sur eux, afin qu'il leur soit plus facile de se familiariser avec des conditions nouvelles et de s'y adapter,

une délimitation précise du domaine de responsabilité de chacun des acteurs du programme, de manière à pouvoir éviter que ne surgissent ultérieurement, par exemple, des revendications ou des malentendus entre les organisations qui délèguent les participants, celles qui les accueillent, etc.,

une coordination qui, en matière de politique de la mobilité soit plus poussée au niveau européen, plutôt que de s'effectuer à celui de chaque État membre, permettant ainsi d'atteindre les objectifs de la Commission et de concourir à la réalisation effective des résolutions de la stratégie de Lisbonne.

2.   Observations générales

2.1

Le CESE accueille avec satisfaction la proposition de la Commission sur une recommandation du Parlement européen et du Conseil relative à la mobilité transnationale dans la Communauté à des fins d'éducation et de formation: Charte européenne de qualité pour la mobilité (1). La mobilité des habitants de l'Union européenne et la proposition visant à supprimer toute restriction à la mobilité entre ses États membres permettront de renforcer sa compétitivité, dans la logique des dispositions de la stratégie de Lisbonne.

2.2

Le CESE se réjouit que les États membres, le Parlement européen, le Conseil de l'Union européenne et la Commission européenne s'attachent à lever les obstacles à la mobilité dans les domaines de l'éducation et de la formation (2).

2.3

Ces dernières décennies s'est développée sur le territoire de l'UE une mobilité à des fins de formation qui a offert aux participants des différents programmes la possibilité de s'enrichir de nouvelles expériences et d'abattre les barrières linguistiques et culturelles en Europe.

2.4

Le CESE fait remarquer que grâce aux programmes d'éducation et d'échanges internationaux proposés par la Commission aux États membres, on a enregistré depuis l'an 2000 un triplement du nombre de personnes partant à l'étranger à des fins d'éducation.

2.5

Le CESE considère en outre que ces programmes constituent autant d'occasions de construire une société européenne de tolérance, ouverte aux personnes différentes quant à leur confession, leur origine ethnique, leur orientation sexuelle, etc.

2.6

Le CESE se dit hautement favorable à la nouvelle génération de programmes de formation que la Commission a proposés en 2004. Au vu du grand intérêt manifesté pour y participer, il est permis de considérer que la jeunesse met en œuvre, de manière indirecte, les résolutions de la stratégie de Lisbonne.

3.   Observations spécifiques

3.1

Le CESE estime que les États membres devraient veiller à la coordination des différents programmes, au niveau tant national que local.

3.2

Il conviendrait que les institutions, les organisations, les établissements d'enseignement, les écoles et les responsables de la coordination des programmes de mobilité déploient tous les efforts pour assurer la transparence des procédures de sélection et de qualification appliquées aux candidats. Dans la pratique actuellement constatée, les personnes décidant des candidatures qui seront retenues pour une participation à des programmes d'échanges internationaux y voient une récompense accordée pour la réalisation de tel ou tel objectif.

3.3

Le CESE préconise en outre des actions d'information étendues, grâce auxquelles il soit possible d'atteindre le plus grand nombre possible de participants potentiels. Il y a lieu de s'employer à tout prix à informer le pourcentage le plus élevé de la jeunesse européenne sur les principes des programmes et les possibilités qui s'y rattachent.

3.4

Le CESE estime que les États membres doivent garantir la reconnaissance de l'expérience et des qualifications que les participants auront acquises durant le déroulement de ces programmes.

3.5

Il convient de porter un jugement très positif sur le soutien à la mobilité tant à des fins de formation professionnelle que pour les programmes destinés aux volontaires. Ces actions contribueront sans aucun doute au développement de la carrière des travailleurs et faciliteront le processus de leur adaptation à l'emploi dans un environnement international.

3.6

Les recommandations que la «Charte européenne de qualité pour la mobilité» formule en matière d'éducation et de formation sont déjà appliquées par certains États membres, dans lesquels la transposition des différentes étapes du processus de Bologne touche à sa fin. Les principes et les actions qui sont avancés dans le cadre de la Charte doivent être reconnus comme une initiative positive, visant à améliorer l'utilisation des programmes proposés par la Commission.

3.7

Il y a lieu de noter que la proposition de la Commission ne reprend que les éléments susceptibles d'être adoptés pour avoir un effet bénéfique au niveau européen.

3.8

Un des aspects positifs de la recommandation de la Commission qui est commentée dans le présent avis tient à ce qu'elle n'impose pas de charges financières supplémentaires liées à la coordination, si bien qu'il n'existe aucun obstacle qui empêcherait de mettre en œuvre les mesures préconisées.

3.9

L'adoption de la «Charte européenne de qualité pour la mobilité» reposant sur une base volontaire, le risque existe que les États membres cherchent à obtenir sur telle ou telle de ses prescriptions des accommodements qui, à leur tour, peuvent influer sur l'efficacité de la transposition de ses principes et provoquer des retards dans sa mise en œuvre au niveau national.

3.10

Le CESE souhaite également faire état de signaux qui, émanant d'associations de citoyens, relèvent des situations dans lesquelles des organisations hôtes ou invitantes ne sont pas réellement préparées à réaliser les programmes, avec l'incidence négative qui en découle lorsque les participants à ces derniers doivent formuler une appréciation finale à leur propos.

3.11

Le CESE estime que la Commission devrait recommander une date d'entrée en vigueur de la Charte, afin d'inciter, par ce fait même, les États membres à agir.

Bruxelles, le 14 février 2006.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  COM (2005) 450 final, du 23 septembre 2005.

(2)  Rapport du Parlement européen sur «L'éducation, pierre angulaire du processus de Lisbonne (2004/2272(INI)», rapporteur: M. Guy BONO, 19 juillet 2005).

Résolution du Conseil et des représentants des gouvernements des États membres réunis au sein du Conseil, du 14 décembre 2000, portant plan d'action pour la mobilité, réunion du Conseil européen des 7, 8 et 9 décembre 2000 à Nice.


11.4.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 88/22


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions sur la mise en œuvre, les résultats et l'évaluation globale de l'année européenne des personnes handicapées 2003»

(COM(2005) final 486)

(2006/C 88/07)

Le 27 octobre 2005, la Commission européenne a décidé, en vertu de l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de saisir le Comité économique et social européen d'une demande d'avis sur la communication susmentionnée.

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», qui était chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 24 janvier 2006 (rapporteuse: Mme Anca).

Lors de sa 424e session plénière des 14 et 15 février 2006 (séance du 14 février), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 147 voix pour, 1 voix contre et 2 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le CESE accueille favorablement la communication comme une occasion de faire le point des réussites et des points faibles de l'AEPH 2003, d'en tirer des leçons pour la préparation d'autres Années européennes, et d'assurer un suivi des initiatives lancées pendant l'AEPH 2003.

1.2

Le CESE partage le sentiment selon lequel la réussite de l'AEPH 2003, par rapport aux Années européennes précédentes, s'explique par le fait qu'elle a été organisée à la demande des organisations de personnes handicapées elles-mêmes, et s'explique aussi par la participation de ces organisations à la planification et à la mise en œuvre de l'Année. Le CESE invite la Commission européenne et les institutions européennes à favoriser à l'avenir une démarche ascendante en ce qui concerne les préparatifs de telles initiatives.

1.3

Le CESE regrette que les informations sur les actions entreprises au niveau national et régional fassent défaut dans la communication, et estime qu'il conviendrait à l'avenir de mettre en place un cadre permettant à l'information de circuler de manière appropriée, et permettant aussi de recueillir et de partager l'information relative aux meilleures pratiques.

1.4

Les mesures prises pour améliorer en général la sensibilisation et la visibilité dans les médias ont été évaluées en termes de quantité, mais non de qualité. Le CESE invite donc la Commission européenne à aborder cette question dans le cadre d'initiatives futures.

1.5

Le CESE estime que la réussite de l'AEPH 2003 aurait dû déboucher sur des politiques et des instruments législatifs, et que la réponse politique est décevante, compte tenu des attentes suscitées par cette Année.

1.6

Le CESE invite la Commission européenne à évaluer dans son futur rapport bisannuel sur la situation des handicapés le suivi des engagements politiques pris pendant l'Année européenne, et notamment le suivi des résolutions du Conseil concernant l'emploi, l'enseignement, l'eAccessibilité et la culture, et à présenter des recommandations en vue de l'intégration des considérations relatives au handicap dans la méthode de coordination ouverte, dans le cadre de la stratégie de Lisbonne.

1.7

Le CESE regrette également le caractère limité des informations concernant les mesures prises par les États membres en vue de l'intégration des questions de handicap, et invite la Commission européenne à mettre au point un outil de collecte et d'évaluation des informations portant sur les politiques des États membres.

1.8

L'AEPH 2003 a incité le Comité à entreprendre plusieurs initiatives: création d'une task-force sur le handicap; intégration des questions de handicap dans les travaux du Comité; adoption d'avis d'initiative concernant les personnes handicapées; prise en compte des exigences d'accessibilité dans la rénovation de son nouveau siège et application des modifications apportées au Statut en ce qui concerne l'emploi des personnes handicapées.

1.9

Le CESE demande aussi d'une part, que l'intégration des questions de handicap passe dans la pratique pour toutes les politiques de l'UE, et d'autre part, que se construise un dialogue structuré avec les organisations de personnes handicapées, notamment en ce qui concerne l'élaboration de la législation relative au marché intérieur.

2.   Introduction

2.1

Le CESE a pris connaissance avec grand intérêt de la communication de la Commission européenne sur la mise en œuvre, les résultats et l'évaluation globale de l'Année européenne des personnes handicapées 2003.

2.2

L'Année européenne des personnes handicapées a été officiellement approuvée par le Conseil de l'UE le 3 décembre 2001 (1). La campagne a duré, en fait, près d'une année et demie à compter du début des travaux préparatoires au milieu de l'année 2002, et a disposé d'un budget limité alloué par l'UE, qui était d'environ 12 millions d'euros.

2.3

Les objectifs principaux de l'Année étaient de renforcer la sensibilisation aux droits des personnes handicapées et d'encourager la réflexion et la discussion sur les mesures nécessaires pour promouvoir l'égalité des chances et combattre de nombreuses formes de discrimination auxquelles se trouvent confrontées les personnes handicapées en Europe. Cette Année avait également pour but de promouvoir et de renforcer l'échange de bonnes pratiques et de stratégies conçues au niveau local, national et européen, ainsi que d'améliorer la communication concernant le handicap et de promouvoir une image positive des personnes handicapées.

2.4

La Commission européenne souligne que l'Année a été le fruit d'un processus de partenariat entre l'UE, les États membres, et les organisations de personnes handicapées, parmi lesquelles tout particulièrement le Forum européen des personnes handicapées, ainsi que d'autres parties concernées de la société civile.

2.5

Au niveau européen, la Commission européenne a déployé un certain nombre d'activités telles qu'une campagne de sensibilisation dont le slogan était «Tous à bord» et pour laquelle un autobus a fait le tour de l'Europe. Des fonds ont été mobilisés pour financer des programmes dans le domaine de la jeunesse, de l'enseignement et de la culture, ainsi que des initiatives dans le domaine de la recherche et de la société de l'information. En outre, plusieurs institutions de l'UE, telles que le Parlement européen, le Comité des régions et le Comité économique et social européen, ont lancé des initiatives spécifiques dans le cadre de l'AEPH 2003.

2.6

Les initiatives de niveau national et régional ont privilégié l'amélioration de la sensibilisation aux droits, l'accessibilité aux bâtiments, la société de l'information, les transports, l'élaboration de nouveaux instruments législatifs nationaux, l'établissement de rapports réguliers et l'aide aux familles. La Commission souligne également que cette Année a contribué à faire figurer le handicap à l'ordre du jour politique.

3.   Observations et suggestions concernant la communication de la Commission

3.1

Le CESE regrette que la communication évaluant l'AEPH 2003 ait été adoptée presque deux ans après la conclusion de l'Année. Néanmoins, le CESE accueille avec satisfaction l'occasion qui est ainsi donnée de faire le point des résultats de l'Année, et de mettre en évidence certaines actions de suivi.

3.2

Le CESE partage l'appréciation positive des résultats de l'AEPH 2003, qui a probablement été l'Année européenne la plus réussie au plan de la visibilité et de la participation des pouvoirs publics, ainsi qu'au plan de la création d'une dynamique propre à la prise d'initiatives et aux activités législatives, d'un bout à l'autre de l'Europe.

3.3

La communication résume et analyse bien les mesures adoptées au niveau européen. Toutefois, elle apporte peu d'informations sur les initiatives de niveau national et régional. Il aurait été utile de mettre en lumière des projets ou des activités significatifs financés par l'AEPH, en vue de stimuler l'échange de bonnes pratiques, mais aussi en vue de déterminer quelles initiatives il pourrait y avoir lieu de poursuivre, à la fois au niveau national et au niveau européen.

3.4

Il est intéressant de noter que l'évaluation externe met l'accent sur le fait suivant: le projet pilote lancé par le Parlement européen pour le suivi de l'AEPH 2003 n'a pas été en phase avec les activités de l'Année. Le CESE estime que l'on aurait pu faire un meilleur usage de ce financement si l'on avait entrepris pendant l'Année une analyse des activités et des partenariats intéressants.

3.5

La décision relative à l'AEPH 2003 prévoyait la participation des pays de l'AELE/EEE, des pays associés de l'Europe centrale et orientale, de Chypre, de Malte et de la Turquie, la plupart de ces pays étant devenus membres de l'UE, ou étant candidats à l'adhésion. Toutefois, la communication ne donne aucune information sur les activités organisées dans ces pays, sans que la question de savoir si un accord spécifique avait été signé ou non avec la Commission européenne entre en ligne de compte.

3.6

La communication indique également que le nombre de sujets présentés par les médias à propos des handicapés a augmenté de 600 % en 2003. Il serait intéressant de comparer ces résultats au traitement médiatique de 2004 et 2005 pour évaluer ce qu'a été à moyen terme, ou même à long terme, l'impact de ces campagnes de sensibilisation.

3.7

De surcroît, l'on n'a pas analysé la qualité de l'information. L'un des objectifs de l'Année était de promouvoir une image positive des personnes souffrant de différents handicaps. Le rapport ne permet guère de savoir si cet objectif a effectivement été atteint ou non, ni si l'on a modifié dans un sens novateur l'image des personnes handicapées.

3.8

La méthode décentralisée a amené les administrations et les comités nationaux à adopter des démarches diverses. Certains pays ont préféré privilégier un nombre limité de projets d'assez grande envergure, tandis que d'autres ont préféré soutenir un grand nombre de petites initiatives locales. Il aurait été intéressant de savoir quelle a été l'efficacité de chaque démarche en termes de visibilité de la campagne, mais aussi de durabilité des initiatives.

3.9

Le CESE constate aussi que le niveau de participation politique à l'AEPH 2003 au niveau national a varié considérablement selon les pays. Néanmoins, il regrette de ne trouver aucune analyse de la question de savoir si cela a contribué ou non à susciter d'autres initiatives politiques dans certains pays.

3.10

Au niveau européen, un certain nombre d'engagements politiques ont été pris, notamment sous forme de résolutions du Conseil concernant l'emploi et la formation, l'accès aux activités culturelles, l'enseignement et l'eAccessibilité (2), ainsi que sous forme d'initiatives des institutions de l'UE sur l'accessibilité (3) et l'emploi, par exemple.

3.11

La Commission européenne devrait examiner la mise en œuvre de ces engagements dans son prochain rapport bisannuel sur la situation des handicapés, comme cela est prévu dans le cadre de son plan d'action sur l'égalité des chances pour les personnes handicapées.

3.12

Cette Année a été une belle occasion d'améliorer la sensibilisation au rôle crucial que peuvent jouer les entreprises par rapport à l'intégration sociale des personnes handicapées ainsi que par rapport à leur intégration dans le marché de l'emploi. Suite à cette Année, un nombre croissant de sociétés recrutent des personnes handicapées et conçoivent leurs produits et services en tenant compte des exigences d'accessibilité universelle. Une initiative particulièrement positive a été le «European Year Corporate Partnership» (partenariat des entreprises pour l'Année européenne) que la Commission européenne s'est chargé de promouvoir et qui a donné naissance au «Business and Disability Network» (Réseau Entreprise et Handicap); ce réseau est l'un des résultats de l'Année qui se perpétuera dans le long terme.

3.13

Les entreprises d'économie sociale ont, elles aussi, été particulièrement actives pendant cette Année, déployant des centaines d'initiatives au niveau local, régional, national et européen. L'une de ces initiatives présente un intérêt particulier: il s'agit de la publication par la CEP-CMAF (la Conférence européenne permanente des coopératives, mutualités, associations et fondations), en collaboration avec le CESE, d'un guide sur la manière dont les organisations du secteur de l'économie sociale peuvent contribuer à l'intégration sociale des personnes handicapées et à leur intégration dans le marché de l'emploi.

3.14

L'on a aussi pu constater en 2003 un renforcement de l'action des organisations syndicales pour la défense des droits des personnes handicapées en matière de travail.

3.15

Cette Année a aussi aidé les organisations soit à obtenir l'accès, soit à améliorer leur accès, au processus de décision, et il est possible qu'elle ait donné aux personnes handicapées des possibilités accrues d'agir pour défendre leurs droits.

3.16

L'échange de bonnes pratiques et l'examen des initiatives politiques seront à organiser par le Groupe de haut niveau sur le handicap; ce groupe devra définir clairement un mandat et un programme de travail.

3.17

En outre, il est crucial que l'égalité des chances pour les personnes handicapées soit intégrée dans la totalité des différents processus de l'UE qui utilisent la méthode de coordination ouverte. Cela est d'autant plus crucial que les politiques en matière de handicap sont encore largement un domaine de compétence nationale. Depuis la fin de l'Année européenne des personnes handicapées, nous avons malheureusement vu s'amenuiser les références aux handicapés et diminuer en importance les objectifs concernant les handicapés, objectifs qui ont maintenant disparu de l'ordre du jour de Lisbonne.

4.   Leçons à tirer pour les futures Années européennes

4.1

Le succès de l'AEPH 2003 s'explique dans une large mesure par le caractère «ascendant» de sa démarche. La communication souligne que c'est au mouvement européen des personnes handicapées que revient le mérite de l'initiative et de la promotion de cette Année, et que ces personnes se sont aussi considérablement investies dans la préparation et l'organisation de l'Année. Il est décevant de constater que cette démarche n'a pas été appliquée aux décisions concernant les Années suivantes, avec les conséquences évidentes que cela comporte pour la mobilisation et pour l'intérêt à la fois des groupes cibles et du grand public.

4.2

Il faut maintenir, et même renforcer, pendant l'Année européenne de l'égalité des chances 2007 l'association étroite des organisations de personnes handicapées à la mise au point de la campagne européenne de sensibilisation qui a été caractéristique de l'AEPH, étant donné la diversité des parties prenantes. Il est d'une importance essentielle de faire ressentir aux groupes cibles que les outils et le cadre répondent à leurs besoins, et de faire de ces personnes les propriétaires des manifestations afin d'assurer le succès de ces dernières. Il importe aussi de prévoir suffisamment de temps de préparation entre la décision concernant l'Année et son démarrage officiel.

4.3

Les personnes chargées de l'évaluation externe ont souligné que l'obligation de respecter les réglementations financières avait fait peser une charge trop lourde à la fois sur les États membres et sur les contractants, mais également sur la Commission européenne, qui aurait pu investir davantage de temps dans d'autres initiatives nouvelles. La Commission européenne devrait en tenir compte lors du réexamen actuellement en cours des réglementations financières et des règles de mise en œuvre.

4.4

En outre, la définition d'indicateurs et la mise en place d'un système de contrôle permettraient aux États membres de garder la trace de données concernant leurs activités, ce qui serait un facteur d'efficacité au plan du contrôle et au plan de la collecte efficace d'information sur les bonnes pratiques.

4.5

Il ne faut pas que les Années européennes soient seulement une occasion de sensibiliser ou de rendre hommage; il faut qu'elles constituent aussi un tremplin pour de nouvelles initiatives. L'AEPH 2003 a suscité beaucoup d'attentes à la fois au niveau national et au niveau européen. Il importe que les campagnes de sensibilisation engendrent des pratiques permanentes, et qu'il existe une politique appropriée et un cadre législatif pour répondre aux défis qui se font jour pendant l'Année. Les ressources sont également d'une importance cruciale pour assurer la permanence de partenariats et de projets novateurs qui se sont construits au cours de l'Année.

5.   Examen des activités du CESE en liaison avec l'AEPH 2003

5.1

Le CESE s'est engagé vis-à-vis d'un certain nombre d'initiatives pendant l'AEPH 2003. Ce rapport est une occasion de passer en revue lesdits engagements, et de proposer certaines mesures pour l'avenir.

5.2

Le CESE a créé une task-force sur le handicap, qui consistait en un groupe de membres et de fonctionnaires du Comité chargé de préparer et de mettre en œuvre les activités du CESE pendant l'Année européenne.

5.3

Le CESE a approuvé les principes de la déclaration de Madrid et s'est engagé à assurer sa diffusion (4). Le CESE a adopté plusieurs avis et prises de position au stade de la préparation et au stade du suivi de l'AEPH 2003 (5), et ces textes ont été largement diffusés auprès des institutions européennes et des organisations concernées. De plus, le CESE a organisé deux séminaires sur l'emploi des personnes handicapées et sur l'évaluation de l'AEPH 2003.

5.4

Le CESE s'est engagé à intégrer les questions de handicap dans l'ensemble de ses travaux et à prendre en compte dans tous ses avis les intérêts, les droits et les devoirs des personnes handicapées. Bien qu'il y ait moyen de faire encore beaucoup mieux, le CESE progresse dans la bonne direction et un nombre croissant d'avis du Comité intègrent l'aspect du handicap, attirant ainsi l'attention des autres institutions sur les droits des personnes handicapées.

5.5

Le CESE a adopté de sa propre initiative et en réponse à des communications ou à des propositions législatives des avis concernant les personnes handicapées (6). En particulier, le CESE a élaboré un avis donnant des indications sur l'intégration des questions de handicap et sur la consultation des organisations de personnes handicapées (7). De nombreux avis du Comité évoquent les questions de handicap en rapport avec l'emploi, l'inclusion sociale et l'industrie (8). Le CESE s'est également engagé à procéder régulièrement à une évaluation, qui sera effectuée en 2006 par un groupe de travail du Comité.

5.6

En outre, le CESE a tenu compte des exigences d'accessibilité dans la rénovation de son nouveau siège, qui a été inauguré en mai 2004. Le nouveau siège a permis au CESE d'assurer une égalité d'accès presque complète pour les membres et les fonctionnaires handicapés. Par ailleurs, cela a aussi permis que puissent avoir lieu dans le bâtiment du CESE des séminaires auxquels participent des organisations de personnes handicapées. Cela constitue un exemple pour les autres institutions et organes de l'UE.

5.7

Le CESE prend note de la révision du Statut des fonctionnaires européens, qui a eu lieu en 2003, et de ses dispositions qui facilitent l'emploi de personnes handicapées. Toutefois, le CESE note qu'une démarche plus «proactive» est également nécessaire pour assurer le recrutement d'un plus grand nombre de personnes handicapées.

5.8

Le CESE invite la Commission européenne à procéder à une évaluation des modifications du Statut concernant l'emploi de personnes handicapées, dans le cadre de l'Année européenne de l'égalité des chances 2007.

5.9

Le CESE demande également la mise en place d'un régime de stages pour les personnes handicapées. L'Année européenne de l'égalité des chances 2007 pourrait être le moment opportun pour ce faire.

6.   Suivi de l'Année européenne des personnes handicapées au niveau de l'UE

6.1

Le CESE a toujours souligné dans ses avis que la réussite de l'Année des personnes handicapées devrait se mesurer à l'aune des résultats qui en découlent dans la pratique.

6.2

Le CESE regrette que l'AEPH 2003 n'ait pas abouti à l'adoption d'une législation complète sur la non-discrimination des personnes handicapées dans tous les domaines de décision politique de l'UE.

6.3

Le plan d'action européen de 2003 sur l'égalité des chances a été accueilli favorablement par le CESE dans son avis adopté en février 2004. Le CESE a également souligné dans l'avis le fait que le plan d'action manquait d'ambition, et il a proposé des mesures supplémentaires que devrait envisager la Commission européenne (9).

6.4

Le CESE constate que le premier rapport bisannuel sur la situation des personnes handicapées vient d'être publié, ainsi que les nouvelles priorités pour la prochaine phase du plan d'action européen (10).

6.5

Il conviendrait d'élaborer des recommandations sur les conséquences que comportent pour les personnes handicapées les stratégies européennes en matière de protection sociale, d'emploi et de formation permanente. Cela se justifie d'autant plus que les personnes handicapées ne sont pas évoquées dans la nouvelle stratégie de Lisbonne rationalisée, non plus que dans les programmes nationaux de réforme présentés en 2005. Dans ce contexte, le CESE accueille favorablement le document de travail sur l'intégration des questions de handicap dans la stratégie pour l'emploi (11), et invite la Commission européenne à procéder à une évaluation de la mise en œuvre de ce document.

6.6

Le CESE est également favorable à la proposition de la Présidence britannique de conférence ministérielle annuelle sur le handicap, afin de promouvoir le débat politique de haut niveau, avec la participation des organisations de personnes handicapées.

6.7

Le CESE estime que la Commission européenne devrait mettre au point, en coopération avec les organisations de personnes handicapées, un outil d'évaluation des conséquences que comporte la législation de l'UE pour les personnes handicapées, et organiser pour les fonctionnaires des différentes directions générales des cours de formation sur l'utilisation de cet outil.

6.8

Aux termes du traité d'Amsterdam, la CE s'est engagée à prendre en compte les personnes handicapées lors de la formulation de mesures concernant le marché intérieur. Malheureusement, la déclaration 22 n'a pas été suivie d'effet, et il en résulte des entraves de plus en plus importantes à la libre circulation des biens et des services.

6.9

Le CESE invite la Commission européenne à présenter une initiative qui rassemblerait d'une part, des fonctionnaires traitant des dossiers relatifs au marché intérieur et d'autre part, des experts provenant d'organisations de personnes handicapées, et ce afin d'élaborer un plan stratégique.

6.10

Le CESE exprime sa satisfaction quant à l'adoption rapide du règlement sur les passagers à mobilité réduite dans les transports aériens, règlement qui contribuera à la recherche d'une solution au problème de la discrimination à laquelle se heurtent les personnes handicapées lorsqu'elles empruntent les transports aériens; le CESE marque également sa satisfaction à propos d'un certain nombre d'autres initiatives législatives concernant le domaine des transports et allant aussi dans le sens de la promotion des droits des handicapés.

6.11

Le CESE demande l'inclusion des exigences d'accessibilité dans le cadre de toutes les subventions bénéficiant d'une promotion de l'UE et dans le cadre des politiques de l'UE concernant ses propres marchés publics.

6.12

Le CESE suit aussi de près les négociations relatives à une convention internationale sur les droits humains des personnes handicapées, et accueille favorablement la proposition de l'UE visant à faire en sorte que les Communautés européennes soient partie à la convention, laquelle assurerait aussi la protection des personnes handicapées résidant sur le territoire de l'UE, y compris une protection par rapport aux actes des institutions et organes de l'UE.

6.13

Le CESE estime qu'il y a lieu de légiférer encore pour essayer de résoudre les problèmes de discrimination dans tous les domaines de compétence de l'UE, et il attend avec intérêt les résultats de l'étude de faisabilité sur de nouvelles initiatives législatives en matière de non-discrimination. En outre, il espère fermement voir publier l'année prochaine une proposition de directive traitant expressément des questions de handicap.

Bruxelles, le 14 février 2006.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  Décision 2001/903/CE du Conseil.

(2)  Résolution du Conseil du 15 juillet 2003 relative à la promotion de l'emploi et de l'intégration sociale des personnes handicapées (JO 2003/C 175/01).

Résolution du Conseil du 6 mai 2003 concernant l'accès des personnes handicapées aux infrastructures et activités culturelles (JO 2003/C 134/05).

Résolution du Conseil du 5 mai 2003 concernant l'égalité des chances pour les élèves et étudiants handicapés dans le domaine de l'enseignement et de la formation (JO 2003/C 134/04).

Résolution du Conseil du 6 février 2003 relative à «eAccessibilité» – Améliorer l'accès des personnes handicapées à la société de la connaissance (JO 2003/C 39/03).

(3)  2010: Une Europe accessible à tous, - Rapport du groupe d'experts constitué par la Commission européenne

http://europa.eu.int/comm/employment_social/index/7002_fr.html

(4)  Avis du CESE du 17 octobre 2001 sur la proposition de décision du Conseil relative à l'Année européenne des personnes handicapées 2003 (COM(2001) 271 final – 2001/0116 2003 (NCS)) (M. Cabra de Luna, rapporteur. JO C 36 du 8.2.2002).

(5)  Avis du CESE du 26 mars 2003 sur la communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen – Vers un instrument juridiquement contraignant des Nations unies destiné à promouvoir et protéger les droits et la dignité des personnes handicapées (COM(2003) 16 final) (M. Cabra de Luna, rapporteur. JO C 133 du 6.6.2003).

Avis du CESE du 17 octobre 2001 sur la proposition de décision du Conseil relative à l'Année européenne des personnes handicapées 2003 (COM(2001) 271 final – 2001/0116 (CNS)) (M. Cabra de Luna, rapporteur. JO C 36 du 8.2.2002).

Avis du CESE du 25 février 2004 sur la communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions - Égalité des chances pour les personnes handicapées: un plan d'action européen (COM(2003) 650 final) (M. Cabra de Luna, rapporteur. JO C 110 du 30.4.2004).

(6)  Cf. note 5 de bas de page et: avis d'initiative du CESE du 17 juillet 2002 sur l'intégration des personnes handicapées dans la société (M. Cabra de Luna, rapporteur) (JO C 241 du 7.10.2002).

Avis du CESE du 28 septembre 2005 sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant les droits des personnes à mobilité réduite lorsqu'elles font des voyages aériens (COM(2005) 47 final – 07/2005 (COD)) (M. Cabra de Lun, rapporteur. (JO C 24 du 31.1.2006).

Document de travail conjoint sur la situation des personnes handicapées en Turquie - 19ème réunion du Comité consultatif mixte UE-Turquie (rapporteurs: M. Daniel Le Scornet, membre du CESE et M. Süleyman Çelebi, coprésident du CCM UE-Turquie (REX/194).

(7)  Avis d'initiative du CESE du 17 juillet 2002 sur l'intégration des personnes handicapées dans la société (M. Cabra de Luna, rapporteur) (JO C 241 du 7.10.2002).

(8)  Avis du CESE du 28 septembre 2005 sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant les droits des personnes à mobilité réduite lorsqu'elles font des voyages aériens (COM(2005) 47 final – 07/2005 (COD)) (M. Cabra de Luna, rapporteur. (JO C 24 du 31.1.2006).

Document de travail conjoint sur la situation des personnes handicapées en Turquie - 19ème réunion du Comité consultatif mixte UE-Turquie (rapporteurs: M. Daniel Le Scornet, membre du CESE et M. Süleyman Çelebi, coprésident du CCM UE-Turquie (REX/194).

Avis du CESE du 1er juillet 2004 sur la communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions - Moderniser la protection sociale pour des emplois plus nombreux et de meilleure qualité, une approche globale pour rendre le travail rémunérateur (COM(2003) 842 final) (Mme St Hill, rapporteur. JO C 302 du 7.12.2004).

Avis du CESE du 29 octobre 2003 sur un tourisme accessible à tous et socialement soutenable (M. Mendoza Castro, rapporteur. JO C 32 du 5.2.2004).

Avis du CESE du 26 mars 2003 sur la communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social et au Comité des régions - L'avenir de la stratégie européenne pour l'emploi (SEE) «Une stratégie pour le plein emploi et des emplois de meilleure qualité pour tous» (COM(2003) 6 final) (M. Koryfidis, rapporteur. JO C 133 du 6.6.2003).

Avis du CESE du 18 juillet 2002 sur le projet de règlement de la Commission concernant l'application des articles 87 et 88 du traité CE aux aides d'État à l'emploi (JO C 88/2 du 12.4.2002) (M. Zöhrer, rapporteur. JO C 241 du 7.10.2002).

(9)  Avis du CESE du 25 février 2004 sur la communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions - Égalité des chances pour les personnes handicapées: un plan d'action européen (COM(2003) 650 final) (M. Cabra de Luna, rapporteur. JO C 110 du 30.4.2004).

(10)  Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions - La situation des handicapés dans l'Union européenne élargie: plan d'action européen 2006 2007 – (COM(2005) 604 final du 28.11.2005).

(11)  Disability Mainstreaming in the European Employment Strategy by the European Employment Committee (Intégration des questions de handicap dans la stratégie européenne pour l'emploi par le Comité européen de l'emploi). EMCO/11/290605.


11.4.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 88/27


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen et au Comité économique et social européen “Lancer le débat sur une approche communautaire en matière de programmes d'étiquetage écologique des produits de la pêche”»

(COM(2005) 275 final)

(2006/C 88/08)

Le 29 juin 2005, la Commission a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la communication susmentionnée.

La section spécialisée «Agriculture, développement rural et environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 25 janvier 2006 (rapporteur: M. SARRO IPARRAGUIRRE).

Lors de sa 424e session plénière des 14 et 15 février 2006 (séance du 14 février), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 100 voix pour, 1 voix contre et 3 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

Le Comité économique et social européen:

1.1

accueille favorablement le lancement définitif d'un débat sur une approche communautaire concernant les systèmes d'éco-étiquetage des produits de la pêche,

1.2

manifeste sa volonté de participer activement aux travaux ultérieurs,

1.3

recommande à la Commission, outre la coordination que l'on est en droit d'espérer entre les services compétents en matière d'étiquetage des produits de la pêche, de maintenir une étroite coopération avec les organisations internationales compétentes dans ce domaine, telles que la FAO (Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture), l'OMC (Organisation mondiale du commerce), l'OCDE, la CNUCED (Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement), l'Alliance ISEAL (Alliance internationale pour l'accréditation et l'étiquetage social et environnemental) et l'ISO (Organisation internationale de normalisation ),

1.4

suggère à la Commission de veiller simultanément à maintenir un lien constant avec les interlocuteurs environnementaux, les interlocuteurs sociaux, et en particulier les représentants des secteurs concernés (pêche, transformation, commercialisation), ainsi qu'avec les consommateurs;

1.5

estime qu'à l'heure actuelle, et compte tenu de la complexité de la matière, il est préférable d'opter en faveur de la troisième option parmi celles figurant dans la communication de la Commission, à savoir l'établissement d'exigences minimales pour des systèmes volontaires d'éco-étiquetage,

1.6

observe cependant que ces exigences minimales doivent être suffisamment rigoureuses et être accompagnées de normes capables d'en empêcher et d'en sanctionner la violation,

1.7

attire l'attention sur le fait qu'en tout état de cause, les opérateurs doivent respecter les écolabels déjà adoptés par les organisations régionales de pêche conformément à des réglementations adoptées par l'Union européenne — l'étiquette «Sans risque pour les dauphins» du Programme pour la sauvegarde des dauphins (APICD) (1), par exemple — et appliquer des normes de développement précises.

1.8

demande à la Commission de porter une attention particulière aux coûts générés par l'éco-étiquetage des produits de la pêche, et lui demande de les répercuter de façon équilibrée dans la chaîne de valeur entre les producteurs, les industries de transformation, les distributeurs et les consommateurs.

2.   Motivation

2.1

En février 2004, le Conseil de l'Union européenne a jugé nécessaire d'inclure dans son calendrier le lancement d'un débat sur l'éco-étiquetage des produits de la pêche. Dans sa communication sur ce sujet, le Conseil a annoncé qu'il proposerait des conditions afin d'identifier les méthodes de capture et la traçabilité du produit depuis le bateau de pêche jusqu'au consommateur final, ce qui permettrait de garantir le respect des pratiques de pêche et du commerce responsable.

2.1.1

Le Conseil estimait alors que «la Communauté doit prendre la tête de ce débat qui se déroule dans différents forums internationaux».

2.1.2

Par le biais de la communication à l'examen, la Commission a finalement lancé un débat sur une approche communautaire concernant les systèmes d'étiquetage des produits de la pêche; elle a invité les autres institutions de l'Union européenne à faire valoir leur point de vue, à proposer des initiatives législatives et à formuler des recommandations pertinentes en la matière.

2.1.3

Il incombe dès lors au Comité économique et social européen de se prononcer sur cette initiative et de préciser sa position sur ce point.

2.1.4

Les passages du présent avis faisant référence aux «produits de la pêche» s'appliquent également aux produits de l'aquaculture, compte tenu des spécificités environnementales de chaque secteur d'activité.

2.2   Antécédents de l'avis

2.2.1

La communication à l'examen est le résultat d'un effort considérable de synthèse d'une situation de fait et de droit complexe; en ce sens, le Comité économique et social européen souhaite tout d'abord féliciter le service responsable du travail effectué. Il convient également de rappeler que le Comité a déjà abordé de façon générale dans son avis intitulé «Commerce éthique et dispositifs visant à apporter une garantie aux consommateurs» (2), certaines des questions qui se posent aujourd'hui concrètement avec l'éco-étiquetage des produits de la pêche.

2.2.2

Afin de pouvoir situer le débat de manière précise, il est indispensable de rappeler que l'agence des Nations unies compétente en la matière, à savoir le Comité des Pêches de la FAO (COFI), a approuvé récemment (du 11 au 13 mars 2005), après les avoir soumises à l'avis d'experts, une série de directives relatives à l'éco-étiquetage des poissons et de la production halieutique rédigées en octobre 2004 (3). Le débat avait été lancé au sein de la FAO dès 1998.

2.2.3

Le présent avis ne peut reprendre dans leur intégralité l'ensemble des directives citées au paragraphe précédent. Il convient toutefois de signaler que ces documents contiennent les exigences minimales ainsi que les critères permettant l'octroi ou non d'un écolabel à une pêcherie donnée, celle-ci constituant l'unité de certification. En résumé, les exigences portent sur l'existence d'une législation, d'une structure de contrôle administratif, de données scientifiques certaines sur les stocks existants et sur les effets de la pêche sur l'écosystème. Par ailleurs, la FAO a élaboré une série de lignes directrices relatives à l'établissement de règles pour une pêche durable et, surtout, à la mise en place de mécanismes efficaces d'accréditation et de certification. Il convient de souligner plus particulièrement que ces lignes directrices précisent les conditions sine qua non du bon fonctionnement du système d'éco-étiquetage, à savoir la transparence, la participation des acteurs concernés, la définition de règles de notification, la création d'un registre, l'examen et la révision des procédures et des règles, l'existence de ressources humaines et financières suffisantes, la nécessité de rendre des comptes et de garantir l'accessibilité de l'information, l'élaboration de systèmes de maintien, de suspension et de retrait de l'accréditation ainsi que les modalités de recouvrement y relatives.

2.2.4

Dans le même temps, rappelons que l'éco-étiquetage est une activité relativement récente, qui se limite pour l'essentiel aux pays membres de l'Organisation pour la coopération et le développement (OCDE) (4) et que des travaux sont actuellement en cours dans ce domaine au sein de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). De même, l'Organisation internationale de normalisation (ISO) a élaboré ses propres critères méthodologiques et conceptuels sur la gestion de la qualité de l'environnement par le biais de la série de normes ISO 14000. La Commission devra réaliser un effort considérable afin que les règles approuvées soient efficaces et cohérentes avec les lignes directrices et les règles internationales existantes.

2.2.5

Plusieurs États membres et plusieurs collectivités régionales dotées de compétences en la matière ont également élaboré des normes, en fonction de leurs modèles constitutionnels propres, tandis que d'autres sont en train de le faire. Il existe dès lors au sein de l'Union européenne une grande diversité d'écolabels publics, privés, suprationaux, nationaux et régionaux, ce qui peut créer une certaine confusion parmi les consommateurs et les opérateurs des différents marchés (5).

2.2.6

Par conséquent, il est nécessaire, compte tenu de la multiplicité des réglementations et de la confusion créée par les écolabels sur les différents marchés, d'adopter une approche multidisciplinaire dans un but d'harmonisation.

2.2.7

L'Union européenne s'est dotée pour la première fois d'un écolabel harmonisé en 1992, lorsqu'elle a adopté le règlement du Conseil 880/92 du 23 mars (6). La révision de ce règlement il y a maintenant cinq ans et son remplacement par le règlement actuellement en vigueur (7) a établi un système d'éco-étiquetage pour différentes catégories de produits, à l'exclusion notable des produits de la pêche. A cet effet, la Commission devra étudier de façon détaillée la possibilité d'étendre l'éco-étiquetage en vigueur aux produits de la pêche et de l'aquaculture.

2.2.8

L'on rappellera que le débat sur les systèmes d'éco-étiquetage des produits de la pêche se déroule alors même que des politiques sont en cours au sein de l'Union européenne. Concrètement, l'on se reportera au VIème programme communautaire d'action pour l'environnement adopté par décision conjointe du Parlement européen et du Conseil (1600/2002/CE du 22 juillet 2002) (8) et au Plan d'action communautaire pour intégrer les exigences de la protection de l'environnement dans la politique commune de la pêche (9), dans lequel l'examen des écolabels pour les produits de la pêche est envisagé comme une mesure complémentaire.

2.2.9

Bien que la situation soit relativement différente, le Comité souhaite attirer l'attention de la Commission et des autres institutions ainsi que des autres parties intéressées au sein de l'Union européenne sur l'existence d'un exemple d'application harmonieuse et unifiée d'un signe distinctif que l'on peut qualifier sans hésiter d'écologique, dans la mesure où il garantit l'application des directives en matière de recyclage des emballages (10). Nous nous référons au «Point vert» apposé sur la majorité des emballages recyclables dans les pays de l'Union européenne. Cette étiquette, de fait, est une marque déposée créée par une organisation privée allemande, qui a transféré son siège à Bruxelles en 1996 et qui en a autorisé l'usage comme moyen de coopérer avec la majorité des États membres et des pays tiers ainsi qu'avec les opérateurs économiques impliqués dans la bonne gestion du recyclage des emballages. À l'heure actuelle, la base juridique est constituée par les directives communautaires et les normes nationales de développement, qui pourraient rendre nécessaire le recours à un logo unique permettant de diffuser un message clair, via une organisation privée (Packaging Recovery Organisation Europe sprl) veillant à l'harmonisation des critères et à leur développement par divers organismes nationaux dans la plupart des États membres (11).

2.2.10

Eu égard aux considérations exprimées ci-dessus, le Comité estime que les débats menés actuellement au sein de l'Union européenne sur la question complexe de l'éco-étiquetage des produits de la pêche et de l'aquaculture viennent à point nommé et ne doivent donc pas être prolongés ou reportés de façon excessive. Il doivent avoir pour fil rouge les lignes directrices de la FAO, mais sans renoncer aux critères propres à l'UE et en les améliorant le plus possible, et suivre une approche multidisciplinaire dans un souci d'harmonisation et dans le respect des objectifs prioritaires que sont la protection de l'environnement et des ressources, ainsi que le service au consommateur.

3.   Observations générales

3.1   Approches diverses

3.1.1

Les travaux de la FAO — compte tenu du fait que cet organisme a des compétences en matière de pêche et qu'il constitue dès lors une référence pour les différentes organisations régionales de pêche qui sont apparentées au système de droit maritime actuellement en vigueur depuis la Convention des Nations unies sur le droit de la mer, ont une approche de l'étiquetage des produits de la pêche centrée sur la protection des pêcheries, et ne font allusion que de manière indirecte aux autres phases de la commercialisation du produit.

3.1.2

Au contraire, les travaux des autres organisations internationales, plus particulièrement ceux de l'OMC (12) et de la CNUCED visent, dans la mesure où ils sont effectués dans le cadre de l'Accord sur les entraves techniques aux échanges, à ce que les systèmes d'éco-étiquetage ne constituent pas des entraves illicites au commerce international et ne défavorisent pas les pays en développement (13). Ces organisations s'efforcent également de rendre les mesures complémentaires pour une pêche responsable telles que l'écolabel compatibles avec les règles internationales, qui interdisent toute barrière technique au commerce international ou toute mesure ayant un effet équivalent, compte tenu en outre de la nécessité de coopérer afin que les pays disposant de ressources techniques et financières limitées pour l'instauration d'écolabels puissent recevoir le soutien nécessaire pour y parvenir. Dans ce contexte, le Comité considère que l'éco-étiquetage des produits de la pêche ne constiue pas en soi un obstacle au commerce international, si sa réglementation prévoit les mécanismes de transparence et d'égalité d'accès qui s'imposent.

3.1.3

Les travaux de la FAO se réfèrent exclusivement à l'éco-étiquetage écologique des produits de la pêche; le Comité fait toutefois sien le critère de la Commission selon lequel toute décision doit partir non seulement du respect des décisions des organisations internationales mais aussi de l'harmonisation des différentes approches de ces organisations compte tenu de leur nature et de leur mission propre.

3.1.4

Les travaux de l'Organisation internationale de normalisation (ISO) et d'autres organisations compétentes dans ce domaine sont quant à eux davantage centrés sur la méthodologie et les bonnes pratiques en matière de gestion environnementale et d'éco-étiquetage, sans référence explicite aux spécificités des produits de la pêche.

3.1.5

Compte tenu de ce qui précède, le Comité estime que, en même temps que les travaux internationaux, la future proposition législative de la Commission devra prendre en considération l'énorme acquis communautaire et l'expérience dont peut se prévaloir l'actuel système d'éco-étiquetage (et l'expérience parallèle du «Point vert») de l'Union européenne; ainsi, les services compétents en matière de pêche doivent coordonner leurs activités avec les services qui s'occupent d'environnement et d'harmonisation des marchés afin de ne pas créer de dysfonctionnements inutiles et d'éviter toute prolifération des écolabels qui, loin de contribuer à la défense des intérêts des opérateurs du marché et du consommateur final, ne ferait qu'aggraver encore la confusion. Malgré les difficultés que cela suppose, il est souhaitable que la Commission fixe un calendrier afin que sa proposition législative soit prête au plus tard à la fin du premier semestre 2006.

3.2   Diversité des situations de fait dans le domaine de l'éco-étiquetage des produits de la pêche

3.2.1

En l'absence d'une réglementation de base qui permettrait d'harmoniser les critères de manière suffisamment rigoureuse, comme l'explique bien le document de la Commission, l'on constate l'existence d'une multiplicité de situations de fait, dont certaines peuvent servir d'exemples de bon fonctionnement et d'autres d'exemples de pratiques à éliminer.

3.2.2

Il ressort de la documentation consacrée à ce sujet (14) ainsi que de la réglementation internationale en vigueur qu'il existe un grand nombre de situations qui ne répondent pas toujours aux exigences de transparence et de justice essentielles à tout système d'éco-étiquetage.

3.2.3

Certains cas offrent un exemple de mécanisme volontaire né de la coopération entre opérateurs du marché et organisations de la société civile. Ces organisations disposent de normes d'accréditation, de certification et d'utilisation de l'écolabel claires, justes et accessibles au grand public qui s'appliquent à des pêcheries dans différents pays du monde. Ces organisations disposent de comités consultatifs et de mécanismes de contrôle adaptés.

3.2.4

Toutefois, dans d'autre cas (que la Commission mentionne dans sa communication), l'on se trouve face à de véritables «logos» privés dont la réglementation soit est inexistante, soit n'est pas publique, et dont l'application pratique est loin d'être conforme aux codes de bonnes pratiques en matière d'éco-étiquetage. Certains cas peuvent servir d'exemple pour illustrer les effets pernicieux d'un écolabel applicable à des produits de la pêche dans la mesure où ils contreviennent à la législation internationale, créent des barrières non souhaitables au commerce international et se fondent sur des méthodologies totalement étrangères à toute recommandation en matière d'éco-étiquetage, créant selon les mots d'un haut responsable européen un véritable monopole de fait.

3.2.5

De tels exemples montrent bien que le maintien de la situation actuelle, dans laquelle il est possible de créer des écolabels sans base juridique solide, voire en allant à l'encontre de la réglementation internationale et communautaire existante, ne peut se prolonger indéfiniment eu égard au préjudice causé aux producteurs, aux consommateurs et aux autres acteurs concernés.

3.2.6

Dans le cas particulier du thon originaire de l'océan Pacifique oriental, l'organisation régionale de pêche compétente en la matière, en l'occurrence la Commission interaméricaine du thon tropical, a approuvé un accord sur le Programme international pour la conservation des dauphins (PICD) (15) auquel l'Union européenne a adhéré volontairement par le biais de la décision 1999/337/CE du Conseil du 26 avril 1999 (16). Cet accord réglemente un écolabel qui bénéficie du soutien de la Communauté européenne et qui fait actuellement l'objet d'un débat législatif au Parlement européen (17).

3.2.7

Cette situation particulière doit être prise en considération comme préalable à l'étude et aux propositions de réglementation dans ce domaine; en effet, dans la mesure où, certains cas, une organisation régionale de pêche compétente pour une pêcherie donnée promeut, en se prévalant des principes de la FAO, son propre écolabel, l'Union européenne devrait, premièrement, participer aux travaux afin que la méthodologie de certification et d'émission soit bien conforme aux exigences requises et, deuxièmement, envisager dans ses propres normes l'utilisation de telles étiquettes ainsi que l'interdiction de celles qui contreviennent aux normes spécifiques.

3.2.8

Le Comité estime que tout système privé d'éco-étiquetage des produits de la pêche et de l'aquaculture doit répondre à des critères stricts d'accréditation et de certification indépendante, et que la proposition législative de la Commission devra stipuler l'existence d'un registre public accessible à toutes les personnes intéressées et aux opérateurs du marché des produits de la pêche et de l'aquaculture afin de savoir quelles étiquettes en usage satisfont les exigences légales.

4.   Observations particulières

4.1   Mise en œuvre, certification, concession, surveillance et sanction

4.1.1

L'éco-étiquetage doit se distinguer clairement des normes générales relatives à l'étiquetage des produits d'alimentation proprement dit. L'utilisation d'un écolabel ne suppose pas de façon intrinsèque la reconnaissance du respect des normes, qui reste en tout état de cause exigible y compris pour les produits non pourvus de ce label, mais du respect de niveaux de protection de l'environnement élevés, parmi lesquels figurent, dans le cas qui nous occupe, les pratiques de pêche responsable, la conservation de stocks du produit labellisé et la limitation au minimum des dommages causés à la biodiversité et à l'environnement marin en général.

4.1.2

L'étiquetage des produits de la pêche, comme de tout autre produit extractif ou de l'aquaculture, pourrait être effectué tant sur des produits non transformés (poisson entier frais ou congelé) que sur des produits de la pêche transformés, qu'il s'agisse de produits congelés, salés, en conserve, précuits ou préparés à base de poisson. Dans le premier cas, l'écolabel doit être le garant que les méthodes de pêche extractive pratiquées par les pêcheurs sont conformes non seulement aux normes de contrôle de la pêcherie en question, mais aussi au Code de pêche responsable de la FAO. Dans le deuxième cas, l'écolabel du produit halieutique doit garantir que la correcte application des règles de traçabilité des produits alimentaires implique que le produit transformé et proposé au consommateur a réellement été élaboré à partir de poisson répondant aux exigences de l'écolabel.

4.1.3

Pour une bonne mise en oeuvre de l'écolabel applicable aux produits de la pêche, l'existence d'un cadre législatif général n'est pas suffisante; il est nécessaire d'établir en outre un mécanisme clair d'accréditation des organismes qui délivrent ces écolabels, d'obtention de ces derniers, de résolution des conflits, de surveillance et de sanction des abus et du non-respect que les caractéristiques qui font la différence entre le produit de la pêche porteur d'un écolabel et le produit de la pêche en général peuvent induire.

4.1.4

Le CESE estime que le «mécanisme clair d'accréditation» évoqué devrait être le registre dont il est fait mention au paragraphe 3.2.8. Tant les règles que le registre doivent garantir que la transparence constitue un des éléments clés du système qui, à condition d'informer simultanément le consommateur, doit être capable de susciter la confiance nécessaire pour réduire le fossé qui existe entre les consommateurs concernés par les problèmes environnementaux que peuvent poser les produits qu'ils achètent (actuellement 44 %) et les consommateurs pour lesquels l'acte d'achat est le plus important (actuellement 10 %).

4.1.5

Les données figurant dans le rapport EVER précité, de même que la position adoptée par EUROPÊCHE/COGECA (18) dans sa note relative au sujet traité dans le présent avis, autorisent un certain pessimisme quant au fait que l'écolabel en général, et ceux applicables aux produits de la pêche en particulier sont synonymes de valeur ajoutée pour les producteurs et d'information transparente et juste pour les consommateurs. Toutefois, la préservation de l'environnement, au sens le plus large du terme, est en passe de devenir, avec la lutte contre la faim, l'un des deux principaux défis qui se posent à l'humanité à l'heure actuelle. Il est dès lors indispensable que l'Union européenne tente de devenir le chef de file du processus permettant aux consommateurs responsables de discerner et de choisir des produits dont l'extraction, la transformation et la commercialisation respectent des critères de protection de l'environnement.

4.1.6

Le Comité a été informé de la position exprimée formellement par le WWF et se félicite qu'indépendamment des différentes approches adoptées, celle-ci coïncide d'une façon générale avec les opinions exprimées dans le présent avis, en particulier en ce qui concerne la rigueur dont doit faire preuve la réglementation relative à l'éco-étiquetage des produits de la pêche.

4.1.7

Le Comité estime que la réglementation que la Commission proposera en temps utile doit accorder une attention particulière à la possibilité d'utiliser l'écolabel des produits de la pêche comme outil permettant de soutenir l'industrie halieutique et dont les coûts peuvent être répercutés sur la chaîne commerciale sans porter préjudice aux consommateurs. Dans ce contexte, l'écolabel des produits de la pêche pourrait devenir un mécanisme de conscientisation des pêcheurs et des entreprises face à la nécessité de pratiquer une pêche et une aquaculture durables pour la conservation des ressources que constituent le maintien de leur activité et l'ensemble de la chaîne commerciale située en aval.

4.1.8

Le Comité souhaite signaler à la Commission que l'éco-étiquetage des produits de la pêche et de l'aquaculture suppose un coût financier qui devra être supporté par la chaîne de production avant que le produit soit mis sur le marché. Les petites et moyennes entreprises ainsi que les opérateurs des pays en développement peuvent, dans certaines circonstances, éprouver des difficultés pour avoir accès à l'éco-étiquetage. Par conséquent, la future réglementation devra prévoir des mécanismes d'intervention à travers les organisations de producteurs, les associations de pêcheurs ou les accords de partenariat. Quoi qu'il en soit, la pleine efficacité de l'éco-étiquetage exige un effort considérable en termes d'éducation et d'information. À cet égard, le Comité estime que le financement des actions d'information et de sensibilisation auprès des opérateurs et des consommateurs incombe aux pouvoirs publics.

4.1.9

C'est la raison pour laquelle toute action de l'Union européenne dans ce domaine doit être considérée comme un premier pas. Ce pas doit cependant être suffisamment ambitieux pour aboutir à la création:

i.

de normes claires et obligatoires de reconnaissance, de certification et d'utilisation du ou des écolabels applicables aux produits de la pêche;

ii.

de systèmes de suivi de l'efficacité, de la transparence et de l'équité de ces normes pour tous les opérateurs;

iii.

de systèmes de sanction (fondés sur le principe de subsidiarité) en cas d'infraction aux normes en vigueur;

iv.

de programmes d'information des consommateurs et des opérateurs du marché sur le sens exact de l'écolabel pour les produits de la pêche;

v.

d'un programme d'investissement en rapport, accordant une attention toute particulière aux répercussions économiques de l'éco-étiquetage des produits de la pêche;

vi.

des nécessaires mécanismes de dialogue permanent avec les acteurs impliqués en vue de l'amélioration continue du système.

Bruxelles, le 14 février 2006.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  Voir le document COM(2004) 764 final du 29.11.2004, qui contient la proposition de la Commission au Conseil ainsi que l'amendement suivant adopté par le Parlement européen: «(9 bis) En application des dispositions visées au considérant précédent, la certification» Sans risque pour les dauphins «prévue dans l'APICD constitue, à ce jour, la seule qui soit reconnue par la Communauté» (A6-0157/2005 du 26 mai 2005).

(2)  JO C 28 du 23 février 2006.

(3)  Voir le document FAO TC:EMF/2004/3 d'août 2004.

(4)  Voir à titre d'exemple le document COM/ENV/TD(2003)30/FINAL du 25 février 2004 sur l'accès des pays en développement aux marchés des pays développés dans les programmes d'étiquetage écologique sélectionnés. Accessible sur www.oecd.org.

(5)  A titre purement indicatif, voir la liste des logotypes figurant sur la page internet de l'Union européenne consacrée à l'éco-étiquetage: http://europa.eu.int/comm/environment/ecolabel/other/int_ecolabel_en.htm.

(6)  JO L 99 du 11 avril 1992, page 1.

(7)  Règlement (CE) 1980/2000 du Parlement européen et du Conseil du 17 juillet. JO L 237 du 21 septembre 2000, page 1.

(8)  JO L 242 du 19 septembre 2002, page 1.

(9)  COM(2002) 186 final du 28 mai 2002.

(10)  Concrètement, il s'agit des directives 94/62/CE et 2004/12/CE.

(11)  Voir http://www.pro-e.org.

(12)  L'on trouvera des informations exhaustives sur la position de l'OMC en matière de commerce et d'environnement à l'adresse électronique suivante: http://www.wto.org/french/tratop_f/envir_f/envir_f.htm.

(13)  Voir le document TD/B/COM.1/EM.15/2. Bien qu'il traite principalement de l'agriculture, il s'applique à toutes les industries extractives comme la pêche: http://www.unctad.org/en/docs/c1em15d2.en.pdf.

(14)  Voir par exemple le rapport réalisé par Carolyn DEERE pour la FAO et l'UICN, intitulé Eco-labelling and sustainable fisheries, page 9, ou encore le rapport EVER: http://europa.eu.int/comm/environment/emas/pdf/everinterimreport_en.pdf

(15)  On peut consulter les dispositions relatives à cet accord à l'adresse suivante: http://www.iattc.org/PICDDocumentsSPN.htm

(16)  Voir aussi la proposition de décision du Conseil sur la signature par la Communauté européenne de l'Accord relatif au Programme international pour la conservation des dauphins (COM(2004) 764 final).

(17)  PE 357.789v01-00 du 2 mai 2005 (rapporteur: M. Duarte FREITAS). Projet de rapport sur la proposition de décision du Conseil sur la signature par la Communauté européenne de l'Accord relatif à la conservation des dauphins.

(18)  EP(05)115-CP(05)86S1 du 24 août 2005.


11.4.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 88/32


Avis du Comité Économique et Social européen sur «La représentation des femmes dans les organes de décision des groupes d'intérêts économiques et sociaux de l'Union européenne»

(2006/C 88/09)

Le 11 mars 2003, le Parlement européen a décidé, conformément à l'article 262 du Traité CE, de solliciter l'avis du Comité économique et social européen sur «La représentation des femmes dans les organes de décision des groupes d'intérêts économiques et sociaux de l'Union européenne».

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté» chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 24 janvier 2006 (rapporteur: M. ETTY).

Lors de sa 424e session plénière des 14 et 15 février 2006 (séance du 14 février), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 88 voix pour, 13 voix contre et 11 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le CESE souscrit à la position du Parlement européen selon laquelle la question du renforcement de la représentation des femmes au sein des organes décisionnels des groupes d'intérêts économiques et sociaux de l'UE est importante. Il soutient l'appel lancé par le Parlement aux organisations nationales concernées et à leurs fédérations européennes, ainsi qu'à la Commission européenne, afin qu'elles y accordent une attention accrue et plus systématique. La Commission européenne doit entamer l'établissement des données, ainsi que d'une base de données relative à la représentation des femmes dans les organes décisionnels des groupes d'intérêts économiques et sociaux de l'UE, conformément à la demande du Parlement. Le Comité constate qu'entre-temps, des démarches ont été entreprises en ce sens. Il est d'avis que l'Institut européen pour l'égalité entre les hommes et les femmes ainsi que la Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail peuvent apporter à cet égard une contribution appréciable. Quant aux indicateurs, le Comité remarque que la Commission travaille actuellement avec les neuf éléments formulés par la présidence italienne en 2003.

1.2

Le Parlement a concentré son analyse sur les organisations patronales et les syndicats. Le monde syndical a vraisemblablement connu une évolution plus positive que celle qui ressort de la résolution et du rapport. Par ailleurs, il semble qu'une bonne évaluation de la situation et de l'évolution de la situation du point de vue des employeurs et d'autres groupes d'intérêts économiques et sociaux requiert une prise de conscience du fait que les organisations concernées fonctionnent autrement que les organisations dont les membres sont des personnes physiques.

1.2.1

Tous les groupes d'intérêts économiques et sociaux représentés au CESE ont leurs propres caractéristiques. Les politiques qui ont des effets positifs sur un type d'organisation n'auront pas nécessairement des effets similaires sur un autre.

1.2.2

Compte tenu de ce qui précède, le Comité a pris connaissance avec satisfaction du cadre d'actions sur l'égalité hommes-femmes élaboré par la CES, l'UNICE/UEAPME et le CEEP, et en particulier de la priorité accordée par ces organisations au thème des «femmes dans la prise de décisions». Il attend avec intérêt les rapports annuels et européens annoncés sur les progrès réalisés en la matière.

1.3

Le CESE, comme le Parlement, adhère aux politiques européennes existantes sur la participation équilibrée des hommes et des femmes au processus décisionnel. Le CESE souscrit à la position du Parlement selon laquelle il convient de faire preuve d'une véritable volonté politique afin de mettre en œuvre les changements et d'aboutir à une représentation équilibrée. Dans de nombreuses organisations, y compris en dehors du cercle des employeurs et des travailleurs, cette volonté politique est effectivement présente. Le CESE préconise une transmission régulière à la Commission des résultats obtenus par les organisations représentées; il recommande également à la Commission de développer la base de données proposée en étroite collaboration avec les fédérations européennes, et d'établir, dans le prolongement de l'initiative de la présidence italienne en 2003, des indicateurs appropriés concernant le renforcement de l'influence des femmes dans les organes décisionnels économiques et sociaux.

1.4

Les représentants qui sont envoyés dans les enceintes internationales et nationales, et le cas échéant chargés de participer à un dialogue social par les organisations, sont principalement des administrateurs. Cependant, il est également important, pour les organisations souhaitant apporter une contribution au renforcement de la représentation des femmes, de cibler le niveau de préparation politique à partir duquel de nombreuses organisations recrutent déjà leurs représentants délégués.

1.5

Les structures séparées et auxiliaires, ainsi que les réseaux de personnel et membres féminins ont contribué de manière significative à un changement positif dans les organisations. Si ces instruments ne constituent pas nécessairement, partout et toujours, la panacée, le CESE estime utile de les promouvoir davantage et plus largement, notamment en ce qui concerne la représentation externe de l'organisation.

1.6

Les aménagements en matière de formation/d'éducation et de temps de travail/de garde semblent constituer les politiques les plus appropriées pour améliorer la carrière des femmes dans les organisations concernées. La promotion de ces politiques par les services compétents de la Commission, qui ont mis au point des mesures visant à lutter contre la discrimination et à favoriser l'intégration de l'égalité des chances dans les politiques, reste très importante. Les employeurs et les syndicats ont un rôle majeur à jouer dans la réalisation de ces politiques.

1.7

Les quotas sont recommandés par bon nombre d'experts. Les systèmes de quotas qui, dans certains pays, se sont avérés efficaces sur le plan politique et dans des organisations sociales, devraient faire l'objet d'un examen minutieux par les organisations concernées et la Commission en vue de dégager les facteurs expliquant leur efficacité et leur succès.

1.8

Le Comité souhaiterait que les États membres, lors de la nomination des conseillers du CESE, présentent au moins 30 % de candidats du sexe sous-représenté (sur proposition des groupes d'intérêt économiques et sociaux) pour le mandat 2006-2010, dans l'optique de faire passer cet objectif à 40 % lors du mandat suivant.

1.9

Le CESE se repenchera sur les conclusions de l'enquête menée actuellement en 2006/2007, au moment du renouvellement de son mandat. Ce sera également l'occasion d'examiner si les politiques et pratiques des organisations des nouveaux États membres sont fort différentes de celles des anciens. Selon le Comité, d'ici là, le Parlement devrait également réétudier la situation actuelle à la lumière de sa résolution et de son rapport de 2002.

2.   Observations

2.1   Contexte

2.1.1

En janvier 2003, le Parlement européen a demandé au Comité économique et social européen (CESE) d'élaborer un avis sur la représentation des femmes dans les organes décisionnels des «partenaires sociaux» (1). Cette démarche visait à compléter les données statistiques dont disposait le Parlement européen lors de la rédaction de sa résolution et de son rapport sur «La représentation des femmes dans les organes des partenaires sociaux de l'Union européenne» (2002/2026 INI) et à formuler des recommandations relatives à la stratégie à suivre pour améliorer la représentation des femmes au sein des différents organes de ces «partenaires sociaux».

2.1.2

Dans sa propre résolution, le Parlement européen avait constaté que les femmes étaient sous-représentées dans les organes et structures au sein desquels les «partenaires sociaux» échangent leurs positions en matière de politique sociale. Ce texte déclare qu'il convient de mettre au point des programmes et stratégies pour obtenir une représentation plus équilibrée et il invite la Commission européenne et les «partenaires sociaux» à compiler de manière systématique les données pertinentes, ainsi qu'à prendre des mesures adéquates afin de renforcer l'influence des femmes dans les organes décisionnels sociaux et économiques, non seulement en assurant une meilleure représentation de ces dernières, mais également en intégrant la dimension de genre dans leurs politiques.

2.1.2.1

Par ailleurs, le texte du Parlement européen précise que les déclarations d'intention non contraignantes sont inadéquates et qu'une volonté politique réelle est requise de la part des organisations au sein desquelles les «partenaires sociaux» se réunissent afin de mettre en œuvre les changements et de parvenir à une représentation équilibrée.

2.1.3

Dans sa résolution et son rapport, le Parlement européen n'évoque pas le CESE.

2.1.4

Le CESE est l'assemblée la plus représentative des groupes d'intérêts économiques et sociaux («la société civile organisée») de l'UE. Si sa mission n'est pas de conseiller les organisations représentées par rapport à leurs politiques concernant la représentation des femmes au sein des organes décisionnels et leurs politiques d'égalité des chances, sa composition peut certainement être considérée comme un reflet partiel de ces politiques. Le CESE est l'une des organisations, évoquées par le Parlement européen, au sein desquelles les groupes d'intérêts économiques et sociaux se rencontrent et l'un de ces organes ou structures au sein desquels ils se consultent au sujet de la politique sociale. Ses membres peuvent dès lors répondre parfaitement aux demandes d'information et de conseil du Parlement européen.

2.2   Observations générales

2.2.1

Le CESE convient avec le Parlement européen que la représentation des femmes dans les structures décisionnelles des groupes d'intérêts sociaux et économiques de l'UE constitue une question importante. Il est également d'avis qu'une meilleure base statistique et des informations plus fournies sur les politiques concernées de ces organisations sont des conditions préalables majeures à la mise en œuvre des politiques communautaires sur la représentation équilibrée des hommes et des femmes dans le processus décisionnel.

2.2.1.1

Il constate que la Commission européenne a commencé à compiler les données pertinentes. Entre-temps, des premières mesures ont été prises en vue de l'établissement de la base de données demandée par le Parlement européen et de la définition d'indicateurs permettant de renforcer l'influence des femmes au sein des organes décisionnels économiques et sociaux de l'UE. La Commission estime par ailleurs qu'il est difficile d'obtenir des données sur les groupes d'intérêts concernés. Il est à espérer que l'Institut européen pour l'égalité entre les hommes et les femmes pourra à l'avenir apporter une contribution à cet égard, comme le fait déjà la Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail.

2.2.1.2

En outre, la Commission doit continuer à développer des politiques générales visant à élargir la participation des femmes dans l'ensemble du processus décisionnel, telles que des politiques permettant de lutter contre la discrimination persistante dans les domaines de l'emploi et des professions et d'améliorer l'équilibre entre travail et vie privée dans les États membres, ou d'assurer un traitement équitable et l'égalité de traitement sur le lieu de travail.

2.2.2

Le CESE est généralement favorable aux demandes formulées par le Parlement européen aux employeurs, aux travailleurs et à la société civile organisée dans son ensemble. Il a traité la plupart d'entre elles dans une enquête, basée sur un questionnaire, qui a été envoyée en 2003 aux 222 membres (de l'époque) (2). 107 membres ont répondu au questionnaire, ce qui équivaut à un taux de réponse d'environ 50 % (3).

2.2.2.1

Les réponses se répartissent de manière relativement égale entre les trois groupes du CESE: 34 % pour le groupe I (Employeurs), 31 % pour le groupe II (Travailleurs) et 34 % pour le groupe III (Activités diverses).

2.2.2.2

Le pourcentage de représentantes au CESE au moment de l'enquête était de 23 %. (4)

2.2.2.3

Les organisations comptant un pourcentage de femmes assez élevé parmi leurs membres étaient probablement légèrement surreprésentées. Le tableau général dessiné par ces réponses risque donc d'être quelque peu faussé par un parti pris favorable aux femmes.

2.2.3

Le questionnaire s'est concentré successivement sur le type et la nature de l'organisation représentée, la structure de sa direction, sa représentation dans les organisations et enceintes à différents niveaux, la présence des femmes en son sein, ainsi que ses politiques en matière d'égalité des chances.

2.2.4

Par ailleurs, les données existantes ont été étudiées et collectées lors d'une audition d'experts consacrée à la situation et aux expériences vécues en Belgique, en Espagne et dans les pays scandinaves, ainsi qu'auprès de membres du CESE. Les données pertinentes concernaient essentiellement les syndicats. Tout comme dans la résolution et le rapport du Parlement, les éléments d'évaluation concernant les employeurs étaient pauvres et l'on ne disposait de presque aucune information sur les autres organisations (5).

2.2.5

L'enquête et les éléments complémentaires pris en compte ont renforcé l'impression initiale laissée par la résolution du Parlement, à savoir que la base statistique est effectivement très limitée (la seule exception à ce constat concerne les syndicats, mais dans ce cas, les éléments disponibles ne permettent pas de refléter correctement l'évolution positive récente (6)) et qu'il est difficile, voire problématique, de comparer les conclusions pour différentes organisations, par exemple les organisations dont les membres sont des personnes physiques (telles que les syndicats) et les organisations dont les membres sont également des organisations (telles que des entreprises). Des caractéristiques d'organisation différentes (par exemple dans les organisations d'agriculteurs ou de PME) peuvent requérir différentes méthodes d'évaluation de la représentation équilibrée des hommes et des femmes. Il convient également d'observer qu'une faible représentation des femmes dans les organes de décision ne prouve pas nécessairement l'absence de politiques d'égalité des chances dans l'organisation.

2.2.6

L'une des critiques formulées à l'égard de la résolution du Parlement européen était qu'elle ne se concentrait que sur les aspects quantitatifs de la représentation, en ignorant les aspects qualitatifs de l'élaboration des politiques dans les organisations au sein desquelles les femmes jouent parfois un rôle plus important que ne le laisserait supposer leur représentation formelle. Tout en reconnaissant l'importance de ces aspects qualitatifs, le CESE a décidé de ne pas les étudier en détail. Il a toutefois inclus dans son analyse la représentation des femmes dans les structures d'élaboration des politiques. Les aspects qualitatifs de l'élaboration des politiques dans cette acception méritent une attention accrue de la part des groupes d'intérêts économiques et sociaux et de leurs fédérations européennes, mais également du Parlement et de la Commission européenne.

2.2.7

En examinant les politiques et pratiques pertinentes des groupes d'intérêts économiques et sociaux de l'UE, le CESE a choisi d'analyser les politiques de représentation de manière intégrée (niveau national et européen, incluant le dialogue social, et niveau international).

2.2.7.1

Les comités d'entreprises européens n'ont pas été inclus dans l'enquête. Cela aurait nécessité un important effort de recherche supplémentaire, pour lequel le CESE n'est pas le mieux équipé (7).

2.2.8

Le Comité renvoie au cadre d'actions sur l'égalité hommes-femmes du 1er mars 2005, élaboré par la CES, l'UNICE/UEAPME et le CEEP, dont l'une des quatre priorités consiste à promouvoir les femmes dans la prise de décisions.

2.3   Observations particulières (basées sur les résultats de l'enquête)

2.3.1

Près de la moitié des deux principaux types d'organisations représentés au CESE (différents types de confédérations d'une part et organisations composées de membres individuels d'autre part) ont un taux de participation des femmes qui est élevé (40 % ou plus). Seules 10 à 15 % d'entre elles présentent un faible taux de participation des femmes (0-19 %). D'une manière générale, le taux de participation féminine est de 36 % dans les organisations représentées. (NB: comme nous l'avons précisé plus haut, le pourcentage de femmes parmi les membres du CESE était de 23 % à l'époque de l'enquête).

2.3.2

Si les femmes sont présentes dans ces organisations, il est plus fréquent de les trouver parmi les cadres qu'en tant que déléguées au congrès de l'organisation ou dans l'équipe de direction, et encore moins au conseil d'administration.

2.3.3

Cela constitue probablement une explication majeure du pourcentage relativement faible de femmes au sein du CESE: en effet, de nombreux membres sont issus des conseils d'administration.

2.3.4

Les organisations envoyant un taux élevé de représentantes au CESE recrutent ces dernières parmi les cadres ou alors suivent d'autres types de dispositions (par exemple mixte), plutôt que de choisir exclusivement des représentantes au niveau décisionnel interne le plus élevé.

2.3.5

En ce qui concerne la représentation dans les enceintes nationales et internationales, l'option privilégiée est une disposition mixte. Dans ce cas, la représentation par un ou plusieurs membres du conseil d'administration arrive en deuxième position.

2.3.6

Une grande partie des organisations représentées au CESE ne participent pas au comité du dialogue social (environ un quart). Parmi les organisations faisant partie de ce comité, environ un tiers choisissent une forme de représentation mixte ou envoient des représentants issus du conseil d'administration.

2.3.7

L'une des politiques visant à améliorer la représentation des femmes dans les organes de décision identifiées par le Parlement est la création de structures destinées aux femmes au sein de l'organisation. Dans un même temps, le Parlement estime que souvent, ces structures restent symboliques ou se résument à un forum de discussion isolé. Par conséquent, ces structures ne doivent pas isoler les femmes du processus décisionnel, mais plutôt les intégrer et leur offrir des possibilités d'accès renforcées à ce processus. Le CESE partage ce point de vue.

2.3.7.1

Le Parlement souligne également que l'accompagnement et la création de réseaux de femmes au sein des organisations jouent un rôle crucial lorsqu'il s'agit de les préparer à des fonctions dirigeantes.

2.3.8

Seule une minorité des organisations du CESE (33 %) dont les représentants ont répondu au questionnaire ont une organisation affiliée distincte ou auxiliaire pour leurs membres féminins. Dans la plupart des cas, ces structures sont représentées au conseil d'administration des organisations et près de la moitié d'entre elles ont d'autres canaux d'influence dans les organisations. Dans 15 % des cas, les cadres et les membres féminins ont constitué un réseau; les deux systèmes coexistent dans 4 % des cas (c'est-à-dire organisations et réseaux distincts ou auxiliaires).

2.3.8.1

Les organisations et réseaux séparés se trouvent essentiellement dans les organisations du groupe II (les syndicats), soit de 50 à 75 %. Dans le groupe III, la proportion est de 19 à 39 % et dans le groupe I, ce phénomène est beaucoup moins visible (6 à 19 %). Les organisations auxiliaires ne sont pas rares dans les organisations d'agriculteurs (33 %) et sont environ de 10 % dans les associations de consommateurs et de défense de la santé.

2.3.9

En ce qui concerne les politiques visant à valoriser la carrière des femmes, et en particulier à les préparer à occuper des postes de direction, 46 % des organisations en disposeraient. Les politiques les plus répandues sont la formation (26 %), l'aménagement du temps de travail/la garde d'enfants (22 %) et le contrôle/l'évaluation (19 %). Cependant, seul un quart des organisations applique ces modes de valorisation des carrières.

2.3.10

Les mesures accordées spécifiquement aux femmes se reflètent également dans les statistiques relatives à la présence des femmes dans les organisations. Près de la moitié des organisations représentées (48 %) déclarent établir de telles statistiques et la plupart d'entre elles disent les mettre à jour sur une base annuelle (67 %).

2.3.10.1

Ce sont les organisations du groupe II qui sont manifestement les plus actives dans ce domaine (nettement plus de 50 %), suivies par les organisations du groupe III avec environ un tiers. Les pourcentages pour le groupe I sont faibles. Une divergence très nette apparaît ici entre le très faible taux de collecte de statistiques déclaré (1 %) et les politiques de valorisation des carrières déclarées.

2.3.11

Dans 75 % des 61 cas mentionnés de politiques de valorisation des carrières des femmes, les personnes interrogées ont déclaré qu'elles avaient porté leurs fruits. Dans 40 organisations, il existe un service ou une personne responsable des politiques d'égalité hommes-femmes. Dans la moitié de ces cas, cette mission représente un équivalent temps plein.

2.3.11.1

La réussite s'est traduite par un accroissement du nombre d'employées aux postes-clés dans 49 % des cas et par un accroissement du nombre de femmes cadres dans 46 % des cas.

2.3.12

La présence des politiques d'égalité des chances est de 68 % dans les syndicats (groupe III), 25 % dans les organisations du groupe III et 5 % dans celles du groupe I.

2.3.13

Un certain nombre d'organisations (33 membres) ont déclaré que les questions relatives aux politiques de valorisation des carrières des femmes et d'égalité des chances ne les concernaient pas.

2.3.14

La proportion hommes/femmes parmi les représentants des organisations au sein du CESE semble être fortement corrélée à la proportion hommes/femmes parmi les représentants au niveau international, mais beaucoup moins à la proportion dans le cadre du dialogue social et pas du tout à la proportion au sein des enceintes nationales.

2.3.15

Compte tenu du fait que les personnes du groupe I ayant répondu estiment à 30 % le taux hommes/femmes dans leurs organisations, leur taux de participation hommes/femmes au sein du CESE est relativement élevé (35 %), ce qui est nettement supérieur aux résultats du groupe II (25 % avec une proportion hommes/femmes parmi les membres des organisations équivalant à 40 %) et du groupe III (27 % et 65/35 %).

2.3.16

Selon l'enquête, il semble que la proportion d'hommes et de femmes à la direction des organisations constitue un facteur majeur de la forte représentativité des femmes au sein du CESE (voir paragraphes 2.3.2 et 2.3.3). Le Parlement européen a invité les «partenaires sociaux» (les groupes d'intérêts économiques et sociaux) à «revoir leurs mécanismes de représentation et leurs procédures de sélection, ainsi qu'à faire d'une représentation équilibrée des femmes et des hommes un principe énoncé dans leurs statuts» (8).

2.3.16.1

Dans l'enquête, le CESE évoque les procédures de désignation des conseils d'administration, ainsi que les proportions hommes/femmes au sein de ces organes. La cooptation semblait la procédure la plus désavantageuse pour les femmes, de même que la désignation par des organisations associées. Les procédures jugées plus positives par les personnes ayant répondu ont été mentionnées trop rarement pour permettre de tirer des conclusions.

2.3.17

En mettant en rapport les proportions moyennes de représentants/représentantes dans les organes décisionnels et les différentes politiques visant à valoriser les carrières des femmes, la conclusion a pu être tirée que seuls les objectifs semblent être liés à une forte présence de femmes au sein des organes décisionnels. La double candidature et les quotas (à propos desquels il reste beaucoup à faire dans le cadre des discussions sur les programmes des partis politiques de l'UE) ont rarement été cités.

Bruxelles, le 14 février 2006.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  Lors d'échanges ultérieurs, le concept de «partenaires sociaux» a été défini: il désigne non seulement les organisations d'employeurs et les syndicats, mais également les autres groupes d'intérêts économiques et sociaux représentés au sein du CESE.

(2)  Voir «Report on balanced decision making in the EESC» (J. Oldersma, N. Lepeshko, A. Woodward), VUB Bruxelles, Université de Leiden, septembre 2004 (disponible uniquement en anglais), sur la page internet de la section spécialisée «Emploi, affaires sociales et citoyenneté» du Comité économique et social européen http://www.esc.eu.int/sections/soc/docs/balanced_decisionmaking_eesc.pdf.

(3)  Lorsque deux représentants ou plus de la même organisation ont répondu au questionnaire, leurs réponses ont été traitées comme une seule réponse.

(4)  Avec l'élargissement (en mai 2004), ce pourcentage a légèrement augmenté (26 %).

(5)  L'UNICE a du reste fourni au Parlement, à deux reprises en 2002, davantage de données que celles qui ont finalement été reprises dans ces documents.

(6)  Ainsi, entre le début des années 1990 et le début des années 2000, la part de femmes participant aux congrès de la CES est passée de 10/12 % à 30 %, au sein du conseil d'administration, ce chiffre est aujourd'hui de 25 % et du comité de direction de 32 %. Les organisations affiliées peuvent également faire preuve d'une évolution positive: ainsi, la plupart d'entre elles ont aujourd'hui des services consacrés à la représentation des femmes.

(7)  La Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail a réalisé une étude sur les conseils d'entreprise européens («European works councils in practice», 2004). Ce rapport comprend un certain nombre d'études de cas. Il montre qu'à quelques exceptions près, la représentation des femmes ne reflète pas correctement la composition du personnel. Cela est probablement dû à la composition des conseils d'entreprise des sociétés concernées au niveau national.

(8)  PE 315.516, A5-0279/2002.


ANNEXE

à l'avis du Comité économique et social européen

Le passage suivant de l'avis de section a été rejeté au profit d'amendements adoptés par l'assemblée, mais a obtenu au moins un quart des suffrages:

Paragraphe 1.8

Les quotas sont recommandés par bon nombre d'experts. Il n'est toutefois pas précisé que ces recommandations s'appliquent aux organisations économiques et sociales. Il convient néanmoins d'insister pour que les organisations concernées et la Commission explorent davantage cet outil qui s'est avéré efficace sur le plan politique dans certains pays.

Résultat du vote:

Voix pour: 42

Voix contre: 55

Abstentions: 8


11.4.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 88/37


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de Règlement du Conseil portant création d'une Agence des droits fondamentaux de l'Union européenne — Proposition de Règlement du Conseil autorisant l'Agence des droits fondamentaux de l'Union européenne à exercer ses activités dans les domaines visés au titre VI du traité sur l'Union européenne»

(COM(2005) 280 final — 2005/0124-0125 (CNS))

(2006/C 88/10)

Le 22 septembre 2005, le Conseil a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 24 janvier 2006 (rapporteur: M. SHARMA; corapporteuse: Mme LE NOUAIL MARLIÈRE).

Lors de sa 24e session plénière des 14 et 15 février 2006 (séance du 14 février), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 94 voix pour, aucune voix contre et 4 abstentions.

1.   Contenu essentiel du document de la Commission

1.1

L'objectif des propositions à l'examen est d'étendre le mandat de l'Observatoire européen sur les phénomènes racistes et xénophobes (OEPRX) et de créer une Agence européenne des droits fondamentaux, conformément à la décision du Conseil européen du 13 décembre 2003.

1.2

La principale différence entre la législation existante et les propositions à l'examen tient au fait que ces dernières étendent le champ d'intervention de l'Observatoire, actuellement limité au racisme et à la xénophobie, au-delà des systèmes réglementaires reconnus par l'ONU, l'OIT et le Conseil de l'Europe, à tous les domaines des droits fondamentaux traités dans la Charte, sans préjudice des domaines déjà couverts par le fonctionnement d'autres agences communautaires.

1.3

L'Agence s'occupera des droits fondamentaux en ce qui concerne la mise en œuvre du droit communautaire tant dans les États membres et dans les pays candidats à l'adhésion que dans les pays potentiellement candidats qui participent aux activités de l'Agence. En outre, la Commission pourra demander à l'Agence de lui fournir des informations et des analyses sur des pays tiers avec lesquels la Communauté a conclu des accords d'association ou des accords comportant des dispositions relatives au respect des droits de l'homme, ou avec lesquels elle a ouvert, ou prévoit d'ouvrir, des négociations en vue de la conclusion de tels accords.

1.4

L'objectif de l'Agence est de fournir aux institutions, organes et organismes compétents de la Communauté, ainsi qu'aux États membres lorsqu'ils mettent en œuvre le droit communautaire, une assistance et une expertise sur les droits fondamentaux, afin de les aider à respecter pleinement ces derniers lorsqu'ils adoptent des mesures ou formulent des plans d'action dans leur domaine de compétence respectif.

1.5

À l'intérieur de ces domaines thématiques, l'Agence collectera et évaluera, en toute indépendance, des données concernant, d'une part, les effets concrets sur les droits fondamentaux des mesures prises par l'Union et, d'autre part, les bonnes pratiques en matière de respect et de promotion de ces droits; elle émettra des avis sur l'évolution de la situation des droits fondamentaux dans la mise en œuvre des politiques, mènera des actions de sensibilisation du public sur tous les textes et les instruments réglementaires auxquels l'UE fait référence, encouragera le dialogue avec la société civile, coordonnera son action et mettra en place des réseaux avec différents acteurs du domaine des droits fondamentaux. Il y a lieu de souligner que l'Agence ne dispose d'aucun mécanisme de résolution des litiges.

1.6

La proposition à l'examen permet à l'Agence de poursuivre ses activités dans les domaines visés au Titre VI du traité sur l'Union européenne.

2.   Observations générales

2.1

Le Comité se félicite de la décision du Conseil européen de créer une Agence européenne des droits fondamentaux (ci-après dénommée «l'Agence») afin de mettre en valeur les principes et les pratiques de l'Union garantis par l'article 6 du TUE. Cette décision instituera un mécanisme pour la surveillance des droits fondamentaux dans l'Union qui pourrait contribuer à améliorer la coordination des politiques des États membres en matière de droits fondamentaux. Parmi les éléments de la proposition de la Commission dont le Comité se félicite tout particulièrement, l'on signalera notamment les points suivants:

l'utilisation de la charte des droits fondamentaux comme point de référence pour le mandat de l'Agence rendant, pour la première fois, les droits sociaux et culturels indissociables et leur conférant la même valeur. À cet égard, l'Agence dispose d'une capacité de réaction rapide pour la mise en œuvre des droits sociaux, y compris dans les relations entre l'UE et des pays tiers;

l'extension du champ d'application de l'Agence afin d'inclure des activités liées à la coopération policière et judiciaire en matière criminelle par le biais d'une décision du Conseil;

le recours à l'Agence en tant qu'expert technique dans le contexte de procédures entamées dans le cadre de l'article 7 du traité sur l'Union européenne;

les mesures proposées afin de garantir l'indépendance et l'intérêt public du conseil d'administration, du directeur et du Forum;

la participation de pays candidats ou potentiellement candidats.

2.2

Le Comité se félicite du 2e considérant de la proposition de règlement, qui reconnaît la portée des droits existants pour la protection des citoyens et des non-citoyens dans l'Union. Ce paragraphe stipule que «La Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne réaffirme les droits qui résultent notamment des traditions constitutionnelles et des obligations internationales communes aux États membres, du traité sur l'Union européenne et des traités communautaires, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, des Chartes sociales adoptées par la Communauté et par le Conseil de l'Europe, ainsi que de la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes et de la Cour européenne des droits de l'homme».

Le Comité reconnaît la nécessité de trouver un juste équilibre entre la sécurité, notamment les mesures de lutte contre le terrorisme, et la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans l'Union. Après les attentats du 11 septembre 2001 et les attentats récents de Madrid et de Londres, les droits de l'homme et les libertés fondamentales risquent d'être remis en cause par certaines des nouvelles mesures adoptées par les États membres. Toutefois, l'une des principales faiblesses de la coopération européenne dans le domaine de la sécurité réside dans le fait que ces politiques restent en dehors du cadre communautaire, dès lors qu'elles sont développées principalement selon la méthode intergouvernementale (troisième pilier de l'UE). Le rôle de l'Union européenne en la matière est par conséquent très limité. L'exclusion du Parlement européen et de la Cour de justice des Communautés européennes entraîne un manque de transparence dans le processus décisionnel. L'inclusion du troisième pilier de l'UE (Titre VI du TUE) dans les attributions de la nouvelle Agence serait essentielle pour préserver un bon équilibre entre la liberté, la sécurité et la justice dans les politiques élaborées par l'Union (1).

2.3

Le Comité reconnaît l'expertise et le mécanisme de surveillance existant du Conseil de l'Europe dans le domaine des droits de l'homme, et des libertés fondamentales, y compris les droits sociaux de la charte sociale européenne révisée ayant force exécutoire. Il reconnaît également la compétence du Conseil de l'Europe et de sa Cour européenne des droits de l'homme, pour traiter les cas de violation des droits de l'homme conformément aux conventions et aux lois internationales, pour lesquels l'Agence n'est pas compétente. Il est donc essentiel de renforcer la coordination et la coopération entre l'Agence et le Conseil de l'Europe.

L'Agence doit se référer, comme la Cour de justice des Communautés européennes dans ses avis et jugements, aux textes internationaux quant à l'interprétation et à l'application au droit primaire et dérivé de l'UE.

Le Comité réitère sa demande d'adhésion de l'UE à la Convention européenne des droits de l'homme et à la charte sociale révisée du Conseil de l'Europe, une fois que l'UE aura la compétence nécessaire à cet effet.

2.4

Le Comité est très préoccupé par le fait que la proposition ne prend pas position en faveur d'une large représentation de la société civile organisée dans la gestion du conseil d'administration et du forum des droits fondamentaux (ci-après dénommé «le Forum») de la nouvelle Agence. Cela est contraire au Livre blanc sur la «gouvernance européenne» qui stipule que «la société civile joue un rôle important en permettant aux citoyens d'exprimer leurs préoccupations et en fournissant les services correspondant aux besoins de la population. De plus en plus, la» société civile «considère que l'Europe offre de bonnes chances de modifier les orientations politiques et de changer la société. Cette attitude ouvre de réelles perspectives pour élargir le débat sur le rôle de l'Europe. Elle permet de faire participer plus activement les citoyens à la réalisation des objectifs de l'Union et de leur offrir un canal structuré pour des réactions, des critiques et des protestations»  (2) .

2.5

De l'avis du Comité, le Conseil d'administration et le Forum ne doivent pas être composés uniquement d'avocats et d'universitaires, mais doivent comprendre un échantillon plus large de la population et associer en leur sein plus particulièrement les ONG, les partenaires sociaux, les associations culturelles, religieuses et humanistes qui militent en faveur des droits fondamentaux des exclus et des groupes marginalisés de notre société.

3.   Observations particulières

3.1   Base juridique pour la création de l'Agence des droits fondamentaux de l'UE

3.1.1

L'on peut arguer du fait que le recours à l'article 308 du Traité et une décision du Conseil (Titre VI) ne suffisent pas pour garantir que l'Agence a compétence dans les domaines couverts par le droit communautaire. L'article 308 du Traité donne à la Communauté (et non à l'Union) le pouvoir de prendre les dispositions appropriées pour réaliser l'un des objectifs de la Communauté, si ledit Traité n'a pas prévu les pouvoirs d'action requis à cet effet. Si le fait de veiller à ce que l'action de la Communauté respecte pleinement les droits fondamentaux constitue bien un objectif général de la Communauté, aucun pouvoir spécifique n'est prévu à cette fin par le Traité.

3.1.2

La proposition de décision du Conseil à l'examen tend à permettre à l'Agence de poursuivre ses activités dans les domaines visés au Titre VI du traité sur l'Union européenne.

3.1.3

Le Comité souligne le fait que la protection et la promotion des droits de l'homme constituent les valeurs et les objectifs communs de l'Union tels qu'ils sont exprimés par l'article 6 paragraphe 4 du TUE, lequel stipule que «l'Union se dote des moyens nécessaires pour atteindre ses objectifs et pour mener à bien ses politiques.» Le Comité demande dès lors au Conseil de doter l'Agence d'une base juridique solide, conformément à l'article 6 paragraphe 4, afin de garantir que l'Agence dispose des pouvoirs nécessaires à l'exercice de ses fonctions.

3.2   Tâches de l'Agence (article 4)

3.2.1

Le Comité recommande l'insertion d'un nouveau paragraphe à l'article 2, précisant que l'un des objectifs de l'Agence est de formuler des recommandations dont les institutions, organes, bureaux et agences de la Communauté et de ses États membres pourront se prévaloir pour adopter des mesures et formuler des actions dans le domaine des droits fondamentaux et d'informer des possibilités de recours et d'action en justice, pour donner droit à des personnes ou des groupes discriminés par des législations ou pratiques d'États non respectueux de la notion d'état de droit.

L'Agence devra établir un rapport annuel sur la mise en œuvre des droits fondamentaux dans l'UE et des rapports périodiques dans le cadre de ses relations avec les institutions internationales, notamment sur les plans commercial et de l'aide au développement, et celui des accords d'association et de la Convention de Cotonou

3.2.2

De même, le Comité préconise que l'Agence peut, à la demande du Parlement, de la Commission ou du Conseil européens, procéder à la rédaction de l'évaluation sur la compatibilité entre la Charte des droits fondamentaux et toute proposition de nouvelle législation ou politique communautaire (y compris dans le domaine de la politique extérieure, comme dans le cas des échanges commerciaux avec des pays en développement), sans préjudice du droit d'effectuer, de sa propre initiative, des évaluations sur tout sujet relatif à une proposition de législation européenne, en accord ou sur proposition de ses conseils.

3.3   Domaines d'action (article 5)

3.3.1

Les réponses obtenues lors de la consultation ont montré que 90 % des personnes interrogées souhaitent que la lutte contre le racisme et la xénophobie ne soit pas délaissée par la nouvelle Agence. Le Comité se félicite dès lors de ce que l'article 5 de la proposition de la Commission précise que les domaines thématiques d'action de l'Agence dans le cadre du programme pluriannuel doivent toujours comprendre la lutte contre le racisme et la xénophobie.

3.3.2

Toutefois, le Comité estime qu'afin d'intégrer la lutte contre le racisme et la xénophobie aux domaines d'action de la nouvelle Agence, conformément à l'article 5 paragraphe premier alinéa b), il y a lieu de créer un comité spécial sur le racisme et la xénophobie au sein du Conseil d'administration afin de définir des orientations et d'allouer les ressources nécessaires à cet effet.

3.4   Le Conseil d'administration (article 11)

3.4.1   Composition

Le Comité préconise la création d'une Agence de type «inclusif», qui réunirait toutes les parties prenantes, et estime que cette approche doit se refléter dans la composition du Conseil d'administration (3). Toutefois, il est préoccupé par le fait que la proposition de Règlement ne prend pas position en faveur d'une représentation élargie de la société civile organisée au sein du Conseil d'administration.

Le Livre blanc de la Commission sur la gouvernance européenne stipule que «le Comité économique et social doit jouer un rôle dans l'établissement d'une nouvelle relation de responsabilité mutuelle entre les institutions et la société civile, conformément aux modifications de l'article 257 du traité CE approuvées à Nice»  (4). Le Comité préconise dès lors qu'une personnalité nommée par le Comité économique et social européen siège au sein du Conseil d'administration.

3.4.2   Accords sur la gouvernance

Le Comité est également préoccupé par la question de l'indépendance de l'Agence, vis-à-vis non seulement des institutions européennes mais aussi des États membres. Les expériences passées concernant l'OEPRX (Observatoire européen des phénomènes racistes et xénophobes) montrent que «les États membres, lorsqu'ils sont remis en question, cherchent parfois à intervenir davantage dans la gestion de l'Observatoire»  (5) . Étant donné que dans de nombreux cas, ce sont les États membres, agissant soit à titre individuel, soit à titre collectif au sein du Conseil, qui sont susceptibles d'enfreindre les droits humains fondamentaux dans le cadre de la mise en œuvre du droit communautaire, la nouvelle Agence doit être protégée contre toute intervention politique des États membres. Parmi les garanties, il y a lieu d'inclure la nomination de membres indépendants du Conseil d'administration.

La gestion de l'Agence doit pouvoir résister au regard critique de l'opinion publique. Le Livre blanc sur la gouvernance européenne énumère cinq principes de bonne gouvernance: ouverture, participation, responsabilité, efficacité et cohérence. Le Comité préconise que le Conseil d'administration soit nommé dans le cadre d'une procédure ouverte et transparente. Il suggère à la Commission de fournir aux États membres des profils correspondants aux postes de membres du Conseil d'administration. Afin de rendre la procédure de recrutement plus transparente, l'information pourrait être diffusée par le biais d'annonces dans les États membres ainsi par les réseaux existants tant au plan national que communautaire.

Le Comité invite en outre la Commission à approuver le budget (article 19 paragraphe 3) et le cadre pluriannuel (article 5 paragraphe premier) de la nouvelle Agence. Il estime qu'afin de garantir l'indépendance de l'Agence, il y a lieu de mettre en place des mécanismes permettant de veiller au respect du «principe de Paris» des Nations unies sur le statut et le fonctionnement des institutions nationales pour la protection des droits de l'homme.

3.4.3   Nombre des réunions du Conseil d'administration

De l'avis du Comité, le Conseil d'administration de l'Agence devrait se réunir au moins une fois par an afin de garantir une meilleure responsabilité et la participation des membres du Conseil d'administration.

3.5   Bureau exécutif (article 12)

Il a été proposé que le Bureau exécutif soit composé d'un(e) président, d'un(e) vice-président(e) et de deux représentant(e)s de la Commission. Du point de vue du Comité, le nombre de représentants de la Commission est particulièrement élevé, ce qui pourrait compromettre l'indépendance de l'Agence. Il préconise dès lors d'augmenter le nombre de membres du conseil d'administration de deux à cinq.

Le Comité réaffirme qu'il est souhaitable de renforcer la coordination et la coopération entre l'Agence et le Conseil de l'Europe, comme indiqué au point 2.3 et de se fixer comme objectif premier l'instauration d'une culture des droits de l'homme au sein de l'Union européenne. Dès lors, le Comité recommande que l'un des membres du conseil d'administration soit issu du Conseil de l'Europe. Ceci garantira une synergie et un rôle complémentaire entre l'Agence et le Conseil de l'Europe.

3.6   Forum des droits fondamentaux (article 14)

3.6.1

Le Comité est préoccupé par le fait que la proposition à l'examen ne prend pas position en faveur d'une large représentation de la société civile organisée au sein du Forum. Il estime que toutes les parties prenantes — ONG, partenaires sociaux, associations culturelles, religieuses et humanistes intéressées par la défense des droits de l'homme — devraient être représentées, et recommande de porter le nombre de membres représentant la société civile organisée à 1/3 au moins du total.

3.6.2

La Commission propose de confier la présidence du Forum au président de l'Agence. Dans la mesure où le Forum se doit d'être une caisse de résonance pour le conseil d'administration dans sa totalité et non pour le seul directeur. En conséquence, le Comité préférerait confier la présidence du Forum au président du conseil d'administration afin qu'il existe un lien étroit entre les deux postes.

3.6.3

L'expertise du réseau existant d'experts indépendants sur les droits de l'homme fondamentaux est précieuse. Le Comité recommande que le réseau des experts indépendants soit également représenté au sein du Forum.

3.7   Indépendance et intérêt général (article 15)

3.7.1

Afin de garantir l'indépendance de l'Agence, il y a lieu de mettre en place des mécanismes visant à veiller, dans la mesure du possible, au respect des «principes de Paris» des Nations unies sur le statut et le fonctionnement des institutions nationales pour la protection des droits de l'homme. C'est pourquoi le Comité recommande de remplacer l'article 15 paragraphe premier, qui stipule que «l'Agence s'acquitte de ses missions en toute indépendance» par la formulation suivante:

«L'Agence s'acquitte de ses missions en toute indépendance, conformément aux principes de Paris des Nations unies sur le statut et le fonctionnement des institutions nationales pour la protection des droits de l'homme».

3.8   Dispositions financières (Chapitre 5), article 19 (Établissement du budget)

Le Comité réitère son attachement aux principes de Paris relatifs à un financement adéquat visant à doter l'Agence des ressources nécessaires à l'exercice de ses fonctions et de ses activités. Le but de ce financement doit être de permettre à l'Agence de disposer du personnel, des locaux et des programmes dont elle a besoin. Sans garanties quant à son financement, l'Agence risquerait d'être vulnérable aux influences politiques de la part des institutions de l'UE et de ses États membres.

3.8.1

Dès lors, le Comité recommande d'insérer la phrase suivante avant l'article 19 paragraphe premier:

«(1A) L'Agence bénéficie d'un financement adéquat de la part de l'Union afin d'exercer ses fonctions tout au long du cycle de l'année budgétaire. Elle peut, à titre exceptionnel, demander des ressources additionnelles afin d'effectuer des tâches spéciales ou supplémentaires non prévues dans le budget annuel».

Bruxelles, le 14 février 2006.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  Avis du CESE sur le «Programme de La Haye: liberté, sécurité et justice» (rapporteur Mr. Pariza Castaños) – OJ C 65 du 17.3.2006.

(2)  COM(2001) 428 final, pages 14-15.

(3)  Avis CESE sur «l'Observatoire européen des phénomènes racistes et xénophobes» CESE 1615/2003, paragraphe 3.3.3, (JO C 80 du 30 mars 2004).

(4)  Traité de Nice, article 257, page 15.

(5)  Avis CESE sur «l'Observatoire européen des phénomènes racistes et xénophobes» CESE 1615/2003, paragraphe 3.3.4, (JO C 80 du 30 mars 2004).


11.4.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 88/41


Avis du Comité économique et social européen sur «La représentativité des organisations européennes dans la société civile dans le cadre du dialogue civil»

(2006/C 88/11)

Le 25 septembre 2003, le Comité économique et social européen a décidé, conformément aux dispositions de l'article 29 de son règlement intérieur, d'élaborer un avis sur: «La représentativité des organisations européennes de la société civile dans le cadre du dialogue civil».

et, conformément aux dispositions de l'article 19, paragraphe 1er, de son Règlement intérieur, le Comité a décidé de constituer un sous-comité pour préparer ses travaux en la matière.

Le sous-comité a adopté son projet d'avis le 12 janvier 2006 (rapporteur: M. Jan OLSSON).

Lors de sa 424ème session plénière des 14 et 15 février 2006 (séance du 14 février), le Comité économique et social européen a adopté l'avis suivant par 103 voix pour, 1 voix contre et 6 abstentions.

1.   Préambule

1.1

Au cours des dix à quinze dernières années, l'intérêt des institutions européennes pour un dialogue avec la société civile, en particulier la société civile organisée au niveau européen, n'a cessé de croître. Elles ont en effet reconnu qu'il ne peut y avoir de bonnes politiques sans écoute des citoyens, sans participation et sans assentiment des personnes concernées par les décisions communautaires.

1.2

L'expérience et l'expertise dont disposent les acteurs de la société civile, le dialogue entre eux et avec les autorités et institutions publiques, à tous les niveaux, la négociation et la recherche de convergences, voire de consensus, permettent de dégager des propositions en faisant prévaloir l'intérêt général. La qualité et la crédibilité de la décision politique s'en trouvent ainsi augmentées, car la compréhension et l'acceptabilité de cette décision par les citoyens en sont améliorées.

1.2.1

En offrant aux citoyens des possibilités de participer sur la base d'un engagement individuel et collectif à la gestion des affaires publiques par la contribution propre de la société civile organisée, la démocratie participative enrichit la démocratie représentative et renforce ainsi la légitimité démocratique de l'Union européenne.

1.3

Ceci étant, il convient de rappeler et de souligner que, du fait de sa composition et du rôle et des missions qui lui sont impartis par les traités depuis sa création, le Comité économique et social européen (CESE) est historiquement, et avant la lettre, un acteur à part entière de la démocratie participative au niveau européen et sa composante la plus ancienne.

1.4

Le «droit à participer», qui a été revendiqué par la société civile et les organisations actives au niveau européen depuis longtemps, revêt aujourd'hui une acuité particulière. Les enjeux et les défis auxquels est confrontée l'Union européenne sont tels qu'ils exigent la mobilisation de l'ensemble des acteurs de terrain et de leurs représentants.

1.5

Cet impératif a été reconnu notamment par le Conseil européen, réuni à Lisbonne les 23 et 24 mars 2000, à propos de la mise en œuvre de la Stratégie de Lisbonne (1) et mis une nouvelle fois en exergue par celui-ci, lors de sa réunion des 22 et 23 mars 2005, dans le contexte de la relance de cette Stratégie (2).

1.6

Dans son Livre blanc sur la gouvernance européenne (3) de juillet 2001, la Commission fait de la participation de la société civile à l'élaboration et à la mise en œuvre des politiques de l'Union à la fois l'un des principes de base d'une bonne gouvernance et l'un des domaines d'action prioritaires pour rénover la méthode communautaire et accroître le fonctionnement démocratique des institutions.

1.7

Le principe de la démocratie participative est également consacré par l'article I-47 du Traité établissant une Constitution pour l'Europe  (4) . À cet égard et malgré les aléas du processus de ratification du Traité constitutionnel, les institutions de l'UE doivent suivre cette logique et instaurer une authentique démocratie participative. Pour que celle-ci puisse satisfaire aux exigences d'une gouvernance européenne moderne, il reste cependant nécessaire de mettre en place les instruments qui permettront aux citoyens européens, et notamment aux organisations au sein desquelles ils agissent, de débattre, d'être consultés et d'influencer effectivement le développement de l'Union et de ses politiques dans le cadre d'un véritable dialogue civil structuré avec la société civile organisée.

1.8

Pour sa part, le CESE œuvre activement au développement de la démocratie participative, en partenariat avec les autres institutions de l'Union et les organisations représentatives de la société civile.

1.8.1

Le CESE a ainsi organisé en octobre 1999 la première Convention sur le rôle et la contribution de la société civile organisée dans la construction européenne et a émis, depuis cette date, plusieurs avis qui s'inscrivent dans la perspective d'un développement et d'une structuration accrue du dialogue entre les organisations de la société civile et les institutions européennes (5)  (6).

2.   Les acteurs du dialogue civil au niveau européen  (7)

2.1

Les acteurs du dialogue civil au niveau européen sont les organisations qui représentent les intérêts spécifiques et/ou généraux des citoyens. À ce titre, les organisations européennes de partenaires sociaux ont naturellement vocation à être partie au dialogue civil. Le dialogue social constitue à cet égard un excellent exemple de la mise en œuvre concrète du principe de la démocratie participative. Toutefois, il convient de souligner à nouveau la distinction fondamentale à opérer entre dialogue social et dialogue civil. Le dialogue social européen est clairement défini tant en termes de participants, que de finalités et de procédures, et les partenaires sociaux européens disposent de pouvoirs quasi législatifs (8). Il tire sa spécificité des pouvoirs spéciaux et des responsabilités de ses participants, lesquels agissent de manière autonome.

2.2

Au niveau européen, ces organisations se présentent sous une multitude de formes et de dénominations: association, fédération, fondation, forum et réseau, notamment, sont des appellations très communes (9). Souvent, ces différentes dénominations sont regroupées sous la terminologie «organisations non gouvernementales» (ONG) qui, de fait, est utilisée pour englober tous types de structures autonomes et sans but lucratif. Il s'avère également qu'un bon nombre des organisations européennes sont structurées sur le plan international.

2.3

Les organisations européennes coordonnent les activités de leurs membres et associés dans les différents États membres, et souvent au-delà. Elles se regroupent en outre, et de plus en plus fréquemment, pour constituer des réseaux européens, comme c'est le cas dans le domaine social, environnemental, des droits humains, du développement, de la consommation ou de l'économie sociale.

2.4

Afin d'illustrer l'ampleur acquise par les organisations européennes de la société civile et la manière dont elles s'articulent, un aperçu des organisations, fédérations et réseaux les plus significatifs dans les différents secteurs de la société civile organisée au niveau européen, à l'exclusion des organisations socioprofessionnelles, fait l'objet d'une annexe au présent avis. Une vingtaine de secteurs spécifiques est identifiée dans ce document.

2.4.1

Cet aperçu témoigne d'une structuration de plus en plus grande de la société civile organisée européenne et d'une diversité dans la structuration même des organisations concernées: elles peuvent être composées uniquement d'organisations nationales, voire dans certains cas également d'organisations régionales et locales, représentant un secteur donné; leurs membres peuvent être à la fois des organisations européennes et nationales comme des personnes morales et physiques de tous les niveaux. Le regroupement en réseau suit quant à lui généralement deux schémas: soit le réseau est composé d'organisations européennes d'un secteur donné, soit il associe des organisations nationales et européennes.

2.5

Il est évident qu'un certain nombre d'organisations européennes de la société civile, sans parler de certaines organisations ou réseaux nationaux, disposent généralement d'une expérience et d'une expertise qui les autorisent à revendiquer un droit à participer aux processus consultatifs dans le cadre de la formation des politiques de l'Union. Toutefois, il est tout aussi clair que, faute de critères objectifs d'appréciation, la représentativité des organisations européennes de la société civile, autres que les organisations de partenaires sociaux, est souvent mise en question. Le monde associatif est vu comme fragmenté car souvent morcelé en une multitude d'organisations et comme représentant souvent davantage les intérêts particuliers de leurs membres, plus que l'intérêt général, et manquant de transparence; il est en outre perçu par beaucoup comme incapable d'exercer une influence réelle dans le processus de formation des politiques et de préparation des décisions.

3.   L'exigence de représentativité

3.1

Le CESE a déjà souligné à plusieurs reprises que seule une représentativité clairement établie peut donner aux acteurs de la société civile un droit à participer de manière effective au processus de formation des politiques et de préparation des décisions communautaires.

3.1.1

Outre un principe démocratique fondamental, l'exigence de représentativité répond également au souci de conférer davantage de lisibilité et d'accroître l'influence de la société civile organisée au niveau européen.

3.1.2

Dans cette perspective, le CESE a élaboré des critères de représentativité qu'il a formulés, en dernier lieu, dans son avis du 20 mars 2002 sur le Livre blanc sur la gouvernance européenne (10). Pour pouvoir être considérée comme représentative, une organisation européenne devrait remplir neuf critères:

être dotée d'une structure durable au niveau européen;

avoir un accès direct à l'expertise de ses membres;

représenter des intérêts généraux, conformes aux intérêts de la société européenne;

être composée d'organisations qui, au niveau de leurs États membres respectifs, sont considérées comme représentatives des intérêts qu'elles défendent;

avoir des organisations affiliées dans la grande majorité des États membres;

prévoir une obligation de rendre compte («accountability») aux membres de l'organisation;

disposer d'un mandat de représentation et d'action au niveau européen;

être indépendante et ne pas être soumise à des directives émanant d'intérêts extérieurs;

être transparente, en particulier pour ce qui concerne ses finances et ses processus décisionnels.

3.1.3

Le CESE proposait toutefois dans ce même avis «de débattre de ces critères avec les institutions et les organisations de la société civile comme base d'une coopération pour l'avenir».

3.2

Afin d'éviter des malentendus quant au champ d'application des critères de représentativité établis dans le cadre du présent avis, il paraît nécessaire de distinguer clairement entre «consultation», ouverte en principe à toutes les organisations disposant d'une expertise dans un domaine donné, et «participation», en tant que possibilité donnée à une organisation d'intervenir formellement et activement dans un processus collectif de détermination de la volonté, dans l'intérêt général de l'Union et de ses citoyens. Ce processus, qui repose sur des principes démocratiques, permet aux organisations de la société civile d'être effectivement partie prenante dans la formation des politiques et la préparation des décisions relatives à l'évolution et à l'avenir de l'UE et de ses politiques (11).

3.2.1

Même si elle peut sembler revêtir un caractère essentiellement académique, cette distinction est pertinente: la représentativité constitue un préalable à la participation dans la mesure où elle confère une légitimité. Dans le cadre d'un processus de consultation, l'objectif est d'entendre les points de vues et de recueillir l'expertise des acteurs de la société civile sans imposer de condition préalable. La consultation n'en reste pas moins une composante très importante du dialogue civil.

3.3

Dans son Livre blanc sur la gouvernance européenne, précité, la Commission avait envisagé l'élaboration, dans certains secteurs où la pratique de la consultation est déjà bien établie, de normes de partenariat allant au-delà des normes minimales de consultation applicables à l'ensemble de ses services. La Commission conditionnait toutefois la conclusion de tels accords à des garanties de la part des organisations de la société civile en termes d'ouverture et de représentativité, mais sans que soit abordée la question des critères à appliquer.

3.4

La communication du 11 décembre 2002 (12) établissant les principes généraux et normes minimales applicables aux consultations engagées par la Commission avec les parties intéressées distingue, quant à elle, entre les consultations «ouvertes», dans le cadre d'une approche globale et non exclusive, et les consultations «ciblées» dans le cadre desquelles les parties intéressées et concernées par la consultation — les groupes cibles — sont clairement définis sur la base de critères de sélection qui doivent être «bien établis» et «transparents», selon les termes de la communication. Mais là encore, aucun critère n'est défini.

3.4.1

Dans cette même communication, la Commission souligne également l'importance qu'elle attache aux contributions d'organisations européennes représentatives mais renvoie aux travaux déjà accomplis par le CESE, sur la question des critères de représentativité pour la sélection des organisations susceptibles de participer au dialogue civil.

3.5

Conforté par le Traité de Nice dans son rôle d'intermédiaire privilégié entre la société civile organisée et les instances décisionnelles de l'Union, le CESE se trouve investi d'une responsabilité accrue pour:

d'une part, organiser les échanges de vues entre des représentants de la société civile animés par des motivations différentes et défendant des intérêts divergents, et

d'autre part, faciliter un dialogue structuré et continu entre les organisations et réseaux européens de la société civile organisée et les institutions de l'Union.

3.6

Il convient toutefois de souligner que le présent avis ne vise pas:

le dialogue sectoriel quotidien entre les organisations de la société civile et entre celles-ci et leurs interlocuteurs au sein des pouvoirs législatifs et exécutifs de l'Union, et en particulier au sein de la Commission (13);

le dialogue social européen et les organisations européennes de partenaires sociaux, dont la représentativité est clairement établie sur la base de critères propres à ces organisations. Il en est de même des organisations socioprofessionnelles qui sont impliquées dans le dialogue social sectoriel. Ces organisations ont néanmoins vocation à être des acteurs à part entière du dialogue civil.

3.7

Ceci étant, l'élaboration du présent avis s'inscrit en tout premier lieu dans une perspective de clarification et de rationalisation des relations du CESE avec les organisations et réseaux européens de la société civile et vise à conférer une crédibilité accrue au dialogue avec la société civile organisée en renforçant la légitimité de ces organisations et réseaux.

3.7.1

Cette perspective s'inscrit elle-même dans le cadre de la poursuite de la mise en place d'un dialogue renforcé et structuré avec la société civile organisée européenne à la fois:

sur un plan général, c'est-à-dire sur toutes questions d'intérêt commun liées en particulier à l'évolution et à l'avenir de l'Union européenne et

dans le cadre de l'exercice, par le CESE, de sa fonction consultative liée à la définition et à la mise en œuvre des politiques communautaires.

3.8

Cet avis pourrait également:

constituer un élément de réflexion utile, voire un point de référence, pour les autres institutions particulièrement dans la perspective d'une consolidation de la démocratie participative au niveau européen et de la mise en place d'un véritable dialogue civil européen, et

ouvrir un champ de coopération inter-institutionnelle incluant l'échange de bonnes pratiques, tout particulièrement avec la Commission et le Parlement européen, sans qu'il s'agisse, pour le CESE, de s'ingérer dans leur mode d'organisation du dialogue avec la société civile organisée européenne.

3.9

Le CESE souligne, dans ce contexte que la mise en place d'un système d'accréditation des organisations de la société civile auprès des institutions européennes présente à la fois des avantages et des inconvénients. Le présent avis ne constitue pas toutefois pour le CESE le cadre approprié pour se prononcer sur les mérites d'un tel système. Il estime néanmoins qu'il existe un lien étroit entre cette question et celle de la représentativité et qu'elles devront par conséquent être examinées parallèlement dans le cadre d'un large débat associant l'ensemble des parties concernées, institutions européennes et organisations de la société civile.

4.   Le CESE et les organisations européennes de la société civile: une approche pragmatique et ouverte

4.1

Conscient qu'il ne reflète que partiellement la diversité et l'évolution de ce que recouvrent les termes «société civile organisée», le CESE a entrepris des initiatives et mis en œuvre des réformes pour faire en sorte d'assurer une représentation aussi large que possible de la société civile organisée.

4.2

Il associe ainsi à ses structures et à ses travaux, sous diverses formes et d'une manière croissante, notamment les organisations et réseaux européens de la société civile qui ne sont pas ou pas encore directement représentés en son sein, sans toutefois que cette association repose sur des critères de représentativité explicites.

4.2.1

Ainsi, chacun des trois Groupes  (14) du CESE reconnaît des organisations européennes en leur conférant un statut d'organisation agréée. En principe, des membres du Comité ont des liens directs ou indirects avec ces organisations, mais cela n'est pas un impératif.

4.2.2

Au niveau des sections spécialisées  (15), les organisations européennes qui ont une contribution effective à apporter lors de l'élaboration d'avis sont souvent impliquées dans les travaux. Elles sont informées des travaux en cours, fournissent leurs observations et peuvent être représentées par des experts et participer aux auditions ou conférences qui sont organisées.

4.2.3

Le CESE organise des événements (conférences, séminaires, auditions, etc.) sur des thèmes transversaux, comme, par exemples et récemment, la Stratégie de Lisbonne, le développement durable et les perspectives financières 2007-2013; on mentionnera encore les rencontres de suivi des travaux de la Convention européenne (16).

4.2.3.1

Les participants issus de la société civile organisée sont choisis de manière pragmatique sur la base des propositions des groupes, des membres du CESE, des sections ou encore du Secrétariat. Ces évènements sont en principe également ouverts aux représentants d'organisations de la société civile ayant spontanément manifesté leur intérêt à y participer.

4.3

Une étape supplémentaire dans cette coopération a été franchie avec la création en 2004 d'un Groupe de Liaison entre le CESE et les représentants des principaux secteurs de la société civile organisée européenne. Il comprend actuellement — à côté des dix représentants du CESE (dont la Présidente du CESE, ainsi que les Présidents des trois Groupes et des six sections spécialisées — quatorze membres issus des principales organisations et réseaux actifs dans les secteurs représentés au sein du groupe de liaison, qu'il s'agisse ou non d'organisations disposant déjà du statut d'organisation agréée.

4.3.1

Ce Groupe de Liaison a pour mission de garantir, d'une part, une approche coordonnée du CESE vis-à-vis des organisations et réseaux européens de la société civile et, d'autre part, le suivi des initiatives décidées en commun.

4.4

Cet aperçu témoigne de l'approche pragmatique adoptée jusqu'à présent par le CESE qui se traduit généralement par une approche ouverte et non exclusive dans le cadre d'une structuration progressive de ses rapports avec la société civile organisée européenne. En ce qui concerne l'octroi du statut d'organisation agréée ou les consultations sectorielles menées par les sections, l'approche est toutefois plus ciblée.

4.5

À cet égard, le rapport final du groupe ad hoc «Coopération structurée avec les organisations et réseaux européens de la société civile» du 10 février 2004 souligne que «la question de la représentativité mérite incontestablement une grande attention» mais que «cette question ne doit pas faire obstacle à toute marche en avant» préconisant «la sagesse en la matière qui n'exclut pas la prudence, mais commande d'être ouvert et pragmatique».

5.   Une procédure en trois dimensions pour évaluer la représentativité

5.1

Il est évident que les critères définis par le CESE dans son avis relatif au Livre blanc sur la gouvernance européenne sont énoncés de manière inégalement claire. C'est pourquoi il paraît nécessaire d'en préciser la signification et la portée pour les rendre mesurables et applicables en pratique.

5.2

Dans ce contexte, le CESE estime qu'il importe de mettre en place une procédure claire, uniforme et simple d'évaluation de la représentativité des organisations européennes de la société civile, tout en évitant les problématiques complexes et propres à susciter des controverses.

5.3

Cette procédure doit permettre de procéder à l'examen des critères de façon adaptée à la structure et aux modes opératoires existants des organisations européennes. Elle devra aussi se fonder sur la participation des organisations proprement dites au processus d'évaluation en question. Le CESE n'envisage nullement d'empiéter sur l'autonomie de ces organisations.

5.4

C'est pourquoi cette procédure devrait se fonder sur les principes suivants:

transparence;

objectivité;

non-discrimination;

possibilité de vérification;

participation de la part des organisations européennes.

5.5

Il est proposé que la procédure comporte trois bases d'évaluation, à savoir:

les dispositions des statuts de l'organisation et leur application;

l'implantation de l'organisation dans les États membres;

des critères qualitatifs.

5.5.1

Les deux premières bases d'évaluation sont claires et se rapportent à la structure propre à chaque organisation. Elles offrent ainsi de bonnes possibilités d'évaluer de manière relativement objective la représentativité de l'organisation tout en préservant la dynamique de la société civile. La troisième dimension est plus complexe.

5.6

Le CESE est d'avis que la démarche proposée ne comporte aucune charge ou contrainte particulière pour les organisations en question, mais qu'elle exige une transparence en ce qui concerne leurs structures et leurs modes opératoires. La transparence constitue d'ailleurs un principe démocratique de base et d'intérêt général car elle permet aux différents groupes d'intérêts présents dans la société et aux citoyens, à titre individuel, ainsi qu'aux autorités publiques, de pouvoir prendre connaissance de ce que sont les structures et les activités des organisations et de former leur propre jugement à leur sujet.

5.7

À partir de ces principes et bases d'évaluation, il devrait être possible pour le CESE de développer une procédure permettant d'apprécier la représentativité des organisations européennes de la société civile. Cette procédure pourrait être rendue opérationnelle par la mise en place d'un instrument spécial d'évaluation en collaboration avec, en tout premier lieu, le Groupe de Liaison avec les organisations et réseaux européens de la société civile.

6.   Les statuts et leur application

6.1

Le CESE considère qu'il existe un lien direct et étroit entre les critères qu'il a déjà proposés et les statuts dont sont dotées les organisations européennes de la société civile.

6.2

En principe, toutes les organisations actives au niveau européen, qu'elles soient de droit ou de fait, devraient en effet être dotées de règles statutaires (17).

6.3

Dans l'esprit des critères que le CESE a déjà définis (18) et dans la perspective de les rendre pleinement opérationnels, les statuts d'une organisation européenne devraient indiquer ou prévoir:

ses champs d'activité et les objectifs qu'elle poursuit;

les critères d'affiliation;

les modalités de fonctionnement qui doivent être démocratiques, transparentes et impliquer notamment la notion de responsabilité («accountability») des organes dirigeants vis-à-vis des organisations membres;

les engagements financiers des organisations membres;

la présentation annuelle d'un rapport financier audité, ainsi que d'un compte rendu d'activités, au caractère public.

6.4

En l'absence d'une législation européenne, chaque organisation adopte en toute indépendance ses statuts dans le cadre de la législation nationale applicable (19).

6.4.1

À cet égard, il peut être utile de mentionner que dès 1991 (20), la Commission européenne avait proposé un texte législatif destiné à permettre la constitution «d'associations européennes». Ce texte avait pour objet la création d'une forme juridique qui serait propre aux associations ayant des affiliés dans plusieurs États membres, à l'instar de ce qui existe pour les sociétés par actions et pour les coopératives. Les dispositions matérielles figurant dans cette proposition coïncident avec ce qui est proposé plus haut à propos du contenu des statuts.

6.4.2

Cette proposition, en faveur de laquelle le CESE s'était prononcé (21), a été bloquée du fait de l'opposition d'un certain nombre d'États membres et a même été maintenant retirée par la Commission. Le CESE reste convaincu qu'un tel statut est un instrument essentiel à l'affirmation du droit d'association en tant que liberté fondamentale consacrée par la Charte des Droits fondamentaux de l'Union et expression de la citoyenneté européenne. Il estime en outre que les principes énoncés à l'article I-47 du Traité constitutionnel devraient constituer une incitation à réouvrir le dossier.

6.4.3

En conséquence, le CESE plaide à nouveau pour la création d'un statut européen des associations transnationales, par analogie avec le statut des partis politiques européens qui est entré en vigueur en novembre 2003 (22), plaidoyer qui s'inscrit également dans la logique des propositions formulées dans le présent avis.

6.5

Ceci étant, il convient néanmoins de partir du principe qu'il appartient aux organisations membres de garantir, par des mécanismes et procédures appropriés, le contrôle des règles statutaires et de leur application dans le cadre des processus démocratiques internes de décision propres à l'organisation concernée.

6.6

Afin d'assurer une transparence effective du fonctionnement des organisations européennes de la société civile, il conviendrait que ces statuts, le rapport financier et le compte rendu d'activités annuels, ainsi que tous renseignements relatifs aux engagements financiers des organisations membres et aux sources de financement soient rendus publics, si possible également par leur publication sur le site Internet de chacune des organisations concernées.

7.   L'implantation de l'organisation dans les États membres

7.1

Parmi les critères proposés par le CESE, figure celui selon lequel une organisation européenne doit avoir dans la grande majorité des pays membres des organisations affiliées qui soient reconnues comme représentatives des intérêts qu'elles défendent.

7.2

Pour les besoins de l'application pratique de ce critère, le CESE estime qu'une organisation européenne doit avoir une présence dans plus de la moitié des États membres de l'Union européenne pour pouvoir être considérée comme représentative. Une telle exigence apparaît nécessaire, même si le récent élargissement de l'UE rend la situation plus complexe.

7.3

Afin de rendre possible l'appréciation de cette implantation toute organisation européenne devrait en toute hypothèse rendre public la liste de ses organisations membres, qu'il s'agisse d'organisations (personnes morales) indépendantes de groupes d'intérêts extérieurs et représentant la société civile dans les pays membres et/ou de regroupements européens d'organisations de même nature.

7.4

L'appréciation de la situation d'une organisation européenne ou des organisations nationales qui lui sont affiliées pour pouvoir les considérer comme reconnues et les présumer représentatives est, en toute hypothèse, difficile. Les considérations qui suivent devraient guider une telle appréciation.

7.5

Il convient de partir du principe que l'affiliation d'une organisation, qu'elle soit nationale ou transnationale, à une organisation européenne répond non seulement aux critères d'affiliation prévus par les statuts de l'organisation européenne concernée, mais également à ceux prévus par les propres statuts de l'organisation affiliée.

7.6

Dès lors, il convient que les organisations nationales affiliées, de la même manière que l'organisation européenne dont elles sont membres, fassent connaître de manière transparente leurs statuts et leur compte rendu d'activité, ce qui permet de rendre visible la structure de l'organisation et ses modes opératoires. Il serait aussi souhaitable, comme l'exige le Conseil de l'Europe, de pouvoir connaître le nombre de membres individuels directement ou indirectement affiliés.

8.   Critères qualitatifs

8.1

Les critères dont il a été question ci-dessus peuvent, par leur nature même, faire l'objet d'une évaluation objective relativement aisée. Plus délicates, par contre, sont l'application et l'évaluation de critères qualitatifs. Certes, les statuts d'une organisation, en particulier les buts et moyens d'action dont elle est dotée, ainsi que l'étendue de son implantation géographique, apportent certains éléments d'appréciation. Cependant, ils peuvent s'avérer insuffisants pour évaluer la représentativité d'une organisation. Ceci étant, les critères qualitatifs constituent plutôt un instrument d'appréciation de la capacité contributive des organisations considérées.

8.2

Dans ce contexte, il convient de rappeler à nouveau que cet avis ne traite pas d'organisations ayant l'expertise requise pour participer à un processus de consultation ouvert (voir plus haut), mais de celles qui sont appelées à participer effectivement et de manière formelle au processus de formation des politiques. Ceci justifie donc que l'analyse soit approfondie.

8.3

Ainsi, les critères qualitatifs renvoient d'une part, à l'expérience d'une organisation et à sa capacité à traduire les intérêts des citoyens auprès des institutions européennes et d'autre part, à la confiance qui lui est faite et à la réputation qui lui est reconnue par ces institutions comme par d'autres composantes de la société civile organisée en Europe.

8.4

C'est pourquoi il faut évaluer la capacité contributive d'une organisation européenne, et partant sa représentativité qualitative, en s'appuyant sur la manière dont l'organisation en question peut témoigner, par son activité, de son degré d'engagement dans les processus consultatifs menés par les institutions européennes.

8.5

Il est fondamental à cet égard que les organisations européennes concernées présentent leurs comptes rendus d'activités et toute autre information pertinente sous une forme transparente. Des «indicateurs de performance» pourraient être également utilisés, comme cela se pratique en particulier dans le domaine universitaire et de la recherche, indicateurs à définir en coopération avec les organisations européennes de la société civile.

8.6

En toute hypothèse, le CESE entend agir en la matière de façon transparente, pragmatique et objective dans le cadre d'un processus dynamique et ouvert.

Bruxelles, le 14 février 2006.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  Au point 38 de ses conclusions (doc. SN 100/00), le Conseil européen déclare que:

«L'Union, les États membres, les collectivités régionales et locales, ainsi que les partenaires sociaux et la société civile seront activement associés dans diverses formes de partenariat».

(2)  Au point 6 de ses conclusions (doc. 7619/05), le Conseil européen souligne que:

«À côté des gouvernements, tous les autres acteurs concernés – parlements, instances régionales et locales, partenaires sociaux, société civile – doivent s'approprier la stratégie et participer activement à la réalisation de ses objectifs».

(3)  COM(2001) 428 final du 25 juillet 2001 - JO C 287 du 12 octobre 2001.

(4)  L'article I-47 du Traité constitutionnel prévoit notamment en son paragraphe 2 que «les institutions de l'Union entretiennent un dialogue ouvert, transparent et régulier avec les associations représentatives et la société civile», tandis que le paragraphe 1 demande aux institutions de donner, par les voies appropriées la possibilité notamment aux «associations représentatives» de faire connaître et d'échanger publiquement leurs opinions dans tous les domaines d'action de l'Union.

(5)  Voir à cet égard la documentation relative à la «Première Convention de la société civile organisée au niveau européen» des 15 et 16 octobre 1999 (CES-2000-012-FR), ainsi que les avis pertinents: «Le rôle et la contribution de la société civile organisée dans la construction européenne», 23 septembre 1999 (CES 851/1999 - JO C 329 du 17 novembre 1999), «La Commission et les organisations non gouvernementales - Renforcement du partenariat», 13 juillet 2000 (CES 811/2000 - JO C 268 du 19 septembre 2000), «La société civile organisée et la gouvernance européenne – contribution du Comité à l'élaboration du Livre blanc», 26 avril 2001 (CES 535/2001 - JO C 193 du 10 juillet 2001), «La gouvernance européenne – un Livre blanc», 21 mars 2002 (CES 357/2002 – JO C 125 du 27 mai 2002).

(6)  Le CESE a également organisé deux autres conférences traitant de cette problématique, la première les 8 et 9 novembre 2001 sur «Le rôle de la société civile organisée dans la gouvernance européenne» et la seconde les 8 et 9 mars 2004 intitulée «Démocratie participative: état et perspectives ouvertes par la Constitution européenne».

(7)  Pour le Comité économique et social européen, le dialogue civil prend trois formes:

 

La première est le dialogue entre les organisations européennes représentatives de la société civile sur l'évolution et l'avenir de l'Union et de ses politiques;

 

La deuxième est le dialogue structuré et régulier entre l'ensemble de ces organisations et l'Union et enfin

 

La troisième est le dialogue sectoriel quotidien entre les organisations de la société civile et leurs interlocuteurs au sein des pouvoirs législatifs et exécutifs.

(8)  Voir articles 137 et 138 du traité.

(9)  Le répertoire des organisations de la société civile sans but lucratif constituées au niveau communautaire, qui a été établi sur une base volontaire par la Commission européenne (base de données CONECCS) répertorie près de 800 organisations dont un certain nombre, il est vrai, est à ranger dans la catégorie socioprofessionnelle.

(10)  Voir note en bas de page no5 point 4.2.5 de l'avis (CES 357/2002).

(11)  Voir notamment l'avis du Comité du 26 avril 2001 sur «la société civile organisée et la gouvernance européenne - contribution du Comité à l'élaboration du Livre blanc» (CES 535/2001 - JO C 193 du 10 juillet 2001 - point 3.4).

(12)  COM(2002) 704 final.

(13)  La problématique de la représentativité n'en reste pas moins, dans ce contexte, une question primordiale dans la perspective de conférer aux organisations de la société civile un droit effectif, non seulement à être consultées, mais également à participer dans des processus de formation des politiques sectorielles de l'Union et de préparation des décisions y afférentes, ainsi qu'à la mise en œuvre et au suivi de ces décisions. Elle soulève toutefois des questions d'une nature et d'une portée différentes, à de nombreux égards, de celles abordées dans le cadre du présent avis, ce qui justifie qu'elle fasse, le moment venu, l'objet d'un examen particulier.

(14)  Le CESE est structuré en trois Groupes représentants les employeurs (Groupe I), les salariés (Groupe II) et les autres composantes à caractère économique et social de la société civile organisée (Groupe III).

(15)  Le CESE compte six sections spécialisées qui traitent l'ensemble des domaines d'activités de l'Union européenne dans lesquels il exerce sa fonction consultative.

(16)  Conformément à la déclaration du Conseil européen de Laeken du 15 décembre 2001, la Convention européenne avait notamment mandat de nouer le dialogue avec la société civile. Cette tâche a été assurée par Jean-Luc Dehaene, Vice-président de la Convention, avec lequel le CESE a organisé huit rencontres d'information et de dialogue avec les organisations et réseaux européens de la société civile, sans exclusive, rencontres auxquelles ont participé des membres de la Convention et plus particulièrement de son Présidium. Le succès de ces rencontres a été confirmé par la coopération fructueuse entre le Parlement européen et le CESE dans la préparation et la tenue des auditions des organisations et réseaux qui ont précédé l'adoption par la commission des affaires constitutionnelles de son rapport parlementaire sur le traité constitutionnel en novembre 2004. Dans un premier temps, le CESE avait organisé, en présence du 1er Vice-président de la commission des affaires constitutionnelles et des deux rapporteurs du Parlement européen une audition des représentants de toutes les organisations intéressées. Dans un deuxième temps, les porte-parole des réseaux représentatifs ont été invités à s'exprimer directement devant la commission parlementaire.

(17)  Il apparaît que certains des grands réseaux européens eux-mêmes sont dotés de statuts. Cela s'applique, par exemple, à la Plate-forme des ONG européennes du secteur social et à CONCORD, réseau d'ONG actives dans le domaine du développement. D'autres, par contre, ne sont pas dotés de statuts propres. Cela s'applique en tout état de cause au «Green 9», regroupement d'ONG environnementales, et au réseau des Droits humains qui rassemble des ONG actives dans le domaine des droits de l'Homme.

(18)  Voir le point 3.1.2. ci-dessus.

(19)  La législation belge prévoit, par exemple, le statut d'Association internationale sans but lucratif (AISBL).

(20)  COM(91) 273/1 et 2.

(21)  Avis CES 642/92 du 26 mai 1992JO C 223 du 31 août 1992.

(22)  JO L 297 du 15 novembre 2003.


11.4.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 88/48


Avis du Comité économique et social européen sur la «Création d'une assiette consolidée commune pour l'impôt sur les sociétés dans l'UE»

(2006/C 88/12)

Le 13 mai 2005, M. László KOVÁCS, membre de la Commission européenne, a, en vertu de l'article 262 du traité instituant la communauté européenne, saisi le Comité économique et social européen d'une demande d'avis sur la «Création d'une assiette consolidée commune pour l'impôt sur les sociétés dans l'UE».

La section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 27 janvier 2006 (Rapporteur: M. Lars NYBERG).

Lors de sa 424ème session plénière des 14 et 15 février 2006 (séance du 14 février), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 94 voix pour, 6 voix contre et 4 abstentions.

Conclusions et recommandations

Dès 1992, le rapport Ruding a constaté la nécessité de disposer de règles communes pour définir l'assiette. L'on voulait en outre élargir la proposition à la question des taux d'imposition minima et maxima.

Maintenant qu'un groupe de travail créé pour travailler sous la direction de la Commission va élaborer une proposition d'assiette consolidée commune pour l'impôt sur les sociétés, le CESE y voit une mesure allant enfin dans la bonne direction. Le fait que les travaux doivent prendre trois ans paraît nécessaire, compte tenu de la complexité de la question. Ce groupe mène aussi ses travaux dans une grande transparence. Tous les documents sont directement mis en ligne sur Internet, de telle sorte que toute personne qui le souhaite est en mesure de suivre les discussions. Ce que l'on devrait dorénavant éviter est une situation où la réticence à modifier des systèmes nationaux établis de longue date pourrait retarder la mise en place de l'assiette commune. Les États membres doivent montrer que le fait d'appartenir à l'union européenne présente un intérêt, étant donné que c'est seulement par le moyen de l'union européenne que l'on peut mettre en place une assiette commune consolidée pour l'impôt sur les sociétés. De même, il faut pour l'instant mettre en sommeil la question des taux d'imposition, de manière à atténuer les difficultés auxquelles se heurte la prise de décision concernant l'assiette.

Essentiellement, les systèmes d'imposition doivent se déterminer par des voies politiques. Il est nécessaire d'établir des règles communes pour l'impôt sur les sociétés par la voie de l'intervention du Conseil des ministres et du Parlement européen, afin d'éviter que faute de cela, la réglementation dans ce secteur ne naisse progressivement des décisions juridictionnelles de la Cour européenne de justice. De même, il importe de mener les discussions en coopération avec les partenaires sociaux et, au demeurant, avec la société civile.

La question que soulève une assiette commune de l'impôt sur les sociétés est du type «rien n'est clair jusqu'à ce que tout soit clair». Quand il existe un important risque de retards, l'on devrait néanmoins examiner en tout temps s'il n'est pas possible de mettre en œuvre progressivement par le moyen de directives ponctuelles les décisions partielles sur lesquelles l'accord s'est réalisé.

Les questions à envisager sont en partie juridiques, en partie du domaine technique de la fiscalité et en partie économiques. Nous voudrions inviter la Commission et les États membres, malgré le grand nombre de questions techniques de détail et malgré les différences considérables qui existent entre les pays, à néanmoins considérer avant tout les avantages économiques que comporte une assiette consolidée commune en matière d'impôt sur les sociétés.

L'on peut trouver la synthèse du débat que nous avons eu dans les propositions relatives aux principes d'une assiette consolidée commune pour l'impôt sur les sociétés, que nous présentons en conclusion du présent avis. En ce qui concerne les travaux relatifs aux aspects techniques, nous voudrions en même temps inviter la Commission à toujours se laisser guider par les principes que nous indiquons. Nous avons choisi de privilégier les raisonnements de principe, car nous croyons que l'acceptation de ces principes rend plus faciles les choix à effectuer entre différentes solutions techniques.

1.   Contexte

1.1

Le 13 mai 2005, le commissaire Laszlo Kovacs a demandé au CESE de rendre un avis exploratoire sur une assiette consolidée commune pour l'impôt sur les sociétés. Le commissaire a fait observer que cette assiette devrait permettre d'éliminer un grand nombre des problèmes rencontrés par les sociétés qui ont des activités dans plusieurs pays de l'UE. La proposition bénéficie d'un soutien considérable de la part des entreprises et de beaucoup de gouvernements.

1.2

Depuis 2001, la Commission a publié plusieurs communications et rapports concernant l'impôt sur les sociétés, et notamment un important rapport sur la fiscalité des entreprises en octobre 2001.

1.2.1

Après un «non-papier» en juillet 2004 relatif à une assiette consolidée commune pour l'impôt sur les sociétés et après un débat au Conseil des ministres, a été constitué un groupe spécial composé d'experts des États membres. Jusqu'en 2007, ce groupe effectuera un examen de détail de tous les aspects concernant la structure pratique d'une assiette commune. Ces débats, ainsi que le présent avis, portent uniquement sur l'assiette pour le calcul de l'impôt sur les sociétés et non sur le taux de cet impôt sur les sociétés. La question de ce que l'on appelle «l'imposition selon les règles de l'État de résidence» («home-state taxation») n'est pas abordée, elle non plus. Il s'agit là d'un éventuel projet pilote à caractère conjoncturel, alors que l'assiette commune est un projet global.

1.3

Les débats portent non seulement sur la mise en place d'un système commun pour la détermination de l'assiette, mais aussi sur le fait que cette assiette doit être consolidée. Cela concerne très précisément les sociétés qui ont des activités dans plusieurs États membres. Pour qu'un système d'assiette commune puisse fonctionner de façon optimale, il faut que ces sociétés puissent passer à une assiette uniforme et calculer leurs bénéfices pour le groupe de sociétés dans son ensemble. Les calculs se trouvent ainsi consolidés. Ainsi, le besoin se fait sentir de systèmes permettant de déterminer la part de bénéfices réalisés par chacune des sociétés membres du groupe.

1.4

Les débats concernent seulement l'impôt sur les sociétés et non pas tous les aspects de la fiscalité des entreprises. Il existe de nombreuses formes de sociétés, telles que, par exemple, les organisations sans but lucratif et les fondations, qui sont différentes d'un État membre à l'autre. Si l'on met en place une assiette commune pour les sociétés anonymes, l'on modifie les rapports entre ces sociétés et les autres types de sociétés et d'entreprises au plan de l'imposition des bénéfices. Des corrections peuvent donc devenir nécessaires au niveau national en ce qui concerne l'imposition des bénéfices d'autres types de sociétés et d'entreprises. Cet aspect n'est pas envisagé par le groupe d'experts de la Commission et des États membres qui est évoqué plus haut; et il n'est pas non plus envisagé dans le présent avis.

2.   Avis antérieurs du CESE concernant l'assiette de l'impôt sur les sociétés

2.1

Le CESE a examiné dans plusieurs avis les problèmes suscités par les différences existant en matière d'assiette de l'impôt sur les sociétés dans les différents pays de l'UE. Le CESE considère que l'objectif poursuivi est de créer des conditions équitables de libre concurrence qui soient bénéfiques à l'activité transfrontalière des entreprises sans déstabiliser les systèmes nationaux d'imposition des société (1). La démarche préconisée par le CESE est d'essayer en premier lieu de trouver des solutions en matière d'assiette commune de l'impôt sur les sociétés et ensuite seulement d'examiner la question des taux d'imposition (2).

2.2

Une assiette commune de l'impôt sur les sociétés devrait pouvoir réduire, voire éliminer, la majorité des obstacles que rencontre l'activité transfrontalière des sociétés au sein de l'Union européenne. Comme exemples de ces problèmes, l'on peut citer:

la double imposition,

la tarification interne pour les transactions transfrontalières,

la manière de concevoir les provisions de différents types lors de la fusion de sociétés de différents pays,

la répartition de la localisation des bénéfices ou des pertes en capital lors de la restructuration de groupes de sociétés situées dans plusieurs pays,

la compensation des pertes subies par une société qui a des activités dans plusieurs pays et

les différences entre les règles relatives au traitement fiscal des investissements.

2.2.1

Même si l'impôt sur les sociétés est un facteur important pour ce qui est de créer une situation bénéfique, il ne faut pour autant pas perdre de vue que de nombreux autres facteurs peuvent également revêtir une importance cruciale à la fois pour le commerce transfrontalier et pour la localisation des entreprises (3).

2.3

Le CESE a également précisé que ce ne sont pas seulement les différences en matière d'assiette proprement dite qui font problème. Il existe aussi beaucoup de différences concrètes entre les réglementations applicables, par exemple, à la façon dont les impôts sont collectés, aux documents à publier et au règlement des conflits. Il devrait être possible d'atténuer aussi toute une série de problèmes de cette nature au moyen des règles concrètes qui doivent accompagner la mise en place d'une assiette commune (4).

2.3.1

N'avoir qu'un seul corps de réglementations à connaître et à appliquer est peut-être le plus grand avantage pratique que voient les sociétés dans un système d'assiette commune. Au lieu d'une comptabilité distincte dans les différentes entités d'un groupe de sociétés, il leur sera possible d'utiliser une comptabilité uniforme. Outre qu'elle peut permettre de créer des conditions de concurrence plus équitables, une assiette commune de l'impôt peut déboucher sur des gains d'efficacité non seulement pour les sociétés, mais aussi pour l'administration fiscale (5).

2.4

Le CESE a également recommandé que le débat sur une assiette commune soit élargi pour englober non seulement le problème central, mais aussi les problèmes transfrontaliers. La mise en place d'une assiette commune doit faciliter non seulement le fonctionnement des sociétés ayant une activité transfrontalière, mais aussi le fonctionnement de celles qui n'ont d'activité qu'au niveau national. La poursuite de l'objectif principal, qui est d'assurer des conditions de concurrence équitables pour les sociétés qui ont des activités dans plusieurs pays ne doit pas aboutir à créer de nouvelles différences entre ces sociétés et les sociétés qui n'ont d'activité qu'au niveau national.

2.4.1

Il y a également en ce domaine le désir de faciliter le fonctionnement des petites entreprises dont l'activité se situe presque entièrement au niveau national. Les efforts visant à créer des règles simples et claires en matière d'imposition sont aussi très importants à cet égard (6).

2.5

Le CESE a précédemment fait observer qu'il n'est pas possible de mettre en place une assiette commune sur base volontaire — autrement dit, sur une base permettant de choisir entre un système d'imposition national qui continuerait d'exister et un système particulier pour les sociétés ayant une activité transfrontalière. C'est pourquoi le CESE estime que la mise en place d'une assiette commune pour l'impôt sur les sociétés doit avoir un caractère obligatoire (7).

2.6

Le CESE a toujours défendu l'idée selon laquelle il fallait dans toute la mesure du possible établir un lien entre les règles d'assiette commune d'imposition et les règles internationales de comptabilité. Le Comité a conscience que les normes IFRS de comptabilité internationale ne peuvent servir que de point de départ aux règles d'assiette commune d'imposition.

2.7

Un effet indésirable de l'incapacité qui a été jusqu'ici celle du Conseil des ministres et du Parlement européen à prendre des décisions sur une assiette commune de l'impôt sur les sociétés est que les choix qu'il faut de toute façon effectuer se trouvent portés devant la Cour européenne de justice. Aussi longtemps qu'il existera des différences, des décisions de justice seront nécessaires pour arbitrer entre les différents systèmes d'imposition. De cette façon, les systèmes d'imposition des États membres prennent progressivement la marque des décisions de la Cour en matière de marché intérieur sans qu'aucune décision politique ne soit prise. (8)  (9) L'on trouve un exemple patent de cette situation dans l'affaire «Marks and Spencer», qui a récemment fait l'objet d'une décision de la Cour européenne de justice.

2.8

Le désir du CESE d'envisager l'imposition des sociétés dans une plus large perspective politique signifie que la neutralité fiscale doit être considérée non seulement dans le contexte de l'impôt sur les sociétés, mais aussi par rapport aux deux facteurs de production que sont le travail et le capital. Cette position de principe est toutefois liée en premier lieu à la question de savoir quel est le taux d'imposition choisi (10).

2.9

L'intégration et une concurrence accrue sont des phénomènes qui vont de pair. Cela peut augmenter l'efficacité et la croissance. Mais cela suppose dans le même temps que ceux qui ne peuvent pas affronter une concurrence accrue ne puissent pas compenser leur insuffisance de productivité par une réduction de la fiscalité des sociétés. Afin de réaliser les effets positifs de l'intégration, il faut donc éliminer les éléments de la fiscalité des sociétés qui sont susceptibles de fausser la concurrence (11).

2.10

Avec une assiette qui est commune et, il faut l'espérer, obligatoire, l'on dispose de possibilités plus importantes de contrôler le paiement de l'impôt, en raison du fait qu'il suffit aux autorités de connaître un seul système et que ces autorités sont dès lors plus facilement en mesure de communiquer les unes avec les autres. Il deviendrait donc plus facile de détecter bon nombre de cas d'évasion fiscale. Un système commun d'assiette qui serait non contraignant, c'est-à-dire où l'on pourrait choisir entre ce système commun et le système national restant en place pour déterminer l'assiette de l'impôt sur les sociétés qui n'ont d'activité qu'au niveau national, créerait en outre une situation dans laquelle au lieu des sociétés, ce serait les États qui devraient gérer plusieurs systèmes d'imposition.

3.   Certains faits concernant l'impôt sur les sociétés

3.1

Les recettes de l'impôt sur les sociétés varient selon le pays où l'impôt est prélevé. Ce phénomène s'explique en premier lieu par les différences de taux d'imposition (entre 12,5 et 40 %), mais en fait, précisément parce que l'assiette varie, l'on ne voit pas clairement la mesure dans laquelle cela dépend des différences de taux d'imposition (12).

3.2

La Commission a fourni des informations sur ce que l'on appelle «le taux d'imposition implicite», c'est-à-dire un taux qui indique quelle est la proportion des bénéfices d'une société qui est effectivement payée au titre de l'impôt. Le plus souvent, l'on voit au contraire de simples comparaisons des taux d'imposition. Ceci peuvent être trompeurs, comme par exemple dans le cas où un taux d'imposition élevé correspond à des recettes fiscale modestes parce que les possibilités de déductions sont importantes. Les recettes fiscales peuvent également varier en fonction de l'efficacité du recouvrement et de la nature des contrôles qui existent. La mise en place d'une nouvelle solution efficace en termes d'organisation administrative de la fiscalité a également de l'importance au regard des ressources qu'une société doit mobiliser pour gérer le paiement de l'impôt sur les sociétés (13).

3.3

L'OCDE a constaté en 1990 que 60 pour cent du commerce mondial s'effectuent à l'intérieur de groupes de sociétés. Les différences entre les systèmes d'imposition nationale deviennent ainsi un problème pour les sociétés dans la mesure où elles se répercutent à l'intérieur de ces sociétés.

3.4

Il est difficile de quantifier les effets économiques d'une assiette commune pour l'impôt sur les sociétés. Dans une étude qui est d'actualité, l'on estime que l'effet sur le PIB se situe entre 0,2 % et 0,3 % du PIB. Les estimations portent uniquement sur les règles de détermination de l'assiette et ne tiennent compte ni de la consolidation, ni des économies administratives. Il convient aussi d'envisager cela en liaison avec le fait que l'impôt sur les sociétés représente dans son ensemble environ 3 % du PIB (14).

3.5

Les grandes sociétés représentent à l'heure actuelle la majorité des activités transfrontalières. C'est pourquoi les différences entre systèmes d'imposition des sociétés leur posent un problème. Celles dont l'activité se situe dans plusieurs pays ont néanmoins acquis l'expertise nécessaire et sont parvenues à financer les coûts supplémentaires. Mais les sociétés les plus durement touchées par les différences de systèmes d'imposition sont probablement les petites et moyennes entreprises qui ont envisagé d'avoir des activités en dehors de leur pays d'origine, mais ont renoncé à le faire. Des règles communes atténueraient sensiblement les obstacles qui empêchent les entreprises de commencer à étendre leurs activités à plus d'un pays. Il y a là beaucoup de place pour une intégration accrue et un renforcement de la concurrence, ce qui pourrait être l'un des grands bénéfices d'un système commun de calcul de l'assiette pour l'impôt sur les sociétés.

4.   Décisions communes adoptées jusqu'à présent en matière d'impôt sur les sociétés

4.1

Seules trois directives ont jusqu'à présent été adoptées dans le domaine de l'impôt sur les sociétés. La directive sur les sociétés mères et les filiales (90/435) prévoit que le dividende d'une filiale dans un pays donné n'est pas imposable dans l'État membre de la société mère. La non-imposabilité peut néanmoins être remplacée par une règle en vertu de laquelle l'impôt qui a été payé dans le pays de la filiale est déductible de l'impôt à payer dans le pays de la société mère.

4.2

La directive concernant les fusions (90/434) régit l'imposition en cas de restructuration de sociétés. Toutefois, étant donné que les dispositions de droit civil font défaut pour les fusions et les scissions transfrontalières, cette matière n'entre pas encore dans le champ d'application de la directive. Aussi la directive régit-elle essentiellement l'aliénation de certaines activités.

4.3

Une troisième directive a récemment été adoptée pour traiter de l'imposition des intérêts et des redevances entre les sociétés étroitement liées (2003/49). La directive supprime l'imposition à la source pour ce type de transferts transfrontaliers.

4.4

Depuis 1997, il existe un code de conduite de l'imposition des sociétés, code en vertu duquel les États membres ne doivent pas attirer les investissements au moyen de mesures qui sont dommageables d'un point de vue fiscal. Aux termes du code, les pays s'engagent à ne pas instaurer de nouveaux impôts dommageables et à passer en revue par la suite leurs dispositions existantes. Ce code a été complété par une liste de 66 mesures fiscales qui sont considérées comme dommageables. Ces mesures sont maintenant en cours d'abrogation.

5.   Le débat sur les aspects techniques

5.1

Les règles régissant les types de déductions autorisées pour la détermination de l'assiette avant le calcul de l'impôt relèvent du domaine où les différences entre les pays sont les plus grandes en matière de calcul de l'assiette et constituent dès lors un sujet important dans les discussions entre les États membres. À cet égard, nous voudrions attirer tout particulièrement l'attention sur l'importance qu'il y a à s'efforcer d'asseoir sur des bases larges l'impôt sur les sociétés. Il faut toutefois se rappeler que l'élargissement de l'assiette risque d'obliger à revoir le taux d'imposition.

Malheureusement, le débat doit commencer à la base. L'on peut déjà aujourd'hui traiter les dépenses différemment selon qu'elles sont considérées comme des dépenses ordinaires, et donc prises en compte dans le calcul de l'assiette proprement dite, ou comme des dépenses qui doivent être déduites des bénéfices après la détermination de l'assiette. Il reste encore aux experts en fiscalité beaucoup de travail à effectuer avant de parvenir à des propositions communes.

5.2

Il faut que le système de l'assiette soit compétitif, de manière à créer des conditions favorables aux investissements à l'intérieur de l'UE. Le système d'imposition ne doit cependant pas en général influer sur le type d'investissements réalisés, ni sur le choix de l'État membre où ils se réalisent. C'est la rentabilité qui est la considération déterminante, et non la question de savoir comment financer un investissement. Il doit évidemment y avoir aussi des possibilités d'encourager, par exemple, des investissements favorables à l'environnement ou de les orienter vers des régions défavorisées, mais cela peut se faire commodément par d'autres moyens qu'en utilisant l'assiette de l'impôt sur les sociétés.

5.2.1

De même, il importe de maintenir une ligne de partage bien claire par rapport à l'imposition des revenus. La question de savoir comment traiter les dividendes payés aux actionnaires relève du domaine de l'impôt sur le revenu. Il ne faut pas faire intervenir cette question dans les discussions sur les modes d'imposition des bénéfices des entreprises proprement dits. Au demeurant, la question de l'impôt sur le revenu n'entre pas en jeu dans les décisions des sociétés en matière de choix d'implantation de leurs installations.

5.3

Même s'il est possible de parvenir à un système d'assiette commune, celui-ci doit prévoir des règles différenciées pour certains secteurs. Il peut, par exemple, y avoir lieu de fixer dans certains secteurs des règles particulières en matière de provisions. Peut être concerné, à cet égard, le secteur bancaire et financier, et tout spécialement l'assurance-vie, où les provisions ont souvent une importance particulière précisément pour ce secteur. Un autre exemple est la sylviculture, où dans les cas extrêmes, les recettes peuvent rentrer à des intervalles de l'ordre de cent ans.

5.4

Un autre aspect à envisager est la question de savoir si une société est principalement financée par des prêts ou par des fonds propres. Si les coûts résultant des intérêts des prêts sont déductibles de l'impôt, seule une petite partie des recettes de la société sont imposées au titre de bénéfices sur le faible nombre d'actions. S'il n'existe aucun prêt et que le financement est intégralement assuré par le capital social, tout est imposé comme bénéfices. Il faut dans toute la mesure du possible éviter d'orienter le choix du financement au moyen de l'impôt sur les sociétés.

5.5

Une fois que l'on a établi quelles déductions il y a lieu d'effectuer, il reste encore à décider quand et comment effectuer ces déductions. La plus grande différence entre les États membres concerne la question de savoir si chaque type d'investissement est amorti individuellement ou si l'on utilise un système en vertu duquel tous les investissements sont agrégés et traités globalement. Le système de traitement global est facile à gérer pour les sociétés. Il n'y a besoin d'aucun calcul pour des machines ou des équipement distincts.

5.6

Afin de pouvoir mettre en place un système d'assiette consolidée où les bénéfices sont calculés pour l'ensemble d'un groupe de sociétés, l'on est obligé de définir ce qu'est un groupe de sociétés. Les possibilités de définition sont les suivantes: un pourcentage de la propriété de chaque société membre du groupe, ou bien le lien entre chaque société membre et l'activité de la société mère. Il semble nécessaire d'opter pour un mélange de ces critères, puisqu'il n'y a aucune raison de mettre en place une assiette consolidée pour des sociétés dont les propriétaires sont les mêmes, si elles opèrent dans des secteurs distincts.

5.7

Une fois que l'on s'est entendu sur la manière d'établir l'assiette pour calculer l'impôt sur les sociétés, reste la difficulté que suscite la question de la consolidation: comment répartir entre les différents pays la localisation des bénéfices des sociétés qui opèrent dans plusieurs pays? Afin d'éviter l'utilisation des systèmes d'imposition pour délocaliser les bénéfices, une assiette commune ne suffit pas; il faut également disposer d'un système simple et logique pour décider comment répartir entre les États membres (et donc entre des pays ayant des taux d'imposition différents) la localisation des bénéfices de la société. Agréger de la sorte les bénéfices réalisés dans différents pays par des entités qui font partie d'une entreprise conduit aussi, nécessairement, à élargir la coopération entre les administrations fiscales.

5.7.1

À la lumière de ces contraintes, il peut être intéressant d'étudier le système utilisé au Canada (la localisation des bénéfices est répartie pour moitié en fonction de la proportion de main-d'œuvre et pour moitié en fonction du chiffre d'affaires).

5.8

Pour que la répartition de la localisation des bénéfices puisse fonctionner simplement dans la pratique, il faut uniformiser d'autres règles que le seul calcul de l'assiette. Les calculs devraient par exemple se faire sur la base d'une année entière et le paiement de l'impôt devrait avoir lieu en même temps dans tous les pays. Il devrait être aussi obligatoire d'effectuer des transferts normalisés sous forme électronique.

5.9

L'un des effets les plus importants de la mise en place d'une assiette commune est de rendre le système transparent. Actuellement, la seule donnée visible pour un profane est le taux d'imposition. Pour montrer à quel point cela peut être trompeur, il suffit de comparer le taux d'imposition des sociétés avec la part de PIB que représentent les recettes provenant de cet impôt. Les chiffres de 2003 indiquent que c'est en Allemagne, où le taux d'imposition est de 39,5 %, que cette part est la plus faible, c'est-à-dire 0,8 %. Il faut probablement mettre cela en rapport, dans une certaine mesure, avec l'existence de problèmes de définition en matière d'assiette. Les «nouveaux» États membres perçoivent en moyenne 2,7 % du PIB, avec des taux d'imposition qui oscillent entre 35 et 15 %. La plupart des «anciens» États membres perçoivent environ 3 % du PIB avec des taux d'imposition qui varient entre 38 et 12,5 % (15). Il importe de rendre apparentes des différences qui présentent une telle diversité et qui sont aussi inattendues, et ce non seulement dans l'intérêt des entreprises, mais aussi dans une perspective démocratique, dans l'intérêt des électeurs.

6.   Principes d'une assiette consolidée commune pour l'impôt sur les sociétés (16)

6.1   Larges bases d'imposition

Le but des impôts est de financer le bien-être des citoyens. Il convient donc que la base d'imposition soit aussi large que possible. Les bases d'imposition larges contribuent également à réduire autant que possible les effets de distorsion qui s'exercent sur le fonctionnement de l'économie, étant donné que cela permet de maintenir à un niveau faible le taux d'imposition proprement dit.

6.2   Neutralité

Une assiette commune pour l'impôt sur les sociétés doit être neutre envers les différentes possibilités d'investissement et ne pas fausser la concurrence entre les secteurs. Ce sont des considérations financières réalistes qui doivent déterminer à quel endroit les sociétés localisent leurs activités et à quel endroit se situe l'assiette d'un point de vue technique. Une assiette neutre contribue à assurer des conditions équitables de libre concurrence entre les sociétés.

6.3   Simplicité

Les règles communes doivent dans le même temps se caractériser par la simplicité, la clarté et la transparence. L'exigence de simplicité suppose, lorsque cela peut se faire au plan fiscal, un lien avec les règles internationales de comptabilité, qui sont déjà appliquées par beaucoup de sociétés. Des règles identiques en matière de date et de modalités de paiement aboutissent aussi à des systèmes plus simples.

6.4   Efficacité

L'imposition doit être efficace aussi dans le sens où la vérification doit être facile, de sorte que l'on puisse prévenir les erreurs d'imposition et lutter contre la fraude fiscale.

6.5   Stabilité

Il importe que des systèmes d'imposition soient stables. Les investissements des sociétés doivent se justifier sur le long terme, et comme les systèmes d'imposition sont un élément qui entre en ligne de compte dans les décisions d'investissement, ces systèmes ne doivent pas être susceptibles d'un nombre excessif de changements.

6.6   Légitimité

Le système doit être accepté par ceux qu'il affecte directement, les partenaires sociaux, et par la population dans son ensemble, puisqu'il s'agit du financement d'activités nécessaires à la collectivité.

6.7   Équité

La répartition entre les États membres de la localisation des bénéfices calculés au moyen d'une assiette commune de l'impôt sur les sociétés est le fondement d'un système équitable. Une répartition équitable contribue à laisser aux États membres la liberté de déterminer eux-mêmes le niveau du taux d'imposition.

6.8   Concurrence internationale

Lors de la définition du système d'assiette, l'on devrait également prendre en considération la question de savoir comment ce système se rapporte aux systèmes d'imposition des sociétés qui existent dans les pays tiers.

6.9   Caractère obligatoire

Afin d'éviter de créer de nouvelles différences en matière d'imposition à l'intérieur des États membres, les règles de détermination de l'assiette doivent, dans un système optimal, être obligatoires à la fois pour les sociétés ayant des activités transfrontalières et pour les sociétés ayant des activités dans un pays seulement. Si un système commun se conforme aux autres principes applicables et se révèle suffisamment simple et compétitif pour les entreprises, l'opposition entre un système obligatoire et un système facultatif a tôt fait de devenir hypothétique. Ainsi, la question de savoir si un système obligatoire sera ou non remis en question dépend de la manière dont ce système sera perçu.

6.10   Règles intérimaires /transitoires

Néanmoins, laisser un libre choix aux sociétés peut être acceptable en tant que système intérimaire. Un grand changement tel que la mise en place d'une assiette commune pour l'impôt sur les sociétés peut également rendre nécessaire d'adoption de règles transitoires. Un système intérimaire est une autre solution possible, à côté de l'adoption de règles transitoires, et assure davantage de flexibilité dans la mise en œuvre d'un système commun.

6.11   Règles souples en matière de prise de décision

Malgré la nécessité de disposer d'un système d'imposition stable à long terme pour les sociétés, il est nécessaire de pouvoir disposer de possibilités de modification, en raison des changements qui se produisent dans le monde environnant ou afin de remédier aux failles du système. Il peut par exemple se trouver que le système produise des effets qui ne sont pas les effets attendus. La décision relative à un système commun devrait donc comporter des règles permettant d'assurer avec souplesse la mise en œuvre des adaptations nécessaires.

Bruxelles, le 14 février 2006.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  «Politique fiscale de l'Union européenne — Priorités pour les prochaines années», avis du CESE – JO C 48/18 du 21.02.2002, p. 73.

(2)  «La fiscalité dans l'Union européenne: principes communs, convergence des règles fiscales et possibilité de vote à la majorité qualifiée», avis du CESE – JO C 80/33 du 30.03.2004, p. 139.

(3)  «La concurrence fiscale et ses effets sur la compétitivité des entreprises», avis du CESE – JO C 149/16 du 21.06.2002, p. 73.

(4)  «La fiscalité directe des entreprises», avis du CESE – JO C 241/14 du 7.10.2002, p. 75.

(5)  «La fiscalité directe des entreprises», avis du CESE – JO C 241/14 du 7.10.2002, p. 75.

(6)  «La fiscalité directe des entreprises», avis du CESE – JO C 241/14 du 7.10.2002, p. 75.

(7)  «La fiscalité directe des entreprises», avis du CESE – JO C 241/14 du 7.10.2002, p. 75.

(8)  «Un marché intérieur sans obstacles liés à la fiscalité des entreprises: réalisations, initiatives en cours et défis restants», JO C 117/10 du 30.4.2004, p. 41.

(9)  Dans le courant des années 2003 et 2004, la Cour de justice des CE a rendu 25 décisions en matière de fiscalité directe.

(10)  «La fiscalité directe des entreprises», avis du CESE – JO C 241/14 du 7.10.2002, p. 75.

(11)  «La fiscalité dans l'Union européenne: principes communs, convergence des règles fiscales et possibilité de vote à la majorité qualifiée», avis du CESE – JO C 80/33 du 30.03.2004, p. 139.

(12)  «La fiscalité directe des entreprises», avis du CESE – JO C 241/14 du 7.10.2002, p. 75.

(13)  «La fiscalité dans l'Union européenne: principes communs, convergence des règles fiscales et possibilité de vote à la majorité qualifiée», avis du CESE – JO C 80/33 du 30.03.2004, p. 139.

(14)  Economic effects of tax cooperation in an enlarged European Union (effets économiques de la coopération fiscale dans une Union européenne élargie), Copenhagen Economics 2004 (Copenhagen Economics (2005), p. 36).

(15)  Structures of the taxation systems in the European Union (structures des systèmes fiscaux dans l'Union européenne), édition 2005 de Copenhagen Economics.

(16)  Aucune hiérarchisation des principes n'est à déduire de l'ordre dans lequel ceux-ci sont présentés.


11.4.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 88/53


Avis du comite economique et social europeen sur «l'efficacite energetique»

(2006/C 88/13)

Par lettre du 7 juin 2005, la Commission a demandé au Comité économique et social européen, conformément aux dispositions de l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, d'élaborer un avis sur: «L'efficacité énergétique».

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 31 janvier 2006 (rapporteur: M. BUFFETAUT).

Lors de sa 424ème session plénière des 14 et 15 février 2006 (séance du 14 février), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 78 voix pour, 2 voix contre et 1 abstention.

1.   Conclusion: promouvoir l'efficacité énergétique

1.1

La recherche d'efficacité énergétique est devenue une nécessité pour les entreprises dès lors les accords volontaires sont de nature à répondre aux défis majeurs de renchérissement de l'énergie dans la plupart des cas.

1.2

L'Union européenne jouerait un rôle particulièrement utile en systématisant l'information sur les bonnes pratiques et les innovations en ce domaine. La DG énergie pourrait devenir une sorte de plaque tournante de l'information en matière d'efficacité énergétique.

1.3

Les campagnes de sensibilisation du public peuvent jouer un rôle utile. Pour être efficaces elles doivent être menées au plus près des consommateurs finaux et des secteurs professionnels concernés. Il appartient donc aux autorités nationales et locales d'en prendre la responsabilité.

1.4

Enfin le recours à la réglementation ne doit pas être la règle mais plutôt l'exception dans la mesure où bien des instruments juridiques ont déjà été adoptés et qu'il convient de dresser un bilan de leur mise en œuvre.

1.5

L'efficacité énergétique n'est pas un slogan, un luxe ou un gadget. Dans un contexte international où la demande énergétique ne va cesser de croître, notamment en raison du rapide développement de pays émergeants tels la Chine, l'Inde ou le Brésil, il y va de l'intérêt des citoyens, des entreprises, des États membres et de l'Union européenne. L'Agence internationale de l'énergie prévoit que la demande d'énergie mondiale va croître de 60 % d'ici à 2030, pendant que l'Union européenne — qui est dépendante à 80 % des combustibles fossiles — verra ses importations énergétiques passer de 50 à 70 % durant la même période. Or, face aux pays producteurs et aux autres grands pays consommateurs, l'Union européenne n'est pas un acteur unifié du marché énergétique mondial. C'est bien pourquoi Tony Blair, en tant que Président du Conseil, plaida pour la création d'une politique commune de l'énergie lors du sommet informel d'Hampton Court en octobre dernier.

1.6

Il ne faut pas se cacher le fait que l'explosion de la demande et le renchérissement des coûts de l'énergie peuvent peser lourdement sur la croissance économique de l'Union européenne, inciter à délocaliser certaines activités très consommatrice d'énergie, et par contrecoup dégrader la situation sociale d'États membres déjà exposés à des tensions fortes sur leurs systèmes de protection sociale dans un contexte de vieillissement de la population et de déclin démographique. À cet égard, les mesures d'efficacité énergétique sont tout à fait judicieuses, car elles contribuent en fin de compte à la réduction des coûts et partant, à un accroissement de la compétitivité.

1.7

De même la compétition pour s'assurer les ressources en énergie peut entraîner des crispations politiques fortes voire une menace pour la paix dans certaines régions du monde, menace qui peut facilement s'étendre par le biais du terrorisme international.

1.8

Enfin l'usage raisonnable, efficace et économe des sources d'énergie est une nécessité d'équilibre vital pour notre planète et pour les générations futures.

1.9

Le CESE considère que le livre vert «comment consommer mieux avec moins» soulève des questions pertinentes et propose des voies d'action réalistes. Il soutient de façon très déterminée la volonté de réduire la consommation d'énergie de 20 % et considère nécessaire non seulement de parvenir très rapidement à l'objectif de réduction annuelle de la consommation d'énergie de 1 %, mais encore de se fixer pour but, dans une seconde étape, une réduction effective de 2 %.

1.10

Il estime que les accords volontaires avec les grands secteurs économiques constituent sans doute une solution efficace et préférable, lorsque c'est possible, à des mesures réglementaires contraignantes.

Les deux secteurs les plus consommateurs d'énergie étant les transports et le bâtiment, c'est à leur égard que les efforts les plus soutenus doivent être consentis et les innovations recherchées.

L'introduction continue et progressive d'innovations performantes sur le plan de l'efficacité énergétique répond à la fois à la demande des consommateurs et des industriels. L'Union européenne et les États membres doivent s'engager fortement dans des politiques convergentes visant à promouvoir l'efficacité énergétique, l'échange des bonnes pratiques et la diffusion des meilleures technologies ainsi que dans des campagnes d'information et d'incitation auprès des ménages et des consommateurs.

2.   Introduction

En 2000, la Commission avait souligné le besoin urgent de promouvoir plus activement l'efficacité énergétique, tant au niveau de l'Union européenne qu'à celui des États membres. Ce besoin était affirmé tant au regard des objectifs adoptés par les accords de Kyoto, qu'au regard de la nécessité d'initier une politique énergétique plus soutenable pour un continent largement dépendant en matière de ressources et de renforcer la sécurité d'approvisionnement.

Un plan d'action visant à renforcer l'efficacité énergétique dans la Communauté européenne avait donc été publié, dont les objectifs étaient les suivants:

attirer l'attention sur l'efficacité énergétique,

proposer des mesures et des actions communes dans le cadre des accords de Kyoto,

clarifier les rôles respectifs de la Communauté et des États membres,

réaliser le potentiel d'amélioration de l'efficacité énergétique, l'objectif étant de parvenir à une réduction de 1 % par an de l'intensité énergétique, objectif cumulatif supposé dépassable,

diffuser de nouvelles technologies.

2.1   Cinq ans après où en sommes-nous?

L'objectif de 1 % reste un objectif à atteindre mais un certain nombre d'instruments juridiques ont été mis en place, des accords d'objectifs signés avec certains secteurs économiques, des réflexions plus larges initiées par la Commission ou à la demande du Conseil, les accords de Kyoto sont entrés en vigueur, des objectifs de développement des énergies renouvelables fixés. Il est au demeurant probable que l'objectif de réduction de l'intensité énergétique ne sera pas linéaire et que, secteur par secteur, l'on passera par des seuils de progression.

2.1.1   Des instruments juridiques

Certains ont été adoptés, d'autres sont en cours d'adoption; certains sont «ciblés», d'autres plus larges: règlement sur le programme d'étiquetage de produits énergétiquement efficaces (1), directive sur la performance énergétique des bâtiments (2), directive relative à la promotion de la cogénération (3), proposition de directive relative à l'efficacité énergétique dans les utilisations finales et aux services énergétiques (4).

En outre, des accords négociés avec certains secteurs économiques déterminent des normes d'efficacité minimales; ces accords volontaires représentent une alternative à l'élaboration de nouvelles législations.

Ce faisant, il convient toutefois de veiller à ne pas créer un enchevêtrement de normes juridiques trop nombreuses se chevauchant mutuellement, ce qui entraînerait un accroissement supplémentaire de règles bureaucratiques difficiles à démêler, constituerait ainsi de manière générale un obstacle pour l'économie, et irait donc à l'encontre de l'objectif affiché d'une amélioration de l'efficacité dans le secteur énergétique.

2.1.2   Des réflexions plus vastes

Dans le même temps, l'Union européenne s'est engagée dans des réflexions plus vastes, se traduisant notamment par des stratégies, dont la stratégie de développement durable adoptée par le Conseil européen de Göteborg en 2001 et qui devait être renouvelée avant la fin 2005, ce qui n'a malheureusement pas été fait; peuvent aussi être citées les stratégies thématiques sur le recyclage, l'utilisation durable des ressources naturelles, ou sur le développement urbain qui comportent des aspects énergétiques.

2.1.3   Kyoto

Le protocole de Kyoto est entré en vigueur après la ratification par la Fédération de Russie, mais sans les États-Unis d'Amérique qui n'en consacrent pas moins des sommes considérables à la recherche sur les moyens de réduire les émissions de CO2.

Dans ce cadre, la Commission a publié une communication intitulée «vaincre le changement climatique planétaire» et le Conseil européen de printemps a affirmé sa volonté d'imprimer un nouvel élan aux négociations internationales.

2.1.4   Le développement des énergies renouvelables

Des politiques et des objectifs de développement des énergies renouvelables ont été mis en place, notamment en ce qui concerne l'énergie éolienne, mais au-delà, l'ensemble des écotechnologies.

Il demeure que la demande énergétique ne cesse de croître et que la dépendance énergétique de l'Union européenne reste forte et pourrait peser très lourdement sur des performances économiques déjà insuffisantes, dans un contexte mondial de très fort accroissement de la demande, notamment en raison de la croissance de pays émergeants comme la Chine, l'Inde, et le Brésil.

La réflexion et la mise en œuvre d'une politique d'efficacité énergétique européenne n'est donc pas un luxe mais une triple nécessité:

nécessité de développement durable,

nécessité économique,

nécessité d'indépendance politique.

Les réflexions du CESE s'articuleront donc sur le thème «l'efficacité énergétique, nécessité de développement durable, de compétitivité et d'indépendance économiques» qui recoupe les préoccupations du Livre vert.

3.   Le Livre vert sur l'efficacité énergétique

3.1

La Commission a publié le 22 juin 2005 un Livre vert sur l'efficacité énergétique intitulé: «Comment consommer mieux avec moins». Cette publication survient après la publication et le commencement des débats parlementaires sur la proposition de directive relative à l'efficacité énergétique dans les utilisations finales et aux services énergétiques et après la saisine du CESE d'un avis exploratoire sur l'efficacité énergétique. Cette chronologie a pu paraître déconcertante dans la mesure où les Livres verts précèdent généralement les textes de nature juridique, mais le champ de ce Livre vert est plus étendu que celui de la proposition de directive. L'avis exploratoire du CESE pourra, quant à lui, être considéré comme une contribution à la consultation engagée par la Commission.

3.2

Partant du constat que malgré les discours sur un usage plus rationnel de l'énergie la demande énergétique ne cesse de croître, la Commission estime qu'il convient de donner «une impulsion forte à un programme vigoureux de promotion de l'efficacité énergétique à tous les niveaux de la société européenne». Elle considère que l'Union européenne pourrait économiser au moins 20 % de sa consommation actuelle d'énergie. Le CESE se félicite de l'ambition affichée par la Commission ainsi que par le Parlement européen en matière d'objectifs et de diversification de l'approvisionnement. Il considère que se met en place un effet d'entraînement vertueux qui, de surcroît, devrait être créateur d'emplois par le développement de nouvelles technologies. Toutefois il faut veiller à ce que les politiques énergétiques engagées ne conduisent pas à une augmentation des coûts de l'énergie qui entraînerait une augmentation des coûts de production dans un contexte de concurrence mondiale exacerbée. Ainsi les certificats d'émission de CO2 représentent un coût non négligeable pour les industries très consommatrices d'énergie (l'industrie cimentière par exemple) et pourraient inciter à des délocalisations. Les conséquences socio-économiques des mesures envisagées ou mises en place ne doivent donc pas être négligées.

3.3

Conformément à l'usage des Livres verts, la Commission pose 25 questions concernant les options identifiées afin de structurer la consultation publique. Elle envisage les actions à mener sur le plan communautaire, sur le plan national, sur le plan régional et local et enfin dans le cadre de la coopération internationale en évoquant les politiques à mener et les secteurs concernés, le tout illustré par des exemples.

3.4

De façon surprenante certaines problématiques ne sont pas abordées alors qu'elles ont une importance réelle. Par exemple la question de l'éclairage urbain et public en général n'est pas évoquée, pas plus que celui de la production à partir de produits recyclés qui, dans certains cas, est plus économe sur le plan énergétique (métaux, aluminium, etc.) ou encore de la valorisation du bio gaz dans les décharges.

3.5

L'objectif du Livre vert est d'identifier les «goulots d'étranglement» (manque d'incitation, d'information, de formation, de financement…) qui empêchent actuellement les améliorations d'efficacité les plus rentables. Les mesures à promouvoir sont celles qui débouchent sur une économie nette après amortissement de l'investissement nécessaire. Il est attendu des réponses aux questions posées sous la forme de suggestions ou d'exemples qui répondent à l'objectif proposé. A la suite du Livre vert, un plan d'action devra être élaboré en 2006.

3.6

La Commission se montre assez optimiste puisqu'elle considère que la mise en œuvre rigoureuse de l'ensemble des mesures prises après 2001 (directive sur la performance énergétique des bâtiments ou sur la cogénération), combinées à de nouvelles mesures pourraient conduire à des économies d'énergie correspondant environ à 1,5 % de la consommation annuelle afin d'atteindre le niveau de consommation de 1990.

4.   L'efficacité énergétique: une nécessité de développement durable, de compétitivité et d'indépendance économique

4.1

Il existe une chaîne de l'énergie qui implique le producteur, le transporteur, le distributeur et le consommateur. Il importe donc d'agir à tous les stades de cette chaîne de l'offre à la demande. C'est probablement aux deux bouts de la chaîne que l'action pourra s'avérer la plus efficace: production et consommation.

4.2

Dans le domaine de la production, des gains d'efficacité sont introduits régulièrement dans les modes de production.

4.2.1

Ainsi la cogénération de chaleur et d'électricité a pour principe même de récupérer une énergie qui serait gaspillée mais ces nouvelles technologies sont utilisées qui permettent d'utiliser des sources d'énergie alternative. Ainsi la captation et la valorisation du gaz de mine permet-elle d'alimenter des installation de cogénération (par exemple à Freyming Merlebach en Lorraine). La chaleur des hauts fourneaux peut être elle aussi récupérée pour être valorisée (technique mise en œuvre à Brescia en Italie).

Dans les pays nordiques des unités de cogénération de chauffage et d'électricité ont été converties pour utiliser le bois et sont à l'origine de la création d'une filière bois.

En outre, des recherches pour résoudre des problèmes tels que l'encrassement des installations et des phénomènes de combustion anormale, devraient permettre d'améliorer las rendements des installations.

4.2.2

La récupération du biogaz et sa valorisation dans les centres d'enfouissement (décharges) permet d'utiliser une source d'énergie autrefois perdue, tout en luttant contre les gaz à effet de serre. Ce type d'innovation et de valorisation incite à situer les installations à proximité du lieu de consommation et permet ainsi d'éviter ou de réduire les pertes d'énergie dues au transport.

4.2.3

Dans le domaine de la production d'électricité, les gains en efficacité sont sensibles, par exemple dans le domaine de l'énergie solaire et éolienne, ainsi que dans tous les types de grandes centrales classiques et nucléaires de nouvelle génération.

4.3

En ce qui concerne la consommation, les technologies plus économes sont introduites de façon continue dans les secteurs consommateurs d'énergie. Le renchérissement de l'énergie pesant sur le consommateur final/client entraîne les industriels à l'innovation technique.

4.3.1

Dans le secteur des transports automobiles, les innovations et les progrès portent tout à la fois sur la motorisation, la qualité et l'efficacité des carburants, la conception des pneumatiques. La consommation des automobiles est en amélioration depuis dix ans, mais force de reconnaître que cette amélioration est contrebalancée par l'augmentation du nombre de véhicules. L'utilisation accrue de bio carburant est facilitée par des incitations fiscales comme le fait, par exemple, de ne pas les soumettre à la même fiscalité que les produits pétroliers (5).

L'industrie automobile s'est engagée par un accord volontaire avec l'Union européenne à atteindre un chiffre moyen d'émission de CO2 de 140 gr/Km pour 2008. Le Parlement et le Conseil des ministres souhaiteraient que l'ACEA s'engage sur un objectif de 120 gr/Km pour 2010. En tout état de cause, si l'accord est respecté, les voitures particulières mises sur le marché en 2008/2009 devraient consommer 25 % de carburant en moins par rapport à 1998.

4.3.2

En matière de transports, les collectivités locales s'engagent partout en Europe dans des politiques de déplacement urbain visant à améliorer la qualité des transports publics pour réduire le recours aux véhicules particuliers. Par exemple en France, chaque commune doit préparer et présenter et faire approuver un plan de déplacement urbain. Dans d'autres cas, des mesures plus coercitives sont prises comme, notamment, les péages urbains (Londres par exemple).

4.3.3

Des modes de transport «en perte de vitesse» devraient être encouragés comme le rail pour le fret, dont la part de marché ne cesse de décroître en Europe (- de 7 %) et les voies navigables. Toutefois force est de connaître que, malgré les discours, ces deux secteurs importants au regard de l'efficacité énergétique, peinent à se développer, notamment parce que les infrastructures font défaut et que le coût de leur mise en place ou de leur modernisation est très élevé (Canal Rhin/Rhône par exemple ou liaison de fer routage transalpine). De surcroît, la réalisation des infrastructures se heurte souvent, à tort ou à raison, à l'opposition de groupes de pression environnementalistes.

4.3.4

La gestion de l'éclairage urbain fait, elle aussi, l'objet d'innovation afin d'économiser l'énergie. Ainsi les systèmes de télégestion des réseaux permettent d'une part de contrôler en temps réel le fonctionnement des réseaux, mais encore de régler la tension électrique et d'adopter le flux émis en fonction des besoins réels et donc de générer des économies d'énergie pour la collectivité.

Les lampes d'éclairage public d'ancienne technologie (vapeur de mercure par exemple) sont souvent remplacées par des lampes sodium haute pression moins puissantes et moins onéreuses. Les diodes blanches, peu énergivores, se développent, tout comme l'énergie solaire. Pour l'usage privé les lampes à basse consommation prennent leur place sur le marché progressivement et conduire à une baisse de la consommation. Certaines entreprises de fourniture d'énergie électrique offre des bons d'achat pour des ampoules à basse consommation à leurs clients (Italie).

4.3.5

Pour les bâtiments, l'application de la directive sur la performance énergétique devrait porter ses fruits. En tout état de cause, les normes d'isolation ont entraîné des considérables progrès pour toutes les constructions neuves, tout comme les progrès en matière de vitrage.

4.3.6

Dans le domaine de l'industrie plusieurs grands secteurs comme l'automobile, ont pris des engagements volontaires pour renforcer l'efficacité énergétique de leurs produits, qui sont, au demeurant, soumis aux normes d'étiquetage européen. La mise en place d'unités de cogénération pour l'usage industriel se développe. Il convient de noter que certains secteurs très consommateurs d'énergie comme l'aluminium réalisent des économies d'énergie non négligeables pour le recours à des produits de recyclage.

4.4

Des exemples cités, il ressort que, dans un contexte de renchérissement durable de l'énergie, l'efficacité énergétique est devenue un processus vertueux naturel pour les acteurs économiques, ce qui conduit à penser que les démarches volontaires sont aussi efficaces à long et moyen terme que les réglementations.

5.   Les questions du Livre vert

5.1   Question 1: comment stimuler plus efficacement l'investissement européen dans les technologies d'efficacité énergétique?

Le CESE estime que des mesures d'incitation fiscale peuvent être efficaces pour stimuler les investissements mais outre ceux-ci, les services d'efficacité énergétique dans le cadre de l'exploitation en continue peuvent accroître l'efficacité énergétique des installations.

Il considère toutefois qu'il existe d'autres mesures de type volontaire et non fiscales qui peuvent s'avérer efficaces telles des trophées pour l'économie d'énergie, la diffusion des «meilleures technologies disponibles», des campagnes internes aux entreprises pour développer des habitudes usuelles simples et quotidiennes (extinction automatique de l'éclairage, veille des installations électriques et électroniques etc.) ainsi que des campagnes destinées au grand public, qui peuvent s'avérer efficaces. Dans le même esprit, des entreprises de fournitures d'énergie incitent les consommateurs et clients à adopter des modes de consommation responsable, par exemple en développant l'usage d'ampoules électriques à basse consommation. Il s'agit là aussi d'une question de responsabilité personnelle et collective. Un proverbe indien énonce à juste titre que «nous vivons dans un monde que nous devrons laisser en héritage à nos enfants». Il serait moralement inconcevable d'adopter une attitude irresponsable à l'égard des générations futures.

En ce qui concerne l'utilisation de fonds dans le domaine de la recherche, elle pourrait sans doute avoir un effet démultiplicateur dans le cadre de partenariat entre des centres de recherche publics et des centres de recherche privés.

5.2   Question 2: Pertinence du mécanisme de quotas d'émission par rapport à l'efficacité énergétique

Cette politique pourrait être éventuellement utilisée pour la formation de projets domestiques dans le secteur de l'habitat et des entreprises de transports, dont on sait qu'ils sont très consommateurs d'énergie. Au demeurant certains pays ont déjà instauré des certificats d'économie d'énergie qui font peser des obligations sur les producteurs en matière d'économie d'énergie et, indirectement, d'émission de CO2. À défaut d'action concrète, ceux-ci sont taxés (en France 2 centimes d'€ par KWH), ce qui les pousse à lancer des initiatives auprès de leurs clients afin de réaliser des économies d'énergie.

Il convient de veiller à ce que l'augmentation des coûts de l'énergie qui peut en résulter n'entraîne pas d'effets socio-économiques pervers (délocalisations) mais elle doit toutefois être appréciée à l'aune du risque de crise énergétique majeure dans le futur. Un coût présent peut garantir un gain dans l'avenir. De la même façon les divers mécanismes de certificats d'émission ou d'économie d'énergie doivent aussi être considérés en fonction de leur effet incitatif pour investir dans les technologies propres et économes en énergie.

En ce qui concerne les plans d'allocation de certificats d'émission de CO2, il est regrettable que les installations qui ont déjà fait des efforts d'investissement dans des technologies plus propres et moins consommatrices d'énergie ne soient pas traitées de façon plus favorables que celles qui n'ont pas réalisé ces efforts.

En outre, la cogénération que souhaite encourager l'Union européenne, devrait être mieux intégrée dans les plans d'allocation.

5.3   Question 3: opportunité de programmes annuels d'efficacité énergétique à l'échelon de chaque État-membre et comparaison de ces plans

Si de tels plans étaient mis en place, il conviendrait qu'ils soient cohérents avec les cycles d'investissement. En pratique, les investissements ne s'amortissent pas sur une année, il conviendrait donc que d'éventuels plans tiennent compte des délais nécessaires de mise en œuvre et d'amortissement.

Ces plans ne pourraient que déterminer des objectifs, néanmoins leur comparaison pourrait s'avérer utile comme outil de diffusion de pratiques performantes et efficaces.

5.4   Question 4: opportunité de développer des instruments fiscaux

Les instruments fiscaux peuvent s'avérer efficaces à condition d'être bien choisis et bien ciblés. Toutefois, il est clair que la mise en œuvre d'instruments fiscaux est délicate et qu'elle relève principalement des compétences nationales et qu'il convient de respecter les principes de subsidiarité et de libre administration des collectivités locales. En ce qui concerne les taux de TVA, l'unanimité est requise au Conseil pour pouvoir les modifier.

En revanche, l'utilisation systématique d'éco labels est plus aisée et peut se révéler efficace.

5.5   Question 5: développer un régime d'aides d'État plus favorable à l'environnement en encourageant l'éco-innovation et les gains de productivité

En la matière, il faut viser les secteurs les plus consommateurs d'énergie: l'habitat et les transports. Toutefois, il faut veiller à ce que d'éventuelles aides d'État ne viennent pas fausser la concurrence.

5.6   Question 6: exemplarité des autorités publiques

Le CESE estime que l'introduction de critères d'efficacité énergétique dans les appels d'offre des marchés publics devrait-être encouragée, de même que les audits d'efficacité énergétique dans les bâtiments publics. Peut-être faudrait-il développer la notion de mieux-disant énergétique?

En tout état de cause une évaluation des expérimentations réalisées sur des bâtiments publics serait nécessaire pour pouvoir apprécier le rapport coût/efficacité.

5.7   Question 7: pertinence des fonds dédiés à l'efficacité énergétique

Les fonds consacrés à l'efficacité énergétique pourraient constituer des instruments importants permettant une plus grande efficacité et davantage d'économies en matière d'énergie. Ils pourraient faciliter les investissements privés et aider les fournisseurs d'énergie à offrir à leurs clients des possibilités de consommer moins d'énergie, ils accélèreraient la mise en place de services liés à l'efficacité énergétique, ils stimuleraient la recherche-développement et le lancement rapide sur le marché de produits efficaces énergétiquement. Aussi ces fonds viennent-ils judicieusement compléter la mise en place du système d'échange des droits d'émission.

En revanche, une prise en compte cohérente de l'efficacité énergétique dans le cadre des fonds de cohésion et des fonds de développement régional serait à envisager.

L'urgence réside sans doute dans l'augmentation des crédits à la recherche et le développement, à l'instar des États-Unis qui consentent des efforts budgétaires considérables dans le domaine des technologies de l'énergie.

5.8   Question 8: efficacité énergétique des bâtiments

Le secteur est stratégique et les gains d'efficacité énergétique peuvent-être considérables, toutefois il faut veiller à ne pas faire supporter aux propriétaires bailleurs ou occupants propriétaires des charges disproportionnées par rapport à leurs possibilités, ni imposer des charges administratives trop lourdes et trop complexes. À cet égard, il faut prendre garde à ce que les États membres ne produisent pas des textes dont l'application serait très difficile à contrôler du fait de leur complexité et qui ne seraient pas appliqués par certaines entreprises alors que d'autres s'efforceraient de le faire, ce qui créerait des distorsions de concurrence. Dans le domaine du bâtiment, la performance énergétique est globale or les corps d'état interviennent individuellement. Il faut donc une maîtrise d'ouvrage structurée. En pratique ce sera l'architecte, aidé d'un bureau d'étude, qui sera chargé de la mise en œuvre des normes énergétiques, d'où la nécessité de textes simples et clairs pour une réalité complexe de mise en œuvre.

Toute extension du champ de la directive ne doit être éventuellement envisagée qu'après un bilan de l'application de directive de 2001 et notamment une éventuelle baisse du seuil aujourd'hui fixé à 1 000 m2. On peut souligner que la révision des règlements thermiques tous les cinq ans représente en pratique un délai d'implémentation très court pour un secteur où les entreprises sont souvent de petite taille. Un délai de 7 ans serait sans doute plus réaliste afin de leur laisser réellement le temps de mettre en œuvre ces règlements sans être contraints d'appliquer de nouvelles règles alors que les précédentes sont à peine effectives.

Un bilan des mesures prises dans les États membres et un échange des bonnes pratiques seraient utiles.

5.9   Question 9: quelles incitations pour les propriétaires dans l'efficacité énergétique?

Il faudrait sans doute privilégier la fiscalité incitative, par exemple de la réduction de l'impôt foncier par les propriétaires en fonction de leurs investissements en matière d'efficacité énergétique. En tout état de cause, le niveau d'intervention doit demeurer national.

Il serait en tout état de cause très utile de voir se développer un marché des services énergétiques tel qu'il existe d'ores et déjà dans certains pays de l'Union, notamment les pays nordiques et la France.

5.10   Question 10: amélioration de la performance des produits consommateurs d'énergie chez les ménages

Il conviendrait d'utiliser les retours d'expérience dans le cadre de la politique intégrée des produits:

de relier cet enjeu avec la mise en place de la directive sur l'éco-conception des produits consommateurs d'énergie;

de dresser un bilan de la mise en place des engagements volontaires en cours dans l'industrie.

L'étiquetage énergétique est obligatoire pour certains appareils domestiques (réfrigérateurs, surgélateurs, lave-linge, lave-vaisselle, ampoules électriques). Il pourrait être étendu à d'autres appareils électroménagers (tels que les fours électriques et à micro-ondes), ainsi qu'aux appareils utilisés dans d'autres domaines — notamment pour le chauffage et la climatisation — et consommant beaucoup d'énergie (par exemple, les chaudières à gaz domestiques, les circulateurs et les climatiseurs bibloc).

5.11   Question 11: amélioration de l'efficacité énergétique des véhicules

Il convient d'attendre les résultats de l'engagement volontaire de l'ACEA auprès de la Commission.

En tout état de cause, les innovations en matière d'efficacité énergétique des véhicules, du progrès de la motorisation et de la décroissance de la consommation, sont introduites de façon continue et progressive par l'industrie automobile.

Reste la question du parc automobile plus ancien qui revêt parfois un aspect social. Néanmoins tant pour des raisons d'efficacité énergétique que de sécurité il serait utile d'inciter au renouvellement du parc automobile. Il conviendrait peut-être d'envisager des mesures spécifiques en matière de crédit afin de ne pas pénaliser les personnes à revenus modestes.

Enfin la fiscalité des moyens de transport demeure très inégale et donc pénalisante pour certains modes de transport comme le CESE l'a souligné dans son rapport sur le transport durable.

5.12   Question 12: campagnes d'information du public

Pour qu'elles soient efficaces, il faut préférer les campagnes nationales ou régionales, aux campagnes européennes en ce qui concerne les ménages. Des campagnes de sensibilisation spécifiques pour les enfants seraient utiles pour qu'ils prennent très tôt de bonnes habitudes en matière d'économie d'énergie (tout simplement éteindre la lumière lorsque l'on quitte une pièce, par exemple). Une information adéquate des consommateurs serait aussi très utile pour qu'il puisse faire le choix d'achat de matériel consommateur d'énergie le plus adapté.

Puisque des campagnes nationales ont déjà eu lieu, il pourrait être procédé à un échange d'expériences.

5.13   Question 13: efficacité du transport et de la distribution de l'électricité, promotion de la cogénération

La production d'électricité subit des pertes au moment de la transformation (environ 30 %) et du transport (environ 10 %). Ces pertes de transport peuvent être diminuées par le raccourcissement de celui-ci.

Des économies peuvent aussi être réalisées grâce à un meilleur management de la demande, notamment en ce qui concerne les gros utilisateurs d'énergie. Il est donc souhaitable de développer les accords entre ceux-ci et les producteurs afin de mieux gérer la demande.

L'ouverture du marché devrait permettre d'atteindre une meilleure efficacité grâce à l'émulation entre les distributeurs mais il est prématuré de faire un bilan.

En ce qui concerne la cogénération, il conviendrait de bien définir le statut de l'électricité issue de la cogénération, en outre les paramètres de la directive cogénération paraissent difficiles à atteindre et cela d'autant plus qu'ils sont interprétés de façon différentes d'un État membre à l'autre.

5.14   Questions 14 et 15: rôle des fournisseurs d'énergie dans le cadre de la fourniture issue d'un service énergétique et introduction de certificats blancs

On peut se demander si c'est bien l'intérêt du producteur-fournisseur d'énergie de favoriser les réductions de consommation? C'est la raison pour laquelle certains États membres ont mis en place des certificats d'économie d'énergie.

Il faut prendre en compte toute la chaîne des acteurs pour aboutir à des réductions de consommation d'énergie. Un code de bonne conduite volontaire serait utile.

Sans doute faudrait-il mieux définir ce que l'on entend par service d'efficacité énergétique et contrat de performance énergétique.

En ce qui concerne les certificats blancs, il serait opportun de dresser un bilan de leur utilisation dans les États où ils ont été mis en œuvre, avant que de les étendre sur le plan communautaire.

5.15   Question 16: stimulation de l'industrie dans les technologie générant une meilleure efficacité énergétique

Efficacité des mesures existantes (carbone, engagements volontaires).

Il faut privilégier les engagements volontaires sur les mesures coercitives. En tout état de cause les mesures, si elles sont économiquement valables et financièrement rentables, ont déjà été prises dans beaucoup de pays européens. L'action éventuelle devrait donc être centrée sur les mesures qui ont besoin d'incitations ou d'aides, dans le cas contraire on crée des effets d'aubaine.

5.16   Question 17: équilibre des modes de transports et augmentation du transport par rail et par voies d'eau

Le secteur ferroviaire manque souvent de souplesse et d'offre alternative et le réseau des voies d'eau n'est pas encore assez développé et a trop d'étranglements. Il faut plus investir dans l'interopérabilité des différents modes de transports, intégrer les coûts externes et valoriser les modes qui permettent une meilleure efficacité énergétique. L'introduction d'une possibilité de concurrence régulée plutôt qu'une concurrence pure et dure répond mieux aux caractéristiques du secteur et serait de nature à le dynamiser.

5.17   Question 18: financement des infrastructures du réseau de transport trans-européen (6)

Certains grands réseaux trans-européens sont attendus depuis longtemps. La crise des finances publiques partout en Europe a souvent retardé leur mise en œuvre. Le CESE préconise que les fonds communautaires soient alloués en priorité au développement des modes de transport qui se sont avérés particulièrement efficaces en matière d'utilisation de l'énergie.

Il faut espérer aussi encourager les partenariats publics privés.

5.18   Question 19: normes ou mesures réglementaires pour les transports

La priorité doit être donnée aux innovations technologiques et à l'établissement de normes définies conjointement entre l'industrie et les pouvoirs publics.

5.19   Question 20: faut-il imposer l'achat de véhicules propres aux autorités publiques?

Les principes de libre administration des collectivités locales et de subsidiarité s'opposent à instaurer une obligation. Toutefois, nombre de collectivités publiques procèdent déjà à ce type d'achats. Les normes en matière d'appel d'offre peuvent encourager cette pratique.

Au demeurant, la proposition de directive relative à la promotion de véhicules de transport routier propres (COM(2005) 634) entend développer cette pratique en imposant un quota de véhicules «propres» dans les appels d'offre des collectivités publiques.

5.20   Question 21: imputation des dépenses d'infrastructures de transport et des coûts externes (pollution, accidents, etc.)

Le CESE s'est prononcé à plusieurs reprises en faveur d'une prise en compte des coûts externes et a demandé à la Commission de présenter un projet à l'avenant. Il convient donc d'effectuer le bilan des mesures adoptées jusqu'ici dans certains pays afin de pouvoir mesurer leur efficacité avec précision.

5.21   Question 22: programme de financement de projets d'efficacité énergétique par des compagnies d'efficacité énergétique

Si des initiatives ont été des succès, il faut encourager la diffusion et leur soutien dans l'Union européenne.

5.22   Question 23: efficacité énergétique dans le cadre des relations avec les pays tiers

Le coût de l'énergie rendra la question de l'efficacité énergétique plus sensible qu'auparavant. Les institutions financières internationales devraient en effet inclure cette préoccupation dans le cadre de leur assistance technique et financière.

5.23   Question 24: utilisation du savoir-faire européen dans les pays en développement

Il conviendrait de simplifier et rendre plus efficaces les mesures existantes (MDP, JI) (7).

5.24   Question 25: possibilité de négocier des avantages tarifaires au sein de l'OMC pour les produits efficaces en énergie

Il semble peu probable que l'Union européenne aura la capacité de faire accepter de telles mesures au sein de l'OMC, car elles pourraient être considérées comme destinées à porter préjudice aux productions des pays en développement.

Bruxelles, le 14 février 2006.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  Règlement (CE) no 2422/2001, JO L 332 du 15.12.2001.

(2)  Directive 2002/91/CE, JO L 1 du 4.1.2003.

(3)  Directive 2004/8/CE, JO L 52 du 21.2.2004.

(4)  COM(2003) 739.

(5)  Directive 2003/96/CE, JO L 283 du 31.10.2003, Cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l'électricité.

(6)  Voir JO C 108 du 30.4.2004«Les infrastructures de transport de l'avenir».

(7)  CDM: mécanisme de développement propre (Clean Development Mechanism), JI: mise en œuvre conjointe (Joint implementation).


11.4.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 88/61


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil instituant une procédure européenne pour les demandes de faible importance»

(COM(2005) 87 final — 2005/0020 (COD))

(2006/C 88/14)

Le 4 avril 2005, le Conseil a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 23 janvier 2006 (rapporteur: M. J. PEGADO LIZ).

Lors de sa 424ème session plénière des 14 et 15 février 2006 (séance du 14 février), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis à l'unanimité.

1.   Synthèse, conclusions et recommandations

1.1

Avec la proposition de règlement visant à instituer une procédure judiciaire européenne pour les demandes de faible importance (1), la Commission donne suite à une série d'initiatives prises en vue de la mise en place et du développement progressifs d'un espace de liberté, de sécurité et de justice, en éliminant les obstacles au bon déroulement des procédures civiles et en favorisant des règles de procédure civile plus faciles au niveau européen, comme prévu notamment dans son plan d'action approuvé par le Conseil justice et affaires intérieures du 3 décembre 1998 (2).

1.2

Conformément aux positions qu'il a adoptées précédemment concernant toutes les initiatives de la Commission et du Conseil en vue de renforcer l'existence d'un véritable espace judiciaire européen, le CESE salue et soutient la proposition à l'examen. Il souligne également l'adéquation de la base juridique proposée afin de définir son champ d'application non seulement aux conflits transfrontaliers mais aussi, à titre facultatif, aux conflits nationaux, dans le but de garantir l'égalité souhaitable du droit des parties au procès équitable, rapide et accessible pour la résolution de litiges dans tous les États membres.

1.3

Le CESE félicite la Commission pour le bien-fondé technico-juridique de la proposition, qui ressort clairement de ses observations article par article (3), pour l'équilibre atteint entre les différents intérêts en jeu et leur défense dans une étude d'impact structurée, bien développée et clairement présentée (4).

1.4

Les observations que le CESE exprime à titre général et spécifique visent uniquement à renforcer la valeur de la proposition présentée et à affiner certains de ses dispositifs, afin de faire de la procédure consacrée un instrument efficace pour la poursuite des objectifs visés, offrant les meilleures garanties de respect des droits des parties concernées.

1.5

Le CESE exhorte donc la Commission à adopter les recommandations figurant dans les observations du CESE et invite les États membres à approuver la proposition de la Commission sans en modifier le champ et la nature.

2.   Introduction. Objet de la proposition

2.1

La proposition à l'examen répond à l'un des objectifs centraux du Livre vert du 20 décembre 2002 (5). L'autre objectif connexe, à savoir l'instauration d'une procédure européenne d'injonction de payer a fait l'objet, il y a un an, d'une proposition de règlement de la Commission (6) puis d'un avis du Comité.

2.2

En ce qui concerne l'instauration d'une procédure européenne pour les demandes de faible importance, après avoir pris en considération les commentaires et les recommandations sur le Livre vert formulés tant par le Parlement européen que par le Comité économique et social européen, la Commission présente un projet de règlement dans l'objectif d'instituer une procédure unique à caractère facultatif dans l'ensemble de l'Union européenne concernant les actions judiciaires de faible importance, aussi bien pour les litiges transfrontaliers que pour les litiges internes aux différents États membres.

2.3

Cette initiative est justifiée par les différences entre les régimes du droit de procédure civile des États membres, ainsi que par les coûts élevés et les délais excessifs des actions judiciaires de faible importance, lesquels sont, notamment en cas de litiges transfrontaliers, véritablement disproportionnés par rapport au montant en jeu.

2.4

La Commission a voulu étendre le champ d'application de la procédure actuellement proposée aux litiges internes, pour des raisons d'égalité entre sujets de droit et de non-distorsion de la concurrence entre opérateurs économiques, suivant à ce titre l'avis du CESE sur le Livre vert tout en garantissant la compatibilité de ladite procédure avec les principes de proportionnalité et de subsidiarité.

2.5

Le caractère alternatif de la procédure actuellement proposée est expressément mentionné dans le corps du texte, la Commission suivant là encore le point de vue exprimé par le CESE. En effet, le créancier peut toujours opter pour une autre procédure existant au niveau des États membres.

2.6

Dans la formulation des mécanismes procéduraux en vue, la Commission a suivi les principes fondamentaux suivants:

a)

simplicité procédurale maximum avec utilisation de formulaires types;

b)

grande rapidité grâce à l'instauration de délais courts;

c)

procédure écrite en principe, sans audience; si le tribunal le juge nécessaire, elle peut se faire par téléconférence, vidéoconférence ou échange de courriels;

d)

garanties suffisantes en matière de procédure contradictoire et de production de preuves;

e)

grand pouvoir discrétionnaire accordé au juge dans l'appréciation et l'obtention de la preuve;

f)

force exécutoire de la décision, sans préjudice de recours, selon le droit national et garantie de reconnaissance et d'exécution dans tout État membre sans nécessité d'exequatur et sans possibilité de contester sa reconnaissance;

g)

non-obligation de se faire représenter par un avocat.

3.   Antécédents et initiatives parallèles

3.1

Il y a longtemps que le souci d'uniformisation et de simplification des procédures civiles, comme moyen de garantir une application rapide et efficace de la justice, ressort des différents documents des institutions communautaires, du Parlement européen (7) au Comité économique et social (8).

3.2

Se faisant l'écho de ces préoccupations, généralement véhiculées par les opérateurs économiques, les professionnels et les consommateurs, la Commission a également entamé de longue date une réflexion sur les meilleures voies à suivre; les progrès obtenus dans le domaine pionnier du droit de la consommation sont particulièrement intéressants à cet égard (9).

3.3

C'est toutefois avec le «Livre vert sur une procédure européenne d'injonction de payer et sur des mesures visant à simplifier et à accélérer le règlement des litiges portant sur des montants de faible importance» que la question a été envisagée en termes d'initiative législative éventuelle. Ce livre vert pose de façon adéquate les questions essentielles que devrait éclaircir une réglementation en la matière (10).

3.4

Cette initiative s'inscrit néanmoins dans un ensemble de mesures particulièrement importantes qui ont été prises successivement en matière de coopération judiciaire dans le domaine du droit civil au cours de ces dernières années (11).

3.5

Le Règlement CE/805/2004, du 21 avril 2004, portant création d'un titre exécutoire européen pour les créances incontestées (12) ainsi que la proposition de la Commission relative à la procédure d'injonction précitée, méritent en particulier d'être soulignés. Ces documents ne peuvent d'ailleurs manquer d'être pris en considération dans l'appréciation de l'actuelle proposition de la Commission, dès lors qu'ils sont les deux faces d'une même réalité: la nécessité de rendre simple et efficace l'application de la justice civile dans un espace judiciaire unique.

4.   Instrument légal et base juridique

4.1

Comme pour l'ensemble des initiatives prises dans ce domaine, la Commission a décidé de proposer l'utilisation d'un règlement et a fondé sa proposition sur les articles 61 al. c) et 65 du traité.

4.2

Le CESE apporte son plein soutien à la proposition de la Commission. Dans ses avis sur le Livre vert et sur la procédure d'injonction, il s'était déjà prononcé ouvertement et sans réserve en faveur de l'adoption d'un règlement.

4.3

Quant à la base juridique, elle lui paraît également tout à fait correcte dès lors qu'elle correspond à une interprétation qui n'est pas purement formaliste des dispositions légales mentionnées, seule interprétation qui soit conforme à l'objectif de création d'un espace judiciaire unique dans l'UE. La Commission mérite toutes nos félicitations pour la manière cohérente, techniquement parfaite et juridiquement correcte dont elle justifie la nécessité d'action au niveau communautaire, dans le respect des principes de subsidiarité et de proportionnalité.

4.4

Le CESE réaffirme aussi, en l'espèce, qu'une initiative de ce type et dans ce domaine, avec tous les efforts qu'elle suppose, se justifie uniquement si elle est également applicable aux litiges internes de chaque État membre, quoiqu'à titre facultatif, dans la mesure où son éventuelle limitation aux litiges transfrontaliers pourrait remettre en question sa pertinence, voire sa nécessité (13).

5.   Observations générales

5.1

Le CESE se félicite de la présentation de la proposition de règlement à l'examen où sont prises en considération la majorité de ses observations concernant le «Livre vert sur une procédure européenne d'injonction de payer et sur des mesures visant à simplifier et à accélérer le règlement des litiges portant sur des montants de faible importance» COM(2002) 746 final.

5.2

Dans son avis sur le Livre vert, le CESE déclare que: «Lors de la conception d'une procédure européenne pour les demandes de faible importance, il faudra surtout veiller à trouver des mesures appropriées pour accélérer les litiges portant sur des petits montants, sans remettre en question les garanties conférées aux parties en vertu de l'État de droit».

5.3

De l'avis du CESE, la proposition de règlement à l'examen, même si elle doit faire l'objet de légères améliorations, traduit de manière équilibrée ces deux nécessités: la rapidité de résolution des litiges, l'accessibilité en matière de coûts et la garantie des droits des parties.

5.4

Toutefois, pour qu'il puisse jouer pleinement son rôle dans la résolution équitable, rapide et moins onéreuse de litiges de faible importance il est essentiel, et le CESE attire spécialement l'attention sur ce point, que le nouveau régime soit connu des citoyens et pas seulement des juristes, par le biais d'une information systématisée, soulignant les avantages de son utilisation ainsi que ses limites par rapport aux régimes ordinaires traditionnels (coûts, production de la preuve, régime d'appel, assistance d'avocat, représentation par des tiers, délais, etc.).

5.5

En outre, pour que ce régime puisse être correctement mis en œuvre dans les litiges transfrontaliers, une des conditions décisives serait de trouver une solution efficace à la question de la diversité linguistique et de s'assurer que les diverses parties concernées — juridictions, magistrats, parties au litige — aient compris précisément les termes de la procédure. Aussi, faudra-t-il consentir un effort fondamental à cet égard, en ce qui concerne la clarté des formulaires utilisés

5.6

Conformément aux positions maintes fois exprimées en la matière, le CESE réaffirme son engagement en faveur du développement et de l'approfondissement parallèle des mécanismes alternatifs de résolution de conflits (Alternative Dispute Resolution, ADR) qui devraient être harmonisés au niveau communautaire, suivant des règles et des principes bien définis. Une référence à ces mécanismes pourrait figurer dans l'exposé des motifs de la proposition.

6.   Observations spécifiques

6.1   Article 2 — Champ d'application

6.1.1

De l'avis du CESE, le plafond prévu de 2.000 euros est manifestement insuffisant pour couvrir un nombre significatif de situations compte tenu des prix actuels des biens et des services. En outre, le CESE estime que si une procédure d'appel est prévue (articles 13, 15 et 16), le plafond prévu devrait être au moins de 5.000 euros. D'un point de vue purement économique et considérant les estimations de coûts qui figurent dans l'«évaluation d'impact étendue», l'élévation du plafond entraînerait une diminution plus que proportionnelle des coûts.

6.1.2

La formulation selon laquelle ce règlement ne recouvre «notamment» pas les matières fiscales, douanières et administratives nous semble peu claire. D'ailleurs, selon les principes d'une bonne technique juridique, cette délimitation négative du champ d'application devrait être exhaustive et pas exemplative. Il faudrait donc supprimer cette formule à la fin du premier paragraphe et l'ajouter aux alinéas du deuxième paragraphe.

6.1.3

On ne comprend pas non plus que l'arbitrage soit cité au point e) du paragraphe 2 de cet article. En effet, l'arbitrage n'a rien à voir avec les matières citées aux autres alinéas, car il s'agit plutôt d'une forme de résolution alternative des conflits exclue par nature du champ d'application du règlement sans qu'il soit nécessaire de le mentionner expressément. Le CESE suggère que ce point soit supprimé.

6.1.4

Le Comité note avec regret la position du Danemark, qui s'exclut totalement de l'application du règlement, pour des raisons d'ailleurs bien connues, de nature générale, sur ce type de question (14). Il forme toutefois le vœu qu'à l'avenir les obstacles qui entravent la pleine réalisation d'un espace unique européen (15) puissent être surmontés et se félicite de l'indication selon laquelle le Royaume-Uni et l'Irlande envisagent la possibilité d'adhérer à cette initiative, comme cela s'est produit avec d'autres initiatives similaires.

6.2   Article 3 — Engagement de la procédure

6.2.1

Le CESE considère que la question de la prescription et de son interruption doit être traitée par les législations des États membres; dans le cas contraire, la règle figurant au paragraphe 4 doit tenir compte des différentes formes d'introduction des demandes et prévoir l'interruption de la prescription à la date d'envoi, dûment attestée, du formulaire de demande — situation particulièrement pertinente dans le cas de litiges transfrontaliers, les retards dans l'acheminement du courrier pouvant être considérables (16).

6.2.2

Le CESE souscrit à ce que la Commission accorde, au paragraphe 6 de cet article, la possibilité au demandeur de rectifier ou de compléter le formulaire, d'autant qu'il avait déjà fait une suggestion similaire à l'analyse de la proposition de règlement sur la procédure européenne d'injonction. C'est avec grande satisfaction qu'il accueille donc l'inclusion de cette possibilité dans le règlement. Toutefois, il est d'avis que la règle doit prévoir un délai raisonnablement court pour apporter cette rectification.

6.2.3

Cependant, le CESE manifeste son inquiétude à l'égard de la dernière partie du paragraphe 7 de l'article 3, en ce qu'il ne précise pas qui accorderait cette «assistance pratique», ni si ces personnes auraient la formation adéquate pour le faire. Sans limiter cette fonction aux avocats et avoués, le CESE attire l'attention sur le fait que les «aspects pratiques» mentionnés peuvent inclure des questions exigeant une formation juridique adéquate et la disponibilité à exercer cette fonction sans rémunération. Or les tribunaux de nombreux États membres pourront difficilement remplir cette condition; par ailleurs, cette dernière pourrait être aisément considérée comme «représentation illicite» selon les codes déontologiques en vigueur chez les professionnels de la justice.

6.3   Article 4 — Déroulement de la procédure

6.3.1

Bien qu'il comprenne les raisons d'opter pour le caractère écrit de la procédure, en règle générale, le CESE attire l'attention sur les avantages de l'audience, notamment pour faciliter les tentatives de conciliation et pour sauvegarder les principes fondamentaux inclus dans l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

6.3.2

Aux paragraphes 5 et 6, la proposition admet l'introduction d'une demande reconventionnelle, même si la cause de la demande n'est pas la même.

6.3.2.1

Le CESE émet de sérieuses réserves sur le fait que, dans une procédure de cette nature, prétendument rapide et très informelle, l'on admette l'introduction d'une demande reconventionnelle, sans que cela transforme automatiquement la procédure en procédure ordinaire.

6.3.2.2

Le CESE estime que si la demande reconventionnelle ne trouve pas son origine dans la relation juridique sous-jacente à l'action, elle ne doit pas être recevable.

6.3.2.3

Quoi qu'il en soit, le CESE considère que si elle est admissible, une demande reconventionnelle ne peut en aucun cas dépasser le plafond fixé pour la procédure, sous peine de nuire à la réalisation des objectifs visés par celle-ci.

6.3.2.4

Enfin, il est stipulé au deuxième alinéa du paragraphe 7 que si l'une des pièces versées au dossier n'est pas rédigée dans une des langues prévues par le règlement 1348/2000, la juridiction «demande» à la partie adverse de fournir une traduction. Quelles seront les conséquences pour la demande et la procédure, si elle ne le fait pas? Il est important d'éclaircir ce point étant donné qu'il s'agit en l'espèce d'un règlement; il ne peut donc incomber aux États membres d'en combler les lacunes, sauf moyennant l'application du principe générique de l'article 17.

6.4   Article 5 — Conclusion de la procédure

6.4.1

La formule «cite les parties à comparaître à une audience» est utilisée au point c). Or, la distinction entre citation et notification étant bien connue, il ne s'agit pas ici au sens strict de citation mais bien de notification. Aussi, le CESE suggère-t-il que la Commission modifie le point précité en remplaçant le verbe «citer» par «notifier».

6.4.2

Un délai maximum devra être stipulé pour la fixation de l'audience.

6.5   Article 6 — Audience

6.5.1

Le CESE se félicite de l'adoption de normes qui prévoient le recours aux nouvelles technologies pour la tenue de l'audience, le cas échéant.

6.5.2

Toutefois, le CESE attire l'attention de la Commission sur le fait que le champ d'application précis de ces nouvelles technologies n'étant pas défini, leur utilisation dans certaines circonstances peut porter préjudice aux garanties de la défense et à des principes de procédure essentiels, comme la sécurité et la certitude juridiques, le principe du contradictoire et l'immédiateté de la preuve. Il suffit de songer, par exemple, à l'utilisation du courriel pour interroger des témoins ou pour recevoir la déposition d'un expert.

6.5.3

Le Comité attire l'attention sur la nécessité d'assurer l'authenticité des déclarations, par exemple, par le biais de la signature électronique. Il faudra prendre les précautions nécessaires pour que les juridictions locales disposent des infrastructures techniques permettant d'envoyer à une autre juridiction, même à l'étranger, une déclaration juridiquement valable (envoi par courriel sécurisé, obtention de preuves par téléconférence, vidéoconférence ou échange de courriels).

6.5.4

Ainsi, le CESE invite instamment la Commission à modifier la formulation du paragraphe 1 de l'article 6 en précisant concrètement son champ d'application ainsi que les actes ou les situations qui admettent l'utilisation de moyens audiovisuels et du courriel.

6.5.5

Par ailleurs, si les deux parties admettent la fiabilité des moyens techniques disponibles, le CESE ne comprend pas qu'on leur laisse le droit d'en récuser l'utilisation. Aussi, suggère-t-on de reformuler cette disposition de telle sorte à limiter le droit des parties à récuser le recours à ces moyens techniques aux situations où ils n'offrent pas les garanties nécessaires de fiabilité et d'égalité de traitement.

6.6   Article 7 — Obtention des preuves

6.6.1

Le CESE manifeste son inquiétude face à la possibilité d'obtenir des preuves par téléphone. Seuls l'enregistrement et la transcription ultérieure permettraient de garantir que la déposition par téléphone soit digne de foi. Par conséquent, le CESE demande instamment à la Commission de retirer le téléphone comme moyen valable d'obtention de la preuve si la procédure décrite précédemment s'avérait impossible.

6.6.2

Le CESE recommande de supprimer la formule «dans des circonstances exceptionnelles» du point 2, car elle véhicule une notion subjective et qu'en toute occurrence, il appartient au juge de prendre la décision de recourir aux «témoignages d'experts».

6.7   Article 8 — Représentation des parties

6.7.1

Aux termes de la proposition à l'examen, les parties peuvent être représentées par des professionnels autres que des avocats. Le CESE est d'avis qu'il faudrait expressément prévoir la possibilité que les associations de consommateurs représentent ceux-ci en cas de conflit de consommation et que les associations professionnelles puissent représenter leurs membres. Cette représentation, courante notamment dans les systèmes alternatifs de résolution de litiges, n'est en revanche pas généralement prévue dans la législation procédurale des États membres.

6.8   Article 9 — Rôle de la juridiction

6.8.1

Contrairement à ce qui ressort d'une première lecture, la proposition ne prévoit pas, comme l'a d'ailleurs confirmé la Commission, que la résolution de litiges ne se fasse pas exclusivement sur des critères de légalité mais aussi, éventuellement, sur des critères d'équité («ex aequo et bono»), ce qui est particulièrement important lorsque des questions de nature non pécuniaire sont en jeu. L'on regrette que cette possibilité ne soit pas prévue et suggère de l'inclure à condition qu'elle soit préalablement et complètement expliquée aux parties, avec toutes ses implications.

6.8.2

Par ailleurs, les considérations émises au point 6.2.3 valent également pour les dispositions prévues au troisième paragraphe de cet article.

6.8.3

En ce qui concerne le paragraphe 4, le Comité estime que la juridiction devrait toujours chercher à amener les parties à une «transaction»; il y aurait donc lieu de supprimer la formule «le cas échéant» en début de phrase.

6.9   Article 10 — Décision

6.9.1

Dans la dernière partie du deuxième paragraphe, à côté de la présence des parties, il faut prévoir le cas où celles-ci sont dûment représentées, aux termes de l'article 6, paragraphe 2.

6.10   Article 11 — Signification ou notification des actes

6.10.1

Le paragraphe 2 de cet article stipule que lorsque «l'adresse du destinataire est connue avec certitude», la notification aux parties peut se faire par des moyens plus simples, comme une lettre, une télécopie ou un courriel.

6.10.2

Le CESE attire l'attention de la Commission sur le fait que la formule «l'adresse du destinataire est connue avec certitude» est trop vague et peut donner lieu à des situations de grande incertitude juridique ayant des conséquences graves pour les parties.

6.10.3

Il existe dans plusieurs États membres la règle de l'élection du domicile, en vertu de laquelle, si la citation ou notification est envoyée au domicile élu par les parties au contrat, l'on présume qu'elle a bien été reçue, ce qui dispense d'apporter la preuve de la réception. Cependant, l'on estime que le caractère élu du domicile ne suffit pas à remplir l'exigence de la connaissance avec certitude.

6.10.4

Aussi, le CESE propose-t-il, conformément à ce qu'il a affirmé avec insistance dans l'avis précité sur le Livre vert relatif à la procédure d'injonction, qu'il ne soit pas possible d'utiliser des moyens de citation et de notification, par exemple un courrier ordinaire, qui n'apportent pas ou ne permettent pas d'obtenir la preuve de la réception par les parties.

6.11   Article 12 — Délais

6.11.1

De l'avis du CESE, il n'est pas admissible, dans une procédure de ce type, que la juridiction puisse proroger indéfiniment les délais. Le CESE suggère à la Commission de fixer un délai limite pour proroger le délai, ce qui ne pourrait se faire qu'une seule fois.

6.11.2

Les dispositions contenues au paragraphe 2 de cet article sont tout aussi inadmissibles. En réalité, connaissant le fonctionnement des juridictions et sachant que s'il existe des délais, leur non-respect entraîne rarement des sanctions, l'inclusion d'une telle disposition normative garantit presque l'échec de la procédure. Par conséquent, le CESE demande instamment à la Commission de supprimer le paragraphe 2 de cet article.

6.12   Article 13 — Force exécutoire de la décision

6.12.1

Le CESE interroge la Commission sur la nécessité de prévoir un appel dans une procédure de cette nature. En effet, soit le plafond pour la procédure est fixé à un niveau considérablement supérieur à celui proposé par la Commission, par exemple 5.000 euros, auquel cas l'existence d'un appel se justifie par le montant en cause, soit ce plafond est inférieur (jusqu'à 3.500 euros, par exemple) et il ne doit pas y avoir d'appel (17).

6.12.2

Il est également important de préciser que lorsque l'on parle de la possibilité ou non d'interjeter appel, c'est à un appel ordinaire que l'on fait référence et non aux actions engagées à l'encontre de décisions entachées d'un vice; ces dernières sont toujours susceptibles de recours selon les lois nationales de tous les pays, indépendamment du montant du litige.

6.12.3

Aussi, le CESE exhorte de nouveau la Commission à élever le plafond des litiges visés par la présente procédure à 5.000 euros au minimum. Si la Commission estime cependant que cette valeur doit être égale ou inférieure à 3.500 euros, il ne faut pas prévoir la possibilité d'un appel. Si une limite supérieure à 3.500 euros était définie, en revanche, il serait justifié de prévoir une telle possibilité pour les litiges d'un montant supérieur.

6.12.4

Le CESE attire l'attention de la Commission sur le fait que si un appel est prévu, il faudra garantir dans la lettre de la loi la possibilité que la juridiction confère à la décision un effet suspensif, pour les cas où l'exécution immédiate de celle-ci pourrait entraîner des préjudices graves et injustifiables pour la partie requérante ou rendre le recours inutile. Dans ces cas, par exemple, une caution pourrait être exigée pour assortir l'appel d'un effet suspensif.

6.12.5

Enfin, si la possibilité d'appel est admise, il faudra stipuler clairement que, comme exception à la dispense de représentation des parties par un avocat prévue à l'article 8, le régime de procédure propre à chaque État membre sera d'application, l'obligation du ministère d'avocat en cas d'appel devant être spécifiquement mentionnée.

6.13   Article 14 — Frais de justice

6.13.1

Il convient de souligner le bien-fondé des dispositions de cet article relatives aux coûts. Toutefois, il y a lieu de signaler que l'utilisation de concepts vagues, subjectifs et imprécis tels que «inéquitable» ou «déraisonnable» n'est pas compatible avec l'objectif d'«harmonisation», car elle introduit un élément de distorsion dans un domaine aussi primordial que celui des frais de justice.

6.13.2

Comme cela a été suggéré pour la procédure d'injonction, il conviendrait par ailleurs de faire explicitement référence, en l'espèce, à l'applicabilité des dispositions transposant la directive 2003/8/CE du 27 janvier 2003, relative à l'aide judiciaire, dans le droit interne de chaque État membre (18).

6.13.3

À cet égard, le CESE estime qu'il est indispensable de prévoir l'obligation d'informer préalablement les parties sur le régime de coûts et de remboursement, le cas échéant, des honoraires d'avocat, par comparaison avec d'autres procédures judiciaires éventuellement applicables, de telle sorte à offrir réellement le choix aux parties.

6.14   Article 16 — Réexamen de la décision

6.14.1

Le CESE attire l'attention sur le fait qu'aucun délai limite n'a été fixé pour l'exercice de ce droit et que la formule «agir rapidement» n'est pas admissible car elle est trop vague. Ainsi, de l'avis du CESE, si le but est de garantir l'exercice effectif des moyens de défense du défendeur (lors d'une notification incorrecte de formulaire ou en cas de force majeure non imputable à la partie), sans entraver la célérité de la procédure, en évitant la pratique d'actes qui empêcheraient la notification ou le recours à des manœuvres dilatoires, il y a lieu de préciser concrètement le délai accordé au défendeur pour demander le réexamen de la décision.

6.15   Formulaires annexes

6.15.1

L'ensemble du système proposé repose sur l'utilisation de formulaires joints en annexes 1 à 3 à la proposition de règlement à l'examen. Pour que les procédures proposées fonctionnent correctement, les formulaires doivent être adaptés aux fonctions auxquelles ils sont destinés.

6.15.2

Or, le CESE nourrit des doutes fondés quant à l'efficacité et à la faisabilité de l'application des formulaires pour les litiges transfrontaliers.

6.15.3

Prenons l'exemple suivant: une entreprise italienne présente une demande à un tribunal italien contre un consommateur polonais. Dans quelle langue ce dernier va-t-il se voir notifier la demande et en recevoir copie, en italien ou en polonais? Dans la première hypothèse, comment garantir que le consommateur a compris le contenu de la notification de manière à pouvoir décider en connaissance de cause s'il va introduire une réclamation? Dans la dernière hypothèse, qui est responsable de la traduction de la notification? Qui prend les coûts en charge?

6.15.4

De plus, les formulaires en cause présupposent que le demandeur doit non seulement cocher des champs prédéfinis mais également rédiger un texte. Qui a la responsabilité de la traduction de ce texte? Et qui en certifie la conformité?

6.15.5

Le règlement (CE) no 1348/2000 du 29 mai 2000 relatif à la signification et à la notification dans les États membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale n'apporte pas de réponse aux préoccupations antérieurement évoquées compte tenu de la nature peu formelle et rapide de la procédure à l'examen.

6.15.6

En effet, même si l'hypothétique consommateur polonais précité reçoit la notification dans sa langue maternelle, dans quelle langue va-t-il répondre? Qui fera la traduction du polonais vers l'italien? Dans quelle langue formulera-t-il la demande reconventionnelle? Comment cette dernière sera-t-elle traduite? Dans tous ces cas de figure, il existe des obstacles qui remettent en cause la rapidité et le coût de la procédure.

6.15.7

Aussi, le CESE invite vivement la Commission à réfléchir sur la manière la plus efficace de s'assurer que la réalisation des objectifs de rapidité et d'économie et les garanties de la défense des parties ne soient pas compromis par l'utilisation des formulaires dans le cadre de litiges transfrontaliers.

6.15.8

Le CESE estime également que tous les formulaires sont encore trop complexes pour pouvoir être remplis par des personnes qui n'ont pas de formation juridique.

6.15.9

En effet, des concepts tels que «taux d'intérêt légal»; «% au-dessus du taux de base de la BCE»; «annulation d'une vente»; «exécution d'engagements»; «jugement par défaut»; «demande reconventionnelle» ne sont pas faciles à comprendre pour les non-initiés. Étant donné que la Commission propose que le ministère d'avocat ne soit pas obligatoire dans cette procédure, il est nécessaire de veiller à ce que les vrais utilisateurs comprennent et sachent remplir les formulaires en question.

6.15.10

Enfin, la possibilité de représentation des parties par un avocat ou par un tiers n'étant pas exclue, elle devrait expressément figurer dans les formulaires.

Bruxelles, le 14 février 2006.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  COM(2005) 87 final du 15.3.2005.

(2)  JO C 19, du 23.1.1999.

(3)  Voir annexe SEC(2005)352 du 15 mars 2005.

(4)  Voir annexe SEC(2005) 351 du 15 mars 2005.

(5)  COM(2002) 746 final du 20.12.2002, au sujet duquel un avis CESE a été émis (rapporteur: Frank von FÜRSTENWERTH) (JO C 220, du 16.9.2003).

(6)  COM(2004) 173 final du 19.3.2005.

(7)  Cf. les résolutions du PE A2-152/86 du 13.3.1987, A3-0212/94 du 22.4.1994 et A-0355/96 du 14.11.1996.

(8)  Avis concernant le Livre vert sur l'accès des consommateurs à la justice (rapporteur: M. ATAÍDE FERREIRA - JO C 295 du 22.10.1994) et avis sur le marché unique et la protection des consommateurs: opportunités et obstacles (rapporteur: M. CEBALLO HERRERO - JO C 39 du 12.2.1996).

(9)  Cf. à ce propos les documents suivants:

Mémorandum de la Commission sur «l'accès des consommateurs à la justice» et «Communication complémentaire» respectivement du 12.12.1984 [COM(84)692] et du 07.5.1987 (COM(87) 210).

Communication de la Commission «Un nouvel élan pour la politique des consommateurs» COM(85) 314 final, du 23.7.1985, dans JO C 160 du 1.7.1985.

Plan d'action de la Commission du 14.2.1996 (COM(96) 13 final).

Communication de la Commission «Pour une efficacité accrue dans l'obtention et l'exécution des décisions dans l'Union européenne» (COM(1997) 609 final du 22.12.1997, dans JO C 33 du 31.1.1998).

Livre vert sur l'accès des consommateurs à la justice et le règlement des litiges dans le marché unique (COM(1993) 576).

Livre vert sur les modes alternatifs de résolution des conflits relevant du droit civil et commercial (COM(2002) 196 final du 19.4.2002).

(10)  Au nombre de dix, à savoir: le seuil et le type des litiges, la nature facultative ou obligatoire de la procédure, l'utilisation de formulaires, la représentation des parties et l'assistance à ces dernières, le règlement alternatif des litiges, l'obtention de preuves, le contenu de la décision et les délais, les coûts et les possibilités de recours.

(11)  Parmi lesquelles on peut distinguer:

Recommandation de la Commission du 12.5.1995 relative aux retards de paiement dans les transactions commerciales et communication de la Commission y afférente, dans JO L 127 du 10.6.1995 et JO C 144 du 10.6.1995.

Directive 98/27/CE, du 19.5.1998, relative aux actions en cessation (JO L 166 du 11.6.1998).

Directive 2000/35/CE du 29.6.2000 concernant la lutte contre les retards de paiement dans les transactions commerciales dans JO L 200 du 8.8.2000.

Règlement CE 44/2001 du 22.12.2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale (Bruxelles I) dans JO L 12 du 16.1.2001. Avis H. MALOSSE, dans JO C 117, du 26.4.2000.

Règlement CE no 805/2004 du 21.4.2004 qui prévoit la création d'un titre exécutoire européen pour les créances incontestées, dans JO L 143 du 30.4.2004. Avis G. RAVOET dans JO C 85 du 8.4.2003.

Règlement CE no 1206/2001 du 28.5.2001 relatif à la coopération entre les juridictions des États membres dans le domaine de l'obtention des preuves en matière civile et commerciale dans JO L 174 du 27.6.2001. Avis B. HERNÁNDEZ BATALLER dans JO C 139 du 11.5.2001.

Programme de mesures destinées à appliquer le principe de reconnaissance mutuelle des décisions en matière civile et commerciale (JO C 12 du 15.1.2001).

Règlement CE 1346/2000, du 29.5.2000, relatif à la procédure d'insolvabilité, dans JO L 160 du 30.6.2000. Avis G. RAVOET dans JO C 75, du 15.3.2000.

Règlement CE 1347/2000 du 29.5.2000 relatif à la compétence, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale des enfants communs; idem. Avis P. BRAGHIN dans JO C 368 du 20.12.1999.

Règlement CE 1348/2000 du 29.5.2000 relatif à la signification et à la notification dans les États membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale; idem. Avis B. HERNÁNDEZ BATALLER dans JO C 368 du 20.12.1999.

Décision 2001/470/CE du Conseil, du 28.5.2001, relative à la création d'un réseau judiciaire européen en matière civile et commerciale (JO L 174 du 27.6.2001). Avis D. RETUREAU dans JO C 139 du 11.5.2001.

Communication de la Commission relative à un nouveau cadre juridique pour les paiements dans le marché intérieur (COM(2003) 718 final, du 2.12.2003). Avis G. RAVOET dans JO C 302 du 7.12.2004.

(12)  COM(2002)159 final, JOCE C 203 du 27.8.2002. Avis G. RAVOET dans JO C 85 du 8.4.2003.

(13)  Puisque, comme le démontre bien l'étude d'impact, le nombre de cas de litiges de faible importance à caractère purement transfrontalier sera toujours relativement réduit y compris dans un avenir prévisible.

(14)  Conformément à l'article 1er du protocole relatif à la position du Danemark, annexé au traité d'Amsterdam, le Danemark ne participe pas à l'adoption par le Conseil des mesures proposées relevant du titre IV du traité instituant la Communauté européenne en ce qui concerne la justice et les affaires intérieures.

(15)  Comme cela s'est déjà produit avec la reconnaissance et l'application des décisions en matière civile et commerciale (décision du Conseil du 20.09.05, dans J.O L 299 du 16.11.05)

(16)  Comme c'est déjà le cas avec la proposition de la Commission portant modification du règlement relatif à la signification et la notification des actes judiciaires.

(17)  Il en est ainsi dans plusieurs États membres. Par exemple, au Portugal, la règle générale veut qu'il ne soit pas possible d'interjeter appel dans le cadre de procédures dont le montant est inférieur à 3 750 euros.

(18)  JO L 26/41 du 31.1.2003.


11.4.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 88/68


Avis du Comité économique et social européen sur «Le renforcement de la gouvernance économique — La réforme du pacte de stabilité et de croissance»

(2006/C 88/15)

Le 10 février 2005, le Comité économique et social, conformément à l'article 2, paragraphe 2 de son règlement intérieur, a décidé d'élaborer un avis sur le thème suivant: «Le renforcement de la gouvernance économique — La réforme du pacte de stabilité et de croissance».

La section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux en la matière, a élaboré son avis le 27 janvier 2006 sur la base du projet présenté par Mme FLORIO (rapporteuse) et M. BURANI (corapporteur).

Lors de sa 424e session plénière des 14 et 15 février 2006 (séance du 15 février 2006), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 88 voix pour, 7 voix contre et 5 abstentions.

1.   Contexte général

1.1

Le Comité se dit extrêmement préoccupé par l'impasse dans laquelle se trouve la gouvernance économique européenne. Par conséquent, il juge opportun de relancer le débat sur tous les instruments de politique économique dont l'Union européenne s'est dotée au fil du temps et de poursuivre l'évaluation des réformes du Pacte de Stabilité et de Croissance.

1.2

Le présent document poursuit les objectifs suivants:

illustrer les différents points de vue qui ont émaillé le débat politique et économique des six dernières années, aux cours desquelles le pacte de stabilité et de croissance a produit ses effets;

évaluer le processus de réforme qu'a subi le pacte ces derniers mois;

esquisser des lignes directrices qui permettraient de renforcer la gouvernance économique européenne.

1.3

Depuis sa création, le pacte de stabilité et de croissance a joué un rôle fondamental pour assurer la croissance économique européenne dans un contexte commun de stabilité monétaire.

1.4

Ce processus n'a toutefois pas été assorti d'une coordination suffisante de la gouvernance économique européenne et ce, à une période où les tensions internationales étaient fortes, et le restent, tant sur le plan économique que politique.

1.5

Au cours des six années qui se sont écoulées depuis la mise en vigueur du Pacte, plusieurs États ont exercé une certaine pression, exigeant la réforme de celui-ci.

1.6

Force est toutefois de constater que cette réforme est incomplète, étant donné qu'elle n'est pas parvenue à renforcer le processus de coordination de la politique économique européenne qui permettrait de tirer pleinement profit des occasions offertes par l'Union économique et monétaire en termes de croissance économique et de développement de l'emploi.

1.7

C'est sur le renforcement nécessaire de la gouvernance économique européenne que sont axées les mesures proposées par le Comité économique et social européen, qui visent à la coordination des politiques économiques et fiscales, dans le respect de l'assainissement des budgets des États membres et dans l'optique de la relance des investissements orientés vers la réalisation des objectifs définis par la stratégie de Lisbonne.

2.   Du traité de Maastricht au pacte de stabilité et de croissance

2.1

L'adoption en 1997 du pacte de stabilité et de croissance a été l'instrument par lequel l'on s'est employé à poursuivre au sein de l'Union économique et monétaire la discipline budgétaire instaurée par le traité de Maastricht (1). Sur la base de ce principe, l'équilibre des finances publiques devait constituer, pour ses auteurs, le moyen grâce auquel renforcer les conditions favorables tant à la stabilité des prix qu'à une croissance vigoureuse et durable permettant la création d'emplois.

2.2

Dans le cadre de cette approche, «l'adhésion à l'objectif qui consiste à parvenir à une situation budgétaire saine proche de l'équilibre ou excédentaire permettra à tous les États membres de faire face aux fluctuations conjoncturelles normales tout en maintenant leur déficit budgétaire en dessous de la valeur de référence de 3 % du PIB» (2).

2.3

Le pacte de stabilité et de croissance se fonde sur les éléments essentiels suivants:

un engagement politique des parties au pacte (Commission, États membres, Conseil européen) fondé sur la disponibilité à mettre dûment en œuvre le renforcement du processus de surveillance budgétaire et de coordination des politiques économiques entre les États membres;

une action préventive de surveillance, permettant d'empêcher que les déficits publics dépassent le seuil de référence fixé à 3 % du PIB. À cet égard, le règlement du Conseil 1466/97 renforce le processus de surveillance multilatérale des positions budgétaires et la coordination des politiques économiques en prévoyant que chaque État membre de l'UE prépare un programme de stabilité et de croissance en vue de son approbation par le Conseil européen;

une action dissuasive, dans le cadre de laquelle les pays risquant de créer un déficit excessif font l'objet d'un avertissement précoce afin de les induire à adopter les mesures adéquates de correction.

un déficit excessif dans un pays déclencherait l'activation d'une «procédure de déficit budgétaire excessif» (3): au terme de celle-ci, si le déficit n'est pas résorbé de façon substantielle par le pays concerné, il est prévu de lui appliquer une sanction pouvant atteindre 0,5 % du PIB.

3.   Évaluation des six premières années de fonctionnement du pacte

3.1

Six ans après l'introduction de l'euro, il convient de reconnaître que la réalisation de l'Union économique et monétaire européenne constitue l'un des phénomènes les plus importants et les plus surprenants de l'histoire européenne. Le simple fait que 300 millions de citoyens environ appartenant à 12 pays européens partagent depuis janvier 2002 la même monnaie donne une idée de l'importance de cet événement historique pour l'Europe.

3.2

Les facteurs de réussite et d'échec, lors des six premières années de cette expérience, peuvent être résumés pour l'essentiel dans les deux termes qui donnent son nom au Pacte: une réussite indéniable pour la stabilité monétaire et une désillusion tout aussi évidente en ce qui concerne la croissance économique européenne. Pendant ces six années, à l'intérieur de la zone euro, l'inflation a été sensiblement limitée, autour de 2 %. La stabilité monétaire a été maintenue surtout grâce à l'action obstinée menée par la Banque centrale européenne par l'intermédiaire du contrôle des taux d'intérêt.

3.3

Un second facteur positif lié à la formation de l'Union économique et monétaire est celui de l'intégration européenne des marchés (surtout financiers), grâce à la suppression des coûts de transaction et des risques de change. Cette intégration, conjuguée avec la stabilité monétaire, a entraîné une baisse progressive des taux d'intérêt dans la zone euro.

3.4

L'action concomitante de la stabilité des prix et de la baisse des taux d'intérêt s'est traduite, après une première période d'attente (1999-2001), par une confiance progressive des marchés financiers à l'égard de la monnaie européenne, comme on peut le constater dans la figure 3 qui illustre l'appréciation de la monnaie européenne.

3.5

À côté de ces éléments indéniablement positifs liés à la naissance de l'euro, il en est d'autres, sur le front de la croissance économique, qui suscitent une vive perplexité. Rappelons qu'au cours de la seconde moitié des années 90, les pays qui allaient participer à la monnaie unique européenne avaient enregistré une forte augmentation de leur produit intérieur brut. Pour cette raison, à la veille de la constitution de l'UEM, les attentes étaient nourries quant au nouveau renforcement de la croissance européenne qu'entraînerait la monnaie unique européenne. Or, le renforcement attendu de la croissance économique dans la zone euro ne s'est pas produit. Contrairement aux prévisions, ce sont précisément les pays restés en dehors de l'euro qui ont bénéficié d'un renforcement de la croissance économique, enregistrant des taux de croissance du PIB supérieurs à ceux de la zone euro.

3.6

Les chocs asymétriques survenus au sein de la zone euro constituent un autre phénomène inattendu dans l'UEM. Les différences entre les taux de croissance des États membres participant à l'UEM ont en effet été très variées et beaucoup plus amples que prévues: certains pays se sont retrouvés en récession tandis que d'autres connaissaient des phases d'expansion économique.

3.7

Parmi les attentes qui avaient vu le jour au sein de la communauté des États membres de la zone euro, il convient de mentionner celle selon laquelle l'unification monétaire mènerait à une transparence accrue des prix, la concurrence accrue sur le marché des biens de consommation qui en aurait résulté entraînant quant à elle une baisse des prix et une nette amélioration des bénéfices pour les consommateurs (grâce à la croissance de leurs revenus réels). Malheureusement il n'en a pas toujours été ainsi. Suite à l'absence de contrôles, dans certains États membres, en particulier durant la phase du basculement vers l'euro, des augmentations de prix injustifiés ont été enregistrées. C'est ce qui est arrivé pour le prix de certains produits alimentaires, en Italie notamment, mais aussi en Allemagne et en Grèce. Suite à de telles distorsions (dans les mécanismes de transfert des prix) dans ces pays, l'Europe n'a pas été perçue par la collectivité comme un instrument susceptible d'améliorer le bien-être de la communauté des consommateurs.

3.8

Il ne fait aucun doute que ces six premières années d'existence de l'UEM ont été une réussite essentiellement monétaire et financière, l'euro devenant de plus en plus populaire sur les marchés financiers et bancaires. Rappelons qu'en six ans seulement, l'euro est devenu la deuxième monnaie la plus employée dans le monde (4). Cet essor de la monnaie européenne a été favorisé par une politique monétaire rigoureuse ayant pour principal objectif la stabilité des prix, comme le prévoit le traité instituant la Banque centrale européenne, et partant, l'accroissement de la confiance témoignée par les marchés financiers à l'égard de la nouvelle monnaie (5).

4.   L'UEM: le conflit entre stabilité et croissance

4.1

Malheureusement, le succès rencontré sur le plan monétaire et financier n'a pas été le même dans l'économie réelle, en termes d'accroissement de la production et de l'emploi. Pour ces raisons, l'euro, même s'il représente un événement très important, n'est pas encore perçu — par une partie substantielle de la communauté de la zone euro — comme il le devrait, c'est-à-dire comme une réussite.

4.2

Les causes de cette impasse particulière dans laquelle se trouve l'Union économique et monétaire ont donné lieu à plusieurs interprétations, qui sont principalement de deux types. D'une part, certains (que nous pourrions appeler structuralistes) estiment que les écarts de croissance économique sont essentiellement imputables à des rigidités structurelles qui n'ont rien à voir avec les règles imposées par l'Union économique et monétaire. À l'opposé, d'autres (les macroéconomistes) estiment que, d'abord le traité de Maastricht, et ensuite le pacte de stabilité et de croissance, ont introduit des règles qui ont donné lieu à une politique macroéconomique inefficace, laquelle a bloqué le potentiel de croissance de l'économie européenne.

4.3

Il est indéniable qu'existent entre les États qui composent l'UEM des différences substantielles de caractère structurel, mais à elle seule, cette interprétation ne peut expliquer la croissance insuffisante de l'économie de la zone euro à partir de 2001. Les pays européens n'appartenant pas à cette zone sont sortis d'une situation de stagnation de manière plus nette et plus rapidement que les pays de la zone euro. À partir de 2001, les différences de taux de croissance économique entre les pays de la zone euro et les pays n'appartenant pas à celle-ci étaient en moyenne de 1,1 % en faveur de ce dernier groupe. Par ailleurs, si l'on compare la dynamique économique des pays de la zone euro et des États-Unis, on constate que dans la zone euro, la phase conjoncturelle défavorable, quoique moins intense, a duré plus longtemps qu'aux États-Unis.

4.4

Ces différences ne peuvent s'expliquer exclusivement par des facteurs de caractère structurel. Une interprétation de ce genre doit faire l'objet d'explications ultérieures, et comme nous le verrons, le second type d'interprétation de la situation va dans ce sens, qui juge inadéquate l'actuelle politique macroéconomique européenne, tant du point de vue monétaire que fiscal.

4.5

En ce qui concerne la politique monétaire, la Banque centrale européenne, conformément au mandat exclusif qui lui a été confié afin de «maintenir la stabilité des prix» au sein de la zone euro, a adopté une politique monétaire particulièrement rigide fixant le taux d'inflation objectif à 2 %, plafond jugé excessivement contraignant au cours de la période de stagnation qui a marqué les années 2001 et 2002. Il faut toutefois reconnaître que l'extrême diversité des situations au sein de la zone euro n'a certainement pas aidé la BCE à réagir prestement aux conjonctures délicates par une réduction décisive des taux d'intérêt.

4.6

Du point de vue de la politique fiscale, c'est également le comportement des pays de la zone euro qui n'a pas permis à l'époque de sortir de la crise conjoncturelle née en 2001. Durant la période de stagnation, les pays de la zone euro ont pratiquement stabilisé le rapport dette/PIB (de 2001 à 2003, il est passé de 69,6 % à 70,8 %), alors que les États-Unis ont réagi plus rapidement (pour la même période, ce rapport est passé de 57,9 % à 62,5 %) grâce à une politique keynésienne proposant de sortir de la période de stagnation grâce au «deficit spending» (dépenses délibérément supérieures aux recettes).

4.7

L'incapacité des pays de la zone euro à adopter des politiques budgétaires anticycliques est due en partie à un héritage du passé (déficits publics accumulés par les gouvernements nationaux et incapacité à les réduire durant la phase d'expansion 1996-2000) et en partie aux exigences du Pacte de stabilité et de croissance. Ce Pacte impose, aussi bien aux pays dont le rapport dette/PIB est inférieur à 60 % (Espagne: 48,9 %; Irlande: 29,9 %; Pays-Bas: 55,7 %; Finlande: 45,1 %) qu'aux pays dont le même rapport est acceptable c'est-à-dire légèrement supérieur au seuil fixé (Allemagne: 66,0 %; France: 65,6 %; Autriche: 65,2 %; Portugal: 61,9 %), une contrainte budgétaire jugée par beaucoup injustifié (6). Une des principales critiques adressées au Pacte portait essentiellement sur la règle limitant le déficit public à 3 %, celle-ci étant considérée comme tout à fait arbitraire et inutile tant dans les phases de récession que dans les phases d'expansion. En effet, en phase de récession, elle ne permettait pas aux gouvernements de mettre en œuvre une politique budgétaire d'expansion, susceptible de permettre à leur économie de se sortir de telles phases dans des délais raisonnables. Pendant la phase d'expansion, elle ne garantissait pas non plus que les gouvernements adopteraient un comportement vertueux en renforçant leur discipline budgétaire. L'on accusait donc le pacte de représenter l'un des principaux instruments de l'inertie institutionnelle européenne dans le domaine macroéconomique. Concentré exclusivement sur les objectifs intermédiaires (équilibre budgétaire et stabilité financière), le Pacte négligeait, voire empêchait d'atteindre les objectifs finaux de la stabilité macroéconomique (croissance économique et plein emploi) (7).

4.8

Bon nombre des propositions de réforme exigeaient que l'attention soit concentrée sur le rapport déficit public/PIB plutôt que sur le rapport dette/PIB. Dans ce nouveau contexte, le Pacte de stabilité et de croissance évoquait la «durabilité de la dette» des pays appartenant à la zone euro en adoptant une position plus souple vis-à-vis des pays dont le niveau de la dette était légèrement inférieur à 60 %.

4.9

En septembre 2003, l'économiste Paul De GRAUWE élaborait une proposition de réforme intéressante, dans laquelle il suggérait que chaque gouvernement de la zone euro définisse son propre objectif de dette (sur la base de la situation économique et financière de chaque pays) avant d'adopter une série d'interventions en matière de politique économique compatibles avec cet objectif. Bien que prévoyant la possibilité pour chaque pays de s'éloigner pour une brève période de l'objectif fixé (en cas de situation conjoncturelle exceptionnelle), cette proposition ne garantissait pas qu'à moyen et long terme, le rapport dette/PIB atteindrait l'objectif défini au préalable.

4.10

Une autre proposition de réforme du Pacte consistait à garantir l'introduction d'une «règle d'or des finances publiques» selon laquelle les dépenses d'investissement permettant d'atteindre les objectifs fixés par la stratégie de Lisbonne (introduction et diffusion de l'innovation technologique, dépenses de R&D, dépenses de formation, etc.) ne figurent pas parmi les dépenses ayant un impact sur le déficit public.

4.11

L'application de cette règle d'or suscite quelques critiques concernant l'imprécision du concept d'investissement public, faiblesse qui pourrait amener à inclure parmi les dépenses d'investissement d'autres frais. Afin de supprimer ce risque, d'aucuns, notamment l'économiste français J.P. FITOUSSI, proposent que les investissements publics concernés par la «règle d'or» soient définis par le Conseil européen après consultation du Parlement européen. Ainsi, le flou qui entoure la définition des investissements publics serait converti en une opportunité de développer une politique de coordination grâce à l'instauration d'un système de stimulation qui inciterait les pays à investir dans des secteurs spécifiques d'intérêt commun (8). C'est pourquoi la proposition présentée par le Président de la Commission, M. BARROSO, mérite que l'on s'y attarde. Elle concerne l'institution d'un fonds communautaire destiné aux investissements présentant un intérêt au niveau européen et nécessaires pour la croissance et le développement économique.

4.12

Un vaste débat a été lancé sur les mesures qui permettraient une mise en œuvre réelle du pacte. Deux points de vue essentiellement se sont affrontés: d'un côté ceux qui préfèrent s'en tenir à un système de règles sûres, de l'autre ceux qui espèrent que le pacte encouragera les gouvernements à prendre des décisions politiques sur la base des principes économique qui le sous-tendent. Ce débat a mis en lumière la nécessité de réformer le pacte sur la base d'un système de règles en mesure d'asseoir sa légitimité sur les plans technique, économique et politique (9).

5.   La réforme du Pacte: de la proposition présentée par la Commission européenne  (10) à la position défendue par le Conseil européen  (11)

5.1

Les critiques émises à l'encontre du Pacte ont eu un écho retentissant lorsqu'à la suite de la situation conjoncturelle délicate des années 2002-2003, le Pacte a été soumis à une série de pressions qui ont mis en évidence la nécessité d'une révision. Rappelons le refus de l'Allemagne et de la France de se soumettre à la règle des 3 %, et la polémique entre la Commission et le Conseil européen qui s'en est suivi. En fait, il s'agissait d'une véritable déchirure institutionnelle marquant le passage d'une méthode communautaire de coordination ouverte, définie par les règles du Pacte, à une méthode de contrôle intergouvernemental totalement autoréférentielle. Bon nombre des propositions de réforme exigeaient que l'attention soit concentrée sur le rapport déficit public/PIB plutôt que sur le rapport dette/PIB.

5.2

Le conflit institutionnel au sein de l'UE reflétait le conflit existant entre les deux piliers de la politique fiscale et économique de l'Union: garantir une croissance économique tout en imposant aux États membres une discipline budgétaire. Dans ce contexte, il était urgent de procéder à une réforme du Pacte qui renforcerait l'Union en conciliant ces deux piliers. A l'automne 2004, la Commission a élaboré une proposition de réforme à l'intention du Conseil européen, et qui comprenait cinq lignes directrices.

5.2.1

Les procédures de contrôle des équilibres comptables nécessitaient qu'une attention particulière soit accordée à la dette et à la durabilité des budgets tout en continuant à maintenir un contrôle sur l'évolution du déficit;

5.2.2

Définir des objectifs budgétaires à moyen terme pour chaque État membre en tenant compte des spécificités de chacun. Une telle méthode permettait d'une part de respecter la règle des 3 % en cas de conjonctures défavorables et d'autre part de réduire le rapport dette/PIB, notamment en vue de contrer l'impact du vieillissement de la population sur le budget de certains États;

5.2.3

En cas de déficit excessif, la Commission proposait d'accorder davantage d'importance aux circonstances économiques. La définition de «circonstances exceptionnelles», qui dans le Pacte permettait aux États de se soustraire aux procédures en cas de déficit excessif, pouvait être modifiée de façon à prendre éventuellement en considération des situations de récession prolongées dans le temps. Les procédures appliquées en cas de déficit excessif pouvaient être revues compte tenu aussi bien des conditions cycliques que des risques en termes de durabilité. Ainsi, le processus d'ajustement correspondait davantage aux spécificités de chaque pays concerné et en garantissant que la correction du déficit pouvait se faire dans un laps de temps plus long que l'année suivant celle de l'identification du déficit excessif;

5.2.4

Garantir l'efficacité des actions de prévention en ce qui concerne la correction des positions budgétaires inappropriées. La rapidité de réaction à de telles situations garantissait que les rééquilibrages budgétaires nécessaires étaient réalisés durant des phases conjoncturelles favorables;

5.2.5

Renforcer l'application des règles de contrôle. La proposition prévoyait de confier la notification préventive à la Commission sans approbation préalable du Conseil. Cette mesure renforçait aussi bien le pouvoir de contrôle de la Commission que celui des organismes institutionnels nationaux de contrôle.

5.3

La proposition de réforme du Pacte — pour la Commission — représentait non pas une révolution mais une évolution, qui permettait au Pacte de résoudre les situations critiques susceptibles de mener à une impasse institutionnelle, comme ce fut le cas par le passé. En outre, en adaptant le Pacte à la situation sur le terrain, la Commission avait l'intention, grâce à la réforme, de renforcer la crédibilité du Pacte et d'accroître parmi les États membres le consensus sur les règles qu'il contient.

5.4

Au printemps 2005, le Conseil européen apportera une réponse assez différente des attentes de la Commission. Durant la réunion de printemps (22-23 mars 2005), le Conseil européen a approuvé le document préparé par le Conseil ECOFIN et intitulé «Améliorer la mise en œuvre du pacte de stabilité et de croissance». Ce document présentait une série de modifications significatives du Pacte concernant «l'accélération et la clarification de la mise en œuvre de la procédure concernant les déficits excessifs» (Règlement CE no1056/2005 du Conseil du 27 juin 2005) et «le renforcement de la surveillance des positions budgétaires ainsi que de la surveillance et de la coordination des politiques économiques» (règlement CE C 1055/2005 du Conseil du 27 juin 2005). Ces modifications ont introduit d'une part plusieurs éléments de flexibilité afin de prévoir des circonstances atténuantes pour les pays engagés dans des situations de déficit excessif et d'autre part le prolongement des délais prévus pour la correction des déficits. Cela vaut la peine de se pencher un instant sur les principales modifications apportées au Pacte par le Conseil européen.

5.4.1

Une des principales modifications concerne la définition des objectifs budgétaires à moyen terme. La version précédente du Pacte considérait ces objectifs comme des positions budgétaires proches de l'équilibre ou excédentaires: d'éventuels déficits allant jusqu'à 0,5 % du PIB étaient admis en cas d'incertitude liée à l'évaluation des différents postes comptables. Des écarts par rapport à l'objectif à moyen terme n'étaient pas prévus.

5.4.1.1

Avec la modification introduite par le Conseil, la marge de variation du déficit public des États membres de l'UEM et des pays adhérant au mécanisme de change européen (MCE II) peut aller d'une situation d'équilibre ou excédentaire (pour des pays dont la dette est élevée et ayant un faible potentiel de croissance) à un déficit de 1 % du PIB (pour des pays dont la dette est faible et ayant un potentiel de croissance élevé). D'éventuels écarts par rapport à l'objectif à moyen terme sont admis lorsque le gouvernement de l'État concerné a procédé à des réformes de type structurel.

5.4.2

Le parcours d'ajustement en vue d'atteindre l'objectif budgétaire à moyen terme. Dans la précédente version du Pacte, les procédures prévues dans ce cas n'étaient pas définies par le Pacte mais par les décisions prises par le Conseil européen.

5.4.2.1

Dans la nouvelle version, un État peut s'écarter de l'objectif à moyen terme. Il est prévu que cet écart soit corrigé grâce à un ajustement annuel de 0,5 %. Les efforts en vue du rééquilibrage peuvent être «modestes» durant les phases économiquement défavorables, et «vigoureux» durant les phases d'expansion économique, de sorte que les retombées «inattendues» de ces phases puissent être mises à profit pour réduire le déficit et la dette. Des écarts sont également admis en cas de réformes structurelles, tandis qu'aucune sanction n'est prévue lorsque l'ajustement annuel de 0,5 % n'est pas atteint.

5.4.3

Facteurs significatifs de manque de respect du seuil des 3 %. La précédente version du Pacte prévoyait des facteurs temporaires et exceptionnels, à savoir: catastrophes naturelles, baisse du PIB de 2 %, baisse du PIB comprise entre 0,75 et 2 % laissée à la libre appréciation du Conseil. Aucun autre facteur n'était prévu.

5.4.3.1

Dans la réforme du Pacte, les facteurs exceptionnels sont définis mais ne sont pas quantifiés: taux de croissance du PIB annuel négatif, diminution accumulée de la démographie accompagnée d'un taux de croissance du PIB inférieur à la croissance potentielle. A ces facteurs s'ajoutent d'autres éléments importants dont la Commission devra suffisamment tenir compte «dans l'évaluation qualitative des résultats au vu du seuil de référence des 3 %»:

i)

développement du potentiel de croissance;

ii)

primauté des conditions de cycle économique;

iii)

mise en œuvre de la stratégie de Lisbonne;

iv)

dépenses pour la recherche, le développement et l'innovation;

v)

réajustements budgétaires précédents survenus lors de phases conjoncturelles favorables;

vi)

durabilité du niveau de la dette;

vii)

investissements publics;

viii)

qualité des finances publiques;

ix)

poids des contributions financières en matière de solidarité internationale;

x)

de la contribution financière dérivant de la réalisation d'objectifs communautaires dans le cadre du processus d'unification (12);

xi)

réforme des pensions.

5.4.4

Délai pour la correction du déficit. Dans la version précédente du Pacte, ce délai coïncidait avec l'année suivant l'identification du déficit, sauf en cas de circonstances exceptionnelles. Ces circonstances n'étaient toutefois pas spécifiées, et le Conseil était libre de fixer le nouveau délai.

5.4.4.1

Le nouveau Pacte maintient d'une façon générale le même délai mais en cas de «circonstances particulières» faisant partie des autres facteurs décrit ci-dessus, le délai peut être de deux ans après l'identification du déficit. Toute une série de délais liés à la procédure pour déficit excessif sont reportés dans le temps.

5.5

En ce qui concerne la proposition de la Commission, la réforme réalisée par le Conseil européen s'engage sur une voie relativement différente, qu'il semble plutôt difficile de concevoir comme un compromis entre la direction empruntée par la Commission et les exigences du Conseil. La réforme introduit de nombreux éléments affaiblissant le Pacte en raison d'une répartition déséquilibrée des compétences entre les organes institutionnels européens. Ainsi, on observe une asymétrie entre les compétences de la Commission (en tant que gardienne des traités) qui s'avère assez affaiblie, le Conseil qui ressort excessivement renforcé et le Parlement européen qui est pratiquement ignoré tout au long de ce processus.

6.   Premières évaluations du processus de réforme du Pacte de stabilité et de croissance

6.1

La réforme choisie par le Conseil européen porte considérablement atteinte au principe de la discipline budgétaire introduit par le Traité de Maastricht (1991) et confirmée par la suite par le Pacte conclu lors du Sommet d'Amsterdam en 1997. Comme le signalaient J. Bouzon et G. Durand (2005), le caractère schizophrène du processus de réforme apparaissant déjà dans le document du Conseil ECOFIN du 21 mars: «Il importe d'assurer un équilibre adéquat entre, d'une part, le discernement économique le plus élevé et la liberté de décision en matière de surveillance et de coordination des politiques budgétaires et, d'autre part, la nécessité de faire en sorte que le cadre réglementaire soit simple, transparent et applicable». En réalité, il s'agissait d'un véritable conflit entre la nécessité d'arriver à une liberté de décision politique et économique d'une part et le maintien d'un cadre réglementaire simple, transparent et renforcé d'autre part. Le processus de réforme en cours semble avoir privilégié les arguments conjoncturels et politiques au détriment du cadre réglementaire simple et transparent.

6.2

La réforme affaiblit le Pacte essentiellement à deux niveaux: d'une part par le prolongement des délais, d'autre part par l'introduction d'un système d'exceptions et d'exemptions qui peut couvrir toutes sortes de situations, précisément parce que les facteurs d'évaluation peuvent être interprétés de plusieurs façons. La combinaison de ces deux éléments tend à affaiblir l'efficacité du contrôle budgétaire et à le rendre moins transparent. Dans ce contexte, l'objectif d'équilibre des finances publiques devient, comme le fait observer la deutsche Bundesbank, un objectif «mouvant» (13). Avec un Pacte affaiblit dans son objectif de garantir la discipline budgétaire des États membres, la BCE pourrait avoir tendance à exercer le rôle exclusif de gardienne du Pacte et de garant unique de la stabilité monétaire de l'Union européenne. Cela engendrera — en termes macroéconomiques — une sorte d'ex æquo, où les «gains» découlant du relâchement de la politique fiscale seraient compensés par les «pertes» dues au durcissement de la politique monétaire (14).

6.3

Au-delà de ce qui s'est avéré une tentative claire — plutôt bien réussie — de la part des gouvernements nationaux de se réapproprier un mécanisme de politique économique qui leur avait été retiré, du moins en partie, par l'intermédiaire du Pacte, il serait utile d'émettre une série de considérations générales.

6.4

Il ne fait aucun doute que l'expansion du rapport dette/PIB passe inévitablement par une croissance continue du rapport déficit/PIB. Mais il est tout aussi vrai que dans un contexte de durabilité des finances publiques, le déficit devient un objectif intermédiaire et la dette, un objectif final (15).

6.4.1

Un des problèmes clés de l'UEM est donc lié à la viabilité à long terme des finances publiques des États membres. Il serait utile d'adopter d'autres instruments communautaires permet de garantir un assainissement des finances publiques pour les pays dont le déficit public est élevé, dans la mesure où la viabilité des finances publiques non seulement garantit une stabilité monétaire mais permet également de lancer un processus de développement et de croissance.

6.4.2

La viabilité des finances publiques ne passe pas par une réduction systématique des dépenses sociales mais bien par leur optimisation, une meilleure efficacité, conformément au principe énoncé à plusieurs reprises par la Commission et selon lequel «la protection sociale est considérée comme pouvant jouer un rôle important de facteur de production dans la mesure où elle assure la construction d'économies efficientes, dynamiques et modernes sur des bases solides et sur la justice sociale» (16).

6.5

Une autre caractéristique du document proposé par le Conseil ECOFIN et le processus de réforme du Pacte qui a suivi avec les règlements 1055/2005 et 1056/2005, est la singulière référence à la réforme des retraites. Bizarrement, le document accorde beaucoup plus de place à la nécessité de parvenir à une réforme des systèmes de retraite européens (favorisant ainsi l'introduction d'un système «à piliers multiples» public et privé) qu'au poids que devrait avoir le niveau de la dette publique dans l'évaluation de la durabilité fiscale des États membres. Dans ce contexte, les pays qui ont mis en œuvre de telles réformes sont en droit de s'écarter de l'objectif à moyen terme ou de dépasser le seuil des 3 %.

6.5.1

On introduit ainsi le concept de «passifs implicites», lié aux dépenses croissantes auxquelles les États devront faire face dans un avenir proche en raison du vieillissement de la population. Le concept de «passifs implicites» s'ajoute ainsi aux autres critères qui permettent à la Commission et au Conseil d'évaluer la durabilité des finances publiques des États membres. Comme le font observer J. Bouzon et G. Durand, le problème posé par une approche de ce genre est l'absence d'un jugement uniforme concernant les définitions en jeu et ce qu'elles couvrent (17).

7.   Les propositions du CESE pour la relance d'une gouvernance économique européenne

7.1

Malheureusement, durant le processus de réforme lancé par la Commission à l'automne 2004 et prenant fin avec la réforme du Pacte décrétée par le Conseil européen au printemps 2005, personne n'a eu le courage de rediscuter et de redéfinir l'appareil théorique et idéologique sous-tendant le Pacte. Une lacune qui a limité la possibilité de parvenir à une transformation et une mise en œuvre radicale du Pacte lui-même (18). Cette transformation aurait été nécessaire pour faire face et tenter de résoudre une fois pour toutes le «paradoxe de la souveraineté» qui caractérise le Pacte (mais qui est aussi présent dans d'autres domaines de la politique européenne).

7.2

Un paradoxe qui consiste à avoir d'une part les États et le Parlement européen, organes de représentation jouissant de la légitimité démocratique mais privés des outils appropriés en matière de politique économique, et d'autre part des organismes tels que la Commission et la Banque centrale européenne qui, bien que ne disposant pas d'une légitimité directe, sont toutefois dotés des instruments de politique économiques ad hoc. Il en ressort un conflit entre légitimité sans pouvoir et pouvoir sans légitimité, un pouvoir qui, dans ce dernier cas, fonde sa légitimité non pas sur un processus démocratique clair, mais sur un «système doctrinal» qui sert de base à la neutralisation des gouvernements. Ce paradoxe de la souveraineté ne peut être résolu si l'on ne règle pas le conflit entre légitimité sans pouvoir et pouvoir sans légitimité.

7.2.1

Les critères à adopter pour évaluer les performances économiques des États membres découlent de ce système doctrinal: équilibre budgétaire, flexibilité des marchés, réformes structurelles, etc. Tels sont les principaux objectifs de finances publiques durables qui font malheureusement passer au second plan les objectifs finaux de la stabilité macroéconomique de la croissance et du plein emploi qui sont les fondements de la stratégie de Lisbonne (19).

7.3

Dans ce contexte particulier, la réforme du Pacte a cherché à résoudre le «paradoxe de la souveraineté». Le Conseil européen a en réalité neutralisé le pouvoir de contrôle de la Commission en l'attribuant à un Conseil composé de ceux qui sont susceptibles de rentrer dans la catégorie des «contrôlés». A la question «Qui contrôle les contrôleurs?», il faut bien répondre non sans un certain embarras «Les contrôlés» ! Le déficit démocratique présent dans la version traditionnelle du Pacte de stabilité et de croissance ne semble pas avoir été résolu par la réforme. Pire, à ce déficit s'ajoute un autre déficit, lié à l'absence de transparence et de simplicité. Dans ce contexte, il est utile de se demander quel peut être le rôle du Parlement européen pour renforcer le degré de légitimité démocratique du Pacte et quelles sont les mesures susceptibles d'améliorer et de rééquilibrer les pouvoirs de la Commission, du Conseil et du Parlement européen.

7.4

Après le processus de réforme du Pacte, on a constaté une série d'événements qui ont sérieusement porté atteinte au processus d'unification européenne, comme en témoignent les résultats négatifs des référendums sur la Constitution européenne en France et aux Pays-Bas, la décision prise dans les autres pays de suspendre le processus de consultation pour l'approbation de la Constitution européenne, l'échec embarrassant d'un accord sur le budget européen 2007-2013. C'est comme si le lent mais inexorable processus de construction du puzzle européen avait été interrompu parce que chaque État membre avait décidé de retailler ses propres pièces sur la base de ses intérêts nationaux. Désormais, les pièces du puzzle ne s'emboîtent plus les unes dans les autres. Elles pourront seulement être posées, voire superposées, sur la table, donnant lieu à une mosaïque pour le moins incomplète et vouée à être détruite à la moindre secousse — involontaire ou non — de la part des participants à sa (dé)construction.

7.5

Lorsque l'Union européenne traverse des phases délicates, comme c'est le cas actuellement, des décisions capables de faire prendre un tournant au débat en cours s'imposent. Il convient donc de se demander s'il ne serait pas opportun de suivre le conseil donné par J. HABERMAS dans un de ses récents articles (20). Le philosophe allemand explique que l'Union européenne est aujourd'hui paralysée par le conflit non résolu entre des manières différentes et inconciliables d'envisager les objectifs et que les institutions européennes doivent en même temps internaliser ce conflit et le porter au grand jour pour pouvoir trouver des solutions productives. Le CESE accueille favorablement la proposition d'ouvrir la porte à des «approfondissements politiques» entre États membres de l'Union dans toute une série de secteurs, sur une base volontaire et pas nécessairement sur celle de l'unanimité. Ces approfondissements permettraient de sortir de l'impasse à laquelle aboutit la nécessité de prendre des décisions à l'unanimité dans une Union à vingt-cinq.

7.6

Ces approfondissements devraient s'opérer au travers des coopérations renforcées prévues par les articles 43 et 44 du traité de Nice entre au moins huit États membres. Si ce type de coopération permet de prendre des décisions communes grâce à des règles de procédure moins restrictives, il reste cependant «ouvert» puisque, conformément à l'article 43 B du traité de Nice, la coopération reste à tout moment ouverte aux autres États membres.

7.6.1

L'Union économique et monétaire (UEM) pourrait naturellement être un premier secteur d'application de la coopération renforcée. Celle-ci pourrait s'avérer nécessaire compte tenu du fait que, contrairement aux États qui ne participent pas encore à la monnaie unique, ceux qui y participent ont indubitablement besoin de coordonner leurs politiques économiques. Par ailleurs, la politique fiscale fait partie intégrant des politiques économiques et par conséquent, comme le CESE l'a signalé dans d'autres avis (21), l'adoption de mesures dans ces matières dans la zone euro pourrait contribuer au renforcement de la cohésion économique et sociale dans l'ensemble de l'UE.

7.6.2

Les pays qui participent à l'UEM pourraient désigner un coordonnateur et porte-parole des États membres pour la politique économique qui ne recevrait pas simplement le mandat de coordonner les politiques économiques européennes mais également les pouvoirs nécessaires pour effectuer cette coordination. Le coordonnateur devrait agir en accord avec les présidents de la Banque centrale européenne et de la Commission européenne.

7.6.3

Les États membres qui participent à la coopération renforcée pourraient en outre décider d'organiser régulièrement des rencontres entre le coordonnateur de la coopération renforcée dans le secteur de l'UEM, la Commission, le Conseil, le Parlement européen et la Banque centrale. Cette approche permettrait de tenter de rééquilibrer l'actuelle répartition des pouvoirs qui penche trop en faveur du Conseil européen.

7.6.4

La coordination des politiques économiques entre les États membres qui participent à l'UEM devrait se traduire par l'établissement d'une liste de priorités en matière de politique économique et la définition d'instruments permettant de réaliser ces objectifs. Des contrôles devront être effectués en temps réel de manière à pouvoir procéder aux adaptations qui s'imposent en cours de route. Dans ce contexte, le renforcement de la gouvernance économique européenne devra s'accompagner d'un soutien du dialogue macroéconomique et dans le respect du dialogue social européen.

7.7

Outre les coopérations renforcées, il serait intéressant de reprendre la piste tracée par J. DELORS dans son Livre blanc de 1993 (22), à savoir créer un fonds européen pour la promotion de la croissance économique et la relance de la compétitivité européenne, en émettant des obligations de l'Union européenne à long terme liées à des projets stratégiques d'infrastructures matérielles et immatérielles. Par ailleurs, le fonds pour le développement proposé par M. BARROSO semble suivre cette direction.

7.8

Le renforcement de la gouvernance économique européenne exige la participation de tous les États membres, dans la mesure où il représente une chance de croissance pour l'Union européenne dans son ensemble.

7.9

Le débat sur la réforme du pacte de stabilité et de croissance a mis en exergue des contradictions propres à la nature institutionnelle de l'Union européenne.

7.10

La mise en œuvre du pacte de stabilité et de croissance implique un effort de clarification concernant l'avenir institutionnel de l'Union. Cet effort est indispensable si l'on veut que le pacte devienne l'un des instruments permettant de garantir la croissance économique, et donc la relance de l'emploi, tout en prévenant l'instabilité économique.

7.11

Face à une situation délicate comme celle dans laquelle se trouve aujourd'hui l'Union européenne, il est indispensable d'opérer des choix courageux pour imprimer un nouvel élan à l'idée de l'Europe que nous ont léguée les pères fondateurs.

7.12

Pour que la mise en œuvre du pacte de stabilité et de croissance soit couronnée de succès et que les objectifs à l'origine de sa création soient atteints, un vaste consensus et le soutien de l'opinion publique, pas seulement celui des institutions communautaires et des gouvernements nationaux, sont impératifs. Aussi, au cours des prochains mois, le CESE organisera-t-il une conférence dans le cadre de laquelle toutes les parties concernées par ce processus, des responsables institutionnels aux partenaires sociaux en passant par les acteurs de la société civile, auront l'occasion de participer à un débat vaste et approfondi.

Bruxelles, le 15 février 2006.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  Le Pacte a été adopté officiellement en 1997 (dans le but de renforcer la discipline budgétaire de l'Union économique et monétaire prévue par les articles 99 et 104 du traité instituant la Communauté européenne), mais n'est entré en vigueur qu'avec le lancement de l'euro, le 1er janvier 1999.

(2)  Résolution du Conseil européen sur le Pacte de stabilité et de croissance, Amsterdam, 17 juin 1997.

(3)  La procédure des déficits excessifs n'est pas appliquée dans les cas exceptionnels tels que: i) événement extraordinaire indépendant de la volonté de l'État membre concerné; ii) récession économique accompagnée d'une réduction du PIB réel d'au moins 2 %. Il convient de rappeler que jusqu'à présent, ce sont quelque 26 procédures pour déficit excessif qui ont été appliquées, dont pas moins de 10 pour des pays appartenant à la zone euro. Les pays concernés sont: en 2002, Allemagne et Portugal; en 2003, France; en 2004, Grèce, Hongrie, République tchèque, Chypre, Malte, Pologne, Slovaquie, Pays-Bas, France, Allemagne, Royaume-Uni; en 2005, Hongrie, Grèce, Pays-Bas et Italie.

(4)  L'internationalisation d'une monnaie est un processus essentiellement guidé par les forces du marché, et donc par le degré de confiance que les agents économiques attribuent à cette monnaie en termes destabilité.

(5)  «L'objectif principal du SEBC (Système européen de banques centrales) est de maintenir la stabilité des prix. Sans préjudice de l'objectif de stabilité des prix, le SEBC apporte son soutien aux politiques économiques générales dans la Communauté, en vue de contribuer à la réalisation des objectifs de la Communauté, tels que définis à l'article 2» (article 105 paragraphe 1 du traité). Les objectifs de l'Union (article 2 du traité sur l'Union européenne) sont un niveau d'emploi élevé et une croissance durable et non inflationniste.

(6)  Paul De GRAUWE, 2003.

(7)  J.P FITOUSSI, 2004.

(8)  J. P. FITOUSSI, 2004.

(9)  Le débat lancé en 2004 sur la réforme du pacte de stabilité et de croissance revêt une importance certaine, comme en témoignent les conclusions d'un récent article de Jean PISANI-FERRY: «L'importance du débat qui aura lieu les prochains mois ne devrait pas être sous-estimée. La question clé qui émerge clairement est de savoir si la gouvernance économique dans la zone euro doit être basée sur des règles fixes juridiquement contraignantes ou sur des décisions collectives étayées par des principes économiques. L'expérience du premier modèle a pris fin lorsque la politique a repris ses droits. Le second modèle n'a quant à lui pas encore été éprouvé, mais il est d'ores et déjà évident qu'il ne pourra s'imposer en l'absence d'une légitimité technique, économique et politique. Si aucun accord n'est conclu ou si le second modèle échoue, la zone euro devra probablement se rabattre sur une version indigène de la “doctrine Sinatra”. Ce n'est certainement pas le meilleur moyen de gérer une zone monétaire. “La doctrine Sinatra” est le nom que Mikhaïl GORBATCHEV avait donné à l'autonomie de décision des États du Pacte de Varsovie». PISANI-FERRY, J. (2005).

(10)  COM(2004) 581 final.

(11)  COM(2005) 154 et 155 final.

(12)  Ce facteur a été introduit sur insistance du gouvernement allemand afin de tenir compte du coût de la réunification de l'Allemagne. Il n'est cependant pas exclu que cette exception puisse être invoquée, à l'avenir, par les gouvernements de pays exigeant une plus grande indulgence vis-à-vis de leur déficit budgétaire en tant que participants au budget de l'UE. (J Bouzon, G. Durand, 2005).

(13)  Deutsche Bundesbank, 2005, rapport mensuel, avril 2005.

(14)  Dans un communiqué de presse, la BCE se disait «sérieusement préoccupée par les modifications qu'il est prévu d'apporter au Pacte de stabilité et de croissance. (…) l'ensemble des parties concernées (doivent assumer) leurs responsabilités respectives». BCE, 2005.

(15)  Comme l'avait justement signalé dans sa proposition Paul De GRAUWE en 2003 (voir paragraphe précédent).

(16)  Commission européenne: 1995, 1997, 2003.

(17)  «… Potentiellement, ces responsabilités pourraient s'étendre au-delà des retraites. Selon le document de l'OCDE, dans certains États membres, seules les responsabilités liées au régime des retraites des fonctionnaires publics (pour lesquels il existe une relation contractuelle) sont prises en compte dans le calcul de la dette publique. Telle est l'approche qui semble être soutenue par le rapport ECOFIN» (J. BOUZON, G. DURAND, 2005).

(18)  J. BOUZON e G. DURAND, 2005.

(19)  J.P. FITOUSSI, 2004.

(20)  J. HABERMAS, 2005, «Soltanto un sogno può salvare l'Europa» (Seul un rêve peut sauver l'Europe), la Repubblica, 09/06/2005.

(21)  «La fiscalité dans l'Union européenne: principes communs, convergence des règles fiscales et possibilité de vote à la majorité qualifiée», JO C 80 du 30.03.2004, p. 139.

(22)  Commission des Communautés européennes, Livre blanc sur la croissance, la compétitivité et l'emploi: les défis et les pistes pour entrer dans le XXI ème siècle, COM(93) 700 final, Bruxelles, le 5 décembre 1993.


11.4.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 88/76


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Grandes orientations des politiques économiques (2005-2008)»

(2006/C 88/16)

Le 10 février 2005, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l'article 29 paragraphe 2 de son règlement intérieur, d'élaborer un avis sur le thème: «Grandes orientations des politiques économiques (2005-2008)».

La section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 27 janvier 2006. (rapporteur: M. METZLER).

Lors de sa 424e session plénière des 14 et 15 février 2006 (séance du 15 février), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 79 voix pour, 18 voix contre et 9 abstentions.

Conclusions et recommandations

Le CESE a décidé, en prélude au sommet de printemps 2006, d'élaborer un avis d'initiative afin de soumettre aux acteurs de la politique économique européenne, pour leurs actions futures, des propositions émanant des diverses composantes de la société civile.

Dans le contexte de la faible croissance persistante qui affecte la zone euro et l'UE et face aux défis liés notamment à la mondialisation et aux changements démographiques, le Comité défend dans son avis d'initiative sur les «Grandes orientations des politiques économiques (2005-2008)» l'idée que, dans le cadre de la stratégie de Lisbonne, la crise conjoncturelle et les difficultés actuelles en matière d'emploi ne sauraient être surmontées sans une macropolitique coordonnée favorisant activement la croissance et l'emploi. Par ailleurs, la crise de confiance qui touche les grandes économies de la zone euro ne pourra être maîtrisée qu'à condition de se laisser guider par les principes fondamentaux de la viabilité financière et sociale. Le Comité estime dès lors à l'instar de la Commission que les États membres de l'UE sont tenus de mener une politique budgétaire conforme à leurs engagements.

Le Comité soutient la Commission lorsqu'elle invite à moderniser les systèmes de sécurité sociale afin d'en assurer la viabilité. L'adaptabilité des marchés du travail doit en outre être améliorée, afin de réduire le chômage. Il convient ici de garantir la sécurité sociale sur laquelle beaucoup de gens comptent à juste titre. Dans le même temps, il convient de mobiliser le potentiel de main-d'œuvre disponible. Il incombe à cet égard aux partenaires sociaux et aux gouvernements des États membres d'établir un équilibre entre flexibilité et sécurité qui soit propice à l'innovation.

Le Comité estime qu'à côté d'une politique macroéconomique adaptée pour stimuler la croissance et l'emploi, il y a lieu de lancer des réformes microéconomiques destinées à accroître le potentiel de croissance. Il s'agit non seulement d'intensifier la concurrence et de lancer des mesures de débureaucratisation, mais aussi de poursuivre le développement du marché intérieur européen. Le Comité estime qu'il serait néanmoins erroné de penser que le degré maximal d'intégration des marchés correspond dans tous les cas au degré d'intégration optimal.

S'agissant de la société de la connaissance, le Comité considère qu'il est extrêmement important de fixer les orientations appropriées dans le domaine de l'éducation et la formation tout au long de la vie, de l'égalité des chances, des aides à la famille, de l'éducation ainsi que de la recherche et de l'innovation. Le cadre et les mécanismes d'incitation présidant à la création d'un environnement propice à l'innovation doivent être encore améliorés. De plus, le Comité souligne d'une manière générale la nécessité de prêter une attention particulière à la promotion de l'esprit d'entreprise.

1.   Remarques préliminaires

1.1

Le présent avis d'initiative sur «Les grandes orientations des politiques économiques (2005/2008)» élaborées dans le cadre des «lignes directrices intégrées pour la croissance et l'emploi (2005-2008)» doit être considéré comme complémentaire de l'avis sur les «Lignes directrices pour les politiques de l'emploi 2005/2008» (1). Le Comité réitère ses critiques à l'encontre des modalités de la procédure de consultation qu'il juge inadaptées du point de vue de la cohérence effective de ces deux avis. Le traitement commun des grandes orientations et des lignes directrices pour les politiques de l'emploi reflèterait mieux les multiples interdépendances entre ces deux domaines.

1.1.1

Afin d'améliorer la mise en œuvre de la stratégie de Lisbonne, le Conseil européen a décidé lors de sa réunion de printemps de lier les lignes directrices pour les politiques économiques et celles pour l'emploi et de les intégrer au processus de Lisbonne.

1.1.2

Dans son avis sur «Les grandes orientations des politiques économiques 2003-2005» (2), le Comité exhortait déjà à mettre davantage encore la croissance et le plein emploi au cœur de la combinaison des différentes politiques. Cette recommandation n'a rien perdu de son actualité.

1.2

Dans le cadre de ses obligations découlant du traité, la Banque centrale européenne doit non seulement garantir la stabilité des prix, mais également répondre aux exigences de croissance et d'emploi de l'économie réelle. Dans le contexte de la coordination des différents domaines de la politique macroéconomique définie par le processus de Cologne, elle doit à cet égard s'engager dans un dialogue constructif avec les décideurs en matière de politique budgétaire et de politique salariale.

1.3

Les lignes directrices intégrées se présentent sous la forme de recommandations en matière de politiques économiques nationales dont la responsabilité de la mise en œuvre, conformément au principe de subsidiarité, incombe toutefois aux États membres. «Dans les domaines qui ne relèvent pas de sa compétence exclusive, la Communauté n'intervient, conformément au principe de subsidiarité, que si et dans la mesure où les objectifs de l'action envisagée ne peuvent pas être réalisés de manière suffisante par les États membres et peuvent donc, en raison des dimensions ou des effets de l'action envisagée, être mieux réalisés au niveau communautaire» (article 5 du traité CE). Les politiques économiques n'en demeurent pas moins une question d'intérêt commun (article 99, paragraphe 1, du traité CE).

1.4

Le présent avis examine l'économie européenne dans son ensemble, dans le respect de l'hétérogénéité des différentes économies nationales des États membres.

2.   Enjeu

Situation de départ: développement économique actuel

2.1

Après quatre années décevantes, la croissance économique n'était à nouveau plus que de 1,5 % en 2005 dans l'UE-25 et de 1,3 % dans la zone euro. Cette tendance varie toutefois considérablement d'un État membre à l'autre. En dépit de la croissance, l'économie européenne n'a pas été en mesure de profiter pleinement de la reprise de l'économie mondiale. L'écart avec d'autres pays industrialisés et régions hors Europe s'est encore creusé.

2.1.1

En raison notamment de la dépréciation de l'euro, le commerce extérieur a finalement insufflé un net élan à l'activité économique. La confiance des consommateurs européens ne s'est en revanche que très légèrement améliorée depuis 2003 et a même encore fléchi pendant une bonne partie de l'année 2005, ce qui s'est traduit par une augmentation seulement modérée de la demande des consommateurs. On ne peut toujours pas parler d'un redressement de la conjoncture porté par une demande intérieure soutenue. L'incertitude persistante des consommateurs européens se reflète également dans le taux d'épargne élevé par rapport au reste du monde.

2.1.2

Les investissements productifs, en recul quasi-constant depuis le début de la récession en 2001, sont repartis à la hausse l'année dernière. Des conditions de financement avantageuses à la faveur de taux d'intérêt bas et de l'accroissement des profits des entreprises maintiennent un environnement favorable aux investissements, plus aux investissements financiers à haute profitabilité boursière qu'aux investissements productifs. Le Comité est cependant préoccupé par les fuites de capitaux vers les États-Unis, qui sont également le reflet de la faiblesse des investissements en Europe. Pour une reprise durable des investissements, il reste donc essentiel d'améliorer les conditions d'implantation des entreprises en Europe. L'une des principale explications du faible niveau d'investissement est l'actuelle faiblesse de la demande des consommateurs. Simultanément, en dépit des prix toujours élevés de l'énergie, le taux d'inflation se situe à un niveau supportable. C'est notamment le cas de l'inflation de base (hors énergie et produits alimentaires non transformés), qui reste encore très en deçà de l'inflation globale. Les risques géopolitiques et les goulets d'étranglement des capacités d'extraction pétrolière risquent toutefois d'entraîner une pression inflationniste à l'avenir. Le défi que représente l'augmentation des prix du pétrole brut est abordé plus loin.

2.1.3

Le Comité est surpris de constater qu'en dépit d'une situation financière favorable et d'une bonne rentabilité, l'explosion des bénéfices des grandes entreprises en 2003 et 2004 n'a pas entraîné l'activité de recherche et les investissements productifs qui auraient permis à l'UE d'atténuer la concurrence à laquelle elle doit faire face. Au lieu de cela, les liquidités accumulées sont canalisées pour payer des dividendes supplémentaires aux actionnaires, racheter les propres parts de la société afin de les stimuler en bourse, ou procéder à des fusions et des acquisitions donnant lieu à des restructurations. Le Comité est particulièrement préoccupé par cette vision à court terme, entravant les investissements des entreprises à long terme, pourtant indispensables.

2.1.4

L'un des principaux problèmes de l'économie européenne tient, outre à sa faible croissance par rapport au reste du monde et à la faiblesse actuelle de la demande, à son chômage structurel élevé. La récente reprise économique n'a ainsi que très faiblement contribué à une amélioration de la situation sur le marché de l'emploi. Avec environ 9 %, le taux de chômage se maintient à un niveau toujours trop élevé, empêchant ainsi l'économie européenne de libérer son potentiel de création de valeur. A cela s'ajoute que la faiblesse actuelle des investissements continue de nuire aux chances de croissance à venir.

2.1.5

Cette tendance à la «reprise sans emploi» («jobless recovery») a également été observée sur le marché du travail d'autres pays et régions industriels comparables. La situation du marché du travail y est néanmoins bien plus favorable. Des estimations de la Commission (3) prévoient que la croissance en 2005 et 2006 devrait se traduire par plus de trois millions de créations d'emplois dans l'Union européenne. L'effet sur le taux de chômage sera toutefois limité, étant donné que l'amélioration de la situation économique devrait entraîner une augmentation du taux d'activité du fait des retours sur le marché de l'emploi.

2.1.6

L'emploi du potentiel de main-d'œuvre inexploité reste par conséquent l'un des défis majeurs que doit relever l'Union européenne. Des programmes spécifiques devraient être mis en œuvre afin de faciliter l'accès des femmes et des jeunes au marché du travail, tandis que d'autres programmes viseraient la réintégration des travailleurs âgés.

Autres enjeux: mondialisation et changements démographiques

2.2

L'Union européenne devra faire face, outre aux grands problèmes actuels des politiques économiques et financières tels que la situation délicate sur le marché du travail, en particulier le chômage, et l'accroissement des déficits publics, à d'autres défis, certes dès à présent identifiés, mais dont les effets ne se feront pleinement sentir qu'ultérieurement.

2.2.1

L'Union européenne doit d'une part affronter une concurrence économique accrue. Avec la forte croissance des économies chinoise et indienne, de nouveaux concurrents se manifestent qui, dix ans auparavant, n'avaient encore aucune incidence sur l'économie mondiale. Le potentiel de main-d'œuvre à l'échelle mondiale a doublé et les rapports entre capital et travail se sont globalement modifiés. Par rapport aux États industrialisés traditionnels, la Chine et l'Inde, pays à forte population, disposent en raison de leur évolution économique d'un capital par travailleur nettement moindre.

2.2.2

Tout doit être fait pour que les conséquences actuelles de la mondialisation et du renforcement de la division internationale du travail puissent également être considérées comme une chance pour l'avenir de l'Europe. Si l'ouverture économique de la Chine et d'autres États du Sud-Est asiatique a exacerbé la concurrence pour les investissements, de nouveaux débouchés majeurs et, compte tenu de l'augmentation du niveau de vie dans cette région, très prometteurs se sont dans le même temps ouverts aux entreprises européennes. La politique économique doit accompagner de manière adéquate les changements structurels qui en découleront. Cela inclut l'aménagement des conditions internationales en ce qui concerne la sauvegarde de normes écologiques et sociales minimales ainsi que des droits de propriété.

2.2.3

L'UE doit également faire face à la flambée des prix du pétrole qui est liée à la mondialisation et à l'augmentation de la demande au niveau mondial. Par rapport au passé, la dépendance de l'UE vis-à-vis du pétrole a nettement diminué grâce à des économies à la consommation et à un plus grand recours à d'autres sources d'énergie. Des pays industrialisés concurrents comme la Chine sont plus sévèrement touchés. L'UE pourrait profiter très largement du fait que les pays exportateurs de pétrole «recyclent» leurs recettes en achetant des produits en provenance de l'UE.

2.2.4

L'évolution démographique et le vieillissement de la société qui l'accompagne constituent le second grand défi qui se pose aux économies européennes. L'influence de la Communauté en la matière est toutefois limitée dans la mesure où la Commission a à juste titre conclu dans d'autres documents que de nombreuses questions relatives aux changements démographiques relevaient des États membres ou des partenaires sociaux. En outre, les changements démographiques constituent un phénomène social que les mesures économiques ne peuvent influencer que de manière limitée. Il importe d'autant plus de poser les bases de façon à ce que les adaptations nécessaires puissent être effectuées dans les temps.

2.2.5

Les changements démographiques tiennent essentiellement à l'allongement permanent de l'espérance de vie, à l'augmentation de la tranche d'âge des plus de 60 ans et à la faiblesse persistante du taux de natalité. La modification de la structure par âge influe sur tous les marchés d'une économie: le marché du travail qui manquera de plus en plus de jeunes actifs à partir de 2020, les marchés des produits qui devront s'adapter à une autre clientèle et le marché des capitaux, où les habitudes d'épargne et la demande de placements se modifieront. De plus, l'exacerbation de la concurrence générale induite par la mondialisation devrait se répercuter sur le marché du travail, nécessitant une organisation différente du travail dans le cadre du dialogue social. Le concept d'éducation et de formation tout au long de la vie prend dès lors tout son sens (4). Le dialogue social et la société civile seront également mis à contribution pour surmonter les transformations démographiques.

2.2.6

Afin de pouvoir réaliser l'objectif consistant à faire de l'Europe une économie de la connaissance compétitive, les entreprises doivent être en mesure de promouvoir et de développer de nouvelles technologies et de nouveaux modes d'organisation, la productivité et l'innovation. Seules une adaptation permanente des qualifications des travailleurs à l'évolution de la demande et l'adoption par les entreprises de stratégies actives permettront d'y parvenir. A cette fin, les entreprises doivent intégrer dans celles-ci la formation comme étant un investissement à moyen et long terme et non pas comme une action justifiant un retour sur investissement rapide si ce n'est immédiat. La formation professionnelle, la formation et l'éducation tout au long de la vie ne doivent pas être considérées isolément. Elles doivent être constitutives de la gestion de carrière des salariés. Il s'agit là d'assurer, au travers de la formation, les motivations à tous âges en valorisant les compétences et en dynamisant les parcours professionnels. De ce point de vue, les bilans de compétence, la validation des acquis sont autant d'outils qui doivent être développés dans le cadre de projets professionnels individuels s'articulant avec le projet de l'entreprise (5).

Stratégie de Lisbonne

2.3

L'évolution de l'économie mondiale au cours des cinq dernières années vient conforter les objectifs ambitieux de la stratégie de Lisbonne qui consistent à renforcer durablement la compétitivité et à garantir les emplois. Il convient d'intégrer pleinement les principes qui fondent la stratégie de Lisbonne. Ce n'est qu'en se montrant confiante dans ses propres atouts et en ayant le courage de se réformer que l'Union européenne pourra atteindre son but, à savoir devenir la première économie de la connaissance à l'échelle mondiale et créer des emplois à la fois sûrs et de meilleure qualité. Les rapports du CESE (6) et du groupe d'experts de haut niveau (7) (rapport Kok) établis pour le Conseil européen et qui évaluent les résultats obtenus dans le cadre de la stratégie de Lisbonne considèrent cependant que les objectifs fixés ne seront pas atteints avant longtemps. La croissance économique de l'Union européenne, enserrée dans les exigences d'une politique monétariste qui ne lui donne pas les moyens de relancer la demande par la dépense, est nettement à la traîne par rapport à celle des États-Unis. Sur la période 2001-2004, le taux de croissance moyen de l'Union européenne s'élève à peine à 1,5 %. En ce qui concerne le PIB par habitant de l'Union européenne et la croissance de la productivité, l'écart avec d'autres pays et régions industriels comparables n'a pas pu être réduit.

2.3.1

L'agenda de Lisbonne ouvre à cet égard de nombreuses pistes en vue de renforcer la dynamique économique interne au sein de l'Union européenne et de ses États membres (8).

2.3.2

Dans la plupart des États membres, le potentiel de croissance peut être libéré par une augmentation du taux d'activité.

2.4

Certaines des causes de la faible croissance européenne et de l'évolution pour le moment décevante du marché du travail tiennent également à la persistance de problèmes structurels non résolus, auxquels sont confrontées en particulier les grandes économies de la zone euro. Il existe par ailleurs un consensus dans l'ensemble des gouvernements des États membres pour reconnaître la nécessité à la fois d'assainir les finances publiques et de surmonter la faiblesse de la croissance.

2.4.1

L'Union européenne doit au contraire devenir elle-même la locomotive de la croissance afin de ne pas se laisser encore davantage distancer par d'autres grandes économies et d'atteindre les objectifs ambitieux de la stratégie de Lisbonne.

2.4.2

Dans ce contexte, le Comité estime que les partenaires sociaux et d'autres organisations représentatives de la société civile ont un rôle important à jouer dans ce débat. Le Comité renvoie à nouveau à son avis sur l'amélioration de la mise en œuvre de la stratégie de Lisbonne (9) dont le présent avis constitue le prolongement.

Surmonter la crise de confiance

2.5

L'incertitude quant à la situation de l'emploi qui règne dans de nombreux États membres a conduit les consommateurs à abandonner ou à différer leurs décisions de consommation. Se met dès lors en place un processus d'anticipation (débouchant sur de l'attentisme) qui déprime la demande intérieure; les transactions ayant un effet positif à long terme sont repoussées, ce qui nuit à la croissance économique. Fait inquiétant: dans certains États membres les dépenses de consommation, faibles en 2001-2003 en raison de la récession, ne sont pas véritablement reparties à la hausse au cours de l'embellie conjoncturelle qui a suivi. Il en va de même des décisions d'investissement des entreprises. Les anticipations qui se trouvent vérifiées dans la réalité risquent de se perpétuer, entretenant un déséquilibre conjoncturel persistant. Des mesures adaptées doivent être prises afin de prévenir ce risque.

2.5.1

Rendus publics, les insuffisances et les manquements de certains dirigeants et de structures dirigeantes entières renforcent dans nombre d'États membres de l'Union européenne la crise de confiance parmi les travailleurs et les consommateurs. Il importe aux yeux du Comité que les États européens, avec l'appui de la Communauté européenne, accordent une plus grande attention à la lutte contre le manque de qualification et d'intégrité des dirigeants et prennent en la matière de nouvelles mesures. Il faut en outre réfléchir aux moyens d'obliger les responsables, par une transparence accrue et éventuellement par des critères plus stricts de responsabilité, à se concentrer davantage sur leur mission tout en assumant leur responsabilité sociale.

2.5.2

L'une des tâches essentielles consiste à surmonter la crise de confiance qui règne dans les grandes économies de la zone euro. Seule une stratégie visant à assurer la viabilité financière et sociale maintiendra et renforcera la confiance des citoyens en la capacité d'action de leurs gouvernements nationaux et des institutions de l'Union européenne (10).

2.5.3

L'allégement des finances publiques et le renforcement des systèmes de sécurité sociale ne seront possibles que dans le cadre d'une amélioration durable de la situation sur le marché du travail. Les réformes du marché du travail, qui répondent à l'accélération des changements économiques tout en se conformant aux impératifs de sécurité sociale, doivent être placées au cœur d'une politique économique viable à long terme. Conformément à la stratégie de Lisbonne, l'État peut jouer un rôle d'orientation afin de réagir efficacement à la mondialisation en accompagnant les investissements correspondants vers de nouveaux secteurs et en y créant des emplois.

2.5.4

Il est donc primordial de s'orienter clairement vers ces nouveaux secteurs et les perspectives qu'ils offrent par le biais d'une meilleure coordination des mesures dans le domaine du commerce, de la concurrence, de l'industrie, de l'innovation, de l'éducation et de la formation ainsi que de l'emploi. La société civile dans son ensemble doit assumer pleinement la responsabilité qui lui incombe à cet égard.

2.5.5

Dans ce contexte, il est indispensable que la politique monétaire et fiscale contribue à stimuler la croissance et l'emploi (11). C'est bien d'une coordination de la politique économique dont les États membres ont besoin. À cet égard, il convient toutefois de veiller à ce que les mesures conjoncturelles de relance de la demande ne mettent pas en péril la confiance dans la stabilité.

3.   Politiques macroéconomiques en faveur de la croissance et de l'emploi

Politique budgétaire

3.1

Entreprendre des réformes structurelles sans que la demande soit suffisante produit des effets négatifs sur l'emploi. Il faut tenir compte dès maintenant de la forte augmentation des dépenses à long terme qui découle du vieillissement de la population. A cette condition, la politique fiscale pourrait également contribuer, dans le cadre d'une politique macroéconomique équilibrée, à un renforcement de la demande effective (12).

3.1.1

Les États membres doivent pour ce faire s'appuyer sur une programmation budgétaire à la fois plus réaliste et plus transparente. Une remise à plat des missions relevant effectivement de l'État et une discipline accrue s'agissant des dépenses publiques seraient autant de preuves de la pertinence de l'engagement financier de l'État, ce qui contribuerait à stimuler la croissance. Il en va de même de l'Union européenne, et cela à tous les niveaux. Cela suppose des mécanismes de contrôle plus rigoureux au sein des différents pays afin de traiter à la source les risques de déficit. S'agissant du déficit public, les prévisions d'automne 2005 de la Commission soulignent la nécessité d'assainir les finances publiques. En dépit d'une embellie conjoncturelle persistante (sans véritable reprise pour autant), la Commission estime que le déficit budgétaire de l'UE25 atteindra 2,7 % en 2005 et 2006, soit un niveau encore trop proche de la limite de 3 %.

3.1.2

De la discipline financière dépend dans une large mesure la capacité du système européen des banques centrales à garantir durablement la stabilité des prix tout en maintenant les taux d'intérêt à un niveau relativement bas. La BCE devrait continuer de se montrer attentive aux risques de tendance à la hausse du niveau des prix, liés notamment à l'excédent de liquidités au niveau mondial ou aux effets secondaires de l'augmentation des prix de l'énergie. Aussi le Comité approuve-t-il la Commission qui estime que le maintien de la stabilité des prix doit rester l'objectif premier de la BCE.

Viabilité des systèmes de sécurité sociale

3.2

La forte pression à l'adaptation qui pèse sur les systèmes de sécurité sociale ne tient pas tant à la mondialisation que, surtout, au chômage structurel élevé ainsi qu'aux changements démographiques majeurs provoqués par la baisse du taux de natalité et l'augmentation de l'espérance de vie, ce qui peut se traduire par un allongement des périodes de versement des retraites. Le Comité soutient la Commission dans tout ce qu'elle met en œuvre pour l'emploi et lorsqu'elle invite à moderniser les systèmes de sécurité sociale afin d'en assurer la viabilité, car un haut degré de sécurité sociale est indispensable pour préserver l'équilibre entre la compétitivité, la demande et la cohésion sociale (13). Il convient ici de garantir la sécurité sociale sur laquelle beaucoup de gens comptent à juste titre.

3.2.1

Toute réforme des systèmes de sécurité sociale passe donc par des plans spécifiques visant à faciliter l'accès des femmes au marché du travail; de ce fait, la disponibilité de services de gardes d'enfants et d'établissements scolaires devrait également être garantie. Les mesures permettant de mieux concilier famille et vie professionnelle, notamment en prévoyant des crèches ouvertes toute la journée, doivent être encouragées (14). Dans les pays ne disposant pas d'une offre suffisante de garderies pour enfants, le taux d'emploi des femmes est relativement faible. Inversement, dans les pays affichant un taux élevé d'emploi des femmes, l'accès aux établissements de garde d'enfants est satisfaisant. Des études ont montré qu'il existe dans l'Union européenne une forte différence entre le nombre d'enfants souhaités (2,3) et le nombre effectif (1,5). Un taux de natalité de seulement 2,1 serait d'ailleurs suffisant pour mettre un terme au déclin démographique qui attend l'Europe. La création d'infrastructures adaptées, un aménagement de l'organisation du travail dans le respect des garanties pour les travailleurs, en rendant le travail à temps partiel plus attractif pour les salariés et pour les employeurs, en facilitant, sans pour autant les encourager, les interruptions de carrière ainsi qu'en assouplissant la réglementation sur le temps de travail, devraient inciter dans une mesure accrue à revenir sur le marché du travail après une période consacrée à l'éducation des enfants, tout au moins dans certains États membres. De plus, une réforme durable du marché du travail conduisant à une augmentation de la demande de main d'œuvre renforce la position des salariés et encourage les employeurs à faire en sorte que la vie professionnelle et la vie familiale soient plus faciles à concilier.

3.2.2

Il incombe aux gouvernements et aux partenaires sociaux de soutenir par le biais d'accords collectifs de nouvelles possibilités d'emploi et d'établir un équilibre entre flexibilité et sécurité qui soit notamment propice à l'innovation. A cet effet, et s'agissant «des travailleurs âgés», le Comité a soutenu les recommandations et l'analyse qu'a faites la Commission quand elle indique dans sa Communication (COM(2004) 146 final) que «les partenaires sociaux devraient élargir et intensifier leurs efforts, tant au niveau national qu'à l'échelon de l'Union pour créer une nouvelle culture en matière de vieillissement et de gestion du changement. Bien trop souvent, les employeurs continuent à privilégier les régimes de retraite anticipées». Il est essentiel d'accroître le taux d'emploi. Sur ce point, le CESE estime qu'accroître le taux d'emploi global, ou celui concernant plus particulièrement la tranche d'âge des 55/64 ans passe également par l'accroissement du taux d'emploi des catégories de salariés potentiels qui y sont insuffisamment présentes. De ce point de vue, des mesures importantes doivent être prises pour mobiliser toutes les réserves de main-d'œuvre qui existent dans l'Union, qu'il s'agisse, en particulier, des jeunes trop souvent maintenus dans un chômage démotivant, ce qui est préoccupant pour l'avenir du taux d'emploi global, ou bien encore des femmes ou des handicapés (15).

Réduction du chômage, mobilisation de la main-d'œuvre

3.3

Le Comité souligne la nécessité, mise en évidence par la Commission, de relever sensiblement les taux d'emploi, notamment dans les grandes économies, et d'accroître durablement l'offre de main-d'œuvre. La viabilité à long terme de l'économie européenne ne sera garantie que si la lutte contre le chômage de masse est érigée au rang de toute première priorité.

3.3.1

Le chômage structurel élevé et le développement des échanges internationaux imposent de nouvelles exigences en termes d'adaptation efficace et dynamique aux marchés du travail. L'expansion rapide du commerce international ouvre notamment de nouvelles perspectives multiples sur les marchés d'exportation mais également dans le secteur des services. L'adaptabilité des marchés du travail est ainsi soumise à des exigences complètement nouvelles qui supposent un cadre stable pour qu'elles puissent être surmontées.

3.3.2

Les marchés du travail européens doivent être en mesure de s'adapter de manière plus efficace et plus dynamique à des tendances telles que l'externalisation et la délocalisation. Les régimes d'assurance-chômage, les systèmes de sécurité sociale et les services de placement des chômeurs ne devraient pas se limiter à intervenir lors du passage du chômage à l'emploi mais également faciliter la transition entre différentes situations au cours de la vie active, notamment le travail, la formation, les interruptions de carrière ou encore l'installation à son compte. La Communauté ne disposant dans ce domaine que de compétences limitées, il appartient aux États membres de gérer dans ce sens leurs institutions du marché du travail.

3.3.3

De surcroît, il existe toujours des entraves temporaires à la mobilité transfrontalière des travailleurs au sein de l'Union européenne. Le Comité invite les États membres à examiner sérieusement la possibilité de mettre un terme aux périodes transitoires. Cet examen doit avoir lieu moyennant une participation et une consultation appropriées des partenaires sociaux à tous les niveaux pertinents (16). Le maintien des périodes transitoires doit en tout cas être justifié par des arguments solides et objectifs.

3.3.4

Étant donné que le taux de chômage des personnes disposant d'une formation professionnelle limitée voire inexistante se situe largement au-dessus de la moyenne, la promotion de la formation initiale et continue constitue l'un des axes majeurs de la politique de l'emploi. L'éducation et la formation sont autant d'investissements dans le capital humain. Elles accroissent les chances d'insertion des individus sur le marché du travail et élargissent les possibilités de production des entreprises. Le facteur éducatif constitue l'une des principales composantes du développement de la productivité et de la compétitivité au niveau international. Les partenaires sociaux devraient s'entendre dans le cadre des conventions collectives et de tous les contrats les concernant sur le fait que les employés et les travailleurs doivent maintenir et renforcer leur capital humain grâce à la formation continue et à la promotion professionnelle.

3.3.5

Une formation professionnelle est à juste titre considérée comme une condition nécessaire pour l'avenir des jeunes sur le marché du travail sans qu'elle constitue pour autant une condition suffisante pour garantir une parfaite adéquation avec la demande de travail. Les personnes âgées dont, à l'instar des jeunes, le taux de chômage est supérieur à la moyenne doivent également acquérir de nouvelles connaissances par le biais de programmes de formation continue ou de qualification. En effet, le potentiel de productivité des travailleurs âgés n'est pas dégradé par l'âge mais par l'obsolescence des qualifications, ce à quoi il convient de remédier par la formation. Fort de ce qui précède, il est utile de préciser qu'il ne suffit pas de mener une politique pour les catégories d'âges à partir de 40-50 ans (17).

3.4

Le Comité voit dans le poids des taxes et des contributions sociales qui pèse sur le facteur travail un problème majeur.

4.   Réformes microéconomiques visant à augmenter le potentiel de croissance

Le marché intérieur de l'UE

4.1

Le Comité partage l'avis de la Commission selon lequel un marché intérieur élargi et approfondi doit être une composante importante d'une politique économique orientée vers l'emploi et la croissance. Toutefois, le Comité estime que les problèmes rencontrés dans la mise en œuvre de la stratégie de Lisbonne ne sont pas principalement imputables à une intégration insuffisante du marché intérieur.

4.1.1

L'intégration des marchés de services qui n'est jusqu'à présent pas encore totalement réalisée peut difficilement être considérée comme la cause des faibles performances des marchés du travail et de la croissance économique. Une grande partie des chômeurs appartient au groupe des personnes peu qualifiées qui ne profiterait que très peu d'un marché européen des services intégré. L'élimination des entraves fiscales peut certes produire un climat plus favorable aux investissements et la suppression des obstacles à la mobilité peut soulager certains employeurs et travailleurs. Toutefois, cela ne contribuera pas à soulager les marchés nationaux de l'emploi de manière substantielle. La poursuite du développement du marché intérieur dans le but de créer un marché intérieur des services réel et équilibré peut néanmoins apporter une contribution importante.

4.1.2

Le Comité estime qu'il serait erroné de penser que le degré maximal d'intégration des marchés correspond dans tous les cas au degré d'intégration optimal. En particulier dans le cas de marchés typiquement régionaux ou locaux, sur lesquels opèrent de nombreux prestataires de service, le volume des prestations de service transfrontalières sera toujours très limité. À cet égard, intensifier l'harmonisation pourrait donner à penser que la politique européenne ne prend pas suffisamment en compte les particularités régionales et conduit ainsi à aggraver les réserves qui existent déjà à son encontre. Pour cette raison, il convient au moins d'identifier les obstacles déjà existants et de les mettre en balance par rapport aux réglementations qui resteront en vigueur du fait des particularités des États membres et auxquelles les acteurs économiques doivent s'adapter. Pour ce faire, il vaut mieux accorder la préférence à un examen minutieux effectué par marché et par branche.

4.1.3

Le Comité soutient également la proposition de la Commission qui consiste à réduire les aides d'État qui font obstacle à la concurrence ou à les redéployer davantage dans les domaines de la recherche, de l'innovation et de la politique de l'éducation, qui sont en lien avec le programme de Lisbonne. L'objectif d'intensification de la concurrence permettrait également de parvenir à un allègement des budgets publics et à un renforcement des investissements publics tournés vers l'avenir.

4.1.4

L'intégration des marchés européens des capitaux revêt de l'importance pour la relance de la croissance dans l'UE. Ces dernières années, d'importants efforts ont été faits pour créer un cadre réglementaire adapté à un marché des capitaux et des services financiers intégré. Dans ce contexte, le Comité est attentif aux plaintes qui se sont élevées face à une harmonisation trop rapide et trop coûteuse.

4.1.5

Avant d'envisager de nouveaux projets d'harmonisation et de réglementation, il faut au préalable examiner minutieusement les critères de nécessité et d'urgence. À court terme, les projets de directives qui ne sont pas absolument nécessaires dans l'immédiat devraient être repoussés à plus tard. Il semble bien plus indiqué de se concentrer pour l'instant sur la mise en œuvre et la consolidation, dans une optique d'orientation vers le marché et d'efficacité en termes de coûts, d'initiatives législatives très récentes qui n'ont pas encore été entièrement achevées. Le Comité soutient également les positions défendues à ce sujet par la Commission dans le Livre blanc sur la politique des services financiers (2005-2010).

Concurrence et débureaucratisation

4.2

Le Comité se félicite de l'objectif de la Commission tendant à une plus grande liberté des échanges. Une administration allégée et modernisée, centrée sur quelques compétences essentielles, recèle un potentiel d'économies, mais peut laisser les États membres désemparés car privés d'outils d'intervention en cas de crises. Les États membres devraient davantage aspirer à se concentrer de manière ambitieuse sur la réalisation des missions principales de l'État que sont parmi d'autres l'éducation, les infrastructures publiques, la politique de sécurité intérieure et extérieure, la sécurité sociale et un haut niveau de santé publique. Dans ce contexte, le Comité soutient fermement les déclarations de la Commission affirmant l'importance économique d'une meilleure législation. Consulter davantage les parties prenantes aux processus législatifs favorise un processus décisionnel plus transparent, conformément à l'intérêt du législateur et des acteurs économiques.

4.2.1

Un accroissement de l'intensité de la concurrence peut également devenir un moteur pour le soutien aux innovations. Le cadre politique qui préside aux innovations et plus largement à la recherche devrait être amélioré. Sur ce point, le Comité rappelle qu'il a, dans de nombreux avis, fait des propositions qui sont toujours d'actualité. Il ne peut ici que les confirmer (18).

4.2.2

Le CESE attire l'attention sur le fait que le thème de la débureaucratisation n'a pas été suffisamment pris en compte dans les grandes orientations. C'est pourquoi il insiste à nouveau sur l'importance des projets européens visant à mieux légiférer. Le Comité déplore que dans les grandes orientations, les États membres ne soient pas instamment invités à prendre des mesures pour alléger la bureaucratie, par exemple en simplifiant le système d'imposition et de taxation. C'est également le cas pour la législation européenne et son application au niveau national. Non seulement des modes de décision rapides mais aussi des procédures simplifiées permettraient de diminuer les coûts et d'alléger les budgets publics.

4.2.3

En ce qui concerne la régulation, la dérégulation et la libéralisation des marchés, il est particulièrement nécessaire de mettre minutieusement en balance les intérêts de la protection du consommateur et de l'environnement ainsi que les objectifs de la politique sociale d'une part par rapport aux perspectives de croissance de l'économie dans son ensemble d'autre part. Les activités législatives et prudentielles futures devraient être davantage soumises qu'auparavant à une analyse d'impact (19).

4.2.4

En particulier, les PME et d'autres indépendants voient leur productivité exagérément restreinte par des réglementations trop poussées, étant donné qu'ils ne disposent que de structures de direction et d'administration extrêmement réduites. Le Comité réitère donc sa demande concernant la création d'un statut distinct pour les PME (20).

4.2.5

Le Comité considère qu'une coopération renforcée entre le secteur public et les entreprises dans l'accomplissement de missions de service public (partenariats public-privé) constitue une opportunité très intéressante. Cette forme récente de coopération qui s'applique aux États membres de l'UE et à la Communauté elle-même dans l'accomplissement et l'exécution de missions de service public devrait garantir l'égalité de traitement des secteurs privé et public afin que les citoyens en tirent pleinement parti. Le financement de projets par l'emprunt auprès des entreprises devrait être envisagé lorsque le rapport coût/efficacité est favorable et indépendamment de la conception, de l'architecture et du mode de gestion des projets.

L'éducation et la formation

4.3

La notion d'éducation et de formation tout au long de la vie, notamment par l'intermédiaire de méthodes d'apprentissage flexibles, joue un rôle important dans le contexte de la société de la connaissance. Pour mettre celle-ci en pratique, il faut développer une culture sociale de l'apprentissage et mettre en place l'infrastructure requise à cet effet. Les partenaires sociaux et la société civile devraient promouvoir le modèle de l'éducation et de la formation tout au long de la vie. En outre, il conviendrait d'envisager de faire davantage appel aux possibilités de partenariat public-privé également dans le domaine de l'éducation et de la formation. Le financement de cette infrastructure nécessite actuellement un soutien public encore accru, mais jusqu'à présent insuffisant. L'ensemble des dépenses d'éducation et de formation dans l'UE à 25 s'élevaient dernièrement (en 2002) à 5,2 % du PIB, un niveau égal à celui enregistré dans des espaces économiques comparables. Seuls 0,6 % du PIB provenaient toutefois du secteur privé, ce qui est très inférieur à la moyenne des régions de référence. Ce chiffre pourrait en effet être revu à la hausse lorsque le rapport coût/efficacité est favorable sur l'ensemble du cycle du projet ou de la période d'emprunt.

4.3.1

Le CESE s'est déjà exprimé dans un avis antérieur sur les liens existant entre les échanges culturels et la jeunesse dans le cadre d'un programme d'action dans le domaine de l'éducation et de la formation tout au long de la vie (21). Il convient de souligner à nouveau ici l'importance de ce lien pour l'établissement d'une société de la connaissance. La promotion des échanges culturels (notamment entre jeunes) éveille l'intérêt à l'égard d'autres cultures et contribue ainsi positivement aux échanges de connaissances.

4.3.2

Le Comité se félicite que la décision prise concernant la directive sur la reconnaissance des diplômes ait permis de lever des obstacles majeurs à la mobilité des travailleurs salariés et non salariés. Il invite les États membres à transposer au plus vite cette directive. Par ailleurs, la réalisation régulière d'analyses et d'évaluations comparatives des performances des universités et des écoles, telles qu'elles sont pratiquées dans le cadre de l'étude PISA et du processus de Bologne, devrait exercer une influence positive sur les ambitions et l'engagement des participants (22).

4.3.3

Par ailleurs, l'enseignement supérieur européen n'est pas suffisamment orienté vers l'objectif visant à placer l'UE à l'avant-garde de la recherche de pointe au niveau mondial. Le concept de pôles et de groupements d'excellence devrait, lorsque ce n'est pas encore suffisamment le cas, faire l'objet d'une attention accrue au niveau national et européen. Cela permettrait de faire barrage à l'émigration vers d'autres continents de chercheurs européens de haut niveau.

Recherche et innovation

4.4

Le recul et le vieillissement escomptés de la population européenne nécessitent toujours plus d'innovations technologiques afin de préserver le bien-être futur de l'ensemble de la société européenne. La Commission a toutefois observé que les efforts déployés pour développer l'innovation dans l'Union européenne n'étaient pas suffisants jusqu'ici et a à juste titre mis en garde contre cet état de fait (23).

4.4.1

Pour développer l'innovation au niveau communautaire, le Comité estime indispensable de lever les obstacles à sa diffusion transfrontalière. L'activité dans le domaine de l'innovation, qui reste encore en deçà des possibilités, compte, avec la situation défavorable du marché de l'emploi, parmi les facteurs déterminants du fléchissement de la hausse de la productivité dans la zone euro. Or, si l'on souhaite améliorer les résultats en termes d'innovation, il faut supprimer les causes de la segmentation du marché, qui constituent actuellement un frein à la diffusion des nouvelles technologies.

4.4.2

Le Comité partage le point de vue de la Commission selon lequel les conditions d'encadrement et les mécanismes d'incitation doivent être encore améliorés afin de créer un environnement propice à la productivité et à l'innovation.

4.4.3

Il convient de faire un usage plus efficace et plus ciblé des aides publiques à l'innovation, afin qu'elles n'aient pas un effet dissuasif sur les investisseurs privés et n'entraînent pas une mauvaise allocation des fonds publics. Il faudrait concevoir davantage de projets réalisés en étroite concertation avec les universités et les entreprises, sans préjudice de la nécessité d'une recherche fondamentale, afin d'améliorer les liens entre la recherche et le secteur privé.

4.4.4

Les réglementations relatives aux mesures publiques d'aide devraient être plus transparentes, afin de faciliter l'accès au budget public de la recherche. Le Comité se félicite d'une coopération accrue, y compris au sein des services de la Commission. Le Comité réitère sa revendication, déjà formulée à plusieurs reprises, selon laquelle les conditions générales d'octroi des aides devraient être conçues de telle sorte qu'elles soient accessibles et d'une utilisation facile pour les PME et les microentreprises également.

4.4.5

L'introduction d'un brevet communautaire valable dans toute l'UE contribuerait également à stimuler l'innovation. Les obstacles qui s'opposent à son adoption (tels que le «problème des langues») ne devraient pas être insurmontables. Le Comité plaide encore une fois expressément en faveur de l'introduction dans les meilleurs délais d'un tel brevet communautaire.

Petites et moyennes entreprises

4.5

Comme le Comité l'a déjà souligné dans un avis antérieur, il convient d'accorder une attention particulière à la promotion de l'esprit d'entreprise (24). Les PME notamment possèdent un potentiel particulier en matière d'innovation. Pour compenser leur handicap en termes de coûts par rapport aux grandes entreprises en place, elles doivent s'imposer grâce à des produits et des services innovants. Le CESE approuve en conséquence la demande de la Commission visant à faciliter l'accès des jeunes entreprises européennes au financement en général et aux marchés des capitaux à risque (25).

Bruxelles, le 15 février 2006.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  Voir l'avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de décision du Conseil relative aux lignes directrices pour les politiques de l'emploi des États membres (en application de l'article 128 du Traité CE)» (JO C 286 du 27.11.2005, p. 38).

(2)  Voir l'avis du CESE sur «Les grandes orientations des politiques économiques 2003-2005» (JO C 80 du 30.3.2004, p. 120). Le présent avis s'inscrit dans le prolongement de ce document.

(3)  Prévisions d'automne 2005 de la Commission.

(4)  Voir l'avis du CESE intitulé «Croissance économique, fiscalité et soutenabilité des systèmes de retraite dans l'UE», (JO C 48 du 21.2.2002, p. 89).

(5)  Voir l'avis du CESE intitulé «Compétitivité des entreprises» (JO C 120 du 20.5.2005, p.89), paragraphes 5.4.6.3 et 5.4.6.4, et l'avis du CESE intitulé «Accroître l'emploi des travailleurs âgés et différer la sortie du marché du travail» (JO C 157 du 28.6.2005, p.120), paragraphe 4.3.5.4.

(6)  Voir l'avis du CESE intitulé «Améliorer la mise en œuvre de la stratégie de Lisbonne» (JO C 120 du 20.5.2005, p. 79).

(7)  «Relever le défi – La stratégie de Lisbonne pour la croissance et l'emploi», rapport du groupe de haut niveau présidé par M. Wim KOK, novembre 2004.

(8)  Conseil de l'Union européenne, conclusions de la présidence (19255/2005 du 18.6.2005), en particulier les paragraphes 9 à 11, et Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen: «Actions communes pour la croissance et l'emploi: le programme communautaire de Lisbonne» (COM(2005) 330 final du 20.7.2005).

(9)  Voir l'avis du CESE intitulé «Améliorer la mise en œuvre de la stratégie de Lisbonne» (JO C 120 du 20.5.2005, p. 7 904).

(10)  Voir également l'avis de la section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale» sur le thème du «Renforcement de la gouvernance économique – La réforme de stabilité et de croissance» (ECO/160 du CESE 780/2005 fin du 31.1.2006).

(11)  Le CESE l'a demandé à plusieurs reprises, notamment récemment dans son avis sur le thème «Politique de l'emploi: rôle du CESE après l'élargissement et dans la perspective du processus de Lisbonne» (JO C 221 du 8.9.2005, p.94).

(12)  Voir également l'avis du CESE sur le thème des «Grandes orientations de la politique économique 2003-2005» (JO C 80 du 30.3.2004, p. 120, paragraphe 1.4).

(13)  Voir avis du Comité économique et social européen sur le thème «Les grandes orientations des politiques économiques pour la période de 2003 à 2005» (JO C 80 du 30.3.2004, p. 120, paragraphe 1.5.3).

(14)  Voir l'avis du CESE sur la «Proposition de décision du Conseil relative aux lignes directrices pour les politiques de l'emploi des États membres (en application de l'article 128 du Traité CE)» (JO C 286 du 17.11.2005, p. 38). Il y est notamment indiqué au paragraphe 3.2.3: «Le CESE invite les États membres à continuer à promouvoir la conciliation de la vie familiale et professionnelle. Il appartient à l'ensemble de la société d'assumer cette mission».

(15)  Voir l'avis du CESE intitulé «Accroître l'emploi des travailleurs âgés et différer la sortie du marché du travail» (JO C 157 du 28.6.2005, p. 120), paragraphes 6.3.2 et 4.4.4.

(16)  «La dimension sociale de la mondialisation – comment la politique de l'UE contribue à en étendre les avantages à tous», COM(2004) 383 final du 18.5.2004.

(17)  Voir l'enquête internationale de l'OCDE sur l'alphabétisation des adultes [International Adult Literacy Survey-IALS] ainsi que les avis du CESE «Travailleurs âgés» (JO C 14 du 16.1.2001) et «Accroître l'emploi des travailleurs âgés et différer la sortie du marché du travail» (JO C 157 du 28.6.2005, p. 120, paragraphe 4.3.5).

(18)  Voir les avis du CESE «Les chercheurs dans l'espace européen de la recherche: une profession, des carrières multiples» (JO C 110 du 30.4.2004, p.3), «Intégrer et renforcer l'espace européen de la recherche» (JO C 32 du 5.2.2004, p. 81), «L'espace européen de la recherche: un nouvel élan – Renforcer, réorienter et ouvrir de nouvelles perspectives» (JO C 95 du 23.4.2003, p. 48) et «Renforcer la cohésion et la compétitivité par la recherche, le développement technologique et l'innovation» (JO C 40 du 15.2.1999, p. 12).

(19)  Dans cet esprit, le Comité économique et social européen s'est déjà prononcé par le passé en faveur de la création d'un dispositif réglementaire et d'un système d'imposition simples. Voir l'avis du CESE relatif aux «Grandes orientations des politiques économiques 2003-2005» (JO C 80 du 30.3.2004, paragraphe 4.4.2.4).

(20)  Voir l'avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de décision du Conseil relative aux lignes directrices pour les politiques de l'emploi des États membres (en application de l'article 128 du Traité CE)» (JO C 286 du 27.11.2005, p. 38).

(21)  Avis du CESE sur la «Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil établissant un programme d'action intégré dans le domaine de l'éducation et de la formation tout au long de la vie», du 10.2.2005 (JO C 221 du 8.9.2005, p.134).

(22)  Le CESE a déjà souligné ailleurs qu'il «est également très important de veiller à la transparence et à l'harmonisation des qualifications en Europe et également au niveau international». Voir l'avis du CESE sur la «Proposition de décision du Conseil relative aux lignes directrices pour les politiques de l'emploi des États membres (en application de l'article 128 du Traité CE)» (JO C 286 du 17.11.2005, p. 38, paragraphe 3.8.1).

(23)  L'UE ne consacre actuellement que 2 % de son PIB à la R&D. Cf. Commission européenne, Recommandation relative aux grandes orientations des politiques économiques (2005-2008), COM(2005) 141 final, section B.2. Ce pourcentage est à peine supérieur à celui enregistré à l'époque du lancement de la stratégie de Lisbonne et est très éloigné de l'objectif de l'UE consistant à porter les dépenses de recherche à 3 % du PIB. Le Comité rappelle que les deux tiers de ces dépenses doivent être financés par le secteur industriel privé.

(24)  Voir l'avis du CESE sur le thème «Encourager l'esprit d'entreprise en Europe: priorités pour l'avenir» du 27.5.1998, ainsi que l'avis du CESE sur la «Proposition de décision du Conseil relative aux lignes directrices pour les politiques de l'emploi des États membres (en application de l'article 128 du Traité CE)» (JO C 286 du 17.11.2005, p. 38).

(25)  Le Comité économique et social européen s'était déjà exprimé dans ce sens par le passé et il s'était en même temps félicité de la promotion de l'esprit d'entreprise et de la création d'entreprises. Voir l'avis du CESE sur le thème des «Grandes orientations de la politique économique 2003-2005» (JO C 80 du 30.3.2004, p. 120, paragraphe 4.4.2.4).


ANNEXE 1

à l'avis du Comité économique et social européen

Amendement rejeté

L'amendement suivant, qui a recueilli au moins un quart des suffrages exprimés, a été rejeté au cours de la discussion.

Paragraphe 2.5.1

Il est proposé de supprimer le paragraphe 2.5.1.

Exposé des motifs

Vingt-trois millions d'entités économiques de tout genre et un nombre plusieurs fois supérieur de dirigeants, dont une majorité de salariés, exercent leur activité dans les États de l'Union européenne. Ils travaillent dans un environnement soumis à de fortes tensions et sont responsables de presque tous les événements qui se produisent au sein d'une société à cause des fautes ou des actions de tous ses collaborateurs. Nombreux sont les dirigeants qui renoncent à leurs fonctions ou qui s'assurent contre le risque.

Tous les États de l'Union européenne sont dotés de dispositifs juridiques (codes civils, codes de commerce, codes pénaux, etc.) qui réglementent la responsabilité des cadres dirigeants des entités économiques.

Pourtant, le paragraphe 2.5.1 appelle les États européens et l'Union européenne à accorder leur attention au niveau de qualification et à l'intégrité des dirigeants, ainsi qu'à combattre activement les lacunes dans ce domaine.

Dans ce contexte, un certain nombre de questions apparaissent, qu'il conviendra de faire émerger si nous voulons que les avis du Comité économique et social européen soient pris au sérieux:

1.

De quelle manière l'Union et les États de l'Union doivent-ils contrôler le niveau de qualification et l'intégrité de plusieurs dizaines de millions de personnes? De nouveaux organismes sont-ils nécessaires? Les systèmes juridiques existants ne sont-ils pas suffisants et ne conviendrait-il pas simplement d'appliquer le droit?

2.

Dans la mesure où les dirigeants doivent répondre des fautes dont leurs collaborateurs se sont rendus coupables, pourquoi n'étendrait-on pas également cette exigence aux travailleurs, afin qu'ils travaillent de manière efficace et consciencieuse, possèdent le niveau de qualification adapté et témoignent d'un comportement intègre? Si le Comité économique et social est un organe qui vise au consensus, nous devrions également demander que les travailleurs et toutes les fondations et organisations sociales et non gouvernementales soient dotés des qualifications et des règles d'éthique nécessaires et il conviendrait que nous invitions les États membres et l'Union à les contrôler. Pourquoi les dirigeants seraient-ils les seuls concernés par cet impératif?

3.

Lors du débat qui s'est déroulé dans la section ECO à l'occasion de l'adoption de l'avis, d'aucuns ont fait valoir qu'il n'y avait pas lieu de prendre au sérieux l'appel lancé à l'Union et à ses États membres car il ne s'agissait «que d'un appel». À ce train-là, nous pourrions peut-être régler tout de suite, par un seul avis et un unique appel, en sachant bien qu'il ne s'agirait que d'un appel, l'ensemble des problèmes économiques, sociaux et autres, quels qu'ils soient. L'opposition formulait ce genre de propositions aux assemblées parlementaires dans les pays à régime communiste, dans lesquels plus l'économie connaissait des difficultés, plus on adoptait de dispositions, dans l'idée que ces mesures, décrets et appels pourraient changer quelque chose. Je propose que nous adoptions l'avis et l'appel suivants à l'adresse de l'Union et de ses États membres: «Il faut que ça marche!» Nous réglerons alors non seulement le problème des dirigeants mais également toutes les autres questions, de quelque nature que ce soit. Le Comité économique et social ne sera désormais plus nécessaire et l'Union européenne, tout comme l'intégration européenne, s'en trouveront bien.

Résultat du vote:

Voix pour: 37

Voix contre: 53

Abstentions: 9


11.4.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 88/85


Avis du Comité économique et social européen sur «Les relations UE-Mexique»

(2006/C 88/17)

Le 1er juillet 2004, conformément à l'article 29, paragraphe 2, du Règlement intérieur, le Comité économique et social européen a décidé d'élaborer un avis sur «Les relations UE-Mexique»

La section spécialisée des relations extérieures, chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 26 janvier 2006 (rapporteur M. RODRÍGUEZ GARCÍA-CARO).

Lors de sa 424ème session plénière des 14 et 15 février 2006 (séance du 15 février), le Comité économique et social européen a adopté l'avis suivant par 107 voix pour, 4 voix contre et 6 abstentions.

1.   Introduction

1.1

L'objectif du présent avis est d'analyser l'évolution des relations entre l'Union européenne (UE) et le Mexique depuis décembre 1995, date à laquelle le CESE a adopté son premier avis à ce sujet (1), et de proposer des pistes de réflexion pour les développer et les approfondir, en ce qui concerne tant l'avenir de ces relations entre l'UE et le Mexique que la participation des sociétés civiles des deux parties.

1.2

Les relations UE-Mexique ont considérablement progressé, progrès qui s'est matérialisé par l'Accord de partenariat économique, de concertation politique et de coopération avec le Mexique (Accord global) d'octobre 2000, lequel prévoit une zone de libre-échange. En ce sens, le présent avis entend apporter des éléments qui, tout en respectant les spécificités de chacune des parties, contribuent à mettre en évidence l'importance stratégique de la relation entre l'UE et le Mexique.

1.3

L'un des aspects spécifiquement couverts par les dispositions contenues dans cet accord (articles 36 et 39) est l'association des sociétés civiles des deux parties au développement des relations entre l'Union européenne et le Mexique. Dans la déclaration (2) adoptée lors de la IIIème rencontre de la société civile organisée UE-Amérique latine et Caraïbes au Mexique, en avril 2004, à laquelle le CESE a très activement participé, il a été convenu d'une série d'actions dans un triple objectif: approfondir l'association entre l'Union européenne, l'Amérique latine et les Caraïbes, fixer un agenda en faveur de la cohésion sociale et renforcer le rôle de la société civile organisée.

Dans cette déclaration, l'on souligne entre autres choses, la nécessité de créer des «instances structurées de dialogue au niveau national et au niveau régional»; la volonté de «s'engager pleinement dans le processus de renforcement de ces institutions», et la demande de «soutien du Comité économique et social européen en termes de transfert d'expertise et de dialogue».

1.4

Dans le cas des relations UE-Mexique, l'objectif de l'association de la société civile à l'accord devrait, de l'avis du CESE, se matérialiser non seulement par la promotion des relations entre les sociétés civiles des deux parties et entre les instances représentatives de celles-ci mais également par la reconnaissance de leur participation effective au cadre institutionnel de cet accord à travers un organisme consultatif. L'intervention de cet organisme consisterait soit en des consultations obligatoires relatives au contenu de l'accord soit en la présentation de propositions de sa propre initiative. Cette participation devrait selon le CES se concrétiser par la constitution d'un Comité consultatif conjoint dans le cadre de l'accord.

2.   Situation et perspectives du Mexique: volets politique, économique et social

2.1   Situation politique

2.1.1

Au Mexique, la transition démocratique est un long et singulier processus. Les événements de la vie politique nationale de ces vingt dernières années ont permis de bâtir de solides fondations pour la transition vers un régime pluraliste et démocratique. Le Mexique a connu l'alternance, le renforcement et l'indépendance des pouvoirs législatif et judiciaire, ainsi que des changements dans la répartition du pouvoir politique et des réformes institutionnelles d'envergure telles que la création de la Cour suprême de justice de la Nation, de l'Institut Fédéral électoral et du Tribunal électoral du pouvoir judiciaire de la Fédération.

2.1.2

La situation politique au Mexique a pris un nouveau virage en 2000, avec la victoire de Vicente FOX QUESADA, candidat à la présidence pour le Partido de Acción Nacional (PAN). Cette victoire a mis fin à une période de 71 années pendant laquelle les gouvernements se sont succédé sous l'hégémonie du Partido Revolucionario Institucional (PRI). Cela a mis en évidence la nécessité d'une alternance pour le bon fonctionnement du système démocratique et a ouvert une ère de changement.

2.1.3

Le Plan de développement national 2001-2006 du gouvernement mexicain a été conçu comme un élément de transition politique, économique, sociale et démographique. Y était fixé un ensemble de priorités dont devait tenir compte le gouvernement actuel. Elles s'articulaient autour des grands axes suivants: le développement social et humain, une croissance de qualité, ainsi que l'ordre et le respect.

2.1.4

Plusieurs projets de réforme que le gouvernement mexicain actuel juge fondamentaux (réforme fiscale et réforme de la politique énergétique) sont bloqués, en raison tout d'abord de l'absence de majorité suffisante aux chambres (Congrès et Sénat) pour leur approbation et, ensuite, des prochaines élections présidentielles de juillet 2006.

2.1.5

Le taux de croissance économique et la relative stabilité politique qu'a connus le Mexique le durant une grande partie de la seconde moitié du 20ème siècle lui ont valu une place de choix au sein des puissances moyennes. Cette situation a évolué du fait de la crise économique dont le pays a souffert dans les années 1980 et des grands changements intervenus sur le plan international dans les années 1990, qui ont obligé le pays à redéfinir ses objectifs économiques, politiques et en matière de relations extérieures.

2.1.6

Par la suite, la perception stratégique, par les Mexicains, des Européens et vice-versa s'est matérialisée par la signature du dénommé «Accord global», qui dépasse le cadre des aspects concrets de la relation bilatérale. Ainsi, il convient de souligner le rapprochement croissant entre les deux parties au cours de ces dernières années sur les questions internationales et leur capacité, également en augmentation, à coordonner leurs positions lors des rencontres multilatérales. Le Mexique et l'UE ont par exemple coopéré, entre autres, sur des thèmes tels que l'environnement (Protocole de Kyoto), le développement (sommets de Johannesburg et de Monterrey) et les droits de l'Homme. Le Mexique a entretenu des relations très étroites avec le reste de l'Amérique latine, comme en témoignent les contenus politiques de concertation avec le Groupe de Rio. Le Mexique soutient également le processus d'intégration du MERCOSUR, et son association à celui-ci, ainsi que la Zone de libre-échange des Amériques (ZLEA).

2.1.7

Pour l'UE, le Mexique, en tant que «pays trait d'union» entre l'Amérique du Nord et l'Amérique du Sud, doit constituer une référence stratégique fondamentale dans tous les aspects, présents et futurs, de ses relations avec celui-ci.

2.2   Situation économique

2.2.1

Le Mexique a également vécu une importante transition économique au cours de la dernière décennie et son économie s'est beaucoup ouverte. Il est en effet le seul pays à avoir conclu un traité de libre-échange avec les États-Unis et le Canada, avec le Japon, l'Union européenne, l'Association européenne de libre-échange (AELE), Israël et une majorité de pays d'Amérique latine. De plus, il a adhéré en 1984 au GATT, devenu aujourd'hui l'Organisation mondiale du commerce (OMC), et en 1993 au Mécanisme de coopération économique Asie-Pacifique (APEC). Il fait partie, depuis 1994, de l'Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE). La réforme mexicaine, en raison aussi bien de son rythme que de son ampleur, est allée au-delà des réformes de la majorité des pays en voie de développement qui ont réalisé des ajustements économiques similaires au cours des dernières années. L'évolution de la consommation intérieure, l'augmentation de la demande de la part des États-Unis, la hausse des prix des actifs dans ce pays, celle du prix du pétrole et les entrées importantes d'investissements directs étrangers (IDE), les revenus du secteur du tourisme et les envois d'argent des immigrés ont très largement contribué, entre autres facteurs, à l'économie du Mexique.

2.2.2

Environ 98 % des entreprises mexicaines peuvent être considérées comme des microentreprises et des petites et moyennes entreprises (PME), qui jouent un rôle fondamental dans la création d'emploi, l'activité économique régionale et la formation de cadres, techniciens supérieurs et chefs d'entreprises. Leur contribution potentielle au développement économique et social du Mexique est considérable en ce qu'elles satisfont les besoins fondamentaux de la population tout en fournissant des matières premières et des produits semi-finis aux grandes entreprises, et en raison de leurs exportations directes et indirectes.

2.2.3

Depuis la fin des années 80, les PME ont été le secteur le plus touché par les changements de politique économique, les crises financières et la suppression des incitations financières à l'investissement, à l'emploi et au développement régional. Ces entreprises ont vu leur activité décroître considérablement. À l'heure actuelle, beaucoup s'accordent à penser que, notamment dans le cas des PME, les politiques et les instruments en vigueur sont insuffisants pour leur survie et leur développement futurs.

2.2.4

Le rapport du Fonds monétaire international sur le Mexique (FMI) (3) fait état de progrès considérables au Mexique au niveau de la gestion de la dette publique au cours des cinq dernières années, du fait d'une stratégie de gestion appropriée et d'une plus grande transparence. Toutefois, malgré ces progrès, le secteur public reste exposé au refinancement et aux risques liés au taux d'intérêt.

2.2.5

De même, le processus d'ouverture commerciale engagé en 1986 avec l'adhésion au GATT (4) a fait des exportations mexicaines le principal moteur de la croissance économique du pays, qui est passé d'une situation d'exportateur de matières premières à une situation d'exportateur de produits manufacturés, principalement du fait des maquiladoras  (5) (usines d'assemblage). La perte de vitesse commerciale du pays depuis 2000 a toutefois mis en évidence la vulnérabilité du Mexique face aux fluctuations de la demande extérieure.

2.2.6

Le ralentissement de l'économie mexicaine est dû aux relations de cause à effet suivantes:

les moins bonnes perspectives de croissance aux États-Unis et leur impact direct sur les exportations mexicaines,

la baisse des exportations mexicaines entraîne la baisse des investissements destinés au secteur de l'export,

la baisse des investissements affecte, plus généralement, l'ensemble de la production nationale,

la baisse des niveaux de production nationale se répercute sur les tauxd'emploi (6).

2.2.7

L'absence d'une reprise économique optimale aux États-Unis n'est cependant pas le seul facteur à affecter l'économie mexicaine à la situation de laquelle contribuent également l'émergence économique de la Chine (7), d'une part, et d'autre part, la perte de compétitivité globale du Mexique.

2.2.8

Quant à la perte de compétitivité du Mexique sur le plan mondial et selon le rapport publié par l'Institut mexicain pour la compétitivité (8) (Instituto Mexicano para la Competitividad), la position concurrentielle du Mexique s'est détériorée sur le plan mondial au cours des dernières années. L'une des raisons de la perte de compétitivité pourrait être, principalement l'épuisement du modèle économique mexicain basé sur des salaires bas et qui n'a pas été suffisamment amélioré au niveau d'autres facteurs, favorables à l'activité des entreprises tels que les dépenses liées à l'infrastructure de base (transports, communication, eau), l'énergie, le système fiscal, l'éducation, la qualification et la productivité de la main-d'œuvre, la sécurité et la gestion du gouvernement.

2.2.9

C'est dans ce contexte que le pays doit relever le défi de la création de conditions qui lui permettront de parvenir à une compétitivité effective qui s'appuie sur des éléments tels que l'amélioration de la compétitivité, la productivité, une main-d'œuvre qualifiée, l'innovation et le développement technologique, ainsi que la démocratie. En ce qui concerne le commerce, le Mexique devra renforcer la sécurité juridique, la logistique et l'infrastructure qui lui faciliteraient les investissements et le transport des marchandises. Il devra également mettre en place une structure des tarifs douaniers plus compétitive.

2.3   Situation sociale

2.3.1

Comme nous l'avons déjà dit, le Mexique est un pays en transition dont la situation sociale est caractérisée par l'inégalité. Les disparités entre les régions et les citoyens ont augmenté (disparité des taux de développement, surtout entre le Nord et le Sud), l'exode rural se poursuit (et donne naissance à des agglomérations démesurées) et la majorité des Mexicains continue à vivre dans une situation de grande fragilité sociale et la précarité.

2.3.2

À l'issue d'une période de longue détérioration de la situation sociale, le Plan de développement national 2001-2006 qui fait des politiques sociales l'une des priorités du pays a été adopté. Ces dernières années, les différents programmes sociaux du gouvernement ont connu une expansion, tant en nombre de bénéficiaires qu'en bénéfices apportés et aides accordées. Les dépenses à caractère social ont augmenté en termes réels, notamment en matière d'éducation, de protection sociale et de programmes destinés aux plus défavorisés (avec une augmentation annuelle de 8,4 % dans les années 1990 et de 9,8 % à partir de l'année 2000).

2.3.3

Des différences existent cependant entre les taux de croissance et la capacité de redistribution de l'État est limitée par le bas niveau de recouvrement des impôts et par la faible pression fiscale. En conséquence, les politiques de cohésion sociale sont déficientes, situation qui est aggravée par le faible volume de l'économie domestique et par l'insuffisance de son marché intérieur qui n'est pas assez développé.

2.3.4

Entre 2000 et 2002, 3,4 millions de personnes sont passées au-dessus du seuil de pauvreté alimentaire, c'est-à-dire qu'elles sont parvenues à une situation dans laquelle elles sont en mesure de couvrir leurs besoins alimentaires et peuvent donc investir, même modestement, dans l'éducation et la santé. Ces chiffres contrastent avec la situation enregistrée entre 1994 et 1996, lorsque le nombre de Mexicains vivant sous le seuil de pauvreté alimentaire avait augmenté de 15,4 millions.

2.3.5

La proportion de la population vivant en dessous du seuil de pauvreté alimentaire (foyers dont le revenu par personne est insuffisant pour couvrir les dépenses d'alimentation) en zone urbaine est passée de 12,6 à 11,4 % et de 42,4 à 34,8 % en zone rurale. Malgré la réduction du nombre de Mexicains qui vivent dans des conditions de pauvreté, les proportions restent énormes compte tenu du niveau de développement et de richesse du pays. Les progrès réalisés peuvent cependant être interprétés comme une tendance positive (9). Par ailleurs, les inégalités de la société mexicaine ne sont pas uniquement liées à la pauvreté mais également à la qualité de l'éducation et de la santé et à l'accès à celles-ci, ce qui complique la situation des régions défavorisées. S'agissant d'éducation, le taux d'analphabétisme du Nord du pays (5 %) contraste avec celui de la région Sud/Sud-Est qui s'élève à 17 %.

2.3.6

La question des droits de l'homme est un problème grave et souvent lié non seulement à des lacunes d'ordre juridique mais également à d'autres facteurs. Le trafic de drogue et de personnes ne fait que noircir le tableau, si bien que la situation des droits de l'homme au Mexique, surtout en ce qui concerne la population indigène, demeure manifestement déficiente. Les principales difficultés proviennent de carences importantes constatées au niveau des forces de police et du système judiciaire dès lors qu'il n'est parfois pas possible de garantir à la population un accès satisfaisant à la justice, même si cet état de fait est combattu depuis les plus hauts niveaux de l'État.

2.3.7

De plus et même si au cours des dernières années des progrès constitutionnels ont été réalisés au Mexique en matière de reconnaissance de la diversité culturelle et ethnique ainsi que des droits des peuples indigènes, le pays doit encore relever de grands défis pour parvenir à la défense et à la promotion effective des droits de l'homme et des libertés fondamentales des indigènes. On peut distinguer entre autres problèmes les conflits agraires, la discrimination en matière d'accès à la justice et dans la manière dont celle-ci est rendue ainsi que le déplacement involontaire de la population (10).

2.3.8

Parmi les principaux problèmes sociaux du Mexique, il convient également de citer le problème de la répartition territoriale. La zone métropolitaine de la ville de Mexico, avec environ 25 millions d'habitants, connaît actuellement deux grandes transitions. En premier lieu, elle est passée d'une forte croissance de sa population à une relative stabilité et une redistribution spatiale. Ensuite, elle est passée d'une économie industrielle destinée au marché national à une économie de services visant la compétitivité au niveau international (11).

2.3.9

La zone métropolitaine de la ville de Mexico dispose d'un véritable potentiel de croissance du fait de la concentration sur son territoire de sièges sociaux d'entreprise et de centres d'enseignement et de recherche, et grâce à sa richesse culturelle et à l'importance des flux d'investissement direct étranger. Cette croissance potentielle est toutefois freinée par la concentration d'habitants disposant de faibles revenus dans des quartiers constitués de logements précaires et caractérisés par l'insuffisance ou l'absence de services publics et d'infrastructures et la vulnérabilité face aux catastrophes naturelles. Les niveaux de formation sont quant à eux insuffisants et l'indice d'insécurité est beaucoup plus élevé dans ces zones (12).

2.3.10

Toutefois, entre 2000 et 2002, des évolutions ont pu être observées au niveau des chiffres de l'éducation en ce qui concerne la population en situation de pauvreté alimentaire. Le pourcentage d'enfants de 5 à 15 ans non scolarisés est passé de 14,3 à 11,9 %. L'évolution la plus marquante concerne la tranche d'âge 12-15 ans: le pourcentage d'enfants qui travaillent est passé de 18,6 à 6,6 % sur la période de référence. Le taux d'analphabétisme a diminué dans les mêmes proportions, ainsi que la proportion de la population de plus de 15 ans qui ne termine pas le premier cycle d'enseignement. L'on peut se féliciter de cette diminution mais les niveaux et la qualité des systèmes d'enseignement et de santé ne sont pas appropriés et ne peuvent par conséquent pas permettre d'atteindre un taux de cohésion sociale souhaitable.

2.3.11

En matière d'emploi, le taux de chômage au Mexique en 2004 était de 3,1 % tandis que celui de l'UE à 15 était de 8,2 % et celui des États-Unis de 5,6 % pour la même année (13). Selon l'Observatoire de l'emploi (14) créé récemment, la dernière décennie s'est traduite par une augmentation du nombre de cadres dans pratiquement tous les domaines de la connaissance. 56 % des cadres salariés se concentrent dans trois domaines de connaissance: économie/administration, éducation et sciences sociales. La catégorie économie/administration est celle qui a connu la plus forte croissance en nombre d'emplois au cours des quatre dernières années.

2.3.12

De même, ces chiffres montrent que la majorité des femmes accèdent au marché de l'emploi. Toutefois, 40 % seulement des femmes diplômées de l'enseignement supérieur ont un emploi bien qu'elles représentent 52 % des diplômés.

2.3.13

Huit travailleurs mexicains sur dix sont salariés (15), c'est-à-dire qu'ils ont un contrat de travail et perçoivent un salaire. Si les secteurs offrant les salaires les plus élevés sont également ceux qui connaissent le plus fort taux de chômage (ingénierie, sciences physiques, mathématiques et biologie), le domaine de l'enseignement est celui qui enregistre le taux de chômage le plus faible et propose les salaires les moins élevés.

2.3.14

Sur le plan institutionnel, des progrès ont été réalisés en matière de développement social et de promotion de la société civile au moyen de réseaux et d'alliances. À ce propos, il convient de souligner la loi pour l'accès à l'information publique, la loi de développement social et la loi de promotion des organisations de la société civile.

3.   Évolution et évaluation de l'Accord global UE-Mexique

3.1   Évolution  (16)

3.1.1

L'actuel Accord d'association économique, de concertation politique et de coopération entre l'UE et le Mexique (Accord global), en vigueur depuis le 1er octobre 2000, inclut en plus un accord de libre-échange entre les deux parties ainsi que des dispositions pour le dialogue politique et la coopération. Cet Accord global succède à l'accord signé en 1991 entre la Communauté européenne et le Mexique. En 1995, les deux parties ont signé, à Paris, une déclaration conjointe qui fixait les objectifs politiques, économiques et commerciaux devant se concrétiser sous la forme d'un nouvel accord. Les négociations en vue de ce dernier ont commencé en octobre 1996 et se sont achevées en juillet 1997. Cela a donné naissance à l'Accord global et à l'Accord intérimaire, dont la signature a eu lieu le 8 décembre 1997 à Bruxelles.

3.1.2

Les principaux aspects de l'Accord global sont l'institutionnalisation du dialogue politique; le renforcement des relations commerciales et économiques au moyen de la libéralisation bilatérale et préférentielle, progressive et réciproque des échanges, conformément aux règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) et l'élargissement du champ de la coopération, qui comprend désormais une trentaine de domaines différents. Enfin, l'Accord a instauré un Conseil conjoint chargé de superviser son application.

3.1.3

L'Accord intérimaire (17) a permis aux parties, jusqu'à la ratification de l'Accord global, d'appliquer sans tarder les dispositions concernant le commerce et les mesures d'accompagnement et il est entré en vigueur le 1er juillet 1998.

3.1.5

En novembre 2004, dans le cadre du Comité conjoint, l'UE et le Mexique ont décidé de rendre effectives les dispositions des clauses de révision que l'accord comporte pour les chapitres «agriculture», «services» et «investissements», en décidant de lancer des négociations parallèles pour ceux-ci au début de l'année 2005, en vue de leur éventuelle conclusion cette année même.

3.2   Évaluation

Plus de cinq ans après l'entrée en vigueur de l'Accord d'association économique, de concertation politique et de coopération entre l'UE et le Mexique (Accord global), le CESE estime qu'il s'agit d'un instrument à fort potentiel et que son caractère progressif peut permettre d'engendrer des bénéfices pour les deux parties en ce qui concerne ses trois piliers (dialogue politique, développement commercial et coopération). De l'avis du CESE, le bilan est globalement positif, en ce qui concerne tant les chiffres des échanges commerciaux et de l'investissement que l'intensification du dialogue institutionnel. Mais le CESE considère que l'Accord global n'a pas encore développé tout son potentiel et le présent avis fournit à cet égard quelques réflexions.

3.2.1   Volet politique

3.2.1.1

Sur le plan politique, le Mexique et l'UE ont décidé, lors de la 4ème réunion du Comité conjoint Mexique-UE (Mexico, 10 novembre 2004), de lancer le dialogue politique bilatéral et ont réitéré leur engagement envers le renforcement du multilatéralisme. Par ailleurs, ils ont échangé leurs points de vue sur la Cour pénale internationale et ont décidé qu'il était nécessaire d'en faire la promotion.

3.2.1.2

Outre les sommets des chefs d'État et de gouvernement entre le Mexique et l'UE et les différents conseils et comités qui réunissent des experts sur des thèmes spécifiques, l'Accord global a facilité l'ouverture de nouveaux canaux de communication permanents qui n'existaient pas auparavant, permettant ainsi un dialogue de qualité sur les questions qui intéressent les deux parties. De même, dans le cadre de l'accord, un rapprochement a eu lieu entre les représentants politiques. Les relations entre les sociétés civiles des deux parties se sont quant à elles intensifiées, notamment à la suite de la IIIème rencontre de la société civile organisée Union européenne-Amérique latine et Caraïbes, tenue en avril 2004 organisée par le CESE dans la ville de Mexico.

3.2.1.3

Toutefois, le CESE estime qu'il y a lieu d'améliorer la qualité des accords, en y incorporant des dispositions pour la coopération et le dialogue institutionnalisé et associant la société civile à la prise de décisions. Aussi, accueille-t-il avec satisfaction les conclusions du conseil conjoint relatives à la possibilité d'institutionnaliser le dialogue avec la société civile et dans lesquelles le comité conjoint s'est vu confié «la tâche de déterminer, lors de sa prochaine réunion, la méthodologie et le format les plus adéquats à cette fin» (18).

3.2.1.4

Sur proposition de l'UE, l'on a inclus dans l'accord la dénommée «clause démocratique» qui stipule que «le respect des principes démocratiques et des droits humains fondamentaux, tels qu'ils sont énoncés dans la déclaration universelle des droits de l'homme, inspire les politiques internes et internationales des deux Parties et constitue l'élément essentiel du présent Accord». Cette clause a suscité de grandes espérances au sein de la société civile en ce qu'elle constitue un pas en avant pour faire du commerce un moyen de développement durable et en tant qu'instrument pour garantir les droits de l'homme, y compris les droits économiques et sociaux. Toutefois, le texte ne donne pas plus de précision au sujet des droits sociaux et économiques.

3.2.2   Volet économique

3.2.2.1

Globalement, les parties estiment que, cinq ans après la signature de l'accord, le bilan est positif, notamment si l'on se réfère à l'augmentation significative du commerce (19) et des investissements entre le Mexique et l'Union européenne.

3.2.2.2

L'accord a aussi donné à l'UE la possibilité de se retrouver sur un pied d'égalité avec les pays ayant signé avec le Mexique des accords de libre-échange, ce qui garantit aux entreprises européennes un accès équivalent à celui dont ont bénéficié les États-Unis grâce à l'Accord de libre-échange nord-américain, situation connue sous le nom de «parité ALENA». Le Mexique, pour sa part, profite du potentiel élevé de l'investissement européen, des transferts de technologie et du grand marché européen.

3.2.2.3

Les résultats sont susceptibles toutefois d'être substantiellement améliorés. Si les flux commerciaux entre l'UE et le Mexique ont augmenté depuis l'entrée en vigueur de l'Accord, cela ne s'est pas traduit pour l'UE par une augmentation de la part qu'elle représente dans le total alors que le déficit de la balance commerciale mexicaine ne cesse de se creuser. Il faut néanmoins tenir compte du fait que ce déficit se traduit principalement par des importations de biens intermédiaires et de capitaux nécessaires à la modernisation des usines de production mexicaines tout comme à la fabrication par des entreprises européennes installées au Mexique de produits finis, ayant une plus forte valeur ajoutée destinés à être exportés vers les États-Unis.

3.2.2.4

Les investissements totaux cumulés de l'UE au Mexique sur la période janvier 1994-juin 2004 s'élèvent à 33.656,6 millions de dollars (20), soit 24,3 % du total de l'investissement direct étranger (IDE) au Mexique sur cette période. Entre 1999 et 2004, le Mexique a reçu un total de 78.060 millions de dollars au titre de l'IDE, dont 19.791 en provenance de l'UE. En ce qui concerne les flux d'IDE sur la période janvier 1994-juin 2004, les pays de l'UE y ont participé comme suit, par ordre décroissant: Espagne (8,3 %), Pays-Bas (8,2 %), Royaume-Uni (3,7 %) et Allemagne (2,6 %). L'évolution des investissements de l'Union européenne met en évidence l'importance stratégique du Mexique pour elle. Le Mexique et l'Union européenne doivent exploiter les possibilités ouvertes par leur accord pour approfondir et élargir les échanges en matière de services, secteur essentiel pour l'UE, et d'investissements.

3.2.2.5

Le CESE attire l'attention sur les autres effets économiques de l'accord, à savoir:

L'UE doit diversifier ses investissements (surtout en matière de développement scientifique et technologique), car ils sont centrés sur un très petit nombre de secteurs productifs et de régions du Mexique.

Le Mexique exporte plus de biens mais les exportations sont toujours cantonnées à une gamme de produits très limitée. Les entreprises mexicaines doivent donc exploiter des niches commerciales de nouveaux produits et les marchés d'autres pays de l'UE.

L'augmentation du commerce et de l'investissement a des effets positifs sur l'économie en général, mais n'a pas eu les effets escomptés en matière de développement social et de lutte contre la pauvreté.

L'Accord est surtout bénéfique aux grandes entreprises mexicaines et européennes, mais les PME ne profitent pas de tout le potentiel qu'il offre.

Le cadre législatif de l'Accord est insuffisant pour attirer des investissements plus importants, raison pour laquelle il est essentiel d'accroître la sécurité juridique.

L'Accord ne constitue pas en lui-même un nouveau cadre inaltérable des relations commerciales. Il faut donc mettre au point des façons de l'améliorer et de l'actualiser, au moyen de clauses de révision.

3.2.3   Volet de la coopération

3.2.3.1

La coopération entre le Mexique et l'UE s'articule autour de quatre éléments: la coopération bilatérale au niveau gouvernemental; la coopération au travers de programmes régionaux (AL-Invest; URBAN; ALFA; @lis,Eurosocial, etc.) que la Commission destine à l'ensemble de l'Amérique latine et auxquels participe le Mexique; la coopération sur des questions spécifiques telles que les droits de l'Homme, l'environnement et les ONG. Enfin, le Mexique a la possibilité d'accéder à d'autres programmes tels que le VIème programme-cadre de recherche et développement.

3.2.3.2

En matière de coopération bilatérale, il existe un cadre juridique solide qui figure au chapitre coopération de l'accord et dans le Mémorandum d'entente sur les orientations pluriannuelles pour la mise en œuvre de la coopération UE-Mexique pour la période 2002-2006 à travers lequel les deux parties ont convenu d'orienter la coopération vers les domaines du développement social et de la réduction des inégalités, la consolidation de l'État de droit; la coopération économique ainsi que la coopération scientifique et technologique. La programmation 2002-2006 dont la réalisation fait l'objet d'un cofinancement est dotée de 52,6 millions d'euros provenant de l'UE et un montant similaire est apporté par les institutions mexicaines bénéficiaires de la réalisation des projets. L'Accord-cadre de financement, document de base pour la formulation des projets spécifiques de coopération entre le Mexique et l'Union européenne est un autre des instruments signés.

3.2.3.3

De même, un élan a été donné à la négociation et à l'adoption d'instruments supplémentaires pour le renforcement de la coopération entre le Mexique et l'Union européenne et c'est dans ce contexte qu'a été signé l'Accord sectoriel de coopération scientifique et technologique en février 2004. Entre temps, les contacts se poursuivent pour concrétiser les accords sectoriels en matière d'enseignement supérieur et d'environnement.

3.2.3.4.

Actuellement, le Programme intégral de soutien aux petites et moyennes (PIAPYME) destiné au renforcement de la productivité des PME, entre autres objectifs, est en cours de réalisation. Il faut également mentionner le soutien au transfert de technologie, l'appui au processus de coopération entre entreprises pour promouvoir les investissements conjoints et les alliances stratégiques entre les PME mexicaines et celles de l'Union européenne ainsi que la modernisation et l'internationalisation des PME, entre autres choses. Par ailleurs, le Programme pour la mise en œuvre de l'accord est orienté vers des domaines spécifiques tels que les douanes, les normes techniques, les normes sanitaires et phytosanitaires, la protection du consommateur et la propriété intellectuelle.

3.2.3.5

De plus, dans le cadre de la coopération en matière de droits de l'homme, les projets sur la mise en œuvre des recommandations découlant du diagnostic de la situation des droits de l'homme et la promotion et la défense des droits humains des peuples indigènes au Mexique sont en cours de réalisation.

3.2.3.6

Concernant la gestion et l'administration de la coopération, certaines institutions gouvernementales mexicaines ont fait part au CESE de la complexité des procédures et des mécanismes communautaires pour la mise en œuvre de la coopération. Pour la coopération à venir, le Mexique et l'UE semblent être d'accord sur l'importance du renforcement de leur relation, à travers une nouvelle approche de la coopération, moyennant l'identification et l'adoption de modalités supplémentaires telles que les dialogues sectoriels et la coopération trilatérale Mexique-UE-pays tiers, en particulier en ce qui concerne l'Amérique centrale. Quant aux domaines de coopération futurs qui devront être établis pour la période 2007-2013, le CESE considère qu'il y a lieu de renforcer le soutien actuellement accordé aux PME ainsi que les volets cohésion sociale, éducation et environnement, entre autres.

3.2.4   Effets de l'UE élargie sur les relations avec le Mexique

3.2.4.1

Le dynamisme commercial entre le Mexique et l'UE est particulièrement évident dans les échanges avec certains des dix nouveaux États membres. Il convient par exemple de souligner l'évolution du commerce avec la République tchèque, la Hongrie et la République slovaque. L'on a pu observer que les petites et moyennes économies bénéficient davantage de cette évolution que les grandes économies. Mais les échanges commerciaux entre le Mexique et les nouveaux États membres n'en sont qu'à leurs débuts.

3.2.4.2

Pour le Mexique, l'élargissement signifie que la relation commerciale privilégiée existant entre les parties depuis l'entrée en vigueur de l'accord global est élargie aux dix nouveaux États membres de l'UE. Par conséquent, l'élargissement devrait avoir un effet tangible pour les chefs d'entreprise mexicains et ceux des nouveaux États membres, car ils peuvent profiter d'une zone de libre-échange de plus de 550 millions (21) de consommateurs (populations de l'UE et du Mexique (22) additionnées). Avec l'élargissement, les nouveaux États membres participent également à la politique commerciale communautaire et les opérations dans ces pays des entreprises de pays tiers tels que le Mexique ont été nettement simplifiées en conséquence de l'application de ce régime unique de règles commerciales, d'un tarif douanier unique et de procédures administratives communes.

3.2.4.2

Le Mexique comme les nouveaux États membres de l'UE s'accordent à penser que leurs marchés présentent de nombreuses opportunités pour les entreprises de l'autre partie, notamment le secteur manufacturier de l'UE pour le Mexique et le secteur agricole du marché mexicain pour l'UE. Par ailleurs, la croissance économique qui est désormais évidente dans les nouveaux États membres engendrera une forte augmentation de la demande, ce qui procure un avantage relatif aux exportateurs mexicains par rapport à leurs concurrents d'Amérique latine et d'Asie qui ne peuvent pas encore s'appuyer sur un accord préférentiel avec l'UE.

4.   L'Accord global euro-mexicain et l'Accord de libre-échange nord-américain (ALENA)

4.1

Le fait que le Mexique se trouve à proximité de l'un des plus grands marchés du monde, les États-Unis, explique dans une large mesure le degré d'intégration de l'économie mexicaine avec celle de ce pays. Ce dernier était intéressé par une compétitivité accrue face à ses principaux rivaux, à savoir, le Japon et l'UE. Le Mexique quant à lui aspirait à s'insérer dans l'économie mondiale. Ainsi, a-t-il orienté ses relations bilatérales vers les États-Unis à travers l'Accord de libre-échange nord-américain (ALENA), qui s'est avéré très bénéfique pour l'Amérique du Nord et, en général, pour les petites et les grandes entreprises. L'UE était alors au beau milieu du processus d'ouverture vers l'Est, qui a débuté avec la réunification allemande.

4.2

Depuis le premier janvier 1994, date à laquelle l'ALENA est entré en vigueur, le commerce trilatéral a atteint des niveaux supérieurs à 623 milliards de dollars, soit plus du double du niveau existant avant le traité. De 1994 à 2003, l'investissement étranger direct (IDE) accumulé dans les trois pays a augmenté de plus de 1,7 billion de dollars. Parallèlement à l'ALENA, l'Accord nord-américain sur la coopération en matière d'environnement (ANCA) et l'Accord de coopération dans le domaine du travail d'Amérique du Nord sont entrés en vigueur (23).

4.3

Selon des estimations de la Banque mondiale (24), sans l'existence de l'ALENA, les exportations mexicaines et l'investissement étranger auraient été moindres. L'Amérique du Nord constitue la source principale d'investissement au Mexique (l'Union européenne occupe la deuxième position). Entre 1999 et 2004, l'investissement nord-américain était principalement destiné à l'industrie manufacturière (43,7 % du total) et aux services (38,4 % du total). Toutefois, les effets de l'ALENA ont été controversés dans d'autres domaines, en particulier en ce qui a trait au chômage, à l'immigration, au revenu par habitant ou à l'agriculture. Depuis l'entrée en vigueur de l'ALENA, l'apport massif d'investissements n'a pas agi comme le facteur promis de nivellement entre le Mexique et ses partenaires nord-américains (25).

4.4

Actuellement, les pays faisant partie de l'ALENA sont en train d'œuvrer à l'approfondissement de l'intégration économique de l'Amérique du Nord, recherchant des outils supplémentaires pour améliorer le commerce, l'investissement et la compétitivité. Toutefois, l'ALENA n'aborde pas les questions fondamentales comme l'immigration ou la mobilité des travailleurs, relativement auxquelles l'UE se limite à offrir un nombre limité de visas pour raisons professionnelles. Il y a lieu de signaler qu'après la libéralisation des échanges, le nombre de migrants mexicains illégaux aux États-Unis est passé de 2 millions en 1990 à 4,8 millions en 2000 (26), ce qui a eu pour effet d'accroître les problèmes à la frontière. En 2004, près de 10 millions de personnes nées au Mexique avaient leur résidence aux États-Unis. Si l'on ajoute les citoyens des États-Unis d'origine mexicaine, ce chiffre atteint 26,6 millions, soit 9 % de la population nord-américaine. Parmi les impacts les plus visibles de la migration figurent les envois d'argent au pays d'origine, qui s'élèvent à 13 000 milliards de dollars (27).

4.5

La différence fondamentale entre l'ALENA et l'Accord global Mexique-UE est que ce dernier va au-delà du cadre commercial, car non seulement il a fait de l'UE le deuxième partenaire commercial du Mexique, avec une relation commerciale plus équilibrée et plus équitable en soi, mais également parce qu'il comprend des aspects fondamentaux en termes de coopération et de concertation politique que l'ALENA ne prévoit pas. En ce qui concerne la participation de la société civile à la prise de décision, l'ALENA ne prévoit pas de mécanismes à cette fin.

4.6

En ce qui concerne la balance commerciale, les échanges entre l'UE et le Mexique ont considérablement augmenté en cinq ans, bien que, d'après les chiffres (28) l'on ne soit pas parvenu à enrayer la concentration du commerce mexicain avec les États-Unis, qui restent le principal partenaire commercial du Mexique. En 2003, 90 % des exportations mexicaines concernaient les pays de l'ALENA (29), et seulement 3,4 % étaient à destination de l'UE. Quant aux importations du Mexique, 64,2 % provenaient des États-Unis et seulement 10,4 % de l'UE.

5.   Institutionnalisation du dialogue avec la société civile organisée

5.1

L'Accord global institutionnalise le dialogue politique, qui englobe toutes les questions bilatérales et internationales d'intérêt mutuel, à tous les niveaux. Dans ce contexte, il est envisagé de créer un «Conseil conjoint» (art. 45) chargé de superviser l'application de l'Accord. Il est assisté dans sa tâche par un «Comité conjoint» (art. 48). Au titre de l'Accord, le Conseil conjoint pourra également décider de la création de tout autre comité spécial ou organisme pouvant l'aider dans la réalisation de ses tâches (art. 49).

5.2

Il est essentiel de faire participer la société civile mexicaine et européenne si l'on veut parvenir à la prise en considération des intérêts des secteurs sociaux des deux parties dans le processus d'application de l'Accord global. Une meilleure représentation doit être assurée à tout l'éventail des organisations de la société civile (agriculteurs, consommateurs, femmes, environnement, droits de l'homme, fédérations professionnelles et PME).

5.3

Les titres VI et VII de l'Accord global contiennent les articles précités et établissent le fondement juridique de la création d'un comité consultatif mixte UE-Mexique. En premier lieu, l'article 36 prévoit la reconnaissance explicite de la nécessité d'associer la société civile au processus d'intégration régionale. Ensuite, l'article 39 définit les domaines concernés par la coopération, à commencer par le développement de la société civile. Enfin, l'article 49 confère au Conseil conjoint la faculté de créer tout autre comité consultatif ou organisme qu'il juge nécessaire pour mettre en œuvre les dispositions de l'Accord. En outre, la clause évolutive (art. 43) permet d'élargir l'un ou l'autre domaine de la coopération. Il existe donc une possibilité réelle de créer cet organe conjoint UE-Mexique, au sein duquel l'opportunité sera donnée de participer aux divers volets de l'accord. De l'avis du CESE et en fonction de l'expérience acquise (30), la dénomination appropriée pour un tel organe serait celle de «Comité consultatif conjoint» (CCC) UE-Mexique.

5.4

De l'avis du CESE, la constitution et le fonctionnement d'un organisme de ce type seraient facilités par l'existence au Mexique d'un organe similaire au CESE, légitimé, représentatif, indépendant et au sein duquel seraient dûment représentés les trois secteurs traditionnels (employeurs, travailleurs et intérêts divers). Cependant, aucune des tentatives parlementaires de créer un CES mexicain n'a abouti, malgré la présentation d'un projet de loi fédérale dont l'objectif est de créer un Conseil économique et social en tant qu'organe public qui serait établi dans la ville de Mexico (31). Il n'existe pas non plus de consensus entre les organisations syndicales d'employeurs et du troisième secteur, qui favoriserait sa création. Une certaine confusion entre les différents instruments de dialogue social (consultation, concertation et négociation) et la consultation de la société civile entoure la création d'un organe de ce type.

5.5

Quant au gouvernement, le dialogue (à caractère plus social que civil) avec une partie de la société civile s'articule autour du dénommé Conseil pour le dialogue avec les secteurs productifs (CDSP) (32), au sein duquel sont représentés les syndicats et les employeurs aux côtés de l'administration centrale et régionale. Le troisième secteur n'y est que partiellement et insuffisamment représenté par l'intermédiaire de représentants du monde universitaire et agricole. Par ailleurs, le gouvernement a également instauré un dialogue avec d'autres plate-formes qui regroupent diverses organisations (syndicats, chambres des petites et moyennes entreprises, ONG) de la société civile, en particulier en ce qui a trait aux accords commerciaux signés par le Mexique.

5.6

Le gouvernement et les chefs d'entreprises mexicains préconisent de faire du CDSP l'interlocuteur du CESE, même si le premier reconnaît que ce serait un premier pas en attendant de voir comment l'on peut intégrer progressivement les organisations du troisième secteur. Les syndicats, pour leur part, participent activement et reconnaissent, dans leur grande majorité, le CDSP, même s'ils ne sont pas unanimes quant à savoir s'il doit s'agir d'un organe similaire au CESE. Pour ce qui est des organisations faisant partie de la plate-forme de la société civile, elles sont partisanes d'un CES ex novo.

6.   Conclusions et recommandations

6.1

Si les changements qui sont en train de se produire au Mexique sont favorablement accueillis, il ne fait pas de doute qu'il reste encore de nombreuses réformes à mettre en œuvre. Ainsi, il faut notamment renforcer l'État de droit en garantissant la liberté et la sécurité juridique, aborder les problèmes existants en matière d'application de la justice, redistribuer de manière plus appropriée la richesse, développer la protection sociale, permettre un accès à une éducation et à des soins de santé de qualité et agrandir le marché domestique à travers, entre autres, les PME, en faisant de la cohésion sociale le pivot de toutes les améliorations qui doivent être entreprises afin que le Mexique puisse être considéré comme un pays développé présentant toutes les garanties.

6.2

Le CESE considère que l'on n'a pas suffisamment développé toutes les potentialités de l'Accord global dans tous ses volets. Il estime ainsi qu'il faut donner un élan à l'accord pour réduire les droits de douane, éliminer les obstacles techniques au commerce et ouvrir de nouveaux secteurs au commerce des services et à l'investissement. Il faut également favoriser l'établissement d'entreprises des deux côtés, en facilitant les relations institutionnelles, en créant un environnement favorable à l'activité des entreprises et en promouvant des forums de rencontres. De plus il conviendrait de renforcer la coopération bilatérale pour des initiatives d'intérêt commun, principalement en ce qui concerne le reste de l'Amérique latine et les États-Unis. Il faut développer les dimensions sociale et professionnelle de l'accord (formation, égalité des chances, emploi, etc.) à travers des projets de coopération.

6.3

Afin de rendre possible la participation de la société civile à ces actions, le CESE estime que l'on pourrait créer un CCC UE-Mexique. Le CESE est également un ardent défenseur de la création d'un organe similaire au Mexique et encourage les représentants mexicains à continuer les travaux dans ce sens.

6.4

Du point de vue du CESE, le CCC UE-Mexique pourrait être un organe consultatif du Conseil conjoint dans l'objectif d'une participation à l'élaboration, au suivi et à la mise en œuvre de l'Accord global. Il aurait pour fonction d'émettre des avis au sujet des consultations demandées par le Conseil conjoint sur des questions à définir. Ainsi, il pourra émettre des avis ou des recommandations, de sa propre initiative, sur les questions qui ont un rapport avec l'accord. De même, il serait chargé de rédiger un rapport périodique sur l'évolution de l'accord et de coordonner, avec l'appui, y compris financier, du Conseil conjoint, les rencontres périodiques avec la commission parlementaire Mixte UE-Mexique, selon des modalités à établir, pour un meilleur suivi de l'accord.

6.5

Afin d'étudier l'éventuelle création d'un CCC UE-Mexique, le CESE estime qu'il convient d'entretenir, de manière systématique, les relations, qui jusqu'ici ont été sporadiques, avec la société civile mexicaine et dans cet objectif, il invite les acteurs de celle-ci à désigner par consensus trois représentants par secteurs de la société civile (chefs d'entreprise, travailleurs et du troisième secteur). Le CESE quant à lui, désignerait trois représentants de chacun des trois groupes qui le composent. Il s'agit de créer un groupe de travail conjoint dans l'objectif d'aller de l'avant car c'est en forgeant que l'on devient forgeron.

6.6

Ce groupe de travail conjoint CESE-représentants de la société civile mexicaine a pour but d'élaborer une proposition sur la création, la composition, les fonctions et les règles de fonctionnement d'un CCC UE-Mexique. Cette proposition pourrait être élaborée dans le courant de l'année 2006 et présentée au Conseil conjoint en 2007.

6.7

Par ailleurs et dans le cadre bilatéral hors accord, le CESE serait disposé à appuyer, dans la mesure de ses possibilités et s'il existe un consensus à ce sujet dans la société mexicaine, la création d'un organe similaire, au niveau national, au Mexique. Cela permettait de développer davantage encore les relations entre les différentes organisations des sociétés civiles européenne et mexicaine et contribuerait au renforcement des liens entre l'UE et le Mexique.

6.8

6De l'avis du CESE, cet organe devrait être le reflet de la pluralité de la société civile mexicaine et par conséquent se composer des trois secteurs précédemment mentionnés. Trois principes doivent le sous-tendre (comme c'est le cas du CESE): représentativité, indépendance et légitimité. Notre expérience nous a montré que pour parvenir à la création d'une institution de ce type, il est essentiel de faire un effort pour dégager un consensus entre les différents secteurs de la société civile concernés et parvenir à une certaine définition de la représentativité des organisations qui doivent être représentées en son sein.

Bruxelles, le 15 février 2006.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  Paragraphe 5.5 de l'avis sur «Les relations entre l'Union européenne et le Mexique», adopté le 21 décembre 1995 (JO C 82, du 19.03.1996, p 68).

(2)  Paragraphe 3 de la synthèse et paragraphes 33, 34 et 35 de la déclaration finale de la IIIème rencontre de la société civile organisée Union européenne-Amérique latine et Caraïbes, tenue au Mexique, les 13, 14 et 15 avril 2004. Dans ce document, il est fait état des progrès accomplis en matière de reconnaissance de la diversité culturelle et ethnique ainsi que des droits des peuples indigènes.

(3)  Rapport du Fonds monétaire international (FMI) sur le Mexique no04/418, du 23 décembre 2004.

(4)  General Agreement on Tariffs and Trade (Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce).

(5)  Le terme de «maquiladora» désigne, selon le Conseil national de l'industrie d'assemblage d'exportation (http://www.cnime-org.mx/), le processus industriel ou relevant du secteur des services, qui est destiné à la transformation, à l'élaboration ou à la réparation de marchandises en provenance de l'étranger temporairement importées pour être ensuite exportées, processus mené à bien par les entreprises d'assemblage ou qui se consacrent partiellement à l'exportation, aux termes du décret pour la promotion et le fonctionnement de l'industrie d'assemblage d'exportation et ses réformes. L'activité industrielle mexicaine est centrée sur les mines, l'industrie manufacturière, la construction, l'électricité, le gaz et l'eau. La diminution des flux d'investissement destinés au secteur manufacturier entre 2001 et 2003 a engendré une diminution de la production, principalement dans l'industrie manufacturière et la construction. Durant cette période, les secteurs manufacturiers qui ont connu le plus de difficultés furent les plus affectés par la diminution des exportations, notamment les entreprises de produits métalliques (automobiles, appareils électriques ou électroniques, machines et équipement), de textile, d'habillement, de cuir et de produits chimiques (pétrole, médicaments, caoutchouc, plastique). Les secteurs qui ont le plus souffert d'une diminution de leur production réelle sont ceux pour lesquels l'activité d'assemblage représente plus de 50 %, c'est-à-dire ceux dont plus de la moitié des exportations proviennent des usines d'assemblage, tels que le textile et l'habillement (6 %), les machines et l'équipement (60 %) et le secteur du bois (56 %).

(6)  D'après le Sous-secrétariat à l'industrie et au commerce du Mexique, entre 2001 et 2003, tous les sous-secteurs industriels ont enregistré une augmentation du chômage, qui a grimpé, par rapport à la période 1995-2000, de 17,8 % dans les usines d'assemblage et de 13,8 % ailleurs. La reprise de 2004 n'a eu aucun impact sur les indicateurs d'emploi, qui affichent encore des taux de croissance nuls.

(7)  La pression concurrentielle de la Chine et sa présence sur le marché du textile et de l'habillement des États-Unis et de l'UE implique des mesures d'ajustement pour les pays qui exportent vers ces marchés. Les conséquences sont particulièrement graves pour le Mexique. De plus, le potentiel de développement de la Chine constitue un véritable défi pour la position actuelle du Mexique, essentiellement en ce qui concerne les biens à forte intensité de main-d'œuvre, étant donné les niveaux des salaires au Mexique.

(8)  Analyse de la compétitivité au Mexique, Institut mexicain pour la compétitivité (Análisis de la Competitividad en México, Instituto Mexicano para la Competitividad). Septembre 2003.

(9)  Secrétariat au développement social du Mexique, «Medición del desarrollo, México 2000-2002»,23 juin 2003.

(10)  Bulletin de l'ONU no 03/042 du 17 juin 2003, relatif à la situation des droits fondamentaux et des libertés des indigènes au Mexique.

(11)  Policy brief OCDE, octobre 2002, «Territorial reviews: México City».

(12)  La pauvreté au Mexique: une évaluation des conditions, des tendances et de la stratégie du gouvernement, Banque mondiale, 2004.

(13)  OCDE Employment outlook, 2005.

(14)  L'Observatoire de l'emploi (Observatorio laboral) est l'instrument créé par le gouvernement mexicain afin d'améliorer la situation du marché de l'emploi. Son inauguration par le président mexicain a eu lieu le 2 mars 2005 à la Residencia oficial de Los Pinos et une délégation du CESE y était invitée.

(15)  Institut national de statistique, géographie et informatique, Mexico, 8 mars 2004.

(16)  Relations UE-Mexique, Représentation permanente de l'Espagne auprès de l'UE.

(17)  Accord-cadre qui a défini les règles de la négociation commerciale et constitué une sorte de «voie rapide» (fast track) qui a permis d'engager les négociations commerciales, à travers le «Conseil conjoint», prévu dans l'Accord global.

(18)  Paragraphe 15 du communiqué du Conseil conjoint UE-Mexique, tenu au Luxembourg, le 26 mai 2005.

(19)  Tous les chiffres concernant l'IDE sont basés sur les informations fournies par 'L'Europe au Mexique, 2004, Délégation de l'UE au Mexique, 2004.

(20)  Tous les chiffres concernant l'IDE sont basés sur les informations fournies par «L'Europe au Mexique, 2004», Délégation de l'UE au Mexique, 2004.

(21)  Y compris la Bulgarie et la Roumanie.

(22)  La population mexicaine s'élevait en 2003 à 102 millions d'habitants (OCDE. FACT Book, 2005).

(23)  Déclaration conjointe de la Commission de libre-échange du Traité de libre-échange de l'Amérique du Nord, 16 juillet 2004.

(24)  «Rapport sur le Mexique» du service études de la Caisse de Madrid, mai 2002. Banque mondiale «leçons de l'ALENA pour les pays d'Amérique latine et des Caraïbes»D. Lederman, W.F.Maloney et L. Serven 2003

(25)  Banque mondiale, World development indicators outline.

(26)  John Audley, ibidem, p. 49.

(27)  Communiqué de presse 71/04 du Secrétariat du gouvernement mexicain, 17 décembre 2004.

(28)  Source: ANIERM (Asociación Nacional de Importadores y Exportadores de la República Mexicana) avec des données fournies par le Secrétariat à l'économie du Mexique.

(29)  Il faut néanmoins en tenir compte du fait que sur ces 90 %, 10 % concernent le pétrole et 50 % les usines d'assemblage.

(30)  L'article 10 de l'accord d'association UE-Chili (en vigueur depuis le 1er mars 2005, JO L 352, du 30/12/2002) instaure le «Comité consultatif conjoint» qui a pour fonction d'«aider le Conseil d'association à promouvoir le dialogue et la coopération entre les diverses organisations économiques et sociales de la société civile dans l'Union européenne et au Chili».

(31)  Article 1 du projet de loi.

(32)  Pour de plus amples informations, le lecteur est invité à se référer à la page suivante d'internet: http://www.stps.gob.mx/consejo_dialogo/cpdsp/frameset.htm.